La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
Ce matin, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.
La parole est à M. Pierre-Alain Muet, dernier orateur inscrit.
Monsieur le président, madame la ministre de l'économie, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, en matière de régulation il y a loin des discours aux actes. À la fin de cette matinée, Sandrine Mazetier faisait le parallèle entre le discours de Toulon et les réalisations. Force est de reconnaître que, dans cette crise, la France et les pays européens n'ont pas pris la mesure des réformes qu'il fallait mettre en oeuvre pour y répondre.
La régulation fondamentale consiste à obtenir que les banques fassent leur métier. Or le métier de banquier, c'est de gérer des dépôts, c'est d'accorder des crédits aux entreprises et aux consommateurs, ce n'est pas de spéculer sur les marchés financiers.
Les États-Unis ont pris à bras-le-corps cette question. Le président Barack Obama a proposé une séparation des activités de dépôt et d'investissement, reproduisant – dans un contexte nouveau – ce qui avait été fait en son temps par Roosevelt après la crise de 1929. Ce dernier avait notamment séparé les banques de dépôt des banques d'affaires, avec une idée très simple : les banques de dépôt ont une mission de service public : gérer des dépôts et attribuer des crédits.
Les États-Unis avancent en matière de régulation et nous, en Europe, nous bougeons peu. Madame Lagarde, vous nous disiez ce matin que les États-Unis avançaient lentement parce que les lois en question sont en discussion. Mais que dire de celle-ci ! Proposée par le Gouvernement en décembre, elle est discutée seulement maintenant et je pense que, si elle est redevenue d'actualité, c'est en partie parce que la crise l'a ramenée à l'ordre du jour. Quant aux conclusions, elles seront adoptées de façon définitive en septembre. Cela ressemble étrangement à la façon dont l'Europe réagit à cette crise : toujours avec un temps de retard.
Le secteur financier – Henri Emmanuelli le disait ce matin – est un secteur prédateur. Quand il ne fait pas ce pour quoi il a été fait, c'est-à-dire assurer le financement de l'économie, mais qu'il passe son temps à spéculer sur les marchés financiers, il ne crée pas de richesses : il ne fait que s'accaparer une rente à travers la spéculation. En effet, le résultat de la spéculation, c'est une rente, comme le montrent les chiffres : sur la longue période, la rentabilité du secteur réel, c'est-à-dire celle des fonds propres, n'a pas bougé en cinquante ans – elle se situe toujours autour de 6 à 7 %. Au contraire, celle du secteur financier a explosé jusqu'à la crise, passant d'un ordre de grandeur semblable au précédent – de 6 à 7 % – à près de 20 %. Ces chiffres s'appliquent notamment au Royaume-Uni, pour lequel on dispose des données sur une longue période.
Réagir face à la spéculation, madame la ministre, c'est en finir avec les ventes à découvert. Nous subissons depuis trois mois une spéculation sur les dettes souveraines. Il est totalement absurde de maintenir cette pratique qui permet à un acteur économique ne disposant pas de titres de dettes souveraines de spéculer à la baisse sur ces titres : il les vend sans les posséder et il les rachète quand leur valeur a baissé.
Cela ne sert qu'à la spéculation, car j'aimerais bien que l'on m'explique l'utilité, en dehors de mécanismes spéculatifs, des ventes à découvert à nu.
En tout cas, dans une période de spéculation, il faut les empêcher. Les Allemands l'ont fait le 19 mai. Il était très simple pour la France d'emboîter le pas à l'Allemagne.
Si la France et l'Allemagne avaient, à un jour d'intervalle, pris la même mesure, les pays européens se seraient engagés vers la suppression des ventes à découvert. Notre commission des finances a voté un amendement sur le sujet ; nous attendons toujours la réponse du Gouvernement. Mais il est clair que la France a manqué de réactivité.
En ce qui concerne les banques, nous proposons depuis des mois que l'on mette en place une taxe sur les profits bancaires, avec un argument très simple, que l'on entend dans d'autres pays, aux États-Unis par exemple : les États – donc les citoyens – sont venus au secours des banques. Bien sûr, ils devaient le faire, mais il est juste qu'ils ne soient pas les seuls à en supporter les conséquences. Il est normal que les banques contribuent à la réduction des déficits, dont le paiement dans le futur repose, pour l'instant, sur les seuls citoyens. Les banques auraient pu y contribuer de façon très simple si vous aviez fait, à l'époque, ce que nous proposions, c'est-à-dire entrer dans le capital. Si vous aviez soutenu les banques en achetant des actions – le rapport qui vient d'être publié par la Cour des comptes le montre –, l'État aurait pu bénéficier de 5,8 milliards d'euros de plus-value, ce qui aurait été une contribution normale étant donné l'action entreprise par le Gouvernement, qui a permis aux banques de continuer leurs activités et de se redresser.
En matière de régulation, il faut aussi que l'on aille beaucoup plus loin, en Europe, que ce qui est proposé. Je me souviens que, lorsque M. de Larosière est venu devant la commission des finances et la commission des affaires européennes expliquer ce qu'il faisait, il nous a dit qu'il était parti avec l'idée d'obliger les banques à garder 10 % de leurs crédits dans leurs comptes. C'était déjà très peu : autrefois, elles gardaient l'essentiel des crédits dans leurs comptes. Il s'agissait d'éviter qu'elles titrisent la plupart de ces crédits, qu'elles s'en défaussent en les plaçant sur les marchés financiers. Or M. de Larosière a obtenu finalement 5 %. Aujourd'hui, si l'on veut réellement empêcher que des crises se renouvellent, il faudrait porter ce ratio à 20 ou 30 %.
Les agences de notation pourraient contribuer à la régulation, mais c'est l'inverse qu'elles ont fait : en dégradant des notes souveraines à des moments inopportuns, elles ont contribué à accentuer la spéculation. Alors, oui, il faut réguler les agences de notation.
Il faut aussi changer la façon dont elles sont rémunérées : il est absurde que ce soit l'établissement noté qui rémunère l'agence de notation. Il faut envisager la création d'une agence publique européenne de notation. Il convient, par ailleurs, que le régulateur ne s'appuie pas sur les travaux des agences de notation pour réguler les banques : ce sont celles-ci qui doivent expliquer au régulateur les dispositifs qu'elles mettent en place. De son côté, le régulateur ne doit pas s'appuyer sur des notes, dont on voit bien toute l'imperfection, pour vérifier si la banque se conforme aux règles de bonne conduite – qui restent d'ailleurs à établir.
S'agissant des bonus, on ne peut pas rester dans une situation où, dès que les banques ont rétabli leur santé, elles se mettent à en verser de nouveau aux traders, alors que ce sont tous les citoyens qui sont appelés à participer à la réduction des déficits publics.
Nous vous proposerons des amendements pour mettre un peu d'ordre, aussi bien dans les bonus que dans les agences de notation, mais je voudrais, pour terminer, évoquer la situation de l'Europe et des États-Unis dans cette crise.
Je crains qu'on ne voie se reproduire l'histoire. En effet, après la crise de 1929, le seul pays qui ait changé complètement les règles, c'est les États-Unis : en 1933, le président Roosevelt a modifié le système de régulation bancaire. Les règles édictées se sont imposées pendant près de cinquante ans après la Seconde guerre mondiale. Il a aussi changé complètement la fiscalité aux États-Unis, en imposant très fortement les rémunérations les plus élevées. Enfin, il a lancé le New Deal. C'est cette association de trois changements fondamentaux qui, pendant une cinquantaine d'années en Europe, après la guerre, s'est généralisée et a permis que l'économie fonctionne et ne soit pas sous la tutelle des marchés financiers.
Il ne faudrait pas que l'histoire se répète, parce que, après la crise de 1929, dans les années trente, et alors que les États-Unis mettaient en place une régulation, comme le fait le président Obama aujourd'hui, l'Europe s'est quant à elle enfoncée dans des politiques de déflation. Je pense qu'au sein de la zone euro il y a aujourd'hui le même risque.
Je redirai donc, comme ce matin, que, dans la période actuelle, les États-Unis agissent tandis que l'Europe réfléchit et que la France attend. Eh bien, il est temps que l'Europe se réveille et que la France joue son rôle, pas seulement dans des discours ou dans des lettres, mais par des actes, et vous avez l'opportunité de le faire, madame la ministre, notamment aujourd'hui en ce qui concerne les ventes à découvert. Je trouve que le texte qui nous est proposé n'est vraiment pas à la hauteur des enjeux : il faut une réponse bien plus forte à cette crise. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La discussion générale est close.
La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, je ne répondrai dans le détail à l'ensemble des questions évoquées lors de la discussion générale qu'à l'occasion de l'examen des amendements. Je m'e tiendrai donc pour l'instant à un bref exercice qui se limitera aux points les plus décisifs abordés par les orateurs.
Vous avez été au moins deux à évoquer le soutien consenti par la France au système financier, à propos de la perte d'une potentielle plus-value de 5 milliards d'euros. Mais, monsieur Pierre-Alain Muet, vous m'accorderez que tout est une question de calendrier, parce que, selon la date à laquelle on aurait disposé des actions que l'on aurait été obligé d'acquérir dans le cadre d'une prise de participation au capital, on aurait réalisé soit une moins-value, soit une plus-value.
Si nous avions cédé les actions – toujours dans le cadre de cette hypothétique prise de participation au capital, à hauteur de 5 milliards d'euros – nous aurions réalisé en octobre 2009, c'est-à-dire un an plus tard, un milliard d'euros de pertes, c'est-à-dire de moins-value !
Il est exact que, si nous avions attendu, nous aurions peut-être réalisé une plus-value.
Et si cela avait duré un peu plus longtemps, peut-être le résultat aurait-il été encore différent.
C'est précisément sur ce point que nous sommes en désaccord, parce que notre gouvernement a préféré prêter, en s'assurant que l'argent des Français était placé à un taux d'intérêt fort rémunérateur. Or, s'il est une chose que le rapport de la Cour des comptes, sous l'autorité de son président, M. Migaud, précise bien, c'est que des intérêts ont été réalisés, à concurrence d'un peu plus de 2 milliards d'euros.
Un certain nombre d'autres considérations entrent en jeu dans le raisonnement de la Cour des comptes mais, sur la réalisation des intérêts, en tout cas, il n'y a pas l'ombre d'un doute.
Quatre milliards pour les actionnaires ! Si au moins ils vous avaient remerciée !
Nous ne sommes pas d'accord sur ce point-là, c'est tout. Nous n'avons pas voulu spéculer avec l'argent des Français. Nous n'avons voulu prendre ni le risque de la perte, ni celui du gain.
Nous avons préféré la sécurité de la réalisation de l'intérêt sur les prêts que nous avions consentis. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je vais maintenant faire un point rapide sur la rémunération des opérateurs de marchés. Vous considérez, monsieur Pierre-Alain Muet – et je le regrette, même si c'est votre droit le plus strict – que la France attend, pendant que l'Europe réfléchit et que les États-Unis agissent. C'est une magnifique critique, mais vous lisez l'histoire à l'envers : c'est la France qui agit, c'est l'Europe qui réfléchit – même si, c'est vrai, quelques-uns de nos partenaires ont agi avec nous – et ce sont les Américains qui suivent. Souvenez-vous : en matière de rémunération des opérateurs de marché, la France était bien isolée au mois d'août 2009 pour recommander qu'une réglementation soit mise en place et que les États interfèrent dans le mode de fixation des rémunérations. Dans ce que l'on appelle la culture anglo-saxonne des entreprises privées, c'est tout à fait contre-intuitif ! C'est bien grâce à l'action de la France qu'on a interdit les bonus garantis, qu'on a mis en place un mécanisme pour différer la rémunération sur une période de trois ans, avec l'obligation de rémunérer à concurrence de 50 % en actions, et qu'on a instauré un système de malus, si d'aventure les activités au titre desquelles un bonus est attribué se révèlent ultérieurement génératrices de pertes.
C'est donc bien la France qui était à la manoeuvre, et c'est bien la France qui, au mois de novembre 2009, a fait entrer dans son arsenal réglementaire les mécanismes de respect des règles. Ces mêmes principes figureront dans la directive européenne « Fonds propres réglementaires » – dite CRD 3 – qui entrera en vigueur au mois d'octobre prochain. De la même façon, la France a demandé que l'on trouve dans la directive relative aux gérants de fonds dits alternatifs des mécanismes permettant d'encadrer les rémunérations.
La France agit ; la France prend les devants. Cela ne vous fait peut-être pas plaisir, car cela contredit votre thèse,…
Cela me fait très plaisir : j'espère que vous allez aussi approuver nos amendements !
…mais c'est la réalité de ce que nous avons fait.
Quels résultats ? L'encadrement des rémunérations des opérateurs de crédit que nous avons mis en place a entraîné, nonobstant des réalisations d'opérations nettes extrêmement profitables pour les établissements bancaires, une diminution proportionnelle du montant des sommes versées à titre de rémunération variable.
Le mécanisme a donc fonctionné. Nous l'avons mis en place les premiers. Je dois à la vérité de dire que cela n'a toujours pas été fait aux quatre coins de la planète, y compris dans des territoires dont vous avez vanté le caractère innovateur, voire pionnier, comme les États-Unis.
Tout le monde est émerveillé, ce doit être pour cela que le spread augmente.
En matière de taxation, je voudrais également souligner que la France n'a pas à rougir de ce qu'elle n'aurait pas fait. Nous avons été les premiers, avec les Britanniques – c'était un accord entre le Premier ministre Gordon Brown et le Président de la République Nicolas Sarkozy – à proposer, dès l'été dernier, un mécanisme de taxation non pas des opérateurs de marché mais des banques, afin de taxer 50 % des sommes versées à titre de bonus, au-delà de 27 500 euros par opérateur. C'est ce qui se passe.
Monsieur le président de la commission des finances, vous m'interrogez sur les montants en cause. Nous avions prévu que ce mécanisme rapporte 360 millions d'euros, qui seraient affectés à OSEO, financeur des petites et moyennes entreprises et bras armé de l'État.
Mais je fais toujours tout ce que vous me dites, monsieur Emmanuelli ! Je suis étonnée que vous ne l'ayez pas remarqué. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
À ce jour, nous avons collecté 300 millions d'euros : nous ne disposons pas encore des chiffres définitifs, mais il est clair que nous avançons dans la bonne direction.
En matière de taxation toujours, et plus particulièrement en ce qui concerne l'augmentation qui sera nécessaire pour permettre aux établissements bancaires de se conformer à leurs obligations en matière de garantie des dépôts, je redis devant l'Assemblée que je publierai avant la fin de l'année 2010 – date à laquelle ces obligations nouvelles entreront en vigueur – une mesure qui permettra de prélever les 270 millions d'euros qui doivent venir alimenter le fonds de garantie des dépôts.
Avant la fin de l'année, la France mettra en place un mécanisme de taxation des banques. J'en ai pris l'engagement, et je le tiendrai. Cette discussion se déroule au niveau du G20 comme au niveau de l'Union européenne : je sais bien que deux pays développés au moins ne voudront pas nous soutenir, mais j'espère que nous pourrons mettre en place de la manière la plus large possible un mécanisme de taxation des banques qui permette d'anticiper, ex ante, c'est-à-dire avant la survenance d'un sinistre, la couverture du risque dans l'hypothèse où un établissement bancaire serait à nouveau en difficulté.
En matière de taxation, franchement, la France a fait ce qu'il fallait, et dans les temps.
Plusieurs orateurs, à gauche de l'hémicycle, ont regretté que le texte ne soit pas plus fourni, plus volumineux. C'est un choix. De directive en directive, de règlement en règlement, grâce – notamment, mais pas seulement – à l'action déterminée de la France, nous sommes en train de bâtir un corpus juridique européen qui sera de nature à réguler toutes les transactions financières, toutes les notations financières, tous les opérateurs financiers. Certains textes, nous y reviendrons tout à l'heure, devront être transposés. Mais c'est bien le niveau européen qui est le plus pertinent. Et si l'on voulait s'amuser à comparer, en nombre de pages, les textes du Sénat américain et de la Chambre des représentants avec les nôtres, il conviendrait d'ajouter à ce projet de loi l'ensemble des directives et règlements européens, à l'élaboration desquels nous participons de manière active et qui s'appliqueront à la France comme aux vingt-six autres États membres : alors seulement on pourrait déterminer si nous avons réalisé les progrès nécessaires pour amener de la discipline, de la mesure, de la raison, et si nous avons réussi à empêcher les excès et les abus que nous avons pu constater au cours des derniers mois.
J'ai entendu, ici ou là, mettre en cause l'Autorité des marchés financiers, qui ne serait pas capable de s'occuper des tâches nouvelles qui lui sont attribuées. Eh bien, le plan stratégique 2009-2011 de l'AMF va l'amener à augmenter ses effectifs de 13 % ; vous conviendrez que c'est plutôt rare chez un opérateur public, mais tout à fait justifié en l'espèce, car on demande à l'AMF d'intervenir comme superviseur, comme contrôleur notamment des agences de notation. Un équivalent temps plein sera spécifiquement affecté à l'enregistrement des agences de notation – qui ne seront bien sûr pas 150, comme on a pu le dire tout à l'heure – et de nombreux contrôleurs et opérateurs travailleront au sein de l'AMF dans ces domaines élargis : il n'y a aucune raison de mettre en doute leurs compétences.
Enfin, nous aurons tout à l'heure l'occasion d'expliquer, pour ceux qui sont ici comme pour tous ceux qui nous écoutent, ce que sont la vente à découvert, la vente à découvert à nu et la manière dont il convient d'intervenir et surtout de donner des pouvoirs à l'AMF – ce que fait parfaitement le texte – pour qu'elle puisse, dans des circonstances exceptionnelles, mettre un terme à des opérations de pure spéculation qui seraient dangereuses pour les États et pour les mécanismes de financement et de refinancement.
Mon ambition personnelle, c'est d'arriver à mettre en place un certain nombre de mécanismes au niveau européen. C'est la démarche résolument adoptée par la France pour disposer d'un corps de règles qui soient paneuropéennes, et non spécifiquement nationales, pour des raisons que j'aurai l'occasion d'exposer lors de la discussion des amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Dont l'objet est d'éclairer le débat, monsieur le président. Mme la ministre vient en effet de dire quelque chose de très important : « dans des circonstances exceptionnelles », l'AMF pourra intervenir. Ainsi, je l'expliquais ce matin, votre projet de loi empêchera les vols à la tire, mais il continuera de permettre le grand banditisme ; c'est une méthode à géométrie variable, et elle pose problème. Ce que vous dites est clair : vous n'avez nulle intention d'agir contre les méthodes qui ont conduit à la catastrophe actuelle. Il y a là une différence essentielle entre vous et nous.
Acte vous est donné de ce rappel au règlement – fondé comme à l'habitude sur l'article 58 : chacun aura bien entendu complété de lui-même. (Sourires.)
J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
À l'article 1er, je suis saisi d'un amendement n° 30 rectifié .
La parole est à M. Jérôme Chartier, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
L'article 1er du projet de loi crée un conseil de régulation financière et du risque systémique.
En 2001, la loi relative aux nouvelles régulations économiques a créé le collège des autorités de contrôle des entreprises du secteur financier, qui réunissait le gouverneur de la Banque de France, le président de la Commission bancaire, le président de l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles et le président de l'Autorité des marchés financiers. Il devait se réunir trois fois par an, mais manifestement il n'a pas été très efficace dans la crise – sa composition était peut-être trop restreinte.
L'objectif du conseil de régulation financière et du risque systémique est d'exister en même temps qu'un conseil semblable aux États-Unis, en même temps qu'un conseil européen : il est donc créé en cohérence avec toutes les grandes places financières occidentales en espérant que tout le monde se mettra à créer de tels conseils, afin de renforcer la qualité de l'échange d'informations entre comités, et afin de lancer, au sein de ces conseils, une vraie réflexion sur la prévention des risques systémiques.
Ce conseil de régulation, dont votre rapporteur approuve tout à fait la création, pourrait être utilement complété, à intervalles réguliers, par des membres de la représentation nationale. On l'a bien vu au moment de la mise en place du sauvetage des banques ou, très récemment, quand nous avons décidé d'aider la Grèce et de créer un fonds de solidarité au niveau européen, le Parlement est sollicité dès qu'il y a une crise systémique.
Cet amendement vise donc à associer au conseil les présidents des commissions des finances et les rapporteurs généraux de l'Assemblée et du Sénat, qui seraient conviés au minimum deux fois par an, et en tant que de besoin, aux réunions de cette instance. Cela paraît utile à la bonne diffusion de l'information, et le cas échéant, si des décisions doivent être prises, il serait bon que la représentation nationale ait été consultée le plus en amont possible.
Avis favorable.
La formulation de l'amendement est très ambiguë : « au minimum deux fois par an, et en tant que de besoin, il se réunit en présence des présidents et rapporteurs généraux des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat. »
Nous nous réunissons ici en présence de citoyens français, qui siègent dans les tribunes. Mais ils n'ont aucun pouvoir d'influence sur nos débats ! Monsieur le rapporteur, je n'imagine pas que les parlementaires puissent être des potiches : il faut leur donner du pouvoir.
C'est pourquoi je propose le sous-amendement suivant : « après le mot “Sénat”, ajouter les mots : “, qui auront le droit de demander un nouvel examen avant une nouvelle délibération”. »
Je suis donc saisi d'un sous-amendement oral de M. Brard à l'amendement n° 30 rectifié .
Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?
Je crois préférable de s'en tenir à la rédaction initiale de l'amendement.
Avis défavorable au sous-amendement. Le texte prévoit deux réunions annuelles au moins. Quant à la mention « en tant que de besoin », elle est utilisée dans différents textes, ce n'est pas un concept juridique nouveau. L'appréciation du besoin se fait évidemment sous l'autorité du président, qui réunit le conseil ; il s'agit d'assurer le bon fonctionnement de la surveillance macro-économique et l'identification des risques dans ce secteur d'activité : l'amendement paraît raisonnable.
Monsieur le président, je pense que cet après-midi nous allons devoir faire preuve de pédagogie, pour montrer ce qui se cache vraiment derrière les textes.
J'imagine, parce que M. Chartier est favorable à la parité, que les deux parlementaires seront un homme et une femme ; on les invitera pour servir le thé aux autres participants à la réunion, mais, quand on passera aux choses sérieuses, ils n'auront droit à rien. Ce que M. Chartier nous propose est un leurre parce que les parlementaires n'auront aucun pouvoir. Dans plusieurs organismes où des parlementaires siègent, notre pouvoir est déjà très restreint ; je ne comprendrais pas que nous acceptions aujourd'hui d'envoyer des parlementaires dans une enceinte où leur pouvoir serait nul. Et moi je ne suis pas prêt à servir d'alibi au saint-bernard du groupe UMP.
Je ne voulais pas insister, monsieur le président, parce que, ayant l'expérience des joutes oratoires avec M. Brard, je sais qu'il aime bien relancer les échanges. Mais il a parlé de pédagogie et, en effet, il va falloir que nous en usions cet après-midi.
Si le conseil de régulation financière et du risque systémique a vocation à être souple en termes de fonctionnement, il ne manquera pas d'associer à ses réflexions, comme Mme Lagarde l'a toujours fait au coeur de la crise, la représentation nationale, en l'occurrence les présidents des commissions des finances et les rapporteurs généraux. D'ailleurs, aujourd'hui, aucune décision n'est prise sans que la représentation nationale y soit étroitement associée : on l'a constaté au plus fort de la crise de l'euro ou de la crise financière.
La formule « en tant que de besoin » m'a semblé utile. Elle laisse l'opportunité à ce comité de se réunir avec la représentation nationale, dès que les circonstances l'exigent.
Quant à M. Emmanuelli, qui se demandait ce que le conseil allait faire, qu'il se rassure : un amendement socialiste ayant proposé qu'un rapport soit établi, il pourra prendre connaissance de l'action du conseil dans ce rapport, qui sera sans doute édité à l'issue de la première année d'exercice.
J'espère simplement que cela ne coûtera pas trop cher.
Pour ce qui est de son pouvoir, en fait il n'en aura pas puisque le projet de loi se contente d'indiquer que le conseil « veille à la coopération et à l'échange d'information […], examine les analyses de la situation du secteur et des marchés […], facilite la coopération et la synthèse des travaux d'élaboration ».
Nous nous abstiendrons sur la création de ce nouveau conseil qui ne servira pas à grand-chose parce qu'il n'aura que peu de responsabilités. J'espère que le pouvoir législatif restera au Parlement. Cela dit, que les présidents et les rapporteurs généraux des commissions des finances de nos assemblées y participent me paraît plutôt une bonne chose. Sur le reste, nous n'attendons pas beaucoup de cette nouvelle entité.
(Le sous-amendement oral de M. Brard n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 30 rectifié est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement rédactionnel de M. Chartier, n° 29 rectifié.
(L'amendement n° 29 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 1er, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 104 rectifié portant article additionnel après l'article 2 bis.
La parole est à M. le rapporteur.
Cet amendement vise à élargir les pouvoirs de régulation de l'AMF aux conseillers en gestion de patrimoine.
Avant de m'en remettre à la sagesse de l'Assemblée, je voudrais préciser la position du Gouvernement.
Je ne suis pas véritablement favorable à cet amendement dans sa brièveté, même si c'est un talent que d'être bref. En effet, si je souscris au principe selon lequel tous les intermédiaires qui distribuent des produits financiers doivent être soumis à un régime de responsabilité, que ce soit en tant qu'intermédiaires ou via l'organisme auquel ils appartiennent, je trouve les frontières du régime de responsabilité proposé par M. Chartier incertaines.
La notion de gestionnaire de patrimoine ne correspond à aucune catégorie juridique identifiée. Il existe, en droit français et européen, un cadre pour les intermédiaires exerçant dans le secteur financier : la notion de conseiller en investissement financier figure à l'article L.621-9 du code monétaire et financier, celle d'intermédiaire en opération de banque dans le livre III du même code et celle d'intermédiaire en assurance dans le livre V du code des assurances. Ces professions font donc l'objet d'un contrôle de l'AMF et de l'Autorité de contrôle prudentiel, dont la coopération renforcée au sein du pôle commun créé en mars 2010 vise précisément à ce qu'un contrôle plus strict soit effectué dans ce domaine.
En outre, le Gouvernement poursuit les travaux initiés par le rapport Deletré 2 sur l'évolution de la responsabilité et du contrôle des intermédiaires. Je ferai des propositions en ce domaine dans le courant du mois de septembre.
Je m'en remets donc à la sagesse de l'Assemblée, sachant que, d'ici là et dans le cadre du processus législatif habituel, nous aurons le temps, j'espère, de mieux définir la notion de gestionnaire de patrimoine au regard des préconisations du rapport Deletré 2.
je remercie Mme la ministre pour ses propos. L'objectif est assez simple. Il existe aujourd'hui une profession qui n'est malheureusement pas référencée juridiquement, celle de conseiller en gestion de patrimoine. Les avis de ces conseillers n'engagent qu'eux-mêmes et s'ils conduisent leurs clients à un investissement malheureux, leur responsabilité n'est aucunement engagée, contrairement par exemple à celle des société d'investissement financier. Il me semble donc logique d'introduire les conseillers en gestion de patrimoine dans le champ de compétence de l'AMF.
Cela dit, je me range à la proposition du Gouvernement de chercher à améliorer la rédaction pendant la navette pour affiner la définition et la responsabilité de cette profession.
M. Chartier n'est pas clair dans sa conclusion, on ne sait pas s'il maintient ou s'il retire son amendement.
Dans ce cas, pour une fois, c'est moi qui vais jouer le saint-bernard auprès de Mme Lagarde, qui préfère le cordeau à l'élastique de M. Chartier.
Notre rapporteur propose en réalité de créer des interstices. Or on sait bien que des gens peu scrupuleux dans la pratique de ces métiers n'attendent que cela pour essayer d'optimiser leurs opérations au profit de leurs clients. Mes chers collègues, si nous voulons de la rigueur, pour le coup, il faut en rester à la proposition du Gouvernement dans la mesure où Mme Lagarde nous promet que nous aurons tout loisir pour discuter de cette profession sur la base d'un amendement moins lapidaire que celui-ci. Derrière les rédactions trop concises peuvent parfois se cacher des exégèses perverses.
Cet amendement propose de renforcer la régulation de l'Autorité des marchés financiers en élargissant sa compétence aux conseillers en gestion de patrimoine. Que le moment venu, nous précisions les choses, c'est très bien, mais aujourd'hui, dans la mesure où le Gouvernement et la majorité souhaitent renforcer l'information et la protection des investisseurs, il me semble souhaitable que le régulateur suive particulièrement cette profession.
(L'amendement n° 104 rectifié est adopté.)
Sur l'article 2 quater, je suis saisi d'un amendement n° 103 .
La parole est à M. le rapporteur.
Dans le fonctionnement de l'Autorité des marchés financiers, il n'y a pas, jusqu'à présent, de membre du collège qui suive particulièrement une enquête lorsque cette enquête est décidée par le secrétaire général.
L'amendement est assez simple : il propose qu'un membre du collège de l'AMF supervise l'enquête, de telle sorte que lorsque le collège se réunit pour déterminer s'il y a lieu ou non de transférer le dossier à la commission des sanctions, cette personne puisse informer plus particulièrement ses collègues du déroulement des investigations et donner un avis éclairé sur la société ou l'établissement en cause.
(L'amendement n° 103 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement de précision rédactionnelle de M. Chartier, n° 33.
(L'amendement n° 33 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Cet amendement vise à apporter une précision quant à la publication prévue à l'alinéa 9 de l'article 2 quater, l'amendement adopté en commission des finances risquant d'être jugé inconstitutionnel.
(L'amendement n° 35 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement rédactionnel de M. Chartier, n° 34.
(L'amendement n° 34 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 2 quater, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 90 portant article additionnel après l'article 2 quinquies.
La parole est à M. Pierre-Alain Muet.
Il s'agit d'adapter aux membres de l'Autorité des marchés financiers les obligations du code de procédure pénale qui pèsent sur les magistrats, donc d'interdire à un membre de l'AMF de « délibérer dans une affaire s'il a eu lui-même, son conjoint, ses parents ou alliés avec une des parties un lien direct ou indirect susceptible de faire peser une suspicion légitime de partialité ».
Des dispositions sont déjà prévues dans le code pénal. En outre, l'adoption de cet amendement risquerait d'avoir l'effet exactement inverse de celui recherché par son auteur : le tribunal pourrait être conduit à estimer que seuls les liens familiaux mentionnés sont susceptibles de donner lieu à un conflit d'intérêts. Il me semble plus sage de laisser la jurisprudence faire son oeuvre, en l'occurrence celle des conflits d'intérêts, et donc de ne pas accepter l'amendement de M. Muet.
Je comprends parfaitement l'esprit dans lequel vous proposez cet amendement, monsieur Muet. J'ai une proposition à vous faire, même si mon avis sur l'inscription de cet amendement dans le présent texte n'est pas favorable.
Nous partageons bien évidemment votre souci d'éviter les conflits d'intérêts, dans l'intérêt même des personnes qui participent aux instructions dans quelque commission que ce soit au sein de l'Autorité des marchés financiers.
Je rappelle simplement que l'article L.621-4 du code monétaire et financier contient déjà un certain nombre de dispositions à ce sujet : « Aucun membre de l'Autorité des marchés financiers ne peut délibérer dans une affaire dans laquelle lui-même ou, le cas échéant, une personne morale au sein de laquelle il a, au cours des deux années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat, a ou a eu un intérêt au cours de la même période. Il ne peut davantage participer à une délibération concernant une affaire dans laquelle lui-même ou, le cas échéant, une personne morale au sein de laquelle il a, au cours des deux années précédant la délibération, exercé des fonctions ou détenu un mandat, a représenté une des parties intéressées au cours de la même période. »
On vise chaque fois, pour éviter les conflits d'intérêts, la situation dans laquelle s'est trouvée la personne, en particulier soit son employeur, soit l'entreprise au sein de laquelle il a exercé, soit l'entreprise qu'il a défendue, si par hasard il a été conseil, avocat ou autre desdites entités.
Au-delà de cet article L.621-4, un dispositif prévoit que l'Autorité des marchés financiers doit fixer dans son règlement intérieur les règles de conflits d'intérêts. Il est vrai qu'à l'examen du règlement intérieur de l'Autorité des marchés financiers, on n'y voit pas figurer la mention du conjoint ou d'un membre de la famille. Je propose donc que nous demandions à l'Autorité des marchés financiers de modifier son règlement pour prendre en compte la situation du conjoint. Il n'y a en effet pas de raison de la mettre en exergue par rapport à celle de l'ancien employeur ou de l'ancien client s'agissant d'un conseiller, d'un consultant ou d'un avocat. C'est dans le règlement intérieur de l'Autorité des marchés financiers que cette disposition relatif aux conflits d'intérêts doit trouver sa place, car c'est là que, sous l'autorité du président, se règlent les questions de déport : lorsque des membres sont empêchés, pour une raison X ou Y tenant à leur appartenance à telle ou telle société ou à la représentation qu'ils ont faite de l'entité morale poursuivie, ils se déportent et ne sont évidemment pas impliqués dans la procédure.
Sous le bénéfice de ces explications, je souhaite que cet amendement soit retiré. Si tel n'était pas le cas, ce que je comprendrais parfaitement, le Gouvernement serait évidemment défavorable à son adoption.
Je comprends l'argumentation du Gouvernement, mais elle est exactement contraire à celle du rapporteur. Mme Lagarde évoque en effet le cas des personnes concernées directement ou par l'intermédiaire d'une entreprise dont elles ont été salariées et auxquelles la loi interdit de délibérer à l'AMF. Elle a ensuite mentionné le cas du conjoint, mais notre amendement est un peu plus large puisqu'il vise aussi explicitement les parents ou alliés. Je veux bien le retirer au nom de mon groupe, mais je vous demande, madame la ministre, de ne pas limiter votre proposition aux conjoints et de l'élargir aux parents.
J'accepte volontiers votre proposition, monsieur Eckert : « conjoint et parents », c'est juridiquement plus précis.
C'est une question importante. En effet, de délits d'initiés en conflits d'intérêts, trop d'affaires de ce genre ont été rendues publiques pour que l'on se satisfasse de la situation actuelle. Il nous reste à croiser les doigts, madame la ministre, pour que votre autorité sur l'AMF, qui est indépendante, soit suffisante pour que vous obteniez d'elle ce à quoi vous vous êtes engagée.
Je souhaiterais, mais cela me semble implicite dans votre propos, que les pacsés figurent parmi les membres de la famille qui ont été évoqués par Pierre-Alain Muet. Lors de l'examen de la loi sur la corruption, j'avais déposé un amendement de même nature et Charles Pasqua m'avait répondu, pour justifier son rejet, qu'il était favorable à la transparence mais pas à l'exhibitionnisme. Je pense que nous sommes dans la transparence, pas dans l'exhibitionnisme ! Souvenez-vous du débat sur la déviance sectaire que nous avons eu il y a quelques mois. Nous avions alors mis en avant, y compris au Conseil constitutionnel, le conflit d'intérêts qui avait frappé fort injustement notre collègue Georges Fenech lequel, bien qu'étant de droite, a été renvoyé de cet hémicycle dans des conditions d'inéquité totale. Ce que vous avez dit est donc très important, surtout si les pacsés sont concernés.
(L'amendement n° 94 est retiré.)
Je suis saisi d'un amendement n° 90 .
La parole est à M. Pierre-Alain Muet.
Cet amendement vise à élargir les incompatibilités des membres du collège de l'AMF en précisant que cette fonction est incompatible avec l'exercice d'un mandat d'administrateur ou de dirigeant d'une société anonyme. Il me paraît en effet naturel de faire en sorte que l'autorité de régulation ne puisse avoir de conflits d'intérêts.
Défavorable.
Tout d'abord, s'agissant de la discussion précédente, que se passe-t-il si la proximité familiale est mise en cause ? La commission des sanctions de l'AMF prend une décision. Celle-ci est contestée par la société qui a fait l'objet d'une enquête et elle est déférée au tribunal au prétexte que la commission des sanctions, voire le collège de l'AMF, n'a pu délibérer valablement en raison d'une proximité familiale. Qu'aurait fait la justice ? Elle aurait vérifié si la proximité familiale était réelle et de nature à entacher l'indépendance de la personne en cause. Puis elle aurait jugé et cela aurait fait jurisprudence. Intégrer la disposition en question dans le code monétaire et financier n'empêcherait pas la justice civile, voire la justice pénale, de se prononcer. Je suis en phase avec Mme la ministre lorsqu'elle dit vouloir demander à l'AMF de réglementer mais, même sans cela, la jurisprudence judiciaire aurait parfaitement pu qualifier la proximité, Dieu merci !
La justice devra de toute façon se prononcer.
Quant à l'amendement n° 90 , il n'a pas de lien direct avec le précédent, mais il est très important. La question est de savoir s'il peut y avoir, dans le collège de l'AMF, des personnes qualifiées pour examiner une enquête en cours, c'est-à-dire qui puissent avoir un jugement éclairé sur la nature des faits reprochés à la personne subissant l'enquête. Or comment avoir un jugement éclairé sinon en exerçant des responsabilités éminentes ou en les ayant exercées depuis suffisamment peu de temps pour être au fait des affaires économiques et financières ? Exercer un mandat d'administrateur permet aussi de rester au contact de ces affaires.
S'agissant des personnes cumulant des responsabilités d'administrateur et de membre du collège de l'AMF, le code monétaire et financier est là aussi très précis, pour que celles qui pourraient être en conflit d'intérêts ne puissent pas avoir de lien direct avec l'enquête en cours. C'est l'un des éléments que le secrétaire général de l'Autorité des marchés financiers vérifie avant de lancer chaque enquête, afin qu'il ne puisse pas y avoir, de près ou de loin, de conflit d'intérêts : de près, si la société dont l'un des membres du collège est administrateur est mise en cause ; de loin, si c'est l'une des filiales ou une filiale de filiale qui est concernée.
En revanche, il me semble nécessaire pour l'Autorité des marchés financiers que puissent siéger au collège des personnes susceptibles de rendre un avis éclairé du fait de leurs responsabilités professionnelles passées ou, le cas échéant, de l'exercice d'un mandat d'administrateur. Si tel n'était pas le cas, les décisions pourraient être prises par des personnes déconnectées de la réalité économique et financière et risqueraient d'être nettement moins fondées.
Défavorable.
Il est en effet bon qu'il y ait, au sein de l'Autorité des marchés financiers, des personnes ayant exercé des mandats de ce type, mais quand on a la responsabilité de juger, de trancher certains sujets, il ne doit pas y avoir de mélange avec des responsabilités privées. C'est une tradition ancienne dans notre pays et il n'y a aucune raison pour que l'Autorité des marchés financiers ne s'y soumette pas.
La parole est à M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Le capitalisme français souffre d'un mal que nous connaissons tous et dont les racines sont historiques : la consanguinité. En effet, lors des grandes opérations de privatisation, des noyaux durs ont été constitués. Dénoncés à l'époque, ils pouvaient se légitimer car, à un moment où l'économie française était relativement fragile, il s'agissait de protéger des entreprises vitales, présentant parfois un intérêt stratégique pour le pays, contre d'éventuelles offres publiques d'achat hostiles. Cette période est révolue, mais la consanguinité demeure. Chacun sait que tel dirigeant d'entreprise est membre du conseil d'administration d'une autre dont le président est par ailleurs membre du conseil d'administration de la société que le premier dirige. La consanguinité est un fait et je ne suis pas certain que l'intérêt général y trouve toujours son compte. Ne pas veiller à ce que cette consanguinité n'atteigne pas l'Autorité des marchés financiers me paraîtrait une erreur.
J'ajoute que l'AMF aura à juger non pas en opportunité, mais sur le fondement de lois et de règlements qu'elle aura à faire appliquer. Je ne vois pas en quoi le fait d'appartenir, en tant que mandataire social ou dirigeant d'entreprise, à tel ou tel groupe plus ou moins grand donne, en matière juridique, des compétences plus importantes que celles d'autres personnes qui, en revanche, ne pourraient être suspectées d'une quelconque consanguinité avec certains membres du conseil d'administration de grandes entreprises.
On voit bien la logique de consanguinité qui se poursuit avec cette vision de l'Autorité des marchés financiers, comme on voit la logique d'autorégulation que les pouvoirs publics semblent vouloir faire prévaloir dans notre pays. Il m'avait pourtant semblé, notamment en 2008, que cette logique d'autorégulation avait failli, en France comme ailleurs, et que l'une des leçons qu'il fallait tirer de la crise était qu'il revenait aux pouvoirs publics d'éviter l'autorégulation avec tout ce qu'elle pouvait comporter, nonobstant l'honnêteté foncière de chacun de ceux qui y participaient, de jugements probablement biaisés par la connaissance trop intime des acteurs et des actes.
Je me dois aussi d'évoquer l'aspect inconstitutionnel d'un tel amendement. Certaines personnalités, au sein du collège de l'AMF, sont en effet désignées par le Président de la République, par le président de l'Assemblée nationale, par le président du Sénat, par le Premier président de la Cour des comptes, par le Premier président de la Cour de cassation, et cet amendement aurait pour effet d'interdire ces libres nominations, ce qui juridiquement créerait un problème. Une telle modification ne peut intervenir par le biais d'un simple amendement. Elle doit se faire dans le cadre d'une proposition de loi constitutionnelle.
Je ne connaissais pas à Jérôme Chartier des talents qui feraient rougir de modestie Portalis, mais je ne vois pas du tout où est le fondement de ce qu'il vient de dire !
Il faut toujours raisonner par analogie pour bien comprendre. Après tout, le Président de la République peut faire une proposition sans disposer de tous les éléments de décision et se tromper ! Je vais vous donner un exemple où il s'est lourdement trompé. Madame Lagarde, vous étiez avec lui alors, et je suis sûr que cela vous a choquée : le parrain, dans tous les sens du terme, du pavillon français à l'exposition universelle de Shanghai est Alain Delon, un expatrié fiscal. Pensez-vous que cela soit légitime ? Évidemment pas. Si nous suivions notre collègue Pierre-Alain Muet, nous ne permettrions pas que de telles horreurs se produisent, et je soutiens complètement son amendement.
Monsieur le président, je demanderai après ce vote une suspension de séance de dix minutes.
Cet amendement me paraît essentiel, et je ne comprends absolument pas l'intervention du rapporteur sur sa prétendue inconstitutionnalité. Si la loi fixe des règles et des limites pour les nominations des membres de l'AMF, ceux qui les nomment, qu'il s'agisse du Président de la République ou des présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, sont, de par leur fonction même, particulièrement tenus de respecter la loi.
L'argumentation du rapporteur ne me semble donc pas recevable ; et je me permets d'insister, pour reprendre le terme du président Cahuzac, sur la consanguinité qui peut exister au sein de toutes ces instances. Si l'on veut avoir confiance en une autorité indépendante et éviter les conflits d'intérêts, il me paraît indispensable d'adopter cet amendement clair et bien rédigé.
Monsieur le rapporteur, vous sembliez nous dire que seuls les dirigeants ou les membres des conseils de grandes sociétés auraient les capacités intellectuelles et morales pour siéger au sein de l'AMF, ou en tout cas qu'il fallait être au contact avec le terrain. Cet autre argument n'a pas non plus de fondement et je ne comprends absolument pas la réticence vis-à-vis de cet amendement de bon sens qui veille à éviter les conflits d'intérêts et à assurer l'indépendance de l'AMF.
Je suis choqué par la surabondance de l'emploi du terme de consanguinité.
ChezJean-Pierre Brard, on le sait, l'individu appartient d'abord à une classe, et l'adage : « si ce n'est toi, c'est donc ton frère » est gravé en lettres d'or dans ses jugements.
Telle n'est pas notre position. En effet, ce n'est pas le statut ou l'identité de quelqu'un qui compte. Il ne s'agit pas de dire que les dirigeants ou les administrateurs d'entreprise sont les meilleurs, mais ils font partie de ceux qui ont des capacités, tout simplement.
Vous définissez une catégorie pour lui interdire l'exercice d'une fonction. Même en droit français, ce n'est pas ainsi que l'on procède, ce sont les actes que l'on juge. Les titulaires de fonctions doivent les exercer dans le cadre de leurs prérogatives et en obéissant aux règles destinées à prévenir les conflits d'intérêts ou les délits d'initiés. Ce ne sont pas les statuts des personnes qui sont primordiaux, ce sont leurs actes, qu'elles accomplissent dans le cadre de la loi ou en dehors. Cette façon de déclarer une personne indésirable pour des motifs de consanguinité me semble quelque peu abusive.
Vous confondez personne et fonction.
(L'amendement n° 90 n'est pas adopté.)
Après l'article 2 quinquies
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze.)
Nous en venons à l'article 3, sur lequel je suis saisi d'un amendement n° 37 rectifié .
La parole est à M. le rapporteur.
Cet important amendement, qui a reçu hier un avis favorable de la commission des finances, précise le régime de responsabilité des agences de notation.
Cette question a été largement débattue en commission, et nous en avons encore parlé ici même ce matin. Je m'en tiendrai donc à ces quelques mots de présentation. Évidemment, si la représentation nationale souhaite que nous approfondissions le sujet, je suis à sa disposition.
Je suis favorable à cet amendement présenté par M. le rapporteur. Nous en avons longuement discuté en commission : le dispositif retenu met en place un système de responsabilité qui me paraît plus que bienvenu.
Madame la ministre, monsieur le rapporteur, qu'en est-il des sanctions ?
On a beaucoup parlé de la caractérisation de la faute ou de l'erreur mais, en cas de manquements, des sanctions sont-elles prévues ?
Deux sortes de sanctions sont mises en place : elles peuvent soit être pécuniaires – l'Assemblée augmentera probablement tout à l'heure les plafonds prévus par le texte initial –, soit prendre la forme du retrait de l'agrément.
Il faut compter aussi avec la réparation du préjudice au civil ; elle relève d'une procédure engagée sur le fondement de la responsabilité que nous sommes précisément en train de mettre en place.
(L'amendement n° 37 rectifié est adopté.)
Sur l'article 5 A, je suis saisi d'un amendement rédactionnel, n° 38, de M. Chartier.
(L'amendement n° 38 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 5 A, amendé, est adopté.)
Cet amendement revient, sans toutefois la remettre en cause, sur une excellente initiative de M. Louis Giscard d'Estaing, qui a amené la commission des finances à élargir la composition du collège de l'Autorité de contrôle prudentiel en y faisant siéger un député et un sénateur. Le Parlement bénéficierait ainsi d'une influence au sein de cette autorité administrative indépendante.
En vertu du principe du partage des responsabilités, le rapporteur, Jérôme Chartier, et moi-même estimons cependant qu'il n'est peut-être pas judicieux que des parlementaires siègent dans une autorité de ce type.
Certes, il nous faut d'autant plus veiller à exercer un contrôle et une influence réelle sur le fonctionnement de ces autorités que leur multiplication risque de dépouiller le Parlement de ses prérogatives légitimes. Toutefois, nous devons respecter les rôles de chacun.
En conséquence, comme cela se pratique déjà pour de nombreuses autorités indépendantes, mon amendement propose que les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat nomment, après avis des commissions compétentes de leurs assemblées respectives, des personnalités qualifiées pour siéger à l'ACP.
Cet amendement ne remet en cause ni l'orientation extrêmement judicieuse proposée par Louis Giscard d'Estaing, ni l'appartenance à l'ACP du président de l'Autorité des marchés financiers, qui nous paraît essentielle.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir le sous-amendement n° 160 .
Monsieur le rapporteur général, je suis extrêmement favorable à votre amendement.
Non seulement, comme vous venez de l'exposer très éloquemment, il prévoit que le président de chacune des deux assemblées désignera une personnalité qualifiée pour siéger à l'Autorité de contrôle prudentiel, mais il soumet aussi la désignation de son vice-président à un avis conforme des commissions des finances de l'Assemblée et du Sénat.
Nous étions parvenus à cette solution à l'issue de nos débats en commission des finances, et j'y étais d'autant plus favorable qu'il s'agissait, en quelque sorte, d'une coproduction. Cependant, depuis lors, le secrétariat général du Gouvernement m'a alerté sur la non-conformité à la Constitution du mécanisme prévu au troisième alinéa de l'amendement, qui s'apparente à un droit de veto puisqu'il est prévu que « les ministres chargés de l'économie, de la sécurité sociale et de la mutualité ne peuvent procéder à la nomination si l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois-cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions ».
Même si j'avais de bonne foi approuvé ce dispositif, je vous propose donc maintenant, par ce sous-amendement, de supprimer cette phrase, étant entendu que l'avis simple des commissions reste nécessaire.
À l'occasion de la prochaine loi organique, nous ferons en sorte que le vice-président de l'ACP fasse partie de la liste des nominations permettant l'application de la procédure voulue par la commission des finances.
J'émets à regret un avis favorable sur le sous-amendement du Gouvernement. Nous aurions préféré que les nouvelles dispositions constitutionnelles s'appliquent dès maintenant à la nomination du vice-président de l'ACP. Toutefois, j'ai bien relevé que la ministre s'est engagée à permettre l'application de cette procédure en utilisant le prochain texte organique qui nous sera soumis.
Comme à son habitude, le rapporteur général a fait preuve d'une très grande pédagogie pour présenter son amendement. Je n'ai donc rien à ajouter, et j'émets un avis très favorable.
La pédagogie, c'est la façon de présenter les choses. Seulement il peut y avoir des pédagogues pervers tandis que d'autres rendent vraiment les choses intelligibles. Je crains que notre collègue Jérôme Chartier n'appartienne plutôt à la première catégorie.
Le Gouvernement n'aime pas que des députés ou des sénateurs représentent le Parlement au sein de structures extraparlementaires. Pourtant ce système marche.
Je représente l'Assemblée nationale à l'Observatoire des cartes bancaires, et je ne crois pas manquer aux obligations de confidentialité inhérentes à cette charge si j'affirme que la présence des deux parlementaires qui y siègent pèse dans le bon sens. Cela permet à tous ceux qui sont présents autour de la table de faire preuve de retenue, en particulier dans l'expression d'intérêts qui pourraient être corporatistes ; nous sommes en effet les garants de l'intérêt général.
Par ailleurs, je rappelle qu'il existe un précédent sans aucune ambiguïté puisque la CNIL est présidée par un sénateur : M. Alex Türk. Aujourd'hui, qui oserait le mettre en cause ?
En fait, le véritable enjeu, ce sont les droits du Parlement.
Que le Gouvernement ne souhaite pas que le Parlement mette son nez dans des organismes où il préfère voir siéger des personnalités qualifiées dont il a inspiré la nomination avant qu'elle ne soit ratifiée par les commissions ad hoc du Parlement, je le comprends, même si je ne l'approuve pas. En revanche, que des députés demandent, de leur propre initiative, que les parlementaires disparaissent de ces organismes, j'avoue qu'à mon sens c'est faire preuve d'une grande dose de masochisme. Je ne connaissais pas cette tendance, que je n'ose qualifier de perversion, chez Gilles Carrez. (Sourires.) Il reste que quelque chose ne tourne pas rond dans son raisonnement.
Nous devons absolument maintenir les dispositions adoptées lors de la réunion de la commission des finances : Louis Giscard d'Estaing y avait admirablement défendu sa position – et je suis certain que personne ne nous accusera de vouloir créer, dans cet hémicycle ou à l'extérieur, un axe Giscard d'Estaing-Brard. (Sourires.)
Je m'étonne que cet amendement modifie le texte qui avait été adopté par la commission. Après tout, les mêmes réflexions pourraient s'appliquer aux parlementaires qui siègent au conseil de surveillance de la Caisse des dépôts.
Ce n'est pas pareil : la Caisse des dépôts est placée sous la protection du Parlement, et son conseil de surveillance n'est pas une autorité administrative indépendante.
L'Autorité de contrôle prudentiel est tout de même un organe essentiel qui doit permettre à l'État d'exercer un contrôle sur le fonctionnement du système bancaire.
Ce matin, je citais l'affaire Kerviel – d'ailleurs, Mme la ministre ne m'a toujours pas répondu à ce sujet. Tout le monde parle de la culpabilité de ce trader et de celle de la Société générale, mais personne n'évoque l'éventuelle responsabilité de l'organe chargé de superviser le fonctionnement de la banque.
Il est important que les parlementaires soient représentés au sein de l'ACP. J'ajoute, même si l'argument est accessoire, que, puisqu'ils ne sont pas indemnisés pour cette tâche, leur présence permettrait d'économiser la rémunération de deux administrateurs supplémentaires.
J'étais cosignataire de l'amendement adopté par la commission des finances sur lequel M. Carrez souhaite revenir. Nous posions un certain nombre de questions auxquelles il me semble utile de répondre.
Tout d'abord, quel contrôle, a priori et a posteriori, le Parlement a-t-il exercé lors de la création de l'ACP par voie d'ordonnance ? En siégeant, en qualité de représentant de l'Assemblée nationale au comité consultatif de la législation et de la réglementation financière, j'ai pu, dans un premier temps, exprimer mes positions sur l'ordonnance en préparation. Dès ce stade, la capacité du Parlement à se saisir du sujet était en jeu. Grâce à l'introduction dans ce projet de loi d'un article 5 A, qui ratifie l'ordonnance créant l'Autorité de contrôle prudentiel, un premier pas important est franchi, et le débat qui se tient aujourd'hui constitue bien une étape majeure dans l'exercice du droit de regard du Parlement.
Ensuite, comment le Parlement peut-il être associé aux travaux de cette nouvelle autorité administrative indépendante ? Plusieurs critères peuvent être retenus.
D'abord, il peut exercer un contrôle sur les moyens qui lui sont attribués : tel est l'objet de la mission du comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques sur le fonctionnement des autorités administratives indépendantes, qui a été confiée à nos collègues Christian Vanneste et René Dosière.
Toutefois, puisqu'il s'agit, en l'espèce, d'une nouvelle autorité, qui se substitue à la Commission bancaire et à l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles, nous nous sommes également demandé comment nous pourrions contrôler son fonctionnement. En commission, nous avons envisagé – et le rapporteur ainsi que le rapporteur général en sont d'accord – qu'un rapporteur spécial puisse contrôler précisément les moyens de fonctionnement de l'Autorité de contrôle prudentiel.
Par ailleurs, comment le Parlement peut-il être représenté au sein du collège de l'ACP ? À ce sujet, nous avions fait la proposition, assez audacieuse – je ne dirai pas révolutionnaire pour ne pas brusquer M. Brard (Sourires) –…
…qu'un représentant de l'Assemblée nationale et un représentant du Sénat siègent dans ce collège. Toutefois, nous avions conscience que cette solution pouvait causer un certain nombre de difficultés, au premier rang desquelles figure – et Mme la ministre l'a relevé à juste titre en commission – le risque, pour le Parlement, de se retrouver en porte-à-faux. En effet, l'Assemblée nationale pourrait être liée par un vote auquel son représentant aurait participé, quand bien même ce vote ne correspondrait pas au sentiment majoritaire de la commission des finances, voire de l'Assemblée nationale.
Il fallait donc trouver une autre réponse, et il me semble que la formule suggérée par le rapporteur général est la bonne. Celui-ci propose en effet, dans son amendement, que le président de l'Assemblée nationale et celui du Sénat désignent des personnalités qualifiées pour siéger au sein du collège de l'ACP. Nos débats auront donc permis de renforcer le droit de regard du Parlement sur le fonctionnement et les décisions de l'Autorité de contrôle prudentiel, ainsi que sur les conditions de sa création. C'est pourquoi je soutiens l'amendement n° 21 de Gilles Carrez, qui me semble répondre à cet objectif.
Décidément, les membres de la majorité me surprendront toujours. Louis Giscard d'Estaing, qui a été si convaincant en commission, fait maintenant acte de renoncement, d'abdication, de capitulation.
Il n'a pas besoin de béquilles, monsieur Censi : il peut se défendre tout seul.
On nous dit que le Parlement pourrait être lié par le vote auquel aurait participé un parlementaire, mais je connais des parlementaires qui ne se sentent absolument pas liés par les votes auxquels ils ont participé et qu'ils doivent rapporter en séance publique. Ainsi Jérôme Chartier n'hésite pas à appuyer un amendement qui fusille le texte voté par la commission, dont il est pourtant le rapporteur. Il y a là un problème de déontologie parlementaire auquel il devrait être sensible. Comment peut-il s'octroyer le droit de ne pas suivre la commission des finances, alors qu'il devrait exposer, en rapporteur scrupuleux, les arguments qui l'ont conduite à l'adoption de ce texte ?
Autant M. Giscard d'Estaing a été convaincant l'autre jour, autant, aujourd'hui, il faut avoir pour lui beaucoup d'estime pour continuer de l'écouter.
Il s'agit d'une question de fond, dont nous débattons très souvent, celle de la place éventuelle de représentants du Parlement au sein des autorités indépendantes. Sur ce point, notre doctrine juridique doit être parfaitement claire. Puisqu'une autorité indépendante exerce des prérogatives de puissance publique, elle appartient à la sphère de l'exécutif. Dès lors, si, en tant que parlementaires, nous sommes directement nommés pour siéger au sein de cette autorité, nous nous retrouverons, à un moment ou à un autre, en porte-à-faux.
Or, notre pouvoir tire en grande partie sa légitimité – et vous nous l'avez souvent rappelé, monsieur Brard – de la séparation des pouvoirs. Certes, il existe une exception – et on a rappelé que M. Türk accomplit un travail remarquable –,…
…mais cette exception est liée à un domaine très particulier, celui des libertés fondamentales. Au reste, le texte qui prévoyait la présence de parlementaires au sein de la CNIL n'a pas, me dit-on, été déféré au Conseil constitutionnel, ce qui explique cette exception. En tout état de cause, il est évident que si des parlementaires devaient siéger au sein du CSA ou de l'Autorité de contrôle prudentiel, il y aurait un risque de conflit d'intérêts. De ce point de vue, la solution proposée, à laquelle souscrit Louis Giscard d'Estaing, devrait donner satisfaction.
(Le sous-amendement n° 160 est adopté.)
(L'amendement n° 21 , sous-amendé, est adopté.)
(L'article 5 C, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement rédactionnel de M. Chartier, n° 39.
(L'amendement n° 39 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 5 D, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 102 , portant article additionnel après l'article 5 D.
La parole est à M. le rapporteur.
Il s'agit d'un amendement important, puisqu'il vise à créer un code de déontologie pour tous les établissements bancaires et financiers.
L'article 612-1 du code monétaire et financier prévoit que l'Autorité de contrôle prudentiel, qui rassemble la Commission bancaire et l'Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles, sera chargée de veiller à la protection de la clientèle des banques et qu'elle pourra, à cette fin, s'appuyer sur les règles de bonne pratique de ces établissements.
Afin de permettre à la clientèle de prendre connaissance de l'ensemble de ces règles de bonne pratique, nous proposons que celles-ci soient rassemblées dans un document appelé code de déontologie, qui comporterait les engagements de l'établissement bancaire ou financier vis-à-vis de ses clients.
Sous réserve que M. le rapporteur confirme que le code de déontologie est bien « mis à disposition de la clientèle », le Gouvernement est favorable à l'amendement.
Je vais en effet rectifier mon amendement, en substituant, au IV, les mots : « mis à disposition » aux mots : « porté à la connaissance ».
(L'amendement n° 102 , ainsi rectifié, est adopté.)
Actuellement – nous y avons fait référence ce matin lors de la discussion générale –, des discussions ont lieu en vue de l'établissement d'une nouvelle norme prudentielle, désignée sous le nom de « Bâle III ». Ces discussions font suite au deuxième round de négociation, dit « Bâle II », qui a abouti en 2004 à des normes progressivement mises en oeuvre, sans l'être encore entièrement au niveau mondial.
L'établissement des nouvelles règles prudentielles post-crise dites « Bâle III » est prévu pour la fin de l'année 2010, c'est-à-dire dans un délai relativement proche. Compte tenu de leur importance pour l'économie réelle, nous proposons, par l'amendement n° 99 , que les commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat soient régulièrement informées, au moins une fois par trimestre et en tant que de besoin, de l'avancée des négociations.
À ce propos, je souhaite d'ailleurs apporter une rectification à mon amendement, en substituant au mot : « trimestriel », les mots : «, une fois par trimestre au moins, ».
(L'amendement n° 99 , ainsi rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 5 E, amendé, est adopté.)
Madame la ministre, aujourd'hui, en France, 58,2 millions de cartes de type interbancaire sont en circulation. Les cartes sont le moyen de paiement doté de la progression la plus dynamique, avec une croissance de 6,5 % en un an, et représentent près de 42 % des paiements de détail en France en 2009.
Lorsqu'une transaction est réglée par carte bancaire, la banque du consommateur ne transfère pas intégralement le montant de l'achat à la banque du commerçant, mais en conserve une partie. Les banques prélèvent ainsi une commission, dite « commission interbancaire de paiement », censée couvrir les risques de fraude, d'insolvabilité, ainsi que le coût supposé d'entretien des infrastructures bancaires.
En parallèle, une commission dite « commerçante » est facturée par la banque du commerçant à son client, afin de répercuter cette commission interbancaire de paiement. Même si cette commission dite « commerçante » se noie fréquemment dans un pack proposé aux commerçants et comprenant différents services, comme la location du terminal de paiement ou l'abonnement téléphonique, elle n'est nullement négligeable, puisqu'elle varie entre 0,4 % et 1,8 % de la transaction et influence donc les prix payés par les consommateurs.
Cette commission soumet les commerçants et les consommateurs à une double facturation, puisqu'ils payent tous deux l'utilisation du système de carte bancaire à plusieurs reprises. Il apparaît donc important d'instaurer un système de rémunération bancaire basé sur une commission fixe correspondant aux services rendus par les banques.
Par ailleurs, l'amendement vise à instaurer un taux plafond de la commission commerçante indexé sur le taux de fraude établi chaque année par l'observatoire de la sécurité des cartes de paiement.
Enfin, il est proposé d'envoyer chaque année aux commerçants – comme c'est le cas pour les particuliers depuis 2008 – un récapitulatif des sommes perçues par leur banque au cours de l'année civile précédente au titre des frais facturés fixés contractuellement.
La commission n'a pas examiné cet amendement, mais je reconnais que la question des commissions interbancaires sur les transactions réglées par carte est un vrai sujet. J'ai le sentiment que cette question va faire l'objet d'un examen approfondi par une mission judicieusement choisie. L'objectif, qui devra être atteint assez rapidement, est double. Il s'agit d'une part de lever les incompréhensions évoquées par Bernard Debré, d'autre part de mettre la réglementation française en phase avec l'évolution de la réglementation européenne.
Dans le cadre de l'examen de ce projet de loi relatif à la régulation bancaire et financière, je ne peux qu'émettre un avis défavorable à cet amendement, bien que je sois très favorable à ce qu'une réflexion s'engage sur la question.
Le Gouvernement est tout à fait sensible aux préoccupations que vous venez d'exprimer au sujet des frais bancaires en général. J'ai d'ailleurs demandé à deux personnalités, M. Constant et M. Pauget, de me remettre avant la fin du mois de juin un rapport sur les frais bancaires. Ce rapport portera sur les frais bancaires mis à la charge des clients des banques en général, notamment en cas de cascade, de succession d'impayés, de forfaits, bref, toutes les situations où les clients paient des frais bancaires dont il n'est pas certain qu'ils correspondent à des services rendus en contrepartie. Il me sera remis fin juin.
Par ailleurs, monsieur Debré, je sais que vous avez engagé un travail de fond avec deux autres députés de la majorité, dans le cadre duquel vous allez effectuer un certain nombre d'auditions, de vérifications et d'appréciations de différents modèles économiques. Je serai extrêmement attentive aux conclusions que vous tirerez, qui nous permettront de travailler de concert sur la question des frais bancaires. Cette question doit être examinée du point de vue des clients directs, mais aussi des utilisateurs de services que sont les commerçants détaillants, en ayant à coeur les intérêts de tous les commerçants.
Cela étant dit, et si mes explications vous agréent, monsieur Debré, je vous invite à retirer votre amendement.
Madame la ministre, monsieur le rapporteur, j'ai déposé cet amendement pour vous sensibiliser à un problème extrêmement important, notamment au regard de ses enjeux financiers.
Richard Mallié, Françoise Branget et moi-même travaillons effectivement sur ce sujet, qu'il m'a paru nécessaire d'évoquer afin de vous alerter. Les réponses que vous m'avez apportées m'ont convaincu et me conduisent à retirer mon amendement.
Comme je le disais ce matin, ce texte est un acte manqué : il ne dit rien au sujet des frais bancaires. Le seul amendement déposé sur cette question est évacué, rejeté sans autre forme de procès avec, comme d'habitude, la promesse d'un rapport qui sera rendu plus tard. C'est à n'y rien comprendre : n'est-on pas capable, sur un texte relatif au fonctionnement des banques et de la finance, d'évoquer la question des frais bancaires ?
L'amendement proposé est pourtant modeste, puisqu'il indique qu'un décret fixera les plafonds. On pourrait concevoir qu'il soit adopté et que le rapport qui va vous être remis prochainement vous fournisse tous les éléments utiles pour fixer ultérieurement, par décret, les montants des plafonds. Je reprends donc cet amendement, monsieur le président.
Madame la ministre, confier un rapport à M. Constant et M. Pauget n'est sûrement pas la garantie d'obtenir un rapport objectif.
Faire appel à l'ancien patron du Crédit Agricole, c'est pour le moins étonnant !
M. Pauget est effectivement l'ancien patron du Crédit Agricole. Pouvez-vous nous rappeler combien de milliards cette banque a perdu au moment de la crise ? Et c'est à des compétences comme celle-là que l'on va demander un avis autorisé !
Cela me fait penser à votre prédécesseur, Thierry Breton, qui avait demandé un rapport sur la fiscalité à Alain Prost, alors exilé fiscal ! Il y a un minimum de morale, madame la ministre : on ne fait pas appel à ce genre de personnes pour faire des propositions sérieuses, tenant compte de l'intérêt général. Je suis sûr que Bernard Debré, qui est un homme moral – comme il l'a prouvé au sujet de la grippe A et de bien d'autres sujets –, ne peut que partager mon point de vue.
Deuxièmement, on nous dit que l'un des deux députés chargés d'effectuer, avec notre collègue Debré, un travail approfondi sur les frais bancaires, n'est autre que Richard Mallié. Comme on le sait, ce dernier est régulièrement en proie à des obsessions, qu'il s'agisse du travail du dimanche ou de la HALDE, à laquelle il s'est attaqué : la protection des citoyens contre les atteintes aux droits n'étant pas sa tasse de thé, il a décidé de passer la HALDE à la moulinette ! Je n'ai pas de conseil à vous donner, monsieur Debré, mais à votre place, je choisirais mieux mes amis politiques. Compte tenu du passé de M. Mallié – je ne parle évidemment que de son passé politique, il ne s'agit pas de me livrer à une attaque personnelle qui serait tout à fait déplacée – je pense que vous auriez pu trouver mieux.
C'est une attaque personnelle ! Vous nous avez habitués à mieux, monsieur Brard !
Troisièmement, vous avez parlé d'évolution européenne, monsieur le rapporteur, mais vous n'êtes pas sans savoir que les évolutions européennes ne vont pas du tout dans le bon sens : elles tendent plutôt à une altération des normes de sécurité relatives aux cartes. Alors que les Français sont actuellement les plus performants, les autres Européens essaient, avec des complicités américaines, d'abaisser le niveau de sécurité. Nous avons les cartes les plus sûres d'Europe, peut-être même du monde. Les Allemands ne peuvent en dire autant, eux qui ont été victimes d'un énorme bug lors des fêtes de la fin de l'année dernière ! Tout cela donne l'impression que l'on ne met pas sur la table tous les éléments qui permettraient de comprendre la situation.
Comme cela a été dit plusieurs fois, les frais bancaires sont tout à fait exorbitants – à ce sujet, l'un de nos collègues nous a rapporté, tout à l'heure, les propos de M. Baudouin Prot. Les banquiers français sont, on le sait, ceux qui plument leurs clients avec le plus d'enthousiasme, notamment grâce aux packages. C'est un truc bien connu que celui consistant à rouler les gens en employant des termes qu'ils ne comprennent pas – ce n'est pas Mme Lagarde qui se fera avoir, elle qui sait parfaitement ce qui signifie le terme package. (Sourires.)
M. Prot a expliqué que si l'on additionnait le coût de chacun des services compris dans les packages…
J'ai presque terminé, monsieur le président. Pour expliquer les turpitudes, il est parfois nécessaire d'entrer dans les détails.
Selon M. Prot, disais-je, la somme des services compris coûte beaucoup plus cher que le package – sauf que les clients n'ont jamais besoin de tous les services composant ce package ! Ce n'est donc rien d'autre qu'une arnaque supplémentaire de la part des banques.
Vous avez sollicité deux personnalités éminentes, madame la ministre, dont nous doutons qu'elles puissent rendre un rapport objectif. Si je peux me permettre une suggestion, il me semble qu'il serait plus pertinent de soumettre le sujet à l'Observatoire des cartes bancaires qui, lui, rendrait un rapport objectif parce que pluraliste et déconnecté d'intérêts particuliers.
Sur le vote de l'amendement n° 98 , je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Henri Emmanuelli.
Madame la ministre, si nous évoquons actuellement un sujet quelque peu éloigné de la régulation bancaire, nous sommes en revanche très près du portefeuille des Français.
Comme je l'ai dit ce matin à la tribune, un rapport rendu au niveau européen fait apparaître que la France est très mal placée pour ce qui est des frais bancaires – seuls l'Espagne et le Portugal pratiquant des tarifs plus élevés que les nôtres. Je suis, jusqu'à présent, resté assez silencieux dans ce débat, car j'ai le sentiment qu'il ne sert pas à grand-chose : vous êtes enfermée dans vos réponses et n'entendez pas en sortir. La seule chose qui bougera sans vous et sans nous, c'est le spread, l'écart entre les taux d'intérêts pratiqués en France et en Allemagne. Mais quand vous venez nous expliquer que vous avez confié à M. Pauget, l'ancien président de l'Association française des banques, qui a négocié toutes sortes de choses avec vous, notamment la façon dont l'État devait soutenir les banques, le soin de vérifier si les tarifs bancaires sont adéquats, franchement, vous vous moquez de nous ! Si vous voulez que cela paraisse sérieux, allez chercher quelqu'un à l'UFC-Que Choisir, mais avec M. Pauget, on ne risque pas d'apprendre grand-chose !
Je veux profiter de la discussion sur cet amendement pour préciser quelques éléments. Il ne faut pas confondre le crédit fait aux entreprises et aux particuliers et les tarifs pratiqués par les banques à l'égard des déposants qui leur font confiance. Nous avons auditionné Baudouin Prot, président de l'Association française des banques – dont le prédécesseur était effectivement M. Pauget – qui nous a indiqué que les taux des crédits consentis aux entreprises et aux particuliers en France étaient plus bas que la moyenne de ceux consentis en Europe.
En revanche, il en va tout autrement des tarifs. Depuis 2001, les commissions à la charge des clients ont augmenté presque deux fois plus vite que le PIB, et l'écart s'est creusé ces trois dernières années. En moyenne, une brochure d'information compte 24 pages – jusqu'à 63 pages pour le Crédit Lyonnais qui, je le rappelle, est une filiale du Crédit Agricole, la banque dont M. Pauget, à qui vous avez confié une mission, est l'ancien président. Ces brochures comprennent en moyenne 303 tarifs – jusqu'à 396 pour la BPCE en Île-de-France. Il existe cinq façons différentes d'afficher les tarifs, ce qui ne favorise guère la lisibilité pour les usagers.
Depuis 2004, les banques ont concentré l'augmentation tarifaire sur les incidents de paiement. En moyenne, les opérations liées aux incidents de paiement ont augmenté de 28 % ces cinq dernières années, soit 2,3 fois plus vite que ce que l'on appelle le package, c'est-à-dire l'ensemble des services considérés comme indispensables, proposés par les banques à leurs clients. Tous les tarifs des incidents du quotidien ont connu une augmentation supérieure à celle de la moyenne des packages.
Les frais perçus lors du transfert d'un plan épargne logement ont augmenté deux fois plus vite que la moyenne du transfert des packages. Enfin, au moindre découvert, les banques pratiquent des taux que l'on peut juger excessifs. Comme tout parlementaire, je reçois lors de ma permanence des concitoyens qui viennent m'exposer les difficultés auxquelles ils sont confrontés. La semaine dernière, j'ai reçu une jeune femme travaillant à temps partiel pour une rémunération mensuelle inférieure à 800 euros. Elle a une dette à l'égard de l'administration fiscale, qu'elle honore régulièrement selon un échéancier. La seule fois où elle s'est acquitté d'un paiement avec deux jours de retard, elle a été l'objet d'un avis à tiers détenteur, que sa banque lui a facturé 150 euros.
Je ne suis pas sûr, madame la ministre, que l'énumération de ces tarifs et la description de cet épisode – que l'on ne saurait imaginer isolé – justifient une enquête de la part de l'ancien président du Crédit Agricole, si estimable soit-il. Ce n'est plus l'heure d'effectuer des études, mais l'heure d'agir ! À cet égard, l'amendement de nos collègues de l'UMP est de nature à sensibiliser la représentation nationale à une situation qui n'est pas acceptable.
Si l'on comprend que les banques ont besoin de réaliser des profits pour être en mesure de prêter aux entreprises, encore faut-il que cela se fasse dans des conditions raisonnables. Vous voyez, quand je cite ces tarifs et les situations que cela peut créer pour les particuliers, à quel point la connaissance de la rémunération des dirigeants de certaines banques peut choquer – et en la circonstance, le mot est faible.
J'ai entendu M. Brard avec délectation, mais aussi un peu de surprise et de tristesse.
D'abord, les attaques ad hominem, même si elles sont voilées, monsieur Brard, me choquent profondément. M. Mallié et Mme Branget sont des élus du peuple, comme nous le sommes tous ici. Je trouve que ce n'est pas bien d'aller les accuser en leur envoyant des noms d'oiseaux. Il peut certes s'agir de jolis oiseaux, mais enfin, quand même !
Vous m'aviez habitué à mieux, monsieur Brard. Vous pouvez être plus percutant que cela, surtout quand vous faites des références historiques, lesquelles, en l'occurrence, étaient absentes de votre propos.
Si mes deux collègues et moi-même avons déposé cet amendement, c'est bien pour alerter. Nous l'avons d'ailleurs modifié, car si nous l'avions rédigé comme nous l'avions voulu, il serait tombé sous le coup de l'article 40. Richard Mallié, Françoise Branget et moi-même sommes particulièrement attachés à ce que nous allons faire. Bien sûr, nous attendrons le rapport qui sera remis à Mme la ministre. Et à cet égard, encore une fois, il est quelque peu désagréable d'entendre des noms d'oiseaux qui visent des gens tout à fait respectables.
J'espère que vous n'allez pas mettre un nom derrière la crise. Parce qu'alors, il faudrait peut-être prendre des mesures drastiques contre celui qui porte ce nom.
Trouvez-le moi !
Ce rapport, donc, sera sûrement très intéressant. Mais au moins, faites-nous confiance ! Nous allons travailler. Et nous avons déjà des rendez-vous sur ce sujet important. Nous ferons part à Mme la ministre de nos constatations, et nous saisirons l'Assemblée. Je crois que c'est une bonne démarche.
Alors oui, j'ai décidé de retirer cet amendement, parce qu'il est incomplet, parce que…
Non, la majorité réfléchit, ce que l'opposition ne fait pas toujours. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
S'agissant du droit des consommateurs à mieux connaître les facturations des commissions bancaires, je voudrais simplement ajouter que dans un projet de loi défendu à l'époque par M. Luc Chatel lorsqu'il était secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme, j'avais introduit un amendement, qui avait d'ailleurs été adopté à l'unanimité, tendant à étendre aux comptes des associations loi 1901 l'obligation pour les banques de récapituler de façon annuelle l'ensemble des frais qu'elles facturent.
Nous sommes engagés depuis maintenant plusieurs années dans cette démarche visant à permettre aux consommateurs, aux épargnants, aux dépositaires, une meilleure connaissance des frais qui leur sont facturés. Cette information est tout à fait nécessaire et utile.
M. Giscard d'Estaing m'a précédé. Je voulais dire à M. le président de la commission des finances que le Gouvernement est particulièrement attentif à cette question des frais bancaires, comme il le sera, monsieur Debré, aux résultats de vos travaux, de vos auditions, ainsi qu'à vos propositions.
Nous avons toujours été attentifs à cette question. Grâce à la disposition contenue dans le projet de loi défendu à l'époque par M. Chatel, dans le cadre de mon équipe – mais je ne m'approprie pas les mérites du texte, car c'est bien M. Chatel qui l'avait défendu –, les Français reçoivent maintenant chaque année le relevé des frais bancaires qui leur ont été facturés. Ils peuvent s'en offusquer, ou exercer leurs droits de consommateurs, tout simplement. C'est notre majorité qui a voté cette disposition.
C'est aussi notre gouvernement qui a proposé le plafonnement des frais pour incident de paiement, ainsi que la suppression des pénalités libératoires.
Ce n'est donc pas pour nous une préoccupation nouvelle que ce problème des frais bancaires. Cela étant, nous savons très bien qu'il faut aller plus loin. Pour cela, nous bénéficierons des préconisations du rapport que j'ai confié à MM. Pauget et Constans – et j'en profite pour souscrire aux propos de M. Debré regrettant les attaques ad hominem –, ainsi que des conclusions qui résulteront, monsieur Debré, des travaux effectués par votre groupe.
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 98 , qui a été repris.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 36
Nombre de suffrages exprimés 35
Majorité absolue 18
Pour l'adoption 9
Contre 26
(L'amendement n° 98 n'est pas adopté.)
Je suis saisi de deux amendements, nos 122 rectifié et 49 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 122 rectifié .
Concernant les « attaques ad hominem », quand, dans le cadre de ses responsabilités, on a causé des sinistres considérables, on doit les assumer. Il ne me semble pas que les intéressés aient renoncé, du fait de ces sinistres, à leurs rémunérations plantureuses.
J'en viens à cet amendement. Comme cela a été souligné abondamment ce matin, les banques ont évidemment une responsabilité éminente dans la situation de crise que nous connaissons. À cet égard, oui, monsieur Debré, on peut mettre derrière cette crise des noms, que nous connaissons. Fortes du soutien sans contreparties que leur accorde le Gouvernement, elles s'arrogent le droit de continuer à vampiriser sans vergogne l'économie réelle.
Alors que l'intervention des pouvoirs publics et les prises de participation de l'État au capital des banques auraient permis de recentrer ces dernières sur leur coeur de métier, qui consiste à financer les investissements des entreprises et des ménages, les établissements de crédit ont recommencé à lorgner sur leurs prochains bonus et à faire de nouveau grossir la bulle spéculative.
C'est pourquoi, indépendamment de la réforme du secteur bancaire dont vous discutiez, madame Lagarde, avec vos homologues du G20 – réforme qui concerne les exigences de fonds propres des établissements financiers –, il nous paraît aujourd'hui opportun d'engager une réflexion de fond sur la séparation des activités des banques.
Nous ne sommes pas les premiers à le suggérer. Plusieurs collègues l'ont fait, et le Premier ministre britannique, David Cameron, et son numéro deux, Nick Clegg – qui sont certainement plus des références pour vous que pour moi – se sont engagés dans cette perspective, tout comme d'ailleurs l'administration Obama.
La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour soutenir l'amendement n° 49 .
Avec votre permission, monsieur le président, je souhaiterais revenir un instant au débat sur le précédent amendement. En France, les frais bancaires sont bien plus élevés que partout ailleurs. La tenue de compte, c'est 150 euros. Dans la plupart des autres pays, c'est une quarantaine d'euros.
Quant à la transparence de l'information, on peut constater, en lisant les documents fournis par les banques, que, contrairement à ce que nous a dit Mme la ministre, on est en très loin. On en arrive à des situations complètement aberrantes, qui ont été relevées par l'UFC-Que Choisir : pour un découvert de l'ordre de trente euros, le taux d'intérêt effectif, frais inclus, dépasse de très loin le taux de l'usure – je rappelle que celui-ci est actuellement de 19,45 % –, puisqu'il atteint parfois 40 %. C'est donc un débat important, que nous devons reprendre et que nous reprendrons.
L'amendement n° 49 porte sur un sujet qui me paraît fondamental. Si l'on veut sortir de cette crise, il faut que les banques se remettent à faire leur métier, qui consiste à détenir des dépôts et à consentir des prêts en étant attentives à ce qu'elles font. D'où la nécessité de reprendre ce débat sur la séparation entre les activités de dépôt et celles d'investissement, ou de placement.
C'est l'objet d'un texte qui est actuellement en discussion aux États-Unis. Nous, nous demandons seulement que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur ce sujet. Il n'est pas possible d'écarter ce sujet après la crise financière que l'on a connue ! L'activité de dépôt, c'est une mission de service public. Cela suppose que la banque qui remplit cette mission le fasse en étant attentive aux fonds qu'elle collecte, c'est-à-dire en ne transformant pas cette fonction en une activité de spéculation. Sur un tel sujet, demander qu'un rapport soit présenté à notre assemblée, c'est un minimum.
Cette question de la séparation entre les activités de banque de dépôt et de banque d'investissement, c'est un vieux sujet. C'est ce qu'on appelle, dans les médias, un « marronnier ». Il revient régulièrement.
Certains se demandent si ce n'est pas la bonne solution pour échapper à la crise financière. Je voudrais recadrer le débat à partir de quelques exemples.
Aux États-Unis, depuis les années trente, le système bancaire est marqué par la séparation entre les banques de dépôt et les banques d'investissement.
Non, je suis désolé. Il l'est. Au niveau des États, les petites banques ont certes une activité de placement et d'investissement, mais qui est relativement modeste, car ces banques régionales sont, à l'origine, des banques de dépôt. Quant aux banques d'investissement, ce sont des banques importantes, qui ont une activité à l'échelle nationale. Elles ont essentiellement une activité d'investissement. Ainsi, en raison de ce qui est un héritage de l'histoire, il s'est instauré une sorte de séparation de fait entre les banques de dépôt et les banques d'investissement.
Cela ne veut pas dire, monsieur Emmanuelli, que les banques de dépôt ne font pas de l'investissement. Cela veut dire que l'organisation bancaire n'est pas celle de l'universalité. C'est la différence majeure avec la France.
Pourquoi le système américain est-il davantage systémique que le système français ? Cela tient tout simplement à une question d'exposition aux risques. Lorsqu'un groupe bancaire est très puissant et très diversifié, les risques qu'il prend sont eux-mêmes diversifiés, d'où une moindre exposition à des phénomènes systémiques qu'une banque très spécialisée, qui exerce dans un domaine particulier.
Les exemples sont nombreux. Le premier auquel on pense est celui d'AIG.
Monsieur Emmanuelli ! Cela n'a rien à voir, et vous le savez bien.
AIG et les CDS : voilà l'exemple même d'une activité de réassurance qui s'est développée et qui a conduit cet établissement au bord de la faillite. Le gouvernement américain a dû intervenir pour l'éviter, afin que le système puisse se maintenir. La faillite d'AIG aurait provoqué celle du système financier tout entier. Lehman Brothers, à côté, ce n'était rien ! Le rachat d'AIG était absolument indispensable, et lorsque Bank of America…
Pardonnez-moi d'être long, monsieur le président. Mais sur cette question qui revient régulièrement, j'essaie d'être complet et d'expliquer les raisons pour lesquelles il ne me semble pas opportun de demander un rapport de plus. Sur un sujet qui a été amplement traité, on pourrait peut-être éviter à un certain nombre de fonctionnaires de consacrer du temps à la rédaction d'un rapport qui, de toute façon, arrivera toujours à la même conclusion. Et quelle est cette conclusion ? C'est qu'il n'y a pas d'intérêt à instaurer une séparation entre les activités de dépôt et d'investissement. Ces deux activités sont nécessairement liées. Et de surcroît, ce lien est un excellent moyen de résistance à la crise systémique, précisément du fait de la diversité du risque.
Le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements.
Dans l'esprit de leurs auteurs – du moins en ce qui concerne l'amendement n° 122 rectifié –, cette distinction entre les banques d'investissement, d'une part, et les banques de dépôt, de l'autre, est destinée à éviter les risques systémiques, un peu dans l'esprit des propositions Volcker. Mais qui retrouve-t-on parmi les banques qui sont à l'origine du risque systémique survenu aux États-Unis ? On retrouve Bear Stearns, Merrill Lynch, Lehman Brothers. Ces trois banques ne relevaient pas de l'autorité bancaire. Elles n'étaient pas, en tant que telles, des banques de détail. Elles ne faisaient pas de dépôt. C'étaient purement des banques d'investissement. Or ce sont elles qui sont à l'origine du risque.
De la même manière, en Grande-Bretagne, Northern Rock est une des banques qui a été à l'origine des difficultés dès 2007 et qui a dû être nationalisée. Or elle ne faisait pas d'opérations de trading, mais du dépôt et du financement de collectivités locales. La distinction préconisée pour éviter le risque systémique ne semble donc pas opérante, en tout cas pas vérifiée par les faits.
Je suis d'accord avec vous, monsieur Muet, les banques doivent se concentrer sur leur coeur de métier. Celui-ci consiste à gérer du temps, c'est-à-dire, pour simplifier, à prendre des dépôts et à les convertir en financement de l'économie. Mais il faut arriver à distinguer entre ce coeur de métier d'activité bancaire et un certain nombre d'autres opérations. Par exemple, quand une banque couvre des opérations pour l'un de ses clients corporate, est-ce du trading ou du banking ? Ce n'est pas toujours évident.
À supposer que l'on ait franchi la première étape, pour la deuxième, qui consisterait à distinguer entre banques qui font du dépôt et banques qui font de l'investissement, la frontière serait extrêmement difficile à délimiter.
C'est la raison pour laquelle il ne me paraît pas opportun de créer une distinction institutionnelle entre les deux. En revanche, il est déterminant et nécessaire, et j'espère que c'est l'orientation que prendra Bâle 3, d'exiger des banques plus de réserves et de garanties pour leurs activités de trading, et ce dans des proportions importantes.
Le rapport que M. Lepetit m'a rendu sur l'étude du risque systémique et les moyens de l'éviter contient une série de propositions auxquelles j'entends donner suite. Sont notamment proposés des régimes de taxation qui seraient assis sur les activités à plus forts risques dans des proportions bien plus importantes que les activités traditionnelles de banking.
J'espère vous avoir, non pas convaincu – j'y renonce (Sourires) –, maisen tout cas éclairé sur les raisons pour lesquelles j'émets un avis défavorable sur les deux amendements.
Monsieur Chartier, vous nous avez fait un rappel historique quelque peu tronqué. Aux États-Unis, la distinction n'existait pas jusqu'à ce que M. Roosevelt l'impose après la crise de 1929. Puis, dans les années 1970, un sénateur américain a fait voter un texte qui faisait sauter ce distinguo. Et nous nous sommes retrouvés dans la situation problématique d'aujourd'hui.
Le sujet est certes difficile, mais vos réponses ne sont pas convaincantes. On est en plein procès Société générale contre Kerviel. Cette banque de dépôt avait aussi une activité de marché qui a présenté tout d'un coup – mais ce sera aux juges de le dire – un risque monumental. Qui, s'il n'y avait pas eu la puissance publique pour les garantir, aurait assumé le risque sinon les déposants ? Au minimum, on devrait dire que, pour les banques de dépôt, les activités de marché ne sont pas tolérées au-delà d'une certaine proportion. Car il est vrai que la frontière est difficile à tracer.
Je m'interroge. Alors que M. Obama va essayer, et ce ne sera pas facile pour lui, de pousser les États-Unis dans ce sens et que M. Guaino dit qu'il faudrait le faire, pourquoi tout d'un coup, ici, à l'Assemblée nationale, nous répond-on, sur un ton sentencieux, comme si l'on parlait à des gens pas tout à fait analphabètes mais n'ayant pas dépassé le niveau primaire, que le sujet n'est plus d'actualité ? Je crois que la raison de l'opposition à ce distinguo n'est ni économique ni financière ; elle relève de la sociologie des rémunérations.
Qu'est-ce qui est le plus rémunéré dans les banques ? Les activités de marché et les traders. C'est la haute rémunération de ces traders qui justifie ensuite les rémunérations monumentales, exorbitantes, des managers de banques. Revenir à un distinguo entre banque d'affaires et banque de dépôts remettrait en question cet eldorado qu'ils se sont fabriqué au cours des années. Vous devriez y réfléchir, madame la ministre, car une fois qu'on a pensé à cela, il est difficile de se l'enlever de la tête. Sinon, on ne voit pas pourquoi des banques, dont le rôle économique est de transformer de l'épargne à court terme en prêts à moyen et long terme, se mettraient tout d'un coup à spéculer.
Quel sens économique peut bien avoir le high frequency trading ? Aucun ! Pourtant, il représente jusqu'à 40 % des recettes d'activité de marché. Des esprits brillants pourraient-ils nous expliquer à quoi ça sert ? Je ne le sais pas, personne ne le sait. Ou plutôt si, cela sert à rapporter à des gens. Il y a d'ailleurs forcément des contreparties qui se font plumer en face, mais comme elles sont extrêmement nombreuses et dispersées, on ne s'en aperçoit pas. Ne dites donc pas qu'il n'y a pas un problème d'organisation du système financier. Il y en a un et, quelle que soit la position qu'on adopte aujourd'hui, il faudra bien finir par le régler.
Je me livrerai, moi aussi, à un petit rappel historique. Les banques américaines universelles avançaient exactement les mêmes arguments que ceux que l'on entend aujourd'hui lorsque, en 1933, Roosevelt a pris la décision de les séparer. Depuis dix ans, les États-Unis sont revenus sur ce système. Ils ont eu tort, comme beaucoup de pays ont eu tort de laisser des banques de dépôt, au lieu de faire leur métier de banquier, s'amuser à faire des placements inconsidérés sur les marchés financiers.
Les banques sont plus robustes, dit M. Chartier. Évidemment ! Si une pure banque d'investissement fait faillite à cause de ses placements financiers, il n'y a aucune raison qu'un État la soutienne, à condition toutefois de n'être pas assez importante pour entraîner avec elle l'ensemble du système financier.
La logique de la séparation place, d'un côté, une mission bancaire de service public, de l'autre côté, la spéculation soumise à une loi : quand on se trompe, on assume soi-même ses pertes. Nous ne proposons pas de séparer les banques de dépôt des banques d'investissement, mais de séparer les activités, par exemple en interdisant le trading pour le compte propre des banques. Que ces dernières réalisent des placements financiers pour leurs clients, c'est naturel : s'ils se trompent dans la spéculation, ce sont eux qui le supporteront et c'est normal. Ce qui n'est pas normal, c'est que les déposants, c'est-à-dire l'ensemble des citoyens, soient mis en danger par des activités de banques mal régulées en interne et sans doute en externe. À cet égard, l'affaire Jérôme Kerviel est tout à fait édifiante, qui a mis en danger tous les déposants de la banque en perdant cinq milliards en un week-end.
Il y a là un vrai sujet. Le Gouvernement peut refuser de nous soumettre un rapport sur l'opportunité d'interdire le trading pour compte propre aux banques à activité principale de dépôt. J'observe toutefois qu'aux États-Unis et dans le monde entier, tout le monde se pose la question. Vous-même finirez peut-être par vous interroger. En tout cas, je pense que tant qu'on ne répondra pas sérieusement à cette question, on ne pourra pas apporter de vraie réponse à la crise.
Pendant soixante-cinq ans, période des trente glorieuses comprise, de 1933 à 1998, le système américain a vécu sous le régime de la séparation. Une kyrielle de petites banques se sont créées au niveau local et fédéral et quelques grandes banques d'investissement au niveau fédéral.
À entendre votre argumentation, on a le sentiment que les banques d'investissement ont forcément des activités de marché. Or elles ne font pas que cela. Elles financent aussi l'économie, aident à la restructuration de fonds propres, financent le développement des entreprises. Bref, elles ont une activité nécessaire à la croissance. Parfois, c'est vrai, cette activité est rentable, mais pas autant que la spéculation sur les marchés financiers que M. Emmanuelli a illustrée avec l'affaire Kerviel. Cette activité rentable est en tout cas nécessaire pour le financement de l'économie.
Quelle rentabilité pourrait avoir une banque de dépôt ? Son activité garantissant une sécurisation parfaite par adossement à la banque centrale, elle retirerait une rémunération à 0,25 %. C'est le cas aujourd'hui avec la Banque centrale européenne. Pourquoi pas, mais elle n'aurait rien d'autre que les dépôts. Quant à la banque d'investissement, où se refinancerait-elle ? Sur les marchés, certes, mais avec quel argent ? Elle pourrait en trouver, mais en cherchant beaucoup. D'un côté, des dépôts faiblement rémunérés mais toujours là, de l'autre côté, la banque d'investissement qui se finance sur les marchés avec de l'argent beaucoup plus cher, cela peut être sympathique.
Je ne cherche pas à caricaturer, mais à vous convaincre que l'on peut approfondir la réflexion en prenant en compte la sécurisation des déposants. En France, cette sécurisation, qui n'a pas d'équivalent dans tous les pays, est très importante et elle a encore été renforcée après la crise financière. D'où mon sentiment qu'elle ne constitue pas un sujet pour notre pays. Si, comme l'a suggéré Mme Lagarde, on peut poursuivre la réflexion, un rapport est sans objet pour l'instant.
(L'amendement n° 122 rectifié n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 49 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 132 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Actuellement, on compte une vingtaine de territoires non coopératifs, au nombre desquels figurent notamment le Guatemala, les îles Cook, le Panama, les îles Marshall ou encore les Philippines. Ces territoires persistent à présenter des lacunes très importantes du point de vue de leur réglementation financière. Pourtant, le Gouvernement ne semble pas encore prêt à imposer de véritables sanctions à leur encontre. Devrons-nous attendre encore longtemps pour légiférer dans ce sens ? Non, bien sûr. Il serait donc judicieux d'interdire tous les mouvements financiers, les ouvertures de compte ainsi que les produits et montages en lien avec des territoires non coopératifs.
L'urgence de cette mesure se justifie par les manquements graves relevés dans ces territoires au regard des normes internationales. On y constate, en effet, l'absence totale ou une insuffisance de réglementation et de dispositifs de surveillance visant les institutions financières. Par ailleurs, aucune mesure n'existe de nature à empêcher les criminels ou leurs associés d'exercer des fonctions. Autre fait choquant, ces territoires persistent à faire obstacle à la coopération internationale en matière d'échanges d'informations et de répression des activités de blanchiment. Ainsi, ces territoires contribuent à entretenir tous les vices de notre système financier.
La régulation financière doit se traduire avant tout par la lutte contre ces territoires que je qualifierai des plus véreux. D'autres territoires, qu'on n'a pas l'habitude de citer, pourraient être ajoutés à cette liste, madame la ministre : par exemple les Pays-Bas, qui refusent de transmettre à l'administration fiscale française des renseignements sur des filiales de firmes françaises installées sur leur territoire.
Je vous propose de répondre de façon globale aux amendements de M. Brard qui ont sensiblement le même objet. Ces amendements poursuivent l'objectif louable de lutter contre les paradis fiscaux. À cet égard, je rappellerai les mesures prises par le Gouvernement et votées par le Parlement, notamment dans la loi de finances rectificative de 2009. Ces mesures sont de quatre types.
C'est tout d'abord, la création d'une liste noire – article 22 – qui introduit une liste française d'États non coopératifs, à laquelle un certain nombre de mesures fiscales, voire non fiscales, pourront désormais se référer. La publication de cette liste le 12 février 2010 est un pas très important franchi, à l'initiative de la France.
Il s'agit ensuite de l'introduction et de l'alourdissement d'une fiscalité pénalisante pour les flux en provenance ou en direction des territoires non coopératifs avec en particulier la non-application du régime des sociétés mères et filles au produit des titres d'une société établie dans un État non coopératif, la non-application de l'exonération des plus-values à long terme sur les titres de sociétés établies dans un territoire non coopératif et en particulier un taux de prélèvement forfaitaire de 50 % sur les produits de placements à revenus fixes payés dans un État ou un territoire non coopératif.
Par ailleurs, je souligne le renforcement des dispositifs anti-abus existants en direction des régimes fiscaux privilégiés, avec en particulier une application du dispositif de l'article 209 B du code général des impôts, lorsque les entités ou les entreprises contrôlées sont constituées ou établies dans un État ou un territoire non coopératif.
Il s'agit enfin des prix de transfert. La commission des finances s'est particulièrement investie lors du vote du projet de loi rectificative pour 2009, qui a donné lieu à l'adoption d'un ensemble de mesures tendant à préciser la composition de ces prix.
Outre cet article, à l'initiative de la commission des finances de l'Assemblée, une disposition créant une nouvelle obligation de reporting des banques françaises en matière de relations avec les paradis fiscaux a été intégrée à la loi du 18 juin 2009 relative à l'organe central des caisses d'épargne et des banques populaires. Cette nouvelle obligation générale impose aux établissements de crédit de publier en annexe de leurs comptes annuels des informations sur leurs implantations et leurs activités dans des États ou territoires qui n'ont pas conclu avec la France de convention d'assistance administrative, en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscale permettant l'accès aux renseignements bancaires.
Enfin, je rappelle que l'article 23 de la loi de finances rectificative pour 2003 octroie des pouvoirs de police judiciaire à des agents des services fiscaux, en vue d'enquêtes portant sur des cas de fraude fiscale les plus graves.
Telles sont les raisons pour lesquelles le dispositif est déjà très opérant. De ce fait, la commission des finances est défavorable à vos amendements. Elle s'est réunie hier soir pour les examiner.
La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Je vais, si vous le permettez , monsieur le président, adopter la même approche que M. le rapporteur en répondant à M. Brard. Ce dernier a déposé une série d'amendements qui, quoique un peu différents dans leur objet, leur portée, leurs effets, visent à donner corps à l'interdiction des paradis fiscaux ou à l'interdiction de travailler avec des paradis fiscaux, d'en tirer ou d'y envoyer des revenus de toutes catégories.
Je ne reviens pas sur les explications fournies par M. le rapporteur sur l'ensemble du dispositif fiscal pris en application de la loi de finances rectificative de 2009, qui prévoit un régime, non pas confiscatoire, mais extraordinairement aggravé en matière de prélèvements à la fois sur les sommes à destination des paradis fiscaux, mais aussi – ce qui est plus rare en droit fiscal français – des sommes en provenance des paradis fiscaux.La liste des paradis fiscaux a été publiée par mes services le 12 février 2010, dans des délais rapides permettant l'action.
La France a été à la manoeuvre et à l'initiative à l'occasion du G 20 de Londres, pour obtenir la publication par l'OCDE des listes noires, grises, blanches – même si l'on peut s'interroger sur leur pertinence, leur longueur, leur contenu, la dissociation entre tel ou tel territoire. Elle est déterminée, ayant modifié son arsenal juridique, à demander aux autres États membres du G 20 de rendre compte de ce qu'ils ont fait dans leur arsenal juridique, pour en apprécier l'effectivité.
Cette action s'ajoutera à celle du forum global de l'OCDE, sous l'autorité de M. d'Aubert, qui vérifie que les mesures ont été prises, que les textes ont bien été ratifiés et qu'ils sont suivis d'effet en matière d'échanges réels d'informations entre les parties prenantes aux différents avenants aux conventions fiscales.
Une double action a été prise à la fois en droit interne et en droit international dans le cadre du prochain G 20 dans la foulée de ce que M. d'Aubert met en oeuvre dans le cadre du forum global sur la fiscalité.
Avis défavorable sur cet amendement ainsi que sur l'ensemble des autres ayant à peu près le même objet, la même portée, mais pas toujours les mêmes effets.
C'est toujours très intéressant. L'objectif est louable : l'honneur est sauf.
Vous avez parlé de listes noires. Vous savez, comme moi, que, pour sortir de la liste noire, il suffit de conclure douze accords avec douze États voyous. J'espère que la règle avec la France n'est pas la même, j'en suis même certain.
Par ailleurs, vos contraintes ne s'appliquent pas à l'Union. Comme vous le savez, il y a dans l'Union des États à la rectitude aléatoire : le Luxembourg, la Belgique, les Pays-Bas, l'Italie, l'Autriche, l'Irlande, Monaco, etc. Ceux qui sont de vraies plaques tournantes sont exonérés.
J'ai eu le privilège d'être, un jour, invité à Genève pour m'exprimer devant une assemblée de voyous. Il y avait là des personnes honnêtes, si nombreuses qu'elles auraient pu tenir dans une cabine téléphonique – le Procureur du Roi de Charleroi, le député Ziegler et votre serviteur. Ils expliquaient comment l'on pouvait, depuis son ordinateur, faire des placements dans les paradis fiscaux sans avoir besoin de billet d'avion.
Je voudrais que l'on regarde de plus près, madame la ministre, certains établissements bancaires basés par exemple dans la ville d'Annemasse et dans quelques villes alentour.
Nous n'avons pas inventé nos propositions. Elles sont, pour l'essentiel, reprises de la mission de la commission des finances sur les paradis fiscaux. Un travail consensuel a été fait. Il a débouché sur des propositions qui peuvent être efficaces, mais qui ne sont pas reprises.
Certes, ce n'est pas à notre assemblée de décider de la mise sur pied d'une mission de la commission des finances. Mais je pense que le travail fait il y a quelques années mérite d'être entrepris dans le cadre de la situation actuelle. Quant à ce que les autres vont faire, madame la ministre, vous savez comme moi qu'il n'y a pas à grand-chose à en attendre et qu'il y a une sorte de consensus quand les États concernés en bénéficient. Je reviens aux Pays-Bas qui ont sous leur souveraineté un territoire bénéficiant de conditions d'autonomie qui permettent toutes les montages – je pense aux Antilles néerlandaises. Sur le territoire de l'île concernée, il y a l'autre partie, qui est Saint-Martin.
Il y a beaucoup de choses à faire et je ne suis pas sûr, madame la ministre, qu'il y ait les moyens suffisants, si j'en juge par la charge de travail insuffisante confiée à la Direction nationale des enquêtes fiscales. Tout se passe comme si le nombre de dossiers à traiter était désormais moindre. Chacun sait que ce n'est pas vrai.
(L'amendement n° 132 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 133 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
L'amendement est défendu.
(L'amendement n° 133 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 126 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Même chose, il est défendu !
(L'amendement n° 126 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 127 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Je vais le défendre. Je ne voudrais pas que nous allions trop vite, car je sens que j'ai du mal à convaincre nos collègues.
Cet amendement n° 127 s'inscrit dans notre lutte contre les territoires dits non coopératifs. Il nous apparaît primordial d'interdire la commercialisation de tous les produits proposés par des partenaires de services qui transiteraient par des entités établies dans ces territoires.
Il s'agit d'une mesure très concrète. Qu'il n'en déplaise aux gros groupes financiers, dont la seule obsession est celle du profit, les épargnants doivent être protégés. C'est tout l'enjeu de cette mesure.
Cette disposition permettrait d'affaiblir l'attrait des établissements financiers français pour les territoires non coopératifs. Il semble que la majorité ne soit pas disposée à prendre ses distances avec le lobby tout puissant des banquiers. Ces derniers seraient attristés si les députés de l'UMP se décidaient enfin à mettre en place de véritables mesures pour lutter efficacement contre ces territoires brigands.
Pour mémoire, je rappelle que les fraudes à l'impôt et aux cotisations sociales coûtent entre 30 et 50 milliards d'euros par an à l'État et que 70 % de ce manque à gagner sont dus à la fraude fiscale. Mais le Gouvernement préfère pointer du doigt la fraude sociale, de peur de froisser ceux qui figurent au CAC 40.
On pourrait ajouter le cas de sociétés comme Air France, qui utilisent les paradis fiscaux. Vous allez me répondre que cette société relève aujourd'hui du droit fiscal néerlandais, mais n'oubliez pas que le gouvernement français est encore propriétaire d'une partie du capital. Nous ne pouvons imaginer que le gouvernement français se désintéresse des comportements fiscaux d'une société comme Air France.
(L'amendement n° 127 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 129 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Si j'avais eu une réponse à la question que j'ai posée précédemment, j'aurais pu considérer que l'amendement était défendu.
L'État français est actionnaire d'un certain nombre de grands groupes, qui ont des comptes dans les paradis fiscaux : Air France-KLM et Renault, par exemple. Que font les représentants de l'État français dans les assemblées générales et au conseil d'administration de Renault et d'Air France KLM. On vole l'État français. Est-ce que les représentants du Gouvernement laissent faire ?
(L'amendement n° 129 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 130 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Je n'ai pas eu de réponse à la question que je viens de poser. Je sais que nous sommes à l'ère des CD et des DVD, mais j'ai encore quelque 78 tours à la maison et c'est horrible quand ils sont rayés, ils répètent toujours la même chose. Vous risquez de subir, madame la ministre, le régime du 78 tours rayé si vous ne répondez pas à mes questions.
L'amendement n° 130 vise à interdire l'accès aux eaux territoriales françaises de bateaux battant pavillon de complaisance, enregistrés dans les paradis fiscaux. L'actualité récente montre l'urgence de l'opportunité de cette mesure. Permettez-moi de rappeler l'affaire du bateau Probo Koala, battant pavillon panaméen. Il fut affrêté par une société écran, Puma Energy, domiciliée aux Bahamas, dont l'actionnaire unique est une société fondée par deux hommes d'affaires français. Leurs bureaux sont à Londres, la filiale en cause ainsi que l'adresse fiscale à Amsterdam, le siège social en Suisse. La holding qui détient les actions siège à Malte et les parts du personnel sont logées dans un trust basé à Jersey.
Les résultats de ces obscures manigances financières se sont révélés dramatiques : le bateau a en effet déversé des déchets toxiques au large de la Côte d'Ivoire en 2006, faisant une dizaine de morts et conduisant à quelque 42 000 consultations médicales.
Il est bien de faire le sommet de Copenhague. Il est encore mieux de prendre des mesures contre ces voyous.
(L'amendement n° 130 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Pierre Brard pour présenter l'amendement n° 124 .
Madame la ministre, monsieur le rapporteur, j'évoque des sujets certes différents, mais pas indifférents. Les parlementaires qui ont travaillé sur les paradis fiscaux se sont donné la peine de formuler des propositions consensuelles. Or tout ce que vous trouvez à répondre, c'est que vous êtes défavorables à nos amendements. Ainsi donc les navires battant pavillon de complaisance peuvent relâcher dans nos ports sans que cela n'entraîne de conséquences pour eux. Il faut que l'opinion le sache.
J'en viens à l'amendement n° 124 .
Cet amendement vise à renforcer les règles prudentielles s'appliquant aux établissements de crédit, s'agissant de leurs activités ou de leurs implantations dans des territoires non coopératifs. Des contraintes de fonds propres spécifiques, tenant compte de l'importance de l'activité et des relations des banques avec ces territoires, mériteraient d'être instituées.
En effet, la mise en place de dispositifs rigoureux d'appréciation du risque opérationnel par les établissements bancaires français est prioritaire de même que la mise en oeuvre de dispositifs spécifiques visant à identifier et à suivre le risque de fraude. Il s'agit encore une fois d'un amendement de bon sens qui devrait pouvoir emporter votre approbation sinon susciter votre enthousiasme.
(L'amendement n° 124 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Pierre Brard pour présenter l'amendement n° 123 .
Il faut avoir du mérite pour persévérer, monsieur le président, car je ne sens pas beaucoup d'encouragement ! (Sourires.)
Cet amendement a pour but d'obliger Bercy à pointer du doigt tous les paradis fiscaux. J'ai bien dit tous ! Ce n'est pas votre « liste noire » qui ressemble plus à du gruyère qu'à de la tomme de Savoie qui pourrait me donner satisfaction. Vous avez épargné les vrais paradis fiscaux !
Qu'est-ce que cette liste de dix-huit territoires où Andorre, les Bahamas, la Malaisie ou le Vanuatu ne figurent même pas ?
Pour échapper à la liste, une seule condition : il suffirait pour ces territoires de signer un accord d'échange d'informations fiscales avec la France.
Le problème, c'est que l'information sur les fraudeurs ne sera donnée qu'à la demande du fisc français et sous certaines conditions, non de façon automatique. Une solution qui s'est déjà montrée peu efficace : entre 1997 et 2008, les États-Unis n'ont ainsi demandé que seize fois des renseignements à la Suisse ! Étonnant quand on compare ce chiffre aux 15 000 exilés fiscaux en Suisse qui se sont dénoncés au fisc américain après le scandale UBS en 2009 !
Votre Gouvernement s'intéresse surtout à quelques îlots des Caraïbes et du Pacifique et oublie les vrais sanctuaires de l'argent sale,…
…la Suisse, le Luxembourg, les îles Caïmans, Jersey, Singapour, le Delaware aux États-Unis, les Bermudes. Pas un seul de ces quinze principaux territoires opaques identifiés par le Tax Justice Network ne figure sur la liste française !
Une « liste noire » avec autant de territoires anecdotiques sur le plan économique n'est plus une liste noire, ni même grise, c'est un mensonge par omission !
Au-delà des banques, comme les Banques populaires et BNP Paribas, qui ont annoncé dès octobre 2009 leur retrait du Panama, les sanctions annoncées ne devraient pas faire trembler les entreprises françaises. La liste de Bercy ne gênera guère que L'Oréal au Panama, Schneider au Costa Rica et Air Liquide à Brunei. Bref, seulement cinq filiales sont concernées sur les 1 500 que possèdent les entreprises du CAC 40 dans les paradis fiscaux !
Votre liste est dramatiquement incomplète et prive l'État français d'au moins 20 milliards d'euros de recettes chaque année ! C'est un cadeau de plus dans la liste, très complète celle-là, que vous proposez aux grands patrons.
Voulez-vous que je vous dise où habitent M. et Mme Lagardère ? Voulez-vous que je vous dise où Mme Lagardère va faire ses courses ? Je sais bien que c'est un compagnon de table du Fouquet's, mais lorsqu'on a les moyens d'aller au Fouquet's, on a les moyens de payer ses impôts. Tous ces gens-là sont protégés par la majorité UMP et par votre Gouvernement. (M. Yves Censi rit.) Cela fait hoqueter M. Censi.
Pourquoi riez-vous ? Vous ont-ils associés ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
…et c'est un filon sans fin pour les voleurs qui les font prospérer.
(L'amendement n° 123 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je souhaite indiquer que M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi, Laurent Wauquiez, me remplacera au banc pour représenter le Gouvernement sur les articles 14 à 18 du projet de loi.
En application de l'article 95 du règlement de l'Assemblée nationale, le Gouvernement demande la réserve de la discussion des articles et amendements suivants : de l'amendement 139 portant article additionnel avant l'article 7 bis jusqu'à l'article 14.
Je vous demande une courte suspension de séance, monsieur le président, et je vous promets de revenir dans les plus brefs délais.
La réserve est de droit.
Je propose que nous poursuivions en votre absence, madame la ministre, l'examen de la série d'amendements après l'article 7, dans la mesure où la commission et le Gouvernement ont déjà donné leur avis.
J'en suis d'accord.
Je ne voudrais pas que M. Brard ait le sentiment d'être seul dans la lutte contre les paradis fiscaux. Si nous n'intervenons pas, c'est pour une raison simple. Nous avons en effet le sentiment que peu de chose a été fait dans ce domaine. Tant qu'existera le secret bancaire, on peut toujours multiplier les artifices, on n'enrayera pas vraiment les mouvements financiers qui transitent par les paradis fiscaux qu'il faut bien appeler par leur nom. Je suis à peu près persuadé que lorsque l'on fera le bilan à la fin de l'année, en dépit des dispositions prises en loi de finances initiale, monsieur le rapporteur, en dépit des conventions, madame la ministre, on s'apercevra que les flux financiers qui transitent par ces pays n'ont pas diminué. Cela sera déjà bien s'ils n'ont pas augmenté !
Je souhaite dire à l'attention de Mme la ministre – et j'espère que mes propos lui seront transmis – qu'il n'est pas normal que les conventions qui sont signées entre ces territoires et notre pays passent par la commission de la défense – ou plutôt des affaires étrangères – sans passer devant la commission des finances. On ratifie des conventions dans l'hémicycle sans que la commission des finances en ait eu connaissance et cela n'a l'air d'émouvoir personne. On souhaiterait qu'à l'avenir cela ne soit plus le cas.
Acte vous est donné de cette déclaration, monsieur Emmanuelli.
Je suis saisi d'un amendement n° 131 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Dans la mesure où une sorte de conversation s'est engagée, je la poursuis. Ce que n'a pas vu notre collègue Henri Emmanuelli, c'est que si cela passe par la commission de la défense, c'est qu'on ne se fera rendre justice qu'à la vue de la canonnière. (Sourires.)
Cela relève un peu de la même chose, encore qu'avec l'efficacité du ministre des affaires étrangères, on n'est pas prêt de faire rendre gorge aux voleurs. Mais c'est un autre sujet, il n'est pas là pour se défendre.
L'amendement n° 131 propose un instrument supplémentaire de la lutte contre la fraude selon une logique très simple. Si les diverses sociétés de conseil et cabinets d'avocats spécialisés n'ont rien à se reprocher et ne proposent que des prestations d'optimisation fiscale, ils ne devraient manifester aucune opposition à ce que soit instaurée une obligation de déclarer officiellement les montages opérés pour le compte de leurs mandants. Toutes ces structures se dotent de chartes morales et autres codes de bonne conduite. Malheureusement, l'ampleur de la fraude fiscale opérée dans les territoires non coopératifs est le symptôme de pratiques accompagnées et encouragées par ces mêmes structures ; les chartes et codes de bonne conduite sont donc une farce de bien mauvais goût.
Je vais vous raconter une anecdote édifiante. Quand j'ai travaillé sur ce sujet pour la commission des finances, j'ai eu l'occasion de me rendre à Panama. Là, après les efforts réalisés par notre ambassadeur, j'ai enfin été reçu par le directeur des services fiscaux. Celui-ci n'avait que très peu de temps à me consacrer parce qu'après l'entretien qu'il m'avait accordé, il allait diriger son cabinet privé de conseil fiscal. Voilà comment ça marche dans les paradis fiscaux et il faut toute la candeur, la naïveté ou la jobardise des membres du Gouvernement actuel pour croire que la signature des conventions qui ont été avalisées ce matin changera quelque chose.
(L'amendement n° 131 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Pierre Brard pour présenter l'amendement n° 134 .
L'amendement est défendu.
(L'amendement n° 134 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Pierre Brard pour soutenir l'amendement n° 135 .
Je pensais, monsieur le secrétaire d'État chargé de l'emploi, que vous seriez plus causant que Mme la ministre ! (Sourires.)
Dans l'esprit des préconisations formulées par le groupe des vingt-quatre parlementaires travaillant sur la crise financière internationale, cet amendement propose l'obligation pour les établissements payeurs installés en France, qu'ils soient français ou étrangers, de s'assurer de l'identité des bénéficiaires effectifs des revenus pour l'application des taux de retenue à la source, ainsi que l'obligation de transmettre ces informations à l'administration fiscale de résidence des bénéficiaires.
Sous son apparente technicité, cet amendement est simple. Il s'agit de faire jouer un rôle actif aux établissements payeurs dans le renforcement de la transparence du système bancaire et de les sortir d'une passivité qui favorise parfois la fraude fiscale.
Par ailleurs, cette mesure concourt à l'établissement d'un registre ou fichier d'informations permettant de connaître l'identité réelle des bénéficiaires propriétaires et dépositaires quelle que soit la nature juridique de l'entité en cause, société, fondation, fiducie, trust etc. Vous voulez la transparence ? Nous vous en donnons les moyens, monsieur le secrétaire d'État !
Je rappelle à M. Brard que la commission et le Gouvernement ont déjà donné leur avis sur l'ensemble de ces amendements.
(L'amendement n° 135 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Pierre Brard pour soutenir l'amendement n° 125 .
Monsieur le président, je pense que vous faites un procès d'intention ! (Sourires.) Dans une période récente, on a entendu des ministres exprimer une opinion différente de celle qui était prêtée au Gouvernement ! Connaissant le caractère juvénile, spontané, intelligent, imaginatif de M. le secrétaire d'État, il serait étonnant qu'il n'ait pas des choses à dire.
Avec l'amendement n° 125 , il s'agit de mettre le doigt sur l'un des principaux vices du système financier français qui réside dans sa complète opacité du point de vue des transactions qui sont opérées. Nul n'ignore que toutes les grandes entreprises françaises possèdent des filiales dans les paradis fiscaux. Environ 1 500 filiales off shore, monsieur le secrétaire d'État, seraient réparties sur une trentaine de territoires des Bermudes à la Suisse en passant par le Panama.
Hélas, M. Tranchant n'est plus parmi nous. Mais les plus anciens d'entre nous, dont Henri Emmanuelli, se rappellent certainement cette nuit budgétaire au cours de laquelle il nous promena aux quatre coins de la planète. Et c'est grâce à M. Tranchant que j'appris où se trouve l'île Moustique, qu'il connaissait évidemment beaucoup mieux que moi.
En réalité, les banques françaises ont trouvé le bon filon : ces centres financiers leur permettent de faire fructifier au moindre coût fiscal le patrimoine des personnes aisées. La palme revient naturellement à BNP Paribas, qui possède un peu moins de deux cents filiales dans ces territoires douteux. Outre celles du secteur bancaire, d'autres entreprises, comme LVMH, Schneider ou Danone, y ont également des succursales.
Cela ne semble poser de problème à personne que le tiers du stock d'investissement à l'étranger des multinationales françaises se situe dans les paradis fiscaux. Pourtant, la nécessité de fournir des informations sur les liens entretenus par les entreprises françaises avec ces territoires crapuleux s'impose comme un impératif.
Nous demandons donc que toutes les activités conduites par des sociétés françaises dans les paradis fiscaux soient publiées en annexe de leur rapport annuel. Ces informations seraient transmises à l'AMF, dont le rôle et la responsabilité en sortiraient accrus.
Je veux simplement lever tout doute quant au procès d'intention que me ferait le président, monsieur Brard. (Sourires.)
Avis défavorable à l'amendement : dans le secteur financier, la loi du 18 juin 2009 relative aux caisses d'épargne et aux banques populaires a déjà imposé aux établissements la publication en annexe à leurs comptes des informations relatives à l'implantation de leurs activités.
(L'amendement n° 125 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 128 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Monsieur le président, sous couvert de défendre mon amendement, j'aimerais vous raconter une anecdote, qui concerne une fois de plus nos pérégrinations dans les paradis fiscaux.
Vous savez peut-être que, pour ouvrir un compte dans une banque domiciliée dans un paradis fiscal, il faut amener de l'argent – mais pas cinquante euros ; à l'époque dont je vous parle, les sommes se comptaient en dollars. J'ai donc multiplié les tentatives, mais il fallait chaque fois un, deux ou trois millions de dollars.
Et voilà qu'aux Bahamas, je suis enfin tombé sur un banquier compréhensif. Quand je lui ai demandé à partir de quel montant je pouvais ouvrir un compte chez lui, il m'a répondu qu'il n'y avait pas de plancher. « C'est formidable », lui ai-je alors dit. « Donc, je peux déposer cent dollars et vous vous en occuperez ? — Vous pouvez le faire, mais je ne vous le conseille pas, car les frais de gestion sont très élevés. »
En d'autres termes, les grandes sociétés françaises ou les tenants de la mafia internationale implantés dans ces paradis fiscaux acceptent d'acquitter des frais considérables – 10 % ou plus de ce qu'ils déposent chaque année – parce qu'il s'agit d'argent dissimulé ou d'origine incertaine.
Il est vrai que, si vous tombez malade aux Bahamas, ce n'est pas très pratique, et que vous téléphonez alors non pas au pharmacien, qui n'existe pas, mais à votre banquier, qui pense à tout et qui vous sert aussi de nurse, pour qu'il vous fasse venir un tube d'aspirine de Floride un jour où il n'y a pas d'ouragan. (Sourires.)
Voilà comment cela fonctionne ; et voilà ce que le Gouvernement ne veut pas corriger. C'est pourquoi je trouverais particulièrement pertinent que nous renouvelions la mission que j'avais effectuée à l'époque, pour observer concrètement sur place la manière dont les banquiers se comportent aujourd'hui.
C'est pour leur bien que nous le ferions, monsieur le président. On m'a raconté la façon dont un cocktail s'est terminé à Panama pour le banquier d'un grand établissement suisse. Après le cocktail, organisé au sommet d'un gratte-ciel, ce banquier avait d'autres engagements ; il est donc descendu dans le parking souterrain pour y reprendre sa voiture. Que lui est-il arrivé ? Nul ne le sait, car on ne l'a plus jamais revu ; et le canal de Panama n'est manifestement pas drainé assez souvent pour que l'on sache s'il ne gît pas au fond de l'eau, les deux pieds dans le béton.
Quelle chute ! (Rires sur quelques bancs du groupe UMP.)
(L'amendement n° 128 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 136 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
J'arrive au terme de ma série d'amendements et je constate que, malgré les exemples très concrets que je cite, le secrétaire d'État ne semble pas ému. Imaginez que cela se produise au Puy-en-Velay : il s'y rendrait immédiatement pour savoir ce qu'est devenu le banquier suisse ! (Sourires.) Mais, parce que cela se passe à l'étranger, pas une larme pour le banquier !
L'amendement n° 136 concerne un autre sujet. La crise bancaire et financière qui a débuté en 2007 a mis en évidence les contradictions et les impasses du système financier international, notamment les difficultés qu'éprouvent les États souverains à faire appliquer les règles nationales dans un contexte où les échanges financiers sont internationalisés. Dès lors, l'existence d'États pratiquant une concurrence fiscale déloyale et refusant toute coopération fiscale prive les autres États des ressources grâce auxquelles ils pourraient combattre et alléger les inégalités sociales.
En 2008, 55 % du commerce international et 35 % des flux financiers auraient ainsi transité par des paradis fiscaux ; ces États ou territoires concentreraient 10 000 milliards d'actifs et les deux tiers des hedge funds mondiaux. Pourtant, la transparence et l'instauration de règles du jeu équitables sont le préalable indispensable à une cohabitation satisfaisante entre les États et au bien-être des populations.
Faut-il rappeler que l'Union elle-même a favorisé des pratiques inégales ? On en voit le résultat en Irlande : malgré le dumping de toute nature qui y a été pratiqué, cet État est aujourd'hui au bord de la faillite.
(L'amendement n° 136 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 137 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
La crise économique actuelle et le lot de misères qui l'accompagne devraient vous obliger à regarder en face les dérives – que dis-je, monsieur le secrétaire d'État, les pathologies – intrinsèques du système qui les a engendrées.
L'une des tumeurs principales dont les cellules cancéreuses rayonnent sur toute la planète se nomme paradis fiscal. Ces États fantoches à la solde des banques refusent toute coopération fiscale et pratiquent une fiscalité occulte, privant ainsi les autres États des ressources qui pourraient leur permettre de protéger les populations des effets du capitalisme et de ses crises successives.
Je l'ai dit : en 2008, 55 % du commerce international et 35 % des flux financiers auraient transité par ces paradis fiscaux. Il est grand temps que les collectivités territoriales, censées veiller localement aux intérêts des Français, prennent leurs responsabilités, en s'inspirant de l'initiative prise par la région Île-de-France. De même, monsieur le secrétaire d'État, les États voyous ne devraient plus bénéficier des aides de l'Union européenne.
Aux Bahamas, par exemple, la sécurité règne : dès votre arrivée, l'ambassadeur de France vous dit de ne surtout pas vous promener seul le soir, et, sur les chemins de ronde qui surplombent les murs d'enceinte des maisons – j'allais dire des prisons –, on croise des individus à la mine patibulaire, munis de l'outillage nécessaire. Or savez-vous qui finance les infrastructures routières des Bahamas ? L'Union européenne, avec nos sous ! Aucune solution n'a été apportée à ce problème ; ce n'est pourtant pas faute d'en avoir parlé.
Il a été plusieurs fois question du fait que, ce matin, nous avons adopté sans débat une série de conventions relatives aux paradis fiscaux.
Ces conventions ont fait l'objet de rapports de la commission des affaires étrangères qui en a débattu il y a quelques jours ou quelques semaines. Les députés de la majorité ont alors voté pour ces textes, avec de grandes réserves, considérant simplement qu'ils contenaient quelques petits progrès. Les représentants de notre groupe et de celui de Jean-Pierre Brard, notamment Jean-Paul Lecoq, ne les ont pas votés.
Mais nous nous sommes mis d'accord pour que l'application de ces nouvelles conventions fasse l'objet d'un examen attentif, suivi d'un rapport au bout d'une année au plus. C'est le moins que nous puissions faire.
Je m'associe également à la demande formulée tout à l'heure par M. Emmanuelli, et je pense que le rapporteur général sera lui aussi d'accord : ces conventions devraient faire l'objet d'un avis de la commission des finances, même si elles continuent de relever de notre commission des affaires étrangères.
Je tenais à préciser ces points, car tous les groupes ont exprimé des inquiétudes sur ces dispositifs lors du débat en commission.
Acte est donné de votre déclaration ; je transmettrai naturellement au président Bernard Accoyer.
(L'amendement n° 137 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Après l'article 7
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures vingt-cinq.)
La séance est reprise.
Les articles et amendements situés avant l'article 14 sont réservés, à la demande du Gouvernement.
Cette réserve étant de droit, nous en venons à l'article 14.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-moi de me réjouir que soit enfin engagée la fusion des différentes structures d'OSEO, attendue depuis de très nombreuses années par les équipes dirigeantes de cet établissement car elle simplifiera grandement sa gouvernance et permettra, nous l'espérons tous, plus d'efficacité dans la mise en oeuvre des politiques publiques en direction des entreprises.
OSEO doit aussi faire l'objet d'une augmentation de capital à la suite d'engagements pris par le Gouvernement. Il faut savoir que cet établissement a la particularité de réunir dans son capital l'État, d'une part, et la Caisse des dépôts, d'autre part.
La Caisse des dépôts, actionnaire de l'une des entités d'OSEO, n'a pas souhaité participer à cette augmentation de capital, non par désintérêt pour les actions menées par OSEO, de l'importance desquelles nous sommes tous conscients, mais compte tenu de la raréfaction de ses disponibilités et de la sollicitation importante dont elle fait l'objet de la part de l'État pour un investissement de 1,5 milliard dans le groupe La Poste.
Néanmoins, pour la Caisse des dépôts, OSEO restera une participation stratégique, comme cela transparaît dans les documents remis chaque année au Parlement et dans le rapport de présentation des résultats du directeur général. La participation au capital, après l'augmentation de capital, se situera encore au-delà de 30 %. En outre, OSEO représente pour la Caisse des dépôts un risque important, non par sa nature, mais par son volume, puisque c'est le troisième risque privé supporté par la Caisse, et le sixième si nous prenons en compte les risques souverains, dont l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale.
C'est dire l'attention que nous portons à la capacité de la Caisse des dépôts à continuer à bénéficier des garanties nécessaires pour s'assurer que les engagements pris par OSEO, dans sa nouvelle configuration, n'aient pas un jour de répercussions sur l'établissement public. Cela est d'autant plus important que l'autorité de contrôle prudentiel va être amenée à intervenir désormais en assistance à la commission de surveillance et qu'il appartiendra à cette dernière de définir le modèle prudentiel de la Caisse des dépôts.
Dans ces conditions, nous souhaitons attirer l'attention de notre assemblée et du Gouvernement sur deux points du projet de loi dans l'état actuel de sa rédaction.
Le premier point concerne la représentation au sein du conseil d'administration d'OSEO SA.
Tel qu'il a été déposé au Parlement et discuté en commission, le texte assure à la Caisse des dépôts une représentation d'un siège sur quinze, ce qui est très loin à la fois de la représentation actionnariale et du risque supporté par l'établissement public.
Vous conviendrez donc que ce texte sur la répartition des sièges au conseil d'administration peut évoluer et nous voudrions avoir la certitude que, dès lors qu'il bénéficierait de représentants au conseil d'administration nommés par décret, l'État ne prendrait pas en plus des représentants au titre de l'assemblée générale des actionnaires comme il en a la possibilité s'il n'est pas représenté par un fonctionnaire, ce qui est tout à fait possible aussi.
Dans le cadre de la gouvernance de l'entité dont la Caisse des dépôts est aujourd'hui actionnaire, nous souhaitons bénéficier d'un certain nombre de garanties. Évidemment, nous aimerions retrouver ces garanties dans le nouveau groupe OSEO SA issu de la fusion des différentes entités. Cela veut dire que la Caisse des dépôts, en tant qu'actionnaire, doit pouvoir assurer pleinement le contrôle des actions d'OSEO. L'idéal serait évidemment de pouvoir, au travers d'un pacte d'actionnaires, fixer les conditions et les responsabilités des différents actionnaires d'OSEO et de garantir par exemple à la Caisse des dépôts la présidence du comité d'audit.
J'ajoute que nous portons une attention particulière à l'activité innovation et à son financement, plus qu'au risque lié à cette activité. Là aussi, cela supposerait, à mon sens, que l'État, eu égard à sa responsabilité dans la mise en oeuvre de l'activité innovation actuelle, puisse s'engager vis-à-vis de l'établissement public, soit en apportant une garantie, soit en autorisant une clause particulière au bénéfice de l'actionnaire minoritaire principal que sera demain la Caisse des dépôts.
Bien évidemment, les observations que je viens de formuler n'enlèvent rien à l'avancée considérable que constitue la fusion des entités d'OSEO. La réactivité d'OSEO durant la crise, les grandes avancées en matière de synergie avec la Caisse des dépôts qui ont été mises en oeuvre, au travers notamment des plates-formes « Appui-PME », ont permis sans doute à notre pays et au Gouvernement d'avoir la traduction dans la politique publique des engagements qui avaient été pris en matière de soutien aux PME. Les produits nouveaux qui ont été mis en place, je pense par exemple à OC+, rencontrent également un succès important.
Enfin, je tiens à saluer le travail effectué sur le terrain par les équipes d'OSEO, et par son président.
Nous sommes d'accord avec un certain nombre de points évoqués par M. Bouvard, l'amendement n° 79 répondant à l'une de ses préoccupations en ce qui concerne la représentativité au sein du conseil de l'organisme regroupé.
Il nous paraît important de veiller à ce que les risques pris par OSEO ne dépassent pas les règles prudentielles que nous avons évoquées à plusieurs reprises durant cette journée. En la matière, il me semble que le secteur bancaire traditionnel est assez défaillant. En effet, si OSEO est appelé aussi souvent au secours de certaines opérations concernant les PME ou les TPE, c'est bien parce que le secteur bancaire traditionnel faillit à sa mission, les garanties apportées par OSEO contribuant largement à soutenir un secteur économique important qui est peut-être l'un des derniers à créer de l'activité et de l'emploi. Il me semble donc important que le principal actionnaire d'OSEO soit représenté au sein du conseil. Tel est le sens de cet amendement.
L'amendement n° 78 vise à régler le problème de la sous-représentation de la Caisse des dépôts en intégrant deux personnalités qualifiées nommées sur proposition du directeur général nommé par le président de la Caisse des dépôts.
Comme il est possible de répondre à cette préoccupation d'une autre manière, j'attends de connaître la position du Gouvernement par rapport au problème général tel qu'il a été posé. Peut-être pourra-t-on trouver une meilleure solution.
La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour soutenir l'amendement n° 80 .
Je tiens tout d'abord à remercier l'ensemble des parlementaires pour avoir souligné le rôle déterminant d'OSEO dans cette période.
Je rappelle que 107 000 entreprises ont été aidées, ce qui représente 25 milliards d'euros. Michel Bouvard connaît parfaitement ces questions.
J'ajoute que ces articles visent à faire en sorte qu'une fusion, qui a très largement eu lieu au niveau des structures d'organisation internes, de l'implantation géographique, des synergies qui ont été trouvées au sein des équipes, n'a pas encore fait l'objet d'une concrétisation juridique et institutionnelle. Il s'agit donc de donner la capacité à OSEO d'être une force de frappe au service des PME.
Vous avez soulevé, sur différents bancs, la question de la composition et du mode de gouvernance d'OSEO. M. Bouvard notamment a posé des questions précises.
Il est important de bien clarifier la volonté du Gouvernement et de trouver un équilibre entre les amendements qui ont été déposés et un amendement qui peut sans doute permettre de parvenir à un bon compromis.
Le but est bien d'assurer le rôle d'actionnaire d'OSEO dans le cadre d'une coopération étroite entre l'État et la Caisse des dépôts et de maintenir cette coopération étroite. Il n'y a aucune ambiguïté en la matière.
Tout ne relève pas de la loi. Un pacte d'actionnaires, négocié avec la Caisse des dépôts, viendra en support. Il me semble donc important de donner des éléments d'explication, même si cela ne relève pas de la loi, et d'éclairer la représentation nationale et nos débats. Les éléments sont les suivants : le conseil d'administration comprendrait deux administrateurs nommés par l'assemblée générale qui seraient issus de la Caisse des dépôts, avec des conditions de pilotage et de contrôle de l'activité innovation très précises qui apportent des garanties, et la présidence du comité d'audit serait désignée par la Caisse des dépôts.
Par ailleurs, vous souhaitez que, au sein du conseil d'administration, une part significative des quinze membres du conseil d'administration d'OSEO soient des représentants des actionnaires. C'est en partie le cas avec le texte du Gouvernement, puisqu'il propose quatre représentants de l'État, qui est l'actionnaire majoritaire d'OSEO, et trois membres désignés par l'assemblée générale des actionnaires.
Parmi ceux-ci, et le souhait a été clairement exprimé par Michel Bouvard au travers de l'amendement n° 77 , il me semble intéressant d'adopter le principe que vous avez fixé et qui nous permet un cadre et un nombre de membres du conseil d'administration qui garantissent une bonne répartition entre ceux qui viennent de l'État et ceux qui viennent de la caisse. C'est dans ce cadre, monsieur le président, que le Gouvernement a déposé l'amendement n° 161 qu'il convient de rectifier en supprimant les mots « au moins ».
Cet amendement reprend largement les principes posés par M. Bouvard et M. Muet. En supprimant les mots « au moins », nous avons la garantie d'une représentation de l'État avec quatre administrateurs, ce qui correspond aujourd'hui à la représentation des droits de vote.
Je tiens à préciser à l'attention de M. Bouvard que cela suppose aussi que l'équilibre des droits de vote soit maintenu sur la durée.
Je pense que les précisions que je viens d'apporter répondront aux préoccupations qui ont pu être exprimées sur l'ensemble des bancs de l'Assemblée.
L'amendement n° 161 est donc rectifié, les mots « au moins » étant supprimés.
Quel est l'avis de la commission ?
Comme Michel Bouvard, il faut se féliciter de la fusion administrative juridique d'OSEO qui, comme l'a dit à l'instant Laurent Wauquiez, est déjà traduite dans les faits pour l'organisation des équipes.
Cette organisation de qualité des équipes avait la particularité d'être gouvernée par 135 membres de conseil d'administration répartis dans trois entités au moins. Cela n'était pas neutre sur le plan financier puisque 2,2 millions d'euros par an étaient consacrés à l'organisation des conseils d'administration et des décisions desdits conseils avec, bien sûr, toutes les procédures relatives à leur préparation et à la publication de leurs décisions.
C'est à la fois une mesure d'économie et de rationalité à laquelle Michel Bouvard est très justement attaché, et qui doit préserver la représentation des actionnaires minoritaires mais d'influence qui existe au sein de la banque OSEO dont on a souligné, à juste titre, le rôle éminent de soutien des PME françaises pendant la crise financière.
Votre rapporteur est donc globalement favorable aux différentes initiatives. Il se rallie à l'amendement du Gouvernement qui « tourne » depuis quelques jours et a été finalisé il y a quelques secondes. C'est maintenant un amendement de qualité qui permet de veiller à la représentation minoritaire au sein de l'assemblée générale et d'augmenter de façon significative la représentation des actionnaires au sein du conseil d'administration, élément qu'il fallait perfectionner et qui l'a été.
Le conseil d'administration d'OSEO pourra désormais très valablement décider et surtout faire fonctionner encore mieux cette remarquable entreprise.
Monsieur le rapporteur, vous êtes donc défavorable à l'amendement n° 79 .
Je préfère dire que je suis favorable à l'amendement du Gouvernement, qui résume tous les autres,...
Pour citer Talleyrand, cela va sans dire, mais cela va encore mieux en le disant !
La parole est à M. Michel Bouvard.
Compte tenu de la réponse du Gouvernement, je retire les amendements nos 78 et 77 .
Toutefois, j'aurais aimé que le ministre me donne des éclaircissements sur la problématique de l'innovation. Peut-être pourra-t-il le faire plus tard.
(Les amendements nos 78 et 77 sont retirés.)
(Les amendements nos 79 et 80 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
(L'amendement n° 161 rectifié est adopté.)
Afin que l'on ne sorte pas de ce débat sans que tout ait été précisé, je rappelle que le pacte d'actionnaire porte notamment sur les conditions de gouvernance, l'association avec la Caisse des dépôts et consignations et l'activité innovation d'OSEO.
Cet amendement ne s'oppose pas à ce qui vient d'être dit car il ne concerne pas la représentation des actionnaires mais celle des personnalités qualifiées : le directeur général de la Caisse des dépôts et consignations pourrait très bien nommer l'une d'entre elles.
Je partage l'opinion de M. Bouvard et je maintiens par conséquent mon amendement.
Le Gouvernement a fait beaucoup de pas vers vous pour trouver un point d'équilibre. Par principe, une personnalité qualifiée n'est pas représentante d'un actionnaire.
Quand c'est l'État qui les nomme, ce n'est pas l'État actionnaire mais l'État puissance publique.
Je considère qu'à présent la répartition est bonne et que nous avons beaucoup avancé. Tout dernièrement encore, l'amendement gouvernemental a été rectifié pour répondre aux aspirations de Michel Bouvard, aussi lui serais-je reconnaissant de retirer son amendement, compte tenu de surcroît de toutes les explications que je lui ai apportées, notamment sur le pacte d'actionnaire.
Je suis désolé de donner ainsi le sentiment d'être en pleines tractations, ce qui, en séance publique, n'est jamais bon. Je suis le premier à reconnaître les mérites de ce texte et les avancées consenties par le Gouvernement.
Je ne pensais pas que mon amendement poserait un problème. Certes, l'État n'agit pas là en tant qu'actionnaire mais en tant que puissance publique. Cela étant, l'État puissance publique n'est pas le seul compétent pour pouvoir identifier des personnalités qualifiées en matière de problématique des entreprises dès lors que l'on veut bien reconnaître qu'un certain nombre de missions ont été confiées en ce domaine à la Caisse des dépôts elle-même – rappelons le travail réalisé au travers des plateformes appui PME.
Cela étant, si le Gouvernement s'engage à être attentif aux propositions qui pourraient être faites et qu'il nous assure que ces personnalités qualifiées seront issues des milieux économiques plutôt que de la haute fonction publique, nous pourrions trouver un accord.
Il faudrait que le Gouvernement précise le profil des personnalités qualifiées qu'il envisage de nommer. Certaines personnalités de la sphère publique pourraient entrer dans ce cadre, comme le patron d'une grande entreprise publique, mais le responsable d'une PME pourrait en relever tout autant.
L'objectif est que les représentants appartiennent à la vie économique, avec une personnalité directement issue du milieu économique, un spécialiste du financement des entreprises et un spécialiste de l'innovation.
Je comprends les craintes de Michel Bouvard et je tiens donc à le rassurer.
Dans ces conditions, je retire mon amendement.
(L'amendement n°15 est retiré.)
Nous n'allons pas batailler toute la soirée sur cette question, d'autant plus qu'au fond nous sommes d'accord. Vous aurez tout de même remarqué notre bienveillance à l'égard des articles relatifs à OSEO. Je comprends du coup assez mal la rigidité du Gouvernement sur un point assez mineur.
Par principe, je maintiens donc mon amendement.
(L'amendement n° 53 n'est pas adopté.)
(L'article 16, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement de suppression n° 155.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
C'est un amendement de principe : quand on voit ce que la Caisse des dépôts et consignations a fait d'Icade…
La maison-mère, c'est bien la Caisse des dépôt, non ? Et que faites-vous, monsieur Bouvard, des comportements scandaleusement arrogants, n'obéissant qu'à la logique du privé, de la rentabilité, de ceux qui considèrent les locataires comme des clients, en les pressant comme des citrons, en les piétinant au moment de la vente ? Comment ne pas craindre ce que pourrait faire la Caisse des dépôts d'OSEO ?
Vous avez vendu les appartements avec les locataires : c'est cela, la réalité.
Avis défavorable, d'autant plus que cet amendement me semble surtout fournir l'occasion à M. Brard d'agresser personnellement M. Bouvard, ce que je regrette.
Cette attitude ne ressemble pas à M. Brard. Avis défavorable.
Une remise en cause des rastaquouères qui sont parfois mis à la tête de telles sociétés par le Gouvernement : oui. Je vous rappelle l'audition du président d'Icade, ici, dans cette maison, qui a horrifié tous les députés présents.
Certes, mais vous l'aviez tout de même installé à ce poste et ce sont ces gens qui discréditent les politiques de l'État.
Il est évident que je ne visais pas Michel Bouvard, qui ne ferait pas de mal à une mouche.
(L'amendement n° 155 n'est pas adopté.)
(L'article 17 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement de suppression n°156.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Il est défendu.
(L'amendement n° 156 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 18 est adopté.)
Je suis saisi de deux amendements, nos 148 rectifié et 91 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard pour soutenir l'amendement n° 148 rectifié .
Il est défendu.
(L'amendement n° 148 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Pierre-Alain Muet pour soutenir l'amendement n° 91 rectifié .
Nous avons discuté tout à l'heure de l'endogamie des conseils d'administration. Afin de la limiter, cet amendement tend à ce qu'un administrateur ne puisse cumuler plus de quatre mandats.
(L'amendement n° 91 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 71 .
La parole est à M. Pierre-Alain Muet.
Cet amendement tend à rendre plus transparente la rémunération des dirigeants d'entreprise.
Les salaires des dirigeants des grandes entreprises ont en effet explosé avant la crise, allant parfois jusqu'à représenter 300 fois le montant du SMIC alors même que la rémunération d'un patron de PME est seulement trois fois supérieure au salaire minimum.
Pour que les actionnaires jouent pleinement leur rôle, nous souhaitons que l'assemblée générale des actionnaires vote un plafond entre la plus basse et la plus haute rémunération. Ce plafond doit être proposé par le conseil d'administration après consultation du comité d'entreprise. Cette règle de transparence nous semble indispensable au sein des entreprises.
(L'amendement n° 71 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 93 rectifié .
La parole est à M. Christian Eckert.
Je m'étonne que ni le secrétaire d'État ni le rapporteur ne s'expriment sur ces sujets qui marquent l'opinion. Comment ne pas parler de rémunération lorsque l'on veut traiter de la régulation ? M. Pierre-Alain Muet vient de donner une moyenne des rémunérations des dirigeants de grandes entreprises mais songez que l'on trouve des rapports atteignant parfois mille fois le SMIC ! Vous évacuez d'un revers de main cette question alors que nos concitoyens sont choqués par de telles situations. Encore aujourd'hui, la presse se fait l'écho de cumuls de rémunérations. Je mets en garde le Gouvernement, qui ne devrait pas rester silencieux sur cette question.
En soi, l'amendement n° 93 rectifié n'est pas diabolique : il vise simplement à préciser des informations qui figurent déjà dans le code de commerce afin que les rémunérations des dirigeants deviennent réellement transparentes. S'il était ajouté au deuxième alinéa de l'article L225-102-1 du code du commerce, après le mot « reçu », les mots « directement ou indirectement », les actionnaires de l'assemblée générale seraient informés de la totalité des rémunérations des dirigeants, ce qui n'est actuellement pas le cas. Une telle information pourrait faire progresser un certain nombre de pratiques.
Je m'étonne vraiment que vous ne répondiez pas ou que vous ne répondiez que laconiquement.
Je veux bien vous répondre, monsieur Eckert, mais certains des amendements soutenus sont des amendements de posture qui ne trompent personne.
Lisez votre exposé des motifs : vous faites référence à M. Baudouin Prot, en citant précisément sa rémunération. Je suis désolé mais tel n'est pas l'objet du débat. Je suis d'accord pour que nous ayons une réflexion de fond mais pas pour faire de la démagogie. Vous n'obtiendrez donc pas de réponse de ma part sur ce point.
Pour en revenir en votre amendement, il est inutile car les rapports des assemblées générales des actionnaires, s'agissant des mandataires sociaux, sont réputés faire état des rémunérations directes et indirectes, ce qui comprend les rémunérations perçues à l'étranger. Votre amendement n'a donc pas d'objet, non plus que celui que vous allez défendre tout à l'heure. Mon avis est bien évidemment défavorable.
Tant que vous persisterez à présenter des amendements de ce type, vous n'obtiendrez pas de réponse de ma part.
Je vais vous répondre, monsieur Eckert, car il est normal que le Gouvernement explique ses positions. Votre amendement est satisfait car le code de commerce pose déjà cette obligation dans son article L. 225-102-1, lequel précise que les rémunérations sont celles perçues par les sociétés contrôlées au sens de l'article L. 233-16 ou de la société qui contrôle, au sens du même article, la société dans laquelle le mandat est exercé.
D'une manière plus générale, s'agissant des rémunérations, le Gouvernement a réalisé de nombreuses avancées, ce qui n'avait pas été fait depuis très longtemps, même en remontant aux lois de 2001 qui furent les dernières à porter sur la régulation.
Rappelons les décrets des 30 mars et 20 avril qui ont prévu des mesures très fortes : interdiction d'attribuer des stocks-options et actions gratuites aux dirigeants…
…interdiction de verser des rémunérations variables qui ne soient pas la contrepartie de performances réelles, interdiction de verser des rémunérations variables ou des indemnités de départ quand l'entreprise procède à des licenciements de forte ampleur – ce point était très important pour moi –, interdiction enfin de créer de nouveaux régimes de retraite-chapeau.
Toute une série de dispositifs juridiques forts sont en vigueur et restent parmi les plus contraignants jamais adoptés par notre pays ; ils vont plus loin que ceux votés en 2001.
(L'amendement n° 93 rectifié n'est pas adopté.)
Mes chers collègues, je vous informe que l'amendement n° 72 est déplacé après l'amendement n° 70 .
La parole est à M. Alain Muet, pour soutenir l'amendement n° 92 rectifié .
Mesurez-vous, monsieur le rapporteur, monsieur le secrétaire d'État, l'impact sur l'opinion de la divulgation d'informations sur les salaires des dirigeants des grandes entreprises – et pas seulement celles qui ont été soutenues par l'État ? Ce qu'il était éventuellement possible de supporter en période normale devient particulièrement insupportable en période de crise.
Vous affirmez, monsieur le secrétaire d'État, avoir pris certaines mesures. L'auriez-vous fait si nous n'avions pas mené pied à pied le combat contre ce qui paraît excessif ? Nos amendements ne sont par conséquent pas d'opportunité, contrairement à ce que soutient notre collègue Jérôme Chartier. Ils permettent au contraire d'insister sur le fait que les écarts de salaires constatés ne se justifient pas et se justifient d'autant moins dans le présent contexte.
(L'amendement n° 92 rectifié n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 143 .
Je sens que je vais agacer le rapporteur car je vais parler des intouchables. Les « intouchables » pas au sens indien du terme puisque j'évoquerai les privilégiés.
Le présent amendement a pour objet de plafonner le total des rémunérations, indemnités et avantages attribués annuellement aux dirigeants d'entreprise à vingt fois le montant du salaire minimum applicable dans l'entreprise considérée. Vous reconnaîtrez avec moi que cet écart est déjà colossal : vingt fois, monsieur Chartier, c'est énorme pour des gens qui sont payés au SMIC.
Les rémunérations mirobolantes auxquelles je fais allusion ne sont pas la juste rémunération du risque ou du niveau de performance des entreprises considérées mais bien plus sûrement celle de la composition de l'actionnariat des comités de rémunération. Vous savez comment fonctionnent ces derniers : je te passe le séné et tu me passes la rhubarbe, puisque les uns se retrouvent dans les comités des autres.
Cet amendement n'aurait pas seulement pour vertu de ramener les patrons et les mandataires sociaux à plus de mesure, mais encore de les conditionner au relèvement des salaires de l'ensemble de leurs employés. La logique est très simple : si le patron souhaite justifier une augmentation de son salaire qui serait contraint dans un rapport de un à vingt fois le SMIC, il le pourrait à condition d'augmenter le SMIC.
Je vais vous citer quelques exemples parmi les malheureux auxquels M. Chartier et ses collègues ne cessent de penser.
Le salaire du patron de Danone, Franck Riboud, n'a augmenté que de 65 % en 2009. Henri de Castries, président du directoire d'AXA, perçoit un salaire de seulement 4,5 millions d'euros, soit une augmentation de 45 % par rapport à l'année précédente. Xavier Huillard, PDG de Vinci, avec un revenu de 4,34 millions d'euros, n'a pour sa part bénéficié que d'une augmentation de 32 %. À qui Christopher Viehbacher, de Sanofi Aventis, doit-il dire merci ? Rappelez-vous : H1N1… Il a touché 3,69 millions d'euros en 2009, soit une augmentation annuelle de 66 %. Quant à M. Baudouin Prot qui, l'autre jour, nous aurait fait pleurer, il a perçu 3,35 millions d'euros, soit une augmentation de 115 % par rapport à l'année précédente.
Ce serait bien la première fois !
Aurait-il dissimulé certains revenus ?
François-Henri Pinault, président du conseil d'administration du groupe PPR, a gagné 2,76 millions d'euros, en augmentation de 129 %. Xavier Fontanet, PDG d'Essilor, a touché 2,17 millions d'euros, soit 51 % d'augmentation. Le dernier exemple, monsieur le président – je constate que vous êtes alléché par cette énumération –, sera celui de Frédéric Oudéa, PDG de la Société générale : le trou de 5 milliards d'euros n'a pas empêché l'augmentation de 76 % de sa rémunération, qui est passée à 1,12 million d'euros.
Si vous ne souhaitez pas encadrer les rémunérations, comme nous le proposons, dans une marge – déjà considérable – de un à vingt, dites-le clairement aux Français.
Même si je sens que le président de la commission des finances souhaite intervenir, je ne bouderai pas le plaisir de commenter cet amendement.
Je suis surpris, monsieur Brard, que vous limitiez le multiplicateur à vingt et que vous ne réserviez cette disposition qu'à un nombre limité de personnes au sein de l'entreprise. Votre amendement laissera les traders, dont vous ne faites pas mention, gagner deux mille fois plus que le président-directeur général.
Si vous vous étiez montré cohérent, vous n'auriez pas limité la portée de votre amendement aux directions générales mais l'auriez étendue à l'ensemble des salariés de l'entreprise, ce qui aurait pu provoquer un autre débat.
En l'espèce, la difficulté d'apprécier une rémunération vient de ce que ses éléments ne sont pas forcément transparents tant du côté du comité des rémunérations que de l'assemblée générale des actionnaires. Si cette transparence existe pour les mandataires sociaux, ce n'est pas forcément le cas pour les traders.
Afin de satisfaire M. Brard et plusieurs de nos collègues, nous examinerons ultérieurement un amendement prévoyant que le montant des rémunérations et des bonus des traders, des opérateurs de marchés et de tous ceux qui, de façon directe ou indirecte, concourent à l'enrichissement d'un établissement via des activités de marché, soient connus du comité des rémunérations, qui donnera un avis sur la formule de ces bonus et sur la fixation des parties fixe et variable de la rémunération. Cet amendement s'inscrit dans le droit fil de l'arrêté pris par Christine Lagarde il y a quelques semaines et dont Laurent Wauquiez vient de donner un aperçu : il contraint à davantage de transparence, de raison en matière de rémunérations.
Pour l'heure, la commission émet un avis défavorable à l'amendement de M. Brard.
Très bonne intervention ! Même avis.
Vous imaginez bien que je n'ai, moi, pas du tout le même avis.
La discussion est intéressante car M. Chartier vient de reconnaître qu'il n'y a pas de transparence sur les revenus des traders. Pourquoi cela ? Parce que vous ne le voulez pas, alors qu'il suffirait de le décider.
Selon vous, mon amendement ne concerne que quelques dirigeants d'entreprises. Nous défendrons plus tard un amendement visant à taxer à 95 % les bonus des traders,…
…ainsi leur rémunération sera-t-elle comprise dans la fourchette de un à vingt fois le salaire minimum.
Qu'avons-nous à faire de ces gens, les traders, qui s'enrichissent en ruinant l'économie nationale, en jouant au Monopoly à nos dépens ? Nous n'avons pas besoin de traders. Ils sont nuisibles, ils doivent être éliminés des circuits pour que les moyens financiers ne soient plus l'objet de spéculations mais servent au développement de l'économie.
Vous restez attachés à une autre logique. Vous avez une autre vision du monde. Nous ne pensons pas, pour notre part, que des gens ont le droit de s'enrichir immensément en réduisant à la misère et à la famine des centaines de milliers d'autres. Nous n'avons pas la même morale, monsieur Chartier.
Certains vont tous les dimanches matins faire leur prière…
À peine ont-ils terminé qu'ils conduisent à la misère des centaines de milliers de nos compatriotes.
Eh bien, nous, nous avons le même comportement à la cour qu'aux champs. Vous feriez bien de vous inspirer de notre comportement. Vos électeurs voteraient dès lors pour vous avec plus d'enthousiasme, parce que, pour les faire voter pour vous, vous êtes obligés de ne pas leur dire la vérité sur les engagements que vous prenez ici.
La messe n'est pas encore dite, mes chers collègues.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
Ce débat n'est pas médiocre. On peut y répondre par une pirouette ou en professant une forme d'impuissance au motif que la situation est la même partout et que nous ne pouvons donc rien changer ici – deux attitudes qui ne me semblent pas épuiser la question.
La preuve a été apportée que des modalités et des niveaux de rémunération surprenants n'ont pas peu contribué au déclenchement de la crise. Si certains avaient été moins intéressés à des opérations loufoques – titrisation, diffusion de produits financiers douteux sur l'ensemble de la planète –, nous ne connaîtrions pas la situation actuelle et le présent texte n'aurait même pas existé. Nous ne pouvons donc évacuer le débat, j'y insiste, par une pirouette ou un aveu d'impuissance.
Tous les cas de figure ne sont cependant pas les mêmes. Un de nos collègues a eu raison de préciser qu'il ne fallait pas confondre les dirigeants de grandes entreprises, notamment celles qui, en France, sont cotées au CAC 40, avec les dirigeants de PME. Ceux-ci se sentent parfois blessés par les appréciations portées sur « les » dirigeants d'entreprise alors qu'ils ne sont évidemment pas concernés.
Existe un deuxième cas de figure ; il concerne ceux qui possèdent leur entreprise pour l'avoir créée. Au fond, dès lors que l'entreprise fonctionne selon leurs directives, avec des capitaux qui leur appartiennent, ces dirigeants font ce qu'ils veulent, sous réserve du respect du droit du travail, des conventions sociales, du dialogue syndical. Il me paraît donc difficile de leur adresser un quelconque reproche, d'autant qu'ils investissent souvent leur propre fortune dans l'entreprise.
Les deux derniers cas de figure sont ceux dont nous parlons. J'évoquerai pour commencer les dirigeants d'entreprise du CAC 40 qui sont de surcroît des mandataires sociaux. L'opinion a été légitimement choquée par le montant de certaines retraites chapeau, des golden parachutes ou des attributions massives de stock-options, sans parler de la rémunération variable, la rémunération fixe étant déjà tout sauf faible.
Prétendre que la situation est partout la même pour ne rien faire n'est pas une bonne attitude. Reconnaissons que la France est entrée dans un système d'autorégulation, confiant à ceux-là le soin d'être raisonnables dans l'attribution des rémunérations fixes, des rémunérations variables, des stock-options et d'avantages divers tels que les retraites chapeau garanties ou les golden parachutes en cas de départ.
On est dans l'autorégulation, puisque ces dirigeants-là, aujourd'hui, sont seulement sous l'empire d'un code, celui du MEDEF et de l'AFEP, dont on peut se demander s'il fonctionne vraiment. Ils étaient également sous l'empire d'un arrêté du Premier ministre, mais l'exemple qu'a cité tout à l'heure notre collègue M. Brard – celui d'une augmentation de 151 % – montre à tout le moins que, si cet arrêté était censé encadrer les rémunérations de dirigeants d'entreprises ayant été aidées par l'État, alors il est probablement inutile ! De même, on peut se demander si cela valait la peine d'élaborer le code du MEDEF et de l'AFEP.
Oui, il y a un problème ; il y a même une fracture qui se produit. En effet, nous avons tous eu l'occasion de discuter de ce sujet avec ceux qui, si j'ose dire, le suscitent – je parle notamment des dirigeants de grandes banques en France. Eh bien, ces gens-là ne comprennent pas que nous ne comprenions pas ; ils ne comprennent même pas que la population ne comprenne pas ! Et quand on les interroge plus avant, ils répondent qu'untel gagne plus, alors que son entreprise est moins importante que la leur. Autrement dit, ils se placent toujours dans une comparaison, avec un phénomène d'échelle de perroquet : puisque untel gagne tant, il est inadmissible que je ne gagne pas au moins autant – et, en fait, davantage. La course à l'échalote – si vous me passez cette expression – est lancée et, en vérité, elle est sans fin.
C'est vrai pour les dirigeants des banques ; c'est aussi vrai pour les entreprises du CAC 40. Concernant le numéro deux de Suez-Gaz de France, on sait ce qu'a été son parcours professionnel, tout à fait remarquable et sur lequel il n'y a rien à dire. On sait ce qu'a été son changement de vie, puisqu'un homme qui n'avait jamais dirigé une entreprise, ne serait-ce que de quelques salariés, s'est tout d'un coup trouvé propulsé numéro deux d'une entreprise qui, fusionnant avec une autre, le place aujourd'hui à la tête de milliers de salariés.
Cet homme a eu un traitement, au début de sa nouvelle vie, d'un peu plus de 500 000 euros. Or en moins de deux ans il s'est augmenté de plus de 200 %. C'est incompréhensible ! Qu'a-t-il fait pour mériter cela ? Interrogée par mes soins, Mme Lagarde – puisque l'État avait tout de même un peu son mot à dire – a indiqué que l'augmentation de sa rémunération était inévitable car l'écart entre le numéro un et le numéro deux était trop important. Seul l'écart posait donc un problème. Toutefois, l'idée que l'on puisse diminuer la rémunération du numéro un n'a manifestement effleuré personne ! Ainsi donc, on augmente la rémunération du numéro deux dans des proportions qui sont en vérité injustifiables.
Le quatrième et dernier cas de figure est celui des professionnels des marchés. Reconnaissons que la France a été à l'initiative d'une régulation qui est parmi les plus contraignantes. Je ne dis pas qu'elle est efficace ou satisfaisante mais, comparativement à d'autres pays, la France a été à l'origine d'une régulation qui fait partie des plus contraignantes dans le monde. Je ne suis pas certain qu'elle soit suffisante, mais dire que notre pays n'a rien fait en la matière serait probablement injuste, même s'il reste beaucoup à faire.
Je ne crois pas que l'on puisse évacuer cette question, même si je ne suis pas persuadé que l'on puisse la traiter à travers un amendement. Je regrette qu'un projet de loi de régulation bancaire et financière n'aborde pas plus sérieusement ce sujet, à l'initiative des pouvoirs publics.
On sait, mes chers collègues, comment ce débat va se terminer. Je veux donc simplement vous dire que, comme tout parlementaire, je sais ce que pense la population sur cette question. Quel que soit le choix politique de nos concitoyens, ces choses-là sont incomprises ; elles sont rejetées. Nous, représentants de la puissance publique, nous devrions agir avant qu'une forme de révolte, qui gronde à l'heure actuelle, ne se manifeste vraiment. Il est de notre responsabilité de le faire.
Ces rémunérations sont injustifiables ; elles sont injustifiées. Les responsabilités exercées sont certes importantes, mais elles ne justifient pas, je le répète, des rémunérations de ce niveau, et c'est le rôle des pouvoirs publics de l'expliquer à ceux qui aujourd'hui en bénéficient sans même comprendre que l'on puisse s'en indigner.
Sur ce sujet, je pense qu'il y a, premièrement, une position que l'ensemble des députés partagent et qui est la suivante : c'est un domaine dans lequel il faut de la retenue, de la régulation et de la transparence.
Deuxièmement, comme le président de la commission des finances l'a bien souligné, il nous faut agir sur cette question qui appelle des éléments concrets et pour laquelle il faut se méfier des simplifications. D'ailleurs, la démonstration du président de la commission établissait finalement très bien qu'un amendement comme celui qui est présenté, se contentant de fixer une proportion qui serait commune à tous les secteurs, n'a pas de sens.
Troisièmement – là aussi, le président de la commission l'a rappelé et c'est un point sur lequel je pense que tout le monde est maintenant d'accord –, sur bien des aspects de cette question de la régulation, la position du Gouvernement, portée très énergiquement par Christine Lagarde, a fait que notre pays a eu très clairement un rôle moteur en la matière depuis maintenant quasiment deux ans, même si l'on peut discuter pour savoir s'il est possible ou non de faire plus. Je remercie d'ailleurs le président de la commission d'avoir souligné le travail accompli par Christine Lagarde au sein du Gouvernement.
Je voudrais rappeler quelques éléments, afin que tout le monde comprenne l'ampleur de ce travail, dans un contexte marqué par d'énormes enjeux internationaux, ce qui fait que notre pays et le Gouvernement doivent posséder une grande force de conviction.
Nous avons d'abord agi en matière de transparence sur les bonus, avec l'obligation faite aux banques de publier chaque année une information complète en la matière. Ensuite, la question de la rémunération des traders a fait l'objet de règles précises, avec l'interdiction des bonus garantis, l'obligation d'un versement différé de plus de 50 % du bonus et un système de bonus-malus qui assure que ce versement différé ne peut être opérationnel que s'il y a véritablement eu une performance.
En ce qui concerne les retraites chapeau, je rappelle l'obligation, instaurée par la loi TEPA, de conditionner par la performance le versement d'indemnités de départ. La loi de finances pour 2010 a introduit une taxation de 30 % sur les indemnités de départ les plus élevées. À cela s'ajoutent les décrets que j'ai rappelés tout à l'heure pour tous les secteurs où les entreprises bénéficient d'aides. Nous pouvons d'ailleurs nous retrouver sur ce sujet, puisque vous disiez vous-mêmes, à l'époque, que l'État devait intervenir quand il y avait des aides publiques.
Une régulation a donc été instaurée.
Il y a un autre sujet, qui fait vraiment l'objet de batailles et sur lequel notre pays doit faire preuve d'une grande force de conviction au niveau européen. Pour ce faire, il bénéficie d'ailleurs de toute l'expertise internationale de Christine Lagarde. Je veux parler de la mise en place d'une plus grande transparence sur les marchés obligataires. En effet, nous savons très bien que c'est l'instauration de conditions de transparence et de concurrence sur les marchés qui permet d'éviter la constitution d'un petit groupe d'acteurs qui se répartissent cette manne financière.
Vous le voyez, il y a là un ensemble de paramètres qui vont d'ailleurs être complétés par ce texte à travers un amendement remarquable présenté par Jérôme Chartier, qui consiste à prévoir l'instauration obligatoire d'un comité de rémunération qui se penchera sur les bonus. Ce très bon amendement va permettre de renforcer encore l'appareil dont nous disposons. Bien sûr, on peut toujours dire qu'il faut faire plus, mais il y a un point sur lequel nous pouvons nous retrouver et qui a été rappelé par le président Cahuzac : c'est que la France est incontestablement le pays qui a pris le plus d'initiatives en ce domaine, depuis maintenant deux ans, au niveau international.
Pardonnez-moi de reprendre la parole, monsieur le président, mais ce débat n'est pas médiocre ; il mérite d'être tenu.
Vous avez souligné, monsieur le secrétaire d'État, le besoin de transparence. Je souscris tout à fait à ce jugement et, puisque vous vous inscrivez dans cette perspective, je vais vous poser quelques questions. L'État est présent dans le capital de quelques banques que nous connaissons. Je pense notamment à Dexia et au groupe issu de la fusion des Banques populaires et des Caisses d'épargne.
Vous avez souligné que la loi TEPA avait commencé à régler certains problèmes. Comment expliquez-vous alors que le Gouvernement français ait accepté que les dirigeants passés de Dexia, dont on sait dans quelle situation ils avaient mis cette banque – un besoin de recapitalisation de la part de l'État de 3 milliards d'euros et une garantie de passif de 57 milliards d'euros à l'époque, et environ 30 milliards aujourd'hui, accordée à cette banque par le Parlement au nom de la France –soient partis, l'un avec une retraite chapeau et l'autre avec un golden parachute ?
Vous avez dit tout à l'heure que la loi TEPA conditionnait ces avantages par la performance. Jugez-vous que ces dirigeants ont été performants ? Je ne le crois pas. Par conséquent, puisque vous utilisez vous-même le mot « transparence », donnez-nous, s'il vous plaît, les raisons qui ont conduit le Gouvernement français à accepter ces avantages invraisemblables pour deux dirigeants qui, à mes yeux – et je ne suis pas le seul à le penser – avaient failli.
Toujours sur Dexia, le nouveau dirigeant de l'établissement redresse incontestablement cette banque, encore que beaucoup d'efforts restent à faire. Je rappelle que notre État est engagé dans une garantie de passif pour cet établissement bancaire, à hauteur d'une trentaine de milliards d'euros, ce qui n'est quand même pas mince.
Avec, en effet, l'État belge, mais aussi celui du Luxembourg. En plus de cette garantie, l'État français a accordé 3 milliards, ce qui, je le rappelle, cher monsieur Giscard d'Estaing, n'est pas le cas des États belge et luxembourgeois.
Dans ces conditions, je ne comprends pas, pour ma part, que l'actuel dirigeant de cette banque ait bénéficié l'année dernière d'un bonus équivalant à sa rémunération de base. Vous en appelez à plus de transparence. Donnez-nous donc les raisons pour lesquelles les représentants de l'État ont accepté ce bonus.
En ce qui concerne maintenant le groupe Banque populaire-Caisses d'épargne, un nouveau dirigeant est arrivé après la fusion, qui s'est faite dans les conditions que l'on sait, et dont le Parlement a eu à connaître ; l'État y est représenté. Que s'est-il passé pour que ce dirigeant bénéficie lui aussi l'année dernière d'un bonus tout à fait conséquent ? Je veux bien comprendre – même si c'est à mes yeux un peu abusif – que l'on renvoie à l'assemblée générale, et donc aux seuls actionnaires, le soin d'expliquer des rémunérations que je persiste à juger extravagantes pour des dirigeants de banques ; mais là, à plus forte raison étant donné que l'État est présent, notamment au conseil d'administration, quelle a été sa position et, s'il a donné son accord, pour quelle raison ?
Mes chers collègues, je voudrais clarifier les choses. Comme vous l'avez constaté, monsieur le président de la commission, j'ai laissé très largement la place à ce débat qui est important et, de surcroît, d'une grande qualité. Je souhaite simplement alerter nos collègues, encore et toujours présents dans cet hémicycle, sur le fait qu'il reste quatre-vingt-cinq amendements à examiner. Si l'on continue à la vitesse actuelle, qui est à peu près de dix amendements à l'heure, cela veut dire que nous en avons encore pour plus de huit heures de débats. Or la Conférence des présidents n'a pas prévu de séance pour demain et je compte lever celle-ci vers vingt heures, de façon à pouvoir reprendre à vingt et une heures trente.
Sans peser évidemment sur les débats qui, je le répète, sont de qualité, je laisse chacun d'entre vous méditer sur ce que cela pourrait donner cette nuit ! Je suis comme toujours à la disposition de l'Assemblée, mais je souhaitais vous faire part de cette réflexion. Nous pouvons parfaitement avoir des débats tels que celui qui vient d'avoir lieu – j'ai coutume de les autoriser, y compris pour les lois de finances –, mais il est de votre responsabilité d'aller plus vite sur certains amendements.
(L'amendement n° 143 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 147 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Je vais essayer de déférer à votre demande, monsieur le président, mais, dans l'esprit de ce que disait à l'instant le président de la commission des finances, je voudrais signaler des anomalies. Par exemple, monsieur le secrétaire d'État, j'imagine que vous êtes abonné au gaz. Eh bien, comment justifier que, d'un côté, le patron de Suez-Gaz de France puisse gagner 4,9 millions d'euros, tandis que, de l'autre, on augmente le prix du gaz ? Les Français ne comprennent pas.
On pourrait multiplier les exemples. Il y a aussi des dirigeants dont on a étalé les rémunérations. Par exemple, M. Xavier Huillard de Vinci, ou encore M. Benoît Potier ont chacun sous le pied 11 millions d'euros, ce qui représente dix ans de travail ! Comment voulez-vous justifier que des gens gagnent autant ? Ils n'ont rien fait pour le mériter ! Et s'ils pensent que, quand on les paye moins, on ne reconnaît pas leur mérite, qu'ils aillent voir ailleurs ! Les « coblençards », les traîtres à la nation, il y en a déjà eu, et plus vite on verra leurs talons, mieux notre économie nationale se portera !
Pendant ce temps-là, vous voulez faire pleurer dans les chaumières à propos des retraites, alors que, des sous, il y en a ! En plus, vous n'avez même pas l'excuse de dire que vous ne savez pas où ils sont ! Seulement, le problème, c'est que ce sont les copains et les coquins du Fouquet's qui l'ont, et que, ceux-là on n'y touche pas. Ils sont sanctuarisés !
Vous dites que je radote, mais c'est plus de votre âge que du mien, mon cher collègue !
Monsieur Scellier, vous qui avez été agent du fisc, votre métier était une vocation et vous l'avez pratiqué d'une façon morale. Eh bien, comment pouvez-vous justifier cela ? Vous savez bien que ce n'est pas possible et, au fond de vous-même, vous êtes d'accord avec moi, même si vous avez encore une certaine marge de progrès avant d'être à gauche !
(L'amendement n° 147 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 73 .
La parole est à M. Pierre-Alain Muet.
Je suis étonné d'entendre M. le secrétaire d'État parler de transparence, alors qu'il a refusé un amendement qui visait justement à permettre la transparence des rémunérations dans l'entreprise, puisqu'il s'agissait de faire en sorte que les actionnaires jouent leur rôle et fixent le rapport entre la rémunération la plus basse et la plus haute.
L'amendement n° 73 vise à ce que l'attribution de stock-options ou d'actions gratuites soit interdite dès lors qu'une société a été recapitalisée grâce à une intervention publique.
Monsieur le secrétaire d'État, c'est effectivement ce que fait un décret que vous avez cité tout à l'heure. Mais il le fait de façon transitoire et pour un certain nombre de sociétés seulement ; la logique voudrait que ces interdictions s'appliquent systématiquement à toute entreprise recapitalisée, et que cela concerne toutes les personnes rémunérées par ces sociétés de façon permanente. C'est ce que propose cet amendement.
Avis défavorable. Le décret porte bien sur ce sujet – avec les différences que vous avez mentionnées.
(L'amendement n° 73 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 67 .
La parole est à M. Christian Eckert.
Je serai bref, monsieur le président, car je vous ai bien écouté. (Sourires.)
J'entends régulièrement rappeler l'origine et la date de création des mécanismes de stock-options. L'amendement n° 67 vise leur redonner leur vocation initiale : nous proposons donc de limiter le versement de telles rémunérations, certes différées, aux sociétés ayant une durée d'exercice inférieure à cinq ans.
(L'amendement n° 67 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 69 .
La parole est à M. Pierre-Alain Muet.
Il s'agit de limiter le montant des retraites chapeau à 30 % du montant de la rémunération reçue la dernière année d'exercice. C'est cohérent avec plusieurs des interventions que nous avons entendues, notamment celle du président de la commission des finances.
(L'amendement n° 69 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 70 .
La parole est à M. Christian Eckert.
Cet amendement vise à limiter les indemnités de départ des dirigeants des sociétés visées aux articles L. 225-57 à L. 225-93 du code de commerce à deux fois la plus haute indemnité de départ en cas de licenciement d'un salarié prévu par les accords d'entreprise.
Il s'agit, là encore, d'une mesure de bon sens.
(L'amendement n° 70 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 72 rectifié .
La parole est à M. Pierre-Alain Muet.
Nos propositions sont cohérentes : dans l'ensemble des entreprises, il revient aux actionnaires de jouer leur rôle pour faire en sorte que les rémunérations des dirigeants ne soient pas excessives. Voilà pourquoi nous proposions d'établir un rapport.
En revanche, lorsqu'il s'agit d'une entreprise recapitalisée par les pouvoirs publics, il est tout à fait logique que l'État fixe ces rémunérations à un niveau comparable aux plus hautes rémunérations de la fonction publique. C'est d'ailleurs ce qu'a fait le président Obama pour les entreprises recapitalisées.
Nous proposons donc que, dans ces entreprises, l'État fixe à vingt le rapport entre la plus haute et la plus basse rémunération. C'est cohérent avec ce qu'a fait le président des États-Unis.
(L'amendement n° 72 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 144 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Cet amendement reste dans la même logique, et il répond au souhait du rapporteur, qui craignait que je ne propose pas de taxer suffisamment les hauts revenus. Nous n'avons pas besoin, sur le territoire national, de ces gloutons ! S'ils ont tellement de talent, s'ils aiment tellement la France, ils doivent contribuer aux dépenses publiques et être imposés à un taux très élevé.
(L'amendement n° 144 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Cet amendement prévoit une taxe additionnelle sur les banques tant que notre déficit sera supérieur à 3 %. Ce serait simplement un juste retour des efforts faits par l'État pour les sauver : je rappelle que si l'État était entré dans le capital des banques en revendant au moment opportun les actions de ces banques, il aurait encaissé – c'est la Cour des comptes qui le dit – 5,8 milliards d'euros. Cela aurait contribué de façon importante à la réduction de notre déficit !
Une taxe exceptionnelle de 15 % sur les profits des banques rapporterait 3 milliards d'euros : cela nous paraîtrait cohérent avec l'intervention de l'État pour recapitaliser ces établissements.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour défendre l'amendement n° 151 .
Madame la ministre, vous avez fait le choix de vous porter à la rescousse des banques, en particulier dans l'affaire grecque. Si vous ne l'aviez pas fait, que se serait-il passé ? Ce sont les banques qui auraient dû mettre la main à la poche pour faire face au sinistre grec. Ce n'aurait été que justice.
Vous avez au contraire décidé de protéger la BNP, la Société générale, le Crédit agricole, etc. Une taxe de 15 % ne serait qu'une modeste rétribution du signalé service que vous avez rendu à ces banques.
(Les amendements identiques nos 64 et 151 , repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi d'un amendement n° 146 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Madame la ministre, vous avez pu constater que les agents du fisc, durement touchés par la RGPP puisque 13 000 postes ont été supprimés depuis 2002, n'ont pas été les derniers à participer aux récents mouvements sociaux. Là, ce n'est pas un fonctionnaire sur deux qui n'est pas remplacé, mais bien deux sur trois !
Vous prétendez vous battre contre la fraude et l'évasion fiscale – vous avez même signé une convention avec l'OCDE et le Conseil de l'Europe. Mais ce qui est terrible, c'est que malgré toutes ces grandes déclarations vous supprimez les agents compétents et efficaces qui pourraient mener la bataille contre la fraude. Ils ont prouvé leur efficacité, mais vous les empêchez de lutter en réduisant leur nombre !
(L'amendement n° 146 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 68 deuxième rectification.
La parole est à M. le rapporteur.
Cet amendement se situe dans le droit fil du débat qui a eu lieu tout à l'heure, qui n'était pas médiocre, qui n'a pas fait l'objet de dégagements en touche ni de pirouettes, qui a été bien conduit.
Deux philosophies se sont affrontées. L'une s'inscrit dans une démarche – qui n'est pas la mienne – de plafonnement des rémunérations, suivant une sorte de règle établissant un rapport entre des rémunérations trop élevées et des rémunérations trop faibles. J'ai entendu qu'il pouvait y avoir deux façons d'agir, selon que la personne la mieux rémunérée était ou non actionnaire de son entreprise. Dans ce cas-là, je rappellerai très simplement l'histoire d'un homme du passé : Henry Ford avait fixé le principe d'un multiplicateur maximal de quatre entre la rémunération la plus faible et la rémunération la plus élevée. Il était pourtant actionnaire de son entreprise !
Après tout, pourquoi ne pas aller jusqu'à cet extrême ?
Je suis d'accord pour réfléchir à la responsabilité des actionnaires et à la façon dont ils peuvent prendre la parole sur la rémunération des dirigeants d'entreprise.
Mais je ne vois pas du tout au nom de quoi on établirait une distinction entre les entreprises conduites par des mandataires sociaux qui sont actionnaires majoritaires de leur entreprise – puisque ce n'est pas incompatible – et les mandataires sociaux qui ne le sont pas.
Au fond, si c'est l'écart de salaire ou une rémunération excessive pour le travail accompli qui pose problème, cela doit relever de l'assemblée générale des actionnaires – qu'il s'agisse de l'actionnaire majoritaire, qui prend alors la décision, ou de l'ensemble des actionnaires.
En tout cas, il faut que les actionnaires soient informés non seulement des rémunérations les plus élevées mais aussi des rémunérations des personnes qui concourent à l'enrichissement de la société au titre des activités sur les marchés. C'est la raison pour laquelle je vous propose, par cet amendement, la création d'un comité spécialisé en matière de rémunération de l'ensemble des personnes désignées comme les salariés « professionnels des marchés financiers dont les activités sont susceptibles d'avoir une incidence significative sur l'exposition aux risques de l'entreprise. » Vous connaissez cette formule.
Cet amendement complétera utilement le comité des rémunérations actuellement en place, mais également l'arrêté du 3 novembre 2009, qui a transposé les engagements pris par la France lors du sommet du G20 à Pittsburgh : cet arrêté fixe de façon très précise les modalités de mise en place du comité des rémunérations ; il impose des règles concrètes de transparence pour les professionnels des marchés, donc les traders ; il indique surtout que ces éléments d'information doivent faire partie du rapport prévu par le fameux règlement n° 97-02, rapport portant sur la situation d'un établissement bancaire remis chaque année au régulateur. Ce document peut être consulté par n'importe quel actionnaire de l'entreprise considérée.
Voilà de quelle façon, en France, on améliore notablement, valablement, l'information de l'actionnaire sur la rémunération des mandataires sociaux et des dirigeants les mieux payés – je rappelle que, pour les entreprises de plus de 200 salariés, le rapport annuel d'activité présenté à l'assemblée générale des actionnaires doit comprendre le montant de la rémunération des dix dirigeants les mieux payés.
En complément des mesures contenues dans cet arrêté très important, le comité des rémunérations que je vous propose renforce la transparence des rémunérations et l'information des actionnaires, leur permettant ainsi de prendre les meilleures décisions.
Le Gouvernement est favorable à la mise en place de ce comité des rémunérations chargé de préparer les décisions de l'organe dirigeant. C'est, je crois, une bonne proposition, qui va dans le sens de la transparence, en tirant notamment les leçons de l'expérience sur ce sujet de M. Camdessus.
Monsieur le rapporteur, vous semblez refuser le plafonnement des plus hauts salaires dans les entreprises. Je vous prends au mot : faisons le contraire !
Ce débat reviendra bien sûr dans cet hémicycle, et je vous ferai alors cette proposition : dans une société, aucun salaire ne peut être inférieur à un certain nombre de fois le salaire le plus élevé de l'entreprise.
Modeste agrégé de mathématiques, j'ai fait un petit calcul. Imaginons une entreprise dans laquelle le plus haut salaire s'élèverait à 1 million d'euros par an, et qui se fixerait un rapport maximal de quarante entre le plus haut et le plus bas salaire : le salaire minimum y serait de 2 000 euros par mois. Et quarante fois, c'est déjà beaucoup !
Puisque vous déclarez ne pas souhaiter plafonner mais affirmez en même temps être soucieux des écarts qui peuvent exister, la prochaine fois, au lieu de fixer un maximum pour le plus haut dirigeant de l'entreprise, nous vous proposerons de faire l'inverse, c'est-à-dire de fixer un salaire minimum en divisant par un certain coefficient le salaire le plus élevé dans l'entreprise. Ainsi, il n'y aura pas de limitation et nous aurons le sentiment que tout le monde, en cas de bénéfices, participe à la fête.
Nous avions déposé des amendements de transparence, vous proposez de créer un comité des rémunérations, cela me fait penser au code de bonne conduite auquel a fait référence tout à l'heure le président de la commission des finances : on sait comment ce code de bonne conduite n'a pas été respecté, finalement.
En tout cas, nous allons travailler sur ce sujet et nous pourrons ainsi vous mettre au pied du mur.
La proposition de M. Eckert est tout à fait intéressante. Je faisais la division à l'instant : un salarié de Danone aurait 12 000 euros par mois. Cela devient intéressant parce que le salarié de Danone ne ferait pas comme son patron, il n'irait pas spéculer à la Bourse, il se mettrait à l'aise, et donc ferait tourner la machine économique.
Monsieur le rapporteur, vous disiez tout à l'heure que c'était aux actionnaires de décider. Non, les actionnaires n'ont pas à décider de tout. Ils sont sur un territoire, ils font partie d'un ensemble national et doivent obéir aux règles qui sont fixées par la nation. Il faut payer l'école, la santé, les infrastructures, et chacun doit être solidaire dans cet effort d'équipement et de formation du pays.
Tout à l'heure, vous avez affirmé, monsieur le rapporteur, que vous alliez améliorer la transparence mais, dans votre propos, il a manqué un mot qui, pour moi, est le premier, c'est l'amélioration de la justice. Celui-là, vous l'avez oublié. Ce n'est pas un hasard, parce que, comme dirait Freud, c'est votre subconscient qui a parlé. Or le subconscient met les âmes à nu.
(L'amendement n° 68 deuxième rectification est adopté.)
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 48 rectifié et 150 .
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 48 rectifié .
Je suis heureux de constater que nous avons été rejoints dans notre proposition par des collègues, même s'ils sont courageusement absents à cet instant, puisque MM. de Courson, Perruchot, Vigier, entre autres, avaient déposé un amendement identique. Le but de cet amendement est de pérenniser les dispositions de la loi du 9 mars 2010 qui avait instauré une taxation sur les rémunérations variables dans les établissements financiers.
Vous le savez, cette taxation avait été limitée sur les bonus versés au titre de l'année 2009. Nous souhaitons supprimer les termes « au titre de l'année 2009 » et, si nos collègues n'avaient pas été absents, ils auraient pu apporter leur contribution et faire pencher la balance, vu le faible écart de voix à chaque vote.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 150 .
Un dispositif très timide a été créé, qui vise à pérenniser la taxation des rémunérations mise en place par le Gouvernement. Je ne reviendrai pas sur les affaires Lehman Brothers et Kerviel. Je rappelle simplement qu'après que le Président de la République eut fait les gros yeux, la direction de la BNP avait décidé de ne pas répartir 1 milliard d'euros de bonus mais de donner deux fois 500 millions – même à l'école maternelle, on sait que deux fois 500, ça fait 1 000. Peut-être était-ce l'écho de l'engagement qui avait été pris par les banquiers, le temps d'un printemps, d'établir un code de bonne conduite.
Avec cet amendement, nous proposons d'envoyer un message clair. Tout à l'heure, le rapporteur, emporté par un élan de lyrisme et des accents révolutionnaires, a proposé de réduire l'échelle des salaires de un à quatre. Nous, nous proposons d'aller plus loin et, surtout, de faire en sorte qu'il y ait plus de justice.
Défavorable. Je voudrais rappeler que, lors de l'examen de ce texte, j'avais dit que la taxation était exceptionnelle, qu'elle portait sur des revenus exceptionnels résultant d'une contribution elle aussi exceptionnelle de l'État au soutien de l'activité. Il était parfaitement légitime dans ces conditions d'instaurer une taxation particulière au-delà de 27 500 euros, à concurrence de 50 %.
En revanche, je crois indispensable d'examiner le risque systémique et de chercher la manière d'y répondre. À mon avis, la solution n'est pas une taxation sur les bonus, et la pérennisation de cette taxation ne se pose pas. Il faut trouver une taxation qui repose sur une assiette logique, orientée le plus possible sur le risque auquel peuvent nous exposer des établissements. J'espère qu'une telle taxation pourra être mise en oeuvre au niveau international, à tout le moins au niveau européen. C'est tout le sens de l'action que nous menons.
Avis défavorable sur les deux amendements.
(Les amendements identiques nos 48 rectifié et 150 ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi d'un amendement n° 145 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour le soutenir.
Nous souhaitons, c'est une vieille proposition de notre groupe, réfléchir à l'opportunité d'un regroupement de l'ensemble des institutions financières. Cela nous aurait été fort utile, à la condition évidemment que ce pôle public soit géré non pas au service des autres établissements privés mais au service de la nation tout entière, pour le plus grand bénéfice de tous et pas pour le profit personnel de quelques-uns.
Défavorable, même dans l'esprit : il faut faire attention au too big to fail.
(L'amendement n° 145 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 139 portant article additionnel avant l'article 7 bis.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
L'amendement est défendu.
(L'amendement n° 139 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Sur l'article 7 bis, je suis saisi d'un amendement rédactionnel de M. Chartier, n° 41.
(L'amendement n° 41 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 7 bis, amendé, est adopté.)
Cet amendement a un but, que notre pays se dote au moins d'un moyen – je ne prétends pas que ce soit le seul – pour lutter contre ce que je juge intolérable, c'est-à-dire la spéculation contre des titres de dette souveraine et contre les certificats d'assurance qui y sont attachés.
Certes, l'activité spéculative est sûrement très difficile à éradiquer partout, c'est d'ailleurs une activité probablement vieille comme le monde, et il est probable que ce n'est pas notre assemblée qui y mettra un terme dans le monde entier, mais ce n'est pas une raison, me semble-t-il, pour baisser les bras et ne vouloir rien faire.
En outre, plus personne aujourd'hui ne défend l'idée qu'une activité spéculative puisse avoir une quelconque utilité, comme cela a pu être parfois le cas il y a une vingtaine d'années, certains ayant théorisé la spéculation comme une façon pour les marchés de revenir à une forme d'équilibre. Plus personne ne défend cette option car tout le monde sait aujourd'hui que la spéculation, si elle est profitable pour certains, est nuisible pour le plus grand nombre.
Ceci étant posé, il me semble que cette activité spéculative est particulièrement nuisible quand elle concerne des titres de dette souveraine et les certificats d'assurance, qu'on appelle les CDS, qui sont attachés à ces titres de dette.
Sur ces deux préliminaires, il me semble que nous pouvons tous être d'accord.
Là où nous risquons de diverger, c'est sur la déclinaison de ces deux principes. On sait que les ventes à découvert à nu des titres de dette ou des certificats, mais des titres de dette en réalité, ont menacé des pays de la zone euro. On se réjouit que cette activité n'ait pas menacé la dette souveraine française et, objectivement, nous pensons que le risque n'était pas grand. L'Allemagne, qui était dans la même position, a quand même adopté une disposition interdisant la vente à découvert à nu des titres de dette de l'Allemagne ainsi que des certificats attachés à ces titres de dette.
Je crois qu'il serait bon que le Parlement adopte cet amendement, pour plusieurs raisons.
Premièrement parce que, objectivement, ce serait un moyen de lutter contre la spéculation, même si nous savons qu'en l'adoptant nous ne garantirions pas que cette activité spéculative serait interdite partout et pour tout le monde. Au moins notre pays aurait envoyé un signal assez fort, refusant par cette adoption que la dette souveraine française puisse faire l'objet de mouvements spéculatifs.
Deuxièmement, parce que l'Allemagne a déjà pris cette mesure. L'Allemagne et la France, qui ont conduit l'Europe, ont vocation à la conduire à nouveau. Il me semble que si la France rejoint l'Allemagne dans ces dispositions, l'exemple serait ainsi donné de manière très forte, non seulement au sein de la zone euro mais au sein de l'Europe elle-même, engageant les autres pays à adopter des mesures comparables. Si l'Europe adoptait à la longue ce type de disposition, luttant contre la spéculation dont sont l'objet les dettes souveraines, il me semble qu'elle aurait avancé, qu'elle aurait manifesté une certaine unité, qu'elle aurait également envoyé un signal au marché qui ne me paraît pas mince par les temps que nous vivons.
Une telle mesure est-elle possible en France ? Oui, car ce type d'interdiction existe déjà. Elle fut énoncée avec des principes juridiques contestables, mais qui ne furent pas contestés et ce fut heureux. Donc le principe lui-même de l'adoption d'une telle disposition n'est pas contestable puisque c'est sous l'empire de cette interdiction qu'un certain nombre de titres de banques qui ont été aidées au moment de la crise sont encore interdits aujourd'hui. Ce genre d'interdiction a déjà été utilisée en France pour certains produits, elle est toujours d'actualité, son principe n'est donc pas contestable.
Par ailleurs, je le répète, un autre pays, et non des moindres en Europe, l'Allemagne, a déjà pris cette disposition. Le fait que la France imite, ou plutôt suive l'Allemagne sur ce chemin serait, je crois, compris.
Je suggère que le Parlement adopte cet amendement. Je sais les réticences de certains au sein de la majorité comme au sein du Gouvernement, mais je crois que le débat permettra à chacun de se prononcer dans un vote que pour ma part j'espère favorable, même si, pour cela, il faut discuter certains termes de l'amendement que je présente. Je pourrais comprendre, par exemple, des dispositions exonérant de cette interdiction ceux que l'on appelle les SVT, les spécialistes en valeurs du Trésor, à l'instar de ce qu'a fait l'Allemagne, dès lors qu'il serait clairement indiqué que les banques exonérées de cette obligation ne le seraient que pour leurs missions, si j'ose dire, de SVT, et certainement pas pour des activités de comptes propres.
Voilà ce que je vous propose, madame la ministre, en espérant être bien compris et en formant le voeu que, ce soir, la France puisse être aux côtés de l'Allemagne, afin d'envoyer un signal très fort, non seulement au marché mais surtout à l'encontre des spéculateurs qui, au fond, attendent de voir quelle faiblesse pourrait se manifester ici ou là afin d'en profiter, pour leur compte certainement, mais très certainement aussi au détriment des populations des pays concernés.
La parole est à Mme Marie-Anne Montchamp, pour soutenir l'amendement n° 87 .
À dire vrai, cet amendement est sur le métier depuis l'annonce par la chancelière Merkel de l'interdiction des ventes à découvert. Nous avons appris hier avec beaucoup de satisfaction que la Chancelière et le Président de la République avaient rédigé en commun, à l'attention de José Manuel Barroso, une lettre prônant une accélération des travaux de la Commission sur la régulation financière. Outre l'affichage de l'union renforcée…
…du couple franco-allemand, ce dont naturellement je me réjouis, ce courrier souligne « l'urgence du besoin d'encadrer de façon renforcée le marché des CDS souverains et des ventes à découvert ».
Mes chers collègues, cet amendement n'est rien d'autre que l'expression parlementaire, acceptée par notre commission des finances, de l'urgence à agir en ce domaine. Il faut en effet que les États de la zone euro se dotent le plus vite possible, pour leurs titres souverains et pour les CDS, d'une protection suffisante en limitant et en interdisant ces formes de spéculation qui, par leur nature même, concourent à spéculer sur ce qui fait précisément la fragilité de la zone euro en ce moment, à savoir l'aggravation de la situation d'un État, voire sa défaillance, comme on a pu le voir avec nos voisins grecs. Cet amendement diffère du précédent dans la mesure où il vise à ce que l'on puisse, par voie réglementaire, pour ce qui concerne les OAT, se doter d'une période spécifique à l'initiative du Gouvernement.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 43 rectifié .
Si vous en êtes d'accord, monsieur le président, j'en profiterai pour donner également l'avis de la commission sur les autres amendements en discussion commune.
Nous parlons de l'activité qui nous concerne tous collectivement, la spéculation, c'est-à-dire le détournement des produits financiers rentables à très court terme pour enrichir quelques acteurs des marchés, que l'on retrouve non seulement dans le principe des ventes à découvert sur les titres de dettes souveraines, mais également sur les produits de protection, à savoir les assurances que sont, en l'occurrence, les CDS.
Pour bien comprendre de quoi nous parlons, je vais donner un chiffre qui me semble important et très révélateur. En 2003, 3 780 milliards de dollars étaient assurés au titre des CDS, et ce chiffre a été porté à 62 170 milliards de dollars en 2007. Cela signifie simplement que ce produit essentiel au bon fonctionnement du marché a connu un détournement d'objet à des fins spéculatives.
Le principe de la vente à découvert n'est pas régi par la loi. Le code monétaire et financier ne définit pas précisément la vente à découvert. C'est un terme générique qui revêt plusieurs réalités auxquelles la commission des finances s'est attaquée lorsqu'elle a décidé d'adopter l'amendement visant à faire passer le J +3 à J +1 dans le délai des règlements à livraison du marché réglementé, c'est-à-dire le marché des actions, le seul qui puisse aujourd'hui être valablement contrôlé par l'Autorité des marchés financiers. Voilà une forme de vente à découvert qui s'élimine puisque l'on vise à réduire des deux tiers le temps s'écoulant entre le moment de la transaction, où acheteur et vendeur se mettent d'accord, et celui où l'acheteur verse l'argent et où le vendeur remet le titre. En réduisant ce temps, on réduit bien sûr, vous l'avez compris, le caractère spéculatif du marché boursier, en l'occurrence le marché réglementé, et spécifiquement celui des actions.
La question très importante que nous devons nous poser est la suivante : sommes-nous en mesure aujourd'hui en France de concrétiser notre volonté par ces amendements ? Je vous le dis tout de go : non, parce que la plupart des transactions s'agissant du marché des souverains, c'est-à-dire de la dette souveraine, des obligations d'État, sont des marchés de gré à gré. Il existe deux types de marchés : un marché primaire, lorsque l'agence France Trésor cède les obligations d'État françaises aux spécialistes de valeurs du Trésor – les SVT –, et un marché secondaire, lorsque les SVT décident de renégocier ces obligations à d'autres acteurs. Celui-ci est un marché de gré à gré, c'est-à-dire que les conditions de transaction sont fixées par accord entre l'acheteur et le vendeur. Les marchés de gré à gré ne sont pas réglementés, au sens où on l'entend aujourd'hui. On va étendre la réglementation, mais il est difficile d'appréhender celle-ci dans la mesure où il n'y a pas d'inscription des différents acteurs de ces marchés ; cela va changer du fait de la volonté du gouvernement français, de l'action conduite par Christine Lagarde pour que cela se traduise dans les faits aux niveaux européen et mondial. De surcroît, il n'y a pas de chambre de compensation, ou plus exactement il y en a une, Clearnet, qui commence à faire son travail…
Pardonnez-moi, monsieur le président, mais il est très important d'approfondir ce débat pour que nous puissions nous prononcer en toute connaissance de cause !
Cette chambre de compensation commence donc à produire son travail, mais ne peut pas le faire complètement.
L'initiative allemande est-elle bonne ? La réponse est oui. Cette initiative pouvait-elle être complètement opérationnelle et atteindre son objectif ? La réponse est non. L'initiative franco-allemande qui vient d'être prise est-elle salutaire et nécessaire ? Réponse : oui, plus que jamais, car c'est au niveau européen, voire mondial, que l'on peut faire en sorte que les produits financiers quels qu'ils soient, en l'occurrence les CDS, ne soient pas détournés de leur objet. Voilà l'essentiel. Pour le reste, si nous prenons une telle décision, à court terme elle aura un important d'effet d'annonce, mais soyons réalistes : elle n'aura pas beaucoup de conséquences sur les marchés.
En revanche, ce qui a une conséquence importante sur les marchés c'est la décision franco-allemande, c'est la volonté marquée envers le président de la Commission européenne de raccourcir le calendrier pour se doter d'une législation opérationnelle s'agissant des ventes à découvert prises sous leur forme globale, d'en profiter pour les définir juridiquement et pour réglementer les marchés de gré à gré, ce qui est une tendance européenne et mondiale évidente puisque les Américains sont sur la même longueur d'onde. Il faut veiller à réduire les détournements d'objet de l'ensemble des produits financiers, produits d'assurance ou marchés d'options, qui constituent autant d'occasions de spéculation et dont on n'a pas parlé parce que ce sont des produits plus techniques, donc plus difficiles à appréhender. Voilà aujourd'hui la réalité des marchés financiers, qui nous ennuie tous, non seulement nous, représentation nationale, mais aussi les industriels, avec lesquels j'ai eu beaucoup de contacts ces derniers temps. Nous voulons tous que les marchés financiers retrouvent la sérénité et surtout leur objectif premier qui est le financement de l'économie, de la croissance.
Ces amendements poursuivent tous le même objectif. Nous souhaitons réduire la spéculation, voire y mettre fin. Reste à savoir quel est le meilleur moyen pour cela. Je pense que c'est l'initiative franco-allemande. En tout cas, c'est derrière celle-ci que je me range.
Je remercie les auteurs des différents amendements pour leur détermination à expliquer les motivations qui les animent.
Je suis, au fond, plutôt d'accord avec la plupart de ces propositions. En revanche, je suis en désaccord avec la mécanique proposée par l'amendement du président de la commission des finances et par celui de Mme Montchamp. En effet, dans la foulée de l'initiative prise par le Président de la République et la Chancelière Merkel, mon souhait profond et la raison pour laquelle je combats au quotidien, c'est que nous arrivions à une solution qui soit européenne. J'accueille évidemment avec une infinie satisfaction la démarche franco-allemande consistant à demander au président de la Commission européenne de faire accélérer la manoeuvre par son commissaire au marché intérieur, qui n'est autre que Michel Barnier, la lettre lui demandant très précisément de fournir certaines pistes avant l'ECOFIN du mois de juillet – c'est vous dire la brièveté du délai dans lequel nous demandons que son action soit encadrée. Lorsque, à l'occasion de l'ECOFIN de mardi dernier, j'en ai parlé avec Michel Barnier, celui-ci a indiqué très clairement, même s'il ne l'a pas encore fait par écrit à ce jour parce qu'il n'avait pas encore été saisi formellement par le président Barroso, son accord pour accélérer le processus concernant ces projets sur les ventes de CDS à découvert pur ou à découvert « à nu », ce qui est plus grave, et pour explorer toutes les pistes sollicitées par le Président de la République et la Chancelière Merkel.
Je souhaite que nous restions sur cette ligne, d'abord parce que cela me semble la bonne approche dans un contexte européen ; ensuite, parce que cela renforce l'action concertée franco-allemande, dont on connaît l'importance considérable dans les avancées rapides des travaux, y compris dans une Europe à vingt-sept ; ensuite, parce que cela consacre le fait que nos partenaires et amis allemands souhaitent parvenir à une solution dans le cadre européen plutôt que prendre de simples mesures allemandes comme celles qui ont été annoncées le 19 mai puis évoquées lors du dernier conseil des ministres allemand, et dont la portée est singulièrement réduite par rapport au champ qui avait été consacré par la médiatisation. On a en effet affaire exclusivement à des titres qui sont cotés sur les marchés allemands, et de manière restrictive puisque les spécialistes en valeurs du Trésor ne sont pas concernés par les interdictions éventuelles.
Il faut que nous restions dans cette logique européenne, dans un contexte franco-allemand et avec le souci d'éviter les volatilités considérables qui risquent de se produire si on s'amuse à faire cavalier seul, fût-ce après les annonces faites par l'Allemagne au mois de mai.
Donc avis défavorable à ces amendements.
Sur le vote de l'amendement n° 1 deuxième rectification, je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Pierre-Alain Muet.
Sur ce sujet important il faut rappeler qu'il n'y a pas, aujourd'hui, de justification aux ventes à découvert « à nu ». À l'époque où ces ventes ont été inventées, certains économistes pensaient que la spéculation pouvait être stabilisatrice et conduire à l'équilibre des marchés, mais on voit que cela n'est pas vrai. La spéculation consiste en effet à anticiper ce que vont penser les marchés demain et cela peut conduire à des situations catastrophiques totalement aberrantes et très éloignées de l'équilibre d'une parité, d'une monnaie ou d'un titre.
Il faut bien sûr interdire les ventes à découvert « à nu », parce que l'on voit bien à quoi elles servent : c'est l'instrument de spéculation par excellence. Vous vendez quelque chose que vous n'avez pas, que vous allez acheter quand cela aura baissé, c'est-à-dire quand votre vente aura fait en sorte que cela baisse. Autoriser aujourd'hui des ventes à découvert sur des titres publics alors que l'Europe connaît une crise de la dette souveraine, c'est absurde.
Je sais bien que tout le monde partage cette analyse, mais comment peut-on se contenter de dire qu'il faut lancer les choses en Europe, écrire une lettre, faire des annonces ? Les marchés ne croient pas aux annonces. Les marchés croient dans les mesures qui sont effectivement prises. Dans ce domaine, certes, l'Allemagne a fait cavalier seul, et elle aurait mieux fait de se joindre à d'autres. Mais l'avoir fait, c'est un vrai signal au marché, c'est le signal qu'il ne s'agit pas que de propositions, mais d'actes. Je continue à dire que si la France avait suivi tout de suite l'Allemagne, on aurait compris que le couple franco-allemand était en marche, que l'Europe était prête à changer les choses, et cela aurait eu de l'influence.
Se contenter d'une lettre disant que nous allons négocier, c'est exactement comme le temps qu'a mis l'Europe entre le moment où elle a décidé d'intervenir pour la Grèce et le moment où elle l'a effectivement fait. Trois mois se sont écoulés, alors que la spéculation peut changer complètement les conditions en quelques jours, voire en quelques heures, ce n'est pas un délai responsable, et il faut que nous allions beaucoup plus vite. Voter cet amendement y contribuera.
Madame la ministre, il est des moments où l'initiative parlementaire, aussi bizarre que cela puisse paraître, peut se fixer pour objectif de rejoindre l'intérêt de l'exécutif dans sa démarche. Cet amendement, en y regardant de près, peut parfaitement s'inscrire dans cette idée, et faire qu'une volonté publique soit gagée de manière symétrique par la volonté parlementaire.
Madame la ministre, j'ai sous les yeux la lettre de Mme Merkel et du Président de la République, à aucun moment je n'y vois évoquée l'interdiction des ventes à découvert de CDS.
Bien sûr que si !
On y trouve effectivement des recommandations, on y fait des allusions, on y demande des pistes, mais je ne vois pas les termes de vente à découvert dans le texte.
C'est au quatrième paragraphe.
Je lis : « L'Union européenne doit proposer que tous les hedge funds et autres fonds susceptibles de créer un risque systémique fassent l'objet d'un enregistrement, d'une régulation et d'une supervision appropriée. » Où est l'interdiction que nous proposons dans l'amendement ?
Page 2 !
Il s'agit de la lettre datée du 8 juin 2010.
Sur la forme, monsieur le rapporteur, je suis un peu surpris de votre présentation : vous n'avez pas donné votre avis sur les amendements. Vous portez l'amendement n° 161 , probablement au nom de la commission. Comment pouvez-vous porter un amendement et ne pas donner d'avis ? En tout cas je n'en ai pas entendu, à moins d'avoir été inattentif une nouvelle fois, et je vous demanderais à nouveau de bien vouloir m'en excuser.
Nous parlons beaucoup de l'action qualifiée d'exemplaire de l'Allemagne, en disant que la France doit faire exactement la même chose. J'aimerais insister sur la nécessité d'une position européenne. Il ne s'agit pas simplement de dire qu'il faut le faire de manière européenne parce que cela aurait peu d'impact au niveau national. Il faut d'abord savoir que la mesure d'interdiction des ventes à découvert annoncée par l'Allemagne, contrairement à ce que l'on dit, a très peu de portée aujourd'hui. L'annonce, qui avait été très forte au départ, a provoqué de fortes perturbations sur le marché de la dette souveraine dans la zone euro. Cela n'a pas été totalement neutre, et ces perturbations ont aussi été préjudiciables aux émissions des États de la zone euro.
Je souhaite insister sur un point qu'a abordé Mme la ministre : l'annonce allemande a porté sur l'interdiction des ventes à nu d'obligations publiques cotées sur les marchés réglementés allemands. Concrètement, cela signifie qu'elle vise la dette du gouvernements national et des Länder, mais cette interdiction ne sera opposable qu'aux opérations dont les deux parties sont allemandes. C'est une restriction qui vide concrètement la mesure de son sens, il faut être clair sur ce point. C'est la raison pour laquelle la mesure doit être coordonnée au niveau européen, sachant que la délocalisation des transactions permet de s'affranchir de tout dispositif national. Bien entendu, le signal donné par l'Assemblée pourrait être un accompagnement de la lettre commune du Président de la République et de la Chancelière allemande, mais tout signal exclusivement national peut avoir un effet directement négatif, pas simplement neutre, ni positif ou en soutien de cette démarche. C'est pourquoi cette indispensable position européenne me semble devoir être unique et exclusive.
Pour être tout à fait précis, il ne s'agit pas d'amendements de la commission des finances, mais simplement d'avis de la commission puisque nous avons examiné ces amendements dans le cadre de l'article 88. En l'occurrence, la commission a rendu des avis favorables sur les amendements de MM. Cahuzac, Courson et de Mme Montchamp, ainsi que de M. Muet, dans le cadre d'une majorité que je qualifierai pudiquement de réduite.
C'est pourquoi, avec Gilles Carrez, nous avons déposé ces amendements que nous allons maintenant retirer. Nous les avions déposés voici une semaine car nous voulions un positionnement en phase avec l'initiative allemande s'agissant des ventes à découvert. Entre-temps, l'engagement fort de Nicolas Sarkozy et d'Angela Merkel est intervenu. Et cet engagement va être suivi d'effets non seulement en France et en Allemagne, mais également dans l'ensemble des pays de l'Union européenne. C'est bien là l'objectif poursuivi.
Au fond, se lancer dans l'interdiction des CDS en France, puisqu'on ne peut pas réguler véritablement les marchés de gré à gré où s'effectuent les transactions CDS, c'est une forme de bonne intention. Moi, je souhaite des intentions suivies d'effets. Je souhaite que l'on puisse trouver toutes les solutions pour mettre fin aux activités spéculatives des marchés et, en l'occurrence, des produits dont les transactions se font sur les marchés de gré à gré. L'initiative franco-allemande est la seule valable, c'est la raison pour laquelle par souci de clarté je me range dans le droit fil de cette initiative.
Avec Gilles Carrez, nous retirons notre amendement, et j'appelle à voter à titre personnel contre l'ensemble des amendements, puisque je ne peux m'exprimer en qualité de rapporteur de la commission des finances.
(L'amendement n°43 rectifié est retiré.)
Dans le temps qui nous sépare du scrutin, je voudrais d'abord dire un mot sur la légitimité du vote au sein de la commission des finances, qui m'a semblé être mise en cause puisque l'expression du rapporteur a été : « dans le cadre d'une majorité réduite ». Je ne comprends pas cette expression. Cet amendement a recueilli un avis favorable de la commission par un vote de commissaires aux finances appartenant les uns à l'opposition et d'autres à la majorité présidentielle. J'ignore si c'est la définition d'une majorité réduite ; pour ma part, je le répète, je ne comprends pas cette expression. Je souhaitais simplement dire ce qui fut et, pour ceux qui en douteraient, je les engage à consulter le compte rendu de la commission.
Marie-Anne Montchamp a indiqué que l'initiative parlementaire avait sa place dans les débats et je crois qu'elle a raison. À moins que, peut-être à notre corps défendant, nous ne confirmions aux yeux de ceux qui nous font confiance que, lorsqu'il s'agit de sujets importants, ce n'est pas au Parlement français que les choses se passent.
Comme nombre d'entre vous, tous devrais-je dire, j'aime beaucoup le Parlement, j'aime l'Assemblée nationale, et je regretterais de donner l'impression de demander au président de la Commission, M. Barroso, de faire ce que j'estime être de notre domaine de compétence, de notre légitimité, et probablement de notre devoir. C'est en tout cas ainsi que je vois les choses. L'Allemagne n'a pas attendu l'accord de quiconque pour prendre ces dispositions. Quand le rapporteur indique qu'elles ne s'appliquent qu'à l'Allemagne, je souhaite tout de suite préciser, si le doute existait, que si d'aventure cet amendement était adopté, cela ne s'appliquerait qu'à la France. Chaque Parlement est souverain chez lui, mais ce qu'il décide ne s'applique qu'à l'intérieur de ses frontières. Là-dessus, je n'ai pas de désaccord de fond avec Jérôme Chartier.
En revanche, contrairement à lui, je crois que s'il s'agit de dynamiser une initiative franco-allemande le fait que notre Parlement prenne une disposition en tous points comparable, si ce n'est identique, à ce que l'Allemagne a fait serait un élément de dynamisation très fort, une stimulation pour que M. Barroso agisse enfin. On a vu depuis maintenant deux ans et demi ce qu'a été l'inaction de la Commission et de son président. Lui confier le soin de prendre des dispositions de cette importance me paraît un acte de foi que le passé ne justifie probablement pas, en tout cas à mes yeux.
Il s'agit d'un sujet délicat et je comprends que certains hésitent. Il me semble que ce sujet n'est pas politiquement partisan, à preuve le vote en commission des finances, ainsi que le fait que beaucoup des personnes consultées, au moins de manière officieuse, n'ont manifesté aucun désaccord, ni sur le fond ni sur la forme. Je souhaite donc que cet amendement soit adopté, ce ne serait pas la victoire des uns contre les autres, ce serait probablement une bonne chose pour le Parlement, ce serait certainement la marque de la volonté de la France de rejoindre effectivement l'Allemagne dans ses décisions, et ce serait aussi un signal envoyé à l'Europe pour en finir avec ces activités spéculatives qui sont détestables, d'autant plus qu'elles s'attachent à des titres de dette souveraine, en l'occurrence celle de la France.
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 1 deuxième rectification.
(Il est procédé au scrutin.)
Je suis saisi d'un amendement n°81 .
Sur le vote de cet amendement, je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Pierre-Alain Muet.
Cet amendement est relatif à un point qui a apparemment également été abordé dans le courrier d'Angela Merkel et du Président de la République : il s'agit d'interdire une autre forme de vente à découvert à nu, qui consiste à spéculer à l'aide des CDS sans avoir les titres en sa possession. Les CDS sont un facteur d'assurance, mais comme tous les facteurs d'assurance et de couverture, ils sont fréquemment utilisés pour spéculer, ce qui n'est pas leur fonction initiale. Si l'on ne dispose pas des titres en question, c'est une forme de vente à découvert qu'il faut également interdire.
Je le disais tout à l'heure en citant les chiffres, il s'agit de l'un des plus caractéristiques détournements d'objet de produits financiers très utiles au marché. Mais, je le répète, et le cas allemand est très significatif, prendre une décision en sachant qu'elle n'est pas applicable dans les faits, parce que les marchés de gré à gré ne sont pas appréhendables aujourd'hui dans la connaissance du marché par les régulateurs, c'est certes intéressant mais c'est insuffisant.
C'est la raison pour laquelle le seul vrai moyen d'action, et non uniquement de communication, est l'engagement européen, et la démarche solidaire franco-allemande. Voilà la raison pour laquelle je m'inscris dans cette démarche. Certes, nous aurions pu faire une déclaration de l'Assemblée marquant notre volonté de lutter contre la spéculation. On l'a dit et redit ce soir, et c'est dans l'esprit de tous nos collègues qui sont présents, ainsi que des collègues qui n'ont malheureusement pu se joindre à nous par manque de temps ou de possibilité de le faire.
Oui, les CDS, c'est un des sujets qui nous occupent le plus. Oui, l'interdiction que les CDS puissent faire l'objet de transactions à nu, c'est essentiel. Il faut qu'un CDS soit obligatoirement associé à un titre assuré : c'est la moindre des sécurités.
Chers collègues, nous sommes déjà allés très loin dans la réduction des ventes à découvert en réduisant le délai à J +1. Nous n'avons pas parlé de cette mesure parce qu'elle a été adoptée en commission et qu'elle figure désormais dans le texte que nous examinons, il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'une avancée significative. C'est même un progrès considérable qui permet de réduire la partie spéculative du marché des titres actions.
Savez-vous que la moitié des transactions effectuées sur la place de Paris ne sont pas dénouées in fine ? En fait, ces transactions sont tout simplement « recédées » entre le moment où elles s'effectuent et le moment où, en principe, elles devraient être livrées et réglées. Voilà un seul chiffre marquant qui illustre bien la réalité. Il s'agit d'une forme d'animation détournée à des fins spéculatives.
La commission des finances est engagée dans une démarche de fond visant à réduire la spéculation. Cette démarche trouvera une issue très favorable grâce à l'engagement franco-allemand pris par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel pour pousser l'Europe à mettre fin à la spéculation sur les marchés financiers. C'est en tout cas mon voeu le plus cher.
Je crois qu'il faut utiliser certains arguments avec prudence.
C'est certainement une bonne chose d'avoir réduit de J +3 à J +1 les délais de dénouement des contrats ; toutefois je fais remarquer au rapporteur que la disposition votée ne s'appliquera qu'en France. Cela relativise l'argument de ceux qui s'opposent à l'interdiction des ventes à nu en prétendant que nous ne pouvons pas légiférer parce que la loi ne s'appliquerait qu'en France.
Le Parlement se contente d'interdire ce qui n'a aucune chance de se reproduire. Si nous devons interdire uniquement lorsque nous avons la certitude que nos interdits auront une efficacité absolue sans jamais souffrir aucune exception, je ne suis pas certain que nous pourrons encore le faire souvent.
Pour conclure, je précise que l'amendement n° 81 reprend les termes exacts de la première recommandation du groupe de travail bipartisan sur la régulation financière, formé entre l'Assemblée nationale et le Sénat à la suite d'un souhait exprimé par le Président de la République.
Défavorable.
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 81 .
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 29
Nombre de suffrages exprimés 28
Majorité absolue 15
Pour l'adoption 8
Contre 20
(L'amendement n° 81 n'est pas adopté.)
(L'article 7 quater est adopté.)
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures quarante-cinq :
Suite du projet de loi de régulation bancaire et financière.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures trente.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma