La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, de la proposition de loi de MM. Gérard Cherpion, Bernard Perrut, Jean-Charles Taugourdeau et plusieurs de leurs collègues pour le développement de l'alternance, la sécurisation des parcours professionnels et le partage de la valeur ajoutée (n°s 3369, 3519, 3512).
Ce matin, l'Assemblée a commencé l'examen des articles, s'arrêtant à l'amendement n° 89 à l'article 3.
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour soutenir l'amendement n° 89 .
Je crains de ne pas avoir encore tout à fait convaincu, ce matin, nos collègues de la majorité sur le risque de glissement inhérent à l'apprentissage saisonnier.
J'aimerais donc, par cet amendement, tenter de limiter les dégâts en revenant sur un amendement adopté en commission. Qu'un apprenti travaille dans plusieurs entreprises est, d'une certaine manière, possible. Le fait – nous en avons discuté – qu'il ait deux employeurs d'apprentissage ne me paraît cependant pas souhaitable. Mais, lorsque ce texte prévoit, de surcroît, que cet apprenti pourra préparer deux qualifications, donc deux diplômes différents, cela peut sembler intéressant, mais me paraît matériellement irréalisable. Cela nécessite, en effet, deux CFA et, lorsque l'on sait la difficulté de suivre toutes les heures de cours nécessaires à la préparation d'un diplôme, il est impossible d'envisager de mener parallèlement deux cursus. On ne peut faire d'analogie avec les cursus universitaires. Nous proposons, par conséquent, de supprimer l'alinéa 2 de cet article.
La commission a rejeté cet amendement. Nous en avons longuement discuté ce matin. Je ne reviens, par conséquent, pas sur les motifs.
Même avis.
(L'amendement n° 89 n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour soutenir l'amendement n° 90 rectifié .
La commission a repoussé cet amendement. Sur le fond, l'idée est concrète et intéressante, mais il est impossible d'introduire dans la loi l'acronyme Cerfa. Cela me paraît, de plus, relativement aléatoire.
(L'amendement n° 90 rectifié , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi de trois amendements, nos 8 , 41 rectifié et 141 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n°s 41 rectifié et 141 rectifié sont identiques.
La parole est à M. Roland Muzeau, pour soutenir l'amendement n° 8 .
En ouvrant la possibilité à un saisonnier de conclure deux contrats d'apprentissage avec deux employeurs différents amenés à co-employer et cogérer un même jeune en formation, nous allons indiscutablement au-devant de difficultés. Nous l'avons précédemment souligné, je n'y reviens donc pas. L'article 3 détaille, certes, le contenu de la convention annexée devant être signée par les trois parties, et qui détermine notamment l'affectation de l'apprenti dans les deux entreprises, selon un calendrier déterminé et en désignant l'employeur tenu de verser la rémunération due au titre de chaque période. Il est néanmoins muet s'agissant de la durée du travail de l'apprenti. C'est pourtant un aspect important pour la bonne exécution du contrat, d'autant plus délicate que les employeurs sont multiples. Le patronat avait d'ailleurs fait des propositions jugées choquantes par les organisations syndicales de salariés, concernant l'aménagement des règles légales de la durée du travail des apprentis mineurs.
Par cet amendement, il ne s'agit pas de rouvrir le débat, mais de préciser, en insérant, à l'alinéa 4, après le mot « affectation », les mots : « et la durée du travail », que la convention prévoit la durée du travail de l'apprenti.
La parole est à M. Philippe Morenvillier, pour soutenir l'amendement n° 41 rectifié .
Je me réjouis que mon amendement, de nature technique, ait été repris par l'ensemble du groupe UMP dans l'amendement n° 141 rectifié .
La notion d'affectation du salarié dans le cadre du contrat d'apprentissage est floue. Cet amendement précise donc qu'un calendrier prédéfini, annexé au contrat d'apprentissage, sera imposable aux parties signataires. Ainsi, l'employeur, au moment de la signature du contrat d'apprentissage, connaîtra le nombre d'heures effectuées par son futur salarié. L'affectation sera donc clarifiée et qualifiée, ce qui est de bon aloi.
La parole est à Mme Pascale Gruny, pour soutenir l'amendement n° 141 rectifié .
Nous devons nous en tenir à la législation en matière de durée de temps de travail. Il est, par conséquent, nécessaire que chaque employeur connaisse le nombre d'heures effectuées dans chaque entreprise.
Favorable aux amendements nos 41 rectifié et 141 rectifié , qui pourraient d'ailleurs être cosignés puisqu'ils sont identiques, et défavorable à l'amendement n° 8 .
Non, mon cher collègue. Nous sommes d'accord sur le fond, mais votre amendement est mal formulé, car il vise non pas la durée du travail, mais le nombre d'heures effectuées en entreprise. Si toutefois vous voulez cosigner les amendements identiques, nous vous accueillerons avec plaisir !
Même avis.
Oui, monsieur le président.
(L'amendement n° 8 n'est pas adopté.)
(Les amendements identiques nos 41 rectifié et 141 rectifié sont adoptés.)
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour soutenir l'amendement n° 91 .
Il est défendu.
(L'amendement n° 91 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour soutenir l'amendement n° 92 .
Nous sommes dans l'amphigouri législatif. En effet, pour régler cette question, il faut multiplier les éléments dans le code du travail, et le problème soulevé par cet amendement est plus complexe encore. Vous savez que, dans le cadre de l'apprentissage, des primes sont versées aux employeurs. À partir du moment où il y aura deux employeurs, conviendra-t-il de verser deux primes ou de diviser la prime par deux ? De plus, si l'apprenti travaille une saison à la mer et une à la montagne, il ne dépend pas du même conseil régional. Or les primes diffèrent, car la fixation de leur montant a été transférée aux conseils régionaux. Des précisions s'imposent donc. Tel est le sens de cet amendement, au demeurant adopté par la commission.
Cet amendement a été accepté par la commission. Toutefois l'argumentation de M. Gille aurait tendance à me faire changer d'avis… (Sourires.)
Défavorable, et je comprends que le rapporteur ait quelques doutes. En effet, dans le cadre de l'attribution des aides régionales aux employeurs d'apprentis, il ne revient pas aux parties d'en préciser la répartition dans la convention tripartite. La loi dit clairement qu'il appartient aux régions de déterminer la nature, le montant et les conditions d'attribution de cette indemnité dans le cadre de leurs règlements respectifs. Par ailleurs, la réglementation fixe le montant minimal de cette indemnité à 100 euros et précise que son montant est fonction de la durée effective du contrat. Dès lors, il appartient aux régions de prévoir les conditions d'attribution des aides aux employeurs d'apprentis dans le cadre de ce type de contrat, tout en veillant au respect des dispositions précitées.
Ce débat est amusant ! J'ai, en effet, tendance à trouver que Mme la ministre a, d'un certain point de vue, raison…
Oui !
…concernant, notamment, le respect des compétences entre l'État et les régions. Toutefois, ne pas préciser les modalités de répartition risque d'être source de nombreux contentieux, chaque employeur pouvant déplorer de ne pas avoir reçu sa prime. Nous devons trouver une solution, sauf à hypothéquer le dispositif que vous essayez de mettre en place, ce qui va plutôt dans mon sens.
Je suis d'accord avec les arguments développés par Mme la ministre. J'ajouterai, de plus, qu'à mon sens ce sujet n'est pas d'ordre législatif, mais réglementaire.
Je retire l'amendement, mais permettez-moi de noter qu'un problème ardu demeure, qui rend difficile l'apprentissage saisonnier tel que vous le souhaitez.
(L'amendement n° 92 est retiré.)
Il n'a pas échappé au rapporteur que la rupture du contrat d'apprentissage peut se révéler plus délicate lorsqu'il y a deux employeurs. C'est pourquoi nous avons proposé de clarifier les conditions de cette rupture lorsqu'elle est demandée par les deux employeurs ou l'un d'entre eux, en leur faisant assumer ses conséquences financières.
Cet amendement de repli vise à substituer à la notion de rupture « aux torts » de l'employeur celle de rupture « à l'initiative » de l'employeur, plus conforme au droit commun en matière de rupture du contrat de travail.
Cet amendement fait problème. Au départ, la commission lui a donné un avis favorable.
Je me pose néanmoins des questions et je souhaite entendre le Gouvernement.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement visant à mettre les conséquences financières de la rupture d'un contrat d'apprentissage saisonnier à la charge de l'employeur qui est à l'origine de la rupture.
Cette rupture peut en effet résulter d'une faute grave de l'apprenti, de manquements répétés à ses obligations ou encore de son inaptitude à exercer ses obligations. Dans ce cas, il revient au conseil des prud'hommes de prononcer la rupture, d'identifier ses motifs et, le cas échéant, la responsabilité de l'employeur.
Par conséquent, il appartient à l'employeur ayant rompu le contrat à ses torts de prendre en charge les conséquences financières de cette rupture.
Nombre de contentieux ne manqueront pas d'apparaître avec ce dispositif, dont nous avons déjà expliqué qu'il serait difficile à mettre en oeuvre. Cet amendement nous semble justifié et a d'ailleurs été adopté en commission.
La rupture peut être la conséquence d'une faute et, s'il y a tort du salarié, il n'y a pas de raison que l'employeur prenne en charge les conséquences financières. Sinon, tout le monde pourra faire n'importe quoi puisqu'il n'y aura plus de sanction. Le droit du travail est assez clair. Lorsque l'employeur veut rompre le contrat de travail, il doit respecter certaines dispositions législatives et réglementaires. Dès lors qu'elles le sont, il n'est pas justifié que l'employeur prenne en charge le coût de la rupture si elle est due à une faute du salarié.
Il faudrait s'entendre. Si cette modification a été acceptée par la commission, ce n'est pas pour faire un savant dosage entre ce que l'on pouvait accorder, pour la forme, à l'opposition et ce que l'on accordait à la majorité : c'est simplement que la précision paraissait utile pour éviter des contentieux évidents de prime abord.
La rupture à l'initiative de l'employeur, dans le code du travail et dans la pratique des contentieux du travail, peut certes être la conséquence d'une faute grave, mais c'est bien ainsi que l'on définit la fin de ce type de contrats. Vous inventez une notion qui est source de contentieux à venir. Je ne comprends pas que vous refusiez une formule qui existe dans le code du travail pour un salarié.
Je rappelle qu'il s'agit du secteur de la restauration, où le taux de rupture est de 40 %. Nous sommes en train de créer le contrat d'apprentissage saisonnier – saisonnier au sens qu'il ne durera qu'une saison...
(L'amendement n° 9 n'est pas adopté.)
Nous avons voté l'article 1er relatif à la revalorisation du statut d'apprenti. Nous avons voté l'article 2 simplifiant les procédures de recrutement en alternance. Avec l'article 3, notre rapporteur innove et élargit les possibilités de recrutement en alternance en permettant qu'un apprenti soit embauché sur deux emplois de type saisonnier. C'est un système qui ne devrait pas effrayer, mais qui pose un certain nombre de problèmes tant aux maîtres d'apprentissage qu'aux apprentis.
L'amendement que je vous propose d'adopter lève un certain nombre d'incertitudes juridiques, et les sous-amendements permettront de l'améliorer.
Il s'agit de permettre à deux employeurs saisonniers d'embaucher le titulaire d'un contrat de professionnalisation âgé de moins de vingt-six ans. Les justifications d'un tel amendement sont les mêmes que pour l'embauche d'un apprenti par deux employeurs saisonniers, prévue à l'article 3. Cette disposition devrait faciliter l'emploi durable des jeunes de seize à vingt-cinq ans titulaires de contrats de professionnalisation, et mieux répondre aux besoins des entreprises. Nous faisons ainsi d'une pierre deux coups.
Je suis un peu surpris de la frilosité de l'opposition à l'égard d'une telle innovation, qui n'est pourtant pas d'une audace extraordinaire sur le plan juridique. Le temps partagé existe dans un certain nombre d'activités professionnelles, comme les services ou la prospection commerciale. Comme l'a souligné le rapporteur, cela peut intéresser la région des Vosges, mais aussi l'Auvergne, le Massif Central et même les Landes.
La parole est à M. Francis Vercamer, pour soutenir l'amendement n° 48 .
Je n'ai pas grand-chose à ajouter à l'exposé de M. Proriol, sinon que nous instaurons un certain parallélisme des formes entre le contrat d'apprentissage et le contrat de professionnalisation, qui sont tous deux des contrats en alternance. L'objectif est de réduire les distorsions entre ces différents contrats, notamment pour les plus jeunes, qui, comme l'expliquait M. le rapporteur, sont souvent dans la même classe.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les sous-amendements et donner l'avis de la commission sur les amendements.
Ce sont des amendements intéressants, et je suis favorable au parallélisme des formes.
Le sous-amendement n° 131 tend à préciser que le contrat de professionnalisation à deux employeurs peut concerner deux activités saisonnières.
Le sous-amendement n° 134 tend à harmoniser le texte avec les options retenues pour l'apprentissage saisonnier.
Les sous-amendements n°s 135 , 136 et 137 sont rédactionnels.
Les sous-amendements n°s 138 , 139 et 140 visent à harmoniser le texte avec les options retenues pour l'apprentissage saisonnier.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements et sous-amendements ?
Sur les amendements, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée,…
..en raison de la complexité du sujet.
Ces amendements ouvrent la possibilité de signer un contrat de professionnalisation saisonnier avec deux employeurs, à l'instar de ce que prévoit l'article 3 de la proposition de loi pour le contrat d'apprentissage. Dès lors que cette possibilité est ouverte pour l'apprentissage, il n'est pas illogique, en effet, de la prévoir dans les mêmes termes pour le contrat de professionnalisation.
Cependant, le montage financier et juridique serait plus complexe si les deux employeurs étaient affiliés à deux OPCA différents ou s'il y avait des règles de prise en charge financière différentes selon les branches considérées. Une telle complexité pourrait entraîner une insécurité juridique pour l'entreprise et le bénéficiaire du contrat, dans le cas, par exemple, où, du fait de l'accord de branche qui le lie, un OPCA refuserait de financer la formation du contrat ou offrirait un forfait de formation inférieur.
Quant aux sous-amendements présentés par le rapporteur, le Gouvernement y est favorable.
Cela ne vous surprendra pas : je suis en total désaccord avec ces amendements. Vous avez d'ailleurs vous-mêmes tellement peur de vos propres dispositifs que vous vous sentez obligés de les sous-amender. Vous sentez le terrain si instable, madame la ministre, que vous vous en remettez à la sagesse de l'Assemblée.
Je n'ai pas dit ça !
Vous savez pourtant être plus précise, vous l'avez été il y a quelques instants en refusant un amendement relatif à la rupture du contrat de travail, qui tendait à protéger les salariés.
Ce que vous vous apprêtez à adopter sans guère vous poser de questions, mes chers collègues, ce sont des dispositions permettant d'employer jusqu'à quatre ans en CDD des jeunes titulaires d'un contrat de professionnalisation et de les payer moins que les minima conventionnels. Pour reprendre ce qu'a dit M. Vercamer, vous voulez un parallélisme des formes, mais en tirant toujours vers le bas la situation sociale de ces jeunes, comme d'ailleurs d'autres couches de la société et du monde du travail. Je ne suis pas certain que vous en mesuriez les conséquences.
Je ne peux pas vous laisser dire cela, monsieur Muzeau. Je n'ai pas parlé d'instabilité : j'ai souligné la complexité du dispositif qui nous est proposé. Cela ne signifie pas qu'il soit instable ou qu'il ne faille pas le mettre en place. C'est pourquoi je m'en suis remise à la sagesse de l'Assemblée, tout en considérant que, sur de tels sujets, il est bon d'ouvrir le champ des possibles.
Monsieur Muzeau, vos propos sont quelque peu caricaturaux. Ce n'est pas « tirer vers le bas » la situation des jeunes que d'ouvrir aux emplois saisonniers les contrats de professionnalisation, c'est leur donner une possibilité supplémentaire de trouver du travail.
Il faudrait que notre collègue parte du principe que l'organisation de l'apprentissage est très difficile pour les employeurs dont l'activité est saisonnière. Ce que nous voulons, c'est sauvegarder la possibilité pour le jeune d'accomplir son apprentissage dans des activités de cette nature, tout en tenant compte des besoins de la profession.
Dans nos régions, nous avons des apprentis et des saisonniers qui travaillent tantôt à la mer et tantôt à la montagne, avec, le cas échéant, deux maîtres d'apprentissage et deux employeurs. Il est vrai, madame la ministre, que nous avions négligé la question des OPCA. Celles-ci, me semble-t-il, ont été regroupées : d'une centaine, leur nombre a été ramené à une vingtaine, ce qui me paraît bien suffisant.
Monsieur Muzeau, la précarité résulte de l'impossibilité d'accéder à l'emploi.
Exactement !
Il faut donc multiplier les possibilités d'accès à l'emploi. Le code du travail est suffisamment riche s'agissant du suivi de ces jeunes, ainsi que de leur rémunération. Nous devons simplement laisser les jeunes réaliser leurs voeux, en nous chargeant de gérer la complexité.
Je donne acte à Mme la ministre de ses interrogations, notamment sur les OPCA. Nous ne sommes pas favorables à un rapprochement trop poussé des deux voies de l'alternance. Il me semble qu'il existe deux outils, deux philosophies qui ont toutes deux leur intérêt, et que les rapprocher à l'excès n'est pas une bonne idée.
Nous n'étions pas d'accord sur le dispositif relatif à l'emploi saisonnier. Roland Muzeau a raison : c'est ouvrir une possibilité d'extension à quatre ans du contrat de professionnalisation. Je maintiens les propos que j'ai tenus ce matin, qui n'ont pas été compris. Être saisonnier, c'est un travail. Ce n'est pas une qualification, mais une contrainte propre à certaines professions.
L'alternance, elle, consiste à permettre aux jeunes de se former tout en étant salariés. Je crains, je le répète, que nous ne soyons en train de dévier gravement.
Je reprends les propos que je tenais ce matin. Ce qui nous motive, c'est l'intérêt des jeunes. Il faut faire en sorte qu'ils accèdent à la formation et à l'emploi.
Toute disposition nouvelle, comme celle qui nous est présentée, est évidemment bonne, puisqu'elle va dans l'intérêt des jeunes. Je ne reviens pas sur les propos de ce matin concernant l'emploi saisonnier, la réalité de la vie.
N'ayons pas peur d'être un peu audacieux, de mettre un peu de souplesse dans notre législation, car ce qui compte, c'est avant tout l'emploi.
Certains carcans administratifs nous rendent frileux et l'on veut protéger à tous prix le jeune. Nous pensons que ces dispositions ne mettent pas en péril le jeune, mais lui offrent au contraire une ouverture vers plus de formation et d'emploi.
Je vais répondre, puisque l'on me provoque… (Sourires.) Vous n'avez pas le monopole de la défense des jeunes, même si je ne conteste pas le fait que vous en préoccupez. Je veux que les choses soient claires sur ce point.
Je considère – et vous ne m'avez pas apporté la preuve du contraire – que les dispositifs que vous vous apprêtez à voter vont aggraver la précarité de la situation des jeunes sous contrat de professionnalisation, puisque leur rémunération pourra être maintenue pendant quatre ans au-dessous des minima conventionnels. C'est la réalité.
Vous évoquez l'instabilité dans l'emploi, mais vous devriez vous interroger sur les raisons de ce phénomène, qui touche aussi bien les emplois saisonniers que les autres. Ce sont des métiers parfois difficiles, non seulement physiquement, mais aussi quant aux perspectives offertes, et le taux de rupture atteint 40 % dans l'hôtellerie et la restauration. Vous avez voté un cadeau fiscal de 3,5 milliards d'euros à cette profession, mais ni les conditions de travail ni les statuts n'ont pour autant été améliorés. Vous n'avez donc nullement répondu aux causes principales de ce taux de 40 .
Il ne s'agit là ni d'une caricature, ni d'une stigmatisation de ces professions. Je vous demande d'accorder plus d'attention à l'analyse des raisons qui font que l'emploi n'y est pas plus durable. Ce n'est pas, monsieur Perrut, une simple question de « souplesse », de cette souplesse dont la majorité se fait la championne depuis quelque temps, en matière de droit du travail. Si vous voulez rejoindre les systèmes anglo-saxons, où la souplesse est telle qu'il n'y a ni contrat, ni assurances sociales, il est à craindre qu'il n'y ait pas de limite à l'assouplissement ! La seule chose qui nous en préserve encore, c'est un code du travail qui soit, non une contrainte, mais une garantie, tant pour les employeurs que pour les salariés.
Monsieur Muzeau, il me semble extraordinaire que, lorsque l'on parle de l'apprentissage, on fasse uniquement référence aux jeunes. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Tout le monde admet aujourd'hui que l'on peut changer plusieurs fois de métier durant sa vie professionnelle. L'apprentissage ne doit donc pas être lié à l'âge.
Nous cherchons aujourd'hui à ouvrir le maximum de pistes pour que les gens puissent accéder au travail, car c'est tout de même le travail qui permet de créer des emplois. Je préfère l'instabilité dans le travail, à l'instabilité dans le chômage. À force de trop vouloir protéger l'emploi, on a tué le travail. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
(Les sous-amendements nos 131 , 132 , 133 , 134 , 135 , 136 , 137 , 138 , 139 et 140 sont successivement adoptés.)
(L'amendement n° 47 , sous-amendé, est adopté.)
En conséquence, l'amendement n° 48 n'a plus d'objet.
(L'article 3, amendé, est adopté.)
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour soutenir l'amendement n° 93 .
Vous poussez votre folle logique jusqu'à étendre le contrat d'apprentissage à l'intérim.
L'intervention du rapporteur était effarante : selon lui, la dégradation des conditions de travail n'est pas grave, dès lors que cela permet de donner du travail !
Je voudrais rappeler que le contrat d'apprentissage s'adresse aux moins de vingt-six ans. Je suis inquiet, car vous vous attaquez là à la dégradation du contenu de formation des dispositifs d'alternance, et c'est grave.
Le recours à l'intérim vise normalement à faire face à un surcroît de travail, à remplacer l'absence momentanée d'un salarié ou d'une compétence, ou encore à développer une nouvelle technologie ou compétence qui n'est pas encore présente dans l'entreprise.
A priori, l'entreprise qui recourt à l'intérim a besoin que le salarié soit pleinement disponible. Celui-ci ne peut donc, durant son contrat, partir en formation. Il faut que les périodes d'alternance tombent pendant les « trous » d'activité et que l'entreprise d'intérim envoie à ce moment-là le salarié en formation. Cela nécessite de sa part une organisation très au point, et de la part des CFA une capacité d'adaptation qu'ils n'ont pas, car ils ont des périodes bien définies pour l'accueil des jeunes. D'un point de vue pratique, c'est donc assez difficile.
Je voudrais en outre appeler votre attention sur deux obstacles. Le premier est que les contrats d'apprentissage sont généralement de deux ans, éventuellement de trois, tandis que les missions d'intérim sont limitées, si je ne m'abuse, à dix-huit mois.
Le deuxième obstacle a trait au maître d'apprentissage. Qui exercera cette fonction ? Si la mission consiste à remplacer un salarié absent, celui-ci ne pourra, par définition, être maître d'apprentissage. Quant à l'entreprise d'intérim elle-même, elle ne dispose pas en son sein de la qualification requise, puisqu'elle s'occupe uniquement de placer ses salariés en intérim.
Elle a repoussé l'amendement.
L'article 3 bis vise à ouvrir une possibilité d'apprentissage dans le cadre du travail temporaire. Plus de 30 % de la population intérimaire est âgée de moins de vingt-cinq ans et le besoin de qualification y est particulièrement fort.
Les entreprises de travail temporaire sont déjà habilitées à conclure des contrats de professionnalisation ; plusieurs milliers de salariés sont concernés chaque année, et cela fonctionne bien. Ce secteur a donc l'expérience de la construction d'une formation longue et diplômante pour ses salariés. Étendre cette possibilité à l'apprentissage lui permettrait de développer son rôle en matière de formation. Cette mesure a été demandée par la majorité –quatre fédérations de salariés sur cinq – des partenaires sociaux de la branche, dans une lettre rédigée de façon paritaire et adressée en mars dernier au Gouvernement. Une telle possibilité est également mentionnée à l'article 5 de l'accord signé le 7 juin, c'est-à-dire la semaine dernière, par les organisations nationales interprofessionnelles.
Au cours des auditions, j'ai été saisi à plusieurs reprises de cette demande, émanant de gens qui connaissent leur sujet. Il est proposé, afin de garantir la qualité de l'accompagnement, que les apprentis concernés bénéficient obligatoirement de maîtres d'apprentissage, tant dans l'entreprise de travail temporaire que dans les entreprises utilisatrices, et que chaque mission dure au moins six mois. Il ne s'agit pas d'être un intérimaire qui remplace un salarié malade, mais d'être un apprenti dans la branche de l'intérim, qui apprend un métier.
Dans l'intérim, il existe de nombreux métiers.
Je crains vraiment que vous ne soyez fâchés avec le dialogue social, car cette disposition figure dans l'accord national interprofessionnel. L'ensemble des partenaires sociaux de la branche du travail temporaire s'est engagée sur ce sujet, qui répond à une attente des jeunes souhaitant se diriger vers l'apprentissage. Il s'agit, une fois de plus, d'ouvrir pour eux le champ des possibles, de façon pragmatique.
Je suis vraiment très étonnée de votre position sur le dialogue social, alors même qu'un de vos candidats a prévu de l'inscrire dans la Constitution !
Ce n'est tout de même pas rien d'écrire dans le code du travail qu'on pourra recourir à l'apprentissage dans le cadre d'un contrat d'intérim. Au passage, et pour compléter ce qu'a relevé Jean-Patrick Gille, je note, même si c'est discret, que vous créez un intérim de trente-six mois alors que le total de la durée des missions ne peut normalement dépasser dix-huit mois – vingt-quatre en cas de circonstances exceptionnelles. C'est une idée extraordinaire, et je me demande pourquoi vous n'y aviez pas pensé en neuf ans, si elle vous paraît aussi évidente – mais, bien sûr, elle ne l'est pas davantage que le reste de ce que vous proposez.
Pourquoi cette mesure vient-elle maintenant ? Pourquoi répondez-vous à la demande de la branche de l'intérim ? Il y a une explication possible : ce serait une compensation. Je rappelle que cette mesure n'était pas prévue à l'origine. Il y a une inquiétude dans la branche de l'intérim à cause de ce que vous allez faire à l'égard des groupements d'employeurs. La concession que vous faites ne s'inscrit absolument pas dans une démarche constructive, mais constitue une réponse aux inquiétudes de la branche de l'intérim devant votre volonté d'ouvrir les vannes aux groupements d'employeurs, qui pourraient alors devenir un intérim low cost.
Par ailleurs, vous prenez évidemment un risque majeur en plaçant le contrat d'intérim, qui devrait rester enfermé dans sa spécificité, au milieu de procédures de formation. Mais peut-être est-ce votre vision des choses que de créer un apprentissage de l'intérim.
Dernière observation : comment M. Taugourdeau peut-il dire ce qu'il a dit ? Affirmer que tout le monde peut être apprenti à tout âge, personne ne l'avait encore avancé jusqu'à présent ! Nous parlons de formation en alternance, pas de formation professionnelle tout au long de la vie. Il s'agit donc d'un dispositif qui, par définition, s'adresse aux jeunes : on ne va pas placer sous le statut de l'apprentissage des gens de quarante-cinq ou de cinquante ans après un licenciement économique !
Tout cela n'est ni raisonnable ni sérieux. Il faudrait tout de même poser des limites à votre approche de la déréglementation. La fin ne justifie pas les moyens.
Puisque M. Vidalies m'interpelle, je vais lui répondre. J'ai dit qu'on allait changer plusieurs fois de métier dans la vie : il va donc bien falloir les apprendre, par la formation professionnelle ou par l'alternance.
Je veux maintenant revenir sur l'apprentissage et les sociétés d'intérim. Monsieur Gille, monsieur Vidalies, vous ne voulez pas comprendre que les sociétés d'intérim apportent un service à l'entreprise parce qu'elles ont, elles aussi, un marché à défendre. Mettez-vous à la place du jeune : il a beaucoup de mal à trouver une place alors que les agences d'intérim connaissent très bien les entreprises, qu'elles apportent un service à l'employeur en lui proposant cet apprenti et, en plus, en le gérant. Et l'apprenti va apprendre son métier avec le maître d'apprentissage, c'est-à-dire le chef d'entreprise en question. Il faut bien faire le distinguo entre maître d'apprentissage et employeur, et nous y reviendrons à l'article 9 bis, à propos des groupements d'employeurs. Les agences d'intérim souhaitent cette mesure, elles nous disent qu'elles placeraient beaucoup plus d'apprentis si elles pouvaient le faire.
L'intérim, c'est du business, pas un service public, monsieur Taugourdeau !
Mes chers collègues, mettez-vous à la place du jeune qui ne trouve pas d'entreprise pour faire son apprentissage. Vous ne pouvez pas nier, en tant que députés, que les jeunes nous écrivent sans arrêt et que leurs parents viennent nous demander si nous pouvons leur en trouver une. Actuellement, c'est de la cooptation : si l'on n'a pas des relations ou des parents qui en ont dans le milieu de l'entreprise, on ne trouve pas de place d'apprentissage.
Actuellement, l'article L. 6222-16 précise que : « Si le contrat d'apprentissage est suivi de la signature d'un contrat de travail à durée indéterminée dans la même entreprise, aucune période d'essai ne peut être imposée, sauf dispositions conventionnelles contraires. » Or la même disposition n'existe pas pour les contrats à durée déterminée ni pour les contrats de travail temporaire. Je pense que c'est une discrimination et qu'un contrat d'apprentissage peut être considéré comme une période d'essai, de même que le CDD et le contrat de travail temporaire.
(L'amendement n° 58 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
Cet amendement vise à accélérer la procédure de rupture du contrat d'apprentissage. Actuellement, on passe d'abord par le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes avant que l'affaire soit éventuellement portée devant le bureau de jugement, et la procédure peut mettre jusqu'à huit ou neuf mois. Or quand il y a un litige entre l'apprenti et l'employeur, c'est difficile pour les deux de continuer à travailler ensemble. Il s'agit donc d'avoir une réponse rapide du conseil de prud'hommes en portant directement la demande de rupture devant le bureau de jugement. La situation respective de l'apprenti et de l'employeur sera ainsi plus claire dans leur esprit.
Cet amendement n'a pas été examiné par la commission. Sur le fond, je pense que la rapidité de décision est importante, mais je m'interroge sur l'incidence qu'aurait la mesure sur le fonctionnement même des conseils de prud'hommes. Je m'en remets à l'avis du Gouvernement.
Madame Gruny, vous proposez d'instaurer une procédure accélérée de rupture du contrat d'apprentissage. Elle consiste en une saisine directe du bureau de jugement du conseil des prud'hommes, qui statuerait au fond dans un délai d'un mois. Cette procédure serait identique à celle édictée pour la requalification du CDD en CDI, mais cette dernière a été prise dans un souci de protection du salarié, qui peut seul s'en prévaloir. Il est difficile d'en transposer le principe à la rupture du contrat d'apprentissage au seul motif que celle-ci peut s'avérer longue et difficile pour l'employeur. Accepter une telle dérogation au droit commun pourrait ouvrir la porte à des demandes reconventionnelles tout aussi justifiées ; il s'ensuivrait alors un dysfonctionnement de la justice prud'homale. Au regard de ces explications, je vous demande de retirer votre amendement. À défaut, l'avis du Gouvernement serait défavorable.
Madame Gruny, êtes-vous convaincue par les explications de Mme la ministre ?
Moyennement. (Sourires.) Quand il y a un conflit, accélérer les choses en matière de rupture serait bien préférable. Mais j'entends le Gouvernement et je retire mon amendement.
(L'amendement n° 62 est retiré.)
La rédaction actuelle du code du travail permet d'ores et déjà au titulaire d'un contrat de professionnalisation de demander le renouvellement de celui-ci en cas d'accident ou d'échec aux épreuves d'évaluation de la formation suivie pour des raisons limitativement énumérées. L'article 4, lui, ouvre une seconde possibilité de renouvellement : elle concerne les personnes qualifiées dès lors qu'elles souhaitent préparer une qualification supérieure ou complémentaire. S'il est indéniable que de plus en plus de jeunes enchaînent les contrats d'alternance ou de professionnalisation, nous réfutons le fait que cette évolution ait pour origine l'allongement des études et les attentes des employeurs quant à l'élévation des qualifications, comme le précise le rapport.
Nous pensons en effet que l'augmentation des cas d'enchaînement de contrats de formation en alternance ou de contrats de professionnalisation tient principalement à deux tendances : la première est l'effet conjoncturel de la crise, qui a réduit les offres d'emploi, notamment pour les jeunes qualifiés ; la seconde est une tendance structurelle de l'économie française, en particulier des employeurs, encouragée par le Gouvernement depuis une dizaine d'années, et visant à abaisser sans cesse le coût du travail.
Dès lors, la mesure proposée ne respecte pas l'esprit de l'article L. 6325-7 du code du travail, qui visait à protéger les titulaires de tels contrats. Elle vise à assouplir encore davantage les conditions dans lesquelles les entreprises pourront bénéficier de salariés qualifiés à bas coûts. Les faits nous donnent malheureusement raison : lors de sa création par l'accord national interprofessionnel de 2003, le contrat de professionnalisation était d'une durée de douze mois ; or dans de nombreuses branches, le patronat a porté sa durée à vingt-quatre mois, excédant la limite de dix-huit mois imposée par le droit commun pour les CDD.
Si l'article 4 était adopté, les employeurs pourraient s'offrir, pour une durée allant jusqu'à quatre ans, une main-d'oeuvre en contrat de professionnalisation à durée déterminée, rémunérée au-dessous du SMIC. Notre rapporteur l'a lui-même admis à la page 102 de son rapport : « Un chef d'entreprise n'embauche pas un jeune par philanthropie : si le renouvellement du contrat de professionnalisation lui semble nécessaire, c'est dans l'intérêt de son entreprise. » Avec cet article, on change de paradigme en faisant désormais coexister la protection du salarié et l'intérêt de l'entreprise. On doute dans ces conditions et dans la conjoncture économique actuelle que la protection du salarié contre une précarisation grandissante prévaudra. C'est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour défendre l'amendement n° 94 .
Notre collègue Muzeau a dit l'essentiel. Il s'agit d'introduire un cas supplémentaire de renouvellement du contrat de professionnalisation : lorsque le bénéficiaire du contrat prépare une qualification supérieure ou complémentaire. Mais nous considérons qu'il y a un risque de dérive grave. Il faut en effet éviter que le contrat de professionnalisation, d'une durée moyenne de dix-huit mois, devienne un contrat de trente-six mois, avec peu ou prou la même qualification qui aura été préparée. On nous dira qu'il n'a pas pu passer l'examen ou on jouera sur les mentions complémentaires. Or je rappelle qu'une qualification complémentaire peut correspondre à une simple mention complémentaire pour un même niveau de formation. Le renouvellement d'un tel contrat ne peut être qu'exceptionnel et ne doit pas devenir la règle, faute d'insertion dans l'emploi.
Nous proposerons donc que le contrat de professionnalisation puisse être renouvelé exceptionnellement pour préparer une qualification uniquement supérieure et non complémentaire, et que le second contrat soit alors un CDI. Cela me paraît, comme diraient le Gouvernement et les rapporteurs, une proposition pragmatique.
La commission a repoussé ces amendements. Pourquoi refuser à des jeunes une possibilité d'ascension sociale ?
Je maintiens ce que je viens de dire, monsieur Muzeau. Notre mesure est du « gagnant-gagnant ».
Si l'employeur a un jeune qui a déjà obtenu une qualification et qu'il lui propose de continuer pour arriver à une qualification supérieure, c'est bien l'intérêt du jeune et l'intérêt de l'entreprise. C'est ainsi que nos entreprises vont se développer. Il n'y a pas de raison d'empêcher cette possibilité. Nous ne cherchons pas du tout à détourner le droit du travail, mais j'ai l'impression que, pour vous, les chefs d'entreprise cherchent à le détourner systématiquement.
Je sais bien que de telles craintes donnent du travail aux avocats, mais ce n'est tout de même pas cela le problème.
Si les entreprises n'ont pas toujours les moyens d'embaucher directement,…
…elles peuvent offrir à un jeune la possibilité d'avoir une formation supérieure ou complémentaire.
C'est un ascenseur social, une possibilité offerte aux jeunes dont, une fois de plus, vous voulez les priver, en les maintenant ainsi dans des situations de précarité.
Je suis évidemment défavorable à ces amendements et je m'inscris dans la droite ligne…
…des arguments défendus par le rapporteur.
Mais franchement, monsieur Gille, quand je vous entends répondre : « Pas tous ! » à M. le rapporteur qui vous rappelle que tous les chefs d'entreprise ne sont pas des voyous, j'ai envie de vous répondre : ne faites pas de procès d'intention aux entrepreneurs !
Vous demandez au rapporteur s'il est pour les jeunes ou pour les entreprises ! Eh bien, nous sommes à la fois pour les jeunes et pour les entreprises ! Comment pourrions-nous améliorer l'emploi des jeunes sans travailler avec les entreprises ? Il s'agit de faire entrer les jeunes dans l'entreprise, pas d'organiser une compétition entre les deux parties.
Je ne comprends vraiment pas votre position, basée sur une espèce de lutte des classes caricaturale : être pour les jeunes ou pour l'entreprise.
Vous êtes contre les jeunes si vous n'êtes pas pour l'entreprise, monsieur Gille, voilà la réalité.
Dans un débat parlementaire, au fur et à mesure que les heures passent, la parole se libère. Pour défendre le renouvellement des contrats de professionnalisation, on évoque d'abord les grands principes : l'intérêt du jeune, la carrière, etc. Puis tout à coup, M. le rapporteur nous déclare que les entreprises n'ont pas toujours les moyens de payer les jeunes.
Et c'est bien le problème, car ces propos corroborent totalement nos arguments.
S'il s'agit d'une démarche constructive en direction des jeunes, il n'y a effectivement pas lieu d'opposer les deux parties. Mais, par manque de vigilance sans doute, vos derniers propos font apparaître une deuxième possibilité : vous cherchez à organiser un système permettant aux entreprises de payer les jeunes moins cher. Et c'est notre rôle que de le dénoncer.
Si les relations entre les jeunes et les entreprises sont parfois difficiles, la principale cause en est le développement de la précarité. Quand, dès leur premier contact avec le monde du travail, les jeunes ont l'impression qu'un cadre d'une flexibilité absolue, sans droits et avec des protections de plus en plus faibles, a été organisé pour eux, il se crée une sorte de rupture.
Vous en connaissez d'ailleurs vous-mêmes les dangers. Neuf ans après son arrivée au pouvoir, cette majorité invente tout à coup ce type de systèmes à un an de l'élection présidentielle. Si vous ne les avez pas mis en place jusqu'à présent, si même M. Woerth, ici présent, n'était pas allé sur ce terrain lorsqu'il était ministre du travail, c'est qu'il existait tout de même des réticences à faire des choses qui, de ce point de vue, sont dangereuses.
Nous en sommes là, et le rapporteur vient de confirmer nos craintes : il s'agit d'organiser des systèmes parce que les entreprises n'ont pas les moyens de payer les salariés.
Franchement, si les jeunes entendent que telle est votre conception de leurs relations avec les entreprises, c'est effectivement assez désespérant pour les uns et pour les autres.
Je voudrais répondre calmement à Mme la ministre, qui saisit quelques paroles au vol dans le feu de l'action,…
Des paroles importantes et graves !
…pour faire un petit exercice, mais j'aurais préféré qu'elle me réponde.
Force est de constater que les diverses propositions étudiées depuis le début de l'après-midi correspondent nettement plus aux demandes du patronat qu'aux intérêts des jeunes. À chaque début de discussion, la majorité se drape dans une posture, comme si elle détenait le monopole de l'intérêt des jeunes. Cela paraît un peu exagéré car nous sommes tous là pour essayer de faire avancer les choses.
Or, comme vient de le rappeler Alain Vidalies, le rapporteur a commencé à dire des choses un peu inquiétantes. Nous pensons, nous, que ces dispositifs ne doivent pas conduire à une forme de sous-rémunération sous prétexte qu'ils concernent des jeunes.
Il est ici question d'alternance, c'est-à-dire de contrats de travail qui sont aussi des contrats de formation, et c'est pourquoi tout le monde accepte l'idée que leur rémunération soit moindre, qu'elle ne représente qu'une fraction du SMIC. Voilà la part que les jeunes acceptent de perdre. Du coup, on ne peut pas les multiplier à l'envi soit en les répétant, soit en allongeant indéfiniment leur durée. C'est toute la question.
Pour répondre à vos accusations, je ne vais pas vous raconter ma vie, mais je crois tout de même, au quotidien, à travers le réseau des missions locales et l'école de la deuxième chance, fréquenter des entreprises et faire avec elles un travail constructif.
Votre idée de départ n'est pas mauvaise en soi, à condition qu'il y ait un engagement à faire déboucher le contrat sur une qualification supérieure et sur une formation réelle, mais l'idée de qualification complémentaire me paraît dangereuse. D'où ma proposition qui est finalement équilibrée : le renouvellement est possible s'il donne accès à une qualification supérieure.
Puisque le jeune fait un effort en acceptant d'être rémunéré au-dessous du SMIC pendant dix-huit mois supplémentaires, il faut qu'on lui apporte au moins la garantie d'un CDI. Si vous êtes aussi pragmatiques que vous le dites, vous devriez accepter cette proposition.
Nos collègues de gauche parlent de développement de la précarité ; nous, au contraire, nous promouvons l'idée du développement de la qualification, visant à une meilleure insertion des jeunes dans l'entreprise.
Cette démarche est somme toute pragmatique. Si le jeune qui prépare sa formation dans une entreprise échoue, on lui permettra de renouveler son contrat. S'il n'échoue pas,…
…il faut lui permettre d'accéder à cette qualification dite supplémentaire qui apparaîtra souvent nécessaire après une certaine durée de présence au sein de l'entreprise, au cours de laquelle il aura exercé certaines fonctions et aura eu une approche du métier. L'employeur lui-même constatera qu'il faut aller plus loin.
Nous voulons donner cette chance aux jeunes. Contrairement à ce que vous pensez, nous ne cherchons pas à faire de l'employeur un profiteur. Les chefs d'entreprise, particulièrement ceux qui dirigent une PME, sont très impliqués dans le domaine de l'apprentissage et des contrats de professionnalisation. Ils ont envie de former celles et ceux qu'ils accueillent.
Derrière tout cela se profile la notion de « gagnant-gagnant », car le chef d'entreprise veut former des personnes avec l'idée de les garder. Quand un chef d'entreprise a formé quelqu'un qui sait travailler et qui correspond à ses attentes, il l'engage en CDI. Celui-ci reste alors longtemps dans l'entreprise.
Nous vous proposons de parier sur la confiance du chef d'entreprise envers son jeune, et réciproquement.
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour soutenir l'amendement n° 95 .
Il est défendu.
(L'amendement n° 95 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour défendre l'amendement n° 96 .
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour soutenir l'amendement n° 97 .
Par cet amendement, je propose que le renouvellement soit possible pour une qualification supérieure, mais pas pour une mention complémentaire.
Défavorable. Certains métiers requièrent un diplôme de base que les postulants n'ont pas forcément. C'est ainsi qu'un titulaire de BTS aura besoin du CAP correspondant au métier qu'il vise – la bijouterie par exemple. Cette formation, qui n'est pas supérieure mais complémentaire, va lui donner accès à un métier. Pourquoi voulez-vous encore rigidifier le système ?
Laissez la possibilité aux gens de choisir leur parcours, de passer d'un système à l'autre pour finalement réussir leurs études.
(L'amendement n° 97 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour soutenir l'amendement n° 98 .
Amis pragmatiques, je vous offre une dernière chance. (Sourires.) De dix-huit mois en dix-huit mois, nous arrivons à trente-six mois. Il paraîtrait légitime que le deuxième contrat prenne la forme d'un CDI. Vu toute la flexibilité que l'on demande aux jeunes, au moins qu'il y ait un peu de sécurisation. C'est un peu l'épreuve de vérité : soyez pragmatiques.
Dans les courriers de jeunes que je reçois, il s'en est trouvé un de remerciements au rapporteur. C'est gentil et sympathique. Ce jeune m'écrit : je vais pouvoir rester dans l'entreprise où j'ai déjà eu un premier contrat de professionnalisation, pour poursuivre ma qualification.
Sinon, poursuit-il, j'aurais été obligé d'interrompre mon cycle d'études.
Pourquoi demander obligatoirement un CDI ? Si j'ai parlé de CDI tout à l'heure, c'est bien dans cet esprit. D'ailleurs, le CDI est-il plus protecteur que le CDD ? (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
(L'amendement n° 98 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Il s'agit d'un amendement technique visant à ajouter la maladie professionnelle, qui a été oubliée, dans la liste des raisons du renouvellement d'un contrat de professionnalisation à durée déterminée. Si l'on vise l'accident du travail, on doit aussi viser la maladie professionnelle.
Favorable à cet excellent amendement.
(L'amendement n° 61 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 4, amendé, est adopté.)
Notre amendement vise à rétablir le contrôle de validité d'enregistrement des contrats d'apprentissage par les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, les fameuses DIRECCTE. Il s'agit d'un service déconcentré de l'État, interlocuteur des PME, compétent notamment en matière de respect de la législation du travail.
L'actuel contrôle systématique a priori de la validité de ces contrats permet à l'administration de s'opposer à leur enregistrement ou de demander leur régularisation dans les quinze jours suivant la réception du contrat enregistré et transmis par les chambres consulaires.
C'est aussi le moyen d'orienter le contrôle a posteriori de l'inspection du travail vers les entreprises, garantie de la préservation de la santé ou de l'intégrité physique ou morale des apprentis.
Au moment même où vous envisagez de déroger aux règles actuelles en matière d'apprentissage, notamment en ouvrant la possibilité de conclure des contrats avec plusieurs employeurs pour des activités saisonnières, vous proposez de supprimer le droit de regard de l'administration sur la validité de ces contrats. Vous réservez ce droit aux seules chambres consulaires, ainsi chargées de contrôler leurs mandants, avec le risque de conflit d'intérêts que cela comporte et que vous n'ignorez pas.
L'argument du rapporteur selon lequel cette intervention des services régionaux de l'État alourdirait et rallongerait inutilement la procédure de signature des contrats d'apprentissage est peu convaincant. Votre souci n'est pas simplement celui de la simplification des formalités d'embauche : cette mesure est également justifiée – assumez-le – par cette fameuse RGPP qui fait tant de dégâts dans la fonction publique.
Nos amendements se justifient d'autant plus que le texte que vous vous apprêtez à voter entrera bien en application.
Vous êtes en train d'ouvrir un champ d'une totale complexité : contrats saisonniers conclus avec plusieurs employeurs, contrats de professionnalisation renouvelés avec formation complémentaire, contrats d'apprentissage signés avec des entreprises d'intérim… Conservez au moins le contrôle de validité des contrats par l'administration, c'est-à-dire par les pouvoirs publics ! Déléguer cette tâche à ceux qui sont, d'une certaine façon, à la fois juge et partie peut créer des difficultés.
Je ne veux faire de procès d'intention à personne, mais vous savez bien que, plus le droit est complexe, et plus les possibilités de le contourner sont importantes. Nous voyons bien toutes les interprétations qui pourront être faites du texte que vous nous proposez, tous les contournements auxquels pourront se livrer des esprits qui ne seraient pas bien intentionnés. Gardons au moins, pour ceux qui vont se trouver face à cette usine à gaz, et peut-être face à des imbroglios juridiques, le secours d'un contrôle par l'administration.
Défavorable. Franchement, je ne comprends pas la position de MM. Muzeau et Vidalies.
Vous nous reprochez de complexifier les choses et de faire des propositions difficiles à mettre en oeuvre, et vous vous opposez à un article de bon sens et de simplification.
Aujourd'hui, lorsqu'un jeune fait une demande de contrat d'apprentissage, c'est la chambre consulaire qui reçoit le dossier et qui l'enregistre. Ce dernier va ensuite devant la DIRECCTE, qui met quinze jours pour donner un coup de tampon avant de le renvoyer à la chambre.
Quinze jours, c'est peu de chose ! Et elle ne fait pas que mettre un coup de tampon !
Comme leur responsabilité est engagée, les chambres consulaires sollicitent toujours la DIRECCTE, qu'il y ait un problème ou non.
Si tant est qu'il y ait un problème elle consultera demain la DIRECCTE, comme elle le fait aujourd'hui.
Cet article répond à votre souhait de simplification puisqu'il supprime le contrôle a priori de la DIRECCTE. Cette dernière continuera d'exercer sa mission de contrôle et restera à même d'annuler un contrat d'apprentissage si nécessaire.
On pourrait simplifier dans l'autre sens, c'est-à-dire envoyer directement le dossier à la DIRECCTE !
Compte tenu de la suppression du contrôle de la validité de l'enregistrement des contrats d'apprentissage par les DIRECCTE, il est proposé, par l'amendement n° 69 , de rétablir, pour les organismes d'enregistrement, la possibilité de les consulter dans les cas litigieux – cela paraît évident, mais il me semble préférable de l'écrire – et, par l'amendement n° 70 , de prévoir la création d'une base de données nationale répertoriant l'ensemble des dispositions conventionnelles traitant de la question de l'apprentissage afin de permettre aux organismes d'enregistrement d'y avoir accès facilement.
Ces dispositions me paraissent de nature à sécuriser la procédure et à répondre aux inquiétudes des collègues qui se sont exprimés avant moi.
Plutôt défavorable, car elle a estimé qu'ils étaient satisfaits, le texte prévoyant, comme je viens de l'expliquer, la possibilité pour les chambres de commerce ou de métiers de saisir pour avis la DIRECCTE. Je vous demande donc, monsieur Marcon, de bien vouloir retirer vos amendements, sans quoi j'émettrais un avis défavorable.
(Les amendements nos 69 et 70 sont retirés.)
(L'article 5 est adopté.)
Cet article tend à généraliser une expérimentation en cours dans les départements de Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, dont nous aurions aimé pouvoir apprécier en détail les résultats.
Vous semblez, par exemple, affirmer comme une évidence le lien entre cette expérimentation et le faible taux de rupture des contrats d'apprentissage : 8 % contre 24 % en moyenne nationale. À quoi cela tient-il ?
Les modalités d'inspection et de contrôle des formations en cours dans les autres départements jouent-elles vraiment un rôle dans les ruptures de contrat, comme cet article semble le sous-entendre ? Vous connaissez bien la réponse. Ce n'est pas exact.
Cette inspection est actuellement dévolue aux services académiques de l'inspection de l'apprentissage, placés sous l'autorité du recteur chancelier des universités. Confier de telles missions aux chambres consulaires pose un problème majeur d'indépendance et d'impartialité de l'inspection, dans la mesure où les CFA relèvent de leur compétence.
En l'absence de réponses concrètes, nous demandons la suppression de cet article qui, tendant à confier l'entière responsabilité d'apprentissage aux chambres consulaires, comporte davantage de risques qu'il ne semble apporter de solutions.
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour défendre l'amendement n° 100 .
Nous craignons que l'expérimentation actuelle, qui consiste à confier l'inspection de l'apprentissage aux chambres consulaires, ne débouche sur une généralisation, selon la tendance actuelle qui est de généraliser avant même la fin d'une expérimentation et sans s'entourer des garanties nécessaires.
La stratégie consistant à confier aux chambres consulaires, outre une grande partie de la formation, le contrôle a priori des contrats d'apprentissage et l'inspection de celui-ci, m'inquiète. Cela revient finalement à leur confier l'ensemble de l'apprentissage et à leur demander de s'inspecter elles-mêmes, puisqu'elles sont dispensatrices de la formation. Cela me paraît source de difficultés, peut-être même constitutionnelles, comme me le souffle Alain Vidalies. C'est, en tout cas, les placer dans une situation où elles seront juge et partie, alors que, je le rappelle, tous les CFA ne dépendent pas d'elles.
Il me paraîtrait préférable de renforcer les services d'inspection de l'apprentissage, qui connaissent des difficultés, et de donner les moyens financiers nécessaires aux CFA pour organiser les examens, puisqu'il leur est maintenant demandé de le faire sous le contrôle de ces inspections.
Cet article me paraît, en tout cas, nuisible à l'image de l'apprentissage. S'il existe une interrogation à son égard et même une sorte de dévalorisation de celui-ci, c'est parce que les gens ont l'impression qu'il n'est pas au même niveau que le système scolaire traditionnel. Il est pourtant soumis à l'inspection des services de l'État. Si vous supprimez cette garantie, cela constituera un retour en arrière, peut-être pas quant à la qualité, même si je le crains, mais, en tout cas, quant à l'image même de l'apprentissage.
Elle a repoussé ces amendements.
L'expérimentation proposée à cet article s'appuie sur celle menée actuellement en Alsace et en Moselle, où l'on constate un taux de rupture divisé par trois : 8 %, au lieu de 24 % en moyenne nationale. Celle-ci fait donc l'objet d'un suivi.
Cela n'empêche pas du tout que soient menées en parallèle l'action de la DIRECCTE et celle de l'inspection du travail. L'inspection de l'apprentissage a pour but d'accompagner et de guider les entreprises, de proposer des apprentis et de surveiller la bonne marche et le bon accomplissement du dispositif.
Je ne vois pas pourquoi l'on ne pourrait pas mener une expérimentation plus large, dans les départements qui le souhaitent.
Nous avons, le rapporteur et moi, une petite divergence de vues sur le sujet.
Depuis la loi de 1971, l'inspection de l'apprentissage est confiée à un corps unique et indépendant, celui des inspecteurs à compétences pédagogiques des ministères chargés de l'éducation nationale, de l'agriculture et de la jeunesse et des sports.
En effet, la formation dispensée à la fois par l'entreprise et par le CFA doit être pensée en continuité et de manière globale. C'est cette complémentarité qui fonde la pédagogie de l'alternance. Le contrôle de la formation doit donc être cohérent et s'assurer de la complémentarité entre le CFA et l'entreprise.
Par ailleurs, cette mission régalienne ne peut être confiée qu'à des fonctionnaires de l'État.
Le Gouvernement est donc favorable aux amendements de suppression de l'article. (Murmures sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
En conséquence, l'article 5 bis est supprimé et l'amendement n° 34 tombe.
La parole est à Mme Cécile Dumoulin, pour soutenir l'amendement n° 39 , portant article additionnel après l'article 6.
L'amendement a trait aux contrats aidés, auxquels le Gouvernement a recouru de manière importante en 2009. D'ailleurs, les 502 000 conventions qui ont été signées ont joué un rôle indéniable d'amortisseur social.
Mais ces contrats doivent aussi bénéficier de mesures d'accompagnement professionnel. Or le taux d'insertion dans l'emploi est beaucoup plus important dans le secteur marchand que dans le secteur non marchand.
Les contrats aidés doivent également être une solution beaucoup plus pérenne. Il faudrait, pour ce faire, renforcer les actions de formation et d'accompagnement professionnel dispensés dans ce cadre. Je regrette, à cet égard, qu'un de mes amendements ait été déclaré irrecevable, car il visait à renforcer cette formation obligatoire pour les personnes les moins qualifiées.
Dans le présent amendement, il est proposé que l'employeur « apporte son appui au salarié qui souhaite s'engager dans une démarche de validation des acquis de l'expérience » et que « le salarié bénéficie, dans des conditions fixées par décret, d'une priorité d'accès à la procédure de validation ». Cela lui permettra, une fois son contrat aidé terminé, de postuler dans une entreprise du secteur non marchand. Tous ceux qui travaillent dans une collectivité territoriale savent combien il est difficile, à l'issue d'un contrat, de pérenniser l'emploi.
Une fois que cette validation des acquis de l'expérience sera faite, le salarié pourra postuler pour un emploi dans le secteur marchand.
La commission a repoussé cet amendement.
Néanmoins, je comprends la préoccupation de son auteur. L'amendement pose une vraie question, mais celle-ci me semble relever davantage de pratiques insuffisantes que d'une lacune du droit, car le code du travail prévoit déjà explicitement la formation dans le cadre des contrats aidés.
Je pourrais me rallier à cet amendement s'il était réduit à sa première phrase, qui a le mérite de rappeler clairement aux employeurs publics et associatifs leurs obligations. La seconde, par contre, crée une priorité d'accès à la VAE dont la mise en oeuvre ne serait pas facile.
La parole est à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, pour donner l'avis du Gouvernement.
Je suis prêt à donner un avis favorable à cet amendement si la seconde phrase est supprimée. L'octroi d'une priorité d'accès à la procédure de VAE poserait, en effet, un problème par rapport au principe d'également de traitement de tous les citoyens.
L'amendement devient donc l'amendement n° 39 rectifié et est ainsi rédigé : « L'employeur apporte son appui au salarié qui souhaite s'engager dans une démarche de validation des acquis de l'expérience. »
(L'amendement n° 39 rectifié est adopté.)
La parole est à M. Jean-Pierre Marcon, pour soutenir l'amendement n° 67 .
La rémunération des apprentis est actuellement déterminée en pourcentage du SMIC, et son montant varie en fonction de l'âge du bénéficiaire et de sa progression dans les cycles de formation.
Suivant la situation du jeune, des règles complémentaires s'ajoutent et complexifient ce principe : succession de contrats avec le même employeur ou un employeur différent. Ces multiples ajouts rendent incompréhensible pour de nombreux petits artisans l'élaboration de la feuille de paie, qui devient parfois un véritable casse-tête.
Il est important de simplifier cette procédure, et c'est pourquoi je propose que la formation des apprentis soit déterminée, non plus en fonction de l'âge de l'apprenti mais de sa progression dans le ou les cycles de formation, sans modifier, bien sûr, la fourchette de rémunération de ces apprentis, qui s'étage entre 25 % et 78 % du SMIC.
Ce dispositif me paraît important pour un certain nombre de chefs d'entreprise, d'artisans notamment, qui rencontrent des difficultés à rédiger ces feuilles de paie.
Elle a repoussé l'amendement. Si je comprends le souci de simplification qu'elle traduit, je me demande quel en serait l'effet sur les salaires des apprentis et sur l'attractivité de l'apprentissage. Il serait nécessaire de réaliser une étude d'impact.
Le dispositif que vous proposez conduirait à supprimer la prise en compte de l'âge dans le salaire des apprentis. Or cette règle est admise par les jeunes, qui sont attachés à ce que le revenu progresse avec l'âge. Cela correspond aussi, pour les entreprises, à une réalité, car le degré de maturité des jeunes est corrélé à leur âge, de même que leur niveau d'encadrement.
En outre, des textes interdisent l'utilisation de certains équipements avant un certain âge, certaines machines étant dangereuses.
S'il fallait payer au même niveau tous les apprentis quel que soit leur âge, trouverait-on encore des entreprises pour embaucher de très jeunes apprentis ?
Même avis, même argumentation.
Ne plus prendre l'âge comme référence pose problème. En effet, les besoins en apprentis sont aussi fonction de l'âge et ne dépendent pas uniquement du niveau de qualification ou du diplôme. On risque de se retrouver dans le cas où un apprenti plus jeune, ayant un diplôme plus élevé, toucherait plus qu'un autre apprenti, situation qui ne serait pas simple à gérer au sein d'une même entreprise.
C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Je ne partage pas tout à fait ce point de vue. Il me paraît dommage de déterminer la rémunération des apprentis en fonction de l'âge.
Je maintiens mon amendement car beaucoup d'artisans réclament ce nouveau dispositif.
(L'amendement n° 67 n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Cécile Dumoulin, pour soutenir l'amendement n° 37 .
Il s'agit de favoriser l'apprentissage dans le secteur public. On a vu que cette proposition de loi et le projet de loi de finances rectificative incitaient les entreprises de plus de 250 salariés à avoir dans leur effectif 4 % de personnes en formation par alternance, ce qui va dans le bon sens.
La fonction publique compte 5 millions de salariés, alors qu'elle n'emploie que 3 % de personnes en alternance. Certes, on y a constaté une progression du nombre de personnes suivant une formation en alternance : 4 000 en 2004, 8 400 en 2010. Pour autant, cette progression n'est pas suffisante. L'État, les collectivités territoriales et les établissements publics doivent se montrer beaucoup plus exemplaires et volontaristes en matière d'apprentissage. Il y a là de vraies possibilités, tant pour les jeunes que pour les collectivités territoriales et l'État. Le directeur des ressources humaines de l'hôpital de ma circonscription m'a indiqué qu'il n'y avait dans son établissement que huit contrats d'apprentissage pour 1 800 salariés et que, outre l'obstacle culturel, l'un des freins majeurs résidait dans le financement de ces contrats.
Laurent Hénart a rédigé un rapport sur le financement de l'apprentissage. Aujourd'hui, il faut passer à la vitesse supérieure, passer de l'intention à la réalisation. C'est pourquoi je vous propose deux amendements.
L'amendement n° 36 prévoit que le Gouvernement déposera un rapport au Parlement proposant des mesures qui permettraient d'atteindre un objectif de 4 % de personnes en formation par alternance dans leurs effectifs.
Quant à l'amendement n° 37 , il prévoit que, dans un délai d'un an après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport sur le financement des formations en alternance dispensées. Toutefois, monsieur le président, je souhaiterais rectifier mon amendement en l'élargissant à la fonction publique d'État et aux établissements publics.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 37 tel qu'il vient d'être rectifié.
Nous soutenons ces amendements. Certes, il y a un frein culturel dans les collectivités territoriales en raison de la règle du concours, mais il existe aussi un autre obstacle, lié à la différence de coûts.
Pour ma part, j'avais déposé un amendement plus modeste puisque je ne proposais qu'un objectif de 1 %, reprenant en cela la proposition de M. Hénart.
Un autre problème est celui des lieux de formation. À cet égard, le CNFPT va ouvrir prochainement un troisième CFA, particulièrement approprié à la formation en apprentissage dans la fonction publique, notamment s'agissant des métiers relatifs à l'aide à la personne.
Nous arrivons donc, sur ce sujet, à un large consensus. Comme cet amendement va être adopté, nous n'allons pas tarder à nous mettre au travail.
Mes chers collègues, je me réjouis toujours des larges consensus (Sourires), mais, comme celui-ci ne m'est pas apparu sur la première version de l'amendement, je vais suspendre la séance, le temps de disposer d'un texte écrit.
Après l'article 6
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quarante, est reprise à seize heures cinquante.)
La séance est reprise. L'amendement n° 37 rectifié est ainsi rédigé : « Après l'article 6, insérer l'article suivant :
Dans un délai d'un an après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le financement des formations en apprentissage dispensées au sein de l'État, des collectivités territoriales et des établissements publics. »
(L'amendement n° 37 rectifié , est adopté.)
La parole est à Mme Cécile Dumoulin pour présenter l'amendement n° 36 .
Cet article 6 bis consacre expressément une proposition que j'avais formulée dans une question écrite à M. le ministre de l'éducation nationale au mois de mars 2010. J'appelais son attention sur les stages d'une semaine effectués par les élèves de troisième pour découvrir le monde de l'entreprise, stages qui doivent les aider dans leur orientation future.
Afin d'optimiser et d'encourager l'initiative et la découverte du monde du travail et des métiers qui existent, je lui avais demandé s'il n'était pas envisageable d'effectuer un second stage d'observation d'une semaine durant les vacances scolaires, sur la base, bien entendu, du volontariat, en mettant une autre convention de stage à la disposition de l'élève. M. le ministre de l'éducation nationale m'avait répondu au mois de juin 2010, il y a donc un an, que cela ne paraissait pas opportun au regard des divers dispositifs qui existaient déjà, tels le stage obligatoire en classe de troisième, la réalisation de fiches métiers, la participation à des salons ou des forums, des échanges avec des représentants d'entreprises ou de branches professionnelles.
Je suis donc ravi de ce revirement positif et utile pour nos jeunes étudiants, qui envisagent leur avenir avec avidité, curiosité et enthousiasme. En ma qualité de parent, je ne peux que remercier le Gouvernement de cette chance offerte à tous les enfants.
En cette première journée du baccalauréat, je tenais à le signaler.
Bien entendu, je suis également favorable à l'amendement n° 63 .
La parole est justement à Mme Pascale Gruny, pour présenter cet amendement n° 63 .
Il s'agit de proposer le même stage aux élèves des lycées. Plus les élèves, lycéens et collégiens, peuvent faire des périodes d'observation en entreprise, mieux c'est, notamment en vue de décider ensuite de leur orientation.
(L'amendement n° 63 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
La parole est à M. Jean-René Marsac, pour défendre l'amendement n° 101 .
L'alinéa 2 de l'article 6 bis dispose que « les chambres consulaires apportent leur appui à l'organisation de ces périodes ».
Le texte ne dit pas assez précisément qui est l'organisateur de ces périodes. On peut renvoyer à des textes d'application ; se contenter de dire que « les chambres consulaires apportent un appui » manque de précision. Nous proposons donc de supprimer cette phrase.
La commission a repoussé cet amendement.
Le fait est que, aujourd'hui, ce sont les chambres consulaires qui organisent les mini-stages. Il est nécessaire de les mentionner dans la loi si l'on veut que l'éducation nationale accepte de trouver des solutions aux problèmes de droit et de responsabilité qui se posent. À défaut, il se trouvera un certain nombre de gens pour les écarter du système alors que ce sont elles qui, aujourd'hui, mettent en place ces mini-stages.
Il serait vraiment dommage d'adopter un tel amendement. Avis défavorable, donc.
(L'amendement n° 101 n'est pas adopté.)
(L'article 6 bis, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 102 .
La parole est à M. Jean-Patrick Gille.
Il s'agit, dans cet article, de l'extension du DIMA, le dispositif d'initiation aux métiers en alternance. Je n'y suis pas complètement opposé mais il faut quand même être assez prudent : un certain glissement pourrait conduire les employeurs à préférer accepter des jeunes en DIMA plutôt qu'en contrat d'apprentissage, alors qu'ils ont pourtant l'âge d'en signer un, au motif qu'ils ne seraient pas tout à fait au niveau.
Ce n'est pas excessivement grave, me direz-vous ; cela fait tout de même une différence pour le jeune qui, en DIMA, n'est pas rémunéré. Soyons donc vigilants.
La commission a repoussé cet amendement.
Effectivement, le DIMA n'est pas rémunéré, mais le rémunérer, cela veut dire que vous êtes pour l'apprentissage à quatorze ans ! Nous, nous n'en voulons pas.
Oui, mon cher collègue, ça va se gâter. Nous venons de vivre un moment de consensus, après, certes, des discussions très difficiles cette nuit et ce matin en raison de la manière dont vous considérez l'apprentissage et l'employeur. J'entends M. Muzeau…
Non, pas maintenant, monsieur Muzeau, mais vous parliez de protéger le jeune par rapport à l'employeur.
Quelle mentalité !
Nous, nous voulons faire du « gagnant-gagnant », et je soutiens complètement le Gouvernement qui affirme vouloir passer de 600 000 à 800 000 jeunes en apprentissage. Il faut cependant se donner des moyens, faire confiance aux jeunes, faire confiance aux employeurs.
J'ai déposé un amendement qui a été accepté par la commission des affaires sociales, dont je remercie le président et le rapporteur, et, avec l'appui du rapporteur Jean-Charles Taugourdeau, par la commission des affaires économiques ; cet amendement a donc été intégré au texte que nous examinons. Pourquoi l'ai-je fait ? Il se trouve qu'un jeune qui a terminé son premier cycle de formation d'enseignement général secondaire au mois de juin n'a pas de chance s'il est né en septembre, octobre, novembre ou décembre : s'il trouve un maître d'apprentissage, s'il est motivé pour faire de l'apprentissage, on lui demandera de faire une année supplémentaire dans l'enseignement général – qu'il se débrouille donc ! – et de renouveler sa demande l'année suivante. D'un certain point de vue, c'est inacceptable !
C'est priver l'entreprise de donner cette chance au jeune, empêcher une démarche « gagnant-gagnant ».
Dans les faits, des dérogations sont possibles, à condition que l'inspecteur d'académie donne son accord. Il se trouve que, si l'inspecteur le donne effectivement dans certains départements, ce n'est pas le cas dans d'autres, au motif que la dérogation est prévue par une circulaire mais non par la loi. Je propose donc d'inscrire dans la loi la possibilité d'une dérogation dans le cas d'un jeune qui a trouvé un possible contrat d'apprentissage mais qui n'a pas tout à fait l'âge requis ; c'est tout simplement du bon sens. Nous voulons être pragmatiques, nous voulons être opérationnels.
Notre collègue Jean-Patrick Gille va défendre deux amendements. L'un vise à supprimer cet article. Le rapporteur vous répondra, monsieur Gille, et je vous répondrai aussi, mais je vous invite déjà à venir dans les CFA, dans les maisons familiales rurales, voir les familles qui nous disent ne pas comprendre pourquoi des jeunes motivés ne peuvent pas aller en apprentissage.
Votre deuxième amendement est encore pire, c'est pur dogmatisme.
Vous supprimez, non seulement l'article 6 quinquies de la proposition de loi, mais aussi un alinéa du code du travail actuel, afin d'interdire l'apprentissage aux jeunes de quinze ans. Le code actuel dispose en effet que l'entrée en apprentissage est possible, sous certaines conditions, comme le fait d'avoir accompli la scolarité du premier cycle de l'enseignement secondaire.
Non seulement vous ne voulez pas de l'alinéa qui figure dans la loi, suite à l'amendement que nous avons fait adopter, mais vous souhaitez revenir sur l'actuel code du travail. Autrement dit, je le répète, vous êtes dans le dogmatisme. Il ne faut faire bouger ni l'enseignement ni le droit du travail, parce que l'employeur pourrait profiter du jeune !
Revenez à la réalité, venez écouter les parents et tous ceux qui sont prêts à s'engager dans l'alternance. C'est une chance pour le jeune – à qui elle offre un emploi, un métier et un revenu – et pour l'entreprise.
M. Poignant relance un débat qui n'a pas lieu d'être, car jamais pour ce qui me concerne, et plus généralement sur les bancs de gauche, nous n'avons contesté l'utilité de l'alternance et de l'apprentissage.
Nous sommes, au groupe GDR, favorables à un code du travail opposable. C'est ce qui fait que la France est ce qu'elle est. C'est, hélas, de moins en moins vrai depuis que vous êtes au Gouvernement, mais il y a encore des droits opposables ; un salarié, un apprenti, et plus globalement, tous les acteurs du monde du travail peuvent se référer à des textes qui bordent les droits et les devoirs des employeurs et des salariés. Aussi, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit sur l'apprentissage. Si je devais me justifier, je rappellerais simplement que la ville dont je suis l'un des responsables a offert à la région un terrain pour construire un CFA, ce qui montre que nous étions demandeurs. Cessez donc de me faire de vilains procès non fondés !
Par ailleurs, je n'ai jamais considéré tous les employeurs comme des tricheurs. Je dis simplement qu'il y a des faits : les tribunaux des prud'hommes sont si surchargés qu'il faut deux ans à une affaire pour être jugée. Tout à l'heure, vous avez vous-même déposé, avec vos amis, un amendement pour supprimer la première phase, celle de la conciliation. Si les prud'hommes sont aussi débordés, c'est bien qu'il y a des conflits dans le travail, qui relèvent parfois de la responsabilité des salariés, mais en très grande majorité de celle d'employeurs.
S'il ne faut, certes, pas stigmatiser les employeurs, il n'en reste pas moins qu'il faut garder la tête froide et regarder ce qui se passe quotidiennement ; l'actualité rend nécessaire l'existence d'un droit du travail solide, qui soit une véritable référence. Je pense à la situation de Carrefour Market, qui a été condamné à hauteur de 3 millions d'euros pour avoir triché sur l'exercice du travail dans leur magasin.
Monsieur le président, je voudrais prolonger les propos du président de la commission des affaires économiques et répondre à M. Muzeau.
On nous a demandé tout à l'heure pourquoi nous avions attendu si longtemps pour proposer de telles mesures, alors que nous sommes majoritaires depuis neuf ans. Nous attendions simplement que les esprits s'ouvrent un peu, mais nous nous apercevons qu'au fil des amendements, les esprits se referment, puisque vous voulez même faire marche arrière pour ce qui est du code du travail !
Ne l'oubliez pas, notre démarche vise à la revalorisation de l'apprentissage ; cela passe par le fait qu'un bon élève dans le premier cycle, peut être très en avance à la fin de la troisième. Nous précisons que, s'il a quatorze ans et demi au mois de juin – et donc, quinze ans avant le 31 décembre –, il pourra commencer un apprentissage au mois de septembre. Et nous l'inscrivons dans la loi afin que les inspecteurs d'académie n'agissent pas en la matière selon leur bon vouloir, ou encore qu'ils ne soient pas seulement guidés par la crainte de tomber sous le coup de la loi en cas de problème.
La revalorisation de l'apprentissage passe par le fait qu'un bon élève peut, jusqu'en troisième, choisir délibérément d'apprendre un métier.
Puisque le débat est bien engagé, je m'inscris également sur l'article, monsieur le président.
Je remercie Serge Poignant, car il a bien posé les données du problème. Je vais essayer de lui montrer que ce n'est pas du dogmatisme, mais de l'attachement à certains principes de notre pays, qui sont connus de tous.
Par ailleurs, il semble croire que je ne connais pas la réalité. Certes, nous ne nous connaissons pas bien, mais étant depuis seize ans, président d'un CFA qui compte plus de mille apprentis, j'ai l'impression, moi aussi, de connaître un peu le sujet !
Je cite l'article 6 quinquies : « Toutefois, les jeunes âgés d'au moins quinze ans au cours de l'année civile peuvent souscrire un contrat d'apprentissage ». Il s'agit donc d'autoriser un jeune de quatorze ans, puisqu'il n'a pas encore quinze ans, à signer un contrat d'apprentissage. Ce qui nous dérange et nous a conduits, avec mes collègues, à déposer les amendements nos 103 et 104 , c'est qu'une telle mesure remet en cause deux principes simples et clairs, que connaissent tous les Français : le premier concerne l'obligation scolaire jusqu'à seize ans – notre pays s'en félicite ; le deuxième n'autorise à travailler qu'à partir de seize ans. Nous ne faisons pas preuve de dogmatisme, nous voulons seulement protéger le travail des mineurs et des enfants.
Mais peut-être considérez-vous que le contrat d'apprentissage n'est pas un contrat de travail. C'est ce qu'on devine dans certaines propositions. Pour ma part, je suis attaché au fait que le contrat d'apprentissage est un contrat de travail, et c'est ce point qui pose problème entre nous.
Depuis plusieurs années, votre majorité rogne petit à petit – cela a commencé sous le gouvernement Raffarin – sur l'âge légal pour commencer à travailler. Vous l'avez ramené à quinze ans sous certaines conditions, puis – vous l'avez rappelé –, un peu avant quinze ans, c'est-à-dire quatorze ans avec une dérogation de l'éducation nationale. Aujourd'hui, il s'agit de faire sauter ladite dérogation. J'aimerais d'ailleurs avoir l'avis du ministre de l'éducation nationale sur cette remise en cause de l'obligation scolaire jusqu'à seize ans…
Vous nous reprochez d'avoir une position dogmatique et idéologique. Je ne le crois pas. Concrètement, je suis d'accord avec vous, car ce genre de pratique existe dans le CFA que je préside. Si un jeune de quinze ans veut aller en entreprise, il existe des dispositifs, comme le DIMA – le dispositif d'initiation aux métiers en alternance. Pour ma part, j'ai expérimenté un autre dispositif qui fonctionne très bien : les jeunes vont au collège, en entreprise et au CFA pour découvrir des métiers. Cela se passe très bien, même s'il y a quelques difficultés du côté de l'éducation nationale. Tous les ans, grâce à ce dispositif, nous sauvons quarante à soixante jeunes. Nous pourrions sans doute aller plus loin en nous demandant comment les jeunes concernés par ce dispositif pourraient bénéficier d'une petite rémunération. Il nous faudra en discuter avec les régions.
Quoi qu'il en soit, je ne crois pas exagérer en le disant, vous ouvrez une double brèche pour ce qui est de l'obligation scolaire et de l'impossibilité de travailler avant l'âge de seize ans. Il y aura une terrible exception pour les apprentis à partir de quatorze ans. Je considère que c'est inacceptable et je tenais à réaffirmer ces deux principes.
Je suis saisi d'un amendement n° 103 .
Puis-je considérer que vous l'avez présenté, monsieur Gille ?
Défavorable.
L'article 6 quinquies vise à donner une base légale à une circulaire de 1997. Or à ma connaissance, cette circulaire n'a pas été remise en cause sous le gouvernement Jospin ! Le code du travail, dans sa rédaction présente, autorise l'apprentissage à quinze ans aux jeunes qui ont terminé leur premier cycle d'enseignement, autrement dit le collège.
Il s'agit seulement d'interpréter cette condition d'âge en spécifiant qu'elle est appréciée au regard de l'âge atteint au cours de l'année civile. C'est ce que prévoit déjà la circulaire, afin de ne pas bloquer stupidement des jeunes qui sont à un ou deux mois de leur anniversaire, comme l'a excellemment rappelé le président de la commission des affaires économiques.
L'enjeu est l'égalité de traitement entre des jeunes sortis de la classe de troisième. Certains auraient le droit de signer, d'autres non, un contrat d'apprentissage, selon qu'ils seraient nés avant ou après la date du début du stage d'apprentissage.
Même argumentation et même avis défavorable.
Mon cher collègue, tout président de CFA que vous soyez, n'ayez pas une lecture aussi sélective ! Nous vérifierons sur le compte rendu. Vous avez dit : « Toutefois, les jeunes âgés d'au moins quinze ans au cours de l'année civile peuvent souscrire un contrat d'apprentissage ». Vous vous êtes arrêté là, alors qu'il fallait aller jusqu'au bout de la phrase ! Je le fais pour vous : «…s'ils justifient avoir accompli la scolarité du premier cycle de l'enseignement secondaire ou avoir suivi une formation prévue à l'article L. 337-3-1 du code de l'éducation. »
Lorsque j'entends dire que vous, au parti socialiste, vous reprochez à la majorité d'ouvrir l'apprentissage dès l'âge de quatorze ans, je réponds qu'il n'en est rien !
Je m'élève contre cela, car c'est un mensonge, mon cher collègue ! Les journaux et les télévisions n'arrêtent pas de nous appeler en nous demandant s'il est vrai que nous ramenons l'âge d'entrer en apprentissage à quatorze ans. Non, absolument pas !
Vous, en revanche, vous mentez. Nous ne ramenons pas l'âge d'entrer en apprentissage à quatorze ans. Nous restons dans le cadre de la loi, c'est-à-dire à quinze ans, sous conditions, et nous y ajoutons la fin de l'année sous conditions. Il ne s'agit pas d'ouvrir l'apprentissage aux jeunes de quatorze ans. Cessez donc de communiquer de fausses nouvelles !
La démonstration de M. Poignant est parfaite sur le plan sémantique.
On vient de nous expliquer qu'il ne s'agissait pas d'autoriser l'apprentissage à quatorze ans, mais à quinze ans sous conditions. Autrement dit, comme tous ceux qui ont quatorze ans finiront bien par en avoir quinze, la condition finira par être remplie ! Le manque de cohérence de cette démonstration est tout de même incroyable…
En réalité, la souplesse existe déjà : il y a la circulaire, il y a des interprétations ; le contrôle de l'éducation nationale est nécessaire puisque l'on a affaire à des enfants. Il y a donc aujourd'hui plusieurs réponses. Or de ce qui est une souplesse, vous voulez faire une règle et, ce faisant, vous vous heurtez à des principes qui, jusqu'à présent, faisaient consensus sur le plan républicain.
Assumez ce que vous faites, chers collègues, et cessez d'avoir recours à des arguments tels que le fait de pouvoir entrer en apprentissage à quinze ans sous condition – d'en avoir quatorze ! L'explication, comme l'évolution sociale qu'elle traduit, ne rehausse pas la qualité de nos débats !
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, à qui je demanderai d'être bref.
Ayant été traité de menteur, monsieur le président, je souhaite répondre.
Monsieur le ministre, monsieur Poignant, je vous pose une question très simple : si vous adoptez cet article, comme je le crains, y aura-t-il, à la rentrée prochaine, des jeunes de quatorze ans en contrat d'apprentissage ? La réponse est oui. Je n'ai donc pas menti.
Cette mesure pose un vrai problème. Il y avait, dans notre pays, deux principes républicains clairs : l'obligation scolaire jusqu'à seize ans et l'interdiction de signer un contrat de travail avant l'âge de seize ans, ce qui protégeait les enfants. Ce sont des règles simples et, pour les situations pédagogiques que vous évoquez, nous arrivons à les gérer de façon pragmatique dans les CFA, même si c'est sans doute perfectible.
Si j'ai bien suivi, l'âge précis est de quatorze ans et huit mois. Ainsi, nous éviterons peut-être de discuter pendant deux heures pour savoir exactement quel âge auraient ces enfants !
La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre.
Monsieur Gille, la circulaire de 1997 dit exactement ce qu'il y a dans la loi ! Pourtant, vous ne l'avez pas remise en question, simplement parce que c'est une pratique qui existe aujourd'hui.
Non, monsieur Gille ! Cette pratique est autorisée par des dérogations émanant de l'éducation nationale. Dans le texte, nous donnons une base juridique aux dérogations pour éviter des disparités régionales dans les décisions des inspecteurs d'académie.
Alors, vous pouvez toujours dire « Vous ne vous rendez pas compte ? C'est dramatique, les pauvres petits, à peine sortis de la maternelle, les voilà en apprentissage ! ». Cela ne marche pas, je l'ai dit hier. Ne vous en déplaise, nous sommes à 1 000 % dans le pragmatisme ! Et vous pouvez toujours parler de « quatorze ans et un jour ». Non ! C'est tout simplement un jeune qui a fini sa scolarité. Le président l'a rappelé, nous ne débattons plus pour savoir s'il s'agit de quatorze ans et huit mois ou de quatorze ans et neuf mois !
Je voudrais juste vous poser une question. Prenons le cas d'un homme qui vient vous voir à votre permanence. Son fils n'a pas réussi à l'école et il aura seize ans – mais je pourrais tout aussi bien dire quinze – seulement huit mois plus tard.
Il vous demande ce qu'il va pouvoir faire de lui pendant huit mois. Que lui répondez-vous ?
Que vous allez essayer de lui trouver un stage ? Voilà le problème, envisagé ici à partir d'un cas pratique. Certes, ce n'est pas sur cette base qu'on légifère. Un tel cas illustre pourtant – rien de plus, mais cela compte quand même – l'utilité qu'il y a à pouvoir enclencher aussitôt un cycle d'apprentissage. En tant que ministre, de tels exemples me conduisent à m'interroger.
Nous sommes donc bien d'accord : des jeunes de quatorze ans pourront désormais avoir un contrat d'apprentissage.
En ce qui concerne la question que m'a posée le ministre, je croyais avoir déjà répondu en disant que le DIMA permet, quand on est dans un CFA, de suivre un cursus. On reste donc sous statut scolaire.
Vous allez avoir du mal à m'attaquer sur le pragmatisme car j'ai moi-même créé un dispositif établissant un lien entre le collège et les entreprises tout en donnant la possibilité d'être dans un CFA. Certes, ce n'est pas tout à fait de l'apprentissage et le mécanisme est sûrement perfectible – j'aimerais bien, d'ailleurs, qu'il soit reconnu par l'éducation nationale –, mais une telle solution répond à la question que vous me posiez.
Reste la question de savoir s'il pourrait y avoir une forme de rémunération pour le jeune qui se trouve dans une telle situation. Je l'ai abordée très honnêtement tout à l'heure et je le répète : appelez cela du dogmatisme si vous voulez, mais, oui, je reste pour ma part attaché aux deux principes que sont l'obligation scolaire jusqu'à seize ans et le fait que l'on ne travaille pas, dans notre pays, avant cet âge. On peut être en désaccord, mais ce sont là des principes acceptés et reconnus par tout le monde, qui revêtent même un caractère fondateur de notre société.
Pour autant, comme je l'indiquais encore à l'instant, je suis prêt à me montrer pragmatique sur d'autres formes de pédagogie de l'alternance qui permettent à des jeunes d'entrer dans les entreprises, ce qui est, je le reconnais, une excellente solution pour eux.
Ce débat est important. J'apprécie le fait que l'on puisse, avec M. Gille, se dire les choses sans polémiquer. Dans l'exemple que vous donniez, le jeune est en DIMA, c'est-à-dire sous statut scolaire. Il n'a donc pas de rémunération. Il n'a pas non plus de diplôme à la fin. C'est donc toute la différence avec l'exemple que je vous donnais du père qui est venu me parler de ce sujet. Ce père souhaitait que son fils, qui voulait entrer en apprentissage, n'attende pas un an et huit mois – s'il était âgé d'un peu plus de quatorze ans – pour pouvoir commencer, avoir une rémunération…
et s'engager dans une voie diplômante et qualifiante. Voilà la vraie différence – et cette différence est telle que ce n'est pas du tout la même chose.
Si vous alliez au bout de votre logique, il vous faudrait considérer qu'aucune des situations existant aujourd'hui sur le terrain ne peut perdurer,…
…qu'aucune des dérogations qui sont validées par l'éducation nationale aujourd'hui n'est justifiée en droit.
Nous ne souhaitons ni voir se multiplier les situations de ce genre, ni faciliter leur apparition. Nous leur donnons tout simplement une base juridique au nom du pragmatisme.
(L'amendement n° 103 n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour présenter l'amendement n° 104
Je déduis des propos précédents du ministre qu'il n'a pas bien lu cet amendement n° 104 . Nous avons eu un débat clair ; nous avons bien posé les choses. Le présent amendement vise justement à répondre au reproche qui m'était fait à l'instant de ne pas aller jusqu'au bout de ma logique. Comme M. Poignant l'a d'ailleurs noté, je suis cohérent : selon moi, l'apprentissage ne peut clairement commencer qu'à seize ans.
(L'amendement n° 104 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 6 quinquies est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 105 , tendant à supprimer l'article.
La parole est à M. Jean-Patrick Gille.
Une double expérimentation avait été proposée dans le cadre de la loi relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie. Il s'agissait, d'une part – ce qui était une excellente chose –, de faire en sorte qu'un jeune en contrat d'apprentissage puisse bénéficier d'une pause quelques mois avant l'examen, tout en continuant à fréquenter le CFA. Les régions prenaient le relais pour son indemnisation. D'autre part, un dispositif, qui était plus discutable et auquel j'étais opposé, prévoyait pour ainsi dire l'inverse, c'est-à-dire qu'un jeune n'ayant pas encore tout à fait trouvé de maître d'apprentissage puisse quand même entrer, pour une durée de trois mois au maximum, dans le CFA et commencer son apprentissage.
Or avec cet article on propose de faire sauter toutes ces barrières. Finalement, on pourra être dans un CFA sans maître d'apprentissage. Vous allez me dire que c'est une souplesse qui est dans l'intérêt des jeunes. Mais vous voyez bien que, dès lors, on n'est plus tout à fait dans l'apprentissage. C'est une manière très claire de transférer l'ensemble de la rémunération – si l'on veut que le jeune en bénéficie – à la charge des conseils régionaux.
Vous êtes coutumiers du fait : vous autorisez l'expérimentation en disant que ce n'est pas très grave et après vous la généralisez. Pour être parfaitement honnête avec vous, je ne suis pas radicalement opposé, en l'occurrence, à l'idée. Je pense toutefois que ce que vous proposez est trop rapide et que nous manquons de recul par rapport à ce qui s'est fait.
S'agissant de la deuxième possibilité que j'évoquais, celle que des jeunes entrent dans un CFA sans avoir de maître d'apprentissage, il y a eu moins de 700 cas l'an passé, dont 170 pour lesquels il n'y a jamais eu de solution. Il vaudrait peut-être mieux aller plus progressivement et avoir une concertation renforcée avec les régions.
La commission a repoussé cet amendement. Chaque année, plusieurs milliers d'apprentis sont contraints d'abandonner leur formation parce qu'ils ne trouvent pas de maître de stage suffisamment tôt. Or certains conseils régionaux, et non des moindres, ont mis en place un dispositif d'accompagnement innovant qui permet à l'apprenti de continuer à suivre sa formation au centre de formation, au maximum pendant une année, en pouvant à tout instant signer un contrat d'apprentissage. Cet article s'inspire de ces expérimentations en leur donnant une base juridique pour faciliter et encourager leur généralisation.
Je ne vous laisserai pas, monsieur Gille, profiter de l'absence de M. Rousset pour remettre en cause le dispositif PREPA, mis en place dans la région Aquitaine. Je ne vous laisserai pas davantage, sous prétexte que M. Huchon ne siège pas dans cette assemblée, critiquer le dispositif Passerelles qui existe en Île-de-France ! (Sourires.)
J'assume ces dispositifs ; je les revendique. Nous avons non pas copié, mais tout simplement décidé de donner une base juridique, en l'occurrence par la loi, à des expérimentations qui fonctionnent dans certaines régions, de façon à ce que personne ne trouve à y redire.
Voulez-vous que je vous dise ? Je ne me préoccupe pas de savoir si ce qui marche, en matière d'emploi des jeunes, est de droite ou de gauche. L'essentiel est que cela fonctionne. Or c'est le cas ici. J'aurais donc aimé que vous puissiez nous accompagner pour dire que ces expériences, menées par des présidents de région dont vous connaissez la sensibilité politique, valent la peine d'être élevées au niveau législatif.
L'Alsace ne le fait pas encore ? Quel scandale ! (Sourires.)
(L'amendement n° 105 n'est pas adopté.)
(L'article 6 sexies est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 40 .
La parole est à M. Philippe Morenvillier.
La proposition de rapport concernant le règlement du crédit individuel de formation, formulée par MM. Vercamer et Sauvadet, est très intéressante. Le règlement est, d'une part, inversement proportionnel au niveau d'études atteint, et, d'autre part, disponible sous forme de chèque formation. Il me semble toutefois possible de modifier la rédaction du texte pour en améliorer la portée. C'est ce que je propose, avec l'accord de Francis Vercamer, à travers le présent amendement.
(L'amendement n° 40 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 6 octies, amendé, est adopté.)
Cet amendement a pour objet de prévoir un rapport du Gouvernement pour éclairer la représentation nationale sur les conditions et l'évolution des sources de financement des examens organisés par les CFA.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter son sous-amendement n° 130 .
Tel qu'il est rédigé, je suis plutôt défavorable à cet amendement. Pour autant, je vous propose d'ajouter les mots : « ainsi que sur les aménagements qui pourraient être apportés quant à la périodicité de ces examens. »
Il s'agit donc d'expertiser aussi la possibilité que les CFA organisent des examens en dehors des périodes traditionnelles de fin d'année scolaire, de sorte que les jeunes puissent entrer et sortir de l'apprentissage à différents moments de l'année. Sous réserve de votre accord sur ce sous-amendement, je serai favorable à l'amendement n° 107 .
Je suis favorable à ce que propose le rapporteur. J'aurais tellement aimé, d'ailleurs, que l'on aille plus loin qu'un rapport ! En effet, ce problème fait lui aussi partie de ceux qui me sont souvent cités. On souhaiterait qu'il existe d'autres moments que les cycles réguliers pour valider les examens, parfois même pour intégrer l'apprentissage. Je suis favorable à cette idée, même si je sais que cela est lourd à organiser et que l'on a besoin d'y voir clair. C'est également compliqué à gérer du point de vue interministériel. Bref, la proposition va dans le bon sens.
Il s'agissait d'un amendement d'appel en direction du ministre, puisque, comme je l'ai indiqué tout à l'heure – mais je crois qu'il n'était pas encore là –, l'organisation des examens n'est plus financée par l'État, ce qui est un problème.
Sur le sous-amendement et les entrées et sorties plus souples, il existe une formule qui connaît un développement rapide dans les centres de formation d'apprentis : de plus en plus, le contrôle se fait en cours de formation, ce qui permet beaucoup plus de souplesse. Vous évoquez quant à vous les examens ou les sanctions de parcours intervenant en fin d'année, qui sont tout de même de plus en plus rares. La réflexion mériterait donc d'être conduite dans son ensemble. Dans un souci de consensus, j'accepte toutefois le sous-amendement.
(Le sous-amendement n° 130 est adopté.)
(L'amendement n° 107 , sous-amendé, est adopté.)
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour défendre l'amendement n° 108 .
J'indique au passage que selon moi, si le président de la commission des lois était aussi strict que celui de la commission des finances pour appliquer l'article 41, je ne pense pas qu'un tel amendement serait recevable.
Il s'agit de demander un rapport au Gouvernement sur le financement des centres de formation d'apprentis. J'ai déjà signalé hier les problèmes que posent la collecte et surtout le reversement de la taxe d'apprentissage, dont, on s'en souvient, seule une partie – à peine plus de la moitié – revient aux CFA.
Si, comme chacun ici le souhaite, on veut procéder à un développement de l'alternance, il faut trouver un mode de financement plus pérenne. Je me permets aussi de dire, après avoir souligné le problème en commission, que le financement de l'apprentissage est une vraie usine à gaz. Le système mériterait d'être remis à plat. Nous demandons donc au Gouvernement de s'engager dans ce travail.
Là encore, c'est un amendement d'appel. J'aimerais bien avoir l'avis du ministre : faut-il réformer la taxe d'apprentissage ? Comment assure-t-on le financement pérenne de cette évolution de l'alternance, notamment de l'apprentissage, qui est souhaitée sur tous les bancs de l'hémicycle et par le Gouvernement lui-même ?
Je prends l'amendement de M. Gille comme une marque de confiance à l'égard du Gouvernement.
Certes, mais c'est suffisamment rare pour que je le savoure !
Plus sérieusement, il y a peut-être mieux à faire : le Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie est le cadre idéal pour mener cette étude car c'est exactement son rôle. En plus, les régions y sont représentées.
Vous pouvez donc réfléchir à la manière de le saisir de la question. Je veux bien agir moi aussi dans ce sens.
Ce sera d'ailleurs beaucoup mieux que de demander un rapport. En effet, je ne vous cacherai pas qu'un rapport demandé au Gouvernement, c'est toujours du travail en plus pour nous. (Rires.)
Après, on n'arrive pas à tenir les délais. Donc si on peut saisir ce conseil qui existe, je préférerais.
Je suis d'accord avec le ministre mais je n'ai pas bien compris si, du coup, il allait saisir ou non le conseil et s'il était favorable à une réforme du financement de l'apprentissage. Notre amendement avait pour but d'appeler l'attention du Gouvernement.
On me dit que le conseil peut s'autosaisir, je ne suis pas sûr qu'il le fasse. Mais dès lors que j'ai qualité pour le saisir moi-même, je ferai état de la discussion que nous venons d'avoir et le saisirai.
Je suis saisi d'un amendement n° 14 portant article additionnel avant l'article 6 nonies.
La parole est à M. Roland Muzeau, pour soutenir cet amendement.
Nous proposons de créer, « en complémentarité avec le service prévu à l'article L.6111-4 du code du travail un service dématérialisé gratuit favorisant la mise en relation entre les employeurs et les personnes recherchant un stage nécessaire à la validation de leur formation initiale ».
Cette proposition vise à répondre aux très grandes difficultés que rencontrent un certain nombre de jeunes dans leur recherche de stage pour valider leur formation.
La commission n'a pas examiné cet amendement mais, à titre personnel, je n'y suis pas très favorable. Des bourses de stage sont organisées par les académies, les universités, les grandes écoles et les stages ne constituent pas un ensemble structuré comme peut l'être l'apprentissage qui, lui, justifie un portail national.
(L'amendement n° 14 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement, n° 15 , tendant à supprimer l'article 6 nonies.
La parole est à M. Roland Muzeau, pour défendre cet amendement.
L'article 6 nonies vise à codifier les mesures législatives disparates qui encadrent actuellement les stages en entreprise et à transposer les stipulations du récent accord des partenaires sociaux sur l'accès des jeunes en formation en alternance et aux stages en entreprise, accord qui n'a pas été paraphé par une grande organisation syndicale, la CGT.
En dépit de cette nouvelle section, la relation contractuelle stagiaire-employeur demeurera profondément déséquilibrée aux dépens des demandeurs de stage. Manifestement, la rédaction de cet article répond davantage aux craintes des employeurs liées à l'insécurité juridique découlant d'un encadrement lacunaire et à leur volonté de ne pas souffrir de dispositions trop contraignantes qu'à un objectif de protection du stagiaire. Pour preuve ? Aucune sanction n'est prévue en cas de non-respect des dispositions de cet article par les employeurs.
Au regard de la condition des stagiaires, nous aurions pu attendre d'un tel exercice l'émergence de nouveaux droits pour les stagiaires. Or il n'en est rien, ou si peu. La seule avancée, d'ailleurs pointée par la CGT et Force ouvrière à l'occasion de la discussion de l'accord, réside dans l'accès du stagiaire aux activités et avantages gérés par le comité d'entreprise.
Loin de contester l'intérêt pédagogique et professionnel que sont censés revêtir les stages en entreprise, les députés communistes, républicains et du parti de gauche dénoncent de manière constante le recours massif des employeurs aux stages, l'indignité du statut de stagiaire au regard de notre droit du travail et l'institutionnalisation de la précarité de cette catégorie de travailleurs. Sur ces points, l'article ne résout rien. Nous en demandons par conséquent la suppression.
La commission a repoussé cet amendement. Je comprends difficilement que le groupe GDR puisse être hostile aux progrès très substantiels qui sont contenus dans ce texte concernant l'encadrement des stages, que nous actons par l'article 6 nonies.
Par ailleurs, vous affirmez, monsieur Muzeau, que des sanctions ne sont pas prévues. Ce n'est pas vrai puisque le code du travail prévoit une requalification en CDI si l'employeur ne respecte pas ces dispositions.
Je ne comprends pas votre amendement.
(L'amendement n° 15 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour défendre l'amendement n° 109 .
C'est un amendement de précision, voire un peu plus, de l'alinéa 5 de l'article, selon lequel les « stages sont intégrés à un cursus pédagogique, selon des modalités définies par décret ».
Nous avons déjà acté ce principe dans une autre loi mais, quand le décret est paru, nous avons été déçus dans la mesure où le décret faisait la liste, en plus du cas prévu, de toutes les possibilités qu'il y avait de faire des stages, notamment post-cursus.
Dans notre souci du respect du dialogue social, nous proposons de revenir à la disposition telle qu'elle est rédigée dans l'ANI des partenaires sociaux et d'écrire que les stages « s'inscrivent dans le cadre d'un projet pédagogique » et qu'« ils ne peuvent, en aucun cas, être mis en oeuvre hors cursus pédagogique ou post-formation ».
Cette rédaction plus précise nous éviterait les éventuelles mauvaises surprises du décret.
La commission a repoussé cet amendement. S'il reprend, c'est vrai, les termes, de l'article 9 de l'ANI, son adoption ferait disparaître dans le texte la référence à un décret, qui constitue la base légale du décret du 25 août 2010 – c'est d'ailleurs peut-être le but recherché puisque les aménagements que prévoit ce décret à l'obligation d'inscription dans un cursus pédagogique sont contestés par certains. Mais j'observe que, dans son article 10, l'ANI fait explicitement référence deux fois à ce décret, notamment à propos des aménagements concernant les « périodes pendant lesquelles l'étudiant suspend temporairement sa présence dans l'établissement, tels que prévus au cinquième tiret de l'article 1er du décret 2010-956 ». Du point de vue des partenaires sociaux, ce cas particulier doit être conservé.
Ces stipulations très explicites démontrent que les partenaires sociaux ont entendu conserver le décret du 25 août 2010 et les aménagements qu'il comporte. C'est pourquoi je demande le retrait de cet amendement qui irait en fait à l'encontre de l'article 10 de l'ANI.
Même avis.
Dans un esprit constructif, je vais retirer mon amendement mais je voudrais profiter de cette discussion sur les stages pour appeler l'attention du ministre sur un problème qu'on n'arrive pas à régler.
J'ai interrogé les divers ministres successifs sur la question de la gratification des stages concernant la formation de travailleurs sociaux, je pense que vous connaissez le sujet, monsieur le ministre. La solution n'est pas facile à trouver. Ces étudiants travaillent beaucoup dans des collectivités locales ou des établissements qui dépendent d'un prix de journée versé par les collectivités locales et il existe une sorte d'imbroglio qui fait que personne ne veut payer. Tous les ans, au moment des examens, le problème se pose pour finaliser et valider les cursus. Je me permets d'attirer une nouvelle fois votre attention sur ce sujet.
(L'amendement n° 109 est retiré.)
Il s'agit d'un amendement de repli. Nous estimons qu'une durée de six mois de stage est déjà excessive, quand bien même ces stages seraient effectués dans le cadre d'un cursus pédagogique. Nous sommes a fortiori opposés à toute dérogation à cette règle, quelles qu'en soient les conditions et notamment dès lors que l'étudiant interrompt sa formation.
La commission a repoussé cet amendement ainsi que l'amendement suivant, n° 18, car les phrases qu'ils suppriment reprennent les stipulations des articles 10 et 11 de l'accord national interprofessionnel.
En effet, l'article 10 de l'accord stipule que la règle de six mois au plus par an n'est pas « opposable aux stages organisés dans le cadre de périodes pendant lesquelles l'étudiant suspend temporairement sa présence dans l'établissement, tels que prévus au cinquième tiret de l'article 1er du décret 2010-956 visé ci-dessus ».
Quant à l'article 11, il indique que « le délai de carence n'est pas applicable à l'accueil d'un nouveau stagiaire lorsque l'initiative de la rupture anticipée du stage est imputable au précédent stagiaire. »
(L'amendement n° 17 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Il est défendu.
(L'amendement n° 18 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Cet amendement vise à éviter tout abus dans l'accueil des stagiaires. Pour cela, il vous est proposé de limiter le nombre de stagiaires par entreprise en fonction des effectifs.
Nous sommes très favorables aux stages, qui apportent beaucoup aux étudiants. Cependant, nous pensons que lorsqu'on accepte un étudiant en stage, il faut l'accueillir correctement et dignement et pouvoir lui apporter des compétences. Des abus, nous le savons, sont commis dans ce domaine.
La commission a repoussé cet amendement. D'une part, il ne s'agit pas de l'une des stipulations de l'ANI. D'autre part, je crois qu'il faut se méfier de ce type de quotas maximaux, pas plus de x % de stagiaires. Pourquoi alors pas plus de x % de temps partiel, de CDD, d'intérim…
On n'arrivera pas à s'adapter à la situation des entreprises, qui peuvent parfois justifier, sans pour autant créer un abus, un recours plus important aux stages.
Je suis au regret de donner un avis défavorable, mais je préférerais que l'amendement soit retiré.
Je ne suis pas sûr en effet qu'on doive ou qu'on puisse fixer par décret le nombre de contrats. Et si c'était à l'entrepreneur de décider, en fonction de son secteur d'activité, de la taille de l'entreprise ?
D'ailleurs, si cette idée n'a pas été reprise par les partenaires sociaux dans l'ANI, c'est certainement qu'elle est compliquée à mettre en oeuvre. Je vois bien l'idée mais pas la modalité pratique.
Nous souhaitons préciser que la gratification qui est attribuée pour certains stages en fonction de la durée est versée au mois le mois.
Comme la précision est utile, l'avis du Gouvernement est très favorable.
(L'amendement n° 65 est adopté.)
Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.
Je suis saisi d'un amendement de coordination de la commission, n° 54.
(L'amendement n° 54 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 6 nonies, amendé, est adopté.)
Je voudrais interroger le rapporteur et le ministre sur l'interprétation qu'il convient de donner à cet article 7 A, qui concerne les groupements d'employeurs.
Nous avons eu un débat, qui reste pendant, sur les règles, s'agissant des rémunérations, des conditions de travail, qui sont applicables à ces salariés des groupements d'employeurs au regard de leur situation dans telle ou telle entreprise utilisatrice. Quelle convention collective doit-on appliquer ? Deux règles préexistent dans le code du travail : si l'activité relève de la même convention collective, c'est naturellement cette convention collective qui s'applique ; s'il y a plusieurs activités, le groupement d'employeurs fait référence lui-même à une convention collective. Mais votre texte de loi va multiplier les cas de figures, puisqu'on pourra être membre de plusieurs groupements et que le nombre de salariés n'est plus limité. Par conséquent, on peut avoir plusieurs types d'activités.
Cette question a été posée, et un nouvel article nous est proposé qui dit que les contrats de travail « garantissent l'égalité de traitement entre le salarié du groupement et les salariés des entreprises auprès desquelles il est mis à disposition ».
C'est l'utilisation astucieuse, peut-être efficace, d'un concept juridique, qui appelle une réponse très précise du rapporteur et du Gouvernement à la question : qu'est-ce que l'égalité de traitement ? C'est un concept juridique qui n'apporte rien de nouveau dans sa rédaction puisque c'est tout simplement la reprise d'un principe plus connu qui est celui du « à travail égal, salaire égal » et qui est déjà prévu dans une autre disposition du code du travail, l'égalité de traitement étant la déclinaison, dans la terminologie européenne, de ce principe.
En l'état du droit, lorsque l'on dit qu'il y a égalité de traitement, chacun comprend que l'ensemble des règles les plus favorables s'appliquent au salarié.
La situation n'est pas aussi simple. L'égalité de traitement est un principe qui permet des dérogations. Ces dérogations ne sont pas prévues par les textes mais, selon la jurisprudence, elles peuvent découler de la situation personnelle, de l'état de santé ou de la formation du salarié, toutes choses pouvant justifier que ne soit pas respectée la règle « à travail égal, salaire égal ».
Dès lors que vous introduisez ce nouvel article, ma question est extrêmement simple : le fait de préciser qu'il y a égalité de traitement entre les salariés du groupement et les salariés de l'entreprise exclut-il que quiconque se serve de la distinction entre ces salariés pour déroger au principe d'égalité ? Autrement dit est-ce que cette précision permettra d'éviter les dérogations actuellement admises par la jurisprudence, s'agissant de l'application du principe d'égalité de traitement ? Votre réponse est extrêmement importante, car non seulement elle conditionnera l'appréciation que nous portons sur cet article, mais elle permettra également d'éviter de nombreux contentieux.
Nous sommes là dans un cas d'application du principe de faveur. Les salariés mis à disposition bénéficient, d'une part, de la convention collective du groupement auquel ils appartiennent et, d'autre part, d'une prime de poste, prévue par leur contrat de travail, si la convention collective conduit à leur verser un salaire inférieur à celui des personnes occupant le même poste parmi les salariés des entreprises utilisatrices.
Cette garantie d'égalité de traitement est une avancée, puisque, jusqu'à présent, la Cour de cassation avait écarté le principe « à travail égal, salaire égal » pour les salariés relevant d'employeurs différents.
Je ne vais pas prétendre avoir ici réponse à tout. Si vous souhaitez une réponse très précise, je peux vous la communiquer par écrit. Pour l'heure, je puis vous dire, après un échange avec Franck Morel, qu'égalité de traitement ne signifie pas égalitarisme. On peut donc avoir des différences de traitement, si tant est qu'elles soient justifiées par la situation, par exemple par des différences de qualification.
Si vous voulez davantage de détails, soit vous me laissez un petit quart d'heure, soit je vous réponds par écrit.
Nous ne faisons pas là un travail inutile, et je vais être plus précis. Je remercie tout d'abord M. le rapporteur pour les éléments nouveaux qu'il nous a fournis, notamment sur l'application du principe de faveur. Si telle est la règle, ce nouvel article a en effet des conséquences concrètes.
Monsieur le ministre, la jurisprudence parle de « raison objective » de ne pas appliquer l'égalité de traitement. Est-il exclu que l'appartenance à un groupement d'employeurs puisse en soi constituer une raison objective d'écarter le principe d'égalité de traitement ? C'est une question importante, au coeur du débat juridique.
Si on réinscrit ce principe dans la loi pour empêcher que le seul fait d'appartenir à un groupement d'employeurs constitue une raison objective, au sens de la jurisprudence, de ne pas appliquer le principe « À travail égal, salaire égal », cette disposition et l'application du principe de faveur nous donnent satisfaction.
Je voudrais rassurer M. Vidalies. La prime de poste garantit le même salaire à qualification et à poste égaux. Un salarié du groupement, dans la période où il travaille dans l'entreprise, a exactement les mêmes qualités qu'un salarié permanent de cette entreprise.
Plus des deux tiers des groupements d'employeurs pratiquent aujourd'hui cette prime de poste, qui ne figurait pas dans la loi. J'ai souhaité l'y inscrire pour améliorer la protection du salarié. Je le répète, le salarié du groupement, quand il travaille pour une entreprise, est un salarié de l'entreprise, qui bénéficie donc des mêmes conditions qu'un salarié permanent de l'entreprise.
Pour être très précis : non, le seul fait d'appartenir à un groupement d'employeurs ne constitue pas une raison objective de déroger au principe d'égalité de traitement.
Je remercie le Gouvernement pour cette précision, qui évite de nombreuses questions sur la portée de cet article.
(L'article 7 A est adopté.)
Je voudrais, au moment où l'on débute l'examen du titre II, me réjouir qu'on ait profité de ce texte pour aborder la question des groupements d'employeurs – dont la pertinence est avérée et qui ont fait la preuve de leur efficacité, surtout en milieu rural –, en y inscrivant des dispositions visant à simplifier le dispositif et à y introduire de la souplesse.
Cette souplesse est parfaitement illustrée par l'article 7, qui propose de supprimer l'interdiction d'appartenir à plus de deux groupements d'employeurs. Elle n'est pas, à mes yeux, synonyme de précarisation mais peut au contraire contribuer efficacement à la consolidation des emplois proposés et ouvrir, pour des salariés aujourd'hui à temps partiel, la perspective de bénéficier d'un emploi à temps plein, voire à durée indéterminée.
Je suis saisi de deux amendements de suppression identiques, nos 19 et 111.
La parole est à M. Roland Muzeau, pour défendre son amendement n° 19 .
Nous ne sommes pas favorables à la suppression de toute limitation concernant le nombre d'adhésions possibles à des groupements d'employeurs. Notre amendement vise donc à maintenir l'interdiction actuelle d'appartenance à plus de deux groupements, qui est loin d'être un obstacle juridique inutile selon nous.
« Les groupements d'employeurs doivent être constitués entre entreprises partageant un objectif social et économique commun pour ne pas s'apparenter à une nouvelle forme d'agences d'intérim », met en garde la CFDT. Multiplier les possibilités, pour une entreprise, d'adhérer à des groupements va à rebours de cette recommandation opportune.
Il n'a échappé à personne qu'une première séance de négociations sur les groupements d'employeurs s'est tenue le 14 juin et qu'à l'issue de celle-ci les partenaires sociaux ont demandé qu'on leur laisse le temps de poursuivre sur cette question avant d'en fixer les termes dans la proposition de loi. Nous serions bien inspirés de les entendre et de renoncer à l'ensemble des articles du titre consacré à cette question, qui font évoluer les normes actuelles dans le sens unique de la déréglementation.
Pourquoi vouloir assouplir encore et toujours cette formule de recrutement à temps partiel permanent, ce partage d'emploi offrant déjà aux employeurs de nombreux avantages, dont celui de pouvoir disposer d'un salarié stable et qualifié, pour une quantité de temps adaptée à ses seuls besoins – pérennes ou saisonniers –, sans jamais véritablement se situer aussi du point de vue des salariés ?
Ce n'est pas parce que vous prétendez que cette formule de juxtaposition d'heures de travail auprès de plusieurs employeurs contribue à la sécurisation des parcours professionnels en créant pour les salariés un emploi stable qu'elle leur permettra dans les faits d'échapper à la précarité.
Le volume de CDD permanent signés dans ce cadre reste très important, et ce texte ne porte nullement l'ambition d'inciter les employeurs à recourir à des CDI à temps plein. Il est muet sur la difficulté de la convention collective de rattachement, comme il est muet sur le temps de travail, les modalités de partage de celui-ci entre les employeurs selon les besoins des entreprises utilisatrices, ou encore sur les conditions de travail ou de trajet pour le salarié. C'est symptomatique du sens de votre démarche et cela explique clairement notre opposition.
La parole est à M. Jean-René Marsac, pour défendre son amendement n° 111 .
Nous ne voyons pas ce qui motive la suppression de l'interdiction d'appartenir à plus de deux groupements d'employeurs, et les raisons de ce choix n'apparaissent pas clairement dans le rapport.
Les groupements d'employeurs ont été créés au départ pour embaucher des salariés à temps partagé en contrat à durée indéterminée, au bénéfice de plusieurs entreprises du même territoire ou de la même branche professionnelle. Ce dispositif s'est ensuite élargi avec la possibilité d'appartenir à deux groupements d'employeurs, ce que l'on peut comprendre lorsqu'il s'agit, pour la même entreprise, de gérer des sites très éloignés ; mais l'on ne voit nullement ce qui justifie d'aller au-delà de deux groupements.
De surcroît, l'article ne précise pas si le salarié travaillant pour une entreprise pourra être embauché par plusieurs groupements d'employeurs, le principe étant qu'il n'ait de contrat qu'avec un seul groupement d'employeurs.
L'ouverture que vous proposez détourne les groupements d'employeurs de leur objectif initial pour les faire de plus en plus ressembler à des entreprises de travail temporaire, mais sans les mêmes garanties.
Qu'on s'entende bien : un salarié n'appartient qu'à un seul et unique groupement d'entreprises.
Si, mais vous ne vous placez pas du côté du salarié. Un salarié, un groupement : il n'y a pas d'équivoque. Je rappelle au passage que le salarié ne peut intégrer un groupement d'employeurs que s'il est volontaire.
Cela étant, pourquoi une entreprise pourrait-elle adhérer à plusieurs groupements ? Prenons une PME de cinquante salariés, qui possède un site à Rennes, un à Bordeaux, un à Toulouse et un à Lyon. Notre texte lui permet d'adhérer à un groupement sur chaque site, car on ne va pas demander à un salarié toulousain d'aller travailler à Lyon !
Il travaillera dans un groupement situé à Toulouse, qui lui procurera, à travers deux ou trois entreprises, un CDI à l'année.
Cela vaut aussi pour les coopératives agricoles, ou pour les bureaux d'Air France, les succursales Renault ou Peugeot, disséminées un peu partout sur le territoire national.
Les groupements doivent exister dans tous les endroits où il y a du travail, pour le transformer en emplois. C'est l'addition des heures de travail qui crée l'emploi et non l'inverse.
C'est pour cette raison que nous souhaitons que les entreprises puissent adhérer à un nombre de groupements qui soit fonction des succursales qu'elles comptent sur le territoire national., et même métropolitain Imaginez qu'une entreprise ait une succursale en Nouvelle-Calédonie : on ne va pas demander aux salariés de faire l'aller-retour toutes les semaines.
La commission a rejeté ces amendements. Je souhaiterais que la défiance laisse place à la confiance. Depuis le début des débats, nous sentons une défiance à l'encontre des groupements d'employeurs qui ne se justifie absolument pas.
Jusqu'à présent la spécificité des groupements d'employeurs tenait à ce que la décision de mettre un salarié à disposition relevait de leur seule appréciation de la gestion du groupement.
Quelle différence, importante, y a-t-il entre les contrats à durée déterminée, l'intérim et les groupements d'employeurs ? Dans les deux premiers cas, le code du travail prévoit les conditions dans lesquelles l'on peut recourir à ces formes dérogatoires de contrat de travail. Dans celui du groupement d'employeurs, en revanche, la question n'est pas abordée, ce qui est logique puisque l'objectif du groupement est de parvenir à utiliser en commun des salariés ou de permettre à un saisonnier de travailler toute l'année en enchaînant les activités. Les choses étaient claires.
Vous décidez à présent de supprimer les seuils – toutes les entreprises, y compris les très grandes, celles qui comptent 20 000 ou 30 000 salariés, pourront constituer des groupements d'employeurs – et en même temps, ce qui est redoutable, d'autoriser chaque entreprise à adhérer à plusieurs groupements d'employeurs.
Vous citez les exemples qui vous arrangent. Mais permettez-moi de prendre, non pas celui d'une petite entreprise qui aurait des succursales, mais celui d'une entreprise de 50 000 salariés. Aujourd'hui, elle n'est pas concernée par le dispositif que nous avons créé – j'en assume la paternité, mais je ne reconnais plus mon enfant.
Quel était l'esprit de ce dispositif ? Permettre à des entreprises trop petites pour embaucher de se regrouper pour pouvoir offrir à un salarié un contrat sur toute une année ou à plein temps, plutôt qu'une succession de petits contrats. Si une entreprise, seule, ne peut pas se payer un comptable, peut-être peut-elle en effet le faire à plusieurs. Même principe pour le travail saisonnier.
Mais ces questions ne se posent pas pour une entreprise de 50 000 salariés. Quel serait l'intérêt pour une telle entreprise d'adhérer à un groupement d'employeurs ? Aucun, en dehors de celui que votre texte va permettre : détourner le dispositif en organisant un système d'intérim low cost qui sera d'autant plus utilisé que le recours à ce type de prestations ne sera pas conditionné par le code du travail. D'où cet amendement.
Nous vous avions pourtant dit, avec Jean-Patrick Gilles, que nous étions prêts à discuter de la souplesse à accorder au dispositif, en passant par exemple de 300 à 500 salariés. Le problème réside dans le risque de détournement par les très grandes entreprises. Passer de deux groupements à quatre, cinq ou six, pourquoi pas, mais passer de deux à l'infini et de 300 salariés à 50 000 dénature complètement le groupement d'employeurs.
Si l'on veut éviter de telles conséquences, il faut placer les groupements d'employeurs dans les mêmes conditions que l'intérim ou les CDD, en prévoyant, dans la loi, les cas dans lesquels un groupement d'employeurs peut mettre des salariés à la disposition des entreprises ou des organismes adhérents à ce groupement. Ces cas, qui ont été énumérés dans l'amendement, sont ceux qui, à l'origine, nous avaient amenés à créer le groupement d'employeurs. Ils pourraient être modifiés.
Monsieur Vidalies, je ne prends pas les exemples qui m'arrangent mais ceux qui illustrent le mieux la situation des personnes qui veulent obtenir un CDI.
Quel avantage une entreprise de 50 000 salariés trouverait à adhérer à un groupement ? Aucun. C'est le groupement qui a intérêt à trouver dans cette entreprise les trois ou quatre mois de travail qui manquent au salarié déjà engagé dans une ou deux autres entreprises pour atteindre les 1607 heures et pouvoir signer un CDI à l'année.
Inversement, vous avez raison, le dispositif ne présente aucun intérêt pour les entreprises de 50 000 salariés.
Cela étant, monsieur Vidalies, n'êtes-vous pas choqué par le fait que les entreprises de 50 000 salariés recourent sans limite à l'intérim ?
Ce serait tout de même bien que cette mesure permette que soient signés quelques CDI.
La commission a rejeté cet amendement. Les groupements d'employeurs représentent 26 000 salariés contre 600 000 pour l'intérim. Qui va croire que les groupements d'employeurs pourraient constituer une sorte d'alternative low cost, pour reprendre vos termes, à l'intérim ? Fixer une liste des motifs légaux de recours aura pour effet de tuer les groupements d'employeurs qui ne sont déjà que peu développés. Admettons même que nous retenions votre liste, elle ne mentionne même pas le cas du remplacement d'un salarié ou du chef d'exploitation absent alors que c'est l'une des premières raisons pour lesquelles les groupements d'employeurs se sont développés au sein du monde agricole.
L'objet du groupement d'employeurs est de sécuriser les salariés dont les emplois seraient, sans cela, précaires car ils correspondraient à des tâches saisonnières, un remplacement ou une courte vacation spécialisée. Il est absurde et ridicule de prétendre limiter le recours aux groupements pour « pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice » : par définition, c'est au contraire le type d'emplois qui doivent être occupés par des salariés directs de ces entreprises.
(L'amendement n° 112 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour défendre l'amendement n° 121 .
Le débat avance finalement, puisque nous sommes d'accord sur le fait que la création des groupements d'employeurs permet de mutualiser les besoins et de créer des emplois. Tout le monde s'accorde également pour reconnaître un intérêt aux groupements d'employeurs à vocation d'insertion et de qualification.
Il est cependant évident que les groupements d'employeurs sont de plus en plus gros, avec de multiples activités. C'est cette dérive qui nous inquiète et nous amène à parler d'intérim low cost ou, à tout le moins, d'une sorte de grossiste de main-d'oeuvre.
Prenons ainsi le cas d'activités saisonnières sur une même saison. S'il est fait appel au groupement d'employeurs pour couvrir la période du pic saisonnier et que ce groupement d'employeurs embauche à son tour des personnes en CDD pour assurer la saison, le principe du groupement d'employeurs perd tout intérêt mais cette solution coûte moins cher que l'intérim. C'est de ce point de vue que l'on peut parler d'intérim low cost.
Le transfert de la saisonnalité sur le groupement d'employeurs permet d'échapper à tous les surcoûts liés à l'intérim. Ce n'est pas que nous défendions l'intérim mais par rapport à un dispositif qui va s'apparenter à du prêt de main-d'oeuvre, l'intérim – l'OIT l'a reconnu – est bien sécurisé dans notre pays et le salarié y gagne un peu plus.
La solution serait bien sûr de faire signer des CDI pour revenir au principe d'origine des groupements d'employeurs. La réalité n'est malheureusement pas aussi simple et je reprendrai l'exemple du groupement d'employeurs Alliance Emploi. On a beau nous dire que c'est formidable, il reste que plus de la moitié des salariés y sont engagés en CDD. Mon amendement est donc très simple : si l'on est bien d'accord sur le fait que l'objectif des groupements d'employeurs est de favoriser la signature de CDI, je vous propose d'imposer, non pas 100 % mais au moins 80 % de CDI dans le groupement d'employeurs. À cette condition, nous serons d'accord car c'est un véritable dispositif à mutualiser le travail que nous aurons créé. Sinon, nous pourrons continuer à parler d'intérim low cost.
Monsieur Gille, je suis autant d'accord avec vous que je l'étais avec M. Vidalies.
Un groupement d'employeurs mono-sectoriel ne peut pas fonctionner. Plusieurs saisons à la même date pour tous les salariés, c'est de l'intérim. Ce n'est ni plus ni moins un groupement d'employeurs déguisé en agence d'intérim. Il y en a très peu car cela implique que des entreprises s'associent, acceptent d'être solidairement responsables et de payer des permanents à l'année pour s'occuper d'un groupement qui ne fonctionnerait que quatre ou cinq mois.
Pourquoi les groupements doivent-ils être multi-sectoriels, voire à cheval sur les deux régimes, agricole et général ? Tout simplement pour multiplier les chances de trouver des heures de travail, si possible à moins de vingt kilomètres du domicile du salarié, et atteindre les 1607 heures par an – il faut en moyenne deux ou trois entreprises.
Pourquoi suis-je contre l'idée de 80 % de CDI ? La plupart des groupements qui fonctionnent bien tournent plutôt aujourd'hui autour de 60, 63 ou 70 %. C'est vrai, j'ai vu la semaine dernière à l'assemblée générale de l'Union des groupements d'employeurs de France – UGEF –, un groupement qui comptait 100 % de CDI, mais c'est assez exceptionnel. La tendance est de favoriser les CDI, en recherchant des heures de travail un peu partout. C'est pour cette raison que les grandes entreprises doivent pouvoir ouvrir largement des petits postes et c'est à cette condition que l'on atteindra des taux de 80 ou 90 % de CDI. En revanche, imposer une telle proportion conduirait à la perte des groupements d'employeurs. Cela me rappelle l'époque où M. Muzeau ou M. Chassaigne, je ne sais plus, réclamait que les groupements d'employeurs embauchent en CDI. Cela aurait signé leur fin !
On a avancé petit à petit. J'étais la semaine dernière, je vous le disais, à l'assemblée générale de l'UGEF : tous les présidents de groupements d'employeurs qui sont, je le rappelle, bénévoles, n'ont qu'une envie, mettre fin au statut précaire de ces personnes et les former. Les groupements présentent en général des taux de formation supérieurs à ceux des entreprises. Les salariés y sont performants et coûtent aussi cher que les intérimaires mais vous avez oublié de compter le coût de la responsabilité solidaire. Ce n'est pas rien d'être responsable solidaire dans un groupement alors qu'en engageant un intérimaire, l'on n'a pas à se préoccuper de savoir si l'entreprise d'à côté va déposer le bilan.
(L'amendement n° 121 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
L'adhésion d'une entreprise ou organisme de plus de trois cents salariés à un groupement d'employeurs est aujourd'hui subordonnée à la conclusion d'un accord collectif d'entreprise définissant les garanties accordées aux salariés du groupement d'employeurs. Cet amendement vise à maintenir ce dispositif que la proposition de loi a supprimé. Cette obligation avait été imposée par la loi en 2000 lorsqu'elle avait permis aux entreprises de plus de trois cents salariés d'adhérer aux groupements d'employeurs – ce seuil était auparavant passé de dix à cent salariés, en 1987, puis à trois cents, en 1993.
Vous justifiez cette surprenante suppression en parlant de recherche de « souplesse ». Dans votre bouche cela signifie, je le crains, qu'il faut démanteler les règles protectrices actuelles. En dehors de cet argument, nous ne vous avons pas entendu expliquer pourquoi vous refusiez de maintenir une règle qui existe depuis vingt ans. Nous demandons son rétablissement.
Avec toute la finesse que nous lui connaissons, M. Vidalies nous propose, de fait, un amendement de suppression déguisé. En effet, l'adoption de son amendement conduirait à maintenir en l'état l'article L. 1253-5 du code du travail, à quelques modifications de forme près.
L'avis de la commission est défavorable.
L'article 9 aménage les règles de responsabilité applicables aux membres de groupements d'employeurs en permettant que l'on puisse déroger au principe actuel de responsabilité solidaire des membres du groupement à l'égard des salariés et des organismes sociaux.
De l'avis même du rapporteur de la commission des affaires sociales, cette règle est protectrice pour les salariés et les organismes sociaux. Selon lui, elle constitue aussi un « élément fédérateur renforçant l'implication des entreprises dans le fonctionnement du groupement ».
Selon Michel Desurmont, interrogé en 2004 alors qu'il était délégué général de la Fédération française des groupements d'employeurs, ce qui fait justement la particularité de ce groupement, c'est que ses membres sont solidairement responsables. Je le cite : « C'est un engagement très différent de celui d'un client qui passe un contrat de service avec une agence de travail temporaire. Si un des membres est défaillant, ce sont les autres qui paient à sa place. Les règles de cooptation des nouveaux adhérents prennent donc une place toute particulière dans les statuts. Les membres doivent pouvoir veiller à ce que le groupement ne soit pas tenu d'accepter une entreprise trop fragile financièrement. Cela explique également que les groupements doivent avoir une gestion financière extrêmement rigoureuse. »
Ces excellents arguments militent en faveur du maintien de la responsabilité solidaire des membres du groupement en matière de dettes salariales et de cotisations sociales. C'est l'objet de notre amendement.
La parole est à M. Jean-René Marsac, pour présenter l'amendement n° 115 .
L'article 9 module et, au final, affaiblit la solidarité entre les entreprises membres du groupement. Pour autant, vous ne donnez pas des garanties suffisantes pour que les salariés soient assurés que la solidarité fonctionnera bien à leur égard immédiatement et totalement, sans conflit et sans procédure judiciaire.
Cet article introduit un déséquilibre aux dépens des salariés, c'est pourquoi nous demandons sa suppression.
Vous reconnaissez les groupements d'entreprises comme « votre enfant » : souvenez-vous qu'ils ont été créés pour les petites entreprises ! En refusant l'aménagement de la responsabilité solidaire, vous empêchez ces dernières d'y adhérer.
Peut-être imaginiez-vous en 1985 que les groupements compteraient quatre ou cinq salariés ? Aujourd'hui, certains dénombrent plus d'une centaine d'équivalents temps plein. Une entreprise de trois salariés qui veut recruter un salarié qualifié ou un cadre pour quatre mois n'adhérera pas à un groupement d'employeurs si elle devient responsable solidairement, à parts égales avec d'autres membres beaucoup plus gros.
Nous voulons seulement qu'un accord interne au groupement permette une répartition de la responsabilité au prorata de l'utilisation des salariés par chaque entreprise.
Nous sommes défavorables aux deux amendements.
Même avis.
Je n'ai pas bien compris les explications du rapporteur, qui m'ont paru un peu brèves.
Par ailleurs, les propos de Michel Desurmont, ancien délégué général de la Fédération française des groupements d'employeurs sont très clairs et ils militent en faveur de la suppression de l'article 9. Aujourd'hui, vous semblez dire que cet article résulte d'une demande de cette fédération : cela me semble un peu curieux.
(Les amendements identiques nos 21 et 115 ne sont pas adoptés.)
Quelle est la situation des salariés d'un groupement d'employeurs lorsque l'un de ses membres fait faillite ?
Aujourd'hui, le principe de solidarité permet de désigner comme interlocuteur du salarié l'ensemble du groupement. Le droit positif prévoit qu'en cas de défaillance de l'un des membres du groupement, les autres, qu'ils soient ou non utilisateurs du salarié concerné sont conjointement responsables du passif social du groupement.
Avec votre texte, vous souhaitez mettre fin à la solidarité à l'égard des créanciers extérieurs…
Vous voulez que les statuts du groupement prévoient des règles de répartition des dettes entre les membres, opposables aux créanciers.
Pour ce qui concerne les créances commerciales dites chirographaires et l'activité externe à l'entreprise, je vous avoue que cela ne me gêne pas : la question relève du droit commercial.
En revanche, il en est tout autrement des créances des salariés. Nous sommes cette fois dans le domaine du droit social. Si une entreprise, membre d'un groupement, dépose le bilan, la garantie des AGS ne joue pas pour le salarié créancier puisque le contrat de travail perdure. Vers qui va-t-il se tourner ? Le groupement d'employeurs sera-t-il toujours responsable solidairement des dettes à l'égard des salariés et des organismes de cotisations obligatoires ? Si ce n'est plus le cas, ces créanciers seraient renvoyés au rang de créanciers ordinaires.
L'amendement n° 116 dispose que : « Les statuts du groupement d'employeurs peuvent prévoir des règles de répartition des dettes à l'égard des salariés et des organismes créanciers de cotisations obligatoires entre les membres du groupement. »
L'amendement n° 117 ajoute que : « La répartition des dettes ne peut en aucun cas être opposée aux salariés du groupement qui bénéficient de droit du principe de solidarité des adhérents du groupement. »
Si nous adoptions ces amendements, en particulier le second, nous respecterions l'esprit du groupement d'employeurs tout en introduisant une certaine souplesse ce qui, en tout état de cause, ne doit pas se faire sur le dos des salariés.
Monsieur Vidalies, nous ne supprimons pas la responsabilité solidaire : nous l'aménageons. La répartition des dettes sera proportionnelle à l'utilisation des salariés par les entreprises du groupement.
Si une entreprise disparaît, les salariés continueront à être payés puisqu'ils sont salariés du groupement d'employeurs, association relevant de la loi de 1901. Le groupement se retournera vers les autres membres. Si une entreprise utilise deux salariés parmi les cent salariés employés par les entreprises non défaillantes du groupement, elle paiera 2 % des créances.
Monsieur Taugourdeau, qu'en est-il si une entreprise ne paie pas ? Aujourd'hui le groupement est solidairement responsable de son passif social, et la répartition que vous évoquez n'est pas opposable au salarié. Vous fragilisez considérablement ce dernier s'il doit en tenir compte et allez récupérer 2 % chez l'un et 30 % chez l'autre.
Je me préoccupe seulement du salarié et de la façon dont il pourra récupérer ce qui lui est dû – pour ce qui est de la répartition interne au groupement tant qu'elle ne le concerne pas, elle ne m'intéresse pas.
Le groupement paiera le salarié sur ses réserves. Il dispose de provisions.
Par ailleurs, dans plus de 90 % des cas, le groupement permet aussi au salarié de se recaser. Je peux citer l'exemple de deux entreprises de ma circonscription qui ont dû fermer : sur un total de trente salariés, vingt-huit ont été réemployés au sein du groupement.
C'est tout de même très important. Nous parlons des conséquences d'une fermeture d'entreprise.
Monsieur Vidalies, votre amendement n° 116 est d'ores et déjà satisfait par la proposition de loi.
Il nous a permis d'alimenter une intéressante discussion mais je vous demande de bien vouloir le retirer.
À nouveau, je constate la finesse de vos procédés : l'adoption de l'amendement n° 117 reviendrait à supprimer l'article 9 de la proposition de loi. Nous y sommes donc défavorables.
Défavorable.
La finesse de mes amendements n'est pas en cause. Ce n'est pas rien de passer d'une situation dans laquelle les salariés créanciers peuvent s'adresser à un interlocuteur responsable solidairement, à un système où ils se verront opposer une répartition décidée entre les membres du groupement.
L'amendement n° 117 précise seulement que les règles de répartition internes que vous appelez de vos voeux ne sont pas opposables aux salariés. Il respecte tout simplement l'esprit des groupements d'employeurs. Monsieur le rapporteur, vous venez de nous dire que l'adoption de cet amendement remettrait en cause la logique de la proposition de loi : c'est donc bien que celle-ci consiste à remettre en cause, au détriment des salariés, le régime de responsabilité solidaire en vigueur.
L'adhésion d'une entreprise ou organisme de plus de trois cents salariés à un groupement d'employeurs est aujourd'hui subordonnée à la conclusion d'un accord collectif d'entreprise définissant les garanties accordées aux salariés du groupement d'employeurs. Cet amendement vise à maintenir ce dispositif que la proposition de loi a supprimé. Cette obligation avait été imposée par la loi en 2000 lorsqu'elle avait permis aux entreprises de plus de trois cents salariés d'adhérer aux groupements d'employeurs – ce seuil était auparavant passé de dix à cent salariés, en 1987, puis à trois cents, en 1993.
Vous justifiez cette surprenante suppression en parlant de recherche de « souplesse ». Dans votre bouche cela signifie, je le crains, qu'il faut démanteler les règles protectrices actuelles. En dehors de cet argument, nous ne vous avons pas entendu expliquer pourquoi vous refusiez de maintenir une règle qui existe depuis vingt ans. Nous demandons son rétablissement.
Avec toute la finesse que nous lui connaissons, M. Vidalies nous propose, de fait, un amendement de suppression déguisé. En effet, l'adoption de son amendement conduirait à maintenir en l'état l'article L. 1253-5 du code du travail, à quelques modifications de forme près.
L'avis de la commission est défavorable.
L'article 9 aménage les règles de responsabilité applicables aux membres de groupements d'employeurs en permettant que l'on puisse déroger au principe actuel de responsabilité solidaire des membres du groupement à l'égard des salariés et des organismes sociaux.
De l'avis même du rapporteur de la commission des affaires sociales, cette règle est protectrice pour les salariés et les organismes sociaux. Selon lui, elle constitue aussi un « élément fédérateur renforçant l'implication des entreprises dans le fonctionnement du groupement ».
Selon Michel Desurmont, interrogé en 2004 alors qu'il était délégué général de la Fédération française des groupements d'employeurs, ce qui fait justement la particularité de ce groupement, c'est que ses membres sont solidairement responsables. Je le cite : « C'est un engagement très différent de celui d'un client qui passe un contrat de service avec une agence de travail temporaire. Si un des membres est défaillant, ce sont les autres qui paient à sa place. Les règles de cooptation des nouveaux adhérents prennent donc une place toute particulière dans les statuts. Les membres doivent pouvoir veiller à ce que le groupement ne soit pas tenu d'accepter une entreprise trop fragile financièrement. Cela explique également que les groupements doivent avoir une gestion financière extrêmement rigoureuse. »
Ces excellents arguments militent en faveur du maintien de la responsabilité solidaire des membres du groupement en matière de dettes salariales et de cotisations sociales. C'est l'objet de notre amendement.
La parole est à M. Jean-René Marsac, pour présenter l'amendement n° 115 .
L'article 9 module et, au final, affaiblit la solidarité entre les entreprises membres du groupement. Pour autant, vous ne donnez pas des garanties suffisantes pour que les salariés soient assurés que la solidarité fonctionnera bien à leur égard immédiatement et totalement, sans conflit et sans procédure judiciaire.
Cet article introduit un déséquilibre aux dépens des salariés, c'est pourquoi nous demandons sa suppression.
Vous reconnaissez les groupements d'entreprises comme « votre enfant » : souvenez-vous qu'ils ont été créés pour les petites entreprises ! En refusant l'aménagement de la responsabilité solidaire, vous empêchez ces dernières d'y adhérer.
Peut-être imaginiez-vous en 1985 que les groupements compteraient quatre ou cinq salariés ? Aujourd'hui, certains dénombrent plus d'une centaine d'équivalents temps plein. Une entreprise de trois salariés qui veut recruter un salarié qualifié ou un cadre pour quatre mois n'adhérera pas à un groupement d'employeurs si elle devient responsable solidairement, à parts égales avec d'autres membres beaucoup plus gros.
Nous voulons seulement qu'un accord interne au groupement permette une répartition de la responsabilité au prorata de l'utilisation des salariés par chaque entreprise.
Nous sommes défavorables aux deux amendements.
Même avis.
Je n'ai pas bien compris les explications du rapporteur, qui m'ont paru un peu brèves.
Par ailleurs, les propos de Michel Desurmont, ancien délégué général de la Fédération française des groupements d'employeurs sont très clairs et ils militent en faveur de la suppression de l'article 9. Aujourd'hui, vous semblez dire que cet article résulte d'une demande de cette fédération : cela me semble un peu curieux.
(Les amendements identiques nos 21 et 115 ne sont pas adoptés.)
Quelle est la situation des salariés d'un groupement d'employeurs lorsque l'un de ses membres fait faillite ?
Aujourd'hui, le principe de solidarité permet de désigner comme interlocuteur du salarié l'ensemble du groupement. Le droit positif prévoit qu'en cas de défaillance de l'un des membres du groupement, les autres, qu'ils soient ou non utilisateurs du salarié concerné sont conjointement responsables du passif social du groupement.
Avec votre texte, vous souhaitez mettre fin à la solidarité à l'égard des créanciers extérieurs…
Vous voulez que les statuts du groupement prévoient des règles de répartition des dettes entre les membres, opposables aux créanciers.
Pour ce qui concerne les créances commerciales dites chirographaires et l'activité externe à l'entreprise, je vous avoue que cela ne me gêne pas : la question relève du droit commercial.
En revanche, il en est tout autrement des créances des salariés. Nous sommes cette fois dans le domaine du droit social. Si une entreprise, membre d'un groupement, dépose le bilan, la garantie des AGS ne joue pas pour le salarié créancier puisque le contrat de travail perdure. Vers qui va-t-il se tourner ? Le groupement d'employeurs sera-t-il toujours responsable solidairement des dettes à l'égard des salariés et des organismes de cotisations obligatoires ? Si ce n'est plus le cas, ces créanciers seraient renvoyés au rang de créanciers ordinaires.
L'amendement n° 116 dispose que : « Les statuts du groupement d'employeurs peuvent prévoir des règles de répartition des dettes à l'égard des salariés et des organismes créanciers de cotisations obligatoires entre les membres du groupement. »
L'amendement n° 117 ajoute que : « La répartition des dettes ne peut en aucun cas être opposée aux salariés du groupement qui bénéficient de droit du principe de solidarité des adhérents du groupement. »
Si nous adoptions ces amendements, en particulier le second, nous respecterions l'esprit du groupement d'employeurs tout en introduisant une certaine souplesse ce qui, en tout état de cause, ne doit pas se faire sur le dos des salariés.
Monsieur Vidalies, nous ne supprimons pas la responsabilité solidaire : nous l'aménageons. La répartition des dettes sera proportionnelle à l'utilisation des salariés par les entreprises du groupement.
Si une entreprise disparaît, les salariés continueront à être payés puisqu'ils sont salariés du groupement d'employeurs, association relevant de la loi de 1901. Le groupement se retournera vers les autres membres. Si une entreprise utilise deux salariés parmi les cent salariés employés par les entreprises non défaillantes du groupement, elle paiera 2 % des créances.
Monsieur Taugourdeau, qu'en est-il si une entreprise ne paie pas ? Aujourd'hui le groupement est solidairement responsable de son passif social, et la répartition que vous évoquez n'est pas opposable au salarié. Vous fragilisez considérablement ce dernier s'il doit en tenir compte et allez récupérer 2 % chez l'un et 30 % chez l'autre.
Je me préoccupe seulement du salarié et de la façon dont il pourra récupérer ce qui lui est dû – pour ce qui est de la répartition interne au groupement tant qu'elle ne le concerne pas, elle ne m'intéresse pas.
Le groupement paiera le salarié sur ses réserves. Il dispose de provisions.
Par ailleurs, dans plus de 90 % des cas, le groupement permet aussi au salarié de se recaser. Je peux citer l'exemple de deux entreprises de ma circonscription qui ont dû fermer : sur un total de trente salariés, vingt-huit ont été réemployés au sein du groupement.
C'est tout de même très important. Nous parlons des conséquences d'une fermeture d'entreprise.
Monsieur Vidalies, votre amendement n° 116 est d'ores et déjà satisfait par la proposition de loi.
Il nous a permis d'alimenter une intéressante discussion mais je vous demande de bien vouloir le retirer.
À nouveau, je constate la finesse de vos procédés : l'adoption de l'amendement n° 117 reviendrait à supprimer l'article 9 de la proposition de loi. Nous y sommes donc défavorables.
Défavorable.
La finesse de mes amendements n'est pas en cause. Ce n'est pas rien de passer d'une situation dans laquelle les salariés créanciers peuvent s'adresser à un interlocuteur responsable solidairement, à un système où ils se verront opposer une répartition décidée entre les membres du groupement.
L'amendement n° 117 précise seulement que les règles de répartition internes que vous appelez de vos voeux ne sont pas opposables aux salariés. Il respecte tout simplement l'esprit des groupements d'employeurs. Monsieur le rapporteur, vous venez de nous dire que l'adoption de cet amendement remettrait en cause la logique de la proposition de loi : c'est donc bien que celle-ci consiste à remettre en cause, au détriment des salariés, le régime de responsabilité solidaire en vigueur.
Je suis saisi d'un amendement n° 32 , portant article additionnel après l'article 9.
La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau.
Afin de répondre à une préoccupation exprimée en commission par l'opposition, nous proposons de préciser que les collectivités territoriales, qui ne présentent pas de risque de défaut de paiement, ne sont pas solidairement responsables avec les autres membres du groupement des dettes de celui-ci.
La commission n'a pas examiné cet amendement ; je m'en remets à la sagacité du ministre.
Monsieur le ministre, une responsabilité supplémentaire vous incombe. Pouvez-vous nous donner l'avis du Gouvernement, avec la clarté et la concision dont vous êtes coutumier ?
Vous placez décidément la barre très haut, monsieur le président. (Sourires.)
Monsieur Taugourdeau, puisque je ne peux sous-amender votre amendement, je vous suggère de retirer celui-ci au profit d'un amendement du Gouvernement, dont la rédaction est différente du vôtre. Je comprends votre préoccupation de ne pas voir les entreprises reporter leurs charges sur les collectivités locales, qui ne présentent pas de risque de défaut. Aussi l'amendement que je vous proposerai a-t-il pour objet de permettre que la dérogation prévue à l'article 9 s'applique à la situation spécifique des collectivités territoriales.
Cet amendement viserait ainsi à remplacer, à l'alinéa 1er de l'article 9, les mots : « une phrase » par les mots « deux phrases » et à compléter l'alinéa 2 du même article par la phrase suivante : « Ils peuvent également prévoir des modalités de responsabilité spécifiques pour les collectivités territoriales membres du groupement.
Si vous acceptez de retirer votre amendement, je communiquerai le mien au service de la séance. Je n'ai pas voulu le faire avant que vous ne présentiez le vôtre, afin de ne pas préempter quoi que ce soit.
Monsieur le ministre, je vais suspendre la séance afin que l'on puisse parfaire la rédaction de votre amendement : l'article 9 ayant été adopté, elle ne peut convenir en l'état.
Après l'article 9
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures trente-cinq, est reprise à dix-huit heures quarante-cinq.)
La séance est reprise.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 142 du Gouvernement, portant article additionnel après l'article 9. Cet amendement, que M. le ministre nous a présenté tout à l'heure, a recueilli un avis favorable de la commission après le retrait de l'amendement n° 32 de M. Taugourdeau.
(L'amendement n° 142 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 118 , portant article additionnel après l'article 9 bis.
La parole est à M. Alain Vidalies.
L'amendement n° 118 est un amendement de précision : il traite d'un cas de figure qui n'existait pas forcément jusqu'à présent. Dès lors qu'une entreprise aura toute liberté d'adhérer à un nombre très important de groupements, il pourra arriver que plusieurs groupements soient amenés à intervenir dans une même entreprise utilisatrice.
Par cohérence avec le principe que nous avons adopté précédemment, nous proposons de préciser que si plusieurs groupements d'employeurs interviennent dans la même entreprise utilisatrice, les salariés mis à disposition bénéficieront de la convention collective la plus favorable.
Cet amendement est satisfait par l'article 7 A inséré à l'initiative de Jean-Charles Taugourdeau, qui garantit l'égalité de traitement aux salariés. Par conséquent, j'invite M. Vidalies à le retirer ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Même avis : cet amendement est satisfait.
Dans la mesure où, contrairement à ce qui vient d'être dit, mon amendement n'est pas satisfait, je le maintiens.
(L'amendement n° 118 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
L'article L. 1253-20 du code du travail restreint le champ des tâches pouvant être confiées aux salariés d'un groupement mis à disposition d'une collectivité territoriale : ils ne peuvent ainsi se voir confier des tâches que dans le cadre d'un service public industriel et commercial, environnemental ou de l'entretien des espaces verts ou des espaces publics. Il interdit également que ces tâches constituent l'activité principale des salariés du groupement et limite à un mi-temps le temps qui peut y être consacré par ces salariés.
La nouvelle rédaction proposée par l'article 10 fait disparaître toutes ces restrictions : d'une part, les salariés pourront se voir confier toute tâche au sein de la collectivité territoriale à laquelle il est mis à disposition, et ces tâches pourront constituer l'activité principale du salarié tant qu'elles ne constituent pas l'activité principale du groupement ; d'autre part, les groupements pourront mettre leurs salariés à disposition de ces collectivités à plein-temps.
La mise à disposition de salariés à temps complet à une collectivité membre du groupement pour y effectuer toute tâche sans limitation, y compris administrative, risque de déboucher sur des situations de gestion de fait, ce qui constitue une manière cavalière d'externaliser les ressources humaines de la collectivité et de s'exonérer de l'embauche de fonctionnaires ou de la titularisation de contractuels.
Cet article présente donc un risque non négligeable d'explosion du prêt de main-d'oeuvre, pratique à laquelle nous sommes fermement opposés : les salariés ne sont pas des objets déplaçables au gré des choix des gestionnaires.
La parole est à M. Jean-René Marsac, pour défendre l'amendement n° 119 .
Avec votre permission, je défendrai par la même occasion l'amendement n° 120 , monsieur le président.
En complément de ce que vient de dire M. Muzeau, j'ajouterai que l'embauche des agents contractuels doit être justifiée par des motifs précis et soumise à un contrôle de légalité. Il est à craindre qu'en élargissant la capacité des collectivités territoriales à faire appel aux groupements d'employeurs pour des personnels à temps partiel, on en vienne à permettre le détournement des règles d'embauche des agents contractuels.
Ajoutons que la question de la gestion de fait n'est, me semble-t-il, toujours pas réglée. Vous avez évoqué tout à l'heure les conditions dans lesquelles il y a, ou non, solidarité entre une collectivité territoriale et une entreprise privée dans le cadre des groupements d'employeurs, mais vous n'avez rien dit de la participation du représentant de la collectivité à la gestion du groupement lui-même. Si je ne suis pas opposé à l'idée que les collectivités territoriales se trouvent associées d'une manière ou d'une autre aux groupements, il me semble toutefois que cette pratique doit être sécurisée.
L'amendement n° 120 est un amendement de repli pour le cas où l'article ne serait pas supprimé. Nous proposons de maintenir un encadrement limitant l'activité des salariés du groupement effectuée pour le compte d'une collectivité territoriale.
Une fois de plus, il me semble que nous devons nous placer du point de vue du salarié. Aujourd'hui, les collectivités territoriales utilisent déjà des sociétés extérieures prestataires de services. Tous les ans, les conseils municipaux votent l'emploi de travailleurs saisonniers ou occasionnels de date à date.
Dans les collectivités territoriales comme dans les entreprises, il faut plusieurs séquences de travail pour faire un emploi – et en tout état de cause, les emplois dont il est ici question ne pourraient pas donner lieu à la création de postes permanents au sein des collectivités.
Quant à la gestion de fait, je ne vois pas ce qui justifie que vous l'évoquiez, à moins que vous ne cherchiez à susciter des craintes injustifiées. Je le répète, nous avons avant tout besoin d'un maximum de séquences possible dans un rayon de vingt kilomètres autour d'un salarié, afin de permettre à celui-ci de bénéficier d'un CDI.
Je suis saisi d'un amendement n° 128 .
La parole est à M. Alain Vidalies.
Cet amendement vise à encadrer le recours aux salariés mis à disposition d'une collectivité territoriale, compte tenu de la suppression des règles de précaution qui permettaient, jusqu'à présent, d'éviter le mélange des genres entre les salariés de collectivités locales et ceux appartenant à des structures privées. Il nous semble qu'il ne faut pas faire n'importe quoi en matière de statut des personnels de la fonction publique.
Sans remettre en cause le principe de la mise à disposition de salariés auprès d'une collectivité territoriale, nous souhaitons préciser que l'utilisation d'un groupement d'employeurs par une collectivité locale ne peut se faire que pour pourvoir à une tâche ne justifiant pas le recrutement d'un salarié à temps complet. Il convient également d'éviter de créer une possibilité, par la mise à disposition de salariés de groupements, de contourner l'obligation légale de justifier le recours à des agents contractuels.
Nous prenons acte de votre volonté d'élargir le champ du recours aux groupements d'employeurs. Toutefois, cela ne doit pas se traduire par la suppression de toutes les règles relatives aux emplois de la fonction publique territoriale, ce qui serait évidemment dangereux et attentatoire aux statuts de la fonction publique. Les deux conditions contenues dans notre amendement viendraient donc, de notre point de vue, utilement compléter le texte.
La commission n'a pas examiné cet amendement mais, à titre personnel, j'y suis défavorable. Nous avons déjà eu le même débat au sujet de l'amendement n° 112 . Si l'on veut tuer les groupements d'employeurs, il n'y a qu'à établir, comme vous le faites, une liste de recours parmi lesquels ne figure même pas le cas de remplacement temporaire d'un absent !
Je suis saisi d'un amendement n° 33 , portant article additionnel après l'article 10.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
Cet amendement m'est très cher : ce n'est jamais que la troisième fois que je le présente ici, après qu'il a déjà été adopté deux fois, et à l'unanimité !
Nous avons dit tout à l'heure que le salarié d'un groupement est assimilé à un permanent intermittent dans l'entreprise auprès de laquelle il est mis à disposition. À partir du moment où, durant une période de vingt ans, le salarié d'un groupement va se trouver trois, quatre ou cinq mois par an dans une entreprise, il me paraît difficile de soutenir qu'il ne participe pas au développement et à la croissance de cette entreprise – d'autant que, par définition, c'est lors de périodes de forte activité que sa présence est requise.
Dès lors, il me paraît juste qu'il bénéficie de tous les dispositifs d'intéressement et de participation mis en oeuvre dans l'entreprise où il est mis à disposition. À cet effet, nous proposons de remplacer, au dernier alinéa des articles L. 3312-2 et L. 3322-2 et à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 3332-2 du code du travail, les mots : « peut bénéficier » par le mot : « bénéficie ».
Je rappelle qu'à partir d'un certain temps de présence, les travailleurs saisonniers ont droit à la participation lorsque celle-ci est prévue par l'entreprise qui les emploie – car il s'agit bien, je le précise, de la participation distribuée par l'entreprise et non par le groupement qui n'a pas vocation à réaliser des bénéfices, mais simplement à équilibrer ses comptes.
La commission n'a pas examiné cet amendement. À titre personnel, je m'interroge sur la possibilité d'imposer que les salariés mis à disposition par un groupement d'employeurs bénéficient automatiquement de la participation et de l'intéressement.
En effet, la participation et l'intéressement sont mis en place au moyen d'un accord interne dans les entreprises. L'amendement proposé pourrait signifier que le législateur impose une option indépendamment de ce que peuvent être les stipulations des accords, y compris ceux en vigueur actuellement, dont l'équilibre pourrait être remis en cause.
Par ailleurs, je me demande si cet amendement n'est pas satisfait par l'article 7 A, introduit par Jean-Charles Taugourdeau : à partir du moment où l'égalité de traitement est garantie, la prime de poste qui peut être versée par le groupement ne devra-t-elle pas intégrer l'équivalent des éventuelles primes de participation et d'intéressement ? J'aimerais connaître l'avis du Gouvernement sur ce point.
Monsieur Taugourdeau, vous savez que nous veillons à faciliter le développement des groupements d'employeurs. Les salariés de ces groupements peuvent avoir accès, par le biais d'un accord, à la participation. Nous ne voulons pas réduire la participation pour les salariés permanents. Si tel était le cas, ce serait un frein à l'adhésion aux groupements d'employeurs. Mais l'accord est nécessaire, car, sans lui, cela ne peut pas bien fonctionner. Qui plus est, la règle que vous proposez ne s'applique pas à l'intérim.
Tel est la raison pour laquelle, et j'en suis désolé, je suis défavorable à votre amendement.
Précisément, monsieur le ministre, un salarié d'un groupement d'employeurs n'est pas un salarié d'une agence d'intérim. Aujourd'hui, une entreprise, dont l'activité est très saisonnière, est contrainte de distribuer une participation à ses saisonniers et non aux salariés de groupements d'employeurs, en CDI intermittent, qui seront présents pendant vingt ou trente ans. C'est profondément injuste. C'est pourquoi je propose cet amendement depuis neuf ans. Nous l'avons déjà voté ensemble, monsieur le ministre !
Ah oui ?
Cet amendement a été voté une fois à l'unanimité contre l'avis du Gouvernement et de la commission, et une seconde fois avec l'avis favorable de la commission et du Gouvernement.
Mais le « peut » est dans la loi !
Certes, mais le décret est mal rédigé, monsieur le ministre ! En effet, aux termes de ce décret, le groupement, dont ce n'est pas la vocation, distribue la participation. Les groupements qui ont consenti un effort et qui ont distribué, comme il est normal, une prime de 150, voire 200 euros par an à leurs salariés, doivent, à lire le décret, revoir tous leurs accords. C'est la raison pour laquelle je souhaitais remplacer les mots « peut bénéficier » par le mot « bénéficie ».
Il suffit de mettre un accord en place !
Si vous me dites que j'ai voté cet amendement avec vous, je veux bien vous croire, car il m'est aussi arrivé, ces dernières années, d'être député !
Alors je n'ai pas voté cet amendement avec vous, je lui ai donné un avis favorable !
C'est grâce à vous, vous aviez alors donné un avis favorable à mon amendement !
Que dit l'article L. 3322-2 du code du travail ? « Le salarié d'un groupement d'employeurs peut bénéficier du dispositif ». Êtes-vous d'accord, monsieur Taugourdeau ?
L'article D. 3321-2 précise, quant à lui, que les salariés d'un groupement d'employeurs qui n'a pas mis en place un dispositif de participation peuvent bénéficier des dispositifs de participation mis en place dans chacune des entreprises du groupement auprès de laquelle ils sont mis à disposition si l'accord le prévoit. Que puis-je préciser d'autre ?
Il faut ôter la clause qui nuit aux salariés des groupements. Je le répète, les groupements n'ont pas vocation à verser de la participation ou de l'intéressement. Ce sont des associations et elles n'ont pas pour mission de faire du résultat.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je tiens juste à vous indiquer que des gens lisent le Journal officiel et d'autres suivent nos débats. Or je crains que ce travail d'ordre réglementaire ne leur semble quelque peu confus et obscur ! Vos interpellations sont incompréhensibles. Ce travail aurait sans doute pu être fait en commission. Peut-être pouvez-vous donc conclure sur ce sujet. Mais je vous invite à terminer votre propos, monsieur le rapporteur pour avis. Si la réponse du ministre vous a convaincu, sans doute retirerez-vous votre amendement, sinon, vous le maintiendrez et je le soumettrai au vote. Mais venons-en au fait !
La séance est suspendue pour quelques instants.
Après l'article 10
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue, est reprise à dix-neuf heures cinq.)
Si je donne droit à la demande de M. Taugourdeau, je crains que le niveau de participation dans les entreprises ne diminue. Je ne pense pas que ce soit satisfaisant, car cela risquera à un moment donné de susciter des réticences face aux groupements d'employeurs, ce que ni vous ni moi ne voulons. En revanche, des interprétations peuvent différer sur le terrain. Dans ce cas, je peux demander à Jean-Denis Combrexelle, Directeur général du travail, de rédiger une lettre circulaire permettant d'apporter les précisions nécessaires et de couper court à toute différence d'appréciation. Je ne crains pas le cumul de la participation dans l'entreprise ou dans le groupement – d'ailleurs, je m'en moque – mais je ne veux pas que la part globalement attribuée à la participation dans l'entreprise diminue. Je vois que mes propos suscitent chez vous l'enthousiasme ! Une chose est certaine : la lettre circulaire permettra d'éviter l'écueil et apportera des réponses.
Sous le bénéfice de ces explications, dois-je comprendre que vous retirez votre amendement, monsieur Taugourdeau ?
Je suis saisi d'un amendement n° 31 .
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour le soutenir.
Afin de faciliter l'embauche de travailleurs handicapés, cet amendement tend à compléter l'article L. 5 212-14 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé : « les personnes mises à disposition de l'entreprise par un groupement d'employeurs sont prises en compte dans les mêmes conditions que les salariés de l'entreprise. » Il est aisé d'aménager certains postes sur des périodes d'activité, ce qui permettra d'offrir un CDI dans deux ou trois entreprises à des travailleurs handicapés, donc de ne plus les laisser pour compte moyennant paiement d'une cotisation.
(L'amendement n° 31 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
Sur l'article 11, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à M. Roland Muzeau.
Sur le contrat de sécurisation professionnelle dont l'objet est de permettre aux licenciés pour motif économique d'entreprises de moins de 1 000 salariés de bénéficier de mesures d'accompagnement et d'indemnisation renforcées favorisant leur reclassement rapide dans l'emploi, l'accord unanime semble compromis. Des voix se sont fait entendre, y compris au sein des organisations syndicales signataires jugeant l'accord globalement positif, pour regretter que le nouveau dispositif issu de la fusion de la convention de reclassement personnalisé et du contrat de transition professionnelle, ne soit pas l'occasion d'en élargir la cible. Si son expérimentation sur certains bassins d'emploi a bien été prévue pour son extension à des publics précaires, demandeurs d'emploi en fin de CDD, en fin de mission d'intérim ou de fin de contrat de chantier, elle se limite à l'accompagnement des intéressés et exclut toute mesure d'indemnisation. Le dispositif continuera donc à ne concerner que les salariés licenciés pour raison économique, lesquels licenciements représentent une très faible part des motifs de rupture du contrat de travail ; et encore, il sera fermé aux salariés avant un an d'ancienneté. Nouveauté importante, les salariés devront maintenant justifier d'une ancienneté d'un an, alors qu'aujourd'hui une telle condition n'est pas requise pour bénéficier du contrat de transition professionnelle.
Nos amendements proposent donc d'aligner sur le CTP ce nouveau dispositif, en supprimant la condition d'ancienneté. Un amendement de repli précise qu'entrent aussi dans le dispositif du contrat de sécurisation professionnelle les salariés qui, bien que ne remplissant pas cette condition d'ancienneté, justifient des périodes d'affiliation requises pour avoir droit aux allocations chômage. Ce correctif avait été prévu pour la convention de reclassement personnalisé. Mais vous l'avez bien compris, nous n'en débattrons probablement pas, car l'article 40 a encore frappé…
L'article 11 consacre la création du contrat de sécurisation professionnelle. Il était effectivement urgent de légiférer en la matière, car ce contrat ne survit que grâce à un décret de prorogation à la valeur juridique bien faible. Il convient donc de le prolonger et de le généraliser en le fusionnant avec la convention de reclassement professionnel, suivant en cela les recommandations du rapport de Philippe Dole, inspecteur à l'Inspection générale des affaires sociales.
Ce nouveau dispositif issu de la fusion est relativement onéreux, en termes notamment de rémunérations, et ne concerne que les licenciés économiques dont le nombre est proportionnellement en baisse dans notre pays si on le compare à l'importance prise par la rupture conventionnelle.
Comme le disait Roland Muzeau, l'un des enjeux est aussi d'en faire bénéficier de nouveaux publics tels que ceux qui ne cotisent que depuis un an, les fins de CDD, de mission d'intérim ou de chantier. Cette expérimentation, à laquelle nous sommes très attentifs, est prévue dans l'accord. Je pense toutefois que l'on peut être un tout petit peu plus optimiste que M. Muzeau. Force est de reconnaître que la négociation collective a abouti à un accord a priori unanime. Nous sommes favorables à sa transcription dans la loi parce que nous respectons le dialogue social et que nous avons porté la généralisation du CTP. Il n'en demeure pas moins que la question d'un accord définitif sur les financements est encore en débat entre les partenaires sociaux et entre les partenaires sociaux et l'État.
À ce titre, et conformément à l'article 24 de l'ANI, nous défendrons un amendement précisant qu'une annexe financière est négociée chaque année entre l'État et les partenaires sociaux. C'est une garantie supplémentaire, même si elle n'est peut-être pas totale, s'agissant de la participation de chacun.
Nous serons attentifs aux points clés de ce dispositif que sont l'animation, sa gouvernance territoriale et l'accompagnement.
Nous verrons si tout fonctionne bien avec ce dispositif, si les crédits nécessaires sont mis en place. Une forte approche territoriale et un accompagnement renforcé, comme le réclament de nombreux rapports, telles sont les clés de la réussite d'une politique de l'emploi.
Il s'agit de reprendre les termes de la convention de reclassement personnalisé et d'être plus précis quant au formalisme à respecter.
(L'amendement n° 59 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
La mention dont nous demandons la suppression doit être retirée pour deux motifs, parce qu'un délai de douze mois existe déjà dans le cadre de la rupture conventionnelle et parce que le Parlement européen, par maintes dispositions, a demandé aux États membres de revoir les délais de contestation dans le cadre de la sécurité juridique. La France dispose de délais de contestation particulièrement longs, ce qui n'est pas acceptable dans le cadre de la sécurité des rapports juridiques.
(L'amendement n° 60 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
J'aurais été tenté de le sous-amender, mais disons que j'y suis favorable.
(L'amendement n° 50 est adopté.)
Cet amendement n'a pas été examiné par la commission mais, à titre personnel, j'y suis favorable.
(L'amendement n° 110 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
J'aurais aimé que M. le ministre me réponde sur la fusion des deux dispositifs et le fait que les critères sont plus restrictifs que ne l'étaient ceux du CTP, notamment la condition d'ancienneté. Les signataires ont relevé cette disparité, en la regrettant.
À partir du moment où il y a fusion de deux dispositifs, on reprend des éléments qui viennent de l'un et de l'autre pour former un ensemble qui me paraît cohérent. On a le droit d'être maximaliste, monsieur Muzeau, mais vous l'êtes davantage que les partenaires sociaux.
Je maintiens que vous êtes plus maximaliste que les partenaires sociaux, et il faut l'assumer. Il y a juste une petite équation dont il faut tenir compte : plus vous faites des propositions, plus cela coûte. Il est donc important d'avoir le meilleur équilibre possible. C'est le cas avec ce texte et j'ai eu l'occasion de le saluer. Ont été retenus de la CRP et du CTP des éléments qui forment un ensemble cohérent, qu'il s'agisse du pilotage, des garanties apportées ou de l'ancienneté. Par rapport à certains éléments du CTP, il y a des différences, c'est vrai, mais nous avons tout de même un ensemble non seulement cohérent, mais également performant.
Vous auriez aimé aller plus loin que les partenaires sociaux. Nous avions dit aussi que nous respecterions les modalités de l'accord national interprofessionnel.
Pour ne pas fermer la porte à certaines expériences professionnelles, la commission des affaires sociales a aménagé le congé de reclassement pouvant être proposé dans les entreprises de plus de 1 000 salariés par l'employeur aux salariés qu'il envisage de licencier pour motif économique.
Désormais, des périodes de travail intercalaires, effectuées en CDD ou en intérim, pourront s'insérer dans le congé de reclassement, avec retour automatique dans le dispositif d'accompagnement à leur échéance.
Sans remettre en cause de telles possibilités, nous entendons préciser les conséquences que ces périodes de travail ne manqueront pas d'avoir sur la mise en oeuvre du congé de reclassement.
La durée du congé de reclassement, comprise entre quatre et neuf mois, fixée en fonction des difficultés de reclassement propres aux différentes catégories de salariés, de la durée des actions de formation ou de validation des acquis de l'expérience, ne doit pas être réduite, bouleversée par les périodes travaillées.
La dernière phrase de l'article 11 bis dispose qu'au terme de ces périodes, le congé reprend sans excéder son terme initial. Cette disposition risque de compromettre les actions engagées. Aussi, notre amendement n° 26 propose que les périodes de travail ne s'imputent pas sur la durée du congé de reclassement.
S'agissant du montant et de la durée de versement de l'allocation due par l'employeur pendant toute la période du congé de reclassement, nous souhaitons que les périodes travaillées soient là aussi sans incidence. Tel est l'objet de l'amendement n° 27 . Pour mémoire, dans le cadre de l'expérimentation du contrat de transition professionnelle, lorsque le salarié effectuait des périodes de travail dont la rémunération était inférieure à l'allocation de transition professionnelle, il bénéficiait d'une allocation différentielle. Dans cet esprit, un mécanisme devrait être prévu pour les salariés en congé de reclassement… Mais peut-être est-ce maximaliste ! (Sourires.)
Défavorable, par parallélisme des formes avec le CSP.
(L'amendement n° 27 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
J'ai déjà défendu cet amendement.
(L'amendement n° 26 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 11 bis est adopté.)
Sur l'article 11 ter, je suis saisi d'un amendement n° 28 .
La parole est à M. Roland Muzeau.
Nous apprécions que puisse être expérimentée l'ouverture du contrat de sécurisation professionnelle à d'autres publics précaires que les salariés licenciés économiques.
Toutefois, nous regrettons vivement le manque d'ambition du MEDEF et son refus que puissent être proposées des mesures d'indemnisation, pour des raisons étroitement financières. Il est vrai que si l'État avait fait preuve lui aussi d'un peu plus de volontarisme et de pragmatisme, ce point de blocage aurait pu être surmonté.
Dans le cadre fixé pour l'expérimentation des mesures d'accompagnement, la question du financement doit aussi être posée, d'autant que nous ne disposons pas d'informations précises.
Liaisons sociales a fait état d'une « réunion d'un nouveau genre » à la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle, à laquelle participaient non seulement les représentants de l'État et les partenaires sociaux mais aussi notre collègue rapporteur de la présente proposition de loi. Au cours de cette réunion, l'État aurait affirmé qu'il mettrait au plus 50 millions d'euros supplémentaires pour prendre en charge le surcoût du contrat de sécurisation professionnelle par rapport aux deux autres dispositifs.
Pouvez-vous confirmer ces chiffres, monsieur le ministre ? Pouvez-vous expliquer à la représentation nationale comment sera pris en charge le coût de l'expérimentation permise par l'article 11 ter ? Se fera-t-elle dans le cadre de l'enveloppe financière consacrée au contrat de sécurisation professionnelle ou en plus de cette enveloppe ? Notre amendement n° 28 appelle le Gouvernement à préciser ses intentions sur cet aspect.
Ces réponses sont d'autant plus attendues que les moyens en personnel pour lutter contre le chômage et accompagner les demandeurs d'emploi manquent cruellement à notre pays, comme l'a confirmé en avril dernier une étude de l'inspection générale des finances sur les effectifs des services publics de l'emploi en France.
Défavorable. Ce n'est pas l'accord entre les partenaires sociaux qui fixera les conditions de financement de l'expérimentation mais un accord d'application ultérieur qui sera passé entre les financeurs, c'est-à-dire entre l'État et l'UNEDIC.
Défavorable.
Monsieur Muzeau, le coût sera pris sur les 50 millions supplémentaires par rapport à ce que l'État verse aujourd'hui. Ce sera moitié-moitié.
(L'amendement n° 28 n'est pas adopté.)
(L'article 11 ter est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 122 portant article additionnel après l'article 13.
La parole est à M. Bernard Gérard.
L'amendement n° 122 vise à permettre aux salariés à temps partiel qui le souhaitent, à chaque fois que les compétences en présence, l'organisation et les conditions économiques le rendent possible, de bénéficier d'une augmentation de l'horaire contractuel, sur le même métier ou sur un autre, de préférence à la conclusion de CDD ou de contrats de travail temporaires avec d'autres salariés.
Ce faisant, il offre l'opportunité de consolider et de clarifier un certain nombre de possibilités offertes aux salariés à temps partiel d'augmenter leur durée contractuelle du travail, pour une durée déterminée, dans les seules circonstances où un contrat à durée déterminée pourrait être conclu.
Un accord collectif obligatoire et préalable établira les règles relatives à l'usage de ces avenants. Il en déterminera notamment les cas de recours, qui ne pourront excéder ceux qui permettent le recours aux contrats à durée déterminée. L'accord collectif détermine également les garanties apportées aux salariés, notamment sur la date et sur les modalités de retour aux conditions initiales de travail.
Favorable. Cet amendement a du sens.
(L'amendement n° 122 est adopté.)
J'indique à l'Assemblée que la commission a ainsi rédigé le titre de la présente proposition de loi : « Proposition de loi pour le développement de l'alternance et la sécurisation des parcours professionnels ».
Mes chers collègues, nous avons achevé l'examen des articles de la proposition de loi.
Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble de la proposition auraient lieu le mardi 21 juin après les questions au Gouvernement.
La parole est à M. le ministre.
Nous venons d'examiner un texte important. En mon nom personnel, mais également au nom de Nadine Morano je veux tout particulièrement les commissions et leurs rapporteurs, Gérard Cherpion et Jean-Charles Taugourdeau. Celui-ci a dû nous quitter, mais je tiens à souligner à quel point sa connaissance de la question des groupements d'employeurs nous a permis d'avancer et d'éclairer le débat.
Nous avons pu dialoguer dans un esprit qui n'a jamais été polémique, il faut le souligner. J'aurais aimé que l'on parvienne à un plus grand consensus, mais des débats comme celui que nous avons eu aujourd'hui montrent qu'il est possible d'aborder des sujets aussi essentiels sans que cela ne vire au combat permanent. L'emploi des jeunes, il est vrai, est un sujet qui méritait une discussion de cette qualité. Je vous en remercie.
Prochaine séance, mardi 21 juin à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Vote solennel sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2011, la proposition de loi pour le développement de l'alternance, la sécurisation des parcours professionnels et le partage de la valeur ajoutée ;
Discussion, sur les rapports des commissions mixtes paritaires, du projet de loi relatif à la bioéthique, de la proposition de loi visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherche comportant des projets ayant recours à cette technique ;
Discussion du projet de loi sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma