La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
Monsieur le président, monsieur le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, mes chers collègues, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, l'ONIAM, disposera à la fin de l'année 2011 de 41,8 millions d'euros de réserves sur son fonds de roulement. Dans le contexte des finances publiques que l'on connaît, il n'est pas possible de laisser un établissement public disposer d'un tel fonds de roulement.
Cela ne doit évidemment pas remettre en cause la mise en oeuvre des missions de l'ONIAM, qui provisionne déjà dans ses comptes les indemnisations à verser. La dotation que doit lui verser l'assurance maladie a justement pour objectif de couvrir ces dépenses futures. Toutefois, un effort plus limité, qui n'assécherait pas totalement la trésorerie de l'ONIAM, irait dans le bon sens et serait tout à fait acceptable par la commission des finances. C'est pourquoi je puis prête à retirer cet amendement au profit de l'amendement n° 212 de la commission des affaires sociales, qui diminue de seulement 20 millions d'euros la dotation de l'assurance maladie.
(L'amendement n° 48 est retiré.)
La parole est à M. Jean-Pierre Door, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour l'assurance maladie et les accidents du travail, pour soutenir l'amendement n° 212 .
Dans son amendement n° 48 , la commission des finances avait proposé de réduire de façon très importante le fonds de roulement de l'ONIAM. Je rappelle quand même qu'une incertitude pèse quant à la hausse du coût des contentieux – on ne sait pas ce qui peut se passer –, ainsi que sur celle des indemnisations. Nous avons reçu les dirigeants de l'ONIAM, qui nous ont signalé qu'il fallait être prudent.
Cela dit, le fonds de roulement est important. Avec Yves Bur, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général, nous proposons de réduire de seulement 20 millions d'euros la dotation à l'ONIAM, la ramenant de 55 à 35 millions d'euros.
La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 212 .
Monsieur le président, puis-je poser une question aux rapporteurs ?
Monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, comment avez-vous fait pour estimer qu'il était possible de ramener la dotation de l'ONIAM soit à 13,2 millions – comme le proposait l'amendement de la commission des finances –, soit à 35 millions, comme le propose la commission des affaires sociales ? Comment êtes-vous arrivés à ces chiffres ?
Nous avons eu des indications de la part de la CNAM, qui nous a fait cette proposition, ayant constaté que le fonds de roulement de l'ONIAM était suffisant, certes pas pour aller jusqu'à ce que proposait Mme Vasseur,…
…mais du moins pour réduire sa dotation de 20 millions d'euros. Cela permettra de réduire les dépenses.
Je vous ai posé cette question parce qu'il y a un problème, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis. Les dépenses de l'ONIAM sont des dépenses de guichet. Il ne dispose pas d'un stock qui serait en sommeil. L'ONIAM, ce n'est pas l'écureuil. Si vous réduisez sa dotation, vous risquez de causer un retard dans le versement des indemnités. L'argent de l'ONIAM, ce n'est pas de l'argent qui dort.
La logique de la CNAM consiste peut-être à dire qu'il y a beaucoup d'argent dans ce fonds de roulement, mais la réalité, c'est que si vous réduisez la dotation de l'ONIAM de façon trop importante, vous prenez un risque pour l'indemnisation des victimes, un risque que je n'ai vraiment pas l'intention de courir, je le dis très clairement. Je ne me vois pas aller expliquer aux victimes qu'il y aura du retard et que, pour leurs indemnisations, elles devront attendre un peu, parce que la CNAM a dit qu'on pouvait réduire la dotation de l'ONIAM de tant de millions d'euros. Ce n'est pas la CNAM qui indemnise, c'est l'ONIAM.
Je veux bien qu'on puisse se dire, à chaque fois, que l'on n'a pas besoin d'avoir des fonds de roulement trop importants. Peut-être. Mais il reste qu'ils doivent être suffisants. Honnêtement, une dotation de 35 millions d'euros, ce n'est pas suffisant.
Monsieur le ministre, j'entends bien ce que vous dites. L'ONIAM a de toute façon une dotation de l'État. Elle a un fonds de roulement en plus. C'est sur le fonds de roulement que nous voulons ponctionner un certain montant.
Il ne s'agit pas de réduire la dotation, mais de l'alimenter au moyen du fonds de roulement. Nous laissons donc évidemment à l'ONIAM la possibilité de remplir ses missions.
Je voudrais vous rappeler, monsieur le ministre, qu'à l'initiative du Gouvernement, notre assemblée a décidé de ponctionner les fonds de roulement…
…de tous les opérateurs de l'État. Je ne vois pas pourquoi ceux dont le budget est alimenté par la sécurité sociale y échapperaient.
Mais parce que nous sommes en train de parler de dépenses de guichet. C'est cela, le problème. L'ONIAM n'est pas un établissement comme un autre.
L'ONIAM ne sera pas en manque de crédits !
De quoi parlons-nous ? L'ONIAM, ce sont les dossiers amiante, ce sont les dossiers Mediator. Je suis désolé, je ne ferai pas prendre le moindre retard à l'indemnisation des victimes parce que l'on appliquerait à l'ONIAM les mêmes mesures que pour les autres fonds. J'entends bien votre logique, mais on ne peut pas traiter de la même manière des dépenses d'intervention type et des dépenses de guichet. Ce n'est pas la même chose.
Je voudrais poser une question au Gouvernement. Nous avons en effet des chiffres différents.
Les chiffres du Gouvernement nous disent qu'il y a environ 41,8 millions dans les réserves de l'ONIAM. Or la CNAM nous a parlé de 77 millions.
Pour quelle date ?
Ce sera la situation au 31 décembre 2011, nous ont dit les représentants de la CNAM.
M. Bur et moi-même avons auditionné divers représentants, y compris ceux de l'ONIAM et ceux de la CNAM. Ces chiffres-là, nous ne les inventons pas. Il faudrait donc expliquer d'où vient cette différence entre 41,8 millions et 77 millions. C'est en se fondant sur ce dernier chiffre que la commission des affaires sociales a proposé, non pas la réduction suggérée par Mme Vasseur, mais une réduction modérée, de 20 millions d'euros.
Juste un dernier point. Le nombre de dossiers que l'ONIAM a à traiter n'est pas en diminution mais en augmentation.
Réduire la dotation alors que le nombre de dossiers est en augmentation, cela pose à mes yeux un sérieux problème. Voilà pourquoi le Gouvernement est défavorable à l'amendement.
Le groupe SRC ne votera pas cet amendement, pour deux raisons.
Premièrement, nous considérons que c'est prendre un risque. Le ministre a posé des questions de bon sens. Nous n'avons pas d'éléments nous permettant de penser que les besoins auxquels l'ONIAM devra répondre connaîtraient une diminution telle que nous n'aurions pas besoin du fonds de roulement tel qu'il existe actuellement.
Deuxièmement, je suis absolument sidérée par cette recherche d'économies de bouts de chandelle. C'est vraiment la course à l'échalotte. Comme l'a dit Mme Vasseur à plusieurs reprises, il s'agit de « ponctionner ». Alors, on ponctionne !
Vous avez employé le mot « ponctionner », madame. On ponctionne, une fois, deux fois, trois fois, et on cherche des économies de bouts de chandelle. Et l'on ne dispose même pas d'études permettant de se fonder sur des chiffres qui soient partagés ! Dans l'incertitude où nous nous trouvons, aucun élément objectif n'ayant été porté à notre connaissance, nous considérons que nous ne pouvons pas nous permettre de voter cet amendement.
Un dernier point. De toute façon, il est aujourd'hui évident qu'il faudra revenir sur cette loi en adoptant un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificatif. Vous avez donc largement le temps, d'ici là, de faire les études complémentaires pour voir s'il faut vraiment économiser, de cette manière-là, quelques millions d'euros alors que, si j'ai bien compris, nous devons en trouver deux milliards.
(L'amendement n° 212 n'est pas adopté.)
Nous sommes dans le même cas de figure, sauf qu'il s'agit ici de l'EPRUS, l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires. Dans la même logique que pour l'ONIAM, la commission des finances a proposé de réduire la dotation que doit lui verser l'assurance maladie en 2012. Elle serait néanmoins, là encore, tout à fait prête à se rallier à l'amendement n° 213 de la commission des affaires sociales, qui réduit la dotation de 5 millions d'euros seulement.
(L'amendement n° 49 est retiré.)
La parole est à M. Jean-Pierre Door, rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 213 .
À nouveau, nous sommes un peu dans une partie de ping-pong avec la commission des finances. Celle-ci demande une réduction importante de la dotation de l'EPRUS, étant donné qu'il y a en effet plus de 11 millions d'euros de réserves sur son fonds de roulement. M. Bur et moi-même proposons, par le présent amendement, de réduire les réserves de 5 millions d'euros seulement.
Je voudrais poser deux questions.
Oui, parce qu'il ne s'agit pas seulement de dire qu'on fait des économies. En matière d'économie, je peux aussi faire des propositions, même si elles ne sont pas toujours suivies, mais êtes-vous sûrs et certains, messieurs les rapporteurs, au-delà de la logique budgétaire, que l'EPRUS sera en mesure de procéder aux renouvellements de stocks stratégiques ? À l'EPRUS, à qui a-t-on posé la question ?
Deuxième question : en cas d'urgence sanitaire exceptionnelle, est-on capable de mobiliser immédiatement tous les fonds ?
Voilà les deux questions que je pose. Si vous pouviez y répondre, cela n'intéresserait pas seulement le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, mais également l'ensemble de ses collègues. Il y a de très nombreux endroits où l'on peut faire des économies, mais quand, à un moment donné, on assèche la dotation, on diminue aussi les capacités d'intervention.
Je le répète, il ne s'agit pas d'avoir des dotations de confort. L'époque ne s'y prête pas, elle ne s'y prête plus. Aucun organisme ne peut se dire, aujourd'hui, qu'il va demander plus que ce dont il a besoin. Tout le monde sait bien que ce n'est plus dans l'air du temps. Mais de là à ne pas donner les crédits suffisants pour intervenir, il y a une différence. Moi, cela me pose un problème de fond, en cas d'urgence sanitaire.
J'en profite, monsieur le président, pour répondre à Mme Touraine. Ponctionner sur un fonds de roulement, cela veut bien dire ce que cela veut dire. Quand on a un fonds de roulement sur lequel il reste des dotations, il peut sembler logique de « réduire » ce fonds de roulement – si le terme « ponctionner » ne vous plaît pas.
Monsieur le ministre, j'ai bien entendu votre explication. Mais je suis dubitative. On demande au Parlement de participer aux économies et à la réduction des déficits publics, et la commission des finances est tout à fait dans son rôle quand elle fait des propositions en ce sens.
Je le sais. J'étais moi-même membre de la commission des finances.
Je ne crois pas !
Je veux rappeler, s'agissant de stocks stratégiques, que nous proposons de prélever sur les dotations affectées à l'EPRUS.
Nous prenons sur une dotation votée chaque année par le Parlement et qui a généré un fonds de roulement excédentaire. C'est bien ce fonds de roulement que l'on veut ponctionner, car l'EPRUS n'a pas à thésauriser, comme l'ONIAM, sur des dotations de l'État.
Monsieur le ministre vous connaissez mon attachement à l'EPRUS. Nous l'avons défendu ensemble, grâce à vous, et c'est un organisme auquel je tiens particulièrement.
Notre amendement reconnaît la nécessité d'une réserve prudentielle de 3 millions d'euros. À la fin de l'année 2011, l'EPRUS dispose de plus de 11 millions d'euros en réserve sur son fonds de roulement.
Si l'on garde les 3 millions, et que l'on réduit de 5 millions la dotation à l'EPRUS, comme nous le souhaitons avec Yves Bur, il restera 6 millions d'euros de réserve, soit le double des réserves prudentielles.
S'il y avait une proposition de renouvellement d'antibiotiques ou de pilules d'iode, les 6 millions en question y pourvoiraient, nous n'avons pas besoin de beaucoup plus dans les mois à venir, sauf cas dramatique.
En s'il y a un cas dramatique, comment fait-on ?
Dans ce cas, nous verrons : je vous fais confiance pour l'avenir.
Pourquoi laisser dormir un fonds de roulement plus important que nécessaire alors que nous avons besoin d'équilibrer le PLFSS ?
M. le ministre a posé des questions, mais je n'ai pas entendu clairement son avis, même si je le pressens.
Pour ne rien vous cacher, je n'ai pas non plus entendu les réponses à mes questions.
Vous évoquez les 55 millions de dotation à l'ONIAM, et les autres dotations prévues par l'article 46. Le problème est simple : la dotation de l'État est de 26 millions, celle de l'assurance-maladie est de 20 millions, avant votre amendement. Concernant les réserves, pour qu'il n'y ait pas de fantasmes ou de mystères, elles seront de 11,26 millions d'euros à la fin 2011, et de 3 millions d'euros fin 2012. Expliquez-moi comment il est possible de thésauriser avec de tels niveaux.
Nous ne sommes pas en train d'atteindre le minimum minimorum, nous sommes en dessous, et ce sont des sujets sur lesquels je n'ai pas envie de partir à l'aventure. Ce n'est pas un excès de précaution de ma part, mais pour faire face à des situations d'urgence sanitaire, cela vaut la peine de disposer d'un fonds suffisamment doté.
Jean-Pierre Door y faisait allusion : ce n'est pas parce que l'EPRUS est mon bébé que j'ai le moindre droit de suite en la matière, là n'est pas le sujet. Je veux bien que l'on fasse des économies, mais sans se contenter d'aligner les chiffres sur une feuille, il faut voir ce dont nous avons réellement besoin.
Jean-Pierre Door nous dit qu'en cas de catastrophe, on avisera. Bien sûr que nous savons être réactifs, mais il vaut mieux ne pas avoir à se poser la question, au moment de faire des commandes, des sommes que l'on peut engager immédiatement, et disposer, non pas de marges, mais simplement des moyens nécessaires. Lors d'une crise sanitaire, on a d'autres problèmes à régler. Avis défavorable.
Monsieur le ministre, vous avez certainement calculé avec Bercy les dotations au plus juste, et l'on voit très bien ici que, lorsque l'on veut prélever sur des réserves ou des fonds prudentiels – vous comprenez que je fais allusion aux mutuelles –, il est très difficile de laisser filer un peu de sous lorsque l'on pense que ces réserves sont nécessaires.
Je vous fais simplement remarquer que lorsqu'on défend son propre budget, on trouve qu'il est indispensable d'avoir les réserves nécessaires.
Par ailleurs, j'ai évoqué la question ce matin : tout le monde est d'accord pour reconnaître que le cas de la grippe H1N1 a été géré de façon plutôt catastrophique.
Je voudrais savoir si l'EPRUS a tiré les leçons de la gestion précédente, et s'il a été suffisamment réformé. Qui gérera, et dans quelles conditions, l'éventuelle prochaine épidémie ? Toutes les mesures ont-elles été prises pour que l'on soit assuré que tout se passera bien demain ?
Mais ce n'est pas la gestion de l'EPRUS qui est en cause !
(L'amendement n° 213 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 46, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 50 deuxième rectification, portant article additionnel après l'article 46.
La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Tous les acteurs et observateurs de notre système de santé s'accordent pour reconnaître qu'il est trop centré sur le curatif et pas assez sur le préventif. Or la prévention doit être développée et mieux assumée, car elle est la source d'économies futures importantes en matière de dépenses de santé.
Les actions de prévention ne figurent pas dans l'ONDAM mais sont financées par les différents régimes d'assurance maladie. Pour le régime général, un fonds est dédié au financement de ces actions au sein de la CNAM : il s'agit du Fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaires. Selon le rapport de septembre 2011 de la commission des comptes de la sécurité sociale, il est prévu que ce fonds sera doté de 442 millions d'euros en 2012.
Sans créer un sous-objectif spécifique de dépense, initiative qui appartient au seul Gouvernement, la commission des finances a estimé utile, pour le contrôle parlementaire, de mieux suivre les actions de prévention en identifiant les sommes qui lui seront affectées en 2012.
Si cet amendement est adopté, le Gouvernement devra rendre compte de l'utilisation des crédits de prévention l'année prochaine, et présenter l'an prochain un article au PLFSS pour actualiser ce montant qui, je l'espère, augmentera, car la prévention n'est pas à la hauteur des enjeux dans notre système de santé.
Le Fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaires fait l'objet d'une programmation pluriannuelle dans le cadre de la convention d'objectifs et de gestion entre l'État et l'assurance maladie.
L'objet de votre amendement est de protéger les sommes destinées à la prévention : c'est largement pris en compte par le présent texte de loi, dont l'article 36 prévoit une fongibilité asymétrique au sein du FIR en faveur de la prévention. Avis défavorable.
Je ne peux que me rallier à l'excellent avis, excellemment présenté par l'excellent rapporteur qu'est Jean-Pierre Door. Avis défavorable.
J'entends bien l'excellent rapporteur de la commission des affaires sociales, ainsi que le ministre. Il s'agit ici de l'affichage d'une volonté politique, et d'un moyen de renforcer le contrôle parlementaire. Ce n'est pas un objectif limitatif, le montant est uniquement indicatif : ce n'est donc pas bloquant pour le Gouvernement en cours d'année.
D'autre part, 422 millions d'euros pour la prévention représentent une somme importante, mais elle n'est pas suffisante à mes yeux. Lorsque nous aurons compris que toutes les mesures de prévention mises en place évitent des frais importants en matière curative, nous aurons fait un énorme pas.
Deux exemples illustrent mon propos : lorsque nous avons participé, avec notre ancien collègue Jean-Frédéric Poisson, à la mission « pénibilité au travail », nous nous sommes rendus en Finlande. Les Finlandais se posent la question que nous devrions nous poser : comment fait-on pour que nos concitoyens arrivent dans le meilleur état de santé possible à l'âge de la retraite ? Et non pas : comment fait-on pour les prendre en charge lorsqu'ils arrivent dans un état de santé dû au fait qu'ils n'ont pas forcément bénéficié d'un suivi et d'une prévention suffisamment efficaces ? Nous avons à prendre en compte les exemples des autres pays européens, notamment nordiques, qui sont très en avance dans le domaine de la prévention.
Autre exemple parlant : celui du diabète, qui est la première cause de cécité dans les pays industrialisés. L'examen annuel de la rétine, qui est une pratique simple et un indicateur de la qualité des soins, est encore sous-exploité en France. Les résultats sont bien plus importants dans d'autre pays, ce qui prouve que la prévention doit être inscrite dans le PLFSS, avec une ligne budgétaire à la hauteur de ce que l'on envisagera. C'est une volonté politique, non pas de bloquer les choses, et je rejoins le rapporteur de la commission des affaires sociales, mais d'inciter à poursuivre cet effort et d'avoir une lisibilité des mesures préventives.
Merci monsieur le président. En votre qualité de vice-président de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, vous savez qu'elle m'a chargé de faire un rapport sur la prévention et l'éducation à la santé.
Tout le monde convient que la prévention est essentielle, et que nous insistons trop sur le curatif. Mais il existe aujourd'hui de nombreux intervenants dans le domaine de la prévention ; la Cour des comptes vient d'ailleurs de faire un rapport très intéressant sur ce point. Chaque caisse a sa politique, chaque assurance complémentaire a sa politique, l'INPES joue un rôle important, et il est donc difficile d'y voir clair.
Il est également important de prendre en compte le fait que le curatif inclut un part de prévention. Chaque professionnel de santé s'en occupe lorsqu'il soigne.
La rapporteure pour avis a pris l'exemple du diabète ; eh bien Sophia, le service d'accompagnement pour les malades chroniques, financé par la CNAM, est un procédé considéré comme un soin, et fait même partie de la convention médicale.
Je crois donc nécessaire aujourd'hui d'étudier tout ce qui fonctionne : vous savez qu'au sein de la CNAM les centres de santé font partie de la prévention. L'INPES joue également un rôle.
Enfin, à titre personnel, je suis tout à fait opposé aux sous-objectifs de l'ONDAM. Il faut d'abord un ONDAM avec des enveloppes régionales, et ne pas multiplier les sous-objectifs nationaux qui bloquent finalement tout le système.
Je voudrais apporter mon soutien à la rapporteure pour avis de la commission des finances. Ce n'est pas un soutien total, mais un soutien partiel…
Le fait de sanctuariser les crédits me semble une excellente chose. En revanche, je suis un petit peu inquiète des propos que vous avez tenus, notamment sur le diabète.
Je crois que vous confondez, et c'est une erreur très fréquente, la prévention et le dépistage. L'examen de la rétine se situe dans le cadre du dépistage, et non de la prévention du diabète. Contre le diabète, les moyens de prévention portent sur les questions d'alimentation, sur les problèmes des perturbateurs endocriniens que l'on vient de remettre en cause, ou peut-être encore de l'aspartame.
Lorsque vous parlez des conditions de travail en citant nos collègues étrangers qui sont très attentifs à ce que l'on vieillisse en bonne santé, je souscris également à vos propos, et c'est pourquoi je suggère depuis que je siège dans cette assemblée un grand plan d'ergonomie participative, afin que chaque salarié puisse participer à l'amélioration de ses conditions de travail. Peut-être vais-je être entendue dans les heures qui viennent ?
Pour répondre à Mme Poursinoff, dans le cas du diabète, l'examen annuel de la rétine est un examen de suivi. Il peut exister de manière préventive, mais c'est un suivi des personnes déjà diabétiques.
Cela participe à la prévention d'autres risques et de multipathologies.
C'est d'ailleurs pour cela que l'examen de la rétine est clairement intégré dans le contrat d'amélioration des pratiques professionnelles, et qu'il le sera aussi dans la convention.
Sur la question de la prévention, laissez-moi dix ans au ministère de la santé, avec quelques milliards d'euros, et je pense que nous saurons faire effectuer le virage nécessaire à notre système de santé.
Pas encore ! Le temps ne vous a pas semblé suffisant ? Je vous remercie madame Clergeau, je suis sensible à cet encouragement !
Notre système est considéré comme l'un des meilleurs au monde sur le plan curatif, mais la prévention n'a pas toujours fait partie de notre culture, c'est vrai.
Il y a juste un point sur lequel je m'éloigne des propos d'Isabelle Vasseur : je ne suis pas sûr qu'en soi la prévention fasse vraiment réaliser des économies. En tout cas, nous ne sommes pas en mesure de les évaluer.
À terme, peut être. C'est un sujet que je connais bien, sur lequel je n'ai jamais cessé de me pencher : le remboursement de l'ostéodensitométrie, c'est moi qui l'ai imposé ; la campagne « aime tes dents », c'est moi qui l'ai lancée avec la CNAM.
Je pense que cela créé une responsabilisation sans pareille de nos concitoyens. Quand il y a de la prévention, il y a une meilleure prise de conscience, et cela permet de vieillir en meilleure santé, sujet qui tient particulièrement à coeur à Pierre Méhaignerie.
Mais l'économie, bien malin qui sait l'évaluer en tant que telle et qui peut aussi nous dire quel est son impact dans notre système de santé.
Il est très compliqué, même pour les pays scandinaves, très en avance sur la question, de dire qu'ils savent réaliser telle économie. Ou alors il faut changer complètement le système de santé, avec un système d'incitation, si vous jouez le jeu de l'incitation. Certains autres pays, qui jouent l'incitation, se sont interrogés sur les modalités de remboursement de celui qui ne joue pas le jeu de la prévention. C'est ainsi que plusieurs pays ont franchi des caps en la matière.
La prévention est pour moi très importante. C'est pour cela, madame la rapporteure, que c'est prévu dans la convention d'objectifs et de gestion entre l'État et l'assurance maladie. Il n'y aura aucun problème pour réaliser une évaluation et une étude d'impact, si vous le désirez. Vous connaissez ma position sur les différents rapports, mais je suis tout à fait disposé à venir vous rendre compte en commission des finances ou en commission des affaires sociales, et vous pouvez également interroger la CNAM.
Pour les mesures de convention d'objectifs et de gestion, il faut garder de la souplesse, sans pour autant que tout le monde fasse à sa façon. Entre les différentes caisses, c'est vrai, les politiques de prévention peuvent être différentes. Entre les régions, des politiques différentes sont menées et il faut se demander si cela correspond véritablement aux enjeux de prévention. Monsieur Préel, je suis élu d'une région, qui, après le Nord-Pas-de-Calais, n'a pas les meilleurs résultats, loin s'en faut, en termes de déterminants de santé : espérance de vie, nombre de cancers, et notamment pour les addictions. Les programmes régionaux de santé en termes de prévention ne sont pas suffisamment adaptés. Il est utile de se poser des questions en termes d'objectifs. En tout état de cause, je pense que c'est à la convention d'objectifs et de gestion de le faire. C'est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.
Monsieur le ministre, je suis contente de vous avoir entendu sur la prévention, puisque je voulais ouvrir le débat sur ce sujet. J'ai a priori atteint mon objectif. Je vous rejoins tout à fait quand vous dites : « Donnez-moi dix ans et quelques milliards. » Commençons dès aujourd'hui. Soutenez la gageure ! Si on attend encore dix ans, on repousse l'échéance. Je suis consciente que ce sera long, mais on peut commencer dès aujourd'hui.
Les méthodes incitatives, je suis d'accord, participent d'un complet changement de mentalité, car nous n'avons pas, en France, la culture de la prévention par rapport au curatif. J'espère que nous pourrons continuer de travailler sur ce sujet. Je retire donc l'amendement.
Je voudrais réagir à l'intervention de M. le ministre. Je suis d'accord sur un certain de nombre de points. Nous sommes en retard en matière de prévention. Ce n'est pas notre culture. Des efforts très importants doivent être accomplis. Je pense que cela participe, comme vous l'avez dit, monsieur Bertrand, à l'information et à la responsabilisation de l'ensemble des citoyens. Il faudrait prévoir cela très en amont, dans les programmes scolaires.
Cependant, je diverge sensiblement quant aux économies réalisées. Sans doute est-il difficile de les chiffrer. Mais je suis sûre que nous réalisons des économies lorsque nous développons des campagnes de prévention, en termes financiers et humains. Je prends l'exemple de l'hypertension artérielle : je bondis lorsque je vois que la prise en charge à 100 % a été supprimée. On peut éviter, en prévenant l'hypertension artérielle et en la traitant très rigoureusement, des accidents vasculaires cérébraux et des infarctus du myocarde qui coûtent très cher en soins et en jours d'arrêts de travail.
Un dépistage précoce du cancer du sein permet de gagner « de l'argent et de l'humain », comme toutes les préventions d'affections. Il n'y a pas lieu de s'interroger là-dessus. Il importe simplement d'avoir une volonté politique et de la mettre en oeuvre.
(L'amendement n° 50 deuxième rectification est retiré.)
Je suis saisi d'un amendement n°471 .
La parole est à M. Dominique Tian.
La contribution des régimes obligatoires d'assurance maladie à des fonds, entités et agences sans lien direct avec leurs missions a fortement augmenté au cours de ces dernières années. Je souhaite qu'un rapport soit réalisé – sans doute est-ce le premier de cet après-midi – permettant de mieux nous informer.
Comme vous l'avez fait remarquer, les demandes de rapports se multiplient.
Monsieur Tian, je pense que votre demande est satisfaite, puisqu'il existe déjà des rapports d'activité du Fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins et du Fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés disponibles à l'Assemblée. Le rapport d'activité de l'ATIH est disponible en ligne sur le site Internet.
Avis défavorable.
Avis défavorable car l'annexe 8 reprend exactement, monsieur Tian, ce que vous souhaitez.
Monsieur le ministre, on peut s'interroger principalement sur les augmentations. Le financement reçu par l'ATIH, pour reprendre cet exemple, a augmenté de 123%. Pour quelle raison ?
(L'amendement n° 471 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 793 rectifié .
La parole est à M. le ministre.
Dans cet amendement, il s'agit du fameux décret « fouchette-taux », qui a besoin d'être davantage sécurisé par la loi.
(L'amendement n° 793 rectifié , accepté par la commission, est adopté.)
La parole est à M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les recettes et l'équilibre général.
Monsieur le ministre, je voudrais rappeler que, tout au long de l'examen de ce PLFSS, la majorité a fait preuve de responsabilité en votant des recettes supplémentaires pour 455 millions d'euros, ainsi que des économies supplémentaires à hauteur de 230 millions d'euros.
Ceci compense largement les moindres recettes décidées, en supprimant notamment l'assujettissement du CLCA à la CSG, qui s'élève à 160 millions d'euros, et des dépenses nouvelles qui se montent à environ 68 millions d'euros. Le solde entre recettes et dépenses s'élève à peu près à 450 millions d'euros, solde qui ne remet en aucune manière en cause la solidarité incarnée par la sécurité sociale.
Nous vous avons fait part, avec M. Méhaignerie, de notre refus d'une diminution du montant des indemnités journalières en cas de maladie. Nous ne sommes pas opposés à la modification du calcul des indemnités journalières, fixé désormais sur le salaire net, au lieu du salaire brut. Au lieu de passer de 50 % du salaire brut à 63,7 % du salaire net, le choix a été fait de baisser de 3,7 % les indemnités journalières pour arriver à 60 % du salaire net et économiser ainsi 220 millions d'euros au sein de l'ONDAM. Je voudrais rappeler que cette mesure ne touchera, comme d'habitude, que les salariés du secteur privé et que les agents de la fonction publique continueront à être indemnisés à 100 % en cas d'arrêt maladie.
Nous voulons faire des propositions, pour compenser cette baisse des dépenses de l'ONDAM, par une autre économie au sein de l'ONDAM. Comme l'a toujours affirmé M. le président Méhaignerie, nous souhaitons faire preuve, à vos côtés, de responsabilité. Aussi, nous vous proposons trois types de mesures d'économies, qui permettraient de compenser l'abandon de la mesure sur les IJ.
Je propose notamment une série d'économies sur les dépenses de soins au sein de l'ONDAM, pour un montant de plus de 300 millions d'euros – les baisses sur le tarif de la biologie, de la radiologie, telles qu'elles étaient prévues dans le programme d'économies proposé en juillet dernier par l'UNCAM ; la décote du prix du générique par rapport au princeps, on pourrait gagner une quarantaine de millions d'euros ; la remise des tarifs de biologie en établissements de santé, que nous avons votée hier soir pour un montant de 50 millions d'euros. Il pourrait aussi y avoir un alignement sur un tarif forfaitaire de responsabilité pour les génériques de plus de sept ans et des mesures complémentaires pour lutter contre les fraudes aux indemnités journalières.
Une autre possibilité est d'exclure de la diminution du calcul des indemnités journalières les arrêts maladie supérieurs à quinze jours ou un mois, afin de ne pas pénaliser les salariés souffrant en particulier de maladies de longue durée.
Nous proposons une dernière mesure, qui consisterait à instaurer un quatrième jour de carence pour la prise en charge de l'indemnisation des arrêts maladie. Il y a actuellement trois jours de carence, qui restent à la charge de l'employeur. Le quatrième jour de carence s'imposerait à l'ensemble des salariés et aux agents de la fonction publique, alors que les mesures de baisse des IJ ne s'adressaient, une fois de plus, qu'aux seuls salariés du privé. Ce quatrième jour de carence pourrait être pris ou non en charge par les employeurs. S'il ne l'était pas, il resterait bien évidemment à la charge des salariés, mais limiterait la pénalisation des malades de longue durée à une journée. On peut estimer, notamment pour les salaires les plus faibles, qu'elle se limite à une perte de 20 euros, ce qui me paraît préférable, puisqu'elle ne s'applique qu'une fois, aux pertes de 30 à 40 euros qui se renouvellent tous les mois, lorsque le salarié est en arrêt maladie. Une telle mesure aurait peut-être aussi un impact sur les petits arrêts maladie répétitifs, que les employeurs connaissent bien.
Je pense qu'il vous appartiendra de choisir les mesures qui les plus appropriées, en cohérence avec d'autres mesures qui pourraient être envisagées, afin d'adapter les finances sociales aux perspectives d'une croissance limitée à 1 %. Monsieur le ministre, notre souci, c'est d'empêcher qu'une mesure de baisse du montant des IJ à 60 % ne pénalise les salariés non couverts par des contrats de prévoyance, c'est-à-dire ceux des plus petites entreprises et ceux qui ont les salaires les plus modestes.
Nous ne pouvions accepter qu'ils subissent un préjudice même limité à 30 ou 40 euros, ce qui est énorme pour les salariés qui se situent en bas de la grille des salaires, alors qu'ils sont déjà confrontés aux difficultés d'une affection de longue durée.
En vous faisant ces propositions, nous vous proposons des alternatives responsables à la mesure de baisse des indemnités journalières. J'espère que le Gouvernement voudra bien prendre en compte ces propositions.
J'interprète l'intervention du rapporteur comme une présentation générale du sujet, avant de passer à l'examen des amendements.
La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour défendre l'amendement n° 677 rectifié .
J'ai beaucoup apprécié que M. Bur intervienne sur les indemnités journalières avant la présentation de nos amendements. Il a employé le pronom « nous ». Ce n'est sans doute pas le « nous » de majesté, mais un « nous » de consensus.
Le Gouvernement a prévu de simplifier le mode de calcul des indemnités journalières maladie, en passant d'un pourcentage de salaire brut à un pourcentage de salaire net, par décret applicable dès le 1er janvier 2012.
L'indemnisation maladie passerait ainsi de 50 % du salaire brut à 60 % du net, soit 47,8 % du brut. Cette mesure conduit à baisser le montant de près de 6 %. Or, tous les ans, on constate plus de 7 millions d'arrêts de travail et environ 30 % de salariés n'ont aucune couverture complémentaire, principalement les salariés les plus fragiles et les précaires.
Pour un salarié au SMIC, l'indemnité passerait ainsi de 680 à 640 euros. Or l'indemnisation des salariés malades est l'un des fondements de la sécurité sociale. L'article 27 de l'ordonnance du 19 octobre 1945, qui a fondé la sécurité sociale, indiquait que l'indemnité journalière est égale à la moitié du gain journalier de base. Cela date de 1945.
Nous proposons que le législateur s'empare de ce sujet touchant très directement au pouvoir d'achat de plusieurs millions de Français. Ce sujet, qui a toujours été au coeur des engagements de la majorité présidentielle, est gravé dans le marbre de la loi. L'engagement de la nation envers les plus faibles doit rester inchangé. Par conséquent, nous souhaitons maintenir le calcul des indemnités journalières en fonction du salaire brut afin de ne pas pénaliser les malades. Si lutter contre la fraude est nécessaire et souhaitable, cela ne justifie pas pour autant que les malades soient pénalisés, cela n'est pas acceptable. Il revient au Gouvernement d'organiser des contrôles plus efficaces des fraudes.
Le conseil de surveillance de la CNAM a rejeté le projet de décret par huit voix contre, quatorze abstentions, et aucune voix pour. Les 200 millions d'euros espérés par cette réduction ont été trouvés – et même plus – par diverses mesures que nous avons votées dans le cadre de ce PLFSS.
Je souhaite que le mode de calcul de l'indemnité journalière figure dans la loi. C'est pourquoi notre amendement précise que l'indemnité journalière sera de 63 % du gain journalier de base net de charges sociales, dans des conditions fixées par décret, ce qui revient à maintenir l'équivalent de 50 % du salaire brut actuel.
La parole est à Mme Marisol Touraine, pour présenter l'amendement n° 594 .
Nous défendons le même amendement. Dans la mesure où le Gouvernement veut procéder à la réduction des indemnités journalières par voie de décret – ce qui est la voie juridique normale –, nous voulons nous aussi que le mécanisme de calcul des indemnités journalières soit inscrit dans la loi.
J'ai entendu les propositions de M. Bur, mais les personnes qui sont malades ne sont pas des fraudeurs ou des fraudeuses en puissance.
Plusieurs députés du groupe UMP. Ceux qui sont vraiment malades, non !
Il y a des fraudes. Il y a des malades, qui ont besoin d'être indemnisés puisqu'ils ne peuvent pas travailler.
S'il s'agit simplement de chercher des économies – et non de prétendre que la réduction des indemnités journalières renvoie à un risque de fraude potentielle –, il nous semble que ce n'est pas ainsi qu'il faudrait procéder. Car comme nous l'avons déjà dit, ces économies se font au détriment des personnes les plus fragiles, puisque ce sont des personnes malades.
Nous ne nous retrouvons pas non plus dans la contre-proposition de M. Bur, sur le quatrième jour de carence. J'aimerais du reste que l'on me donne des chiffres sur le nombre de personnes qui sont malades à répétition – ce qui s'apparenterait à de la fraude – cinq à six jours, puis reprennent le travail trois jours, puis s'arrêtent de nouveau cinq à six jours pour pouvoir bénéficier des indemnités journalières de manière indue.
Je ne suis pas convaincue que cela corresponde à un comportement largement répandu. Là encore, cela revient à cibler les personnes qui, étant malades, ne peuvent pas assumer la perte d'un jour de salaire. Ce sont uniquement les plus modestes qui seront concernés par la contre-proposition de M. Bur.
S'il faut chercher des économies, ce n'est pas uniquement pour compenser l'abandon de la mesure proposée par le Gouvernement, c'est de façon plus générale. Nous avons fait des propositions pour revoir à la baisse des niches fiscales. Nous avons fait des propositions sur la politique du médicament. Le Gouvernement, comme nous l'avons indiqué à plusieurs reprises, doit purement et simplement revenir sur la mesure qu'il avait annoncée ; les compensations à trouver ne peuvent être réalisées sur le dos de personnes malades.
Puis-je considérer, monsieur Préel, que votre amendement n° 643 est défendu ?
La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales.
Avant que le ministre ne s'exprime, je voudrais lui demander de prendre en compte la position presque unanime de la commission des affaires sociales. En effet, au cours de très longues séances en commission, trop longues d'ailleurs, et en séance publique, nous nous sommes tenus à une double ligne de conduite : responsable, mais juste.
Responsables, nous le sommes en proposant comme vient de le dire le rapporteur, des économies, pas seulement en termes de recettes – il est toujours facile de faire des économies ainsi –, mais en proposant moins de dépenses avec un ONDAM où les économies seront plus importantes que les dépenses.
Responsables également parce que nous mesurons l'effort du Gouvernement de réaliser un ONDAM à 2,8 % de croissance dans la période actuelle, au risque d'aggraver les dettes. Je rappelle que l'État providence français, c'est 630 milliards d'euros. Nous sommes en Europe le pays qui dépense le plus, mais qui apporte sur le plan social, en particulier aux moins aisés, une contribution très importante : les 20 % les moins aisés voient leur revenu augmenter de 54 % grâce aux prestations sociales. Ce qui nous situe en Europe au troisième ou quatrième rang des pays dans la lutte contre la pauvreté. Il faut le rappeler car le catastrophisme social ne rend pas service au pays, qui a besoin de vérité.
Cet effort a des conséquences sur les 20 % les moins aisés. Vous avez, monsieur le ministre, corrigé votre budget sur deux points. Vous avez notamment accepté l'amendement visant à ne pas assujettir à la CSG le complément de libre choix d'activité, car la politique familiale est un élément clé de la politique du Gouvernement et de sa majorité.
Je suis, comme beaucoup d'entre vous, maire d'une ville. J'ai pu constater que sur soixante-dix postes proposés dans l'industrie – salariés de maintenance industrielle ou conducteurs de ligne –, il n'y a eu aucune réponse ou très peu. Dans le même temps, pour un poste dans le centre communal d'action sociale, 142 candidats se sont présentés ! N'aggravons pas les choses et n'adoptons pas de mesures au détriment des salariés du secteur privé qui seraient forcément perçues comme une injustice.
En fait, compte tenu des économies, l'idéal serait, monsieur le ministre, de repousser totalement le projet de décret du Gouvernement sur les indemnités journalières.
Le rapporteur Yves Bur a fait quelques suggestions complémentaires au cas où l'exigence de réduction de la dette nous y contraindrait. Mais la meilleure des solutions serait bien sûr de supprimer ce décret de façon à prendre en compte les propositions, responsables et justes, de la commission. (Applaudissements plusieurs bancs du groupe UMP.)
Je vais émettre un avis favorable à la proposition d'Yves Bur. Mon rôle est de proposer un ONDAM ambitieux et réaliste à 2,8 %. Vous avez compris que ce n'était pas une option. Pierre Méhaignerie et Yves Bur savent prendre leurs responsabilités lorsqu'il s'agit de proposer moins de dépenses. Le vrai courage n'est pas de créer des recettes supplémentaires, mais de diminuer les dépenses.
Concernant les indemnités journalières, j'assume totalement le fait d'avoir un système unifié avec pour base le salaire net. Ce sera la déclaration simplifiée. Nous avons un poste de dépenses de 6,6 milliards d'euros en augmentation moins importante par rapport à l'année dernière, mais tout de même de 3,8 %. Là aussi, nous pensions qu'il était possible de dépenser légèrement moins, 220 millions d'euros sur 6,6 milliards d'euros, avec un effort principalement porté, que j'assume, par les entreprises, dans la mesure où un très grand nombre de salariés, notamment dans les grandes entreprises, sont couverts soit par une convention collective ou un accord collectif de prévoyance, soit, dans une moindre mesure, par un avantage lié au contrat de travail.
Vous nous avez dit que ce dispositif relevait du niveau réglementaire, mais je vois bien pourquoi vous voulez l'élever au niveau de la loi. J'entends aussi vos réticences et vos interrogations sur la possibilité éventuelle de recourir à d'autres choix.
M. Bur a proposé la prise en compte d'un autre ensemble de dépenses en moins, et suggéré au Gouvernement un autre choix pour les indemnités journalières, celui du quatrième jour de carence.
Dans ces conditions, je vous propose de retravailler, au niveau réglementaire, sur ce sujet. Nous devons avancer rapidement en expertisant les différentes hypothèses, notamment celle que vous venez d'indiquer. Je me tiendrai ensuite à la disposition de la commission des affaires sociales. Même si l'on est au niveau réglementaire, je pourrai vous dire ce que l'on peut mettre en oeuvre comme nouveau dispositif, et cela dans la plus grande transparence.
La mesure qui passerait par la voie réglementaire devra être équivalente en termes de dépenses.
Sur la méthode, nous travaillons, nous expertisons vos suggestions. Nous reviendrons vers vous, monsieur le président de la commission des affaires sociales, avant la fin du cheminement législatif.
En regardant plus en détail ce dossier, je voudrais faire la part des choses, notamment par rapport aux propos de Marisol Touraine.
Il y a deux questions, celle de l'indemnisation du revenu de remplacement offert par les indemnités journalières, et celle, tout aussi légitime, même si elle n'est pas au coeur du dispositif, de la lutte contre les fraudes. Or, en la matière, je pense que nous ne sommes pas allés jusqu'au bout du processus. En 2004, lorsque j'étais secrétaire d'État et m'occupais de l'assurance maladie, j'ai lancé un programme de lutte contre les arrêts de travail abusifs. Qu'avions-nous constaté alors ? Qu'un arrêt de travail sur six de longue durée n'était pas justifié. Ces économies-là, je suis content de les avoir réalisées. Depuis, je pense que les efforts se sont relâchés car, en 2010, le niveau des arrêts de travail considérés comme abusifs était sensiblement le même.
Je dois vérifier un point et je ferai ce travail avant de revenir vous voir. Au moment du contrôle, je suis sûr que l'on a mis un terme à l'arrêt de travail abusif. Mais a-t-on demandé le remboursement des sommes versées ? Cela n'est pas la même chose en termes de rendement. S'agissant de ceux dont l'arrêt de travail est justifié, je ne vois pas qui pourrait leur reprocher d'avoir ce revenu de remplacement, d'autant que c'est lié à la valeur travail que nous portons.
Mais s'agissant de la lutte contre les fraudes, c'est une chose de contrôler, c'en est une autre d'obtenir le remboursement des sommes indûment perçues.
De la même façon – je le dis pour que les choses soient claires –, je mettrai la même énergie et la même force à contrôler celui qui aura bénéficié d'un arrêt de travail abusif et celui qui aura signé cet arrêt. Les deux vont ensemble.
L'idée de justice qu'évoquait Pierre Méhaignerie renvoie à quelque chose de simple : votre action est légitime dès lors que vous vous en prenez de la même manière à tous ceux qui sont impliqués dans la fraude, quelle que soit leur situation et quel que soit leur statut.
Plutôt que de chercher à contrôler tous les prescripteurs de France, il suffit de se tourner en priorité vers ceux qui sont largement surprescripteurs. Cela signifie non pas qu'ils sont fraudeurs mais qu'on doit leur demander d'abord à eux des renseignements. C'est l'un des maux français que de contrôler tout le monde de la même façon et, si vous voulez mon sentiment, ne pas très bien contrôler tout le monde de la même façon. On devrait davantage s'intéresser à ceux qui sont largement surprescripteurs et surconsommateurs pour savoir si les arrêts de travail sont justifiés.
Vous le voyez, monsieur Bur, il y a votre idée de faire passer le délai de carence de trois à quatre jours, que je dois expertiser, mais il y a aussi cette idée d'avancer davantage encore dans la lutte contre les fraudes. Je ne vous promets pas un rendement immédiat, mais je ne pense pas que Dominique Tian me reprochera de m'engager dans cette voie.
Je sais que nous ne disposons que de peu de temps : je dois vous garantir une totale transparence dans le cadre du cheminement législatif.
Dans ces conditions, nous gardons bien l'objectif d'une économie de 220 millions d'euros sur les arrêts de travail. J'entends bien que nous n'avons pas trouvé d'accord sur le dispositif pensé par le Gouvernement. Nous devons vous en proposer un autre d'un rendement équivalent.
Vous comprendrez donc, monsieur le président, que je donne un avis défavorable aux différents amendements et que j'accueille très favorablement la proposition de M. Bur.
M. le ministre vient donc de proposer une méthode pour traiter de ce sujet qui fait débat et a émis un avis défavorable aux trois amendements en discussion.
Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?
En tant que rapporteur de la branche assurance maladie, je suis concerné par les amendements portant article additionnel après l'article 34.
Lors de nos réunions en commission des affaires sociales, j'ai pu mesurer à quel point les avis étaient divergents. Cela nous a fait réfléchir, mais nous avons tout de même donné un avis défavorable aux différents amendements, en proposant que l'on revoie le problème avec les différents rapporteurs, avec le président de la commission des affaires sociales et avec M. le ministre, en lui demandant de trouver une mesure alternative à son projet de modifier le montant des indemnités journalières par décret.
Il reste vrai que nous devons couper dans les dépenses à hauteur de 220 millions d'euros. Nous avons la responsabilité du maintien de l'ONDAM. Il faut donc trouver une alternative pour des économies équivalentes, et c'est un peu le travail dont je suis chargé en tant que rapporteur pour l'assurance maladie.
Il n'est pas question de toucher à la prise en charge des patients.
Je viens d'entendre la proposition de M. le ministre pour une alternative à ce décret. En attendant de disposer d'autres éléments, je m'y rallie et maintiens les avis défavorables que la commission a émis sur ces trois amendements.
La parole est à Mme Martine Pinville, rapporteure de la commission des affaires sociales, pour la famille.
Ce matin, la majorité a voté le report du 1er janvier au 1er avril de la revalorisation de la base des prestations familiales. Il y a deux jours, elle adoptait une taxation des complémentaires santé. Après le déremboursement des médicaments, les franchises médicales, vous nous proposez la baisse des indemnités journalières ou bien l'instauration d'un quatrième jour de carence, avec un impact de trente à quarante euros par famille.
Mais qui cela va-t-il affecter le plus fortement ? Encore une fois, ce seront les familles les plus démunies et ceux qui ont les salaires les plus faibles. Cela, nous ne pouvons pas l'accepter !
Il existe un vrai problème dans notre pays avec les arrêts de travail. Les éléments récoltés lors des contrôles effectués par les médecins de la sécurité sociale ont montré – M. le ministre a eu bien raison de le rappeler –...
…que 10 % d'entre eux avaient reçu des avis défavorables, autrement dit que 130 000 arrêts ne sont pas justifiés. Dans ce cas, il est mis fin au versement des indemnités mais il n'est demandé aucun remboursement des sommes perçues, ce qui est déjà très injuste.
D'autre part, le privé et le public ne sont pas traités de la même manière. Le texte du décret du Gouvernement ne réduisait pas cette injustice, bien au contraire. Or il y a un vrai problème dans la fonction publique, nous sommes un certain nombre à le dire. Sans en faire un sujet politique,…
…il faut rappeler que dans la fonction publique hospitalière, 14 % du personnel est absent quasiment tous les jours. Cela nous a même conduits à la MECSS à prévoir une disposition – que nous n'avons finalement pas votée – visant à multiplier les accords de « présentéisme ». À l'AP-HP, en effet, les syndicats et les directeurs d'hôpital signent des accords pour que les gens ne soient pas malades : lorsque vous êtes présent, vous touchez une prime ! Voilà où en est la fonction publique hospitalière !
Dans la fonction publique, les arrêts maladie représentent en moyenne treize jours chaque année, ce qui est beaucoup plus important que dans le secteur privé car les délais de carence n'existent pas.
Je citerai encore une étude du ministère de l'intérieur qui a montré une triste réalité : les enseignants sont évidemment en tête pour les arrêts de travail, avec une moyenne de dix-sept jours par an et par personne.
Plusieurs députés du groupe SRC. Pourquoi « évidemment » ?
Une enquête du ministère de l'éducation nationale menée il y a deux ans a même mis en évidence que 80 % des arrêts de courte durée chez les enseignants avaient lieu au mois de mai, pendant la période des ponts !
Il y a un moment où il faut dire certaines choses. Vous avez eu raison d'évoquer ces problèmes, monsieur le ministre. Il y a un vrai souci. On ne peut pas continuer de cette manière avec les indemnités journalières car il y a des abus, madame Touraine : certaines personnes profitent de ce système et ce n'est plus tenable. Le Gouvernement manifeste de bonnes intentions et il devra faire preuve de courage pour prendre certaines mesures d'urgence car la situation l'exige.
Compte tenu de l'importance de ce débat, je vais donner la parole à d'autres orateurs pour de brèves interventions.
Nous reviendrons ensuite à une application très stricte du règlement afin de respecter les horaires, auxquels vous êtes encore plus que moi attachés, chers collègues.
La parole est à Mme Marisol Touraine.
Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre franchise.
Les raisons pour lesquelles des économies devaient être spécifiquement réalisées sur les indemnités journalières n'étaient pas très claires. Vous avez consacré les deux tiers de votre intervention à la question de la fraude. C'est donc bien, contrairement à ce que certains nous ont expliqué, parce que vous faites l'hypothèse que les salariés qui perçoivent des indemnités journalières sont des fraudeurs.
C'est cela le message que les Français doivent entendre de nos débats. C'est cela le message – sans tomber dans la caricature à laquelle nous a habitués M. Tian – qui transparaît dans les propos du ministre. Au fond, si le Gouvernement fait le choix de faire des économies en revoyant à la baisse les indemnités journalières, c'est qu'il fait l'hypothèse que les salariés en arrêt maladie sont des fraudeurs. Sinon, il n'aurait pas besoin de parler de la fraude, qui relève de l'exercice régulier de la lutte contre les abus, ce qui est un autre sujet.
Par ailleurs, je m'étonne que personne n'ait évoqué le fait que les arrêts maladie sont aussi aujourd'hui un très bon indicateur de ce que l'on appelle la souffrance ou le stress au travail.
Vous le savez bien. Quand les difficultés ont atteint un pic à France Telecom, elles se sont traduites par des manifestations extrêmes, les suicides, mais aussi par un taux d'absentéisme préoccupant dans certains services.
Dans les entreprises privées ou dans les secteurs de la fonction publique où le taux d'absentéisme est important, les salariés ont en général des problèmes de stress.
Pointer comme vous le faites les indemnités journalières perçues lors des arrêts maladie comme étant le signe non pas d'une maladie ou d'une souffrance, mais d'une fraude, est extrêmement choquant pour nous, monsieur le ministre.
Madame Touraine, vous vous laissez aveugler par votre souci de polémiquer. Vous avez tout simplement oublié de regarder de quel dossier il s'agissait. Nous sommes en train de parler des arrêts maladie et non pas des arrêts pour accident du travail ou des maladies professionnelles.
Ne cherchez pas à faire du ping-pong quand ça vous arrange. Le problème est simple. Les arrêts maladie n'ont rien à voir avec la question des relations dans le monde du travail. Ils concernent les salariés qui sont arrêtés pour quelques jours parce qu'ils sont malades.
Si vous étiez à l'aise, vous me laisseriez continuer, madame Touraine.
La preuve : vous m'empêchez de parler.
Vous avez fait un contresens et je vais vous dire pourquoi : vous n'êtes pas à l'aise avec la lutte contre la fraude. La vérité est là.
Trouvez-vous normal que, si un arrêt de travail est reconnu comme frauduleux, le remboursement des indemnités indûment perçues ne soit pas exigé ?
Prenez donc davantage sur votre temps de parole pour le dire haut et fort. La lutte contre la fraude n'est ni un sujet de droite ni un sujet de gauche a priori. Je ne comprends pas pourquoi, chaque fois que nous l'évoquons, le parti socialiste est aussi mal à l'aise avec cette question. Nous, nous prenons des initiatives en ce domaine ; jamais vous n'en avez pris, jamais.
L'autre jour, je débattais avec M. Moscovici et lorsque j'ai évoqué le sujet de la fraude, il s'est bien vite gardé de l'aborder, comme s'il ne fallait pas y toucher.
Quand on croit à la valeur travail, il est normal de vouloir combattre la fraude, car la fraude, c'est du vol. C'est une question de justice sociale, comme le soulignait Pierre Méhaignerie.
J'ai passé l'âge, madame, de me laisser caricaturer sans répondre. Je tiens à mes convictions. Avoir une juste indemnisation quand on ne peut travailler pour des raisons de santé, c'est tout à fait normal. Mais ce qui est encore plus normal, c'est que ce soient ceux qui sont réellement malades qui aient le droit à ces indemnités et pas ceux qui fraudent.
Je suis vraiment atterrée par les propos de M. le ministre. Comment peut-il prétendre que les gens cherchent à être arrêtés alors qu'ils ne seraient pas malades ? Dans ma carrière professionnelle, ce que j'ai observé, c'est au contraire que beaucoup de gens malades allaient au boulot. Ceux-là, on n'en parle jamais, ce qui est bien dommage. Beaucoup, sachant que leur médecin traitant ne leur donnera que trois jours de repos, ce qui est insuffisant pour se remettre d'aplomb,…
…vont quand même travailler et tombent ensuite malades pour longtemps.
Cela ne me paraît pas une bonne solution de rogner sur les arrêts maladie.
Quand Mme Touraine évoque la souffrance au travail, le ministre lui rétorque qu'elle se trompe de sujet et que cela renvoie aux maladies professionnelles. Cela n'a absolument rien à voir ! Comment dire qu'un salarié souffre d'une maladie professionnelle quand il est épuisé par un trajet trop long dans les transports en commun ? La plupart des personnels de l'AP-HP ne peuvent pas se loger dans Paris et doivent subir deux heures de trajet matin et soir dans des conditions épouvantables : au bout d'un certain temps, c'est vrai qu'ils vont voir leur médecin traitant pour avoir un arrêt. Sachant que les médecins ne donnent que des arrêts de trois jours, ils savent à quoi s'en tenir. Maintenant, si vous ajoutez un quatrième jour de carence, il y aura des arrêts de travail de quatre jours.
Quelle curieuse conception ! (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Ce n'est pas de la sorte que l'on améliorera la santé de nos concitoyens, surtout celle des femmes, qui doivent travailler de plus en plus longtemps.
Maintenant, monsieur le ministre, je peux vous retourner le procès que vous venez de faire à Mme Touraine. Si vous m'interrompez, c'est que vous ne devez pas être très à l'aise.
Sur un sujet comme celui-ci, il me semble que nous pouvons prendre le temps de nous exprimer.
Depuis mardi, nous nous consacrons au projet de loi de financement de sécurité sociale.
Il faut se rappeler ce que représente dans notre pays ce qu'on appelle la sécurité sociale, et plus largement la protection sociale.
La mesure que vous présentez consiste, chacun l'a bien compris, à rogner les indemnités journalières versées aux personnes touchées par la maladie. Il s'agit bien d'arrêts maladie mais, dans ce débat, vous utilisez cette mesure, déjà par essence injuste et incompréhensible, pour faire croire que toutes les personnes en arrêt maladie sont de potentiels fraudeurs.
Nous sommes ici assez nombreux, je crois, pour considérer qu'il s'agit vraiment d'une mesure extrêmement grave, voire inique. Nous ne pouvons pas accepter que ce pays, qui jusqu'à présent a su préserver son modèle et son socle de protection sociale, en arrive, dans une période particulièrement difficile, à toucher aux arrêts maladie et à leur indemnisation.
Nous avons, je veux le rappeler, essayé les uns et les autres, avec parfois des mots un peu plus forts sur certains points, tout au long de cette semaine, de trouver des solutions ; nous avons cherché, ce que rappelait d'ailleurs le président de la commission, responsabilité et équité. Mais ce qui se passe à cet instant ne grandit pas le Parlement et ne grandit pas ce que nous sommes. Personnellement, je ne serai pas fière en sortant d'ici, après cette semaine, d'expliquer ce qui s'est passé. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Nous devons, je pense, bien réfléchir. Nous avons participé à la mission sur la fraude sociale dont Dominique Tian a été le rapporteur. Mais il arrive un moment où l'on ne peut accepter de telles propositions.
Je voudrais donc appeler votre attention sur le message qui sera délivré. Nous parlons de questions qui touchent nombre de nos concitoyens, notamment ceux qui sont victimes d'aléas de la vie. Réfléchissons bien et, s'il y a des efforts à faire, essayons d'en faire porter le poids par d'autres que ceux-là.
Monsieur le ministre, j'ai beaucoup de mal à comprendre cette stigmatisation d'un certain nombre de corporations – les fonctionnaires, les fonctionnaires territoriaux. C'est totalement inadmissible ! C'est insupportable !
Mon père a été fonctionnaire pendant toute sa vie, il a pris quinze jours d'arrêts de travail ; et il y en a des centaines de milliers comme cela. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Mais il y a aussi des fonctionnaires qui sont malades, et ils ont le droit d'être malades : ce n'est pas parce que l'on est fonctionnaire et malade que l'on ne peut pas s'arrêter ! Je trouve cela inadmissible.
Ensuite, je l'ai dit hier à M. le ministre, je suis moi-même médecin généraliste, et j'exerce en secteur I, en zone urbaine sensible ; cette zone compte seize usines classées « Seveso », et la présence la plus forte en France de maladies liées à l'amiante. Ces patients ont de cruelles destinées : au port de Dunkerque, 80 % de l'amiante était déchargée à mains nues ; imaginez ce que cela peut donner !
Si M. le ministre a envie – oh, ce n'est pas lui qui le fera – de venir vérifier les IJ que je prescris dans ma modeste activité, il verra que je suis très nettement au-dessus de la norme ! C'est évident : il y a des risques industriels considérables, il y a une pénibilité au travail immense. Je suis donc très nettement au-dessus des IJ qu'il peut y avoir à Nice, à Cannes ou à d'autres endroits où certains risques sont probablement moindres !
Je n'accepte donc pas que l'on stigmatise certaines professions et en particulier les fonctionnaires.
Je n'accepte pas non plus que, depuis trois jours, on parle de la responsabilisation et de l'honnêteté des médecins. Je viens d'entendre que les médecins prescripteurs seraient eux-mêmes des voyous : mais c'est quelque chose d'incroyable ! Je vais expliquer cela à mes collègues médecins généralistes : nous serions des voyous qui prescrivons des arrêts de travail pour frauder ! On va nous surveiller. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
En 1981, 67 % des médecins généralistes ont voté pour François Mitterrand ; on va arriver à 80 % pour François Hollande ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Très intéressante, votre démonstration : la démagogie, pourquoi ? Pour récupérer des voix ?
Bien sûr que si ! Votre numéro est un numéro entier de démagogie.
Pourquoi ne peut-on pas parler ? Arrêtez de vous énerver, s'il vous plaît !
La preuve que si.
Regardez le spectacle que l'on donne !
Plusieurs députés du groupe SRC. Que vous donnez !
Cela ne sert à rien de montrer du doigt, cela ne sert à rien d'être violent.
Je vais juste vous dire une chose ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Regardez ! J'ai déjà vu des provocations, ce n'est pas celle-ci qui me déstabilisera.
Ce que je voulais dire, quand même…
Relisez le compte rendu de ce que nous avons dit. Regardez votre petit sourire ! Il montre bien ce que vous avez cherché à faire tout à l'heure. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Il faut en priorité chercher à savoir quels sont les médecins qui prescrivent plus que les autres. J'ai dit aussi – et devant des syndicats de médecins – que dans ces cas-là il faut simplement demander des explications. Quand vous avez un bassin d'emploi plus industriel… et le vôtre l'est peut-être, mais venez chez moi, vous ne serez pas déçu non plus, vous verrez !
Une chose est certaine : dans ces conditions, tout se justifie. Mais ce qui est vrai, c'est que quand un médecin prescrit davantage, vous devez tout simplement vérifier à quoi correspondent ces surprescriptions ! Il n'y a rien de mal à cela ! Et vous ne pourrez pas nous prendre en défaut !
Le vrai sujet, vous l'avez révélé quand vous avez dit « en 81, ils ont voté pour nous, il faut qu'ils le refassent cette fois-ci »
Mais en définitive, que regardent les médecins ?
Les médecins regarderont les attitudes, les projets ; et ils aiment bien quand les choses sont claires. Un médecin est clair avec son patient. Eh bien, je vais vous le dire, il faudra aussi que le parti socialiste se mette au clair.
Parfois vous tapez sur les médecins, comme vous l'avez fait à différents moments, parfois vous les cajolez : vous hésitez et, je vous le dis, votre ligne manque de cohérence,…
…de même votre position sur la lutte contre la fraude manque de cohérence. Vous pouvez chercher à me caricaturer matin, midi et soir : il y a ceux qui sont pour, il y a ceux qui sont contre. (M. Hutin mime les gestes d'un violoniste.) Et vos gestes ont beau être particulièrement désobligeants dans cette enceinte, ça ne changera rien à ma conviction : la lutte contre la fraude vous gêne profondément, c'est important que les Français s'en rendent compte !
Monsieur Jacques Myard, vous avez la parole, mais j'espère que ce n'est pas pour faire rebondir le débat.
Le président Méhaignerie a tout à l'heure employé deux termes : juste et responsable. Il a, je crois, profondément raison. Sur ce sujet, ce n'est jamais bleu-blanc, on le sait bien. Il y a malheureusement des fraudeurs ; il y a, oui, madame Poursinoff, des gens malades qui vont travailler ; des gens qui, malades, préfèrent aller travailler, j'en connais beaucoup : il vaut mieux parfois aller au travail que rester chez soi, parce que pour le moral, rester chez soi, ce n'est pas excellent.
Voici ce qui me trouble, dans cette affaire. Loin de moi toute volonté de caricaturer. J'ai bien noté, monsieur le ministre, votre volonté de trouver des solutions, en liaison avec la commission des affaires sociales, car je ne vous cache pas que la mesure que le Gouvernement s'apprêtait à prendre nous paraissait politiquement inexplicable.
Mais il y a autre chose : nous ne pourrons pas, je crois, échapper à un débat sur la rupture d'égalité entre le public et le privé.
Je suis moi-même fonctionnaire à l'origine, et je peux vous dire que je n'ai pas eu beaucoup d'arrêts de travail. Mais il n'est pas acceptable que, pour une catégorie professionnelle, celle des fonctionnaires, il n'y ait pas de délai de carence, tandis que pour le secteur privé il y a trois, quatre jours de carence pendant lesquels les salariés ne sont pas payés, ou bien dans les conditions que l'on sait.
Cela me paraît constituer un véritable chantier : les citoyens doivent être égaux devant les charges publiques ; on demande à tous de faire des efforts ; il faut aussi, je crois, mettre ce sujet sur la table. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Marisol Touraine, pour un rappel au règlement.
Sur la base de l'article 58, alinéa 1, sans doute ?
Sur la base de l'article que vous connaissez bien, monsieur le président. (Sourires.)
Mon propos est grave. Monsieur le ministre, vous accumulez les formulations désobligeantes à l'égard de certains de nos collègues ; quand il s'agit de moi, peu importe ; quand il s'est agi de M. Hutin il y a un instant, c'était plus désagréable.
Nous ne sommes pas ici dans une arène ; nous ne sommes pas ici pour faire des sketchs, pour reprendre votre formulation ; nous ne sommes pas ici dans un souk, pour parler comme Mme Nora Berra. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) C'est elle qui a utilisé cette formule, que nous avons contestée, justement, car nous l'avons trouvée particulièrement désobligeante !
Nous sommes ici pour faire la loi. Monsieur le ministre, il n'est pas possible de débattre sereinement de sujets aussi importants, qui concernent la vie quotidienne des Français, dans ce climat d'agressivité, de mépris et de mauvaise foi que vous instaurez.
Mes collègues me disent leur sentiment que le débat devient pour eux insupportable. Je demande donc une suspension de séance de quinze minutes.
La parole est à M. le ministre, avant la suspension de séance, qui est de droit.
Madame Touraine, ce n'est pas la première fois que vous faites cela ! L'autre jour, en commission, vous vous êtes longuement concertés – il fallait rester, il fallait partir, il fallait rester, il fallait partir ; en définitive, vous êtes partis, et je sais les propos qui ont été tenus à titre privé par les uns et les autres sur votre sortie très médiatique.
Vous reprendrez mes expressions, vous reprendrez mes propos.
Vous reprendrez les gestes de M. Hutin, et vous verrez de qui on peut dire que le comportement est respectueux ou pas.
Cela ne sert à rien de vous emballer là-dessus, on peut tout de même s'écouter. (M. Hutin mime les gestes d'un violoniste.) Quand on ne veut pas entendre ces mots-là, on évite les gestes que vous venez de faire. Rien de plus, rien de moins.
Ce n'est pas la première fois que je vois un débat. J'en ai vu, des débats, notamment les 160 heures de débat sur les retraites en 2003 ; je connais cet hémicycle et je l'aime. Mais je sais aussi que les comportements de certains font déraper.
Et tout cela parce que, parfois, le positionnement politique pose problème. Mais ce n'est pas parce que nous en arrivons à la fin des débats du PLFSS qu'il faut perdre sa sérénité.
On peut se dire les choses fermement, tout en se respectant. J'ai participé à des débats au Sénat, qui n'étaient pas forcément très simples, sur des sujets qui ne l'étaient pas non plus. On peut avoir une véritable écoute, un véritable respect, et on sait aussi l'avoir dans cet hémicycle.
Mais à partir du moment où vous commencez à caricaturer et à travestir les propos, il ne faut pas s'étonner que les débats dérapent.
Ce n'est pas l'honneur du Parlement, et ce n'est ni la volonté ni la vocation du Gouvernement et des parlementaires.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
J'essaye de respecter les convictions des uns et des autres, et je dis souvent que la vérité est dans la nuance.
Il faut reconnaître, monsieur Hutin, que vos propos étaient d'une dureté exceptionnelle.
Mes chers collègues, j'ai reçu, il y a quelques jours, le président d'une très grande institution publique. Il me disait : monsieur Méhaignerie, toutes les six semaines, j'ai 50 % de mon personnel qui part pour une ou deux semaines. Cela fait réfléchir, les quarante-cinq jours de RTT ! Y a-t-il un autre pays dans le monde qui soit dans cette situation ? (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Il faut regarder la vérité des uns et des autres. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Quarante-cinq jours de RTT, vingt-cinq plus vingt, c'est la situation dans beaucoup de secteurs. Vous avez tous des enfants, dans d'autres pays. Nos voisins européens voient tout cela avec stupéfaction ! Ce n'est pas mentir que de rappeler aux Français que nous sommes dans une situation vraiment exceptionnelle, et qui peut expliquer nos difficultés en matière de compétitivité.
Il faut prendre cet élément en compte, et je regrette, monsieur Hutin, mais j'ai moi aussi été choqué par la dureté de vos propos.
Rappel au règlement
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures trente, est reprise à seize heures quarante.)
La séance est reprise.
Nous reprenons la discussion des amendements nos 677 rectifié, 594 et 643.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Je voudrais donner mon point de vue sur un débat qui nous anime et nous passionne chaque année.
Nous avions clos le chapitre sur les fraudeurs, mais nous y revenons par différents biais.
Affirmer qu'il y a des fraudeurs, c'est enfoncer une porte ouverte. De la même manière, dire qu'on lutte contre les fraudes, c'est enfoncer une porte ouverte. Nous le savons, dans toute société, il y a des fraudeurs et il faut, bien évidemment, lutter contre les fraudes et contre les abus, notamment les abus d'arrêts de travail, ainsi que les abus des prescripteurs.
En revanche, ce qui est inacceptable, c'est cette volonté permanente de diminuer le montant des indemnités journalières, donc les moyens pour les malades, qui ont besoin de vivre.
Par ailleurs, vous semblez nier que l'immense majorité de nos concitoyens sont honnêtes. Essayer de les faire passer pour des fraudeurs ou des fainéants, ce n'est pas recevable.
J'ai parfaitement écouté !
Vous partez du postulat que les personnes qui s'arrêtent pour maladie sont des fraudeurs.
N'interrompez pas Mme Fraysse, sinon son propos sera forcément plus long !
Partons du postulat que les gens sont honnêtes, Si le nombre des arrêts de travail augmente, c'est bien qu'il y a un problème.
Décidément, Monsieur Tian, vous avez une attitude provocatrice. En effet, vous ciblez les enseignants alors que vous avez supprimé des milliers de postes, ainsi que les hospitaliers alors que tout le monde sait dans quelles conditions dramatiques ils travaillent.
Franchement, je m'inquiète pour votre santé ! Je crains que vous n'ayez un syndrome obsessionnel sur les fraudes ! (Sourires.)
Deux chiffres : 674 millions d'euros par an ; tel serait le montant de la fraude aux prestations. De 15 à 19 milliards ; tel serait celui de la fraude aux cotisations.
Mon souhait initial était de graver dans le marbre, donc dans la loi, le mode de calcul des indemnités journalières, qui seraient maintenues au niveau actuel. Il s'agirait par conséquent de reprendre l'ordonnance de 1945, qui n'a rien perdu de son importance malgré son ancienneté.
J'entends bien qu'il faut lutter contre la fraude et condamner les fraudeurs quels qu'ils soient, mais il ne convient pas pour autant de pénaliser les malades, parmi lesquels ceux de longue durée, et notamment ceux qui souffrent d'un cancer et doivent être protégés.
Même si les promesses n'engagent que ceux qui les reçoivent, comme l'on dit, je suis prêt à vous faire confiance, monsieur le ministre, et à retirer mes deux amendements – ce qui n'est pas dans mes habitudes.
Je souhaite intégrer le groupe de travail qui étudiera le futur décret qui, si j'ai bien compris, ne reprendra pas l'ancien. Je compte sur deux engagements de votre part. D'abord, le calcul de l'indemnité journalière doit être fondé sur 63,5 % du salaire net, correspondant aux 50 % du salaire brut actuel. D'autre part, puisque nous avons déjà réalisé un certain nombre d'économies dans le cadre de l'ONDAM grâce au rapporteur général et aux mesures que nous avons votées précédemment, il n'y a plus 220 millions d'euros à récupérer mais une toute petite partie, encore que, selon le calcul d'Yves Bur, nous sommes au-delà de 220 millions d'euros.
Absolument !
(L'amendement n° 677 rectifié est retiré.)
(L'amendement n° 643 est retiré.)
(L'amendement n° 594 n'est pas adopté.)
Je profiterai de mon intervention sur l'article pour défendre mes trois amendements.
Comme le précédent, l'ONDAM pour 2011 va être respecté, ce qui constitue une bonne nouvelle. Il est vrai que 500 millions d'euros avaient d'emblée été mis en réserve.
L'ONDAM pour 2012 doit augmenter de 2,8 %, avec une hausse de 2,7 % pour les dépenses de soins de ville et de 2,7 % également pour les dépenses consacrées aux établissements de santé. Il sera difficile de respecter cette augmentation modeste compte tenu du vieillissement de la population, des améliorations technologiques et de la nécessité d'investir. Modeste, elle n'en correspond pas moins à 4,5 milliards d'euros, ce qui n'est pas rien dans le contexte économique actuel, celui en particulier d'une faible inflation.
Cependant, la construction de l'ONDAM repose sur l'hypothèse d'une croissance tendancielle de l'ordre de 4 % des dépenses du champ de l'objectif. Pour respecter une augmentation de l'ONDAM de 2,8 %, il faudra trouver des économies de l'ordre de 2 milliards d'euros, des économies douloureuses.
Je ne reviens pas sur la construction de l'ONDAM qui, depuis l'origine, ne repose hélas ni sur des données médicales, ni sur les besoins de santé, mais sur des critères économiques. Il serait souhaitable d'organiser au printemps prochain un débat d'orientation sur la politique de santé, fondé sur les travaux des conférences régionales de santé, afin de prendre en compte les besoins du pays et de veiller à leur adéquation avec l'offre de soins. Ce serait aussi l'occasion de discuter de la nécessité de renforcer la prévention et l'éducation à la santé, de discuter des moyens à mettre en oeuvre à cette fin, et surtout d'organiser une concertation des divers intervenants et un réel pilotage de cette politique de prévention pour prendre en compte des priorités telles que les mortalités prématurées évitables.
L'ONDAM est décliné en sous-objectifs : soins de ville, établissements de santé, médicaments, secteur médico-social…
Nous avons créé des ARS, en faveur desquelles j'ai milité pendant longtemps. J'en suis heureux même si j'en désapprouve leur mode de fonctionnement pyramidal et centralisateur. Cette création avait d'abord pour but de mettre un terme au défaut majeur du système de santé : la séparation, que tout le monde considérait comme absurde, entre la prévention et le soin, la ville et l'hôpital, le sanitaire et le médico-social.
Chaque région compte désormais un responsable unique de la santé. Il est donc absurde de continuer à voter des sous-objectifs « fléchés », qui contribuent à faire perdurer les séparations que la création des ARS devait supprimer. La logique voudrait que nous votions désormais des enveloppes régionales, des ORDAM calculés en fonction de critères objectifs donnant toute latitude aux ARS d'arbitrer selon les besoins régionaux. Du reste, le comité Fourcade, dont le rapporteur Jean-Pierre Door a été un membre éminent, préconise la création des ORDAM.
J'en viens à mes trois amendements à l'article 48.
L'amendement n° 572 est un amendement d'appel quelque peu absurde puisqu'il vise à supprimer l'ONDAM ; il s'agit seulement de manifester mon opposition aux sous-objectifs de l'ONDAM.
L'amendement n° 687 a pour but de créer des ORDAM. Leur mise en place, m'a-t-on déclaré, serait difficile mais, de mon point de vue, ce ne serait pas très compliqué car il suffirait d'augmenter de 2,8 % l'enveloppe attribuée à chaque région en 2011.
Enfin, l'amendement n° 686 , qui recueille l'assentiment de Pierre Méhaignerie, vise à expérimenter les ORDAM dans trois régions pour une durée de trois ans.
L'article 48 fixe l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, qu'il établit à 2,8 % en moyenne et à 2,7 % pour les établissements hospitaliers.
Les députés de mon groupe ne voteront pas cet article pour deux raisons essentielles. D'abord, ce taux ne permettra pas, loin de là, de répondre aux besoins évalués en matière de santé, notamment, je l'ai déjà souligné, en ce qui concerne l'hôpital. Qu'il s'agisse des fluides, du prix des médicaments ou d'éventuelles augmentations de salaire, la hausse naturelle des dépenses de l'hôpital est telle que les prévisions de l'ONDAM restent très en deçà de ce qu'il faudrait. Aussi les conditions de travail à l'hôpital ne pourront-elles que s'aggraver.
Ensuite, n'ayons pas peur des mots, ce chiffre est fantaisiste. On nous demande de nous prononcer sur une évaluation de la masse salariale erronée, sur un taux de croissance erroné : je n'insiste pas sur l'annonce du chef de l'État hier soir.
Dans ces conditions, nous demander de voter cet article relève de la mascarade et traduit même un certain mépris pour la représentation nationale.
Je présume, monsieur Préel, que vous avez défendu votre amendement n° 572 ?
Je donnerai l'avis de la commission sur les trois amendements de M. Préel.
Il est vrai que le comité Fourcade avait évoqué la création des ORDAM et nous ne sommes pas loin de penser parfois la même chose, M. Préel et moi-même. Un rapport a été remis au ministère de la santé, qui montre l'existence de disparités de dépenses en matière de santé et de disparités de niveau de vie entre nos concitoyens. On note également des disparités intrarégionales plutôt qu'interrégionales.
La création du fonds d'intervention régional est un outil grâce auquel les directeurs des ARS vont pouvoir piloter plus facilement la politique de santé au sein de leur région. Ce dispositif répond à vos attentes comme aux miennes. J'ai grande confiance en ce FIR. Attendons qu'il donne ses premiers résultats pour en discuter avec les ARS.
La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements nos 572 , 687 et 686 .
M. Préel sera peut-être déçu mais certainement pas surpris par l'avis défavorable du Gouvernement sur ses trois amendements. Le FIR représente une avancée très importante et je ne partage pas la conception de M. Préel sur les ORDAM. Nous en avons déjà discuté avec Pierre Méhaignerie. Il vous reste à me convaincre sur les apports de l'ORDAM alors que j'en perçois très bien les risques. La balance ne penche donc pas encore du côté de l'avis favorable.
(L'amendement n° 572 n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Marisol Touraine, pour soutenir l'amendement n° 524 .
Il s'agit de rappeler l'importance que nous accordons au fonds d'intervention de la qualité et de la coordination des soins, le FIQCS, régulièrement ponctionné, pour reprendre le mot de Mme Vasseur. Les établissements qui s'adressent à ce fonds pour bénéficier d'un soutien n'y sont pas encouragés.
L'évolution de la médecine de ville suppose le renforcement d'une médecine de premier recours, dont la nécessaire réorganisation passe par des actions de modernisation, des actions qualitatives qui seules inciteront les professionnels à s'installer dans les secteurs plus difficiles.
Voilà la discussion que nous souhaitons engager à l'occasion de la discussion sur l'ONDAM. Des sommes plus importantes doivent pouvoir être consacrées au FIQCS dans le cadre des enveloppes affectées à la médecine de ville
En effet, en diminuant les dépenses de l'ONDAM consacrées aux soins de ville, on diminue les dépenses liées aux consultations, à l'accès aux soins, aux médicaments… Les médecins libéraux apprécieront votre demande dès lors que vous réduisez leur ONDAM. Vous verrez bien de quelle manière ils réagiront. Avis défavorable.
Même avis.
(L'amendement n° 524 n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Marisol Touraine, pour soutenir l'amendement n° 525 .
Il est défendu.
(L'amendement n° 525 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
L'amendement n° 686 a lui aussi déjà été défendu mais M. Préel semble vouloir ajouter un mot.
Je ne souhaite pas défendre une seconde fois cet amendement mais, comme le ministre a besoin d'être convaincu, je lui rappellerai que j'ai connu plusieurs ministres de la santé qui devenaient favorables à la création des ORDAM à la faveur de la cessation de leurs fonctions, comme Mme Bachelot, qui en est devenue un ardent défenseur.
Les ORDAM ne me paraissent pas difficiles à mettre en place. Il existe certes des inégalités entre les régions, mais il suffirait de donner à chaque région la somme qu'elle a reçue en 2011 et de l'augmenter de 2,8 %. Nous réaliserions ainsi la fongibilité réclamée par tous.
Avec Pierre Méhaignerie, nous pensons, monsieur le ministre, qu'à défaut de créer un ORDAM dans chaque région, il faudrait l'expérimenter dans deux ou trois pendant deux à trois ans afin que vous mesuriez qu'il s'agit bien d'un progrès. J'espère donc vous convaincre et, comme vous n'ignorez pas que la pédagogie est l'art de la répétition, je n'hésite pas à répéter mon point de vue en espérant parvenir un jour à mes fins.
(L'amendement n° 686 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 48 est adopté.)
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l'amendement n° 460 rectifié , portant article additionnel après l'article 48.
Cette année encore, le versement des crédits MIGAC finançant les missions d'intérêt général des établissements de santé sera conditionné par le respect des objectifs de dépenses, ce qui n'est pas acceptable : comme M. Préel, je le répéterai jusqu'à vous convaincre.
L'enveloppe MIGAC a diminué de 25 millions d'euros en 2009. En 2010, 400 millions d'euros ont été mis en réserve et, cette année, ce sont 545 millions d'euros qui seront gelés.
Pour l'essentiel, c'est l'hôpital public qui est pénalisé par ces dispositions prises pour remédier au dépassement de l'objectif. Pourtant ce dépassement tient aussi aux activités du secteur privé. Il est donc tout à fait injuste que le secteur public en supporte seul les conséquences. C'est pourquoi nous demandons que ces efforts d'économie si néfastes à la santé publique soient répartis de façon équitable entre les établissements publics et privés.
Avis défavorable. Depuis quelques années, l'ONDAM soins de ville et l'ONDAM hospitalier sont au même niveau. Les mêmes efforts sont demandés à tous les professionnels et à tous les établissements de santé : c'est un effort partagé au service de l'ONDAM, et nous pouvons être fiers que, pour la première fois depuis 1997, ce dernier soit respecté, et même deux ans de suite. On voit là l'esprit de responsabilité de tous les acteurs.
Même avis.
Certes, vous demandez des efforts à tout le monde mais vous savez bien que ce sont les établissements publics qui assurent l'essentiel des missions de service public. Par conséquent, lorsque vous prenez la décision de ne pas verser les MIGAC aux hôpitaux, donnez-moi acte que ce sont essentiellement les établissements publics que vous pénalisez. Les efforts sont sans doute répartis, mais les punitions touchent principalement les établissements publics, voilà ce qui ne va pas !
(L'amendement n° 460 rectifié n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse pour présenter l'amendement n° 465 rectifié .
Cet amendement traduit également notre volonté de soutenir les hôpitaux publics, qui sont censés faire face à toutes les éventualités, en particulier aux catastrophes comme la canicule et aux épidémies comme la grippe H1N1, qui touchent un grand nombre de personnes. Ils devraient pour cela pouvoir bénéficier, au sein de l'ONDAM, de dotations de financement des charges de structure des missions de service public hospitalier.
Avis défavorable. Les charges de structure que vous évoquez sont prises en charge dans le cadre des aides à la contractualisation – AC – des MIGAC. Cela figure d'ailleurs dans le rapport sur ces dernières : on y voit bien les différences entre les aides à la contractualisation en fonction des régions.
(L'amendement n° 465 rectifié , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi de deux amendements, nos 526 rectifié et 462 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Marisol Touraine pour soutenir l'amendement n° 526 rectifié .
Cet amendement porte à nouveau sur les MIGAC, qui sont pour nous un élément majeur des politiques hospitalières et qui sont les premières visées par les restrictions des financements. Ainsi, au cours de l'année écoulé, le respect de l'ONDAM a été obtenu pour une large part par le gel des dotations correspondantes, à hauteur de 550 millions d'euros.
Nous demandons qu'en cas de dérive de l'ONDAM constatée en cours d'année – ce qui n'est jamais souhaitable mais peut advenir – ces fonds ne soient ni diminués ni gelés, mais au contraire sanctuarisés, car ce sont ces ressources qui permettent de garantir que les établissements publics soient en mesure d'assumer leurs missions de service public dans toutes les circonstances et dans toutes les occasions.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse pour défendre l'amendement n° 462 rectifié .
Cet amendement répond au même souci que celui que je viens de présenter.
Je souscris pleinement à la proposition de Marisol Touraine de sanctuariser ces fonds, qui sont en effet essentiels au fonctionnement de l'hôpital public.
La mise en réserve de crédits des MIGAC est un outil qui a été préconisé par le comité de pilotage de l'ONDAM instauré à la suite des travaux du groupe de travail présidé par Raoul Briet. Cela permet de maintenir l'ONDAM au cas où le comité d'alerte constaterait un dépassement, donc de juguler ce risque.
Voilà pourquoi j'émets un avis défavorable à ces amendements.
(Les amendements n°s 526 rectifié et 462 rectifié , repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
La parole est à M. Dominique Tian pour soutenir l'amendement n° 483 rectifié .
Cet amendement que je présente à l'occasion de chaque PLFSS vise à instituer un « rendez-vous assurance maladie 2013 » comme il existe des « rendez-vous retraite ».
Avis défavorable. Nous ne manquerons pas d'occasions de débattre de l'avenir de l'assurance maladie en 2012, belle année électorale…
(L'amendement n° 483 rectifié , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Nous en venons aux dispositions concernant les dépenses relatives à l'assurance vieillesse
Nous abordons le peu d'articles consacrés à l'assurance vieillesse.
Malgré la récente réforme des retraites, on peut nourrir quelques doutes quant à la capacité d'atteindre l'équilibre en 2018 au regard des bases économiques sur lesquelles il avait été prévu. C'est pourquoi le groupe Nouveau Centre demande qu'une nouvelle réforme, systémique, permette d'aller rapidement vers un régime de retraites à points ou à comptes notionnels, avec extinction des régimes spéciaux.
Par ailleurs, en tant que président du groupe d'études sur les conjoints survivants, au sort desquels notre rapporteur Denis Jacquat est également très attaché, j'avais déposé de nombreux amendements afin de tenter d'améliorer leurs pensions de réversion. Parce qu'il s'agissait d'améliorations, tous ces amendements sont hélas tombés sous le coup de l'article 40, je le regrette.
Deux de mes amendements viendront toutefois en discussion. Ils concernent les veuves de la fonction publique, où les pensions de réversion sont calculées en fonction du nombre de lits et non de la durée des mariages, ce que je déplore. Il me paraîtrait judicieux que ces pensions rejoignent celles du régime général. Bien entendu, il faut maintenir les pensions au bénéfice des orphelins.
S'agissant de l'article 49, je me félicite de la prise en compte de seize trimestres dans le calcul de la retraite des sportifs amateurs de haut niveau, qui marque un réel progrès. Cela peut toutefois paraître un peu insuffisant pour ceux de ces sportifs qui font partie de l'élite. Envisagez-vous pour ces derniers une évolution qui est demandée par le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) et par un certain nombre de ces sportifs de l'élite qui ont consacré de nombreuses années de leur vie à porter haut le drapeau de notre pays ?
Nous nous réjouissons que cet article vienne réparer une injustice ancienne vis-à-vis de l'ensemble des sportifs de haut niveau qui composent l'élite amateur de notre pays et reconnaître ainsi leur investissement et le temps qu'il leur a fallu consacrer à devenir ces champions reconnus au plan français et international.
Leur ouvrir des droits à la retraite est légitime quand on sait que le sport de haut niveau exige des années de travail acharné, ce qui retarde souvent leur parcours de formation – il faut donc absolument qu'ils puissent mener de pair leurs projets sportif et social, même s'ils sont diplômés un peu plus tardivement – et le moment de leur insertion professionnelle, donc celui où ils peuvent commencer à cotiser pour leur retraite.
Peu d'entre eux bénéficient d'une convention d'insertion professionnelle, car il n'est pas facile pour un employeur de recruter un sportif de haut niveau qui sera absent 25 ou 30 heures chaque semaine pour s'entraîner et qui sera fréquemment en déplacement en France et à l'étranger.
J'ajoute que cet article ne concerne pas les sportifs professionnels qui vivent, parfois très bien, de leur passion, mais seulement les amateurs de haut niveau. Lors de l'olympiade précédente, 2004-2008, seulement 200 d'entre eux ont pu cotiser pour leur retraite.
Ce sujet est porté depuis des années par le CNOSF et par les représentants des sportifs de haut niveau. Il a fait l'objet en 2007 d'une proposition de loi de Jean-François Lamour. En 2010, je me suis exprimée à de nombreuses reprises à ce propos, et la presse nationale spécialisée a fort bien accompagné ce mouvement, afin que l'on réponde à la nécessité de prendre en compte dans les cotisations retraite l'engagement de ces sportifs de haut niveau en faveur de la nation.
Même si je pense comme M. Préel que seize trimestres, soit la durée d'une olympiade, c'est un peu court pour les sportifs inscrits sur la liste ministérielle, il faut néanmoins se réjouir que cette première étape soit aujourd'hui franchie, après des années de combat.
La parole est à M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour l'assurance vieillesse.
Je répondrai d'abord à Jean-Luc Préel, qui préside le groupe d'études sur les conjoints survivants dont je suis moi-même le vice-président. Je tiens à rappeler que l'année dernière, dans le cadre de la loi sur les retraites, nous avons voté à l'unanimité la demande, qui a été acceptée, d'un rapport sur le veuvage. Nous n'avons jamais été très bons sur ce sujet, mais nous pourrons aller de l'avant à la lumière de ce rapport qui doit nous être rendu avant la fin de l'année.
S'agissant des sportifs amateurs de haut niveau, je tiens à remercier David Douillet de s'être battu dans les couloirs ministériels comme il le faisait sur les tatamis afin que cette disposition soit gravée dans le marbre. (Sourires.)
Comme vient de le rappeler Valérie Fourneyron, c'est une demande fort ancienne du milieu sportif, en particulier du CNOSF, qui est aujourd'hui satisfaite par cette disposition que notre commission a adoptée à l'unanimité.
Si certains sportifs de haut niveau bénéficient à un moment de leur vie d'une rémunération, voire de contrats professionnels, d'autres, parfois même médaillés olympiques, n'ont que peu de retombées.
Or, pour être sportif de haut niveau, il y a des années et des années d'entraînement, de stages, de compétitions. Tout cela se fait aux dépens de la vie professionnelle et des études. Il était donc logique, dans un État où l'on veut de l'équité et de la solidarité, que ces personnes qui sacrifient une partie de leur vie étudiante et professionnelle, qui font en sept ou huit ans leurs études, alors que d'autres les font en quatre ans, ne soient pas injustement pénalisées à la fin de leur vie parce qu'il leur manquerait des points.
On est toujours très contents de les voir à la télévision ou de visu, en se disant que ce sont des sportifs de haut niveau. Mais il est logique que les encouragements et les félicitations que nous leur prodiguons se traduisent de notre part par un article visant à un juste dédommagement des années qu'ils ont passées à s'entraîner.
Le ministre, d'une part, le Comité olympique, d'autre part, m'ont fait remarquer à juste titre que quatre années séparaient deux olympiades et qu'un sportif de haut niveau, dans l'ensemble, peut se maintenir à ce stade sept à huit ans en moyenne.
L'article 49 est donc un point de départ mais, dans la foulée, nous souhaitons aller un peu plus loin. Si les trimestres supplémentaires que nous demandons pouvaient être accordés – ils le seront probablement – ce serait parfait. C'est pour cette raison que j'ai déposé un amendement. Nous en avons parlé avec le ministre lors d'une réunion de travail, de façon à rester dans de l'enveloppe de 9 millions d'euros. Si cette somme n'était pas dépensée, le reliquat pourrait être dévolu aux sportifs de haut niveau qui participent à une période supérieure à deux olympiades.
Monsieur le président, j'ai bien entendu que vous me trouviez un peu trop long, mais c'est la première fois que nous parlons de la retraite des sportifs amateurs de haut niveau dans l'hémicycle et, aujourd'hui, nous allons procéder en leur faveur à un vote important.
Comme quoi la perception du temps n'est pas toujours la même, selon que l'on parle ou que l'on écoute les autres parler ! (Sourires.)
C'est un excellent article, qu'il faut absolument voter.
L'ensemble de la représentation nationale est présent ; je remercie M. le ministre David Douillet qui s'est déplacé pour cet article spécifique, ainsi que Valérie Fourneyron, qui est spécialiste en la matière. Vous venez également d'en parler, cher Denis Jacquat. C'est une belle chose que de reconnaître l'investissement des sportifs qui portent le drapeau de la France.
Il y a ceux qui réussissent et, monsieur le ministre, vous l'avez fait formidablement, mais il y a ceux qui réussissent moins. C'est surtout à eux que s'adresse cette mesure, car ils ont aussi durement travaillé, ils se sont autant entraînés, ils en ont autant bavé. Las, le huitième ou le quart de finale ne se passe pas forcément bien. C'est essentiellement pour ces sportifs que nous sommes là, parce qu'ils le méritent.
Quoi qu'il en soit, seize mois me semblent un peu courts. Nous pourrions peut-être nous revoir ultérieurement pour aller un peu plus loin. Cela ne choquerait certainement personne sur ces bancs.
Monsieur le président, madame et messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de ce consensus.
C'est en présentant ses voeux que le Président de la République avait annoncé la mise en place, au profit des 2 500 ou 3 000 athlètes concernés, d'un dispositif permettant l'ouverture de droits à la retraite spécifiques pour les sportifs amateurs de haut niveau.
Vous l'avez dit, monsieur Hutin, seule une petite partie d'entre eux accèdent un jour à la plus haute marche du podium. Il y a des centaines, voire des milliers d'athlètes qui s'entraînent autant tous les jours, qui suent sang et eau pour notre drapeau, pour représenter la France, pour le rayonnement de notre pays, et qui restent dans l'ombre. On ne peut pas gagner seul, on a besoin de partenaires d'entraînement et d'un encadrement. Je pense ici à tous ces sportifs et à mes anciens amis.
Malheureusement, la loi n'est pas rétroactive. Elle ne sera applicable qu'à compter du 1er janvier 2012.
Pour bénéficier du dispositif, il faudra être âgé de vingt ans et plus. Le niveau de ressources devra être inférieur à 75 % du plafond de la sécurité sociale. Et comme vous l'avez dit, le nombre de trimestres acquis est fixé à seize, soit quatre années. Ce dispositif coûtera entre 6 et 9 millions d'euros par an.
Au terme de ces quatre ans, il conviendra de faire un état des lieux et, éventuellement, d'envisager une extension du nombre de trimestres, en restant dans la marge du budget prévu pour ce dispositif. Car en réalité, une carrière d'athlète est souvent un peu plus longue.
Je suis saisi d'un amendement n° 214 .
La parole est à M. le rapporteur.
Favorable.
(L'amendement n° 214 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 431 .
La parole est à Mme Anny Poursinoff.
Je me rallie au consensus sur les droits à la retraite des sportives et sportifs amateurs de haut niveau.
Si nous avons déposé l'amendement n° 431 , c'est que Mme Pécresse n'a cessé de dire que nous étions dépensiers, sans jamais trouver de recettes correspondantes. Pour le coup, nous lui avons trouvé une recette afin de compenser le coût de la mesure. J'espère donc que notre amendement sera accepté !
Il vise à créer une taxe additionnelle afin que les cotisations ne soient pas prises en charge par le régime général. Je sais qu'il y a déjà beaucoup de taxes, mais celle que nous proposons porte sur les recettes publicitaires du sport professionnel. La publicité rapportant énormément d'argent en ce domaine, nous pourrions en prélever un petit peu pour les sportifs amateurs de haut niveau.
Mme Poursinoff a eu le même souci que moi en lisant le texte. Nous étions un peu chiffonnés tous les deux, car il s'agit tout de même de 9 millions soustraits au budget des sports. Cela nous gênait car nous trouvions déjà que ce budget pourrait être plus abondant. La proposition de Mme Poursinoff est parfaite, dans le sens où elle essaie de trouver de l'argent, de façon que ces 9 millions d'euros viennent de l'extérieur.
Cela étant, il y a un double problème opérationnel. D'une part, elle propose de taxer les recettes publicitaires du sport professionnel. Or un article du code des impôts s'y oppose. D'autre part, en vertu de l'article 34 de la Constitution, toute taxe doit être précisée en matière d'assiette, de taux et de modalités de recouvrement.
La commission ne peut donc pas accepter cet amendement, mais c'est une excellente proposition. Dans le cadre du rapport que je demande dans un amendement à venir – et sur lequel j'espère un vote positif – nous pourrons étudier cette question : donner de l'argent en plus au milieu sportif pour la retraite des athlètes amateurs de haut niveau.
Pour ces raisons, madame Poursinoff, je le regrette, mais je ne peux qu'émettre un avis défavorable à cet amendement.
Défavorable, même s'il s'agit d'une bonne démarche.
J'anticipe un peu en vous demandant de ne pas aller dans le sens d'une mesure similaire à la loi Buffet – une taxe de 5 % prélevée sur les droits télévisuels des sports professionnels. Les déficits constatés dans le sport professionnel, notamment dans le milieu du football, étaient, l'an dernier, de l'ordre de 130 millions. Si vous instauriez une taxe, elle ne ferait, malheureusement, qu'alourdir la note. Et je suis, à titre personnel, assez critique à cet égard.
Je le répète, n'allez pas sur ce terrain en créant une taxe ; cela pénaliserait encore plus nos clubs en leur enlevant une partie de leurs recettes. Il leur serait alors plus difficile d'être compétitifs, ce qui viendrait encore alourdir leur déficit, déficit qui entraînerait à son tour moins de compétitivité, moins de recettes annexes, moins de billetterie, etc. Un cercle vicieux !
(L'amendement n° 431 n'est pas adopté.)
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
(L'amendement n° 215 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Comme je l'ai évoqué il y a un instant, seize trimestres, soit quatre ans, correspondent à la période qui s'écoule entre deux olympiades. Or, M. le ministre et Mme Fourneyron en ont parlé, la durée moyenne d'activité d'un sportif amateur de haut niveau est supérieure à seize trimestres.
Mon amendement n° 216 demande qu'un rapport étudie la possibilité d'augmenter le nombre de trimestres que le dispositif permet de valider. Le coût marginal de cet allongement serait inférieur au coût des premiers trimestres, puisque le nombre de sportifs concernés diminue dans la durée. Avec l'expérience, ils ont tendance à bénéficier de davantage de contrats de marques, ou sont encouragés à travailler par leur fédération. Si le coût de la mesure s'avère inférieur à 9 millions d'euros – fourchette haute indiquée dans l'étude d'impact –, ce qui est probable, le nombre de trimestres validés pourrait être augmenté, à l'intérieur de cette enveloppe.
Le milieu sportif, le ministre, ainsi que Mme Fourneyron et M. Hutin, seraient ravis que nous votions cet amendement à l'unanimité.
Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.
C'est une bonne formule ! Nous aimons beaucoup que les ministres s'en remettent à notre sagesse…
La parole est à Mme Valérie Fourneyron.
Il y a consensus sur cet amendement comme sur l'ensemble de l'article. Cela n'a pas pu être le cas hier sur les recettes de votre PLFSS, monsieur le ministre, et ce ne sera pas le cas non plus le 10 novembre pour le budget du sport. Néanmoins, vous pouvez constater que nous nous retrouvons quand l'intérêt du sport français est en jeu !
J'ai bien compris que quatre ans correspondaient à une olympiade. Quid en deçà ? J'ai été saisi par quelques sportifs de très haut niveau qui sont dans la catégorie Élite et qui aimeraient savoir comment fonctionne le système.
C'est un système assez souple puisqu'il prend en compte la durée d'inscription sur les listes des athlètes de haut niveau ; il s'agit de listes ministérielles.
Absolument !
(L'amendement n° 216 est adopté à l'unanimité.)
(L'article 49, amendé, est adopté à l'unanimité.)
Je suis saisi d'un amendement n° 543 , portant article additionnel après l'article 49.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Il y a aujourd'hui plus de 400 000 apprentis en France. L'apprenti a un statut de salarié. Employé en CDD, sa formation théorique comme pratique s'étale entre un et trois ans. Sa rémunération est comprise entre 25 % et 78 % du SMIC. Les cotisations salariales et patronales attenantes au contrat d'apprentissage sont prises en charge par l'État.
Actuellement, la retraite des apprentis est calculée sur une base forfaitaire. Ils ne parviennent pas à cotiser quatre semestres par an. Les apprentis, notamment ceux qui commenceront leur formation à dix-huit ans, seront donc particulièrement touchés par l'allongement de la durée de cotisation et l'élévation de l'âge légal de départ à la retraite de soixante à soixante-deux ans.
C'est pourquoi nous souhaitons lancer une réflexion sur l'élaboration d'un dispositif spécifique de retraite pour les apprentis.
La commission est défavorable à cet amendement car la demande de Mme Fraysse est déjà satisfaite. Elle était présente, l'année dernière, lors du débat sur les retraites. Dans cette loi du 9 novembre 2010, il est prévu que le Gouvernement remette un rapport au Parlement sur la validation des stages en entreprise pour la détermination du droit à pension. Nous avons demandé que ledit rapport traite également des droits à la retraite des apprentis. Je me suis inquiété de l'état d'avancement de ce rapport ; il chemine et nous allons bientôt en avoir connaissance.
Même avis.
(L'amendement n° 543 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement rédactionnel de la commission, n° 217.
(L'amendement n° 217 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 50, amendé, est adopté.)
Nous en venons à une série d'amendements portant articles additionnels après l'article 51.
La parole est à Mme la rapporteure pour avis, pour soutenir l'amendement n° 51 .
L'assurance volontaire vieillesse est un dispositif qui permet aux personnes ne remplissant pas la condition d'affiliation à un régime légal d'assurance vieillesse et qui, compte tenu de leur âge, ne remplissent pas la condition pour bénéficier d'une prestation servie par un de ces régimes, de s'acquérir des droits à retraite. Le régime des personnes non salariées des professions agricoles est le seul dans lequel reste fixée une condition d'âge maximal pour l'adhésion à l'assurance volontaire vieillesse alors que, dans le régime général, aucune condition d'âge n'est prévue. La commission des finances vous propose donc de l'aligner sur le régime général en supprimant la condition d'âge. Cette mesure assurerait, par ailleurs, une égalité entre les assurés du régime non salarié agricole et les ressortissants des autres régimes d'assurance vieillesse.
La commission des affaires sociales a également eu ce souci. Mme Vasseur vient de l'expliquer parfaitement. Nous pouvons nous réjouir des progrès que représente cet amendement pour les non-salariés agricoles. Avis favorable.
Avis très favorable. C'est une mesure d'équité et de cohérence.
(L'amendement n° 51 est adopté.)
Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.
Je suis saisi d'un amendement n° 52 .
La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Depuis le 1er janvier 2009, un chef d'exploitation ou d'entreprise agricole peut, sous certaines conditions, percevoir sa pension de retraite agricole et poursuivre ou reprendre une activité non salariée agricole. Aucun assouplissement du principe du non-cumul emploi-retraite n'est, en revanche, prévu pour les collaborateurs d'exploitation et pour les aides familiaux, qui doivent aujourd'hui cesser leur activité pour pouvoir percevoir leur retraite. La commission des finances considère que cette différence de traitement ne se justifie pas. La mesure proposée vise donc à autoriser un aide familial ou un collaborateur d'exploitation à poursuivre son activité agricole tout en percevant sa pension de retraite.
Dans un souci d'équité et de soutien au monde agricole et plus particulièrement aux conjoints et aux aides familiaux, la commission a donné un avis favorable à cet amendement.
Favorable.
(L'amendement n° 52 est adopté.)
Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.
Je suis saisi d'un amendement n° 53 .
La parole est à Mme la rapporteure pour avis.
Il existe, depuis le 1er janvier 2009, un dispositif de majoration des retraites personnelles de base servies par le régime d'assurance vieillesse des personnes non salariées agricoles. Cependant, les personnes susceptibles de bénéficier d'un départ en retraite anticipée et à taux plein pour cause de pénibilité n'ont pas été ajoutées aux personnes remplissant les conditions pour bénéficier d'une majoration de leur retraite de base. La commission des finances vous propose de remédier à cette omission.
La commission des affaires sociales a la même préoccupation. Les personnes qui bénéficieront d'un départ anticipé pour pénibilité sont détaillées dans cet amendement présenté par Mme Vasseur.
Avis favorable.
Favorable.
(L'amendement n° 53 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 329 .
La parole est à M. Denis Jacquat, pour le soutenir.
Dans certains cas, le minimum de réversion conduit à attribuer des pensions de réversion d'un montant nettement supérieur à celui de la pension de retraite de l'assuré décédé. Pour corriger cette anomalie, j'ai déposé à titre personnel cet amendement qui supprime le minimum de réversion lorsque la pension personnelle du conjoint décédé était servie sous forme de versement forfaitaire unique –VFU. J'ai cependant été amené à le retirer en précisant que je le redéposerais en séance publique. En effet, dans le cadre des difficultés financières de notre pays, il serait intéressant de savoir combien de personnes bénéficient de ces prestations que je qualifierai d'anormales.
Favorable.
Nous pouvons difficilement être favorables à cet amendement, puisque nous n'en connaissons absolument pas les conséquences financières. Combien de personnes seront-elles concernées ? Nous ne pouvons voter une disposition sans savoir réellement ce à quoi nous nous engageons.
Les économies réalisées seront de 5 millions d'euros en 2015 et de 10 millions en 2020 ; 4 000 conjoints survivants par an sont concernés.
(L'amendement n° 329 est adopté.)
Cette importante disposition permet de rendre applicable l'extension de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé aux assurés relevant du régime social des indépendants – RSI – afin qu'ils puissent bénéficier de la retraite anticipée des travailleurs handicapés. C'est donc une avancée.
Je me félicite de cette disposition que nous avions évoquée en commission. Il est effectivement nécessaire de prendre en compte le statut des travailleurs indépendants en situation de handicap. Le fait qu'ils ne bénéficient pas de la retraite anticipée est, en effet, une injustice.
(L'amendement n° 5 est adopté.)
Je suis saisi de deux amendements, nos 24 et 342 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme la rapporteure pour avis, pour soutenir l'amendement n° 24 .
Je précise, monsieur le président, que je présente cet amendement en mon nom propre et pas au nom de la commission des finances.
Il concerne l'allocation de solidarité aux personnes âgées, qui remplace, depuis un certain temps, le minimum vieillesse et est allouée aux personnes âgées au moins de soixante-cinq ans qui résident en France et n'ont pas cotisé à un régime obligatoire de retraite. Son montant est de 8 907,34 euros par an pour une personne seule, ou lorsqu'un seul membre d'un couple en bénéficie, et de 14 181,30 euros par an lorsque les deux conjoints, concubins ou partenaires pacsés en bénéficient.
L'importance du nombre de bénéficiaires en 2011 – soit 70 930 personnes –, comme du coût de l'ASPA, qui s'élève aujourd'hui à 612 millions d'euros, nécessite que le Parlement s'interroge sur les raisons de cette dépense publique en augmentation de plus de 20 % sur les cinq dernières années selon les comptes de la sécurité sociale. Le déficit de nos comptes sociaux, que le Gouvernement et le Parlement cherchent à réduire lors de chaque loi de financement de la sécurité sociale, impose que nous limitions le nombre d'allocataires de l'ASPA. Il est, me semble-t-il, légitime de verser une retraite à ceux qui ont travaillé dans notre pays, même s'ils n'ont pas cotisé à un régime obligatoire de retraite, mais il n'y a aucune logique à l'accorder à ceux qui ont travaillé dans un pays étranger à la Communauté européenne.
Il convient donc de modifier l'article L. 815- 1 du code de la sécurité sociale afin que le versement de l'ASPA soit réservé aux personnes issues de la Communauté européenne et ayant au moins soixante-cinq ans, même si elles n'ont pas cotisé à un régime obligatoire de retraite. Cette disposition permettrait de réduire fortement les dépenses liées à cette allocation versée par l'État français.
La parole est à Mme Marianne Dubois, pour soutenir l'amendement n° 342 rectifié .
L'allocation de solidarité aux personnes âgées, créée le 11 mai 1998, sous le gouvernement Jospin, en remplacement du minimum vieillesse, doit être, à notre sens, comme vient de l'expliquer Mme Vasseur, réservée aux ressortissants de l'Union européenne.
La commission a rappelé que le minimum vieillesse, devenu l'ASPA, était une prestation à vocation sociale. Dans ce cas particulier, il ne peut y avoir de discrimination basée sur la seule nationalité. Il s'agit d'une prestation non contributive. Je rappelle que le minimum vieillesse a augmenté de 20 % ces dernières années et que le Gouvernement s'était engagé à ce qu'il croisse de 25 % dans les années à venir.
La commission a donné un avis défavorable à ces deux amendements.
Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements au bénéfice d'un amendement gouvernemental, n° 794, qui ne présente selon moi aucun risque de fragilité juridique et permet d'aller dans le sens souhaité par Mme Vasseur et Mme Dubois. Et je n'oublie pas Philippe Meunier, qui est totalement partie prenante à ce débat.
Il me paraîtrait raisonnable de présenter dès maintenant l'amendement n° 794 , monsieur le ministre.
C'est en effet préférable pour la clarté des débats, monsieur le président, mais je n'osais le solliciter de votre part. (Sourires.)
Cet amendement vise à déconnecter le lien entre ASPA et carte de résident. Donc, tous les étrangers non communautaires seront soumis à la condition de résidence préalable de droit commun sans exception. Il tend également à porter la condition de résidence de cinq à dix ans, ce qui est une réelle avancée, de façon à offrir la stabilité juridique nécessaire.
La commission ne les a pas examinés, mais ses membres ont tous été à titre individuel sollicités, voire harcelés, textuellement ou par internet, au sujet de ce problème, au cours des derniers mois.
Quelque 2 000 personnes étrangères obtiennent l'ASFA chaque année, dont 450 sont titulaires d'une carte de résident au titre du regroupement familial qui peuvent donc bénéficier du jour au lendemain d'un minimum social. Il faut reconnaître que beaucoup de questions se posent. À titre personnel, je pense que l'amendement du Gouvernement va dans le bon sens, car il ne remet pas en cause le fait d'accueillir des étrangers en France de façon régulière ni de leur garantir un niveau de vie décent, tout en faisant en sorte que l'étranger ne puisse bénéficier immédiatement de la solidarité nationale sans aucune contrepartie de sa part. Désormais, tous les étrangers, sauf les réfugiés,…
…devront prouver une résidence régulière en France depuis dix ans pour avoir droit à cette allocation. C'est pourquoi j'émets, à titre personnel, un avis favorable.
Il ne faut pas oublier les anciens combattants, monsieur le rapporteur !
Le sujet a été abordé par la MECSS à la suite du succès du mouvement de solidarité pour les personnes âgées et de l'intense campagne menée sur internet, qui ont amené les députés à se poser des questions. Avec M. Mallot, nous avons donc enquêté sur l'ASPA. Au terme de notre enquête, il est apparu que le nombre des bénéficiaires de cette allocation est relativement stable, autour de 70 000 personnes, en augmentation de 1,3 % sur quatre ans. Ce ne sont pas des chiffres considérables. La MECSS a servi à rétablir la vérité sur ce point.
La seconde question était de savoir si le versement de cette allocation donnait lieu à des fraudes. La Caisse des dépôts et consignations, gestionnaire de l'allocation, a, à la suite des demandes répétées des parlementaires et sans doute aussi alertée par la campagne menée sur internet, effectué des contrôles gigantesques, portant sur 38 000 allocataires, qui ont conduit à 7 800 suspensions de droits. Voilà pour ceux qui disent que la fraude n'existe pas !
À la suite de l'ensemble des recours permis par la loi, les contrôles ont abouti finalement à 1 500 annulations de droits par la Caisse des dépôts. Il convenait de mettre un peu d'ordre dans le versement de cette allocation, ce que la Caisse a fait, à la grande satisfaction de la MECSS.
La troisième question était de savoir si cette allocation n'était pas distribuée trop généreusement. Il nous a semblé qu'elle l'était dans le cadre du regroupement familial et de l'obtention de cartes de résidents, que des effets d'aubaine pouvaient exister. C'est pourquoi je soutiens l'amendement de Philippe Meunier et de la Droite populaire. La solution médiane que propose le Gouvernement me paraît également tout à fait acceptable.
Le peuple français est fondamentalement attaché à la notion de justice et il ne comprend pas que des étrangers qui ne sont pas des réfugiés puissent venir sur notre sol et, n'ayant jamais cotisé, bénéficier d'une allocation.
Il me semble donc utile que le versement de l'ASPA soit réglementé de manière plus juste. Le Gouvernement nous propose de conditionner le bénéfice de cette allocation par une durée de séjour régulier de dix ans sur le sol national. Cela me paraît une bonne chose.
Notre amendement n° 24 prévoit également le cas des anciens combattants ayant combattu pour la France. Alors que nous nous apprêtons à fêter le 11 novembre, je rappelle que de très nombreux Africains – ceux de la Première Guerre mondiale sont déjà décédés – ont combattu avec les Forces françaises libres pendant la Seconde Guerre mondiale. Je souhaiterais que l'amendement du Gouvernement les prenne en considération.
La Droite populaire présente les mêmes amendements que l'an passé, ce qui n'est pas rassurant. Elle ne me paraît pas argumenter de manière tout à fait juste. L'idée que des personnes arriveraient sur le territoire français pour bénéficier immédiatement de l'ASPA sans avoir jamais travaillé est totalement fausse !
L'une des conditions d'ouverture du droit à cette allocation pour les étrangers est d'être titulaire depuis au moins cinq ans d'un titre de séjour autorisant à travailler.
Nos collègues suivent la propagande d'un autre parti qui défend ces thèses. Il faut mettre fin au fantasme. M. Bur a déjà avancé, l'année dernière, les éléments dont j'ai fait état, et rappelé, comme le rapport de la MECCS, qu'en 2010 la durée moyenne de séjour au moment de l'ouverture des droits est de dix ans et huit mois.
Ces amendements se basent sur des notions que je ne développerai pas plus avant mais qui sont bien loin de l'idée de solidarité. Sachant, de plus, qu'ils toucheraient dans 75 % des cas des femmes dans des situations très difficiles, nous y sommes tout à fait opposés, y compris à l'amendement du ministre car, comme je l'ai rappelé, les dix ans sont déjà une réalité.
Nous abordons un sujet qui trouve une grande résonance dans l'opinion publique, et nous pouvons nous féliciter que le Gouvernement ait réagi. Le fait de passer de cinq à dix ans, madame Clergeau, est la preuve que personne n'est stigmatisé. Au contraire, il s'agit d'apporter des garanties pour la pérennité de ce système.
Jacques Myard a évoqué la question des anciens combattants, à laquelle je suis moi-même très sensible, mais, à y réfléchir, je me demande si cette question n'est pas déjà réglée par les lois de décristallisation. Pouvez-vous me répondre sur ce point, monsieur le ministre ?
Je souhaiterais une précision de la part de M. le ministre. M. Tian m'a interpellé sur la question des anciens combattants. J'ai bien relu l'amendement du Gouvernement : les anciens combattants n'y sont pas inclus. Il conviendrait qu'ils le soient.
La condition des cinq ans n'existe pas dans le cas du regroupement familial. Je précise que les étrangers non européens représentent tout de même un tiers des personnes bénéficiant de l'allocation alors qu'elles n'ont jamais cotisé.
L'amendement n'inclut pas, en effet, les anciens combattants, mais j'ai bien entendu M. Myard et M. Vitel, et j'ai le sentiment que leurs collègues les approuvaient, du moins au sein de la majorité. Par conséquent, monsieur le président, je propose de rectifier l'amendement du Gouvernement, en écrivant le 2° de la façon suivante : « Être réfugié, apatride, ancien combattant, ou bénéficier de la protection subsidiaire », c'est-à-dire d'ajouter les mots « ancien combattant ».
Notre amendement porte la mention : « ancien combattant ayant combattu pour la France » !
Autrement cela pourrait bénéficier aux vétérans du Polisario ! (Sourires.)
Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, la version définitive de votre rectification ?
C'est un travail en direct, monsieur le président ! (Sourires.)
Je propose de rectifier l'amendement en écrivant, au 2° : « Être réfugié, apatride, ou ayant combattu pour la France ».
Il me semble donc que la rédaction pourrait être la suivante : « Être réfugié, apatride, avoir combattu pour la France, ou bénéficier de la protection subsidiaire ».
Très bien, monsieur le président !
C'est donc l'amendement ainsi rectifié que, le moment venu, je mettrai aux voix.
La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau.
Je trouve vraiment très choquant que nous en soyons à débattre sur un thème comme celui-ci. Ces amendements, il faut le dire clairement, ont été envoyés par une association qui s'appelle Sauvegarde retraites. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Nous savons où sont ses origines et que sa campagne a été très relayée sur internet. Pour faire plaisir à certains, on laisse croire que l'immigration régulière pose problème et que nous serions aujourd'hui obligés de légiférer. Il est vraiment dommage que, dans notre assemblée, nous débattions de thèmes tels que ceux-ci, sachant ce qu'il y a derrière.
Monsieur Myard, retirez-vous votre amendement au bénéfice de celui du Gouvernement ?
Oui, monsieur le président.
(L'amendement n° 342 rectifié est retiré.)
(L'amendement n° 794 , tel qu'il vient d'être rectifié, est adopté.)
La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l'amendement n° 615 .
Entre cinquante-cinq et soixante ans, près de la moitié des salariés sont sans emploi. La première conséquence du relèvement de l'âge du départ à la retraite de soixante à soixante-deux ans et de l'âge de la retraite à taux plein de soixante-cinq à soixante-sept ans, sera de laisser au chômage, au RSA, ou sans rien, pendant un an, deux ans, voire plus, ceux qui sont déjà en grande difficulté.
Ces mesures engendrent des économies immédiates de court terme pour la branche retraite sans garantir dans la durée le rétablissement de l'équilibre financier. Qui plus est, elles provoqueront des transferts vers l'assurance chômage, les pensions d'invalidité et les finances des collectivités locales par le biais du RSA.
Nous souhaitons qu'avant le 31 mars 2012, le Conseil d'orientation des retraites remette aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat un rapport sur toutes les conséquences des relèvements d'âge. Afin de réaliser les travaux d'expertise nécessaires, le Conseil pourrait faire appel, en tant que de besoin, aux administrations de l'État et aux organismes privés gérant un régime de base de sécurité sociale obligatoire. Ce rapport devrait être rendu public dès sa transmission aux commissions compétentes du Parlement.
Défavorable. D'une part, le COR a déjà planché sur l'emploi des seniors. D'autre part, depuis l'adoption du plan national d'action concerté en faveur de l'emploi des seniors, en 2006, le taux d'emploi des personnes entre cinquante-cinq et soixante-quatre ans a progressé de façon continue. Cette progression n'a pas été remise en cause par la crise économique et financière.
Ainsi, alors que le taux d'emploi des cinquante-cinq ans à soixante-quatre ans était de 38,1 % en 2006, il est passé à 38,9 % en 2009, puis à 39,7 % en 2010, pour atteindre 40,9 % actuellement. Une telle évolution traduit bien un changement des comportements, qui devrait se confirmer dans la durée, surtout depuis la réforme des retraites de 2010. De même, au deuxième trimestre de 2011, le taux d'emploi des cinquante-cinq ans à cinquante-neuf ans s'élève à 63,4 % contre 60,6 % l'année d'avant, et celui des soixante ans à soixante-quatre ans, qui était le plus préoccupant, est actuellement de 18,1 % contre 17,9 % en 2006.
Par conséquent, notre politique pour l'emploi des seniors marche. Nous nous sommes beaucoup inspirés de la Finlande. Celle-ci avait exactement les mêmes chiffres que la France il y a vingt ans, et elle est aujourd'hui leader dans l'emploi des seniors. À notre tour, dans quelques années et malgré la crise, nous arriverons à des résultats très positifs.
Je tenais à donner ces explications parce que, à ce sujet aussi, on lit beaucoup de choses inexactes. On ne progresse pas par un coup de baguette magique, il faut de la patience, mais tout doucement nous arriverons au but.
Défavorable.
Monsieur le rapporteur, malheureusement, l'évolution du chômage ces derniers mois est négative, on le sait, et particulièrement chez les seniors puisque le taux de chômage des plus de cinquante-cinq ans a augmenté de plus de 14 % au cours des douze mois écoulés, et de 2 % pour le seul mois de septembre. La situation que vous avez tendance à dépeindre sous des couleurs riantes l'est beaucoup moins en réalité. Aujourd'hui, dans notre pays, nombre de personnes de plus de cinquante-cinq ans qui souhaitent travailler ne le peuvent pas, et elles se retrouvent dans des situations parfois difficiles lorsqu'elles dépassent soixante ans.
La situation progresse tout de même, madame Touraine.
(L'amendement n° 615 n'est pas adopté.)
La commission souhaite que soient étudiées les conditions d'amélioration de la retraite anticipée des personnes handicapées, en particulier s'agissant des bornes d'âge.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour défendre l'amendement n° 545 .
À juste titre, les associations qui interviennent dans le champ du handicap regrettent l'absence de prise en compte de la situation très particulière des personnes en situation de handicap et des aidants familiaux dans ce projet de loi. Elles craignent même que les orientations générales de la réforme ne pénalisent encore davantage les assurés handicapés.
S'agissant des mécanismes de solidarité, en particulier de la retraite anticipée pour les travailleurs handicapés, il importe que la réforme en cours ne conduise pas à allonger mécaniquement de deux ans l'âge de départ en retraite anticipée pour ces personnes, lesquelles doivent continuer à bénéficier de ce droit dès l'âge de cinquante-cinq ans. Il est également indispensable que le Gouvernement et nous-mêmes, mes chers collègues, réfléchissions aux améliorations qui peuvent être apportées à ce dispositif, notamment à son extension aux personnes ayant un taux d'incapacité permanente compris entre 50 % et 80 % et aux personnes en situation de handicap lourd survenu au cours de leur vie professionnelle.
Cet amendement, adopté à l'unanimité en commission des affaires sociales, propose donc de lancer la réflexion sur les conditions d'amélioration du dispositif de retraite anticipée pour les travailleurs et les fonctionnaires handicapés en proposant que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur le sujet avant le 30 décembre 2012. Je pense que si l'Assemblée l'adopte à son tour, nous aurons fait une petite avancée, mais qui ne manque pas d'intérêt, en faveur de ces personnes qui méritent toute notre attention.
Je suis saisi d'un amendement n° 622 .
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.
Notre amendement propose que le Gouvernement remette un rapport sur les modalités de la limitation du cumul emploi-retraite avant le 31 mars 2012. Nous avons bien entendu M. le ministre nous dire hier qu'il avait déjà beaucoup de rapports en préparation, mais il y a des sujets sur lesquels il nous faut disposer d'éléments supplémentaires pour pouvoir les approcher au plus près afin de prendre des décisions mieux informées.
Le principe d'une libéralisation du cumul emploi-retraite est prévu à l'article 88 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009. Depuis le 1er janvier 2009, un retraité peut cumuler totalement sa retraite avec les revenus d'une activité professionnelle en respectant certaines conditions : liquider la totalité de ses retraites personnelles de base et complémentaires ; à partir de soixante ans, sous réserve de justifier de la durée d'assurance et de périodes reconnues équivalentes au moins égales à la limite exigée pour bénéficier du taux plein ; à partir de soixante-cinq ans, quelle que soit la durée d'assurance et de périodes reconnues équivalentes. Ce dispositif est applicable aux assurés du régime général, des régimes alignés et de ceux des professions libérales, des agriculteurs et des fonctionnaires.
Les assurés ne remplissant pas ces conditions continuent à se voir appliquer le dispositif cumul emploi-retraite antérieur à la LFSS 2009, à savoir : un plafond de revenu global égal au dernier salaire d'activité perçu avant le départ en retraite. Ce plafond est de 1,6 SMIC dans le cas où le dernier salaire d'activité est inférieur à ce seuil. Un délai de six mois doit être respecté avant de reprendre une activité salariée quand il s'agit de son ancienne entreprise. Restent ainsi concernés par le dispositif antérieur les assurés partant en retraite anticipée, ceux liquidant une pension à taux minoré et ceux liquidant à taux plein en raison de leur inaptitude ou de leur invalidité.
Cet amendement vise à rétablir pour tous les assurés le dispositif applicable avant la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009. En effet, la libéralisation totale du cumul emploi-retraite, censée participer à l'amélioration du taux d'emploi des seniors peut se révéler contreproductive pour l'emploi en général et donc encourager le dumping social sur les salaires des seniors.
Ayant été le rapporteur de plusieurs textes sur le sujet, en particulier du projet de loi sur les retraites, je ne pense pas que le cumul emploi-retraite desserve l'emploi. Je ne partage pas du tout votre conception du partage du travail.
D'autre part, je ne pense pas non plus que le cumul emploi-retraite soit la cause d'une paupérisation chez les seniors.
Bien au contraire, ce dispositif leur permet d'améliorer leurs revenus. Certains viennent d'ailleurs nous féliciter pour cette raison.
S'agissant des informations que vous demandez, j'ai interrogé la CNAV, qui m'a indiqué que 280 200 retraités du régime général qui avaient pris leur retraite en 2009 ou auparavant exerçaient une activité salariée en 2010 contre 245 000 en 2009. Le dispositif actuel a donc un effet extrêmement positif. La commission a par conséquent rejeté cet amendement.
Avis défavorable pour trois raisons.
Premièrement, vous connaissez, madame la députée, ma position de principe sur les rapports.
Deuxièmement, je vais vous confirmer les informations données par Denis Jacquat : 280 000 retraités du régime général sont en cumul emploi-retraite en 2010, soit 14,2 % de plus que l'année précédente. Vous vouliez des renseignements : vous les avez.
Troisièmement, je le dis sans passion mais je le dis tout de même : vous êtes contre ce principe de libéralisation qui donne satisfaction à 280 000 personnes. Vous voulez le retour en arrière : moi certainement pas et eux non plus. Votre position montre bien que vous et vos collègues êtes pour une économie administrée (Exclamations sur les bancs du groupe SRC)…
…alors que nous, nous sommes partisans de définir des repères, mais des repères pour une libéralisation qui permette aux intéressés de faire leur choix en connaissance de cause.Je le dis sans passion. On ne va pas recommencer ce qui s'est passé tout à l'heure. Il faut savoir si j'ai le droit de prendre la parole ou pas.
Plusieurs députés du groupe SRC. Oh là là !
Il est très important de montrer les différences entre nous. Nous sommes pour la souplesse, vous voulez plus de rigidité. C'est une grande différence. Avis défavorable.
(L'amendement n° 622 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 619 .
La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau.
Cet amendement concerne les pensions de réversion. Là encore, je vais rappeler des promesses qu'avait faites le Président de la République, promesses d'ailleurs confirmées dans le document d'orientation du Gouvernement en 2008. Mais celles-ci non plus n'ont pas été tenues. Il était ainsi prévu d'augmenter les pensions de réversion de 56 % au 1er janvier 2009, 58 % au 1er janvier 2010 et 60 % au 1er janvier 2011. Ces engagements n'ont pas été tenus : il n'y a pas eu d'augmentation générale du taux des pensions de réversion au 1er janvier 2009. En plus, la création d'une majoration à compter du 1er janvier 2010 n'a concerné que les conjoints survivants de plus de soixante-cinq ans dont les ressources totales n'excèdent pas 800 euros. Mes chers collègues, c'est la seule catégorie de personnes que l'on traite de cette façon : avant de leur verser cette allocation différentielle, on prend en compte tous leurs revenus, même locatifs, et ceux-ci ne doivent pas excéder 800 euros pour qu'elles aient droit à la majoration. Je rappelle qu'il y a plus de trois millions de veuves en France et qu'on ne l'est pas par choix. Elles peuvent se trouver dans des situations difficiles, avec des enfants à élever, en proie à des difficultés financières ou morales qu'elles s'efforcent de surmonter.
Si M. Préel était encore là, il serait d'accord avec moi. Je le sais parce que nous sommes souvent du même avis sur ces questions. Il dirait comme moi qu'il est tout à fait inadmissible qu'il n'y ait pas eu d'avancées pour les veuves.
Monsieur le ministre, je ne vous demande pas un rapport, mais une évaluation des modalités d'évolution des conditions d'âge et de plafond prévues pour la majoration de la pension de réversion.
L'amendement prévoyait un rapport, mais j'ai bien compris, madame Clergeau, ce que vous demandez. Je vous ai déjà répondu en indiquant qu'un rapport était en cours d'élaboration à notre demande, et Jean-Luc Préel m'a demandé d'être extrêmement vigilant en ce qui concerne le veuvage.
J'étais présent quand Nicolas Sarkozy a annoncé au Sénat les mesures qu'il allait prendre pour les veuves. Je me souviens très bien qu'il a en particulier indiqué que, dans un premier temps, les mesures bénéficieraient aux veuves qui sont aux minima. Les efforts qui ont été réalisés ont donc concerné les veuves les plus pauvres.
Tout à fait.
Exact.
Vous comme Jean-Luc Préel ou moi-même, nous nous intéressons beaucoup aux problèmes du veuvage et de la pension de réversion. Cela étant, les conclusions du rapport devraient faire apparaître que le véritable problème dans notre pays ne sera bientôt plus celui de la pension de réversion, mais celui du plafond du cumul.
En effet, la pension de réversion concernait le plus souvent des femmes qui n'avaient pas travaillé, et qui sont donc des personnes d'un certain âge. En revanche, le problème du plafond ou du cumul vient du fait que de plus en plus de femmes ont travaillé – il y a plus de veuves que de veufs – et que, par la suite, compte tenu des plafonnements, ces personnes risquent de rencontrer des difficultés financières importantes car elles sont aussi très souvent propriétaires de leur appartement ou de leur maison. Le veuvage est une catastrophe sociale, morale et économique pour toutes ces personnes.
La commission émet un avis défavorable, mais elle préconise une vigilance extrême sur la question du veuvage.
Défavorable. La mesure atteint son objectif pour un coût de 60 millions d'euros en 2010.
Je tenais juste à rappeler les promesses électorales de M. Sarkozy. À la page 9 de son document de campagne, il écrivait : « Je comprends la forte inquiétude des personnes âgées qui, depuis dix ans, subissent une véritable érosion de leur pouvoir d'achat sous l'effet de la pression fiscale. C'est pour cela que je suis autant soucieux de réduire les impôts. » Nous n'avons pas vu grand-chose. Il poursuivait : « Je revaloriserai les petites retraites et les pensions de réversion pour que ces retraités vivent mieux. »
Si vous pensez que l'on peut vivre mieux avec 800 euros, je me pose beaucoup de questions. Les engagements n'ont pas été tenus. Je suis d'accord avec M. Jacquat pour regarder le problème du plafond, ce qui permettrait d'aller au-delà de ces 800 euros et de ne pas laisser ces personnes dans une situation que nous trouvons tous anormale.
(L'amendement n° 619 n'est pas adopté.)
Le nombre de PACS signés chaque année ne cesse de croître : 175 000 pour 256 000 mariages en 2009. C'est donc un mode de vie en couple largement plébiscité par nos concitoyens. Il convient de tenir compte de ce phénomène de société et d'ouvrir le droit à pension de réversion pour les couples ayant signé un PACS.
Rappelons qu'il s'agit d'une promesse de campagne électorale – décidément ! – faite par le candidat Nicolas Sarkozy, en mars 2007.
Le sixième rapport du Conseil d'orientation des retraites, en date du 17 décembre 2008 et intitulé Retraites : droits familiaux et conjugaux, soulignait que du fait de l'exclusivité du mariage pour le droit à la réversion, un tiers des membres des jeunes générations pourrait en être exclu, et préconisait l'extension de la réversion dans le cadre du PACS sous condition de durée minimum.
Déjà, dans son rapport du 22 mai 2007, la MECSS avait elle aussi préconisé l'ouverture du droit à réversion aux personnes ayant conclu un PACS depuis au moins cinq ans.
En février 2009, le Médiateur de la République a rendu un avis favorable à l'ouverture de ce droit.
De plus, dans un arrêt du 1er avril 2008, la Cour de justice des communautés européennes a considéré que le refus de versement d'une pension de réversion à un partenaire survivant de PACS constituait « une discrimination fondée sur l'orientation sexuelle, prohibée par la directive du Conseil du 27 novembre 2000 en faveur de l'égalité de traitement ».
Tous ces rappels me conduisent à conclure que cette question est importante, qu'elle est d'actualité et qu'il convient de la traiter sans retard, de manière à anticiper un problème qui ne peut que s'aggraver au fil du temps, et qui, de surcroît, met en cause le principe d'équité.
La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir l'amendement n° 618 .
Je ne vais pas répéter les propos de Mme Fraysse, mais seulement signaler une prise de position qui s'ajoute à celles de la HALDE, du Médiateur de la République et de la Cour de justice des communautés européennes : le 25 octobre dernier, le Défenseur des droits, Dominique Baudis, a demandé au Gouvernement de faire évoluer les dispositifs légaux actuellement en vigueur dans notre pays du fait de leur caractère discriminatoire et contradictoire avec le droit européen.
Le PACS engage des droits et des devoirs. Ce sont des liens de solidarité, qui unissent les couples pacsés comme les couples mariés. Il doit donc se traduire par le droit à la pension de réversion sans discrimination envers les couples de même sexe. Cette évolution législative correspond à une légitime attente de nos concitoyens, tendant à l'égalité des droits.
Mercredi, lors de la séance de questions au Gouvernement, Mme la ministre du budget, Valérie Pécresse, a évalué à 7 milliards d'euros le coût de cette mesure. Je me permets de qualifier ce chiffre de fantaisiste car, pour atteindre un tel montant, il faudrait que toutes les personnes pacsées perdent leur conjoint le même jour ! Nous aurions besoin d'une évaluation plus sérieuse du coût de cette mesure.
Ce débat a déjà eu lieu l'année dernière lors de la discussion de la loi sur les retraites, puis la semaine dernière au sein de la commission des affaires sociales. Le rapport sur le veuvage auquel vous venez de faire allusion devrait comporter un chapitre sur ce point. J'irai plus loin : pourquoi alors ne pas parler aussi des concubins ?
Pour toutes ces raisons, la commission a rendu un avis défavorable sur ces deux amendements.
L'impact d'une telle mesure serait de 7,8 milliards d'euros en 2060.
La parole est à Mme Martine Pinville, pour soutenir l'amendement n° 623 .
Cet amendement vise à demander au Gouvernement un rapport sur les conditions de validation des périodes d'études en contrepartie du versement d'une cotisation volontaire supplémentaire à la cotisation d'assurance vieillesse pour les personnes affiliées au régime général de sécurité sociale.
Le ministre vous dirait que l'administration est débordée par les demandes de rapports. C'est étonnant car, dans notre pays, les gens estiment qu'il y a trop de collaborateurs dans les cabinets ministériels et qu'il faut en réduire le nombre. Je leur réponds que, dans ce cas, ils n'auront pas les rapports demandés. On en arrive à la saturation décrite ce jour.
Dans le cas particulier, vous aurez à moitié satisfaction : l'année dernière, nous avons demandé un rapport concernant les stagiaires en général, et il est en cours de rédaction.
La commission émet donc un avis défavorable.
(L'amendement n° 623 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Anny Poursinoff, pour soutenir l'amendement n° 507 , tendant à supprimer l'article 52.
Je ne voudrais pas que seuls les ministres puissent faire de la politique de tribune. Je monte donc à la tribune pour défendre cet amendement de suppression, mais surtout pour rappeler combien nous sommes opposés à la réforme des retraites qui engendre beaucoup de difficultés notamment pour les femmes.
Vu l'heure avancée, je ne défendrai pas plus longuement cet amendement de suppression dont l'objectif est politique, vous l'aurez compris. Mais pourquoi pas ?
Heureusement, nous avons adopté la loi sur les retraites l'année dernière. Dans le contexte de crise actuel, je dis toujours : amenez-moi un retraité qui, en France, n'a pas reçu le jour dit le montant qu'il devait percevoir, et allons voir à l'étranger comment cela se passe. Nous avons donc eu raison de faire cette réforme. La commission a rejeté l'amendement.
(L'amendement n° 507 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 52 est adopté.)
Nous abordons les dispositions concernant les dépenses relatives aux accidents du travail et aux maladies professionnelles.
Nous en venons aux dispositions relatives aux dépenses des accidents du travail et des maladies professionnelles.
La parole est à M. Jean-Pierre Door, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance maladie et les accidents du travail, pour présenter l'amendement n° 341 portant article additionnel avant l'article 53.
Défavorable pour des raisons de forme : la rédaction proposée ne respecte pas les termes de la loi organique et induit en outre une hétérogénéité dans les titres des sections.
Je ferai deux remarques préalables à l'examen des quatre articles de la branche accidents du travail et maladies professionnelles de ce PLFSS.
Je regrette qu'une nouvelle fois votre projet soit exempt de mesures significatives. Vous ne vous écartez pas des articles classiques, obligés, devant nécessairement figurer en loi de financement de la sécurité sociale. Cette attitude confirme le manque d'ambition du Gouvernement pour inciter les employeurs à effectivement prévenir les pathologies causées par le travail, mettre ces derniers face à leurs responsabilités s'agissant de la réparation des victimes du travail en général, des victimes de l'amiante en particulier.
En commission, M. le ministre avait annoncé qu'il présenterait deux amendements visant à harmoniser les modalités de prise en charge des périodes d'exposition à l'amiante entre les différentes branches. Ils ont dû m'échapper, à moins qu'il ne se soit agi d'un effet d'annonce, ce que je regretterais beaucoup.
Seconde observation : le retour à l'équilibre de la branche AT-MP en 2011 n'a rien d'exceptionnel dans la mesure où, par principe, cette branche uniquement financée par les cotisations des employeurs se doit d'être équilibrée. C'est la situation des années passées qui était anormale, tout comme le fut le transfert à la CADES de la dette de cette branche.
Vous nous dites que la situation financière de la branche sera positive grâce au relèvement du taux de cotisation employeur – 80 millions d'euros – et aux économies opérées dans le champ de l'ONDAM.
Pouvez-vous être plus précis sur les marges de manoeuvre ainsi dégagées ? Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, si le Gouvernement entend prendre des mesures en direction des gestionnaires de la branche pour rétablir la fiabilité des comptes qui n'ont pas été certifiés en 2010 par la Cour des comptes.
Enfin, sur l'article 53 lui-même, fixant à 790 millions d'euros pour l'année 2012 le montant du reversement de la branche AT-MP à la branche maladie au titre de la sous-déclaration et sous-reconnaissance des accidents du travail et des maladies professionnelles, le Gouvernement fait aussi preuve d'un manque de volontarisme coupable.
Certes, le montant affiché est en augmentation, mais il est loin de refléter le coût réel de cette sous-déclaration et de cette sous-reconnaissance des accidents du travail et des maladies professionnelles. Il se situe plutôt dans le bas de la fourchette des estimations de la commission Diricq, pour laquelle le coût de la sous-déclaration pour la branche maladie pourrait atteindre 1,110 milliard d'euros.
Les employeurs ne sont décidément pas incités, monsieur le ministre, à faire de la problématique de la santé au travail leur priorité. C'est dommage.
(L'article 53 est adopté.)
La parole est à M. Christian Hutin, pour soutenir l'amendement n° 626 portant article additionnel après l'article 53.
Ce n'est un secret pour personne : il y a sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles. Tout le monde le sait, et le rapport de la commission présidée par M. Diricq l'a prouvé.
Notre amendement a pour objet de réunir la commission chargée d'évaluer le montant annuel résultant de cette sous-déclaration tous les deux ans et non tous les trois ans.
On ne connaît pas toutes les raisons de cette sous-déclaration. Certains patients se posent probablement des questions, et les rapports entre ouvriers et patrons ne sont sans doute pas non plus étrangers à cet état de fait. En outre, le lien entre la maladie et les conditions de travail ne vient pas forcément immédiatement à l'esprit de tous les médecins.
Il nous semble donc important que la commission se réunisse plus fréquemment. De manière plus générale et d'un point de vue plus politique, nous estimons que les modalités de réparation des préjudices devraient être les mêmes pour les accidents du travail et les maladies professionnelles que pour les accidents de la route ou les drames provoqués par le terrorisme. Les accidents de la vie du travail sont, eux aussi, des accidents de la vie ; tel est le point de vue que nous dicte notre philosophie politique.
Elle a repoussé cet amendement.
Effectivement, un rapport est rendu tous les trois ans par une commission présidée par un magistrat de la Cour des comptes. Il évalue le coût réel, pour la branche maladie, de la sous-déclaration des accidents du travail.
En outre, six commissions successives se sont déjà attelées à l'estimation du montant annuel du reversement dû au titre de cette sous-déclaration : en 1997, 1999, 2002, 2005, 2008 et 2011.
Nous ne retenons donc pas votre suggestion d'avancer la date de remise du rapport du 1er juillet au 30 juin.
(L'amendement n 626 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Christian Hutin, pour soutenir l'amendement n° 654 .
Il participe du même esprit.
La Cour des comptes estime que la tarification n'incite pas vraiment à la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles. Nous pensons donc qu'un système de bonus-malus serait extrêmement intéressant, y compris pour les entreprises, car de plus en plus d'employeurs sont conscients du problème et s'intéressent à la qualité du travail, aux difficultés rencontrées dans le travail, aux accidents du travail. Le système que nous proposons est particulièrement incitatif. Il va dans le sens de cette fameuse performance dont nous parlons depuis maintenant deux jours.
Cet amendement me semble donc pouvoir recueillir l'assentiment de tous les bancs de cette assemblée.
Le décret du 5 juillet 2010 a transposé les mesures arrêtées à l'unanimité des partenaires sociaux dans le cadre de l'accord national interprofessionnel. Le précédent ministre du travail, M. Woerth, m'avait chargé de rencontrer les représentants du patronat et des syndicats, et ils ont, à l'unanimité, validé la rédaction de ce décret.
Il serait donc mal venu de modifier dès maintenant un système de tarification approuvé par tous les partenaires sociaux. Ce décret devrait d'ailleurs faire rapidement la preuve de son efficacité en matière de prévention, car c'est bien d'une telle volonté qu'il procède.
(L'amendement n° 654 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l'amendement n° 549 .
Par cet amendement, nous demandons un rapport sur les conditions d'application par les tribunaux de la décision du Conseil constitutionnel le 18 juin 2010 à propos de la conformité du régime d'indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles aux droits et libertés garantis par la Constitution. Il s'agit d'une décision importante puisqu'elle ouvre la voie à la réparation intégrale des préjudices subis par les victimes du travail dans l'hypothèse où la faute inexcusable de leur employeur est reconnue.
Or il apparaît que cette décision pourtant claire est appliquée de manière confuse par les magistrats, voire qu'elle est interprétée de manière trompeuse tant par les caisses de sécurité sociale que par les avocats des employeurs, et la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés appelle notre attention sur la nécessité d'éclaircir rapidement la question des dommages couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale, sous peine de conséquences dramatiques pour les victimes.
En effet, d'aucuns poussent à considérer que, dès lors qu'un poste de préjudice – parmi les postes : dépenses de santé, frais de déplacement, appareillage, perte de gains professionnels, assistance d'une tierce personne – est au moins partiellement pris en charge dans le cadre du dispositif d'indemnisation, les victimes ne sont pas fondées à demander un complément d'indemnisation.
S'agissant des besoins en tierce personne, ce raisonnement pourrait s'avérer redoutable. Prenons l'exemple du jugement rendu en mai 2009 par le tribunal de grande instance de Niort, qui allouait à une victime paraplégique une somme totale de 653 153 euros au titre des besoins en tierce personne. Sachant que le montant de la majoration pour tierce personne versée par la caisse n'est que de 125 260 euros, la victime aurait été privée, si elle n'avait pu se prévaloir de la réparation intégrale, d'une indemnisation complémentaire de près de 530 000 euros couvrant ses besoins réels en tierce personne.
Vous le voyez, il faut faire le point sur l'application de cette décision par les juridictions de la sécurité sociale, avant que le législateur n'intervienne, si nécessaire. Notre amendement prévoit donc la remise d'un rapport au Parlement pour préparer ce travail.
Défavorable. Sans même parler de l'inflation des rapports, j'indique à Mme Fraysse que le calendrier des travaux de notre assemblée comporte la discussion, dans un mois, de la proposition de loi de M. Vidalies, relative à l'amélioration de l'indemnisation des victimes d'accidents du travail et maladies professionnelles. Ce sera l'occasion de débattre de la question que vous soulevez.
Comme quoi les niches parlementaires sont utiles !
(L'amendement n° 549 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l'amendement n° 550 .
Il y a maintenant près d'une dizaine d'années que le rapport du professeur Masse a préconisé l'évolution du régime de réparation forfaitaire des accidents du travail et des maladies professionnelles vers la réparation intégrale et que celui de M. Yahiel a proposé des éléments de méthode en vue de cette évolution.
Plus récemment encore, le Médiateur de la République a demandé de reconsidérer le système de réparation forfaitaire des AT-MP afin de mettre un terme aux inégalités entre les victimes du travail – celles de l'amiante et les autres – et les victimes d'un dommage environnemental ou de la circulation.
Il est effectivement tout à fait injuste qu'une victime soit indemnisée différemment selon la cause du dommage. Or, en cas d'accident industriel, la victime se trouvant aux abords d'une usine sera mieux indemnisée que le salarié se trouvant à l'intérieur.
Las, la réflexion sur l'évolution du régime de réparation forfaitaire vers un régime de réparation intégrale est au point mort. Il semble pourtant que nous soyons nombreux, sur ces bancs, à souhaiter dépasser une législation obsolète, dont je rappelle qu'elle date de 1898. Nous avons d'ailleurs déposé une proposition de loi en ce sens en début de législature, et certains députés des groupes UMP et SRC viennent à leur tour de prendre une initiative pour franchir le pas de la réparation intégrale en cas de faute inexcusable.
Évidemment, l'article 40 de la Constitution nous interdit de progresser sur cette question. Aussi notre amendement vise-t-il, en demandant un rapport sur l'évolution de notre régime de réparation des accidentés du travail et victimes de maladies professionnelles, à rappeler au Gouvernement qu'il est urgent d'agir en ce sens.
Défavorable. Je vous rappelle, madame Fraysse, que le Conseil constitutionnel a jugé, il y a un an, que l'exclusion de toute réparation intégrale dans le cadre des régimes d'indemnisation était conforme à la Constitution. En outre, et même s'il date de l'année 2004, le rapport Laroque avait évalué à 2,9 milliards d'euros le coût, pour le seul régime général, de la réparation intégrale des préjudices. Rendez-vous compte de l'impact qu'aurait une telle réforme !
Défavorable également, mais je souhaite préciser deux ou trois points.
Lisons attentivement la décision du Conseil constitutionnel : celui-ci reconnaît un droit à réparation de tous les préjudices, mais non un droit à réparation intégrale de chaque préjudice. Sinon, il n'aurait pas confirmé la constitutionnalité de la réparation forfaitaire.
En outre, et même si je ne veux pas parler en leur nom, je tiens à rappeler que les partenaires sociaux désirent conserver le dispositif actuel. Il est vrai, en revanche, qu'ils souhaitent comme nous en corriger certains points faibles, comme le manque d'individualisation de la réparation de l'incapacité permanente.
Une personnalité a donc été désignée le 6 juin dernier pour travailler sur la question de la rénovation du dispositif de réparation du sinistre professionnel. Il s'agit de Mme Ruellan, ancienne présidente de la sixième chambre de la Cour des comptes, qui associe l'ensemble des acteurs à ses travaux afin de préparer, pour l'an prochain, un projet de réforme.
(L'amendement n° 550 n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l'amendement n° 551 .
Dans son rapport de juin 2011, la commission chargée d'évaluer le coût réel pour la branche maladie de la sous-déclaration des maladies professionnelles a dressé un bilan pour le moins contrasté de la mise en oeuvre des propositions précédemment formulées et des actions conduites pour lutter contre les phénomènes de sous-déclaration et de sous-reconnaissance. Parmi les sujets de préoccupation, l'absence de progrès dans la mise en place concrète de la formation initiale et continue des médecins aux problématiques des AT-MP, mais aussi l'extrême lenteur du travail de révision des tableaux des maladies professionnelles.
Dans son rapport de 2005, la commission préconisait de revoir le fameux tableau 57, « Affections périarticulaires, provoquées par certains gestes et postures de travail », qui représente entre 75 et 80 % des maladies professionnelles reconnues. Cela n'a toujours pas été fait, et aucun décret modifiant ou complétant les tableaux de maladies professionnelles n'a été publié en 2010.
D'après les éléments que notre collègue Jean-Pierre Door a bien voulu nous communiquer, le groupe de travail sur les pathologies psychiques d'origine professionnelle, créé en 2010 pour formuler des recommandations facilitant l'examen des demandes par les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles dans le cadre juridique existant, et pour explorer dans un second temps les autres voies d'amélioration de la prise en charge de ces pathologies, devrait poursuivre ses travaux en 2012.
La lisibilité de ces travaux reste pour nous insuffisante. Notre amendement tend à remédier à cette anomalie.
Nous demandons la remise d'un rapport au Parlement sur ce sujet, afin de pouvoir débattre des moyens d'améliorer l'évolution des tableaux et de l'opportunité de la suppression du seuil d'incapacité permanente de 25 %, actuellement requis pour toute personne souhaitant faire reconnaître une maladie non désignée dans un tableau professionnel, qui représente un véritable obstacle.
Je comprends que les parlementaires souhaitent être de mieux en mieux informés sur tous ces sujets cruciaux.
Madame Fraysse, vous m'aviez demandé le rapport lors de la commission, je vous l'ai transmis.
Si ces informations ne sont pas suffisantes, je ne doute pas que M. le ministre sera prêt à compléter mes réponses à vos questions.
Néanmoins, un rapport supplémentaire n'est pas nécessaire. En conséquence, nous avons émis un avis défavorable.
Même avis. J'ajoute que le tableau n° 57 des maladies professionnelles a été complété sur ce point par un décret publié le 19 octobre 2011.
Merci de cette information, monsieur le ministre.
(L'amendement n° 551 n'est pas adopté.)
Tout d'abord, je tiens à m'excuser auprès du président de la commission si mes propos lui ont paru durs. Je partage le respect que nous avons tous pour lui dans cet hémicycle et je ne voulais pas le choquer. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)
À l'occasion de cet article qui concerne l'amiante, j'ai une pensée pour Patrick Roy qui aurait occupé ma place s'il avait encore été parmi nous, lui qui a défendu les victimes de l'amiante d'une manière exceptionnelle.
C'est vrai !
Je pense à lui en abordant ce dossier.
Parfois, l'actualité s'immisce dans nos décisions. Hier, la cour d'appel de Douai a abaissé l'indemnisation des victimes de l'amiante. Elle a repris à la lettre un arrêt de la Cour de cassation de novembre 2009 qui avait été saisie par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, le FIVA, et a décidé de revoir les indemnisations de l'amiante.
Désormais la plupart des indemnisés de l'amiante verront leur indemnité diminuer d'un quart, d'un tiers, voire de moitié. L'arrêt prévoit la fin de la linéarité dans le calcul des rentes des victimes de l'amiante, considérées comme des accidentés du travail. Il oblige à calculer ces rentes selon le modèle de l'assurance maladie, bien entendu moins généreux, en particulier pour ceux qui souffrent d'une infection impliquant un taux d'incapacité inférieure à 50 %.
Pire, cette mesure touche aussi les victimes de l'amiante qui sont à la retraite. La rente de l'assurance maladie qui leur est attribuée pour la perte de la capacité à gagner leur vie doit être considérée désormais comme une réparation pour préjudice personnel. Cela pourra aller jusqu'à une division par deux des dommages et intérêts ! Suite à la décision rendue hier par la cour d'appel de Douai, 300 personnes, des petits retraités, devront rembourser entre 5 000 et 15 000 euros. La plupart d'entre eux n'ont même pas un dixième de cette somme sur leur compte. Je n'imagine pas une saisie chez les victimes de l'amiante !
Si vous êtes victime d'un accident sur la voie publique, d'un accident de la circulation ou d'un acte de terrorisme, vous êtes totalement indemnisé de votre préjudice. Il n'en est pas de même pour l'accident de la vie du travail.
Je le dis à l'ensemble des législateurs présents dans cet hémicycle : il faudra considérer ce problème, notamment dans le domaine spécifique de l'amiante qui concerne 150 000 personnes.
Cet article est certes relatif au FIVA et à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, mais il faut tenir compte de l'actualité : la colère et le désarroi montent chez les associations et les victimes. Nous en reparlerons dans les jours qui viennent.
Avant l'examen de l'article 54, il me semblait important d'exprimer cette actualité brûlante et inquiétante pour les familles et les victimes.
La contribution de la branche AT-MP au financement des fonds amiante, dispositifs auxquels l'État contribue peu – les recettes du FIVA et du FCAATA proviennent à plus de 90 % de la branche AT-MP de la sécurité sociale –, est en baisse de 7 % pour le FIVA – 315 millions d'euros cette année contre 340 en 2011 –, alors même que la Cour des comptes fait état d'un déficit de 34 millions.
Le montant du versement de la branche AT-MP au FCAATA, en hausse de 10 millions cette année, ne permettra pas d'apurer la dette du fonds envers la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, ni de dégager les marges de manoeuvre nécessaires pour faire face à l'entrée de nouveaux allocataires.
Mais il est vrai que le Gouvernement a renoncé à réformer le dispositif de cessation anticipée d'activité pour rendre les modes d'admission moins injustes, alors que de nombreux rapports recommandent une réforme.
Ces observations faites, je profite de l'examen de cet article pour revenir sur la question de la gouvernance du FIVA. Notre amendement tendant à préciser que le président de cet organisme devait être un magistrat de la Cour de cassation a été jugé irrecevable au titre de l'article 40, ce qui est surprenant.
Nous l'avions déposé pour que le Gouvernement s'explique sur le décret du 8 octobre dernier par lequel, monsieur le ministre, sans consulter la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles, vous avez pris l'exact contre-pied du décret de 2001 en permettant que soit nommé à la tête du FIVA un président qui ne soit pas membre de la Cour de cassation.
La Fédération nationale des accidentés du travail, et l'Association nationale de défense des victimes de l'amiante sont vent debout contre ce qu'elles considèrent comme une manoeuvre de votre part pour affaiblir l'indépendance du conseil d'administration d'un fonds conçu comme un premier degré de juridiction, déterminant les principes et les montants d'indemnisation des victimes de l'amiante.
Elles ont d'ailleurs saisi le Conseil d'État d'une demande d'annulation du décret modifiant la gouvernance du FIVA. Ainsi la décision du Gouvernement est-elle extrêmement discutable, tant sur le fond que sur la forme. Je tenais à le rappeler ici et je souhaiterais que M. le ministre nous donne son opinion sur ce qui vient d'avoir lieu et sur la réaction légitime des personnes et des associations concernées.
Je répondrai d'abord à Mme Fraysse, puis à M. Hutin.
Contrairement à ce que vous affirmez, madame Fraysse, et même si cela n'a pas d'impact financier, la commission AT-MP a été consultée le 21 juin sur le décret relatif au président du FIVA.
Elle a émis un avis favorable dans le cadre de ce processus de consultation.
J'ai répondu à une question d'actualité du groupe communiste ou du groupe socialiste, je ne sais plus, portant sur ce sujet. J'ai également tenu à répondre à tous les courriers qui m'avaient été adressés.
Des manifestants sont venus dans ma ville, à Saint-Quentin, samedi dernier, proférant des slogans comme « Bertrand assassin ! ».
Cela fait toujours plaisir ! Avant d'être ministre, j'ai été élu local et je le suis toujours. Certains de mes amis ont d'ailleurs été victimes de l'amiante dans des entreprises de ma commune, UNELEC par exemple. Je connais donc ce sujet plus qu'un ministre simplement concerné par ses dossiers.
Le décret ne remet pas en cause les droits des victimes de l'amiante. Publié le 8 octobre dernier, il est encore vivement contesté, et je voudrais donc en exposer les termes avec précision.
Que dit la loi sur la présidence du conseil d'administration du FIVA ? Qu'elle est assurée par un magistrat, sans préciser s'il s'agit d'un magistrat de l'ordre judiciaire ou administratif.
Que disait le décret d'application de cette loi avant le 8 octobre ? Que le président du FIVA était choisi parmi les présidents de chambre ou les conseillers à la Cour de cassation.
Que dit le nouveau décret ? Que ce président peut être également un président de tribunal administratif ou de cour administrative d'appel ou encore un magistrat de la Cour des comptes.
Pourquoi cette évolution ? Parce que, comme je l'ai dit lors des questions d'actualité, nous avons voulu nous laisser le choix et cette possibilité. Parce que le conseil d'administration du FIVA doit être avant tout un lieu où s'élaborent, entre les partenaires sociaux, les associations de victimes et l'État, dans un esprit constructif et d'écoute, les orientations qui détermineront le niveau d'indemnisation des victimes de l'amiante.
Son président joue un rôle déterminant. Son indépendance vis-à-vis de l'État est nécessaire pour crédibiliser son action. En revanche, cette indépendance n'implique pas qu'il soit forcément un magistrat de l'ordre judiciaire.
Rien dans la loi ne l'empêche : les membres des tribunaux administratifs et de la Cour des comptes sont tous des magistrats. Mais dit-on pour autant que le premier président ou les magistrats de la Cour des comptes ne sont pas indépendants ? Il n'y a pas de hiérarchie dans l'indépendance. D'ailleurs, ils bénéficient des mêmes garanties d'indépendance et d'inamovibilité que les magistrats de l'ordre judiciaire.
Appeler à l'abrogation du décret au motif que ces personnes seraient aux ordres de l'État, ce n'est pas très sympathique ! C'est une façon de les mettre en cause, ce que je n'apprécie pas. Cela signifierait que tout un pan de l'organisation juridique de notre pays ne serait pas au même niveau que les autres. On n'accorderait pas le même prix à la souffrance des uns et des autres dans la sphère publique.
C'est pourquoi j'ai été heurté, non par les slogans – j'en ai l'habitude –, mais par certaines remarques.
J'ajoute que les exemples existent d'organismes chargés de l'indemnisation de dommages corporels, ou qui agissent dans le champ de la sécurité sanitaire, dont la présidence ne revient pas obligatoirement et systématiquement à des magistrats de l'ordre judiciaire.
Il en est ainsi du Fonds de garantie des actes de terrorisme. Le code des assurances prévoit que sa présidence est assurée parmi les membres en activité ou honoraires du Conseil d'État ou de la Cour de cassation. Je ne suis pas sûr que les associations de victimes qui siègent dans cet organisme aient jamais eu l'occasion de s'en plaindre.
D'autres organismes sont présidés par des personnes dont la loi ne précise pas non plus qu'elles doivent être des membres des juridictions judiciaires ou administratives. C'est le cas de l'Institut de veille sanitaire, de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ou de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux.
Je citerai enfin le conseil de surveillance du Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, actuellement présidé par une magistrate de la Cour des comptes. Voilà la réalité.
Encore une fois, avec ce décret, le Gouvernement s'est seulement donné la faculté de choisir le profil le plus adapté à la présidence du FIVA. Personne ne serait assez fou pour choisir un président qui, par son parcours ou son tempérament, n'aurait pas à coeur d'apporter les meilleures solutions aux victimes. On nous soupçonne de vouloir nommer un président favorable aux employeurs plutôt qu'aux victimes. Sur de tels sujets, personne n'a jamais joué ce jeu-là !
Pour remplir cette fonction durant les trois prochaines années, j'ai aussitôt voulu montrer notre volonté et notre bonne foi en la matière. C'est Claire Favre, présidente de la chambre commerciale de la Cour de cassation, qui assurera la présidence du FIVA. Je ne crois pas que son autorité et sa légitimité puissent être mises en cause. Le décret nous ouvre un vaste champ de possibilités mais c'est d'abord le profil qui importe.
Elle sera suppléée, en tant que de besoin, par Xavier Prétot, conseiller en service extraordinaire à la deuxième chambre civile de la Cour de cassation.
Je pense qu'il est temps de clore ce dossier. Nous avons voulu faire la preuve qu'il était possible de se donner davantage de choix tout en restant fidèle aux orientations du FIVA.
J'ai pris le temps d'apporter ces précisions car il était bon d'être clair.
J'en viens à la cour d'appel de Douai. Je n'ai pas à commenter les décisions de justice, mais j'ai été surpris par la division par moitié des indemnités dont il était question.
La cour d'appel de Douai a rendu plusieurs arrêts relatifs aux modalités d'indemnisation des victimes de l'amiante par le FIVA. Ces arrêts ont été relayés par les médias, ce qui est normal dès lors qu'il est question d'amiante, d'indemnisation et de victimes.
Les arrêts concluent à la réduction des indemnités que cette même cour avait accordées aux victimes de l'amiante dans des précédents arrêts, que la Cour de cassation avait finalement cassés en novembre 2009.
Mon cabinet – Bruno Dupuis est présent ce soir – et les services du ministère viennent à peine de recevoir les premiers arrêts. Mais je voudrais vous donner mes premières réactions à chaud. Il faudra que l'on expertise davantage.
Qu'est-ce qui est en jeu dans ces arrêts ? S'agit-il d'une régression par rapport à un dispositif dont la loi prévoit qu'il doit assurer une réparation intégrale des préjudices subis par les victimes de l'amiante ? La réponse est non.
D'abord, cela ne concerne pas les bénéficiaires du FIVA, mais – comme vous l'avez dit tout à l'heure – 300 personnes qui avaient fait un recours et qui avaient choisi de contester l'offre du FIVA.
Ensuite, c'est une décision souveraine du juge judiciaire. Je n'ai normalement pas à la commenter, mais je pense que cela vaut la peine de regarder exactement quelle est la situation.
Ces arrêts appliquent tout simplement les principes législatifs ou les décisions prises par le conseil d'administration du FIVA, dans lequel, je le rappelle, siègent bien les représentants des victimes et des salariés. La question sur laquelle la cour d'appel s'est prononcée est celle de l'articulation entre les prestations versées par la sécurité sociale au titre des maladies professionnelles et les indemnités versées par le FIVA.
Le FIVA assure l'indemnisation intégrale des victimes de l'amiante. Mais cette indemnisation intégrale doit tenir compte de ce que la victime de l'amiante perçoit par ailleurs, en particulier de la sécurité sociale. C'est la position de la cour d'appel. L'indemnisation intégrale – je sais que cela peut choquer, et mettre certaines personnes dans la difficulté – ne signifie pas que l'on doive indemniser deux fois. Je sais toutefois qu'il est difficile d'aller expliquer cela aux personnes concernées en leur disant : « Vous avez été marqués dans votre chair, et en plus il faut rembourser ». Je sais que c'est loin d'être simple.
Oui, le problème est là. Mais ce que je veux dire, c'est que les personnes n'ont pas été indemnisées deux fois moins. Il y a eu la réparation intégrale, il y a eu les versements de la sécurité sociale, et la cour d'appel dit : on ne peut pas toucher les deux.
C'est pourquoi la loi prévoit que le FIVA doit déduire de son offre d'indemnisation le montant des prestations versées par les organismes de sécurité sociale au titre du même préjudice. C'est ce que la Cour de cassation a rappelé à la cour d'appel de Douai en cassant ses précédents arrêts. Et, si mes souvenirs de juriste ne me trompent pas, je crois que l'arrêt de la Cour de cassation lie la cour d'appel. Le jugement rendu par une deuxième cour d'appel est tenu de suivre la Cour de cassation.
Évidemment, comme le recours devant la Cour de cassation n'est pas suspensif, le FIVA avait versé aux personnes concernées les indemnités déterminées dans un premier temps par la cour d'appel de Douai, et les arrêts rectificatifs que cette cour vient de rendre impliquent des opérations de régularisation qui sont particulièrement mal vécues – je ne vois pas comment il pourrait en être autrement – par les personnes.
J'ajoute que ce n'est pas non plus une situation spécifique aux victimes de l'amiante : toutes les personnes victimes d'un accident qui décident d'engager un contentieux peuvent être confrontées à cette situation car, en matière de réparation, la décision du juge s'applique. Et, encore une fois, on ne peut pas être indemnisé deux fois pour la même chose.
Cela dit, mes services vont s'attacher à expertiser plus avant ces arrêts. Je crois que la justice devra se pencher sur la question de savoir dans quelles conditions cela va se passer. Bien souvent, ce ne sont pas des millionnaires qui ont été victimes de l'amiante.
Il faudra donc veiller à ce que ces personnes ne soient pas plongées dans une situation sociale tragique. Mais je voulais aussi mener une analyse à froid – même si c'est à chaud par rapport aux événements et par rapport à la date de publication de cet arrêt – de ce qu'il en est en droit. Dans les faits, ces personnes sont dans la difficulté. Mais en droit, voilà exactement comment se présente la situation.
(L'article 54 est adopté.)
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse pour soutenir l'amendement n° 553 tendant à la suppression de l'article 55.
Cet article fixe la contribution de la branche AT-MP à la branche vieillesse au titre du dispositif « pénibilité » au sein de la réforme des retraites. Notre amendement de suppression doit être compris comme un rappel de notre opposition à la prise en compte de la pénibilité sous l'angle étroit de l'incapacité.
La loi et ses décrets d'application ont ainsi réservé le droit de partir à soixante ans aux seules personnes justifiant d'un taux d'incapacité permanente d'au moins 20 % reconnu au titre d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail – condition excluant les victimes d'accidents de trajet – ou à celles justifiant d'un taux compris entre 10 et 20 % à condition qu'elles puissent prouver devant une commission pluridisciplinaire leur exposition pendant au moins dix-sept ans à un facteur au moins de risque professionnel à l'origine de l'incapacité.
Le premier bilan d'application dressé par la CNAV confirme qu'il est très difficile d'entrer dans le dispositif. Les organisations syndicales sont amères. Elles sont notamment très critiques sur les seuils restrictifs qui ont été retenus.
Pour la CGT, Éric Aubin constate qu'« il est impossible de prouver une telle durée d'exposition. Il faut produire des certificats de l'employeur ou des témoignages qui ne sont pas faciles à obtenir au moment de la retraite ».
Le résultat, c'est que les salariés victimes de la pénibilité, dont l'espérance de vie est bien inférieure à la moyenne, ne peuvent faire valoir leurs droits à réparation.
Le résultat, c'est aussi que le nombre de demandes est très en deçà des estimations du Gouvernement lui-même, d'où des crédits non dépensés en 2011, et reportés en 2012.
S'agissant des négociations sur la prévention, le doute demeure sur le nombre précis des entreprises susceptibles d'être concernées par la loi, ainsi que sur la volonté du Gouvernement d'appliquer des sanctions financières. Il faut dire que le précédent en matière d'égalité professionnelle ne pousse pas à l'optimisme.
Par contre, il est acquis, comme le regrette la CFDT, qu'« il va y avoir des inégalités entre les entreprises qui peuvent payer les préretraites et les autres. »
Pour toutes ces raisons, nous proposons de supprimer cet article.
Elle a repoussé l'amendement. Le dispositif de prise en charge de la pénibilité constitue tout de même, depuis la promulgation de la loi sur les retraites, une avancée significative.
L'article 55 porte le montant de la contribution de la branche AT-MP à 110 millions d'euros, contre 35 millions dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. C'est pourquoi il faut repousser cet amendement de suppression.
(L'amendement n° 553 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 55 est adopté.)
La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 767 rectifié portant article additionnel après l'article 55.
Il s'agit d'aligner les conditions d'attribution des rentes d'ayant droit pour tous les types d'union.
Cet amendement n'a pas été examiné par la commission, mais j'y suis favorable à titre personnel.
Je voudrais regretter que des amendements du Gouvernement continuent de nous arriver au dernier moment. Cela étant, cet amendement qui accorde aux membres survivants d'un couple le même traitement, qu'il s'agisse d'un couple marié, d'un couple pacsé ou d'un couple de concubins, va dans le bon sens, et le groupe GDR le votera.
La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 766 portant article additionnel après l'article 55.
Cet amendement porte sur la coordination des régimes de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante. Comme M. Hutin l'a fait tout à l'heure, je veux à mon tour rendre hommage à Patrick Roy. C'est l'une des propositions qu'il avait faites dans son rapport de novembre 2009 sur l'indemnisation des victimes de l'amiante.
C'est aussi un sujet sur lequel mon ami Éric Woerth s'était engagé, à l'occasion d'une question posée au Sénat par un autre spécialiste de ce sujet, le sénateur Godefroy.
Cette amélioration de la coordination des régimes était attendue. Elle était souhaitée. Elle trouve aujourd'hui sa place dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Cet amendement n'a pas été examiné par la commission, mais j'y suis favorable à titre personnel.
(L'amendement n° 766 est adopté.)
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l'amendement n° 554 .
À défaut de pouvoir modifier sur ce point le code de la sécurité sociale – nous sommes limités par l'article 40 –, nous demandons, par cet amendement, que le Gouvernement transmette au Parlement un rapport proposant des pistes de réforme de l'indemnisation de l'incapacité temporaire de travail, dans l'objectif de garantir à toute victime du travail un revenu de remplacement égal à ce qu'elle percevait avant son arrêt de travail.
Actuellement, jusqu'au vingt-huitième jour d'arrêt de travail, les indemnités journalières dues au titre des AT-MP ne représentent que 60 % du salaire journalier, et 80 % à compter du vingt-neuvième jour. Le salarié en incapacité de travail n'est donc pas indemnisé intégralement de la perte de son salaire, sauf lorsqu'un complément est versé dans le cadre de conventions collectives, d'accords d'entreprise ou d'accords de groupe.
Les victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles n'ont pas été épargnées par les décisions injustes prises par votre gouvernement depuis le début de la législature : franchises médicales, fiscalisation des indemnités journalières, sans compter la mesure à venir de révision du mode de calcul des prestations en espèces de l'assurance maladie-maternité et accidents du travail, mesure qui ne sera pas neutre, contrairement à ce que vous avancez, monsieur le ministre.
La question d'un réexamen des conditions d'indemnisation des victimes du travail se pose donc avec acuité. Je rappelle que nous portons l'exigence d'une amélioration de l'indemnisation de l'incapacité temporaire de travail, et posons comme objectif le maintien, pour le salarié victime du travail, de la totalité de son salaire pendant son arrêt de travail.
(L'amendement n° 554 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l'amendement n° 555 tendant à supprimer l'article 56.
Il est défendu.
(L'amendement n° 555 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 56 est adopté.)
Je mets aux voix l'ensemble de la quatrième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012.
(L'ensemble de la quatrième partie du projet de loi est adopté.)
Nous avons achevé l'examen des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012.
Je rappelle que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble du projet auront lieu le mercredi 2 novembre, après les questions au Gouvernement.
Prochaine séance, mercredi 2 novembre 2011 à neuf heures trente :
Discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2012 :
Recherche et enseignement supérieur.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures quinze.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron