La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
Hier soir, l'Assemblée a commencé l'examen des articles, s'arrêtant à l'article 2 bis.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l'amendement n° 33 .
Cet amendement de précision propose de remplacer les mots : « de patients » par les mots : « d'usagers du système de santé ». Il a été adopté par la commission dans le cadre de l'article 88 du règlement de l'Assemblée.
La parole est à M. Arnaud Robinet, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour donner l'avis de la commission.
La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé, pour donner l'avis du Gouvernement.
La parole est à Mme Pascale Gruny, pour soutenir l'amendement n° 181 portant article additionnel après l'article 2 bis.
Il s'agit d'insister sur le fait que le financement des actions de formation médicale continue est possible dès lors que ces actions ne constituent pas des actions promotionnelles déguisées.
Favorable. Il s'agit d'un très bon amendement.
Je comprends votre engouement pour ce qui vous paraît être une bonne mesure, mais il ne faut pas être dupe : il s'agit rien d'autre que d'une vitrine. Il existe tant de manières de mener l'action promotionnelle auprès des médecins ! On peut bien proposer une telle disposition, on pourra bien rédiger des rapports, proposition qui, en général, ne rencontre guère d'obstacles, vous savez pertinemment que cet amendement ne changera rien aux pratiques et que tout sera fait pour détourner le dispositif que vous prévoyez. C'est ce qu'on appelle surcharger la loi pour rien. (Murmures sur les bancs du groupe UMP.)
Pour une fois je serai de votre avis, madame Lemorton : je ne vois pas ce que signifie une « action promotionnelle déguisée ». Qui sera à même de découvrir qu'une action sera déguisée ou non ? Un tel amendement alourdit en effet le texte. Même s'il est très gentil – c'est un peu : Embrassons-nous, Folleville –, je ne vois pas à quoi il sert.
Puisque nous faisons la loi, autant savoir ce que nous votons. Quelqu'un pourrait-il me décrire une opération promotionnelle déguisée, m'en donner une illustration ?
Le programme du parti socialiste ! (Sourires sur les bancs du groupe UMP.)
Les résultats de dimanche dernier, mon cher collègue, montrent que votre déguisement n'a pas tenu longtemps et l'on a bien vite vu ce qu'il cachait, au grand dam de vos candidats aux élections sénatoriales. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Il me semble difficile de voter un amendement dont personne ne parvient à définir le contenu.
(L'amendement n° 181 n'est pas adopté.)
Si nous nous accordons pour considérer comme une avancée la déclaration des liens d'intérêts avec les entreprises du médicament et des dispositifs médicaux, si nous nous accordons sur la fixation de sanctions pénales, prévue à l'article 3, l'articulation entre les deux fait défaut. Qui va vérifier l'existence de liens d'intérêts ? Qui va vérifier le changement de liens d'intérêts dès lors que la déclaration d'un tel changement revient à la personne concernée ? Quelle instance signalera que des sanctions pénales doivent s'appliquer ?
L'articulation fait défaut, j'y insiste, entre la déclaration de liens d'intérêts et les modalités de la prise de sanctions pénales si cette déclaration n'est pas effectuée, si elle est incomplète ou si elle n'est pas modifiée en temps et en heure.
Quid donc de l'application de l'article 3 ?
Une mention spéciale dans les contrôles internes est nécessaire. Il convient en outre – nous verrons si une telle disposition relève du pouvoir réglementaire ou du pouvoir législatif – de prévoir un engagement de la responsabilité des dirigeants. Certes, un manquement, une erreur sont sanctionnés pénalement, mais les autorités de l'Agence qui ne vérifieraient pas et ne signaleraient pas un problème doivent également être sanctionnées.
Il y a donc une faille à combler. Je ne suis pas certain que la disposition à prévoir relève du pouvoir législatif, mais je retiens le message car nous ne pouvons nous permettre l'existence d'un vide juridique. Il s'agit de savoir qui sera chargé de la vérification en question et quel type de responsabilité sera engagé. Si elle l'est après coup, honnêtement, cela ne m'intéresse pas.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l'amendement n° 34 .
Il s'agit de compléter l'alinéa 13 par les mots : « ainsi que pour les associations et groupements les représentant ». Cet amendement de coordination est lié à un précédent.
(L'amendement n° 34 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
Lors de l'examen de l'article 2 relatif à la publication des avantages en nature ou en espèces procurés par les entreprises aux professionnels de santé, nous avons défendu la suppression du seuil au-delà duquel cette nouvelle obligation devrait s'appliquer. Nous considérons en effet qu'il n'y a pas d'avantages minimes, anodins.
Par conséquent, la référence à un éventuel seuil n'est pas pertinente. Le présent amendement propose donc que les sanctions en cas de manquement à l'obligation de transparence soient applicables sans référence à un seuil.
L'amendement porte sur l'alinéa 14 de l'article 3, qui modifie l'article L. 4163-2 du code de la santé publique portant sur l'interdiction pour les professions médicales mentionnées de recevoir des avantages en nature ou en espèces sous quelque forme que ce soit, de façon directe ou indirecte, de la part des entreprises du médicament.
La législation en vigueur ne prévoit pas de seuil. Nous avons longuement débattu hier de son éventuelle instauration, le ministre le fixant à un très bas niveau puisqu'il a évoqué le premier euro. Nous considérons que l'alinéa 14, prévoyant l'application de la sanction au-delà d'un certain seuil, constitue un recul par rapport au droit en vigueur. Nous sommes donc favorables à la suppression de cet alinéa.
Avis défavorable. Nous avons débattu de ce sujet hier, et notamment de la question du seuil. En tout état de cause, si seuil il devait y avoir, ce serait par un décret, par un acte réglementaire, qu'il devrait être fixé. En outre, par cohérence avec l'article 2, nous ne pouvons pas accepter cet amendement.
Je ne suis pas sûr que les auteurs de l'amendement soient satisfaits, mais je suis persuadé qu'à partir du moment où j'ai dit hier : « un ou dix euros », l'amendement est satisfait. Avis défavorable.
Je crois qu'on pinaille un peu, et même beaucoup.
Si vous participez à un congrès médical, de manière tout à fait officielle, et qu'un laboratoire vous donne un stylo bille,…
Ou un café !
…ou une pochette, ou un carnet, vous allez rentrer chez vous et vous allez déclarer au fisc : « J'ai reçu du laboratoire un stylo bille à son nom » ?
Je trouve que c'est pinailler. Ce n'est pas cela, l'enjeu ! Le problème, c'est quand un laboratoire vous soudoie, quand un laboratoire vous paie, quand un laboratoire vous prend dans ses filets. Mais ce n'est pas quand il vous donne un stylo bille !
Monsieur Mallot, vous voulez développer la question du stylo bille, je suppose ? (Sourires.)
Non, je souhaite que l'on soit plus précis, parce que je pense que notre collègue Debré s'égare. Hier, nous avons eu un échange sur la question de savoir s'il fallait fixer un seuil pour l'obligation de rendre publics les avantages. Ici, la question est différente. Il s'agit de l'interdiction des avantages en nature ou en espèces, sachant que la disposition proposée par le texte n'introduit pas une mesure nouvelle dans la législation, mais constitue un recul par rapport au droit existant, lequel ne prévoit pas de seuil.
M. le ministre l'a implicitement admis dans la réponse qu'il vient de nous donner. Il est favorable à ce qu'il n'y ait pas de seuil, ou à ce que le seuil soit proche de zéro. Ne renvoyons pas à un décret pour dire ce qui doit être dit, et qui est dit aujourd'hui, par la loi.
Il y aurait un double recul : d'abord, parce que l'on fixerait un seuil alors qu'il n'y en a pas actuellement pour interdire les avantages en question ; et ensuite, parce que l'on renverrait de la loi au décret la fixation dudit seuil. Double recul. Non !
(Les amendements identiques nos 35 et 210 ne sont pas adoptés.)
(L'article 3, amendé, est adopté.)
Nous en venons à l'examen de l'article 4.
Plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
Cet article prévoit la création de la nouvelle Agence. La mission parlementaire a clairement mis en évidence un dysfonctionnement grave de l'AFSSAPS. Sa réforme était donc nécessaire. Elle change de nom. Soit. Cela ne changera sans doute pas grand-chose. La réforme prévoit donc une réelle transparence dans les discussions et les décisions, réglemente les conflits d'intérêts, prévoit un nouveau conseil d'administration. Surtout, elle définit ses missions, essentiellement la délivrance de l'AMM – avec si possible des essais contre comparateur, ce que je propose –, fondée sur le rapport bénéfice-risque, mais aussi le suivi de l'AMM et la pharmacovigilance, qui est bien entendu essentielle.
Mais la question que je souhaite poser est celle de la nécessité de maintenir deux commissions, celle de l'Agence et la commission de la transparence, dépendant de la HAS. Nous avons trop de structures, trop d'agences, parfois redondantes. La commission de l'Agence fait appel à des experts pour étudier le rapport bénéfice-risque, mais le bénéfice attendu doit tenir compte du service médical rendu, voire de son amélioration. La commission de la transparence fait également appel à des experts. Elle se prononce sur le service médical rendu, pour en tirer la conclusion d'un éventuel remboursement. Mais comment se prononcer sur le SMR sans tenir compte du rapport bénéfice-risque ? Encore heureux si les décisions concordent !
On explique que les buts et les missions ne sont pas les mêmes. Je ne suis pas convaincu. Certes, la commission de la transparence permet à notre pays d'émettre un avis sur les produits ayant obtenu une AMM européenne, pour proposer ou non son remboursement. Mais je pense que nous aurions pu profiter de ce projet de loi pour simplifier notre administration, voire pour proposer – ce que je n'ai pas osé – de faire de l'Agence du médicament un service de la HAS.
Cet article 4 a en effet cet objet tout à fait révolutionnaire qui consiste à changer l'AFSSAPS en ANSM. Bon…Ce qui est important, ce n'est pas le sigle, c'est le contenu.
Je l'ai dit.
Simplement, j'ai deux questions, une mineure et une majeure, auxquelles je pense que M. le ministre répondra plus précisément, parce que les déclarations en commission sont ce qu'elles sont, mais c'est ici qu'on fait la loi. Les travaux parlementaires qui font référence sont ceux qui sont conduits en séance publique.
J'ai toujours un problème avec le mot « gouvernance ». C'est le mot que vous avez choisi pour le libellé du titre II : « Gouvernance des produits de santé ». J'ai ouvert mon dictionnaire, et je n'y ai pas trouvé la définition de ce mot. J'aimerais bien savoir, en outre, ce qu'est la gouvernance « des produits de santé ». J'imagine ce que peut être la réglementation des produits de santé, la législation s'appliquant aux produits de santé, mais la « gouvernance des produits de santé », je ne vois pas ce que c'est. On les fait marcher au pas ? On les aligne ? On les nourrit ? Comment on gouverne des produits de santé ? Je ne sais pas.
Deuxièmement, on transforme l'AFSSAPS en Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Cette Agence a des différences avec l'AFSSAPS, dont nous discuterons. Mais surtout, il y a un point auquel nous sommes très attachés et qui ne figure pas dans ce texte, je veux parler des modalités de financement de la nouvelle Agence. Actuellement, elle est financée par des taxes parafiscales prélevées directement, et qui « justifient », avec beaucoup de guillemets, les relations qu'elle entretient, y compris au sein de son conseil d'administration, avec les laboratoires pharmaceutiques. À l'avenir, j'ai cru comprendre que serait prévu un mode de financement plus « laïc », peut-être, via le budget de l'État – c'est le principe d'universalité –, de façon à neutraliser, en quelque sorte, les ressources financières en question. J'aimerais que M. le ministre nous précise un peu plus les modalités de financement de cette Agence. Cela nous paraît être tout à fait déterminant pour son avenir, son fonctionnement et sa crédibilité.
L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé devient donc l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Dont acte. Je suppose que vous allez faire appel à une agence de com pour changer de logo, sachant que cela ne va rien changer. On aurait pu garder l'AFSSAPS et décliner les améliorations qu'il était nécessaire de lui apporter. Je ferme la parenthèse.
Je voudrais insister sur le financement public. En février 2008, Mme Bachelot a été auditionnée par la MECSS. Quand on lui a fait remarquer qu'il y avait quelque chose de trouble dans le fait que le contrôleur soit, en tout ou partie, financé par le contrôlé, en l'occurrence par le prélèvement des taxes sur les dossiers traités pour l'industrie pharmaceutique, elle nous avait répondu qu'elle ne voyait pas où était le problème, et qu'il en était ainsi dans beaucoup d'autres domaines. Je vous renvoie au compte rendu de l'audition.
Êtes-vous capable, monsieur le ministre, de nous dire quel est aujourd'hui, au moment où nous parlons, le financement dont a besoin la nouvelle Agence pour fonctionner, au regard des taxes qui ont été prélevées sur les dossiers ? Parce qu'il ne faudrait pas que les laboratoires fassent du chantage : puisque nous ne pouvons plus passer par vous, et qu'il sera peut-être plus facile de passer par l'Agence européenne, eh bien vous n'aurez plus nos taxes, vous vous débrouillerez tout seuls. Oh, vous savez, monsieur le ministre, ce sont là des méthodes que l'on connaît. Je voudrais savoir, donc, quel est à ce jour le nombre de dossiers qui ont été traités, et au moins à combien s'est élevé le prélèvement des taxes.
C'est une vraie question, monsieur le ministre. Nous attendons de vous des garanties. L'examen du projet de loi de finances, c'est dans deux semaines. J'espère que les dispositions nécessaires ont été prises, au moins sur ce sujet-là.
Mon intervention portera sur les deux articles, 4 et 5, qui concernent cette nouvelle Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, qui doit en effet être différente de l'Agence précédente, faute de quoi elle risquerait de tomber dans les mêmes travers.
Son nom est différent. Son fonctionnement sera quelque peu différent. Il faut aussi que sa composition soit différente. S'agissant de son fonctionnement et de sa composition, je voudrais avoir quelques garanties. M. le ministre disait hier que beaucoup de choses pourraient être corrigées par rapport au texte précédent. Je crois qu'il est indispensable que l'on puisse avoir l'engagement, dans le texte lui-même, que le conseil d'administration ne comprendra pas de représentants de l'industrie pharmaceutique ou des entreprises qui fournissent les produits de santé. Car alors, ils seraient, comme dans le passé, juges et parties. Et l'on voit très bien les décisions qui seraient prises.
Autant nous pouvons comprendre que des gens qui, dans le passé, ont pu travailler pour les uns ou les autres, puissent, à condition de déclarer leurs conflits d'intérêts, être membres de ce conseil d'administration, autant on ne peut pas imaginer qu'un administrateur actuel soit en même temps impliqué dans une industrie de santé. Je crois que cela doit absolument être précisé dans le texte de loi.
Cet article, qui se veut emblématique de ce projet de loi, me semble porter essentiellement sur des questions sémantiques. Je rejoins tout à fait Jean Mallot pour dire que le mot de « gouvernance » est totalement inappoprié. Laisser penser que cette Agence va, demain, diriger la politique du médicament, c'est une erreur. Au mieux, et nous l'espérons, elle aura une fonction de régulation, de contrôle, de vérification de la réglementation et de la qualité des produits. Mais elle ne gouvernera en rien la politique du médicament.
Le changement de nom, on peut toujours y être favorable. Encore que. On voit bien qu'il y a là un effet de communication plus qu'une réalité. Et je voudrais insister sur cette dimension de la communication. Autant nous avons eu l'occasion, à de multiples reprises, de nous exprimer sur les insuffisances de l'AFSSAPS, et notamment sur les conflits d'intérêts, sujet que nous avions abordé à plusieurs reprises au cours des dernières années pour demander au Gouvernement et à cette majorité de mettre en oeuvre le fameux Sunshine Act, autant il serait tout à fait dommageable de laisser croire que la crise sanitaire à laquelle nous avons à faire face serait de la responsabilité de l'AFSSAPS, même si celle-ci a eu des insuffisances, voire des responsabilités dans cette affaire.
C'est là un débat très important. Personne ne peut croire que, dans cette affaire, la responsabilité principale n'incombe pas au laboratoire Servier. Et c'est bien sur ce point que nous attendons le Gouvernement. Comment va-t-il agir sur le laboratoire Servier ? Et qu'il ne se cache pas derrière un discours très général pour essayer de faire retomber sur une administration qui a pu avoir ses insuffisances la responsabilité de troubles majeurs qui n'existent, pour l'essentiel, que dans notre pays, non pas tant parce que l'Agence n'était pas au niveau, mais parce que nous avions une entreprise particulièrement délinquante.
Je sais bien que j'ai deux minutes, mais puisque mes collègues font un peu de bruit, vous allez peut-être, monsieur le président, dans votre grande sagesse, me donner dix secondes de plus. De toute façon, vous présidez remarquablement nos séances, avant de présider peut-être, un jour, notre assemblée. (Sourires.)
S'agissant de la nouvelle Agence, j'espère qu'elle sera un peu plus proche des différents acteurs que, par exemple, l'ARS, qui me donne l'impression d'être partie à des milliers de kilomètres. Il me semble qu'elle est lointaine. Et je ne suis pas le seul à avoir ce sentiment. Il n'y a pas longtemps, j'ai fait « la révision des 56 000 » (Sourires)…
…et j'ai un peu rencontré l'ensemble des professions médicales. Le laboratoire qui m'a examiné, par exemple, se sentait très isolé et très seul, comme s'il ne faisait pas partie du monde médical. Ensuite, j'ai dû visiter un laboratoire de santé, qui m'a dit : « Moi, je ne compte pas. Je ne compte que pour les mauvais coups, c'est-à-dire quand il y a un scandale. Mais en dehors de cela, on ne fait pas attention à moi. »
Je connais bien M. Bertrand, un très bon ministre qui suit de très près tous les problèmes de santé, je voulais donc lui signaler que je perçois un éclatement considérable de tous ces milieux.
J'ai également rendu visite à un médecin, âgé de cinquante ans, qui venait de faire la pyramide des âges du département. La moitié des médecins vont partir dans dix ans, un tiers dans quinze ans. Il ne sait pas qui pourra nous soigner, car il restera moins de médecins que de curés !
Je souhaitais simplement porter ces quelques impressions de non-inscrit à la sagesse de l'Assemblée que vous présidez si bien, monsieur le président.
Merci monsieur Lassalle, aussi sympathiques que soient vos commentaires sur la présidence, vous pouvez vous en abstenir.
La parole est à M. Bernard Debré.
Cet article 4 est très important, et je souhaite répondre à M. Le Guen. Il est vrai que les laboratoires Servier ont été très largement fautifs, et je n'ose pas utiliser de termes plus forts encore, la justice tranchera.
Néanmoins, le médicament que les laboratoires Servier ont mis sur le marché a été accepté, ce qui pose la question des conflits d'intérêts. Cela a fait l'objet de l'article 1er, que nous avons amélioré grâce à l'accord du ministre sur certains amendements, et qui a bien réglé la question.
Il était fondamental que l'on supprime ces liens d'intérêts entre le laboratoire fautif et l'AFSSAPS, non moins fautive.
Nous allons maintenant nous pencher sur l'AFSSAPS, en changeant son nom. Certains diront qu'il s'agit d'un épiphénomène, peu importe, il était nécessaire de le faire pour des raisons symboliques. La question est de savoir ce que l'on veut faire de cette nouvelle agence.
Cette nouvelle agence devra d'abord s'occuper des nouvelles autorisations de mise sur le marché. Entendons-nous bien : plus de 90 % des nouvelles autorisations de mise sur le marché relèvent de l'agence européenne. Il faudra une adéquation entre notre volonté de transformer la procédure de mise sur le marché des médicaments, et la réglementation qui sera adoptée par l'Union européenne, afin que nous ne nous trouvions pas coincés entre deux chaises, entre notre bonne volonté affichée et la logique de compromis à vingt-sept qui prévaut au sein de l'Union européenne. Nous serions alors face à des difficultés, voire des conflits d'intérêts, au niveau européen.
Par ailleurs, il est évident que lorsque l'on met un produit sur le marché, il faut réaliser des études. Nous reparlerons des études tout à l'heure, jusqu'à présent elles étaient réalisées contre placebo : c'est inacceptable. On prétendait même que l'on pouvait faire des études visant à démontrer que le nouveau produit n'était pas pire que les produits existants. C'est absurde ! Il faut montrer que ces produits sont meilleurs que les produits existants, et qu'ils apportent quelque chose, non seulement par rapport aux produits, mais aussi par rapport aux traitements existants. Souvent, les évaluations sont réalisées par rapport aux produits de la même famille, de la même classe thérapeutique. Il faut avoir le courage de dire que nous allons faire des évaluations qui nous permettront de voir quelle est l'amélioration apportée par rapport au traitement, même si l'on utilise des produits d'autres familles.
Et puis, cet article 4 devra aborder la question de l'Institut national de la transfusion sanguine, et du sang, afin de ne pas retomber dans le problème du sang contaminé. Il y avait d'un côté l'Établissement français du sang, et de l'autre l'Institut national de la transfusion sanguine. Il faut que ces deux structures soient séparées pour que l'on ne retombe pas dans les errements anciens qui ont provoqué les problèmes du sang contaminé.
Cet article, tel qu'il nous est proposé, est déjà très intéressant, et nous allons pouvoir l'améliorer grâce aux amendements présentés, dont certains viennent du Gouvernement. Nous aurons alors un article fondamental de ce futur texte de loi.
Je ne vais pas m'attarder sur la discussion sémantique sur le terme de gouvernance. En tout état de cause, il y a un problème de direction, qui tient aux structures et à la façon dont les divers cadres chargés des secteurs d'activité de l'agence, quel que soit son nom, la font fonctionner.
Le problème de direction est tel que le ministre a changé la direction de l'AFSSAPS, avant même que ne soit créée la nouvelle agence. Le précédent directeur général, M. Marimbert, a été remercié et remplacé par M. Maraninchi. Il est évident que la direction de l'agence est capitale, et nous avons vu au cours des différentes auditions sur la question que la façon dont l'agence avait dysfonctionné tenait beaucoup, au-delà des problèmes de connivence ou de corruption, à la façon dont l'agence était dirigée.
Je ne pense pas que le fait d'avoir remplacé en 2004 un directeur par un autre, M. Marimbert, ait amélioré ce fonctionnement et cette direction. Et il faut admettre que M. Marimbert a été remercié, puisqu'il a été nommé secrétaire général du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. Or, je rappelle que les laboratoires Servier sont également très présents dans la recherche : le président de Medicen, l'un des principaux pôles de recherche en l'Île-de-France dans le domaine sanitaire, est un cadre de Servier, et son secrétariat fonctionne grâce à du personnel mis à disposition par Servier. L'enseignement supérieur, nous en parlions hier soir, pose aussi la question de la façon dont les laboratoires accompagnent, avant même le diplôme, les étudiants en médecine, avant d'essayer de les accompagner par la formation médicale continue. Cette présence va jusqu'à l'Académie de médecine, dont le bulletin trimestriel est publié grâce à l'obligeance des laboratoires Servier.
Ce problème de direction est donc très important. Mais il faut également des moyens. L'an dernier, nous avons observé un fléchissement des moyens, du fait de la disparition de la subvention directe d'État : l'agence ne fonctionnait plus que grâce aux prestations de service réalisées pour les entreprises. Le nombre d'emplois a également diminué. Cette année, l'agence a réalisé des projections incluant des moyens supplémentaires, notamment à destination des centres régionaux de pharmacovigilance, qui travailleront ainsi de manière autonome sur des crédits publics.
Monsieur le ministre, vous avez annoncé une réforme devant la commission des comptes de la sécurité sociale, j'imagine que vous allez nous la confirmer.
Un autre aspect concerne la taxation forfaitaire qui est opérée au moment des réévaluations quinquennales du rapport bénéfice-risque des médicaments. Cette taxation forfaitaire est fixée à un niveau ridicule. J'ai rencontré la direction de l'AFSSAPS pour préparer le budget de l'an prochain, et elle me disait que la réévaluation quinquennale coûte plus cher à l'Agence que le montant de cette taxation, autour de 1 500 euros, que l'on pourrait facilement quintupler pour apporter des ressources supplémentaires à l'Agence.
Sur ces points, j'aimerais que le ministre nous éclaire sur ses intentions.
Monsieur le ministre, ce que je vis cet après-midi est un peu irréaliste. Nous sommes à peu près une cinquantaine de députés, un ministre de la République, vingt fonctionnaires, cent de nos concitoyens, pour essayer d'encadrer la faute d'un laboratoire.
Cette faute n'est pas la faute de l'ensemble de l'industrie pharmaceutique, qui a apporté de grands progrès thérapeutiques pour nos concitoyens. Il ne s'agit pas de faire ici le procès de l'industrie pharmaceutique, comme a voulu le faire notre collègue Le Guen. J'étais pourtant d'accord avec le début de son intervention, mais pas avec le ton doctrinaire qu'il a pris à la fin, pour exonérer l'AFSSAPS, qui a fait des erreurs et qui n'a pas fait son travail pendant plus de trente ans. C'est la justice qui est chargée de condamner, nous ne devons pas nous y substituer.
Nous devions préciser la problématique des conflits d'intérêts, nous l'avons fait à l'article 1er, et c'est une bonne chose. Mais, par un certain nombre de dispositions, nous allons faire courir un certain nombre de risques en matière d'innovations thérapeutiques, et à toute une profession qui fait honnêtement son travail ; je pense aux visiteurs pharmaceutiques. La pantalonnade des visites de groupe, c'est l'expression qui convient, n'a pu être imaginée que par quelques énergumènes qui, visiblement, ne connaissent pas la vraie vie.
Je souhaite que l'on en revienne à la raison, monsieur le ministre, je connais votre bon sens, et je pense que votre autorité doit pouvoir faire fonctionner cette agence de manière efficace. Les contrôles que l'on est en droit d'exiger peuvent être réalisés sans toutes ces fioritures qui font perdre du temps à tout le monde.
C'est vous qui nous faites perdre du temps : cet article ne porte pas sur les visites médicales !
S'il suffisait de changer le nom des organismes pour en améliorer le fonctionnement, pour leur conférer de nouvelles vertus, alors il faudrait changer le nom de l'AFSSAPS. C'est maintenant un nom bien installé dans le paysage institutionnel, je propose donc de le conserver.
Nous allons complètement refonder le fonctionnement de cet organisme, qui n'aura plus rien à voir avec l'AFSSAPS d'hier. De plus, la nouvelle dénomination proposée, « Agence nationale de la sécurité du médicament », ignore un autre pan de l'activité cet organisme : s'occuper du dispositif médical. Le fait de conserver le nom permet d'englober dans cette dénomination l'ensemble des produits dont la régulation sera confiée à cette agence.
Enfin, dans la période budgétaire que nous connaissons, qui impose de réaliser des économies, c'est souvent sur les économies de communication que nous pouvons porter le premier effort. Changer le nom de l'AFSSAPS induira des coûts de communication, un changement de logo, nous pourrions nous éviter ces dépenses et personne ne vous fera grief, monsieur le ministre, de garder le nom de l'AFSSAPS. Nous serons tous vous remercier de votre engagement à changer la politique du médicament afin de la rendre plus sûre, au service des Français.
L'important dans le débat, ce n'est pas la forme, mais le fond. Cet article 4 créé cette nouvelle agence, l'Agence nationale de la sécurité des médicaments et des produits de santé, qui voit ses missions renforcées par des pouvoirs de sanction et qui aura la possibilité, via le groupement d'intérêt public qui sera créé, de mener des études de pharmacovigilance et de pharmacoépidémiologie, et d'accéder aux données de la Caisse nationale d'assurance maladie. Cette nouvelle agence va fonctionner et voir ses missions élargies. C'est là le principal, et non pas le nom de l'agence et la partie cosmétique.
Monsieur Bur, l'agence prend le nom d'Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé. Parmi les produits de santé, on vise également les dispositifs médicaux. Le nouveau nom de cette agence englobe bien l'ensemble des produits de santé – dispositif et médicaments.
Avis défavorable.
J'ai entendu les propos de M. Bur. Franchement, ce n'est pas pour faire bien dans le paysage. Mais je pense que si l'on change en profondeur le fonctionnement de l'agence, on ne peut pas garder son nom. De plus, pardonnez-moi, mais le nom de l'agence est associé aujourd'hui au scandale du Mediator. C'est tout.
C'est la police du médicament incarnée par l'AFFSAPS qui a été défaillante. Clairement, nous ne sommes pas dans une opération de « com », mais dans une opération qui découle de ce changement. Si on changeait juste le nom, sans rien modifier à l'intérieur, ce serait stupide.
Monsieur Bur, j'ai bien entendu votre message sur le coût. C'est vrai. Nous allons consulter des agences. Il y a une enveloppe de 150 000, 300 000 euros : c'est beaucoup trop.
Je ne vois pas pourquoi on styliserait un logo. Il faut juste mettre « Agence du médicament », je ne suis pas très doué, mais je peux le faire. Il n'est pas nécessaire de dépenser des sommes folles. On changera aussi, au fur et à mesure, un certain nombre de choses. Mais je pense que cela a du sens, car cela permet d'aller jusqu'au bout de la logique. Nous sommes sur la sécurité du médicament – je l'avais indiqué lors des assises du médicament – et je veux vraiment que figurent les mots « sécurité et médicament », ce qui est le coeur du sujet.
Je n'oublie pas les autres produits de santé, mais je pense que cela ira de soit si le changement est en profondeur. Il ne s'agit pas de ripoliner le nom et de ne rien faire.
Si l'on fait un changement en profondeur, il ne faut plus que subsiste dans l'esprit le nom de l'AFSSAPS, qui est, pour moi, trop connoté par le scandale du Mediator car l'agence n'a pas été à la hauteur de ses responsabilités et de la confiance qu'on lui témoignait.
Avis défavorable.
Une fois encore, Yves Bur parle avec bon sens et un grand sérieux intellectuel. Il est absolument évident que derrière tout cela il y a essentiellement un élément de communication.
M. Roubaud ne m'a pas entendu. Il fait l'amalgame entre l'ensemble des industries du médicament et le laboratoire Servier. Le Gouvernement met plus l'accent sur les agences que sur l'industrie et, en l'occurrence, sur un industriel, dont on parle le moins possible, alors qu'il défraye la chronique tous les jours. Moins on parle de cet industriel, mieux ça vaut ! Et je ne parle pas des éléments de justice, mais de la gouvernance de cette entreprise. C'est bien là le sujet et il devrait nous intéresser. Mais il est passé sous silence au profit d'un halo vague où l'on attaque l'industrie du médicament, à tort ou à raison. Sans doute l'industrie du médicament a-t-elle abusé, d'une façon générale, d'un certain nombre de choses – personne ne vient aujourd'hui dire le contraire. Il est dommage qu'elle n'ait pas eu l'idée de faire le Sunshine Act elle-même.
C'est bien que nous l'ayons réclamé ici depuis des années, et c'est bien que le Gouvernement avance dans ce sens.
Vous avez raison, nous avons fait l'AFSSAPS au moment où il se passait encore des choses bien pires et où Servier pouvait agir encore plus correctement, comme on l'a vu récemment encore dans certains documents. La création de cette agence a représenté un progrès considérable et c'est ce que vous voulez faire oublier aujourd'hui en plaquant un halo très général et en expliquant qu'il y avait un problème de régulation – il y en avait un –, en expliquant que c'est le problème de l'industrie pharmaceutique – et il y avait des problèmes d'industrie pharmaceutique – mais en ne mettant pas le doigt sur la responsabilité particulière du laboratoire Servier.
Je comprends parfaitement que cela vous gêne, …
…mais nous allons parler du laboratoire Servier, je vous l'assure. Les liens particuliers existant autour de ce laboratoire posent évidemment un problème, et c'est à tort que l'on met en cause toute l'industrie du médicament pour essayer de disculper Servier. C'est à tort que l'on met en cause une agence du médicament qui a constitué un progrès, même insuffisant. Aujourd'hui, le texte dont nous débattons a vocation à oublier la responsabilité particulière du laboratoire Servier.
Je crois que nous nous égarons. Si l'on veut, on peut se lancer des noms d'oiseaux. Si vous voulez que je vous rappelle l'affaire du sang contaminé, je peux le faire.
Nous ne sommes pas là pour nous rappeler des histoires anciennes, qui ne sont pas très glorieuses, mais pour regarder devant nous.
Certes, un certain nombre d'entre nous ont stigmatisé Servier. Mais cette loi n'est pas forcément et uniquement une loi anti-Servier. Ce texte vise à assainir la situation en règle générale. Il permettra, d'une part, d'éviter les conflits d'intérêts et, d'autre part, une meilleure gouvernance. Cette loi sera pour les Français, les médecins et pour ceux qui sont malades. Arrêtez de stigmatiser en permanence le Gouvernement ! Vous portez autant de responsabilités que les autres.
Si vous voulez que l'on s'amuse et que l'on continue à s'envoyer des noms d'oiseaux, on peut continuer, mais cela ne fera pas avancer les choses.
Il faut changer le nom de l'AFSSAPS, car il a été entaché par un certain nombre de problèmes graves. Il ne s'agit pas de l'ossature de ce texte, mais simplement d'un véhicule parce qu'à l'intérieur de cette nouvelle agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé on prévoira ce qu'il faut pour que les problèmes ne se renouvellent pas.
Je pense que l'amendement de M. Bur est opportun, nous l'avons défendu.
Ce changement de nom, c'est évident, n'a en soi aucun intérêt, ce qui compte c'est le contenu. Je vais vous en donner une illustration. L'année prochaine, nous allons élire un Président de la République ou une Présidente de la République. Nous sommes de ceux qui pensent qu'il faut en changer. Le nom et la politique suivie seront changés. Mais cela s'appellera toujours la Présidence de la République. La Constitution n'est pas changée.
Changer le nom de l'agence ne nous intéresse pas, mais la politique qu'elle conduit et les règles du jeu qu'elle fait respecter.
Vous allez dépenser de l'argent pour changer le nom, le logo, le papier à en-tête, la communication, il y aura des grands encarts dans la presse. Les personnels qui y travaillent dépenseront une énergie folle en réunions, pour savoir si l'on va mettre les bureaux à tel endroit, chercher de nouveaux locaux – nous connaissons bien ces problèmes.
Le sujet n'est pas là. Il faut les faire travailler sur de nouvelles bases, avec une nouvelle règle du jeu, avec une nouvelle réglementation, pour éviter que des affaires comme celle de Servier ne se reproduisent.
Monsieur Mallot, la SFIO s'est appellée le PS. Vous avez changé de nom, vous n'avez pas changé de contenu.
Il est vrai que le parti communiste n'a pas changé de nom et n'a pas changé de contenu.
Depuis hier soir, nos débats avec l'opposition avaient été sereins, constructifs. Si certains de nos collègues sont venus cet après-midi pour faire des effets de manche et essayer de dérouter le débat, il convient de revenir au coeur de nos débats.
Aujourd'hui, nous débattons d'un projet de loi qui va dans le sens de l'intérêt général, de la sécurité sanitaire. Il faut que l'on cesse de parler du nom de l'agence. L'AFSSAPS, comme l'a rappelé Bernard Debré, est liée au scandale du Mediator. Le changement de nom fait partie de ceux qui sont attendus par l'ensemble des acteurs du médicament. Je vous en prie, mes chers collègues, reprenons nos débats dans la sérénité, afin qu'ils soient constructifs.
Je pense que ce texte intéresse les Français. S'ils suivent le déroulement de cette séance, je pense qu'il vaut mieux que l'aparté à laquelle nous venons d'assister ne reste pas trop dans les mémoires.
Je suis très heureux de retrouver Jean-Marie Le Guen inchangé, car cela faisait un petit moment qu'il n'avait pas siégé dans cet hémicycle. C'est bien sûr un compliment.
Ayons juste un peu de mémoire ! Certains acteurs ici ont tout suivi de A jusqu'à Z. Il me semble que, dans ce dossier, la responsabilité de la défaillance de la politique du médicament a toujours été pointée. Et l'on m'a même reproché d'être sorti de mon rôle en pointant la responsabilité première et directe, début janvier, du laboratoire Servier. Il ne s'agit pas aujourd'hui de mettre un rideau de fumée, en confondant tout le monde.
J'ai dit, à différents moments, que la façon dont le LEM avait pris ses responsabilités, ses distances, vis-à-vis du laboratoire Servier était nécessaire
Mais pour le reste, il ne s'agit pas, en parlant fort, de laisser croire que l'on cherche quoi que ce soit.
Responsabilité première et directe : Servier. Ensuite seront cherchées d'autres responsabilités, mais, si vous le permettez, personne ne sera ni procureur ni juge dans cet hémicycle, surtout au moment où une action judiciaire est engagée. Les responsabilités précises seront traitées par qui de droit, c'est-à-dire par la justice. Des questions ont été posées à certains moments : « N'y aura pas un déni de justice ? » Des affirmations ont été avancées : « Cela va mettre des années et des années. » On s'aperçoit heureusement que tel n'est pas le cas.
On nous avait dit la même chose pour le Fonds d'indemnisation. Vous avez voté ce texte à l'unanimité – je ne vous en remercierai jamais assez.
Sur ce texte, nous sommes tous, en tant que législateur, face à nos responsabilités devant les Français. Si nos débats pouvaient garder la même tonalité qu'au départ, ce serait beaucoup mieux pour les Français.
Je tiens à être clair. J'ai laissé M. Debré s'exprimer quatre minutes lors de sa première intervention, puis j'ai laissé le même temps à M. Le Guen.
Nous allons revenir à des interventions de deux minutes, sinon il y aura des dérives et nos débats ne tiendront absolument pas, compte tenu du nombre d'amendements, dans l'après-midi. Je vous rappelle qu'un texte beaucoup plus long doit être examiné ensuite. Il faut donc que, les uns et les autres, vous limitiez, par correction, votre expression.
(L'amendement n° 59 n'est pas adopté.)
Je demande une suspension de séance de séance pour réunir mon groupe, puisqu'un amendement du Gouvernement deux fois rectifié vient de nous être distribué. Il correspond à un des amendements que nous avons déposés. Nous aimerions pouvoir en discuter.
Rappel au règlement
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures dix.)
Je suis saisi d'un amendement n° 36 .
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Par cet amendement, nous proposons de compléter l'alinéa 3 de l'article 4 en précisant que l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé doit être placée sous la tutelle du ministre de la santé.
L'Agence reste investie d'une large délégation de puissance publique l'amenant, au nom de l'État, à prendre des décisions importantes. M. le ministre lui-même avait déclaré ne pas être favorable à l'autonomie complète des agences. Il faut, disait-il, non seulement une tutelle, mais aussi un avis transversal.
Pour toutes ces raisons, nous pensons qu'il est légitime de réintroduire explicitement la référence à la tutelle de l'État. J'indique par ailleurs que cet amendement a été adopté par la commission dans le cadre de l'article 88.
Même avis.
(L'amendement n° 36 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 91 .
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
Lors de la discussion générale et de mon intervention sur l'article 4, je vous ai interpellé, monsieur le ministre, sur le regroupement de la commission de la transparence dépendant de l'HAS et l'Agence du médicament. Je regrette que vous n'ayez pas profité de ce projet de loi pour regrouper ces deux commissions, ce qui serait allé dans le sens d'une simplification.
Certes, l'Europe existe et beaucoup d'autorisations de mise sur le marché sont accordées par l'Agence européenne. L'intérêt de la commission de la transparence consiste à permettre de donner son avis sur le remboursement ou non des produits de santé. Cependant, chacune fait appel à des experts. Chacune prend en compte soit le bénifice-risque, soit le service médical rendu. Or il faudrait tenir compte des deux.
Je déplore que nous n'ayons pas une seule agence permettant à notre pays de se prononcer sur le remboursement ou non des médicaments. J'avais même imaginé que l'on puisse tout regrouper sous la Haute autorité de santé, mais ce débat n'a malheureusement pas eu lieu.
Je regrette que l'autorisation de mise sur le marché relève essentiellement d'études comparées avec les placebos. Il faudrait proposer des comparaisons avec les médicaments existants et si possible les meilleurs, voire les stratégies thérapeutiques.
J'ai noté, monsieur le ministre, que vous proposerez un amendement. Je sais que la directive pose problème, mais elle n'empêche pas, me semble-t-il, de faire appel à des comparateurs plutôt qu'à des placebos.
Avis défavorable.
En répondant à M. Préel, je réponds également à Mme Lemorton sur la question de l'eurocompatibilité des évaluations comparatives. Certes, nous en avons largement discuté hier, mais il semble que je me sois mal fait comprendre, je tiens donc à apporter quelques précisions.
La directive 200183CE dispose que « d'une manière générale, les essais cliniques doivent être effectués sous forme d'essais contrôlés si possible randomisés et le cas échéant par opposition à un placebo et par opposition à un médicament dont la valeur thérapeutique est déjà communément connue : toute autre manière de procéder doit être justifiée. Le traitement attribué aux groupes de contrôle peut varier selon le cas et dépend aussi des considérations éthiques et du domaine thérapeutique. Ainsi, il peut dans certains cas être plus pertinent de comparer l'efficacité d'un nouveau médicament à celle d'un médicament dont la valeur thérapeutique est déjà communément connue plutôt qu'à l'effet d'un placebo. »
La directive précise que les essais cliniques doivent être effectués sous forme d'essais contrôlés « si possible » randomisés. Cette disposition ne permet donc pas d'imposer systématiquement la réalisation d'essais versus comparateur sous peine de sanctions. En revanche, il est possible de les demander.
Nous pouvons prévoir que l'ANSM puisse demander les études comparatives. Si l'entreprise refuse de les communiquer, elle devra alors les justifier. Dans ce cas, je serai favorable à l'amendement du Gouvernement qui viendra en discussion.
Je souhaiterais que M. Préel retire son amendement au profit de l'amendement n° 277 du Gouvernement, qui répond à sa demande.
Pour ma part, je ne suis pas favorable à la création d'une seule commission, même si les professeurs Debré et Even avaient défendu cette idée.
Je demanderai à M. Préel de retirer son amendement au profit de l'amendement n° 277 du Gouvernement, qui me semble répondre à sa demande.
J'aimerais revenir sur la possibilité de créer une commission unique. Bernard Debré et le professeur Even ont défendu cette idée, j'ai eu l'occasion d'échanger avec eux sur ce sujet : je n'y suis pas favorable.
La commission de la transparence comprend aussi une dimension économique. Comment être certain que, dans une commission unique, la sécurité du produit sera placée au-dessus de toute autre considération et qu'elle ne sera pas amoindrie ? Par ailleurs, dans notre pays, une vaste confusion est faite entre l'efficacité d'un médicament et son éventuelle dangerosité et je crains qu'une commission unique ne permette pas d'aller vers plus de clarification.
Deuxième élément : avec les AMM européennes, tant que le changement au niveau européen que j'appelle de mes voeux n'aura pas lieu, comment être certain de pouvoir faire la part des choses dans le cadre d'une commission unique ? Je ne crois pas que cela permette de disposer au niveau national de davantage de marges de manoeuvre par rapport aux décisions européennes.
J'ai beaucoup réfléchi à cette idée de commission unique, car elle va dans le sens de la simplification. Je ne l'ai pas retenue, mais je suis persuadé qu'il est nécessaire d'établir une coordination fonctionnelle entre les deux commissions qui, aujourd'hui, suivent des logiques, je ne dirai pas divergentes, mais différentes. Nous devons imaginer autre chose, c'est certain. Pour autant, la fusion représente plus de risques qu'on ne le pense.
Monsieur Préel, dans votre amendement, vous précisez que l'évaluation doit s'effectuer en comparaison avec les produits existants. Vous restez donc toujours dans le cadre du médicament. Or, l'on sait que trop de médicaments sont consommés dans notre pays. Par ailleurs, La Haute autorité de santé vient de commencer un gros travail de comparaisons thérapeutiques avec des stratégies non médicamenteuses – on sait, par exemple, que les anti-dépresseurs ne sont pas forcément efficaces pour les dépressions légères ou les débuts de dépression.
J'adhère à l'esprit de votre amendement, mais regrette qu'il reste dans les limites du domaine du médicament.
Nous parlons de l'agence du médicament. Il s'agit bien de comparer les nouveaux médicaments avec ceux qui existent.
Je ne vois pas comment demain on pourra comparer un médicament avec une psychothérapie, par exemple. Ce sont deux logiques complètement différentes et ce n'est pas à ce niveau-là qu'on peut procéder à de telles comparaisons.
Enfin, monsieur le président, je vous précise qu'à la demande de M. le ministre et pour lui être agréable, je retire mon amendement n° 91 au profit de l'amendement du Gouvernement qui me paraît intéressant.
(L'amendement n° 91 est retiré.)
Je suis saisi d'un amendement n° 48 .
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Notre amendement vise à compléter l'alinéa 4 de l'article 4, qui concerne l'évaluation des bénéfices et des risques des médicaments par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.
Le texte actuel présente plusieurs écueils.
Tout d'abord, il précise que les études sont demandées par l'agence aux titulaires de l'autorisation, lesquels ne sont pas indépendants : le laboratoire devra procéder à des tests sur ses propres produits.
Ensuite, le texte ne prévoit pas de périodicité pour la réévaluation de l'efficacité des produits.
Enfin, il ne précise pas que de nouvelles études doivent être mises en place pour vérifier que la balance bénéfices-risques du médicament reste favorable.
Nous proposons donc de rédiger ainsi la fin de l'alinéa 4 pour préciser que l'agence effectue « tous les trois ans, sans préjudice des dispositions des articles L. 5121-9-3 et L. 5121-8-1, des réévaluations des bénéfices et des risques basées, lorsqu'elles sont disponibles, sur de nouvelles études scientifiques ».
Cela permet donc de répondre aux trois écueils évoqués concernant l'indépendance, la périodicité des réévaluations et la mise en place de nouvelles études.
Madame Fraysse, votre amendement est restrictif. L'article 7 du projet de loi prévoit que la réévaluation des médicaments présentant un risque particulier pour le ou les patients peut intervenir à tout moment et pas seulement tous les trois ans comme vous le préconisez.
De plus, les textes prévoient déjà qu'une réévaluation peut être effectuée tous les six mois, à la demande de l'agence, si elle le souhaite.
Votre amendement est en effet déjà satisfait. Notre texte propose un processus continu même si, s'agissant de la pharmacologie, il est bien indiqué qu'il y a des rendez-vous tous les trois ans, voire moins – je vous renvoie au cas du Protelos qui fait l'objet de réévaluation tous les six mois.
Plutôt qu'une opération très lourde tous les trois ans, nous préférons une réévaluation continue.
Je ne peux donc donner un avis favorable à votre amendement qui me semble en retrait par rapport à ce que nous proposons.
Je sais bien que lorsque certains médicaments posent problème, des réévaluations beaucoup plus fréquentes sont prévues et je m'en félicite.
Pour ma part, je vise des médicaments qui ne répondent pas à ces critères, soit la majeure partie des médicaments. C'est un dispositif, il est vrai, un peu lourd, mais si l'on veut protéger la santé de nos concitoyens, il faut mettre en place des dispositifs efficaces.
Madame Fraysse, je suis très surpris que vous demandiez à ce que les laboratoires ne puissent pas mener d'études sur leurs propres produits lorsqu'ils présentent une nouvelle molécule. On ne peut pas faire autrement !
L'État ne peut pas faire le travail de recherche des laboratoires : ce n'est pas possible !
Vous appelez de vos voeux une évaluation tous les trois ans. Mais encore faut-il qu'il y ait une alerte émanant de la pharmacovigilance. Sinon, pourquoi faire des études si un médicament remplit pleinement son rôle et ne pose pas problème ? Vous savez bien que tous les médicaments sont initialement évalués par rapport aux médicaments existants et aux traitements antérieurs, qu'ils soient médicamenteux ou pas, et que, en cas de doute, ils fassent l'objet d'une surveillance continue.
Je ne vois pas l'intérêt d'une approche si restrictive.
(L'amendement n° 48 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 263 .
La parole est à M. Bernard Debré.
Cet amendement, je l'ai évoqué lors de mon intervention sur l'article 2. Il faut que l'on puisse évaluer les nouveaux médicaments par rapport aux médicaments de leur classe thérapeutique mais aussi par rapport aux traitements antérieurs qui peuvent être meilleurs. Le nouveau médicament doit apporter une amélioration du service rendu.
Cela dit, je vais retirer cet amendement au profit de l'amendement du Gouvernement, qui est suffisant et qui me satisfait.
À l'occasion de la discussion des amendements précédents, il a été beaucoup question du suivi des effets des médicaments et des dispositifs d'alerte. Or, si mes informations sont bonnes, les caisses primaires d'assurance maladie écrasent au bout de cinq ans les données des patients. Comment, dans ces conditions, mener des recherches sur la durée en l'absence de données sur les prescriptions au-delà de cinq ans ? Certes, on peut faire appel aux archives des médecins. Mais on va se heurter à de nombreuses difficultés du fait des départs à la retraite massifs à venir.
Je sais qu'une telle question est d'ordre réglementaire, et non législatif. Mais j'aimerais avoir une précision sur le projet de porter à dix ans la durée d'archivage des données personnelles par les caisses primaires d'assurance maladie afin de savoir si les évaluations que nous évoquons seront possibles dans les années à venir.
L'amendement ayant été retiré, j'imagine que vous donnerez votre avis lors de la discussion de l'amendement du Gouvernement, monsieur le rapporteur ?
J'aimerais simplement revenir sur l'amendement de Mme Fraysse, monsieur le président.
Il faut savoir qu'en commission, nous avons voté un amendement qui prévoit que l'agence remettra un bilan annuel de l'ensemble de la réévaluation de la pharmacopée qu'elle aura effectuée. Nous disposerons ainsi d'informations supplémentaires.
(L'amendement n° 263 est retiré.)
Je suis saisi d'un amendement n° 211 .
La parole est à Mme Catherine Lemorton.
Nos amendements portent sur le même sujet : il s'agit d'examiner dans quelles conditions on peut mettre en toute sécurité des médicaments sur le marché en les comparant à l'existant, et quand je parle de l'existant, je fais référence aux stratégies thérapeutiques, qu'elles soient médicamenteuses ou non.
Quand j'entends M. Préel affirmer que si une thérapie n'est pas médicamenteuse, c'est qu'elle n'a pas d'efficacité, j'ai envie de lui dire d'aller voir la Haute autorité de santé pour qu'elle arrête tout de suite les investigations qu'elle est en train de mener …
Je n'ai jamais dit une chose pareille ! Vous m'avez mal entendu et mal compris !
Vous avez en tout cas laissé entendre que ça ne marchait pas.
J'aimerais avoir une précision. À l'alinéa 4 de l'article 4, il est indiqué que « l'agence procède à l'évaluation des bénéfices et des risques liés à l'utilisation des produits à finalité sanitaire destinés à l'homme et des produits à finalité cosmétique ». Cela implique-t-il que si un produit censé avoir une action anti-rides n'est pas efficace, une personne pourra attaquer l'agence en lui reprochant de ne pas avoir prouvé l'effet anti-rides de ce produit ?
Je sais bien que l'agence a pour but d'établir si un produit cosmétique est nocif ou pas, et non pas de se prononcer sur son efficacité, mais je tenais à appeler l'attention sur les implications de cette rédaction : il est possible de se retourner contre l'agence pour ce motif.
Pour en venir à notre amendement, je dirai qu'il est plus complet que l'amendement du Gouvernement deux fois rectifié. Il définit vraiment les conditions de comparaison des traitements, et, surtout, il ne prévoit pas de clause pour éviter le recours aux comparaisons comme le fait l'amendement du Gouvernement, lequel permet à l'industriel d'échapper à la comparaison. Nous en reparlerons.
S'agissant d'Europe, j'aimerais revenir sur la fameuse directive sur les essais cliniques évoquée par M. le rapporteur dans sa réponse à Mme Fraysse. Il y est clairement indiqué qu'il est possible d'effectuer des essais cliniques en dehors des laboratoires pharmaceutiques. Mais l'État s'est tellement désengagé de la recherche clinique publique que le privé a pris la place laissée vacante.
La lecture des directives européennes montre du reste de manière évidente qu'il n'est pas interdit à un pays d'imposer des tests contre comparateurs.
Et si l'on m'oppose encore que la législation européenne l'empêche, j'invoquerai le principe subsidiarité en matière de santé publique. Un État, au nom de la sécurité sanitaire de sa population, peut fort bien considérer qu'un médicament n'a pas été bien testé.
Avis défavorable. Au risque de me répéter, l'État peut demander une évaluation comparative, mais il ne peut pas exiger qu'elle soit réalisée systématiquement.
Avis défavorable, au profit de celui du Gouvernement. J'en suis désolé.
Nous nous heurtons, je crois, une différence d'interprétation de la directive européenne : que permet-elle, et qu'interdit-elle ?
Je me tourne donc vers le président Méhaignerie pour formuler à nouveau une demande déjà faite en commission : pourquoi ne pourrions-nous pas auditionner le commissaire européen chargé de ces questions, M. Dalli, afin que celui-ci nous indique comment il faut lire cette directive européenne ? Nous saurions ainsi quelles sont les règles du jeu et donc nos marges de manoeuvre. Ce serait utile, et cela nous éviterait de parler en l'absence de celles et ceux qui ont produit ces règles.
Nous déduisons, nous, de notre lecture de cette directive que nous pouvons – lorsque, évidemment, des produits et des stratégies thérapeutiques alternatifs existent – demander que des tests contre comparateurs soient faits. Nous pensons que, quand ces tests sont possibles, ils doivent être demandés systématiquement.
Après avoir examiné l'amendement du Gouvernement, deux fois rectifié, et l'amendement de Mme Lemorton et du groupe socialiste, je pense que ce dernier est beaucoup plus précis.
La lecture de l'amendement du Gouvernement permet de constater qu'il est possible d'échapper à la comparaison avec des comparateurs, à condition d'expliquer pourquoi. Or quelle explication pourraient donner les industriels, si ce n'est l'absence de comparateurs ? À l'impossible, évidemment, nul n'est tenu ; mais hors de cette circonstance très particulière, je ne vois pas quelles justifications pourraient être apportées.
Nous voterons donc l'amendement défendu par Mme Lemorton ; on ne peut pas, je crois, considérer que l'amendement n° 277 deuxième rectification du Gouvernement répond à la même préoccupation.
(L'amendement n° 211 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement du Gouvernement n° 277 deuxième rectification.
La parole est à M. le ministre.
L'idée de l'amendement n° 277 deuxième rectification est simple : c'est un amendement qui permettra à l'ANSM de demander aux industriels des essais contre comparateurs, lorsque ces comparateurs existent.
La directive 200183CE ne permet pas, je vous l'assure, d'exiger des essais contre comparateurs. Nous écrivons « peut demander » : c'est déjà une avancée – que je vais compléter, tout à l'heure, en élevant au niveau législatif des mesures prévues sur le remboursement. Je ne suis pas là en contradiction avec la directive européenne, et si les industriels refusent de faire des essais contre comparateurs, ils devront dorénavant le justifier : ce n'est pas la même chose si on leur demande, et qu'ils refusent, et s'ils sont tenus de le justifier. Je ne suis donc pas là, je le répète, en contradiction avec la directive européenne.
Le président dira peut-être que je suis trop long, mais je vais vous en dire plus.
Je me suis en effet entretenu avec le commissaire Dalli en marge du sommet de l'ONU consacré aux questions de santé. Monsieur Mallot, vous qui êtes toujours très attentif, je sais que vous allez m'écouter tout particulièrement. (Sourires.)
J'ai reçu de M. Dalli la lettre suivante, dont je voudrais vous donner lecture.
Non, c'est écrit en français. (Sourires.)
« Monsieur le ministre,
« Je vous remercie pour votre lettre du 1er août 2011. Je partage votre opinion quant à l'importance primordiale de disposer d'un système efficace pour garantir la sécurité sanitaire des produits de santé disponibles dans l'Union européenne, condition de la confiance dans nos médicaments.
« Vous avez présenté en France un projet de loi visant à renforcer la sécurité sanitaire des produits de santé, reposant sur trois piliers : prévention des conflits d'intérêts, transparence des décisions, ainsi que l'amélioration de l'information des patients et des professionnels de santé et l'amélioration de la formation de ces derniers.
« Les préoccupations évoquées ci-dessus sont systématiquement prises en charge dans la mise à jour continue du cadre législatif régissant les médicaments dans l'Union. Le dernier exemple en date est la révision de la législation sur la pharmacovigilance, adoptée en 2010, tandis que la procédure législative relative à la proposition de la Commission visant à modifier la législation sur l'information des patients est toujours en cours. Je me félicite que votre projet prévoie également la transposition de la nouvelle législation sur la pharmacovigilance, qui s'appliquera à compter de juillet 2012.
« En ce qui concerne les conditions d'octroi des d'autorisations de mise sur le marché de nouveaux médicaments, vous suggérez d'exiger des données permettant la comparaison avec un médicament de référence, s'il existe, et de n'accorder l'AMM que si le rapport bénéfice-risque du médicament faisant l'objet de la demande est au moins équivalent à celui du médicament de référence. »
Vous voyez que j'ai bien demandé ce qu'il en était au niveau européen, ce que je vous ai toujours dit.
« La législation de l'Union sur les médicaments offre une certaine liberté de manoeuvre en ce qui concerne la conception des essais cliniques dont les données sont présentées dans une demande d'AMM. Le code communautaire sur les médicaments à usage humain dispose que “d'une manière générale, les essais cliniques doivent être effectués sous forme d'essais contrôlés et, si possible, randomisés ; toute autre manière de procéder doit être justifiée. Le traitement attribué au groupe contrôle peut varier selon les cas ; ce choix peut être influencé par des considérations d'ordre éthique. Ainsi, il peut parfois être plus intéressant de comparer l'efficacité d'un nouveau médicament à celui d'un médicament dont la valeur thérapeutique est déjà communément connue, plutôt qu'à l'effet d'un placebo.”
« L'approbation proprement dite, quant à elle, est fondée sur l'évaluation de la qualité, de l'innocuité et de l'efficacité du médicament et sur une évaluation positive du rapport bénéfice-risque.
« Je ne pense pas qu'il faille ajouter un critère de comparaison entre des médicaments dans ce contexte. Une telle démarche entraînerait une confusion entre, d'une part, les conditions d'autorisation de mise sur le marché et, d'autre part, les questions d'évaluation des technologies de la santé – domaine qui fait l'objet d'une coopération européenne dont l'ambition devra être déterminée dans les prochains mois – et, éventuellement, les décisions en matière de tarification et de remboursement – des domaines qui relèvent en grande partie de la compétence des États membres. De plus, un tel critère pourrait avoir pour effet de restreindre l'innovation pharmaceutique. »
Effectivement.
Je continue ma lecture.
« À cet égard, il ne faut pas oublier que les données sur lesquelles se fonde une AMM sont nécessairement limitées aux essais cliniques menés dans un cadre très contrôlé. L'évaluation des bénéfices, des risques et de l'efficacité comparative d'un médicament pourrait évoluer une fois qu'il est autorisé. Dans ce contexte, je tiens à souligner que c'est précisément par un système de pharmacovigilance renforcé qu'il convient de surveiller les effets indésirables, en conditions réelles, des médicaments autorisés et de prendre les mesures qui s'imposent. C'est justement ce que prévoit la nouvelle législation de l'Union sur la pharmacovigilance.
« Veuillez croire… », etc.
Voilà pourquoi, après cette lettre, nous avons rectifié notre amendement – parce que, je peux vous le dire, pour que ça bouge, il faudra du temps ! J'ai pris acte de la réponse du commissaire, mais je l'ai prévenu que j'allais prendre contact avec les autres ministres pour ne pas être le seul à pousser ce dossier au niveau politique. Car nous ne sommes pas d'accord.
J'entends bien ce qu'il dit de la concurrence ; mais, moi, je m'occupe du domaine de la santé. La concurrence ne me gêne pas, mais, quand il s'agit de santé, j'ai d'autres critères. J'ai donc prévenu le commissaire que nous étions en désaccord ; une fois ce texte voté, j'écrirai à l'ensemble de mes collègues ministres pour reprendre ce dossier.
Mais je n'attends pas, pour agir, que ces procédures aboutissent : voilà pourquoi, après cet amendement, nous en discuterons un autre qui modifie les conditions de remboursement en France, de façon à mettre en oeuvre sans tarder ce qui serait effectivement souhaitable dans un cadre plus général au niveau européen.
Mais je ne vous demande pas d'attendre que l'Europe se prononce pour que le changement intervienne : j'ai un peu d'expérience. Allez, disons cela : ce sera long. (Sourires.)
Voilà pourquoi il y a deux amendements : celui-ci, et un autre qui interviendra plus tard et qui porte sur les conditions de remboursement. Si j'ai refusé les autres amendements, c'est que je pense que le complément apporté par les deux amendements du Gouvernement permet d'être efficace tout de suite.
Madame Catherine Lemorton, vous avez la parole pour répondre à M. le ministre.
Merci. Ce sera plus long que lorsque mon collègue Gérard Bapt répondra au rapporteur, qui a juste dit qu'il était d'accord. (Sourires.)
Ce n'est pas si mal ! Il n'est pas obligé de chanter une chanson ! (Sourires.)
Pour rejoindre Mme Fraysse, je vais lire la directive européenne que je paraphrasais tout à l'heure : « Des essais cliniques non commerciaux menés par des chercheurs sans la participation de l'industrie pharmaceutique peuvent être très bénéfiques pour les patients concernés. »
Votre amendement, monsieur le ministre, paraît cohérent, notamment avec la réponse de M. Dalli – dont je regrette, d'ailleurs, que les députés que nous sommes, censés contrôler l'action du Gouvernement, n'ayons pas pu prendre connaissance plus tôt.
Je vous la passerai !
Je ne dis pas cela de façon polémique, monsieur le ministre, mais nous aurions aimé la lire à l'avance. Cela nous aurait facilité la tâche.
Je note que notre amendement est plus complet que celui du Gouvernement. En effet, nous ne parlons pas que de médicament. Or, il me semble que la nouvelle agence que vous mettez en place ne doit pas parler que de médicament, mais aussi des dispositifs médicaux. Me trompé-je, monsieur le ministre ?
Ce n'est pas la même directive ! Ce n'est pas la même législation européenne.
Notre amendement est beaucoup plus large que le vôtre. En tout cas, le vôtre n'inclut pas complètement les missions de l'Agence que vous mettez en place – qui, au fond, correspond à l'ancienne, comme le disait M. Bur : les dispositifs médicaux sont absents.
Dans votre amendement, vous écrivez : « Si la personne produisant ou exploitant un médicament s'oppose aux essais contre comparateurs, elle doit le justifier. » Inutile de vous dire, monsieur le ministre, que n'importe quel industriel – et, si vous les dénoncez peut-être un peu moins, vous les connaissez tout aussi bien que moi – saura contourner cette mesure, et saura toujours justifier son refus de mener des essais contre comparateurs !
Le souci qui s'exprime à gauche de cet hémicycle, c'est de savoir quelle décision prendra l'Agence quand un industriel, un exploitant, un fabricant, produira une justification de l'absence de tests contre comparateurs. L'Agence aura-t-elle le pouvoir de faire recommencer la phase III des essais cliniques ? N'oublions pas que cela a un coût. L'Agence pourra-t-elle dire : cela ne nous convient pas, recommencez votre phase III ?
Je voudrais aussi que nous fassions un peu de pédagogie – puisqu'il paraît que toute la France, 63 millions de personnes, nous regarde. C'est à propos de l'alinéa 37.
Je voudrais que les gens qui nous écoutent comprennent bien que lorsqu'une entreprise communique l'arrêt de commercialisation, l'interdiction ou la restriction imposée par une autorité compétente dans un pays membre – je vous renvoie à l'alinéa 37 –, le produit ne fait pas forcément l'objet d'une mesure de retrait dans notre pays. Je ne suis pas là pour défendre Servier, vous le savez très bien, mais je ne voudrais pas que cette obligation d'information amène nos concitoyens à croire que si tel produit a été retiré en Belgique, il doit forcément l'être en France. Dans la tête des gens, Servier n'a pas fait ce qu'il fallait : le Mediator avait été retiré en Espagne, il aurait dû l'être chez nous : il fallait le retire partout. À ceci près que la notion de balance bénéfice-risque n'est pas ressentie de la même manière dans tous les pays, même s'ils font partie de l'Union européenne : certains médicaments peuvent très bien rester autorisés dans un pays alors qu'ils ont été retirés dans d'autres. Il va falloir faire oeuvre de pédagogie auprès de nos concitoyens…
…particulièrement dans le domaine des vaccinations.
Vous l'aurez compris, notre amendement est beaucoup plus pertinent que celui du Gouvernement.
L'amendement du Gouvernement souffre à mes yeux de plusieurs faiblesses.
Pour commencer, le fait de dire que l'agence peut demander laisse entendre qu'elle peut ne pas le faire. Il faudrait donc plutôt écrire : l'agence demande…
Non ! Lisez la directive européenne !
…quitte à prévoir des exceptions, des dérogations.
Vous prévoyez ensuite que si la personne produisant ou exploitant un médicament s'oppose aux essais contre comparateurs, elle doit le justifier. La question est de savoir sur quelles bases. Imaginez qu'on vous réponde : « Cela m'ennuie de le faire »… C'est déjà une justification !
Par ailleurs, auprès de qui doit-elle le justifier ? Et qui tranche ? Qui va dire que la justification est valable ou non ? Votre texte n'en dit rien. En tout cas, ce n'est pas clair.
Dès lors des comparateurs existent, il n'y a aucune justification à ce que les essais contre comparateurs ne soient pas effectués.
Soyons clairs : la directive européenne s'impose tant qu'elle n'est pas modifiée,…
…à moins que vous ne vouliez sortir de l'Europe !
La directive dit qu'on ne peut pas exiger. Dans ces conditions, moi, je ne sais pas écrire autre chose que « peut demander ».
C'est peut-être votre choix, mais en attendant, je cherche des solutions.
Dorénavant, les industriels qui refusent de faire des essais contre comparateurs devront le justifier – par l'absence de comparateur, par exemple. Encore que, dans le cas de maladies rares, par exemple, ou de champs nouveaux, il faudra faire des essais contre placebo – j'ai cru hier que vous étiez d'accord sur ce point.
Si vous ne dites pas le contraire, vous vous apercevrez que nous disons la même chose.
L'amendement du Gouvernement ne fait pas état des dispositifs médicaux pour la simple raison que cela ne relève pas de la même réglementation. Je ne les perds pas de vue, mais existe-t-il une AMM sur les dispositifs médicaux ? Non. Voilà pourquoi je ne sais pas tout mettre dans le même contenant.
Vous avez le droit de ne pas être d'accord, mais reconnaissez que je suis en train d'écrire ce que vous aviez souhaité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre, nous vous donnons acte de vos bonnes intentions : notre amendement visait précisément à vous accompagner.
Toute la question est de savoir comment interpréter la lettre de M. Dalli. M. le commissaire Dalli pense ceci ou cela, mais, après, il peut se tromper. Il est du reste dommage que nous n'ayons pas eu cette lettre.
Je vous l'ai lue !
Comme la procédure accélérée a été engagée sur ce texte, il ne reviendra pas ici. Mme Lemorton a fait l'effort de rechercher les directives européennes et en a tiré des conclusions. Voilà pourquoi l'interprétation qu'en fait M. Dalli mérite d'être prise en compte dans la formulation même de notre amendement, et dans la façon dont on peut juger le vôtre.
On sait très bien qu'il y aura des cas où il ne sera pas possible de réaliser des essais contre comparateurs. Reste que votre amendement indique que si la personne produisant ou exploitant un médicament s'oppose aux essais contre comparateurs,…
…elle devra le justifier. Mais cette justification s'imposera-t-elle au directeur général de l'AFSSAPS ? Si oui, il n'y aura pas d'essais contre comparateurs mais contre placebo. Notons que l'essai contre placebo peut présenter un intérêt : s'il s'agit de rechercher des effets indésirables, mieux vaut faire un essai contre placebo que contre un autre produit qui pourrait présenter d'autres problèmes ou effets indésirables.
Mais dès lors que le directeur de l'AFSSAPS disposera d'une justification du laboratoire, devra-t-il s'incliner ? Si je vous ai bien compris, en l'état actuel de la législation européenne, il y sera obligé.
Et c'est au niveau de l'ASMR, c'est-à-dire de la commission de la transparence, que l'on pourra agir. Est-ce cela que sous-tend votre amendement ?
Si l'agence demande des essais cliniques, en particulier des essais contre comparateurs, c'est qu'elle considère que cela est nécessaire, autrement dit que cela répond à un motif d'intérêt général. Mais si, face à ce motif d'intérêt général, une simple justification suffit à interrompre la procédure, cela semble aller à contresens de l'intérêt de la sécurité sanitaire. Il serait donc intéressant, monsieur le ministre, que vous nous expliquiez comment vous voyez les choses.
Que se passera-t-il si, pour toute justification, l'industriel répond à l'agence, l'industriel répond que c'est parce qu'il ne veut pas le faire ?
Il ne sera pas remboursé !
Et surtout, votre amendement concerne-t-il l'industriel qui produit un nouveau médicament ou celui qui servirait de comparaison ?
(L'amendement n° 277 , deuxième rectification, est adopté.)
La parole est à M. Roland Muzeau, pour soutenir l'amendement n° 75 rectifié .
Nous proposons d'insérer, après l'alinéa 4 de l'article 4, l'alinéa suivant : « II bis. – L'agence met en place en son sein une unité nationale de pharmacologie clinique chargée de procéder aux essais comparatifs pré-autorisation de mise sur le marché et post-autorisation de mise sur le marché qu'elle estime nécessaires, et à la réévaluation, tous les trois ans, des médicaments déjà commercialisés. Ces essais sont complémentaires des études qui peuvent être demandées aux titulaires en application des articles L. 5121-8-1 et L. 5121-9-3 du présent code. »
Cette proposition est issue du rapport d'information du Sénat qui souligne l'indépendance pharmacologique de l'AFSSAPS vis-à-vis des laboratoires pharmaceutiques, aussi bien pour les essais préalables à l'AMM que pour les études post-autorisation. Un exemple, déjà donné à de multiples reprises, me semble assez révélateur et instructif : confier aux seuls laboratoires le soin d'évaluer les produits qu'ils vendent ne revient-il pas à s'en remettre aux industriels du tabac pour évaluer la dangerosité de la cigarette ? Je ne doute pas que cette comparaison emportera votre adhésion et que notre amendement sera adopté à l'unanimité.
Défavorable. Votre amendement, monsieur Muzeau, est manifestement d'ordre réglementaire.
Plus précisément, il est prévu que l'Agence verra ses moyens renforcés, comme nous l'a confirmé le directeur de l'AFSSAPS lors de son audition en commission, pour mener des études de pharmacovigilance et de pharmaco-épidémiologie. De surcroît, la création du GIP permettra à l'Agence d'avoir accès aux bases de données et de lancer des appels d'offre pour réaliser des études épidémiologiques.
Enfin, l'article 4 du projet de loi prévoit que l'Agence peut engager des études de suivi de patients et de recueil des données, d'efficacité et de tolérance.
Même avis.
(L'amendement n° 75 rectifié n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour soutenir l'amendement n° 37 .
Au vu du caractère spécifique du texte, je propose, à la première phrase de l'alinéa 26 de l'article 4, après le mot : « observations », d'insérer les mots : « avec l'indication de la possibilité de se faire assister d'un conseil. », dans le but de garantir le respect du contradictoire.
Favorable.
(L'amendement n° 37 est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 168 rectifié .
Favorable.
(L'amendement n° 168 rectifié est adopté.)
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l'amendement n° 49 .
Je défendrai par la même occasion l'amendement n° 46 .
Si les nouveaux pouvoirs de sanction dévolus par ce texte à l'Agence nationale de sécurité des produits de santé sont plutôt les bienvenus, je tiens à formuler quelques remarques et présenter quelques propositions pour améliorer encore le texte.
Ma première remarque concerne le montant des amendes qui ne peut dépasser 500 000 euros. Nous estimons que cette somme est relativement faible, par comparaison avec les coûts liés au non-respect par les laboratoires pharmaceutiques de leurs engagements – sans commune mesure, par exemple, avec ce qu'aura coûté le Mediator à l'assurance maladie : on l'évalue à 1,2 milliard !
Ma deuxième remarque concerne le champ des manquements susceptibles d'être mentionnés par une amende administrative. L'exemple récent du Protelos nous conduit à proposer à l'alinéa 32 d'étendre ce champ au cas où le laboratoire aurait communiqué des informations erronées sur les risques que présente le médicament. C'est l'objet de notre amendement n° 49 .
Dans le même esprit, l'amendement n° 46 , qui complète l'alinéa 33, vise à sanctionner non seulement l'absence de déclaration d'un effet indésirable, mais également le fait d'en minorer la gravité.
Ces amendements viennent opportunément compléter une démarche que nous partageons.
La commission est défavorable à ces amendements, déjà satisfaits par les dispositions du code pénal.
Même avis.
(L'amendement n° 49 n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 212 .
Après l'alinéa 33, nous proposons d'insérer un nouvel alinéa ainsi rédigé : « Le fait pour toute personne exploitant un médicament ou produit, ou pour tout titulaire de l'autorisation prévue à l'article L. 4211-6, ayant eu connaissance d'une utilisation hors AMM » – cela doit résonner dans toutes nos têtes, vu le passé récent – « de s'abstenir de la signaler sans délai selon les modalités définies par voie réglementaire à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. »
Au fond, ce dispositif sur la prescription hors AMM et l'obligation pour le titulaire de l'AMM de la déclarer n'est que la transposition du droit européen, et plus précisément d'une directive du 15 décembre 2010 qui dispose : « Dès lors que les médicaments pourraient être utilisés d'une manière qui ne correspond pas aux termes de l'AMM, le titulaire d'une AMM devrait avoir la responsabilité de fournir toutes les informations disponibles y compris les résultats d'essais cliniques ou d'autres études, ainsi que de notifier toute utilisation du médicament non conforme aux termes de l'AMM. »
Ainsi, il ne s'agit pas d'un amendement basé sur la libre appréciation du rapporteur, du Gouvernement ou d'un quelconque membre de cette assemblée, mais d'une transposition de directive appelée à devenir tôt ou tard obligatoire.
Défavorable car cet amendement a été satisfait par l'amendement n° 277 , adopté il y a quelques instants.
Même avis.
(L'amendement n° 212 n'est pas adopté.)
Désolé, je ne vous avais pas vu. Mais je vous la donne bien volontiers.
Je voulais simplement insister sur le fait que l'amendement n°212 était parfaitement cohérent la problématique de la prescription hors AMM, dont nous discuterons plus loin à l'occasion des articles 11 et 16.
La question de la prescription hors AMM est au coeur de l'affaire du Mediator. À partir du moment où nous voulons, dans les articles 11 et 16, organiser les choses et faire en sorte que la prescription hors AMM puisse exister puisqu'elle est nécessaire et opportune dans certains cas, à condition d'être justifiée par le prescripteur, il faut pouvoir suivre ce qui se passe et sanctionner la prescription hors AMM lorsqu'elle n'est pas justifiée. Encore faut-il être sûr que les cas soient signalés : iIl faut donc savoir ce qui se passe et donc que l'agence du médicament – et probablement la HAS – ait connaissance des cas de prescription hors AMM pour mener à bien ce travail de suivi, de sanction et d'encadrement. Je le répète, ces prescriptions hors AMM sont parfois nécessaires mais elles ne doivent pas se faire sans restrictions comme ce fut le cas avec le Mediator.
La parole est à M. François Vannson, pour soutenir l'amendement n° 11 .
Il s'agit d'un amendement de cohérence avec un amendement que je défendrai à l'article 23.
Monsieur le ministre, je partage totalement votre volonté de restreindre la publicité sur le médicament, qui répond à une logique, voire à des règles déontologiques. En revanche, il m'apparaît essentiel de préserver la publicité sur les dispositifs médicaux externes tels que les lunettes ou les prothèses auditives.
Si je comprends que la publicité sur la prothèse de la hanche ait pu choquer, rappellons qu'il s'agit là d'un dispositif médical invasif nécessitant à la fois une prescription et l'intervention d'un praticien, ce qui est fondamentalement différent.
Pour ma part, je considère qu'inciter le grand public à s'équiper le mieux possible en produits optiques ou en prothèses auditives – si le besoin s'en fait sentir, naturellement –, ne peut avoir que des incidences positives sur la santé publique. Il semblerait d'ailleurs qu'un dépistage précoce des problèmes d'audition a des incidences positives notamment sur la maladie d'Alzheimer. On peut trouver des arguments similaires pour l'optique et la lunetterie.
Précision sur les remboursements et donc sur les dépenses sociales : les remboursements étant forfaitaire, cela n'a aucune incidence sur la nature, la technologie des différents équipements qui seront choisis par le client.
Dans un tel secteur d'activité, la concurrence peut initier une dynamique positive en matière de prix, en faveur du client.
C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je vous demanderai d'adopter mon amendement n° 11 .
La commission est défavorable à cet amendement puisqu'il est satisfait par un amendement que j'ai déposé à l'article 23. En tout cas, les deux vont dans le même sens.
Défavorable, pour la même raison.
Ce serait bien de le faire voter tout de suite. Je le maintiens.
(L'amendement n° 11 n'est pas adopté.)
Même avis, car votre amendement est satisfait à un autre alinéa, monsieur Decool. Sinon, j'y aurais été favorable.
(L'amendement n° 38 n'est pas adopté.)
(L'article 4, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement no 187 portant article additionnel après l'article 4.
La parole est à M. Bernard Debré.
Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps mon amendement n° 275 .
Le problème, un peu historique, remonte à l'affaire du sang contaminé. Tout le monde se souvient de ce drame presque comparable à celui du Mediator, et des morts qui en sont découlés. Pour répondre à ce problème, on a décidé de séparer prélèvement et contrôle : c'est ainsi qu'ont été créés l'établissement français du sang et l'institut national de transfusion sanguine.
Seulement voilà : l'INTS est un GIP et il n'est pas inscrit dans le marbre de la loi. Sait-on jamais ce qui peut arriver ? À entendre certains bruits, l'INTS et l'EFS pourraient être refusionnés.
Mes amendements visent à sanctuariser l'INTS, soit en le laissant seul – c'est l'objet de l'amendement n° 275 – soit en le rattachant à la nouvelle agence. Cela permettrait d'assurer définitivement la séparation entre le prélèvement et l'évaluation, et d'éviter que ne se reproduise un drame analogue à celui du sang contaminé.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 187 : il ne correspond pas à l'objet et au choix de ce projet de loi.
L'Agence nationale de sécurité du médicament est chargée de l'évaluation de tous les produits de santé, pas seulement des médicaments mais aussi des produits sanguins et des produits dérivés.
Le Gouvernement réfléchit, car cela fait partie des décisions qui ne sont pas automatiques. Certes, ce n'est pas la première fois que Bernard Debré m'en parle ni qu'il écrit sur la question. À entendre certains, il faut absolument fusionner l'INTS et l'EFS. Ce sera bien mieux, on évitera les doublons et on fera des économies, disent la Cour des comptes et l'IGAS. Mais d'autres s'inquiètent : est-on certain qu'une telle fusion offre toutes les garanties et ne fait courir aucun risque ?
Le sujet, Bernard Debré l'a dit, est sensible, mais cela ne doit pas pour autant tétaniser les responsables. Cela étant, est-ce que j'y vois suffisamment clair sur le sujet aujourd'hui ? Non. Un comité de préfiguration se met en place car l'INTS est appelé à disparaître au 31 décembre, si je ne me trompe.
Le comité de préfiguration a-t-il suffisamment avancé pour que l'on y voie clair au moment où je parle ? Non.
Je vous montre un peu le cheminement des décisions qu'un ministre doit prendre : il a toujours deux points de vue différents.
Bien sûr, et je ne vais pas me plaindre de la difficulté : je ne suis pas à plaindre d'exercer des fonctions ministérielles.
Au final, cela se résume toujours à un arbitrage, mais tout le monde arbitre tous les jours !
Pour ma part, je ne trouve pas qu'il y ait une très cohérence entre l'INTS et l'Agence nationale de sécurité du médicament. Bernard Debré l'a dit aussi avec beaucoup d'honnêteté mais, selon lui, placer l'INTS dans ce cadre-là permettrait d'éviter une fusion avec l'EFS, qu'il estime dangereuse.
Pour répondre à son appel, je veux bien prolonger le GIP INTS pour ne pas être lié par un calendrier au risque de devoir précipiter les choses à un moment où les garanties peuvent sembler insuffisantes à certains. Je peux m'engager devant vous à le prolonger d'un an, de façon à bien approfondir la réflexion et ne pas prendre de décision hâtive sur un sujet sensible – non parce qu'il a marqué l'histoire, mais tout simplement parce qu'il s'agit du sang.
Voilà ce que je vous propose, pour éviter d'aller trop vite en faisant directement le choix de l'ANSM dont la logique n'est pas établie à 100 %. Vous m'alertez sur le danger de l'autre solution et je vous entends également.
Si je n'émets pas un avis favorable à ces amendements pour le cas où ils seraient maintenus, je m'engage officiellement devant vous à prolonger ce GIP et à ne pas précipiter les décisions en la matière. Il n'empêche que nous pourrons peut-être trouver d'autres solutions avant que l'année supplémentaire soit écoulée. Mais j'entends bien votre message, monsieur Bernard Debré.
Le ministre a bien vu le danger : dans quelques mois, il n'y aura plus d'INTS, le GIP disparaîtra. La Cour des comptes, l'IGAS et d'autres encore plaident pour une fusion qui ramènerait à la situation d'avant l'histoire du sang contaminé. Le rapporteur parle des prérogatives de la nouvelle agence, mais cela reste assez flou.
J'entends bien le ministre et je crois qu'il a raison. Mes deux amendements visaient à soulever le problème. C'est chose faite ; je vais donc les retirer.
La parole est à M. Jean Mallot qui se plaint de ne pas être vu, tandis que M. Debré m'accuse d'avoir un strabisme de gauche.
Si c'est un strabisme de gauche, monsieur le président, je ne peux que vous y encourager !
Monsieur Debré, je vous ai écouté avec beaucoup d'attention, d'autant que nous sommes d'accord sur la démarche.
Il se trouve que, dans une vie antérieure, j'ai un peu connu ce genre de dossier et je suis de ceux qui ont pu constater le progrès accompli lorsque, à partir de la Fédération nationale de transfusion sanguine, trois entités distinctes ont été constituées : l'Agence française du sang, chargée de la collecte et de la distribution des produits sanguins labiles, le laboratoire du fractionnement et des biotechnologies, en charge des produits non labiles, l'institut national de la transfusion sanguine enfin, organe de référence, de formation, de recherche, etc., chargé de surveiller et de contrôler.
Cela a constitué un progrès. Détruire ce bon équilibre, c'est prendre un risque, et je tenais à y insister. Évidemment, on peut arguer que ce n'est pas l'objet direct de ce texte même s'il traite bel et bien du contrôle des produits de santé.
Si la décision de M. le ministre de prolonger le GIP d'un an est une précaution louable et nécessaire, il faut aller plus loin. L'existence d'un INTS autonome a marqué un progrès par rapport à la situation antérieure et sa suppression constituerait un risque.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 276 du Gouvernement.
Il s'agit d'un amendement de toilettage des textes visant à doter l'ensemble de la structure d'une organisation plus homogène.
(L'amendement n° 276 , accepté par la commission, est adopté.)
L'article 5 traite notamment de la composition du conseil d'administration et les modalités de travail des diverses instances de l'agence nationale de sécurité du médicament.
On ne peut raisonner sans prendre en considération les modalités de financement de cette agence du médicament rebaptisée. Voilà pourquoi je regrette un peu, monsieur le ministre, que vous ne m'ayez pas répondu tout à l'heure et que vous n'ayez pas précisé les choses. Je sais bien que nous en parlerons à l'occasion de l'examen de prochains textes, mais les modalités de financement, l'origine des ressources, le budget de cette agence et la gestion de celle-ci sont des éléments déterminants dès lors qu'il s'agit de considérer sa structure et son fonctionnement.
Telle qu'elle ressort du texte de la commission, la composition du conseil d'administration appelle des observations qui justifient les différents amendements déposés sur l'article 5. Elles portent notamment sur la présence des industriels du médicament, la présence de « représentants des entreprises produisant ou commercialisant des produits mentionnés au même article L. 5311-1 » pour reprendre les termes du texte. Nous y sommes effectivement opposés : il n'y a pas lieu, selon nous, d'inclure ces représentants parmi les membres du conseil d'administration de l'agence ni de leur donner voix délibérative. Nous nous en expliquerons tout à l'heure.
Sont également mentionnés les représentants des caisses nationales d'assurance-maladie. Mais pourquoi n'incluez-vous pas des représentants des régimes complémentaires ? Ils sont pourtant appelés à rembourser des dépenses de santé de plus en plus importantes, notamment des dépenses de médicaments ; on peut le regretter, mais c'est un fait. Les franchises médicales, entre autres, entraînent un déport de la prise en charge sur les régimes complémentaires. La présence de leurs représentants autour de la table du conseil d'administration n'est donc pas moins justifiée que celles d'autres membres.
Je veux encore insister, monsieur le ministre, sur le fléchage budgétaire de cette agence.
Le scandale du Mediator a éclaté au grand jour il y a un an. Les choses vont donc très vite, et l'on ne peut que saluer votre réactivité face à ce scandale. Reste que vous avez forcément vous inquiéter du devenir de cette agence : de quel budget disposera-t-elle à partir de l'année 2012 pour assurer son fonctionnement et remplir toutes les missions dont on la charge et qui, si nous votons ce projet en l'état, seront bientôt inscrites dans la loi ? Dites-nous donc ce qu'il en est de ce fléchage budgétaire. J'espère que vos collaborateurs ont pu, depuis tout à l'heure, vous donner les informations pertinentes.
Le projet de loi de finances pour l'année 2012 sera examiné à la fin du mois d'octobre et au début du mois de novembre. L'examen en commission du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour cette même année 2012 commencera, pour sa part, dans exactement trois semaines. Je ne peux donc pas croire que vous n'ayez pas un montant à nous indiquer.
Rassurez-nous, s'il vous plaît, monsieur le ministre.
Je suis saisi d'un amendement n° 53 .
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Nous proposons de modifier la composition du conseil d'administration de cette nouvelle agence. En l'état actuel du texte, il comporterait des parlementaires, des représentants de l'assurance-maladie, des représentants des entreprises du médicament – ce qui nous pose problème, M. Muzeau vous en parlera tout à l'heure –, des professionnels de santé, des représentants des personnels de l'agence, des personnes qualifiées et enfin des représentants d'associations.
L'amendement n° 53 a pour objet de renforcer la représentation des parlementaires. En l'état actuel du texte, ne siègeraient qu'un député et un sénateur.
Nous estimons, pour notre part, qu'il y a lieu de renforcer cette représentation des parlementaires. Ils expriment effectivement l'intérêt général, et cela me paraît important. D'un point de vue plus pratique, avec seulement un député et un sénateur, ceux-ci, compte tenu de leur charge de travail, risquent de ne pas pouvoir se libérer pour siéger au conseil d'administration aussi souvent que nécessaire et y travailler dans de bonnes conditions. En portant à trois le nombre de députés et celui des sénateurs nous garantirions une présence plus sûre et plus continue des parlementaires au sein du conseil d'administration, ce qui serait de nature à renforcer la prise en compte de l'intérêt général dans les débats de cette instance.
Défavorable.
Bien sûr, les parlementaires doivent être représentés au conseil d'administration de cet organe, qui est une instance de gestion et non de contrôle. Le texte prévoit donc d'y faire siéger un député et un sénateur. Vous proposez d'y nommer trois députés et trois sénateurs. Pourquoi pas quatre, cinq ou six ?
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée nationale, parce que cela relève de la représentation parlementaire : il est permis au Gouvernement de ne pas avoir d'avis là-dessus. Si je devais toutefois en formuler un, je rappellerais que j'ai moi-même souhaité la présence de parlementaires au conseil d'administration de cette agence. Il peut y avoir du sens à proposer une représentation proposée plus équilibrée, mais ce n'est pas à moi qu'il appartient d'en décider. La présence d'un seul membre de chaque chambre peut effectivement poser des problèmes. En faut-il trois ? J'ai parlé de responsabilité politique : s'il y a trois membres, il faudra que tous les membres désignés siègent effectivement. J'ai tendance à penser qu'un seul membre de chaque chambre ne garantira peut-être pas une représentation équilibrée, mais c'est à vous qu'il revient d'en décider.
J'en profite pour indiquer à Mme Lemorton que, si je ne lui ai pas répondu tout à l'heure, c'est parce que je n'ai pas encore les chiffres précis qu'elle a demandés. J'ai demandé au représentant de l'AFSSAPS me fournir ces informations ; je les les donnerai sitôt que je les aurai.
S'agissant du budget, nous travaillons encore sur des estimations ; or, pour l'instant, je ne suis pas tout à fait en phase avec ce qui m'est proposé. Le montant du budget se situerait entre 141 et 151 millions d'euros. Je veux que l'on retrouve au niveau des recrutements l'intégralité des 40 millions d'euros de prélèvements supplémentaires. Si je n'ai pas à m'immiscer dans la gestion détaillée du budget de l'agence, ni dans le fonctionnement de celle-ci, je n'en veux pas moins que des moyens soient bien fléchés pour l'expertise indépendante. J'attends donc que soient détaillés le nombre des experts, leur rémunération et les garanties offertes en matière d'avancement. Dès lors qu'un renforcement des moyens est décidé, je veux savoir où passe l'argent. Peut-être est-ce outrepasser mes fonctions, mais j'y tiens.
Par ailleurs, si vous trouvez, les uns et les autres, que l'augmentation de 40 millions d'euros du budget de l'AFSSAPS est une bonne décision, les prochains ministres de la santé devront particulièrement veiller, avec les parlementaires, à ce que les choix budgétaires arrêtés ne soient pas l'objet d'arbitrages particuliers lorsque se décidera le budget de l'État. J'ai imposé ce changement, je pense qu'il est nécessaire, mais je ne serai pas ministre de la santé toute ma vie ; il faudra donc que les parlementaires veillent, quel que soit le ministre de la santé, à ce que les choix budgétaires faits ne remettent pas en question les dotations dont bénéficie aujourd'hui la sécurité du médicament et des produits de santé.
Un budget qui passe, monsieur le ministre, d'un montant de moins de 120 millions d'euros à un montant compris dans la fourchette que vous indiquez, c'est appréciable, même s'il reste encore à examiner cela de plus près à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Cela dit, vous n'avez pas encore répondu sur la question des participations forfaitaires. Jusqu'à présent, leur suppression est accordée pour une durée maximale de cinq ans. Disparaissent-elles aujourd'hui, à la faveur de cette nouvelle dotation, ou bien demeurent-elles dans le cadre de cette nouvelle ligne budgétaire ? Peut-être pourrez-vous nous donner quelque indication supplémentaire à ce propos.
S'agissant de la composition du conseil d'administration, un député et un sénateur, je trouve cela un peu court, même s'il faut saluer le fait que vous avez souhaité une représentation parlementaire.
Pour ma part, j'ai trouvé tout à fait anormal que l'on ne trouve pas de parlementaires au conseil d'administration de l'ANSES, la nouvelle Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail issue de la fusion de l'AFSSA, l'Agence française de sécurité sanitaire de l'alimentation, et de l'AFSSET, l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail, à propos de laquelle un certain nombre de parlementaires se sont mobilisés au moment – notamment pour que ses instances comprennent un comité d'éthique, de déontologie et de prévention des conflits d'intérêt –, alors qu'y sont représentées l'Association des maires de France et l'Association des départements de France. Ce sont pourtant les parlementaires qui ont voté la possibilité d'une fusion des agences, même si celle-ci a précisément été réalisée par voie d'ordonnance. Ce sont également les parlementaires qui votent tous les ans le budget, leurs rapporteurs contrôlant, en vertu de la nouvelle Constitution budgétaire, l'utilisation des fonds et le fonctionnement de l'agence. Il faudrait donc, à tout le moins, que le conseil d'administration compte un représentant de la commission des finances et un représentant de la commission des affaires sociales de chaque assemblée, puisque la compétence de voter le financement et de contrôler le fonctionnement de l'agence incombe aux deux commissions des deux assemblées.
Tout passe par l'État, tout reviendra par l'assurance-maladie, et rien ne se fera directement.
(L'amendement n° 53 est adopté.)
Lors de l'examen de l'amendement n° 53 , je n'ai pas osé demander que la représentation parlementaire au sein du conseil d'administration de l'agence soit arrêtée en fonction des groupes parlementaires, mais je souhaite effectivement, en vertu du pluralisme de notre assemblée, que chaque groupe puisse être représenté.
Il est prévu que le conseil d'administration compte un représentant des régimes obligatoires de base d'assurance-maladie. Or les assurances complémentaires sont un partenaire essentiel en matière de remboursement des médicaments. Aujourd'hui, cette mission incombe tant à l'Union nationale des organismes d'assurance maladie complémentaire, qu'à l'Union nationale des caisses d'assurance maladie – encore que, de temps à autre, elle incombe plus à l'une qu'à l'autre.
Il me paraît donc indispensable que l'UNOCAM soit représentée au sein du conseil d'administration. Les assurances complémentaires ne sont pas moins concernées par la politique du médicament, par la chaîne du médicament et par le rapport bénéfice-risque que la CNAMTS. Je ne comprends pas pourquoi cette dernière serait seule représentée. Mais peut-être notre rapporteur peut-il me l'expliquer…
Défavorable.
Comme vous, cher collègue, j'ai pensé à intégrer les organismes complémentaires au sein de la nouvelle agence. Cependant, après réflexion, je ne suis pas certain qu'ils y aient leur place. L'Agence a une mission de sécurité sanitaire et non de remboursement. De ce fait, la présence des organismes complémentaires n'est pas nécessaire.
Par ailleurs, la CNAMTS participera à la création du groupement d'intérêt public qui la liera à l'Agence. Elle permettra également de mettre à disposition des bases de données très utiles pour les études de pharmacovigilance et de pharmacoépidémiologie.
Je ne voudrais pas que ma demande de retrait de cet amendement s'apparente à une remarque à l'encontre des assurances complémentaires…
Pourquoi ? Je préfère l'apaisement à un affrontement stérile qui n'apporte rien aux patients ! Ma demande n'est pas dirigée contre les complémentaires. Le rapporteur l'a très bien dit, la présence de la CNAMTS se justifie parfaitement sur le plan de la pharmacoépidémiologie ; en revanche, nous ne sommes pas dans une logique de remboursement à l'ANSM. Voilà pourquoi il ne me parait pas souhaitable que les assurances complémentaires en fassent partie. Je n'ai rien contre elles, mais je ne vois pas pourquoi cette mesure s'imposerait si l'on reste dans la logique de sécurité du médicament,.
(L'amendement n° 95 n'est pas adopté.)
L'alinéa 6 prévoit que des représentants de l'industrie pharmaceutique siègent au conseil d'administration de la future Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ; on touche aux limites de ce projet de loi qui, loin d'en finir avec les liens d'intérêts, les institutionnalise.
L'agence sera dotée d'un pouvoir de sanction administrative financière afin d'intervenir rapidement sur toute personne physique ou morale qui manquerait aux obligations prévues dans le projet de loi, à savoir essentiellement les fabricants de médicaments.
Comment pourrait-elle prononcer de telles sanctions en toute indépendance si ceux-là mêmes qui pourraient être sanctionnés siègent dans les instances dirigeantes ?
C'est pourquoi nous proposons, par notre amendement n° 51 , que les représentants de l'industrie pharmaceutique ne puissent pas siéger au conseil d'administration de l'ANSM.
Lors de votre intervention au début de ce débat et lors votre audition, même si vous étiez moins précis, j'ai cru comprendre, monsieur le ministre, que vous n'étiez pas opposé à une modification de ce genre. C'est la raison pour laquelle je vous propose d'accepter cet amendement.
La parole est à Mme Pascale Crozon, pour soutenir l'amendement n° 213 .
L'un des objectifs de ce projet de loi est d'assurer l'indépendance de l'Agence. C'est pourquoi nous sommes étonnés de retrouver au conseil d'administration de l'ANSM des entreprises qui produisent et qui commercialisent des médicaments et des produits de santé.
Comme M. Muzeau, nous souhaitons la suppression de cet alinéa. D'ailleurs, au début de la séance d'hier, il me semble effectivement avoir entendu le ministre nous dire qu'il était prêt à comprendre que ces entreprises ne puissent pas être représentées au conseil d'administration.
C'est pourquoi il nous paraît nécessaire de supprimer l'alinéa 6.
, rapporteur. Avis favorable.
En effet, comme je l'ai expliqué plus tôt, le conseil d'administration est surtout un organe de gestion.
Néanmoins je ne voudrais pas que cet amendement soit l'occasion de stigmatiser l'ensemble de l'industrie pharmaceutique, même si, certes, il y a eu des manquements de la part de l'une d'elles.
Je suis saisi d'un amendement n° 272 .
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Cet amendement tend à assurer, parmi les associations agréées représentées au sein du conseil d'administration de la nouvelle agence, la participation des associations représentant les victimes d'accidents médicamenteux.
Les associations de victimes n'ont pas forcément les mêmes attentes que les autres associations de patients. C'est pourquoi elles doivent être clairement représentées.
Elles sont trop souvent réduites au silence dans les instances et les organismes gravitant autour du médicament, en raison des risques liés à l'utilisation des médicaments qu'elles sont amenées à soulever.
Il est légitime de leur assurer une place, qui est justifiée au moins par le nombre d'hospitalisations consécutives à des accidents médicaux. Je l'ai déjà dit dans la discussion générale, entre 130 000 et 150 000 hospitalisations sont liées à des accidents médicamenteux.
Les associations qui représentent ces personnes méritent d'avoir une place assurée.
, rapporteur. Défavorable. Cet amendement est satisfait.
En effet, les associations de victimes pourront siéger au conseil d'administration.
Défavorable.
(L'amendement n° 272 n'est pas adopté.)
À l'alinéa 17, nous proposons de supprimer les mots : « à l'exclusion de toute information présentant un caractère de confidentialité industrielle et commerciale ou relevant du secret médical, ».
Au regard du souci de transparence affiché par ce texte, il ne nous paraît ni souhaitable ni concevable que certaines informations puissent être exclues de la publication.
Le secret commercial, outre qu'il est protégé par des brevets – ce qui est logique –, ne saurait primer sur l'exigence de décision des instances concernant un médicament.
Enfin, pour ce qui est du secret médical, il sera aisé au personnel des agences, le cas échéant, d'anonymiser les données publiées.
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 215 .
Notre amendement est pratiquement identique.
Nous sommes tous d'accord, sur les bancs de cet hémicycle sur le fait que le médicament n'est pas un produit comme les autres. Le médicament, ce n'est pas un paquet de riz…
Puisqu'il relève de la santé, il n'appartient pas tout à fait au domaine marchand, même s'il génère une prescription et donc une vente.
Il faut rappeler ce qu'est un brevet. Un brevet confère à son titulaire une exclusivité commerciale temporaire en contrepartie de la publication de l'innovation. Le brevet peut être obtenu pour tout type d'invention, mais l'innovation ne sera effectivement brevetée que si elle est véritablement nouvelle, si elle implique une activité inventive et si elle est susceptible d'application industrielle.
Ces critères sont importants, car ils limitent le dépôt de brevets. Ainsi, il est impossible de breveter une théorie, une approche théorique globale ou une simple découverte.
Or, dans le cas qui nous occupe, il s'agit de protéger la santé des personnes. Je rejoins vos propos, monsieur le ministre. En cas de doute, le bénéfice ira au patient, non à l'industriel.
Je ne vois pas, dans ces brevets, ce qui relèverait de la confidentialité industrielle ou commerciale, ou bien du secret médical !
Le secret médical existe de fait. Je ne vois pas une commission de l'ANSM nommer les cohortes malades concernés ! De fait, le secret médical ne peut pas être levé.
Il en est de même de la confidentialité industrielle ou commerciale. Nous craignons qu'elle ne soit utilisée régulièrement pour cacher au grand public les données de l'Agence. Dans le domaine du médicament et de la santé publique, la confidentialité industrielle ou commerciale ne peut justifier le fait de ne pas rendre publics des échanges quels qu'ils soient. Cela n'a pas lieu d'être. Comme l'a dit M. le ministre, et l'on ne peut qu'en convenir, le doute bénéficie au patient et c'est ce qui doit présider à nos décisions sur ce texte.
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n°216 .
L'amendement est défendu, monsieur le président.
(L'amendement n° 216 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 128 .
La parole est à M. Roland Muzeau.
Cet amendement tend à renforcer la publicité et la transparence des travaux des commissions de l'ANSM.
Dans l'appel aux parlementaires pour améliorer ce projet de loi afin de protéger l'intérêt des patients et de la santé publique, le directeur éditorial de la revue Prescrire fait justement remarquer que « sans accès aux documents factuels sous-tendant les décisions, et " à l'exclusion de toute information présentant un caractère de confidentialité commerciale " », selon la restriction inscrite dans le texte, cet article bavard risque fort de passer à côté de son objectif.
L'alinéa 17 nous pose problème également dans la mesure où il ne se contente pas de reprendre les termes de l'avant-dernier alinéa de l'actuel article L 5 311-1 du code de la santé publique. Il ajoute le secret médical comme nouvelle restriction à cette publicité et fait disparaître l'obligation de rendre public le règlement intérieur de l'Agence ainsi que celui des commissions.
L'amendement n° 128 tend à réparer cet oubli en prévoyant la publicité de ces règlements intérieurs.
La commission est défavorable puisque les règlements des commissions peuvent déjà être consultés.
Franchement, nous sommes dans de l'infra-règlementaire, puisque ces règlements sont consultables… Je peux demander à l'ANSM de les mettre en ligne, mais inscrire ces précisions dans la loi risque de la rendre très bavarde. Mais si cela vous semble absolument nécessaire, je m'en remets à la sagesse de votre assemblée.
(L'amendement n° 128 n'est pas adopté.)
Monsieur le président, je souhaiterais une suspension de séance de quelques minutes.
Article 5
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinquante.)
Je suis saisi d'un amendement n°188 , portant article additionnel après l'article 5.
La parole est à M. Bernard Debré.
Cet amendement vise à ce que le Conseil d'administration de l'Établissement français du sang soit présidé par un membre d'une profession médicale ou pharmaceutique, en particulier par un médecin, alors qu'il l'a souvent été jusqu'ici par de grands administrateurs de l'État, sortant par exemple de l'ENA, mais sans cette dimension médicale pourtant indispensable : on a vu, par exemple, que le Président du conseil d'administration de l'AFSSAPS avait parfois une certaine difficulté à s'expliquer sur les problèmes médicaux.
Mes amendements 189 et 190 ont d'ailleurs le même objet, respectivement pour l'ANSM, qui remplace l'AFSSAPS, et pour la HAS dont il me semblerait tout à fait légitime qu'elles soient présidées par un professionnel de santé ou par un pharmacien.
Cela dit, je reconnais bien volontiers que cette question ne relève pas du cadre législatif mais doit être réglée par un décret. J'aimerais connaître l'avis du ministre à ce propos avant de retirer éventuellement ces amendements.
Avis défavorable. Outre que cette tradition n'est pas obligatoire, cette décision relève du Président de la République. Faut-il, de la même façon, que le ministre de la santé soit forcément un médecin ?
Du coup, je me demande si je peux m'exprimer… Il est vrai que cela fait longtemps qu'il n'y avait pas eu de ministre de la santé qui ne soit pas médecin. Que je sache, il n'y a pas de validation des acquis de l'expérience pour les ministres…
Plus sérieusement, faut-il vraiment prévoir un critère très précis en la matière ?
Cela pose d'abord un petit problème de séparation des pouvoirs : le législateur peut-il contraindre le Président de la République dans le cadre d'un décret qui relève de la compétence de ce dernier ? Je n'en suis pas sûr.
Je le dis moi-même, il faudrait à l'avenir que le choix se porte plutôt sur un médecin. Là, c'est plutôt l'homme, la personnalité, qui sont adaptés à la fonction. Dominique Maraninchi est l'homme de la situation. Réactivité, vision stratégique, capacité à manager : je suis chaque jour convaincu que j'ai fait le bon choix.
Pour autant si, un jour, une personnalité qui n'est pas médecin peut incarner cette fonction et apporter son expertise, faudrait-il se priver de cette possibilité au motif que la loi nous en empêcherait ? Je ne suis pas très à l'aise avec votre proposition car il me semble qu'elle rigidifierait le système et nous lierait les mains, ce qui serait dommage. J'émets donc un avis défavorable à cet amendement.
Je suis hostile à ces amendements non seulement pour les raisons de forme que vient d'exposer le ministre mais aussi pour des raisons de fond : je les trouve, sinon ubuesques, pour le moins incongrus…
Dans le passé, à la direction générale de l'AFSSAPS, c'est un non-professionnel de santé qui a réservé aux hôpitaux la prescription de l'Isoméride et du Pondéral, ce qui lui a valu d'être attaqué de toutes parts, par l'industrie pharmaceutique mais aussi par les syndicats de médecins, qui l'accusaient de s'en prendre aux médecins libéraux. C'est un médecin qui lui a succédé, mais cela n'a pas changé le cours des choses pour le Benfluorex… Et elles se sont ensuite aggravées, lorsque le poste a été occupé par un conseiller d'État !
Le ministre a déclaré à plusieurs reprises qu'il avait installé à la tête de l'AFSSAPS un binôme composé d'un scientifique – je ne parle même pas d'un médecin – et d'un administrateur. Cela me semblait en effet de bon sens.
Au sein de la direction de l'Agence, outre un conseiller d'État et un directeur adjoint venant aussi de l'administration, plusieurs cadres importants étaient des professeurs et des praticiens hospitaliers – Mme Castot, présente depuis 1974, Mme Kreft-Jais, également là depuis très longtemps, le professeur Lechat – Nous avions eu auparavant de grands pharmaciens et de grands médecins, tel le professeur Alexandre. Tout cela n'a rien empêché !
Ce qui importe, c'est la transparence et la pertinence des nominations : il faut éviter qu'elles ne soient le fait de réseaux. Car vous le savez, monsieur le professeur Debré : dans les hôpitaux comme dans les universités, les réseaux fonctionnent bien…
Après avoir entendu les explications du ministre, je retire mes trois amendements. Cela dit, je ne suis pas totalement convaincu par les arguments de M. Bapt. Au niveau du sang, de l'HAS et de l'ANSM, il est bon qu'il y ait au moins un professionnel de santé, un scientifique, dans le binôme.
Bien entendu, on ne va pas prendre des incompétents ! Mais on ne va pas inscrire dans la loi « un professionnel de santé compétent » ! Cela me semble évident… Et je ne suis pas candidat, et vous non plus madame Lemorton ! Si l'on choisit quelqu'un, j'espère qu'il sera compétent, même lorsque c'est un énarque !
L'important est que, dans le binôme, il y ait au moins un professionnel de santé, que ce soit le président ou le directeur général, appelez cela comme vous voudrez. Il est vrai que cela ne relève pas du domaine législatif, mais d'un décret du Président de la République. Et lorsque le ministre dit qu'il ne faudrait pas se lier les mains, c'est justifié.
Voilà pourquoi je voulais évoquer ce sujet, et dire qu'il fallait mettre en place des gens compétents…
Évidemment. Comme l'a dit Mme Lemorton, il serait très gênant de nommer des incompétents et Dieu sait s'il y en a partout !
(L'amendement n° 188 est retiré.)
Notre amendement propose, après l'article 5, d'insérer l'article suivant : « Le président du conseil d'administration est un magistrat du Conseil d'État ».
Cela va de soi, cher collègue ! Mais la précision est utile !
À ce propos, l'actualité a révélé il y a quelques jours qu'un conseiller d'État pouvait aussi faire preuve d'inconséquence. Des écoutes téléphoniques dans le cadre d'une enquête ont révélé qu'un conseiller d'État, directeur général de L'INSERM, avait prêté son concours à la rédaction d'un rapport sénatorial sur l'affaire du Médiator au profit des laboratoires Servier. Si j'étais à la place du ministre, je dirais « sagesse », car je ne sais plus où est la sagesse dans cette affaire !
Aussi, compte tenu de cette actualité brûlante et assez désagréable, je retire mon amendement.
(L'amendement n° 76 est retiré.)
Cet amendement nous est cher depuis de nombreuses années.
Comme nous sommes dans l'Europe et que nous l'aimons, nous souhaitons mettre en ligne une base de données indépendante, exhaustive et objective sur les médicaments. Elle est attendue depuis très longtemps, mais elle n'arrive jamais…
Il ne vous a pas échappé qu'internet, qui fait la pluie et le beau temps, est devenu le premier médecin de notre pays, particulièrement chez les jeunes qui l'utilisent énormément et vont se renseigner sur des sites comme doctissimo.fr. et autres. Car vous pouvez taper le nom de n'importe quel médicament, jamais vous ne tomberez sur le site d'une agence sanitaire de l'État.
C'est un vrai problème. J'en ai déjà fait la démonstration à propos d'un vaccin, car on ignore quelle est la source des informations diffusées sur ces sites, dont on ne sait qui les alimente. Quand bien même ils ont la certification « Health On Net », on a bien vu qu'il y avait des failles dans le système. Voilà pourquoi nous attendons cette base de données médicamenteuses, objet de notre amendement.
Selon la directive européenne du 15 décembre 2010, « les États membres devraient mettre sur pied et tenir à jour des portails web sur les médicaments. »
L'article 106 de son chapitre II précise: « Chaque État membre met en place et gère un portail web national sur les médicaments, en liaison avec le portail web européen des médicaments (…) Les États membres utilisent ces portails web nationaux sur les médicaments pour rendre publics, au minimum, les éléments suivants :
« a)les rapports publics d'évaluation, ainsi qu'une synthèse desdits rapports ;
« b) les résumés des caractéristiques des produits et les notices ;
« c) des synthèses des plans de gestion des risques relatifs à des médicaments autorisés conformément à la présente directive ; (…)
« e) des informations relatives aux différents modes de modification des effets indésirables suspectés des médicaments(…). »
Si nous avions eu ce portail web, promis d'ailleurs par votre prédécesseur, Mme Bachelot, pour la fin 2009, cela vous aurait évité, monsieur Bertrand, une erreur de communication lorsque des dizaines de médicaments sont sorties sous surveillance de l'Agence. S'il y avait un portail facile d'accès, les Français sauraient que les médicaments sont sous surveillance – et c'est heureux – lorsqu'ils sont mis sur le marché : c'est une sécurité.
Ce portail…
Si j'avais su, je l'aurais fait moi-même !
Dont acte. Cela aurait pris du temps, mais je vous aurais aidé, monsieur le ministre !
Si vous acceptez notre amendement, nous serons très contents…
Dans le cas contraire, nous ne serons pas contents ; mais quoi qu'il en soit, nous attendons qu'une date soit fixée.
Favorable ! Nous avons l'intention de faire ce que vous demandez, madame Lemorton, et je l'avais déjà dit. Certes, vous vous demandez si cela se fera puisque ce n'est pas dans la loi. Cela ne relève pas de l'affectif (Sourires), mais la confiance ne se nourrissant pas de déclarations, je vous en apporte la preuve en donnant un avis favorable à votre amendement !
S'agissant des médicaments sous surveillance, si je l'avais su, je l'aurais fait moi-même. Lorsque cela a été fait la première fois, ce n'était pas forcément génial. Je ne suis pas sûr qu'il aurait été possible de faire beaucoup mieux, car c'est un changement sans précédent ; mais j'ai fait savoir au responsable qui l'avait annoncé à l'époque que je n'étais satisfait de la manière dont cela avait été lancé.
(L'amendement n° 218 est adopté.)
L'article 6 concerne la réalisation d'études après autorisation de mise sur le marché et prévoit que l'Agence pourra exiger ces études à tout moment, ce que je trouve très imprécis.
Les complications, les effets néfastes ou inattendus n'apparaissent souvent qu'après la mise sur le marché. En effet, les études cliniques préalables sont réalisées sur un nombre restreint de personnes. Les complications apparaissent lorsque le produit est consommé à grande échelle, en association avec d'autres médicaments qui peuvent se comporter, par exemple, comme des inducteurs enzymatiques ou apparaître en lien avec des anomalies génétiques.
On a vu, toujours avec le Médiator, que le laboratoire peut invoquer de bonnes raisons pour retarder ces études complémentaires pourtant indispensables. Certes, je reconnais qu'elles sont coûteuses, mais elles sont nécessaires pour assurer la sécurité des patients.
Il me paraîtrait sage, monsieur le rapporteur, que le texte de loi, au lieu d'indiquer « à tout moment », précise un délai de l'ordre de trois ou cinq ans pour ces études post-AMM indispensables, car « à tout moment » ne veut pas dire grand-chose.
L'article 6 ouvre la rubrique de l'autorisation de mise sur le marché. Nous entrons là dans le vif du sujet. En réalité, nous entrons dès à présent dans la partie post-AMM, autrement dit après l'autorisation de mise sur le marché.
Outre les amendements que nous avons déposés et que nous défendrons, je ferai deux observations.
D'abord, pour avoir participé à la mission d'information sur le Médiator, j'ai été frappé, notamment à la lecture du rapport de l'IGAS, par le mécanisme qui fait que les autorités sanitaires, quelles qu'elles soient, s'en remettent à tout instant au demandeur, c'est-à-dire au laboratoire titulaire de l'autorisation, pour réaliser des études, plus ou moins à leur demande, sans que des délais soient fixés ou que des sanctions interviennent.
L'alinéa 3 précise qu'après délivrance de l'autorisation prévue à l'article L. 5121-8, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé doit, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, exiger du titulaire de l'autorisation qu'il effectue, dans un délai qu'elle fixe, des études de sécurité post-autorisation et des études d'efficacité post-autorisation. Là encore, y compris après l'AMM, on s'en remet à des études qui seront effectuées par le titulaire de l'AMM. La puissance publique ne fait réaliser ni par un organe indépendant ni par elle-même les études en question.
Ma deuxième observation, qui est davantage une question, est tirée de l'étude d'impact que vous avez produite en annexe à votre projet de loi. Vous y donnez des indications chiffrées sur le nombre d'AMM délivrées et retirées ou suspendues en 2009 et 2010 suivant la procédure, qu'elle soit centralisée ou nationale. Il s'agit en quelque sorte d'un rapport d'activité chiffré de L'AFSSAPS pour les années 2009 et 2010.
Mais ce qui m'intéresserait maintenant, c'est de savoir comment vous envisagez l'avenir. Un projet de loi va modifier les règles du jeu. Par conséquent, l'étude d'impact doit nous donner des indications sur ce que vous en attendez. Attendez-vous une multiplication des dossiers d'AMM ou une forte restriction, une augmentation du nombre de retraits ou de suspensions ? Si oui, dans quelles proportions ? C'est le seul moyen dont nous disposons pour mesurer, le moment venu, vos objectifs à la réalité des choses quand la loi sera en application.
Comme l'a dit mon collègue Jean Mallot, il s'agit de la mise sur le marché du médicament.
La puissance publique s'est peu à peu désengagée et, au fond, nous sommes contraints, puisque la volonté politique ne suit pas, de laisser tout aux mains des industriels. Quand on donne une autorisation de mise sur le marché à un médicament, celui-ci arrive avec des contre-indications et des effets indésirables que seule gère l'industrie pharmaceutique.
Les Français doivent comprendre qu'un médicament, une fois dans sa vraie vie, peut faire l'objet de nouvelles indications, ou parfois présenter des effets indésirables inattendus. Cela peut arriver, reconnaissons-le, y compris avec des fabricants parfaitement honnêtes. Puis il y a ces industriels qui cachent des effets secondaires ou une bonne indication pour pouvoir prolonger le brevet quelques années après. C'est ce que l'on appelle « les brevets en grappes ». Cela a fait l'objet – je le rappelle ou je le dis pour ceux qui ne le savent pas – d'un très gros rapport de la Commission européenne il y a deux ans. Des perquisitions ont eu lieu dans les sièges sociaux des grandes firmes pharmaceutiques – je ne parle pas de la start up du coin qui fait de la véritable innovation –, qui ont permis de mettre à jour des contournements de génériques par le jeu de brevets en grappes : il est arrivé qu'une seule et même molécule fasse l'objet de six cents brevets ! Il ne faut pas manquer d'imagination !
Nous devons donc être encore plus stricts face à ce que l'industriel accepte de nous présenter. S'il y a le moindre doute sur un nouvel effet secondaire ou sur une nouvelle indication, qui aient éventuellement été cachés, il me semble important que la puissance publique, car ce sont des choix politiques – à savoir, le gouvernement en place, le ministre de la santé, la Direction générale de la santé, la sécurité sociale…que sais-je encore – vérifie en toute indépendance si, lors des tests du médicament sur les cohortes de patients, l'effet secondaire était avéré. Cela doit être obligatoire pour que les gens retrouvent confiance. Les industriels, j'ai l'humilité de le penser et la honte de le dire, sont bien plus puissants que nous. Vous connaissez, monsieur Bertrand, la puissance de ce lobby au niveau de l'Europe.
Cet amendement conditionne la délivrance de l'autorisation de mise sur le marché à la réalisation d'essais cliniques faisant apparaître une amélioration du service médical rendu par rapport aux médicaments de même catégorie. Nous sommes, avec cet amendement, en plein dans le débat qui nous anime depuis quelque temps.
Vous allez être satisfait, je crois !
Vous semblez empressé, monsieur le ministre, de me répondre que cette demande est justifiée. (Sourires) Je vous propose donc d'adopter cet amendement.
Défavorable. Cet amendement est satisfait par l'amendement n° 277 , deuxième rectification.
Satisfait, donc avis défavorable.
Cet amendement est très voisin de celui de notre collègue Muzeau. Le ministre et le rapporteur prétendant que l'amendement présenté par M. Muzeau est satisfait, je vais tenter de démontrer que ce n'est pas le cas. Nous avons précédemment expliqué tous les tenants et aboutissants de l'amendement n° 277 , deuxième rectification, du Gouvernement et avons donné les raisons pour lesquelles il ne nous satisfaisait pas et nous ne pouvions le voter. Nous souhaitons, en effet, que l'alinéa 1 de cet article 6 soit complété afin de prévoir « la réalisation d'essais cliniques versus des stratégies thérapeutiques déjà existantes, au plus près des conditions réelles de soins, pour la ou les mêmes pathologies. » L'ANSM doit pouvoir exiger la réalisation d'études de sécurité et qu'elles soient faites en comparaison avec des stratégies thérapeutiques déjà existantes.
Nous avons eu ce débat, je ne développerai pas davantage. Je rappelle, pour conclure, monsieur le président, que c'était une des préconisations essentielles du rapport de la MECSS pour 2008 rédigé par notre collègue Catherine Lemorton et adopté à l'unanimité.
(L'amendement n° 86 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 219 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 79 rectifié .
La parole est à M. Roland Muzeau, pour le soutenir.
Nous proposons d'insérer, après l'alinéa 1, l'alinéa suivant : « I bis. – Le deuxième alinéa du même article est supprimé. »
Rien ne justifie, en effet, que le demandeur d'une autorisation de mise sur le marché soit dispensé de produire certaines données et études, surtout lorsque les conditions de cette dispense sont fixées par voie réglementaire et échappent, de ce fait, à toute transparence.
(L'amendement n° 79 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Nous souhaitons, par cet amendement, que les autorisations de mise sur le marché ne soient pas renouvelées pour une période indéterminée après les cinq premières années de commercialisation. Nous proposons que la durée des AMM soit limitée à cinq ans et leur renouvellement conditionné à la réévaluation par l'ANSM des effets thérapeutiques positifs du médicament ou du produit, ainsi que de ses effets indésirables.
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 220 .
Nous ne pouvons pas donner un chèque en blanc, considérant que, je le rappelle, le post-AMM est essentiellement géré par l'industrie elle-même. On nous dit que, si des effets secondaires indésirables s'avèrent ou que la balance bénéfice-risque bascule du côté du risque, peut-être demandera-t-on à l'industriel de démontrer que le médicament est efficace. Mais, cela ne se passe que dans le pays de Candy, donc si tout va bien. Je ne fais pas aujourd'hui le procès de l'industrie pharmaceutique. Je ne suis pas à la tête de la Commission européenne et ce n'est pas moi qui ai demandé cette enquête, il y a deux ans. Un médicament peut très bien comporter des risques qui seront indétectables si certaines personnes ne font pas bien leur travail. Si l'on n'instaure pas une révision régulière et systématique, nous risquons de devoir faire face à une autre affaire Mediator. L'objet de cet amendement n'est pas d'embêter le monde, mais de faire remarquer que ce texte de loi ira dans le bon sens, à condition de ne tomber que sur des gens qui accomplissent parfaitement leur travail. Or nous n'en sommes pas sûrs. L'éthique de chacun, à tous les maillons de la chaîne, n'est pas forcément bonne à 100 %. Cet amendement permet de prévenir l'arrivée d'un autre médicament de type Mediator.
Avis défavorable. Le droit en vigueur prévoit, en effet, d'ores et déjà une réévaluation à cinq ans du médicament et le projet de loi permet une réévaluation du rapport bénéfice-risque à tout moment, dès lors que des doutes pèsent sur la nocivité du médicament. Pour certains médicaments, la réévaluation est à six mois.
Ces amendements sont par conséquent inutiles.
Même avis.
Je souhaite demander une précision à M. le rapporteur, lequel vient de nous répondre que la réévaluation quinquennale figure déjà dans le droit. Or nous savons parfaitement que, ces dernières années, cette règle a été non seulement inobservée, mais que la tendance européenne, sous la pression des laboratoires, a été d'abandonner cette notion de réévaluation systématique. Dans quel article du code cette réévaluation quinquennale obligatoire figure-t-elle ?
(L'amendement n° 77 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 220 n'est pas adopté.)
Je tiens à répondre à M. Bapt que cette mesure, tout comme la réévaluation à trois ans au moins pour la pharmacovigilance, figure dans la directive. Je vous préciserai tout à l'heure à quel endroit de ladite directive elle se trouve.
Je suis saisi d'un amendement n° 177 .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Cet amendement vise à maintenir la possibilité pour la nouvelle agence d'exiger ou non des études complémentaires relatives à la sécurité ou à l'efficacité d'un médicament.
Favorable.
M. le rapporteur a présenté cet amendement en son nom personnel. En effet, l'inverse a été décidé en commission. La commission a, en effet, estimé que ce devait être une obligation et non une possibilité. En effet, monsieur le ministre, ce projet de loi tend à renforcer la sécurité sanitaire et à rassurer nos concitoyens. Le rapporteur propose que la nouvelle agence puisse demander des études de sécurité post-autorisation s'il existe des craintes quant aux risques présentés par un médicament autorisé. Lorsqu'il existe des craintes peut-on ou doit-on agir ? Inscrire « peut » dans ce texte signifie qu'il est possible de ne pas demander d'études alors même qu'il existerait des craintes. En revanche, préciser « doit » entraîne l'obligation de recourir auxdites études.
L'alinéa 2 précise, quant à lui, que des études d'efficacité post-autorisation doivent être menées lorsque la compréhension de la maladie ou la méthodologie clinique indique que les évaluations d'efficacité antérieures pourraient devoir être revues de manière significative. Au lieu d'obliger à revoir, vous proposez, monsieur le rapporteur, de laisser la possibilité de ne pas le faire.
La commission a décidé au contraire, dans sa sagesse, de rendre obligatoires ces deux mesures.
J'adhère totalement aux propos de M. Préel. S'il existe vraiment des craintes quant au risque présenté, cela prouve qu'il y a eu des alertes de pharmacovigilance. S'il y a des doutes quant à l'efficacité du médicament sur la maladie, il convient aussi d'exiger des études complémentaires. Le directeur de l'Agence ne peut, je le pense, que les demander. Donc, il est préférable de préciser « doit ».
Cela relève de la responsabilité du directeur de l'Agence. C'est lui qui, selon les informations communiquées, se fera sa propre opinion et décidera s'il doit exiger un certain nombre d'études complémentaires
Si l'on nomme un directeur et qu'on supprime tous ses pouvoirs, il n'y a plus de directeur !
La commission n'a pas suivi le rapporteur et a adopté, dans sa grande majorité, un amendement différent. Nos institutions prévoient que nous travaillons, dans cet hémicycle, sur le texte tel qu'il est issu de la commission. Il est regrettable de constater que le travail de la commission soit remis en question, donc dévalorisé, par le rapporteur, et ce à titre personnel. C'est très ennuyeux.
Je suis assez sensible aux arguments de M. Préel, notamment. Nous avons passé, hier, toute notre soirée à dire que le politique devait reprendre la main sur les techniciens et les experts. Or M. le rapporteur demande que le choix soit laissé au directeur de l'Agence, donc à un expert. Le politique doit, je le pense, s'imposer. Ainsi, en cas de doute sérieux, l'Agence doit procéder à des vérifications.
Vous avez raison, monsieur Muzeau, les textes sont modifiés en commission. Mais les députés qui n'en sont pas membres doivent aussi pouvoir s'exprimer et donner un avis.
Quant au directeur de l'Agence, on ne peut pas le nommer et rogner toutes ses prérogatives, sauf à ce qu'il n'y ait pas de directeur de l'Agence. Nommons alors le ministre directeur de l'Agence ! L'aspect politique, administratif et scientifique, s'il est médecin, sera alors réglé ! Mme Lemorton a dit tout à l'heure qu'il fallait un directeur de l'Agence compétent. Cela entrera justement dans ses compétences !
Monsieur Bapt, voici ce que prévoit l'article L.5121-8 du code de la santé publique :
« L'autorisation est délivrée pour une durée de cinq ans et peut ensuite être renouvelée, le cas échéant, sans limitation de durée, dans des conditions fixées par un décret en Conseil d'État, sauf si l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé décide, pour des raisons justifiées ayant trait à la pharmacovigilance, de procéder à un renouvellement supplémentaire »…
Pour ce qui est de la réévaluation, la législation française est en deçà de ce que souhaite l'Europe en matière de sécurité sanitaire.
La directive 200183CE stipule clairement en son article 24 que « l'autorisation est valable pour cinq ans et renouvelable par périodes de cinq ans, sur demande introduite par le titulaire au moins trois mois avant la date d'expiration, après examen par l'autorité compétente d'un dossier reprenant notamment l'état des données de la pharmacovigilance et les autres informations pertinentes pour la surveillance du médicament. »
Notre code prévoit une réévaluation au bout de cinq ans, mais pour une durée illimitée, et je reprends le même argumentaire : si certains ne font pas bien leur travail, un produit pourra vivre sa vie dix, quinze ou vingt ans. Il ne sera jamais réévalué et la notice ne sera jamais revue, comme ce fut le cas pour le Mediator.
Au bout de cinq ans, on n'avait pas encore décelé les hypertensions artérielles pulmonaires ou les valvulopathies dues aux anorexigènes. Une réévaluation quinquennale est donc nécessaire mais elle n'est pas prévue par la disposition de notre code que vient de nous lire le rapporteur.
Peut-être pourriez-vous présenter dès maintenant un amendement, monsieur le ministre, pour que notre législation soit conforme à la directive européenne, ce qui serait une bonne chose. C'était d'ailleurs l'une des propositions de la mission d'information.
Monsieur le président, je vous demande une suspension de séance de cinq minutes.
Article 6
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures trente-cinq, est reprise à dix-huit heures quarante-cinq.)
Pour tenir compte de ce qui a été dit par Mme Lemorton et par le rapporteur, monsieur le président, je vais déposer un amendement prévoyant qu'en conformité avec la directive européenne, l'autorité procédera tous les cinq ans à un renouvellement. Je vous le transmettrai dès qu'il sera rédigé.
Mon rappel au règlement a pour but de clarifier nos débats. Si j'ai bien compris, la suspension de séance demandée par le ministre a eu pour but d'apporter une précision à la suite d'une affirmation peut-être un peu hâtive du rapporteur sur la question des cinq ans, se rapportant à notre amendement n° 220, qui a été rejeté. C'est sur ce point que monsieur le ministre souhaite, à juste titre, revenir et, pour cela, il entend présenter tout à l'heure, ainsi qu'il vient de l'indiquer, un amendement du Gouvernement.
En revanche, dans le déroulement de nos travaux, nous en étions à l'amendement n° 177, sur lequel je souhaite pouvoir m'exprimer avant que nous passions au vote.
L'interprétation qui vient d'être donnée par un membre éminent de l'opposition correspond-elle bien à votre souhait, monsieur le ministre ?
Absolument.
Nous en revenons donc à la discussion de l'amendement n° 177 présenté par M. Robinet à titre personnel.
La parole est à M. Jean Mallot.
Par cet amendement présenté par M. Robinet à titre personnel, ce dernier souhaite que l'Assemblée revienne sur une décision de la commission, laquelle avait, à l'alinéa 3 de l'article 6, remplacé le mot « peut » par le mot « doit ».
Cela signifie que, dans les cas où existeraient « des craintes quant aux risques présentés par un médicament autorisé », l'agence pourrait mais ne devrait pas exiger des études. Il en irait de même « lorsque la compréhension de la maladie ou la méthodologie clinique » ferait « apparaître que les évaluations d'efficacité antérieures pourraient devoir être revues de manière significative ».
(Mme Catherine Vautrin remplace M. Jean-Pierre Balligand au fauteuil de la présidence.)
Dans ces cas graves, le directeur de l'agence pourrait donc ne rien faire. Nous pensons que ce n'est pas acceptable et c'est pourquoi la commission a voté l'amendement remplaçant « peut » par « doit » dans le texte initial. C'est pour la même raison que nous voterons contre l'amendement n° 177.
Si l'on vous suivait, monsieur Mallot, il faudrait totalement réécrire l'article 6, notamment son alinéa 4 – « des études de sécurité post-autorisation s'il existe des craintes quant aux risques de sécurité présentés par un médicament autorisé » – et son alinéa 5 – « des études d'efficacité post-autorisation lorsque la compréhension de la maladie ou la méthodologie clinique indique que les évaluations d'efficacité antérieures pourraient devoir être revues de manière significative ».
La rédaction laisse bien entendre que le directeur de l'agence a, non peut-être une liberté, mais du moins un pouvoir…
Chers collègues, laissez M. le rapporteur aller au terme de son explication ! Vous pourrez reprendre la parole ensuite.
Si le directeur « doit », c'est à chaque fois. L'article est précis : il s'agit des cas où des craintes existent ou bien lorsque des méthodologies cliniques feraient apparaître que les évaluations antérieures devraient être revues de manière significative. Il faut donc laisser au directeur le pouvoir de décider si une réévaluation de la molécule s'impose ou non. Il n'est pas obligé de le faire pour l'ensemble de la pharmacopée.
Dans les cas évoqués aux alinéas 4 et 5 de cet article, c'est-à-dire quand des craintes existent, nous pensons que l'agence doit réagir. Nous ne souhaitons pas qu'elle puisse rester sans rien faire.
L'objet de ce texte, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, est de redonner confiance à la population. Il ne convient donc pas d'écrire qu'en cas d'effets néfastes avérés, le directeur de l'agence « peut » faire procéder à des études nouvelles, mais qu'il le « doit ».
Je suis d'accord avec le rapporteur. Il ne s'agit pas d'ennuyer qui que ce soit, mais si la directive dit « peut », on ne peut écrire « doit ». C'est aussi simple que cela.
Ce n'est donc pas autre chose qu'un problème de conformité. Il ne faut pas s'exposer juridiquement.
(L'amendement n° 177 n'est pas adopté.)
Cet amendement vise à rendre obligatoires les études sur le bénéfice-risque et l'amélioration du service médical rendu par rapport à un comparatif tous les trois ans. C'est peut-être un peu excessif et je crois d'ailleurs, monsieur le ministre, que vous présenterez un amendement pour résoudre ce problème. Je pourrais donc retirer le mien.
Défavorable. L'amendement du Gouvernement répond en effet au souci de M. Préel.
(L'amendement n° 96, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Il s'agit de préciser que des études post-autorisation sont nécessaires dès que des signalements d'effets néfastes ont été constatés dans le cadre de la pharmacovigilance.
(L'amendement n° 97, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
Il s'agit d'un amendement de coordination.
(L'amendement n° 236, accepté par la commission, est adopté.)
Je suis saisi de deux amendements, nos 80 rectifié et 222, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Roland Muzeau, pour soutenir l'amendement n° 80 rectifié.
Avec votre permission, madame la présidente, je présenterai ensemble les amendements nos 80 rectifié et 78 rectifié.
Le nouvel article L. 5121-8-1 du code de la santé publique prévoit que, suite à la délivrance d'une autorisation de mise sur le marché, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé devra exiger du titulaire de cette autorisation qu'il effectue des études de sécurité et d'efficacité post-autorisation.
Nous proposons, par l'amendement n° 80 rectifié, que l'agence puisse exiger du titulaire un suivi spécifique du risque, de ses complications et de sa prise en charge médico-sociale par le biais d'un registre de patients atteints lorsque le médicament, bien qu'autorisé, est susceptible de provoquer un effet indésirable grave.
Dans la mesure où un médicament peut être autorisé et maintenu dès lors que la balance bénéfice-risque est ou reste positive, il s'agit, par cet amendement, de responsabiliser le producteur de telle ou telle molécule sur le suivi du risque et de ses conséquences pour les victimes, notamment en finançant les études cliniques permettant d'améliorer leur prise en charge thérapeutique.
Notre rapporteur, répondant à notre collègue Jean Mallot en commission sur ce sujet, a donné un avis défavorable au motif que ce registre serait déjà prévu à l'article R. 5121-37-2 du code de la santé publique. Or cet article dispose : « Après la délivrance de l'autorisation de mise sur le marché, le directeur général de l'agence peut, dans l'intérêt des malades ou pour tout autre motif de santé publique, exiger la mise en place d'un plan de gestion de risque. » Notre amendement est donc plus précis dans sa rédaction et donne une force législative à une compétence de l'agence en réponse à un enjeu fort de santé publique.
L'amendement n° 78 rectifié vise, quant à lui, à ajouter un article au code de la santé publique prévoyant que les associations agréées de patients puissent saisir l'ANSM pour lui demander de faire application de l'article L. 5121-8 et d'effectuer des études de sécurité et d'efficacité post-autorisation.
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 222.
M. Muzeau a bien présenté les enjeux. Prenons l'exemple du vaccin de l'hépatite B, au sujet duquel Mme Bachelot avait d'ailleurs accepté un amendement. Il ne s'agit pas d'en remettre en cause la balance bénéfice-risque, bien que deux laboratoires ayant commercialisé ce vaccin soient mis en examen depuis le 1er février 2008, ne l'oublions pas, pour tromperie aggravée sur la balance bénéfice-risque. Apparemment, rien n'a bougé.
Puisque rien n'a bougé, nous pouvons toujours penser, allez, que la balance bénéfice-risque est bonne. La notice indique la possibilité de scléroses en plaques, certes très rares, mais très graves. Il faut donc suivre ces patients. Si l'un d'eux est un jour atteint d'une sclérose en plaques, un suivi social doit également être assuré : une telle pathologie ne permet pas de travailler comme la plupart des gens en bonne santé. Ce suivi est d'autant plus important que le vaccin peut être obligatoire dans le cadre d'une activité professionnelle. C'est ainsi que Mme Bachelot avait accepté l'indemnisation des pompiers obligés de se faire vacciner et présentant des troubles invalidants de cette nature.
Défavorable. Ce type de registre est déjà prévu par le droit en vigueur. Il est utilisé pour certaines pathologies et inclut tous les patients faisant l'objet du même traitement thérapeutique. C'est l'article R. 5121-37-2 du code de la santé publique.
(Les amendements nos 80 rectifié et 222, repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 223.
Nous souhaitons, par cet amendement, ajouter à l'article un alinéa ainsi rédigé : « Les études mentionnées aux 1° et 2° sont faites au plus près des conditions réelles de soins, c'est-à-dire en comparaison avec les traitements de référence disponibles lorsqu'ils existent. »
Je précise qu'il ne s'agit pas seulement de traitements médicamenteux, et je citerai à cet égard Clémence Thébaut, chef de projet au sein du service « Évaluation économique et santé publique » de la Haute autorité de santé, qui, dans un article publié par la HAS, « Changer de regard sur les thérapeutiques non médicamenteuses », écrit : « Les freins sont liés à la représentation que se font médecins et patients de l'importance du médicament dans le traitement, mais aussi à l'investissement personnel et financier que ces thérapeutiques demandent souvent au patient. » Elle précise qu'un autre obstacle est la méconnaissance des thérapeutiques non médicamenteuses par les professionnels de santé eux-mêmes, qui n'y sont pas assez formés et manquent de données d'efficacité clinique étayées.
Lorsque nous demandons des études post-AMM, notre souci pourrait aussi s'étendre au développement des stratégies non médicamenteuses car, je le répète, nous devenons les champions du monde en matière de consommation de médicaments.
(L'amendement n° 223, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 78 rectifié et 221 rectifié.
L'amendement n° 78 rectifié a déjà été présenté par M. Muzeau.
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 221 rectifié.
Il est défendu.
(Les amendements identiques nos 78 rectifié et 221 rectifié, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)
Cet amendement précise le caractère quinquennal du réexamen de l'AMM.
Votre amendement, monsieur le ministre, rouvre la question qui avait été close quelque peu rapidement tout à l'heure par le rejet de notre amendement n° 220. Mais l'article L.5121-8 du code de la santé publique dispose, en son alinéa 4, que « l'autorisation est délivrée pour une durée de cinq ans et peut ensuite être renouvelée, le cas échéant, sans limitation de durée […] ». Notre amendement 220 visait à remplacer les mots : « sans limitation de durée », par les mots : « pour une durée de cinq ans ». L'alinéa 4 aurait ainsi été rédigé : « L'autorisation est délivrée pour une durée de cinq ans et peut ensuite être renouvelée, le cas échéant, pour une nouvelle durée de cinq ans […] ». Votre amendement est assez différent puisqu'il conserve la formule : « sans limitation de durée » sauf, selon l'article du code ainsi modifié, « si l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé décide, pour des raisons justifiées ayant trait à la pharmacovigilance, de procéder à un renouvellement quinquennal supplémentaire ». La durée illimitée demeurerait donc le droit commun…
En effet.
…alors que nous, nous souhaitions qu'elle soit supprimée et remplacée par une durée de cinq ans. Ce n'est pas la même chose.
Monsieur Mallot, il faut prendre la bonne directive : elle prévoit le renouvellement « pour une durée illimitée sauf si l'autorité nationale compétente décide […] un renouvellement quinquennal ». Je l'ai expliqué pendant la suspension de séance et je peux vous en transmettre le texte. Nous prévoyons donc que le renouvellement se fera bien de façon quinquennale et nous serons ainsi en conformité avec la directive tout en donnant droit à la demande exprimée dans l'amendement n° 220. Nous sommes, je le répète, en conformité avec la directive tout en étant bien dans la logique d'un renouvellement quinquennal.
N'hésitez pas à faire confiance, monsieur Mallot.
Mais vous-même avez dit que vous n'étiez pas éternel, monsieur le ministre ! (Sourires.)
J'ai une question à vous poser, monsieur le ministre, pour que les choses soient vraiment claires entre nous : un médicament qui arrive sur le marché sera-t-il révisé systématiquement tous les cinq ans si notre pays le décide ?
Nous sommes d'accord. Une telle révision aura donc lieu même s'il n'y a pas d'effets indésirables qui seraient revenus du terrain ou de balance bénéfices-risques dont un plateau commencerait à pencher du mauvais côté.
Tout médicament mis sur le marché en France sera revu automatiquement tous les cinq ans. Pour moi, nous nous sommes mis d'accord là-dessus.
Il y a encore une divergence d'appréciation entre nous. Je demande la réserve des votes sur l'amendement et sur l'article, madame la présidente, parce que je ne veux pas qu'il y ait d'ambiguïté sur un tel sujet. Nous travaillons un peu dans l'urgence, mais ce point mérite une clarification complète.
Vous voyez que notre motion de renvoi en commission n'était pas inutile, monsieur le ministre !
Si, monsieur Muzeau, parce que l'adoption de votre motion aurait retardé les débats et je ne sais pas si votre groupe aurait alors été au complet comme en ce moment. (Sourires.)
Monsieur le ministre, pensez-vous que nous pourrons reprendre l'examen de l'article 6 à vingt et une heures trente ?
Sans aucun problème, madame la présidente.
(Le vote sur l'amendement n° 259 est réservé.)
(Le vote sur l'article 6 est réservé.)
Cet article est très important puisqu'il fixe les conditions de suspension, de retrait ou de modification de l'autorisation de mise sur le marché d'un médicament.
Les alinéas 3 et 4 m'inquiètent. Prévoir de suspendre, de retirer ou de modifier l'autorisation pour un médicament nocif conduit à se demander pourquoi il a été mis sur le marché – d'où l'intérêt de la révision quinquennale… Il n'est même pas question de balance bénéfices-risques ou d'effets indésirables : il s'agit d'un médicament nocif. Autre raison de retrait prévue à l'alinéa 4 : le médicament ne permet pas d'obtenir de résultats thérapeutiques. Il me semble pourtant que les essais avant AMM ont pour but de prouver qu'il y a eu de tels résultats, ce qui a justifié son autorisation. Je ne comprends donc pas ce que cela veut dire. Dans trente ans, relisant cela, les juristes se demanderont si nous n'étions pas tombés sur la tête... D'ici là, je ne sais pas ce que l'Agence du médicament va faire de ces deux alinéas. J'espère qu'elle n'aura jamais à les utiliser pour retirer un médicament, car cela signifierait qu'on aurait encore une fois trop laissé entre les mains de l'industrie pharmaceutique les autorisations de mise sur le marché et la présentation de ses tests cliniques.
Ensuite, il y a le critère prévu à l'alinéa 6 : « La spécialité n'a pas la composition qualitative et quantitative déclarée ». Certes, je serai moins sévère dans mon appréciation parce qu'une telle disposition correspond aux contrôles de l'Agence sur des lots de médicaments relevant d'une spécialité ; mais je ne voudrais pas que cet alinéa soit le cheval de Troie des industries du princeps pour freiner l'arrivée du générique. Le groupe socialiste sera très vigilant sur ce point car les industries du princeps sont dans notre pays particulièrement ingénieuses pour contourner les génériques.
Notre amendement propose que l'autorisation de mise sur le marché soit aussi refusée lorsque « le médicament n'a pas fait la démonstration d'un progrès thérapeutique par rapport aux médicaments de comparaison déjà autorisés et commercialisés lorsqu'ils existent ». Nous retrouvons là le débat sur les tests contre comparateur. Je ne vais pas reprendre toute notre démonstration, et je pense que vous approuverez mon souci de brièveté et de synthèse,…
…mais nous n'hésiterons pas à répondre au rapporteur et au ministre s'ils ne font pas droit à notre amendement.
Avis défavorable puisque, conformément à l'amendement du Gouvernement que nous avons adopté à l'article 4, la nouvelle agence pourra demander des études comparatives pré et post AMM.
Même avis.
(L'amendement n° 226 n'est pas adopté.)
Cet amendement vise à modifier l'alinéa 2 afin que la suspension, le retrait ou la modification de l'autorisation prévue à l'article L. 5121-8 s'applique aussi à son renouvellement. Il s'agit en effet de prévoir les deux cas.
Avis défavorable. En effet, une telle précision est inutile car la suspension ou la modification de l'AMM est possible à tout moment pour des raisons de santé publique.
Oui, madame la présidente. Vous rendez-vous compte, monsieur Mallot, des conséquences de votre amendement ? Pour suspendre l'AMM, on devrait attendre la date du renouvellement alors qu'il faut pouvoir le faire à tout moment.
(L'amendement n° 227 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 39 .
La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
Il vise à rappeler l'obligation de respect de la procédure contradictoire avant toute suspension, retrait ou modification.
Défavorable.
L'article 7 énumère les cas dans lesquels l'autorisation de mise sur le marché peut être retirée ; entre autres, lorsque le médicament en question ne permet pas d'obtenir de résultats thérapeutiques. L'effet placebo pouvant être considéré comme un effet thérapeutique, cet amendement propose de préciser que les médicaments dont l'effet n'est pas supérieur à celui d'un placebo feront l'objet d'un retrait de leur AMM.
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 228 .
À propos de cet amendement, on m'a renvoyé en commission à une contradiction qui n'en est pas une. Chacun sait que dans les stratégies thérapeutiques existantes, en particulier les stratégies médicamenteuses, on utilise sur plusieurs pools de patients restreints, dans certaines pathologies, des médicaments placebo pour éviter la dépendance, notamment lorsqu'il s'agit de psychotropes. Ces stratégies existent pour le bien du patient. Or l'alinéa dans sa rédaction actuelle pourrait les empêcher. Certes, elles sont rares, mais elles servent parfois. Ainsi, on ne pourrait plus utiliser de médicaments placebo pour les patients qui dépendent des hypnotiques à forte dose alors que les professionnels de santé utilisent une telle stratégie : un soir sur deux, ils donnent un hypnotique et le soir d'après un placebo pour, peu à peu, diminuer la dépendance. Je crains fort que le rejet de ces deux amendements remette en cause ce genre de stratégies.
J'appelle votre attention, madame Lemorton, sur la différence entre intérêt thérapeutique et effet thérapeutique. Le texte de la commission renvoie à l'intérêt thérapeutique, notion beaucoup plus large qui inclut l'effet thérapeutique. L'avis est donc défavorable.
L'alinéa 7 se réfère à l'article L. 5121-8-1, mais cet amendement vise à compléter les cas dans lesquels il sera possible pour l'ANSM de suspendre ou de retirer une AMM. Il convient en effet d'y ajouter le non-respect de deux autres articles, ceux qui prévoient d'une part l'obligation de prévenir l'ANSM de toute interdiction ou restriction imposée par l'autorité compétente de tout pays dans lequel le médicament à usage humain est mis sur le marché et de toute autre information nouvelle qui pourrait influencer l'évaluation des bénéfices et des risques du médicament à usage humain concerné ; et d'autre part l'obligation de lui transmettre quand elle le demande des données démontrant que le rapport bénéfices-risques reste favorable.
Sur le fond, je comprends vos motivations, monsieur Mallot, mais accepter cet amendement reviendrait à accepter une application non harmonisée des règles de retrait et de suspension des AMM au sein de l'Union européenne. Par ailleurs et surtout, nous sommes forcés de nous limiter à la transposition de la directive. Tout titulaire dont l'AMM serait suspendu ou retiré pour les motifs que vous proposez obtiendrait gain de cause devant les juridictions européennes.
L'option choisie a donc été de sanctionner les comportements tels que l'absence d'envoi d'informations permettant de réévaluer la balance bénéfices-risques ou la non-transmission d'informations sur l'arrêt de la commercialisation dans un autre État membre. Avis défavorable.
(L'amendement n° 229 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 232 .
Cet amendement vise à insérer, après l'alinéa 7, trois alinéas visant à renforcer la sécurité sanitaire vis-à-vis de l'industriel qui aura commercialisé le médicament incriminé. L'une des faiblesses de la France, en effet – même si elle n'est pas le seul pays dans ce cas –, consiste à laisser la phase qui précède l'autorisation de mise sur le marché aux mains de l'industrie du médicament. Les autorités publiques doivent ensuite contrôler la phase qui suit l'AMM et par conséquent tâcher de repérer ce qui ne va pas en s'adressant à l'industriel pour savoir si son médicament est toujours bon !
Il s'agirait donc d'ajouter, après l'alinéa 7, trois autres motifs de suspension, de retrait ou de modification : quand le caractère erroné ou trompeur des renseignements fournis lors de la demande d'autorisation de mise sur le marché est avéré, quand la non-conformité de l'étiquetage ou de la notice du médicament est avérée, enfin quand est avérée la nécessaire mise en conformité de l'autorisation de mise sur le marché sur la base d'une décision d'arbitrage.
Il convient de pousser l'industrie pharmaceutique à présenter des demandes d'AMM comportant tous les renseignements nécessaires, et donc d'éviter qu'elle fasse pression sur les personnels de l'INSERM, par exemple. On m'a en effet rapporté que certains laboratoires, en mettant en forme les demandes d'AMM, découvrent des effets secondaires cachés par l'industriel qui, dès lors, menace les personnels des laboratoires en question de ne pas les rémunérer s'ils révèlent ces effets secondaires.
Il faut donc enjoindre l'industriel au respect maximal d'une certaine éthique quand il dépose ses demandes d'AMM.
Même avis.
(L'amendement n° 232 n'est pas adopté.)
Il s'agit de prévenir la réédition d'affaires comme celle du Mediator, parfois qualifiée, à juste titre, de drame. Nous voulons ajouter des motifs de suspension ou de retrait d'AMM à l'énumération figurant à l'article 7, notamment – il s'agirait d'un 6° – lorsque « la forme pharmaceutique ou le conditionnement de la spécialité pharmaceutique rendent défavorable le rapport entre le bénéfice et les risques du médicament, particulièrement en raison de la survenue d'erreurs aux conséquences graves » et, septièmement, quand « un usage habituel hors autorisation de mise sur le marché du médicament est nocif ».
Si nous reviendrons, à l'article 11, sur la question très sensible de la prescription hors AMM, nous n'en souhaitons pas moins l'évoquer dès à présent.
(L'amendement n° 231 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 230 .
Cet amendement vise à renforcer la démocratie sanitaire. Ce sont les utilisateurs des médicaments qui parfois les connaissent le mieux, notamment quant à leurs effets secondaires et indésirables. Nous souhaitons compléter l'article 7 par l'alinéa suivant : « L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé peut être saisie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, par une association agréée au titre de l'article L. 1114-1 d'une demande visant à ce qu'elle fasse application du présent article. Le refus de prendre la décision demandée ainsi que les motifs attachés à cette décision sont rendus publics. »
Nous pouvons faire confiance aux associations de patients, puisqu'elles sont agréées, dès lors que leur financement est transparent. Quand les patients ont utilisé un médicament pendant des années – les associations dont il est ici question rassemblent bien sûr toujours des personnes affectées de maladies chroniques –, ils savent de quoi ils parlent et sont donc capables de saisir l'Agence au même titre que des médecins ou des visiteurs médicaux ou encore qu'une industrie pharmaceutique pour peu qu'elle soit honnête sur les effets secondaires de son médicament.
Cet article apporte des compléments sur la manière dont les entreprises doivent informer l'Agence du médicament sur certains dysfonctionnements, pour lui permettre de réaliser son travail. Il apporte en outre des précisions sur la façon dont l'Agence réagit à ces données.
Nous avons vu dans l'affaire dite du Mediator à quel point c'était nécessaire puisque la non-transmission d'informations – je n'irai pas jusqu'à prononcer le mot de dissimulation, même s'il n'est pas trop fort – de l'entreprise Servier à l'égard des autorités sanitaires, a conduit à la situation que nous regrettons et qui a causé des dégâts considérables auprès des patients.
Il est nécessaire que l'entreprise communique immédiatement à l'Agence des éléments d'information sur l'interdiction ou des restrictions imposées dans un pays étranger de façon que les autorités sanitaires françaises prennent les décisions qui s'imposent tenant compte de ces informations.
Ensuite, l'alinéa 3 précise qu'« afin de pouvoir évaluer en continu le rapport entre le bénéfice et les risques liés au médicament », l'Agence « peut à tout moment demander au titulaire de l'autorisation de mise sur le marché de transmettre des données démontrant que ce rapport reste favorable ». Nous retrouvons là l'un des mécanismes regrettables qui ont conduit aux dysfonctionnements que nous savons concernant le Mediator, dysfonctionnements que ces mécanismes ont même entretenus. À tout moment, on demande en effet au titulaire de l'AMM de justifier lui-même le caractère favorable du rapport entre le bénéfice et les risques liés au médicament alors qu'il nous semble qu'une telle étude devrait être réalisée de façon plus indépendante.
Cela nous ramène à notre discussion sur l'article 1er, autrement dit à l'institutionnalisation du conflit d'intérêts. On demande au titulaire de l'autorisation de mise sur le marché de démontrer que le rapport entre le bénéfice et les risques liés au médicament demeure favorable. Or il y a peu de chances pour qu'il s'échine à démontrer le contraire.
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 233 .
On inscrit dans le marbre le conflit d'intérêts.
Le présent amendement vise à compléter l'alinéa 3 par les mots : « en fournissant des données d'évaluation clinique recueillies au plus près des conditions réelles de soins, c'est-à-dire en comparaison aux traitements de référence disponibles. » D'autres personnes que les industriels du médicament en question devraient en effet participer à l'évaluation du rapport entre le bénéfice et les risques liés au médicament. Il s'agit d'obtenir plus de transparence.
Avis défavorable puisque cet amendement est satisfait par l'amendement n° 277 voté à l'article 4.
Nous en venons à l'article 9 bis.
La parole est à M. Roland Muzeau, pour soutenir l'amendement n° 54 .
Aujourd'hui, l'appréciation de l'amélioration du service médical rendu d'un médicament, préalable à la détermination du prix du médicament et de son admission au remboursement par l'assurance maladie de la sécurité sociale, est fondée dans la plupart des cas sur une comparaison avec des placebos. Les auteurs de cet amendement souhaitent que ne soient admis à remboursement que les médicaments apportant une amélioration significative du SMR par rapport aux médicaments existants.
(L'amendement n° 54 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 224 .
À l'alinéa 2, après le mot : « thérapeutique », il s'agit d'insérer les mots : « lorsqu'elles existent ». Ayant entendu l'argument qu'on nous a souvent opposé, puisque nous sommes raisonnables, nous tenons compte des stratégies thérapeutiques lorsqu'elles existent.
(L'amendement n° 224 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
Cet amendement vise à appliquer l'une des préconisations de la MECSS dans un rapport adopté par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales le 30 avril 2008.
Il s'agit de compléter l'article 9 bis par la disposition suivante : « La Haute autorité de santé tient à jour, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État, une liste des médicaments classés selon le niveau d'amélioration du service médical rendu pour chacune de leurs indications. »
Nous souhaitons entretenir une plus grande transparence sur la question du SMR et de la qualification des médicaments qui en dépend.
Même avis.
J'appelle votre attention sur la grande importance de cet amendement. La disposition selon laquelle « La Haute autorité de santé tient à jour, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État, une liste des médicaments classés selon le niveau d'amélioration du service médical rendu pour chacune de leurs indications » éviterait sans doute cette particularité française de l'innovation.
Prenons l'exemple du Multaq, particulièrement sur la sellette, beaucoup mieux remboursé que l'Amiodarone – dont le nom de spécialité est Cordarone, génériqué. Il a été mis sur le marché à un prix équivalent à six ou sept fois celui du générique. Si la Haute autorité de santé, qui dispose de cette compétence médico-économique, avait pu classifier le Multaq, les médecins auraient été moins tentés d'en élargir la prescription immédiatement, l'industrie ayant soutenu que ce médicament était bien meilleur que l'Amiodarone. Or, on se rend compte que ce médicament n'est pas si bon que cela, qu'il a des effets secondaires, qu'il est beaucoup plus cher. Et je ne suis pas sûre que ni la santé publique ni les comptes publics y aient gagné quelque chose. Je sais qu'une réévaluation est en cours, mais il reste que nous avons là un exemple typique qui montre pourquoi il serait bon, puisque les logiciels d'aide à la prescription vont être certifiés, que la HAS puisse inscrire ces informations dans ces LAP. Cela aiderait les médecins à y voir un peu plus clair dans une information que vous voulez indépendante, objectif que nous n'avons pas encore forcément atteint.
Défavorable. En fin de compte, je trouve que cet amendement est restrictif. Car sur le portail, il n'y aura pas que l'ASMR. Il y aura d'autres dimensions. Voilà pourquoi je pense sincèrement que votre amendement est plus restrictif que le dispositif qui sera retenu.
(L'amendement n° 225 n'est pas adopté.)
(L'article 9 bis, amendé, est adopté.)
Nous en venons à l'examen de l'article 10.
La parole est à M. Jean Mallot, inscrit sur l'article.
En réalité, madame la présidente, je saisis l'occasion de l'article 10 pour m'exprimer a posteriori sur l'article 9 bis. Je voulais souligner qu'il constitue une avancée. Il résulte d'un amendement que nous avions déposé, qui avait été adopté en commission, et que nous venons de préciser en ajoutant les mots : « lorsqu'elles existent ».
Sera ainsi insérée dans le code de la sécurité sociale une disposition précisant que l'amélioration du service médical rendu s'appuiera sur « la réalisation d'essais cliniques versus des stratégies thérapeutiques, lorsqu'elles existent, pour la ou les mêmes pathologies. » On entre ainsi dans la comparaison, qui nous paraît être de bon aloi.
(L'article 10 est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 176 de M. Robinet portant article additionnel après l'article 10.
La parole est à M. Arnaud Robinet, rapporteur.
Cet amendement vise à sécuriser l'exécution des préparations pour les pharmaciens.
L'exécution des préparations stériles ou des préparations à base de substances dangereuses est soumise à autorisation des directeurs des agences régionales de santé, les fameuses ARS. Les officines réalisant ces activités avaient jusqu'au 24 avril 2010 pour transmettre au directeur général de l'ARS leur demande d'autorisation. Or, à ce jour, la grande majorité des pharmaciens d'officine n'ont pas déposé de demande d'autorisation. Cet amendement vise à mettre fin à l'insécurité juridique dans laquelle se trouvent les pharmaciens d'officine – vos collègues, madame Lemorton –, en simplifiant le régime d'autorisation par les ARS.
Favorable.
(L'amendement n° 176 est adopté.)
Nous en venons à l'examen de l'article 11.
La parole est à M. Jean Mallot, inscrit sur l'article.
Cet article porte sur la prescription hors AMM. Je vais reprendre très brièvement mon argumentation, puisque M. le ministre ne m'a pas totalement répondu lors de l'échange que nous avons eu à l'occasion de la discussion générale.
La prescription hors AMM – dont on sait qu'elle est au coeur de l'affaire du Mediator, avec tous les paradoxes que cela comporte, d'ailleurs – ne peut pas être purement et simplement interdite. Il est des cas dans lesquels elle est opportune. Simplement, cet article prévoit qu'elle doit être justifiée. Nous y reviendrons dans les débats.
Il y a un point qui fait discussion, et sur lequel je reviendrai à nouveau quand nous examinerons l'article 16 : il s'agit du lien en quelque sorte automatique que le dernier alinéa de cet article établit entre le fait de prescrire hors AMM – de façon justifiée, et en inscrivant sur l'ordonnance la mention « Prescription hors AMM » – et le caractère non remboursable du médicament. Ce lien automatique ne nous paraît pas fondé. J'aimerais entendre le ministre sur ce point.
Tout d'abord, d'une certaine manière, dès l'instant où il y aura un lien automatique entre la mention « hors AMM » et le non remboursement, on peut craindre que beaucoup de prescripteurs ne portent pas cette mention, justement pour que le médicament soit remboursé. Et alors, nous retombons dans la pratique antérieure.
Deuxièmement, ce lien direct ne paraît pas justifié lorsque la prescription hors AMM est elle-même justifiée. Ou bien une prescription hors AMM est justifiée par le prescripteur, et alors il n'y a aucune raison de ne pas la rembourser ; ou bien elle n'est pas justifiée, et alors elle n'a pas à être prescrite.
Ce lien automatique mérite discussion. Il nous gêne beaucoup.
Je crois qu'il faut remettre les choses à l'endroit. Durant tout l'été, les entreprises du médicament se sont livrées à une campagne, cela n'aura échappé à personne. Chaque parlementaire a reçu une lettre du LEEM disant que ce projet de loi empêcherait nos concitoyens d'accéder à l'innovation thérapeutique. Ensuite, les entreprises ont évidemment mobilisé les syndicats de salariés. Des associations de patients, qu'elles financent, nous ont interpellés, affolées. Je les comprends, notamment les associations de patients chroniques utilisant des hormones de croissance. Il faut redire ici que ces hormones font seulement l'objet d'une réévaluation par l'AFSSAPS, qui ne fait là que son travail.
Cette campagne délétère des entreprises du médicament à l'encontre de ce projet de loi a créé une peur chez nos concitoyens, ce que je trouve absolument inacceptable, monsieur le ministre. J'espère que vous partagez la même position. Et je remercie l'AFSSAPS d'avoir, dans des communiqués de presse, rassuré nos concitoyens. J'espère, du moins, qu'elle y est parvenue. Mais vous avez une force de frappe moindre que celle du LEEM, et je le regrette.
Quoi qu'il en soit, je crois qu'il faut redire ici, dans cet hémicycle, que ce projet de loi n'empêche en rien l'accès de nos concitoyens à l'innovation thérapeutique.
Je suis saisie d'un amendement n° 74 .
La parole est à M. Roland Muzeau.
Nous proposons de compléter l'alinéa 3 par les mots : « , cette recommandation ne pouvant excéder trois ans ». Cet amendement a été adopté par la commission lors de la réunion qu'elle a tenue dans le cadre de l'article 88 de notre règlement.
(L'amendement n° 74 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 180 de M. Robinet.
La parole est à M. Arnaud Robinet, rapporteur.
Amendement de précision.
(L'amendement n° 180 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Le projet de loi prévoit que le prescripteur informe le patient que la prescription n'est pas conforme à l'autorisation de mise sur le marché du médicament, et il l'oblige à motiver sa prescription dans le dossier médical. Il nous semble néanmoins nécessaire que la motivation ne soit pas seulement prévue par écrit dans le dossier mais également par oral en accompagnant l'information. Il semble logique que le patient dispose de la même qualité d'explication que dans le cas d'une autorisation temporaire d'utilisation.
Voilà pourquoi nous proposons d'insérer, après l'alinéa 5, l'alinéa suivant :
« Le médecin prescripteur doit justifier que le patient, son représentant légal ou la personne de confiance qu'il a désignée en application de l'article L. 1111-6 a reçu une information adaptée à sa situation sur l'absence d'alternative médicamenteuse appropriée, les risques encourus, les contraintes et le bénéfice susceptibles d'être apportés par le médicament. La procédure suivie est inscrite dans le dossier médical. »
Cet amendement a déjà été, en commission, intégré au texte. Avis défavorable.
Avis favorable.
Cet amendement n'est pas dans le texte, monsieur le rapporteur.
Il s'agit, me semble-t-il, d'un amendement très important. Dans l'affaire du Mediator, dans plus de 80 % des cas, le patient n'avait pas été informé qu'il s'agissait d'une prescription hors AMM. La charte de déontologie du Conseil de l'ordre prévoit que le consentement éclairé du patient est requis en cas de prescription d'une molécule hors AMM. Autant que cela soit inscrit dans la loi. Je remercie M. le ministre d'accepter, contrairement au rapporteur, notre amendement.
(L'amendement n° 234 est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 82 .
La parole est à M. Roland Muzeau.
L'alinéa 9 prévoit que « la convention peut comporter l'engagement, par le titulaire de l'autorisation, de déposer dans un délai déterminé une demande de modification de cette autorisation ».
Nous proposons de substituer aux mots : « peut comporter », le mot « comporte », ainsi que de préciser la durée du délai, qui nous semble devoir être compris entre trois et cinq ans.
Cet amendement vise à renforcer les obligations de surveillance des prescriptions hors AMM pour le titulaire de l'autorisation de mise sur le marché.
(L'amendement n° 82 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 235 .
La parole est à Mme Catherine Lemorton.
Nous proposons de compléter l'alinéa 9 par la phrase suivante : « Les recueils d'information sont rendus publics dans leur intégralité sur le site internet de l'Agence. »
On parle de transparence, de clarification, de restauration de la confiance de nos concitoyens dans le système. Il me semble que cet amendement va dans ce sens.
Même avis. Nous parlons de sujets qui sont au coeur du médical. Si l'on met les recueils d'information tels quels sur le site Internet, sans accompagnement et sans précision sur le rôle du prescripteur, je pense que beaucoup ne seront pas très à l'aise.
Les alinéas 10 et 11 prévoient l'automacité dont je parlais tout à l'heure dans mon intervention sur l'article : la mention « Prescription hors AMM », portée sur l'ordonnance, « dispense de signaler leur caractère non remboursable », dit l'article.
Encore une fois, nous pensons que cette automaticité n'est pas justifiée. Ou bien la prescription hors AMM est justifiée par le prescripteur, et alors pourquoi le médicament ne serait-il pas remboursé ? Ou bien cette prescription hors AMM n'est pas justifiée, et alors elle n'a pas lieu d'être, elle doit même être sanctionnée.
Voilà pourquoi nous proposons la suppression des alinéas 10 et 11.
Défavorable. Selon moi, l'inscription « hors AMM » sur l'ordonnance est une véritable avancée pour l'information du patient. Vous savez comme moi, monsieur Mallot, que beaucoup de médecins hésitaient à écrire « non remboursé » sur l'ordonnance de leurs patients. C'est d'ailleurs pour cela que nous manquons, aujourd'hui, d'informations précises sur les prescriptions hors indications thérapeutiques.
De plus, la mention « hors AMM » sera accompagnée d'une information obligatoire du patient sur les risques qu'il encourt et les bénéfices apportés par le médicament. C'est là une disposition que nous avons ajoutée en commission.
Enfin, je vous rappelle qu'il existe des cas où le « hors AMM » peut être remboursé.
Même avis.
Il existe, à l'heure actuelle, beaucoup de prescriptions de nature pédiatrique qui se font hors AMM parce que les laboratoires considèrent qu'il n'est pas rentable de distribuer les produits sous forme pédiatrique. Cela veut donc dire que le traitement prescrit pour les enfants ne serait pas remboursé. Il me semble qu'il y a là une difficulté dont vous devriez tenir compte, monsieur le rapporteur.
J'ai bien compris l'argumentaire du rapporteur, et son intention me semble bonne. Mais nous craignons la non-inscription par les prescripteurs d'une mention sur l'ordonnance, quelle qu'elle soit.
Nous l'avons vu dans l'affaire du Mediator, les prescripteurs ne mentionnaient pas la formule « NR », qui signifie « non remboursable ». Dans notre cas, puisqu'il y a automaticité et lien direct entre les deux formules, ils risquent de ne pas mentionner la formule « prescription hors AMM ». Nous retomberons donc dans le même travers.
Nous avons constaté un extraordinaire paradoxe dans cette affaire du Mediator : le volume de prescription hors AMM de Mediator, qui représentait 80 % des prescriptions sur la fin de vie de ce médicament, a été mesuré sur la base des fichiers de l'assurance maladie, c'est-à-dire sur la base des médicaments qui étaient effectivement remboursés, et ce alors même qu'ils étaient prescrits en dehors de l'indication prévue. C'était donc bien des cas dans lesquels les prescripteurs avaient prescrit hors AMM, mais n'avaient pas porté la mention « NR » sur l'ordonnance.
Nous risquons d'entretenir ce paradoxe à l'avenir : les médecins prescripteurs n'inscriront pas la formule « prescription hors AMM » au motif que le risque est fort pour leurs patients de ne pas être remboursés.
Je souhaitais apporter une précision à ce que je viens d'entendre concernant la prescription de traitements chez l'enfant, le pré-adolescent ou l'adolescent. Ce n'est pas parce que les laboratoires ne s'y intéressent pas, c'est parce que mettre en place des essais thérapeutiques chez l'enfant, comme chez la femme enceinte, est presque impossible pour des raisons éthiques.
(L'amendement n° 196 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 3 et 100 rectifié .
La parole est à M. Guy Lefrand pour défendre l'amendement n° 3 .
L'expérience des protocoles temporaires de traitement, des référentiels de bon usage et des protocoles nationaux de soins a mis en évidence le fait que la généralisation de protocoles nationaux était un processus long, complexe et difficile.
C'est pourquoi le décret 2008-1121 avait intégré cette réalité en permettant, par exception, la prise en charge de certaines situations hors AMM pour lesquelles aucun référentiel officiel n'était encore publié mais qui présentaient un intérêt majeur pour certains patients au regard de la littérature scientifique.
Or, l'article 11 dans sa version actuelle n'intègre pas ces situations d'exception et risque de rendre impossible, pour raison économique, l'accès à ces soins que le prescripteur peut juger indispensables pour améliorer l'état du patient au regard des données acquises de la science, en l'absence d'alternative.
Cet amendement vise donc à maintenir cette dérogation exceptionnelle et strictement encadrée dans ces situations transitoires pour des produits traitant des pathologies graves et souvent rares, entre la présomption scientifique documentée par des publications ou des sociétés savantes, dans l'attente de la publication des AMM, PTT, PNDS ou des futures RTU correspondantes.
C'est pourquoi, sur le modèle du décret de 2008, nous proposons qu'un décret permette de définir précisément les conditions que doit documenter le prescripteur pour que le patient puisse bénéficier de cette prise en charge.
La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour défendre l'amendement n° 100 rectifié .
Nous venons d'évoquer le problème des médicaments pédiatriques. C'est un réel problème dans notre pays : nous n'avons pas de formes pédiatriques pour soigner nos enfants.
L'amendement que je défends est identique à celui qu'a excellemment présenté Guy Lefrand ; je n'ai rien à ajouter si ce n'est qu'il est indispensable de le voter afin de tenir compte de l'expérience des protocoles temporaires de traitement qui sont essentiels aujourd'hui. Nous proposons d'encadrer cette expérience de manière très stricte par un décret qui définira les conditions que doit documenter le prescripteur dans ce cas très particulier.
Avis défavorable. Chers collègues, vous proposez en fait de transposer aux prescriptions de ville le dispositif de prise en charge dérogatoire, à l'hôpital, des médicaments de la liste dite « en sus », qui concerne les produits particulièrement onéreux n'entrant pas dans le cadre de la tarification à l'activité. Or, cette pratique est propre à l'hôpital, et n'est pas transposable à la médecine de ville.
Du point de vue du remboursement des prescriptions hors AMM, le projet de loi ne change rien : le hors AMM ne sera pas remboursé. Il ne l'a jamais été, et il n'a pas à l'être.
Le hors AMM encadré par des recommandations sera, quant à lui, évidemment remboursé, au même taux qu'aujourd'hui.
Même avis. Dans l'optique de l'amendement, il faudrait également transposer le système du contrat de bon usage des médicaments auquel adhèrent les établissements hospitaliers, ce qui serait très lourd.
De plus, un point me gêne : nous faisons entrer une dimension économique, ce qui ne me met pas à l'aise.
En revanche, je tiens à préciser officiellement ce qui sera établi par voie réglementaire, et qui va exactement dans la ligne de ce que vous prônez : les recommandations temporaires d'utilisation seront bien établies selon les pathologies et les molécules. Elles seront donc bien adaptées, par voie réglementaire, aux spécificités des différentes situations, notamment les maladies rares et la pédiatrie, en liaison avec les centres de référence.
C'est exactement ce que vous souhaitez, et cela sera fait par voie réglementaire. En revanche, l'amendement que vous proposez est une adaptation du contrat de bon usage qui est trop lourde pour que nous puissions la réaliser, et la dimension économique sous-jacente m'interpelle. Voilà pourquoi je rends un avis défavorable à cet amendement, mais je pense être en accord avec l'intention qui l'a motivé. Je le dis donc officiellement dans l'hémicycle : cela sera établi par voie réglementaire.
Au vu des explications du ministre, je retire l'amendement.
(L'amendement n° 3 est retiré.)
Notre débat sur la traçabilité du hors AMM me donne l'occasion de proposer une innovation, permise par les avancées incluses dans la nouvelle convention médicale qui va promouvoir de manière plus active l'informatisation des cabinets : il s'agit du codage des pathologies.
Ce codage des pathologies, dans le cas du hors AMM, permettrait naturellement d'en assurer une totale traçabilité. Aujourd'hui, l'assurance maladie est incapable de dire qui prescrit du hors AMM, et dans quel cadre.
Le codage des pathologies aurait également l'avantage de mettre des conseils et des orientations à la disposition des prescripteurs, grâce aux logiciels de prescription.
De plus, comme c'est le cas en Allemagne, cette innovation permettrait de mettre en oeuvre un dispositif d'ordonnance moyenne afin de demander aux prescripteurs d'encadrer leurs prescriptions.
Enfin, ce serait un outil important de suivi des prescriptions et de l'activité des praticiens pour l'assurance-maladie. Aujourd'hui, l'assurance-maladie reste un financeur assez aveugle ; grâce aux outils nouveaux, nous pourrions l'aider à un meilleur pilotage du système de santé.
Je reconnais bien là le degré d'exigence d'Yves Bur ! Mais je doute que nous puissions réussir à coder du hors AMM.
Nous sommes favorables aux logiciels d'aide à la prescription, mais je ne sais pas si nous pourrons tout faire entrer dans les cases. Je veux bien que l'on avance sur le sujet, mais le faire figurer dans la loi dès maintenant, sans expertiser davantage, ce serait se donner un objectif que nous ne savons pas réaliser en temps et en heure, et au final, compte tenu de la complexité de certaines pathologies, de la difficulté à trouver le traitement adapté, je ne crois pas que nous pourrions atteindre l'objectif.
Voilà pourquoi mon avis est défavorable.
Permettez-moi une petite remarque réactionnaire : je suis un peu malheureux lorsque j'entends parler de logiciels ; j'ai été élevé à l'école de la clinique, et je préfère que les médecins réapprennent à examiner leurs patients, à poser des diagnostics, parce que nous formons des générations d'internes qui n'ont fait que des QCM, qui ne savent plus raisonner, et qui n'examinent plus leurs patients.
De plus, dans ma discipline, la psychiatrie, si nous prescrivons hors AMM, devrons-nous appliquer la typologie fixée dans le manuel diagnostique et statistique des désordres mentaux, le DSM-IV, ou bien une autre typologie ? Et que faire des patients qui n'entrent pas dans les cases prédéfinies ?
Nous allons générer un afflux de données pour le décideur qui seront ingérables puisqu'il s'agit de cas très particuliers. Je suis donc profondément défavorable à ce type d'amendement.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de l'examen du projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé ;
Projet de loi renforçant la protection et l'information des consommateurs.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron