La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
Je salue, mes chers collègues, la présence dans les tribunes d'une délégation de la Chambre des représentants de la République d'Irlande, conduite par son président, Seán Barrett. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)
Nous accueillons également une délégation du groupe d'amitié Indonésie-France de la Chambre des représentants de la République d'Indonésie, conduite par son président, Abdilla Fauzi Achmad. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement applaudissent de nouveau.)
Je suis heureux de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à nos collègues.
Mes chers collègues, à la suite de l'incident d'une exceptionnelle gravité qui s'est produit hier dans l'hémicycle (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR), lors de la séance des questions au Gouvernement,j'ai réuni immédiatement les présidents des groupes de notre assemblée.
J'ai également convoqué à la présidence l'auteur des propos à l'origine de ce très grave incident de séance, propos qui ont suscité l'indignation des députés et des membres du Gouvernement.
Après ces échanges, j'ai décidé de convoquer une réunion en urgence et dans les meilleurs délais du Bureau de notre assemblée. Il se réunira la semaine prochaine, avant la séance des questions au Gouvernement, le mardi 14 février au matin, afin de décider des suites à donner au trouble profond créé par les propos inadmissibles de notre collègue. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Nous commençons par une question du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre chargé des collectivités territoriales.
Les collectivités financent la majorité des investissements publics de notre pays, 71 % exactement. Elles financent plus particulièrement le bâtiment et les travaux publics, et les entreprises porteuses d'emplois de ce secteur d'activité qui a tant souffert de la crise.
Comme nous le savons tous, le retrait des banques du financement aux collectivités, conséquence directe de la crise et de l'application des accords de Bâle III, induit, pour les collectivités, un manque de financement de l'ordre de 10 milliards d'euros. En mars, c'est-à-dire le mois prochain, les collectivités vont voter leur budget qui deviendra de ce fait immédiatement exécutoire.
Les travaux auraient dû pouvoir démarrer en avril. Or les collectivités, départements en tête, ont d'ores et déjà été obligées de revoir à la baisse les budgets d'investissement et de reporter des projets d'entretien et de rénovation, notamment du réseau routier.
Nous sommes en février et il manque 10 milliards d'euros de prêts aux collectivités, 10 milliards qui manqueront pour financer des infrastructures publiques – les routes, les transports régionaux – et donc l'emploi dans le bâtiment et les travaux publics.
D'ores et déjà, les hôpitaux, les syndicats intercommunaux connaissent de graves problèmes de trésorerie et diffèrent leurs paiements à leurs fournisseurs.
Monsieur le ministre, jamais les collectivités n'ont autant souffert que sous votre gouvernement. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe UMP.) Vous avez gelé les dotations et restreint la fiscalité locale. Que faites-vous, dès maintenant, pour qu'en mars les collectivités puissent financer les investissements de notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.)
La parole est à M. Philippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales.
Vous venez, monsieur le député, de rappeler que le financement de nos collectivités est actuellement marqué par des difficultés d'accès au crédit.
J'ai rencontré l'ensemble des banques partenaires des collectivités. Ce que l'on peut dire, c'est que les collectivités continueront d'être financées à peu près au même niveau que l'an dernier.
La difficulté est que les banques ne financent plus la totalité des emprunts qu'une collectivité leur soumet.
Par ailleurs, nous savons bien que la disparition, dans ce paysage, de Dexia, crée un trou. Jadis, Dexia finançait les collectivités à hauteur de 10 milliards d'euros. Ensuite, ce fut à hauteur de 4 milliards. Aujourd'hui, Dexia n'est plus présente.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a pris un ensemble de décisions.
D'abord, la mise en place d'ouvertures de crédit au travers de la Caisse des dépôts et consignations, avec la possibilité, sur ces 5 milliards d'euros, d'un report à hauteur de 20 % sur 2012.
Cela nous a permis de tenir en ce début d'année.
Ensuite, la création d'une Banque des collectivités avec, comme partenaires, La Banque postale et la Caisse des dépôts et consignations. Cette mise en place est un peu plus longue que prévu. Dans l'attente, la tension est palpable ; un certain nombre de contrats n'ont pu être validés car les collectivités ont du mal à trouver des partenaires complémentaires des banques traditionnelles.
Nous devons donc examiner comment cette complexité peut être gérée. Le Président de la République réunira le vendredi 10 février une conférence sur les finances locales qui permettra d'approfondir ces différents sujets avec les associations de collectivités locales, en particulier le partenariat avec la Caisse des dépôts et consignations, qui doit, une nouvelle fois, être examiné.
Voilà les réponses que je peux vous donner aujourd'hui. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Bruno Bourg-Broc, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères et européennes.
Monsieur le ministre d'État, je crois pouvoir dire, au nom de l'ensemble des députés du groupe UMP, mais aussi de tous nos collègues, que nous sommes extrêmement préoccupés par la tournure toujours plus dramatique des événements de Syrie. Cette nuit, une nouvelle fois, la ville d'Homs a été pilonnée sans relâche, et la très longue liste des morts qui sont à déplorer depuis le début de la répression s'est encore allongée. Ce nouveau bain de sang, dans l'un des principaux foyers de contestation du régime en place, se poursuivait ce matin avec un autre assaut des forces de Bachar el-Assad.
Avec nos partenaires, nous n'avons pas ménagé nos efforts au Conseil de sécurité – et vous-même en particulier, monsieur le ministre d'État – afin que des sanctions soient prises contre ce régime sanguinaire. Malheureusement, samedi dernier, les Russes et les Chinois ont encore opposé leur veto à l'adoption d'une résolution du Conseil de sécurité condamnant la répression en Syrie. Ce blocage donne véritablement un permis de tuer à Bachar el-Assad.
À l'instar de nombreux pays, nous venons de rappeler notre ambassadeur en Syrie. Les monarchies du Golfe ont expulsé les ambassadeurs syriens de leur territoire. Le Président de la République a fait part de sa volonté de créer un groupe des amis du peuple syrien, en soutien au plan de la Ligue arabe.
Monsieur le ministre d'État, que pouvons-nous faire ? Quelles mesures la communauté internationale peut-elle prendre pour mettre fin à ces exactions ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, la semaine dernière, en réponse à une question de Jean-Christophe Lagarde, je disais qu'une lueur d'espoir était apparue au Conseil de sécurité où je m'étais rendu. Malheureusement, quelques jours plus tard, la Russie, suivie par la Chine, opposait son veto au projet de résolution que nous avions préparé.
Je voudrais souligner que les treize autres membres du Conseil de sécurité, y compris l'Inde, le Pakistan et l'Afrique du Sud, ont approuvé ce projet de résolution.
Je crois qu'il y a très peu de chose à attendre de la visite du ministre russe des affaires étrangères, qui a lieu actuellement à Damas. Il est probable que Bachar el-Assad fera des promesses qu'il ne tiendra pas.
Que pouvons-nous faire ? On nous parle d'une intervention militaire en Syrie, comme celle que nous avons menée en Libye. Les circonstances sont radicalement différentes. Nous n'obtiendrons pas de mandat du Conseil de sécurité. Par ailleurs, le risque de guerre civile, dans un pays divisé entre communautés antagonistes, serait maximal.
Notre diplomatie se déploie donc selon trois axes. Elle vise d'abord à réunir les amis du peuple syrien : les treize membres du Conseil de sécurité qui ont voté la résolution, les partenaires de l'Union européenne, les grands pays émergents, comme la Turquie, pour accentuer nos pressions, d'une part sur ceux qui bloquent la situation, d'autre part sur Bachar el-Assad lui-même.
Deuxièmement, à Bruxelles, nous allons à nouveau alourdir les sanctions, notamment celles qui pèsent sur la Banque centrale de Syrie.
Troisièmement, nous soutenons l'opposition syrienne. J'ai encore rencontré hier le président du Conseil national syrien, M. Ghalioun, pour l'assurer de notre soutien et voir avec lui comment nous pouvons l'aider à organiser et à ouvrir le Conseil national syrien.
Depuis des mois, le peuple syrien est martyrisé. Son supplice restera une tache morale sur l'image du Conseil de sécurité des Nations unies. La France, elle, ne renonce pas à aider ce peuple ami, courageux et martyrisé. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC, et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme Martine Billard, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé et porte sur les menaces qui pèsent actuellement dans notre pays quant à la permanence, sur l'ensemble du territoire, d'un accès pour toutes les femmes aux centres d'IVG.
La loi Bachelot « Hôpital, patients, santé, territoire » a mis en oeuvre une politique de démantèlement du service public hospitalier, avec le développement de la tarification à l'activité et la convergence tarifaire public-privé.
Votre politique de fermeture des hôpitaux et maternités de proximité accentue la désertification sanitaire de nos territoires.
Conséquence de la T2A, les gestionnaires d'hôpitaux considèrent que l'acte d'IVG, même facturé à 300 euros, n'est pas assez rémunéré. Aussi, en dix ans, 179 centres d'IVG ont disparu et les délais d'attente sont maintenant de plusieurs mois.
C'est grâce à la mobilisation d'un collectif local et d'associations des droits des femmes que le CIVG de Tenon, dans le XXe arrondissement de Paris, a été rouvert.
Le droit à l'avortement, reconnu en France avec la loi Veil de 1975, a été une étape importante de la conquête des droits des femmes.
Cependant, ces droits, et notamment le droit à l'IVG, ne sont jamais totalement acquis. Nous le voyons ces jours-ci en Espagne, où vos amis politiques, sitôt revenus au gouvernement, s'empressent de remettre en cause la loi votée en 2010.
Alors que la candidate du Front national a annoncé vouloir mettre fin au remboursement de l'IVG, pourquoi le Gouvernement n'applique-t-il pas la loi Neiertz de 1993 contre les groupes de catholiques intégristes ? Par cinq fois, depuis septembre 2011, ils se sont rendus coupables d'entrave à l'IVG à l'hôpital Tenon de Paris, cherchant, par l'intimidation, à culpabiliser les femmes et à faire pression sur les équipes soignantes.
Pour garantir le droit à l'IVG, il faut, contrairement à la situation actuelle, au minimum un centre par département et dans chaque hôpital public, ainsi que la prise en charge à 100 %. C'est ce que proposent le Front de gauche et son candidat Jean-Luc Mélenchon. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Madame Billard, je suis, comme vous, très attachée à l'accès à l'IVG pour les femmes qui en ont le désir. D'ailleurs, chacun sait ici que nous devons cet acquis fondamental à une femme, Simone Veil (Exclamations sur les bancs du groupe SRC),…
…à son courage, à sa ténacité.
L'accès à l'IVG reste une préoccupation constante du Gouvernement. Je veux d'ailleurs vous rappeler qu'en 2010 le rapport de l'IGAS avait conclu aux effets pertinents de la politique volontariste du Gouvernement pour réduire les inégalités d'accès à l'IVG.
Le centre d'IVG de l'hôpital Tenon avait en effet été suspendu en 2010, pour des questions de réorganisation de l'offre de soins. Depuis, le schéma régional de l'organisation des soins a évolué et a décidé sa réouverture, effective dès 2011.
Si je suis, comme vous, très attachée à ce droit fondamental des femmes, l'IVG ne peut être pour elles une réponse contraceptive. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP. – « Bien sûr ! » sur les bancs du groupe SRC.) La question essentielle, celle qui est au coeur de la politique volontariste du Gouvernement, reste la prévention des grossesses non désirées. Cette politique est mise en oeuvre, dans les projets régionaux de santé, par les agences régionales de santé dans les territoires.
Pour le reste, ni l'agitation ni la provocation ne sauraient remettre en cause cet acquis majeur pour la condition des femmes. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
Ma question, à laquelle j'associe mes collègues Demilly et Hunault, s'adresse à Mme la ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle.
Il y a trois ans, nous avons voté la loi relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie. Nous avons, en France, 50 000 organismes de formation qui dispensent 750 millions d'heures à 11 millions de nos concitoyens. Il faut bien dire que certains de nos compatriotes ne s'y retrouvent plus du fait de la multiplicité de ces organismes de formation. Certaines sectes en profitent pour les investir, dans le but de récupérer des sommes d'argent importantes, mais aussi de recruter de nouveaux adeptes.
La formation professionnelle est primordiale, surtout dans cette période de grand chômage, pour faire coïncider formation et demande d'emploi. Les sommes investies sont importantes, puisqu'il s'agit de 25 milliards d'euros : 13 milliards pour l'État, 7 milliards pour les entreprises, 5 milliards pour les régions. Il faut absolument une liaison entre Pôle emploi et la formation, de façon à adapter la formation à la demande et à la flexibilité.
Madame la ministre, ma question sera double. Comment allez-vous associer formation et emploi, de façon à créer une véritable synergie ? Comment allez-vous supprimer tout financement pour des sectes qui pourraient s'introduire dans les organismes de formation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Nadine Morano, ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle.
Monsieur le député, ce que vous décrivez est à la fois un risque et une réalité.
Vous avez rappelé les chiffres : il y a 50 000 organismes de formation, dont 20 % dans le domaine dit « comportemental ». Et c'est dans ce secteur que nous avons identifié des possibilités de dérives sectaires.
En 2011, 4 000 contrôles ont été effectués et quarante organismes de formation ont perdu leur label, parce qu'il y avait dans ces établissements un manque de sérieux, et surtout des dérives d'ordre sectaire. C'est parce que nous devons à nos concitoyens la qualité de la formation et la transparence sur tous ces dispositifs que j'ai donné des consignes très strictes, par circulaire, pour renforcer les contrôles dans les organismes de formation, dès le mois de janvier.
Par ailleurs, s'agissant de la qualité de la formation, nous avons organisé avec la Miviludes – la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives à caractère sectaire –, placée sous l'autorité du Premier ministre, les Assises de la qualité de la formation professionnelle.
Demain, nous tiendrons une journée d'étude afin de définir les bonnes pratiques et le contenu d'un guide qui sera diffusé par La Documentation française…
…pour montrer comment déceler les dérives sectaires dans la formation professionnelle, ce qui est extrêmement important pour nos concitoyens.
Enfin, nous allons mettre en place une bibliothèque nationale qui recensera tous les organismes de formation dès le premier semestre de cette année, qui sera accessible sur internet et qui permettra non seulement aux prescripteurs de formation, mais aussi à nos concitoyens, de s'y retrouver dans le secteur de la formation professionnelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je rappelle que la présentation de documents et autres artifices de communication n'est pas autorisée.
La parole est à M. Yves Durand, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, comme on le constate dans chaque académie, depuis dix ans, vous dégradez l'école. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Toutes les études le confirment, mais vous y restez obstinément sourd.
Aujourd'hui même, le dernier rapport de la Cour des comptes condamne sans appel votre réforme de la formation des maîtres. Qui peut croire encore cette ineptie selon laquelle on peut faire mieux avec moins ?
Monsieur le ministre, nous ne sommes pas, comme vous le prétendez toujours, obsédés par les seuls moyens, et le projet de François Hollande est une véritable refondation qualitative de l'école. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Mais, comme les parents et les enseignants, nous ne pouvons que constater les dégâts provoqués par la saignée que vous infligez à l'éducation nationale.
Dans ma région du Nord-Pas-de-Calais, par exemple, vous avez supprimé 5 000 postes en neuf ans. En plus des classes surchargées, même en ZEP, des RASED sacrifiés, des enseignants non remplacés, cela a provoqué la fermeture de quatorze lycées professionnels depuis 2010, alors que 50 000 jeunes n'ont pas trouvé de place depuis dix ans.
Où iront les 7 000 lycéens supplémentaires attendus à la rentrée 2013 ? Il est facile de prétendre que le nombre d'élèves baisse quand vous ne comptabilisez plus les enfants de moins de trois ans et que vous fermez la porte de l'école à des milliers de jeunes en fermant des lycées pour lesquels les régions ont massivement investi. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Non content d'être le premier licencieur de France avec plus de 80 000 suppressions de postes en dix ans, vous êtes le grand responsable du décrochage scolaire en excluant de nombreux jeunes de toute possibilité de formation. (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Il est grand temps, monsieur le ministre, de rendre à l'éducation les moyens de redevenir le premier investissement de la nation, comme s'y engage François Hollande. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.
Avec vous, monsieur Durand, c'est toujours la même chose ! Vous voulez parler de saut qualitatif, mais vous ne présentez qu'une seule mesure du programme de François Hollande : la création de 60 000 nouveaux postes dans l'éducation nationale.
Or s'il fallait des moyens supplémentaires pour obtenir des résultats dans l'éducation nationale, cela se saurait ! Depuis 1980, les moyens par élève ont augmenté de 80 %. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je rappelle que la nation y consacre 21 % de son budget et la France 7 % de son produit intérieur brut, c'est-à-dire plus que la moyenne des pays développés et plus que la moyenne des pays de l'Union européenne. Donc, si c'était une question de moyens, nous aurions les meilleurs résultats au monde !
Or, malgré l'engagement de nos enseignants, malgré leur travail, auquel je tiens à rendre hommage, notre système éducatif n'a pas su prendre un certain nombre de virages. Le Gouvernement a voulu différencier les moyens et personnaliser l'enseignement pour obtenir de meilleurs résultats.
Monsieur le député, vous parlez de « premier licencieur de France ». Je vous rappelle simplement qu'aujourd'hui, l'éducation nationale reste le premier employeur de France, le premier service de proximité de France et le premier recruteur de France. En 2012, vous le savez puisque vous avez étudié le budget pour cette année, nous allons recruter 19 000 personnes à l'éducation nationale. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Assez de caricature, le débat public s'en portera mieux ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Arlette Grosskost, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire
Madame la ministre du budget, à l'UMP, nous nous réjouissons que le « Produire en France », le « Made in France », soit devenu un thème central de débat et d'intérêt pour l'ensemble des formations politiques qui nous ont rejoints en votant à l'unanimité la proposition de résolution de notre collègue Christian Estrosi qui avait pour objectif de mieux déterminer la notion d'origine des produits. « Produire en France », ce n'est pas qu'un slogan ! « Produire en France », c'est le but d'une politique volontariste. C'est une stratégie de développement de l'industrie consistant non seulement à maintenir un secteur industriel puissant dans notre pays, mais aussi à favoriser la réindustrialisation.
Tel est aussi l'enjeu de la fiscalité anti-délocalisation qui a été proposée ce matin en conseil des ministres et qui permettra, selon les dires d'experts, de créer, en France, jusqu'à 100 000 emplois d'ici à trois ans.
Pour répondre aux souhaits de nombreux partenaires sociaux, le Gouvernement a décidé d'alléger de façon significative le coût du travail. Pour cela, il a été proposé de basculer le financement des allocations familiales à la charge des employeurs sur la TVA, dont l'assiette est plus large. C'est une mesure forte, courageuse, prise dans l'intérêt général, au moment où certains, dans l'opposition, sont tentés de la caricaturer pour des raisons purement politiciennes, voire de la renier, quand bien même Manuel Valls y était favorable ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Vous l'aurez compris, il est très important, pour notre majorité, de prendre ces problèmes à bras-le-corps et de mettre en oeuvre ces mesures impératives pour la France et les Français dans un contexte économique bousculé.
Madame la ministre, pouvez-vous nous apporter des précisions complémentaires sur les modalités de mise en place de cette baisse des charges attendue et réclamée par l'ensemble de nos entreprises, petites et grandes ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Vous avez raison, madame la députée : pour renforcer la compétitivité de nos entreprises, pour doper la croissance, pour dynamiser l'emploi, il faut baisser le coût du travail et non l'augmenter. La diminution des charges sociales des entreprises a démontré, par le passé, son efficacité. Je vous donnerai quelques chiffres très parlants. Les allégements instaurés en 1995 et 1996 sur le coût du travail ont permis la création ou la sauvegarde de 200 000 à 400 000 emplois. En 2003, les allégements dits « Fillon » sur le coût du travail et sur les bas salaires ont eu un impact positif sur l'emploi et ont permis de sauver ou de créer entre 400 000 et 800 000 emplois.
Au-delà de ces expériences françaises, il y en a eu d'autres à l'étranger : les expériences allemande et danoise, qui sont des succès. Il suffit de regarder le taux de chômage dans ces pays pour constater que la baisse du coût du travail compensée par une hausse de la TVA a eu un impact très positif sur l'emploi. Alors, oui, nous voulons baisser les charges sociales sur les salaires moyens pour compléter les allégements qui existent aujourd'hui sur les bas salaires. Cette mesure concernera quatorze millions de salariés, 80 % des salariés de l'industrie et 92 % des salariés de l'agriculture. De plus, elle visera massivement les très petites entreprises.
Notre objectif est donc de créer de l'emploi, d'avoir un effet massif compétitivité-emploi, et ce à l'inverse de François Hollande qui veut, dans son projet, augmenter le coût du travail pour revenir sur la réforme des retraites. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Oui, nos projets sont différents.
Nous voulons créer de l'emploi, l'opposition veut en détruire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, l'un de nos collègues vous a posé une question sur le financement des collectivités locales ; je vous interrogerai, au nom des députés du Nouveau Centre, sur le financement des petites et moyennes entreprises.
Vous savez combien l'accès au crédit est un problème pour de nombreux chefs d'entreprise. Je sais que cette préoccupation est partagée, puisque le Président de la République a annoncé la création d'une banque dédiée au financement de l'industrie.
Au moment où la croissance marque le pas, au moment où de nombreuses petites et moyennes entreprises rencontrent des difficultés, comment le Gouvernement entend-il concrétiser la création de cet outil supplémentaire ? Vous avez été, comme votre majorité, très réactifs au plus fort de la crise avec la création de fonds dédiés – je pense au Fonds stratégique d'investissement, aux plans de soutien ciblés – mais il nous faut aujourd'hui améliorer l'accès au crédit, notamment pour les entreprises qui dépassent le seuil de 250 salariés et n'ont pas accès à Oséo. Je pense en particulier à l'industrie ferroviaire, que vous connaissez bien, puisque vous avez soutenu l'entreprise ABRF de Châteaubriant. Vous aviez, d'ailleurs, prévu la création d'un fonds dédié à cette industrie.
Ma question est simple : quand et comment ce nouvel outil sera-t-il créé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
La parole est à M. François Baroin, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le député, cher Michel Hunault, quels sont les chiffres et comment les faits se présentent-ils ? La France, en matière d'accès au crédit, s'est plutôt bien, voire très bien comportée par rapport à la moyenne de la zone euro, puisqu'elle a terminé l'année à plus 3,8 % d'accès au crédit pour les petites et moyennes entreprises. À titre de comparaison, la moyenne de la zone euro est une augmentation de 1,1 %. Donc, la France se tient bien. Elle a connu un pic au cours du premier semestre 2011 – une augmentation de plus de 10 % – et un ralentissement parallèle au ralentissement économique à la fin du dernier trimestre.
Les taux d'intérêt bancaires se tiennent également dans des proportions convenables : 3,5 % en moyenne.
Cette situation plutôt positive en France nécessite, vous l'avez justement souligné, d'être accompagnée et exige une vigilance de chaque instant de la part des pouvoirs publics, du Gouvernement en général et du ministère dont j'ai la responsabilité en particulier. C'est dans cet esprit que nous avons réactivé la médiation du crédit. Je citerai, là aussi quelques chiffres : la moyenne d'examen de dossiers de la médiation du crédit est de 300 par mois, contre 1 400 en 2009. La situation est donc moins tendue.
Nous sommes cependant conscients des difficultés d'accès au crédit pour les très petites entreprises et celles qui connaissent des difficultés procédurales. C'est pourquoi nous avons réactivé la coordination de la Banque de France, de la médiation du crédit et du Commissariat général à l'investissement. C'est aussi la raison pour laquelle le Président de la République, le Premier ministre et le Gouvernement ont proposé, dans le collectif budgétaire, la mise en place de cette filiale d'Oséo dont la mission singulière sera d'être une banque de l'industrie qui apportera des financements en complément du Fonds stratégique d'investissement et d'Oséo. C'est la clé du maintien de l'activité économique dans notre pays. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Alain Moyne-Bressand, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique, la vague de froid qui frappe toute l'Europe démontre combien il est important d'avoir une capacité de production énergétique performante. Les pics de température constatés nécessitent en effet une utilisation maximale de tous les réseaux électriques.
C'est dans ces moments-là que nous pouvons mesurer l'intérêt d'avoir en France un outil de pointe, avec une filière énergétique performante et robuste. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Je pense bien sûr au secteur nucléaire français, qui seul garantit à tous les Français un accès constant et durable à cette ressource vitale qu'est l'électricité, à des prix considérablement plus faibles que dans le reste du monde.
Le nucléaire, c'est l'indépendance énergétique. Depuis le général de Gaulle, tous les présidents de la République française ont soutenu l'énergie nucléaire.
Cette indépendance énergétique ne doit pas être remise en cause, elle doit au contraire être préservée et renforcée. C'est ce à quoi notre gouvernement s'est engagé, avec le soutien infaillible de la majorité à laquelle j'appartiens, et je m'en félicite.
On ne peut pas en dire autant de l'état d'esprit qui règne sur les bancs de l'opposition (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), qui ne cesse de vouloir marchander des circonscriptions électorales contre des centrales (Protestations sur les bancs du groupe SRC – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP), sans jamais prendre en compte l'intérêt des Français. Ses membres mentent aux Français sur les conséquences financières de leur proposition visant à diaboliser le nucléaire.
Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous nous assurer que le Gouvernement fera tout ce qu'il faut pour mettre en oeuvre des travaux de sûreté nucléaire et développer cette filière d'avenir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique.
Comme vous l'avez souligné, monsieur le député, nous traversons une vague de grand froid, qui touche d'ailleurs toute l'Europe. La température est inférieure de dix degrés aux moyennes, et la France a battu hier son record de consommation électrique puisque nous avons dépassé le seuil des 100 000 mégawatts.
Nous y avons fait face, d'abord en produisant de l'électricité, et il faut remercier tous nos industriels, et en particulier EDF et RTE. Le coefficient de disponibilité de nos centrales nucléaires a été remarquable, 97 %, parce que cinquante-cinq réacteurs sur cinquante-huit étaient en pleine activité.
Nous avons eu recours aussi aux importations, et je veux essayer d'être clair sur ce point parce qu'il y a parfois un malentendu. La France est exportatrice nette d'électricité. Nous vendons en permanence de l'électricité, notamment à l'Allemagne, depuis quelques mois singulièrement. Mais, lors des pics de consommation, les caractéristiques de notre production font que nous en importons de pays amis et voisins parce qu'ils peuvent mettre en marche un plus grand nombre de centrales thermiques au fioul et à charbon. C'est la raison pour laquelle nous sommes ponctuellement importateurs nets lors des pics de consommation.
Nous y faisons face, enfin, en demandant à nos industriels et aux consommateurs de la modération, et je salue le succès du site ecowatt. Un grand nombre de nos compatriotes font preuve de civisme en acceptant sur une base volontaire de renoncer ponctuellement à tel ou tel élément de leur consommation, un lave-vaisselle ou un lave-linge, par exemple.
Pour le reste, nous sommes bien d'accord, la filière nucléaire française est un atout qu'il nous faut impérativement préserver. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Paul Giacobbi pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, il y a deux ans, je vous disais ici que la crise des Trésors publics, dont celui de la Grèce n'était que le signe précurseur, allait prolonger de plusieurs années celle de l'Europe.
Je m'étonnais aussi que l'Europe, à travers son union ou la zone euro, ou dans le cadre de la BCE, soit tellement réticente à aider les pays en difficulté ou subordonne son aide à des exigences draconiennes alors qu'elle allouait des sommes beaucoup plus élevées et sans contrepartie aux banques.
Nous en sommes toujours au même point. On exige tout de la Grèce, on ne lui prête rien sans d'immenses contreparties, et l'Allemagne s'est même autorisée à parler de tutelle, tandis que la BCE s'apprête à allouer mille milliards d'euros de concours aux banques à la date du 28 février, ce qui fait suite à une première tranche de 489 milliards, sans leur demander de réformes structurelles ni même un contrôle de la rémunération de leurs dirigeants.
Pourquoi est-il si facile d'allouer aux banques des milliers de milliards d'euros et si difficile de sauver un peuple aux abois ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Les quelque 100 milliards d'euros de besoins en fonds propres d'une banque immobilière bavaroise méritent-ils plus de solidarité que les 130 milliards d'euros qui permettraient à la Grèce d'éviter la banqueroute ?
La Grèce n'est pas le seul homme malade de la zone euro. Le besoin de financement du budget de notre État pour 2012 se monte, selon l'agence France Trésor, à 178 milliards d'euros. Il est en diminution, c'est vrai, par rapport aux trois dernières années, mais c'est le double de ce qu'il était en 2001, et il est en augmentation de plus de 70 % par rapport à 2007.
La détente toute relative sur les taux d'intérêt de nos emprunts publics est due non à un renouveau de la confiance des marchés mais à l'inondation de liquidités en provenance de la BCE au profit des banques et à ses interventions massives sur les marchés secondaires.
Monsieur le Premier ministre, vous nous avez annoncé ici en 2007 que la France ne serait pas affectée par la crise américaine, en 2008 que le risque financier systémique était derrière nous, en 2010 que la Grèce était l'exception d'une zone euro solide et solidaire. Qu'allez-vous nous dire aujourd'hui ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Et vous, que nous dites-vous, monsieur le député ?
Dites-vous qu'il ne faut rien demander en échange au gouvernement grec ? Nous sommes leurs créanciers, ils nous doivent de l'argent. Nous leur prêtons pour les aider à passer cette mauvaise période alors que, chacun le sait sur les bancs de cette assemblée, leurs chiffres n'étaient pas sincères, leur démarche n'a pas été objective et les réformes structurelles n'ont pas été engagées à temps. C'est bien la moindre des choses que les premiers contributeurs que sont l'Allemagne et la France demandent des contreparties à un gouvernement qui prend des engagements vis-à-vis de ses créanciers. Si vous prêtiez de l'argent, ce serait la moindre des choses de demander en contrepartie qu'il y ait des réformes pour garantir le remboursement.
C'est donc la moindre des choses que les discussions se poursuivent pour voir quel effort est demandé aux créanciers privés, quel effort est demandé aux créanciers publics pour atteindre l'objectif de financer un second programme de solidarité, maintenir la Grèce à l'intérieur de la zone euro et créer les conditions d'une stabilité pour éviter la contagion à des pays eux-mêmes endettés.
Vous mettez en lumière le rôle de la BCE en le critiquant, mais nous devons au contraire nous en féliciter. C'est probablement l'une des nouvelles les plus importantes que la décision prise par le Conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne avant Noël d'offrir un accès illimité aux liquidités pour alléger la pression sur les banques. Ce n'est pas de l'argent dans la poche des dirigeants, c'est de l'argent dans l'économie, c'est un accès au crédit pour financer les projets de nos entreprises et des particuliers. C'est vrai pour les Français, c'est vrai pour l'ensemble des acteurs économiques européens. Le nier, c'est nier le principe économique.
Enfin, faut-il poursuivre dans cette voie ? Oui, puisque nous sommes entrés dans une période de relative stabilité. La baisse des taux d'intérêt, y compris des taux français, nous permet de nous concentrer sur le double effort de réduction des déficits et de coordination de la politique européenne pour stabiliser notre monnaie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. François Goulard, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Madame la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, le conseil des ministres a examiné ce matin un projet de loi augmentant de 30 % les droits à construire. En effet, face à une certaine pénurie de logements, face, surtout, à l'augmentation de leurs prix, tant à la vente qu'à la location, il est infiniment plus opportun de développer l'offre de logements que de bloquer les loyers.
Le blocage des loyers – qu'on se souvienne de 1948 – a toujours pour effet de réduire immédiatement et fortement la production de logements. Cela illustre s'il en était besoin, l'archaïsme des propositions socialistes sur ce sujet et sur quelques autres. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
L'application du principe, bon et sain, de ce projet de loi se heurtera néanmoins à un certain nombre de difficultés. On pense à notre droit de l'urbanisme, complexe et d'une façon générale assez restrictif. On pense aussi à la manière dont ce texte sera appliqué par les collectivités locales et les services extérieurs de l'État.
C'est pourquoi, madame la ministre, je souhaiterais que vous nous disiez comment vous envisagez la mise en oeuvre de ces nouvelles dispositions et comment vous prévoyez d'en assurer l'efficacité. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
Monsieur le député, oui, la réponse au problème du logement, c'est de construire plus (« Ah ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR), et certainement pas de bloquer les loyers, comme le propose le parti socialiste. Quelques années seulement après l'expérience de 1948, l'abbé Pierre lançait son appel pour les mal-logés : si le blocage des loyers marchait, ça se saurait ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Construire plus, nous l'avons fait : par exemple 600 000 logements sociaux entre 2007 et 2012, là où, sur la même durée, au temps du gouvernement Jospin, 265 000 seulement ont été construits. (Mêmes mouvements.)
Aujourd'hui, le Président de la République nous propose d'aller plus loin et nous a demandé, à Benoist Apparu et moi-même, de mettre en oeuvre deux nouvelles mesures : la mise à disponibilité beaucoup plus rapide et importante des terrains publics et l'augmentation des droits à construire de 30 %.
Concrètement, sur un terrain où il est prévu cent logements, on pourra en construire cent trente. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Sur une habitation de cent mètres carrés, on pourra prévoir une extension de trente mètres carrés. (Mêmes mouvements.)
Cette mesure est proposée dans les 17 000 communes de France soumises à un plan d'occupation des sols ou à un plan local d'urbanisme, seulement, bien sûr, sur les terrains constructibles : les zones à risques ou celles soumises à des contraintes environnementales ne sont pas concernées. Cette mesure ne diminue pas la protection environnementale ; au contraire, elle permet de lutter contre l'étalement urbain en construisant plus là où l'on peut construire.
Chaque mairie pourra choisir : soit appliquer toute la mesure – elle entrera en vigueur neuf mois après la promulgation de la loi –, soit augmenter la constructibilité dans certains quartiers seulement, soit renoncer à profiter de cette possibilité, après consultation des habitants.
Nous en attendons 20 000 à 40 000 logements de plus par an. Voilà une réponse concrète au problème du logement des Français ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Philippe Plisson, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à Mme la ministre du budget et des comptes publics, qui s'est apparemment éclipsée pour ne pas avoir à répondre à ma question embarrassante. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La proposition du président-candidat d'augmenter de 30 % les surfaces constructibles recueille une belle unanimité, y compris du président de la chambre des notaires, pour dire qu'elle ne servira à rien sinon à augmenter considérablement le prix des terrains.
À ce propos, Mme la ministre a péremptoirement affirmé sur France Inter, mardi dernier, que la mesure va à tout coup infléchir à la baisse les prix de l'immobilier. Quand le journaliste lui a répondu que les constructions neuves seraient dorénavant taxées non plus à 19,6 % mais à 21,2 %, elle a rétorqué, je la cite : « Dans la construction, la TVA est à 7 %. » (Rires sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Cette allégation est fausse, comme l'atteste le site officiel de son ministère, impots.gouv.fr, qui indique que « le taux de TVA réduite est exclu pour les travaux qui concourent par leur nature ou leur ampleur à la production d'un immeuble neuf ». (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Placée devant la contradiction, elle persiste dans l'erreur : « Si un particulier décide de faire agrandir son logement de 30 %, il fera des travaux de rénovation et paiera donc la TVA à 7 %. » (« Oh ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Il s'agit à nouveau d'une affirmation fausse puisque l'instruction fiscale à ce sujet est limpide : « Le taux à 7 % ne porte pas sur les travaux qui conduisent à une surélévation du bâtiment ou à une addition de construction. »
Dans tous les cas, contrairement à ce que la ministre a martelé, ces travaux de construction seront bien taxés au taux de votre nouvelle TVA antisociale, 21,2 %.
Alors ma question est simple : la ministre méconnaît-elle les règlements de son ministère ou ment-elle délibérément aux Français ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement.
Monsieur le député, si je comprends bien, vous essayez de nous donner un cours sur la TVA. (« Oui ! » sur les bancs du groupe SRC.) Moi, je vais vous répondre « production de logements ». (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Ce gouvernement, sous l'autorité de François Fillon, aura construit, comme Nathalie Kosciusko-Morizet vient de le rappeler, 600 000 logements sociaux. (Mêmes mouvements.) Il aura construit 420 000 logements cette année. (Brouhaha.)
Et nous souhaitons continuer, pour faire baisser les prix et répondre à l'attente des Français.
Plusieurs députés du groupe SRC. TVA ! TVA !
C'est la raison pour laquelle le Président de la République a annoncé deux mesures : d'une part, construire sur des terrains publics – 50 000 logements prévus en Île-de-France, 50 000 sur le reste du territoire – et, d'autre part, mieux utiliser la matière première foncière (« TVA ! TVA ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR), c'est-à-dire mieux rentabiliser les terrains en permettant de construire plus de logements sur chaque terrain. (Mêmes mouvements.)
C'est notre engagement.
Enfin, s'agissant de votre allégation quant à l'augmentation des prix qui résulterait d'une telle décision, je voudrais juste vous rappeler un principe économique : certes, la matière première foncière augmentera de 30 %,…
Plusieurs députés du groupe SRC. TVA !
…mais n'oubliez pas que le chiffre d'affaires augmentera également de 30 %. Cela s'appelle la croissance ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Huées sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour le groupe de l'Union pour un mouvement. populaire
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Monsieur le ministre, à l'occasion du déplacement du candidat socialiste à Dijon, nous avons pu constater que la question de la sécurité de nos concitoyens s'invitait enfin au programme du candidat Hollande. Trop longtemps silencieux sur le sujet, il semblerait qu'il se réveille et se décide soudainement à prendre en compte les inquiétudes légitimes des Français. Lors de son meeting au Bourget, il n'avait pas hésité à avertir les petits caïds et les fraudeurs que « la République les rattraperait ». (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Nous attendions de savoir comment !
Dès lors, la représentation nationale et nos concitoyens ne peuvent que s'étonner de la faiblesse des solutions envisagées par les socialistes. Abroger les peines plancher ? Recourir à une police de proximité qui n'a jamais fait ses preuves ? (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Toujours les mêmes vieilles recettes… Une fois de plus, la gauche nous montre son incapacité à lutter efficacement contre la délinquance, son incapacité à apporter des solutions crédibles. Seule idée nouvelle : créer des inégalités territoriales dans la prise en compte de la sécurité.
La députée de territoire rural que je suis, le Jura en l'occurrence,…
…redoute le pire. Les élus de tous les territoires ruraux partagent mon inquiétude.
Comment la gauche peut-elle prétendre donner des leçons alors que, sous le gouvernement de M. Jospin, elle a lamentablement perdu son combat contre la délinquance, celle-ci s'accroissant de 17,8 % ?
Pouvez-vous, monsieur le ministre, éclairer la représentation nationale sur la pertinence des propositions du parti socialiste en matière de sécurité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.Madame Marie-Christine Dalloz, il est vrai qu'après les déclarations martiales de M. Hollande au Bourget, nous nous attendions tous, lundi dernier, à l'exposé d'une véritable politique de sécurité. Nous avons été déçus : entre les déclarations d'intention et la réalité des propositions, il y a plus qu'un fossé, il y a un abîme et beaucoup de contradictions.
Ainsi, M. Hollande veut mieux lutter contre les récidivistes mais, dans le même temps, il propose de supprimer les peines plancher, qui sont justement faites pour lutter contre la récidive. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
M. Hollande veut une meilleure exécution des peines et, dans le même temps, le parti socialiste propose la suppression de 30 000 places de prison. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Hollande veut une police plus efficace mais, à la tribune de cette assemblée, il y a quelques jours, les représentants du parti socialiste mettaient en cause les fichiers de police, notamment le fichier des empreintes génétiques qui, tous les jours, permet à la police de déférer à la justice les coupables de graves crimes et de nombreux délits. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Hollande nous dit qu'il veut apporter des réponses à la délinquance des mineurs mais, dès que nous voulons moderniser les lois concernant la délinquance pour apporter des réponses plus rapides de la part de la justice, la gauche hurle au scandale. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Et puis il y a deux cerises sur le gâteau.
Tout d'abord, M. Hollande propose la création de périmètres de sécurisation renforcée, qui seraient prioritaires. Cela veut dire que les Français qui n'habitent pas dans ces périmètres ne seront plus prioritaires. (Mêmes mouvements.)
Seconde cerise sur le gâteau : le retour de la police de proximité ! Elle a une grande qualité, c'est son nom, il est sympathique. Mais, dans la réalité, ce fut un échec terrible ! Et nous ne voulons pas renouer avec cet échec. (Mêmes mouvements.)
Vous voulez mon appréciation sur ces propositions, madame Dalloz ; elle est claire : l'application d'un tel programme signerait le retour de l'insécurité en France ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Marie-Lou Marcel, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers. gauche
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, à l'inverse de ce que vous avez dit il y a quelques minutes, ce quinquennat aura été celui de la casse de l'éducation nationale. Les moyens matériels et humains ont été sacrifiés. La notion même d'éducation nationale est sans cesse remise en cause.
Un député du groupe UMP. C'est faux !
Pour ce gouvernement, l'école publique, comme l'hôpital public, comme tout ce qui est public, doit être gérée comme une entreprise privée !
Avec 66 000 postes supprimés en cinq ans, c'est d'un véritable plan social qu'il s'agit : en Aveyron, le monde rural est frappé de plein fouet ; vous supprimez les postes détachés dans les instituts médico-éducatifs. De plus, vous organisez la razzia des RASED…
…avec 3 000 postes supprimés en 2012, soit un poste sur deux en Aveyron ! Il n'y a plus d'aide pédagogique, plus d'aide rééducative, plus d'aide psychologique, alors que ces personnels formés et qualifiés sont pourtant un atout indispensable pour les élèves, les familles et les enseignants. Aucune aide personnalisée ne pourra remplacer les aides spécialisées. J'ai pu mesurer ces derniers jours l'immense détresse des parents. (« C'est vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Ils se sentent abandonnés par l'école de la République !
Monsieur le ministre, c'est de l'égalité des chances et de l'avenir de nos enfants qu'il s'agit. Au-delà de ces suppressions de postes, c'est notre système éducatif qui est remis en cause en permanence, comme dans la proposition de loi sur la formation des maîtres qui veut supprimer le statut des enseignants. Comme si cela ne suffisait pas, vous supprimez aussi les inspecteurs d'académie, qui ne seront plus que des petits télégraphistes au service d'un recteur omnipotent.
Vous mettez à mal toute l'architecture de la maison éducation. Monsieur le ministre, une seule question : dites-nous franchement si vous souhaitez privatiser purement et simplement l'éducation nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.
Madame la députée, j'entends, là encore, beaucoup de caricatures.
Vous et vos collègues évoquez en permanence la question des suppressions de postes. Je veux vous rappeler qu'à la rentrée prochaine, après application du schéma d'emplois et du budget 2012, il y aura toujours plus de professeurs dans l'éducation nationale qu'en 1990. Est-ce que vous considériez à l'époque qu'elle était sous-administrée ? La réponse est non – mais je ne crois pas que le ministre de l'époque était membre de l'actuelle majorité…
Vous évoquez l'égalité des chances, mais c'est par exemple être capable, comme nous aujourd'hui,…
…de faire plus pour les élèves qui ont le plus de difficultés. Voilà tout l'esprit de l'aide personnalisée que nous avons mise en place dans le primaire : deux heures par semaine. Lorsque nous repérons un enfant qui a des difficultés de lecture, nous réalisons immédiatement la remédiation dans nos établissements scolaires grâce à nos enseignants, qui sont formés à cet effet.
L'égalité des chances, c'est être capable de faire beaucoup plus pour des élèves issus de milieux défavorisés qui n'auront pas la chance d'aller loin dans leurs études s'ils restent à la maison après l'école, et les internats d'excellence nous permettent d'accueillir aujourd'hui plus de 10 000 élèves, et 20 000 en 2014. Ces élèves n'auraient sans doute pas pu avancer dans leurs études s'ils étaient restés dans un environnement familial éloigné de l'école.
Madame la députée, je veux bien recevoir toutes les leçons de la terre en matière d'éducation, mais je sais une chose : ce gouvernement a décidé de se mobiliser pour une différenciation afin de faire plus pour les élèves qui ont le plus de difficultés. L'objectif est que chacun ait une solution en sortant de l'école. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe NC.)
La parole est à M. Manuel Aeschlimann, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Madame la ministre de l'apprentissage et de la formation professionnelle, le Gouvernement n'a pas attendu d'être confronté à la crise pour mettre l'emploi des jeunes au coeur de ses priorités.
Le Président de la République a toujours cru dans les vertus de l'apprentissage pour favoriser l'insertion de notre jeunesse. Il a confié cette ambition à une ministre énergique et déterminée…
…dont je veux saluer l'action, en lui donnant une feuille de route claire : porter le nombre d'alternants de 600 000 à 800 000 en 2015. Le travail a commencé à porter ses fruits puisque le nombre de contrats en alternance a grimpé de 7 % en un an malgré la crise.
C'est le résultat des réformes que vous avez engagées pour développer l'apprentissage et mieux soutenir les apprentis, madame la ministre, via un train de mesures allant de la simplification administrative aux incitations financières. L'État s'est aussi significativement investi par le biais des contrats d'objectifs et de moyens.
Miser sur l'apprentissage est un pari raisonnable et gagnant pour tous, qui implique une vraie révolution dans les structures, les comportements et les mentalités. Notre partenaire allemand l'a fait avec succès. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Nous savons que le chef de l'État veut mobiliser toutes les énergies en faveur de notre jeunesse, en faisant appel notamment à la responsabilité sociale des entreprises. Dans son allocution du 28 février dernier, le Président de la République a annoncé le relèvement de 4 % à 5 % du quota d'apprentis dans les entreprises de plus de 250 salariés. Cet effort demandé aux chefs d'entreprise nécessitera une vraie concertation et une réelle pédagogie quant aux bénéfices mutuels attendus.
Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer le calendrier d'application de cette mesure, décliner ses objectifs et les moyens que vous engagerez pour obtenir la mobilisation générale autour de cette priorité nationale en faveur de l'emploi de notre jeunesse ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Nadine Morano, ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle.
Monsieur Manuel Aeschlimann, je vous sais très engagé dans la problématique de l'emploi des jeunes…
…puisqu'il y a quelques semaines nous étions avec Éric Besson dans un CFA industriel chez vous, à Asnières. Cet après-midi, je me rendrai dans un centre interprofessionnel de formation des commerces de l'alimentation, dans un secteur où il y a 193 alternants, 90 % de réussite et 90 % d'embauche dans les six mois.
Vous le voyez, ces formations fonctionnent. En un an, nous avons enregistré une augmentation de 7,2 % du nombre de contrats d'alternants dans notre pays, et cela malgré la crise.
Notre politique fonctionne ; nous devons donc aller plus loin. Nous y avons mis les moyens, comme vous l'avez rappelé, à travers les contrats d'objectifs et de moyens que nous avons signés avec les régions pour un montant de 1,7 milliard d'euros. Nous avons pris des mesures pour les entreprises de moins de 250 salariés : le dispositif zéro charge a fait l'objet d'une campagne de communication importante sur toutes les radios, ce qui a suscité 40 000 demandes.
Le Président de la République a souhaité donner un coup d'accélérateur puissant à ce dispositif qui marche. Des marges de manoeuvre existent dans les entreprises de plus de 250 salariés. La semaine dernière, j'ai signé avec Airbus un engagement visant à atteindre 5 % d'alternants, sachant que cet objectif est déjà atteint par cette entreprise en Allemagne.
Vous allez examiner un projet de loi de finances rectificative qui portera le quota à 5 % dans les grandes entreprises. Voilà une réponse crédible, concrète, en faveur de l'emploi des jeunes dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Pascal Deguilhem, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, je vais vous parler « qualitatif », de ces élèves les plus en difficulté pour lesquels la réponse du seul enseignant de la classe n'est pas suffisante, ceux-là mêmes que vous abandonnez de façon dramatique en supprimant massivement les postes RASED.
Votre prédécesseur, Xavier Darcos, avait initié en 2008 cette politique à hauts risques pour les élèves qui rencontrent des difficultés durables d'apprentissage ou d'adaptation aux attentes scolaires.
Comment croire à votre volonté de lutter contre l'échec scolaire quand vous supprimez à nouveau 3 000 postes d'enseignants spécialisés cette année ? En cinq ans, votre majorité aura fait disparaître la moitié de ces personnels qualifiés et engagés à l'intérieur de l'école dans la lutte contre l'échec scolaire.
Vous sabordez les RASED, comme vous avez sacrifié la formation initiale et continue des enseignants, la scolarisation des moins de trois ans, réduit les postes de remplaçants au-delà du raisonnable et dégradé les conditions d'enseignement.
Monsieur le ministre, je connais votre réponse : aide personnalisée. Or vous savez très bien que celle-ci ne peut répondre qu'à un besoin de soutien ponctuel, ce qui n'a rien à voir avec la prise en charge de la grande difficulté scolaire. D'ailleurs, votre inspection générale s'est clairement exprimée à ce sujet, de même que de nombreux parlementaires de votre majorité.
Ce qui devait être une expérimentation – qui n'a jamais été évaluée – est devenu la variable d'ajustement de votre carte scolaire : 25 postes sur 70 sont supprimés en Dordogne et il en ira de même dans tous les départements à la rentrée prochaine.
Monsieur le ministre, sauf pour quelques rares indications thérapeutiques, la saignée, censée améliorer l'état du malade, a été abandonnée depuis longtemps. Dans quelques semaines, nous ferons cesser cette saignée idéologique dangereuse pour l'école de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.
Monsieur Deguilhelm, l'école de la République a d'abord besoin de sérénité et de calme, mais aussi d'un cap, celui que ce gouvernement a choisi : la personnalisation des parcours, des pédagogies, des enseignements, la recherche d'une solution pour chaque élève.
Si l'on veut lutter contre la difficulté scolaire, il faut d'abord la détecter le plus tôt possible.
Tel est le sens du plan de lutte contre l'illettrisme que j'ai engagé il y a dix-huit mois et qui consiste, dès la maternelle, à travailler sur la détection des difficultés scolaires en apportant un accompagnement individuel.
Quoi que vous en disiez, c'est le sens de l'aide personnalisée, qui permet d'apporter une remédiation aux élèves en difficulté, grâce aux maîtres qui ont été formés pour cela.
C'est aussi le sens des stages de remise à niveau, organisés une semaine avant la rentrée scolaire, dont bénéficient 24 000 élèves, soit 15 % d'une classe d'âge de CM1-CM2, ceux qui sont le plus en difficulté.
C'est aussi le sens de l'accompagnement éducatif au collège. Depuis 2007, un million de collégiens sont pris en charges tous les jours à partir de seize heures, dans le cadre d'un soutien aux devoirs et d'un travail avec le milieu éducatif et sportif local.
Voyez, monsieur le député, c'est le traitement individualisé, la personnalisation, qui permettra de lutter durablement contre l'échec scolaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
RASED
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt.)
L'ordre du jour appelle le dépôt du rapport annuel de la Cour des comptes.
Je souhaite en votre nom à tous la bienvenue à M. le Premier président de la Cour des comptes, et je lui donne immédiatement la parole.
En application de l'article L. 136 1 du code des juridictions financières, j'ai l'honneur, monsieur le président de l'Assemblée nationale, de vous remettre le rapport public annuel de la Cour des comptes.
Monsieur le président, monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les députés, c'est pour moi un plaisir renouvelé de présenter au Parlement le rapport public annuel de la Cour des comptes. Je l'ai remis au Président de la République hier après-midi, et le déposerai tout à l'heure sur le bureau du Sénat.
Ce rapport est la publication historique et emblématique de la Cour. Il est l'expression la plus forte de la mission constitutionnelle d'information des citoyens que, à travers votre pouvoir constituant, vous nous avez confiée à l'occasion de la révision constitutionnelle de 2008. Nos nombreuses autres publications, qui s'échelonnent dans l'année, concourent aussi à cette mission. Ainsi que le veulent la loi et la tradition, il vous est remis chaque année depuis 1832.
Mais cette tradition plus qu'ancienne n'est plus, avec le rapport sur l'exécution du budget de l'État, la seule manifestation des liens qui unissent le Parlement et la Cour des comptes. D'une part, le rapport public annuel est aujourd'hui accompagné, durant l'année, de rapports thématiques : pas moins de quatorze en 2011. D'autre part, notamment les dispositions de la loi organique relative aux lois de finances de 2001 et la révision constitutionnelle que j'ai citée ont élargi les missions que la Cour assure pour assister le Parlement dans le contrôle de l'action du Gouvernement et l'évaluation des politiques publiques.
En 2011, nous vous avons ainsi remis nos six rapports annuels sur les finances publiques, qui sont destinés à nourrir vos débats budgétaires et financiers.
Par ailleurs, en réponse aux demandes des commissions des finances et des affaires sociales, nous vous avons également transmis neuf communications en application de la LOLF et de la LOFSS. Nous avons également adressé sept communications au Sénat. Je me réjouis de voir que ces rapports, par les observations et les recommandations qu'ils contiennent, alimentent les travaux de vos commissions.
À votre initiative, monsieur le président, nous sommes allés plus loin en 2011. Nous vous avons remis, pour le nouveau comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques, nos deux premiers rapports d'évaluation de politiques publiques, l'un sur la médecine scolaire, l'autre sur l'hébergement d'urgence des personnes sans domicile. Le travail d'évaluation a été mené de façon coordonnée et complémentaire entre les rapporteurs de la Cour et les députés.
Ces premiers exemples encourageants d'évaluation de politiques publiques nous engagent à perfectionner nos méthodes et nous impliquer plus résolument encore dans l'évaluation. Nous sommes heureux de contribuer toujours davantage aux travaux du Parlement.
Nous sommes aussi très attachés, vous le savez, à exercer pleinement notre liberté de programmation, ce qui impose que la majeure partie des activités de la Cour relève de sa propre initiative, afin d'assumer ses missions propres, notamment l'examen des comptes et de la gestion des administrations et entreprises publiques. Mais ce sont là aussi des travaux qui sont utiles et à la disposition du Parlement. L'audition que la commission des finances a organisée sur le référé de la Cour portant sur le bilan à mi-parcours du Grenelle de l'environnement, le mois dernier, en est une illustration.
Cette année, le rapport public annuel vous présente quarante-quatre contributions, sur 1 600 pages. Celles-ci figurent dans deux tomes distincts. L'un présente des observations et recommandations nouvelles, l'autre expose les résultats des travaux de suivi que mène la Cour de façon systématique pour vérifier dans quelle mesure ses recommandations sont prises en compte. Vous constaterez que, dans de nombreux domaines, des évolutions positives sont relevées. La Cour prend les exemples du plan cancer, des contrats de reclassement professionnel, des inspecteurs de l'académie de Paris ou de la gestion des juridictions administratives.
Sur d'autres sujets, des évolutions sont constatées, mais doivent être prolongées pour produire tous leurs effets positifs. La Cour « insiste » ainsi sur la réforme portuaire de 2008, les grands chantiers culturels, France Télévisions, ou encore les industries publiques d'armement.
Enfin, la Cour constate que sur certains sujets, minoritaires par rapport à tous ceux que nous présentons, la prise en compte de ses recommandations est insatisfaisante. La Cour alerte, et alertera régulièrement les citoyens et les décideurs publics, aussi longtemps que nécessaire, pour que les réformes s'engagent. Cette année, la Cour vise particulièrement – encore une fois, dirai-je – le régime des intermittents du spectacle, la gestion des pensions et des fonctionnaires de l'État, la prime à l'aménagement du territoire et la politique de périnatalité.
Ce travail sur les suites apportées à ses recommandations illustre que la Cour n'est pas seulement un facteur de transparence au service de l'information du citoyen, elle est aussi un déclencheur et un accompagnateur de réformes. Elle s'efforce d'associer à ses constats et critiques des recommandations formulées en des termes les plus opérationnels possible. Son suivi systématique des recommandations illustre aussi cette attention à être pleinement utile et constructive. Monsieur le ministre, je sais que le Gouvernement et l'ensemble des administrations y sont également attentifs.
C'est vrai.
Avant d'attirer votre attention sur une sélection de sujets du rapport, comme les dépenses fiscales, la Banque de France, le logement social, la lutte contre la fraude et les sous-préfectures, je souhaite vous exprimer les constats et messages de la Cour concernant la situation de nos finances publiques.
Il y a un mois, à l'occasion de la séance solennelle de début d'année, j'ai rappelé quatre orientations et principes fondamentaux à l'aune desquels la Cour examine la situation des finances publiques, et qu'elle a clairement dégagés dans ses précédentes publications. Le premier est qu'il faut que notre pays s'éloigne aussi rapidement que possible de la zone dangereuse dans laquelle il est entré, en raison de son niveau d'endettement. Le deuxième est qu'il importe d'assurer la crédibilité des engagements de la France en matière de finances publiques, ce qui suppose de préciser le plus possible les modalités retenues pour les tenir. Le troisième est que les déficits récurrents de nos régimes de protection sociale, sans équivalent dans les autres pays d'Europe, sont des anomalies et doivent être éliminés. Enfin, le dernier est que l'effort de redressement doit concerner toutes les entités publiques – l'État, la sécurité sociale, les collectivités territoriales –, et à la fois les dépenses et les recettes. Davantage les dépenses que les recettes, en raison du niveau déjà atteint par les prélèvements obligatoires dans notre pays.
La vigilance de la Cour pour alerter sur les déséquilibres des comptes publics ne résulte pas de préoccupations de nature simplement comptable. L'enjeu fondamental pour notre pays est de rester maître de ses décisions, et en définitive de son destin. Selon Paul Valéry, « la plus grande liberté naît de la plus grande rigueur ». Il n'est pas tout à fait certain qu'il avait à l'esprit les finances publiques en écrivant ces mots.
Mais la perte considérable de marges de manoeuvre que la charge de la dette nous impose aujourd'hui – et pourrait nous imposer davantage demain si nous ne mettons pas en oeuvre un redressement rapide de nos comptes – montre qu'en effet, afin de rester maître de sa souveraineté, un pays doit être maître de ses finances publiques.
En juin dernier, la Cour avait à nouveau relevé l'importance du déficit structurel de la France. Nous avions conclu que la crise expliquait de l'ordre du tiers du déficit de 2010. Il était, pour le reste – donc, pour l'essentiel –, de nature structurelle.
Notre pays est entré dans la crise avec un déficit structurel qui était déjà de 3,7 % du PIB en 2007, comme un marathonien entrerait dans sa course lesté d'un sac de pierres.
Il n'en est pas encore délesté. Pendant plus de trente ans auparavant, le déficit public avait presque toujours été supérieur aux moyennes communautaires, quel que soit le gouvernement en place, y compris pendant les périodes de reprise de la croissance.
Dans ses précédents rapports, la Cour a montré la nécessité de faire disparaître les cinq points de déficit structurel qu'elle a constatés en 2010, c'est-à-dire 100 milliards d'euros, par un effort structurel de redressement, suffisamment rapide et vigoureux, d'un point de PIB par an, soit 20 milliards d'euros par an pendant cinq ans.
Analysant les résultats provisoires de l'année 2011, la Cour confirme, dans le présent rapport, qu'un effort de réduction du déficit structurel a été engagé. Alors qu'il avait été quasi-nul en 2010, cet effort structurel a représenté environ 0,5 point de PIB en 2011. Ce résultat est encourageant, mais il aurait fallu le double pour s'inscrire dans le processus de redressement dont la Cour a montré la nécessité.
Un élément nouveau de l'année 2011 a été le ralentissement de la dépense, qui a augmenté de 1,4 % en volume contre 2,2 % par an sur la dernière décennie. Toutefois, ce rythme ralenti de la dépense publique a peu contribué à la réduction du déficit structurel, puisque l'accroissement de la dépense a encore été du même ordre que la croissance du PIB. En fait, la quasi-totalité de l'amélioration structurelle a reposé en 2011 sur les hausses de prélèvements obligatoires…
…qui ont apporté 11,5 milliards d'euros de mesures pérennes, soit 0,6 point de PIB.
Selon les annonces les plus récentes du Gouvernement, le déficit total de 2011 serait inférieur à sa prévision, qui était de 5,7 % du PIB. En toute hypothèse, ce niveau de déficit, même un peu inférieur à 5,7 %, et moindre qu'en 2009 et 2010, demeure trop élevé. Il signifie que 110 milliards d'euros de dépenses n'ont pas été couverts par des recettes, soit, par exemple, l'équivalent de l'ensemble des dépenses du budget de l'État effectuées pour l'enseignement scolaire, la justice et la défense. Avec un tel déficit, la dette publique continue d'augmenter à un rythme dont la prolongation serait difficilement soutenable.
Ainsi, pour conduire le redressement, les étapes qu'il nous reste à franchir pour la réduction de notre déficit structurel seront à la fois plus importantes et plus difficiles que celle déjà accomplie. Si les objectifs de réduction du déficit que vous avez voté pour 2012 sont tenus, ce ne serait que 1,75 point de déficit structurel qui aura été résorbé depuis 2010, sur les 5 points que j'évoquais, ce qui signifie que la plus grande part du chemin restera à parcourir en 2013 et 2014.
Ce message, la Cour le renouvelle pour que chacun en prenne la mesure.
C'est d'ailleurs au cours des deux années à venir que doit être accompli l'essentiel de l'effort de redressement des comptes publics, selon le programme de stabilité remis à la Commission européenne. Il prévoit un déficit public de 4,5 % en 2012 et de 3 % en 2013.
Ce n'est plus un dépôt de rapport, c'est un dépôt de bilan pour le Gouvernement.
Pour que ces objectifs soient atteints, vous devriez plutôt rester à l'écart, monsieur Terrasse. (Sourires.)
Les prévisions sur lesquelles est fondé ce programme reposent sur le cumul d'hypothèses favorables, et les moyens qui seront mis en oeuvre pour assurer la maîtrise des dépenses demeurent insuffisamment explicités.
La Cour avait jugé, en juin, trop optimistes les hypothèses de croissance retenues pour 2012 et les années suivantes. Le Gouvernement les a progressivement réduites depuis septembre, notamment pour 2012. Cette prévision vient encore d'être révisée, ce qui est plus conforme à l'analyse de la Cour et confirme, si besoin en était, que les budgets doivent être préparés à partir d'hypothèses suffisamment prudentes.
Le projet de loi de finances rectificative présenté ce matin en Conseil des ministres conforte le constat de la Cour que seule une partie de la réserve budgétaire est mobilisable pour tenir compte de la révision à la baisse de l'hypothèse de croissance. Cette opération a par ailleurs pour conséquence que presque toutes les marges de gestion du budget 2012 ont désormais disparu.
Le solde primaire en 2012, c'est-à-dire après versement des intérêts de la dette, demeurerait négatif en France, de 1,7 % du PIB, alors qu'en Allemagne, il serait positif à hauteur de 1,3 % du PIB. La décroissance du ratio de dette sur PIB de l'Allemagne se poursuivrait donc, revenant à 81 % du PIB, alors que la dette française poursuivrait encore son augmentation, à presque 90 % du PIB.
L'ajustement doit donc se poursuivre. La mobilisation de nouvelles recettes atteignant ses limites, le volet des dépenses devrait apporter une contribution beaucoup plus importante au redressement des comptes publics. Cela implique inévitablement la réduction de la dépense publique dans certains domaines, qu'il convient d'identifier. Les mesures envisagées pour l'atteindre doivent être explicitées.
Le recours à des règles générales relatives à la dépense publique ou à la réduction des effectifs ne suffira pas à cet effort sur la dépense. L'application d'un rabot uniforme par type de dépenses n'est pas recommandée par la Cour.
L'effort doit être ciblé : les dépenses inefficaces doivent être identifiées et réduites, voire supprimées. À lui seul, l'État finance aujourd'hui plus de 1 300 dispositifs d'intervention. Qui peut dire qu'il n'y en a pas d'inutiles ?
La mise en oeuvre d'une revue triennale des politiques publiques et le développement de l'évaluation des politiques publiques doivent permettre de faire porter les efforts sur l'argent public mal dépensé, en préservant les dépenses essentielles.
Cet effort doit aussi pleinement concerner les collectivités territoriales, ainsi que les dépenses de protection sociale, ces secteurs ayant été jusqu'ici relativement moins concernés par la maîtrise des dépenses que l'État et ses opérateurs.
Certes, les finances locales pèsent peu dans la dégradation globale des finances publiques et leur endettement apparaît, dans l'ensemble, bien maîtrisé. Toutefois, dans beaucoup de collectivités, la dynamique des dépenses locales retient l'attention : si l'on écarte les transferts de compétences, elles ont augmenté en volume chaque année de 3,6 % en moyenne entre 1999 et 2009.
Symétriquement, la fiscalité locale a augmenté, elle aussi, pour suivre la progression des dépenses. Les prélèvements obligatoires locaux sont ainsi passés de 4,9 % à 6,2 % du PIB entre 2002 et 2009. Même s'il a connu une inflexion en 2010, la poursuite d'un tel rythme n'apparaît pas compatible avec la poursuite de l'effort structurel de redressement, qui impose de recourir le moins possible à de nouvelles recettes et de ralentir nettement la progression des dépenses publiques.
La masse salariale constitue un facteur important de croissance de la dépense, qui devrait être davantage maîtrisé. Une meilleure articulation entre les moyens dont disposent les communes et ceux dont disposent les structures intercommunales pourrait être recherchée.
Des contraintes plus fortes doivent aussi peser sur les dépenses de sécurité sociale. Elles représentent 46 % des dépenses publiques et ne peuvent plus être financées à crédit. Elles continuent d'augmenter à un rythme trop rapide, qui exclut le retour à l'équilibre avant un terme très éloigné. Mettre en oeuvre des réformes structurelles pour infléchir durablement la progression des dépenses sociales, sans remettre en cause la qualité de la protection sociale, est un impératif premier et essentiel. Cet effort doit porter en priorité sur l'assurance maladie. Ce n'est en effet que par des mesures d'une ampleur à la hauteur des enjeux qu'elle représente que sera préservé le haut degré de protection sociale de notre pays.
La résorption de notre déficit structurel doit être conduite aussi vite que possible. Ce redressement est, en tout état cause, moins lourd de conséquences qu'une poursuite de l'endettement. Les pays qui réussissent le mieux aujourd'hui sont ceux qui ont engagé le plus tôt le redressement de leurs comptes publics. Des réformes structurelles nouvelles sont donc indispensables. Il faut bien entendu assortir cet effort de mesures de nature à renforcer la compétitivité du pays et à assurer un juste partage des efforts. Ce que la Cour prescrit, c'est de mettre en oeuvre, pendant qu'il est encore temps, un traitement de fond, continu et suivi, afin d'écarter le risque de devoir recourir à une brutale cure d'austérité, à un remède de cheval, administré sous la pression de l'extérieur, ce qui reviendrait à une mise sous tutelle.
Pour contribuer à ce redressement, la Cour recommande depuis plusieurs années la réduction des dépenses fiscales. Leur coût était en 2010 d'environ 73 milliards d'euros, soit presque un tiers des recettes fiscales nettes de l'État, en hausse de plus de 60 % depuis 2004. S'y ajoutent des dépenses fiscales non recensées, que la Cour a identifiées comme telles. La définition de ces dépenses fiscales a été précisée mais l'inventaire demeure incertain.
La Cour recommande de réduire fortement le coût de ces niches, en réduisant celles qui n'ont pas fait la preuve de leur efficacité au regard de leur coût. En 2013, les mesures votées par le Parlement, qui représenteront 11 milliards d'euros de réduction des niches par rapport à 2010, conduiront à une réduction du coût d'ensemble des niches de 5 milliards d'euros, car, entre-temps, le coût des niches fiscales a progressé. L'effort doit être amplifié, et viser une réduction de 15 milliards d'euros. Les rapports de la Cour comme ceux de l'inspection générale des finances ont identifié de nombreuses niches dont l'inefficacité est avérée.
Très juste ! Il suffit de lire le programme de François Hollande, tout est dedans.
Dans le présent rapport, la Cour prend un tel exemple de niche : les défiscalisations dites « Girardin » en faveur de l'outre-mer. Dans la mesure où les résultats sont loin d'être à la mesure des moyens engagés, la Cour propose la suppression de ces niches, au profit d'autres modes d'action publique pour soutenir les économies ultramarines.
La Cour rend compte du contrôle de la Banque de France. Depuis 2004, la taille de son bilan a triplé et sa situation financière s'est améliorée considérablement. Elle a constitué des portefeuilles d'investissement qui sont sources de revenus financiers élevés et croissants. La Cour estime cependant que, dans l'univers financier incertain où elle se situe désormais, la gestion financière de la Banque devrait donner plus d'importance au long terme et à la sécurité par rapport à la rentabilité à court terme.
Un exemple cité dans le rapport est celui de la vente d'un cinquième des réserves d'or, soit 589 tonnes, pour un produit de 9,2 milliards d'euros. Cette opération a été lancée en 2004, notamment pour que la Banque de France diversifie ses réserves, mais aussi pour que les actifs en devises qu'elle constituerait dégagent une rentabilité lui permettant d'augmenter le dividende servi à l'État. Dans le contexte où elle a été lancée, cette opération pouvait se justifier. Cependant, elle s'est échelonnée sur plusieurs années, jusqu'en 2009. La remontée considérable du cours de l'or n'a pas conduit la Banque à interrompre son programme de vente, comme l'ont fait d'autres banques centrales. L'objectif d'assurer à l'État un dividende élevé a conduit à une gestion patrimoniale qui n'est pas vraiment satisfaisante si l'on regarde le long terme.
Sur la gestion de la Banque de France, la Cour constate des progrès intervenus à la suite de son rapport de mars 2005, jugé à l'époque sévère par la Banque.
Mais celle-ci dispose toujours d'importants réservoirs de gains de productivité.
Elle a continué à mener une politique salariale onéreuse, alors que ses agents bénéficient systématiquement de rémunérations supérieures à ceux du reste de la fonction publique, à poste équivalent. Le coût salarial moyen s'élève à 100 000 euros par agent.
La Cour recommande à la Banque de France de modérer les augmentations générales de salaires, d'accélérer la baisse des dépenses sociales et culturelles, d'améliorer la gestion du parc locatif et d'examiner la possibilité de ne pas remplacer deux départs en retraite sur trois.
Concernant le logement social, l'indispensable recentrage de l'effort de construction que la situation actuelle des finances publiques rend nécessaire a produit des résultats décevants. En 2009, 75 % des logements sociaux étaient construits là où n'existaient pas de besoins manifestes, et seuls 25 % l'étaient dans les zones les plus tendues. Ces résultats médiocres s'expliquent en partie par les faiblesses dont souffre le zonage sur lequel reposent les incitations à la construction. Les instruments utilisés sont mal adaptés, parfois même contre-productifs. La connaissance nationale du parc social de logements et de son évolution doit s'améliorer, et un nouveau zonage, adapté aux enjeux du recentrage et révisé tous les trois ans, doit être adopté.
La Cour aborde particulièrement, dans ce rapport, le sujet de la lutte contre la fraude. La cellule française de renseignement financier chargée de la lutte contre le blanchiment, TRACFIN, doit définir une stratégie claire, lisible par tous les acteurs. Dans son ensemble, l'appareil répressif en ce domaine demeure trop peu efficace. La Cour s'est penchée spécifiquement sur un cas de fraude spectaculaire, qui a coûté 1,6 milliard d'euros de perte fiscale à l'État entre l'automne 2008 et le printemps 2009 : la fraude à la TVA sur les marchés de quotas carbone. Tant la Caisse des dépôts et consignations que l'entreprise BlueNext en charge du marché ont tardé à percevoir l'ampleur systémique de la fraude. De son côté, l'administration fiscale a fait preuve d'une insuffisante réactivité, du fait de l'inadaptation de ses méthodes de contrôle. Une telle fraude révèle l'insuffisance de la régulation d'un marché dont les potentialités frauduleuses ont été négligées.
Enfin, je voudrais terminer mon intervention en abordant brièvement plusieurs sujets en lien avec l'intervention de l'État et des collectivités locales sur les territoires.
S'agissant de l'intervention de l'État, la Cour a examiné le réseau des sous-préfectures. Leurs missions principales, notamment la délivrance des titres et le contrôle de légalité, sont en train de disparaître, laissant la plupart d'entre elles sans activités administratives précises. Le sous-préfet conserve un rôle de représentation et de mission mais cette vocation se détache progressivement du ressort territorial de l'arrondissement pour assister les préfets de département et de région. La gestion courante est défaillante : les ressources humaines restent sans perspective, la mutualisation des moyens humains et des tâches est insuffisante, les charges immobilières surdimensionnées et pesantes.
Pourtant, les marges d'évolution sont très nombreuses pour faire évoluer ce réseau étatique de proximité, auquel le pays est souvent attaché, sans que la présence de l'État disparaisse pour autant. Le réseau doit se moderniser et s'adapter : son découpage devrait être amélioré, les perspectives d'évolution des sous-préfectures les plus petites doivent être clarifiées, la recherche d'économies doit être amplifiée, notamment au plan immobilier. Le parc actuel doit être rationalisé en fonction des missions restantes et des modes de vie actuels.
La Cour évoque également deux sujets sur lesquels des arbitrages pourraient être utilement rendus : d'une part, la prime à l'aménagement du territoire, versée par l'État, dont le rôle est devenu marginal et que la Cour propose de supprimer, et d'autre part, les aides d'urgence à l'agriculture, dont l'usage doit être rationalisé.
Le secteur de la santé n'est pas non plus oublié, de même que ceux de l'enseignement et de la recherche, avec les réseaux thématiques de recherche avancée, la formation des enseignants, le passage aux responsabilités et compétences élargies des universités parisiennes, le plan réussite en licence et les écoles normales supérieures.
Le secteur des transports est abordé avec le bilan de la décentralisation routière, les autoroutes ferroviaires. Il y aurait donc encore beaucoup d'autres choses à dire. Mais je veux vous laisser aussi découvrir par vous-mêmes les 1 600 pages de ce rapport public annuel.
Je vous remercie, monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames, messieurs les députés, de m'avoir écouté aussi longuement sur des sujets de préoccupation qui nous sont communs. Je souhaite sincèrement que la sélection de nos contrôles qui figure dans ce rapport annuel alimente vos débats et nourrisse votre travail parlementaire. Notre expertise, en tout cas, demeure à votre entière disposition. (Applaudissements sur tous les bancs.)
Merci, monsieur le Premier président de la Cour des comptes.
La parole est à M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le Premier président, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, c'est un rendez-vous annuel que nous avons désormais. Ce rendez-vous, chacun comprendra mon propos, est un plaisir.
Vous retrouver ici, monsieur le Premier président, pour vous écouter, pouvoir m'adresser à vous une fois encore, est évidemment un plaisir, mais c'est aussi un témoignage de ce que je crois être une évolution tout à fait satisfaisante de notre fonctionnement parlementaire.
Je n'aurai pas avec vous de discussion sur les finances publiques, car nous aurons très vite ce débat en commission, puis, la semaine prochaine, en séance publique, à l'occasion de la première loi de finances rectificative pour 2012.
Je profiterai en revanche de l'occasion qui m'est donnée de m'exprimer devant vous pour faire deux remarques. La première est que, dans notre République, il est des lieux de confrontation et des lieux de consensus.
Le Parlement, l'Assemblée nationale sont les lieux naturels de la confrontation politique et démocratique ; les oppositions y sont la norme : s'en étonner, ou pire, s'en choquer, relève de la naïveté ou de l'illusion sur le fonctionnement démocratique d'un pays.
C'est parce que la confrontation est la règle dans notre assemblée qu'existe d'ailleurs un règlement, qui en encadre les modalités. C'est aussi la raison pour laquelle nous élisons un président, à charge pour lui de faire respecter ce règlement et de veiller à ce que les débats ne perdent rien en qualité et conservent tout en dignité. À la fin d'une mandature, c'est à l'aune de ces critères – qualité des débats et dignité des échanges – qu'elle sera jugée, comme le seront ceux qui eurent la responsabilité de l'exercer, dans les charges que leur ont démocratiquement confiées le peuple et les députés. Cette confrontation, qui doit être encadrée, est donc légitime.
Il est, par ailleurs, des lieux de consensus, et il faut les respecter. C'est vrai du Conseil constitutionnel, du CSA et, bien sûr, de la Cour des comptes. Si je me permets de le souligner, c'est parce que, pour être fécond et utile à notre pays, le débat démocratique doit préserver ces lieux de consensus. Attaquer le Conseil constitutionnel quand il rend une décision défavorable à l'un ou l'autre camp, ce n'est rendre service à aucun des deux camps. Contester les décisions du CSA, fût-ce avec les meilleurs arguments, non seulement ne change rien à ces décisions mais compromet de surcroît la confiance de nos concitoyens dans ces institutions de consensus.
Pour des parlementaires, enfin, tenter de discréditer un rapport de la Cour des comptes au motif que ses conclusions ne sont pas favorables aux politiques publiques mises en oeuvre depuis quelques années, tenter de discréditer la Cour des comptes en excipant de l'engagement partisan de tel ou tel de ses membres – ce qui revient à suspecter ledit rapport de partialité – ne rend service ni à la Cour des comptes, ni au Parlement, ni au débat démocratique.
Puisque nous sommes quasiment à la fin de cette mandature, je voudrais à présent remercier la Cour des comptes pour les liens très étroits qui ont été noués entre elle et le Parlement. Certes, des révisions constitutionnelles sont passées par là, mais, au-delà des révisions, l'on sait bien que, pour être correctement mis en oeuvre, les textes supposent des hommes de bonne volonté et visionnaires : il n'en a manqué ni à la Cour ni au Parlement. Pierre Joxe, Philippe Séguin, Didier Migaud ont fait partie de ces premiers présidents de la Cour des comptes qui ont permis à cette dernière de faire progresser la qualité du débat démocratique, tout en restant fidèle à ses traditions. D'autres, au Parlement, ont également fait ce qu'ils ont pu, pour utiliser au mieux les rapports et les informations que l'institution de la rue Cambon mettait à leur disposition pour les éclairer dans leurs travaux, dans leurs débats et, en définitive, dans leurs votes.
Oui, les rapports de la Cour des comptes ou ses référés peuvent déplaire aux uns ou aux autres, mais le débat démocratique, s'il n'a qu'un arbitre, le peuple, doit accepter les jugements d'institutions qui, si elles n'ont pas pour tâche de définir les politiques publiques, ne doivent pas pour autant voir discréditées les évaluations qu'elles font de l'efficacité de ces dernières.
La Cour des comptes est là pour aider le Parlement, comme d'autres institutions sont là pour aider d'autres parlements dans d'autres démocraties. Elle permet aux parlementaires d'exercer au mieux leur mission, qui est certes de voter la loi mais aussi d'évaluer les politiques publiques, c'est-à-dire d'apprécier le résultat des choix politiques faits en matière d'engagement des deniers publics.
Que chacun, quel que soit son engagement partisan, accepte les jugements et les avis des magistrats de la rue Cambon sur les politiques publiques, et le débat démocratique s'en trouvera enrichi, les uns et les autres y puisant inspiration et arguments pour approuver ou condamner, mais en aucune manière pour discréditer des travaux qui doivent nous aider à apprécier les politiques publiques.
Si nous ne pouvons nous entendre sur ce point, le débat démocratique deviendra obscur et perdra de son intérêt, pour se faire violent et polémique. Pour éviter cette obscurité, cette violence et ces polémiques, acceptons que les travaux de la Cour des comptes servent de base commune au débat démocratique que nous menons au nom de nos concitoyens, aux suffrages desquels nous nous sommes librement présentés en espérant être élus.
Voilà, mes chers collègues, les quelques réflexions que je souhaitais vous livrer, à l'occasion de l'ultime remise du rapport annuel de la Cour des comptes sous cette mandature. J'espère n'avoir choqué personne. Si tel était le cas, j'assure que ce n'était nullement mon intention. Comme vous tous qui êtes ici, j'aime passionnément le Parlement et les débats que nous y avons. Je sais les oppositions que nous avons, que nous avons eues et que nous aurons encore, et je forme le voeu que ces oppositions servent le pays et qu'elles permettent à nos concitoyens de faire le meilleur choix possible pour son avenir, celui de nos enfants et de nos petits-enfants.
Pardonnez-moi cette gravité ; je n'ai pas voulu être grandiloquent mais tenais à vous dire ce que j'avais sur le coeur. Aucune autre occasion ne m'aurait permis de m'exprimer ainsi. C'est la raison pour laquelle je vous demande par avance votre indulgence. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le Premier président de la Cour des comptes, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, je m'associe tout d'abord aux propos de Jérôme Cahuzac, qui sont marqués par une grande sincérité.
C'est la dixième fois, depuis que je suis rapporteur du budget, depuis 2002, que j'assiste au dépôt du rapport de la Cour des comptes…
Je voudrais tout d'abord souligner combien les relations entre notre assemblée et la Cour des comptes se sont resserrées. Comme l'a très bien dit Jérôme Cahuzac, nous travaillons aujourd'hui ensemble dans un climat de confiance. Nous partageons la charge de travail, guidés par le souci de l'indispensable rééquilibrage de nos finances publiques. La Cour des comptes nous apporte pour cela un concours extrêmement précieux, en particulier dans un domaine auquel vous êtes, monsieur le président de l'Assemblée, très attaché, celui de l'évaluation et du contrôle. Je souhaite qu'à l'avenir, ce qui est quasiment un travail d'équipe entre notre assemblée et la Cour des comptes puisse encore s'approfondir et s'améliorer.
Nous sommes en effet confrontés à un énorme défi, celui du rééquilibrage de nos comptes publics, avec une question primordiale – que vous soulignez à juste titre, monsieur le Premier président, dans votre rapport –, celle de la maîtrise des dépenses.
J'ajouterai deux ou trois réflexions rapides, un peu improvisées, qui pourront servir pour les premiers mois de la prochaine législature.
Car, mes chers collègues, les débuts de législature, depuis 1981, sont particulièrement funestes à nos finances publiques. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP et du groupe NC.)
Et s'il y a une chose que je regrette aujourd'hui, c'est le manque de lucidité dont nous avons fait preuve en juillet 2002. En ce début de législature, nous vivions tous, majorité et opposition, avec l'idée que la croissance moyenne était de 2,8 % et que le déficit public était stabilisé autour de 3,3 points de PIB. En réalité, monsieur le Premier président, sur les quatre à cinq points de déficit structurel que vous évoquez, deux au moins s'étaient formés durant ces années 2000-2001 et aux premiers mois de l'année 2002, sans que nous nous en rendions compte. Ils sont liés pour une part à de nouvelles catégories de dépenses, certes généreuses, mais dont nous n'avons pas mesuré alors l'incidence. Nous avons manqué de lucidité en cet été 2002.
Je prendrai l'exemple de la CMU et de l'aide médicale d'État. Souvenons-nous que la loi de finances initiale pour 2002 prévoyait pour l'AME un crédit de 80 millions d'euros. Or, m'étant livré en juillet 2002 à l'inventaire de plusieurs lignes de crédit, je découvris que nous avions déjà atteint les 400 millions d'euros… Nous en sommes aujourd'hui à 550 millions !
À côté de la CMU, nous n'avions pas non plus perçu à l'époque les effets funestes de l'APA sur les finances des départements, n'est-ce pas, monsieur le président du conseil général de l'Ardèche ? Pas plus que nous n'avons pris la pleine mesure du coût financier des trente-cinq heures, des trente-cinq mille emplois créés, et j'en passe !
Monsieur Emmanuelli, nous ne nous étions pas non plus rendu compte de l'ampleur des baisses d'impôt intervenues en 2000.
Des baisses d'impôt considérables : quinze milliards de fiscalité locale supprimés et transformés en dotations, auxquels il faut ajouter la baisse de la TVA et de l'impôt sur le revenu !
Or, qu'a fait la nouvelle majorité face à cette accumulation ? Nous avons entériné la totalité de ces dépenses supplémentaires !
Nous en avons même rajouté une couche, en ajoutant 5 % de baisse d'impôt sur le revenu !
Si ce n'est pas une autocritique, ça ! M. Carrez va finir en camp de travail !
Ayant ainsi créé sans s'en rendre compte deux points supplémentaires de déficit structurel, nous avons dû ramer. Et, depuis 2002, nous avons mis en place la norme d'évolution zéro volume, puis zéro valeur ; nous l'avons étendue aux prélèvements sur recettes, puis nous avons mis en place les lois de programmation pluriannuelle, la RGPP, la réforme de l'administration territoriale, le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux…
Une chose est certaine : tous ces efforts ont été insuffisants compte tenu de nos quatre points de déficit structurel.
La question qui se pose aujourd'hui à nous est celle des interventions de l'État. J'emprunterai sur ce sujet un exemple à votre rapport, car il faut bien parler de sujets difficiles. Est-il normal que, depuis des années, nous consacrions un milliard à indemniser 100 000 intermittents du spectacle ? Pouvons-nous encore soutenir de telles interventions ?
Quand on va à l'opéra, comment fait-on s'il n'y a pas d'accessoiristes ?
J'ai parlé des dépenses, je vais parler des recettes. En ce domaine également les débuts de législature sont très difficiles. En juillet 2007, qu'avons-nous fait ? Nous avons procédé à dix milliards de baisses d'impôt…
La moitié concernait les heures supplémentaires et donc – rendez-nous cette justice, monsieur Muet – des familles plutôt modestes, car ce ne sont pas les cadres supérieurs qui font des heures supplémentaires.
Nous avons donc baissé les impôts, mais avons-nous, à l'époque, gagé ces baisses d'impôts par des économies ? Non.
général. Le déficit structurel s'est donc aggravé. La crise est arrivée et nous sommes aujourd'hui confrontés au mur de la dette.
Si nous n'avons pas le courage de traiter la question de la dépense publique dans ses trois composantes, à savoir l'État, sur lequel nous avons bien avancé, les collectivités locales et la sécurité sociale, nous ne parviendrons pas à rééquilibrer nos comptes. Penser que nous pourrons le faire en nous appuyant essentiellement sur des hausses de prélèvements obligatoires, c'est complètement illusoire.
général. Nos marges de manoeuvre pour augmenter les prélèvements obligatoires sont très limitées. M. Jérôme Cahuzac vient de nous citer quelques chiffres. Une tranche supplémentaire de l'impôt sur le revenu, dont le taux serait fixé à 45 %, cela représenterait une recette de 600 ou 700 millions. Que pouvons-nous gagner sur la fiscalité du patrimoine ? Rappelons que les prélèvements sociaux sur les revenus du capital seront passés de 10 % en 2004 à 15,5 % au 1er juillet prochain. Autrement dit, à partir de juillet, la fiscalité du patrimoine sera aussi lourde que la fiscalité du travail. De quelle marge de manoeuvre disposons-nous dans ces conditions, surtout si l'on compare notre situation à celle de l'Allemagne ?
général. Nous n'avons pas davantage de marge de manoeuvre en ce qui concerne la TVA, sauf en termes de redéploiement. Par conséquent, deux défis se présentent à nous : maîtriser les dépenses, ce qui est la priorité absolue ; et en termes de fiscalité, à prélèvements constants, redéployer pour rendre notre fiscalité plus juste, plus favorable à la compétitivité des entreprises. Mais en aucun cas, nous ne devons continuer à l'augmenter.
Je conclurai sur une note optimiste, parce qu'il le faut. Après tout, le défi sur la dépense est-il si difficile à relever ? La dépense publique représente un peu plus de 1 000 milliards, soit 55 ou 56 % du PIB. La dérivée fut de 40 ou 50 milliards par an pendant des années et des années. Nous devons faire en sorte qu'elle ne s'élève plus qu'à une dizaine ou une quinzaine de milliards par an. C'est tout à fait possible. Mais ce n'est possible, comme vous l'avez très bien dit, monsieur le Premier président, que si l'ensemble des composantes de la dépense publique participent à cet effort. Cela concerne dont l'État, mais aussi administrations sociales, ainsi que les collectivités locales.
Parce que nous devons relever ce défi, nous devons rechercher des gains d'efficacité, de productivité, sur les différents secteurs de la dépense, en particulier celui des interventions sociales, qui est le plus difficile.
M. Pierre Méhaignerie souligne régulièrement, et à juste titre, le paradoxe du système français : nous battons tous les records en matière de dépense sociale, mais elle est complètement saupoudrée, et sa répartition manque parfois de justice. Je suis persuadé que l'argent public, qui se fait rare, pourrait être bien plus efficacement employé si cette dépense sociale était recentrée, mieux ciblée, gérée plus rigoureusement, sans pour autant dégrader le service public ni porter atteinte à la solidarité.
Je citerai pour finir cette phrase placée en exergue du rapport sur la LOLF : « Dépenser moins en dépensant mieux ». (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Monsieur le Premier Président, l'Assemblée nationale vous donne acte du dépôt du rapport de la Cour des comptes.
Nous vous remercions pour la présentation que vous en avez faite et nous félicitons de l'excellence des relations qui unissent désormais l'Assemblée nationale et la Cour des comptes. L'intention du constituant était, en 2008, de renforcer nos liens ; le résultat est à la hauteur de nos attentes et nous savons combien vous y avez personnellement contribué. Recevez-en notre gratitude.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinq, est reprise à dix-sept heures dix, sous la présidence de Mme Laurence Dumont.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, relatif à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique (nos 4224, 4238).
Hier soir, l'Assemblée a commencé l'examen des articles, s'arrêtant à l'article 41.
Madame la présidente, monsieur le ministre de la fonction publique, mes chers collègues, l'article 41 concerne ce que l'on appelle globalement la parité. Je souhaite, à ce stade, soumettre à l'Assemblée quelques réflexions sur l'ensemble des articles qui vont suivre, notamment sur l'amendement que défendra tout à l'heure le Gouvernement après l'article 41 sexies.
Nous le savons tous, la Constitution dispose désormais que la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales. Mesurons la formulation : « la loi favorise l'égal accès ». C'est une disposition qu'en son temps j'ai votée car elle parle d'égalité, d'égal accès, et non pas de quotas.
Le principe d'« égal accès des hommes et des femmes » renvoie bien à celui de l'égalité des chances. Partant, cette disposition est compatible avec un principe constitutionnel fondamental, celui de l'égal accès de tous les citoyens aux emplois publics.
L'« égal accès » ne signifie pas parité de nominations, ni en stock ni en flux. Ce ne serait pas conforme, selon moi, à la Constitution. Je pense que le constituant a choisi en conscience et avec sagesse les termes d'« égal accès ».
Il s'agit bien de garantir que la probabilité d'accéder à des fonctions est semblable pour les hommes et pour les femmes. Il ne s'agit pas, à un quelconque moment des concours ou des carrières, de définir de quelconques quotas.
Je peux comprendre que la tentation médiatique amène à parler de parité et de quota. Mais la réalité constitutionnelle, c'est bien celle de l'égalité d'accès.
Je me permets de souligner que si l'on transforme ce principe d'égalité d'accès en quotas, l'on pourrait, au regard des conditions initiales de recrutement, se retrouver dans des situations absurdes. Admettons qu'au sein d'un corps qui sert de vivier à l'accès à telle fonction ne se trouvent que 10 % d'hommes, comment voulez-vous en retrouver 40 % aux fonctions de direction, sauf à introduire une inégalité qui est tout à fait contraire aux principes constitutionnels ?
Je me permets aussi d'attirer votre attention sur la curiosité qu'il y a, dans les dispositifs proposés, à parler de pénalités que l'État se paierait à lui-même. Au fond, j'ai le sentiment que l'on nous propose une construction qui, lorsqu'elle s'inspire de l'idée d'égalité d'accès, est bonne mais, lorsqu'elle se rapproche de la notion de quota, est mauvaise et, sans doute, dans la durée, inapplicable.
Ces pénalités que l'État se paierait à lui-même relèvent d'une vision assez curieuse des modalités de contrôle du respect de ces dispositions qui, je le répète, si elles recouvrent une notion de quota, ne sont ni souhaitables ni applicables. S'il s'agit d'égalité d'accès des femmes et des hommes, c'est le principe de la Constitution, principe auquel nous adhérons bien volontiers.
J'avoue que je n'ai pas bien compris la démonstration de M. Mariton, mais je pense que M. le ministre saura y répondre.
Je n'ai pas compris non plus.
Monsieur le ministre, vous vous félicitez du titre III, et vous avez un peu tendance, dans les médias, à vous l'approprier.
Hier soir, très lucidement, vous avez reconnu que le travail de la délégation aux droits des femmes avait permis cette avancée.
Je l'ai dit dix fois !
D'ailleurs, je dois rendre hommage à la délégation, où siègent également des députés hommes, car le bilan de l'activité de votre ministère, monsieur le ministre, fait apparaître qu'aucun projet de loi, donc émanant du Gouvernement, relatif à l'égalité entre les hommes et les femmes n'a été présenté durant la mandature. Pendant cinq ans, il n'y a eu que des propositions de loi. Votre bilan est donc vite fait.
Aussi, le rapport de Mme Guégot, qui permet d'introduire ce titre III, est une très bonne nouvelle.
Monsieur Mariton, je ne vois pas où vous n'avez pas le vivier pour atteindre la parité : la fonction publique compte plus de 60 % de femmes, parfois 75 % voire 80 % par endroits ; elles sont 3 150 000. Comme dans le privé, elles vivent des inégalités professionnelles, ce qui est étonnant en raison du statut qui devrait l'empêcher. Soit elles choisissent, ou sont conduites à choisir, des métiers féminins qui n'offrent pas les mêmes primes, et donc les mêmes salaires nets, soit, là comme dans le privé, le plafond de verre s'applique. Les femmes sont très nombreuses à l'école maternelle et à l'école primaire, moins nombreuses au collège et au lycée, et encore moins à l'université, dans les fonctions de direction. De tels exemples existent dans toutes les fonctions. Selon Mme Guégot, l'écart de salaires est encore de 15 %. C'est là une inégalité contre laquelle il faut lutter.
Le rapport Guégot propose d'établir, comme dans le privé, un rapport de situation comparée, selon certains critères. Cette obligation est une véritable avancée. Or je me souviens de la discussion que nous avons eue au cours de l'examen de la réforme des retraites. Dieu sait si nous avons été déçus par le décret d'application de son article 99, qui édulcore complètement le débat et les résultats que nous voulions obtenir à travers le rapport de situation comparée ! Et là, aucune obligation ni aucune pénalité ne sont prévues pour faire appliquer ce rapport et aboutir à une égalité hommes-femmes.
Monsieur le ministre, je vous fais une proposition. Vous avez accepté que le rapport de situation comparée soit remis au Parlement. Pourrait-il être remis à la délégation à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes afin qu'un débat s'engage, de sorte que ce rapport ne soit pas juste un rapport de plus, mais l'occasion de demander au Gouvernement de s'engager sur des mesures de nature à faire avancer l'égalité ?
Je rappelle à M. Mariton, qui n'était peut-être pas député à l'époque, que nous avons voté une réforme constitutionnelle en 1999, précisément pour répondre à la question posée en 1982 s'agissant des quotas. Les articles 3 et 4 avaient été modifiés, l'article 3 précisant que « la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives », et l'article 4 disposant que les partis politiques « contribuent à la mise en oeuvre » de ce principe.
En 2008, là aussi sous l'impulsion de la délégation, nous avons une nouvelle fois modifié la Constitution, ce qui nous permet de légiférer aujourd'hui. En 2006, en effet, lorsque nous avions voulu imposer un quota de 20 % de femmes dans les conseils d'administration, le Conseil constitutionnel nous avait opposé l'absence de base constitutionnelle. Cette base constitutionnelle, nous l'avons posée en 2008, grâce à un travail conjoint entre l'Assemblée et le Sénat. C'est ainsi que l'article 1er de la Constitution dispose dorénavant que « la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales. »
Deuxième observation, mon cher collègue, certains termes ont été employés, notamment en commission, qui me dérangent. Je ne les aime pas.
Les femmes ne sont ni un stock ni un flux. Jamais on n'a parlé des hommes en ces termes.
S'agissant du « stock » ou du « vivier » que vous évoquez, mon cher collègue,…
…je vous indique que, selon les chiffres officiels de l'INSEE, les filles représentent 30,5 % des élèves dans les prépas scientifiques. L'École polytechnique, dont vous êtes issu, est ouverte aux femmes depuis 1972. Cette année-là, elles étaient sept ; entre 1994 et 2010, elles représentaient 14 % des admis, soit, sur une promotion de 500 élèves, soixante-dix élèves. Cette année a vu la promotion la plus féminisée avec quatre-vingt-douze femmes, c'est-à-dire 18,5 % des effectifs.
Mon cher collègue,…
…si, dans un tel vivier, nous n'arrivons pas à trouver des ingénieurs généraux, où allons-nous ! Certains débats datent d'un autre âge…
…et ne devraient même plus être ouverts dans cet hémicycle.
Dernier point, madame Coutelle, M. le ministre a, dès le départ, indiqué que tant le travail de la délégation que le rapport de Mme Guégot avaient fourni un fond qui permettait aujourd'hui de légiférer sur la fonction publique. Je suis très heureuse que, après l'adoption de la loi qui a imposé, dans le secteur privé, une proportion minimale de 40 % de femmes dans les conseils d'administration, l'État puisse aujourd'hui se montrer exemplaire. C'est la fierté de cette fin de mandat et le fruit d'une excellente collaboration entre le Gouvernement et le Parlement.
Je n'avais pas prévu d'intervenir à ce stade du débat mais, compte tenu des prises de position, je crois devoir le faire au nom de mon groupe. Je ne partage pas l'analyse présentée par notre collègue Mariton.
Nous sommes en présence d'un problème très concret : assurer l'égal accès des hommes et des femmes aux emplois publics.
Il y a, par conséquent, deux attitudes possibles. Ou bien on en reste aux déclarations d'intention, comme nous le faisons depuis des années, sur les bancs de l'Assemblée comme sur les autres. Et si l'on ne peut douter de la sincérité des engagements pris de part et d'autre, force est de constater que les résultats ne sont pas là. Ou bien on admet que le seul moyen de progresser, c'est d'édicter des règles normatives.
La base juridique existe, la volonté affichée par le Gouvernement mérite d'être soutenue et par conséquent, monsieur le ministre, nous sommes derrière vous dans ce combat. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. François Sauvadet, ministre de la fonction publique.
Je remercie le porte-parole du groupe UMP de son soutien à cette initiative. C'est en effet un moment très important que nous allons vivre aujourd'hui, à l'Assemblée nationale, puisque nous allons, par la loi, fixer l'objectif de remédier à une inégalité criante, qui perdure depuis des années et que divers textes, circulaires ou déclarations d'intention n'ont pas pu régler.
Madame Coutelle, depuis le début, j'indique que le Gouvernement et le ministre que je suis se sont largement inspirés des travaux de la délégation pour faire des propositions engagées, puisqu'un objectif sera fixé avec des quotas. Nous nous sommes aussi beaucoup inspirés du rapport de Mme Françoise Guégot pour prendre les dispositions que je souhaitais.
J'ai conscience que ce moment va bousculer un certain nombre de conservatismes. D'ailleurs, monsieur Mariton, vous avez employé exactement les arguments de ceux qui ne veulent pas que les choses changent.
Ce sont les mêmes qu'on entend depuis des années.
Le constat est simple : la fonction publique emploie 60 % de femmes ; elles accèdent à moins de 10 % des postes de direction dans la haute fonction publique. Je le dis, c'est inacceptable et cela ne peut pas durer ! La conception que nous avons en partage de la fonction publique, c'est qu'elle doit être représentative de la société qu'elle sert, ouverte à la diversité des parcours et des talents, et qu'elle doit également laisser, à égales compétences, les femmes accéder tout à fait naturellement aux responsabilités.
À partir de ce constat, j'ai observé que toutes les initiatives que nous avons pu prendre jusqu'à présent, notamment par voie de circulaire, n'ont produit aucun effet. À cet égard, je me souviens des intentions de l'opposition lorsqu'elle était la majorité, il y a dix ans, et de la circulaire signée par Lionel Jospin, alors Premier ministre.
En commission ont été adoptés toute une série de dispositifs. D'abord, si la loi est votée, ce que je souhaite, les jurys de concours devront dorénavant être composés à 40 % de femmes, de même que les instances paritaires, les CAP.
Nous avons aussi souhaité reprendre le dispositif de la loi Copé-Zimmermann imposant la présence des femmes dans les conseils d'administration des grandes entreprises, et nous l'avons transposé aux conseils d'administration des établissements.
Que Mme Coutelle se rassure, nous avons précisé dans la loi ce qui doit figurer dans le rapport annuel sur l'évolution de la situation faite aux femmes et l'égal accès des femmes et des hommes, qui sera présenté, je le rappelle, devant le Conseil commun de la fonction publique. Cette instance, que nous venons d'installer le 31 janvier, est l'émanation des trois conseils supérieurs de la fonction publique, d'État, hospitalière et territoriale, sur une base de représentativité. Le rapport fera l'objet d'une analyse et d'un regard croisé avec les organisations syndicales, les représentants des employeurs territoriaux et hospitaliers, et le représentant de l'État, le Conseil commun étant présidé par le ministre de la fonction publique.
Vous avez souhaité, mesdames, messieurs les députés, que le rapport soit transmis au Parlement et fasse l'objet d'un débat public. Je ne puis m'engager sur la commission destinataire, puisqu'il vous appartient d'organiser vos travaux, mais je fais confiance à la délégation aux droits des femmes pour se saisir de ce rapport et en faire toute la publicité qu'il conviendra, en tout cas pour en tirer toutes les leçons qu'il serait nécessaire.
Je veux dire à M. Mariton que si nous ne faisons rien, rien ne changera.
Je n'ai pas dit qu'il ne fallait rien faire, mais qu'il fallait faire les choses bien et conformément aux principes de la République.
Les quotas ne sont pas la panacée, je l'ai toujours dit. C'est pourtant le chemin incontournable si l'on veut que les choses changent.
Nous avons fixé une évolution progressive : 20 % de nominations de femmes dans les deux ans qui viennent, puis 30 %, pour parvenir à l'objectif de 40 % à l'horizon 2018.
Monsieur Mariton, vous avez évoqué la Constitution. Selon son article 1er, je rappelle que la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales.
La révision de 2008 qui a permis d'apporter cette précision avait précisément pour objectif de lever les obstacles antérieurs consacrés par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, notamment ceux découlant du principe d'égal accès aux emplois publics issu de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. C'est sur le fondement de cette révision constitutionnelle que la loi dite « Copé-Zimmermann » a instauré des quotas de nomination dans les conseils d'administration des grandes sociétés commerciales.
Monsieur Mariton, vous observerez que le Conseil constitutionnel a validé à plusieurs reprises des dispositions législatives mettant en oeuvre le principe de représentation équilibrée, par exemple pour le Conseil supérieur de la magistrature ou le Conseil économique, social et environnemental.
Par ailleurs, le mécanisme ne limite pas le pouvoir de nomination du Président de la République, prévu par l'article 13 de la Constitution.
À cet égard, le Conseil constitutionnel a déjà décidé que ce pouvoir n'était plus absolu : pour la nomination des préfets, le Président est ainsi tenu de nommer au moins deux tiers des préfets en poste territorial parmi les sous-préfets et les administrateurs civils.
De quels postes parlons-nous ? La liste des emplois concernés par ces nominations sera fixée par décret, mais je peux d'ores et déjà vous indiquer qu'il s'agira d'un peu plus de 4 000 emplois, soit environ 600 emplois pourvus en Conseil des ministres – ambassadeurs, préfets, directeurs d'administration centrale –, 1 700 emplois de cadres supérieurs – sous-directeurs, chefs de services en administration centrale, directeurs de services déconcentrés –, 1 500 emplois fonctionnels de direction dans les collectivités territoriales les plus importantes comme les communes de plus de 80 000 habitants, les conseils généraux et les conseils régionaux – directeurs généraux des services, directeurs généraux adjoints –, et encore 350 emplois de direction des principaux établissements hospitaliers.
Le dispositif prévoit évidemment quelques éléments de souplesse. Madame Zimmermann, je suis comme vous : je n'aime pas les mots de « stock » et de « flux ». Je dirai donc que la règle jouera pour les primo-nominations, car il faut permettre que les hommes qui sont déjà en poste soient renouvelés dans la limite fixée par les textes, ou qu'ils soient nommés sur un même type d'emploi. Par exemple, un préfet qui passe d'un département à un autre doit pouvoir échapper au calcul des quotas. En revanche, les départs à la retraite en grand nombre des titulaires de ces emplois permettront de nommer un nombre significatif de femmes. Il s'agit bien là de l'objectif que nous nous fixons et pour lequel j'espère que vous voterez.
Les quotas s'appliqueront par étapes : 20 % au 1er janvier 2013, 30 % au 1er janvier 2015, et 40 % au 1er janvier 2018.
Plutôt que d'employer le mot affreux de « vivier », je préfère parler des « compétences » sur lesquelles nous pouvons nous appuyer pour permettre un égal accès, à compétences égales, des hommes et des femmes aux postes de responsabilité. Aujourd'hui, 1 062 femmes sont présentes dans les grands corps d'ingénieurs : 150 femmes ingénieurs des mines sur 1 407 ; 889 femmes ingénieurs des ponts, eaux et forêts ; et 23 femmes inspecteurs de santé publique vétérinaire.
Les nouveaux recrutements dans les grands corps ont vu la part des femmes augmenter progressivement. J'observe que les dernières promotions du corps des ponts, eaux et forêt comptent entre 65 et 68 % de femmes. En 2011, elles représentent au total 25 % des effectifs de ce corps.
Contrairement à l'argument régulièrement avancé pour faire en sorte que les choses ne changent pas, nous disposons des ressources et des compétences nécessaires.
Prenons l'exemple des DREAL, les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement, ou même celui des DRAAF, les directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt. Sur 61 postes en DREAL, les femmes représentent plus de 10 % des effectifs ; sur 45 postes en DRAAF, elles sont 31 %. Au vu de ces chiffres, vous voyez que l'argument de la ressource et des compétences tombe de lui-même.
Cela est d'autant plus vrai que certains des postes concernés peuvent être occupés par des corps aux compétences beaucoup plus générales, comme celui des administrateurs civils, qui compte aujourd'hui 800 femmes. Je veux citer tous ces chiffres afin qu'ils soient consignés au Journal officiel et que nul ne les ignore.
Au final, pour pourvoir les emplois fonctionnels les plus techniques, la ressource existe. Celle-ci et la féminisation croissante du recrutement via les grandes écoles devraient vous convaincre, monsieur le député – mais je m'adresse aussi à l'ensemble de la représentation nationale –, que les femmes peuvent aujourd'hui pourvoir 20, 30 puis 40 % des postes à haute responsabilité.
Je cite un dernier exemple car je ne désespère pas de vous convaincre, monsieur Mariton, en faisant appel à votre sens aigu de l'observation des réalités, pour en tirer des leçons pour l'avenir que nous devons construire. Tous les ans, vingt personnes sont nommées dans le corps préfectoral. L'application du taux de 20 % conduira d'abord à nommer quatre femmes par an, puis celui de 30 % amènera à la nomination de six femmes…
Ces objectifs sont tenables ; nous avons les moyens d'atteindre le but que nous nous fixons.
Je précise que l'application du respect des quotas se fera ministère par ministère, collectivité par collectivité, et à l'échelon du centre national de gestion pour la fonction publique hospitalière. Les résultats par rapport aux objectifs seront appréciés annuellement. Je souhaite que le rapport annuel présenté au Conseil commun puisse faire un point très précis des évolutions.
Pour conclure, je veux noter la féminisation croissante des nouvelles promotions des grandes écoles. Je me suis récemment rendu à l'ENA, avant la sortie de la dernière promotion. L'école comptait 21 % de femmes en 1996 ; elles sont aujourd'hui 36 %. La dernière promotion de l'INET, l'Institut national des études territoriales, grande école qui forme les cadres territoriaux, et que je visiterai d'ailleurs bientôt, compte trente et une femmes sur soixante-quatre lauréats, soit près de 50 % des reçus.
Les dernières promotions de l'École des hautes études en santé publique comptent plus de 50 % de femmes.
Madame Coutelle, je suis déterminé à ce que des sanctions s'appliquent à ceux qui ne respecteront pas les règles. Ces sanctions sont de nature financière, et je suis surpris que M. Mariton s'en étonne. Un dispositif similaire est en place pour les personnes handicapées. Nous avons créé un fonds d'intégration des personnes handicapées dans la fonction publique, qui est alimenté par ceux qui ne respectent pas le quota fixé à 6 %.
J'ai l'intention de faire exactement la même chose.
Monsieur Mariton, de grâce ! la société a changé ; elle a évolué. Nous voulons faire en sorte de garantir à l'ensemble de la société française, et pas seulement aux femmes, un égal accès des hommes et des femmes aux postes de responsabilité. Monsieur le député, rejoignez votre époque,…
…rejoignez les voies de l'avenir ! Soutenez le Gouvernement ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
À ce stade de notre discussion, je souhaite, après avoir rappelé le contexte de notre débat, faire un bilan du travail effectué par la commission des lois.
À la suite de l'adoption en commission d'amendements déposés par Mmes Françoise Guégot et Marie-Jo Zimmermann, ainsi que d'amendements présentés par le Gouvernement, plusieurs mesures nouvelles et essentielles en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes ont été introduites dans le projet de loi.
Le contenu du rapport prévu à l'article 41 a été précisé. Il devra être remis au Parlement. La présentation annuelle devant les comités techniques, dans le cadre du bilan social, d'un rapport sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes a été instituée. Des dispositions tendant à assurer une représentation équilibrée des femmes et des hommes parmi les personnalités qualifiées des conseils d'administration et de surveillance des établissements publics de l'État, au Conseil commun et dans les conseils supérieurs de la fonction publique, au sein des commissions administratives paritaires ainsi que dans les jurys et comités de sélection ont aussi été adoptées.
Nous examinerons dans quelques instants des amendements essentiels sur les nominations dans l'encadrement supérieur. Je souhaite dire à nouveau à Françoise Guégot, à Marie-Jo Zimmermann et à la représentation parlementaire mon attachement à ce sujet capital, en rappelant quelques chiffres. La fonction publique connaît un taux de féminisation important qui s'élève à 59,8 % à la fin de l'année 2008 ; ce taux ne saurait cependant masquer des disparités par filières d'emplois, qui attestent une représentation encore traditionnelle du rôle de la femme dans le monde du travail. En outre, si les femmes représentent plus de la moitié des cadres de la fonction publique, soit 57 % des agents de la fonction publique de catégorie A au 31 décembre 2008, la fonction publique de l'État ne compte que 20,3 % de femmes occupant des emplois de direction à cette même date. On observe par ailleurs des inégalités salariales persistantes, alors même que le traitement dans la fonction publique est indexé sur une grille indiciaire censée constituer un gage d'égalité salariale : dans la fonction publique de l'État, cet écart salarial est de 15,6 % en 2006.
Par ailleurs, le déroulement de la carrière des femmes est beaucoup moins linéaire que celui de la carrière des hommes, du fait des interruptions de ces carrières et du recours au temps partiel. Enfin, l'écart des pensions civiles respectivement attribuées aux femmes et aux hommes était de 15 % dans la fonction publique de l'État à la fin de l'année 2008, de 12 % dans la fonction publique territoriale et de 3,7 % dans la fonction publique hospitalière, toujours au détriment des femmes.
Bref, si certaines avancées peuvent être relevées – je pense par exemple à la signature de la Charte pour la promotion de l'égalité dans la fonction publique, le 2 décembre 2008, fruit d'une coopération entre la HALDE et le ministère du budget –, beaucoup reste à faire.
C'est dans ce contexte que nous allons aborder l'examen des amendements, et je veux redire à M. Mariton qu'il y a beaucoup de choses à faire en matière de parité.
(L'article 41 est adopté.)
Le rapport de situation comparée fera l'objet d'un décret. Cela est prévu par le projet de loi ainsi que les thèmes qu'il devra aborder. Monsieur le ministre, malgré certaines expériences malheureuses, je vous fais confiance.
Soumettre ce rapport aux comités techniques est une très bonne chose. Le manque de progrès en matière d'égalité salariale entre les hommes et les femmes tient aussi au fait que ce sujet n'est pas suffisamment traité par les partenaires sociaux durant les négociations sociales, tous partenaires sociaux confondus.
Monsieur Mariton, vous pourriez lire le rapport de votre collègue, Mme Guégot ! Est-il normal, en 2012, il n'y ait aucune femme secrétaire générale d'administration centrale ? Est-il normal qu'il n'y ait que dix préfètes sur cent quatre-vingt-dix préfets ? Est-il normal que sur cent trésoriers-payeurs généraux on ne compte que huit femmes ?
Nous savons que les quotas ne sont pas satisfaisants. Pour ma part, j'ai toujours été contre : je suis pour la parité. Pour l'atteindre, s'il faut en passer par des quotas, faisons-le, mais pendant une durée brève ! En 2012, rien ne justifie que l'on ne parvienne pas à la parité !
Je veux dire au ministre qu'il a le plein soutien des collègues du groupe Nouveau Centre présents dans l'hémicycle.
Les exemples qu'il a donnés montrent que nous ne sommes pas exemplaires. Les chiffres cités par lui et par le rapporteur sont parlants ; il faut mettre fin à une situation inadmissible.
On peut regretter que de tels objectifs doivent être imposés par la loi, mais il me semble qu'ils sont communément partagés.
Par ailleurs, vous me permettrez d'élargir mon propos en émettant un souhait. Il faut rendre hommage à toutes les femmes qui occupent des postes de responsabilité dans des conditions difficiles, dès lors qu'elles doivent concilier leur vie professionnelle avec l'éducation de leurs enfants. De cela, on ne parle pas. Pourtant, nous devrons – même si je sais que ce n'est pas l'objet du texte – améliorer la sécurisation de leurs parcours professionnels et prendre en compte ces spécificités dans le calcul de leurs droits à retraite et à un crédit formation. Le texte du Gouvernement apporte des améliorations, mais, à l'avenir, il devra faire l'objet, si vous le permettez, monsieur le ministre, d'un suivi attentif de la part du Parlement.
Monsieur le ministre, l'Assemblée a adopté l'article 41 avec le concours du groupe SRC. Ma collègue Catherine Coutelle a en effet exposé les raisons pour lesquelles nous sommes attachés au concept que vous nous proposez, dont nous espérons qu'il amorcera un processus qui aboutira à une réelle parité entre chacun des sexes de l'humanité française.
Par ailleurs, les articles 41 et 41 bis concernent la remise de rapports. Hier, je vous ai proposé de rétablir l'article 32 bis, voté par le Sénat, qui prévoyait l'établissement d'un registre unique du personnel similaire à celui mentionné à l'article L. 1221-13 du code du travail. Vous avez refusé et je le regrette, car il y avait là, selon moi, un parallélisme des formes à respecter.
Il s'agit d'une expérimentation !
Ce n'est parce qu'on est en désaccord sur la méthode que l'on est une brute épaisse, incapable de comprendre l'évolution du monde. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Je suis d'accord avec vous, madame Coutelle : il n'est ni heureux ni même normal qu'aucun secrétaire général d'administration centrale ne soit une femme. Mais il n'est pas non plus heureux de remédier à cette situation en usant de méthodes qui violent le principe de l'égalité d'accès aux emplois publics.
Monsieur le ministre, je vous le dis : les quotas ne font pas partie de la société à laquelle j'aspire. Bien entendu, le monde change, mais nous ne devons pas pour autant perdre de vue les valeurs auxquelles nous sommes attachés. La démocratie française est notamment fondée sur le principe de l'égal accès aux emplois publics. En instituant ces quotas, vous créez une torsion entre l'entrée dans les cadres qui se fait dans le respect du principe du concours – lequel garantit aussi cet égal accès – et l'accès aux postes de responsabilité. Il y a quelque chose qui cloche !
En Allemagne – c'est du reste la raison pour laquelle j'approuve l'article 41 bis –, il n'y a pas de quotas, mais des personnes chargées de défendre l'égalité des opportunités pour les hommes et les femmes sont systématiquement présentes dans chaque commission de nomination, et cela me semble fondamental. Mais, en instituant des quotas, on n'atteindra pas le but recherché de manière heureuse, car on violera les principes de la République.
Les compétences existent-elles ? Oui, et c'est heureux. Il faut les mettre en valeur en respectant les principes de la République et favoriser l'égalité des hommes et des femmes, à laquelle j'aspire, mais sans violer des principes essentiels de notre République, des principes constitutionnels, des principes éthiques.
Monsieur le ministre, je souhaiterais à mon tour dresser la liste – qui ressemble, hélas, à une litanie – des hauts postes de la fonction publique d'État auxquels les femmes n'accèdent jamais.
Depuis 1944, le Conseil d'État a connu neuf vice-présidents, parmi lesquels on ne compte aucune femme, alors que 30 % des effectifs de cette institution sont féminins.
Depuis 1946, la Cour des comptes a été présidée par quinze magistrats ; aucune femme n'a jamais accédé au poste de Premier président.
Certes, nous avons eu le bonheur de voir une femme accéder au secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, poste qu'elle a occupé entre 1996 et 1998.
Mais, depuis 1958, le Conseil constitutionnel a été présidé par neuf hommes et, actuellement, on ne compte que deux femmes parmi ses onze membres.
Par ailleurs, 90 % des ambassadeurs sont des hommes et aucune femme n'a été nommée dans les ambassades importantes, notamment aux États-Unis et en Chine.
Enfin, on ne compte que neuf femmes parmi les 94 présidents d'université.
Chacun mesure le chemin qu'il nous reste à parcourir. Monsieur le ministre, nous ne doutons pas de vos bonnes intentions, mais nous devons nous retrousser les manches.
Je souhaiterais réagir aux propos de notre collègue Mariton, pour qui les mesures que nous nous apprêtons à adopter seraient quasiment un déni de justice. Je lui rappelle que, lorsque des quotas ont été introduits pour les élections, la controverse a été vive également. Or, si nous ne l'avions pas fait, la parité ne serait pas respectée dans les conseils régionaux et les femmes ne seraient pas aussi nombreuses dans l'hémicycle. Or, je suis de ceux qui estiment que, depuis cette évolution, les choses vont au moins aussi bien qu'avant et que l'ambiance est parfois meilleure, que ce soit dans l'hémicycle, en commission ou dans les groupes.
Par ailleurs, vous avez évoqué la question des distorsions. À ce propos, l'année dernière, j'ai vécu un épisode très éclairant, dans ma collectivité. Dans le cadre du recrutement d'un directeur ingénieur, nous sommes tous tombés d'accord pour considérer que le meilleur candidat était une femme. Eh bien, l'un de mes collègues a levé le doigt et nous a dit : « Il y a un problème ». « Quel problème ? » lui ai-je demandé. Et ce collègue de me répondre : « C'est une femme. »
Monsieur Mariton, j'ai bien compris vos préoccupations et je vais tenter de vous rassurer.
Tout d'abord, la loi Copé-Zimmermann n'a-t-elle pas fait évoluer les choses ?
J'observe que, depuis son adoption, la place des femmes au sein des conseils d'administration des grandes sociétés a évolué. Or, ce sont les mêmes arguments qui nous ont été systématiquement opposés.
Non, j'approuve cette loi. Mais un conseil d'administration et un emploi, ce n'est pas la même chose !
Je le répète, les quotas ne sont pas la panacée, mais c'est le seul moyen de faire évoluer une situation que nous déplorons depuis une bonne vingtaine d'années et que les différentes circulaires qui ont été publiées n'ont pas modifiée d'un iota, en dépit de l'évolution de la société et de l'accès des femmes aux formations d'excellence.
La question centrale est, en fait, celle de l'effectivité de l'égal accès des citoyens aux emplois publics. Moi, je ne me contente pas d'une égalité formelle,…
…qui ne serait qu'une aspiration subliminale. Je veux une égalité réelle, c'est-à-dire qui se traduise dans les faits. Puisque vous avez placé le débat sur le terrain des valeurs, ce sont des valeurs que nous devons porter ensemble.
S'agissant de l'effectivité de l'égal accès des citoyens aux emplois publics, je souhaiterais rappeler l'existence de plusieurs dispositifs qui auraient pu susciter la même réaction de votre part – mais peut-être n'avez-vous pas exprimé alors votre pensée avec la même vigueur qu'aujourd'hui. Je pense au troisième concours, destiné à favoriser l'accès des salariés issus du privé à la fonction publique. Je pense au recrutement sans concours des personnes handicapées. Je pense au recrutement par la voie du Pacte pour l'égalité et la diversité.
Moi aussi, j'ai beaucoup réfléchi à ce sujet.
Je n'en suis pas arrivé à cette conclusion spontanément. Ce type de mesures n'est pas satisfaisant dans son principe, mais, en raison de leur effectivité, elles sont incontournables.
Monsieur Mariton, je me suis rendu dans des classes préparatoires intégrées pour le concours d'accès à l'ENA et aux Instituts régionaux d'administration. Je vous invite à faire de même, car, lorsque j'entends les mots de ces jeunes femmes et de ces jeunes hommes issus de la diversité et désireux de se mettre au service de la République parce qu'ils croient en ses valeurs, je me dis que, oui, la République doit tenir compte de la différence pour garantir l'égal accès de tous à des fonctions qui sont parmi les plus nobles, puisqu'elles garantissent la cohésion sociale et territoriale d'un pays, que ce soit au niveau local ou national. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP et sur les bancs du groupe NC.)
À l'appui de votre thèse, vous invoquez le grand principe constitutionnel d'égalité et un principe d'éthique. Or, je puis vous dire, pour suivre régulièrement l'analyse que le Conseil constitutionnel peut faire de nos grands principes, qu'il sait adapter sa jurisprudence aux évolutions de la société. Aujourd'hui, il appartient au législateur, en lien avec le Gouvernement, d'adapter la loi aux réalités sociales pour prendre en compte la problématique de la parité. Dès lors, je ne comprends pas pourquoi vous vous cachez derrière les grands principes constitutionnels.
Je veux également saluer le fait qu'en 2011, les deux postes de secrétaire général de l'Assemblée nationale ont été confiés à des femmes.
Je suis saisie d'un amendement n° 42 .
La parole est à Mme Françoise Guégot.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel, mais je souhaiterais profiter de cette occasion pour rappeler l'importance des éléments statistiques qu'a cités M. le ministre. En effet, lors de la rédaction de mon rapport, j'ai pu constater que, si nous souhaitons mener une politique en faveur de l'égal accès des hommes et des femmes aux postes de responsabilité, nous devons nous appuyer sur des éléments de connaissance incontestables, que ce soit en matière de recrutement ou – notre collègue Hunault évoquait à l'instant la sécurisation des parcours professionnels – d'évolution des carrières. Les chiffres sont essentiels pour comprendre les causes de ce plafond de verre : pourquoi les femmes, qui réussissent de mieux en mieux aux concours, n'occupent-elles pas, trente ans après, des postes de responsabilité ?
Finalement, les raisons en sont assez simples ; elles sont d'ailleurs liées à l'objet de mon amendement, qui propose que le rapport porte sur l'articulation de la vie professionnelle avec la « vie personnelle » plutôt qu'avec « l'exercice de la responsabilité familiale ». En effet, nous savons tous que la conciliation de la vie personnelle et de la vie professionnelle est une condition essentielle de l'accès des femmes aux postes de responsabilité.
Qu'est-ce qui fait que la carrière d'un homme et celle d'une femme n'évoluent pas d'une façon aussi linéaire ? Selon une enquête sortie cette année, 80 % des femmes prennent en charge le suivi des enfants et de la vie familiale. Mener de front plusieurs activités, à savoir élever les enfants, exercer une activité professionnelle, éventuellement une activité politique – autant dire conduire de front plusieurs vies – n'est pas sans difficultés, et ce ne sont pas les femmes qui se trouvent sur ses bancs qui me contrediront.
Si nous voulons faire évoluer les choses, nous devons nous interroger sur les politiques d'accompagnement à mener en ce sens. Dans le cadre du rapport que j'ai rendu en mars 2011, j'ai proposé qu'à l'exemple de ce qui se fait dans d'autres pays européens, des personnes-ressources soient présentes dans les administrations, afin de réfléchir aux moyens permettant d'accompagner les femmes, de favoriser leur retour après une interruption professionnelle, ou de faire en sorte que le critère de disponibilité ne soit pas le seul pris en compte lors du recrutement ou de l'avancement de grade.
Les données que nous pourrons recueillir sont essentielles pour nous permettre de mener à bien les politiques d'accompagnement des femmes. Cette notion de quotas, je ne l'ai jamais utilisée dans mon rapport : j'ai toujours parlé d'objectifs. Parce que ces objectifs de 20 %, 30 % ou 40 % ont aussi pour fonction de contraindre les administrations, comme nous l'avons fait précédemment pour les entreprises du secteur privé.
J'ai presque terminé, madame la présidente.
J'ai auditionné une grande entreprise qui a dû mettre en oeuvre un accompagnement pour parvenir aux 40 %. Comment y est-elle parvenue ? Comme elle s'est trouvée du jour au lendemain mise en demeure d'atteindre cet objectif, l'entreprise en question a bien été obligée de s'interroger sur les politiques à mener pour ce faire, notamment pour aider les femmes à postuler – puisque, c'est un fait, il existe des phénomènes d'autocensure.
L'amendement n° 41 bis vise à élargir les données recueillies, afin de mieux comprendre les choses, donc mieux accompagner le déroulement des carrières.
Merci, madame la députée. Je rappelle que chacun d'entre vous dispose d'un temps de parole de deux minutes par intervention.
La mansuétude dont a bénéficié notre collègue serait-elle l'effet de la solidarité féminine ? (Sourires.)
J'espère que nous parlons bien de parité, et non de diversité : les deux notions sont fréquemment confondues et je le déplore. Je rappelle que les femmes représentent la moitié de la société – la moitié, et même un peu plus, n'en déplaise à certains ! Il convient donc qu'elles aient toute leur place dans cette société, et qu'on ne ramène pas la question de leur présence à des critères de diversité.
Si je suis tout à fait d'accord avec l'amendement de Mme Guégot et de Mme Zimmermann, je veux cependant insister sur un point : l'articulation qui doit s'établir entre l'activité professionnelle et la vie personnelle ne concerne pas que les femmes. J'espère que ce principe s'appliquera autant aux hommes fonctionnaires hommes qu'aux femmes fonctionnaires, et que le fait pour les hommes de prendre des disponibilités pour des raisons personnelles et familiales n'aura pas d'incidences négatives sur leur évolution professionnelle – je pense surtout aux jeunes fonctionnaires, pour lesquels cet amendement prend toute son importance.
Favorable. Je précise à Mme Guégot que la question de l'égal accès des femmes et des hommes sera évoquée dans le cadre de la négociation engagée avec les syndicats. Nous avons l'intention d'installer des référents dans la haute administration, notamment au niveau des DRH et des plates-formes RH territoriales, qui auront pour mission d'assurer un suivi sur tous les points évoqués par les articles 41 et 41 bis ainsi que par l'amendement n° 42 dont on ne saurait négliger l'importance.
(L'amendement n° 42 est adopté.)
(L'article 41 bis, amendé, est adopté.)
L'article 41 ter établit un parallélisme avec l'amendement que nous avons voté dans le cadre de la loi sur les conseils d'administration des grandes entreprises du CAC 40. Il tend à garantir une représentation équilibrée des femmes et des hommes parmi les personnalités qualifiées des conseils d'administration et conseils de surveillance des établissements publics de l'État.
Ce principe pourrait d'ailleurs être étendu encore plus largement, par exemple à l'Académie française : je pense à l'élection au fauteuil de Jacqueline de Romilly, où nous sommes en présence de six candidatures d'hommes… Ce n'est donc pas une femme qui succédera à Mme de Romilly – comme si aucune écrivaine n'était suffisamment talentueuse pour cela.
Que voulez-vous, c'est comme au Loto : 100 % des gagnants ont tenté leur chance ! Comment voulez-vous élire une femme si aucune ne se présente ?
L'article 41 ter prévoit un dispositif de sanction, la nullité des nominations intervenues en violation des principes posés, mais pas de nullité des délibérations. Si je comprends pourquoi on a fait ce choix, je crains tout de même que la nullité restreinte aux nominations ne suffise pas à faire avancer assez vite la question de la représentation équilibrée. Pour moi, il serait souhaitable d'adopter une démarche plus incitative.
J'ai dit tout à l'heure que je n'aimais pas beaucoup les quotas. Cependant, l'article 41 ter n'est pas de la même gravité que celui que va nous présenter prochainement le Gouvernement. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Je vais expliquer ma position en élargissant notre propos à la question de la parité dans le cadre des élections. Lors des élections municipales, par exemple, tout citoyen inscrit sur une liste a vocation à devenir conseiller municipal du jour au lendemain. L'instauration d'une règle de parité ne pose donc pas de problème en termes d'égal accès à une responsabilité publique, en l'occurrence celle d'un élu du peuple : tout citoyen peut, du jour au lendemain, devenir élu de sa commune, voire élu de la Nation.
Je le redis : le cheminement qui conduit à des postes de direction n'est pas de même nature. Il s'agit, dans les articles du projet de loi que nous sommes en train d'examiner, de nommer les membres de conseils d'administration. À mon sens, le fait de forcer les choses auxquelles l'évolution spontanée ne conduit pas est plus légitime dans ce cas que dans celui d'élections. Si je suis globalement défavorable aux quotas, j'en admets le principe comme un mal nécessaire et transitoire…
Mais il ne peut s'appliquer de la même manière, quel que soit le sujet concerné. Quand on nomme une personne de cinquante ans au sein d'une société, il me paraît un peu difficile de ne pas tenir compte de ce qu'étaient les conditions d'entrée dans la carrière trente ans auparavant, sous peine de créer une inégalité.
Sur l'article 41 ter, je suis saisie d'un amendement n° 44 .
La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann, pour le soutenir.
Je suis favorable à l'extension des règles de mixité aux établissements publics administratifs et aux établissements publics à caractère industriel et commercial.
La parole est à Mme Catherine Coutelle, inscrite sur l'article 41 quater.
L'article 44 quater vise à garantir une représentation équilibrée des femmes et des hommes au Conseil commun et dans les conseils supérieurs de la fonction publique.
M. Mariton vient de développer des arguments si étonnants que je me dois de répondre : nous avons entendu exactement les mêmes au sujet des élections au sein des conseils municipaux. À partir du moment où l'on fait de la place aux femmes alors qu'elles n'en avaient pas, il y en a toujours pour considérer qu'on leur en fait trop…
Vous ne semblez pas avoir entendu que j'ai défendu la parité dans les conseils municipaux !
…et cela vaut, hélas, dans tous les domaines. C'est pourquoi il est aujourd'hui nécessaire de forcer le passage, en instaurant, par la loi, le principe de la parité obligatoire dans toutes les fonctions – en l'occurrence, dans le conseil supérieur de la fonction publique.
Tout cela a été très bien exprimé !
Je suis saisie d'un amendement n° 29 , visant à supprimer l'article 41 quinquies.
La parole est à M. Jacques Alain Bénisti.
Si je suis d'accord avec l'ensemble des articles relatifs à la parité – je me suis d'ailleurs exprimé à ce sujet en tant que président des centres de gestion – il n'en est pas de même en ce qui concerne les commissions administratives paritaires, évoquées tout à l'heure par Mme Coutelle. En effet, dans la mesure où on trouve une très forte proportion de femmes au sein de ces commissions, le fait d'y imposer la parité aurait pour effet d'en restreindre le nombre. Je trouve que cela serait très dommage vis-à-vis de ces femmes qui siègent bénévolement au sein des commissions, lors de réunions pouvant durer cinq ou six heures d'affilée. Voilà pourquoi je propose de supprimer purement et simplement l'article 41 quinquies.
Je constate que vous n'avez pas repris l'intégralité des propos que vous aviez tenus en commission, monsieur Bénisti, et dont je vais donner lecture à l'intention de ceux qui n'y ont pas assisté : « Imposer le principe de parité à la composition de ces commissions reviendra à interdire à des femmes d'y siéger au profit d'hommes peut-être moins sérieux. » Est-ce à dire, monsieur Bénisti, que lorsque des femmes se voient confier des postes à responsabilités, ou sont élues au Parlement, elles travaillent davantage et plus sérieusement que les hommes ? Pour ma part, en ce domaine comme ailleurs, je réclame la parité !
La commission a repoussé l'amendement n° 29 . Je précise à M. Bénisti que le dispositif prévu par l'article 41 quinquies ne concerne que les représentants de l'administration ou de l'autorité territoriale. Il est bien indiqué : « À compter du 1er janvier 2015, au sein des commissions administratives paritaires instituées au titre de la fonction publique de l'État, de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, les membres représentant l'administration ou l'autorité territoriale sont désignés en respectant une proportion minimale de 40 % de personnes de chaque sexe. » Je ne comprends donc pas votre amendement.
Par ailleurs, vous indiquez, dans l'exposé des motifs, souhaiter une réforme des commissions administratives paritaires. Je vous rappelle que nous avons déjà modifié les CAP dans une loi de 2010 dont j'étais le rapporteur. Il ne me semble pas opportun de rouvrir ce débat aujourd'hui.
Je suis du même avis que le rapporteur : on ne peut pas remettre en cause l'objectif de parité au motif que la situation serait plus favorable aux femmes qu'aux hommes.
Cela étant, je précise que je serai particulièrement attentif à ce point. Un bilan devra être effectué au bout d'un an au niveau du Conseil commun de la fonction publique : il faudra vérifier très précisément les conséquences de la mesure qui va être adoptée afin de prévenir l'apparition d'éventuelles difficultés.
Je veux simplement préciser que le personnel administratif des commissions administratives paritaires ne prend pas part aux votes. Mon seul souci était d'équilibrer la présence des hommes et des femmes ; si les élus ne sont pas concernés, il n'y a effectivement aucun problème.
Je suis saisie d'un amendement n° 43 .
La parole est à Mme Françoise Guégot.
L'amendement n° 43 a pour objet de modifier la date d'entrée en vigueur de l'article 41 quinquies, afin de tenir compte du calendrier de renouvellement des instances prévu par la loi relative à la rénovation du dialogue social du 5 juillet 2010. Ce texte fixe en effet la fin de la période transitoire au 31 décembre 2013, alors que le texte de la commission retenait l'échéance de 2015.
L'article 41 sexies ne faisant l'objet d'aucun amendement, je le mets directement aux voix.
(L'article 41 sexies est adopté.)
Je suis saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 41 sexies.
Les amendements, nos 81 et 1 , deuxième rectification, peuvent être soumis à une discussion commune.
L'amendement n° 81 fait l'objet d'un sous-amendement n° 88 .
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 81 .
J'ai déjà présenté cet amendement, qui vise à fixer par la loi des objectifs garantissant l'égal accès des femmes et des hommes à des fonctions de responsabilité – 4 000 postes, dont j'ai déjà parlé, pourraient être concernés.
Il s'agit bien de se fixer un objectif : 20 % à l'horizon 2013, puis 30 % en 2015 et 40 % en 2018. Ce faisant, je tiens à le redire devant Mme Zimmermann et Mme Guégot, nous reprenons une proposition des membres de la délégation aux droits de femmes, en la complétant.
Je souhaite donc, mesdames, que vous retiriez l'amendement n° 1 , deuxième rectification, que vous présenterez dans quelques instants, au profit de celui du Gouvernement. On peut en effet estimer – je le dis au président Jacob, à M. Hunault comme aux représentants du groupe socialiste et du groupe GDR – qu'il s'agit là d'un travail de coproduction législative, au service d'une certaine conception de la société française : il s'agit que chacun puisse y trouver pleinement sa place, y compris au service de la République.
C'est aussi pour moi, en tant que membre du Gouvernement, un moment marquant : l'adoption de cet amendement marquera une étape extrêmement importante dans l'évolution de la société française, notamment dans ce domaine très particulier qu'est la fonction publique. La fonction publique n'est pas un secteur comme un autre : on y travaille au service de l'intérêt général, au service du pays. Dès lors, faire en sorte que la fonction publique soit exemplaire dans la gestion de ses ressources humaines, c'est aussi adresser un signal, non pas simplement aux femmes, mais à l'ensemble de la société française. C'est donc, j'ose le dire, une petite révolution que nous sommes en train d'accomplir ensemble grâce à ce travail de coproduction législative.
La parole est à M. Bernard Derosier, pour soutenir le sous-amendement n° 88 .
L'amendement n° 81 du Gouvernement est évidemment tout à fait satisfaisant et je veux, une fois n'est pas coutume, remercier le ministre d'avoir pris cette initiative pour avancer des solutions au problème dont nous débattons – en l'occurrence la parité.
Quel dommage, monsieur le ministre, que vous soyez obligé de passer par voie d'amendement et que votre prédécesseur, M. Tron, n'ait pas introduit ces dispositions dans la version initiale du texte. Mais peut-être avait-il d'autres sujets de préoccupation ! (Sourires.)
Le sous-amendement que je vous propose, monsieur le ministre, consiste à supprimer les cinquième et sixième alinéas de votre amendement, ainsi que, après le mot « concernés », la fin du septième l'alinéa.
Premièrement, il me semble que cette disposition n'est pas tout à fait compatible avec le principe de libre administration des collectivités territoriales. Quand bien même celle-ci s'exerce dans le cadre de la loi, il nous faut veiller à la respecter.
Deuxièmement, qui va prononcer la sanction lorsque la parité ne sera pas respectée ? Est-ce le préfet, dans le cadre du contrôle de légalité, qui va regarder de près ce que décident les assemblées locales ?
Troisièmement, à qui les pénalités prononcées, auxquelles on confère un caractère de dépense obligatoire, seront-elles versées et que fera-t-on des sommes récoltées ? Seront-elles affectées au financement de la prestation compensatoire du handicap, du RSA ou des autres dépenses sociales du département, insuffisamment financées par l'État ?
La parole est à Mme Françoise Guégot, pour soutenir l'amendement n° 1 , deuxième rectification.
Marie-Jo Zimmermann et moi-même allons répondre favorablement à la demande du ministre : nous allons, bien évidemment, retirer notre amendement n° 1 , deuxième rectification, de la même façon que nous avions retiré en commission un amendement tendant à la même fin.
Il s'agit effectivement d'un moment très important dans notre travail parlementaire. C'est aussi un moment qu'attendent toutes les personnes qui, depuis des années, travaillent sur cette question de l'égalité entre les hommes et les femmes. Je voudrais remercier le Gouvernement d'avoir travaillé sur cette question de l'égalité dans l'accès aux postes à responsabilité et d'avoir étudié comment elle pouvait être réglée techniquement.
Tout le monde attend un État exemplaire, et une de nos collègues rappelait tout à l'heure qu'il y a autant d'hommes que de femmes : si la vie est possible, c'est grâce à cette complémentarité entre nous. Il est donc normal que nous nous efforcions aussi de l'assurer dans le domaine de l'égalité professionnelle. Cet objectif est absolument essentiel. À l'issue du travail que j'ai accompli, je crois pouvoir affirmer que nous serons le premier pays en Europe à voter ce principe d'un objectif en la matière. Les autres pays européens qui travaillent sur cette question attendent et observent ce que nous faisons. Nous sommes un pays connu dans le domaine des droits de l'homme ; en faisant en sorte que la fonction publique française donne l'exemple, nous lançons, me semble-t-il, un message très fort. Nous avions besoin d'avancer dans ce domaine, notamment pour nos jeunes filles. Il arrive souvent que certains des collègues avec lesquels j'aborde le sujet aient du mal à admettre, en la matière, la contrainte imposée. Je leur dis alors : « Essayez-vous de vous projeter dans l'avenir de vos filles plutôt que de penser à la vie que vous menez aujourd'hui avec votre conjoint. » (Sourires.)
L'amendement n° 81 vise à compléter, à la suite des débats en commission, le chapitre consacré à l'égalité entre les femmes et les hommes. Calendrier échelonné, prise en compte des flux et des situations de primo-recrutement : c'est un excellent dispositif et, en tant que rapporteur, je veux saluer le travail accompli par le Gouvernement, en liaison avec les parlementaires et la commission des lois. Nous sommes donc favorables à cet amendement et, par cohérence, nous avions repoussé l'amendement n° 1 , deuxième rectification, qui vient d'être retiré.
Je voudrais simplement répondre à M. Derosier que l'élaboration de la loi est souvent un long processus. Comme je l'ai déjà dit au début de ce débat, le projet de loi comptait 63 articles au départ, 103 après le travail du Sénat et 123 après son passage dans notre commission ; il en comptera certainement 134 à l'issue de nos débats. Georges Tron a beaucoup oeuvré sur le protocole d'accord. Le ministre actuel a tenu à ce que celui-ci serve de base pour avancer sur ces dispositions. Il n'y a donc aucune malice dans la démarche du Gouvernement, qui a travaillé dans la concertation la plus totale.
La commission est défavorable au sous-amendement n° 88 .
Je remercie d'abord Mme Guégot d'avoir souligné, avec Mme Zimmermann et le rapporteur, l'esprit de l'engagement que nous avons pris : c'est effectivement un engagement historique.
Vous proposez, monsieur Derosier, de supprimer les sanctions financières. Malheureusement, l'expérience en la matière depuis plus de vingt ans a montré que les bonnes intentions affichées ne suffisent pas. Nous n'entendons pas en rester à une loi déclarative. C'est un véritable objectif que nous nous fixons ; il doit donc être assorti de sanctions financières.
Pourquoi des sanctions financières ? D'abord parce que c'est beaucoup plus souple que de prononcer la nullité des nominations. Le but est de responsabiliser les acteurs, y compris au niveau territorial ; nous y tenons beaucoup. Les ministères comme les collectivités territoriales devront déclarer le nombre de femmes nommées chaque année et le montant de la sanction sera calculé automatiquement, sans aucun arbitraire. En procédant de la sorte, nous ne portons nullement atteinte au principe de libre administration : l'autorité territoriale restera entièrement libre de nommer. Le montant de la sanction sera proportionnel au nombre de femmes manquantes, sans possibilité de modulation par l'autorité administrative.
Je vais vous préciser quelle est mon intention dans le décret, qui sera d'ailleurs discuté notamment dans le cadre du Conseil commun. Par voie de conséquence, les organisations syndicales et les employeurs, notamment les employeurs territoriaux, seront consultés.
Il faudra du reste qu'il soit publié rapidement. J'en prends l'engagement : sitôt que le texte sera voté – j'espère bien qu'il le sera – et devenu loi de la République, le décret d'application sera pris. Si le calendrier, tel qu'il est prévu, est respecté, je prends l'engagement que cela soit fait dès le mois de mars.
Je vous le répète : ce ne sera pas une loi déclarative. Je sais que, aux yeux de certains, elle arrive tardivement.
Mais vous savez bien qu'avancer tardivement vaut mieux que de reculer ou de ne pas avancer ! (Sourires.)
J'espère que vous êtes d'accord avec ce principe d'ordre général !
Vous devriez également saluer l'engagement d'un gouvernement qui assume sa responsabilité, jusqu'à la dernière minute – tout en espérant qu'elle se prolonge – devant la société française. Quoi qu'il en soit, je vous remercie de cet encouragement.
Je n'entends pas créer une usine à gaz. Nous ne construirons donc pas un outil dédié, par exemple un fonds quelconque. En revanche, je prends l'engagement que le Parlement et le Conseil commun soient informés de l'utilisation des crédits. J'espère d'ailleurs que ces fonds seront le moins élevés possible, parce que l'on ne peut se réjouir d'une sanction financière.
Cela irait d'ailleurs à l'inverse de l'objectif que nous poursuivons.
Je prends devant vous l'engagement que ces crédits serviront à mener des actions de sensibilisation à l'égalité professionnelle femmes-hommes dans l'ensemble de la fonction publique, aussi bien la fonction publique d'État que les fonctions publiques territoriale et hospitalière.
La sanction, monsieur Derosier, est inscrite dans la loi : elle s'imposera de fait, tout simplement, dès lors que le décret aura été publié.
En réponse à votre question, je constate d'ailleurs, s'agissant de la proportion de handicapés, et sans vouloir faire d'analogie entre les deux sujets – que l'on n'aille pas me dire que j'apparente la cause des femmes à celle des handicapés ! –, que nous avons déjà un fonds alimenté par ceux qui ne respectent pas la loi. Ce fonds sert aujourd'hui à mener des actions dans le domaine de l'accessibilité. Il a été fortement abondé ces dernières années, ce dont je ne me réjouis pas. Même si les efforts que nous avons faits en la matière ont été considérables, il faut que nous les poursuivions.
Pour en revenir au sujet, je prends l'engagement suivant : dans le décret, nous allons nous assurer que les fonds ainsi collectés serviront bien à la sensibilisation à l'objectif que nous poursuivons.
En conclusion, et même si l'argumentation suffisait à le faire comprendre, le Gouvernement est défavorable au sous-amendement n° 88 .
La discussion sur l'amendement n° 81 ayant déjà largement eu lieu dès le début de notre débat, je n'y reviendrai que très brièvement.
Je voudrais en revanche insister sur le sous-amendement présenté par notre collègue Derosier. Il soulève de vraies questions, mais je ne partage pas totalement ses préoccupations. La disposition visée est-elle compatible avec le principe de libre administration des collectivités territoriales ? Oui, bien sûr ! À mon avis, cela ne fait pas l'ombre d'un doute. Cette liberté d'administration des collectivités territoriales s'exerce dans le cadre des lois, c'est-à-dire des dispositions que nous votons et qui seront adoptées. Qui prononce la sanction ? La loi dit que le représentant de l'État est chargé du contrôle de légalité.
Le décret dira, non pas qui exerce le contrôle de légalité, mais comment il est exercé, ce qui relève bien du domaine réglementaire.
La question de savoir à qui les pénalités prononcées sont versées est à mon avis un vrai problème. Notre collègue Derosier a eu raison de la poser. Il observe que la réponse est de nature législative. Son sous-amendement aurait donc dû être l'occasion d'apporter cette réponse, ce qu'il ne fait pas. Je serai donc, de mon côté, plutôt défavorable à ce sous-amendement, tout en reconnaissant qu'il pose une vraie question ; il conviendra de vérifier ce point avant que la loi soit définitivement votée.
Je rappelle enfin, sur l'amendement n° 81 , que le groupe UMP y est très favorable. Je reprendrai d'ailleurs à mon compte l'expression, à mon sens très heureuse, de M. le ministre : c'est une petite révolution.
Je crois moi aussi, comme M. le ministre, que nous vivons un moment historique.
Mieux vaut tard que jamais, ai-je dit tout à l'heure. Lorsque nous avons légiféré sur la composition des conseils d'administration, c'était une étape. Nous avons alors avancé. J'ai toujours insisté, que ce soit à propos du texte sur les conseils d'administration comme de la loi sur la fonction publique, pour que l'on mette en avant ce que j'appelle le rapport de situation comparée, qui permet vraiment une lisibilité de la politique de l'égalité : c'est extrêmement important.
Aujourd'hui, grâce à cette avancée extraordinaire, l'État pourra se dire exemplaire. Nous le devons, comme vous l'avez souligné, à un travail exemplaire de collaboration, de coopération, de cogestion entre le Parlement et le Gouvernement. Tous les amendements ont ainsi été traités et retravaillés au mieux.
Je réponds maintenant à mon collègue Derosier : le ministre a évoqué la question des pénalités. Même si j'espère qu'il ne sera pas nécessaire d'en infliger de nombreuses, le plus souhaitable de les affecter à ce fonds spécifiquement consacré à la politique d'égalité. C'est, au fond, ce que nous avons toujours souhaité, qu'il s'agisse du public ou du privé.
Nous franchissons donc aujourd'hui une étape majeure, et je tiens à remercier le rapporteur d'avoir ainsi coopéré avec nous.
Je suis volontiers le mouvement ; je ne suis pas révolutionnaire pour autant. Peut-être suis-je l'un des rares membres de cette assemblée à assumer le fait de ne pas être révolutionnaire,…
…mais je le dis.
Je respecte l'engagement, sincère, de nos collègues en faveur de l'égalité des droits et de la promotion des femmes. Il est important de le préciser pour que chacun comprenne bien les motifs qui déterminent ma position dans ce débat.
Je l'ai dit, je le redis : même si, sur le principe, on peut être choqué d'avoir dû prendre de telles mesures, j'assume les dispositions que nous avons adoptées à propos des élections municipales. En tant que maire de ma ville, je le vis d'ailleurs très bien : la réalité n'aurait sans doute pas évolué comme elle l'a fait si nous n'avions pas pris ces mesures. J'ai expliqué tout à l'heure la différence de principe fondamentale que je fais entre cette évolution et ce que l'on nous propose aujourd'hui.
Je suis d'accord avec vous, monsieur le ministre, pour que l'État soit attentif, dans la gestion de ses agents, à faire en sorte qu'il n'y ait pas de plafond de verre, que l'un ou l'autre sexe ne soit pas pénalisé et que les déroulements de carrière et les conditions de recrutement garantissent un accès égal aux grades les plus élevés. Mais, au fond, n'est-ce pas là le boulot normal de l'administration et du Gouvernement qui la dirige ?
Je me permets de faire cette observation, et ce n'est pas vous que je mets en cause.
Non, non, le mal vient de plus loin.
La loi ne vient-elle pas pallier les carences historiques des gouvernements qui se sont succédé dans notre pays, les défaillances de leur manière de gérer ? Il faut faire son travail !
On nous dit que la France serait le premier pays d'Europe à prendre de telles mesures. Faut-il en tirer fierté…
…ou se poser quelques questions ? Je vous le dis : la France a, plus clairement que d'autres, posé le principe de l'égal accès aux emplois publics. C'est l'une des caractéristiques propres de notre démocratie. Monsieur le ministre, ne l'abîmez, s'il vous plaît, qu'avec beaucoup d'hésitation !
Il est toujours un peu difficile de prendre la parole après M. Mariton… En l'occurrence, j'avoue que la chute de son propos me rend très perplexe ! Je ne m'attendais pas du tout à devoir m'exprimer à ce sujet, mais on n'abîme pas la démocratie ni la République ni les droits de l'homme, parce que ce sont aussi les droits de la femme ! L'égalité n'abîme pas la République !
Cela étant, monsieur le ministre, que je me rallie bien volontiers à votre amendement. Je souligne aussi le progrès accompli entre le texte initial, dont le titre III ne comptait que cinq lignes, et le texte auquel nous sommes parvenus. Je me permets d'ailleurs de le redire, puisque j'y ai travaillé avec Mme Zimmermann et avec d'autres députés, hommes et femmes : c'est tout de même un peu le résultat du travail de la délégation aux droits des femmes,…
C'est aussi que je me suis laissé aiguillonner, madame la députée !
Et je vous en félicite, monsieur le ministre.
Je souhaite que ce texte s'applique à l'ensemble des fonctions publiques. Il est cependant vrai que vous n'avez pas complètement répondu à M. Derosier : qui prononcera la sanction ? Qui décidera quelle doit être la sanction ? Je ne le sais pas, et je suis dans la même ignorance s'agissant des sanctions prévues par la loi sur le handicap. Peut-être une précision est-elle souhaitable sur ce point particulier.
Cela dit, je souhaite effectivement que ce texte, qui marque un grand progrès, s'applique à l'ensemble des fonctions publiques.
Nous sommes favorables à votre amendement, monsieur le ministre : cela vient d'être clairement redit à l'instant par ma collègue.
Mon sous-amendement, auquel le rapporteur et vous-même êtes défavorables, n'avait pas d'autre objectif que celui de vous interpeller. Vous avez, d'une certaine façon, reconnu tout à l'heure que ce dispositif avait été mis au point un peu rapidement.
Point de dénégation, monsieur le ministre : ce dispositif n'est pas le fruit d'une réflexion et d'une concertation longues de plusieurs mois ! C'est quand même un peu du vite fait… C'est aussi, je le reconnais, du bien fait, mais il reste des imperfections.
Des comparaisons ont été faites avec les conseils municipaux ou avec les administrations, que la loi oblige à compter un certain pourcentage de personnes en situation de handicap, sauf à devoir payer ce qu'on peut appeler une amende. S'agissant des conseils municipaux, la parité est constatée par le préfet qui enregistre les listes et la question de la sanction ne se pose pas, puisqu'il ne reçoit pas de listes qui ne respectent pas l'obligation de parité. S'agissant des personnes en situation de handicap, la loi a prévu une sanction automatique du non-respect des règles qu'elle fixe en la matière.
Votre amendement, en revanche, ne prévoit pas de sanction. Il faut donc prendre des dispositions ; M. Diefenbacher a bien voulu me donner acte que je soulevais un vrai problème. Je ne voudrais pas qu'il revienne aux préfets de décider que telle collectivité – je ne sais pas qui pourra le faire pour les administrations d'État – doit payer une amende. Non, le préfet n'a pas ce pouvoir en l'état actuel du droit des collectivités territoriales. Il doit donc être possible de trouver une autre solution, pour que d'éventuelles décisions préfectorales ne provoquent pas un engorgement de la juridiction administrative.
Je veux le dire à M. Mariton : avec une telle loi, ce ne sont pas les principes de la République que nous abîmons, contrairement à ce qu'il laisse entendre. Savez-vous ce que l'on abîme, monsieur Mariton ? Les conservatismes !
Depuis plus de vingt ans, nous déplorons de devoir constater que la place faite aux femmes n'est pas satisfaisante et ne reflète pas la composition de la société française.
Je pense à tous les jeunes qui nous regardent, qui, demain, peut-être, liront certains articles. Ils sauront que nous avons pris des dispositions pour que la société se sente représentée dans sa haute fonction publique.
Oui, je suis heureux, aujourd'hui, que l'on abîme le conservatisme qui a conduit à cette situation.
Vous invitez tel ou tel à faire un travail d'introspection, mais nous sommes tous responsables, monsieur le député, de la situation que nous constatons aujourd'hui, de cette absence des femmes dans la haute fonction publique. Dès lors que nous voulons apporter une solution, nous servons, je crois, une certaine idée de la République en garantissant à tous un égal accès aux responsabilités, qu'il s'agisse des femmes ou des hommes ; cela vaut, de manière générale, pour tous ceux qui aspirent à servir, demain, la République. J'espère qu'ils trouveront leur avenir dans une fonction publique rénovée, une fonction publique de carrière au service des grands principes qui fondent notre République française.
Monsieur Mariton, ma main, la main du Gouvernement, ne tremble pas, et je serais très heureux que vous révisiez votre point de vue et votiez une loi d'avenir, une loi qui garantit tout simplement l'équilibre d'une société qui a beaucoup changé en vingt ans. Pensez à nos jeunes au moment de voter.
Ce très important amendement a également fait l'objet de négociations avec les organisations syndicales, et je sais que la délégation aux droits des femmes avait souligné le problème ; il vise à assouplir les règles relatives au congé parental, en prévoyant que le fonctionnaire conserve en totalité ses droits à l'avancement au cours de la première année et que ce congé est considéré comme un service effectif cette même première année. Il s'agit tout simplement de faire sauter un plafond de verre et d'empêcher un décrochage de la carrière au moment de l'arrivée de l'enfant, comme on l'a déjà souligné. Cela doit permettre de concilier vie professionnelle et vie personnelle.
Cet amendement est très important. Il vise évidemment à garantir la linéarité de la progression de carrière des femmes.
Un mot sur cette période d'un an : nous savons que le congé parental peut être beaucoup plus long. Pour ma part, je trouve qu'il est intéressant de retenir la durée d'un an. Si l'on examine de près cette question des interruptions de travail des femmes et de leur impact sur la linéarité de leur carrière et sur l'accès aux responsabilités, on s'aperçoit très souvent qu'un congé de trois ans pose une vraie difficulté, particulièrement au moment du retour à l'emploi. Nous en reparlerons dans les réflexions que nous devons mener avec les partenaires sociaux, mais un congé parental un peu plus court, un an par exemple, que les femmes pourraient en contrepartie prendre plusieurs fois au cours de leur vie professionnelle, me semble une idée plus intéressante en ce qu'elle préserverait leur progression professionnelle, limiterait les difficultés au moment de revenir sur un poste de travail et inciterait à réfléchir à une autre forme de disponibilité : il peut être beaucoup plus utile de prendre une année au moment de l'adolescence de son enfant que trois ans d'un coup au moment de sa naissance.
Cet amendement est très important, mais je tiens à rappeler que nous avons déposé une proposition de loi qui visait à raccourcir la durée du congé parental, pas seulement dans la fonction publique, et à faire en sorte qu'il soit partagé entre les deux parents. Cela ne concerne pas seulement les femmes, madame Guégot : si nous voulons changer le regard porté sur les femmes, notamment dans les entreprises, si nous voulons qu'on embauche des femmes à l'âge où elles sont susceptibles d'aller à la maternité, il faut lever ce frein principal : le recruteur voit en elles une personne susceptible de s'arrêter, et ne les embauche donc pas. C'est là qu'est la véritable discrimination.
Tant que, premièrement, ce congé parental ne sera pas raccourci et que, deuxièmement, il ne sera pas également distribué entre les deux parents, il n'y aura aucun progrès.
S'il est une avancée, le congé parental ne concerne pas uniquement les femmes. J'espère que, dans la fonction publique, il sera aussi pris par les hommes. Je suis donc favorable à cet amendement, sous réserve d'une évolution ultérieure. Nous souhaitons que vous l'acceptiez ; pour notre part, nous proposerons des textes dans ce sens.
(L'amendement n° 79 est adopté.)
(L'article 42 est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 41 , tendant à insérer un article additionnel après l'article 42.
La parole est à M. Daniel Goldberg.
Le titre III traite de la lutte contre les discriminations dans les trois fonctions publiques. Nous proposons d'y aborder un autre sujet : celui de l'égal accès aux concours de la fonction publique, quelle que soit la nationalité de ceux qui y postulent. Nous voulons permettre que des étrangers non-européens qui résident de manière régulière et ininterrompue sur le territoire français depuis cinq ans au moins puissent postuler à un certain nombre d'emplois des trois fonctions publiques, qui ne participent pas de l'exercice de la souveraineté ou des prérogatives de puissance publique de l'État. Cette possibilité est déjà offerte aux étrangers dits communautaires par la loi du 26 juillet 1991.
Nous proposons que cette évolution intervienne après avis du Conseil commun de la fonction publique qui vient d'être mis en place.
Je rappelle simplement que, dans sa décision du 23 juillet 1991, le Conseil constitutionnel affirme que l'accès aux trois fonctions publiques ne saurait être compris comme devant être réservé aux seuls citoyens.
De son côté, le, la HALDE avait proposé dans sa délibération du 30 mars 2009 que les étrangers non communautaires puissent bénéficier des mêmes droits.
Rappelons enfin, que, pour une partie de la fonction publique – notamment l'enseignement supérieur et la recherche –, cette condition n'existe pas.
Enfin, ceux d'entre nous qui sont également des élus locaux ne l'ignorent pas, nombre d'étrangers non européens occupent des postes dans nos fonctions publiques sans être titulaires, y compris lorsqu'il s'agit de s'occuper de nos enfants : par exemple, lorsqu'il manque un enseignant dans une école, les chefs d'établissement ont pour consigne de s'adresser à Pôle Emploi sans vérifier les conditions de nationalité.
Avec cet amendement, nous voulons faire évoluer cette situation. Il s'agit tout simplement de faire en sorte que, à niveau de compétence égal, un médecin, un enseignant ou un agent administratif puisse être aussi bien vénézuélien qu'irlandais, japonais que hongrois, algérien qu'italien. C'est la compétence qui importe, et non la nationalité de la personne qui postule.
J'ai bien écouté ce que disait M. le ministre hier : à propos de ces CDD reconduits pendant six années, il évoquait la nécessité de permettre à celles et ceux qui, tous les jours, participent aux missions de service public, de mener une vie digne, de leur adresser un message fort. Cela doit valoir également pour les étrangers non européens.
La commission a repoussé cet amendement, qui vise à ouvrir la fonction publique aux étrangers ressortissants de pays extérieurs à l'Union européenne. Ce sujet a été largement abordé à l'Assemblée nationale comme au Sénat, en dernier lieu lors de l'examen de la proposition de loi visant à supprimer les conditions de nationalité qui restreignent l'accès des travailleurs étrangers à l'exercice de certaines professions libérales ou privées.
Comme le rappelle l'exposé sommaire de l'amendement, la France s'est déjà conformée à ses obligations européennes en ouvrant sa fonction publique aux citoyens européens, à l'exception des emplois dont les attributions sont inséparables de la souveraineté ou comportent une participation directe ou indirecte à l'exercice de prérogatives de puissance publique de l'État ou des autres collectivités publiques, comme le prévoient la loi du 26 juillet 1991 et celle du 26 juillet 2005.
Faut-il aller plus loin dans cette ouverture ? Ce ne serait concevable, à mon sens, que sous réserve de réciprocité. Pouvez-vous m'indiquer si d'autres États de l'Union européenne ou plus largement de l'OCDE ont ainsi ouvert leur fonction publique aux ressortissants étrangers ? Il faudrait à tout le moins opérer une étude de droit comparé sur le sujet.
Une réforme d'une telle ampleur ne saurait en tout état de cause être adoptée au détour d'un amendement et nécessiterait une contribution préalable – et non postérieure à la promulgation de la loi comme le propose le II de l'amendement. Il faudrait, pour le moins, consulter les organisations syndicales.
Même avis que le rapporteur.
Je voudrais faire observer que l'on peut déjà recruter ces agents par contrat. En l'absence de règles de réciprocité avec l'ensemble des pays extracommunautaires, le Gouvernement ne souhaite pas une ouverture généralisée de la fonction publique aux étrangers non communautaires.
(L'amendement n° 41 n'est pas adopté.)
Sur l'article 43, je ne suis saisie d'aucun amendement.
(L'article 43 est adopté.)
Sur l'article 44, je suis saisie d'un amendement n° 82 rectifié du Gouvernement.
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement vise à favoriser la mobilité entre les corps civils et militaires ; c'est là un enjeu particulièrement important pour la fonction publique. Les dispositifs prévus par la loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique doivent être reprécisés afin d'éviter les difficultés d'articulation des grades militaires et des grades civils. En l'absence de dispositions spécifiques prévues par les statuts particuliers, une commission permettra de valider le choix du corps et des grades de détachement. Les corps qui disposent de modalités de classement spécifiques, comme les sapeurs-pompiers, voient leur dispositif maintenu.
(L'amendement n° 82 rectifié , accepté par la commission, est adopté.)
Sur l'article 45, je ne suis saisie d'aucun amendement.
(L'article 45 est adopté.)
Sur l'article 46, je suis saisie d'un amendement n° 83 , deuxième rectification, du Gouvernement.
La parole est à M. le ministre.
C'est le symétrique de l'amendement précédent, qui traitait de la mobilité des militaires vers les corps civils. Celui-ci traite, au sein du statut général des militaires, de la mobilité des civils vers les corps militaires, compte tenu des spécificités liées à l'état militaire. Nous sommes donc en présence d'un dispositif équilibré, qui permettra des mobilités dans les deux sens et qui sera une source d'enrichissement pour chaque fonction publique.
(L'amendement n° 83 , deuxième rectification, accepté par la commission, est adopté.)
Les articles 46 bis à 46 quinquies ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.
(Les articles 46 bis, 46 ter, 46 quater et 46 quinquies, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Sur l'article 46 sexies, je suis saisie d'un amendement n° 59 du Gouvernement.
La parole est à M. le ministre.
Amendement de clarification.
(L'amendement n° 59 , accepté par la commission, est adopté.)
(L'article 46 sexies, amendé, est adopté.)
Les articles 46 septies, 46 octies et 47 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.
(Les articles 46 septies, 46 octies et 47, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Sur l'article 48, je suis saisie d'un amendement n° 40 .
La parole est à M. Germinal Peiro.
Cet amendement propose de porter à quatre ans la durée de validité des concours de la fonction publique territoriale. Cette disposition a été adoptée, le 5 octobre dernier, par la commission des lois, qui prévoyait même un allongement à cinq ans. Elle a été votée par le Sénat le 26 janvier dernier. Elle est soutenue par le président du Centre national de la fonction publique territoriale, ici présent. Elle vise tout simplement à lutter contre la précarité et à sécuriser les lauréats. Une partie des lauréats sont membres de la fonction publique territoriale – et ceux-là verront leur carrière avancer au gré de la libération des postes –, mais d'autres sont extérieurs à la fonction publique territoriale, et ceux qui n'ont pas de travail, qui sont titulaires d'un concours et voient la période de trois ans toucher à son terme, vont se retrouver sans travail, mais en ayant perdu le bénéfice de leur concours. Il s'agit de donner aux lauréats davantage de chances de trouver un emploi au grade du concours.
Chacun sait que le contexte économique et social est particulièrement difficile et que nombre de lauréats de concours sont sans emploi. Tout le monde connaît la situation budgétaire délicate des collectivités locales et leur difficulté à créer des postes. Nul n'ignore enfin que l'allongement de durée des carrières, lié au report de l'âge de la retraite, ne permet pas de libérer des postes.
Mes chers collègues, cette mesure ne coûte rien, ni à l'État ni aux collectivités locales. Elle bénéficiera à plusieurs milliers de lauréats. Elle est soutenue par plus de deux cents députés, siégeant sur tous les bancs de l'hémicycle. Pour rassurer et prouver que je dis la vérité, je voudrais citer les noms de ceux qui soutiennent cette mesure et qui font partie de la majorité : MM. Daubresse, Voisin, Baguet, Joulaud, Herbillon, Calméjane, Hillmeyer, Degauchy, Mourrut, Mme Labrette-Ménager, Mme Hostalier, MM. Couve, Spagnou, Lachaud, Domergue, et bien d'autres encore.
Il ne s'agit pas, monsieur le rapporteur et monsieur le ministre, d'un choix partisan, mais de permettre à des gens qui sont lauréats d'un concours de gagner du temps pour trouver un emploi.
Sur le vote de l'amendement n° 40 , je suis saisie par le groupe SRC d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
La commission a repoussé cet amendement. Il vise à rétablir la rédaction de l'article adoptée par le Sénat, qui portait la durée de validité des listes d'aptitude pour les lauréats des concours de la fonction publique territoriale de trois à quatre ans. Il me semble – mais je sais, monsieur Peiro, que nous ne sommes pas d'accord là-dessus – que cet allongement créerait davantage de précarité, en maintenant les candidats dans une situation d'incertitude, alors que les chances d'être recruté au-delà de trois ans sont dans la pratique très faibles. Il serait en définitive défavorable aux personnes concernées. La durée de validité des listes d'aptitude a d'ailleurs déjà été relevée de deux ans à trois ans par la loi du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale, sans que cette prolongation ne se traduise, in fine, par une diminution du nombre de reçus-collés.
Je comprends la générosité qui vous anime, monsieur Peiro. Mais un principe de réalité s'impose à nous – et cette réalité, vous la connaissez tout aussi bien que moi : nombre des postes qui sont mis au concours ne sont pas ouverts au recrutement. Nous avons déjà eu la même discussion lorsque nous étions passés de deux à trois ans. Avec cette mesure, les lauréats resteront plus longtemps sans trouver de poste. Proposera-t-on alors de passer de quatre à cinq ans ? Cela réglera-t-il les difficultés qu'ils connaissent ? Non.
Ce qu'il faut, c'est faire en sorte que les concours comportent effectivement des postes ouverts au recrutement, faute de quoi l'on constituera un stock de personnes qui feront l'effort de passer un concours et qui n'auront pas d'emploi. Nous pourrions d'ailleurs mener une réflexion sur la nature de ces concours, sur les questions qui sont posées, sur les efforts que cela exige : expliquer aux personnes qui s'y sont pliées que cela ira mieux en passant à quatre ans, ce n'est pas leur dire la vérité.
Quand on est passé de deux à trois ans, cela a-t-il changé les données du problème ? Le nombre des reçus-collés a-t-il diminué et fondu à due proportion de l'ouverture de l'année supplémentaire ? En ouvrant une année de plus, vous conduisez un certain nombre d'agents publics dans le mur, car ce n'est qu'une illusion. Le vrai problème, c'est le nombre de postes ouverts.
Absolument ! Je le leur explique !
Oui, je leur tiens un discours de vérité. Croyez-vous qu'on rend service à la fonction publique en ne lui tenant pas un discours de vérité ?
Engager des personnes à passer des concours, alors qu'on sait pertinemment qu'il n'y aura pas assez de postes pour que l'effort qu'elles auront consenti puisse être récompensé, est-ce vraiment leur rendre service ?
Comptez-vous passer à cinq ans, à sept ans, à huit ans, à neuf ans ? Je ne crois pas que cela réglera la question. Ce n'est certes pas une affaire d'État. Comme vous l'avez dit, cela n'aurait aucun coût, mais il faut savoir tenir, sur ces sujets, un discours de vérité.
Mes chers collègues, cet amendement n'est pas raisonnable. M. le ministre a donné un premier argument : les listes d'aptitude s'allongent et ne durent que trop car, au moment des recrutements, on fixe un nombre de postes à pourvoir trop élevé. On connaît pourtant les ordres de grandeur, et ne nous illusionnons pas, mes chers collègues : à l'avenir, le nombre de postes sera moins important qu'aujourd'hui. Ce qu'il faut, c'est réduire le nombre de postes mis au concours.
Un deuxième point me paraît beaucoup plus grave : nous risquons une rupture d'égalité entre les générations. Nombre de services ont trop recruté et les listes d'aptitude se sont tellement allongées que l'on n'organise plus de concours, afin de faire baisser le nombre d'inscrits sur les listes d'aptitude. Du coup, pendant deux ans, voire trois ans, il n'y a aucun concours. Derosier connaît parfaitement le problème pour ce qui concerne les pompiers.
Oui, mon cher collègue, M. Derosier, le duc du Nord-Pas-de-Calais ! (Sourires.)
Je dis cela en riant, mon cher collègue !
Vous désavantagez donc les nouvelles générations. C'est pour cela qu'il ne faut pas prolonger le délai. Déjà, trois ans, c'est un peu se moquer des gens. Les derniers seront recrutés à la fin de la troisième année ! Que font-ils pendant ce temps ? Il faut bien qu'ils trouvent un autre boulot !
Ce n'est donc vraiment pas raisonnable, et je considère même que le Gouvernement devrait demander que cela passe de trois à deux ans. Ce serait plus responsable. Le Gouvernement est trop laxiste à cet égard. (Sourires.)
Soutenez le Gouvernement !
Cette fois, je crois que le Gouvernement a raison. Cependant, la proposition de notre collègue de Courson va plutôt dans le bon sens. Le Gouvernement devrait suivre la même logique de mouvement.
Merci, monsieur Mariton !
Tout a été dit, mais j'aurais été plus tenté de revenir de trois à deux ans. Déjà, à l'époque, j'avais expliqué qu'une telle disposition ne servait strictement à rien. Et de fait, elle n'a servi à rien du tout !
SI le fait de passer de deux à trois ans n'a servi à rien, je ne vois pas pourquoi nous passerions de trois à quatre ans. La réalité sur le terrain, c'est qu'en multipliant de telles mesures, nous allons à l'encontre de l'intérêt même des fonctionnaires.
Monsieur le ministre, il y a tout de même un réel problème avec les reçus-collés. Voilà des gens, la plupart du temps assez jeunes, qui passent un concours à plusieurs reprises, qui cherchent un travail pendant des années, et qui, au bout du compte, n'ont rien du tout. Ou alors, ayons le courage de d'arrêter avec ces concours qui ne servent à rien !
Passons directement par un entretien avant embauche par contrat, et on titularisera après, mais finissons-en avec ces concours qui n'aboutissent à rien de sérieux, si ce n'est à mettre certaines personnes dans des situations problématiques !
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 40 .
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 59
Nombre de suffrages exprimés 59
Majorité absolue 30
Pour l'adoption 22
Contre 37
(L'amendement n° 40 n'est pas adopté.)
(L'article 48 est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement, n° 39 , tendant à insérer un article additionnel après l'article 48.
La parole est à M. Bernard Derosier.
L'Assemblée n'a pas accepté l'amendement de mon collègue et ami Germinal Peiro et je le regrette. J'ai entendu tous les arguments, ceux de M. de Courson en particulier, ainsi que ceux du rapporteur et du ministre. Dont acte. C'est une décision démocratiquement prise que de rejeter cet amendement.
Celui que je vous propose maintenant n'a rien à voir avec le précédent. Nous parlions de ceux que l'on appelle communément les reçus-collés, c'est-à-dire ceux qui passent le concours et qui sont inscrits sur une liste d'aptitude.
Notre amendement n° 39 traite quant à lui de la promotion interne. Je propose de laisser aux agents le bénéfice de l'inscription sur la liste d'aptitude jusqu'à leur nomination sur un des emplois auxquels ils ont droit au titre de la promotion interne.
Défavorable. Cet amendement vise à prolonger indéfiniment la durée de validité des listes d'aptitude pour la promotion interne après examen professionnel ou avis de la commission administrative paritaire.
Actuellement, la durée de validité de la liste est d'un an, prorogeable sur demande jusqu'à trois ans au total. La durée indéfinie qu'il est proposé d'instaurer conduirait à limiter de manière excessive la liberté de recrutement des collectivités territoriales. De plus, elle rigidifierait le système en mettant un frein à toute nouvelle promotion dans l'attente de la nomination des agents qui seraient ainsi maintenus sur la liste d'aptitude.
Défavorable. Je comprends l'intention de M. Derosier, mais je crains que son amendement n'atteigne pas l'objectif qu'il s'est fixé. Il risque en effet de conduire au blocage de toute nouvelle promotion en attente de la nomination des agents qui sera ainsi maintenue sur la liste d'aptitude. J'appelle votre attention, monsieur le Derosier, sur le fait qu'une telle disposition est contraire à la possibilité reconnue à l'employeur d'établir des listes d'aptitude annuelles. Cela contraindrait de façon excessive sa liberté.
Je suis donc désolé d'émettre un avis défavorable à cet amendement.
(L'amendement n° 39 n'est pas adopté.)
Les articles 49 et 50 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.
(Les articles 49 et 50, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Cet article de modernisation de la gouvernance de l'École Polytechnique vise à renforcer le rôle du président du conseil d'administration – lequel est actuellement, signalons-le, une femme.
Aujourd'hui, le président du conseil d'administration n'a pas de rôle fort de représentation de l'école, ce qui constitue un obstacle à son développement et ses relations avec la communauté académique, le monde de la recherche et le monde économique, tant en France qu'à l'étranger.
L'article 50 bis que la commission a bien voulu adopter – j'en remercie en particulier le rapporteur et le Gouvernement – a pour objet de faire évoluer et de moderniser cette gouvernance, tout en respectant un certain nombre de principes et d'acquis forts hérités de l'histoire.
La modernisation, c'est la responsabilité soulignée et le rôle accru du président du conseil d'administration dans l'administration de l'école. L'histoire, c'est la cohérence avec le statut militaire de l'école et l'affirmation du rôle fort du directeur général, désormais placé sous l'autorité du président. Conformément au statut et à l'histoire de l'École, cette fonction est confiée à un officier général, chargé en particulier du commandement militaire ; mais d'autres missions peuvent lui être confiées par le président de l'école.
(L'article 50 bis est adopté.)
Les articles 51, 52, 52 bis et 52 ter ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.
(Les articles 51, 52, 52 bis et 52 ter, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Sur l'article 53, je suis saisie d'un amendement n° 38 .
La parole est à M. Bernard Derosier.
Nous arrivons à la question des juridictions administratives : tribunaux administratifs et cours administratives d'appel.
Le rapporteur a reçu des représentants des magistrats des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel. Nous avons entendu leurs propositions qui me semblaient tout à fait acceptables, visant à permettre que, chaque année, deux membres soient nommés au grade de maître des requêtes sans que l'on tienne compte de l'application du deuxième alinéa de l'article L. 133-4.
M. Mariton disait tout à l'heure qu'il n'était pas révolutionnaire. Notre amendement n'a pas non plus la prétention de révolutionner les recrutements dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, mais simplement de faciliter le déroulement de carrière de ces magistrats.
Je voudrais, à la faveur de cet amendement, revenir sur ce que nous avons fait, dans le présent texte, pour les juridictions administratives.
De nombreuses dispositions sont favorables à la modernisation des carrières et au développement des recrutements dans les juridictions administratives.
Je citerai notamment, outre le présent article, la consécration du statut de maître des requêtes en service extraordinaire – première grande avancée ; l'ouverture de la possibilité d'un renforcement ponctuel et immédiat des effectifs d'un tribunal administratif ; un ajustement permettant le report des nominations au tour extérieur au titre du grade de premier conseiller sur le grade de conseiller des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel ; la pérennisation du concours complémentaire de conseiller des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel sous la forme d'un concours direct – mesure essentielle ; l'ouverture de la possibilité d'une affectation de présidents des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel auprès de la mission permanente d'inspection à l'égard des juridictions administratives ; la création de nouveaux emplois de premier vice-président de tribunaux administratifs et cours administratives d'appel ; la limitation à sept du nombre d'années passées à la tête d'une même juridiction par les présidents des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, pour favoriser la mobilité des intéressés ; enfin, ce qui répond à une demande forte, la consécration d'un statut de magistrats administratifs des membres des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, et non plus juges administratifs.
La commission a émis un avis défavorable à l'amendement de M. Bernard Derosier. J'ai bien entendu les demandes, mais plutôt que deux nominations obligatoires, je crois préférable de nous limiter à une nomination obligatoire et une nomination facultative.
Sur l'article 53 bis, je suis saisie d'un amendement n° 45 .
La parole est à M. Bernard Derosier.
Il s'agit des juridictions administratives et du Conseil d'État. L'une des voies de recrutement des magistrats au Conseil d'État, c'est l'École nationale d'administration. Or on observe un tarissement du recrutement par la voie de l'ENA.
Notre amendement n° 45 vise donc à faciliter la composition de cette haute juridiction en permettant que, chaque année, un fonctionnaire ou un magistrat ayant exercé pendant une durée de quatre ans les fonctions de maître des requêtes en service extraordinaire puisse être nommé au grade de maître des requêtes.
Ce n'est pas un amendement révolutionnaire et il n'y a sans doute que ceux qui souhaitent conserver une certaine rigidité du corps qui s'opposeront à cette proposition. D'éminents collaborateurs ministériels sont, je le sais, vent debout contre cette initiative, mais j'y vois une défense très catégorielle qui, à ce niveau, n'a pas sa place.
La commission a également repoussé cet amendement.
Le Sénat, et c'est une bonne chose, a créé au profit des fonctionnaires détachés ou mis à disposition du Conseil d'État, un nouveau statut de maître des requêtes en service extraordinaire d'une durée maximale de quatre ans.
Notre commission a modifié le dispositif en supprimant la possibilité ouverte au Conseil d'État de proposer chaque année l'intégration directe au grade de maître des requêtes en service extraordinaire ayant exercé pendant quatre ans. En effet, la diversité des profils est déjà assurée par les trois voies d'accès existantes au Conseil d'État. En outre, la vocation des fonctionnaires qui accomplissent une mobilité au Conseil d'État est de faire bénéficier l'administration d'origine de l'expertise juridique qu'ils y ont acquise.
Cette voie d'accès risque par ailleurs de susciter de nombreuses attentes, alors qu'il n'y aurait, par définition, que très peu d'élus. Si j'en crois ce que j'ai analysé, il y a à peu près quarante personnes concernées et parmi celles-ci, on n'en retiendra qu'une seule. Imaginez la déception des trente-neuf autres !
Les articles 53 ter, 54, 55, 56, 56 bis, 56 ter et 56 quater ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.
(Les articles 53 ter, 54, 55, 56, 56 bis, 56 ter et 56 quater, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Sur l'article 57, je suis saisie d'un amendement n° 46 .
La parole est à M. Bernard Derosier.
Favorable. Cette mesure d'équité doit être saluée. Il n'y a pas lieu, en effet, de prévoir la possibilité d'un détachement des seuls professeurs d'université dans le corps des magistrats de la Cour des comptes et non celle d'un détachement des maîtres de conférences.
Favorable. Les maîtres de conférences peuvent aujourd'hui être détachés dans le corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, mais pas dans celui des magistrats de chambres régionales des comptes.
L'amendement que vous proposez, monsieur Derosier, met ainsi en cohérence des dispositions relatives à l'accueil en détachement au sein des tribunaux administratifs et des cours administratives, d'une part, et les chambres régionales de comptes, d'autre part. Il ne remet pas en cause les modalités de recrutement et il élargit les viviers. Il me semble donc bienvenu.
(L'amendement n° 46 est adopté.)
(L'article 57, amendé, est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 19 portant article additionnel après l'article 57.
La parole est à M. Charles de Courson.
C'est un petit amendement technique : il est précisé, dans le code des juridictions financières, que sont élus au Conseil supérieur de la Cour des comptes, pour un mandat de trois ans renouvelable une fois, neuf représentants des magistrats, des conseillers maîtres en service extraordinaire et des rapporteurs extérieurs. Or il se trouve que, pour les conseillers maîtres en service extraordinaire et les rapporteurs extérieurs, la rotation est assez rapide. On doit, en conséquence, faire face à des vacances. Je propose, donc, par cet amendement, de prévoir des suppléants afin d'éviter lesdites vacances.
J'aimerais faire plaisir à Charles de Courson, mais, après en avoir débattu, la commission a décidé de rejeter son amendement.
Je me tourne donc vers le Gouvernement pour connaître tout de même sa position.
Je ne vois pas pourquoi vous avez laissé entendre qu'il s'agirait d'un amendement mineur, monsieur de Courson. En général, les amendements présentés au sein de l'Assemblée ne sont jamais mineurs, sinon ils n'existeraient pas ! Le Gouvernement porte donc la même attention à votre amendement qu'aux autres. Je m'en remets par conséquent à la sagesse de l'Assemblée…
(L'amendement n° 19 est adopté.)
Les amendements 57 bis A, 57 bis et 57 ter ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.
(Les articles 57 bis A, 57 bis et 57 ter sont successivement adoptés.)
Je suis saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 57 ter.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 17 .
Ce petit amendement technique concerne les conseillers maîtres nommés au tout extérieur à la Cour des comptes dont l'âge minimum de recrutement est fixé à quarante ans, alors qu'il est de quarante-cinq ans au Conseil d'État. Je propose donc une harmonisation et de porter à quarante-cinq ans l'âge minimum de recrutement des conseillers maîtres à la Cour des comptes.
Cet amendement complète ce dispositif par les dispositions de l'article 10 undecies du projet de loi portant réforme des juridictions financières, voté par la commission de l'Assemblée nationale. Il a pour objet de limiter au plus à deux par an le nombre de nominations au tour extérieur dans le grade de conseiller maître. Il vise ainsi à stabiliser le nombre de conseillers maîtres en activité à la Cour, qui atteint aujourd'hui des proportions qu'on peut estimer suffisantes, voire excessives. Vous savez qu'il y a une sorte de gonflement des effectifs de la maîtrise. En effet, 63 % des magistrats en fonction à la Cour étaient conseillers maîtres au 31 décembre 2010 contre 30 % en 1980, 47 % en 1990 et 53 % en 2000. Il convient d'éviter ce gonflement de la tête. Il s'agit donc d'un amendement « anti-céphalopathie »…
Puis-je vous demander de défendre également votre amendement n° 23 , mon cher collègue ?
C'est demandé si gentiment, comment pourrais-je refuser, madame la présidente ?
L'objet de l'amendement n° 23 est identique à celui de l'amendement n° 17 : il s'agit de permettre le recrutement d'un plus grand nombre de conseillers référendaires en dissociant les nominations au tour extérieur du nombre des promotions internes d'auditeurs. Cela permettrait de « recylindrer » les corps et d'éviter le phénomène de « tiare ».
Je voudrais revenir au préalable sur tout ce que nous avons fait en matière de juridictions financières : le détachement dans le corps des magistrats de la Cour des comptes et dans le corps des chambres régionales des comptes ; la saisine par le Premier président de la Cour des conseils supérieurs en matière disciplinaire ; la participation de magistrats des chambres régionales et territoriales des comptes aux travaux de la Cour des comptes ; le statut des experts près la Cour des comptes ; la suppression des quotas pour les nominations à l'emploi de président des chambres régionales des comptes ; la pérennisation du recrutement complémentaire des conseillers des chambres régionales des comptes ; l'institution des emplois de vice-président dans les chambres régionales des comptes comportant au moins quatre sections, mesure que j'ai fortement soutenue…
Enfin, la révision du régime des incompatibilités dans le corps des chambres régionales des comptes.
C'est dire le nombre d'efforts que nous avons consentis pour obtenir un équilibre aujourd'hui parfait. Il n'est pas question de revenir sur ce statu quo. La commission est donc très défavorable aux amendements n°s 17 et 23 .
Défavorable à ces deux amendements pour les mêmes raisons que celles évoquées par le rapporteur.
Notre collègue Charles-Amédée de Courson est beaucoup plus courtois et aimable à l'égard de la présidence qu'à l'endroit des jeunes magistrats, puisqu'il veut porter la limite d'âge pour tous à quarante-cinq ans.
Nous ne pouvons accepter un amendement « anti-jeunes » qui tendrait, d'une certaine façon, à maintenir un corps composé de personnes qui n'ont pas l'engouement de la jeunesse !
Mon éminent collègue Derosier n'a pas bien compris la portée de mon amendement. Je ne pense pas que ce soit l'intérêt d'un corps d'avoir une maîtrise disproportionnée. Un équilibre entre les différents grades est nécessaire, faute de quoi vous allez dégrader les grades, si j'ose dire ! Je vous ai communiqué les chiffres : en trente ans, nous sommes passés de 30 à 63 % de conseillers maîtres dans le corps. Cet amendement propose de « recylindrer » ce dispositif déséquilibré. Si on ne procède pas ainsi, les conseillers maîtres ne seront plus des juges, mais des rapporteurs, comme les auditeurs et les conseillers référendaires, d'où une dégradation.
La facilité, c'est l'acéphalie : 100 % de conseillers maîtres, ce sera formidable… Mon amendement n'a rien d'une mesure anti-jeunes, monsieur Derosier : au contraire, il maintiendrait l'équilibre entre les jeunes et les plus âgés.
(L'amendement n° 17 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 23 n'est pas adopté.)
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 26 .
Je compte sur vous tous, mes chers collègues, pour adopter cet amendement. En effet, et l'actuel ministre n'est pas ici spécifiquement en cause, aucun gouvernement ne peut être favorable à cette proposition.
Quel est le problème ? Nous avons créé, voici bien longtemps avec Alain Lamassoure, dans le cadre du tour extérieur d'accès au référendariat, une commission de sélection chargée de vérifier que la personne est apte à exercer la fonction de conseiller référendaire. En revanche, cela n'existe pas pour la maîtrise. Je propose, donc, d'étendre à la sélection des candidats au tour extérieur de conseiller maître le dispositif prévu pour les conseillers référendaires. Le mécanisme est très simple : une commission siégeant auprès du Premier président émet un avis sur l'aptitude des candidats à exercer les fonctions auxquelles ils sont candidats. Ensuite, le Gouvernement, ainsi éclairé, choisit.
Malheureusement, les ministres sont tous les mêmes. Ils n'aiment pas trop ce mécanisme. Ils ont toujours, surtout en fin de législature, un vieil ami fidèle à caser… Or ce n'est pas respecter la juridiction qui joue un rôle de plus en plus important auprès du Parlement.
Je compte donc sur tous les républicains, nombreux sur les bancs de cet hémicycle, pour voter cet amendement n° 26 !
Monsieur Charles de Courson, tout en étant parfaitement républicaine, la commission a émis un avis très défavorable à votre amendement : on ne touche pas au tour extérieur pour les conseillers maîtres référendaires !
Même avis que la commission. M. de Courson a lui-même répondu à sa question sur la diversité du recrutement.
Les ministres sont tous les mêmes !
(L'amendement n° 26 n'est pas adopté.)
La commission a supprimé l'article 57 quater.
Je suis saisie d'un amendement, n° 48 , tendant à rétablir cet article.
La parole est à M. Bernard Derosier, pour le soutenir.
Depuis quelque temps, nous observons qu'un travail sérieux est accompli par le Sénat (Sourires.)
Depuis quelle année ?
Nos collègues sénateurs ont introduit une disposition tendant à modifier les conditions de nomination au grade de conseiller référendaire de la Cour des comptes. La commission l'a supprimée. Je propose, en conséquence, de rétablir l'article 57 quater dans la rédaction qui est sous vous yeux, l'objectif étant de diversifier le vivier des recrutements effectués par la voie du tour extérieur au grade de conseiller référendaire à la Cour des comptes. Chaque année, ce sont, au plus, deux premiers conseillers de chambre régionale, au lieu d'un actuellement, qui pourront être nommés.
(L'amendement n° 48 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Sur l'article 57 quinquies, je ne suis saisie d'aucun amendement.
(L'article 57 quinquies est adopté.)
Le Gouvernement a présenté un amendement, n° 57 , tendant à supprimer l'article 57 sexies.
La parole est à M. le ministre.
Amendement rédactionnel de coordination.
(L'amendement n° 57 , accepté par la commission, est adopté.)
Les articles 57 septies et 57 octies ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.
(Les articles 57 septies et 57 octies sont successivement adoptés.)
Sur l'article 58, je suis saisie d'un amendement n° 58 du Gouvernement
La parole est à M. le ministre.
Amendement rédactionnel de coordination.
(L'amendement n° 58 , accepté par la commission, est adopté.)
(L'article 58, amendé, est adopté.)
Les articles 59 et 60 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.
(Les articles 59 et 60 sont successivement adoptés.)
Je suis saisie d'un amendement, n° 49 rectifié , tendant à supprimer l'article 60 bis AA.
La parole est à M. Bernard Derosier, pour le soutenir.
Défendu !
(L'amendement n° 49 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 60 bis AA est adopté.)
Les articles 60 bis A, 60 bis B, 60 bis C, 60 bis D, 60 bis E, 60 bis F, 60 bis G, 60 bis et 60 ter ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.
(Les articles 60 bis A, 60 bis B, 60 bis C, 60 bis D, 60 bis E, 60 bis F, 60 bis G, 60 bis et 60 ter sont successivement adoptés.)
Sur l'article 60 quater, je suis saisie d'un amendement n° 25 .
La parole est à M. Jacques Alain Bénisti.
Lors de la discussion au Sénat, nous sommes parvenus à un équilibre concernant les missions des centres coordinateurs. Il ne paraît donc pas souhaitable de revenir aujourd'hui en arrière.
Je vous ai réuni hier matin avec les principaux acteurs pour aller de l'avant. Le Gouvernement, conformément aux engagements que j'avais pris au Sénat, va déposer des amendements. Je préférerais donc, monsieur le président Bénisti, que vous retiriez votre amendement.
Je suis saisie d'un amendement n° 27 tendant à supprimer l'article 60 quinquies.
La parole est à M. Jacques Alain Bénisti.
Pour les mêmes motifs, je vous demande, monsieur Bénisti, de le retirer.
Je suis saisie d'un amendement n° 31 portant article additionnel après l'article 60 quinquies.
La parole est à M. Jacques Alain Bénisti.
L'amendement est défendu.
(L'amendement n° 31 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
M. Bénisti a beaucoup contribué à faire avancer la question et je veux lui en rendre hommage, ainsi qu'a M. Derosier qui a participé à la réunion. Il est important d'arriver à une formulation susceptible de répondre aux attentes des centres de gestion, de donner un cadre structuré à l'adhésion volontaire des communes non affiliées. Je remercie donc l'ensemble des parlementaires qui ont permis de parvenir, si ce n'est à un consensus, du moins à une véritable convergence d'idées.
Ces trois amendements concernent la définition d'un socle indivisible et l'adhésion facultative pour les collectivités et établissements non affiliés aux centres de gestion. Ils prévoient l'organisation de la représentation des collectivités non affiliées au conseil d'administration des centres de gestion et le montant de la contribution des collectivités non affiliées qui choisissent d'adhérer à un socle insécable de missions.
Je vous demande, monsieur Bénisti, de retirer votre amendement au profit de ceux du Gouvernement qui répondent, je l'espère en tout cas, à votre attente.
La parole est à M. Jacques Alain Bénisti, pour défendre l'amendement n° 67 .
Je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir repris les amendements que nous avions déposés et qui tombaient malheureusement sous le coup de l'article 40. Cela va dans le bon sens pour les centres de gestion et cela va un peu rééquilibrer la situation entre les non affiliés et les affiliés.
Je retire l'amendement n° 67 .
(L'amendement n° 67 est retiré.)
Plusieurs parlementaires avaient soulevé la question des centres de gestion, et l'on peut saluer, monsieur le ministre, la méthode que vous avez retenue et, surtout, votre sens de l'écoute. Vous nous avez montré hier avant l'examen en commission et dans l'hémicycle toute l'attention que vous accordiez à ces légitimes questions. C'est l'occasion pour moi de rendre hommage à l'action des centres de gestion. Je crois que nous sommes parvenus à un texte d'équilibre qui mérite d'être soutenu.
Comme vous insistez pour que je rende compte de ma participation à la réunion que vous avez organisée, monsieur le ministre, je le fais bien volontiers.
J'ai cité votre nom par courtoisie…
Je suis personnellement satisfait que le Gouvernement ait pris une telle initiative pour les centres de gestion. Je n'entre pas dans le détail, d'autres l'ont fait avant moi. Ces amendements correspondent à ce que nous souhaitons.
Je profite de l'occasion pour souligner une fois de plus l'urgence à remettre sur le métier le dispositif qui n'avait pas été retenu en 2002, le Sénat ayant à l'époque refusé de suivre l'Assemblée nationale et de créer un établissement public national fédérant les centres de gestion. Vous avez encore deux ou trois mois devant vous dans cette législature, et vous serez peut-être encore après aux affaires…
Je ne veux pas anticiper sur les résultats, même si quelques indices me laissent penser qu'il y aura un changement de majorité. Néanmoins, n'hésitez pas, vous avez encore du temps pour le faire.
Je ne peux que m'associer aux propos de M. Derosier. Nous n'avons pas souvent eu l'occasion de nous mettre d'accord au cours de ces dernières années, mais nous partageons au moins la volonté de voir émerger un centre national à côté du CNFPT.
(Les amendements n°s 86 , 84 deuxième rectification et 85 deuxième rectification, acceptés par la commission, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Les articles 61, 62, 62 bis, 63, 63 bis, 63 ter, 63 quater et 63 quinquies ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.
(Les articles 61, 62, 62 bis, 63, 63 bis, 63 ter, 63 quater et 63 quinquies, mis aux voix successivement, sont adoptés.)
Je voudrais revenir sur cet article non pour le critiquer, mais pour être sûr que l'Assemblée est parfaitement informée de la difficulté que nous aurons avec les ingénieurs en chef.
Sur le principe, nous sommes tout à fait d'accord. Techniquement, c'est faisable ; mais, financièrement, c'est impossible à mettre en oeuvre et je ne voudrais pas que nous votions un texte sans que l'Assemblée sache qu'il ne sera pas mis en oeuvre en 2013 puisque nous avons perdu la recette du 1 % formation.
Hier soir, je vous ai interrogé sur ce sujet, monsieur le ministre, et vous m'avez parlé de la Cour des comptes. Selon la Cour des comptes, le CNFPT avait un excédent de 2004 à 2008 ; mais, quatre ans plus tard, les choses ont changé. Il a appliqué la loi de 2007, que votre majorité a fait voter et qui a porté ses fruits puisque notre excédent a été consommé et que nous n'en produisons plus, et nous avons augmenté la formation de 28 %, ainsi que l'avait recommandé la Cour des comptes. Du coup, il n'y a plus aucun excédent en 2012 et le danger est grand d'être en déficit. Or vous nous demandez de prendre en charge une dépense supplémentaire alors que nous n'en avons pas les moyens.
Vous avez institué une nouvelle contribution pour les CDG. Je vous demande donc de déposer un amendement pour rétablir le 1 %, d'autant plus que vous avez évoqué hier soir la Cour des comptes et que Mme Pécresse a déclaré ce matin à propos de son rapport annuel que les chiffres sur lesquels elle s'était appuyée étaient justes mais anciens. C'est exactement le cas du CNFPT et je crois l'avoir prouvé à de nombreuses reprises. L'AMF, l'ARF, l'ADF, tous les syndicats des organisations des agents sont favorables à ce rétablissement, 6 800 collectivités ont voté une motion dans ce sens.
Je me permets donc d'insister, monsieur le ministre, non pour vous mettre en difficulté, vous le savez, car la création d'ingénieurs en chef est une bonne chose, mais parce c'est impossible à mettre en oeuvre alors que je le souhaiterais. Déposez donc un amendement, comme vous l'avez fait pour les centres de gestion : 1,8 million de fonctionnaires territoriaux vous en sauront gré.
Amendement rédactionnel de coordination.
Je veux saluer la constance du président du CNFPT qui a soulevé à plusieurs reprises cette question. Je lui donne acte en tout cas de sa volonté de tout faire pour atteindre l'objectif de formation qui est le sien et que nous partageons. Je lui fais donc confiance pour assumer pleinement sa mission – dans un cadre contraint, certes mais personne ne peut échapper à ces cadres contraints…
Je vous invite à regarder les choses très simplement. Comme je l'ai souligné hier, il s'agit d'une initiative parlementaire, à laquelle le Gouvernement ne s'est pas opposé ; cela dit, monsieur le président du centre national de la fonction publique territoriale et député, le Gouvernement vous fait confiance pour trouver les dispositions internes permettant d'assurer la formation parce que c'est une exigence qui s'impose à vous et que c'est attendu.
C'est une ouverture !
(L'amendement n° 75 , accepté par la commission, est adopté.)
(L'article 63 sexies, amendé, est adopté.)
Les articles 63 septies, 64, 65 et 66 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.
(Les articles 63 septies, 64, 65 et 66, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Je suis saisie d'un amendement n° 50 , portant article additionnel après l'article 66.
La parole est à M. Michel Hunault.
À travers cet amendement, monsieur le ministre, je voudrais évoquer la place des personnes reconnues handicapées dans la fonction publique.
Il s'agit, vous le savez, d'une préoccupation partagée sur tous les bancs de cet hémicycle. Je sais combien, à la tête de votre ministère, vous y êtes particulièrement sensible. Il n'est pas inutile de rappeler qu'il y a quelques années, la fonction publique échappait à cette obligation : on mesure mieux le chemin parcouru. Néanmoins, si certaines fonctions publiques sont exemplaires, d'autres le sont moins et je voudrais parler des critères d'intégration des personnes reconnues travailleurs handicapés.
Actuellement, on exclut du décompte des effectifs les salariés titulaires d'un contrat de travail à durée déterminée, les salariés temporaires ainsi que les salariés titulaires d'un contrat aidé. Mon amendement n° 50 vise à les prendre en compte pour calculer le pourcentage d'intégration des travailleurs handicapés. C'est donc un amendement très contraignant. Son objet est donc plutôt de faire prendre conscience du problème et j'aurais aimé que l'on puisse s'attarder sur l'engagement du Gouvernement sur cette exigence que je sais partagée.
J'en profite pour évoquer les problèmes d'accessibilité dans un trop grand nombre d'administrations publiques, qu'elles soient territoriales ou d'État. La loi prévoyait l'accessibilité à la fin de l'année 2012, nous avons trop d'exemples où il y a du retard.
Cet amendement a le mérite de rappeler cette exigence que, je le sais, nous partageons tous. Je suis certain que vous y serez attentifs, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur.
L'intention est louable, monsieur Hunault, et nous la saluons, et je le fais d'autant plus en tant que député de la Lozère, département d'excellence dans la prise en considération du handicap, Jacques Blanc ayant été le rapporteur de la loi de 1975 qui avait reconnu la dignité de la personne handicapée.
Votre amendement vise à étendre le champ d'application de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés en incluant dans le décompte des effectifs tous les salariés titulaires d'un contrat de travail à durée déterminée et les salariés mis à disposition par une entreprise extérieure, y compris les salariés temporaires et les salariés bénéficiant d'un contrat aidé. Cette modification s'appliquerait aussi bien dans le secteur privé que dans le secteur public.
Pour commencer, cela dépasse le champ de ce projet de loi.
S'agissant des emplois publics, seuls concernés par le présent projet, la portée de l'amendement serait limitée puisque les titulaires d'un CDD et les intérimaires, sauf en cas de remplacement, sont déjà inclus dans le calcul de l'effectif au prorata de leur temps de présence au cours des douze derniers mois.
Comme l'a souligné le rapporteur, votre souci est tout à votre honneur, monsieur Hunault, et je connais votre implication sur le sujet ; mais il ne faudrait pas en arriver à comptabiliser deux fois les salariés, le salarié titulaire du contrat et son remplaçant.
Je suis donc défavorable à cet amendement, même si je reconnais que c'est une initiative louable.
(L'amendement n° 50 n'est pas adopté.)
Compte tenu de la complexité de la fiabilisation des échanges dématérialisés entre les différents régimes de retraite, l'amendement n° 64 reporte l'entrée en vigueur de la réforme du minimum garanti au 1er janvier 2013. Le II rectifie une référence dans le code de la sécurité sociale.
(L'amendement n° 64 , accepté par la commission, est adopté.)
Il s'agit d'un amendement important, qui a trait à la situation des ouvriers des parcs et ateliers. Nous répondons à une attente. L'amendement n° 63 vise en effet à maintenir le bénéfice du départ anticipé pour les ouvriers de l'État affectés sur des travaux ou emplois comportant des risques particuliers d'insalubrité.
(L'amendement n° 63 , accepté par la commission, est adopté.)
La parole est à Mme Geneviève Fioraso, pour soutenir l'amendement n° 68 .
Cet amendement vise à prolonger le dispositif prévu par l'article 47 de la loi du 30 décembre 2006 prévoyant que, jusqu'au 31 décembre 2010, les organismes de recherche, les établissements d'enseignement supérieur et les entreprises pouvaient mettre leurs salariés à la disposition d'une entreprise, d'un établissement d'enseignement supérieur ou d'un organisme de recherche faisant partie d'un même pôle de compétitivité.
Les évaluations du dispositif par les acteurs des pôles de compétitivité, en 2009, ont montré qu'il avait un impact très positif sur la dynamique d'emploi locale. Cela a d'ailleurs été reconnu par plusieurs journaux quotidiens économiques.
Malheureusement, le dispositif n'a pas été reconduit dans le budget 2011, alors que les pôles de compétitivité demeurent. L'amendement ne coûte rien en termes de dépense publique. Il est fondé sur le principe du volontariat des salariés mis à disposition, auxquels il garantit le retour dans l'entreprise d'origine avec tous les droits afférents. Pendant la période de mise à disposition, le salarié est en effet considéré comme travaillant pour l'entreprise d'origine, et il a donc droit à tous les avantages en matière de formation et d'avancement.
Ce dispositif présente un double intérêt. En période de crise économique et dans des secteurs fortement concurrentiels, il permet de maintenir des emplois stratégiques pour l'avenir dont la pérennité est provisoirement menacée. Par ailleurs, il contribue à la réussite des projets partenariaux menés dans les pôles de compétitivité, en assurant la continuité nécessaire des expertises. De plus, les échanges ainsi permis entre chercheurs privés et publics au sein d'organismes et de laboratoires publics favorisent les partenariats utiles au développement d'emplois porteurs pour l'avenir.
Cette disposition a été utilisée, dans ma circonscription, par les pôles de compétitivité grenoblois, où il a permis de sauver des emplois dans des ETI ou des start-up, tout en maintenant la bonne réalisation des projets des pôles de compétitivité. C'est un dispositif qui ne coûte rien à l'État et qui est très utile à l'emploi, en particulier aux emplois d'avenir.
Défavorable. Je me tourne vers le ministre pour qu'il nous confirme l'information qui m'a été communiquée, selon laquelle l'IGAS et le Contrôle général économique et financier, au terme de leur évaluation du dispositif expérimental relatif à la mise à disposition de personnel entre les membres d'un pôle de compétitivité, ont recommandé de ne pas reconduire l'expérimentation d'un prêt de main-d'oeuvre spécifique aux membres des pôles de compétitivité, et que, par conséquent, l'expérimentation s'est achevée fin 2010.
Défavorable également. Nous avons conduit une expérimentation, et force est de constater que le dispositif n'a pas marché. Dont acte.
Le rapport de l'IGAS et du Contrôle général économique et financier a recommandé de ne pas reconduire l'expérimentation d'un dispositif qui n'a été, au bout du compte, mis en place que sur un seul pôle. J'ajoute qu'il existe la possibilité, à droit constant, d'obtenir les mêmes effets de mise à disposition de salariés entre entreprises et laboratoires membres d'un pôle de compétitivité. C'est donc un avis de bon sens que donne le Gouvernement.
Nous ne connaissons pas les motifs qui ont conduit l'IGAS à juger l'expérience négative, hormis le fait que celle-ci n'a eu lieu que dans un seul pôle. Notre collègue Geneviève Fioraso, qui précisément suit attentivement ce pôle de compétitivité, n'a pas le même point de vue. Pour une fois qu'une expérimentation était conduite et gagnait à être étendue, la démarche aurait pu être saluée.
Il semble que ce dispositif, qui ne coûte rien à l'État, crée des passerelles et des ponts. Tout à l'heure, on a parlé de « vivier », de « stock » – des mots que nous n'aimons pas beaucoup – au sujet de la promotion des femmes. Nos débats portaient sur des catégories très resserrées, notamment les grandes écoles, mais la fonction publique pourrait aussi s'aérer et chercher des talents et des ressources ailleurs. La mise à disposition entre entreprises et centres de recherche me paraît un dispositif intéressant. Peut-être que la publicité n'a pas été suffisante et que cette opération mériterait d'être mieux connue des pôles de compétitivité.
J'entends vos arguments, madame la députée, mais, quand on conduit une expérimentation, c'est pour vérifier l'opportunité et l'utilité d'un dispositif. Les rapports ont fait un constat : les pôles de compétitivité, qui ont été informés, ne se sont pas mobilisés. De surcroît, le prêt de main-d'oeuvre non lucratif est légal de plein droit ; dans la majorité des cas, il présente moins de risques de contentieux, tout en étant moins onéreux pour les structures accueillantes. C'est probablement une des raisons de la non-reconduction.
Des initiatives de cette nature ne peuvent qu'être encouragées, notamment par des actions d'information, afin de maintenir des emplois stratégiques pour l'avenir dans les pôles de compétitivité. Je vous renvoie simplement à la réalité, c'est-à-dire à la possibilité du prêt de main-d'oeuvre non lucratif.
(L'amendement n° 68 n'est pas adopté.)
Les articles 68
et 69 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre successivement aux voix.
(Les articles nos 68 et 69, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Cet amendement vise à préciser les modalités de cotisations à pension des fonctionnaires détachés sur un emploi de directeur général de CHR ou CHU. Il conditionne la cotisation à la prise d'un décret en Conseil d'État, lequel fixera l'indice de traitement applicable à chaque emploi.
(L'amendement n° 70 , accepté par la commission, est adopté.)
(L'article 70, amendé, est adopté.)
Je souhaite dire quelques mots sur le télétravail. Ce que nous proposons aujourd'hui est l'aboutissement de cinq ans de combat pour parvenir à introduire ce concept dans le droit français. Je me félicite que nous le fassions en même temps dans le secteur privé, par la loi de simplification, et dans le secteur public, par le présent projet de loi.
Quand j'ai été chargé d'une mission auprès du Premier ministre, en 2006, le télétravail était encore un mot honteux. « Surtout, ne parlez pas du télétravail ! », me disaient certains syndicats, invoquant la désocialisation et tous les maux imaginables, alors même que nous constations une certaine inculture ou « aculture » française dans l'émergence des nouvelles technologies.
Aux États-Unis, 28 % de la population active télétravaille, tout comme au Canada, en Suède, en Finlande. En France, les chiffres sont un peu erronés : on parle de 1 à 1,5 % dans le secteur public et de 7 % dans le secteur privé, alors que nous sommes plutôt à 5 % dans le public et à 12 ou 13 % dans le privé.
Signe de l'évolution de la société française, le télétravail va de pair avec les nouvelles technologies, le téléphone mobile, le haut débit, l'internet, l'ordinateur portable, qui créent un nouvel équilibre entre vie privée et vie professionnelle, avec aussi ce que l'on appelle les « open bureaux », les open spaces, qui traduisent également une évolution très importante. Ces cinq dernières années, les syndicats ont beaucoup évolué et sont aujourd'hui bien plus ouverts sur la problématique.
Le salarié sera moins présent dans l'entreprise, le fonctionnaire moins présent dans le service administratif. C'est aussi la conséquence de l'apparition de l'e-administration et des téléprocédures, dans une nouvelle relation entre le salarié, l'employeur, l'objectif et la mission.
Cinq années de combat, disais-je, avec leurs jalons : un rapport en 2006, plusieurs propositions de loi entre 2007 et 2009, un très beau rapport du Centre d'analyse stratégique commandé par Nathalie Kosciusko-Morizet en 2009, la proposition de loi Poisson, votée en juin 2009 à l'Assemblée, où elle avait été portée par Jean-Pierre Decool, Bernard Gérard et moi-même, mais qui n'a pas été votée au Sénat, un amendement à la loi Grenelle, un colloque au Sénat à la diligence de Georges Tron, un rapport du CGIET à la demande de M. Sauvadet, ministre de la fonction publique.
En 2002 les partenaires sociaux s'étaient entendus sur un accord-cadre européen. Cet accord-cadre a été transposé en droit français dans un ANI, un accord national interprofessionnel, en 2005. Nous avons eu beaucoup de difficultés à l'intégrer. M. Gosselin a déposé un amendement dans la loi de simplification ; aujourd'hui, je vous propose, avec le Gouvernement, un article 71 nouveau applicable à l'ensemble des fonctionnaires et des agents publics, reprenant les quatre éléments du télétravail : la nécessité d'un contrat de travail ou d'un avenant, le volontariat – on ne peut pas imposer le recours au télétravail, ni du côté de l'agent ni de celui de l'employeur –, la réversibilité synallagmatique – il peut être mis un terme au télétravail de part et d'autre –, et un temps limité : il ne s'agit pas de 100 % de travail à domicile mais de deux ou trois jours par semaine.
Aux termes de l'article 71, un décret en Conseil d'État fixera, après concertation avec les organisations syndicales représentatives de la fonction publique, les conditions de son application.
Enfin, je souhaite également saluer le travail réalisé par Mme Turbé-Suetens, experte auprès des communautés européennes. Aujourd'hui, nous nous mettons en conformité avec les évolutions des technologies dans le monde du travail, à la fois dans le secteur privé et dans le secteur public.
Monsieur le rapporteur, je vous ai écouté avec beaucoup d'attention. Il est vrai qu'il faut accepter des évolutions, et la condition du volontariat est importante. Comme vous le soulignez, le décret en Conseil d'État sera pris après concertation avec les organisations syndicales. Au début de la discussion, nous avons indiqué que la parité devait être réalisée parmi les partenaires sociaux. Nous ne pouvons l'imposer puisqu'il s'agit d'une élection, mais elle serait souhaitable. Il convient de prendre en considération le travail féminin : il ne faudrait pas que le télétravail crée pour les femmes une situation d'isolement, de maintien à domicile, car il peut aussi rendre difficile une séparation entre vie professionnelle et vie personnelle.
J'ai eu connaissance de plusieurs expériences. Certaines opérations de travail à domicile ont abouti à ce que les femmes demandent à être regroupées dans un lieu commun afin de pouvoir se rencontrer. Ce n'est sans doute pas ce que vous voulez, monsieur le rapporteur, puisqu'il s'agit, dites-vous, d'un temps limité et non de la totalité du temps de travail. Il faudra néanmoins faire très attention à la manière dont le télétravail se mettra en place.
Pour avoir conduit, dans le département que je préside, une expérience de télétravail, que d'ailleurs connaît bien Pierre Morel-A-L'Huissier, je trouve très judicieux de créer, à l'occasion du présent texte, un cadre à l'exercice du télétravail, sur la base du volontariat, mais aussi avec une limite temporelle, car le contact régulier avec les services peut être fort utile.
S'agissant du lieu d'exercice, les expériences sont très diverses. Certains privilégient un travail à domicile, d'autres – c'est notre cas – incitent les personnes à se retrouver dans des télécentres, ce qui est important sur le plan social et pour la qualité de l'exercice du travail.
Je salue cette initiative qui a le mérite de donner un cadre aux expériences de télétravail, appelées de toute évidence à se généraliser. Il est bon que la fonction publique s'adapte en la matière et que nous y veillions, comme nous avons su le faire pour le secteur privé.
Madame Coutelle, il ne faut pas avoir peur du télétravail. Vincent Descoeur vient de le rappeler : il fait d'ores et déjà l'objet de nombreuses expériences dans le Cantal, le Puy-de-Dôme,…
…en Côte-d'Or et dans le Finistère au sein des conseils généraux. Dans le Puy-de-Dôme, par exemple, le télétravail concerne cent agents publics.
On en trouve également plusieurs cas dans des rectorats, à Bordeaux, à Montpellier.
En tout état de cause, je le redis, le télétravail ne peut se concevoir que sur la base du volontariat : il n'est pas possible pour un employeur public d'exiger d'un agent qu'il passe au télétravail. Reste que cette formule peut être très intéressante pour les femmes, dans certains cas, ou pour des agents handicapés et, plus globalement, se révéler très efficace pour certaines tâches. Je salue à ce propos la très belle expérimentation menée dans le Cantal.
Madame la députée, vous avez exprimé des inquiétudes que je vais m'empresser d'apaiser.
Des principes ont été fixés à partir d'expérimentations et sur la base des conclusions du rapport demandé par mon prédécesseur au Conseil général de l'industrie et que j'ai moi-même présenté à Mende, dans le magnifique département de la Lozère. Ce rapport reprend des principes auxquels les organisations syndicales sont unanimement très attachées : premièrement, le volontariat ; deuxièmement, la réversibilité, ce qui veut dire que quelqu'un qui ne souhaite plus poursuivre l'expérimentation peut réintégrer de plein droit une équipe ; troisièmement, éviter la désocialisation,…
Ce qui signifie que le télétravail ne peut se concevoir que sur des temps courts afin de préserver un lien avec son service.
Je ne reviens pas sur les opportunités que, sur la base de ces principes, le dispositif peut offrir, mais ma volonté est très claire : il s'agit d'ouvrir une discussion sur ces sujets – j'ai d'ailleurs déjà commencé avec les organisations syndicales – afin de parvenir à une forme de charte du télétravail fondée sur les travaux de votre collègueM. Morel-A-L'Huissier. Je tiens à le saluer, d'abord parce qu'il est le rapporteur du projet de loi, mais aussi pour tout le travail qu'il a réalisé afin de promouvoir un télétravail respectueux de ces trois principes. Cette charte permettrait de travailler ensemble sur cette question, employeurs territoriaux, employeurs d'État, employeurs hospitaliers.
Enfin, n'oublions toutes les nouvelles possibilités ouvertes par la télémédecine, avec notamment les transmissions d'informations qui représentent une chance nouvelle pour nos hôpitaux ruraux, qui pourront avoir accès aux compétences des CHU.
Le télétravail est donc une opportunité : il ne reste plus qu'à la concrétiser, mais en évitant à tout prix la désocialisation. C'est une préoccupation que nous avons en partage, madame la députée. Je l'ai en tout cas bien présente à l'esprit.
Il faut aussi éviter la désertification administrative, monsieur le ministre !
(L'article 71 est adopté.)
Mes chers collègues, nous avons terminé l'examen des articles du projet de loi.
Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet, auront lieu le mardi 14 février, après les questions au Gouvernement.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Proposition de loi relative à la formation des maîtres.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron