La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le groupe Nouveau Centre.
Madame la ministre de la culture, le 1er août 2006, le Parlement adoptait définitivement le projet de loi relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information. Ce texte avait un objectif louable : définir un nouveau modèle juridique et économique prenant pleinement en compte notre environnement Internet et jetant les bases d'une juste rémunération des activités de création.
Disons-le brutalement : cette loi a échoué et nous sommes nombreux, dans cet hémicycle, à avoir ce naufrage en mémoire.
Dès le début du nouveau quinquennat, le Gouvernement s'est efforcé à juste titre de revenir sur cet enjeu majeur, complexe et très sensible. Ce fut la mission Olivennes qui, le 23 novembre 2007, a débouché sur un ensemble d'accords entre professionnels de la création et ceux de l'Internet, destinés à lutter contre le piratage des oeuvres sur l'Internet. Aux termes de ces accords, les industries culturelles se sont engagées à améliorer l'offre en ligne et à prendre des mesures pour qu'une oeuvre légalement acquise puisse être écoutée sur tous les matériels. Les accords prévoient également un mécanisme de prévention et de sanction du piratage, lequel est inclus dans un projet de loi en préparation et qui doit être examiné très prochainement par l'Assemblée, en tout cas avant la fin de la session.
Ce projet – appelé Hadopi, ou plutôt, semble-t-il, « Création et Internet » – fait aujourd'hui couler beaucoup d'encre. Certains membres du Parlement européen, notamment, s'interrogent publiquement sur l'une des réponses envisagées au piratage, à savoir la suspension de l'accès à l'Internet.
Le groupe Nouveau Centre se montre réservé sur une telle mesure, qu'il s'agisse de sa faisabilité ou de sa légalité.
À ce stade du débat public, madame la ministre, notre question sera juridique : la suspension de l'accès à l'Internet est-elle compatible avec le droit communautaire et le droit français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.
Monsieur le député Jean Dionis du Séjour, vous avez fait allusion aux accords de l'Élysée qui ont réuni tous les professionnels du secteur, y compris les fournisseurs d'accès à Internet. Ces accords prévoient le dépôt d'un projet de loi destiné à compléter le texte relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, certes efficace contre les « gros » pirates, ceux qui viennent casser les systèmes, mais pas contre les « petits » pirates, notamment les jeunes.
Ce projet a été examiné par la CNIL et l'est actuellement par le Conseil d'État. Il sera présenté en conseil des ministres entre le début et la mi-juin. J'espère qu'il sera rapidement mis à l'ordre du jour des travaux parlementaires.
La mauvaise situation de notre industrie musicale mais aussi de notre industrie cinématographique l'exige, d'autant que de puissantes attaques sont portées contre elles.
Je tiens à souligner que ce projet vise à accroître l'offre légale, d'où l'intérêt pour tous les professionnels de le signer. L'offre légale sera plus rapide, meilleur marché et beaucoup plus large. En outre, il s'agit de mettre en place un dispositif essentiellement pédagogique puisque l'autorité régulatrice devra d'abord envoyer au pirate des messages personnalisés, puis une lettre recommandée, la suspension de l'abonnement à Internet n'intervenant qu'en dernier recours, après un dialogue avec le contrevenant qui pourra, s'il s'engage à ne plus pirater, bénéficier d'une réduction de la suspension d'abonnement.
Ce dispositif est tout à fait conforme à nos règles constitutionnelles et communautaires et s'inscrit dans le droit-fil de la jurisprudence « Promusicae » de la Cour de justice des communautés européennes, c'est-à-dire de la jurisprudence la plus récente puisqu'elle date de février 2008. En effet, le dispositif est susceptible de recours devant le juge ; il ne suppose pas de filtrage généralisé des réseaux, les fournisseurs d'accès à Internet n'étant pas chargés de la police ; enfin, il n'est pas en contradiction avec la directive sur la protection des données personnelles.
Il s'agit donc de trouver un équilibre entre la liberté de naviguer sur Internet et la liberté de créer et d'être rémunéré pour sa création. Les Français l'ont compris puisqu'ils se montrent favorables à l'esprit de ce projet. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. Daniel Fasquelle, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse au ministre de l'agriculture et de la pêche, et j'y associe les nombreux parlementaires UMP qui, comme moi, suivent de très près la situation de la pêche française.
Monsieur le ministre, j'ai longuement rencontré les marins-pêcheurs de la coopérative maritime étaploise, samedi dernier, ainsi que des responsables locaux et nationaux du monde de la pêche. Ceux-ci m'ont redit les difficultés qu'ils rencontrent en raison de l'augmentation du prix du gazole. Ils m'ont aussi de nouveau confié leur incompréhension vis-à-vis de la politique européenne qui reste sans réponse tant en ce qui concerne la hausse du prix du carburant que la gestion de la ressource. Ainsi, ils ne comprennent pas que l'on ferme le quota du cabillaud, alors qu'ils constatent avec les scientifiques que la ressource abonde à l'est de la Manche et au sud de la Mer du Nord.
Monsieur le ministre, alors que l'on déplore certains débordements qui pourraient entraîner des conséquences très graves pour l'ensemble de la filière de transformation et de consommation du poisson, pouvez-vous nous expliquer de quelles mesures concrètes vont immédiatement bénéficier les marins pêcheurs et leurs entreprises ?
Tandis que le Gouvernement a pris les décisions qui s'imposaient, les seules possibles dans le cadre européen, quelles initiatives envisagez-vous pour que l'Union européenne entende elle aussi le message du monde de la pêche – en particulier de la pêche artisanale – et adopte enfin des dispositions en faveur d'une pêche durable, protectrice de la ressource mais aussi de l'emploi, pour qu'elle mène une politique qui soit enfin comprise et acceptée par les professionnels de la mer ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le député Fasquelle, les pêcheurs français sont touchés de plein fouet par une augmentation insensée du prix du gazole : vingt centimes de plus en six mois alors qu'il avait précédemment augmenté de vingt centimes en deux ans ! Le Gouvernement a entendu et le message et la détresse des pêcheurs.
Nous voulons y répondre à la fois par des mesures d'urgence et par des mesures plus structurelles. Dans l'urgence, en accord avec le Premier ministre, nous avons décidé d'apporter un soutien social au revenu des pêcheurs puisqu'il est directement impacté par la hausse du prix du gazole.
La première enveloppe représente 40 millions d'euros pour les prochains mois. Par ailleurs, nous avons décidé d'accélérer le versement de 22 millions d'euros d'aides à toutes les entreprises de pêche, dans le respect des règles communautaires. Ces aides seront, elles aussi, versées dans les tout prochains jours, en tout cas avant le 15 juin.
Au-delà de l'urgence, monsieur Fasquelle,…
…le Gouvernement a décidé d'accélérer le plan que j'avais présenté le 16 janvier dernier, ainsi que le Président de la république l'avait souhaité. Ainsi, 310 millions d'euros de crédits européens et nationaux sont mobilisés, avec l'aide de nombreuses collectivités locales, pour moderniser et restructurer la pêche française afin de lui donner un horizon.
Monsieur Fasquelle, nous allons exécuter ce plan en deux ans au lieu de trois !
Vous l'avez très bien dit, il ne s'agit pas seulement une question française.
Voilà pourquoi hier, en Slovénie, avec mes homologues, j'ai commencé à travailler sur une série de propositions que nous allons soumettre à la Commission européenne. En effet, si nous voulons garder une pêche européenne, il faut adapter la politique commune de la pêche, y compris en créant de nouveaux outils communautaires.
Dans le même esprit, comme l'a souhaité le chef de l'État – je pense en particulier à la question sur laquelle vous m'avez interpellé à plusieurs reprises –, mes homologues et moi-même allons discuter de la modernisation de la gestion des quotas de pêche.
Enfin, face à une crise aussi grave, ni la violence ni les polémiques ne sont d'aucune utilité. Je fais appel à la responsabilité de chacun des marins pêcheurs de notre pays, qui doit les conduire à mesurer l'engagement du Gouvernement et à reprendre la mer au plus tôt. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. Philippe Vuilque, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, je souhaite vous interroger sur l'envolée des prix de l'énergie et du carburant en particulier.
Un chiffre : 133 dollars – c'était le prix du baril de pétrole hier et l'on nous dit que le pire est à venir. Les causes de cette envolée sont connues. Les conséquences pour le pouvoir d'achat de nos concitoyens sont catastrophiques. Les entreprises de transport, les pêcheurs – on vient d'en parler –, les agriculteurs sont, parmi d'autres, durement touchés.
Face à cette situation, la réponse gouvernementale est hypocrite et n'est absolument pas à la hauteur. Certes, vous ne pouvez pas maîtriser les cours, mais vous pouvez limiter l'impact de cette augmentation, ce que vous ne faites pas. Du reste, ce ne sont pas les mesurettes annoncées – pour certaines inapplicables, d'ailleurs – qui changeront les choses.
Vous refusez le rétablissement de la TIPP flottante que nous ne cessons de vous réclamer. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous refusez la mise en place du chèque transport que vous n'avez pas sérieusement étudié. (Mêmes mouvements.) Vous refusez la taxation des bénéfices des compagnies pétrolières alors qu'elles profitent de cette augmentation sur le dos des consommateurs en répercutant immédiatement les hausses à la pompe alors que l'achat des stocks s'est réalisé à un prix inférieur.
Dois-je vous rappeler que Total a réalisé un bénéfice record de plus de 13 milliards d'euros ? Se borner, monsieur le Premier ministre, à inviter mollement les dirigeants de ce groupe à limiter leurs appétits en matière de profits ne suffit pas, c'est même indécent.
Ma question est simple : allez-vous enfin mettre en place les mesures que nous vous proposons et qui s'imposent pour amortir ce nouveau prélèvement intolérable pour le pouvoir d'achat des Français, notamment pour celui des plus démunis ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et plusieurs bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Monsieur le député Vuilque, je vous trouve bien sévère…
…et bien démagogique ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. –Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Le Président de la République a en effet très clairement indiqué, hier, que la priorité du Gouvernement était de tenir compte de l'augmentation du prix du pétrole mais pas d'une manière démagogique, virtuelle, pas, comme vous le faites, en essayant de tromper les gens. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Quelle est la réalité ? Le cours du pétrole augmente d'une façon structurelle. Ce n'est pas un problème conjoncturel. L'ensemble du monde est touché. D'une part, nous apportons une réponse à long terme : c'est le Grenelle de l'environnement, et nous devons, dans cette perspective, travailler ensemble. D'autre part, nous répondons à la situation par des mesures de court terme, qui, très sincèrement, sont tout à fait à la hauteur de l'enjeu.
Vous souhaitez rétablir la TIPP flottante. Toutefois, quand vous-mêmes l'avez mise en oeuvre, elle s'est révélée illisible et coûteuse : 2,7 milliards d'euros pour un an et demi ! Pour quel résultat, monsieur Vuilque ? Tout simplement pour trois centimes en moins à la pompe pour les usagers. Cela ne veut rien dire !
C'est, pardonnez le jeu de mots, une usine à gaz. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Nous devons donc l'éviter. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
En ce qui concerne le chèque transport, par exemple, il existe déjà.
Tout est fait pour qu'il soit utilisé par les entreprises. Je vous rappelle que, comme les chèques restaurant, il suppose la conclusion d'un accord entre l'entreprise et ses salariés.
Et le Gouvernement exonère de charges sociales les entreprises sur la base du chèque transport qui est donné aux salariés. Il faut que les salariés…
…et les employeurs se mettent d'accord pour le créer et l'utiliser. Le Gouvernement, évidemment, va y inciter.
S'agissant de la fiscalité des groupes pétroliers, d'abord, nous pourrions être fiers d'avoir une entreprise aussi performante que Total.
Dans un certain nombre de pays, on est fier d'avoir des entreprises qui fonctionnent.
Je vous ferai aussi remarquer, car vous ne l'avez pas fait, que les profits de Total se font plutôt ailleurs qu'en France. Et nous ne pouvons pas les taxer dans ce cas-là. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) C'est à Total qu'il appartient d'organiser une redistribution juste de ses profits. C'est ce qui a été fait l'année dernière, avec le financement de la prime à la cuve.
Enfin, en ce qui concerne la TVA et la TIPP, comme l'ont dit le Président de la République et le Premier ministre, le Gouvernement rendra les recettes supplémentaires dues à l'augmentation des prix du pétrole. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Madame la ministre du logement, vous ne l'ignorez pas, la crise du logement est de plus en plus préoccupante. Plus de 3 millions de personnes sont mal logées ; 1 million sont logées par des proches ; 100 000 sont sans domicile fixe. Et les locataires subissent de plein fouet l'explosion des loyers.
En moyenne, les dépenses de logement représentent près d'un quart du budget des ménages. Cette part atteint près de 50 % pour les ménages les plus modestes. Plus de 1,6 million de demandes de logements sociaux répondant aux critères sont insatisfaites. Et le besoin immédiat de logements sociaux est évalué à 800 000. Cette demande ne devrait cesser de croître en raison de la hausse du nombre de ménages dans les prochaines années.
En outre, votre réforme du livret A, sous la pression de la très libérale Commission européenne, ajoute encore à l'inquiétude, avec le détournement de l'épargne populaire qui finance aujourd'hui le logement social à des taux préférentiels.
Le Parlement a voté une loi en 2000, la loi SRU. Elle visait à imposer la construction de 20 % de logements sociaux dans les communes de plus de 3 500 habitants. Depuis, personne n'ignore plus le refus de nombre de maires de villes riches – un exemple parmi d'autres : Neully – d'appliquer la loi. Et ce ne sont pas les dérisoires sanctions financières qui les ont conduits à un plus grand respect de la loi. Ces élus ont simplement considéré que c'était le prix à payer pour ne pas la respecter.
Ce mécanisme de sanction pécuniaire étant un échec, il faut, madame la ministre, faire respecter la loi en usant des prérogatives de la puissance publique. En cas de carence des communes, que ce soit l'État qui, pour le compte de la commune défaillante, aux frais et aux risques de celle-ci, se substitue à elle en confiant à un organisme social la mission impérieuse de construire les logements sur son territoire.
Il faut le faire en ignorant, bien sûr, les fausses excuses du manque de terrains, puisque c'est la raison avancée par ces communes qui, bizarrement, trouvent ces terrains quand il s'agit de construire des logements de standing.
Il est temps de montrer que la loi républicaine s'impose à tous et que le logement social est une priorité.
Madame la ministre, proposerez-vous une telle mesure, seule susceptible de faire respecter la loi par les maires récalcitrants, dans le texte que vous nous soumettrez prochainement ?
La parole est à Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville.
Monsieur le député, vous m'interrogez sur l'application de l'article 55 de la loi SRU. Je vous rappellerai mes deux priorités : tout d'abord, une politique d'incitation et d'encouragement pour les élus qui construisent ; mais également, fermeté et sanction pour ceux qui seraient déficients. (« Neuilly ! » sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Depuis la loi SRU, les communes sont soumises à un prélèvement quand elles ne respectent pas le seuil de 20 % de logements locatifs sociaux.
Vous le savez, monsieur le député, un arrêté de constat de carence peut être pris par le préfet, après échange avec le maire, si l'effort n'est pas suffisant.
Je n'ai pas attendu, monsieur le député, l'application d'une loi à venir pour envoyer aux préfets, le 30 janvier 2008, une circulaire leur demandant d'appliquer avec rigueur, par arrêté préfectoral, la procédure du constat de carence. Les dispositions sont prises. Je tiens à saluer l'engagement des préfets dans cette démarche.
Actuellement, même si je n'ai pas encore les chiffres définitifs, je peux vous dire, sur la base de l'inventaire de logements locatifs sociaux pour l'année 2007 – vous savez en effet que la loi prévoit une évaluation par période triennale –, que 730 communes sont en dessous du seuil de 20 %.
Au niveau national, le montant des prélèvements s'est élevé à 31 millions d'euros.
Pour les communes qui n'ont pas atteint cet objectif de rattrapage sur la période triennale 2006-2007 (« Neuilly ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la gauche démocrate et républicaine), les procédures de constat de carence sont engagées, soit plus du double que pour la précédente période triennale 2002-2004, pendant laquelle 140 arrêtés de constat de carence ont été pris.
Pour les communes où l'effort ne sera pas fait, monsieur le député – et je vous le dis à tous, mesdames et messieurs les parlementaires –, j'ai demandé aux préfets de faire réaliser directement les logements sociaux, en passant une convention avec un organisme.
S'agissant des mesures d'incitation, n'oubliez pas celles qui ont été prises pour la construction de logements sociaux. Cela représente plus de 100 000 PLUS et PLAI, ainsi que 42 000 PLS.
Vous le voyez, monsieur le député, ma détermination est totale, et il n'y aura pas d'exception. (« Et Neuilly ? » sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe Nouveau Centre.)
En ce qui concerne la ville de Neuilly, je tiens à vous dire que les efforts ont été importants. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.) .)
La parole est à M. Olivier Dassault, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Moderniser notre économie, madame la ministre, c'est un peu, n'ayons pas peur des mots, partir à la reconquête du monde. Vous l'avez bien compris, puisque, pour la toute première fois, vous avez souhaité intégrer la préoccupation de l'attractivité aux propositions dont nous allons débattre à l'occasion de l'examen du projet de loi de modernisation de l'économie.
L'attractivité d'un pays, c'est sa capacité à séduire, à attirer à lui les talents, les énergies et les investisseurs. C'est aussi, bien entendu, savoir retenir sur son territoire ses propres atouts, afin que celles et ceux qui veulent réussir ne tentent pas leur chance ailleurs.
Pour stimuler les implantations d'entreprises et les investissements chez nous plutôt que chez nos voisins, pour être les pionniers de la radio en fréquence numérique, pour répondre aux attentes des entrepreneurs et de nos concitoyens afin que, partout, ils puissent bénéficier de la meilleure couverture du téléphone mobile, ce qui n'est pas encore le cas aujourd'hui, pouvons-nous compter sur la loi de modernisation de l'économie que vous nous présentez ?
Pouvez-vous nous montrer, madame la ministre, en précisant vos mesures, que nous avons raison de faire avec vous le pari de l'innovation et de la modernité pour permettre à la France de retrouver la place qu'elle n'aurait jamais dû perdre en Europe, c'est-à-dire la première ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement. (« Chouchou ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
M. Patrick Roy. Xavier Bertrand va être jaloux !
Monsieur le député, je sais à quel point vous êtes attaché, en tant que président du groupe d'études sur l'attractivité et le rayonnement de la France à l'Assemblée nationale, à l'attractivité économique de notre pays.
Trois challenges doivent être relevés :…
…l'attractivité des capitaux, celle des savoirs et celle des talents.
S'agissant de l'attractivité des capitaux, notre pays se situe aujourd'hui au troisième rang mondial en ce qui concerne les investissements directs étrangers, avec 123 milliards d'euros en 2007, ce qui représente 20 000 entreprises, soit 2 millions de collaborateurs installés sur notre territoire. Un chapitre entier du projet de loi de modernisation de l'économie vise à moderniser la place financière de Paris, à la suite des travaux du Haut comité de place créé à l'initiative de Christine Lagarde, afin de faire davantage rayonner cette place au niveau international.
S'agissant de l'objectif d'attirer les connaissances, vous avez voté un dispositif de crédit d'impôt-recherche qui est aujourd'hui le plus compétitif des pays de l'OCDE. Nous comptons aller plus loin et donner des signes dans le sens que vous indiquez. Dans le projet de loi de modernisation de l'économie figurent des dispositions visant à renforcer l'attractivité en matière de haut débit, pour permettre à notre pays de prendre ce virage de l'économie du numérique.
Enfin, l'attractivité implique d'être capable de faire venir des talents. Le projet de loi prévoit de faciliter et de favoriser la venue de cadres étrangers de haut niveau, dont on sait que la présence est un facteur déterminant pour l'attractivité des entreprises.
Vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement est totalement mobilisé, comme vous l'êtes, pour mener la bataille de l'attractivité, que nous sommes déterminés à gagner avec vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Étienne Pinte, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre des affaires étrangères, j'associe à ma question l'ensemble des membres du groupe d'amitié France-Liban.
Nous avons eu la joie, avec mes collègues Catherine Génisson et Élie Aboud, de vous accompagner à Beyrouth, dimanche dernier, pour assister à l'élection tant attendue du Président de la République libanaise. Ce fut un grand moment, et c'est une étape importante dans le processus de paix et de stabilisation politique au Liban.
Bien entendu, cette élection ne résout malheureusement pas tous les problèmes. Les affrontements violents qui ont eu lieu à Beyrouth la semaine dernière sont très inquiétants.
Cette élection aura aussi des répercussions sur la situation politique au Proche-Orient comme au Moyen-Orient.
Monsieur le ministre, pouvez-vous éclairer la représentation nationale sur les perspectives que l'on peut attendre de cette embellie, et nous préciser quelles seront les actions de la France pour accompagner nos amis libanais et contribuer à la paix dans cette région du monde ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes.
Monsieur le député, nous nous sommes réjouis de l'accord de Doha. Nous nous sommes réjouis de l'élection du Président libanais, qui a eu lieu en votre présence. Cela fait un an et demi que nous attendions cela. Dix-neuf séances du Parlement n'avaient rien donné, et nous avons eu la bonne surprise d'assister à cette élection dimanche dernier.
Quelles perspectives ? Tout d'abord, comme vous le savez sans doute, le député Fouad Siniora a été réélu à la tête du gouvernement libanais. C'est de bon augure, car il travaillait fort bien. Je pense que l'unanimité s'est faite autour de lui.
Il reste, bien sûr, que le système électoral n'a pas été précisé à Doha, comme il devait l'être. C'est là une tâche qui attend le Président Sleimane et le Premier ministre.
Et puis, il y a les élections, qui se tiendront en 2009. Je crois que la campagne sera rude car, sur le fond, peu de choses ont été réglées.
L'initiative française, qui a duré pendant un an, a abouti à trois points, qui ont été des points de désaccord mais qui furent, à un moment donné – durant 24 heures seulement –, des points d'accord entre l'opposition et la majorité. Repris par la Ligue arabe, ils ont été proposés à Doha, et ce fut le « miracle » libanais. Mais vous avez bien fait de rappeler qu'avant ce « miracle », il y a eu dans les rues de Beyrouth et de Tripoli 60 morts et 200 blessés, ce qui, hélas, n'est pas un procédé démocratique pour réaliser l'entente entre la majorité et l'opposition.
Mais vous avez vu comme moi que, du Hezbollah aux forces libanaises, tout le monde approuvait l'élection de ce Président. Il faudra continuer à travailler. La France se réjouit d'avoir participé à cet accord. Il faudra, avec les pays de la région, dans un dialogue sans concession, y compris, je le crois, avec la Syrie et l'Iran, aider nos amis libanais à surmonter ce qui a été une épreuve non seulement physique mais aussi économique. Tous les Libanais ont perdu 20 % de pouvoir d'achat,…
…les banques ne fonctionnaient plus, les entreprises étaient fermées.
Nous avons, avec nos amis libanais, abordé une nouvelle étape. Il faut s'en réjouir. D'autant que, dans la région d'autres étapes ont été franchies : entre la Syrie et Israël, par l'intermédiaire de la Turquie, et entre le Hamas et Israël, par l'intermédiaire de l'Égypte. Il souffle donc dans la région un vent d'espoir qui, je l'espère, ne retombera pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, subrepticement, à la faveur du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptations du droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations – c'est bien là le comble ! –, votre gouvernement vient de faire adopter, certes dans le cadre d'un vote global comprenant nombre de dispositions, une mesure qui tend à remettre en cause le principe de mixité à l'école, nous ramenant ainsi trente ans en arrière.
Alors qu'il n'y avait en la matière aucune obligation de la Commission européenne, pourquoi avez-vous choisi de vous attaquer en catimini au principe fondateur de mixité scolaire ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Par la même, vous portez un coup à l'école laïque et républicaine, dont la mission ne saurait se résumer à transmettre des savoir-faire disciplinaires, aussi importants soient-ils, mais se doit aussi d'être le creuset du savoir- être à l'autre et à la société.
Les élèves, qu'ils soient filles ou garçons, ensemble, y apprennent certes à lire, à écrire et à compter, mais aussi et surtout à s'écouter, à se respecter, à se reconnaître dans une communauté de destin s'appuyant sur les valeurs républicaines, à égalité de droits et de devoirs.
J'espère, que, au delà de nos diverses obédiences politiques, nous sommes nombreux dans cet hémicycle à penser, contrairement aux assertions du Président de la République dans son discours de Latran, que les enseignants ont bien un rôle fondamental dans la transmission de ces valeurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Aussi, au moment où, le 6 juin prochain, les assises du Centre national d'information du droit des femmes et des familles se réuniront autour du thème « Agir contre les discriminations sexistes et oeuvrer pour l'égalité : un défi permanent », pouvez-vous, monsieur le Premier ministre, nous assurer que cette disposition rétrograde et perverse ne sera pas mise en oeuvre dans l'éducation nationale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Madame Pérol-Dumont, je voudrais vous rassurer. La directive telle qu'elle a été adoptée, qui exclut l'éducation du champ anti-discrimination, ne créée pas une situation nouvelle. Elle maintient le droit antérieur, le statu quo.
Vous ne pouvez, bien évidemment, pas imaginer que le Gouvernement et le ministre de l'éducation nationale puissent encourager quelque forme de discrimination que ce soit.
Cependant, il se trouve que le maintien de cette directive peut nous être utile. Les professeurs et les élèves eux-mêmes souhaitent, pour un certain nombre d'enseignements, que des séparations puissent exister. Je pense en particulier à la piscine, dans certains établissements. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Vous protestez, monsieur Lang. Mais puis-je vous rappeler que vous aviez instauré – à mon avis, à juste titre – l'étude séparée de la sexualité à la demande des élèves dans les classes de collège. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Je n'ai pas l'intention, pour une fois, de modifier ce que vous avez mis en place.
Il n'y a pas là matière à se scandaliser, même si, bien entendu, il faut rester très vigilant. Il ne faut pas que ces dispositifs rarissimes, demandés par les enseignants et parfois par les adolescents eux-mêmes pour des situations exceptionnelles, puissent prendre un caractère général. Cela irait à l'encontre de ce que nous pensons.
Nous ne souhaitons pas que la mixité soit remise en cause. Nous ne souhaitons pas que l'on puisse imaginer, de quelque manière que ce soit, des enseignements séparés. Mais nous respecterons le statu quo aujourd'hui établi. Celui-ci, lorsque l'on regarde ce qui s'est passé, ces dernières années, n'a pas été de nature à troubler la communauté éducative. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Philippe Gosselin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Madame la ministre de la santé, chaque année, en France, un million de malades ont recours aux produits sanguins pour des opérations chirurgicales, des accouchements, des cancers notamment. Or, le don du sang est, pour des raisons de sécurité et de protection, strictement encadré. Une directive européenne vient d'introduire une nouvelle contre-indication, qui conduit à écarter du don un certain nombre de personnes – pour des anémies, par exemple.
Or, du fait de l'allongement de l'espérance de vie et du développement de nouvelles techniques thérapeutiques de plus en plus consommatrices en produits sanguins, la demande ne cesse d'augmenter et, dans le même temps, le nombre de donneurs diminue. Aujourd'hui, environ 4 % de Français donnent leur sang, soit seulement 1,5 million. Les périodes de tension sont de plus en plus vives, même si elles sont différentes d'un département à un autre.
Dans ces conditions, plusieurs propositions ont été faites : le relèvement de l'âge limite du don, la mobilisation des étudiants, des lycéens, une invitation au don par texto à l'initiative de l'Établissement français du sang.
Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre ?
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Monsieur Gosselin, l'année 2007 a été marquée par l'autosuffisance des dons du sang.
Nous savons que, en 2008, la demande de sang augmentera de 5 %, et vous en avez parfaitement indiqué les raisons : l'augmentation de l'espérance de vie ; le fait que, dans certains protocoles thérapeutiques – la chimiothérapie des cancers et des leucémies –, on utilise des produits sanguins ; enfin, le retour de la confiance chez les professionnels dans la qualité des produits sanguins.
Vous l'avez signalé : la directive Hémoglobine va interdire l'accès au don du sang aux personnes anémiées, ce qui devrait diminuer de 2 à 8 % le nombre de nos donneurs habituels.
Pour résoudre ces problèmes, nous assistons à la mobilisation de l'Association française des donneurs de sang, que je tiens à saluer, et de l'Établissement français du sang, qui ont tous les deux entamé une stratégie de conquête.
D'abord, il faut fidéliser les donneurs. Les donneurs habituels donnent en moyenne leur sang 1,6 fois par an. Nous voudrions parvenir à deux dons annuels.
Nous voulons aussi faire en sorte qu'il y ait plus de donneurs. Lorsque l'on interroge les Français, 90 % se disent attirés pas le don. En fait, seulement 4 % de nos concitoyens donnent leur sang.
Nous allons mener une stratégie de communication avec l'Établissement français du sang. Nous allons multiplier les lieux où l'on pourra donner son sang. La collecte mobile représente 90 % des dons du sang. Nous allons créer des maisons du don et installer des centres de collecte dans les centres-villes.
Je prépare un arrêté qui élargira les possibilités du don et fera passer l'âge limite de don du sang de soixante-cinq à soixante-neuf ans.
Mesdames, messieurs les députés, mesdames, messieurs les ministres, à l'Assemblée nationale et dans chacun de vos ministères, des journées de collecte du sang sont organisées. Je vous engage à donner votre sang. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je vous remercie, madame la ministre, de l'avoir rappelé. À l'Assemblée, des collectes du sang sont régulièrement organisées. J'invite nos collègues et tous ceux qui travaillent avec nous à penser, ce jour-là, que leur geste peut sauver des vies. (Applaudissements sur de nombreux bancs.)
La parole est à M. Jean-Michel Fourgous, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le secrétaire d'État chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique, la révolution numérique, c'est un nouvel avenir pour la France. La révolution numérique, c'est la maîtrise des nouvelles technologies de l'information, c'est l'accès de tous au haut débit. C'est avant tout un accélérateur des échanges de connaissances, de savoirs, de solutions.
Vous le savez : le numérique est un nouvel enjeu, à la fois économique et sociétal.
Économique parce que le développement de l'informatique et d'Internet constitue un nouvel outil de croissance incontournable et une source d'emplois pérennes pour notre économie. Le secteur représente déjà aujourd'hui 6 % de notre PIB, avec un potentiel de croissance extraordinaire.
Sociétal parce que les nouvelles technologies deviennent le premier acteur de changement de la société française.
Les technologies numériques représentent déjà un quart de la croissance mondiale. Toutefois l'investissement européen dans ce domaine est deux fois moindre que celui des Etats-Unis. La France, en dépit de son potentiel, se situe encore au-dessous de la moyenne européenne.
Pourtant, « demain, ne pas maîtriser Internet, ce serait comme être analphabète il y a vingt ans ». La France ne peut pas se permettre de prendre du retard dans le train de la révolution numérique.
La réussite de la France ne passe pas par des déclarations incantatoires contre le progrès technique et scientifique, contre la mondialisation, contre l'entreprise, contre l'économie. Cette réussite de la France ne passe pas non plus par un affrontement permanent de la gauche contre la droite. Elle passe par notre capacité à rassembler les compétences et à tirer profit de la révolution numérique.
La réussite est avant tout un état d'esprit et une culture. Pour gagner, c'est comme au football : il faut jouer en attaque et non pas en défense.
Monsieur le secrétaire d'État, à la veille du lancement des assises du numérique, pouvez-vous nous indiquer quels sont les grands chantiers que le Gouvernement entend mettre en place pour dynamiser l'offre et la demande du numérique en France, pour faire gagner notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Éric Besson, secrétaire d'État chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir écouter la réponse à cette question importante.
Vous avez la parole, monsieur le secrétaire d'État.
Les assises du numérique, ce sera un mois de concertation, un mois de rencontres et de débats qui permettront de préparer le plan de développement numérique demandé par le Premier ministre. Les parlementaires de la majorité et de l'opposition y seront associés. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Quant aux principaux acteurs du Web et aux internautes, ils pourront nous faire part de leurs propositions et de leurs suggestions grâce à un site dédié :www.assisesdunumérique. fr.
Vous venez de rappeler nos principaux objectifs. Nous voulons créer un véritable droit à l'accès Internet haut débit, fixe et mobile, sur tout le territoire. Je sais que, sur tous les bancs, vous y êtes très attachés.
Nous voulons réussir le passage à la télévision numérique, qui signifie pour tous les Français une meilleure qualité d'image et dix-huit chaînes gratuites. Nous voulons réduire la fracture numérique…
..et faire en sorte qu'aucun enfant, quel que soit son milieu, ne soit privé de l'accès à un ordinateur et à Internet.
Nous voulons favoriser l'accès légal à la musique, aux films, aux jeux vidéos. Nous voulons qu'Internet soit mieux utilisé dans le secteur de la santé, de l'éducation, du commerce en ligne ou des relations avec l'administration.
Le Premier ministre, François Fillon, a arrêté hier, en présence de tous les ministres concernés, le contenu et la méthode de ces assises. C'est pourquoi, sur tous ces sujets, le Gouvernement proposera demain vingt-sept pistes de travail, que nous transformerons, lors des assises, en propositions, pour faire de la France une grande nation numérique.
Prenons le meilleur d'Internet. Comme vous l'avez fort bien dit, c'est un enjeu économique, industriel, social et culturel pour notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à Mme Dominique Orliac, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de la santé et concerne les dérives mercantiles qui menacent notre système de santé, qui est de plus en plus la cible d'investisseurs financiers et de lobbies marchands.
Madame la ministre, vous savez qu'aujourd'hui les pharmaciens et les étudiants en pharmacie sont mobilisés dans toute la France. Ils sont inquiets pour l'avenir de leur profession, mais, plus largement, pour la qualité des soins et la santé de tous les Français.
Vous avez décidé d'autoriser très prochainement la vente, dans les pharmacies de plus de 200 médicaments d'usage courant délivrés sans ordonnance et non remboursés. Cependant, la délivrance restera encadrée par le pharmacien, qui assumera pleinement sa mission de conseil et d'expertise. Le pharmacien bénéficie d'une compétence acquise après un concours national, six années d'études et l'obtention d'un doctorat. L'exercice de cette compétence nécessite éthique et sens des responsabilités, qui représentent autant de protections face à une dérive mercantile.
Or, depuis plusieurs mois, nous assistons à l'offensive de la grande distribution, plus intéressée par l'argent des Français que par leur santé, qui entend désormais prolonger cette logique de libéralisation pour disposer ses médicaments dans les rayons des grandes surfaces.
Les prix ne baisseraient pas, bien au contraire ! Aujourd'hui, le même anti-inflammatoire vendu dans un supermarché italien coûte deux fois plus cher que dans une officine française.
Il convient donc de rappeler cette évidence : le médicament n'est pas un produit marchand comme les autres. Il en va de la santé des Français !
Mais plus grave encore est l'offensive des investisseurs financiers sur les professionnels et les services de santé. Guidés par le seul objectif de la rentabilité financière, ces fonds de pension étrangers cherchent à prendre le contrôle de la pharmacie, de son maillage performant de 23 000 officines et, plus largement, du secteur de la santé.
Après les franchises médicales et les graves atteintes au pouvoir d'achat des Français, le Gouvernement entend-t-il poursuivre le démantèlement de notre système de santé, l'un des meilleurs du monde ?
Madame la ministre, cherchez-vous à remettre en cause cette mission de service public en libéralisant la santé, au profit d'investisseurs financiers ?
Enfin, la présidence française de l'Union européenne permettra-t-elle la rédaction d'une directive qui exclurait la santé des services marchands ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Madame la députée, il y a quelques années, j'aurais apprécié que les membres du groupe socialiste soient à mes côtés pour défendre la qualité de l'exercice pharmaceutique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous n'aviez alors pas de mots assez violents pour dénoncer le lobby des pharmaciens ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Mesdames et messieurs les députés, je suis à la manoeuvre (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine ) pour défendre la qualité de l'exercice pharmaceutique dans notre pays. En effet, le médicament n'est pas un produit comme les autres, et je souhaite que l'exercice pharmaceutique soit exercé par des pharmaciens. C'est la raison pour laquelle je me suis prononcée clairement, ainsi que tout le Gouvernement, contre la vente des médicaments en grandes surfaces. Ce n'est pas parce qu'un docteur en pharmacie est choisi comme chef de rayon de produits d'hygiène qu'il remplit les garanties pour exercer la profession de pharmacien.
Le monopole pharmaceutique doit demeurer celui des docteur en pharmacie, propriétaires de leur officine, inscrits à l'ordre, respectant un code de déontologie, soumis à une formation médicale continue et exerçant suivant des règles bien précises, notamment en étant attentifs à la qualité des personnes qu'ils sont en droit d'embaucher. C'est cette qualité qui correspond aux besoins de santé. Il va de soi que je défendrai cette position devant la Commission européenne, comme je l'ai toujours fait, aussi bien pour la pharmacie d'officine que pour la biologie et pour l'ensemble de notre système de santé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. Yanick Paternotte, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse également à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Différentes études sur la consommation de tabac chez les jeunes ont récemment été publiées. Parfois contradictoires, toutes s'accordent néanmoins à mettre en cause les cigarettes sucrées qui incitent de plus en plus les jeunes à fumer.
Certes, les dispositifs anti-tabac mis en place par les pouvoirs publics ont porté leurs fruits ces dernières années. Mais beaucoup reste à faire, notamment en direction des jeunes et, du reste, la prochaine journée mondiale sans tabac, qui se déroulera le 31 mai prochain, s'intitulera « Jeunesse sans tabac ».
Très attaché à la lutte contre le tabagisme chez les jeunes, j'ai eu l'occasion, comme vous le savez, de déposer en novembre dernier avec mes collègues Gabrielle Louis-Carabin, Patrice Calméjane, Éric Ciotti et Alain Moyne-Bressand deux amendements au projet de loi de finances rectificative pour 2007, amendements qui visaient, d'une part, à taxer le papier à rouler à même hauteur que le tabac et, d'autre part, à rationaliser l'offre de tabac à rouler.
Puis j'ai déposé, en mars 2008, une proposition de loi, cosignée par plus de quarante de mes collègues, visant à « préserver les mineurs du tabagisme ». Cette proposition de loi est une réponse concrète au tabagisme chez les jeunes, véritable problème de santé publique.
Ce texte vise, entre autres, à interdire la vente des produits du tabac à des mineurs ; à interdire les cigarettes « bonbons » ; à rationaliser l'offre du tabac à rouler ; et enfin, à taxer le papier à rouler comme un produit du tabac.
Sur ces quatre points, j'aimerais insister sur deux d'entre eux qui me semblent particulièrement importants.
Le premier concerne les cigarettes « bonbons ». Nos mineurs sont, en effet, la cible d'un seul et unique cigarettier hollandais, non implanté en France – donc difficilement contrôlable – qui commercialise deux marques qui me paraissent devoir être proscrites !
Aussi, madame la ministre, je vous demande purement et simplement d'interdire ces deux marques car elles n'ont qu'un seul but : cibler les jeunes !
En second lieu, je souhaite souligner le pouvoir attractif du tabac à rouler dont la vente est en hausse, contrairement à celle du tabac. (« La question ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Je propose que le papier à rouler, qui sert d'ailleurs à fumer bien d'autres choses que le tabac, soit taxé et que l'on réduise la différence de prix entre le tabac à rouler et les cigarettes !
Madame la ministre, j'aimerais connaître vos projets en la matière. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Moi, je me sers de papier à rouler français, monsieur ! Vous, vous fumez le cigare !
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Monsieur le député, des études fragmentaires et parcellaires, dont une strictement parisienne, ont pu laisser croire que le tabagisme des jeunes était en hausse dans notre pays. Il n'en est rien ! Les enquêtes épidémiologiques globales montrent qu'entre 1999 et 2007, le tabagisme a reculé de 33 % à 16 % chez les jeunes garçons et de 30 % à 18 % chez les filles. Nous en connaissons les raisons, vous les avez, du reste, rappelées, monsieur le député. Ce recul est notamment dû à l'augmentation de la fiscalité sur le tabac, aux messages sanitaires sur les paquets de cigarettes, à l'interdiction de vente aux mineurs de moins de seize ans, à différentes campagnes d'information, ou encore au soutien à des associations qui luttent contre le tabagisme.
Néanmoins des points d'inquiétude demeurent, il ne faut pas se voiler la face. Le nombre de gros fumeurs ne baisse pas chez les jeunes, et l'on note une augmentation de la consommation du tabac par narguilé : un jeune de seize ans sur trois est concerné. Or il y a autant de monoxyde de carbone dans une bouffée de narguilé que dans une cigarette entière ! (Brouhaha.)
Je vous invite, mes chers collègues, à écouter la réponse de Mme la ministre de la santé. Monsieur Gremetz, vous qui avez l'habitude de vous manifester bruyamment, écoutez la réponse de Mme la ministre : pensez à votre santé ! (Sourires.)
Par ailleurs, la législation interdisant la vente du tabac aux mineurs de moins de seize ans n'est, en fait, pas appliquée.
Je tiens à vous remercier, monsieur le député, vous et vos collègues, qui avez approfondi cette question. Vous nous avez indiqué de nombreuses pistes à suivre. Nous sommes, du reste, en train de les étudier. Dès le 31 mai prochain, à l'occasion de la journée mondiale contre le tabac, j'aurai l'occasion de présenter un certain nombre de mesures durcissant la législation, qui iront tout à fait dans le sens que vous souhaitez. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. Jean-Paul Dupré, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question, à laquelle j'associe ma collègue Sylvie Andrieu, s'adresse à M. le Premier ministre.
Favoriser l'insertion est l'un des éléments essentiels de la lutte contre la précarité et l'exclusion tant pour les jeunes que pour l'ensemble de nos concitoyens. Il y va de la solidarité nationale ! Nous pouvons tous être d'accord sur ce point.
Aussi, pourquoi remettre en cause ce qui fonctionne bien autour de structures comme les missions locales d'insertion – MLI – ou l'association française pour la formation professionnelle des adultes – l'AFPA ? La lutte contre la précarité dans le domaine de l'emploi serait-elle en passe de devenir un marché sur lequel des opérateurs privés viendraient faire leurs choux gras ? Où voulez-vous en venir ?
La question se pose au regard des signes donnés en ce domaine par le Gouvernement, comme l'appel d'offre qui a immédiatement suivi, fin mars, l'annonce de la mise en oeuvre d'un contrat d'autonomie dans le cadre du plan Espoir Banlieues. L'appel d'offre, lancé à la hussarde, arbitrairement, sans concertation avec le Conseil national des missions locales, a suscité l'inquiétude et l'incompréhension des élus locaux et des responsables des MLI.
Voilà, en effet, que les missions locales d'insertion, investies par l'État lui-même d'une mission de service public par la loi du 18 janvier 2005, sont aujourd'hui mises en concurrence avec des opérateurs privés alors que, sur le terrain, tant les préfets que les directions régionales du travail et de l'emploi – DRTE – vantent leurs bons résultats.
Et qu'en sera-t-il de l'avenir de l'AFPA qui, faut-il le rappeler, forme 160 000 personnes par an et dont le Gouvernement s'apprête, là encore, à transférer une partie de l'activité vers les services marchands, alors que plus de 70 % des personnes qui sortent de l'AFPA trouvent un travail ?
Le traitement de la précarité et de l'insertion, relevant de la solidarité nationale, doit être confié à des structures oeuvrant hors du périmètre marchand.
Allez-vous, monsieur le Premier ministre, revenir à ces fondamentaux ? Renoncerez-vous à supprimer une grande partie des contrats aidés et à réduire les aides à l'emploi ?
C'est cela qu'attendent nos concitoyens, qui désapprouvent aujourd'hui à 67 % votre politique et celle du Président de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville.
Je vous remercie, monsieur le député, d'avoir posé cette question centrale qui engage l'ensemble de la nation et du Gouvernement, qui a fait du plein emploi son objectif prioritaire.
Le plein emploi qui, il y a quelques années, était un objectif impossible à atteindre est aujourd'hui à portée de main. Je préfère donc parler d'emploi plutôt que d'insertion. Malgré les résultats très satisfaisants que l'on observe dans ce domaine au niveau national, la situation reste très préoccupante dans nos quartiers prioritaires, notamment pour les jeunes. Nous sommes aujourd'hui dans une situation nouvelle : d'un côté, des jeunes qui peinent à trouver un emploi : de l'autre, des entreprises qui n'arrivent pas à trouver de main d'oeuvre. Cette situation est socialement inacceptable et politiquement dangereuse.
C'est pourquoi le Gouvernement a mis en place un dispositif novateur qui mobilise à la fois les secteurs public et privé pour connecter la jeunesse avec les entreprises : c'est le dispositif que j'ai appelé « contrat d'autonomie ». Il concerne 45 000 jeunes. L'appel d'offre a été lancé le 28 mars dernier ; plus de 140 prestataires ont postulé dans tous les départements. Avant même de signer le contrat, on peut déjà dire que ce concept est un succès. Tous les opérateurs, publics et privés, s'engagent : des entreprises bien sûr, mais aussi des associations, des chambres consulaires, des missions locales, des maisons de l'emploi, des centres de formation, entre autres.
Ce partenariat public-privé m'encourage : il ouvre une nouvelle dynamique au service du plein emploi.
Les opérateurs désignés seront payés au résultat.
Dès le mois de juin, et durant tout l'été, j'entamerai un tour de France pour vérifier la mise en oeuvre et le bon déroulement de ce dispositif.
Soyez assuré, monsieur le député, de la détermination de l'ensemble du Gouvernement pour agir sur tous les leviers,..
… pour traduire cette ambition en acte en faveur d'un emploi durable. Je reste évidemment à la disposition de l'ensemble des élus pour les associer à cette dynamique nouvelle. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Politique d'insertion des jeunes
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze.)
Le projet de loi constitutionnelle qui nous est soumis entend revaloriser le rôle du Parlement. Une telle revalorisation, que nous sommes nombreux à souhaiter, passe, à mon sens, par la reconnaissance de la responsabilité des députés et des sénateurs, par la reconnaissance du fait qu'ils sont des adultes responsables. Or l'article 40 de la Constitution de 1958 encadre de manière extrêmement stricte le droit d'amendement des parlementaires, leur interdisant de faire toute proposition ayant pour conséquence d'aggraver les charges publiques.
Avec Jean Artuis, président de la commission des finances du Sénat, nous avons publié une tribune libre dans Le Monde proposant la suppression de l'article 40. Nous n'avons pas, je crois, le profil de parlementaires irresponsables, nous sommes même chargés d'apprécier la recevabilité financière des amendements déposés par nos collègues. Nous avons donc le recul nécessaire pour apprécier les conséquences – ou non-conséquences – de cet article.
Les constituants de 1958 ont voulu encadrer le droit d'amendement en responsabilisant les parlementaires en matière budgétaire. Pourtant, malgré cette disposition, les dépenses publiques ont explosé et la dette publique atteint aujourd'hui plus de 1 200 milliards. Cette dégradation des comptes publics n'a donc pas pour origine les propositions des parlementaires, même s'il ont pu voter des textes y contribuant.
L'article 40 n'a donc pas eu l'efficacité recherchée. Je dirai même plus : il a des effets profondément pervers. Il est ainsi loisible à un parlementaire de proposer par amendement une diminution de plusieurs milliards d'euros du produit d'un impôt, quel qu'il soit, s'il compense, pour la forme, cette initiative par une taxe additionnelle, par exemple sur les tabacs. En revanche, il lui est interdit de soumettre à discussion la possibilité, pour une collectivité territoriale, de prendre une initiative de quelques centaines de milliers d'euros pour investir et créer de l'emploi.
Non seulement l'article 40 est inefficace, mais, dans le même temps, il a des effets pervers et il peut être contourné de bien des manières, qu'il s'agisse de créer de la dépense fiscale...
..ou de proposer une diminution des recettes ou un prélèvement sur celles-ci.
Pourtant, le Gouvernement dispose de nombreux moyens de contrecarrer l'initiative d'un député ou d'un sénateur, qui lui déplairait ou qui ne rentrerait pas dans la ligne budgétaire : seconde délibération, vote bloqué, troisième alinéa de l'article 49 – qui continue d'exister.
Pour finir, je soulignerai que, pendant très longtemps, le Sénat n'a pas appliqué l'article 40. Sa commission des finances considérait qu'elle pouvait s'en exonérer,...
..avant que le Conseil constitutionnel ne la rappelle à l'ordre. Mais pendant tout le temps où cet article n'y a pas été appliqué, aucune catastrophe n'a eu lieu.
Pour toutes ces raisons, nous estimons que le droit d'amendement doit désormais être exercé dans toute sa plénitude par l'ensemble des parlementaires, ce qui implique la suppression de l'article 40. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Madame Billard, peut-on considérer votre amendement n° 343 comme défendu, après l'admirable intervention du président de la commission des finances ?
Monsieur le président, M. Migaud a peut-être fait une intervention admirable, mais j'appartiens à une autre force politique que lui et je tiens à expliquer pourquoi les députés Verts proposent eux aussi la suppression de l'article 40.
Certes, nous pouvons toujours rester dans l'hypocrisie et dire qu'il faut maintenir l'article 40 pour empêcher députés et sénateurs de provoquer une explosion des dépenses publiques. Mais force est de constater qu'il n'a empêché ni l'explosion des dépenses publiques ni l'aggravation de la dette publique. Depuis 2002, alors même qu'il est appliqué de façon stricte, de nouvelles exonérations fiscales non compensées ont été créées, elles ont même connu une véritable floraison depuis l'été 2007.
Cessons plutôt cette hypocrisie. Les ministres ont beau jeu de répondre à l'opposition qu'elle ne propose jamais rien. Mais pour pouvoir construire un contre-projet crédible, encore faut-il expliquer quelles dépenses nous proposons de supprimer et quelles autres nous voulons créer. Toutes choses que l'article 40 nous empêche de faire.
Enfin, ne faisons plus semblant de compenser une dépense supplémentaire par des taxes sur le tabac ou sur les jeux, dont tout le monde sait aujourd'hui qu'elles sont obsolètes.
Tout cela aboutit à un déséquilibre entre les droits de la majorité et ceux de l'opposition. Nos collègues de la majorité peuvent proposer en commission des amendements pour lesquels le Gouvernement lèvera le gage en séance publique, alors que ce n'est pas possible pour ceux de l'opposition.
Le Gouvernement doit défendre en séance publique ses propositions face à l'opposition, sans refus a priori, afin que la discussion se fasse projet contre projet.
Monsieur Sandrier, deux amendements identiques à votre amendement n° 396 ont déjà été défendus. Voulez-vous le soutenir ?
..et le débat a surtout été animé du côté de la majorité. (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Présentez donc votre amendement avec des arguments nouveaux, je vous en prie.
Je voulais simplement dire, monsieur le président, que nous avions fait gagner du temps, ce qui ne veut pas dire que d'autres en ont fait perdre.
La suppression de l'article 40 est fondamentale. Les communistes ont toujours été fermement opposés à cet article car il restreint considérablement le droit d'amendement et, plus largement, le rôle du Parlement. C'est avec plaisir que nous avons pu lire dans les pages « Débats » d'un quotidien du soir que les présidents des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat nous rejoignaient désormais sur cette position. C'est une nouveauté, et nous la saluons. Ils soulignaient qu'on ne pouvait pas « sans hypocrisie parler de revalorisation du rôle du Parlement tout en conservant intact l'article 40 ».
De fait, l'article 40 rend saillants les déséquilibres des pouvoirs respectifs du Gouvernement et du Parlement dans la procédure législative. Il témoigne également d'un mépris ahurissant pour le sens des responsabilités des parlementaires. Il a aussi pour effet de renforcer le poids exorbitant de Bercy sur l'ensemble de nos institutions, y compris sur le Gouvernement dans son ensemble.
Ajoutons que l'article 40 aboutit à une aberration de taille : autant un parlementaire peut en toute liberté proposer un amendement diminuant de plusieurs millions, sinon de plusieurs milliards d'euros, le montant des recettes publiques – ce qui participe de la définition d'une politique économique –, autant il ne peut agir sur ce levier en sens inverse.
Pourquoi un député ne pourrait-il pas proposer de gager une dépense sur la suppression du bouclier fiscal par exemple...
..estimant que cette dernière mesure n'aurait pas fait la preuve de son utilité économique, ou encore la compensation d'exonérations de cotisations sociales que la Cour des comptes ne juge guère utile à l'emploi ?
Il faut supprimer l'article 40 au nom du respect du Parlement et des parlementaires, car il les infantilise. Les députés doivent pouvoir exercer pleinement leurs responsabilités de représentants du peuple. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Sur le vote des amendements identiques nos 23 , 343 et 396 , je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, président et rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
La commission émet un avis défavorable. Il y a une relative contradiction entre ces amendements et les dispositions adoptées la nuit dernière relatives aux lois de programmation sur les finances publiques.
La parole est à M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.
Le Gouvernement ne peut qu'être défavorable à ces amendements.
Monsieur Migaud, on ne peut pas dire que l'article 40 n'est pas appliqué au Sénat. Il se trouve que, dans une vie antérieure, j'ai été sénateur et il m'est arrivé d'opposer en séance l'article 40, au nom de la commission des finances, aux amendements que j'avais moi-même déposés.
Non, ce n'est pas du masochisme, c'est le respect de la règle !
Aujourd'hui, alors que l'on cherche plus que jamais à rééquilibrer les comptes publics,...
..les dispositions de l'article 40 ont encore toute leur utilité. Elles servent de garde-fou contre les tentations de réduction des recettes ou d'augmentation des dépenses. Aussi le Gouvernement est-il attaché au maintien de cet article.
Je précise d'ailleurs, et M. Migaud le sait, que le Parlement dispose de pouvoirs budgétaires très importants, la LOLF ayant étendu le droit d'amendement des parlementaires lors de l'examen du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Dans ces conditions, le Gouvernement émet un avis défavorable à ces amendements.
J'ai écouté avec attention les plaidoyers en faveur de la suppression de l'article 40, et en particulier celui du président de la commission des finances. Si je partage en partie son diagnostic, je n'en titre absolument pas les mêmes conclusions.
Didier Migaud considère que l'article 40 n'a pas empêché la dégradation de nos finances publiques – nous en sommes tous conscients – et qu'il ne permet pas d'éviter des contournements par le biais des recettes puisque, comme vous le savez, il est très facile de diminuer les impôts, de créer une dépense fiscale, tout en gageant par une augmentation totalement fictive des recettes, par exemple au titre des droits sur le tabac, ou d'agir par le biais des prélèvements sur recettes. M. Migaud en tire la conclusion qu'il faut supprimer l'article 40. Mais en le supprimant, on aggraverait les difficultés : non seulement on pourrait gager des diminutions d'impôts par des augmentations de recettes fictives, mais, de surcroît, on pourrait compenser des augmentations de dépenses par des augmentations de recettes non moins fictives. Pour ma part, je pense qu'il faut traiter la question à la racine, c'est-à-dire en s'attaquant au problème de la dépense fiscale.
Ce matin, lors de la conférence des finances publiques qu'il présidait, le Premier ministre a proposé d'encadrer la dépense fiscale sur une base pluriannuelle. D'ici à une quinzaine de jours devrait paraître un rapport dans lequel je fais, avec Didier Migaud et Charles de Courson, des propositions allant dans ce sens. Avec cette réponse, nous progresserons.
Grâce à la loi organique sur les lois de finances, et Didier Migaud le sait bien, nous pouvons aujourd'hui, au sein d'une même mission, augmenter les crédits d'un programme à condition de diminuer ceux d'un autre programme. Nous avons expérimenté ce dispositif lors de la discussion de la loi de finances pour 2007 puis lors de celle pour 2008. Les amendements qui ont été présentés par les parlementaires ont été remarquablement responsables. Il nous faut maintenant développer ce système, qui a très bien fonctionné.
Dès le vote du budget pour 2009, nous allons nous engager dans une programmation pluriannuelle des dépenses. Les rapporteurs pour avis et les rapporteurs spéciaux de ces missions auront une marge de manoeuvre beaucoup plus grande qu'auparavant pour faire des propositions visant à augmenter les dépenses avec, en contrepartie, des redéploiements, des baisses de dépenses sur d'autres programmes.
Dans cette perspective, Charles de Courson et moi-même nous sommes demandés si nous ne pourrions pas aller plus loin, en permettant les redéploiements entre programmes d'une même mission, mais d'une mission à une autre.
Pour l'heure, il est encore trop tôt parce que la procédure budgétaire actuelle ne le permet pas. Imaginez que l'on vote une mission le mercredi, puis que le vendredi on en vote une autre qui déshabille la première !
Il serait donc dangereux d'adopter l'amendement de Didier Migaud.
Mieux vaut juguler la dépense fiscale, tout en essayant d'être plus audacieux sur les redéploiements au sein de la colonne des dépenses, c'est-à-dire au sein des crédits. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Comme le rapporteur général, je pense que l'analyse de Didier Migaud est pour partie inexacte. Il ne faut pas dire que l'article 40 ne sert à rien. La preuve : voilà plus de vingt ans que nous échouons à redresser les finances publiques. Il faut plutôt se demander si elles n'auraient pas encore été plus dégradées si on avait abrogé l'article 40. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Depuis la Constitution de 1958, une baisse de recettes peut être compensée par une hausse de recettes. Et depuis la LOLF, une hausse de dépenses peut être compensée par une baisse de dépenses au sein d'une même mission. Je me suis demandé si on ne pouvait pas élargir le dispositif en compensant une hausse de dépenses de la mission x par une économie sur la mission y. Supposons que je sois de gauche : je proposerais davantage de moyens pour l'enseignement et moins de canons ! (Sourires.)
Certes, mais mon exemple n'a pour objectif que de me faire bien comprendre.
Le problème, c'est qu'on vote mission par mission. Si l'on a déjà voté la mission « Défense », on ne pourra faire des économies que sur une mission qui sera présentée ultérieurement.
Combien de fois avons-nous déposé des amendements visant à réduire les recettes qui étaient compensées par de fausses hausses ? Si l'on additionnait tous les amendements gagés par les droits sur le tabac, le paquet de cigarettes vaudrait 100 euros !
Soyons donc raisonnables et repoussons ces trois amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre.)
J'avoue qu'il m'arrive de partager le point de vue de Gilles Carrez sur la gestion des finances publiques.
Mais comment pouvons-nous douter autant de nous-mêmes et de notre capacité à être responsables ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Comment pouvons-nous accepter cette autocensure, ne nous permettant même pas de débattre d'une question alors même que le Gouvernement dispose déjà dans la Constitution de beaucoup d'armes pour éviter que telle ou telle mesure soit adoptée ? Je l'ai dit tout à l'heure, plusieurs procédures existent : la seconde délibération, le vote bloqué, l'utilisation du troisième alinéa de l'article 49 et le débat entre le Gouvernement et le Parlement. Pourquoi alors ne pas réserver seulement au Gouvernement la possibilité d'invoquer l'article 40 ? Je le répète, pourquoi doutons-nous de notre propre capacité à proposer ? En fait, c'est comme si l'on disait de nous-mêmes que nous sommes des adultes majeurs mais qu'il faut nous empêcher y compris de débattre.
Si le Gouvernement estime qu'une proposition formulée par un parlementaire n'est pas raisonnable, il en discute avec lui et lui oppose effectivement qu'elle n'est pas raisonnable. Pour cela, les moyens à sa disposition ne manquent pas.
On ne m'oppose pas vraiment d'argument de fond. Le seul argument que l'on m'oppose est celui d'un certain conservatisme consistant à maintenir une règle qui existe et qui nous contraint fortement. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
J'espère que le Sénat se montrera plus audacieux que nous, ce qui n'est pas exclu.
Monsieur Migaud, je ne peux pas vous laisser dire cela. Les parlementaires sont des parlementaires !
Monsieur le président, nous devons nous comporter en élus responsables...
..et ne pas douter de notre capacité à être responsables.
En outre, monsieur le rapporteur, je ne vois pas en quoi la mesure que je propose est contradictoire avec celle que nous avons votée hier, c'est-à-dire la possibilité que nous avons de débattre de lois de programmation visant à équilibrer les finances publiques. Votre affirmation est purement gratuite.
Opposons-nous de bons arguments, disons plutôt que nous acceptons cette automutilation ou cette autocensure et ne parlons plus de la revalorisation du rôle du Parlement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Mes chers collègues, il nous reste encore à examiner 300 amendements. Beaucoup d'amendements de repli relatifs à l'article 40 ont été déposés. Aussi aurez-vous l'occasion de vous exprimer. Je vous propose donc de donner la parole à deux orateurs pour et à deux orateurs contre les amendements.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Monsieur le président, si ma mémoire est bonne, en 1946 les débats ont duré plusieurs mois !
Il y a des clivages qui transcendent notre histoire. « Les Français ne sont pas faits pour la liberté, ils en abuseraient » disait Voltaire. Et c'est un peu ce que vous nous dites aujourd'hui.
Jean-Jacques Rousseau déclarait pour sa part : « Renoncer à sa liberté, c'est renoncer à sa qualité d'homme, aux droits de l'humanité, et même à ses devoirs ». Les parlementaires qui renoncent à la liberté que notre peuple leur a donnée pour le défendre, ce sont des parlementaires qui sont prêts à accepter d'être les membres d'un Parlement croupion ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Nous sommes bien, comme cela a été dit, au coeur du sujet. Il y a en effet deux verrous dans notre Constitution : les articles 16 et 40. Il s'agit de deux articles essentiels si l'on veut juger de la sincérité des intentions du Gouvernement en matière d'élargissement des pouvoirs du Parlement. Or vous ne lâchez rien, parce que vous n'avez pas une conception démocratique de nos institutions ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je vous vois soupirer, monsieur le secrétaire d'État. Vous faites bien : dans Le Monde de cet après-midi…
Monsieur Brard, pouvez-vous parler de l'article 40 de la Constitution, s'il vous plaît ?
C'est ce que je fais, monsieur le président : pour éclairer avec pertinence son propos, il faut parfois faire quelques détours… (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Le Monde de cet après-midi rapporte donc comment M. Copé a appris que ses propositions sur la redevance télévisuelle avaient été balayées.
Vous me direz que cela n'a pas de rapport avec la réforme constitutionnelle. Bien sûr que si, car le Président de la République s'attribue des pouvoirs que lui dénie la Constitution ! Tout en prétendant élargir les droits du Parlement, vous ne faites que les encadrer davantage : l'article 40, qui est précisément un verrou essentiel, vous y tenez comme à la prunelle de vos yeux !
Nous sommes, je le répète, au coeur du sujet. Vous affirmez tout le temps vouloir réduire les déficits, mais vous n'envisagez qu'une méthode pour ce faire : réduire les dépenses, en particulier celles des services publics. Il ne vous vient pas à l'esprit d'augmenter les recettes en vous en prenant à la cassette des privilégiés ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) M. le Premier président de la Cour des comptes vous dit que les 60 milliards d'allègements de cotisations sociales ont été accordés en pure perte.
Mais là, vous ne l'écoutez pas, vous êtes autistes !
De l'argent, il y en a pourtant, mais vous êtes perclus de courbatures dès qu'il s'agit de vous baisser pour plonger les mains dans les poches de ceux qui les ont bien pleines ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous ne voulez pas consentir à cet effort parce que vous n'êtes que les fondés de pouvoir des privilégiés ! (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
L'article 40 encadre vos choix idéologiques ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Je suis saisi d'un amendement n° 344 .
La parole est à Mme Martine Billard, pour le soutenir.
Comme il s'agit d'un amendement de repli, je vous remercie par avance, madame Billard, de le présenter de manière synthétique.
En effet, monsieur le président, l'amendement n° 344 est un amendement de repli. Il propose que l'article 40 ne soit opposable par le Gouvernement qu'en séance publique, ce qui permettrait de rétablir une certaine égalité entre les parlementaires et le Gouvernement et d'avoir un débat projet contre projet.
Nos collègues de la majorité nous disent que, lors de la discussion des projets de loi budgétaires, nous pouvons faire des propositions de modification. Mais tout au long de l'année des projets de loi comportent des propositions de dépenses ou de recettes, et les pouvoirs des parlementaires sont verrouillés par l'article 40. Nous voulons modifier cet état de fait afin de renforcer, comme cela a été promis, les droits du Parlement.
Défavorable.
Je suis opposé à la proposition de nos collègues, que je trouve assez singulière. Actuellement, qui décide de l'application de l'article 40 ?
C'est le président de l'Assemblée nationale, qui délègue ce pouvoir au président de la commission des finances ! Autrement dit : le Parlement. Ce qu'on nous propose là, dans une disposition de substitution, c'est de donner au seul Gouvernement la possibilité d'appliquer l'article 40 !
On retire donc un pouvoir au Parlement pour le donner au Gouvernement,… (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
…qui pourra, en séance, s'opposer à tout amendement, même si nous le jugeons utile. L'amendement n° 344 me semble donc néfaste. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je suis saisi d'un amendement, lui aussi de repli, n° 345.
La parole est à Mme Martine Billard, pour le soutenir.
Contentez-vous de présenter votre amendement, s'il vous plaît, madame Billard.
Je vais le faire de suite, monsieur le président. J'espérais cependant que l'on saurait sortir du formalisme et de l'hypocrisie pour examiner des situations concrètes. Or, concrètement, nous ne pouvons défendre nos propositions en séance plénière.
L'amendement n° 345 aborde un problème sur lequel nous n'avons pas encore obtenu de réponse. En effet, grâce à la nouvelle rédaction de l'article 42 de la Constitution, c'est le texte de la commission qui sera discuté en séance publique. L'article 40 pourra-t-il lui être opposé a priori – sachant en outre qu'une commission peut être saisie au fond et d'autres pour avis ? Dans la situation présente, il semble bien que oui : la commission sera obligée de s'autocensurer, sous peine d'être censurée au titre de l'article 40. L'amendement n° 345 propose donc que l'article 40 s'applique sous réserve des dispositions du premier alinéa de l'article 42, c'est-à-dire que la commission puisse présenter son texte en séance publique.
Même avis.
L'amendement n° 272 est naturellement un amendement de repli, consécutif au rejet de l'amendement présenté par Didier Migaud. Il devrait pouvoir être adopté car, pour avoir bien écouté les arguments échangés, il me semble que ceux qui ont été avancés contre l'amendement du président de la commission des finances ne sont plus recevables ici – pour autant qu'ils l'aient été tout à l'heure, ce dont je doute.
En premier lieu, l'amendement n° 272 ne me semble nullement contraire aux dispositions que notre assemblée a déjà adoptées, notamment cette nuit – pas plus, d'ailleurs, que l'amendement du président Migaud.
Ensuite, Charles de Courson estime que l'aggravation du déficit, incontestable, aurait pu être pire encore si le Parlement n'avait pas été contraint par l'article 40. Or c'est l'idée même de réforme qu'il met ainsi en cause : quel que soit le sujet, on peut toujours se demander si la situation n'aurait pas été pire sans la disposition que l'on souhaite réformer ! Il s'agit donc d'accepter l'idée même de réforme, en faisant le pari que la rénovation de la Constitution que nous appelons de nos voeux, non seulement renforcera les droits du Parlement, mais plus généralement améliorera la situation de notre pays.
Enfin, mes chers collègues, cet amendement reprend intégralement une proposition du comité Balladur. Je ne vois pas comment l'argument du risque, avancé par notre rapporteur général et par certains collègues de la majorité, pourrait lui être opposé, dans la mesure où il ne fait pas – hélas ! – sauter le verrou de l'article 40. Il s'agit seulement d'assouplir les règles de recevabilité financière, tout en laissant la possibilité au président de la commission des finances, par délégation de pouvoir du président de notre assemblée, de juger si, au regard de l'équilibre des finances publiques, un amendement est ou non acceptable.
Permettez, monsieur le président, que je poursuive : il me semble que le sujet en vaut la peine et vous avez fait preuve envers mon collègue Brard d'une tolérance que je salue.
Monsieur Cahuzac, permettez-moi de vous signaler que vous arrivez dans un débat qui dure déjà depuis plusieurs jours.
Il a été convenu que les interventions sur un même sujet ne soient pas trop longues afin de pouvoir nous concentrer sur ce qui, précisément, fait débat. Convenez que c'est de bonne méthode. Il n'est pas facile de travailler lorsque nous sommes si nombreux dans l'hémicycle. Vous vous en seriez rendu compte si vous aviez été là ces jours derniers. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Maintenant, veuillez achever votre exposé, s'il vous plaît.
Merci, monsieur le président. J'en conclus toutefois qu'une nouvelle règle a été instaurée : tout nouvel arrivant dans un débat dispose de moins de temps de parole que les autres. Ce sera la jurisprudence Accoyer ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je termine donc. Il serait surprenant que notre proposition, qui est, je le rappelle, directement issue du comité Balladur, ne puisse être adoptée : elle maintient le verrou de l'article 40, tout en assouplissant les conditions de recevabilité des propositions parlementaires, ce qui me paraît tout à fait souhaitable. S'il s'agit de revaloriser les droits du Parlement, on ne voit pas pourquoi ce ne serait pas possible en matière financière : tout projet a un coût, et limiter la capacité d'amendement des parlementaires dans ce domaine augurerait mal de cette réforme, en dépit de nos espoirs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir l'amendement n° 422 . Je le remercie par avance de la concision de son propos.
Cet amendement reprend littéralement la proposition du comité Balladur – dont, que je sache, le président n'était pas considéré, à l'époque où il était Premier ministre ou ministre des finances, comme particulièrement irresponsable en matière de finances publiques.
L'amendement n° 422 prévoit donc d'accroître, modestement, mais de façon tout de même significative à nos yeux, les possibilités d'intervention des parlementaires dans l'élaboration du budget – qui, en dépit d'une discussion qui nous occupe durant deux mois, sont aujourd'hui quasi nulles : le budget voté est en général, à un milliard d'euros près, identique à celui qui nous est présenté par le Gouvernement.
La piste évoquée tout à l'heure par notre rapporteur général, M. Carrez, qui consiste à nous permettre de redéployer les crédits dans le respect de l'équilibre budgétaire – comme il est d'usage dans toute collectivité territoriale –, me semble bonne. En attendant, je vous propose de nous en tenir à la proposition du comité Balladur, que nous pourrons éventuellement améliorer durant la navette. Les conclusions de ce comité et notre présent débat le montrent bien : les parlementaires veulent desserrer l'étau, non sur l'équilibre budgétaire – auquel nous sommes favorables –, mais sur la discussion budgétaire, et sortir d'une forme d'hypocrisie qui consiste, comme Charles de Courson vient de le rappeler, à financer chaque dépense par une recette fictive, par exemple sur les tabacs ou les alcools, afin de pouvoir débattre en séance plénière. Après tout, lorsque le Parlement souhaite augmenter – légèrement, en général – une dépense publique, ce devrait être au Gouvernement de veiller in fine à l'équilibre budgétaire.
La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 346 .
Je serai brève, car cet amendement a le même objet que les précédents : il s'agit de redonner au Parlement une plus grande faculté de débat et de proposition, sans tomber dans l'hypocrisie – comme c'est trop souvent le cas aujourd'hui, en particulier lors des discussions budgétaires.
Il s'agit d'un amendement de repli, non de retraite.
La revalorisation massive et inédite du rôle du Parlement est le refrain qu'on nous sert depuis des semaines à propos de cette réforme constitutionnelle. Mais le refus de supprimer l'article 40 de la Constitution est un très mauvais signal envoyé par les réformateurs que vous prétendez être. Je ne reviendrai pas sur les arguments tout à fait pertinents développés pour illustrer l'inefficacité de cet article antidémocratique mais, faute d'une suppression pure et simple de l'article 40, il est quand même possible d'accomplir des avancées, fussent-elles modestes, qui entrouvriraient la porte à un renforcement du droit d'amendement des parlementaires. Il s'agit d'aligner le dispositif applicable aux dépenses publiques sur celui qui encadre les amendements en matière de recettes publiques, où la pratique de la compensation est admise, puisqu'il suffit de gager la perte de recettes proposée par une autre recette la compensant intégralement pour qu'un amendement échappe aux foudres de l'irrecevabilité en matière financière.
Cet amendement vise dont à ouvrir la possibilité de gager une dépense nouvelle ou une aggravation de dépense par la réduction strictement équivalente d'une autre dépense.
Monsieur le président, l'annonce d'un scrutin public nous donnant un peu de temps,…
Monsieur Brard, il faut en réserver pour recueillir les avis de la commission et du Gouvernement.
S'ils sont aussi succincts et caricaturaux que ceux que M. le rapporteur émet d'habitude…
Non, monsieur le président, puisque j'évoque les avis du rapporteur sur les amendements en discussion. Or, en se contentant de dire « défavorable », il avoue fuir le débat par peur d'une confrontation d'idées sur des sujets essentiels, comme l'équilibre des finances publiques.
Ce n'est pourtant pas difficile d'y parvenir : il suffit de faire un choix politique et de répondre aux questions suivantes : où prendre l'argent ? Comment répartir les richesses ? Mais je sais que ces questions font faire des cauchemars la nuit à certains ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Karoutchi, c'est vrai, est un peu plus disert que M. le rapporteur.
Quant à vous, madame la garde des sceaux, je vous suggère de corriger l'injustice commise à votre égard par le journal Le Monde en vous montrant plus prolixe.
Au risque de surprendre M. Brard, défavorable.
Même si ces amendements s'inscrivent dans la continuité de ceux qui visaient à abroger l'article 40 et que nous avons rejetés, ils posent de vraies questions. Du reste, les travaux du comité Balladur ont montré l'importance qui s'attachait à cette question et la nécessité de progresser sur le sujet.
Je tiens à rappeler qu'au début de la législature, lorsque le président de la commission des finances a précisé comment il entendait appliquer l'article 40, il n'a pas été question d'une nouvelle interprétation. Il s'est en effet contenté de déclarer qu'agissant par délégation du président de l'Assemblée nationale, il ne se sentait que le droit de l'appliquer de façon stricte. Je comprends, du reste, tout à fait la position du président de la commission.
Nous avons créé, c'est vrai, avec l'adoption de la loi organique sur les lois de finances, des marges de manoeuvre au sein d'une même mission en matière de redéploiements des dépenses entre programmes. Gilles Carrez a souligné avec raison qu'il serait tout à fait envisageable, si nous arrivions à trouver une méthode satisfaisante, d'aller encore plus loin en procédant à des redéploiements de crédits entre missions, ce qui, du reste, permettrait de prévenir la tentation que certains ministres ou responsables de mission ont de massifier les programmes en vue de limiter le droit du Parlement d'amender les programmes.
La plus grande partie des amendements qui nous sont présentés visent à gager de nouvelles dépenses par des nouvelles recettes. Gardons-nous d'entrer dans une logique délicate consistant, d'une part, à alourdir la pression fiscale et, d'autre part, à méconnaître les risques qu'il y aurait à engager des dépenses dans le cadre d'un budget pluriannuel, c'est-à-dire dans la durée.
En effet, si, demain, nous votons des dépenses devant être compensées par des recettes en partie différées, comme les droits de succession – lesquels, il est vrai, ont été supprimés pour les tranches les plus basses –, cette décision s'inscrira automatiquement dans la durée. Nous devons donc aborder cette question avec la plus grande prudence. Plutôt que de faire courir un risque aux finances publiques en adoptant dans un projet de loi constitutionnelle de tels amendements qui n'ont pas encore été évalués, il serait préférable de continuer à progresser dans le cadre, désormais bien maîtrisé, de la loi organique des lois de finances. Alors, peut-être, franchirons-nous un jour la seconde étape. Aujourd'hui, il est surtout nécessaire de prendre du recul !
Je suis saisi d'un amendement n° 582 .
La parole est à M. François Goulard, pour le soutenir.
Monsieur le président, je retire cet amendement puisque le débat sur le sujet a déjà eu lieu.
Je souhaite toutefois rappeler que l'État est extrêmement sourcilleux, pour ne pas dire méfiant, s'agissant de l'équilibre des comptes des collectivités locales, tandis que le constituant, en refusant de voter les amendements visant à supprimer l'article 40, a de nouveau donné la preuve de sa méfiance vis-à-vis du législateur. Dans ces conditions, il me paraît essentiel que ce même constituant fixe à l'égard de l'État dépensier des règles de sagesse afin de se donner la possibilité de le rappeler à tout instant à la raison. Nous n'avons encore franchi qu'une timide étape en ce sens alors qu'il y a là un enjeu d'intérêt majeur. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Nos débats visent à moderniser les institutions de la Ve République. C'est un souhait tout à fait louable.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Il n'y a pour l'instant rien à redire !
Apparemment, le projet de loi constitutionnelle aurait également pour objectif de renforcer les pouvoirs du Parlement. Le principe est bon.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Nous sommes toujours d'accord !
Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Attention, « in cauda venenum » !
Toutefois, certaines dispositions du texte, comme le comportement du Gouvernement ces derniers jours – je pense notamment aux conditions dans lesquelles s'est achevé le débat sur les OGM – et la discussion que nous venons d'avoir sur la suppression de l'article 40 ne font que renforcer les réserves du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche à l'égard du texte. En aparté, Didier Migaud n'a pas pu s'empêcher de lâcher : « Les bras m'en tombent ! Comment peut-on accepter de s'autocensurer ? », en entendant les arguments par lesquels nos collègues de la majorité refusaient de supprimer l'article 40 de la Constitution, alors que cette suppression aurait permis au Gouvernement de témoigner de sa réelle volonté de renforcer les pouvoirs du Parlement.
Or l'article 15 s'inscrit dans la même logique puisque, sous prétexte de renforcer les pouvoirs du Parlement, il contribue, lui aussi, à limiter l'action des parlementaires. Je ne comprends pas cette contradiction entre la volonté affichée par le Gouvernement de renforcer les pouvoirs du Parlement et la réalité qui le conduit à présenter des articles dont l'effet immédiat sera de limiter l'action de tous les parlementaires, c'est-à-dire, notamment, des députés qui composent cette noble assemblée.
Je suis saisi d'un amendement n° 301 .
La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour le soutenir.
L'article 41 de la Constitution, qui complète l'article 40 et a pour objet de protéger le Gouvernement des empiétements du législateur dans le domaine réglementaire, n'a pas été très vivant sous la Ve République, les gouvernements l'utilisant surtout comme instrument de régulation du débat vis-à-vis de leurs propres majorités dans les cas critiques où ils entraient en conflit avec elles.
Or l'extension au « président de l'assemblée saisie » d'un pouvoir jusque-là réservé au seul Gouvernement aura pour conséquence de réveiller une faculté qui était en sommeil, l'article 41 devenant de ce fait un outil de régulation – le mot est faible – non seulement du Gouvernement vis-à-vis de sa majorité mais également de la majorité vis-à-vis de l'opposition.
Il s'agit pour nous d'un véritable point de désaccord : c'est la raison pour laquelle nous avons déposé un amendement de suppression de l'article 15.
En effet, alors que nous avons reconnu tout au long du débat que le texte permet de réelles avancées en renforçant les droits de la majorité vis-à-vis du Gouvernement, l'article 15, en revanche, représente un recul des droits de l'opposition vis-à-vis de la majorité. C'est la raison pour laquelle, je le répète, nous ne pouvons faire autrement que de demander la suppression de cet article.
Défavorable.
En effet, l'article 15 ne touche pas le périmètre des articles 34 et 37 de la Constitution mais établit l'égalité des armes entre les présidents des assemblées et le Gouvernement.
Je tiens du reste à appeler votre attention sur le fait que le président de chaque assemblée pourra utiliser ce nouveau pouvoir contre les amendements du Gouvernement lui-même, alors qu'il n'existe actuellement aucun garde-fou de ce type contre une initiative d'amendement malheureuse de la part du Gouvernement – certes, un tel garde-fou n'est pas utile aujourd'hui, mais qu'en sera-t-il demain ?
Sans être fondamental, l'article 15 nous paraît cohérent. Nous sommes donc favorables à son maintien et nous nous opposerons à tous les amendements tendant à le supprimer.
Avis défavorable.
L'article 15 du projet de loi met en oeuvre une des recommandations du comité Balladur. L'irrecevabilité prévue à l'article 41 de la Constitution, en cas d'empiétement de la loi sur le domaine réglementaire, étant rarement mise en oeuvre, l'article 15, monsieur Montebourg, constitue une véritable avancée puisqu'il vise à donner au Parlement un vrai pouvoir nouveau.
Le Gouvernement, en proposant de donner la faculté au président de chaque assemblée d'opposer l'irrecevabilité prévue à l'article 41, rend son utilisation beaucoup plus facile, ce qui permettra à la loi de mieux respecter la répartition des domaines législatif et réglementaire et concourra à la rendre plus claire et plus lisible, donc plus efficace.
Cette disposition rétablira aussi l'égalité des armes, comme vient de le souligner M. le rapporteur, puisque les présidents pourront l'utiliser à l'encontre des amendements du Gouvernement, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à cet amendement de suppression.
Je ferai un certain nombre d'observations.
Les conclusions du comité Balladur continueront d'alimenter notre réflexion. Toutefois, force est de constater que leur utilisation, dans un sens ou dans un autre, par le Gouvernement et la majorité fait que l'on ne peut plus les considérer comme un critère de référence et de pertinence.
M. Warsmann a utilisé la formule selon laquelle on serait alors à armes égales, puisque le président de l'Assemblée pourrait opposer l'irrecevabilité. Je considère, quant à moi, qu'il n'est absolument pas intéressant qu'une nouvelle disposition restreigne le droit d'amendement des députés. Si nous avions dû inscrire une mention très symbolique dans la Constitution, ç'aurait été que chaque député détient d'une manière absolue le droit d'amendement. C'est en effet notre premier et véritable droit. Nous en avons, certes, d'autres, mais celui-ci est fondamental s'agissant de l'élaboration de la loi. Cette réforme constitutionnelle donne lieu à des propositions pernicieuses. Ainsi, nous fait-on à chaque fois « miroiter » une avancée dans notre travail législatif, ou une protection de celui-ci, pour mieux nous broyer la main.
Le Gouvernement a très peu eu recours à l'article 41 parce qu'il était, sans nul doute, trop compliqué, mais également parce qu'il dispose d'autres instruments de contestation. Une contradiction d'arguments entre la présidence de l'Assemblée et le Gouvernement avec un arbitrage du Conseil constitutionnel va sans nul doute s'installer. Qu'adviendra-t-il alors des amendements présentés par l'opposition en cours de débat et en pleine nuit ?
Le sujet est intéressant. Peut-être aurez-vous un jour à assumer cette responsabilité, monsieur le président !
Je considère que le président n'a pas la capacité de déclarer l'irrecevabilité. Je parle, ici, bien entendu de l'institution et non du collègue qui préside et protège notre Assemblée, comme c'est son rôle. Pourquoi y aurait-il une institutionnalisation ? Pourquoi ne pas donner ce pouvoir au président de la commission des lois ? Cette solution ôterait toute dimension politique à cette disposition pour ne retenir que l'aspect technique.
Sous couvert d'une avancée, se cache ainsi un magnifique piège qui contraindra l'opposition dans son droit d'amendement.
Je serai très bref, parce que j'aurai l'occasion, lorsque je défendrai l'amendement suivant, de demander la suppression de l'article 41 de la Constitution.
Madame la garde des sceaux, vous nous avez dit que cet article 41 était finalement peu utilisé. Cela prouve que les députés, très responsables, ne font pas d'opposition systématique et restent toujours dans le vif du sujet. Ils ne détournent donc finalement pas le débat parlementaire à d'autres fins. Est-ce à dire que cet article 15 offrira une possibilité supplémentaire au président de l'Assemblée ? Je rejoins les propos de M. Le Bouillonnec : si l'on voulait aller jusqu'au bout de la logique, il serait préférable que le président de la commission des lois joue ce rôle. La disposition contenue dans le présent article sera donc une pression supplémentaire du président de l'Assemblée nationale qui pourra ainsi décider de l'irrecevabilité d'un amendement. Comme M. Le Bouillonnec vient de le préciser, le droit d'amendement est pour nous fondamental. Faisons appel à la responsabilité de chacun et considérons que tout député dans cette assemblée ne fait pas d'opposition systématique, mais accomplit consciencieusement sa mission en défendant des amendements qui, que cela plaise ou non à la majorité, sont de droit et naturels dans le débat démocratique.
Je rappelle que cet article 41 a été utilisé, voici peu de temps, lors de l'examen du texte relatif à la régulation des activités postales. Le président de l'Assemblée nationale avait alors fait déclarer irrecevables pas moins de 14 000 amendements. Il n'est donc pas anormal que le président de cette institution dispose du pouvoir de distinguer ce qui relève du domaine réglementaire ou du domaine législatif. Je tenais juste à éclairer le débat.
Je suis saisi d'un amendement n° 397 .
Sur le vote de cet amendement, je précise d'ores et déjà que je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Patrick Braouezec, pour soutenir l'amendement n° 397 .
Madame la garde des sceaux, vous avez quasiment justifié cet amendement lorsque vous avez mis la Constitution en accord avec la réalité des faits. Certes, M. le président nous a rappelé que cet article de la Constitution a dernièrement été utilisé face à une abondance d'amendements.
Je suis d'accord avec vous sur ce point, monsieur le président. Je me rappelle ces amendements ; quelques-uns étaient quelque peu tirés par les cheveux et ne s'avéraient pas très dignes du travail parlementaire. Cet exemple est tout de même assez marginal. Le fait qu'aucun article n'empêche le débat parlementaire placerait chaque député devant ses responsabilités : leurs amendements devraient être en relation avec le débat et non viser à faire de l'obstruction.
Tout comme l'article 40, cet article 41 n'a plus aucune raison de figurer dans la Constitution. Faisons définitivement confiance aux députés, qui sont responsables et matures, dans l'exercice de leur travail parlementaire.
Nous ne souhaitons pas la suppression de cet article, parce qu'il est fondamental pour le Gouvernement et pour le président de l'Assemblée. Votre amendement est beaucoup plus restrictif que l'article 15 qui donne un nouveau pouvoir au Parlement par le biais du président de l'Assemblée nationale.
Les lois doivent être extrêmement claires, lisibles et efficaces. C'est de notre intérêt. Réservons le domaine réglementaire à l'application des lois votées par le Parlement.
Je ne peux pas être d'accord avec vous, madame la garde des sceaux. J'attire l'attention de notre assemblée sur l'usage abusif des adjectifs. « C'est un article fondamental » ! Mais qu'est-ce qui ne l'est plus ? On se le demande ! Le président de l'Assemblée nationale, M. Accoyer, vient de nous expliquer comment il avait réglé le sort des 14 000 amendements qu'il jugeait pléthoriques sans avoir pensé, sur le moment, à réformer la Constitution ! Chacun connaît pourtant sa perspicacité, sa sagesse et sa pertinence (Sourires) dès qu'il s'agit d'apprécier le fonctionnement de notre assemblée ! Comme le diraient MM. Myard, de Charette, Goulard, Garrigue et Grand, tout cela n'est évidemment pas fondamental : cela ne sert à rien ! Mais si nous débattons depuis plusieurs jours, c'est qu'il y a un objectif caché ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il faut gratter ! Pendant que nos compatriotes tirent le diable par la queue, on les amuse en extrayant quelques articles du magasin de farces et attrapes pour leur faire croire que des réformes importantes ne souffriraient pas de délai afin que notre pays aille mieux ! Tout cela n'est évidemment pas vrai, il s'agit d'occuper l'opinion avec des sujets secondaires pendant qu'on met le pays en coupe réglée !
Nous allons maintenant procéder au scrutin public, précédemment annoncé, sur l'amendement n° 397 .
(Il est procédé au scrutin.)
On donne ici un droit nouveau non au Parlement, mais au président de l'Assemblée nationale. Contrairement à tout ce que l'on vient d'entendre, le groupe Nouveau Centre considère que la loi s'est, si j'ose dire, « enrichie » au cours de ces dernières années de beaucoup trop de dispositions réglementaires qui n'avaient pas à y figurer, à l'initiative parfois du Gouvernement, mais le plus souvent des parlementaires. Cet article 15 représente donc plutôt une avancée, mais pose question.
Le président de l'Assemblée nationale – qui est une fonction, mais aussi une personne – pourrait seul juger du caractère réglementaire ou non, sans débat ni faculté d'appel. La situation n'est pas la même lorsqu'il s'agit du Gouvernement, lequel peut, en l'occurrence, être interpellé. On peut lui demander pourquoi et comment tel amendement n'a pas été accepté. Avec cette nouvelle disposition, cet amendement disparaîtra dans les couloirs de l'Assemblée nationale sans que l'on n'en ait débattu.
De plus, cela pose un certain nombre de difficultés d'application. En effet, le président de l'Assemblée nationale – qui préside aujourd'hui nos débats – n'est pas toujours présent en séance. Un vice-président pourrait-il avoir ce pouvoir lorsqu'un sous-amendement, de nature réglementaire sera déposé en séance ? Nous devons, monsieur le président, discuter de la règle du jeu. Aussi l'amendement n° 423 prévoit-il que le président de la commission saisie au fond puisse également écarter toute disposition ne relevant pas du domaine de la loi comme le président de la commission des finances peut opposer l'article 40. Il serait nécessaire de prévoir dans notre règlement un mécanisme d'arbitrage et d'appel. Le débat est ouvert. Je suggère à notre assemblée d'adopter l'amendement n° 423 . Je retire, en revanche, les amendements nos 424 et 425 qui sont excessifs.
La commission a donné un avis défavorable.
Les présidents de commission ne sont pas aujourd'hui mentionnés dans la Constitution. Je ne pense pas qu'il soit opportun de les y faire entrer.
Je tiens, de plus, à attirer l'attention de notre collègue : ce n'est pas le président de la commission des finances qui peut opposer l'article 40, mais le président de l'Assemblée qui lui délègue cette responsabilité. On pourrait donc tout à fait imaginer ultérieurement d'inscrire dans notre règlement un système de délégation.
En l'état actuel des choses, la rédaction du Gouvernement nous semble meilleure et n'interdit pas une souplesse dans l'application.
Jusqu'à présent, seul le Gouvernement pouvait opposer l'irrecevabilité législative. Pour rétablir un bon équilibre, nous avons souhaité donner cette possibilité au président de l'Assemblée. Cela permettra aussi d'assurer une cohérence de l'application de l'article 41, au lieu de devoir faire face à différentes applications par les présidents de commission. Il ne nous a donc pas semblé nécessaire de confier ce pouvoir au président de la commission permanente saisie au fond.
Cependant, rien n'empêche le président de l'Assemblée de lui demander son avis. Par ailleurs, comme vient de le souligner le rapporteur, on peut tout à fait prévoir une telle délégation dans le cadre du règlement de l'Assemblée.
Nous sommes donc défavorables à cet amendement.
J'entends la réponse de notre rapporteur, qui pourrait même me conduire à retirer l'amendement mais, même si ce n'est pas de tradition – encore que cela ait été fait hier sur la création des commissions d'enquête –, il n'aurait pas été inutile de savoir comment le président de l'Assemblée nationale va interpréter cette nouvelle disposition.
Soit il y a délégation et mon amendement est inutile, et je le retire. Soit il pourrait ne pas y en avoir et mon amendement est utile, et je le maintiens.
Je suis saisi d'un amendement n° 322 .
La parole est à M. François de Rugy, pour le soutenir.
C'est un peu une question de principe pour la revalorisation du Parlement et, d'une manière générale, le rééquilibrage des pouvoirs au sein de nos institutions entre l'exécutif et le législatif car, s'il peut paraître symboliquement intéressant à l'extérieur du Parlement que le président d'une assemblée puisse saisir le Conseil constitutionnel, il ne faut pas oublier, avec tout le respect que l'on doit à ceux qui ont occupé cette fonction et qui l'occupent aujourd'hui, que le président de l'Assemblée nationale est de la même couleur politique que le Gouvernement, même en cas de cohabitation. On pense souvent que, dans ce cas, l'exécutif et le législatif ne sont pas de la même couleur mais ce sont le Président et le Gouvernement qui ne le sont pas.
Il est important, si l'on étend les pouvoirs du Parlement, que l'on étende aussi les droits de l'opposition. C'est pourquoi nous proposons que, au-delà du président de l'assemblée saisie, ce qui serait une très bonne chose, le Conseil constitutionnel puisse être saisi par un dixième des parlementaires, comme c'est le cas lorsqu'il s'agit de vérifier la constitutionnalité d'une loi votée.
Pour vraiment revaloriser le Parlement, monsieur le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, il faut que la majorité ait plus de liberté vis-à-vis du Gouvernement, et vous conviendrez que, dans ce domaine, il y a des marges de manoeuvre.
Il n'est pas absolument indispensable de changer de constitution pour en arriver là.
L'article 16, j'y suis fondamentalement opposé, et d'abord parce qu'en mon âme et conscience, j'ai le sentiment qu'il est contraire à l'esprit de notre constitution.
Le Gouvernement gouverne. Quand vous gouvernez, madame la garde des sceaux, monsieur le secrétaire d'État, vous montez à la tribune de l'Assemblée nationale défendre un texte qui est le vôtre. S'il a été totalement remanié par la commission, ce n'est plus votre projet, c'est une forme de proposition de loi que vous allez défendre. Cela choque naturellement le gaulliste que je suis, parce que l'esprit de la Ve République est foulé aux pieds.
Sur la forme, j'attends de voir comment les choses vont se passer. Actuellement, nous faisons l'autruche, c'est-à-dire que nous mettons tous la tête dans le sable.
Si c'est le texte amendé par la commission qui est défendu en séance, cela veut dire qu'en commission, il aura été examiné de la même manière qu'en séance publique. Sinon, ce ne serait plus la démocratie. Le Gouvernement devra être présent, donner son avis, répondre à toutes les interrogations et accepter ou refuser les amendements proposés. Certains d'entre nous doivent déjà s'imaginer ministres, secrétaires d'État ou sous-secrétaires d'État, parce que le Gouvernement devra embaucher ! Et quand le texte viendra en séance publique, il devra, pour rétablir son texte, grappiller une majorité. Ce n'est plus la Ve République !
Pour un parlementaire, l'article que nous allons examiner est sans doute l'un des plus intéressants et des plus importants de ce texte, et je ne partage pas l'opinion de M. Grand.
D'une certaine manière, l'article 16 redistribue le pouvoir au bénéfice du législatif. Ce n'est pas pour autant une révolution car, après tout, ce n'est jamais que le retour au parlementarisme…
…que l'on connaissait sous la IIIe République, qui est par essence le régime républicain, et sous la IVe République.
Il est vrai qu'un tel dispositif va renforcer le poids des parlementaires et, notamment, du rapporteur, dont on connaît le rôle fondamental, et limiter un peu celui du Gouvernement, qui, en séance publique, devra éventuellement tenter de les convaincre de revenir à son texte.
Pour qu'il produise son plein effet, il faut naturellement un certain nombre de conditions, et la première, c'est que les commissions aient le temps nécessaire pour étudier un projet.
Les parlementaires qui prendront connaissance du nouveau texte issu de la commission devront également disposer du temps nécessaire pour lire le rapport avant l'examen en séance publique. De ce point de vue, je ne peux que me réjouir du fait que le rapporteur et la majorité de la commission aient accepté notre proposition d'allonger les délais prévus par le Gouvernement.
Toutefois, ces délais ne s'appliquent pas aux textes qui seront discutés en urgence. L'urgence, chacun doit le savoir, ce n'est pas parce qu'il y a une crise, c'est tout simplement parce que le Gouvernement veut aller plus vite. Les statistiques que donne le rapporteur dans son rapport sont éloquentes, ce sont pratiquement 50 % des textes qui sont discutés en urgence, et souvent d'ailleurs les plus importants. Or ce sont eux qui sont examinés dans les délais les plus courts.
Il faudra certainement évoluer sur ce point, monsieur le rapporteur. Il n'y a pas de raison qu'il en soit ainsi. Les délais doivent être les mêmes pour les textes discutés en urgence car ce sont des textes plus importants, qui ne font l'objet que d'une seule lecture. Sinon, cela enlève un peu d'intérêt à cette disposition.
Une telle procédure aura au moins deux conséquences pour le Gouvernement. Elle va l'obliger à être davantage présent en commission. Aujourd'hui, il peut l'être, mais il ne vient pas. Par ailleurs, le ministre devra connaître son texte et être capable de répondre aux interrogations des parlementaires. Le travail en commission n'est pas le même qu'en séance publique. Il ne pourra pas se contenter de lire les notes que ses collaborateurs lui auront préparées. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Il faudra également que les députés soient présents en commission. Aujourd'hui, ils ne le sont pas plus qu'en séance publique. Se posera donc à nouveau le problème du cumul des mandats, qu'il faut, je pense, interdire. Delenda est cumulatio. (Sourires.)
Lorsque vous nous avez invités à travailler sur la réforme de la Constitution, monsieur le président, j'étais a priori favorable à cet article 16. Je pensais que discuter du texte de la commission en séance nous éviterait par exemple d'examiner des amendements rédactionnels, qui ont assez peu d'intérêt en général, et nous permettrait peut-être d'avoir des débats plus construits, plus argumentés et plus intéressants. Mais, au fur et à mesure que les débats se sont développés autour de cet article, qui est tout de même présenté comme l'article fondamental pour renforcer les pouvoirs du Parlement, j'avoue que je commence à avoir des interrogations.
Sa philosophie, je suis pour.
…et je rejoins les inquiétudes exprimées par mes collègues communistes du groupe GDR depuis le début. Il suffit d'ailleurs de lire l'exposé des motifs.
S'il s'agissait de mieux travailler, ce serait très bien. S'il s'agissait d'améliorer la qualité des débats, de mieux écrire les lois, qui sont parfois très mal rédigées, ce serait très bien, mais, si une telle modification est proposée, c'est en partie pour réduire la longueur des débats en séance publique.
L'un des arguments qu'a donné l'un de mes collègues, dont je tairai le nom, c'est que nos concitoyens voient trop souvent à la télévision que l'hémicycle est très peu plein. Sinon, il faudrait avoir un plus petit hémicycle. (Sourires.)
Il est proposé de transférer une grande partie des débats en commission mais, comme vient de le souligner M. Dosière, ce sont souvent les députés qui sont assidus dans l'hémicycle qui le sont en commission, et je ne suis pas sûre qu'il y aura plus de députés présents en commission. Cela suppose dans ce cas que les temps de travail des commissions soient plus longs.
Dans la mesure où tout est de plus en plus concentré sur le mardi après-midi, on aura tout de même du mal à travailler sérieusement.
Comme la durée de l'examen de l'ensemble du texte sera programmée, je m'interroge sur le maintien du droit d'amendement individuel, qui me semble être un droit imprescriptible du député.
Effectivement, les groupes ont des droits, qui ont d'ailleurs été reconnus dans ce texte. Pour la discussion générale, par exemple, le temps de parole est réparti entre les groupes au prorata du nombre de députés.
Mais il ne faudrait pas que, par ricochet, cet article 16, bon dans son principe, ait pour conséquence de réduire les débats en séance publique et le droit d'amendement individuel de chaque député, qu'il soit de la majorité ou de l'opposition.
En effet, la richesse de certains de nos débats tient aussi au fait que des députés ont osé adopter et défendre des positions, individuelles ou collectives, qui n'étaient pas celles de leur groupe. Perdre cette possibilité entraînerait un appauvrissement de la loi.
Telles sont les inquiétudes que partage l'ensemble du groupe de la Gauche démocrate et républicaine sur cet article 16.
Avant d'aborder cet article effectivement important, j'insiste sur le fait que notre discussion précédente aurait dû régler certains problèmes. Je regrette notamment que vous n'ayez pas souhaité nous dire comment l'article 41 serait mis en oeuvre. En effet, puisque le texte qui sera discuté en séance sera celui de la commission, je ne suis pas sûr, étant donné notre rythme de travail, que le texte adopté en commission ne comportera pas de disposition de nature réglementaire, qui devrait alors être supprimée avant la discussion en séance. Mais je n'en saurais manifestement pas plus sur le sujet : nous n'aurons qu'à subir.
Toujours est-il que cet article est une avancée, et le groupe Nouveau Centre ne comprend pas les préventions dont il est l'objet. C'est d'autant plus vrai que la commission, autour de M. Warsmann, a fait oeuvre utile, notamment en votant des amendements prolongeant les délais d'une façon qui n'est pas déraisonnable, puisqu'on passe de quatre à six semaines et de quinze jours à trois semaines.
Je citerai en contre-exemple le calendrier du débat constitutionnel, qui traduit une certaine imprévoyance, les délais qui lui étaient impartis à l'origine étant tellement brefs qu'on pouvait se demander s'il serait même possible de débattre. Cela pose un problème de navette : si nous terminions dans les jours à venir, le Sénat devrait se saisir du projet dans les huit jours. On voit bien que c'est un mal chronique.
Je ne peux pas comprendre, chers collègues, l'argument selon lequel cette avancée pourrait se traduire par un recul dans les faits. Cet article est une avancée réelle puisqu'on ne pourra plus nous imposer des textes, sauf dans le cas d'une dérive vers l'urgence permanente.
Alors il faut la dénoncer, politiquement plus que juridiquement. Il est vrai que nous en avons tous assez de ces textes pour lesquels l'urgence est déclarée parce que leur fonction réelle est de permettre de passer à la télévision. Nous allons à ce propos examiner un amendement intéressant, par lequel il nous est proposé de ne plus l'appeler « urgence » mais « procédure accélérée ». Il suffit en effet qu'un chien morde un gamin pour qu'on invoque l'urgence de voter un projet de loi, qui est en réalité celle de passer à la télévision. C'est non seulement ridicule, mais indigne de la fonction de législateur, et surtout ce n'est pas vrai.
En effet.
L'avancée permise par cet article est donc renforcée par les amendements de la commission, sur lesquels je n'interviendrai pas, monsieur le président. Ces amendements sont réellement utiles en ce qu'ils aménagent des délais qui, cumulés, nous donneront le temps de travailler, sauf en cas d'abus de la procédure d'urgence. Dans ce cas, chers collègues, il nous reviendra à nous tous de le dénoncer, qu'on soit dans la majorité ou dans l'opposition.
L'artiste ne crée qu'en retranchant, madame la ministre. Il est temps de tailler dans votre projet, qui est « brut de fonderie », pour s'en tenir à l'essentiel. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Que cela soit très clair : il ne faut pas toucher à l'article 42 de la Constitution, tel qu'il a été adopté en 1958, car il était une avancée certaine vers la rationalisation du travail parlementaire, trop souvent brocardée.
Le travail en commission est certes excellent, et pour qu'il le soit plus encore, il suffit d'organiser notre temps, comme le font les membres de la Diète fédérale, qui travaillent deux jours en commission et deux jours en séance plénière : c'est ainsi qu'on travaille correctement. C'est aussi simple que cela, et cela ne nécessite pas de modifier la Constitution.
Mais votre texte place la commission au même niveau que la séance plénière. Je suis désolé : le Parlement, c'est ici. Aussi excellent et nécessaire que soit le travail en commission, c'est ici que ça doit se passer.
Ce que vous nous proposez, c'est simplement le retour à la ive République…
Si, monsieur le président, et on sait avec quelles difficultés les gouvernements faisaient passer leurs projets.
Vous ne pouvez pas le nier, monsieur Warsmann, c'est un fait historique.
Il faudra me le démontrer !
Ce que je crains dans ce retour, c'est que le texte du Gouvernement n'y perde de sa cohérence. On suppose en effet que le Gouvernement présente au Parlement un texte élaboré, cohérent et qui a une logique, une économie interne. Or la commission peut obéir à une autre économie, une autre logique. C'est tout à fait légitime, mais on ne doit pas pour autant chambouler tout le texte.
On voit très bien l'illogisme. Vous avez d'ailleurs vu le risque puisque votre texte pose des exceptions à ce principe. Je ne comprends pas : ou le principe est vrai pour tous les projets de loi, ou il ne l'est pour aucun : il ne peut pas être vrai pour une seule catégorie de textes. Votre projet manque là de cohérence : ça ne peut pas marcher.
Je suis intimement convaincu qu'il y a aussi un danger politique : outre que le texte qui nous sera présenté aura perdu de sa cohérence s'il est complètement chamboulé en commission, vous allez en séance plénière…
…ramer systématiquement à contre-courant pour obtenir ici une majorité contre celle de la commission. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
On voit clairement le profond illogisme dans lequel nous sommes, et c'est pourquoi je prône la suppression de cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour défendre l'amendement n° 398 . Nous comptons sur l'art de la présentation qu'on vous connaît pour que vous usiez d'arguments synthétiques.
Un nombre certain d'arguments peut s'avérer nécessaire, aussi synthétiques soient-ils ! (Sourires.)
Comme souvent sur les sujets importants, des passerelles peuvent s'établir dès lors qu'il s'agit de l'essentiel, c'est-à-dire du fonctionnement de notre État républicain, de la démocratie, de la nation, etc. Vous avez entendu Jean-Pierre Grand tout à l'heure, Jacques Myard à l'instant : nos arguments ne sont pas les mêmes, mais partant d'un biais différent, nous arrivons néanmoins à la même conclusion.
Avec cet article, nous sommes de nouveau dans les faux-semblants, et on ne doit pas dissocier l'article 16 de ce qui le précède ni de ce qui le suit.
L'article 15 renforce les conditions d'irrecevabilité ; l'article 18 multiplie les possibilités d'examen simplifié en commission. Par ailleurs, la conférence des présidents pourra réduire notre temps de parole dans l'hémicycle. Rappelez-vous que notre temps de parole a déjà été singulièrement réduit : je pense notamment aux motions de procédure.
On nous oppose de prétendus abus. Mais c'est aussi un moyen pour les parlementaires de s'expliquer et d'expliquer. Certains d'entre vous se souviennent des ordonnances Juppé, et surtout de ce qui s'ensuivit. Je vois que ce souvenir éveille encore chez certains de nos collègues émotion et douleur. (Sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Les trente minutes qui nous sont chichement concédées aujourd'hui n'auraient pas suffi à expliquer ce qu'était le fond des ordonnances : nous sommes contraints de rester dans le superficiel et nous ne pouvons faire aucune démonstration de fond.
Regardez les débats auxquels a donné lieu la loi de 1905 dans cet hémicycle.
C'était la IIIe République, et nous en sommes aux institutions de la Ve !
Certes, monsieur le président, mais si cet hémicycle avait plus de mémoire, nous aurions certainement des institutions plus démocratiques.
Je termine, monsieur le président. Il faut parfois raisonner par l'absurde. Admettons l'hypothèse que le célèbre amendement n° 252 au projet de loi relatif aux OGM, pour prendre un exemple récent et concret, eût été adopté en commission. Selon votre projet, c'est ce texte qui aurait dû être soutenu par le ministre dans l'hémicycle. Dans le cas d'espèce, vous avez la chance d'avoir deux ministres, Mme Kosciusko-Morizet et M. Borloo, qui ne sont pas du même avis. Mais vous n'aurez pas toujours la chance d'avoir un gouvernement schizophrène pour relayer une position prise en commission ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Ce raisonnement par l'absurde visait, monsieur le président, en mettant le doigt là où ça fait mal, à montrer à quel point ce texte n'est pas pertinent.
Avis défavorable, monsieur le président. Cet article extrêmement important représente un progrès considérable pour le travail du Parlement.
J'ai entendu certains collègues parler d'un retour à la IVe République.
Je vous invite à regarder ce qu'était la IVe République : vous constaterez que c'est très différent, puisque sous la ive République, le Gouvernement n'avait pas le droit d'amendement.
Le Gouvernement ne pouvait donc pas amender dans l'hémicycle le texte de la commission, et il devait trouver un député ami pour présenter un amendement conforme ce qu'il voulait.
Là c'est complètement différent. (Protestations sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je vous en prie ! Après avoir écouté respectueusement les avis des uns et des autres, je me contente modestement de dire qu'il est inexact de parler d'un retour à la IVe République.
Deuxièmement, nous reconnaissons tous souffrir de ce que le travail dans l'hémicycle soit souvent une redite du travail fait en commission. À partir du moment où une large majorité de la commission a fait évoluer le texte en votant des amendements, il n'est pas utile de recommencer les débats.
En revanche, s'il y a un différend entre le Gouvernement et la commission, l'hémicycle jouera tout son rôle en le tranchant : soit la majorité de l'hémicycle suivra la commission, soit elle votera l'amendement que déposera le Gouvernement. On rendra ainsi à l'hémicycle son rôle véritable, qui est de trancher les différends importants, et non de répéter tous les débats de la commission. Voilà pourquoi, monsieur le président, nous sommes extrêmement favorables à cet article 16, et par conséquent très défavorables aux amendements de suppression. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Comme je l'ai déjà dit, les débats en commission font évidemment l'objet de comptes rendus.
Et si nous prenions l'habitude de nous écouter les uns les autres ?
J'ai eu l'occasion de dire la nuit dernière qu'au cas où la révision serait votée, les règlements devraient être modifiés en conséquence, notamment en ce qui concerne les règles de publicité des débats en commission.
C'est que cela relève du règlement de l'Assemblée nationale. Mais à partir du moment où le rôle des commissions évoluera, il est évident que nous renforcerons la publicité des débats en commission. C'est la logique même, et je suis sûr, mes chers collègues, que dans quelques mois, quand cette révision entrera en application, ce que je souhaite, nous constaterons tous, quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons, qu'elle constitue un très grand progrès pour le travail concret de parlementaire. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous avez raison, monsieur Dosière : c'est sans doute la disposition la plus importante de ce texte.
Elle permettra d'abord la revalorisation du travail parlementaire. Il s'agira pour le Gouvernement d'une vraie révolution, puisque le texte discuté en séance ne sera plus le sien, mais celui de la commission. Cela l'obligera à travailler le plus en amont possible avec tous les membres de la commission, et non pas uniquement avec le rapporteur.
Cela revalorisera aussi le travail des parlementaires, dont le Gouvernement sera obligé de tenir compte. Il devra en tout cas motiver beaucoup plus ses demandes de rejet d'amendements. Le travail devra donc être beaucoup plus approfondi et beaucoup plus technique.
Comme vous l'avez dit, madame Billard, les séances publiques seront beaucoup plus intéressantes, moins techniques et sans doute plus politiques. Le débat en séance publique y gagnera en efficacité et en qualité.
Monsieur Brard, le droit d'amendement sera évidemment respecté : les amendements rejetés en commission pourront toujours être repris en séance publique et le Gouvernement pourra toujours amender le texte de la commission.
Compte tenu de l'importance de cette disposition, le Gouvernement est défavorable aux amendements visant à supprimer l'article 16.
Comme cela a été souvent dit dans la discussion, il s'agit ici de l'une des dispositions les plus importantes de ce projet de loi, qui constituera une avancée essentielle pour le déroulement de nos travaux.
Merci de me laisser terminer, monsieur Brard. Je vous écoute systématiquement et respectueusement,…
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Religieusement !
…et je souhaiterais que vous fassiez preuve du même respect.
Le texte du projet de loi prévoit que le texte débattu dans l'hémicycle sera celui qui a été adopté par la commission, inversant en quelque sorte la charge de la preuve. Si le Gouvernement estime son texte meilleur que celui de la commission, c'est à lui qu'il reviendra de déposer un amendement et d'exposer les raisons pour lesquelles il estime que c'est le cas. Il ne s'agit donc pas d'un retour à la IVe République car, comme l'a indiqué le rapporteur, le Parlement a la possibilité de déposer un amendement. En outre, ce dispositif exprime incontestablement le respect du travail accompli par les membres de toutes les commissions permanentes et représente une valorisation majeure du travail parlementaire.
Je tiens enfin à souligner pour Mme Billard, qui craignait que soit modifiée la façon de construire la loi, qu'il n'est ni dans le texte ni dans les intentions du Gouvernement et de la majorité qu'un amendement rejeté en commission ne puisse pas être à nouveau présenté en séance publique. Il ne s'agit donc pas ici de réduire le droit d'amendement, ni le droit de discuter d'un amendement.
Je ne vois donc dans l'article 16 que des améliorations et le groupe UMP votera contre les amendements visant à supprimer cet article.
Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 58, alinéa 1, du règlement.
Monsieur le président, voilà dix minutes que j'ai demandé la parole pour répondre au Gouvernement sur cet article et je regrette que vous ne me l'ayez pas donnée. Ce n'est pas ainsi que nous gagnerons du temps.
Les propos du Gouvernement et de la commission méritaient une réponse et un échange. Si, comme cela a été dit, cet article est le plus important ou l'un des plus importants du texte que nous examinons, je ne comprends pas qu'on ne prenne pas le temps de la discussion et de l'argumentation.
Je demande donc une suspension de séance de cinq minutes pour permettre à mon groupe de réfléchir sur la position à adopter pour la suite des débats.
La suspension est de droit.
Permettez-moi cependant de vous faire remarquer, cher collègue, que si nous voulions démontrer le besoin de faire évoluer notre règlement, nous en avons ici la preuve. Voilà en effet plus de 34 heures que nous débattons de ce texte ; un député de chaque groupe peut s'exprimer dans l'intervention liminaire sur les articles ; sont également possibles, sur chaque amendement, conformément au règlement, une intervention contre, puis, à l'appréciation de la présidence, des interventions permettant de répondre à la commission ou au Gouvernement ; lorsque de nombreux amendements identiques sont déposés, je m'applique à faire circuler la parole afin que les débats soient intéressants et vivants.
Le public qui regarde nos travaux a, comme nous-mêmes, besoin de clarté dans l'hémicycle. C'est avec ce souci que je donne la parole, au fil du texte, selon le décours de nos débats.
La suspension étant, je le répète, de droit, nous allons suspendre la séance pour cinq minutes.
Rappel au règlement
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures cinq, est reprise à dix-huit heures quinze.)
Je ne crois pas nécessaire d'apporter des arguments complémentaires à ceux que le président de la commission des lois a opposés aux amendements de suppression de l'article – en espérant que mon amendement ne subira pas le même sort ! J'ai trouvé son exposé remarquable : il a expliqué combien ce pouvait être important pour le travail parlementaire et pour la revalorisation du rôle du Parlement que de commencer la discussion en séance sur le texte adopté par la commission.
Dès lors, pourquoi en exclure deux textes essentiels : le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale ?
De surcroît, la commission des finances et celle des affaires culturelles, familiales et sociales sont deux commissions éminemment responsables. Ces dernières années, le texte voté par la commission des finances a même souvent été, sur le plan des finances publiques, plus raisonnable…
…que le projet initial du Gouvernement. Entamer la discussion en séance à partir du texte de la commission me paraît donc aller dans bon le sens.
En outre, comme l'a ditJean-Luc Warsmann, si le Gouvernement veut modifier le texte de la commission, nous pourrons en débattre en séance publique.
Je le dis une fois de plus : n'ayons pas peur des pouvoirs qui peuvent être les nôtres,…
…et ne craignons pas de les exercer. La Constitution de 1958 donne tant de possibilités au Gouvernement d'intervenir dans le débat que nous pouvons bien nous faire quelques plaisirs !
La parole est à M. François Goulard, pour défendre l'amendement n° 191 .
Mme la garde des sceaux nous a dit que l'article 16 est la disposition la plus importante du texte. Cela relativise l'importance de la révision constitutionnelle parce que, même si l'examen en séance du texte de la commission en lieu et place de celui du Gouvernement est une réforme heureuse, ce n'est pas pour autant un bouleversement de la Constitution. Toutefois, si cette réforme est si importante, il est contradictoire d'en exclure les projets de loi de finances, les PLFSS et les révisions constitutionnelles.
…nos commissions sont souvent, en termes d'esprit de responsabilité financière, plus sérieuses que le Gouvernement. Il est arrivé dans notre histoire récente que le texte de la commission soit moins dépensier, et que l'équilibre des finances publiques ou sociales soit mieux assuré à l'issu de l'examen en commission. C'est faire un mauvais procès aux parlementaires que de supposer qu'ils sont irresponsables en matière financière.
L'autre dérogation à la règle commune établie par l'article 16 concerne le domaine constitutionnel. Pourtant le travail parlementaire est, en matière constitutionnelle, par essence d'une meilleure qualité que le travail gouvernemental. Nous avons en commun avec le Gouvernement l'expérience du fonctionnement des pouvoirs publics, madame la garde des sceaux, et je puis vous dire que si le texte de cette réforme avait été écrit par les parlementaires, je suis absolument convaincu qu'il eût été meilleur que celui que vous nous soumettez !
Il est d'ailleurs paradoxal que la conception et la rédaction d'un texte censé concrétiser la volonté gouvernementale d'accroître les pouvoirs du Parlement aient échappé aux assemblées parlementaires. L'exclusion des révisions constitutionnelles de cette nouvelle disposition me paraît donc absolument contradictoire avec ce qui est annoncé par le Gouvernement.
Notre assemblée devrait, par souci de cohérence, adopter ces amendements pour que ce symbole fort – ou du moins présenté comme tel – du renforcement des pouvoirs du Parlement soit accentué dans sa portée et augmenté dans sa valeur. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour soutenir l'amendement n° 302 .
La commission a donné un avis défavorable.
Les arguments des auteurs des amendements ne sont pas d'une grande puissance en ce qui concerne les lois de financement de la sécurité sociale.
En matière de lois de finances, nous avons craint que les délais constitutionnels ne soient dépassés.
En effet, l'Assemblée peut-être dessaisie si elle n'a pas voté la loi de finances dans les délais requis. Or la reconstitution d'un texte dans la version de la commission nécessite de réécrire tous les tableaux d'équilibre, et je ne suis pas sûr que les services de l'Assemblée soient assez outillés pour les éditer suffisamment vite. Cet aspect technique est suffisamment important pour avoir incité la commission à donner un avis défavorable.
N'y a-t-il qu'un argument technique pour justifier votre avis défavorable, monsieur le rapporteur ?
Avis défavorable car les trois exceptions que ces amendements proposent de supprimer sont parfaitement fondées.
S'agissant des projets de loi constitutionnels, ils sont d'une nature particulière puisqu'ils traduisent l'engagement du Président de la République.
Il est donc normal d'avoir un débat dans l'hémicycle à partir d'un texte présenté au nom du Président de la République.
Quant aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale, ils sont l'expression de choix forts. Ils constituent vraiment le cap déterminant d'une politique gouvernementale, en termes de choix budgétaires mais aussi en termes de financement de la sécurité sociale. Il est donc important que l'on puisse totalement débattre dans l'hémicycle des choix du Gouvernement plutôt que d'un texte issu des choix de la commission.
C'est pourquoi nous souhaitons maintenir ces trois exceptions.
Malgré le respect que le membre de la commission des finances que je suis doit à son président, ainsi qu'à mon collègue François Goulard, je vais expliquer pourquoi le groupe UMP votera contre ces amendements.
Nous sommes tous d'accord sur le fait que les projets de révision constitutionnelle, la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale constituent les actes majeurs d'une volonté politique de l'exécutif. Si la rareté des premiers en marque le statut particulier, le caractère récurrent des seconds n'en justifie pas moins un traitement exceptionnel…
…car cette récurrence, acte fondateur d'une volonté politique, justifie pleinement que l'on conçoive pour ces lois un statut exceptionnel, en raison même de la cohérence d'ensemble du projet qu'a très justement évoquée tout à l'heure Jacques Myard.
Bref, si l'on continue à admettre que le Gouvernement, du fait de l'organisation des institutions de la Ve République, a la responsabilité non seulement d'exécuter le budget, mais aussi de le construire, il faut alors en conclure que c'est le budget dans le texte du Gouvernement qui doit être présenté en séance publique. Cela n'enlève rien à l'excellent travail d'enrichissement et de contrôle des lois de finances, apanage des commissaires aux finances, qui vérifient tout au long de l'année l'exécution du budget et apportent des éléments supplémentaires qui en compléteront la seconde partie.
Voilà pourquoi ces trois exceptions doivent être maintenues : en ce qui concerne la révision constitutionnelle, du fait de son caractère exceptionnel, et, s'agissant des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale, parce qu'elles sont l'expression de la volonté politique d'une majorité.
Il y a encore beaucoup de travail à faire pour que le Parlement devienne un vrai Parlement !
Notre marge de progression est forte. À cet égard, ce n'est pas seulement une question de textes – nous aurons vraisemblablement l'occasion d'y revenir lorsque nous aborderons le contrôle et l'évaluation –, mais aussi d'affirmation de soi et de volonté.
Monsieur Chartier, ce que vous venez d'exposer est en totale contradiction avec la démonstration du président de la commission des lois que j'ai rappelée tout à l'heure, qui montre combien l'examen en séance publique du texte de la commission est essentiel à la revalorisation du Parlement. Ce principe peut-il souffrir des exceptions ?
Oui !
Admettre des exceptions, ce serait oublier que le Gouvernement procède d'une majorité, qui le soutient.
Quelle marque de défiance de la part de l'exécutif s'il refusait de travailler à partir d'un texte susceptible d'avoir été corrigé par sa majorité !
J'avoue que les bras m'en tombent !
Votre argumentation ne tient pas, monsieur Chartier, même s'agissant d'un projet de révision constitutionnelle. En effet, à partir du moment où les débats en commission seront publics, dans les conditions de publicité dont le président nous a parlé – il faudra pour cela que nous modifiions notre règlement intérieur –, une majorité apparaîtra clairement, et le dialogue aura lieu en son sein entre elle et le ministre. Les arguments des opposants aux amendements ne résistent pas aux nôtres. Ou alors, autant dire que les parlementaires peuvent se saisir de l'ordinaire, mais que pour les textes importants, pas question de lâcher la bride !
Mais non !
C'est pourtant un peu ce que cela veut dire. Permettez-moi de le regretter. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
L'alinéa 4 de l'article 16 instaure un délai d'un mois entre le dépôt d'un texte de loi sur le bureau de l'Assemblée et son examen en séance plénière. Le comité Balladur avait proposé d'accorder deux mois pour la première assemblée saisie et un mois pour la seconde. Nous reprenons cette suggestion en proposant un délai de deux mois entre le moment où le texte est déposé et le moment où il vient en séance plénière – le travail effectué en commission est donc inclus dans ces deux mois.
Actuellement, la Constitution ne prévoit aucun délai, ce qui a permis aux gouvernements successifs de pousser à un examen rapide des textes. À l'inverse, le fait d'introduire un délai ne doit pas, du même coup, bloquer le travail parlementaire.
Notre proposition prend en considération le travail tant des parlementaires de la majorité que de ceux de l'opposition. Un député de l'opposition – c'est ma seule expérience – ne découvre un texte qu'à son dépôt en commission, sauf indiscrétions ou transmissions parallèles. La préparation des auditions – une opposition, comme une majorité a le droit de les pratiquer –, lorsqu'on souhaite faire un vrai travail, exige un peu de temps. Si nous voulons que le travail en commission, tel qu'il est prévu, se fasse dans des conditions qui vont servir le débat parlementaire, il faut du temps, et pour tout le monde. Voilà pourquoi nous en revenons aux propositions du comité Balladur – deux mois pour le dépôt, et un mois pour la deuxième saisine –, considérant que cela améliorerait l'efficacité du travail de tous.
La parole est à M. Jean-Claude Sandrier, pour soutenir l'amendement n° 399 .
Monsieur le président, par la même occasion je défendrai aussi l'amendement n° 574 , relativement voisin.
Tout à l'heure, notre rapporteur a affirmé que l'article 16 donnera un pouvoir accru aux commissions, et Mme la garde des sceaux a indiqué que le droit d'amendement serait respecté. Nous sommes prêts à les croire tous les deux, à une seule condition : la suppression des articles 15 et 18. Le premier limite le droit d'amendement avec une irrecevabilité législative renforcée ; le second le restreint aussi par la possible limitation de la durée des débats et par la multiplication de procédures simplifiées. Ces limitations sont renvoyées à un règlement ultérieur. Cela fait beaucoup de limitations et de conditions. Nous sommes prêts à vous croire : supprimez ces deux articles et tout ira bien.
Vouloir revaloriser le rôle des commissions, c'est aussi leur donner plus de temps. En l'état, les délais proposés laissent trop peu de temps aux commissions pour travailler sérieusement, d'autant qu'ils sont remis en cause par les déclarations d'urgence du Gouvernement – que l'article 19 du projet de loi facilite –, ou encore par le recours facilité aux amendements additionnels « fourre-tout », sur lequel l'article 18 ne revient pas. Les propositions intéressantes du comité Balladur n'ont pas été retenues alors qu'elles étaient pourtant très explicites : le fait de proposer le texte de commission à la séance publique ne peut, en aucune façon, être de quelque effet sans un rallongement des délais.
Pourquoi ne pas avoir retenu ces propositions pourtant longuement réfléchies ? Pourquoi donner l'un sans l'autre, alors que ces deux dispositions sont complémentaires ? De plus, pourquoi des textes essentiels comme le projet de loi de finances, le projet de loi de finances sur la sécurité sociale, les projets de loi de révision constitutionnelle ne sont pas concernés ?
Cela m'amène à l'amendement n° 574 . Nous pensons que le débat parlementaire doit se dérouler sur la base d'un texte présenté par le Gouvernement, tout simplement, parce que nous n'avons aucune garantie sur les avantages annoncés. La disposition proposée – débattre du texte modifié par la commission –, loin de clarifier les responsabilités et les enjeux, aboutit à verrouiller d'emblée le débat. Ainsi que je viens de l'expliquer, il suffit de se reporter aux articles 15 et 18 pour constater que l'échange n'en vaut vraiment pas la peine. S'il s'agit de donner plus de temps de discussion à la commission pour verrouiller le débat en séance publique, je ne vois pas où se trouve l'avantage.
La commission a été sensible aux arguments exposés par l'opposition, notamment par le groupe socialiste. En effet, nous devons disposer d'un temps minimum entre le dépôt d'un texte et son passage en séance plénière. Pour ne pas être désagréable au Gouvernement, je vais citer l'exemple d'une proposition de loi de la majorité, discutée récemment : nous avons eu le texte le lundi soir, pour un examen en commission le mardi ! Ce ne sont pas des manières de travailler. Je crois que nous devons nous autoréguler.
La commission a voté une position moyenne : nous demandons un délai de six semaines avant le passage devant la première assemblée, et de trois semaines avant le passage devant la seconde – contre les délais d'un mois et quinze jours prévus respectivement dans le projet de loi. Il ne nous semble pas qu'il faille aller trop loin, au risque d'encourager le recours à l'urgence. Il faut trouver une juste mesure, et la commission des lois estime que ces délais de six semaines et trois semaines constituent la bonne mesure.
Le Gouvernement émet un avis favorable à l'amendement n° 68 .
La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.
Compte tenu des éléments apportés par M. le rapporteur, nous retirons notre amendement n° 303 pour nous ranger à celui de la commission.
Notre amendement visait à porter de quinze jours à un mois le délai fixé entre le dépôt d'un texte sur le bureau de la deuxième assemblée saisie et son examen en séance plénière. L'amendement de la commission porte ce délai de quinze jours à trois semaines. Comme précédemment, nous nous rallions à la position du président Warsmann et nous retirons notre amendement au profit de celui de la commission.
Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.
Je suis saisi d'un amendement n° 336 .
La parole est à M. René Dosière, pour le soutenir.
Notre amendement porte sur les délais applicables aux textes sur lesquels le Gouvernement a déclaré l'urgence, ceux qui font l'objet d'une discussion accélérée.
Le projet de loi prévoit que pour un texte en discussion accélérée – une seule lecture –, les délais modifiés par la commission des lois que nous venons de voter ne s'appliqueront pas. Il est tout de même un peu curieux que sur ces textes, souvent importants pour le Gouvernement, la commission disposera d'un temps beaucoup plus limité pour produire son rapport alors même que ces projets ne donneront lieu qu'à une seule lecture. À la limite, les délais devraient être surtout préservés pour ces textes-là. Nous acceptons cependant qu'il soit plus réduit et nous proposons huit jours. Mais peut-être M. Warsmann préfèrera-t-il davantage, compte tenu des contraintes qui pèsent sur un rapporteur.
Tout à l'heure, notre collègue Jean-Yves Le Bouillonnec faisait valoir sa seule expérience d'opposant. Pour ma part, j'ai aussi une expérience de majoritaire, et je connais la charge de travail d'un rapporteur, qui va encore s'alourdir. Quand on examinera le texte de la commission, le rapporteur devra dialoguer avec tous les intéressés, avec le Gouvernement, avec sa majorité et – il faut l'espérer – un peu avec l'opposition. Tout cela exigera du temps, surtout si, comme nous l'espérons, les députés sont davantage présents en commission.
Notre collègue. Dosière pose une vraie question à laquelle nous n'avons pas réussi à trouver de solution.
Ce serait à l'évidence un abus si le Gouvernement utilisait l'urgence de manière systématique et imposait des délais raccourcis à l'excès. Cependant, il peut incontestablement se produire des situations où le Gouvernement a besoin de faire voter un texte en quelques jours. Nous n'avons pas trouvé de solutions car si nous fixions un délai minimum dans la Constitution, nous risquerions de bloquer un gouvernement qui pourrait avoir besoin, en période de troubles par exemple, de faire voter un texte très rapidement. Nous sommes donc défavorables à l'amendement n° 336 .
La Constitution doit conserver un minimum de souplesse. L'urgence s'adapte à des situations extrêmement variées et nous n'avons pas souhaité fixer de seuils ni de délais s'agissant de ces textes adoptés en urgence. C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 336 .
On peut accepter beaucoup de choses, mais j'ai tout de même quelques expériences en mémoire, comme celle du texte relatif au pouvoir d'achat au mois de décembre dernier : le matin à Matignon, l'après-midi en commission et le soir en séance publique ! Où est alors le pouvoir législatif ? Je ne parle même pas du problème de l'urgence, pour un texte débattu à la veille de Noël, mais bien, je le répète, du pouvoir législatif lui-même. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La difficulté est la suivante : si l'on institue les délais suggérés par M. le rapporteur, il faut aussi, dans le cas de la procédure d'urgence, imposer des délais à celui qui en est le seul acteur, à savoir le Gouvernement. À défaut, comme nous n'aurons aucun moyen de nous opposer à la qualification d'urgence qu'il retiendra, quelles que soient les circonstances, cela réduirait à néant ce que nous essayons de construire pour que le débat entre le Gouvernement et l'Assemblée, et, au sein de celle-ci – notamment dans les commissions – entre la majorité et l'opposition s'installe dans de bonnes conditions d'intelligence. L'enjeu est majeur et il est constitutionnel, puisqu'il intéresse les capacités de délibérer de notre assemblée. Si la Constitution ne prévoit pas un minimum de délai pour l'examen d'un texte sur lequel le Gouvernement aura déclaré l'urgence, ce n'était pas la peine, mes chers collègues, de discuter de ce qui précède !
Je me permets d'insister, monsieur le président : la notion d'urgence n'est pas affinée dans son contenu. Nul n'est capable de définir les conditions dans lesquelles un texte doit être déclaré urgent, que celles-ci soient sociales, économiques, politiques, environnementales ou de pure opportunité. Si l'on ne règle pas ce problème, les dispositions proposées par M. le rapporteur, dont nous avons souhaité l'adoption, n'auront aucun intérêt. Je le répète, la réforme n'a de sens que si elle a un véritable effet sur notre mode de travail et nos relations avec le Gouvernement.
Je suis saisi d'un amendement n° 135 .
La parole est à M. Richard Mallié, pour le soutenir.
Après les grands débats de ces derniers jours, mon amendement vous semblera peut-être relever de la pure sémantique. Je crois néanmoins qu'il a son importance, dans la mesure où la notion d'urgence n'est pas toujours bien identifiable par le commun des mortels : notre discussion le montre d'ailleurs un peu. Cette notion peut suggérer une certaine précipitation ou un manque de préparation. Les soixante-dix signataires de l'amendement n° 135 préféreraient donc lui substituer l'expression de « procédure accélérée ».
Lorsque la commission a examiné l'amendement, elle a émis, après réflexion, un avis défavorable.
La procédure d'urgence ne se réduit pas à une procédure accélérée : elle peut même être très longue. Elle consiste seulement à n'autoriser qu'une seule lecture à l'Assemblée et au Sénat avant l'éventuelle réunion d'une commission mixte paritaire. Mais il arrive que le Gouvernement déclare l'urgence sur des textes importants, lesquels donnent lieu à des débats vifs et fort longs.
La République n'est certes pas en danger avec cet amendement, loin s'en faut, mais la commission, pour des raisons techniques, a émis un avis défavorable : je me dois donc de vous en faire part.
Votre amendement vise à substituer au terme d'« urgence » l'expression de « procédure accélérée ». Vous avez raison, monsieur Mallié : la procédure d'urgence est accélérée puisqu'elle réduit la navette. L'expression « urgence » est cependant utilisée depuis cinquante ans : le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse de l'Assemblée. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Voilà ce que l'on appelle un pas de clerc ! Va-t-on faire de l'étymologie pour savoir si le mot « urgence » vaut mieux que l'expression de « procédure accélérée », ou inversement ?
Quelle que soit la manière de désigner la stratégie qui consiste, pour le Gouvernement, à faire travailler l'Assemblée plus vite, le seul problème, mes chers collègues, est que nous ayons le temps d'assumer notre fonction de législateur.
Il est vraiment dommage que certains de nos collègues se bornent à proposer de changer le nom de cette procédure : il aurait mieux valu réfléchir à la technique, c'est-à-dire à notre capacité d'examiner les textes soumis à une procédure d'urgence – ou « accélérée », si vous préférez – et au temps dont nous disposons pour ce faire.
Cet amendement éclaire la manière dont on est en train d'élaborer la réforme constitutionnelle. On agite des chiffons qui nous font lever la tête, avec des mesures intéressantes en apparence, comme celle relative aux délais. Mais le fond du problème est que si un gouvernement déclare l'urgence pour la moitié des textes qu'il dépose, on n'aura en rien valorisé le travail parlementaire. C'est donc vraiment, comme on dit au palais, un pas de clerc !
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.
Je ne peux pas laisser M. Le Bouillonnec tenir un tel raisonnement.
L'article 19 du texte prévoit en effet que les conférences des présidents de l'Assemblée et du Sénat pourront refuser l'urgence. Vous demandez sur quels fondements repose celle-ci : les conférences des présidents seront précisément habilitées à les apprécier. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Et qui siège majoritairement dans les deux conférences des présidents ?
Je dis bien « les » conférences des présidents. On peut très bien imaginer que les deux assemblées refusent l'urgence, même si elles n'ont pas la même couleur politique. Il s'agit donc d'un vrai pouvoir de contrôle pour le Parlement.
M. Le Bouillonnec oublie que nous vivons dans une démocratie médiatique. Quand nos concitoyens entendent le mot « urgence », ils ont l'impression – cela nous arrive aussi – qu'à peine annoncé, le texte est adopté et acquiert force de loi. Nous savons que tel n'est pas le cas.
L'expression de « procédure accélérée » suggère que l'examen ira plus vite, sans que ses effets en soient immédiats. Il s'agit donc d'un très bon amendement.
Deux précisions, monsieur le secrétaire d'État.
Dans son rapport, M. le président de la commission expose la fréquence des déclarations d'urgence au cours des différentes législatures. De 3 à 10 % des textes dans les années soixante, on est passé à plus de 65 % dans les années quatre-vingt, puis à plus de 51 % sous la neuvième législature, à plus de 37 % sous la dixième, de 42 % sous la onzième, et à près de 30 % sous la douzième. Nous n'avons pas encore les chiffres pour le début de la présente législature.
Bref, quels que soient les gouvernements, l'urgence – ou la « procédure accélérée » – est devenue fréquente. Vous évoquez par ailleurs l'article 19 et la possibilité donnée aux conférences des présidents de s'y opposer. Mais il faudra qu'elles le fassent toutes deux : une fois encore, vous mettez le Sénat sur un pied d'égalité avec l'Assemblée, et il fort possible que cela ne donne aucune garantie.
J'ai beaucoup de respect pour le Sénat, mais je n'accepte pas que l'assemblée élue au suffrage indirect soit mise sur un pied d'égalité avec celle élue au suffrage universel. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. – Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Ce n'était pas tout à fait l'objet de l'amendement en discussion, lequel a une portée un peu esthétique, comme un certain débat sur les plaques minéralogiques – n'est-ce pas, monsieur Mallié… (Sourires.)
Je mets aux voix l'amendement n° 135 .
(Après une épreuve déclarée douteuse, l'Assemblée est consultée par assis et levé.)
(L'amendement est adopté.)
(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je suis saisi d'un amendement n° 347 .
La parole est à M. François de Rugy, pour le soutenir.
Après m'être abstenu sur les amendements précédents pour ne pas allonger les débats, je souhaite m'exprimer sur celui-ci, qui participe de la même logique.
Nous sommes conscients que l'article 16 constitue une avancée : Mme Billard l'a reconnu. Le problème est néanmoins toujours le même : un pas en avant, puis, presque en même temps, un pas en arrière, lequel vide partiellement le premier de sa substance.
L'amendement n° 347 vise à supprimer l'exception réservée aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale. D'une façon générale, on n'écrit pas la loi pour un mois ou une année, mais pour longtemps. Il est donc logique que nous prenions le temps de la faire. Certes, comme l'a dit M. Lagarde, nous sommes dans une démocratie médiatique. Mais le Parlement n'a pas à se soumettre à la télévision ou à l'Internet : il doit prendre le temps de la réflexion, d'autant que, dans notre pays, on préfère souvent empiler les lois plutôt que de remplacer les anciennes par de nouvelles. Bref, il nous paraît normal de respecter le temps du travail parlementaire.
Il existe bien sûr des exceptions, et la procédure peut parfois être utile, mais à mon sens, il faudrait même en finir avec l'urgence, avec cette bougeotte politique permanente – vous voyez sans doute de qui je veux parler.
La loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale comptent parmi les textes les plus importants du calendrier parlementaire. Ils ne devraient donc pas être exclus de l'avancée prévue par l'article 16. On nous objectera sans doute que, dans la pratique, des délais suffisants seront observés. Sauf que, depuis un an, l'urgence a été déclarée sur presque tous les projets de loi ! Sur la pratique, on ne peut donc pas faire confiance a priori au Gouvernement : il faut prévoir des garde-fous.
En outre, les projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale sont des textes parmi les plus complexes : ils nécessitent donc un délai de préparation correct, et il n'y a aucune raison qu'ils fassent exception.
Tous les parlementaires connaissent cette situation : dans nos circonscriptions, des citoyens nous interpellent sur telle ou telle disposition fiscale, sociale ou autre,…
…pour laquelle le délai pour déposer un amendement, trop court, a expiré.
C'est pourquoi nous proposons de supprimer l'exception réservée aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale.
Évitons toute confusion.
S'agissant du PLF et du PLFSS, des délais spécifiques sont déjà fixés dans la Constitution : soixante-dix jours pour le premier, cinquante pour le second.
Afin d'éviter toute confusion, nous n'avons pas souhaité soumettre ces textes aux mêmes délais que les autres.
Avis défavorable.
Je suis saisi d'un amendement n° 70 .
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, pour le soutenir.
Je mets aux voix l'article 16, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 16, ainsi modifié, est adopté.)
Sur l'article 17, je suis saisi de cinq amendements, nos 192 , 237 rectifié , 426 , 489 et 19 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 192 , 237 rectifié , 426 et 489 sont identiques.
La parole est à M. François Goulard, pour soutenir l'amendement n° 192 .
Monsieur le président, mes chers collègues, mon amendement a pour objet d'augmenter le nombre des commissions permanentes de notre assemblée. Le projet de loi du Gouvernement le porte à huit : nous souhaitons, pour notre part, le porter à dix.
La révision constitutionnelle qui nous est proposée, tout au moins à travers un grand nombre de ses dispositions, a pour objectif de revenir sur certains aspects du « parlementarisme rationalisé » qui a présidé à l'écriture de notre loi fondamentale.
Didier Migaud l'a évoqué brièvement : depuis 1958, une évolution fondamentale a eu lieu avec l'apparition du fait majoritaire, qui, je vous le rappelle, n'existait pas pour les constituants de 1958 ; à l'époque, le Gouvernement ne disposait pas de majorité acquise. Celle-ci est apparue dans les années qui ont suivi. Le fait majoritaire a considérablement transformé la pratique politique et constitutionnelle dans notre pays. Il a été renforcé par l'élection du Président de la République au suffrage universel, en 1962, et par l'instauration du quinquennat. Dès lors, des restrictions imposées en 1958 au pouvoir parlementaire ne se justifient plus aujourd'hui.
La limitation du nombre de commissions permanentes allait dans ce sens : il fallait éviter que le Parlement ne devienne un contre-pouvoir. Or des commissions permanentes en trop grand nombre représentaient autant d'organes susceptibles de contrôler en permanence l'action des ministères.
Une telle dérive n'est plus à craindre, dès lors que le Gouvernement et la majorité ont a priori les mêmes positions sur les textes, qu'ils soient de moindre importance ou fondamentaux comme les lois de finances ou les lois de financement de la sécurité sociale.
Si nous voulons élargir notre champ d'intervention et aérer le travail parlementaire, il faut que l'ordre du jour de nos commissions soit moins chargé et qu'elles aient le temps d'approfondir les sujets : il faut donc que leur nombre soit plus élevé.
Passer de six à huit commissions, comme le propose le Gouvernement, est déjà un progrès, mais, comme un certain nombre de mes collègues, je pense qu'il ne serait pas excessif de porter leur nombre à dix. Cela renforcerait incontestablement les pouvoirs du Parlement.
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement n° 237 rectifié .
Mon amendement est identique à celui de M. Goulard. Si je souhaite porter à dix le nombre des commissions permanentes, c'est d'abord parce que l'on ne réforme pas la Constitution tous les huit jours…
En nous proposant d'augmenter le nombre des commissions, le Gouvernement répond à une demande forte, qui s'est exprimée à la suite du Grenelle de l'environnement, de créer une commission de l'environnement et peut-être du développement durable. Cela dit, le Parlement contourne aisément l'interdiction d'instaurer de nouvelles commissions en créant de multiples organismes parlementaires comme les délégations et les offices, mais ceux-ci ne répondent pas aux mêmes exigences de transparence que les commissions dont il est préférable d'augmenter le nombre.
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir l'amendement n° 426 .
Nous essayons aujourd'hui de corriger les excès de la Constitution de 1958. Les dérives de la IVe République – majorités absentes ou sans cesse renversées, débordements dus à un régime parlementaire liés et concentration des pouvoirs – ont rendu la France ingouvernable. Les constituants de 1958, en voulant mettre fin à ces excès, en ont commis d'autres : nous essayons aujourd'hui d'en corriger une partie.
Le fait de limiter le nombre de commissions est un outil essentiel pour entraver la capacité du Parlement à rééquilibrer ses pouvoirs face au Gouvernement. En proposant de porter le nombre des commissions à huit, le Gouvernement lève un tabou vieux de cinquante ans ! Mais nous sommes nombreux sur tous les bancs à considérer que cet effort n'est pas suffisant, dans la mesure où le passage de six à huit permettra seulement de scinder les deux commissions qui comptent le plus grand nombre de parlementaires : la commission des affaires économiques et la commission des affaires sociales. Je ne suis pas convaincu que cela suffise.
Il me paraît notamment indispensable de créer une commission de suivi de l'exécution des lois. Nous en avons déjà débattu lors de l'examen de l'article précédent : il nous est très difficile, à nous parlementaires, de suivre l'exécution des lois que nous votons, car chaque commission traite en urgence les textes qui lui sont soumis par le Gouvernement. Ce type de commission n'existe ni à l'Assemblée ni au Sénat. Or nous savons tous, et nous le déplorons, que 70 % des textes que nous adoptons ne sont jamais appliqués : c'est pourquoi il est indispensable de créer une commission de suivi des décisions. Or nous ne pourrons le faire si nous en limitons le nombre à huit.
J'ajoute que la plupart des Parlements européens ont beaucoup plus de commissions, ce qui leur permet de travailler dans de bonnes conditions. En tant que membre de la commission des lois, qui compte soixante-treize membres, j'observe que le local dans lequel nous sommes censés nous réunir ne permet pas d'accueillir l'ensemble des commissaires – peut-être est-ce pour cela qu'ils ne viennent pas – et j'imagine que c'est le cas pour les autres commissions. Que se passe-t-il dans les Parlements de nos voisins européens ? Il y a trente-deux commissions au Royaume-Uni, vingt-trois en Espagne, vingt au Parlement européen, et vingt et un au Bundestag – auquel la commission des lois a rendu visite au cours de la précédente législature.
J'en termine, monsieur le président ! Lorsqu'elles sont plus nombreuses, les commissions peuvent travailler dans de bonnes conditions et se spécialiser : les commissions de notre assemblée, nous le savons tous, traitent un trop grand nombre de sujets en même temps.
Sans aller jusqu'à vingt commissions, comme dans les régimes parlementaires, nous en proposons, dans notre régime semi-parlementaire, comme disent les spécialistes de droit constitutionnel, une dizaine. Cela nous paraît équilibré. Passer de six à huit commissions en scindant deux des commissions actuelles n'améliorera pas la capacité de travail et de contrôle du Parlement.
En augmentant le nombre de commissions, nous ne faisons que compléter l'article précédent, qui visait à accroître les pouvoirs des commissions.
Cela répond à la même logique. Du fait d'un nombre insuffisant de commissions, nous ne pouvons légiférer dans de bonnes conditions ni effectuer le fameux contrôle. Il faut donc en augmenter le nombre. Nous proposons de le porter à dix, pour les raisons déjà exposées mais aussi parce que cela permettrait, dans le cadre de notre règlement, de partager plus équitablement les présidences avec l'opposition… (« Nous y voilà ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Il n'y a pas pire argument que celui-là ! Vous tenez à ce que ces amendements soient rejetés ?
…ce qui est naturellement impossible avec un nombre de commissions restreint.
Enfin, cela permettra aux parlementaires d'être plus présents, et c'est la raison pour laquelle il faut également limiter le cumul des mandats : delenda est cumulatio ! (Sourires.)
Sur le vote des amendements nos 192 , 237 rectifié , 426 et 489 , je suis saisi par le groupe Nouveau Centre d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Daniel Garrigue, pour soutenir l'amendement n° 19 .
Monsieur le président, mes chers collègues, mon amendement pose la question de la place des affaires européennes dans les débats de l'Assemblée nationale. Certes, l'Assemblée nationale et le Sénat se sont dotés d'une délégation pour l'Union européenne, présidée ici même par notre collègue Pierre Lequiller, et qui accomplit un travail considérable. Mais comme le souligne M. Warsmann dans son rapport, la culture communautaire et le droit européen s'y expriment un peu en vase clos.
Nous avons de nombreuses occasions de débattre de l'Europe, notamment lorsque nous examinons, chaque année, le prélèvement sur les recettes de l'État destiné à assurer la contribution de la France au budget des Communautés européennes. Mais cette discussion a souvent lieu en marge de la discussion budgétaire : elle est souvent inscrite à l'ordre du jour le lundi ou le vendredi, lorsque les députés sont peu nombreux… Quant à la procédure de résolution, elle parvient rarement à la séance publique : il est donc difficile à la délégation de faire partager ses propositions à l'ensemble de l'Assemblée – et je pense que le problème est le même au Sénat.
Cette situation a des conséquences sur le plan juridique. Le paradoxe de l'article 88-4, c'est que les délégations sont chargées de suivre les projets de résolutions, de directives et de règlements communautaires avant leur adoption, afin de faire connaître au Gouvernement la position de chaque assemblée. Mais lorsqu'il s'agit de transpositions, elles ne sont plus saisies. Il y a là une certaine asymétrie.
Au-delà de cet aspect juridique, je voudrais dire à quel point il est difficile de faire descendre l'Europe dans cet hémicycle. Nous venons d'en avoir l'illustration : jusqu'à cette session, il était prévu qu'une séance de questions au Gouvernement par mois commence par des questions sur l'Union européenne. Cette procédure a été remise en cause au motif, nous a-t-on dit, qu'elle devait être mieux calée sur l'actualité. Depuis, nous n'avons eu aucune question sur l'actualité européenne. Cela m'amène à vous proposer de transformer la délégation pour l'Union européenne en commission des affaires européennes de plein exercice. Tel est l'objet de l' amendement n° 19 .
Vous me direz qu'une commission des affaires européennes peut être amenée à toucher à tous les domaines couverts par les autres commissions. C'est vrai, mais il appartiendra à la conférence des présidents de répartir les textes entre les commissions et de désigner, le cas échéant, celles qui seront saisies au fond et pour avis.
La commission des lois est défavorable à ces amendements. Que leurs auteurs se rassurent : je n'ai pas été convaincu par leurs arguments…
L'augmentation du nombre de commissions permettrait, nous dit-on, de mettre en place une commission chargée d'assurer le suivi des lois. Mais il ne s'agirait pas d'une commission législative : rien ne nous interdit, en l'état actuel des choses, de créer une commission spécialisée dans le suivi des lois. Nous débattons de commissions législatives ; l'objectif est de découper la matière des textes soumis à l'Assemblée en secteurs spécialement dévolus à chacune des commissions qui se verra « flécher » les projets ou propositions de lois relevant de sa compétence, en débattra et dont le texte issu de ses travaux viendra désormais en séance publique. Autrement dit, l'argument du suivi des lois, développé par Jean-Christophe Lagarde pour défendre la création de deux commissions supplémentaires, ne vaut pas.
Est-il nécessaire de créer une commission législative spécialisée dans le droit européen ? C'est à elle que reviendrait l'examen de tous les textes de transposition. Ainsi, un texte de transposition ayant trait aux affaires sociales ne serait plus examiné au fond par la commission des affaires sociales, mais par la commission chargée spécifiquement des affaires européennes. Quand on sait l'importance qu'a prise le droit européen dans le domaine législatif, cela ne me semble pas une bonne solution. Mieux vaudrait améliorer le système de la délégation et renforcer ses liens avec les commissions.
Pourquoi défendons-nous le chiffre de huit commissions permanentes ? Ce n'est pas par fétichisme… Depuis la précédente législature, nous avons énormément travaillé sur la question. J'aurai notamment une pensée pour le président Jean-Michel Dubernard, qui a été l'un des grands acteurs de cette réflexion.
Nous avions abouti à la conclusion que six commissions ne suffisaient pas et que deux d'entre elles, beaucoup trop étendues – affaires économiques et affaires sociales – devaient être divisées. Ce qui, pour les quatre autres, ne signifie pas qu'il faille en rester au statu quo : rien n'interdit de retoucher leur périmètre et de repenser l'organisation générale en recherchant un meilleur équilibre. Le nombre de huit commissions correspond à ce que souhaitaient tous les groupes politiques durant cette législature.
Je crois que votre groupe pluraliste, monsieur le président, l'avait aussi envisagé.
Notre débat montre bien que, si les Français ont des défauts, ils ont aussi une qualité : la créativité. Si nous inscrivons le chiffre de dix commissions dans la Constitution pour nous ménager une réserve de deux, je crains que les deux assemblées arrivent effectivement à dix commissions, ce qui à mon sens n'est pas utile. Je crois possible de travailler efficacement à huit et de traiter les questions de droit européen. La commission vous demande donc d'en rester à huit commissions et de voter contre ces amendements.
Depuis cinquante ans, il y a six commissions. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Heureusement, M. Brard est là pour nous rappeler ce fait, même si, pour ma part, je ne vois pas le rapport avec notre débat !
Depuis cinquante ans, disais-je, il y a six commissions.
Nous avons voulu revaloriser le travail des commissions. C'est pourquoi, dans le projet de loi constitutionnel, nous les faisons passer de six à huit.
Le rapport du comité Balladur, comme d'autres projets ici ou là, préconisait un nombre plus élevé de commissions. Ces propositions, au demeurant fort sympathiques, prônent une répartition différente de celle que nous vous proposons. Compte tenu de l'évolution du travail parlementaire, le nombre de nos commissions est à l'évidence devenu trop restreint. On peut imaginer créer une commission sur le développement durable, mais si nous lâchons par trop la bride, nous risquons de nous retrouver avec dix ou douze commissions, voire davantage…
Passer de six à huit commissions constitue une avancée non négligeable. À la suite de quoi, nous pourrons répartir entre elles l'ensemble du travail parlementaire.
Le Gouvernement souhaite par conséquent…
Le fait qu'il y ait six commissions figure dans la Constitution, et ce n'est pas moi qui l'y ai inscrit en 1958 ! Le texte du Gouvernement propose de porter ce nombre à huit et nous en resterons là.
Il est vrai que huit, c'est mieux que six. Je rappelle toutefois que si le rapport Balladur a préconisé de passer à dix, c'est que nous risquons de nous apercevoir dans quelque temps que huit commissions ne suffisent pas. Nous ne pouvons tout de même pas réviser la Constitution tous les jours ! Vous semblez reconnaître que la commission des affaires culturelles et la commission des affaires économiques sont pléthoriques et qu'il faut confier les questions d'environnement à une commission spécialisée. Pour ma part, je retiens les observations de M. Garrigue sur la délégation pour l'Union européenne qui, selon lui, gagnerait à être transformée en commission. Elle est déjà chargée de l'examen de tous les projets d'actes législatifs en vertu de l'article 88-4 de la Constitution. Mais il est paradoxal que cette délégation, tant à l'Assemblée qu'au Sénat, ne puisse suffisamment participer à nos travaux en séance ni suivre l'application des actes et la transposition des directives sur lesquels elle a été amenée à donner son avis.
Pour que l'Assemblée puisse mieux organiser son travail, nous devrions, par précaution, nous doter de dix commissions. Nous pourrons ensuite avoir un débat plus approfondi sur le nombre de commissions à créer à partir des commissions existantes ou des délégations à l'Union européenne. C'est pourquoi nous soutiendrons les amendements, dont celui de M. Lagarde, qui visent à passer de huit à dix commissions. Nous sommes également très sensibles aux arguments de M. Garrigue en faveur de la création d'une véritable commission des affaires européennes.
M. le secrétaire d'État a qualifié la proposition d'augmenter le nombre de commissions de « sympathique ». Je lui fais remarquer que si des députés de groupes très divers défendent la même proposition consistant à passer de six à dix commissions, c'est que celle-ci émane du comité présidée par M. Balladur. Le travail de ce comité n'est pas « sympathique », c'est un travail de fond qui répond à bon nombre de préoccupations.
Qui plus est, nous venons de voter une disposition précisant qu'à l'avenir, les textes qui viendront en discussion dans cet hémicycle seront issus du travail des commissions. Cette disposition risque d'être vidée de son sens si leur nombre reste trop limité. La redéfinition et l'amélioration des compétences et du périmètre de chaque commission seront plus aisées si elles sont au nombre de dix – ce qui est loin d'être excessif.
Monsieur le secrétaire d'État, dans la mesure où s'agit d'un texte constitutionnel, vous avez bien entendu parfaitement le droit vous prononcer. Reste que la question du nombre de commissions à l'Assemblée ressort éminemment du législatif. Cela ne mériterait-il pas que le Gouvernement s'en remette à la sagesse de l'Assemblée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Si nous voulons les faire passer de six à huit, c'est parce qu'il y a dans notre assemblée deux commissions pléthoriques, qui n'ont pas le temps d'effectuer le contrôle parlementaire nécessaire dans l'ensemble de leur champ de compétence. Tel est l'objet principal de la réforme qui nous est proposée.
Certains de nos collègues demandent la création d'une « réserve » de commissions supplémentaires, au cas où l'Assemblée souhaiterait passer de huit commissions à dix. Il y a, depuis une dizaine d'années, un consensus dans cet hémicycle sur le fait que la commission des affaires économiques et la commission des affaires culturelles doivent être scindées en deux. De nombreux rapports ont été écrits sur ce sujet. L'idée de créer une « réserve complémentaire » sans savoir aujourd'hui ce que l'on va y mettre me semble peu pertinente.
Plusieurs propositions ont été faites. La première, celle de M. Garrigue, vise à créer une commission des affaires européennes. Aujourd'hui, la délégation a pour vocation – de fait – à examiner pour avis des textes examinés au fond par d'autres commissions. Qu'en serait-il avec une commission des affaires européennes ? C'est elle qui aurait été saisie au fond du texte sur les OGM, puisqu'il s'agissait d'une transcription de directive. À croire M. Garrigue, la délégation aurait du mal à diffuser la culture européenne. Mais si vous la transformez en commission, les parlementaires ne pourraient être membres que de cette seule commission, puisque la double appartenance n'est pas possible. Or c'est précisément grâce à cette double appartenance – à la délégation et à une commission – que nous pouvons diffuser la culture européenne.
J'évoquerai enfin la question de la délégation aux droits des femmes, que certains d'entre vous souhaitent également transformer en commission. Nous serions confrontés à la même problématique que précédemment : la nouvelle commission se verrait saisie au fond de tous les projets relevant de la politique du genre, autrement dit de pratiquement tous les textes.
S'agissant enfin de la commission de suivi des lois, proposée par M. Lagarde, il n'est pas opportun de dissocier le vote d'une loi de son suivi. Le même rapporteur, qui a examiné au fond le texte de loi, doit ensuite en assurer le contrôle et le suivi. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Les commissions ne le font jamais, et vous le savez ! Je vous rappelle par ailleurs que M. Ollier est pour la création de sous-commissions !
La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
Je confirme les propos du président de la commission des lois et de Benoist Apparu. J'ai entendu tout à l'heure vanter l'exemple du Parlement allemand et de ses vingt commissions. J'ai reçu plusieurs fois, en tant que président de la commission des finances, la visite de parlementaires allemands, et je puis vous assurer que l'Allemagne aimerait bien copier le système français, avec son nombre limité de commissions (Exclamations sur divers bancs)…
…dans la mesure où leur multiplicité ne répond pas toujours à l'objectif, nécessaire, d'une vue d'ensemble.
Ajoutons que la création d'une commission spécifique pour les affaires européennes ne correspond pas à nos traditions et ne répond pas à la nécessaire prise en compte par toutes les commissions des questions européennes.
Dernière information, dont je sais qu'elle peut sembler incongrue dans cette assemblée : la présence de tous les députés est obligatoire dans certains pays. Ayant été président de commission durant plusieurs années, je dois dire que nous manquons parfois d'effectifs, sans parler des problèmes financiers – même s'ils peuvent paraître secondaires aux yeux de certains.
Incontestablement, la question du nombre de commissions fait débat. Les plus anciens d'entre nous et ceux qui s'intéressent à l'histoire des institutions savent que nous avons atteint, sous la IVe République, le chiffre record de dix-neuf commissions ! Nous frisions le ridicule.
Alors qu'on nous reproche en permanence l'inflation législative, je ne voudrais pas que l'on puisse nous accuser d'être à l'origine de l'inflation des commissions. (Exclamations sur divers bancs.)
Comme j'entends s'exprimer des avis différents, je vous demande, monsieur le président, de bien vouloir suspendre la séance, afin de parvenir, au sein du groupe UMP, à une position commune et à une expression la plus unanime possible. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe Nouveau Centre, du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Article 17
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à dix-neuf heures cinquante.)
J'espère, monsieur le président, que nous allons pouvoir avancer grâce au renfort de « soeur Emmanuelle » – célèbre depuis ses propos hostiles à la laïcité et favorables aux sectes, mais cela est une autre histoire…
J'en reviens aux amendements. Pierre Méhaignerie a pointé un problème – le coût représenté par la création de commissions permanentes supplémentaires – qui n'est évidemment pas essentiel : non parce qu'il a été relevé par Pierre Méhaignerie, mais parce que votre devise est d'ordinaire « un chou c'est un chou »… Là, mes chers collègues, on n'hésite pas à en rajouter, quitte à faire valser l'anse du panier !
Pour nous, huit, dix, douze, là n'est pas le problème. Il est exact que le Bundestag compte bien plus de commissions que l'Assemblée nationale. Lorsque les membres de la commission des finances ont voulu travailler avec leurs collègues allemands, cela a été très difficile, car nous n'avions pas véritablement de vis-à-vis. De même, Pierre Méhaignerie a eu raison de souligner le problème de la présence. Au Bundestag, il y a un pointage et quelle que soit l'activité des députés – en séance publique, en commission, etc. –, ils doivent être présents, ce qui est une excellente chose.
Mais finalement, peu importe le nombre de commissions permanentes : c'est la discussion dans son ensemble qui nous paraît surréaliste. D'abord, à entendre le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, on pourrait croire qu'un tel débat ne peut avoir lieu que tous les cinquante ans. Dans ces conditions, et à part, peut-être, Mme Dati et M. Apparu, je doute que nous soyons très nombreux à pouvoir aborder le sujet la prochaine fois…
Mais surtout, ce qui est choquant, c'est que le nombre de commissions permanentes soit ficelé par la Constitution. N'est-ce pas au Parlement qu'il appartient d'organiser son propre travail – et donc de déterminer, en fonction de ses contraintes et de ses besoins, le nombre de commissions nécessaires pour mener sa tâche à bien ?
Monsieur le président, je n'ai pas, en ce qui me concerne, besoin de « soeur Emmanuelle » pour m'inspirer. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je trouve désagréable, voire choquant que la directrice de cabinet du Président de la République vienne à l'Assemblée nationale pour donner le « la » aux députés de l'UMP et orchestrer la petite musique élyséenne ! (Mêmes mouvements.) C'est pire que le Politburo !
En conclusion, monsieur le président, nous ne voterons pas cet article.
En présentant mon amendement, j'ai déjà souligné l'inconvénient majeur que représentait l'absence d'une commission des affaires européennes à l'Assemblée nationale ; vous avez entendu Mme Guigou soutenir ce point de vue. La plupart des autres parlements ne connaissent pas pareille lacune.
Je comprends les inquiétudes de certains de nos collègues dans la mesure où les affaires européennes couvrent aujourd'hui pratiquement l'ensemble du domaine de la législation. Une commission permanente compétente dans ce domaine aurait donc, de fait, une compétence universelle, au point de porter ombrage aux autres commissions, voire de faire preuve d'impérialisme à leur égard.
Peut-on pour autant se contenter de la situation actuelle ? La délégation, sous la conduite de Pierre Lequiller, effectue un travail considérable. Malheureusement, elle fonctionne trop souvent en circuit fermé, et le résultat de ses travaux reste trop peu connu. Ce problème explique pour une large part le fait que les enjeux européens restent trop souvent éloignés de l'hémicycle.
Je fais donc une proposition. J'ai déposé un autre amendement tendant à modifier l'article 88-4 de la Constitution afin que la délégation, ou le « comité aux affaires européennes », comme elle pourrait désormais s'appeler, puisse présenter en séance publique, sur décision de la conférence des présidents, un avis sur des textes comprenant une dimension européenne – par exemple des projets de transposition d'une directive, ou qui abordent une question sur laquelle l'Union a une compétence déterminante, ou encore nécessitant une comparaison avec la législation en vigueur dans d'autres pays européens. Si l'Assemblée et le Gouvernement acceptent cette idée, je veux bien renoncer à l'idée d'une commission de plein exercice.
Je ne veux pas intervenir dans ce débat pour appeler la création de telle ou telle nouvelle commission. Dans ce domaine, chacun peut trouver moult arguments en faveur de sa propre idée géniale. En revanche, comme mes collègues socialistes, comme M. Goulard ou M. Lagarde, je suis favorable au passage à dix commissions permanentes, et ce pour une raison simple : la limitation de leur nombre à six fut un des moyens employés en 1958 pour rabaisser la position du Parlement par rapport au Gouvernement.
M. Karoutchi a eu bien du mal, tout à l'heure à nous expliquer pourquoi il était nécessaire de passer de six commissions à huit, mais pas de huit à dix, tout en laissant entendre qu'il en serait peut-être autrement dans cinquante ans. Si une limitation est nécessaire, pourquoi ne pas l'appliquer aussi au Gouvernement ? Lors de sa campagne électorale, le Président de la République n'avait-il pas longuement insisté sur l'intérêt d'un gouvernement resserré ? Or celui-ci, depuis son remaniement au lendemain des élections municipales, compte quinze ministres et vingt-deux secrétaires d'État, soit trente-sept membres au total ! Pourquoi le resserrage ne s'applique-t-il pas au Gouvernement ?
Selon moi, il serait logique qu'à chaque département ministériel corresponde une commission dotée d'un président ou d'une présidente, afin que l'équilibre soit assuré entre le Parlement et le Gouvernement. Mais nous ne vous demandons même pas d'aller jusque-là, seulement de franchir un pas supplémentaire et, en portant de six à dix le nombre de commissions permanentes, de permettre aux députés de travailler sur tous les grands sujets dont s'occupe le Gouvernement. Alors qu'un ministère d'État regroupe les questions relatives au développement durable, au transport, à l'énergie, il ne trouve en face de lui aucune commission permanente. Il n'existe pas davantage de commission correspondant au ministère de l'intérieur et de la sécurité. Passer de huit à dix, c'est vraiment le minimum.
Laisser croire que nos votes seraient dictés par l'Élysée est choquant, voire insultant. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Nous sommes parfaitement capables de penser par nous-mêmes. Et si nous pouvons exprimer des doutes, nous avons aussi le droit de changer d'avis.
Si j'ai défendu un amendement visant à porter de six à dix le nombre de commissions permanentes, c'est parce que je pensais – et je continue à le penser – que cette assemblée devait se voir dotée de pouvoirs plus importants. Cela étant, je me range aux arguments de la majorité : nous ne pouvons pas donner en permanence à l'opinion publique le sentiment que nous augmentons les dépenses.
Et dans la même logique, je suis favorable à une limitation du nombre de membres du Gouvernement comme de celui des parlementaires.
Je retire donc mon amendement.
L'amendement n° 237 rectifié est retiré.
La parole est à M. Pierre Lequiller.
Je remercie M. Garrigue et Mme Guigou de leurs bonnes intentions à notre égard, mais, comme je l'ai déjà clairement dit lors de mon audition devant la commission des lois, je ne souhaite pas que la délégation pour l'Union européenne devienne une commission permanente.
Notre délégation a deux spécificités : d'une part, par le vote de résolutions, elle donne des avis au Gouvernement – lequel les suit d'ailleurs largement – ; d'autre part, tous ses membres sont également membres d'une des six commissions permanentes. Cette règle de la double appartenance est extrêmement importante dans la mesure où elle permet d'irradier les autres commissions.
Ensuite, je ne peux pas laisser dire que nous travaillons en vase clos. Nous nous sommes au contraire efforcés d'organiser, à plusieurs reprises, des réunions communes avec les commissions permanentes. À la demande du président de l'Assemblée, nous avons également constitué un pôle européen au sein de chacune d'elle. Enfin, nous fournissons des études comparatives aux commissions lorsqu'elles examinent les projets de loi. Pour aller plus loin – on le verra à l'article 32 –, il serait même intéressant que, lors des discussions en séance, la délégation puisse faire état de la législation en vigueur en Europe sur le sujet dont il est question.
Nous devons par conséquent en rester au texte du Gouvernement sur la future dénomination, les fonctions et les particularités de la délégation.
Si le porte-parole de la majorité a retiré son amendement, le groupe socialiste maintient pour sa part le sien.
Je m'étonne quelque peu de la procédure choisie. Au fond, de quoi s'agit-il ? Nous venons de voter un article qui vise à renforcer le pouvoir des commissions puisque, en cas d'adoption du projet, les textes seront désormais examinés en séance publique tels qu'ils auront été amendés par la commission saisie au fond. Or nous savons tous que le nombre actuel des commissions est insuffisant dans la mesure où leurs compétences respectives sont trop dispersées.
Nous étions donc unanimes à proposer le passage de six à dix commissions permanentes. N'était-ce pas, d'ailleurs, la proposition du comité présidé par Édouard Balladur ? Or nous ne pouvons que constater la pression du Gouvernement pour s'y opposer, alors qu'il est seulement question d'assurer le bon fonctionnement de l'Assemblée. Aussi le Gouvernement aurait-il dû s'en remettre à la sagesse de l'Assemblée.
D'ailleurs, pour être certain que tout va bien se passer, à savoir que l'amendement que nous proposons sera repoussé, ce qui est vraisemblable, il a fallu quinze minutes de suspension de séance, une pression très forte de l'exécutif, le rappel du président de groupe. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Et vous venez nous dire, après cela, monsieur Pancher, que les parlementaires de la majorité prennent leurs décisions en toute conscience !
De plus, monsieur le secrétaire d'État, vous connaissez ma position sur le projet puisque j'ai signé, avec un certain nombre de camarades, un texte qui dit à quel point nous le trouvons sympathique.
Qu'est-ce que ça veut dire ?
Je trouve que la manière dont le Gouvernement s'y prend sur tel ou tel amendement n'est pas de nature à nous faire penser que son intention est vraiment de réhabiliter le travail du Parlement. Dans ce cas, il ne faudra pas compter sur notre accord.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.
Je respecte pour ma part tout le monde et je fais très attention à ce que je dis sur les activités et les propos des élus, quel que soit leur bord.
Monsieur Dosière, quand vous affirmez que l'exécutif a exercé une pression intolérable sur les députés de la majorité, laissez-moi vous indiquer que je n'avais pas à intervenir dans le déroulement de la réunion du groupe UMP.
Aussi n'ai-je pas ouvert la bouche, non plus que madame le garde des sceaux ! Seuls les élus ont pris part à la discussion. Dès lors, quand vous soutenez qu'il y a eu des pressions insupportables, il suffit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Autrement dit, le Gouvernement n'a même plus besoin de s'exprimer pour être obéi !
Je vous en prie, monsieur Dray !
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, et à lui seul.
Chers collègues, nous avons dû nous égarer au cours de la discussion. Peut-être certains d'entre nous n'étaient-ils pas présents au moment où nous l'avons commencée.
L'amendement proposé vise à porter le nombre des commissions permanentes à dix, soit moitié moins qu'au Parlement européen. Si on nous le refuse, c'est que l'on n'accepte pas l'idée de nous réunir par groupes de soixante pour travailler... Nous savons tous à quoi se résume le travail au sein de certaines commissions. Un de nos collègues ne disait-il pas, en sortant de l'hémicycle, ne plus s'y rendre…
…dans la mesure où l'on y est si nombreux qu'il est impossible d'y travailler ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Rires sur divers bancs.) Riez, riez ! Vous savez pertinemment comment cela se passe... Du reste, si l'on a fait monter autant de députés en ligne, ce n'est pas pour rien ; c'est bien parce que les parlementaires ici présents savent comment se déroule réellement le travail en commission.
J'appelle d'ailleurs votre attention sur l'amendement suivant, proposé par un président de commission qui n'a rien d'un farfelu. Ce président nous a expliqué pendant les auditions en commission, monsieur le rapporteur, que, dans l'incapacité où il se trouvait de faire travailler ses commissaires dans de bonnes conditions – au point qu'ils ne pouvaient guère, notamment, suivre l'action gouvernementale – il a pris la liberté, et il le propose, de créer des sous-commissions au sein de sa commission. Il s'agit de M. Patrick Ollier, qui a été président de l'Assemblée nationale,…
…aujourd'hui président de la commission des affaires économiques. Je ne pense pas qu'il ait dit cela pour rien.
Passer à dix commissions, loin d'être excessif, me paraît au contraire tout à fait raisonnable. Si nous ne sommes pas capables de voter cette mesure, il va être singulièrement difficile de revaloriser le Parlement.
Je ne reviens pas sur la discussion relative au nombre de commissions, mais sur un argument qui me dérange terriblement : la nécessité de faire des économies, quand bien même il s'agit du débat démocratique. La qualité du débat politique exige des moyens ; cessons donc de défendre l'idée que la limitation du nombre des commissions permanentes ou, plus largement, de tout moyen utile au débat démocratique, permet la réalisation d'économies.
M. Karoutchi peut sans doute nous donner les résultats sans qu'il soit nécessaire de procéder au vote !
(Il est procédé au scrutin.)
Prochaine séance, ce soir à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République (nos 820, 892, 881, 890, 883).
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma