La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
Pour bien dialoguer il faut savoir de quoi l'on parle et être par conséquent d'accord sur le sens des mots. Or, depuis hier soir, nous sommes victimes d'un certain obscurcissement.
Je m'adresse à vous, madame la présidente, pour savoir s'il vous est possible de saisir la Conférence des présidents pour qu'elle-même saisisse l'Académie française afin de redéfinir le sens des mots. Hier soir, en effet, le Président de la République a sans cesse parlé de vérité alors qu'il n'a fait qu'égrener des mensonges comme autant de grains d'un chapelet.
Il convient donc de redonner aux mots leur sens originel, faute de quoi il faudrait récrire le Petit et le Grand Robert, ainsi que les autres dictionnaires.
Mercredi soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles de la seconde partie du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement n° 134 rectifié portant article additionnel après l'article 12.
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 134 rectifié .
Je regrette que nous commencions par cet amendement qui va m'obliger à revenir sur le débat surréaliste que nous avons eu à propos de l'amendement précédent – portant sur les services à la personne –, maltraité au beau milieu de la nuit de mercredi à jeudi, alors qu'il était le fruit de deux ans de travail. Mais le vote est acquis et il n'est pas question d'y revenir.
Les services à la personne représentent, certes, un important gisement d'emplois, développé par plusieurs gouvernements, mais nous souhaiterions limiter la dépense fiscale liée à la réduction d'impôt qui les concerne, une dépense qui avoisine 4 milliards d'euros par an.
Je n'en dirai pas plus puisque nous avons déjà souvent défendu cette mesure, sauf pour préciser que le présent amendement vise à baisser le plafond des dépenses prises en compte, ce qui ne pénaliserait pas les usagers ordinaires, si je puis dire, mais permettrait de revenir à plus de raison en évitant le dévoiement de ce dispositif.
La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Même avis.
(L'amendement n° 134 rectifié n'est pas adopté.)
Selon un récent rapport du Conseil des prélèvements obligatoires, les niches fiscales et sociales coûtent chaque année 150 milliards d'euros à l'État. Vous imaginez les ressources dont vous disposeriez, madame la ministre, si toutes ces niches illégitimes étaient supprimées.
L'article 200-0 A du code général des impôts dispose que le montant des réductions d'impôt procuré par une niche fiscale est plafonné à 18 000 euros, plafond extrêmement élevé : 18 000 euros est une somme qui ferait rêver ceux qui touchent le SMIC ou le RSA. Cette disposition représente un manque à gagner important pour l'État et ne profite qu'à de très hauts revenus qui n'ont pas besoin de cette niche pour vivre dans l'opulence.
On autorise ces grandes fortunes à ne pas payer d'impôt sur le revenu à concurrence de ce qu'un salarié au SMIC met un an, quatre mois et dix-neuf jours à gagner, après avoir travaillé dur.
Il s'agit donc d'un amendement de raison et, madame la ministre, vous qui cherchez chaque petit euro comme d'autres cherchent la radioactivité avec leur compteur Geiger, nous vous apportons des ressources sur un plateau.
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 244 .
…un amendement similaire. Je n'y reviendrai donc pas, d'autant que nous l'avons défendu très souvent. La fixation du plafonnement à 18 000 euros plus 4 % du revenu imposable représentait certes un progrès puisque ce plafond n'existait pas auparavant. Il a certes été légèrement abaissé par la suite mais il reste considérable.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 253 , amendement de repli, si j'ai bien compris.
En effet, madame la présidente, mais vous savez, quand on est au combat, on fait comme on peut pour essayer, malgré tout, de se donner du temps. Nous sommes dans un état d'esprit coopératif et souhaitons donner le temps à Mme la ministre de réfléchir ; quelques minutes supplémentaires lui seront fort utiles car elle paraît ce matin quelque peu perdue dans ses papiers.
Votre politique s'est traduite pendant des années par l'accumulation sans précédent de niches. On pourrait dire qu'elles ont grandi à proportion de l'augmentation du chômage : on compte un million de chômeurs de plus et 150 milliards d'euros de cadeaux fiscaux consentis sous des formes diverses aux plus riches.
Compte tenu du poids exorbitant de ces dépenses fiscales dans l'aggravation des déficits, sur lesquels nous n'avons cessé de vous alerter, votre majorité s'est résolue à proposer un plafond global pour ces niches, mais bien trop élevé, et nous restons aujourd'hui dans le symbolique, dans le cosmétique, plus que dans la remise en cause des privilèges accordés.
Si vous adoptez cet amendement, ce sera un progrès puisqu'il s'agit de supprimer la référence au pourcentage du revenu imposable et de conserver seulement le plafond de 18 000 euros. C'est une mesure modeste mais, en la votant, vous feriez un geste, après le discours lénifiant, hier, du Président de la République, qui veut nous faire oublier ce qu'il a fait depuis 2002, et vous montreriez votre souci de prendre en compte le réel pour essayer de prendre l'argent là où il se trouve.
Défavorable. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2012, il y a quelques semaines, nous avons beaucoup avancé sur ce sujet : le pourcentage qui soulève votre ire a été considérablement abaissé puisqu'il est passé de 6 à 4 %, et je rappelle qu'il était encore de 10 % il y a deux ans. Le plafond de l'avantage procuré par les niches fiscales paraît raisonnable puisqu'il est fixé à 18 000 euros plus 4 % du revenu imposable.
Il convient en outre de faire attention à ne pas entrer en contradiction avec les dispositifs d'investissement industriel outre-mer. Aussi faut-il calibrer le plafonnement global par rapport au plafonnement de telle ou telle niche particulière : le plafonnement global doit être au moins égal au plafonnement particulier de telle ou telle niche. Et parmi ces dernières, il en est une que nous devons préserver : le dispositif d'investissement industriel outre-mer ; d'où un plafonnement global de 18 000 euros plus 4 % du revenu imposable.
Défavorable.
J'admire votre précision et votre optimisme, monsieur le rapporteur général, mais nos collègues les plus assidus – et ils sont très nombreux ce matin – savent bien que l'ensemble des niches fiscales n'est pas touché par ce plafonnement puisque, vous l'avez reconnu vous-même, seuls 10 milliards d'euros sur un total de 35,5 milliards sont concernés.
Vous vous vantez d'avoir instauré un plafonnement, vous vous vantez de l'avoir diminué mais vous menez une politique des petits pas sur un plafonnement qui ne concerne pas l'ensemble des niches fiscales. Or l'heure n'est plus aux petits pas mais à des décisions qui rétablissent une vraie justice fiscale.
Je souhaite apporter une précision afin que nous tâchions d'appréhender cette question de la façon la plus objective. Vous avez raison, monsieur Eckert : les niches fiscales représentent un total de 35,5 milliards d'euros et le plafonnement global ne touche que 10 milliards d'euros – il est question de l'impôt sur le revenu.
Comment expliquer la différence entre ces deux chiffres ? On doit tenir compte de la prime pour l'emploi et de tout un ensemble de revenus exonérés comme ceux liés au handicap par exemple. Une dépense fiscale n'est pas concernée par le plafonnement : celle liée aux emplois familiaux, aux services à domicile dont nous avons déjà discuté.
Ensuite, comment a été introduit le plafonnement global ? J'avais déjà abordé ce sujet quand je me trouvais dans l'opposition entre 1997 et 2002. À l'automne 2008, avec Didier Migaud qui présidait la commission des finances, nous avons pris l'initiative d'engager un contrôle sur pièces et sur place. Nous nous sommes rendus conjointement auprès de la direction de la législation fiscale à Bercy où nous avons été parfaitement accueillis.
Il y a accueil et accueil, monsieur Brard.
Nous avons demandé à étudier le cas des contribuables bénéficiant des taux de défiscalisation les plus importants, nous avons demandé comment se répartissaient les réductions d'impôts, sur quels types de dépenses fiscales.
Je le redis, cela a été vraiment un travail d'initiative parlementaire conduit par l'ensemble de la commission des finances.
Quand, il y a trois semaines, Charles de Courson nous a présenté un amendement ramenant le pourcentage de 6 % à 4 %, j'étais moi-même hésitant. Et, en l'absence de collègues ultramarins, j'ai soulevé le problème pour l'outre-mer à leur place. Peut-être pourra-t-on encore descendre, mais je vous assure que les marges de manoeuvre ne sont pas considérables.
Permettez-moi de m'attarder un instant sur ce sujet. Il ne suffit pas de dire qu'on supprime 50 milliards de niches fiscales, il faut désigner très précisément lesquelles et montrer par des additions qu'on arrive à 50 milliards. Là, on se rend compte que tout un ensemble de dépenses fiscales a une utilité qu'on ne peut absolument pas nier. C'est l'approche que je voudrais voir adopter, en tout cas au sein de la commission des finances.
S'il y a encore des efforts à faire en la matière, ce n'est pas encore la panacée, la recette miracle qui permettra de supprimer le déficit public.
Personne ne met en cause le caractère méticuleux, acharné, consciencieux, moral, du travail du rapporteur général. À mon avis, dans une vie future, il pourra prétendre entrer dans l'ordre de saint Benoît, tellement ce travail est méticuleux.
C'est un avenir qui garantit les plus belles perspectives, pour ceux qui y prétendent, bien sûr.
Il est vrai que retirer des avantages qui ont été consentis, c'est comme retirer une pièce d'un puzzle. Même si je considère qu'ils ne sont pas utiles, ils jouent quand même un rôle. C'est donc tout un processus qu'il faut mettre en place pour démonter le système de tous ces avantages.
Vous avez commencé, dites-vous. D'une certaine manière, c'est vrai, même si Christian Eckert a complété votre propos d'une façon fort utile pour garantir l'objectivité de nos débats. Comme on dit dans ma Normandie natale à propos de quelqu'un qui est très lent : lorsqu'on aura besoin de la mort, on l'enverra la chercher, comme cela, on sera centenaire. (Sourires.) Le rythme que vous avez adopté ne nous garantit pas la justice fiscale et sociale pour demain.
(L'amendement n° 242 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 244 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 253 n'est pas adopté.)
Il s'agit d'un amendement que notre collègue Marc Le Fur a préparé en liaison avec Aurélie Filippetti.
Je n'ai pas dit en accord, j'ai dit en liaison, monsieur Eckert. Ils ont cheminé de conserve sur une partie du sujet, puis ont divergé.
Il s'agit de diminuer les possibilités de réduction d'impôt s'agissant des dons ou des cotisations aux partis politiques. Aujourd'hui, on peut avoir une réduction d'impôt au taux de 66 %, plafonnée à 7 500 euros par personne, quel que soit le bénéficiaire du don. Pour éviter la multiplication à l'infini des dons dans le cadre de ce plafond de 7 500 euros, il est proposé de fixer un plafond global de 15 000 euros par foyer fiscal. Quelle que soit la multiplicité des dons, en tout état de cause, l'addition de ces dons et cotisations aux partis politiques ne pourrait être défiscalisée qu'en dessous de ce plafond de 15 000 euros.
On progresse bien là dans le souci de limiter un certain nombre de dépenses fiscales.
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 307 .
Là encore, c'est la politique des petits pas. Les collègues qui ont travaillé dessus le savent, le sujet est très sensible car il mêle des questions, soulevées par un certain nombre d'affaires, qui heurtent l'opinion publique. Sur ce sujet sensible, nous sommes attendus, à la fois par nos concitoyens mais aussi quelques journalistes qui, légitimement, font leur travail d'information, parfois jusqu'à la caricature.
Deux questions sont traitées. La première est : que peut-on donner aux partis politiques ? Aujourd'hui, s'il y a des limites par parti politique, il n'y a pas de limite pour le total des dons. D'où la création d'une multitude de micro-partis et associations de financement, vers lesquels sont envoyés des dons multiples plafonnés à 7 500 euros qui sont finalement souvent remontés à une structure centrale. Voilà ce qu'il faudrait limiter.
L'amendement de M. Le Fur ne répond pas à cette question. C'est pourquoi, sur ma suggestion, l'exposé sommaire a été revu. Il ne faudrait pas qu'on nous accuse d'avoir un double langage, de faire croire qu'on a limité, rendu impossibles même, les dons multiples d'une même personne à des associations parasites qui permettent de financer un seul parti, dans des proportions excessives, pour contourner l'esprit de la loi.
Il répond de façon tout à fait correcte à une autre préoccupation : limiter la déductibilité fiscale des dons et des cotisations en les plafonnant. Il ne fait que cela, mais c'est déjà un pas, même si ce n'est pas ce qui empêchera la multiplication de dons à des micro-partis ou à des associations de financement. La déduction fiscale ne sera possible que dans la limite de 15 000 euros par foyer fiscal. C'est une petite avancée, mais pas la solution.
L'amendement de notre collègue Aurélie Filippetti, en revanche, allait plus loin en fixant une limite, mais il a dû être retravaillé pour ne pas être considéré comme un cavalier. Mme la ministre, ou peut-être le rapporteur général, pourrait-elle m'indiquer dans quel véhicule législatif on pourrait introduire une clause qui répondrait à la première préoccupation, c'est-à-dire qui limiterait la possibilité de faire des dons globalement à 15 000 euros par foyer fiscal ?
Défavorable à l'amendement n° 307 . Je n'ai pas mentionné le point sur lequel nos collègues ont divergé. Pour Marc Le Fur, puisque nous sommes dans un collectif budgétaire, on ne traite que l'aspect fiscal, alors qu'Aurélie Filippetti revient également sur certaines dispositions de la loi relative à la transparence financière de la vie politique. Tous deux ont convenu que le sujet méritait une remise à plat générale qui n'était pas possible dans le cadre du collectif.
L'ambition de l'amendement de Marc Le Fur, c'est vrai, est moins grande que celle de l'amendement d'Aurélie Filippetti. Pour ma part, je souhaite qu'on s'en tienne à l'aspect fiscal.
La proposition est raisonnable car elle permet de faire des dons à plusieurs partis, y compris aux micro-partis. Mais ces micro-partis, monsieur Eckert, y compris en Meurthe-et-Moselle, peuvent être utiles.
Nous avons le souci de faire respirer la démocratie sous toutes ses formes, y compris dans sa capillarité extrême.
Favorable à l'amendement n° 14 et défavorable au n° 307.
Nous voterons l'amendement de M. Le Fur, même s'il ne va pas suffisamment loin. Cela dit, j'attendais de Mme la ministre qu'elle indique à quel moment un texte législatif nous permettrait de pousser plus loin nos ambitions. Nous pouvons toujours déposer une proposition de loi, mais le Gouvernement est maître de l'ordre du jour.
Elle ne peut pas prendre d'engagement pour le moment où elle ne sera plus là !
(L'amendement n° 14 est adopté.)
Il est défendu.
(L'amendement n° 344 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 368 .
Il s'agit d'un amendement très important dont l'objectif est de dissuader les versements de sur-indemnités, qui sont véritablement choquants et heurtent la conscience de nos concitoyens. Sont visés les dispositifs de retraite chapeau et d'indemnité de rupture du contrat de travail lorsqu'ils sont excessifs.
Un seuil est prévu, à partir duquel une contribution, fixée à un taux dissuasif, est due. Ce seuil est de trente fois le plafond de la sécurité sociale. Ainsi, toute rémunération, dont certaines peuvent atteindre des sommes folles, dépassant de trente fois le plafond de la sécurité sociale serait taxée à hauteur de 20 %.
(L'amendement n° 368 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 296 rectifié .
Le sujet est important dans une période où tous les populismes prospèrent et mettent en cause la vie et le personnel politiques, en particulier en matière de finances. Tous, nous devons contribuer à la transparence. Trop d'affaires nauséabondes ne sont pas éclaircies. On a encore parlé cette semaine de l'affaire Balladur Karachi, même si celui qui a revêtu les habits du procureur est un homme particulièrement sulfureux. Que ce soit cet homme-là qui porte les accusations ferait presque accorder du crédit à qui n'est pas d'accord avec lui.
L'amendement propose de modifier la clé de répartition des crédits affectés au financement des partis et groupements politiques, qui serait davantage respectueuse de l'expression démocratique du peuple français.
Actuellement, le financement de la vie politique est trop axé sur l'importance du nombre d'élus, ce qui le déconnecte des suffrages réellement exprimés par nos concitoyens.
J'invite tous nos collègues, en particulier ceux qui militent pour une VIe République et souhaitent revaloriser le rôle de l'Assemblée nationale, à voter cet amendement.
(L'amendement n° 296 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 225 .
La parole est à M. Christian Eckert.
Cet amendement se défend très simplement et très sommairement. Il porte sur l'une des déductions appliquées aux services à la personne ; il s'agit de rentrer dans le plafond.
Attention aux bosses !
(L'amendement n° 225 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie de deux amendements, nos 339 rectifié et 340 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Christian Eckert pour présenter l'amendement n° 339 rectifié .
Il s'agit d'une disposition qui a recueilli l'assentiment d'un certain nombre de membres de la majorité, visant à créer une tranche d'impôt sur le revenu supplémentaire à hauteur de 45 %.
Alors que le Président de la République nous dit que l'heure est grave et qu'il faut prendre des dispositions, celle-ci nous semble tout à fait juste. Elle consiste à revoir le barème de l'impôt sur le revenu, que vous avez gelé dans un article précédent, et à créer cette tranche supplémentaire pour les très hauts revenus, qui s'appliquerait aux revenus supérieurs à 100 000 euros par part.
(L'amendement n° 339 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Il est défendu.
(L'amendement n° 340 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie par la commission d'un amendement n° 16 .
La parole est à M. le rapporteur général.
Il s'agit d'un amendement important. Le Gouvernement nous propose à juste titre d'aligner l'imposition des dividendes sur le barème de l'impôt sur le revenu, afin de les imposer de la même façon que les revenus du travail. Cela va dans le sens que nous souhaitons tous.
Mais si l'on retient le taux proposé par le Gouvernement, il y a un problème technique qui fait peser le risque de priver de recettes l'année 2012. L'option du prélèvement forfaitaire libératoire pour les dividendes a été ouverte très récemment, dans la loi de finances pour 2008. À l'époque, cette possibilité avait été ouverte à un taux de 16 % dans le projet du Gouvernement, et nous avions remonté ce taux à 18 %.
Le dispositif du prélèvement forfaitaire libératoire est avantageux pour un contribuable concerné par la tranche marginale à 41 %. En effet, dès lors que ce contribuable est au barème, il bénéficie d'un abattement de 40 %. S'il perçoit un dividende de 100, ce dividende sera imposé, après déduction de 40 %, sur une assiette de 60, et il paiera donc 24 %. Le taux proposé, de 18 %, est inférieur à 24 %, et nous avions demandé au Gouvernement de remonter le taux de 16 % à 18 %, en expliquant qu'il n'y avait pas de risques. La différence entre 18 % et 24 % était suffisante pour ceux qui choisissaient le prélèvement forfaitaire libératoire, alors que le taux de 16 % était à l'évidence beaucoup plus avantageux.
Aujourd'hui, nous partageons tous la volonté d'aligner le prélèvement forfaitaire libératoire des dividendes sur le barème. Mais il me semble qu'un point vous a échappé : dans le cadre du barème, la CSG est partiellement déductible, ce qui a pour effet de réduire de 1,8 point le taux d'imposition. L'imposition au barème se fait donc à un taux de 22,2 % après déduction de la CSG.
Si nous alignons les deux taux à 24 %, toutes les gazettes financières vont recommander aux contribuables d'opter pour le barème, puisque le taux du prélèvement forfaitaire libératoire à 24 % sera supérieur à ce qu'ils paieraient au barème. D'autant que, s'ils choisissent le barème, au lieu de payer l'an prochain avec prélèvement à la source, ils paieront en 2013, avec l'imposition des revenus pour 2012.
Par conséquent, au lieu de générer une rentrée fiscale supplémentaire de 600 millions d'euros, comme espéré, cette mesure risque de créer un manque de 200 à 300 millions d'euros. Car, si l'on regarde la distribution des dividendes par tranches de revenus, il existe une forte concentration sur la tranche supérieure à 41 %.
La commission des finances, si elle se félicite du rapprochement des taux d'imposition des revenus du capital et des revenus du travail, souhaite donc que nous gardions une petite incitation pour préserver le budget 2012. Sinon, nous risquons d'être dans une impasse financière. Tel est l'objet de cet amendement.
Nous avons hésité sur le taux à proposer. Nous pensions proposer un taux de 22 %, mais l'avantage par rapport à un taux de 22,2 %, payé un an plus tard, nous est apparu minime. C'est pourquoi nous avons opté pour le chiffre de 21 %.
Le prélèvement forfaitaire libératoire étant plus simple, j'espère que le taux de 21 % sera suffisamment incitatif, mais nous courons malgré tout un petit risque. Ceci étant dit, comme nous souhaitons rapprocher la fiscalité du travail et celle du capital, nous devons trouver le point où les deux se rapprochent au maximum, tout en préservant une petite incitation en faveur du prélèvement forfaitaire libératoire, pour des raisons de trésorerie, et pour une année 2012 qui s'annonce critique.
Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée. Aujourd'hui, le Gouvernement souhaite que la fiscalité des revenus du patrimoine soit la même que celle des revenus du travail. C'est l'objet de l'article que nous vous présentons.
Le rapporteur général souligne un fait à prendre en compte : notre impôt sur le revenu porte sur les revenus de l'année précédente, il est donc payé un an après.
Il existe donc un risque, si nous alignons totalement et sans aucune décote la fiscalité des dividendes sur celle des revenus, que les contribuables décident de repousser d'un an le paiement de l'impôt, ce qui serait extrêmement dommageable pour nos finances publiques et pour la solidarité nationale.
Puisque nous souhaitons préserver le dispositif du prélèvement forfaitaire libératoire afin de ne pas risquer de nous retrouver dans cette impasse de trésorerie, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.
Pour les très hauts patrimoines, qui sont particulièrement concernés, ce point de pourcentage de différence les incitera à ne pas déclarer à l'impôt sur le revenu leurs dividendes et leurs intérêts, mais plutôt à payer l'impôt en 2012, car c'est en 2012 que nous aurons besoin de recettes fiscales.
Nous allons voter cet amendement, sinon à reculons, du moins en regrettant de ne pas pouvoir aller plus loin.
Je n'ai pas développé les motifs de l'amendement précédent, mais vous connaissez notre avis sur cette question.
Madame la ministre, je ne peux pas vous laisser proférer des contrevérités : vous ne pouvez pas dire que vous alignez, par cet article, la fiscalité des revenus du travail et celle du capital !
Le rapporteur général est un homme honnête. Il a bien expliqué que, lorsque l'on est au barème, on bénéficie d'abord d'un abattement de 40 %, madame la ministre. Vous oubliez cela dans votre raisonnement ! L'assiette de l'impôt intègre un abattement de 40 %.
Cela évite la double imposition !
Mais non, il n'y a plus de double imposition, puisque la plupart des très grandes entreprises paient un impôt sur les sociétés à hauteur de 8 % !
Ne mélangez pas tout !
Je ne mélange pas tout, madame la ministre, je ne vous permets pas de dire cela !
Elles paient l'impôt sur les sociétés à 33 % !
Madame la ministre, il serait plus simple que vous répondiez après l'intervention de M. Eckert.
Croyez-vous que les entreprises du CAC 40 acquittent un impôt sur les sociétés de 33 % ? Vous moquez-vous de nous ?
Madame la ministre, l'abattement de 40 % se justifiait par le fait qu'une partie des bénéfices des sociétés était imposée au titre de l'impôt sur les sociétés. Mais tout le monde sait bien que, par le jeu des dispositions fiscales dérogatoires, les grandes entreprises paient en moyenne un impôt sur les sociétés aux alentours de 8 %.
Cela n'a rien à voir !
Cet abattement de 40 %, qui se basait sur un impôt sur les sociétés de 33 %, n'a donc plus de sens, et le rapporteur général l'a lui-même reconnu.
Et du fait de cet abattement de 40 %, vous ne pouvez pas dire que la taxation des revenus du capital est alignée sur les revenus du travail. Et ne me répondez pas que les revenus du capital sont assujettis à la CSG : les revenus du travail sont dans le même cas !
Je partage l'avis de Christian Eckert, et nous voterons aussi cet amendement.
Mais pourquoi en sommes-nous réduits à la politique des petits pas ? Parce que vous n'êtes pas résolus à attaquer la grande fraude et à prélever convenablement sur les grandes fortunes, car vous craignez toujours l'exil fiscal. Il suffit de faire comme aux États-Unis, qui sont si souvent votre référence ! Si vous êtes ressortissant des États-Unis, vous devez déclarer et payer l'impôt aux États-Unis. Sinon, en rentrant sur le territoire de ce pays, dès que vous passez les contrôles d'identité, on vous offre une paire de bracelets 18 carats ! (Sourires.)
Pourquoi ne pas faire la même chose chez nous, et mettre au trou et au trot les grands voleurs, plutôt que de désigner les petits fraudeurs à la vindicte populaire comme vous le faites ?
Ces gens-là, qui ont beaucoup d'argent, sont entêtés. Par exemple, le défunt époux de Mme Bettencourt, voyant le risque que sa fortune fonde un petit peu, était allé voir le Président de la République de l'époque, François Mitterrand, parce qu'ils se connaissaient. La demande de M. Bettencourt était tellement excessive que François Mitterrand lui répondit : « Franchement, Liliane et toi, vous avez quand même de quoi manger ! » Cela reste tout à fait vrai.
Madame la ministre, vous ne traitez pas tout le monde de la même manière. La famille dont je viens de parler est richissime et a menti à de multiples reprises, puisque Mme Bettencourt a prétendu qu'elle n'avait pas de comptes à l'étranger.
Je connais votre sens de l'équité, madame la présidente, mais tout dépend du point de vue auquel on se place.
Madame la ministre, est-il vrai que vous avez décidé de ne pas porter plainte contre Mme Bettencourt pour fraude ? Si tel est le cas, c'est très grave, parce que vous ne loupez pas les gens modestes qui ont un petit retard de paiement.
Vous savez, monsieur Brard, que le ministre du budget est tenu au secret fiscal. Il vous a été souvent opposé. Il s'agit du droit au respect de la vie privée de tous les contribuables.
Une procédure judiciaire est ouverte contre Mme Bettencourt pour blanchiment et recel de fraude fiscale, et l'administration fiscale y prêtera évidemment tout son concours.
Mme Bettencourt s'est soumise au redressement fiscal que nous sommes en train d'effectuer. Elle paiera tout ce qu'elle doit à l'État, ainsi que toutes les pénalités de retard. Mme Bettencourt sera donc soumise au droit français dans toute son intégralité, sa pureté et sa dureté.
J'en profite, puisque vous m'interrogez sur cette question, pour citer une enquête parue ce matin. Dans un pays très proche de nous, la Suisse pour ne pas le citer, quarante Français figurent parmi les très grandes fortunes installées. Ces très grandes fortunes françaises se sont exilées pour ne pas payer l'impôt en France.
Cela m'a fait réfléchir. Lorsque vous accusez le Président de la République d'être le président des riches, d'avoir mis en place une fiscalité tellement favorable aux grandes fortunes et tellement défavorable aux Français modestes, vous devriez vous demander pourquoi ces grandes fortunes se sont installées en Suisse. Certainement pas parce que le Président de la République est celui des riches, mais peut-être parce que nos mécanismes fiscaux de solidarité marchent à plein dans la période de crise que nous connaissons. Parce que, lorsqu'il y a crise, il y a plus de solidarité et on demande plus à ceux qui ont plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la ministre, vous gagnez chaque jour en habileté dans le débat, mais pas en crédibilité. Vous noyez le poisson avec la Suisse !
Cette liste existe-t-elle ou non ?
Ce n'est pas parce qu'il y a plus voleur que c'est un modèle. Vous connaissez les Suisses. Lorsque vous disposez d'une grande fortune, vous allez les voir et ils vous indiquent quel sera le montant de votre impôt.
Ils pensent qu'il vaut mieux prendre ce qui leur est offert plutôt que de ne rien avoir. Votre démonstration ne tient donc pas la route. Vous ne m'avez pas répondu.
Si !
Non ! Et je vais vous expliquer pourquoi.
Le fait que Mme Bettencourt accepte de se soumettre – pourquoi ne se soumettrait-elle pas, d'ailleurs ? – ne masque pas le délit. Vous n'avez pas voulu déposer plainte pour fraude.
La justice est saisie !
Non !
Délit de faciès !
Pas du tout !
Vous êtes encore naïve. Pensez-vous que Mme Bettencourt vous ait dit toute la vérité ? Il aurait fallu que vous ayez le pouvoir du confesseur pour en être certaine. Elle vous a forcément trompée, parce qu'elle a passé sa vie à mentir quant à ses ressources.
(L'amendement n° 16 est adopté.)
Madame la présidente, je demande une suspension de séance de quelques minutes pour réunir mon groupe.
Article 13
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures vingt, est reprise à dix heures vingt-cinq.)
Madame la ministre, cet amendement – je parle sous le contrôle de M. le rapporteur général – est le résultat d'un travail assez ancien, puisqu'il a été engagé au moment de l'examen du projet de loi sur la modernisation de l'économie, dont j'étais rapporteur pour la commission des finances.
Après de nombreuses concertations avec les services du ministère des finances, les membres de notre commission et M. le rapporteur général, nous sommes parvenus à un texte équilibré, dans lequel j'inclus les sous-amendements déposés par M. Carrez.
Cet amendement vise à combler un vide préoccupant qui existe aujourd'hui entre les sociétés cotées et les sociétés non cotées en matière de rachat d'une partie de leurs actions, pour fluidifier le capital de ces dernières. Elles ne peuvent pas procéder à des rachats d'actions pour répondre à des objectifs très pratiques, alors que, par définition, les sociétés cotées ont cette possibilité, si je me souviens bien depuis 1978, et ont accès à un marché permanent.
La France est le seul pays à ne pas avoir mis en place ce type de dispositif pour les sociétés non cotées, alors que c'est le cas dans tous les autres pays industriels voisins, l'Allemagne, l'Angleterre, l'Espagne ou l'Italie.
Nous avons donc essayé de répondre à ce besoin, de façon très encadrée. Notre objectif majeur était d'assurer la transparence – cela a été ajouté dans le texte – et l'équité absolue entre les actionnaires.
Ce sont des sociétés familiales, patrimoniales, qui constituent la base de notre tissu industriel, de grandes entreprises et de PME. Elles ont choisi de ne pas aller en Bourse, pour ne pas être soumises à des fonds de pension étrangers et à une certaine incertitude quant à leur capital. Les plus grandes d'entre elles ont un chiffre d'affaires de 70 milliards d'euros. Elles emploient trois millions de salariés.
Elles ont besoin d'avoir une certaine liquidité de leurs actions pour répondre aux besoins d'attribution d'actions à des salariés ou des dirigeants, à un projet de croissance externe par attribution d'actions, sans pour autant diluer leur capital, ni faire appel à une augmentation de capital, qui aboutirait également à le diluer, ce qui pourrait les placer en situation de faiblesse.
Je fais un résumé de la situation, madame la présidente, car le sujet est très complexe.
Par cet amendement, nous nous mettons à égalité avec les autres pays et nous comblons le vide qui existe par rapport aux sociétés cotées, de manière équilibrée et transparente. C'est le résultat d'un long processus auquel le ministère a été étroitement associé et pour lequel, madame la ministre, vos prédécesseurs avaient pris des engagements. Je serais heureux qu'ils se concrétisent aujourd'hui.
L'amendement de M. Forissier est très intéressant. Dans un premier temps, je n'y étais pas favorable, voire très opposé, mais ma position a évolué après avoir vraiment étudié le sujet.
Avec Mme la ministre, nous avons été formés à la comptabilité et aux finances des entreprises sur les mêmes bancs, mais pas à la même époque. (Sourires.)
Le rachat par une entreprise de ses propres actions n'existait pas alors. C'était même, monsieur Forissier, une idée tout à fait incongrue. Cette possibilité n'a été introduite qu'à partir de 1998. Une entreprise n'était pas faite pour se rétracter sur elle-même. Une entreprise qui rachète ses propres actions, c'est un peu, si vous me permettez cette comparaison, comme un père qui mangerait ses enfants (Sourires), ou qui se dévore lui-même.
Monsieur Brard, laissez le rapporteur général poursuivre son raisonnement.
Votre image est encore plus frappante que la mienne, monsieur Brard.
Mais les temps ont changé et la modernité est arrivée. Le paradoxe, c'est que l'on a introduit la possibilité de rachat par soi-même de ses propres actions pour les sociétés cotées. En 1998, on aurait dû faire l'inverse, me semble-t-il, et commencer par les sociétés non cotées.
Le problème des entreprises non cotées, vous l'avez très bien dit, monsieur Forissier, c'est celui de la liquidité. Puisqu'elles sont non cotées, l'actionnaire ne peut pas échanger, vendre, aliéner, acheter les actions à sa guise.
Il existe plusieurs cas de figure, madame la ministre, et M. Forissier m'a convaincu en évoquant des cas concrets.
Premier cas de figure. L'entreprise a besoin d'acheter des actions pour les distribuer à ses salariés, ce qui peut arriver dans des entreprises familiales ; c'est un moyen d'incitation.
Deuxième cas de figure. Une famille, cela peut être compliqué, surtout après plusieurs générations. Le cousin ou le neveu peut avoir impérativement besoin de vendre ses actions. Plutôt que de vendre à l'extérieur, parfois à un groupe qui peut être hostile, concurrent, mieux vaut vendre à l'intérieur et échanger entre cousins. Il faut donc une fluidité.
Troisième cas de figure auquel, je l'avoue, je n'avais pas pensé, la croissance externe. Si une entreprise non cotée a la possibilité d'acquérir une autre entreprise, elle pourra le faire plus facilement par échange d'actions. Encore faut-il que les actions soient disponibles.
De ces exemples, il ressort de manière évidente qu'il est encore plus intéressant d'introduire ce dispositif pour les sociétés non cotées que cela n'a pu l'être en 1998, lorsqu'il fut créé pour les sociétés cotées. À l'époque, la motivation principale a dû être l'attribution d'actions aux salariés.
Sur les quatre sous-amendements que j'ai présentés, deux sont vraiment importants. Le premier, n° 430, prévoit que le nombre d'actions acquises par la société ne peut excéder 10 % des actions si c'est pour les céder aux salariés ou entre actionnaires. En cas d'opérations de croissance externe et d'échanges, c'est limité à 5 %.
Le sous-amendement n° 431 est essentiel. Il faut que l'entreprise trouve de l'argent pour acheter ses propres actions. Cela ne peut se faire qu'à partir de la réserve non statutaire, la partie de bénéfices qui, au cours des années précédentes, a été incorporée dans les fonds propres. On ne peut donc baisser la réserve statutaire par le biais du rachat d'actions. On peut seulement effectuer un prélèvement sur les réserves, dont l'assemblée générale a la disposition en vertu du deuxième alinéa de l'article L. 232-11 du code de commerce.
Les deux autres sous-amendements sont rédactionnels.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement et les sous-amendements ?
Le Gouvernement est favorable à l'amendement de Nicolas Forissier, tel que sous-amendé par la commission.
Cet amendement va permettre aux sociétés non cotées de faire entrer de nouveaux partenaires dans leur capital sans diluer les autres associés et d'assurer la liquidité des titres détenus par les associés minoritaires. Et si les Français ont vu cette année un film à succès intitulé The social network – le Réseau social –, ils comprendront à quel point cela peut être utile.
Un peu de pédagogie politique, chers collègues. Que nous a dit M. le rapporteur général ? « M. Forissier m'a convaincu parce qu'il m'a rapporté des cas concrets. » Le connaissant, on ne peut avoir aucun doute.
Le problème, c'est que, lorsque nous vous présentons des cas concrets décrivant la situation de gens qui habitent nos HLM ou celle des couches moyennes, qui n'arrivent plus à rembourser leur emprunt parce que l'un des membres du couple a été frappé par le chômage – je pense aux intermittents du spectacle dont 1 600 habitent ma bonne ville de Montreuil –, vous ne réagissez pas de la même façon. Je ne sais pas comment vous êtes conformés physiologiquement mais, visiblement, vous avez un problème. Vous n'entendez pas tout le monde de la même manière, et pourtant il s'agit de millions de personnes…
C'est réciproque. Ça doit être l'hémisphère gauche.
Nous poursuivons pour lever cet autisme du côté du Gouvernement, mais il faut reconnaître que c'est très difficile. Vous ne traitez pas tout le monde de la manière : c'est une évidence qu'il faut répéter.
(Les sous-amendements nos 430 , 431 , 435 et 436 sont adoptés.)
(L'amendement n° 147 , sous-amendé, est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 50 .
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement a été très largement adopté par la commission des finances, si ce n'est à l'unanimité.
Les personnes âgées qui deviennent dépendantes sont très réticentes à quitter leur domicile pour partir en maison de retraite. Elles finissent cependant par partir, quels que soient les services qui existent pour le maintien à domicile. Néanmoins, elles ne veulent pas acter le fait qu'elles resteront en maison de retraite, souvent médicalisée, en vendant leur domicile. Psychologiquement, il est très difficile d'accepter l'idée que l'on a définitivement quitté son domicile. Or, en raison de la réforme des plus-values immobilières, leur domicile, du fait qu'elles ne l'habitent plus depuis plusieurs mois, voire un ou deux ans, n'est plus considéré comme une résidence principale. Dans ces conditions, elles seront soumises au régime de taxation des plus-values immobilières. Comme celui-ci a été sensiblement durci – et c'était une bonne chose –, l'imposition sera très importante.
Pourquoi cela pose-t-il problème ? Parce qu'un certain nombre d'entre elles n'ont pas des revenus très élevés au regard du coût que représente l'hébergement dans une maison de retraite pour personnes âgées dépendantes. Or la plus-value sur la vente du domicile permet souvent aux enfants de payer une partie de ce qui reste à régler après les déductions fiscales, le cas échéant, et après prise en compte de l'APA, du coût de l'hébergement.
L'amendement de nos collègues Grosskost et Diefenbacher, élaboré à partir de cas concrets, propose d'étendre légèrement le dispositif concernant l'habitation principale. Dans sa grande sagesse, votre administration, madame la ministre, accepte de prolonger ce régime d'imposition pendant un laps de temps inférieur à un an. Nos collègues nous proposent de porter ce laps de temps à trois ans, délai pendant lequel on considère qu'il s'agit encore d'une résidence principale. Mais, pour que cela ne coûte pas cher, ils proposent de le soumettre à des conditions de ressources : 23 224 euros contre 9 876 euros aujourd'hui.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cette proposition. Nous n'allons pas passer notre temps à chercher tous les cas de figure qui correspondent à toutes les situations de la vie et à modifier notre fiscalité en conséquence. Une personne propriétaire d'une résidence principale qui décide de partir en maison de retraite, compte tenu de la fiscalité actuelle, vendra sa résidence avant de partir en maison de retraite.
Il faut faire très attention. Monsieur le rapporteur général, j'ai été très sensible à l'amendement que vous nous avez demandé de déposer, prévoyant que les personnes non propriétaires d'une résidence principale puissent vendre une résidence secondaire ou un bien immobilier qu'elles ont acquis pour protéger leurs économies, notamment si c'est pour acquérir une résidence principale. Il y avait également le cas des expatriés dont la résidence principale était devenue, de fait, la résidence secondaire. Maintenant, nous avons le cas d'un retraité qui partirait en maison de retraite, mais qui voudrait quand même garder sa résidence principale. On n'en sortira pas. Vous trouverez tous les cas de figure correspondant à la diversité de la vie. On ne va pas créer des niches et des exonérations pour chaque cas particulier.
On trouvera toujours une situation où les gens sont imposés alors que l'on aurait voulu qu'ils soient exonérés. Cela peut être vrai pour tous les types de fiscalité. Là, on se focalise sur la fiscalité des plus-values immobilières. Je vous rappelle qu'il y a trois mois, la personne de votre exemple était fiscalisée sur ses plus-values immobilières si elle n'avait pas détenu le bien pendant quinze ans.
Le droit en vigueur permet déjà de répondre à votre préoccupation. Il suffit de vendre sa résidence principale quand on entre en maison de retraite et, à ce moment-là, on n'est pas du tout taxé.
Par ailleurs, sous condition de ressources, vous savez que ces personnes bénéficient déjà d'une exonération de la plus-value immobilière résultant de la cession d'un immeuble, qu'il s'agisse de leur résidence principale ou d'un autre bien immobilier. Je vous renvoie au III de l'article 150 U du code général des impôts.
Nous avons déjà fait beaucoup de gestes. De plus, cet amendement est déjà satisfait pour les personnes âgées les plus modestes.
Le Gouvernement n'est donc pas favorable à cet amendement.
Madame la présidente, je m'étonne que cet amendement soit défendu par le rapporteur général alors qu'il est signé par Arlette Grosskost et Michel Diefenbacher.
Monsieur Eckert, l'usage constant de notre assemblée veut que lorsqu'un amendement est accepté par la commission des finances dans le cadre de l'article 88, il puisse être présenté par le rapporteur général.
Je voudrais appeler l'attention de mes collègues sur les conditions dans lesquelles a été annoncée la réforme des plus-values immobilières.
Le 24 août, on nous a annoncé que les plus-values immobilières ne feraient plus l'objet d'une exonération totale au bout de quinze ans mais au bout de trente-deux ans.
Ce nouveau régime fiscal est ainsi revenu sur la réforme de 2004, qui avait instauré l'exonération au bout de quinze ans et s'était accompagnée de la suppression de toutes sortes de dispositions venues assouplir le régime de l'exonération au bout d'une trentaine d'années qui prévalait auparavant. Cependant, le nouveau régime fiscal n'a pas rétabli les différents assouplissements qui existaient avant 2004.
Lors de l'examen du collectif budgétaire de septembre, madame la ministre, nous avons immédiatement attiré votre attention sur quatre problèmes.
Et bientôt, ce sera cinq !
Premier problème : une application immédiate du nouveau régime au 25 août risquait de bloquer tout le marché immobilier.
Vous en avez convenu et nous avons adopté la mise en place d'un régime transitoire allant jusqu'au 1er février.
Le deuxième problème concerne les personnes qui ne peuvent pas accéder à la propriété dans certaines zones urbaines, parce que les biens sont trop chers, et qui consacrent leur épargne à l'achat de d'une résidence secondaire – je pense notamment aux jeunes ménages. Il ne nous paraissait pas normal qu'on fasse peser sur eux une fiscalité trop lourde. Vous en avez là encore convenu et nous avons pu apporter un correctif.
Le troisième problème, ce sont les terrains à bâtir, que nous allons bientôt évoquer. Prenons le cas d'une promesse de vente portant sur un terrain à bâtir signée le 1er juillet 2011, avec comme condition suspensive l'attribution du permis de construire. Tous ceux qui sont maires ici savent que tout ce qui touche à l'urbanisme réclame un long processus.
Compte tenu des délais moyens, cette promesse aboutirait à une vente en février 2012 : elle aurait donc été signée sous l'empire d'un régime fiscal qui se trouve être complément modifié au moment de la vente.
Nous arrivons au quatrième problème ; et là, madame la ministre, c'est le maire qui vous parle car il s'agit des problèmes concrets de la vie quotidienne : les personnes âgées à revenus modestes.
Prenons une personne âgée de quatre-vingt-cinq ans, quatre-vingt-dix ans, maintenue à son domicile par les services de la commune. Dans la plupart des cas, quand elle est propriétaire, c'est depuis plus de quinze ans. Avec le régime de 2004, elle bénéficiait donc d'une exonération ; avec le nouveau régime, l'exonération ne s'applique que lorsque le bien est détenu depuis plus de trente ans. Admettons que ses enfants lui fassent accepter l'idée de partir en maison de retraite médicalisée parce qu'elle ne peut plus rester chez elle. Il est bien entendu que, psychologiquement, il est impossible de lui faire vendre son domicile à ce moment-là, car ce serait synonyme de départ définitif.
L'administration fiscale admet que le bénéfice de l'exonération s'applique pendant quelques mois mais, en général, la mise en vente intervient après ce délai. Le nouveau régime risque donc de faire peser sur ces personnes une fiscalité très lourde.
Ce n'est pas dans l'intérêt de la collectivité, madame la ministre, car les sommes correspondant à la plus-value sur la résidence principale permettront à la famille de faire face au reste à payer, après versement de l'allocation personnalisée d'autonomie, entre autres.
Nous avons bien réfléchi à cet amendement. Dans un premier temps, nous avions abouti à une rédaction où il n'y avait pas de condition de ressources. Nous en avons ensuite introduit une, qui est assez basse, comme vous pouvez le constater.
Nous vous avons soutenue. Il fallait faire cette réforme du régime des plus-values. Mais il nous paraît normal de lui apporter deux ou trois assouplissements.
Vous semblez redouter qu'il y en ait une kyrielle. Non, il n'y en a que trois : le premier assouplissement a déjà été adopté, le deuxième porte sur le cas des personnes âgées que nous examinons présentement, et nous allons discuter plus tard du troisième, les terrains à bâtir, sur lesquels nous sommes prêts à adopter les solutions les plus restrictives possible.
Monsieur le rapporteur général, j'entends vos arguments et je vais vous proposer une solution de compromis. Mais je vous demande de faire vraiment très attention car nous sommes en train de détricoter toute cette réforme. On ne peut pas en permanence se référer à l'ordre fiscal précédent qui était plus favorable, sinon nous nous heurterons aux mêmes problèmes que pendant les discussions sur le nouveau taux de TVA où, pour tel ou tel produit, était réclamé le maintien du taux antérieur.
Aujourd'hui, le nouvel ordre juridique, c'est que les plus-values immobilières sont défiscalisées progressivement sur une durée de trente ans. Au bout de vingt ans, le taux d'exonération est plus élevé.
Rappelons aussi qu'il s'agit de plus-values et donc d'enrichissement. La taxation ne porte que sur l'enrichissement personnel dont on a bénéficié.
Je comprends votre préoccupation, monsieur le rapporteur général. Au moment où une personne âgée entre dans une maison de retraite, la vente de sa maison est un souci. Cela dit, croyez-moi, je connais aussi les familles : au bout de trois mois, la question de la vente de la résidence principale inoccupée se posera.
Je vous propose donc une solution de compromis, de douceur, pour faciliter l'entrée en maison de retraite des personnes qui deviennent dépendantes et éviter de les obliger à vendre tout de suite leur bien. Cette solution consisterait à maintenir pendant un an le bénéfice de l'exonération. Pendant un an, mais pas pendant trois ans, parce que certaines personnes retraitées pourraient faire le choix, en conscience, de louer leur résidence principale pour en tirer des revenus. Un délai de trois ans, ce serait ouvrir un début de niche fiscale : les retraités auraient un revenu quand ça leur chante et bénéficieraient ensuite de l'exonération.
Je suis désolée, monsieur le rapporteur général, mais les retraités font déjà l'objet de régimes fiscaux extrêmement dérogatoires : une réduction d'impôt au titre des frais de dépendance dont le coût est de 200 millions d'euros, une réduction d'impôt pour les plus défavorisés d'entre eux, qui touchent moins de 10 000 euros de revenu annuel.
Autant je comprends votre souci d'humanité à l'égard des personnes qui entrent en maison de retraite et qui doivent faire le deuil de leur résidence principale –c'est pourquoi j'accepte un délai d'un an –, autant je crois qu'il n'est pas possible de maintenir un tel régime de défiscalisation pendant trois ans, car il permettrait à des retraités de donner en location leur résidence principale.
Madame la ministre, vous venez parler de douceur. Eh bien, je trouve votre douceur un peu rugueuse et musclée.
Absolument pas !
Monsieur Brard, je ne vous permets pas de parler de ma famille !
Madame la ministre, je ne parle pas de votre famille. Je ne me le permettrai pas.
Ne parlez pas de ma grand-mère !
Je ne parlerai ni de votre grand-mère ni de votre grand-père, j'en resterai à des considérations plus générales et vous avez bien compris d'ailleurs que telle était mon intention.
Vous feriez mieux de présenter des excuses !
Si d'aventure j'ai égratigné quelque partie de votre épiderme, sachez que ce n'était pas mon intention. C'est donc très volontiers que je vous prie d'accepter mes excuses.
Toutefois, cela ne change rien à ce que je voulais dire quant à votre douceur rugueuse. Vous le savez bien et votre indignation ne me convainc pas. Peu importe !
Le rapporteur général vous a dit que c'était aussi en tant que maire qu'il parlait. Tous les élus locaux connaissent les situations dont il est question. Tous les retraités lucides, que des problèmes physiques obligent à partir en maison de retraite pour personnes âgées dépendantes, vivent un drame psychologique quand ils quittent leur maison. Il est légitime que le temps nécessaire pour faire son deuil et se résigner à la rupture varie selon les personnes. Certaines, au bout de trois mois auront fait ce cheminement ; pour d'autres, ce sera beaucoup plus compliqué.
Par ailleurs, je trouve que vous ne manquez pas d'audace de parler d'enrichissement, vous qui appartenez à ce gouvernement qui, face à d'autres situations d'enrichissement, se montre nettement moins délicat.
Enfin, il faut penser aussi aux enfants. Si la génération appelée à aller en maison de retraite s'enrichit dans les conditions que vous laissez supposer, il ne faut pas oublier que la génération suivante aura à payer les frais d'hébergement en maison de retraite.
Il importe de prendre en compte ces multiples aspects. C'est seulement à cette condition que l'on pourra dire que la représentation nationale et le Gouvernement font preuve d'humanité.
Madame la ministre, je vais faire une proposition après avoir entendu votre intervention.
Tout d'abord, je veux vous rassurer sur un point. La rédaction de l'amendement est très claire : l'exonération porte sur les biens « qui ont constitué la résidence principale du cédant et n'ont fait l'objet depuis lors d'aucune occupation ». Il n'y pas de location possible.
Ensuite, le délai d'un an dont vous avez parlé est déjà celui de l'instruction fiscale. Je suis prêt à accepter que l'on ramène à deux ans le délai de trois ans que nous avons proposé et que l'on s'en tienne là.
Certes, cette disposition a un coût – d'une dizaine ou d'une quinzaine de millions d'euros – et je suis le premier à partager vos préoccupations budgétaires. Mais elle correspond à des situations humaines. De plus, elle ne s'appliquerait que sous un certain niveau de ressources, calibré par rapport au coût d'hébergement en maison de retraite.
Ce sous-amendement consiste donc à remplacer à la dernière ligne du 1°bis du I. de l'amendement n° 50 les mots : « trois ans », par les mots « deux ans ». Le membre de phrase se lirait donc ainsi : «, et si la cession intervient dans un délai de deux ans suivant l'entrée dans l'établissement ; ».
Quel est l'avis du Gouvernement sur ce sous-amendement, auquel est attribué le numéro 451?
J'accepte ce sous-amendement par souci d'humanité et parce que le rapporteur général a accepté de faire un geste.
Toutefois, je vous mets tous en garde : ne détricotons la réforme fiscale car tout changement de la règle entraîne une instabilité extrêmement nocive pendant des mois, voire des années.
(Le sous-amendement n° 451 est adopté.)
(L'amendement n° 50 , sous-amendé, est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 348 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Voilà une gageure, madame la présidente : comment trouver le coeur d'un amendement ? Cela dit, avec le coeur, nous en revenons aux questions d'humanité.
Le présent amendement permet d'insérer dans le code général des impôts une taxe de 95 % sur les stock-options ainsi que sur tous les bonus ou autres rémunérations dérogeant au droit commun excédant le montant annuel du SMIC que s'attribuent les cadres dirigeants, à moins qu'un accord collectif spécifique ne fixe leur montant. Il pose ainsi la question du droit des salariés et de leurs représentants dans les entreprises.
Madame la ministre, trouvez-vous normal que Christopher Viehbacher, le PDG de Sanofi-Aventis, reçoive une rémunération variable de 2,4 millions d'euros, alors qu'en 2010 il a supprimé 3 000 emplois en France, dont 1 300 dans la recherche ? Cette entreprise a pourtant réalisé les bénéfices les plus importants du CAC40 en 2010. Qui peut justifier que Bernard Arnault, le PDG de LVMH, ait reçu en 2010 une rémunération variable de 2,2 millions d'euros, alors qu'en choisissant de délocaliser la fabrication de ses vêtements de marque il a été responsable de charrettes et de charrettes de licenciements dans l'industrie textile au début des années 2000 ?
Personne ne peut le justifier, même pas vous, madame la ministre, qui vous montrez si souvent prête à voler au secours des plus riches. Il faut mettre un terme aux rémunérations exorbitantes de ces grands patrons et à la folie des stock-options.
Je ne résiste pas à vous citer pour conclure un extrait du Figaro daté du 24 novembre dernier : « Dénonçant la financiarisation de l'économie et le court-termisme des marchés financiers, le Centre des jeunes dirigeants – ce n'est pas un repère de gauchistes ! – souhaite séparer les activités de banque d'affaires et de banque de dépôts, supprimer les stock-options, favoriser les actionnaires qui investissent à long terme dans les entreprises. »
Avis défavorable, toujours pour la même raison : la fiscalité sur les stock-options, établie en 2000, a été renforcée il y a trois ans par le forfait social, et elle atteint aujourd'hui, je vous l'assure, des niveaux extrêmement élevés.
Même avis.
Monsieur le rapporteur général, nous ne comprenons pas l'adverbe « extrêmement » de la même façon. Je propose pour ma part un taux d'imposition de 95 % : l'adverbe retrouverait alors tout son sens ; certains, je le sais bien, pourraient alors utiliser un adjectif : « confiscatoire ». Oui, assumons : ce serait confiscatoire, et légitimement. On parle de dirigeants qui ramassent la monnaie, si j'ose dire, pendant qu'ils licencient des milliers de personnes. C'est un amendement moral, et on ne peut pas imaginer la vie politique sans considérations morales.
(L'amendement n° 348 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 171 .
La parole est à M. Christian Eckert.
Il est défendu.
(L'amendement n° 171 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 259 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Je ne l'ai pas consulté, mais je pense que M. le ministre du travail et des affaires sociales, Xavier Bertrand, devrait être favorable à cet amendement : il s'agit de supprimer la niche Copé. (Sourires.)
Cet amendement a pour objet d'abroger ce dispositif, dont le Conseil des prélèvements obligatoires a chiffré le coût à 6 milliards d'euros par an. À l'heure où le Gouvernement prétend s'attacher à faire payer davantage les plus riches – en réalité, il fait payer aux plus modestes les conséquences de sa politique d'austérité – il n'est pas inutile de rappeler qui sont les favoris du régime, ceux contre lesquels aucune mesure forte de restriction n'est prévue, sinon quelques aménagements cosmétiques. Demain comme hier, ces privilégiés pourront continuer de faire du gras sans vergogne.
Il ne manquera certainement pas de libéraux sur les bancs de la droite pour aligner de pseudo-arguments, mais depuis le temps que l'on parle de cette niche Copé, il est temps de la démanteler.
Avis défavorable. Il s'agit d'un fantasme récurrent de la gauche ; la niche Copé n'existe pas.
Écoutez, je ne sais pas si la niche existe, mais je peux vous dire qu'il y a des chiens dedans, et qu'ils se régalent ! Qu'ils mangent en plein air ou dans la niche, peu m'importe !
Le privilège existe, il a été chiffré par le Conseil des prélèvements obligatoires à 6 milliards d'euros. Ce n'est pas là, madame la ministre, une hallucination ou un mirage : pour les bénéficiaires, c'est même plutôt un miracle !
Je ne vais pas reprendre ce débat que nous avons eu de nombreuses fois, mais je dirai à M. Brard que, pour avoir un impôt, il faut avoir une assiette. Quand dix-sept pays ne fiscalisent pas les cessions de titres, si nous les fiscalisons, nous n'aurons plus de cessions de titres. L'impôt n'aura plus d'assiette, et nous n'aurons plus de recettes.
On peut donc chiffrer à ce qu'on veut, on peut dire que si l'on taxait à 100 % une assiette aujourd'hui détaxée, on aurait 100 % de recettes. Mais la vérité, c'est que quand il n'y a plus d'assiette, il n'y a plus de recette !
Mais non.
On vit une époque formidable ! Madame la ministre, c'est une provocation : je ne souhaitais pas en faire des tonnes sur la niche Copé, mais là vous faites fort !
Vous venez nous dire que la niche Copé n'existe pas, alors que cette mesure, votée une nuit au Sénat, évaluée à 1 milliard d'euros, a coûté en trois ans une dizaine de milliards : on se demande à qui sont confiés les cordons de la bourse de l'État.
Je veux bien entendre tout ce qu'on veut, mais dire que la niche Copé n'existe pas, ça pourrait figurer dans Le Canard enchaîné !
On pourrait montrer ça au Zapping ! On ne peut pas laisser dire des choses pareilles.
Bien sûr que l'assiette diminuerait ; mais pourquoi ? Dans vos démarches de convergence, plutôt que d'aller chercher de la convergence sur des sujets où manifestement cela ne sert à rien, vous feriez mieux de rechercher avec nos partenaires européens un accord pour que les circulations des sièges sociaux et des capitaux ne permettent pas cette évasion fiscale. Mais nous dire que la niche Copé n'existe pas, c'est tout de même assez grotesque !
(L'amendement n° 259 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 396 .
La parole est à M. Olivier Dassault.
Décourager celles et ceux qui s'engagent au service de l'intérêt général n'est pas juste.
Or il existe depuis plusieurs années une situation particulière d'injustice pour les entreprises, qui se rencontre lorsqu'une collectivité publique propose à une entreprise un échange de biens immobiliers dans le but de réaliser une opération d'intérêt général. L'exemple type, c'est celui-ci : une commune souhaite créer en centre ville un équipement sportif, un stade, une piscine, ou encore un jardin public, et sur le terrain choisi se trouve une entreprise – qui, en ville, est souvent implantée depuis longtemps et utilise ce terrain comme site de production ou de stockage. Pour réaliser son projet, la commune, qui n'a pas forcément les moyens de racheter le terrain, ou ne le souhaite pas, réalise avec l'entreprise un échange, c'est-à-dire une substitution de biens immobiliers. Or la hausse des prix du foncier partout en France fait que cet échange entraîne, quasi-automatiquement, une plus-value – je souligne qu'il n'y a pas eu d'échange financier. L'entreprise, le plus souvent une PME, se retrouve dans l'obligation de payer, dès l'année de réalisation de l'opération d'intérêt général, l'impôt correspondant à cette plus-value. C'est, vous le reconnaîtrez, injuste, et c'est aussi néfaste pour le fonctionnement de l'entreprise.
Aussi ai-je souhaité vous proposer cet amendement technique, dont une fois encore l'objet n'est en aucun cas de faire échapper les entreprises à la fiscalité sur les plus-values, mais de permettre que les entreprises puissent étaler dans le temps l'imposition de ces plus-values, avec un double dispositif permettant l'étalement ou le report, suivant que les plus-values en cause sont affectées au bien amortissable ou pas.
La commission n'a pas examiné cet amendement, mais pour ma part je le trouve très intéressant et on ne peut plus logique, à partir du moment – et cela arrive souvent dans nos villes – où il facilite la réalisation d'un équipement public par un échange avec une entreprise qui possède justement un terrain au bon endroit. On connaît les difficultés à trouver du foncier.
C'est un échange, il n'y a pas de paiement : il est normal que la plus-value soit traitée en report. Je suis donc favorable à cet amendement.
Je suis également favorable à cet amendement. L'étalement et le report d'imposition des plus-values résultant de l'échange de biens ou droits immobiliers entre une entreprise et une personne publique en vue de la création d'ouvrages collectifs est, je crois, une bonne mesure.
De prime abord, cet amendement paraît effectivement de bon aloi. Mais je voudrais poser deux questions.
Je ne connais pas par coeur le livre III du code de l'urbanisme : qu'est-ce qu'une association mentionnée « aux chapitres Ier, II et IV du titre II du livre III du code de l'urbanisme » ? (Sourires.) Cet amendement n'a pas été examiné par la commission, et il faudrait donc savoir ce que nous votons.
Ce sujet semble tout à coup important, voire urgent ; notre collègue Dassault présente cet amendement au cours d'une matinée de forte affluence. J'aimerais donc savoir de quoi il s'agit – ce n'est peut-être rien de grave, je ne sais pas.
Ensuite, je ne vois pas très bien la différence que l'on fait entre un bien vendu contre espèces sonnantes et trébuchantes et un bien échangé : il me semble que les service des domaines interviennent dans les deux cas. Pour l'État, les collectivités territoriales, les EPCI, c'est sûr ; pour les associations mentionnées aux chapitres Ier, II, etc., je ne sais pas. Mais il me semble que lorsqu'on reçoit un bien en échange d'un autre bien, France Domaine fait son travail, et le fait correctement. Où est la différence ?
Je suis donc très méfiant. En tout cas j'aimerais entendre la réponse à ces questions avant de me prononcer.
Les établissements publics mentionnés sont surtout des établissements publics d'aménagement : par exemple, chez vous, l'établissement public de la métropole lorraine. Quant aux associations, il s'agit probablement des AFU, les associations foncières urbaines.
Par ailleurs, s'il y a report de la plus-value, c'est parce qu'il n'y a pas de paiement : quand la collectivité locale achète le terrain à l'entreprise, l'entreprise reçoit des liquidités et est imposée sur la plus-value. C'est normal. En revanche, quand il y a échange de terrains, il y a bien une évaluation des domaines, qui est obligatoire, mais comme l'entreprise reçoit un terrain, elle ne reçoit pas les liquidités qui lui permettraient de payer ce qui correspond à la plus-value. Il est donc normal de traiter celle-ci en report.
Le jour où l'entreprise cédera le terrain que lui a échangé la collectivité locale, elle sera imposée sur la plus-value.
Évidemment, sur un amendement qui vient de notre collègue Olivier Dassault, qui le présente sur le ton patelin qui fait son charme discret, on se demande tout de suite où est le piège,…
…surtout quand il parle dès la première phrase d'intérêt général, et tout de suite après d'entreprises.
Vous avez raison, « amendement technique », c'est le pire argument pour fusiller un amendement ! (Sourires.)
C'est donc suspect a priori.
C'est vrai : personne n'est noir ou blanc. Peut-être que, décidément, M. Dassault n'est pas à vouer aux gémonies totalement et définitivement.
Cette affaire est un problème de rente foncière, comme aurait dit Engels. Oui, monsieur Novelli : vous qui êtes un idéologue, vous savez de quoi je parle.
Si nous avons l'engagement que les associations concernées sont bien les AFU, et si nous avons l'engagement qu'au moment de la revente du terrain qu'aura reçu l'entreprise dans cet échange, les règles normales d'imposition de la plus-value s'appliqueront, alors effectivement c'est une mesure de bon sens, et les collectivités pourront ainsi disposer de terrains dont elles ont absolument besoin pour réaliser des équipements d'intérêt général.
Mais du point de vue de la pédagogie, permettez-moi, chers collègues, de ne pas mettre « entreprise » directement après « intérêt général » : parfois, les intérêts sont contradictoires.
Nous vivons un moment historique puisque nous allons peut-être voir M. Brard voter un amendement de M. Dassault !
Le grand-père de M. Dassault avait une vieille connivence avec le parti communiste !
La réponse à vos questions me semble devoir être oui !
Je remercie M. Brard de ses compliments !
M. le rapporteur général a fort bien répondu aux craintes de M. Eckert. Je précise que c'est l'entreprise qui supporte les frais de déménagement et qu'elle ne demande en aucun cas à la commune de participer. Voilà, je crois, un élément supplémentaire qui milite en faveur de l'adoption.
(L'amendement n° 396 est adopté.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 343 .
Même avis.
J'aurais dû défendre cet amendement avec un peu plus de passion dans la mesure où il porte sur une mesure de la loi TEPA qui a été adoptée dans l'euphorie de l'été 2007 : la réduction importante des droits de succession. Mme Lagarde nous vantait alors les mérites des places boursières. On en était presque à généraliser les subprimes en France. On plaignait les traders qui faisaient la queue à la gare du Nord pour prendre l'Eurostar,…
…afin de se rendre à la City, ce paradis londonien. Je ne sais pas si on oserait tenir aujourd'hui la moitié du quart du discours de l'époque.
Il est bon de se souvenir des discours de 2007 car cela donne une idée de l'origine de la gravité de la situation à laquelle nous sommes confrontés aujourd'hui. Pour sa part, le rapporteur général nous a indiqué que ce n'était pas la mesure qui l'avait le plus enthousiasmé.
Dans la vie, il faut toujours voir le bon côté des choses. Votre amendement, monsieur Eckert, comporte un point très important puisque vous ne touchez pas à l'exonération du conjoint survivant,…
…qui représente la moitié du coût de la loi TEPA au titre des successions.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 229 rectifié .
On dit que la pédagogie est l'art de la répétition… Madame la ministre, je ne vous poserai pas, pour la vingt-sixième fois, la même question puisque vous l'avez déjà à l'esprit, mais j'en reviens à l'ISF.
Le présent amendement vise à intégrer les oeuvres d'art ainsi que les objets d'antiquité et de collection dans l'assiette du calcul de l'ISF. Vous avez pu remarquer, lors de nos dernières discussions, que commence à se former à ce sujet une sorte de consensus sur tous les bancs de notre assemblée.
Cet amendement est équilibré car il propose de maintenir l'exonération actuelle dans trois cas : pour les biens meubles qui constituent le complément artistique des immeubles classés ou inscrits à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, pour les oeuvres présentées au public, pour les oeuvres des artistes contemporains encore en vie.
Les propriétaires d'oeuvres d'art sont les gardiens bénévoles d'un patrimoine universel. Ils en ont obtenu la garde grâce à leur fortune, mais ils devraient être dans l'obligation de les présenter au public. Rien ne justifie que telle oeuvre de Picasso ou de Van Gogh ne soit réservée qu'aux yeux délicats de quelques milliardaires.
Cet amendement a donc un objectif culturel indéniable. De surcroît, il permettrait de vivifier le marché de l'art en relançant l'intérêt pour les oeuvres contemporaines. Enfin, madame la ministre, vous savez bien que les oeuvres d'art peuvent constituer, pour les gens peu scrupuleux, un vecteur de fraude et de blanchiment d'argent sale. C'est donc, si j'ose dire, un amendement polymorphe puisqu'il est à la fois culturel, moral et fiscal.
Défavorable.
Souvenez-vous de nos débats : même M. Le Fur était favorable à l'élargissement de l'assiette de l'ISF aux oeuvres d'art. Aujourd'hui, il n'y a plus d'argument qui tienne face aux exonérations octroyées dans les conditions fixées par notre amendement. Si vous possédez par hasard, dans votre château, quelques Modigliani ou Rouault, on ne vous en tiendra pas rigueur à condition que vous n'exigiez pas une jouissance solitaire de ces oeuvres remarquables et que vous les présentiez au public au moins une fois par an, ce qui ne constitue tout de même pas une grande exigence. Comme le dirait Olivier Dassault, c'est une question d'intérêt général. (Sourires.)
(L'amendement n° 229 rectifié n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 260 . Puis-je considérer, monsieur Brard, qu'il est défendu ?
Madame la présidente, vous voyez bien que j'ai du mal à convaincre. Il faut donc toujours remettre l'ouvrage sur le métier.
Les dispositions de l'article 805 I quater du code général des impôts, qui prévoient que les parts ou actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ne sont pas comprises dans les bases d'imposition à l'impôt de solidarité sur la fortune à concurrence des trois quarts de leur valeur, ne se justifient d'aucun motif d'opportunité économique. Il ne s'agit que d'un énième dispositif destiné à vider l'ISF de son contenu sans que les effets sur l'activité économique en aient été démontrés. Cette exonération à hauteur des trois quarts de la valeur des parts et actions prive l'État de recettes substantielles.
Avec votre réforme de juin dernier, vous avez fait le choix d'ajouter l'injustice à l'injustice en permettant aux contribuables très aisés de réduire encore davantage leur imposition au titre de l'ISF. Ce n'est pas par deux ou trois qu'ils diviseront leur ISF mais par quatre ou cinq !
Ceux qui sont dans les tribunes ou qui nous écoutent sur internet doivent savoir de qui vous beurrez la tartine. Ce sont toujours les mêmes : vous avez fait un cadeau supplémentaire aux riches de 1,9 milliard d'euros au moment où les caisses de l'État sont vides. Et c'est vrai qu'elles sont vides puisque vous les avez vidées au bénéfice des privilégiés.
Même avis.
Quand on appuie là où ça fait mal, Mme la ministre préfère abréger la souffrance en me répondant seulement « défavorable ». Elle ne veut pas s'exposer à justifier des privilèges honteux dont bénéficient des gens qui sont déjà fortunés, alors que les plus modestes et les couches moyennes en bavent de plus en plus du fait de la politique impulsée par le Président de la République.
(L'amendement n° 260 n'est pas adopté.)
Avec l'amendement n° 218 , on change un peu de registre.
Le Gouvernement cherche désespérément à conserver le triple A. Or, madame la ministre, depuis que les États-Unis l'ont perdu, il ne s'est rien passé s'agissant de leur faculté à emprunter à des taux réduits. Ne faites donc pas semblant d'avoir peur des agences de notation. Du reste, pour ne pas en avoir peur du tout, il suffirait de reprendre notre proposition qui consiste à leur interdire de noter les dettes souveraines et à criminaliser le fait de les noter.
Ce que je ne comprends pas, c'est que Nicolas Sarkozy a déclaré, lors du fumeux discours du 25 septembre 2008 à Toulon – c'était l'épisode 1 du feuilleton Toulon – qu'il ne conduirait pas une politique d'austérité qui aggraverait la récession. Il ajoutait : « Je n'accepterai donc pas des hausses d'impôts et des taxes qui réduiraient le pouvoir d'achat des Français, car notre objectif c'est de leur rendre du pouvoir d'achat et non de leur en prendre. » Je ne me trompe pas quand je dis que, parmi les ancêtres lointains du Président de la République, il y a Pinocchio.
Les riches ne connaissent pas la crise puisque le nombre de millionnaires en France a augmenté de 18 % en un an. En trente ans – écoutez bien, madame de Panafieu, car votre circonscription doit en compter quelques-uns de cette espèce –, le pouvoir d'achat des plus riches a crû de 340 %. Malgré cela, madame la ministre, vous n'avez pas hésité à accorder à ces gens richissimes un nouveau cadeau de 2 milliards d'euros en modifiant le barème de l'ISF. Il est vrai que vous avez été habile et que vous avez opéré cette réforme de l'ISF en abrogeant en même temps le bouclier fiscal. L'expérience de Mme Bettencourt montre que, d'un côté, vous lui avez pris trois francs six sous et que, de l'autre, – je le dis à ceux qui nous écoutent puisque vous ne voulez pas répondre à ma question au nom du secret fiscal – si cette année elle paie 42 millions d'euros d'impôts, l'année prochaine, hormis les redressements fiscaux, elle ne paiera plus que 10 millions.
J'en viens à l'amendement n° 222 qui vise à créer une nouvelle tranche de l'ISF, au taux de 0,75 %, pour les patrimoines dont la valeur nette taxable dépasse 16 millions d'euros. Contrairement aux personnes qui vivent en maison de retraite, il s'agit là d'une catégorie vraiment taxable.
En juin dernier, le Gouvernement a fait adopter une réforme de l'ISF. Or, en août 2011, vous avez indiqué, madame la ministre, que le Gouvernement mettrait davantage à contribution ceux qui le peuvent. Nous ne pouvons que constater l'inverse puisque le bouclier fiscal existe encore pour deux ans, que l'ISF a été immédiatement réformé et que les niches fiscales qui profitent aux grandes fortunes et aux grandes entreprises n'ont pas été supprimées. Vous avez même renoncé à la taxe de 2 % sur les nuitées d'hôtels de luxe.
Cet amendement poursuit un objectif de justice fiscale conforme à l'article 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
Je suis saisie d'un amendement n° 239 rectifié .
Si vous souhaitez, monsieur Brard, présenter en même temps l'amendement n° 235 rectifié , ne vous en privez pas !
Ce serait un grand sacrifice, madame la présidente, mais l'amendement n° 235 rectifié étant de repli, si l'Assemblée souhaite qu'il ne fasse pas l'objet d'une présentation distincte, il lui suffit d'adopter celui que je vais maintenant défendre.
Nous ne cesserons jamais de le répéter, madame la ministre : la cause que nous défendons est juste, légitime et morale. En revanche, la brièveté des avis que vous émettez sur mes amendements – « défavorable ! » – témoigne bien de votre degré de conviction lorsqu'il s'agit de défendre les positions qui sont les vôtres ; c'est que, vous le savez bien, vous ne pouvez pas défendre votre politique !
S'agissant de l'ISF, prenons Les Échos, qui n'est pas exactement – c'est le moins qu'on puisse dire – un journal de gauche. Que lisons-nous dans l'édition du 22 novembre dernier ? « Le Gouvernement a sous-estimé les recettes d'impôt de solidarité sur la fortune attendues cette année. […] L'impôt sur la fortune devrait rapporter 4,2 milliards cette année, soit 10 % de plus qu'attendu en juin dernier. […] Mais cela pourrait accroître le coût de la réforme. »
Alors que vous ne cessez de brandir le prétexte fallacieux du déficit public et de la dette pour taxer nos concitoyens qui souffrent du chômage et des privations, vous n'avez pas hésité une seule seconde à amputer un impôt qui rapporte 4 milliards d'euros à l'État.
L'alternative est simple, madame la ministre : ou bien vous apportez un démenti aux affirmations du journal Les Échos, ou bien vous soutenez mon amendement.
(L'amendement n° 239 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 235 rectifié .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Comment pouvez-vous expliquer, madame la ministre, que, d'un côté, vous demandez aux Français de payer une TVA plus élevée sur des produits de première nécessité, comme les médicaments, le bois de chauffage ou les produits culturels, même les livres, alors que votre réforme de l'ISF fait perdre 2 milliards d'euros au budget de l'État ?
Si vous acceptiez de me répondre, peut-être serais-je convaincu, ce qui me dispenserait de défendre mes autres amendements.
(L'amendement n° 235 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 361 .
La parole est à M. Christian Eckert.
L'heure est grave. Avec la crise financière et la crainte de perdre la note AAA, on fouille dans toutes les poches à la recherche du moindre euro. On a même été jusqu'à relever le taux de la TVA sur les produits de première nécessité, y compris la salade vendue avec des couverts pour être mangée sur un banc public, ou encore sur l'eau et l'assainissement. En revanche, vous n'avez pas relevé – je ne sais pourquoi et vous êtes restée de marbre lorsque je vous l'ai demandé – le taux applicable à l'énergie.
Par cet amendement, je vous propose de récupérer, rendez-vous compte, 40 millions d'euros d'un seul coup, d'un seul !
L'article 885 V du code général des impôts permet de réduire de 300 euros par enfant à charge le montant de son ISF. Est-on à 300 euros près lorsqu'on paie l'ISF, étant entendu, par ailleurs, que vous avez relevé tous les seuils d'imposition à cet impôt et que vous avez déjà réduit de 1,9 milliard d'euros la facture de ceux qui y sont assujettis ? Mais vous avez maintenu cette réduction de 300 euros par enfant à charge, qui coûte au total 40 millions d'euros. C'est ignoble !
Une récente étude de l'INSEE montre les écarts de patrimoine entre les Français. Sachez, vous qui aimez les chiffres, que les 10 % des ménages les mieux dotés en patrimoine possèdent au minimum 552 300 euros d'actifs, alors que les 10 % les plus modestes possèdent au maximum 2 700 euros, soit 205 fois moins ! Alors arrondissez donc : ceux qui possèdent 552 300 euros auront encore 552 000 euros si on cesse de leur permettre de déduire 300 euros. Cela rapporterait 40 millions d'euros, ce qui est probablement supérieur au produit de la taxation des salades vendues avec des couverts.
Défavorable. Nous avons déjà longuement débattu de cet abattement de 150 euros…
Oui, il a été doublé, sur la proposition de notre collègue Hervé Mariton, pour la bonne cause, à savoir encourager la politique familiale.
Même avis.
(L'amendement n° 361 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 231 rectifié .
La parole est à M. Christian Eckert.
Il est défendu.
(L'amendement n° 231 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 365 .
La parole est à M. Christian Eckert.
Il s'agit, madame la présidente, d'ouvrir une réflexion collective sur l'assurance vie, sujet fondamental. Nos compatriotes disposent d'un montant total de 1 500 milliards d'euros placés en assurance vie.
Or cette fameuse dette qui nous préoccupe représente un montant, qui n'est guère plus élevé, de 1 800 milliards d'euros.
Une grosse partie des fonds de l'assurance vie sert déjà financer la dette !
Moins d'un tiers, mon cher collègue ! Cela montre qu'il reste de la marge.
Nous proposons de réduire le montant de l'abattement dont bénéficient les contrats d'assurance vie sur les droits de succession en le faisant passer de 152 500 à 100 000 euros.
Précisons que cet abattement ne fait que s'ajouter à l'abattement avant taxation des successions, si bien que seuls les très gros contrats d'assurance vie seraient affectés par ce type de disposition.
J'en profite, madame la ministre, pour vous demander – encore faudra-t-il que vous acceptiez de répondre autrement que de manière laconique –, quel est l'état de la réflexion du Gouvernement sur la manière dont on pourrait inciter les Français à souscrire davantage de titres de dette émis par la France pour que nous soyons moins tributaires des marchés. Certes, un récent sondage a montré que l'idée ne suscitait guère leur enthousiasme, mais une part non négligeable de leur épargne pourrait servir à sécuriser notre dette et à nous rendre moins dépendants d'agents extérieurs.
Nous partageons les préoccupations de M. Eckert. Nous devons nous interroger sur la nature de nos créanciers : qui couvre nos besoins de financement ? Inciter les Français à le faire serait une bonne chose. L'assurance vie, avec ses 1 400 milliards d'euros, finance déjà une part non négligeable de la dette française, comme Michel Bouvard vient de le rappeler.
Quant à l'abattement dont vous souhaitez réduire le montant, c'est votre majorité, monsieur Eckert, qui l'avait fixé en 1999. Nous ne l'avons d'ailleurs pas actualisé depuis lors.
Cela étant, je le dis sous le contrôle de Michel Bouvard, nous avons supprimé, dans le cadre de la loi organique, tout avantage fiscal lié aux emprunts d'État. Cela pouvait effectivement coûter très cher. Vous connaissez le célèbre adage : la mise en Pinay précède la mise en bière ! L'emprunt Pinay était effectivement exonéré de droits de succession. Quant à l'emprunt Giscard indexé sur l'or, il n'a pas été une bonne affaire pour les finances publiques.
Les incitations fiscales sont donc supprimées depuis la LOLF. Nous n'en devons pas moins réfléchir aux moyens de faire en sorte que l'épargne française couvre plus largement notre besoin de financement public.
Avis défavorable à l'amendement.
Défavorable également.
En réponse à votre question, monsieur Eckert, je veux souligner que l'adjudication de dette française qui a eu lieu hier s'est très bien passée.
C'est important. Il y a deux ou trois fois plus d'acheteurs de titres de dette française qu'il n'y a de titres offerts, et les taux d'intérêt, comme vous n'aurez pas manqué de le relever, ont baissé. Ils sont revenus en-deçà de 3,4 %, alors que le service de la dette est calculé, dans le budget, en retenant un taux de 3,7 %. Nous pouvons donc exprimer notre satisfaction.
Eh bien, il a encore baissé ! C'est le taux de 3,7 % qui était retenu quand M. Cahuzac s'inquiétait de ce problème ; la semaine dernière. Hier, il était de 3,38 %. Aujourd'hui, il est de 3,17 %. Peut-être cela prouve-t-il, monsieur Eckert, que les décisions que nous prenons sont appréciées et que la dette française est souscrite, tandis que les adjudications de dette d'autres pays, que vous aimez à citer, ne se passent pas correctement.
Ce n'était pas du tout ma question !
(L'amendement n° 365 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 17 .
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement est le fruit de l'expérience. Il y a deux ans, nous avions décidé de limiter la taille maximale du territoire sur lequel un fonds d'investissement de proximité peut financer des entreprises à trois régions limitrophes. Il s'avère, à l'expérience, que cette limitation est contre-productive. Nous souhaitions favoriser des régions où l'épargne est plus difficile à lever, étant entendu qu'elle se concentre plutôt sur certaines régions comme l'Île-de-France ou Rhône-Alpes, mais il vaudrait mieux, pour atteindre notre objectif, revenir au nombre de quatre régions.
Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.
(L'amendement n° 17 , modifié par la suppression du gage, est adopté.)
Cet amendement important concerne la fiscalisation des retraites chapeaux. Ce sont nos collègues de la commission des affaires sociales qui, il y a un an, dans le cadre de l'examen de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, ont souhaité fiscaliser ces retraites. Pourquoi ont-ils pris cette décision ? Ils se sont rendu compte que, comme différentes études, dont un rapport de la Cour des comptes, l'avaient montré, les ressources qui permettent d'abonder, soit directement soit par le biais de compagnies d'assurance, ces retraites complémentaires, que je préfère d'ailleurs appeler retraites supplémentaires pour éviter toute ambiguïté, n'étaient que très partiellement assiette de cotisations.
Les retraites normales du régime de base ou du régime complémentaire font l'objet de cotisations sociales, patronales et salariales. Or, pour les retraites chapeaux, il n'y a pas de cotisations, du moins celles-ci sont réduites. Leur taux est compris entre 12 % et 24 % selon qu'elles passent par une compagnie d'assurance ou qu'elles sont provisionnées. Ce système participe beaucoup moins au financement de la protection sociale que celui des retraites normales.
En conséquence, nous avons décidé d'introduire une fiscalisation a posteriori en taxant de façon spécifique les retraites chapeaux. Un dispositif extrêmement pénalisant et beaucoup trop lourd avait été voté en loi de financement pour 2011. Avec mon collègue rapporteur général au Sénat, Philippe Marini, nous avons travaillé sur ce dispositif en commission mixte paritaire et nous l'avons corrigé lors du collectif de décembre 2011.
Voici le dispositif que nous avons adopté, qui s'applique pour la première fois en 2011 et selon deux régimes différents.
D'une part, pour les retraites servies avant le 1er janvier 2011, jusqu'à 500 euros par mois, l'exonération est totale ; entre 500 et 1 000 euros par mois la taxation s'élève à 7 % ; au-delà de 1 000 euros, elle s'élève à 14 %, et ce dès le 501ème euro.
D'autre part, pour les retraites chapeaux versées après le 1er janvier 2011, l'exonération est totale jusqu'à 400 euros ; la taxation s'élève à 7 % de 400 à 600 euros dès le premier euro ; au-delà, la taxation est de 19 %, toujours dès le premier euro.
Ce dispositif n'est pas satisfaisant parce que la fiscalité est trop lourde. Par cet amendement, la commission des finances vous propose d'utiliser un barème, comme pour l'impôt sur le revenu.
Ce fonctionnement par tranches éviterait les effets de seuil qui frappent dès le premier euro, dès lors que vous dépassez 400, 600 ou 1 000 euros.
Je citerai deux exemples chiffrés montrant l'allègement substantiel et nécessaire que l'on pourrait ainsi obtenir.
Prenons le cas d'un retraité qui perçoit une retraite chapeau de 1 100 euros par mois. Dans le dispositif actuel, si sa retraite a été liquidée avant le 1er janvier 2011, il verse une cotisation de 1 008 euros. Si elle a été liquidée après le 1er janvier 2011, il paie 1 848 euros.
Dans le dispositif que nous proposons par cet amendement, il ne paierait plus que 588 euros pour une retraite liquidée avant le 1er janvier 2011, soit une diminution de 41 %, et 1 008 euros si la retraite a été liquidée après le 1er janvier 2011, soit une diminution de 46 %.
Une personne qui toucherait une retraite chapeau de 2 000 euros par mois, au lieu de 2 520 euros de cotisation, ne paierait plus que 2 100 euros, et au lieu de 3 360 euros, elle ne paierait plus que 2 520 euros, soit, respectivement, des diminutions de 17 % et 25 %.
Il était possible de traiter la question autrement, en passant par la déductibilité. La commission n'a pas choisi cette voie pour ne pas rouvrir un dossier très difficile où l'enjeu est de plusieurs milliards d'euros pour les finances de l'État, celui de la déductibilité partielle de la CSG.
Or, je l'ai dit dans mon propos introductif, la taxe de 7 % ou 14 % est directement issue d'un problème de cotisations sociales, tout comme la CSG. Je rappelle en effet que la CSG a été créée pour remplacer la cotisation salariale maladie qui existait avant 1990. L'analogie avec la taxe des retraites chapeaux est très forte. Il nous a semblé que si l'on prenait la voie de la déductibilité, on risquait de rouvrir le débat général sur la déductibilité partielle de la CSG. D'où la proposition de barème que nous faisons à travers cet amendement.
Par ailleurs, la commission a eu un débat sur les retraites chapeaux indécentes. Certains dirigeants partent à la retraite avec leur retraite de base, leur retraite complémentaire et, en plus, on leur verse une retraite chapeau.
Pourtant, ils n'ont pas toujours mené l'entreprise à une grande réussite, c'est le moins que l'on puisse dire.
Dans le cadre du barème, nous proposons un troisième taux assez élevé, fixé à 28 %, pour les retraites chapeaux dépassant 24 000 euros par mois et dès le premier euro.
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 386 .
Je présente cet amendement au nom de notre collègue Jérôme Cahuzac qui l'a soutenu devant la commission des finances mais ne pouvait être parmi nous ce matin.
M. le rapporteur général a raison, il s'agit de viser les retraites chapeaux indécentes. Nous avons perdu 3 milliards d'euros avec le groupe Dexia, qui pose encore beaucoup de problèmes, et son dirigeant, M. Richard a touché 600 000 euros de retraite chapeau ! Cela heurte nos consciences.
Mais il y a un autre problème, et M. le rapporteur général le sait, celui des petites retraites chapeaux, que l'on appelle ainsi à défaut d'un meilleur nom. Cela concerne notamment des professions que je connais bien, comme la sidérurgie.
En Lorraine, dans les entreprises sidérurgiques, une tradition, certes assez paternaliste, avec ses avantages et ses inconvénients, voulait qu'on octroie à certaines catégories de personnels, pas forcément les dirigeants, des petites retraites chapeaux, ou des compléments de retraite, constitués par capitalisation avec versement différé.
Lorsque la commission a mis en place la contribution sur les retraites chapeaux, j'ai été saisi par de nombreux petits retraités qui se voyaient taxer. Denis Jacquat, qui est également lorrain, l'avait été lui aussi.
L'amendement de Jérôme Cahuzac a l'avantage de taxer plus lourdement les grosses retraites chapeaux, et c'est pourquoi nous l'avons soutenu. Nous aurions souhaité parvenir à une version commune de ces deux amendements, mais cela n'a pas été possible pour des raisons que M. Cahuzac connaît mieux que moi.
L'amendement de Gilles Carrez répond au double souci de diminuer la taxation des petites retraites chapeaux et de durcir la taxation des plus grosses. Mais il me semble, monsieur le rapporteur général, que le durcissement n'est pas considérable. Avec une retraite chapeau de 24 000 euros par mois, on approche de 300 000 euros par an, ce qui est énorme. Le seuil que vous avez établi à 24 000 euros aurait donc pu être un peu plus bas.
Par ailleurs, la taxation se fait dès le premier euro dans l'amendement de Jérôme Cahuzac alors qu'elle se fait par tranches et donc à partir du premier euro dépassant le seuil de 24 000 euros dans celui de M. le rapporteur général.
Merci de votre patience, madame la présidente. Je crois que le sujet est important et peut permettre de trouver un début de consensus, même si nous aurions souhaité aller plus loin.
Il me semblait important de vous laisser finir votre démonstration, monsieur Eckert. Merci de l'avoir remarqué.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement de M. Eckert ?
Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements en discussion commune ?
J'émets un avis défavorable sur l'amendement de M. Eckert, qui me pardonnera une fois encore.
Concernant l'amendement du rapporteur général, je ferai plusieurs observations.
D'abord, le Gouvernement est extrêmement favorable à l'initiative prise par le rapporteur général en faveur des petites retraites.
En effet, nous estimons qu'il est très important d'éviter une fiscalité confiscatoire sur les petites retraites complémentaires. Or, le taux de fiscalisation actuel peut atteindre jusqu'à 67 % sur les retraites chapeaux.
Par ailleurs, l'amendement du rapporteur général est très intéressant en ce qui concerne les toutes petites retraites inférieures à 400 euros par mois.
L'instauration d'un barème d'imposition sur les retraites chapeaux nous paraît aussi une mesure excellente. Cela permet un impôt progressif en fonction du montant de la retraite chapeau et évite une taxation dès le premier euro. Nous sommes là aussi très favorables à toutes les mesures d'allègement pour les petites retraites de moins de 400 euros par mois et pour celles comprises entre 400 et 600 euros.
En revanche, monsieur le rapporteur général, le Gouvernement vous met en garde sur le taux prévu par l'amendement sur les retraites les plus élevées.
Il peut sembler a priori qu'une taxation de 28 % sur les retraites supérieures à 24 000 euros, ce n'est pas grand-chose, monsieur Eckert.
Oui, mais combien reste-t-il à la fin ?
Monsieur Eckert, monsieur Brard, avez-vous fait le calcul ? Je vais vous donner le résultat.
À 25 000 euros par mois de retraite chapeau, avec la fiscalité proposée, il reste au total 5 000 euros par mois. C'est encore beaucoup, certes, mais on passe tout de même de 25 000 euros à 5 000 euros, avec 8 % de CSG, 41 % d'impôt sur le revenu, 28 % de contribution non déductible de l'impôt sur le revenu et 3 ou 4 % de contribution exceptionnelle de solidarité pour la réduction des déficits. Ainsi une retraite chapeau de 25 000 euros par mois serait fiscalisée à 81 % !
J'attire l'attention de cet hémicycle sur le risque d'inconstitutionnalité de cette mesure pour fiscalité confiscatoire.
C'est pourquoi nous souhaitons que le taux de 28 % puisse être abaissé à un niveau plus raisonnable, autour de 20 %, ce qui représenterait tout de même un taux global de fiscalité de quelque 75 % sur les retraites chapeaux les plus importantes.
Madame la ministre, j'entends bien vos arguments. Au-delà de la question du curseur sur les retraites les plus importantes, il faut traiter celle des retraites d'entreprise, puisqu'il s'agit de cela et non de retraites chapeaux.
Christian Eckert l'a dit, ces retraites concernent des dizaines de milliers de Français qui ont travaillé notamment dans tout le secteur de la sidérurgie, des alumineries, des aciers spéciaux, ou encore dans de grandes entreprises comme Pechiney Ugine Kuhlmann, qui, à l'époque appliquaient ce type de dispositif. Il ne faudrait surtout pas décourager ces entreprises. De nos décisions en matière de retraites complémentaires peuvent dépendre leurs futures pratiques.
Or, avec l'évolution des systèmes de retraite, nous avons intérêt à conforter les régimes complémentaires plutôt qu'à les décourager.
En outre, il faut rappeler le contexte dans lequel a été voté le dispositif : je me souviens notamment que nous avons fait des ajustements en commission mixte paritaire sans être exactement fixés sur l'impact qu'ils auraient – impact dont on s'aperçoit aujourd'hui qu'il est très fort. Quand on connaît le montant de la retraite principale que touchent beaucoup de ces personnes, on comprend que c'est la retraite complémentaire qui leur permet de vivre dans un confort qu'ils ont bien mérité, eu égard à leur profil de carrière.
Autant il me semble nécessaire d'organiser la solidarité et d'écrêter celles des retraites chapeaux qui nous ont toujours posé problème, autant il me semble souhaitable que, d'ici à la fin de l'année, on trouve une solution pour les retraites d'entreprise.
On peut considérer que c'est sans importance, mais je ne vous autorise pas à dire, madame la ministre, que l'initiative en la matière ne vient que d'un seul côté de l'hémicycle. Il me semble que, sur ce sujet en particulier, nous avons fait preuve de responsabilité, estimant, avec d'autres en commission, qu'il fallait trouver un dispositif qui préserverait les petites retraites chapeaux. Je ne dis pas que nous avons été les seuls à prendre cette initiative, mais la paternité nous en revient en grande partie.
Vous pouvez penser que c'est là, de notre part, du cabotinage, mais ce n'est pas la première fois que nous voyons certaines personnes s'approprier nos initiatives. Il est parfois bon de rappeler certaines vérités, à l'intention de ceux qui nous regardent ou qui liront le compte rendu de la séance.
Plus fondamentalement, on peut s'interroger sur l'utilité, à terme, d'un dispositif de cette nature. Il s'agit là d'un authentique débat politique. Qu'est-ce qui est préférable : un système collectif ou des initiatives dans chaque entreprise ? Pour ma part, je m'interroge. Mais, pour ce qui est de la position du curseur – 28 % auxquels s'ajoutent divers pourcentages –, il faut savoir ce que l'on veut faire.
Nous pourrions décider d'interdire des pratiques que nous jugeons immorales, mais ce n'est pas la solution qui a été retenue, la majorité ayant toujours refusé de légiférer sur la limitation des excès des rémunérations variables pour s'en remettre à des codes de bonne conduite qui ne sont jamais appliqués, si bien que, après Toulon 1, nous avons eu droit à Toulon 2.
Quel outil avons-nous encore à notre disposition ? L'outil fiscal. Assumons donc : il est évident que le taux de 28 % est dissuasif – nous préférons cet adjectif à celui que vous employez, « confiscatoire ». Puisque vous ne voulez pas légiférer, il nous reste l'outil fiscal, qui a d'ailleurs été utilisé dans plusieurs pays pour dissuader les entreprises de verser des rémunérations que tout le monde juge excessives.
On voit comment on se sert du vocabulaire pour masquer certaines politiques. L'expression « retraite chapeau » a plusieurs sens : c'est une sorte d'auberge espagnole.
Et il y a même les casquettes, mon cher collègue, bérets et casquettes servant au Gouvernement d'alibi pour s'occuper des hauts-de-forme. En mettant dans le même paquet des retraites complémentaires souvent négociées par les syndicats dans des contextes particuliers – ce n'est pas sans raison que Michel Bouvard faisait référence à la sidérurgie – et les millions d'euros qu'empochent les dirigeants de banques ou de grands groupes dont, à un moment donné, les actionnaires veulent se débarrasser. Il n'est pas étonnant que le Gouvernement refuse de réglementer tout cela. J'insiste sur ce point à l'intention des personnes qui nous regardent et nous écoutent : on prétend défendre les petits, mais c'est en réalité pour mieux protéger les gros. Pour reprendre l'exemple cité par Mme Pécresse, on prétend défendre quelqu'un qui a 25 000 euros pour protéger ceux qui touchent 3 millions d'euros.
Mes chers collègues, je ne suis pas sûr que les gens qui nous écoutent aient tous, dans leur circonscription, un député qui leur explique la vérité avec la clarté qui s'impose. Je crains que ce ne soit parfois que la vérité au sens sarkozyste du terme, comme hier soir à Toulon : elle est à la vérité vraie ce que la nuit est au jour.
Je voudrais attirer l'attention de la représentation nationale sur une situation que vivent très mal les bénéficiaires de petites retraites chapeaux, ceux que le rapporteur général a identifiés comme étant à la première tranche, qui touchent une retraite complémentaire de moins de 1 000 euros par mois et sont imposés au taux de 7 %. Ils ne comprennent pas le mécanisme qui fait que, si vous touchez une retraite chapeau complémentaire de 100 euros, vous devez acquitter un prélèvement sur cette somme, après quoi vous êtes imposé sur l'intégralité des 100 euros, alors que vous n'en avez touché qu'une partie nette. Ils trouvent très injuste de payer l'impôt sur des revenus qu'ils n'ont pas perçus, puisqu'ils ont déjà fait l'objet d'un prélèvement.
Soucieux de protéger les retraites complémentaires d'un montant modéré – en dessous de 1 000 euros –, le Gouvernement souhaite déposer un sous-amendement à l'amendement du rapporteur général : il permettrait de rendre déductible à l'impôt sur le revenu le montant de ce prélèvement, pour la première tranche de fiscalisation des retraites chapeaux. Peut-être aurons-nous besoin d'une brève suspension de séance pour finir de rédiger ce sous-amendement.
Il me semble que nous progressons dans la bonne direction.
En ce qui concerne la troisième tranche – le taux marginal –, la commission des finances a proposé 28 % en se calant sur l'amendement de M. Eckert, qui proposait 34 %. Mais il faut reconnaître que ces 28 % s'ajouteront aux 41 % de l'impôt sur le revenu, aux 3 à 4 % de la contribution exceptionnelle et aux 6,5 % de la CSG.
Monsieur Novelli, vous avez assisté à la réunion de la commission des finances…
…et vous savez que nous avons souhaité prendre une mesure dissuasive. En grand libéral que vous êtes, vous serez le premier à reconnaître que le talent doit être reconnu, mais jusqu'à un certain point. Comme l'a dit M. Eckert, quelqu'un qui n'a pas vraiment mené son entreprise à la grande réussite mérite-t-il une retraite chapeau de 600 000 euros ?
Mme la ministre a invoqué l'argument de constitutionnalité, que nous sommes obligés de prendre en considération : nous ne pouvons pas voter un taux confiscatoire. Pour la troisième tranche, le raisonnement de la commission des finances était simple : 7 % multipliés par deux font 14 %, qui, également multipliés par deux, font 28 %. Je propose un raisonnement aussi simple : 7 % plus 7 %, qui font 14 %, auxquels on ajoute encore 7%, pour obtenir 21 %.
L'amendement n° 127 serait donc ainsi rectifié.
Quant à la seconde question qu'aborde à juste titre Mme la ministre et qui concerne les petites retraites chapeaux, il est clair que l'amendement de la commission des finances apporte un progrès. Je reconnais qu'il n'est peut-être pas suffisant. On admettrait donc en outre la déductibilité totale dans la limite de la première tranche. Elle jouerait pour tout le monde, mais jusqu'à 1 000 euros seulement, puisque c'est au-delà de cette somme qu'intervient la deuxième tranche à 14 %. Nous aurions là, je crois, une réponse équilibrée. Monsieur Eckert, vous-même avez reconnu en commission qu'un problème se posait à propos des petites retraites, notamment dans la sidérurgie. La déductibilité serait donc totale en dessous de 1 000 euros, et nulle au-delà. Cette formule, qui est celle que propose Mme la ministre, me paraît bonne.
Il serait souhaitable que nous puissions avoir une suspension de séance de deux minutes pour rédiger le sous-amendement.
Monsieur le rapporteur général, dans ma grande bonté, je vous en accorde cinq. (Sourires.)
Après l'article 13
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures dix, est reprise à douze heures quinze.)
La séance est reprise.
Je donne lecture du sous-amendement présenté par le Gouvernement sous le numéro 454 :
« Substituer à l'alinéa 12 les quatre alinéas suivants :
« II. – Après le 2°- 0 ter de l'article 83 du code général des impôts, il est inséré un 2°-0 quater ainsi rédigé :
« 2°-0 quater La contribution prévue à l'article L. 137-11-1 du code de la sécurité sociale dans la limite de la fraction acquittée au titre des premiers 1 000 euros de rente mensuelle. »
« III. – 1° Le I est applicable aux rentes versées à compter du 1er janvier 2012.
« 2° Le II est applicable à compter de l'imposition des revenus de 2011. »
Mes chers collègues, ce sous-amendement va vous être distribué.
La parole est à Mme la ministre.
Mon intervention vise à expliciter la modification, que nous allons voter, de la fiscalité des retraites chapeaux.
Les retraites chapeaux sont soumises, dès le premier euro, à 16 % de contribution patronale. Ensuite, les retraites chapeaux versées aux particuliers seront exonérées d'impôt jusqu'à 400 euros. Puis, elles seront soumises à une tranche marginale de 7 % jusqu'à 1 000 euros, de 14 % entre 1 000 et 24 000 euros, et de 21 % au-dessus de 24 000 euros.
Ce qui donne, au total, pour un particulier qui déclarerait plus de 250 000 euros par part, en ajoutant l'impôt sur le revenu à 41 %, la CSG et la contribution spéciale de solidarité sur le revenu qui vient d'être instaurée par le Gouvernement, une fiscalité de 41+8+3+21, donc de73 % sur les très grosses retraites chapeaux des très gros contribuables.
Oui, 73 % sur la fraction au-dessus de 24 000 euros par mois et à condition que le revenu soit supérieur à 250 000 euros par part.
Je tenais à le souligner, car, comme vous pouvez le constater, ce gouvernement fait jouer à plein, grâce à l'amendement du rapporteur général, les mécanismes de solidarité et de redistribution.
Par ailleurs, nous vous proposons d'adopter un sous-amendement qui, jusqu'à 1 000 euros, permet de ne pas être taxé à l'impôt sur le revenu sur la contribution de 7 % payée au titre des retraites chapeaux. Ainsi, quand un retraité touchera 500 euros ou 1 000 euros de retraite chapeau, il acquittera une tranche marginale à 7 %, mais cette contribution – qu'il aura payée – ne sera pas taxée à l'impôt sur le revenu. Elle sera déductible.
Les retraités ne comprendraient pas pourquoi ils seraient taxés sur une contribution déjà payée.
Je rappelle que les indications de Mme la ministre se déclinent dans un sous-amendement n° 454 – que l'on est en train de vous distribuer – concernant la non-imposition en dessous de 1 000 euros, et dans un amendement n° 127 rectifié , dans lequel le taux de 28 % est remplacé par 21 % pour la part des rentes supérieures à 24 000 euros par mois.
La parole est à M. Christian Eckert.
Je ne peux pas accepter sans rien dire, madame la ministre, votre argument selon lequel ce dispositif est très pénalisant…
…car votre addition n'est pas correcte. Le rapporteur général vous a d'ailleurs reprise en faisant remarquer que seule la tranche marginale serait touchée comme vous l'avez indiqué.
Vous dites que la retraite chapeau serait imposée à 41 %. D'abord, vous faites une erreur en affirmant qu'elle entre systématiquement dans la tranche marginale de l'impôt sur le revenu.
Je parlais des très grosses retraites chapeaux.
Même les très grosses retraites chapeaux ne sont pas en totalité dans la tranche marginale.
En outre, il ne faut pas oublier qu'il y a encore tout un panel de dispositifs, de niches et d'abattements dont nous avons parlé ce matin, ce qui fait que l'addition n'est pas aussi simple que vous voulez la faire paraître.
Je veux bien me rallier à l'amendement sous-amendé parce qu'il présente des avancées – je pense notamment aux petites retraites chapeaux. Mais, à l'évidence, l'avancée bénéficie surtout à ceux qui perçoivent une retraite chapeau de plus de 1 000 euros. Vous faites, certes, un petit geste avec la déductibilité pour celles qui sont comprises entre 500 et 1 000 euros. Mais nous aurions pu construire un dispositif un peu plus équilibré. Vous passez de la progression géométrique, 7-14-28, à la progression arithmétique, 7-14-21. Je suis désolé de vous le dire, madame la ministre, mais vous reculez, et ce pour aboutir à un dispositif complexe et illisible. J'espère que nous aurons l'occasion de le retoucher lors d'une prochaine réunion de la commission des finances.
Quoi qu'il en soit, n'exagérez pas : quand vous faites un petit pas, n'essayez pas de faire croire que vous faites un pas de géant ! Le Premier ministre actuel a déclaré – ou peut-être est-ce M. Copé – qu'il avait proposé d'interdire les rémunérations extravagantes mais que le Parlement lui avait opposé un refus. Encore une fois, la fiscalité peut être dissuasive sans être confiscatoire.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement du Gouvernement ?
Favorable à la déductibilité limitée au plafond de 1 000 euros, c'est-à-dire à la première tranche.
La commission est également favorable à l'amendement n° 127 rectifié qui vise à remplacer, au I, le taux 28 % par le taux 21 %.
(Le sous-amendement n° 454 est adopté.)
(L'amendement n° 127 rectifié , sous-amendé, est adopté.)
Cet amendement a pour objectif d'abroger la réforme de l'ISF du 29 juillet 2011, qui prive le budget de l'État d'environ 2 milliards d'euros. Nous avons déjà exposé les raisons qui justifient cette abrogation. Je serai donc rapide.
En 1996, ce n'est pas si loin, pour entrer dans le classement des 500 grandes fortunes de France, il fallait avoir plus de 14 millions d'euros – une misère, monsieur Novelli ! Aujourd'hui, pour entrer dans ce club, c'est 60 millions qu'il faut posséder. Pendant la même période, contrairement à ce qu'avance le Gouvernement, le nombre de Français vivant au-dessous du seuil de pauvreté n'a cessé d'augmenter. Aujourd'hui, ils sont plus de 8 millions, soit 13,5 % de la population. Il est vrai que l'Allemagne, que vous citez toujours en exemple, fait pire que nous : le nombre d'Allemands en dessous du seuil de pauvreté dépasse 17 %.
Monsieur Novelli, comme l'a dit le rapporteur général, vous êtes un libéral, mais un libéral qui s'assume, pas un libéral honteux qui, quand il parle des privilégiés, fait semblant et regarde ailleurs pour ne pas être stigmatisé !
Savez-vous ce que représentent 60 millions d'euros, monsieur Novelli ?
Certes, mais traduisez ! À l'école élémentaire, on apprenait à faire des conversions.
Je ne parle pas des conversions des nouveaux évangiles, mais d'une conversion qui intéresse les gens d'aujourd'hui : 60 millions d'euros, c'est l'équivalent de 4 000 années de SMIC. Pouvez-vous imaginer que quelqu'un puisse posséder une somme pareille ?
Un smicard devrait travailler 4 000 ans pour accumuler autant d'argent !
Vous voyez, madame la ministre, comment vont les inégalités dans notre pays. Il est aisé d'interpréter les chiffres. Aussi vous demanderai-je, pour mettre un peu plus de justice dans notre système, d'être favorable à notre amendement.
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 338 .
Je suis saisie d'un amendement n° 149 rectifié .
La parole est à M. le rapporteur général.
Je serai très bref parce que j'ai déjà évoqué ce sujet.
Cet amendement a pour objet de prendre en compte la réforme de la taxation des plus-values immobilières et ses conséquences sur les terrains à bâtir pour lesquels des promesses de vente étaient assorties de conditions suspensives liées à de très longues procédures d'urbanisme. Nous souhaitons rattraper ces promesses de vente. Je n'aurais d'ailleurs pas dû présenter cet amendement, puisque c'est Nicolas Forissier qui en a pris l'initiative !
Je suis très sensible à la question qu'ont soulevée à juste titre Nicolas Forissier et Gilles Carrez. En effet, des opérations immobilières ont été lancées bien avant les annonces du Premier ministre le 24 août et nécessitent un peu de temps pour se concrétiser. Nous partageons le souci du rapporteur général : nous devons construire, en zone tendue notamment, parce qu'il est vrai que nous ne construisons pas assez en France. Il faut le dire et le répéter, notamment à tous ceux qui mènent une politique malthusienne du logement.
Pour préserver ces constructions, le régime d'exonération des plus-values immobilières doit s'appliquer à ces terrains ayant fait l'objet de promesses de vente, dont je voudrais que l'on précise qu'elles ont été enregistrées, et non pas signées, avant le 25 août. En effet, la naïveté, contrairement à ce que prétend M. Brard, n'est pas mon fort en matière fiscale et je pense donc que les promesses de vente doivent être signées et enregistrées en bonne et due forme avant le 25 août. Cela évitera la tentation de l'anti-datation.
Je souhaite par conséquent que l'amendement présenté par le rapporteur général soit rectifié, afin qu'il y soit précisé que les conditions doivent être cumulatives, que la promesse de vente doit avoir été dûment enregistrée avant le 25 août, c'est-à-dire avant les annonces du Premier ministre, et que la vente doit être réalisée avant le 31 décembre 2012 pour éviter, là encore, que l'on ne se traîne la queue de la comète de la défiscalisation jusqu'à l'exercice 2070 ! Nous devons fixer les bornes nous permettant de clarifier cette exonération.
J'abonderai dans le sens de Gilles Carrez. Nous avons effectivement travaillé cet amendement ensemble à partir d'un premier amendement que j'avais déposé.
Je souscris personnellement à votre proposition, madame la ministre, parce qu'elle permet de bien clarifier cet amendement. Il est clair qu'il faut éviter tout risque d'antidatation lors de l'achat d'un terrain.
Il est fondamental d'adopter cet amendement parce qu'il ôte tout risque de piège, de situation extrêmement préjudiciable et totalement inéquitable pour certains de nos compatriotes, même s'ils ne sont pas nombreux.
Cette solution me satisfait donc tout à fait.
Afin de clarifier nos débats, pourriez-vous reformuler la dernière phrase de l'amendement, monsieur le rapporteur général ?
J'allais vous le proposer, madame la présidente.
Il convient donc de rédiger ainsi la dernière phrase du deuxième paragraphe du I : « pour lesquelles une promesse de vente a été enregistrée avant le 25 août 2011 et la vente est conclue avant le 1er janvier 2013. »
Tout à fait, madame la présidente.
(L'amendement n° 149 deuxième rectification est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 289 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Parfois, certains persévèrent dans l'erreur, nous persévérons, quant à nous, à vous évangéliser ! Je note, madame la ministre, que vous refusez les circonstances atténuantes que je vous ai accordées tout à l'heure au nom de la naïveté que je vous supposais. Si c'est tout à votre honneur de l'avoir fait, cela aggrave votre cas dans la mesure où vous défendez les privilégiés à visage découvert !
La crise actuelle n'a pas été nuisible à tout le monde. Le creusement des inégalités en Europe est une réalité que tous les organismes indépendants ont démontrée. La France est particulièrement concernée par cette évolution s'agissant, notamment, de la multiplication des personnes très riches. Une étude du Crédit Suisse montre que la France est le pays qui héberge le plus grand nombre de millionnaires en Europe – c'est la preuve qu'ils n'ont pas tous peur de notre fiscalité ! – avec 2,6 millions d'individus détenant plus d'un million de dollars de patrimoine ! Cette richesse – résultat du labeur de tous les travailleurs européens, mais confisquée par quelques-uns – ne saurait être concentrée entre les mains de quelques privilégiés sans que cela n'amène à une situation de crise sociale que l'on voit poindre chaque jour davantage à l'horizon.
Les auteurs de cet amendement proposent la création d'une taxe exceptionnelle de 5 % sur le patrimoine des personnes physiques dont le stock de patrimoine excède un million d'euros. Ce dispositif doit également être, à terme, mis en oeuvre dans les autres pays européens. Nous avons ainsi élaboré une proposition de résolution européenne en commun avec nos camarades députés de Die Linke. Ce texte a été présenté ici même hier matin, et hier soir au Bundestag.
Mes chers collègues, adopter un tel amendement permettrait d'impulser en Europe des politiques nouvelles, de justice fiscale notamment. Je vous donne ces chiffres à titre d'exemple : en 2010, le patrimoine des millionnaires européens représentait 7 688 milliards d'euros. Une taxe de 5 % sur cette base 2010 aurait rapporté plus de 380 milliards d'euros aux instances européennes ! Rapprochez cela des déficits et vous constaterez qu'on peut leur trouver une solution à la condition de prendre l'argent à ceux qui en ont beaucoup et d'arrêter de plumer les plus pauvres, comme vous le faites.
Défavorable.
C'est extraordinaire ! Je parle de centaines de milliards d'euros et vous expédiez l'affaire, telles les transactions à haut débit : en une fraction de seconde, il n'y a plus de problème ! Mais si, le problème existe. Il y a de l'argent ! Les pépites brillent devant vos yeux ! Au lieu de tendre la main pour les ramasser et en distribuer un peu de l'autre côté, vous dites : « Cachez ces grandes fortunes que nous ne saurions voir ! Nous voulons continuer de protéger ces gens, certes immoraux, parce que telle est notre croyance. Des riches, il en faut, il y en a toujours eu, ma brave dame, et il y en aura toujours parce que c'est la condition du développement économique ! » Mais non ! Nous considérons, pour notre part, que la sortie de crise est justement liée à la répartition de la richesse. Je connais les convictions, les croyances et l'éthique religieuse d'un certain nombre d'entre vous ! Ils n'hésitent pas à se rendre, le dimanche, dans le lieu de leur choix – et je ne parle pas de ce qu'ils mettent dans la corbeille ! – pour dire qu'il faut partager et aider les gens à sortir de la difficulté. Mais, quand ils sont ici, ils oublient ce qu'ils ont dit le dimanche et ils renouent avec l'âpreté et l'inhumanité qu'ils iront confesser après !
(L'amendement n° 289 n'est pas adopté.)
Cet amendement, adopté par la commission des finances, concerne la majoration exceptionnelle de 5 % de l'impôt sur les sociétés s'appliquant dès l'exercice 2011 aux entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 250 millions d'euros. Il vise à traiter cette majoration comme les contributions exceptionnelles de 1995, surtaxe Juppé, et de 1997, surtaxe Strauss-Kahn. Cela permettra d'éviter que les crédits d'impôt ne l'annulent. Vous serez sensible, madame la ministre, au souci de la commission des finances de protéger la recette attendue.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir le sous-amendement n° 452 .
Le présent sous-amendement a pour objet de supprimer les quatre acomptes envisagés pour le paiement de la contribution exceptionnelle d'impôt sur les sociétés qu'il est proposé de substituer à la majoration exceptionnelle du même impôt prévue par le Gouvernement. Le Gouvernement partage totalement le souci constant du rapporteur général de veiller à ce que l'impôt sur les sociétés ne puisse pas être mité par des déductibilités excessives. Reconnaissez que nous y avons beaucoup répondu depuis trois mois puisque toute une série de mécanismes de déductibilité ont été supprimés pour rendre l'impôt sur les sociétés plus solide et plus contributif, s'agissant essentiellement des grands groupes. Je crois toutefois que le système des acomptes imposerait aux entreprises de s'acquitter à la fois de la contribution due au titre de 2011 et des quatre acomptes dus au titre de 2012. Or, vous le savez, la majorité des entreprises clôturent leur exercice social au 31 décembre.
Par conséquent, afin de ne pas dégrader la trésorerie des redevables de cette contribution en 2012, il est proposé qu'elle ne soit due qu'au moment du paiement du solde de l'impôt sur les sociétés.
Nous en venons à une série d'amendements portant articles additionnels après l'article 14.
La parole est à M. Nicolas Forissier, pour soutenir l'amendement n° 90 rectifié .
Le présent amendement définit le régime fiscal des sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires – les SISA – constituées entre professionnels de santé et qui ont pour objet, d'une part, la mise en commun de moyens pour faciliter l'exercice de l'activité professionnelle de chacun de leurs associés et, d'autre part, l'exercice en commun d'activités de coordination thérapeutique.
Cet amendement comporte trois volets.
Il prévoit d'abord de soumettre ces sociétés au régime fiscal des sociétés de personnes prévu à l'article 8 du code général des impôts.
Il sécurise ensuite la situation de ces professionnels de santé pour le passé, afin de ne pas pénaliser ceux qui se sont engagés en 2010 et 2011, avant la création des SISA, dans les expérimentations sur les nouveaux modes de rémunération au travers de sociétés civiles de moyens, de groupements d'intérêts économiques ou d'associations.
Il envisage enfin que la transformation de ces structures – les SCM, GIE et associations – en SISA, avant le 30 juin 2012, pourra se réaliser en toute neutralité fiscale, c'est-à-dire sans imposition immédiate des résultats et plus-values réalisées au jour de la transformation et non encore imposées.
Cet amendement a été travaillé par Mme Vasseur ainsi que par Mme Irles, M. Calméjane, M. Le Mèner et M. Siré. Il sécurise la situation des professionnels de santé et, en même temps, règle un cas particulier qui est important. Il est très attendu et, je le dis au nom d'Isabelle Vasseur, nous serons très attentifs à la façon dont vous soutiendrez ce dossier.
La commission a adopté cet amendement qu'elle a jugé vraiment intéressant parce qu'il facilitera la coordination et le suivi du patient entre différents professionnels de santé. J'avais compris qu'il permettait aussi une coordination avec l'hôpital.
Cela permettra effectivement de coordonner les soins ambulatoires entre eux et avec ceux qui sont dispensés l'hôpital. Le Gouvernement est tout à fait favorable à ce que le régime fiscal des SISA soit sécurisé et il lève le gage.
(L'amendement n° 90 rectifié , modifié par la suppression du gage, est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 170 .
La parole est à M. Christian Eckert.
C'est un amendement de convergence avec l'Allemagne, où la déductibilité des charges d'intérêts des entreprises est plafonnée à 30 %. Je crois que nous sommes à 40 %. Nous souhaitons aligner les taux.
Vous avez déjà remplacé la taxe professionnelle par des taxes diverses et variées dont personne ne connaît le produit. Nous n'avons toujours pas de bilan. Peu importe. Cette disposition qui incite parfois les entreprises à s'endetter plutôt qu'à utiliser leurs fonds propres est pénalisante à la fois pour l'économie et pour la finance.
(L'amendement n° 170 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 360 .
La parole est à M. Christian Eckert.
C'est un amendement que nous avons l'habitude de défendre.
Les LBO, ou financements d'acquisitions par emprunt, permettent des montages qui peuvent se révéler intéressants mais, lorsque le recours à l'emprunt est excessif, ainsi que le ratio de la dette sur les capitaux propres, ce sont des pratiques dangereuses. Nous proposons donc de supprimer l'avantage fiscal lié à la déductibilité des intérêts d'emprunt lorsque le rapport entre les capitaux propres et la dette financière est inférieur à 66 %.
(L'amendement n° 360 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 45 .
La parole est à M. Nicolas Forissier.
C'est un amendement que j'ai cosigné avec de nombreux collègues et qui est porté pour l'essentiel par Marc Le Fur, dont je salue le travail.
Les bâtiments d'élevage doivent subir de grandes modifications pour satisfaire à l'obligation de mise aux normes « bien-être animal », qui sera à terme imposée par la réglementation européenne.
Des mesures fiscales d'incitation favoriseraient la réalisation rapide de ces mises aux normes et permettraient de concilier l'économie et la protection animale. Je tiens à souligner ici, et je pense en avoir le droit au vu de ce que j'ai pu faire dans le passé, que la profession agricole est attachée au bien-être animal. Il faut simplement que le calendrier soit compatible avec ce qu'elle peut réaliser et avec ce que font nos partenaires européens. C'est d'ailleurs ce qui a été souvent dit, notamment lors des rencontres « animal et société » organisées en 2008 par le ministère de l'agriculture.
De telles mesures fiscales ont déjà montré leur efficacité dans de nombreux domaines tels que les énergies renouvelables, les économies d'énergie ou la lutte contre le bruit. Nous pourrions avoir des dispositions comparables pour le bien-être animal.
L'amendement proposé concerne les installations classées. C'est une disposition, madame la ministre, que le Gouvernement devrait pouvoir soutenir.
Défavorable.
D'une part, il existe, vous le savez bien, des dispositifs d'amortissement et, d'autre part, élément nouveau, le ministre de l'agriculture a indiqué que seraient mis en place dans les trois ans qui viennent, à travers la PAC, des subventions supplémentaires, à savoir une vingtaine de millions d'euros pour les volailles et 60 millions d'euros pour les élevages de porcs. Nous avons donc un système équilibré.
Défavorable.
Je voudrais de nouveau attirer l'attention sur les conséquences de l'inflation normative, même si je ne dis pas que les normes, en l'occurrence, ne sont pas justifiées.
On édicte des normes, en dehors du champ parlementaire évidemment, dans des bureaux ou des officines, avec, le cas échéant, quelques lobbies qui espèrent pouvoir vendre ensuite un peu de matériel. Cela représente un coût pour ceux qui sont chargés de les appliquer. Comme ils n'ont pas les moyens de le supporter seuls, ils s'adressent à l'État, qui intervient soit par des subventions soit par un système de déduction fiscale. Moyennant quoi, cela diminue ses recettes ou alourdit sa charge budgétaire.
Le Gouvernement doit vraiment être attentif à ce problème. Les normes nouvelles, nous savons d'où elles viennent. Nous avons une démonstration très claire de ce à quoi elles aboutissent. Elles ne sont pas forcément gratuites pour le budget de l'État. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
J'ai bien entendu votre réponse, monsieur le rapporteur général. Vous avez raison de rappeler le gros effort du Gouvernement annoncé par le ministre de l'agriculture, Bruno Le Maire.
Madame la ministre, votre réponse a été un peu laconique mais je me joins aux propos de Michel Bouvard. Il est essentiel de contenir cette évolution et, en tout cas, d'harmoniser le calendrier de mise en oeuvre, particulièrement en matière d'élevage, avec ce qui se passe dans le reste de l'Union européenne et d'ailleurs dans le reste du monde, où il y a évidemment beaucoup moins de contraintes.
En France, on veut toujours laver plus blanc que blanc. C'est extrêmement grave dans un certain nombre de secteurs, notamment l'élevage. Nous y reviendrons en d'autres occasions et je retire notre amendement.
(L'amendement n° 45 est retiré.)
Il s'agit des jeunes entreprises innovantes. Je laisse à M. Forissier le soin de le défendre.
C'est un amendement qui a été adopté par la commission des finances après un débat qui a eu lieu à plusieurs reprises au cours de ces derniers mois.
La loi de finances de 2011 a largement modifié le régime d'exonération de charges sociales et fiscales qui visait à faciliter les premières années des jeunes entreprises innovantes. L'amendement que je propose, qui a été très largement travaillé avec les professionnels et l'ensemble des intervenants du secteur - tout particulièrement par Laure de la Raudière, notre collègue députée d'Eure-et-Loir, qui vous prie d'excuser son absence - permet de trouver une solution équilibrée et de mettre un terme au débat que nous avons depuis deux ans.
En un mot, il rétablit, dans des conditions d'ailleurs plus cohérentes, les exonérations de charges sociales. Il est vertueux en incitant davantage les entreprises innovantes à embaucher des salariés, notamment de jeunes salariés qualifiés dont elles ont besoin. Il demande un effort en contrepartie, pour que ce soit compensé financièrement, en réduisant de cinq à deux le nombre d'années d'exonération de l'impôt sur les sociétés.
Je pense que c'est un amendement équilibré. Il a été travaillé de façon approfondie par les uns et par les autres et adopté par notre commission. Il faut simplement préciser les bases de calcul, et ce sera l'objet du sous-amendement de M. Mancel. Il va de soi que, notamment pour les charges sociales, il faut prendre en compte les cotisations réellement payées et non pas le plafond de la sécurité sociale.
En tout cas, c'est un amendement très important pour les jeunes entreprises innovantes, qui permet de conforter définitivement le système.
La parole est à M. Jean-François Mancel, pour défendre le sous-amendement n° 472 .
M. Forissier vient de le présenter. Il s'agit simplement de bien préciser sur quelles bases s'appliquent les taux.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement et le sous-amendement ?
Compte tenu de mon parcours, personne dans cet hémicycle ne peut douter de mon soutien plein et entier aux jeunes entreprises innovantes. Vous avez vu avec quelle énergie nous avons préservé l'outil formidable qu'est le crédit d'impôt recherche et incité les PME à travailler davantage avec des laboratoires de recherche publics et à innover.
Je suis donc totalement acquise à la cause des jeunes entreprises innovantes. Je viens d'ailleurs d'en donner une preuve supplémentaire lors de la précédente séance puisque le Gouvernement s'en est remis à la sagesse de l'Assemblée sur une proposition de Nicolas Forissier tendant à recentrer le dispositif Madelin de défiscalisation à l'impôt sur le revenu sur les entreprises de moins de cinq ans, parmi lesquelles il y aura évidemment un grand nombre d'entreprises innovantes.
Nous avons fait de la très belle ouvrage depuis cinq ans pour aider les entreprises à très fort potentiel technologique à se développer, en triplant le crédit d'impôt recherche, en le quadruplant et en le quintuplant même pour les premières années.
Du coup, nous avons estimé l'année dernière qu'il fallait un peu recentrer le statut de jeune entreprise innovante de façon que ces entreprises ne bénéficient pas à la fois de la défiscalisation du crédit d'impôt recherche et des avantages énormes de défiscalisation liés à leur statut de jeune entreprise innovante.
C'est un peu l'inverse de la retraite chapeau. La retraite chapeau est fiscalisée à quelque 75 % pour la part marginale au-dessus de 24 000 euros. Les jeunes entreprises innovantes, elles, sont défiscalisées et encore défiscalisées. On rajoute des louches de défiscalisation et, maintenant, on va leur donner des fonds propres Madelin.
Je ne souhaite vraiment qu'une chose, c'est que l'on ait en France des Google ou des Facebook et des start-up de haute technologie en biotechnologie, et je n'ai agi depuis quatre ans que pour cela. Néanmoins, nous avons voté une mesure l'année dernière et je ne crois pas que ce soit de bonne politique fiscale de revenir dessus cette année.
Le dispositif des JEI se termine en 2013. Prenons le temps de réexaminer ce régime fiscal et de voir l'ensemble des exonérations dont ces entreprises bénéficient, de remettre tout à plat et de construire un régime consensuel. Ce serait vraiment brouillon de changer le dispositif d'une année sur l'autre. Il a été voté l'année dernière, ne le détricotons pas cette année, surtout que c'est un régime qui va s'éteindre. Il entraîne la huitième année des effets de seuil assez durs à appréhender par les entreprises. Tout n'est donc pas idéal et idyllique.
Ce qui est certain, c'est que ces entreprises bénéficient d'un nombre incroyable d'exonérations fiscales, qui fait de la France l'environnement le plus favorable au monde pour les jeunes entreprises à fort potentiel de R&D.
J'entends bien ce que vous dites, madame la ministre, mais je souligne tout de même que, dans cette affaire, c'est nous qui rétablissons ce qui a été modifié l'an dernier.
Vous avez voté cette modification !
Personnellement, non, et elle a été adoptée par l'Assemblée à la demande insistante du Gouvernement.
Nous avons aujourd'hui un peu de recul. Il ne s'agit d'ailleurs pas de tout changer. Notre amendement conserve le système tel qu'il existe, mais nous préférons mettre l'accent sur les incitations en matière de charges sociales, en réduisant en contrepartie les incitations fiscales, car nous partons du principe que, quand une entreprise commence à payer des impôts de façon durable, c'est qu'elle a la possibilité de le faire. Je ne vois pas ce qu'il y a de choquant à ramener de cinq à deux ans la réduction d'impôt sur les sociétés, d'autant moins que c'est en contrepartie d'une mesure vertueuse, qui met l'accent sur le recrutement de personnel. C'est pour cela que nous avons déposé l'amendement. Nous ne rajoutons pas une couche supplémentaire, madame la ministre ; nous tirons simplement les conséquences de l'expérience, nous rééquilibrons et stabilisons les choses.
Dans la mesure où la préoccupation de votre cabinet est, à juste titre, la maîtrise de la dépense publique, je crois pouvoir dire que la conséquence de l'amendement n° 20 en la matière est peu importante, et même, à terme, vertueuse.
Ne me dites pas ça ou je reprends la parole ! (Sourires.)
La différence est de 20 millions. Quant aux chiffrages de Bercy, vous savez bien qu'ils sont souvent variables ! (Mouvements divers.)
(Le sous-amendement n° 472 est adopté.)
Oui, madame la présidente.
(L'amendement n° 20 , sous-amendé, modifié par la suppression du gage, est adopté.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 369 .
Il est défendu.
(L'amendement n° 369 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 214 rectifié .
Il est défendu.
(L'amendement n° 214 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 308 deuxième rectification.
Il s'agit d'un amendement essentiel. Lorsque vous avez allégé l'ISF de 2 milliards d'euros, madame la ministre, lors du dernier ou avant-dernier collectif budgétaire, vous avez créé le dispositif d'exit tax. Il s'agit d'une imposition acquittée par les contribuables résidant à l'étranger lorsqu'ils possèdent une participation d'au moins 1 % dans les bénéfices d'une société ou dont la valeur excède 1,3 million d'euros. Il convient de corriger une imperfection importante de ce dispositif, de manière intéressante, là encore, pour le budget de l'État.
Si la valeur de la participation est inférieure à 1,3 million, le contribuable ne paye rien. Nous pensons qu'une personne détenant dans plusieurs entreprises des participations dont le cumul atteint 1,3 million devrait être soumise à cette taxe. C'est une consolidation du dispositif au niveau de l'individu, comme cela se pratique ordinairement en matière fiscale, afin d'éviter des saucissonnages. Ainsi, le propriétaire d'un patrimoine de 2 millions ne pourrait plus répartir cette somme entre deux sociétés, à hauteur de 1 million dans l'une et de 1 million dans l'autre, pour échapper à la taxe. Cela me paraît de bon sens. Le président de la commission des finances m'a demandé d'insister fortement sur cette mesure à la fois juste et efficace.
Tout à fait favorable. La taxe a été adoptée au mois de juin. Il faut traiter le cas où des participations différentes dépasseraient 1,3 million ; c'est tout à fait logique et cela s'inscrit, madame la ministre, dans votre souci de lutter contre l'évasion fiscale, sujet sur lequel nous avons récemment conduit une conférence de presse ensemble.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cette proposition, car il lui semble qu'elle change complètement le champ de l'exit tax. Cette dernière vise les personnes qui cherchent à échapper à l'imposition sur les plus-values de cession des valeurs mobilières et aux droits sociaux en transférant leur domicile fiscal hors de France, par exemple en Belgique, pour bénéficier d'un régime d'exonération. La fiscalité peut, de fait, être un déterminant du choix de la résidence fiscale pour des personnes qui projettent de vendre l'entreprise qu'ils ont fondée ou développée.
Cet objectif justifie que le dispositif ne s'applique qu'aux participations les plus exposées aux risques d'abus eu égard à leur importance. Le texte retient ainsi les participations qui sont, par entreprise, supérieures à 1 % des droits dans les bénéfices sociaux ou dont la valeur excède 1,3 million d'euros. Ce faisant, nous visons les personnes les plus susceptibles de changer de domicile fiscal en vue de réaliser une cession dans des conditions optimales.
En revanche, nous n'avons absolument pas voulu viser les contribuables qui possèderaient plusieurs participations dans différentes sociétés. Viser un patrimoine d'ensemble comme vous le faites risque d'être incohérent au regard de l'objectif poursuivi, car cela change la nature de la mesure.
Vous proposez de soumettre à l'exit tax les contribuables qui possèdent plusieurs participations de valeur limitée dont le total serait supérieur à 1,3 million. Or il est peu vraisemblable qu'un contribuable gérant un portefeuille de titres important, dont il tire une partie de ses revenus, décide de s'expatrier pour vendre l'ensemble de ses actifs financiers d'un seul coup. En pratique, il procédera à des cessions financières de manière à maximiser le rendement de telle ou telle ligne de son portefeuille, ou bien il vendra des titres pour faire face à des besoins précis. Sa situation n'a donc rien à voir avec celle d'un chef d'entreprise qui souhaite céder son actif professionnel dans les meilleures conditions fiscales et qui se verra conseiller à cette fin un changement de domicile fiscal préalable à la cession.
Comme il ne s'agit pas de la même logique, nous risquons de voir échapper à l'impôt l'exilé fiscal de convenance, si vous me passez l'expression, et au contraire de taxer le propriétaire d'un portefeuille de titres, ce qui ne nous paraît pas cohérent avec l'objectif poursuivi.
Votre lecture attentive des notes qui vous ont été préparées n'est absolument pas convaincante, madame la ministre. Tout le monde a compris ce dont nous parlons. Pour organiser le transfert à l'étranger en vue d'y réaliser des plus-values échappant à l'imposition française, il suffit de saucissonner.
Vous venez même de le confirmer en expliquant que la personne concernée ne fera pas son opération en bloc mais petit à petit. Elle transférera d'année en année des montants inférieurs à 1,3 million.
Je souligne l'avis favorable du rapporteur général sur cette mesure. Si votre volonté est de lutter contre l'évasion fiscale, il faut la voter.
Que l'on soit bien clair : notre objectif est d'éviter que quelqu'un parte à l'étranger pour céder une entreprise hors de France et échappe ainsi à l'imposition sur les plus-values. C'est pourquoi l'exit tax grève les plus-values latentes du bien professionnel.
Ce qui risque de se passer avec l'amendement rédigé par M. Cahuzac, c'est que, par exemple, un cadre expatrié disposant d'un patrimoine important en France, qu'il s'est constitué tout au long de sa vie, devra payer de l'impôt sur la plus-value latente de ce patrimoine alors même qu'il n'a pas du tout l'intention de le vendre, son seul souhait étant de travailler quelques années à l'étranger. Il ne s'agit donc pas du tout, dans ce cas, d'évasion fiscale mais de mobilité de cadre à haut potentiel.
Monsieur Eckert, on part toujours à l'étranger avec son potentiel fiscal !
Il ne faut pas confondre les deux logiques d'évasion fiscale et de mobilité. La mesure a purement et simplement pour objectif d'empêcher que quelqu'un vende son bien professionnel à l'étranger. Nous avons, avec l'accord de l'opposition, exonéré le bien professionnel de la fiscalité sur le patrimoine, car nous ne voulons pas que nos entreprises soient vendues.
C'est exactement la même question. Le jour où le chef d'entreprise veut vendre son bien professionnel, il devient assujettissable à l'impôt, car il faut éviter que la plus-value soit réalisée en Belgique ou en Suisse.
L'amendement de M. Cahuzac a cet effet pervers qu'il fiscalise les plus-values latentes sur tous les portefeuilles, y compris les PEA et les portefeuilles d'actions, d'un cadre à haut potentiel fiscal en mobilité.
Votre exit tax ne vise certes pas, du moins je l'espère, les cadres expatriés mais les personnes qui transfèrent un patrimoine pour réaliser des plus-values à l'étranger. Or nous avons remarqué qu'elle n'empêchait pas l'évasion fiscale, car les gens s'arrangent pour procéder par morceaux. Ils ne sont pas plus bêtes que nous ! Vous assumez ce choix.
(L'amendement n° 308 deuxième rectification est adopté.)
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2011.
Pour information, il reste 216 amendements en discussion.
La séance est levée.
(La séance est levée à treize heures quinze.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron