La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
La parole est à M. Hervé Féron, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative. J'y associe Christian Eckert, inquiet du devenir de l'hôpital de Longwy, qui a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire.
La ville de Nancy était hier en état de siège à l'occasion de la visite du Président de la République, venu au chevet du CHU de Nancy, pour tenter d'expliquer l'inexplicable : un « plan de retour à l'équilibre » qui prévoit la suppression de 650 emplois et la diminution de 50 % des investissements !
Nicolas Sarkozy a bien annoncé une aide de l'État à l'investissement, mais il n'en a pas indiqué le montant. Au demeurant, chacun sait que ce type d'aide ponctuelle n'est absolument pas adapté. Et puis, en Lorraine, les effets d'annonce du Président de la République en visite, on les connaît !
Les Lorrains se souviennent de Gandrange. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Allez-vous nous annoncer la levée de l'urgence, afin que la loi « Hôpital, patients, santé, territoires » puisse faire l'objet d'une deuxième lecture à l'Assemblée nationale ? Il faut en effet que la démocratie fonctionne dans notre pays et que celui-ci ne soit plus uniquement régi par le fait du prince. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Nous demandons enfin que le débat parlementaire soit repoussé après l'examen des propositions de la commission Marescaux.
Le 7 juin prochain auront lieu les élections européennes. Les Françaises et les Français doivent savoir que le projet européen de la majorité de Nicolas Sarkozy propose, contrairement à celui des socialistes, une Europe libérale où la sécurité sociale et l'hôpital public seront remis en cause.
Il n'est pas vrai que l'hôpital public coûte trop cher. Le problème vient du fait que son déficit est organisé. Il est en effet provoqué depuis des années par la diminution des recettes, par des budgets d'austérité et par des contraintes financières réparties de manière inéquitable entre le secteur public et le secteur privé.
Le Gouvernement va-t-il enfin redonner à l'hôpital public les moyens qu'il mérite ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le député, je vous demande tout d'abord d'excuser l'absence de Roselyne Bachelot,…
…retenue en ce moment même au Sénat par l'examen du projet de loi « Hôpital, patients, santé, territoires ».
Vous devriez plutôt vous réjouir que le Président de la République soit aux côtés du personnel hospitalier dans un centre hospitalier tel que celui de Nancy au moment même où l'on planche sur l'avenir du système de santé publique. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
L'objectif du Gouvernement est tout simplement de conforter le système de santé publique. Le projet de loi défendu au nom du Gouvernement par Roselyne Bachelot fait suite à deux années de concertation marquées par les états généraux de l'organisation de la santé, ainsi que par les rapports d'André Flajolet et de Gérard Larcher. Cette concertation a abouti à un projet de loi qui vise à doter l'hôpital public d'un meilleur fonctionnement, grâce à une meilleure organisation et une meilleure gouvernance. Nous savons tous, en tant qu'élus locaux, que celle de l'hôpital fait problème et qu'elle doit être optimisée. Les territoires doivent, eux aussi, être mieux organisés.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Pour cela, il faudrait une seconde lecture !
Pour ce qui est plus précisément de votre question, Mme Bachelot a indiqué qu'il n'y aurait pas de fermeture d'hôpitaux, mais que de nouvelles coopérations pourront être organisées en matière hospitalière. Le projet de loi apporte donc de vraies réponses.
Pendant l'examen du texte à l'Assemblée nationale, j'ai souvent entendu dire sur tous les bancs que, si la santé n'a pas de prix, elle a un coût. Le Gouvernement veut que l'on cesse d'opposer efficience du système et qualité des soins. Nous mettons en oeuvre des moyens nouveaux : ainsi, cette année, 2 milliards d'euros auront été débloqués pour l'hôpital public. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur divers bancs du groupe SRC.)
Monsieur Roy, cessez de hurler dans cet hémicycle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Ma question, à laquelle j'associe mon ami François Rochebloine, chargé des sports au sein de notre groupe, ainsi que Raymond Durand et tout le groupe Nouveau Centre, s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé des sports.
Monsieur le secrétaire d'État, devant la multiplication des cas de dopage depuis quelques années, les instances nationales et internationales ont entrepris de mener une politique volontariste contre ce fléau qui ternit l'image du sport comme ses valeurs sociales et éducatives.
En France, votre ministère a mené une politique active en instaurant en 2008 de nouvelles sanctions pénales contre le trafic des produits dopants, décision qui a déjà porté ses fruits, et en mettant en place une surveillance médicale particulière pour les sportifs de haut niveau. Je salue en outre les efforts consentis par les fédérations sportives et le travail remarquable de l'Agence française de lutte contre le dopage.
Le sport a besoin de règles claires, applicables à toutes les disciplines et à tous les niveaux de compétition, et mettant tous les sportifs sur un pied d'égalité. Il constitue en effet un enjeu majeur de santé publique et de respect d'une dimension éthique essentielle pour notre jeunesse.
Face à la récurrence des cas avérés et prouvés – bien que la présomption d'innocence doit prévaloir dans ce domaine comme dans les autres –, pouvez-vous dresser un bilan de votre action et nous indiquer quelques pistes qui pourraient encore améliorer l'efficacité de la lutte contre le dopage ? Je pense particulièrement aux actions de prévention menées auprès des clubs et des jeunes.
La parole est à M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports.
Monsieur le député, je vous remercie de votre question, dont l'actualité des derniers jours montre le bien-fondé. La France a toujours été un pays leader en termes de lutte contre le dopage. Les gouvernements, de droite comme de gauche, se sont employés à défendre cette image de la France et j'en suis ravi. Nous continuerons dans cette voie.
Le ministère des sports a investi 22 millions d'euros dans la lutte contre le dopage. Celle-ci comprend trois volets.
Le premier concerne la prévention. J'ai lancé une campagne en ce sens à destination des éducateurs et des associations sportifs. Voici d'ailleurs un DVD particulièrement pédagogique (M. le secrétaire d'État montre le DVD aux députés), que vous pourrez trouver dans nos services déconcentrés. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Le deuxième volet porte sur la répression. La loi du 3 juillet 2008 a pénalisé la détention de produits dopants. Auparavant, seuls le trafiquant, qui vendait ces produits, et le sportif, qui les consommait, encouraient une sanction. Au milieu, ceux qui en détenaient, mais qui n'étaient ni l'un ni l'autre, n'étaient jamais poursuivis… Vous vous souvenez sans doute de cette femme d'un coureur cycliste lituanien, qui avait pu suivre tout le Tour de France le coffre de sa voiture rempli de produits dopants, sans avoir jamais été inquiétée. Désormais, ce n'est plus possible. Les effets bénéfiques de la loi du 3 juillet se sont aussitôt manifestés.
Troisièmement, nous avons signé, Mme Bachelot et moi-même, un protocole d'accord avec les industries du médicament prévoyant que celles-ci informeront les autorités de lutte contre le dopage sitôt qu'une molécule ou un nouveau produit potentiellement dopant sera développé. Ce qui nous permet, sans attendre, de mettre parallèlement en place des tests et de mettre fin au phénomène de la « molécule de retard » dont les tricheurs profitaient souvent.
Certes, tout n'est pas parfait. Il nous reste à transposer le code mondial anti-dopage, entré en vigueur le 1er janvier 2009. Je compte sur vous pour nous aider à le mettre en oeuvre rapidement. À cet égard, nous vous proposerons une solution dans les prochains jours. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Noël Mamère, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'identité nationale et de l'immigration.
Monsieur le ministre, après avoir menti à la représentation nationale (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) en affirmant qu'il n'y a pas de délit de solidarité pour ceux qui viennent en aide aux clandestins, après avoir traité de façon plutôt infamante les associations qui viennent en aide à ces damnés de la terre, voilà que vous êtes pris en flagrant délit de mépris de la justice. En effet, dans la nuit de dimanche à lundi, vous avez signé en catimini un contrat avec six associations pour venir en aide aux réfugiés qui se trouvent dans les centres de rétention. Vous l'avez fait avant que le tribunal administratif se prononce, alors qu'il avait demandé à pouvoir le faire aujourd'hui, à la demande d'une association qui assiste et suit les étrangers en centre de rétention, la CIMADE.
Vous en avez profité pour introduire dans ces centres de rétention des associations que personne ne connaît et dont la légitimité n'est pas affirmée. Je pense en particulier au collectif « Respect », créé en 2003 par un ancien collaborateur du ministère de l'immigration que l'on sait proche du parti auquel vous appartenez aujourd'hui, l'UMP. Je pense aussi à cette subvention de 450 000 euros, ce qui n'est pas rien, accordée récemment à une association que personne ne connaît non plus, l'Association Soutien Service Social Familial Migrants.
Monsieur le ministre, vous avez décidé de poursuivre l'action engagée par votre prédécesseur pour casser la CIMADE dans son oeuvre d'assistance aux malheureux qui se trouvent en centre de rétention. Je vous demande de revenir sur l'appel d'offres et de vous expliquer. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
La parole est à M. Éric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.
Monsieur Mamère, j'essaierai d'esquiver la partie polémique de votre question (Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC), pour en venir directement au fond, qui est ce qui préoccupe ceux et celles qui s'intéressent aux étrangers en situation irrégulière.
D'abord, ma seule préoccupation a été que, le 2 juin, les centres de rétention administrative puissent continuer à fonctionner avec l'aide d'associations, de six associations précisément, dont aucune ne mérite l'opprobre – mais je leur laisse le soin de vous répondre – et qui doivent pouvoir travailler. Or, quatre des associations retenues ont publié, le 17 avril, un communiqué dans lequel elles disaient que, si on ne les laissait pas recruter et organiser leurs équipes, elles ne pourraient pas, le 2 juin, apporter d'assistance juridique aux étrangers en situation irrégulière.
Ensuite, j'ai respecté scrupuleusement la loi. D'une part, je n'ai rien changé aux propositions de la commission d'appel d'offres et c'est avec les associations retenues par elle que j'ai signé. D'autre part, le juge des référés, par ordonnance, m'avait demandé de ne pas signer de contrat avant le 7 mai ; j'ai signé le 10 mai – un dimanche, je vous le concède, mais certains ont droit de travailler le dimanche (Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC) et le 10 mai est une belle date. J'ai donc signé trois jours après l'expiration du délai.
Enfin, la CIMADE a été bien traitée dans cet appel d'offres. Sur les deux mille places des centres de rétention, elle continuera d'en gérer mille. Elle recevait pour cela 4 millions d'euros d'aide publique chaque année ; elle conservera 2 millions à l'issue de l'appel d'offres.
Ce que vous avez dit est profondément injuste – mais on sait que cela vous arrive très exceptionnellement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe NC.)
La parole est à M. Christophe Guilloteau, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Mamère s'en va !
Ma question s'adresse à Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Madame la ministre, alors qu'une très grande majorité des étudiants veulent reprendre les cours et passer leurs examens, des blocages persistent dans certaines universités. Il semble qu'ils soient orchestrés par des minorités, parfois extérieures aux facultés.
Vous nous l'avez déjà dit : il faut que les cours reprennent le plus vite possible et que des rattrapages soient organisés pour que les examens se déroulent dans de bonnes conditions.
Certains présidents ont pris des dispositions pour qu'ils soient organisés normalement. Parfois, c'est plus difficile : à Lyon 2, par exemple, alors que les étudiants, consultés en fin de semaine dernière, ont voté massivement la reprise des cours, des bloqueurs ont essayé de saboter le vote.
Je tiens à saluer l'action du Gouvernement qui a fait tout ce qu'il pouvait pour que la situation s'améliore de jour en jour.
Mais que comptez-vous faire pour les universités où les difficultés persistent ? Pouvez-vous, madame la ministre, nous faire un point de la situation ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Effectivement, la tendance à la reprise des cours se confirme jour après jour. Elle correspond à l'attente de la majorité des étudiants et de la communauté universitaire.
S'il faut faire le point globalement, je tiens à souligner d'abord que 35 universités n'ont pas été affectées par ces mouvements ; les cours y ont eu lieu, les examens sont en train de s'y dérouler tout à fait normalement. Une quarantaine d'universités ont été perturbées plus ou moins fortement ; leurs plans de rattrapage des cours ont été approuvés par le Gouvernement, les rattrapages sont en train de se faire, et les examens auront lieu, parfois avec un décalage dans le calendrier.
Reste une petite dizaine d'universités où subsistent des blocages. Je déplore, à ce propos, qu'une quarantaine de bloqueurs violents aient provoqué des échauffourées ce matin à Saint-Étienne, obligeant les forces de l'ordre à intervenir (Protestations sur les bancs du groupe GDR), alors même que, la semaine dernière, une grande majorité d'étudiants stéphanois avaient demandé que le blocage de leur établissement cesse.
Mon ministère sera aux côtés de ces établissements pour les aider à mettre au point leur plan de rattrapage, et nous serons extrêmement vigilants quant à la qualité des diplômes qui seront délivrés. Je le répète, il n'y aura pas de délivrance de diplôme national sans rattrapage des cours. Les recteurs veilleront à la fois à ce que ce rattrapage ait lieu et à la qualité du contrôle des connaissances. Il en va de l'image de ces universités et de l'avenir de leurs étudiants.
Je pense enfin aux étudiants les plus fragiles et je leur demande de se manifester auprès des CROUS pour obtenir les aides sociales auxquelles ils ont droit. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, le 1er juin 2009, dans seulement dix-huit jours, l'application du revenu de solidarité active sera généralisée. Je veux rappeler dans quel contexte cette généralisation aura lieu.
La structure dénommée Pôle emploi, née du regroupement des services de l'ANPE et des ASSEDIC, a toutes les peines du monde à s'organiser, comme en attestent les inquiétudes de ses salariés, et comme peuvent le constater les usagers de ce service – ce que ne nie d'ailleurs pas son directeur général que la commission des affaires sociales a auditionné la semaine dernière.
On ne sait toujours pas quel sera l'avenir des maisons de l'emploi, surtout lorsqu'on entend les déclarations divergentes des ministres en charge de ces questions.
Des études sur les expérimentations menées sur le RSA montrent, selon la DREES, que les écarts du taux de retour à l'emploi entre zones tests et zones témoins sont à la limite de la signification statistique.
Quant aux caisses d'allocations familiales aux budgets étriqués, elles en sont, pour certaines, à devoir fermer leurs portes pendant plusieurs jours afin de rattraper le retard accumulé… Elles annoncent d'ores et déjà leur crainte de ne pouvoir être prêtes pour le 1er juin face à l'afflux des dossiers.
Tout cela alors que le chômage explose, avec 3 500 000 personnes inscrites à Pôle emploi à la fin mars 2009, dont 77 000 inscrits supplémentaires pour le seul mois de mars, et une augmentation de plus de 13 % sur un an.
Dans ces conditions, je poserai quatre questions précises.
Le RSA, qui vise à favoriser le retour à l'emploi, n'a de sens que s'il y a des emplois. Où allez-vous trouver les emplois supports ?
Le RSA ne peut se développer que s'il y a un accompagnement fort par Pôle emploi. Mais comment ferez-vous puisque chacun sait déjà que cet organisme ne pourra pas assumer cette mission dans les délais impartis ?
Enfin, où est la rationalité du financement lorsque Pôle emploi, et donc l'État, demande des fonds aux départements pour financer les postes nécessaires au suivi des bénéficiaires du RSA tout en prévoyant, dans le même temps, d'accorder des crédits à des entreprises privées pour l'accompagnement renforcé des demandeurs d'emploi ?
Alors, pour les chômeurs et les travailleurs pauvres, si les caisses d'allocations familiales et Pôle emploi ne peuvent assurer leur charge de travail et que les emplois supports vous font défaut, comment comptez-vous assurer la réussite du RSA ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse.
Monsieur le député, connaissant bien ce dossier, vous me posez quatre questions précises. À questions précises, réponses précises.
Première question : en période de crise, le RSA favorise-t-il le retour à l'emploi des personnes en difficulté ? (« Non ! » sur les bancs du groupe SRC.) La réponse est oui : la preuve en est qu'avant la fin du mois de mai, nous transmettrons au Parlement le rapport du comité d'évaluation qui montrera notamment qu'au cours des six derniers mois, dans les zones où le RSA est expérimenté, le taux de retour à l'emploi est significativement supérieur à celui des autres zones. Même en période de crise, on a plus de chance de retrouver un emploi avec le RSA. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La deuxième question concerne l'accompagnement par Pôle emploi. Que se passait-il jusqu'à cette année ? Un tiers du million d'allocataires du RMI était inscrit à l'ANPE, alors que les deux tiers restant n'avaient pas droit aux prestations de retour à l'emploi. À partir du mois prochain, 100 % des allocataires du RSA auront droit à l'inscription, à l'accompagnement et aux prestations dont ils ont besoin. Il s'agit clairement d'un droit nouveau que tout le monde attendait.
Troisième question : comment se finance le RSA ? Il est écrit dans la loi votée par la majorité de cette assemblée que tous les conseils généraux peuvent gratuitement inscrire les allocataires du RSA à Pôle emploi.
L'inscription est gratuite, ce qui signifie que les départements n'ont rien à payer pour les prestations de droit commun : zéro euro.
Cela dit, les départements qui veulent faire plus, avec des associations, avec Pôle emploi ou avec leurs partenaires habituels, peuvent continuer à le faire. Ils dépensent 1 milliard d'euros pour l'insertion, l'État ajoute 150 millions supplémentaires pour l'aide au retour à l'emploi : cela marchera ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Parlez-nous donc des récentes statistiques relatives aux travailleurs pauvres !
La parole est à M. Marc Joulaud, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le secrétaire d'État à l'emploi, dans la période que nous traversons, l'emploi constitue à l'évidence la préoccupation première de nos concitoyens et du Gouvernement.
Animé du même souci, le groupe UMP a choisi, dans le cadre de sa niche parlementaire, d'inscrire à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, les 26 et 27 mai prochains, une proposition de loi visant à faciliter le maintien et la création d'emplois.
Les députés UMP, et particulièrement Jean-Frédéric Poisson et Jean-Paul Anciaux, ont travaillé à des propositions concrètes, animés par une double préoccupation : faciliter la vie des acteurs de l'emploi en leur donnant la possibilité d'utiliser tous les moyens de créer ou de préserver des emplois, et garantir les droits des salariés.
Dans ce cadre, la proposition de loi comporte plusieurs dispositions innovantes afin de sécuriser et de développer les groupements d'employeurs. Ils permettent d'offrir des emplois pérennes à partir d'emplois partiels ou temporaires, mais aussi de reconnaître les nouvelles formes de travail comme le télétravail.
Afin de tenir compte de la situation actuelle, nous avons également souhaité rétablir en 2009 l'allocation équivalent retraite versée aux demandeurs d'emplois seniors. Cette disposition vient toutefois d'être déclarée irrecevable par la commission des finances.
Aussi ma question sera-t-elle simple, monsieur le secrétaire d'État : pouvez-vous nous indiquer, d'une part, quelle est la position du Gouvernement sur les dispositions de la proposition de loi UMP, et, d'autre part, si le Gouvernement compte reprendre le principe du rétablissement de l'allocation équivalent retraite en 2009, sujet qui concerne un grand nombre de nos concitoyens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, permettez-moi tout d'abord une remarque. À chaque fois que le président me donne la parole dans l'hémicycle en me désignant comme le secrétaire d'État chargé de l'emploi, l'opposition ajoute systématiquement : « et du chômage ». (« C'est vrai ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Je n'ai pas honte de le dire, mesdames et messieurs de l'opposition : la tâche qui m'a été confiée par le Gouvernement et le Premier ministre est de m'occuper de ceux qui ont un emploi, mais aussi de ceux qui l'ont perdu. Je regrette que vous les stigmatisiez de cette manière (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR) en les instrumentalisant de façon si politicienne. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur Joulaud – je m'adresse à vous puisque je préfère me tourner vers ceux qui, dans cette période, essaient de porter des propositions constructives –, permettez-moi, tout d'abord de souligner le travail effectué par Jean-Frédéric Poisson et Jean-Paul Anciaux sur cette proposition de loi qui s'efforce d'explorer, dans tous les domaines, les améliorations possibles en termes de politique de l'emploi.
Trois points sont particulièrement intéressants. Le premier concerne l'extension du contrat de professionnalisation aux petites PME. Il faut y travailler car l'emploi ne se crée pas seulement dans les grands groupes. Deuxième proposition importante, qui a fait l'objet d'un amendement de Benoist Apparu : faire en sorte que les stagiaires puissent être indemnisés dès le deuxième mois. Ce sujet donnait lieu, depuis longtemps, à de nombreux débats politiques ; finalement, c'est vous qui aurez contribué à le faire avancer. Enfin, une troisième proposition intelligente concerne les groupements d'employeurs qui ont fait leurs preuves, notamment dans votre région. Sur ces trois propositions constructives, le Gouvernement avancera avec vous.
Par ailleurs, il y a deux mois, le groupe UMP avait déjà appelé notre attention sur la question, absolument essentielle, de l'allocation équivalent retraite, destinée notamment aux demandeurs d'emplois seniors en fin de droits. Le Gouvernement vous suivra aussi sur ce sujet, au besoin en reprenant à son compte l'amendement présenté à cet effet.
On le voit bien au travers de votre question, dans la crise, il y a deux attitudes : celle qui consiste à tout critiquer, tout dénigrer, tout stigmatiser (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR), et la vôtre, monsieur Joulaud, qui consiste à aller de l'avant et à faire des propositions.(Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le Premier ministre, le chiffre d'affaires du groupe EDF a augmenté de plus de 10 % en 2008, et son bénéfice net dépasse les 3,4 milliards d'euros. Et GDF-Suez a vu, grâce à la hausse du prix du gaz pour les usagers, son chiffre d'affaires augmenter de 17 % et son bénéfice net de 13 %. Nous ne sommes donc pas face à des entreprises victimes de la crise.
Malgré cela, ces deux entreprises de service public n'ont trouvé qu'une réponse à apporter à leurs salariés, qui revendiquent depuis maintenant sept semaines, dans l'unité syndicale, des hausses de salaires et le maintien de leurs missions de service public : la répression. C'est à croire que même les directions d'EDF et de GDF ont oublié les déclarations du chef de l'État appelant à un meilleur partage des profits. Qu'il semble loin, le temps où EDF et GDF étaient des entreprises publiques réputées pour leurs acquis sociaux !
Les gaziers et les électriciens jouent un rôle central dans le développement de notre pays. Ce sont leurs savoir-faire et leur courage qui rendent possible le droit à l'énergie pour tous et toutes. Pourtant, leurs directions n'ont qu'une réponse à leur apporter : l'intimidation et les procédures disciplinaires.
Aussi ma question est-elle claire, monsieur le Premier ministre : dans quelle mesure l'État, actionnaire incontournable de ces deux groupes, mettra-t-il ses belles paroles sur le partage des profits et le dialogue social en conformité avec ses actes ? Comment l'État compte-t-il inciter EDF et GDF-Suez à accepter enfin de négocier avec les salariés sur la base de leurs revendications et à arrêter toutes les procédures disciplinaires et judiciaires engagées contre les salariés grévistes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement.
Madame Buffet, vous avez fait référence à un certain nombre de conflits sociaux dans les industries électriques et gazières. Or, des négociations salariales menées par les partenaires sociaux y sont actuellement en cours ou achevées, et certaines d'entre elles ont abouti à des accords importants en faveur des salariés.
Ainsi, à GRTgaz, des négociations ont permis une revalorisation de la rémunération des salariés de l'ordre de 4 % et le versement d'une prime exceptionnelle de 900 euros.
À EDF, deux projets d'accord sont actuellement soumis à la signature des organisations syndicales. Le premier porte sur la rémunération individuelle des salariés, le second sur des mesures exceptionnelles complémentaires en matière d'intéressement. Je vous rappelle en outre, madame Buffet, que la masse salariale d'EDF, au cours des deux derniers exercices, a augmenté largement plus que l'inflation, puisqu'elle a crû de 9 %.
Pour respecter les partenaires sociaux, le mieux est de laisser aller à son terme ces négociations, dont l'échéance a été fixée au 20 mai. Par ailleurs, des élections au conseil d'administration d'EDF se déroulent à partir d'aujourd'hui et jusqu'au 19 mai.
Telles sont les indications que je peux vous apporter sur les négociations salariales en cours. J'ajoute que ces conflits ont, hélas ! été marqués, et je ne peux que le déplorer au nom du Gouvernement – le Premier ministre a déjà eu l'occasion de s'exprimer sur le sujet – par des coupures sauvages réalisées par certains salariés.
Ce n'est pas acceptable. Il faut à la fois favoriser et respecter le dialogue social et condamner les coupures sauvages. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le Premier ministre, la décision d'une entreprise française de proposer à ses salariés licenciés un reclassement en Inde pour 69 euros par mois a suscité une indignation légitime.
Le porte-parole du Gouvernement a ainsi parlé de provocation. Or, je n'entends pas la même indignation de votre gouvernement face aux fermetures d'usine et aux délocalisations, qui s'expliquent pourtant par les mêmes causes : une concurrence imbattable, fondée sur des salaires de misère, et l'absence de protection européenne.
L'effondrement de la production manufacturière au premier trimestre 2009 – moins 18 % par rapport au premier trimestre 2008 – et le fait que, depuis quatre ans, 40 % de la production automobile française ait été délocalisée devraient vous inciter à changer de politique économique et à suivre les préconisations du Président de la République qui, pendant la campagne présidentielle, dénonçait à juste raison l'euro cher, l'absence de barrières douanières et le libre-échange déloyal.
Les États-Unis et la Chine protègent leurs marchés et se livrent à des dévaluations compétitives. Pendant ce temps, nos entreprises sont toujours plus nombreuses à fermer, dans l'ensemble de nos circonscriptions. Ma question est donc simple : quand le Gouvernement comprendra-t-il l'urgence sociale ?
Quand comprendra-t-il que les bonnes mesures qu'il est susceptible de prendre pour remédier aux difficultés nationales et contribuer à l'amélioration de notre compétitivité sur notre sol seront toujours battues en brèche par cette concurrence déloyale ? Quand mettrez-vous en accord les beaux discours, justifiés, sur la protection européenne, et les actes, comme la signature du traité de Lisbonne qui interdit toute protection européenne ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services.
Monsieur le député, la situation est suffisamment sérieuse pour qu'on ne la noircisse pas de façon outrancière. (Applaudissements les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Il est vrai que la situation est difficile en France, mais vous avez omis de préciser dans votre question qu'elle l'est partout dans le monde ; la France subit les effets de la crise comme tous les autres pays. Toutefois, avec le Premier ministre, et sous l'impulsion du Président de la République, nous avons été réactifs.
Ce mot de réactivité veut dire quelque chose, puisque, dès le mois d'octobre, nous avons soutenu les PME, ainsi que le financement de l'économie, grâce au plan de financement des banques. Que ce soit avec le plan de relance ou avec le plan en faveur de l'emploi des jeunes, le Gouvernement, sous l'impulsion du Président de la République, a mis à l'ordre du jour cette réactivité dont vous dites qu'elle est inexistante. Si tel était le cas, croyez-moi, nous ne serions pas regardés comme nous le sommes et nos résultats, certes insuffisants, ne seraient pas meilleurs que ceux d'autres pays.
Quant aux restructurations industrielles, Luc Chatel et le ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi s'attachent au quotidien à en limiter les effets. Nous agissons.
Je déplore que vous vous soyez rangés dans le camp de ceux qui se réfugient dans le repli sur soi et l'immobilisme, plutôt que dans celui de l'action, qu'ont choisi le Gouvernement et sa majorité. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Michel Grall, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Monsieur le ministre, le 27 février dernier, vous avez lancé le Grenelle de la mer, qui va permettre de compléter les engagements du Grenelle de l'environnement, voulu par le Président de la République. Le Grenelle de la mer réunit cinq collèges : l'État, les élus, les partenaires sociaux – salariés et employeurs – et les associations de protection de l'environnement. Nourri par des ateliers nationaux, décliné dans des forums régionaux, ce Grenelle de la mer va définir une nouvelle stratégie nationale pour la mer et le littoral, une politique que nous souhaitons ambitieuse et innovante.
Bâtir une politique nationale de la mer, c'est bien sûr conforter la filière de la pêche, valoriser l'ostréiculture ou le tourisme littoral. Mais cela va également au-delà. La mer est au coeur des enjeux de demain : ressources alimentaires et énergétiques, commerce maritime, protection de nos ressortissants. Plus d'un milliard d'hommes dépendent de la pêche pour leur alimentation en protéines animales. Les océans assurent un quart du stockage des gaz à effet de serre.
Toutefois, la mer est aujourd'hui un espace menacé car soumis à de nombreuses pressions urbaines, démographiques et industrielles. La France, qui possède le deuxième espace maritime mondial, a un rôle particulier et majeur à jouer sur ce plan. Nous souhaitons que chacun puisse s'investir dans les débats à venir, afin que la France se positionne comme un leader responsable, reconnu sur le plan international, comme elle a su le faire dans le cadre du Grenelle de l'environnement.
Monsieur le ministre d'État, pouvez-vous nous éclairer sur les prochaines étapes du Grenelle de la mer ?
La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Monsieur le député, le fait que vous veniez d'une circonscription de Bretagne n'est sans doute pas étranger à la passion avec laquelle vous évoquez ce sujet.
Je suis, pour ma part, convaincu du fait que la mer et les océans ont été un peu les oubliés de la deuxième partie du XXe siècle. Or les océans représentent le plus grand potentiel énergétique disponible : l'énergie marine. La mer renferme également la principale ressource alimentaire, qui nourrit aujourd'hui plus de deux milliards d'individus. Elle le théâtre d'une biodiversité très méconnue, dont nous connaissons moins de 1 %. Elle est, enfin, un acteur absolument déterminant de l'évolution du climat, a fortiori dans une perspective de réchauffement climatique.
Or, à tous point de vue, la mer est aujourd'hui en danger du fait de la pollution terrestre, de la pollution maritime et du réchauffement climatique. Nous nous trouvons à un moment crucial de l'histoire de la mer et des océans. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
C'est d'une limpidité ! C'est la bouteille à la mer… ou la bouteille à l'ancre ! (Rires sur les bancs du groupe SRC.)
Nous avons lancé le Grenelle de la mer et, comme nous l'avions fait pour le Grenelle de l'environnement, nous y avons associé tout le monde, notamment vingt-deux parlementaires, toutes tendances confondues – je remercie ceux d'entre vous qui y participent. Les groupes de travail se rendront fin mai dans les outre-mers français afin d'approfondir certains points. Ils rendront leur rapport le 9 juin et des débats régionaux et nationaux seront ensuite organisés, avant la grande réunion qui aura lieu en juillet en vue de mettre au point une grande stratégie française. La France, ne l'oublions pas, est le deuxième pays maritime du monde. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Louis-Joseph Manscour, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé de l'outre-mer. Après le cyclone Dean et le fort séisme de 2007, auxquels est venue s'ajouter la grave crise sociale de février dernier, la Martinique vient de subir sa quatrième catastrophe en moins de deux ans.
En effet, le mardi 5 mai, les Martiniquais se sont réveillés abasourdis par les pluies diluviennes qui se sont abattues sur l'île, plus particulièrement sur les communes de Sainte-Marie, de Gros-Morne, du Robert, du François, de Saint-Esprit et de La Trinité. Plus de 600 millimètres d'eau sont tombés en 72 heures, dont 317 pour la seule nuit du lundi – soit l'équivalent d'une année de pluviométrie en région parisienne –, occasionnant des dégâts considérables : deux morts, plus de 2 000 sinistrés, des coulées de boue, des maisons emportées par des éboulements, des centaines de familles relogées, un réseau routier fortement endommagé, des exploitations agricoles complètement anéanties, un hôpital dévasté, et j'en passe.
Monsieur le secrétaire d'État, vous êtes venu, vous avez vu : une nouvelle fois, la Martinique paye un lourd tribut aux dérèglements climatiques, et la situation est d'une gravité exceptionnelle. Au moment où je vous parle, 60 000 personnes sont encore privées d'eau potable et la seule usine sucrière de l'île, pourtant en pleine campagne de récolte, ne peut encore envisager son redémarrage.
La solidarité familiale et de voisinage a joué pleinement. Les services préfectoraux ont été réactifs. Mais tout cela ne suffira pas pour sortir de cette épreuve. À cette situation exceptionnelle doivent répondre des mesures exceptionnelles.
Je vous pose donc deux questions, monsieur le secrétaire d'État. Premièrement, quelles dispositions concrètes envisagez-vous de mettre en oeuvre pour aider les communes sinistrées, mais aussi les familles, les commerçants, les chefs d'entreprise, déjà touchés par une conjoncture difficile ? Deuxièmement, allez-vous favoriser le processus de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, comme l'urgence le commande ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le député, la Martinique a effectivement connu un phénomène climatique tout à fait exceptionnel, qui a occasionné de nombreuses victimes – des blessés, mais aussi deux décès – et dont le bilan humain aurait pu être encore plus important si l'on pense, notamment, aux conséquences qu'aurait pu avoir l'envahissement soudain de l'hôpital de Saint-Esprit, que j'ai visité lundi.
Comme vous l'avez dit, la solidarité a joué. Des moyens de sécurité civile ont été envoyés sur l'île, notamment afin de permettre l'approvisionnement des 56 000 familles encore privées d'eau potable. La situation sera rétablie d'ici quelques jours grâce à la mobilisation des entreprises et des communes. Cela étant, le réseau routier et les habitations individuelles ont également subi d'importants dégâts auxquels il faut faire face.
Pour cela, j'ai mobilisé les moyens de l'État. Le préfet est en train de constituer les dossiers pour que les communes concernées se voient reconnaître l'état de catastrophe naturelle – on peut envisager que cet objectif soit réalisé pour la fin du mois de juin, autrement dit très rapidement – et pour que nous puissions mobiliser des crédits en faveur des communes sinistrées. Les crédits provenant du fonds exceptionnel d'investissement iront aux collectivités locales ayant à faire face à de gros travaux ; les crédits du fonds de secours de l'outre-mer ont vocation à bénéficier aux particuliers non assurés et obligés de réaliser eux aussi de lourds travaux.
Comme vous le voyez, face à ce nouvel aléa climatique, le Gouvernement et la nation ont montré leur solidarité aux Martiniquais et souhaitent apporter rapidement, dans les semaines qui viennent, les réponses financières qu'attendent nos compatriotes d'outre-mer afin d'être en mesure de réparer les dégâts le plus rapidement possible. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Christian Ménard, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères. J'y associe mon collègue Michel Grall, député du Morbihan.
Alors que la piraterie maritime dans le golfe d'Aden semble connaître ses premières difficultés, qu'il me soit permis de saluer le courage, l'abnégation de ceux qui, bien souvent au péril de leur vie, n'ont pas hésité, notamment à trois reprises, lors des affaires du Ponant, du Carré d'As et, plus récemment, de la Tanit, à se lancer dans un combat à l'issue parfois incertaine. Je veux parler ici de nos commandos fusiliers marins, de notre marine et du GIGN. Ces hommes font un travail remarquable, particulièrement dangereux. Il en est de même de nos services de renseignements.
Aujourd'hui, sous l'égide de l'Union européenne et à l'instigation de notre président Nicolas Sarkozy (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), l'opération Atalante commence à porter ses fruits. Il ne se passe pas une semaine sans que des pirates soient arrêtés. Par ailleurs, force est de constater que les vaisseaux civils observant les consignes de sécurité sont très peu attaqués.
Bien sûr, nous savons qu'une opération navale militaire, fût-elle parfaitement planifiée, ne peut suffire à faire cesser du jour au lendemain des actes de piraterie comme ceux que nous connaissons aujourd'hui. Plusieurs années seront nécessaires pour juguler ce phénomène, ou tout au moins le réduire, comme cela s'est passé dans le détroit de Malacca, et la solution, nous le savons, n'est pas uniquement militaire.
Pourriez-vous donc nous indiquer, monsieur le ministre, quelles sont les perspectives d'évolution, tant en mer que sur terre, car la solution est aussi politique ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Bernard Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes.
Monsieur Christian Ménard, je vous remercie d'avoir, comme vous l'avez fait, rendu hommage à nos forces armées, qui accomplissent un travail remarquable.
Dès l'année dernière, la France avait proposé que les bâtiments du programme alimentaire mondial soient accompagnés, demandant au Conseil de sécurité des Nations unies de donner au dispositif une base juridique ; nous avons enfin, au cours de la présidence française de l'Union européenne, suggéré l'organisation de l'opération Atalante, dont les résultats sont plutôt satisfaisants.
Il faut savoir que 1,6 million de Somaliens dépendent aujourd'hui des programmes alimentaires mondiaux, et que nous dépendons tous du commerce maritime ; que 100 % des navires ayant demandé la protection de la force Atalante ont été protégés ; que 200 bateaux transitent actuellement dans la zone, protégés par deux bâtiments français et des bâtiments allemand, grec, britannique, italien, russe, chinois, indien, américain, soit onze navires au total. Cela ne suffira pas néanmoins à éradiquer la piraterie, et l'opération devra probablement être reconduite pour une année supplémentaire.
Vous avez raison cependant de dire que la solution ne se trouve pas uniquement en mer. Elle se trouve également en Somalie. Un nouveau président a été désigné après les accords de Djibouti ; nous nous sommes engagés à former des troupes somaliennes et nous invitons les pays européens à faire de même. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Serge Janquin, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Madame la garde des sceaux, la crise de l'administration pénitentiaire semble s'apaiser, et c'est tant mieux. Je ne crois cependant pas à l'efficacité des mesures supplémentaires annoncées : la surpopulation carcérale a atteint en sept ans un niveau sans précédent, et les suicides de gardiens comme de prévenus et de détenus témoignent de cet état d'indignité.
Mardi dernier, vous avez répondu à une question bénigne d'un député de la majorité par un hommage mérité mais sans frais aux personnels, à qui vous aviez cependant envoyé les CRS ; surtout, vous avez tenu des propos inexacts et agressifs envers l'opposition. Sous le gouvernement Jospin, la population carcérale a diminué de 8 000, suite à la diminution de la détention provisoire.
Six réhabilitations lourdes et six constructions ont été programmées. S'il existait un délit de mensonge devant la représentation nationale, vous risqueriez la comparution immédiate : fâcheux pour une garde des sceaux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations de l'Union pour un mouvement populaire.)
Le lendemain, vous avez choisi le même registre pour répondre à Mme Robin-Rodrigo : la récidive est constituée. Alors qu'une question de cette gravité nécessite une volonté partagée dans l'intérêt national, vous en avez fait une question partisane.
Quand, simplement, prendrez-vous en compte les règles européennes ? Quand la loi pénitentiaire, votée le 13 mars au Sénat, heureusement amendée par Robert Badinter entre autres, viendra-t-elle en discussion ici ? Alors que le Gouvernement avait décrété l'urgence, pourquoi l'a-t-il retirée de l'ordre du jour de l'Assemblée – ce qui ne vous empêche pas de la vendre comme si elle était déjà votée ?
Il y a eu, sous la Ve République, de grands ministres de la justice, et notamment des femmes – par rejet de l'esprit partisan, je ne citerai que Mme Veil. Elles ont montré compétence, sérieux, travail, dignité, respect de la représentation nationale. À ce jour, s'il s'agit de votre bilan, vous faites au contraire preuve d'inconséquence et d'humeur, comme en témoigne la valse de vos collaborateurs au ministère ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice.
Je déplore les attaques personnelles et les caricatures systématiques ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) La grandeur de tel ou tel ministre m'ayant précédé ne me concerne pas. Je vous signale seulement pour votre gouverne, monsieur le député, que Mme Veil n'a jamais été garde des sceaux. (Mêmes mouvements.)
Mais venons-en aux faits. La surpopulation existe depuis bien avant mai 2007. Face à ce problème, on peut choisir le courage ou la facilité. Le courage consiste à lancer des programmes de construction de prisons. Et qui les a lancés ? Albin Chalandon, Édouard Balladur, Jean-Pierre Raffarin, François Fillon. Il faut avoir le courage de construire des places de prisonsupplémentaires, ce qui est plus difficile que de les inaugurer… (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous dites que la surpopulation carcérale a diminué sous le gouvernement Jospin : sans doute, mais la délinquance a, elle, explosé ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.) Il est facile de ne pas interpeller, de ne pas condamner et de laisser impunie la délinquance (Mêmes mouvements), mais c'est une attitude scandaleuse, qui n'est pas dans l'intérêt de la sécurité des Français.
Vous évoquez la détention provisoire et les libertés individuelles : parlons-en ! Sous le gouvernement Jospin, 46 % des personnes incarcérées étaient en détention provisoire. Nous avons réduit cette proportion de moitié, puisque nous sommes à moins de 20 % aujourd'hui. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Voilà la réalité. Ce n'est ni de la caricature ni de la polémique, mais un constat qui vous fait probablement mal. Ne comptez pourtant pas sur nous pour nous excuser d'améliorer les conditions de détention ! (Applaudissements nourris sur les bancs du groupe UMP. – Huées sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Philippe Boënnec, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre de l'agriculture et de la pêche, dans le courant du mois d'avril dernier, lors d'un déplacement à Étaples, dans le Nord-Pas-de-Calais, nous avons rencontré, avec Daniel Fasquelle, les pêcheurs de la région afin de faire le point sur les importantes difficultés qu'ils rencontrent pour vivre de leur activité.
À votre initiative, une réunion a par la suite été organisée entre leurs représentants et le commissaire européen chargé de la pêche et des affaires maritimes, M. Joe Borg. Pourriez-vous nous indiquer quelle a été la teneur de ces discussions ?
Le conseil des ministres européens de la pêche qui a suivi cette rencontre a été l'occasion d'examiner le Livre vert sur la pêche proposé par la Commission. L'une des principales réflexions de ce texte porte sur l'épuisement de la ressource halieutique. Dans ce cadre, la commission fait un certain nombre de propositions, tant en matière de réduction des flottes qu'en matière de quotas.
Monsieur le ministre, je sais votre mobilisation constante aux côtés des pêcheurs. Un débat plus approfondi sur ce sujet doit avoir lieu lors du prochain conseil européen, le 25 mai. Pouvez-vous dresser un état des lieux précis de ce que propose la commission et des perspectives en la matière ?
De façon plus générale, et sans remettre en cause le nécessaire respect des équilibres de la ressource, la principale demande de nos entreprises de pêche artisanale est de pouvoir vivre décemment de leur travail. Aussi souhaiterais-je connaître les mesures mises en place par le Gouvernement pour rétablir la rentabilité des entreprises de pêche. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche.
Votre question, monsieur le député, me permet d'évoquer l'une des toutes premières politiques européennes, avec l'agriculture : celle de la pêche. Pour les entreprises, le moment est grave : elles sont confrontées tout à la fois aux difficultés économiques et la gestion extrêmement délicate d'une ressource fragile.
La Commission européenne a ouvert le débat le 22 avril, comme vous l'avez rappelé, par son Livre vert. Avec les marins-pêcheurs professionnels, nous voulons trouver à ces questions des réponses nationales, ainsi que les voies d'un meilleur dialogue avec la Commission.
Je pense que nous avons trouvé, avec vous, une partie des réponses nationales dans le Plan d'action pour une pêche durable et responsable : quinze mesures dont, vous le savez, je suis personnellement et quotidiennement la mise en oeuvre. Sur les années 2008 et 2009, ce sont 310 millions d'euros qui leur seront consacrés.
Nous cherchons des réponses européennes en améliorant le dialogue avec la Commission : c'est ainsi qu'il faut comprendre la toute première réunion que j'ai organisée avec les marins-pêcheurs du Nord-Pas-de-Calais. Il y en aura d'autres, avec les pêcheurs de Normandie, de Bretagne, de l'Atlantique, de la Méditerranée et de l'outre-mer.
Je veux établir un meilleur dialogue avec la Commission européenne, notamment sur cette question des quotas : ceux-ci doivent être gérés de façon plus moderne, avec une meilleure communication entre les scientifiques et les pêcheurs.
La défense de la pêche artisanale est un point important : nous n'accepterons pas l'une des propositions de la Commission, qui voudrait établir des quotas transférables individuels. Je n'accepterai pas la financiarisation des quotas, qui aboutirait à la concentration des entreprises de pêche.
Toutes ces questions figureront sur l'agenda des assises de la pêche que nous allons organiser à partir de septembre, pour trouver ensemble les bonnes réponses de la France au débat ouvert par la Commission sur la politique commune des pêches. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Christian Hutin, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le ministre du budget, nous allons dans quelques semaines travailler ensemble, dans cet hémicycle, sur les paris en ligne et sur la libéralisation du marché européen. Ce sera la fin du monopole de notre PMU et de la Française des Jeux.
Nous, parlementaires, le savons tous : dans nos circonscriptions, bon nombre de familles défavorisées s'accrochent à ces jeux de grattage pour essayer de boucler leurs fins de mois, qui – depuis quelque temps – arrivent souvent dès le 15 du mois !
Mais, en travaillant sur ce dossier, j'ai réfléchi et je me suis dit qu'il y avait encore des Français qui gagnaient : il existe un certain nombre de jeux auxquels on gagne à tous les coups !
Récemment, il y a eu à peu près 333 gros gagnants au grand jeu du bouclier fiscal. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Ces 333 gros gagnants ont touché chacun 364 000 euros. Vous me direz qu'ils avaient un patrimoine de quinze millions ; ils ont aussi eu la chance, contrairement aux autres gagnants, de ne pas même devoir aller toucher leur lot au PMU ou à la Française des Jeux : ils ont reçu directement à la maison un chèque du Trésor public.
Il y a aussi d'autres Français qui gagnent : au jeu du tapis vert, il faut s'appeler Bernard – on gagne, là, 100 millions d'euros.
Il y a encore d'autres Français qui gagnent au jeu du CAC 40 : là, c'est qui perd gagne ! Je perds des milliards, je gagne des millions ; je perds des emplois, je gagne des millions ; j'arrive à la table, je gagne de l'argent, je quitte la table, je gagne de l'argent, je reste à la table, je regagne de l'argent…
Monsieur le ministre, vous êtes le maire de Chantilly, vous connaissez bien les chevaux. Je n'ai pas choisi le même que vous pour les élections présidentielles – ne voyez là aucune irrévérence pour les deux candidats ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Mais si vous pouviez susurrer à l'oreille de votre cheval, de votre candidat, qu'il y a en France beaucoup d'injustices fiscales et sociales, ce serait fort bien ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
En réalité, et que vous posiez la question avec ou sans humour, vous vous répétez beaucoup. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Enfin, c'est une impression – je peux me tromper… (Sourires)
Mais j'ai eu le sentiment que la question d'hier, celles de la semaine dernière, celle du mois dernier, et certainement celle de mardi prochain que vous habillerez peut-être autrement, reviennent sans cesse sur ce bouclier fiscal que vous ne pouvez pas admettre.
Pour notre part, nous l'assumons. C'est une bonne décision, je vous l'ai déjà dit à plusieurs reprises. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) L'imposition en France est forte, tant sur le revenu que sur le patrimoine. Dès lors, il est naturel de la plafonner à un niveau de 50 %.
C'est d'autant plus naturel que si ce plafonnement est atteint, c'est que l'impôt est fort. Vous dites qu'on gagne à tous les coups : c'est absolument faux ! Pour gagner à tous les coups, comme vous dites, il faut surtout payer beaucoup, beaucoup, beaucoup d'impôts !
Il faut payer 50 % de son revenu en impôts ! On a l'impression que tout vous balayez cela d'un revers de main. L'imposition, ce n'est pas la confiscation : nous avons pris sur ce sujet de bonnes mesures.
En votre temps, vous aviez d'ailleurs répondu à des questions de façon tout à fait anormale sur le plan de la fiscalité. Lorsque vous avez diminué de façon drastique l'imposition sur les stock-options, vous avez commis une erreur, et nous avons rétabli la situation. Lorsque vous avez permis aux gérants de fonds spéculatifs d'être totalement exonérés d'impôts, vous faisiez une erreur, et nous avons rétabli la situation. (« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP.) Cette majorité n'a, vous le voyez, pas vraiment de leçons à recevoir, fût-ce sur un ton humoristique – dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Catherine Vautrin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Notre pays a aujourd'hui le meilleur taux de fécondité d'Europe. Pour conforter cette situation, il est clair qu'il faut apporter aux familles les solutions les plus efficaces, notamment en ce qui concerne la garde des enfants.
Madame la secrétaire d'État chargée de la famille, vous avez mis en place, lundi dernier, une expérimentation sur un nouveau mode de garde que vous appelez les « jardins d'éveil ». (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Ces jardins d'éveil sont inspirés d'un modèle qui existe dans d'autres pays d'Europe, notamment en Allemagne.
Ce sont des lieux où l'on accueille les tout-petits, entre deux et trois ans, propres ou non. Ils constitueraient pour les familles une nouvelle alternative.
Cette annonce a suscité, notamment hier au Conseil de Paris si j'en crois ce que la presse rapporte aujourd'hui, une polémique alors qu'on aurait pu s'attendre à une réflexion sur l'aspect novateur de cette mesure pour les familles.
Pourriez-vous, madame la secrétaire d'État, donner à la représentation nationale les éléments lui permettant de comprendre ce concept ?
Pourriez-vous nous dire comment il fonctionne, nous expliquer en quoi il n'a pas vocation à se substituer à l'école et comment il peut être mis en place dans les communes dans les meilleurs délais, au bénéfice de l'ensemble des familles de France ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille.
Madame la députée, je suis venue dans votre circonscription, à Ville-en-Tardenois (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), à l'invitation du maire, Thierry Barba, lancer l'expérimentation des jardins d'éveil, et notamment les appels à projet afin que nous puissions accueillir, d'ici à 2012, près de 8 000 enfants dans ces structures sur l'ensemble du territoire.
La tranche d'âge concernée est celle des deux à trois ans. Vous qui êtes préoccupée par le développement de modes de garde adaptés aux contraintes des territoires – car le milieu urbain et le milieu rural, ce n'est pas la même chose –, vous devez savoir qu'il nous faut développer des structures souples, faciles à mettre en oeuvre et, surtout, offrant une bonne qualité d'accueil pour ces enfants qui, je le rappelle, sont encore des bébés et ont besoin d'un accompagnement plus rapproché, plus personnalisé.
D'un côté, il y a, pour les plus de trois ans, l'école maternelle, à laquelle nous sommes très attachés ; de l'autre côté, il y a les autres modes de garde. À la maternelle, vous le savez, les enfants sont encadrés par un enseignant et un ATSEM ; dans les jardins d'éveil, l'accompagnement sera assuré en permanence par trois adultes pour vingt-quatre enfants, plus deux administratifs.
Les projets pourront être portés par les communes, par les communautés de communes, mais également par les associations ou les entreprises.
La ville de Paris, comme vous l'avez dit, a indiqué qu'elle n'expérimenterait pas les jardins d'éveil ; cette décision est fâcheuse pour nos concitoyens, auxquels nous devons proposer un panel de modes de garde très diversifié. Je crois pourtant me souvenir que Mme Ségolène Royal avait annoncé ici même, le 25 octobre 2001, lors d'une séance de questions, alors qu'elle était ministre déléguée à la famille : « Nous assouplirons les conditions d'accueil pour les enfants de deux à trois ans qui n'auront pas encore intégré l'école maternelle en instaurant des classes passerelles, des jardins d'enfants. »
À cette époque, on accueillait les enfants de moins de trois ans en maternelle !
Je pense que M. Delanoë devrait demander pardon à Mme Royal et que Mme Royal va nous donner sa bénédiction. (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Henri Jibrayel, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
L'augmentation des pensions de retraites fixée à 1 % à partir du 1er avril ne répond pas à la situation des 14 millions de retraités qui vivent dans des conditions modestes et, pour certains, sous le seuil de pauvreté. Une augmentation de 1 % représente à peine plus de 6 euros pour une personne seule qui touche 649 euros par mois. Cela ne couvre même pas, pour certaines, l'augmentation des loyers et de la mutuelle. C'est dérisoire au regard des 368 000 euros du bouclier fiscal, soit 30 000 euros par mois, que vous accordez aux 834 contribuables les plus riches de France !
La suppression du paquet fiscal permettrait de dégager 15 milliards d'euros par an et de mener ainsi une véritable politique permettant d'améliorer le quotidien de nos concitoyens.
Ne nous répondez pas, comme toutes les autres fois, qu'il faudra aller plus loin. Nous savons très bien que, pour vous, le difficile prend du temps et l'impossible un peu plus encore, mais avec 1 % seulement d'augmentation de leur retraite, c'est la vie de nos aînés qui devient impossible.
Je vous demande, monsieur le Premier ministre, ce que vous comptez faire concrètement et rapidement, non pas pour améliorer l'ordinaire des personnes à la retraite, mais tout simplement pour le rendre concevable ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille.
Monsieur le député, je vous rappelle qu'en septembre 2008 les pensions de 15 millions de retraités ont été revalorisées de manière anticipée de 0,8 %. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Une nouvelle augmentation de 1 % est intervenue le 1er avril dernier pour tenir compte de l'inflation.
Nous avons voulu (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC),pour remédier aux situations de pauvreté que connaissent certains retraités, aller au-delà, grâce à trois mesures structurelles.
Premièrement, nous mettons en oeuvre dès cette année l'engagement du Président de la République d'augmenter augmentera de 25 % d'ici à 2012 le minimum vieillesse pour les personnes seules.
La première étape de cette augmentation a eu lieu, comme le prévoit la loi de financement de la sécurité sociale, dès le 1er avril : 6,9 % d'augmentation, soit 44 euros de plus par mois pour 400 000 de nos concitoyens. Lundi, les bénéficiaires du minimum vieillesse ont touché pour la première fois cette prestation à son nouveau montant.
Deuxièmement, les pensions de réversion des 600 000 veuves et veufs les plus modestes seront revalorisées de 11 % dès le 1er janvier. C'est un effort de 200 millions d'euros par an.
Troisièmement, nous avons pris en compte la situation des exploitants agricoles retraités et de leurs veuves, en créant au 1er février un minimum de pension, garanti aux assurés les plus modestes ayant cotisé au moins vingt-deux ans et demi. Cela concerne 230 000 personnes.
Face à la crise, le Gouvernement a également pris des mesures exceptionnelles.
D'abord, le collectif budgétaire, que vous n'avez pas voté, prévoit un allégement de l'impôt sur le revenu pour les classes moyennes à revenus modestes, qui bénéficie à plus de 6 millions de ménages imposables.
Ensuite, des bons d'achats de 200 euros par foyer seront versés dès le mois de juin à 660 000 personnes âgées dépendantes qui vivent à domicile. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Augmentation des petites retraites
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Alain Néri.)
L'ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour le développement économique des outre-mer (n° 1631).
La parole est à M. Michel Diefenbacher, rapporteur de la commission mixte paritaire.
de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État chargé de l'outre-mer, monsieur le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, mes chers collègues, en rapportant devant vous le texte mis au point par la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour le développement économique des outre-mer, je voudrais d'abord saluer l'excellent travail effectué tout au long de la procédure par notre collègue Gaël Yanno, qui en a été le rapporteur et à qui il reviendrait aujourd'hui, s'il n'était pas retenu en Nouvelle-Calédonie, de vous présenter les derniers ajustements apportés à ce texte.
Un de perdu, un de retrouvé, si je puis dire : je voudrais saluer le retour parmi nous de notre collègue Alfred Almont, dont la collaboration à la mise au point du projet tout au long de la procédure a été en tous points exemplaire.
Qu'il me soit également permis de souligner l'excellent état d'esprit dans lequel les parlementaires de tous les bancs, élus de tous les territoires de la République, ont participé à l'examen du texte. Avec l'opposition, nous n'avons pas été toujours d'accord sur tout, mais les débats ont toujours été courtois, respectueux et constructifs. Et nous avons su nous retrouver chaque fois que l'intérêt de l'outre-mer le commandait. En cette période où la tension, en Guadeloupe notamment, n'est pas encore complètement retombée, même si on en parle moins, il y a là un message qui doit être entendu : pour qui veut avancer, l'union des efforts est toujours préférable à l'affrontement.
Je souhaite enfin saluer la disponibilité, la recherche d'objectivité et le sens de la conciliation dont, monsieur le secrétaire d'État, vous avez constamment fait preuve.
J'en viens à présent au contenu du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
À l'issue de la première lecture, l'essentiel du projet restait en discussion. Notre assemblée avait précisé et corrigé presque l'ensemble des articles, principalement à l'initiative de la commission des finances, qui avait pour la première fois la charge de fixer les termes du texte soumis à la discussion en séance, ainsi que sous l'impulsion des commissions des lois et des affaires économiques, saisies pour avis. Ces corrections étaient majoritairement techniques, mais plusieurs divergences de fond étaient également apparues entre les deux assemblées.
La commission mixte paritaire a retenu, pour l'essentiel, la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, parfois assortie de corrections strictement formelles : soixante-deux articles sur soixante-quatorze restant en discussion sont ainsi inchangés, sauf corrections rédactionnelles, par rapport à vos délibérations de première lecture.
Sur les douze articles restant, la commission mixte paritaire est parvenue à plusieurs compromis, dont je vais rapidement faire l'exposé.
Le premier compromis concerne le soutien au pouvoir d'achat : la commission mixte paritaire a resserré le dispositif, supprimant notamment l'obligation de transmission des documents d'urbanisme commercial aux parlementaires.
Le deuxième compromis intéresse la défiscalisation des investissements productifs. Trois modifications ont été apportées au texte de l'Assemblée nationale : la commission a tout d'abord aligné, en matière d'impôt sur les sociétés, la limitation du risque fiscal déjà prévue pour la réduction d'impôt sur le revenu ; elle a ensuite souhaité que les entreprises de taxi ayant plus de deux ans d'existence ne soient pas affectées par le durcissement du régime d'agrément prévu pour le secteur des transports ; enfin, le projet de loi entendait réserver le bénéfice de la défiscalisation aux entreprises à jour de leurs cotisations fiscales et sociales. La commission mixte paritaire a précisé que figurent au rang de ces entreprises celles qui ont souscrit et respectent un plan d'apurement de leurs dettes.
Le troisième compromis concerne diverses modifications techniques qui ont été apportées à l'article 20, principalement dans un souci de simplification. Ainsi, l'obligation d'un porté à connaissance des opérations d'un montant inférieur au seuil d'agrément a été supprimée, puisqu'elle était devenue redondante avec la déclaration au premier euro voulue par notre assemblée.
S'agissant de l'article 20 ter, la CMP a voulu concilier l'information des exécutifs locaux au titre de chaque investissement, à laquelle nos collègues du Sénat étaient attachés, et l'extension de ce dispositif aux régions d'outre-mer, que nous avions jugé opportune.
Le quatrième compromis se rapporte à des dispositions diverses. La commission a repoussé de six mois la date butoir pour l'achèvement des travaux de la commission chargée d'établir un état civil à Mayotte et a précisé l'objet des rapports de la Commission nationale d'évaluation des politiques de l'État outre-mer.
Voilà résumés, chers collègues, les derniers ajustements qui vous sont proposés. Le projet de loi sur le développement économique des outre-mer est important par son contenu et en raison des difficultés qui, depuis le début de l'année, affectent le climat social, et par conséquent la situation de l'économie et de l'emploi dans les départements d'outre-mer. Ce n'est toutefois qu'un texte d'étape, les états généraux de l'outre-mer devant apporter d'autres idées et, par conséquent, d'autres projets. L'urgence qui a marqué nos travaux n'a pas empêché l'Assemblée nationale de débattre pleinement de cette réforme voulue par le Président de la République.
Le texte mis au point par la commission mixte paritaire, complété par quelques amendements du Gouvernement qui nous seront présentés tout à l'heure, a été adopté par le Sénat mercredi dernier. Je demande à l'Assemblée nationale de faire de même aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, messieurs les secrétaires d'État, mes chers collègues, le parcours législatif du projet de loi de développement économique des outre-mer, issu du travail des deux assemblées du Parlement, va enfin connaître aujourd'hui son aboutissement. Il traduit les engagements pris par le Président de la République en 2007. S'il apporte une partie des solutions à nos difficultés, il marque une première étape et nous attendons beaucoup des états généraux de l'outre-mer.
Avec ce nouveau projet de loi, l'économie de nos régions ultramarines va connaître un nouveau souffle. Il faut donc saluer des avancées notables. Ainsi, la création de zones franches d'activités devrait permettre, grâce à des exonérations de charges, de redynamiser les entreprises et de favoriser la création d'emplois, surtout dans les secteurs prioritairement retenus comme le tourisme, l'agro-nutrition, l'énergie et l'environnement, les nouvelles technologies et la recherche.
Il en est même de la création d'un fonds exceptionnel d'investissement outre-mer, destiné à financer des équipements collectifs, et qui donnera un coup de pouce aux collectivités. Je souhaite d'ailleurs que la priorité soit donnée à la création de zones d'activités économiques, à la réalisation d'opérations immobilières d'entreprises, à la création de parkings, en un mot que les collectivités puissent avoir des équipements structurants.
Les besoins de logement social, qui est une des grandes priorités de l'outre-mer, sont estimés à plus de 70 000 euros. Ce texte prévoit d'apporter une réponse grâce à l'outil de la défiscalisation, dans le domaine du logement social et intermédiaire, mais également grâce à la réhabilitation des logements anciens.
Par ailleurs, l'adaptation de l'amendement Scellier à l'outre-mer favorisera – n'en doutons pas – la construction de logements libres et relancera l'industrie du BTP.
D'autres aides ont également été prévues pour les petits commerces, l'artisanat, l'agriculture, les très petites entreprises. Je me félicite que les entreprises relevant d'un régime micro aient été prises en compte et que le dispositif du plan Corail s'applique à l'ensemble des départements d'outre-mer.
Il faut noter aussi, messieurs les secrétaires d'État, l'unanimité de nos assemblées sur le dossier de la bagasse – c'est une grande première – qui permet de produire, comme vous le savez, 40 % de l'énergie à La Réunion. Ce n'est pas négligeable. Les agriculteurs et les industriels sont ravis que cet amendement ait été adopté à l'unanimité.
Enfin, le dispositif de la continuité territoriale a été amélioré, afin de répondre plus amplement aux demandes d'aide à la mobilité pour études ou formation professionnelle de nos concitoyens. Cependant, comme vous me l'avez assuré, monsieur le secrétaire d'État, j'attends que, dans les mois à venir, les sujets étudiés mais encore en suspens puissent aboutir concrètement. Il s'agit plus précisément de la reconnaissance des commerçants comme acteurs à part entière des zones franches d'activités, des propriétaires de petits équipements hôteliers ; de la demande d'un gazole professionnel pour les transporteurs. Les agriculteurs attendent, compte tenu des difficultés liées à leurs activités, de bénéficier d'une aide à l'importation des produits phytosanitaires et engrais.
Il est bien d'autres sujets, par exemple la prise en compte d'une défiscalisation de l'outil de travail pour les professions libérales, comme les ambulanciers, qui n'en bénéficient pas. Le Gouvernement a su, une nouvelle fois, manifester le plus grand intérêt pour le développement économique de nos régions d'outre-mer. Je ne doute pas de son engagement pour l'avenir. C'est la raison pour laquelle le groupe UMP votera ce projet de loi, sans état d'âme.
Toutefois, de la promulgation rapide de cette loi et de la publication de ses décrets d'application dépend la relance économique effective de l'outre-mer. Je compte donc sur votre diligence pour faire accélérer les procédures administratives.
Je voudrais adresser mes remerciements, ainsi que ceux des collègues de notre groupe, aux ministres qui ont beaucoup oeuvré pour que ce texte soit examiné dans un bon climat et que les amendements puissent être retenus. Je remercie également les collaborateurs des cabinets ministériels, des groupes parlementaires et des députés qui ont travaillé sur ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous voici donc réunis pour l'adoption définitive du projet de loi de développement économique des outre-mer.
La commission mixte paritaire qui s'est réunie la semaine dernière est en effet parvenue assez facilement – et dans un très bon climat – à un texte commun, adopté à l'unanimité. Elle a maintenu certaines modifications apportées par l'Assemblée nationale. C'est notamment le cas pour l'extension à Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin et Saint-Barthélemy de la possibilité de verser un bonus salarial exonéré d'impôt de 1 500 euros ; de l'extension de la défiscalisation du logement social à l'accession sociale ; du fléchage d'une quote-part de la dotation de développement urbain, créée par la loi de finances pour 2009, vers les départements d'outre-mer.
Par ailleurs, la commission mixte paritaire a confirmé la suppression, votée par l'Assemblée nationale, de la taxe sur les jeux en outre-mer qu'avait instituée le Sénat, ce que nous sommes nombreux à regretter. Soyez assurés que nous remettrons très prochainement l'ouvrage sur le métier, notamment lors du prochain débat sur la légalisation des jeux en ligne, tout comme nous reposerons avec force la question du prix des carburants dans nos régions.
Je tiens également à souligner deux éléments du texte qui innovent en matière de grands principes et qui ont été entérinés en CMP : l'article 32 bis, qui reconnaît l'appartenance des langues créoles au patrimoine national de la France, et les articles 31 bis B et 31 bis C, qui mettent en oeuvre, pour le conseil régional de Guadeloupe, la possibilité d'intervenir dans le domaine de la loi, comme le permet l'article 73 de la Constitution, en matière énergétique et de formation professionnelle. C'est une première historique ; permettez-moi d'en tirer quelques motifs de satisfaction.
De même, l'avancée considérable que nous avions obtenue sur le sujet de la bagasse, grâce au combat tenace mené par notre collègue Fruteau, a été entérinée par la CMP. Les habitants de Guadeloupe y ont été très attentifs. C'est du bon travail.
D'autres ajouts apportés par l'Assemblée nationale ont été, à l'initiative du Sénat, modifiés ou supprimés en commission mixte paritaire.
Ainsi, la CMP a supprimé ce qu'elle a considéré comme des déclarations de principe, à savoir l'importance du secteur de la pêche et de l'agriculture pour le développement endogène des territoires d'outre-mer, ainsi que la possibilité de cumuler les crédits de la ligne budgétaire unique avec la défiscalisation. Il est en effet apparu que ces déclarations n'avaient pas d'effet normatif et qu'elles risquaient de poser plus de problèmes qu'elles n'en résolvaient. Je ne suis personnellement pas persuadé de la justesse de ces craintes. Mais je peux les comprendre.
Par ailleurs, la CMP a supprimé le crédit d'impôt créé en faveur des PME qui adhèrent à des structures d'accompagnement de projets, ainsi que la création d'une conférence quinquennale des observatoires des prix et des revenus outre-mer, deux mesures qu'elle a jugées peu pertinentes, ce que je regrette également.
Enfin, à l'initiative de l'Assemblée nationale, la CMP a apporté au texte du projet de loi de nombreuses améliorations rédactionnelles, d'harmonisation et de coordination, notamment à l'article 20.
Je regrette cependant que les propositions d'élargissement de l'éligibilité géographique des zones franches d'activités à deux nouvelles communes de la Guadeloupe, Basse-Terre et Saint-Claude, n'aient pu être acceptées en CMP. Il fallait une règle.
En définitive, la CMP n'a donc modifié qu'à la marge le texte issu de nos travaux. Si le projet de loi sort profondément transformé et, il faut le reconnaître, sensiblement enrichi par la discussion parlementaire en raison, notamment, de nouvelles marges de manoeuvre que le Gouvernement a dû concéder sous la pression populaire, répondra-t-il pour autant aux inquiétudes, aux craintes, aux indignations qui se sont exprimées récemment dans nos départements d'outre-mer en matière d'emploi, de pouvoir d'achat, de logement, de formation, de transports, de communication ? Nous craignons très sincèrement que ce ne soit pas le cas, ce qui nous interdit de vous accompagner dans l'approbation de ce texte. Sur le fond, vous savez que nous n'en partageons pas la philosophie générale. Derrière votre volonté de favoriser un développement endogène de nos territoires, nous avons vu la réalité des économies budgétaires que vous nous imposez, lesquelles poursuivent une politique de désengagement de l'État, qui, à périmètre constant, a coûté plus d'un demi-milliard d'euros de crédits au budget de l'outre-mer depuis 2002.
J'espère que nous aurons très prochainement l'occasion de reparler ici des outre-mer lorsque le temps sera venu de tirer les conclusions, éventuellement législatives, des états généraux. Nous aurons alors matière à juger plus concrètement des résultats de cette loi. Soyez certain que nous saurons reconnaître nos éventuelles erreurs de jugement quant à l'efficacité des mesures proposées, comme vous saurez, je l'espère, reconnaître les vôtres.
Par ailleurs, nous serons également attentifs, lors de l'examen du prochain projet de loi de finances, aux moyens mis en oeuvre pour répondre à tous les engagements pris, je pense notamment au doublement des effectifs du SMA ou à la revalorisation des aides au logement, d'autant que les avancées introduites au cours de ce débat n'ont pas été intégrées dans la dernière loi de finances rectificative, notamment en ce qui concerne les exonérations de charges.
Vous le comprendrez, les membres du groupe socialiste adopteront une position cohérente avec celle qui fut la leur en première lecture. Ils s'abstiendront donc. Ils vous demandent cependant, monsieur le secrétaire d'État, de voir dans cette position à la fois un gage de bonne volonté et le signe d'une extrême vigilance. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour le groupe Nouveau Centre.
Monsieur le président, monsieur les secrétaires d'État, mes chers collègues, nous achevons aujourd'hui l'examen d'un projet de loi particulièrement attendu par nos concitoyens ultramarins. En effet, les mouvements de très grande ampleur qu'ont connus la Guyane, la Guadeloupe, la Martinique puis La Réunion ces derniers mois, ont révélé le besoin criant et l'urgence à apporter des réponses de fond aux problèmes entravant structurellement le développement économique de nos départements et collectivités d'outre-mer.
Nous connaissons parfaitement les handicaps structurels dont souffrent depuis longtemps les collectivités d'outre-mer. Elles subissent ainsi des contraintes liées à leur éloignement géographique de l'hexagone et à une économie trop tournée vers la métropole ; à leur insularité, à l'étroitesse de leur marché intérieur, trop souvent contrôlé par quelques puissances économiques, qui, de ce fait, désorganisent le marché à leur profit ; et enfin, au fait qu'elles sont, pour la plupart, proches de pays disposant d'une main-d'oeuvre à faibles revenus.
De plus, ces contraintes ont de très lourdes répercussions sur le taux de chômage, qui touche en moyenne 36 % de la population active de l'outre-mer. Conséquence directe de revenus plus bas et de prix plus élevés qu'en métropole, le pouvoir d'achat y est très dégradé : les écarts en termes de prix peuvent ainsi atteindre 35 % pour les produits de première nécessité. C'est le fruit de situations monopolistiques, auxquelles nous pensons que l'État devra impérativement s'attaquer s'il souhaite rétablir un niveau de prix plus raisonnable.
Face à un tel constat, le Nouveau Centre ne peut que se féliciter des engagements pris par le Gouvernement à travers ce projet de loi, en première lecture et à l'issue de la CMP, afin de fonder un nouveau développement économique de nos territoires ultramarins. Notre soutien est d'autant plus fort que quatre lois ont déjà été votées depuis 1986, en vue de promouvoir l'essor économique de l'outre-mer : la loi Pons en 1986, la loi Perben en 1994, la loi Paul en 2000 et, enfin, la loi Girardin en 2003. Or force est de constater que les objectifs initiaux de ces lois n'ont pas été atteints.
Il apparaît indispensable de répondre aux préoccupations sociales et politiques de l'outre-mer que les populations ont légitimement exprimées ces derniers mois, avec force. La réponse se doit d'être à la hauteur et efficace : il s'agit de poser, dès aujourd'hui, les fondements d'un nouvel essor économique outre-mer.
Les territoires ultramarins souffrent d'un réel déficit en matière de création de richesses. C'est le problème de fond. Aussi, nous saluons un texte qui s'attaque aux objectifs de viabilité économique et de cohésion sociale par le biais du développement des capacités de productions propres à l'outre-mer : sans elles, il ne saurait y avoir de réel développement économique ; il n'y aurait qu'une politique d'assistanat à court terme. Cet objectif nécessite de promouvoir les principes de responsabilité et de liberté d'entreprendre et de croissance endogène. Mais, on ne saurait l'oublier, il suppose également une action publique efficace, notamment pour lutter contre le phénomène des monopoles économiques concentrés entre les mêmes mains.
Nous estimons que ce texte va dans le bon sens. Il reprend d'ailleurs trois objectifs que nous défendons depuis plusieurs années.
Le premier est le nécessaire développement économique endogène de l'outre-mer. Il est indispensable de mettre en place les conditions d'un développement économique plus prospère, qui permette à la fois de créer des emplois et d'accompagner les entreprises locales, surtout les plus petites d'entre elles. Essentiellement tourné vers le tissu local d'entreprises, le texte issu de nos travaux rejoint nos ambitions. Il faut en effet remettre les entreprises et les entrepreneurs au coeur de nos préoccupations et de notre action. Ainsi, la principale mesure du texte créant des zones franches d'activités va dans le bon sens : au sein de ces zones, les entreprises pourront bénéficier d'abattements à hauteur de 50 % sur les bases de l'impôt sur les bénéfices, de la taxe professionnelle et de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Le travail de la commission a permis d'identifier les secteurs prioritaires dans chaque territoire, ce qui est une innovation utile. Ainsi, en Martinique et en Guadeloupe, ces secteurs recouperont les activités de recherche-développement, les nouvelles technologies, le tourisme ainsi que les activités concernant les énergies renouvelables. À La Réunion, cet abattement bénéficiera au tourisme, au secteur de l'agro-nutrition ou encore aux énergies renouvelables, secteur dans lequel le retard des départements ultramarins est considérable, alors qu'il représente un important potentiel de développement économique, que ce projet de loi met en valeur en prévoyant d'y consacrer les aides nécessaires.
Nous souhaitons souligner le travail de concertation qui a été effectué en commission dans la définition de cet objectif. En effet, nous ne croyons pas à l'utilité d'une exonération à 100 % sur le foncier non bâti, car cette mesure aurait tendance à favoriser encore davantage le propriétaire au détriment de l'exploitant, idée rejetée par le Nouveau Centre.
Le deuxième objectif de votre projet de loi, que nous partageons, concerne le recentrage des aides sur le logement social. Le groupe Nouveau Centre se félicite que soit ajouté aux crédits budgétaires existants un nouveau mode de financement permettant aux sociétés anonymes de HLM et aux sociétés anonymes coopératives de HLM de bénéficier du dispositif de défiscalisation des logements sociaux. En effet, les dispositifs antérieurs avaient eu des effets secondaires très préjudiciables au logement social. Nous saluons le choix courageux qu'a effectué le Gouvernement : il offrira une réponse à l'explosion des demandes de logements sociaux constatée ces dernières années, en limitant les dérives que nous avons connues à cause de défiscalisations qui ne faisaient que renchérir le coût du logement dans les territoires ultramarins.
Enfin, le troisième objectif que nous saluons est la possibilité que se donne l'État de réglementer les prix des produits de première nécessité dans les collectivités territoriales d'outre-mer où il a compétence pour le faire. Les députés du Nouveau Centre et les sénateurs centristes sont satisfaits de cette mesure qui est, à court terme, le seul moyen de répondre aux grandes difficultés concernant le pouvoir d'achat outre-mer. Nous restons avant tout attachés au principe de l'économie de marché régulée, dans laquelle l'État détermine le cadre des initiatives économiques. Cela étant posé, le Gouvernement doit permettre que la concurrence soit réelle afin de lutter contre les situations de monopole en matière d'importation et de distribution. Le système financier et d'octroi de prêts bancaires doit être revu afin de libérer l'économie. C'est, à long terme, le meilleur moyen d'atteindre un niveau de prix plus proche de celui qui existe en métropole.
S'inscrivant dans une histoire complexe et spécifique, dans un climat social et économique tendu, le développement de l'outre-mer constitue un enjeu très particulier. Nous avons toujours eu la volonté de bâtir un avenir prospère et prometteur pour les territoires ultramarins qui ne doivent plus s'appuyer seulement sur les aides de la métropole, mais sur les forces propres de ces territoires : la formidable jeunesse de leur population, la richesse de leur patrimoine naturel ainsi que l'exceptionnel dynamisme dont font preuve la plupart de leurs entreprises, en particulier les petites et les moyennes. Il nous faut les accompagner. Aussi, le Nouveau Centre apportera-t-il un vote favorable au texte qui nous est soumis aujourd'hui. Nous avons certes conscience que ce texte est une première pierre et que les conclusions des états généraux de l'outre-mer – qui se déroulent actuellement – conduiront à légiférer de nouveau. Il vous faudra donc, monsieur le secrétaire d'État, revenir devant le Parlement afin de traduire, au plan législatif, les résultats de cette concertation.
Si le président Victorin Lurel n'est pas allé jusqu'à qualifier l'abstention de son groupe de positive – même si elle y ressemblait fort –, je veux souligner, pour ma part, les évolutions positives de ce texte, comme la reconnaissance de la langue créole et la mise en oeuvre effective de l'article 73 de la Constitution, afin de rompre avec la trop grande habitude de Paris qui consiste à vouloir faire passer tout le monde sous la même toise. Au lieu de faire du prêt-à-porter, monsieur le secrétaire d'État, vous avez fait du sur-mesure, répondant ainsi à une partie des attentes de l'outre-mer. J'espère que, à la suite des états généraux, nous aurons la possibilité de poursuivre sur cette voie afin que l'outre-mer connaisse enfin l'essor dont il a besoin et qu'il mérite. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, messieurs les secrétaires d'État, mes chers collègues, le projet de loi relatif au développement économique des outre-mer arrive aujourd'hui au terme du processus législatif.
Ce débat clôt ce qui est désormais présenté, en raison de la forte poussée de fièvre sociale ultramarine, comme la première étape de la réforme de l'action de l'État en faveur des outre-mer. L'examen par le Sénat avait permis quelques progrès. Le travail réalisé par notre assemblée, grâce à l'esprit de dialogue et d'ouverture qui a animé nos débats – et que je me plais à souligner, monsieur le secrétaire d'État, parce que vous n'y êtes pas étranger – a consacré un certain nombre de dispositions qui améliorent ce projet de loi de manière significative.
Ces avancées, quelles sont-elles ? Je commencerai bien évidemment par celles qui me tiennent particulièrement à coeur, notamment la valorisation de la bagasse comme biomasse qui, dans ce texte, trouve toute la reconnaissance qu'elle mérite et ouvre de réelles perspectives de développement endogène. En effet, l'article 27 A, pour le cas particulier de La Réunion, permettra la consolidation de l'ensemble de la filière canne-sucre-rhum-bagasse dans la perspective des échéances futures qui sont incertaines. Je resterai néanmoins très vigilant sur ce sujet, puisque l'effectivité des dispositions adoptées repose sur la publication d'un décret – publication que j'espère rapide.
D'autres avancées dans le domaine du logement peuvent être soulignées. Je pense notamment à la sacralisation de la ligne budgétaire unique comme socle privilégié du financement du logement social ou aux progrès effectués entre la version initiale du projet et ce texte sur la défiscalisation maintenue pour les primo-accédants.
Dans le domaine de la téléphonie fixe et mobile, ainsi que dans celui des nouvelles technologies de l'information et de la communication, si ce projet ne contient pas de progrès immédiats pour nos populations, il ouvre néanmoins la porte au rétablissement de la justice sociale due à nos territoires. À titre personnel, je serai attentif aux suites qui résulteront de l'adoption de ces dispositions.
Dans d'autres domaines, des progrès sont également à noter : je pense à la place faite à la pharmacopée ultramarine et à la reconnaissance des langues créoles comme appartenant au patrimoine national.
Toutefois, malgré l'intégration de ces points positifs, je ne peux m'empêcher d'avoir des doutes et des regrets.
Parlons d'abord des doutes. Le Gouvernement fait des paris osés, tant sur le volet économique de la loi – c'est un choix politique que je ne partage pas – que sur la réorientation de la défiscalisation en faveur du logement social. Je déplore au passage la disparition, dans le texte issu de la CMP, de la sécurisation juridique adoptée par notre assemblée quant au cumul LBU-défiscalisation : il s'agissait pourtant d'une demande fortement exprimée par l'ensemble des acteurs intervenant dans ce domaine, compte tenu des contradictions qui entachent la législation.
J'éprouve également quelques regrets. La crise qui a secoué nos territoires, malgré l'apparence de calme retrouvé, pèse toujours lourdement sur le fragile équilibre de la paix sociale dans les outre-mer. Or ce texte n'apporte pas de réponse concrète aux principales revendications. Ainsi refuse-t-on toujours la régulation impérative des prix des produits de première nécessité, qui figure pourtant parmi les principales revendications des collectifs. Nos économies n'ont jamais connu, et ne connaîtront probablement jamais, une situation de concurrence pure et parfaite, en raison de nombreux facteurs naturels, et je doute fort que les signes de bonne volonté sur les prix des produits de première nécessité, arrachés par la pression de la rue, perdurent très longtemps. À mon sens, la régulation était impérative : je déplore donc cette occasion manquée.
Le volet social est le grand absent de ce texte, alors même que les attentes et la détresse sociale n'ont jamais été aussi fortes. On nous promet que le second volet législatif – dont on ne connaît bien évidemment pas le calendrier – apportera les réponses tant attendues par les populations grâce notamment aux conclusions des états généraux. Je l'espère vivement, monsieur le secrétaire d'État, mais permettez-moi, là aussi, de nourrir de sérieux doutes, tant est laborieux le démarrage de ces états généraux, qui sont d'ailleurs déjà contestés par les collectifs. Je crains par ailleurs que ces travaux ne fassent fausse route en se focalisant sur les questions institutionnelles, car les attentes premières des populations portent beaucoup plus sur la formation et l'insertion professionnelle, la place des jeunes dans le marché du travail, l'avenir de la santé, de l'éducation, l'évolution du pouvoir d'achat, la capacité à trouver un logement.
Face aux enjeux en présence, les parlementaires de l'opposition ont pris toutes leurs responsabilités dans les débats relatifs à la LODEOM. Désormais, il incombe au Gouvernement de prendre les siennes pour une présentation aussi rapide que possible de ce second projet de loi qui, je l'espère vivement, apportera des réponses concrètes aux préoccupations quotidiennes de nos populations. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, messieurs les secrétaires d'État, mes chers collègues, le débat sur le projet de loi pour le développement économique des outre-mer a été riche, constructif et ouvert. Au-delà des considérations partisanes, le Gouvernement a accepté certains de nos amendements, ce dont nous nous réjouissons. Au final, certaines avancées, comme les exonérations de charges sociales ou la reconnaissance de la langue créole, sont satisfaisantes.
Pourtant, il est évident que le projet de loi ne répond ni à l'urgence de la situation de l'outre-mer ni à l'attente légitime de nos concitoyens ultramarins. C'est qu'il n'est pas à la hauteur des enjeux, notamment financiers, que la crise a rendus encore plus cruciaux, comme l'a révélé le grand mouvement social qui a eu lieu dernièrement dans ces territoires. La déception est d'autant plus grande que ce projet était attendu depuis fort longtemps et qu'il avait été annoncé par le candidat Sarkozy. Il aura finalement mis près de deux ans pour venir en discussion au Parlement. Quand bien même une rallonge budgétaire a été consentie, les crédits, en baisse, se révèlent bien insuffisants.
Le projet de loi ne répond pas à l'urgence de la situation, car on était en droit d'attendre un texte spécifique, ambitieux et doté de moyens à la hauteur des enjeux, pour des territoires spécifiques de notre République – spécifiques en raison de leur insularité et de leur éloignement du continent, spécifiques car, même si ces territoires connaissent une relative amélioration sur certains points, avec le ralentissement du chômage, la situation reste délicate et plus dégradée que dans l'hexagone, avec un taux de chômage plus élevé – 22 % –, un retard et une dépendance en matière économique.
Le Président de la République souhaite tendre vers l'autosuffisance de ces territoires, ce qui est légitime. Mais, si le développement endogène peut être un objectif à long terme, il n'est pas incompatible avec la prise en compte, dans nos politiques publiques, du caractère spécifique de ces territoires et ne doit pas lui être opposé.
En ce qui concerne le secteur essentiel du logement, nous redisons fortement qu'une politique de défiscalisation, même si elle offre des moyens supplémentaires, ne suffit pas à satisfaire les besoins. Le financement privé du logement ne remplacera jamais ni l'investissement public ni une véritable politique de logement social. C'est sur la question même de la stratégie que nous menons dans ces territoires que nous devons nous interroger. Les chiffres sont, en effet, très inquiétants. Dans un contexte de hausse démographique où la demande explose et où l'offre s'effondre, comme le rappelait Jean-Yves Le Bouillonnec, 21 910 logements autorisés ont été produits dans les DOM en 2000, contre seulement 16 127 en 2007 ; 11 303 logements ont été réalisés avec les financements de l'État en 2003, contre 7 713 en 2007. En outre, de 6 035 logements locatifs sociaux en 2000, nous sommes passés à 2 365 en 2006. Pour rattraper le retard accumulé en huit ans, il faudrait en construire 60 000.
Dès lors, le risque est grand que la politique de défiscalisation prônée dans votre projet de loi ne masque en réalité le désengagement financier de l'État. Aussi relançons-nous l'idée d'un ANRU exceptionnel, au même titre que le plan national de renouvellement urbain dans nos banlieues, que le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés, ou encore d'une loi de programmation sur le logement et l'aménagement du territoire pour les départements et territoires d'outre-mer, afin de rattraper le retard historique qui les affecte.
Tant que l'on ne comprendra pas que ces territoires ont des besoins spécifiques, qui nécessitent des politiques particulières et des moyens extraordinaires, tant que l'on continuera à modifier les dispositifs qui fonctionnent et à réinventer l'eau salée à chaque nouveau projet de loi, au risque de rendre les investisseurs frileux et de décontenancer les acteurs locaux, on ne parviendra pas à résoudre les problèmes de ces territoires qui ont besoin de suivi, de continuité et d'un volontarisme fort. Or, je le répète, c'est l'avenir de notre République qui se joue dans ces territoires relégués.
Nous en venons au texte de la commission mixte paritaire. Conformément à l'article 113, alinéa 3, du règlement, je vais appeler l'Assemblée à statuer d'abord sur les amendements dont je suis saisi.
Ces douze amendements du Gouvernement, nos 1, 2, 3 rectifié, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11 et 12, portant tous sur des levées de gage, des précisions ou des modifications rédactionnelles mineures, je vous propose, monsieur le secrétaire d'État, de les soutenir en une seule fois.
Je vais donc faire une présentation commune, monsieur le président.
Les amendements nos 1 à 4 visent à lever le gage, ainsi que les amendements nos 6 , 8 , 10 et 11 . L'amendement n° 5 prévoit, conformément aux souhaits des opérateurs de défiscalisation, des modifications rédactionnelles précisant les conditions de défiscalisation dont sont l'objet les câbles sous-marins, L'amendement n° 7 apporte des précisions rédactionnelles relatives à la fiscalité. L'amendement n° 9 comble un oubli de la commission mixte paritaire. L'amendement n° 12 procède à une extension dans les références au code civil pour des dispositions concernant la Nouvelle-Calédonie.
Comme vous le voyez, ces amendements procèdent à des changements tout à fait mineurs.
Dans les explications de vote, la parole est à Mme Christiane Taubira, pour le groupe SRC.
Il me revient, à ce stade de nos débats, d'expliquer le vote du groupe SRC, qui s'abstiendra sur ce texte, mais avec des nuances, que je préciserai à la fin de mon intervention.
Ce projet de loi sera vraisemblablement adopté par votre majorité, monsieur le secrétaire d'État. Mais, sans vouloir être désagréable à mes collègues de l'UMP, je rappellerai que leur parti est minoritaire dans les outre-mer. Nous nous trouverons donc dans une situation déconcertante : le texte aura été adopté par une majorité minoritaire sur le terrain et ne l'aura pas été par une opposition majoritaire sur le terrain. (Protestations les bancs du groupe UMP.)
Je ne sais pas si cela s'apparente à une fantaisie démocratique, mais je m'interroge sur les conséquences de tout cela, en particulier sur la vie quotidienne de nos concitoyens des outre-mer.
Vous avez accepté, monsieur le secrétaire d'État, de donner votre nom à ce projet de loi. Nous y voyons la marque de votre sens aigu de l'abnégation, mais aussi, sans doute, de votre esprit de prévoyance. Tout au long de ces débats, les sujets importants, impliquant une réflexion dense, ont été renvoyés aux états généraux de l'outre-mer dont on connaît le parcours brinquebalant. Et nous pouvons penser que vous avez fait en sorte de saisir la proie sans l'ombre, afin que les outre-mer puissent disposer d'une loi de développement économique.
L'exposé dithyrambique du rapporteur ne saurait faire oublier les défauts majeurs des dispositions de ce projet de loi. Mes collègues les ayant exposés lors de la discussion générale, je ne les évoquerai que sommairement.
En ce qui concerne les mesures de soutien au pouvoir d'achat, vous êtes resté au milieu du gué, monsieur le secrétaire d'État. Pour ce qui est des mesures de soutien à l'économie et aux entreprises, vous avez fait preuve du conformisme le plus ordinaire. Pour la relance du logement, vous avez introduit une disposition créant une insécurité dans le financement budgétaire de cette politique. Vous n'avez pas levé les contraintes pesant sur l'accès au foncier et son aménagement, pas plus que vous n'avez réduit la pression inflationniste sur l'immobilier. Enfin, et ce n'est pas de votre fait, la réponse apportée n'est pas à la hauteur de la pression démographique dans nos territoires.
S'agissant de la continuité territoriale, une inégalité considérable demeure entre les outre-mer et les territoires insulaires plus proches, avec une différence de l'ordre de un à soixante. Il serait peut-être temps de nous expliquer ce qui nous vaut un tel traitement.
Quant aux dispositions diverses, on y trouve de tout : des mesures relatives à la pêche et à l'agriculture, mais aussi des mesures lourdes, comme le schéma départemental d'orientation minière pour la Guyane, lequel pose la question de la hiérarchie des normes. Vous qui avez l'expérience des mandats locaux et nationaux, vous savez que les arbitrages politiques doivent l'emporter sur les réponses techniques, à plus forte raison lorsqu'il s'agit de sujets aussi importants que l'aménagement du territoire.
Cela me conduit à vous interroger très rapidement sur la question de la demande d'habilitation formulée par le conseil régional de Guyane. Il semble que nous nous soyons assez mal compris. Les propos que vous avez tenus, recueillis dans le Journal officiel, ont bien été interprétés comme un accueil favorable donné à la gestion et non à la conception du schéma minier.
En ce qui concerne les outre-mer dans leur ensemble, je souhaiterais avoir des précisions sur le régime international de l'accès aux ressources génétiques et aux savoirs traditionnels et de leur utilisation. Ce régime a fait l'objet d'une conférence, qui s'est tenue à Paris en avril 2009. En décembre 2008, quand j'avais interrogé votre ministre de tutelle à ce propos, elle m'avait répondu qu'elle procéderait à des consultations en amont et associerait les présidents des collectivités des outre-mer. Or ceux que j'ai interrogés m'ont indiqué qu'ils n'avaient en aucune façon été associés ou consultés.
Ensuite, monsieur le secrétaire d'État, qu'en est-il du processus de ratification de l'accord bilatéral signé entre la France et le Brésil en décembre 2008 concernant la lutte contre l'orpaillage clandestin ? La question est importante, car il ne s'agit plus d'une activité interlope mais d'une filière qui se transforme en un véritable secteur d'activité.
Enfin, dans la perspective de la conférence de Copenhague sur le changement climatique en décembre 2009, avez-vous l'intention d'associer à ces travaux les outre-mer dont vous connaissez le grand intérêt pour toutes les questions relatives à la biodiversité, au changement climatique, à la taxe carbone ou au crédit carbone ?
Le groupe SRC a choisi de s'abstenir sur ce texte. Cependant, trois députées de ce groupe – Mme Jeanny Marc, Mme Chantal Berthelot et moi-même – ont préféré voter contre. Nous avons estimé que, compte tenu des problèmes extrêmement lourds abordés dans le projet de loi et de la faible probabilité pour que des solutions y soient apportées dans le cadre des états généraux, il est important que nous fassions comprendre et entendre la nécessité de sortir les outre-mer d'une économie de dépendance et d'enclencher enfin un processus de développement.
À la tribune, tout à l'heure, j'ai engagé notre groupe dans un vote en faveur de ce texte. Je tiens à remercier ceux de nos collègues métropolitains qui se sont mobilisés à nos côtés. Au-delà du caractère minoritaire de notre implantation outre-mer, ils ont pu montrer l'importance de la solidarité entre élus : une fois élus, quelle que soit notre circonscription, nous sommes tous des élus de la République, des élus de la nation tout entière. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Nous ne céderons pas à la logique de la division. Les états généraux sont en cours, certains départements se sont déjà organisés. Chacun peut y prendre part en toute liberté. Comme le Président de la République l'a indiqué, il n'y avait pas de sujet tabou : débattons !
Notre collègue Jean-Claude Fruteau a dit sa crainte de voir les débats sur le développement économique pollués par les questions institutionnelles. Il importe en effet de trouver un bon équilibre et d'engager nos départements dans un développement qui soit le plus durable possible, au sein de la France et au sein de l'Europe. L'UMP votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par les amendements adoptés par l'Assemblée.
(L'ensemble du projet de loi est adopté.)
Vote sur l'ensemble
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Bernard Accoyer.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de résolution tendant à modifier le règlement de l'Assemblée nationale (n° 1630).
Hier soir, l'Assemblée a commencé l'examen des articles, s'arrêtant à l'article 4.
Je suis saisi de deux amendements, nos 327 rectifié et 328 , qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.
La parole est à M. René Dosière.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, monsieur le président et rapporteur de la commission des lois, mes chers collègues, je me réjouis que la discussion d'aujourd'hui commence par l'examen de ces amendements, car ils illustrent parfaitement le type de propositions susceptibles de témoigner que notre assemblée est capable d'aboutir à un accord entre opposition et majorité.
Ces deux amendements ont trait à la commission spéciale chargée de vérifier les comptes de l'Assemblée nationale. Elle n'a aucune vocation politique et n'aborde aucun enjeu partisan. Bien au contraire : elle travaille avec sérieux à la vérification des comptes de l'Assemblée, tenus par les questeurs. Grâce à votre accord, monsieur le président, cette commission pourra désormais missionner ses membres afin qu'ils examinent la situation des services et qu'ils rendent compte à l'Assemblée de la transparence qui règne sur ses comptes.
Nous avons estimé que la composition d'une telle commission pouvait être paritaire entre la majorité et l'opposition. C'est pourquoi l'amendement n° 327 rectifié vise à augmenter le nombre de ses membres de quinze à seize, pour permettre la parité.
D'autre part, l'amendement n° 328 , s'inspirant de la règle en vigueur dans diverses assemblées, tend à ce que la présidence de cette commission soit systématiquement accordée à un membre de l'opposition : qu'on ne voie pas là une quelconque défiance, mais un simple souci d'équilibre. Je le répète : il ne s'agit pas d'une commission législative, qui aurait une vocation politique ou partisane ; le climat de travail y est bon. Ce serait donner un signe que de faire toute sa place à l'opposition dans ce genre d'instance.
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, président et rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Par ces deux amendements, M. Dosière souhaite augmenter le poids et l'influence de l'opposition au sein de la commission chargée de vérifier et d'apurer les comptes de l'Assemblée nationale.
L'amendement n° 327 rectifié vise à remettre en cause l'attribution proportionnelle des sièges, qui est la règle actuelle – y compris dans de nombreux autres organismes parlementaires. La commission y est défavorable : il convient de conserver le principe actuel qui n'a jamais été remis en cause.
En revanche, je suis favorable, à titre personnel, à l'amendement n° 328 qui vise à ce que la présidence de cette commission soit confiée à un député issu d'un groupe de l'opposition. Le règlement qui vous est proposé réserve d'ores et déjà la présidence de la commission des finances à un député de l'opposition ; je serai favorable à un pas supplémentaire en faisant de même avec la commission chargée d'apurer les comptes de l'Assemblée. Je reprends en effet l'argument de M. Dosière, selon lequel il s'agit là d'un sujet qui ne doit pas susciter de dispute entre les groupes. Je propose donc à chacun d'entre vous de consentir à ce geste, et à M. Dosière de retirer l'amendement n° 327 rectifié , sachant que je donne un avis personnel favorable à l'amendement n° 328 .
Mes collègues du groupe socialiste et moi-même apprécions l'évolution de la position du président de la commission des lois.
C'est la raison pour laquelle je retire l'amendement n° 327 rectifié .
(L'amendement n° 327 rectifié est retiré.)
(L'amendement n° 328 est adopté.)
Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.
(L'article 4, amendé, est adopté.)
L'article 5 ne fait l'objet d'aucun amendement.
(L'article 5 est adopté.)
Je défendrai brièvement l'amendement n° 59 , qui vise à abaisser de vingt à huit le nombre de députés permettant de constituer un groupe. Les commissions permanentes étant désormais au nombre de huit, un groupe pourra être constitué dès lors qu'il disposera d'un nombre de députés suffisant pour effectuer un vrai travail en commission, travail que met en avant le nouveau règlement intérieur. Toutefois, nous comprendrions que cette proposition ne soit pas retenue.
C'est la raison pour laquelle je défendrai avec davantage de pugnacité l'amendement n° 69 , qui vise à abaisser de vingt à quinze le nombre de députés permettant de constituer un groupe.
Chacun le sait, l'actuel mode de scrutin législatif ne favorise pas la diversité des choix exprimés par les électrices et par les électeurs, puisque, ayant tendance à favoriser la bipolarisation, il conduit à une survalorisation des deux grands groupes de l'Assemblée nationale, notamment dans l'organisation des débats et la mise à disposition des moyens. J'ajoute que le futur règlement accentuera cette bipolarisation. Il en résulte, à nos yeux, un affaiblissement de la démocratie : seule l'instauration de la proportionnelle permettrait une juste représentation de la nation.
L'abaissement du seuil autorisant la création d'un groupe à l'Assemblée nationale permettrait de pallier un peu les défauts de l'actuel mode de représentation de la nation en redonnant de l'air à la démocratie parlementaire. Une telle mesure a toute sa place dans une démarche soucieuse de renforcer le rôle du Parlement, car elle accordera de réels moyens d'intervention et d'expression aux divers courants de pensée, notamment de l'opposition.
Je rappelle que, au Sénat, le nombre d'élus requis pour constituer un groupe est de quinze et que, au Parlement européen, qui compte pourtant 785 membres, il est fixé à quatorze – les députés devant appartenir à quatre États membres au minimum. Enfin, dans plusieurs pays européens, les exigences pour faire reconnaître un groupe parlementaire sont encore plus accessibles – c'est le cas de l'Autriche, de la Belgique, de l'Estonie, de la Lettonie, de la Bulgarie, de la Grèce ou encore de la Roumanie.
C'est la raison pour laquelle, au nom du respect du pluralisme et de la démocratie, cet amendement vise à abaisser à quinze membres le seuil à partir duquel il sera possible de constituer un groupe.
Il vous faut du reste savoir, mes chers collègues de la majorité, que, si vous votiez une telle disposition, vous ne froisseriez pas le Président de la République qui a déclaré, dans un entretien donné au Monde le 16 juillet 2008 : « Je suis pour que le seuil de la constitution d'un groupe à l'Assemblée, qui est actuellement de vingt membres, soit abaissé à quinze. »
Je profite de la présence de M. Karoutchi dans l'hémicycle pour lui demander s'il confirme cette position du Président de la République et du Gouvernement.
La commission a émis un avis défavorable – oserai-je dire : très défavorable ? – à l'amendement n° 59 , qui vise à abaisser à huit le nombre de députés nécessaires pour constituer un groupe.
Sur l'amendement n° 69 , qui vise à abaisser ce même seuil de vingt députés à quinze, je m'étais exprimé défavorablement en commission et celle-ci m'avait alors soutenu. Je crois comprendre, monsieur le président, que les esprits ont beaucoup évolué depuis, comme s'il s'agissait d'une position ancienne : c'est pourquoi je pressens un vote favorable de l'Assemblée nationale sur cet amendement.
Monsieur le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, souhaitez-vous répondre à M. Braouezec ?
Ce n'est pas la tradition, pour un membre du Gouvernement – une tradition que je respecterai –, d'intervenir sur le règlement de l'Assemblée nationale, mais, puisque M. Braouezec m'a directement interpellé sur cette question, je souhaite rappeler ce que j'ai déjà dit devant l'Assemblée nationale il y a à peu près un an, au cours du débat sur la révision constitutionnelle.
Comme le Président de la République et le Gouvernement avaient clairement affiché, au travers des articles 48 et 51, alinéa 1, ce que devaient être à leurs yeux des groupes d'opposition et des groupes minoritaires, en vue de définir de nouveaux équilibres au sein de l'Assemblée, la question de la constitution d'un groupe parlementaire à partir de quinze membres s'était naturellement posée. J'avais alors précisé la position du Gouvernement, que je renouvelle aujourd'hui – dans la mesure où le Gouvernement peut avoir une position en matière d'élaboration du règlement de l'Assemblée nationale. À l'époque, l'idée d'abaisser à quinze députés le seuil pour constituer un groupe avait été avancée et le Gouvernement ne souhaite pas revenir dessus.
Cet amendement étant substantiel, j'ai plusieurs demandes d'intervention.
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
Le groupe Nouveau Centre – je l'ai déjà dit en commission – votera l'amendement n° 69 . En effet, s'il n'est pas raisonnable d'adopter un seuil de huit députés, il faut en revanche rappeler que quinze députés représentent, en fonction du nouveau redécoupage électoral, entre 1,5 et 1,8 million de nos concitoyens. Il paraît donc normal que des groupes puissent être constitués à partir d'un tel seuil.
Je ne reviendrai pas sur les déclarations du Président de la République. Je rappellerai simplement que nous avions constamment défendu cette position, y compris lors de la dernière législature. En effet, le mode du scrutin qui régit aujourd'hui les élections législatives conduit à accepter, au nom du pluralisme, que les députés élus, représentant chacun entre 100 000 et 120 000 Français, puissent se regrouper en fonction de leurs affinités politiques. L'abaissement du seuil, joint à l'élargissement du nombre des commissions, permettra de rendre plus cohérent et donc d'améliorer le travail parlementaire. Il est en effet absurde, chacun d'entre nous le sait, de pousser des parlementaires, qui ne partagent pas un nombre suffisant d'options politiques, à se regrouper pour avoir la possibilité de s'exprimer. Il est préférable d'instaurer un seuil raisonnable. Je le répète : 1,5 à 1,8 million de citoyens sont suffisants pour donner à ceux qui les représentent les moyens d'un groupe parlementaire.
Nous invitons donc l'Assemblée à voter cet amendement.
Après de longs débats en commission des lois, je rappellerai tout d'abord que les déclarations du Président de la République ont mûri dans les esprits.
Du reste, le règlement intérieur que nous nous apprêtons à adopter rend encore plus nécessaire d'abaisser à quinze le nombre de députés nécessaire pour constituer un groupe. Après avoir écouté nos collègues socialistes, dont les propos me font espérer un vote unanime, je tiens à préciser que nous ne voulons pas brider les minorités, ce qui serait le cas si le règlement intérieur ne les autorisait pas à s'exprimer. La meilleure solution est de permettre à ces minorités, si d'aventure leur expression politique devenait plus constante, de s'exprimer indépendamment des groupes auxquels elles appartenaient à l'origine. C'est une avancée démocratique qui va dans le sens du pluralisme et de la liberté d'expression. Après les débats en commission et le débat d'hier, nous arriverons, j'en suis certain, à une solution qui satisfera tous les parlementaires en leur garantissant la liberté de s'exprimer.
Je tiens à rappeler, monsieur le président, quelle est l'attente des radicaux de gauche depuis plusieurs législatures en matière de constitution d'un groupe parlementaire : c'est l'abaissement du seuil, que nous avons régulièrement demandé. C'est la raison pour laquelle nous soutenons évidemment l'amendement n° 69 du groupe GDR.
D'autres l'ont dit avant moi : en permettant aux minorités de s'exprimer, l'abaissement du seuil élargira la place laissée au pluralisme. Nous pouvons tous nous retrouver pour que le règlement renforce la démocratie au sein de notre assemblée.
(L'amendement n° 59 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 69 est adopté.)
Je constate que le vote est acquis à l'unanimité. (Applaudissements sur tous les bancs.)
Je suis saisi d'un amendement n° 339 .
La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas.
J'ai évoqué cet amendement de bon sens hier en défendant la motion de renvoi en commission. Il concerne l'article 19 du règlement de notre assemblée qui prévoira, si l'article 6 de la proposition de résolution est adopté, que la déclaration des groupes pourra « mentionner l'appartenance du groupe à l'opposition ».
Le fait que la Constitution française soit l'une des rares au monde à constitutionnaliser la notion d'opposition est une des avancées consensuelles de la révision, car cette disposition permettra d'offrir aux groupes qui se réclament de l'opposition des « droits spécifiques ». Il nous semble toutefois que la rédaction actuelle est très restrictive, puisqu'elle conduit la majorité à se définir par soustraction : appartient à la majorité celui qui n'appartient pas à l'opposition, ce qui est une manière bizarre d'aborder cet état de fait.
C'est la raison pour laquelle l'amendement n° 339 vise à corriger la fin de l'alinéa 3 de l'article 6, afin de permettre aux groupes de choisir entre trois positions politiques : appartenir à la majorité, appartenir à l'opposition ou n'appartenir à aucune des deux, dernier cas de figure dont l'histoire de la Ve République n'a pas encore donné d'exemple mais que, demain, en raison de l'augmentation probable du nombre des groupes, rien d'interdit d'imaginer, au moins à titre d'hypothèse d'école.
Afin d'étayer la correction proposée par l'amendement, je citerai le rapport Balladur, qui a beaucoup inspiré la révision constitutionnelle – elle ne l'a pas, malheureusement, inspiré dans sa totalité, puisque le Président de la République n'a retenu du rapport que les éléments qui l'arrangeaient : « Le comité a estimé qu'il y avait plus d'avantages que d'inconvénients pour le fonctionnement des institutions, sinon à jeter les bases d'un statut de l'opposition, du moins à reconnaître aux partis qui ne font pas partie de la majorité des garanties spécifiques. C'est pourquoi il propose en premier lieu que soit reconnu le rôle des groupes parlementaires qui ne se considèrent pas comme appartenant à la majorité » : votre proposition de résolution répond à cette aspiration.
Toutefois, le rapport Balladur suggérait « que soit mis en place un système souple de déclaration d'appartenance à la majorité pour ceux des groupes parlementaires qui le souhaitent ».
C'est donc de manière tout à fait évidente que nous vous proposons d'inscrire dans le règlement que la déclaration peut mentionner, « ou non, le choix du groupe de soutenir l'action du Gouvernement ou de s'y opposer ».
Comme je l'ai souligné hier, l'une des avancées considérables de la Ve République, au regard de notre système politique depuis l'instauration du régime républicain, est la stabilité, au travers, notamment, du fait majoritaire, dont nous avons tous profité et dont nous profiterons probablement encore longtemps. Or, si le fait majoritaire appelle, par définition, une majorité qui se définit, dans nos rapports quotidiens, comme étant « la » majorité, la rédaction actuelle de la fin de l'alinéa 3 ferait du groupe majoritaire, stricto sensu, le plus grand groupe qui n'est pas un groupe d'opposition. Nous préférons dire que la majorité est la majorité et l'opposition l'opposition.
La commission a émis un avis défavorable parce que cet amendement n'est pas conforme à la logique de la révision constitutionnelle.
Le premier député qui, au cours de la précédente législature, s'est efforcé d'introduire la notion d'opposition est Didier Migaud. Ensuite, les résolutions du président Debré, en visant à offrir à un groupe se déclarant dans l'opposition des avantages supérieurs à ceux qu'il aurait proportionnellement à son effectif, imposaient à un tel groupe de se définir. Le choix a alors été fait de laisser aux groupes la liberté de se déclarer dans l'opposition, en vue de bénéficier de certains avantages.
Enfin, au cours du débat qui a entouré la révision constitutionnelle, l'idée a été émise de donner également des droits aux groupes dits minoritaires : c'est donc également en raison du nombre de ses membres qu'un groupe pourra bénéficier de certains avantages. C'est pourquoi le fait d'imposer les critères « majorité » et « opposition » réduirait la liberté de certains groupes, je pense notamment au groupe Nouveau Centre, qui serait obligé de se déterminer dans un sens ou dans l'autre : s'il se déclarait dans la majorité, il perdrait le bénéfice des droits attachés aux groupes minoritaires.
La révision constitutionnelle a permis d'instaurer un système qui offre la plus grande liberté possible. C'est la raison pour laquelle je vous propose de ne pas adopter cet amendement.
(L'amendement n° 339 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement de coordination n° 340.
La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas.
Cet amendement s'inscrit dans la même logique que les précédents et que ceux qui vont suivre.
J'entends bien les arguments que M. le rapporteur a déjà développés en commission, ainsi que je l'ai fait moi-même d'ailleurs.
Quand on relira nos débats, on aura l'impression que nous ne nous disons pas la vérité. Il ne s'agit pas d'accorder des pouvoirs supplémentaires à qui que ce soit, mais simplement de reconnaître notre pratique. Il y a une majorité, et il ne faut pas se le cacher, mais l'assumer !
Je vais même vous dévoiler un secret : nous espérons redevenir un jour la majorité, et le plus tôt sera le mieux ! (Sourires sur les bancs du groupe UMP.)
Je ne doute d'ailleurs pas que la politique du Gouvernement soit de nature à accélérer ce processus.
Je ne crois pas que le groupe Nouveau Centre soit gêné d'appartenir ouvertement à la majorité. Sa situation serait plus difficile s'il se trouvait dans l'opposition, ce qui ne semble de toute façon pas à l'ordre du jour, si l'on en juge par les votes de ses membres depuis quelques années.
Cet amendement de coordination vise donc à retirer la mention d'appartenance, qui ne saurait constituer un boulet, un verrou, chaque groupe devant garder la possibilité, au gré des aléas de la vie politique, au gré de la teneur des textes proposés, de changer d'appartenance. Je ne vois pas en quoi ce que nous proposons créerait des difficultés.
(L'amendement n° 340 , repoussé par la commission, n'est pas adopté.)
Je regrette que le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement se soit absenté, même s'il n'est pas tenu, eu égard à la nature du texte que nous examinons, d'assister à ce débat – ce dont nous le remercions d'ailleurs.
Je souhaite m'exprimer sur la mise en cause de Mme Élisabeth Guigou, retenue par un deuil familial, par un communiqué de Mme Dati…
La mise en cause n'a même pas eu lieu dans l'hémicycle : c'est donc un fait personnel !
Pas tout à fait, monsieur le président, puisque ce communiqué fait suite aux questions au Gouvernement. J'avais pensé, moi aussi, dans un premier temps, que mon intervention relevait davantage du fait personnel, mais on m'a précisé qu'il s'agissait bien d'un rappel au règlement.
Je vous livre donc un extrait du communiqué de Mme Dati, qui en fait nous concerne tous : « L'arrogance d'Élisabeth Guigou est révélatrice de l'attitude hautaine de certains socialistes vis-à-vis des souffrances de nos concitoyens dans leur vie quotidienne. »
Certains propos à notre encontre n'ont pas à être prononcés, d'autant que les arguments donnés à l'appui d'une telle déclaration n'ont rien à voir avec elle. Je rappelle donc que le respect d'autrui conditionne celui qu'on reçoit de lui, et que ce respect mutuel est la meilleure assurance d'une bonne entente entre un gouvernement et un parlement.
Je suis saisi d'un amendement n° 165 .
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
Il s'agit d'un amendement de précision. Le texte ne prévoit rien quant à un éventuel changement de situation d'un groupe qui se serait déclaré dans la majorité en début de législature pour passer dans l'opposition quelque temps plus tard.
Aussi cet amendement vise-t-il à permettre que la déclaration d'appartenance d'un groupe à la majorité ou à l'opposition incombe au président dudit groupe. Sans cette disposition, en effet, on ne voit pas bien comment l'évolution que je viens d'évoquer serait possible.
La commission est, hélas, contrainte de donner un avis défavorable. L'amendement n° 165 pose presque des problèmes d'ordre constitutionnel. Le dispositif de déclaration d'appartenance à un groupe est bien réglé. L'amendement reviendrait à rendre facultatif l'accord formel des membres d'un groupe pour un changement pour le moins important, puisque ledit groupe passerait de la majorité à l'opposition, ou l'inverse.
Je comprends l'hésitation du président Warsmann, mais elle ne tient pas. Évidemment, si un président de groupe choisissait seul, il serait bien fantasque – et une telle hypothèse ne risque pas de se réaliser dans notre assemblée. (Sourires.) Mais si un président, contre l'avis des membres de son groupe, décidait de passer à la majorité s'il est dans l'opposition, ou dans l'opposition s'il est dans la majorité, ce groupe se dissoudrait de lui-même et se reconstituerait aussitôt pour faire une nouvelle déclaration d'appartenance.
Il faut bien, monsieur le président de la commission, proposer un moyen de procéder à ce changement. Or le règlement ne prévoit rien.
Pour lever toute ambiguïté éventuelle, laissez-moi souligner qu'il s'agit simplement de respecter le parallélisme des formes. L'article 19, alinéa 2, du règlement est très clair : « Les groupes se constituent en remettant à la présidence une déclaration politique signée de leurs membres, accompagnée de la liste de ces membres. »
Dès lors que l'on modifie cette déclaration de façon substantielle, il nous semble qu'on doive respecter le parallélisme des formes, ce que ne fait pas l'amendement.
(L'amendement n° 165 n'est pas adopté.)
Cet amendement est défendu.
(L'amendement n° 315 , repoussé par la commission, n'est pas adopté.)
(L'article 6, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 70 , visant à insérer un article additionnel après l'article 6.
La parole est à M. Patrick Braouezec.
Dans sa grande sagesse, l'Assemblée a décidé à l'unanimité d'abaisser de vingt à quinze le nombre requis de députés pour constituer un groupe. Toutefois, un groupe de quinze députés nécessite autant sinon plus de travail qu'un groupe de 150, de 200, voire de 250 députés. La question des moyens humains pour aider les parlementaires à réaliser leur travail se pose donc avec au moins autant d'acuité.
Pour tenir compte de cette réalité, cet amendement vise à compléter l'article 20 du règlement par l'alinéa suivant : « Chaque secrétariat administratif d'un groupe comprend au moins huit collaborateurs et quatre administratifs. » Ce n'est pas que huit soit notre chiffre fétiche : il correspond au nombre de commissions permanentes. Ainsi, au sein de chaque commission, un collaborateur pourrait aider l'ensemble des députés de chaque groupe.
Je souhaite vraiment que cet amendement soit pris en considération par l'Assemblée, même s'il me semble que la commission a émis un avis défavorable. Son adoption ne représenterait pas un coût trop important pour l'Assemblée et constituerait une mesure de justice et d'équité pour que chacun puisse exercer sa fonction à égalité.
M. Braouezec a raison : la commission a donné un avis défavorable à cet amendement. En effet, l'organisation du secrétariat de groupe ne relève pas du règlement. En outre, je rappelle que le bureau de l'Assemblée du 2 avril 2008 « a approuvé le projet de modification des règles de financements des groupes politiques en faveur des groupes de l'opposition et de ceux à effectifs réduits ».
C'est donc dans ce cadre que ces questions se traitent et, au cours de cette législature, un geste a été accompli en faveur des groupes à effectifs réduits, afin que la dotation ne soit pas proportionnelle et pour tenir compte des remarques de notre collègue relatives aux moyens de fonctionnement des groupes minoritaires.
Les moyens ont été décidés à enveloppe constante. Aussi l'application des dispositions proposées par M. Braouezec – qui me semblent justes – se révélerait-elle impossible cette année. Il s'agit donc de donner des moyens aux groupes pour fonctionner. Je ne vous révélerai pas la teneur des réunions de questure, puisqu'elles sont confidentielles, mais il s'agit d'un sujet essentiel. Je ne vois pas comment demain, compte tenu de la décision que nous avons prise à l'unanimité, nous pourrions enlever des moyens à un groupe pour essayer de pallier les difficultés des autres.
La décision que nous avons prise implique donc la création d'une dotation supplémentaire pour les collaborateurs des groupes. Or nous n'allons pas demander à l'UMP, au Nouveau Centre ou aux socialistes de rendre des moyens.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Il faut recompter !
…il n'y a donc aucun problème. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
J'ai déjà dit hier que ces remises en cause permanentes de la présidence ne sont pas acceptables !
Votre façon de procéder n'est pas très correcte, monsieur le président !
L'article 7 ne fait l'objet d'aucun amendement.
(L'article 7 est adopté.)
Sur l'article 8, je suis saisi d'un amendement n° 89 .
La parole est à M. Jean Mallot.
Nous en sommes au chapitre portant sur les nominations personnelles et l'article 8 renvoie à l'article 28 du règlement qui serait, s'il était adopté, rédigé ainsi : « Les nominations effectuées sur le fondement des dispositions du présent chapitre ont lieu en s'efforçant de reproduire la configuration politique de l'Assemblée. »
L'amendement n° 89 vise à substituer aux mots : « s'efforçant de reproduire », le mot : « reproduisant ». Nous avons, les uns et les autres, le souci de voter des dispositions compréhensibles, claires et applicables. Or, « s'efforcer de reproduire » quelque chose est une notion floue, et personne n'est certain d'obtenir le résultat souhaité. D'ailleurs, si l'on se contente de « s'efforcer de reproduire la configuration politique de l'Assemblée », qui appréciera que l'on s'y sera suffisamment « efforcé » ? Quelle est, en outre, la voie de recours si un groupe considère que les nominations ne reproduisent pas suffisamment « la configuration politique de l'Assemblée » ? Mais peut-être s'en remet-on une fois de plus au fait majoritaire, que renforce la formule que nous voulons amender. Or j'avais cru comprendre que tel n'était pas l'état d'esprit des auteurs de la proposition .
Le présent amendement permettrait donc aux nominations de reproduire carrément la configuration politique de l'Assemblée.
Avis défavorable. Il est bien ici question des députés nommés par l'Assemblée dans des organismes extérieurs. Quel est l'état du droit ? Néant. Rien dans le règlement ne précise que tel ou tel groupe doit bénéficier d'une représentation. La commission propose donc « que les nominations s'efforcent de reproduire la configuration politique de l'Assemblée ». Quelle est la proposition du groupe socialiste ? Substituer à l'expression « s'efforçant de reproduire » le mot « reproduisant ».
Pourquoi sommes-nous contre ? Parce qu'il faut garder une marge de manoeuvre. En effet, il faut parfois nommer deux personnes, parfois quatre, parfois trois. Il arrive également qu'il faille faire une place aux groupes minoritaires qui, si on leur appliquait la proportionnelle, n'auraient pas droit à un poste.
Cette disposition est un progrès important, et je note, dans le rapport, les conséquences que cela aura lorsque, à la prochaine législature, il faudra nommer à nouveau des personnalités dans toutes les missions. Si l'on avait appliqué cette disposition au début de la précédente législature, cela se serait traduit par quarante à cinquante représentations supplémentaires passant de la majorité à l'opposition. C'est un grand pas en avant. Mais je pense qu'il faut maintenir une certaine souplesse afin de préserver les équilibres. L'amendement proposé serait contraire aux différents objectifs que j'ai cités.
(L'amendement n° 89 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 121 .
La parole est à M. Patrick Braouezec.
L'amendement n° 121 vise à rappeler que toutes les composantes politiques représentées à l'Assemblée nationale doivent être, autant que possible, représentées pour toutes nominations. Dans notre rédaction, nous avons anticipé les arguments que M. Warsmann vient d'opposer à nos collègues socialistes, puisque nous avons pris soin d'insérer les mots « autant que possible », ce qui laisse une marge de manoeuvre en fonction des situations.
Défavorable. Ou bien l'on raisonne sur l'ensemble des nominations – il y en a plusieurs centaines –, et dans ce cas il y a de quoi servir tout le monde, ou bien l'on raisonne sur une série de nominations ; et quand il n'y en a que deux, on ne peut évidemment pas en donner une à chaque groupe.
C'est pourquoi la commission a retenu la rédaction proposée à l'alinéa 2, rédaction qu'elle a également retenue, par cohérence, pour l'ensemble des dispositions de ce type.
(L'amendement n° 121 n'est pas adopté.)
(L'article 8 est adopté.)
Cet article tend à fixer la nouvelle procédure d'avis des commissions permanentes sur certaines des nominations du Président de la République. Il est révélateur d'un équilibre que nous estimons précaire, pour ne pas dire scabreux : celui de la réforme constitutionnelle de 2008. Cet article a été présenté comme la « contrepartie » de l'augmentation des marges de manoeuvre du Président, notamment la possibilité de prendre la parole devant le Congrès réuni à Versailles, et le retour automatique des membres du Gouvernement sur le banc de l'assemblée dont ils étaient membres.
Or cette procédure d'avis est partielle – toutes les nominations ne sont pas concernées – et l'encadrement parlementaire de ces nominations parfaitement théorique. La procédure prévue dans la proposition de résolution n'y changera rien. Les auditions seront publiques, tant mieux, mais cette procédure permettra surtout de donner un blanc-seing parlementaire aux nominations envisagées par le Président.
La question est de savoir s'il y aura une réelle augmentation des pouvoirs du Parlement. Nous ne le pensons pas.
Il s'agit de rendre obligatoire l'audition de la personnalité dont la nomination est envisagée, afin que l'avis de la commission soit suffisamment éclairé. Aussi l'amendement n° 122 propose-t-il, à la première phrase de l'alinéa 6, de substituer aux mots « peut être », le mot « est ».
C'est une bonne initiative. La commission y est favorable. J'ajoute que la deuxième partie de l'alinéa 6 est la suivante : « Sous réserve de la préservation du secret professionnel ou du secret de la défense nationale constatée par le bureau, l'audition est publique ». Elle découle d'un amendement du groupe socialiste que la commission a introduit dans le texte. Grâce à ces modifications, la procédure d'audition est claire et va dans le bon sens.
(L'amendement n° 122 est adopté.)
Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.
Je suis saisi d'un amendement n°203 .
La parole est à M. Roland Muzeau.
Dans le cadre de la procédure de nomination de certaines personnalités, le projet de résolution prévoit, dans son article, 11 alinéa 7, un scrutin secret et une explication de vote tout aussi secrète, puisque les membres de la commission compétente s'exprimeront par écrit sur leur bulletin de vote.
Nous avons tous rappelé, en mai dernier, lors de la discussion de la loi de modernisation des institutions, les propos du Président de la République concernant les nominations des responsables à la tête des autorités administratives de l'État : ces nominations ne se décideraient pas en fonction des « connivences et amitiés », mais en fonction des « compétences ». Comment ne pas rallier le chef de l'État sur ces beaux principes ?
Pourtant, vous vous en souvenez, nous avions alors dénoncé le leurre de cette mesure, car la procédure établie par l'article 4 de la loi de modernisation des institutions revient, elle, à avaliser systématiquement le choix du chef de l'État. L'alinéa 7 de l'article 11 renforce encore un peu plus l'hypocrisie de cette procédure. Pourquoi priver les membres des commissions de l'occasion de s'exprimer publiquement sur la nature de leur vote ? N'auraient-ils pas d'arguments plus convaincants que celui d'avoir suivi le choix du Président de la République ?
L'amendement que nous présentons propose donc de rétablir le débat à l'issue de l'audition publique de ladite personnalité, et d'organiser un scrutin public. Si nous voulons être à la hauteur des principes que nous énonçons, à savoir la transparence des nominations, nous devons également nous conformer aux exigences conséquentes, c'est-à-dire à la publication de nos avis.
La commission est défavorable au scrutin public, et ce pour plusieurs raisons. D'abord, parce que jusqu'à présent, dans notre assemblée, le principe est que les votes personnels se font à bulletin secret. Ensuite, parce que l'idée du vote à bulletin secret, c'est précisément de libérer chaque député : en conscience, quel que soit le groupe auquel il appartient et quel que soit le fait majoritaire, le député fait son choix sur la personne dont la nomination est envisagée. Rendre le vote public ne serait pas de nature à libérer les députés d'éventuelles consignes qui pourraient leur être données. L'esprit, c'est que chaque député se prononce en son âme et conscience, et à bulletin secret.
Pour le reste, chaque commission est en train de mettre en place sa propre manière de travailler. À la commission des lois, nous avons, d'un commun accord, à l'unanimité, décidé de débattre après l'audition, à huis clos et sans compte rendu. Mais nous avons permis des explications de vote. Ainsi, lors du dernier avis, sur la nomination d'Yves Guéna, le groupe SRC a fait savoir qu'il avait une position, laquelle a figuré au compte rendu. Mais tout député, tout groupe, était libre de donner ou non une explication de vote. Je pense que c'est un bon équilibre.
J'en profite, monsieur le président, pour dire qu'il reste cependant deux sujets à régler, en cohérence avec le Sénat.
Premièrement, je souhaite très vivement que les dépouillements dans les deux assemblées aient lieu en même temps.
Deuxièmement, le Sénat admet la possibilité de délégations de vote. On ne peut pas admettre qu'à l'Assemblée nationale, seuls les présents votent, alors que dans l'autre chambre, un autre système est en vigueur.
Ces problèmes ne peuvent pas recevoir une solution dans notre règlement – pas le second, en tout cas –, mais quand notre assemblée sera saisie du projet de loi organique sur la liste des nominations, je vous propose que nous prenions alors position sur le sujet.
(L'amendement n° 203 n'est pas adopté.)
(L'article 11, amendé, est adopté.)
Cet article tend à introduire dans notre règlement la notion de « procédure accélérée », qui remplacera probablement la procédure d'urgence et qui permet de ramener la navette parlementaire à une seule lecture devant chaque chambre.
Cette nouvelle procédure contient en germe de futurs blocages institutionnels, tant son dispositif est compliqué par le jeu des neutralisations mutuelles. Que se passera-t-il lorsque le Gouvernement et le Parlement se disputeront la fonction législative ? On commence à le voir : cela se règle à l'intérieur des rangs de la majorité, et l'opposition – ainsi que le groupe minoritaire de la majorité, inévitablement marginalisé par ce jeu – se retrouvera nécessairement spectatrice de cette situation. Même vous, monsieur le président de l'Assemblée, avez publiquement exprimé vos craintes pas plus tard que le week-end dernier.
Alors que la réforme de 2008 était censée compenser les effets du fait majoritaire, décuplés par le quinquennat, on s'aperçoit qu'elle le replace au centre du jeu politique. Vous comprendrez, par conséquent, nos doutes et nos craintes.
Je suis saisi d'un amendement n°166 .
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
L'article 51-1 de la Constitution permet désormais de reconnaître des droits spécifiques aux groupes de l'opposition et aux groupes minoritaires. Cet amendement prévoit d'abaisser de trente à vingt le nombre de députés nécessaire à la demande de constitution d'une commission spéciale.
Cet amendement a été examiné par la commission des lois dans le cadre de l'article 88 de notre règlement. En effet, l'idée nous en est venue à la suite de l'adoption par la commission d'un amendement de M. Sandrier qui portait sur les commissions d'enquête. Nous proposons la même chose pour les commissions spéciales.
Favorable, mais il serait bon de rectifier cet amendement en remplaçant le nombre : « vingt » par le nombre : « quinze », et ce par souci de cohérence.
Cet amendement, comme celui de nos collègues du Nouveau Centre, suggère de revenir sur la rédaction proposée pour l'article 32 de notre règlement, qui prévoit que la constitution d'une commission spéciale ne sera de droit que pour les seuls présidents de groupes dont l'effectif global représente la majorité absolue des membres de notre assemblée.
Cela revient évidemment, en pratique, à réserver au seul groupe majoritaire, ou à la coalition majoritaire, la possibilité d'obtenir la constitution d'une commission spéciale.
Nous proposons, et c'est bien le moins d'un point de vue démocratique, de revenir sur cette restriction et d'ouvrir cette possibilité à tout président de groupe.
Certes, le poids des habitudes, la tradition française privilégiant les commissions permanentes attachées à leur pré carré, n'a pas joué en faveur de la constitution des commissions spéciales, qui restent peu usitées.
Si nous souhaitons qu'elles connaissent un plus grand succès à la faveur de l'augmentation du nombre de commissions permanentes, qui risque de multiplier les cas de textes manifestement transversaux, il nous paraît souhaitable d'en autoriser plus fréquemment la constitution et d'ouvrir cette possibilité à l'ensemble des groupes.
Il ne s'agit nullement d'en faire un instrument politique de contestation de la compétence de telle ou telle commission permanente, mais de permettre de mieux tenir compte, une fois encore, de la transversalité objective de certaines questions et d'enrichir le débat démocratique.
En commission, M. Warsmann, d'abord réticent, avait présenté une solution de compromis, proposant que la constitution d'une commission permanente puisse être proposée par vingt députés au lieu de trente. Nous venons de voir le sort favorable que l'Assemblée a réservé à cette proposition.
Jean-Claude Sandrier, au nom du groupe GDR, comme Jean-Christophe Lagarde pour le groupe du Nouveau Centre, avaient approuvé cette démarche. Nous n'en trouvons cependant pas trace dans les propositions d'amendement de la commission. Peut-être y a-t-il eu une incompréhension réciproque sur la responsabilité du dépôt de l'amendement proposé verbalement par M. Warsmann. Quoi qu'il en soit, nous souhaiterions que cette proposition consensuelle puisse être reprise, auquel cas nous proposerions de sous-amender notre amendement pour indiquer que « la constitution d'une commission spéciale peut être décidée par l'Assemblée sur la demande, soit du président d'une commission permanente, soit du président d'un groupe, soit de vingt députés au moins ».
L'avis de M. le rapporteur sur ce point est tout à fait indispensable.
(M. Marc Laffineur remplace M. Bernard Accoyer au fauteuil de la présidence.)
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir l'amendement n° 167 .
Notre collègue Muzeau vient de rappeler le débat qui a eu lieu en commission. Je voudrais simplement ajouter une chose. Nous avons décidé, dans la révision constitutionnelle, de créer des droits pour les groupes, qu'ils soient de la majorité ou de l'opposition. Mais le but de cet amendement n'est pas de multiplier les commissions spéciales.
Je vais prendre un exemple, chers collègues, qui est de nature à vous éclairer. Il y a quelques mois, le Gouvernement, face à la crise financière et économique, a souhaité créer un ministère de la relance économique. Ce sujet était suffisamment transversal pour que le ministre qui a été nommé ait été placé auprès du Premier ministre. À l'époque, au groupe Nouveau Centre, nous avons demandé qu'une commission spéciale de l'Assemblée nationale suive le travail de ce ministère. Cela nous paraissait évidemment nécessaire. En effet, la commission des finances était concernée par cette création, puisque l'on débloquait un certain nombre de crédits, mais la commission des affaires économiques l'était également, tout comme pourraient l'être les nouvelles commissions que nous allons créer, notamment celle qui sera compétente pour les affaires relatives à l'environnement.
Nous ne voulons donc pas multiplier les commissions permanentes, mais notre proposition nous paraissait acceptable. Malheureusement, elle a été rejetée, par anticipation, si j'ose dire, sur l'article tel qu'il serait rédigé.
Peut-être, monsieur le rapporteur, ce dispositif pourrait-il être amélioré – par exemple en limitant ce droit annuellement, ce qui me conviendrait –, mais je pense qu'il faut permettre qu'une commission spéciale puisse être créée, quand bien même un groupe majoritaire voudrait l'empêcher. D'ailleurs, je suis persuadé que le groupe majoritaire n'a pas forcément été consulté s'agissant d'une commission spéciale sur le plan de relance, puisque le sujet était transversal au point qu'on a créé un ministère auprès du Premier ministre et que tant la commission des finances que celle des affaires économiques n'ont pas suivi dans le détail et suffisamment l'application des mesures gouvernementales. J'ajoute que, dans un cas comme celui-là, nous, parlementaires aurions pu être utiles à motiver plus encore les administrations de l'État, qui se seraient senties aussi contrôlées et inspectées par le Parlement.
Je voudrais d'abord rassurer nos collègues du groupe GDR, l'engagement qui a été pris vient d'être tenu : c'est très exactement l'objet de l'amendement n° 166 de M. Sauvadet, que nous venons d'adopter rectifié.
Cet amendement prévoit que si quinze députés demandent la création d'une commission spéciale, en l'absence d'opposition de la part du Gouvernement, du président d'une commission permanente ou du président d'un groupe, celle-ci est acceptée d'office. Par contre, en cas d'opposition, cette demande est soumise à un vote. Voilà l'équilibre que nous avons trouvé.
Vous proposez, dans un nouvel article, de la considérer de droit de quelque groupe qu'elle émane. Cela ne me paraît pas possible. Si c'est le groupe majoritaire qui en est à l'initiative, elle va passer. Sinon, il est tout de même légitime d'en faire la demande : si personne ne s'y oppose, c'est d'accord ; s'il y a une opposition, il faut en débattre entre nous, et trancher.
D'autant que la révision constitutionnelle a inversé la logique. Jusqu'alors, par principe, la commission spéciale prévalait et la commission permanente était quasiment l'exception. Nous avons rétabli les choses en considérant que le travail habituel de l'Assemblée devait s'appuyer sur les commissions permanentes.
Il me semble donc que nous avons trouvé un bon équilibre avec le premier amendement du Nouveau centre. Avis défavorable de la commission sur les deux amendements identiques.
(Les amendements identiques nos 71 et 167 ne sont pas adoptés.)
(L'article 13 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 236 .
La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas.
Monsieur le président, nous avons convenu avec mon collègue Jean-Jacques Urvoas que je défendrai cet amendement et que lui-même soutiendrait le suivant, n° 238 rectifié, qui est lié.
Je pense important de savoir de quoi nous parlons. Nous avons protesté, les uns et les autres, contre la perspective de voter sur de simples numéros dans l'avenir. Il est bon de donner à nos amendements de la chair et d'en connaître parfaitement le contenu.
Dans ces conditions, je propose que nous examinions ces amendements en présentation commune.
Poursuivez, monsieur Mallot.
Le rapporteur vient de rappeler que désormais la règle sera de recourir par priorité aux commissions permanentes et par exception aux commissions spéciales, contrairement à la précédente version de la Constitution. Il est donc important que le périmètre de chacune de nos commissions permanentes soit clair et bien compris de tous. L'article 16, qui rédige l'article 36 du règlement, détermine précisément ce périmètre.
Nous pensons en particulier que la définition et le périmètre proposés pour la commission « des affaires économiques », au 2°, et pour la commission « du développement durable et de l'aménagement du territoire », au 6°, posent un problème. Aussi proposons-nous une autre formule, qui consisterait à revenir à l'actuelle commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Celle-ci serait compétente pour l'agriculture et les pêches, l'énergie et les industries, la recherche technique, la consommation, le commerce intérieur et extérieur, les douanes, les moyens de communication et le tourisme, l'aménagement du territoire et l'urbanisme, l'équipement et les travaux publics, le logement et la construction, l'environnement.
Cette configuration nous paraît plus pertinente que celle qui est proposée de la commission dite « du développement durable et de l'aménagement du territoire ». Nous savons que le développement durable est une notion transversale. N'est-il pas bizarre, dès lors, de mettre l'énergie dans le périmètre de la commission des affaires économiques et pas dans celui de la commission du développement durable ? L'énergie est pourtant bien au coeur de la question du développement durable. À l'inverse, les transports seraient dans attributions de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, mais pas dans celles de la commission des affaires économiques.
Ce découpage peu clair et pas vraiment convaincant nous conduit à proposer de définir une commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire qui reprend toutes ces notions et garde sa cohérence, ce qui donnerait de la place pour l'amendement suivant, que présentera Jean-Jacques Urvoas, s'agissant de la commission du 8°.
La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, pour soutenir l'amendement n° 238 rectifié .
Il n'y a probablement pas de bonne solution pour créer de nouvelles commissions dans notre assemblée. Je partage le point de vue exprimé en commission par mon collègue Dosière, qui suggérait de fusionner, comme au Sénat, la commission de la défense et celle des affaires étrangères – proposition qui s'est heurtée à un net refus de leurs commissaires. Cela ne paraissait pas inconvenant,…
…mais il semblerait qu'on touche là à des choses indicibles. Nous nous sommes donc contentés d'évoquer cette idée sans aller jusqu'à la proposer.
La majorité, notamment le groupe qui s'était réuni autour du président Accoyer, nous proposede diviser la commission des affaires économiques. Jean Mallot a annoncé mon amendement, qui vise à diviser plutôt la commission des lois. Nous proposons de scinder la commission des affaires culturelles, de rétablir le périmètre des affaires économiques, et de créer deux commissions, dont chacun sait qu'elles auraient largement de quoi travailler compte tenu de ce que le Gouvernement nous annonce régulièrement : une commission des droits et libertés, qui réunirait des départements dont la cohérencen'échappe à personne – les libertés publiques, la sécurité, la sécurité civile, le droit administratif, l'organisation judiciaire, le droit civil, le droit commercial, le droit pénal et les pétitions – ; une commission des affaires institutionnelles, qui rassemblerait les domaines des lois constitutionnelles, des lois organiques, du règlement, du droit électoral, de l'administration générale et territoriale de l'État, et des collectivités territoriales. Au regard de ce qui nous est annoncé pour la fin de l'année, on imagine que cette dernière aurait largement de quoi occuper des commissaires motivés, disponibles et présents. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Comme l'a dit l'un des deux orateurs, il n'y a pas de solution idéale. Moi-même, j'ai indiqué en commission que ce qui nous était présenté n'était pas parfait et serait d'ailleurs appelé à évoluer.
La proposition de Bernard Accoyer a été beaucoup discutée. Depuis la dernière législature, il avait été acté par tous que deux commissions avaient un périmètre beaucoup trop important, celle des affaires sociales et celle des affaires économiques. La proposition de règlement s'appuie sur ce constat.
La commission des lois s'est permis d'y apporter une seule précision : la commission des finances souhaitait être compétente non seulement pour le domaine de l'État, mais également pour les participations de l'État. Hormis cette précision, la commission des lois vous propose de nous en tenir au texte de la résolution du président Accoyer. C'est la raison pour laquelle je vais devoir, à mon grand regret, émettre un avis défavorable à tous les amendements tendant à toucher à la répartition.
Je comprends qu'après le travail en commission, le rapporteur éprouve des difficultés à accepter des modifications. Mais nous sommes là pour essayer d'améliorer les choses.
De l'avis de la plupart de ses membres, le découpage de la commission des affaires économiques rendra le travail législatif extrêmement compliqué. Un bon exemple est celui qui a été cité de la politique énergétique et de celle de l'environnement, qui dépendent de deux commissions différentes. Lorsque nous aurons à examiner le Grenelle II, cela va être impossible !
J'aimerais que, au moins pour cette commission, on trouve une solution de bon sens, pour la majorité et pour le Gouvernement mêmes. Une grande partie du travail législatif se fait en commission, puisque ce sont désormais les textes qui en sont issus qui sont débattus en séance publique. Je crains que cela ne devienne particulièrement complexe. Prenons le temps de trouver une solution pour cette commission. Monsieur le président et rapporteur de la commission des lois, je souhaite que, sur ce point, vous fassiez preuve d'ouverture.
À l'évidence, s'agissant du découpage des commissions, la bonne solution n'existe pas. Mais peut-être pourrait-on réfléchir à la réponse la moins perturbante et la plus pertinente. Le sujet est très technique et ne prête pas à une querelle politicienne entre gauche et droite.
Scinder en deux des commissions sur le critère du volume de leurs compétences peut paraître séduisant mais va se heurter à des difficultés de fonctionnement. Avec la montée en puissance, partout dans le monde et en France, du développement durable, les prochains projets n'auront pas de cadre évident, et donc ni contenu ni cohérence. Je vous demande, monsieur le rapporteur, de bien vouloir relancer le débat afin de nous éviter une mauvaise solution technique si vous mainteniez votre proposition. J'en appelle au bon sens et à une nouvelle réflexion.
Effectivement, on aurait pu multiplier à l'infini les applications et la nature de chaque commission. En réalité, ce travail, pour intéressant qu'il soit sur le plan théorique, n'a pas d'intérêt réel sur le plan pratique. Déjà dans le système actuel, des conflits de compétence entre les commissions se posent presque à chaque texte. Il n'est pas rare de voir plusieurs présidents de commission revendiquer un texte.
Face à une telle situation, il faut laisser jouer la jurisprudence des commissions. On verra à l'usage. Il faut laisser du mou dans l'application entre les commissions et laisser la pratique parlementaire jouer, comme elle joue actuellement. Au fond, on aurait pu parfaitement suivre la proposition M. Urvoas, tout aussi justifiée que la commission sur le développement durable.
Laissons faire les choses. La commission parlementaire vit et évolue ; on verra à l'usage comment se feront les rapports sur telle ou telle loi. Je suis persuadé qu'il vaut mieux laisser le texte en l'état, parce qu'il a été élaboré à partir d'un compromis difficile qui ne mérite pas d'être remis en cause.
Je comprends que le compromis a été difficile à obtenir. Mais, monsieur Goasguen, il n'aboutira qu'à accentuer les difficultés que nous rencontrons aujourd'hui. Je reprendrai trois thèmes à titre d'exemple.
M. Sarkozy a fait la promesse qu'il y aurait une commission du développement durable à l'Assemblée nationale. En réalité, cette commission existait déjà : elle s'appelait commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. C'est elle qui couvrait ce champ. Or l'agriculture a une fonction de production extrêmement importante, mais aussi une fonction d'aménagement du territoire – les habitants des secteurs de montagne le savent bien – et une fonction d'environnement. Moi qui suis breton, je le sais aussi. Quand nous parlerons d'agriculture, il sera normal que la commission « aménagement du territoire », au titre du développement durable, s'en saisisse aussi.
Même démonstration pour l'énergie : on en parlera en termes industriels dans une commission, et en termes d'énergies renouvelables, d'économies d'énergie, de maîtrise de la demande énergétique en commission du développement durable, parce que cela relève aussi de sa compétence. Un texte traitant de ce sujet donnera donc forcément lieu à deux saisines, l'une au fond et l'autre pour avis. Reste à savoir quelle commission acceptera de n'être saisie que pour avis.
Continuons : la construction et l'urbanisme, d'une part, et le logement, de l'autre, dépendront de deux commissions différentes. Extraordinaire ! Lorsque nous établirons un programme de construction intégrant des impératifs de maîtrise de l'énergie, devrons-nous nous adresser à la commission des affaires économiques ou à celle du développement durable ?
Si je disposais d'un quart d'heure, je pourrais poursuivre ma démonstration en reprenant tous les termes les uns après les autres. La solution envisagée est invivable. J'ai compris qu'elle résulte d'un compromis. Mais si le résultat est mauvais, peut-être est-il encore temps de le modifier.
Notre manière de travailler nous permet de surmonter ces difficultés. Le président Ayrault parlait du Grenelle : chaque fois qu'un texte sera déposé, le service de la séance l'orientera vers une commission saisie au fond. Et si une autre est concernée, elle sera saisie pour avis sur certains articles.
N'oublions pas non plus que cette réforme est un puzzle. Nous en avons déjà voté le premier élément en adoptant à l'unanimité la proposition de loi n° 58-1100 du président Accoyer, qui a supprimé la délégation à l'aménagement du territoire. Si nous l'avons fait, c'est clairement parce que nous avions prévu, quelques semaine plus tard, de créer une commission du développement durable. Après avoir fait ensemble, et dans un climat unanime, ce premier pas, il me paraît difficile de changer d'avis.
Sur ces questions, je reconnais humblement que le compromis auquel nous sommes parvenus n'est sans doute pas idéal. Il évoluera peut-être dans deux ou trois ans, quand nous l'aurons suffisamment éprouvé. Mais, en attendant, je vous propose de nous en tenir à notre décision.
(Les amendements nos 236 et 238 rectifié , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Cet amendement, qui va dans le même sens que les précédents, propose de transférer les mots « agriculture et pêche ; énergie et industries » de l'alinéa 7 à l'alinéa 15. Son but n'est pas tant de renforcer les pouvoirs de la commission du développement durable, que de parvenir à un découpage plus cohérent.
Chacun, certes, voit la cohérence où il veut. Mais, pour siéger depuis sept ans à la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, je pense que son unité serait plus forte si l'on reconsidérait ses attributions sur cette base, quand bien même certaines superpositions déjà signalées ne seraient sans doute pas évitées.
Je relève par ailleurs que cette commission s'appellerait désormais « commission du développement durable et de l'aménagement du territoire ». Mes excellents collègues socialistes font remarquer que le développement durable comporte trois piliers : l'écologie et l'environnement, mais également le social et enfin l'économique. Or il existera une commission des affaires sociales, une commission des affaires économiques et une commission du développement durable. Peut-être l'intitulé est-il mal choisi si la « vastitude » de la notion est aussi forte qu'on le dit... Le site Internet du ministère du développement durable n'indique-t-il pas : « Aujourd'hui, on ne peut plus parler de transport sans parler de l'aménagement de nos villes, ou de logement sans parler d'économie d'énergie. Nous avons besoin d'une approche transversale et décloisonnée. C'est la raison pour laquelle, le ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire concentre l'écologie mais aussi les transports, l'énergie, l'aménagement du territoire, l'habitat, la mer... »
Dernier exemple : la pêche. La commission des affaires économiques considérera l'opportunité d'augmenter la puissance – il en faut, pour traîner un chalut pélagique ! –ou la taille des chalutiers, afin de défendre les pêcheurs, tandis que la commission du développement durable, préoccupée par la raréfaction des poissons, pourra défendre un avis inverse. C'est pour éviter ce type de contradiction que nous invitons à voter l'amendement n° 194 .
Par souci de cohérence, avis défavorable.
(L'amendement n° 194 n'est pas adopté.)
Cet amendement tend lui aussi à améliorer la cohérence des attributions des commissions, ce qui pose également la question de la constitution des commissions spéciales, puisqu'il est vraisemblable que les deux commissions concernées travailleront souvent ensemble, et probablement avec d'autres.
L'amendement n° 72 propose que les questions d'urbanisme et de logement relèvent désormais de la commission permanente en charge de l'aménagement du territoire, tandis que celles de l'énergie devraient être examinées par la commission en charge du développement durable plutôt que par celle des affaires économiques. Au demeurant, cette modification extrêmement modeste ne résoudra pas toutes les questions qui ont été soulevées.
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour soutenir l'amendement n° 168 .
Avec votre autorisation, monsieur le président, je présenterai en même temps, pour des raisons de cohérence, les amendements nos 168 et 169 .
Si le groupe socialiste défend un autre découpage que celui que prévoit le texte, ce n'est pas notre cas. Jusqu'à présent, deux de nos commissions avaient un champ de compétences très étendu, qui se traduisait du coup dans le règlement intérieur par un nombre de commissaire très élevé ; nous venons de retenir le principe de huit commissions comptant chacune le même nombre de députés. De même, nous considérons que, si le Gouvernement, investi par l'Assemblée nationale, a souhaité regrouper dans un grand ministère des administrations autrefois distinctes, c'est pour permettre qu'une politique en faveur du développement durable se construise de manière transversale. Un consensus s'est par ailleurs dégagé en faveur de la création d'une commission chargée du développement durable. C'est désormais chose faite et nous nous en réjouissons.
Notre réserve porte cependant sur deux points.
Premièrement, est-il sérieux d'exclure du développement durable l'énergie, qui en est un des enjeux majeurs ? J'ai entendu que, notamment pour le Grenelle II, il faudra sans doute constituer une commission spéciale, mais parler de développement durable sans poser la question de l'énergie nous paraît iconoclaste, sinon incongru. L'amendement n° 168 vise à réparer cette lacune. Je sais certains arbitrages ont été difficiles, chaque président de commission défendant son pré carré, ou ses prérogatives. Reste que notre nouveau règlement doit viser non à leur donner satisfaction, mais à durer et à encadrer la politique. Dans le même esprit, l'amendement n° 169 propose d'inclure l'urbanisme et le logement dans la réflexion sur le développement durable. Le règlement prévoit en effet que la commission du développement durable se saisira des questions de construction, mais non de celles de l'urbanisme et du logement. Quelle absurdité ! Un tel arbitrage témoigne davantage des sphères d'influence des uns et des autres que de la cohérence du travail parlementaire.
L'adoption des amendements nos 168 et 169 donnerait davantage de cohérence à la commission du développement durable créée par la volonté du Président de la République, du Gouvernement mais également de notre Assemblée ; et à ceux qui s'effraieraient de voir les secteurs que j'ai cités échapper à la commission des affaires économiques, je rappelle qu'il lui resterait encore l'agriculture, la pêche, l'industrie, la recherche appliquée et l'innovation, ainsi que la consommation, le commerce intérieur et extérieur, les postes et communications électroniques, et le tourisme. N'y a-t-il pas là matière à satisfaire un président de commission ?
Je dois dire à M. Lagarde, non sans un certain sourire, que je ne me sens pas concerné par sa description des présidents de commission attachés à défendre leur pré carré.
La commission des lois se dessaisit en effet du secteur de la propriété intellectuelle au profit de la nouvelle commission des affaires culturelles.
Pour le reste, à mon grand regret, j'émets un avis défavorable sur ces amendements.
La proposition de résolution suggère de placer sous l'égide de la commission des affaires économiques les questions d'urbanisme et de logement. Comme l'a montré récemment la consultation des équipes internationales d'architectes sur le Grand Paris – le chef de l'État l'a bien compris quand il s'est exprimé le 29 avril à la Cité de l'architecture –, la réflexion sur l'organisation d'une métropole, c'est-à-dire sur ce qui fait l'urbanisme, doit être articulée avec les questions de développement durable. Le défi lancé aux architectes n'était-il pas de « faire la métropole de l'après-Kyoto » ?
Les paramètres que nous impose le développement durable impliquent que la question de l'urbanisme relève de cette commission et non de celle des affaires économiques – à moins que les auteurs du règlement ne considèrent que la ville doive être au service de l'économie et non du bien-vivre de ses habitants. Mais les propos du chef de l'État n'allant pas dans ce sens, je suis sûr que mes collègues de l'UMP ne me contrediront pas et voteront cet amendement.
De même, attribuer à la commission des affaires économiques la question du logement me semble relever d'une logique mercantile déplacée. En France, la question du logement est, à l'heure actuelle, une question sociale. À défaut de la placer sous la responsabilité de la commission des affaires sociales, et pour ne pas séparer le couple qu'elle forme avec celle de l'urbanisme, nous proposons de la transférer à la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.
L'amendement n° 169 a déjà été défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
Je suis saisi d'un amendement n° 60 .
La parole est à M. Roland Muzeau, pour le soutenir.
Afin d'ajuster les compétences de la commission des affaires sociales, vous proposez qu'elle soit désormais compétente pour ce qui relève de « l'insertion et l'égalité des chances ».
La notion d'égalité des chances ne nous convient pas, pour une raison de fond. Elle ne figure en effet dans aucun texte fondateur du pacte républicain, à la différence de celle d'égalité des droits.
Remplacer la seconde par la première relève d'un tour de passe-passe idéologique inacceptable. De fait, le discours sur l'égalité des chances, qui se substitue à celui de l'égalité tout court, vise à faire reposer sur l'individu la responsabilité de ses succès, mais surtout de ses échecs. Votre but est de faire croire à nos concitoyens qu'un enfant de banquier a les mêmes chances qu'un enfant d'ouvrier, qui n'a donc qu'à s'en prendre à lui-même s'il échoue à emprunter l'ascenseur social que vous avez vous-même contribué à mettre en panne. La diversification des seules élites sert précisément, comme l'ont souligné de nombreux sociologues, à accréditer cette illusion.
La notion d'égalité des chances est en réalité une trahison de celle d'égalité des droits, qui seule a valeur constitutionnelle. C'est pourquoi nous tenons à voir inscrit dans notre règlement la notion d'égalité des droits en lieu et place de votre « égalité des chances » d'inspiration résolument libérale : je ne doute pas que M. Poisson soutiendra cet amendement…
Il ne s'agit pas seulement d'une question de sémantique et de vocabulaire. Sur le sujet de l'égalité des chances, nous avons entendu un certain nombre de sottises pendant des années. Pourquoi inscrire dans notre règlement une égalité des chances qui n'existe pas ? Si elle existait en effet, nous ne serions sans doute ni dans cet hémicycle ni dans nos communes ni dans certaines associations. Comment parler d'égalité des chances entre deux enfants dont l'un a eu la chance de naître dans un milieu très aisé, l'autre la malchance d'être issu d'un milieu défavorisé ?
Ce n'est d'ailleurs pas une nouveauté. Déjà, dans les années 1960, dans Les Héritiers, ouvrage que ceux qui s'intéressent à ces questions connaissent, Bourdieu et Passeron écrivaient – ne voyez dans cet exemple aucun esprit polémique – que, entre les enfants des bateliers de la Volga et les enfants de M. Brejnev, il y a une différence fondamentale, et aucune égalité des chances… Cela se décline aisément dans d'autres pays, et dans le nôtre au premier chef.
Les constituants, sous la Révolution, avaient écrit de façon plus raisonnable que « les citoyens naissent libres et égaux en droit », bien conscients que l'égalité n'allait pas au-delà. Et, cette égalité n'existant pas, tout notre travail consiste à agir pour l'égalisation des chances. C'est pourquoi je propose de sous-amender l'amendement n° 60 en substituant à la notion d'égalité des droits celle d'égalisation des chances, qui s'accordera mieux avec le terme d'insertion qui précède. (Murmures sur les bancs du groupe UMP.) La différence est fondamentale, mes chers collègues : plutôt que de parler d'une égalité des chances qui n'existe pas, mieux vaut affirmer la volonté de mettre en place une politique d'égalisation des chances.
J'en suis désolé, monsieur Néri : cette rédaction ne constituerait pas un sous-amendement de l'amendement présenté par M. Muzeau, mais un amendement en soi. Or il ne peut être reçu.
La parole est à M. Roland Muzeau.
J'apprécie l'effort de M. Néri pour trouver une solution de compromis. Avec toute l'amitié que je lui porte, elle ne me séduit pas outre mesure (Rires sur les bancs du groupe SRC.). Mais j'aime cette volonté de distinguer entre égalité des chances et égalité des droits, et de tordre le cou à une formule qui, nous le savons tous, n'existe pas dans la réalité. L'égalité des chances peut être un slogan de préau d'école, mais elle ne saurait figurer dans la Constitution ni dans notre règlement pour définir les compétences d'une commission permanente. En revanche, l'égalité des droits est une notion claire, acceptée par toutes les composantes politiques depuis fort longtemps. Mieux vaut y revenir. Cela sera plus conforme avec la réalité sociale de notre pays car, année après année, le rapport de la fondation Abbé Pierre, celui de la Cour des comptes, les rapports de la commission des affaires sociales eux-mêmes, dénoncent l'accroissement des inégalités et du nombre de travailleurs pauvres. Parler d'égalité des chances dans ces conditions n'a aucun sens ; revenons à l'égalité des droits, je vous prie.
Cet amendement n'est pas anodin. Je regrette que le rapporteur lui ait accordé une réponse aussi laconique, comme si ce n'était pas un sujet de fond. C'est une question de philosophie et de droit constitutionnel essentielle. La rédaction de la commission est un moyen d'introduire la discrimination positive et de remplacer l'égalité par l'équité, suivant les idées de John Rawls, pour peu que nous nous aventurions sur le terrain théorique. Peut-on vraiment se contenter de dire d'un mot qu'on est défavorable à un amendement qui la remet en cause, alors même que l'on introduit subrepticement dans le droit républicain une conception qui ne fait pas partie de notre socle de valeurs républicaines ? Il faut le dire clairement, car ce n'est pas anodin que de remplacer « égalité » par « équité » ou « égalité des chances ». Je regrette que l'on adopte de façon cavalière et, disons-le, un peu superficielle, une telle rédaction sans aller au fond des choses.
Il s'agit en effet d'un débat fondamental. Je peux bien, pour mon plaisir personnel, voter l'amendement de M. Muzeau. Mais remplacer « égalité des chances » par « égalité des droits » ne conduira pas pour autant vers l'égalisation des chances. Relisez donc Les Enfants sauvages de Lucien Malson qui, en plus de sa qualité d'animateur d'émissions de jazz, était un éminent professeur de psychopédagogie au centre national de pédagogie spéciale de Beaumont-sur-Oise. Il cite des exemples significatifs tel celui des Indiens Osages – allons cette fois aux États-Unis, cela rétablit l'équilibre, Monsieur Muzeau... Dans leur réserve, les Osages semblaient avoir un quotient intellectuel particulièrement faible – on n'y croyait pas trop pour le prix Nobel ! Or voilà qu'un beau jour, on a découvert du pétrole sur leur territoire… Et comme par miracle, leur quotient intellectuel a fait un bond ! C'est la démonstration évidente…
…que l'influence du milieu est déterminante. Si l'on était mathématicien de père en fils chez les Bernoulli et musicien de père en fils chez les Bach, c'est grâce avant tout à l'influence du milieu.
Puisque vous me dites, monsieur le président, que je ne peux proposer la formule « égalisation des chances », au moins inscrivons « égalité des droits », en affirmant notre volonté – que nos débats éclairent suffisamment – de mener une véritable politique d'égalisation des chances. Je vous demande donc, mes chers collègues, d'adopter l'amendement de M. Muzeau, en attendant de pouvoir, lors d'une révision ultérieure du règlement, déposer un amendement qui y introduira la notion d'égalisation des chances, qui est la véritable avancée démocratique.
Je vous remercie. Nous aurons ainsi appris que le pétrole faisait remonter le QI. (Sourires sur tous les bancs)
(L'amendement n° 60 n'est pas adopté.)
(L'article 16 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 77 .
La parole est à M. Roland Muzeau pour le soutenir.
Il est bref, vous comprendrez mieux.
Pour garantir le respect du pluralisme dans notre Assemblée, il tend à ce que chaque groupe dispose d'un vice-président aux bureaux des commissions permanentes. De ce fait, à la première phrase de l'alinéa 4, il convient de substituer aux mots « quatre vice-présidents » les mots « un vice-président par groupe ».
Avis défavorable. Le nombre de groupes n'étant pas limité, la majorité pourrait se trouver en situation minoritaire dans le bureau des commissions.
La réponse du rapporteur est astucieuse mais un peu facile. Au Sénat, dont j'ai une modeste expérience, tous les groupes avaient un vice-président dans chaque commission permanente, sans exception. Les groupes décidaient eux-mêmes d'augmenter le nombre de vice-présidents. Cela ne posait aucun problème. Si l'on voulait faire un petit effort, ce ne serait pas difficile.
La proposition du président Accoyer constitue justement un effort pour que chaque groupe soit représenté au bureau de chaque commission – ce n'était pas le cas jusqu'alors. Ainsi, la commission des lois a actuellement trois vice-présidents ; elle en aura donc quatre. La commission des lois du Sénat a huit vice-présidents : cela me paraît un peu élevé... Bien entendu, on peut augmenter constamment le nombre de vice-présidents en fonction du nombre de groupes pour permettre à la majorité de rester majoritaire. Mais j'ai peur que cela ne finisse par devenir un peu abusif. Proposer, comme nous le faisons, d'augmenter le nombre de vice-présidents dans chaque bureau, ce qui permettra à un représentant de votre groupe d'y appartenir, me paraît être déjà un pas en avant et garantir un bon équilibre.
Je suis saisi d'un amendement n° 326 .
La parole est à Mme Marietta Karamanli pour le défendre.
L'amendement tend à ajouter, à l'alinéa 4, après les mots : « la composition du bureau de chaque commission s'efforce de reproduire la configuration politique de l'Assemblée et d'assurer la représentation de toutes ses composantes » la précision : « en respectant le principe de parité. » Je signale que la version de l'amendement qui est diffusée comporte, par erreur, le mot « autant ».
Cela permettrait de mettre le règlement en conformité avec l'article 1er de la Constitution et de montrer que l'Assemblée nationale donne l'exemple. Je sais que le rapporteur ne partage pas cet avis et soutient que la responsabilité d'assurer la parité revient aux groupes politiques. Or ceux qui ont voulu la prendre l'ont déjà fait : ainsi, à l'Assemblée, c'est notre groupe qui comporte le plus grand nombre de femmes. Mais on ne peut se contenter de renvoyer cette responsabilité aux groupes. Ce serait une nouvelle avancée que d'affirmer le principe de parité dans le règlement qui gouverne le fonctionnement de l'Assemblée.
Je prends acte de la correction que vous avez indiquée.
Quel est l'avis de la commission ?
Nous avons eu un échange similaire hier. Le critère retenu pour composer le bureau des commissions est de respecter la configuration politique de l'Assemblée. Ensuite, c'est à chaque groupe politique de désigner ses candidats et ses candidates. Je conçois que cela ne réponde pas à l'attente de Mme Karamanli, mais pour la satisfaire, il faudrait indiquer que, par exemple, le Nouveau centre a droit à un poste dans telle commission et qu'il doit être occupé par une femme. De même, l'UMP aurait droit à trois postes, dont une femme et deux hommes. Cela deviendrait très difficile. C'est à chaque groupe de désigner ses candidats en tenant compte de la parité. C'est la position constante de la commission, et à mon grand regret, je ne peux que donner un avis défavorable.
Renvoyer la décision aux groupes politiques, c'est maintenir l'inégalité. En effet, certains groupes politiques feront l'effort nécessaire pour les autres. Ce n'est pas cela, appliquer le principe de parité.
(L'amendement n° 326 n'est pas adopté.)
Parce qu'elles préparent le débat législatif en séance publique, parce qu'elles informent l'Assemblée et qu'elles contrôlent le Gouvernement, les commissions permanentes sont des organes de travail essentiels de notre assemblée.
Avec la réforme du règlement que nous examinons aujourd'hui, les commissions deviennent de véritables « mini-séances publiques ». En effet, c'est désormais en leur sein que s'effectue l'essentiel du travail législatif puisque nous ne discutons plus en séance du texte du Gouvernement, mais de celui qu'elles ont adopté.
Aussi la composition du bureau de chaque commission doit-elle être d'autant plus respectueuse du pluralisme de notre Assemblée. À ce jour, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine ne dispose d'aucune présidence ou vice-présidence de commission. Il lui a été royalement attribué deux postes de secrétaire – soit deux des quarante-six postes que comptent les bureaux des six commissions permanentes !
Qu'en est-il du côté du Sénat ? Là encore, il semblerait que la chambre haute soit plus soucieuse du respect du pluralisme que notre assemblée. Depuis le début de nos travaux, vous ne cessez de vous moquer de nos collègues du Sénat, mais le jour viendra où vous y finirez votre carrière… (Sourires.)
Chers collègues, vous vous battrez peut-être un jour, au sein de votre propre formation politique, pour devenir sénateurs. Ne crachez pas sur un futur mandat au Sénat !
Au Sénat, chacune des six commissions permanentes est vice-présidée par un sénateur ou une sénatrice appartenant au groupe communiste, républicain et citoyen. Il est vrai que, comme vient de le préciser notre rapporteur, le bureau de chaque commission permanente comprend huit vice-présidents, alors que la proposition de résolution que nous examinons n'en prévoit que quatre.
Très sérieusement, j'aimerais que quelqu'un nous explique pourquoi le Sénat n'hésite pas à compter au sein de ses organes représentatifs un nombre plus important de vice-présidences que l'Assemblée nationale. Finalement, l'Assemblée ne serait-elle pas, contrairement à sa réputation, plus conservatrice que le Sénat, au moins dans son fonctionnement ?
Les manuels de droit parlementaire ne nous permettent pas d'éclaircir ce mystère. Toujours est-il que, si vous refusiez notre amendement tendant à ce que chaque groupe dispose d'une vice-présidence au sein de chaque commission permanente, j'aimerais que vous nous en donniez au moins la raison juridique, si tant est qu'elle existe. Dans le cas contraire, il vous faudra voter notre amendement, qui s'inscrit dans le souci du respect du pluralisme au sein des organes essentiels de notre assemblée.
Permettez-moi de faire une dernière observation, relative au respect de la diversité. Aucune présidence de commission n'est confiée à une femme ; aucune femme n'est représentée au bureau de la commission des finances ni à celui de la commission des lois, pas plus qu'à celui de la commission de la défense. On mesure, là encore, le chemin qu'il nous reste à parcourir pour moderniser notre institution. L'intervention de Mme Karamanli était très éclairante à ce sujet.
L'article 18 de la proposition de résolution formalise l'engagement du Président de la République de confier la présidence de la commission des finances à un représentant d'un groupe d'opposition. De fait, cette présidence a été confiée à un membre du groupe d'opposition majoritaire, le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
À ce jour, le groupe d'opposition le plus nombreux a à son actif une présidence de commission permanente et cinq vice-présidences. Au total, les membres de ce groupe occupent dix des postes disponibles dans les bureaux des commissions, alors que ceux de mon groupe n'occupent que deux postes de secrétaire, et aucun poste de vice-président. Pour sa part, le groupe du Nouveau Centre, lui aussi minoritaire, dispose de six postes dont trois vice-présidences !
Dans sa rédaction initiale, le projet de résolution prévoyait de revoir tous les équilibres au sein des commissions permanentes. Dans une telle configuration, le Nouveau Centre aurait sans doute été le grand perdant, puisque, aujourd'hui, 13 % des postes lui reviennent alors qu'il ne représente que 3,6 % des députés. Le grand gagnant aurait sans doute été le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, qui représente plus de 4 % des députés et ne se voit attribuer que deux postes de secrétaires.
C'est certainement la raison pour laquelle la commission a préféré modifier le dispositif : avec la nouvelle formule, la clef de répartition pourra rester la même. Voilà qui devrait rassurer la majorité des députés ! En effet, le texte adopté par la commission des lois dispose que : « La composition du bureau de chaque commission s'efforce de reproduire la configuration politique de l'Assemblée et d'assurer la représentation de chacune de ses composantes ». En termes clairs, cela signifie que l'opposition pourra être représentée par un seul et même groupe. Il s'agit, n'en doutons pas, d'un pas supplémentaire vers le bipartisme au sein de notre assemblée.
Dans cet esprit, il n'est prévu de confier qu'une présidence de commission permanente à l'opposition. Seuls les deux partis dominants se verront donc confier la présidence de la commission des finances, au gré du résultat des élections législatives : les autres n'auront que les miettes à ramasser.
Accorder un véritable statut à l'opposition ne devrait pas se limiter à donner un statut au groupe d'opposition le plus puissant. L'opposition est plurielle, et cette pluralité doit être prise en compte, faute de quoi la réforme du règlement ne pourra être considérée que comme une façon de favoriser le bipartisme.
C'est pourquoi nous vous proposons d'adopter l'amendement n° 79 , qui a pour objet de confier à chacun des groupes la présidence d'une commission permanente, au lieu de réserver ces présidences aux deux groupes « majoritaires ». Le président Warsmann écrit d'ailleurs dans son rapport, au sujet de la commission des finances, que « cette présidence réservée ne saurait être exclusive de la possibilité que soient élus à la présidence d'autres commissions d'autres députés membres de groupes – le mot est au pluriel – de l'opposition ». Soit ! Mais, dans ce cas, autant tirer dans notre règlement les conséquences de cet accord de principe.
Tout d'abord je ne peux laisser dire que la modification du règlement aboutit à favoriser le bipartisme. En portant à neuf le nombre de membres du bureau des commissions, nous satisfaisons une demande fort ancienne du groupe GDR, qui souhaitait être représenté au bureau des commissions permanentes.
Ensuite, en matière de présidences, le texte que nous examinons prévoit bien que : « Ne peut-être élu à la présidence de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire qu'un député appartenant à un groupe s'étant déclaré d'opposition. » C'est la première fois qu'une telle disposition est adoptée sous la Ve République. La présidence d'une commission avait certes déjà été assurée, à deux reprises, par un membre de l'opposition, mais cela répondait plus à des circonstances de fait qu'à des circonstances de droit – si vous m'autorisez l'usage de ces qualificatifs.
Je signale également que nous avons décidé à l'unanimité, en début de séance, que la présidence d'une autre commission permanente reviendrait de droit à un membre de l'opposition. Juridiquement, jamais autant de pas en avant n'avaient été faits.
Je maintiens donc ce que j'ai écrit dans mon rapport, et j'émets un avis défavorable à l'amendement n° 79 .
J'ai bien écouté l'intervention de M. Warsmann, et je compléterai son propos en rappelant qu'en 1981, le Premier ministre de l'époque, Pierre Mauroy, avait proposé que les présidences de commission soient réparties à la proportionnelle – même si cela n'a pas eu de suite, pour des raisons que je ne connais pas... (Sourires.)
Je veux aussi signaler au rapporteur que, dans son propre rapport relatif à la modification du règlement proposée par Jean-Louis Debré en 2006, il citait, avec de nombreux exemples à l'appui, la situation des démocraties modernes d'Europe ou d'Amérique du nord, dans lesquelles les présidences de commission sont réparties à la proportionnelle – ou du moins réparties entre tous les groupes politiques. Que ce soit en Grande-Bretagne ou en Allemagne, les membres des groupes minoritaires assument plusieurs présidences de commission. Cela montre les limites des avancées proposées dans la direction d'un « statut de l'opposition » – même s'il ne s'agit pas de dire, bien entendu, que la présidence de la commission des finances soit un poste sans intérêt.
Pour défendre le temps programmé, le rapporteur nous cite toujours l'exemple des pays étrangers, mais il oublie de nous dire que, dans ceux où il est en vigueur, la place faite à l'opposition est assez importante pour lui éviter de recourir à des manoeuvres de retardement ou de blocage.
De même que Clemenceau disait qu'il fallait prendre la Révolution « comme un bloc », il faut en quelque sorte, lorsqu'on invoque les exemples étrangers, les regarder comme un bloc et analyser globalement la situation. On ne peut pas dire que d'autres pays sont en avance pour ce qui est de la conduite des débats, et oublier totalement la place que ces mêmes pays font à l'opposition quand il s'agit d'accéder aux divers postes de responsabilité.
La véritable modernité consisterait à progresser vers un véritable statut des oppositions. Ces dernières devraient avoir davantage de place au sein des instances de l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
(L'amendement n° 79 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 170 .
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
Dans la plupart des démocraties, les parlements répartissent les responsabilités en leur sein de façon proportionnelle, ou du moins de façon à garantir un certain partage des fonctions. C'est vrai notamment de celles qui concourent à l'élaboration de la loi et au contrôle de l'action du Gouvernement. Telle n'est pas la tradition dans notre assemblée, et je crois que la France ne s'honore pas en faisant si peu démocratiquement exception.
Je voudrais signaler une curiosité de notre mode d'organisation. Pour l'élection des vice-présidents de l'Assemblée nationale, la tradition veut que l'on respecte une certaine proportionnalité. Leurs fonctions sont pourtant neutres par nature. Comme le rappelait tout à l'heure le président Accoyer, la présidence de séance n'est jamais mise en cause : quel que soit le groupe auquel appartient celui qui l'exerce, il conduit les débats en toute neutralité. Or, si le principe de proportionnalité est accepté pour cette fonction neutre, il ne l'est pas pour les fonctions qui participent de façon bien plus effective au processus législatif – je veux parler des présidences des commissions, le rôle des bureaux de ces dernières demeurant très virtuel. J'ajoute que l'on retrouve une certaine proportionnalité dans la répartition des postes de questeurs, chargés de gérer l'Assemblée nationale, même si cette proportionnalité est nécessairement imparfaite du fait qu'elle joue sur trois postes seulement.
Nous avons voulu augmenter le nombre de commissions pour deux raisons : parce que certaines d'entre elles étaient surchargées de travail, mais aussi pour permettre une meilleure répartition des rôles et des responsabilités au sein de l'Assemblée. C'est ce qu'a voulu le Président de la République lorsque, avant même que notre règlement le prévoie, il a souhaité que la présidence de la commission des finances, poste de contrôle important s'il en est, revienne à l'opposition. Dans cette même logique, nous vous proposons, par l'amendement n° 170 , que la présidence de l'une des commissions permanentes revienne à l'un des groupes minoritaires – comme nous avons abaissé le seuil nécessaire pour constituer un groupe, il est en effet possible que, sous les prochaines législatures, il y ait plusieurs groupes minoritaires.
Quelle que soit la configuration politique, il n'est pas normal qu'un seul groupe politique puisse monopoliser les présidences de commission, à rebours de ce qui se pratique à l'étranger. Si d'aventure, demain, aucun groupe n'était majoritaire à lui seul – le cas s'est déjà présenté dans l'histoire de la Ve République –, ses membres pourraient malgré tout, à la faveur de majorités relatives, présider l'ensemble des commissions permanentes à l'exception de la commission des finances, soit sept commissions sur huit, alors même qu'il compterait moins d'un député sur deux !
Pour préserver un certain équilibre, il serait souhaitable que, conformément à ce qui se passe dans d'autres parlements, conformément à ce que nous avons voté en révisant la Constitution, et conformément à la parole donnée, lors des débats portant sur cette révision, par un certain nombre de responsables politiques de notre assemblée, une autre commission, sans qu'il soit besoin de la désigner par avance, soit présidée par un député d'un groupe minoritaire. C'est ce que nous pratiquons déjà pour les postes de vice-président et de questeur ; il n'y a aucune raison de refuser d'étendre ce principe, sauf à vouloir faire preuve d'une volonté d'hégémonie.
Je veux d'abord réagir aux propos de M. Dosière, qui choisit de voir le verre à moitié vide plutôt qu'à moitié plein.
Certes, mais il n'en demeure pas moins que, dès aujourd'hui, le niveau monte dans le verre… (Sourires.)
Si les présidences de commission étaient actuellement réparties à la proportionnelle, le groupe UMP en détiendrait cinq et le groupe SRC trois. Un pas est fait avec la présidence de la commission des finances.
Je comprends que vous regrettiez que la proportionnelle ne s'applique pas, mais reconnaissez qu'un pas a été fait.
Quant à l'amendement n° 170 , la commission y est défavorable. Actuellement, les candidatures aux présidences de commission font l'objet d'un accord politique, sauf pour la présidence de la commission des finances, qui est réservée à l'opposition. J'ajoute que, même si l'on appliquait une logique proportionnelle, on n'aboutirait pas aux résultats souhaités par les auteurs de l'amendement.
Monsieur le rapporteur, nous reconnaissons bien volontiers que des pas sont faits à chaque fois – et ils finiront par tracer un chemin. Néanmoins, je rappelle que des députés de l'opposition ont présidé des commissions avant la législature actuelle. Ce fut le cas notamment de Roland Dumas et de Valéry Giscard d'Estaing, qui ont présidé la commission des affaires étrangères sous des majorités différentes.
Il est vrai que nous progressons et que des efforts sont faits. Toutefois, la proposition de nos collègues du Nouveau Centre nous paraît justifiée. Permettre aux groupes minoritaires d'accéder à la présidence d'une commission nous grandirait tous, surtout à l'heure où l'on crée deux commissions supplémentaires. Au reste, chacun se félicite de la manière dont notre collègue Migaud préside, avec le talent qui est le sien, la commission des finances. Il faut que, même si l'on appartient à un groupe de l'opposition ou minoritaire, on puisse présider une commission. Ce sera bénéfique pour chacun.
Je comprends la démarche du Nouveau Centre, même si l'on voit bien à quelle configuration renvoie la référence au « groupe minoritaire ».
En revanche, M. Lagarde a tort de dire que « l'opposition » détient une présidence de commission. En effet, l'opposition est plurielle, comme la majorité. Et si le Nouveau Centre est un groupe minoritaire, il appartient à la majorité parlementaire, ce qui n'est pas le cas du groupe GDR, groupe minoritaire d'opposition.
Il me semble donc que la proposition de M. Lagarde, qui est motivée par le souci légitime d'assurer la représentation démocratique d'une sensibilité – celle du Nouveau Centre –, vaut également pour le groupe GDR et la sensibilité qu'il représente. Si vous aviez accepté notre proposition, monsieur le rapporteur, cinq vice-présidences reviendraient à l'UMP, une au Nouveau Centre, une au groupe SRC et une au groupe GDR.
On en reparlera le jour où il existera un groupe iconoclaste, monsieur Myard…
Vous prétendez, monsieur le rapporteur, qu'il n'est pas possible de prendre une telle mesure. Or c'est faux. Il suffit d'en avoir la volonté politique. Quoi qu'il en soit, si, après avoir refusé notre amendement, vous refusiez également celui du Nouveau Centre, nous serions obligés de constater que les sensibilités représentées dans cet hémicycle ne sont pas respectées.
M. le président de la commission des lois a indiqué que l'attribution des présidences de commission faisait l'objet d'un accord politique. Or, je rappelle que c'est le groupe majoritaire qui détermine la présidence des commissions, et il en a toujours été ainsi. Il n'y a donc pas d'accord politique sur ce point, si ce n'est un accord interne au groupe majoritaire.
Cet amendement a pour objet d'assurer le respect du pluralisme, tout en reconnaissant le fait majoritaire. À ce propos, je précise à mon collègue communiste que le groupe dit minoritaire se caractérise, comme le mot ne l'indique pas, par le fait qu'il appartient à la majorité. Le groupe GDR ne peut donc pas bénéficier à la fois de ce statut et des droits nouveaux accordés à l'opposition. Au demeurant, le groupe Nouveau Centre a plaidé, en accord avec le groupe majoritaire, pour que l'opposition se voie reconnaître ces droits nouveaux, lesquels sont réels. Qu'il s'agisse des questions au Gouvernement, des initiatives parlementaires ou du contrôle de l'action du Gouvernement, chacun doit pouvoir jouer pleinement son rôle. Or, dans une démocratie apaisée et vivante, l'opposition doit contribuer à l'activité législative.
Par ailleurs, le Président de la République avait rendu un arbitrage en faveur du respect du pluralisme, qui a été reconnu, dans la Constitution, comme l'un des facteurs de vitalité d'une démocratie moderne. Lorsque nous avons discuté de l'article 13 de la loi organique, chers collègues de l'UMP, nous avons évoqué la manière dont des droits spécifiques pourraient être reconnus non seulement à l'opposition, mais aussi aux groupes dits minoritaires, et nous étions parvenus à un accord politique sur ce point, monsieur le président de la commission, monsieur le président de l'Assemblée.
Nous examinons actuellement la réforme du règlement de l'Assemblée nationale. Celui-ci reconnaît désormais à l'opposition le droit d'assumer la présidence de la commission des finances, ce qui est un signal important et une garantie du bon fonctionnement de notre démocratie. Aussi souhaiterions-nous que le groupe dit minoritaire assume également la responsabilité d'une présidence de commission. Tel est l'objet de notre amendement.
J'en appelle à chacun des députés du groupe majoritaire : il ne s'agit pas d'attribuer un poste à tel ou tel qui aurait déjà été désigné. Le règlement – je le dis depuis le début de nos débats – régit le fonctionnement de notre assemblée. Vous pouvez envoyer aujourd'hui un signal favorable à la reconnaissance des groupes dits minoritaires. Ce faisant, vous agirez conformément à l'esprit de la Constitution, dont nous avons voté la révision, et des lois organiques, que nous avons également votées, après avoir abouti à une rédaction équilibrée – et je remercie le président de la commission des lois et le président de l'Assemblée nationale d'y avoir contribué. Je souhaite donc que notre règlement respecte l'intention du constituant et l'esprit des lois organiques, et j'en appelle à l'esprit de responsabilité de chaque député.
(L'amendement n° 170 n'est pas adopté.)
Cet amendement vise à éviter le cumul des présidences de commission. En effet, la disposition actuelle du règlement qui interdit à un même député d'assumer la présidence simultanée d'une commission spéciale et d'une commission permanente a disparu du texte adopté par la commission. Nous demandons son maintien, car sa suppression contredirait la volonté du Gouvernement, qui prétend vouloir contrôler la présence des parlementaires dans l'hémicycle. Ces derniers n'ayant pas, que je sache, le don d'ubiquité, les bancs de l'Assemblée resteront probablement toujours aussi dégarnis si l'on multiplie ainsi les possibilités de cumul.
En outre, le nombre des députés est suffisamment élevé pour que la pratique des cumuls soit, une fois pour toutes, bannie de notre règlement.
Aussi proposons-nous de supprimer l'alinéa 6 de l'article 18.
Il s'agit de ménager une certaine souplesse. Lorsque j'ai demandé l'avis des uns et des autres sur le sujet, il m'a été répondu que, dans un certain nombre de cas, cela faciliterait la création de commissions spéciales.
Je prends bonne note de l'argument du président de la commission, car il me semble que cela fait déjà un certain temps que nous n'avons pas créé, au sein de cette assemblée, de commission spéciale. Je rappelle qu'au début de la Ve République, la création de commissions spéciales était presque la norme pour l'examen des textes. Ensuite, les commissions permanentes se sont spécialisées.
J'insiste sur ce point, car j'ai eu l'occasion, dans le passé, de présider une commission spéciale consacrée à l'aménagement du territoire et au développement des responsabilités locales, qui a notamment examiné la première loi sur l'intercommunalité. Un sujet comme les collectivités locales, par exemple, concerne un grand nombre de nos collègues, qui peuvent être membres de commissions différentes. Certes, la commission compétente est la commission des lois – nous avons suffisamment défendu ensemble ce principe, monsieur le rapporteur. Mais la commission des finances est concernée par les finances locales, et la commission des affaires sociales peut considérer que c'est à elle qu'il revient de traiter, par exemple, des responsabilités des départements dans son domaine.
Nous aurions donc intérêt, non pas à multiplier les commissions spéciales, mais à ne pas craindre d'en créer sur les sujets qui le méritent. Le travail législatif y est en effet souvent plus intéressant, grâce aux échanges qu'elles permettent entre les membres des différentes commissions, et moins spécialisé que dans les commissions permanentes.
En la matière, ce n'est pas tant le cumul que le conflit d'intérêts qui fait problème. En effet, une commission spéciale a vocation à traiter de sujets transversaux, qui concernent donc plusieurs commissions permanentes. Or, si le président d'une de ces commissions préside également la commission spéciale, son approche des travaux est orientée par son appartenance à la commission qu'il préside habituellement, ce qui nuit à la transversalité des débats. C'est humain ; je ne fais ici nul procès d'intention. En tout état de cause, le principe même de la commission spéciale serait bafoué si le président de l'une des commissions permanentes – et pourquoi l'un plus que l'autre ? – en prenait la présidence.
Je souhaite ajouter deux éléments. Tout d'abord, je rappelle à M. Dosière que, sous cette législature, nous avons créé une commission spéciale pour examiner le projet de loi sur l'audiovisuel public. Par ailleurs, je précise à M. Brottes que l'article 33 du règlement, qui dispose désormais que l'effectif des commissions spéciales est fixé à soixante-dix membres, comprend une clause de protection, afin d'éviter que la commission spéciale ne devienne une annexe d'une commission permanente : il dispose en effet que ne peuvent y siéger plus de trente-quatre membres appartenant à la même commission. Enfin, je ne méconnais pas le rôle d'un président, mais vous savez qu'il revient également au rapporteur de guider les travaux de la commission.
(L'amendement n° 63 n'est pas adopté.)
(L'article 18 est adopté.)
L'article 19 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je le mets aux voix.
(L'article 19 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 87 , portant article additionnel après l'article 19.
La parole est à M. Roland Muzeau.
Cet amendement a pour objet d'empêcher que deux commissions puissent se réunir simultanément lorsqu'elles travaillent sur le même texte. Encore une fois, la logique de nos travaux a considérablement évolué, puisque nous examinons désormais en séance publique le texte de la commission. Tous les députés doivent donc pouvoir assister aux réunions des commissions. C'est pourquoi nous proposons d'insérer, après l'avant-dernier alinéa de l'article 40, un alinéa ainsi rédigé : « Les commissions travaillant à l'adoption d'un texte ne peuvent se réunir au même moment. »
La commission est défavorable à cet amendement, car la solution proposée est impraticable, a fortiori si nous passons de six à huit commissions permanentes.
L'alinéa que vous proposez d'insérer indique simplement : « Les commissions travaillant à l'adoption d'un texte ne peuvent se réunir au même moment ». Quand bien même vous rectifieriez cet amendement, il nous semble que la question que vous soulevez – à juste titre – est satisfaite par l'alinéa 2 de l'article 20, tel qu'amendé à l'initiative de Jean-François Copé et de Claude Goasguen : « Quand l'assemblée tient séance, les commissions permanentes ne peuvent se réunir que pour terminer l'examen d'un texte inscrit à l'ordre du jour ». C'est une véritable révolution : le mercredi matin, une commission est saisie d'un texte ; elle peut se réunir une nouvelle fois – le mercredi après les questions au Gouvernement, par exemple –, mais uniquement pour mener à son terme l'examen du texte qu'elle a commencé. Cette disposition nous paraît constituer un bon équilibre, contrairement à l'amendement n° 87 .
La réforme du règlement pose en principe qu'il ne doit pas y avoir concomitance entre la séance publique et les réunions des commissions, ce qui est un progrès majeur, attendu par nombre d'entre nous. Cela nous obligera, cela dit, à être la plupart du temps présents le jeudi. En revanche, il ne me paraît pas opportun d'aller au-delà et d'empêcher que les commissions puissent siéger en même temps, car cela équivaudrait à exiger la présence des députés durant toute la semaine.
(L'amendement n° 87 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 124 .
La parole est à M. Roland Muzeau.
L'essentiel du travail législatif se fait désormais au sein des commissions. Dans sa décision n° 2009-579 du 9 avril 2009, le Conseil constitutionnel a estimé que la loi organique relative à l'application de l'article 44 de la Constitution n'apportait « pas de limites inconstitutionnelles à l'exercice du droit d'expression et d'amendement des membres du Parlement », considérant que « le constituant a entendu permettre que les amendements ne puissent être discutés que lors de l'examen du texte en commission ».
Il convient de laisser chaque député suivre les travaux de chaque commission lorsqu'elle examine un projet ou une proposition de loi. Nous proposons par conséquent de rédiger ainsi la fin de l'alinéa 2 de l'article 20 : « la ou les commissions permanentes saisies sur le texte en discussion ne peuvent se réunir que pour délibérer sur les affaires qui leur sont renvoyées par l'Assemblée en vue d'un examen immédiat. »
Défavorable, pour la raison que j'ai déjà exposée : la règle que nous avons fixée constitue déjà, en elle-même, une petite révolution, et il est difficile d'aller plus loin.
(L'amendement n° 124 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 138 .
La parole est à M. Roland Muzeau.
Pour la raison que j'ai indiquée à l'amendement précédent, nous proposons de compléter l'alinéa 2 par les mots : « et qui ne fait pas l'objet d'un examen simplifié en vertu de l'article 103 du présent Règlement. »
Je suis saisi d'un amendement n° 23 , visant à supprimer l'article 20 ter.
La parole est à M. Jacques Myard.
Je dois informer l'Assemblée qu'en plus des sept collègues qui ont cosigné mon amendement n° 23 , un certain nombre d'autres qui auraient souhaité le faire également en ont été empêchés du fait de la forclusion des délais. Ils m'ont demandé de les citer afin d'appuyer l'amendement que j'ai rédigé. Il s'agit de Mme Joëlle Ceccaldi-Raynaud, de M. Georges Ginesta, de M. François-Michel Gonnot, de Mme Gabrielle Louis-Carabin – qui est à la Guadeloupe –, de M. Bruno Sandras – qui est en Polynésie française –, de M. Éric Straumann, de M. Christian Vanneste et de M. Jean-Sébastien Vialatte.
Aux yeux de certains, les députés seraient des paresseux, des tire-au-flanc, à qui il faudrait imposer d'être présents à leur banc à heure fixe et de justifier de leur présence en pointant, sous peine de sanctions financières. Cette sorte de rhétorique m'agace profondément, car elle semble partir du principe que le travail du député se résume à pointer en séance ou en commission, en oubliant qu'il peut avoir d'autres activités. Or, si vous consultez, sur le site de l'Assemblée, la rubrique permettant de prendre connaissance du nombre d'interventions en séance et en réunions de commission de chaque député, vous vous rendrez compte qu'un certain nombre de nos « ténors » n'atteignent pas des scores extraordinaires !
Et pourtant, ils remplissent bien la fonction qui est la leur en animant le débat politique lors d'interventions effectuées en province ou à l'étranger. C'est un fait, le travail d'un député ne se fait pas seulement en séance ou en commission !
Cette espèce de caporalisation est, pour moi, parfaitement inadmissible. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Ce n'est pas en pointant pour prouver que l'on a assisté à une séance que l'on remplit sa mission de contrôle du Gouvernement et d'évaluation des lois ! S'il y a eu, dernièrement, un coup tordu – dont on connaît très bien les circonstances –,…
…c'est tout simplement parce que le travail législatif a été mal organisé par le Gouvernement lui-même. Si l'on veillait, comme le faisait le président Séguin, à renvoyer le vote des lois importantes à un moment où la présence des députés en séance est assurée, les lois seraient votées sans coup férir, selon le fait majoritaire.
C'est la raison pour laquelle je demande la suppression de l'article 20 ter, qui est du niveau des discussions de café du commerce et ne vise qu'à montrer du doigt des députés qui, sur tous les bancs, font pourtant très bien leur travail. J'ajoute, monsieur le président, que l'article 42 est toujours là et que nous sommes toujours à la hauteur de notre tâche !
Quel est l'objectif poursuivi par l'article 20 ? Assurément pas de sanctionner ou de caporaliser,…
…mais simplement d'appliquer une ordonnance du 13 décembre 1958 signée Charles de Gaulle. (Mouvements divers.)
Cette ordonnance, relative à l'indemnité des membres du Parlement, prévoit en son article 1er que l'indemnité des députés est d'abord constituée d'une indemnité parlementaire forfaitaire. L'article 2 dispose par ailleurs que : « L'indemnité parlementaire est complétée par une indemnité dite indemnité de fonction.
« Le montant de cette indemnité est égal au quart du montant de l'indemnité parlementaire.
« Le règlement de chaque assemblée détermine les conditions dans lesquelles le montant de l'indemnité de fonction varie en fonction de la participation du parlementaire aux travaux de l'assemblée à laquelle il appartient. » Il ne s'agit en aucune manière de sanctionner ou de caporaliser, et je ne vois pas, mes chers collègues, en quoi il serait choquant de faire en sorte que cette ordonnance soit réellement appliquée, afin d'aboutir à une indemnité dépendant réellement de l'activité.
Par ailleurs, chacun sait que les dispositions figurant dans le Règlement sont, à l'heure actuelle, inapplicables parce qu'excessives, et que le travail parlementaire est organisé de telle sorte que l'on demande à un député d'être à plusieurs endroits en même temps.
Nous avons eu un long débat en commission afin de proposer un système qui ne nuise en aucun cas aux parlementaires susceptibles d'être appelés à plusieurs endroits à la fois. Cependant, mes chers collègues, si 90 ou 95 % d'entre nous accomplissent un travail sérieux dans le cadre de leur mandat, je dois bien reconnaître que certains, au sein de la commission que je préside, n'ont pas été présents dix fois depuis les élections de 2007. Chacun le sait bien, il est certains députés que l'on voit fort peu et dont on serait bien en peine de dire s'ils sont blonds, bruns ou roux ! (Exclamations et rires sur tous les bancs.)
Si je me bats contre l'antiparlementarisme, j'estime que nous ne devons pas laisser l'ordonnance de 1958 sans application, et il est à notre honneur de prévoir un dispositif selon lequel les quelques députés qui ne viennent jamais à l'Assemblée ne perçoivent pas l'intégralité de l'indemnité de fonction.
Si vous me le permettez, monsieur le président, je présenterai sans attendre l'amendement de la commission qui tend à réécrire l'article et dont M. Myard souhaite, de fait, la suppression. Cet amendement, n° 347 rectifié , prévoit que l'indemnité de fonction est susceptible de varier en fonction de la présence ou de l'absence aux seules réunions du mercredi – et non, par exemple, à une réunion en application de l'article 88 un jeudi à quatorze heures quarante-cinq ou un mardi à vingt et une heures. Seule l'absence répétée aux réunions, régulières et prévisibles, du mercredi peut légitimement donner lieu à sanctions.
Par ailleurs, nous avons eu un long débat en commission, dont il est sorti que, dans la mesure où personne ne conteste qu'un député puisse se voir confier des missions à l'étranger, il serait juste que deux absences mensuelles soient admises – sans qu'il soit demandé aucune explication, le but n'étant pas de « fliquer » les députés. Au-delà, par contre, les absences seraient sanctionnées. En d'autres termes, il est simplement demandé aux députés de venir une fois par mois, parfois deux, en commission,…
…dans le prolongement des dispositions que nous avons votées et qui fixent au mercredi matin les réunions ordinaires des commissions – et, plus généralement, du principe selon lequel c'est désormais au sein des commissions que s'élabore le texte soumis à l'Assemblée.
Nous donnons ainsi, conformément à la demande de plusieurs présidents de groupe, une réalité aux dispositions de l'ordonnance de 1958, dispositions qui ne visent que ceux de nos collègues que l'on ne voit jamais à l'Assemblée. Je précise que les députés élus de l'outre-mer, qui ne peuvent évidemment venir à l'Assemblée chaque semaine et qui doivent, par conséquent, adopter un rythme différent de celui de leurs collègues de métropole, ne sont pas concernés par ce dispositif. Je le répète, nous souhaitions avant tout trouver une solution d'équilibre, afin que l'on n'entende plus dire que l'indemnité de fonction est versée à tous les députés, quelle que soit leur activité.
Seuls sont visés ceux qui ne font pas l'effort de venir au moins une ou deux fois par mois. Je ne crois franchement pas que ce soit trop exiger, et tous les députés présents ce soir remplissent cette exigence. Au-delà des groupes politiques, nous avons trouvé un amendement qui me paraît constituer un bon équilibre. Je suis donc contre l'amendement de suppression déposé par M. Myard, et pour l'amendement n° 347 rectifié .
Je regrette que nous abordions le problème de la présence des parlementaires d'une manière aussi réductrice que le fait le président de la commission des lois. En effet, d'une part, cette présence ne peut pas être jugée à la seule aune des réunions de commission – même s'il est vrai que les commissions vont avoir une importance accrue. D'autre part, ce n'est pas par la menace de sanctions financières que l'on peut régler cette question.
Si je dis cela, c'est parce que nous avons déposé un amendement qui viendra en discussion ultérieurement, à un autre article, et qui propose une vision plus globale des choses. Nous refusons d'engager un débat sur les motifs de l'absentéisme parlementaire, car nous n'en sortirions pas. Nous disons simplement qu'un député doit être trois jours par semaine à Paris : le mardi, le mercredi et le jeudi. Mais il ne suffit pas de le dire, encore faut-il prendre les moyens de le vérifier. C'est pourquoi nous proposons de relever l'heure d'arrivée et l'heure de départ de chaque député, selon des modalités qui devront être fixées par le Bureau. À l'intérieur de ce temps global de présence, chacun aurait a la liberté de participer aux réunions qu'il veut.
Néanmoins, s'agissant de la présence en commission et dans l'hémicycle, nous proposons, pour lutter contre l'absentéisme, de déterminer des quorums, fixés par exemple à un tiers des membres pour les commissions – soit vingt-quatre députés – et à un tiers ou un quart pour la séance publique, voire à un cinquième, ces proportions pouvant être revues à la hausse ou à la baisse lorsque nous discuterons de l'amendement.
La troisième proposition que nous faisons consiste à appliquer une disposition d'une ordonnance de 1958, jamais appliquée, et qui concerne la délégation de vote. Celle-ci en effet n'était envisagée en 1958 qu'à titre exceptionnel, en cas de maladie, de mission à l'étranger ou d'événement familial grave, et à la condition que celui qui déléguait son vote l'écrive personnellement à son délégué et en avertisse le président de l'Assemblée. Or la délégation de vote est devenue aujourd'hui une pratique courante et généralisée, car l'ordonnance n'est pas appliquée.
Dès lors que nous aurons instauré le principe de la durée de présence obligatoire, celui des quorums pour les commissions et la séance publique et celui d'une application stricte de la délégation de vote, nous nous serons donné les moyens de lutter contre l'absentéisme, la seule sanction de celui-ci étant la publication de l'assiduité de chacun sur le site Internet de l'Assemblée – les citoyens seront juges. Telles sont nos solutions, qui participent d'une vision plus complète, moins rigoriste et plus efficace que celle du rapporteur.
Nous ne pouvons pas faire l'économie de cette discussion, car les Français qui nous regardent et nous écoutent sont choqués par notre absentéisme.
Cela étant, et au risque de contredire mon collègue, je préfère l'égalité des chances à l'égalité des droits. En effet, nous avons tous ici les mêmes droits, mais pas les mêmes chances, selon que nous habitons le VIIe arrondissement, Clermont-Ferrand, Wallis-et-Futuna, la Martinique ou la Nouvelle-Calédonie, et qu'il nous faut un quart d'heure à pied ou huit heures de vol pour rejoindre l'Assemblée.
Il y a, c'est vrai, un problème d'absentéisme, mais c'est mal le poser que de le poser comme vous le faites. Les députés d'outre-mer font de gros efforts pour être ici.
D'une manière qui ne nous satisfait pas. Nous contestons cette manière de voir et demandons la suppression de l'article 20 ter.
Je souscris à ce que viens de dire Louis-Joseph Manscour : l'égalité des situations n'existe pas dans l'hémicycle. La République ne se résume pas à l'Île-de-France : elle inclut l'outre-mer, à huit mille kilomètres d'ici. Modifier les lois, ce n'est pas forcément déroger au principe constitutionnel d'égalité.
Je trouve hypocrite de faire figurer dans notre règlement, pour nous donner bonne conscience, une disposition qui ne sera jamais appliquée. L'amendement rectifié du président de la commission des lois ne me satisfait pas non plus et je souhaite également que ces dispositions soient supprimées.
Pour le coup, je soutiens le président de la commission des lois dans cette affaire. Il propose ici une riposte graduée, claire et précise – si vous me permettez ce trait – même si, comme pour un texte récent, elle risque de poser des problèmes de gestion… (Sourires.)
Il s'agit de quatre demi-journées par mois, sur lesquelles sont tolérées deux absences, avec de nombreuses dérogations possibles, ainsi que le précise l'amendement n° 347 rectifié , selon lequel « le présent alinéa ne s'applique pas aux membres des bureaux de l'Assemblée, aux présidents de groupes, aux députés élus dans une circonscription située hors de métropole et lorsque l'absence est justifiée par l'un des motifs mentionnés à l'article 38, alinéa 2 ». Le régime n'est donc pas bien méchant et nous pouvons l'adopter.
Monsieur le président Warsmann, quand on se réfère au général de Gaulle, il faut faire attention.
L'ordonnance existe certes, mais il y avait dans sa Constitution beaucoup de choses que vous avez mises par terre ! Faites donc attention, je vous prie, car il s'agissait d'un bloc. Et souvenez-vous de son Premier ministre, qui disait : « Les gars, occupez-vous de vos circonscriptions, on tournera les clefs. »
Le député a un rôle d'animation globale, qui ne consiste pas uniquement à aller pointer dans une commission le mercredi matin. (Protestations sur divers bancs.) Nous sommes en train d'abaisser la fonction parlementaire en nous autoflagellant de manière disproportionnée et sans fondement.
J'ai trois questions à poser à notre rapporteur, car il ne faudrait pas que cet amendement de bonne conscience se révèle un amendement de mauvaise facture. J'attends ses réponses à trois cas de figure, qui démontrent que cet amendement risque de sanctionner ceux qui s'investissent le plus dans le travail parlementaire.
Il se peut d'abord qu'il y ait simultanéité entre les travaux en commission et les débats dans l'hémicycle, si le texte débattu en séance publique ne relève pas de la commission qui siège. Dans ce cas, un député, membre d'une commission mais qui souhaite proposer des amendements sur un texte ne relevant pas de sa commission, en sera empêché par le fait qu'il doit pointer dans sa commission et ne peut défendre ses amendements en séance.
Le second cas de figure – et ce n'est pas l'un des députés les plus absents en commission qui vous parle, pas plus d'ailleurs que ne le sont tous ceux qui m'écoutent en ce moment – concerne les commissions qui traitent moins de textes que d'autres et seront donc amenées à moins siéger, ce qui mériterait, monsieur le rapporteur, que l'on introduise dans votre dispositif un peu de proportionnalité. La commission des affaires économiques, par exemple, traite deux à trois textes par mois quand d'autres n'en traitent qu'un tous les six mois.
Enfin, et c'est le comble, permettez-moi en dernier lieu de citer l'exemple de Jean-Yves Le Bouillonnec, excellent député…
Jean-Yves Le Bouillonnec est, de temps à autre amené à changer de commission, afin de pouvoir intervenir sur différents textes examinés par les commissions saisies au fond.
Or cet excellent député ne répondrait pas aux critères que vous invoquez car il risquerait, en changeant de commission au mauvais moment, de ne jamais remplir les conditions d'assiduité.
Ces trois exemples montrent bien comment ceux qui s'investissent risquent d'être pénalisés. Votre affaire, monsieur le président de la commission, est donc assez « mal foutue », si vous me permettez cette expression triviale.
Je suis préoccupé par le caractère unidimensionnel du critère retenu par l'amendement Warsmann. Comme François Brottes, je crains que ce système ne pénalise davantage les parlementaires actifs que les autres,...
…surtout avec le nouveau système qui veut que l'on débatte en séance du texte issu de la commission, et qui peut nous amener à aller défendre, le mercredi matin, des amendements, non dans la commission à laquelle nous appartenons, mais dans une autre. Or ce cas de figure n'est absolument pas résolu par l'amendement Warsmann.
Prenons par ailleurs le cas d'un député désigné rapporteur d'un texte important. Ce rôle va l'obliger à prendre du champ par rapport aux autres travaux de la commission, par exemple pour procéder à des auditions ou pour rencontrer dans les ministères les fonctionnaires qui ont travaillé à l'élaboration du texte. Va-t-on le contraindre à venir pointer le mercredi matin pour conserver son indemnité ?
Si j'admets qu'il faut un contrôle de l'activité parlementaire, ce contrôle doit être fondé sur des critères plus globaux que celui qui nous est proposé ici et qui risque de virer à la caricature, quand des députés viendront simplement pointer en commission, puis rentreront chez eux.
Ma première remarque est qu'il est assez paradoxal discuter de l'absentéisme devant les seuls présents – mais c'est la loi du genre.
Ma deuxième remarque anticipe sur les discussions que nous aurons à propos du temps législatif programmé. Notre débat présent est précisément de ceux dont on ne pouvait prévoir le temps que nous y passerions, chacun souhaitant faire valoir ses arguments. Le temps global ne sera donc pas si simple que cela à gérer.
Enfin, il est hypocrite de faire croire que l'absentéisme parlementaire n'existe pas. Il existe depuis toujours ; je rappelais hier, dans ma motion de renvoi en commission, que le premier président de l'Assemblée nationale à s'en être plaint l'avait fait en 1898. De tout temps l'Assemblée a souffert de l'absentéisme, et ce n'est pas propre à cette législature.
Je suis d'accord, et c'est pour cela qu'il ne faut pas faire comme eux !
Pour ma part, je soutiens plutôt l'amendement du rapporteur. Le groupe socialiste ne participera pas au vote sur l'amendement de M. Myard : parce que nous voulons que les autres points soient évoqués, nous ne souhaitons pas la suppression de cet article.
Il y a dans l'article 42 de notre règlement un alinéa – le premier – qu'aucun groupe, qu'aucun parlementaire ne propose de supprimer : il dispose que « la présence en commission est obligatoire ». Je souligne au passage que le Conseil constitutionnel a décidé que les ministres participeront aux réunions des commissions : il sera donc compliqué de les organiser le mercredi matin, car il me semble que les ministres ont une autre occupation – mais peut-être avancera-t-on le conseil des ministres, ou retardera-t-on les réunions de commission. (Sourires.)
Je ne propose pas de supprimer le conseil des ministres… (Sourires.)
Je crois surtout, comme René Dosière, qu'il faut que ceux qui travaillent soient reconnus. Notre collègue Myard disait tout à l'heure que le site Internet actuel de l'Assemblée national recense les participations aux commissions, les interventions en commission et en séance. C'est parfaitement justifié : je connais des membres de la commission des lois qui sont présents à toutes les réunions, même s'ils ne prennent jamais la parole. Je trouve normal que l'on sache qu'ils sont effectivement présents, et je trouve normal que cette information, qui paraît au Journal officiel, figure aussi sur le site Internet de l'Assemblée nationale. Il me semble que l'amendement qui le prévoit a été adopté : il va, je crois, dans le bon sens.
Je crois qu'il faut que notre travail prenne en considération ce type d'argument. Avant d'avoir le plaisir d'appartenir à cette assemblée, j'ai beaucoup entendu les parlementaires nous dire que, lorsqu'ils n'étaient pas dans l'hémicycle, ils travaillaient beaucoup en commission. Et, alors que l'on propose de calculer la présence en commission, on nous explique que les parlementaires ne sont pas en commission, mais qu'ils sont ailleurs ! (Sourires.)
Comme le disait tout à l'heure Jean-Luc Warsmann, il faut que nous progressions pas après pas. Celui-là va dans le bon sens.
Je vous demande à tous d'être brefs : j'ai donné la parole à tous ceux qui l'ont demandée, alors que telle n'est pas la règle.
La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.
Je ne serai pas nécessairement bref, mais je vous prie de noter que je serai le seul de mon groupe à intervenir. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Franchement, je pense que cet amendement – comme le disait M. Myard – est lié à l'actualité : après un vote raté comme celui de la loi HADOPI, la presse, en mal de scandale et de papier à vendre, a expliqué que les députés sont des fainéants qui ne font jamais rien. C'est à cela que cet amendement vise à répondre ; je peux comprendre, voire partager, cet objectif.
Je ne suis pas tout à fait convaincu, cependant, par l'amendement de la commission, et je présenterai tout à l'heure un sous-amendement.
Je veux d'abord dire que cet amendement ne réglera rien : ce qui fait problème dans l'image donnée du travail parlementaire, c'est cet hémicycle-ci, dont les images télévisées montrent qu'il y a plus de fauteuils rouges, c'est-à-dire vides, que de fauteuils occupés. Mais cela, nous devrions avoir le courage de dire que c'est normal ! (« Très bien ! » sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
Il ne servirait à rien que trois cents députés supplémentaires soient présents ce soir, car ils seraient pas venus ici pour prendre la parole, mais pour participer à des votes à peu près décidés d'avance : ils perdraient leur temps, alors qu'ils sont, ce soir, en train de faire, ailleurs, leur travail de parlementaire. C'est quelque chose que nous devrions avoir le courage de dire.
Je m'apprête à abonder dans le sens du président de la commission des lois, mais je regrette que l'on n'ait pas le courage de dire aux citoyens comment se fait le travail législatif : serions-nous cinq cents ce soir qu'une dizaine seulement d'entre nous prendraient la parole – et moins encore, lorsque le temps programmé sera en vigueur !
Trêve d'hypocrisie : certains passent parfois des heures dans l'hémicycle et y font tout autre chose,…
…car le travail d'un député est lourd, et son emploi du temps chargé ! Que nous n'ayons pas, chers collègues, le courage de le dire à nos concitoyens me paraît regrettable ; à titre personnel, je le fais à chaque fois que je fais visiter l'Assemblée au public.
Il n'en reste pas moins qu'il faut effectivement revaloriser le travail en commission. Un équilibre peut être trouvé, et il y a plus de raison de le faire en commission que dans l'hémicycle : bien sûr, la présence est publiée dans les comptes rendus du Journal officiel et les comptes rendus de commission, mais comme personne ne les lit, aucun de nos concitoyens ne le sait – alors que les images de l'hémicycle sont vues dans la presse et à la télévision.
Enfin, j'ai entendu tout à l'heure des propos pour le moins excessifs de M. René Dosière – pour qui j'ai cependant la plus grande estime. Je me demande d'ailleurs si son groupe partage sa position. Afin de renchérir sur son idée de pointeuse qui vérifierait l'heure d'arrivée et l'heure de départ de chaque député, je lui propose de déposer un sous-amendement visant à instaurer ici un conclave : que l'on ferme les portes, et que l'on ne nous libère que lorsque nous aurons fini d'examiner un texte !
À un moment donné, il faut admettre que le parlementaire est assez grand, et assez responsable, pour savoir comment il doit travailler – et, avec lui, les électeurs qui le désignent pour siéger ici.
Oui, monsieur Warsmann : on peut avancer grâce à votre amendement. Non, monsieur Dosière : vous mettez le doigt dans un engrenage qui fera que les huissiers ne seront plus ici pour nous accueillir, mais pour nous enchaîner ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
Le débat est vif ; il nous oppose ou nous rapproche quelles que soient nos opinions politiques, notre parti ou notre ligne directrice.
Une vraie question se pose : il apparaît aux uns et aux autres qu'il nous faut trouver une nouvelle organisation, une rationalisation de notre façon de travailler.
Je crois, pour ma part, comme je l'avais déjà suggéré, que nous devons tout remettre à plat : pourquoi ne pas créer une commission qui poserait vraiment les problèmes du cumul des mandats, du cumul de l'activité de député avec une activité professionnelle, de la succession des mandats dans le temps ? Nous devrions poser radicalement le problème d'une conception nouvelle du rôle et de la fonction de député.
Je serai bref, monsieur le président. Je voterai contre l'amendement de M. Myard : vous proposez, monsieur Myard, un amendement qui sera compris par ceux qui auront regardé cette séance comme une forme d'absolution donnée à ceux qui ne font pas leur travail de parlementaire.
Il y a l'article 42 du règlement ! Ce sont des propos de café du commerce !
Je ne dis pas que telle soit votre volonté ; je dis que c'est à cela qu'il conduira, que vous le vouliez ou non ! Le fait que vous ayez malheureusement tenu à citer un certain nombre de vos collègues qui soutiennent votre démarche n'a franchement pas arrangé votre cas. Je voterai donc contre votre amendement, qui ne donne pas une bonne image de l'Assemblée.
Je laisserai en revanche la majorité débattre de l'amendement du rapporteur : la question de l'absentéisme ne sera pas réglée par une pseudo-pénalité financière qui n'a jamais été appliquée – sans doute parce qu'elle est inapplicable – et qui ne le sera pas davantage avec l'amendement de notre collègue rapporteur.
On parle ici pour amuser la galerie : de ce trop long débat, il ne sortira rien du tout. Un certain nombre d'autres propos, venus de tous les bancs, méritent plus d'attention.
Non. Vingt-trois de nos collègues l'ont demandée : sur un seul amendement, il est exceptionnel de donner la parole à vingt-trois personnes !
La parole est à M. Jean Mallot.
Nous partions de l'idée de sanctionner l'absentéisme en commission, et M. Lagarde a élargi la question à l'absentéisme visible en séance publique.
Nous pourrions, en allant dans le même sens, regretter qu'il y ait dans cet hémicycle un siège par député : comme me le soufflait notre collègue Urvoas, la Chambre des Communes a résolu le problème en ne prévoyant qu'un siège pour deux, ce qui sauve un peu les apparences ! (Rires.)
J'en reviens à l'amendement, qui porte sur l'absentéisme en commission. J'observe que l'article 20 ter ne vise à modifier que le dernier alinéa de l'article 42 du règlement, qui en comporte actuellement trois.
Le premier alinéa indique que la présence des commissaires en commission est obligatoire. Le deuxième, dont on a peu parlé, prévoit que les noms des commissaires présents, ainsi que les noms de ceux qui sont excusés, sont publiés au Journal officiel ou sur Internet.
Mais ce deuxième alinéa mentionne les commissaires excusés « en raison d'un empêchement insurmontable ». Monsieur le rapporteur, vous vous souviendrez que nous avons eu, en commission, un échange à propos de cette formule : c'est d'ailleurs la raison pour laquelle vous vous apprêtiez à voter contre l'amendement présenté par René Dosière, qui a été finalement adopté après rectification.
M. Nicolin, qui assistait à la réunion de la commission, avait beaucoup critiqué cette rédaction : elle pourrait justifier l'excuse.
Je souhaiterais que M. le rapporteur, président de la commission des lois, nous donne son interprétation de ce terme d'« empêchement insurmontable » : à défaut de savoir qui décide du caractère plus ou moins insurmontable de tel ou tel empêchement, cette disposition deviendrait inapplicable, et l'on ne pourrait mesurer l'absentéisme en commission.
Sur l'égalité de traitement entre les députés sur la question de la présence, je voudrais interroger le rapporteur : faudra-t-il assister à la réunion de la commission depuis neuf heures et demie le matin jusqu'à midi et demie, voire une heure ? Ou bien suffira-t-il de pointer, voire d'être pointé, pour pouvoir ensuite repartir ?
Il y a en effet des députés dont la circonscription est proche, et qui pourront venir pour repartir au bout d'une demi-heure dans leur permanence, alors que celui qui vient de l'autre bout de la France devra renoncer à honorer des engagements, puisqu'il lui faudra être là l'après-midi pour assister à la séance de questions au Gouvernement.
J'aimerais donc quelques précisions sur les contrôles.
C'est du grand guignol ! Entendre des choses pareilles, c'est incroyable !
Monsieur le président, je voudrais simplement demander une suspension de séance pour réunir mon groupe avant le vote de cet amendement : chacun voit bien qu'il s'agit ici d'une question sensible.
Nous suspendrons la séance quelques instants avant de passer au vote.
La parole est à M. le rapporteur.
Je vais m'efforcer de répondre aux différentes questions qui ont été posées.
Première question, pourquoi évoque-t-on la commission du mercredi ? Tout simplement parce que le règlement de l'Assemblée prévoit, dans son article 50, alinéa 3, que : « La matinée du mercredi est réservée aux travaux des commissions. »
Deuxième question, sur l'outre-mer. Peut-être me suis-je mal exprimé tout à l'heure. Nous avons estimé que certains députés n'étaient pas en état d'être présents facilement et régulièrement, c'est notamment le cas de nos collègues élus dans les circonscriptions hors de métropole. C'est aussi le cas des membres du bureau.
C'est également le cas des députés qui sont désignés dans une assemblée internationale ou une assemblée européenne car ils peuvent, à ce titre, se trouver hors de France.
M. Brottes m'a posé trois questions précises, avant de conclure que le texte était « mal foutu ». J'aurais préféré qu'il se contente de poser les questions et d'attendre les réponses.
Ah, c'était une hypothèse d'école ?
Première question, opportune, M. Brottes s'est demandé ce qui se passerait s'il y avait séance le mercredi matin. Il est naturellement prévu qu'on ne comptabilise pas les absences s'il y a séance dans l'hémicycle. On ne peut demander aux députés d'être à la fois dans l'hémicycle et en commission.
Deuxième question, M. Brottes s'est interrogé sur le cas du député brillant qui changerait de commission.
C'est simple, il sera comptabilisé dans la commission dont il fait partie.
S'il était présent à la commission des lois dont il était membre et que, la semaine d'après, il est présent à la commission des affaires économiques dont il devient membre, cela ne pose aucune difficulté.
Troisième question, sur les excuses insurmontables. Nous ne sommes pas dans une logique de « flicage ».
Nous n'avons pas l'intention d'aller demander à un député pourquoi il n'est pas présent. L'amendement prévoit simplement d'autoriser deux absences par mois sans demander de justification.
Le député n'aura pas à fournir un papier ou quoi que ce soit. L'absence peut être due à une mission, ou à un événement dans la circonscription, comme vient de le dire notre collègue.
Philippe Martin s'est interrogé sur ce qui se passerait s'il devait être le mardi soir dans sa circonscription et qu'il n'arrivait qu'à onze heures le mercredi en commission pour siéger jusqu'à douze heures trente alors que la réunion a commencé à neuf heures trente. Cette présence sera prise en compte comme aujourd'hui. Aujourd'hui, les agents de l'Assemblée notent, et cela n'a jamais soulevé de polémique, tous les noms des députés qui viennent participer aux travaux. Nous ne changeons rien. Nous prévoyons seulement un garde-fou qui permet de ne viser que les députés qui, dans les faits, ne viennent pas.
Nous considérons, je le répète, que les séances de commission du mercredi sont obligatoires, mais vous savez bien que tous les mois ne sont pas complets parce qu'il y a des vacances, des interruptions. En outre, les deux premières absences n'ont pas besoin d'être justifiées.
Dans les faits, cela revient à demander aux députés d'être présents à une ou deux séances de commission par mois. Je pense que ce n'est pas excessif. Nous avons exclu du dispositif les députés de l'outre-mer, et nous nous sommes concentrés sur ce qui nous paraissait le plus important.
Pourquoi la mesure n'a-t-elle pas été appliquée dans le passé ? À cause de l'« empêchement insurmontable » : qui pouvait juger objectivement si l'excuse était valable ou non ? Il y a d'ailleurs une certaine logique à cela, dans la mesure où nous sommes détenteurs d'un mandat. Nous n'avons pas voulu entrer dans une autre logique qui consisterait à demander des justificatifs.
Nous sommes à un point d'équilibre : nous avons créé un groupe de travail, échangé des mails pour essayer de trouver une règle qui, d'une part, remplisse les conditions de la loi organique et de l'ordonnance de 1958, et, d'autre part, ne pénalise pas les députés qui font leur travail correctement. Nous avons, en d'autres termes, traité le sujet, et si vous acceptez notre proposition, nous refermerons le dossier en ayant fait notre devoir vis-à-vis de la loi et de nos concitoyens.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la proposition de résolution tendant à modifier le règlement de l'Assemblée nationale.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures vingt.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma