Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous voici donc réunis pour l'adoption définitive du projet de loi de développement économique des outre-mer.
La commission mixte paritaire qui s'est réunie la semaine dernière est en effet parvenue assez facilement – et dans un très bon climat – à un texte commun, adopté à l'unanimité. Elle a maintenu certaines modifications apportées par l'Assemblée nationale. C'est notamment le cas pour l'extension à Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin et Saint-Barthélemy de la possibilité de verser un bonus salarial exonéré d'impôt de 1 500 euros ; de l'extension de la défiscalisation du logement social à l'accession sociale ; du fléchage d'une quote-part de la dotation de développement urbain, créée par la loi de finances pour 2009, vers les départements d'outre-mer.
Par ailleurs, la commission mixte paritaire a confirmé la suppression, votée par l'Assemblée nationale, de la taxe sur les jeux en outre-mer qu'avait instituée le Sénat, ce que nous sommes nombreux à regretter. Soyez assurés que nous remettrons très prochainement l'ouvrage sur le métier, notamment lors du prochain débat sur la légalisation des jeux en ligne, tout comme nous reposerons avec force la question du prix des carburants dans nos régions.
Je tiens également à souligner deux éléments du texte qui innovent en matière de grands principes et qui ont été entérinés en CMP : l'article 32 bis, qui reconnaît l'appartenance des langues créoles au patrimoine national de la France, et les articles 31 bis B et 31 bis C, qui mettent en oeuvre, pour le conseil régional de Guadeloupe, la possibilité d'intervenir dans le domaine de la loi, comme le permet l'article 73 de la Constitution, en matière énergétique et de formation professionnelle. C'est une première historique ; permettez-moi d'en tirer quelques motifs de satisfaction.
De même, l'avancée considérable que nous avions obtenue sur le sujet de la bagasse, grâce au combat tenace mené par notre collègue Fruteau, a été entérinée par la CMP. Les habitants de Guadeloupe y ont été très attentifs. C'est du bon travail.
D'autres ajouts apportés par l'Assemblée nationale ont été, à l'initiative du Sénat, modifiés ou supprimés en commission mixte paritaire.
Ainsi, la CMP a supprimé ce qu'elle a considéré comme des déclarations de principe, à savoir l'importance du secteur de la pêche et de l'agriculture pour le développement endogène des territoires d'outre-mer, ainsi que la possibilité de cumuler les crédits de la ligne budgétaire unique avec la défiscalisation. Il est en effet apparu que ces déclarations n'avaient pas d'effet normatif et qu'elles risquaient de poser plus de problèmes qu'elles n'en résolvaient. Je ne suis personnellement pas persuadé de la justesse de ces craintes. Mais je peux les comprendre.
Par ailleurs, la CMP a supprimé le crédit d'impôt créé en faveur des PME qui adhèrent à des structures d'accompagnement de projets, ainsi que la création d'une conférence quinquennale des observatoires des prix et des revenus outre-mer, deux mesures qu'elle a jugées peu pertinentes, ce que je regrette également.
Enfin, à l'initiative de l'Assemblée nationale, la CMP a apporté au texte du projet de loi de nombreuses améliorations rédactionnelles, d'harmonisation et de coordination, notamment à l'article 20.
Je regrette cependant que les propositions d'élargissement de l'éligibilité géographique des zones franches d'activités à deux nouvelles communes de la Guadeloupe, Basse-Terre et Saint-Claude, n'aient pu être acceptées en CMP. Il fallait une règle.
En définitive, la CMP n'a donc modifié qu'à la marge le texte issu de nos travaux. Si le projet de loi sort profondément transformé et, il faut le reconnaître, sensiblement enrichi par la discussion parlementaire en raison, notamment, de nouvelles marges de manoeuvre que le Gouvernement a dû concéder sous la pression populaire, répondra-t-il pour autant aux inquiétudes, aux craintes, aux indignations qui se sont exprimées récemment dans nos départements d'outre-mer en matière d'emploi, de pouvoir d'achat, de logement, de formation, de transports, de communication ? Nous craignons très sincèrement que ce ne soit pas le cas, ce qui nous interdit de vous accompagner dans l'approbation de ce texte. Sur le fond, vous savez que nous n'en partageons pas la philosophie générale. Derrière votre volonté de favoriser un développement endogène de nos territoires, nous avons vu la réalité des économies budgétaires que vous nous imposez, lesquelles poursuivent une politique de désengagement de l'État, qui, à périmètre constant, a coûté plus d'un demi-milliard d'euros de crédits au budget de l'outre-mer depuis 2002.
J'espère que nous aurons très prochainement l'occasion de reparler ici des outre-mer lorsque le temps sera venu de tirer les conclusions, éventuellement législatives, des états généraux. Nous aurons alors matière à juger plus concrètement des résultats de cette loi. Soyez certain que nous saurons reconnaître nos éventuelles erreurs de jugement quant à l'efficacité des mesures proposées, comme vous saurez, je l'espère, reconnaître les vôtres.
Par ailleurs, nous serons également attentifs, lors de l'examen du prochain projet de loi de finances, aux moyens mis en oeuvre pour répondre à tous les engagements pris, je pense notamment au doublement des effectifs du SMA ou à la revalorisation des aides au logement, d'autant que les avancées introduites au cours de ce débat n'ont pas été intégrées dans la dernière loi de finances rectificative, notamment en ce qui concerne les exonérations de charges.
Vous le comprendrez, les membres du groupe socialiste adopteront une position cohérente avec celle qui fut la leur en première lecture. Ils s'abstiendront donc. Ils vous demandent cependant, monsieur le secrétaire d'État, de voir dans cette position à la fois un gage de bonne volonté et le signe d'une extrême vigilance. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)