La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Nous commençons par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Madame la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, six ans après l'adoption de la loi sur le handicap, le Président de la République fait une énième annonce sur la dépendance, future cinquième branche de la sécurité sociale, dont il assure qu'elle sera mise en place avant l'été. Comment pourrez-vous tenir cet engagement, alors que vos gouvernements successifs n'ont pas été en mesure d'appliquer les objectifs ambitieux de la loi handicap de 2005 ?
Les maisons départementales des personnes handicapées attendent toujours que l'État leur alloue les moyens de fonctionner. Un rapport de l'inspection générale des affaires sociales évalue cette dette à près de 19 millions d'euros.
Plus grave, dans certains territoires, les structures ne sont toujours pas en place. C'est le cas à Saint-Pierre-et-Miquelon où, depuis plus de deux ans et demi, les personnes handicapées sont quasiment abandonnées, livrées à elles-mêmes, car l'ouverture de la maison territoriale de l'autonomie est suspendue à un accord financier de l'État, qui n'arrive pas.
La loi prévoyait aussi une accessibilité totale des bâtiments aux personnes handicapées en 2015. Or vous vous apprêtez à remettre en cause cet acquis en accordant des dérogations pour des constructions neuves. Ce recul, qui attaque le fondement même de la loi de 2005, est inadmissible.
Après un tel constat, vous comprendrez notre scepticisme face aux effets d'annonce du Président de la République concernant le « grand soir » de la dépendance, qu'il « n'exclut pas » de laisser aux assurances privées – tout est dit ! C'est d'autant plus inquiétant que, partout sur le territoire, les difficultés se multiplient, notamment pour les infrastructures d'accueil de nos aînés, en raison de l'impasse financière dans laquelle ont été placés les conseils généraux. C'est le cas à Saint-Pierre-et-Miquelon où nous sommes inquiets pour la prise en charge de nos aînés dans les mois à venir, notre unique maison de retraite devant subir une mutation dont nous n'aurons pas les moyens.
Madame la ministre, la valeur d'une société se mesure à la manière dont elle traite ses membres les plus fragiles. Ne pensez-vous pas qu'il est temps d'en finir avec les grandes annonces pour donner aux outils dont nous disposons aujourd'hui les moyens de faire correctement leur travail, sur tout le territoire de la République ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, madame la députée Annick Girardin, la priorité que le Président de la République et le Gouvernement ont donnée à la politique du handicap n'est pas un effet d'annonce. Je veux vous rassurer sur le financement des maisons départementales des personnes handicapées : l'État a entièrement réglé ses dettes, et j'ai donné hier, lors du débat sur la proposition de loi relative à la politique du handicap, le détail des crédits.
La MDPH de Saint-Pierre-et-Miquelon est en train de se mettre en place. Pour tenir compte des spécificités des territoires, nous avons voulu qu'une structure plus souple, avec un service commun à l'État et au conseil général, soit instituée de préférence à un GIP.
Quant à l'accessibilité, le texte équilibré que nous allons continuer à examiner cet après-midi la garantit. Permettez-moi de vous rappeler quelques chiffres : en quatre ans, nous sommes passés de 32 milliards d'euros à 41 milliards d'euros mobilisés pour la politique du handicap, soit une augmentation de 27 %. Le nombre d'enfants handicapés scolarisés en milieu ordinaire est passé de 133 000 à 214 000, et le nombre d'équivalents temps plein d'auxiliaires de vie scolaire de 12 000 à 23 000. L'allocation aux adultes handicapés a été augmentée de 25 %. Enfin, alors que le montant moyen de l'allocation compensatrice pour tierce personne était de 400 euros, la prestation compensatrice du handicap, qui l'a remplacée, a été portée en quatre ans à 850 euros, ce qui correspond à un doublement de l'allocation.
Non, il n'y a pas d'effet d'annonce, madame Girardin. Le Gouvernement a tenu ses promesses et la prise en compte des personnes en situation de handicap est une priorité pour lui : Mme Montchamp aura d'ailleurs l'occasion d'y revenir dans un instant. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Serge Grouard, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Je voudrais d'abord vous remercier, monsieur le président, ainsi que les deux cent et quelques députés qui ont, hier, manifesté leur soutien à Florence Cassez par cette photo collective prise sur les marches de l'Assemblée nationale.
Ma question s'adresse à Mme la ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, dont je salue la fermeté. Si le Président de la République, le Gouvernement, les parlementaires et les Français sont autant mobilisés derrière Florence Cassez, ce n'est pas par volonté de s'ingérer dans les affaires intérieures du Mexique, dont nous respectons la souveraineté : c'est afin d'obtenir justice pour une compatriote victime d'une manipulation délibérée et de graves dysfonctionnements de la police et de la justice mexicaines. Les Mexicains en sont d'ailleurs les premières victimes, qui connaissent cette affaire et les multiples violations du droit qui l'émaillent : violations de la convention de Vienne sur les droits consulaires, violations nombreuses de la constitution mexicaine, pressions et menaces sur les rares témoins à charge, refus de convoquer les témoins à décharge, manipulation dans les dates et le montage de l'arrestation elle-même, refus enfin de faire jouer la convention de Strasbourg sur le transfèrement des détenus.
Ma question, madame la ministre d'État, est simple : les autorités françaises partagent-elles cette analyse ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme la ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes.
Pendant toute la procédure, monsieur le député, la France a totalement respecté l'indépendance de la justice mexicaine, mais, vous l'avez dit, ce dossier a été marqué par de nombreuses et importantes irrégularités dont il n'a jamais été tenu compte.
Les droits de la défense n'ont pas été respectés. La présomption d'innocence de Florence Cassez n'a pas été respectée. Un montage médiatique a été effectué après son interpellation afin de la présenter comme coupable à l'opinion publique mexicaine. Certains témoignages qui la disculpaient n'ont pas été pris en considération, tandis que des contradictions entre certaines déclarations des témoins à charge n'ont pas été relevées. Florence Cassez n'a donc pas bénéficié d'un procès équitable.
Alors que l'amparo mexicain vise, comme en France le pourvoi en cassation, à faire valoir des irrégularités commises au cours de la procédure, tout démontre que la réalité de ces irrégularités n'a pas été prise en considération. Le recours de Florence Cassez a été rejeté, alors que nombre d'éléments auraient dû constituer des causes de nullité.
Nous éprouvons amitié et respect pour le Mexique et le peuple mexicain ; nous savons la gravité de la situation en matière d'enlèvements. Cela ne nous empêche pas de nous indigner d'une décision qui fait fi des manquements graves ayant conduit à la condamnation de Florence Cassez et qui nie ainsi son droit à un procès équitable. Soyez assuré, monsieur le député, que nous continuerons, avec l'ensemble des parlementaires qui le voudront, à nous mobiliser pour qu'une issue conforme à la justice et au droit soit trouvée au bénéfice de Florence Cassez. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Noël Mamère, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Ma question s'adresse à Mme la ministre d'État, ministre des affaires étrangères.
Il y a des moments où l'on aimerait ne pas poser la question que je vais vous poser (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP),…
…tant il est vrai que, lorsque nous abordons ces sujets, nous ne faisons que nourrir la rhétorique du « tous pourris ! » – alors même que nous ne sommes pas « tous pourris ».
Mais, dans une République qui se veut irréprochable, il y a des choses qu'on ne fait pas. Je n'ai pas à juger ici de ce qui légal ou illégal (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), je me place au plan des principes : vous êtes au plus haut sommet de l'État, ministre d'État, ministre des affaires étrangères, et vous bénéficiez des libéralités d'un des hommes les plus proches du régime tunisien (Même mouvement) au moment même où ont lieu des émeutes, et quelques jours après qu'un jeune homme s'est immolé, ouvrant la voie aux manifestations et à la libération du peuple tunisien.
Vous avez donc été victime d'une sorte d'aveuglement qui n'est que le révélateur de relations incestueuses entretenues depuis plus de vingt-trois ans, non seulement par le gouvernement auquel vous appartenez, par tous les pouvoirs qui se sont succédé depuis vingt-trois ans. Nous sommes très loin de ces affaires de cigares, de permis de construire ou de médailles. (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Il s'agit de deux représentants du Gouvernement enchaînant les contrevérités et les dénégations, et qui se sont faits les complices d'un régime chassé par le peuple. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Ce qui est en cause aujourd'hui, c'est la légitimité et la crédibilité de notre politique étrangère. Dans n'importe quel autre pays de l'Union européenne, on vous aurait demandé de démissionner. C'est ce que je vous demande aujourd'hui, madame ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur de nombreux bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme la ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes.
Vous avez beau, monsieur Mamère, répéter des mensonges, cela n'en fait pas des vérités. (Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.) Pendant que vous vous complaisez dans la polémique, moi, je travaille (Même mouvement), et je travaille avec le Gouvernement, pour aider la Tunisie autant qu'elle le souhaitera.
Conformément aux orientations du Président de la République, le Premier ministre a présenté ce matin, en conseil des ministres, un plan de soutien à la Tunisie, élaboré en étroite relation avec un certain nombre de ministres tunisiens avec lesquels je travaille quasi-quotidiennement.
Il s'agit effectivement d'accompagner ce pays ami de la France dans sa nouvelle vie après la « révolution de jasmin », dans sa volonté de se reconstruire, de mettre en place la démocratie et l'État de droit et de lutter contre la corruption. Il s'agit de contribuer à la modernisation de l'économie et au développement de l'emploi, pour résoudre les vrais problèmes des Tunisiens. Il s'agit de multiplier les contacts entre la société civile et les ONG en investissant davantage dans le domaine de la francophonie et en aidant au développement des médias. Ce plan est conçu en plein accord avec les autorités tunisiennes ; d'ailleurs, plusieurs ministres français vont se rendre la semaine prochaine en Tunisie pour discuter avec les Tunisiens de sa mise en oeuvre.
Les événements qui se passent dans le monde arabe nous imposent de changer notre grille de lecture à l'égard des pays proches et des pays amis. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Leurs aspirations à la liberté, à la démocratie, au développement économique et social nous obligent. Nous avons une responsabilité envers eux. Nous, nous l'assumons ; ce ne sont pas vos propos qui permettent de répondre aux enjeux de la situation. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe NC.)
Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'État chargée de la santé.
Un très grand nombre de nos concitoyens, habitants des territoires ruraux comme des villes, sont inquiets face au déficit grandissant de médecins généralistes et spécialistes.
Dans ma circonscription, près de la moitié de ces médecins vont partir à la retraite dans les dix prochaines années ; et la plupart d'entre eux, qui exercent seuls, ont peu d'espoir d'être remplacés.
À Vendôme, il faut quatre mois pour obtenir un rendez-vous chez un ORL, un gynécologue ou un dentiste. Le centre hospitalier public comme la clinique privée éprouvent des difficultés croissantes à recruter et donc à offrir une bonne offre de soins.
Les collectivités territoriales sont mobilisées. En Loir-et-Cher, le conseil général, les pays et communautés de communes se sont fortement engagés, conformément à l'esprit de la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dans la création de maisons médicales, le soutien à la scolarité et à l'accueil des étudiants stagiaires en médecine comme des internes.
Mais il faut se rendre à l'évidence : ces mesures ne suffiront pas à endiguer le déséquilibre croissant entre, d'un côté, des eldorados de l'offre de soins et, de l'autre, des déserts médicaux. L'ouverture du numerus clausus n'est pas de nature à réduire les déficits dans les zones sous-médicalisées. C'est pourquoi, par la voix de nos collègues Olivier Jardé et Jean-Luc Préel, les députés du Nouveau Centre souhaitent que soit envisagé un numerus clausus régional permettant de répondre aux vrais besoins des régions durablement en difficulté.
Nous n'échapperons pas au désert médical dans nos campagnes, et pas davantage dans certaines de nos villes et quartiers, si des mesures plus drastiques ne sont pas mises en oeuvre pour garantir une juste répartition des professionnels de santé.
Sans remettre en cause la liberté d'installation, il est temps de poser la question de pénalisations financières en cas d'installation dans des zones déjà surdotées.
Monsieur le député, en matière de démographie médicale, l'objectif du Gouvernement est simple : pas de contrainte, mais confiance et incitation.
Parmi les mesures incitatives, je peux vous citer le contrat d'engagement de service public, qui prévoit une allocation mensuelle de 1 200 euros par étudiant, avec pour contrepartie l'obligation d'exercer dans les zones sous-denses.
Un autre axe de travail consiste à favoriser l'exercice regroupé. D'ici à l'horizon 2013, nous allons ouvrir 250 maisons de santé pluridisciplinaires, ce qui correspond à un mode d'exercice attractif, car plus conforme aux attentes des professionnels.
Il y a aussi des mesures plus directes. Vous avez évoqué le numerus clausus : nous allons l'augmenter, mais il a déjà doublé depuis une dizaine d'années. Il prendra en compte une répartition selon les territoires, en fonction des besoins.
Enfin, vous évoquez la question des modes de rémunération. Le chantier d'un nouveau mode de rémunération combinant le paiement à l'acte et le forfait a été ouvert par le Président de la République lors de son déplacement à Orbec, suite aux préconisations du rapport Hubert.
Sachez que Xavier Bertrand et moi-même sommes totalement mobilisés pour la mise en oeuvre de ce projet.
Monsieur le député, c'est bien une relation de confiance que nous développons avec les professionnels de santé. C'est avec leur implication et les mesures que nous mettons en oeuvre que nous réussirons à relever ce défi. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Alain Vidalies, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
M. Miled, un des hommes les plus riches de Tunisie, a eu la gentillesse de proposer à Mme la ministre des affaires étrangères un transport amical en avion sur le tarmac de Tunis – ce même avion a d'ailleurs servi le 14 janvier à la fuite vers Paris d'une partie de la famille de M. Ben Ali.
Or nous apprenons aujourd'hui qu'en fait, ce voyage d'agrément était aussi un voyage d'affaires destiné à l'achat, par les parents de la ministre, de parts d'une société immobilière appartenant à M. Miled. Ainsi, M. Miled ne transportait pas gratuitement des amis, mais des partenaires intéressés dans une affaire !
Je suppose que personne ne va soutenir que la réalisation de cette opération financière s'est décidée spontanément dans l'avion, mis spontanément à disposition, alors qu'elle supposait, en droit tunisien, l'accord préalable du ministre de l'intérieur.
Mme la ministre adapte ses explications au fur et à mesure des révélations sur la réalité des modalités et du contenu de ce voyage.
Mme la ministre n'est pas responsable des amis de ses amis. Mme la ministre n'est pas responsable des opérations financières de ses parents. Au fond, Mme la ministre n'est responsable de rien…
Mais la France est responsable de sa diplomatie. Tous les Français comprennent que l'image de notre pays est abîmée par cette affaire. Le peuple tunisien, qui s'est libéré dans le sang du joug du dictateur, ne peut oublier que, le 12 janvier, dans cet hémicycle, la seule réponse du Gouvernement fut de proposer notre savoir-faire pour régler la question sécuritaire.
Les questions d'éthique personnelle renvoient à la responsabilité personnelle de chacun, mais la question politique renvoie à la responsabilité politique.
Aujourd'hui, c'est la vôtre, celle de la majorité, du Gouvernement et du Président de la République. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
La parole est à Mme la ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes.
Monsieur le député, depuis quelques semaines, certains médias et hommes de gauche passent ma vie tant publique que privée au peigne fin. Faute d'y avoir trouvé quoi que ce soit d'illégal à me reprocher, c'est aujourd'hui sur la vie privée de mes parents, qui ont quatre-vingt-douze ans, que l'on enquête. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Ont-ils fait quelque chose d'illégal ? Non !
Cette campagne, monsieur le député, est indigne. Je veux vous dire tout simplement et très sincèrement combien je regrette que vous ayez la petitesse, l'abjection (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) d'utiliser mes parents pour vous en prendre à moi et m'attaquer politiquement. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP. – Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Monsieur le député, à mes yeux, la politique, c'est autre chose.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Et les affaires ?
Pour ma part, je ne rappellerai pas ce qui s'est passé du temps de M. Mitterrand : il y aurait sans doute beaucoup à dire.
Moi, quand je pose des questions, ce sont de vraies questions, des questions politiques, celles qui concernent vos choix, votre morale, votre responsabilité politique.
Alors, monsieur le député, puisque vous avez l'indignation si sélective et la mémoire si courte, je vous repose la question : si M. Ben Ali était aussi infréquentable, pourquoi avez-vous attendu son départ pour l'exclure de l'Internationale socialiste, et même, trois jours après ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. - Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Si M. Ben Ali et ses amis étaient infréquentables, pourquoi avez-vous invité deux membres du parti au mois de novembre à votre conseil à Paris ? Si vous tenez tant aux principes et au respect des peuples, pourquoi M. Gbagbo et son parti sont-ils toujours à l'Internationale socialiste, alors qu'ils dénient la volonté des Ivoiriens ? Voilà de véritables questions ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP. - Plusieurs députés du groupe UMP se lèvent et applaudissent. - Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Didier Gonzales, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Dans la nuit de lundi à mardi dernier, Aude, jeune étudiante de dix-huit ans, quitte la gare d'Ablon pour rejoindre son domicile, quand elle est victime d'une agression à caractère sexuel.
Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Il faut une nouvelle loi !
Un homme la poursuit, lui assène une série de coups, la projette au sol et menace de la tuer. Aude se débat, échappe par trois fois à son agresseur et ne doit son salut qu'au passage providentiel d'un véhicule transportant trois jeunes gens. S'ensuit un concours de circonstances exceptionnellement favorable qui permet à la police d'interpeller l'individu.
À l'issue d'une garde à vue de quarante-huit heures, l'enquête policière parvient à confondre l'agresseur. Débute, ensuite, la procédure judiciaire de comparution immédiate. La convocation devant le tribunal correctionnel est prévue le jeudi à treize heures. Malheureusement, le concours de circonstances favorable s'arrête là, précisément au moment où justice doit être rendue. Aude est présente dès treize heures à la convocation, mais son affaire n'est examinée qu'à dix-sept heures. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Le juge regarde alors sa montre et constate que le délai de comparution a expiré une heure plus tôt. En conséquence, le délinquant sexuel est immédiatement remis en liberté, sans contrôle judiciaire ni condamnation. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Quel message notre société délivre-t-elle en remettant en liberté un délinquant sexuel, alors que les faits sont établis et qu'il était aux mains de la justice ? Il ne s'agit pas ici d'une question de moyens, mais d'une priorité mal appréhendée par la justice, avec des conséquences humaines déplorables. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le garde des sceaux, quelles mesures comptez-vous prendre pour améliorer les droits des victimes ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Monsieur le député, je vous demande tout d'abord, si vous le voulez bien, de transmettre à cette jeune étudiante mes excuses et ma sympathie. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Je voudrais, maintenant, expliquer les règles qui ont conduit le tribunal à prendre cette décision. Le 17 décembre 2010, le Conseil constitutionnel, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, a décidé qu'une personne dont la garde à vue a été prolongée par le parquet doit être présentée dans un délai de vingt heures au juge du siège. Cette décision du Conseil constitutionnel est d'application immédiate, et c'est ce que j'ai d'ailleurs rappelé par circulaire à l'ensemble des juridictions avant la fin de l'année dernière.
Dans le cas que vous soulevez, et comme vous l'avez indiqué, la personne a été remise en liberté, car ce délai était dépassé d'une heure. Pour éviter que ce genre de situation ne se reproduise, le projet de loi réformant la garde à vue, que vous avez récemment adopté en première lecture, comporte une disposition aux termes de laquelle la personne déférée, faute d'être entendue dans les délais par le tribunal, peut être immédiatement présentée au juge des libertés et de la détention. Dans l'attente de sa mise en application, je vais demander au procureur de prévoir un dispositif permettant que les dossiers de ce type soient systématiquement appelés en priorité.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Avec quels moyens ?
Bien qu'ayant été libéré, le mis en cause sera jugé rapidement. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.
La mise en perspective de deux articles publiés avant-hier dans Le Monde illustre la France inégalitaire que vous voulez construire. Je cite : « Les patrons du CAC 40 sont les mieux payés d'Europe » et « La France dernière de l'OCDE pour l'encadrement des élèves ». Le récent rapport du Centre d'analyse stratégique – organisme rattaché au Premier ministre – sur l'emploi public est une gifle à la politique menée par le Gouvernement. Dans le primaire, le niveau d'encadrement est le plus bas des pays de l'OCDE. Il est inférieur à celui du Portugal, de l'Italie, de l'Allemagne, de l'Irlande, de la Grèce. La liste est longue !
Vous invoquez vos efforts qualitatifs. Or le compte n'y est pas, car l'OCDE a démontré que les résultats de notre système éducatif se dégradaient. Plus il y a d'élèves par classe, moins les résultats sont bons. Mais, à vos yeux, cette situation n'est pas encore suffisamment dramatique. Après avoir supprimé 50 000 postes d'enseignants entre 2007 et 2010, vous détruisez 16 000 postes pour la rentrée prochaine, alors que le nombre d'élèves augmente. Votre politique se traduit par des regroupements autoritaires, en dépit de l'opposition des élus locaux, des enseignants et des parents d'élèves.
Nos territoires sont durement touchés. Dans ma circonscription, par exemple, à Chauny, Tergnier, Coucy-le-Château, Barisis-aux-Bois, au lycée Gérard-de-Nerval de Soissons, des postes sont supprimés. Dans des collèges, la dotation horaire globale est amputée.
Mais le plus important pour notre pays, c'est que vous hypothéquez son avenir. En détruisant une formation initiale de qualité, vous empêchez notre pays de développer son savoir global. Comment prétendre, ensuite, favoriser la formation de haut niveau pour le plus grand nombre, puis la recherche, si nos jeunes n'ont pu acquérir des bases solides ? La France est riche du cinquième PIB mondial, mais elle ne se situe qu'au vingt-troisième rang pour l'éducation !
Monsieur le ministre, allez-vous écouter les recommandations du Centre d'analyse stratégique et mettre un terme à votre politique de non-remplacement d'un enseignant sur deux ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.
Monsieur le député, votre fixation sur l'unique question des moyens et des postes vous empêche de regarder la réalité en face ! (Vives exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.) Quelle est cette réalité ? Oui, nous avons décidé de tourner le dos à une politique, à cet égalitarisme coupable et bien-pensant qui n'a pas obtenu les résultats escomptés pendant de trop nombreuses années. L'école du XXIe siècle, monsieur le député, est une école capable de personnaliser les parcours, de tenir compte de la diversité des élèves (Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC) et de faire plus pour ceux qui en ont le plus besoin. C'est ce que nous faisons en ouvrant cette année 6 000 places d'internat d'excellence pour des élèves issus de quartiers défavorisés.
C'est une école capable de mettre en place, en primaire, deux heures d'aide personnalisée par semaine afin que les élèves qui rencontrent des difficultés en lecture maîtrisent les fondamentaux ! C'est cela, l'école du XXIe siècle ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Monsieur le député, l'école du XXIe siècle a confiance en ses enseignants. (Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.) Elle améliore et allonge d'une année leur formation initiale et elle les paye mieux !
Les enseignants en début de carrière ont été augmentés de 10 % le 1er septembre dernier ! (Protestations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Vous ne l'avez pas fait, nous l'avons fait !
Enfin, monsieur le député, une école qui mise sur l'avenir est une école qui mise sur l'autonomie de ses établissements et qui fait confiance aux acteurs locaux. C'est tout le sens de l'action que nous menons pour l'autonomie des lycées et des collèges, et c'est ainsi que nous obtiendrons de meilleurs résultats !
Non, monsieur le député, ce ne sont pas les solutions du XXe siècle qui permettront de relever les défis de l'école du XXIe siècle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
La parole est à M. Claude Gatignol, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire, la France a une longue tradition d'une agriculture qui est une force économique, sociale, liée aux biodiversités de ses territoires ruraux. Elle joue un rôle essentiel en assurant notre alimentation, mais également en participant à nos exportations, alors même que des évolutions technologiques et de lourdes contraintes environnementales se mêlent au choc de la mondialisation.
En dépit de ces éléments, par des efforts considérables, par l'acquisition de compétences nouvelles de haut niveau et une responsabilisation de leur métier de paysan, nos agriculteurs ont su gagner le double pari d'assurer des quantités de production et un niveau de qualité reconnu par les consommateurs et les acheteurs étrangers, la Normandie, que vous connaissez bien, en est un excellent exemple.
Le soutien du Président de la République et du Gouvernement, et le vôtre en particulier, a été constant. L'Assemblée nationale, sur tous ses bancs, porte une attention constante à la situation difficile et parfois dramatique de nombreux agriculteurs.
Or un certain organisme, dont je tairai le nom ici, a déclenché hier, pour des motifs peu avouables,…
…une campagne lamentable de dénigrement, de fausses informations, relevant de l'injure contre l'agriculture française.
Nos agriculteurs sont blessés à juste titre par cet affichage contre lequel je proteste avec la plus grande force. Je suis indigné par ces actions médiatiques offensantes et non fondées.
Monsieur le ministre, vous avez pris clairement position sur cette actualité qui surgit à quelques jours de l'ouverture du salon de l'agriculture, et je vous en félicite. Quelles suites entendez-vous donner à ces attaques pour dire toute la considération que la France porte à ses agriculteurs ? Quel message d'espoir et de confiance pouvons-nous ensemble lancer en direction des agriculteurs et des consommateurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.
Monsieur le député, la campagne de France Nature Environnement est, je pèse mes termes, un scandale et une provocation. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Plusieurs députés du groupe GDR. Non !
Quand cesserons-nous dans notre pays d'accabler les agriculteurs de tous les maux de notre société ? (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Quand cesserons-nous de confondre agriculteurs et pollueurs ? Quand reconnaîtrons-nous enfin les efforts que font tous les agriculteurs français depuis des années pour concilier l'agriculture et l'environnement ? (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Contre tous ceux qui persistent à opposer agriculture et environnement, nous poursuivrons, avec le Premier ministre et le Président de la République, dans la voie qui consiste à concilier l'agriculture et l'environnement, et nous le ferons en gardant trois principes très précis à l'esprit.
Le premier, c'est la solidarité vis-à-vis de tous les agriculteurs. Nous continuerons à les aider à mettre leurs exploitations aux normes, à développer la mécanisation, à aller vers davantage de bio et de respect de la biodiversité.
Le deuxième, c'est l'harmonisation européenne. Nous voulons des règles environnementales qui soient les mêmes pour tous, en France, en Allemagne, en Espagne ou en Italie. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) Nous ne pouvons pas demander aux agriculteurs français d'être compétitifs et, en même temps, de respecter des règles plus strictes que leurs voisins et leurs concurrents. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Le troisième, c'est la réciprocité des règles internationales. Nous ne pouvons pas demander à nos agriculteurs de respecter les règles environnementales, sanitaires, de bien-être animal parmi les plus strictes au monde…
…et, dans le même temps, ouvrir tout grand nos frontières à des produits qui ne respecteraient pas les mêmes règles. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Monsieur Gatignol, nous ne céderons pas sur ce sujet. Avec le Premier ministre et le Président de la République, nous irons ensemble, environnement et agriculture, dans la même direction. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC, dont de nombreux députés se lèvent.)
La parole est à M. François Loncle, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, à défaut de nous répondre sur la forme, peut-être accepterez-vous de nous répondre sur le fond.
Les événements de Tunisie (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) et d'Égypte ont jeté le discrédit sur la diplomatie française. Ils en ont révélé ses silences honteux, ses hésitations embarrassées, ses propositions saugrenues, ses revirements à contretemps.
Au-delà des extravagances excellemment évoquées par Alain Vidalies, il y a des raisons profondes à l'abaissement de la diplomatie française. Il résulte tout d'abord de l'absence patente de ligne politique claire, de dessein adapté au moment de notre histoire.
Il est ensuite le fruit des dysfonctionnements constants au sein de l'appareil d'État entre la cellule diplomatique de l'Élysée, omnipotente, et un Quai d'Orsay à la dérive. Il est enfin la conséquence du déséquilibre flagrant entre les valeurs humanistes portées historiquement par la France et les excès de la realpolitik.
L'image de la France dans le monde, en particulier dans les pays arabes et africains, est profondément dégradée. Notre capacité d'action semble avoir sombré avec les régimes de M. Ben Ali et de M. Moubarak.
Le discrédit de la France est si grand qu'il a contraint un ministre tunisien à démissionner. « Un rêve devenu réalité », voilà comment le ministre des affaires étrangères de Tunisie, M. Ahmed Ounaïes, avait qualifié le 4 février sa rencontre à Paris avec son homologue français. Ce rêve a vite tourné au cauchemar : les louanges qu'il avait adressées à notre ministre des affaires étrangères ont révolté ses compatriotes, qui n'avaient pas oublié que la France avait proposé à Ben Ali son « savoir-faire » en matière de maintien de l'ordre. Alors qu'il occupait ce poste depuis seulement deux semaines, le ministre tunisien n'a pas tardé à tirer les conséquences logiques de sa bévue…
La parole est à Mme la ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes.
Monsieur le député, vous me prêtez un bien grand pouvoir, celui de défaire les gouvernements étrangers. Je ne me connaissais pas un tel pouvoir ! En tout cas, ni vos attaques ni vos injures ne me détourneront de la tâche qui m'incombe.
Pendant que vous vous égosillez, nous travaillons, nous, sur des sujets sur lesquels on ne vous entend pas. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Il y a, en effet, de grands sujets sur lesquels vous êtes totalement muets, mesdames, messieurs les députés de l'opposition.
Vous êtes muets, par exemple, sur la Côte-d'Ivoire. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je comprends que vous ne soyez pas très à l'aise puisque vous n'avez toujours pas exclu M. Gbagbo de l'Internationale socialiste (Mêmes mouvements) alors qu'il dénie totalement la démocratie et les élections.
Quand le Gouvernement prépare l'aide et le soutien que la France entend apporter à la Tunisie comme à l'Égypte dans leur démarche démocratique, on ne vous entend pas non plus, vous n'avez aucune proposition à faire.
Sur le processus de paix au Moyen-Orient, quand je suis en contact deux ou trois fois par semaine aussi bien avec Mme Clinton qu'avec le Président palestinien ou son Premier ministre, le Président ou le Premier ministre israélien, on ne vous entend pas, vous n'avez aucune proposition. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Quand nous travaillons sur l'aide au développement pour l'Afrique (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), comme l'a fait le Président de la République hier, et comme je l'ai fait moi-même en recevant à dîner l'Africa Progress Panel, vous restez muets. (« Démission ! Démission ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Sur ces sujets, comme sur les sujets français, vous faites plein de déclarations lénifiantes mais vous n'avez aucun projet à proposer. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. Éric Besson, ministre chargé de l'industrie.
Le Président de la République était en déplacement hier dans la Marne, sur le site de l'entreprise de connectique Axon Cable, qui a reçu fin décembre une aide de 2,2 millions d'euros pour l'accompagner dans son projet d'investissement et de création d'emplois.
Cette aide à la réindustrialisation fait partie de l'une des vingt-trois mesures prises dans le cadre des états généraux de l'industrie. Elle témoigne du renouveau de la politique industrielle de la France mené par le Gouvernement.
L'industrie représente 90 % des dépenses privées de recherche et développement, 75 % de nos exportations et, avec les services qui lui sont liés, un tiers de nos emplois salariés.
Moi qui suis élu, comme mes collègues Jacques Pélissard et Marie-Christine Dalloz, d'une circonscription du Jura où sont implantées depuis plusieurs années des entreprises industrielles qui ont fait et continueront de faire l'histoire de notre département, je sais à quel point l'industrie est importante pour nos territoires. Il n'y a pas de pays sans industrie.
Monsieur le ministre, au-delà des aides à la réindustrialisation et des dispositions prises dans le cadre des états généraux de l'industrie, au-delà de la création de la conférence nationale de l'industrie et de la mise en place des comités stratégiques de filières, quelles sont les mesures prises par le Gouvernement pour soutenir notre industrie nationale ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique.
Monsieur le député, vous avez raison : hier, dans la Marne, le Président de la République a souligné notre volontarisme industriel, sa volonté que la France et l'Europe restent des terres de production industrielle et pas simplement de consommation.
Vous avez rappelé nos aides à la réindustrialisation et évoqué la politique industrielle menée avec constance depuis 2007. Je n'ai pas besoin de vous remettre en mémoire le triplement du crédit impôt recherche, la suppression de la taxe professionnelle, la création du Fonds stratégique d'investissement, ni le fait que, dans le cadre des investissements d'avenir, plus de 18 milliards d'euros ont été consacrés à l'industrie.
On voit que c'est une politique industrielle cohérente, déterminée, avec des actions concrètes, et qui commence à porter ses fruits.
Cette action volontariste s'accompagne d'une très grande détermination à l'échelle européenne. C'est vrai en matière industrielle mais aussi, comme mon collègue Bruno Le Maire l'a rappelé à l'instant, en matière agricole. Nous voulons la réciprocité. Nous acceptons d'importer des produits en provenance de pays étrangers, émergents ou industrialisés, mais nous voulons que nos produits puissent être importés par ces pays dans les mêmes conditions. C'est en ce sens que nous agissons, avec le plein soutien, je le souligne, du commissaire européen à l'industrie, M. Tajani.
Nous avançons également sur un autre dossier crucial : celui du brevet européen. Vous savez qu'il en coûte aujourd'hui dix fois plus cher à nos PME de prendre un brevet en Europe que ce n'est le cas aux États-Unis.
Vous le voyez, monsieur le député, nous ne pensons pas qu'une société post-industrielle soit imaginable et nous menons une politique industrielle extrêmement volontariste. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Jean Mallot, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, tous les moyens sont-ils bons pour parvenir à ses fins ? Vous ambitionnez, dit-on, de vous faire élire député de Paris en 2012. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Pour préparer le terrain, vous ne reculez devant rien. Le Président de la République avait voulu faire nommer son fils à la tête de l'établissement public pour l'aménagement de La Défense. (Même mouvement.)
Vous venez de nommer par décret le fils de l'ancien maire de Paris, M. Dominique Tiberi, contrôleur général économique et financier de première classe. (Rires sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La commission d'aptitude avait pourtant estimé à l'unanimité que M. Tiberi n'était pas apte à exercer ces fonctions. Vous n'en avez pas tenu compte. L'audition de l'intéressé par la commission avait pourtant même fait apparaître « l'absence de connaissances par l'intéressé des missions du corps et des compétences que requièrent ces fonctions ». Ça ne s'invente pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Pensiez-vous vraiment que cela passerait inaperçu ? Entre l'inconscience et le cynisme, on hésite ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Dois-je vous rappeler les propos du candidat Nicolas Sarkozy en 2007 ? « La démocratie irréprochable, ce n'est pas une démocratie où les nominations se décident en fonction des connivences et des amitiés, mais en fonction des compétences. »
Je cite toujours : « Le fait du prince n'est pas compatible avec la République irréprochable. » Avec vous, ce n'est pas la République irréprochable : c'est la République des passe-droits !
Dans notre pays, où les inégalités s'accentuent et où le sentiment d'injustice va croissant, votre manière de gouverner est en cause. Au moment où vous prétendez vouloir réglementer les conflits d'intérêts, je vous le demande, monsieur le Premier ministre : qui va vous croire ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le député, j'ai envie de vous dire : pas vous, pas ça, pas ici, pas maintenant ! (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Ce corps de contrôle existe depuis 1984. C'est Laurent Fabius qui l'a mis en place. Je tiens à votre disposition la liste de tous les familiers du pouvoir de l'époque qui y ont exercé des responsabilités, avec le sens de l'État, et personne ne vous a condamnés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Nous arrivons aux affaires en 1986, avec une première loi qui encadre plus strictement les modalités. Vous revenez aux affaires. Je tiens à votre disposition la deuxième liste des nominations au contrôle général économique et financier. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Revenus au pouvoir, nous rédigeons en 1994 une nouvelle loi de transparence, qui instaure l'obligation de publier des avis de la commission chargée d'examiner les candidatures. Vous revenez aux affaires : je tiens à votre disposition la troisième liste des gens que vous avez nommés dans ce corps de contrôle. Si vous voulez vraiment laver plus blanc, je vous renvoie à la situation des vingt-cinq dernières années ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Une évolution a incontestablement eu lieu. Le Gouvernement n'est pas lié pas l'avis de la commission ; il a l'obligation de le publier, ce qui a été fait il y a quelques semaines, au moment de la nomination en conseil des ministres. Cet avis est au Journal officiel. Il y a là, me semble-t-il, de quoi prendre la mesure de l'évolution, depuis 2007, de la transparence, de la rigueur et de la publicité générale.
Permettez-moi de signaler, pour conclure, que je ne vous ai pas entendu protester de la même manière lorsque, dans un esprit d'équilibre républicain, ont été nommés des gens comme M. Migaud à la tête de la Cour des comptes (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR), M. Cahuzac à la tête de votre commission des finances ou M. Charasse au Conseil constitutionnel. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Jean Bardet, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, ma question s'adresse à monsieur le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Elle porte sur la sécurité routière.
Il y a quinze jours, les chiffres des tués sur les routes de France, pour le mois de janvier, ont été rendus publics. Le constat est sans appel : une augmentation de 21 % par rapport au mois de janvier 2010. Vous avez vous-même jugé ce constat préoccupant.
Le problème de la sécurité routière n'est pas univoque, et les conditions météorologiques différentes des deux mois de référence expliquent peut-être ces chiffres ; mais n'oublions pas que les principales causes de décès restent toujours : l'alcool, la vitesse, la drogue, le téléphone et l'endormissement.
Tous les acteurs de la sécurité routière se sont donc interrogés pour savoir si cette augmentation soudaine tenait à des raisons ponctuelles, celles je viens d'évoquer, ou à une modification du comportement des conducteurs. On a ainsi pu se demander, et je l'ai fait moi-même, si les annonces fracassantes faites il y a quelques mois sur les nouvelles dispositions de récupération de points sur le permis n'avaient pas été considérées par certains automobilistes comme un encouragement à moins de vigilance. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe GDR.) Je sais que ce n'était pas le but du législateur, mais les chiffres sont là !
Loin des tergiversations et des procès d'intention, vous n'avez pas attendu pour réagir : vous avez annoncé, dès jeudi dernier, un plan de lutte contre l'insécurité routière et vous vous êtes rendu sur le terrain, la même semaine, pour montrer votre engagement auprès des forces de l'ordre.
Je souhaite, monsieur le ministre, que vous détaillez à la représentation nationale (« Allô ! Allô ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC) les mesures que vous entendez prendre pour atteindre l'objectif fixé par le Président de la République.
La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Monsieur Jean Bardet, au cours de l'année 2010, nous sommes passés, pour la première fois depuis un demi-siècle, sous la barre des 4 000 tués. Naturellement, c'est 4 000 de trop, mais c'est à rapprocher des 18 000 que nous enregistrions au début des années soixante-dix. Mais vous avez raison de le souligner : les résultats du mois de janvier sont extrêmement préoccupants, avec une hausse de 21 %. Je le vous dis très directement : il n'est pas question de laisser quatre semaines de hausse remettre en cause l'efficacité et les résultats de la politique menée depuis plus de dix ans.
Nous allons donc renforcer la formation et renforcer aussi les contrôles et les sanctions.
Renforcer la formation des conducteurs à tous les âges de la vie : c'est ainsi que, dès la rentrée 2011, les lycéens concernés bénéficieront d'un module de sécurité, qui leur sera dispensé avec le concours de Luc Châtel. Simultanément, nous allons mieux faire respecter les règles du code de la route, grâce d'abord aux treize mesures que vous et vos collègues ont adopté dans le cadre de la loi sur la sécurité intérieure, grâce au déploiement de 1 000 radars supplémentaires tout au long de l'année, avec des technologies innovantes comme les radars-tronçons et les radars discriminants, grâce enfin au développement, au bénéfice des forces de sécurité, de systèmes tels que la lecture automatique des plaques d'immatriculation – 326 appareils seront distribués.
J'ai demandé la plus grande fermeté à l'égard des chauffards. Je vous précise que depuis quelques jours ont été démultipliées les opérations de contrôle à bord de véhicules banalisés.
Oui, monsieur Bardet, nous devons impérativement poursuivre notre politique pour faire baisser le nombre de tués et de blessés. Et nous nous en donnons les moyens. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Olivier Dussopt, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, il y a quelques semaines, certains de mes collègues vous ont interrogé sur la question des conflits d'intérêts et sur les rapports entre le pouvoir et les grandes fortunes de notre pays ; Christian Eckert avait évoqué une réunion du « premier cercle », ce club des généreux donateurs de l'UMP, (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP) réunion au cours de laquelle le Président de la République avait promis la suppression de l'ISF. Cette promesse au moins, il semble vouloir la tenir, et même contre l'avis de certains collègues de la majorité puisqu'il a répété hier sa volonté de supprimer l'ISF.
Monsieur le Premier ministre, sur d'autres sujets, à propos des errements de votre ministre des affaires étrangères et de toutes les affaires qui les ont précédées, nous avons dit que nous sommes passés de la promesse d'une République irréprochable à une complaisance coupable vis-à-vis des puissants et des dictatures. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Si vous nous confirmez aujourd'hui la suppression de l'impôt sur la fortune, vous ajouterez l'indécence à la complaisance.
Les Français souffrent et paient les erreurs de votre politique économique : erreurs dans la gestion de la crise, erreurs et injustices dans vos choix, avec un chômage au plus haut, 15 % des Français sous le seuil de pauvreté, des prix qui augmentent sans cesse – le gaz, l'électricité, les transports et j'en passe –, des aides sociales qui diminuent, des associations caritatives débordées, et le rapport de la fondation Abbé Pierre qui souligne la crise sociale que traverse notre pays.
Alors que, dans le même temps, vous-même et votre gouvernement semblez vous complaire dans un décalage indécent entre voyages inopportuns et affairisme, entre nominations de complaisance à tous les étages de la République et provocation gratuite. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Plutôt que de répondre aux attentes de nos concitoyens, le Président de la République, fidèle à son image de Président des riches, décrète que la priorité est de baisser l'impôt sur les grandes fortunes !
Vous renvoyez l'image d'un pouvoir sourd aux aspirations de justice sociale, obstiné dans la mise en oeuvre d'une politique injuste. Baisser l'impôt sur les grandes fortunes, est-ce vraiment votre priorité ? Ne nous dites pas que les socialistes allemands l'ont fait : c'est Helmut Kohl, Chancelier de droite, qui l'avait décidé en 1997.
Ma question est très simple : allez-vous faire encore un cadeau fiscal supplémentaire aux ménages les plus favorisés de notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur de nombreux bancs du groupe GDR.)
La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur Dussopt, retenons ensemble que l'exemple de l'Allemagne et de Helmut Kohl n'est pas pertinent et prenons alors l'exemple espagnol : M. Zapatero est socialiste…
et il a supprimé l'impôt sur les grandes fortunes. (« Eh oui ! » et applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.) Assumez-le et reconnaissez que cette réflexion n'est ni de gauche ni de droite. C'est une réflexion qui doit être partagée pour atteindre le double objectif de cette réforme : celui de justice sociale, que nous partageons tous, et celui de compétitivité économique, dont je veux croire qu'une partie de l'opposition, qui a exercé les responsabilités, le poursuit également.
Je vous remercie d'assurer ainsi, à travers votre question, la promotion des travaux que nous pilotons, sous l'autorité du Premier ministre, avec les membres de la majorité. Depuis plusieurs semaines en effet, nous travaillons sur une photographie précise de la constitution du patrimoine des Français, sur le droit comparé des fiscalités européennes, sur les éléments comparatifs de la fiscalité française et sur son évolution, ce qui dit beaucoup d'ailleurs sur la réalité d'un pays.
Ces travaux vont se poursuivre selon un calendrier qui est maîtrisé : le texte sera soumis au Conseil d'État à la fin du mois d'avril, et devrait être présenté en conseil des ministres dans la première quinzaine de mai. Le projet de loi devra alors être équilibré et ne pas s'éloigner de ce double objectif. Pour l'heure, aucun choix n'est privilégié par rapport à un autre : tous les scénarios sont toujours en discussion. Nous dirons, début mars, quelles sont les mesures que nous ne retenons pas. Ce qui nous laissera encore un mois et demi pour peaufiner le texte et s'adapter à l'équilibre du travail législatif. Cela nous permettra, comme le Président de la République s'y était engagé, comme le Premier ministre l'a réaffirmé à de nombreuses reprises, d'avoir, au mois de juin prochain, un débat utile pour notre économie et utile pour une certaine idée de la justice sociale. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme Marianne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.
Madame la secrétaire d'État, le handicap est pour notre majorité une priorité, et nous pouvons en être fiers. Le Président de la République l'a rappelé lors de la première conférence nationale du handicap ; il a notamment voulu la revalorisation de 25 % en cinq ans de l'allocation d'adulte handicapé.
Citons aussi les mesures en faveur d'une meilleure insertion professionnelle et d'une scolarisation encadrée des enfants handicapés en milieu ordinaire, ainsi que la création de nombreuses places d'accueil en établissements spécialisés.
Le budget consacré au handicap a augmenté de plus de 27 % en quatre ans, dans un contexte économique pourtant dégradé.
Si nous avons fait beaucoup, il reste encore à faire. Nous débattons actuellement pour améliorer le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées. Nous débattons aussi des problèmes d'accessibilité. Nous cherchons sans cesse avec vous, madame la secrétaire d'État, à améliorer l'environnement des plus fragiles d'entre nous.
Nous célébrons actuellement l'anniversaire de la loi sur le handicap du 11 février 2005, que vous avez portée. Cette loi a été à l'origine d'un changement véritable, et très positif, de regard sur nos compatriotes handicapés.
D'autre part, le grand chantier de la réforme de la dépendance vient d'être lancé. Les associations de personnes handicapées s'inquiètent de ne pas être incluses dans cette réflexion. Pouvez-vous nous expliquer, madame la secrétaire d'État, quelle sera l'articulation entre les objectifs fixés voici plus de deux ans lors de la conférence nationale sur le handicap et le débat sur la dépendance ?
Pouvez-vous rassurer nos compatriotes handicapés sur la place qui leur est faite dans cette réflexion, sur cette question aussi majeure pour l'avenir de notre société ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.
Madame la députée, permettez-moi d'abord de dire que la politique du handicap dans notre pays doit beaucoup à vous tous, sur tous ces bancs, et à notre majorité.
En effet, à travers les grandes lois qui font référence, depuis celle de 1975 jusqu'à la plus récente, notre majorité a construit ce qui fait la politique du handicap en France.
Vous m'interrogez, madame la députée, sur l'articulation plus précise entre le grand chantier sur la dépendance voulu par le Président de la République et la politique du handicap.
Les personnes handicapées ont naturellement toute leur place dans ce débat, mais il est important de rappeler sur quels principes se fonde le grand chantier voulu par le Président de la République. C'est un chantier dédié à la dépendance liée à l'âge. La dépendance est un risque ; le handicap est la situation de quelque sept millions de nos compatriotes.
Naturellement, le monde du handicap a tout à apporter à cette réflexion. Malgré cette différence essentielle et ce principe, les associations de personnes handicapées seront pleinement sollicitées, à travers les groupes de travail et les grands débats interdépartementaux. Elles seront d'autant plus associées que la question du vieillissement de la personne âgée est particulièrement importante et est au coeur du débat.
À vous tous mesdames et messieurs les députés, et à vous-même madame Bérengère Poletti, je tiens à dire qu'avec Roselyne Bachelot,…
…je veillerai tout particulièrement à la présence des associations au coeur de ce débat. L'une comme l'autre, nous sommes certaines de l'apport qui sera le leur. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question, à laquelle j'associe mes collègues Martine Pinville et Jean-Louis Bianco, s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, et concerne les difficultés que rencontrent de nombreuses familles pour scolariser leur enfant handicapé.
En application de la loi du 11 février 2005, déjà citée cet après-midi, l'État a le devoir de fournir le personnel suffisant, notamment les auxiliaires de vie scolaire, pour accueillir tous les élèves handicapés.
Depuis cette loi, on enregistre une progression du nombre d'élèves scolarisés, ce qui est positif. Mais ce qui nous intéresse aujourd'hui, ce sont tous les enfants qui ne peuvent bénéficier de l'accompagnement d'un AVS, malgré les décisions validées par les maisons départementales des personnes handicapées.
En effet, les AVS sont déjà en nombre insuffisant dans les écoles et leurs contrats ne sont pas renouvelés. Des familles se voient donc dans l'impossibilité de scolariser leur enfant ou obligées d'interrompre la scolarité en cours d'année.
Pour résoudre ce problème, monsieur le ministre, quelles mesures envisagez-vous ? Vous avez décidé de réduire le nombre de contrats aidés, le faisant passer de 400 000 en 2010 à 340 000 en 2011. Quelles sont vos marges pour la création de nouveaux postes d'AVS à l'intérieur de ce contingent ?
Au-delà des chiffres, le statut précaire des AVS, leur absence de formation et leur rotation fréquente auprès des enfants ne sont pas propices à une bonne intégration scolaire.
Alors que le Conseil d'État impose d'accueillir tous les enfants handicapés, avez-vous l'intention d'ouvrir dès maintenant le chantier de la valorisation de cette profession, afin qu'elle devienne un véritable métier ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.)
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.
Madame la députée, l'école de la République accueille cette année 197 000 enfants handicapés, c'est-à-dire 12 000 de plus que l'année dernière et 45 % de plus qu'en 2005.
Cet effort considérable nous le devons non seulement aux parlementaires qui ont voté la loi de 2005, mais surtout aux enseignants qui accueillent tous les jours en milieu ordinaire ces enfants handicapés qui se voyaient fermer la porte de l'école. Je souhaitais leur rendre hommage.
Madame la députée, nous avons progressé parce que nous avons décidé d'agir avec discernement, comme je le disais tout à l'heure : faire plus pour ces enfants qui ont davantage de besoins. Dans le contexte budgétaire contraint que vous connaissez, le budget pour l'accueil des enfants handicapés à l'école augmente cette année de 13 %.
Dans un contexte de non-remplacement d'un fonctionnaire qui part en retraite sur deux, nous augmentons cette année de 500 le nombre de professeurs et d'éducateurs spécialisés. C'est ce qui nous a permis d'ouvrir, dans le premier degré, 72 classes d'intégration scolaire et 268 unités locales d'inclusion scolaire supplémentaires, dépassant ainsi l'objectif de 2 000 que nous nous étions fixé il y a cinq ans.
Contrairement à ce que vous dites, madame la députée, nous avons obtenu de vrais résultats…
…et nous les avons obtenus parce qu'il y a eu une mobilisation générale.
En outre, le Parlement a adopté, dans le cadre de la loi de finances, un amendement important – dont je veux en remercier la majorité – tendant à redéployer 20 millions d'euros, ce qui nous permettra d'augmenter le nombre d'auxiliaires de vie scolaire.
Contrairement à ce que vous venez d'indiquer, nous allons augmenter le nombre d'emplois aidés, ainsi que le Président de la République l'a rappelé au cours de son intervention, la semaine dernière.
Vous le voyez, madame la députée, l'accueil des enfants handicapés restera une priorité pour le Gouvernement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Scolarisation des enfants handicapés
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Marc Le Fur.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à améliorer le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées et portant diverses dispositions relatives à la politique du handicap (nos 2924, 3 146).
Je suis saisi d'un amendement n° 50 , portant article additionnel avant l'article 1er.
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable.
La loi du 11 février 2005 a repris la définition de la classification internationale du handicap remontant à 1980. Or la classification internationale du fonctionnement du corps et de la santé, développée par l'Organisation mondiale de la santé et adoptée par la France en 2002, a radicalement changé la définition du handicap, bien que les gouvernements successifs n'aient pas suivi en France les engagements internationaux qu'ils ont pris.
Cet amendement propose de modifier la définition française du handicap en y intégrant les éléments de définition que l'OMS a donné du handicap en 2001, inspirés des différentes recommandations européennes ou de la Déclaration de Madrid du Forum européen des personnes handicapées.
La parole est à M. Paul Jeanneteau, rapporteur de la commission des affaires sociales.
Avis défavorable. L'article L. 114 du code de l'action sociale et des familles, issu de la loi du 11 février 2005, retient une définition juridique très large du handicap, qui ne procède pas d'une approche psycho-médicale mais repose sur la prise en compte des conséquences du handicap. Il ne me semble pas utile de revenir sur cette approche.
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale.
Nous ne souhaitons pas revenir sur la définition du handicap qui a fait l'objet d'un large débat en 2005. Avis défavorable.
(L'amendement n° 50 n'est pas adopté.)
Sur l'article 1er, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.
Nous nous félicitons de la stabilisation du statut des maisons départementales des personnes handicapées à l'article 1er. Cette amélioration fait suite à de nombreux rapports qui ont montré les difficultés que connaissaient ces établissements.
Les propositions qui sont faites devraient permettre plus de souplesse et préserver la participation des associations dans le fonctionnement de ces maisons. Elles ont un rôle important à jouer, au même titre que les experts et les personnels.
Nous nous félicitons également du maintien des MDPH sous la forme d'un groupement d'intérêt public.
L'article 1er est intéressant en ce qu'il stabilise la structure des maisons départementales des personnes handicapées. Le choix qui avait été fait au moment de leur création dans la loi du 11 février 2005 méritait, en effet, nous en conviendrons tous, d'être conforté, l'organisation des MDPH sous forme de GIP constituant, comme un de nos collègues l'a fait remarquer hier, une forme de pari.
L'article 1er a le mérite, d'une part, de reconnaître l'intérêt de ces maisons pour les personnes handicapées et, d'autre part, de consolider leur structure, même si quelques éléments méritent d'être regardés de près. Nous y reviendrons tout à l'heure.
La présence du directeur de l'agence régionale de santé ou de son représentant dans la commission exécutive est également un élément fort. Cette décision concourt à la globalisation de la politique de santé et de la politique médico-sociale souhaitée par la loi « Hôpital, patients, santé, territoires » en rapprochant les MDPH des autres organismes publics participant à l'effort sanitaire.
Nous sommes donc tout à fait favorables aux propositions qui nous sont faites.
Je suis saisi d'un amendement n° 53 .
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable.
L'article 1er entend tirer les conséquences de la création des agences régionales de santé par la loi HPST du 21 juillet 2009.
Or, dans sa rédaction actuelle, il ne revient pas à substituer le représentant de l'État dans les départements, comme il est prévu dans cette loi, mais à prévoir, en plus de ce dernier et du recteur d'académie, la participation du directeur de l'ARS ou de son représentant.
La rédaction proposée dans cet amendement permettrait d'éviter que l'État ne soit surreprésenté au sein des MDPH par une présence tricéphale pouvant parfois être génératrice de conflits.
La présence d'un représentant de l'ARS ne va pas déséquilibrer la commission exécutive des MDPH, puisqu'il y a 50 % de représentants du conseil général, 25 % de représentants des associations et 25 % de représentants de l'État, de la sécurité sociale ou d'autres membres du groupement d'intérêt public. Je suis donc défavorable à cet amendement qui avait déjà été repoussé en commission.
La parole est à Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.
Madame la députée, que vous considériez la place de l'État comme trop importante, c'est une chose, mais que vous vouliez supprimer purement et simplement sa participation, c'en est une autre !
Permettez-moi quand même de rappeler que c'est l'État qui contribue au fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées, à travers les personnels et les financements. Par ailleurs, c'est l'État qui est garant de l'égalité de traitement sur le territoire.
(L'amendement n° 53 n'est pas adopté.)
(L'article 1er est adopté.)
Sur l'article 2, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à M. Guy Malherbe.
Tous les articles de cette proposition de loi ont leur importance, mais celle de l'article 2 est toute particulière, puisqu'il vise à stabiliser le personnel des maisons départementales.
L'une des principales difficultés rencontrées dans leur fonctionnement par ces maisons départementales venait de la gestion des personnels, qui relèvent aujourd'hui de statuts très divers : agents des trois fonctions publiques mis à disposition, détachés ou agents contractuels de droit public. Ces disparités ont d'ailleurs été mises en avant par le rapport de l'inspection générale des affaires sociales comme l'une des raisons qui ont conduit à la déstabilisation des équipes et à la faible visibilité du plan de charge des maisons départementales.
Par ailleurs, le cadre juridique de droit commun applicable à la mise à disposition semble particulièrement mal adapté à la gestion prévisionnelle des effectifs. Aussi l'article 2, tel qu'il nous a été proposé, puis modifié par le rapporteur et la commission, va-t-il apporter une certaine stabilité aux personnels des MDPH, en permettant en particulier à ceux-ci d'être mis à disposition par l'État.
Il est prévu de porter la durée de mise à disposition de trois à cinq ans, ce qui va conforter la stabilité des personnels. Le préavis est lui aussi allongé, passant de trois à six mois, de façon à mieux anticiper les retours des agents dans leur administration d'origine. La direction aura donc une meilleure maîtrise des personnels.
Ouvrir la possibilité de recruter des agents en contrats de droit public à durée déterminée permettra, en outre, d'avoir recours à des professionnels de santé – des médecins, mais aussi des personnels paramédicaux comme des ergothérapeutes –, qui viendront renforcer les équipes et leur apporteront leur expérience de professionnels. De plus, on peut espérer, car c'est aussi l'objectif, que cela permettra de raccourcir les délais de traitement des dossiers.
Complété par l'article 4, qui fait contribuer le Centre national de la fonction publique territoriale à la formation des personnels – qui, avec le statut, forme un ensemble –, ce qui devrait améliorer considérablement le fonctionnement des MDPH, cet article va vraiment dans le bon sens.
Je voudrais souligner à mon tour l'intérêt de cet article, qui va améliorer la place des personnels et donc le fonctionnement des MDPH.
Dès la mise en place des MDPH, des personnels qui n'avaient pas l'habitude de travailler ensemble ont été amenés à faire équipe sur des sujets ou des préoccupations qu'ils n'avaient pas forcément partagés avant. Cela a donc suscité beaucoup de difficultés et parfois même des retards dans le traitement des dossiers, comme nous l'ont confirmé différents rapports. Nous nous félicitons donc que ces situations aient pu être prises en compte à travers cet article.
Afin de conforter ces évolutions et de faire fonctionner ces équipes pluridisciplinaires issues d'administrations voire d'horizons différents dans de bonnes conditions, il sera impératif que la direction de la MDPH conduise un projet mettant à contribution les compétences de chacun et chacune, ce qui suppose aussi de prévoir un soutien par des formations, ainsi que du temps pour le travail en commun. Voilà qui devrait permettre de renforcer encore la qualité du travail en équipe. Bien évidemment, elle devra disposer de garanties financières pour assurer les perspectives d'amélioration des carrières, notamment par des formations. Ainsi, chacun pourra, dans l'exercice de sa mission, répondre aux attentes des personnes qui s'adressent aux MDPH.
Hier, lors de mon intervention dans la discussion générale, j'ai eu l'occasion de dire que cette proposition de loi avait sans aucun doute l'avantage de permettre de toiletter un peu la loi du 11 février 2005 et de corriger certaines des difficultés que nous pouvions rencontrer.
Force est en effet de constater que, sur la question des personnels, de nombreuses difficultés se sont présentées. Quelques rapports en ont d'ailleurs mis en avant les raisons. L'une des plus marquantes est sans doute l'instabilité des personnels relevant de l'État transférés dans les maisons départementales des personnes en situation de handicap, avec les conséquences que cela suppose sur l'effectivité de la mission remplie.
Le texte qui nous est soumis a le mérite d'essayer de clarifier ces éléments, notamment s'agissant de la durée, puisqu'il est proposé de porter de trois à cinq ans la mise à disposition et de faire passer le préavis de trois à six mois. Bien évidemment, c'est mieux que la situation actuelle. Néanmoins, passer par la voie du détachement aurait rendu les choses un peu plus simples. En effet, parmi les interrogations que suscite le dispositif, l'une tient à sa complexité.
La relation financière est, elle aussi, complexe. Elle est bien expliquée dans les différents articles, notamment les articles 2 et 5, mais – et mon propos n'est pas polémique – il y a un passif entre l'État et les conseils généraux notamment. Dès lors, à chaque fois que nous aurons des affirmations claires s'agissant de la prise en charge par l'État des salaires, notamment de ceux des fonctionnaires mis à la disposition des MDPH, nous irons dans le bon sens. De ce point de vue, un certain nombre d'éléments sont inscrits dans le texte, même si, je le redis, cela nous paraît un peu compliqué.
Le plus important, au bout du compte, c'est que les maisons départementales des personnes handicapées gagnent en termes d'efficacité. L'efficacité suppose des personnels et des relations financières stables. Il nous semble que c'est ce que vous nous proposez à travers cette proposition de loi, notamment à l'article 2. Nous accepterons donc cet article.
Cet amendement a pour but de prolonger le préavis des mises à disposition, qui est de trois mois dans le droit commun, à six mois. Cela va permettre aux MDPH de mieux anticiper les départs et d'organiser les vacances de postes.
Cette modification implique que soient précisées par décret en Conseil d'État les modalités selon lesquelles un agent peut demander la fin de sa mise à disposition. Il s'agit de préciser également que l'État est tenu de faire droit à sa demande. Il faut une base légale à ces dispositions, ce qui suppose de modifier l'article 2 pour renvoyer à un décret en Conseil d'État le soin de fixer ces règles. Voilà la substance de cet amendement, que je crois consensuel.
La commission n'a pas examiné cet amendement mais, à titre personnel, j'y suis favorable.
(L'amendement n° 77 est adopté.)
(L'article 2, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 73 rectifié , portant article additionnel après l'article 2.
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable.
L'idée de cet amendement est que le Gouvernement remette, dans les six mois, un rapport au Parlement concernant les modalités de remboursement des dettes aux MDPH, ainsi que la compensation financière des emplois mis à disposition.
Je vous ai entendu dire, madame la ministre, tout à l'heure, lors des questions au Gouvernement, que le chiffre avancé de 34 millions d'euros, pour les dettes dont nous parlons ici, n'était pas le bon. Vous allez peut-être éclaircir ce point.
Ce que nous avons vu, quant à nous, c'est que plusieurs maisons départementales du handicap – celles des Ardennes, du Finistère, de la Seine-et-Marne et de Paris – ont déposé des recours contre l'État devant le tribunal administratif pour obtenir le remboursement. La MDPH de Paris évoque ainsi une dette évaluée à 600 000 euros. Nous souhaiterions donc avoir un rapport dans les six mois qui précise tous ces éléments.
La commission a émis un avis défavorable, car un rapport de l'IGAS vient justement de pointer ce problème. Le but de cette proposition de loi est bien, d'ailleurs, de mettre fin à ce contentieux.
L'avis est également défavorable dans la mesure où, comme le prévoit la loi, le Gouvernement déposera sur le bureau des assemblées parlementaires, à l'issue de la conférence nationale du handicap, un rapport sur la mise en oeuvre de cette politique. Votre demande sera ainsi satisfaite.
(L'amendement n° 73 rectifié n'est pas adopté.)
La commission a maintenu la suppression de l'article 3.
Je suis saisi d'un amendement, n° 70 , tendant à le rétablir.
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable.
Il s'agit en effet de rétablir l'article 3 du texte initial, qui prévoit d'exonérer les MDPH du paiement de la taxe sur les salaires pour les salariés mis à disposition par l'État.
Avec l'accord du Gouvernement, le Sénat n'a pas voté cette disposition pour deux motifs : d'une part, la crainte que cette disposition suscite des demandes reconventionnelles d'autres GIP et, d'autre part, la législation prévoyant la mise à disposition par l'État.
Sur le premier point – certains sénateurs l'ont d'ailleurs relevé –, l'extension de cette disposition à d'autres acteurs, comme les GIP intervenant dans d'autres domaines ou les organismes oeuvrant dans l'action sociale, n'est absolument pas frappée d'automaticité. En revanche, cette exonération aurait pour effet de diminuer les charges supportées par les conseils généraux, puisque ce sont eux qui assument actuellement les conséquences des manquements de l'État à pourvoir les postes vacants.
Le second point nous semble, quant à lui, contredit par la réalité. Le recours à des contrats directs par les MDPH augmente de façon continue, notamment pour compenser les postes qui ne sont pas mis à disposition par l'État. Il faut noter que l'activité de ces structures croît chaque année en moyenne de 10 %.
Cet amendement a été repoussé par la commission. Le Sénat a, effectivement, supprimé cette exonération de taxe sur les salaires, estimant que cela ouvrirait la porte à des demandes reconventionnelles de la part d'autres employeurs qui assurent, eux aussi, des missions d'action sociale et sont financés par des fonds publics. C'est le cas des GIP, d'un certain nombre d'établissements publics et du monde associatif. Je partage cet avis et suis donc défavorable à cet amendement.
Vous comprendrez que le Gouvernement soit, lui aussi, défavorable à cet amendement, pour les mêmes raisons que celles avancées par le rapporteur, qui sont excellentes. J'ajoute toutefois, pour rassurer Mme Amiable, que les personnels mis à disposition ne sont effectivement pas concernés par le versement de la taxe sur les salaires, puisque cette mise à disposition ne confère pas aux GIP le statut d'employeur.
(L'amendement n° 70 n'est pas adopté.)
Deux orateurs sont inscrits sur l'article 4.
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.
Cet article porte sur la formation professionnelle, dont je souligne à nouveau l'extrême importance : les professionnels qui interviendront dans les maisons départementales des personnes handicapées doivent y avoir accès.
Les dispositions de cet article rejoignent les orientations générales de la formation professionnelle des agents de la fonction publique territoriale comme des autres agents. Elles vont, je crois, et comme nous l'avons dit tout à l'heure, dans le bon sens.
Sur cette question de la formation des personnels de la MDPH, je voudrais demander une précision. L'article dispose qu'ils pourront bénéficier des formations du Centre national de la fonction publique territoriale ; mais ils dépendront également de leur administration. Comment se fera l'articulation entre ces formations ?
La formation des personnels des MDPH est un sujet essentiel.
Toutefois, il semble judicieux d'introduire cette disposition dans le code de l'action sociale et des familles et non dans le statut général de la fonction publique.
Le Gouvernement partage entièrement cette analyse. Avis favorable.
(L'amendement n° 37 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 49 .
La parole est à Mme Annick Girardin.
Cet amendement technique a pour objet d'assurer la prise en compte de l'existence à Saint-Pierre-et-Miquelon d'une structure spécifique adaptée au territoire, que nous avons évoquée tout à l'heure : la « maison territoriale de l'autonomie » remplace les maisons départementales des personnes handicapées dans cette collectivité d'outre-mer.
L'amendement permet de préciser la rédaction et de lever un doute potentiel quant à l'applicabilité des dispositions de l'article 4 : l'archipel ne doit pas rester en marge. Depuis la fin de la Commission technique d'orientation et de reclassement professionnel, la COTOREP, il y a deux ans et demi, les personnes handicapées à Saint-Pierre-et-Miquelon n'ont aucun interlocuteur.
Pour que s'ouvre une nouvelle maison, il faudrait que l'État confirme sa participation financière. Madame la ministre, pouvez-vous dire aux habitants de l'archipel qui suivent ce débat que cela sera réglé sous peu ?
Je voudrais apporter un certain nombre de précisions, car je n'ai pas répondu à toutes les questions, ce dont je vous prie de m'excuser.
Madame Pinville, la situation des personnels des MDPH a justement été clarifiée : chaque employeur paie pour la formation, et celle-ci est assurée par le CNFPT.
Je confirme aussi, madame Girardin, les propos que j'ai tenus lors de la séance de questions au Gouvernement : l'installation de la MDPH dans l'archipel a été un peu longue, car nous avons estimé que la formation d'un groupement d'intérêt publique était une solution trop lourde et mal adaptée à ce territoire. Nous avons donc opté pour un service commun.
Aujourd'hui, c'est fait : vous pouvez donc être tout à fait rassurée et transmettre cette information aux habitants de Saint-Pierre-et-Miquelon.
La commission a donné un avis favorable à cet amendement, car il est évident qu'il faut adapter ce dispositif législatif à tous les territoires.
À l'examen, il semble qu'il ne soit pas nécessaire d'inscrire cette précision dans la loi. Je voudrais donc savoir ce qu'en pense le Gouvernement.
Effectivement, monsieur le rapporteur, il n'est pas nécessaire d'introduire cette précision dans la loi.
En l'absence de dispositions législatives spécifiques – en l'espèce, sur le statut juridique de la Maison de Saint-Pierre-et-Miquelon –, ce sont les dispositions de droit commun qui s'appliquent.
C'est la raison pour laquelle, madame la députée, le Gouvernement émet un avis défavorable, non pas sur le fond, bien sûr, mais sur la forme.
J'entends ces explications et ces engagements ; je veillerai, et vous veillerez, à ce que l'archipel ne reste pas en marge.
Je retire donc l'amendement.
(L'amendement n° 49 est retiré.)
(L'article 4, amendé, est adopté.)
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 5.
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.
L'article 5 porte sur la structuration des maisons départementales des personnes handicapées.
L'alinéa 5 dispose que « la convention pluriannuelle détermine pour trois ans les missions et objectifs assignés à la maison départementale des personnes handicapées, ainsi que les moyens qui lui sont alloués pour les remplir. Elle fixe en particulier le montant de la subvention de fonctionnement versée par l'État et précise, pour la part correspondant aux personnels mis à disposition, le nombre d'équivalents temps plein qu'elle couvre. »
Ces points sont importants. L'État s'est engagé, depuis plusieurs années, en particulier dans le champ médico-social, à promouvoir des conventions pluriannuelles d'objectifs et de moyens ; cela permet de garantir des crédits à leurs signataires et de leur assurer une visibilité sur plusieurs années. Cette évolution est plutôt positive : l'absence de perspectives sur plusieurs années constituait un frein au développement de structures nouvelles.
Ces conventions pluriannuelles permettent aussi une meilleure prise en compte des besoins, dans le cadre d'un dialogue, qui peut s'avérer constructif, avec les pouvoirs publics. Il n'en demeure pas moins qu'afin d'assurer la stabilité financière des MDPH, il conviendra de fixer des règles avec les principaux intéressés d'une manière qui doit évidemment être loyale et impartiale.
Un dialogue doit donc être systématiquement instauré pour connaître les besoins et les demandes des MDPH. Le Parlement doit aussi être informé des budgets demandés et des financements accordés.
Si ce dispositif peut sembler favorable aux MDPH, il est impératif, d'une part, que les objectifs définis soient réalistes et réalisables, et, d'autre part, que les moyens alloués permettent vraiment de les atteindre.
Des éléments concrets, je le disais tout à l'heure, sont nécessaires pour sécuriser la relation financière entre l'État et les partenaires des MDPH : chacun sait que le financement des MDPH a été source de conflits entre les conseils généraux et l'État.
Vous nous avez donné des chiffres, madame la ministre. Vous nous avez également assuré qu'une solution serait apportée, y compris de façon rétroactive, au problème du passif – dont on s'accorde maintenant à reconnaître la réalité. J'aimerais que vous le disiez à nouveau, afin que les choses soient parfaitement claires.
L'article 5 a la vertu de mettre des choses concrètes derrière les mots, en instaurant entre l'État, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie et les conseils généraux, ainsi que, le cas échéant, les autres partenaires, une convention précise d'objectifs et de moyens.
C'est un élément fort, déterminant. Il faudra que les actes suivent, mais la signature d'une convention est un élément de sécurisation.
La question du financement est fondamentale, notamment pour les questions de personnels. L'article 2 et l'article 5 sont intimement liés : le premier n'a pas de sens sans la sûreté des financements apportée par le second.
Nous serons vigilants sur tous ces points, afin que les MDPH fonctionnent correctement.
Un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales, rendu il y a quelques semaines, constatait « l'effondrement récent du taux de couverture des engagements pris [par l'État] dans les conventions constitutives », avec notamment un taux de couverture des équivalents temps plein passé de 72,9 % au mois de juillet 2006 à 45,3 % seulement en janvier 2010.
La dette de l'État s'élève à 18,8 millions d'euros.
Pour que le fonctionnement des MDPH puisse être le plus clair et le plus lisible possible, il faudra travailler sur ces points.
Je voudrais redonner quelques informations à propos des engagements de l'État vis-à-vis des MDPH, et notamment confirmer à M. Sirugue ce que j'ai dit hier soir au cours de la discussion générale.
L'État ne s'est pas désengagé, bien au contraire : il y a, dans les MDPH, 1 550 postes mis à disposition par l'État, ou compensés financièrement. En 2010, l'État a versé aux MDPH 26,4 millions d'euros au titre de la compensation financière des postes vacants ; à ces crédits s'ajoute le concours de la CNSA, soit 60 millions d'euros versés chaque année.
Je veux confirmer que l'État sera irréprochable en 2011 sur le plan financier. Le projet de loi de finances rectificative pour 2010 prévoit des crédits supplémentaires destinés à couvrir la totalité de la dette de l'État au titre des années 2006 à 2009, et à éteindre les contentieux. Le projet de loi de finances pour 2011 prévoit également la compensation des postes vacants, soit 23,5 millions d'euros correspondant au stock des postes vacants depuis plus d'un an ; ils feront l'objet d'une délégation aux MDPH dans les prochaines semaines.
J'ai ainsi, je crois, répondu à M. Sirugue, ainsi qu'à Mme Girardin, qui m'avait interpellée sur ce sujet pendant la séance des questions au Gouvernement ; ne pouvant parler que deux petites minutes, je n'avais pas pu, madame Girardin, vous apporter tous ces éléments d'information. (Sourires.)
Madame la ministre, je suis très heureux d'entendre cette reconnaissance de la dette de l'État envers les départements. Au plus fort de la crise – notamment lorsque des conseils généraux de toutes sensibilités politiques avaient exprimé leur inquiétude sur le financement des maisons départementales des personnes handicapées –, on aurait, en effet, pu penser que les départements avaient tort. Je vous remercie donc de votre réponse.
Je suis saisi d'un amendement n° 6 .
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.
Il vous est proposé d'ajouter, à l'alinéa 4 de l'article 5, après le mot : « groupement », les mots : « ainsi que la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie ».
Cette proposition avait été formulée par les élus départementaux, qui souhaitent que la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées joue un rôle pivot pour le compte de l'État au plan local dans le dispositif des MDPH.
Je crains que cet amendement ne soit pas adopté. Pourtant, il est important qu'on reconnaisse le rôle de la CNSA, ainsi que le recommandait le rapport de la mission d'information parlementaire sur ce sujet.
la commission n'a pas accepté cet amendement. Certes, la CNSA a un rôle majeur à jouer dans le pilotage national de la politique du handicap ainsi que dans la diffusion des bonnes pratiques. Pour autant, elle ne peut se substituer à l'État dans le pilotage financier des MDPH, pilotage financier que l'État partage avec les départements. En outre, la CNSA n'a pas le réseau décentralisé qui lui permettrait d'être partie prenante des cent conventions pluriannuelles qui seront négociées.
Le souhait que vous formulez, madame Carrillon-Couvreur, de voir la CNSA signataire des conventions pluriannuelles d'objectifs et de moyens impliquerait pour elle une charge considérable alors même que l'État est déjà représenté dans ces CPOM. Outre le fait que la CNSA n'est pas outillée pour instruire et suivre à l'unité une centaine de CPOM, l'État, pour le compte duquel elle joue un rôle pivot, valide ces CPOM. Votre amendement serait donc quasi inopérant et disproportionné pour la CNSA. Le Gouvernement, comme le rapporteur, ne peut donc qu'y être défavorable.
(L'amendement n° 6 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 78 .
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
L'article 5 prévoit la signature d'une convention triennale d'objectifs et de moyens entre l'État et chaque maison départementale pour apporter plus de visibilité aux maisons sur leurs moyens. Si cet article dispose que ces conventions doivent être signées au plus tard le 1er janvier de la deuxième année suivant la date de promulgation de la présente loi, il omet de préciser que leur entrée en vigueur doit être calée sur cette même date, ce qui est évidemment essentiel pour que tout concorde avec l'exercice budgétaire. L'amendement n° 78 a pour objet de réparer cet oubli.
Avis favorable, à titre personnel, car cet amendement n'a pu être étudié en commission.
(L'amendement n° 78 est adopté.)
Dans l'esprit des lois de décentralisation, la convention d'objectifs et de moyens doit être soumise à l'avis de l'ADF afin d'analyser au plan national les modalités de compensation des postes que l'État s'est engagé à mettre en place. Le fait de conforter la CNSA comme maison commune de l'État, des associations, des partenaires sociaux, des caisses de sécurité sociale et des conseils généraux, doit amener à renforcer la place et le poids de l'ADF. C'est l'objet de l'amendement n° 8 .
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable, pour soutenir l'amendement n° 57 .
Avis défavorable. La CNSA est un établissement public national à caractère administratif. Il est normal que sa convention d'objectifs et de gestion soit négociée avec l'État dans la mesure où, parmi ses missions essentielles, figure la répartition de ressources issues d'impôts nationaux. Mais les départements sont déjà fortement représentés au sein de la CNSA. S'ils doivent, bien sûr, être consultés, comme les autres membres du conseil, sur cette convention, confier de tels pouvoirs à l'ADF poserait néanmoins des problèmes institutionnels non négligeables.
Le Gouvernement souhaiterait que ces amendements soient retirés, sinon il se verrait contraint, à son grand regret, d'émettre à leur encontre un avis défavorable.
Il ne semble pas envisageable de soumettre à l'Assemblée des départements de France les CPOM de l'ensemble des MDPH, soit cent CPOM. D'abord, parce que cela représenterait, je viens de le dire, un travail énorme. Ensuite, parce que ces CPOM, même si elles ont toutes une architecture commune, devront s'adapter à des réalités locales qui ne seraient pas nécessairement perceptibles à un autre échelon. Enfin, parce qu'il ne serait pas tout à fait normal de soumettre les présidents de conseils généraux à une telle forme de tutelle.
Il faut bien comprendre l'esprit de cet amendement. Il s'agit de signifier qu'aujourd'hui, en France, les politiques du handicap relèvent de l'État, bien évidemment, des conseils généraux, très fortement, et de la CNSA. Les conseils généraux sont représentés au sein de l'ADF. L'objet de l'amendement n'est pas tant un examen attentif des spécificités de chaque département – sur ce point, je vous rejoins, madame la secrétaire d'État – que l'affirmation que les politiques publiques ont des constantes qu'il convient de faire valider par l'Assemblée des départements de France.
(Les amendements identiques nos 8 et 57 ne sont pas adoptés.)
(L'article 5, amendé, est adopté.)
Sur l'article 6, deux orateurs sont inscrits.
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.
L'article 6 a pour but d'organiser l'activité et le fonctionnement des maisons départementales du handicap en précisant plusieurs points sur lesquels je ne reviendrai pas dans le détail.
Un examen attentif du fonctionnement très varié de ces maisons a conduit les rapports que nous connaissons sur la question à souligner des difficultés, notamment le fait que les MDPH ne pouvaient pas assurer un accueil aussi bien physique que téléphonique au moins hebdomadaire. Les recommandations qui ont été faites devraient permettre d'apporter des réponses satisfaisantes.
Cependant, il serait intéressant de proposer, à travers l'organisation des MDPH, plus de proximité en permettant, chaque fois que c'est possible, que les équipes puissent se déplacer sur les lieux de vie des personnes. En effet, il n'est parfois pas possible de s'assurer de manière fiable des besoins des personnes à la MDPH. Il serait sans doute bon de prévoir des déplacements et une organisation plus proche des usagers.
Si, comme le dit Mme Carrillon-Couvreur, un dysfonctionnement des maisons départementales du handicap a été constaté, alors cet article 6 a toute sa légitimité. Toutefois, je m'interroge sur le fait qu'il faille inscrire dans la loi la nécessité pour un service public d'être ouvert au public et d'avoir un accueil téléphonique. (Sourires.) Si, à chaque fois, il faut rappeler aux services publics qu'ils ont vocation à être ouverts au public, nous n'avons pas fini !
Au-delà de la boutade, les MDPH, comme le rappelait Mme Carrillon-Couvreur, ce ne sont pas simplement des murs, ce sont aussi des missions qui s'exercent à l'extérieur, au contact des personnes en situation de handicap.
Nous voterons cet article 6 tout en manifestant notre étonnement de devoir inscrire cela dans la loi.
Je suis saisi d'un amendement n° 43 .
La parole est à Mme Anny Poursinoff.
Comme vient de le dire notre collègue, il faut que des horaires d'ouverture minimum, mais aussi les trente-cinq heures, soient respectés. Il nous semblait utile que le Gouvernement abonde budgétairement ces obligations minimales, et nous avions donc déposé un amendement en ce sens. Celui-ci a été retoqué dans la mesure où il engageait de nouvelles dépenses. Nous nous sommes donc rabattus sur la proposition de réaliser une étude dans le but de savoir quelles dépenses supplémentaires vont devoir être prises en compte par les maisons départementales des personnes handicapées pour couvrir ces obligations qui manifestement n'étaient pas assurées jusqu'à présent dans certains endroits.
Je partage avec vous, monsieur Sirugue, ce sentiment que parfois la loi est un peu bavarde. D'ailleurs, vous avez vu que, dans sa grande sagesse, la commission avait amendé cet article 6 en renvoyant à la convention pluriannuelle la fixation des horaires d'ouverture.
Le fait de renvoyer justement à une convention les horaires d'ouverture permettra de les ajuster, madame Poursinoff, en fonction des réalités et des besoins locaux, sans augmenter les besoins et donc les moyens humains et financiers de la maison départementale du handicap.
Avis négatif donc sur l'amendement.
Madame Poursinoff, je partage votre objectif d'adéquation des missions et des moyens des MDPH. Mais c'est justement pour cela que les CPOM seront signées avec les maisons départementales des personnes handicapées : pour permettre de vérifier cette adéquation que vous réclamez. Dans ces conditions, je considère que votre amendement est satisfait.
J'aurais pu admettre que mon amendement était satisfait si M. le rapporteur ne venait pas d'indiquer que ce serait à budget constant. Si on découvre que, par endroits, les horaires ou les conditions d'ouverture ne sont pas mis en place faute de moyens, vous me dites : on va faire les conventions d'objectifs et de moyens. Mais si on rétrécit ces conventions à hauteur des moyens au lieu de les augmenter à hauteur des besoins, on risque d'être en difficulté. Donc je maintiens mon amendement.
(L'amendement n° 43 n'est pas adopté.)
(L'article 6 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 58 , portant article additionnel après l'article 6.
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable.
Je voudrais d'abord rectifier une erreur dans la rédaction de l'amendement. Il faut lire « au plus tard le 1er janvier 2012 » et non pas « au plus tard le 1er janvier 2011 ».
Les associations qui accompagnent au quotidien les personnes en situation de handicap nous ont fait part de difficultés qui pouvaient être engendrées par la diversité des règlements intérieurs des fonds de compensation du handicap d'une MDPH à l'autre. Lors de l'adoption de la loi de 2005, les législateurs avaient prévu qu'un décret viendrait préciser le contenu de ces règlements intérieurs afin d'assurer une égalité des droits sur tout le territoire national. Malheureusement, ce décret n'a pas été pris. Nous souhaiterions donc que s'engage au plus vite une concertation nationale avec l'ensemble des acteurs, y compris des financeurs. L'objectif serait de faire des propositions quant aux harmonisations possibles afin d'aider le Gouvernement dans la rédaction d'un décret qui permettrait une égalité de traitement sur tout le territoire national.
L'on peut évidemment souhaiter une plus grande harmonisation des pratiques, même si ces fonds ont été créés pour donner une certaine autonomie aux départements dans la conduite de leur politique, autonomie dont ils disposent d'ailleurs assez peu concernant, par exemple, la PCH. Je me tourne vers le Gouvernement pour lui demander de nous éclairer et de nous livrer sa réflexion sur ce point.
Les fonds départementaux de compensation sont des dispositifs extra-légaux, vous le savez, madame la députée. Il est donc normal que, à ce titre, ils disposent d'une marge d'appréciation pour fixer, au plan local, leur règlement intérieur. Le Gouvernement n'est donc pas favorable à une harmonisation complète de ces règlements intérieurs qui se ferait au mépris du statut même des fonds.
Par ailleurs, le législateur a prévu que la maison départementale des personnes handicapées rende compte aux différents contributeurs de l'usage des fonds départementaux de compensation.
Enfin – c'est important et cela fonctionne bien –, des échanges de bonnes pratiques sont organisés à l'initiative de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie sur ces sujets. Le Gouvernement considère que ce mode d'échanges informels est particulièrement adapté aux instruments d'aide sociale extra-légale que constituent les fonds.
J'ajoute que le Gouvernement s'efforce d'obtenir un arbitrage favorable pour que ces fonds puissent faire l'objet, enfin, d'un abondement qui sera évidemment particulièrement utile pour leur fonctionnement.
(L'amendement n° 58 , tel qu'il vient d'être rectifié, n'est pas adopté.)
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 7.
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.
L'article 7 vise à autoriser les commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées à adopter une procédure simplifiée de prise de décision, à condition que la personne handicapée n'y soit pas opposée. Nous pouvons comprendre l'intérêt d'une telle disposition, à laquelle nous sommes favorables. Quand on relit les rapports qui ont été rédigés, on constate d'ailleurs qu'une telle pratique était déjà en vigueur dans de nombreux départements. Nous voudrions toutefois avoir l'assurance que le fait d'étudier certains dossiers en section locale pour les faire remonter ensuite en formation plénière ne ralentira pas le traitement de ces dossiers.
Par ailleurs, le texte précise que la personne handicapée devra être d'accord pour que la commission puisse adopter une procédure simplifiée. Il sera sans doute plus rassurant pour les familles ou les enfants qui viennent pour la première fois de se présenter devant une commission restreinte ; cela devrait faciliter le dialogue. J'espère que ces éléments seront pris en compte par les conventions d'objectifs et de moyens, que les délais seront respectés et que ces commissions restreintes permettront aux personnes handicapées de bénéficier d'une écoute plus attentive.
J'avoue que cet article me laisse dubitatif. Il présente à la fois un aspect positif en ce sens qu'il favorise la proximité et permet un meilleur partage de l'information, une transparence intéressante, mais aussi un aspect négatif, car il présente le gros inconvénient d'augmenter le nombre des instances décisionnaires avec toutes les conséquences négatives que cela peut avoir sur la cohérence des politiques publiques développées au sein d'une même maison départementale des personnes handicapées. Je comprends donc l'esprit de l'article 7, mais il me semble mériter un examen attentif.
Par ailleurs, quelles seront les conséquences d'un tel article sur les délais d'instruction ? On peut imaginer que le fait d'avoir plus d'instances décisionnaires permettra de raccourcir le délai de traitement des dossiers, qui est aujourd'hui un problème pour les maisons départementales des personnes handicapées, mais s'il faut une cohérence des décisions, cela ne doit pas occasionner une surcharge du calendrier. J'aimerais obtenir une réponse sur cette question.
Il faut, en effet, veiller à ce que la multiplication des centres de décision en sections locales ne nuise pas à l'équité qui doit prévaloir dans le traitement des dossiers. Ne serait-il pas intéressant d'avoir un référentiel plus précis pour que tous les dossiers soient traités de la même façon ?
Je suis saisi d'un amendement n° 11 .
La parole est à M. Jean-Luc Pérat.
Cet amendement vise à insérer, après l'alinéa 2 de l'article 7, l'alinéa suivant :
« 1° bis L'avant-dernier alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées : " Toute décision prise en section locale ne peut l'être qu'à la majorité qualifiée comprenant au moins une voix d'un représentant de la personne handicapée ou de sa famille. À défaut, la demande est transmise à la formation plénière de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. " ; »
Il nous semble en effet capital de laisser toute sa place dans la décision au représentant de la personne handicapée ou de sa famille. Le renvoi en commission plénière à défaut de vote à la majorité qualifiée nous paraît approprié.
Défavorable. Il est à redouter qu'un tel dispositif ne ralentisse les procédures alors que l'objectif du texte est de les accélérer.
Je dirai, pour répondre à M. Sirugue, que la multiplication des instances décisionnaires réduira forcément les délais. C'est d'ailleurs le but de l'institution de ces sections locales.
Quant à l'amendement n° 11 , il n'est pas justifié de prévoir des règles différentes pour les sections locales et les commissions plénières puisque la répartition des différents représentants est exactement la même. Je suis donc obligée d'émettre un avis défavorable à cet amendement.
Madame la ministre, vous n'avez pas éclairé notre réflexion sur la cohérence des décisions prises par une multitude de commissions locales alors que les décisions doivent être équitables quel que soit l'endroit où l'on se trouve sur le territoire. C'est un aspect qui nous inquiète. La multiplication des instances de décision risque, en effet, d'être à l'origine de différences dans le traitement des dossiers au sein d'un même département, ce qui serait mal perçu par nos concitoyens. On sait que, pour d'autres politiques, il vaut parfois mieux aller devant telle commission que devant une autre.
Je vous répondrai tout à l'heure.
(L'amendement n° 11 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 44 .
La parole est à Mme Anny Poursinoff.
Cet amendement vise à compléter l'alinéa 4 de l'article 7 par la phrase suivante : « Les représentants de l'État ne peuvent avoir la majorité des voix dans les commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. »
Il ne faut pas que le décideur soit le payeur. Nous craignons qu'il ne soit plus intéressant pour les représentants des personnes handicapées de siéger dans ces commissions et que, à terme, l'attribution de l'AAH ne se fasse en fonction plutôt des moyens financiers disponibles que des besoins des personnes.
Défavorable. Évidemment, tous les partenaires doivent pouvoir participer à la prise de décision concernant l'attribution de telle ou telle prestation, mais il n'est pas illogique que le principal financeur ait une voix prépondérante. C'est d'ailleurs le cas aujourd'hui pour les conseils généraux en ce qui concerne la PCH.
Enfin, je me tourne une nouvelle fois vers vous, madame la ministre, car il serait intéressant de savoir où en est la discussion en cours entre le Gouvernement et les associations concernant le projet de décret évoqué dans l'exposé sommaire de l'amendement n° 44 .
La discussion de cet amendement me donne l'occasion de poursuivre le débat avec M. Sirugue. Il est vrai que, s'agissant de ces commissions d'attribution, se pose toujours la question des divergences dans l'attribution de certaines allocations ou prestations, qui devrait pourtant relever d'une sorte de doctrine imparable. Il est vrai aussi que la gestion décentralisée d'une prestation d'État peut engendrer des distorsions. Comment concilier l'équité, qui relève toujours de mesures générales un peu éloignées de la réalité du terrain, avec la proximité qui peut générer des inégalités ? C'est d'ailleurs ce qui explique les réformes de la loi de 2005. Il y avait en effet de très grandes divergences dans les COTOREP : elles allaient de un à six. Avec les CDAPH, dont nous allons parler, ces divergences ne sont plus que de un à trois, mais elles existent encore.
Un premier élément rassurant, monsieur Sirugue, réside dans le fait que les équipes d'évaluation sont les mêmes. Le dossier technique qui vient étayer la décision de la commission est donc bien instruit de façon cohérente. Je ne sais pas si c'est entièrement satisfaisant, mais c'est un élément important.
Madame Poursinoff, vous souhaitez que les représentants de l'État ne détiennent pas la majorité des voix dans les CDAPH. Nous sommes en pleine discussion avec les associations sur ce sujet, et il me semble faire preuve d'ouverture d'esprit. Il n'est pas illégitime – le rapporteur le rappelait – que, s'agissant d'une prestation entièrement financée par l'État, ce dernier soit majoritaire dans les CDAPH.
Nous réfléchissons avec les associations à la manière de concilier le rôle de l'État payeur avec une meilleure prise en compte des revendications soutenues par les représentants des bénéficiaires, afin de garantir l'équité dont parlait Christophe Sirugue. Il faudrait à tout le moins – et c'est sur ce point que portent nos discussions – que l'État ait un droit d'appel, un droit de seconde délibération.
Je trouverais donc dommage, madame Poursinoff, qu'avec votre amendement nous fermions le dialogue. Cela ne signifie pas que j'ajourne la question sine die ; la décision sera prise d'ici à quelques semaines, après concertation approfondie avec les associations. C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable à votre amendement.
Je constate que vous vous montrez plus ouverte que M. le rapporteur, mais si le postulat de base de vos discussions est que l'État sera de toute façon majoritaire, je crains que la concertation soit vouée à l'échec.
Non, ce n'est pas ça !
Vous pourriez donc revoir la composition des commissions ? J'avoue ne pas bien comprendre cette idée d'appel, à l'initiative de l'État.
Ne me poussez pas dans mes derniers retranchements, madame Poursinoff ! Je vais parler clair : il faut que l'État puisse se prémunir contre certaines dérives, et notamment contre la tentation de faire supporter par l'AAH – prestation entièrement financée par l'État – des bénéficiaires qui n'en relèvent pas.
Tous ceux qui ont participé à ce type de commission, qu'ils soient gestionnaires départementaux ou gestionnaires de prestations sociales, savent que de telles dérives existent, et l'État doit pouvoir s'en garder. S'il n'est plus décisionnaire majoritaire dans l'attribution des allocations, il faut qu'il puisse faire appel. C'est ce dont nous discutons avec les associations.
Excusez-moi, madame la ministre, je n'avais pas compris votre proposition qui consiste à donner à l'État la possibilité de faire appel s'il n'était plus majoritaire. Cela me semble cohérent, et je retire mon amendement.
(L'amendement n° 44 est retiré.)
L'attribution aux sections locales ou spécialisées d'un pouvoir décisionnaire équivalent à celui de la CDAPH en formation plénière doit s'accompagner des mêmes prérogatives que celles inhérentes à cette dernière. Il est donc indispensable de leur reconnaître la possibilité de consulter la personne handicapée, le cas échéant ses parents ou son représentant légal. Tel est l'objet du présent amendement.
Excellent amendement de notre excellent rapporteur : j'y suis favorable.
(L'amendement n° 36 est adopté.)
(L'article 7, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 59 , portant article additionnel après l'article 7.
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable.
Certaines commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées refusent d'orienter les personnes de plus de soixante ans en situation de handicap qui ne sont pas hébergées dans des structures pour personnes handicapées adultes. Nous souhaiterions donc que cette limite d'âge soit levée. C'est le sens de cet amendement.
La commission n'a pas examiné cet amendement, qui semble remettre en cause la barrière d'âge. C'est sans doute souhaitable à terme, mais je souhaiterais interroger nos excellentes ministres sur ce point.
En lisant votre amendement, plusieurs hypothèses viennent à l'esprit. Soit il a pour objet de permettre la saisine simple de la CDAPH, auquel cas, il est satisfait. Comme vous le savez, il n'y a pas aujourd'hui de limite d'âge pour saisir la CDAPH ; ainsi les personnes handicapées de tout âge, y compris après soixante ans, peuvent faire une demande pour obtenir une carte d'invalidité.
La seconde hypothèse est que votre amendement tend, comme semble l'indiquer l'exposé des motifs, à rendre la CDAPH compétente pour l'orientation des personnes handicapées de plus de soixante ans. Là encore, votre amendement est inutile puisqu'elle l'est déjà.
Cela étant, les auteurs de l'amendement, dont vous êtes, madame Amiable, entendent peut-être mettre fin à ce que l'on appelle les barrières d'âge pour l'accès aux droits et aux prestations. Mais les conditions d'ouverture des droits, et notamment les conditions d'âge, sont précisées par la législation propre à chaque droit ou prestation. Votre amendement est donc inopérant. C'est cependant une question que nous ne négligeons pas, mais elle doit être abordée par un biais spécifique et ne saurait être traitée, ni dans la formulation ni dans l'esprit, au travers de votre amendement.
(L'amendement n° 59 n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, inscrite sur l'article 8.
Cet article aborde le problème du domicile de secours. Lorsque la MDPH du domicile de secours ne peut procéder à l'évaluation pour des raisons d'éloignement géographique, la MDPH du lieu de résidence effectif peut être sollicitée. C'est une pratique qui a déjà cours dans des cas exceptionnels, et il convient donc de l'entériner.
L'article 8 s'avère nécessaire dans le cadre d'un traitement individualisé des personnes, car il permet des évaluations rapides. J'ajoute que l'ensemble des MDPH étant encadré par la grille GEVA, cela implique une égalité d'évaluation, sans aucune possibilité d'adaptation locale des aides accordées.
Le financement des prestations est souvent source de difficultés, du fait du retard important pris par les conseils généraux dans la liquidation des PCH en établissement, ce qui est préjudiciable pour beaucoup d'allocataires. À travers cet article, nous espérons améliorer cette situation en assouplissant le fonctionnement du dispositif, répondant ainsi aux attentes dont nous font part les personnes concernées.
(L'article 8 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 60 , tendant à supprimer l'article 8 bis.
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable.
L'article 8 bis vise à supprimer l'article L. 146-11 du code de l'action sociale et des familles, qui prévoit l'installation dans chaque MDPH d'une équipe de veille pour les soins infirmiers, chargée d'évaluer les besoins, de mettre en place des dispositifs permettant d'y répondre et de gérer un service d'intervention d'urgence auprès des personnes handicapées.
Si nous comprenons la logique qui a prévalu à l'insertion de ce nouvel article, suite à l'adoption de la loi « Hôpital, patients, santé, territoires », nous considérons que la suppression des équipes de veille de soins infirmiers constituerait une difficulté supplémentaire pour les personnes en situation de handicap, alors que la loi de 2005 leur avait permis de bénéficier de l'ensemble de ces services dans un même lieu. Nous souhaiterions donc conserver ces dispositions.
La commission a émis un avis défavorable parce que les obligations aujourd'hui inscrites à l'article L. 146-11 du code de l'action sociale et des familles sont clairement du ressort des agences régionales de santé et non des MDPH.
La loi de 2005 avait prévu la mise en place par les maisons départementales des personnes handicapées d'équipes de veille en soins infirmiers. L'objectif était louable mais, en pratique, il faut admettre que les maisons ont eu la plus grande difficulté à mettre en oeuvre ce dispositif, à telle enseigne qu'à ce jour une seule y est parvenue.
Pourquoi cela n'a-t-il pas fonctionné ? Tout simplement parce que les maisons départementales des personnes handicapées sont en réalité un guichet unique et qu'elles n'ont pas vocation à être des structures gérant directement une offre de service ; elles ne sont d'ailleurs pas outillées pour cela. Les maisons départementales ne peuvent donc pas être le lieu de la mise en place d'équipes de veille en soins infirmiers. Cette compétence doit relever, dans l'esprit de la loi HPST, des agences régionales de santé. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à votre amendement.
(L'amendement n° 60 n'est pas adopté.)
bis
Je suis saisi d'un amendement n° 10 .
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.
Cet article encadre le partage du secret professionnel. J'avais fait en commission certaines remarques pour lesquelles j'ai reçu des réponses qui ne m'ont pas totalement éclairée.
Je veux bien entendre qu'il est nécessaire d'établir des règles concernant le partage du secret et l'on peut souscrire aux dispositions proposées. Cependant, les équipes de professionnels qui interviennent dans les évaluations ou dans les plans personnalisés de compensation du handicap ont l'habitude du secret professionnel, y compris dans leurs échanges avec d'autres professionnels. Comme pour le fonctionnement des MDPH, je trouve donc les dispositions de l'article superfétatoires.
Votre amendement est, si je le comprends bien, un amendement d'appel. La commission l'a repoussé, car il semble que le texte adopté en commission apporte toutes les garanties nécessaires. Le texte sécurise des pratiques qui existaient déjà sans être encadrées juridiquement.
Le Gouvernement partage l'avis du rapporteur. Il s'agit de sécuriser certaines pratiques, et le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
(L'amendement n° 10 n'est pas adopté.)
(L'article 8 ter est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 72 , portant article additionnel avant l'article 10.
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable.
Cet amendement, qui tient à coeur à Huguette Bello, demande au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport établissant un état des lieux exhaustif des établissements médico-sociaux accueillant des enfants handicapés en métropole et plus particulièrement dans les départements d'outre-mer. Mme Bello souligne en effet les sérieuses difficultés de mise en oeuvre des orientations médico-sociales pour les enfants handicapés, faute d'un nombre de places suffisant dans les DOM où la population jeune est plus importante qu'en métropole.
Le problème de l'inégalité de l'offre de structures médico-sociales est bien réel et c'est la mission des ARS d'établir, pour ce secteur, des schémas régionaux visant à réduire progressivement les disparités entre territoires et notamment les territoires d'outre-mer. Quant à l'état des lieux, il est relativement bien connu grâce aux travaux de la CNSA.
Nous sommes d'accord sur le diagnostic, mais, au nom de la commission, j'émets un avis défavorable sur cette demande de rapport supplémentaire.
L'état des lieux exhaustif de ces établissements pour enfants handicapés fait l'objet d'une enquête quadriennale réalisée par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, la DREES. Elle est en cours pour établir cet état des lieux au 31 décembre 2010. Les premiers résultats de ce travail considérable ne seront pas disponibles avant début 2013.
Pour ce qui est de l'évaluation des besoins, les outils existent également, avec le système d'information des MDPH en cours de consolidation, les outils de planification prévus par la loi HPST et notamment les schémas régionaux d'organisation médico-sociale que les ARS sont en train d'élaborer et qui permettront de repenser de façon plus fine l'organisation en fonction des besoins recensés sur le territoire.
L'ensemble des données sera traité au niveau national et il en sera fait état dans le rapport sur la politique du handicap que le Gouvernement déposera sur le bureau des assemblées, à la suite de la conférence nationale du handicap qui se déroulera en juin.
Le Gouvernement ne peut donc vous suivre sur cet amendement.
(L'amendement n° 72 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 40 rectifié .
La parole est à M. le rapporteur.
La commission a tenu à préciser les conditions dans lesquelles les données à caractère médical peuvent être transmises au tribunal du contentieux de l'incapacité.
Néanmoins, la rédaction actuelle de l'article L. 143-1-1 réserverait également au seul médecin l'accès aux documents non médicaux que sont l'évaluation de l'équipe pluridisciplinaire et le projet de vie du requérant, ce qui empêcherait le juge d'en prendre directement connaissance. Une telle restriction ne paraît pas justifiée ; l'amendement y met fin.
L'argumentation du rapporteur est bonne. Je suis donc favorable à cet amendement.
(L'amendement n° 40 rectifié est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 16 .
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.
La commission y est favorable. Voyez, madame Poursinoff, comme je peux faire preuve d'ouverture d'esprit !
Nul n'en doutait, monsieur le rapporteur. (Sourires.)
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Avis favorable.
(L'amendement n° 16 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 12 .
La parole est à Mme Martine Pinville.
Cet amendement vise à rendre plus efficiente la disposition adoptée en commission permettant à la juridiction pour les contestations relatives aux décisions de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de solliciter, outre l'avis du médecin, l'expertise d'une ou plusieurs personnes qualifiées dans le domaine concerné par la décision mise en cause.
Avis défavorable. C'est donner au requérant un moyen d'action qui rompt l'équilibre entre les deux parties.
(L'amendement n° 12 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 13 .
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.
Cet amendement, conformément à l'objectif de l'article 10, vise à améliorer le fonctionnement des tribunaux du contentieux de l'incapacité.
Il s'agit plus exactement de rendre plus efficiente la disposition adoptée en commission permettant à la juridiction pour les contestations relatives aux décisions de la CDAPH de solliciter, outre l'avis du médecin, l'expertise d'une ou plusieurs personnes qualifiées dans le domaine concerné par la décision mise en cause. Cela facilitera la demande du requérant.
(L'amendement n° 13 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 14 .
La parole est à Mme Martine Pinville.
Cet amendement s'inscrit dans l'objectif de l'article 10. Il vise à simplifier et à unifier le contentieux du droit du handicap en le confiant aux juridictions techniques de la sécurité sociale. En effet, lorsqu'il existe un différend avec la MDPH, la lenteur des délais fait que bien souvent la décision intervient tardivement. Cet amendement prévoit donc d'imposer un délai aux juridictions pour statuer dans ces situations.
Avis défavorable. Un tel transfert accroîtrait considérablement la charge de ces juridictions, ce qui compromettrait leur fonctionnement et allongerait les délais de jugement.
Même avis défavorable.
(L'amendement n° 14 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 15 .
La parole est à M. Christophe Sirugue.
Cet amendement est dans le même esprit que les précédents, mais concerne cette fois l'intégration scolaire. La longueur des délais d'instruction peut mettre à mal une année de scolarité. Si, à la rentrée de septembre, il se crée un contentieux au sujet de l'intégration scolaire, et qu'il faut cinq ou six mois pour le résoudre, on imagine les conséquences. Pour protéger la scolarité des enfants en situation de handicap, il est proposé, de façon plus coercitive que dans les amendements précédents, que le délai laissé à la juridiction pour statuer ne puisse excéder deux mois à compter de la saisine.
Avis défavorable. Je comprends bien les motivations des auteurs de l'amendement, mais instaurer un délai ne me semble pas une solution opérationnelle. Il s'agit avant tout d'un problème de moyens des juridictions, qu'on ne peut résoudre par une disposition de procédure.
Défavorable.
L'argument du rapporteur n'est pas acceptable. Dire que, sur un problème comme la scolarisation des enfants, on ne peut pas établir une priorité dans l'examen des dossiers est difficilement compréhensible.
Voyons bien la situation : quand il y a une contestation sur un cas d'intégration scolaire, c'est ordinairement, en vue de la rentrée de septembre. Ne pas prévoir de délai de réponse sous prétexte que les juridictions n'ont pas de moyens suffisants, c'est refuser de donner priorité à l'étude de ces dossiers, au risque de gâcher l'année scolaire de l'enfant handicapé. Dans de tels cas, on ne peut se satisfaire de la réponse qui nous est faite.
Ayant émis un avis défavorable sans l'argumenter, après l'interpellation de M. Sirugue, je souhaite lui donner des explications de fond. Son amendement a deux objectifs et je ne souscris à aucun des deux.
Il transfère aux tribunaux du contentieux de l'incapacité l'ensemble des recours exercés à l'encontre des décisions des MDPH dans ce cas. Comme l'a très bien dit le rapporteur, cela accroîtrait considérablement la charge de travail de ces juridictions, avec finalement des effets contre-productifs sur leur fonctionnement et sur les délais de jugement. Cette unification totale que vous appelez de vos voeux me paraît excessive au regard de l'objectif recherché. Le texte de la commission, tel qu'il a été défendu par Paul Jeanneteau, me paraît plus équilibré. Il clarifie les compétences respectives des deux juridictions en les recentrant sur des champs cohérents.
En second lieu, l'amendement fixe des délais pour les décisions concernant l'orientation scolaire. On comprend l'urgence de ce type de décision et l'irritation de certains parents devant les retards. Mais le juge doit avoir la possibilité de poursuivre la procédure chaque fois qu'il le souhaite et de recourir à une expertise s'il le juge utile. Enfermer sa décision dans un délai, qui doit être le plus bref possible mais doit permettre les investigations nécessaires, ne me paraît pas recevable au fond. C'est pourquoi je souscris à l'avis défavorable du rapporteur.
On touche ici à un point difficile, et les familles ne peuvent pas comprendre une telle situation. Vous avez permis qu'on progresse sur cette question de scolarisation depuis quelques années. Vous donniez des chiffres hier. On voit bien qu'une prise de conscience a eu lieu et qu'aujourd'hui il y a des possibilités de scolarisation, ce qui est très important pour les familles et d'abord pour les enfants. Mais lorsqu'un problème se pose, il faut pouvoir réduire au minimum la période d'interruption de la scolarité. Il faut vraiment voir les choses de près, car cela met les enfants en situation difficile et les parents ne peuvent l'accepter. Il faut que le juge puisse établir des priorités dans l'étude des dossiers.
(L'amendement n° 15 n'est pas adopté.)
(L'article 10, amendé, est adopté.)
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 10 bis.
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.
Entre autres dispositions, l'article 10 bis prévoit que, tous les cinq ans, le service public de l'emploi élabore, sous l'autorité du représentant de l'État dans la région, un plan régional pour l'insertion des travailleurs handicapés. Ce plan, coordonné avec les politiques d'accès à la formation et à la qualification professionnelles des personnes handicapées, comprendra un diagnostic régional, un plan d'action régional et des indicateurs régionaux de suivi et d'évaluation.
Nous sommes évidemment favorables à ces plans régionaux pour l'insertion des travailleurs handicapés. Toutefois, je veux vous faire part de quelques réflexions.
En la matière, nous pouvons tirer plusieurs enseignements et renseignements de l'expérience des dernières années. Pour l'heure, un PRITH en tout et pour tout a été mis en place, dans le Limousin. Dans de nombreux départements, nous avons constaté que la mise en place de ces plans régionaux était difficile. Dans mon département de la Nièvre, une seule réunion sur le sujet s'est tenue à ce jour ; une seconde est prévue, mais force est de reconnaître que les choses ne vont pas très vite. Dans le même temps, nous avons assisté à la suppression des PDITH, les plans départementaux qui, eux, fonctionnaient bien. Tous les ans, nous avions droit à une présentation de leur action, qui nous montrait qu'ils avaient permis d'établir des relations fructueuses en matière d'insertion des handicapés avec Cap emploi, et les MDPH trouvaient dans ces structures des relais de proximité efficients et efficaces. C'était un réel progrès ; par comparaison, force est de constater que les regroupements régionaux constituent plutôt un recul.
Les PRITH ont certainement leur utilité, mais ils sont nécessairement éloignés des données locales et ils peuvent difficilement jouer leur rôle en termes d'impulsion et de coordination départementale, ce dont les PDITH s'acquittaient bien mieux. Pourquoi les a-t-on supprimés ? Était-ce pour des raisons budgétaires ? Ne serait-il pas possible de revoir la question et d'organiser à nouveau le suivi de l'insertion des travailleurs handicapés au niveau départemental ?
Cet article révèle une nouvelle ambiguïté qui mérite d'être soulignée.
Certes, lorsque nous parlons des politiques de l'emploi, et notamment de leur dimension économique, nous pouvons à juste titre considérer que le niveau régional est le bon. À ceci près que la structuration de la prise en charge du handicap relève du niveau départemental. C'est même le coeur de la loi du 11 février 2005 qui a créé les MDPH, considérant que la proximité constituait un atout supplémentaire en faveur des départements, notamment en matière de suivi des personnes en situation de handicap.
À partir du moment où nous reconnaissons tous que la question de l'insertion professionnelle est le deuxième axe fondamental de la loi du 11 février 2005, on a du mal à comprendre pourquoi l'échelon départemental, qui précisément permettait de mettre en musique les acteurs du service public de l'emploi et de les diverses politiques, a été subitement supprimé. Avec cette suppression, nous nous retrouvons au niveau régional, dont il faut bien reconnaître que la proximité est moindre. Nous pourrons peut-être y entendre de grandes déclarations, mais il manquera ce qui faisait sans doute la spécificité des plans départementaux : l'adaptation à la réalité des bassins d'emplois des différents départements.
En tant que président de conseil général, j'ai eu à présider un PDITH : j'ai pu mesurer combien ces structures étaient importantes et combien les acteurs étaient mobilisés sur les territoires. Je ne parviens décidément pas à comprendre les véritables raisons pour lesquels on nous propose dans l'article 10 bis la régionalisation de la réflexion sur les politiques de l'accès à l'emploi des travailleurs handicapés.
(L'article 10 bis est adopté.)
Sur l'article 11, je suis saisi d'un amendement n° 63 rectifié .
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable.
Monsieur le président, si vous le voulez bien, je présenterai également l'amendement n° 74 .
L'article 11 vise à favoriser l'accès à l'emploi des personnes en situation de handicap.
Toutefois, nous ne partageons pas votre analyse quant à la nécessité d'associer les organismes de placement spécialisés dans l'ensemble de la chaîne de prise de décision en matière d'emploi.
Si, dans le cadre de leurs missions et de leur connaissance du territoire, les organismes de placement spécialisés vont pouvoir, en participant en tant que tels au service public de l'emploi, apporter une expertise utile sur l'emploi des travailleurs handicapés, en complémentarité de l'Association de gestion du fonds pour l'insertion des personnes handicapées, et du Fonds pour l'insertion des personnes handicapés dans la fonction publique, nous pensons néanmoins qu'associer les organismes de placement spécialisés à la déclinaison régionale de la convention pluriannuelle d'objectifs et de moyens n'est pas opportun.
En effet, cette convention prévoit les missions des différents acteurs, mais également les modalités de mise en oeuvre de l'activité de placement. Cela inclut la question du financement en contrepartie de l'accomplissement des missions. Les organismes de placement spécialisés seraient, en quelque sorte, juges et parties.
Si ces organismes doivent éventuellement être associés aux déclinaisons locales et régionales de la convention, ils ne doivent toutefois pas disposer de la possibilité de peser par le vote dans la prise d'une décision qui les concerne.
L'amendement n° 63 rectifié est, en quelque sorte, un amendement de précision. La commission y est favorable.
L'amendement n° 74 avait dans un premier temps été rejeté par la commission mais, après une analyse plus approfondie, il semble que le problème qu'il soulève est bien réel. J'émets donc un avis favorable.
Madame Amiable, comme le rapporteur, le Gouvernement est favorable aux deux amendements.
Vous avez raison : il n'appartient pas à des prestataires de participer à la fixation des objectifs et des priorités en matière de politique de l'emploi. En revanche, il est effectivement utile et même nécessaire de les consulter.
(L'amendement n° 63 rectifié est adopté.)
(L'amendement n° 74 est adopté.)
En conséquence, l'amendement n° 18 tombe.
(L'article 11, amendé, est adopté.)
Pardonnez-moi de revenir sur les articles précédents. D'un côté, l'article 11 crée dans le code du travail une section intitulée « Pilotage des politiques en faveur de l'emploi des personnes handicapés », où tout le travail sera réalisé au niveau départemental, avec la signature d'une convention d'objectifs entre l'État et le service public de l'emploi ; de l'autre côté, l'article 10 bis propose que l'insertion des personnes handicapées soit traitée au niveau d'un plan régional. Franchement, je ne perçois pas vraiment la logique de ces dispositions qui me paraissent contradictoires.
(L'article 11 bis est adopté.)
Monsieur le président, j'avoue tricher un peu, puisque je me suis inscrite sur l'article 12 afin de pouvoir évoquer l'article 13 dont la commission a maintenu la suppression par le Sénat.
Je regrette cette disparition. L'article 13 permettait que la prestation de compensation du handicap prenne en charge les aides humaines dès lors que ces dernières conditionnaient le maintien à domicile de la personne handicapée. Sa disparition prive d'aide ménagère un certain nombre de personnes handicapées restées à leur domicile.
(L'article 12 est adopté.)
Paul Jeanneteau, rapporteur. L'interdiction, édictée par le code du travail, d'usage de machines dangereuses par les jeunes travailleurs de moins de dix-huit ans fait l'objet de dérogations attachées à la qualité d'apprenti ou de jeune en formation professionnelle.
Les établissements médico-sociaux, comme les IME, les instituts médico-éducatifs, ou les ITEP, les instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques, pour les préparations à la vie professionnelle adaptées à leur public, mais également les établissements de la protection judiciaire de la jeunesse, ne relèvent pas de ce régime de dérogation.
Le I du présent amendement permet aux jeunes handicapés de bénéficier des mêmes mesures de protection de la santé et de la sécurité au travail que les jeunes élèves ou apprentis.
Le II permet d'éviter toute contradiction avec la directive européenne relative à la protection des jeunes au travail. Les actions de préformation, de formation et de préparation à la vie professionnelle sont ainsi identifiées comme contribuant à la formation professionnelle.
Ces dispositions permettront, par la suite, de procéder à une modification de l'article D. 4153-41 du code du travail en ouvrant les possibilités de dérogation aux jeunes handicapés ou aux jeunes présentant des difficultés d'adaptation.
Monsieur le rapporteur, le Gouvernement est particulièrement favorable à votre amendement. Il répond à un souci que les associations qui gèrent des établissements et des services pour les jeunes handicapés ont très souvent exprimé, et Mme Roselyne Bachelot et moi-même sommes très heureuses que vous ayez pris cette excellente initiative.
Pour leur formation professionnelle, certains jeunes handicapés ont besoin d'un accompagnement spécifique assuré par les établissements spécialisés tels que les IME, les IMPRO ou encore les ITEP. Dans le cadre des formations dispensées par ces établissements, il est indispensable que ces jeunes puissent utiliser certains outils et certaines machines dont ils auront plus tard l'usage dans l'univers professionnel qu'ils tentent d'intégrer – évidemment toutes les protections nécessaires doivent être prévues. Ces expériences sont irremplaçables pour assurer le niveau technique de ces jeunes ; elles favorisent leur employabilité et leur confiance en eux-mêmes.
Or on n'a pas pensé à eux lorsque l'on a édicté les règles relatives à la protection des jeunes travailleurs rien n'a été prévu pour eux. Aujourd'hui, ils sont donc, en quelque sorte, passés à la trappe.
Les établissements concernés souhaitent que ces jeunes puissent s'exercer au maniement de ces outils et de ces machines. En leur permettant de le faire, ils prennent actuellement un risque considérable et ils engagent leur responsabilité en cas d'accident. Les jeunes en question ne bénéficient ni des dispositions protectrices du code du travail en matière de santé au travail ni du contrôle de l'inspection du travail.
Monsieur le député, ces raisons nous ont poussées, Roselyne Bachelot et moi-même, à apporter notre soutien à votre amendement.
Je tiens à apporter mon soutien à l'amendement n° 38 , mais également à élargir le débat, car l'accès des apprentis mineurs aux machines dites dangereuses pose un vrai problème.
Le code du travail prévoit la possibilité de dérogations qui, dans les faits, ne sont pas accordées. Les différents services concernés – médecins scolaires, inspection du travail ou inspection académique –, se renvoient systématiquement la balle. En fait, personne ne veut assumer la responsabilité d'accorder une dérogation.
En 2008, j'avais saisi le ministre du travail et celui de l'éducation nationale. Ils m'avaient répondu qu'une réforme allait être mise en oeuvre. Je n'ai rien vu venir et les jeunes ont toujours autant de difficultés à obtenir des dérogations. Celles difficultés sont évidemment bien plus grandes pour les jeunes handicapés.
Si nous voulons développer l'apprentissage, il faut lever ce type de blocage.
Il faut savoir que la voie de l'apprentissage est aujourd'hui la meilleure façon d'intégrer le monde du travail. Le problème se pose pour tous les jeunes entre seize et dix-huit ans, notamment dans les métiers manuels. La plupart du temps, dans les entreprises, parce qu'ils ne peuvent pas accéder à beaucoup de machines, ils ne servent à rien si ce n'est à porter des cartons. On s'étonne, après, que les entreprises ne prennent pas de jeunes ! Pour les travaux manuels, et notamment les travaux en élévation, elles sont confrontées à un vrai problème de recrutement et de formation. C'est un vrai sujet, un sujet énorme, sur lequel il serait bon que Mme la ministre puisse nous apporter quelques réponses. À un moment donné, il faut bien prendre ses responsabilités pour intégrer au mieux nos jeunes dans le monde du travail.
La cadence à laquelle nous soumet M. le président nous empêche presque d'intervenir… À peine avons-nous le temps de nous retourner que l'examen de l'article est déjà achevé ! Je vais donc me permettre de dire un mot de l'article 12.
Je voudrais attirer l'attention sur une situation qui, en matière d'emploi, même si nous notons depuis tout à l'heure des améliorations, n'est quand même pas tout à fait satisfaisante. Il devrait y avoir une cohérence entre les acteurs du service public de l'emploi et les organismes qui remplissent des missions d'insertion. Des inquiétudes se sont exprimées quant aux budgets alloués et aux politiques menées.
J'ai sous les yeux deux tracts que vous connaissez sans doute. Le premier émane des CAP Emploi, qui rappellent les difficultés qui sont les leurs : au début de l'année 2011, ils n'avaient toujours pas connaissance du budget dont ils allaient pouvoir bénéficier, alors que les objectifs de placements ont été définis en novembre 2010. On voit bien qu'il est nécessaire de mettre en oeuvre des mesures de sécurisation, afin que ces politiques dont tout le monde parle soient assurées.
Le second est signé par l'APF, l'APAJH, la CFPSAA, la FNATH, l'UNAPEI et l'UNISDA, qui dénoncent les mesures prises par Pôle Emploi. Son titre est relativement évocateur : « Pôle Emploi réduit l'emploi des travailleurs handicapés en charpie ». À l'évidence, il y a là des mesures qui méritent d'être regardées de près.
Ce que nous disions tout à l'heure à propos des plans régionaux commence malheureusement à se vérifier. Lorsqu'il n'y a plus un lieu de proximité dans lequel peuvent être débattues les politiques publiques de l'emploi, lorsqu'il n'y a plus un lieu dans lequel peut être mise en avant la question de la mobilisation des différents acteurs de l'insertion professionnelle des personnes en situation de handicap, les hiatus qui sont ici dénoncés ne peuvent que se produire.
Mesdames les ministres, je sais que vous connaissez ces éléments, mais je voudrais alerter sur les difficultés qui nous remontent du terrain, et sur la nécessité d'une cohérence et d'une cohésion entre Pôle Emploi, d'une part, et les organismes qui participent au placement et à l'accompagnement des personnes en situation de handicap dans les processus de professionnalisation et de reconnaissance professionnelle, d'autre part.
Dans cette période de crise extrêmement difficile, un très bon travail a été fait, qui a porté ses fruits : la progression du chômage – bien sûr toujours trop forte au regard des situations de détresse individuelle – a été deux fois moins importante chez les personnes en situation de handicap que chez les personnes valides. Cela démontre la qualité des prises en charge dans ce domaine.
Vous l'avez rappelé, monsieur Sirugue, Pôle Emploi et CAP Emploi sont liés par une relation de co-traitance, qui permet d'assurer une complémentarité pour l'accompagnement des personnes en situation de handicap. Or, chaque année, le flux de co-traitance était fixé à 70 000 emplois. En 2011, Pôle Emploi avait envisagé un flux de 64 000, en raison de considérations budgétaires. Pour des raisons évidentes, cette proposition a bien sûr rencontré l'opposition de CAP Emploi et de l'AGEFIPH, ainsi que des associations, qui réclament à juste titre le rétablissement d'un flux de 70 000 emplois. Nous sommes en train de négocier avec Pôle Emploi le retour aux objectifs initialement prévus, c'est-à-dire 70 000 accompagnements. Cette précision devrait être de nature à vous rassurer, monsieur Sirugue.
Je vous remercie, madame la ministre, pour cette précision effectivement intéressante.
J'ajoute que le nombre des travailleurs handicapés a augmenté de 2 % par rapport à la situation qui justifiait l'objectif de 70 000 emplois. Autrement dit, non seulement Pôle Emploi a retenu l'objectif de 64 000 emplois mais, qui plus est, le chiffre de référence a augmenté. Autrement dit, même si l'on en revient à 70 000 accompagnements, le différentiel sera négatif par rapport à la situation antérieure.
Je sais que le contexte est tel qu'il est difficile de mobiliser des moyens. J'entends bien cet argument. Mais au-delà des chiffres, sur lesquels vous avez apporté des précisions qui sont en effet rassurantes, je voudrais quand même insister sur un motif d'inquiétude : la relation entre Pôle Emploi et CAP Emploi, c'est-à-dire entre le service public de l'emploi et ceux qui sont chargés d'accompagner les personnes en situation de handicap, devrait être beaucoup plus proche. Ces décisions ont été prises unilatéralement. Je ne crois pas que cela témoigne d'un bon état d'esprit, qui aille dans le sens de l'objectif que nous partageons tous, celui d'accompagner les personnes en situation de handicap dans l'emploi.
Monsieur Sirugue, la ministre Roselyne Bachelot vous a répondu sur les négociations que nous sommes en train de mener en vue de revenir à ce qui nous semble être, bien que ce ne soit pas un terme tout à fait approprié, la « norme », dans cette relation entre Pôle Emploi et CAP Emploi, en tout cas en volume.
Pour ma part, je voudrais attirer votre attention sur le fait que dans ce débat sur les échelons, et notamment sur l'échelon régional, la dimension de la formation professionnelle, en particulier pour ce qui concerne les travailleurs handicapés, n'est pas tout à fait négligeable.
Alors même que, sur ces sujets, nous nous acheminons vers une approche de droit commun, il me semble qu'il faudra regarder attentivement la part que les régions consacrent spécifiquement aux travailleurs handicapés. Je vous demande de croire, monsieur Sirugue, parce que je l'ai constaté, qu'il y a une singulière disproportion entre ce que j'appellerai les meilleurs élèves de la classe et ceux qui tardent à comprendre qu'investir dans la formation de nos compatriotes handicapés, c'est investir au bout du compte dans l'emploi de ces personnes.
Je crains que M. Tardy n'ait pas eu la réponse à la question qu'il avait posée…
J'aurais aimé avoir une réponse sur le problème des machines dangereuses.
Monsieur le député, il me semble que l'amendement du rapporteur répond à une partie de votre question. Par contre, pour ce que j'appellerai les jeunes « ordinaires » – pardon de cette expression, mais dans la politique du handicap, c'est le terme que l'on emploie –, vous comprendrez que nous ne soyons pas fondés à vous répondre et à intervenir sur ce registre.
Je tenais tout de même à avoir votre avis.
(L'amendement n° 38 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 19 portant article additionnel après l'article 12 bis.
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.
Nous proposons qu'un rapport sur l'évaluation de la prestation de compensation du handicap soit présenté et transmis au Parlement avant le 30 juin 2011.
La prestation de compensation pour les personnes en situation de handicap, créée par la loi du 11 février 2005, comprend les aides humaines, les aides techniques, l'aménagement du logement et du véhicule, les aides relatives à l'entretien de produits liés aux handicaps ou aux aides animalières.
Six ans après le vote de la loi, il s'agit d'effectuer une analyse de la mise en oeuvre de ce dispositif depuis sa création.
Défavorable, parce que PLFSS après PLFSS, les rapporteurs des deux assemblées donnent un avis sur l'évolution de l'APCH. Ils sont aidés en cela par les rapports de la CNSA et ceux de l'IGAS. Il semble inutile d'ajouter un nouveau rapport.
Même avis.
(L'amendement n° 19 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 39 rectifié .
La parole est à M. Paul Jeanneteau, rapporteur.
Amendement rédactionnel.
(L'amendement n° 39 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 12 ter, amendé, est adopté.)
Nous en venons à l'examen de l'article 14 bis.
La parole est à M. Guy Malherbe, inscrit sur l'article.
Avec l'article 14 bis, nous abordons un sujet important. La loi de 2005 a posé le principe de l'accessibilité généralisée des bâtiments publics pour les personnes handicapées. Cela concerne aussi bien les bâtiments neufs que les bâtiments anciens. Il faut confirmer ce progrès, qui est extraordinaire. Il doit être préservé, de même que le calendrier dont cette disposition était assortie. Pour les bâtiments publics, c'est absolument nécessaire ; il n'y a pas de discussion possible.
S'agissant des logements en revanche, nous rencontrons quelques difficultés. Tous les immeubles doivent-ils être rendus accessibles ? Faut-il que tous les appartements le soient aussi, qu'ils soient situés au rez-de-chaussée ou à tous les étages ? Faut-il soumettre aux mêmes normes et contraintes l'ensemble des étages ? C'est vraiment une question que l'on peut se poser, et que les bailleurs sociaux eux-mêmes nous posent.
Je prends l'exemple de ma commune. Nous sommes en train de livrer vingt-quatre logements sociaux, dans un bâtiment tout neuf. Les personnes sont en train d'en prendre possession. Des familles avec de jeunes enfants sont extrêmement étonnées de découvrir des couloirs très larges, des salles de bain sans baignoire, des toilettes adaptées aux personnes handicapées. Par contre, il n'y a pas de cuisine : ce sont des cuisines américaines, parce qu'il a fallu rester, évidemment, dans l'enveloppe budgétaire assignée au logement. Les normes des couloirs, des salles de bain, des commodités sont telles les autres pièces sont réduites d'autant. Au lieu de baignoire, il n'y a qu'une douche, ce qui n'est guère pratique lorsqu'on a des enfants en bas âge. Les interphones sont à la portée des personnes handicapées en fauteuil roulant, mais ils sont aussi, du coup, à la portée des enfants en bas âge, d'où des problèmes de sécurité. Bon nombre de ces nouveaux locataires, totalement surpris, n'ont pas manqué de m'interpeller : « Monsieur le maire, qu'est-ce que cela signifie ? »
Même les bailleurs sociaux, tout en reconnaissant qu'il faut certes prendre en compte les exigences de l'habitat adapté aux personnes handicapées, posent la question : tous les logements d'un même immeuble doivent-ils être accessibles aux personnes handicapées ?
Certes, ce débat ne nous permettra peut-être pas d'aller jusqu'au bout de la réflexion, mais il faudrait peut-être, comme l'a dit le président de la commission, que nous en discutions avec le secrétariat d'État au logement en vue de trouver un compromis entre les normes d'accessibilité et celles qui conviennent à des personnes qui ne sont pas handicapées. Naturellement, il faut préserver l'accessibilité des logements pour les personnes handicapées, mais il faudrait peut-être trouver aussi un équilibre, s'agissant des normes.
Nous en arrivons, avec cet article 14 bis, au point dur du texte. Nous répétons que cet article n'est pas acceptable dans un texte censé apporter des améliorations en matière de politique du handicap – ce qu'il fait d'ailleurs plutôt bien dans sa première partie, relative aux maisons départementales des personnes handicapées. Aussi en demanderons-nous la suppression.
Cet article est choquant dans la mesure où il remet en cause l'esprit même de la loi du 11 février 2005. Si nous admettons que des difficultés se présentent sur certains immeubles anciens – en tant qu'élus, nous pouvons le constater dans nos communes et nos départements –, ce qui justifie certains assouplissements, il ne nous paraît pas concevable de revenir, six ans après, sur les dispositions qui ont permis de faire prendre conscience à nos concitoyens de l'importance des aménagements visant à améliorer l'accessibilité.
On peut toujours trouver des justifications, mais il y a, sur ces questions, des responsabilités à prendre et à assumer.
Comme je l'ai déjà dit en commission, il y a une contradiction entre, d'une part, les discours que l'on nous tient continuellement, lors des débats relatifs à la question de la dépendance, sur la nécessité d'aménager la cité et les logements – et, d'une façon générale, la nécessité d'améliorer les conditions de vie des habitants – et, d'autre part, la proposition qui nous est faite aujourd'hui de revenir sur les avancées du texte du 11 février 2005, puisque tel est bien l'objectif de cet article 14 bis.
Vraiment, quel dommage ! Ainsi, la poussée vertueuse qui s'est manifestée tout au long de nos débats sur ce texte vient finalement s'échouer sur un article 14 bis d'une hypocrisie sans nom.
J'ose espérer que cet article n'a pas pour objectif de remettre en cause l'accessibilité. Rassurez-moi !
J'ai bien entendu ce que vous disiez, mes chers collègues : vous vous êtes demandé combien cela coûte !
Je parle d'un autre de vos collègues.
Au demeurant, la question peut se poser. Mais les surcoûts justifient-ils que l'on adopte un article qui revient sur des engagements remontant à 1975 ? J'ai relu les débats de 1975 : on y évoquait déjà le nécessaire effort à accomplir en matière d'accessibilité pour les personnes en situation de handicap. Près de quarante ans plus tard, certains avancent des arguments grotesques censés nous convaincre de renoncer à l'accessibilité ! Alors que nous sommes capables d'aller sur la lune, nous ne serions pas capables de construire, sur notre territoire, des bâtiments accessibles ? De qui se moque-t-on ?
Si l'application des normes dans les bâtiments constitue un vrai problème qui mérite que nous en débattions,…
…le fait que l'accessibilité entraîne systématiquement des surcoûts est plus discutable : nombre de surcoûts facturés par les maîtres d'ouvrage me paraissent injustifiés. Nous pouvons en débattre, mais il faut nous garder d'ouvrir une brèche dans l'application systématique du principe d'accessibilité des bâtiments neufs. Contrairement à ce qu'affirme l'article 14 bis, vous ne trouverez personne pour attester qu'il existe des contraintes techniques ou, pire, des usages qui rendraient impossible l'accessibilité des bâtiments neufs. Le prétendre, c'est prendre les gens pour des ânes ! Mes chers collègues, si nous pouvons avoir un débat légitime sur les surcoûts, qui permettrait peut-être de trouver quelques réponses dans ce domaine, ce débat ne doit pas partir sur des bases erronées.
Enfin, notre collègue Malherbe a soutenu que si tous les bâtiments publics devaient être accessibles, tous les logements n'avaient pas forcément à l'être. Qu'est-ce que cela signifie ? Qu'une personne handicapée qui voudrait rendre visite à un ami habitant dans un logement neuf, mais non accessible, n'a pas le droit d'aller le voir ?
Si une personne handicapée veut aller voir ses parents, vivant dans un immeuble n'ayant pas fait l'objet d'aménagements d'accessibilité, elle doit y renoncer !
Si l'on suit votre raisonnement, les personnes handicapées devraient habiter dans les seuls immeubles rendus accessibles…
…et uniquement au rez-de-chaussée, car permettre l'accessibilité à tous les étages reviendrait trop cher ! Mais quelle société êtes-vous en train de nous proposer ?
Où est le choix de vie, où est le projet de vie pour les personnes handicapées ? Où sont les éléments dont on nous rebat les oreilles – à juste titre – depuis la loi de 1975, confirmée et renforcée par la loi de 2005 ?
Mes chers collègues, je pense très sincèrement qu'il y a un vrai risque à vouloir traiter de l'accessibilité uniquement sous l'angle du coût : c'est ouvrir une brèche dans laquelle s'engouffreront ceux qui manqueront pas d'argument pour expliquer que l'on ne peut rendre accessibles tous les bâtiments neufs ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Comme mes collègues, j'estime que l'on ne doit pas revenir sur le principe d'accessibilité. La commission des affaires sociales a entamé une série d'auditions sur la question de la dépendance, ou plutôt de la perte d'autonomie. Sans doute, en effet, faut-il repenser l'urbanisme, repenser notre mode d'organisation de la ville.
Si nous avons pris l'habitude, et même le réflexe, d'aménager la ville pour la rendre plus accessible aux enfants, nous devrons également, à un moment donné, faire en sorte de la rendre accessible aux personnes dépendantes, aux personnes âgées ou en situation de handicap. Revenir sur la loi de 2005 et sur l'accessibilité reviendrait à adresser un signal très négatif en préambule des travaux législatifs que j'ai évoqués.
Est-il utile de préciser que les députés communistes, républicains et du Parti de gauche sont fermement opposés à toute mesure qui aurait pour effet de renforcer les dérogations aux règles en matière d'accessibilité du bâti ?
Les personnes en situation de handicap sont chaque jour les victimes d'un sur-handicap majeur : il leur est impossible de se loger où elles le souhaitent, de se déplacer comme elles le voudraient – d'être, tout simplement, des citoyens comme les autres.
Cet article est la marque du renoncement à l'éradication des discriminations envers les personnes en situation de handicap, une disposition incompréhensible alors même qu'un pourcentage non négligeable de nos concitoyens se trouve dans cette situation et que l'âge moyen de la population augmente régulièrement, entraînant mécaniquement un accroissement du nombre de personnes – souvent des anciens – confrontées au handicap et aux discriminations qui l'accompagnent.
Comment peut-on prévoir une telle mesure dans un texte sur les politiques du handicap ? C'est, en tout cas, un très mauvais signal envoyé à des personnes souvent confrontées à des situations humiliantes : une porte non adaptée, un escalier pour tout accès, etc. Vous inscrivez dans la loi une violence sociale muette qui n'est pas acceptable.
Il est indispensable, pour les personnes en situation de handicap, mais aussi pour les familles et pour les personnes âgées, de créer et de promouvoir des équipements, des architectures, des environnements simples d'emploi et adaptés au maximum d'utilisateurs. C'est au prix de cet effort collectif, qui, je le dis, repose très clairement sur un choix de société, que nous permettrons à chacune et à chacun de trouver pleinement sa place. Mes chers collègues, l'article 14 bis, s'il était maintenu, constituerait un signal très négatif.
Pour éviter que notre pays, qui a déjà pris beaucoup de retard par rapport aux efforts faits depuis parfois des décennies par nos partenaires européens, ne devienne l'un des plus mauvais élèves de l'Union européenne, nous proposons la suppression de cet article.
La loi de 2005 a prévu l'adaptabilité de 100 % des logements neufs, sans distinguer entre l'habitat permanent, qui n'est pas l'objet de mon propos, et l'habitat temporaire ou saisonnier. Le principe d'adaptabilité trouve tout son sens dans l'habitat permanent, dans la mesure où il permet à une personne en situation de handicap de s'installer où elle le souhaite. Il est plus contestable pour des logements temporaires, où l'essentiel est de garantir l'accès à la prestation, ce qui passe par un nombre suffisant non de logements adaptables, mais de logements adaptés dès l'origine.
Les associations, je le sais, ne sont pas unanimes sur ce point, mais peut-être devrait-on écouter l'Association nationale pour l'intégration des handicapés moteurs – pourtant à l'origine du recours devant le Conseil d'État qui nous pose problème aujourd'hui. Cette association a déclaré que « la notion d'adaptabilité, qui consiste, le cas échéant, à adapter un appartement par de petits travaux, n'a pas de sens dans le contexte d'une location saisonnière où d'évidence une politique de quotas de logements adaptés d'origine est la seule solution pertinente », étant entendu que « l'accès depuis la voirie, tous les services et circulations communes soient accessibles et qu'un certain nombre de chaque type d'appartements proposé soit, d'origine, adaptés ».
La situation actuelle est, il faut le dire, insatisfaisante pour tout le monde. L'adaptabilité à 100 % impose un accroissement des surfaces, donc des coûts. Pour en limiter l'impact, les opérateurs sont contraints de proposer des surfaces mal réparties, des cloisons mobiles, etc. Au final, les logements adaptables sont, pour les personnes handicapées, moins pratiques que des logements réellement adaptés – et, pour le reste de la clientèle, moins pratiques que des appartements classiques.
Mais la question cruciale est celle du coût. J'ai entendu dire qu'on ne pouvait objectiver les surcoûts et que, dès lors, il était inutile de prévoir des règles spécifiques à ce sujet. Je préfère croire qu'il s'agit d'une plaisanterie ou d'une mauvaise analyse. Ces coûts ne sont pas liés à des équipements particuliers, dont la généralisation ferait baisser les prix, mais au nombre de mètres carrés supplémentaires nécessaires, ne serait-ce que pour les pièces d'eau ou la circulation. Or chaque mètre carré supplémentaire a bien un coût fixe.
J'ai aussi entendu dire que la prise en compte de l'accessibilité dès la conception limiterait ces surcoûts. L'argument ne tient pas : les résidences de tourisme ont déjà l'obligation d'accessibilité, la conception universelle est déjà prise en compte et ne générera pas d'économies. Enfin, on ne peut compenser l'augmentation de surface des pièces d'eau par une réduction des surfaces d'habitation : la clientèle ne veut plus de studios-cabines !
Le surcoût lié à la surface est parfaitement objectif. Au vu de projets en cours, on peut l'évaluer à cinq à sept mètres carrés supplémentaires par appartement, soit 12 000 à 17 000 euros ! Par le seul effet « surface », le coût d'un projet en cours en Savoie augmenterait de près de trois millions, c'est-à-dire de 10 %, ce qui reviendrait à condamner ce projet !
Quant à l'autre solution, consistant à majorer les coûts de séjour, elle aboutirait à exclure toute une catégorie de la population, qui n'aurait plus les moyens de prendre des vacances.
Hier, dans la discussion générale, j'ai considéré que, conformément à l'esprit de la loi de 2005, qui a maintenant six ans, nous devions nous appuyer sur deux piliers : un premier pilier qui tourne autour de l'humain et des moyens – et la proposition de loi que nous examinons conforte le fonctionnement des MDPH, les conditions d'attribution des prestations aux personnes en situation de handicap et le niveau de ces prestations –, et un deuxième pilier, réglementaire et normatif, qui concerne le bâti.
Par mes contacts avec les élus des territoires, j'ai pu constater que, dans la réalité de son application, cette loi pose de gros problèmes à tous les acteurs, au-delà même des questions de coûts ou de délais. Il est de notre responsabilité de faire preuve de lucidité et de réalisme, et de profiter de l'occasion que nous offre cette proposition de loi pour travailler sur la question des normes et des règlements en matière de bâti. Nous le savons, il faut distinguer les constructions neuves du patrimoine bâti à restructurer et à rénover. Nous serions bien inspirés de fixer une clause de revoyure en 2014, afin de préparer 2015 en dressant un état des lieux qui, vous le verrez, nous surprendra tous.
C'est tout le sens d'un amendement que vous propose le groupe Nouveau Centre, mais je soutiendrai toute démarche qui fera preuve de pragmatisme et de réalisme. L'excellente et ambitieuse loi de 2005 a placé la barre très haut, et il nous sera difficile de respecter l'échéance.
Madame la ministre, madame la secrétaire d'État, pour l'essentiel, ce texte important nous rassemble sur l'essentiel : améliorer la situation des personnes handicapées. Avec le rapporteur, vous avez rappelé que vous aviez le souci d'améliorer à la fois le fonctionnement des maisons départementales et d'en assurer le financement. Il a beaucoup été question de l'intégration des personnes handicapées et de leur dignité. Je fais miens les objectifs du Gouvernement et soutiens chacun des aspects de la proposition de loi, sauf en ce qui concerne cet article 14 bis qui, me semble-t-il, représente un mauvais signal en matière d'accessibilité.
L'accessibilité est une exigence. Elle a un coût, et il faut en parler, mais je ne voudrais pas que cet article vienne parasiter le message de l'intégration des personnes handicapées. Il faudra également, madame la ministre, adapter les logements à l'accueil des personnes âgées, et nous devons y penser en discutant de l'accessibilité des logements anciens. Je vous rejoins donc parfaitement en ce qui concerne l'esprit du texte et ses objectifs, mais j'exprime des réserves sur les effets que cet amendement pourrait entraîner sur l'accessibilité dans le parc ancien.
Nous sommes tous d'accord pour reconnaître que la loi de 2005 a marqué des progrès remarquables et que l'accessibilité doit être un principe intangible. Mais il n'en faut pas moins être réaliste. Dans l'article 14 bis, il n'est pas question de dérogation, mais, comme l'ont dit certains de nos collègues, il faut parfois savoir s'adapter à la réalité. Il est très facile d'avoir de grands principes. Pardonnez-moi, chers collègues de l'opposition, de rappeler que c'est notre majorité qui a pris l'initiative de cette proposition de loi. Nous sommes aujourd'hui confrontés à des difficultés d'application. Nous serions sans doute mal inspirés de nous montrer trop intransigeants. Pour ma part, je ne soutiendrai pas les amendements de suppression de l'article 14 bis.
Ce point est en effet très important et mérite que nous nous y attardions un moment. L'accessibilité, ce n'est pas simplement une question technique : c'est un outil majeur de citoyenneté. Le concept d'accessibilité dépasse largement cet aspect technique. Les principes qui ont été inscrits au fronton de la loi de 2005 sont absolument irréfragables. La lecture que nous proposons à travers le texte équilibré qui vient du Sénat ne remet nullement en cause la notion d'accessibilité. À aucun moment il n'est question de dérogations à la loi de 2005, pas plus dans l'ancien que dans le neuf – je remercie Michel Bouvard de l'avoir dit. Il ne s'agit donc à aucun moment d'exonérer un promoteur des obligations liées à l'accessibilité en
lui permettant de contourner la loi, mais de lui donner la possibilité de parvenir à l'accessibilité par d'autres moyens, notamment grâce à des mesures de substitution.
Pour dissiper toute équivoque, il convient d'expliquer ce que sont ces mesures de substitution. Elles ne s'appuient pas sur des considérations financières, mais sur des considérations techniques. Le promoteur doit être à même de prouver qu'il se heurte à une contrainte technique insurmontable pour respecter l'ensemble des normes d'accessibilité prescrites. Vous avouerez que, en ce qui concerne le neuf, le champ de cette mesure est extrêmement restreint.
Je m'interroge sur les arguments financiers qu'avancent les uns ou les autres, et je me demande si nous ne manquons pas quelquefois d'intelligence collective. Je suis sûre qu'on peut résoudre cette question dans une stratégie gagnant-gagnant. Je veux vous en donner deux exemples. Un élu m'a raconté l'histoire de l'inauguration d'une école : le bâtiment avait été construit de plain-pied et, pour respecter les normes d'accessibilité, une rampe et un escalier avaient été prévus ; mais, curieusement, au moment de pénétrer dans l'école, tout le monde a pris le plan incliné, beaucoup plus confortable. Pourquoi construire un plan incliné et des escaliers ? C'est absurde. Ce que l'on fait pour les personnes handicapées est beaucoup plus confortable.
Par ailleurs, faisant visiter sa salle à la commission d'accessibilité, le propriétaire d'un cinéma expliquait qu'il avait construit des toilettes pour personnes en situation de handicap et, au bout du couloir, d'autres toilettes ordinaires. On lui apprit qu'il aurait pu se contenter des toilettes pour personnes en situation de handicap, qui conviennent à tout le monde et sont même beaucoup plus confortables.
Notre lecture des normes d'accessibilité est parfois totalement grotesque. Soyons simples, intelligents : c'est ce à quoi je vous invite, pour faire un monde vivable. J'entends que, dans des cas extrêmement restreints, on ne puisse absolument pas respecter certaines normes, et c'est pour cela que je veux mettre de l'huile dans les rouages. Mais toutes les garanties doivent être prises pour encadrer le recours à ces mesures de substitution. Le décret qui prévoit ce recours sera pris après avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées. Chaque demande individuelle devra faire l'objet d'un avis préalable et conforme de la commission départementale d'accessibilité et de sécurité. Avec le texte issu des travaux du Sénat et qui prévoit l'ouverture de la possibilité de substitution encadrée – contrainte technique insurmontable, prouvée par le promoteur – et avec le décret pris après avis du CNCPH, il me semble que nous pourrions trouver une solution équilibrée.
Je m'engage par ailleurs, au nom du Gouvernement, à ce que la concertation se poursuive avec les représentants des personnes handicapées sous l'égide du secrétaire général du comité interministériel du handicap pour parfaire ce nouveau dispositif juridique et garantir ainsi la primauté du respect des règles d'accessibilité dans la construction.
Je vous signale que nous avons confié à un trio – composé du vice-président du Conseil général de l'environnement et du développement durable, du chef de service de l'inspection générale des affaires sociales et du chef de service du contrôle général économique et financier – une mission visant à évaluer les impossibilités techniques et à définir la nature des mesures de substitution, sans remettre en cause le concept d'accessibilité. C'est dans ce cadre-là, cher Michel Bouvard, que nous examinerons la question des résidences temporaires de tourisme et des possibilités que vous évoquez.
Voilà ce que je souhaitais dire pour apaiser notre débat. Non, les règles d'accessibilité ne sont pas mises en cause : elles restent un principe irréfragable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
Je souhaiterais répondre à Christophe Sirugue, qui m'a interpellé hier soir. En commission, je m'étais posé une question que nous soumettent en permanence tant les élus que les familles, et qui concerne les conséquences que peuvent avoir certaines contraintes et l'insatisfaction que cela entraîne. Je m'étais d'autre part interrogé sur la situation qui prévaut chez nos voisins européens, me demandant s'ils avaient des contraintes différentes des nôtres. Hier soir, j'ai écouté Bérengère Poletti et Christophe Sirugue, et je suis très sensible à leurs arguments, par exemple à l'idée qu'une personne handicapée doit pouvoir se rendre dans un autre appartement que le sien et y être reçue dans les mêmes conditions. Bérengère Poletti m'a appris, d'autre part, que certains constructeurs proposent à de jeunes familles qui ne disposent que de 53 mètres carrés des solutions pour rentabiliser l'espace.
Il n'en est pas moins vrai que, chaque semaine, nous sommes interpellés par des élus locaux à propos de la multiplication des contraintes et de l'augmentation des coûts.
Je constate en outre que le coût du logement a bien plus augmenté en France que chez nos voisins européens. Nous devons donc être au rendez-vous.
En matière d'urbanisme, il existe 142 sigles différents, et les contraintes sont de plus en plus lourdes. Alors, peut-on concilier l'objectif défendu par Bérengère Poletti, par un certain nombre de nos collègues, dont Christophe Sirugue, et par Mme la ministre, avec ces complexités dont le nombre et le coût vont croissant, à rebours de l'intérêt des familles ?
Pour cette raison, et après m'être interrogé en commission, je soutiens totalement cet article, au champ très limité, adapté à des circonstances réellement exceptionnelles. Accédons aux demandes des familles et des associations d'handicapés, mais, de grâce, faisons preuve de pragmatisme, eu égard au poids des normes dans la société française.
Tout d'abord, je tiens à dire que je souscris en tous points à l'intervention de Roselyne Bachelot. Je tiens également à dire que le débat est utile, qu'il est nécessaire bien que difficile – ou, sans doute, parce que difficile.
La question de l'accessibilité ne saurait toutefois se résumer à une vision contrainte des choses. Elle est en effet l'un des principes intangibles de la loi du 11 février 2005. Pourquoi ? Parce que c'est par l'accessibilité, par la participation à l'ensemble des actes élémentaires de la vie en commun, que nous donnerons à nos concitoyens handicapés les moyens de leur citoyenneté.
Je veux dire à Michel Bouvard que, lorsque je me suis rendu dans sa circonscription et qu'il m'a fait essayer cet engin redoutable, empruntant des pistes vertigineuses à une allure terrifiante, j'ai tenté d'imaginer l'expérience vécue par une personne tétraplégique, solidement attachée, qui découvrirait ainsi le bonheur de faire du ski comme n'importe lequel de nos compatriotes. Mais à quoi sert-il de se donner des moyens aussi ambitieux, si la résidence située à côté de la piste ne permet pas à la personne d'être logée dans des conditions à la hauteur de cette ambition ?
Ce que notre échange a de regrettable, c'est que nous ne considérons l'accessibilité que sous l'angle des personnes en fauteuil.
Or, la question du handicap, c'est aussi celle du handicap sensoriel, celle du handicap mental, sans même parler de celle du handicap psychique. Se laisser enfermer dans un aspect partiel de la question, c'est se priver de cette intelligence collective dont parle si bien Roselyne Bachelot et que vient d'évoquer le président Méhaignerie, c'est se priver du confort d'usage nécessaire, qui est l'esprit de la loi du 11 février 2005. À la veille du débat sur la dépendance et sur la capacité de notre société à maintenir à ses aînés des conditions de vie ordinaires, il y aurait quelque ironie à renoncer à ce principe.
Le débat est possible. L'article 14 bis, qui nous vient du Sénat, propose un équilibre intéressant, car il permet la réflexion,…
…mais il la restreint à des conditions techniques savamment pesées, sous le contrôle du CNCPH, des associations, des préfets – bref, en laissant la contrainte à sa juste place.
Le débat est indispensable. N'en ayons pas peur, adaptons les choses, mais sans jamais renoncer aux principes ni à l'esprit. Telle est la démarche dont participe le texte qui vous est soumis ce soir.
Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 1 , 20 , 46 et 69 , tendant à supprimer l'article 14 bis.
Sur ces amendements, je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l'amendement n° 1 .
Vos explications et vos définitions des procédures de substitution m'ont vivement intéressée, madame la ministre. Que nous puissions avoir ce débat, tous ensemble, sur un sujet aussi important, au confluent des contraintes économiques et de la nécessité d'ouvrir notre société aux personnes les plus fragiles, est très enrichissant.
Je ne suis pas favorable, à titre personnel, à un retour en arrière en matière d'accessibilité dans le neuf. Je considère, moi aussi, que ce serait un signal négatif, et que l'adaptation de l'espace aux personnes handicapées est profitable à tous : profitable aux parents de jeunes enfants ; profitable aux personnes âgées qui, de plus en plus nombreuses, auront besoin d'être logées de la meilleure manière ; profitable à nous tous. Très honnêtement, je préfère prendre ma douche dans une cabine à l'italienne que de sauter dans une baignoire. Je ne suis d'ailleurs pas sûre que nous ayons encore, dans vingt ans, des baignoires dans nos logements : l'avenir, tant du point de vue de la mobilité que de celui de l'environnement, est plutôt à la douche italienne.
Le cerveau humain n'est jamais aussi inventif que lorsqu'il y est contraint. Puisque les constructeurs cherchent à faire des économies, qu'ils s'intéressent donc aux normes des constructions ! On en parle depuis des années et des années, mais pourquoi cela n'aboutit-il pas ? Pourquoi n'arrive-t-on pas à asseoir autour d'une même table les architectes, les constructeurs, les bailleurs, les politiques, pour définir des normes permettant dès le départ de bâtir des constructions qui seront source d'économies ? Acheter une porte hors standards coûte effectivement très cher ; si l'on construit, dès le départ, des portes qui seront les mêmes pour tout le monde, on fera des économies substantielles, et je ne cite là qu'un exemple.
Ce que je redoute, c'est que nous nous exonérions, par dispositif, de toutes ces réflexions et que nous empêchions ainsi l'imagination humaine de chercher et de trouver des solutions, d'aller vers la modernité.
C'est la raison pour laquelle j'ai déposé cet amendement de suppression. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour soutenir l'amendement n° 20 .
J'ai bien entendu les plaidoyers de Mme la ministre et de Mme la secrétaire d'État. On a beau tourner le problème dans tous les sens, les dérogations existent dans l'ancien, et l'article L. 111-7-1 du code de la construction et de l'habitation a trait aux seuls logements neufs. Alors que, dans la France entière, des architectes sont en train d'imaginer – et pas seulement pour les personnes en situation de handicap, car nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à y aspirer – des logements aussi adaptables, aussi ouverts, aussi faciles à personnaliser que possible, on veut nous faire croire que certains éléments, dont on n'arrive d'ailleurs même pas à nous citer d'exemples, justifient que l'on ouvre, par la loi, une brèche dans le principe de l'accessibilité.
Au-delà de ce problème, la convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées, dont notre pays est signataire et dont j'ai ici le texte, stipule que les États signataires doivent garantir aux personnes handicapées la liberté de choix nécessaire à la vie en société et prendre les mesures appropriées pour leur assurer la pleine jouissance de ce droit. Elles doivent en particulier avoir la même liberté de choix de leur lieu de résidence et de leur voisinage que les autres personnes, sans être obligées de vivre dans un milieu particulier.
Vous êtes donc en train de nous proposer un dispositif qui contrevient aux textes internationaux que nous avons ratifiés, et ce sans oser dire que ce ne sont pas les contraintes techniques d'accessibilité qui font problème – comme vient de le rappeler fort judicieusement Bérengère Poletti.
Madame la secrétaire d'État, j'ai ici les propos que vous avez tenus lors de l'examen de la loi du 11 février 2005. Je n'aurai pas l'outrecuidance de vous les rappeler, car vous auriez du mal à nous expliquer votre position d'aujourd'hui, vous qui aviez bataillé à l'époque – y compris contre vos propres amis politiques – en faveur des dispositions sur l'accessibilité inscrites dans cette loi. Vos propos d'alors sont l'exact contraire de ceux que vous venez de tenir. Ce n'est pas crédible. Je ne sais pas ce qui s'est passé pour que vous soyez obligée de vous exprimer ainsi. S'il le faut, lors des explications de vote, je vous citerai, et chacun pourra constater que vous aviez répondu par avance à tous les arguments entendus aujourd'hui.
Mes chers collègues, il s'agit d'un débat de société, qui porte non seulement sur les personnes handicapées, mais aussi sur les personnes âgées dépendantes et sur notre capacité à nous doter d'un environnement permettant à chacun de vivre dignement.
C'est pour cela que nous sommes favorables à la suppression de cet article,…
Force est de constater que, sans s'être concertés, Mme Poletti, l'ensemble du groupe GDR et l'ensemble du groupe SRC réclament la suppression de cet article, en se fondant sur les mêmes arguments. Tout le monde dit en effet la même chose : l'accessibilité sert à tout le monde, et j'ai apprécié, moi aussi, l'expression de Mme la ministre, qui la qualifiait d'« outil majeur de citoyenneté ». C'est très beau, madame la ministre, mais il faut aller jusqu'au bout. Certains nous taxent d'irréalisme ou de manque de lucidité ; pour ma part, je crains plutôt que la brèche ouverte ne nous fasse sombrer dans le renoncement. Ne mettons pas le pied dans la porte, n'ouvrons pas de brèche, supprimons cet article qui n'apporte rien.
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable, pour soutenir l'amendement n° 69 .
Nous sommes totalement opposés à l'article 14 bis. Vous nous parlez de mesures de substitution, d'assouplissements, mais c'est à la fois un recul et un très mauvais signal, et nos concitoyens le vivront ainsi.
Vous nous parlez de citoyenneté, de droit et d'autonomie, mais vous nous proposez le contraire. Comment expliquer que, dans les logements et bâtiments neufs, l'on ne puisse pas, avec tous les moyens qui sont à notre disposition, trouver des solutions techniques ?
La technique n'est qu'un faux prétexte. Elle a bon dos, la technique ! Nous figurons parmi les plus mauvais élèves de l'Europe, et nous n'avons aucun intérêt à adopter cet article. Je le redis, ce serait adresser un très mauvais signal, non seulement aux associations d'handicapés, mais encore à toute la société, à tous nos concitoyens.
Défavorable. Sans reprendre l'exposé développé, précis et clair de nos deux ministres, je soulignerai que le texte adopté par le Sénat est un texte équilibré. Pourquoi ? Parce qu'il propose d'encadrer le dispositif de quatre façons, particulièrement pertinentes et que je ne détaillerai pas.
Je reviendrai simplement sur la notion de substitution. J'ai entendu Mme Poursinoff parler de dérogations, mais c'est bien le mot « substitution » qui figure dans le texte. Les mots ont leur importance. Je lis dans le grand Robert la définition du mot « dérogation » : modification, abrogation, suppression. Je cite maintenant la définition du mot « substitution » : action de substituer, de remplacer par autre chose, changement. Ce n'est pas du tout la même chose, monsieur Sirugue ! L'article 14 bis ne propose pas de déroger, mais de substituer en cas d'impossibilité technique.
C'est pour cette raison que, moi qui suis très attaché à l'accessibilité – comme nombre d'entre vous ici –, je voterai l'article 14 bis.
Je trouve très touchant que des gens qui n'ont pas voté la loi de 2005 et qui s'y sont même opposés deviennent de véritables militants de cette loi ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Nous y sommes, avec Marie-Anne Montchamp, extrêmement sensibles ! Comme disait l'autre, il y a plus de joie dans le ciel pour un pécheur qui se repent ! (Sourires.)
Avec cette disposition, nous comblons un vide juridique, suite à l'annulation d'un décret en Conseil d'État qui prévoyait des dérogations et avait été accepté à l'unanimité par le Conseil national consultatif des personnes handicapées, lequel trouvait recevable l'idée qu'il puisse y avoir des dérogations.
Aujourd'hui, nous proposons une démarche pragmatique sans renoncer en rien au concept d'accessibilité ni, par conséquent, à celui de citoyenneté. Je vous invite donc, mesdames et messieurs les députés, à voter contre cet amendement de suppression et à respecter le texte équilibré qui vous est soumis.
Madame la ministre, on peut être pour les objectifs poursuivis par une loi et contester la technique et les règles contenues dans cette loi. Il n'y a donc pas contradiction, dès lors que l'on adhère aux mêmes objectifs.
Le temps viendra où nous n'aurons plus besoin de la loi pour que les personnes handicapées, quel que soit leur handicap, aient toute leur place dans la société, car chacune et chacun de nos concitoyens la leur reconnaîtra. Mais, pour l'instant, tel n'est pas le cas ; c'est pourquoi il faut une loi et des règles.
Nos collègues ont eu raison d'affirmer qu'en matière de construction de logements neufs, la possibilité de prendre des mesures de substitution vient entamer la force de la norme. Le secrétaire d'État chargé du logement prépare actuellement quatre ordonnances portant réforme du droit de l'urbanisme et de la construction. Demandez-lui de faire ce que vous évoquiez tout à l'heure, et faites en sorte que les ordonnances qui nous seront soumises avant la fin de l'année comportent des éléments venant modifier les normes !
Par ailleurs, monsieur Méhaignerie, il est faux de considérer que, dans la construction, c'est l'habitat qui coûte le plus cher. En France, c'est le foncier qui coûte le plus cher.
Enfin, l'ingénierie de construction de notre pays, qui est la meilleure au monde, peut faire face à toutes les difficultés grâce à la compétence des urbanistes et des architectes.
Cela étant, le jour où le budget de l'État viendra aider à l'aménagement particulier des logements destinés aux handicapés, nous aurons gagné la partie. Car, aujourd'hui, un bailleur social ne bénéficie d'aucun financement spécifique pour la construction de logements adaptés aux personnes handicapées. Là est le vrai scandale !
C'est pourquoi nous demandons la suppression de l'article 14 bis.
Monsieur le président, je voudrais préciser ma réflexion, que mon collègue Sirugue n'a pas bien comprise, sans doute parce que je n'ai pas été assez clair.
Il n'est pas question pour moi d'empêcher les personnes handicapées d'accéder à des immeubles. Elles ont, bien sûr, le droit de rendre visite à leurs amis ; les immeubles doivent donc être accessibles aux personnes handicapées. J'ai simplement voulu dire que ce qui faisait problème était le logement dans sa partie privative. Je vous parle de mon expérience de maire : aujourd'hui, je livre des logements sociaux répondant aux normes d'accessibilité pour personnes handicapées, mais qui ne sont pas adaptés à des familles « ordinaires », lesquelles sont insatisfaites.
C'est pourquoi je ne suis pas tout à fait d'accord avec l'exemple donné tout à l'heure par Mme la ministre. Dans une école ou une salle de cinéma, on peut effectivement utiliser les équipements prévus pour les personnes handicapées. Mais, aujourd'hui, les logements conçus pour des handicapés ne répondent pas aux normes prévues pour des familles « ordinaires », qui ne comprennent pas que leur soient livrés des logements qui ne leur sont pas adaptés.
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable, pour soutenir l'amendement n° 67 .
Il est défendu.
(L'amendement n° 67 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Au risque d'être caricaturé comme manquant de solidarité envers les handicapés, j'ai déposé, avec plusieurs de mes collègues, cet amendement qui a pour objectif de traduire dans les faits la problématique pour les résidences de tourisme. Nous considérons en effet que l'impossibilité technique ne doit pas être la seule prise en compte, mais qu'il s'agit d'un problème général.
Marie-Anne Montchamp a évoqué le séjour qu'elle avait fait en Savoie. Pour ma part, je ne demande pas qu'il y ait 100 % de logements accessibles aux handicapés dans toutes les résidences de tourisme de toutes les stations alpines. Ce qui m'importe, c'est qu'il y en ait dans chaque résidence de tourisme, et ce dans une proportion suffisante. Au lieu de devoir subventionner un surcoût de 3 millions pour chaque village, je préfère que nous ayons les moyens d'aménager le domaine skiable et d'acheter des matériels permettant d'ouvrir la montagne aux handicapés. C'est ce que nous faisons depuis huit ans dans les Alpes ; aujourd'hui, la moitié des stations alpines sont accessibles pour ce qui est des domaines skiables. Nous avons mis au point des matériels, aidé à créer des entreprises qui se sont spécialisées, nous avons adapté les remontées mécaniques. Le jour où l'on nous demandera des subventions pour boucler les tours de table sur les résidences neuves parce qu'il faudra 100 % des logements, ce sera autant d'argent en moins pour l'aménagement des activités sportives et des loisirs pour les handicapés car, en la matière, il n'y a aucune obligation légale. Voilà l'enjeu du débat ! Nous préconisons des quotas par résidence.
Dans les résidences de tourisme à la montagne, un quota de 5 % de logements accessibles dans chaque catégorie de logement serait suffisant, étant donné qu'il y a 1 à 2 % de handicapés parmi ceux qui fréquentent les stations de sports d'hiver. J'ai entendu dire que nous étions le plus mauvais élève d'Europe. Avec un taux de 5 %, nous serions le meilleur élève : en Suisse, 4 % des chambres sont accessibles aux personnes à mobilité réduite, il en est de même en Allemagne et en Autriche, tandis qu'en Espagne le taux varie entre 1 et 1,33 % selon le nombre de chambres…
…et qu'en Italie il n'y a aucune contrainte.
Par conséquent, je ne vois pas l'intérêt d'imposer que, dans une résidence de tourisme, 100 % des logements soient accessibles aux handicapés. Ce ne sont pas des logements que l'on achète pour les occuper toute sa vie : ce sont des appartements dont on vous donne la clé pour la durée de votre séjour.
Défavorable. L'ajout par le Sénat de l'adjectif « technique » vise précisément à limiter les cas de substitution.
Je répondrai sur les trois amendements de M. Bouvard, car ils procèdent de la même logique.
Si j'émets un avis favorable à l'amendement n° 4 , je lui demanderai, en revanche, de bien vouloir retirer l'amendement n° 2 qui étend la notion à des contraintes qui ne seraient pas techniques.
En matière de bâtiments neufs, les contraintes liées à la préservation du patrimoine architectural ne peuvent, par définition, être retenues. Quant aux contraintes liées au coût des travaux, elles doivent inviter le promoteur à tenir compte de ces difficultés dans l'équilibre économique de son projet, comme il le fait pour nombre d'autres critères, en particulier le plan d'occupation des sols, les normes environnementales ou de protection contre les risques d'inondation ou d'incendie.
Quant à l'amendement n° 3 , je vous demanderai également, monsieur Bouvard, de bien vouloir le retirer. La crainte que vous exprimez est à mon avis excessive. Les préfets suivent, dans la très grande majorité des cas, l'avis des commissions, et cela ne conduit pas pour autant les membres de celles-ci à une opposition frontale.
La question posée par Michel Bouvard mérite que l'on s'y arrête, car nous oublions trop souvent, lorsque nous votons des textes, l'économie touristique et ses particularités. Ce fut le cas pour la loi de 2005. J'ai déposé un amendement en ce sens, ainsi que plusieurs de nos collègues, mais nous y reviendrons dans quelques instants.
L'économie touristique, c'est 6 % du PIB et 2 millions d'emplois directs et indirects. Il va de soi que les infrastructures touristiques doivent être accessibles à tous, y compris aux personnes handicapées. Nous en sommes tous conscients, notamment les maires de communes touristiques qui sont ici ce soir. Cela étant, on ne peut pas appliquer les textes de la même façon à des résidences de tourisme et à l'habitat ordinaire.
Ce que propose Michel Bouvard est empreint de pragmatisme et frappé au coin du bon sens, et mérite sans aucun doute d'être soutenu. Il est plus que temps d'adapter la loi de 2005 à l'économie touristique, qui constitue un pan important de notre économie et à laquelle nous devons être attentifs.
Je n'en reviens pas que Mme la ministre puisse accepter l'amendement n°4 ! Cette fois, la brèche est grand ouverte ! Vous ne pouvez pas nous dire, madame la ministre, que l'article 14 bis est équilibré après l'ajout du Sénat, et accepter un amendement visant à compléter l'alinéa 2 de ce même article par les mots : « de l'activité qui y est exercée ou de sa destination », sans que l'on puisse dire quoi que ce soit de l'activité ou de la destination. !
C'est le texte du Sénat !
Vous ajoutez un amendement qui vient en réalité compléter l'article 14 bis… C'est incroyable !
C'est l'amendement de M. Bouvard, qui complète l'article 14 bis. Je lis le texte de l'amendement : « Compléter l'alinéa 2 par les mots : « de l'activité qui y est exercée ou de sa destination ». »
Autrement dit, après le débat que nous avons eu sur l'article 14 bis tel que rédigé par notre commission, vous proposez maintenant d'ouvrir la possibilité de nouvelles mesures de substitution, dans le cadre de la construction neuve, en y ajoutant des éléments indéfinissables tels que « l'activité qui y est exercée ou de sa destination » – laquelle ? On l'ignore !
Mais que signifient ces mots ? Qu'est-ce qu'ils sous-tendent ? Je suis, pour ma part, estomaqué ! Ce ne sont, en effet, absolument plus les prudences mentionnées par Mme la ministre ! Je voudrais dire à mes collègues, qui expriment des revendications que j'entends, que nous devons travailler à modifier le logiciel de conception des logements afin d'éviter des incohérences, comme cela a été indiqué par certains d'entre nous. Travaillons avec des architectes, des urbanistes, à une conception différente des logements ! Avec ce que vous nous proposez, la brèche est ouverte. L'accessibilité n'est plus qu'un mot !
M. Sirugue est particulièrement de mauvaise foi quand il parle de mon argumentation.
En effet, toute mon argumentation liminaire a consisté à dire que le texte issu du Sénat était équilibré. Or, l'amendement n° 4 tend à revenir intégralement à la rédaction du Sénat, qu'a modifiée un amendement du rapporteur. Je ne tiens pas un double langage !
Sans doute n'avez-vous pas alors lu les textes ! L'amendement n° 4 de Michel Bouvard, que je vous invite à voter, restitue le texte du Sénat ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Évitez ce genre d'arguments, madame la ministre : j'ai travaillé sur ce sujet autant que vous !
Alors, évitez de me mettre en cause !
Je reprendrai à mon compte les amendements présentés par mon collègue Michel Bouvard, et dont je suis cosignataire. Je suis quelque peu inspiré par mon expérience professionnelle et mes responsabilités associatives dans le domaine de la petite hôtellerie indépendante, mais aussi dans celui du tourisme associatif et social. L'objectif de ces amendements n'est pas de multiplier les dérogations pour des motifs techniques, mais de limiter l'obligation d'accessibilité totale. C'est totalement différent, et ce que vous venez d'exprimer est donc faux. Cette sollicitation concerne, d'ailleurs, essentiellement les équipements d'accueil temporaire ou saisonnier.
Comprenons-nous bien : il ne s'agit pas de prévoir des dérogations pour l'habitat permanent, comme cela a été répété à plusieurs reprises, mais simplement de faciliter l'accueil d'une clientèle plus importante de personnes à mobilité réduite dans les équipements saisonniers. Nous pourrons ainsi continuer à investir en faveur de ces personnes et de celles souffrant d'un handicap particulier. Dès lors que la réglementation actuelle n'est pas totalement satisfaisante, il n'est pas honteux de vouloir y déroger. C'est qu'une simple question de bon sens. J'apprécie l'intervention de Mme la ministre, qui nous a fait une proposition tout à fait acceptable et à laquelle je me range.
Compte tenu de la position de Mme la ministre sur l'amendement n° 4 et considérant qu'il s'agit non de l'habitat, mais d'activités touristiques et de loisirs,…
Afin, justement, d'éviter les dérapages, je propose, par cet amendement, de préciser qu'il s'agit de logements destinés à l'occupation temporaire ou saisonnière dont la gestion et l'entretien sont organisés et assurés de façon permanente, la fixation des quotas nécessaires étant renvoyée à des dispositions réglementaires.
La parole est à M. Jean-Marie Binetruy, pour présenter le sous-amendement n° 76 .
Ce sous-amendement de précision rend la rédaction de M. Michel Bouvard un peu plus positive.
En effet, l'amendement précise les conditions dans lesquelles les mesures de substitution peuvent être prises afin de répondre aux exigences de mise en accessibilité. Par ce sous-amendement, je propose qu'un décret en Conseil d'État fixe les exigences relatives à l'accessibilité prévues à l'article L. 117-7 et aux prestations que ceux-ci doivent fournir aux personnes handicapées.
L'amendement et le sous-amendement tendent à revenir sur la situation créée, comme l'a dit Mme la ministre, par l'annulation par le Conseil d'État du décret de 2006, lequel permettait aux résidences de tourisme de bénéficier des normes d'accessibilité propres aux établissements recevant du public.
Je tiens également à revenir sur les précédents propos de Michel Bouvard. Le fait que, dans une résidence de tourisme, tous les appartements ne soient pas obligatoirement rendus accessibles, permet de réaliser des économies sur le coût des séjours, sur l'immobilier ainsi que sur le chauffage et la viabilisation.
Nous avons évoqué, concernant le quota, un pourcentage de 5 %. Il reviendra au décret de le préciser.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement et le sous-amendement ?
Nous pouvons entendre les motivations de leurs auteurs. À titre personnel, j'y serai toutefois défavorable, pour des raisons tenant à la méthode. Définir un quota ne peut évidemment se faire sans une large concertation entre le secteur concerné et les associations représentatives des personnes handicapées. Or, cette concertation n'a, à l'évidence, pas eu lieu.
Hier soir, en réponse aux orateurs inscrits dans la discussion générale, Mme Bachelot a indiqué – et elle vient de le rappeler – qu'elle avait confié une mission sur ce sujet au vice-président du conseil général de l'environnement, au chef de l'IGAS et à celui du Contrôle général économique et financier. Il me semblerait plus pertinent d'attendre les conclusions de cette mission avant de voter. Je considère en effet, mais c'est un avis tout à fait personnel, que nous avons une fâcheuse tendance à légiférer avant même d'avoir connaissance des rapports diligentés sur le sujet
Sagesse !
J'ai bien entendu, tout à l'heure, notre collègue qui, se targuant de son expérience dans la petite hôtellerie, nous a expliqué qu'il entendait pouvoir déroger – pour reprendre son terme – aux règles d'accessibilité. Si nous avions besoin d'une illustration de ce que nous craignions, nous en avons maintenant la démonstration !
L'amendement n° 34 est encore pire, car il concerne les résidences de tourisme, lesquelles, selon leurs configurations, seront considérées comme des établissements recevant du public. Ainsi, après l'avoir fait pour le logement, vous vous attaquez à l'accessibilité des établissements recevant du public !
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Mais non !
Ah, mais tout est spécifique ! M. Bouvard vient de préciser qu'il s'agit d'établissements recevant du public. Donc, non seulement cette mesure s'appliquera au logement, mais elle concernera également les établissements recevant du public. Je ne sais pas comment cela va se terminer !
La parole est à M. Patrice Calméjane, pour soutenir l'amendement n° 47 .
Nous proposons de compléter l'alinéa L. 111-7-3 du code de la construction et de l'habitation par un alinéa ainsi rédigé : « Au sein des structures relevant de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, dans la mesure où l'établissement remplit un seuil minimum des obligations fixées par la réglementation en vigueur sur l'accessibilité, des dérogations sont automatiquement accordées si la structure apporte la preuve de la présence d'une aide humaine qualifiée et formée à l'accompagnement des personnes handicapées. Ce seuil minimum est fixé par un arrêté du ministre chargé des questions relatives à la politique du handicap, après avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées. »
Le principe d'accessibilité est, d'ores et déjà, une réalité dans la très grande majorité des établissements et services médico-sociaux. Contrairement à de nombreux autres établissements recevant du public, ces structures, de par leur nature, sont équipées pour accueillir toutes les personnes en situation de handicap, notamment physique, visuel et auditif : elles disposent de couloirs et portes larges pour faciliter la circulation de fauteuils roulants ; des mains courantes sont généralement installées ; les chambres sont prévues pour permettre la circulation de fauteuils ; les cabinets d'aisance sont équipés de barres d'appui latérales ; la signalétique est adaptée aux déficiences visuelles et auditives. Cependant, une grande majorité de ces établissements ne répond pas à l'intégralité des normes d'accessibilité généralisée définies par la loi du 11 février 2005 et le décret du 17 mai 2006. Par conséquent, la mise aux normes complète de ces établissements engendrera un coût important, soit pour les autorités de tarification – conseils généraux, assurance maladie, État –, soit directement pour les usagers de ces établissements, dont le reste à charge est très souvent dénoncé comme insuffisant. En effet, la diversité des avis des commissions départementales consultatives de la protection civile, de la sécurité et de l'accessibilité ne peut avoir pour conséquence d'impacter différemment le reste à charge des usagers sur le territoire national.
Ainsi, l'adoption de cet amendement permettra « l'accès de tous à tout » sans grever de façon importante les finances des autorités de tarification ni le reste à charge des usagers des quelque 30 000 établissements médico-sociaux existants sur le territoire national.
Elle a repoussé cet amendement. Je ne pense pas que l'on puisse exonérer certains établissements de leur obligation d'accessibilité au motif que des aides humaines sont apportées.
Défavorable pour les mêmes raisons.
Nous mesurons désormais où nous conduisent ces amendements, et celui-ci en particulier. Ainsi, il sera possible de s'exonérer de la mise aux normes d'accessibilité des établissements médico-sociaux, entre autres, dans lesquels des personnels accompagnent les personnes en situation de handicap. Avec une telle disposition, une personne handicapée sera désormais de nouveau dépendante de la personne qui l'accompagne, alors que nous avions progressé dans ce domaine et que nous étions parvenus à faire accepter l'idée selon laquelle une personne handicapée peut, grâce à un environnement aménagé, être autonome et vivre comme vous et moi !
Je ne sais pas si vous mesurez bien la portée d'une telle mesure. J'ai dirigé un établissement médico-social, j'ai travaillé avec des enfants et des adolescents pendant des années. Si l'on avait raisonné ainsi, où seraient-ils aujourd'hui ? Nous prenions en considération leur situation personnelle, nous considérions qu'ils devaient pouvoir évoluer et participer comme les autres sans avoir tout le temps quelqu'un à leurs côtés, même s'il est nécessaire qu'ils aient des personnels proches d'eux.
Avec cet amendement, nous sommes en train de reculer et d'enlever de l'ordre du jour tout ce qui a permis d'avancer ces dernières années.
Vous allez vraiment très loin, chers collègues de l'UMP ! Je ne sais pas si tout le monde a bien lu l'amendement que vous proposez : si la structure apporte la preuve de la présence d'une aide humaine qualifiée et formée à l'accompagnement des personnes handicapées, des dérogations seront automatiquement accordées ! C'est purement inacceptable. Vous remettez en cause le droit à la dignité de ces personnes, le droit à leur autonomie, à leur citoyenneté.
Mesdames les ministres, faites quelque chose ! Vous ne pouvez pas laisser passer un tel amendement.
J'ai émis un avis défavorable !
Essayez de les convaincre. C'est l'article 14 bis qui a ouvert la voie à ce type de propositions.
Cela n'a rien à voir !
J'en appelle à votre vigilance à tous, car c'est un amendement inacceptable.
Je suis membre de l'UMP et je suis fière de ce que nous avons fait en 2005. Nous avons élaboré une grande loi, considérablement amélioré les conditions de vie des personnes handicapées, mis en place les MDPH.
Cela dit, je suis un peu désolée de ce qui se passe dans l'hémicycle et je vous appelle à la raison car, franchement, trop, c'est trop. Les bornes sont dépassées. Je vous demande d'être très attentifs à ce que nous allons voter et de ne pas aller trop loin, car vous risquez de perdre la fierté que vous éprouvez en voyant ce que vous avez fait pour les personnes handicapées.
Je suis absolument contre cet amendement, comme j'étais contre les précédents, mais j'aimerais, cette fois, pouvoir convaincre au moins une partie d'entre vous qu'il ne faut pas aller aussi loin. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR et sur quelques bancs du groupe UMP.)
Je suis un tout jeune député, je ne suis dans l'hémicycle que depuis deux mois, et je suis assez choqué de cette façon d'aborder les débats : il y a toujours le camp des vertueux d'un côté et les mauvais élèves de l'autre.
Je suis maire d'une ville qui a avec le handicap une très ancienne histoire commune. Les Papillons blancs y ont leur siège, et Lino Ventura, qui habitait la commune, y a créé Perce-Neige. Il n'y a pas d'un côté ceux qui savent, qui ont le monopole du coeur et, de l'autre, les méchants, qui n'ont aucune attention pour les autres.
Cette façon d'essayer systématiquement, sur tous les sujets, de cliver les positions de chacun, avec un manque réel de discernement… (Protestations sur les bancs du groupe SRC)
Si !
Cette façon, disais-je, est assez blessante, et éloignée du travail que chacun fait dans son métier, sa commune ou son territoire.
En l'occurrence, je rejoins l'avis du rapporteur et du Gouvernement et, même si j'ai voté pour les amendements précédents, je voterai contre celui-ci, mais je veux tout de même rappeler que chacun, quel que soit le banc sur lequel il siège dans cet hémicycle, est animé, dans son for intérieur et son intime conviction, de la même envie de contribuer au bien-être de son prochain et d'améliorer la situation que nous connaissons aujourd'hui. Alors, de grâce, trêve de sectarisme ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
Je tiens à confirmer que la commission a repoussé cet amendement, auquel le Gouvernement est défavorable. Si nous voulons permettre une intégration totale des personnes handicapées dans notre société, nous devons nous en donner les moyens. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
(L'amendement n° 47 n'est pas adopté.)
Il s'agit de tenir compte des difficultés rencontrées par les gestionnaires d'établissements recevant du public pour concilier les exigences d'accessibilité avec les contraintes matérielles insurmontables dans certains bâtiments existants.
Cela se vérifie surtout, je le répète, dans la petite hôtellerie indépendante et les équipements de tourisme social, dont la mission principale est d'accueillir tous les publics, en s'adaptant à la spécificité de chaque client. Ces opérateurs ont d'ailleurs fait suffisamment de très gros efforts dans ce domaine pour ne pas avoir de leçon à recevoir.
La proposition de loi privilégie la substitution par rapport à la dérogation, et c'était bien ainsi, mais elle ne résout pas totalement les contraintes parfois insurmontables dans des bâtiments existants, difficilement adaptables dans certains secteurs, d'où la précision que nous proposons, et qui répond précisément à l'esprit de la loi de 2005 en instituant une obligation d'objectifs et non de moyens.
Si nous ne prévoyons pas des mesures spécifiques pour certains bâtiments existants, de nombreux établissements hôteliers et centres de vacances risquent de fermer. De trop lourdes exigences risquent d'accélérer la vague de fermetures que l'on constate depuis quelques années, au détriment des publics les plus défavorisés. Ce sont ceux qui ont le moins d'argent, ceux qui se déplacent le plus difficilement, qui paient les pots cassés d'une règle un peu trop rigoureuse qui nous empêche d'aménager convenablement certains sites. Certains devront malheureusement fermer leurs portes, et même avant la fin de l'année si les contraintes demeurent aussi fortes.
La parole est à M. Daniel Fasquelle, pour défendre l'amendement n° 32 .
Nous avons voté un amendement extrêmement important pour les résidences de tourisme, mais pensons aussi à l'hôtellerie indépendante et aux centres de vacances. Cela représente 600 000 chambres en France, et nous en perdons actuellement une par jour. Si nous appliquons les normes de sécurité et les normes relatives au handicap telles qu'elles ont été conçues, sans les faire évoluer, nous devrions passer à trois chambres perdues chaque jour. C'est donc une question extrêmement sérieuse.
Si nous ne faisons rien, nous irons droit dans le mur et la France perdra des capacités hôtelières. Première destination touristique au monde, elle reculera au classement et nous perdrons de l'emploi partout, notamment en milieu rural, où les hôtels sont anciens et difficilement adaptables.
Face à une telle situation, nous pourrions demander des dérogations, mais nous demandons simplement des mesures de substitution. Dans certains cas, il n'y a pas d'autre choix possible, sous peine de devoir fermer l'établissement.
Ces mesures seront soumises à l'accord du préfet après avis de la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité. Nous demandons aussi que le groupe de dialogue prévu par les textes, et qui n'a pas fonctionné sur ce point, soit réactivé de façon à les préciser.
C'est un dispositif très encadré, très raisonnable, indispensable pour sauver l'hôtellerie française.
Défavorable, car ils visent à étendre au bâti existant le dispositif prévu à l'article 14 bis pour la construction neuve. Une telle extension n'est pas légitime, dans la mesure où la loi de 2005 prévoit déjà un certain nombre de dérogations pour le seul bâti existant.
Trois cas de dérogation sont prévus à l'article L. 111-7-2 du code de la construction et de l'habitation : l'impossibilité technique, les contraintes liées à la préservation du patrimoine architectural, la disproportion manifeste entre les améliorations apportées et leurs conséquences. Il n'est pas nécessaire d'aller plus loin.
Défavorable.
Les dispositions que vous proposez, monsieur Fasquelle, sont plus dures que la législation en vigueur. En voulant protéger l'hôtellerie existante, vous lui imposez en réalité des charges. Il existe déjà des possibilités de dérogation, et y ajouter des mesures de substitution ne ferait qu'alourdir la législation sans aucune coordination.
Les quotas existent également déjà, puisque l'obligation d'accessibilité ne vaut que pour une chambre sur vingt et une chambre supplémentaire par tranche de cinquante chambres.
Retirez donc cet amendement, contraire aux intérêts mêmes de ceux que vous voulez défendre !
J'aimerais que vous ayez raison, madame la ministre. Beaucoup de commissions départementales, malheureusement, ne respectent pas l'esprit de la loi et refusent tout. C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement.
S'il est voté, ce sera pire !
J'entends ce que vous dites, madame la ministre, et je veux bien retirer mon amendement, mais je demande que le groupe de dialogue soit rapidement relancé, que l'on se mette autour d'une table avec les représentants de l'hôtellerie, qui sont très inquiets, et que l'on travaille avec eux pour que les textes soient réellement appliqués.
(L'amendement n° 32 est retiré.)
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour soutenir l'amendement n° 25 .
Je reviens un instant sur la question de l'hôtellerie. Nous sommes tous conscients des problèmes, mais l'on ne peut indéfiniment considérer que c'est l'obligation d'aménager les locaux pour accueillir des personnes en situation de handicap qui en est la cause.
Notre amendement, quant à lui, tend à rendre accessibles les lieux de travail, car ce n'est pas toujours le cas. Le code de la construction et de l'habitation prévoit que les lieux doivent être accessibles aux personnes handicapées, mais ne donne pas davantage de précisions. Aucune disposition n'a donc pu être prise, faute de base législative suffisante.
En 2005, l'intention du législateur était évidemment de rendre accessibles les lieux de travail, qu'ils soient neufs ou existants, même si l'on peut prévoir des exigences différentes dans l'un et l'autre cas. Ils n'ont toutefois pas bénéficié à ce jour de cet apport majeur de la loi de 2005. C'est pourquoi nous proposons de donner la base législative suffisante à la publication d'un décret afin de régler le problème.
Comme je l'ai expliqué en commission, je n'ai pas la même analyse juridique que Mme Carrillon-Couvreur. Il me semble que l'article L. 111-7-2 concerne l'ensemble des bâtiments existants, y compris les lieux de travail, et constitue donc un fondement légal suffisant pour un éventuel décret. J'attends donc l'avis du Gouvernement.
Défavorable.
Je reviens sur ce que vous m'avez répondu, monsieur Fasquelle. Visiblement, il n'y a pas eu de concertation. La mission dont je vous ai parlé, dont les trois chefs seront le vice-président du Conseil général de l'environnement et du développement durable, le chef de l'Inspection générale des affaires sociales et celui du Contrôle général économique et financier, sera le lieu du dialogue que vous appelez de vos voeux. Elle réunira des professionnels du tourisme, des élus qui, comme vous, veulent concilier accessibilité et développement touristique, et des associations de personnes en situation de handicap pour dialoguer et trouver ensemble des solutions. Je retiens donc votre idée.
(L'amendement n° 25 n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour soutenir l'amendement n° 35 .
J'ai déposé cet amendement car je suis lasse des obstacles que, dans certaines villes, les architectes des Bâtiments de France opposent à la mise en accessibilité, s'agissant de travaux de réhabilitation du patrimoine ancien. En effet, s'agissant de réhabilitation, les ABF exigent la reproduction à l'identique, alors que ce patrimoine, hélas ! est souvent inaccessible, non seulement aux personnes handicapées, mais aussi aux personnes âgées et, parfois, à nous-mêmes.
Je citerai l'exemple de la place Ducale, chez moi, à Charleville-Mézières. C'est exactement la même place que la place des Vosges, si ce n'est qu'au lieu d'un jardin au milieu, s'y trouvent des pavés. La municipalité s'est fait signifier l'interdiction d'aménager sur la place des espaces où pourraient circuler des personnes en fauteuil roulant ou même des personnes âgées.
Moi-même, quand je porte des talons, j'évite de traverser la place Ducale. Cette place magnifique, totalement interdite aux personnes à mobilité réduite, devient un désert minéral et inhumain.
Je ne comprends pas pourquoi, lorsqu'il s'agit d'implanter une pyramide dans la cour du Louvre, on accepte d'introduire de la modernité dans un bâtiment historique alors que ce ne serait pas admissible quand il est question de rendre un espace accessible à tous nos concitoyens !
Je voudrais que nous bousculions les idées reçues, que nous essayions, tous ensemble, de comprendre ce qui se passe. J'ai donc déposé un amendement ; je ne sais pas si sa rédaction répond exactement à ma préoccupation, mais je souhaite que nous en discutions.
Je pense que c'est un vrai sujet de discussion. Je lance donc la balle dans le camp du Gouvernement : pourrait-il être traité dans le cadre de la mission ?
Je suis exactement dans la même situation que Mme Poletti. Toutefois, madame la ministre, si nous ne souhaitons pas surcharger la réglementation, il faut rappeler qu'il existe une possibilité d'appel devant le préfet de région.
Tout à fait !
Cette voie de recours n'est pas suffisamment mise en valeur. Peut-être les préfets pourraient-ils, avec votre soutien, permettre un tel aménagement.
Dans le cas qui me concerne, je sais que je serai critiqué par les personnes âgées comme par les personnes handicapées, et j'ai le sentiment d'être totalement impuissant. Je porte la responsabilité politique de cet état de fait, tandis que ceux qui décident ne la portent pas. C'est là un vrai problème, qui doit trouver sa solution dans l'appel devant le préfet de région.
Bérengère Poletti soulève un vrai problème. Tous ceux qui s'occupent de personnes en situation de handicap ont entendu les justes observations et le très grand mécontentement de ces associations, qui se plaignent des blocages résultant des ABF.
Nous avons donc réfléchi. Bérengère Poletti signale elle-même que son amendement est plutôt un amendement d'appel, et il est certain que sa rédaction soulève un certain nombre de difficultés.
Tout d'abord, il vise l'autorité administrative qui délivre les permis de construire, de démolir ou d'aménager, c'est-à-dire le maire dans la majorité des cas, et non l'architecte des bâtiments de France. Il manque donc son but.
Ensuite, il tend à lier la décision de l'autorité compétente en matière d'urbanisme en l'obligeant à faire prévaloir dans tous les cas l'avis de la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité. Or, le président Méhaignerie vient de rappeler quelque chose de très juste, et que l'on oublie souvent : il est possible de passer outre l'avis de l'ABF, il suffit pour cela de déposer un recours devant le préfet de région, dont l'avis, rendu après consultation de la commission régionale du patrimoine et des sites, se substituera éventuellement au sien. Il existe des voies de recours spécifiques, qui permettent au représentant de l'État dans la région d'articuler entre elles les différentes politiques publiques dans l'intérêt général.
Il y a aussi un vrai problème de formation des architectes, en particulier des ABF. Je crois qu'une autre culture s'impose : la conservation du patrimoine ne doit pas revenir à maintenir celui-ci sous une bulle en cristal. Il a connu des transformations tout au long des siècles ; pourquoi notre siècle ne pourrait-il réaliser certaines transformations qui rendraient ce patrimoine accessible aux personnes en situation de handicap ? N'est-ce pas aussi notre responsabilité ?
Je crois, madame Poletti, que ce que vous préconisez pourrait tout à fait s'inscrire dans la réflexion engagée au sein de la mission, et en constituera même un chapitre particulièrement bienvenu. Au bénéfice de cet engagement, accepteriez-vous de retirer votre amendement ?
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable, pour soutenir l'amendement n° 68 .
L'objet de cet amendement est d'empêcher la participation des collectivités publiques à tout projet de construction, d'extension ou de transformation d'un bâtiment d'habitation, d'un établissement recevant du public ou d'une installation ouverte au public, qui ne respecterait pas le principe d'accessibilité.
(L'amendement n° 68 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour soutenir l'amendement, n° 28 , portant article additionnel après l'article 14 ter.
Il s'agit de modifier les dispositions prévues concernant les projets expérimentaux, les transformations de services ou les initiatives prises par les associations ou les promoteurs dans le cadre d'un projet innovant.
Aujourd'hui, ces réalisations doivent faire l'objet d'un appel à projets, ce qui complique les choses. Jusqu'alors, les promoteurs contactaient en amont les financeurs et les décideurs publics, après quoi s'établissait un dialogue sur les modalités concrètes ; les établissements, structures ou unités d'accueil pouvaient être mis en place à titre expérimental. La notion d'appel à projets alourdit la procédure.
Défavorable. L'amendement revient sur une disposition de la loi « Hôpital, patients, santé, territoires », ce qui n'est nullement l'objet de la présente proposition de loi.
(L'amendement n° 28 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour soutenir l'amendement n° 21 .
Nous demandons la présentation au Parlement d'un rapport sur les conditions d'attribution du complément de ressources et de la majoration pour la vie autonome, ce qui permettrait d'examiner la situation des personnes concernées par ces dispositifs.
(L'amendement n° 21 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi de deux amendements, nos 22 et 61 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour soutenir l'amendement n° 22 .
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable, pour soutenir l'amendement n° 61 rectifié .
Nous considérons, vous le savez, que les aides et les prestations sociales devraient être individualisées. Comme nous ne pouvons pas formuler de proposition en ce sens du fait de l'article 40 de la Constitution, nous demandons qu'un rapport soit consacré à cette question.
(Les amendements nos 22 et 61 rectifié , repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
La parole est à Mme Martine Pinville, pour soutenir l'amendement n° 23 .
Il s'agit d'un sujet déjà abordé à plusieurs reprises, et que j'ai évoqué dans la discussion générale : les auxiliaires de vie scolaire. Nous souhaitons que soit élaboré un rapport, c'est-à-dire, surtout, une évaluation.
Les maisons départementales des personnes handicapés attribuent des heures, en fonction de la demande, pour des enfants en situation de handicap. L'inspection, dans certains cas, recrute. Aucun bilan n'a toutefois été publié, de sorte que nous ne connaissons pas l'étendue de cet accompagnement – inexistant dans certains cas. Il serait souhaitable que nous disposions d'un tel rapport, y compris sur les modalités d'intégration des auxiliaires de vie scolaire dans un corps de fonctionnaires.
Défavorable.
C'est un sujet extrêmement important. Hier soir, Mme la ministre a expliqué que l'action du Gouvernement avait permis de mieux accueillir les enfants handicapés dans nos écoles et que le nombre de postes avait augmenté. C'est un point très positif.
Mais il est également nécessaire de professionnaliser cette activité et de l'encadrer par un véritable statut. J'ai vécu le problème dans ma circonscription : une auxiliaire de vie scolaire développe avec l'enfant qu'elle suit et avec l'équipe pédagogique une relation particulière, mais elle doit souvent quitter l'école en milieu d'année pour des questions de statut, ce qui déstabilise l'équipe pédagogique et l'enfant.
C'est un sujet sur lequel nous devons avancer à tout prix. Je ne sais pas s'il faut un rapport de plus ; il en existe déjà un grand nombre. En revanche, dans le cadre de la Conférence nationale du handicap, au mois de juin, nous pourrions ajouter un chapitre consacré à cette question très importante.
(L'amendement n° 23 n'est pas adopté.)
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 75 à l'article 14 quater.
Il s'agit de tenir compte du résultat des discussions qui ont eu lieu, depuis l'examen du texte en commission, entre les éditeurs et les associations de défense des droits des personnes malvoyantes.
(L'amendement n° 75 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
En conséquence, l'article 14 quater est ainsi rédigé.
La parole est à Mme la ministre.
Je tiens à remercier l'ensemble de l'Assemblée nationale, les députés qui ont participé à ce débat, en particulier votre rapporteur Paul Jeanneteau, le président Pierre Méhaignerie, ainsi que tous les orateurs des groupes. Quelle que soit son appartenance sur ces bancs, chacun a participé à ce débat avec beaucoup de coeur, de conviction et, souvent, de militantisme. Les personnes en situation de handicap, qui souhaitent accéder à une pleine citoyenneté, méritaient un débat de cette qualité.
Au titre des explications de vote, la parole est à M. Christophe Sirugue, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ce devait être une belle discussion, avec des avancées significatives sur les structures des maisons départementales – confortées –, sur le problème récurrent des relations financières – aujourd'hui clarifiées par des conventions d'objectifs –, sur la question des personnels, qui méritait assurément d'être abordée autrement, afin que les gens restent plus longtemps en poste et subissent moins de fluctuations. Malheureusement, l'introduction de l'article 14 bis est venue altérer la position positive qui aurait pu être la nôtre – je le dis sincèrement – sur cette proposition de loi.
Pire, le débat qui vient de se dérouler a ouvert non plus des brèches, mais, hélas, de véritables entailles dans le principe d'accessibilité, notamment par le vote de l'amendement qui permet aux établissements recevant du public de bénéficier d'une souplesse considérablement accrue.
C'est une faute, une faute politique, qui mérite d'être qualifiée comme telle dans cette enceinte.
Dès lors, mes chers collègues, puisque vous avez décidé de vous affranchir des textes internationaux dont nous sommes signataires, puisque vous avez décidé que les intérêts particuliers devaient primer sur l'intérêt général – je note d'ailleurs que les auteurs des amendements en question ont disparu de l'hémicycle dès qu'ils ont été adoptés –,…
…nous ne pouvons évidemment pas vous suivre sur ce texte. Nous voterons donc contre la proposition de loi.
La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission, chers collègues, les associations oeuvrant en faveur des handicapés avaient fondé beaucoup d'espoirs dans cette proposition de loi. Si elle apporte des améliorations, on peut toutefois conclure aujourd'hui qu'elle ne tient pas ses promesses.
En effet, le texte a été amputé en cours de route de son article 13, qui prévoyait enfin la concrétisation d'un des principaux objectifs de la loi du 11 février 2005, à savoir un dispositif de compensation intégrale du handicap. Pire, cette proposition de loi, présentée par la majorité UMP et soutenue par le Gouvernement, a été le prétexte pour intégrer, à l'article 14 bis, un très large assouplissement des exigences d'accessibilité pour les nouvelles constructions, ce qui consiste à revenir sur la possibilité donnée à tous les citoyens qui en ont besoin – les personnes en situation de handicap, mais aussi les personnes âgées – de bénéficier des mêmes droits que les autres citoyens. Nous venons d'en débattre longuement.
Pour ces raisons, pour la régression majeure contenue à l'article 14 bis, les députés communistes, républicains, du parti de gauche et verts voteront contre cette proposition de loi.
Nous considérons que ce texte conforte la loi de 2005 sur plusieurs points.
Il conforte notamment les modalités de versement de l'allocation d'adulte handicapé et de la prestation de compensation du handicap. En outre, il fixe et précise les modalités de fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées, et atténuera les lourdeurs administrative. Je note, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, que vous avez apporté des garanties quant aux moyens financiers pour résoudre les retards de paiement frappent les MDPH, et c'est très important. La loi stabilisera les personnels dans leur statut, les conditions de mise à disposition des agents étant précisées. De plus, la loi favorisera l'insertion et l'accès à l'emploi des personnes en situation de handicap.
En 2004, je le rappelle, 134 000 enfants étaient accueillis par l'éducation nationale ; ils sont aujourd'hui 200 000. Je veux aussi rappeler que 57 000 enfants font l'objet d'accompagnements individuels.
Reste la question de l'accessibilité, qui a suscité et suscite de vrais débats. Nous considérons que l'article 14 bis fait preuve de mesure car il s'agit de mesures de substitution et non de dérogations. Contrairement à ce qui vient d'être dit, il n'ouvre pas de brèche dans laquelle tout le monde pourrait s'engouffrer. Nous, centristes, sommes très sensibles aux trois garde-fous prévus dans la loi : l'avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées, l'avis de la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité, l'accord du préfet.
Tous ces éléments nous conduisent à soutenir et à voter cette loi.
La parole est à M. Jean-Marie Binetruy, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Je salue la richesse des débats sur ce texte, pour lequel la représentation nationale a pris le temps nécessaire à un examen attentif. J'en profite pour saluer la patience des représentants des associations qui ont assisté aux débats depuis hier.
Nos débats nous ont donné l'occasion de faire un retour sur cette belle loi de 2005, et de la préciser. À cet égard, nous devons avoir une pensée pour nos collègues du Sénat, notamment Paul Blanc qui est à l'origine de cette proposition de loi. Je salue également l'engagement des membres du Gouvernement, en particulier de Mme Bachelot-Narquin qui, malgré son extinction de voix, a su se faire entendre et comprendre (Sourires), ainsi que l'engagement et la compétence de l'excellent rapporteurPaul Jeanneteau, avec lequel nous travaillons depuis deux ans sur le budget de la solidarité.
Je ne reprendrai pas tous les points de cette loi. Un point important est la stabilisation des personnels et l'équilibre financier que le Gouvernement apportera aux maisons départementales des personnes handicapées dans le projet de loi de finances pour 2011.
Je dois dire que j'ai été surpris par la véhémence avec laquelle nos collègues de l'opposition (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC) ont défendu une loi qu'ils n'avaient pas votée, même quand il s'agissait des dispositions relatives à l'accessibilité.
Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ils ont du culot !
Défendre un principe n'exclut pas un peu de réalisme. Je précise à M. Sirugue que nous ne sommes pas revenus sur les établissements recevant du public, mais que nous y avons simplement assimilé les résidences de tourisme.
Les garanties évoquées par notre collègueBenoit semblent donc suffisantes.
C'est une loi d'équilibre que nous allons voter, avec la même conviction qu'il y a six ans. Son adoption permettra d'appliquer encore mieux cette belle loi de 2005. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)
Prochaine séance, ce soir, à vingt-deux heures :
Deuxième lecture des projets de loi organique et ordinaire relatifs au Défenseur des droits.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures trente.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma