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Séance en hémicycle du 3 juin 2009 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • main-d
  • main-d'oeuvre
  • prêt de main-d'oeuvre
  • télétravail

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi deM. Jean-Frédéric Poisson et plusieurs de ses collègues pour faciliter le maintien et la création d'emplois (nos 1610, 1664).

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Mercredi 27 mai, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'article 6.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'emploi, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je désire faire deux remarques sur le déroulement de nos travaux.

D'abord, je m'interroge sur leur bonne organisation. Nous reprenons l'examen de la proposition de loi seulement maintenant alors qu'aucun texte n'était inscrit entre seize heures et dix-sept heures trente. La décision appartient certes à ceux qui fixent l'ordre du jour, mais c'est tout de même un peu curieux.

Ensuite, je veux revenir sur la très longue intervention de notre collègueFrédéric Lefebvre qui a expliqué, dans le cadre d'un rappel au règlement, pendant un quart d'heure, les raisons pour lesquelles il retirait un amendement. Nous aurions souhaité qu'il soit présent. Je ne sais pas si nous le verrons ce soir. Je tenais à faire état de mon étonnement et de mon émotion à ce sujet.

Monsieur le secrétaire d'État, je ne sais si certaines informations vous sont parvenues, mais dans le cadre de l'agenda social et de la discussion entre les partenaires sociaux, dont une réunion s'est tenue encore aujourd'hui, il semblerait – êtes-vous au courant et pouvez-vous confirmer ou infirmer cette information ? – que les partenaires sociaux se soient mis d'accord sur le fait de négocier à partir du 10 juin sur deux points traités dans le texte dont nous discutons aujourd'hui : les groupements d'employeurs et le prêt de main-d'oeuvre. Ce sont deux aspects principaux d'un texte a minima sur la création et le maintien de l'emploi.

Si cette information était confirmée, vous qui prônez le dialogue social comme étant le préalable, l'alpha et l'oméga de tout texte de loi, cela signifierait que nous allons légiférer alors que les partenaires sociaux vont discuter de cette question la semaine prochaine. Nous nous sommes souvent interrogés sur la question de savoir comment retranscrire un accord entre les partenaires sociaux et s'il fallait ou non l'inscrire dans la loi.

Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous infirmer cette information ? Si vous nous indiquiez que nous allons tout de même légiférer, j'avoue que je ne comprendrais pas l'esprit de cette discussion.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur de la commission des affaires culturelles familiales et sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Monsieur Eckert, j'ai été en contact, cet après-midi, avec un certain nombre de partenaires sociaux. Je suis parfaitement informé de la volonté de ces derniers de négocier sur ces deux sujets. Cela étant je dois formuler deux remarques.

Premièrement, personne ne peut connaître précisément l'issue des négociations, ni leur terme.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Si nous légiférons, ils n'ont plus besoin de discuter !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Ce n'est pas tout à fait faux, c'est vrai ; mais ce n'est pas tout à fait exact.

Premièrement donc, personne ne peut savoir dans quel schéma nous nous situons. Sommes-nous dans un schéma semblable à celui qui a prévalu pour la formation professionnelle, sujet sur lequel un accord a été conclu rapidement, ou sommes-nous dans le schéma des accords sur la pénibilité, qui n'ont rien donné après trois ans et demi de discussions ? Il existe donc bien une incertitude sur le terme et le contenu des aboutissements éventuels de cette négociation.

Deuxièmement, je ne vois pas au nom de quoi le Parlement, qui a commencé à débattre de cette proposition de loi, s'arrêterait en chemin. Si elle était adoptée in fine ce soir par l'Assemblée, cela n'obèrerait absolument pas la possibilité pour les partenaires sociaux de prévoir d'autres éléments dans leurs accords.

En ce qui concerne le prêt de main-d'oeuvre – nous y reviendrons en examinant l'article 6 –, il s'agit uniquement de préciser une jurisprudence un peu diverse, pour ne pas dire chaotique des chambres sociale et criminelle de la Cour de cassation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Nous y reviendrons lors de l'examen de l'article.

Je ne vois donc aucun motif pour arrêter nos travaux. Je vous rappelle que cette proposition de loi fera l'objet d'une navette. Il sera toujours temps pour le Sénat et pour nous en seconde lecture de prendre en compte, le cas échéant, les éventuels accords issus de la négociation.

Je souligne enfin que l'autorité législative demeure, en toute hypothèse, à l'Assemblée nationale, et non aux partenaires sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Nous en reparlerons lors de la transposition de l'ANI sur la formation professionnelle. En l'occurrence – pardonnez cette expression –, nous allons rigoler cinq minutes. Il est heureux qu'il y ait des différences entre l'ANI, son contenu sur la formation professionnelle et le contenu de la proposition de loi, sinon nous ne pourrions pas le transposer. Je veux bien que nous ayons cette discussion ad infinitum, mais il faudra s'arrêter à un moment.

Nous allons donc continuer à débattre de cette proposition de loi. Ce n'est absolument pas une marque de défiance, ni de mépris vis-à-vis des partenaires sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Le sujet que vous nous soumettez, monsieur Eckert, est un vrai sujet, notamment dans le cadre de l'évolution des pouvoirs du Parlement, à supposer que l'on parvienne progressivement à trouver une pratique pour l'articulation entre la démocratie sociale et la démocratie politique.

Il y a deux jours s'est tenue une réunion du fonds d'investissement social avec les partenaires sociaux. La CFDT, la CGT, FO, la CFTC, la CGC m'ont, à cette occasion, demandé comment caler leurs négociations sur l'agenda social avec la proposition de loi en cours de discussion.

Premièrement, la loi du 31 janvier 2007 ne concerne pas les propositions de loi. Ce n'est donc pas un problème juridique.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Deuxièmement, et je réponds au fond, j'ai indiqué aux partenaires sociaux qu'il y avait effectivement ce débat sur la proposition de loi et que le calendrier parlementaire nous laissait le temps d'aller au bout.

Les sujets évoqués dans la proposition de loi sont assez précis par rapport au calendrier de négociations et aux thèmes abordés par l'agenda social. Nous sommes donc convenus que cela ne posait pas de problèmes par rapport au déroulement de leurs négociations, tout au moins pour les intervenants présents dans le cadre du FISO.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Jean Mallot, pour un bref rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Mon rappel au règlement ne saurait être long. Il est justifié par la réponse de M. le secrétaire d'État.

Si l'on s'en tient à la loi de janvier 2007, les propositions de loi ne sont pas soumises… etc. Il s'agit d'une argumentation juridique un peu courte.

Nous sommes dans un travail d'élaboration de la norme sociale. Il est évident qu'il y a télescopage entre les deux démarches.

Le jeu normal de la négociation sociale aboutit en effet à ce que les partenaires sociaux se mettent d'accord sur un calendrier. Les négociations commencent mercredi prochain, le 10 juin. Ils se sont mis d'accord sur au moins deux sujets, qui sont au coeur de votre proposition de loi, à savoir les groupements d'employeurs et la question du prêt de main-d'oeuvre. Nous ne pouvons décemment pas, sauf à mépriser totalement le travail fait entre les partenaires sociaux – et nous avons tous dit que nous respections cette négociation et que nous la prendrions en compte sans renoncer à nos pouvoirs de législateur pour élaborer la loi – qui préjugent, conditionnent ou préemptent des options qui figureront dans la négociation sociale.

Nous devons, a fortiori, envoyer au Sénat un texte qui cadrera la négociation et fixera implicitement aux partenaires sociaux le cadre dans lequel ils doivent entrer. À défaut, nous ne saurions prendre en compte les aboutissements des négociations autrement que dans cet accord. Sinon nous enfermerions les partenaires sociaux – je n'imagine pas que vous soyez sur cette ligne – dans un cadre, avant même qu'ils n'aient commencé cette négociation que nous appelons tous de nos voeux. Voilà pourquoi, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission, nous vous appelons à la sagesse : reconsidérez votre position.

Nous avons traité des groupements d'employeurs la semaine dernière. « Congelons » donc cette partie du texte et réservons celle qui porte sur le prêt de main d'oeuvre. Laissons faire les partenaires sociaux qui se sont mis d'accord aujourd'hui pour en discuter à partir de la semaine prochaine et passons au sujet suivant. Nous ne pouvons pas prendre une position qui placerait les acteurs de la démocratie sociale dans un cadre dans lequel nous voudrions les enfermer, en niant par avance leurs capacités de négociation et d'aboutissement à des dispositions qui ne seraient peut-être pas exactement celles que nous souhaiterions. Franchement, nous ne pouvons pas prendre le risque de torpiller cette négociation, de l'empêcher d'aboutir ou de l'enfermer. Ce ne serait pas convenable.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 6.

La parole est à M. Christian Eckert.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Je veux profiter de mon temps de parole sur l'article pour m'indigner des réponses de M. le secrétaire d'État. M. Mallot a indiqué qu'il était inconvenant vis-à-vis des partenaires sociaux de légiférer aujourd'hui alors qu'ils se sont engagés à négocier à partir de mercredi prochain sur deux des titres de la proposition de loi.

Nous ne voudrions pas retarder les discussions sur le titre V, car, là, un vrai problème juridique va se poser.

L'article 6 a, selon vous, pour but de préciser le cadre du prêt de main-d'oeuvre. Vous prétendez qu'il n'y a pas de but lucratif dans une opération de prêt de main-d'oeuvre lorsque l'entreprise prêteuse n'en tire pas de bénéfice. Cependant, nous sommes inquiets, car aucun garde-fou ne figure dans votre proposition de loi. Celle-ci ne précise pas les conditions dans lesquelles un salarié peut accepter ou refuser suivant l'éloignement, les conditions, les horaires de travail. Une entreprise A prête un salarié à une entreprise B, et les conditions, les horaires de travail, l'éloignement peuvent différer considérablement. Le salarié pourrait être obligé de travailler à quarante kilomètres de chez lui, le dimanche au lieu de la semaine, la nuit, etc.

Nous sommes également inquiets sur la question du statut du salarié. Ne serait-ce pas l'occasion pour une entreprise d'utiliser la main-d'oeuvre en profitant d'un statut, d'une convention collective qui ne soit pas celle de l'entreprise où le salarié va être appelé à travailler ? J'y ai fait allusion lors de la défense d'une motion de procédure. Certes, il n'y a pas que des patrons voyous.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Effectivement nous savons qu'il y en a. On pourrait donc trouver dans cette disposition un moyen de contourner certaines dispositions du droit du travail. Vous n'avez de cesse de contourner la législation du travail, les droits des travailleurs. Voilà ouverte une brèche supplémentaire.

Enfin, je pense qu'il aurait été plus sage de définir la notion de bénéfice de l'entreprise emprunteuse, car il existe un risque de dérive importante si l'entreprise trouve dans cette notion un moyen de faire des bénéfices, d'employer une main-d'oeuvre à bon compte dans des conditions assouplies. On risque d'aboutir à davantage de précarité et à moins de garanties pour le salarié.

Si cet article 6 doit faire l'objet de négociation entre les partenaires sociaux, c'est la preuve qu'il est nécessaire d'équilibrer les droits et les devoirs respectifs de chacun, salariés comme employeurs. Cela ne fonctionne pas à sens unique ; le prêt de main-d'oeuvre ne peut pas être le moyen de trouver de la main-d'oeuvre bon marché et d'échapper à un certain nombre de règles.

Nous proposerons des amendements, mais, a priori, cet article 6 nous effraie beaucoup.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Nous abordons le deuxième grand sujet de cette proposition de loi : le prêt de main-d'oeuvre. Le sujet n'est pas nouveau. Comme le rappelle dans son rapport M. Jean-Frédéric Poisson – il sera content que je le cite – : « L'interdiction du marchandage remonte presque aux origines du droit du travail, en 1848 précisément. Louis Blanc avait montré la nécessité d'éviter “qu'entre le patron et l'ouvrier se glissent de rapaces intermédiaires qui, quelle que soit la bonne volonté du premier, fassent descendre les salaires au niveau marqué par la faim”. » Il cite Louis Blanc, une bonne source.

Aux termes de l'article L. 8241-1 du code du travail en vigueur, « toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d'oeuvre est interdite » tandis que l'article L. 8241-2 du même code dispose que « les opérations de prêt de main-d'oeuvre à but non lucratif sont autorisées ».

Vous pensez opportun de modifier ce texte et vous proposez de remplacer la mention de but lucratif, qui peut donner lieu en effet à interprétation ou à difficulté d'analyse, par la notion de bénéfice. Dans une opération de prêt de main-d'oeuvre, l'entreprise prêteuse ne devrait pas, dites-vous, tirer de bénéfice.

En réalité, la Cour de cassation, qui s'est déjà penchée sur cette question à plusieurs reprises, a précisé que le but lucratif au sens de cet article consistait en un bénéfice, un profit ou un gain pécuniaire au profit de l'utilisateur ou du prêteur de main-d'oeuvre. En effet, il faut prendre en considération la situation non seulement de l'entreprise prêteuse mais également celle de l'entreprise utilisatrice. Comme l'a fort bien dit M. Christian Eckert, il suffit qu'une entreprise prête à bas prix un salarié pour ne pas faire de bénéfice mais on voit bien comment l'entreprise emprunteuse, utilisatrice, elle, fera un bénéfice. Il faut considérer les deux protagonistes.

D'ailleurs, monsieur le rapporteur, vous reconnaissez dans votre rapport que votre proposition de remplacer le « à but lucratif » par la formule « ne tirant pas de bénéfice », est imparfaite et ne résout pas la question de l'imprécision et de la difficulté d'interprétation. Je lis : « Avec la disposition qui y est consacrée à l'article 6 de la présente proposition de loi, le sujet du prêt de main-d'oeuvre à but lucratif n'est naturellement pas épuisé. Mais une telle mesure a au moins le mérite de constituer une première étape dans la nécessaire clarification de ce régime juridique. »

Le fait de parler d'une première étape suggère qu'il y en aurait d'autres. Vous avez trop écrit ou pas assez. Il faut que vous nous disiez quelle est l'étape suivante, jusqu'où voulez-vous aller dans la précision et comment.

Cela nous ramène à la question posée tout à l'heure par M. Eckert et moi-même dans nos rappels au règlement sur la non-consultation préalable des partenaires sociaux sur cette modification. Qui vous dit – nous sommes même fondés à penser le contraire – que, dans la négociation qui débute mercredi prochain, les partenaires sociaux vont proposer de remplacer le but lucratif par le bénéfice ? Il suffit de les avoir interrogés – ce que vous avez probablement fait, en tout cas, nous, nous l'avons fait – pour savoir que telle n'est pas leur intention. Comme nous, ils déplorent l'imprécision de la formule que vous proposez par rapport à la situation existante et considèrent que ce n'est pas un progrès, au contraire, et que vous ouvrez un champ d'imprécision nouveau.

Nous butons sur cette difficulté et cette constatation renforce notre demande d'un report de l'examen de cet article. Voilà pourquoi également nous proposerons un amendement de suppression.

Pour conclure mon propos, monsieur le président, puisque vous avez l'amabilité d'appliquer le règlement et de me laisser la minute qui me reste, ce dont je vous remercie…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

…j'ajoute que la commission a ajouté à cet article 6 un nouvel alinéa qui indique : « Les modalités de mise en oeuvre du prêt de main-d'oeuvre à but non lucratif sont fixées dans une convention conclue entre l'entreprise prêteuse, l'entreprise utilisatrice et le salarié concerné. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Rien n'est dit à ce stade sur le contenu de cette convention.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Il me reste encore trente secondes puisque, désormais, on compte en secondes.

Cela dit, monsieur le président, vous conviendrez avec moi que si, cet après-midi, nous avions travaillé entre seize heures et dix-sept heures trente au lieu d'attendre la séance de nuit, nous aurions pu débattre de ce projet de loi extrêmement important plus aimablement et plus complètement. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Vous savez fort bien, monsieur Mallot, qu'on ne réécrit pas l'histoire. Donc nous la continuons. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Je veux revenir quelques instants sur l'amendement Lefebvre qui sera retiré tout à l'heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Exactement, je voulais souligner le caractère pédagogique de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

N'interrompez pas M. Gille, cela nous fera gagner du temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Cet amendement tend à permettre à un salarié de pouvoir travailler pendant ses congés, de maladie, de maternité, parentaux, ou de paternité, c'est-à-dire de renoncer à ses propres droits.

Cet amendement a une vertu pédagogique ; si j'osais je le qualifierais d'amendement Lefebvre « utile » parce qu'il nous donne des biscuits pour étayer notre démonstration à propos de cette proposition de loi.

Cet amendement permet en effet d'expliquer l'évolution que vous voulez faire subir au droit du travail et au contrat de travail, c'est-à-dire la transformation de ce dernier en un échange de la force de travail sous la forme d'une marchandise comme une autre. Vous voulez banaliser le contrat de travail, en faire un contrat comme un autre, dans lequel tout se négocie de gré à gré.

Nous n'aurons de cesse de le répéter : le contrat de travail est un contrat déséquilibré qui comprend un lien de subordination entre l'employeur et le salarié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

C'est pour cela qu'il existe un droit du travail. Et le contrat de travail est l'outil central de ce droit du travail.

Vous proposez en permanence d'alléger ce droit qui vous paraît d'un autre temps, qui vous semble représenter une rigidité à l'emploi et vous voulez faire du contrat de travail un simple contrat, un contrat comme un autre, entre le salarié et l'employeur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Vous voulez utiliser les salariés comme une énergie, une énergie qu'on se vend.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Avec l'article 6 et la généralisation du prêt de main-d'oeuvre entre entreprises, c'est une forme d'intérim au rabais que vous souhaitez mettre en place parce que, en face, vous ne mettez pas les garanties qui permettraient de l'encadrer.

Vous utilisez systématiquement une démarche de déconstruction, nous l'avons vu l'an passé avec l'inversion de la hiérarchie des normes – un accord de branche ne s'applique plus que par défaut d'un accord d'entreprise et, sur le forfait jour par exemple, l'accord d'entreprise ne s'applique que par défaut du gré à gré, parce que, à travers cette question du prêt de main-d'oeuvre, c'est bien sur la question du gré à gré que vous voulez revenir.

Vous élargissez la flexibilité au nom de la flexisécurité sans prévoir les garanties nécessaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Vous favorisez les situations où le salarié n'est plus en relation directe avec son employeur – c'est le point commun des trois sujets principaux de cette proposition de loi : le groupement d'employeurs, le télétravail et le prêt de main-d'oeuvre – toujours pour assouplir les obligations sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je vous demande de bien vouloir conclure, monsieur Gille.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Comme pour le groupement d'employeurs, on pourrait imaginer le prêt d'un spécialiste entre deux entreprises, cela pourrait faire l'objet d'une expérimentation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

En revanche, avec la généralisation du prêt de main-d'oeuvre que vous proposez, nous allons basculer dans un autre marché du travail. C'est d'ailleurs en train de se préparer.

Ainsi, on sait par exemple que l'entreprise Renault est en discussion avec un major du bâtiment, Vinci, pour déplacer, transférer une partie de ses ingénieurs, ce qui lui évitera d'avoir à payer des indemnités de licenciement. C'est ce que vous recherchez d'un certain point de vue. Cela veut dire que le prêt de main-d'oeuvre est une manière de contourner les procédures et les conventions collectives.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

En préambule, je tiens à rappeler à M. le rapporteur, à M. le secrétaire d'État et à ceux qui soutiennent ce gouvernement – nous n'en sommes pas bien évidemment – que tout cela relève d'une faute originelle : vous continuez à pécher régulièrement sans demander, et même sans vouloir demander, rédemption. Vous perpétuez vos actes condamnables (Protestations sur les bancs du groupe UMP), à savoir privilégier toujours ceux qui ont beaucoup, ceux qui ont tout plein, ceux qui ont trop.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Preuve que vous ne faites rien : alors qu'hier nos amis du groupe GDR vous proposaient quelques mesures évidentes de justice sociale, vous avez opposé une fin de non-recevoir, estimant par exemple que limiter les rémunérations à vingt fois le salaire minimum serait insultant pour ceux qui, à vos yeux, méritent bien plus.

Tout cela ne facilite pas le maintien et la création d'emplois, contrairement à ce que vous voulez faire croire. Depuis sept ans, vos lois n'ont souvent de bien que leur titre. Ceux-ci sont toujours très flatteurs mais leur contenu l'est évidemment beaucoup moins.

Cela a d'ailleurs été rappelé par mon collègue Christian Eckert, un homme très au fait de ces questions sociales et en première ligne dans le combat pour que le dimanche reste un jour de repos mérité pour nos millions de travailleurs, dans l'excellente motion de renvoi en commission que vous n'avez pas cru bon de voter. Vous auriez dû parce que – cela a été démontré par les orateurs qui m'ont précédé – ce texte est dans un flou complet.

Le statut du salarié en intérim, chacun, je l'espère, en conviendra, offre très peu de garanties. Avec cette proposition tout à fait curieuse et quelque peu révoltante de prêt de main-d'oeuvre, vous voulez faire, cela a été souligné par Jean-Patrick Gille, de l'intérim au rabais, sans expliquer ni les conditions ni les contours. Une fois de plus, nous ne pouvons que redouter les dérives que cela engendrera, à l'exemple de celles constatées chez Renault.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Tout cela contribue au détricotage du droit du travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

C'est moi qui lui donne la parole, monsieur Roy, pas vous.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Monsieur Roy, vous avez terminé votre intervention. Seul M. Muzeau a la parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Nous y reviendrons. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Tout à l'heure, vous demandiez des arguments, et maintenant vous n'en voulez plus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Si nous ne nous en tenions qu'au titre des projets de loi ou à l'analyse des exposés des motifs, nous pourrions très souvent considérer que ce n'est pas trop mal. La volonté serait là ! J'ai ainsi lu dans le préambule du rapport que l'UMP était attentive aux problèmes de nos concitoyens et donc des propositions fusent de toutes parts.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Bien évidemment, la réalité est tout autre, chacun en a bien conscience.

Au nom « des chances à l'emploi », depuis le début de ce débat, vous tentez de justifier les mesures contenues dans la proposition de loi de votre majorité, des mesures inopportunes au regard de l'urgence économique et sociale que nous connaissons, et nous l'avons vu au travers des trois propositions de loi que nous avons déposées jeudi 28 et qui ont été rejetées hier. Des mesures dangereuses car ouvrant grand les portes à des abus au détriment des salariés, suscitant légitimement de vives inquiétudes de la part des syndicats de salariés rétifs à une nouvelle vague de dérégulation sociale.

Il faut dire qu'il y a peu, le Gouvernement leur vendait la flexisécurité à la française, assouplissait les règles en matière d'embauche, sécurisait toujours pour les employeurs les règles en matière de licenciement, mais oubliait les contreparties protectrices pour les salariés.

L'antienne est bien connue : les règles collectives de protection des salariés seraient désormais inadaptées à la relation contractuelle qui lie ces collaborateurs du XXIe siècle à leurs dirigeants, lesquels devraient être libres de s'échanger les salariés, libres de négocier de gré à gré leur rémunération, leur relation de travail et la fin de cette dernière.

S'il peut être normal que des espaces de choix se développent, en revanche « l'exercice de la liberté individuelle ne doit pas porter préjudice à l'individu ni remettre en cause les garanties collectives », nous rappelle Marcel Grignard de la CFDT.

Le problème, in fine, du leurre du volontariat du salarié à faire des heures supplémentaires, à monétiser ses congés, à travailler le dimanche, c'est qu'il « sert à banaliser les atteintes au code du travail », comme le rappelle Maryse Dumas de la CGT.

Nonobstant la crise et ses effets dévastateurs, ce gouvernement et sa majorité restent les principaux porte-parole de la vulgate libérale selon laquelle le droit du travail est un frein à l'emploi. Il faudrait donc libéraliser les règles, en l'occurrence libéraliser le prêt de main-d'oeuvre pour maintenir, voire créer des emplois.

De bonnes raisons, structurelles, conjoncturelles et pratiques doivent, selon vous, pousser le législateur à faciliter l'utilisation du prêt de main-d'oeuvre en période de crise. Qu'en est-il des prérequis jugés indispensables par l'ancien président du Centre des jeunes dirigeants d'entreprise, le CDJ.

Si l'article 6 est disert quant à la définition du but non lucratif d'une opération de prêt de main-d'oeuvre dès lors que l'entreprise prêteuse n'en tire pas de bénéfice, prenant ainsi l'exact contre-pied de la jurisprudence pour éviter que certains employeurs ne tombent sous le coup du délit de marchandage, il est en revanche muet s'agissant des prérequis que sont la définition claire et précise des conditions d'emploi des salariés prêtés, la durée de leur mission, leur objet, la responsabilité de chacun en cas d'accident du travail, la convention collective dont ils relèvent.

Une autre raison de fond justifie notre opposition à cette banalisation du prêt de main-d'oeuvre : l'être humain est inaliénable, il n'est pas une marchandise et ne peut donc être objet d'un contrat commercial.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Vous ne pouvez vous asseoir ainsi sur cette question essentielle de la place de la relation marchande entre employeur et salarié sauf, comme l'a déploré Stéphane Lardy de FO, « à ignorer ce qui caractérise le droit du travail et ce qui justifie que le travailleur bénéficie d'une protection particulière. »

Comment enfin ne pas voir que ce transfert de salariés d'une entreprise à d'autres entreprises accroît la précarité des salariés eux-mêmes, finit d'atomiser le statut salarié et affaiblit encore davantage les collectifs de travail. C'est, vous l'aurez compris, ce qui motive notre amendement de suppression de l'article 6, que je viens de défendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Merci, monsieur Muzeau.

Je suis en effet saisi de deux amendements identiques, nos 13 et 65, visant à supprimer l'article 6.

L'amendement n° 13 a donc été défendu.

La parole est à M. Michel Liebgott, pour soutenir l'amendement n° 65.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Je vais peut-être vous surprendre, mais après tout pourquoi pas ?

Il pourrait en effet paraître séduisant pour un salarié, ouvrier ou cadre, notamment en période de crise, d'entrer dans une société en se disant que si, à un moment donné, il n'a plus de travail dans son entreprise, il pourra en trouver dans l'entreprise voisine si tant est qu'elle soit voisine et que le travail corresponde à ses qualifications. Malheureusement, les choses ne sont pas aussi idylliques. Les partenaires sociaux vous ont sollicité pour savoir ce que cache cette proposition de loi, car ils ont été informés de son contenu réel par la presse, par vous sans doute et par nous-mêmes puisque nous les avons rencontrés. Ils veulent savoir s'il ne s'agit que d'un petit rectificatif juridique permettant de contourner la jurisprudence ou s'il y a là un vrai débat de fond, une réorientation de la société ce qui, d'une certaine façon, doit les inquiéter, comme nous d'ailleurs.

Il faut néanmoins relativiser le phénomène.

Aujourd'hui, 4 500 personnes font régulièrement l'objet de ce type de procédure et 3 000 demandeurs d'emplois supplémentaires se précipitent tous les jours vers Pôle emploi. C'est dire à quel point le sujet dont nous parlons est mineur par rapport aux problèmes que rencontrent les millions de Français confrontés à la montée du chômage. Il ne faut pas se voiler la face ! Je sais bien que les petits ruisseaux font les rivières qui, elles-mêmes, font les fleuves, mais il faut relativiser.

Néanmoins, ce qui inquiète les partenaires sociaux c'est que nous légiférions a minima. En effet, soit nous sommes là simplement pour corriger les petites dérives imposées par la jurisprudence, soit nous faisons une révolution avec une mobilité professionnelle assortie de toutes les sécurités connexes allant dans le sens de l'intérêt des salariés, auquel cas il faut en discuter car, si vous adoptez tous les amendements que nous vous proposerons, les salariés seront sécurisés.

Tout n'est pas contestable dans les accords qui ont été passés ; encore faut-il les appliquer intégralement. C'est sans doute ce que vous diront les partenaires sociaux, avec néanmoins certaines réserves.

D'abord, tous les syndicats n'ont pas signé, et ceux qui l'ont fait ont exprimé des réserves, ce en quoi ils ont sans doute raison. Si on veut aller au bout de la logique, ce n'est donc pas un petit phénomène.

Selon Les Échos, près d'un salarié sur deux a changé de travail ces cinq dernières années. L'important est de savoir comment ils changent de travail. Trouvent-ils un nouveau contrat de travail après une formation, une reconversion, ou leur impose-t-on un autre travail à travers un prêt de main-d'oeuvre ?

Le même article nous apprend que ce sont en réalité les salariés les moins qualifiés, les ouvriers et ceux qui sont déjà en difficulté, qui pourraient faire l'objet des prêts de main-d'oeuvre les moins valorisants. En effet, si un cadre peut faire des kilomètres en TGV ou en avion pour aller travailler dans une entreprise performante pendant deux ou trois mois et revenir ensuite dans son entreprise d'origine, le problème se pose pour ceux qui, comme chez les sous-traitants de la sidérurgie dans la région que je connais bien, n'ont aujourd'hui aucune perspective parce qu'on ne leur offre rien, on ne leur promet rien. Et s'ils ont une possibilité, c'est à cinquante ou soixante kilomètres, pour un salaire de misère et sans les droits connexes dont nous traiterons dans nos amendements.

La montagne va-t-elle accoucher d'une souris, comme nous le pensons ? Allons-nous nous en tenir à un simple correctif juridique, ce qui tranquillisera les employeurs mais ne sécurisera en rien les salariés, ou allons-nous engager une vraie réflexion, une vraie négociation, auquel cas je rejoins mes collègues : il fallait laisser les syndicats discuter, négocier, avant de légiférer en fonction de ce qu'ils avaient proposé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Si vous le permettez, monsieur le président, j'en profiterai pour faire une présentation assez complète de l'article 6, ce qui me permettra de répondre ensuite succinctement aux amendements que présenteront nos collègues.

D'abord, mes chers collègues de l'opposition, choisissez votre camp une fois pour toutes !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Occupez-vous du vôtre et laissez-nous nous occuper du nôtre !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Monsieur Liebgott, vous ne pouvez à la fois dire que le problème est important parce que les partenaires sociaux en discutent et considérer que cela n'a aucune importance quand c'est le Parlement qui s'en empare ! C'est une question de cohérence.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Ce n'est pas ce qu'on a dit ! Le rapporteur n'a pas écouté !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

C'est vous qui n'avez pas écouté ce qu'a dit votre collègue, monsieur Roy. Il est vrai que vous vous êtes absenté quelques instants, mais personne ne peut vous le reprocher.

J'ai été choqué par l'allusion au fait que des entreprises feraient du prêt de main-d'oeuvre pour éviter de payer l'indemnité de licenciement. L'idéal sur terre consisterait-il, pour un salarié, à recevoir une indemnité de licenciement ? Mais dans quel monde vivons-nous ? Le mieux pour un salarié n'est-il pas d'avoir l'assurance de conserver le lien avec son employeur actuel, les modalités d'exécution de son contrat, son salaire, la garantie de retour à son emploi d'origine, plutôt que de recevoir une indemnité de licenciement ? Quelle est cette conception des relations du travail que vous défendez ?

Par ailleurs, je suis désolé de devoir vous rappeler, chers collègues, que ma proposition de loi n'est pas une tentative de contournement de la jurisprudence. Je rappelle que c'est le législateur qui fait la loi, pas la justice. Le législateur est toujours fondé à dire la loi, quand bien même elle viendrait contrecarrer la jurisprudence de la Cour de cassation, car ce n'est pas son problème. L'ambiguïté est terrible, car nous sommes confrontés à un très grand volume de décisions des chambres criminelle et sociale de la Cour de cassation sur la question de la définition du but lucratif, qui provoquent une insécurité juridique très importante sur les opérations de prêt de main-d'oeuvre. Il appartient au législateur de clarifier cette situation.

Sur ce sujet, je vous fais remarquer au passage que, quelle que soit la position des partenaires sociaux, il n'est pas dans leur pouvoir de faire évoluer la jurisprudence de la Cour de cassation. Cela relève de la compétence du législateur et de personne d'autre. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Enfin, je sais bien que la réunion prévue par l'article 88 de notre règlement a connu des fluctuations en raison des aléas du programme de travail de notre assemblée, mais nous étudions le texte de la commission. Celle-ci a adopté, à ma demande, l'amendement n° 35 qui prévoit certaines garanties dans le cadre de l'opération de prêt de main-d'oeuvre et qui répond à toutes les questions que vous avez posées. Si vous le lisez de bonne foi vous devez reconnaître ces garanties, mais cela ne me semble pas être votre attitude pour le moment. Cela dit, la conversion est toujours possible…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Ce n'est pas un procès d'intention, monsieur Eckert ! Je vous écoute attentivement depuis le début et je crois être encore en-deça de ce que traduisent vos propos !

Quant à la transposition de l'accord signé par quatre syndicats sur cinq, j'ai entendu beaucoup de choses. Vous avez mentionné, je suppose, l'accord sur le prêt de main-d'oeuvre signé, il y a quelques jours, par l'Union des industries métallurgiques et minières.

À ce propos je me permets de vous prendre à votre propre raisonnement : pourquoi ne transposez-vous pas cet accord dans vos amendements ? Tout simplement parce que, je le répète, il n'est pas possible de transposer, ad litteram, un accord interprofessionnel dans la loi ! Je parle sous le contrôle de M. le secrétaire d'État qui s'est livré à l'exercice en écrivant le projet de loi sur la formation professionnelle. C'est impossible ! Ce n'est donc pas une question de mauvaise volonté ou de défiance vis-à-vis des partenaires sociaux.

Un accord national interprofessionnel et la loi ne sont pas des textes de même niveau. Ils n'ont pas la même portée, et cela ne met en cause ni leur qualité ni leur contenu. Nous devons en prendre acte. Je vous ferai d'ailleurs remarquer, chers collègues de l'opposition, que même les syndicats ne sont pas favorables à ce que les accords signés par les partenaires sociaux l'emportent sur la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Si j'ai bien compris, monsieur le rapporteur, la commission est défavorable à ces amendements !

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Le fait de parler de « prêt » de main-d'oeuvre signifie que le salarié devient un objet économique. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Vous avez toujours l'art de vouloir rendre fluides les relations entre les partenaires sociaux et vous utilisez les accords quand bon vous semble.

Effectivement, certains syndicats ont signé l'accord dont il est question.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Calmez-vous, monsieur Poisson ! Vous vous faites du mal !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Cependant le délégué général de l'UIMM a souligné qu'il ne s'agissait que d'une première étape et qu'il s'inquiétait de la seconde. À cet égard je vais vous rapporter les propos que tiennent les syndicats qui ont signé cet accord.

FO exprime de « vives inquiétudes face à un texte qui porte en germe la marchandisation des salariés et leur transformation en objet économique. En clair, la porte s'ouvre pour briser le lien contractuel et transformer le salarié en une marchandise que les employeurs pourraient s'échanger au gré de leur besoin. »

La CFDT considère, pour sa part, que « proposer le prêt de main-d'oeuvre entre entreprises en laissant les employeurs libres de l'organiser à leur guise est dangereux et inacceptable. »

En outre, certains des arguments que vous avancez pour expliquer le prêt de main-d'oeuvre sont parfois paradoxaux. En effet, vous dites qu'une entreprise pourrait prêter un salarié à une autre entreprise pour éviter un licenciement et le récupérer ensuite sans qu'il ait perdu sa compétence, mais s'il n'a pas perdu sa compétence, c'est qu'il travaille dans le même domaine. Or, quand un secteur industriel va mal, c'est toute la filière qui est touchée.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Quand Airbus ne va pas bien, il a du mal à faire des prêts de main-d'oeuvre dans la même filière, car c'est toute la sous-traitance qui souffre ; et il faudrait aussi qu'il respecte le souhait du salarié de ne pas s'éloigner de son lieu de travail initial !

Voilà qui est pour le moins paradoxal. C'est pourquoi, tout en regrettant que le rapporteur et le ministre aient émis un avis défavorable, nous invitons nos collègues à voter ces amendements.

(Les amendements identiques nos 13 et 65 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Jean Mallot, pour un rappel au règlement que je souhaite très bref.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Il le sera, monsieur le président. Ce soir, je fais dans la brièveté.

Tout à l'heure, quand j'ai évoqué l'ordre du jour, on m'a répondu que, si nous avions discuté de la proposition de loi plus tôt dans l'après-midi, nos travaux auraient été hachés. Pourtant rien n'interdisait d'ouvrir dès seize heures, après les questions d'actualité, le débat d'initiative parlementaire sur la politique énergétique, pour examiner ensuite la proposition de loi en discussion. Nous aurions ainsi pu travailler dans l'après-midi au lieu de prolonger la discussion tard dans la nuit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Je veux également répondre à la remarque de notre rapporteur, qui, après avoir rappelé que nous examinons le texte issu des travaux de la commission, a indiqué qu'il avait déposé l'amendement n° 35 voté au cours de la réunion que la commission a tenue au titre de l'article 88.

M. Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, fin connaisseur de notre règlement ne me contredira pas : le texte que nous examinons en séance est issu de la réunion au cours de laquelle la commission a examiné le fond du texte ainsi que les premiers amendements. En revanche ceux qui sont déposés dans les réunions tenues au titre de l'article 88 sont examinés quelques minutes avant le début de la séance…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

…au cours d'une réunion dont le but est non d'adopter des amendements, mais d'émettre à leur sujet un avis favorable ou défavorable.

Les amendements examinés dans ce cadre ne sont donc pas intégrés au texte. Ils sont simplement appelés au cours de la discussion, comme le sera, à son heure, l'amendement n° 35. Que le rapporteur prenne donc patience !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l'amendement n° 4.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Dalloz

Cet amendement, que j'ai cosigné avec M. Tian, vise à insérer avant l'alinéa 1, l'alinéa suivant : « I. – À l'article L. 8 231-1 du code du travail, le mot : "effet" est remplacé par le mot : "objet" ».

Afin de sécuriser davantage le prêt de main-d'oeuvre à but non lucratif, il convient de rétablir l'élément intentionnel en matière de délit de marchandage. C'est un point essentiel, dès lors que des sanctions pénales sont susceptibles d'être appliquées. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

D'une part, il porte non sur le prêt de main-d'oeuvre à but non lucratif mais sur le prêt de main-d'oeuvre à but lucratif.

D'autre part, la substitution du mot « effet » au mot « objet » supprimerait la notion d'intention.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

L'amendement propose d'introduire la notion d'intention dans la définition du but lucratif, ce qui n'est pas une mauvaise idée. Toutefois ce point fait déjà l'objet d'un contrôle du juge. Comme M. Tian, vous connaissez parfaitement ces questions, madame Dalloz, mais je vous renvoie à un arrêt du 16 mars 2004 de la Cour de cassation. Au bénéfice de ces explications, je vous suggère de retirer votre amendement.

(L'amendement n° 4 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 66.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Ainsi que je l'ai déjà souligné, nous craignons, tout comme les syndicats, que l'article 6 ne permette de contourner la législation du travail qui fixe les droits des salariés. Or, dans ce domaine, nous avons choisi notre camp.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Nous proposons donc de préciser que ni l'entreprise prêteuse ni l'entreprise emprunteuse ne doivent tirer bénéfice du prêt de main-d'oeuvre, au regard de leurs obligations sociales et fiscales habituelles. Cet amendement de bon sens rétablirait un équilibre et éviterait tout dévoiement d'une disposition, qui, à vous croire, n'a pas d'autre but que de créer ou de maintenir des emplois.

Nous reviendrons sur ce sujet quand nous examinerons l'amendement n° 35 ; mais je veux rappeler à ceux de nos collègues qui seraient arrivés en retard ce que nous avons appris en cours de journée : dès lundi, les partenaires sociaux négocieront sur la question des groupements d'employeurs et des prêts de main-d'oeuvre. Nous légiférons donc avant qu'ils aient commencé à discuter.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Restez calme, monsieur Poisson, nous avons tout notre temps. Nous continuerons la discussion demain, s'il le faut. Il n'y a pas lieu de vous agiter ni de frétiller. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Entre ce qui doit être retranscrit dans un accord professionnel et ce qui doit figurer dans la loi, où faut-il placer le curseur ? Nous avons déjà eu ce débat quand nous avons examiné le texte sur la représentativité sociale et nous l'aurons à nouveau, car la commission a souhaité effectuer un travail de fond sur ce point.

L'amendement n° 66 permettrait d'apporter un minimum de garanties, en évitant que la procédure ne soit pas dévoyée au détriment des salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

En saluant l'inventivité de M. Eckert en matière de calembour, je rappelle que j'ai demandé à la commission de rejeter cet amendement, ce qu'elle a fait.

Il se fonde en effet sur un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation de mars 2007,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

…qui précise que l'entreprise emprunteuse ne doit tirer ni profit, ni bénéfice, ni gain pécuniaire d'un prêt de main-d'oeuvre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Néanmoins cet arrêt ne précise ni le délai ni la nature du bénéfice du gain ou du profit que l'entreprise prêteuse serait censée réaliser, de sorte que, bien qu'il semble précis, il contient une incertitude de fond.

Par ailleurs, il sous-entend que la seule forme de prêt de main-d'oeuvre autorisée est celle dans laquelle l'entreprise prêteuse facture à l'euro près à l'entreprise emprunteuse ce que lui coûtent ses salariés. La situation dans laquelle une entreprise emprunterait des salariés pour un prix inférieur à ce qu'ils coûtent réellement n'est donc pas prévue.

En somme, même si l'amendement n° 66 a été rédigé dans une bonne intention, son adoption anéantirait le dispositif du prêt de main-d'oeuvre.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Je tiens à répondre au rapporteur et au secrétaire d'État.

Nous mesurons toute la difficulté de l'exercice auquel nous nous livrons ce soir : il nous faut préjuger l'issue de discussions entre les partenaires sociaux qui n'auront lieu qu'à partir de mercredi prochain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Comment concilierons-nous, le moment venu, la démarche du législateur et celle de la négociation ? Le rapporteur a eu la bonne idée de rappeler la position de la chambre criminelle de la Cour de cassation de mars 2007.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Cependant dans l'exposé des motifs de sa proposition de loi, dont nous nous sommes détachés, puisque nous travaillons désormais sur le texte issu de la commission, il a bien senti le problème. Il précise en effet que, pour éviter un « scénario-catastrophe “perdant-perdant”, des entreprises cherchent à trouver d'autres solutions qui permettent de préserver le lien d'emploi tout en allégeant leurs charges fixes. La solution s'appelle la mise à disposition de personnel ou détachement. » Il reconnaît donc lui-même que le but des entreprises est d'alléger leurs charges fixes.

Plus loin, il indique même que le prêt de main-d'oeuvre « peut être neutre ou source d'économies pour l'entreprise qui "emprunte". » Il a donc perçu la difficulté, sans pouvoir la résoudre, ce qui nous a amenés à déposer l'amendement n° 66.

À partir de mercredi, les partenaires sociaux seront amenés à donner leur point de vue. J'invite donc M. le rapporteur – auquel je recommande une fois encore de se calmer – à la prudence. Ne conviendrait-il pas au moins de réserver la discussion sur l'article 6, afin que nous puissions prendre en considération le résultat des négociations ?

(L'amendement n° 66 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour soutenir l'amendement n° 74.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Cet amendement nous mettra d'accord, monsieur le rapporteur, car il reprend exactement votre analyse.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Comme l'a dit M. Mallot, nous sommes au coeur du sujet quand nous essayons de préciser ce qu'est le non-lucratif. Vous l'avez défini comme « l'absence de bénéfice pour le prêteur », mais cette expression, qui exonère l'emprunteur et ouvre toutes sortes de possibilités, crée un flou, voire des difficultés juridiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Je vais essayer de vous démontrer que si.

Supposons que l'entreprise Renault soit en discussion avec Vinci pour des travaux sur le sarcophage de Tchernobyl. Grâce à ce prêt de longue durée, Renault, qui facturera l'opération à l'euro près, ne licenciera pas ses ingénieurs. Toutefois, à bien y réfléchir, d'un point de vue purement comptable, l'entreprise ne réalisera-t-elle pas un bénéfice en s'exonérant des charges qu'auraient entraînées des licenciements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

La rédaction du texte, qui procède d'une bonne intention, risque d'introduire des contestations devant les juges. C'est pourquoi il serait plus simple, dans votre perspective, de préciser que l'entreprise prêteuse ne facture à l'entreprise emprunteuse que la stricte valeur des salaires versés aux salariés pendant leur mise à disposition, ainsi que les charges sociales afférentes et les frais professionnels. Cette formulation ne correspond-elle pas à votre point de vue ?

Si vous la dénonciez, ce serait sans doute que votre intention est tout autre. Néanmoins nous vous accordons volontiers que votre but n'est pas d'exonérer l'emprunteur en lui laissant la possibilité de se livrer à certaines manipulations ou de contourner sur une grande échelle les conventions collectives.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

J'ai demandé à la commission des affaires sociales de repousser l'amendement n° 74, ce qu'elle a fait, pour les mêmes raisons que celles qui l'ont amenée à repousser l'amendement précédent.

Pour M. Gille, j'ajouterai tout de même deux motifs de refus supplémentaires.

Tout d'abord, mon cher collègue, la notion de bénéfice me semble très claire si l'on consulte les divers codes concernés, auxquels je me permets de vous renvoyer. Je pense, en particulier, au code de commerce et au code des impôts, dont les dispositions ne laissent place à aucune ambiguïté sur le sujet.

Ensuite, la formulation de votre amendement implique que le prêt de main-d'oeuvre ne peut fonctionner, selon vous, que s'il se fonde sur une refacturation à l'euro près entre l'entreprise qui prête et celle qui emprunte. Or, pas plus que la commission, je ne souhaite limiter de cette façon le dispositif que nous mettons en place.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Vous disiez pourtant le contraire tout à l'heure !

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Défavorable.

Je reconnais la qualité de l'argumentation de M. Gille. Je ne pense d'ailleurs pas qu'il y ait entre nous une divergence sur le fond ; il s'agit plutôt d'un choix de stratégie législative.

Si certaines définitions sont trop précises, elles risquent de ne plus s'appliquer qu'à quelques cas, en laissant passer les autres au travers des mailles du filet. Nous avons plutôt intérêt à sécuriser la notion de bénéfice qui est suffisamment précise ; le juge pourra ensuite l'interpréter et apporter lui-même les précisions évoquées par l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Je n'ai pas été convaincu par les réponses du rapporteur sur le bénéfice.

Mon exemple était pourtant clair : le dispositif, sans être lucratif, peut manifestement permettre à l'entreprise qui emprunte des salariés de réaliser un bénéfice.

Surtout, la réponse du rapporteur m'a surpris car ce n'est pas la même que celle qu'il avait donnée précédemment.

Il s'agissait de clarifier une jurisprudence flottante : pour certains, « non lucratif » signifie « gratuit », pour d'autres, cela veut dire « à prix coûtant ». Si, dans un premier temps, le rapporteur semblait pencher pour la deuxième solution, dans un second temps, il dit refuser de « s'enfermer » dans une définition. C'est donc qu'il pense que le prêt de main-d'oeuvre peut être facturé par l'entreprise prêteuse à un prix inférieur à celui que lui coûtent ses salariés. Un tel dispositif serait donc très lucratif pour les entreprises « emprunteuses ».

Je comprends finalement pourquoi le rapporteur préfère le terme « bénéfice » au terme « lucratif ». Cela lui permet de ne traiter que du prêteur. En revanche cela confirme nos craintes de voir se mettre en place un système très lucratif pour les emprunteurs.

(L'amendement n° 74 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n° 35, qui fait l'objet de plusieurs sous-amendements.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

L'amendement n° 35 devrait répondre à certaines des préoccupations de nos collègues de l'opposition. Il tend en effet à compléter l'article 6 relatif au prêt de main-d'oeuvre, et à préciser les modalités d'application de la convention tripartite prévue entre l'entreprise prêteuse, l'entreprise emprunteuse et le salarié concerné.

Puisque j'évoque la convention tripartite, je me permets de répondre à la remarque formulée tout à l'heure par M. Muzeau ; c'est un peu tardif, mais il m'en excusera, j'en suis sûr. Dans la mesure où le salarié est partie prenante de la convention, il est difficile de le considérer comme l'objet de celle-ci. Il est signataire de l'accord, il est volontaire et il exerce son libre arbitre en étant l'un des partenaires de la convention : il ne peut donc pas être considéré comme une marchandise. Mon cher collègue, voilà qui devrait vous rassurer.

L'amendement n° 35 fait référence aux éléments essentiels du contrat de travail. Cela devrait également rassurer ceux qui évoquent la délocalisation des salariés à des centaines de kilomètres de l'entreprise prêteuse. Selon une jurisprudence constante, ces « éléments essentiels » sont tout simplement les éléments du contrat de travail. Or, en toute hypothèse, le lieu de travail en fait partie. S'il est modifié, l'amendement prévoit la signature d'un avenant au contrat par le salarié qui reste donc libre d'accepter ou non.

L'amendement prévoit aussi que le salarié « ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire pour avoir refusé une proposition de mise à disposition ».

Il précise aussi que le prêt de salarié ne peut affecter les mandats représentatifs dont le salarié serait titulaire. Cet alinéa répond donc aux inquiétudes exprimées par nos collègues. Il prouve que le salarié conserve un lien contractuel avec son entreprise d'origine ; si ce n'était plus le cas, ses mandats représentatifs n'auraient plus lieu d'être et ils deviendraient caducs.

Je cite enfin le dernier alinéa de cet amendement : « Un accord de branche étendu ou un accord interprofessionnel étendu peut définir les conditions et les modalités selon lesquelles est réalisé le prêt de main-d'oeuvre mentionné au présent article. » Les débats en commission sur ce point ont été rapides, et cette disposition a sans doute échappé à l'opposition qui me rappelle sans cesse à la nécessité de respecter la négociation collective.

Il est donc bien prévu que le législateur et les partenaires sociaux fassent chacun leur travail. Le législateur renvoie à la négociation collective les modalités du prêt de main-d'oeuvre et la façon dont il doit être pratiqué ; les partenaires sociaux veillent à compléter le dispositif autant que de besoin.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Michel Liebgott, pour soutenir le sous-amendement n° 96.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Nous sommes au coeur d'un débat intéressant puisque nous débattons à coup de jurisprudences, d'accords et de textes législatifs.

Avec l'amendement n° 35 de M. Poisson, on veut nous faire croire que tout est réglé, et qu'il n'y a plus qu'à laisser les partenaires sociaux travailler dans le meilleur des mondes, comme si nous avions sauvé l'essentiel du droit du travail et préservé la sécurité des salariés.

Toutefois, en ce qui nous concerne, nous pensons que la base légale du dispositif doit être beaucoup plus large.

Heureusement refusé par le rapporteur, l'amendement présenté par Mme Dalloz et M. Tian pour rétablir l'élément intentionnel en matière de délit de marchandage – cela aurait tout de même été un comble – voulait donner encore plus de droits à l'entreprise ; c'était elle qu'il fallait sécuriser. Nous pensons, au contraire, que c'est au salarié qu'il faut assurer plus de sécurité, puisqu'il est la partie prenante la plus faible du dispositif. Il est en effet en situation d'infériorité, et non en position de force, puisque le prêt de main-d'oeuvre s'applique alors qu'on lui laisse entrevoir qu'il pourrait y avoir des suppressions d'emplois.

Je note que cela ne sera pas nécessairement vrai. On peut faire croire à un salarié qu'il doit accepter d'être prêté à une autre entreprise dans des conditions qui ne le satisfont pas, alors même que son emploi n'est pas vraiment menacé. On peut le lui laisser croire. Cela est d'autant plus facile qu'il y a inégalité fondamentale entre le salarié et l'entrepreneur.

Le sous-amendement n° 96 reprend une partie de l'accord national signé avec l'Union des industries et des métiers de la métallurgie. Il permet de clarifier et de préciser le fonctionnement du dispositif du prêt de main-d'oeuvre. Il ne s'agit pas pour nous seulement de reprendre un accord : nous voulons mieux légiférer en apportant davantage de sécurité aux salariés.

Le sous-amendement prévoit ainsi expressément que, s'il est nécessaire de modifier son contrat de travail, l'acception du salarié doit être préalable à la mise en oeuvre du prêt de main-d'oeuvre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

À la demande du rapporteur, la commission a rejeté les quatre sous-amendements de M. Liebgott. En effet, ils sont tous satisfaits par le texte même de l'amendement n° 35.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 96 ?

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Christian Eckert pour présenter le sous-amendement n° 97.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Monsieur le rapporteur, je vous présente tout d'abord mes excuses pour avoir fait un mauvais calembour tout à l'heure. Considérez que cette blague était d'Eckert (Sourires.), et nous serons quittes. J'éviterai de recommencer.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Le sous-amendement n° 97 reprend également une disposition importante de l'accord national du 7 mai 2009, signé dans la branche de la métallurgie. Nous faisons confiance à la négociation collective, mais nous voulons inscrire dans la loi un certain nombre de protections.

Vous nous répondez que nos sous-amendements sont satisfaits par la rédaction de l'amendement n° 35 : ce n'est pas le cas. Vous avez, par exemple, oublié de préciser dans quelles conditions le prêt de main-d'oeuvre sera proposé au salarié. Or il nous paraît essentiel de prévoir certains garde-fous.

Nous l'avons déjà souligné, et nous le répéterons : le contrat de travail implique une subordination du salarié par rapport à son employeur. Monsieur le rapporteur, vous disiez vous-même, dans vos propos introductifs : « Pour nous, le prêt de main-d'oeuvre est une alternative au licenciement. » Imaginez un salarié à qui l'on dirait : « Tu es licencié, sauf si tu acceptes un avenant à ton contrat de travail et une convention de prêt de main-d'oeuvre. » Imaginez donc la situation de ce salarié s'il ne bénéficie pas d'un certain nombre de protections.

Nous souhaitons que la loi oblige l'employeur à proposer par écrit le prêt de main-d'oeuvre, en indiquant les éléments essentiels du contrat de travail qui seront modifiés. Le salarié disposerait ensuite d'un délai de huit jours pour accepter ou refuser cette proposition. En effet, confrontés à un choix aussi difficile, il nous semble que des salariés, plutôt que de rentrer chez eux pour annoncer à leur famille qu'ils sont licenciés, pourraient être conduits à accepter tout et n'importe quoi.

En conséquence, nous demandons que l'article 11 de l'accord UIMM, qui prévoit une proposition écrite et un délai de huit jours, soit repris dans le projet de loi. C'est tout simplement de la décence lorsque des choix aussi perturbants sont proposés aux salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Si j'ai bien compris, la commission est défavorable au sous-amendement n° 97 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Monsieur Eckert, j'ai bien entendu le début de votre intervention.

L'accord que vous voulez transcrire dans la loi comprend aussi dans son article 11 une disposition essentielle selon laquelle « le silence du salarié sur la proposition de prêt de main-d'oeuvre vaut refus ». Je ne comprends pas pourquoi vous n'avez pas repris cela dans votre sous-amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Dommage : nous sommes pourtant prêts à le voter !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

L'ensemble des dispositions contenues dans l'amendement n° 35 fixe le cadre dans lequel la convention doit s'appliquer. Je vous rappelle que, actuellement, le code du travail ne contient aucune disposition pour encadrer une convention, quelle qu'elle soit, relative au prêt de main-d'oeuvre. Il est donc impossible de nier que cet amendement accroît les droits des salariés par rapport au droit actuel. Je suppose que si vos sous-amendements étaient votés, vous seriez d'ailleurs prêts à le reconnaître.

Par ailleurs, et je le dis en souriant, même si le sujet est sérieux : laissons donc la négociation collective travailler sur le contenu de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Vous n'y croyez pas vous-même ! Dites donc la vérité !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Mais j'y crois, monsieur Muzeau.

Laissons donc les partenaires sociaux décider si les salariés doivent avoir ou non un délai de réflexion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Monsieur Mallot, je ne me fais pas rire, et je ne vous dirai pas ce qui m'amuse depuis le début de la séance.

La commission a repoussé ce sous-amendement.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Monsieur le rapporteur, s'il est vrai que nous n'avons pas repris la disposition selon laquelle le silence du salarié vaut refus, nous avons néanmoins précisé dans notre sous-amendement que le salarié disposait d'un délai de huit jours pour accepter ou refuser le prêt de main-d'oeuvre, ce qui lui laisse toute liberté.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Jean Mallot, pour soutenir le sous-amendement n° 98.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Je veux souligner le caractère paradoxal de la démarche de notre rapporteur. En effet, celui-ci nous a expliqué qu'il avait déposé l'amendement n° 35 afin de compléter la disposition qui prévoit une convention. Or, lorsque je l'ai interrogé sur ladite convention, il m'a renvoyé au texte de la commission ; mais passons !

Nous savons depuis aujourd'hui que les partenaires sociaux entameront mercredi prochain une négociation sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

C'est très important, monsieur le rapporteur, car il faut bien que nous nous préparions à gérer cette terrible contradiction : nous sommes en train d'élaborer, à la virgule près, un texte qui définit le contenu d'une convention dont les partenaires sociaux n'ont pas encore débuté la négociation. Autrement dit, nous indiquons à ces derniers ce qu'ils doivent faire, tout en prétendant attendre le résultat de leurs négociations. Cela est totalement incohérent !

En outre, M. le rapporteur ne reprend qu'une partie des dispositions de l'accord auquel il fait référence, c'est-à-dire l'accord UIMM du 7 mai 2009, signé par quatre syndicats sur cinq. Or si, comme il le prétend, il veut être fidèle à la négociation sociale, il doit reprendre l'ensemble des dispositions.

Je pense notamment à l'article 8 de cet accord, qui dispose : « Lors d'un prêt de main-d'oeuvre, le salarié est placé par son employeur, l'entreprise prêteuse, sous l'autorité de l'entreprise utilisatrice. Pendant cette période, le contrat de travail qui lie le salarié à l'entreprise prêteuse n'est ni suspendu ni rompu. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Notre sous-amendement n° 98 vise à inscrire cette disposition dans le texte afin de sécuriser les salariés. En effet, si nous ne le faisions pas, on se demanderait pourquoi le législateur a voulu l'exclure. Le simple fait de ne reprendre qu'une partie des dispositions de l'ANI serait forcément interprété comme un désaveu de celles qui n'auraient pas été retenues.

Par conséquent, si nous ne reprenions pas la disposition de l'article 8, on comprendrait que vous avez fragilisé la situation du salarié, à mi-chemin entre l'entreprise prêteuse et l'entreprise utilisatrice, ce qui créerait une situation extrêmement dangereuse.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Je réitère mon souhait qu'un jour, soit organisé dans notre assemblée un débat de fond sur ce que signifie la transposition dans la loi d'un accord national interprofessionnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Je me félicite que cette demande rejoigne les préoccupations de nos collègues de l'opposition.

La commission a rejeté, à ma demande, le sous-amendement n° 98. Un accord national interprofessionnel comprend des dispositions de niveau différent. Or je défie quiconque de trouver, dans la proposition de loi ou dans nos amendements, quelque allusion que ce soit à une rupture du contrat de travail du salarié prêté. Il est donc inutile de préciser que ce contrat n'est pas rompu ; ce serait redondant.

Puisque nous devons nous efforcer d'éviter que la loi soit redondante, la commission a émis un avis défavorable à ce sous-amendement.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour soutenir le sous-amendement n° 99.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Ce sous-amendement précise que « la convention de mise à disposition définit les conditions et modalités de rupture anticipée de la mise à disposition par le salarié ou par l'une ou l'autre des parties à la convention. » La question posée est donc celle de la réintégration du salarié dans l'entreprise prêteuse.

Cependant, je souhaite, à ce stade de notre débat, poser à M. le secrétaire d'État certaines questions qui n'ont pas encore été évoquées. En effet, nous allons entrer dans une période transitoire, puisqu'on crée une nouvelle forme de prêt de main-d'oeuvre – ouvrant ainsi, selon nous, la boîte de Pandore – et que vont débuter, sur ce sujet, des négociations entre les partenaires sociaux qui aboutiront peut-être à un accord qui nécessitera de revenir devant le législateur.

À ce propos, je rappelle à M. le rapporteur, qui nous reproche de manquer de clarté au sujet des transpositions d'accords nationaux interprofessionnels, que le Gouvernement a adopté une attitude différente chaque fois qu'il a transposé un ANI : selon ce qui l'arrange, il transpose l'ensemble de l'accord ou ne retient qu'un seul article pour en faire un projet de loi. C'est donc à la majorité de clarifier sa position.

Cela étant, j'en reviens aux questions que je souhaite vous poser, monsieur le secrétaire d'État.

Ne pensez-vous pas que l'on pourrait considérer cette période transitoire comme une phase d'expérimentation, durant laquelle – je sais que cette proposition ne vous plaira pas – le prêt de main-d'oeuvre serait soumis, notamment lorsqu'il est quantitativement important, à une autorisation de l'inspection du travail ?

Par ailleurs, pouvez-vous nous dire ce qui se passera lorsque le prêt de main-d'oeuvre impliquera une entreprise étrangère, que les deux appartiennent ou non au même groupe ? Je pense notamment à des entreprises frontalières : ne risque-t-on pas de réintroduire les dispositions de la directive Bolkestein, puisque la législation du travail applicable sera celle du pays d'origine de l'entreprise ?

Enfin, une association pourra-t-elle pratiquer le prêt de main-d'oeuvre ? Si tel est le cas, toutes les dérives sont possibles, car un groupement d'employeurs peut revêtir la forme d'une association.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Défavorable, pour des raisons que j'ai déjà eu l'occasion de préciser.

Monsieur Gille, rien ne s'oppose à ce que des associations pratiquent le prêt de main-d'oeuvre, dans le respect du droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Pas du tout !

Par ailleurs, l'article 1262-4 du code du travail, qui n'est pas modifié par la présente proposition de loi, définit les garanties que doivent respecter les entreprises étrangères employant des salariés sur le sol national.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Monsieur Gille, votre sous-amendement ne concerne absolument pas l'inspection du travail ; je ne vous répondrai donc pas sur ce point.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

En revanche, comme je suis soucieux de répondre aux véritables questions qui me sont posées, je vous indique que, lorsqu'une entreprise étrangère se fait prêter un salarié, ce n'est pas la notion juridique de prêt de main-d'oeuvre qui s'applique, mais celle du détachement ou de la prestation de service, qui fait l'objet d'une directive qui a été transposée à l'article L. 1261-1 du code du travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Je remercie le rapporteur et le ministre pour leurs réponses, mais il me semble qu'elles ne coïncident pas tout à fait en ce qui concerne le prêt de main-d'oeuvre à des entreprises étrangères, à moins que je n'aie pas été assez attentif.

En revanche, si, comme le rapporteur l'a reconnu, vous autorisez une association à prêter de la main-d'oeuvre à une entreprise, vous ouvrez véritablement la boîte de Pandore, car on voit bien toutes les exploitations qui peuvent être faites d'une telle possibilité. Je vous ai déjà mis en garde contre ces pratiques d'apprenti sorcier. En permettant que les notions de groupement d'employeurs et de prêt de main-d'oeuvre fassent système, vous recréez les conditions qui ont conduit à la création du délit de marchandage en 1948. Il deviendra en effet possible de constituer une association ou un groupement d'employeurs « bidons », afin qu'ils servent de vivier à des entreprises qui pourront y piocher en fonction de leurs besoins. Et, une fois que ce sera devenu inutile, on mettra la clé sous la porte sans que cela coûte très cher. Voilà la mécanique qui sera mise en place.

J'insiste sur ce point, car j'espère que les partenaires sociaux y seront attentifs lors de leurs négociations et que le Parlement sera à nouveau saisi pour prévoir des garde-fous.

(Les sous-amendements nos 96, 97, 98 et 99, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 35 ?

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Avis favorable, car cet amendement permet d'articuler la proposition de loi avec d'éventuels accords de branche.

Je rappelle, afin d'éclairer l'ensemble de la représentation nationale, qu'un accord sur le prêt de main-d'oeuvre a été conclu entre l'UIMM et quatre organisations syndicales, la CGT étant la seule à refuser de signer. Les partenaires sociaux ont donc beaucoup moins d'inquiétudes et ne jugent pas nécessaire de s'entourer de tant de précautions : ils constatent simplement que le prêt de main-d'oeuvre permet d'avancer rapidement et d'éviter des licenciements en organisant une mutualisation entre différentes entreprises. Il conviendrait donc de faire preuve d'un peu plus de sérénité et de s'inspirer davantage de la dynamique des négociations, parfois plus efficace.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Je ne peux pas vous laisser dire cela, monsieur le secrétaire d'État. Vous n'avez pas dû lire les mêmes dépêches AFP que nous !

Certes, un accord a été signé dans la branche des industries métallurgiques et minières, mais cela ne vous permet pas d'affirmer que tous les syndicats sauf un sont enthousiastes face à cette proposition de loi et à ces aménagements. Comme nous vous l'avons dit au début de la séance, ce texte n'aurait pas dû être discuté, dans la mesure où les partenaires sociaux vont négocier sur le sujet la semaine prochaine. Vous persistez dans l'erreur. Tant pis ! Ce que nous souhaitons, c'est, comme me le disait mon collègue Gille en aparté, apporter notre pierre à l'édifice en éclairant, grâce au débat parlementaire, les partenaires sociaux sur les risques et les dangers que peuvent présenter ces dispositions.

En ce qui concerne les entreprises étrangères, j'ai pris bonne note de votre réponse, monsieur le secrétaire d'État, mais il faudra veiller à ce que l'inspection du travail puisse faire son travail. Moi qui suis frontalier du Luxembourg, je puis vous indiquer que des entreprises d'intérim luxembourgeoises emploient des salariés français qu'elles mettent à disposition d'entreprises françaises en vertu de contrats de sept jours reconduits à plusieurs reprises. C'est une manière de contourner l'interdiction de renouveler des contrats de travail temporaire. J'espère que les contrôles nécessaires seront exercés afin d'éviter ce type de dérives.

Quoi qu'il en soit, notre souci était de conforter l'amendement n° 35 de M. Poisson et nous avons d'ailleurs déposé d'autres amendements, que nous examinerons prochainement, visant à compléter la sécurisation du dispositif.

(L'amendement n° 35 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

En conséquence, l'amendement n° 75 tombe.

La parole est à M. Michel Liebgott pour défendre l'amendement n° 76.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Je suis très heureux que l'amendement n° 75 soit tombé, ce qui signifie que l'on progresse un tant soit peu ; même si l'on peut toujours regretter que l'amendement n° 76 ne soit pas tombé également.

Comme M. Eckert, je trouve un peu curieux que nous discutions de dispositions qui vont être intégrées à la loi, alors que les partenaires sociaux vont continuer les discussions dès la semaine prochaine. Ce sont là des systèmes d'une très grande complexité. Je sais bien que la loi, une fois votée ici, ne sera pas définitivement adoptée et qu'il faudra peut-être tenir compte, lors de la prochaine lecture, des discussions qui auront eu lieu entre les partenaires sociaux.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Bien sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Avouez que tout cela ressemble beaucoup à une usine à gaz…

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Cela s'appelle le Parlement !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

…et que si la proposition de loi de M. Poisson a pu, à un moment donné, paraître opportune du fait de la crise, elle se révèle aujourd'hui complètement dépassée par les événements, les partenaires sociaux eux-mêmes voulant s'en emparer pour en savoir plus.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Le débat que nous avons ici les a sans doute éclairés sur les dangers que pouvait comporter l'absence de certaines transpositions. Si nous insistons lourdement, avec cet amendement, sur un certain nombre de points, c'est parce que nous considérons qu'il existe des éléments fondateurs. Ainsi, chaque accord qui va être passé contient des éléments que l'on retrouvera systématiquement. La notion de durée prévisible du prêt de main-d'oeuvre ne s'appliquera pas exactement de la même manière selon qu'il s'agit de l'UIMM ou d'une autre branche.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Nous souhaitons qu'un certain nombre de sécurités soient accordées a minima afin de préserver les salariés de tout abus. On sait, en effet, qu'il y a une inégalité de départ entre un salarié se trouvant en situation précaire parce que son entreprise ne peut plus ou ne souhaite plus lui donner de travail, et l'entreprise qui, de par sa position, pourra abuser de ce salarié. Il est d'ailleurs permis de penser que la conjonction de l'extension des pouvoirs des groupements d'employeurs et du développement de la mobilité professionnelle va placer les entreprises dans des situations tout à fait nouvelles, en leur offrant notamment l'opportunité de trouver des salariés à moindre coût sur le marché du travail.

L'apparition de ces situations, plutôt que de résoudre les problèmes d'emploi liés à la crise, risque donc de se traduire par une fragilisation considérable des salariés.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Je veux insister sur les nécessaires compléments que l'amendement n° 76 vise à apporter à l'article 6.

Si nous souhaitons que la convention de mise à disposition précise « la durée prévisible du prêt de main-d'oeuvre », c'est parce que nous pensons aux familles monoparentales. Quand un parent – qu'il s'agisse de la mère ou du père – élève seul ses enfants et qu'il quitte son entreprise d'origine pour être prêté à une autre, il faut tout de même qu'il sache combien de temps cette situation va durer.

Par ailleurs, notre proposition consistant à préciser « le travail confié au salarié par l'entreprise utilisatrice » vise à garantir au salarié qu'il ne sera pas amené, par exemple, à occuper un sous-emploi. Selon le rapporteur, l'objectif recherché est que l'entreprise prêteuse puisse récupérer un salarié qui n'a pas perdu ses compétences car il ne paraît pas inutile d'inscrire noir sur blanc ce principe vertueux.

Préciser « la durée et les horaires de travail en vigueur dans l'entreprise utilisatrice » me paraît important pour permettre aux familles, notamment monoparentales, de s'organiser en sachant, par exemple, à quelle heure le salarié concerné pourra récupérer ses enfants. En effet, les horaires de l'entreprise utilisatrice peuvent être très différents de ceux pratiqués dans l'entreprise d'origine, tant en répartition – avec, notamment, l'éventualité d'avoir à travailler de nuit – qu'en durée, puisque vous avez voté en juillet dernier la possibilité d'effectuer jusqu'à quarante-huit heures par semaine durant douze semaines d'affilée en cas d'activité exceptionnelle de l'entreprise.

Il en est de même des « conditions d'exercice des droits à congé » : en cas de prêt de main-d'oeuvre survenant durant l'été, le salarié ayant posé des congés dans son entreprise d'origine doit connaître les conditions dans lesquelles il pourra les prendre dans l'entreprise utilisatrice.

Je regrette donc que le rapporteur et le Gouvernement aient rejeté cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

(L'amendement n° 76 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Jean Mallot pour soutenir l'amendement n° 77.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Nous sommes en train de définir le contenu d'une convention de prêt de main-d'oeuvre.

Comme je l'ai souligné précédemment, une négociation va commencer mercredi prochain, qui aura notamment pour objet les conditions du prêt de main-d'oeuvre. Vous avez pris pour référence le seul accord récent sur cette question, celui de l'UIMM, pour introduire à l'intérieur de la proposition de loi ce que vous pensez devoir être le contenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Premièrement, j'observe que vous allez, par ce biais, étendre à l'ensemble des branches des dispositions figurant dans une convention relative à une branche. Rien ne dit – je suis même enclin à penser le contraire – que les partenaires sociaux vont vouloir appliquer à l'ensemble des branches des dispositions négociées dans une seule branche, celle de la métallurgie.

Deuxièmement, vous avez repris une partie des dispositions que l'accord UIMM prévoit pour le contenu de cette convention, mais une partie seulement. En ne retenant pas la totalité, contrairement à ce que nous proposions dans nos amendements et sous-amendements, vous avez signalé ce que vous ne souhaitiez pas reprendre, donc indiqué les points qui, selon vous, n'avaient pas à y figurer. Cette décision, dont vous assumez la responsabilité, va nécessairement conditionner les discussions entre les partenaires sociaux.

Nous proposons, avec l'amendement n° 77, de compléter l'article 6 par l'alinéa suivant : « La convention de mise à disposition définit également les conditions et modalités de rupture anticipée de la mise à disposition par le salarié ou par l'une ou l'autre des parties à la convention ». Il y aura en effet forcément des situations dans lesquelles le salarié se rendra compte que ses conditions de travail ne sont pas celles qui lui avaient été annoncées, voire qu'elles ne correspondent pas à celles prévues par la convention. Dans certains cas, ce sont les aléas rencontrés par l'entreprise qui l'amèneront à remettre en cause les conditions de la mise à disposition.

Mme Lemorton nous a démontré que les changements de conditions de travail induits par la mise à disposition pouvaient avoir des conséquences considérables sur la vie quotidienne des salariés. Les conditions de la rupture anticipée de la mise à disposition doivent donc être prévues par la convention. À défaut, le salarié se trouverait démuni s'il se retrouvait dans cette situation, a fortiori pour des raisons indépendantes de sa volonté. C'est pourquoi nous estimons indispensable de compléter l'article 6 par cet alinéa supplémentaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Premièrement, la proposition de loi est antérieure à la signature et à la publication de l'accord UIMM.

Deuxièmement, la proposition de loi est antérieure à la manifestation d'une volonté de négociation par les partenaires sociaux sur les thèmes que vous mentionnez.

Troisièmement, je répète que rien, aujourd'hui, ne permet de présumer que les partenaires sociaux trouveront un accord sur un sujet qui, de mon point de vue, doit être tranché par le législateur. C'est également une question de respect du Parlement, mon cher collègue : le Parlement ne doit pas interrompre ses travaux…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

En tout cas, je me souviens avoir travaillé avec M. Mallot sur la mission « Pénibilité », et je rappelle qu'il y a eu trois ans et demi de négociations sans que cela aboutisse à quoi que ce soit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Nous ne pouvons pas, me semble-t-il, prendre le risque de nous retrouver devant un dispositif de même nature.

Monsieur le président, j'ai déjà répondu tout à l'heure au sujet de cet amendement, puisqu'il est identique à un sous-amendement que la commission avait rejeté. Je confirme que la commission est défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Je regrette vraiment que M. le rapporteur anticipe implicitement l'échec de la négociation qui ne commencera que mercredi prochain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Vous qui nous chantez les louanges de la démocratie sociale à longueur de séance et qui avez même voté, en janvier 2007, une loi prévoyant que lorsque des dispositions sont prises en matière sociale, il faut passer par une négociation préalable…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

…vous considérez aujourd'hui qu'il faut passer en priorité par l'examen d'une proposition de loi, l'un de vos arguments consistant en l'absence de certitude de voir les négociations aboutir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Les représentants des partenaires sociaux, syndicats de salariés et d'employeurs, vont être extrêmement surpris, pour ne pas dire plus, de vos propos, monsieur le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

En ce qui concerne la pénibilité, dont nous n'avions pas encore parlé jusqu'à présent, ce que je regrette, vous nous dites que la loi de 2003 prévoyait, en son article 12, qu'une négociation ait lieu et que des dispositions soient mises en oeuvre pour prendre en compte la pénibilité dans le système des retraites. C'est certainement une bonne idée, à laquelle nous avons travaillé dans le cadre d'une mission d'information. J'observe cependant que le Gouvernement n'a donné aucune suite à vos propositions, monsieur le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Quelle désespérance ! Vous émettez des doutes sur le fait que la négociation sociale aboutisse, quand vous faites des propositions sur un autre thème, le Gouvernement n'en tient pas compte. Dans ces conditions, on se demande à quoi l'on sert !

Vous vous entêtez à maintenir la discussion de cette proposition de loi, mais il est bien évident que vous n'allez pas transmettre cette proposition de loi au Sénat, ou du moins que le Sénat ne l'inscrira pas à son ordre du jour avant que les négociations qui vont commencer prochainement n'aient abouti.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Chacun sait bien qu'une fois la discussion de cette proposition de loi achevée, celle-ci va être mise au réfrigérateur, en ayant pris soin de donner aux partenaires sociaux des indications plus ou moins explicites sur ce que les uns ou les autres souhaitent voir figurer dans leurs conclusions d'accord collectif.

Ce ne sont là que des bouteilles à la mer totalement inutiles. Pourquoi ne pas prendre les choses dans l'ordre ? Puisqu'on a demandé aux partenaires sociaux de négocier sur la question du prêt de main-d'oeuvre et du groupement d'employeurs, laissons-les travailler et prenons ensuite en considération, sans perdre aucune de nos prérogatives de législateur, le résultat de leurs travaux. Les choses seront, ainsi, beaucoup plus simples et plus claires pour tout le monde. En procédant comme vous le faites, vous savez très bien que vous n'allez pas gagner de temps.

(L'amendement n° 77 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Christian Eckert pour défendre l'amendement n° 78.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Nous n'avons, jusqu'à présent, parlé que de l'accord UIMM, qui est effectivement une référence, mais parmi d'autres. Nous abordons une série d'amendements s'inspirant, non pas de l'accord UIMM, mais de la loi du 30 décembre 2006 qui, en son titre III, prévoyait des dispositions relatives à la sécurisation des parcours professionnels.

L'objet de notre amendement n° 78 est très simple. Il vise à compléter l'article 6 par l'alinéa suivant : « Pendant la durée de la mise à disposition, le salarié a droit au maintien de sa rémunération. Celle-ci ne peut être inférieure à celle que percevrait, dans l'entreprise, l'établissement ou l'organisme d'accueil, un salarié embauché directement par ceux-ci, de qualification équivalente, de même ancienneté et occupant un poste similaire. ».

Il s'agit là, encore une fois, de consolider le dispositif afin de garantir qu'une entreprise rémunère un salarié mis à sa disposition dans les mêmes conditions qu'un de ses propres salariés. Cet amendement s'inspire de l'article 47 de la loi du 30 décembre 2006 qui prévoyait ce type de mesure de bon sens, de nature à sécuriser le dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Défavorable, dans la mesure où l'amendement fait référence au dispositif portant sur les pôles de compétitivité et non au présent texte, et où le contrat de travail d'origine du salarié est maintenu pendant la durée du prêt de main-d'oeuvre : il n'y a donc aucune raison que la rémunération soit modifiée.

(L'amendement n° 78, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n° 79.

La parole est à M. Jean-Patrick Gille.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Cet amendement s'inscrit dans la suite logique du précédent et – même si nous rencontrons dans cette entreprise un bien médiocre succès – précise les modalités de ce prêt de main-d'oeuvre auquel vous tenez particulièrement. Ainsi sont mentionnées les conditions d'exécution du travail en matière de durée, de repos, d'hygiène, de sécurité, de travail des femmes et des jeunes travailleurs.

Au-delà, je souhaite revenir, monsieur le secrétaire d'État, sur vos propos concernant l'accord dans la métallurgie : vous nous reprochez notre absence de confiance. Notre collègue Mallot a pourtant rappelé qu'il s'agissait d'un accord interne à cette branche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

On connaît la capacité innovante de cette branche à tous points de vue…

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Nous leur transmettrons le message !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Cet accord va porter ses fruits et inspirer au moins une partie des partenaires sociaux dans la négociation.

Je suis tenté de vous demander, monsieur le secrétaire d'État, de choisir votre camp : soit cet accord est digne d'intérêt et, dans la mesure où nous le reprenons morceau par morceau, je ne comprends pas pourquoi vous continuez à émettre des avis défavorables à nos amendements ; soit il ne l'est pas, et vous devez en tirer les conclusions. Vous prétendez à chaque instant prendre le relais des partenaires sociaux et, lorsque nous le prenons à notre tour, vous n'en voulez plus !

Par ailleurs, les présents amendements s'inspirent, M. Eckert l'a rappelé, de la loi Larcher de 2006 sur la sécurisation des parcours professionnels, qui offrait une possibilité de prêt de main-d'oeuvre très encadrée – ce que nous aurions voulu pour le présent texte – au sein des pôles de compétitivité. Je ne comprends donc pas pourquoi vous ne prenez pas en compte nos amendements, qui ne sont tout de même pas le fait de gauchistes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Ils s'inspirent, j'y insiste lourdement, du texte de M. Larcher, aujourd'hui président du Sénat, et méritent donc votre attention.

En outre, la démarche suivie par M. Larcher est la même que celle que je vous proposais précédemment : expérimentation à petite échelle d'un dispositif très encadré, assouplissement éventuel s'il fonctionne bien. Or, si j'ai bien compris, l'expérimentation prévue par cette loi cessera à partir de 2010. Peut-on savoir ce que compte faire la majorité à cette date ?

Enfin, et quitte à m'écarter quelque peu de notre sujet, nous devons tous réfléchir au fait de savoir si le dispositif du prêt de main-d'oeuvre est applicable aux associations.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Pensez à ce que cela pourrait donner pour l'aide à domicile : une sorte de mélange, impossible à maîtriser, entre le monde associatif et le monde privé. Je maintiens ma position initiale, qui avait suscité le courroux de nos collègues de la majorité : nous sommes en train de basculer vers un autre marché du travail.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Les groupements d'employeurs font partie des organismes habilités à pratiquer des opérations de prêts de main-d'oeuvre, ce qui ne vous aura pas échappé, monsieur Gille, aussi suis-je quelque peu étonné de votre remarque.

Enfin, vous nous demandez de reprendre les dispositions de l'accord UIMM signé par quatre organisations syndicales et par la fédération patronale. Or, cet accord ne fait lui-même que reprendre les dispositions de la loi, en particulier celles – d'ailleurs similaires à vos amendements – de l'article L. 1251-21 du code du travail, article qui s'applique de plein droit dans le cadre de l'article L. 8241-2.

Pour ne pas faire dire deux fois la même chose à la loi, j'ai proposé à la commission, qui m'a suivi, de rejeter cet amendement.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

J'ai trop d'estime pour les connaissances de M. Gille pour croire qu'il ignore l'article L. 4111-5 du code du travail, qui répond pleinement à son amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Alors pourquoi de telles dispositions figurent-elles dans l'accord ?

(L'amendement n° 79 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n° 80.

La parole est à M. Jean Mallot.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Avant de défendre cet amendement, je relève que, selon M. le rapporteur, ainsi qu'il l'avait déjà mentionné dans son rapport fort instructif, les groupements d'employeurs font partie des organismes autorisés au prêt de main-d'oeuvre « à but non lucratif et réglementé ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Je fais simplement le lien, comme certains partenaires sociaux, entre la question du prêt de main-d'oeuvre et celle du groupement d'employeurs, car ce n'est sans doute pas par hasard que ces deux sujets ont été retenus pour faire l'objet de la négociation collective qui débutera la semaine prochaine.

N'oublions pas ce que vous avez voté à propos des groupements d'employeurs, faisant sauter tous les verrous. Quelle que soit leur taille – plus de 300, de 30 000, de 40 000 salariés –, les entreprises pourront désormais adhérer à des groupements d'employeurs, en nombre illimité qui plus est. La nébuleuse est donc en place, les groupements d'employeurs pouvant recourir au prêt de main-d'oeuvre et les entreprises pouvant ainsi, comme vous le souhaitez, jongler avec plusieurs groupements d'employeurs et faire naviguer les salariés au gré de leurs besoins.

J'en viens au présent amendement,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

…avant, monsieur le président, d'encourir votre impatience naturelle. (Sourires.) Nous demandons qu'à l'article 6 du texte soit ajouté l'alinéa suivant : « À l'issue de la mise à disposition, ou si la mise à disposition prend fin avant le terme initialement fixé, le salarié retrouve son emploi ou un emploi équivalent assorti d'une rémunération au moins égale, ainsi que tous les droits attachés à son contrat de travail, notamment liés à son ancienneté, pour la détermination desquels la période de mise à disposition est considérée comme du travail effectif, et est prioritaire pour bénéficier d'une action de formation dans le cadre du plan de formation. »

Il s'agit de veiller à la sécurisation du parcours professionnel des salariés concernés, afin d'éviter les mauvaises surprises à la fin de la mise à disposition, qu'elle soit prévue ou anticipée. Cette disposition est indispensable pour crédibiliser ce que M. le rapporteur et le Gouvernement souhaitent mettre en place. Le recours au prêt de main-d'oeuvre ne pourrait en effet se développer car aucun salarié ne signerait une convention ne prévoyant pas ce genre de dispositions.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Monsieur Mallot, je vous ai écouté avec intérêt et une patience toute naturelle… (Sourires.)

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

M. Mallot a répondu lui-même à son amendement. Si le dispositif prévu par le texte décourage tous les salariés de signer un avenant à leur contrat, la proposition de l'opposition est donc inutile.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Ensuite, je rappelle que le contrat de travail n'est pas interrompu par le prêt de main-d'oeuvre et qu'il n'est absolument pas question de toucher aux droits des salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

C'est inutile car redondant, monsieur Mallot !

La commission a donc rejeté cet amendement.

(L'amendement n° 80, repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n° 81.

La parole est à M. Jean Mallot.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Pendant que M. Gille se prépare pour défendre l'amendement suivant,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

…je ne soutiendrai que brièvement celui-ci, car il est relativement analogue à l'un des précédents.

Il s'agit de reprendre les dispositions de l'accord UIMM qui, encore une fois, ne concerne qu'une branche, mais que le Gouvernement et le rapporteur entendent généraliser, donnant aux partenaires sociaux un signal qui me paraît dangereux – mais à tant faire, allons jusqu'au bout.

Cet accord prévoit, dans son article 8 intitulé « Situation des parties », que, pendant la période de mise à disposition, le contrat de travail qui lie le salarié à l'entreprise prêteuse n'est ni rompu ni suspendu. Dans la réponse qu'il vient de me donner, M. le rapporteur a estimé qu'il s'agissait d'une évidence. Nous pensons qu'il convient de la préciser par écrit.

Aussi l'amendement n° 81 prévoit-il de compléter l'article 6 du texte par l'alinéa suivant : « Pendant la période de mise à disposition du salarié dans le cadre d'un prêt de main-d'oeuvre à but non lucratif, le contrat de travail qui lie le salarié à l'entreprise prêteuse n'est ni rompu, ni suspendu. »

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je vous remercie pour la sobriété de votre explication, monsieur Mallot.

(L'amendement n° 81, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n° 82.

La parole est à M. Jean-Patrick Gille.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

L'honnêteté me conduit à admettre que nous avons déjà traité la première partie de l'amendement, sans succès hélas. Quant à la seconde partie, il semble qu'elle soit satisfaite par l'amendement n° 35 du rapporteur.

J'en profite néanmoins pour demander à M. Poisson une réponse à ma question sur une éventuelle prorogation de la loi Larcher sur la sécurisation des parcours professionnels.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Le dispositif proposé par M. Gille, que je remercie pour la clarté de son propos, a en effet déjà été traité ou satisfait.

Le texte initial de la proposition de loi prévoyait une prorogation des pôles de compétitivité tels que définis par la loi de 2006. Je l'ai signalé en commission et je le rappelle devant la représentation nationale : ce dispositif a été retiré du texte en vertu de l'article 40 de la Constitution, après décision du président de la commission des finances, au motif qu'il était susceptible de prolonger une charge reposant sur les collectivités locales, les prêts de main-d'oeuvre n'étant pas obligatoirement compensés par des recettes afférentes auxdits prêts.

Avis défavorable, donc.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Défavorable. Je souhaite néanmoins souligner l'honnêteté intellectuelle de M. Gille. Comme de très nombreux amendements précédents, celui-ci est en effet satisfait par l'amendement n° 35.

(L'amendement n° 82 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n° 83.

La parole est à M. Jean Mallot.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Cet amendement a pour objet de prévoir la bonne application de l'accord UIMM, dont nous considérons, je me permets une fois encore de le rappeler brièvement, qu'il restreint le champ des négociations pour les partenaires sociaux, ce qui est regrettable. Mais quitte à le reprendre, reprenons-le plus complètement.

L'amendement n° 83 prévoit donc de compléter l'article 6 par l'alinéa suivant : « Pendant le prêt de main-d'oeuvre, le salarié continue d'appartenir au personnel de l'entreprise prêteuse. À ce titre, il bénéficie de toutes les dispositions résultant des conventions et accords collectifs de branche ou d'entreprise,… »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

« …d'établissement ou de groupe, des usages et engagements unilatéraux d'entreprise, ainsi que des garanties individuelles, dont il aurait bénéficié s'il avait exécuté son travail dans l'entreprise prêteuse. »

Il s'agit bien de prévoir qu'il n'y aura aucune rupture…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

…des droits auxquels peut prétendre le salarié au moment du changement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Tout en signalant à M. Mallot que les députés présents dans l'hémicycle savent généralement lire (Protestations sur les bancs du groupe SRC), j'indique que cet amendement est déjà satisfait, comme j'ai eu vingt fois l'occasion de le dire pour les amendements précédents. Avis défavorable.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Monsieur le rapporteur, vous pourriez éviter d'être désobligeant. Nous sommes ici pour nous expliquer entre nous, mais nous travaillons aussi pour que nos débats fassent l'objet d'un compte rendu qui servira de référence pour celles et ceux qui analysent l'élaboration des textes. Je ne doute pas que les partenaires sociaux – dont vous écartez la négociation d'un revers de main, en disant : « Nous verrons bien ; pour le moment, c'est nous qui décidons » – seront attentifs à ce que nous aurons dit ce soir.

Je ne qualifierai pas vos propos. Je regrette que vous ayez éprouvé le besoin de considérer implicitement que les miens étaient inutiles. Vous avez d'ailleurs pris un risque, à cet égard, parce que nous pouvons tous parler très longuement. J'ai droit à cinq minutes, je peux les prendre. Et nous ne sommes pas encore couchés !

Lorsque l'on défend un amendement, on dit ce qu'il contient, puis on argumente en disant pourquoi on considère qu'il faut le voter. Cela s'appelle le travail parlementaire. Et ces explications sont aussi respectables quand elles sortent de ma bouche que quand elles sortent de la vôtre.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je mets aux voix l'amendement n° 83.

(L'amendement n° 83 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n°84.

La parole est à M. Jean-Patrick Gille.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Nous avons bien compris que nos amendements tendant à introduire dans le texte des précisions importantes ne seraient pas votés. Néanmoins, les questions que nous posons méritent d'être posées. Elles seront discutées par les partenaires sociaux. Et nous nous appuyons sur la première discussion qu'ils ont eue.

S'agissant de cet amendement, le calcul de l'effectif des entreprises pose un vrai problème. Fait-on entrer les salariés dans l'effectif de l'entreprise utilisatrice ou de l'entreprise prêteuse ? Même si l'amendement ne devait pas être adopté, il serait bon que le secrétaire d'État dise qu'il est plutôt d'accord avec son contenu, car les conflits ne vont pas manquer de se produire, par exemple à l'occasion des élections des délégués du personnel.

(L'amendement n° 84, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n° 85.

La parole est à M. Michel Liebgott.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Ce sujet est particulièrement important, puisqu'il s'agit de la santé au travail. Nous discutons depuis maintenant quelques heures d'un texte qui va éloigner le salarié de son entreprise, et donc de son cadre habituel. Or, on peut constater, même dans le cadre habituel, une augmentation considérable des troubles musculo-squelettiques. On a pu également observer, plus grave encore, une fréquence accrue des suicides dans un certain nombre d'entreprises. (Murmures sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Je ne crois donc pas que l'on puisse aborder ce sujet avec légèreté, et ce d'autant moins que, comme il a été souligné tout à l'heure, les discussions sur la pénibilité n'aboutissent pas. Et si elles n'aboutissent pas, c'est avant tout au détriment du salarié.

Ces questions relèvent d'un souci humaniste, bien entendu, mais elles concernent aussi l'intérêt de l'entreprise. Si les salariés sont en bonne santé, ils seront efficaces, productifs, et s'ils ne le sont pas, ils seront un poids à la fois pour l'entreprise et pour la société.

C'est donc notre intérêt collectif que de se pencher très sérieusement sur cette question, qui ne saurait être considérée comme secondaire.

C'est pourquoi nous voulons qu'elle soit traitée dans la loi, et pas seulement dans le cadre d'accords. Car seule la loi peut apporter certaines sécurités, qu'un accord n'apportera pas forcément, puisqu'il ne contiendra pas forcément ces dispositions. De ce point de vue, nous pensons que l'accord UIMM contient des dispositions intéressantes, suffisantes, que nous croyons devoir intégrer dans la loi.

Ces dispositions s'appliquent, je le précise, à des salariés temporaires ou stagiaires. On ne voit pas pourquoi elles ne s'appliqueraient pas à des salariés mis à disposition, conformément à l'article L. 4111-5 du code du travail.

(L'amendement n° 85, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n°86.

La parole est à M. Christian Eckert.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Cet amendement est important, comme les autres. J'observe qu'aucun de nos amendements n'est retenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Vous prétendez qu'ils sont satisfaits par l'amendement n° 35 de notre rapporteur, ce qui n'est pas notre avis.

Pourquoi cet amendement n° 86 ? Nous considérons que le dialogue social dans l'entreprise doit être approfondi, et qu'il ne saurait y avoir de discussion de gré à gré entre un salarié et son employeur. La disposition proposée ici ne coûte finalement pas très cher, et entre dans cet esprit. Nous proposons que l'employeur soit tenu d'informer et de consulter, préalablement à l'exécution de conventions de prêt de main-d'oeuvre, le comité d'entreprise ou les délégués du personnel.

Cette disposition nous paraît frappée au coin du bon sens. Elle contribue à associer les salariés à la gestion de l'entreprise, à la gestion sociale de l'entreprise, pas seulement lorsqu'il y a des négociations, mais en continu, lorsqu'il y a des évolutions dans la structure de l'entreprise ou sur des questions qui les touchent de près.

C'est d'ailleurs, une fois de plus, la reprise de l'article 9 de l'accord UIMM du 7 mai 2009.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

D'abord, je maintiens, monsieur Eckert, que si la commission a rejeté vos amendements, c'est par ce qu'ils sont satisfaits, soit par le texte initial, soit par les amendements adoptés. Il en est de même pour cet amendement-ci.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Non : les obligations d'information et de consultation des instances représentatives du personnel s'appliquent de droit, partout où ces institutions existent. Il n'y a pas de raison que le code du travail ne s'applique pas aux opérations de prêt de main-d'oeuvre. Il n'y a aucun motif pour lequel le comité d'entreprise ne serait pas informé et consulté sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Je me permets en outre de vous rappeler que les articles actuels consacrés au prêt de main-d'oeuvre prévoient expressément l'applicabilité des articles L. 2313-3 et suivants du code du travail, qui font précisément référence aux instances représentatives du personnel.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Défavorable. Si tous ces amendements sont rejetés, c'est tout simplement, je suis désolé d'y insister, parce qu'ils figurent déjà dans le code du travail : aux articles L. 1111-2 et L. 2314-18-1 pour l'article de la loi du 20 août 2008, à l'article L. 4111-5 pour l'autre article. L'amendement précédent était satisfait par l'amendement n° 35, et celui-ci par l'article L. 2323-6. Ces amendements sont donc redondants.

(L'amendement n° 86 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n°87.

La parole est à M. Jean-Patrick Gille.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

C'est la même logique. J'ai bien entendu ce que vient de dire M. le secrétaire d'État. Évidemment, le code du travail s'applique, mais le prêt de main-d'oeuvre crée parfois des situations nouvelles qui ne sont pas tout à fait réglementées. Ou alors, il faut expliquer aux partenaires sociaux qui ont travaillé à l'accord UIMM qu'ils ont perdu leur temps puisqu'ils l'ont passé à recopier le code du travail !

Tout à l'heure, le secrétaire d'État était d'ailleurs prêt à répondre à la question relative au calcul des effectifs, car il y a une difficulté particulière entre l'entreprise prêteuse et l'entreprise utilisatrice.

Il en est de même pour l'amendement n° 87, qui concerne la priorité de réembauchage.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Défavorable. Article L. 1233-45.

(L'amendement n° 87, repoussé par la commission, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n°88.

La parole est à M. Michel Liebgott.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Cet amendement vise à préserver les salariés licenciés dans un cadre économique. Il propose en effet d'interdire de faire appel à un salarié mis à disposition dans le cadre d'un prêt de main-d'oeuvre afin d'exécuter le travail qui aurait pu l'être par une personne ayant fait l'objet d'un licenciement économique.

Cette disposition vaut d'ailleurs en cas d'embauche d'un CDD, ainsi que d'un salarié en contrat de travail temporaire. Ce qui s'applique pour l'intérim et pour les CDD doit évidemment s'appliquer aussi pour le prêt de main-d'oeuvre.

(L'amendement n° 88, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(L'article 6, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n° 25 rectifié, portant article additionnel après l'article 7.

La parole est à Mme Laure de La Raudière.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Mon amendement propose de résoudre, en complet accord avec l'ensemble de la jurisprudence existante, les difficultés résultant de l'imprécision actuelle de la définition du prêt de main-d'oeuvre illicite et du délit de marchandage par les articles L. 8231-1 et L. 8241-1 du code du travail.

Comme vous le savez, le prêt de main-d'oeuvre illicite et le délit de marchandage relèvent du pénal.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Toutes les entreprises prestataires de services – forces de vente, nettoyage, accueil, gardiennage, informatique, maintenance, sous-traitance en général – sont amenées à mettre à disposition leur personnel auprès d'une société cliente.

Prenons un simple exemple : celui d'une entreprise mettant un animateur commercial à disposition de grandes marques agro-alimentaires. Cet animateur a été formé par l'entreprise qui l'emploie et se rend dans les supermarchés pour faire la promotion du produit de la marque cliente. Il lui arrive d'ailleurs fréquemment d'effectuer des prestations pour plusieurs marques différentes, toutes clientes de l'entreprise qui l'emploie. Or le dirigeant de celle-ci peut parfaitement être attaqué pour prêt illicite de main-d'oeuvre et délit de marchandage.

La personne qui porte plainte arguera que l'animateur commercial travaille en réalité pour la marque agro-alimentaire initialement cliente de l'entreprise employeuse, et qu'il doit donc bénéficier des mêmes avantages que les salariés de la marque : convention collective, convention d'entreprise.

La définition actuelle retenue par le code du travail ignore totalement que l'entreprise prestataire de services a son propre savoir-faire, qu'elle a transmis à son salarié, et sa propre convention collective. Les dispositions législatives en vigueur ignorent en outre que l'animateur commercial peut travailler chez plusieurs clients.

On aboutit donc à des plaintes au pénal contre les dirigeants des entreprises proposant des prestations d'animation commerciale, et à des relaxes au bout de trois ou quatre ans, après une période de stress constant pour les personnes poursuivies.

Un tel exemple montre que l'imprécision des articles L. 8231-1 et L. 8241-1 du code du travail ne permet pas de tenir compte de l'évolution et de la complexité accrue des tâches développées par les entreprises prestataires de services. Celles-ci risquent une condamnation pénale dans un flou reconnu de tous, et qui n'est que relativement juridique.

C'est un sujet important, étant donné l'augmentation du nombre d'emplois dans ce secteur. C'est pourquoi je propose de clarifier la définition du prêt de main-d'oeuvre illicite et du délit de marchandage, en plein accord avec la jurisprudence existante.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

L'amendement traite d'une évolution importante du droit sur un sujet qui n'est pas directement l'objet de la proposition de loi. Il est vrai que le nombre de contentieux se développe en raison d'un décalage entre l'évolution classique de la prestation de service et l'état du droit du travail.

J'ai demandé à la commission de rejeter l'amendement parce qu'il était « à côté » de la proposition de loi. Mais j'ai également signifié que j'étais prêt à mettre à profit le temps de la navette parlementaire pour réétudier la question et préciser les choses.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

L'amendement traite d'un véritable sujet, avec la volonté louable de clarifier la définition juridique des délits de marchandage et de prêt illicite de main-d'oeuvre. Toutefois, au-delà de l'intention, un point fait problème : la définition très restrictive qui a été choisie aboutirait à rendre quasi impossible la caractérisation juridique de l'infraction. En droit du travail, en effet, le pouvoir de direction n'est jamais totalement abandonné. Le juge considère toujours que l'employeur garde un pouvoir de direction, même extrêmement partiel, sur un salarié prêté. De fait, l'adoption de l'amendement aurait pour effet d'empêcher tout encadrement du prêt illicite de main-d'oeuvre ou du délit de marchandage.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Tout en comprenant bien l'intention qui sous-tend l'amendement, je me permets de demander à Mme de La Raudière de bien vouloir le retirer.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure de La Raudière

J'entends bien vos arguments, monsieur le ministre, et je comprends que mon amendement mérite un travail supplémentaire. J'entends aussi que M. le rapporteur souhaite que celui-ci soit effectué au cours de la navette législative. Je vais donc retirer mon amendement pour le retravailler et le représenter en deuxième lecture.

(L'amendement n° 25 rectifié est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 8.

La parole est à M. Lionel Tardy.

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

Le 24 avril dernier, le Président de la République a annoncé la mise en place d'une aide pour les entreprises qui embauchent en contrat de professionnalisation un jeune de moins de vingt-six ans. C'est une excellente mesure, que j'approuve pleinement. J'ai toutefois quelques interrogations.

Pour être efficace, il faut cibler large. Or, l'article 8, tel qu'il est rédigé, me semble manquer de souffle puisqu'il limite cette aide aux entreprises de moins de 50 salariés et qu'il utilise le mécanisme du crédit d'impôt. Il faut viser plus large, relever le plafond à 250 salariés au moins et, surtout, apporter l'aide sous forme d'un versement immédiat et non pas d'une moindre dépense dans quelques mois. La crise est toujours là et les trésoreries des entreprises sont particulièrement fragiles. Je suis bien conscient que le choix du crédit d'impôt est dû à des considérations de recevabilité financière, mais cela montre qu'une proposition de loi n'est pas forcément le meilleur véhicule.

De même, dans l'exposé sommaire de son amendement de suppression, le Gouvernement indique qu'il va procéder par décret. Je suis un peu surpris qu'une dépense publique nouvelle puisse passer par voie réglementaire. J'aimerais, monsieur le ministre, que vous m'expliquiez comment vous allez procéder.

Sur le fond, nous ne savons pas grand-chose des modalités et de l'ampleur de cette aide. Nous n'en connaissons que le montant, et nous ignorons quelles entreprises seront concernées et de quelle façon l'aide sera apportée.

Monsieur le ministre, vous nous demandez de supprimer cet article. Je suis prêt à vous suivre, mais j'aimerais que vous nous indiquiez dans quelle direction vous souhaitez aller et que vous apportiez une réponse aux questions que je vous ai posées.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Verchère

Incontestablement, les jeunes sont les premières victimes de la crise que nous traversons. Aujourd'hui, outre les plans sociaux et les suppressions d'emplois, beaucoup d'entreprises gèlent leurs embauches, au détriment des jeunes en particulier. On constate également que, depuis le début de l'année, les entrées en alternance, qu'il s'agisse de l'apprentissage ou des contrats de professionnalisation, ont diminué de 20 % à 30 %. Si l'on ne fait rien, 170 000 à 220 000 jeunes de plus pourraient se retrouver au chômage d'ici à la fin de 2010. Nous ne pouvons l'accepter.

Faut-il rappeler que le taux d'emploi des jeunes en France est l'un des plus faibles des pays de l'OCDE ? Seuls 46 % des jeunes âgés de 20 à 24 ans ont un emploi, contre 63 % dans l'ensemble des pays de l'OCDE.

Au-delà de la crise, nous sommes pris depuis trop longtemps dans un cercle vicieux puisque, pour beaucoup d'emplois, les entreprises exigent que les candidats aient de l'expérience et des références. Encore faut-il donner aux jeunes la chance de les acquérir !

Face à un tel constat, il apparaissait urgent de prendre des mesures significatives en faveur de l'emploi et de la formation des jeunes. On ne peut donc qu'être favorable à l'article 8, qui propose que les entreprises de moins de 50 salariés signant des contrats de professionnalisation avec des jeunes de moins de vingt-cinq ans bénéficient d'un crédit d'impôt.

L'objectif de cet article est de faciliter la conclusion de ces contrats par les petites entreprises, souvent bien plus créatrices d'emplois que les grands groupes et les multinationales. On constate d'ailleurs que, ces dernières années, ce sont les PME et les TPE qui, proportionnellement, ont accompli les efforts les plus importants en matière de signature de contrats d'apprentissage et de professionnalisation. Il est donc tout à fait justifié que le crédit d'impôt s'applique exclusivement à ces catégories d'entreprises, qui sont depuis longtemps les moteurs de l'emploi dans notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Nous appuyons le contrat de professionnalisation. Ce n'est pas nouveau, nous l'avons défendu et nous continuons à le défendre. Cela dit, au vu de ce qui est en train de se passer, nous serions enclins à vous laisser discuter entre vous…

Nous avons bien compris que si cette disposition – l'une des rares de ce texte qui aurait pu recueillir notre assentiment – était présentée sous forme de crédit d'impôt, c'était pour échapper à l'article 40. Puis le Gouvernement est intervenu, usant de ce que j'ai appelé, en soutenant la motion de renvoi en commission, un droit de préemption. Les questions posées par nos collègues de la majorité m'étonnent : je pensais que ce texte était le fruit de la coproduction législative, comme il me semble que l'on dit à l'UMP…

Tout le monde a compris aussi que passer par une proposition de loi permet d'échapper à l'obligation de la négociation sociale, comme Jean Mallot l'a excellemment rappelé. S'il s'était agi d'un projet de loi, vous auriez dû conduire une consultation avec les partenaires sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Lors de la discussion du texte sur la représentation syndicale, nous avions observé qu'il suffisait de présenter des propositions de loi pour échapper à cette obligation de consultation des partenaires sociaux. En l'espèce, celle-ci n'a pas eu lieu puisque nous sommes opportunément saisis d'une proposition de loi – dont on devine d'ailleurs très bien les origines.

Et voici que le Gouvernement demande la suppression de l'article 8 afin de s'occuper lui-même du dispositif. Selon ce qui nous a été indiqué en commission, mais qui demande néanmoins à être vérifié, des moyens budgétaires seraient prévus. De son côté, le Président de la République a fait des déclarations sur le sujet. Nous en sommes là.

Mettez-vous d'accord ! Est-ce le Parlement qui pilote cette affaire, ou bien le Gouvernement par voie réglementaire ? Dans cette seconde hypothèse, précisez-nous – nous sommes prêts à en discuter – les modalités, les montants, les seuils que le Gouvernement entend retenir. La proposition de loi avait au moins le mérite de la clarté ; il semble qu'on ne sache plus très bien où l'on va. Nous travaillons face à un rideau de fumée, dont nous attendons que M. le ministre le dissipe en nous apportant des précisions, qui sont, à l'évidence, tout aussi attendues sur les bancs de la majorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

L'article 8, dont on nous prédit que, dans quelques minutes, le Gouvernement va veiller à ce qu'il disparaisse, se situe dans la logique que nous connaissons bien, et à laquelle toutes les majorités et tous les gouvernements, depuis longtemps, ont d'ailleurs sacrifié. Cette logique veut que, pour l'embauche des seniors ou des jeunes, pour l'emploi de telle catégorie sociale ou de telle minorité, il faille des exonérations, des prises en charge, des crédits d'impôt, etc. En d'autres termes, il faut que la puissance publique paie pour avoir des emplois. C'est tout de même fâcheux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Nous devrions essayer de trouver d'autres formules. Il en existe, que nous avons utilisées dans un passé assez récent et qui ont fait leurs preuves.

Avant d'y venir, je voudrais insister sur un point de méthode. Quelle confusion ! Au motif qu'il fallait éviter que les partenaires sociaux engagent une négociation avant que le législateur intervienne, on a utilisé le procédé de la proposition de loi, qui permet effectivement de contourner les dispositions de la loi de janvier 2007.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Puis les partenaires sociaux sont quand même venus négocier, mais on leur a dit que, puisqu'on avait commencé à légiférer, on allait malgré tout continuer !

Sur l'article 8, c'est le Président de la République qui vient vous couper l'herbe sous le pied. Alors que votre proposition de loi prévoit un crédit d'impôt de 1 000 euros par contrat de professionnalisation, il a annoncé le 24 avril dernier un plan pour les jeunes, avec 1 000 euros pour toute nouvelle embauche d'un jeune de moins de vingt-six ans en contrat de professionnalisation !

Il y a cependant, entre les deux dispositifs, des différences qui ne vous ont pas échappé, monsieur le rapporteur, puisque vous les soulignez dans votre très intéressant rapport, que j'aime à citer. Celui proposé par le Président de la République, et qui sera donc mis en oeuvre, « proche de celui de la présente proposition de loi, en diffère en prenant en compte les embauches et non les contrats en cours, en n'étant pas limité aux petites entreprises et en prévoyant une majoration de l'aide à 2 000 euros pour certains jeunes ». On voit bien que les périmètres ne sont pas exactement les mêmes : vous souhaitiez cibler plutôt les petites entreprises et soutenir les contrats en cours, alors que le Président de la République annonce un dispositif réglementaire qui ne répond pas exactement à ces souhaits.

Pour conclure, j'évoquerai un autre dispositif pour l'emploi des jeunes, que nous avons utilisé par le passé et qui a très bien fonctionné : les emplois-jeunes. La formule est fondée sur le constat simple que l'économie est un système en boucle. Lorsque la puissance publique, pour répondre à des besoins nouveaux, finance des emplois-jeunes, elle met le pied à l'étrier à des jeunes qui vont payer un loyer, fonder et nourrir une famille, consommer, payer de la TVA, bref, faire vivre l'économie et renflouer les régimes sociaux par leurs cotisations sociales. Grâce à leur entrée sur le marché du travail, ils vont produire des ressources pour la puissance publique, via l'impôt, la valeur ajoutée et différents autres éléments, pour financer d'autres emplois.

C'est ainsi que la machine économique se remet en route, et c'est beaucoup plus intéressant que de distribuer simplement de l'argent aux entreprises pour qu'elles fassent ce qu'elles auraient fait de toute façon. Une entreprise embauche d'abord et avant tout parce qu'elle a un débouché et non pas pour faire plaisir à la puissance publique. Le crédit d'impôt ou l'aide vient simplement diminuer le coût de l'emploi qu'elle aurait créé de toute façon.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

J'ai déjà eu l'occasion de dire que la mesure en question est une demi-mesure, voire une mesure de rattrapage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Mes collègues l'ont dit, nous sommes favorables à l'alternance appuyée sur un contrat de travail, qu'il soit d'apprentissage ou de professionnalisation. Un choix malheureux a été fait dans cet hémicycle il y a un peu de moins de deux ans, en novembre 2007, lors de l'examen du PLF pour 2008. Un débat avait même traversé la majorité lorsqu'il s'était agi de supprimer les aides au contrat de professionnalisation, qui a, de ce fait, connu une sorte de décrochage par rapport à l'apprentissage. Il était positif de réparer cette erreur dans la proposition de loi.

Le Gouvernement a considéré qu'il était plus simple de le faire sous forme de prime. Je rassure mes collègues : ce sera fait par décret, et celui-ci est prêt puisqu'il est passé devant le Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie.

Une interrogation demeure. Monsieur le ministre, les chiffres ne sont pas bons, ce qui est dû en grande partie à la crise : le nombre de contrats de professionnalisation a diminué de moitié depuis un an ; il y en avait un peu plus de 5 000 en avril 2009, contre un peu plus de 10 000 en avril 2008. Avez-vous d'ores et déjà prévu, au-delà du plan d'urgence annoncé par le Président de la République le 24 avril, d'autres mesures d'incitation, qu'elles prennent appui sur ce type de contrat ou sur d'autres ? Comptez-vous utiliser le projet de loi sur la formation professionnelle en préparation pour émettre d'autres propositions ? Est-ce là, d'ailleurs, une explication du report de l'examen de ce texte ?

Pour conclure, je voudrais évoquer ce projet de loi, et son article 9 qui demande, je crois, une certaine prudence. Il met en effet en place le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, alimenté par une ponction sur le financement de la professionnalisation, donc des contrats de professionnalisation. Or, ces derniers seront en partie financés par le fonds en question – s'il fonctionne bien de la même façon que l'ancien fonds unique de péréquation. On peut donc s'interroger sur ces effets de circuit internes.

Il est, de plus, prévu que le financement par le nouveau fonds ne soit plus fixé à 50 %, mais à 40 %. L'auteur du rapport sur les contrats en alternance – issu de l'UIMM, dont il est décidément beaucoup question ce soir – s'est lui-même ému de cette diminution.

Je ne sais pas si nous pourrons avoir la réponse ce soir, mais on met ici en place un circuit bien compliqué : il faut veiller à ne pas engendrer d'effets contreproductifs, pervers – involontaires, bien sûr, mais qui pourraient pénaliser le contrat de professionnalisation une fois que celui-ci, comme nous le souhaitons tous, aura redémarré.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Nous en venons à l'examen des amendements.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 29 et14, tendant à supprimer l'article.

La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement n° 29.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Cet amendement tend en effet à supprimer l'article 8, et je voudrais m'en expliquer. Le dialogue entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif nous permettra d'appliquer le plus rapidement possible des dispositions similaires à celles prévues par cet article.

Nul ne sera surpris d'entendre que si nous attendons, pour adopter des mesures permettant le développement du contrat de professionnalisation, que la proposition de loi aille jusqu'au terme de son parcours législatif, la rentrée de septembre sera passée, et largement.

Lionel Tardy y a fait référence de façon très précise et très juste : la présentation sous forme de crédit d'impôt permettait de faire en sorte que ce point soit débattu en séance. Je sais que ce dossier tient à coeur aux parlementaires qui ont participé au débat. Le travail effectué en amont avec les députés a permis de mettre sur la table les questions posées par l'alternance, dans le cadre de la réflexion, portée par le Gouvernement, sur le développement de l'emploi des jeunes.

J'ai d'ailleurs écouté avec attention les différents intervenants, et j'ai eu le sentiment d'une petite discordance.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

M. Eckert et M. Gille ont souligné l'intérêt du contrat de professionnalisation, tandis que M. Mallot a regretté le recours à des mesures incitatives pour soutenir son développement.

Pour notre part, nous n'avons pas d'états d'âme : nous considérons que le mieux est de miser sur des dispositifs simples et robustes qui ont fait leurs preuves – et donc sur l'alternance, soit par la voie du contrat d'apprentissage, soit par celle du contrat de professionnalisation.

Je me retrouve tout à fait dans l'intervention de M. Verchère, qui a très bien retracé l'apport et l'utilité de ces dispositifs, notamment pour les petites et moyennes entreprises, auxquelles je le sais particulièrement attentif.

Monsieur Tardy, le décret relève du pouvoir réglementaire autonome reconnu au Gouvernement par l'article 37 de la Constitution, auquel je vous renvoie. C'est sur le même fondement qu'il nous a été possible de mettre en place le décret sur la prime « zéro charge » pour les embauches de salariés supplémentaires dans les entreprises de moins de dix salariés.

Je voudrais maintenant éclairer l'ensemble de la représentation nationale sur le projet de décret, qui a effectivement été transmis à M. le rapporteur. Il crée, pour la période du 24 avril 2009 au 30 juin 2010, une aide à l'embauche pour les employeurs qui recrutent des jeunes de moins de 26 ans. Cette aide est de 1 000 euros ; elle est portée à 2 000 euros si les jeunes embauchés n'ont pas de qualification supérieure au baccalauréat.

Il s'agit donc d'inciter les employeurs à donner la priorité aux jeunes dont les qualifications sont les plus faibles, car ce sont eux qui risquent le plus de se retrouver sur la touche dans cette période délicate. Le dispositif est très simple : l'aide serait versée pour moitié à l'issue du deuxième mois, et pour l'autre moitié à l'issue du sixième mois d'exécution du contrat. Cela permet d'apporter une aide ramassée, rapidement tangible, tout en essayant d'éviter l'effet d'aubaine et de miser sur la durée.

Le but est donc commun au pouvoir législatif et au pouvoir exécutif, mais aussi aux partenaires sociaux. La réunion des partenaires sociaux dans le cadre du Fonds d'investissement social a permis qu'ils s'associent tous au financement de cette mesure, qui repose en partie sur des fonds d'urgence. La boucle de la discussion est ainsi bouclée. La proposition de loi ne sert donc absolument pas à faire une mauvaise manière aux partenaires sociaux : nous en avons au contraire discuté avec eux, et ils sont pleinement associés aux débats sur ces dispositifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

M. Roland Muzeau m'indique que l'amendement n° 14 est défendu.

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Les explications apportées par M. le secrétaire d'État me paraissent tout à fait satisfaisantes et rejoignent les préoccupations des cosignataires de la proposition de loi. J'ai donc demandé à la commission d'adopter cet amendement.

Je précise en outre que le décret du Gouvernement est plus large que l'article 8 initial de la proposition de loi. Il satisfait donc pleinement les parlementaires de la majorité.

À défaut d'une capacité d'innovation dont vous avez naguère critiqué les limites dans cet hémicycle, le rôle d'une proposition de loi peut également être de pousser le Gouvernement à se saisir de certains sujets lorsqu'il ne l'a pas fait spontanément. Nous sommes donc, nous, très satisfaits et c'est pourquoi l'avis de la commission est favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Je souhaite répondre à M. le rapporteur et à M. le secrétaire d'État. Dans cette affaire, je ne sais pas qui pousse qui ; j'ai plutôt l'impression que celui qui pousse n'est pas forcément là où l'on croit : je crois que l'on n'a pas parlé de lui ce soir, mais qu'il est invoqué dans l'exposé des motifs de l'amendement du Gouvernement.

Je suis un peu déçu de votre réponse, monsieur le secrétaire d'État. Il ne s'agit pas de la forme, puisque vous faites votre coproduction législative comme vous l'entendez : de toute façon, vous ne parlez qu'avec votre majorité !

C'est sur le fond que j'aimerais des éléments précis. Où en est exactement ce décret ?

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Il sera signé dans les dix jours !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Le rapporteur en a, manifestement, pris connaissance. Vous pourriez nous donner quelques éléments sur son contenu. J'ai peut-être manqué d'attention, mais j'aurais aimé quelques éléments plus factuels.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Je les ai présentés !

(Les amendements identiques nos 14 et 29 sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n° 28, portant article additionnel après l'article 8.

La parole est à Mme Laure de La Raudière.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Comme vous le savez, mes chers collègues, la loi de modernisation de l'économie a créé le statut d'auto-entrepreneur, qui facilite la création de micro-entreprises, en général unipersonnelles, et permet au créateur de payer ses charges sociales en fonction du chiffre d'affaires réalisé, au mois le mois, dans la limite d'un chiffre d'affaires annuel – résultant, en l'occurrence de prestations de services – de 32 000 euros.

Lors des débats sur la loi d'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés, nous avons ouvert le statut d'auto-entrepreneur aux professions libérales. Malheureusement, la rédaction utilisée a limité le dispositif aux nouvelles activités, donc aux nouvelles créations de professions libérales. Ce n'était pas notre intention : j'étais rapporteure, et je me souviens des discussions. Nous souhaitions pouvoir donner accès au statut d'auto-entrepreneur aux professionnels libéraux qui respectaient les critères et qui le souhaitaient.

Mon amendement vient donc corriger ce point, pour éviter toute distorsion de concurrence entre un professionnel libéral qui aurait créé son entreprise en novembre ou décembre 2008 – imaginons un consultant qui se soit mis à son compte – par rapport à un autre, de même profil, qui aurait créé la sienne au mois de janvier 2009 et qui bénéficierait donc du statut d'auto-entrepreneur. Il s'agit de mettre fin à une injustice.

J'insiste publiquement sur le fait que telle était bien l'intention du législateur lorsque nous avons voté ce dispositif au mois de janvier 2009.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

La commission a repoussé cet amendement, mais je voudrais apporter quelques précisions supplémentaires.

D'abord, M. le secrétaire d'État va, je crois, faire référence à une réflexion en cours, dont il faut attendre l'aboutissement.

Ensuite, nous avons été saisis tardivement de cet amendement, et le temps nous a donc manqué pour l'examiner. Il me semble que la navette devait permettre de préciser les choses.

J'insiste sur le fait que cet amendement est tout à fait intéressant. Il correspond bien, j'en suis d'accord, à là l'intention du législateur ; il faut donc en arriver à une formulation conforme à cette intention.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

J'essaierai d'être le plus bref et le plus précis possible, car c'est là un vrai sujet, très bien cerné par Mme de La Raudière, qui s'est personnellement engagée et qui a fourni un vrai travail sur les difficultés d'application du statut d'auto-entrepreneur aux professions libérales. Il y a effectivement une faille.

Le régime d'auto-entrepreneur connaît un vrai succès : plus de 150 000 auto-entrepreneurs se sont déclarés depuis le 1er janvier dernier. Le rythme mensuel de créations d'entreprises a augmenté de moitié en France par rapport à l'année dernière. Nous avons également veillé, avec Hervé Novelli, à ce que le dispositif puisse être étendu aux demandeurs d'emploi ; ceux-ci bénéficient ainsi des aides à la création d'entreprise, tel le dispositif ACCRE.

J'en viens maintenant au problème soulevé, c'est-à-dire la place des professionnels qui exercent en libéral, et je vais m'efforcer d'aller au fond des choses. La mise en oeuvre du dispositif était notamment subordonnée à la conclusion d'une convention passée avec les caisses. La force du statut d'auto-entrepreneur provient en effet de l'absence de charges, et il faut que celle-ci soit facilement applicable.

Un problème s'est posé, pour les libéraux non réglementés, avec la caisse de retraite CIPAV, et l'élaboration des conventions n'a pas encore abouti.

De son côté, le Gouvernement a essayé d'avancer le plus vite possible. L'article 34 de la loi de relance a ainsi résolu le cas des créateurs d'entreprises à compter de 2009.

Reste, comme vous l'avez mentionné, le problème des entrepreneurs libéraux qui, ayant créé leur entreprise avant 2009, n'ont toujours pas accès au statut d'auto-entrepreneur. C'est pour eux, naturellement, une situation douloureuse.

Nous avons donc demandé à la CIPAV de signer rapidement la convention afin de permettre l'extension du régime de l'auto-entrepreneur aux professions libérales à compter du 1er janvier 2010. Pour l'instant, nous ne disposons d'aucune réponse favorable de la part de la caisse, mais la négociation est enclenchée et devrait aboutir. Bien qu'étant favorable à votre amendement, madame la députée, je souhaite que l'on accorde quelques semaines supplémentaires à la CIPAV. Si la situation ne devait pas évoluer, vous pourriez représenter votre amendement en deuxième lecture.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Retirez-vous votre amendement, madame de La Raudière ?

Debut de section - PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Je préfère qu'il soit mis aux voix, car je pense avant tout à ces entrepreneurs qui ont créé leur entreprise en novembre ou en décembre dernier et qui se trouvent placés dans une situation de distorsion de concurrence par rapport à celles qui ont été créées en janvier, du fait que la CIPAV n'a pas trouvé le temps de prendre une décision alors qu'elle est saisie de la question depuis le mois de janvier. J'ajoute qu'elle s'est permis d'envoyer un appel à cotisations à des auto-entrepreneurs !

Permettez-moi de vous citer le cas d'un sculpteur de ma circonscription. Un sculpteur ne vend pas tous les mois. Il aimerait pouvoir payer ses charges sociales au mois le mois, comme le permet le statut de l'auto-entrepreneur, mais il est dans l'impossibilité de le faire. Il est scandaleux que l'on ne lui permette pas de payer ses charges sociales au mois le mois en fonction de son chiffre d'affaires réel ! (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Cette intervention va me permettre de démonter les arguments invoqués par M. le secrétaire d'État à l'instant. Vous avez avancé le chiffre de 150 000 auto-entrepreneurs, monsieur le secrétaire d'État, mais avez-vous précisé combien d'entre eux avaient déclaré un chiffre d'affaires ?

Par ailleurs, j'ignore si vous recevez les mêmes courriers électroniques que nous, mais, pour notre part, nous en avons reçu un certain nombre, de l'Union professionnelle artisanale notamment,…

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

…mais aussi de petites entreprises et de petits artisans qui nous alertent sur les dérives auxquelles donne lieu cette fausse bonne idée.

Aujourd'hui même, un entrepreneur m'a informé qu'un de ses salariés qui était parti pour créer son auto-entreprise travaille désormais pour lui – pour moitié « au black », selon sa propre expression ! Je pense que vous ne mesurez pas les dérives du système que vous avez mis en place.

Lorsque vous affirmez que la création d'entreprises a explosé grâce au statut de l'auto-entrepreneur, on croit rêver !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Ce qui nous intéresse, pour notre part, c'est la création du nombre d'emplois durables, sérieux, consolidés.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Nous sommes assaillis d'interrogations émanant d'artisans, de petits entrepreneurs qui se disent déroutés par cette disposition qui perturbe leur activité.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

La concurrence déloyale dont vous parlez, ma chère collègue, c'est là qu'elle se situe !

(L'amendement n° 28 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 8 bis.

La parole est à M. Christian Eckert.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

L'article 8 bis part d'une bonne intention en proposant de rémunérer les stages dont la durée est supérieure à deux mois, alors qu'auparavant la durée de stage nécessaire pour avoir droit à une gratification était de trois mois.

Avez-vous bien mesuré l'impact financier de cette mesure ? L'ADF en a chiffré le coût pour les départements à 45 millions d'euros par an. Lorsque nous vous proposons des dispositions qui augmentent la dépense de l'État, vous nous opposez l'article 40 de la Constitution. Or, en l'espèce, vous proposez une mesure dont la charge financière incombera essentiellement aux collectivités territoriales. Selon moi, il faudrait prévoir un article 40 bis visant à interdire la proposition de charges pesant sur les collectivités qui, selon la Constitution, s'administrent librement.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

En outre, il n'y a pas eu de concertation avec l'ADF sur cette mesure. J'interroge très solennellement le Gouvernement : a-t-il chiffré le coût exact de la mesure ? Sur qui pèsera-t-elle ? Quoi qu'il en soit, je vous invite à la plus grande prudence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Je partage bien évidemment l'argumentation de mon collègue Christian Eckert. L'article 8 bis nouveau, issu d'un amendement de notre collègue Benoist Apparu, est avantageux pour les stagiaires. Ceux-ci, utilisés le plus souvent comme une main-d'oeuvre à bon marché, se trouvent dans des situations de précarité, ce qui est regrettable. Le fait de leur accorder une rémunération dès le deuxième mois de stage représente indiscutablement un avantage.

Cela étant, une étude d'impact de la mesure proposée s'imposerait car les collectivités, les associations ou les organismes sur qui elle pèsera ne disposent pas forcément des moyens financiers nécessaires.

Alors que vous ne cessez de nous opposer l'article 40 de la Constitution pour rejeter nos amendements, je souhaiterais savoir pourquoi l'amendement de M. Apparu, tout intéressant qu'il soit, n'a pas connu le même sort.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Je lis l'article 40 : « Les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l'aggravation d'une charge publique. »

Or les charges des collectivités territoriales – départements ou régions – sont des charges « publiques ». J'en veux pour preuve le fait que l'on prenne en compte l'ensemble des déficits – ceux de l'État et celui des collectivités – pour savoir si un pays satisfait ou non aux critères de Maastricht. L'article 40 devrait donc s'appliquer également aux ressources publiques et aux charges des collectivités territoriales.

Une fois de plus, il s'agit – ce que nous ne cessons de déplorer – d'un transfert de charges vers les collectivités territoriales, l'État s'exonérant du poids de ces charges : en quelque sorte, une double peine pour les collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

La gratification des stages est une idée plutôt sympathique et constitue une avancée, obtenue à la suite des mouvements des jeunes stagiaires qui avaient manifesté, masqués, contre leur situation de précarité.

Je souhaite appeler l'attention de M. le secrétaire d'État sur les stages obligatoires dans les cursus de formation des travailleurs sociaux. L'année dernière, les intéressés nous ont fait part des difficultés qu'ils ont rencontrées dans l'organisation de leur année et de l'inadéquation entre les examens et les stages. La question n'a pas été réglée, et il semble que 15 % des étudiants aient été pénalisés, notamment ceux qui relèvent des structures liées à la petite enfance. Xavier Bertrand, alors ministre en charge de ces questions, s'était engagé à trouver des solutions. Or les organismes de formation, les associations et les syndicats de travailleurs sociaux confirment que rien n'est résolu à ce jour. Si les difficultés perdurent pour la rémunération des stages de trois mois, il en ira a fortiori de même pour les stages de deux mois.

Une circulaire de la direction générale de l'action sociale indique que les collectivités locales qui font appel à des stagiaires ne sont pas obligées de les rémunérer, ce qui crée des inégalités de traitement entre stagiaires. Le problème n'est pas simple, car les structures sociales qui font appel à de nombreux stagiaires sont confrontées à une surcharge financière, et toute la question est de savoir qui devra l'assumer. Si ce devaient être les organismes de formation, cela ne ferait que déplacer le problème des conseils généraux vers les conseils régionaux, qui ont la responsabilité, depuis 2004, d'organiser les formations sanitaires et sociales. Il devrait donc revenir à l'État d'abonder leur financement en conséquence, mais une telle proposition serait tombée sous le coup de l'article 40.

Personne ne comprendrait que la même situation se reproduise cette année. Nous attendons des réponses précises, monsieur le secrétaire d'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Comme l'a indiqué Christian Eckert, l'Association des départements de France a saisi les parlementaires pour les alerter. Il ne s'agit pas, de sa part, d'un refus de principe de participer à des actions visant à traiter le drame du chômage des jeunes, mais d'une volonté de rappeler la nécessité de ne pas accroître les charges des collectivités locales par des décisions gouvernementales non concertées. Que des charges nouvelles incombent aux collectivités locales lorsque la décision en a été prise d'un commun accord avec le Gouvernement ou toute autre instance est une chose ; qu'on leur impose des charges supplémentaires sans concertation préalable en est une autre.

La position de l'ADF est, à cet égard, parfaitement raisonnable. Ses responsables, loin d'être des esprits chagrins, ont formulé des propositions constructives. Afin de remédier aux difficultés rencontrées par les 18-25 ans, ils suggèrent de reprendre la proposition issue de l'amendement dans un texte global sur l'avenir des jeunes, ce qui présenterait l'avantage d'une plus grande lisibilité des politiques leur étant destinées.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Au-delà des problèmes posés aux collectivités territoriales, je souhaiterais évoquer les stages eux-mêmes, obligatoires dans certains cursus, comme les études d'orthophonie. En décembre dernier, des étudiants ont attiré notre attention sur la difficulté de trouver des stages dans les cabinets libéraux, qui disent, pour la plupart, ne pouvoir se permettre d'offrir une rémunération en plus de la formation qu'ils doivent assurer. Or l'absence de maître de stage handicape la validation de l'année d'études en cours.

Je ne doute pas du caractère vertueux de la volonté du législateur en ce domaine, mais je me demande si des études d'impact ont été menées dans le secteur privé pour savoir ce qu'il en était des validations de stages.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Nous sommes sur une ligne de crête. D'un côté, les fédérations étudiantes demandent à juste titre une amélioration de la rémunération des stages. De l'autre, il existe un risque de diminution des offres de stage.

S'agissant de l'article 40, notre assemblée a pour tradition de ne pas l'appliquer aux dispositions dont le coût est supporté pour l'essentiel par les entreprises privées et de façon seulement marginale par le Trésor public – ce qui, en l'espèce, est le cas.

J'ajoute que les départements disposent à l'évidence de marges de productivité. Ils peuvent donc faire preuve de solidarité envers les étudiants, en réalisant des économies dans d'autres secteurs. Nous pourrons leur faire des propositions en ce sens…

Je crois que nous devons être davantage attentifs au risque d'une diminution des offres de stage qu'au problème posé aux départements par cette mesure de solidarité justifiée à l'égard des étudiants. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Dupré

Monsieur Méhaignerie, les bras m'en tombent ! Je ne suis pas conseiller général, mais je sais que les départements ont subi une aggravation de leur situation budgétaire du fait de transferts de charges pour lesquels elles n'ont toujours pas reçu de compensation. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Dans ces conditions, comment pourraient-elles donc dégager des marges de manoeuvre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement, n° 15, tendant à supprimer l'article.

Puis-je considérer qu'il a déjà été défendu, monsieur Muzeau ?

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Je remercie le président Méhaignerie d'avoir fait preuve de hauteur de vues.

Il faut bien comprendre ce dont il est question. Certains organismes de droit public ou de droit privé instrumentalisent de manière plus ou moins systématique les jeunes en stage, de sorte que ceux-ci, venus étoffer les effectifs, ne perçoivent aucune rémunération. Or, les jeunes sont aujourd'hui confrontés à de graves difficultés d'insertion. Je suis moi-même responsable d'un exécutif local et, même si je suis très attaché à l'équilibre des finances, je considère qu'il faut savoir, dans la période actuelle, hiérarchiser les priorités.

Cet article, je le rappelle, ne concerne que les employeurs de droit privé. Mais, quand bien même les organismes de droit public seraient concernés, ils sont certainement à même de comprendre qu'il est parfaitement justifié qu'un jeune faisant un stage chez eux reçoive, au bout de deux mois, une rémunération de 380 euros, soit 30 % du SMIC, avec exonération totale de charges.

Soyons sérieux ! Nous sommes tous intervenus, les uns après les autres, pour dire qu'il était inadmissible que des jeunes continuent d'être exploités en faisant des stages non rémunérés, et voici que, pour la première fois, une proposition de loi apporte des éléments de rationalisation et permet de lutter contre les stages hors cursus. Soyons à la hauteur de l'enjeu, sans nous en tenir à la question de l'impact financier sur les collectivités locales : imaginons ce que pourraient penser les jeunes qui nous entendraient ! Je ne doute pas un instant qu'améliorer le sort des jeunes est votre préoccupation première et que les interventions suivantes montreront votre détermination à avancer en ce sens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Monsieur le secrétaire d'État, vous nous avez fait un beau « numéro », mais qui ne répond nullement à la question posée. Je vous rassure, nous n'allons pas voter contre l'article 8 bis : ramener de trois à deux mois la durée de stage nécessaire pour avoir droit à une gratification est une bonne mesure, qui fera sans doute l'unanimité. En revanche, nous voulons obtenir des précisions s'agissant du problème que nous avons évoqué. Votre prédécesseur nous avait promis, la main sur le coeur, qu'il serait réglé ; il ne l'est toujours pas.

Vous nous avez fait part de votre détermination à faire participer financièrement la collectivité que vous dirigez, mais je vous indique, au cas où vous ne le sauriez pas, que votre générosité ne trouvera pas l'occasion de s'exercer, car elle ne sera pas concernée !

Notre question a trait à la formation des travailleurs sociaux et aux métiers du secteur sanitaire et social, qui relève directement de votre secrétariat d'État. Certes, ainsi que le soulignait Pierre Méhaignerie, il ne s'agit sans doute pas de sommes énormes, mais il importe d'agir. L'an dernier, un petit grain de sable s'était glissé, qui a causé de nombreuses difficultés. Or, il est toujours présent dans la mécanique et risque d'entraîner des problèmes de plus grande ampleur, provoquant une exaspération croissante.

La solution la plus simple serait que l'État prévoie une petite enveloppe pour financer directement les organismes, car ces formations se déroulent la plupart du temps dans un cadre très structuré.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Monsieur le président, je vous demanderai, après le vote, une courte suspension de séance afin de me concerter avec les membres de mon groupe à propos du déroulement de la séance.

(L'amendement n° 15 n'est pas adopté.)

Article 8 bis

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue le jeudi 4 juin 2009 à zéro heure quarante, est reprise à zéro heure quarante-cinq.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La séance est reprise.

Je vous rappelle que les articles 9 à 11 et l'amendement portant article additionnel après l'article 11 ont été réservés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

La proposition de loi du rapporteur avait rétabli l'allocation équivalent-retraite pour l'année 2009. J'y vois la preuve que sa suppression, décidée dans le cadre de la loi de finances pour 2008, était bel et bien hâtive. Dans les faits, qu'avons-nous vu ? Que l'emploi des seniors, formalisé dans un plan national ad hoc, ne se développe pas bien.

Certes, vous allez arguer de la crise. Nous serons cependant attentifs à l'amendement du Gouvernement, que le rapporteur a appelé de ses voeux après que le bureau de la commission a opposé à ce rétablissement article l'irrecevabilité financière.

Nous devons considérer de façon concrète le profil des personnes concernées, que chacun de nous a pu rencontrer, et dont le parcours est souvent douloureux, marqué par une grande précarité financière. De qui s'agit-il ? De seniors approchant de soixante ans, souvent de chômeurs de longue durée, voire en fin de droits, parfois créateurs d'entreprise, généralement titulaires d'un minimum de trimestres cotisés et validés, et également bénéficiaires de l'allocation spécifique de solidarité.

Monsieur le secrétaire d'État, il faudrait les autoriser à faire valoir leurs droits à la retraite de façon anticipée tout en continuant de travailler dans leur entreprise afin de valider des trimestres supplémentaires, sans que leur soit opposé le plafonnement actuel qui leur interdit de dépasser un certain pourcentage de leur dernier salaire d'activité.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n° 1 rectifié.

La parole est à M. le secrétaire d'État.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Voici encore un sujet sur lequel nous avons travaillé conjointement avec les parlementaires et les partenaires sociaux.

Dans le contexte de crise que nous connaissons, il ne s'agit pas de rétablir un dispositif de préretraite, puisque l'AER n'en est pas un, mais bien de tenir compte de la situation difficile de demandeurs d'emploi proches de la soixantaine, qui ont peu de perspective, dans le contexte actuel, de retrouver un emploi, en prenant à leur égard une mesure de justice susceptible de leur permettre de traverser cette période de difficulté économique.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Bernard Gérard, inscrit sur l'article 12 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Gérard

Les salariés à temps partiel attendent de pouvoir effectuer des heures supplémentaires, chaque fois que c'est possible, dans des conditions totalement garanties par rapport aux exigences du droit du travail. C'est à cette préoccupation que répond l'article 12 bis, voté à l'unanimité en commission.

Cet article est en parfaite conformité avec la directive européenne de 1997, selon laquelle il convient d'aider les salariés à temps partiel à faire des heures supplémentaires chaque fois que c'est possible, ainsi qu'avec les dispositions de l'article 4 de la loi du 1er décembre 2008 qui, dans le cadre du RSA et des négociations annuelles obligatoires, fait obligation aux chefs d'entreprise de réfléchir aux possibilités d'optimiser les heures supplémentaires pour les salariés à temps partiel.

Cet outil vise à faire reculer la précarité et permet aux salariés d'une entreprise de pouvoir augmenter leur temps de travail et donc leur pouvoir d'achat.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Roland Muzeau, pour soutenir l'amendement n° 19 tendant à supprimer l'article.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Sagesse.

(L'amendement n° 19 n'est pas adopté.)

(L'article 12 bis est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n° 30, portant article additionnel après l'article 12 bis.

La parole est à Mme Françoise Branget.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Branget

Cet amendement vise à compléter les dispositions existantes en direction des seniors.

Un salarié pouvant bénéficier d'une retraite à taux plein peut désormais cumuler un emploi avec une retraite. Toutefois, si une rupture du contrat de travail est exigée par la loi, les nouvelles relations de travail ne sont pas prévues. Le contrat à durée déterminée tel que prévu aujourd'hui ne semble pas adapté, car, il faut entrer dans des cas de figure très précis. Quant au CDI, il ne correspond pas à la situation. Il faut donc que la loi incite les pouvoirs publics à inventer un CDD spécial pour cette catégorie de salariés.

(L'amendement n° 30, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Roland Muzeau, pour soutenir l'amendement n° 20 tendant à supprimer l'article 13.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Il est défendu.

(L'amendement n° 20, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(L'article 13 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 13.

La parole est à Mme Françoise Branget, pour soutenir l'amendement n° 34.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Branget

Cet amendement s'inspire de l'article L. 321-1 du code du travail relatif au licenciement économique.

Il vise à modifier l'alinéa 3 de l'article L. 1226-2 du code du travail, en prévoyant qu'en cas d'inaptitude l'employeur doit envisager un reclassement, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise, aussi proche que possible de l'emploi précédemment occupé, en fonction des possibilités de l'entreprise ou, le cas échéant, des entreprises du groupe auquel elle appartient.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

La commission a rejeté cet amendement, qui aurait pour effet d'atténuer la responsabilité de l'entreprise en mentionnant une simple « possibilité », alors que les aménagements de postes ou de temps de travail sont aujourd'hui une obligation.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Avis défavorable. L'amendement est très intéressant, mais nous sommes presque parvenus à l'aboutissement du travail engagé il y a plus d'un an sur la médecine du travail.

(L'amendement n° 34 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à Mme Françoise Branget, pour soutenir l'amendement n° 33.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Branget

Par cet amendement, je souhaite compléter l'article L. 1251-64 du code du travail par un alinéa ainsi rédigé : « L'accord formalisé entre les parties devra indiquer notamment le fonctionnement du portage, fixer les obligations réciproques quant aux conditions de facturation du client et insister sur le respect de la confidentialité relative aux travaux confiés à l'intervenant par le client. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

La commission a rejeté cet amendement, car des négociations sont en cours avec les fédérations de travail temporaire sur le portage, suite à la loi que nous avons votée l'année dernière sur la modernisation du marché du travail. Les négociations n'ont jamais été aussi près d'aboutir, mais beaucoup de chemin reste à parcourir ; il est donc souhaitable d'attendre leur terme. Aussi proposé-je à Mme Branget de retirer son amendement.

(L'amendement n° 33 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour soutenir l'amendement n° 91.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Monsieur le président, je vous propose de défendre également l'amendement n° 90.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Excellente idée, madame la députée. J'appelle donc également l'amendement n° 90.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure de La Raudière

L'amendement n° 91, qui avait été soutenu par un certain nombre de collègues, a déjà été examiné dans le cadre de la loi de modernisation de l'économie. Cette fois-ci, il est cosigné par douze députés. En fait, il s'agit d'un amendement d'appel sur la problématique des seuils sociaux.

Loin de moi l'idée de supprimer le dialogue social dans l'entreprise,…

Debut de section - PermalienPhoto de Laure de La Raudière

…auquel je suis très attachée, comme nous tous.

Chacun doit avoir conscience que la cinquantième personne embauchée dans une entreprise ne fait que du travail administratif, c'est-à-dire qu'elle n'a aucune production.

Mes chers collègues, nous avons tous dans vos circonscriptions des entreprises qui comptent quarante-neuf salariés. Demandons-nous pourquoi !

Je vous donnerai l'exemple d'une entreprise installée à La Loupe, dans ma circonscription, et dont le directeur refuse de passer au-dessus de quarante-neuf salariés malgré un potentiel de croissance de douze emplois.

Je souhaite que nous puissions trouver, tous ensemble, avec les partenaires sociaux, une piste de réflexion. Pour ma part, je propose le gel des seuls sociaux pendant trois ans, le temps de vérifier si, comme je le suppose, cela aboutit à la création d'emplois.

Peut-être pourrions-nous prévoir aussi d'alléger certaines tâches administratives liées au passage à cinquante salariés. Je demande au Gouvernement de réfléchir sur le sujet, car l'effet de seuil dissuade plus d'un chef d'entreprise d'embaucher du personnel supplémentaire, ce qui est largement dommageable à l'emploi, aux Français et au développement de notre économie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

La commission a rejeté ces deux amendements, car le ministre du travail a sollicité les partenaires sociaux pour traiter la question des instances représentatives du personnel, notamment au regard des seuils – tout en sachant qu'il nous faudra en discuter ici même.

C'est pourquoi je propose à Mme de La Raudière de retirer ses deux amendements. À défaut, je maintiendrai l'avis défavorable de la commission.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Madame de La Raudière, je constate une fois de plus votre bonne connaissance du terrain. La question des seuils est un vrai obstacle au développement de l'emploi ; elle est sur la table, toutes nos administrations y ont travaillé. Le travail commun entre le Gouvernement et les partenaires sociaux est engagé et il doit aboutir avant l'été. Si vous en êtes d'accord, je prendrai contact avec vous pour vous rendre compte personnellement de l'évolution des discussions.

Je profite de ce dernier amendement – étant donné que je vais céder ma place, au banc du Gouvernement, à Mme Kosciusko-Morizet – pour remercier l'ensemble des parlementaires pour la qualité des débats sur les articles qui relevaient plus précisément de mon champ de compétences et de celui de Brice Hortefeux.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Cela montre que l'on peut, sur une proposition de loi, trouver un bon terrain d'équilibre entre majorité, opposition, législatif, exécutif et partenaires sociaux.

(Les amendements nos 91 et 90 sont retirés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Nous en venons aux articles précédemment réservés.

Sur l'article 9, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Vincent Descoeur.

M. Vincent Descoeur. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, plusieurs des mesures que nous examinons dans le cadre de cette proposition de loi présentent un intérêt certain en termes d'aménagement du territoire, et je tiens à souligner le travail effectué en la matière par Jean-Frédéric Poisson. C'est vrai des groupements d'employeurs dont nous avons examiné les modalités de développement ; c'est encore plus vrai du titre IV, qui traite de la promotion du télétravail.

Le télétravail porte incontestablement en lui de véritables perspectives de développement. J'en veux pour preuves tant la proportion de télétravailleurs, très inférieure dans notre pays à la moyenne européenne, que les premiers résultats d'expériences originales conduites en milieu rural, notamment dans le Cantal, que je connais bien. Donner à la faveur de ce texte une base légale au télétravail en vue de le reconnaître en tant que tel est une excellente chose. Certes, les territoires ruraux ne pourront qu'en bénéficier, mais les premiers bénéficiaires, ne l'oublions pas, seront les hommes et les femmes – plus particulièrement les femmes en milieu rural – qui souffrent aujourd'hui de l'isolement géographique ainsi que de l'éloignement de tout employeur potentiel.

L'article 9 évoquant « l'outil de travail et les moyens de travail mis à disposition sous l'angle des obligations de l'employeur », je tiens à appeler votre attention sur un dispositif visant à mettre à disposition des télétravailleurs des moyens modernes dans des conditions économiques très favorables : il s'agit des télécentres, portés par des collectivités. Je me réfère notamment à l'expérience menée dans le département du Cantal, et que vous avez bien voulu citer, madame la secrétaire d'État, dans le cadre d'un appel à projet de la DIAC. Celui-ci a en effet permis de créer sept télécentres dans des communes rurales où celles et ceux qui souhaitent devenir télétravailleurs peuvent trouver un accompagnement, notamment pour accéder au statut de télétravailleur indépendant. J'insiste sur l'importance particulière que revêtent l'accompagnement et les dispositifs d'animation et de formation, indispensables pour accompagner efficacement la création d'emplois – objectif clairement affiché par ce texte.

Enfin, j'inviterai l'État à aller plus loin encore et à accompagner les initiatives des collectivités en participant notamment à des expériences présentant une vraie valeur ajoutée territoriale. C'est ainsi que je lui propose d'encourager ces expériences en montrant l'exemple : il pourrait notamment décider de délocaliser des emplois publics correspondant à des taches ou à des missions qui pourraient être remplies, plutôt qu'à proximité immédiate du ministère de tutelle, dans des territoires où s'exprime clairement la volonté d'assurer le développement du télétravail.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Morel-A-L'Huissier

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, je voudrais revenir très rapidement sur l'atmosphère globale qui entoure le télétravail, notamment sur les définitions du télétravail ainsi que sur les blocages que nous avons connus dans notre pays en la matière.

Les choses sérieuses concernant le télétravail débutent dans les années soixante-dix. Le premier choc pétrolier obligeant au pragmatisme en matière de dépenses énergétiques, la question des économies d'énergies devient alors un enjeu d'importance. C'est ainsi que Jack Nilles, chercheur à l'université de Californie du Sud, se penche sur le teleworking, avec l'objectif de réduire les déplacements des salariés. Soutenu par le développement de l'informatique et des télécommunications, son projet est mis en oeuvre par une grande compagnie d'assurance américaine. De cette époque datent les mots teleworking et telecommuting, traduits en français par les termes « télétravail » et « travail télépendulaire ».

En France, il faut attendre le début des années quatre-vingt-dix pour que le télétravail entre dans le vocabulaire courant. On dénombre à l'époque une centaine de définitions différentes, comme le note Anne Daubrée dans Travail et nouvelles technologies. Dix ans plus tard, en 2003, les avantages et les inconvénients du télétravail sont loin d'être identifiés, d'autant que le mot est entre-temps devenu, en France, tabou et synonyme d'échec. Cette résistance à l'idée de télétravail a longtemps bloqué, dans notre pays, l'ébauche d'une réflexion avancée sur les nouvelles organisations du travail et l'émergence des technologies de l'information et de la communication.

Je voudrais revenir très rapidement sur l'évolution des définitions du télétravail ainsi que sur les raisons de l'échec de ce concept dans notre pays. Une première définition du télétravail est proposée en 1973 et le désigne comme « toute forme de substitution, par l'usage des TIC, aux déplacements normaux liés au travail ». Vingt ans plus tard, la DATAR précise que « le télétravail concerne toute activité tertiaire dont le traitement s'effectue à distance des utilisateurs dans des lieux structurés de façon industrielle et dont la vocation est d'utiliser les moyens de communications électroniques ». En 2002, on définit le télétravail comme « une activité professionnelle exercée hors de l'entreprise grâce à une activité télématique ». Nous pourrions, à l'envi, multiplier les exemples. Je voudrais simplement vous faire toucher du doigt que trois composantes sont systématiquement retenues : l'usage des TIC, l'organisation du travail et la dimension spatiale.

Parmi les raisons de l'échec du télétravail dans notre pays, on peut citer : l'usage, plus marqué que dans d'autres pays, du Minitel, qui a retardé l'appropriation des nouvelles TIC ; la résistance aux changements d'habitudes, notamment en termes de management induit par l'apparition des TIC ; une réticence syndicale avérée, notamment de la part de la CGT ; une perception négative de ce mode de travail trop souvent assimilé au travail à plein-temps à domicile ; une certaine méfiance envers l'apparition de salariés dont l'activité s'exerce pour partie en dehors de l'entreprise – 15 % des entreprises récemment consultées affirmaient encore qu'il s'agit d'un problème essentiel qu'elles devront traiter dans les années à venir – ; l'absence de véritables aides gouvernementales au développement du télétravail ; le déficit en équipements et en réseaux.

Afin de bien fixer les termes du débat, je tiens à donner quelques chiffres : 15 % des foyers étaient équipés d'un ordinateur en 1995, 33 % en 2001, 53 % en 2007 – contre 67 % aux Pays Bas. Le nombre de particuliers abonnés à Internet s'élevait à 8 % de la population en 2000, à 18 % en 2001, à 37 % en 2007. Quant à la téléphonie mobile, 60 % de la population y était abonnée en 2005, pour 80 % aujourd'hui.

Ces quelques observations permettent de camper le sujet et de mettre un terme à une certaine inculture française sur le télétravail. Chacun s'accorde enfin à reconnaître aujourd'hui les avantages du télétravail en termes de rapport qualité-coût du travail, d'environnement, de qualité de vie, de conservation de l'espace ou de management. Aussi souhaiterais-je que nos débats, loin de galvauder le mot « télétravail », permettent d'aborder tous les points qui ont fait l'objet d'un accord entre partenaires sociaux, à savoir la définition du télétravail et du télétravailleur, le volontariat, l'équipement de travail, la santé et la sécurité, l'organisation du travail, la réversibilité, les conditions d'emploi, la protection des données, la vie privée, la formation et les droits collectifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Que le Gouvernement et sa majorité aient pour ambition, en cette période de destruction massive d'emplois dans le secteur industriel – 2 500 suppressions pour la seule journée d'avant-hier –, de favoriser de nouvelles formes de travail, en l'occurrence le télétravail, est plus que discutable, car cela risque d'aggraver la précarité que connaissent déjà les salariés tout en allant, comme le craint Jean-Emmanuel Ray, dans le sens de la « télédisponibilité généralisée ». Mais que d'aucuns aient voulu profiter de l'occasion pour remettre en cause les protections dont bénéficiaient ou bénéficient encore les salariés de ce pays – le droit aux congés consécutif à une maladie ou à un accident, à la maternité et à l'éducation des enfants – est une provocation supplémentaire, en l'occurrence totalement inacceptable, dirigée contre les personnes en arrêt de maladie et les salariés en général, déjà soumis à d'extrêmes pressions, voire au chantage à l'emploi et à des formes d'organisation du travail déstructurantes pour leur santé mentale et physique.

Le désormais trop célèbre amendement Lefebvre…

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Vous voulez le passer par pertes et profits, mais il existait bien !

Il prévoyait tout bonnement que les salariés puissent continuer de travailler de chez eux durant un congé maladie ou un congé maternité !

Cet amendement, au demeurant le seul déposé par son auteur sur l'ensemble du texte, a fait l'unanimité contre lui, à l'exception notable de l'ex-ministre du travail et actuel secrétaire général de l'UMP, qui défendait cette proposition et se refusait à y voir un recul social.

Les médecins du travail et la FNATH – Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés – ont vivement réagi à cette proposition, qui est tout sauf innocente, car elle caresse le fantasme des arrêts de maladie de complaisance et témoigne, comme le souligne la fédération, d'une « méconnaissance […] du rôle et du sens de l'arrêt maladie, qui a pour objectif de permettre aux salariés de se reconstruire physiquement et mentalement, et des relations en entreprise » : en d'autres termes, une méconnaissance, voire un mépris de la dégradation réelle de la santé des salariés, épuisés mais continuant coûte que coûte de travailler, alors même qu'ils souffrent de pathologies professionnelles largement invalidantes, tels les troubles musculo-squelettiques.

Comme la plupart des principaux syndicats de salariés qui ont dénoncé l'amendement Lefebvre, j'ai pensé qu'il n'était qu'un leurre, un chiffon rouge agité pour détourner l'attention de la situation catastrophique de l'emploi ou de certains autres amendements à cette proposition de loi, déposés par nos collègues de l'UMP et qui sont tout aussi régressifs, tels ceux de M. Tian visant à diminuer l'indemnité de licenciement des salariés déclarés inaptes à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, ou à exiger un élément intentionnel pour caractériser le délit de marchandage.

Le télétravail, nouvelle mouture de l'exploitation des salariés, ne saurait en aucun cas être considéré comme une sécurisation des parcours professionnels ou comme un recours contre le chômage massif, aujourd'hui produit en partie par la politique du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Monsieur le président, je m'en tiendrai à deux remarques.

Tout d'abord, les trois articles qui viennent nous permettront de revenir à une discussion que nous avons déjà eue à l'occasion d'un article précédent : il s'agira de nouveau pour nous de compléter la proposition de loi par des dispositions issues de l'accord national interprofessionnel de 2005. Je sais d'ores et déjà ce qui nous sera répondu, à savoir qu'il ne saurait être question de tout mettre dans cette proposition de loi, que certaines mesures relèvent de la loi et d'autres de l'accord. Il n'en demeure pas moins que l'accord de 2005 prévoit des verrous et des protections qui n'ont pas été repris dans le texte.

Ensuite, comment ne pas évoquer, à la suite de Roland Muzeau, l'amendement de M. Lefebvre, courageusement retiré à l'occasion d'un rappel au règlement par son auteur, lequel n'a pas reparu dans l'hémicycle depuis que nous avons commencé l'examen du texte ? Ce sont là des façons quelque peu méprisantes envers l'ensemble de ses collègues… Faut-il rappeler que cet amendement a fait l'unanimité contre lui, à l'exception notable de Xavier Bertrand et de Jean-François Copé, qui a déclaré ne pas avoir d'avis sur la question, ce qui peut prêter à sourire, s'agissant du chantre de la coproduction législative ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

C'est bien le seul sujet sur lequel il n'a pas d'avis définitif !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Je pense que ce sujet reviendra dans l'hémicycle un jour ou l'autre : il s'agit d'une tactique que nous commençons à bien connaître, laquelle consiste à lancer une proposition qui fait des ronds dans l'eau, puis, lorsque l'eau s'est calmée, à y revenir de façon moins brutale afin d'en faire adopter une version moins provocante, pour finir, comme cela a déjà été souligné, par « autoriser » les travailleurs à renoncer à leurs droits : c'est ainsi qu'on les autorisera à renoncer à leurs congés payés, à leurs congés de maladie ou au repos dominical.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Certes, ils pourront toujours le faire depuis leur domicile, en télétravaillant ! Pourtant, comme le reconnaît le rapport lui-même, le télétravail concerne un nombre déjà important de salariés : de 7 % pour certaines catégories professionnelles à 20 % pour les cadres ! Il est temps de se poser la question de savoir si certains cadres – j'en connais – ne finissent pas, ordinateur portable et Internet aidant, par travailler de façon permanente, la semaine au bureau, le soir et le dimanche à la maison, ce qui pose notamment la question des rythmes professionnels, celle de la santé, celle aussi des heures supplémentaires. Ces salariés font en effet des heures supplémentaires, plus ou moins déguisées, payées ou non, taxées ou détaxées – on ne sait plus très bien ! Comment, dès lors, mesurer le temps de travail ? Nous poserons la question, tout en reconnaissant la nécessité pour la société d'une productivité élevée.

Je voudrais revenir, en conclusion, sur ce que Mme de La Raudière disait des seuils, car cela témoigne de la différence d'état d'esprit qui existe entre nous. Vous disiez, madame, qu'en passant de 49 à 50 salariés, on ne gagne rien en termes de production. Mais avoir des comités d'entreprise qui fonctionnent et un meilleur dialogue social dans l'entreprise, cela n'est-il pas source de gains de productivité ? Faut-il vraiment imiter ces cabinets juridiques où l'on paie les avocats à l'heure sans prendre en considération la vie dans l'entreprise et la qualité des relations au travail ? Beaucoup de chefs d'entreprise considèrent au contraire qu'un dialogue social qui fonctionne – ce qui passe par les comités d'entreprise – est un gage de rentabilité supplémentaire pour l'entreprise. Je ne partage donc pas votre raisonnement sur les seuils.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Il nous faut clarifier ce dont nous parlons et la définition du télétravail. Je m'appuie ici sur l'excellent rapport de Jean-Frédéric Poisson, qui décrit le télétravailleur comme une personne qui travaille chez elle et qui, par des connexions informatiques, transmet son travail à l'entreprise et reçoit en retour des commandes.

Mais il y a parmi ces télétravailleurs des travailleurs « nomades », qui, comme le souligne le rapport, utilisent intensivement l'informatique et partagent leur temps de entre plusieurs lieux de travail, parmi lesquels leur domicile ne tient pas une place significative. Dans l'enquête INSEE, que mentionne également le rapport, le télétravail est défini comme le fait de travailler au moins une demi-journée par semaine hors des locaux de l'entreprise, tout en étant connecté à son système informatique.

On voit donc bien que le télétravail recouvre des situations extrêmement diverses, ce qui ressort également de l'accord-cadre européen et de l'accord national interprofessionnel du 19 juillet 2005, lequel reprend la définition communautaire du télétravail en précisant qu'elle a pour effet de couvrir les « salariés nomades » mais que le seul fait de travailler à l'extérieur des locaux de l'employeur ne suffit pas à conférer la qualité de télétravailleur. Il y a donc un problème de définition, qui peut amener à des confusions non seulement dans nos débats, mais surtout dans l'application des règles du jeu que nous sommes censés définir.

La question se pose donc de la transcription dans la loi d'une partie – selon vous – ou de la totalité – selon nous – des dispositions de l'accord-cadre européen sur le télétravail et de l'ANI du 19 juillet 2005.

Nous regrettons en particulier que vous n'ayez pas repris les dispositions concernant le respect de la vie privée, ni les éventuels moyens de surveillance, proportionnés à l'objectif poursuivi. L'employeur, dit l'accord-cadre européen, doit informer le salarié de toute restriction à l'usage des outils informatiques et de l'Internet et des sanctions afférentes, ce qui nous renvoie au débat que nous avons eu récemment dans cet hémicycle sur la loi HADOPI. Que se passe-t-il en effet si le travailleur télécharge illégalement des contenus sur l'adresse de son entreprise ? Est-ce lui ou la société qui est sanctionné ? Lui supprime-t-on sa ligne, et dans quelles conditions ?

Quant au respect de la vie privée, les partenaires sociaux nationaux ont tenu à spécifier que les plages horaires où le salarié doit être joignable doivent être délimitées, ce qui pose la question de l'application de la législation sur le temps de travail.

Enfin, vous n'avez pas repris, alors que cela nous semble nécessaire, les dispositions concernant les conditions de travail, et notamment le droit de visite du comité d'hygiène et de sécurité sur le lieu de travail, ou encore les mesures prises pour prévenir l'isolement du télétravailleur. N'oublions pas en effet que le télétravail disperse les travailleurs et les isole.

J'en termine en réaffirmant que les télétravailleurs doivent bénéficier des mêmes droits individuels et collectifs que leurs collègues, et nous nous inquiétons que vous ayez écarté certaines dispositions de l'ANI, que nous avons souhaité rétablir par nos amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement, n° 16, tendant à supprimer l'article 9.

La parole est à M. Roland Muzeau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Il est défendu.

(L'amendement n° 16, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n° 43.

La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Morel-A-L'Huissier

Il s'agit de compléter l'alinéa 3 par les mots : « et travail mobile ». Le télétravail est en effet une forme d'organisation du travail qui permet d'englober différentes formes de télétravail régulier répondant à un large éventail de situations et de pratiques. Elle inclut les salariés « nomades », mais le fait de travailler à l'extérieur des locaux de l'entreprise ne suffit pas à conférer à un salarié la qualité de télétravailleur.

Le caractère régulier exigé par la définition n'implique pas que le travail soit réalisé en totalité hors de l'entreprise et n'exclut pas les formes alternant travail dans l'entreprise et travail hors de l'entreprise. Le télétravail ne peut donc pas être réduit au travail à domicile, qui ne représente qu'un seul des modes d'exercice possible.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'état chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique

Défavorable. En effet, la formule actuelle donne une définition large du télétravail, sans le restreindre au télétravail à domicile.

(L'amendement n° 43 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi d'un amendement n° 44.

La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Morel-A-L'Huissier

Il s'agit de conserver, par cohérence, la définition du télétravail donnée par l'accord national interprofessionnel de 2005, étendu en juin 2006, dans la mesure où cela permet de respecter les accords déjà signés autant que les partenaires sociaux qui y ont pris part. En outre, cette définition présente l'avantage d'inclure de facto les nomades. Cette définition permet également d'englober différentes formes de télétravail régulier répondant à un large éventail de situations pratiques, sujettes à des évolutions rapides.

Je rappelle que l'ANI avait été précédé en 2002 par un accord-cadre européen, qui n'est pas une directive, et l'ensemble de mes amendements a pour objet de se rapprocher le plus possible de ce qu'ont élaboré les partenaires sociaux sur le télétravail.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Avis défavorable pour deux raisons. Sur la forme d'abord, je ne considère pas que nous ayons l'obligation stricte de transcrire mot pour mot le contenu des accords interprofessionnels. Je suis prêt à m'en expliquer en détail, et nous pourrons avoir ce débat dans le cadre de la commission des affaires sociales. Ce n'est pas pour moi une obligation formelle, a fortiori dans ce cas précis – et j'en viens à la raison de fond – où la définition retenue dans la proposition de loi inclut un élément essentiel qui ne figure pas dans l'ANI, ou pas au même endroit, à savoir la question du volontariat. La définition retenue par la proposition de loi inclut tous les éléments essentiels de la définition du télétravail qui figurent dans l'ANI et y ajoute cet élément, important pour le salarié. La commission a donc rejeté cet amendement.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'état chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique

Je préfère également la formulation initiale de la proposition de loi, qui opère une synthèse des dispositions de l'ANI, notamment sur le volontariat, même si les termes ne sont pas les mêmes. Il me semble donc, monsieur Morel-A-L'Huissier, que vous pourriez vous y ranger ; dans le cas contraire, l'avis du Gouvernement est défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Je souhaite demander au rapporteur et au Gouvernement une précision. Lorsque l'on évoque le fait que le télétravail concerne des tâches qui pourraient être accomplies dans les locaux de l'employeur, cela signifie-t-il que toute entreprise qui pratique le télétravail doit disposer d'une solution alternative et de locaux dédiés, ce qui interdirait, par exemple, que des entreprises se créent en n'employant que des télétravailleurs ? Cette précision est importante, pour éviter qu'une contrainte trop forte freine des initiatives reposant sur le télétravail.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'état chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique

Il n'est pas nécessaire que l'entreprise dispose de locaux pouvant accueillir les télétravailleurs, puisque certaines entreprises ne sont organisées qu'autour du télétravail. La formulation retenue vise à préciser qu'il s'agit d'un type de travail qui d'ordinaire s'effectue dans les locaux, mais la vertu du télétravail est qu'il permet de réduire l'espace, et la loi n'est pas incompatible avec ce type de démarche.

(L'amendement n° 44 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je suis saisi de deux amendements, nos 67 et 48 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement n° 48 rectifié fait l'objet d'un sous-amendement n° 103.

La parole est à M. Michel Liebgott, pour défendre l'amendement n° 67.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

On pourrait discuter sans fin du fait de savoir s'il faut intégrer ou non toutes les dispositions de l'accord national interprofessionnel dans la loi. Il s'agit ici de délimiter la vie privée et la vie professionnelle, et il nous paraît essentiel, s'agissant du télétravail et des abus qu'il peut engendrer, que les dispositions prévues dans l'ANI soient reprises par la loi, qui protège le salarié. Celui-ci, on le sait, demeure toujours dans une position d'infériorité par rapport à son employeur. Cette inégalité de départ ne disparaît pas dans le télétravail, et elle doit être corrigée par la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier, pour défendre l'amendement n° 48 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Morel-A-L'Huissier

Il s'agit de compléter l'article par l'alinéa suivant : « De fixer, en concertation avec le salarié, les plages horaires durant lesquelles il peut habituellement le contacter. »

En effet, le télétravail est un mode d'organisation du travail qui touche de si près, notamment lorsqu'il est exécuté au domicile, la vie personnelle du salarié qu'il convient d'affirmer la protection de la vie privée du salarié et d'encadrer les périodes où celui-ci peut être contacté.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

La parole est à M. le rapporteur, pour défendre le sous-amendement n° 103 et donner l'avis de la commission sur les deux amendements en discussion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Le sous-amendement n° 103 est rédactionnel.

La commission a repoussé l'amendement n° 67, au motif que la notion de vie privée ne figure pas dans les codes. Il nous paraît donc difficile de l'y introduire à cette occasion.

La commission a en revanche accepté l'amendement n° 48 rectifié, qui devrait satisfaire M. Liebgott, à qui je propose donc de retirer son amendement.

(L'amendement n° 67 est retiré.)

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'état chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique

Favorable, à l'amendement comme au sous-amendement.

(Le sous-amendement n° 103 est adopté.)

(L'amendement n° 48 rectifié, sous-amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Mes chers collègues, il est une heure trente. L'Assemblée tenant séance demain matin et le règlement nous imposant huit heures d'interruption entre deux séances, je vais interrompre nos travaux.

La suite de la discussion est renvoyée à cet après-midi, quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Prochaine séance, jeudi 4 juin à neuf heures trente :

Questions orales sans débat.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 4 juin 2009, à une heure trente.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma