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Séance en hémicycle du 10 mai 2011 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, de la proposition de loi visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique (n°s 3301, 3392).

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

J'ai reçu de M. Yves Cochet et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.

La parole est à M. Yves Cochet.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Monsieur le président, madame la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, messieurs les rapporteurs, chers collègues, je commencerai par revenir sur les contrevérités que j'ai entendu proférer cet après-midi, notamment par MM. les rapporteurs.

Vous avez, monsieur Havard et monsieur Chanteguet, inventé une nouvelle classification des hydrocarbures, hors de toute norme internationale. Les hydrocarbures non conventionnels sont définis par la matière elle-même, selon l'endroit où ces matières sont accumulées. Ils sont connus, ils se trouvent on shore, dans des poches, des réservoirs, dans des champs pétroliers ou gaziers. Les hydrocarbures non conventionnels sont les hydrocarbures de roche mère. C'est du reste la dénomination exacte qui a été employée par les inspecteurs généraux de l'industrie et de l'environnement dans leur rapport pour les distinguer du gaz que l'on trouve dans les mines.

Pour éviter toute ambiguïté, il était préférable de parler d'hydrocarbures de roche mère ou de gaz de schiste, deux dénominations à peu près équivalentes. En anglais, il n'y a qu'un mot : shale gaz.

Or vous changez la définition, en disant que ce qui est non conventionnel, ce n'est pas la matière, mais le procédé technique de forage, éventuellement d'exploration et ensuite d'exploitation. Dans aucune instance internationale, il n'y a de techniques non conventionnelles. Il peut y avoir des hydrocarbures non conventionnels suivant leur localisation géologique.

Vous avez vous-même relevé une fragilité juridique. Pour lever cette ambiguïté, il suffit de parler d'hydrocarbures de roche mère ou de schiste.

Ce qui vous inquiète, ce sont moins les hydrocarbures que la fracturation hydraulique. On ne connaît que cette technique pour essayer d'extraire les hydrocarbures de roche mère, on le voit aux États-Unis et au Canada. Elle peut d'ailleurs être utilisée pour des hydrocarbures conventionnels, traditionnels, afin d'accélérer les débits à la fin de l'exploitation d'un champ. Encore que les pétroliers eux-mêmes en reviennent car, lorsque vous exploitez trop vite, que vous accélérez le débit avec de l'hydro-fracturation, vous perdez de la matière. Ce que l'on appelle la réserve ultimement récupérable est moins forte que celle que vous auriez obtenu sans recourir à l'hydro-fracturation.

En réponse à une question d'actualité, Mme la ministre a déclaré cet après-midi que tous les commissaires présents en commission du développement durable ont, la semaine dernière, voté pour la loi nouvelle, la seconde version.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Eh bien, c'est faux. M. Chassaigne et moi-même avons voté contre.

Le président Grouard s'est interrogé sur la manière d'éviter tout recours, mais il a ajouté qu'en tout état de cause il valait mieux voter la loi. Je ne partage pas cet avis.

D'une part, une mission conjointe du Conseil général de l'industrie, de l'énergie et des technologies et du Conseil général de l'environnement et du développement durable est en cours. Le rapport d'étape a été rendu public il y a quelques jours. D'autre part, la commission du développement durable a confié une mission d'information à M. François-Michel Gonnot et M. Philippe Martin. Et voilà qu'une proposition de loi a été déposée avant même que ces deux missions n'aient eu le temps de nous éclairer. Nous pourrions légiférer de manière plus sérieuse et ne pas voter dès demain cette loi. Nous pourrions attendre la publication des deux rapports afin d'être plus informés et en mesure de légiférer à la rentrée avec un peu plus de raison.

Pourquoi avons-nous déposé une motion de procédure ? Parce que, par rapport à la version initiale, le texte a profondément changé, M. Grouard lui-même l'a reconnu.

Au départ, cette proposition, dans sa version initiale, était claire du point juridique et politique. Maintenant, elle a des apparences trompeuses. L'article 1er n'a pas beaucoup changé. Il faut pouvoir éventuellement élargir l'interdiction de la fracturation hydraulique à d'autres types de forages. Pour ma part, mon opposition ne se limite pas à la fracturation hydraulique. La proposition de loi telle qu'elle est présentée aujourd'hui a reformulé l'article 2, ce qui est inacceptable. Nous n'avions pas été prévenus des subtilités juridiques qui ont été introduites en catimini. Des modifications importantes ont bouleversé ce qui, au départ, était un texte acceptable que j'aurais pu voter en l'état, sans présenter le moindre amendement, même si je n'étais pas totalement convaincu. Les rapporteurs, qui ont bien travaillé au départ, se font désormais complices d'une reculade que je déplore.

Sur ce dossier, le Gouvernement et l'UMP jouent un double jeu et contournent le débat public. On l'a vu l'an passé avec M. Borloo qui a signé un peu vite des permis d'exploration, il l'a du reste reconnu. Cela laisse supposer que personne dans son ministère n'y a regardé de plus près, ce qui est pour le moins étonnant, son ministère ayant été le plus important après celui du Premier ministre. Bref, il avait les moyens de savoir ce qu'il en était.

En commission, vous avez, monsieur Chanteguet, défendu l'idée d'un durcissement juridique parce que l'on n'était pas certain que les industriels ne fassent pas de recours avec la version initiale. Vous nous avez montré l'arrêté par lequel le Gouvernement autorise l'exploration. Cette autorisation est muette, si je reprends vos termes.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Permettez-moi de faire le parallèle avec un permis de construire d'une maison, délivré par les maires. Ce permis figure sur une seule page et indique que vous avez le droit ou non de construire votre maison. En amont, il y a une demande de permis de construire dans laquelle sont indiqués la surface, le nombre d'étages, de portes, de fenêtres, l'orientation etc.

En amont d'une demande de permis d'exploration, un dossier a été déposé par les industriels. Nous voulons, madame la ministre, avoir accès à ces dossiers, puisque maintenant, on prône la transparence. Dans le nucléaire, il paraît qu'il y a transparence, on l'attend toujours ! Transparence, démocratie, tout le monde a le droit de savoir, ne cesse-t-on d'entendre. Donnez-nous, madame la ministre, les dossiers de toutes les demandes de permis d'exploration. Nous sommes capables de les lire, nous sommes aussi des techniciens. Nous verrons alors s'il ne s'agit pas seulement d'une demande de creuser un trou, mais bien d'une demande de recherche de gaz ou d'huiles de schiste avec telle et telle technique. Tous les détails techniques doivent figurer dans ces dossiers. Vous me répondrez peut-être qu'au nom du secret industriel, il n'est pas possible de tout révéler. Allons ! Des secrets en matière de gaz et d'huile de schiste ? Tout le monde les connaît. Les techniques ont été inventées par Halliburton ou Schlumberger, elles sont ultra-connues. Allez sur le web, il y en a des gigaoctets.

Nous voulons que la transparence soit faite non pas sur l'autorisation elle-même, qui est muette comme un permis de construire, mais sur le fond des dossiers. Il existe un arrêté de 1995 qui oblige tous les ans les industriels, pour les forages classiques ou non conventionnels, à faire part au Gouvernement de leurs prévisions pour l'année suivante, un peu à la manière d'un projet de loi de finances. Nous souhaitons donc disposer non seulement des dossiers de demande d'autorisation de permis d'explorer mais aussi des documents fournis par les industriels ayant obtenu ces permis l'année dernière. Qu'ont-ils prévu pour 2011 ?

Le double jeu consiste à dire que la fragilité juridique empêche de connaître les décisions des industriels, ce qui est faux. Vous communiquez le contenu des permis seuls et non les dossiers d'autorisation. Mais peut-être que vous-même n'avez pas eu accès à ces dossiers. Pour notre part, nous avons saisi la Commission d'accès aux documents administratifs. Des dizaines de milliers de kilomètres carrés de notre territoire, des centaines de milliers voire des millions de personnes sont concernés, ce n'est pas une mince affaire, d'autant que l'on parle de nouvelle indépendance énergétique de la France. Et si le ministère n'a pas ces dossiers, c'est qu'il se fait avoir par les industriels, ce qui m'étonnerait de la part de Mme Kosciusko-Morizet.

Le Gouvernement doit cesser son double jeu et faire la transparence sur ces dossiers essentiels le plus tôt possible.

Le Gouvernement sait bien que les populations sont fort mécontentes, nous l'avons nous-mêmes constaté dans nos circonscription – enfin, dans le XIVe arrondissement, l'éventualité qu'il y ait des forages est peu probable bien qu'en Ile-de-France, bassin sédimentaire, les hydrocarbures soient présents un peu partout dans le sous-sol. De nombreux maires, de nombreux députés, y compris en Seine-et-Marne, comme M. Copé et M. Jacob, ont été saisis parce que les populations refusent ces techniques de forage et ont l'impression qu'on se moque d'elles parce qu'elles n'ont pas été averties. Vous me direz que le code minier est très imparfait.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Bien sûr ! En attendant, il serait possible de mener certaines actions. La loi autorise ainsi la tenue de référendums locaux consultatifs sur des projets de grande importance, et Dieu sait si les projets dont nous parlons le sont.

Le code minier est obsolète, il sera révisé, et je m'en réjouis, madame la ministre. Mais, en attendant, rien n'empêche le Gouvernement d'être transparent, démocrate, dans une logique territorialisée, comme vous l'avez souligné, madame la ministre. Or nous avons l'impression que le Gouvernement et l'UMP veulent contourner le débat public.

Nous avons pu constater qu'il existait un magnifique soulèvement populaire ce matin dans la rue. Il va se poursuivre.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

C'est une hypothèse vraisemblable : si cette loi scélérate est votée, nos concitoyens se révolteront. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Ils voudront montrer qu'ils ne sont pas satisfaits.

Par une démonstration de stratégie politico-juridique, dans la perspective des élections sénatoriales et des grandes élections de l'année prochaine, le Gouvernement essaie de contourner la contestation populaire. Le mouvement contre l'exploration et l'exploitation des gaz de schistes sur le territoire national est un mouvement citoyen d'une grande force.

La nouvelle rédaction de l'article 2 introduit des modifications de taille. Le texte prévoyait initialement l'abrogation des "permis exclusifs de recherches de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux non conventionnels ". Si vous voulez retirer les mots « non conventionnels », j'en suis d'accord. Il serait possible de sous-amender en les remplaçant par les mots « de schiste » ou « de roche-mère ». Mais là n'est pas le problème. Ce qui est en cause c'est que cette formulation compréhensible de tous a été modifiée. Le projet de loi vise désormais "à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherches comportant des projets ayant recours à cette technique". Ce qui ne paraît être qu'une nuance est en fait un changement énorme. L'interdiction touche tous les hydrocarbures et pas seulement ceux qualifiés de non conventionnels, ce dont on peut se réjouir, mais le texte explique que les titulaires de permis de recherches pourront, "dans les deux mois" à compter de la promulgation de la loi, "préciser les techniques employées" pour exploiter leurs gisements. Je me demande d'ailleurs si les rapporteurs ont pris connaissance des dossiers les concernant. Vous n'avez eu que les autorisations, n'est-ce pas ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Ce qui compte, c'est le fond du dossier, pas simplement le papier administratif. Du reste, il serait étonnant qu'en deux mois les industriels inventent comme par miracle une autre technique. Il existe peu de techniques :…

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

… reposant sur la fracturation hydraulique, elles ont été inventées aux États-Unis par Halliburton – qui s'est rendu célèbre pour d'autres raisons dans la guerre d'Irak – ou Schlumberger, et les conséquences se sont avérées catastrophiques.

J'en viens à la pression économique. Vous prétendez que nous pouvons parvenir à une indépendance énergétique de la France alors même qu'il existe de grands groupes pétroliers. L'amendement est trompeur, il est le signe d'un manque de courage politique devant les pressions exercées par les industriels.

La France emboîte le pas d'autres pays alors que les gaz de schiste connaissent un boom. Il suffit de dire que nous serions bien pourvus en gaz ou en huiles de roche-mère pour faire saliver tout le monde.

Or qu'observe-t-on aux États-Unis et au Canada ? Après cinq à six ans d'exploitation, le PDG de Chesapeake Energy, qui occupe le premier rang national pour le shale gas, a déclaré que si les forages ont été très profitables, il n'est pas sûr qu'ils le soient longtemps. L'exploitation suit une évolution semblable aux courbes de Hubbert : elle commence par une pente forte, avec une exploitation qui donne rapidement des résultats, atteint un pic – comme dans le champ de Barnett au Texas – puis subit une rapide descente. Autrement dit, un puits donné, selon la qualité de la base écologique, n'est exploité que quatre à six ans. Il faut ensuite forer un ou deux kilomètres plus loin. C'est ainsi que dans les Appalaches, sur l'immense champ de Marcellus, des dizaines de milliers de kilomètres carrés de forêt ont laissé place aux puits : le paysage est détruit de manière irréversible. Comme pour les OGM ou le nucléaire, une fois la décision prise, il est impossible de revenir en arrière. Cet aspect du problème doit nous conduire à nous interroger en tant que gestionnaires d'un bien commun.

Ainsi, le PDG de Chesapeake estime qu'à terme, le gain n'est pas assuré au-delà de trente à quarante ans. Malgré le boom actuel, l'échec commercial est palpable. Les actionnaires eux-mêmes commencent à s'en mordre les doigts, se rendant compte qu'ils seront perdants. Les opérateurs, grâce au marketing et à la publicité, ont entretenu une illusion de succès : le gaz de schiste représentait un nouvel Eldorado, une bonanza. Ils ont produit des chiffres bidonnés pour évaluer les réserves, à l'instar des statistiques de l'OPEP, qui gonflent les chiffres des réserves d'hydrocarbures des pays du Golfe. Cela permet d'attirer les investisseurs. Mais l'exploitation est en réalité bien inférieure à ce que laissent supposer les chiffres.

Autrement dit, on feint d'ignorer que le déclin de la production est très rapide et oblige à forer et à forer encore, provoquant la dévastation paysagère.

Mais venons-en au rapport commandé par vous-même, madame la ministre, et par votre collègue de l'industrie Éric Besson. Il annonce d'entrée de jeu l'état d'esprit : il s'agit seulement de suspendre, et non pas d'abroger définitivement. La porte reste ouverte.

Dans son annexe III – j'y reviendrai lors de la discussion des amendements –, figure une liste non exhaustive des permis autorisés pour l'exploration des gaz et huiles de schiste. Pourtant, une liste exhaustive existe. Nous aimerions pouvoir en disposer. Curieusement, le titre a changé. La semaine dernière encore, sur internet, le document téléchargeable comprenait une liste de trente-cinq « permis autorisés » ; cette semaine, cette même liste est intitulée « permis en cours d'instruction ». Comme quoi les inspecteurs généraux de l'environnement et de l'industrie ne sont pas tout à fait sûrs des autorisations d'exploration qu'ils ont accordées l'année dernière, avec la signature de M. Borloo.

La mission interministérielle a déjà fait la part belle aux demandes des exploitants, qui doivent être contents du rapport intermédiaire. Si les députés ont une écoute aussi bienveillante, la fracture avec l'opinion publique s'accroîtra.

Des chiffres extravagants sont annoncés dans ce rapport, comme 100 millions de mètres cubes « techniquement exploitables » en huiles dans le Bassin parisien et 500 milliards de mètres cubes de gaz dans le sud du pays. Qu'en sait-on ? Ces estimations sont faites au pifomètre. Certains exploitants oscillent entre 2 et 60 milliards de barils. Nous ne savons pas exactement ce que recèlent les sous-sols.

Ces supputations productivistes risquent de donner des arguments aux exploitants pour majorer l'éventuel préjudice subi en cas de refus d'autorisation d'exploiter.

À cet égard, je ne crois pas à l'argument de la fragilité juridique de la première version du texte de loi. Nous parlerons à l'occasion de la discussion des amendements des dommages et des réparations que réclameraient les industriels si jamais leur permis était abrogé.

Par parenthèse, la jurisprudence montre qu'en cas d'indemnisation après abrogation, il ne faut pas considérer le préjudice lié au manque à gagner, car le permis concerne l'exploration et non l'exploitation. Seuls seraient en cause des déplacements de camion pour faire un trou ou des photocopies pour établir un dossier. La seule indemnisation possible relèverait d'une négociation entre vous et les exploitants et ne coûterait donc pas cher à l'État.

Il faut insister également sur les méfaits environnementaux sur la nature, le paysage et la santé des populations. La technologie appliquée, même pour les hydrocarbures, qu'ils soient liquides ou gazeux, est très polluante, en particulier pour les gaz et les huiles de schiste. J'en appelle à la responsabilité de chacun : quel monde voulons-nous ? Devons-nous prendre de nouveau un risque en ne nous engageant pas dans la voie de la réduction de notre consommation énergétique et de l'émission de gaz à effet de serre ? Il faut savoir en effet que les gaz et les huiles de schiste produisent beaucoup de gaz à effet de serre.

On sait bien que ce que l'on appelle le forçage climatique est bien plus important dans le cas du méthane que dans celui du CO2 : les membres du GIEC vous le diront. Ce n'est donc pas en dégageant du méthane que l'on améliorera la situation climatique, bien au contraire. Il en va de même d'un point de vue sanitaire : des rapports l'ont montré, le méthane – qui n'est rien d'autre que du gaz naturel – n'est pas bon à respirer.

Enfin, nous avons souscrit des engagements internationaux, aux termes desquels nous devons réduire de 20 % nos émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2020 et de 80 % au moins d'ici à 2050. Ce n'est pas en envisageant d'exploiter des dizaines de milliards de barils équivalent pétrole que nous y parviendrons ! Il s'agit d'une véritable fuite en avant.

Une première évaluation réalisée par une équipe scientifique de l'université Cornell, aux États-Unis, a montré que l'extraction des gaz de schiste pourrait être aussi néfaste pour le climat que l'extraction et la combustion du charbon. Il me semble que M. le rapporteur Chanteguet a fait allusion à cette étude.

Le bilan global, du puits à la roue, serait nettement moins positif que celui de n'importe quel autre hydrocarbure, en raison des fuites de méthane, des méthodes de production, du transport, des émissions additionnelles et des combustions de gaz. L'étude aboutit au chiffre de 33 grammes d'équivalent CO2par million de joules d'énergie – étant entendu qu'un million de joules n'est pas grand-chose –, contre 31,9 grammes pour le charbon, un charbon que l'on nous présente toujours comme l'énergie fossile sale par excellence, qu'il faudrait absolument proscrire.

Quant au rendement énergétique sur investissement des huiles et gaz de schiste, dont on ne parle presque jamais, il serait extrêmement faible. Selon une étude publiée en février 2011 par l'Institut de recherche et d'informations socio-économiques du Québec, ce rendement est de deux pour un, voire de un pour un, soit presque aussi mauvais que celui des biocarburants !

Pour produire de l'énergie, il faut d'abord en injecter : c'est ce que l'on appelle le bilan net. Le rendement du pétrole conventionnel est de l'ordre de quinze à vingt pour un, voire trente pour un : avec un baril de pétrole, on peut en extraire quinze à trente. Ici, en revanche, il faudrait un baril équivalent pétrole pour extraire un baril équivalent en gaz ou en huile de schiste. Le bilan énergétique est donc quasi nul : du point de vue thermodynamique, cela ne vaut même pas le coup ! Quant au point de vue financier, je l'ai dit, le PDG de Chesapeake lui-même s'interroge.

Je ne reviens pas sur l'analyse toxico-chimique bien connue contenue dans le rapport Picot, de l'association toxicologie-chimie. Nous en reparlerons en examinant les amendements.

J'en terminerai donc par les résultats d'une expertise menée par des scientifiques de l'université Duke, en Caroline du Nord, dans l'État voisin de New York et en Pennsylvanie. Selon cette étude, les niveaux de méthane sont plus de dix-huit fois supérieurs à la moyenne – 19,2 milligrammes par litre contre 1,1 milligramme par litre en moyenne – dans les nappes phréatiques proches des sites concernés. On le voit de manière spectaculaire dans le film Gasland. Toujours selon l'étude, les échantillons prélevés présentent jusqu'à 60 milligrammes de gaz par litre, et il existe même un risque d'explosion.

Je vous ai cité plusieurs rapports ; je me suis efforcé d'être bref et synthétique. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP.) J'ai tout de même une demi-heure pour m'exprimer !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Je m'achemine vers ma conclusion, monsieur le président.

Il s'agit là d'un mauvais modèle énergétique pour demain. On croit disposer d'une nouvelle corne d'abondance sous forme d'énergie fossile,…

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

…mais les lourds investissements qui iront à l'exploitation du gaz de schiste seront perdus pour la sobriété et l'efficacité énergétique et pour les énergies renouvelables.

C'est donc notre modèle de développement prédateur et irresponsable qui est en cause.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

…reviendrait à essorer la terre et le sous-sol jusqu'à la dernière goutte.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Tel est l'objectif caché de ce projet. Nous le refusons ; nous ne voterons pas cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Je ne répondrai pas à toutes les remarques d'Yves Cochet, car nous y reviendrons ; je m'en tiendrai à quelques points précis.

Monsieur Cochet, vous n'avez pas voté le texte en commission, non plus que M. Chassaigne ; je vous en donne acte. C'est à Pascal Terrasse que je voulais faire observer tout à l'heure, lors des questions au Gouvernement, que sa position et celle de son groupe avaient quelque peu évolué depuis l'examen du texte en commission.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Vous êtes en tout cas nombreux à l'avoir voté en commission – tous ceux qui étaient présents et qui ont voté pour les autres. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Nous y reviendrons. On fera la liste de tous ceux qui ont voté le texte, et ils étaient nombreux.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

J'en viens aux dossiers. Ils peuvent tous être communiqués. Simplement, une question pratique se pose. Quatre-vingt-cinq dossiers sont en cours d'instruction, dont quarante-cinq impliquent le cas échéant de recourir à une technique non conventionnelle ou à l'exploitation de gaz non conventionnels, et nous reviendrons sur cette distinction. Nous avons commencé de communiquer les documents aux personnes qui en ont fait la demande ; certaines de celles qui ont demandé des documents précis les ont déjà reçus.

Enfin, n'oublions pas que, pour l'obtention d'un permis de recherche, seule la capacité technique et financière de l'entreprise est évaluée. De mon point de vue, ce n'est pas suffisant ; voilà pourquoi j'ai appelé tout à l'heure de mes voeux une réforme du code minier, notamment sur ce point. Quoi qu'il en soit, à l'heure actuelle, un dossier de demande n'est pas si important qu'il y paraît.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Dans les explications de vote sur la motion de rejet préalable, la parole est à Mme Anny Poursinoff, pour le groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto de Anny Poursinoff

Yves Cochet a énuméré les documents et études que les parlementaires que nous sommes auraient intérêt à consulter avant de se risquer à voter une loi qui n'est pas plus sûre, d'un point de vue juridique, que sa première version.

Nous nous apprêtions à voter celle-ci parce qu'elle abrogeait les permis actuels et garantissait que d'autres permis ne seraient pas accordés ; ce n'est pas le cas de cette seconde version.

Notre collègue a exposé de nombreux arguments, tant économiques qu'environnementaux, dont il ressort que, par courage politique, nous devons refermer la porte que cette nouvelle version tente d'entrouvrir.

Je vous appelle donc à voter cette motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Franck Riester, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Le groupe UMP ne votera pas cette motion, car nous souhaitons que ce texte soit adopté.

Pendant une demi-heure, M. Cochet a dit beaucoup de choses, avec une grande démagogie, bien évidemment (Mme Martine Billard s'esclaffe), et, par moments, de manière très embrouillée. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Il a en outre fait des procès d'intention au Gouvernement.

Le Gouvernement a reconnu que le dossier était mal engagé ; il va soutenir cette proposition de loi visant à interdire la fracturation hydraulique ; il reconnaît qu'il est nécessaire de réformer le code minier. Le Gouvernement ne pratique donc pas le double langage : il est clair. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Sincèrement, monsieur Cochet, je suis un peu déçu. Je vous connais depuis des années ; vous êtes un militant de longue date de la cause écologiste. Pourquoi, sinon pour des raisons politiciennes, refuser de voter cette proposition de loi urgente ?

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Dans tous les territoires concernés par les forages non conventionnels en vue de l'exploration et de l'exploitation des gaz et huiles de schiste, on attend que la représentation nationale interdise ces techniques. Nous devons être unis pour adresser un signal fort à nos concitoyens. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Nous devons montrer que, quand l'essentiel est en jeu, la représentation nationale est unie.

Or ce texte contient exactement ce que vous demandez : il prescrit l'interdiction de cette technique néfaste pour l'environnement, l'abrogation des permis d'exploration et d'exploitation, …

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

…mais un peu plus finement, d'un point de vue juridique, que dans la rédaction initiale.

J'ai participé, avec Christian Jacob et quelques autres collègues, à la rédaction de ce texte. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Je balaie donc devant ma porte : le texte de la commission est un bon texte.

Enfin,…

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Nous voterons donc contre la motion de rejet préalable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Nous sommes réunis autour d'un même objectif, en apparence du moins : l'interdiction de l'exploration et de l'exploitation des gaz et huiles de schiste.

Mais, comme souvent, les derniers convertis font assaut de démonstrations. L'UMP a ainsi manoeuvré, usant de grosses ficelles – procédé dont nous venons d'être à nouveau témoins –, pour que le texte discuté aujourd'hui ne soit pas celui du groupe SRC, pourtant déposé à temps, bien avant le vôtre.

Plutôt beaux joueurs – vous nous connaissez (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP),…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

…nous avons retiré notre proposition de loi, parce que nous pensions que le débat déboucherait sur l'abrogation des permis que Jean-Louis Borloo avait accordés lorsqu'il était ministre de l'écologie, commettant ainsi une grossière erreur.

Où en sommes-nous ? Loin de clarifier le débat, le passage en commission a révélé des ambiguïtés qui permettent aux titulaires des permis de passer entre les mailles du filet. Le travail des rapporteurs, que j'ai écoutés attentivement, n'est pas en cause, non plus que leur bonne foi. Mais la position du législateur ne doit se prêter à aucune interprétation, elle ne souffre aucune ambiguïté face au risque de saccage environnemental.

On nous dit que la nouvelle rédaction aurait le mérite d'éviter d'éventuels recours et demandes d'indemnisation. C'est justifier le flou. J'ai bien écouté la ministre défendre cette thèse. Nous avons nous-mêmes consulté des juristes après le passage en commission.

Puisque nous en sommes aux explications de vote sur la motion de rejet préalable défendue par Yves Cochet avec une clarté et une précision dont je le remercie,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

…contrairement à ce que vous avez dit, M. Riester, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Un instant, monsieur le président ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Laissez-moi le temps de m'expliquer !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je vous en fais la remarque comme je l'ai faite à M. Riester.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Vous êtes un habitué des remarques, surtout quand le fond du propos vous gêne !

Il faut s'appuyer, disais-je, sur la Charte de l'environnement, notamment sur son article 5, aux termes duquel, « lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attribution, à la mise en oeuvre de procédures […] ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Arrêtez de dire « bien » ! Laissez-moi finir ma phrase !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Je peux arrêter tout de suite et quitter la séance ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Vous devez me laisser exposer mes arguments jusqu'au bout, parce qu'ils peuvent fonder un recours devant le Conseil constitutionnel. (Mêmes mouvements.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Puisque vous ne voulez pas me laisser finir, je m'arrête mais je considère que vous avez pris parti dans cette affaire (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP. – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC), et que vous faites le jeu de ceux qui pratiquent l'ambiguïté !

(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

J'ai reçu de M. Yves Cochet et des membres du groupe GDR une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du règlement. (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Monsieur le président, vous avez choisi de m'interrompre. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) J'ai écouté les arguments juridiques de Mme la ministre : ils ne tiennent pas debout. Ils ne sont qu'un prétexte pour permettre aux opérateurs qui ont joué de leur influence de continuer à nous menacer, à pratiquer la prospection et l'exploitation.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Mallié

Vous n'y croyez pas vous-même, monsieur Ayrault !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Je vous demande donc une suspension de séance d'une demi-heure, après quoi je reviendrai m'expliquer devant vous. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Ayrault, je ne peux pas vous laisser mettre en doute la présidence. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je vous ai laissé le double du temps auquel vous aviez droit pour les explications de vote ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Néanmoins, vous avez demandé une suspension de séance ; elle est de droit. Elle sera de cinq minutes.

Rappel au règlement

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures quinze, est reprise à vingt-deux heures vingt.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est reprise.

La parole est à M. André Chassaigne.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Non, pas de rappel au règlement. La parole est à M. Chassaigne. (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Chassaigne a commencé son intervention sur la motion de renvoi en commission ; il y aura un rappel au règlement après son intervention. (Très vives protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Plusieurs députés du groupe SRC. Il n'a pas commencé ! Rappel au règlement !

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Mes chers collègues, voulez-vous que je quitte la tribune ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Chassaigne, avez-vous achevé votre intervention ? (Très vives protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Pourquoi cherchez-vous l'incident, monsieur le président ?

Plusieurs députés du groupe SRC. C'est une provocation !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Le règlement de notre assemblée est très clair. Dès lors que j'ai donné la parole à l'orateur qui défend la motion de renvoi, il a la parole. (Très vives protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

S'il doit y avoir un rappel au règlement, il se fera après.

Monsieur Chassaigne, vous avez la parole. (Huées sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance était reprise. Il n'y a aucun doute là-dessus.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Monsieur le président, pourquoi ce comportement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Chassaigne, vous avez la parole ; il y aura un rappel au règlement après votre intervention. (Huées sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Chassaigne, je vous ai donné la parole, vous avez même commencé votre intervention…

Plusieurs députés des groupes SRC et GDR. Non, il n'avait pas commencé !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Si vous refusez de continuer, monsieur Chassaigne, nous allons passer aux explications de vote. (Huées sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Martin

Mais pourquoi ce comportement ? Madame la ministre, réagissez !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Chassaigne, voulez-vous commencer votre intervention ? (Huées sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Monsieur Chassaigne, une dernière fois, vous avez la parole. (Mêmes mouvements.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Monsieur le président, je demande une suspension de séance pour réunir mon groupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Mais il n'y a pas de suspension de séance pendant la défense d'une motion ! Monsieur Chassaigne, voulez-vous prendre la parole ? (Huées redoublées sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Caresche

Mais où vous croyez-vous, monsieur le président ? Nous sommes à l'Assemblée nationale !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Chassaigne je le répète, si vous avez fini, je mets la motion de renvoi en commission au vote. (« Il n'a pas commencé ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Monsieur le président, vous êtes fou ! Imaginez-vous les échos de ceci dans la presse demain ?

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Briand

Calmez-vous ! On est à l'Assemblée nationale, pas au cirque !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Dalloz

C'est scandaleux ! Ce sont des méthodes de voyous !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

Rendez-nous Accoyer ! Accoyer, président ! (Rires sur les bancs du groupe SRC, dont plusieurs députés scandent « Accoyer, Accoyer ! »)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis désolé.

Monsieur Chassaigne, vous avez la parole. (Nouvelles huées sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Dalloz

Mais quelle image la gauche donne-t-elle de l'Assemblée ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Plisson

C'est le président de séance qui donne une mauvaise image ! Une image de dictature !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Monsieur le président, je demande une suspension de séance de dix minutes pour réunir mon groupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Mais non, il n'y a pas de suspension de séance pendant que l'orateur défend la motion de renvoi en commission. Je suis désolé, mais c'est comme ça. (Huées continues sur les bancs des groupes SRC et GDR. — Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

C'est pour une question de principe, monsieur Ayrault, que vous souhaitez parler tout de suite ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

On ne peut pas interrompre un orateur ! Le règlement de notre assemblée est extrêmement clair. (Le groupe SRC quitte l'hémicycle.)

Monsieur Chassaigne, vous prendrez la parole quand vous voulez ; mais le temps passe.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Madame la ministre, mes chers collègues, le contexte et les conséquences du recours à l'exploitation des hydrocarbures non conventionnels viennent d'être largement évoqués.

Alors que différents textes ont été déposés, par des parlementaires de toutes sensibilités, pour abroger les permis exclusifs d'exploration et d'exploitation d'hydrocarbures non conventionnels, l'arrivée rapide de ce texte en séance publique cherchait avant tout à apaiser la colère de tous ceux qui se sont mobilisés depuis plusieurs mois contre une énième contradiction environnementale du Gouvernement.

Si l'on peut se réjouir du fait que la majorité des parlementaires ont aujourd'hui pris conscience de la nécessité de mettre un terme à la technique de la fracturation hydraulique pour l'exploitation minière, nous ne pouvons oublier l'histoire de ces permis exclusifs octroyés généreusement, et dans la plus grande discrétion, en 2008 et 2009 pour les huiles de roche-mère en Île-de-France, et aux mois de mars et avril 2010 pour les gaz de schiste dans le sud de la France.

Vous avez dit tout à l'heure, madame la ministre, que ces permis n'ont pas été accordés dans de bonnes conditions, avec des procédures suffisantes.

Il est cependant curieux de constater que le ministre de l'écologie méconnaissait à l'époque les principes élémentaires de transparence et de participation des citoyens, qu'il défendait pourtant, au même moment, et avec conviction, devant les parlementaires, lors des débats sur le projet de loi portant engagement national pour l'environnement, dit « Grenelle 2 ».

Sans doute, dans le cas des gaz et huiles de schiste, l'esprit de Grenelle ne planait-il pas encore sur tous les actes du ministère de l'écologie – à moins que cet esprit ne se soit curieusement évaporé pour ce qui concernait notre sous-sol, à la demande de groupes spécialisés.

À la décharge de M. Borloo, il semble que du point de vue juridique le sous-sol de notre pays ne fasse toujours pas partie de notre environnement, bien qu'il soit reconnu comme patrimoine commun de la nation ; il est nécessaire, je le crois, de revoir de fond en comble notre code minier pour l'adapter aux exigences sociales, environnementales et démocratiques de notre temps.

Encore faudrait-il que cette réforme fût globale et qu'elle proposât des modifications profondes du droit à l'information et à la participation du public déclinant la Convention d'Aarhus ratifiée par notre pays et les deux textes du Grenelle de l'environnement.

Encore faudrait-il donner une véritable portée juridique à la définition des ressources du sous-sol comme patrimoine commun, en excluant par exemple leur exploitation dans le cas où elles portent manifestement atteinte aux hommes, à leur santé ou à leur environnement.

Madame la ministre, mes chers collègues, nous faisons tous le constat de l'insuffisance des connaissances à notre disposition sur les ressources d'hydrocarbures non conventionnels et, plus encore, sur les conditions de leur exploration ou de leur possible exploitation,

Plusieurs missions d'information travaillent, plusieurs rapports sont en cours d'élaboration, avec des objets et des portées différents. J'espère qu'ils nous permettront d'avancer sur la voie de la connaissance et ne serviront pas d'alibi ou de simple code de bonne conduite aux grands groupes industriels de l'extraction et du pétrole.

Le premier pré-rapport conjoint sur les hydrocarbures de roche-mère en France du Conseil général de l'industrie, de l'énergie et des technologies et du Conseil général de l'environnement et du développement durable est effectivement tout à fait lacunaire et partiel, je dirai même partial, en ce qui concerne l'évaluation des impacts environnementaux et sociaux, pourtant connus, notamment aux États-Unis. II reste encore plus évasif quand il s'agit d'évoquer le bilan carbone de l'ensemble de la filière de production des gaz et huiles de schiste et il ne dit pas un mot des perspectives, en termes d'émission de gaz à effet de serre, de l'exploitation massive de ces ressources fossiles.

Certes, ce rapport d'évaluation reste sans doute à finaliser mais quelle curieuse omission ! Votre lettre de mission précisait pourtant, madame la ministre, que « l'impact sur les émissions de gaz à effet de serre semble devoir faire l'objet d'une attention particulière ».

Les principales conclusions de ce rapport appellent d'ailleurs à une nécessaire recherche de « compatibilité » afin de « contribuer à l'émergence et à la formation d'opérateurs et de sous-traitants nationaux susceptibles de se positionner sur le marché mondial ». Le décor capitalistique est planté, et il me rappelle curieusement les débats que nous avions sur la question des organismes génétiquement modifiés ou encore en matière énergétique, avec la loi NOME. Ce parti pris en faveur de l'exploration et de l'exploitation par les sociétés titulaires des permis exclusifs n'est tout simplement pas tolérable !

Je ne saurais que recommander aux futurs auteurs de rapports de faire preuve de plus d'objectivité et de rigueur dans l'analyse des faits, des impacts et des perspectives de cette filière, pour fournir à la représentation nationale, et à chaque citoyen des éléments de connaissance plus approfondis.

Dans le cadre de l'examen, devenu manifestement urgent, de cette proposition de loi, vous avez souhaité, monsieur le rapporteur Havard, modifier le texte présenté en commission afin, prétendez-vous, de le rendre juridiquement plus stable, en habillant de quelques oripeaux la référence à l'abrogation des permis exclusifs octroyés.

De fait, la rédaction de l'article 2 du texte que nous examinons aujourd'hui laissera aux titulaires des permis la liberté de poursuivre leurs expérimentations en recourant à des artifices techniques avec tous les risques potentiels que cela représente et malgré l'incertitude qui pèse sur leurs motivations réelles et leurs agissements. Une réflexion de fond sur une nouvelle rédaction plus précise et contraignante pour les entreprises concernées m'apparaît indispensable. La proposition de loi doit en sortir clarifiée, et les permis accordés doivent être très rapidement abrogés ; c'est ce que je vous propose avec cette motion de renvoi en commission.

Ce n'est pas, en revanche, et quels que soient les arguments juridiques avancés, ce à quoi tend la rédaction actuelle. En adoptant ce texte en l'état, vous seriez donc immédiatement suspectés de vouloir ménager la chèvre et le chou, ce qui, naturellement, n'est pas votre cas !

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Quant à la contre-offensive judiciaire des titulaires des permis, il serait vain de croire que nous pourrions nous y soustraire dans un cas comme dans l'autre. Il faut donc marquer clairement notre volonté politique sur ce sujet.

La colère qui s'est exprimée avec raison, ces derniers mois, dans les territoires tient directement à l'octroi de permis exclusifs d'exploration et d'exploitation dont les conditions semblaient procéder plus des règles coutumières des chercheurs d'or de la conquête de l'Ouest que des prérogatives d'une démocratie moderne.

Chers collègues, je ne veux pas faire ici une revue détaillée des conséquences environnementales et sanitaires connues à ce jour de l'exploitation des hydrocarbures de roche-mère par fracturation hydraulique mais, qu'il s'agisse des volumes d'eau considérables employés, des adjuvants toxiques utilisés, des risques de diffusion de polluants dans les nappes phréatiques, du traitement des eaux contaminées remontées en surface, des emprises au sol des installations ou des transports nécessaires à l'ensemble du cycle d'exploitation, tout nous pousse, dès maintenant, à demander l'interdiction de la technique de la fracturation hydraulique sur la base des principes constitutionnels de précaution et de prévention. Nous devons, dans le même temps, mettre un terme à tous les permis exclusifs accordés sans prise en compte de leurs conséquences.

Je vous invite donc à voter en faveur de cette motion de renvoi en commission afin de reprendre sereinement le débat dans un souci d'approfondissement pour aboutir à une rédaction sans ambiguïté. La pire des choses – je dis bien la pire des choses – serait de passer en force en séance en confirmant ou en adoptant des amendements de circonstance ou fondés sur des non-dits.

Au-delà, notre débat se doit aussi, je le pense, de porter sur l'exploitation même de ce type de ressources.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Deux points fondamentaux me semblent ainsi absents, ou insuffisamment développés.

Le premier, c'est le lien qui existe entre, d'une part, la problématique de l'exploration et de l'exploitation de ces ressources d'hydrocarbures non conventionnels et, d'autre part, les choix énergétiques et le nouveau mode de développement que nous devons promouvoir à l'échelle nationale, européenne et mondiale pour satisfaire les engagements de baisse de 80 % de nos émissions de gaz à effet de serre, en prenant en compte le fait que les ressources énergétiques ne sont pas une denrée inusable.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Je ne veux pas être trop long mais je tiens à rappeler – dans le cadre des trente minutes qui me sont imparties – quelques éléments qui montrent l'ampleur du défi de société que nous devons relever si nous voulons lutter efficacement contre le réchauffement climatique.

Notre biosphère a une capacité de recyclage et d'assimilation de trois milliards de tonnes équivalent carbone chaque année, soit environ cinq cents kilogrammes par terrien et par an. Cela diminuera évidemment au fil de la progression du nombre d'habitants.

Pour compenser les excès d'émissions passées, qui affectent, pour plusieurs décennies au moins, le climat d'aujourd'hui et celui de demain, et si l'on veut respecter les recommandations du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, il faut se donner pour objectif de réduire, à l'horizon 2050, les émissions de CO2 à 250 kilogrammes par habitant et par an. Prenons la mesure de ce que représente cet objectif quand un résident français émet aujourd'hui en moyenne – je dis bien « en moyenne », avec tout ce que cela implique – deux tonnes de CO2 an ! Cela suppose, pour notre pays de réduire de plus de 85 % ses émissions de CO2, alors même que nous ne sommes pas parmi les pires élèves des pays industrialisés. En outre, le volume des émissions actuelles liées à l'activité agricole correspond à lui seul au niveau à atteindre et le développement d'une agriculture écologiquement intensive, que nous souhaitons, ne permettra pas d'obtenir une réduction suffisamment significative.

Pour atteindre cet objectif, la France ne devrait tout simplement plus utiliser, vers l'an 2050, d'énergie carbonée pour toutes ses activités industrielles, de transport ou résidentielles.

Un député UMP. Il reste quoi ?

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Il faut aussi mettre en perspective cet objectif au niveau mondial, avec des pays qui ont des consommations moyennes beaucoup plus importantes, notamment les États-Unis, le Japon ou certains pays européens. Mesurons aussi l'impact de la forte croissance des émissions des pays en développement, notamment la Chine, l'Inde et le Brésil.

Dans ce contexte, le recours à l'exploitation des ressources d'hydrocarbures non conventionnels nous paraît-il soutenable ? Je ne le pense pas, et faire croire que l'on peut encore aujourd'hui confier ce type de débat à quelques spécialistes, sans y associer largement les citoyens, les salariés et les élus de notre pays, est une erreur très grave.

Je déplore pour ma part cette sorte de stratégie de confinement démocratique sur les grands enjeux énergétiques et climatiques. Elle conduit d'ailleurs, comme sur les autres sujets touchant à l'évolution des connaissances et des techniques, à confisquer aux citoyens le droit de décider en toute conscience de leur avenir.

Les parlementaires communistes, républicains et du parti de gauche jugent indispensable la tenue d'un grand débat public sur cette question. La définition et la mise en oeuvre de politiques publiques ambitieuses pour enclencher rapidement une véritable transition vers la sobriété et l'efficacité énergétiques doivent impérativement passer par une confrontation à ces questions que nous devons nous poser collectivement.

Le second point que l'on ne voit pas apparaître dans ces débats, c'est la maîtrise sociale et publique de l'énergie.

Devons-nous considérer comme allant de soi que des ressources naturelles, dont l'existence et l'étendue restent imprécises et qui sont considérées comme appartenant au patrimoine commun de la nation par le préambule de la Charte de l'environnement et par l'article L. 110-1 du code de l'environnement, soient gérées comme d'autres biens par le marché et l'initiative privée ?

Devons-nous considérer que le devenir de notre sous-sol, notamment de nos ressources en eau contenues dans les nappes phréatiques, devra être confié à « des sous-traitants et opérateurs nationaux susceptibles de se positionner sur le marché mondial », comme l'affirment de façon péremptoire les quatre courageux ingénieurs généraux des mines, corédacteurs du rapport sur « les hydrocarbures de roche-mère en France » ?

N'avons-nous pas là, au contraire, une nouvelle occasion de réfléchir ensemble à notre avenir, en donnant corps à d'autres principes de gestion de ces ressources, qui s'appuieraient de façon raisonnée sur l'anticipation des besoins potentiels des générations futures, plutôt que sur l'appropriation privée et la logique spéculative des marchés ?

Plutôt que d'alimenter la boulimie de rentabilité et de profits des actionnaires avides de quelques entreprises privées du secteur pétrolier ou de l'extraction, dont la morale environnementale est bien connue, le cas d'espèce des gaz et huiles de schiste ne doit-il pas servir à la constitution d'un grand pôle public de l'énergie ?

Car un pôle public de l'énergie associant les producteurs, les distributeurs et les usagers est le mieux à même de garantir l'intérêt général de nos concitoyens en matière énergétique en les associant pleinement à leur avenir. Et seul un grand service public national est capable d'organiser une véritable transition énergétique sur la base de ces trois piliers fondamentaux : la maîtrise de la demande d'énergie ou « sobriété énergétique », l'efficacité énergétique et le développement des énergies renouvelables.

Nous le voyons bien, pour satisfaire à nos engagements climatiques, sociaux et environnementaux, le recours aux énergies fossiles comme les gaz et huiles de schiste n'apporte pas de solution. C'est au contraire un problème supplémentaire qui influence la poursuite d'une économie carbonée.

Certains argueront que notre pays est structurellement dépendant des énergies fossiles, et en particulier du pétrole et du gaz – à hauteur de 45 milliards d'euros l'an dernier, comme l'a précisé Mme la ministre. Pour autant, cela justifie-t-il de prôner une politique de courte vue en recourant à ces mêmes ressources par simple effet de substitution aux importations, plutôt que de définir un autre avenir énergétique ?

Personne ne peut ignorer que le choix de s'engager avec frénésie dans l'exploitation déraisonnable de ces ressources non conventionnelles fait par les États-Unis, et par d'autres pays, y compris bientôt par les pays européens, apparaît totalement contradictoire avec les enjeux qui se posent à l'humanité. Sur des bases alliant fièvre spéculative et recherche d'indépendance énergétique, nous voyons se matérialiser le scénario climatique du pire.

Je rappelle qu'après le fiasco du sommet de Copenhague, le sommet de Cancun devait être un moment clé pour se donner des moyens et des outils afin d'atteindre l'objectif de limitation du réchauffement climatique à 2 °C, recommandé par le GIEC, au-delà duquel, je le répète, certaines conséquences ne sont plus maîtrisables.

Curieusement, les grandes puissances ont soigneusement évité de définir des engagements contraignants de limitation des émissions de gaz à effet de serre à Cancun, Après Copenhague et Cancun, la conférence de Durban, fin 2011, poursuivra sans nul doute sur le même chemin du renoncement. Un jour, pourtant, il faudra bien régler le passif ! Comment ne pas faire le rapprochement entre ce renoncement permanent et le recours à l'exploitation massive des sables bitumineux au Canada hier, puis aux gaz et huiles de schiste aujourd'hui ?

Madame la ministre, mes chers collègues, nous ne pouvons sans cesse jouer la stratégie d'évitement de nos responsabilités environnementales. Nous ne pouvons tolérer que les grandes puissances se défilent devant les enjeux de la lutte contre le réchauffement climatique.

Ce débat sur les hydrocarbures non conventionnels doit aussi être l'occasion de reconstruire une politique énergétique européenne tournée vers l'avenir, c'est-à-dire vers l'avenir de l'humanité tout entière.

C'est pourquoi je vous invite à voter cette motion de renvoi en commission pour clarifier la volonté politique de notre pays en matière de recours aux ressources d'hydrocarbures non conventionnels. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Comme André Chassaigne aura des réponses à la plupart de ses remarques tout à l'heure à l'occasion de la discussion générale, je ferai une simple remarque.

Certes, la mission diligentée par mon collègue Éric Besson et moi-même peut aujourd'hui paraître insuffisante, mais le rapport final n'est pas rendu. Nous n'avons eu qu'un rapport d'étape et c'est sur la base de ce rapport, sans aller plus loin, alors que nous en étions seulement à la suspension des opérations de fracturation hydraulique, que nous avons suivi les parlementaires et décidé de prendre des mesures plus radicales.

Cela étant, le Premier ministre l'a annoncé, la mission se poursuit, comme se poursuivent d'ailleurs les travaux des parlementaires. Je ne prétends pas que le rapport de la mission, aujourd'hui, a épuisé la question de l'impact sur l'environnement global, et notamment sur le changement climatique, de l'exploitation des gaz de schiste. Sans attendre la fin de la mission, la majorité a choisi d'aller plus loin que la simple suspension qui était décidée jusqu'à présent.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Dans les explications de vote, la parole est à M. Daniel Paul, pour le groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, André Chassaigne a excellemment défendu la motion de renvoi en commission d'un texte qui, à l'évidence, ne répond ni aux interrogations de l'ensemble de la représentation nationale ni à celles de nos concitoyens sur des territoires connus pour contenir dans leur sous-sol des gaz ou des huiles de schiste.

Il s'agit, premièrement, d'interdire le recours à une technique connue pour son agression et sa mise en cause potentielle des nappes phréatiques ; deuxièmement d'interdire à des titulaires de permis d'exploitation actuels d'en profiter pour se servir des insuffisances du code minier et contourner la volonté du législateur ; troisièmement, de se prémunir contre toute tentative de pression des groupes intéressés pour imposer leur loi dans ce domaine comme dans d'autres.

La façon dont ce texte est venu ici en urgence, avec un amendement de dernière minute présenté en commission et lourd de conséquences, n'est évidemment pas satisfaisante et nourrit toutes les suspicions légitimes sur la réalité de votre volonté de revenir sur les permis accordés. Elle justifie à elle seule la demande de renvoi en commission pour que toutes les questions posées par la motion de renvoi, mais aussi par la motion de rejet préalable de notre collègue Cochet, reçoivent les réponses nécessaires.

Mais ce débat sur les gaz et les huiles de schiste justifie, par ses conséquences, d'autres questions lourdes, elles aussi. Le GIEC l'a bien montré, la priorité est la lutte contre les gaz à effet de serre. Dès lors, c'est la question même du recours amplifié aux énergies fossiles qui est posée et à laquelle il nous faut réfléchir, non en cercle fermé, mais dans le cadre d'un débat bien plus large, un véritable débat public.

Compte tenu de la priorité de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, gardons-nous d'envisager un recours accru aux énergies fossiles, celles de schiste comme les autres. Mais il serait sans doute illusoire de tout interdire, ne serait-ce que parce qu'il faudra bien accompagner le développement de certaines énergies renouvelables dont l'intermittence nécessite le recours à ces énergies fossiles. Tout cela doit aussi être versé au débat.

Toutes ces raisons justifient le renvoi du texte en commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Nicole Ameline, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Ameline

Quelle formidable contradiction, monsieur Chassaigne, à un moment où l'Assemblée doit prendre une responsabilité majeure, de vous entendre évoquer à cette tribune des éléments essentiels, souligner l'urgence de ce dossier et, dans le même temps, demander le renvoi du texte en commission ! Où est la cohérence ? Où est la crédibilité ? Où est l'efficacité ? Car ce qu'attendent les Français aujourd'hui, c'est une décision claire, une réponse à leurs inquiétudes, et c'est l'exercice de notre responsabilité.

Dans ce domaine comme dans d'autres, notre groupe a pris l'initiative et il défendra ce texte qui concilie les exigences fondamentales de protection de l'environnement, notre vision de l'avenir et la recherche de solutions nouvelles dans le domaine de l'énergie.

Monsieur Chassaigne, le courage politique, c'est davantage la décision que l'incantation. Je voudrais vous rassurer sur la détermination totale du groupe UMP à assumer pleinement sa responsabilité sur ce dossier, dans le respect de l'éthique et des valeurs qui fondent le Grenelle de l'environnement, que nous partageons. Mais dès à présent, nous exercerons cette responsabilité en repoussant avec détermination cette motion qui nous paraît totalement contraire à l'esprit de responsabilité de l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Philippe Plisson, pour le groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Plisson

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la position du Gouvernement concernant les gaz de schiste s'apparente à la chorégraphie de la bourrée saintongeaise que j'ai pratiquée : je fais trois pas en avant, deux en arrière – je pourrais la danser devant vous ! –, un à droite, un à gauche, puis je saute en l'air en tournoyant sur moi-même et je repars dans l'autre sens ! (Rires et exclamations.)

Ainsi, après que le ministre Borloo a décidé unilatéralement de signer un décret autorisant le permis de recherche sur les gaz de schiste, le député Borloo déposait quelques semaines plus tard un projet de loi visant à les interdire, juste après le président du groupe UMP, lui-même touché par la grâce écologiste !

Préalablement à ces grandes manoeuvres, le groupe SRC avait déposé une proposition de loi proposant de supprimer les autorisations de recherche. Contraint et forcé, il a dû négocier un aggiornamentopour éviter de disparaître des écrans radars, vu que ceux qui disposent de l'ordre du jour, autrement dit la majorité UMP, menaçaient de mettre en débat leur propre proposition, bien que plus tardive, avant la sienne. Dont acte !

Or l'enthousiasme écologiste des convertis de la vingt-cinquième heure n'a pas tenu longtemps face à l'activisme des lobbies productivistes, les mêmes qui ont déjà sévi lors du Grenelle 2 pour, entre autres, torpiller les énergies renouvelables.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Plisson

Il faut donc être clair et revenir aux fondamentaux : là comme ailleurs, nous n'avons pas les mêmes valeurs !

Cette extraction forcenée de gaz de schiste polluante, dégradante pour les paysages et, au bout du compte, très peu productive au regard des dégâts qu'elle engendre, va dans le sens inverse de ce qu'il faut faire. En effet, il faut cesser cette course pathétique à la quête des dernières gouttes de ressources fossiles, dont le coût environnemental et financier est exorbitant et qui ne fait que repousser l'inexorable échéance de leur disparition dans ce monde fini.

Il faut au contraire mettre en oeuvre une véritable transition volontariste vers les énergies renouvelables, conformément au rapport du GIEC du 9 mai 2011, que je cite : « 80 % de l'approvisionnement énergétique mondial pourrait être couvert par les énergies renouvelables à l'horizon 2050 à condition que les politiques publiques adaptées soient mises en place. »

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Plisson

Nous sommes là au premier acte de la mise en oeuvre de ces principes et, en plein accord avec ces scientifiques reconnus, nous voterons la motion de rejet du groupe GDR, qui porte à la fois nos préoccupations immédiates de défense des territoires menacés et d'application du principe de précaution pour nos concitoyens qui y vivent, mais plus encore, s'inscrit dans nos objectifs d'avenir, ceux de la mise en oeuvre d'un nouveau modèle de développement qui conjugue enfin l'écologie et le social. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

(La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Monsieur le président, les conditions pour débattre sereinement ne nous semblant pas réunies, je demande une suspension de dix minutes pour réunir mon groupe.

Rappel au règlement

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-trois heures cinq.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Je regrette la manière dont les choses viennent de se passer. Je pense, monsieur le président, que vous auriez pu laisser le président du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Vous pourriez un peu vous calmer au groupe UMP ! (Rires sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

N'interrompez pas le président Ayrault, mes chers collègues ! Poursuivez, monsieur Ayrault !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Oh, le groupe UMP est très calme…

Je regrette, disais-je, monsieur le président, que vous n'ayez pas laissé au président de groupe que je suis le temps de donner le fond de notre pensée, avant que ne commence l'examen de ce texte dans le détail, donc avant que ne commence la discussion générale. Je le regrette d'autant plus que vous savez fort bien, vous qui êtes membre de la Conférence des présidents, que le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche avait déposé une proposition de loi sur ce sujet précis de la prospection de gaz de schiste, dans les délais fixés par le règlement, à savoir dans les six semaines. Nous avons découvert que l'UMP avait déposé une proposition de loi presque identique…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

…mais au-delà du délai prévu par le règlement de l'Assemblée nationale. Vous ne pouvez pas dire le contraire ! Mais, parce que le Gouvernement a engagé la procédure accélérée sur ce texte, cette proposition est discutée aujourd'hui, 10 mai 2011. Notre texte a été, quant à lui, inscrit à l'ordre du jour de jeudi. Nous avons cru que le président de la commission du développement durable cherchait la conciliation en proposant de nommer un co-rapporteur de l'opposition et que nous pourrions progresser.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Nous avons donc joué le jeu du bon sens et de la responsabilité et nous avons par conséquent accepté de retirer notre texte. Je tiens toutefois à vous communiquer quelques éléments d'information pour que vous soyez éclairés, mes chers collègues, vous qui n'assistez pas à la Conférence des présidents.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Nous avons respecté le règlement que nous n'avons pas voté. Le groupe UMP, quant à lui, ne s'y est pas conformé, mais, grâce à l'appui du Gouvernement, son texte a été inscrit à l'ordre du jour d'aujourd'hui. Nous avons tout fait pour que les choses s'arrangent, mais nos collègues du groupe UMP n'ont fait preuve d'aucune bonne volonté. Je comprends votre impatience, monsieur le président, et votre volonté de faire respecter les engagements pris par l'UMP en veillant à ce que le vote solennel se déroule comme prévu demain. Donc, pour aller vite, vous pressez l'Assemblée nationale et vous m'avez ainsi coupé la parole. Mais vous devez savoir, mes chers collègues, que, lors de la dernière réunion de la Conférence des présidents, le président du groupe UMP, M. Jacob, a demandé que soit organisé un vote solennel sur notre propre texte portant sur le gaz de schiste, inscrit à l'ordre du jour de jeudi. Comme nous n'avons pas voulu ridiculiser l'Assemblée nationale, nous avons retiré notre texte. Nous pensions alors de bonne foi que le point de vue que l'UMP défendait était identique au nôtre. Nous avons découvert – c'est peut-être ce qui explique la confusion médiatique – que l'UMP avait changé de position. Après avoir opté, comme nous, pour l'intransigeance, et donc exigé l'abrogation par la loi des autorisations données par Jean-Louis Borloo pour la prospection de gaz de schiste,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

…votre position est devenue ambiguë, laissant à l'exécutif la faculté de dire oui ou non. Vous avez ainsi donné deux mois aux opérateurs pour communiquer les éléments techniques. Il est bien évident, nous le savons, que les grandes entreprises qui ont pour projet cette prospection et cette exploitation feront évidemment le dos rond et affirmeront qu'elles ne toucheront pas à la nappe phréatique. Mais, dans quelques mois, lorsque la mousse médiatique sera retombée, le Gouvernement donnera en catimini l'autorisation à ces groupes de reprendre le type d'exploitation que nous dénonçons. Mes chers collègues de l'UMP, vous-mêmes ne vous rendez même pas compte que vous êtes en train de vous faire avoir par le Gouvernement et par un certain nombre de députés de votre groupe qui jouent le jeu de cette complicité face aux intérêts de certains grands groupes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Vous imaginez-vous, dans quelques mois, dans vos circonscriptions, face à des prospections et des exploitations par tel ou tel groupe qui aurait donné le change et aurait dépassé le délai de deux mois ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Pour apporter une justification sérieuse, Mme la ministre a tenté d'avancer des arguments juridiques. J'avais moi-même commencé à le faire pour prouver que cela ne tenait pas. Nous nous appuyons pour notre part sur l'article 5 de la Charte de l'environnement.

Plusieurs députés du groupe UMP. Vous ne l'avez pas votée !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Je ne répéterai pas mes propos précédents. S'agissant de la rétroactivité de la mesure, le Conseil constitutionnel l'admet lorsqu'un motif impérieux d'intérêt général justifie la mesure envisagée. Cette exigence, qui est également imposée par la Cour européenne des droits de l'homme, est parfaitement remplie dans le cas présent, puisqu'il s'agit de la préservation d'un intérêt ayant valeur constitutionnelle, à savoir la protection de l'environnement.

Enfin, s'agissant de l'indemnisation des entreprises – vous l'avez évoquée, madame la ministre – qui verraient leur permis annulé, rien n'oblige la collectivité publique. L'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen n'impose une indemnisation qu'en cas d'atteinte au droit de propriété. Or, dans le cas présent, les entreprises ne sont pas propriétaires des terrains, pas plus qu'elles ne le sont du permis. Les juges éventuellement saisis de cette question devront mettre en balance les intérêts privés liés à l'exploitation de ces gisements non conventionnels et la préservation de l'environnement, constitutionnellement reconnue. Cette annulation brandie par quelques entreprises est donc illusoire, mais vous y cédez. En revanche, la rédaction actuelle de la proposition de loi peut – je dis bien peut – servir par son ambiguïté à maintenir certains permis, le temps que la contestation faiblisse.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Pourquoi est-ce faux ? C'est la réalité ! Pourquoi avez-vous changé d'avis ? Parce que vous avez cédé, parce que le Gouvernement a cédé, et qu'il essaie d'habiller sa position à l'aide d'arguments juridiques qui ne tiennent pas ! Je vous le dis solennellement, monsieur le président : il y a le règlement qui, certes, nous contraint, mais le Conseil constitutionnel a dit et redit dans sa jurisprudence que la clarté et la sincérité des débats doivent éclairer l'Assemblée nationale. J'ai enfin pu justifier notre position et vous avez eu tort de ne pas m'y autoriser tout à l'heure ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Ayrault, vous ne pouvez pas dire que je ne vous ai pas laissé la parole. Vous aviez deux minutes tout à l'heure, je vous ai demandé de conclure au bout de quatre minutes. À l'instant, vous aviez deux minutes, et je vous ai laissé parler huit minutes. Vous pouvez difficilement prétendre que je ne vous laisse pas la parole.

La parole est à M. Christian Jacob.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Mon rappel au règlement est fondé sur l'article 58, relatif au déroulement de nos travaux. Je veux notamment répondre à quelques arguments avancés par M. Ayrault.

Vous n'étiez pas présent en commission, monsieur Ayrault, ce qui nous arrive à tous, à moi le premier.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Je ne suis pas non plus membre de la commission du développement durable mais, à l'occasion de ce débat, j'ai participé à ses travaux.

Il est vrai que nous avons modifié l'article 2. J'avais proposé une première rédaction et j'avais cru comprendre qu'elle vous convenait et qu'elle convenait à M. Cochet. Les deux rapporteurs m'ont ensuite expliqué qu'il n'y avait pas de base juridique si l'on visait les recherches de carburants non conventionnels. Dès le premier recours, l'abrogation tomberait. Si l'on en restait au texte initial, vous le savez pertinemment, comme l'ensemble de votre groupe et des commissaires ayant participé au débat, sans fondement juridique, ce serait un faux-semblant.

J'ai fait cette erreur dans la première rédaction et, après avoir entendu l'argumentation de nos deux co-rapporteurs, Michel Havard et Jean-Paul Chanteguet, je me suis rangé à leur proposition parce qu'elle était juridiquement beaucoup plus solide. Les permis sont muets, comme l'a souligné Jean-Paul Chanteguet à la tribune avec beaucoup de clarté, c'est-à-dire qu'on ne connaît pas la technique utilisée.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

La rédaction telle qu'elle était proposée par les deux co rapporteurs oblige les industriels à annoncer quelle technique ils utilisent, et l'on a alors un document opposable aux tiers. Les entreprises peuvent être condamnées pénalement si la déclaration est erronée.

Le texte est ainsi beaucoup plus fiable sur le plan juridique et c'est la raison pour laquelle, monsieur Ayrault, il a été voté à l'unanimité, à l'exception de M. Cochet. Si l'ensemble des députés de votre groupe l'ont voté, et ceux de notre groupe également, c'est bien parce qu'il était cadré juridiquement. Pourquoi avez-vous voté à l'unanimité l'article 2 sur le fondement de vos explications juridiques la semaine dernière et ne voteriez-vous pas aujourd'hui le même texte, à la virgule près ? C'est la seule raison pour laquelle je regrette que vous n'ayez pas participé à nos travaux en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Serge Grouard, président de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Je voudrais apporter deux précisions à M. Ayrault.

La première, purement factuelle, concerne la manière dont les choses se sont passées, et je crois que c'est important.

Le retrait de la proposition de loi du groupe SRC a été notifié à la présidence de l'Assemblée nationale vendredi. Le texte de la proposition de loi de Christian Jacob est venu en discussion mercredi. Il a été amendé et voté, et il a donc été connu de nous tous mercredi vers treize heures ou treize heures trente. Le groupe SRC comme l'UMP et le Nouveau Centre l'ont voté amendé, donc avec l'article 2 modifié. Je ne comprends donc pas pourquoi ce texte qui a été voté tel qu'il est présenté aujourd'hui suscite les foudres du groupe SRC.

Sur le fond, je voudrais soumettre un élément à la sagesse de l'Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je vous rappelle que nous sommes dans le cadre de rappels au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Je réponds aux différents arguments mais je serai le plus rapide possible.

Vous connaissez tous ce qu'on appelle un coup de grisou. Vous reconnaissez tous que c'est dangereux.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Nous sommes d'accord, notamment pour les habitants du Nord.

Vous savez qu'il y a dans le Nord des mines qui ne sont plus exploitées. Le grisou, comme gaz de mine ou gaz de houille, est classé dans les hydrocarbures liquides ou gazeux non conventionnels. Si vous reprenez la rédaction initiale de l'article 2, vous interdirez un certain nombre d'actions de pompage conduites notamment pour des raisons de sécurité.

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

C'est faux, il n'y a pas de fracturation hydraulique !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Vous avez raison, mais l'article 2 tel qu'il était rédigé ne parlait pas de fracturation hydraulique. C'est ça le problème, monsieur Peiro.

Vous allez donc interdire des interventions qui sont nécessaires pour la sécurité de nos concitoyens. C'est une raison fondamentale qui nous a amenés à parler non d'hydrocarbures non conventionnels mais de fracturation hydraulique, parce que c'est elle que nous voulons interdire. CQFD. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Je ne cherche pas à prolonger le débat mais je voudrais répondre au président de la commission, qui vient de mettre en cause le vote des députés socialistes en commission.

Plusieurs députés du groupe UMP. Au contraire !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Je pense que, si vous avez refusé, groupe UMP et Gouvernement, que le texte du groupe socialiste vienne en discussion commune aujourd'hui, c'est que vous aviez une arrière-pensée.

En commission, vous nous avez donné le sentiment de votre bonne foi et de votre sincérité. Nous, nous étions de bonne foi et nous avons voté le texte. Comme vous nous aviez donné des arguments juridiques, nous avons vérifié, et nous avons la démonstration qu'ils ne tiennent pas et laissent la place aux initiatives des groupes industriels qui sont déterminés et savent très bien où ils veulent aller. Ils veulent endormir tout le monde et vous, majorité comme Gouvernement, avez cédé à leurs pressions.

Nous, nous avons la preuve de notre bonne foi. Le co-rapporteur, Jean-Paul Chanteguet, a ouvert la possibilité d'amender. Ce sur quoi vous devrez vous prononcer, ce sont les amendements qui ont pu être déposés par le groupe socialiste grâce à son initiative. C'est bien la preuve que nous ne voulons pas nous laisser piéger par vos manoeuvres. Pour nous, la position la plus claire, c'est d'abroger purement et simplement les permis de prospection et d'exploitation des entreprises pour les gaz de schiste. C'est clair et net. À vous d'assumer vos responsabilités. Nous, nous assumons les nôtres. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Martine Billard.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous devions légiférer pour abroger les permis d'exploration et d'exploitation des gaz de schiste. L'unanimité tant vantée de tout l'hémicycle pour s'opposer fermement à ces huiles et gaz de schiste aura finalement été de très courte durée. Ce ne sera finalement pas le cas. Je le dis clairement, le texte sorti de la commission est un véritable tour de passe-passe.

Christian Jacob, président du groupe UMP, appelait au prolongement ad vitam du moratoire. Le 16 avril, comme par hasard, parce que c'était une journée de mobilisation contre les gaz de schiste, Jean-François Copé a mis une banderole sur la mairie de Meaux où était écrit : « non au gaz de schiste ». Les habitants de Seine-et-Marne ont eu droit à un tract de l'UMP : « non au gaz de schiste ». Ce n'était pas « non à la fracturation hydraulique » !

Or ce que vous allez nous proposer avec l'article 2, ce n'est pas de dire « non au gaz de schiste », c'est de contourner la question pour permettre, une fois les échéances électorales de 2012 passées, de relancer l'exploration et l'exploitation des huiles et gaz de schiste. C'est ça la réalité de votre proposition de loi et je crois que, sur ces bancs, peu de personnes ont des doutes sur l'importance qu'ont jouée les lobbies pétroliers et gaziers dans ce retournement de situation.

Si les travaux des rapporteurs ont été très importants, la liste des personnes auditionnées par la commission est tout de même un peu surprenante. Sur vingt-cinq personnes auditionnées, vingt d'entre elles participent à des entreprises directement concernées par l'exploitation des gaz et des huiles de schiste, quatre de chez Total, cinq de chez Halliburton, trois du conglomérat Hess Oil-Toreador, dont Julien Balkany lui-même. L'amicale des foreurs avait envoyé le 11 avril une lettre ouverte aux députés, en particulier à ceux qui avaient signé la proposition de loi. C'est avec une vive stupéfaction mêlée d'amertume, expliquaient-ils, qu'ils avaient lu cette proposition de loi de Christian Jacob, Jean-François Copé et autres députés UMP. Ils voulaient absolument être auditionnés pour démontrer qu'interdire l'exploration et la production de gaz et huiles de schiste sur le territoire national ramènerait tôt ou tard la France à l'âge de pierre. C'est à cela que vous avez cédé !

La rupture, avec la réécriture de l'article 2, est très nette puisque l'on passe de l'interdiction de l'exploration et de l'exploitation des gaz et des huiles de schiste à l'interdiction de la fracturation hydraulique. Ce que vous espérez, c'est trouver une méthode qui, en cimentant mieux les puits d'exploration verticaux et en changeant la formule chimique, soit plus acceptable par nos concitoyens, et c'est bien là que nous avons un désaccord de fond.

La fracturation hydraulique est-elle le seul risque avéré de l'exploitation des gaz et des huiles de schiste ? Différents rapports, y compris ceux utilisés par nos rapporteurs, montrent qu'il y a un grand nombre d'autres problèmes : réchauffement climatique, noria de camions, emprise au sol, destruction des paysages, etc.

Si le principe de précaution a pour but de prévenir un risque potentiel, celui de prévention, comme le dispose l'article L. 110-1 du code de l'environnement, implique l'interdiction lorsque les risques sont avérés.

Le fond du problème, c'est que cette exploitation est indéfendable. Il n'est pas possible, d'un côté, de défendre la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre et le réchauffement climatique et, de l'autre, de poursuivre la multiplication des projets qui vont à l'encontre de ces engagements.

Le Grenelle de l'environnement est une fois de plus enterré corps et biens, avec cette relance à terme de l'exploitation des gaz de schiste. Or, comme l'a rappelé mon collègue Yves Cochet, nous devons réduire nos émissions de gaz à effet de serre de 20 % en 2020 – c'est demain ! – et de 80 % en 2050.

La simple déclaration des exploitants, qui doivent s'engager à ne pas utiliser la technique de fracturation hydraulique, n'est pas suffisante : une fois qu'ils auront fait cette déclaration, il faudra qu'une personne ayant un intérêt à agir puisse démontrer que ce qui est dit est faux. Cette personne pourra présenter un référé au tribunal administratif, mais encore faut-il que le président du tribunal l'accepte. Sinon, il y aura un jugement au fond, et nous savons ce qu'est la durée d'un jugement au fond dans le contentieux administratif.

Pendant ce temps, l'exploitation se poursuivra. L'entreprise Total dit elle-même que la technique de fracturation hydraulique est utilisée dès la troisième phase de l'exploration car elle est nécessaire pour connaître le futur rendement du gisement ; c'est pour eux le seul moyen de savoir si le gisement sera rentable ou non. Or, en l'état, vous permettez d'aller jusqu'à cette troisième phase, donc jusqu'à la fracturation hydraulique.

Le ministère est incapable de nous fournir des réponses exactes sur le contenu des permis et l'utilisation des procédés. Abroger les permis existants est indispensable pour pouvoir tout remettre à plat, car ni les gaz ni les huiles de schiste ne peuvent être exploités autrement que par la fracturation hydraulique.

Il n'y a pas de réserves majeures connues d'hydrocarbures conventionnels dans la plupart des zones où les permis ont été délivrés. Il est donc parfaitement hypocrite de prétendre que nous ne savons pas et que nous pouvons interdire les permis, au risque d'empêcher l'exploitation d'hydrocarbures conventionnels.

Avec la rédaction actuelle, il n'est de fait même plus question d'un moratoire. Les travaux peuvent reprendre en Île-de-France ou dans le Sud : il suffit que les deux industriels qui ont les permis disent qu'ils n'utilisent pas cette technique. De fait, ils ne l'utilisent pas lors de la première phase d'exploration ; ils pourront donc toujours lancer ou poursuivre cette phase. C'est la remise en cause de ce que disait le Premier ministre, selon lequel il convenait d'annuler les autorisations déjà données. La proposition de loi telle qu'elle a été modifiée revient à le déjuger, avec pour seul objectif de laisser le temps aux industriels de démarrer l'exploitation.

L'article 3 de la proposition de loi a lui aussi disparu, sous prétexte qu'il fallait modifier le code minier au fond et non par morceaux. Vous dites, madame la ministre, que, dans l'ordonnance prise sur le code minier, la possibilité d'informer et de consulter les citoyens a été introduite, mais entre cette information et cette consultation light par internet et une véritable enquête publique au sens du code de l'environnement, il y a une sacrée différence !

Par ailleurs, la loi de ratification d'une ordonnance ne permet pas aux parlementaires de modifier l'ordonnance ; nous votons pour ou contre la ratification. Dans ces conditions, les futures demandes de permis, notamment en Alsace, ne donneront pas plus lieu à débat et à enquête publics que jusqu'alors.

Au fond, la question est de savoir si l'on peut toujours repousser les décisions courageuses nécessaires à la prise en compte les limites de notre planète. L'Agence internationale de l'énergie a confirmé que le peak oil était dépassé depuis 2006 ; cela signifie que la production de barils de pétrole ne fera que décroître dans le temps. Face à cette situation, faut-il faire l'autruche et chercher à exploiter la moindre goutte de pétrole et de gaz sans se préoccuper des générations suivantes ? On peut certes essayer d'exploiter au maximum tout ce qui peut être trouvé aujourd'hui, sans se soucier des conséquences pour l'environnement, en se disant que, tant que nos générations sont en vie, il faut continuer d'exploiter toujours plus les ressources pour vivre le plus tranquillement possible ; mais que faisons-nous des générations suivantes ?

Le problème n'est pas la planète – il existe beaucoup de planètes sans êtres vivants – mais la vie humaine sur terre. Il faut absolument prendre des décisions courageuses très vite parce que, sinon, à reculer constamment les échéances, à ne pas vouloir s'attaquer à la question de la conversion écologique de notre économie, de nos modes de production et de consommation, de nos échanges, nous allons vers des décisions qui seront encore plus douloureuses et dramatiques pour les populations.

Il faut rappeler qu'à niveau d'empreinte écologique équivalente, il faudrait au moins trois fois la terre pour que nous ayons tous un niveau de vie équivalent. Avec 2 % de croissance annuelle en Europe, en 2050, il faudrait que l'économie mondiale soit quinze fois plus importante qu'aujourd'hui pour que tous les êtres humains aient le niveau de vie européen.

Il y a donc bien urgence, une urgence à la fois écologique et sociale,…

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

…de répartition des richesses sur la planète, de buen vivir, comme on dit en Équateur ou en Bolivie, de « vivre bon », c'est-à-dire ne pas vouloir consommer toujours plus, ne pas poursuivre cette frénésie de consommation qui existe aujourd'hui sur la planète, mais chercher à ce que chacun puisse vivre dignement, correctement, en faisant vivre sa famille,…

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Je suis en train de terminer ma phrase, monsieur le président !

Je poursuis : …sans que cela ait pour conséquence d'épuiser les ressources de la planète, au détriment des générations futures.

Voilà l'enjeu de ce débat, au-delà du fait de savoir s'il faut exploiter maintenant ou plus tard les gaz de schiste. Il ne faut pas les exploiter, il faut tourner la page et nous porter tout de suite, d'urgence, vers des alternatives énergétiques. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Durand

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, il y a encore quelques mois, nous aurions pu penser qu'une opportunité nouvelle en termes de ressources énergétiques s'offrait à la France.

Mais, au final, le manque de transparence, le manque d'information du public, l'opacité d'une filière, celle du gaz et des huiles issues de roche mère, ont réduit à néant toute marge de manoeuvre.

En effet, dans le Bassin parisien comme dans le Sud-Est de la France, nombreuses ont été et sont encore les inquiétudes exprimées par les populations locales.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Durand

Ces craintes, nous les avons relayées au sein du Parlement. Nous avons d'ailleurs eu un débat de qualité en avril dernier à ce sujet, et plusieurs initiatives parlementaires, émanant aussi bien de la majorité que de l'opposition, ont été déposées sur les bureaux de l'Assemblée nationale et du Sénat.

La mesure de ces préoccupations locales a été prise aussi par le Premier ministre, qui a prolongé, le 11 mars dernier, le moratoire sur l'exploitation du gaz et des huiles de schiste. Les permis de recherche et les autorisations de travaux sont désormais suspendus jusqu'à la fin de la première quinzaine de juin.

Pour le Nouveau Centre, il s'agissait d'une prolongation nécessaire pour travailler à un cadre réglementaire serré.

Aujourd'hui, je tiens, au nom de mon groupe, à saluer les deux rapporteurs de cette proposition de loi, qui ont travaillé dans l'urgence et avec peu de données pour nous proposer un texte plus équilibré et éclairé que dans sa première version.

Ce cadre législatif, nous l'avons appelé de nos voeux lors du précédent débat dans cet hémicycle ; aussi nous réjouissons-nous de l'arrivée de cette proposition de loi à l'ordre du jour.

Une question, toutefois : pourquoi une telle précipitation, lorsque l'on sait que le rapport de MM. les députés Gonnot et Martin sera rendu dans les toutes prochaines semaines ?

Vous me répondrez : « principe de précaution ». La précaution est certes de mise car nous n'avons que peu d'informations – il faut bien le reconnaître – sur le sujet. Nous attendons à ce titre avec un grand intérêt les conclusions de la mission conjointe du Conseil général de l'industrie, de l'énergie et des technologies et du Conseil général de l'environnement et du développement durable sur la roche mère.

La remise du rapport d'étape le 15 avril dernier a été à ce titre éclairante. Ce rapport provisoire suggère aux ministres de retenir, s'agissant des hydrocarbures de roche mère, les principes suivants.

Lancer un programme de recherche scientifique sur les techniques de fracturation hydraulique et leurs impacts environnementaux, dans un cadre national. C'est véritablement indispensable, et les Européens convaincus que nous sommes en appellent même au niveau européen, pour une décision harmonisée à l'échelle communautaire.

Promouvoir la réalisation par les industriels d'un nombre limité de puits expérimentaux. En effet, dans l'état actuel de nos connaissances, les ressources en gaz et huiles de roche mère de notre pays restent largement inconnues. Pouvons-nous nous permettre de passer à côté ? Dans l'état actuel des méthodes de forage, oui, mais plus tard ? Nous posons la question et notons que les rapporteurs ont fait de leur mieux pour ne pas bloquer toute innovation. C'était important.

Favoriser l'émergence et la formation d'opérateurs et de sous-traitants nationaux susceptibles de se positionner sur le marché mondial. Ce principe doit nous guider dans l'ensemble des filières, notamment vertes.

Enfin, le rapport préconise, concernant les Causses-Cévennes, de parfaire les connaissances scientifiques sur le milieu spécifique de la région avant toute autre chose. C'est une décision sage.

Ces préconisations sont plutôt sages, je le redis. Toutefois, nous ne pouvons écarter les enjeux environnementaux qui entourent les techniques d'exploitation des gaz et huiles de schiste.

Nous l'avons exprimé en commission et lors du précédent débat sur cette énergie dans l'hémicycle : l'exploitation des gaz de schiste a deux conséquences potentiellement majeures pour l'environnement.

La première conséquence est mondiale, globale. En effet, la consommation de gaz participe à l'effet de serre et donc aux changements climatiques.

Bien sûr, l'effet varie suivant l'énergie à laquelle se substitue le gaz de schiste. La combustion d'une tonne équivalent pétrole de gaz naturel émet 2,3 tonnes de CO2, contre 3 tonnes pour le pétrole et 3,9 tonnes pour le charbon.

Cependant, regardons le bilan du « puits à la roue » comprenant l'ensemble des émissions pendant tout le cycle de vie, en particulier celles dues aux énergies utilisées pour la construction des puits et pour leur démantèlement, transport des matériels compris : là, le bilan est clairement moins bon !

La seconde conséquence est locale. Le risque est tout d'abord celui de la pollution des nappes souterraines par manque d'étanchéité des forages.

Ce risque est aggravé pour le gaz, qui est par nature éruptif, par rapport aux huiles, plus denses. Le risque réside donc dans la pollution des sols en cas de fuite des canalisations. Si le mélange injecté dans le sous-sol est composé à 98 % ou 99 % d'eau et de sable, a priori neutres pour l'environnement, les 1 % à 2 % restants contiennent des acides et produits gélifiants potentiellement dangereux pour l'homme et l'environnement.

Par ailleurs, la consommation d'eau par ces techniques est très élevée : de 15 000 à 20 000 mètres cubes par puits.

Enfin, l'implantation des machines à forer et des installations connexes peut produire du bruit et avoir un impact important sur les paysages.

Autant d'éléments qui démontrent encore un peu plus la non-neutralité de cette source énergétique.

Par ailleurs, les rapporteurs l'ont souligné, c'est d'une réforme plus globale de notre code minier qu'il doit être question. Le groupe Nouveau Centre salue la sagesse qui a prévalu : oui, il faut encore quelques semaines, quelques mois pour actualiser ces dispositions, alors ne nous précipitons pas dans cette tâche, à travers cette proposition de loi. Chaque chose en son temps !

Cette question a été soulevée d'une manière assez passionnée, il faut en convenir. Nous aurions aimé qu'elle puisse être étudiée de façon plus sereine, mais nous sommes aussi conscients que la raison demandait de tout remettre à plat.

C'est chose faite avec cette proposition de loi à laquelle notre groupe devrait se rallier.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Durand

Nous émettons des réserves quant à une utilisation toujours plus poussée du principe de précaution. Néanmoins, le groupe Nouveau Centre est conscient des enjeux environnementaux, et entend placer dans un cadre sûr ce débat. Aussi, la majorité de notre groupe (« Pas tous ? » sur les bancs du groupe SRC) s'associera à l'approbation de la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les co-rapporteurs, mes chers collègues, le 29 mars dernier, à l'occasion du débat sur l'exploration et l'exploitation des gaz et des huiles de schiste, j'avais estimé que le moratoire annoncé par le Gouvernement ne pouvait être qu'une première étape. Il fallait aller beaucoup plus loin, pour rassurer nos concitoyens et l'immense majorité des élus locaux concernés par les permis d'exploration. La proposition de loi que je présente aujourd'hui n'a donc d'autre but que de franchir une nouvelle étape, à la fois nécessaire et indispensable. En examinant aujourd'hui ce texte dans une séance d'initiative parlementaire, nous franchissons cette nouvelle étape à peine quarante jours après le débat, et cet enchaînement illustre parfaitement l'avancée démocratique majeure que représente la réforme constitutionnelle de 2008, qui a permis…

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

…de consacrer l'initiative parlementaire. Vous devriez vous en féliciter, mes chers collègues de l'opposition.

Notre sujet n'est pas ici de se pencher sur les conditions dans lesquelles les permis ont été délivrés. Jean-Louis Borloo lui-même – il le redira tout à l'heure – pense que ces délivrances ont été une erreur.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Nous avons tous au tournant de l'année, entre décembre et janvier derniers, découvert l'existence de ces permis. La responsabilité du législateur était donc d'agir et de répondre aux vives inquiétudes des Français.

Si tout avait été limpide, rien n'aurait justifié une mission interministérielle confiée aux corps d'inspection des ministères de l'écologie et de l'industrie, rien n'aurait justifié la mission d'information confiée à nos deux collègues Gonnot et Martin, rien n'aurait justifié le moratoire prononcé par le Premier ministre. Si tout avait été simple, quelques mois auraient suffi à apporter des réponses scientifiquement crédibles.

Tel n'est malheureusement pas le cas.

Dans ce contexte, l'étape législative est un passage obligé pour rendre la confiance dans un dossier qui était mal engagé, mal parti.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Avec le texte qui nous est soumis, nous affichons une volonté commune de respecter les engagements que nous avons pris en 2005 dans la Charte de l'environnement. Des députés issus de tous les bancs ont souhaité cette avancée majeure. À cet instant, je tiens à saluer le travail exemplaire de la commission du développement durable, de son président, Serge Grouard, de ses deux corapporteurs, Michel Havard et Jean-Paul Chanteguet, qui ont permis à la commission de vous proposer un texte solide et équilibré.

En effet, nous interdisons la mise en oeuvre de la fracturation hydraulique pour explorer et exploiter les gaz et huiles de schiste, et plus généralement les hydrocarbures. C'est on ne peut plus clair à l'article 1er.

De plus, à l'article 2, nous abrogeons tous les permis qui emploient cette technique. Une compagnie pétrolière titulaire d'un permis aura deux mois pour indiquer quelle technique elle utilise. C'est ce que j'ai expliqué à M. Ayrault.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Le texte amendé, présenté par nos deux corapporteurs, est en cela beaucoup plus solide juridiquement que la version initiale. Vous savez bien, monsieur Cochet, quelle était la fragilité de la première version. Je me suis rangé aux arguments de Jean-Paul Chanteguet car ils étaient fondés. Cet article amendé a d'ailleurs été voté à l'unanimité.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Excepté par vous, mais parce que vous ne votez jamais aucun texte. Il aurait été extraordinaire qu'il en aille autrement. Ç'aurait été une grande première que nous aurions pu fêter, en ce jour mémorable pour certains d'entre vous… Je pressens que certains collègues vont tenter de prendre prétexte de la nouvelle version de cet article pour se désolidariser d'un texte qui a pourtant été voté à l'unanimité en commission – à l'exception de M. Cochet.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Monsieur Terrasse, un commissaire du groupe SRC a quand même toute légitimité pour voter en commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Il faut lire les comptes rendus ! Lisez donc la page 65 !

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Le vote des commissaires n'engage pas tout leur groupe !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

J'expliquais à M. Terrasse, qui a décroché quelques instants, le bien-fondé du vote des commissaires. Mon cher collègue, ne les reniez pas : ils ont fait un bon travail et il faut les soutenir.

Pour être tout à fait précis, il est important de rappeler que si je me suis rangé à leur argumentation, c'est parce que les permis avaient été accordés et la fracturation hydraulique allait être mise en place avant même que le moindre rapport ne soit rendu. Avec cette loi, nous remettons le sujet à l'endroit. Voilà pourquoi notre commission souhaite que le Parlement soit saisi chaque année d'un rapport gouvernemental pour connaître l'évaluation et l'évolution des techniques, pour connaître le sous-sol avec précision, pour juger de la nécessité de faire évoluer notre droit et pour voir dans quelles conditions l'expérimentation aux fins de recherche scientifique peut être mise en oeuvre.

La sécurisation de nos approvisionnements énergétiques est une question majeure que, comme l'ensemble de mes collègues, je ne sous-estime pas. Mais il y a un préalable non négociable : prendre le temps de l'évaluation et de la connaissance scientifique.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

C'est important car si nous ne le prenons, nous condamnerons ad vitam aeternam tous les autres temps : celui de l'expérimentation, et peut-être un jour celui de l'exploration ou de l'exploitation. Voilà pourquoi la connaissance scientifique est nécessaire.

Parallèlement à cette évolution, nous appelons de nos voeux une réforme du code minier. Je sais que vous la souhaitez, madame la ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Il ne s'agit pas de la souhaiter, il faut la faire !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Notre débat témoigne que le plus vite sera le mieux s'agissant de réformer ce code pour le rendre plus transparent et plus lisible, et pour qu'il permette toutes les enquêtes publiques nécessaires à la bonne information de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Monsieur le président, je profite de l'intervention de Christian Jacob pour l'inviter à lire l'ensemble du rapport, notamment la page 65, où il apparaît qu'au nom du groupe socialiste j'ai émis les plus grandes réserves sur l'article 2.

Madame la ministre, depuis plusieurs mois, la mobilisation citoyenne sur la question des risques liés à l'exploration et à l'exploitation des gaz de schiste ne faiblit pas. On l'a vu encore aujourd'hui. Notre premier devoir en tant que législateurs – vous me rejoindrez au moins sur ce point – est évidemment de prendre en compte cette indignation et cette forte inquiétude. Mais il est aussi de notre devoir de ne pas céder aux sirènes de l'émotion, comme c'est trop souvent le cas. Notre rôle consiste donc bien sûr à examiner, avec l'ensemble des éléments techniques et scientifiques à notre disposition, les mesures qui nous sont proposées aujourd'hui.

Par ailleurs, je me permets de vous rappeler quelques principes juridiques. Je suis membre de la commission des lois et, à ce titre, je voudrais que l'on prenne des décisions qui soient guidées par des éléments juridiques.

La proposition de loi que nous examinons doit répondre aux questions urgentes puisque les décisions prises au mois de mars dernier par le Gouvernement nous ont placés devant le fait accompli, un fait que je considère comme révoltant. Mais cette loi doit également s'inscrire dans la durée en prévoyant l'ensemble des éventualités et en répondant aux questions énergétiques et environnementales qui pourront se poser dans dix ou quinze ans, voire dans vingt ans. Elle doit faire prévaloir les principes de précaution et de prévention, et plus généralement la préservation de l'environnement, de la santé et de la qualité de vie de nos concitoyens.

Au regard des éléments et des principes que je viens d'énoncer, ce texte de loi, notamment son article 2, me laisse dubitatif. Je l'ai dit lors de l'examen en commission du développement durable, bien que je n'en sois pas membre. Il me semble essentiel de rappeler les principes juridiques sur lesquels nous devons nous appuyer. À ce titre, le texte proposé présente des lacunes évidentes. En effet, il ne tient suffisamment compte ni du règlement européen Reach, ni de la directive-cadre européenne sur l'eau, ni de la Charte de l'environnement.

Premièrement, le règlement européen Reach sur l'utilisation des produits chimiques est crucial parce qu'il fait porter à l'industrie la responsabilité d'évaluer et de gérer les risques posés par les produits chimiques et de fournir des informations de sécurité adéquates à leurs utilisateurs. Les risques liés à l'utilisation de produits chimiques dans les techniques d'exploration et leur impact potentiel sur les nappes phréatiques sont évidents. Vous ne me contredirez pas, madame la ministre, puisque vous les avez vous-même rappelés.

Deuxièmement, l'utilisation de ressources hydrauliques pour la recherche semble totalement inappropriée, notamment dans les territoires où celles-ci sont limitées, en particulier les zones méditerranéennes. Je suis bien placé pour vous dire que le préfet du département de l'Ardèche vient de prendre des arrêtés en raison de la sécheresse. Utiliser des techniques de fracturation hydraulique qui peuvent conduire à court terme à puiser des millions de litres d'eau dans les nappes phréatiques ou dans les rivières a donc un impact environnemental.

Au-delà du principe de précaution auquel on se réfère souvent, la Charte de l'environnement insiste sur le principe de prévention. De plus, dans son article 6, elle dispose que « les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable [et concilier] la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social ». À ce titre, l'impact que pourraient avoir les activités de recherche et d'exploitation sur le tissu économique des territoires concernés doit être pris en compte. En effet, la préservation de l'environnement apparaît pour de nombreux territoires comme essentielle au maintien de leur équilibre économique ; qu'il s'agisse d'activités touristiques ou du secteur agricole, des pans entiers de leur économie reposent sur un environnement et des paysages fragiles qui doivent être préservés. Il ne suffit pas d'abroger les permis d'exploration et d'exploitation déjà délivrés : il faut créer les conditions qui nous permettront d'envisager sereinement l'avenir puisque les questions énergétiques et environnementales resteront au coeur de nos préoccupations dans un monde où les ressources naturelles et énergétiques sont limitées et doivent être préservées.

Or le texte que nous examinons propose, dans son article 2, une définition des méthodes de recherche qui me semble très restrictive, et je soutiendrai des amendements pour cette raison. Cette définition ne concerne en effet que la technique de la fracturation hydraulique, et n'apporte donc pas des réponses à la mesure des enjeux de long terme auxquels nous sommes confrontés. Ne doutons pas que les firmes opérant dans ce secteur ne soient en mesure, à l'avenir, de déployer des trésors d'inventivité, technique ou sémantique, pour rendre cette loi caduque. Si nous ne prêtons pas une attention particulière à la formulation, nous aurons évidemment des recours.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

je vais conclure, monsieur le président. J'aurais souhaité évoquer la convention d'Aarhus à propos du nécessaire débat démocratique car il n'y en a eu aucun sur ce sujet, pas une consultation, pas un élu informé.

On voit donc qu'au vu de l'ensemble des éléments juridiques, l'article 2 dans le texte de la commission n'est pas valable. C'est pourquoi je considère que le débat en séance devrait pouvoir amener l'ensemble des députés à trouver une solution satisfaisante. Faute de quoi, mes collègues et moi-même ne voterons évidemment pas ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Anny Poursinoff

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, partout en France, et encore aujourd'hui devant l'Assemblée nationale, la mobilisation démontre qu'on ne peut pas faire fi de la transparence et imposer aux citoyennes et aux citoyens une menace pour leur environnement, les nappes phréatiques et la santé publique.

Pour une fois, nous avons la possibilité de mettre en oeuvre le principe de précaution en amont des futures catastrophes annoncées. Ne nous en privons pas.

La semaine dernière, les députés ont pris la courageuse décision d'interdire les phtalates, les parabènes et les alkylphénols, dont les risques sur la santé sont avérés.

Debut de section - PermalienPhoto de Anny Poursinoff

Dans notre environnement saturé de pesticides, dans notre pays qui a tout misé sur le nucléaire, est-il nécessaire de rajouter encore des facteurs de risques ?

Les écologistes ne le pensent pas. Les scientifiques, aux États-Unis et en France, ont déjà réalisé nombre d'études qui montrent les dangers représentés par l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures de roche mère.

La semaine dernière, l'association Toxicologie-Chimie, présidée par André Picot, directeur de recherches honoraire au CNRS et expert auprès de l'Union européenne, m'a remis un rapport que je vous ai communiqué.

Ce rapport, réalisé avec l'aide de Jérôme Tsakiris et de Joëlle et Pierre David, apporte un éclairage nouveau concernant la toxicité des produits employés pour les forages et les risques de radioactivité des déchets induits.

Ce travail fouillé dresse la liste des principaux composés chimiques organiques utilisés dans les fluides de fragmentation, au regard de leurs dangers avérés pour la santé humaine et l'environnement et de leur toxicité neurotoxique, cancérogène, narcotique, mutagène, néphrotoxique et allergisante.

Ce rapport corrobore l'évidence : le principe de précaution nécessite l'abrogation pure et simple de tous les projets d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures de roche mère.

La proposition de loi qui est faite aujourd'hui pourrait être satisfaisante si, au détour de l'amendement sur l'article 2, elle ne se retrouvait pas vidée de son sens. En effet, contrairement à ce que vous affirmez, madame la ministre, il n'existe pas actuellement de techniques de forage qui ne fassent pas appel à la fracturation hydraulique.

Le législateur se doit de faire preuve de transparence. Nos collègues Yves Cochet et André Chassaigne l'ont bien démontré lors de la présentation des motions de procédure et je n'y reviendrai pas.

La France est déjà dotée de l'un des parcs nucléaires les plus importants au monde, avec tous les risques que cela entraîne ainsi que les coûts exorbitants du démantèlement, sans compter notre incapacité à traiter les déchets. Est-il nécessaire de faire croire à la population que des techniques propres existeront demain pour l'extraction des hydrocarbures de schiste ? Les écologistes ne le pensent pas.

Sacrifier des terres agricoles pour y implanter des installations polluantes n'est pas acceptable. Alors que la France vit une sécheresse importante dont vous vous êtes souciée, madame la ministre, gaspiller et polluer l'eau de nos nappes phréatiques serait irresponsable.

Développons les énergies alternatives, comme nous y incite le dernier rapport du GIEC, y compris la géothermie. Réduisons notre consommation énergétique. Repensons l'aménagement du territoire afin d'assurer une transition vers une ère post-pétrole. Voilà la responsabilité que nous devons assumer vis-à-vis des générations futures. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Un grand moment ! Je n'ai rien vu, rien entendu !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Borloo

Monsieur le président, monsieur le président de la commission du développement durable, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je me réjouis de l'examen de ce texte en urgence.

Il y a urgence parce que...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Borloo

…d'autres dossiers sont en cours de débat ou d'analyse.

Assez clairement, notre pays ne souhaite pas qu'il y ait d'exploitation par fracturation hydraulique des gaz de schiste. Comment, malgré cela, en sommes-nous arrivés là ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Borloo

Je vais vous répondre, monsieur Cochet, si vous pouvez avoir la gentillesse de respecter le débat démocratique.

Alors qu'au fond tout le monde est absolument d'accord sur ce problème des gaz de schiste, nous en débattons pourtant à une heure tardive, et c'est heureux : il se pose malheureusement de plus en plus et un peu partout sur la planète.

Ayant été le ministre en charge d'une administration qui a donné son autorisation, j'ai été amené à regarder très précisément ce qui s'était passé.

La situation est assez simple. En 1994, suite aux recommandations du Conseil d'État, les procédures en matière de recherche ont été allégées par le législateur, partant d'une idée assez simple : les procédures d'exploitation étant encadrées, les procédures de recherche devaient être allégées. Ce fut fait, notamment en supprimant les dispositions de l'article 9 du code minier prévoyant des enquêtes publiques en matière de recherche.

À l'époque, en 1994, la recherche était vue comme le moyen de mieux connaître et comprendre. On pensait donc qu'il était possible d'alléger ses procédures, dès lors que l'exploitation, elle, était encadrée de diverses manières : analyse des conséquences environnementales, enquêtes publiques et citoyennes, etc.

Depuis cette époque, il a toujours été donné délégation aux services de l'État pour instruire ces permis de simple recherche. Vous disant cela, je ne cherche en aucune manière à m'exonérer de mes responsabilités politiques car les ministres sont responsables de leur administration. Je vous le dis pour qu'on en tire les leçons objectives, afin que cela ne se reproduise pas.

Cette décision était une énorme erreur pour deux raisons. D'une part, certaines recherches, et notamment celles qui sont concernées par ce débat, peuvent comporter des risques extrêmement graves pour l'environnement et pour la santé. Ce n'était pas le cas pour les autres types de recherche. D'autre part, le code minier induit une forme de continuum entre l'autorisation de recherche et l'autorisation d'exploitation.

C'est pourquoi nous avons eu doublement tort dans cette affaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Borloo

Cela ne date pas d'aujourd'hui : depuis dix-sept ans, des centaines de permis de recherche sont attribuées tous les ans de cette manière, sans enquête publique, sans discussion générale, ce qui est objectivement regrettable.

Que faut-il faire maintenant ? Une réforme en profondeur du code minier. Messieurs les présidents de groupe, madame la ministre, je fais une affaire personnelle de la modification du code minier, comme l'ordonnance le prévoit d'ores et déjà : aucune autorisation de recherche ne peut être accordée sans une étude d'impact et un débat public local. C'est le minimum, mais je ferai plusieurs propositions pour aller plus loin.

Depuis dix-sept ans, la France délivre tous les ans des autorisations de recherche qui ne posent pas de problèmes particuliers. En revanche, les cas dont nous débattons ce soir posent un problème majeur.

S'agissant du texte, les rapporteurs ont effectué un travail absolument remarquable, alors que c'était difficile pour l'un comme pour l'autre. J'avais déposé une proposition de loi prévoyant une abrogation pure et simple…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Borloo

… mais j'ai tendance à me ranger à l'avis juridique de la commission en ce qui concerne l'article 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Borloo

Attendez, tout le monde est d'accord dans cette affaire !

Je demande seulement une chose à la commission ou au Gouvernement : que le Parlement soit à nouveau saisi si, par extraordinaire, l'on découvrait des turpitudes de quelque groupe que ce soit dans le délai de deux mois. Nous ferions alors en sorte que l'article 1er soit parfaitement appliqué…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Borloo

… et que les autorisations dont nous souhaitons l'abrogation soient effectivement abrogées. Ce n'est tout de même pas très compliqué. Dans huit semaines et un jour, vous saurez si la commission avait raison – ce qui serait heureux. Si un ou deux cas lui donnaient tort, le Parlement assumerait alors l'abrogation totale.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Pourquoi ne pas le faire maintenant, plutôt que de rejouer l'HADOPI ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Borloo

On vous l'a expliqué, monsieur Terrasse. Vous avez sûrement raison sur tout, comme d'habitude mais, pour ma part, j'ai plutôt confiance dans les analyses juridiques qui ont été faites. C'est vrai que le texte ne cible pas le gaz de schiste en tant que tel mais la technique qui est utilisée.

J'ai tendance à me ranger à cette analyse, d'autant que le président de la commission et le Gouvernement devraient nous assurer qu'en cas de déception dans huit semaines, l'Assemblée serait ressaisie en vue d'une abrogation définitive.

Madame la ministre, je n'ai aucun doute à ce sujet. Sachez simplement que je serai à votre disposition pour une amélioration absolument indispensable du code minier. Pour ma part, j'en fais, je le répète, une affaire personnelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Frédérique Massat

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il y a un peu plus d'un an, en catimini et dans l'opacité la plus totale, le ministre de l'énergie de l'époque signait des permis d'exploration de gaz de schiste dans le Sud-Ouest.

Quand les habitants des départements concernés ont découvert avec stupeur ce qu'on leur avait caché, une formidable mobilisation s'est organisée. Et au fil de la montée en puissance de cette contestation, les révélations se sont succédé.

Ainsi, sans concertation locale préalable avec les élus et encore moins avec les populations, il avait été accordé dès 2006 en Midi-Pyrénées, un permis exclusif de recherche d'hydrocarbures gazeux, dit permis de Foix, s'étendant sur une surface de plus de 3 000 kilomètres carrés dans les départements de l'Aude, l'Ariège, la Haute-Garonne et les Hautes-Pyrénées pour une durée de quatre ans. Les seules informations publiées à ce sujet avaient annoncé une éventuelle présence de pétrole en Ariège.

Le plus surprenant est que, sans que les populations locales aient été averties sur la nature exacte des forages, des fracturations hydrauliques ont eu lieu lors de cette phase d'exploration. Un rapport de l'ancienne DRIRE est venu confirmer ces affirmations.

Parce qu'en France un particulier qui possède un terrain n'est pas propriétaire du sous-sol, on peut forer sans son autorisation. C'est ainsi que de nombreuses personnes ont eu la grande surprise de constater que leurs sols avaient été contaminés sans qu'aucune étude d'impact globale ait été réalisée.

Absence de transparence et manque d'information ne sont pas sans évoquer la situation à laquelle les États-Unis sont confrontés. Révélé notamment par le film Gasland cité par Mme la ministre tout à l'heure, le scandale né de la plus grande campagne de forage par hydro-fracture devrait nous amener à réfléchir. Nous avons tous en mémoire ces images stupéfiantes d'eau qui s'enflamme, ces habitants qui ne peuvent plus utiliser l'eau du robinet et qui souffrent de maux de tête, d'étourdissements, de lésions cérébrales irréversibles.

Le 18 avril dernier, la commission de l'énergie et du commerce de la Chambre des représentants américaine a rendu un rapport alarmant : les quatorze compagnies pétrolières et gazières auditionnées auraient, entre 2005 et 2009, utilisé 2 500 produits de fracturation hydraulique contenant 750 composés chimiques dont certains représentent un risque extrêmement dangereux pour la santé humaine. Ainsi, pour favoriser les intérêts de puissantes industries pétrolières, le gouvernement américain n'a pas hésité à bafouer les lois environnementales et la santé publique.

En France, les réserves d'hydrocarbures apparaissent comme une solution qui tombe à point nommé. Elles pourraient, selon certains, représenter jusqu'à dix ans de consommation gazière et permettre de diminuer notre facture énergétique due aux importations de pétrole et de gaz.

L'industrie pétrolière se veut plus que rassurante, considérant que nous sommes à des années-lumière de la situation des États-Unis. Le président de l'Union française des industries pétrolières nous a affirmé, lors de sa récente audition par la commission des affaires économiques, que les risques environnementaux provoqués par la fracturation étaient exagérés, tout en estimant par ailleurs qu'ils étaient maîtrisables.

Derrières les arguments défendus par l'industrie pétrolière dont votre gouvernement n'a eu de cesse de préserver et protéger les intérêts, le risque est bel et bien réel. Les permis accordés dans la plus grande opacité traduisent les dysfonctionnements de l'appareil d'État.

Comment la France, dans le même temps qu'elle adoptait le Grenelle de l'environnement, a-t-elle pu autoriser ces recherches sans même appliquer le principe de précaution alors que les dangers pour l'environnement étaient connus de tous ?

Notons que ces autorisations s'inscrivent dans le cadre du code minier, largement évoqué au cours de cette soirée, qui date de 1956 et reprend lui-même la loi fondamentale sur les mines de 1810. Le contexte énergétique de la France de 1956 – voire de 1810 – et celui d'aujourd'hui n'ont pas grand-chose à voir...

C'est pourquoi, au-delà de cette proposition de loi, il faut absolument – tout le monde s'accorde à le dire – révéler les faiblesses de notre code minier et se doter d'une politique énergétique ambitieuse en adéquation avec les réalités et les besoins actuels.

Pour conclure, je souhaiterais faire part de mes profondes inquiétudes après la réécriture de l'article 2 par la commission, la semaine dernière. Si cette modification est intervenue pour faire face à une insécurité juridique, elle ouvre une brèche dans laquelle il y a fort à craindre que les industriels ne manqueront pas de s'engouffrer.

Dans la mesure où le Gouvernement s'est officiellement engagé à abroger les permis exclusifs de recherche, nous vous demandons de faire preuve de responsabilité en soutenant nos amendements qui verrouillent le dispositif en garantissant l'abrogation de tous ces permis.

De plus, à l'heure actuelle, nous ne disposons toujours pas de la liste précise des permis concernés. L'opacité continue à régner dans ce dossier.

Madame la ministre, en soutenant nos amendements et en publiant la liste de ces permis, vous feriez taire les interrogations qui persistent sur la sincérité de l'engagement du Gouvernement, que d'aucuns accusent d'opportunisme face au tollé suscité par cette affaire auprès des populations.

Mes chers collègues, nous parlons aujourd'hui de protection de l'environnement et de santé publique. Face aux inquiétudes légitimes de nos concitoyens, nous ne pouvons nous contenter d'une position minimaliste. C'est pourquoi, au nom de l'intérêt général, il faut impérativement lever le flou sur la rédaction actuelle et voter nos amendements, condition sine qua non pour que nous votions ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je sais que le sujet est passionnant mais je demande à chaque orateur de respecter son temps de parole.

La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Morel-A-L'Huissier

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, aujourd'hui, comme il y a cinq mois, ma position est claire : non à l'extraction du gaz de schiste par la technique de la fracturation hydraulique.

Il y a cinq mois, lorsque j'ai créé, avec Pascal Terrasse, le comité parlementaire de surveillance et de précaution sur le gaz de schiste, on n'en parlait pas beaucoup. S'en sont suivis une motion parlementaire, des pétitions, une commission d'enquête, des débats dans l'hémicycle, des auditions par la mission d'information, la saisine de la commission d'accès aux documents administratifs – la CADA –, qui se prononcera demain sur la communicabilité de tous les documents et, maintenant, une proposition de loi de Christian Jacob, que j'ai soutenue immédiatement.

Il y a deux semaines, la mission confiée au Conseil général de l'industrie, de l'énergie et des technologies – le CGIET – a rendu son pré-rapport. Il me semble primordial de l'utiliser aujourd'hui. Je regrette cependant que pas un acteur lozérien n'ait été auditionné par cette mission, alors même que l'un des permis, celui de Nant, touche tout le sud-ouest du département.

Je retiendrai trois éléments principaux de ce rapport.

Le premier est la mauvaise connaissance que nous avons de la fracturation hydraulique. Il est précisé dans le rapport que « les techniques de fracturation utilisées par les grandes sociétés de services susceptibles d'intervenir en France sont mal connues de nos organismes techniques et même des opérateurs pétroliers disposant de types de recherche d'hydrocarbures, de roches mères dans notre pays. » C'est un comble !

Le rapport pointe ensuite l'insuffisance de transparence, que je ne cesse de dénoncer depuis trois mois. Il faudra, dans le futur, associer les élus locaux, les associations et les citoyens à toutes les décisions. Il n'est pas tolérable que des actes administratifs qui ont des effets si impactants pour les territoires soient pris comme cela a été fait en mars 2010.

Enfin, le rapport dénonce le faible nombre d'experts de l'administration et leur éclatement géographique, qui fait que la compétence collective des administrations est inadaptée à la recrudescence potentielle des forages en métropole. On estime à moins d'une dizaine les experts encore présents dans les services déconcentrés.

La proposition de loi qui est soumise aujourd'hui à la représentation nationale repose sur un triptyque.

Tout d'abord l'interdiction. Il est question d'interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux non conventionnels. Le manque de définition juridique de ce qu'est un gaz non conventionnel a conduit les rapporteurs à proposer d'interdire l'exploitation de tout type de matières premières par la technique de l'hydrofracturation.

Cela solution me semble la bonne car elle allie solidité juridique et effectivité. En effet, le problème n'est pas tant l'exploitation des richesses présumées de notre sous-sol que la façon de procéder.

Je ne reviendrai pas sur le manque de connaissances relevé par le pré-rapport du CGIET sur l'hydrofracturation. Cette technique, dont les expériences étrangères montrent les conséquences extrêmement graves pour l'environnement, ne pourra être utilisée, et je m'en réjouis.

Deuxième élément du triptyque : l'abrogation des arrêtés. Avocat de droit public, j'ai été le premier à la réclamer au Premier ministre. Les travaux de la commission ont montré que, si l'abrogation d'un acte réglementaire par le législateur envoie un message politique fort, il suscite une grande incertitude juridique.

Personnellement, j'aurais pris le risque. Le législateur ne peut-il le faire au regard du principe constitutionnel né de la Charte de l'environnement, à savoir le principe de précaution ?

Si le juge constitutionnel est saisi, il devra trouver un compromis entre l'orthodoxie juridique et le respect du principe de précaution. La problématique du gaz de schiste mérite que ce questionnement soit porté devant le Conseil constitutionnel.

Je proposerai en tout état de cause un amendement sur cet article, afin qu'une plus grande transparence soit garantie et que les habitants des zones concernées aient accès aux rapports des entreprises. Il est en effet essentiel que le rapport remis par les sociétés disposant d'un permis exclusif de recherche sur les techniques qu'elles entendent utiliser soit rendu public et que les citoyens, les associatifs et les élus puissent s'y référer.

Je ne l'ai que trop dit : la transparence dans ce dossier n'est pas un luxe, mais une nécessité.

Troisième élément du triptyque : l'information. J'ai bien entendu la position des rapporteurs qui, avec justesse, demandent que la procédure d'encadrement de la délivrance des permis d'exploration et d'exploitation en association avec le public soit définie une fois les conclusions de la mission parlementaire et de la mission CGIET remises, et dans le cadre plus général de la refonte du code minier.

Le texte issu de la commission oblige le Gouvernement à présenter au Parlement chaque année un rapport sur l'évolution des techniques. C'est une première avancée. Je serai très vigilant pour la réforme du code minier, afin que les engagements pris soient tenus. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jean-Jack Queyranne, pour le groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jack Queyranne

Monsieur le président, madame la ministre, la région Rhône-Alpes est directement concernée par les trois permis de recherche de gaz de schiste qui ont été accordés, le 1er mars 2010, par le ministère de l'écologie, de l'énergie et du développement durable.

Dès le 22 octobre, le conseil régional, que je préside, adoptait un voeu, à l'initiative du groupe socialiste, demandant l'annulation des arrêtés délivrant ces permis.

Nous estimions que ces arrêtés contrevenaient aux objectifs énergétiques définis par le Grenelle de l'environnement et qu'ils généraient des risques importants de pollution des nappes phréatiques. Nous soulignions aussi que ces arrêtés, pris sans consultation des collectivités territoriales, et notamment de la région, étaient contraires au plan régional d'élimination des déchets dangereux que nous venions d'adopter après une longue phase d'élaboration commune avec les services de l'État. Il nous paraissait illusoire d'imposer, par la loi Grenelle 2, aux préfets et aux présidents de région de préparer un schéma climat air énergie s'ils n'avaient même pas connaissance d'une décision lourde de conséquences.

Nous prenions ainsi la tête d'une contestation qui allait s'amplifier au cours des semaines, au point de mobiliser plus de 12 000 personnes, le 26 février, à Villeneuve-de-Berg. Le mouvement a gagné toutes les régions concernées. Il a conduit à une prise de position très ferme de l'association des régions de France, qui s'est directement adressée au Premier ministre, début avril, pour dénoncer l'opacité qui avait présidé à la délivrance des permis. Et cette opacité est bien à l'origine de la fronde citoyenne.

M. Borloo, à l'époque ministre, l'a lui-même reconnu, il y a quelques minutes. Mais il ne me semble pas de bonne manière d'accuser le zèle de fonctionnaires appliquant sans réserve le code minier. Il y a eu faute politique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jack Queyranne

À quoi a donc servi la Charte de l'environnement intégrée depuis 2005 dans notre Constitution et dont vous avez été à l'époque l'initiatrice, madame la ministre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jack Queyranne

Mais, aujourd'hui, elle s'impose à tous puisqu'elle a valeur constitutionnelle !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jack Queyranne

Son article 5 pose le principe de précaution, ce qui a été présenté à l'époque comme une innovation juridique. Mais il n'y a eu aucune étude d'impact, aucune enquête publique, aucune information des populations. Comment dès lors ne pas accréditer l'idée que des intérêts économiques puissants imposent le silence aux citoyens de notre pays ?

La présente proposition de loi a donc pour but d'effacer une faute lourde, mais le texte issu des travaux de la commission est loin d'y répondre. Il revient sur le principe d'une abrogation générale des permis, qui était le fondement même de la proposition Jacob.

Il s'en remet au bon vouloir des industriels, qui auront deux mois pour indiquer à l'État quelle technique ils comptent utiliser, seule la fracturation hydraulique entraînant l'annulation de leur permis. Sachant que ces permis sont délivrés, madame la ministre, pour cinq ans et renouvelables deux fois, ils auront tout intérêt à ne pas déclarer la fracturation comme technique, afin de conserver les permis sous le régime actuel du code minier.

La raison invoquée du risque juridique pesant sur l'État en matière de contentieux n'est qu'un écran de fumée. Comme le président Ayrault, Pascal Terrasse et mon prédécesseur à la tribune l'ont souligné, les documents qui seront adressés dans les deux mois au ministère par les industriels ne seront pas rendus publics.

Il y a une exigence de transparence. J'espère, madame la ministre, que vous nous apporterez des réponses sur ce point.

Enfin, comment ne pas regretter qu'une enquête publique ne soit plus exigée, sous prétexte qu'une ordonnance reprendra l'ensemble du code minier. Actuellement, le projet de loi qui a été déposé pour ratifier l'ordonnance du 20 janvier 2011 ne prévoit qu'une mise à disposition par voie électronique des informations à l'intention du public, qui pourra formuler des observations.

Nous sommes donc bien loin des préconisations du Grenelle en matière d'enquêtes publiques, et le sujet est renvoyé à plus tard.

Au final, cette proposition de loi est devenue un texte passoire, un alibi pour gagner du temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jack Queyranne

Elle ne répondra pas aux légitimes inquiétudes des citoyens.

Je crains qu'à légiférer ainsi, pour donner le sentiment que le Parlement joue son rôle, nous ne dévaluions encore plus la fonction de la loi que nous sommes chargés de voter. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Josette Pons

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi qui nous est présentée aujourd'hui vient en débat à un moment où la mobilisation des élus, des populations et des associations contre l'exploration et l'exploitation des gaz de schistes par fracturation hydraulique est devenue quasi nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Vous vous en êtes quand même rendu compte !

Debut de section - PermalienPhoto de Josette Pons

Dans mon département, comme dans beaucoup d'autres, cette forte mobilisation est née de l'opacité qui a entouré les procédures d'attribution des permis de recherche et la technique d'extraction proposée dans les projets en cours.

La rédaction originelle du texte de Christian Jacob, que j'avais cosigné, prévoyait l'abrogation pure et simple des permis d'exploration déjà délivrés, et répondait à la volonté de remise à plat souhaitée par le Premier ministre. Le texte prévoyait également la modification du code minier pour renforcer l'information à destination des élus locaux et des populations.

La nouvelle rédaction de cette proposition de loi, qui a été adoptée en commission, est décevante,…

Debut de section - PermalienPhoto de Josette Pons

…bien que j'en comprenne les motifs juridiques.

En effet, en premier lieu, le texte ne vise plus les deux objectifs que je viens d'indiquer, mais la seule interdiction de la technique de fracturation hydraulique, ce qui constitue, je le reconnais volontiers, une avancée.

Mais il faut rester vigilant, vous l'avez vous-même reconnu, madame la ministre.

Si vous le permettez, j'évoquerai brièvement le cas de mon département où une demande de permis, le permis dit de Brignoles, a été déposé. Il couvre toute la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et concerne 235 communes sur les 382 qu'elle compte, sur une surface totale de 6 785 kilomètres carrés, dont 75 % de mon département. Une demande de permis exclusif de recherches a été déposée, qui est en cours d'instruction par les services de l'État.

C'est au sein de ce périmètre d'exploration que se trouvent toutes les principales zones de protection concernant la biodiversité et la préservation du patrimoine naturel du Var, comme le parc naturel régional du Verdon dans le nord du département, le parc naturel régional de la Sainte-Baume, en cours de constitution, au milieu de mon département, les nombreuses zones NATURA 2000, de nombreux sites classés, les zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique, la réserve naturelle géologique de Haute-Provence et la réserve naturelle nationale de la plaine des Maures.

De plus, comme dans tous les départements je suppose, le préfet vient d'installer la nouvelle commission des sites et du paysage. Cette commission impose désormais la réalisation d'études d'impact sur ce milieu protégé avant d'y autoriser l'organisation de manifestations, culturelles, sportives ou autres. Donner l'autorisation d'exploration ou d'exploitation de ce gaz de schiste reviendrait à transformer ou détruire ce patrimoine particulièrement riche.

Pour toutes ces raisons, bien que cette proposition de loi mette en oeuvre le principe de précaution prévu dans la Charte de l'environnement, en interdisant le recours à la technique de fracturation hydraulique et en abrogeant les permis de recherche ayant recours à cette technique, je regrette que nous n'ayons pas modifié la procédure d'instruction de ces permis, pour rendre obligatoire une étude d'impact environnemental en même temps que la demande de permis d'exploration ou d'exploitation.

Je regrette également que la commission ait abrogé l'article 3, qui prévoyait la refonte du code minier. Sur ce sujet, nous avons besoin d'information, de transparence, mais également de certitudes.

En conclusion, madame la ministre, je souhaiterais qu'à l'occasion de l'examen de ce texte vous puissiez me rassurer – vous l'avez d'ores et déjà fait en partie – en me précisant d'abord ce qui va advenir de la demande du permis dit de Brignoles, ensuite comment et quand vous entendez réformer le code minier.

Debut de section - PermalienPhoto de Josette Pons

Enfin, j'aimerais savoir comment les élus locaux et les populations seront associés aux prises de décision. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de André Vézinhet

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, si je prends la parole à l'occasion de cette proposition de loi, c'est certes en ma qualité de membre de la commission du développement durable, saisie au fond avant présentation devant l'Assemblée, mais également comme président du conseil général de l'Hérault, département directement concerné. Je le fais aussi au nom de mes amis avec lesquels je mène une action commune et convergente pour que cessent les risques prévisibles liés à la recherche des gaz et des huiles de schiste. Ainsi les territoires de la Drôme, de l'Ardèche, du Gard, du Vaucluse et de l'Hérault ont fait connaître, par leurs assemblées départementales et au plan national, leur opposition. Je m'exprime également au nom de mon ami et collègue Kléber Mesquida, député de l'Hérault comme moi.

Le temps qui m'est accordé dans ce débat étant très bref, je voudrais évoquer une crainte majeure dont peu de commentaires ont fait mention jusqu'ici. Il s'agit du risque encouru par les réseaux hydrogéologiques si denses et si fragiles des eaux profondes contenues dans le sous-sol de nos départements du sud de la France.

Si, en période estivale, nombre de nos rivières s'assèchent, les eaux ne disparaissent pas pour autant. Par un système de collecte très complexe et souvent méconnu, l'eau est conduite jusqu'à des réserves dans lesquelles elle est stockée et ainsi préservée du phénomène d'évaporation qui sévit en surface. Ces eaux profondes, parfois très abondantes, constituent une réserve de toute première qualité, souvent même directement exploitable pour la consommation humaine. C'est dire si elles sont précieuses et l'obligation où nous nous trouvons de les préserver de toute atteinte.

On a beaucoup parlé dans ce débat du risque qui menace les nappes phréatiques, qui seraient les principales pourvoyeuses d'eau pour la fracturation hydraulique nécessaire à l'extraction d'hydrocarbures. Mais on n'a quasiment jamais évoqué les réseaux karstiques et cet aquifère, le karst noyé, ressource inestimable pouvant répondre aux besoins pour un avenir dont on sait qu'il se traduira par des pénuries sensibles dans nos territoires du sud de la France. La sécheresse qui sévit actuellement nous rappelle cruellement cette terrible vérité. Destruction des réseaux, pollution, conséquences sur le niveau de nos cours d'eau ne sont qu'une énumération très restrictive d'un dégât que nous n'avons pas le droit de faire subir à nos populations.

Pour clore mon intervention, il me faut souligner une incohérence majeure par rapport à la proposition de loi dont nous sommes saisis.

En effet, comme vice-président d'une association créée pour proposer le classement au patrimoine mondial de l'humanité d'un territoire dénommé « Causses et Cévennes », je me trouve, avec son président Jean Puech, ancien ministre de l'agriculture, devant la pire des incohérences. Notre dossier est prêt. L'UNESCO le recevra et se prononcera au mois de juin prochain. Mme Rama Yade est convaincue de sa pertinence.

Debut de section - PermalienPhoto de André Vézinhet

Comment justifier que ce territoire, directement impacté par la recherche et l'exploitation des gaz de schistes, puisse être retenu au titre des territoires vivants, avec notamment un pastoralisme qui fait sa fierté et sa qualité dans un cadre d'une rare et incontestable beauté ? Mesdames et messieurs les députés, je vous demande de peser tout cela au moment d'émettre votre vote.

Les énergies fossiles contenues dans les entrailles de la croûte terrestre ne peuvent, par leur extraction, mettre en échec l'incroyable beauté et qualité écologique de nos territoires. Une seule réponse s'impose : l'abrogation des permis de recherches d'hydrocarbures. Leur exploration et leur exploitation représentent un risque que nous nous devons d'éradiquer totalement, il y va de notre engagement et de notre crédibilité politique.

Il nous reste à examiner les articles du texte de loi, et notamment l'article 2, dont l'évolution, sous l'influence de certains représentants de l'UMP, et non des moindres, mais aussi à n'en pas douter sur l'insistance de certains groupes de pression, a terriblement changé de sens par rapport au texte initial proposé par M. Christian Jacob. Nous aurons tout loisir de dénoncer ces basses manoeuvres quand l'article viendra en discussion. Le texte proposé par le groupe SRC et par son président, M. Jean-Marc Ayrault, qui en était le premier signataire, est celui sur lequel nous nous étions déterminés pour empêcher cette très hasardeuse aventure des gaz de schiste. Les populations nous attendent et nous jugeront sur notre volonté. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

J'invite les orateurs à respecter le temps qui leur est imparti.

La parole est à M. Claude Gatignol.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Madame la ministre, monsieur le président, chers collègues, il ne vous paraîtra pas surprenant que le coprésident du groupe d'études sur les énergies intervienne dans cette discussion générale d'autant que, en tant membre de l'office parlementaire des choix scientifiques, je porte un oeil critique sur tous les domaines technologiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Le travail réalisé par les rapporteurs est important et on peut partager largement votre excellent et courageux propos liminaire, monsieur le président de la commission, qui n'était pas facile à écrire dans le contexte.

Dans votre intervention, monsieur le rapporteur Michel Havard, vous avez précisé deux objectifs : interdire la technologie de la fracturation hydraulique et débattre au Parlement des hydrocarbures visés. Si je suis d'accord avec le second objectif, je suis, avec plusieurs collègues, très réservé sur le premier. Cette solution d'interdiction totale ferme en effet la porte à la recherche, à l'innovation et, pour le dire clairement, à l'accès à des ressources nationales d'hydrocarbures dont nous avons tant besoin.

Sur cet aspect économique, il faut recueillir les données les plus fiables : est-ce quarante, cinquante, soixante, quatre-vingt-dix années de pétrole ou de gaz qui sont prévisibles ? Cette ressource est-elle négligeable et bonne à jeter aux orties ? Non, je crois qu'il faut toujours chercher, explorer, expérimenter et savoir si nous avons 150 ou 200 milliards de barils d'huile sous nos pieds, et 2 000 ou 2 500 milliards de mètres cubes de gaz. Soyons raisonnables et responsables : disposer de réserves nationales, ça compte vu le tarif de nos importations, aux environs 45 milliards d'euros par an.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Cela ne justifie pas qu'on fasse tout et n'importe quoi !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Après l'expression connue « La France n'a pas de pétrole mais elle a des idées », je propose que nous utilisions une nouvelle formule : « La France a du pétrole et de bonnes idées ».

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Respectons la qualité de nos entreprises retenues sur le terrain national et leur engagement de rigueur dans leurs travaux. Respectons le talent et la compétence de nos ingénieurs, de nos mineurs, de nos fonctionnaires de l'inspection environnementale et technologique, de l'Académie des technologies.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Tous ici, je le pense, nous voulons le meilleur pour notre environnement et nous refusons de laisser faire n'importe quoi, n'importe où, par n'importe qui. La France n'est pas l'Amérique du Nord et nous entendons bien veiller au respect de nos territoires.

C'est pourquoi j'ai proposé, madame la ministre, un haut comité des ressources minières, doté de capacités d'investigation spécifiques pour l'évaluation technique des impacts. L'article 40 m'ayant été objecté, je vous propose de gager très simplement mon amendement sur la bien connue RPM, la redevance progressive minière, prévue à l'article 31 du code minier. Êtes-vous disposée, madame la ministre, à soutenir cette idée, tout comme celle de la création de commissions locales d'information ? On ne peut pas lancer ces importantes opérations minières sans associer étroitement et localement les élus, les associations, les représentants de la population. La transparence doit être au rendez-vous hors de la filière administrative.

Il est inacceptable que des démarches soient faites sans une large transparence et une information publique dans les zones territoriales concernées par une géologie favorable. Cette information est prioritaire et essentielle. Elle permettra, j'en suis certain, de ramener la juste inquiétude à des niveaux compatibles avec l'exercice démocratique. Nous en avons de bons exemples dans d'autres domaines industriels,

Aspect économique, impact environnemental, mais aussi aspect juridique.

Il y a un point qui concerne les juristes. Je ne suis pas très compétent en la matière mais il semble bien que les notions d'interdiction et d'abrogation soient frappées d'un caractère anticonstitutionnel. Les spécialistes s'en saisiront en temps utile pour voir si sont respectées la parole donnée légalement et la Charte de l'environnement, dans ses articles 5 et 6.

Enfin, je ne comprends pas, monsieur le rapporteur, la fixation sur la fracturation hydraulique, qui conduit à refuser toute évolution, toute innovation, c'est-à-dire les aspects de recherche et d'exploration permettant de mieux connaître notre sous-sol, d'évaluer les éventuelles richesses présentes dont les Français attendent beaucoup, spécialement une baisse des prix. J'ai retenu certains arguments évoqués sur ce point par M. Chanteguet, notre second rapporteur.

De plus, il ne faudrait pas oublier que dans l'attente de la nouvelle rédaction du code minier que vous avez lancée, madame la ministre, la constitution d'un dossier d'autorisation représente plusieurs dizaines de kilos de papier – je m'en suis procuré un auprès d'une DRIRE – et des centaines de pages d'explications et d'informations échangées avec les services de l'État au niveau préfectoral.

Avant de conclure, je voudrais insister sur deux points.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Nous débattons, c'est parfait, sur un sujet d'importance stratégique nationale puisqu'il s'agit de notre indépendance nationale, de notre sécurité énergétique, de nos importations, mais aussi du coût pour les Français qui passent chaque semaine à la pompe à essence ou à gasoil. Mais je vous rappelle que nous avons confié à deux collègues, François-Michel Gonnot et Philippe Martin, une mission spécifique ciblée sur ce sujet. L'urgence n'est pas convenable puisqu'ils n'ont pas rendu leurs conclusions, c'est même offensant à leur égard.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Madame la ministre, vous avez donné mission à deux institutions sur des points précis. Là encore, nous n'avons pas le rapport complet et définitif.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Je veux également souligner, et je termine, monsieur le président, que la technologie de fracturation s'adresse aussi, parfois, à la géothermie dans les cas de récupération d'eau.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Les interrogations sur cette technique sont légitimes. Elle doit s'utiliser dans un cadre sûr et protecteur de l'environnement. Nous essaierons d'y veiller et j'espère que le projet de loi amendé ira dans ce sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Terrasse, l'orateur qui a eu le plus de temps, c'est Jean-Marc Ayrault.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Orliac

Madame la ministre, enfin nous y sommes : nous examinons une proposition de loi concernant l'exploration et l'exploitation des huiles et gaz de schiste. Ce texte, qui bénéficie bien évidemment de l'aval du Gouvernement et donc de vous-même, doit être l'occasion de désavouer une décision pourtant prise par votre prédécesseur, alors ministre d'État.

Mais, comme je vous l'ai indiqué dans une récente question d'actualité, personne n'est dupe. Ce soudain revirement de position est d'abord le résultat de la très forte mobilisation citoyenne. Pourquoi aura-t-il fallu attendre la puissante opposition des collectifs citoyens, des associations et des élus de tous bords pour comprendre que les conséquences de ces autorisations de prospection seraient dangereuses pour l'environnement et pour la santé ?

D'ailleurs, avez-vous réellement pris conscience de ces risques ? Avez-vous réellement la volonté de mettre un terme définitif à l'idée même d'exploiter les gaz de schiste dans notre pays ? Avez-vous pris conscience de la détermination des populations locales à se battre jusqu'au bout pour préserver la qualité de leur environnement ? II est permis d'en douter. L'annonce de ce revirement intervenait quelques jours avant le premier tour des élections cantonales. Maintenant que ces échéances sont derrière nous, voilà que la position de la majorité et du Gouvernement change à nouveau, comme le montre la nouvelle rédaction de la proposition de loi, adoptée en commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Orliac

Désormais, avec le texte tel qu'il nous est soumis aujourd'hui, les permis ne sont pas automatiquement abrogés. Les choses sont donc plus sournoises qu'il n'y paraît : les permis déjà accordés ne seront abrogés que si leurs titulaires ne remettent pas, dans les deux mois qui suivent la promulgation du présent texte, un rapport précisant les techniques utilisées ou si le rapport mentionne l'utilisation de la technique de fracturation hydraulique. Pourquoi autant de précautions ? Comment être certain que les détenteurs de permis n'utiliseront pas d'autres termes que ceux de « fracturation hydraulique » pour, au final, employer une technique analogue ?

Et je ne reviens pas sur les ravages causés par cette méthode qui consiste à faire exploser la roche à l'aide d'un mélange d'eau et de produits chimiques. Un tel procédé n'est pas sans conséquences dramatiques sur les sous-sols et la ressource en eau. Comment peut-on soutenir le Grenelle de l'environnement et, dans le même temps, délivrer de telles autorisations ?

Un rapport de l'association Toxicologie-Chimie et du professeur André Picot, directeur de recherches honoraire au CNRS, dresse un état des lieux très inquiétant des effets sur l'environnement et sur l'homme de cette technique. Il en dénonce les impacts négatifs, tant sur le plan sanitaire qu'environnemental et la pollution inévitable des nappes phréatiques qui en résultera.

Par ailleurs, des fracturations hydrauliques auraient eu lieu sur le territoire national. Madame la ministre, où et quand ces essais ont-ils été effectués ? Quels produits chimiques ont été utilisés et en quelles quantités ? Il ne suffit pas de proclamer la transparence, encore faut-il la pratiquer.

C'est pourquoi, indépendamment de toute condition et quelle que soit la méthode d'extraction utilisée à l'avenir, les députés radicaux de gauche demandent tout simplement le retour à la rédaction initiale de la proposition de loi. Autrement dit, nous souhaitons inscrire dans la loi l'abrogation des permis exclusifs de recherches de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux non conventionnels. C'est pourquoi nous défendrons deux amendements sans équivoque en faveur de cette abrogation, tout en insistant sur son caractère nécessairement rétroactif.

Au-delà des enjeux écologiques et sanitaires, il est inadmissible que ces permis aient pu être accordés sans la moindre concertation ni même information des populations. Nous dénonçons de tels procédés particulièrement éloignés de notre conception de la République et du fonctionnement d'une démocratie adulte.

Pour ces mêmes raisons, nous dénonçons la récente réforme du code minier qui permet l'exploration et l'exploitation de gaz et d'huiles de schiste en simplifiant les procédures à suivre pour les compagnies pétrolières et gazières. Aussi demandons-nous une révision rapide du code minier, à laquelle soient associés les citoyens.

Madame le ministre, je peux vous dire qu'aujourd'hui la mobilisation ne porte plus seulement sur l'abrogation des permis accordés, mais sur l'idée même d'exploiter les huiles et gaz de schiste. J'en veux pour preuve les combats exemplaires menés dans certaines zones urbaines comme la région parisienne, mais surtout dans des territoires ruraux comme dans l'Aisne, à Château-Thierry, ou dans mon département, le Lot. Étrangement d'ailleurs, le permis de recherches de Cahors ne figure pas à l'annexe 2 du rapporteur, alors qu'il figure à échéance du 18 décembre 2011 dans le rapport d'étape des inspecteurs généraux que vous avez missionnés.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Orliac

Nous ne sommes pas opposés à la seule méthode de la fracturation hydraulique mais aussi aux permis déjà accordés, à l'extraction et à l'exploitation des gaz de schiste dans nos territoires ruraux, où la qualité de vie dont nous disposons est probablement notre ressource la plus précieuse.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Orliac

Nous n'entendons pas la brader pour le plus grand profit financier de quelques-uns. Aussi demeurerons-nous vigilants et mobilisés.

Bien évidemment, les radicaux de gauche sont conscients des enjeux énergétiques futurs et de la nécessité de garantir à notre pays son indépendance énergétique. Mais l'enjeu premier est bien de réduire notre dépendance des énergies fossiles et de poursuivre, sans retard, le développement des énergies renouvelables, qui représentent l'avenir. C'est aussi l'un des nombreux enseignements de ce débat sur les gaz de schiste. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Flory

Madame la ministre, nous avons tous conscience de la mutation énergétique que nous devons accomplir au cours des prochaines décennies.

Si cet enjeu est, à juste titre, l'une des premières préoccupations des gouvernants, il faut respecter au préalable des garanties en termes de protection de la santé, de préservation de l'environnement et de sauvegarde de notre patrimoine commun.

Le débat sur l'exploration du gaz de schiste aura permis une prise de conscience populaire sur la nécessité de compléter les règles à respecter en matière de recherche énergétique. Nous devons bâtir un cadre juridique nouveau. Les procédures préalables sont à renforcer, quelles que soient les techniques utilisées. Le code minier doit être adapté car nous devons faire mieux, beaucoup mieux pour l'information des populations concernées.

Nous devons aussi faire plus en matière de connaissance de la diversité de nos sols et sous-sols. Il s'agit d'une exigence contemporaine partagée.

Aujourd'hui, les informations disponibles sur l'exploration du gaz de schiste dans le monde, au Canada, aux États-Unis, ont permis à chacun de prendre position. Nous pourrions citer de nombreuses analyses, à l'image du dernier rapport, aux conclusions inquiétantes, de la commission de l'énergie et du commerce de la Chambre des représentants aux États-Unis. Depuis décembre 2010, l'État de New York a imposé un moratoire sur l'exploration du gaz de schiste par fracturation hydraulique au vu des risques d'impacts significatifs sur la qualité des eaux.

Au regard de ces informations on peut comprendre les initiatives prises au niveau local en France, et notamment les arrêtés d'interdiction de forage pris par certaines municipalités.

Aujourd'hui, dans les territoires potentiellement concernés par l'exploration des gaz de schiste, de nombreux élus, acteurs et citoyens, s'opposent à ce type de prospection. Président d'un syndicat intercommunal spécialisé dans l'environnement et plus particulièrement dans la protection de ressources en eau, je partage ces interrogations et ces inquiétudes. L'utilisation des techniques de forage par fracturation hydraulique ne garantit pas la protection des sols et sous-sols, ni le non-impact sur la qualité des eaux souterraines ou de surface. Les circulations des eaux souterraines sont complexes. Les eaux minérales sont constituées de deux composantes, l'une profonde avec des temps de trajet souterrain parfois supérieurs à 400 ans, l'autre plus superficielle, avec bien entendu des connexions entre ces deux niveaux.

L'eau, et bien plus encore l'eau de qualité, est un élément fondamental de la vie humaine. Des activités multiples en dépendent directement et représentent des centaines de milliers d'emplois en France. Dans certains territoires, comme l'Ardèche méridionale, le développement et l'emploi local dépendent fortement de filières de qualité. Des labels spécifiques, des inscriptions – appellation d'origine contrôlée, indication géographique protégée, démarche en cours de classement UNESCO – garantissent la qualité, la traçabilité des produits mais aussi l'image de tout un espace géographique. Ces initiatives concernent les produits agricoles et agroalimentaires, mais aussi bien d'autres filières comme la cosmétologie ou encore le développement du tourisme nature. Des milliers d'emplois existent grâce à ces démarches qualitatives, engagées depuis des années voire des décennies.

Quels sont les impacts sur les cheminements complexes de l'eau de forages par fracturation à 2 000 ou 3 000 mètres de profondeur ? Comment ne pas être interrogatif au regard des 2 500 produits différents injectés dans les forages pour solidifier les conduites. L'inquiétude des populations et des acteurs est légitime. Oui, le principe de précaution doit s'appliquer.

Madame la ministre, merci de votre action et de vos prises de position très précoces sur ce dossier. Merci aussi de votre soutien pour l'abrogation des permis d'exploration en France, qui nécessitent l'usage de forages par fracturation hydraulique.

L'évolution proposée pour le texte initial doit garantir la solidité juridique des décisions que nous allons prendre. Je souhaite avoir connaissance de votre analyse détaillée sur ce point. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Madame la ministre, c'est peu de dire que le Gouvernement a été particulièrement inconséquent dans le dossier de l'exploration et de l'exploitation des hydrocarbures non conventionnels, dossier que nous abordons pour la deuxième fois dans cet hémicycle après le débat du 29 mars dernier.

En effet, sans aucune information préalable des élus, des citoyens et même des représentants de l'État, le Gouvernement a accordé à différents groupes industriels des permis de recherches concernant les huiles de schiste en région parisienne et les gaz de schiste dans le Sud de la France, à Nant, Montélimar et Villeneuve-de-Berg. En totale opposition avec l'application du principe de précaution inscrit à l'article 5 de la Charte de l'environnement, avoir délivré ces permis révèle une double faute.

Sur le fond d'abord. Comment le Gouvernement pouvait-il ignorer que l'exploration puis l'exploitation des gaz et huiles de schiste présentaient de graves dangers pour l'environnement ? Ces dangers étaient connus. Nos collègues de l'UMP les ont d'ailleurs cités dans l'exposé des motifs de la proposition de loi : « Les conséquences environnementales sont extrêmement néfastes : pollution des eaux, de l'air et des sols, consommation considérable d'eau pour la fracturation, émissions de gaz carbonique inférieures seulement à celles de l'énergie charbonnière, destruction du paysage pour installer les puits de forage. Les nappes phréatiques à proximité des puits sont contaminées par les rejets de produits chimiques et par le gaz libéré. » Et ils concluaient : « Il est à craindre que ces permis, et les travaux qu'ils vont entraîner, causent des dommages irréversibles à l'environnement et portent préjudice aux habitants. » Madame la ministre, comment le Gouvernement pouvait-il ignorer ces dangers ?

Sur la forme ensuite. Il règne dans ce dossier, depuis le départ, l'opacité la plus totale, les décisions étant prises en catimini, là encore en bafouant l'esprit du Grenelle de l'environnement, qui avait pour ambition de réconcilier la société avec la nécessaire protection de notre cadre de vie. Dans ma région, le Périgord, c'est par le plus grand des hasards que nous avons appris qu'une partie de la vallée de la Dordogne, dont nous sollicitons le classement par l'UNESCO en réserve de biosphère, était concernée par une demande dite « permis de Cahors ».

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

La semaine dernière, j'ai appris qu'il existait, dans le Sud-Ouest, une autre demande dite de Beaumont-de-Lomagne, qui couvre les départements du Gers, du Tarn-et-Garonne, du Lot-et-Garonne et de la Dordogne. J'ai alerté notre collègue Philippe Martin qui, vous le savez, est un des deux collègues chargés d'une mission parlementaire à ce sujet. Il n'était même pas au courant alors qu'il occupe de surcroît les fonctions de président du conseil général du Gers ! (Rires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

Madame la ministre, il est de votre responsabilité de faire toute la lumière et de diffuser toutes les informations sur cette affaire.

Ces deux erreurs majeures du Gouvernement ont suscité une mobilisation très importante et une vague de protestations sur nos territoires. Elles ont aggravé la méfiance de nos concitoyens qui, dans cette affaire, ne font confiance à personne, ni au Gouvernement qui apparaît aujourd'hui comme le pompier après avoir été le pyromane,…

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

…ni aux élus, ni aux industriels. Comment pourrait-il en être autrement, surtout quand les catastrophes industrielles comme celle de Fukushima, viennent démontrer que les craintes exprimées étaient justifiées ?

Face à cette situation, Jean-Jack Queyranne l'a rappelé à l'instant, le conseil régional socialiste de Rhône-Alpes a été le premier à adopter un voeu dès le mois d'octobre 2010. Le groupe socialiste a été, par la voix de Pascal Terrasse, le premier dans cet hémicycle à vous interpeller dès le mois de janvier lors des questions d'actualité. Le groupe socialiste a été le premier à déposer une proposition de loi visant à interdire l'exploration et l'exploitation des gaz de schiste par fracturation hydraulique et à abroger les permis accordés. C'est sur cette base, en toute responsabilité que nous abordons ce débat.

Pour les députés du groupe socialiste, les choses sont claires : l'exploration et l'exploitation des gaz de schiste doivent être interdites et les permis de recherches abrogés avec effet rétroactif. C'est dans ce sens que nous déposerons des amendements et que nous orienterons notre vote. C'est dans ce sens que nous participerons à la refonte du code minier. C'est dans ce sens, madame la ministre, que nous espérons que s'ouvrira un débat national sur l'énergie, tant notre modèle de développement pose question, avant que nous ne nous engagions dans une inéluctable mutation écologique. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Mallié

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, certains regrettent que nous examinions ce texte quelques semaines avant la remise officielle des rapports d'information sur les gaz non conventionnels. Plusieurs travaux en cours commandés par le Gouvernement, avec pour objectif une totale transparence, apporteront à la représentation nationale une connaissance plus précise des techniques existantes.

Cependant, en quelques mois, les gaz dits non conventionnels ont fait une entrée remarquée dans le paysage énergétique français. On en distingue six grandes sortes : l'huile de schiste, l'huile de réservoir compact, le gaz de schiste, le gaz de réservoir compact, le gaz de houille et les hydrates de méthane.

Si certains considèrent leur exploitation comme révolutionnaire, l'impact de ces gaz sur l'environnement suscite toutefois des interrogations. Les populations résidant au plus près des sites de forage s'inquiètent légitimement des conséquences sur leur environnement des travaux d'exploration.

Je l'affirme sans ambiguïté : nous ne pouvons être que très réservés sur le procédé industriel utilisé pour exploiter ces gaz, à savoir la fracturation hydraulique. Il me semble que le principe de précaution inscrit dans la Charte de l'environnement s'applique ici fort légitimement car, « lorsque la réalisation d'un dommage peut affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent à la mise en oeuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées ». C'est pourquoi, avec le président Jacob et de nombreux collègues du groupe UMP, nous avons déposé un texte visant à interdire l'exploration et l'exploitation des gaz non conventionnels.

On peut toutefois regretter les modifications substantielles apportées au texte au cours de son examen en commission, notamment celles concernant l'article 2. En effet, comme l'a souligné le Premier ministre, les permis autorisant des recherches qui utiliseraient des technologies blessantes pour l'environnement doivent être identifiés et tout simplement abrogés. Cela étant, on comprend que ces modifications ont pour objectif de sécuriser juridiquement le dispositif législatif.

Nous resterons toutefois vigilants, madame la ministre – un homme averti en vaut deux –, lors de la ratification de l'ordonnance concernant le code minier, le présent texte constituant une première étape, si j'ai bien compris le rapporteur Michel Havard.

Pendant l'examen de la proposition de loi en commission, certains de nos collègues se sont inquiétés de ses conséquences sur la géothermie. Je tiens personnellement à être rassuré dans la mesure où cette ressource est exploitée dans ma circonscription. La géothermie est-elle concernée par ce texte ou celui-ci ne porte-t-il que sur l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures ?

Par ailleurs, je note avec intérêt l'introduction d'un article prévoyant la remise d'un rapport annuel au Parlement. Cette démarche institue ce que l'on pourrait appeler une bonne pratique, plaçant la transparence au coeur du processus de décision politique – bonne pratique qui, en l'occurrence, avait jusqu'à présent fait défaut. Le nouvel article postule ainsi que le Parlement ne peut se priver d'une information essentielle pour lui permettre d'assurer la conformité de la législation à la Charte de l'environnement, selon laquelle « les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable ».

Pour conclure, je souhaite témoigner de la mobilisation dans ma circonscription de populations très inquiètes, un arrêté du 9 avril 2010 ayant prolongé le permis exclusif de recherches de gaz de houille, dit « permis de gaz de Gardanne ». Nous nous sommes volontiers fait leurs porte-parole pour demander la suspension immédiate des permis d'exploration. En réalité, cette mobilisation doit nous amener avant tout à nous poser les bonnes questions concernant l'avenir et l'indépendance énergétique de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Gaudron

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, après un débat intéressant au sein de la commission du développement durable, un peu plus calme que celui de ce soir, nous en venons à l'examen en séance publique de la proposition de loi visant à abroger les permis exclusifs de recherches d'hydrocarbures non conventionnels déjà accordés.

J'ai eu l'occasion de souligner que le débat semblait mal engagé car personne n'a su rassurer nos concitoyens légitimement inquiets. Toutefois, en France, la situation de la recherche d'hydrocarbures, qu'ils soient ou non conventionnels, ne peut être comparée à celle de l'Amérique du Nord, et surtout pas à la réalité décrite dans le film Gasland. Aux États-Unis, chaque État dispose de sa propre réglementation, souvent laxiste d'ailleurs et parfois même inexistante. En Nouvelle-Angleterre, au Canada, en l'absence totale de législation, chacun peut forer comme il l'entend dans son jardin. Dans ces conditions, il est évident que le risque écologique est plus que réel et même, désormais, avéré.

Nous n'en sommes pas là en France et l'interdiction totale de travaux sur les schistes ne me semble pas une bonne solution. Cette proposition me paraît même rétrograde en ce qu'elle risque de mettre en berne notre capacité d'innovation en matière pétrolière. Une telle conception, si elle avait guidé nos prédécesseurs, aurait conduit à ne jamais autoriser, ni par conséquent exploiter, des réserves souterraines de gaz dans des structures géologiques ad hoc, dont nous sommes bien contents de profiter aujourd'hui.

Aboutir, sous prétexte d'un simple problème technique de fracturation hydraulique, à une interdiction totale d'exploration est tout à fait excessif. Permettez-moi de souligner que la fracturation hydraulique est régulièrement et légalement utilisée sur de nombreux forages pétroliers en France sans que personne s'en offusque, alors qu'elle est parfois réalisée avec des adjuvants chimiques. Si l'on entendait considérer la question du seul point de vue technique, il suffisait d'interdire un certain nombre d'opérations bénéficiant d'un permis d'exploration et pratiquant la fracturation hydraulique, puisque personne n'en veut. C'est désormais d'actualité avec le présent texte.

Il ne faut pas affaiblir nos positions pour l'avenir en l'anticipant de manière irréfléchie, car interdire de façon abrupte peut induire des conséquences graves pour toute une industrie innovante, déjà victime d'une diminution de l'exploration. Comme l'a rappelé le président de l'Assemblée, il faut respecter le principe de précaution mais ménager l'avenir. C'était le sens des amendements que j'avais déposés en commission, prévoyant qu'un consensus scientifique soit établi avant toute interdiction et qu'au minimum les rapports scientifiques et parlementaires en cours d'élaboration soient rendus avant toute prise de décision.

Dans sa première mouture, le texte n'était pas acceptable dans la mesure où il fermait définitivement la porte à tous les projets de recherches de gaz de schiste mais aussi à tous les forages utilisant la fracturation hydraulique, ce qui concerne une part non négligeable des forages pétroliers existants en France.

Après l'examen en commission, le texte permet désormais la recherche d'hydrocarbures sur la base de permis excluant le recours à la fracturation hydraulique et prévoit le développement de la recherche sur ce type de fracturation sous le contrôle des autorités compétentes. Cela même si une telle expérimentation a déjà été réalisée par plusieurs protagonistes dans différents champs pétroliers, avec du reste des résultats divers, mais sans inconvénients techniques d'ordre géologique et hydro-géologique pour l'environnement.

Comme je l'avais proposé, un nouvel article prévoit qu'un rapport sera présenté au Parlement chaque année, ce qui nous permettra de vérifier la sécurité juridique de ce texte et les avancées de la recherche en hydrocarbures.

Madame la ministre, j'espère que les orientations que nous allons prendre ne nous feront pas perdre de vue l'essentiel : l'indépendance énergétique de la France et le réchauffement climatique. Le problème de l'énergie demeure entier et il faut lever l'hypothèque de l'existence ou non de gaz et d'huile de schiste dans notre pays, existence non prouvée à ce jour. Il est donc important de vérifier la possibilité d'exploitation.

En ce qui concerne la réforme du code minier, le plus tôt sera le mieux. Je souhaite que, dans un souci d'ordre juridique, les opérateurs ne se montrent pas excessivement gourmands car ils vont attaquer l'État qui encourt des pénalités importantes. Dans ces conditions, il est urgent de réviser ledit code.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Lou Marcel

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en 2010, le ministère de l'environnement délivrait, sans aucune information préalable, pas même celle des populations et des élus directement concernés, trois permis exclusifs d'exploration de gaz de schiste. On apprenait également qu'outre les permis de Nant, de Montélimar et de Villeneuve-de-Berg, d'autres étaient en cours d'instruction, comme celui de Cahors couvrant plusieurs départements de la région Midi-Pyrénées.

L'attribution de ces permis a suscité une vive inquiétude parmi nos concitoyens et particulièrement ceux des territoires concernés. J'en veux pour preuve la formidable mobilisation sur le plateau du Larzac, touché par le permis de Nant, et celle de l'Ouest aveyronnais, touché par la demande de permis de Cahors. La sortie, au même moment, du film Gasland, qui rend compte de l'exploitation sauvage des sous-sols américains, a avivé cette émotion. L'accent est mis, dans ce reportage, sur les conséquences désastreuses pour l'environnement de la technique d'exploitation des gaz et huiles de schiste par la fracturation hydraulique. Utilisant des dizaines de milliers de litres d'eau enrichie en sable et en produits chimiques cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques, ce mode d'exploitation de nos sous-sols constitue un danger évident pour les populations, la flore et la faune.

C'est la raison pour laquelle, dans l'ensemble des départements et des régions concernés par les permis délivrés, ou en passe de l'être, territoires sur lesquels se trouvent des parcs naturels régionaux, comme celui des Grands Causses, de formidables mobilisations populaires ont eu lieu et ne faiblissent pas. Elles sont formées de comités, de simples citoyens, de militants associatifs et d'élus locaux.

Le groupe SRC avait déposé une proposition de loi demandant l'abrogation de l'ensemble des permis délivrés ou en cours d'examen et, par voie de conséquence, une réforme du code minier. Face à cette mobilisation populaire et politique, le Gouvernement a pratiqué successivement la confusion, la temporisation et, finalement, le rétropédalage.

Dans un premier temps, il nous a dit que l'exploration n'était pas l'exploitation. Au même moment, alors que vous exprimiez votre réprobation de toute forme d'exploitation, madame la ministre, votre homologue chargé de l'industrie ne cachait pas qu'il y était, lui, favorable.

Dans un deuxième temps, toujours par votre voix, le Gouvernement, a encouragé la création d'une mission parlementaire puis a prononcé un moratoire – que nous avions demandé – sur l'exploration des gaz de schiste, avant même que ne soient rendues les conclusions de cette mission.

Enfin, rétropédalage complet : le Gouvernement décide finalement qu'une proposition de loi sera déposée par le groupe UMP et par son président. On sait que le sous-sol de la Seine-et-Marne, département où ledit président est élu, suscite depuis de nombreuses années la convoitise des groupes pétroliers.

Ce texte qui, au passage, était censé couper l'herbe sous le pied des élus du groupe SRC, devait en particulier permettre d'abroger les permis délivrés par l'ancien ministre de l'environnement et de réformer le code minier.

Or, après examen par la commission du développement durable, nous nous trouvons à examiner une proposition de loi qui n'abroge plus les permis délivrés et ne dit rien de la nécessaire réforme du code minier. Sans mauvais jeu de mots, ce texte est une usine à gaz. Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement, ce qui n'est vraiment pas le cas, en particulier, de l'article 2. Nous voilà bien loin des exigences initiales, pourtant extrêmement simples : l'abrogation des permis délivrés et l'interdiction de l'exploration et de l'exploitation des gaz et huiles de schiste.

M. Havard a souligné que la nouvelle rédaction de cet article offrait une sécurité juridique. Il s'agirait plutôt, en vérité, d'une insécurité politique et de nouvelles insécurités environnementales.

On nous explique que c'est pour se prémunir contre tout recours à la fracturation hydraulique, quelles que soient les matières premières exploitées, schisteuses ou non, que l'on a modifié le texte initial. Mais la priorité de ce texte, c'était d'interdire l'exploration et l'exploitation des gaz de schiste ! Or on sait aujourd'hui qu'elles ne peuvent se faire autrement que par la technique de la fracturation !

En tout état de cause, il me semble nécessaire que nos concitoyens engagés dans la mobilisation contre l'exploitation des sous-sols par des procédés polluants reçoivent de notre assemblée un message très clair et très ferme : « Non à toute exploration et exploitation des huiles et gaz de schiste ! Abrogation immédiate de tous les permis délivrés ou en cours d'examen ! »

Pour ce qui concerne l'article 3 et la nécessaire réforme du code minier, rappelons que celui-ci date de Napoléon III et n'a pas été modifié fondamentalement depuis. Or le code minier, en son article L. 122-3, permet de délivrer un permis exclusif de recherches sans étude d'impact. Il entre ainsi en contradiction avec l'article 3 de la Charte de l'environnement. En outre, cette évaluation préalable du risque environnemental est obligatoire, non seulement parce qu'il s'agit d'une exigence constitutionnelle, mais encore parce qu'il s'agit d'une exigence communautaire.

Par ailleurs, l'article 3 introduisait initialement l'obligation de faire appel à la participation du public avant la délivrance d'un permis. C'est pourquoi l'articulation entre ce texte de loi et la réforme du code minier aurait dû être maintenue.

Pour conclure,…

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Lou Marcel

…je dirai simplement qu'il faut que soit très clairement adopté un texte qui abroge définitivement les permis accordés et qui interdise toute exploration et exploitation des gaz et huiles de schiste sur notre territoire. Tel est l'objet des amendements que nous défendrons ce soir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, chers collègues, c'est avec beaucoup d'intérêt que je m'exprime ce soir sur la proposition de loi dont je suis cosignataire, avec, entre autres, mes amis Christian Jacob et Franck Riester, puisque nous sommes tous trois concernés par le même projet d'exploration d'huiles de schiste.

Le sujet est complexe, et nos connaissances sont encore probablement trop limitées par rapport à ses impacts potentiels en matière environnementale, voire de sécurité sanitaire. Mais je veux saluer dès à présent l'excellent rapport de nos collègues Michel Havard et Jean-Paul Chanteguet, qui a le mérite de nous éclairer sur la situation.

Le rôle du législateur ne se limite pas à des votes précipités sur des textes qui répondraient à l'urgence du moment.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Et voilà pourquoi l'urgence a été déclarée sur cette proposition de loi ! Une urgence téléguidée !

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

Il doit se fonder sur une réflexion et sur une connaissance les plus parfaites possible des enjeux relatifs aux sujets soumis à la représentation nationale.

Je développerai mon propos en trois points : l'absence de communication, problème de forme que je déplore ; la technologie utilisée et la politique énergétique de la France, problèmes de fond.

Mon attention a été appelée sur la question le 2 février dernier, lors de la séance des questions d'actualité, par l'intervention de notre collègue Yves Cochet. Le lendemain se tenait un comité syndical de l'Union des communautés de communes du Sud de l'Aisne, et le projet qui me concerne a été porté à la connaissance des élus. Dois-je vous décrire l'agitation qui s'en est suivie de toutes parts et l'incapacité avérée où j'étais d'apporter quelques éléments de réponse probants, autres que ceux que vous nous aviez fournis la veille, madame la ministre ?

Je découvre ainsi, en l'espace de vingt-quatre heures, l'existence du permis d'exploration dit de Château-Thierry, accordé à la société Toreador Energy France, en partenariat avec Hess Oil France. Environ 70 % du périmètre de ce permis est localisé dans le département de l'Aisne et concerne, pour ma seule circonscription, 572 kilomètres carrés. Dans cette première phase d'exploration, un forage devrait avoir lieu, celui dit du Bochat, sur la commune de Rozoy-Bellevalle.

Et je ne suis pas au bout de mes surprises, puisque j'apprends, quelques semaines après, que deux demandes de permis supplémentaires sont en cours d'instruction : l'une dite de Nanteuil-Notre Dame, localisée entre Château-Thierry et Oulchy-le-Château, et l'autre dite de l'Ourcq, localisée entre Château-Thierry et Fère-en-Tardenois, dans mon canton, demandes de permis qui n'ont heureusement pas été accordées à ce jour par M. le préfet.

Au vu de la complexité du sujet, je vous sollicite en urgence, madame la ministre, et rencontre votre directeur de cabinet adjoint le 16 février. Ma démarche est guidée par deux objectifs bien précis.

Le premier est de comprendre l'enjeu et les conséquences, pour l'environnement, de la technologie d'extraction des gaz et huiles de schiste, à savoir le forage horizontal accompagné de ce qui est communément appelé la fracturation hydraulique.

Le second est de mettre fin à la désinformation et aux fortes inquiétudes exprimées conjointement, et à juste titre, par les élus, les habitants et les associations environnementales très actives sur le sujet.

La logique, me semble-t-il, aurait voulu que les parlementaires et les élus locaux soient associés très en amont à ces projets. C'est un gage de transparence et de confiance. Voilà pour la forme.

Sur le fond, la technologie utilisée fait l'objet des articles 1er et 2 de la proposition de loi, qui visent d'une part à interdire l'exploration et l'exploitation des huiles et gaz de schiste par des forages recourant à la fracturation hydraulique, et d'autre part à abroger des permis exclusifs de recherches de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux préalablement délivrés, et ce tant que nous ne disposons pas de toute la connaissance nécessaire.

Car les questions en suspens sur l'exploitation de gaz ou huiles de schistes restent nombreuses, notamment en ce qui concerne les risques liés à l'eau et au recours aux additifs chimiques.

Ainsi, je ne peux que me féliciter de la décision du Premier ministre qui, dans sa lettre de mission aux ministres concernés, confie aux corps d'inspection de l'État la mission d'éclairer le Gouvernement sur les enjeux économiques, sociaux et environnementaux liés aux gaz et huiles de schiste. La synthèse du rapport d'étape, rendu récemment, nous apporte d'ores et déjà des éléments de réponse intéressants, mais sa rédaction finale doit préciser un bon nombre d'attendus. Ces travaux doivent apporter à la représentation nationale une connaissance plus précise des techniques d'exploration et d'exploitation minière existantes, de leurs procédures et de leurs impacts sur l'environnement. II me semble important et nécessaire de les laisser aboutir. Je me félicite, à cet égard, de l'ajout d'un article 4.

Pour moi, ce texte ne peut être indépendant d'une réflexion globale sur l'avenir de la politique énergétique de la France. Ce sera mon troisième et dernier point.

Mes chers collègues, à l'heure où se posent quotidiennement à nos concitoyens des problèmes de coût du carburant, il est de notre responsabilité de leur assurer, et sur le long terme, la garantie de productions suffisantes, en somme d'une offre complète et multiple en énergies fossiles et renouvelables.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

Notre but n'est pas de fermer définitivement la porte à des potentialités d'exploitation d'énergies fossiles sur le territoire national, mais d'y procéder en toute connaissance de cause, et en évitant tout risque pour les populations et pour l'environnement.

En conclusion, cette proposition de loi a eu le mérite d'ouvrir le débat, et je ne peux que vous appeler à la voter, comme je le ferai moi-même à l'issue de nos discussions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la proposition de loi que nous avons déposée avec Christian Jacob, Isabelle Vasseur et de nombreux autres collègues vise à répondre à la menace constituée par l'exploration et l'exploitation d'hydrocarbures d'un genre nouveau. En effet, notre pays possède d'importantes ressources d'hydrocarbures de roche-mère, emprisonnés sous forme de pétrole ou de gaz à grande profondeur. L'exploration et l'exploitation de ces gisements ne sont pas possibles avec les techniques conventionnelles et nécessitent le recours à la fracturation hydraulique.

Cette technique, décrite dans le rapport établi par MM. Havard et Chanteguet, dont je salue la qualité du travail, présente de nombreux risques pour l'environnement : dégradation des paysages, utilisation de très importantes quantités d'eau, détérioration des sous-sols, pollution des nappes phréatiques par l'infiltration de produits chimiques, etc.

Mes chers collègues, l'impact sur l'environnement qui a été constaté dans des pays ayant recours à cette technique doit nous inciter à la plus grande prudence. Certes, nous devons faire preuve d'une grande responsabilité en matière énergétique, car nous ne pouvons pas ne pas voir le formidable potentiel de ces hydrocarbures de schiste, dont notre pays aura sans doute besoin à l'avenir. Mais je suis avant tout convaincu que nous n'avons pas le droit de sacrifier sur 1'autel du seul progrès, au prétexte de l'indépendance énergétique de notre pays, la qualité de notre air, de notre eau, de notre cadre de vie.

Nous devons donc agir rapidement, dans trois directions : interdire cette technique de fracturation hydraulique ; abroger les permis de recherches octroyés ; exiger de la transparence et de la concertation pour tout projet similaire à l'avenir.

La proposition de loi que nous examinons est claire et sans équivoque. Elle prévoit bien, dans son article 1er, l'interdiction de la fracturation hydraulique sur le territoire national. Elle prévoit bien, dans son article 2, l'abrogation des permis de recherches déjà octroyés, avec une sécurité juridique plus importante que dans la formulation initiale.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Enfin, dans son article 4, elle n'hypothèque pas l'avenir, en demandant au Gouvernement d'informer le Parlement sur les évolutions des techniques d'extraction. Ainsi, elle crée les conditions à mon sens les meilleures pour la recherche fondamentale, tout en contraignant, et c'est un impératif, les industries extractives au respect de notre environnement, aujourd'hui et à l'avenir.

C'est pourquoi je vous appelle à adopter cette proposition de loi, très attendue par les Français dans leur ensemble, et particulièrement, bien sûr, par les habitants de Seine-et-Marne.

Alors, j'espère, chers collègues socialistes, que vous voterez pour ce texte équilibré, dont la rédaction a été finalisée en commission – notamment à votre initiative, Christian Jacob l'a rappelé –et que vous avez adopté avec le groupe UMP. Un vote massif enverrait un signal fort à nos concitoyens : d'une part, la représentation nationale est capable de se rassembler dès qu'il s'agit de l'essentiel, en l'occurrence la préservation de notre environnement ; d'autre part, elle est capable d'agir promptement. Et il faut aller vite, monsieur Cochet, pour bloquer les forages non conventionnels. Votez ce texte ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les différents intervenants qui se sont succédé à cette tribune ont tous parlé avec passion d'un sujet éminemment important, puisque tout ce qui a trait à l'énergie touche au coeur des préoccupations quotidiennes de nombre de nos concitoyens, mais aussi aux éléments fondamentaux d'organisation de nos sociétés. Sans énergie, pas de possibilité de se déplacer, de se chauffer, de s'éclairer, de faire fonctionner nos usines, bref pas de vie moderne, tout simplement.

Sur les problèmes énergétiques, les interrogations sont donc tout à fait légitimes, et il est logique qu'elles se manifestent.

Nombre de questions ont été soulevées : l'indépendance énergétique de notre pays, la nécessaire préservation de l'environnement, mais aussi tous les problèmes inhérents aux spécificités de l'exploitation des gaz et huiles de schiste. Nous sommes là au coeur d'enjeux très importants.

Ces questions méritent réponse. Elles méritent à tout le moins, pour la représentation nationale, des éclaircissements. C'est pourquoi le Gouvernement a décidé de confier une mission à des corps d'inspection, dont les conclusions nous permettront de progresser dans notre réflexion.

L'Assemblée nationale, de son côté, et c'est à mes yeux essentiel, a décidé, le 1er mars dernier, de confier à François-Michel Gonnot et Philippe Martin, ici présents, une mission d'information sur l'exploration et l'exploitation des gaz et huiles de schiste. À cet égard, je voudrais attirer votre attention sur le précédent très dangereux que nous sommes en train de créer en légiférant dès à présent sur ce sujet alors même que nos collègues n'ont pas encore rendu leurs conclusions, ce qu'ils feront le 8 juin prochain. Ce n'est pas une façon normale de fonctionner ! Nous confions à deux de nos collègues le soin de mener un travail de fond – et nous savons qu'ils s'y attèlent avec beaucoup de sérieux et de volontarisme –, et voilà que nous légiférons dès maintenant, sans nous préoccuper des conclusions de ce travail.

Ce manque de respect de l'Assemblée nationale à l'égard de deux de ses membres du fait d'une prétendue urgence méritait d'être relevé. C'est à croire que, dans le mois qui nous sépare du rendu de ce rapport, il pouvait se passer des choses irrémédiables pour l'environnement ! Cela me choque, ainsi qu'un certain nombre de nos collègues et de nos concitoyens.

Sur le fond, nous risquons de voter un texte créant une insécurité juridique majeure. Il pourrait être remis en cause, totalement ou en partie, par une question prioritaire de constitutionnalité, ce qui emporterait des conséquences très dommageables, puisque nous en reviendrions à la situation antérieure.

Au regard de cette situation, et parce qu'il me paraît essentiel, même sur des points de forme, de poser des questions de fond sur le fonctionnement de notre assemblée, je ne voterai pas ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La discussion générale est close.

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Mesdames et messieurs les députés, permettez-moi d'apporter quelques réponses rapides, qui éclaireront peut-être la suite des débats.

Le tract que montrait tout à l'heure Mme Billard est très intéressant, parce qu'il jette la lumière sur la nécessité, pour l'Assemblée nationale, d'être plus précise qu'un tract, quel qu'il soit. Celui-ci, dont je parle très librement puisqu'il émane de l'UMP, proclamait : « Non au gaz de schiste en Seine-et-Marne ! » En Seine-et-Marne, il n'y a pas de gaz de schiste, mais de l'huile de schiste. Il y a les tracts et il y a la loi ; la loi doit être précise.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Vos tracts ne sont pas plus précis, monsieur Terrasse, ce n'est d'ailleurs pas leur objet. Mais la loi, elle, doit être extrêmement précise. C'est l'objet du travail qui a été mené par les parlementaires, par les rapporteurs et par la commission, et je voudrais leur rendre ici un hommage appuyé.

Je salue les députés qui ont jugé utile d'insister sur la nécessité de retenir des formulations offrant une grande sécurité juridique. Je pense en particulier àPierre Morel-A-L'Huissier, àFranck Riester, qui a réalisé un gros travail, àJean-Claude Flory et àRichard Mallié.

Jean-Claude Flory m'interpellait plus particulièrement sur le détail de notre analyse juridique, et je lui réponds bien volontiers, en contrepoint de l'intervention d'Anny Poursinoff. Cette dernière disait que, contrairement à mes affirmations, il n'existe pas d'autre technologie possible pour exploiter le gaz de schiste que la fracturation hydraulique. Mais c'est justement ce que j'affirme : comme il n'existe pas d'autre technologie possible que la fracturation hydraulique pour exploiter le gaz de schiste, en interdisant la fracturation hydraulique, on obtient le résultat voulu, dans une sécurité juridique à laquelle tous les parlementaires devraient être sensibles.

Je relève une divergence de fond entre Anny Poursinoff et Jean-Jack Queyranne, qui disait pour sa part que seule la fracturation hydraulique entraînerait l'annulation du permis. Il me semble que ces positions sont peu cohérentes, et nous devrions pouvoir les réconcilier autour de la proposition qui vous est faite, dont je reprends les grandes lignes. Cela répondra également aux interventions deDominique Orliac et deMarie-Lou Marcel. Pour éviter de prêter le flanc à des procédures judiciaires de demande de dédommagements financiers, il est proposé d'interdire la technologie, d'en révéler les utilisations potentielles, et de ne pas leur faire droit. C'est à la fois sûr et efficace.

De votre côté, vous souhaitez aller vers une formulation qui n'aurait probablement pas la même force juridique, parce qu'elle serait contestable en droit et prêterait le flanc à des demandes de compensation financière. Dominique Orliac, évoquant le grand profit financier de quelques-uns, nous reprochait de vouloir financer les multinationales du pétrole, symboles du capitalisme le plus débridé et le plus brutal. C'est à dessein que je reprends ce vocabulaire, car c'est en réalité ce que vous proposez en usant de formulations qui laissent subsister la possibilité de demandes de compensation financière. Les pétroliers se frottent les mains : ils se croiront autorisés, avec des démarches de ce genre, à demander beaucoup.

Je voudrais dire un mot des précisions que fournit le ministère sur les différents permis, en réponse à Martine Billard. Apportons des réponses précises à des questions précises, et gardons-nous des anathèmes, des procès d'intention. Tout se trouve sur le site internet du ministère. Il est vrai que cela pourrait parfois être plus clair, car les permis ne sont pas instruits différemment selon qu'il s'agit d'hydrocarbures conventionnels ou non conventionnels, tous y figurent, d'une manière qui peut sembler mélangée. Vous y trouverez tout, y compris les permis en cours, ce qui me permet de répondre aux interpellations de Germinal Peiro et d'Isabelle Vasseur. Il n'y a pas de volonté de cacher les procédures d'instruction de la part du ministère. En revanche, les procédures ne se portent pas au-devant du public, ni au-devant des élus, et il est vrai que certains élus découvrent les permis alors qu'ils sont en cours d'instruction, et même parfois une fois qu'ils ont été accordés. Mais l'information est diffusée et les demandes d'informations précises qui ont été faites ont donné lieu à des communications. Certains documents ont été transmis, d'autres le seront encore.

Prenons l'exemple du permis de Brignoles, à propos duquel m'interpellait Josette Pons. Par cohérence, à partir du mois de février, quand nous avons suspendu les opérations de fracturation hydraulique et lancé une mission, nous avons également suspendu toutes les procédures d'instruction de demandes d'autorisation, qu'elles concernent les hydrocarbures conventionnels ou non conventionnels. Le permis de Brignoles en fait partie. La roche-mère, comme le disait Yves Cochet, ne peut être exploitée autrement que par fracturation hydraulique. Si la demande de permis de Brignoles prévoit le recours à la fracturation hydraulique, ce permis ne sera pas accordé, pourvu que cette proposition de loi soit votée, conformément aux dispositions de l'article 1er.

Concernant la réforme du code minier, Jean-Louis Borloo déclarait tout à l'heure en faire une affaire personnelle, et le point a également été évoqué par Gérard Gaudron. L'opportunité la plus rapide pour la réforme du code minier, c'est la loi de ratification de l'ordonnance qui permet de le recodifier. Cette démarche aurait dû se faire à droit constant, mais il est d'ores et déjà prévu que ce ne sera pas le cas. Le Gouvernement prévoit une procédure de consultation du public dès les autorisations d'exploration. Mais cette avancée est modeste et il est possible d'aller plus loin. Je vous propose d'engager une réflexion associant le Gouvernement et la commission pour mettre à profit la loi de ratification afin d'avancer sur la réforme du code minier. S'agissant d'une ratification d'ordonnance, cela ne pourra être fait que par voie d'amendement gouvernemental. Cela n'exclut naturellement pas toute initiative parlementaire, mais c'est l'horizon le plus proche pour progresser.

La réforme du code minier devrait être l'occasion de donner plus de place aux territoires, sujet qui a été évoqué par Josette Pons et André Vézinhet. Comme je le disais précédemment, des problèmes de cohérence se sont posés dans certains territoires. Dans les Causses et les Cévennes, nous sommes engagés avec mon collègue Frédéric Mitterrand dans une démarche de valorisation de ce territoire en vue de son inscription au patrimoine mondial de l'UNESCO. La congruence avec le projet d'exploration et d'exploitation de gaz de schiste paraissait curieuse, et la réforme doit être l'occasion de résoudre ce genre de problème.

S'agissant du principe de précaution, vous n'imaginez pas l'émotion qui est la mienne de l'entendre si souvent invoquer dans cet hémicycle, moi qui me suis beaucoup battue pour son inscription dans la Constitution. Mon émotion est un peu particulière quand il est invoqué par les parlementaires du groupe socialiste qui, à l'exception de certains d'entre eux, très courageux – je le dis à l'attention de Philippe Martin, qui était de ceux-là –, ne l'ont pas voté. Germinal Peiro, Jean-Jack Queyranne, Jean-Marc Ayrault y ont fait appel. Philippe Plisson en appelait, lui, au Grenelle II, que les socialistes n'ont pas voté non plus. J'y vois une conversion tardive – ce sont les meilleures – que nous apprécions beaucoup.

J'y vois également un comportement que nous retrouvons souvent en matière d'écologie. La même chose s'est passée s'agissant de la Charte de l'environnement : nous avions très bien travaillé sur tous les bancs de l'hémicycle, et au dernier moment seule la majorité l'a votée, à l'exception notable des députés écologistes et de quelques-uns de vos collègues, dont Germinal Peiro. De même, pour le Grenelle de l'environnement, nous avions travaillé tous ensemble, et le Grenelle I avait été voté à l'unanimité.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Il est vrai que M. Cochet ne nous avait pas suivis. Mais, pour le Grenelle II, la majorité s'est encore trouvée un peu seule. Aujourd'hui je constate le même mouvement s'agissant du gaz de schiste. Nos travaux avaient commencé de façon collective, il y avait un engagement de l'ensemble de l'Assemblée nationale pour la défense de l'environnement, et puis, dans la dernière ligne droite, la majorité se retrouve abandonnée par les parlementaires de la gauche. C'est dommage, mais peut-être est-il encore possible de rattraper cela.

À Claude Gatignol, je dirai que l'idée d'une commission locale d'information est intéressante, mais puisque l'on prévoit de ne pas opérer de fracturations hydrauliques, la question ne semble pas être de la première urgence.

Pour la géothermie, ce texte ne modifie rien, l'article 1er est rédigé de façon qu'elle ne soit pas mise en cause. Mais la géothermie recourt à la fracturation hydraulique, la vérité nous impose de le dire.

Pour finir, je ne partage pas toute l'intervention de Philippe Folliot, mais je m'associe à l'hommage qu'il rend au travail de tous les députés, qui ont vraiment approfondi ce sujet. Nous sommes tous devenus de grands spécialistes de la fracturation hydraulique, et je suis sûre que, même s'ils ne sont pas satisfaits des décisions qui seront prises à l'issue de cette séance, les pétroliers pourront au moins reconnaître qu'il y a maintenant d'excellents connaisseurs de la fracturation hydraulique au sein de l'Assemblée nationale. Ils en seront certainement très heureux. (Sourires. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 1er.

La parole est à M. Jean-Pierre Grand.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Grand

L'article 1er formalise le principe de précaution. Je tiens à intervenir en tant que maire d'une ville dont les ressources en eau proviennent de l'aquifère karstique, puisées dans une rivière souterraine provenant du Larzac. La zone concernée est le réservoir hydrique de toute notre région. Le système hydrologique n'est pas celui des nappes phréatiques, mais celui des eaux de résurgence. Vous comprenez donc que nous soyons très mobilisés contre l'exploration et l'exploitation des huiles et du gaz de schiste.

Si je m'exprime aujourd'hui, c'est parce que la préservation de nos ressources en eau pour la consommation humaine est sacrée. Je ne reviendrai pas sur le risque, bien réel, de voir les produits chimiques utilisés et les hydrocarbures récupérés s'infiltrer dans la terre, et donc dans les nappes, polluant immanquablement notre eau potable. Tout le monde est d'accord là-dessus.

Le pré-rapport, que j'ai lu avec attention, ne peut rassurer que ceux qui n'en ont pas pris connaissance. En effet, à la page 28, il y est écrit : « Quand bien même de strictes procédures de contrôle seraient établies et respectées, un certain nombre d'incertitudes demeurent, concernant notamment les risques de pollution liée au processus de fracturation hydraulique. »

Et de conclure : « S'agissant des Causses-Cévennes – cela concerne l'exploitation de l'eau de ma ville – il importera de parfaire la connaissance scientifique du fonctionnement des aquifères et de leurs connexions dans les formations karstiques, connaissance indispensable à une gestion optimale de la ressource en eau. »

Ces éléments du rapport justifient à eux seuls que l'on formalise l'interdiction des forages par fracturation hydraulique de la roche. C'est pour moi un principe de précaution absolument indispensable, incontournable. C'est l'objet de l'article 1er. C'est la raison pour laquelle j'y suis favorable et je le voterai.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Mes chers collègues, vous vous êtes inscrits très nombreux sur l'article 1er. Je vous rappelle qu'il ne s'agit pas d'une nouvelle discussion générale et que chaque orateur ne dispose que de deux minutes.

La parole est à M. Yves Cochet.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Je voudrais revenir, à l'article 1er et à l'article 2, sur la prétendue fragilité juridique de la première version de la proposition de loi.

Sur votre site, madame la ministre, figure l'arrêté du 28 juillet 1995, qui fixe les modalités d'obtention des permis de recherches et donc, si l'on peut dire, d'exploration. On y trouve même un modèle de demande de permis exclusif de recherches d'hydrocarbures, rédigé de telle sorte que les investisseurs, les industriels, puissent envoyer au ministre chargé de l'écologie une lettre conforme à cet arrêté.

À la page 6 de ce modèle de lettre , il est indiqué à l'avant-dernier alinéa : « En fonction de l'environnement géographique et des objectifs visés par la société, la société décrira dans la notice d'impact » – il y en a donc bien une – « les méthodes qu'elle est susceptible de mettre en oeuvre dans le cadre de l'exploration du permis de recherches, l'impact prévisible sur l'environnement pour chacune des méthodes employées et les mesures envisagées pour réduire ou supprimer éventuellement l'impact sur l'environnement. »

La demande de permis, antérieure évidemment à l'autorisation, doit donc bien comporter la description d'une ou plusieurs méthodes. Et je ne peux pas croire qu'aucune des demandes de permis aujourd'hui accordés n'en ait fait état, car cela aurait été illégal. Il y figurait donc, parce que c'est la seule méthode connue pour l'instant, la fracturation hydraulique.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Ainsi, écrire à l'article 2 : « Les permis sont abrogés », ne fragilisait pas du tout la proposition de loi, puisque l'on connaît déjà les méthodes. Nous ne voyons pas comment, en deux mois, les exploitants éventuels pourraient en changer. C'est impossible. Il n'y a donc pas de fragilité sur ce point. J'y reviendrai à l'article 2.

Debut de section - PermalienPhoto de William Dumas

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais revenir quelques instants aux premiers épisodes de ce feuilleton de mauvais goût produit par le Gouvernement.

En tout premier lieu, rappelons que c'est M. Jean-Louis Borloo, alors ministre de l'environnement, qui, de manière tout à fait confidentielle, a cédé aux lobbys pétroliers et délivré en mars 2010 son autorisation pour l'exploration des gaz de schiste.

Rappelons ensuite que, dans le deuxième épisode, et de manière tout aussi confidentielle, ces permis ont été délivrés avant que les modifications du code minier intégrant l'article 7 de la Charte de l'environnement n'entrent en vigueur.

Troisième épisode, le 3 mars, alors que les élus et la population viennent d'être informés par la presse, Benoist Apparu, qui me répondait au nom de Mme la ministre de l'écologie, a tenté de minimiser les conséquences de la technique de fracturation hydraulique.

Quatrième épisode : la fronde anti-gaz de schiste. Les Français montent au créneau : ils refusent de sacrifier leur santé et leur environnement pour permettre à quelques sociétés pétrolières de s'enrichir.

Le cinquième épisode sera, de loin, le plus pathétique. Les députés du parti socialiste, qui dénoncent le scandale depuis qu'ils en ont eu connaissance, signent une proposition de loi. Les députés de la majorité, voyant qu'il leur faudra céder face à la pression de leurs électeurs sur le terrain, font de même.

François Fillon tente alors d'écrire l'épilogue en annonçant qu'il annule les autorisations, mais les députés de la majorité, pour ne pas perdre la face, maintiennent leur proposition de loi. Ils tentent une fois de plus de retourner la situation à leur avantage. C'était sans compter sur la récente réplique d'Éric Besson, qui ne laisse rien présager de bon. Il a déclaré : « La science va progresser et peut peut-être qu'un jour, dans deux ans, trois ans, l'exploitation pourra être faite. »

Alors, chers collègues, au générique de ce feuilleton que l'on pourrait intituler non pas Dallas mais « Gazland : ton univers pitoyable », j'ose espérer qu'il sera inscrit définitivement en toutes lettres le mot « FIN ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Nicolas

Cette proposition de loi – je félicite Christian Jacob d'en avoir pris l'initiative – revêt une importance particulière car il s'agit de préserver notre environnement et de ménager l'avenir en ce qui concerne les ressources énergétiques de notre pays. Les travaux en commission ont été de qualité et ont démontré la nécessité de prendre toutes les dispositions afin que le texte final soit juridiquement solide et empreint de réalisme.

Je me réjouis de constater que l'article 1er a été quelque peu modifié, ainsi que l'article 2, et que l'article 3 a été supprimé.

Après avoir évité l'amalgame entre simple forage et fracturation hydraulique, procédé qui cristallise légitimement les réactions de l'opinion, il me semblerait judicieux, pour ne pas pénaliser la recherche énergétique dans notre pays, de suspendre, pendant un an par exemple, et non d'interdire totalement cette technique. Cette disposition permettrait de prendre connaissance des rapports des missions parlementaires et interministérielles en cours sur les hydrocarbures, qui seraient de nature à éclairer nos travaux.

Elle serait par ailleurs adossée à la décision du Conseil constitutionnel du 19 mai 2008, qui précise que le principe de précaution de la Charte de l'environnement se traduit outre « la mise en oeuvre de procédures d'évaluation des risques par l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ».

J'ajoute que le rapport du 12 mai 2004 de Mme la ministre précisait : « L'incertitude scientifique est une condition déterminante pour entrer dans le régime juridique de la précaution. Mais celui-ci n'a pas vocation à durer. II est au contraire une forte incitation à engager des programmes de recherche destinés à réduire l'incertitude. » Ceci milite en faveur de l'amendement excluant du champ de l'interdiction les recherches expérimentales. N'oublions pas, en effet, mes chers collègues, que l'exploitation des gaz de schiste aux États-Unis a permis de diviser le prix du gaz naturel par trois en quatre ans, alors qu'en France le prix du gaz est sur une tendance haussière, qui pèse lourd dans le budget des ménages et des entreprises.

La préservation de notre environnement est essentielle, mais soyons réalistes vis-à-vis des problèmes énergétiques. D'ailleurs, selon un récent sondage, 93 % des Français estiment important que la France soit indépendante en matière énergétique et produise autant que possible sa propre énergie, et 62 % déclarent qu'ils seraient favorables à un développement du pétrole de schiste en France si cela faisait baisser le prix du carburant. Or le pré-rapport commandé par le Gouvernement chiffre les réserves de gaz de schiste à 90 ans de notre consommation actuelle de gaz.

Mes chers collègues, il nous appartient de préserver le présent, mais aussi le futur.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Saint-Léger

Nous débattons cette nuit d'un sujet crucial et urgent. L'objectif de la proposition de loi de Christian Jacob est d'aboutir à l'interdiction d'exploitation du gaz de schiste. J'aurais personnellement préféré que l'on prononce l'interdiction pure et simple de l'exploitation du gaz de schiste, même si la formulation employée visant à interdire le recours à la fracturation hydraulique revient grosso modo au même, puisque c'est la seule technique existante.

Quelle que soit la sémantique, cette proposition de loi permet donc d'interdire l'exploitation, mais aussi d'abroger les permis d'exploration de gaz de schiste accordés début 2010, dans les circonstances décrites tout à l'heure par Jean-Louis Borloo. Comme il l'a justement indiqué, ces autorisations découlent de procédures trop simplifiées et il conviendra d'en tirer rapidement toutes les conséquences en réformant le code minier. Quoi qu'il en soit, pour l'heure, l'emploi de la technique de la fracturation hydraulique nous préoccupe, car elle est dévastatrice à tous points de vue pour nos territoires, et en particulier pour les Causses et les Cévennes lozériennes que j'ai l'honneur de représenter.

Pour corriger rapidement le tir et répondre aux légitimes inquiétudes de nos concitoyens, il faut être très clair en refusant toute nouvelle autorisation d'exploration et d'exploitation, mais aussi en remettant tout à plat et en abrogeant tous les permis autorisés concernant les gaz de schiste. Le processus de délivrance des permis doit être stoppé, car la technique de fracturation hydraulique n'est pas acceptable. L'interdiction de cette technique est l'objectif de l'article 1er, que nous ne pouvons que soutenir et que j'approuve totalement.

Je voudrais simplement dire pour conclure, parce que les articles 1er et 2 sont indissociables, que je fais confiance actuellement à l'analyse juridique qui a été faite et qui a contribué à la réécriture par les rapporteurs de l'article 2, en vue d'abroger les permis en cours. Si cette réécriture ne répondait pas intégralement à l'objectif fixé, à savoir l'abrogation totale des permis accordés pour l'exploration des gaz non conventionnels, je rejoindrais alors Jean-Louis Borloo, pour dire que nous aurions l'obligation de rechercher dans la foulée une nouvelle solution législative.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Madame la ministre, vous comprendrez que le problème des gaz de schiste intéresse tout particulièrement le député de l'Aveyron que je suis, puisqu'un permis d'exploration, dit de Nant, a été délivré au pied du Larzac, dans ma circonscription.

La deuxième mouture de l'article 1er exclut définitivement le procédé de forage suivi de fracturation hydraulique, qui inquiète de façon légitime nos administrés. Cela a été dit, les articles 1er et 2 sont très liés, mais je voudrais émettre quelques doutes sur la véracité des informations fournies sur les techniques employées par les titulaires de permis exclusifs de recherches.

Comme l'a dit Richard Maillé tout à l'heure : « Chat échaudé craint l'eau froide, même si celle-ci est pure. » Je souhaite pour ma part que toute la publicité soit faite sur la technique employée, car cette information ne saurait être l'exclusivité d'un corps de fonctionnaires. Il va de soi qu'une réforme du code minier s'impose. Ce qui pouvait se concevoir pour les ressources de matières premières au siècle dernier dans l'intérêt de la nation doit être envisagé différemment aujourd'hui, conformément à la Charte de l'environnement et à la nécessaire information des élus et publics concernés.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Lecou

Un journaliste m'a interpellé pour me faire part des projets d'exploration qui concernent une grande partie du département de l'Hérault, et en particulier le plateau du Larzac. Ce territoire, dont le réseau karstique recèle encore des mystères quant à ses connexions aquifères, est connu et reconnu comme un véritable château d'eau, situé au-dessus d'un territoire méditerranéen particulièrement sensible aux problèmes de sécheresse et pour qui l'eau est la richesse, la vie, cette eau pure qui alimente nos rivières, nos fleuves côtiers et nos sources d'eau potable.

Imaginez, madame la ministre, ma stupéfaction lorsque j'ai appris qu'on envisageait de l'explorer pour exploiter des gaz et huiles de schiste avec la technique de fracturation hydraulique, prélevant d'énormes quantités d'eau aux dépens et au détriment de l'eau potable, entraînant une forte pollution, la destruction de paysages, des désordres spectaculaires, comme l'ont démontré les expériences d'exploitation en Amérique du Nord.

De leur côté, les élus locaux surpris, car eux aussi hors des circuits d'information, réagissent et manifestent leur totale désapprobation. Il faut entendre cette préoccupation, ces inquiétudes. C'est pourquoi j'ai cosigné la proposition de loi de Christian Jacob, qui avait pour objectif de supprimer les permis accordés et d'empêcher la destruction de notre territoire. C'est pourquoi j'ai également cosigné un amendement avec mes collègues Saddier et Morel-A-L'Huissier pour en appeler, madame la ministre, au principe de précaution, que j'ai voté. Je me demandais à l'époque si ce n'était pas un peu préoccupant. Je suis très heureux de pouvoir m'y référer aujourd'hui.

Il faut que l'État se mette en cohérence vis-à-vis de ce territoire. Il ne peut pas déposer un dossier de reconnaissance au patrimoine mondial de l'Unesco pour le territoire Causses et Cévennes et laisser planer en même temps le doute sur une exploration, voire une exploitation. Il faut donc que l'on soit vite rassuré. Je pense qu'il est urgent de réviser le code minier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Je crois, madame la ministre, qu'une question se pose : sommes-nous dans l'après-pétrole ? L'échéance du pic pétrolier, c'est-à-dire le moment où la consommation de pétrole dans le monde devient supérieure aux découvertes de nouveaux gisements, est atteinte. Il est fort probable que nous sommes déjà parvenus au point où se constate l'existence de stocks finis de pétrole conventionnel.

La question du pic pétrolier doit être, à mon sens, largement liée à celle du changement climatique. Les deux phénomènes ont une origine commune : l'utilisation sans retenue ni limite de nos ressources en hydrocarbures. Il est temps – le débat le permettra peut-être – de définir des priorités politiques concrètes, ainsi que d'appréhender en même temps ces deux réalités : le pic pétrolier et le changement climatique.

Les alternatives fossiles à la diminution des réserves de pétrole auraient de très graves inconvénients sur le plan climatique, notamment avec l'utilisation des gaz non conventionnels et l'exploitation à une grande échelle du pétrole non conventionnel par la technique de la fracturation hydraulique. Il convient donc de mettre en oeuvre le principe de précaution. Au-delà de l'année de délai que vous demandez, le débat mérite d'être posé au fond. Nos ressources pétrolières sont limitées. Ne donnons pas l'impression de presser notre planète comme une éponge pour en tirer la dernière goutte.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Taubira

Mon propos ne sera pas d'une grande subtilité technique et j'ai bien conscience que je risque d'apparaître tout à fait inculte après les exposés savants que nous avons entendus.

Lorsque l'UMP a fait main basse sur la proposition de loi du groupe SRC, le groupe majoritaire a pris la précaution de supprimer soigneusement une disposition qui incluait l'exploration et l'exploitation d'hydrocarbures en eau profonde, offshore. J'ai introduit un amendement pour la réintroduire et quoique n'étant pas membre de la commission du développement durable, j'ai participé à ses travaux. Mon amendement a été rejeté au motif que tel n'était pas l'objet de ce texte.

Lorsque les risques technologiques ne sont pas totalement maîtrisés j'ai compris qu'en vertu de la Charte de l'environnement, du principe de prévention et du principe de précaution, il fallait éviter de donner libre cours à l'exploration et à l'exploitation, qu'il fallait tenir compte de possibles impacts extrêmement dévastateurs sur l'environnement et respecter la biodiversité. Si ces principes sont bien ceux qui ont inspiré la proposition de loi, ils devraient également valoir pour l'exploration et l'exploitation d'hydrocarbures en eaux profondes.

Cet amendement ayant été rejeté, je vous interroge, madame la ministre. Lors des débats en commission, j'ai bien compris qu'au départ nous nous inscrivions plutôt dans une logique d'interrogation sur les politiques économiques que nous pouvons mettre en oeuvre, sur les priorités que nous pouvons déterminer.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Taubira

Même si nous avons des technologies disponibles, nous devons, si elles ne sont pas sans risques, éviter de les mettre en oeuvre. Si c'est le cas pour les gaz de schiste, pourquoi la même logique ne prévaut-elle pas pour le pétrole ?

Je vous rappelle qu'en Guyane un titre minier a déjà été attribué en mai 2001 ; il ne s'agit donc pas d'un plan tiré sur la comète, mais bien de neuf années d'exploration qui ont déjà eu lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Taubira

Je demande seulement, d'une demi-phrase, au président de la commission du développement durable s'il peut envisager d'élargir le périmètre d'étude qui a été confié à nos collègues Philippe Martin et François-Michel Gonnot pour voir de plus près dans quelles conditions peuvent se faire les forages en eaux profondes.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Vous avez de longues demi-phrases, madame Taubira. (Sourires.)

À l'article 1er, je suis saisi de deux amendements identiques, nos 8 et 40 .

La parole est à M. Pascal Terrasse, pour soutenir l'amendement n° 8 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

À entendre le Gouvernement et une partie des membres du groupe UMP, le texte qui nous est présenté serait parfait, inutile donc de présenter des amendements. Nous allons essayer de vous démontrer qu'il est possible de l'améliorer par le biais d'amendements émanant à la fois du groupe UMP : je pense notamment à celui de M. Morel-A-L'Huissier, et du groupe GDR : je pense à ceux de M. Chassaigne, de M. Cochet et de Mme Taubira. Tous ces amendements s'inscrivent dans un cadre général et l'on ne peut en adopter un sans adopter les autres.

D'ores et déjà, je peux vous dire que nous faisons fausse route avec l'article 1er, car il ne fait référence qu'à l'article 5 de la Charte de l'environnement, alors qu'il faudrait s'y référer en totalité. Ainsi, l'article 2 de la Charte énonce que « toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l'amélioration de l'environnement » et l'article 3 que « toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu'elle est susceptible de porter à l'environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences ». De même l'article 6 proclame que « les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. » Il s'agit d'un aspect important pour l'activité touristique et agricole de nos territoires. Si nous ne faisions pas référence à l'article 6, la loi n'aurait pas de sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Il s'agit également de préciser le principe mentionné à l'article L. 110-1 du code de l'environnement, à savoir « un principe d'action préventive et de correction ».

Si nous ne faisons pas référence à l'ensemble de la Charte de l'environnement à l'article 1er , la loi n'a pas de sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je vous rappelle, chers collègues, que vous disposez de deux minutes pour défendre les amendements.

Qui souhaite soutenir l'amendement n° 40 , M. Saddier ou M. Morel-A-L'Huissier ?

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Saddier

En tant que premier signataire de l'amendement, je souhaite prendre la parole d'autant que je ne me suis exprimé ni au cours de la discussion générale, ni sur l'article.

À mon tour, à l'instar de Mme la ministre, je me réjouis d'entendre parler de la Charte de l'environnement puisque j'ai été le rapporteur pour avis de ce texte sous la précédente législature.

Avec cet amendement, il ne s'agit pas de reconnaître une erreur mais d'être encore un peu plus précis.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Saddier

Sur le fond, nous sommes tous d'accord, et l'amendement a été voté à la quasi-unanimité en commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Saddier

Il vise à compléter le texte initial et à rappeler qu'au-delà du principe de précaution – la fracturation hydraulique ayant été utilisée dans d'autres pays – il y a lieu de faire référence à la Charte de l'environnement, notamment à l'action de prévention des risques connus, référencée aux articles 2 et 3, ainsi que dans le code de l'environnement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

Avis favorable.

La Charte de l'environnement énonce des principes, exigences et obligations qui, toutes, justifient l'interdiction des forages suivis de fracturation hydraulique pour l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures liquides ou gazeux. Il en est ainsi des articles 2, 3 et 6 notamment. Il semble plus pertinent de se référer à l'ensemble de la Charte de l'environnement et non au seul principe de précaution. Cette évolution permettrait également de renforcer le socle juridique de la proposition de loi.

Par ailleurs, concernant le principe d'action préventive et de correction, il est utile de se référer à la rédaction exacte du code de l'environnement dans un souci de clarté et de précision législative.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Avis favorable.

(Les amendements identiques nos 8 et 40 sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Petit à petit, on avance. En tout cas, cela veut dire que le texte n'est pas parfait.

Article 1er

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue le mercredi 11 mai à deux heures dix, est reprise à deux heures quinze.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est reprise.

Je suis saisi d'un amendement n°1 .

La parole est à M. Martial Saddier.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Saddier

L'amendement est retiré.

(L'amendement n°1 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 13 .

La parole est à M. Yves Cochet.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

À la suite de l'intervention de Mme Taubira ainsi que de la proposition initiale du groupe socialiste, il s'agit d'inclure les forages marins dans ce texte, c'est-à-dire les gisements potentiels offshore.

En Guyane, un permis a été attribué en mai 2001 par le ministère de l'industrie, alors même que la loi du 13 décembre 2000 transférait cette compétence au conseil régional. Le décret d'application n'ayant pas été publié, l'État l'a conservée.

La récente autorisation par le préfet de Guyane d'un forage pétrolier au large de Cayenne au bénéfice de la société Tullow Oil a soulevé de nombreuses protestations, cette attribution n'ayant pas été accompagnée d'un processus d'enquête publique, comme les forages d'exploration en métropole.

Le fait que la fracturation hydraulique n'ait jamais été utilisée n'est pas une garantie. Même s'agissant de forages conventionnels on pourrait y recourir pour essayer de booster la production.

La protection des sols marins, de la faune et de la flore aquatique sont des objectifs importants. Cet amendement fait donc entrer en jeu le principe de précaution, mais aussi celui de prévention, de protection de la biodiversité marine, car l'on connaît déjà un certain nombre de conséquences de ce type de forage. Rappelez-vous les événements dramatiques qui ont eu lieu l'an dernier dans le golfe du Mexique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

Le territoire national est composé à la fois d'une partie terrestre et d'une partie marine dans la limite de 12 milles marins, conformément à la prescription de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer. Nous pensons donc que cet amendement est satisfait.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Même avis que la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Oui, monsieur le président. Je ne suis pas sûr en effet que le forage en question se situe dans la zone des 12 milles. Il se situerait plutôt dans la zone des 200 milles, qui ne fait pas partie du territoire national mais dépend de l'État français.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Taubira

Pour éclairer l'Assemblée, je précise que le forage concerné est situé à 153 kilomètres des côtes, il ne se situe donc pas dans les eaux territoriales.

À cet égard, j'aimerais avoir des précisions. Quel est le statut juridique de la zone de forage ? Qu'en est-il au-delà de la zone des 12 milles ? Rappelons que c'est l'État qui a attribué ce titre minier, indépendamment, comme vient de l'expliquer Yves Cochet, de la loi du 13 décembre 2000 qui transfère la compétence d'attribution de titres miniers individuels à la collectivité régionale, compétence qui n'est pas exercée depuis lors, faute de décret d'application.

Ces précisions s'imposent d'autant plus que, l'année dernière, dans le cadre du programme Extraplac, le territoire marin de Guyane a doublé, autrement dit les possibilités de demande de titres miniers à des distances encore plus éloignées des côtes ont été étendues. Où en sommes-nous ? Qu'en est-il des limites du territoire national marin ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Comme l'a dit M. Chanteguet, l'avis de la commission est défavorable. Cet amendement apporte des précisions inutiles. La notion de territoire national inclut la zone des 12 milles. Au-delà, d'autres dispositions législatives s'appliquent.

(L'amendement n° 13 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 16 .

La parole est à M. Claude Gatignol.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Cet amendement tend à compléter l'article par un alinéa ainsi rédigé : « L'interdiction de cette technique ne concerne pas les recherches expérimentales et exploratoires visant à l'acquisition de connaissances scientifiques sur la géologie du sous-sol et sur les ressources minières présentes. »

Cette précision est utile car l'interdiction prévue ne saurait concerner ce qui permet de développer l'innovation et la connaissance dans les domaines des techniques et de la géologie. La recherche ne peut être visée par cette mesure. Il faut pouvoir continuer de chercher, innover, élaborer des techniques plus performantes avec un impact moindre pour l'environnement. Ces projets, encadrés, bien définis, déclarés, visant l'acquisition de connaissances, ne peuvent être visés par l'interdiction totale et définitive.

J'ai repris une idée du Gouvernement, qui a déjà indiqué par la voix du Premier ministre qu'il était « légitime que la France conduise des recherches qui peuvent être exploitées dans notre pays. Il n'est pas question de sacrifier notre environnement mais il n'est pas question non plus de fermer la porte à des progrès technologiques qui permettraient demain d'accéder à de nouvelles ressources énergétiques. »

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Avis défavorable. Nous avons déjà eu cette discussion en commission.

Je tiens d'abord à préciser que le texte n'empêche pas la recherche. L'ensemble de nos débats va, au contraire, pousser les organismes publics, tels le BRGM, IFP-Energies nouvelles ou Ineris, et les universités, à Lyon et ailleurs, à poursuivre leurs recherches tout comme les organismes privés.

Les travaux continuent, que ce soit au sein des missions parlementaires – nous en avons beaucoup parlé –, ou au sein des deux conseils généraux ministériels, celui de l'environnement et celui de l'industrie, de l'énergie et des technologies.

En outre, en ce qui concerne les travaux d'expérimentation sur le terrain, nous aurons des propositions à faire, plus précises que celle que vous nous soumettez, à l'article 4.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Nous sommes très attachés à la recherche scientifique mais c'est à l'article 4 que nous aurons l'occasion de l'aborder. La proposition de loi est ainsi construite. Je vous suggère donc de retirer votre amendement, monsieur Gatignol.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Si nous avons la garantie que le souci de préserver l'innovation et la recherche, avec tous les apports à la connaissance qu'elle implique dans ces domaines techniques, est pris en compte à l'article 4, je veux bien retirer mon amendement.

(L'amendement n° 16 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 2 .

La parole est à M. Gérard Gaudron.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Gaudron

Cet amendement est défendu, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Avis défavorable. Cet amendement propose de s'assurer de la dangerosité d'une technique avant de l'interdire, ce qui revient à laisser se poursuivre le recours à la fracturation hydraulique tant qu'elle n'aura pas été jugée dangereuse de manière définitive. Cela va à l'encontre de la Charte de l'environnement et du principe d'action préventive et de correction.

Par ailleurs, il faut préciser que l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures dits non conventionnels ne sont interdites par le présent texte de loi qu'en cas de recours à la technique de fracturation hydraulique, qui cristallise les inquiétudes et les risques environnementaux et sanitaires.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Même avis. Le principe de précaution revient à renverser la charge de la preuve. L'amendement impliquerait de la renverser à nouveau.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Gaudron

Oui, monsieur le président.

(L'amendement n° 2 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 17 .

La parole est à M. Claude Gatignol.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Si le texte indique que sont visés les forages d'hydrocarbures, il me semble encore utile de préciser que « les forages relatifs à l'énergie géothermique sont autorisés, dans le cadre du développement des énergies renouvelables, notamment pour les puits captant l'eau à une température supérieure à 20 degrés ».

Deux régions sont plus particulièrement concernées : l'Île-de-France et l'Alsace. L'intérêt de la géothermie est grand pour les réseaux de chaleur urbains : on parle de la possibilité d'alimenter plus de 500 000 logements. Cette source de chaleur est également utile à l'agriculture, en particulier aux serristes. Certains puits, avec une eau remontant à 70-80 degrés, sont d'ores et déjà utilisés pour la culture des tomates sous serre.

Il ne saurait être question d'englober ces forages dans l'interdiction édictée par le texte. Je voudrais que cette précision figure dans la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Si, sur le fond, on ne peut qu'être d'accord avec l'amendement, la commission a émis un avis défavorable, pour deux raisons.

D'abord cet amendement est dépourvu de lien avec le texte en discussion. À cet égard, il pourrait constituer un cavalier législatif au sens de l'article 45 de la Constitution et de l'article 98 du règlement de l'Assemblée nationale.

Ensuite, au cours de nos travaux, il nous est apparu qu'une telle disposition, souhaitée depuis longtemps par les acteurs concernés, pourrait faire plutôt l'objet d'une disposition dans le cadre de la prochaine proposition de loi de simplification du droit.

Dans tous les cas, un tel amendement trouverait mieux sa place dans le cadre de la réforme du code minier, que nous avons longuement évoquée.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Je tiens à dire très clairement que le Gouvernement soutient le développement de la géothermie. Je souhaite même que le code minier soit modifié afin que des opérations simples de géothermie, comme le creusage d'un puits canadien pour le chauffage d'une maison individuelle, ne fassent pas nécessairement l'objet d'une autorisation préfectorale avec enquête publique.

Par ailleurs, cet amendement, s'il était adopté, aurait probablement pour effet de dispenser l'exploitation géothermique de toutes les procédures prévues par le code minier.

Je préfère que nous renvoyions cette question à la modification du code minier. Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Oui, monsieur le président.

(L'amendement n° 17 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 9 .

La parole est à Mme Christiane Taubira.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Taubira

Cet amendement consiste, en application de la Charte de l'environnement, à déclarer l'exploration et l'exploitation de gisements d'hydrocarbures en eaux profondes interdites sur le territoire national.

L'un des rapporteurs nous a indiqué que d'autres dispositions intervenaient en matière maritime. Pourrait-il avoir l'amabilité de nous en préciser le contenu et la nature ?

J'ai déjà précisé qu'un permis de recherches avait été attribué en Guyane. Nous avons écouté avec beaucoup d'intérêt M. le ministre d'État Jean-Louis Borloo à la tribune, qui a rappelé que les titres d'exploitation sont généralement attribués aux sociétés ayant obtenu un permis de recherche. Il paraît en effet logique et loyal que la société qui a investi pour rechercher l'existence d'un gisement soit prioritaire. Dans ces conditions, un permis de recherches ayant été attribué il y a neuf ans, il est légitime de penser qu'un permis d'exploitation sera délivré. Or le forage en eaux profondes pour l'exploitation du pétrole au large des côtes de la Guyane utilise la même technique que celle à laquelle BP a eu recours dans le Golfe du Mexique. Et le plan POLMAR n'apporte aucune garantie puisque les premières interventions n'auraient lieu que trente-six heures après en cas d'incident.

Je vous demande de prendre très sérieusement en considération cet amendement d'interdiction des forages en eaux profondes.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

En commission, nous avons émis un avis défavorable pour plusieurs raisons.

Premièrement, nous ne disposons pas de définition juridique des eaux profondes, notion difficile à préciser.

Deuxièmement, il n'y a pas de fracturation hydraulique pour les forages off-shore. Or le texte ne vise que l'interdiction de cette technique.

Troisièmement se pose la question des délimitations maritimes. Si la zone économique exclusive ou les eaux internationales sont visées, ce n'est pas par le biais d'un amendement que l'on va régler cette question. Il faudrait plutôt l'envisager dans le cadre d'une réforme du code minier qui prendrait en compte un champ juridique beaucoup plus large.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Taubira

Il faut qu'on y arrive ! On ne peut se contenter de dire qu'on ignore ce que sont les eaux profondes. Monsieur le rapporteur, l'arrêté préfectoral autorisant le forage l'autorise à 6 000 mètres de profondeur. Voilà une précision. Peut-on parler d'eaux profondes à 6 000 mètres de profondeur ? Ce n'est pas certain (Sourires), mais je suis encline à le croire.

Vous vous demandez ensuite s'il s'agit d'eaux territoriales. Mais c'est justement l'objet de la question que je vous ai posée tout à l'heure ! À la limite, dites-nous que vous allez vérifier et que vous nous répondrez plus tard, puisque nous débutons l'examen de ce texte, qui partira au Sénat avant de revenir peut-être devant nous – ce qui m'étonnerait. Mais au moins, soyons précis !

C'est le gouvernement français qui a attribué le titre minier. S'il s'agit d'eaux internationales, dites-nous qui attribue les titres miniers dans ce cas ! Car il y a un lien entre l'autorité qui attribue le titre et la police qui peut être exercée sur l'activité découlant de cette attribution. Éclairez-nous donc au moins sur ces points : de quel régime juridique cela relève-t-il ? quelles sont les procédures ?

Pour l'heure, nous disposons d'une précision, je le répète : le forage est autorisé à 6 000 mètres de profondeur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

M. le rapporteur a opposé à Mme Taubira des arguments juridiques,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

… mais le problème majeur posé par les eaux profondes excède largement la question de savoir s'il s'agit ou non du territoire national.

Cet amendement promeut le principe de précaution et le principe de prévention. La biodiversité et la géologie marine le méritent.

La question de l'off-shore outre-mer ne dépasse pas le cadre du présent texte. Au contraire, elle montre combien il est urgent de résister à la fracturation hydraulique, sans attendre l'hypothétique débat parlementaire dont vous nous avez parlé en commission, monsieur le rapporteur, et qui aurait lieu dans un an. Dans un an, nous serons occupés par d'autres débats ! Cette question doit donc être tranchée dès à présent.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

La question est importante et mérite d'être étudiée. Cependant, je l'ai dit, ce n'est pas l'objet du présent texte, mais celui d'une réforme plus globale, la réforme du code minier, à l'occasion de laquelle nous évoquerons toutes les situations possibles, on-shore comme off-shore.

N'ajoutons pas au présent texte des dispositions juridiquement imprécises.

(L'amendement n° 9 n'est pas adopté.)

(L'article1er, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 24 .

La parole est à M. Yves Cochet.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Il s'agit de dispositions dont nous avons déjà parlé à propos des lois Grenelle.

Des entreprises françaises de toute nature sont transnationales : bien que relevant du droit français, elles ont des activités à l'extérieur du territoire – ce dont certains se félicitent, du reste. Je songe évidemment à la plus importante société de France, Total, ou à Perenco. Ces sociétés pratiquent l'extraction d'hydrocarbures – conventionnels ou non – à Madagascar, au Congo, au Guatemala, en Équateur, entre autres.

Or la législation environnementale de ces pays n'est pas nécessairement identique à la nôtre. Ainsi, Total est titulaire de permis d'extraction de gaz et d'huile de schiste au Danemark, en Chine et en Argentine. La législation n'y est pas la même qu'en France, où nous sommes en train de légiférer sur ce point. De même, les sables bitumineux de l'Athabasca, au Canada, sont exploités dans des conditions effroyables pour l'environnement, pour la population et pour la santé.

La filialisation ou l'existence de sociétés mères permet ainsi d'extraire des hydrocarbures hors du territoire national. Or il nous semble que ces activités internationales des entreprises françaises doivent être suspendues dans les conditions que nous sommes en train de fixer pour ce qui concerne notre territoire. Sans quoi nous nous efforcerions de « faire propre » sur le territoire national, ce qui n'est même pas certain, alors que les mêmes entreprises – Total a demandé des permis dans le Sud-Est –pourraient faire très sale à l'extérieur. Ce ne serait pas cohérent.

Tel est le sens de notre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Défavorable. Il ne vous a pas échappé, monsieur Cochet, que nous légiférons pour le territoire national et non pour les autres pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

La législation des autres pays, si elle peut nous intéresser, ne nous regarde pas. Et nous n'allons pas demander à nos entreprises de ne pas appliquer la législation en vigueur dans les pays où elles sont installées.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Même avis.

Permettez-moi d'ajouter un argument à celui du rapporteur. Le Grenelle de l'environnement oblige les entreprises à travailler sur leur responsabilité sociale et environnementale afin de développer l'investissement socialement responsable. Il me semble que c'est le meilleur moyen d'orienter les capitaux, l'épargne, les investissements de nos concitoyens vers des entreprises respectueuses de l'éthique qu'ils appellent de leurs voeux.

Cette mesure s'applique à toutes les entreprises, que leur siège social soit en France ou à l'étranger : l'investissement socialement responsable est drainé par toutes. Elle concourt, monsieur Cochet, à votre objectif, puisqu'elle incite à investir en fonction de l'éthique, sans présenter le risque de discrimination que comporte votre amendement. En revanche, si celui-ci est voté, les entreprises déplaceront leur siège social hors de France. Nous y perdrons des recettes pour l'État, qui sont fort utiles, comme vous le savez.

(L'amendement n° 24 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n°18 .

La parole est à M. Claude Gatignol.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

…à mon intervention dans la discussion générale au sujet de la mesure visée dans cet amendement. Je le répète donc, je propose de créer un haut comité des ressources minières chargé de l'évaluation, de la validation et du suivi des techniques. Sa composition et son fonctionnement seraient fixés par le Conseil d'État et publiés sur proposition du Gouvernement et après avis du Parlement.

Le principe n'est pas nouveau. Nous l'avons appliqué dans deux domaines : les biotechnologies, d'une part ; la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire, de l'autre. Ces deux hauts comités fonctionnent de manière satisfaisante, me semble-t-il, et assurent la transparence de l'information publique.

Le haut comité des ressources minières servirait de relais national aux commissions locales d'information que j'ai par ailleurs proposé de créer afin de diffuser l'information le plus largement possible.

Ses coûts de fonctionnement ne posent aucun problème : un prélèvement minime sur la redevance progressive minière, visée à l'article 31 du code minier, évitera d'inscrire de nouveaux crédits.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Il s'agit sans doute d'une bonne idée, cher Claude Gatignol. Mais avant de créer un comité dont on ne sait pas exactement ce qu'il fera et comment, laissons la procédure suivre son cours.

Au titre de l'article 4, plusieurs propositions – je songe notamment à celles que pourront formuler nos collègues François-Michel Gonnot et Philippe Martin – doivent permettre de créer des outils de contrôle dans divers domaines.

Je vous saurais donc gré de bien vouloir retirer votre amendement. Nous pourrons renvoyer aux différents travaux à venir, dont le rapport d'information de nos collègues, la question de la création de ce haut comité. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Permettez-moi auparavant de dire que je ne partage pas du tout l'analyse du rapporteur.

Sur cette importante question, c'est l'information qui pose problème. Tous les collègues qui sont intervenus ont dit avoir appris par hasard l'existence des projets. C'est inacceptable !

L'information doit faire son chemin et ce cheminement ne saurait être uniquement administratif.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Il suffit de regarder sur le site internet du ministère…

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Il faut que l'information soit diffusée le plus largement possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Merci, monsieur Gatignol.

Avec toute l'amitié que je vous porte, je dois vous dire que je ne vous avais pas donné la parole : vous l'avez prise ! (Rires.)

(L'amendement n° 18 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Yves Cochet, inscrit sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Il s'agit de l'article le plus important, car c'est celui qui a subi le plus de modifications par rapport à la version initiale. Par mes amendements, je propose de revenir à cette première version.

La méthode que vous avez adoptée, messieurs les rapporteurs, et que la ministre semble approuver, consiste à rendre la première version moins fragile du point de vue juridique.

Mais, je l'ai dit, un arrêté du 28 juillet 1995 définit déjà les conditions d'obtention d'un permis de recherches – certes moins strictes que celles qui s'appliquent à un permis d'exploitation.

Un mémoire doit être déposé par les sociétés candidates à la recherche d'hydrocarbures – que ceux-ci soient liquides ou gazeux, conventionnels ou non. Dans ce mémoire, la société en question précise qu'elle ne veut pas seulement creuser un trou, mais bien chercher des hydrocarbures, et expose les méthodes qu'elle compte adopter. Le guide proposé par le ministère indique même, à la page 6, les méthodes à y faire figurer.

Nous connaissons donc déjà les méthodes employées : toutes reposent sur la fracturation hydraulique, puisqu'il n'existe aucun autre moyen d'extraire des gaz et huiles de schiste.

Voilà pourquoi je souhaite que nous revenions à l'article 2 dans sa pureté initiale. Du point de vue tant pédagogique que littéraire et politique, il était extrêmement clair : « Les permis […] sont abrogés. »

Le délai de deux mois que vous y avez introduit est tout à fait inutile : ce n'est évidemment pas en deux mois que les industriels vont inventer une autre méthode, puisqu'il n'en existe pas d'autre. La nouvelle rédaction de l'article n'apporte rien ; bien au contraire, elle est source de complexité et d'obscurité juridiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Peut-on considérer que vous avez également défendu vos amendements à l'article ? (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

J'ajoute que, selon la nouvelle rédaction de l'article 2, un rapport doit être remis qui précise les techniques employées dans le cadre des activités de recherche.

Or un décret en Conseil d'État précise déjà les conditions d'attribution du permis. On nous dit que ces conditions n'apparaissent pas dans le dossier technique. Je demande donc au rapporteur ou à Mme la ministre de faire distribuer en séance ce fameux décret, pour que l'on sache si, oui ou non, il requiert la mention précise des conditions techniques d'exploitation. Puisque vous avez refusé de renvoyer le texte en commission, nous sommes en droit d'obtenir ici et maintenant des renseignements supplémentaires.

Deuxièmement, le rapport rédigé par nos deux rapporteurs précise bien que l'attribution du permis dépend d'un dossier de demande étudié à trois niveaux : par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement, d'abord ; par le bureau exploration-production des hydrocarbures, ensuite, qui examine le dossier au niveau ministériel du point de vue technique – j'y insiste –, économique et financier ; enfin, par le conseil général de l'industrie, de l'énergie et des technologies.

Nous avons donc un décret en Conseil d'État qui précise la procédure et trois rapports sur le même dossier. Démontrez-nous, madame la ministre, qu'il n'y a pas d'études techniques dans ces rapports ! Les études techniques doivent apparaître : si elles n'y sont pas, alors la loi n'est pas appliquée. Il faudrait donc qu'une mission d'information vérifie que la loi est bien appliquée. Pourquoi les services de l'État n'exigent-ils pas le dossier technique prévu par la réglementation ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yanick Paternotte

Beaucoup de choses ont été dites sur cette proposition de loi, dont l'objet fait consensus. Nous venons d'adopter l'article 1er, qui a clairement fixé son objectif politique : interdire sur le territoire national l'exploration et l'exploitation d'hydrocarbures par fracturation hydraulique de la roche.

Il reste à traiter le sort des permis déjà accordés. C'est l'objet de l'article 2. Sa rédaction initiale abrogeait les permis exclusifs de recherches de manière radicale – je le dis pour Jean-Louis Borloo (Sourires) – mais délicate du point de vue du droit. La nouvelle rédaction adoptée par la commission du développement durable propose une méthode consistant à abroger les permis dont les titulaires utilisent la technique de fracturation hydraulique, et eux seuls. Notre collègue Yves Cochet y trouve un prétexte pour refuser l'ensemble du texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Yanick Paternotte

Je dis bien un prétexte. Il vient d'ailleurs de nous le confirmer.

Il me semble au contraire – et je ne suis pas le seul à le penser – que la nouvelle rédaction sécurise bien mieux le dispositif instauré pour les permis d'ores et déjà délivrés.

Debut de section - PermalienPhoto de Yanick Paternotte

En effet, l'objet de l'article 2 est de donner à la loi une portée rétroactive, ce qui n'est pas usuel.

Du reste, le deuxième paragraphe de ce nouvel article se conclut par la même phrase que la rédaction initiale : « les permis exclusifs de recherches concernés sont abrogés. »

Le mot « interdire » figure donc à l'article 1er et au deuxième paragraphe de l'article 2, qui reprend la même rédaction que la version initiale.

Debut de section - PermalienPhoto de Yanick Paternotte

En vérité, la proposition de loi de Christian Jacob, revisitée par nos deux rapporteurs, arrive au moment opportun. Car, après le temps du déficit d'information, nous risquions une campagne de désinformation. Après le temps de l'émotion doit venir le temps de la raison et de l'équilibre. Après le temps de la mobilisation citoyenne, le législateur doit réguler l'initiative privée et contrôler l'action publique. Mes chers collègues, face aux marchands de peur professionnels, faisons ensemble le pari de l'intelligence en adoptant cet article. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Philippe Maurer

Si l'article 1er pose le principe d'une interdiction générale de l'exploration et de l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par des forages suivis de fracturation hydraulique de la roche, il ne concerne pas les permis déjà accordés. En effet, les dispositions du code minier ont amené les uns à déposer des permis de recherche, et les autres à les accorder, dès lors qu'ils étaient conformes aux prescriptions applicables. De ce fait, il faut maintenant donner toute sa portée à l'article 1er en l'étendant aux permis déjà accordés ; il faut donc mettre leurs titulaires en demeure de préciser les techniques employées dans le cadre de leurs activités d'exploration.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Philippe Maurer

Ils seront ainsi placés devant leurs responsabilités et devront préciser s'il y a, ou non, fracturation hydraulique de la roche. Cette disposition permettra, de surcroît, de réaliser l'inventaire des forages destinés à être suivis de fracturation hydraulique de la roche et de les interdire.

Notre volonté est sans ambiguïté, et cet article le démontre, car les titulaires de permis n'échapperont pas à l'interdiction générale prévue à l'article 1er. Notre volonté d'agir nous conduit à l'essentiel, c'est-à-dire à stopper le plus rapidement possible les travaux engagés : nul besoin pour appliquer cette loi de dispositions réglementaires !

Dans les deux mois qui suivront la promulgation de la loi, des rapports devront être remis ; en l'absence de rapports, ou si ceux-ci montrent un recours à des forages suivis de fracturation hydraulique des roches, les permis exclusifs de recherches seront abrogés.

Ainsi ne subsisteront que les permis exclusifs de recherches qui écartent explicitement le recours à la fracturation hydraulique, dont nous ne voulons pas. Notre territoire sera ainsi à l'abri de cette technique qui ne présente aucune garantie de nature à nous rassurer.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 46 , 25 , 27 , 30 et 26 , pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 25 , 27 et 30 sont identiques.

L'amendement n° 25 fait l'objet d'un sous-amendement n° 44 .

La parole est à M. Pascal Terrasse, pour défendre l'amendement n° 46 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Avec votre permission, monsieur le président, je présenterai également le sous-amendement n° 44 .

Le premier amendement que le groupe socialiste a présenté à l'article 1er a été adopté, et j'en suis ravi. Je l'ai dit : quelques-uns de nos amendements sont essentiels ; l'amendement n° 46 , que je présente maintenant, en fait partie. C'est même peut-être le plus important. S'il venait à être voté, alors demain, nous serions à vos côtés ; nous serions au rendez-vous à seize heures trente pour approuver cette proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Nous voulons simplement revenir au texte initial, présenté d'abord par le groupe SRC puis par Christian Jacob et Pierre Morel-A-L'Huissier – qui, disons-le, ont travaillé sérieusement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

La question de la sécurité juridique a été évoquée, notamment par Yves Cochet. L'exposé des motifs de cet amendement reprend six points de droit, qui prouvent que l'on sait précisément ce que veut dire « fracturation hydraulique ».

Pour donner du sens à cette loi, il faut prendre les décisions qui s'imposent et faire en sorte que tous les permis accordés soient abrogés, avec effet rétroactif. C'est là, au fond, un dispositif très anglo-saxon : nous devons aider nos compatriotes, qui comprennent de plus en plus mal la loi, à la comprendre mieux.

Mais peut-être Mme la ministre nous répondra-t-elle, comme elle le fait depuis le début de ce débat, que notre proposition n'est pas sécurisée juridiquement ; peut-être les rapporteurs nous diront-ils la même chose. Nous présentons donc un sous-amendement n° 44 ainsi rédigé : « Dans un délai d'un mois à compter de la promulgation de la présente loi, le ministre chargé des mines arrête la liste des permis exclusifs de recherche à abroger en application de l'article 1er qui interdit sur le territoire national l'exploration des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par des forages suivis de fracturation hydraulique de la roche. »

Bref, nous proposons de revenir au texte initial en le précisant. Dès lors, si, comme vous l'avez fait à l'article 1er, l'amendement n° 46 et le sous-amendement n° 44 sont acceptés, nous considérerons que nous avons, ensemble, avancé sur ce texte de loi, et nous pourrons le voter ensemble. Dans le cas contraire, madame la ministre, si vous en veniez à demander que cet amendement soit repoussé, notre travail en commun serait terminé. La loi, pour nous, ne tiendrait plus ; les engagements pris par les uns et les autres seraient reniés, ce qui serait lourd de conséquences.

Devant les électeurs, chacun devra pouvoir dire quel a été son vote : c'est la raison pour laquelle, monsieur le président, j'ai demandé sur cet amendement un scrutin public.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Sur le vote de l'amendement n° 46 , je suis donc saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Nous en venons à une série d'amendements identiques.

La parole est à Mme Dominique Orliac, pour défendre l'amendement n° 25 .

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Orliac

Il s'agit de revenir au texte initial de la proposition de loi, qui prévoyait l'abrogation des permis déjà accordés. Si cet amendement était adopté, cela permettrait aux radicaux de gauche de voter, demain, cette proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Yves Cochet, pour défendre l'amendement n° 27 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Je l'ai déjà expliqué, cet amendement propose un retour à la rédaction initiale, ou presque : en effet, si vous le souhaitez, et pour sécuriser juridiquement la chose, plutôt que d'écrire « non conventionnels », on peut écrire « de roche-mère », qui est le terme employé par les ingénieurs des inspections générales.

Je propose donc une rectification de l'amendement n° 27 , qui devient alors tout à fait clair : il désigne exactement les permis accordés aujourd'hui.

Nous sommes en revanche inquiets de l'amendement adopté en commission : censé être plus précis, il est en réalité plus confus. La reformulation de l'article 2 est assez opaque, en comparaison de la limpidité initiale. Des citoyens, des militants, des élus, ne manqueront donc pas de se demander ce qui se cache derrière tout cela : on l'a vu ces jours derniers.

Alors que la proposition de loi initiale demandait l'interdiction de l'exploration et de l'exploitation des hydrocarbures de schiste – de roche-mère, si vous voulez – cette version modifiée adoptée en commission ne vise plus que la technique de fracturation hydraulique, quels que soient les hydrocarbures recherchés. Nous disons, nous, qu'il faut refuser tout à fait le gaz et le pétrole de schiste !

L'adoption de la version du texte issue de la commission permettrait au contraire d'utiliser une technique qui apparaîtrait différente : les industriels pourraient alors forer sans être inquiétés.

Il n'est pas trop tard, je crois, pour ramener le texte à sa version initiale, qui pourrait évidemment être complétée par des décrets.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. André Chassaigne, pour défendre l'amendement n° 30 .

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

J'ai interrogé tout à l'heure Mme la ministre et M. le rapporteur sur la nature du décret en Conseil d'État qui précise comment se fait l'attribution des permis. J'aurais souhaité, et je réitère ma demande, que ce décret nous soit distribué, afin que nous sachions à quoi nous en tenir.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

D'autre part, trois rapports sont remis avant que ne soient accordés les permis, notamment celui du bureau exploration-production des hydrocarbures, qui est à la fois économique, financier et technique. Je souhaite obtenir des précisions sur la nature de ce rapport : je suis en effet persuadé – cela apparaît d'ailleurs dans le texte de nos deux rapporteurs – que nous disposons déjà de toutes les précisions techniques nécessaires.

Autrement dit, la nouvelle rédaction de l'article 2 ne se justifie pas : il ne s'agit que d'une argutie destinée à retarder l'abrogation des permis.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Sur le vote des amendements nos 46 , 25 , 27 et 30 , je suis également saisi d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Yves Cochet, pour défendre l'amendement n° 26 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Cet amendement précise considérablement ce que nous demandons : il dresse en effet la liste précise des permis exclusifs de recherches de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux que nous souhaitons abroger. Elle commence, bien sûr, par le permis de Nant dont nous avons parlé, mais il y en a beaucoup d'autres : Villeneuve-de-Berg, Montélimar, etc.

Nous nous rapprochons ainsi de la rédaction initiale, mais en y insérant de surcroît une liste des permis accordés. Ainsi, on sait exactement où on va !

D'ailleurs, en regardant l'annexe 3 du rapport intermédiaire, à mi-parcours disons, des inspecteurs des conseils généraux, on s'aperçoit qu'elle dressait une liste « des permis accordés » la semaine dernière et qu'elle dresse une liste « des demandes de permis en cours d'instruction » cette semaine – c'est une petite anecdote. Ces deux listes sont identiques, et on constate qu'elles sont très longues ; au moins trente-cinq permis sont concernés !

Nous pensons donc qu'une liste exhaustive doit être dressée, afin de savoir exactement quels permis doivent être abrogés.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Nous avons longuement évoqué la question de la sécurité juridique du texte, et je voudrais dire à nos collègues que si, avec Jean-Paul Chanteguet, nous avons opté pour une modification de l'écriture de cet article 2, ce n'est pas pour répondre à quelque demande que ce soit, mais pour rester fidèles à notre objectif : stopper le processus engagé.

Pourquoi la rédaction initiale nous est-elle apparue comme peu sûre du point de vue juridique ? Très honnêtement, nous avons nous aussi, au départ, avec Christian Jacob et l'ensemble des collègues qui ont cosigné cette proposition de loi, fait une erreur.

Nous sommes dans un État de droit, et dans un État de droit, l'arbitraire, cela n'existe pas. Il y a des textes ; il y a la Constitution et les grands principes du droit, qui protègent les citoyens comme les entreprises : quand un titre est accordé et que des droits sont attachés à ce titre, on ne peut pas faire n'importe quoi. C'est pour cette première raison que nous avons réfléchi à une autre rédaction.

Deuxième raison : les permis ne sont pas suffisamment précis pour pouvoir être clairement visés. À coup sûr entreraient dans le champ d'application de la loi des permis qui ne sont pas de ceux que l'on vise, tandis que d'autres, qui sont précisément ceux qui nous préoccupent, en seraient exclus.

Dès lors, avec Jean-Paul Chanteguet, nous nous sommes dit que, s'il ressort de l'article 5 de la Charte de l'environnement que le rôle de l'autorité publique est de chercher à éviter ce qui porte atteinte à l'environnement, un titre, qui n'est qu'un morceau de papier, ne porte pas atteinte à l'environnement. C'est la technique utilisée qui porte atteinte à l'environnement, et pas autre chose.

Si l'objectif était donc de mettre un terme à l'exploitation des gaz et des huiles de schiste, la rédaction initiale, envisagée du point de vue de sa constitutionnalité ou au regard de tous les grands principes du droit, relevait de l'arbitraire, et j'ose à peine citer les pays du monde qui ont agi de la sorte.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Ce sont effectivement tout sauf des exemples de démocratie. Or nous sommes dans un État de droit et une démocratie. Les titulaires d'un droit peuvent donc se défendre devant les tribunaux, et le texte serait très vraisemblablement frappé d'inconstitutionnalité ou retoqué, ce qui serait le pire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

C'est cela qui nous a conduits à cette nouvelle rédaction, même si vous pouvez nous intenter des procès d'intention, prétendre que nous n'aurions pas résisté à tel lobby, etc.

Les permis ne nous donnent pas les précisions nécessaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Vous, vous les avez peut-être, mais pas nous. C'est formidable, vous avez mieux travaillé que nous, alors communiquez-nous ces éléments !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Nous avons donc acté cette procédure qui se trouve, en outre, respecter le principe du contradictoire, un des grands principes du droit. Elle consiste à poser aux titulaires du permis la question de la technique d'exploration ou d'exploitation des gaz et des huiles de schiste – il en est une seule pour l'instant – et ceux-ci nous diront s'ils ont l'intention d'utiliser la fracturation hydraulique.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

S'ils nous répondent par l'affirmative, le permis sera abrogé, puisqu'une interdiction légale aura, je l'espère, été votée. S'ils nous répondent par la négative,…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

…ils resteront titulaires d'un permis de recherches, sans aucune possibilité d'exploiter les gaz et les huiles de schiste. Notre objectif de sécuriser le système, de respecter les grands principes du droit et de mettre un terme à un processus mal engagé sera respecté. Je crois que ce n'est là que sagesse.

Revenir à la rédaction initiale, ce serait au contraire courir un risque très élevé – je vous l'assure – de rater totalement l'objectif que nous nous sommes fixé.

Par conséquent, si vous partagez cet objectif, je vous demanderai de retirer vos amendements. À défaut, la commission émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Quand on prend les amendements un à un, on s'aperçoit que chacun pose des problèmes différents et qu'aucun n'atteint l'objectif que nous visons tous, sur l'ensemble des bancs de cette assemblée.

Je ne prendrai que quelques exemples.

L'amendement n° 46 interdit toute recherche sur les hydrocarbures liquides ou gazeux, sans même préciser si l'on vise les hydrocarbures conventionnels ou les hydrocarbures non conventionnels, étant entendu, par ailleurs, que l'on ne sait pas ce que c'est qu'un hydrocarbure non conventionnel. On sait qu'il y a des méthodes conventionnelles et non conventionnelles, mais le produit lui-même n'est pas particulièrement conventionnel ou non conventionnel. Quant à l'idée d'un rejet avec effet rétroactif, de quoi s'agit-il ? Le permis est abrogé, ou bien il ne l'est pas. Quel est le sens du mot « rétroactif » ? Si des recherches ont été commencées, eh bien elles ont été commencées. Dès lors, qu'est-ce que cela signifie, abroger avec effet rétroactif ?

Pardonnez-moi, mais nombre de ces amendements sont de la même facture. Ils ne sont pas solides techniquement et juridiquement. Certains d'entre eux aboutiraient même, sans le moindre doute, à faire la fortune des avocats, parce qu'ils sont mal rédigés, et peut-être des titulaires de permis qui voudraient tirer parti de cette mauvaise rédaction.

Vraiment, je crois que nous partageons tous le même objectif, qui est clairement exprimé. Nous avons regardé les choses de très près et la rédaction de la commission est vraiment celle qui nous permet le plus sûrement de l'atteindre tout en réduisant au minimum le risque de contentieux.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Je rappelle tout d'abord à notre rapporteur, qui a fait un très bon travail, qu'il ne s'agit pas, pour le groupe socialiste, de revenir sur les grands principes du droit. Nous nous inscrivons très clairement dans la même démarche.

Au fond, madame la ministre, vous essayez de nous amener à l'idée que l'ensemble des amendements présentés les uns après les autres viseraient à la confusion. Il ne s'agit cependant pas de cela, bien au contraire, puisque nous avons en fait défendu un seul et même amendement, qui est très clair et tient en deux lignes : nous voulons interdire les recherches d'hydrocarbures liquides ou gazeux.

Par ailleurs, je suis effectivement très surpris que le rapporteur nous dise que nous ne connaissons pas aujourd'hui la liste des permis de recherche délivrés par le Gouvernement. Tout le monde les connaît, mais il semblerait que M. Havard – il nous l'a précisé tout à l'heure – n'en avait pas connaissance. C'est donc là que nous sommes dans la confusion.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Yves Cochet souhaiterait que la liste complète…

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

…fût intégrée dans le texte de la loi. Pour ma part, je pense que cela ressortit au domaine réglementaire mais nous pouvons en débattre, car d'autres permis ne figurent pas sur la liste en question.

Il nous apparaît donc nécessaire de conforter et de préciser tout cela sur le plan juridique. C'est l'objet de notre amendement n° 46 et de notre sous-amendement n° 44 . Les choses ne peuvent pas être plus claires : les permis seraient définitivement abrogés.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

On sait aujourd'hui qu'une seule technique est aujourd'hui connue ; Mme la ministre vient de le rappeler. N'introduisons donc pas de la confusion, comme le fait le I de l'article dans sa nouvelle rédaction, là où il faut au contraire de l'ordre.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Je réponds à la fois à M. le rapporteure et à Mme la ministre.

Il y a bien un arrêté du 28 juillet 1995. Je n'ai cité jusqu'à présent que le guide que vous propagez vous-même grâce à votre site internet, qui indique aux industriels comment faire pour demander une autorisation de recherche. Puisqu'il semble que l'on ne comprend pas le guide, je vais maintenant lire l'arrêté lui-même. L'article 2 dispose que la demande de permis de recherches doit indiquer « les nom et domicile du ou des demandeurs », « la nature du titre demandé » et « la nature des substances sur lesquelles porte le titre ». Ce sont évidemment, en l'occurrence, des gaz et huiles de roche-mère. J'en veux pour preuve l'annexe 3, recensant les permis accordés, du rapport intermédiaire des inspecteurs généraux. Si la liste de mon amendement n° 26 n'est pas complète, on peut corriger ce dernier en retenant la formule « tous les permis figurant à l'annexe 3 du rapport intermédiaire ». Ou bien on peut tous les citer, il y en a à peu près trente-cinq et, vous avez raison, ma liste était quelque peu restreinte.

J'en reviens à l'arrêté du 28 juillet 1995, dont a parlé notre collègue le ministre Jean-Louis Borloo. L'article 5 dispose : « Si le titre sollicité est un permis exclusif de recherches, le programme des travaux envisagé […] indique :

« a) Le descriptif technique des travaux que le demandeur projette d'exécuter pendant la première période de validité du permis pour la reconnaissance et l'exploration de la superficie demandée […] ;

« e) L'engagement du demandeur à présenter au directeur régional de l'industrie, de la recherche et de l'environnement […] le programme de travaux […] de l'année en cours ;

« f) Si le permis porte sur les hydrocarbures, l'engagement du demandeur à n'extraire du sol ou du sous-sol que les liquides et gaz nécessaires à l'étude du gisement ».

C'est exactement le sujet ! Ou bien l'État n'a pas connaissance des travaux, auquel cas les demandeurs sont dans l'illégalité et il faut tout de suite abroger les permis, ou bien l'État a connaissance de tous ces travaux, auquel cas il peut tout de suite abroger les permis, puisqu'il connaît la nature des méthodes qui vont être employées. Pourquoi donc introduire les conditions et délais inutiles prévus au I de l'article 2 du texte de la commission ? Cela ne sert à rien !

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

…et vous nous accusez d'avoir modifié ce texte pour des raisons cachées. Mais prenons, par exemple, votre amendement n° 27  : « Les permis exclusifs de recherches de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux non conventionnels sont abrogés. » Vous êtes bien d'accord pour dire que le gaz de mine…

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Ce n'est pas le texte de votre amendement ! Vous commencez à être embarrassé parce que vous savez que j'ai raison. Vous proposez un texte qui, concrètement, abrogera un certain nombre de permis de recherches de gaz de mine, ce qu'on appelle le grisou. Vous allez abroger la possibilité de pomper, pour des raisons de sécurité, du grisou dans des mines qui ne sont plus exploitées ! Eh bien, répondez donc à cette objection.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Nous savons que ce sont les gaz et huiles de roche-mère qui sont visés !

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Les interventions de M. Cochet et de certains de ses collègues ne sont pas cohérentes. On ne peut pas dire tout et son contraire. Il n'y a aujourd'hui qu'une seule technologie pour exploiter le gaz ou l'huile de roche-mère. Si cette technologie est interdite, on ne peut plus pratiquer l'exploration ni l'exploitation. Les choses sont donc très claires.

Les permis sont, pour leur part, libellés d'une manière qui ne précise pas la technologie utilisée. Il est vrai que c'est parfois précisé dans le dossier, mais on ne peut utiliser le dossier comme argument pour une proposition de loi ; ce serait emprunter une voie qui nous exposerait au risque de contentieux. En effet, lorsque les industriels ont rempli leurs dossiers, on ne leur a pas indiqué quel était le degré de précision requis. Ils pourraient donc très bien saisir les tribunaux et s'opposer à une disposition de la loi aux termes de laquelle la présence de tel ou tel mot dans le dossier le rendrait a posteriori irrecevable ou entraînerait une annulation. On peut formuler de telles exigences à propos de nouveaux permis, de nouveaux dossiers demandés, de nouveaux rapports à remettre, mais on ne peut pas le faire pour des dossiers antérieurs à la loi.

Cela étant, il y a un problème de fond qui, à mon avis, doit faire l'objet d'une réforme dans le code minier. Ce point est déjà précisé dans le décret, mais plus que la lettre, c'est l'esprit qui compte : je veux parler du décret 2006-648 – que je tiens ici à la disposition d'André Chassaigne – ou de l'arrêté que nous avons évoqué tout à l'heure. Il est vrai qu'on demande aux industriels leurs capacités techniques et financières, ainsi que le descriptif des moyens humains et techniques envisagés pour l'exécution des travaux. Mais en réalité, dans l'esprit de ces textes, il s'agit seulement de vérifier que les industriels vont réellement investir et ne sont pas en train de réserver un droit pour bloquer leurs concurrents. C'est ce que prévoit aujourd'hui le code minier à travers ces différents documents. On vérifie que les industriels sont vraiment motivés et vont réellement se lancer dans l'exploration, qu'ils ne sont pas seulement en train de sécuriser un espace pour préparer l'avenir ou éventuellement gêner leurs concurrents. Ces dossiers sont donc, pour certains, très légers.

Je ne trouve pas ces conditions d'instruction satisfaisantes, mais ce sont aujourd'hui celles du code minier et, pour l'objet qui nous occupe, c'est avec ces conditions que nous travaillons. Cela étant, je le répète, j'appelle de mes voeux un changement en la matière.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 46 .

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 63

Nombre de suffrages exprimés 58

Majorité absolue 30

Pour l'adoption 9

Contre 49

(L'amendement n° 46 n'est pas adopté.)

(Le sous-amendement n° 44 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Nous en venons au scrutin public sur les amendements identiques nos 25 , 27 et 30 .

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 65

Nombre de suffrages exprimés 60

Majorité absolue 31

Pour l'adoption 13

Contre 47

(Les amendements n° 25 , 27 et 30 ne sont pas adoptés.)

(L'amendement n° 26 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'amendement n° 7 , de MM. Havard et Chanteguet, est rédactionnel.

(L'amendement n° 7 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 37 .

La parole est à M. Yves Cochet.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Nous proposons, à l'article 2, d'élargir le champ des techniques considérées.

Nous l'avons vu à l'article 1er, la fracturation hydraulique est désormais interdite. Cependant, d'autres méthodes voisines et à peu près aussi toxiques, pourraient être inventées, bricolées ou détournées, voire simplement reformulées – je pense à des détours rhétoriques. Bien entendu, tout ceci, de la part des industriels, peut sembler fragile, mais enfin on connaît leur imagination, tant sur le plan juridique que technique !

Par conséquent, ne pas préciser que toutes les méthodes actuelles ou potentielles sont proscrites serait un tour de passe-passe pour gagner du temps. Il suffirait que les industriels emploient d'autres termes.

S'agissant des sociétés détentrices de permis qui n'ont pas, comme vient de le dire Mme la ministre, donné toutes les indications techniques et environnementales permettant d'éclairer de façon fiable et honnête le ministère ayant délivré ces permis, nous proposons, pour garantir une sécurité sanitaire et environnementale totale, une plus grande cohérence entre les alinéas 1 et 2.

Les termes employés à l'alinéa 2 sont précis puisqu'ils visent le recours «, effectif ou éventuel, » à des forages suivis de fracturation hydraulique. Notre amendement tend à ce que le champ des techniques visées à l'alinéa 1 soit caractérisé par cette même potentialité. C'est pourquoi nous proposons, après le mot « employées », d'insérer les mots « ou susceptibles d'êtres employées ».

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Je vous propose un sous-amendement qui, selon moi, peut mettre tout le monde d'accord. Il s'agit de remplacer « les techniques employées », par « les techniques qu'ils prévoient d'employer ».

En effet, la question n'est pas de savoir s'ils sont susceptibles d'employer ces techniques, mais de connaître leur intention.

Sous réserve de l'adoption de ce sous-amendement, le Gouvernement émet un avis favorable à l'amendement n° 37 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Je suis favorable à la proposition de Mme la ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Si Mme la ministre me le permet, les termes « employées ou envisagées » me permettraient plus sûrs, car si l'on ne fait référence qu'aux techniques éventuellement employées, on ne fait référence qu'à celles qui seront prévues pour le futur, sans évoquer celles qui peuvent être d'actualité. Il faut que le présent soit « prévu », comme le futur.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Mes chers collègues, nous ne pouvons pas travailler de cette façon. Vous devez me faire parvenir un amendement écrit pour pouvoir ensuite en débattre. Vous ne pouvez pas changer de rédaction trois fois de suite en quelques minutes ! Laquelle choisissez-vous ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Les termes « employées ou envisagées » me paraissent couvrir l'ensemble du champ.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je vous propose une suspension de séance afin que vous puissiez me faire parvenir un amendement écrit.

La parole est à M. le président de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Monsieur le président, je m'apprêtais à vous demander une suspension de séance très courte, d'une ou deux minutes, juste pour rédiger cet amendement.

Article 2

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à trois heures vingt, est reprise à trois heures vingt-cinq.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est reprise.

Nous allons passer au vote sur l'amendement n° 37 .

(L'amendement n° 37 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement des rapporteurs, MM. Havard et Chanteguet, auquel est attribué le n° 48.

Je vous en donne lecture :

« À l'alinéa 1 de l'article 2, après le mot : “employées” , insérer les mots : “ou envisagées”. »

Debut de section - PermalienPhoto de Germinal Peiro

« Envisagées » est inutile !

(L'amendement n° 48 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 29 .

La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Morel-A-L'Huissier

Cet amendement, que j'ai rédigé avec Pascal Terrasse, vise à garantir une meilleure effectivité de l'article 2 en obligeant l'autorité administrative qui recevra le rapport des entreprises titulaires des permis exclusifs à rendre ce rapport public.

Depuis le vote par la commission du développement durable de cette proposition de loi dans sa nouvelle mouture, des voix se sont fait entendre pour dénoncer le fait que l'article 2 nouvellement rédigé allait permettre aux entreprises pétrolières de pratiquer l'hydrofracturation sans en dire le nom.

Ce risque peut exister et c'est pour y répondre que nous vous proposons cet amendement. En effet, en contraignant l'autorité administrative à rendre public le rapport sur l'utilisation des techniques, le législateur permet d'associer pleinement les citoyens, les associations et les élus locaux à la concertation. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

Avis favorable. Nous avons effectivement beaucoup parlé d'opacité à l'occasion de l'attribution des permis exclusifs de recherche. Cette proposition va dans le sens d'une plus grande transparence.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Favorable.

(L'amendement n° 29 est adopté.)

(Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 19 .

La parole est à M. Claude Gatignol.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Cet amendement est simple : il tend à supprimer l'alinéa 2. L'article 2 est excellent, nous avons pu en juger.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Toutefois, les cosignataires de cet amendement sont en faveur de l'information, de la transparence et de la simplification. La consultation des documents d'autorisation est riche d'enseignements. Je conseille à tout le monde de lire ces centaines de pages qui apportent des éléments surprenants s'agissant des nombreuses questions et de la variété des réponses apportées.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Avis défavorable. En effet, cet amendement, qui vise à la suppression du second alinéa de l'article 2, cantonnerait le dispositif élaboré en commission à la simple remise d'un rapport sans qu'aucune conséquence ne puisse en être tirée.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Défavorable.

(L'amendement n° 19 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement rédactionnel, n° 6, de MM. Havard et Chanteguet.

(L'amendement n° 6 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 10 .

La parole est à M. Pascal Terrasse.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Nous souhaitons aller au-delà de la seule mention de la fracturation hydraulique. Il ne s'agit pas, en effet, d'un terme juridique, mais d'un terme technique, lequel, contrairement à un terme juridique, peut évoluer à tout moment. Des techniques différentes de la fracturation hydraulique peuvent être utilisées. Cet amendement tend donc à proscrire les injections dans la roche-mère d'adjuvants chimiques ou d'une importante quantité d'eau. Si, demain, le nom de la technique utilisée change, il sera à tout moment possible de revenir sur les dispositions qui auront été prises. Il convient, afin de préciser la nature même de la fracturation hydraulique de la roche, d'en mentionner les composantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Avis défavorable. En effet, élargir la référence à la technique employée avec des termes peu précis – à savoir une importante quantité d'eau et une liste, qui n'existe pas, des adjuvants chimiques – ne peut qu'apporter de la confusion. Nous avons une obligation de précision.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Quand nous interdisons la fracturation hydraulique, ce n'est pas le mot mais l'opération elle-même, et nous saurions la reconnaître si elle était habillée différemment. Donc, avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Terrasse

Madame la ministre, la fracturation hydraulique n'est pas un terme juridique, mais technique. Il suffit à tout moment de changer son nom et de l'appeler, par exemple, « karchérisation » hydraulique, et il sera possible de recourir à des adjuvants chimiques ou à une importante quantité d'eau.

J'ajoute, monsieur le rapporteur, que nous ne voulons pas préciser la liste des adjuvants chimiques ; nous visons toutes les sortes d'adjuvants chimiques ou une importante quantité d'eau, alors que dans certaines régions, la plupart de nos collègues l'ont reconnu, l'eau manque. Nous ne dressons aucune nomenclature des produits chimiques utilisés. Si, demain, le nom change, la technique peut demeurer la même. Il ne faudrait pas non plus que, dans quelques mois, des sociétés trouvent d'autres méthodes causant les mêmes dégâts, ce qui nous amènerait à vous le reprocher.

(L'amendement n° 10 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 12 , 23 rectifié et 38 .

La parole est à M. Pascal Terrasse, pour présenter l'amendement n° 12 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Dominique Orliac, pour soutenir l'amendement n° 23 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Orliac

Cet amendement vise à mettre en évidence l'effet rétroactif de l'abrogation.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l'amendement n° 38 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Défendu !

(Les amendements identiques nos 12 , 23 rectifié et 38 , repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 3 .

La parole est à M. Gérard Gaudron.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Gaudron

Défendu !

(L'amendement n° 3 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de deux amendements, nos 45 et 32 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Paul Chanteguet, rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 45 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

Nous reprenons la proposition d'Yves Cochet. Nous avons simplement substitué « promulgation » à « publication ». Cet amendement tend à préciser, dans un souci de transparence, que « dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, l'autorité administrative publie au Journal officiel la liste des permis exclusifs de recherches abrogés. »

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l'amendement n° 32 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Je me rallie à la proposition de la commission.

(L'amendement n° 32 est retiré.)

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Favorable.

(L'amendement n° 45 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 47 rectifié .

La parole est à M. le président de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

L'amendement n° 47 rectifié répond à la question de la fausse déclaration, posée à plusieurs reprises dans ce débat. Il prévoit, dans l'hypothèse où la fracturation hydraulique ne serait pas reconnue, des sanctions importantes dans un but dissuasif. Nous avons établi, je le précise, un parallèle avec le régime des installations classées, qui nous a paru une bonne base.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Puis-je en déduire, puisque cet amendement est proposé par son président, que la commission a donné un avis favorable ? (Sourires.)

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Favorable également.

(L'amendement n° 47 rectifié est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 20 .

La parole est à M. Claude Gatignol.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Je vous propose, monsieur le président, de soutenir en même temps l'amendement n° 21 , les deux étant très liés.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

De la même façon que nous avons défini, dans le cadre du Grenelle, ce que l'on a appelé une zone de développement de l'éolien, l'amendement n° 20 propose que, compte tenu de la sensibilité des recherches menées sur un territoire à géologie favorable, soit déterminée, sous l'autorité du préfet de région, une zone de développement minier incluant, bien sûr, les permis autorisés et précisant tout spécialement les usages de l'eau.

Quant à l'amendement n° 21 , il prévoit que le préfet de région concerné par la zone de développement minier puisse proposer la création d'une commission locale d'information.

Tout cela va dans le sens de la transparence et d'une bonne information locale. Je suis encore surpris d'avoir entendu mes collègues – Germinal Peiro, par exemple – dire avoir appris l'existence de tel projet par la presse, par un entrefilet ou une conversation de hasard. La publicité donnée à ces projets par des commissions locales d'information, sur un territoire défini en tant que zone de développement minier, serait une très bonne chose.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Avis défavorable. Nous avons évoqué longuement la nécessité d'une réforme globale du code minier. Ces deux amendements renvoyant à cette réforme, ils n'ont pas leur place dans le présent texte. Ils la trouveront, en revanche, lorsque nous réformerons le code.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Défavorable.

(L'amendement n° 20 n'est pas adopté.)

(L'amendement n° 21 n'est pas adopté.)

(L'article 2, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 22 , portant article additionnel après l'article 2.

La parole est à M. Claude Gatignol.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

Défendu !

(L'amendement n° 22 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 3.

La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l'amendement n° 39 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Défendu !

(L'amendement n° 39 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Christiane Taubira, pour soutenir l'amendement n° 4 .

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Taubira

Je commencerai par avouer ma faute, puisqu'il s'agit d'un amendement franchement cavalier et qui est, en réalité, un appel au Gouvernement. Il vise en effet à créer un cadre fiscal pour l'exploitation d'hydrocarbures. Ce cadre fiscal existe, bien sûr, dans le code minier, excepté pour les gisements en mer. Nous sommes, ce soir, vous l'avez bien compris, concernés par ces gisements. Le rapporteur m'a répondu en commission qu'une telle mesure ne relevait pas de ce texte, ce dont je conviens très volontiers. Toutefois, la même réponse m'a été faite alors qu'il s'agissait de véhicules législatifs beaucoup plus adaptés.

Ce cadre fiscal peut être créé par dérogation, comme cela s'est produit pour Saint-Pierre-et-Miquelon. Il existe donc un précédent. Or il est impossible d'en faire profiter la Guyane et la Martinique, notamment. Je tenais à appeler votre attention sur ce point, puisqu'il est envisagé de modifier le code minier, ce que nous demandons depuis une quinzaine d'années. Une telle réforme aura été difficile à obtenir. Je suis ravie que les problèmes qui se posent aujourd'hui dans l'Hexagone contraignent le Gouvernement à modifier en profondeur le code minier. Je tenais à rendre le Gouvernement sensible à des questions que nous posons depuis de nombreuses années. En effet, en Guyane, des titres miniers sont attribués, mais il n'a jamais été possible de moderniser le code minier.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Il est tout à fait légitime que l'exploitation de ressources minières profite aux collectivités territoriales qui en subissent les nuisances. Mais cela doit être discuté en profondeur. Nous ne pouvons nous contenter d'extrapoler l'existant à des territoires différents, en l'occurrence les concessions sur le plateau continental. Je vous propose de revoir ce point lors de la réforme du code minier. Je m'engage, cependant, à travailler ce sujet car la demande est légitime.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Puis-je considérer que cet amendement est retiré, madame Taubira ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Taubira

Tout à fait, monsieur le président ; l'essentiel est que mes propos figurent au Journal officiel.

(L'amendement n° 4 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 33 .

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Défendu !

(L'amendement n° 33 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Sur l'article 4, je suis saisi d'un amendement n° 28 rectifié .

La parole est à M. Michel Havard, rapporteur, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Nous avons très longuement évoqué l'expérimentation, et la communauté scientifique nous a saisis de cette question, considérant que, dans le cadre de toute recherche, il y a le temps de la recherche théorique et celui de la recherche pratique. Toutefois, décider aujourd'hui, dans ce texte, de faire de l'expérimentation dans un cadre que nous ne connaissons pas était impossible. Je propose donc que l'expérimentation trouve sa place à l'article 4, c'est-à-dire soit renvoyée au rapport au Parlement, et que nous soient à cette occasion présentées les conditions de mise en oeuvre d'expérimentions réalisées aux seules fins de recherche scientifique sous contrôle public.

Ces précisions sont très importantes. C'est la garantie que le débat aura lieu au Parlement avant de prendre toute décision dans un cadre extrêmement strict. C'est la meilleure preuve que nous donnerons à la communauté scientifique que nous ne sommes pas des « obscurantistes », mais que nous accordons à la recherche la place qu'elle mérite. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Cet amendement est essentiel et je l'ai évoqué dès mon intervention liminaire. Si une réflexion était menée plus avant sur la recherche scientifique, elle devrait naturellement être menée sous le contrôle d'un comité scientifique et d'un comité de nature « grenellienne » associant toutes les parties concernées. Il est, par ailleurs, bien précisé que les expérimentations se dérouleront sous contrôle public. Nous sommes clairement dans le cadre de recherches scientifiques à des fins d'intérêt général. Le Gouvernement émet donc un avis favorable.

(L'amendement n° 28 rectifié est adopté.)

(L'article 4, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 34 , portant article additionnel après l'article 4.

La parole est à M. André Chassaigne.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Nous avons évoqué plusieurs fois des rapports en cours d'élaboration. L'objet de cet amendement est de demander au Gouvernement de remettre au Parlement avant le 31 décembre 2011 une synthèse des différents rapports réalisés sur l'exploration et l'exploitation des ressources d'hydrocarbures non conventionnels, avec éventuellement des informations complémentaires.

Les rapports d'étape font apparaître en effet des insuffisances. Ainsi, le bilan carbone de l'ensemble de la filière n'est pas évalué. Il serait également intéressant de connaître les impacts sanitaires et environnementaux dans les sites d'exploitation d'autres pays, ainsi que les impacts sociaux sur les populations présentes à proximité des sites, pour que nous ayons la connaissance la plus complète possible des conséquences de ce type d'exploration et d'exploitation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

Plutôt défavorable. Cet amendement nous paraît satisfait, d'autant plus que des réponses seront sans doute apportées dans les rapports du conseil général de l'environnement et du conseil général de l'industrie et dans ceux de la mission d'information, en particulier pour le bilan carbone.

(L'amendement n° 34 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Gaudron

Il est défendu.

(L'amendement n° 11 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 14 , proposant une nouvelle rédaction du titre de la proposition de loi.

La parole est à M. Claude Gatignol.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Gatignol

C'est un amendement de cohérence. Nous avons évoqué tout au long de la discussion la réforme du code minier, lequel, selon le rapporteur, devra contenir tous les éléments que nous avons abordés. Je propose donc que dans le titre de la proposition de loi l'interdiction soit liée à la publication du nouveau code minier et que ce soit une suspension ou une interdiction temporaire puisque c'est le nouveau code minier qui dira ce qu'il en est.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Havard

Défavorable puisque ce titre ne correspond pas du tout à l'ensemble du texte.

(L'amendement n° 14 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Nous avons achevé l'examen des articles de la proposition de loi.

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public auraient lieu cet après-midi.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Explications de vote et vote, par scrutin public, sur le texte de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité ;

Explications de vote et vote, par scrutin public, sur la proposition de loi visant à abroger les permis exclusifs de recherches d'hydrocarbures non conventionnels et à interdire leur exploration et leur exploitation sur le territoire national ;

Discussion de la proposition de loi portant diverses dispositions d'ordre cynégétique ;

Discussion de la proposition de loi relative à l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires et à son cadre juridique.

(La séance est levée à trois heures cinquante.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma