La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'amendement n° 638 portant article additionnel après l'article 17.
Avant de commencer l'examen des amendements portant articles additionnels après l'article 17, la parole est à M. Michel Piron, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.
Monsieur le président, madame la ministre du logement, mes chers collègues, je souhaite, pour encadrer la discussion sur ce sujet, faire une déclaration préalable qui permettra d'éclairer et, surtout, de border nos propos concernant l'article 17.
La cristallisation du débat sur la politique de mixité de l'habitat autour de l'article 55 de la loi SRU occulte depuis longtemps à mes yeux la question, au demeurant fort complexe, du lien entre urbanisme et mixité, qui appelle une réflexion beaucoup plus large que les débats ouverts au détour d'amendements.
La mixité de l'habitat n'est pas seulement sociale, elle est également fonctionnelle. Pour avoir présidé le COMOP urbanisme et environnement, avec des responsables de très grandes agglomérations françaises, élus et membres de l'administration, je puis vous assurer que cette question est majeure. L'enjeu de l'habitat ne saurait être séparé des enjeux de l'urbanisme commercial qui est, probablement à tort, un urbanisme d'exception en France, de la desserte des transports en commun – il s'agit des plans de déplacements urbains –, du lien entre pôle d'emplois, de services, d'activités et, enfin, du lien entre tous ces éléments et les lieux d'habitation.
En définitive, ce qui est en jeu, c'est la ville qui, tous les jours, se reconstruit et se rénove, mais surtout la ville de demain. Quand on parle d'urbanisme, il faut garder présent à l'esprit le fait qu'il n'y a d'urbanisme que dans un but : celui de l'urbanité. Pour que les gens puissent mieux vivre ensemble, on a d'abord besoin de réfléchir à l'ensemble de ces questions d'une manière synthétique. Nous avons voté un amendement qui permettrait de fusionner le PLU quand il est intercommunal et le PLH. J'appelle pour ma part de mes voeux un document unique, qui intégrerait tant le plan de déplacement urbain que l'urbanisme commercial et qui mettrait en relation l'habitat, les services, les lieux d'emploi et les questions de transports en commun.
Une telle question mérite à elle seule au moins un texte rénovateur, peut-être même novateur – j'ai tendance à le penser – et une réflexion globale sur l'urbanisme, qui n'a pas sa place dans une simple loi comme celle-ci ; elle comprend certes de nombreuses mesures, mais ne donne pas lieu à ouvrir de nouveau ce débat.
Je souhaite personnellement, et c'est la position de la commission, que, sur la question de l'article 17, qui a été tranchée au Sénat, et sur celle de l'article 55, on n'en fasse ni plus ni moins que ce qui existe. Telle sera ma position s'agissant des amendements portant articles additionnels après l'article 17, et j'aimerais qu'elle soit partagée.
Je souhaite avoir le point de vue de Mme la ministre sur cette question, avant d'engager l'examen des amendements.
Monsieur le président, mesdames, messieurs, je souhaite en effet m'exprimer sur les amendements portant articles additionnels après l'article 17 et sur l'article 55 de la loi SRU, afin d'éclairer l'Assemblée sur la position du Gouvernement.
L'article 55 de la loi SRU, pourtant de création récente, puisqu'elle date du 13 décembre 2000, est un élément important de la politique du logement en France. Cet article définit le logement social et impose l'obligation aux maires de construire des logements accessibles aux ménages à revenus modestes. C'est aussi devenu un symbole fort : le seuil de 20 % de logements sociaux fait partie des exigences que les communes les plus importantes doivent prendre en compte.
Comme je l'ai toujours dit, je suis attachée au respect de ces obligations. J'ai demandé aux préfets d'appliquer la loi de manière rigoureuse et j'ai veillé à ce que toutes les informations relatives à son application, en particulier les constats de carence, soient rendues publiques. Le logement locatif social est caractérisé par une TVA à 5,5 % et attribué à des personnes sous plafond de ressources, bénéficiant d'une aide ou de la garantie d'une collectivité. L'accession sociale à la propriété, grâce au Pass-foncier et au prêt social de location-accession, que le Gouvernement souhaite développer, répond aux mêmes caractéristiques que le logement locatif social : une TVA à 5,5 %, un plafond de ressources et une aide de la collectivité.
Au-delà de ces principes, il y a une forte convergence sur le terrain entre le locatif et l'accession sociale, et les élus le savent. Les personnes qui s'engagent dans un projet d'accession sociale à la propriété sont souvent d'anciens locataires du parc HLM ou des jeunes qui, sans ce projet, se logeraient dans une HLM. En favorisant l'accession sociale, on encourage le développement de l'offre de logements, la fluidité dans le parc ainsi que la mixité sociale. Il me semble que nos débats ont montré que nous avions tous la même analyse.
C'est pourquoi, afin de favoriser le développement de l'accession sociale par les maires, j'avais proposé de prendre en compte ces deux dispositifs dans l'article 55 de la loi SRU : locatif et accession sociale. Mon but était bien de favoriser le développement de l'offre d'accession sociale à la propriété. Bien sûr, ce développement ne devait pas se faire au détriment du parc locatif social, mais en complément de celui-ci.
Le Sénat n'a pas retenu la proposition d'inclure les logements en accession par le Pass-foncier ou le PSLA dans le décompte de la loi SRU. Depuis le vote du projet de loi au Sénat, le contexte du logement a fortement évolué. Avec le plan de relance, le Gouvernement a pris des mesures très fortes pour favoriser l'accession sociale à la propriété : doublement du prêt à taux zéro, fonds de 50 millions d'euros pour aider les communes à mettre en oeuvre le Pass-foncier et augmentation de ce dernier à 30 000 logements aidés, enfin, relèvement du plafond de ressources des ménages pour les prêts d'accession sociale conventionnés au niveau du prêt à taux zéro.
Ces différentes mesures constituent des aides très importantes pour les ménages et pour les collectivités qui veulent soutenir l'accession sociale à la propriété. Mon engagement politique visant à soutenir l'accession sociale à la propriété s'est traduit par des actes concrets. Tous les dispositifs incitatifs sont en place. C'est pourquoi je ne pense pas utile d'introduire des modifications au dispositif de décompte du logement social dans le cadre de la loi SRU.
Plus généralement, je donnerai un avis défavorable à tous les amendements portant sur l'article 55, qui seront déposés après l'article 17.
Nous prenons acte des propos tenus par le rapporteur et par Mme la ministre.
Nous nous trouvons dans une situation particulière. La remise en cause de l'article 55 de la loi SRU dans le cadre de l'examen de ce projet de loi ne nous paraît pas opportune. Si le débat a été relancé, c'est qu'il y a eu modification des bases de cette loi. Vous avez en effet introduit la notion d'accession à la propriété, madame la ministre, alors que les 20 % ne portent que sur le logement social. Il s'agissait donc bel et bien d'une remise en cause de la disposition, et c'est ainsi d'ailleurs que la plupart des sénateurs l'ont compris.
Par ailleurs, nous constatons qu'un certain nombre de maires n'appliquent pas la loi SRU et ne respectent pas l'obligation d'atteindre le seuil de 20 % de logements sociaux dans leur commune. Les sénateurs ont été très sensibles à cette question, et plus généralement l'opinion publique.
Le groupe GDR suit avec attention, depuis le début du débat à l'Assemblée, l'évolution de la réflexion et des positions sur l'article 17. Nous prenons acte de vos déclarations. Si aucun amendement sur cette question n'est retenu par le Gouvernement et la majorité, nous aviserons. En tout état de cause, il n'est pas nécessaire d'engager une bataille sans raison.
Comme nos collègues du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, les députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche enregistrent avec satisfaction la déclaration de Mme la ministre après l'intervention de M. le rapporteur.
C'est de notoriété publique, nous sommes particulièrement opposés à la remise en cause de l'article 55 de la loi SRU. Nous avons, en effet, toujours pensé que, s'il s'agissait de favoriser l'accession sociale à la propriété, il existait bien d'autres moyens d'atteindre cet objectif. Et votre propos à l'instant, madame la ministre, montre bien que notre analyse est la bonne.
Si nous ne souhaitons pas une telle remise en cause, c'est que l'article 55 de la loi SRU est désormais devenu le symbole de la volonté, ou non, d'un certain nombre d'élus de mettre en oeuvre une mixité sociale, une répartition équilibrée des logements, en particulier locatifs sociaux, sur l'ensemble du territoire, donc dans chacune des communes et dans les quartiers des grandes villes. Comme le soulignait le rapporteur, au-delà de cette réflexion, c'est la conception même que l'on se fait de la ville du futur, avec la nécessité d'une mixité non seulement sociale, mais également des différentes fonctions, qui est en jeu.
L'article 55 est d'autant plus symbolique que la loi elle-même a permis un certain nombre de modifications qui répondent très largement aux diverses préoccupations. Je rappelle tout de même qu'au-delà de ce que nous appelons, pour notre part, les logements véritablement sociaux – les PLUS et les PLA d'intégration –, les 20 % intègrent le PLS qui concerne davantage le logement intermédiaire.
Ce que beaucoup semblent, de plus, avoir oublié, c'est que la loi SRU donnait vingt ans aux communes pour satisfaire l'obligation de disposer de 20 % de logements locatifs sociaux. Ce n'était donc pas un couperet pour les élus. Les maires devaient donc s'engager à réaliser un certain nombre de logements locatifs sociaux sur vingt ans dans le cadre de plans triennaux. Aujourd'hui, la remise en cause de l'article 55 serait d'autant moins acceptable que beaucoup d'élus concernés par cette obligation se sont mis résolument à la tâche pour résorber ce retard.
Je citerai en exemple mon expérience locale. La communauté urbaine de Lille compte quatre-vingt-cinq communes. Vingt-deux d'entre elles étaient concernées par l'article 55. Lorsqu'on dresse le bilan des années 2006 et 2007 notamment, nous constatons que les engagements pris par les maires devant le préfet, dans le cadre des accords triennaux, ont été plus que respectés.
En effet, sur les vingt-deux communes –je parle de mémoire –, l'engagement était de plus de 300 logements. Or, c'est plus de 600 logements qui ont été constuits en 2006 et plus de 700 en 2007. Nombre de maires, quelle que soit d'ailleurs leur couleur politique, voulant résorber le retard et corriger les dysfonctionnements, nous comprendrions d'autant moins qu'on cherche à remettre en cause l'article 55 de la loi SRU.
Les mesures que vous prenez pour rendre publics les constats de carence participent également de la même volonté de veiller à ce qu'une disposition raisonnable se traduise enfin dans la réalité, favorisant ainsi davantage la mixité sociale dans toutes les communes et tous les quartiers de nos grandes villes.
J'ai également écouté avec intérêt l'intervention de notre rapporteur.
Nous pouvons nous retrouver sur le fait qu'au-delà du logement, se pose un problème d'aménagement du territoire. Nos obligations sont aujourd'hui d'autant plus nombreuses que nous devons lutter contre le réchauffement climatique. Il faut, dans ce cadre, réduire la circulation automobile, ce qui induit un meilleur équilibre d'implantations sur le territoire. Chacun doit pouvoir se loger, travailler et vivre dans les quartiers grâce aux commerces et aux différents services. Il ne doit pas y avoir, comme c'est souvent le cas aujourd'hui, d'un côté des quartiers dortoirs et de l'autre des quartiers d'affaires avec les contraintes de circulation que cela impose. Dans ce cadre, les quartiers doivent offrir la plus grande diversité possible à leurs habitants. Il convient donc d'éviter les ghettos sociaux mais aussi les ghettos riches. Nous devons parvenir à un équilibre harmonieux.
De ce point de vue, et je prends acte de ce que vous avez dit, madame la ministre. Les députés Verts se battent pour que l'article 55 de la loi SRU soit réellement appliqué. Les communes doivent être solidaires en matière de logement social. Lorsqu'on parle « logement social », certains élus et certains concitoyens pensent tout de suite « familles à problèmes ». C'est invraisemblable ! Le logement social s'adresse simplement à des familles à faibles revenus, et les loyers doivent être adaptés en conséquence. Ce n'est rien de plus.
S'il s'agit d'appliquer l'article 55 dans son intégralité, donc de respecter l'obligation de disposer de 20 % de logements sociaux, et si, lorsqu'une commune s'y oppose, le préfet se substitue, après la déclaration de carence, à ladite commune pour conclure une convention en vue de la construction et de l'acquisition de logements sociaux,…
…nous vous suivrons bien évidemment sur ce point. C'est, en effet, ce qui nous importe. Nous présenterons nos amendements, mais nous ne nous livrerons pas à une bataille sans fin.
Nous en venons à l'examen des amendements portant articles additionnels après l'article 17.
L'amendement n° 638 n'est pas défendu.
Je suis saisi d'un amendement n° 35 rectifié .
La parole est à M. Jean-Pierre Gorges.
Défavorable.
(L'amendement n° 35 rectifié n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 481 .
La parole est à M. Jean-Pierre Gorges.
J'ai bien entendu l'intervention de Mme la ministre. Je pense toutefois que cet amendement va dans le bon sens. Je le présente depuis un certain nombre d'années. J'insisterai une fois de plus ce soir car je pense qu'un jour, il finira par figurer dans la loi.
Cet amendement tend donc à compléter l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation par les deux phrases suivantes :
« Dans les établissements publics de coopération intercommunale qui ont adopté un programme local de l'habitat, ces dispositions ne s'appliquent plus sur le territoire de la commune, mais sur l'ensemble du territoire de l'établissement public de coopération intercommunale concerné. Le seuil est alors porté à 25 %.»
En France, on compte 25 % de logements sociaux et les communes se voient imposer un seuil de 20 %, ce qui est une totale contradiction. Les choses ont évolué. Cet amendement vise à corriger une anomalie résultant de la contradiction entre la loi SRU et la loi Chevènement relative à l'intercommunalité. En effet, alors que c'est la communauté d'agglomération qui possède la compétence en matière d'élaboration du PLH – donc la « compétence logements » – c'est aux communes que la loi SRU assigne des objectifs. C'est totalement contradictoire et d'ailleurs inapplicable.
Le PLH précise la répartition prévisionnelle des logements locatifs sociaux nécessaires pour atteindre les objectifs entre les différentes communes membres de l'établissement public de coopération intercommunale.
Depuis la loi ENL du 13 juillet 2006, la mise en oeuvre d'un PLH est obligatoire pour les communautés urbaines, les communautés d'agglomération et les communautés de communes de plus de 50 000 habitants comprenant une commune de plus de 15 000 habitants.
La loi ENL rétablit en son article 65 la possibilité de fixer les objectifs de réalisation de logements sociaux dans le cadre d'un PLH. Cette disposition permet de répartir les obligations des communes soumises à la loi. En fait, on n'a pas besoin d'attendre vingt ans. Il est possible dans un PLH d'imposer immédiatement aux communes des objectifs de réalisation.
Les intercommunalités concernées deviennent les garantes des grands équilibres locaux et de la bonne prise en compte des enjeux de solidarité.
La loi 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a accentué le rôle des intercommunalités concernées en prévoyant la possibilité pour l'État de leur déléguer ses compétences en matière de financement des aides à la pierre. C'est même pire que cela : si la communauté d'agglomération le demande, l'État est obligé de lui accorder.
Il apparaît, dès lors, nécessaire de confier la responsabilité entière de répartition du logement aux intercommunalités compétentes en matière de PLH et d'apprécier le seuil à l'échelle de l'intercommunalité. On peut opter pour une gestion beaucoup plus en flux qu'en stock puisqu'il possible d'inscrire dans un PLH que, dans tout nouveau projet d'une certaine taille, il y aura obligatoirement 20, 25, 30 ou 35 % de logements sociaux.
Tel est le sens du présent amendement rendu d'autant plus nécessaire que la loi SRU établit que le produit des pénalités infligées à la commune fautive est versé à l'EPCI, pénalité qu'il conviendrait d'apprécier à l'échelle de l'intercommunalité. En fait, les pénalités ne sont jamais payées, puisque c'est l'EPCI qui gère le PLH.
Par ailleurs, et dans cette hypothèse, ce seuil pourrait être porté à 25 %, chiffre qui correspond à la proportion de logements sociaux au niveau national.
Nous faisons confiance à la majorité pour respecter sa parole. Deux observations rapides cependant après l'intervention de M. Gorges.
Il n'y a tout d'abord aucune contradiction entre la loi Chevènement et la loi SRU. En réalité, dès lors qu'une intercommunalité élabore un PLH, elle respecte, bien évidemment la loi, et elle se fixe, commune par commune, des obligations. Par ailleurs, ne nous racontons pas d'histoires. Croire qu'une intercommunalité, qui n'est pas élue au suffrage universel, est l'autorité pour imposer à des communes un certain nombre de dispositions, c'est se tromper totalement et c'est vouloir remettre en cause l'article 55.
(L'amendement n° 481 n'est pas adopté.)
La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.
La ministre et le rapporteur se sont exprimés très clairement. Je souhaite que l'on entre tous dans la même logique. Tous les amendements, qu'ils émanent de la majorité ou de l'opposition, portant sur l'article L. 302-5 du code de la construction seront rejetés par la commission et le Gouvernement. Nous ne souhaitons pas débattre sur ce qui n'a pas lieu d'être. Sur la base de cet accord, j'aimerais que nous avancions vite, afin de conclure le plus rapidement possible.
Nous avons bien entendu les propos du président Ollier. Je suis tout à fait d'accord pour que nos débats s'accélèrent. Toutefois, les députés qui ont déposé des amendements ont le droit de les défendre, s'ils le souhaitent.
Je veux quant à moi poser de nouveau une question à laquelle on n'a pas répondu. J'ai pris bonne note des déclarations de M. Copé, président du groupe UMP, qui, dans le même esprit que Mme la ministre, et sans doute soucieux d'être rassurant, a effectivement expliqué que l'article 55 de la loi SRU ne serait pas modifié. Cependant, il a apporté une précision qui demande une explication approfondie pour que nous suivions la recommandation de M. Ollier qui nous invite à ne pas ouvrir un débat qui n'aurait pas lieu d'être.
Je souhaite tout de même que la représentation nationale puisse être éclairée sur les propos du président du groupe UMP…
…qui a indiqué qu'un dispositif serait pris par voie réglementaire pour encourager l'accession sociale à la propriété.
J'ai regardé par anticipation les amendements déposés par mes collègues UMP, et certains portent sur l'accession à la propriété. Je souhaite donc être rassurée et avoir une explication sur les propos tenus par le président du groupe UMP sur ce sujet la semaine dernière.
Nous devons éviter, madame la ministre, de refaire les erreurs des années 60 et 70, au cours desquelles on a construit de nombreux logements sociaux sur des terrains délaissés ou à proximité des périphériques ou des entrées d'autoroute. On a ainsi installé des populations déjà en difficulté dans des endroits exposés à des nuisances sonores et atmosphériques.
Il existe actuellement des plans d'exposition au bruit à proximité des grands aéroports. Il serait légitime que, dans les zones incluses dans ces PEB, l'article 55 de la loi SRU ne soit pas appliquée. Dans ces périmètres, les gens souffrent de fortes nuisances aériennes. Ce n'est pas la peine de forcer la main des communes et de faire venir dans des zones difficiles des populations en difficulté.
Je voulais simplement attirer votre attention sur ce point. Je retire l'amendement.
(L'amendement n° 21 est retiré.)
Je suis saisi d'un amendement n° 491 .
La parole est à M. Olivier Carré.
C'est un amendement de précision. Si vous m'expliquez qu'il est satisfait, madame la ministre, je le retirerai.
Il est satisfait.
(L'amendement n° 491 est retiré.)
Je suis saisi d'un amendement n° 561 .
La parole est à M. Jacques Myard.
Cet amendement a pour objet de réparer ce qu'un grand nombre de collectivités considèrent comme une injustice. Pour aider leurs fonctionnaires à se loger, elles mettent très souvent à leur disposition des logements à des tarifs qui sont bien en dessous du marché car, en région parisienne, elles ne trouveraient pas toujours des collaborateurs pour remplir les fonctions de service public.
Il me paraît donc nécessaire, même si cet amendement mérite d'être précisé par un décret, que ces logements puissent être comptés dans les logements dits sociaux même s'ils ne sont pas conventionnés. On va me répondre, je sais, qu'il faut alors les conventionner. Cela étant, les collectivités territoriales doivent aussi bénéficier d'une certaine liberté dans l'attribution de ces logements. C'est un véritable problème en région parisienne et dans les grandes agglomérations.
Je souhaiterais donc, madame la ministre, que vous preniez en considération cet amendement, qui mérite d'être voté car il répond à un souci de justice, y compris pour les fonctionnaires des collectivités territoriales.
Je m'en tiens à ce que j'ai dit. Défavorable.
(L'amendement n° 561 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 562 .
La parole est à M. Jacques Myard.
J'ai bien entendu le rapporteur et la ministre mais je voudrais redire très rapidement, sans relancer de polémiques inutiles, que voir la France à travers une norme nationale me paraît totalement illusoire. Dans un certain nombre de cas, on aurait vraiment avantage à imposer un ratio de flux de 30 %, qui délierait les collectivités du fameux 20 % du stock. J'ajoute que les logements sociaux coûtent parfois cinq à six fois plus cher qu'ailleurs, qu'il n'y a pas de terrain.
Je maintiens donc cet amendement, mais j'ai bien compris que c'était la politique du politiquement correct qui était aujourd'hui en vigueur et je n'insisterai pas davantage.
Au nom du politiquement responsable, défavorable.
(L'amendement n° 562 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 415 rectifié .
La parole est à M. Alain Cacheux.
Il est défendu.
(L'amendement n° 415 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi de trois amendements, nos 425 rectifié , 666 et 416 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
(Les amendements n°s 425 rectifié , 666 et 416 rectifié , repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi de trois amendements, nos 412 rectifié , 1003 et 1015 , deuxième rectification, pouvant être soumis à une discussion commune.
(Les amendements n°s 412 rectifié , 1003 et 1015 , deuxième rectification, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi d'un amendement n° 428 rectifié .
(L'amendement n° 428 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 417 rectifié .
(L'amendement n° 417 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 413 rectifié .
(L'amendement n° 413 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 931 rectifié .
(L'amendement n° 931 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 426 rectifié
(L'amendement n° 426 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 419 rectifié
(L'amendement n° 419 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 420 rectifié .
(L'amendement n° 420 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 599 .
La parole est à M. Étienne Pinte, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
Sans même aucune déduction fiscale possible, des propriétaires confient leur logement à des associations agréées en contrepartie d'un loyer ou d'une indemnité d'occupation très symbolique. Il s'agit d'un abandon partiel de loyer consacrant un effort pourtant important de la part du propriétaire.
À ce jour, seul l'abandon total de loyer, consenti au profit d'un organisme d'intérêt général, est reconnu comme un don en nature ouvrant droit à avantage fiscal.
Il est proposé dans mon amendement de développer par incitation fiscale cette solidarité des personnes physiques propriétaires de logements, qui veulent louer leur logement, à un niveau nettement inférieur à leur valeur locative, à des associations qui le sous-louent ensuite à des personnes en difficulté.
Cette disposition permettra d'accroître rapidement l'offre de logements accessibles dans le parc privé, ce qui est indispensable pour pallier le déficit de logements sociaux. Elle permettrait, en outre, de baisser le coût de l'intermédiation locative menée à se développer sous l'impulsion du Gouvernement et de faire baisser le risque d'incident dans le cadre de cette activité. Cet effort aura toute sa portée en étant inscrit dans la loi.
La commission a accepté cet amendement mais il me paraît élargir un champ tout de même assez vaste et j'aimerais bien connaître le point de vue de Mme la ministre car, à titre personnel, je suis un peu perplexe.
Nous devons bien sûr tous soutenir le dispositif d'intermédiation locative et, pour cela, vous avez participé à la clarification de son statut juridique, et je vous en remercie. C'était une première étape indispensable.
Puis, par la réforme du 1 %, vous avez mis en place les mécanismes de sécurisation du propriétaire par le fonds d'intervention sociale de l'accession, via le locapass.
Il reste une question économique. Nous devons mettre en place un dispositif simple et lisible pour le particulier qui accepte de louer son logement, et pour le Parlement pour qu'il puisse évaluer l'efficacité du dispositif.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a émis un avis favorable à un amendement de la commission, sous-amendé, mettant en place un dispositif fiscal très incitatif. Ainsi, nous aurons mis en place un dispositif juridique efficace et sécurisé et un dispositif économique attractif.
Dans ces conditions, je ne pense pas qu'il faille en rajouter et je vous suggère de retirer votre amendement. Sinon, j'y serai défavorable.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Vous êtes sûre, madame la ministre, que l'amendement auquel vous faites allusion répond bien à ma préoccupation ?
Absolument ! C'est l'amendement n° 222 rectifié .
Dans ce cas, je retire mon amendement.
(L'amendement n° 599 est retiré.)
Je suis saisi d'un amendement n° 414 rectifié .
(L'amendement n° 414 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 424 rectifié .
(L'amendement n° 424 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Nous en venons à des amendements portant articles additionnels avant l'article 18.
Il s'agit de créer une déclaration d'intention d'expulser pour les congés délivrés par le bailleur, seul véritable outil de prévention des expulsions en amont.
La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 643 .
C'est un amendement similaire.
Nous sommes confrontés à un problème récent avec la multiplication des congés-ventes, notamment dans les centres-villes, qui touche souvent des personnes d'un certain âge.
Une déclaration d'intention d'expulser permettrait de mieux prendre le projet en amont. Aujourd'hui, on est un peu pris par les délais et on se retrouve avec des situations humaines assez dramatiques parce qu'on n'a pas le temps d'organiser le relogement de ces personnes ou leur entrée en maison de retraite quand c'est possible en fonction de l'âge.
Cette proposition avait été débattue et rejetée au moment de la loi sur la vente à la découpe. Je le regrette, parce que, pour l'instant, on n'a pas de solution face à ces congés-ventes, qui sont un droit pour les personnes individuelles mais qui en mettent d'autres dans des situations dramatiques. En cette époque de marché immobilier tendu, nous n'avons pas le temps de réagir.
Nous avons déjà accepté d'autres amendements maintenant un équilibre entre les droits du bailleur et ceux du locataire. Défavorable.
Je suis saisi d'un amendement n° 658 .
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Le paragraphe I de l'article 15, alinéa 2, de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs dispose que le délai de préavis applicable au congé est de trois mois lorsqu'il émane du locataire et de six mois lorsqu'il émane du bailleur.
Toutefois, en cas d'obtention d'un premier emploi, de mutation, de perte d'emploi ou de nouvel emploi consécutif à une perte d'emploi, le locataire peut donner congé au bailleur avec un délai de préavis d'un mois. Le délai est également réduit à un mois en faveur des locataires âgés de plus de soixante ans dont l'état de santé justifie un changement de domicile ainsi que des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion.
La loi du 17 janvier 2002 a introduit une mesure supplémentaire qui permet aux étudiants qui viennent d'obtenir leur premier emploi de bénéficier d'un délai de préavis réduit à un mois. Par contre, le stage n'est pas considéré comme un premier emploi, étant donné qu'il ne s'accompagne pas d'une affiliation à la sécurité sociale.
Or l'obligation de stage rencontrée dans de nombreux cursus scolaires ou un changement de résidence lié à la poursuite des études implique pour les étudiants la même mobilité que les salariés, sans qu'ils bénéficient pour autant du même statut au regard du délai de préavis. En ramenant ce délai à un mois, il s'agit de remédier à une difficulté rencontrée par de nombreux étudiants, qui doivent parfois abandonner leurs projets, faute de moyens financiers suffisants.
Je ne suis pas la seule concernée ; dans ma circonscription, j'ai bien sûr rencontré de nombreux jeunes interessés par cette disposition ; Bérengère Poletti, ma collègue des Ardennes, avait déposé une proposition de loi en ce sens en 2004, et Paul Jeanneteau a déjà posé une question orale sans débat sur le même sujet. C'est vraiment quelque chose de très important et je compte sur vous, madame la ministre.
Madame Gruny, puisque vous allez quitter l'Assemblée, permettez-moi de vous dire le bonheur que j'ai eu de travailler avec vous. Je donne un avis favorable à votre dernier amendement.
Il faut en effet absolument tenir compte de la réalité de la vie des étudiants, même si cela pose un certain nombre de questions du côté des propriétaires. La priorité doit être donnée à la vie étudiante. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je vous remercie, madame la ministre. Cette séance étant la dernière à laquelle j'assiste, j'en profite pour remercier également le président ainsi que tous mes collègues, sur l'ensemble des bancs. J'ai vécu une aventure extraordinaire à vos côtés. J'ai eu beaucoup de chance. Je m'en souviendrai. Je pars sans regrets parce que c'est la loi, mais sachez que j'ai eu vraiment beaucoup de plaisir à être à vos côtés.
Je remercie également l'ensemble du personnel de l'Assemblée nationale, qui s'est toujours montré d'une très grande gentillesse ; nous avons beaucoup de chance de les avoir. Merci beaucoup. (Applaudissements sur tous les bancs.)
Afin de prévenir la flambée des loyers dans le parc locatif privé, nous proposons de rétablir la fixation des loyers pour les logements vacants par référence au loyer habituellement constaté dans le voisinage pour les logements comparables, en vigueur jusqu'en 1997, sachant que nous venons de connaître une période de très forte augmentation.
La loi de 1989 avait prévu une période transitoire qui permettait de limiter l'inflation des loyers au moment de la relocation. Or certains propriétaires profitent de cette période de vacance et de relocation pour augmenter les loyers de manière outrancière, notamment en zones tendues. Ces augmentations, singulièrement en région parisienne, poussent les classes moyennes et populaires à rechercher un logement toujours plus loin en banlieue. Cela peut être considéré comme une entrave à la mixité sociale.
Je suis saisi d'un amendement n° 626 .
La parole est à Mme Martine Billard.
Chaque fois que nous essayons de trouver des solutions contre la flambée des loyers, on nous explique que ce sont de fausses bonnes idées. Les locataires sont en tout cas en attente de vraies bonnes idées, et celles-ci ne viennent pas du Gouvernement !
L'amendement n° 626 propose, dans les zones où une flambée des loyers est constatée, de donner aux maires le pouvoir d'encadrer l'évolution des loyers sur le territoire de leurs communes. Une telle mesure d'encadrement peut être prise aujourd'hui par décret en Conseil d'État sur une commune donnée. Les maires étant ceux qui connaissent le mieux la situation des locataires de leurs communes, il serait judicieux de transmettre ce pouvoir aux maires des communes concernées.
Face à la crise actuelle, on ne peut pas à la fois ne pas relancer le pouvoir d'achat et ne rien faire du côté des loyers et des prix de l'alimentation. Au bout du compte, le Gouvernement nous explique que l'on ne peut rien faire ; c'est le bilan qui peut être tiré des réponses qui nous sont apportées. Va-t-on me répondre, encore une fois, que c'est une fausse bonne idée ? C'est facile, mais tous les Français qui subissent cette flambée des loyers, notamment dans les grandes agglomérations, trouveraient que geler les loyers pour des durées limitées, le temps que les prix reviennent à des évolutions plus raisonnables, serait une bonne idée. À Paris, les prix locatifs ont augmenté de 10 % depuis 2001.
Puisque vous rouvrez un débat très ancien, sur lequel nous avons déjà eu l'occasion de nous exprimer, et que vous demandez absolument une réponse, je vais essayer de faire bref. Je le répète : si les loyers ont tant augmenté, c'est parce qu'en zone tendue, la demande est très supérieure à l'offre. C'est en augmentant l'offre que nous pourrons donner satisfaction à davantage de gens, diminuer la pression de la demande et donc jouer forcément sur le prix des loyers. Cela est si vrai qu'un reproche parfois adressé au de Robien est qu'en créant, en certains endroits, une sur-offre, il a non seulement permis un peu de vacance, mais également produit un tassement manifeste du prix des loyers.
Notre solution est une solution de fond. Elle demande du temps, je vous l'accorde. Cependant, la mesure que vous préconisez est un sur-encadrement. Pourquoi pas l'encadrement du prix de la baguette par le maire ? C'est un bien de première nécessité.
Vous comprenez bien que ce sur-encadrement pourrait aboutir – et ce n'est pas le moindre de ses effets pervers – à décourager les propriétaires de mettre sur le marché un certain nombre de logements. Le risque d'effets pervers et l'inefficience de la mesure en termes d'offre nouvelle nous conduisent à rejeter cette mesure.
(L'amendement n° 626 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 624 .
La parole est à Mme Martine Billard.
L'article 21 de la loi de 1989 prévoit que le bailleur doit remettre gratuitement la quittance au locataire. Depuis 2006, il a été précisé que le bailleur ne peut plus faire supporter au locataire les frais d'expédition de la quittance. Cependant, le terme employé par la loi étant celui de « remettre », et non celui d'« envoyer » la quittance, un certain nombre de bailleurs répondent aux locataires demandant une quittance qu'ils n'ont qu'à venir la chercher.
Je propose donc de préciser dans la loi que le bailleur « envoie » gratuitement la quittance, de façon que les locataires, qui ont besoin de ce document pour un certain nombre de démarches, puissent en disposer.
Chers collègues, vous avez sans doute reçu comme moi un courrier de l'Union nationale de la propriété immobilière, se joignant à un certain nombre d'autres organisations professionnelles, pour expliquer qu'une telle mesure est inopportune dans un contexte économique très difficile et qu'elle remettra en cause le fragile équilibre des relations entre bailleurs et locataires. Je rappelle tout de même que le prix du timbre est de 55 centimes en tarif rapide et de 50 centimes en tarif lent. Je ne pense pas que le paiement mensuel de 50 centimes de timbre mette en danger les bailleurs.
Vous avez satisfaction, madame Billard, car l'article 4 de la loi de 1989 dispose que certaines clauses sont réputées non écrites, en particulier celles qui font supporter aux locataires les frais d'expédition de la quittance.
J'émets un avis défavorable pour les mêmes raisons. L'article 4 de la loi du 6 juillet 1989 dispose que « certaines clauses insérées dans un contrat de bail sont réputées non écrites, notamment les clauses qui font supporter aux locataires les frais d'expédition de la quittance ». L'amendement est donc satisfait.
Monsieur le rapporteur, madame la ministre, ce n'est pas le problème. Les députés n'auraient pas reçu, autrement, ce splendide courrier que j'ai cité. La loi écrivant « remettre », les bailleurs répondent aux locataires : « Puisque nous sommes obligés de vous remettre votre quittance, venez la chercher, par exemple au siège du cabinet de gestion. » C'est pour cela que je propose d'écrire « envoyer » à la place de « remettre ». La preuve, encore une fois, qu'il y a bien une nuance, c'est ce courrier de l'UMPI protestant contre mon amendement, qui porterait atteinte à l'équilibre de leurs comptes.
J'appelle l'attention de nos collègues sur le fait qu'il s'agit d'un amendement de bon sens. Je ne crois pas non plus qu'il crée un problème dans la logique et l'esprit de la loi, madame la ministre. Vous savez bien que « remettre » n'est pas la même chose qu'« envoyer ». En outre, vous faites référence à la loi de 1989, mais l'amendement s'appuie sur 2006. À partir du moment où il y a une confusion, c'est le travail du législateur de clarifier les choses en employant des termes exacts, compréhensibles par l'ensemble de nos concitoyens. Nous soutiendrons donc l'amendement défendu par Mme Billard.
Nous pourrions trouver un autre verbe.
Le verbe « transmettre » conviendrait peut-être mieux, car cela pourrait aussi s'appliquer aux envois par e-mail.
Je propose donc d'écrire dans l'amendement : « de transmettre » à la place de « de remettre ».
L'amendement n° 624 serait donc ainsi rectifié.
Quel est l'avis de la commission ?
Je souscris volontiers au terme « transmettre », qui a en outre un parfum d'au-delà, à travers le préfixe. (Sourires.)
Oui, monsieur le président.
(L'amendement n° 624 , tel qu'il vient d'être rectifié, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 457 .
La parole est à M. Alain Cacheux.
Il est défendu.
(L'amendement n° 457 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 454 .
La parole est à M. Alain Cacheux.
Il est également défendu.
(L'amendement n° 454 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 460 rectifié .
La parole est à M. Alain Cacheux.
Cet amendement constitue le corollaire du système de garantie des risques locatifs – la GRL. En effet, à partir du moment où ce système est mis en place, la caution solidaire n'a plus lieu d'être. En conséquence, nous proposons de ne plus autoriser les bailleurs à demander aux locataires le cautionnement solidaire d'un tiers.
La GRL faisant toujours l'objet de discussions, l'amendement est pour le moins prématuré. L'avis est donc défavorable.
Avis défavorable pour les raisons que vient d'exposer le rapporteur.
(L'amendement n° 460 rectifié n'est pas adopté.)
Avis défavorable.
(L'amendement n° 616 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 455 .
La parole est à M. François Pupponi.
L'amendement vise à limiter le recours au cautionnement de plusieurs personnes physiques. En effet, la pratique de certains bailleurs consiste à demander des cautions à plusieurs personnes physiques, avec des montants qui les rendent souvent insupportables pour les personnes amenées à cautionner. C'est une manière discriminatoire de refuser certains candidats à la location. L'amendement est précis : « Il ne peut donc être demandé qu'un seul cautionnement. Un cautionnement par une personne physique dont les ressources mensuelles représentent au moins 150 % du montant du loyer ne peut être refusé ». Sinon, le bailleur pourrait refuser la caution d'une personne dont le revenu est supérieur de 500 % au loyer, ce qui serait anormal. Il s'agit de limiter certains excès commis par des propriétaires.
Nous pensons que ce qui est proposé est à la fois trop et trop peu : trop du côté de la caution unique, et trop peu pour le bailleur qui attend des garanties. Avis défavorable.
Même avis que la commission. J'ajoute que notre objectif est la suppression, à terme, de la caution.
Je suis saisi d'un amendement n° 934 .
La parole est à M. Roland Muzeau.
L'article 18, tout en restreignant la possibilité pour les bailleurs de recourir au cautionnement, ménage un régime juridique particulier pour les étudiants non boursiers.
Cette mesure est inacceptable et profondément discriminatoire pour une catégorie de la population. Si nous comprenons bien l'idée de cet article exposée dans le rapport commis par notre collègue Piron – qui, soit dit en passant, se montre peu disert sur la mesure que nous souhaitons supprimer –, les jeunes concernés seraient une population à risque dont les bailleurs devraient se méfier. C'est mettre à l'index une importante catégorie de la population qui, sauf à habiter chez leurs parents ou chez l'habitant, et nonobstant les très rares propriétaires de cet âge, se loge exclusivement dans le locatif.
De plus, une telle mesure est particulièrement injuste socialement : tout le monde ici sait que le nombre de boursiers est ridiculement faible au regard de la situation vécue par l'immense majorité des étudiants. En l'état, cet article touche plus particulièrement les étudiants issus de familles modestes, qui sont déjà obligés, pour nombre d'entre eux, de travailler pour financer leurs études.
Est-il par ailleurs normal que des adultes, pour la plupart âgés de plus de vingt ans, soient obligés de demander la caution de leurs parents pour un acte essentiel de la vie ? Cette situation est vécue comme une infantilisation insupportable. Elle freine la nécessaire conquête de leur indépendance, conquête pourtant essentielle à la construction de leur personnalité et à leur responsabilisation.
Avec cette disposition, quelles seront les possibilités de logement pour les étudiants non boursiers issus de familles qui ne disposent pas de ressources nécessaires au cautionnement demandé ? Nous avons l'opportunité d'oeuvrer en faveur de l'ascension sociale et de la responsabilisation de nos jeunes. C'est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, d'adopter cet amendement de suppression de l'alinéa 5 de l'article 18.
Avis défavorable. Cela étant, je comprends votre préoccupation, monsieur Muzeau. Le problème du logement des étudiants préoccupe fortement le Gouvernement, mais ce n'est pas une affaire simple. Dans le projet de loi, ce que j'appelle « le Théo Braun inversé » permettra de sous-louer à des étudiants dans des appartements HLM, ce qui n'existait pas jusqu'à présent. En outre, un dispositif facilitera la co-location et l'application du délai d'un mois qui vient d'être voté.
De plus, je pense que votre proposition aurait un effet pervers.
L'effet pervers serait bien sûr involontaire, monsieur Muzeau, mais vous savez qu'avec les meilleures intentions du monde, on fait parfois des erreurs. Si on supprimait totalement la caution, il faudrait établir le bail au nom des parents, ce qui aurait pour conséquence de priver les jeunes de l'APL et de les placer à rebours de leur souhait légitime d'autonomie.
(L'amendement n° 934 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 186 rectifié .
La parole est à M. le rapporteur.
Je demande le retrait de cet amendement. À défaut, l'avis serait défavorable. Certes, je suis sensible à la préoccupation que votre commission a ainsi exprimée, mais l'article 18 n'aura pas d'effet rétroactif puisqu'il ne s'appliquera pas aux actes juridiques souscrits antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi. En conséquence, un décret prévoyant les modalités d'application de cet article aux baux et contrats en cours serait sans objet.
Je ne voudrais pas maintenir un amendement sans objet. Donc, je le retire.
(L'amendement n° 186 rectifié est retiré.)
Je suis saisi d'un amendement n° 459 .
La parole est à Mme Annick Lepetit.
L'exposé des motifs est suffisamment clair pour justifier la longueur de cet amendement. Celui-ci a pour objet d'aligner les conditions des locataires des appartements meublés sur celles des locataires de logements vides. L'objectif est de protéger tant les locataires recherchant une location de courte durée que les locataires demeurant plusieurs années dans le même logement. En effet, les cas de figure varient : les meublés ne logent pas uniquement des personnes qui y restent peu de temps.
Cet amendement devrait faire consensus puisqu'il favorise une location souple, de courte durée, qui peut s'appliquer à ceux qui recherchent un logement à titre temporaire, tels les étudiants ou les jeunes travailleurs. J'ai entendu un certain nombre de nos collègues s'exprimer en faveur de cette population qui a souvent beaucoup de mal à se loger. Je ne doute pas qu'ils contribueront à ce que notre amendement recueille un consensus.
Si nous partageons l'intention des auteurs de l' amendement, nous pensons que la souplesse mérite d'être maintenue pour des locations qui sont souvent temporaires. Mais nous ne sommes pas étrangers à vos préoccupations de sécurisation. À cet égard, je rappelle que la sécurisation des locataires dans des résidences hôtelières à vocation sociale a fait l'objet d'un amendement n° 480 d'Étienne Pinte, qui prévoit un contrat écrit. Il sera examiné à l'article 23. Il nous semble donc qu'il y a un bon équilibre aujourd'hui entre, d'une part, l'exigence de sécurité et, d'autre part, l'exigence de souplesse que vous venez d'évoquer. L'avis est donc défavorable.
Lors des débats au Sénat, consciente des modifications des modes de vie et de la nécessité de l'existence d'une location souple et de courte durée, j'ai souhaité qu'une réflexion soit menée sur ce sujet. J'ai demandé à Mme Massin, présidente de la Commission nationale de concertation, de me rendre un rapport précisant les insuffisances de la réglementation actuelle et contenant des propositions de nature à y remédier. Le rapport doit m'être rendu autour du 15 février prochain. C'est pourquoi je vous propose d'attendre les résultats de la concertation qu'elle est en train de mener et de retirer votre amendement.
Je suis prête à le faire. Mais je voudrais savoir dans quelles conditions la représentation nationale sera informée du contenu de ce rapport. Vous savez, madame la ministre, que nous sommes bien évidemment soucieux d'en avoir connaissance dès que possible. Si vous nous rassurez sur ce point, je retire l'amendement.
Madame Lepetit, c'est un engagement ferme que je prends. Il y aura sans doute d'autres occasions, après l'examen de ce projet de loi, pour aborder ce sujet. Mais quand le rapport sera public, je vous répondrai bien volontiers, dans le cadre, par exemple, des questions au Gouvernement.
Non, pas du tout, monsieur Brard !
(L'amendement n° 459 est retiré.)
Je suis saisi d'un amendement n° 836 , deuxième rectification.
La parole est à M. le rapporteur.
C'est un amendement de coordination que j'ai déposé à titre personnel. Il a été accepté par la commisison.
Favorable.
(L'amendement n° 836 , deuxième rectification, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 461 .
La parole est à M. François Pupponi.
Sujet important que celui du FSL, qui a été réformé par la loi du 13 août 2004. Celle-ci a transféré une partie des prérogatives des fonds de solidarité pour le logement au département, de pair avec un désengagement de l'État. Cela soulève un vrai problème. En effet, on connaît les difficultés financières d'un certain nombre de départements, à la suite de décisions de désengagement ou de régulation budgétaire du Gouvernement. Si on veut une certaine équité sur le territoire national, sans de grosses disparités sur un sujet aussi sensible que la prise en charge sociale des impayés de loyer, il faut essayer de rétablir une relation forte entre l'État et les départements. Tel est le but de cet amendement.
Avis défavorable. Nous ne souhaitons pas revenir sur la décentralisation des fonds de solidarité, réforme datant de 2004.
Je rajouterai simplement à l'excellente explication du rapporteur (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC),…
…qu'au moment où nous réfléchissons à une réforme des différents échelons territoriaux, il n'est pas opportun de prévoir un tel dispositif. C'est pourquoi je demande le retrait de cet amendement.
(L'amendement n° 461 n'est pas adopté.)
La parole est à M. Pierre Gosnat, premier orateur inscrit sur l'article.
Nous voici arrivés à l'article 19 de ce projet de loi MOLLE, projet qui, je le rappelle, avait pour objectif d'afficher une volonté de lutte contre l'exclusion. C'est un bel exposé de bons sentiments, mais qui ne résiste malheureusement pas à la confrontation avec le contenu des articles, notamment celui que nous allons examiner.
Madame Boutin, vous souhaitez lutter contre l'exclusion, et la seule mesure concrète que vous nous soumettez dans cet article est le raccourcissement des délais d'expulsion ! Avouez que c'est tout de même assez significatif !
La lecture du rapport a particulièrement attiré l'attention des députés communistes. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que vos conclusions, monsieur le rapporteur, sont plus que discutables. Dans le rapport, il est mentionné que l'article 19 aura pour conséquence de réduire les cas d'expulsions locatives. Permettez-nous d'en douter ; car la lecture de l'article 19 permet de se rendre compte que les seules dispositions proposées visent à réduire la durée des procédures d'expulsion. C'est là encore assez significatif !
Vous vous en doutez, madame la ministre, nous ne sommes pas dupes des intentions du Gouvernement : si vous souhaitez réduire les délais d'expulsion, c'est en réalité pour satisfaire des propriétaires pourtant déjà bien exigeants.
En effet, l'article 19 supprime la faculté pour le juge d'accorder au locataire un délai suspensif, et ramène de trois à un an le délai durant lequel le juge peut surseoir à la décision judiciaire d'expulsion. Avant l'intervention des sénateurs, le texte originel prévoyait qu'une personne ayant une possibilité d'hébergement – et non plus uniquement de relogement – pourrait être expulsée.
En tout état de cause, la rédaction actuelle de l'article 19, malgré les modifications sénatoriales, créera, à terme, une trappe à précarité et à misère sociale.
Pourtant, selon le dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre, il y a en France 500 000 locataires qui ne peuvent pas s'acquitter de leur loyer et 88 000 personnes qui sont menacées d'expulsion. En moyenne, au cours des dernières années, sur 130 000 contentieux assortis d'une demande de commandement de quitter les lieux, environ 53 000 se sont soldés par la délivrance d'un tel commandement, dont 40 000 avec une demande de concours de la force publique. Cette demande est accordée dans près de la moitié des cas et seule une autre moitié est suivie d'une intervention effective : cela représente donc environ 10 000 cas par an. Si le concours de la force publique est finalement aussi peu sollicité, ce n'est pas parce que l'inexécution de la procédure coûte à l'État, mais avant tout parce que la plupart des procédures concernent des locataires de bonne foi.
Il y a là un amalgame douteux : on voudrait appliquer à l'ensemble des procédures ce qui n'est que très rarement constitué, c'est-à-dire la mauvaise foi du locataire.
La question de fond posée par cet article est la suivante : quels seront les effets de telles dispositions ?
Je vais vous le dire : il y aura une multiplication du nombre d'expulsion, des gens à la rue avec pour seule alternative des solutions précaires d'hébergement, et le rallongement des listes de demandeurs du DALO. Mais, évidemment, celui-ci ne pourra pas répondre à la multiplication de ces situations !
Alors, vous vous en doutez, madame la ministre, les députés du groupe GDR ne peuvent soutenir une telle mesure, qui s'attaque aux plus faibles, à ces familles victimes d'une grande détresse sociale, aux plus pauvres et aux plus démunis. Nous proposons donc de supprimer l'article 19.
J'irai dans le même sens : cette partie du texte pose effectivement un problème. Les articles 19 et 20 ont pour seul but de faire en sorte que les locataires actuels du logement social quittent leur logement, soit après une expulsion, soit parce qu'il est sous-occupé.
Réduire le délai de sursis à exécution d'une décision d'expulsion à un an est une véritable catastrophe. Comme l'ont déjà dit certains de nos collègues, la situation sociale de certaines familles dans nos quartiers est aujourd'hui dramatique – et la crise économique actuelle ne fera qu'aggraver ces difficultés. Les problèmes sociaux rencontrés par un certain nombre de populations dans nos communes empêcheront des locataires de payer leur loyer ; or, on sait bien que la solution n'est pas de mettre ces gens-là à la rue.
Ils ne feraient en effet que grossir les populations dites de la loi DALO, car il faudra les reloger, tandis que dans les appartements dont ils auront été expulsés, ils seront remplacés par ces mêmes populations relogées au titre de la loi DALO. C'est finalement un turn over entre les populations les plus précaires de notre pays qui serait ainsi organisé, et le logement social perdrait le rôle qui est le sien : permettre, en particulier aux populations les plus en difficulté, de disposer d'un logement, leur proposer un accompagnement social, leur offrir une prise en charge plutôt que de les mettre à la rue.
L'année dernière, le nombre d'expulsions a augmenté de manière importante, ainsi que le nombre de recours à la force publique. En revanche, la prise en charge financière de l'État a diminué. Cela jette des gens à la rue, et nous sommes régulièrement amenés, en tant qu'élus, à défendre ces populations.
Je mets de côté les quelques locataires qui décident de mauvaise foi de ne pas payer : nous sommes tous d'accord pour ne pas les défendre. Mais nous parlons ici de populations confrontées réellement à des situations financières dramatiques, et qui ne peuvent vraiment plus payer leur loyer. Il y a souvent des enfants, et les mettre à la rue ne réglera rien, surtout si la prise en charge sociale est absente.
Nous allons donc, nous aussi, proposer la suppression de l'article 19.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Le rapport que j'ai remis à M. le Premier ministre recommande que les pouvoirs publics, et plus généralement tous ceux qui ont, de près ou de loin, la responsabilité du logement et de l'hébergement, n'alimentent plus la rue.
Qu'est-ce que cela veut dire ? Eh bien, tout simplement que, si pendables que soient les cas concernés – en particulier, que le locataire soit de bonne ou de mauvaise foi – et surtout s'il y a des enfants, le concours de la force publique ne soit plus exercé en l'absence de solution de substitution, de rechange. Car le recours à la force publique est, vous l'avez dit, la pire des hypothèses.
Je n'ai pas proposé, comme on me l'avait parfois demandé, de moratoire des expulsions. À l'heure actuelle, la suppression des expulsions serait, de même, une erreur. L'expulsion doit perdurer juridiquement.
En revanche, le concours de la force publique ne doit pouvoir être apporté à l'expulsion que s'il y a une solution de rechange. On ne doit plus alimenter la rue ; on ne doit plus créer de nouveaux sans-abri, de nouveaux sans domicile fixe.
Pour tarir les mesures juridiques d'expulsion, pour tarir même les demandes de concours de la force publique, j'ai proposé, et le Premier ministre a accepté, la création de commissions départementales de prévention des expulsions. Elles seront obligatoires dans chaque département, de façon que les difficultés des personnes, et en particulier des familles, soient saisies le plus vite possible.
Tous ces outils de prévention devraient permettre de ne plus mettre à la rue des hommes, des femmes, des enfants, des adolescents, des familles.
J'ajoute que, lors de mes premières propositions, intervenues au mois de janvier 2008, j'avais proposé au Premier Ministre de donner des instructions aux préfets pour que le concours de la force publique ne soit plus accordé en l'absence de solution de rechange. Par une lettre circulaire du 22 février 2008, M. le Premier ministre a effectivement donné cette consigne aux préfets.
Malheureusement, nous avons vécu un cas dramatique à Istres : quelques semaines après les instructions du Premier ministre, les autorités préfectorales ont accordé le concours de la force publique à l'expulsion d'une femme seule qui avait trois enfants à sa charge. C'est scandaleux ! Au-delà de la loi, au-delà de la réglementation, il y a un devoir de discernement. Même si aucune communication n'avait pu être établie entre les autorités et cette personne, il est évident qu'une telle situation aurait dû interdire d'accorder le concours de la force publique.
Nous allons en parler. Mais, en principe, ce concours ne doit plus être apporté à une expulsion en l'absence de solution de rechange. C'est la politique que j'ai proposée, que le Premier ministre a acceptée, et que les préfets doivent aujourd'hui en principe respecter.
Est-ce que, comme à Saint-Lô, le préfet des Bouches-du-Rhône a été sanctionné ?
Je tiens à prendre la parole sur cet article 19 avant la discussion des amendements, afin de ne pas avoir, sauf exception, à y revenir longuement par la suite.
J'ai bien entendu les inquiétudes des uns et des autres. On me reproche de demander la diminution du délai d'expulsion.
Je pense, je le redis clairement, qu'il faut arriver à comprendre qu'il ne faut pas opposer les locataires aux propriétaires ; les locataires ont besoin des propriétaires, et les propriétaires ont besoin des locataires. L'expulsion est un échec pour la famille, pour le propriétaire, pour l'État.
Depuis que je suis en charge de ce ministère, je n'ai pris qu'une seule mesure favorable aux propriétaires. Aujourd'hui, nous avons mis en place avec les partenaires sociaux la garantie du risque locatif, qui permettra quasiment de supprimer les expulsions. Que l'on soit de bonne ou de mauvaise foi, les commissions départementales, rendues obligatoires, vont pouvoir accompagner la famille dans sa difficulté financière, et ce dès le premier incident de paiement : car celui-ci peut être dû à un accident de la vie, au chômage, à un divorce, ou à tout autre chose.
Je voudrais attirer votre attention sur le fait que lorsqu'on parle des propriétaires, on imagine tout de suite un gros propriétaire, ou un propriétaire institutionnel…
Mais vous le savez comme moi, monsieur Brard : la plupart des propriétaires qui louent un appartement de deux ou de trois pièces sont des gens qui ont fait des économies, et qui louent un petit bien pour améliorer leur retraite.
Voici quelques chiffres très clairs. L'année dernière, il y a eu 28 000 jugements d'expulsion ; parmi eux, 10 000 seulement ont été suivis d'effet. Autrement dit, 18 000 propriétaires, modestes, ont subi des impayés qui fragilisent leur propre situation financière – nous avons tous vu de telles situations dans nos permanences.
C'est pourquoi, dans une volonté d'arrêter d'opposer les uns aux autres, j'ai proposé de réduire le délai de sursis à exécution des décisions d'expulsion de trois à un an, de façon à envoyer un signal aux propriétaires.
Mais vous savez bien qu'actuellement, les personnes pour qui un jugement d'expulsion a été rendu ne peuvent être expulsées avant le 15 mars. Or, la garantie du risque locatif sera mise en place avant le 15 mars ; les commissions départementales de prévention des expulsions seront elles aussi mises en place dès le vote de cette loi.
C'est la raison de cette proposition. Ce n'est pas parce que, tout d'un coup, je serais devenue une femme sans plus aucune sensibilité sociale : je veux la paix entre les uns et les autres.
Ne l'oublions pas, si les propriétaires ont besoin des locataires, les locataires ont besoin des propriétaires pour trouver un logement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la ministre, je trouve consternant que le seul argument que vous avanciez pour justifier la réduction de ce délai de trois ans à un an soit d'adresser un signe aux propriétaires, comme si c'était la contrepartie aux réactions qu'a suscitées la réduction en nombre de mois de la caution.
Nous le répétons depuis le début du débat, l'offre est très insuffisante par rapport à la demande.
Cela crée un rapport de force infiniment favorable aux propriétaires, au détriment des locataires.
C'est le cas de tous les marchés qui sont tendus, c'est-à-dire ceux qui représentent 90 % des problèmes.
La réduction du délai de sursis à exécution va inévitablement aggraver les difficultés de nombre de nos concitoyens.
Mais cela ne va pas être appliqué !
Ce délai était nécessaire pour que s'enclenche toute une série de services sociaux, de concertations, pour essayer de trouver une solution raisonnable et éviter, comme le disait excellemment M. Pinte, qu'on « alimente la rue ». En le réduisant, vous allez raccourcir le temps nécessaire à la concertation et donc accroître inexorablement le nombre de locataires expulsés. C'est pourquoi nous nous opposons avec force à cet article et nous en demandons la suppression.
La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 615 .
Je l'avoue, j'ai beaucoup plus apprécié l'intervention du rapporteur pour avis, M. Pinte, que celle de Mme la ministre.
Le problème n'est pas entre propriétaires et locataires.
Ça, c'est à la marge finalement. Quand un locataire de bonne foi reçoit un préavis de licenciement par exemple, ce qui, malheureusement, se produit souvent en ce moment, il ne peut plus rien faire. Même s'il sait qu'il ne va plus pouvoir payer son loyer parce qu'il va être licencié, il ne peut pas chercher un autre logement, il est obligé de rester dans celui qu'il occupe. Or, un jour, les indemnités ASSEDIC ne permettent plus de faire face au loyer. C'est une réalité : la perte d'un emploi est souvent le motif du non-paiement des loyers, avec les divorces ou les maladies.
Cela ne sert à rien de dire qu'il ne faut pas opposer propriétaires et locataires. Quand un locataire de bonne foi ne peut plus faire face à son loyer, il perd son droit à l'allocation logement dès le premier incident, s'il en avait un. En effet, l'allocation logement, ou l'APL, est fixée en fonction des revenus du locataire, donc s'il ne paie pas son loyer, il n'a plus d'APL ou d'allocation logement. Mais c'est absurde car cela le fait plonger un peu plus.
Ce n'est pas la première fois que nous soulevons cette question mais nous n'obtenons aucune avancée en la matière. Il serait plus intéressant de prévoir que le locataire se retrouvant au chômage peut demander que son allocation logement soit directement versée au bailleur. Cela permettrait aux bailleurs de récupérer une partie du loyer.
Le fait que l'État doive se substituer aux locataires en cas de non-expulsion alors qu'il y a eu un jugement d'expulsion coûte de l'argent à l'État.
Il est quand même invraisemblable, humainement, de se dire que, même si cela coûte de l'argent, on renvoie ces gens à la rue.
Même économiquement, c'est absurde : cela coûte moins cher de prévoir un fonds de solidarité permettant de faire face au paiement des loyers de ces locataires qui se retrouvent dans l'impossibilité d'assumer, partiellement ou en totalité, leurs loyers, que de devoir assurer un suivi social de ces locataires et de leurs familles.
Au final, il y a des personnes à la rue alors que nous avions décidé à l'unanimité, dans la loi DALO – vous siégiez sur ces bancs avec nous, madame la ministre…
…qu'une personne prise dans les dispositifs d'hébergement ne pourrait plus être renvoyée à la rue. C était une avancée notable.
Cela n'a pas changé, il ne faut pas faire d'amalgame !
La crise est telle que même cette disposition n'est plus respectée parfois – à Paris par exemple.
Expulser des gens et les renvoyer à la rue, ce qui va être fait à partir du 15 mars, c'est absurde socialement, humainement et économiquement.
Cet article 19 ne fera qu'aggraver la situation. C'est inadmissible. C'est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
Il faut avoir conscience de l'ampleur du phénomène, on ne peut pas en rester aux chiffres qui sont évoqués, 10 000, 18 000… Nous savons qu'aujourd'hui, 500 000 foyers environ sont dans une situation de quasi-cessation de paiement de leurs loyers et de leurs charges. Et le nombre de personnes menacées d'expulsion est beaucoup plus important que vous ne le dites.
On peut craindre qu'avec les 45 000 chômeurs supplémentaires que nous comptons depuis le mois de décembre, le phénomène va s'accélérer. C'est un véritable problème de société, qu'on ne peut pas traiter simplement en agitant la menace du bâton : cela ne servira à rien.
Or quel signal donnons-nous aux gens qui sont dans la plus grande précarité ? Que, demain, ils pourront, plus rapidement que dans le passé, être mis à la porte.
C'est faux, parce que cela, on ne va pas le faire.
Certes, les personnes qui sont dans la précarité la plus totale ne retrouvent pas une situation stable en six mois. Mais la non-exécution d'une expulsion au cours de la première année, deuxième année, voire troisième année, peut permettre de trouver des solutions. C'est donner du temps au temps.
J'ai beaucoup apprécié l'intervention de M. Pinte.
On dit la même chose avec M. Pinte.
Je le répète, il ne s'agit pas d'être contre l'expulsion, qui est de toute façon un échec social. Elle ne peut être utilisée qu'à la marge et ne saurait constituer une solution à un vrai problème de société.
Je termine.
Je suis d'accord avec M. Pinte et, à la rigueur, avec ce que dit Mme la ministre, sauf que les procédures qu'elle évoque n'existent pas.
Monsieur Pinte, si vous avez transmis un message à M. Fillon, il ne vous a pas entendu.
Puisque, aujourd'hui, la seule réponse du Gouvernement, c'est de réduire le délai de sursis à exécution des décisions d'expulsion de trois ans à un an.
C'est une question d'équilibre, il ne peut y avoir de discours à sens unique : certes, il y a des gens menacés d'expulsion qui vivent des situations dramatiques mais il y a aussi, ne l'oublions pas, plus de 40 % des propriétaires qui complètent leurs retraites avec la location d'un logement.
De très nombreux petits propriétaires ont besoin de ces 300 euros de loyers pour compléter leurs retraites de 700 ou 800 cents euros. J'essaie de n'oublier ni les uns ni les autres.
M. Pinte a parfaitement explicité la chose. Il existe deux cas de figure : premier cas, l'immense majorité, les gens de bonne foi. Pour eux, ne faisons pas comme si, aujourd'hui, il n'existait aucun service social d'accompagnement, aucune prévention.
Nous ne partons pas de rien, et je ne peux pas vous laisser dire qu'on reviendrait à la barbarie. La prévention existe, les services sociaux existent.
Par ailleurs, la garantie des risques locatifs se met en place. Enfin, on l'a bien dit, ce n'est pas le retour à la rue. Pour les gens de bonne foi, il existe tout un tas de mesures d'accompagnement social – et Dieu sait si c'est important – pour les remettre sur pied et éventuellement solder leurs arriérés. Tout cela va plutôt dans le bon sens.
Que fait le juge ? Il exécute une décision qui a été prise. Auparavant, il y a quand même eu la décision de jugement et l'instruction a pris en compte tout ce que je viens d'indiquer. La plupart des jugements instruisent les situations en amont. On ne prend pas des jugements à la légère en demandant l'expulsion à la moindre occasion de non-paiement.
Je parle de l'immense majorité des juges en qui, j'ose l'espérer, nous avons confiance ici.
Le problème, c'est le deuxième cas de figure, celui des locataires de mauvaise foi. Qu'ils puissent être obligés de libérer des lieux qu'ils occupent en parfaite mauvaise foi sans rien vouloir corriger de leur comportement parfois irresponsable – comme il existe des propriétaires qui ne sont pas corrects, il existe des locataires qui ne sont pas corrects – me semble justifié et le texte me semble parfaitement équilibré. C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
Le Gouvernement a déjà donné un avis défavorable.
La parole est à M. Jacques Lamblin.
Bien que le rapporteur, qui a été véhément, n'ait pas besoin de soutien particulier, je voudrais donner mon opinion.
On a presque tous ici à connaître le fonctionnement des bailleurs sociaux, des offices.
Sans doute, mais on peut observer ce qui se passe chez eux.
Au regard du nombre de foyers qui ont quelques difficultés à payer leurs loyers, le nombre d'expulsions réellement prononcées est relativement faible. Je crois que vous noircissez considérablement la situation.
Par ailleurs, avant que le jugement d'expulsion ne survienne, il y a quand même une période probatoire, une période d'observation, une période pendant laquelle les travailleurs sociaux essaient d'intervenir. Le jugement d'expulsion n'intervient bien souvent qu'en dernier recours. Ensuite, avant que le jugement d'expulsion ne soit mis en oeuvre, avant qu'il n'y ait un recours à la force publique, M. Pinte l'a souligné, je l'observe dans la ville dont j'ai la responsabilité…
…avant que le sous-préfet n'apporte le concours de la force publique, il y a toujours une solution de remplacement qui est prévue. Quoi que vous disiez, c'est la situation actuelle. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Dernière remarque, qui n'est pas la moindre, l'épée de Damoclès de la sanction reste, qu'on le veuille ou non, nécessaire.
Sans elle, il est à peu près certain que le taux d'impayés augmenterait. D'ailleurs, vous l'avez sans doute constaté comme moi, les locataires qui paient leurs loyers n'éprouvent pas forcément la plus grande compassion envers ceux qui ne le paient pas parce qu'ils n'ont aucune envie de voir l'OPH dont ils sont les locataires éprouver des difficultés financières à cause des mauvais payeurs.
Je voudrais souligner certains points.
Pour en avoir fait, en vingt-cinq ans, des référés ou des exécutions en matière d'expulsion, je peux vous dire que la réalité humaine ne doit pas nous échapper.
Vous avez bien fait, monsieur Lamblin, d'évoquer la situation des propriétaires, mais il faut aussi évoquer celle des locataires.
Il y a deux problèmes de nature différente. Il y a, d'abord, les décisions de justice définitives et exécutoires, que l'État n'exécute pas parce que, pour des raisons diverses et variées, les préfets n'accordent pas le concours de la force publique. Dans ce cadre, je vous rappelle que l'État doit indemniser les propriétaires. Cette indemnisation est complexe à mettre en oeuvre et elle est maintenant forfaitisée. J'ai toujours pensé que l'État voulait se décharger de cette obligation incontournable d'exécuter les décisions de justice. Il y a d'ailleurs une volonté manifeste, depuis des années, de réduire les enveloppes liées à cette obligation.
Ensuite, il y a l'appel de la décision du juge. C'est la loi qui imposait au juge de fixer un délai allant de trois mois minimum à trois ans. L'article 19 évoque deux articles du code de la construction et de l'habitation : l'article L. 613-1 et l'article L. 613-2. Je vais vous lire l'article L. 613-2 pour que vous mesuriez ce que le juge a l'obligation de faire, qu'il soit juge des référés ou juge de l'exécution : « La durée des délais prévus à l'article précédent ne peut, en aucun cas, être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans. Pour la fixation de ces délais, il doit être tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations,… » Cela veut dire que la première chose que fait le juge qui accorde les délais, c'est tenir compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution des ses obligations. Je n'ai jamais vu un juge accorder des délais à quelqu'un qui était manifestement de mauvaise foi.
Puis l'article L. 613-2 stipule que le juge doit tenir compte « des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. »
J'estime que cet article est très bien fait. Il prône l'exacte obligation qu'a le juge d'appréhender les intérêts, qui sont toujours contradictoires, et d'estimer l'opportunité d'accorder des délais ou non. Et si j'ai cité l'article L. 613-2 c'est pour montrer que tout ce que vous avez évoqué est déjà dans la loi. Il n'est donc pas justifié de réduire le délai de trois à un an alors que les éléments pris en considération pour accorder ce délai sont clairs, précis, extrêmement forts. Et dans cet article, il est autant tenu compte des intérêts du propriétaire que de ceux du locataire.
La vrai difficulté est de savoir comment faire pour offrir une solution de relogement à quelqu'un qui ne peut pas payer un loyer libre. En outre, il y a le processus des préventions.
Nous considérons que le dispositif législatif actuel tient compte des intérêts contradictoires et que toute tentative de réduire les délais est révélatrice d'une intention de l'État de ne plus assumer ses obligations financières. C'est le budget de l'État qui motive cette décision.
Au-delà des arguments de M. Le Bouillonnec, auxquels nous souscrivons totalement, une telle disposition est saisissante par son manque de nuances. Vous ne faites, en effet, aucun distinguo entre propriétaires. Vous avez évoqué les petits propriétaires, mais vous oubliez les propriétaires de Robien. Or, ils ne sont pas franchement dans la même situation. En durcissant la législation dans une période tendue, vous augmenterez mathématiquement le nombre de personnes expulsées. En effet, et je rejoins là ce que disait M. Bouillonnec, le temps manquera pour juger au fond de la situation.
Et une fois que ces personnes auront été expulsées, où les enverrez-vous ? Vous dites qu'il y aura une solution, mais laquelle ? Les logements d'urgence ! Outre que cela n'est pas une solution sociale, il ne me semble pas qu'il y en ait pléthore ! Madame la ministre, vous choisissez le pire des moments. Si votre seule motivation est de faire un geste vers les propriétaires, commencez à faire le distinguo parmi eux !
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Il faut rappeler quelles sont toutes les dispositions de prévention avant une éventuelle expulsion.
Premièrement, j'ai demandé, dans mon rapport, qu'il y ait, dans tous les baux privés, une disposition obligeant le propriétaire privé, lorsque le loyer n'a pas été payé au bout de deux mois maximum, à avertir les services sociaux, ce que font systématiquement les bailleurs sociaux mais pas les bailleurs privés pour de multiples raisons. Il est important que cette disposition figure dans tous les baux afin que les propriétaires prennent aussi leurs responsabilités et n'attendent pas trop longtemps les impayés.
Deuxièmement, quelqu'un a dit tout à l'heure que l'on pourrait continuer, en cas de non-paiement, à faire bénéficier le propriétaire de l'allocation logement. Cela existe déjà, encore faut-il que le locataire soit d'accord pour que cette allocation soit versée directement au propriétaire. C'est important.
Troisièmement, grâce aux enquêtes sociales réalisées en amont, les commissions départementales de prévention des expulsions devraient pouvoir apprécier de façon juste la situation dans laquelle se trouvent ceux qui sont susceptibles d'être expulsés avant que le juge prenne une décision d'expulsion. Je le répète, j'ai demandé qu'en tout état de cause, plus personne ne soit mis à la rue, qu'il s'agisse de gens qui sortent de prison, d'hôpitaux psychiatriques, ou de jeunes mères sortant de maternité avec leur enfant. C'est cela qui est important.
Vous nous demandez quelle est la solution. C'est du cas par cas. On peut passer du privé au bailleur social, du PSL au PLUS ou au PLAI. Et, dans la pire des hypothèses, on pourrait faire appel aux centres d'hébergement et de réinsertion sociale car, en tout état de cause, comme l'a dit Mme Billard, le coût social, médical et psychiatrique de quelqu'un qui est à la rue est énorme.
(Les amendements identiques nos 462 , 615 et 936 ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi d'un amendement n° 463 .
La parole est à M. François Pupponi.
Cet amendement vise à étendre la trêve hivernale, période pendant laquelle il ne peut être procédé à aucune expulsion. J'ai été gêné par les interventions du rapporteur et de M. Lamblin. J'ai l'impression que nous ne vivons pas dans le même pays ! Tout ce qu'ils expliquent, c'est parfait en théorie,…
…mais cela ne peut s'appliquer dans les quartiers sociaux les plus dégradés, ceux qui ont complètement basculé. Lorsque plusieurs centaines de familles sont en situation d'impayés et que vous n'avez que quinze assistantes sociales pour prendre en charge l'ensemble des problèmes sociaux d'une commune de plus de 60 000 habitants, celles-ci n'arrivent même plus à rencontrer toutes les familles concernées. La prise en charge, c'est parfait en théorie. Si le système fonctionne bien, au bout de deux mois d'impayés le bailleurs social alerte les services sociaux qui rencontrent les familles et font un travail. Mais malheureusement, faute de moyens financiers et de prise en charge, les services sociaux ne sont plus capables de mettre en oeuvre ces mesures. Et il nous arrive régulièrement de voir arriver, début mars, dans nos permanences des gens qui ont reçu leur lettre d'expulsion. Il est alors souvent trop tard, car ils nous appellent la veille du passage de la police et de l'huissier. En effet, et on ne peut pas leur en vouloir, pendant des années, ils ont occulté cette réalité sociale, oublié les lettres qu'on leur envoyait, refusé la main qui leur était tendue. J'en parle avec beaucoup de passion, car la lettre arrive souvent dans des foyers où les enfants vivent quotidiennement dans le stress, car les parents leur demandent de se préparer au cas où la police viendrait. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Tous les vendredis après-midi je fais des permanences sans rendez-vous. Si vous voulez, je vous y invite. Vous verrez alors ce que c'est que la misère sociale des familles en grande détresse ! Et l'expression de cette angoisse perturbe aussi les enfants.
Monsieur le rapporteur, nous ne demandons pas la suppression des expulsions ! Nous souhaitons donner un peu plus de temps pour que la prise en charge sociale permette de régler le problème. Vous ne pouvez donc pas nous dire que nous sommes contre les expulsions et que vous, vous protégez les propriétaires. Ce n'est pas le débat. Il s'agit de mettre en oeuvre tous les moyens pour éviter l'expulsion d'un locataire et si, malgré tout, celle-ci intervenait, il faut trouver une solution de remplacement,…
…car il n'est pas digne qu'une société mette des familles à la rue. Voilà pourquoi cet amendement vise à prolonger la trêve hivernale.
On ne peut ignorer que des mécanismes infernaux se mettent parfois en place dès le début des difficultés rencontrées par certaines familles. Je prendrai un seul exemple, celui des aides au logement. Il suffit d'un décrochage d'un mois pour qu'il n'y ait plus de quittance, donc plus d'aides au logement.
Il se passe des mois avant qu'un accord soit conclu entre le bailleur et le locataire défaillant, dont la dette ne cesse d'augmenter. Le retour en arrière devient impossible. On nous répondra que le locataire doit se mettre en rapport avec les travailleurs sociaux. Mais ceux-ci ne peuvent pas faire de miracle, compte tenu des difficultés auxquelles ils sont confrontés : absence de solution de rechange, pénurie de logements adaptés à la taille de la famille, refus de certains bailleurs sociaux de prendre en compte le cas de personnes endettées. Ainsi, les difficultés s'enchaînent et s'aggravent au fil des mois.
M. Pinte a expliqué tout ce qu'on pouvait tenter pour éviter de mettre quelqu'un à la rue. Mais il suffit de regarder la réalité pour comprendre que ces dispositifs ne sont ni appliqués ni applicables. Il faut par conséquent tout faire pour éviter l'expulsion, qui est neuf fois sur dix une situation irrémédiable.
Je ne comptais pas prendre la parole sur cette question, mais je veux réagir aux interventions que je viens d'entendre. Mme la ministre, qui entend réduire les délais d'expulsion, refuse en même temps d'allonger la trêve hivernale. Certes, elle prétend vouloir installer en amont des dispositifs d'alerte, mais j'ai du mal à y croire.
M. Pupponi, député-maire de Sarcelles, a cité des exemples précis. On pourrait en trouver d'autres à Paris.
Tout comme à Toulon, à Pau, à Châteauroux…
Beaucoup de gens viennent nous voir dans nos permanences, qui sont généralement passés par toutes les étapes, de sorte qu'il est bien tard quand ils s'adressent à leurs élus. Souvent, ils seront expulsés une semaine après la fin de la trêve hivernale, et nous avons du mal à trouver une solution. Cela signifie que le système ne fonctionne pas.
Il suffit d'écouter les assistantes sociales pour comprendre qu'elles sont complètement débordées. Beaucoup de gens, qui peuvent être de bonne foi, échappent totalement à la règle. D'autres peuvent se retrouver à la rue à la suite de ce qu'on nomme élégamment un « congé-vente ». Quand le prix du foncier monte, beaucoup de propriétaires veulent, en fin de bail, récupérer leur logement pour leur famille, ce qui est évidemment leur droit.
Contrairement à ce que voudrait faire croire Mme la ministre, nous n'opposons pas les propriétaires aux locataires. Comment les opposerait-on, d'ailleurs, dans un pays qui compte 50 % de locataires ? Ceux-ci ont besoin de propriétaires, comme les propriétaires ont besoin de locataires. Mais, si un droit est défendu, dans notre pays, c'est bien celui de la propriété. Si chaque propriétaire a le droit de récupérer son logement en fin de bail, comment vérifier qu'il ne le reloue pas deux ou trois ans après ? Les moyens dont nous disposons dans ce domaine ne sont pas très fiables.
Mme la ministre répète volontiers que son projet de loi contient peu de dispositions en faveur des propriétaires. Elle a raison, mais n'oublions pas qu'ils sont déjà protégés par le droit. C'est pourquoi nous voyons arriver dans nos permanences des familles qui seront expulsées prochainement, souvent au terme de procédures qui ont duré pendant plus de deux ans, simplement parce qu'un propriétaire a décidé de récupérer son bien et qu'il y a pénurie de logements.
Un mot encore, parce qu'il faut dire la vérité : globalement, en France, les locataires sont de meilleurs payeurs que dans bien d'autres pays.
Il ne faut donc pas laisser croire le contraire. Ceux qui, volontairement, n'acquittent pas leur loyer ne représentent pas plus de 2 à 3 % de l'ensemble des locataires.
C'est l'impression qu'on a quand on entend vos discours et que l'on constate que vous refusez d'allonger la trêve hivernale, tout en nous proposant de réduire les délais d'expulsion.
Une fois encore, vous refusez de prendre en compte la réalité. Mais, nous, nous y sommes confrontés tous les jours sur le terrain.
Moi non plus, je n'avais pas l'intention d'intervenir dans le débat, dont le sujet m'intéresse pourtant beaucoup. Pour être député de Calais, je connais, outre les problèmes qui viennent d'être évoqués, celui des migrants qui ne sont même pas protégés par la trêve hivernale.
Je condamne très fermement les propos tenus ce matin sur Europe 1 par M. Besson. Je ne veux pas faire de cet hémicycle une tribune, mais je tiens à dire que son intervention est scandaleuse. Il sait que toutes les associations qui travaillent pour les personnes en difficulté, notamment celles qui sont dans la rue, ne peuvent accepter que l'on parle comme il l'a fait.
À Calais, comme dans d'autres grandes villes, on rencontre des gens en difficulté, même quand ils travaillent. S'ils peuvent être relativement protégés quand ils ont un logement social, ils ne le sont plus du tout quand ils habitent dans le domaine privé. L'amendement n° 463 ne vise qu'à étendre de deux fois quinze jours la trêve hivernale. Il ne s'agit que de prendre en compte l'intérêt de la population. Quel problème cela pose-t-il ? Qu'est-ce qui vous empêche de soutenir un amendement aussi consensuel, madame la ministre, monsieur le président Ollier, sinon un refus idéologique ? L'amendement ne vise qu'à allonger la trêve hivernale d'un mois : c'est important pour tous, mais aussi pour l'unité nationale.
(L'amendement n° 463 n'est pas adopté.)
Alors que nous discutons d'un projet de loi de lutte contre l'exclusion, l'article 19 vise à accélérer encore les procédures d'expulsion des locataires du parc locatif privé. Il y a là, avouez-le, madame la ministre, une belle contradiction.
Bien entendu, nos amendements n'ont pas pour objet de nier le droit légitime du bailleur à disposer de son bien, mais vous conviendrez qu'il y a une marche entre ce droit d'un propriétaire sur son bien et la réduction des délais d'exécution du jugement d'expulsion d'un locataire de bonne foi, telle que vous nous la proposez.
J'insiste sur la bonne foi des locataires, car vous n'êtes pas sans savoir que ceux qui ne paient pas leur loyer représentent une part presque négligeable de l'ensemble des locataires, et que, parmi eux, ceux qui, de bonne foi, ne peuvent plus payer pour des raisons économiques – chômage, temps partiel subi, problèmes de santé empêchant de travailler… –, se trouvent dans des situations précaires ou sont en phase de précarisation, forment la majorité. Ces publics de bonne foi ne méritent pas qu'on les expulse, bien au contraire ! Ils méritent que l'obligation de solidarité de l'État joue en leur faveur.
La réduction des délais d'expulsion que vous nous proposez serait éventuellement recevable si nous disposions en France d'un nombre suffisant de structures vouées à l'accompagnement des personnes privées de leur logement ou sous le coup d'un jugement d'expulsion. Mais, en leur absence, en l'absence de dispositifs de prévention permettant de prévenir les situations d'impayés, en l'absence de dispositifs d'intermédiation qui permettraient d'éviter les expulsions, cette réduction des délais aura deux conséquences majeures et particulièrement préoccupantes. Elle contribuera à précariser davantage les anciens locataires de bonne foi et elle augmentera le nombre de dossiers déposés au nom de la loi sur le droit au logement opposable.
L'expulsion des locataires de bonne foi est d'une violence traumatisante pour ceux qui la subissent. Vous ne pouvez l'ignorer, à moins de faire preuve d'une inhumanité qui ne dit pas son nom.
Avec cet article 19, vous déséquilibrez complètement les droits des locataires et des propriétaires, au bénéfice des seconds. Or cet équilibre est un des principes de notre droit, et nous considérons, même si ce n'est pas le cas de votre majorité, que, dans un contrat, la partie faible doit bénéficier de mesures de sûreté qui la prémunissent de l'arbitraire de son cocontractant et de la violence sociale qui pourrait la frapper.
C'est pourquoi, madame la ministre, nous vous proposons de revenir sur les délais que vous avez prévus dans cet article.
Je ne défendrai pas un à un les amendements de cette série, dont l'objet est identique. Vous n'aurez que l'embarras du choix. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe GDR.)
Ces amendements ont le même objet. La commission a émis le même vote défavorable.
Je suis saisi d'un amendement n° 614 .
La parole est à Mme Martine Billard.
L'amendement propose que le préfet sursoie à l'expulsion qui aura été ordonnée judiciairement, chaque fois qu'un locataire répondant aux critères de l'article L. 300-1 du code de la construction et de l'habitation, c'est-à-dire reconnu prioritaire au titre de la loi DALO, parce qu'expulsé sans possibilité de relogement, n'aura pas été relogé dans des conditions normales.
Il ne s'agit pas d'interdire les expulsions, a dit tout à l'heure Étienne Pinte, mais d'éviter qu'aucune solution de remplacement ne soit proposée. Je me retrouve tout à fait dans ce propos. Je n'ai jamais déposé d'amendement visant à supprimer les expulsions. C'est l'absence de relogement qui me choque, surtout quand l'expulsion est due à un défaut de paiement du loyer, et non à des troubles de voisinage.
Il faut que le bailleur privé ou social puisse percevoir les loyers prévus dans le contrat de location. Peu lui importe, en fait, d'où vient ce paiement. Au lieu d'expulser le locataire, mieux vaudrait donc le maintenir dans le logement, grâce à un fond de solidarité qui prendra le relais, tant qu'il ne peut pas payer la totalité du loyer.
La loi DALO a apporté une petite avancée. Mais il faut qu'elle ait des conséquences. Je vous propose donc qu'un locataire reconnu prioritaire au titre de ce texte ne puisse être expulsé tant qu'un logement ne lui aura pas été proposé. Je rappelle qu'à Paris, environ cent cinquante relogements ont été effectués au titre de la loi DALO, alors qu'un nombre bien plus important de familles ont été reconnues comme répondant aux critères de ce texte, le nombre de dossier déposés étant bien plus important encore.
Il y a confusion entre le pouvoir du juge et celui du préfet. Avis défavorable.
Défavorable.
(L'amendement n° 614 n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour défendre l'amendement n° 944 .
L'article 19 propose de réduire les délais d'expulsion et de limiter les possibilités pour le juge de surseoir à une décision judiciaire son second alinéa modifiant l'article L. 613-2 du code de la construction et de l'habitat. Jusqu'alors les locataires frappés d'une décision d'expulsion pouvaient bénéficier d'un sursis dans un délai s'étalant de trois mois à trois ans. Le présent article ramène ce délai à un an.
Nous nous opposons à cette mesure ! Dans le contexte actuel elle nous paraît tout à fait incohérente. À ce propos je vais revenir sur le sondage auquel nous avons fait allusion lors de la défense de l'amendement de suppression. Près d'un Français sur deux – 48 % – pense qu'il pourrait devenir un jour SDF. Ce sondage BVA pour l'Association Emmaus-La Vie-L'Humanité montre que cette crainte de l'exclusion touche 62 % de la population des 35-49 ans et jusqu'à 74 % des ouvriers ! C'est dire à quel point nos compatriotes vivent sans l'angoisse.
Au moment où l'industrie est le secteur le plus durement touché par la crise, le vote de cette disposition ne fera que renforcer la crainte ressentie en particulier par les ouvriers.
Il est impensable que vous ne preniez pas en compte le nouveau contexte national sur lequel le Président de la République a disserté ce soir, sans apporter aucune réponse. Nous sommes en pleine crise économique et sociale couplée d'une crise du logement et vous proposez d'accélérer les procédures d'expulsion et de limiter les recours suspensifs. Que feront ces familles et ces locataires poussés hors de leur logement, à l'heure où l'accession au logement social se raréfie ? La demande d'HLM n'a jamais été aussi importante, et le taux de mobilité dans ce parc de logements s'est réduit : de 12,4 % en 1998, il est passé, depuis 2005, sous la barre des 10 %, taux qui n'est pas surprenant dès lors que le loyer moyen du secteur privé était presque deux fois supérieur au loyer HLM au 1er janvier 2007.
Nous sommes donc dans une impasse. Raccourcir les procédures d'expulsion est fondamentalement une mauvaise idée. Au contraire, il faut trouver des solutions pour prévenir les expulsions et mettre en place des démarches d'accompagnement social pour aider au maintien dans les lieux.
La modification introduite par le projet de loi ne réglera rien ; elle ne fera que précariser davantage des familles déjà plongées dans de grandes difficultés
Pour ce qui est de la loi DALO, en poussant des milliers de locataires vers la sortie vous allez gonfler les listes d'attente ; l'arrivée de ces publics prioritaires ne fera que rallonger une procédure pourtant déjà peu efficace.
Le raccourcissement des procédures d'exclusion ne serait pas un tel problème s'il y avait en France suffisamment de logements sociaux, de places d'hébergement et de logements de transition. Ce n'est malheureusement pas le cas. Chacun a entendu Etienne Pinte, chacun connaît l'engagement et la liberté d'esprit de notre collègue pour défendre ses convictions, y compris pour s'opposer au Gouvernement qu'il soutient.
Mais nous sommes d'accord avec lui.
Je ne dis pas cela par flagornerie, et je ne voudrais pas lui nuire. (Rires)
Dans la mesure où il n'y a pas de possibilité de trouver un logement, Etienne Pinte a raison quand il dit que personne ne doit être jeté à la rue.
Dans nos communes, des enseignants nous disent parfois que tel gamin se montre soudain violent à la récréation, ou devient très renfermé. C'est qu'à la maison, l'angoisse s'est installée avec la peur de voir arriver l'huissier et la police. Parfois, ils n'en sont pas à leur première expulsion. Voilà des enfants marqués pour la vie, qui ont déjà un boulet au pied.
C'est pourquoi nous proposons de revenir sur le raccourcissement des délais durant lesquels le juge peut surseoir à une décision d'expulsion.
S'il y avait suffisamment de logements pour atteindre l'objectif défini par Etienne Pinte, cela ne poserait pas de problème, mais ce n'est pas le cas, en particulier dans les grandes agglomérations. Ainsi, on compte 100 000 demandeurs à Paris et 60 000 en Seine-Saint-Denis.
Madame la ministre, je ne mets pas en cause la sincérité de vos propos, mais il y a un gouffre entre ce que vous dites et la possibilité de le réaliser. Vous n'avez pas les moyens de le combler dans le court terme, et comme le Gouvernement ne prend pas les décisions qu'il faudrait, on n'est pas prêt de s'en sortir.
Mais je ne répondrai qu'une fois, à condition que le rapporteur dise quelque chose. Sinon je serai obligé d'être plus long. (Sourires.)
Monsieur Brard, malgré la délicatesse dont vous avez fait preuve à l'égard de certains d'entre nous,…
Monsieur le président, puisque vous vouliez considérer que nos deux amendements suivants ont été défendus, j'ajouterai quelques mots.
Mme la ministre a souligné qu'il ne fallait pas opposer propriétaires et locataires. C'est un peu comme quand on nous dit de ne pas opposer les riches et les pauvres : c'est bien connu, il faut des pauvres pour que les riches les tondent !
Cela étant, les propriétaires ne sont pas un groupe homogène. Il y a certes de petits propriétaires, mais certains sont âpres au gain, inexorables, car être petit propriétaire n'est pas un brevet de sainteté. En revanche vous n'avez pas du tout parlé des gros, les assurances, les banques les gens implacables qui passent à l'essoreuse les maigres revenus de leurs locataires, qui ne sont accessibles à aucun sentiment humain. Madame la ministre, vous seriez plus crédible si vous faisiez la différence entre ces deux catégories, mais ne l'avez pas faite.
Cette question est très liée à l'augmentation considérable des loyers dans le secteur privé. Alors que le loyer représentait 18 % des revenus d'un ménage en 1984, ce pourcentage a été de 30 % en 2006. Dans le même temps, il est passé de 17 % à 23 % dans le parc public. Et c'est alors que la situation est difficile que vous donnez un tel signe en ce qui concerne les expulsions.
Jean-Pierre Brard a parlé des propriétaires à gros cigare.
Parmi ces propriétaires, certains sont connus, mais ne sont jamais dénoncés par nos juges, qui devraient être plus attentifs, M. Le Bouillonnec a raison quand il demande qui sont les gens qui réclament les expulsions. Ce sont souvent les marchands de sommeil, qui possèdent des dizaines de taudis. Ce sont eux qui demandent des expulsions et, ayant la loi de leur côté, les obtiennent, contre des gens très fragilisés. Cela est plus difficile dans le secteur public, où il y a souvent des associations de locataires. Néanmoins les personnes les plus touchées sont isolées et souvent au fond de la misère.
Les réalités sont très différentes selon les lieux. A Castres par exemple, des petits commerçants des artisans, louent un ou deux logements au plus, pour compléter leur retraite. Ils sont parfois en grande difficulté en raison du comportement des locataires. C'est aussi une réalité sociale.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 19.
La parole est à M. le rapporteur pour défendre l'amendement n° 187 .
Lorsque des locaux à usage d'habitation sont de toute évidence impropres à cet usage, sans avoir fait l'objet d'une interdiction administrative d'habiter, faute de plainte ou de signalement, le juge, saisi par le bailleur ou le locataire dans un conflit locatif, est amené à constater que ces locaux ne peuvent effectivement pas être loués et à condamner le bailleur à des dommages et intérêts pour troubles de jouissance. Cependant, ne pouvant pas être loués, ils ne pouvaient pas être donnés à bail et le juge prononce alors la nullité du bail ou sa résiliation. Dans ces cas, l'occupant dénué de titre d'occupation est donc expulsé.
Cette situation n'est évidemment pas satisfaisante et nombre de juges ont soulevé cette difficulté. Aussi l'amendement n° 187 prévoit-il que, dans ces cas, le bailleur ne puisse pas arguer du caractère inhabitable des locaux pour demander et obtenir l'expulsion des occupants, ce qui nous choque autant que vous.
Cet amendement va dans le sens du rapport de M. Pinte, que je soutiens. Il n'y a pas l'épaisseur d'une feuille de papier à cigarettes entre nous.
Je suis donc favorable à l'amendement.
Il est effectivement scandaleux qu'un propriétaire qui a loué avec bail un local qui était impropre à l'habitation puisse ensuite se prévaloir de cette insalubrité contre le locataire.
Ce qui me gêne, monsieur le rapporteur, c'est que vous n'alliez pas jusqu'au bout du raisonnement. Vous proposez que le locataire ne puisse plus être expulsé, ce qui signifie que vous le maintenez dans des locaux impropres à l'usage d'habitation, et, par ailleurs, vous ne prévoyez aucune sanction contre le propriétaire indélicat. Il ne pourra plus se prévaloir de l'état de son local pour en expulser les habitants : voilà la seule et unique sanction qu'évoque votre amendement.
Je sais, monsieur le rapporteur qu'il est possible d'engager des procédures, mais il faut que nos travaux précisent que le propriétaire doit être lourdement sanctionné, cela aurait au moins pu être signalé dans l'exposé sommaire de l'amendement.
Par ailleurs, nous devons prendre garde à ne pas créer une nouvelle injustice, le rapport de M. Pinte soulève ce point. En effet, dans le cadre de la loi DALO, les locataires qui occupent des locaux impropres à l'usage d'habitation sont prioritaires pour bénéficier de l'attribution de logements dans le parc social public, alors que d'autres attendent déjà depuis dix ou quinze ans. Des propriétaires peuvent donc en profiter pour attirer dans des logements insalubres, qu'ils louent à des prix prohibitifs, une population à laquelle ils promettent qu'elle deviendra ensuite prioritaire quand elle s'adressera au maire de la commune. Quinze jours après avoir relogé une personne qui vivait dans des conditions inacceptables, j'en ai ainsi reçu une autre qui habitait la même adresse et me faisait la même demande.
Nous risquons de créer un appel d'air qui permettra aux propriétaires indélicats d'exploiter les populations les plus fragiles en gagnant beaucoup d'argent et lésera ceux qui attendent un logement depuis longtemps. Soyons attentifs à ne pas créer d'injustices en adoptant des mesures dont on peut avoir le sentiment qu'elles vont dans le bon sens.
Je suis stupéfait qu'un tel amendement ne reçoive pas un soutien franc et simple !
Je vous soutiens, monsieur le rapporteur, mais il faut aller plus loin !
En fait, vous me demandez de rappeler qu'il y a des lois en France, et que la loi est la loi.
Ces lois existent, monsieur Pupponi, et vous le savez bien. On ne va pas citer l'intégralité des codes dans chaque exposé sommaires d'amendement !
(L'amendement n° 187 est adopté.)
Mes chers collègues, il est minuit et nous sommes le 6 février. Bonjour à tous, en particulier à vous, madame la ministre, en cette journée un peu particulière.
Cet amendement propose que les demandes de logements sociaux soient examinées dans des conditions préservant l'anonymat du demandeur.
Les Verts ont mené cette bataille à Paris. L'anonymat des demandes permet d'écarter toute tentation, ou même d'éviter que l'inconscient ne joue. Des discriminations se fondent malheureusement trop souvent sur le nom du demandeur ou son lieu de naissance, qui donneraient des indications sur ses origines supposées. Des données sur la taille de la famille, les revenus, ou d'autres critères liés au handicap, à la santé ou à l'urgence de la situation, sont suffisants pour attribuer les logements.
Notre amendement prévoit ainsi que ne « sont conservées que les données nécessaires pour répondre aux critères d'attribution des logements sociaux » et que les modalités d'application de ce dispositif d'anonymat « sont déterminées par décret en Conseil d'État ».
Personnellement, j'étais déjà favorable au CV anonyme, même s'il ne règle pas tout. Dans un monde idéal, ces mesures seraient inutiles, mais nous ne vivons pas encore dans un monde idéal. Voter notre amendement constituerait une véritable avancée, même si nous espérons, un jour, ne plus avoir besoin de ce type de dispositif.
Mon amendement et mes arguments sont les mêmes que ceux de Mme Billard. Trop régulièrement, les médias relatent des cas de discriminations, au détriment de demandeurs de logement, fondées sur leur patronyme, leur pays d'origine, ou la couleur de leur peau. Ces dossiers subissent des retards, voire des blocages, qui sont inacceptables.
Aujourd'hui, et je crains que ce ne soit pour un certain temps, ce type de mesure est indispensable.
Madame Billard, monsieur Muzeau, je partage totalement votre préoccupation. Vous avez constaté comme moi, et cela est très rare, qu'un bailleur social a été condamné, tout récemment, pour des pratiques inhabituelles, mais qui peuvent exister.
Le problème est difficile car il faut se protéger de toute discrimination tout en assurant un traitement personnalisé de la demande de personnes fragiles qui devraient être considérées comme des publics prioritaires.
L'attribution de logement ne peut pas relever seulement d'un traitement mécanique. Même en prévoyant une multitude de critères, vous savez bien qu'il est des cas où la différence se fait par la connaissance concrète de la situation des personnes. Un traitement standardisé, même sur le fondement d'une vingtaine ou d'une trentaine de critères, pourrait dispenser d'une approche plus personnalisée des demandes. Or celle-ci permet d'opérer des choix qui n'auraient pas été faits dans d'autres conditions. J'en parle en connaissance de cause puisque, comme certains d'entre vous, j'ai vécu moi-même cette situation au sein de commissions d'attribution.
Je partage totalement l'objectif qui est le vôtre mais, confronté aux difficultés que je viens d'exposer, je n'ai pas de solution idéale. En conséquence, la commission a donné un avis défavorable à ces deux amendements.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Madame la ministre, ces deux amendements constituent une réponse précise au rapport que je vous ai remis, avec M. Louis Schweitzer, dans le cadre des travaux de la HALDE, sur la discrimination en matière d'attribution des logements sociaux.
Nous attendions des réponses de votre part et des propositions, alors pourquoi pas dans le cadre de ce projet de loi ? J'ose espérer que vous les formulerez une fois ce texte adopté.
J'émets un avis défavorable à ces deux amendements.
Ce n'est pas que je ne partage pas les préoccupations qui se sont exprimées ce soir, bien au contraire. Monsieur Pinte, j'ai évidemment été très attentive au rapport que vous m'avez remis il y a quelques mois. Toutefois, j'estime que ces amendements sont superfétatoires.
En effet, hier, un arrêt rendu à Saint-Étienne a montré que le droit positif permettait de prononcer une condamnation pour discrimination dans l'attribution d'un logement social. Le travail de la MILOS et l'arrêt que je viens d'évoquer me font donc penser que la loi nous donne, d'ores et déjà, les moyens de combattre ce fléau.
Je ne suis pas du tout convaincu par la réponse de Mme la ministre.
L'arrêt de Saint-Étienne montre seulement que la loi permet de réprimer une discrimination prouvée. Certes, mais les discriminations demeurent et n'en restent pas moins difficiles à prouver. La réponse de Mme la ministre est vraiment hors sujet.
Monsieur le rapporteur, je vous signale que ce dispositif a été expérimenté à Paris, dans le 3e arrondissement, et je n'ai pas eu connaissance que cela ait posé des problèmes particuliers ; il suffit que les fiches de renseignements soient très précises, même si elles sont anonymes.
(Les amendements identiques nos 608 et 738 ne sont pas adoptés.)
Depuis plusieurs années, un certain nombre de maires et de conseils municipaux, principalement situés dans des secteurs tendus en matière de logement, ont pris l'initiative d'interdire, par arrêté municipal, les expulsions locatives pour des motifs économiques et sociaux.
Je fais partie des maires en question, et nous refusons la banalisation des expulsions qui touchent des foyers dont nous connaissons bien la précarisation, voire la misère. Les propriétaires concernés ne sont pas seulement des petits commerçants qui complètent leur retraite, s'ils ont la chance d'en avoir une. On compte aussi parmi eux de grands propriétaires et des marchands de sommeil.
Les maires savent que les relogements ne pourront pas être assurés par les communes où les listes d'attentes sont longues. Dans la mienne qui compte plus de 10 000 logements sociaux, près de 5 000 personnes attendent encore. Pas plus que l'État avec le DALO, les communes ne sont donc en mesure de fournir un logement à ceux qui seraient expulsés.
C'est pourquoi les maires ont pris symboliquement l'initiative de protéger leur territoire et leur population de toute mesure d'expulsion et de délogement. La légalité de tels arrêtés n'a pas manqué d'être contestée, et l'État a opposé le droit à ces bons sentiments. Il ne fait pourtant aucun doute que les maires sont matériellement compétents pour prendre de tels arrêtés. En effet, le maire, en charge de la police municipale, doit veiller au bon ordre, à la sûreté et à la salubrité publics. Vous ne pouvez prétendre qu'une expulsion, qui jette sur la voie publique des adultes et des enfants, livrés à eux-mêmes pour trouver un abri pour la nuit et, finalement, occuper des locaux impropres à l'habitation, ne porte pas atteinte à la sécurité publique.
Il ne fait également aucun doute, pour le Conseil d'État, que la dignité de la personne humaine est un but que l'autorité de police, assumée par le maire, peut protéger en toutes circonstances. Or comment peut-on nier que priver une personne de son logement porte atteinte à sa dignité humaine et sociale ?
Par ailleurs, force est de constater, monsieur Pinte, la carence de l'État dans l'application effective de la loi DALO.
Nonobstant ces arguments, les arrêtés anti-expulsion ont bel et bien été suspendus. Ils constituent pourtant des actes juridiques et politiques très importants qu'il nous faut soutenir. Tel est le sens de cet amendement.
Très bien !
(L'amendement n° 935 , repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Jacqueline Maquet pour défendre l'amendement n° 464 .
Cet amendement vise à permettre le sursis à exécution d'une expulsion si le locataire est de bonne foi et qu'il a déposé une demande dans le cadre de la procédure décrite à l'article L. 441-2-3 du code de la construction et de l'habitation, c'est-à-dire le droit au logement opposable.
Madame la ministre, il paraît logique de suspendre l'exécution d'une décision d'expulsion s'agissant de personnes dont le dossier est instruit dans le cadre de la procédure du droit au logement opposable. C'est un minimum. Vous avez déclaré vouloir mettre l'humain au centre de tout ; avec cet amendement, nous vous offrons l'occasion d'appliquer concrètement ce principe.
Nous partageons les mêmes objectifs. Toutefois, la faculté de surseoir à toute mesure d'expulsion ne peut être exercée que par le juge. Cette faculté est prévue et encadrée par les articles L. 613-1 et L. 613-2, ainsi que par l'article 24 de la loi du 6 juillet 1989. Par ailleurs, la notion de bonne foi nécessitant l'appréciation du juge, le sursis à exécution ne peut être automatique.
Avis défavorable.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Je souhaiterais répondre à nos collègues au sujet des expulsions.
Ainsi que je l'ai déjà indiqué, le Premier ministre, après que je lui ai fait mes premières propositions, en janvier 2008 a adressé, le 22 février, à tous les préfets une lettre circulaire comportant un certain nombre d'instructions, que vous trouverez intégralement reproduites à la page 77 de mon rapport.
En ce qui concerne la possibilité de surseoir à une expulsion tant qu'une solution de remplacement n'a pas été proposée, voici ce qu'écrit le Premier ministre dans cette lettre circulaire, madame Billard : « Généraliser la prévention des expulsions locatives : je vous demande de tout mettre en oeuvre, dès la publication du décret rendant possible la création d'une commission de coordination des actions de prévention, pour que les acteurs locaux du logement et les principaux décideurs concernés en permettent la mise en place et pour qu'une enquête sociale soit réalisée dans ce cadre, sauf refus du locataire, avant décision de recours à la force publique. »
Les instructions sont donc bien claires : il ne peut y avoir d'expulsion, d'une part, sans qu'une enquête sociale ait été préalablement réalisée, et, d'autre part, sans qu'une solution de remplacement ait été proposée.
Madame la ministre, vous avez évoqué les locataires de mauvaise foi. Or il se trouve que, comme Mme Lepetit, je reçois, dans ma permanence, des locataires de bonne foi qui se retrouvent menacés d'expulsion, soit parce qu'ils sont victimes de ventes à la découpe, soit, comme l'a dit M. Folliot, parce que leur propriétaire est un retraité, par exemple, qui souhaite reprendre son bien. Malgré toutes les mesures de prévention évoquées par M. Pinte, ils ne parviennent pas à retrouver un logement dans le délai de trois ans. Ce délai est donc déjà insuffisant, comme l'attestent plusieurs cas concrets qui ont été portés à ma connaissance, y compris avec une réponse DALO.
Si vous comprenez les motifs qui nous poussent à défendre cet amendement, acceptez au moins que le délai de trois ans soit exceptionnellement maintenu lorsque le locataire est de bonne foi et qu'une demande a été déposée dans le cadre de la procédure du droit au logement opposable. Encore une fois, j'ai reçu, ces derniers mois, de nombreux locataires de bonne foi, j'y insiste, qui, au terme du délai de trois ans, n'avaient toujours pas trouvé de logement. Je peux vous présenter certaines de ces personnes si vous le souhaitez. Si l'on applique le nouveau délai d'un an à de tels cas, nos permanences seront de plus en plus encombrées !
(L'amendement n° 464 n'est pas adopté.)
Je suis saisi de deux amendements, nos 466 et 947 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir l'amendement n° 466 .
Cet amendement vise à insérer, après l'article 19, l'article suivant : « Une enquête sociale préalable à toute décision judiciaire d'expulsion est obligatoire. Les conclusions doivent être portées à la connaissance du tribunal avant l'assignation à comparaître des familles.
Le préfet donnera la possibilité aux associations agréées qui assurent des activités d'intermédiation ou de gestion locative de prendre à bail les logements appartenant à une ou des personnes physiques en vue de les sous-louer, meublés ou non, à l'occupant expulsé ou menacé d'expulsion. »
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 947 rectifié .
Cet amendement tend à mettre en place une intermédiation associative afin de prévenir les expulsions des ménages de bonne foi dans le parc privé. Cette mesure, qui vise à accompagner des locataires souvent en situation précaire ou démunis, permettrait d'atténuer, d'une certaine manière, la violence sociale que représentent toujours les expulsions locatives et de reconnaître, de fait, le rôle que jouent déjà certaines associations en leur donnant en quelque sorte un statut légal. Il s'agit donc d'une mesure très positive, qui allégerait d'ailleurs la charge des travailleurs sociaux.
Ces amendements seront partiellement satisfaits par l'amendement n° 188 , qui rend l'enquête sociale obligatoire.
Quant à l'accord du préfet, prévu au second alinéa, il n'est pas nécessaire.
Je ne conteste pas l'intérêt de ces amendements, mais il me paraît inutile de compliquer la démarche. Ils pourraient donc être retirés.
Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
Tout d'abord, une charte de prévention des expulsions est rendue obligatoire par la loi de 1998 de lutte contre les exclusions.
Ensuite, le plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées comprend, depuis la loi ENL, un volet relatif à la prévention des expulsions.
Enfin, le projet de loi instaure de façon systématique, dans tous les départements, une commission de prévention des expulsions.
Ces amendements me paraissent donc satisfaits, tant par la loi que par les textes réglementaires. Je souhaite qu'ils soient donc retirés. À défaut, je donnerai un avis défavorable.
Madame la ministre, j'ai le sentiment que nous ne parlons pas de la même chose. Par notre amendement, nous proposons d'officialiser le rôle d'associations agréées, en quelque sorte, pour leur activité d'intermédiation. Or vous n'avez pas répondu sur ce point. Nous entendons offrir une possibilité supplémentaire, qui me paraît très importante.
Monsieur le rapporteur, vous êtes généralement très attentif, mais, s'agissant de cet amendement, vous avez répondu à une question que je n'avais pas posée.
Monsieur Piron, vous savez ce que parler veut dire et vous choisissez généralement les mots que vous utilisez avec pertinence.
J'apprécie l'élégance avec laquelle vous me traitez, monsieur Brard, mais je maintiens l'avis défavorable de la commission, pour les raisons que j'ai exposées.
(Les amendements n°s 466 et 947 rectifié , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Sur l'article 19 bis, je suis saisi de l'amendement n° 476 .
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Cet amendement, que j'ai annoncé tout à l'heure, vise à rendre obligatoire la saisine de la commission de prévention des expulsions et à remplir ainsi les objectifs de la circulaire du 22 février 2008 du Premier ministre, qui préconise une enquête sociale systématique.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement, sous une réserve. Nous venons en effet de prendre des textes d'application créant les commissions de prévention des expulsions, que nous rendrons obligatoires dans la loi. Ces commissions joueront un rôle très important, qui complétera la garantie du risque locatif pour prévenir les expulsions.
Je suggère néanmoins d'attendre que ces commissions soient mises en place et donc de ne rendre obligatoire leur saisine qu'un an après l'entrée en vigueur de la loi. Si vous en êtes d'accord, monsieur le rapporteur pour avis, le Gouvernement propose donc un sous-amendement afin de tenir compte du délai de mise en place des commissions de prévention des expulsions. C'est une mesure pragmatique qui tient compte de la réalité.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Les commissions de prévention des expulsions sont mentionnées dans une instruction du Premier ministre qui date d'un an. Il faut qu'elles soient créées très rapidement. Je souhaite donc que la disposition proposée dans mon amendement soit applicable dès maintenant.
Nous ne nous plaçons pas dans la perspective d'une autorisation des expulsions, mais, puisque tous nos amendements ont été rejetés, nous ne pouvons qu'accepter une mesure susceptible de contribuer à prévenir ou à limiter leur nombre. Nous souhaitons également que les structures nécessaires soient mises en place le plus vite possible pour soulager la peine des familles qui sont dans cette situation.
Les députés communistes voteront l'amendement de M. Pinte.
Nous considérons que le dispositif proposé par M. Pinte est sans nul doute le plus fiable qui soit. Toutefois, je me permets d'attirer son attention sur le fait que, lorsque l'assignation aux fins de constat de résiliation du bail – qu'il retient comme fait générateur – est délivrée, c'est que la clause résolutoire est déjà acquise par la délivrance du commandement. Or, une fois la clause résolutoire acquise, il est impossible de revenir dessus et il ne reste alors plus qu'une possibilité au juge, celle d'accorder des délais.
Il s'agit d'un débat déjà ancien, et nous avons déjà eu l'occasion de soutenir qu'il est préférable que le fait générateur consiste en la délivrance d'un commandement visant la clause résolutoire. Si l'on s'en tenait à votre formulation, monsieur Pinte, la commission se verrait soumettre le cas d'un locataire ayant perdu de plein droit son bail, le juge ne pouvant pas revenir sur l'acquisition de la clause résolutoire sans l'accord du bailleur. C'est un point très technique que nous ne devons cependant pas méconnaître, car il peut constituer une difficulté de nature à réduire l'efficacité du dispositif. Il faudrait que la commission obtienne du bailleur la renonciation à l'acquisition de plein droit de la clause résolutoire.
Je précise qu'en 1989, alors qu'on avait voulu systématiser l'information préalable des commissions, les juges se sont mis à pratiquer tacitement cette demande, ce qui en réduisait les effets. J'estime qu'en retenant le critère de l'assignation, on est moins efficace qu'en visant celui de la délivrance du commandement de payer visant la clause résolutoire. Je rappelle en effet que toute assignation doit être précédée de la délivrance d'un commandement de payer ; ce n'est qu'au terme d'un délai ininterrompu d'un mois que la clause résolutoire est acquise, ce que l'on peut faire constater devant le tribunal.
En l'occurrence, l'absence de déclaration d'acquisition de la clause résolutoire risque de nuire à l'efficacité d'un dispositif que je considère au demeurant excellent, car il me paraît essentiel que le juge ne statue pas avant que les dispositifs de prévention aient pu jouer.
M. Pinte a fait une proposition à laquelle je suis favorable. En revanche, je n'adhère pas au sous-amendement de Mme la ministre. Le délai d'un an qu'elle propose risque en effet de constituer un signal adressé aux propriétaires qui ne seraient pas de bonne foi, les incitant à expulser leurs locataires avant que la saisine des commissions ne devienne obligatoire.
Souvenez-vous du débat sur les emplois jeunes, madame la ministre, lors duquel Martine Aubry se tenait au banc du Gouvernement à la place que vous occupez actuellement. Nous avions alors le texte législatif et les textes d'application. Aujourd'hui, il me semble que l'adoption de l'amendement d'Étienne Pinte aurait pour effet de « booster » l'administration et de rendre ainsi plus efficace le prolongement du travail des députés.
Je souhaite maintenir mon sous-amendement, justifié par un souci d'efficacité. Le décret du Premier ministre a bien été publié, mais il ne rendait pas obligatoire la création des commissions départementales de prévention des expulsions. Ces commissions, dont la création n'est devenue obligatoire qu'à l'issue de la lecture du texte au Sénat, n'existent pas encore dans tous les départements. En inscrivant dans le texte que les commissions doivent être saisies, alors qu'elles n'existent pas encore partout, vous vous ferez peut-être plaisir, mais c'est bien tout l'effet que vous obtiendrez.
Allons, on peut compter sur le grand homme pour convoquer les préfets et leur ordonner d'activer le mouvement !
Le sous-amendement proposé par Mme la ministre à l'amendement n° 476 de M. Pinte, qui prend le numéro 1074, est rédigé de façon à insérer, après l'alinéa 2, l'alinéa suivant : « Cette disposition s'applique au terme d'un délai d'un an après l'entrée en vigueur de la présente loi. »
Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?
Le délai d'un an est à considérer comme un maximum, ce qui me semble devoir être précisé.
Par ailleurs, comme chacun l'aura compris, l'amendement de M. Pinte n'est pas parfaitement au point sur le plan technique. Dans la mesure où tout le monde paraît d'accord sur l'esprit de la proposition qui est faite, je vais émettre un avis favorable à l'amendement n° 476 et au sous-amendement n° 1074 , en souhaitant toutefois que nous nous efforcions de trouver, avant la réunion de la CMP, une solution rendant le dispositif véritablement opérationnel.
Je regrette : si nous adoptons l'amendement et le sous-amendement, nous aurons déjà bien travaillé !
Je ne suis pas d'accord avec le sous-amendement de Mme la ministre.
Dans les départements où se trouvent de bons préfets, les commissions ont été mises en place et commencent déjà à fonctionner ; c'est le cas dans mon département, comme dans plusieurs autres où la situation est tendue en matière de logement.
Il n'y a pas besoin d'un an pour créer les commissions de prévention des expulsions, et ce serait un très mauvais signal que d'accorder un tel délai pour leur mise en place. Je ne suis pas d'accord !
Pour ma part, je ne suis pas d'accord quand vous nous dites qu'il existe de bons et de mauvais préfets, monsieur Pinte ! Pour moi, les préfets sont tous bons, et je ne peux accepter que l'on prétende le contraire ! (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
C'est tellement vrai que le Président de la République nous en a donné la preuve très récemment !
Je mets aux voix le sous-amendement n° 1074 …
Il est adopté. (Vives protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Ne remettez pas en cause le résultat des votes. Je suis très bien placé pour compter. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Je mets aux voix l'article 19 bis.
(L'article 19 bis, amendé, est adopté.)
Monsieur le président, il n'est pas dans les usages de contester la façon dont le président de séance remplit sa fonction – et nous apprécions, d'ordinaire, l'énergie que vous employez à diriger nos débats. Néanmoins, pour ce qui est du vote sur le sous-amendement de Mme la ministre, force est de constater que vous avez confondu hâte et précipitation : il n'y a aucun doute quant au fait que ce sous-amendement a été rejeté.
Tout le monde n'a pas voté, et M. Pinte a, quant à lui, voté contre. Je le répète, ce sous-amendement devait être rejeté.
Chacun a contribué à ce que le débat se déroule paisiblement jusqu'à présent,…
C'est vous qui créez un problème, monsieur Brard !
…mais nous ne sommes pas d'accord avec ce qui vient de se passer. C'est la méthode du chausse-pied, pour rester poli !
Monsieur Brard, vous n'avez pas à remettre en cause la décision de la présidence. Je vois parfaitement ce qui se passe dans l'hémicycle et je suis donc certain d'avoir compté les voix comme il convenait. Nous allons poursuivre la discussion… (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le président, nous n'avons pas l'intention de contester votre autorité, mais force est de constater que nous nous trouvons face à un problème d'ordre mathématique : il est manifeste que les députés opposés à ce sous-amendement étaient majoritaires.
Monsieur le président, je demande une suspension de séance afin que notre groupe puisse se réunir et décider de l'attitude à adopter.
Rappels au règlement
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue le vendredi 6 février 2009 à zéro heure quarante, est reprise à zéro heure cinquante.)
Je suis saisi de deux amendements portant articles additionnels après l'article 19 bis.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 188 rectifié .
L'enquête sociale prévue depuis 1999 par une circulaire n'est pas toujours prise en compte par les juges, car elle n'est pas contradictoire. Afin de renforcer la prévention des expulsions, il est proposée de donner une base légale à l'enquête sociale et de lui conférer à cette occasion un caractère obligatoirement contradictoire, de telle sorte que les juges puissent s'appuyer dessus.
Je me suis déjà exprimée sur le sujet. Je souhaite le retrait de l'amendement, sans quoi il recevra un avis défavorable de ma part.
La loi du 6 juillet 1989 prévoit déjà que l'huissier transmet au préfet au moins deux mois avant l'audience l'assignation aux fins de constat de la résiliation du bail. Cela répond, me semble-t-il, à votre préoccupation.
L'une de mes obsessions a beau être que le champ législatif n'empiète pas sur le champ réglementaire, en l'occurrence la circulaire, dans le bas de la norme et ne s'imposant pas d'office, pèse d'un poids insuffisant dans un certain nombre de jugements. Dans ces conditions, soit vous prenez l'engagement de publier un décret, lequel aurait sans doute davantage de force, soit cette disposition doit être inscrite dans la loi.
Je maintiens mon avis défavorable.
Je maintiens l'amendement adopté par la commission.
(L'amendement n° 188 rectifié est adopté.)
La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour défendre l'amendement n° 505 .
Il s'agit d'un amendement que nous avons déjà déposé sur des textes précédents. Chaque fois, il nous a été répondu que notre question était pertinente et qu'elle était à l'étude.
Il s'agit tout simplement, dans un contexte de pénurie de l'offre, de permettre la colocation dans les logements gérés par les bailleurs sociaux, ce qui permettrait à des fratries ou à des étudiants de cohabiter sans être obligés de se tourner vers le parc privé.
J'insiste donc sur cet amendement, en soulignant que François Brottes, le président de notre groupe à la commission des affaires économiques, lui est particulièrement attaché. Je tenais donc à prononcer son nom et à lui dédier cette soirée où il ne peut être avec nous. (Sourires.)
La commission a repoussé cet amendement, car un amendement similaire a été proposé à l'article 20 par Mme Labrette-Ménager. Je vous invite donc à vous y rallier, ce qui permettrait de retirer celui-ci.
Nous sommes très sensibles à cette préoccupation, mais en effet l'article 20, modifié par l'amendement n° 1060 , devrait vous donner satisfaction. Je vous invite donc à retirer votre amendement.
Je n'ai pas encore pu prendre connaissance de l'amendement de Mme Labrette-Ménager, mais si les deux amendements sont identiques, autant voter celui-ci.
L'amendement n° 1060 tend à supprimer l'alinéa 46 de l'article 20 qui est ainsi rédigé : « Par dérogation à l'article L. 442-8, les organismes mentionnés à l'article L. 411-2 peuvent louer des logements meublés à des personnes de moins de trente ans et aux étudiants qui ne bénéficient plus du droit au maintien dans les lieux dès lors qu'ils ne répondent plus aux conditions pour être logés dans ces logements. Ces conditions sont précisées par le contrat de location. »
Je ne vois pas en quoi cela rejoint notre proposition.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur cet article.
La parole est à Mme Danièle Hoffman-Rispal.
La publication du rapport sur le mal-logement de la fondation Abbé-Pierre est tombée à point nommé pour éclairer la représentation nationale sur les difficultés rencontrées par certaines catégories de population pour se loger.
Parmi elles figure ce que l'on nomme, par similitude avec les travailleurs pauvres, les retraités pauvres. Le rapport de la fondation nous apprend que 600 000 personnes âgées vivent sous le seuil de pauvreté, avec une allocation de solidarité de 682 euros.
Alors que nous savons tous ici que l'âge moyen d'entrée en institution a largement reculé, Bernard Devert, fondateur de l'association Habitat et humanisme, racontait cette semaine dans la presse l'histoire d'un Lyonnais de soixante-deux ans qui désirait être placé en maison de retraite médicalisée, car ainsi il aurait au moins un toit pour dormir.
Alors que le recul de l'âge de cessation d'activité reste un mythe, il va sans dire que la multiplication des retraités pauvres, phénomène apparu il y a dix-huit mois selon les associations, risque de s'aggraver avec la crise économique.
Madame la ministre, je comprends que l'on puisse proposer des appartements plus petits à des retraités dont les enfants sont partis. Comme l'a souligné M. Folliot, ce sont d'ailleurs souvent les retraités qui le demandent eux-mêmes. L'incitation, la proposition, le dialogue, oui ! L'obligation, non jamais !
D'abord, le texte fixe la limite à soixante-dix ans et, pour ma part, je ne vois pas bien la différence entre une veuve de soixante-huit ans et une veuve de soixante-dix ans.
Ensuite, on va demander à des retraités qui vivent dans leur logement depuis plusieurs années…
… de le quitter pour un autre situé dans le même arrondissement ou le même canton. Mais un arrondissement, ce n'est pas un quartier ! Cinq kilomètres de distance dans un canton, c'est énorme lorsque l'on commence à avoir des difficultés pour se déplacer.
Dans ces conditions, que va devenir cette veuve de soixante-huit ans qui aura reçu trois propositions de relogement ne correspondant pas à ses souhaits ? Va-t-elle être à la rue ? C'est à peu près l'effet pervers de ce texte.
L'incitation ? Oui, et le plus tôt possible : il faut permettre à ces retraités de refaire une partie de leur vie dans un endroit qu'ils vont s'approprier. En revanche, obliger une personne – qu'elle ait soixante, soixante-cinq ou soixante-huit ans – à partir, alors que ses seuls amis sont ses voisins et ses commerçants, c'est un véritable scandale. Je le répète : oui à l'incitation, mais non à l'obligation qui induit des effets pervers ; malheureusement, nous voyons déjà des personnes âgées et même très âgées dans nos rues, et je ne voudrais pas en voir beaucoup plus au cours des années à venir.
La remise en cause du droit au maintien dans les lieux prévue à l'article 20, tout comme les mesures sur l'abaissement des plafonds de ressources contenues dans l'article 21, qui concernent directement les locataires d'HLM, vont avoir pour conséquence de frapper les classes moyennes aux revenus modestes, qui assurent encore la mixité sociale de nombreux sites.
Qu'elles choisissent de rester dans les lieux avec des surloyers qui frapperont fort dès le premier dépassement de plafond, qu'elles décident – ou qu'elles soient obligées – de sortir du parc social, les familles concernées devront acquitter des loyers bien plus élevés. Dans tous les cas, une seule issue s'offrira à elles : vivre dans un logement plus petit au loyer plus élevé, et, par conséquent, subir un recul de leur qualité de vie.
Vous n'êtes pas sans savoir que 35,5 % des locataires d'HLM sont des personnes seules, qui vivent souvent dans de petits logements – F2 ou F3 –, et qui seront poussées vers le parc privé par les mesures contenues dans ces articles, parce que le parc social est nettement déficitaire en logements de petite taille. Or ces locataires acquittent déjà une forme de surloyer dont personne ne parle : celui afférent aux charges locatives calculées sur la base de la surface de leur logement. Les personnes seules seront donc plus durement touchées par ces mesures.
Ces deux articles nous inquiètent d'autant plus que les rédacteurs de ce projet semblent méconnaître la réalité sociologique des populations occupant les logements sociaux. Rappelons brièvement quelques réalités : 66,2 % des ménages du parc locatif social disposent de ressources inférieures à 60 % du plafond de ressources d'un PLUS ; 26,8 % ont un niveau de ressources compris entre 60 % et 100 % de ce plafond ; 6.8 % dépassent ce plafond.
Contrairement à ce que vous voulez nous faire croire, le logement social remplit bien son rôle, même s'il est en difficulté : il loge une large majorité de personnes à très faibles revenus – les couches populaires – et un petit nombre de gens apparentés aux classes moyennes.
En dépit de ces réalités, les personnes concernées voient leur niveau de vie s'amenuiser d'année en année, du fait du remplacement progressif des populations qui sortent du parc par des populations toujours plus pauvres, toujours plus précaires. Ce projet de loi –singulièrement ses articles 20 et 21 – risque fort d'accélérer ce processus de paupérisation, pour finalement créer des ghettos de familles à très faibles revenus, voire en situation de pauvreté.
Les députés communistes n'adhèrent pas à ce modèle de société qui consacrerait une partition territoriale : zones riches, zones de classes moyennes, zones pauvres. Notre vision est celle d'une véritable mixité sociale, mais votre projet de loi va dans le sens contraire.
En contrepartie de ce bouleversement dans le parc social, vous ne proposez aucune mesure pour rendre le parc privé plus accessible aux populations que vous allez pousser vers la sortie. Loin de résoudre la grave crise du logement que nous traversons, vous allez détériorer la situation de milliers de familles.
Nous ne pouvons que nous opposer à cette politique d'une violence sociale inouïe, méprisante des réalités sociales, des situations de précarité, de la détresse de nos concitoyens pour lesquels le logement est la première des préoccupations et représente le premier poste de dépenses.
Madame la ministre, n'oubliez pas que, quand nous parlons du logement, nous parlons aussi et surtout de locataires, de situations humaines.
Que la sous-occupation de certains logements du parc locatif social soit un problème, je le confirme. Ce problème risque même de s'amplifier compte tenu d'une population vieillissante dont les enfants quittent le foyer. Cependant, au lieu de prévoir des mesures incitatives, vous proposez des mesures coercitives.
Les organismes se sont déjà préoccupés de cette situation, et ils ont essayé de trouver des solutions. Si on commençait par lever les obstacles qui freinent ces mutations toujours un peu délicates ce serait déjà un progrès. Prenons l'exemple des plafonds de ressources : dans la législation actuelle, une personne qui dépasse le plafond de 1 % ou 2 % ne peut se voir proposer une mutation dans un logement plus petit, car ce changement serait nécessairement géré comme une attribution nouvelle par l'organisme. C'est un obstacle que vous levez dans l'article 20, mais il en existe bien d'autres.
Vous signalez, par exemple, que les éventuelles mutations ne devront pas se traduire par l'application d'un loyer supérieur. Ce n'est guère incitatif pour le locataire qui se voit proposer un logement plus petit. Si vous laissiez aux organismes la possibilité de pratiquer des loyers nettement inférieurs, dans ce type de situation, ce serait une mesure incitative.
Selon les règles d'attribution actuelles, l'organisme d'HLM ne peut proposer qu'un T2 à une personne qui se retrouve seule dans un T4, après le départ de son conjoint et de ses enfants. Or cette personne peut vouloir bénéficier d'un T3 car elle possède des meubles auxquels elle tient, et qu'elle souhaite recevoir ses petits-enfants de temps en temps. Actuellement, ce n'est pas possible.
Votre première proposition comporte des mesures coercitives sur la sous-occupation, alors qu'il faudrait prévoir des dispositions beaucoup plus incitatives, sans remettre en cause le droit au maintien dans les lieux.
Quant aux alinéas sur les logements adaptés aux handicapés et qui devraient être libérés dès lors que la personne subissant le handicap ne vit plus dans les lieux, ils sont vraiment écrits pour le plaisir. En réalité, dans le parc HLM actuel, le nombre de logements adaptés aux handicapés est très insuffisant. Lorsqu'une personne bénéficiaire d'un tel logement a disparu, des solutions de relogement sont tout naturellement trouvées pour effectuer le relogement des membres de sa famille.
Vous stigmatisez les locataires qui dépassent de deux fois le plafond de ressources. Revenons à la réalité : sur un parc de 4,2 millions de logements HLM, 9 000 locataires seulement sont concernés par ce plafond doublé. Vous n'avez pas besoin de remettre en cause le droit au maintien dans les lieux pour eux : avec le décret d'août 2008 qui instaure une augmentation considérable des surloyers, ces 9 000 locataires concernés vont subir une telle hausse de leur loyer, qu'ils iront assez naturellement se loger sans le parc privé.
De nombreux alinéas tendent à codifier certaines occupations de logements HLM, alors qu'en réalité, dans nos résidences, nous constatons surtout une sur-occupation liée aux hébergements réalisés dans le cadre des solidarités familiales ou autres.
Cet article est une sorte de coup de massue qui remet en cause le droit au maintien dans les lieux et même le droit au maintien dans le parc.
C'est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article.
Je veux revenir sur les propos que j'ai tenus lors de la présentation de la motion d'irrecevabilité.
Si les gens occupent un logement social, c'est parce qu'ils remplissaient les conditions d'accès quand il leur a été attribué, sauf à considérer que les commissions d'attribution ne font pas leur travail et que les gens fournissent de fausses déclarations qui ne sont pas vérifiées. Or les organismes sont très attentifs et savent qui sont les personnes accueillies dans les logements.
Au départ, les locataires étaient donc dans une situation qui légitimait l'attribution de l'appartement qu'ils occupent. Quand ils se retrouvent en sous-occupation, c'est parce qu'un événement est survenu : rupture familiale, départ des enfants, décès du conjoint, ou autres situations qui sont, pour la plupart, des accidents de la vie.
Les enfants grandissent ! Vous n'êtes pas obligé de nous fournir une version morbide de l'histoire !
Votre démarche statistique fait abstraction des parcours de vie et des histoires familiales. Vous tentez de faire croire à l'opinion publique qu'il n'y a que des profiteurs, alors que la sous-occupation est de plus en plus rare, et que nous observons plutôt le phénomène inverse.
Vous niez aussi la réalité humaine de situations extrêmement variées : parents divorcés qui doivent accueillir leurs enfants pendant les jours où ils en ont la garde – actuellement, les règles d'occupation l'interdisent –, parents ouverts au retour des enfants qui ont quitté le foyer, en cas d'accident de la vie, ou à l'accueil des petits-enfants, lorsqu'un besoin de solidarité familiale s'exprime.
Vous posez une exigence de justice selon laquelle nul ne devrait occuper un logement social dont les caractéristiques dépassent ses besoins. Cependant la vie d'un parent divorcé ou veuf ne se limite pas, dans la réalité, à sa situation individuelle. La gestion normée que vous proposez peut entraîner de graves injustices.
Donnez aux bailleurs sociaux, aux élus et aux habitants, madame la ministre, les réponses qu'ils attendent.
Comment chasser les gens de leur logement ? Vous proposez le seuil de soixante-dix ans ; cela signifie donc, par exemple, que l'on pourra chasser une personne de soixante-huit ans ? Comment faire ? Vous devez apporter cette réponse, car la loi, pour être mise en oeuvre, doit d'abord être expliquée. Si nous n'avons pas la réponse, d'ailleurs, c'est peut-être qu'il n'y en a pas !
Va-t-on considérer qu'une personne de soixante-six ans ayant passé toute sa vie dans un appartement avec son mari, qui se retrouve seule une fois celui-ci décédé et ses enfants partis, est en situation de sous-occupation ? Vous ne pouvez pas répondre que l'on réglera le problème, madame la ministre : à Cachan, je ne le réglerai pas ! Je n'ai jamais expulsé une personne au motif qu'elle « sous-occupait » son logement. À chaque fois, je me suis heurté à des réalités humaines que l'on ne peut ignorer.
Il en va de même, par exemple, pour une personne âgée isolée que l'on essayerait de convaincre de quitter un logement où elle veut rester, pour la placer dans un lieu plus adapté à sa situation ; comment aller contre sa volonté ?
Au-delà des déclarations pétitoires et des affichages, vous renouez avec une pratique qui, je le dis avec sévérité, est l'arme actuelle du Président de la République : opposer des populations, puis, à partir des contradictions ainsi constatées, rompre la cohésion sociale. Cette approche est mauvaise : les problèmes que vous posez doivent être résolus autrement que par la loi, car celle-ci sera inapplicable.
Rendez-vous dans trois ans, madame la ministre : nous verrons alors l'inefficacité du dispositif, si toutefois nous ne parvenons pas à le supprimer, comme je l'espère.
Je ne répéterai pas les arguments, que j'approuve, de mes collègues MM. Gosnat, Le Bouillonnec et Cacheux.
La sous-occupation peut être réelle, tout en étant alors explicable, mais aussi apparente : avec les progrès de la pauvreté, la génération la plus âgée est souvent l'ultime recours de la plus jeune, c'est-à-dire des enfants voire des petits-enfants, quand ils perdent leur travail ou sont victimes d'une séparation. Ils sont alors contents d'être provisoirement accueillis chez les grands-parents, malgré des conditions parfois difficiles. On se plaint du délitement des relations familiales ; nous aurions donc tort de ne pas favoriser l'accueil des petits-enfants par les grands-parents, avec la fonction sociale et affective que cela implique. Compte tenu de votre histoire personnelle, madame Boutin, je serais étonné que vous n'y soyez pas sensible.
Autre mais non moins importante est la question de la mixité sociale. Celle-ci s'est, hélas, beaucoup altérée depuis une quinzaine d'années ; raison de plus pour préserver ce qu'il en reste, faute de quoi nous verrons se développer des ghettos comme aux États-Unis. Les personnes qui, sans vivre dans le luxe, dépassent les fameux plafonds, sont celles que l'on retrouve à telle présidence d'association de parents d'élèves ou d'amicale de locataires. Elles donnent une impulsion à la vie sociale et rendent un service que l'on ne peut quantifier financièrement. À la mixité sociale s'ajoute la mixité intergénérationnelle.
Expulser les générations les plus anciennes revient aussi à appauvrir la vie sociale.
Certaines situations, il est vrai, sont anormales ; mais, bizarrement, on n'en parle pas du tout. Il existe même des situations d'exterritorialité. Heureusement, notre Président de la République, très actif, que dis-je, vrai vibrion, a exigé, le 11 décembre 2007, en présentant un énième plan, en l'occurrence sur le logement, davantage de transparence dans les procédures d'attribution des HLM, et ce afin de mettre un terme aux abus. Faites ce que je dis, mais pas ce que je fais !
Deux sociologues connus pour l'excellence de leurs travaux, Monique et Michel Pinçon-Charlot, sont allés enquêter à Neuilly. Au 39 rue de Villiers, des adolescents leur ont confié que leur père était gestionnaire de fortunes dans une banque suisse. À mon humble avis, il dépasse les plafonds ! Dans le parking, indiquent les auteurs, stationnent des voitures qui ne font pas très HLM : Peugeot 607, Citroën C5, énorme 4 x 4, BMW ou coupé Alpha Roméo de collection. « Il n'y a que des gens qui ont de bonnes positions, qui sont très exigeants. Que des Blancs », observe une locataire. « Résultat », concluent les auteurs, « les membres de la noblesse et de la grande bourgeoisie occupent une part non négligeable des appartements ».
Figurez-vous que les adresses publiées dans le Who's who et le Bottin mondain de vingt et une familles, avec sept filles de comtes ou de comtesses, ainsi que six membres de familles possédant au moins un château – il faut bien une résidence secondaire pour vivre, n'est-ce pas – correspondent à des adresses de HLM !
Je passe sur d'autres détails, comme les locataires de HLM adhérents de l'association sportive du Cercle du Bois de Boulogne, pour laquelle les droits d'inscription atteignent la modique somme de 8 000 euros.
Vous aurez l'occasion de reprendre vos propos lors de la discussion des amendements.
…comme dirait le Président de la République, dans ces îlots d'exterritorialité.
On ne peut vouloir tout et son contraire. La sous-occupation est une réalité : certaines personnes, dont la carrière a évolué favorablement, ont ainsi des revenus qui dépassent largement les plafonds, même si le logement qu'ils occupent correspondait initialement à leur situation. Notre ardente obligation est de donner aux organismes d'HLM les moyens juridiques pour y remédier.
Il importe de considérer l'humanité avec laquelle chaque organisme appréhende les situations. Ayant été directeur d'une coopérative d'HLM, j'ai eu à en régler plusieurs. J'en prendrai deux exemples, certes différents, mais qui illustrent un problème auquel le projet de loi nous permettra de répondre.
Au 16 rue de Bretagne, dans le quartier d'Aillot, à Castres – quartier considéré comme difficile –, des personnes occupaient un appartement depuis trente-cinq ans. Bien qu'ils fussent en sous-occupation, il ne nous serait pas venu à l'esprit de rompre leur fragile équilibre, d'autant que nous aurions peut-être eu du mal à trouver de nouveaux locataires correspondant aux critères.
Autre exemple : au sein de l'immeuble Dampierre situé dans le quartier de Lameilhé, nous avons constaté que la consommation d'eau annuelle d'une personne occupant un T4 était de zéro mètre cube. Comment croire qu'elle occupait le logement ? En effet, elle n'y habitait pas, puisqu'elle résidait en maison de retraite, l'appartement HLM lui faisant à peu près office de garde-meuble.
De telles situations existent ; or il est très difficile, pour les organismes d'HLM, de récupérer le logement si la famille s'y oppose. Il n'est donc pas anormal de les doter d'un nouvel outil juridique pour faire face à ces situations. Faisons confiance aux bailleurs sociaux pour appliquer les mesures que nous allons voter avec sagesse. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Je vous ai écouté avec attention, mes chers collègues ; merci de faire de même.
Gardons-nous, disais-je, de tout procès d'intention à l'égard des bailleurs sociaux : ils connaissent leurs locataires et ont la volonté de gérer au mieux leur parc de logements. Ils souhaitent seulement plus de fluidité, tout en gardant un souci de justice et d'équité.
On remarque incidemment qu'il n'y aurait pas de droit à rester à vie dans un appartement d'HLM. Or un tel droit existe dans le secteur privé, à moins d'un non-renouvellement du bail lié à un congé-vente ou à une reprise par le bailleur lui-même ou un membre de sa famille. Il faut garder une certaine équité : pourquoi les locataires du secteur social auraient-ils moins de droits que les locataires du secteur privé ?
À certains égards, ce débat est amusant car les rôles sont un peu inversés : cette fois, c'est l'opposition qui défend des mesures incitatives et le Gouvernement, ainsi que la majorité, qui prônent des mesures coercitives. Or la loi est la loi, mes chers collègues ; c'est tout le problème. L'article 20 prévoit que toute personne n'entrant pas dans les critères – plus de soixante-dix ans, handicap, etc. – sera expulsée si elle est en sous-occupation.
Peut-être, mais c'est quand même le sens de l'article.
Je ne suis pas forcément opposée à des mesures en cas de sous-occupation ; mais cela supposerait des éclaircissements de la part du Gouvernement.
En effet, le problème concerne la définition de la sous-occupation. En l'état, celle-ci relève de l'article R. 641-4 du code de la construction et de l'habitation, comme le souligne le rapport, aux termes duquel un logement est sous-occupé s'il comporte un nombre de pièces habitables supérieur de deux au nombre de personnes y habitant. Dans le cas – le plus fréquent – où, les enfants partis, restent les parents, un couple peut donc vivre dans un appartement de quatre pièces. Encore faut-il être sûr que le décret ne sera pas modifié, puisque ce critère de sous-occupation relève du règlement, et non de la loi.
Dès lors, un problème de confiance se pose : si l'on peut discuter dans le cas d'un couple habitant un appartement de plus de quatre pièces – quoique je réprouve les modalités d'expulsion, mais nous y reviendrons –, encore faut-il s'assurer que ce soit bien le cas.
Par ailleurs, on nous dit – et c'est une avancée – que le logement proposé ne peut avoir un loyer supérieur au loyer acquitté.
Soit ; mais quiconque quitte un appartement de quatre pièces pour un autre de deux pièces s'attend à ce que le loyer diminue, ce qui l'incitera à la mobilité davantage que le contraire, naturellement. Il va de soi que proposer un logement deux fois plus petit à loyer équivalent, et parfois à charges supérieures, n'incitera pas le couple où la personne à déménager.
Autrement dit, je ne réprouve pas l'objectif de l'article, qui consiste à remettre de grands logements sociaux – de quatre ou cinq pièces – sur le marché de la location, mais plutôt la façon de le faire, qui inclut des mesures très violentes pour les personnes concernées, tout en ne proposant que des garanties insuffisantes.
Enfin, il arrive que des familles nous indiquent avoir déposé une demande d'échange, parfois pour un logement plus petit – cela se produit – et que rien ne leur est proposé. Ainsi, il arrive que les offices d'HLM aient peine à fluidifier leur parc, y compris en coopération avec d'autres offices dans certains secteurs. Il semble donc que, sur cette situation mal gérée, vous passiez au bulldozer, ou que vous preniez un marteau pour écraser une mouche.
Nous sommes au coeur d'un problème singulier. À lire attentivement le texte de l'article 20, on est même parfois horrifié.
Nous connaissons tous, dans nos fréquentations, des situations précises de locataires qui seront affectés par cet article et qui, s'il est voté, recevront de leurs bailleurs des lettres leur demandant de quitter les lieux, compte tenu de la définition de la sous-occupation. Plusieurs collègues l'ont rappelé : certaines personnes, qui se retrouvent seules après la perte de leur conjoint ou le départ de leurs enfants, souhaitent néanmoins demeurer dans leur quartier où elles ont construit une vie sociale importante depuis plusieurs décennies, où elles ont leurs habitudes et où, souvent, leurs enfants et petits-enfants vivent encore, ce qui leur permet de conserver une vie familiale normale. Ainsi, chacun peut, à sa génération, s'épanouir dans les conditions qu'il souhaite.
Proposer à ces personnes de quitter les lieux, même en introduisant des limitations en fonction de l'âge ou du statut de ZUS, en ne leur soumettant que trois propositions à l'issue desquelles elles perdent le droit de vivre dans leur appartement, me paraît scandaleux.
Depuis l'ouverture de ce débat, madame la ministre, nous avons avancé sur plusieurs points. Vous avez accepté de renoncer provisoirement au principe du surloyer, comprenant les problèmes qu'il posait. Dans le même ordre d'idées, il convient que vous remettiez à plus tard – voire à jamais – cet article relatif à la sous-occupation. Soyons francs : si cet article est adopté par votre majorité, il fera souffler un vent de panique sur de nombreux territoires, et les populations les plus fragiles craindront que les bailleurs ne puissent dès demain les mettre dehors.
Même à cette heure tardive, madame la ministre, nous vous le disons avec beaucoup de solennité. Certes, il existe des situations anormales de sous-occupation, mais les textes actuels permettent de les régler : le bailleur peut reprendre un logement où le locataire n'habite plus.
Au contraire, nous parlons là de personnes qui continuent d'habiter leur logement et qui veulent y rester, car elles n'ont souvent aucun autre endroit où aller. Si vous souhaitez régler le problème de la sous-occupation, laissez au moins la possibilité aux bailleurs et aux locataires de dialoguer, et n'offrez pas aux bailleurs celle de passer en force.
Avant de justifier notre demande de suppression de l'article 20, un rappel s'impose, celui du rapport de la Fondation Abbé Pierre de 2008 ; il est encore tout chaud : « Le parc HLM assure des fonctions essentielles pour les ménages très défavorisés, mais aussi pour les salariés. Il offre des garanties fondamentales en termes de plafonds de loyers, de stabilité – droit au maintien dans les lieux – et une protection contre le recours à des solutions de logement précaire ou d'habitat dégradés », y lit-on.
C'est précisément à ces garanties essentielles que le Gouvernement entend s'attaquer. Faute de vouloir remettre la politique du logement à l'endroit en construisant partout – notamment dans les régions de pénurie aiguë – des logements véritablement sociaux, vous allez déloger de force les familles modestes, pourtant éligibles au logement social, pour reloger d'autres familles plus pauvres. Encore une fois, vous jouez la carte de l'opposition des uns contre les autres, mais il s'agit toujours des mêmes, au détriment de la cohésion sociale.
La ficelle de la mobilité résidentielle est un peu grosse.
Autre illusion : imaginer que l'ascenseur résidentiel peut être relancé alors que les mécanismes de promotion sociale sont enrayés, que la précarité gagne du terrain et que le travail ne protège plus de la pauvreté. Hélas, cet extrait du rapport 2008 de la Fondation Abbé Pierre demeure d'une triste actualité.
Que deviendront les ménages et les personnes seules durement frappés par votre texte, dont les dispositions restrictives au droit au maintien dans les lieux se combinent à celles du surloyer prises par décret cet été ? Quels seront demain leur qualité et leur niveau de vie ?
L'argument de la mobilité dans le parc de logements est d'autant plus inacceptable qu'il est contraint et forcé, et qu'il menace la sécurité des parcours de vie des ménages, à un moment où, justement, la situation économique est anxiogène.
Le bail à durée déterminée comme l'abaissement des plafonds de ressources ne sont pas des politiques porteuses, sauf à dire qu'elles portent des inégalités spatiales et sociales. Au fond, dans le contexte actuel de pénurie de logements, elles ne sont que des pis-aller. C'est pourquoi nous proposons de supprimer cet article.
Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements de suppression ?
Nous aurons l'occasion de reprendre la discussion amendement par amendement, mais je veux apporter d'emblée quelques éléments d'information qui n'ont pas encore été évoqués, comme cela n'aura pas échappé à ceux qui ont bien lu le texte.
J'ai bien entendu les différents propos – certains plus nuancés que d'autres – sur la sous-occupation. Il m'a semblé que Mme Billard était moins pessimiste que M. Le Bouillonnec, pour qui la sous-occupation a forcément de funestes causes, le décès d'un conjoint, par exemple. L'une des raisons, plus simple et moins sombre, qui font quitter un logement occupé pour un logement sous-occupé est la suivante : il arrive aux enfants de grandir et, une fois grands, il leur arrive même de quitter le domicile des parents.
Mme Billard, qui a bien lu le texte, a eu l'honnêteté intellectuelle – je lui en sais gré – d'être assez précise pour rappeler la définition actuelle de la sous-occupation.
Imaginons l'hypothèse suivante : les parents survivent au départ de leurs enfants. Pour qu'un logement habité par deux personnes soit considéré comme sous-occupé, il doit être un T5 ; cela n'est pas valable s'il s'agit d'un T4.
Deux personnes habitant un appartement de deux pièces avec une cuisine ne sont pas en situation de sous-occupation.
Pour répondre à la vision plus sombre de M. Le Bouillonnec, j'indique qu'une personne seule n'est pas en situation de sous-occupation réglementaire si elle occupe un T3 ; elle doit habiter un T4 pour l'être.
Voilà des éléments d'information qui permettent de préciser la situation actuelle.
J'en viens à la libération de ces logements, non pas par l'expulsion, mais par le relogement, puisque trois offres sont proposées aux personnes concernées. Le texte, en effet, prévoit trois offres de relogement à un prix qui ne peut être supérieur au prix du logement précédent, comme vous l'avez dit.
Dans ces conditions, parler d'expulsion me paraît être un manque de respect à l'égard du texte.
Au fond, il s'agit de libérer des logements sous-occupés dans les zones tendues, parce que des familles nombreuses frappent à la porte. Que répond-on aux familles qui ont deux, trois ou quatre enfants en bas âge, et qui ont besoin non pas d'un T2 ou d'un T3, mais d'un T4 ou d'un T5, alors que certains appartements sont trop grands pour leurs locataires et d'autres trop petits ? C'est une simple mesure de justice : notre objectif est de loger les familles, nombreuses notamment, dans des conditions plus adaptées.
Pour ce faire, il convient de mieux affecter les logements de sorte que ceux qui sont moins nombreux occupent des logements moins spacieux, et que les familles nombreuses occupent des logements plus vastes. C'est aussi simple que cela !
Je voulais apporter ces précisions pour rappeler que la mobilité est d'abord au service des familles avec des enfants qui vivent aujourd'hui dans des logements trop étroits. Cela ne résoudra pas tout car, nous l'avons dit, il y a un déficit d'offre, mais il faut au moins optimiser l'utilisation du parc existant. C'est une simple mesure de justice.
Il n'y a pas besoin d'une loi ! Les organismes et les offices d'HLM s'y emploient déjà !
Le surloyer ne s'appliquera pas aux personnes de plus de soixante-dix ans, aux personnes handicapées ou aux locataires dont le logement n'est pas conventionné et changerait de statut.
Depuis quelques semaines, on oublie de préciser que le loyer plus le surloyer ne devront pas porter le taux d'effort à plus de 25 % des ressources ; les médias ont cité des exemples qui étaient sans doute inexacts. La règle subsiste.
C'est écrit dans les textes actuels, qui ne sont pas modifiés sur ce plan.
J'y insiste : avec la loi telle qu'elle est rédigée aujourd'hui, on ne peut pas demander plus de 25 % de taux d'effort. Par conséquent, des personnes ayant à subir un surloyer ne pourront pas, entre le loyer et le surloyer, avoir un loyer total atteignant plus de 25 % de leurs ressources.
Je vous donnerai la référence exacte qui n'est pas abrogée et qui figure dans le code actuel. Cet élément vous avait peut-être échappé, mais cela méritait d'être explicité, car trop peu de gens et trop peu de médias en ont fait état.
Il s'agit de l'article L.441-4. Vous pouvez vous y référer, car il n'est pas remis en cause. Je suis heureux d'apporter cet élément d'information qui, je le répète, n'a pas été beaucoup repris par les médias.
J'ajoute que le surloyer ne s'appliquera ni dans les ZUS ni dans les ZRR. En outre, il ne jouera que de manière extrêmement progressive. On invitera les gens à quitter leur logement dans un délai raisonnable, que certains ont même proposé d'allonger. Dans la loi actuelle, le délai est de trois ans.
Cela étant, qui est concerné ?
Avant que nous ne nous quittions, je vais vous donner quelques éléments d'information, qui nourriront peut-être la réflexion durant cette fin de semaine et citer un exemple de personnes pouvant être concernées par le surloyer.
Il faut ainsi gagner plus du double du plafond de ressources. Un couple avec deux enfants, vivant à Paris, doit donc avoir un revenu supérieur à 9 600 euros par mois pour être obligé, à terme, de changer de logement. Avec un tel niveau de revenu, il doit être possible de trouver un logement dans le parc privé et de permettre à des gens ayant un revenu bien moindre de pouvoir occuper le logement social qui leur est destiné.
Nous reparlerons de ces sujets lors de l'examen des amendements, mais je tenais à apporter ces éléments d'information ce soir, car ils me paraissent pouvoir nourrir la réflexion en cette fin de semaine, avant de nous retrouver lundi prochain, car nous ne terminerons pas l'examen du texte ce soir.
L'article 20 est important, et il y a manifestement des différences d'appréciation à son égard.
Nous aurons l'occasion, en examinant les amendements, de préciser notre position. À cette heure avancée de la nuit, je souligne simplement, et nous en sommes tous d'accord, qu'il manque des logements en France. L'année dernière, 435 000 logements ont été construits, ce qui est exceptionnel. Jamais autant de logements sociaux n'ont été financés qu'en 2008. Cependant nous avons du retard et nous devons être inventifs et créatifs afin d'adapter le logement aux besoins.
L'article 20 ne fait pas la distinction entre les bons et les méchants, ceux qui abusent et ceux que l'on va mettre dehors. Il s'agit seulement d'instaurer une nouvelle culture en matière de logements sociaux, c'est-à-dire que le maintien dans les lieux n'est plus un principe intangible. Dans un monde qui bouge, cela ne semble pas être en totale inadéquation par rapport à la réalité de la vie des hommes et des femmes du XXIe siècle.
La volonté du Gouvernement est d'instaurer de la fluidité dans le parcours résidentiel et de créer un véritable parcours résidentiel. Les choses ne se feront pas, et vous le verrez à l'occasion de la discussion des articles, de façon autoritaire et arbitraire. Nous proposons que les conventions d'utilité sociale définissent les conditions dans lesquelles les choses se passeront.
J'ai entendu, sur ces bancs, qu'il fallait faire confiance aux organismes d'HLM.
Il est évident que ce seront les organismes d'HLM qui mettront en place cette mobilité et cette fluidité, en tenant compte des réalités humaines. Et il existe des garanties pour éviter les injustices en la matière.
Vous savez tous, quelle que soit votre appartenance politique, que certaines personnes vivent dans des logements HLM trop petits pour elles. Ce sont en général des familles jeunes, avec de nombreux enfants, qui vivent dans deux pièces, alors que d'autres, moins nombreuses, habitent dans un logement plus grand. Nous avons tous, dans nos permanences, des demandes de la part de ces familles nombreuses, lesquelles constatent souvent qu'un appartement plus grand que le leur est occupé par une personne seule, alors qu'avec quatre enfants, elles vivent dans un deux pièces. Nous avons tous été confrontés à de tels cas de figure.
Jusqu'à présent, en raison du principe du maintien dans les lieux, un échange d'appartement entre les deux familles n'était pas possible.
L'article 20 prend en compte cette nouvelle réalité de la vie des hommes et des femmes du XXIe siècle. Nous devons trouver des solutions adaptées. Nous manquons de logements ; il faut donc en construire. Toutefois, avant que ce soit fait et que nous ayons effacé le gap qui existe aujourd'hui entre les besoins et l'offre de logements, nous devons essayer d'adapter, par rapport aux logements existants, la réalité de la vie de nos concitoyens.
C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable aux trois amendements de suppression.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Je voudrais compléter les réflexions et les analyses du rapporteur et de Mme la ministre.
Aujourd'hui, la mobilité dans le domaine du logement social est, comme l'a rappelé Mme la ministre, très compliquée à gérer, du fait du déficit de logements sociaux. Nous partageons sans doute tous cette réflexion.
S'agissant du problème de la sous-occupation, je peux vous citer l'exemple d'un parc de plus de 6 000 logements sociaux, situé dans ma ville.
Premier cas de figure : des personnes âgées, souvent seules, occupent des quatre, cinq ou six pièces et souhaitent un échange. Neuf fois sur dix, elles doivent attendre des mois, voire des années, pour que le bailleur social leur propose un logement plus petit et mieux adapté à leurs conditions de vie. Il y a, notamment dans les logements sociaux construits dans les années soixante ou soixante-dix, quatre, voire cinq niveaux, sans ascenseur. La personne âgée habitant un quatre, cinq ou six pièces, doit monter, une ou deux fois par jour, les quatre ou cinq étages à pied. Elle est, à l'évidence, obligée de demander un échange, mais, neuf fois sur dix – en tout cas à court terme –, les bailleurs sociaux sont incapables de lui offrir, par exemple, un trois pièces.
Deuxième cas de figure : lorsque le bailleur social a des disponibilités, il fait des offres d'échange. C'est une gestion intelligente de son parc immobilier, mais encore faut-il que le bailleur social ait la chance d'avoir quelques logements libres permettant ces échanges. Cette bonne gestion devrait se faire aujourd'hui sans que les bailleurs sociaux soient obligés de s'appuyer sur des textes législatifs ou réglementaires. Cela étant, que le Gouvernement nous propose un cadre général pour alimenter les actions de certains bailleurs sociaux qui n'ont pas ce type de réflexion n'est pas une idée à rejeter.
Troisième cas de figure : le loyer équivalent. Là encore, la pratique, aujourd'hui, fait que, lorsqu'une personne âgée quitte un quatre, cinq ou six pièces pour un trois pièces, par exemple…
…c'est à loyer égal mais avec, dans le cas que j'ai cité, des prestations supplémentaires. Ce sont, en général, des appartements qui ont été construits récemment, qui ont, bien entendu, un ascenseur et qui permettent à la personne âgée de vivre dans son quartier et, si possible, dans sa résidence. Nous essayons de ne pas déraciner les personnes âgées. C'est ainsi que sont gérés les échanges de logements.
Je vous livre une dernière réflexion, puisque la Fondation Abbé Pierre a été souvent citée aujourd'hui.
Parmi ses propositions, la cinquième est très intéressante. Elle indique qu'il faut développer, pour les personnes âgées, des formules d'habitat en petites unités insérées dans la ville et adaptées à l'âge et aux difficultés de déplacement. Il ne doit pas y avoir d'alternative entre le maintien à domicile et la maison de retraite. Il faut pouvoir offrir aux personnes âgées des structures d'accueil correspondant à leur souhait.
Prochaine séance, lundi 9 février à seize heures :
Suite du projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion.
La séance est levée.
(La séance est levée, le vendredi 6 février 2009, à deux heures.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma