Le rapport que j'ai remis à M. le Premier ministre recommande que les pouvoirs publics, et plus généralement tous ceux qui ont, de près ou de loin, la responsabilité du logement et de l'hébergement, n'alimentent plus la rue.
Qu'est-ce que cela veut dire ? Eh bien, tout simplement que, si pendables que soient les cas concernés – en particulier, que le locataire soit de bonne ou de mauvaise foi – et surtout s'il y a des enfants, le concours de la force publique ne soit plus exercé en l'absence de solution de substitution, de rechange. Car le recours à la force publique est, vous l'avez dit, la pire des hypothèses.
Je n'ai pas proposé, comme on me l'avait parfois demandé, de moratoire des expulsions. À l'heure actuelle, la suppression des expulsions serait, de même, une erreur. L'expulsion doit perdurer juridiquement.
En revanche, le concours de la force publique ne doit pouvoir être apporté à l'expulsion que s'il y a une solution de rechange. On ne doit plus alimenter la rue ; on ne doit plus créer de nouveaux sans-abri, de nouveaux sans domicile fixe.
Pour tarir les mesures juridiques d'expulsion, pour tarir même les demandes de concours de la force publique, j'ai proposé, et le Premier ministre a accepté, la création de commissions départementales de prévention des expulsions. Elles seront obligatoires dans chaque département, de façon que les difficultés des personnes, et en particulier des familles, soient saisies le plus vite possible.
Tous ces outils de prévention devraient permettre de ne plus mettre à la rue des hommes, des femmes, des enfants, des adolescents, des familles.
J'ajoute que, lors de mes premières propositions, intervenues au mois de janvier 2008, j'avais proposé au Premier Ministre de donner des instructions aux préfets pour que le concours de la force publique ne soit plus accordé en l'absence de solution de rechange. Par une lettre circulaire du 22 février 2008, M. le Premier ministre a effectivement donné cette consigne aux préfets.
Malheureusement, nous avons vécu un cas dramatique à Istres : quelques semaines après les instructions du Premier ministre, les autorités préfectorales ont accordé le concours de la force publique à l'expulsion d'une femme seule qui avait trois enfants à sa charge. C'est scandaleux ! Au-delà de la loi, au-delà de la réglementation, il y a un devoir de discernement. Même si aucune communication n'avait pu être établie entre les autorités et cette personne, il est évident qu'une telle situation aurait dû interdire d'accorder le concours de la force publique.
Nous allons en parler. Mais, en principe, ce concours ne doit plus être apporté à une expulsion en l'absence de solution de rechange. C'est la politique que j'ai proposée, que le Premier ministre a acceptée, et que les préfets doivent aujourd'hui en principe respecter.