La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2012 (nos 3775, 3805).
Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles de la première partie du projet de loi, s'arrêtant à l'amendement n° 3775%2C3805/363">363 , deuxième rectification, portant article additionnel après l'article 5.
Je suis saisi d'un amendement n° 363 , deuxième rectification.
La parole est à M. Jean-François Lamour.
Madame la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, il y a dix-huit mois, nous avons voté une loi sur l'ouverture et la régulation du marché des jeux et paris en ligne, ce qui nous permet d'offrir aux joueurs et aux parieurs un cadre particulièrement protecteur. Nous avons ainsi pu ramener presque tous ceux qui jouaient sur des sites illégaux, sites qui pouvaient être aux mains des mafias, vers des sites légaux, agréés par une autorité indépendante. Notre dispositif, notamment destiné à lutter contre l'addiction et le jeu excessif, est d'ailleurs si performant qu'il est de plus en plus copié par d'autres pays d'Europe qui veulent, eux aussi, protéger les joueurs et prendre en charge l'addiction et le jeu excessif.
Mais, comme tout texte portant sur internet, celui-ci doit pouvoir évoluer rapidement.
J'ai rédigé avec ma collègue Aurélie Filippetti un rapport d'information et d'évaluation sur l'application de cette loi, et c'est à partir de ce travail que je vous propose cet amendement qui vise à modifier l'assiette de la taxation des jeux et paris en ligne, en passant d'une taxation des mises à une taxation du produit brut des jeux.
Je réponds par avance aux objections que j'entends déjà : il ne s'agit absolument pas de diminuer la taxation ; bien au contraire, cet amendement, qui transforme les taux, ne nous ferait pas perdre un euro, et même pas un centime d'euro, madame la ministre, et je sais à quel point vous tenez, comme nous, à préserver les recettes de l'État.
Pour autant, il est nécessaire d'offrir un dispositif toujours aussi concurrentiel et performant pour les opérateurs – en particulier les opérateurs de paris sportifs, car pour ce qui est des paris hippiques et du poker, la loi fonctionne bien. Encore faut-il être cohérent.
Deux questions demeurent, madame la ministre, et nous allons pouvoir en débattre maintenant.
Quel est le périmètre du produit brut des jeux ? Je vous ai fait une proposition de taxation qui écarte les bonus et abondements ; et vous avez vu les taux de taxation : pour les paris sportifs, ils atteignent 58 % ! C'est un chiffre qui doit nous faire réfléchir. Pour autant, faut-il intégrer les bonus et abondements dans le périmètre de taxation ?
D'autre part, pour éviter toute évasion fiscale, nous devons être certains que les conventions fiscales qui nous lient à d'autres pays, en particulier l'Italie, la Grande-Bretagne et Malte, prévoient que les opérateurs concernés soient imposés dans notre pays. Sinon, il faut prévoir un avenant à ces conventions pour prendre en compte les dispositions de cet amendement.
Voilà l'objet de cet amendement, qui encore une fois concourt à l'évolution nécessaire d'un texte comme celui-là qui avait pour ambition, je le rappelle, la protection des joueurs, et qui est de ce point de vue une vraie réussite.
Je sais, madame la ministre, que vous préparez un rapport sur cette loi dans le cadre de la clause de revoyure, et je ne vous cache pas que nous l'attendons avec une grande impatience.
La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission.
La commission a accepté cet amendement de M. Lamour, qui fait suite au rapport qu'il nous a présenté avec Mme Filippetti. Il vise à changer l'assiette de taxation, en passant des mises au produit brut des jeux, comme cela se pratique dans d'autres pays.
En revanche, je me suis immédiatement posé la question des recettes ; mais j'avoue que je ne sais pas si les recettes demeureraient effectivement identiques.
La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, pour donner l'avis du Gouvernement.
Je voudrais d'abord rendre un hommage au travail absolument remarquable qui a mené à la loi sur l'ouverture des jeux en ligne, il y a deux ans. Vous avez tenu, monsieur le député, un rôle décisif dans ces débats fructueux.
Je voudrais tirer un court bilan de votre action, car l'ouverture des jeux en ligne a été une formidable réussite. C'est un nouveau secteur économique légal qui s'est développé ; nous avons ainsi moralisé ce qui auparavant, vous le savez, était une jungle. Aujourd'hui, 11,8 milliards d'euros sont misés dans les jeux en ligne : voilà qui montre le dynamisme du marché légal des jeux. Le marché illégal a été très largement asséché, puisque plus de 80 % des joueurs jouent désormais sur des sites légaux, contre 30 % seulement avant la loi. C'est donc une oeuvre de moralisation, monsieur le député, que vous avez rendue possible.
Le Gouvernement, vous l'avez dit, s'était engagé à remettre dans les dix-huit mois suivant l'adoption de la loi un rapport sur l'application de ce texte. Ce rapport, il est là, il est tout chaud ; je vous l'ai apporté en avant-première ! (Sourires.) Je le mettrai à votre disposition dès la fin de la matinée, et je le transmettrai évidemment aux assemblées pour qu'il y soit examiné.
J'en viens à votre amendement.
Je prends bonne note du fait que vous ne souhaitez pas diminuer la fiscalité sur les jeux en ligne. Le Gouvernement ne le souhaite pas non plus ; nous sommes aujourd'hui dans une situation financière difficile, il ne serait donc pas acceptable de faire baisser les prélèvements sur ce secteur.
Ce que vous proposez, c'est de modifier l'assiette de prélèvement public, à un niveau global de fiscalité inchangé.
Le problème, très bien soulevé par M. le rapporteur général, c'est que si le Gouvernement avait choisi de taxer les mises plutôt que le produit brut des jeux, c'est parce qu'il craignait l'évasion fiscale. Le Conseil d'État, que nous avions saisi lors de la préparation de la loi, avait en effet considéré que la taxation du produit brut des jeux s'apparentait à la taxation d'un élément de revenu des opérateurs. Dès lors, le produit brut des jeux était susceptible d'entrer dans le champ des conventions fiscales que la France a signées avec différents États de l'Union européenne, et qui prévoient l'imposition des revenus dans le pays d'établissement, et non dans le pays où le service est rendu.
En taxant le produit brut des jeux et non les mises, nous prenons donc le risque que certains opérateurs, situés fort opportunément hors de France, échappent à l'imposition dans notre pays. Le manque à gagner fiscal qui serait ainsi créé ne serait pas acceptable – je rejoins totalement sur ce point les conclusions du rapporteur général.
Nous sommes donc ouverts à vos propositions, mais nous pensons que le passage à cette nouvelle assiette ne pourrait être réalisé qu'à condition de régler trois problèmes.
D'abord, le niveau de fiscalité doit demeurer le même, et pour cela, il faut préciser clairement le périmètre de ce produit brut des jeux ; cela nécessite, si vous me le permettez, un travail complémentaire approfondi. Par exemple, faut-il exclure les bonus de l'assiette de la taxation ? Selon la réponse, l'assiette, et donc le taux de fiscalité, varient sensiblement.
Ensuite, des avenants aux conventions fiscales en vigueur, préservant la taxation du produit brut des jeux en France, doivent être signés avec les pays où les opérateurs agréés se sont, fort opportunément je le répète, implantés. Il faut donc signer ces avenants, et ensuite réformer l'assiette, plutôt que de faire l'inverse et de risquer une très forte évasion fiscale.
Enfin, ne changer l'assiette que pour les paris en ligne pourrait créer une distorsion avec le secteur « en dur ». Une telle différence dans les modalités d'imposition devrait être justifiée constitutionnellement par des impératifs d'ordre public ou social et préalablement notifiée à la Commission européenne.
Compte tenu des questions qui se posent, le Gouvernement ne peut pas vous donner une réponse positive dès maintenant. En revanche, je souhaiterais vous confier une mission afin d'étudier comment modifier l'assiette sans réduire la fiscalité.
Je vous demande donc de retirer votre amendement et d'accepter un travail supplémentaire sur la moralisation des jeux en ligne, beau sujet que vous défendez depuis deux ans.
L'intervention de Mme la ministre nous a permis d'entendre la voix de la sagesse.
Monsieur Lamour, vous nous proposez de passer d'une taxation des mises à une taxation du produit brut des jeux qui est le montant des mises moins le montant des gains.
Je ne conteste pas votre parfaite connaissance du dossier, car je sais que vous aviez rédigé un rapport conjointement avec Mme Filippetti qui, du reste, ne partage pas du tout vos propositions. Je ne conteste pas non plus le fait que les pays voisins ont adopté ce type de fiscalité. Pour autant, ces motifs ne nous permettent pas d'adhérer à votre projet, pour trois raisons.
Premièrement, il s'agit tout simplement d'une baisse de la fiscalité dans un champ concurrentiel, comme vient de le dire Mme la ministre, qui brasse des sommes considérables d'argent, et produit donc des profits très importants pour des opérateurs qui ne sortent pas tous du couvent des oiseaux !
Deuxièmement, réclamer un changement d'assiette de la fiscalité sur les jeux en ligne tout en affirmant que l'on souhaite maintenir les recettes fiscales à leur niveau initial équivaut à encourager les stimulations accrues des jeux, avec le danger d'accentuer les risques d'addiction. Ce ne serait pas très bien joué !
Enfin cette modification de la fiscalité est bruyamment réclamée par les opérateurs des jeux qui sont adeptes du toujours plus côté profit et du toujours moins côté prélèvements.
Je n'ai jamais caché que, pour tenter de juguler les jeux illégaux qui proliféraient au détriment de la fiscalité française, de l'intérêt collectif et des organisateurs des spectacles sportifs, j'étais favorable au principe d'une loi – pas nécessairement à celle du 12 mai 2010, mais entre deux maux, il faut choisir le moindre.
Je suis donc à l'aise pour dire que nous voterons contre cet amendement, car il ne s'agit, ni plus, ni moins, que d'un changement d'assiette au beurre ! (Sourires.)
La disposition présentée prévoit que les fonds affectés au CNDS resteraient les mêmes, puisqu'ils seraient de 10,6 millions au lieu de 10,5 millions d'euros. Or le CNDS manque cruellement de ressources, et notre pays présente un retard considérable en matière de grands équipements, ce qui conduit un certain nombre de collectivités à se lancer dans de telles opérations. Peut-être serait-il intéressant de doter plus abondamment le CNDS, ce qui contribuerait à moraliser les ressources du jeu.
Monsieur Nayrou, vos arguments ne sont pas recevables. Mais je ne vous en veux pas, car je sais que vous êtes en service commandé.
Il y a deux ans, lors de la discussion du texte sur les jeux en ligne, vous aviez soutenu qu'il ne fallait pas bouger, qu'il ne fallait rien faire. Pourtant, Dieu sait que nous avons eu raison de proposer un cadre protecteur car, si nous vous avions écouté, il ne se serait rien passé, trois millions de joueurs évolueraient toujours sur des sites illégaux, et surtout il n'y aurait pas un euro de rentrée fiscale pour l'État.
Vous dites que cette loi ne vous convient pas. Mais sachez qu'elle est maintenant reproduite dans une dizaine au moins de pays européens. Elle constitue une grande avancée pour la protection des joueurs.
Je suis très sensible à la taxation de ces jeux, monsieur Goua. S'agissant des jeux en dur, la Française des Jeux contribue au financement du CNDS. Sachez aussi que, s'agissant des paris en ligne, nous avons prévu une augmentation régulière du taux de prélèvement au profit du CNDS. En effet, ce taux qui était de 1,3 % l'année dernière, sera porté à 1,5 % l'année prochaine, pour atteindre 1,8 % non plafonné en vitesse de croisière. C'est donc une grande avancée que d'avoir obtenu de la part du Gouvernement la possibilité de prélever sans plafonnement les paris et jeux en ligne au profit du CNDS qui a toujours besoin d'argent pour construire des équipements de proximité.
Madame la ministre, même si nous avons tous une charge de travail importante, j'accepte bien volontiers votre proposition de travailler pour parvenir à une cohérence en matière de conventions fiscales avec un certain nombre de pays européens, comme l'Italie, l'Angleterre et Malte. C'est seulement à cette condition que nous pourrons évoluer vers une base d'imposition fondée sur le produit brut des jeux. Par ailleurs, il nous faudra définir ce PBJ, c'est-à-dire savoir s'il faut tenir compte des bonus et des abondements.
Monsieur Nayrou, nous ne faisons aucun cadeau à qui que ce soit, et l'amendement prévoit que pas un seul centime d'euro ne serait perdu par l'État ; c'était là ma priorité. Cela dit, il faut faire évoluer ce texte et rendre toujours plus concurrentielle, sinon au moins aussi concurrentielle, notre offre de paris et jeux en ligne, sinon tous les joueurs retourneront dans le champ illégal, ce qui entraînera des problèmes, à la fois d'addiction et de recettes pour l'État.
Monsieur le président, je retire mon amendement.
(L'amendement n° 363 , deuxième rectification est retiré.)
Les coopératives, notamment de pêche, sont amenées à faire des investissements très lourds. Pour financer par exemple l'acquisition d'un bateau de pêche, elles doivent trouver un certain nombre d'associés. Le présent amendement prévoit d'assouplir le nombre d'associés pouvant participer à ces holdings de pêche, afin de permettre à ces sociétés coopératives, dont le rôle est très important dans notre économie, de pouvoir bénéficier des allégements du dispositif Madelin, c'est-à-dire des réductions d'ISF et d'impôt sur le revenu.
La commission n'a pas examiné cet amendement. Mais notre collègue Louis Guédon m'a parlé à plusieurs reprises de ce dispositif. Il s'agit de faire une exception à une règle générale qui est de maintenir à cinquante le nombre d'associés dans les holdings utilisant ce type d'aide fiscale. Hier, j'ai répondu à Nicolas Forissier qu'on ne pouvait pas ériger en règle générale l'augmentation du nombre d'associés en le portant de cinquante à cent.
Mais ici, il s'agit d'un cas très particulier. Compte tenu du coût très important des bateaux de pêche, il s'avère à l'expérience que le nombre de cinquante associés est insuffisant. Je vous propose donc d'adopter cet amendement proposé par le Gouvernement qui a été préparé notamment à l'initiative de Louis Guédon.
Madame la ministre, je suis favorable à l'amendement du Gouvernement qui me paraît tout à fait intéressant. C'est la traduction d'un travail considérable réalisé par un certain nombre de nos collègues, parmi lesquels Louis Guédon.
Si cet amendement résulte d'une demande singulière du monde maritime, il s'adapte parfaitement à l'ensemble des coopératives, et en particulier aux coopératives agricoles.
Il faut savoir que les coopératives rencontrent des problèmes spécifiques pour mobiliser du capital du fait de leur situation singulière – elles ne peuvent pas faire appel à un capital mobilisé par ailleurs. La présente disposition permet donc de renforcer la structure de bilan des sociétés liées à ces coopératives.
Je suis saisi de deux amendements, nos 439 et 56 , pouvant être soumis à une discussion commune.
L'amendement n° 439 fait l'objet du sous-amendement n° 441 .
L'amendement n° 56 fait l'objet des sous-amendements nos 442 , 433 , 219 rectifié , 387 deuxième rectification, 388, 434 et 392 rectifié.
La parole est à Mme la ministre.
Vous le savez, le Premier ministre a annoncé, le 24 août dernier, dans le cadre de son plan de réduction des déficits, un plan de santé publique d'un milliard d'euros qui vise à prévenir les comportements à risques qui, à terme, dans une durée de dix, vingt, trente ans, peuvent avoir de très grandes conséquences sur les dépenses d'assurance maladie.
Ce plan de prévention mettait en avant un outil nouveau : la taxe comportementale, qui vise à augmenter le prix de certains produits pour modifier les comportements des Français. L'augmentation de ces prix est un signal envoyé aux Français, aux familles, ce qui les incite à un comportement plus protecteur en matière de santé publique.
Nous espérons que cette taxe modifiera tout de suite les comportements, induisant à terme une baisse du coût de l'assurance maladie.
Bien évidemment, il fallait que de telles taxes portent sur les comportements qui entraînent les grandes pathologies du siècle, comme le cancer, dû essentiellement au tabac et à la consommation d'alcool, et l'obésité qui est en train de devenir l'une des pathologies du xxie siècle. Vous le savez, le surpoids a fait, aux États-unis, pour la première fois dans l'histoire de ce grand pays, baisser l'espérance de vie.
Sous l'égide du Président de la République, nous avons lancé le plan cancer II et un grand plan obésité. Ces taxes comportementales font partie de cette logique. Il ne s'agit pas de taxer pour taxer, de faire du rendement mais d'avancer dans la voie des taxes comportementales qui sont utilisées aujourd'hui dans tous les grands pays du monde. Une autre taxe comportementale qui figure dans ce projet de loi de finances est celle relative aux loyers abusifs des toutes petites surfaces. Nous considérons que certains propriétaires abusent et font payer trop cher ces petites surfaces.
J'invite les députés de la majorité à prendre ce tournant de la fiscalité comportementale. C'est une fiscalité moderne, c'est enfin le passage à une logique de prévention des dépenses d'assurance maladie. Je rappelle que l'OMS a montré que l'outil fiscal, et notamment les taxes nutritionnelles sur des produits à sucres ajoutés, était l'un des éléments les plus efficaces de la prévention contre l'obésité.
J'indique également que votre Assemblée n'a pas à rougir de son action en la matière puisque vous avez été les premiers, il y a quelques années, à voter l'amendement de M. Yves Bur, visant à interdire les distributeurs de produits sucrés dans les écoles. Cette disposition a porté ses fruits puisque, depuis cinq ans, le surpoids recule chez les enfants scolarisés.
Cette mesure, associée à d'autres comme les bandeaux publicitaires qui passent sur les écrans de télévision, a permis une prise de conscience et entraîné des changements tangibles, y compris dans les habitudes alimentaires des enfants. Il s'agit donc bien d'un plan de santé publique.
Cela dit, ce plan de santé publique est venu télescoper une réflexion en cours à l'Assemblée sur un tout autre sujet, un sujet économique, relatif au coût de l'emploi permanent dans le secteur agricole – coût si élevé que le taux de recrutement en contrat à durée indéterminée y reste très faible. Or nous voulons stimuler l'emploi permanent, notamment par le biais d'une baisse des charges sociales qui pèsent sur le travail agricole.
Cette proposition – d'origine parlementaire – est soutenue par le Président de la République. Je tiens à cet égard à rendre hommage à Christian Jacob, Bernard Reynès et Charles de Courson, pionniers de ce débat sur la baisse du coût du travail agricole.
Vous aviez prévu de financer cette baisse par une taxe sur l'industrie agroalimentaire. Aussi le projet de santé publique du Gouvernement se heurte-t-il à une proposition parlementaire antérieure ; nous sommes donc en présence de deux projets, reposant sur deux taxes et poursuivant deux objectifs radicalement différents.
Parce que les parlementaires souhaitaient financer la baisse du coût du travail agricole par une taxe sur l'industrie agroalimentaire, le Gouvernement a décidé de transférer la taxe sur les sodas à sucres ajoutés du PLFSS, où elle trouvait toute sa place, au PLF, et, au terme d'un accord passé avec les députés de la majorité, de doubler le produit de cette taxe de façon à en affecter la moitié à la sécurité sociale et l'autre moitié à la défiscalisation du travail agricole permanent, à hauteur d'un euro l'heure pour un employé agricole touchant le SMIC, avec une aide dégressive que je vous ai présentée hier.
Voilà le dispositif que je vous demande d'adopter : le doublement de la taxe sur les sodas à sucres ajoutés. Cette mesure vise à taxer un produit qui ne fait pas partie du régime alimentaire des Français. Je me vois contrainte de vous demander de rester dans celle logique et de vous mettre en garde contre le projet d'élargir l'assiette de cette taxe.
En effet, l'élargissement de son assiette ferait perdre à la taxe sa cohérence s'il devait concerner des produits n'ayant aucun rapport ou bien qu'un rapport lointain avec l'objet de ladite taxe. On courrait ainsi le risque de se voir accuser d'arbitraire fiscal : pourquoi taxer tel produit plutôt que tel autre ? Où se situe la limite ? Voilà pourquoi je vous mets en garde.
La taxe proposée par le Gouvernement est cohérente et vise à satisfaire l'intérêt général. Ne brouillez pas le message que nous voulons adresser aux Français en élargissant l'assiette de cette taxe alors que, telle que nous la proposons, elle permet de dégager les 210 millions d'euros nécessaires pour compenser la baisse du coût du travail agricole.
Je me permets de donner dès maintenant l'avis du Gouvernement sur certains des prochains sous-amendements. L'un d'eux, tout à fait judicieux, présenté par Mme Edwige Antier, fait valoir que le texte ne prend pas en compte la spécificité des produits de nutrition infantile. L'amendement du Gouvernement en tient compte, satisfaisant ainsi votre sous-amendement n° 219 rectifié , madame la députée.
Le sous-amendement n° 387 rectifié de M. Mancel propose quant à lui un dispositif alternatif très intéressant – encore plus « vertueux » que celui du Gouvernement –, consistant à taxer les boissons à sucres ajoutés en fonction du taux de sucres que contient une cannette. Ce sous-amendement présente un double avantage : d'abord on taxe un produit qu'on consommera par conséquent moins, ensuite on incite les producteurs de ces boissons à fournir un effort pour réduire la teneur en sucres des cannettes. Nous ne pouvons malheureusement adopter un tel dispositif en l'état parce qu'il n'existe aujourd'hui aucune obligation légale pour les producteurs de boissons sucrées d'indiquer la contenance en sucres sur les cannettes. Dépourvus des éléments qui nous permettraient d'asseoir la taxe, nous ne pouvons la voter.
Cela dit, monsieur le député, je serais très favorable à la poursuite du travail avec la commission des affaires sociales pour tâcher de mettre en place un tel barème. Un tel dispositif serait vertueux et avantagerait certains producteurs qui ont fait l'effort de baisser le taux de sucres de leurs boissons – je pense à certaines grandes marques françaises –, dans la mesure où, ainsi, ils seraient moins taxés et bénéficieraient d'une sorte de bonus pour bonne fabrication.
Nous devons donc continuer à travailler sur le sous-amendement Mancel qui ne peut être adopté en l'état et en revanche retenir le sous-amendement Antier. Quant à tous les amendements visant à élargir l'assiette de la taxe, le Gouvernement y est défavorable : une telle mesure courrait un risque d'inconstitutionnalité, et ferait perdre sa cohérence au dispositif que nous souhaitons instaurer. Enfin, j'y insiste, elle brouillerait radicalement le message que nous voulons transmettre aux Français. En outre, il ne serait pas responsable, dans le contexte actuel, de priver le secteur agricole de 50 millions d'euros. Sécurisons la recette, votons une taxe cohérente et surtout, je le répète, donnons aux Français un message clair de prévention et de santé publique.
La parole est à M. Daniel Garrigue, pour soutenir le sous-amendement n° 441 .
J'ai déjà présenté, il y a deux ans, ce projet de taxe sur les sodas avec l'intention précise d'apporter un minimum de ressources à la caisse centrale de mutualité sociale agricole afin de faire progresser la question des retraites agricoles.
Si le système des retraites agricoles a bénéficié de certaines avancées au cours des dernières années, il n'en reste pas moins déphasé par rapport au fonctionnement normal des autres régimes. Si les retraités agricoles n'ont pas cotisé un nombre suffisant d'années, ils n'ont pas droit à une retraite proportionnelle et subissent des minorations importantes qui diminuent considérablement leurs droits.
Il faut en effet tenir compte du nombre très important des polypensionnés dans le secteur agricole – c'est le cas de certains au sein même du secteur, qui ont commencé comme salariés et terminé comme exploitants. Il convient en outre de prendre en considération la situation souvent très défavorable des veuves et des conjoints d'exploitants agricoles. Des aménagements se révèlent donc nécessaires.
Le Président de la République, au cours de la campagne présidentielle de 2007, avait pris des engagements très forts vis-à-vis des retraités agricoles, engagements non respectés.
L'amendement du Gouvernement instituant une taxe sur les sodas pourrait apporter un élément de réponse sans remettre en cause l'essentiel du dispositif. Il est prévu dans le VI de l'amendement que le produit de la contribution est affecté pour moitié à la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés. Cet élément du dispositif doit contribuer à l'allégement de charges des exploitants agricoles.
À l'évidence, une autre moitié du produit de cette contribution peut être utilisée différemment. Nous avons ici l'occasion d'accomplir un pas en direction des retraités agricoles, d'avancer en priorité vers la suppression des minorations qui constituent une profonde anomalie dans nos systèmes de retraites, enfin de remédier à la situation souvent très difficile, je le répète, des veuves et des conjoints.
Cet amendement, qui vise à affecter la seconde moitié du produit de la taxe à la caisse centrale de mutualité sociale agricole, non seulement ne remet pas en cause la mesure que vous proposez vis-à-vis des exploitants agricoles, madame la ministre, mais il présente une avancée en faveur des retraites agricoles.
Nous avons déjà abordé la nuit dernière la question de savoir comment trouver 210 millions d'euros de recettes supplémentaires pour financer une mesure générale d'abaissement des charges sociales conventionnelles sur les contrats à durée indéterminée pour tous les salariés – je dis bien tous – relevant du régime agricole, cela dans la limite de vingt salariés. Mme la ministre avait confirmé, à cet effet, qu'une première mesure rapporterait 80 millions d'euros et une seconde, celle que nous allons examiner, 130 millions d'euros, soit 210 millions au total.
Quelle est la différence entre l'amendement n° 439 du Gouvernement et l'amendement n° 56 de la commission ?
Il convient d'abord de rappeler que nous sommes tous d'accord sur la nécessité de dégager une somme de 210 millions d'euros pour financer l'exonération de charges sociales conventionnelles. Toutefois, pour nous, l'allègement des dites charges implique la création de recettes nouvelles. Or qu'il s'agisse de la réduction des TIC ou de cette taxe sur les boissons sucrées, ce que nous proposons est une mesure de rendement destinée à dégager 210 millions d'euros afin que nous puissions voter, en deuxième partie le dispositif sur lequel nous avons beaucoup travaillé avec Bernard Reynès et de nombreux autres collègues ici présents, en particulierMichel Diefenbacher.
Vous nous reprochez de vouloir élargir l'assiette puisque l'amendement de la commission concerne également les édulcorants. Cependant, madame la ministre, j'y insiste, la commission entendait proposer une mesure de rendement. Votre grand argument consiste à nous alerter contre un risque d'inconstitutionnalité. Mais où réside ce risque ? Le Parlement a tout de même le droit d'augmenter des impositions de toutes natures sur telle ou telle catégorie de produits dans le souci de maintenir l'équilibre budgétaire ! Ces mesures, d'ailleurs, dans l'esprit de la commission, ne sont pas affectées.
Le Gouvernement comme la commission entendent affecter 120 millions d'euros à la CNAM. Nous en avons longuement discuté en commission avec le rapporteur général. Nous nous demandons s'il faut maintenir cette disposition. Nous pouvons éventuellement suivre l'idée du rapporteur général et présenter en deuxième partie des amendements visant à compenser les 120 millions d'euros initialement affectés à la CNAM.
Il convient en tout cas de ne pas trop mélanger les questions de rendement avec celles de la santé publique.
Je ne suis pas un grand spécialiste des problèmes nutritionnels mais il m'arrive de lire des articles de l'OMS sur le sujet et je note que, pour la plupart des observateurs, l'augmentation de la part de la population en surcharge pondérale, comme on dit pudiquement, serait liée à la perte de bonnes habitudes alimentaires. Toutes les études montrent que ce phénomène ne s'expliquerait pas par la consommation de boissons sucrées ou non-sucrées mais serait dû à l'absence de pratique sportive, au fait de rester passif, de ne pas avoir une alimentation équilibrée et, surtout, de grignoter matin, midi et soir.
Pour revenir à l'essentiel, tout ce que nous souhaitons, c'est financer une mesure qui sera examinée en deuxième partie. Il s'agit donc bien d'une mesure de rendement. Le rapporteur général développera probablement cette idée mais voilà en tout cas l'esprit de la proposition de la commission.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 56 .
Je laisse à M. Diefenbacher le soin de présenter cet amendement, monsieur le président.
La parole est à M. Michel Diefenbacher, pour soutenir l'amendement n° 56 .
Si vous le voulez bien, monsieur le président, je défendrai en même temps le sous-amendement n° 388 . Et pour la clarté du débat, je dirai également un mot du sous-amendement n° 434 , qui sera défendu par notre collègue Guy Geoffroy.
Chacun l'aura compris, c'est un sujet sensible que la création d'une taxe sur les boissons sucrés, et surtout son extension aux boissons avec édulcorants. L'objectif, je le rappelle, c'est de financer l'exonération des charges des agriculteurs sur la main-d'oeuvre permanente, qui conditionne la compétitivité de notre agriculture.
Pourquoi la commission des finances souhaite-t-elle que cette nouvelle taxe soit étendue aux boissons avec édulcorants ? Essentiellement pour trois raisons.
La première est une raison de cohérence fiscale. Les boissons avec sucres ajoutés et les boissons avec édulcorants sont en réalité des produits très voisins. Ils sont vendus dans les mêmes commerces. Ils sont présentés sur les mêmes gondoles. Ils s'adressent à la même clientèle. Ce ne sont pas des produits de première nécessité, mais ce sont des produits faiblement taxés, puisque le taux de TVA qui leur est appliqué est de 5,5 %. Dans ces conditions, ces produits peuvent, les uns comme les autres, de la même manière, supporter une hausse, au demeurant très modérée, de la fiscalité.
La deuxième raison, c'est que nous souhaitons sécuriser le financement de l'exonération des charges des agriculteurs. Il nous faut trouver 210 millions. Charles de Courson nous a fait, durant la nuit, un exposé très remarquable, d'où il ressortait que nous avions trouvé 120 millions par le doublement de la taxe sur les boissons sucrés et 80 millions par la limitation de la détaxation du fioul domestique pour les activités professionnelles.
C'était hier.
C'était hier. Il nous manque donc 10 millions. Non seulement nous les trouvons sans difficulté en taxant les boissons avec édulcorants, mais de surcroît, en élargissant la base de la taxe, nous pouvons en limiter le taux, et donc l'impact sur les prix de vente. La taxe serait portée, non pas à 7,12 euros par hectolitre, mais à 6,22 euros par hectolitre. L'impact sur les prix serait de l'ordre de trois centimes d'euro pour une canette de trente-trois centilitres : nous sommes ainsi très loin des écarts de prix qui sont d'ores et déjà constatés, dans une même ville, selon les magasins, les quartiers et les conditionnements, écarts que le président Cahuzac avait estimés, au début de nos débats, à quatorze centimes d'euro. On voit donc que l'impact est très faible sur le consommateur.
La troisième raison, et c'est le coeur même de notre débat, c'est que nous nous interrogeons vraiment sur la pertinence du lien entre la taxe et la santé publique. Et nous avons, à cet égard, trois interrogations.
Première interrogation : si la création de la taxe est une mesure de santé publique, pourquoi figure-t-elle dans le projet de loi de finances et non pas dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale ? Ou, pour être encore plus précis, puisqu'elle figurait à l'origine dans le PLFSS, pourquoi le Gouvernement l'en a-t-il fait sortir ? Il nous semble, de notre côté, que dès lors que la taxe est sortie du PLFSS, l'argument de la santé publique ne tient plus.
Deuxième interrogation : si l'intention du Gouvernement est de créer une fiscalité diététique, il faut alors revoir l'ensemble de la fiscalité applicable à ce que l'on appelle le salé, sucré et gras, et non pas se limiter à la création d'une taxe sur les boissons sucrées. Il faut alors regarder l'ensemble des modalités de taxation des produits lactés, des charcuteries, des cacahuètes, des produits d'apéritif, des barres chocolatées, etc.
Il faut aussi soulever une question difficile : la nécessité de mettre de l'ordre dans les taux de la TVA. Que peuvent penser nos cardiologues du fait que le beurre est taxé à 5,5 % et la margarine à 19,6 % ? C'est donc un très vaste chantier, me semble-t-il, que le Gouvernement souhaite ouvrir. Et ce chantier nous paraît excéder de très loin la mesure qui nous est proposée.
Et si nous en restons à une simple taxe sur les boissons sucrées, le Conseil constitutionnel ne risque-t-il pas d'estimer qu'il y a une disproportion manifeste entre l'objectif affiché par le Gouvernement – la politique de santé publique – et le moyen proposé, une simple taxe sur les boissons sucrées ?
Notre troisième interrogation, c'est l'issue incertaine du débat qui est ouvert par les nutritionnistes eux-mêmes sur les avantages et sur les risques des édulcorants. Et tant que ce débat n'est pas clos, il nous semble difficile d'en préjuger l'issue, et donc de traiter différemment les boissons sucrées et les boissons avec édulcorants.
C'est pour toutes ces raisons, madame la ministre, mes chers collègues, que nous pensons plus sage de couper clairement le lien entre les mesures fiscales et les questions de santé publique. Pour nous, cette taxe n'est pas une taxe comportementale. C'est une taxe de rendement. Sur ce point, je rejoins complètement notre collègue de Courson. Et nous en tirons d'ailleurs toutes les conséquences, en supprimant le lien entre la taxe initiale proposée par le Gouvernement et la CNAM. C'est l'objet du sous-amendement n° 434 .
Un mot, enfin, sur le sous-amendement n° 388 , qui vise à conserver pour les nectars de fruits le taux initialement prévu par le Gouvernement. Pourquoi ? Parce que ce ne sont pas des produits industriels. Ce sont des produits qui sont issus de notre agriculture, cette agriculture que l'ensemble de ce dispositif vise à conforter.
Je souhaite ajouter deux mots, pour que chacun comprenne bien.
La taxe annoncée par le Premier ministre le 24 août est une taxe sur les boissons sucrées, liée à des problèmes de santé. C'est donc une taxe à visée comportementale, comme les taxes anti-pollution. Elle est conçue pour être affectée à la Caisse nationale d'assurance maladie, qui s'occupe des problèmes de santé, comme chacun sait. Cette taxe a sa place dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Au cours des semaines suivantes, les choses évoluent, en particulier avec l'excellent travail conduit par notre collègue Bernard Reynès, avec Charles de Courson et Serge Poignant, sur la question du coût du travail salarié agricole. Dès lors, la question se pose de savoir comment financer une exonération de charges patronales d'un euro de l'heure sur les salariés agricoles. Cela conduit à une décision extrêmement importante prise par le Gouvernement : au lieu de faire figurer la taxe dans le PLFSS, on l'insère dans le projet de loi de finances. Et on la double, afin qu'elle puisse, d'une part, être utilisée pour la CNAM – ce que nous verrons en seconde partie –, et d'autre part, servir de gage, et nous le verrons également en seconde partie quand nous examinerons la mission Agriculture, à un amendement déposé par Bernard Reynès et plusieurs de nos collègues tendant à abaisser les charges sociales.
Autrement dit, cette taxe figurait à l'origine dans le PLFSS et avait un objectif de santé, et au fil du temps, elle se transforme en taxe de rendement : elle est dans la loi de finances. Et c'est une taxe de rendement,…
…qui n'est pas affectée. Elle apportera des recettes supplémentaires, dont les députés, madame la ministre, feront bon usage dans les discussions que nous aurons en deuxième partie.
Dès lors que c'est une taxe de rendement, il faut l'assumer comme telle. L'article 34 de la Constitution dit que c'est le Parlement qui fixe l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement. Il est donc légitime que nous découpions une assiette qui permet d'assurer la ressource. Nos collègues Michel Diefenbacher et Charles de Courson ont proposé, en commission des finances, d'étendre l'assiette. Vous savez bien que pour qu'un impôt soit bon, il faut qu'il ait une assiette large et un taux faible. C'est donc le travail que nous avons fait en étendant cette taxe aux boissons avec édulcorants. Cette assiette plus large permet de baisser un peu le taux, et d'éviter que les comportements soient modifiés.
En outre, il est légitime d'étendre l'assiette aux boissons avec édulcorants. Si on l'étendait, par exemple, aux jeux en ligne, cela n'aurait rien à voir avec l'agriculture.
Mais les boissons avec édulcorants font partie des habitudes alimentaires. L'agriculture, monsieur Plagnol, sert à nourrir les hommes et les femmes.
Il y a donc là une certaine cohérence. Nous avons une taxe de rendement, et c'est à nous d'en définir l'utilisation.
Pour terminer, je rappelle les montants. Cette taxe de rendement est calibrée pour rapporter à peu près 210 millions. Hier, nous avons adopté un amendement présenté par Charles de Courson,…
…qui abaisse légèrement, M. Le Fur le sait, le montant de l'exonération de TIPP sur le gazole destiné aux véhicules agricoles et de travaux publics. Cela nous permet donc de dégager une recette de l'ordre de 320 ou 330 millions.
La CNAM bénéficiera – toute une série de tuyaux relient, comme on sait, le budget de l'État à la CNAM – des 120 millions d'euros, comme le souhaitait le Gouvernement. Et le reste gagera la mesure agricole.
Tout cela respecte totalement l'orthodoxie budgétaire. Mais c'est vrai, il faut le reconnaître, que le Gouvernement avait, au départ, présenté cette taxe comme une réponse à des préoccupations de santé. L'avoir inscrite en loi de finances en fait une taxe de rendement.
Monsieur le rapporteur général, pour la clarté du débat, pourriez-vous soutenir le sous-amendement n° 442 ?
Le sous-amendement n° 442 précise que la taxe vise les boissons avec édulcorants « de synthèse ». Cette précision rendra inutile, monsieur Diefenbacher, les sous-amendements portant sur les « nectars de fruits », ou autres boissons.
La parole est à M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances, pour soutenir le sous-amendement n° 433 .
Avant de présenter ce sous-amendement, monsieur le président, je souhaiterais indiquer la façon dont il me semble qu'on pourrait voir les choses.
D'abord, convenons que cette taxe n'augmente pas la dépense publique, puisque ce qui est prélevé est, d'une certaine manière, rendu. Par contre, au moins pour moitié, cette taxe augmentera le taux des prélèvements obligatoires. Pour moitié, en effet, elle est versée à la CNAM.
J'allais le dire. Puisqu'elle est augmentera les prélèvements obligatoires, elle contribuera à lutter contre le déficit. Et l'on voit bien que, contrairement à ce que certains espéraient peut-être, ou à ce que certains peuvent dire encore, la réduction du déficit passe évidemment par une augmentation des prélèvements obligatoires. Tout cela s'inscrit dans la trajectoire des finances publiques qui a été présentée par le Gouvernement en 2010, pour trois ans, et qui prévoit une augmentation considérable des prélèvements obligatoires, puisque dès l'année prochaine, et davantage encore les années suivantes, nous dépasserons le taux historique de prélèvements obligatoires que notre pays ait jamais connu.
Deuxième remarque, cette taxe est un objet fiscal non identifié. C'est une mesure de rendement, a dit le rapporteur général. De fait, c'en est une, au moins pour moitié.
Mais c'est aussi une mesure qui a pour objet de baisser le coût du travail dans la filière agroalimentaire. Et si le rendement est nécessaire au regard de notre déficit public, la baisse du coût du travail dans l'agroalimentaire est également nécessaire. Je le répète, notre pays était en Europe le premier exportateur dans cette filière. Il est aujourd'hui le troisième. Nous sommes passés derrière l'Allemagne, ce dont nous avons hélas l'habitude, mais aussi derrière les Pays-Bas, ce qui est peut-être un plus vexant pour notre pays. Mais cette dégradation de la compétitivité de l'agroalimentaire, nous l'avons constatée ces dernières années : en 2001, 2002, 2003, 2004 – vous voyez que je m'affranchis des grandes dates de notre vie politique –, nous étions les premiers exportateurs de la filière agroalimentaire. C'est depuis 2005 que nous avons rétrogradé, et c'est depuis deux ans que nous sommes troisième.
Enfin, cette taxe vise aussi à modifier le comportement de nos concitoyens, et en tout cas des jeunes enfants et des adolescents, afin qu'ils évitent d'ingurgiter des boissons dont on sait qu'elles jouent un rôle dans la prévalence de l'obésité dans ces catégories d'âge.
Ces objectifs seront-ils atteints ? Concernant la modification comportementale, j'ai déjà émis de très grandes réserves. Si l'on veut modifier les comportements, il faut agir sur les trois P : le prix, la publicité, la prévention. Agir sur le prix n'est efficace que par une augmentation sensible et dissuasive. Une augmentation de un à deux centimes d'euros par canette ne modifiera aucun comportement. On peut espérer le contraire. Je comprends que le Gouvernement espère le contraire. Mais soyons lucides : qui modifiera son comportement à l'achat pour une différence de coût de un à deux centimes par canette ? D'autant que, comme je l'ai déjà dit, et chacun pourra le vérifier, les différences de coûts entre les différentes enseignes de magasins vont au-delà des vingt, vingt-cinq ou trente centimes. Autrement dit, la concurrence entre enseignes annulera totalement ce surcoût d'un à deux centimes par cannette : il n'y aura donc aucune modification comportementale si cette taxe est adoptée.
Le coût du travail sera-t-il suffisamment baissé pour rendre la filière agroalimentaire compétitive ?
Je crains que ce ne soit pas le cas. Il a été indiqué que le coût du travail diminuerait d'un euro par heure au niveau du SMIC. Pour être précis, il s'agira plutôt de 0,96 centime d'euro par heure. Nous restons très loin, avec cette baisse du coût du travail, de la compétitivité de l'agroalimentaire allemand ou néerlandais. Évidemment, nous améliorerons cette compétitivité, ce sera toujours une bonne chose pour les agriculteurs, mais n'espérons pas de résultats sensibles sur les exportations agroalimentaires de notre pays d'une mesure de ce type.
Quant aux recettes, puisqu'il s'agit également d'une mesure de rendement ; le déficit de l'État est de l'ordre de la centaine de milliards d'euros et nous discutons d'une taxe de rendement qui, dans le meilleur des cas, apportera un peu plus d'une centaine de millions d'euros. Ce n'est évidemment pas à la mesure du problème.
Je me permets de renouveler les regrets que j'ai manifestés hier quand l'Assemblée a rejeté deux amendements que je présentais. Leur rendement ne se mesurait pas en dizaines ou en centaines de millions d'euros, mais en milliards. Et ces mesures étaient puisées à bonne source, puisqu'elles figuraient à la fois parmi les recommandations du Conseil des prélèvements obligatoires et dans le rapport de notre rapporteur général sur l'application de la loi fiscale. Ce rapport préconisant l'adoption de ces dispositions, on pouvait espérer un consensus sur celles-ci.
Si ces mesures avaient été adoptées, nous ne discuterions pas aujourd'hui de l'élargissement de l'assiette, de l'augmentation ou de l'abaissement du taux, de l'affectation de tout ou partie des recettes d'une taxe au rendement en définitive assez faible. La recette serait là, non seulement pour améliorer le déficit, mais également pour financer la baisse du coût du travail dans le secteur agroalimentaire – si tel était le souhait du Gouvernement – ainsi que les deux autres « P ». Car n'oublions pas que le Gouvernement s'abrite derrière un prétexte de santé publique. Nous aurions pu financer la prévention et des campagnes de publicité pour sensibiliser les familles aux dangers d'une alimentation nocive pour les jeunes. Car c'est bien le problème : il est vrai que la prévalence de l'obésité augmente dans certaines familles ; les plus dénuées, les plus pauvres, dans les milieux sociaux les plus défavorisés. Mais ce n'est évidemment pas avec cette petite taxe de rien du tout sur les canettes que ce comportement sera modifié. Il faudrait des politiques beaucoup plus énergiques, donc plus coûteuses, et donc des recettes n'ayant rien à voir avec cela.
Monsieur le président, j'en viens à la présentation de mon sous-amendement n° 433 . Tel que le projet gouvernemental est présenté, non seulement les boissons suspectes sont taxées, mais également d'autres, qui n'ont pas à l'être car elles sont à visées diététiques ou médicales ; certaines ont d'ailleurs des autorisations de mise sur le marché qui attestent de leurs caractéristiques. Je vous demande simplement de veiller à ce que ce ne soit pas le cas, il me semble qu'un amendement du Gouvernement va dans ce sens, mais je serai plus rassuré lorsque j'aurai entendu la ministre le confirmer.
Si vraiment cette taxe a un objectif de santé publique ; peut-être pourrait-on sortir de son assiette les boissons qui certes comportent du sucre, mais dont la finalité est de nourrir des patients dénutris dans les hôpitaux, d'aider à restaurer le taux de protéines de nos anciens qui sont en EHPAD médicalisé…
… ainsi que les laits pour enfants, en effet.
Je suis d'accord pour lutter contre la prévalence de l'obésité chez les jeunes et les adolescents, mais peut-être pourrions-nous veiller à ne pas taxer ce que les nouveaux nés s'apprêtent à consommer pour leur plus grand bien-être.
Nous savons qu'un bébé célèbre a rejoint notre nation. Ne serait-ce que pour des raisons affectives : évitez de taxer ce qui s'apprête à le nourrir ! (Sourires)
La parole est à Mme Edwige Antier, pour défendre le sous-amendement n° 219 rectifié .
Je rassure le président de la commission des finances, ce projet de loi ne propose pas de taxer le lait maternel !
Madame la ministre, vous avez été attentive à ne pas intégrer les laits infantiles à l'assiette de la taxe, et je vous en remercie. Mais il existe une autre alimentation que le lait pour les enfants en développement de moins de trois ans.
L'alimentation infantile, telle qu'elle est définie dans le plan nutrition santé, concerne les enfants de moins de trois ans, et contrôle justement le taux de sucres par rapport à des aliments qui n'entrent pas dans ce cadre.
Prenons l'exemple des boissons : les enfants de moins de trois ans démarrent souvent leur journée par un biberon de lait aux céréales. Ce lait aux céréales est inclus dans le code douanier que vous taxez. C'est-à-dire que le bon biberon que prend un enfant le matin avant d'aller à la crèche ou à sa garderie serait taxé. Ce n'est pas possible !
Il faut apposer le label « alimentation infantile », qui fait partie du plan nutrition santé. Tout ce qui ressort de l'alimentation pour les enfants de moins de trois ans et qui est liquide – pas seulement le lait – ne doit pas être taxé. C'est d'autant plus important qu'en ce moment, des familles font des économies sur le panier de la ménagère ; le lait ou les boissons pour enfants de moins de trois ans qui sont bus au biberon le matin compensent le fait que le repas de l'enfant va être carencé en fer et en protéines.
Les enfants gardent des biberons au-delà de trois ans aujourd'hui ; je vous conseille de laisser l'alimentation liquide infantile, et pas seulement le lait, hors de l'assiette de cette taxe.
La parole est à M. Jean-François Mancel pour défendre le sous-amendement 387 , deuxième rectification.
Après les interventions que je viens d'entendre, je regrette que mon amendement n'ait pas pu être débattu en commission des finances, car il aurait sans doute pu faire progresser le débat. Hélas, le président Cahuzac le sait bien, c'est pour des raisons totalement indépendantes de ma volonté que nous n'avons pu l'évoquer en commission.
Je voulais également remercier Mme la ministre d'avoir souligné l'intérêt de cet amendement, et après ce que je viens d'entendre, je l'en considère d'autant plus intéressant.
Avec Valérie Boyer, qui a cosigné cet amendement, nous nous sommes inscrits dans une véritable perspective de santé publique, et c'est pourquoi, dans un premier temps, nous avions décidé d'amender l'article 46 de la loi de finances. Notre amendement propose de graduer le taux de la taxe en fonction de la quantité de sucre ajoutée dans les boissons, sans élargir l'assiette de la taxe, contrairement à la proposition de la commission des finances, et conformément au souhait du Gouvernement.
Par ailleurs, j'ai bien noté les remarques de la ministre sur cet amendement, relevant qu'il était difficile de connaître réellement le taux de sucres ajoutés dans ces boissons. Il y a cependant deux réponses à ce problème : premièrement, nous avons tous reçu l'engagement des industriels de le faire figurer de manière précise sur les bouteilles. Deuxièmement, une directive européenne est actuellement en cours d'élaboration concernant l'affichage nutritionnel. Elle prévoit qu'à l'avenir, cette mention figure sur les bouteilles. Cela répond aux préoccupations de la ministre.
Dernier point, s'agissant du rendement de la taxe, qui n'est pas négligeable : je l'évalue à un niveau supérieur à celui estimé par le Gouvernement. Il est toujours très difficile d'évaluer le rendement d'une telle taxe, car on se lance alors dans des considérations un peu hypothétiques ; mais je pense que mes chiffres ne sont pas absurdes, et si cela posait un problème pour le rendement, on pourrait augmenter un peu le taux réduit, qui représente une part très faible de l'ensemble de la taxe dans ma proposition, pour en faire remonter le rendement global.
Je comptais retirer mon amendement, compte tenu de la proposition de la ministre d'en discuter de manière plus approfondie par la suite. Étant donné ce que je viens d'entendre, et les désaccords qui semblent exister sur l'ensemble de cette question, je le maintiens pour l'instant.
Ce sous-amendement aussi a été évoqué dans l'argumentaire très complet de Michel Diefenbacher. Il vient appuyer la démonstration utile de notre rapporteur général sur la nature de cette taxe, telle qu'elle nous est présentée aujourd'hui. Nous sommes clairement passés d'une taxe nutritionnelle, qui avait sa place dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale, à une taxe de rendement. Les choses ont été dites, et elles me semblent devoir être clarifiées plus encore.
C'est l'objet de ce sous-amendement, qui propose de supprimer le VI de l'amendement de la commission des finances, pour faire apparaître clairement qu'il s'agit d'une mesure de rendement. Le paragraphe en question prévoit l'affectation d'une partie du produit de cette taxe à la CNAM. Le sous-amendement que je défends vise donc à supprimer cette affectation.
La parole est à M. Daniel Garrigue pour défendre le sous-amendement n° 392 rectifié .
Dans l'hypothèse où l'amendement du Gouvernement, qui me paraît préférable à celui de la commission des finances, ne serait pas adopté, je souhaiterais que l'on ait le même dispositif. Il ne s'agit pas de substituer la caisse centrale de mutualité sociale agricole à la caisse nationale d'assurance-maladie, mais de faire en sorte que l'excédent qui n'est pas affecté à cette dernière puisse abonder la caisse centrale de la MSA, pour répondre au problème des retraites agricoles.
Dans la discussion sur l'amendement n° 56 présenté par la commission des finances, la parole est à M. Pierre-Alain Muet.
J'ai entendu M. Diefenbacher expliquer que, si cette taxe avait eu pour objectif de changer les comportements, sa place naturelle aurait été dans les débats du PLFSS, et non dans le projet de loi de finances que nous discutons aujourd'hui.
Ce débat illustre ce que nous disions dès le début : bien sûr qu'il est nécessaire de réduire les déficits, mais il faut les réduire en supprimant des niches fiscales injustes, pas en inventant de nouvelles taxes. Je sais que vous êtes les champions de l'inventivité fiscale : n'aviez-vous pas essayé de faire passer une taxe sur les poissons, les crustacés et les mollusques ? C'était déjà pour diminuer le coût du travail dans l'industrie de la pêche, mais cela n'a pas fonctionné.
En fait, vous êtes en train de taxer les consommateurs alors que la logique voudrait que vous supprimiez des niches fiscales inefficaces. Ce débat est tout de même un peu pitoyable : la recette n'est pas à la hauteur des enjeux de réduction du déficit public.
Si vous aviez voté les amendements que le groupe socialiste a proposés hier, qui émanaient tous de propositions du Conseil des prélèvements obligatoires, notre pays aurait pu faire entre 12 et 15 milliards d'euros d'économies. Cela aurait été à la hauteur des difficultés de notre pays, à la différence de cette taxe.
Personne ne peut croire que vous changerez les comportements en augmentant d'un ou deux centimes le coût des boissons sucrées, ni que vous changerez fondamentalement la compétitivité de notre pays en diminuant d'un euro de l'heure le coût du travail dans le secteur des industries agroalimentaires. Bien sûr qu'il faut maintenir la compétitivité de nos industries agricoles et alimentaires, mais encore une fois, votre mesure n'est pas à la hauteur du sujet.
Vous allez consacrer beaucoup de temps à ce débat. Mais la vraie question consiste à savoir comment réduire le déficit des finances publiques, sans peser sur la croissance. Ce sont les questions que nous avons posées, mais ce budget n'y répond pas du tout.
Madame la ministre, j'ai écouté le débat : taxe de rendement ou taxe comportementale ? En qualité de membre de la commission des affaires sociales, je voudrais insister sur le message anti-obésité. Je suis maire d'une ville de banlieue et je mesure, chaque jour, les drames absolus que représente ce problème.
Nos collègues ont dit que ce n'était sans doute pas suffisant. Notre collègue Diefenbacher a fait remarquer qu'elle ne s'ouvrait pas sur un nombre assez large de produits. J'en perçois tous les défauts. Il est possible que la taxe d'un ou deux centimes ne fasse pas changer les comportements. Mais il y a cependant derrière la proposition du Gouvernement un message très fort en matière de santé publique.
S'il ne ressort de nos débats qu'un message de rendement fiscal, qu'une simple augmentation de la fiscalité, afin d'obtenir des recettes – dont chacun a bien conscience de la nécessité, compte tenu des difficultés que rencontre notre pays – nous passerons à côté du sens politique, défini par le Premier ministre, qu'il faut donner à cette taxe.
Nous devons travailler pour élargir l'idée de taxe comportementale à d'autres objets. Mais je ne voterai pas l'extension aux édulcorants, parce que je crois que l'on risque de perdre de vue le message. La dérive a d'ailleurs commencé. J'ai suivi, monsieur le rapporteur général, votre explication chronologique, qui montrait bien d'où nous étions partis, et comment nous sommes parvenus à quelque chose qui avait changé de nature. Mais est-ce notre rôle d'aller au bout de cette logique, qui tend à faire changer de nature l'objectif du Gouvernement ? Il me semble qu'il faut rester dans le domaine de la santé publique.
Je le répète, l'obésité, la surconsommation de boissons sucrées dans notre pays, en particulier au sein des familles les plus modestes, est un drame, dont on mesure chaque jour les conséquences sur l'équilibre de notre société.
Si grâce à cette taxe sur les boissons sucrées, et uniquement sur celles-ci, nous pouvions envoyer un message et commencer à faire changer les comportements, même si c'est insuffisant et imparfait, je plaide pour que nous restions sur cette logique-là.
Il s'agit d'un débat particulièrement intéressant. Dès le début, je suis resté très ouvert aux différentes propositions. Je souscris totalement aux propos de M. Jégo concernant la lutte contre l'obésité.
J'ai bien entendu les interventions de Mme Edwige Antier, puis de Jean-François Mancel, qui ont proposé à juste titre, chacun dans son domaine, de distinguer des catégories de produits plus ou moins soumises à cette mesure qui est devenue une mesure de rendement. Mais je voudrais savoir, madame la ministre, monsieur le rapporteur général, si l'on est sûr, à partir du moment où l'on entre dans le champ d'une mesure de rendement, de la solidité de cette ouverture de l'assiette ? Je crains que nous ne nous retrouvions face à des contentieux divers et à une remise en question de l'ouverture, si l'on entre trop dans les détails pour telle ou telle catégorie de produits – produits lactés, boissons avec sucre ou sans sucre ajoutée… Il y a même eu un sous-amendement qui faisait allusion aux édulcorants de synthèse ou pas de synthèse. On voit la complexité qu'acquiert le dispositif. Je souscris à l'idée d'une base très large avec un taux faible, mais à condition que cette base soit solide.
Il faudra travailler sur tout cela, je suppose qu'il n'y a pas d'obligation de résultat immédiat. Mais je crois qu'il faut en rester à la proposition du Gouvernement, même si elle n'est pas parfaite, visant à cibler une catégorie. Il faudra travailler ensuite sur la question de la solidité de l'ouverture. Nous risquons, sinon, de nous retrouver devant une multitude de contentieux, qui pourraient finalement faire immédiatement disparaître la recette escomptée.
Lorsque j'ai voulu tout à l'heure défendre mon amendement tendant à taxer le produit brut des jeux sur les paris en ligne, il a bien été précisé : pas un centime d'euro en moins dans les caisses de l'État pour 2012. J'ai retenu la leçon et je suis prêt à travailler avec vous, madame la ministre, pour voir, dans le cadre des conventions fiscales, comment on peut sécuriser les recettes de l'État. Mais on ne peut pas avoir maintenant une logique toute différente, une démarche à géométrie variable, surtout lorsque l'on se trouve dans un système extrêmement contraint en matière de finances publiques.
J'adhère à 90 % au projet défendu aujourd'hui par le Gouvernement. En effet, personne ne l'a dit, mais en créant cette taxe et en affectant la recette, nous rendons hommage à l'idée de la TVA anti-délocalisation. Nous adhérons de façon microscopique à cette thèse. C'est une idée intéressante, sur laquelle je souhaite mettre l'accent.
Cela signifie que l'on épargne les charges qui pèsent sur le travail dans un secteur exposé, l'agriculture. Il revient moins cher de ramasser des fraises en Allemagne qu'en France. De fait, ils nous concurrencent. Il est donc indispensable que nous adoptions cette taxe. Mais nous n'allons pas assez loin. Le vrai sujet, c'est la concurrence sur la première transformation. En Allemagne, les entreprises d'abattage prennent deux euros de moins pour abattre des porcs et des bovins. Même si nous n'allons pas jusqu'au bout, au moins nous commençons.
C'est donc très bien pour la recette ; c'est bien de la TVA anti-délocalisation. Car de fait on fait payer le consommateur qui achète un produit, sinon fabriqué à l'étranger, du moins propriété d'une entreprise étrangère. On fait payer une grande entreprise, qui a son siège à Atlanta, qui s'appelle Coca-Cola. Je ne pleurerai pas sur le fait que l'on fasse payer Coca-Cola.
Dans cette optique, on ne se pose plus la question du light. Il faut bien évidemment faire payer le light. Vous utilisez l'argument sur les aspects sanitaires. Arrêtons un peu avec ce que certains appellent « la police des réfrigérateurs ». Un jour, on nous interdit le sucre, un autre jour le gras, un troisième jour la viande ; bientôt les fruits seront dangereux. Arrêtons ! Soyons simples, laissons aux familles françaises le choix de leur alimentation – elles n'ont déjà que des marges de liberté limitées –, respectons-les un peu.
Je le répète, madame la ministre, j'adhère à 90 % à votre projet, ce qui signifie que j'en réprouve 10 %. Je présidais la séance, hier soir, et je n'ai donc pas pu participer au débat. Une partie de la recette sera payée par les agriculteurs au titre d'une réduction de l'avantage sur le fioul. M. le rapporteur général affirmait que cela représentait très peu de chose, mais il s'agit en fait d'une augmentation de 20 % de la fiscalisation sur le fioul rouge.
Le paradoxe est grand, monsieur le rapporteur général, car qui sont les bénéficiaires ? De fait, ce sont les agriculteurs qui sont employeurs, donc plutôt les gros agriculteurs ; ce n'est pas illégitime, mais c'est ainsi. On fera payer les petits agriculteurs, le petit éleveur qui n'a pas les moyens de se payer un salarié, alors que seuls les gros céréaliers ou gros producteurs bénéficieront de cet avantage.
Nous sommes en train de gâcher la fête, parce que cette mesure va devenir impopulaire dans les campagnes. J'insiste pour que nous sortions de ce qui est, en fait, une pollution et pour que nous revenions à un principe simple – affectation d'une recette à une dépense, sans qu'on aille chercher une ultime recette sur le fioul rouge. Le fioul rouge, est un chiffon rouge pour beaucoup de producteurs agricoles.
Je voudrais remercier Marc Le Fur pour avoir remis en perspective nos propositions par rapport au travail agricole. Ses propos étaient très importants. Nous sommes en train de prendre une mesure de compétitivité du travail agricole en France, par rapport au travail agricole en Allemagne ou en Espagne. Nous proposons une mesure à la fois structurante de fiscalité pour une filière très importante économiquement, et aussi symboliquement, dans le monde à venir
C'est effectivement une ébauche de ce que pourrait être une TVA anti-délocalisation : faire porter sur la consommation de certains produits une partie du financement de la sécurité sociale agricole. En l'occurrence, il était important de remettre en perspective le dispositif que nous proposons, qui est dans une certaine mesure un dispositif charnière dans la conception du PLF.
Nous avons en réalité deux mesures symboliquement très importantes. Premièrement, la mesure de baisse des cotisations du travail agricole, compensée par la consommation ; c'est un changement majeur de paradigme. Deuxième changement majeur de paradigme : l'introduction d'une taxe comportementale pour faire de la prévention en santé publique.
Il y a donc en réalité dans notre débat deux taxes, deux logiques.
Le Gouvernement a fait un pas vers le Parlement en acceptant de rapatrier dans le PLF cette taxe sur les sodas à sucres ajoutés, destinée à financer l'assurance maladie, de façon que vous puissiez l'augmenter pour financer la baisse du coût du travail agricole. Le Gouvernement a fait un pas vers le Parlement, je vous demande maintenant de faire un pas vers le Gouvernement.
Je vous proposerai donc une disposition de compromis qui tiendra compte de tout ce qui a été exprimé dans cet hémicycle.
Premier point : pour une cohérence politique, je vous propose d'adopter l'amendement du Gouvernement qui propose le doublement de la taxe sur les sodas à sucres ajoutés. C'est une mesure de santé publique, un signal clair que nous envoyons aux enfants. J'ai bien entendu les propos de M. Cahuzac, selon lesquels cela ne représentera que deux centimes d'euros de plus sur une canette…
et douze centimes sur un pack de six cannettes. Mais c'est d'abord un signal que l'on veut envoyer aux familles et aux producteurs pour indiquer que nous entrons aujourd'hui dans le champ de la fiscalité nutritionnelle. C'est là encore une nouveauté, un changement de paradigme.
Donc nous doublons ce produit. Cela rapporte 240 millions d'euros pour une taxe de santé publique anti- obésité sur les produits à valeur ajoutée.
Vous avez, dès lors, une cohérence.
Mais le Parlement souhaitait, pour des raisons à mon avis importantes de cohérence d'une filière industrielle, afin d'éviter des transferts, et aussi, disons-le, pour avoir un peu plus de rendement, une taxe de rendement sur les boissons à édulcorants. C'est une taxe de pur rendement, qui n'a rien à voir avec la logique de santé publique. Je demanderai à ce moment-là au rapporteur général, s'il en était d'accord, de proposer une deuxième taxe, identique à la première, mais sur les boissons avec édulcorants.
Quel est l'intérêt de procéder ainsi ?
D'abord, on sépare les enjeux de santé publique et les enjeux de rendement, ce qui est plus clair. Mais en outre M. Michel Diefenbacher a évoqué le problème de la sécurisation des recettes pour les agriculteurs. J'ai toujours quelques doutes sur l'élargissement de l'assiette, je ne suis pas sûre que nous soyons totalement sécurisés grâce à cet élargissement. De plus Jean-François Lamour a posé la question de savoir où l'on s'arrêtait : édulcorants de synthèse, pas de synthèse ?
Si nous éprouvions des soucis sur la rédaction de l'amendement de la commission des finances, le Gouvernement pourrait toujours le reprendre, ainsi que s'il y avait des discussions avec le Conseil constitutionnel. Il ne viendrait ainsi pas brouiller le premier message de la première taxe. En réalité, on sécuriserait les recettes. Nous aurions 240 millions d'euros – 120 millions qui s'additionnent au gazole –, c'est-à-dire de quoi financer un euro l'heure de baisse sur les cotisations, avec un amendement du Gouvernement solide et sûr.
Et puis nous aurions, d'autre part, une augmentation du rendement qui nous permettrait peut-être de faire un tout petit peu plus sur les cotisations sociales agricoles, mais qui resterait soumise au contrôle du Conseil constitutionnel, quant à sa constitutionnalité.
Voilà ce que je propose. On assure ainsi la ressource, et même 40 ou 50 millions d'euros de réserve, si on le souhaite, qui porteraient sur les édulcorants.
Donc, je vous demande, si le rapporteur général accepte cette position de compromis, de voter l'amendement du Gouvernement.
Monsieur Geoffroy, je rappelle que dans l'amendement du Gouvernement, la moitié de la recette sera affectée à l'assurance maladie, l'autre moitié à la baisse du coût du travail agricole.
Oui, vous avez raison. La moitié sera fléchée, identifiée pour la deuxième partie sur… et non « affectée ». Donc je donne un avis défavorable à votre sous-amendement, monsieur Geoffroy.
S'agissant du sous-amendement de M. Garrigue, qui est important, j'indique que dans le PLFSS, on a fait des efforts pour ce qui concerne la Mutuelle sociale agricole, la MSA. Nous devons maintenir l'affectation à la CNAM, car il s'agit d'une taxe de santé publique. De ce fait, elle doit être affectée à la santé publique, donc directement à la CNAM.
Votez d'abord l'amendement du Gouvernement. L'amendement de la commission des finances sur les édulcorants pourra ensuite être voté, sous toutes les réserves juridiques que j'ai rappelées. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Sur le principe d'une taxe de santé publique anti-obésité, je ne peux qu'y souscrire. J'ai du reste été le premier à la proposer il y a deux ans, mais dans le cadre du PLFSS où elle avait davantage sa place.
En revanche, je ne peux pas être d'accord avec vous, madame la ministre, sur la question de l'affectation de cette recette. J'avais à l'époque proposé qu'elle soit affectée aux retraités agricoles. Vous avez décidé d'en affecter une partie à la baisse du coût du travail agricole : c'est une bonne chose, et je rejoins en cela Marc Le Fur ; il est nécessaire d'alléger les charges de notre industrie. Je suis donc également d'accord sur cet aspect.
Mais, lorsque vous dites, madame la ministre, que l'autre moitié sera affectée à la Caisse nationale d'assurance maladie, pardonnez-moi, mais c'est une goutte d'eau – une goutte d'eau peut-être sucrée – dans la masse de l'assurance maladie.
Alors que cette somme aurait pu servir aux retraites agricoles. Je le répète, il existe des situations profondément anormales, qui n'ont pas été traitées ni dans la loi sur les retraites ni dans le PLFSS, pour les retraités dont les retraites ont déjà été liquidées. De plus, se pose le problème des minorations qui n'existent qu'en matière de retraites agricoles. Cette situation pénalise profondément les gens qui sont polypensionnés, très nombreux dans l'agriculture.
Je me félicite de ce qui se dessine et qui répond à la fois aux attentes du Gouvernement et de la commission. Je considère que l'amendement du Gouvernement a toute légitimité, et que l'amendement n° 445 nouveau que va nous présenter la commission permettra d'intégrer le souhait émis par les auteurs du sous-amendement que j'ai défendu.
Je vais commencer par remercier Mme la ministre car la proposition qui est faite est tout à fait intéressante.
La discussion a été très éclairante. Les deux objectifs que l'on rencontre toujours s'agissant des problèmes de fiscalité ont bien été mis en lumière : l'objectif comportemental et l'objectif de rendement.
Sur ce sujet, nous devons aller au bout de la discussion en distinguant les deux. D'une part, il nous faut accepter l'amendement du Gouvernement qui ne porte que sur les boissons sucrées, avec quelques correctifs évoqués par un certain nombre de nos collègues, le président de la commission des finances pour exclure explicitement les laits pour bébé et les boissons sucrées destinées aux personnes hospitalisées.
D'autre part, sera instituée une taxe du même montant par hectolitre, en retenant l'assiette proposée par Michel Diefenbacher, l'assiette des boissons avec édulcorants de synthèse. Les choses sont claires et sécurisées au plan juridique.
Deuxièmement, nous avions une inquiétude sur les montants disponibles et c'était la préoccupation de notre collègue Bernard Reynès et de l'ensemble du groupe de travail. La taxe sur les boissons sucrées va pour moitié à la Caisse nationale d'assurance maladie, l'autre moitié au financement de la baisse sur le travail agricole.
Notre inquiétude était que le montant ne soit pas suffisant, même s'il est fléché – il ne s'agit pas d'une affectation au sens juridique. En adoptant la proposition du Gouvernement, nous augmentons le rendement de l'ordre de 35 à 40 millions d'euros. C'est exactement ce que souhaitait Michel Diefenbacher. Lorsque nous discuterons la semaine prochaine l'amendement Reynès, cela nous permettra d'aborder le sujet avec une certitude de gage.
Troisième point : nous devons faire très attention, dans les mesures fiscales ou d'incitation ou de désincitation que nous pouvons prendre, à ne pas déstabiliser nos filières industrielles, en l'occurrence, la filière agroalimentaire.
Comme je le disais lors de mon intervention générale en prenant l'exemple du crédit d'impôt sur les économies d'énergie, il faut faire très attention à ne pas prendre des mesures qui défavoriseraient la production en France, la valeur ajoutée en France.
En adoptant un niveau de taxation du même montant sur un ensemble cohérent de produits, nous n'allons pas créer de distorsion, ni de modification dans les comportements des consommateurs.
Nous avons là une très bonne solution. Je souhaite donc que nous adoptions l'amendement n° 439 du Gouvernement, puis l'amendement n° 445 de la commission des finances réduit à l'assiette édulcorants, boissons avec édulcorants sans sucres. Je dis « sans sucres », car il paraît qu'il existe des boissons avec des édulcorants et des sucres ! Au quel cas, elles seraient taxées deux fois, ce qui, manifestement, ne serait pas juste. Donc, édulcorants de synthèse sans sucres.
Cela mérite d'être retravaillé !
Cela suppose que vous retiriez votre amendement n°56 , monsieur le rapporteur général ?
De ce fait, les sous-amendements à l'amendement n° 56 sont caducs. Il s'agit des sous-amendements n°s 442 , 433 , 219 rectifié , 387 rectifié , 388 , 434 et 392 rectifié
La parole est à M. Charles de Courson.
J'aime avoir l'esprit clair, comme notre rapporteur général. Il me semble que l'amendement du Gouvernement doit être amendé.
Non.
Dans ce cas, je n'ai pas compris notre débat, madame la ministre.
J'ai compris qu'il y avait deux taxes : une taxe avec l'assiette Diefenbacher, édulcorants compris, dont le produit sera augmenté de 40 millions, ..
Non, non !
Je vais essayer de me faire mieux comprendre.
Pour des questions de cohérence politique et juridique, le Gouvernement vous demande d'adopter une taxe de santé publique sur les boissons à sucres ajoutés dont le quantum va être doublé. Il passera à deux centimes la canette.
Cela permettra, pour moitié, de financer l'assurance maladie, et pour moitié de financer la baisse des cotisations agricoles. Il s'agit d'une recette sûre, une recette sécurisée pour nos agriculteurs et dont nous savons que la légalité est incontestable.
Par ailleurs, la commission des finances propose un amendement…
…instituant une taxe de rendement qui porte sur les boissons édulcorées. Ces boissons seraient, elles aussi, taxées pour assurer…
M. Cahuzac dit cela exprès pour que M. de Courson ne comprenne rien à ce que je dis ! (Rires sur tous les bancs.) C'est pour tromper le Nouveau Centre ! (Rires.) Il faut que le Nouveau Centre le sache : les socialistes cherchent toujours à tromper les centristes. Il faut s'en méfier. (Rires.)
Du coup, le rendement total sera augmenté du produit de la taxe sur les édulcorants, soit 40 millions d'euros. Ce sera une bonne nouvelle pour nos agriculteurs, si elle passe le contrôle du Conseil constitutionnel, qui devra juger si cette nouvelle assiette est constitutionnelle.
On sécurise juridiquement le dispositif et, politiquement, on assure la cohérence de cette discussion. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° 445 .
Pour que les choses soient bien claires : l'amendement du Gouvernement ne concerne que les boissons sucrées.
À 240 millions.
Quant à l'amendement de la commission des finances, il peut se résumer ainsi : « Il est institué une contribution perçue sur les boissons et préparations liquides pour boissons destinées à la consommation humaine contenant des édulcorants de synthèse et ne contenant pas de sucres ajoutés. »
Pour le reste, il s'agit des mêmes taux, 35 et 40.
Selon moi, la solution juridique, sinon politique, adoptée par le Gouvernement et semble-t-il avec l'accord de la majorité, me paraît la bonne.
Couper cette taxe en deux est une bonne chose. Cela donne un peu de lisibilité à une taxe, qui en aurait manqué singulièrement.
Par ailleurs, j'exprimerai un regret, et je souscris aux propos de notre collègue Daniel Garrigue. Des engagements avaient été pris concernant les retraites des agriculteurs. L'enjeu est du même ordre que celui dont nous discutons, 200 à 250 millions d'euros.
Je vous rappelle l'engagement qui avait été pris par beaucoup, notamment par des candidats en 2007. Cet engagement ne sera, manifestement, pas tenu. Si je peux comprendre – et j'y souscris – la nécessité de baisser le coût du travail dans la filière agroalimentaire pour des raisons de compétitivité – on sait ce qu'il en est –, je trouve aussi que la justice ne doit pas être absente des politiques publiques. Or à l'égard de nos concitoyens retraités de l'agriculture, cette justice n'est pas passée. Je doute qu'elle passe d'ici à la fin de la mandature. Comme mon collègue Daniel Garrigue, je le déplore amèrement.
Le groupe UMP votera l'amendement du Gouvernement et celui de la commission des finances. Je voudrais saluer l'excellent travail de Mme la ministre et du rapporteur général pour avoir trouvé cette solution politique et pleine d'efficacité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le rapporteur général, je crois que vous souhaitez apporter une rectification à l'amendement n°445 .
La rectification découle des amendements précédemment adoptés. Dès lors qu'il existe une contribution unique, le 1° – « À l'intitulé de la section III du chapitre II du titre III de la deuxième partie du livre premier, les mots : "Contribution perçue " sont remplacés par les mots : " Contributions perçues " » – devient inutile.
Le début de l'amendement se lit donc de la façon suivante : « La section III du chapitre II du titre III de la deuxième partie du livre premier du code général des impôts est complétée par un article 1613 quater ainsi rédigé : ».
Le reste est limpide.
Favorable.
(L'amendement n° 445 , tel qu'il vient d'être rectifié, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 312 .
La parole est à M. Charles de Courson.
Le texte voté en loi de finances 2009 ayant omis de prévoir la confection du dossier de gestion pour les clients agriculteurs des professionnels de l'expertise comptable, le texte proposé vise à compléter 1649 quater L du code général des impôts afin de spécifier cette obligation dans la loi.
C'est une petite modification visant à remédier à un oubli du législateur.
Favorable.
(L'amendement n° 312 est adopté.)
Cet amendement a pour objet la taxation des rémunérations variables des opérateurs de marché, autrement dit les bonus des traders.
Cette taxation a été mise en place au début de l'année 2010 au titre des bonus versés en 2009. Elle avait été alors présentée comme une contrepartie à l'aide apportée par l'État aux banques lors de la crise financière, au cours de l'année 2009, et était censée dissuader les banques d'avoir recours à certaines pratiques, notamment celle consistant à rémunérer la prise de risques plutôt qu'à augmenter les fonds propres des établissements.
Le Gouvernement avait choisi d'affecter le produit de cette taxation à OSEO pour renforcer la capacité des PME.
Compte tenu de la crise financière actuelle et des bons résultats des établissements bancaires, il conviendrait de pérenniser cette taxation. Nous considérons en effet que les banques n'ont pas tiré les leçons qui s'imposaient de la crise financière et qu'elles contribuent à nous y maintenir en développant des pratiques risquées.
(L'amendement n° 352 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Précisons tout d'abord que cet amendement a deux cosignataires supplémentaires : Dominique Le Mèner et Bernard Gérard.
Cet été, la France s'est émue devant les montants des transferts de sportifs qui ont pu atteindre 87 millions d'euros. Cela avait en effet de quoi choquer alors que les bourses chutaient et que les difficultés financières empêchaient certains de nos concitoyens de partir en vacances.
En loi de finances, nous recherchons des recettes supplémentaires et cet amendement vise à instaurer une taxe exceptionnelle sur les transactions portant sur les transferts d'athlètes entre clubs. Son taux, de 3 %, est calqué sur celui de la taxe sur les hauts revenus.
Cette taxe aurait l'avantage de ne pas peser sur les consommateurs et de rapporter environ 10 millions d'euros par an, selon les calculs que j'ai effectués à partir des données de la direction nationale du contrôle de gestion de la ligue de football professionnel – les transferts se sont élevés à 448 millions d'euros à l'été 2009, 321 millions à l'été 2010 et 371 millions à l'été 2011.
Puisque l'on demande un effort aux entreprises, aux consommateurs, pourquoi ne pas en demander un aux clubs ? Ce serait une mesure d'une portée symbolique dans un milieu sportif où des sommes considérables sont en jeu, ce qui choque énormément nos concitoyens.
Enfin, je précise que les sous-amendements de M. Le Fur me satisfont pleinement.
J'adhère totalement à la disposition proposée par Mme Labrette-Ménager. Je crois que c'est une bonne chose.
Les montants des transferts choquent nombre de nos concitoyens. Chacun en est bien conscient ici. Il convient de faire en sorte que l'ensemble des règles applicables à ce secteur se banalisent.
Nous avons franchi une première étape avec la disparition de ce qui constituait tout de même un petit scandale, le droit à l'image collective, qui permettait à beaucoup de personnes du milieu sportif de ne pas payer de cotisations sociales, patronales ou salariales, alors même que les salaires étaient très élevés. Nous devons poursuivre dans cette voie.
Mes sous-amendements sont très simples.
Le premier, le n° 443, consiste à préciser que la taxation n'est prélevée qu'« à partir de 1 million d'euros », ce qui, de fait, épargne la plupart des sports, à l'exception de celui pour lequel les sommes en jeu sont beaucoup plus importantes, le football.
Le deuxième, le n °444, vise à affecter la moitié du produit de la taxation à la Caisse nationale du développement du sport, un peu dans l'idée que soutenait notre collègue Marc Goua tout à l'heure. Il me semble tout à fait légitime que cette recette, dans la mesure où elle provient du sport, aille pour partie au sport. C'est du bon sens.
Il faut vraiment que nous progression dans ce domaine.
J'ai émis un avis défavorable lorsque cet amendement et ces sous-amendements ont été examinés dans le cadre de la procédure de l'article 88.
Il y a à peine deux ans, nous avons pris des mesures relatives au droit à l'image collective et j'estime qu'il faut se garder d'entrer dans une spirale où, chaque année, serait créée une nouvelle taxation.
Je ne suis pas spécialiste, M. Lamour serait beaucoup plus précis que moi, mais, d'après mes informations, les transferts de joueurs de football se font essentiellement depuis l'étranger. Une telle taxation porterait donc principalement sur les transferts de joueurs de rugby.
Non, pas à partir d'un montant supérieur à 1 million d'euro ! Ce serait le football qui serait concerné !
Et j'estime que ce n'est pas le moment le plus opportun pour instaurer une telle mesure.
Je comprends l'indignation des parlementaires devant les montants des transferts en cause et leur volonté sinon de moraliser du moins de fiscaliser les comportements des clubs sportifs. Néanmoins, le Gouvernement ne peut accepter votre amendement en l'état, madame la députée : il n'est pas suffisamment précis sur l'assiette, sur le fait générateur et les modalités de la taxation.
Je vous propose, si vous le souhaitez, de créer un groupe de travail dont vous prendriez la tête afin de réfléchir aux moyens de remettre à plat la question des transferts de joueurs.
Je ne crois pas qu'il faille aujourd'hui se précipiter pour instaurer une taxe qui risque d'avoir des effets pervers, comme l'a souligné le rapporteur général, à commencer par l'augmentation des signatures de transferts à l'étranger, lesquels échapperaient totalement à la taxation, qui ne serait que pur affichage.
En revanche, je considère que les transferts d'un montant exorbitant mériteraient de rentrer dans le champ d'une taxe, peut-être une taxe européenne. Il s'agit du reste d'un problème similaire à celui de la taxe sur les transactions financières. Dès lors que le fait générateur repose sur les transferts entre clubs européens, nous devons réfléchir à une disposition au niveau de l'Union européenne.
Je vous demande donc, madame la députée, de bien vouloir retirer cet amendement.
Nous partageons le sentiment de Mme Labrette-Ménager et de M. Le Fur sur les sommes considérables qui sont liées soit aux salaires soit aux transferts.
Pour les salaires, nous avons réglé le problème puisque ceux-ci vont prendre de plein fouet la taxe sur les hauts revenus, et même avec un taux de 4 % puisque certains sportifs sont au-delà du seuil des 500 000 euros de revenus.
Nous sommes déjà dans la cible que nous visions en voulant limiter certains excès, sur lesquels vous avez raison d'insister, madame la députée.
S'agissant des transferts, plusieurs questions se posent.
Il s'agit tout d'abord de se montrer cohérent en tant que parlementaire. On ne peut pas, dans l'hémicycle, reprocher aux clubs de gagner trop d'argent, et, dans sa circonscription, approuver le financement de tout ou partie de leur stade grâce aux aides apportées par les collectivités locales. Si l'on considère que les clubs doivent être autonomes dans leur mode de financement, l'on doit veiller à ce qu'aucune subvention de collectivité locale ne leur soit versée. On ne peut pas leur taper sur la tête quand on est au Palais Bourbon et ensuite aller leur faire risette quand on est dans sa circonscription. On ne peut pas non plus les taper des deux côtés en supprimant les subventions locales et en en remettant une couche au niveau national avec une taxation à 3 %. N'oublions pas non plus que la taxe Buffet permet déjà, au travers des droits audiovisuels, de financer une partie du CNDS.
Il faut aussi bien comprendre comment, d'un point de vue technique, se décomposent les sommes des transferts.
Il y a une partie qui va d'un club professionnel à un autre club professionnel. Je suis d'accord avec Gilles Carrez quand il souligne qu'une taxation risquerait de créer une distorsion de concurrence avec les clubs étrangers, mais une telle taxation est à la rigueur envisageable.
Il y a une autre partie – et c'est une pratique de plus en plus courante grâce à la FIFA et grâce surtout à Michel Platini, président de l'UEFA – qui va aux petits clubs qui ont vu naître les champions. Une taxation plomberait ce dispositif puisque les petits clubs formateurs en subiraient les conséquences.
Dans ces conditions, l'idée de créer un groupe de travail me paraît bonne. Si l'on est d'accord sur le principe de taxer les transferts, il faut toutefois prendre garde à ne pas trop plomber les comptes de nos clubs. Rappelons tout de même que les déficits des clubs professionnels français ont atteint 150 millions en 2010.
Vous parlez du football, madame la députée, mais il faut aussi parler du rugby dont les clubs enregistrent un déficit cumulé de l'ordre de 20 millions d'euros pour 2010.
Si l'on continue à les plomber, ils ne pourront plus vivre, d'autant que les aides des collectivités locales sont de plus en plus réduites. Il faut les laisser vivre, Dieu sait comme ils ont déjà été taxés !
Ce groupe de travail sur la taxation des transferts nous permettra, en cohérence avec la législation étrangère, notamment européenne, de trouver la bonne mesure à appliquer dans ce domaine.
Cet amendement m'a donné une grande satisfaction lorsque je l'ai lu. Il reprend une proposition de loi que j'avais faite en novembre 2009 et qui tendait à taxer le montant des transferts. Pour élaborer cette proposition en 2009, j'avais utilisé les chiffres de la saison 2007-2008 qui sont édifiants : pour 265 transferts de joueurs, le montant total des transferts s'élevait à 440 millions d'euros.
Certes, les clubs professionnels ont des difficultés financières, mais ils s'échangent néanmoins 440 millions d'euros au moment des transferts sur une seule saison !
Je suis élu d'une banlieue. Nous n'avons pas un grand club de foot comme à Paris. Nous avons des clubs qui essaient d'émerger, avec les moyens que l'on peut donner dans les banlieues.
En effet, nous avons d'excellents clubs de rugby, notamment à Domont, mon cher Jérôme Chartier ! En revanche, dans le domaine du foot, nous avons du mal à émerger.
Ces petits clubs de football amateur participent à la cohésion sociale de nos banlieues. Ils fonctionnent avec trois bouts de ficelle, un peu de subventions des communes et des bénévoles – qui sont d'ailleurs de plus en plus difficiles à trouver. Ces bénévoles travaillent tout au long de l'année pour que nos jeunes puissent avoir des maillots, des équipements, un stade, grâce aux communes, pour qu'ils puissent se déplacer parce, même si l'on ne va pas jouer loin, il faut se déplacer.
Quand on voit l'opulence dans laquelle se vautrent les joueurs de football professionnels et les dépenses qui sont faites pour des résultats parfois très décevants – je ne reviendrai pas sur l'Afrique du Sud… –, une taxe de 3 % sur ces transferts – elle s'élevait à 5 % dans ma proposition de loi mais, soit, fixons-la à 3 % –, affectée à nos clubs de football, notamment à ceux qui sont dans des zones difficiles, en région parisienne, sur le SDRIF ou dans des communes qui ont le droit à la solidarité, ce serait une bonne idée.
Si groupe de travail il doit y avoir, allons vers un groupe de travail, mais allons vite !
Cet amendement part d'un sentiment vertueux mais son application et son rendement seraient hasardeux. En effet, vous ne l'ignorez pas, ces transferts sont fondés sur des échanges volatiles par nature. Il serait donc extrêmement compliqué de les soumettre à la taxe proposée dans cet amendement.
Je suis favorable à la création d'un groupe de travail, comme M. Jean-François Lamour. Ce groupe de travail ne doit pas avoir pour objectif d'évacuer un problème ponctuel, il doit porter sur des problèmes de fond. Pour ce faire, je vous propose quelques pistes.
Lorsque vous étiez ministre des sports, monsieur Lamour, fin 2006, M. Gaëtan Gorce avait demandé une mission d'information sur les conditions de transferts. Le groupe UMP, à l'exception de M. Dominique Juillot, n'avait d'ailleurs pas brillé par sa présence. Suite à cette mission d'information, vous avez permis aux agents des joueurs d'être payés par les clubs, augmentant ainsi l'opacité de ce système.
Vous répondrez ensuite, monsieur Lamour. Je vous fais remarquer que je ne suis pas en service commandé, sinon par moi-même.
Concernant le rendement fiscal, nous avons une proposition à vous faire. Au lieu de fixer une taxation à 3 % du transfert, et pour répondre au précédent orateur qui a évoqué les sommes indécentes versées aux joueurs professionnels, vous avez la possibilité de donner un sens à une tranche supplémentaire de l'impôt sur le revenu. Ce serait plus simple et plus sûr.
Vous avez également parlé du CNDS. Vous êtes prêts à le doter de moyens supplémentaires. Or, avant-hier, a été prise la décision de ponctionner le CNDS, dans le cadre de l'économie de 5 millions d'euros sur le prélèvement des jeux en ligne, prévu à 35,4 millions d'euros et ramené à 31 millions d'euros. Ce n'est pas une bonne tendance pour défendre le sport amateur, les petits clubs et les parts territoriales liées au CNDS qui en amélioreront le rendement.
Dans le ruissellement de bons sentiments qui caractérise cette matinée, j'ajouterai ceci pour conclure. Si le sport avait été réellement une grande cause nationale, comme l'avait demandé en 2007 le Président de la République, nous n'aurions pas eu des discussions surréalistes sur quelques centimes d'euros prélevés sur les produits sucrés pour lutter contre l'obésité !
Madame la ministre, nous serons au rendez-vous si vous mettez rapidement en place ce groupe de travail, quoiqu'un peu tard dans la mandature.
Monsieur Nayrou, j'ai toujours été opposé au fait que les clubs paient les agents des joueurs. Vous ne pouvez pas dire le contraire ! Vous ne pouvez pas dire que j'aie changé la donne ; j'y ai toujours été opposé en tant que ministre. Ce n'est pas moi qui ai permis cela, contrairement à ce que vous avez affirmé.
Mais je ne vous en veux pas et je suis parfaitement d'accord avec vous concernant le CNDS. Cela rejoint d'ailleurs notre précédente discussion. Les aides apportées par le CNDS dans le cadre de l'Euro 2016 montrent que les pouvoirs publics sont aux côtés des clubs et des villes qui accueilleront l'Euro 2016, mais elles nécessiteront un surplus du CNDS. Madame la ministre, soyez très attentive à ce que ce surplus n'enlève pas des moyens aux petits clubs et aux structures de proximité.
Raison de plus, mes chers amis, pour que nous travaillions à une autonomie des clubs professionnels dans ce domaine plutôt que d'essayer de les taxer. En effet, ou bien ils sont autonomes financièrement, ou bien ils sont aidés. On ne peut pas faire les deux !
Sur le fond, personne n'est opposé à cette proposition, mais il reste un problème de forme et de présentation dans cet amendement.
Madame la ministre, vous nous proposez un groupe de travail pour que, dès la LFR, la réflexion soit entamée.
Inch'Allah !
Si le groupe de travail n'intervient que dans dix ans, cela ne servira à rien !
Tout dépend de vous, madame la député !
Je suis tout à fait d'accord pour piloter un groupe de travail avec mon collègue Claude Bodin, qui avait déposé une proposition de loi en 2009 que j'ai là sur mon pupitre, et Jean-François Lamour qui connaît bien ces sujets.
Nous vous ferons des propositions pour la LFR, madame la ministre.
En conséquence, je retire mon amendement et nous commencerons à travailler dès maintenant. Se joindra également à ce groupe Marc Le Fur, qui avait également déposé des propositions de loi sur le sujet, adoptées il y a deux ans.
La France nous regarde. S'emparer de tels sujets est un symbole. Lorsque la France va mal, il faut regarder là où est l'argent, madame la ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
L'amendement n° 102 est donc retiré, au bénéfice de la création d'un groupe de travail en vue de la loi de finances rectificative.
Tous les cosignataires de l'amendement pourraient être invités à participer au groupe de travail, madame Labrette-Ménager.
Madame la ministre, après un débat d'une heure trente qui pesait 200 millions d'euros et dont on ne savait pas s'il portait sur la taxation des boissons sucrées, sur la fiscalité comportementale ou sur le financement de la réduction des charges agricoles, nous abordons maintenant l'article 6 et les concours de l'État aux collectivités locales, soit 60 milliards d'euros.
Est-il nécessaire de rappeler la part des collectivités territoriales dans l'investissement public en France et donc l'impact de ces investissements sur la croissance, sur l'emploi et la stabilité des entreprises, en particulier dans le secteur du bâtiment et des travaux publics ?
À ce moment de nos discussions et depuis mardi que nous examinons ce texte, madame la ministre, pour la clarté de nos débats, un éclairage global du Gouvernement serait nécessaire sur les articles à venir et les nombreux amendements que vous allez nous présenter.
Quel est le contexte des relations entre l'État et les collectivités locales ? Le gel des dotations, l'inflation rongeant la capacité d'assumer les missions traditionnelles données aux collectivités, l'accroissement de ces missions, une ponction annoncée de 200 millions d'euros sur les collectivités au titre de la participation supplémentaire à la réduction du déficit budgétaire – le tout s'élevant à 1 milliard d'euros.
J'attire votre attention, madame la ministre : dans la discussion générale, Jean-Pierre Balligand et moi-même sommes intervenus sur la dotation globale de fonctionnement, en particulier sur la nécessaire péréquation.
Nous avons évoqué la péréquation horizontale, établie entre les collectivités, qui est prévue, cette année, à hauteur de 250 millions d'euros et qui doit atteindre progressivement 1 milliard d'euros à l'horizon 2015. Nous avons aussi évoqué la péréquation verticale, celle que l'État assume lui-même dans le versement des dotations aux collectivités territoriales, qu'il s'agisse des régions, des départements ou du bloc communal pour les communes et les intercommunalités.
Sur ce point de la discussion générale, je regrette de vous le rappeler, madame la ministre, je n'ai pas eu de réponse et je ne pense pas, compte tenu de votre attention, en obtenir davantage maintenant.
Un autre point sur lequel je suis intervenu au cours de la discussion générale n'a pas plus obtenu de réponse. Il s'agit de la question des prélèvements sur les opérateurs de l'État. Une grande incertitude subsiste.
J'ai évoqué dans la discussion générale la situation particulière des agences de l'eau, ces établissements publics de l'État qui existent depuis 1964, avec la création des districts hydrographiques. N'oublions pas que ces agences investissent avec des redevances affectées.
Le produit des redevances est immédiatement réinvesti sur le terrain pour remplir des missions relatives à la satisfaction des directives-cadres européennes sur l'eau et les eaux résiduaires urbaines. Les agences effectuent ce réinvestissement en soutien aux collectivités.
Dans le contexte actuel où l'État se méfie même de ses propres opérateurs, je rappelle qu'une lettre de mission du mois d'août a été adressée par le Premier ministre à l'Inspection générale des finances. Le travail est en cours.
Mais, mis à part les différents niveaux de collectivités que vous avez indiqués, madame la ministre, où allez-vous, plus généralement, anticiper les ponctions, en particulier sur les opérateurs de l'État ?
Je suis saisi d'un amendement n° 234 .
La parole est à M. Pierre-Alain Muet.
L'article 6 tend à maintenir en valeur la dotation globale de fonctionnement ou, plus exactement, ne l'augmente que de 64 millions d'euros en raison des nouvelles missions qui incombent aux collectivités.
Comme j'ai eu l'occasion de le dire, les collectivités locales ne sont pas responsables de la dette ni du déficit. C'est l'État qui en est responsable. La dette des collectivités locales est restée la même depuis trente ans, à savoir 8 % du PIB. C'est à l'État de mettre de l'ordre dans ses finances.
D'ailleurs, les collectivités locales respectent une vraie règle d'or, et pas la règle de papier que vous vouliez inscrire dans la Constitution : elles ne s'endettent que pour investir. Par conséquent, il est inadmissible que l'État n'indexe pas sur l'inflation les dotations aux collectivités locales. C'est une façon de se défausser de ses responsabilités.
C'est à l'État de mettre de l'ordre dans ses finances, c'est à l'État de réduire le déficit ; c'est l'État qui a laissé exploser la dette, notamment la droite et depuis de nombreuses années. On le voit bien quand on fait le bilan des augmentations de la dette sur trente ans : dans les cinq années de gouvernement de gauche la dette a baissé, dans toutes les années où la droite était au pouvoir elle a augmenté en pourcentage du PIB.
C'est faux ! Elle a augmenté de 160 milliards sous Lionel Jospin !
C'est donc bien à l'État qu'il appartient de mettre de l'ordre dans ses finances publiques au lieu de se défausser sur des collectivités locales qui, elles, sont bien gérées.
Avis défavorable.
Ce que vous venez de dire, monsieur Muet, n'est pas acceptable quand on essaie d'être honnête intellectuellement.
Entre 1997 et 2002 – vous étiez le conseiller économique de Lionel Jospin…
…vous avez décidé de supprimer la part régionale de la taxe d'habitation, de supprimer la vignette, de fortement réduire les droits de mutation et de supprimer la part salaires de la taxe professionnelle. Ce manque à gagner des collectivités a été remplacé par des dotations.
Surtout, ces dotations sont désormais des dépenses dans le budget de l'État et elles expliquent le quart du déficit actuel.
Il est trop facile de donner en permanence des leçons de bonne gestion ! Croyez-vous qu'il est de bonne gestion de signer n'importe quoi en termes d'emprunts ? Vous n'avez pas à exciper d'un comportement prétendument vertueux des collectivités locales…
…par rapport à celui de l'État. C'est insupportable et j'espère que vous allez arrêter de développer de tels arguments !
Quant à la DGF, je rappelle qu'elle est sanctuarisée : c'est l'engagement qui a été pris dans la loi de programmation pluriannuelle. La DGF n'augmente pas, c'est vrai, mais elle ne diminue pas non plus.
Et le fait qu'elle ne diminue pas représente un effort tout à fait remarquable de la part de l'État.
Vous devriez féliciter ce dernier de protéger au mieux les finances locales, en dépit des difficultés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Avis défavorable.
Je partage un point de ce qu'a dit le rapporteur général : oui, nous avons supprimé un certain nombre de ressources des collectivités locales en les remplaçant par des dotations. Mais nous avons indexé ces dernières sur l'inflation et sur la moitié de la croissance. Ce n'était pas une perte pour les collectivités locales…
…et c'était effectivement une charge pour l'État.
Je rappelle que la DGF, comme la plupart des dotations, notamment les dotations de compensation, étaient indexées sur l'inflation et sur la moitié de la croissance et que cela s'est poursuivi jusqu'à ces dernières années, sous la présidence de M. Chirac. Cette indexation tenait précisément au fait que ces dotations remplaçaient des ressources qui croissaient comme l'inflation et comme la croissance : il n'y avait pas de raison d'étrangler les collectivités locales dès lors que l'État, pour des raisons qui lui étaient propres, remplaçait des impôts locaux par ces dotations.
Le reproche que je fais à ce qui se passe depuis deux ans est donc que les dotations ne soient plus indexées de la sorte alors qu'elles ont remplacé des ressources dynamiques. Cela, monsieur le rapporteur général, vous ne pouvez le contester.
Je ne vais pas rouvrir le débat sur qui est responsable de la dette : nos concitoyens en sont conscients, il n'est que de regarder les chiffres pour s'apercevoir qu'elle aura doublé en dix ans.
Monsieur Muet, il est intolérable, notamment au regard de la question des personnels, que vous donniez des leçons de gestion au nom des collectivités locales !
Alors que l'État fait un effort considérable pour appliquer le non-renouvellement d'un fonctionnaire sur deux, les collectivités locales – notamment celles de votre camp – ont embauché à tire-larigot pendant des années et des années. C'est écrit en toutes lettres dans le rapport sur la fonction publique de la Cour des comptes, dont on ne peut pas dire que le président soit affilié à l'UMP… Vous n'avez dès lors aucune leçon à donner !
J'irai même plus loin, madame la ministre : il faudrait demander une véritable contrepartie aux collectivités territoriales afin qu'elles fassent les mêmes efforts que l'État lorsqu'il s'agit de diminuer les dépenses publiques, notamment les dépenses de fonctionnement, en renonçant au recrutement injustifié d'un nombre considérable d'agents.
Je ne veux pas allonger nos débats, mais de fausses évidences nous sont assénées, contre lesquelles il faut affirmer la vérité. Il faut être un peu de bonne foi, faire preuve d'un peu d'humilité.
Gilles Carrez se souvient du débat qui a eu lieu ici – vous n'étiez pas encore parlementaire, monsieur Muet – sur la loi organique mettant en oeuvre les dispositions constitutionnelles sur l'autonomie financière des collectivités locales. L'antienne de vos collègues socialistes était alors « halte aux dotations de l'État, laissez jouer la dynamique de la fiscalité et la responsabilité des élus locaux ! ».
Or, vous êtes en train de dire exactement le contraire !
Gilles Carrez était également à mes côtés au moment de la suppression de la part salaire de la taxe professionnelle. Je vous ferai parvenir les déclarations publiques, répétées, du président socialiste de la ville nouvelle de Sénart dont je suis un élu. Pour lui, si le Gouvernement qu'il soutenait par ailleurs n'avait pas remplacé la part salaire par des dotations qui n'évoluaient pas à hauteur de la dynamique des implantations de villes nouvelles, il n'aurait pas été obligé, en tant que président de la structure intercommunale, de rechercher un moyen d'équilibre auprès du Groupe central des villes nouvelles.
Voilà ce qu'ont dit certains socialistes. Alors vos pseudo-vérités, vos pseudo-évidences, gardez-les pour vous une bonne fois pour toutes ! Nous, nous générons la croissance ; vous, vous la dilapidez et vous êtes bien davantage responsables de la dette cumulée de notre pays aujourd'hui que nous ne le sommes !
Grâce à votre réforme territoriale et à celle des financements des collectivités, les régions n'ont plus de décision budgétaire à prendre pour leur fonctionnement : tout est à base de dotations. Quant aux conseils généraux, il leur reste uniquement à décider des taux du foncier non bâti…
Pour ne pas être trop long, je rappellerai simplement que la réponse à votre propension à mal réformer les rapports entre l'État et les collectivités territoriales vous a été apportée lors des élections sénatoriales…
(L'amendement n° 234 n'est pas adopté.)
La parole est à Mme la ministre pour présenter l'amendement n° 423 rectifié .
Pour des raisons de cohérence, je présenterai l'ensemble des amendements du Gouvernement relatifs aux collectivités territoriales. Je répondrai ensuite aux questions portant sur les opérateurs de l'État.
Depuis 2010, nous sommes sur un chemin courageux et déterminé de désendettement. Nous avons ainsi fait 45 milliards d'efforts sur 2010 et 2011, moitié en nouvelles recettes demandées aux Français et moitié en économies de dépenses. Au-delà, parmi les mesures annoncées par le Premier ministre le 24 août dernier, il nous a été demandé de faire un milliard d'euros d'économies supplémentaires.
Huit cents millions porteront sur l'État, mais nous souhaitons, monsieur Muet, qu'aucun acteur public ne soit exempté de cet effort d'intérêt national de réduction des déficits et de lutte contre la dette.
Cette dette – je vous invite à relire le rapport de la Cour des comptes – tient pour 40 % à la crise économique de 2008 que nous avons dû supporter, pour moitié à l'héritage, de droite comme de gauche,…
…à l'héritage de la dette de 2007, et pour le reste de la politique du Gouvernement.
Cessez donc de nous imputer la responsabilité de la dette et regardez un peu le reste du monde : la moyenne de la zone euro est à 85 %, comme la dette française, les États-Unis sont à 100 %, le Japon à 200 % ! N'essayez donc pas de nous faire croire que la dette est une spécificité de la France, notamment du gouvernement de Nicolas Sarkozy !
Vous n'êtes pas crédible : c'est absurde et ce n'est pas ce que dit la Cour des comptes.
Quand vous dites que Lionel Jospin a baissé la dette de la France entre 1998 et 2002,…
C'est faux en volume et vous le savez. Simplement, il bénéficiait d'une croissance de 3 %.
Je vous donnerai les chiffres afin que vous les transmettiez à vos collaborateurs.
La dette s'exprimant en pourcentage du PIB, ce n'est évidemment pas la même chose quand ce dernier progresse de 3 % que quand on subit une grande récession qui peut être aussi grave que celle de 1929 ! Vous avez eu de la chance, vous avez connu un contexte international extrêmement favorable. Nous, nous connaissons un contexte extrêmement dur, nous menons dans ce contexte une politique courageuse d'économies budgétaires et nous demandons aux collectivités locales, dont le budget consolidé est, je vous le rappelle, de 200 milliards d'euros, de faire cette année un effort supplémentaire à hauteur d'un millième de ce total.
Simplement, comme nous sommes très conscients de la nécessité d'avoir des relations de confiance avec les collectivités territoriales, nous allons garantir, en la sanctuarisant, la stabilité de la dotation globale de fonctionnement entre 2011 et 2012. Mais nous demandons aux collectivités locales de participer à cet effort à hauteur de 20 %, soit 200 millions d'euros, tout simplement parce que, dans le budget de l'État, 80 % des dotations vont aux ministères et 20 % aux collectivités locales.
J'en viens au détail de la répartition de ces 200 millions. Avec Claude Guéant et Philippe Richert, nous avons travaillé en lien étroit avec votre rapporteur général et nous avons voulu vous présenter le dispositif le plus clair possible.
La première série de mesures est destinée à maintenir en 2012 à leur niveau global de 2011 trois des principaux concours de l'État : la DGF, pour sa part départementale et régionale ainsi que la dotation alimentant les fonds de péréquation de la taxe professionnelle et le fonds du produit des amendes.
Cette stabilité est cohérente avec le texte initial du PLF, qui prévoyait le maintien à leur niveau de 2011 de la DGF des communes et des principaux concours de l'État.
Cela veut dire, très concrètement, que la contribution de l'Etat restera globalement stable pour toutes les catégories : cela évitera aux collectivités locales l'incertitude qu'auraient inévitablement introduite des dispositifs beaucoup plus complexes. Cette stabilisation apporte donc lisibilité et prévisibilité. Elle se traduira par 148 millions d'euros d'économies pour nos finances publiques, puisque ces concours devaient légèrement progresser.
J'ajoute qu'en faisant porter l'effort sur des dotations importantes, nous en atténuons d'autant l'effet pour chaque collectivité prise individuellement.
Quelques précisions sur la stabilisation de la DGF pour sa part non communale, qui fait l'objet du présent amendement. Nous vous proposons de reconduire son montant global de 2011, soit, hors mesures de périmètre, 41,4 milliards d'euros. Cela conduira à 77 millions d'euros d'économies et à une baisse de moins de 0,2 % par rapport au montant initialement prévu. Cet effort reste donc très modéré et supportable, d'autant que, en reconduisant le montant 2011, nous pérennisons les rebasages exceptionnels effectués l'année dernière, qui représentent 127 millions d'euros. Au total, je l'ai dit, l'impact pour les collectivités concernées sera extrêmement faible.
Dans la deuxième série de mesures, qui couvre les 52 millions d'euros restants, nous vous proposons de supprimer ou de ne pas doter trois concours de l'Etat qui tiennent dans les finances locales une place si marginale que, pour deux d'entre elles, cela sera même sans conséquence par rapport aux ressources effectivement perçues en 2011. Je pense tout d'abord au fonds catastrophes naturelles : comme nous l'avions fait en loi de finances initiale pour 2011, nous vous proposons de ne pas le doter au regard des excédents des années antérieures. Je pense ensuite à la dotation dite « taxe TGAP granulats », qui n'est toujours pas entrée en vigueur compte de difficultés techniques lourdes et dont le Gouvernement souhaite la suppression. Enfin, nous vous proposons de supprimer une dotation sur les jeux automatiques, dite « dotation flipper », dont le montant moyen par collectivité est très faible.
Certes, nous demandons un effort supplémentaire aux collectivités. Cela n'est jamais facile, je le sais. Mais je suis fermement convaincue que nous avons su faire des choix mesurés, adaptés et responsables, qui limitent l'impact de cet effort, qui rendent l'objectif de 200 millions d'euros d'économies tout à fait atteignable. Nos choix ne rompent pas le pacte de confiance conclu entre l'État et les collectivités territoriales, bien qu'il demande le gel de leurs dotations.
La commission n'a pas examiné cet amendement, mais elle y est favorable.
L'effort supplémentaire de réduction des dépenses de 1 milliard d'euros est nécessaire. Le budget des collectivités locales représentant 20 à 25 % du budget de l'État, il est légitime que les dotations à ces mêmes collectivités participent à l'effort demandé.
Dans l'esprit du contrat passé entre l'État et les collectivités locales, les dotations sont gelées en valeur. Elles ne diminuent pas, mais n'augmentent pas non plus. La série de mesures proposées pour obtenir 200 millions d'euros porte exclusivement sur des dotations – ou certains éléments – qui augmentent. Nous garantissons aux collectivités locales de conserver la même chose qu'en 2011. En cas de progression, même modeste, celle-ci sera ramenée à zéro.
Le premier amendement qui nous est soumis prévoit une petite majoration de dotation globale de fonctionnement de 0,2 %, qui ne bénéficie qu'aux régions et aux départements. Pour les régions, il s'agit de +13 millions d'euros par rapport à 5,5 milliards et, pour les départements, de +64 millions par rapport à un peu plus de 10 milliards d'euros. Il est proposé de reconduire à l'euro près le même montant qu'en 2011, ce qui permet de dégager 77 millions d'euros.
J'en viens à une autre mesure. Il existe une dotation, liée à la réforme de la taxe professionnelle : la dotation aux fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle. Il y a deux ans, lors de la réforme de la TP, nous avons été unanimes – Michel Bouvard s'en souvient sans doute…
…pour conserver les fonds départementaux. Certaines administrations de l'État auraient bien voulu régler définitivement le sort de ces fonds départementaux. Pour notre part, nous avons estimé qu'ils étaient très intéressants du fait de leur diversité. En effet, le fonds départemental de Savoie n'est pas géré de la même manière que celui du Finistère. En 2011, la dotation a été préservée à hauteur de 419 millions d'euros. Il était proposé de l'augmenter, mais elle ne le sera pas. Elle restera au même niveau en 2012.
Je passe maintenant à trois ou quatre nouveaux prélèvements sur recettes, dont le prélèvement sur recette TGAP granulats.
C'est une construction de nos collègues sénateurs à la fin de l'année 2010, qu'ils ont inscrite dans la loi de finances 2011, mais qui a été élaborée de façon si peu précise qu'elle n'était pas applicable. Cette dotation visait à apporter une ressource supplémentaire aux communes qui ont des carrières sur leur territoire. Comme elle n'a pas fonctionné en 2011, elle sera supprimée en 2012, ce qui générera une économie de 23 millions d'euros.
Enfin, souvenez-vous, mes chers collègues, en 2006, certaines communes percevaient une taxe sur les flippers. Ceux-ci disparaissant progressivement – il en reste encore quelques-uns –, nous avons compensé la suppression de cette taxe par une petite dotation de 9 millions d'euros. C'est cette dotation qui est supprimée.
Avec toutes ces mesures, nous arrivons à 167 millions d'euros. Il manque environ 33 millions pour atteindre notre objectif de 200 millions.
Comment trouver ces 33 millions manquants ? Difficile question ! Nous avons une bonne prévision en ce qui concerne les amendes de police, grâce au travail des élus et, notamment, du comité des finances locales. Nous avons assumé l'augmentation des amendes forfaitaires de police. Ainsi, l'amende de 11 euros, dont le montant était de 75 francs en 1986, est le seul produit qui, en vingt-cinq ans, n'a pas bougé en valeur courante !
Il a été décidé qu'à partir du 1er août, cette amende passerait de 11 à 17 euros.
Par ailleurs, l'an dernier, nous avons fusionné dans un même fonds amendes forfaitaires et amendes majorées. L'amende est majorée lorsque le conducteur pénalisé ne la paie pas. Elle passe alors en contentieux et bascule du côté de l'État. Nous avons décidé, madame la ministre, une bonne réforme, à laquelle, personnellement, je tiens beaucoup : dorénavant, le fonds dont je viens de parler sera partagé à hauteur de 53 % pour les collectivités locales et de 47 % pour l'État. Il y aura une progression que nous estimons à environ 50 millions d'euros. Exceptionnellement – malheureusement, cela se produira dès la première année, mais le texte est rédigé de façon exceptionnelle –, l'État prélèvera plus que ses 47 % : il prélèvera les 33 millions qui manquent. Nous arriverons ainsi à 200 millions d'euros.
Comme vous le voyez, monsieur Launay, nous avons essayé de prendre des mesures qui ne jouent que sur des accroissements, pour garantir aux collectivités le même socle de recettes qu'en 2011. Nous restons dans l'esprit de l'engagement, pris dans la loi de programmation, de geler à la hausse, mais aussi, madame la ministre, à la baisse. Malgré les difficultés du budget de l'État, il n'y aura pas de baisse des dotations aux collectivités locales pendant toute cette période.
Monsieur le président, je viens de faire une présentation globale, qui couvre tous les amendements qui vont suivre.
Madame la ministre, monsieur le rapporteur général, vous nous expliquez la nécessaire contribution des collectivités à hauteur de 200 millions d'euros dans la résorption des déficits publics.
Le projet de loi de finances pour 2012 prévoyait un accroissement des dotations des départements et des régions, avec 64 millions d'euros pour les départements et 13 millions d'euros pour les régions, au titre de la DGF. C'est sur ce montant total de 77 millions d'euros que vous nous présentez l'amendement n° 423 rectifié .
Ce que je vais dire sur les départements, vous le savez déjà. Pour la plupart d'entre eux, la situation financière est tendue, à la limite de la rupture de paiement
Pour ce qui est des régions – je parle au nom d'Alain Rousset président de la région Aquitaine et président de l'Association des régions de France –, les 13 millions d'euros supplémentaires inscrits par le Gouvernement sur la DGF des régions pour 2012, à l'article 6, sont tout à fait justifiés. Ils correspondent à l'engagement du Gouvernement de rendre possible la mise en oeuvre de la péréquation horizontale rendue inapplicable dans les faits par les dispositions votées en loi de finances pour 2011.
En réalité, ces 13 millions sont financés par les régions elles-mêmes via une diminution de leurs anciennes allocations compensatrices de taxe foncière, de taxe professionnelle et de CVAE – la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. En réalité, l'amendement du Gouvernement propose de remettre en cause l'engagement d'une sanctuarisation de la péréquation de la DGF. Les régions qui vont être frappées sont celles qui en ont le plus besoin. De plus, c'est l'ensemble des collectivités territoriales dont la visibilité sera plus difficile.
Je ne pensais pas intervenir, mais comme la ministre a pris part à une discussion, essayant d'embrasser largement notre histoire politique et économique contemporaine, ne pas répondre donnerait l'impression de consentir. Pour ma part, je m'y refuse.
D'abord sur la forme, je pense, madame la ministre, que la sincérité n'est pas plus convaincante quand elle s'accompagne d'une forme de véhémence ou d'agressivité. On peut se dire les choses beaucoup plus calmement.
C'est M. Muet qui a commencé !
J'ignore qui a commencé. Je constate seulement ce que vous avez fait et je ne trouve pas que cela apporte grand-chose.
Quant à l'argument qui consiste à dire : « Vous avez fait cela. Donc, nous avons raison et vous n'avez rien à nous reprocher ! », si cet argument devait se généraliser, il faudrait fermer cette maison ! Nous avons, les uns et les autres, gouverné ce pays, certains plus longtemps que d'autres, parce que tel était le choix des Français. Prétendre que les uns n'ont jamais fait d'erreur et que toutes les erreurs sont imputables à l'autre – cet argument s'adresse à tout le monde dans cet hémicycle – est absurde. Au motif que certains ont fait des erreurs, ceux-là, pour autant et parce qu'ils sont parlementaires, ont tout de même le droit de signaler celles qu'ils estiment être commises par d'autres et, en l'espèce, par vous, madame la ministre.
C'est une figure de rhétorique ou de polémique assez classique en politique, qui consiste à discréditer le discours de celui qui s'adresse à vous, même quand il a raison, ou peut-être surtout quand il a raison, en lui rappelant ce que lui, ou en général d'autres que lui, mais appartenant à la même sensibilité politique, ont pu faire. Je le répète, cette figure est classique, mais je tenais tout de même à vous dire qu'elle est bien peu convaincante.
Notre pays a connu quatre périodes noires en matière de finances publiques. La pire est celle de 2008-2011. En deuxième position sur le podium, il y a 1993-1995 ; en troisième position : 1981-1984 ; enfin, en quatrième position : 2002-2006.
Tel est le classement au regard de l'aggravation de la situation de nos finances publiques. Il n'est pas le fait d'une seule sensibilité politique. Il est partagé, même si certains y ont pris une part plus importante que d'autres, car il ne vous aura pas échappé que, sur ces quatre périodes noires, pendant trois d'entre elles, c'est plutôt la droite de l'hémicycle qui gouvernait ; pendant la période restante, ce fut la gauche. C'est ainsi…
et je vous engage à consulter les ouvrages de la Cour des comptes à cet égard. Faisons-en le juge de paix entre nous sur ce point !
Il y a eu trois périodes vertueuses. La première, entre 1998 et 2001. Jamais le déficit de notre pays, depuis le dernier budget en équilibre du Premier ministre Raymond Barre, jamais, sauf pendant cette période, le stock de dette rapporté au PIB n'a diminué avec cette constance – trois ans, même si c'est faible – et avec cette ampleur.
Quel était le taux de croissance à l'époque ?
Je vous rappelle les 58,6 % de stock de dette.
Si vous voulez parler de bombes à retardement, on pourrait parler de celles que vous avez laissées à l'occasion. Mais j'ai quelque scrupule à vous rappeler les paroles d'Alain Juppé lorsqu'il a succédé à Édouard Balladur à Matignon en 1995. Des grenades ont été laissées dégoupillées par tous et il est inutile d'en rappeler certaines en faisant semblant d'oublier les autres ! Là encore, les torts sont assez partagés. Je ne crois pas qu'il y ait eu de mots plus durs pour la gestion précédente que ceux d'Alain Juppé à l'égard de la gestion Balladur Sarkozy de 1993-1995 puisqu'à cette époque, tout fut acheté à crédit, pas comme on l'a vu récemment, mais dans des proportions jamais connues dans notre pays. Ce sont les propos d'Alain Juppé lui-même en 1995. Il semble qu'Alain Juppé retrouve un certain crédit auprès de votre sensibilité politique. Peut-être m'accorderez-vous que cette situation a une certaine importance pour vous…
Il y eut donc trois périodes fastes : 1998-2001 avec Lionel Jospin, 1989-1990 avec Michel Rocard, et 2006 avec Dominique de Villepin. Seuls Michel Rocard, Lionel Jospin et Dominique de Villepin ont réussi à faire baisser notre stock de dette rapportée au PIB.
Quant à l'aggravation de la dette elle-même, faisons, là encore, de la Cour des comptes le juge de paix. Sur le stock de dette, elle a dit ce qu'il fallait, à savoir que les responsabilités sont partagées. Sur l'aggravation récente de cette dette, elle a également indiqué que, pour cette mandature, les politiques menées en étaient responsables pour deux tiers, la crise pour un tiers.
Prétendre que la crise n'y fut pour rien serait idiot, mais se voiler la face et prétendre que les abandons de fiscalité consentis sans financements complémentaires et sans économies en regard ne furent pour rien dans la dégradation de nos finances publiques est à l'évidence manquer de lucidité.
Quant au rôle des collectivités locales, en 2010, le déficit public fut de 7,1 % du PIB. Les collectivités ont leur part, pour 0,1 %. Vous pouvez leur demander un effort. Il reste qu'en 2010, les collectivités locales ne furent responsables du déficit public qu'à hauteur de 0,1 %. Il me semble que cela relativise la responsabilité…
Non ! Que faites-vous de la crise ?
Ne dites pas « non », madame la ministre. Ou alors, relisez les rapports de la Cour des comptes !
Quand aux collectivités, sont-elles bien gérées par définition ? Non, certaines sont bien gérées, d'autres moins bien, d'autres très mal.
J'en discutais tout à l'heure avec notre collègue Plagnol, maire de Saint-Maur-des-Fossés. Qui pourrait prétendre que cette ville fut bien gérée ces dernières années ? Ce n'est certainement pas vous, monsieur le rapporteur général. En tout cas, le successeur de M. Beaumont ne lui décernera certainement pas un brevet de bonne gestion.
C'était un médecin ! Les médecins ne sont pas forcément qualifiés pour gérer ! (Sourires.)
Vous avez parfaitement raison ! (Sourires.) Et le jour où il n'y aura que des énarques à ce banc, ce pays sera parfaitement dirigé ! Ils sont, au demeurant, nombreux dans l'hémicycle, notamment de ce côté, et l'on constate que tout fonctionne très bien !
Vous en soutenez un pour la présidentielle, monsieur Cahuzac !
Puisque vous avez pris cela avec humour, je ne rappellerai pas comment fut géré un département par un énarque. Ce serait inutile, les choses ont été soldées.
Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Serait-ce la Corrèze ?
De quel énarque parlez-vous ? Quel énarque a géré la Corrèze et l'a mise en déficit ? Il peut y avoir ambiguïté ! Les deux sont d'ailleurs énarques et membres de la Cour des comptes !
Certaines collectivités sont bien gérées, d'autres non. Mais, et c'est l'avantage, qu'elles soient bien ou mal administrées, l'interdiction du déficit de fonctionnement est un vrai verrou.
Peut-être y aura-t-il, un jour, un consensus pour qu'une vraie règle d'or interdisant le déficit de l'État, et non une règle d'or bidon, soit proposée au Parlement. Nous verrons alors qui y sera favorable et qui y sera hostile. Mais, par pitié, puisque chacun sait très bien à quoi s'en tenir, évitons au moins entre nous les discours caricaturaux et évitons de nous envoyer à la figure les erreurs passées pour discréditer les propos.
C'est dû à M. Muet !
Je le dis à qui veut l'entendre et vous semblez manifestement l'entendre, madame la ministre. C'était peut-être un de mes espoirs quand je me suis adressé à l'hémicycle ! Évitons de tenir de tels propos pour que le débat soit à peu près intéressant. Reconnaissez au moins que, depuis 2002, il y a eu 25 milliards d'euros de niches fiscales de plus non compensés et non financés, donc sans la moindre économie et la moindre recette de substitution en regard.
Je ne peux accepter ce constat !
Il n'empêche, madame la ministre, que cette somme de 25 milliards émane des rapports de la Cour des comptes. J'en suis, pour ma part, le juge de paix pour les périodes que ma sensibilité a assumées comme pour celles que vous devriez peut-être assumer un peu mieux, madame la ministre !
Depuis 2007, on sait ce qu'il en fut. Le paquet fiscal – 10 milliards d'euros – a été financé par l'endettement du premier au dernier euro. La réforme de la taxe professionnelle, monsieur le rapporteur général, pour des raisons qui ne sont pas toutes imputables à la majorité, est financée du premier au dernier euro par l'emprunt. La réforme de la TVA sur la restauration à hauteur non pas de 3 milliards, comme on l'affirme, mais de 2,3 milliards d'euros, est financée intégralement du premier au dernier euro par l'emprunt. On sait ce qu'il en est de la réforme de l'ISF. Vous prétendez que ce fut compensé, d'autres peuvent estimer que ce n'était pas l'heure d'abandonner 1,9 milliard d'euros de recettes. Quoi qu'il en soit, ces sommes, ajoutées aux 25 milliards que je viens de citer, représentent beaucoup et ne vous autorisent pas à donner de leçons, même à des gens qui ont peut-être, à vos yeux, commis des péchés irréparables !
Je vous remercie, monsieur Cahuzac, d'avoir rendu hommage à l'action du Premier ministre, Raymond Barre. Nous y sommes évidemment ici sensibles.
Tous, je n'en suis pas sûr, considérant ce qu'ils lui ont fait à l'époque !
Le président Cahuzac a eu raison de rendre hommage à Raymond Barre, car cette période fut la seule où les déficits n'existaient pas.
Par la suite, nous n'avons connu que des augmentations des déficits.
Je rappellerai simplement quelques chiffres sur la dette. Je ne remonterai pas jusqu'à Raymond Barre, mais je reprendrai les gouvernements de ces vingt-cinq dernières années. Au début du gouvernement Balladur, la dette de la France s'élevait à 42,8 % du PIB et, à la fin des gouvernements Balladur-Juppé, elle a atteint, pour la première fois, au deuxième trimestre de 1997, 60,4 %. Le gouvernement Jospin l'a ramenée à 58,5 % du PIB et, sous le quinquennat du Président Chirac, elle est passée à 65,7 %. Nous ne connaissons pas encore les résultats pour 2012, mais, selon les prévisions du ministère des finances, cette dette passerait de 65,7 %, à l'arrivée de M. Sarkozy, à près de 86 %. Nous pouvons donc, je le pense, juger de la responsabilité de chacun dans l'augmentation de la dette.
Madame la ministre, si la crise explique effectivement, comme le soulignent la Cour des comptes et vos services à Bercy, un tiers du déficit des finances publiques, son poids est beaucoup plus faible sur la dette. En effet, même si on considère que 40, voire 50 milliards, sont dus à la crise, ils ne représentent que 150 milliards, alors que la dette aura augmenté de 550 milliards sous le quinquennat du Président Sakozy. Nous n'avons jamais connu une aussi forte augmentation de la dette par le passé. Il en ressort, par conséquent, que la responsabilité est forte. Je tenais à rappeler ces chiffres, car, comme nombre d'entre vous, j'ai l'habitude, quand je m'exprime sur des données économiques, de vérifier moi-même les chiffres, ayant passé un certain temps à en fabriquer !
(L'amendement n° 423 rectifié est adopté.)
(L'article 6, amendé, est adopté.)
Sur l'article 8, je suis saisi d'un amendement n° 356 .
La parole est à M. Jean Launay, pour le soutenir.
Le Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion a été créé par la loi de finances pour 2006. Cet amendement a pour but de supprimer ce fonds et de rétablir le principe de compensation intégrale des transferts de charges : chacun des départements reçoit, en plus de l'affectation de TIPP, une dotation couvrant la réalité des dépenses engagées pour l'allocation obligatoire au titre du RSA dont il a la charge.
Cette disposition devrait permettre un lissage pour les départements, la baisse de la DGF en cas de trop-perçu n'intervenant qu'avec un décalage au fil des années.
(L'amendement n° 356 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 8 est adopté.)
Sur l'article 9, je suis saisi d'un amendement n° 202 .
La parole est à M. Charles de Courson, pour le soutenir.
Vous savez que j'ai toujours défendu la thèse selon laquelle qu'il fallait aller au-delà des propositions du Gouvernement. Ainsi, si nous voulons rétablir les finances publiques, il conviendrait de minorer les transferts aux collectivités territoriales. Mais nous progressons, puisque nous avoisinons le zéro. Pour y parvenir, les variables d'ajustement doivent porter sur les allocations compensatrices d'exonérations de charges. Il me semble qu'en la matière l'attitude du Gouvernement n'a pas été assez nuancée. En effet, la baisse de toutes les allocations compensatrices sera de 14,5 %, sans qu'il soit tenu compte de la richesse fiscale. J'ai donc déposé cet amendement de réflexion tendant à protéger les communes les plus pauvres en les excluant de ce dispositif.
La commission n'a pas retenu l'amendement de M. de Courson, considérant qu'un effort est demandé aux communes aux potentiels fiscaux les plus élevés à travers la baisse de la dotation de garantie obéissant au potentiel fiscal. Nous examinerons, par ailleurs, en seconde partie, la mise en place du Fonds national de péréquation des recettes intercommunales et communales qui prendra, lui aussi, en compte le critère du potentiel fiscal.
Il a, en conséquence, paru plus prudent de garder un taux forfaitaire sur les variables d'ajustement, sauf à ce que se produise un effet d'hyperconcentration sur certaines communes qui se retrouveraient en difficulté, en dépit d'un potentiel fiscal élevé.
Je suis saisi de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 9.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l'amendement n° 425 .
Cet amendement tend à supprimer la dotation liée à l'ancienne taxe sur les flippers.
(L'amendement n° 425 , accepté par la commission, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 426 .
La parole est à Mme la ministre, pour le soutenir.
Cet amendement propose la suppression du prélèvement sur recettes « TGAP granulats ».
(L'amendement n° 426 , accepté par la commission, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 357 .
La parole est à M. Jean Launay, pour le soutenir.
Je défendrai cet amendement, dont Thierry Carcenac est le premier signataire, au nom, de nos collègues par ailleurs présidents de conseils généraux.
La spécificité des départements repose, en particulier, sur leur responsabilité totale dans la distribution des allocations individuelles de solidarités que sont le revenu de solidarité active, qui a remplacé le revenu minimum d'insertion, l'allocation de parent isolé, la prestation de compensation du handicap et l'allocation pour l'autonomie. Nous avons tous conscience qu'aucun de nos concitoyens ne peut se voir privé du droit à percevoir ces allocations, même si la collectivité départementale n'a plus la capacité financière correspondante. C'est malheureusement le cas, comme je l'ai précédemment souligné.
L'objet de cet amendement est donc de s'assurer du financement spécifique de ces dépenses de solidarités individuelles en conformité avec le pacte républicain et réparti entre les départements en fonction des besoins réels de leurs habitants. Un tel dispositif aurait l'avantage d'assurer un financement au coût réel des prestations et de ne pas obérer les capacités fiscales locales sur les ménages et sur les entreprises, au travers de l'activité économique.
Défavorable.
Je tiens à rappeler pour l'énième fois qu'un tel dispositif est totalement aveugle. Il n'encourage pas les bons gestionnaires. Il ressort de l'étude que nous avons menée avec M. le rapporteur général sur le RSA, ex-RMI, que des départements gèrent très bien et d'autres non. La gestion d'une même dépense diffère selon les départements. Si un système intelligent devait être mis en place, il devrait tenir compte de la qualité de la gestion des prestations confiées par l'État aux départements.
(L'amendement n° 357 n'est pas adopté.)
Sur l'article 12, je suis saisi d'un amendement rédactionnel, n° 317, de M. le rapporteur général.
(L'amendement n° 317 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 158 .
La parole est à Mme Annick Girardin.
L'article 12 du projet de loi de finances prévoit une compensation des charges liées à la mise en oeuvre du RSA. La somme prévue pour Saint-Pierre-et-Miquelon est dérisoire. Le mécanisme de calcul estime en effet à zéro le coût du volet API, tout simplement parce que ce dispositif n'était pas applicable auparavant, ce qui désavantage l'archipel. Je rappelle d'ailleurs qu'une douzaine d'aides dites sociales ou familiales ne sont toujours pas appliquées à Saint-Pierre-et-Miquelon, par exemple les APL. Nous travaillons sur ces questions.
Il serait juste de partir de la réalité du terrain et je propose un doublement de la somme. Elle est estimée actuellement à 30 000 euros et il ne s'agit donc pas de sommes énormes. C'est une goutte d'eau mais cela permettra à la collectivité de Saint-Pierre-et-Miquelon de bien gérer son RSA et d'apporter une réponse aux gens de l'archipel qui attendent depuis très longtemps la mise en place de ces dispositifs.
Défavorable.
Madame Girardin, l'ajustement RSA se fait en loi de finances rectificative en fonction des derniers chiffres connus. Nous réexaminerons la question au début de décembre. Il y aura un petit ajustement à la hausse, mais, je ne veux pas vous laisser d'énormes espoirs, il devrait être modéré car 30 000 euros pour 109 000 euros de dépenses de RSA, cela fait environ 30 %, ce qui est le taux moyen de compensation par l'État.
(L'amendement n° 158 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 12, amendé, est adopté.)
L'article 13 ne fait l'objet d'aucun amendement.
(L'article 13 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 98 .
La parole est à M. le rapporteur général.
C'est un amendement rédactionnel.
(L'amendement n° 98 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 203 .
La parole est à M. Charles de Courson.
Vous vous souvenez tous, mes chers collègues, du débat que nous avions eu lorsque nous avons doublé le montant de l'IFER sur les éoliennes en le faisant passer de 3,5 à 7 euros par kilowatt.
À cette occasion, j'avais posé la question de l'incidence de cette hausse sur le calcul des dotations de compensation via le FNGIR, et M. le rapporteur général et le ministre m'avaient répondu qu'il n'y en aurait évidemment aucune. En d'autres termes, l'État ne devait pas récupérer la hausse de l'IFER sur les éoliennes en réduisant à due concurrence les dotations du FNGIR.
Or quelle n'a pas été ma surprise de constater, et il paraît qu'il en a été de même dans toute la France, que l'on avait retenu non pas le montant de 2010 de 3,50 euros mais celui de 2011 de 7 euros.
Je n'avais pas déposé d'amendement à l'époque puisqu'il y avait un engagement du Gouvernement, pour qui c'était très clair. Je voudrais donc, madame la ministre, que vous me confirmiez les propos de votre prédécesseur sur cette question.
Je n'ai pas la même interprétation que vous, monsieur de Courson, de l'engagement pris il y a deux ans.
En 2010, cette IFER a été versée à l'État. Ce n'est qu'à partir de 2011 qu'elle est versée aux collectivités locales. C'est donc bien la valeur de 2011 qu'il faut prendre en compte pour calculer le montant de DCRTP. Sur ce point, je ne partage donc pas votre point de vue et c'est la raison pour laquelle j'ai émis un avis défavorable à votre amendement en commission.
Je suis également défavorable à cet amendement ou, plus exactement, j'en demande le retrait parce que ces modifications ont déjà été intégrées dans le calcul de la DCRTP. L'article 108 de la loi de finances de 2011 prévoit de calculer le montant de la DCRTP en 2011 en tenant compte de ces hausses de tarif.
Madame la ministre, j'aurais dû vous sortir les déclarations qui ont été faites tant par le rapporteur général que par votre prédécesseur, François Baroin, lorsque nous avons voté le doublement de la taxe, qui est passée de 3,50 à 7 euros entre 2010 et 2011. Il avait bien été précisé que c'était sans incidence sur le calcul du FNGIR. Sinon, cela voulait dire que l'on doublait le taux de l'IFER sur les éoliennes pour réduire les dotations de l'État via le FNGIR. Je tiens ces déclarations à votre disposition. C'est évident. Sinon, pourquoi aurait-on voté le doublement ?
C'est moi qui avais soulevé le problème à l'époque et c'était très clair.
Ici, à l'Assemblée nationale. Vous ne vous en souvenez peut-être pas mais nous avons battu le Gouvernement, qui n'était pas favorable à une telle hausse. Je crois que M. Bouvard était là lorsque nous avons eu ce débat, qui a été assez long. La question a été soulevée et a été tranchée de façon très claire. C'est la raison pour laquelle je ne m'inquiétais pas.
Les collectivités, que j'aime beaucoup et que je défends beaucoup, ne peuvent pas bénéficier d'une augmentation de DCRTP parce que l'on tiendrait compte du tarif de 2010 et toucher l'IFER au tarif de 2011 car elles toucheraient alors deux fois, à travers la dotation et à travers la majoration d'IFER. Cela me paraît évident.
Lorsque nous avons mis en place le FNGIR, nous avons précisé que l'on tenait compte de la fiscalité du moment. L'IFER sur les éoliennes venait en déduction de la compensation, ce qui est logique puisque c'était un nouvel impôt, dont le montant était de 3,50 euros le kilowatt en 2010.
Quand, un an plus tard, pour essayer de favoriser le développement des éoliennes, nous en avons doublé le montant en le fixant à 7 euros, il a été convenu que cela n'aurait pas d'impact sur le calcul du FNGIR. Sinon, cela voulait dire que l'on augmentait l'IFER au bénéfice de l'État et non des collectivités territoriales, ce qui n'était pas le but. L'objectif, c'était d'accorder une compensation aux collectivités locales qui acceptaient l'implantation d'éoliennes sur leur territoire. Les sommes concernées étaient ainsi partagées : 20 % pour la commune d'implantation, 50 % pour l'intercommunalité et 30 % pour le département.
En fonction de ces éléments, maintenez-vous votre amendement, monsieur de Courson ?
Si le Gouvernement maintient sa position, madame la ministre, je ressortirai les procès-verbaux des débats de notre assemblée il y a un an au cours desquels votre prédécesseur a dit le contraire. J'ai constaté dans ma propre communauté de communes que l'on avait tenu compte du montant de 2011. J'ai d'ailleurs fait un recours gracieux en adressant ces procès-verbaux.
Vous êtes totalement sincère, monsieur de Courson, mais nous n'avons pas eu la même interprétation.
Lorsque, le même soir d'ailleurs, M. Bouvard s'en souvient bien, nous avons créé l'IFER gazier, qui s'appliquait à partir de 2011, nous avons dit clairement que cela nous donnait plus de matière fiscale et que, dès lors,…
Non, cela devait être déduit de la DCRTP. Vous croyez vous aussi que cela vient en plus. Voilà pourquoi je suis rapporteur général du budget ! (Sourires.)
Pour le gaz, vous avez raison. Il a été dit effectivement que c'était en moins.
Je propose que nous réfléchissions à ces divergences d'interprétation d'ici à la discussion du projet de loi de finances rectificative. Nous en reparlerons alors et je demande à nouveau le retrait de cet amendement.
Je le retire. Je le redéposerai en collectif et je lirai ce qui a été dit en séance publique.
(L'amendement n° 203 est retiré.)
Je suis saisi d'un amendement n° 99 .
La parole est à M. le rapporteur général.
C'est un amendement rédactionnel.
(L'amendement n° 99 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Il est rédactionnel lui aussi.
(L'amendement n° 100 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
C'est la rectification d'une erreur matérielle.
(L'amendement n° 97 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 101 .
La parole est à M. le rapporteur général.
C'est encore un amendement rédactionnel mais, comme c'est le dernier amendement sur l'article 14, je voudrais vous poser une question importante, madame la ministre. Nous avons absolument besoin de savoir quand sera connue la nouvelle répartition de la CVAE. Pourrez-vous nous éclairer sur ce point ?
Par ailleurs, nous allons devoir travailler ensemble avant le collectif pour faire vraiment un bilan. Il y a une majoration de DCRTP de plus de 500 millions d'euros que j'ai du mal à expliquer. C'est la raison pour laquelle j'étais si attentif aux observations de Charles de Courson. Lorsque nous aurons la répartition de la CVAE, nous devrons faire un bilan de la décomposition de la réforme de la taxe professionnelle et du coût final pour l'État de cette réforme.
Favorable.
Vous aurez toutes les précisions au début de novembre, et nous aurons la discussion que vous souhaitez lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative. Je m'y engage.
(L'amendement n° 101 est adopté.)
(L'article 14, amendé, est adopté.)
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 55 deuxième rectification et 178 rectifié, portant article additionnel après l'article 14.
La parole est à M. Michel Bouvard.
Ces amendements concernent les redevances d'hydroélectricité.
Les droits sur les ouvrages hydrauliques au bénéfice des communes d'implantation existent depuis l'origine de ces ouvrages. C'était à l'origine un droit de tirage d'énergie, qu'on appelait l'énergie réservée. Lors des renouvellements des concessions hydrauliques, nous avons prévu un partage de la redevance domaniale entre l'État et les départements.
Le Sénat a souhaité modifier cette disposition, s'écartant d'ailleurs de la stabilité législative, en donnant aux communes d'implantation desdits ouvrages une partie de la redevance domaniale, alors que, ce n'est un secret pour personne, ce ne sont pas à proprement parler des communes défavorisées. Elles ont en général une ressource fiscale abondante, qui a d'ailleurs été confortée à l'occasion de la réforme de la taxe professionnelle, les communes ayant été privilégiées dans la répartition de l'IFER attachée aux ouvrages hydrauliques.
De ce fait, je propose de revenir à la situation initiale concernant la redevance domaniale, c'est-à-dire à une répartition de 60-40 entre l'État et les départements, afin que les départements puissent distribuer cette ressource au bénéfice des communes les moins favorisées. Cela me paraît équilibré et judicieux au regard des décisions que nous avons prises antérieurement.
La commission a déposé un amendement identique à celui de M. Michel Bouvard. Avec la concentration de la totalité de la cotisation foncière des entreprises sur les communes, celles qui accueillent ce type d'installations bénéficient de recettes substantielles et, dès lors, nous pouvons revenir à l'ancienne règle. C'est intéressant pour les départements mais aussi, à hauteur de quelques millions d'euros, pour l'État.
L'intérêt collectif est en effet du côté des départements. M. Michel Bouvard a absolument raison, même si c'est un peu tard.
Sagesse. Dès lors que cela ne dégrade pas les revenus de l'État, nous considérons que les parlementaires sont les mieux à même de définir le partage entre communes et départements.
(Les amendements identiques nos 55 deuxième rectification et 178 rectifié sont adoptés.)
(M. Marc Le Fur remplace M. Louis Giscard d'Estaing au fauteuil de la présidence.)
Toujours concernant le rabot de 200 millions des ressources des collectivités territoriales, il s'agit de stabiliser au niveau fixé par la loi de finances pour 2011 la dotation de garantie des reversements des fonds départementaux de taxe professionnelle. Cela représente une économie de 38 millions d'euros par rapport au projet initial du Gouvernement.
Je peux comprendre cette disposition de « cristallisation » des fonds départementaux de taxe professionnelle, qui me paraît légitime. Je m'interroge seulement sur les conditions de mise en oeuvre de la réforme de la TP s'agissant de ces fonds départementaux. La loi a clairement établi que la part « communes défavorisées » continuerait à être répartie par les conseils généraux. Or, ici ou là, les services déconcentrés de l'État demandent si c'est légitime. La loi a tranché et ce type d'interrogation n'a pas lieu d'être.
À côté de cela, les délais se sont considérablement allongés. De même que vous venez de vous engager sur la CVAE, j'aimerais, madame la ministre, que vous vous engagiez sur une délégation aux départements des sommes des fonds départementaux de TP d'ici à la fin de l'année. Ces fonds sont destinés à des communes défavorisées, à de petites communes ayant peu de ressources, qui ont inscrit prévisionnellement dans leurs budgets le montant général reçu l'année précédente et qui vont se trouver en grande difficulté si ces sommes ne sont pas déléguées dans ce délai. Or il faut que les conseils généraux aient le temps de répartir ces sommes, ce qui ne peut se faire qu'en séance plénière car il n'y a pas de délégation aux commissions permanentes pour cela.
Enfin, je rappelle que le législateur a entendu que la totalité de la somme « communes et groupements de communes défavorisés » serait incluse dans la réforme. Or il semble, là aussi, que des problèmes d'interprétation se fassent jour, certains affirmant que les groupements de communes n'y auraient pas droit. Je voudrais donc être assuré que la totalité de la somme inscrite en loi de finances sera bien déléguée aux fonds départementaux, sans soustraction à je ne sais quel titre qui n'aurait aucune légitimité au regard de la loi.
Je partage l'analyse de Michel Bouvard sur la répartition par les départements. Le problème, c'est que le fonds est diminué,…
…comme l'a expliqué Mme la ministre, de 38 millions d'euros par rapport au projet initial. Derrière la logique mathématique et symétrique avancée pour justifier cette participation des collectivités de 200 millions d'euros, il faut bien voir que la répartition est assurée par les départements entre les communes et EPCI en fonction de leur potentiel fiscal. C'est donc une redistribution sur des communes à faible ressource fiscale.
Je tenais à appeler l'attention de l'Assemblée sur ce point. Derrière un affichage d'équité, vous allez déstabiliser les communes les moins favorisées.
Je tiens à rassurer M. Bouvard. Le texte est explicite : il s'agit des communes et des EPCI. C'est donc uniquement un problème de gestion qu'il soulève.
La circulaire que vous attendez, monsieur Bouvard, transférant aux départements la gestion du fonds, est signée et part aujourd'hui.
Les crédits suivront.
À l'article 15, je suis saisi d'un amendement n° 428 .
La parole est à Mme la ministre.
Il s'agit du récapitulatif de tout ce que nous avons fait, soit une économie de 200 millions d'euros qui proviennent de 77 millions d'euros de stabilisation de la dotation globale de fonctionnement, de 9 millions d'euros de suppression de la compensation aux communes du produit historique de 2006 de la taxe sur les jeux automatiques, de 38 millions d'euros de stabilisation au niveau 2011 du montant de la dotation de garantie des reversements des fonds départementaux de taxe professionnelle, de 23,3 millions d'euros de suppression du PSR « Dotation de protection de l'environnement et d'entretien des voies municipales » dit « TGAP Granulats », de 20 millions d'euros de non-dotation en 2012 du fonds de solidarité des collectivités territoriales touchées par les catastrophes naturelles, qui n'a pas été consommé en 2011. Cette addition atteint 167 millions d'euros, auxquels s'ajoutent 33 millions d'euros de mesures exceptionnelles de prélèvements sur les recettes des amendes de police à destination des collectivités locales, soit, au total, une contribution de 200 millions d'euros, comme annoncé le 24 août.
Favorable. C'est la synthèse de tous les dispositifs que nous venons d'adopter. Il faut les récapituler dans l'article d'ensemble.
Les 33 millions d'euros qui s'ajoutent aux 167 millions n'ont pas été, je crois, évoqués dans l'intervention initiale de Mme la ministre. Cette mesure, dont j'espère qu'elle gardera un caractère exceptionnel, taxe une recette dynamique, en raison des actes de prévention routière et de contrôle sur les routes. C'est même l'une des rares recettes qui restent dynamiques, y compris dans le budget des collectivités territoriales.
(L'amendement n° 428 est adopté.)
(L'article 15, amendé, est adopté.)
Je suis saisi de d'un amendement n° 430 . La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre.
La parole est à Mme la ministre.
Monsieur le président, je présenterai ensemble les amendements nos 430 et 431 rectifié , qui concernent la partie du rabot de 1 milliard d'euros relative aux opérateurs de l'État.
L'effort supplémentaire demandé par le Premier ministre le 24 août concerne les ministères et les collectivités locales, mais aussi les opérateurs. Le plan retenu prévoit ainsi une économie de 316 millions d'euros sur ces derniers en 2012. Cet effort doit peser sur l'ensemble de leurs ressources, qu'elles proviennent de subventions budgétaires ou de ressources affectées.
L'amendement n° 430 a pour objet d'effectuer un prélèvement exceptionnel de 96,8 millions d'euros sur le fonds de roulement excédentaire de deux organismes – dans la période que nous vivons, les opérateurs n'ont pas vocation à garder des fonds de roulement excédentaires, vous en conviendrez –,…
…à savoir l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques – pour 55 millions d'euros – et l'Agence nationale des titres sécurisés – pour 41,8 millions d'euros.
Par ailleurs, l'Institut national de la propriété intellectuelle reversera en 2012 à l'État un dividende majoré d'un prélèvement exceptionnel de 3 millions d'euros.
L'effort des opérateurs de l'État à la maîtrise des finances publiques se traduira également par la mise en place dès 2012 d'un plafonnement de la plupart des taxes qui leur sont affectées et de réductions ciblées de subventions budgétaires qui seront proposées dans le cadre de l'examen de la seconde partie de ce projet de loi de finances.
L'amendement suivant prévoit d'instaurer un mécanisme durable de fixation par le Parlement, chaque année, du plafond de chacune des taxes affectées aux opérateurs.
Par cette mesure, nous réintégrons dans le champ de l'autorisation parlementaire annuelle le niveau des taxes affectées qui, je l'ai dit hier, constitue une ligne de fuite de ressources budgétaires et fiscales.
Ainsi, le Parlement pourra débattre globalement, au moment de la loi de finances et des lois de finances rectificatives, du niveau des ressources totales des opérateurs de l'État, que celles-ci soient financées par subventions budgétaires ou par taxes affectées.
Je précise que, s'agissant des opérateurs bénéficiant de plusieurs taxes affectées, le plafond est fixé taxe par taxe, mais qu'il faut bien évidemment envisager le plafond dans son ensemble. Je pense par exemple au Centre national du cinéma, pour lequel l'esprit du texte est de fixer ses ressources à 700 millions d'euros.
Vous l'avez compris, mesdames et messieurs les députés, il s'agit de vous redonner la main, de ne pas faire perdre au législateur, par des taxes affectées, son pouvoir de décider de l'affectation de l'impôt.
Je ne peux qu'approuver cette approche du Gouvernement s'agissant des opérateurs. Depuis 2007, les taxes affectées à ces derniers ont progressé d'un peu plus de 20 %, soit bien plus rapidement que la moyenne des recettes de l'État. Par ailleurs, les opérateurs sont souvent alimentés de deux manières : par la taxe affectée et par une subvention, qui est une dépense dans le budget de l'État, pour charges de service public. Ces subventions ont été plutôt préservées.
Aujourd'hui qu'il faut absolument chercher à réduire le déficit, il est normal que l'État, après avoir, sur ses propres administrations, supporté les efforts, se tourne vers les opérateurs. Je pense que les mesures proposées, qu'il s'agisse de l'ONEMA, du CNC ou des autres, me paraissent correctement calibrées. J'en profite pour vous rappeler, madame la ministre, que je vous ferai des propositions concernant France Télévisions.
Je souhaite intervenir sur l'amendement n° 430 , en particulier, sur l'ONEMA. Mon propos n'est pas de défendre un opérateur qui accumulerait des excédents mais d'expliquer le mécanisme qui conduit aujourd'hui au prélèvement de 55 millions d'euros.
L'ONEMA a été créé dans le cadre de la loi sur l'eau et les milieux aquatiques, et il est financé par des ponctions sur les agences de l'eau. Je suis intervenu sur ce point, dans la discussion générale, en tant qu'administrateur de l'Agence de l'eau Adour-Garonne. Les agences ont été obligées de contribuer au budget de l'ONEMA, qui met en place ses actions progressivement.
Mais, parallèlement, pour mener leurs propres actions, les agences de l'eau ont dû augmenter leurs redevances, en particulier celle d'Adour-Garonne, qui les a par trois fois augmentées de 9,5 %, notamment pour répondre aux objectifs de la directive-cadre sur l'eau ou encore de la directive-cadre sur l'eau résiduelle urbaine. Malgré ces augmentations opérées dans le cadre du neuvième programme des agences, elles ont été obligées, pour la première fois, à avoir recours à l'emprunt alors que, normalement, ce sont les redevances qui financent leurs actions et leurs programmes. On les a obligés à financer l'ONEMA et aujourd'hui on les ponctionne indirectement.
C'est une manoeuvre que je voulais dénoncer, y compris à titre préventif car que nous réservent les exercices prochains ? Ce sujet soulève une vraie difficulté. Il faut préserver pour ces opérateurs de l'État que sont les agences de l'eau la capacité d'intervention sur le terrain. Je rappelle qu'elles participent, elles aussi, à l'investissement public.
Je trouve profondément choquant l'amendement n° 431 rectifié . Une fois de plus, l'État réduit de façon brutale les ressources d'un certain nombre d'agences dont l'ADEME, l'Agence nationale de l'habitat, l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, alors que l'on sait, par exemple, que l'État demande à cette dernière de faire des investissements importants en matière ferroviaire. C'est d'autant plus choquant que vous avez refusé tous les amendements qui proposaient de vraies recettes. Je rappelle que les nôtres auraient permis 15 milliards de recettes supplémentaires par la suppression de niches fiscales, suivant en cela les préconisations du Conseil des prélèvements obligatoires. Vous avez refusé les amendements du président de la commission des finances qui aurait rapporté des milliards de recettes. Et maintenant, vous remettez en cause des institutions qui vont avoir le plus grand mal à effectuer leurs missions. S'agissant du CNC, je signale que cet amendement va remettre complètement en cause le soutien mutualiste au cinéma français qui a permis de maintenir à la fois une industrie cinématographique forte et une création dynamique et diversifiée, alors que vous pouviez construire un budget cohérent en supprimant des niches inefficaces.
Après ce que vous avez fait aux collectivités territoriales, voilà encore un État incapable de prendre ses responsabilités en matière de réduction des déficits et qui se défausse tout le temps sur tous ceux qui dépendent de lui.
C'est profondément choquant.
L'intervention de M. Muet va me permettre de lui apporter un démenti. Les conclusions de la récente MEC sur les opérateurs vont exactement dans le sens du Gouvernement. Je lui rappelle qu'elle était multipartisane. La MEC a constaté qu'il y avait des excédents et que, lorsque les ressources affectées ont une dynamique propre, il est possible aux agences d'aller un peu au-delà des missions initiales qui leur avaient été confiées. Il est bien que l'État puisse reprendre la main sur l'évolution de leurs recettes, notamment lorsque celles-ci dépassent les besoins immédiats de ces organismes. En plus, il serait bon que le Parlement reprenne la main sur leurs missions car celles-ci galopent parfois aux côtés des recettes alors qu'elles devraient être contingentées.
Je suis tout à fait d'accord avec l'amendement n° 431 rectifié . Je voudrais même aller plus loin parce que plutôt que de plafonner telle taxe affectée, tout dépassement étant reversé au budget de l'État, pourquoi ne pas rebudgétiser tous ces impôts et leur substituer des subventions ? Cela reviendrait in fine exactement au même mais n'aurait pas le même sens politique parce qu'on pourrait alors savoir ce qu'il en est et conserver la maîtrise des recettes. On a en effet trop tendance à créer des taxes, puis à les oublier.
Ensuite, elles dérivent, on n'en reparle que rarement, et puis des collègues signalent un problème dans telle organisation. En conséquence, madame la ministre, seriez-vous défavorable à une rebudgétisation de tous ces impôts, des subventions étant alors versées à chacun de ces organismes ? Ce serait de surcroît plus clair au niveau des missions.
Second point : dans l'exposé des motifs de l'amendement n° 430 , il est indiqué que l'INPI, l'Institut national de la propriété intellectuelle, reversera un dividende majoré à l'État. Or, m'en étant occupé pendant quelques années, je suis bien placé pour savoir que ce n'est pas une société anonyme mais un établissement public. Elle ne peut donc verser de dividendes. Il y aurait une correction rédactionnelle à faire. Disons qu'elle versera…
…un versement à l'État. On a eu beaucoup de débats sur l'INPI, y compris en commission des finances, et je ne suis pas sûr que ce soit une très bonne idée d'augmenter les prélèvements sur cet établissement parce qu'il a un problème de compétitivité par rapport à l'organisme des brevets européens.
Madame la ministre, je ne résiste pas à exprimer ma satisfaction qu'une telle étape soit franchie. Quand un certain nombre de collègues et moi-même avons commencé à travailler sur la rédaction de la LOLF il y a dix ans, nous n'avons pas pu placer les opérateurs dans le champ de la loi organique. Nous n'avons eu de cesse depuis, au travers de tous les rapports rendus par la mission LOLF, de les réintégrer progressivement dans le périmètre de contrôle du Parlement. Le fait qu'aujourd'hui on statue sur les recettes affectées et que le Parlement ait à nouveau à se prononcer sur des décisions rendues en ce domaine est un immense progrès du point de vue de la transparence budgétaire.
L'intervention de Jean Launay illustre parfaitement ce qui se passe : jusqu'à maintenant, les opérateurs s'endettaient et prenaient des décisions sans que le Parlement en soit informé. Nous allons dorénavant avoir une vision consolidée et transparente de leur activité. S'il y a des décisions irrationnelles, au moins ne pourrons-nous nous en prendre qu'à nous-mêmes si nous laissons faire, mais il nous sera aussi possible d'avoir une approche cohérente à leur égard. C'est donc une mesure qui va tout à fait dans le bon sens. Je redis ma satisfaction qu'au bout de dix ans, nous puissions enfin réintégrer les opérateurs dans le périmètre budgétaire de l'État et du contrôle parlementaire.
Très bien !
(Les amendements nos 430 et 431 rectifié , successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Sur l'article 17, je suis saisi d'un amendement n° 22 .
La parole est à M. Charles de Courson.
Le produit de la TAC – la taxe de l'aviation civile – est actuellement affecté grosso modo à hauteur de 80 % au budget annexe et de 20 % au budget général. J'appelle votre attention, mes chers collègues, sur le fait qu'on ne peut pas continuer à avoir un budget annexe en déficit de fonctionnement, avec une dette qui croît tous les ans. En tant que rapporteur sur le transport aérien, j'avais proposé une solution consistant à transférer la totalité du produit de la TAC au budget annexe, ce qui lui aurait apporté 80 millions de plus, permettant ainsi de supprimer le déficit de fonctionnement, actuellement de 55 millions, et de commencer une légère décroissance de l'endettement, c'est-à-dire d'appliquer la règle d'or au budget annexe.
C'est un amendement d'appel, madame la ministre. Il faut absolument trouver des recettes nouvelles et continuer à tenir bon sur les dépenses parce qu'on ne peut pas continuer à avoir un budget annexe qui s'endette pour financer une partie de ses dépenses de fonctionnement.
M. de Courson connaît admirablement le budget annexe du transport aérien dont il est le rapporteur depuis 2002. Je partage son analyse, mais j'ai indiqué en commission qu'il ne fallait pas transférer sur l'État le problème de l'endettement d'un budget annexe parce qu'on courrait le risque d'atténuer la responsabilisation des compagnies aériennes quant à son financement, et ce serait gênant. Celles-ci participent évidemment à l'équilibre de son budget, et leur substituer l'État ne me paraît pas un bon signal à leur envoyer. Il s'agit en fait de prestations, lesquelles relèvent autant du prix que va payer l'usager que du budget général.
C'est un amendement d'appel que j'ai bien entendu, mais je demande à M. de Courson de le retirer. À défaut, l'avis serait défavorable.
Je retire mon amendement d'appel, mais il y aurait une solution que vous seule pourriez mettre en oeuvre, madame la ministre : affecter au budget annexe les futures recettes sur les ETS – les droits d'émission de carbone que vont devoir payer toutes les compagnies aériennes en application de directives communautaires, dans le cadre du « Emission trading system ». Le produit serait de l'ordre de 60 millions à 65 millions. Ce ne serait pas idiot de faire ainsi financer ce budget par les compagnies aériennes. Un tel dispositif permettrait au moins d'équilibrer ric-rac son budget de fonctionnement. Je ne pouvais pas déposer un amendement en ce sens puisque nous n'avons pas le droit d'affecter de telles ressources, mais vous, vous pourriez le faire.
Je n'ai d'ailleurs pas compris pourquoi vos services n'ont pas évalué dans les recettes non fiscales le produit de ce nouveau dispositif applicable au 1er janvier. Ils m'ont dit qu'ils ne savaient pas très bien combien cela pourrait rapporter, ils estiment les recettes attendues entre 50 millions et 70 millions. Mais, en tout cas, c'est une idée que je suggère pour résoudre le problème.
(L'amendement n° 22 est retiré.)
(L'article 17 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 427 , portant article additionnel après l'article 18.
La parole est à Mme la ministre.
Il s'agit de la mesure exceptionnelle que j'ai évoquée : elle consiste à prélever 33 millions d'euros des recettes des amendes de police pour abonder la contribution de 200 millions d'euros des collectivités territoriales à l'effort supplémentaire de réduction des dépenses en 2012.
Je voudrais faire à ce sujet une observation en réponse à une question que m'a posée M. Launay : je souligne que c'est un prélèvement exceptionnel. La règle de partage du produit des amendes de police, à savoir 47 % pour le compte d'affectation spéciale et 53 % pour les EPCI, les communes et les départements, demeure inchangée ; le fonctionnement du CAS n'est donc pas remis en cause. C'est un prélèvement que les Anglais qualifieraient de one shot sur l'année 2012.
C'est nous qui déciderons pour l'année prochaine ! (Sourires sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
(L'amendement n° 427 est adopté.)
Sur l'article 21, je suis saisi d'un amendement rédactionnel de M. le rapporteur général, n° 75.
(L'amendement n° 75 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 21, amendé, est adopté.)
Je suis saisi de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 23.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l'amendement n° 429 .
Il s'agit de rééquilibrer budgétairement le dispositif bonus-malus. À cette fin, le Gouvernement propose de substituer un compte d'affectation spéciale « Aide à l'acquisition de véhicules propres » au dispositif actuel. Le volet malus sera durci en le majorant, ce qui assurera la soutenabilité financière de cette belle réforme.
L'amendement de la ministre rejoint la préoccupation de la commission exprimée depuis déjà longtemps : nous voulons que le dispositif bonus-malus soit équilibré. Tant qu'il s'agissait d'un compte de concours financier, il pouvait être déséquilibré, et il l'a d'ailleurs été dans de très grandes proportions. Je rappelle qu'il a été déficitaire de 500 millions en 2009, à nouveau 500 millions en 2010 et probablement 230 millions cette année. Il faut donc absolument qu'il soit équilibré en 2012. Le fait de le transformer en compte d'affectation spéciale oblige de toute façon à l'équilibre. L'amendement prévoit à cet effet des mesures pour augmenter le malus.
Oui, c'est clair, monsieur le président.
(L'amendement n° 429 est adopté.)
Oui, monsieur le président.
(L'amendement n° 58 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Cet amendement vise à créer le compte d'affectation spéciale qui se substituera au compte de concours financier « Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres ».
Je récapitule : l'amendement cosigné par M. Mariton et la commission des finances a supprimé le compte de concours financier, et l'amendement du Gouvernement remplit ce vide en le transformant en compte d'affectation spéciale, structurellement équilibré au sens de la LOLF.
(L'amendement n° 446 est adopté.)
Sur l'article 25, je suis saisi de plusieurs amendements de coordination, rédactionnels ou de précision, nos 335 rectifié, 342, 339 et 340, présentés par M. le rapporteur.
(Les amendements nos 335 rectifié , 342 , 339 et 340 , acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)
Sur l'article 27, je suis saisi d'un amendement n° 77 .
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement, adopté en commission des finances, permet au bénéficiaire d'allocations indûment versées par Pôle emploi d'opter pour un remboursement intégral en une seule fois, comme cela existe dans le cas de paiement indu de prestations familiales.
(L'amendement n° 77 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Sur l'article 29, je suis saisi d'un amendement n° 438 .
La parole est à Mme la ministre.
C'est un amendement de suppression de l'article à des fins de coordination avec l'amendement relatif au plafonnement des taxes affectées.
(L'amendement n° 438 , accepté par la commission, est adopté.)
Prochaine séance, lundi 24 octobre 2011 à seize heures :
Débat sur le prélèvement européen ;
Suite de la discussion des articles de la première partie du projet de finances pour 2012.
La séance est levée.
(La séance est levée à treize heures vingt.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron