La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le ministre du travail, les Français continuent de dire non à votre projet de réforme des retraites, non aux sacrifices pour les modestes, non aux cadeaux pour les plus riches, non à l'injustice.
Au lieu de faire travailler plus longtemps les seniors et de maintenir les jeunes au chômage, défendez donc plutôt l'emploi en France pour augmenter le nombre de cotisants. Cela contribuerait à alléger la pression sur des salariés dont la productivité, la plus élevée en Europe, a été multipliée par cinq depuis 1960. Et elle devrait encore doubler dans les cinquante prochaines années.
Aujourd'hui, un ouvrier finance donc plus de retraites puisqu'il produit cinq fois plus de richesses. En tenez-vous compte ? Non, bien sûr.
Par ailleurs, si le PIB a doublé depuis 1990, la part salariale a augmenté deux fois moins vite, ce qui limite les cotisations aux caisses de retraite.
Les déficits ne sont pas une fatalité, mais le résultat de choix politiques. L'étude d'un cabinet anglo-saxon, Russell Reynolds, révèle que les jetons de présence perçus en 2009 par les administrateurs du CAC 40 ont augmenté de 16 % par rapport à 2008, 36 % par rapport à 2006. Des sociétés ont distribué des jetons supérieurs, en moyenne, à 115 000 euros par an. Pour certains, ce n'est encore qu'un apéritif : Bernard Arnault a perçu 119 650 euros de jetons de présence plus 4 millions d'euros versés par LVMH. Il y a encore un milliard à gagner sur les stock-options et actions gratuites, 1,3 milliard sur les retraites chapeaux. Et on pourrait continuer.
Imposez donc les amis de Mme Bettencourt, comme vous imposez les moins fortunés. Alors, les Français diront oui à la réforme, car elle serait juste et équitable.
Allez-vous, au contraire, vous obstiner dans cette politique de défense des privilèges les plus indécents, dans ce mépris hautain qui vous fait ignorer la voix de millions de Français, la voix de la raison ?
La juste redistribution des richesses produites par le travail : voilà la réponse majeure qu'il faut leur apporter, au lieu d'envisager, à travers la suppression du bouclier fiscal, 680 millions...
La parole est à M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.
Monsieur Desallangre, je n'ai pas entendu la fin de votre question.
Je m'autoriserai cependant à vous répondre comme si je l'avais entendue. (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
Nous pouvons nous accorder sur quelques points.
D'abord sur le constat. Ce n'est pas nous qui l'avons établi, mais le Conseil d'orientation des retraites qui a indiqué qu'il manque, en 2010, environ 35 milliards d'euros.
Ensuite, nous devrions être tous attachés au système par répartition, ce qui signifie que des cotisations sont prélevées sur les travailleurs du moment pour payer les retraites du moment.
Dans une logique par répartition de laquelle vous vous éloignez de plus en plus, on pourrait penser que vous soutenez les mesures qui visent à reculer les bornes d'âge.
À notre grande surprise, depuis des mois et des mois nous n'entendons qu'un seul discours, celui qui consiste à prétendre que l'on va abandonner le système par répartition au profit d'un autre, basé sur des revenus de nature fiscale. C'est le seul leitmotiv du parti socialiste. Ce sont 40 milliards de fiscalité qui toucheraient, bien entendu, les classes moyennes. Autrement dit, aucun Français ne pourrait sortir indemne d'une telle situation. Mais n'oubliez pas le caractère aléatoire des recettes fiscales, en raison de la crise !
Savez-vous, par exemple, qu'entre 2008 et 2009, les recettes perçues au titre de l'impôt sur les sociétés ont baissé de 15 % et celles des prélèvements sur le capital de 40 % ?
Monsieur le député, croyez-vous qu'il soit responsable de vouloir assurer le financement des pensions sur des recettes qui s'effondrent en période de crise ?
En réalité, vous reniez vos convictions, vous reniez le bon sens. C'est une insulte pour la jeunesse, car ce que l'on fera par un autre système c'est uniquement de l'emprunt. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Madame la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, au nom de mes collègues du groupe Nouveau Centre, je souhaite vous interroger sur la réforme de la garde à vue. Saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a pris une décision historique, le 30 juillet dernier, en mettant le Gouvernement en demeure de réformer la garde à vue. Nous vous avions déjà interpellée afin que vous rendiez la garde à vue exceptionnelle, en vue de préserver les libertés individuelles, notamment en cherchant à concilier la présence de l'avocat dès la première heure avec le travail des policiers – vous êtes du reste en concertation sur le sujet avec le ministre de l'intérieur.
Alors que vous avez transmis le projet de loi au Conseil d'État, les avocats ont manifesté quelque inquiétude, soulignant que leur présence dès la première heure de la garde à vue posait la question de l'accès au droit. Vous savez qu'il existe des pistes de réflexion en la matière, notamment avec les assureurs. Quel est votre objectif, votre calendrier ?
La réforme est urgente puisqu'il s'agit de se conformer à la décision du Conseil constitutionnel, mais surtout à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Monsieur Hunault, notre calendrier est simple : dès que le texte aura été examiné par le Conseil d'État, il passera en Conseil des ministres et sera soumis au Parlement.
Trois principes sous-tendent ce projet, que j'avais déjà énumérés dans le cadre de la réforme de la procédure pénale.
Il s'agit d'abord de diminuer sensiblement le nombre des gardes à vue. Elles seront désormais limitées aux cas de crimes ou de délits punis d'emprisonnement. Les individus qui n'encourent pas de peine d'emprisonnement ne seront plus soumis à la garde à vue.
Nous devons ensuite aller plus loin et, en particulier, faire en sorte que les tout petits délits ne puissent plus faire l'objet d'une garde à vue mais d'une procédure simplifiée, sorte d'audition libre. Nous nous trouvons sur ce point en désaccord avec les avocats. Il me semble que lorsqu'une mère de famille est interpellée pour avoir volé un paquet de chips dans un supermarché, nul n'est besoin d'attendre l'arrivée d'un avocat. Ce point mérite donc d'être discuté. Enfin, il convient d'améliorer le déroulement de la garde à vue : les fouilles intégrales seront interdites et le droit au silence sera notifié.
Le troisième objectif concerne les droits de la défense. Dans tous les cas de droit commun, l'avocat pourra être présent en permanence sauf dans des cas exceptionnels où le parquet pourrait différer sa présence.
Ce texte marque une avancée considérable en ce qu'il améliore les droits de la défense tout en préservant la nécessité d'agir pour la sécurité des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Martine Martinel, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, depuis la rentrée 2010 plus de 14 000 jeunes enseignants ont été affectés à des postes à plein-temps quelques semaines seulement après avoir réussi un concours essentiellement fondé sur des savoirs universitaires.
Les plus chanceux ont bénéficié au mieux d'un stage de formation de six semaines durant la préparation de ce concours ; les autres n'ont bénéficié d'aucune formation.
Compte tenu de la difficulté du métier d'enseignant, leurs aînés dans la carrière avaient été formés, eux, pendant un an, selon le principe de l'alternance : cours encadré par un tuteur choisi pour son excellence pédagogique et formation professionnelle pour apprendre à préparer des cours, évaluer, gérer des groupes d'élèves.
Depuis la dernière rentrée, les jeunes enseignants sans formation sont chargés de leurs élèves à temps complet au même titre que leurs collègues expérimentés : vingt-six heures dans le primaire, plusieurs niveaux de classes dans le secondaire. Ils devaient bénéficier de l'aide d'un tuteur, qui, bien souvent, n'existe pas.
Tous les professionnels de l'école reconnus, du Haut conseil de l'éducation à l'Inspection générale, ont souligné les dangers de cette réforme.
Votre politique obéit à une logique budgétaire encore aggravée par le projet de loi de finances pour 2011. Qui fera au premier chef les frais de cette politique, sinon, outre les enseignants, les élèves ? Nous voilà bien loin de votre ambition : « L'école pour tous, la réussite pour chacun. »
Qui peut croire qu'il suffit d'un été pour faire d'un étudiant, même brillant, un enseignant aguerri ? Comment pouvez-vous parler de « pacte de carrière » quand vous laissez les enseignants en proie à la solitude et au désarroi ? Beaucoup sont en arrêt maladie. Certains ont déjà démissionné. Quand allez-vous remettre en chantier une vraie formation des enseignants ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.
Madame Martinel, le Gouvernement souhaite améliorer la formation des enseignants (Rires sur les bancs du groupe SRC), la formation initiale comme la formation continue – celle-ci avec, par exemple, la création d'un droit individuel à la formation pour tous les enseignants, à raison de vingt heures par an, cumulables pendant six ans. Il s'agit d'une nouveauté de cette rentrée scolaire.
En ce qui concerne la formation initiale, nous avons souhaité aligner notre système sur celui en vigueur dans tous les grands pays développés : il s'agit de recruter nos enseignants au niveau master, bac plus cinq, c'est-à-dire des enseignants mieux formés dans leur discipline ; or, pour être un bon enseignant, il faut être le meilleur dans sa discipline.
Une formation complémentaire s'impose, par la suite, sur le terrain. Nous l'avons mise en oeuvre : les nouveaux professeurs stagiaires ont bénéficié de trois jours de formation en académie. C'est la première fois qu'ils y étaient accueillis avant de se retrouver devant les élèves. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Ils ont ensuite bénéficié d'un tutorat. Tous les professeurs des écoles stagiaires travaillent en ce moment en doublon dans les classes du premier degré (Mêmes mouvements), tous les professeurs stagiaires ! Il s'agit d'exercer progressivement le métier.
Dans le second degré, tous les professeurs stagiaires (« Non ! » sur de nombreux bancs du groupe SRC) bénéficient d'un tuteur parce que nous croyons à la transmission du métier entre les enseignants expérimentés et les stagiaires.
Enfin, ils vont bénéficier d'une formation tout au long de l'année.
Ainsi que vous pouvez le constater, le Gouvernement met en place une formation initiale de qualité pour améliorer l'éducation nationale. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Roland Blum, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Contrairement à notre collègue socialiste, je voudrais remercier Luc Chatel pour son action au Gouvernement, et lui exprimer notre soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé des transports, et je la pose au nom de l'ensemble des députés UMP de Marseille, ainsi que de notre collègue Daniel Fidelin, député de la Seine-Maritime.
Depuis plus de huit jours, le port de Marseille fait l'objet d'un blocage quasi-total sur l'ensemble de ses bassins et du terminal pétrolier. Il s'agit en fait de la juxtaposition de deux conflits. D'abord, celui des ouvriers dockers, qui sollicitent la prise en compte de la pénibilité de leur travail, et qui mériteraient sans doute une intervention de l'État. Ensuite, celui des agents salariés CGT du port, qui, eux, refusent l'application de la réforme portuaire et le légitime transfert d'une partie du personnel dans les entreprises de manutention et les filiales portuaires, conformément à la loi du 4 juillet 2008. Cette attitude scandaleuse, antidémocratique et antirépublicaine de la CGT a des conséquences dramatiques pour toute l'économie régionale.
Quant au port, il perd des parts de marché sur l'ensemble de ses activités industrielles, mettant en péril les entreprises portuaires, l'emploi et la fiabilité de toute la filière maritime.
Je souhaiterais donc connaître, monsieur le secrétaire d'État, les mesures que le Gouvernement entend prendre pour permettre le retour à une situation normale dans les ports français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports.
Monsieur Blum, vous connaissez parfaitement ce port, comme tous les collègues que vous avez cités. Hier, je disais, en réponse à une question de M. Gandolfi-Scheit, que si l'on voulait tuer le port de Marseille, on ne s'y prendrait pas autrement. Eh bien aujourd'hui, malheureusement, je note les premiers signes d'engourdissement, puisqu'un grand armateur, le premier en France, CMA-CGM, troisième au monde pour les conteneurs, vient de déporter les escales de ses navires, qui étaient jusqu'à présent prévues à Marseille, à Gênes et à Barcelone. Voilà la conséquence de l'inconséquence.
Pour répondre précisément à votre question, il y a en effet deux négociations. Il y en a une sur le port, sur les quais, qui touche en particulier les installations de raffinage. Elle a abouti à une solution qui était favorable aux travailleurs portuaires, lesquels l'ont acceptée. C'est simplement la situation nationale, et certainement une volonté de nature politique, qui a entraîné un nouveau mouvement, puisque satisfaction leur avait été donnée.
Quant à la négociation nationale, conformément aux instructions de M. le Premier ministre, les discussions se poursuivent entre les ports, les employés des ports et les manutentionnaires, dans le cadre de la convention collective. Il y aura mercredi prochain, après la journée du 12 octobre, une nouvelle séquence de négociations, qui, je l'espère, aboutira.
Voilà où nous en sommes exactement. La réforme s'appliquera. Elle s'applique déjà partout en France. Il faut qu'elle s'applique à Marseille. Il faut que ces mouvements, qui sont scandaleux pour l'avenir du port de Marseille, cessent. Il faut redonner vie à nos ports. Je compte sur le soutien de la représentation nationale, et je pense que ce soutien dépassera d'ailleurs les seuls bancs de la majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur divers bancs du groupe NC.)
La parole est à M. Michel Ménard, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, à qui je rappelle qu'il a supprimé l'année de formation préalable à la prise de fonction des jeunes enseignants. Vous avez reconnu vous-même, monsieur le ministre, qu'il n'y avait que trois jours de formation. Et le tutorat, qui existait déjà, ne peut pas se substituer à une année de formation. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Dans le cadre du budget 2011, vous prévoyez la suppression de 16 000 postes dans l'éducation nationale, dont 8 967 postes d'enseignants dans les écoles maternelles et élémentaires. Ces 16 000 postes viendront s'ajouter aux 40 000 postes supprimés depuis trois ans.
Cela aura pour conséquences l'augmentation du nombre d'élèves par classe, la fermeture de classes et la poursuite de la diminution de la scolarisation des enfants de moins de trois ans, alors que vous avez déjà supprimé plus de 70 000 places en maternelle depuis huit ans.
Selon l'observatoire de la petite enfance, la scolarisation des deux-trois ans est passée de 35 % en 2001 à moins de 20 % aujourd'hui, avec de très fortes inégalités territoriales.
Pourtant, la scolarisation précoce est un outil essentiel de réduction des inégalités ; toutes les études récentes en montrent les effets bénéfiques, particulièrement pour les enfants des milieux défavorisés.
La scolarisation précoce en maternelle, où les jeunes enfants s'épanouissent et enrichissent leur vocabulaire pour entrer en CP dans les meilleures conditions, est pourtant reconnue comme un facteur d'égalité, mais aussi de réussite scolaire.
En préconisant la création de jardins d'éveil, vous reportez la charge financière de l'accueil sur les familles et les municipalités, ce qui aura de graves conséquences économiques pour les parents, notamment pour les femmes issues de milieux modestes, qui ne pourront pas envisager de reprendre une activité professionnelle.
En suivant la consigne dogmatique du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant en retraite, non seulement vous renoncez à lutter contre les inégalités, mais vous les aggravez.
Monsieur le ministre, quand allez-vous enfin renoncer à votre entreprise de démolition de l'école maternelle ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.
Je voudrais d'abord remercier le groupe socialiste de son intérêt soudain pour les questions éducatives. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Je n'avais pas eu une seule question depuis la rentrée, et il n'y a pas moins de six questions au Gouvernement aujourd'hui : c'est la rentrée du parti socialiste, cinq semaines après la rentrée des classes. C'est vous dire la réactivité du groupe socialiste sur ces questions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur Ménard, d'abord, le budget que François Fillon a présenté au Conseil des ministres la semaine dernière montre une augmentation de 1,6 % du budget de l'éducation nationale, et ce dans le contexte budgétaire que vous connaissez. Et l'éducation nationale reste le premier budget de l'État, avec plus de 60 milliards d'euros. La France se situe toujours dans le peloton de tête des grands pays développés pour ce qui est de la part du produit intérieur brut qu'elle consacre à l'éducation. Le reste n'est que contrevérités, monsieur le député.
Vous parlez de la maternelle. Monsieur le député, j'ai consacré une partie de mon action, cette année, au travail sur la maternelle. J'ai décidé de nommer 100 inspecteurs de l'éducation nationale pour conforter le rôle de la maternelle dans le parcours éducatif.
Nous avons lancé un plan de lutte contre l'illettrisme, qui commence dès la maternelle, avec la volonté de travailler sur les fondamentaux : le par coeur, la récitation, le travail sur la pré-lecture, pour permettre un meilleur apprentissage de la lecture, avant d'arriver au cours préparatoire.
Vous le voyez, monsieur le député, nous sommes totalement mobilisés sur ce sujet. Le Gouvernement a une politique ambitieuse en matière éducative, depuis la maternelle jusqu'à l'université, avec l'idée de faire en sorte qu'il y ait bien une solution pour chacun à la sortie de l'école. Il faut passer du dogme de l'école pour tous à la réussite de chacun, parce que ce que nous voulons, nous, c'est que chaque élève sorte du système éducatif avec une solution. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Rémi Delatte, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, je tiens, à mon tour, à exprimer notre soutien à M. Luc Chatel, ministre courageux, compétent et efficace. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Ma question s'adresse à M. le ministre du budget. La loi de finances pour 2011 sera déterminante pour faire face à cette crise économique sans précédent. Si l'objectif est de ramener le déficit public à 6 % en 2011 et à 2 % à l'horizon 2014, il vise également la maîtrise de la dette publique, qui devrait décroître à partir de 2013.
Construit dans un contexte de reprise économique qui reste fragile, ce projet de loi de finances conforte bien sûr la maîtrise des déficits, mais aussi l'accompagnement de la reprise de l'activité.
Pour respecter nos engagements européens, la maîtrise des dépenses constitue le coeur de la stratégie du Gouvernement, laquelle doit s'inscrire dans la durée et donc s'appuyer sur des réformes structurelles.
Le Gouvernement a affronté la crise de façon méthodique, rapide et efficace.
Il a assuré le financement de l'économie grâce au plan bancaire et au dispositif de soutien au crédit.
Il a mis en oeuvre un plan de relance fondé sur l'investissement pour soutenir l'activité et préparer l'avenir.
Il a pris des mesures massives pour protéger l'emploi des Français et soutenir le pouvoir d'achat des plus modestes.
Enfin, je salue la lucidité du Gouvernement français et de notre majorité –, qui n'ont pas cédé aux pressions de la gauche (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) qui n'a d'autres ambitions que d'augmenter les prélèvements sociaux et les impôts –, ce qui a permis de maintenir un haut niveau de consommation des ménages, gage d'une croissance pérenne.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous exposer les grandes lignes de ce projet de loi de finances pour 2011, qui, dans un tel contexte économique, revêt un caractère tout à fait exceptionnel ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.
Monsieur le député, vous avez vous-même retracé l'esprit qui a présidé à la construction de ce projet de budget. Vous avez rappelé la stratégie de la France au moment de la crise. Elle a été pertinente, efficace et fondée. Elle produit ses résultats.
Elle a été pertinente parce que nous avons fait le choix d'accepter un effondrement des recettes à hauteur de 54 milliards et de renoncer à la facilité d'augmenter les impôts à due concurrence pour équilibrer les comptes.
C'était un choix courageux, politique, qui a permis de faire jouer les amortisseurs sociaux et à notre pays de mieux s'en sortir pendant la crise.
Ce choix a aussi permis à notre pays de sortir parmi les premiers de la crise. Grâce à cela, notre pays bénéficie aujourd'hui d'éléments de confiance dans la durée sur un retour à une meilleure fortune et à une activité durable. Je veux rendre hommage à la stratégie mise en place par un Gouvernement auquel je n'appartenais pas à l'époque.
Si la crise est derrière nous, les stigmates et les cicatrices de la crise sont lisibles dans les caisses de l'État. C'est la raison pour laquelle le budget qui vous est proposé ainsi que la loi de programmation des finances publiques s'inscrivent dans cette perspective sur la durée d'aboutir, à terme, à l'équilibre budgétaire.
Nous produisons un effort de réduction de deux points du niveau de déficit public.
Ce budget est historique parce que, en un exercice budgétaire, nous allons réduire de 40 % le déficit budgétaire de l'État, soit de 60 milliards.
Il est équitable, parce qu'il va reposer en termes d'efforts, aussi bien sur les sources de dépenses de l'État – l'État produira un effort, il sera lui-même exemplaire – que sur un effort partagé entre les ménages et les entreprises – 4 milliards dans le cadre des niches sociales pour les ménages et 6 milliards pour les entreprises.
Il est juste et responsable, parce que l'essentiel de l'effort permettra de moderniser et de préserver notre modèle social : 70 % de la réduction des niches fiscales abonderont les déficits des comptes sociaux. Nous préserverons ainsi l'essentiel. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. François de Rugy, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'écologie. Il y a un an, dans cet hémicycle, vous défendiez le projet de taxe carbone. Le dispositif gouvernemental était mal conçu, car injuste socialement et inefficace écologiquement. Nous vous l'avions dit ; vous n'avez pas voulu nous écouter et le Conseil constitutionnel s'est chargé de vous le rappeler.
Depuis, malgré les grands discours et déclarations de Nicolas Sarkozy, vous avez capitulé en rase campagne sur le sujet de la fiscalité écologique et tout renvoyé aux calendes grecques, ou plutôt européennes. Vous vous êtes défaussé sur l'Union européenne, alors que la contribution climat-énergie figurait dans le pacte écologique de Nicolas Hulot, dont vous vous réclamez.
Il y a un an, dans cet hémicycle, vous vous félicitiez de la « grande avancée caractérisée par le crédit d'impôt développement durable ». Vous vantiez les incitations à l'équipement en panneaux solaires et vous proclamiez : « Le Grenelle est en marche. »
Vous avez depuis avalé votre chapeau lors du vote du Grenelle 2, et perdu le bras de fer que vous a imposé l'aile la plus conservatrice de votre majorité sur le développement de l'éolien. Vous avez abandonné purement et simplement votre ambition d'une fiscalité écologique bien sûr sur la taxe carbone, mais aussi sur la taxe poids lourds, que vous avez reportée, comme par hasard, après 2012.
Aujourd'hui, vous réduisez le crédit impôt développement durable. Il ne s'agit pas d'un simple coup de rabot, vous vous y attaquez à la hache. Vous le divisez par deux. C'est le seul dispositif fiscal qui subit une telle diminution dans le projet de budget.
Monsieur le ministre, ma question est claire : jusqu'où irez-vous dans cette politique de Gribouille qui consiste à encenser quelque chose une année et à le supprimer l'année suivante ? Ne trouvez-vous pas finalement que le prix à payer pour satisfaire vos ambitions pour devenir Premier ministre (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) devient incompatible avec toute ambition écologique ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.
Permettez-moi, monsieur de Rugy, de commenter la fin de votre intervention, qui est plus personnelle. Elle ne rehausse pas le prestige de votre personne. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
En ce qui concerne le fond de votre question, vous ne manquez pas de toupet. Lorsque vous avez quitté le Gouvernement, la France était inexistante dans l'éolien, inexistante dans la géothermie, inexistante dans les normes thermiques bâtiments, inexistante dans le photovoltaïque,…
Plusieurs députés des groupes SRC et GDR. C'était il y a dix ans !
pendant que l'Allemagne, l'Espagne et l'Autriche développaient ces filières professionnelles, créatrices d'emplois.
Monsieur de Rugy, connaissez-vous une seule filière professionnelle en France qui ait connu en deux ans 600 % de croissance ? Il s'agit du photovoltaïque, grâce à la fiscalité écologique qui a été votée par la majorité.
Connaissez-vous, monsieur de Rugy, une seule filière, comme l'éolien, bénéficiant d'une croissance de 92 % sur les deux dernières années ?
La géothermie, quant à elle, a connu une croissance de 42 % dans les deux dernières années.
Vous ne connaissez pas la fiscalité écologique, vous ne pouvez donc pas en parler. Nous l'avons mise en place pour soutenir les activités françaises, l'emploi français. Le bonus-malus écologique a été inventé pour les voitures décarbonnées. Grâce à cela, nous offrons des véhicules électriques. Grâce à cela, nous avons des travaux dans le bâtiment.
Monsieur de Rugy, puisque vous ne savez pas analyser, je vous conseille de demander des renseignements à nos amis canadiens, qui viennent d'établir un rapport pour le Parlement canadien sur la mutation écologique et économique des pays industrialisés. Vous devriez savoir que la France est numéro un sur les quinze critères canadiens. Je suis désolé que cela vous ait échappé. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Bernard Perrut, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. Marc-Philippe Daubresse, ministre de 1a jeunesse et des solidarités actives.
Il y a un an, à Avignon, le Président de la République s'exprimait sur un sujet particulièrement important : la jeunesse, son avenir, son autonomie et les chances que la société doit lui réserver.
Vaste sujet, il est vrai. C'est pourquoi l'ensemble du Gouvernement s'est mobilisé à travers le plan "Agir pour la jeunesse" afin de répondre aux aspirations légitimes d'une jeunesse aussi multiple que diverse, qui attend des mesures concrètes pour l'orientation, la formation, la santé, le logement, l'insertion professionnelle et l'emploi, ainsi que la citoyenneté. Nous mesurons combien les actions de Luc Chatel et de Valérie Pécresse sont importantes pour notre pays. Laurent Wauquiez, ici même, évoquait hier…
… les mesures engagées pour l'emploi des jeunes, les engagements financiers reconduits et les résultats encourageants obtenus. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre, nous connaissons votre détermination qui est forte. Vous êtes conscient que la question de la "reconnaissance" de la jeunesse est au coeur de notre dialogue intergénérationnel. Vous voulez, avec juste raison, encourager l'engagement des jeunes.
Comment expliquer, si l'on en croit un sondage, qu'un Français sur deux a une vision négative de la jeunesse qui ne serait pas assez réaliste et responsable ?
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dresser un bilan, du plan "Agir pour la jeunesse" ? Quelles suites entendez-vous lui réserver afin de donner toute sa place à la jeunesse et lui donner confiance ?
N'oublions jamais, mes chers collègues, qu'un pays qui construit son avenir est un pays qui mise sur sa jeunesse. Nous, au groupe UDF (Vives exclamations et rires sur tous les bancs), au groupe UMP, nous en sommes convaincus ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse, ministre de la jeunesse et des solidarités actives.
Monsieur le député, vous l'avez dit avec énergie, le plan présenté l'année dernière par le Président de la République « Agir pour la jeunesse » est un plan de mobilisation collective de l'ensemble du Gouvernement sous l'autorité du Premier ministre. Vous avez cité plusieurs de mes collègues qui y ont fortement contribué.
Le Président de la République a voulu plus d'autonomie pour les jeunes, plus d'autonomie dans les études avec le dixième mois de bourse et les 44 000 chambres pour étudiants. Plus d'autonomie dans le travail avec le RSA pour les jeunes travailleurs, et les 30 000 places créées dans les quartiers, grâce au plan de Fadela Amara, en faveur de l'insertion des jeunes. Plus d'autonomie pour l'égalité des chances avec les 10 000 places dans les Écoles de la deuxième chance et les 6 700 places – bientôt 20 000, grâce à Luc Chatel – dans les internats d'excellence. Plus d'autonomie enfin pour l'engagement citoyen avec les 10 000 services civiques. À cet égard, je suis heureux de vous annoncer que nous venons de lancer, sous l'autorité du Premier ministre, la campagne de communication qui porte déjà ses fruits. À ce jour, plus de 9 000 jeunes ont fait acte de candidature pour donner entre six mois et un an de leur vie au service d'un engagement citoyen, solidaire, environnemental ou humanitaire.
Oui, monsieur Perrut, nous allons poursuivre dans cette voie. Alors que 80 % des mesures ont été engagées, nous entamons une seconde étape dont les mots-clés sont : territorialiser les actions – 10 % du territoire, 6 millions d'habitants – ; sécuriser les parcours avec le revenu contractualisé d'autonomie. Il s'agit d'une véritable déclaration de guerre au décrochage scolaire ! Nous mettrons également l'accent sur l'orientation…(Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Apeleto Albert Likuvalu, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Mes chers collègues, ma question qui s'adresse au ministre de l'Éducation nationale concerne la prise en charge des enfants handicapés dans les outre-mer.
La loi du 11 février 2005, relative à « l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées », affirme le droit pour chacun à une scolarisation en milieu ordinaire et à un parcours scolaire continu et adapté.
Le 10 juin 2008, lors de la Conférence nationale du handicap, le Président de la République avait pris un certain nombre d'engagements, comme la scolarisation en milieu ordinaire des enfants handicapés et l'augmentation sur tout le territoire du nombre d'enfants scolarisés de manière prioritaire.
Il avait également indiqué que « pendant les cinq années à venir, pas un seul jour ne se passerait sans que nous travaillions au service des personnes ayant un handicap, des personnes fragiles et de leurs familles ».
En commission des affaires culturelles et de l'éducation, vous avez, monsieur le ministre, précisé que d'importants efforts ont été effectués au bénéfice de 195 000 enfants handicapés dans plus de 200 unités de scolarisation.
Ces efforts et ces ambitions affichés sont-ils réels ? Si la réponse est oui, ils se sont malheureusement arrêtés aux frontières de la métropole, délaissant, volontairement ou non, nos enfants ultra-marins, comme à Wallis et Futuna.
En effet, sur le terrain, ce principe reste lettre morte et la situation de ces enfants ne s'est guère améliorée. Exclus des établissements scolaires, les enfants handicapés sont livrés à eux-mêmes et à leurs familles démunies et impuissantes. Ils subissent ainsi la double peine du handicap et de l'exclusion sociale.
Aussi monsieur le ministre, pouvez-vous éclairer la représentation nationale et, au delà, nos compatriotes ultra-marins, sur les mesures que vous préconisez afin de remédier à une telle situation qui porte atteinte aux valeurs de la République et de permettre enfin une bonne et rapide application de la loi ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer.
Monsieur le député, vous avez raison d'appeler l'attention de la représentation nationale sur la situation des enfants handicapés, en particulier, en outre-mer.
Oui, le plan national décliné également en outre-mer s'appliquera. Je rappelle qu'il existe deux statuts en outre-mer. S'agissant des territoires qui relèvent de l'identité législative, toutes les mesures qui ont été annoncées hier à la représentation nationale par ma collègue Nadine Morano ont vocation à s'appliquer dans les territoires d'outre-mer. En revanche, les collectivités d'outre-mer relèvent d'un statut particulier. Pour autant, l'État a le souci d'accompagner fortement ces territoires. Ainsi votre circonscription, monsieur le député, bénéficie pour les élèves du lycée de Wallis d'un accompagnement particulier : à ce jour, les sept élèves concernés peuvent suivre leur scolarité.
Monsieur le député, l'outre-mer est peut-être loin, mais l'outre-mer est au coeur des préoccupations du Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Françoise Briand, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale. (« Ah ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Eh oui, mes chers collègues : nous, nous sommes dans l'action, et non dans la polémique et les postures permanentes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Et j'apporte personnellement tout mon soutien à l'action que mène Luc Chatel pour réformer le système éducatif.
Le Président de la République, Nicolas Sarkozy, a tenu à venir hier, mardi 5 octobre, dans ma circonscription, au lycée Jean-Baptiste Corot de Savigny-sur-Orge, dans l'Essonne… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Eh oui : pardonnez-moi, mais la banlieue existe aussi ! (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.) Il y a lancé à vos côtés, monsieur le ministre, et aux côtés du ministre de la culture et de la communication, la campagne nationale « Ciné-lycée ».
Ce nouvel outil, qui sera à la disposition de tous les lycées de France, permettra à tous les lycéens de s'ouvrir à la culture par le cinéma. Dans un premier temps, deux cents classiques du cinéma, libres de tous droits, sont mis à disposition sur la plate-forme cinelycee.fr. Cette plate-forme est un espace participatif permettant également le partage de ressources pédagogiques d'accompagnement.
Nous l'avons constaté ensemble, monsieur le ministre : les professeurs d'arts plastiques, comme les jeunes ayant choisi les options cinéma, théâtre ou musique, sont entièrement satisfaits de ce dispositif. Mais le Président de la République a insisté sur le fait que ce nouvel outil pédagogique est aussi et surtout destiné aux jeunes auxquels leur parcours ou, tout simplement, leur vie ne fournissent pas l'occasion d'accéder au grand cinéma classique européen et américain.
Nicolas Sarkozy a également dit sa volonté (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC) d'étendre ce dispositif au théâtre (Même mouvement), à l'opéra (Même mouvement) et même aux expositions. Il s'est engagé à allouer des crédits supplémentaires au ministère de l'éducation nationale pour favoriser cet accès à la culture.
Monsieur le ministre, je vous remercie de bien vouloir informer la représentation nationale sur ce dispositif innovant… (« Stop ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Merci.
La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale.
Madame la députée, depuis 2007, le Président de la République a voulu donner une nouvelle impulsion à l'enseignement artistique et culturel.
Cette volonté s'est d'abord traduite par la création d'un nouvel apprentissage, celui de l'histoire des arts (Exclamations sur les bancs du groupe GDR), introduit à tous les niveaux de l'école, du collège et du lycée, et qui sera évalué pour la première fois au brevet cette année.
Elle s'est ensuite traduite par la création de nouvelles ressources pédagogiques destinées à nos enseignants. Frédéric Mitterrand et moi-même avons ainsi créé un portail Internet… (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.)
… qui permet aux enseignants d'accéder aux ressources pédagogiques liées aux grandes expositions nationales à rayonnement international.
Elle s'est également traduite par la gratuité de l'accès aux musées pour tous les enseignants…
… afin que ces derniers puissent préparer leurs cours et faire bénéficier leurs élèves de leur travail culturel et pédagogique. (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
Elle s'est enfin traduite, au lycée, par une réforme qui entre en vigueur en cette rentrée. Dorénavant, dans chaque lycée, on trouve un « référent culture », c'est-à-dire un professeur chargé de l'animation culturelle au lycée. Il pourra diffuser les deux cents films issus de toute l'histoire du cinéma qui sont disponibles sur la plateforme numérique que nous avons constituée avec France Télévisions. En effet, nous en avons négocié les droits de sorte qu'ils puissent être diffusés dans tout les lycées, afin de rendre le septième art et son histoire accessibles à toute notre jeunesse.
Vous le voyez, à nos yeux, la culture au lycée, et à l'école en général, est un moyen de lutter contre l'inégalité des chances.
Voilà pourquoi nous l'avons placée au coeur de la réforme du lycée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Michel Françaix, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, s'il veut bien me répondre. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre, au-delà de la provocation, qui est la preuve d'un manque de sérénité (Protestations sur plusieurs bancs du groupe UMP) ; au-delà de vos supercheries, qui se superposent les unes aux autres et qui ne font pas une politique ; au-delà du mille-feuilles que constitue un dispositif mal coordonné ; au-delà d'une mécanique de cache-misère (Même mouvement) qui consiste à rogner partout les dépenses, vous êtes d'une tolérance stupéfiante envers les inégalités.
Monsieur le ministre, je comprends mieux maintenant pourquoi vous êtes le porte-parole de ce gouvernement : ni vous, ni vos collègues, ni le Président de la République n'êtes jamais concernés par les injustices de toute sorte qui touchent notre société. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
Pourtant, on a bien assisté au cours des dernières années à un creusement des inégalités scolaires, qui s'ajoutent les unes aux autres. La Cour des comptes le dit, comme l'institut Montaigne, selon lequel « l'école primaire échoue dans sa mission fondamentale de correction des inégalités » ; pire, selon l'institut, elle les renforce. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre, si vous savez que nous souffrons de handicaps ; si vous savez que le taux d'échec scolaire chez les jeunes est élevé ; si vous savez que nous sommes au dernier rang pour la maîtrise du calcul en CM2 et que nous avons perdu onze places en ce qui concerne la maîtrise de la lecture ; si vous savez tout cela, si vous constatez les dégâts, êtes-vous prêt à modifier votre politique ?
J'aimerais le croire, mais, en guise de recette, vous avez pris une décision intolérable : « Je sais ce qu'il faut faire, supprimons les RASED ! » (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Foin des réformes à la marge, du rideau de fumée, des recettes de communicants ; votre politique est suicidaire pour l'éducation nationale et prépare des milliers de jeunes à Pôle emploi et à de petits boulots. Il est temps de changer de politique, monsieur le ministre de l'éducation nationale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur de nombreux bancs du groupe GDR.)
Monsieur Françaix…
…, les professionnels de l'éducation nationale, les professeurs qui, en ce mercredi après-midi, vous écoutent (« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP) apprécieront le tableau que vous avez dressé du travail quotidien qu'ils accomplissent pour les élèves ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le député, pour lutter contre les inégalités, il ne faut pas, comme l'ont trop souvent fait les vôtres, faire preuve d'égalitarisme (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) : il faut faire davantage pour ceux qui ont le plus de besoins. (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Tel est le fil conducteur de notre politique éducative. (Les députés des groupes SRC et GDR scandent : « Les RASED ! Les RASED ! ».)
Ainsi, en cette rentrée, nous appliquons la réforme du lycée, qui prévoit précisément un accompagnement personnalisé permettant d'en faire davantage pour les élèves qui connaissent le plus de difficultés. (Même mouvement.)
Il s'agit d'apporter un soutien scolaire à ceux qui risquent de décrocher. (Même mouvement.) L'aide personnalisée de deux heures par semaine que nous avons créée en primaire est aussi un moyen de faire davantage pour les élèves en difficulté.
De même, les internats d'excellence – nous en ouvrons onze en cette rentrée – constituent la solution pour ces enfants issus de milieux très défavorisés, éloignés de l'école, mais qui sont méritants et qui ont le potentiel pour réussir à l'école. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Le travail que nous menons dans les établissements de réinsertion scolaire consiste lui aussi à éviter que les élèves en grande difficulté ne quittent le système éducatif, en leur apportant une réponse éducative, même s'ils sont très perturbateurs. (Même mouvement.)
Monsieur Françaix, je vous entends beaucoup critiquer la politique du Gouvernement (« Les RASED ! » sur les bancs du groupe SRC), mais je n'entends guère vos propositions. La vérité, c'est que le parti socialiste n'a plus rien à dire sur l'éducation. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Au demeurant, ce n'est pas moi qui le dis, mais M. Peillon : « Ma famille politique, les socialistes, en ayant cessé de donner la priorité à l'éducation… » (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Merci, monsieur le ministre. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Olivier Carré, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, il y a quatorze mois, alors que nous étions réunis en congrès, le Président de la République nous exposait sa « volonté de mettre en place un très grand programme d'investissements résolument tournés vers l'avenir de notre recherche, de notre formation » – puisqu'il en est question, les moyens qui ne pouvons y consacrer sont en partie là – « et de nos entreprises. »
Hier, avec mes collègues Louis Giscard d'Estaing et Dominique Baert, nous avons participé à la première réunion du comité de surveillance des investissements d'avenir sous les auspices de M. le Premier ministre. Nous avons pu apprécier la collégialité de cette instance, coprésidée par Alain Juppé et Michel Rocard.
Ce programme, piloté d'une main ferme et diligente par René Ricol, est en avance de six mois par rapport au plan initialement prévu. Près de 25 milliards d'euros sont déjà mis à disposition des opérateurs et 10 milliards viendront bientôt les compléter.
Ainsi, près de trois cent quarante projets, tous très innovants ou structurants, répartis sur la France entière, sont en train d'être examinés par les différents comités de sélection qui ont été mis en place. Cet élan, mes chers collègues, est stratégique pour l'avenir de notre pays, de notre peuple, et pour notre place dans le monde de demain.
Plusieurs points ont été soulignés et j'ai été particulièrement sensible au volontarisme du commissaire général qui nous a montré comment ce programme permettait de mettre en place de nouveaux outils de pilotage des investissements publics portant à la fois sur leurs objectifs, leur contrôle et leur efficacité.
Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous préciser les grandes lignes qui ont été retenues pour passer à l'étape du financement concret de ces projets et nous indiquer quelles sont, selon vous, les conditions de réussite de ce programme ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.
Monsieur Carré, parmi les conditions qui ont permis à notre pays de bien traverser la crise, j'évoquais tout à l'heure, en réponse à M. Delatte, le fait d'accepter un effondrement des recettes sans augmenter les impôts et la stratégie qui consiste à faire jouer les amortisseurs sociaux. Il y a aussi, bien sûr, le fait de ne pas sacrifier l'avenir en continuant à investir – votre question me donne l'occasion d'insister sur ce point. Nous faisons un choix puissant qui consiste à créer une enveloppe générale pour préserver les ressources d'avenir de notre pays, l'enseignement supérieur et la recherche.
Cet effort sans précédent en termes budgétaires, et qui réclame une extraordinaire rigueur dans la méthode, commence à porter ses fruits.
S'agissant de la mobilisation des fonds, il faut savoir que les crédits alloués aux opérateurs seront en totalité affectés d'ici à la fin de l'année.
Dès à présent, s'agissant des nouvelles technologies, de l'enseignement supérieur et tout ce qui touche de près ou de loin au développement durable, les seize projets d'excellence ont été retenus.
Nous rentrons dans une deuxième phase avec l'installation du comité de surveillance et l'examen des trois cent quarante dossiers pour les équipements d'excellence destinés aux laboratoires universitaires et des cinquante-quatre projets pour les futurs instituts de recherche technologique.
Il faut insister surtout sur le caractère fécond de la mobilisation exceptionnelle de tous les acteurs du milieu scientifique dans les universités et les instituts de recherche, qui sont en pleine ébullition intellectuelle pour travailler à des projets qui recevront un financement.
Enfin, il importe de conserver cette méthode qui a porté ses fruits, grâce à l'énergie inaltérable du commissaire Ricol et à la volonté de maintenir notre degré d'excellence. Il appartiendra au comité de surveillance de travailler en ce sens. Ce n'est pas parce que nous disposons de fonds et que nous respectons le calendrier qu'il faut laisser s'affaisser notre niveau d'excellence, si décisif pour l'avenir de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Yves Durand, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, l'esquive et les contrevérités ne font pas une politique. À toutes les questions posées par mes collègues du groupe SRC, vous n'avez apporté qu'une seule et même réponse anesthésiante : « tout va bien, ne vous inquiétez pas, je m'en occupe ».
Hélas, la réalité que vivent quotidiennement les enseignants et les élèves est tout autre ; c'est celle des classes surchargées qui ne permettent – ne vous en déplaise, monsieur le ministre – aucun suivi individuel. Comment accompagner les élèves quand ils peuvent être jusqu'à trente par classe ?
Vous prétendez lutter contre l'échec scolaire. Mais comment dans ces conditions justifier la suppression des RASED ? Certes, vous parlez de « sédentarisation » et non de suppression mais le résultat est le même : vous privez l'éducation nationale de l'outil le plus efficace pour lutter contre les inégalités, que vous contribuez dès lors à creuser. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Vous prétendez ne pas remettre en cause l'école maternelle. Mais là encore, vos discours sont des contrevérités. Vous demandez vous-même aux recteurs de ne plus comptabiliser les enfants de deux à trois ans. Pour vous, ils ne comptent même plus !
S'agissant de la formation des enseignants, nous atteignons un summum dans les contrevérités. Vous l'avez avoué vous-même : il s'agira de trois jours de stage ! Allez-vous envoyer vos vidéos de gestion de classe à Laurence, cette jeune enseignante-stagiaire, qui, dans son témoignage ce matin sur France Inter, racontait qu'elle était sous anxiolytiques après avoir reçu une lettre de son inspecteur d'académie lui indiquant qu'elle n'avait qu'à démissionner si elle n'y arrivait plus ?
Vous dites que tous les stagiaires ont un tuteur, monsieur le ministre : oui, mais il faut ajouter que la plupart du temps les tuteurs ne se trouvent pas dans le même établissement que les stagiaires qu'ils sont chargés d'accompagner !
Alors que les rapports relèguent notre système éducatif au fond de la classe, l'école a besoin d'un ministre du bouclier scolaire plutôt que du bouclier fiscal ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur Durand, le 26 mai dernier, lors d'un colloque, vous déclariez en évoquant la position du parti socialiste : « Sans doute, avions-nous traité l'école de manière trop réductrice » et c'est en effet ce que l'on peut constater quand on entend vos propos.
La politique que mène le Gouvernement a pour objectif la réussite de chaque élève.
Pour y parvenir, nous devons avancer dans deux directions en même temps.
Le premier défi est la personnalisation de notre enseignement. Aujourd'hui, la clef de la réussite éducative est l'adaptation de notre système éducatif à l'hétérogénéité des classes. L'aide personnalisée dans le primaire, les deux heures d'accompagnement personnalisé pour tous les lycéens, les stages de remise à niveau à la fin des vacances scolaires pour les élèves en difficulté – 200 000 en ont bénéficié cette année –, voilà autant d'actions qui contribuent à personnaliser l'enseignement pour donner ses chances à chaque élève.
Le deuxième défi est celui de l'autonomie. Il s'agit de faire davantage confiance aux acteurs locaux qui sont au plus près de la réalité du terrain (Exclamations sur quelques bancs du groupe SRC) et qui savent bien mieux que nous, au 110 rue de Grenelle, ce qu'il faut faire pour les élèves. Nous avons ainsi mis en place des réformes qui font davantage confiance aux recteurs, aux inspecteurs d'académie, aux chefs d'établissement et à nos professeurs. La gestion des dédoublements de classe relève ainsi des proviseurs de lycée, qui disposent désormais d'une marge de manoeuvre dans la hiérarchisation de leurs objectifs prioritaires.
C'est ainsi, monsieur le député, que nous obtiendrons des résultats. Davantage de personnalisation, davantage d'autonomie, telle est la politique que mène le Gouvernement en matière éducative. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Guy Geoffroy, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, avant de poser ma question à Mme Morano, je voudrais dire au ministre de l'éducation nationale que, loin de nous décourager, le caractère systématique et outrancier des attaques socialistes d'aujourd'hui à son encontre nous conduit, au contraire, à le soutenir de manière déterminée et sereine dans la politique qu'il conduit sous l'autorité du Président de la République et du Premier ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité, le texte que je vais évoquer maintenant devrait faire taire nos collègues de gauche, puisqu'ils l'ont voté à l'unanimité avec nous. Il s'agit de la loi du 9 juillet dernier portant de nouvelles et importantes mesures de lutte et de prévention contre les violences faites aux femmes.
Avec cette loi, nous avons franchi un grand pas, salué par tous, et respecté la parole que nous nous étions donnée tous ensemble d'aller au bout de notre démarche, ainsi que la volonté exprimée par le Premier ministre que cette importante oeuvre législative soit menée sur la base du travail parlementaire.
En votant cette loi, qui identifie mieux les périls et les prévient mieux, qui protège mieux les victimes, et qui sanctionne mieux quand cela est nécessaire, nous avons décidé d'inscrire de nouvelles dispositions dont l'entrée en vigueur, pour certaines d'entre elles, a été fixée au 1er octobre. Nous sommes le 5 octobre et, ce n'est un secret pour personne, le Gouvernement a tenu sa parole : le 28 septembre dernier, les textes importants qui étaient attendus ont été signés.
Madame la secrétaire d'État, pouvez-vous éclairer la représentation nationale sur les suites naturellement données par le Gouvernement à la volonté unanime du législateur ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC.)
La parole est à Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité.
Monsieur le député, j'étais ce matin au Centre national d'information sur les droits des femmes et des familles où j'ai annoncé les funestes chiffres officiels de 2009 : en légère régression,…
…ils sont porteurs d'un petit message d'espoir puisque 140 femmes ont perdu la vie sous les coups de leur conjoint contre 156 en 2008.
Si toute la représentation nationale s'est mobilisée pour améliorer notre dispositif législatif et nos dispositifs technologiques – à la suite de votre vote, nous allons mettre en oeuvre le bracelet électronique –, le Gouvernement, conformément aux engagements de Michèle Alliot-Marie, a publié le 1er octobre, au Journal officiel, le décret d'application mettant en oeuvre l'ordonnance de protection des victimes. Celle-ci permet au juge, avant même un dépôt de plainte, de prendre toutes les mesures nécessaires à la protection de la victime, notamment l'éviction du conjoint, du concubin ou de la personne pacsée, ainsi que les dispositions pour la garde des enfants.
Outre cette ordonnance de protection, d'autres mesures restent à prendre. Nous avons notamment introduit dans notre droit le délit de violence psychologique, et nous lançons maintenant des campagnes de communication concernant les enfants. Il est en effet inacceptable que des enfants meurent aussi – ils étaient dix l'année dernière – des suites de violences familiales. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Patrick Lebreton, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le ministre du budget.
Le 8 septembre dernier, vous déclariez, monsieur le ministre : « la remise en cause de la défiscalisation en outre-mer serait un désastre économique pour ces territoires et les engagements pris ne seront pas remis en cause ». Sitôt contredit par la ministre de l'économie, vous avez piétiné votre promesse faite aux 2 millions d'ultramarins dans votre projet de budget pour 2011.
Funeste semaine pour l'outre-mer, qui a assisté, impuissante, à la saignée des dispositifs fiscaux de soutien au développement qui détournera de son économie des centaines de millions d'investissement ; à un budget d'intervention qui baisse davantage que tous les autres ; à la présentation du rapport d'application de la LODEOM, qui montre que les textes d'application les plus essentiels n'ont toujours pas été pris.
Monsieur le ministre, nous pouvons comprendre que la détérioration financière due à votre politique depuis 2002 impose des efforts partagés par tous les Français. Mais ils doivent être justement répartis, ce qui n'est malheureusement pas le cas.
Ainsi, vous nous imposez immédiatement les contraintes quand il s'agit d'efforts, mais pour ce qui est des avancées sociales, comme le RSA, alors là, vous n'hésitez jamais à en repousser l'application sur nos territoires !
L'outre-mer, ce sont 2 millions de Français, dont 50 % vivent sous le seuil de pauvreté et 25 % sont au chômage. Plus que d'autres territoires en difficulté, il nécessite le soutien de l'État pour bâtir un modèle économique durable, ainsi qu'une stabilité des politiques menées pour rassurer les investisseurs.
L'outre-mer ne doit pas être une variable d'ajustement de l'échec de votre politique économique et sociale, monsieur le ministre. Jamais ces 2 millions de Français n'ont été aussi maltraités ! Quand le Gouvernement se décidera-t-il enfin à considérer ces populations et ces territoires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et quelques bancs du groupe GDR.) .)
La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.
Monsieur le député, je vais vous répondre un peu au titre de ministre du budget, beaucoup au titre d'ancien ministre de l'outre-mer. À cet égard, je qualifierai vos propos de politiciens. Je les trouve inacceptables et injustes au regard de ce qui est proposé dans la préparation budgétaire. Tout est mis en oeuvre pour tenir les engagements du Président de la République comme pour respecter la lettre et l'esprit de la LODEOM.
Je conserve de deux années passées au ministère de l'outre-mer, auprès de nos 2,5 millions de compatriotes, la claire conviction que sans outil de défiscalisation, il n'y a pas de développement possible. Nous mesurons tous que les problématiques auxquelles sont confrontés nos compatriotes en outre-mer sont les mêmes qu'en métropole mais multipliées par trois : trois fois plus de contrats aidés, trois fois plus de chômage, trois fois plus de retard en matière de logement social. C'est bien la raison pour laquelle, dans le budget que j'ai eu l'honneur de présenter au conseil des ministres et que j'aurai l'honneur de défendre devant vous d'ici à quelques jours, nous avons préservé l'essentiel des outils qui permettent à ces territoires de se développer sur le plan de leurs fondamentaux, qu'il s'agisse du tourisme, de l'accès aux nouvelles technologies, de la compétitivité économique, du logement social. C'est bien la raison pour laquelle la politique de logement social, s'agissant de la défiscalisation, ne subira pas de coup de rabot.
Vous pouvez faire de la politique ici à Paris, mais vous reviendrez sur votre territoire et vous direz, les yeux dans les yeux, à celles et ceux qui accompagnent la politique du Gouvernement de soutien à l'activité ultramarine que nous avons pris ici des engagements et que nous les tiendrons.
Quant à eux, ils savent que nous serons là pour les aider. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Défiscalisation en outre-mer
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Marc Le Fur.)
L'ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi complétant les dispositions relatives à la démocratie sociale issues de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 (n° 2829).
La parole est à M. Guy Lefrand, suppléant M. Dominique Dord, rapporteur de la commission mixte paritaire.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité, mes chers collègues, le rapporteur de la commission mixte paritaire, M. Dominique Dord, retenu par une obligation impérative, m'a demandé de bien vouloir le suppléer pour vous présenter les résultats de la réunion de la commission mixte paritaire qui s'est tenue jeudi dernier : celle-ci a débouché sur un texte qui a été approuvé par les sénateurs et les députés de la majorité et qui a été voté, hier, par le Sénat en séance plénière. Je vous proposerai naturellement de faire de même.
Pour ce qui est du contenu du texte, j'appelle, tout d'abord, votre attention sur son titre : « projet de loi complétant les dispositions relatives à la démocratie sociale issues de la loi n° 2008-789 », qui est la réforme majeure de la représentativité syndicale souhaitée par les partenaires sociaux, que nous avons inscrite dans notre droit en 2008. Ce titre nous rappelle l'enjeu essentiel du présent texte – enjeu que nous devons toujours garder à l'esprit –, qui est de garantir la constitutionnalité de la réforme de 2008. Pour ce faire, il faut absolument – le Conseil d'État l'a confirmé – prévoir un mode d'expression de la préférence syndicale des salariés des entreprises de moins de onze salariés, afin de compléter la prise en compte des résultats des élections professionnelles organisées dans les entreprises de plus grande taille. L'article le plus important du texte est donc l'article 4, qui organise cette expression sous la forme d'un scrutin de représentativité sur sigle tous les quatre ans.
Cet article a été précisé au cours des débats. Notre assemblée a, en particulier, adopté des amendements visant à garantir la confidentialité du vote et à définir très clairement les obligations des entreprises pour son organisation, pour qu'il n'entraîne pas de charges supplémentaires pour elles. Elle a également légèrement modifié la définition du corps électoral : afin d'éviter que ne soient écartés un grand nombre de salariés dans les professions où les contrats très courts dominent, tel le spectacle, elle a étendu la période de référence pendant laquelle les intéressés devaient avoir travaillé. La commission mixte paritaire a conservé ces acquis.
Une autre disposition a suscité quelques interrogations : l'article 8 reporte les prochaines élections prud'homales, initialement prévues en décembre 2013, de deux ans au plus. Ce qui a jeté le trouble, c'est la coïncidence de l'annonce de cette mesure avec la parution d'un rapport administratif envisageant le remplacement des élections prud'homales par d'autres modes de désignation ou d'élection indirecte des conseillers prud'hommes. Je me bornerai à souligner qu'un report ne présume en rien une éventuelle réforme des élections prud'homales, laquelle doit, pour être menée, faire l'objet d'une loi à part, et que celui qui est prévu est pleinement justifié du fait de la proximité de l'échéance initiale, d'une part, avec l'achèvement durant l'été 2013 du processus de mesure de l'audience syndicale prévu par la loi de 2008, d'autre part avec plusieurs échéances électorales politiques en 2014.
J'en viens à l'article 6 du projet de loi initial, qui instituait des commissions paritaires territoriales pour les très petites entreprises. Cet article, qui, à la différence de l'article 4, ne correspondait à aucune nécessité juridique, était proposé par le Gouvernement à la suite de la signature, en janvier 2010, d'une lettre commune par une organisation patronale et quatre syndicats de salariés demandant l'institution de telles commissions. Or cette lettre commune n'a été signée ni par tous les syndicats de salariés ni par toutes les organisations d'employeurs représentatives au plan national et interprofessionnel. C'est d'ailleurs sans doute la raison pour laquelle ses signataires ne l'ont pas dénommée accord national interprofessionnel et ne lui ont donné aucune portée juridique. Ils craignaient que les organisations non signataires n'exercent le droit d'opposition qu'elles détiennent depuis la réforme de la représentativité de 2004 et de 2008. Ce seul fait conduisait à s'interroger sur l'opportunité de donner valeur légale à ce document, la volonté des partenaires sociaux étant d'empêcher qu'un accord minoritaire ne puisse être imposé.
Au-delà de ces considérations, se posait une question de principe : quelles relations sociales voulons-nous dans les très petites entreprises ? À la différence des grandes entreprises, où il y a forcément des échelons intermédiaires justifiant l'existence d'instances représentatives, les TPE se caractérisent par un rapport direct entre le chef d'entreprise et chacun de ses salariés. Voulons-nous y imposer une médiation extérieure, menée par des permanents syndicaux ? C'était apparemment la position du groupe socialiste, qui a défendu des amendements pour imposer des délégués syndicaux de bassin d'emploi. Mais ce n'est pas la position de la majorité.
Sensible aux mêmes préoccupations, le groupe UMP du Sénat a cherché à atténuer la portée de l'article 6, en spécifiant notamment que les membres des commissions paritaires ne pourraient pas entrer dans les locaux des entreprises sans l'accord du chef d'entreprise. Cette précision apparaissait nécessaire au Sénat. Mais on était en droit de s'interroger sur la portée effective de cette précaution, sachant que les négociations relèvent davantage, en la matière, du rapport de force que du droit.
Plus globalement, les tentatives d'amodier, d'aménager, d'atténuer encore l'article 6 conduisaient, pour concevoir des commissions paritaires TPE sans danger, à leur ôter tous moyens, toutes compétences et toutes prérogatives, de sorte qu'elles n'auraient plus servi à rien. Comme une bonne législation doit s'interdire d'empiler des structures inutiles, le groupe UMP de l'Assemblée nationale est arrivé à la conclusion, sous la présidence de Jean-François Copé, qu'il fallait supprimer l'article 6 – ce qui fut fait.
La commission mixte paritaire devait trouver un accord sur ce point. Pour ce faire, les deux rapporteurs, Alain Gournac, au Sénat, et Dominique Dord, à l'Assemblée nationale, sont partis d'une considération simple, à savoir que le nouveau scrutin d'audience syndicale chez les salariés des TPE, prévu par l'article 4, doit être un succès. Si nous voulons un taux de participation acceptable – ce qui ne peut qu'être difficile dans le monde par définition très dispersé des TPE –, il faut que les salariés concernés aient l'assurance que leur vote syndical sera utile, au-delà des calculs complexes que fera le ministère du travail sur l'audience des organisations au niveau national.
C'est pourquoi la commission mixte paritaire a adopté, sur proposition des rapporteurs, qu'il existe un lien entre la nouvelle mesure de l'audience syndicale et la composition des commissions paritaires territoriales existantes. Je rappelle qu'il en existe déjà, mais – et c'est là toute la différence – non dédiées spécifiquement aux TPE.
La rédaction adoptée en commission mixte paritaire est délibérément prudente et respectueuse du dialogue social. Les partenaires sociaux pourront, s'ils le veulent et seulement s'ils le veulent, prendre en compte les résultats de la mesure de l'audience syndicale pour composer les commissions territoriales prévues par la loi de 2004. Ils pourront donc demander, à cette fin, aux services du ministère du travail de calculer cette audience dans le champ de telle ou telle commission territoriale. Ils pourront, enfin, aménager les compétences de ces commissions de la loi de 2004 afin qu'elles ne puissent pas, dans certains cas, conclure des accords collectifs, comme le code du travail leur en donne le pouvoir. Celui-ci est en effet parfois perçu comme un empiétement sur les missions des branches professionnelles, dont le coeur est naturellement la négociation des conventions collectives de branche.
En fin de parcours législatif, nous avons donc un texte qui non seulement respecte pleinement les partenaires sociaux, dont beaucoup ne voulaient pas de commissions territoriales spécifiques aux TPE, mais qui respecte la liberté conventionnelle, à laquelle la majorité est profondément attachée, et qui donne une portée pratique au nouveau scrutin de représentativité qui sera organisé pour les salariés des entreprises de moins de onze salariés. Je vous invite donc à l'adopter, sous réserve d'un amendement de coordination que je vous présenterai dans quelques instants. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur suppléant, mesdames et messieurs les députés, je vous prie d'excuser l'absence de M. Éric Woerth qui, vous le savez, est retenu au Sénat pour l'examen du projet de loi de réforme des retraites.
Le projet de loi sur le dialogue social dans les TPE marque une nouvelle avancée dans la rénovation de notre démocratie sociale, parce qu'il permet de prendre en compte tous les salariés et non plus seulement ceux des grandes entreprises. Je salue le compromis constructif atteint par la commission mixte paritaire.
Nous avons pu atteindre un équilibre sur les points de divergence entre l'Assemblée nationale et le Sénat.
Je voudrais remercier les parlementaires, les deux rapporteurs, particulièrement Dominique Dord, aujourd'hui représenté par Guy Lefrand, pour leur travail et leur implication. Grâce aux débats approfondis qui ont eu lieu, nous pouvons désormais envisager une adoption définitive du texte, sous réserve de l'amendement de coordination qui sera présenté tout à l'heure. Nous allons ainsi pouvoir donner toute sa portée à la loi de 2008 sur le dialogue social.
Notre responsabilité est de préserver la réforme de la représentativité. C'est précisément ce que permet ce projet de loi.
La loi de 2008 a profondément rénové le dialogue social en substituant le critère de l'audience à la présomption irréfragable de représentativité qui subsistait depuis 1948. Désormais, ce sont les salariés qui choisissent les représentants qui vont négocier en leur nom et signer des accords qui s'appliquent à eux. Ces mêmes accords ont désormais vocation à reposer sur une large assise. Ils ne peuvent être rejetés que de manière majoritaire par les syndicats de salariés non signataires.
Cette règle s'applique dans les entreprises depuis 2008. Elle s'appliquera dès 2013 dans les branches et au niveau national interprofessionnel.
Dès l'élaboration de la loi du 20 août 2008, le Gouvernement a identifié avec les partenaires sociaux la nécessité de prévoir un mécanisme spécifique pour les TPE. La loi du 20 août 2008 a donc prévu, en son article 2, l'intervention d'une seconde loi pour les salariés des TPE. C'est de celle-ci que nous parlons aujourd'hui.
Les salariés qui travaillent dans les TPE représentent plus de 20 % des salariés du secteur privé, soit 4 millions de personnes. Les accords négociés, notamment au niveau des branches, s'appliquent aussi, bien évidemment, à ces salariés des TPE. Les arrêtés qui dresseront en 2013 la liste des syndicats représentatifs dans les branches et au plan national interprofessionnel doivent donc impérativement reposer sur des critères de mesure d'audience qui prennent en compte tous les salariés.
Cette loi est indispensable pour organiser une consultation électorale avant le début de l'année 2013, dresser les listes électorales avant la fin de l'année qui précède celle de la consultation et passer les marchés publics nécessaires.
Voici les principales avancées de ce projet de loi à l'issue de la CMP.
Premier point, il organise la mesure de l'audience des syndicats de salariés auprès des salariés des TPE.
Il est de la responsabilité des pouvoirs publics d'organiser cette mesure de l'audience. Tous les quatre ans à partir de l'automne 2012, l'État organisera donc un scrutin auprès des 4 millions de salariés concernés des TPE. Pour qu'il soit le plus souple et le plus simple possible, le projet de loi retient le vote électronique et le vote par correspondance. Les députés ont renforcé cette souplesse en précisant que l'employeur n'aura en aucun cas l'obligation de mettre à disposition un matériel électronique pour le vote lorsqu'il n'en dispose pas.
Grâce à cette réforme, tous les syndicats qui peuvent présenter des candidats au premier tour des élections professionnelles pourront mesurer leur audience auprès des salariés des TPE.
Il s'agit d'une consultation sur des sigles syndicaux. Dès lors que nous pourrons mesurer le poids électoral de chaque syndicat ainsi que les résultats des élections professionnelles, nous pourrons fonder l'audience des syndicats dans les branches et au niveau interprofessionnel sur une expression complète de tous les salariés. C'est ainsi que nous donnerons toute sa portée à la loi de 2008.
Les sénateurs ont souhaité que le Haut Conseil du dialogue social, créé par la loi du 20 août 2008, puisse être informé des modalités d'organisation de cette consultation, comme cela est normal.
Deuxième point, le projet de loi reporte de deux ans au plus les élections prud'homales. Ce report permet d'éviter que nous disposions, la même année et pour une même organisation syndicale, de résultats différents en termes de représentativité et d'élection de juges. Il nous donne aussi le temps de la réflexion afin d'étudier des pistes de réforme du mode de désignation des conseillers prud'hommes.
Enfin, le projet de loi initial présenté par le Gouvernement renvoyait à la négociation collective la possibilité de mettre en place des commissions paritaires pour les salariés des TPE.
Ce sujet a été l'objet d'un très vif débat entre les partenaires sociaux mais aussi entre l'Assemblée nationale, le Sénat et le Gouvernement.
Je salue la solution de compromis trouvée par la commission mixte paritaire : elle permet de prendre en compte au mieux les préoccupations de chacun.
Les accords qui mettent en place des commissions paritaires locales prévues par les dispositions actuelles du code du travail pourront tenir compte de l'audience électorale des syndicats de salariés et adopter des missions plus restreintes, dans l'esprit de ce que nous souhaitions.
Par ailleurs, et contrairement à ce que craignaient plusieurs acteurs, il ne s'agit pas, dans la loi, d'instances paritaires nouvelles.
Tous les acteurs pourront faire en sorte que le dialogue social soit gagnant, et c'est bien là l'essentiel. Grâce à ce texte, le dialogue social pourra gagner à la fois en efficacité et en légitimité, et c'est ce que nous souhaitons tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de loi complétant les dispositions de la loi d'août 2008 relatives à la démocratie sociale, censé permettre à 4 millions de salariés de bénéficier effectivement d'une représentation collective et de mesurer dans les TPE l'audience des organisations syndicales a subi un parcours chaotique. Le moins que l'on puisse dire, c'est que les promesses ne seront pas tenues et que le dialogue social ne s'en trouvera pas renforcé.
En niant le droit des salariés employés dans les TPE à être représentés, en disant non aux syndicats – poussée par le MEDEF et la CGPME –, en agitant l'épouvantail des risques encourus par les entreprises dans le contexte économique et social dégradé que connaît notre pays, en cédant elle aussi très facilement à la caricature, la majorité a montré, à l'occasion de ce débat, l'archaïsme de sa conception des relations sociales.
Dans cet hémicycle, à droite, que de méfiance, de propos insultants vis-à-vis des syndicats, faisant écho à ceux, violents, tenus par un ancien dirigeant du patronat français, Yvon Gattaz, qui juge – ce sont ses termes – leur élimination économiquement souhaitable, rien de moins !
Comment invoquer la démocratie sociale et sa priorité sur la démocratie politique, tout en ayant une telle vision des partenaires sociaux, irresponsables a priori et utiles à condition qu'ils accompagnent les syndicats patronaux et le Gouvernement dans leurs réformes flexibilisant le marché du travail ?
Jean-François Roubaud, de la CGPME, déclare : avec les syndicats, « nous sommes parvenus à instaurer la rupture à l'amiable, mais nous restons fondamentalement attachés au maintien d'un dialogue social direct plutôt qu'à une nouvelle forme de bureaucratie pénalisant les TPE ».
Exit, donc, la création de lieux de dialogue social spécifiques aux TPE, de lieux d'expression, le droit des salariés des TPE, qui représentent tout de même 20 % des salariés du privé, à être représentés collectivement ! Quelle prime attribuée au MEDEF et à la CGPME, c'est-à-dire aux deux organisations patronales qui ont refusé de se lancer dans la négociation sociale, contrairement à l'engagement qu'elles avaient pris, en signant la position commune d'avril 2008, de « développer le dialogue social dans les entreprises, en particulier les PME et TPE, […] en se donnant les moyens de renforcer l'effectivité de la représentation collective du personnel afin d'élargir le plus possible le nombre de salariés bénéficiant d'une représentation collective ».
Le Gouvernement s'est montré tout particulièrement attentif aux préoccupations exprimées par de nombreux parlementaires UMP, relais d'un lobbying patronal forcené. Sous la dictée de Jean-François Copé,…
…ils ne souhaitent pas introduire de représentants syndicaux dans les toutes petites entreprises, afin, prétendent-ils, « de ne pas bouleverser la réalité et la proximité du dialogue social dans ces entreprises ». Ils savent pourtant que c'est justement là que les règles en matière de droit du travail, d'hygiène et de sécurité sont les moins bien connues et que les conflits sont nombreux : 80 % environ du contentieux prud'homal consistent en litiges survenus dans les très petites entreprises.
Pendant les débats, M. le ministre du travail n'a eu de cesse de répéter, non sans paradoxe d'ailleurs, qu'il comprenait les craintes exprimées par l'UMP, qu'il partageait même le refus de permettre aux syndicats de pénétrer dans les petites entreprises, mais qu'il n'y avait pas lieu de fantasmer, que ce n'était pas et ne serait pas le projet du Gouvernement. On voit ce qu'il en est advenu.
Les syndicats signataires de la lettre commune au ministre du 20 janvier dernier, qui demandait une loi et la création de commissions paritaires territoriales, l'ont, eux, bien et rapidement compris.
La CFDT et la CGT, que nous avons reçues, ne se sont pas fait faute de pointer les véritables insuffisances du texte, ses manques majeurs, s'agissant principalement des commissions paritaires facultatives, dont la mise en place effective dépend de l'accord d'organisations patronales, qui se prononcent par ailleurs officiellement contre leur existence, mais aussi de la mesure de l'audience des organisations syndicales par les salariés des TPE reposant sur un vote pour des sigles syndicaux, et non sur l'élection de représentants nommément connus.
Ces organisations syndicales ont souhaité que les parlementaires renforcent les dispositions du projet de loi pour inciter à la participation électorale et lui donner un sens en permettant que vivent des structures dédiées au dialogue social dans les TPE, quelles que soient la branche professionnelle dont relève l'entreprise et son implantation géographique. Elles se sont montrées prêtes à accepter le texte gouvernemental initial qui, s'il reprenait certes a minima leurs exigences, permettait d'adresser des signaux, faibles mais positifs, aux salariés des TPE et aux acteurs de la démocratie sociale.
Au grand dam du rapporteur Dominique Dord, la majorité UMP n'a eu ni l'intelligence ni la maturité de saisir ces possibles.
…illustre à sa façon ce fiasco et le reniement du Gouvernement – un reniement de plus !
En première lecture à l'Assemblée nationale, la droite s'est acharnée à vider totalement de sa substance ce texte en décidant de la suppression de son article 6 relatif aux fameuses commissions paritaires, alors même que le texte déjà édulcoré par le Sénat, du point de vue même de notre rapporteur, « ne justifiait absolument pas la passion, voire les caricatures, qu'il a suscitées, au regard de sa rédaction prudente et du bilan objectif des quelques commissions paritaires départementales ou régionales qui existent déjà : celles-ci ont pu apporter des éclairages intéressants sur des problématiques territoriales sans jamais conduire à quelque intrusion syndicale que ce soit dans quelque petite entreprise que ce soit ».
Rappelons aussi qu'a été introduite, à l'initiative de M. Gournac, rapporteur pour le Sénat, une disposition interdisant toute visite d'un membre de commission paritaire dans l'entreprise sans l'accord du chef d'entreprise.
Autant de gages donnés qui ont rompu le fragile équilibre du texte sans pour autant mettre un terme à la confrontation au sein même de la majorité.
Résultat : en commission mixte paritaire, pour sauver la face entre vous, vous avez accouché d'un texte de synthèse qui ne recrée surtout pas ces nouvelles commissions dans les TPE mais prévoit la prise en compte éventuelle des résultats de la mesure d'audience, dans le cadre des commissions paritaires locales ou départementales non spécifiques aux TPE qui existent déjà – elles aussi facultatives, rappelons-le.
Dans ces conditions, comment prétendre que personne ne sort humilié de ce compromis qui ne satisfait en fait que la seule majorité, le MEDEF et la CGPME ? Constitutionnellement, l'enjeu semble sauvé. En revanche, la démocratie sociale et la représentation de l'ensemble des salariés sans discrimination tenant à la taille de l'entreprise, autres enjeux majeurs de ce projet de loi, ont bel et bien été sacrifiés.
Pourquoi tant de controverses à droite autour de ce projet de loi ? La réponse est à rechercher au-delà du choix du rétablissement ou non des commissions paritaires. Elle nous a été fournie par Jean-François Roubaud lui-même, la semaine dernière, dans sa tribune publiée dans Le Figaro : « Ne nous y trompons pas, les discussions d'aujourd'hui dépassent largement l'instauration de commissions paritaires territoriales spécifiques aux TPE. Ce qui se joue aujourd'hui, c'est deux conceptions différentes de la liberté d'entreprendre. »
C'est en tenant compte de cet élément de contexte, de l'anti-syndicalisme actuel, que nous confirmons aujourd'hui notre vote contre ce projet de loi, qui, s'il est désormais sans grande portée, adresse malheureusement un signal très négatif aux salariés, comme aux acteurs de la démocratie sociale. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de loi dont il est question aujourd'hui et qui suscite la polémique entend compléter les dispositions relatives à la démocratie sociale de la réforme actée par la grande loi du 20 août 2008 portant rénovation du dialogue social.
Je rappellerai l'importance de cette loi, que nous avons votée et qui a profondément modernisé notre système de relations sociales en substituant le principe de l'audience à la présomption irréfragable de représentativité qui subsistait depuis 1948.
Ce sont désormais les salariés qui choisissent les représentants qui négocient et signent en leur nom les accords qui s'appliqueront à eux, accords qui ont désormais vocation à reposer sur une large assise, puisqu'ils ne peuvent être rejetés que de manière majoritaire par les syndicats de salariés non signataires.
Toutefois, ces dispositions ne s'appliquent pas encore dans les entreprises de moins de onze salariés, où il n'est pas obligatoire d'organiser des élections professionnelles. Aujourd'hui, cette possibilité est introduite dans le présent projet de loi et permet de franchir une nouvelle étape en complétant la rénovation de notre démocratie sociale.
L'enjeu de ce texte urgent et indispensable est de taille puisqu'il assure la cohérence constitutionnelle de la réforme de la représentativité syndicale que nous avions votée et en assure la continuité.
Le groupe Nouveau Centre tient d'abord à rappeler que ce texte s'inscrit en cohérence avec l'ensemble des dispositions, votées par cette majorité ou lors de la précédente législature, qui accordent dans notre droit une place plus importante au dialogue social.
Plus précisément, ce projet de loi détermine tout d'abord les conditions de la participation des salariés des entreprises de moins de onze salariés à la mesure de la représentativité des syndicats de salariés.
Le Gouvernement a arrêté le principe d'une appréciation de cette représentativité, par le biais d'une mesure de l'audience syndicale au regard des résultats obtenus lors des élections professionnelles. La mesure de l'audience syndicale, via les élections professionnelles, n'était cependant envisageable qu'à condition de lever différentes incertitudes, dont, en premier lieu, celles qui planaient sur la participation de tous les salariés à la mesure de l'audience syndicale, notamment des salariés des TPE qui ne participent pas – ou peu – aux élections professionnelles.
Le groupe Nouveau Centre a défendu cette position lors du débat sur la réforme de la représentativité.
Ce principe a été retenu dans le cadre du projet de loi que nous examinons aujourd'hui.
Dès lors que le principe de la mesure de l'audience syndicale par l'élection est arrêté, elle ne peut que concerner l'ensemble des salariés. C'est notre conviction. Quelle logique pourrait en effet légitimement priver 4 millions de salariés du droit à se prononcer sur le choix du syndicat qui leur est le plus proche ?
C'est pourquoi notre groupe est favorable aux dispositions qui organisent la mesure de l'audience syndicale auprès des salariés des entreprises de moins de onze employés.
J'en viens maintenant aux commissions paritaires régionales qui ont, quant à elles, suscité la controverse au point de supprimer ce dispositif, en dépit des garanties apportées par le Sénat. Je le dis d'emblée : notre groupe est sensible aux préoccupations exprimées par différentes organisations d'employeurs qui ont le sentiment de se voir imposer des modalités de dialogue social dont elles ne sont pas demandeuses.
Nous avons pour objectif de faire progresser le dialogue social.
Il n'y a pas que la loi, il y a le savoir-faire !
Nous avons pour objectif de faire progresser le dialogue social, de nous affranchir de la conception traditionnelle des relations conflictuelles entre syndicats et employeurs, conception que l'opposition veut perpétuer. Nous sommes convaincus que la démocratie sociale peut être autre chose que le sempiternel affrontement des représentants des salariés contre les représentants des employeurs. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
Je préside des commissions paritaires et je sais de quoi je parle.
Cet objectif nous impose d'être à l'écoute des employeurs qui expriment leur inquiétude, et de prendre en considération la nécessité de ne pas imposer de contraintes supplémentaires aux entreprises.
Il n'est dans l'intérêt de personne, et surtout pas dans l'intérêt des partisans du dialogue social dans les TPE, que celui-ci soit perçu comme une contrainte.
Nous avons bien entendu un certain nombre des arguments présentés par les adversaires de l'instauration de ces commissions paritaires. L'un d'eux consistait à expliquer que le dialogue social existe par nature dans les TPE, grâce aux relations directes établies au quotidien entre l'employeur et les salariés. C'est effectivement une qualité propre aux TPE que de permettre un échange direct entre celui qui a la responsabilité de l'entreprise et les salariés de celle-ci.
Cela étant, le fait qu'un employeur soit ouvert à la discussion signifie-t-il qu'il soit un expert de la législation sociale et du dialogue social ?
Nous restons convaincus, au Nouveau Centre, que les entreprises, et en particulier les plus petites entreprises, ont besoin d'un espace de dialogue social qui puisse se situer, non en leur sein, mais dans un cadre extérieur, et c'est à ce titre que nous défendons l'instauration des commissions paritaires.
Dites plutôt que vous vous êtes couchés, encore une fois ! C'est le groupe Épéda, le groupe qui se couche !
…la commission paritaire a, pour sa part, cherché la manière dont le nouveau scrutin de représentativité, prévu par l'article 4, pouvait gagner en légitimité auprès des salariés. Il fallait éviter un faible taux de participation à ce scrutin, afin qu'un lien se tisse entre le nouveau scrutin et la composition des commissions paritaires existantes.
La disposition issue de la CMP et l'idée sur laquelle elle repose sont en total accord avec ce que nous pensons.
Le groupe Nouveau Centre se félicite de ce compromis qui permettra d'instaurer un véritable dialogue social dans les TPE, tout en garantissant le respect des prérogatives de l'employeur dans son entreprise.
Pour notre groupe – écoutez bien, monsieur Muzeau ! – le dialogue social est, par nature, fondé sur un équilibre fragile et sur la tolérance.
Il ne s'agit pas de verser dans l'angélisme, et nous savons la part de méfiance qu'il peut y avoir entre des interlocuteurs qui ne se connaissent pas. Cette méfiance et les a priori qui l'accompagnent peuvent être levés dans un cadre proche de la réalité des entreprises, au contact des besoins concrets et des enjeux quotidiens des salariés et des patrons des très petites entreprises.
Nous savons, nous qui sommes pour la plupart des élus locaux, que, au niveau des territoires, et en particulier des petites collectivités, les clivages s'estompent bien souvent pour relever des défis de gestion locale qui ne sont ni de droite ni de gauche.
C'est pourquoi, bien que notre groupe, et notamment notre porte-parole Francis Vercamer, ait souhaité que l'article 6 soit maintenu dans la rédaction du Sénat, il salue néanmoins l'avancée issue de la CMP, même si elle nous paraît partielle…
…par rapport au dispositif envisagé initialement.
Le groupe Nouveau Centre votera donc ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, chers collègues, je salue ce texte qui constitue une avancée importante pour notre démocratie sociale – ne vous en déplaise, monsieur Muzeau !
Il complète en effet la réforme de la représentativité syndicale du 20 août 2008.
Les règles en sont désormais simples et claires : ce sont les salariés qui disent qui peut négocier en leur nom.
Pas du tout, monsieur Muzeau !
Nous sommes passés d'un système fondé sur la présomption irréfragable des organisations syndicales à un système fondé sur l'élection.
Ce texte prévoyait une seconde loi pour les salariés des entreprises de moins de onze salariés, pour lesquels il n'y avait pas d'élection professionnelle, et permettait que 20 % des salariés du secteur privé, soit près de 4 millions de personnes au total, aient voix au chapitre.
Dans ce texte, nous avons retenu les principes les plus simples et veillé à ne pas créer de contraintes supplémentaires pour les petites entreprises.
Il sera donc désormais possible pour ces salariés de voter sur des sigles syndicaux à l'occasion d'un scrutin régional organisé tous les quatre ans. La consultation des salariés se fera uniquement par internet et par correspondance afin d'éviter une perte de temps pour aller voter.
Comme l'ont précisé Mme la secrétaire d'État et M. le rapporteur, ce texte permettra également de reporter les élections prud'homales de deux années supplémentaires – au plus tard au 31 décembre 2015.
Enfin, en matière de dialogue social, la spécificité des TPE a été prise en compte puisque aucune structure nouvelle n'a été créée.
C'était la volonté des chefs d'entreprise, comme de leurs salariés, qui n'étaient pas demandeurs de telles structures. Chacun appréciera à sa juste mesure, monsieur Muzeau, l'idée caricaturale que vous vous faites du dialogue social dans les très petites entreprises.
Par cohérence avec les dispositions de l'article 4 du projet de loi visant à mesurer l'audience des syndicats, il est prévu que les commissions paritaires existantes – celles issues de la loi du 4 mai 2004 et qui ne sont pas spécialement dédiées aux TPE – puissent déterminer leur composition en tenant compte des résultats obtenus aux élections.
Je souhaite à cette occasion rendre hommage à la sagesse des deux rapporteurs, Dominique Dord, que notre collègue Guy Lefrand a excellemment suppléé, et le sénateur Alain Gournac, qui ont proposé cet amendement de compromis en commission mixte paritaire.
Pour nous, députés UMP, les TPE constituent un maillon essentiel de notre économie. Nous souhaitons poursuivre notre travail afin de créer les conditions de leur développement.
Pour toutes ces raisons, je vous incite, comme je vais le faire, à voter les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, deux conceptions de la démocratie sociale peuvent en effet nous opposer, selon qu'elles ressortent des propositions de la droite ou de celles de la gauche. Mais vous ne pouvez pas ignorer qu'il existe aussi deux conceptions de la démocratie sociale dans le monde patronal. Cette affaire tire son origine d'un accord intervenu le 12 décembre 2001, qui n'a pas été signé entre les députés socialistes et les députés communistes…
…mais par toutes les organisations syndicales de salariés et l'Union professionnelle artisanale représentant 800 000 entreprises.
Le texte de cet accord indique qu'une forme de dialogue social dans ces entreprises se fait directement et quotidiennement entre le chef d'entreprise et ses salariés ; que, toutefois, la complexité croissante du droit du travail et de la formation professionnelle, ainsi que la nécessité d'adapter les modes d'organisation du travail aux évolutions de l'emploi, font de la branche professionnelle le niveau le plus approprié. Aussi est-il souligné qu'il est nécessaire de renforcer la proximité entre les dispositions conventionnelles et les besoins des entreprises comprises dans le champ d'application du présent accord et d'organiser le dialogue social au niveau territorial.
Vous savez parfaitement ce qui s'est passé : alors que c'était une bonne nouvelle pour tout le monde et que toutes les organisations syndicales de salariés et les représentants d'employeurs de 800 000 entreprises s'étaient mis d'accord sur cette avancée, ils ont trouvé, face à eux, le MEDEF, la CGPME et vous !
Depuis 2001, ce texte n'a jamais été appliqué, parce qu'il a été poursuivi en justice et que vos gouvernements successifs n'ont jamais étendu l'accord jusqu'à ce que la Cour de cassation prenne sa décision.
C'est dans ce contexte que se pose la question issue de la loi de 2008. Nous étions tous d'accord pour constater qu'il était nécessaire de mesurer l'audience syndicale dans les entreprises de moins de onze salariés et que nous n'avions pas d'outil pour ce faire. Il fallait donc une deuxième loi. Vous nous proposez alors un texte visant à mesurer cette audience, mais celui-ci, élaboré par la droite, ne correspond pas à nos conceptions.
De notre côté, nous avions proposé, par amendements, de mettre à la disposition des employés des entreprises de moins de onze salariés des délégués du personnel de plein exercice.
Vous n'en avez pas voulu.
C'est le jeu de la démocratie politique et de la majorité. Nous étions alors face à un texte proposé par le Gouvernement. Les organisations syndicales et l'opposition – le groupe socialiste et le groupe communiste – ont fait preuve de responsabilité en indiquant, au cours du débat, qu'ils étaient prêts à faire en sorte que l'Assemblée nationale se prononce sur ce texte par un vote unanime. Cela aurait été un message fort adressé aux petites entreprises – employeurs et employés – qui nous ont montré le chemin avec l'accord de 2001. Mais là – ô surprise ! – alors que nous étions au fond pratiquement votre dernier soutien, madame la secrétaire d'État, ne voilà-t-il pas que le groupe UMP et son président…
…sont intervenus dans le débat et ont tenu des propos d'un archaïsme social redoutable !
On ne peut pas tenir des discours sur la négociation et venir dire ici, en même temps, l'inverse de ce qu'écrivent les représentants des employeurs, qui ont besoin de ce niveau de dialogue. Si vous vous interrogez, vous ne pouvez ignorer une réalité détestable : 80 % des affaires portées devant les juridictions prud'homales émanent d'entreprises de moins de onze salariés. Ce n'est pas parce que les employeurs s'investissent moins dans ces entreprises ou qu'ils portent un regard plus régressif sur le droit du travail. C'est parce qu'il n'existe aucune structure de dialogue. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) C'est parce que, lorsque telle ou telle partie de la loi est ignorée ou mal appliquée, personne ne peut, faute de lieu de dialogue, faire de synthèse. Vous devriez y être attentif, car cela coûte cher aux employeurs, puisqu'une partie de ce dialogue ne peut avoir lieu que lors de la procédure juridictionnelle. Ainsi, on discute devant le Conseil des prud'hommes alors qu'on aurait dû le faire au sein de l'entreprise ou au niveau territorial.
Pour notre part, nous souhaitions la création de ces commissions paritaires. L'intervention de M. Copé a abouti à une procédure assez singulière. Alors que les deux rapporteurs et le Gouvernement étaient d'accord, et que nous étions prêts à nous associer, l'oukase a produit ses effets.
Vous nous présentez donc un texte dont vous nous dites qu'il est un compromis. Je dois dire qu'il « faut les yeux de l'amour » pour le penser !
Je ne vois franchement pas comment vous pouvez oser prétendre cela sans vous moquer du monde ! J'espère d'ailleurs que le rapporteur n'a pas eu une indigestion quand il a mangé son chapeau. Quand on pense à tout le travail qui a été accompli, y compris par lui, et quand on voit le désastre actuel !
Ce texte de substitution n'a rien d'un compromis. En effet, il se réfère à un article du code du travail qui, par définition – et tel est bien la preuve de votre archaïsme –, ne s'applique pas aux très petites entreprises, contrairement à la demande de l'UPA et de tous les syndicats de salariés. De plus, sa première rédaction n'ajoute rien à la possibilité de prendre l'assiette des élections pour ces commissions paritaires, puisque c'est de toute façon envisagé. On note même une subtile régression – à croire que vous ne pouvez pas vous en empêcher. La rédaction étant à l'indicatif, ce qui vaut impératif, ces commissions, même lorsqu'elles ne sont pas spécifiques, ont trois compétences automatiques que personne ne peut remettre en cause. Or vous avez trouvé le moyen, dans la rédaction que vous avez proposée, de préciser que l'accord pourra remettre en cause une ou deux de ces trois compétences.
Vous parvenez ainsi à cette subtilité : ce compromis est une régression par rapport au droit positif ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je crois franchement qu'il y a des moments où vous devriez assumer vos actes. Ainsi – et les représentants des entreprises artisanales vous le disent –, l'idéologie propre au groupe UMP sent la vieille France !
Ainsi, il existerait un monde merveilleux que le groupe UMP serait seul à connaître : celui de la petite entreprise ! Or, même quand un travailleur indépendant comme moi vous parle, cela vous semble saugrenu. Regardez le monde tel qu'il est : ces chefs d'entreprise modernes ont besoin de bons salariés. Ainsi, maintenir, comme vous le voulez, les salariés des TPE dans un statut social aussi secondaire pose un problème aux chefs d'entreprise en matière de qualité du recrutement. Ils vous le disent, mais vous ne voulez rien entendre, parce que vous êtes enfermés dans cette idéologie qui sent bon la naphtaline et qui s'inscrit davantage dans un tableau du XIXe siècle que dans les exigences de la modernité et du développement des petites entreprises. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Le seul endroit où l'on porte crédit à un tel discours, c'est dans la salle Colbert où le groupe UMP se réunit, toutes portes fermées. Vous êtes en dehors du monde.
Ce texte est la suite logique de votre bilan en matière de démocratie sociale. Mais sans doute devrais-je plutôt parler de tableau noir : après avoir remis en cause le principe de faveur et la hiérarchie des normes, vous ignorez à présent l'exigence de modernité des chefs d'entreprise et des syndicats de salariés. Vous êtes bien dans la logique de tout ce que vous avez fait jusqu'à présent.
Dans ces conditions, vous comprendrez que, en attendant de pouvoir créer, pour ces salariés et pour ces entreprises qui le méritent, une véritable démocratie sociale, nous voterons contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Nous en venons au texte de la commission mixte paritaire.
Conformément à l'article 113, alinéa 3 du règlement, je vais appeler l'Assemblée à statuer d'abord sur l'amendement dont je suis saisi.
La parole est à M. le rapporteur suppléant, pour défendre l'amendement n° 1 .
Amendement de coordination !
(L'amendement n° 1 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par l'amendement qui vient d'être adopté.
(L'ensemble du projet de loi est adopté.)
Vote sur l'ensemble
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures vingt.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité (nos 2400, 2814, 2782).
Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de une heure trente-trois minutes pour le groupe UMP, dont 114 amendements restent en discussion, de une heure treize minutes pour le groupe SRC, dont 112 amendements restent en discussion, de une heure seize minutes pour le groupe GDR, dont 74 amendements restent en discussion, de trois heures cinquante-six minutes pour le groupe Nouveau Centre, dont 17 amendements restent en discussion, et de vingt-trois minutes pour les députés non inscrits.
Il s'agit, monsieur le président, de l'organisation de nos travaux et de l'ordre du jour.
Depuis des mois, depuis l'adoption de la loi HSPT, des luttes sont menées par les infirmiers et infirmières anesthésistes. Mardi, lors des questions d'actualité, mon amie Martine Billard a interpellé Mme Bachelot pour savoir quand de réelles négociations allaient enfin s'ouvrir. « Incessamment », lui a répondu Mme la ministre. Une première réunion a lieu en ce moment même. Or les représentants des infirmiers et infirmières anesthésistes m'apprennent qu'aucune avancée n'a été proposée et que les conclusions de la réunion figurent déjà sur le site du ministère de la santé.
Vous admettrez que ces méthodes de gestion de la vie publique et de la démocratie sociale sont tout à fait inacceptables. Je tenais à faire un rappel au règlement pour demander au Gouvernement de respecter le dialogue.
Chacun conviendra que nous sommes éloignés des questions réglementaires, mais cette intervention est tout à fait pertinente.
Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'amendement n° 271 , à l'article 23.
La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour présenter l'amendement n° 271 .
Cet amendement vise à porter à la connaissance de l'intéressé ses possibilités de recours.
La parole est à M. Thierry Mariani, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 271 .
Sur le fond, je suis entièrement d'accord, mais c'est une précision inutile puisque c'est un principe fondamental du droit. J'y suis donc défavorable.
La parole est à M. Éric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, pour donner l'avis du Gouvernement.
Défavorable.
Au vu de ces éléments, retirez-vous votre amendement, monsieur Decool ?
Je suis saisi d'un amendement n° 553 .
La parole est à Mme Pascale Crozon.
Nous avons discuté hier de la suppression des alinéas 12 à 20, et je n'y reviens donc pas. L'esprit de la directive et la sagesse nous commandent toutefois de ne pas laisser à la seule appréciation de l'administration le soin de choisir qui peut ou ne peut pas disposer du délai de retour volontaire de trente jours. La privation de ce délai doit être motivée, et sur des faits suffisamment consistants pour permettre un recours contre cette motivation.
Défavorable. La directive permet clairement de ne pas accorder de délai de départ volontaire en cas de risque de fuite, possibilité que vous voulez supprimer. Vous voulez donc demander aux étrangers en situation irrégulière interpellés dont le risque de fuite est avéré de rentrer volontairement chez eux. C'est une vision un peu idyllique. Il s'agit par exemple de personnes qui se sont soustraites à une précédente mesure d'éloignement ou qui n'ont jamais demandé de titre de séjour.
(L'amendement n° 553 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 270 .
La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
Défavorable. Nous transposons exactement la directive, qui ne prévoit pas de réserver cette possibilité aux seules menaces graves.
Défavorable.
Nous vous proposons d'insérer après l'alinéa 12 les deux alinéas suivants :
« Dans le cas de ressortissants de l'Union européenne ou de leurs familles, les mesures d'ordre public ou de sécurité publique doivent être fondées exclusivement sur le comportement personnel de l'individu concerné. L'existence de condamnations pénales antérieures ne peut à elle seule motiver de telles mesures.
« Le comportement de la personne concernée doit représenter une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société. Des justifications non directement liées au cas individuel concerné ou tenant à des raisons de prévention générale ne peuvent être retenues. »
Il s'agirait de respecter à la lettre l'article 27, paragraphe 2, de la directive de 2004.
La parole est à Mme George Pau-Langevin, pour défendre l'amendement n° 554 .
Nous insistons sur le fait qu'une décision d'éloignement doit reposer sur le comportement personnel d'un individu. Nous avons eu le sentiment, cet été, que certaines décisions d'éloignement étaient plutôt assises sur des faits reprochés collectivement. C'est la raison pour laquelle il me semble utile de le préciser.
Défavorable. C'est une précision inutile puisqu'elle concerne les ressortissants de l'Union européenne et que l'article 23, qui transpose la directive « retour », concerne exclusivement ceux des pays tiers. Votre disposition pourrait à la limite concerner l'article 25, mais en aucun cas l'article 23.
Je propose de supprimer une formule pouvant faire penser que des demandes de titre de séjour pourraient être infondées. Même si elles n'entrent pas dans le cadre légal et sont donc logiquement rejetées, elles n'en sont pas moins fondées, puisqu'elles émanent de personnes n'ayant pas la nationalité française et souhaitant résider sur notre territoire.
Défavorable, car les demandes de titre de séjour dilatoires manifestement infondées après plusieurs refus ne sont pas une hypothèse d'école.
Non seulement nous en avons besoin pour les questions de fond qui viennent d'être évoquées à juste titre par le rapporteur, mais, en plus, les termes « manifestement infondée » transposent fidèlement l'article 7, paragraphe 4, de la directive. Vous nous avez parfois reproché l'inverse. Prenez acte du fait que nous transposons très exactement la directive.
L'article 7, paragraphe 4, de la directive 2008115CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 liste trois hypothèses dans lesquelles l'administration peut s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire : s'il existe un risque de fuite, si une demande de séjour régulier a été rejetée comme manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale.
Le texte, quant à lui, prévoit huit hypothèses qui permettent à l'administration de refuser d'accorder un délai de départ volontaire. S'il s'agit, pour les deux premiers cas, des hypothèses envisagées par la directive, le dernier cas, décliné en six possibilités dans les alinéas 14 à 20 de l'article 23, n'est pas conforme à ce que la directive désigne comme le risque de fuite.
En effet, les trois premières possibilités sont particulièrement discutables, puisque l'absence de demande de titre de séjour est considérée comme une soustraction à l'obligation de quitter le territoire français, alors que les pratiques préfectorales rendent difficile, voire parfois impossible, le simple dépôt d'une demande de titre de séjour.
Sachant également qu'il n'est pas rare qu'un étranger ne soit pas en possession d'un document de voyage ou d'identité en cours de validité, ou qu'il est difficile auprès de certains consulats en France d'en obtenir le renouvellement, en l'absence notamment de titre de séjour en cours de validité, la dernière possibilité donne toute latitude à l'administration.
Nos arguments vont exactement dans le même sens que ceux qui viennent d'être développés par notre collègue Pinte.
Comme nous l'avons indiqué dans nos prises de parole sur l'article, les alinéas 14 à 20 sont particulièrement restrictifs, par rapport même à la directive « retour ». J'insiste une nouvelle fois sur ce qu'il y a de déprimant dans le fait d'entendre décrire cette directive, que nous avons qualifiée de « directive de la honte », comme un texte accordant davantage de droits aux personnes qui demandent une autorisation de séjour.
Ces alinéas 14 à 20 ne sont qu'une manière pour le Gouvernement de donner la possibilité à l'administration d'exercer son arbitraire, de contribuer à ce qui est devenu une simple politique du chiffre, au détriment des droits et de la dignité des personnes.
La parole est à M. Patrick Braouezec, pour soutenir l'amendement n° 460 .
Je crois que l'adoption de ces amendements serait en réalité défavorable aux étrangers en situation irrégulière. S'il est vrai que la directive permet de ne pas accorder de délai de départ volontaire aux étrangers qui présentent un risque de fuite, le Gouvernement a fait le choix de définir ce risque. Il vaut mieux retenir une définition précise qu'une expression large qui permette à l'administration de lui donner le contenu qu'elle veut.
Vous nous reprochez habituellement, monsieur Braouezec, de présenter des textes trop larges, fourre-tout ; en l'occurrence, c'est le choix inverse qui a été fait. J'émets un avis défavorable à vos amendements, qui vont à l'encontre même de vos préoccupations.
M. Mamère nous explique souvent qu'il faut veiller à ne pas introduire d'automaticité car, brutale, celle-ci ne permettrait pas de tenir compte des situations individuelles et d'accorder, par exemple, des régularisations pour raisons humanitaires. Or, lorsque est fixé un cadre d'appréciation des situations individuelles par le préfet, il évoque immédiatement l'arbitraire de l'administration. Il faut choisir, monsieur Mamère : voulez-vous donner une marge de manoeuvre aux préfets pour apprécier la situation individuelle ou non ?
En ce qui concerne l'amendement de M. Pinte,…
L'exposé n'a pas été identique. C'est pour cela que je spécule sur la bonne foi de M. Pinte et que je vais essayer d'expliquer ce qu'il en est.
Votre amendement, monsieur Pinte, supprime, au fond, les critères qui définissent le risque de fuite. L'article 3, paragraphe 7, de la directive « retour » impose aux États membres de définir des critères objectifs, qui ne peuvent être laissés à la seule appréciation du juge. L'amendement encourt déjà un rejet à ce titre.
Qui plus est, les critères retenus sont conformes à l'article 7, paragraphe 4, de la directive. Ils concernent les étrangers qui présentent un risque de soustraction à la mesure d'éloignement, soit parce qu'ils sont maintenus clandestinement sur le territoire sans demander un titre, soit parce qu'un titre ne leur avait pas été accordé, soit parce qu'ils ne présentent aucune garantie de représentation.
Par ailleurs, il n'existe pas d'automaticité : l'autorité administrative conserve un pouvoir d'appréciation en la matière. L'alinéa 11 précise en effet que le délai de départ « peut » être refusé, et l'alinéa 14 que le risque est établi « sauf circonstance particulière ». Aussi, au regard même des valeurs qui sont les vôtres et de ce que vous défendez, il me semble que vous pourriez retirer votre amendement.
Monsieur le ministre, vous venez d'apporter la brillante démonstration de ce que peuvent représenter l'interprétation et l'arbitraire. Avec deux amendements identiques, ayant exactement la même argumentation, d'un côté on est de bonne foi et de l'autre de mauvaise foi ! C'est une excellente démonstration de l'arbitraire. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Avec cet amendement, que je n'ai pas défendu en commission, je reviens sur un problème juridique lourd. Le texte actuel prévoit la possibilité pour l'administration d'obliger un étranger à quitter le territoire s'il existe un risque que l'étranger puisse se soustraire à cette obligation. Le problème, c'est que les alinéas 15 à 20 mettent en place une présomption de risque de soustraction qui couvre tous les cas de figure.
En résumé, s'il veut éviter l'expulsion sans délai, c'est à l'étranger de prouver qu'il ne risque pas de se soustraire à l'obligation de quitter le territoire, ce qui est un renversement de la charge de la preuve.
Dans la loi Hadopi, le Conseil constitutionnel a censuré un tel dispositif. Pour qu'une présomption de culpabilité existe, il faut qu'elle soit réfragable ; or comment prouver ici qu'un risque n'existe pas ? C'est au contraire à l'administration de prouver que le risque existe et qu'il faut donc expulser sans délai l'étranger qui est sous le coup d'une obligation de quitter le territoire. Si nous ne modifions pas cet article, c'est la censure assurée.
Je ferai la même remarque que tout à l'heure sur les amendements de M. Pinte et M. Mamère, puisqu'il s'agit des mêmes motifs.
Monsieur Mamère, si les amendements en question étaient identiques, ils n'ont pas été présentés de la même manière par M. Pinte et par vous. À force d'entendre, depuis une semaine, parler de « politique scélérate », de « rafles » et autres, nous commençons à être fatigués. (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
M. Tardy est resté sur un registre technique. J'émets un avis défavorable à son amendement, dont je ne suis pas persuadé qu'il aille dans le sens qu'il souhaite.
Quant à la constitutionnalité du dispositif, d'autres en jugeront.
Même avis. Je ne reviens pas sur ce qu'a dit M. Mariani, qui est très juste.
Votre remarque, monsieur Braouezec, a un avantage : que vous me suspectiez d'excès de bienveillance, voire de collusion, avec le député Étienne Pinte, au fond me plaît bien, eu égard à ce qu'a été notre discussion jusque-là.
Je ne suis pas certain qu'il soit d'accord !
(L'amendement n° 81 n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l'amendement n° 555 .
Monsieur le président, nous examinons un article qui compte à lui seul trente-deux alinéas. Depuis la reprise de la séance, le groupe socialiste s'est très peu exprimé ; il n'a pas la capacité d'appuyer les arguments développés par Étienne Pinte, Lionel Tardy, Noël Mamère ou encore Patrick Braouezec. Vous avez rappelé le temps dont nous disposons pour examiner les quelque soixante articles restants, alors que nous avons encore 112 amendements à présenter. Nous n'avons absolument pas la possibilité d'exercer notre droit et notre devoir de parlementaires !
Chacun des trente-deux alinéas de cet article pose des problèmes : problèmes de transposition, de respect des droits des personnes et des garanties procédurales, d'atteinte au droit d'asile.
Le temps guillotine ne nous laisse pas la possibilité de démontrer, dans le débat, tous les aspects nocifs de ce texte, et nous tenons à le redire.
On peut considérer, madame Mazetier, que vous venez de faire un rappel au règlement.
Ce rappel au règlement va dans le même sens que ce que vient d'indiquer Mme Mazetier.
Nos collègues de la droite viennent de s'exclamer que nous avions déjà eu assez de temps comme cela. Cela ne laisse pas d'inquiéter sur leur conception du débat républicain. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Cette réforme de l'Assemblée nationale n'a fait que contribuer à restreindre le droit de parole de l'opposition. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Après les incidents graves qui se sont produits à l'occasion de la discussion du projet de loi sur les retraites, les différents groupes de l'opposition se sont adressés à M. le président de l'Assemblée nationale, qui a répondu par une fin de non-recevoir. Il a considéré que le temps imparti, dont nous demandions l'allongement, suffisait largement pour examiner un texte qui, portant atteinte aux droits de la personne et durcissant nos politiques migratoires, consiste tout de même dans l'application de trois directives, ce qui n'est pas rien, et qui nécessite donc que nous prenions le temps du débat et de la confrontation. C'est le principe même de la démocratie.
Ceux qui nous entendent ou qui liront les comptes rendus de ces débats comprendront que l'Assemblée nationale, qui devrait être le coeur de la démocratie, devient un lieu où celle-ci est minée chaque jour davantage, où la capacité à débattre est ruinée. Ce n'est pas bon pour l'équilibre de notre pays.
J'appelle l'attention de nos collègues de la majorité sur ce qui passe en ce moment et qui me paraît grave. Je pense que le Conseil constitutionnel sera amené à se prononcer sur les conditions dans lesquelles nous délibérons.
Nous sommes à l'article 23 ; il en reste plus d'une cinquantaine. Ce débat a été programmé pour trente heures, alors que le projet de loi comporte plus de quatre-vingt articles ; il y a manifestement une erreur d'appréciation dans la manière dont la conférence des présidents a organisé nos travaux. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
L'opposition n'a pas pratiqué d'obstruction.
Nous avons même renoncé à toute intervention dans la discussion générale. Il y a peut-être eu quelques longueurs… (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Essayons d'être objectifs ! Nous avons voulu mener ce débat de manière sereine. Si nous n'avons pas la possibilité d'aller jusqu'au bout de l'examen du texte, cela signifiera que l'organisation des débats n'a pas permis à l'Assemblée nationale de délibérer.
Je ne remets pas ici en cause le principe du temps programmé, mais j'affirme que le temps imparti pour ce débat est insuffisant, qu'une faute d'appréciation a été commise.
Le débat sur la loi RESEDA, auquel un certain nombre de parlementaires ici présents ont participé,…
…a duré plus de cent heures. Le temps qui nous a été imparti pour le présent texte équivaut à 30 % de ce temps ! C'est manifestement insuffisant. Nous saisirons le Conseil constitutionnel de la manière dont nous avons délibéré.
J'étais de ceux, peu nombreux de ce côté-ci de l'hémicycle, qui considéraient que la minorité, quelle qu'elle soit, abusait parfois du temps de parole, avec des déclinaisons d'amendements faisant preuve de beaucoup d'imagination. Je me souviens d'amendements proposant « deux heures », « deux heures et deux minutes », « deux heures et trois minutes », et ainsi de suite.
Tout cela était abusif et je pense que l'on a eu raison, dans l'organisation des débats, de poser un certain nombre de limites.
Toutefois, je rejoins Christophe Caresche quand il souligne que personne ne s'est prêté au jeu de l'obstruction. Je prends à témoin ceux, peu nombreux, qui ont participé comme moi à l'examen du texte en séance depuis le début – je pense à M. Goasguen, à M. Vanneste et à quelques autres. Nous avons eu un vrai débat sur un certain nombre de sujets. Mais trente heures de temps programmé pour quatre-vingt-quatre articles, cela ne fait en moyenne qu'une vingtaine de minutes par article,…
…alors que certains nécessitaient une vraie discussion. Ainsi, je note que, pour plusieurs articles, le débat a duré près d'une heure, et que c'était nécessaire. C'est cela le jeu démocratique.
Nous devrions, les uns et les autres, bien mesurer l'état du débat démocratique au sein de cette assemblée afin que soit respecté l'ensemble de ceux qui réfléchissent et légifèrent sur des sujets qui ne sont pas anodins pour la plupart de ceux qui vivent et travaillent dans notre pays.
Je rappelle que l'organisation de nos débats résulte des décisions prises en conférence des présidents. Il appartient aux groupes d'y être présents ou représentés. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe SRC.)
Vous oubliez ce qui s'est passé lors du débat sur les retraites, monsieur le président !
Monsieur Braouezec, nous sommes un certain nombre ici à en être à notre quatrième ou cinquième débat sur l'immigration – dont certains ont eu lieu quand la gauche était majoritaire. Certes, le débat sur la loi RESEDA avait duré cent heures, mais l'opposition, dont je faisais partie, avait déposé un très grand nombre d'amendements – à moi seul plus de 300, pas toujours très futés.
Mais, dans ce genre d'exercice consistant, pour gagner du temps, à déposer des amendements pas toujours extraordinaires, la gauche et la droite se valent. Nous nous sommes tous retrouvés à jouer à ce jeu pas très glorieux. À cet égard, le temps programmé a été un grand progrès. De plus, vous omettez de signaler une évolution fondamentale : le texte aujourd'hui en discussion est celui qui a été voté en commission, où il n'y a pas de temps limité. Nos deux réunions ont dépassé les sept heures, mais elles auraient pu se prolonger beaucoup plus.
Nous avons eu de nombreux débats en commission et le texte que nous examinons en est issu, mon cher collègue. Cela n'a donc rien à voir avec ce que nous avons connu avant la réforme constitutionnelle, sous la gauche ou sous la droite.
C'est peut-être un échauffement, monsieur Caresche, mais il a une vraie valeur juridique.
Par ailleurs, je ne peux pas laisser dire que l'opposition est bafouée. Je vous rappelle la répartition des temps de parole : l'UMP disposait au départ de huit heures et trente minutes alors que l'opposition et le Nouveau Centre avaient droit à vingt et une heures et trente minutes, quasiment deux fois et demie plus de temps que nous ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) C'est un constat.
En plus, vous oubliez de préciser, monsieur le rapporteur, que vos interventions et celles du Gouvernement ne sont pas décomptées du temps de parole de la majorité !
C'est le règlement, madame Mazetier. Depuis le début des débats jusqu'à hier soir, j'ai parlé au total une heure et quarante minutes, ce qui, même additionné au temps attribué au groupe UMP, reste largement en dessous de celui imparti au groupe SRC.
Monsieur Caresche, ce type de débat implique, de la part de l'opposition comme de la majorité, une gestion du temps adaptée.
Il est évident que certains articles sont plus importants que d'autres, et on a pourtant passé beaucoup de temps sur des articles qui sont des transpositions obligatoires et automatiques. Nous n'avons pas le choix et, si vous étiez sur les bancs de la majorité, vous répondriez « Directive » à chacune de nos interventions. Si vous le souhaitez, on peut passer deux heures sur celui-ci, mais vous allez carboniser deux heures qui auraient été utiles pour autre chose. Je ne vais pas avoir la cruauté de rappeler le temps passé sur certains sujets qui ne le méritaient pas – comme les quarante minutes consacrées hier à un sujet militaire.
Vous aviez d'ailleurs quitté l'hémicycle, monsieur Braouezec, mais on a tout de même passé quarante minutes là-dessus. Il faut aussi rappeler que la discussion sur la déchéance de la nationalité a pris cinq heures en tout : l'opposition souhaitait en effet marquer le terrain avant le journal de vingt heures – c'est de bonne de guerre, mais, du coup, on a refait le débat après.
Qu'il soit de la majorité ou de l'opposition, un groupe doit désormais avoir une autre approche de la gestion du temps. Il faut savoir faire la différence entre les articles qui méritent qu'on y consacre du temps et les autres.
En outre, nous sommes tous victimes, nous qui suivons régulièrement l'examen du texte, à gauche comme à droite, des collègues qui viennent faire quinze minutes d'effets de manche, et qui quittent l'hémicycle : c'est un temps inutilement utilisé pour répéter six fois la même chose.
Depuis le début, je me doutais que l'on allait avoir ce genre de problème, mais je vous rappelle, sans esprit polémique, que vous aviez vingt et une heures et trente minutes, et que vous êtes les seuls responsables de la gestion de votre temps. À vous de l'utiliser comme bon vous l'entendez.
En avril, ce texte comptait 84 articles ; à son arrivée dans l'hémicycle, il atteint 107 articles.
Entre-temps, il a été augmenté, surtout sur proposition gouvernementale. L'étude d'impact n'aborde donc nullement la déchéance de la nationalité ni les articles qui vont porter préjudice à la France dans le cadre de la procédure d'infraction à la législation européenne – les articles 23, 25, 49. C'est la responsabilité du Gouvernement que de procéder par voie d'amendements, mais il est dès lors parfaitement légitime que la représentation nationale passe du temps à débattre de la déchéance de nationalité ou à s'interroger sur la valeur juridique de la notion d'escroquerie sentimentale.
Monsieur le président, cette intervention est-elle décomptée ? Mme Mazetier joue la montre !
Ce sont des débats que vous nous imposez. Nous ne les avons pas suscités,… (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
…mais il est indispensable que les représentants du peuple puissent s'exprimer sur de tels sujets ! Malheureusement, c'est au préjudice de l'examen du texte initial. Que nous impose-t-on ? Le « choix de Sophie » ? Non, nous récusons ce choix ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Mes chers collègues, j'ai laissé se poursuivre ces interventions qui, pour la plupart, constituaient de vrais rappels au règlement. L'Assemblée est dorénavant suffisamment informée. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Je vous donne la parole, ma chère collègue, mais votre intervention sera imputée sur le temps attribué à votre groupe.
Le président du groupe SRC a adressé lundi une lettre au président de l'Assemblée nationale, qui en a accusé réception et a répondu que la demande de temps de parole supplémentaire était parfaitement légitime pour tous les groupes, en raison de l'importance des sujets soulevés.
Il a écrit qu'il soutiendrait cette demande. Ne pouvait-il donc formuler lui-même cette demande en conférence des présidents, puisqu'il la préside ?
Il a refusé de le faire. Il l'assumera comme vous et vos collègues assumerez les réserves d'interprétation que le Conseil constitutionnel formulera.
Ma chère collègue, la conférence des présidents s'est tenue, votre groupe n'y était pas représenté et ce point n'a donc pu être évoqué.
Nous en revenons à l'examen des amendements.
Il s'agit de s'élever contre la double peine et le véritable bannissement instauré par les alinéas 22 à 32. Monsieur le président, convenez que, à propos de libertés essentielles, de dispositifs susceptibles d'entraîner des conséquences très graves pour des personnes vivant sur notre sol, il est anormal et incompréhensible que l'on dise aux parlementaires quels sont les sujets sur lesquels ils peuvent s'exprimer et ceux pour lesquels ils n'en ont pas le droit.
Les conditions dans lesquelles nous travaillons sont inadmissibles et nos concitoyens ne comprendront pas que, à propos d'atteintes aux libertés aussi graves, on nous interdise de parler sous prétexte que nous aurions dû demander davantage de temps de parole de telle manière plutôt que de telle autre. Sans doute, nous n'aurons pas le droit de nous exprimer sur les très graves atteintes aux droits des citoyens et des étrangers contenues dans ce texte, mais la responsabilité de la majorité n'en demeurera pas moins écrasante.
Cet amendement, co-signé par Françoise Hostalier, vise à supprimer les alinéas 22 à 32. En effet, tout étranger qui aura fait l'objet d'une mesure d'éloignement pourrait être frappé, sur décision discrétionnaire de l'administration, d'une interdiction de retour sur le territoire français allant de deux à cinq ans. C'est le rétablissement de la double peine que, avec Nicolas Sarkozy alors ministre de l'intérieur, nous nous étions engagés à réformer – ce que nous avons fait à l'unanimité dans la loi votée en 2003.
La transposition de ce que la directive qualifie « d'interdiction d'entrée » n'était pas nécessaire. Les règles en matière de transposition des directives communautaires visent à empêcher la superposition de dispositions nouvelles au droit existant dès lors qu'une simple adaptation de ce dernier aurait suffi ou que le droit national contient déjà en son sein des dispositions conformes aux objectifs de la directive à transposer. Or, en droit français, il existe déjà une interdiction judiciaire du territoire français, qui peut être prononcée pour entrée et séjour irréguliers.
Mais la commission des lois, contre l'avis du Gouvernement, a durci l'interdiction de retour en imposant le caractère automatique de son application pour tout étranger qui n'aurait pas respecté une obligation de quitter le territoire français – interdiction de deux ans – ou à qui aurait été notifiée une obligation de quitter le territoire français sans délais – interdiction de trois ans prolongeable de deux ans. L'automaticité devient donc la règle, et les considérations humanitaires l'exception. Cette disposition est contraire à la directive « retour » qui dispose que, « conformément aux principes généraux du droit de l'Union européenne, les décisions prises en vertu de la présente directive devraient l'être au cas par cas et tenir compte de critères objectifs, ce qui implique que l'on prenne en considération d'autres facteurs que le simple fait du séjour irrégulier ».
Enfin, rien n'est prévu quant à la possibilité de solliciter la suspension de l'interdiction du retour sur le territoire français, alors même qu'une telle possibilité est mentionnée par la directive. Cette carence législative tend à dénier toute possibilité d'intervention extérieure du juge, seule autorité compétente pour prononcer la suspension de l'exécution des décisions administratives, et à circonscrire le champ d'application de l'IRTF au seul pouvoir des autorités administratives, ce que ne saurait imposer la directive.
Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?
Je serai bref puisque le ministre me fait savoir qu'il apportera une réponse développée.
Cela étant, au nom de la commission, je rappelle une fois de plus que nous transposons une directive. La commission n'a pas durci le texte.
Pour la quatrième ou cinquième fois, je rappelle que l'article 11 dispose que « les décisions de retour sont assorties d'une interdiction d'entrée ». Il n'est pas écrit « peuvent éventuellement » ou « il est souhaitable que ». C'est clair.
Il s'agit donc d'une pure transcription de la directive. L'interdiction de retour s'applique dans deux situations : si aucun délai n'a été accordé pour le départ volontaire ; si l'obligation de retour n'a pas été respectée.
D'accord, mais cela a aussi été retranscrit.
D'une part, il s'agit donc d'une transcription automatique. D'autre part, alors que la directive prévoit deux à cinq ans d'interdiction, le texte du Gouvernement a retenu une durée de deux à trois ans.
Non seulement nous n'avons transposé que les mesures indispensables, mais, de surcroît, nous n'avons pas retenu l'option la plus dure.
Le Gouvernement est défavorable à ces amendements identiques.
Madame Pau-Langevin, votre exposé m'incite à rappeler une évidence : le droit des étrangers en situation irrégulière est plus protecteur en France que dans tout autre pays d'Europe ; c'était vrai avant ce texte et cela le restera si le projet de loi est adopté. Je ne le dirai qu'une seule fois par séance, mais je tenais à le faire après votre intervention, pour remettre les choses en perspective.
Étienne Pinte, vous nous dites que l'interdiction judiciaire du territoire – l'ITF – assurait de façon suffisante la conformité de notre législation à la directive « retour ».
S'il est vrai que l'ITF judiciaire peut sanctionner le délit de séjour irrégulier, l'existence de cette sanction pénale n'assure pas la transposition de la directive « retour » quand bien même celle-ci est indifférente à la nature administrative ou juridictionnelle de l'autorité décisionnaire.
Avant de vous donner tous les arguments sur ce point, monsieur Pinte, je soulignerai aussi que, contrairement à ce qu'indique l'exposé des motifs de votre amendement, la possibilité de jonction des recours contre l'OQTF et l'interdiction de retour qui l'accompagne est prévue à l'article 34 du projet de loi que nous examinerons ultérieurement.
L'étranger est jugé selon la procédure contentieuse accélérée applicable à l'OQTF, dès lors qu'il est retenu ou assigné à résidence pour la préparation de son départ.
(Les amendements identiques nos 557 , 571 , 581 ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi d'un amendement n° 272 .
La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
Avis défavorable pour les mêmes raisons que celles invoquées lors de l'examen des amendements précédents.
Défavorable également, monsieur le président.
Je suis saisi d'un amendement n° 556 .
La parole est à M. Christian Hutin.
Cet amendement propose d'autoriser les victimes des filières de l'immigration clandestine à revenir en France si leur coopération avec les autorités permet le démantèlement de ces véritables réseaux de traite des hommes.
Elles ne seraient pas victimes d'une interdiction de séjour définitive, ce qui irait dans le sens de la justice. Nous pourrions être tous d'accord sur ce principe juste et efficace dont M. Tardy a d'ailleurs parlé hier.
Effectivement, nous pouvons être tous d'accord sur ce principe.
Cependant, mon cher collègue, cette précision est inutile : à partir du moment où les personnes concernées ont obtenu un titre de séjour en application de la directive de 2004, elles ne peuvent, par définition, pas faire l'objet d'une mesure d'éloignement, ni donc d'une interdiction de séjour.
J'émet un avis défavorable, comme le rapporteur : la demande est déjà satisfaite pour les raisons qui viennent d'être indiquées.
Cela étant, je suis heureux de constater que, comme nous, vous voulez aider ceux qui coopèrent avec les autorités compétentes.
Lorsque, le 5 février de l'année dernière, j'avais signé une circulaire qui disait très exactement la même chose que ce que vous présentez là, j'avais été accusé d'avoir encouragé la délation.
Il faut juste un an pour que vous repreniez exactement le même argumentaire. Je m'en réjouis.
(L'amendement n° 556 n'est pas adopté.)
Je vous informe que le Président de l'Assemblée nationale a décidé de réunir la Conférence des présidents. Elle va se tenir dans les minutes qui suivent.
J'invite les différents groupes à s'y faire représenter.
Article 23
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures cinq, est reprise à dix-huit heures vingt-cinq.)
La séance est reprise.
Je précise à l'ensemble de l'Assemblée que la Conférence des présidents a été convoquée à l'initiative du président Accoyer, dans un geste de bonne volonté et un souci d'apaisement. Or on a constaté que les groupes qui sollicitaient une évolution de l'organisation de nos débats n'étaient pas représentés. La Conférence des présidents n'a pas pu prendre de décision modifiant l'organisation de nos débats.
Nos débats se poursuivent donc tels qu'ils ont été organisés par les précédentes Conférences des présidents.
Monsieur le président, je tiens à faire part de notre étonnement et de notre consternation devant l'attitude de l'opposition.
Je rappelle que mardi, lors de la Conférence des présidents, le président Accoyer aurait accédé à la demande, si elle avait été formulée verbalement en Conférence des présidents, d'accorder trois heures supplémentaires. Or, en l'absence des groupes de l'opposition, il n'a pu accéder à cette demande.
Dans un souci d'apaisement – du reste, dans quel sens faut-il apaiser ? –, à la suite d'une situation de harcèlement verbal et après avoir constaté, une fois de plus, que l'opposition a été incapable de gérer le temps qui lui était imparti et qui est largement suffisant pour exprimer sa position (Exclamations sur les bancs du groupe SRC)...
Monsieur Caresche, monsieur Braouezec, n'est-ce pas vous que j'ai vus, à l'instant, demander à M. Accoyer que nos débats soient prolongées et que la Conférence des présidents se réunisse ?
Vous demandez la réunion de la Conférence des présidents pour bénéficier de trois heures supplémentaires de temps de parole, Conférence à laquelle vous n'assistez pas ! N'est-ce pas quelque peu incohérent ?
Existe-t-il donc tant de divisions au sein des groupes SRC et GDR pour que la parole de M. Caresche et celle de M. Braouezec ne soient même pas représentatives de la poignée de députés de l'opposition ici présente ?
Qui, depuis le début de la discussion, pratique l'obstruction, mène des attaques personnelles indignes ? Ce n'est pas la majorité mais bien évidemment l'opposition, et je ne rappellerai pas certains épisodes consternants.
La majorité prend acte qu'une fois de plus l'opposition a été incapable de gérer son temps de parole. L'opposition a demandé la réunion d'une Conférence des présidents, qui, du fait de l'absence de ses représentants, n'a pas pu décider de quoi que ce soit. Nous en restons par conséquent à la situation antérieure et nous entendons, pour notre part, respecter notre temps de parole. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je rappelle que les rappels au règlement ne doivent pas excéder une durée de deux minutes.
La parole est à M. Noël Mamère.
Notre collègue Leonetti a bonne mine de nous faire la leçon : il passe ici en touriste…
…uniquement pour faire de la provocation (« Oh ! » sur les bancs du groupe UMP),…
…alors qu'il n'a pas assisté plus de dix minutes aux débats que nous menons depuis une semaine. Il vient nous expliquer que nous n'avons pas été capables de gérer notre temps de parole ! S'il vous plaît, cessez de donner dans la caricature ! (Rires sur les bancs du groupe UMP.)
L'Assemblée est en crise et vous savez très bien quelles en sont les causes ; je pense notamment aux oukases du Président de l'Assemblée, qui a refusé d'appliquer le règlement…
…en lui donnant une interprétation très restrictive au motif que nous aurions fait de l'obstruction.
Ce président ne doit pas s'étonner de se trouver aujourd'hui dans une situation particulièrement inconfortable, d'autant que vous-mêmes avez déjà prévu votre emploi du temps dans vos circonscriptions, car vous ne souhaitez pas que le débat continue. Vous n'êtes ici que pour lever la main et si peu pour parler.
C'est en effet M. Pinte et quelques autres qui utilisent le temps de parole de la majorité.
Il revient au président de l'Assemblée, et non à nous, d'assumer cette situation de crise et il est bien normal que nous n'ayons pas répondu à sa convocation pour participer à la Conférence des présidents.
Votre intervention sera décomptée du temps de parole accordé à votre groupe !
Nous ne sommes plus à trente secondes près, monsieur Mariani. Du reste, j'observe que certains, sur les bancs de la majorité, n'ont pas besoin de mesurer leur temps de parole puisqu'ils ne s'expriment pas.
Je comprends bien la volonté du président Accoyer, qui répond sans doute à un souci d'apaisement ; mais telle n'est pas notre préoccupation – nous n'avons déclaré la guerre à personne, nous –, qui était de pouvoir discuter jusqu'au bout d'un texte loin d'être anodin pour un certain nombre de personnes qui vivent sur le territoire national. Il est même à nos yeux dangereux pour eux.
Nous ne disposons que de trois heures pour examiner environ soixante-quinze articles, ce qui ne nous semble pas de bonne pratique démocratique. Avec M. Caresche, nous n'avons pas demandé la réunion de la Conférence des présidents mais réclamé du temps supplémentaire.
Le Président de l'Assemblée pouvait fort bien répondre à la demande écrite qui lui a été faite de nous accorder un temps de parole supplémentaire.
Nous aurions ainsi pu terminer ces travaux de manière plus démocratique sinon très démocratique.
Soyons précis : lundi dernier, le président du groupe SRC adressait au Président Accoyer une lettre soulignant que l'examen du projet de loi sur l'immigration, l'intégration et la nationalité a été interrompu jeudi 30 septembre à minuit à l'article 14. Jean-Marc Ayrault a notamment écrit à M. Accoyer : « Il importe de rappeler que le texte soumis à discussion comporte quatre-vingt-quatre articles. Nous reprendrons la suite de son examen mardi 5 octobre après-midi. » Je vous rappelle, mes chers collègues, qu'il était prévu, à l'origine, de ne consacrer que trente heures à l'examen du texte et en trois jours. Vous avez décidé de décaler la suite de l'examen du texte à la présente semaine.
Contrairement à certains, nous étions là, nous, jeudi à minuit.
Dès jeudi, vous-mêmes avez éprouvé un malaise. Certains amendements présentés par des députés du groupe UMP contre l'avis du Gouvernement et celui de la commission, et qui ont suscité des débats très intéressants, comme sur la double nationalité, n'ont été adoptés que grâce aux voix de l'opposition.
Jean-Marc Ayrault signalait, lundi, que nous ne disposions plus, au total, que de treize heures de discussion.
À notre demande de temps supplémentaire – que nous souhaitions voir attribuer à tous les groupes puisque l'UMP aussi présente des amendements qui méritent discussion –, le Président de l'Assemblée a répondu : « Par lettre de ce jour, vous m'avez fait part de votre préoccupation au sujet des conditions dans lesquelles l'examen du projet de loi sur l'immigration, l'intégration et la nationalité va se poursuivre à partir de demain à l'Assemblée nationale.
« Vous souhaitez qu'un temps de parole supplémentaire soit accordé aux groupes en application de l'article 49, alinéa 12, du règlement. C'est parce que je suis soucieux, comme vous, que ce débat se déroule dans les meilleures conditions possibles que je suis personnellement intervenu pour que le Gouvernement n'engage pas sur ce texte la procédure accélérée.
« Il reviendra à la Conférence des présidents, lors de sa réunion de demain, d'examiner l'ordre du jour de la semaine en cours. Vous comprendrez que je ne puisse m'engager sur la suite qu'elle réservera à la demande précise que vous formulez. »
Plus loin, M. Accoyer écrit : « Je vous informe que je suis prêt à appuyer votre demande. » Dans sa lettre, le Président de l'Assemblée considère en outre que les sujets dont nous avons débattu la semaine dernière et à propos desquels nous continuons de discuter méritent sérénité, temps de réflexion et d'échanges et donc davantage que les trente heures accordées un peu rapidement avant l'examen du texte.
En outre, rien n'oblige les représentants de tous les groupes à participer à la réunion de la Conférence des présidents.
Quand un groupe souhaite que la Conférence examine une de ses propositions, le minimum est tout de même d'y participer !
Monsieur le président, vous pouvez témoigner que de très nombreuses Conférences des présidents se tiennent sans que les représentants de certains groupes y participent.
La demande que nous avons formulée est signée du président Jean-Marc Ayrault et le président de l'Assemblée en a très clairement accusé réception puisque je viens de vous lire une partie de sa réponse.
Le bon sens aurait par conséquent voulu qu'un temps de parole supplémentaire soit accordé. Chacun l'a reconnu, y compris le Président de l'Assemblée. Vous en décidez autrement et porterez donc la responsabilité des conséquences de votre décision.
Pour que l'Assemblée soit parfaitement informée de la réponse du Président Accoyer évoquée par Mme Mazetier, je tiens à en compléter la lecture : « Il vous appartiendra personnellement, ou par l'intermédiaire de votre représentant, de défendre ce point de vue. La Conférence est, vous le savez, un lieu d'échange et de dialogue destiné à régler les questions de cet ordre. »
Ce n'est pas le Président qui décide de l'organisation de nos travaux,…
…c'est la Conférence des présidents, où il appartenait aux uns et aux autres de s'exprimer.
La parole est à M. Marc Laffineur.
Depuis des dizaines et des dizaines d'années, c'est bien la Conférence des présidents qui décide de l'organisation des séances et le Président Accoyer a très justement fait valoir qu'il n'était pas opposé à la demande de l'opposition d'un temps de parole supplémentaire mais qu'il revenait à la Conférence d'en décider. Celle-ci s'est réunie et, aucun représentant de l'opposition n'étant présent, il n'a pu être fait état de sa demande.
Pour vous donner la possibilité de formuler votre souhait, nous avons réuni la Conférence il y a quelques minutes. Et, alors qu'elle était disposée à faire des avancées, aucun représentant de l'opposition, cette fois encore, n'était présent.
Il ne faut donc pas renverser les rôles : chacun connaît la façon de procéder, et qui seule permet le bon fonctionnement de l'Assemblée. J'y insiste, c'est toujours la Conférence des présidents qui a décidé de l'organisation de nos travaux.
N'essayez pas de faire croire ceci ou cela, vous savez aussi bien que nous comment fonctionne l'Assemblée.
Le Président Accoyer pouvait très bien relayer notre demande et il s'y est refusé !
Dès lors que vous ne voulez pas participer aux réunions de la Conférence, il faut en assumer les conséquences.
Je trouve que la majorité fait preuve de beaucoup de formalisme. Nous avons demandé un temps de parole supplémentaire qu'il revient à la Conférence des présidents d'octroyer. Je n'en suis pas membre, et c'est le cas, si je ne me trompe, de personne ici.
Je répondrai ensuite à M. Leonetti à propos de la gestion du temps de parole, et notamment de celui du groupe SRC. Je constate qu'à l'heure où je m'exprime le groupe UMP et le groupe SRC se trouvent sensiblement dans la même situation : ils disposent chacun d'un temps à peu près équivalent.
Raison de plus pour considérer que vous gérez mal votre temps de parole !
Cela montre que le groupe UMP a géré à peu près de la même manière que le groupe SRC son temps de parole.
Plusieurs députés du groupe UMP. Il reste trois heures au total !
Je suis saisi d'un amendement n° 558 .
La parole est à Mme Pascale Crozon.
Je souhaite relayer une question qui nous a été maintes fois posée lors de nos auditions : comment disparaît-on, monsieur le ministre, du système d'information Schengen ? Le texte prévoit que toute personne frappée par une interdiction de retour y est inscrite, mais à quel moment n'y apparaît-elle plus ? Une personne qui a fait l'objet d'une mesure d'interdiction levée deux mois après un départ volontaire est-elle toujours inscrite à ce fichier ? Une personne qui a respecté l'interdiction de retour pendant deux, trois ou cinq ans y apparaît-elle toujours si elle demande un visa pour un autre pays européen dix ou quinze ans plus tard ?
J'espère que vous allez nous éclairer sur ce point et que vous nous rejoindrez pour considérer que, dès lors que la mesure d'interdiction cesse, la conservation des informations personnelles dans le système d'information Schengen doit, elle aussi, cesser.
Cette disposition relève manifestement du pouvoir réglementaire. Avis défavorable.
La directive « Retour » confère une dimension européenne à la mesure d'interdiction de retour sur laquelle repose largement l'efficacité de la mesure. Le considérant 18 de la directive « Retour » rappelle que le partage d'informations entre les États membres sur ces mesures implique l'utilisation du système d'information dit de Schengen. Il va de soi que ces signalements respecteront l'ensemble des règles propres à ce système défini par un règlement communautaire, notamment en matière d'enregistrement et d'effacement. Il n'y a pas lieu de fixer les règles d'effacement du système d'information Schengen dans le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. C'est donc un règlement communautaire qui va l'établir. Avis défavorable.
(L'amendement n° 558 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n°569 .
La parole est à M. Patrick Braouezec.
Cet amendement propose de supprimer les alinéas 24 et 25, et, en conséquence, l'alinéa 27.
L'article 23 a été durci par la commission des lois, contre l'avis du Gouvernement. Celui-ci nous le confirmera, ou pas. Se trouve ainsi durcie l'interdiction de retour en imposant le caractère automatique de son application.
En 1993, l'idée d'une interdiction du territoire automatique avait été censurée, je le rappelle, par le Conseil constitutionnel.
Défavorable. Je ne vais pas vous relire pour la énième fois l'article que nous avons à transposer. Il prévoit une interdiction de retour automatique. Avis défavorable.
Le Gouvernement est également défavorable. Mais je voudrais profiter de cet amendement pour expliquer à nouveau clairement ce qu'est l'interdiction de retour. Aujourd'hui, un étranger en situation irrégulière reconduit dans son pays d'origine peut, dès lors que la mesure d'éloignement a été exécutée, revenir en France. L'interdiction de retour permet la mise en place d'une période pendant laquelle la personne reconduite ne peut revenir. La création de cette période est une mesure de bon sens, prise au niveau européen, et qui permet de rendre réellement effectives des mesures de reconduite à la frontière. C'est cela, l'interdiction de retour. Je pense qu'il n'y a pas matière à spéculer davantage.
Par cet amendement, je propose de revenir au texte initial du Gouvernement concernant la possibilité, pour l'administration, d'édicter une interdiction de retour à l'encontre de l'étranger qui s'est maintenu sur le territoire.
La commission a durci le texte en transformant cette faculté en obligation. Désormais, l'administration doit prononcer une interdiction de retour, sauf cas exceptionnel. Cette interdiction de retour est déjà, d'une certaine façon, une double peine. Si, en plus, elle est automatique – et c'est ce qui me gêne –, cela fait beaucoup.
Je vous rappelle que la jurisprudence constitutionnelle n'aime pas du tout les peines automatiques. Le Conseil constitutionnel vient d'ailleurs d'abroger l'article L. 7 du code électoral sur cette base.
Pour une meilleure solidité juridique, je propose de revenir au texte initial.
Je ne vais pas relire à notre collègue Tardy, une fois de plus, l'article 11 de la directive, qui ne dit pas « peut », ni « pourrait ».
Je précise, en outre, qu'il ne s'agit pas d'une mesure automatique. Car, en l'espèce, la directive prévoit la possibilité de ne pas prononcer la mesure pour des raisons humanitaires, elle permet de lever cette mesure à tout moment, et elle incite à faire varier la durée de la mesure en fonction de la situation de l'étranger.
En outre, je répète que la directive européenne nous permettait de prononcer une interdiction de deux à cinq ans, et le choix du Gouvernement a été de deux à trois ans.
Je souscris à ce que vient de dire le rapporteur. Et je voudrais dire à M. Tardy qu'il ne peut pas dire que nous avons « durci » les termes de la directive. À la limite, Claude Goasguen pourrait même nous soupçonner d'avoir été insuffisamment durs, puisque, comme vient de le dire à juste titre Thierry Mariani, nous avons été plutôt favorables aux étrangers en situation irrégulière. Je vous en donne deux exemples précis, et je suis sûr que votre bonne foi va vous rendre solidaire de ce que je suis en train de dire.
L'article 7 de la directive demande aux États membres de prévoir un délai de départ volontaire entre sept et trente jours. La directive dit : « Accordez-leur entre sept et trente jours. » Que fait le projet de loi ? Il choisit le délai de départ volontaire le plus long possible : trente jours, donc, au bénéfice de l'étranger en situation irrégulière.
L'article 7, alinéa 3, de la directive prévoit la possibilité pour les États membres d'imposer aux étrangers en situation irrégulière auxquels le délai de départ volontaire a été accordé de résider en un lieu déterminé, c'est-à-dire de les assigner à résidence. Ce projet de loi, après discussion avec votre commission, n'a pas utilisé cette possibilité.
Cela signifie – je l'ai dit tout à l'heure à Mme Pau-Langevin, et je le redis à votre assembléé – que le droit des étrangers en situation irrégulière est, en France, particulièrement respectueux des libertés individuelles. En transposant cette directive, nous restons parfaitement fidèles à cette tradition républicaine.
Sincèrement, monsieur Tardy, je ne peux pas vous laisser dire que nous avons « durci » les termes de la directive.
Je prends bonne note des réponses du rapporteur et du ministre. En commission, cet amendement avait été rejeté sans autre forme de procès. Tout ce que je demande, s'agissant de mes amendements, c'est d'avoir des réponses dans l'hémicycle. Parce que l'un des défauts de l'examen de ce texte est qu'il a été très rapide en commission. Nous étions dans un contexte particulier, puisqu'il y avait l'examen du texte sur les retraites. C'est vrai que nous n'étions pas beaucoup en commission, et il faut reconnaître que les amendements ont défilé assez vite.
J'ai mes réponses. Cela me va. Moi, je demande des réponses, c'est tout. Je retire l'amendement.
(L'amendement n° 236 est retiré.)
Je suis saisi d'un amendement n° 448 .
La parole est à M. Patrick Braouezec.
Défendu.
(L'amendement n° 448 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 559 .
La parole est à Mme Sandrine Mazetier.
Le ministre vient de répéter une fois de plus que tout va très bien, et que dans la transposition de la directive « Retour », nous restons les plus généreux et les plus protecteurs.
Vous indiquez le délai de départ volontaire, mais, dans cet article 23, il y a huit hypothèses permettant à l'administration de refuser ce délai. Vous auriez donc tout aussi bien pu fixer ce délai à vingt-neuf ou vingt-huit jours. Puisque vous multipliez les possibilités de refuser ce délai, vous auriez même dû retenir la durée la plus courte. En effet, de toute façon, vous ne l'accorderez pas.
L'amendement n° 559 essaie d'aménager une toute petite brèche pour que le droit d'asile puisse encore être respecté. L'interdiction de retour constitue, de fait, une atteinte au droit d'asile, qui est pourtant garanti par la Convention de Genève. Nous proposons, à travers cet amendement, que la suspension de l'interdiction de retour soit de droit pour l'étranger qui souhaite demander l'admission au séjour au titre de l'asile en France, et ce afin de pouvoir instruire la demande d'asile. Celle-ci peut être repoussée, mais au moins qu'elle puisse être instruite.
Demain, l'interdiction de retour – dont je rappelle qu'elle est une interdiction de retour sur le territoire de l'Union européenne – frappera des personnes qui sont pourtant persécutées dans leur pays.
Défavorable. Dans le cas visé par l'amendement, un étranger interdit de retour qui se présente à la frontière pour demander l'asile se voit placé en zone d'attente, où il pourra demander une admission au titre de l'asile. Depuis la loi de 2007, le recours contre un éventuel refus est suspensif. Si l'étranger est admis sur le territoire à l'issue de cette procédure, il ne pourra bien évidemment pas faire l'objet d'une mesure d'éloignement tant qu'il n'aura pas été statué sur sa demande d'asile.
En outre, je ne vais pas reprendre une fois de plus le discours que nous avons tenu x fois hier soir. Je persiste à dire que la France, en matière de droit d'asile, est certainement l'un des meilleurs élèves de l'Europe.
Défavorable.
(L'amendement n° 559 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 454 .
La parole est à M. Patrick Braouezec.
Défavorable.
Nous voyons bien là l'atteinte aux libertés à laquelle procède ce texte. En fait, vous avez calqué une procédure administrative d'interdiction de retour sur la procédure judiciaire qui existait. L'interdiction du territoire était prononcée à titre de peine par un tribunal. Ici, vous instaurez une procédure absolument similaire, sauf que, cette fois, la mesure d'interdiction est prononcée par l'autorité administrative. C'est une constante, dans ce texte : il y a à la fois la volonté d'instaurer des procédures expéditives et une extrême méfiance par rapport au juge judiciaire, qui, lui, s'oppose très souvent, en tant que protecteur des libertés.
Et puisque M. Mariani disait que nous étions les meilleurs élèves, je voudrais souligner que, même s'il est vrai que la directive « Retour » introduit cette idée d'interdiction de retour sur le territoire, notre droit prévoyait une procédure judiciaire, au terme de laquelle un tribunal prononçait l'interdiction. Il était donc inutile de la doubler d'une procédure administrative, qui présente évidemment beaucoup moins de garanties pour les personnes concernées, et ce d'autant que pour pouvoir faire un recours contre cette interdiction, il faudrait quasiment être sur le territoire. Il va donc y avoir un imbroglio de procédures, dont le résultat est qu'il sera extrêmement difficile pour les particuliers de se défendre face à cette nouvelle possibilité qui est offerte à l'administration.
(L'amendement n° 454 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 560 .
La parole est à Mme Sandrine Mazetier.
Défavorable. Le texte de la commission a déjà repris cette disposition.
Défavorable.
(L'amendement n° 560 n'est pas adopté.)
Le groupe socialiste a demandé le scrutin public, monsieur le président.
Cette demande ne m'était pas parvenue. Je vais y faire droit.
Sur le vote de l'article 23, je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. le rapporteur.
Monsieur le président, je voudrais profiter de ces cinq minutes qui doivent maintenant s'écouler avant la tenue du scrutin public pour faire une observation. Certains de nos collègues répètent en permanence que ce projet de loi contient quatre-vingt-quatre articles. En fait, il y a entre vingt et vingt-cinq articles qui ont un poids réel. L'article que nous allons examiner dans un instant, l'article 24, est l'exemple type d'un article de coordination. Et il y en a un certain nombre dans le texte.
Par conséquent, reconnaissez qu'il n'y a peut-être pas quatre-vingt-quatre articles qui ont une importance réelle.
Il est faux de dire qu'il y a quatre-vingt-quatre articles dans le texte. Il y a tous les bis et les ter. En tout, il y a 107 articles !
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'article 23.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 71
Nombre de suffrages exprimés 71
Majorité absolue 36
Pour l'adoption 42
Contre 29
(L'article 23 est adopté.)
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour défendre l'amendement n° 561 .
L'article 25 est important. Il concerne les ressortissants européens. Nous ne sommes plus sur la directive « Retour », mais sur la directive « Libre circulation », qui fait l'objet d'une intense discussion entre le Gouvernement et la Commission européenne – nous en avons déjà parlé.
Je voudrais revenir rapidement sur l'amendement n° 555 , que je n'ai pas eu l'occasion de défendre. Nous avions proposé de transcrire, de manière littérale, le paragraphe 1 de l'article 28 de la directive « Libre circulation », qui précise les conditions dans lesquelles un ressortissant communautaire peut être amené à quitter le territoire pour des raisons d'ordre public : « L'autorité administrative doit notamment tenir compte de la durée du séjour de l'intéressé sur le territoire, de son âge, de son état de santé, de sa situation familiale et économique, de son intégration sociale et culturelle dans l'État membre d'accueil et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine. »
Monsieur le ministre, vous nous avez expliqué que deux articles de la directive, l'article 28 paragraphe 1 et l'article 27 paragraphe 2, posaient problème dans la discussion avec la Commission européenne. Je ne comprends pas pourquoi vous ne procédez pas à la transcription de ces articles dans la loi ; vous pourriez tout à fait déposer un amendement. Ainsi, le contentieux avec la Commission européenne serait levé et cela vous épargnerait sans doute un certain nombre de discussions.
L'article 25 transpose la question de l'abus de droit. Je reconnais tout à fait – nous n'avons pas sur ce point, monsieur Goasguen, de divergences – que la directive « Libre circulation » prévoit que, dans certaines situations d'abus de droit, il puisse y avoir des mesures de reconduite à la frontière des ressortissants européens concernés.
L'article 35 de la directive « Libre circulation » précise : « Les États membres peuvent adopter les mesures nécessaires pour refuser, annuler ou retirer tout droit conféré par la présente directive en cas d'abus de droit ou de fraude, tels que les mariages de complaisance. Toute mesure de cette nature est proportionnée… » Très clairement, cela signifie que la directive « libre circulation fait explicitement référence à la situation des mariages de complaisance – même s'il y a un adverbe qui peut toujours donner lieu à interprétation sur le plan juridique. Je constate d'ailleurs que, sur ce point, la législation, y compris avec ce texte, s'est beaucoup alourdie. Mais l'article 35 ne fait en aucune façon allusion à la situation à laquelle vous voulez appliquer l'abus de droit. Vous considérez qu'un étranger qui aurait renouvelé un séjour de moins de trois mois, dans l'intention de se maintenir sur le territoire – l'interprétation sera difficile – alors que les conditions requises pour un séjour supérieur à trois mois ne sont pas remplies, serait dans une situation d'abus de droit et pourrait faire l'objet d'une mesure d'éloignement. Je considère que votre interprétation de la notion de libre circulation est extrêmement restrictive. Je pense qu'il s'agit même d'une entrave à la libre circulation. En effet, la directive est très claire : un ressortissant européen a la possibilité de venir s'installer pour trois mois – pas plus, nous sommes d'accord sur ce point – dans un autre pays européen.
Or, avec la disposition que vous proposez, vous limitez cette possibilité. Il me semble que cela va très au-delà de ce que prévoit la directive. Comment sera appliquée cette disposition ? Comment pourrez-vous reprocher à un ressortissant européen de venir pour trois mois dans un pays européen ? Il peut faire cela à plusieurs reprises. Je ne sais pas comment vous pourrez démontrer qu'il s'agit d'un abus de droit.
Je suis saisi d'un amendement n° 564 , visant à supprimer l'article 25.
L'article 25 prévoit qu'une mesure d'éloignement peut être prise lorsque le séjour de l'étranger est constitutif d'un abus de droit.
L'article 35 de la directive relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leur famille de circuler et de séjourner librement permet aux États membres « d'adopter les mesures nécessaires pour refuser, annuler ou retirer tout droit conféré par la présente directive en cas d'abus de droit ou de fraude, tels que les mariages de complaisance ».
La disposition explicite par ailleurs ce que l'on peut entendre par abus de droit : « un séjour dans le but essentiel de bénéficier du système d'assurance sociale et notamment du dispositif d'hébergement d'urgence, conformément à l'article 14 de la directive, qui permet de mettre fin au droit au séjour d'un citoyen »…
On a supprimé cela. Est également mentionné « le fait de renouveler des séjours de moins de trois mois dans le but de se maintenir sur le territoire alors que les conditions requises pour un séjour supérieur à trois mois ne sont pas remplies ». Cette disposition, je l'admets, sera beaucoup plus difficile à mettre en oeuvre, ce qui devrait d'ailleurs vous rassurer. (Sourires.)
Je voudrais signaler à M. Caresche que sur le premier point – je ne reviens pas sur ce que j'ai dit hier à propos de nos relations avec la Commission – nous n'en sommes pas au stade d'un « contentieux » avec la Commission ; j'espère que nous n'y arriverons pas et nous ferons tout pour l'éviter. Nous sommes simplement au stade des explications, des discussions. Je vous ai indiqué pourquoi c'était une discussion juridique qui a d'autres conséquences et un autre impact que celui de ce seul texte, sinon il n'y aurait aucune difficulté.
Deuxième point : vous noterez avec moi que les mariages de complaisance, qu'il convient de sanctionner, ne sont pas une obsession française, puisqu'ils figurent, comme vous l'avez vous-même rappelé, dans la directive. Cela nous renvoie à la discussion que nous avons eue hier. C'est l'une des préoccupations de l'Europe, et non pas seulement de la France.
Le simple fait – vous l'avez indiqué en analysant le texte – que la directive précise : « tels que les mariages de complaisance », montre que cela ne s'applique pas seulement aux mariages de complaisance, sinon elle aurait formulé : « en cas de mariage de complaisance ».
Vous avez donc vous-même fourni l'argumentation pour laquelle votre amendement devait être rejeté. Avis défavorable.
M. Mariani a avoué dans son rapport qu'il ne voyait pas comment de tels comportements pourraient être prouvés, compte tenu de l'impossibilité de contrôler les entrées et sorties du territoire des citoyens de l'Union européenne. Nous sommes donc en train de voter une disposition inapplicable.
Je suis saisi d'un amendement n° 562 .
La parole est à Mme George Pau-Langevin.
Il est défendu.
(L'amendement n° 562 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 566 .
La parole est à Mme George Pau-Langevin.
Défendu !
(L'amendement n° 566 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
C'est un amendement rédactionnel.
(L'amendement n° 14 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 591 .
La parole est à M. le rapporteur.
C'est un amendement de coordination.
(L'amendement n° 591 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 274 .
La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
Avis défavorable.
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 468 et 565 rectifié .
La parole est à M. Patrick Braouezec, pour défendre l'amendement n° 468 .
Cet amendement permettrait de transposer l'article 30 et de l'article 31 de la directive. Le rapport de la Commission stigmatise très clairement la France – et pas seulement la France, j'y reviendrai – pour défaut de transposition.
Si cet amendement était adopté, nous pourrions ainsi rentrer dans la ligne, si je puis me permettre cette expression.
Le rapport de la Commission stipule très clairement que « la transposition des garanties procédurales n'est pas satisfaisante. Seuls quatre États membres ont transposé correctement ces garanties. La majorité des problèmes dans ce domaine semble résulter d'une transposition non conforme. En France, aucune garantie procédurale ne s'applique en cas d'urgence absolue. Le citoyen de l'UE concerné ne reçoit aucune notification écrite de la décision d'éloignement, n'est pas informé des motifs qui sont à la base de cette décision et ne dispose d'aucun droit de recours avant l'exécution de la décision ».
Si vous refusez cet amendement, ce sera la démonstration que vous ne souhaitez pas être en accord avec cette directive et le rapport de la Commission. Ne vous réfugiez pas derrière le fait qu'il n'y a que quatre États et que les autres ont fait comme la France. Nous pourrions être, pour une fois, le bon élève.
La parole est à M. Christophe Caresche, pour défendre l'amendement n° 565 rectifié .
M. Braouezec a parfaitement résumé la situation.
Dans les observations faites par la Commission et le rapport réalisé par cette dernière en 2008, qui épingle un certain nombre de pays, dont la France, il est clair qu'en situation d'urgence la Commission considère que les garanties procédurales ne sont pas suffisantes.
Il faut donc introduire dans notre droit, de manière explicite, et non implicite – je crains que ce ne soit votre réponse –, les garanties procédurales qui figurent très précisément dans la directive.
Cette disposition est inutile. Les règles classiques du droit administratif respectent pleinement les exigences de la directive, que vous citez, sans qu'il soit besoin de les préciser : obligation de motivation, indication des délais de recours, etc.
Même avis que la commission.
Manifestement, cet été, des citoyens de l'Union européenne ont été expulsés sans avoir pu bénéficier du délai obligatoire d'un mois…
C'est faux !
…et sans que leur situation n'ait été examinée individuellement. Un certain nombre de tribunaux ont considéré que les décisions que vous aviez prises n'étaient pas satisfaisantes au regard de la législation européenne.
C'est faux !
Voilà pourquoi nous défendons vigoureusement nos amendements à l'article 25.
(Les amendements identiques nos 468 et 565 rectifié ne sont pas adoptés.)
(L'article 25, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 589 de la commission.
La parole est à M. le rapporteur.
Amendement de coordination.
(L'amendement n° 589 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis dans l'incapacité de m'exprimer sur l'article 26, car mon groupe ne dispose plus de beaucoup de temps de parole.
Si je prenais le temps de défendre cet amendement, ce serait au détriment d'autres articles. Je suis donc dans l'obligation de renoncer à présenter un amendement qui prévoyait des dispositions relevant de la protection contre des mesures de reconduite à la frontière prises à l'encontre de ressortissants de pays tiers.
Je suis saisi d'un amendement n° 82 portant article additionnel après l'article 26.
La parole est à M. Lionel Tardy.
Cet amendement propose de transposer une disposition de la directive « Retour » que l'on ne retrouve pas dans le projet de loi, alors qu'elle est importante. La philosophie de la directive sur la rétention consiste à affirmer qu'elle doit être le dernier recours si les autres solutions ne fonctionnent pas et qu'elle doit servir à quelque chose
À partir du moment où il est évident que l'obligation de quitter le territoire sera très difficile, voire impossible, à mettre en oeuvre, la rétention ne se justifie plus. Cet amendement permettra au juge judiciaire de contrôler la justification de la mesure de rétention et, éventuellement, d'y mettre fin.
L'amendement me semble inutile, et je propose à notre collègue de le retirer. Il correspond en effet à la jurisprudence des JLD : lorsque la rétention ne se justifie plus, elle doit être levée.
Le rapporteur a raison. Je précise à M. Tardy, qui devrait en effet retirer son amendement, que l'article L. 554-1 du CESEDA prévoit déjà qu'un étranger ne peut être retenu que pour le temps strictement nécessaire à son départ et que l'administration doit exercer toute diligence à cet effet.
L'article 27 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je le mets aux voix.
(L'article 27 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 570 rectifié .
La parole est à M. Noël Mamère.
L'amendement est défendu.
(L'amendement n° 570 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 192 rectifié .
La parole est à M. Patrick Braouezec.
L'amendement est défendu.
(L'amendement n° 192 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 277 .
La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
Quel est l'avis de la commission ?
Je suggère que vous retiriez votre amendement qui n'a pas sa place dans ce texte. Il mentionne un « courrier de refus », ce qui n'est pas très clair.
La parole est à M. Patrick Braouezec pour défendre l'amendement n° 470 .
Je suis saisi d'un amendement n° 278 .
La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
Une fois de plus, nous sommes en face d'une interprétation restrictive de la directive « Retour ». Vous ajoutez dans le projet de loi des dispositions qui n'existent pas dans la directive et qui conduisent à mettre en place un dispositif de contrôle et de surveillance des étrangers. La directive ne prévoit pas que l'étranger doive faire un rapport à chaque fois qu'il se présente. La justification de ce type de mesure est de prévenir le risque de fuite. Votre projet de loi va plus loin, car le simple fait de se présenter démontre qu'on n'a pas pris la fuite. Cette nouvelle disposition prouve que vous êtes dans une logique de fermeture et de brutalité par rapport au parcours des migrants.
Je rappelle à M. Mamère que nous avons adopté le dispositif le plus généreux – trente jours. En contrepartie, il est normal de demander à l'étranger comment il utilise cette période pour préparer son départ volontaire.
Même avis que la commission.
Votre argument n'est pas convaincant, car selon la directive « Retour », le simple fait de se présenter vaut explication.
Je rappelle à notre rapporteur qui prétend que nous sommes les champions en matière de droit d'asile que, si les demandes sont très nombreuses, les acceptations sont largement inférieures en France : 31 % contre 51 % aux États- Unis, 51 % au Canada, 51 % en Allemagne.
C'est faux.
(L'amendement n° 193 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 314 .
La parole est à Mme Sandrine Mazetier.
Monsieur le président, je suis dans l'incapacité de défendre cet amendement qui précise que les conditions de l'astreinte sont notifiées par écrit.
Si je m'exprimais plus longuement, cela signifierait que je renonce à le faire sur des articles à venir, encore plus décisifs.
Il faut laisser un peu de souplesse pour s'adapter aux circonstances ! Avis défavorable.
Avis défavorable.
Je ne suis pas sûr que l'incapacité soit simplement liée au temps (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
M. le ministre n'est pas obligé de jeter le discrédit sur des députés qui travaillent. Cette manière d'humilier les gens et de les traiter comme de la valetaille est bien à l'image de ce que vous êtes ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Bien que le temps soit compté, je souhaite m'exprimer sur cet article.
L'interdiction de retour sur le territoire français s'assimilant à une double peine pour l'étranger obligé de quitter le territoire et instituant de fait le « bannissement » du territoire européen, la rédaction de l'article L.551-1 n'a pas lieu d'intégrer ce cas de figure.
Le bannissement doit disparaître des États civilisés.
Je suis saisi d'un amendement n° 315 .
La parole est à Mme George Pau-Langevin.
La directive dit clairement qu'il faut privilégier des formes alternatives à la rétention.
Vous avez dit que le JLD libère les personnes lorsqu'il est impossible de les éloigner. Trop souvent, en réalité, l'administration se bat pour garder les personnes en rétention pendant trente jours alors même qu'elles ne peuvent être reconduites.
Il faut donc explorer de manière sérieuse toutes les alternatives à la rétention, notamment l'assignation à résidence.
Je fais remarquer à notre collègue Dufau qu'il s'est exprimé sur un autre article.
La suppression de l'article 30 aurait pour conséquence d'en rester à la situation actuelle où la rétention est le principe et l'assignation à résidence ne peut normalement être décidée par le préfet. Je comprends donc mal ces amendements.
Avis défavorable.
Contrairement à ce que prévoit la directive « Retour », vous proposez l'assignation à résidence comme seule alternative à la rétention. Nous considérons pour notre part qu'il existe d'autres formes moins coercitives.
Ce qui choque tous les défenseurs des droits de l'homme dans cet article 30, c'est le placement en rétention pour cinq jours. Là, vous franchissez un cap en décidant une mise en rétention arbitraire, puisque le juge n'est pas saisi dans de brefs délais pour se prononcer sur la validité de la présence en rétention de l'étranger.
Je ne peux pas laisser accroire cette interprétation. L'autorité administrative peut recourir à plusieurs mesures en fonction de la situation de l'individu concerné. Aux termes de l'article 30, l'étranger peut être placé en rétention – ce n'est pas automatique. Il ne peut évidemment pas être placé en rétention et assigné à résidence, les deux mesures sont donc alternatives.
J'indique que le projet de loi prévoit aussi une obligation pour l'étranger, pendant le délai de départ volontaire, de se présenter aux autorités – article 29 – afin de faire part des diligences effectuées en vue du départ, ce qui est une mesure moins contraignante que la rétention ou l'assignation à résidence.
Enfin, dernière hypothèse : la remise du passeport aux autorités, qui figure déjà à l'article L. 612 du CESEDA.
Contrairement à ce que vous venez de déclarer, la transposition de la directive est donc complète. Les autres mesures auxquelles vous faites référence sont bien prévues par le projet de loi. Le référé liberté est toujours possible, y compris devant le juge administratif.
Je suis saisi d'un amendement n° 316 .
La parole est à M. Christophe Caresche.
Comme l'a fort bien dit Mme Pau-Langevin, la directive « Retour » demande aux États membres d'essayer de privilégier des solutions qui ne passent pas par la rétention. La directive prévoit que les mesures de rétention ne peuvent concerner que des étrangers dont on pense qu'il existe une forte probabilité de pouvoir les éloigner.
Vous n'avez donc pas transposé toute la directive, qui précise que ne peuvent être placés en rétention que les étrangers pour lesquels il existe des perspectives raisonnables d'éloignement. Or un certain nombre d'étrangers sont aujourd'hui placés en rétention en France alors que l'on sait pertinemment qu'ils ne seront pas éloignés du territoire. Nous aurions donc voulu que ce membre de phrase soit transposé, ce qui n'est pas le cas dans l'article 30.
Enfin, la durée de cinq jours constitue un problème majeur. Vous voulez faire intervenir le juge judiciaire au bout de cinq jours, ce qui est tout à fait exorbitant. Nous aborderons ce problème à la partie contentieuse si nous en avons le temps, mais je crains que nous ne puissions pas le faire.
Avis défavorable. Si la précision que Christophe Caresche propose d'introduire dans le texte en est absente, c'est parce qu'elle va de soi. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
En effet, il est bien évidemment impossible de placer en rétention une personne pour laquelle il n'existe aucune perspective d'éloignement.
J'ai rédigé, avec Mme Pau-Langevin, un rapport sur les centres de rétention. Combien de fois nous a-t-on dit que, pour telle ou telle nationalité, on savait qu'aucun laissez-passer consulaire ne serait délivré et que, automatiquement, les personnes concernées n'étaient donc pas maintenues en rétention ! Il existe une gestion intelligente des centres de rétention.
En outre, l'administration française n'est pas sadique au point de maintenir dans un centre de rétention une personne qui n'a aucune chance d'être reconduite à la frontière.
Je signale à Christophe Caresche que, comme je l'ai dit tout à l'heure à M. Tardy, l'article L. 554-1 du CESEDA dispose déjà qu'« un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ ». Il est donc nécessairement mis fin à la rétention lorsqu'il n'existe pas de perspectives raisonnables d'éloignement à court terme. Par conséquent, l'article 15 est déjà entièrement transposé.
Je rappelle d'autre part que toute prolongation de la rétention doit être décidée par le JLD ; or les possibilités de renvoi vers le pays d'origine font partie des critères sur lesquels il fonde sa décision.
Votre amendement est donc entièrement satisfait. Dès lors, je ne doute pas que vous allez le retirer.
…, car il est inutile de maintenir en rétention des personnes que l'on ne peut pas éloigner.
Néanmoins, dans de nombreux cas, les personnes sont maintenues en rétention pendant la durée maximale autorisée, au terme de laquelle on est obligé de les laisser sortir parce qu'on ne peut pas les renvoyer. Pourtant, on sait dès le dixième jour de rétention si on pourra le faire ou non.
Nous avons même vu, ce qui est encore plus extraordinaire, des gens que l'on n'avait pas pu renvoyer dans leur pays d'origine à l'issue de la première période de rétention et que l'on avait libérés, puis arrêtés de nouveau, si bien qu'ils se sentaient comme chez eux au centre de rétention, où tout le monde les connaissait et où ils connaissaient tout le monde. Ces situations ridicules montrent bien que procéder ainsi ne sert à rien.
Du reste, au dernier alinéa de l'article 30, vous entérinez en quelque sorte ces situations en permettant de placer en rétention des personnes qui, ayant fait l'objet d'une décision de placement en rétention, n'ont pas déféré à la mesure d'éloignement ou sont revenus.
Je le répète, on sait pourtant que, dans bien des cas, des personnes libérées au terme de la durée maximale de trente jours sont arrêtées de nouveau quelques jours plus tard et que vous reprenez alors la procédure de zéro, ce qui est totalement inutile. Il vaudrait mieux, au contraire, renoncer à les placer à nouveau en rétention lorsque l'on a échoué à les reconduire à la frontière une première fois.
(L'amendement n° 316 n'est pas adopté.)
Défendu.
(L'amendement n° 131 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 342 .
La parole est à Mme Pascale Crozon.
Pour les mêmes raisons que Mme Mazetier tout à l'heure, je ne le défendrai pas, monsieur le président.
Avis défavorable.
De toute façon, seuls les étrangers âgés de plus de dix-huit ans doivent disposer d'un titre de séjour et seules les personnes majeures peuvent être placées en rétention. Le placement d'un mineur en rétention constituerait une détention arbitraire que je n'ose même pas imaginer.
Ce que vient de dire le rapporteur est extrêmement important.
Avis défavorable.
Peut-être ai-je commis une erreur d'interprétation, mais j'aimerais citer ici le rapport publié ce matin même par la Cimade, présente dans les centres de rétention. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Vous nous dites que les mineurs ne peuvent pas être placés en centre de rétention. Selon ce rapport, pourtant, le placement d'enfants en rétention administrative s'est nettement accru en 2004, à la suite de l'instauration par M. Sarkozy d'une politique du chiffre. Ainsi, le nombre d'enfants enfermés en rétention est passé de 165 à 318 entre 2004 et 2009. Et il ne s'agit pas de mineurs isolés, mais de mineurs accompagnés de leurs parents.
Vous nous expliquez qu'ils ne sont placés en rétention que le temps strictement nécessaire à leur éloignement. Mais pouvez-vous imaginer le choc psychologique que constitue pour un enfant, à chaque minute qui passe, le fait d'être placé en rétention ? Nos collègues de la majorité sont-ils allés, comme certains d'entre nous, visiter des centres de rétention pour voir dans quelle situation ils se trouvent ?
C'est ce que nous avons voulu faire au Mesnil-Amelot, dans les centres 2 et 3, normalement conçus pour accueillir des familles. Mais, comme je l'ai déjà dit à M. le ministre de l'immigration et de l'identité nationale, on nous a interdit de les visiter…
… sous prétexte qu'ils étaient en travaux et qu'il n'y avait pas de retenus.
Ne baissez pas la voix quand vous avancez vos arguments, monsieur Mamère !
On peut visiter des locaux même lorsque aucun retenu ne s'y trouve ! Cela me semble être un droit minimal des représentants de la République, des parlementaires ! Nous avons le droit de voir dans quelles conditions vous prévoyez d'accueillir ces familles. Vous répondez par la négative ; c'est votre affaire. Mais, je le répète, nous sommes en droit de l'exiger, et vous avez commis une erreur en nous le refusant. C'était de votre part un geste politique.
Le rapport de la Cimade n'en dit pas moins…
Je serai – malheureusement – très bref.
Monsieur le ministre, non seulement vous changez de convictions comme de chaussettes, non seulement vous vous venez de vous montrer très insultant envers Mme Mazetier, mais M. Mamère vous a pris à l'instant la main dans le sac et a prouvé, ici même, dans l'hémicycle, que vous êtes un menteur. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Il est intolérable qu'un ministre mente avec un tel aplomb. J'attends donc vos explications et vos manifestations de repentance. (Rires sur les bancs du groupe UMP.)
M. le ministre fait certainement une confusion. On nous dit qu'un mineur ne peut en aucun cas être placé en rétention, mais nous avons été témoins du contraire. Au demeurant, vous le reconnaissez puisque, dans votre texte, vous prévoyez un registre des mineurs placés en rétention. Vous devez donc confondre avec le cas des mineurs isolés.
Notre amendement propose quant à lui qu'aucun mineur ne puisse être placé en rétention, sous aucun prétexte.
Monsieur Roy, vous êtes l'exemple parfait des députés que M. Mariani évoquait tout à l'heure, que l'on ne voit pas pendant une semaine…
… et qui passent une minute et demie…
Monsieur Roy, je sais que vous avez une grande voix…
Alors là, il est gonflé, le ministre ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Mais continuez donc !
Des députés, disais-je, qui passent une minute et demie dans l'hémicycle pour y lancer une attaque personnelle.
En effet, je change souvent de chaussettes.
Je n'ai pas la chance d'avoir une garde-robe aussi belle que la vôtre, ni des vestes aussi voyantes que vous : je suis bien obligé de m'adapter ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Et comme je n'ai pas une aussi grande bouche que la vôtre, je suis obligé de forcer ma voix.
D'autre part, monsieur Mamère, je vais vous répondre en citant Lionel Jospin et François Mitterrand. Je ne voudrais pas que cela provoque chez vous une décharge d'adrénaline. Puis-je vous demander l'autorisation de les citer ?
Merci.
Les centres de rétention administrative ont été créés par François Mitterrand. Nous avons tous considéré cette création comme un progrès, et je continue de le penser.
Les chambres familiales au sein des centres de rétention administrative…
Je suis en train de vous répondre très précisément ! Vous le verrez si vous me laissez terminer.
Les chambres familiales, disais-je, ont été créées par le gouvernement de Lionel Jospin. C'était, là aussi, un grand progrès. Les décrets ont été notamment signés par Mme Lebranchu, qui était présente dans l'hémicycle il y a quelques minutes et qui va sans doute y revenir très bientôt.
Pourquoi les avoir créées ? Parce que, en France, la possibilité est offerte aux parents de ne pas se séparer de leurs enfants.
C'est une possibilité : les parents peuvent choisir de placer leurs enfants à l'extérieur ou de les garder avec eux. Cette possibilité de choix est considérée en Europe comme une très grande avancée démocratique.
Soyons clair : ce faisant, le gouvernement Jospin a bien agi et a placé la France à la pointe de ce domaine. Ne reprochez donc pas à la majorité actuelle de poursuivre l'action de la majorité de gauche en la matière !
Il faut être cohérent : on ne peut pas créer des chambres familiales au sein des centres de rétention administrative, puis se plaindre qu'on les utilise !
Voilà qui répond très précisément à votre question, monsieur Mamère : aucun mineur étranger isolé n'est placé en centre de rétention. Lorsque des mineurs s'y trouvent, c'est qu'ils sont avec leurs parents.
Voilà la réalité. Vous avez le droit de vous en offusquer ; mais je vous dis que c'est la loi, et je vous rappelle le contexte dans lequel elle a été adoptée. Et, pour ma part, je continue de penser qu'il s'agit d'une grande avancée.
En outre, la France offre aux étrangers en situation irrégulière placés en rétention un accompagnement social et juridique complet. C'est une autre exception dont nous pouvons être fiers. Le budget de l'accompagnement de ces étrangers a encore augmenté de deux millions d'euros en 2010. La dépense budgétaire totale atteint 11,5 millions par an, dont 5,5 millions au titre de la prise en charge sanitaire et médicale, et 6 millions – écoutez bien – au titre de l'accompagnement social et juridique, dont 1,4 million pour la zone d'attente de Roissy et 4,6 millions pour les centres de rétention.
Cette dépense permet notamment aux étrangers – c'est le charme de la démocratie française – de contester les décisions de l'État lui-même grâce à l'action d'associations indépendantes. Pour parler clairement, l'État finance des associations qui se retournent contre son action pour défendre les étrangers en situation irrégulière. C'est une exception en Europe. Et vous jugez bon de protester !
Je précise que la directive « Retour », qu'il s'agit prétendument de transposer, encadre dans son article 17 les conditions de rétention des mineurs et de leurs familles. C'est aussi ce texte qui justifie notre amendement.
En effet, selon la directive « Retour » – qui n'a pas été ratifiée sous le gouvernement de Lionel Jospin, mais bien par votre majorité –, « les mineurs non accompagnés et les familles comportant des mineurs ne sont placés en rétention qu'en dernier ressort et pour la période appropriée la plus brève possible ». Or, comme le rappelait Noël Mamère en citant le rapport de la Cimade, nous sommes témoins d'une dérive.
Ce que vous décrivez, monsieur Besson, c'est en effet la politique de gouvernements de gauche qui ont créé du droit et protégé les libertés individuelles et les droits fondamentaux de la personne humaine en remplaçant l'emprisonnement par le placement en centre de rétention…
… et la rétention à la frontière hors de tout cadre juridique par des zones d'attente, et en aménageant certains dispositifs.
Ce à quoi nous assistons aujourd'hui n'est absolument pas comparable à cela. Du fait de la politique du chiffre, comme Noël Mamère vient de le dire, le nombre de personnes en rétention a considérablement augmenté et, mécaniquement, le nombre d'enfants placés en rétention aux côtés de leurs parents a augmenté avec lui. Il ne s'agit ni du « dernier ressort » mentionné par la directive « Retour », ni de la « période appropriée la plus brève possible » : avec vous, c'est la règle !
Nous vous demandons donc de prendre en considération cet amendement, d'autant qu'il permettrait de transposer efficacement l'article 17 de la directive « retour ».
Monsieur le président, je vais essayer d'être rapide pour ne pas trop manger le temps de parole du groupe GDR.
Monsieur le ministre, nous sommes face à deux conceptions divergentes de la démocratie.
Vous nous dites que ces associations qui vous empêchent de tourner en rond coûtent cher. Mais quatre à cinq millions, qu'est-ce au regard du budget de l'État ? Qu'est-ce par rapport aux vies des personnes concernées ?
Pour notre part, nous nous félicitons qu'il y ait des associations qui exercent leur vigilance et préservent les droits des étrangers que vous voulez expédier toujours plus rapidement vers leur pays d'origine sans leur laisser la possibilité de se défendre.
Ce coût, nous considérons qu'il est utile pour notre société et pour les personnes concernées.
(L'amendement n° 342 n'est pas adopté.)
Monsieur le président, je voudrais revenir à ce qui vient de se passer. Si les députés de l'opposition n'étaient pas là, il n'y aurait qu'une seule vérité, celle du ministre et du rapporteur, et aucun autre éclairage ne pourrait être apporté sur des questions extrêmement sensibles. La majorité a voulu piéger la gauche mais elle n'a pu y parvenir. Mme Mazetier a fait une excellente réponse.
Nous affirmons et répétons que la rétention des familles doit être l'exception et que d'autres solutions peuvent être trouvées alors que, pour vous, elle constitue une méthode automatique que vous tenez pour un grand progrès de l'humanité.
Par ailleurs, nous estimons que s'agissant de sujets aussi difficiles, il faut du temps. Nous sommes entrés dans une caricature que nous ne pouvons pas accepter. Je le dis et le redis – et ce sera la dernière fois dans le cadre de la discussion de ce projet de loi – : lorsque nous ne participons pas à la conférence des présidents, c'est pour de bonnes raisons. Nous voulons arrêter de cautionner un système qui dévoie le Parlement et qui porte atteinte à sa réputation. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.) .)
Nous ne pratiquons pas la politique de la chaise vide ; nous sommes présents dans ce débat. La vérité, c'est que ce règlement que vous voulez nous imposer jusqu'à l'absurde va empêcher que ce texte soit débattu en détail jusqu'au bout. Le groupe SRC ne dispose plus que de cinquante minutes et il en va de même, je suppose, pour le groupe GDR.
Or il reste encore une cinquantaine d'articles en débat. Croyez-vous qu'il nous sera possible de consacrer le temps nécessaire aux points essentiels restant en discussion ? Non, car le dispositif du temps programmé, qui est en fait un temps guillotine, nous l'interdira ce soir.
Le président de l'Assemblée nationale a refusé notre demande visant à disposer d'un temps de parole supplémentaire au prétexte que nous n'aurions pas été présents à la conférence des présidents.
Je rappelle que le président a toute latitude pour proposer, dans l'intérêt du débat, une prolongation de la discussion et que la majorité a tout pouvoir de l'accepter, en notre absence.
Je suis président de groupe depuis de nombreuses années…
… et jamais je n'ai assisté à une telle situation, que mon groupe ait été dans la majorité ou dans l'opposition.
Nous sommes aujourd'hui confrontés à une crise du fonctionnement de notre assemblée. Cette conception de la présidence de l'Assemblée nationale, permettez-moi de le dire, c'est le voyage au bout de l'absurde, et rien d'autre !
Vous allez interrompre un débat alors que l'opposition n'a pas fait d'obstruction – personne ne pourra sérieusement soutenir le contraire. Nous avons fait notre travail. C'est l'intérêt général qui est aujourd'hui atteint du fait de votre absurdité et de votre état d'esprit fermé à tout bon sens et je dirai, d'une certaine façon, à toute dignité.
Pourquoi le Sénat, qui n'est pas élu au suffrage universel, a-t-il décidé de consacrer au moins deux semaines au débat sur les retraites alors qu'à l'Assemblée nationale, le couperet est tombé, par décision unilatérale du président, sur ordre de l'Élysée, empêchant les députés de l'opposition d'expliquer leur vote ? Cela n'aurait demandé que quelques heures de plus, sans porter atteinte à la qualité du travail parlementaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Vous êtes en train d'entacher la réputation de l'Assemblée nationale. Je vous le dis, vous prenez une lourde responsabilité. Nous ne pouvons pas l'accepter.
À près de vingt heures, il est encore temps qu'un sursaut s'opère afin de défendre l'Assemblée nationale. Tel est le rôle du Président de l'Assemblée nationale. Il doit cesser d'être le président d'un clan qui veut en finir avec l'opposition et empêcher les débats sur des questions aussi importantes. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Ce sera mon dernier rappel au règlement sur ce texte. Maintenant, je laisse l'entière responsabilité de ses choix à la présidence. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, ce que fait le président du groupe SRC est indigne. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Il essaie simplement d'instrumentaliser l'Assemblée nationale pour des raisons de politique politicienne, ce qui est tout à fait inacceptable.
Le président de notre assemblée, dans un souci d'apaisement, vous a proposé de venir demander à la conférence des présidents un temps de parole supplémentaire.
Il ne s'agit pas de cela. Le règlement de notre assemblée est ainsi fait que c'est la conférence des présidents qui décide ou non d'octroyer du temps de parole supplémentaire à un groupe.
Cet après-midi, une nouvelle fois, le président de notre assemblée a réuni la conférence des présidents afin qu'elle puisse décider d'une éventuelle prolongation des débats. Vous avez refusé de vous y rendre. Voilà la vérité !
Vous essayez en permanence de provoquer des incidents pour faire bonne figure. Eh bien, vous n'y parvenez pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Nous voulons nous aussi faire un rappel au règlement, ne serait-ce que pour soutenir avec force le président Ayrault. Il n'y a aucune indignité à reconnaître que nous traversons une crise. Il s'agit d'une crise du fonctionnement de l'Assemblée nationale, initiée par son président lui-même, sur ordre venu de l'Élysée,…
… qui tenait absolument à ce que le vote solennel sur les retraites intervienne à la date qu'il avait prévue.
Dans ce but, le président de l'Assemblée nationale a instrumentalisé le règlement au motif que l'opposition voulait procéder à de l'obstruction et ce geste de sectarisme a empêché l'opposition de s'exprimer sur un sujet essentiel.
Dois-je vous rappeler, mon cher collègue Laffineur, que samedi, 3 millions de personnes ont manifesté dans les rues de notre pays pour protester contre cette réforme injuste ?
Nous n'avons pas eu le temps de débattre de ce projet de loi, vous le savez très bien. Le Sénat a prévu deux semaines de discussion quand notre assemblée n'y a consacré que quelques heures.
Et sur un sujet aussi important que l'immigration, qui renvoie aux droits de la personne et à la garantie des libertés, il n'est prévu que trente heures de débat.
Aujourd'hui, ceux qui sont à l'origine de la crise et qui minent le coeur même de la démocratie, ce sont les membres de la majorité !
Il ne s'agit plus d'un rappel au règlement, monsieur Mamère !
La parole est M. Patrick Braouezec.
Je vais tenter de rentrer dans la voie de l'apaisement. Mais il faut tout de même faire le constat qu'il y a une crise et un passif et si vous persistez, chers collègues, à aggraver ce passif, nous aurons du mal à nous sortir de cette crise.
Nous déplorons tous, dans les rangs de l'opposition, de n'avoir pu mener jusqu'à son terme la discussion sur la réforme des retraites. Et ce n'est pas sans un certain malaise que nous constatons que le Sénat, qui n'est pas élu au suffrage universel, va pouvoir débattre librement de ce projet de loi alors qu'un temps contraint nous a été imposé.
Toutefois, il y a une manière de sortir de ce conflit.
Le groupe SRC comme le groupe GDR, ayant pris acte de ce que nous avons vécu comme un coup de force, …
C'est ainsi que nous l'avons vécu. Je n'ai même pas pu prendre la parole alors que j'avais des choses à dire !
Le président de notre assemblée peut montrer qu'il veut sortir par le haut de cette situation en prenant la décision, qui serait relativement bien acceptée, y compris peut-être par certains membres de la majorité, d'ajouter une dizaine ou une quinzaine d'heures de temps de parole – à lui d'en décider, …
…pour aller jusqu'au bout de ce débat. Sinon la situation risque d'empirer.
Le président Ayrault a eu raison de rappeler que les deux groupes de l'opposition ne disposent que d'une cinquantaine de minutes de temps de parole chacun alors qu'il reste une cinquantaine d'articles en débat.
Qui pourra croire que nous pourrons, dans ces conditions, présenter à l'opinion publique …
Tout à l'heure, Jacques Myard a protesté contre l'intervention de M. Mamère.
Aucun des députés présents depuis le début des débats ne peut soutenir qu'il y a eu obstruction. Nous avons eu un vrai débat, un débat d'idées. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Je voudrais apporter une précision à M. Laffineur, monsieur le président.
Nous ne devrions même pas avoir à demander du temps supplémentaire pour débattre alors que le couperet du temps programmé s'apprête à tomber. Le président, dans l'intérêt de l'Assemblée nationale, aurait dû de lui-même décider de l'allongement du temps de parole afin que le débat ait lieu. Vous-même, monsieur Laffineur, devriez partager ce point de vue.
L'un des membres de votre groupe vient de nous opposer que nous aurions dû y penser avant, mais cette position n'est pas tenable : le temps global de trente heures de débat ne permet de toute façon pas d'examiner correctement ce texte.
On a parlé d'apaisement ; je voudrais rappeler aux vice-présidents de notre assemblée que le groupe SRC et le groupe GDR ont adressé un courrier au président de l'Assemblée nationale où nous avons relevé les dysfonctionnements que tout le monde peut constater depuis la mise en place du nouveau règlement. Nous avons demandé à ce que soit mis en place un comité des sages. Or le président Accoyer nous a pratiquement opposé une fin de non-recevoir.
Aux responsables des groupes de la majorité, je demande de bien réfléchir. Nous avons tendu la main et nous nous sommes heurtés à un refus. Mais il n'est jamais trop tard pour sortir d'une crise : la balle est désormais dans votre camp ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR.)
Dans le cadre de ces rappels au règlement, il a été largement fait allusion au débat sur la réforme des retraites. J'ai participé à l'ensemble de la discussion sur ce texte et puisque peu de collègues de la commission des affaires sociales sont présents ce soir, je rappelle pour mémoire que nous avons procédé, au sein de cette même commission, à plus de quarante auditions. Nous avons eu du temps pour discuter sur la réforme des retraites.
Une semaine durant, nous avons eu, toujours en commission, des séances matin, après-midi et soir, voire la nuit ; dans l'hémicycle, nous avons eu cinquante heures de débat. On ne peut pas dire qu'il ait été bâclé !
Le Sénat va avoir cent heures ! Est-ce qu'ils sont plus lents que nous ou qu'ils ont besoin de plus de temps pour s'exprimer ?
Le Sénat n'a pas le même règlement que le nôtre. L'Assemblée a adopté une modification du sien qui prévoit le temps programmé. Sur le projet de loi immigration, intégration et nationalité, votre groupe disposait de onze heures vingt-cinq.
Dans un esprit d'apaisement, je vais vous faire une suggestion de bon sens, me semble-t-il. Dans une telle situation, nous essayerions, nous, de sélectionner les articles les plus fondamentaux sur lesquels nous voulons engager un vrai débat,…
…et de répartir des temps forts en fonction de ces articles.
Qu'avons-nous constaté ? Des discussions sur tous les sujets, parfois même hors sujet.
Parce que c'était important ! On ne dépose pas des amendements si ce n'est pas important.
C'est le choix que vous avez fait, n'en faites pas reproche à la majorité. Nous, nous sommes capables d'appliquer un règlement et de le respecter ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Mes chers collègues, le temps s'écoule, mais je dois rappeler qu'il existe une instance pour organiser nos travaux, c'est la conférence des présidents. Ce n'est ni une difficulté ni une humiliation d'y participer, c'est tout à fait normal et banal.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite du projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma