La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à une vingt et une heures trente.)
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'amendement n° 38 à l'article 4 bis.
La parole est donc à Mme Delphine Batho, pour défendre l'amendement n° 38 .
Nous reprenons donc la discussion de l'article 4 bis, sur lequel M. Vaxès avait déposé un amendement de suppression. Il a soulevé un certain nombre de questions que je pose de nouveau car il ne leur a pas été donné de réponses précises. Comment va fonctionner ce dispositif de rapatriement des images vidéo ? Dans quelles circonstances s'enclenche-t-il, s'il ne s'agit pas d'un système d'enregistrement comme il en existe déjà, dont la police peut utiliser a posteriori les images, mais d'un système dans lequel les images sont rapatriées en temps réel ?
L'amendement n° 38 vise à supprimer les termes « ou, le cas échéant, des agents de la police municipale », de manière à réserver l'usage de ce dispositif aux seules police et gendarmerie nationales. Quel est, en effet, l'intérêt d'introduire une confusion entre, d'une part, les prérogatives de la police nationale et de la gendarmerie nationale et, d'autre part, celles des polices municipales ? Il me semble qu'il n'y a pas lieu d'organiser un tel dispositif au profit des polices municipales. Tel est le sens de l'amendement n° 38 .
La parole est à M. Éric Ciotti, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 38
Le Sénat a très clairement indiqué, madame Batho, que la transmission des images se faisait à l'initiative des bailleurs et uniquement sous la forme d'un flux.
Sur le fond, vous entendez, par votre amendement, priver les polices municipales de la possibilité de recevoir les images qui leur sont transmises par les services de sécurité privés des immeubles collectifs à la demande du propriétaire ou du bailleur. Ce n'est pas cohérent avec le code de la construction et de l'habitation, dont l'article L. 126-1 dispose : « Les propriétaires ou exploitants d'immeubles à usage d'habitation ou leurs représentants peuvent accorder à la police et à la gendarmerie nationales ainsi, le cas échéant, qu'à la police municipale une autorisation permanente de pénétrer dans les parties communes de ces immeubles. »
Par analogie, nous estimons que les forces de police municipale, qui, en outre, disposent souvent de terminaux d'accueil des images vidéo, doivent participer à ce dispositif pour qu'il soit pleinement efficace.
La parole est à M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice, pour donner l'avis du Gouvernement.
Même avis que la commission, madame la présidente.
Je ne comprends pas bien la réponse de M. le rapporteur.
Le dispositif prend des images en permanence. Si un incident survient, on interconnecte, pour qu'une intervention ait lieu, mais c'est à la police nationale qu'il incombe d'intervenir ! Si un incident nécessite l'intervention de forces de sécurité, il appartient à la police et à la gendarmerie nationales de s'en occuper ; c'est leur travail, non celui de la police municipale ! Cette dernière n'a pas à intervenir en cas d'agression, de dégradation, etc., dans un hall d'immeuble.
La comparaison faite par M. le rapporteur ne me paraît pas pertinente. Il s'agit de questions de nature différente.
On peut concevoir qu'il revienne à la police nationale et à la gendarmerie d'intervenir en cas d'incidents, ou à la police municipale lors d'incidents mineurs. Cependant, c'est de l'observation d'un certain nombre d'images qu'il est présentement question. Or, monsieur Ciotti, vous n'ignorez pas que la police municipale est placée sous la responsabilité du maire. Cela signifie donc que vous autorisez le maire à visionner les images en question.
Nous pouvons certes débattre de tout, et ce sujet transversal, très intéressant, nous permet de débattre de la police municipale : faut-il ou non des polices municipales ? quelles doivent être leurs prérogatives ? quelle doit être l'amplitude horaire de leur service ? quelles doivent être leurs missions ? doivent-elles être armées ou non ?
Cela dit, pour avoir étudié la question en son temps, de manière assez approfondie, je sais combien les polices municipales sont aujourd'hui réglementées. Dès qu'il s'agit de la transmission et de l'utilisation d'images vidéo, les polices municipales – je songe notamment à des services que je connais bien – travaillent sous le strict contrôle du parquet et dans le strict respect d'un certain nombre de règles.
Mme Batho considère d'emblée qu'il n'est pas du rôle des polices municipales d'intervenir dans un certain nombre de situations. Il n'est cependant pas interdit à des polices municipales d'intervenir, dans le cadre fixé par la loi, lorsque des contentieux ou des conflits surviennent au pied d'immeubles.
Nous sommes au coeur d'un débat sensible. Nous reviendrons d'ailleurs sur ces questions lors de l'examen du projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dont certains articles portent sur la vidéosurveillance ; je crois qu'il s'agit de ses articles 17, 18 et 19. Peut-être aurait-il été plus approprié d'examiner alors les présentes dispositions que de saucissonner ainsi le débat.
Sur le fond, soit votre texte n'est pas en adéquation avec ce qui se passe, soit il tend à l'interdire. Concrètement, un certain nombre de bailleurs acceptent que la vidéosurveillance soit connectée directement aux terminaux gérés par les polices municipales ; il existe des conventions en ce sens. Dans certains cas, le flux est donc permanent, la police nationale pouvant, ensuite, prendre la main.
Or vous semblez limiter le flux à des moments particuliers. Cela revient à dire que ce sont les bailleurs qui, constatant un incident, autorisent la police municipale à prendre la main, cette dernière permettant, elle, à la police nationale de prendre la main à son tour, dans un deuxième temps.
Un report de ce débat sur la coordination de la vidéosurveillance sur le territoire des communes à l'examen du projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure me paraîtrait donc particulièrement opportun. Entre la vidéosurveillance de la police municipale, la vidéosurveillance des bailleurs, la vidéosurveillance des transporteurs, la vidéosurveillance des sociétés privées et des commerces, il faut que l'on arrive à savoir qui a le droit de visionner quoi et comment, qui a le droit de prendre la main ou non.
Par votre texte, vous autorisez le maire à pénétrer sur un espace privé à la demande d'un bailleur, pour constater des faits éventuellement constitutifs d'une infraction pénale. Je ne suis pas certain que la police municipale, qui n'est pas sous l'autorité du procureur, ait le droit de le faire. En outre, la vidéosurveillance vise à surveiller l'espace public, non l'espace privé. Or les dispositions examinées tendent à autoriser un agent qui n'est pas un officier de police judiciaire et qui n'est pas sous l'autorité du procureur à pénétrer dans l'espace privé. Il s'agit bien, en effet, de regarder ce qui se passe dans un espace privé, de prendre la main et d'en tirer les conséquences. C'est là une nouvelle manière de faire.
Je suis, pour ma part, prêt à un débat sur cette question, car il faut effectivement coordonner la gestion de la vidéosurveillance sur un territoire communale. Cependant, aborder la question ainsi, au moment de la discussion d'une proposition de loi sur les bandes, en ne s'arrêtant qu'à un aspect particulier, ne me paraît pas être la meilleure solution.
Je voulais juste répondre en un mot à M. le secrétaire d'État que je ne pouvais souscrire à son raisonnement sur les compétences des polices municipales. Je maintiens qu'une grave dérive se fait jour au travers de ces dispositions. Cette dérive va dans le même sens que les amendements présentés ce matin par le rapporteur sur un autre texte, le projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, qui donne aux agents de police municipale la compétence d'agents de police judiciaire.
Nous voyons bien le lien entre cet article et les dispositions votées ce matin en commission des lois.
Est à l'oeuvre une logique de désengagement de l'État et de transfert de la mission régalienne de police et de maintien de l'ordre et de la sécurité, sur le dos des collectivités territoriales.
Sur ce dossier, j'ai l'impression, madame Batho, que vous agitez des peurs, comme M. Vaxès. Soyons donc pragmatiques, comme nous y invitent ce débat et la gravité des sujets que nous traitons.
Le propos de M. Pupponi est d'ailleurs beaucoup plus concret. C'est que lui-même est confronté aux réalités du terrain, qu'il connaît bien.
Nous le disons très clairement : en cas d'incident, les images peuvent être transmises par les agents de sécurité du bailleur collectif à la police nationale ou à la gendarmerie ou, le cas échéant, aux services de police municipale. On sait très bien – vous le savez vous-même pertinemment – que, dans certaines villes, certains systèmes de réception des images ne sont mis en place que par les services de police municipaux. Plus généralement, dans les villes de province, ce sont les polices municipales qui disposent de ces équipements.
Quant à nier l'efficacité des polices municipales, vous êtes, une fois encore, dans un monde irréel. À Nice, c'est la police municipale qui procède à 60 % des interpellations – voire 70 %, selon le procureur Éric de Montgolfier –, avant de remettre les personnes interpellées à un officier de police judiciaire. Toute personne constatant une infraction doit effectivement interpeller l'auteur des faits et le remettre à un officier de police judiciaire, il en a la possibilité. C'est là ce qui se produit le plus souvent.
Nier cette efficacité, refuser le statut d'agent de police judiciaire adopté aujourd'hui en commission des lois, c'est contester la réalité. Pour ma part, j'opte pour le pragmatisme et l'efficacité. Nous avons besoin de toutes les forces, et, avec 30 000 agents, les polices municipales constituent aujourd'hui la troisième force de sécurité. Nous rencontrons des problèmes contre lesquels toute la chaîne de la sécurité doit se mobiliser, c'est ce à quoi nous travaillons ; tout le reste n'est qu'idéologie.
Notre débat est très intéressant. Cependant, excusez-moi, monsieur le rapporteur, mais nous ne saurions distinguer, dans cet hémicycle, ceux qui connaissent le terrain et ceux qui ne le connaîtraient pas. Sinon, je vous invite à vous promener sur des terrains que je connais très bien en Seine-Saint-Denis. Si nous voulons continuer d'avoir un débat serein, ne nous faisons donc pas ce type de reproche !
Par ailleurs, qui fait de l'idéologie ? J'aurais souhaité voir M. Hortefeux au banc du Gouvernement, comme l'a demandé Mme Batho hier soir, au début de notre débat. J'aurais aussi aimé être prévenu des changements d'horaires de la police d'agglomération. Dans Le Figaro de ce matin, M. Hortefeux, ministre de l'intérieur, demande aux régions socialistes – non aux régions dirigées par des présidents de conseils régionaux socialistes – de participer au financement de la vidéosurveillance.
Je vais devoir vous expliquer ce qui se passe concrètement sur le terrain, dans mon département : 11 millions d'euros ont été nécessaires pour construire la direction départementale de la sécurité publique de Seine-Saint-Denis – 30 % ont été financés par la région, donc par les élus locaux –, 2,5 millions d'euros pour la rénovation des commissariats de Noisy-le-Sec, Noisy-le-Grand, Bondy, Gagny, Pantin, Sevran et Livry-Gargan ; l'amélioration de quatre sites de garde à vue a coûté 690 000 euros, plus 6 millions d'euros budgétés pour la construction du commissariat de Clichy-sous-Bois–Montfermeil. Telle est la réalité sur le terrain. Lorsque nous parlons d'un transfert de compétences vers les collectivités territoriales, nous nous appuyons sur des faits précis, à savoir un État exsangue financièrement, qui tend à se reposer sur les collectivités locales pour financer ce qui est pourtant sa mission première : assurer la sécurité.
Nous ne refusons pas le débat sur la police municipale. En revanche, le législateur devrait dire précisément qui fait quoi et quelle est la place de chaque acteur de sécurité dans le système. Mais, avec cette proposition de loi telle qu'elle est rédigée, nous craignons d'être dans le flou, ce qui risque de faire peser davantage de charges sur les élus locaux.
(L'amendement n° 38 n'est pas adopté.)
Les dispositions de l'article 4 bis sont claires, mais elles nécessitent que leurs modalités d'application soient définies par un décret d'application.
Si, nous l'avons vérifié, l'avis de la CNIL n'est pas utile et opportun, s'agissant d'un décret qui n'aura pas à prévoir le stockage et la conservation des images de vidéosurveillance, il est en revanche nécessaire de s'assurer de l'avis du Conseil d'État.
En conséquence, il convient de prévoir que les modalités d'applications de l'article 4 bis soient précisées par un décret en Conseil d'État.
Favorable.
Je précise qu'aux termes de la loi du 6 janvier 1978, la CNIL est seule compétente en matière de fichiers et de traitement de données à caractère personnel. Dès lors, le contrôle de la conservation et de la destruction des enregistrements de vidéosurveillance ne ressort pas de la compétence de la CNIL.
Au demeurant, le décret d'application des dispositions prévues à l'article 10 de la loi du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité dont l'objet est l'installation, la transmission et l'enregistrement d'images de vidéosurveillance, ne prévoit pas l'avis de la CNIL. Dès lors, il ne serait pas justifié de déroger au droit commun et d'adopter une solution différente pour les seuls enregistrements de vidéos des parties communes des immeubles.
La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, pour soutenir l'amendement n° 39 .
Nous sommes en désaccord avec la lecture que viennent de faire le secrétaire d'État et le rapporteur. Nous parlons ici des parties communes qui contiennent des lieux ouverts au public et qui relèvent – le rapporteur a raison – de la LOPS du 21 janvier 1995.
Mais il peut arriver que les caméras soient installées dans les parties communes internes aux immeubles, comme les cages d'escaliers, les halls d'immeuble ou les ascenseurs. Or ces lieux relèvent de la conservation prévue par la loi informatique et libertés du 6 janvier 1978. En l'espèce, je ne suis pas pragmatique : je me contente de lire le droit. S'il y a dans les immeubles des espaces ouverts au public, d'autres sont privés. Pour une partie de ces endroits, vous devez demander l'avis de la CNIL. C'est d'ailleurs la lecture qu'en a fait le Sénat, en intégrant l'avis de la Commission nationale informatique et libertés. L'Assemblée nationale conteste cette lecture, mais je persiste à penser que ce n'est pas une histoire de stockage des images ; c'est une question de mesure applicable à des régimes juridiques différents, bien qu'il s'agisse du même lieu.
Défavorable, aux termes de l'argumentation que j'ai développée sur l'amendement précédent.
Je répète ce que j'ai dit tout à l'heure en présentant l'amendement du Gouvernement : un décret d'application est nécessaire, mais l'avis de la CNIL n'est pas juridiquement indispensable. Nous avons vérifié ce point depuis la lecture du Sénat à laquelle vous avez fait allusion, monsieur Urvoas. J'y ai d'ailleurs assisté puisque je représentais le Gouvernement. Je me souviens donc parfaitement de ce débat.
(L'amendement n° 56 est adopté.)
En conséquence, l'amendement n° 39 tombe.
(L'article 4 bis, amendé, est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 40 , deuxième rectification.
La parole est à Mme Delphine Batho.
Cet amendement vise à rétablir une disposition introduite par le Sénat et supprimée par notre rapporteur.
Nous proposons d'assortir le dispositif d'une garantie, en prévoyant que la transmission des images des systèmes de vidéosurveillance aux services de police ou de gendarmerie nationales fasse l'objet d'une autorisation générale accordée pour deux ans par un vote à l'unanimité des voix des propriétaires.
Défavorable.
L'unanimité que vous prônez revient à proscrire l'application de ce dispositif, car on sait parfaitement qu'en la matière, l'unanimité ne sera jamais acquise.
Même avis que la commission.
Je tenais à souligner la qualité de cet amendement reposant sur deux principes qui nous sont chers : la liberté, qui se manifestera par le vote unanime des propriétaires, et la propriété. J'admire le soutien que la gauche apporte ainsi à cette valeur profonde de nos institutions…
Nous qui défendons les pauvres gens, nous pensons que la sécurité est un bien encore plus grand que la propriété. C'est pourquoi il ne faut pas tomber dans le travers consistant, en demandant l'unanimité, à faire peser des menaces de représailles sur certaines personnes. Je rappelle que, dans de très nombreux quartiers, l'insécurité est liée à la menace qui pèse sur les habitants. Si l'on demande l'unanimité dans un bloc d'habitations, il sera facile de faire céder au moins l'un de ses occupants devant la menace. Voilà pourquoi je pense que la demande du groupe SRC, bien que libérale, est particulièrement néfaste.
Je suggère au rapporteur et à notre collègue du groupe UMP d'adresser leurs compliments au rapporteur de la commission des lois du Sénat, qui a fait figurer la notion d'unanimité. En outre, le Sénat a introduit cette disposition parce qu'il est précisé, dans un alinéa précédent, que c'est une décision des propriétaires. S'il s'agit d'un immeuble d'habitat social, avec un bailleur, les choses sont simples, ce qui n'est pas le cas pour une propriété privée.
(L'amendement n° 40 , deuxième rectification n'est pas adopté.)
Nous en venons à un amendement n° 41 , deuxième rectification.
La parole est à Mme Delphine Batho.
Défavorable.
(L'amendement n° 41 , deuxième rectification n'est pas adopté.)
Il s'agit d'un sujet qui fait beaucoup parler dans nos quartiers. L'un des principaux problèmes, dans certains immeubles, est ce que l'on appelle un peu crûment le « squat des halls d'escaliers ». Il y a quelque temps, l'actuelle majorité a voulu légiférer sur ce sujet, annonçant, dans le cadre d'une importante campagne médiatique, qu'elle allait enfin, grâce à cette fameuse loi, vider les cages d'escaliers.
Nous avions dit à l'époque que la loi, telle qu'elle était rédigée, était inapplicable. Nous avions raison puisque vous voilà aujourd'hui obligés de revenir sur le texte et de le modifier pour le rendre applicable ! Les gens avaient cru à la campagne médiatique ; ils pensaient que, grâce à ces dispositions, la tranquillité allait revenir dans leurs cages d'escaliers. Or ils se sont aperçus très vite que tel n'était pas le cas et que les jeunes continuaient à squatter les cages d'escaliers, au grand dam des occupants des immeubles.
Aujourd'hui, les bras m'en tombent, car votre texte, tel qu'il est rédigé, sera toujours inapplicable. Avec le Nouveau Centre, nous avons fait des propositions pour le rendre applicable. Le problème est le suivant : il s'agit de jeunes qui restent toute la nuit dans les cages d'escaliers. Qu'ils empêchent ou non les gens de rentrer chez eux, ils sont là, ils font du bruit, des dégâts, ils perturbent la vie des occupants de l'immeuble. Aussi, il faut préciser dans cet article que l'on doit pouvoir faire sortir quelqu'un qui reste de manière abusive dans une cage d'escalier. C'est simple ! Pourquoi essayer de savoir s'il a empêché volontairement ou involontairement les gens de rentrer chez eux ? Là n'est pas le problème ! Ce que les populations de ces quartiers ne supportent plus, c'est que les jeunes, qui sont souvent des délinquants, puissent rester en toute impunité dans les cages d'escaliers.
Nous devons donc rédiger un texte prévoyant que, lorsque des jeunes sont dans une cage d'escalier de manière abusive, la police a le droit de les faire sortir et la justice de les sanctionner. C'est simple, basique et applicable. J'espère que, sur un sujet si sensible, nous serons enfin entendus.
Nous en arrivons à un amendement n° 7 .
La parole est à M. Michel Vaxès.
Avant de défendre cet amendement de suppression, permettez-moi, monsieur le rapporteur, puisque vous semblez avoir la mémoire courte, de vous rappeler ce que je vous ai dit hier sur le pragmatisme et les hommes de terrain.
J'ignore si vous habitez le quartier de l'Ariane, à Nice, mais j'en serais très étonné. Pour ma part, j'habite dans un quartier difficile. Aussi, pour les vivre au quotidien, je connais les problèmes de ces quartiers. C'est au titre de cette expérience que je ferai quelques remarques. Je puis vous assurer que faire de la vidéo dans un espace privé vous exposera à des poursuites judiciaires. Ensuite, vous prenez vos responsabilités et nous verrons ce qu'il en ressortira…
J'en viens à l'article 4 ter, introduit par la commission et qui a pour objet de remplacer le mot « entravant » par le mot « empêchant » dans la définition du délit d'occupation abusive des halls d'immeubles à l'article L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation, que vous avez rappelé tout à l'heure. En quoi cette substitution terminologique permettrait-elle que cette disposition soit mieux appliquée par les tribunaux ?
Nous pensons qu'elle restera inapplicable, pour deux raisons. D'abord, la dimension subjective du caractère délibéré de l'obstruction ouvrira la voie à toutes les interprétations. Ensuite, engager des poursuites contre tous les jeunes tuant le temps dans les halls d'immeubles engorgera un peu plus la machine pénale. Lorsque certains de ces jeunes se livrent à des pratiques illicites, elles constituent déjà des délits spécifiques qui sont sanctionnés par le code pénal.
Cet article est donc superfétatoire, sauf à vouloir sanctionner spécifiquement une pratique répandue dans les cités HLM, qui résulte d'un déficit de places tant sur le plan physique que symbolique. Cette pratique traduit malheureusement une volonté de visibilité sociale de la part des groupes ou catégories qui en sont dénués. Plutôt que de chercher les moyens de les sortir des halls d'immeubles en leur offrant d'autres lieux de vie dans les cités, où l'on note une absence chronique de lieux de rassemblement, vous favoriserez une logique de dégradation des relations sociales et renforcerez ainsi paradoxalement les enjeux d'une telle pratique. De plus, si on leur trouvait du travail, peut-être ne seraient-ils plus dans les halls !
Cet article, comme d'autres, sera contre-productif. Nous ferons le point lorsque cette loi entrera en application, si tel est, un jour, le cas.
Nous demandons, en conséquence, la suppression dudit article.
Défavorable. La proposition de notre excellent collègue Philippe Goujon permettra justement d'appliquer d'autant mieux ce dispositif.
Nous abordons un sujet extrêmement important. Nous connaissons parfaitement les difficultés que représente, pour les habitants de nos quartiers, l'occupation des halls par des personnes assez turbulentes. La loi actuelle a eu un certain effet, puisqu'elle a déjà permis – même si c'est peu – le prononcé de quatre-vingt-sept condamnations, dont une trentaine de peines d'emprisonnement et vingt-six amendes. Remplacer le mot « entraver » par le terme moins fort d'« empêcher » sera apprécié différemment par les tribunaux. En outre, il ne sera plus nécessaire de prouver la réitération, ce qui permettra aux tribunaux de prononcer des peines plus facilement. Vous avez également constaté que la commission des lois a introduit une peine complémentaire de travaux d'intérêt général qui me paraît également tout à fait opportune.
Nos collègues du Nouveau Centre ont fait par ailleurs d'autres propositions complémentaires dont nous allons débattre.
Je ne comprends pas l'obstination de maintenir « entraver » ou « empêcher » : la difficulté de l'application du texte vient de là. Considérer comme illégale la présence dans les halls d'immeubles d'individus qui, tous les soirs, chahutent, boivent ou cassent résoudrait tous les problèmes. En effet, il est très difficile, voire impossible, pour la police, de prouver qu'une personne a été « entravée » ou « empêchée » dans son passage. Et, mon cher collègue, lorsque vous parlez de quatre-vingt-sept condamnations au niveau national, je vous répondrai que des milliers de jeunes squattent ! J'insiste donc : considérer que la présence abusive dans une cage d'escalier constitue un délit susceptible d'être sanctionné suffirait à régler tous les cas !
Je suis saisie d'un amendement n° 43 .
La parole est à M. François Pupponi.
J'espère, cette fois, être entendu. Je disais, hier, sous forme de boutade, m'adressant aux membres de la majorité, que j'avais l'impression de nous voir, nous, en 2002 ! Entendez-le aussi, chers collègues ! À un moment, en effet, nous n'entendions et n'écoutions plus, s'agissant de certains thèmes. Ne faites pas comme nous pour des sujets aussi graves !
L'amendement n° 43 est ainsi rédigé : « Le fait d'occuper en réunion et de façon abusive les espaces communs d'un immeuble collectif d'habitation constitue un trouble de voisinage puni d'une contravention de cinquième classe. » C'est simple, compréhensible par tout le monde et applicable facilement. Il est même envisageable d'aller plus loin en prévoyant, par amendement, qu'en cas de récidive, la sanction peut être encore plus exemplaire. Ne soyez pas aujourd'hui les laxistes, alors que nous serions les répressifs ! Accordons-nous et soyons en mesure de rédiger un texte applicable, compréhensible et audible par tout le monde !
Ce sujet est très complexe. Nous pouvons tous partager le même point de vue, s'agissant de la nécessité de mieux sanctionner ce phénomène grave, qui perturbe la tranquillité de dizaines de milliers de nos concitoyens, monsieur Pupponi. Notre collègue Philippe Goujon a tenté d'améliorer le dispositif mis en place, et c'est bénéfique.
J'aurais, pour ma part, tendance à vous demander de retirer votre amendement pour en débattre lors de l'examen de la LOPSI.
Il m'est difficile d'émettre un avis défavorable, néanmoins, je demeure réservé. En effet, nous sommes ici dans un domaine où la frontière de constitutionnalité est très ténue. Or nous devons respecter le cadre constitutionnel. La création d'une contravention peut ainsi entraver la liberté fondamentale d'aller et venir. Nous prendrions donc des risques à nous aventurer sur ce terrain. De plus, l'infraction doit être caractérisée, ce qui est extrêmement difficile et risque de s'avérer contraire au principe de la séparation du domaine de la loi de celui du règlement.
M. Pupponi fait, certes, preuve de logique et de pragmatisme. Cela dit, nous sommes aujourd'hui dans une logique qui n'est pas contraventionnelle pour les raisons pertinentes et sérieuses que vient de rappeler à l'instant le rapporteur. Cela a été l'objet d'un dialogue avec le Sénat. Rien n'interdit, comme cela vient d'être suggéré, que le dispositif soit amélioré dans le cadre des débats à venir. Considérant les risques que pourrait faire naître la création d'une telle contravention, je propose de nous en tenir à la logique de texte.
Je le dis tout en estimant – et je crois que c'est également l'avis du rapporteur et de nos collègues – que vos propos méritent effectivement que l'on y revienne lors d'une prochaine discussion.
Nous rencontrons ce problème dans toutes nos villes. Nous considérons tous qu'il est nécessaire de trouver la réponse la plus efficace possible. Notre logique va dans ce sens. Nous avons pu constater que les premières condamnations ont été assez nombreuses et que les procédures ont connu une augmentation exponentielle. Nous sommes certes, j'en conviens, encore loin de la réalité des faits. Mais tenons-nous-en à la logique de ce texte. Accordons-nous sur ce point et profitons du débat sur l'examen de la LOPSI pour compléter le dispositif.
Ce sujet est d'importance, car nombre de Françaises et de Français souffrent de cette situation. Nous partageons sur tous les bancs de l'Assemblée la même volonté de trouver les bonnes réponses. Je ne pense pas qu'il y ait des députés répressifs et d'autres laxistes. Nous devons surtout faire preuve d'efficacité parce que, je le répète, j'ai le sentiment que nous voulons tous parvenir au même résultat.
Comme nombre de collègues, ici, qui veulent également trouver une solution, M. Pupponi connaît bien le sujet. Dans sa sagesse, il a fait une proposition de bon sens qui, à mes yeux, devrait recueillir, sinon l'unanimité, du moins une large majorité. Je demande au Gouvernement et à M. le rapporteur de reconsidérer leurs arguments. Profitons de l'occasion qui nous est offerte ici pour faire preuve d'efficacité.
J'insisterai sur la proposition que j'ai faite précédemment. Ce débat porte sur un sujet extrêmement important et grave et doit se dérouler dans le cadre de l'examen de la LOPSI. Cela nous permettra – et j'en avais évoqué le principe avec M. Lagarde – de réfléchir ensemble à une mesure plus protectrice qui intègre les discussions que nous avons eues avec le Sénat.
De plus, le dispositif de transmission des données vidéos que nous avons mis en place – et dont on vient de débattre – constituera un élément matériel de preuve qui pourra être versé à la procédure en cas de plainte. Nous n'en disposions pas jusqu'à aujourd'hui. Ainsi le système d'enregistrement vidéo et de sa transmission renforcera-t-il le dispositif en place aujourd'hui et souhaité par le Président de la République. Même si son application s'avère difficile – nous partageons tous ce point de vue – il est appliqué ; Philippe Goujon a rappelé les chiffres.
Je vous demande donc très solennellement de reporter ce débat lors de l'examen de la LOPSI afin de nous donner le temps d'y retravailler ensemble et, si possible, de façon consensuelle. Nous n'avons pas évoqué, en outre, cette question avec nos collègues sénateurs.
Voter ce soir une telle disposition serait de nature à remettre en cause certains équilibres, ce qui irait à l'encontre de la rapidité avec laquelle nous souhaitons voir voté ce texte.
Vous êtes nombreux à vouloir vous exprimer. Le sujet me semble suffisamment important pour que je vous donne la parole. Je souhaiterais toutefois que vous puissiez intervenir de façon plus synthétique.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
Je vais tenter de donner l'exemple, madame la présidente.
Je m'associe naturellement aux propos du rapporteur. J'ajouterai, pour ma part, que, si cet amendement était adopté, ce dispositif, de par son caractère contraventionnel, présenterait deux inconvénients majeurs. Ainsi, par rapport au texte d'origine, son imprécision le rendrait très difficilement applicable. De plus, punir d'une contravention l'occupation abusive freinerait tous les moyens coercitifs dont on peut disposer face à de telles situations souvent assez graves.
Si je puis m'exprimer ainsi – et ne prenez pas mal mes propos –, alors que tout un travail a été accompli dans la recherche notamment d'un équilibre, comme l'a rappelé le rapporteur, nous ne devons pas improviser. Cela ne préjudicie pas aux réflexions à venir, notamment lors de l'examen de la LOPSI, qui permettront peut-être de compléter le dispositif.
Pour l'heure, tenons-nous en à la logique actuelle, sauf à se trouver entre deux chaises et à tout perdre par rapport à l'objectif d'efficacité que nous nous sommes fixé, comme vous l'avez rappelé, monsieur le député.
Je comprends parfaitement l'esprit de cet amendement. Néanmoins, je lui trouve de nombreux défauts. Il repose, tout d'abord, sur le terme d'abusif, ce qui me paraît insuffisamment précis. De plus, on se focalise sur les halls d'immeubles, comme si le problème se posait toujours à l'intérieur.
Non, il peut parfaitement se poser dans un square ou un parking. Il ne tient pas à l'existence de l'immeuble, il tient au fait que des habitants du quartier ou du bloc d'immeubles sont harcelés par la présence d'un groupe vindicatif. Que veut d'ailleurs dire le fait d'occuper des espaces communs de façon abusive ? Le problème, c'est qu'entre ce groupe et les habitants, se crée un rapport de force qui se traduit par un harcèlement.
J'avais proposé lors de la première lecture un amendement dans le même sens qui n'a pas été adopté. Il reprenait un dispositif mis en oeuvre à New York par M. Giuliani, qui incriminait la notion de harcèlement social, c'est-à-dire le fait qu'un groupe s'en prenne systématiquement aux habitants d'un immeuble, leur rendant la vie impossible à l'entrée et à la sortie.
En revanche, si un groupe de jeunes se réunit souvent dans un hall d'immeuble il va toujours se trouver un mauvais coucheur pour trouver ça insupportable, mais ce sera peut-être le seul dans la mesure où il se peut aussi que ces jeunes ne se livrent à aucune espèce de menace ou d'intimidation envers les habitants de l'immeuble.
Ce texte est donc insuffisamment précis et, en même temps, il est trop étroit. Moi, je souhaiterais un texte plus précis et plus large dans son application. C'est la raison pour laquelle je soutiens la proposition du rapporteur de travailler à nouveau cette idée, dont, encore une fois, l'intention est bonne, lorsque nous examinerons la LOPSI.
Je vais essayer de remettre de la clarté là où M. Vanneste met de la confusion.
Il y a l'occupation des halls d'immeuble et la façon dont elle est ressentie par de nombreux habitants, et il y a les dispositions de l'article L.126-3 du code de la construction, un dispositif flou, selon tous mes collègues, difficilement applicable, qui, contrairement à ce qu'on nous avait annoncé, ne permet pas de régler le problème de l'occupation des halls d'immeuble.
Avec cet amendement, comme l'avait fait M. Goujon en première lecture, comme a essayé de le faire le Sénat, nous cherchons une solution. Il y en a une qui a émergé la semaine dernière en commission des lois. Entre la réunion de la commission, qui y était, je crois, plutôt favorable, et la séance de ce soir, cette idée a eu tout le loisir de faire son chemin. C'est la raison pour laquelle on la retrouve dans plusieurs amendements.
Deux éléments ne me paraissent pas recevables dans la réponse que nous fait le Gouvernement.
Le premier, c'est le fait qu'il renvoie la question au débat sur la LOPSI. Très sincèrement, c'est une plaisanterie. Nous venons de demander que le débat sur le grand Paris ait lieu lors de l'examen de la LOPSI, cela a été refusé, et vous voulez à cette occasion parler des halls d'immeuble. Dans ce cas-là, supprimons ce soir l'article 4 ter et nous en rediscuterons dans la LOPSI. Comme il ne sera pas supprimé, il doit bien être question de son contenu.
Le second, c'est l'argument de la constitutionnalité. Si le Gouvernement est de bonne foi et sincère, il doit retirer les dispositions de l'article 4 ter et prendre un décret s'il considère que la contravention souhaitée par les parlementaires est du domaine réglementaire. Ce n'est pas ce qu'il a dit.
Un grand nombre de mes collègues, sur tous les bancs, partageant nos sentiments sur cette question de la contravention, le mieux pour faire avancer le sujet est donc de voter cet amendement.
Ce qui est déjà important dans ce débat, c'est que nous ne sommes pas dans l'affrontement idéologique mais que nous cherchons tous, sur tous les bancs, la solution optimale pour lutter contre un fléau qui concerne toutes nos circonscriptions et toutes nos villes.
L'article L.126-3 a tout de même eu des résultats, pas seulement par le faible nombre de condamnations prononcées, mais aussi grâce aux moyens de coercition et d'intervention policière fondés sur cette base juridique, qui a permis, dans plusieurs centaines de cas, d'intervenir dans les espaces communs.
C'est une matière juridique extrêmement difficile, on en a d'ailleurs la preuve au cours de ce débat, et il me paraît très délicat de modifier d'un trait de plume, en quelques instants, un dispositif qui, certes, ne donne pas toute satisfaction, c'est le moins que l'on puisse dire, mais qui, pour être efficace, mérite certainement des études plus approfondies. Ayant été l'auteur de l'amendement, je peux vous dire que c'est extrêmement compliqué et qu'il faut caractériser cette occupation de façon plus précise.
Après avoir beaucoup consulté, il me semblait que le terme « empêcher » permettait d'aller plus loin que le terme « entraver », mais il peut y avoir encore des améliorations. Pourquoi ne pas prévoir également une contraventionnalisation ? Il est très opportun en tout cas de ne pas se précipiter et de réfléchir de façon extrêmement approfondie avant de modifier un dispositif car, si le résultat n'est pas optimal, nous ne pourrons pas plus qu'aujourd'hui répondre aux préoccupations des habitants de ces immeubles collectifs.
Je soutiens donc le Gouvernement et le rapporteur pour reporter ce débat à la LOPSI, c'est une question de quelques jours.
Une fois n'est pas coutume, je suis en accord total avec ce qu'ont dit M. Pupponi ou Mme Batho.
Ceux qui, nombreux, suivent les problèmes de sécurité se souviennent par exemple des débats sur la LOPSI présentée par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, et des discussions que nous avons eues à l'époque sur les halls d'immeuble. Il m'avait semblé que nous devions trouver une solution peut-être un peu plus radicale que celle qui est proposée ce soir. J'avais en tout cas le sentiment qu'il y avait une vraie volonté politique de régler ce problème.
Nous avons eu des débats complexes, et il y a eu des avancées qui, on en fait tous le constat dans nos ZUP, dans nos cités ou ailleurs, ne permettent pas de trouver des solutions pratiques et pragmatiques. Quatre-vingt-sept cas, a dit M. Goujon, c'est tout de même assez peu par rapport aux milliers de personnes qui sont enquiquinées au quotidien dans toutes les cités françaises. Il faut évidemment trouver d'autres solutions.
Je m'étonne donc du premier argument du Gouvernement : wait and see, attendons la LOPSI. Je suis élu depuis huit ans, cela fait huit ans que l'on parle de ce problème quasiment chaque année et je ne vois pourquoi le fait d'attendre quinze jours, trois semaines ou un mois de plus peut nous permettre de trouver la lumière. C'est un premier argument que moi, en tout cas, je réfute.
Second argument, il faut prendre son temps, l'amendement n'est pas très bien rédigé. Au sein de la commission des lois, Jean-Christophe Lagarde et d'autres ont depuis longtemps réfléchi à ces difficultés. Des missions, des groupes de travail ont été mis en place, des discussions ont eu lieu au ministère de l'intérieur avec les différents ministres concernés. Aujourd'hui, nous pourrions arriver à une synthèse permettant de venir en aide à tous ces habitants dont certains sont rackettés tous les jours.
Je peux vous emmener dans une barre que je connais bien, à Blois, dans le Loir-et-Cher, qui n'est pas vraiment une zone de non droit. Il y a un beau château mais il y a aussi une ZUP importante. Le quotidien pour certains habitants de la place Coty, c'est cinq euros par jour à payer pour sortir de chez eux, tous les jours, et cela fait des années que cela dure.
La responsabilité qu'a cette majorité, parce que le Président de la République, je vous le rappelle, s'est engagé pendant la campagne électorale sur ce problème, c'est évidemment de permettre des avancées. Peut-être qu'il y a des améliorations à trouver – le Parlement sert à ça –, peut-être que nous devons arriver à une rédaction encore plus fine, quoique je ne trouve pas grand-chose à redire aux arguments avancés dans les amendements de l'opposition socialiste et dans ceux que nous allons présenter dans quelques instants, mais il faut au moins tester ce dispositif.
On nous opposera toujours le risque d'inconstitutionnalité. On le sait quand on est membre du Gouvernement, rapporteur, ou simple parlementaire. À chaque fois, il y a des motifs d'inconstitutionnalité. La période récente nous démontre que nous avons parfois été amenés à voter des dispositions dont on savait peut-être à l'avance qu'elles seraient inconstitutionnelles. Rappelez-vous les débats sur la taxe carbone que nous avons eus à la commission des finances. À l'époque, nous avions alerté tout le monde et, pourtant, il a fallu voter.
Pourquoi s'arrêter là aujourd'hui alors que des milliers de personnes, qui vivent derrière leurs judas dans leurs appartements, attendent des dispositifs leur permettant de vivre un peu mieux et donnant des moyens effectifs aux forces de sécurité qui sont au quotidien en contact avec les bandes et qui, malheureusement, sont totalement démunies ?
La solution consiste donc à voter les amendements qui sont proposés et à en voir l'application.
Monsieur Ciotti, vous suivez ces questions. Je suis sûr qu'à Nice, il y a les mêmes difficultés, comme à Mulhouse d'ailleurs, Jean-Marie Bockel le sait bien, ou ailleurs. Nous en avons beaucoup discuté lors des débats sur la précédente LOPSI avec Nicolas Sarkozy qui s'est engagé sur ce thème, et avec Christian Estrosi, qui était le rapporteur et qui en a rêvé. Ce serait bien que vous puissiez le faire.
Je vais aller dans le même sens que Nicolas Perruchot.
Parlementaire depuis huit ans, j'attends ce dispositif depuis 2002. Nicolas Sarkozy avait porté une grande attention à cette question qui a été au coeur de la campagne présidentielle de 2007. Or les mesures n'arrivent jamais. À chaque fois, on nous renvoie à la LOPSI suivante, ce qui a un côté assez désagréable.
Le problème de l'inconstitutionnalité, on le vit tous les jours, et des lois ont d'ailleurs été retoquées il y a quelque temps.
En tout cas, au quotidien, les gens vivent mal. Je suis bailleur social, avec 6 000 logements. Franchement, c'est le seul outil qu'il me manque. Aujourd'hui, on fait de la résidentialisation, on construit des clôtures pour protéger les immeubles, on installe des gardiens, mais il y a toujours des regroupements dans des entrées d'immeuble et nous n'avons pas d'outil pour les empêcher. Il y a donc un transfert de responsabilité sur le bailleur social, ce qui est très difficile à gérer, et c'est la raison pour laquelle on considère le logement social de façon péjorative. Là, nous avions un engagement précis. Je ne vois pas pourquoi on ne le tient pas plus que ce qui a été proposé aujourd'hui.
On nous explique que, demain, on utilisera la vidéosurveillance. J'utilise beaucoup un tel système sur le domaine public. Dans ma ville, de 40 000 habitants, il y a 100 caméras. À Nice, il doit y en avoir 270, soit un peu moins proportionnellement. Or c'est très difficile dans le domaine public et je pense que ce sera beaucoup plus compliqué constitutionnellement de faire quoi que ce soit avec un système de vidéoprotection ou de vidéosurveillance dans le domaine privé. En réalité, vous voulez repousser le problème en passant d'une phrase très simple et applicable à un dispositif qui sera très difficile à mettre en oeuvre.
Prenons donc des mesures simples. Le Président de la République précédent parlait d'un droit à l'expérimentation. S'il y a des problèmes, nous saurons revenir en arrière mais, de grâce, permettez-nous au moins d'essayer cette solution, comme le propose M. Perruchot. Les habitants de ces logements attendent quelque chose du Gouvernement.
(L'amendement n° 43 est adopté.)
En conséquence, l'article 4 ter est ainsi rédigé et les amendements n°s 42 , 11 rectifié , 1 et 2 tombent.
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l'amendement n° 48 .
Nous abordons le domaine de la coproduction de la sécurité et de la prévention des comportements violents de la part des jeunes, coproduction qui associe ceux qui sont dits par le Gouvernement être au coeur du dispositif de la future LOPSI 2 : les maires et les communes.
Cet amendement vise à corriger une anomalie qui empêche les établissements scolaires et les communes de collaborer pour prendre en charge les jeunes en rupture scolaire. En effet, un établissement scolaire n'ayant pas la personnalité morale, il ne peut aujourd'hui signer une convention de stage permettant à un jeune déscolarisé d'être pris en charge par la commune.
Il suffirait d'ajouter au code de l'éducation un petit alinéa qui ne coûte rien et ne révolutionne rien, mais résoudrait bien des problèmes. Notre amendement vise simplement à habiliter les recteurs d'académie à conclure des conventions de stage afin de permettre aux collectivités territoriales qui le souhaitent d'accueillir en stage des élèves en rupture scolaire. C'est à la demande de maires et de personnels de direction d'établissements scolaires que cet amendement a été rédigé. Je pense que son adoption ne présente aucune difficulté.
Défavorable. Le dispositif que présente Mme Mazetier, s'il peut être, j'en conviens, opportun, ne relève pas du domaine de la loi. Cette précision est inutile dans le présent texte.
C'est exactement la réponse que vous m'aviez faite en première lecture, monsieur le rapporteur. Si une telle disposition ne relève pas de la loi, elle relève probablement de la circulaire. Or vous nous annonciez, à l'été, ainsi que le Président de la République, un grand plan de prévention pour l'automne. En fait, ce grand plan de prévention, qui tente de sanctuariser les établissements scolaires, se résume à une circulaire cosignée par les ministres de l'éducation nationale et de l'intérieur.
Cette circulaire, datée du 23 septembre 2009, parle – je la tiens à la disposition de l'ensemble de nos collègues – de la sécurisation des établissements et du suivi de la délinquance. Il n'y a rien dans ces quatre pages extrêmement précises qui réponde à la préoccupation que je soulevais : pas un mot sur les maires ou les élus locaux, alors que, sur tous les bancs de cette assemblée, on dit que ces élus sont disponibles, qu'ils sont à la recherche de solutions, qu'ils coopèrent avec les forces de police, les établissements scolaires, les familles, les bailleurs.
Il suffit que l'on adopte ce petit amendement. S'il figurait dans la circulaire, je n'aurais pas eu besoin de le présenter. L'occasion était donnée au Gouvernement de résoudre ce problème de l'impossibilité pour les établissements scolaires de signer des conventions de stage. Émettre un avis favorable sur cet amendement, monsieur Ciotti, ne serait pas un acte d'inconstitutionnalité !
(L'amendement n° 48 n'est pas adopté.)
Cet amendement propose d'inscrire dans la loi un principe très simple. Nous sommes actuellement confrontés au problème des « perdus de vue », ces élèves exclus d'un établissement scolaire par un conseil de discipline sans que personne ne veille à ce qu'ils soient systématiquement rescolarisés ou pris en charge à un titre ou à un autre. Avec le drame du Kremlin-Bicêtre, on a vu à quoi pouvait conduire ce processus.
Par notre amendement, nous proposons donc d'inscrire dans le code de l'éducation le principe selon lequel aucun élève soumis à l'obligation scolaire ne peut être exclu « sans qu'une institution, structure ou personne ne soit désignée afin d'assurer son suivi ».
Il existe des dispositifs qui permettent, dans de tels cas, de rescolariser les jeunes, dans des conditions spéciales : ce sont les classes relais. J'ai porté sur le département du Jura deux structures de ce type, pour éviter justement que des élèves, le plus souvent du second degré, soient exclus définitivement du système scolaire. Encore faut-il que les collectivités locales veuillent bien engager un partenariat avec des instances comme la justice et travailler à un suivi régulier de ces jeunes.
(M. Marc Laffineur remplace Mme Danielle Bousquet au fauteuil de la présidence.)
Défavorable. Les arguments qui viennent d'être développés par Mme Dalloz sont tout à fait pertinents. Il existe des dispositifs pour répondre à ce type de situations. L'amendement est donc inutile.
Même avis. Vous faisiez allusion, madame Batho, à l'article D. 511 du code de l'éducation. Cet article, extrêmement précis, est appliqué, et l'amendement serait à la fois inutile et, par son imprécision – quelles institutions, quelles personnes ? –, contre-productif.
Il y a un décalage entre ce que j'entends ici et la situation vécue. Certes, les classes relais existent ; c'est d'autant mieux de le rappeler que c'est un gouvernement de gauche qui les a créées. Mais certains jeunes passent entre les mailles du filet parce que, dans le principe de l'obligation scolaire, il manque une obligation de résultat vis-à-vis de ces jeunes de moins de seize ans exclus de leur établissement et que l'on retrouve dans la délinquance.
Plutôt que de voter des couvre-feux et autres, je préférerais que l'on adopte un amendement qui prévoit une obligation de prise en charge pour de tels jeunes, cette prise en charge pouvant se faire dans des classes relais, des internats, des centres éducatifs, ou toute autre structure.
(L'amendement n° 13 n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l'amendement n° 46 .
Il s'agit, formulé autrement, de l'impératif de répondre au réel.
Aujourd'hui, des enfants, bien que soumis à l'obligation scolaire, sont exclus de manière définitive d'un établissement et « zonent » pendant des mois dans les quartiers. L'école est un lieu de socialisation ; si elle fait défaut, une socialisation de substitution a lieu, sur laquelle les bandes prospèrent. Les bandes, qui sont l'objet de ce texte et dont nos concitoyens, notamment les plus jeunes, subissent les méfaits, prospèrent sur les béances des dispositifs que nous avons adoptés par le passé.
En ce moment même, à quelques semaines du brevet des collèges, des conseils de discipline prononcent régulièrement l'exclusion définitive d'élèves. Comme nous sommes au dernier trimestre, ces jeunes sont exclus définitivement de toute vie scolaire avant la rentrée suivante dans le meilleur des cas.
Ce que nous vous proposons, c'est de mettre fin à cette situation insupportable, absurde et nuisible pour la société, en assurant la prise en charge effective des élèves exclus définitivement de l'institution scolaire alors qu'ils sont encore, du fait de leur âge, soumis à l'obligation scolaire. Ce sera bien plus efficace que les couvre-feux ou l'aggravation des peines que vous proposez et qui ne résolvent rien.
Même avis. Je rappelle la création de 5 000 médiateurs de la réussite, dont 4 000 ont déjà été recrutés, pour intervenir auprès de ces élèves en difficulté et de leurs familles, et prévenir ainsi l'absentéisme.
Je suis très surpris de ces réponses. Mes collègues décrivent une situation que tous les élus locaux, et même tous les citoyens un peu informés de la vie de leur commune, connaissent, à savoir que des élèves sont régulièrement exclus de leur établissement et ne se retrouvent dans aucune autre structure.
Notre collègue de la majorité a parlé des classes relais, qui fonctionnent d'ailleurs plutôt bien. Je ne polémiquerai pas sur le fait que c'est la gauche qui les a mises en place ; le principal, c'est qu'elle fonctionne.
Ce que Mme Batho et Mme Mazetier ont voulu souligner, c'est que, malgré tout, on laisse des jeunes errer et que, quand un jeune n'est pas à l'école, il est un danger pour lui-même et devient un danger pour la société. Je ne comprends donc pas l'obstination du rapporteur et du secrétaire d'État. Est-ce parce qu'ils ne connaissent pas la vie de ces quartiers en difficulté ? Je connais des jeunes qui se retrouvent en dehors de l'école…
J'en connais autant que vous !
…et pour lesquels aucune solution n'a été trouvée. Je pense que le rapporteur et le secrétaire d'État devraient reconsidérer cet amendement.
(L'amendement n° 46 n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, pour soutenir l'amendement n° 21 .
Nous continuons à chercher des solutions pour répondre à ce que nous avons diagnostiqué et que la quarantaine d'auditions auxquelles nous avons participé aux côtés du rapporteur, qui était à l'époque Christian Estrosi, a mis en évidence.
En l'occurrence, il s'agit ici de l'article 707 du code de procédure pénale qui pose des dispositions générales pour les modalités d'exécution de la sentence.
Quand un mineur ou un jeune majeur est concerné par une telle décision, il peut – c'est ce que nous ont dit les éducateurs que nous avons rencontrés – passer d'un éducateur à un autre, ce qui entraîne une perte de repères, alors même que le but de la sentence est de lui faire réapprendre un système de repères et de valeurs.
Nous proposons précisément de créer un tuteur référent, chargé de suivre l'exécution de la mesure éducative de bout en bout, depuis le moment du prononcé jusqu'à la fin de l'exécution de la sanction. Nous contribuerions ainsi à remettre le mineur dans un système conforme à celui de la société et où il pourrait s'épanouir.
Défavorable sur la forme. Ce type de dispositif, aussi intéressant puisse-t-il être, ne relève pas du domaine législatif. Il n'a pas sa place dans ce texte.
En plus, je souligne que de tels dispositifs existent déjà : je pense en particulier au contrat de responsabilité parentale.
Si, madame Batho. Je préside un conseil général qui a été le premier à mettre en place ces contrats. Dans le cadre du plan d'aide aux familles, qui concerne notamment des mineurs en situation d'absentéisme ou des mineurs « décrocheurs », nous avons mis en place des tuteurs référents et une sorte d'école des parents. Il y a un panel de dispositions. La loi les autorise déjà. Martin Hirsch a pris des mesures très précises en la matière, et qui fonctionnent. Je le répète : sur le fond, ce que vous proposez est intéressant, on peut en débattre, mais sur la forme, cela n'a rien à faire dans ce texte.
Outre ce que vient de dire fort bien le rapporteur, il y a déjà ce qui existe sur le terrain et que nous connaissons tous. Certes, l'existant est toujours perfectible, mais sans forcément passer par la loi.
Il y a déjà les services de milieu ouvert de la direction de la PJJ. Nous sommes en dialogue avec eux au niveau des villes, et je constate sur le terrain que ces services accomplissent un vrai travail de suivi éducatif au fil des changements de situation de ces mineurs – placement en foyer, en détention, en famille d'accueil, retour au foyer. L'esprit de ce suivi, synthétisé dans l'expression « fil rouge », ne se traduit pas nécessairement par un référent tel que vous le proposez, mais c'est un dispositif professionnel avec, à chaque étape, à chaque moment et pour chaque mineur, un référent tout à fait compétent et à même de répondre à vos préoccupations.
Nous n'avons toujours pas la même vision de la réalité ! Notre amendement portant sur l'exécution des sanctions éducatives, nous débattons donc d'un public de mineurs primo-délinquants. Or ce qui fait cruellement défaut aujourd'hui dans l'exécution des sanctions éducatives, c'est la continuité de la prise en charge, la présence d'un tuteur référent qui soit toujours le même, chargé du suivi au long cours de la sanction. On se retrouve avec des mineurs balancés d'un éducateur à un autre, d'un service à un autre, sans un continuum de prise en charge. Cela aboutit à la récidive et à des situations de délinquance qui perdurent.
Cet amendement s'inscrit dans une logique que nous défendons : celle de la sanction précoce. Mieux vaut avoir sur ce public des sanctions réellement appliquées dans de brefs délais, avec de vraies prises en charge pour éviter les récidives, plutôt que de laisser un certain nombre de mineurs s'installer dans la délinquance, puis aller rejoindre des bandes qui commettent les agissements les plus violents que nous connaissons.
(L'amendement n° 21 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 36 .
La parole est à Mme Delphine Batho.
L'amendement vise à créer, dans chaque lycée et collège, un contrat local de sécurité scolaire.
Épisodiquement, après une violence scolaire particulièrement marquante qui fait la une de l'actualité, nous voyons les différents ministres de l'éducation ou de l'intérieur promouvoir comme une recette miracle telle ou telle mesure nouvelle : l'installation de portiques un jour, la fouille des cartables un autre jour ; ensuite, nous entendons un langage différent, comme dernièrement le ministre de l'intérieur au Kremlin-Bicêtre, qui a reconnu que la fouille des cartables était une très mauvaise idée. Ma collègue Sandrine Mazetier et moi-même avons auditionné un certain nombre d'acteurs de la vie scolaire, et examiner les travaux d'un chercheur remarquable, Éric Debarbieux. Il apparaît que la source de la plus grande efficacité pour lutter contre les violences scolaires, c'est une communauté éducative unie au sein de l'établissement, à qui on confie la responsabilité de conduire une politique de lutte contre ce type de violences. Il faut, à l'échelle de l'établissement, un vrai dialogue entre les élèves, les enseignants, le chef d'établissement et les surveillants.
Avec les parents d'élèves aussi bien sûr, mon cher collègue. Tous ces acteurs doivent s'emparer de ce problème et décider collectivement. S'ils décident dans ces conditions qu'il faut installer la vidéosurveillance, réorganiser le travail des surveillants ou prendre une autre mesure, cela fonctionne beaucoup mieux et donne des résultats.
Notre amendement vise donc à inscrire dans la loi l'obligation de fonctionnement partenarial à l'échelle d'un établissement scolaire en proposant qu'un contrat local de sécurité scolaire soit prévu dans le projet d'établissement. Les diagnostics actuellement relancés dans le cadre de la circulaire évoquée par ma collègue Sandrine Mazetier seraient intégrés dans ce volet du projet d'établissement.
Avis défavorable. Je n'ai pas de désaccord philosophique avec vous sur les questions que vous avez évoquées, madame Batho, mais un très grand désaccord sur le plan pratique. Nombre de maires le savent : les contrats locaux de sécurité incluent déjà, si c'est jugé utile, un partenariat avec l'éducation nationale. Vous dites qu'il faut intervenir le plus vite possible, avant que le mineur ne s'installe dans une réitération d'actes délinquants. Mais je sais d'expérience qu'il faut parfois convaincre les partenaires de l'éducation nationale d'établir un partenariat, car ce n'est pas toujours évident au départ. Une fois que c'est fait, cela se passe très bien. Mais si vous enfermez l'établissement dans ce type de contrat, vous rendrez le partenariat, que je souhaite comme vous et que j'ai mis en oeuvre dans ma ville, beaucoup plus difficile encore. Si on veut être efficace et ne pas multiplier les dispositifs, restons dans le cadre des contrats existants. Ceux-ci ont déjà un volet « transport », un volet « logement » et un volet éducatif. Ils fonctionnent bien. D'un point de vue pratique, je suis totalement hostile à votre proposition. Je la considère comme totalement contre-productive.
J'avais entendu un président de la République parler de « sanctuarisation des établissements scolaires ».
Ce n'est pas le sujet !
Mais lorsque nous proposons un contrat de sécurité scolaire, on nous répond qu'il ne faut pas qu'il y ait, au sein de l'établissement, un travail entre les enseignants, le personnel administratif, les élèves et les parents d'élèves pour définir les mesures de prévention et de lutte contre la violence à mettre en oeuvre sur place,…
Ce n'est pas ce que j'ai dit !
…au motif qu'elles devraient l'être dans le cadre du contrat local de sécurité. Or notre amendement ne propose pas de le supprimer. Il n'oppose pas la démarche propre à la vie scolaire d'un établissement et le travail partenarial en lien avec une cité, une commune ou une agglomération. Ce n'est absolument pas antinomique ni contradictoire.
En outre, je ne vois pas en quoi cet amendement n'est pas du domaine de la loi. Le projet d'établissement et le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance – le CLSPD – ressortissant au domaine de la loi, il en est de même du contrat local de sécurité scolaire.
(L'amendement n° 36 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 45 .
La parole est à Mme Delphine Batho.
Au mois d'octobre, nous avons eu la présentation par François Fillon du prétendu nouveau plan de prévention de la délinquance, qui avait été demandé sans délai par le Président de la République au mois de mai. Il est malheureusement d'une indigence totale : ce n'est que la compilation de mesures qui existent depuis une vingtaine d'années, avec la promesse qu'elles seront mieux appliquées. Il n'y a pas du tout de démarche stratégique nouvelle par rapport à toute la problématique que nous avons abordée dans les débats sur les phénomènes de bandes – les processus de désocialisation, de déscolarisation, de perte de repères, etc.
Nous, nous proposons la création d'une agence nationale de la prévention précoce des violences juvéniles. L'amendement vise donc à modifier la loi du 5 mars 2007 en s'inspirant de l'expérience du Québec dans ce domaine – on pourrait l'appeler « l'amendement Canada ».
Défavorable. Nous avions en première lecture rejeté un amendement strictement identique. Madame Batho, il n'est pas possible d'instaurer une hiérarchisation dans la prévention de la délinquance car la politique en la matière est globale. Contrairement à ce que vous dites, la prévention de la délinquance est une préoccupation majeure du Gouvernement. Le plan annoncé par le Premier ministre est complet et exhaustif. Nous avons voté cet après-midi encore en commission des lois des dispositions en matière de prévention de la délinquance, notamment autour du contrat de responsabilité parentale, dispositions qui seront extrêmement efficaces.
Je suis saisi d'un amendement n° 22 .
La parole est à Mme Delphine Batho.
L'article 4 octies, introduit par le Sénat, reprend des dispositions de la LOPSI. Notre amendement vise tout d'abord à interroger le rapporteur car il nous semble qu'il y a un problème à l'alinéa 5. En effet, la logique de l'article, c'est de prolonger les interdictions administratives de stade en raison du phénomène des hooligans – nous partageons pleinement cet objectif–, l'interdiction passant de trois mois à six mois. « Toutefois, cette durée peut être portée à douze mois si, dans les trois années précédentes, cette personne a fait l'objet d'une mesure d'interdiction ». Je ne sais pas si le Conseil d'État a été consulté sur cette dernière disposition, mais nous redoutons qu'elle pose un problème juridique car il s'agit d'une décision strictement administrative. J'aimerais avoir des précisions de la part du rapporteur à ce sujet.
L'amendement vise, en outre, à compléter l'alinéa 5 par les mots : « qu'elle n'a pas respectée ». Cela peut sembler tomber sous le sens, mais il est préférable de le préciser dans le texte.
Défavorable. Dès lorsqu'il y a interdiction de stade, qu'elle ait été respectée ou non, une nouvelle interdiction place la personne en situation de récidive. La position de la commission est très claire sur ce point.
J'ai peut-être loupé une partie du raisonnement, mais je ne comprends pas votre réponse, monsieur le rapporteur. L'article prévoit, je le répète, que la durée de l'interdiction peut être portée à douze mois si, dans les trois années précédentes, cette personne a fait l'objet d'une mesure d'interdiction. Vous ne m'avez pas répondu sur l'avis du Conseil d'État. Je pose cette question par volonté d'assurer la sécurité juridique du texte.
Je n'ai pas d'arrière-pensées. Très honnêtement, je redoute le caractère juridiquement discutable de cette disposition qui prévoit une interdiction de stade de douze mois par simple mesure administrative, sans intervention d'un juge.
(L'amendement n° 22 n'est pas adopté.)
(L'article 4 octies est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 23 .
La parole est à Mme Delphine Batho.
Alors que les intrusions sont actuellement passibles d'une contravention, l'article 7 créé le délit d'intrusion dans un établissement scolaire. C'est un peu le processus inverse de ce que nous avons essayé de mettre au point ce soir pour l'occupation des halls d'immeubles… Cette rédaction pose un énorme problème en ce qu'elle crée une confusion ou un amalgame entre des intrusions violentes visant à commettre des infractions à l'intérieur d'un établissement scolaire et des mobilisations sociales de lycéens ou de parents d'élèves : ainsi rédigées, les dispositions de l'article 7 pourraient s'appliquer aussi bien à des phénomènes d'intrusion tels que ceux qu'a pu connaître le lycée Jean-Baptiste-Clément de Gagny qu'à des événements comme la nuit des écoles ou des occupations d'établissements scolaires dans le cadre de mobilisations lycéennes.
C'est le premier motif grave qui nous conduit à demander la suppression de cet article.
Le Sénat, je l'ai rappelé hier soir lors de la discussion générale, avait supprimé certaines dispositions de cet article 7 : c'était la sagesse. Le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée a souhaité les rétablir. Nous continuons à penser que les alinéas 7 et 17 de cet article ne sont pas constitutionnels, sans compter le problème soulevé par l'alinéa 1.
Défavorable. La correctionnalisation de l'intrusion dans un établissement scolaire est une disposition essentielle, majeure de ce texte. Je m'étonne que vous souhaitiez la remettre en cause alors que vous avez fait état de récents événements tragiques, dramatiques survenus dans des établissements scolaires.
Je précise notre position : la correctionnalisation de l'intrusion dans les établissements scolaires permettra le placement en garde à vue des auteurs ; des peines lourdes pourront s'appliquer à l'égard d'auteurs d'expéditions punitives. Par ailleurs, nous avons souhaité réintroduire l'interdiction d'introduction d'armes à l'école qui doit demeurer un sanctuaire protégé de la violence.
Effectivement, on ne peut pas vouloir sanctuariser les établissements et ne pas s'en donner les moyens juridiques. Avis défavorable.
(L'amendement n° 23 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 26 rectifié .
La parole est à Mme Sandrine Mazetier.
L'amendement n° 26 nous a été inspiré par la loi sur le dialogue social et la continuité du service public du 21 août 2007 – la loi prescrit parfois d'associer certains partenaires à l'élaboration de mesures. Il vise à inscrire, comme principe obligatoire dans le code de l'éducation la consultation des organismes collégiaux nationaux ainsi que celle des organisations représentatives avant l'adoption de toute mesure relative à la vie scolaire ou aux violences.
La « sanctuarisation », comme vous dites, des établissements scolaires ne relève pas uniquement de leur environnement immédiat ou de simples dispositifs techniques. C'est l'affaire de tous.
D'une certaine manière, c'est user d'un biais que de déresponsabiliser la communauté scolaire et éducative en lui promettant l'installation de caméras, de portiques et de je ne sais quels mécanismes de vérification de sécurité, en lui annonçant qu'elle n'aura rien à dire ou à faire et que tout se passera très bien. Ça ne marche pas comme ça…
J'en reviens au contenu de l'article 7 et aux précédentes explications de M. Ciotti. Je partage la surprise, la stupéfaction, l'effarement de bon nombre mes collègues, et pas seulement de gauche, face à vos contradictions, monsieur le secrétaire d'État et monsieur le rapporteur, lorsque vous affichez votre détermination à lutter contre les phénomènes violents et à les sanctionner.
Nous avons eu un long échange…
…sur l'occupation des halls ou des entrées d'immeubles. Vous avez expliqué qu'il ne fallait pas correctionnaliser ces actes, qu'une contravention suffisait. Et là, vous êtes en train de créer un délit d'occupation d'un établissement scolaire !
Dans les jours qui viennent, les conseils d'administration de tous les collèges de France vont examiner les dotations horaires globales. Dans tous ces établissements, on va découvrir que des postes, des heures d'enseignement sont supprimés.
Ces grands délinquants que sont les enseignants et les parents d'élèves, désireux de garantir le droit à l'éducation de nos enfants, vont peut-être être tentés de se maintenir dans les lieux…
Ce n'est pas le sujet. Les fuites logorrhéiques de Mme Mazetier sont inquiétantes, pathologiques !
Je partage d'autant plus l'avis du rapporteur que l'amendement n° 26 propose de consulter des organismes dont ce n'est pas la mission, alors que le Conseil national de l'éducation est déjà systématiquement consulté sur toutes ces questions. Quant aux organisations représentatives, elles se retrouvent dans les instances des établissements.
(L'amendement n° 26 rectifié n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 17 rectifié .
La parole est à M. François Pupponi.
Monsieur le président, je me propose de défendre l'amendement n° 16 par la même occasion.
L'alinéa 4 de l'article 7 suscite notre inquiétude sur un sujet important.
Nous sommes d'accord sur le fait que des individus qui pénètrent sans y être autorisés dans un établissement scolaire pour y commettre un acte délictueux soient lourdement sanctionnés. Il n'y a pas de débat sur ce point. Mais ce n'est pas tout à fait ce que dit l'alinéa 4 : il vise des personnes qui entrent dans un établissement et qui y restent, non pour commettre un acte délictueux, mais dans le but d'y « troubler la tranquillité ou le bon ordre ». Autrement dit, des lycéens en grève qui décident d'occuper un lycée sont passibles d'un an de prison. Ce n'est pas le but, tout de même ! On ne peut pas pénaliser des lycéens qui décident, lors d'un mouvement social ou de revendications, de se maintenir dans un établissement. C'est pourquoi nous proposons de supprimer la notion de « se maintenir » dans un établissement sans y être autorisé.
Reconnaissons, en toute sincérité, que le fait d'être sanctionné d'un an de prison pour avoir perturbé la tranquillité d'une école pose aussi problème. Que l'on soit sanctionné d'un an de prison pour y avoir commis un acte délictueux, oui. Que l'on se voit infliger une peine aussi lourde au seul motif qu'on en a troublé la tranquillité me paraît quand même un peu exagéré !
Défavorable. Le fait de « se maintenir », que vous voudriez supprimer, est d'un élément important pour caractériser le délit d'intrusion. Celui-ci est constitué dès lors qu'une personne non habilitée – il ne peut donc pas s'agir d'un élève – pénètre dans une école, mais aussi lorsqu'une personne qui peut être autorisée à y entrer refuse d'en sortir.
Même avis pour les mêmes motifs.
Ces motifs, vous me pardonnerez de les récuser ! Le texte sanctionne le fait pénétrer ou de se maintenir dans l'établissement et non, comme vous venez de l'expliquer monsieur Ciotti, le fait de pénétrer et de se maintenir. Autrement dit, le seul fait de se maintenir dans les lieux, indépendamment du fait d'y pénétrer, caractérise le délit que vous voulez créer dans cet alinéa. C'est la première difficulté.
Ne seront visées que les personnes « non habilitées », avez-vous précisé. Mon collègue François Pupponi a cité l'exemple d'un mouvement social de lycéens, mais on peut imaginer un mouvement d'enseignants ou de parents d'élèves, comme les nuits d'occupation des écoles. Or les parents ne sont pas des personnes habilitées. Ce dispositif manifeste une volonté de sanction, de répression, de dissuasion de tous ces mouvements sociaux.
Nous sommes tous d'accord, sur tous les bancs, pour sanctionner très lourdement le fait de pénétrer dans les établissements scolaires dans le but d'y commettre des dégradations, voire des agressions sur des personnels. Cela ne pose pas de problème entre nous. En revanche, nous avons besoin de clarifications, monsieur le secrétaire d'État. Je vous réitère ma demande d'hier : précisez-nous que vous n'appliquerez pas ce type de dispositif dans le cadre de mouvements sociaux. Dites-le au moins pour éclairer le débat législatif si, par malheur, vous refusiez d'entendre nos arguments.
(Les amendements nos 17 rectifié et 16 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi d'un amendement n° 18 .
La parole est à Mme Delphine Batho.
Je reviens la discussion qui vient d'avoir lieu. Nous avons déjà eu le même débat lors de l'examen du texte en première lecture et, très honnêtement, je ne comprends pas l'absence de réponse du rapporteur et du Gouvernement au problème que nous posons.
Il est avéré que, tel qu'il est rédigé, le texte peut s'appliquer à des lycéens qui veulent occuper leur lycée ou à des parents d'élèves qui organisent la nuit des écoles.
Depuis le début, vous n'avez jamais voulu lever la suspicion nourrie par cet article 7 : vous avez l'intention d'utiliser cette proposition de loi sur les bandes violentes pour, en fait, viser une autre cible, ce qui rappelle le processus de la loi anticasseurs de 1970.
Une nouvelle fois, je demande au rapporteur et au Gouvernement de s'exprimer sur ce point, afin que l'intention du législateur soit bien claire quand il s'agira d'interpréter ce texte.
Tel qu'il est rédigé, ce texte peut absolument permettre d'infliger un an de prison à des lycéens qui occupent leur établissement scolaire, pour le simple fait qu'ils s'y sont maintenus et qu'ils ont troublé la tranquillité des cours.
L'amendement n° 18 , purement rédactionnel, vise à corriger une imprécision du texte. À l'alinéa 4, il propose de remplacer « les autorités compétentes » par « les directeurs d'école ou d'établissement ».
Défavorable. Nous préférons une formulation générique et globale qui couvre les deux cas : le directeur d'établissement pendant le temps d'enseignement ; éventuellement le maire, hors période scolaire.
Non, je ne réponds pas !
Nous insistons parce que c'est important. Sincèrement, j'aimerais que le Gouvernement prenne position.
Prenons un exemple qui me concerne. Il y a environ trois mois, avec des parents d'élèves, nous avons occupé la nuit et le matin les écoles de la ville parce que nous n'obtenons plus les financements pour rénover les écoles publiques dans les quartiers. Nous avions déposé des demandes mais les financements ne sont pas arrivés : l'ANRU, qui a déjà financé un dossier, explique qu'elle ne peut pas en financer un deuxième. Nous avons donc occupé les locaux afin d'interpeller le Gouvernement, les collectivités locales, la région, le département, tout le monde sur le thème : financez nos écoles publiques, nous en avons besoin dans ces quartiers-là.
Si ce texte est voté, les parents d'élèves qui occupent pacifiquement des écoles publiques pour alerter les autorités sur le manque de moyens seront passibles d'un an de prison ; je trouve cela excessif. Il serait bon que le Gouvernement donne sa position, et qu'il soit inscrit au compte rendu que le texte s'appliquera, non à des lycéens ou à des parents d'élèves ayant de légitimes revendications, mais à des délinquants déterminés à commettre des actes délictueux dans l'établissement.
(L'amendement n° 18 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 19 .
La parole est à Mme Delphine Batho.
L'amendement n° 19 vise, comme l'a proposé le rapporteur de la commission des lois du Sénat, à supprimer l'alinéa 7 que notre rapporteur a rétabli.
Cet alinéa pose en effet deux problèmes constitutionnels. Le premier tient à la disproportion de la peine par rapport à l'infraction ; le second est l'introduction d'une sorte de responsabilité pénale collective.
Laissez-moi, pour vous en convaincre, vous lire un extrait du rapport du sénateur François Pillet : « Votre commission estime que ces dispositions, trop imprécises, sont susceptibles de soulever des difficultés. En effet, il n'est pas impossible d'envisager l'hypothèse où plusieurs personnes ne se connaissant pas ou n'entretenant aucune relation les unes avec les autres pénètrent ou se maintiennent dans un établissement scolaire sans en avoir l'autorisation. Toutes pourraient alors être condamnées à de lourdes peines, du seul fait de la présence parmi elles d'une personne armée. Une telle incrimination pourrait être regardée comme contraire au principe selon lequel nul n'est responsable que de son propre fait. Votre commission a adopté un amendement de votre rapporteur tendant à supprimer l'article 431-25 » – article qui est précisément celui introduit par l'alinéa 7.
Défavorable. Notre commission a été sensible à l'argumentation du Sénat, ce qui l'a conduit à modifier le texte initial, mais en procédant différemment. Elle a rendu cohérente l'échelle des peines, proposant de punir d'un an d'emprisonnement une intrusion simple, de trois ans une intrusion armée ou en réunion, et de cinq ans une intrusion armée et commise en réunion.
Même avis que la commission.
Je réponds à la question posée par M. Pupponi tout à l'heure : la précision relative au maintien est indispensable, pour les raisons indiquées par le rapporteur.
Pour le reste, faisons confiance à l'appréciation des établissements et, le cas échéant, des juges, quant à la nature sociale des mouvements dont vous avez parlé. Les choses se passent en général très bien, sans aucune intention violente. Il arrive aussi que des mouvements prennent une autre dimension, beaucoup moins respectueuse des lieux. Je ne veux préjuger ni de la possibilité, pour un établissement, de se prémunir contre d'éventuels débordements, ni de l'appréciation des juges.
Allons, monsieur le secrétaire d'État, vous avez dû en occuper, des établissements, dans votre jeunesse ! (Sourires.)
Exonérer par avance tout mouvement ne me semble pas être dans l'intérêt des établissements.
Monsieur le rapporteur, vous avez en effet rétabli la disposition qui ramène la peine d'emprisonnement de sept ans à cinq. Mais cela ne règle pas le problème de la responsabilité pénale collective. En l'occurrence, les dispositions de cet alinéa pourront s'appliquer à une personne située au côté d'une autre qui porte une arme. Le problème soulevé par les sénateurs reste donc posé.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'État, vous venez en quelque sorte de reconnaître votre intention de viser, non seulement les agissements de bandes délinquantes, mais aussi certains mouvements sociaux.
Cet amalgame est selon nous inacceptable ; l'expression « ou de se maintenir », je le rappelle, figurait dans l'article R. 645-12 du code pénal, et ce grâce à un décret pris par M. Darcos lors du mouvement lycéen à la fin de 2008. C'est pourquoi nous y avons vu, dès le départ, l'intention maligne d'appliquer aux lycéens manifestants les dispositions relatives à l'intrusion.
(L'amendement n° 19 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 20 .
La parole est à Mme Sandrine Mazetier.
Le délire continue – il n'y a pas d'autre mot.
Si des parents d'élèves, élus au conseil d'administration, se maintiennent dans l'établissement pour protester contre les suppressions de postes, d'heures, de matières ou d'options, ils seront non seulement passibles d'un an d'emprisonnement, mais aussi d'une interdiction de séjour ! L'alinéa suivant évoque même « l'interdiction du territoire français […], soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus ».
En quoi interdire de séjour et infliger une double peine à des parents étrangers qui se battent pour l'éducation de leurs enfants résout-il le problème des intrusions et des violences scolaires ?
Défavorable. L'interdiction de séjour est une peine complémentaire habituelle en droit pénal ; elle est naturellement laissée à l'appréciation du juge.
Je répète, pour répondre à ces procès d'intentions, que nous ne visons ni des personnes ni des catégories de personnes, mais des comportements. Avis défavorable.
(L'amendement n° 20 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 14 .
La parole est à M. Daniel Goldberg.
Laissez-moi être, pendant un court instant, adepte du sarkozysme (Exclamations sur les bancs du groupe UMP),…
…en tout cas dans les faits, et pas seulement dans les paroles. J'invite d'ailleurs mes collègues de la majorité à en faire de même, de temps en temps !
Le Président de la République, alors ministre de l'intérieur, avait clamé, à grands renforts de communication, que la double peine n'existait plus en France. Or que venons-nous d'entendre ? M. le rapporteur, M. le secrétaire et d'État et un certain nombre de collègues de la majorité ont justifié la double peine. Il est entendu que la plupart des gens dont nous parlons séjournent depuis longtemps sur notre territoire, et ont des papiers en règle. Une seule peine – en l'occurrence, celle prévue à l'article 1er – suffit-elle ou non à vos yeux ? Répondez-nous clairement. Un juge pourrait très bien estimer, en effet, que des parents d'élèves qui se sont maintenus dans un établissement scolaire sont passibles des dispositions prévues, c'est-à-dire, en plus de la peine d'emprisonnement, d'une interdiction du territoire français pendant dix ans au plus. Soyons précis : êtes-vous pour ou contre la double peine dans ce cas ? Pour notre part nous sommes contre, d'où notre amendement.
(L'amendement n° 14 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 33 rectifié .
La parole est à Mme Delphine Batho.
L'amendement n° 33 rectifié propose une alternative aux alinéas 15 à 22, dans lesquels ont été réintroduites, à l'initiative du rapporteur, des dispositions que le Sénat avait supprimées, les jugeant redondantes avec des dispositions du code de la défense qui sanctionnent durement le port d'arme, y compris, bien sûr, dans les établissements scolaires.
Le Sénat a également estimé, et j'insiste sur ce point, que les peines prévues étaient disproportionnées, ce qui est aussi notre avis au regard du principe constitutionnel de proportionnalité des peines.
Enfin, les mesures proposées par le rapporteur ne concernent pas seulement les véritables armes, que l'on ne saurait évidemment tolérer dans les établissements scolaires, mais aussi les armes par destination, lesquelles peuvent être des objets de toute nature.
Défavorable. Le dispositif a davantage sa place dans le code pénal ; la section 6, adoptée par la commission, prévoit une liste de peines complémentaires ; elle est donc plus complète.
(L'amendement n° 33 rectifié , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 15 .
La parole est à Mme Delphine Batho.
L'amendement est défendu.
(L'amendement n° 15 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 55 du Gouvernement.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
Amendement de cohérence. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. le secrétaire d'État pourrait-il s'expliquer davantage ? Son amendement vise-t-il à éviter, du moins sur ce point – puisque d'autres parties du texte n'ont pas été amendées dans le même sens –, la censure constitutionnelle ?
Il s'agit bien de cohérence…
Toutes les peines attachées à cette incrimination doivent être cohérentes avec celles prévues pour le délit d'intrusion dans un établissement d'enseignement scolaire par une personne qui n'est pas habilitée à y pénétrer. L'intrusion armée et en réunion étant punie d'une peine de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende, il est logique que l'intrusion armée d'une personne seule et autorisée ne soit passible que d'une peine de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.
(L'amendement n° 55 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 24 .
La parole est à Mme Sandrine Mazetier.
Pour sanctuariser les établissements scolaires et garantir leur sécurité, il convient d'intervenir, non seulement dans l'enceinte des établissements, mais aussi à leurs abords. L'amendement vise en ce sens à inscrire dans le code de l'éducation que « l'État assure la sécurité des élèves et du personnel des établissements d'enseignement primaire et secondaire aux abords de ces établissements ». L'État doit en effet assurer ses missions régaliennes en tout lieu.
Défavorable. L'État assure déjà la sécurité des établissements.
(L'amendement n° 24 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Défendu !
(L'amendement n° 34 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 35 .
La parole est à Mme Delphine Batho.
Cet amendement, très simple, propose que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l'« état des lieux de l'encadrement des élèves et de la spécialisation des personnels en vue de la création d'un nouveau corps de surveillants ».
Le Gouvernement a récemment annoncé des mesures nouvelles, comme les équipes mobiles de sécurité. Nous pensons qu'elles ne sont pas adaptées : les établissements ont plutôt besoin d'un nouveau corps de surveillants.
Rappelons que près de 25 000 postes de surveillants ont été supprimés dans les établissements scolaires ces dernières années. Il est temps de rétablir une présence humaine pérenne afin de travailler sur la vie scolaire, la sécurité et la tranquillité des élèves. Voilà pourquoi il nous paraît nécessaire que le Gouvernement remette un rapport au Parlement dans ce domaine.
Avis défavorable. Nous avons déjà donné les chiffres en première lecture.
Même avis. Il ne faut pas multiplier les rapports.
(L'amendement n° 35 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 25 .
La parole est à Mme Sandrine Mazetier.
Cet amendement propose qu'un rapport sur le climat scolaire des établissements publics d'enseignement dits sensibles soit transmis chaque année au Parlement. Cela permettrait de prendre en compte des faits non recensés dans le fichier CIVIS, qui ne répertorie que les violences constitutives d'infractions. Il ne tient même pas compte des tentatives de suicide des élèves. Or la violence s'installe dans un établissement de manière progressive : bon nombre d'indicateurs permettraient d'agir rapidement, en mobilisant la communauté éducative, avant que des drames ne se produisent ou que des agressions, des violences, des infractions ne soient commises.
Cet amendement ne vise pas, bien évidemment, les milliers d'établissements scolaires que compte notre pays, mais les seuls établissements publics dits sensibles. Ils ne sont pas si nombreux que cela, mais ils devraient intéresser la représentation nationale.
Cette question ne relève pas du domaine législatif et je ne vois pas l'intérêt d'un énième rapport en la matière. Avis défavorable.
Même avis pour les mêmes raisons.
(L'amendement n° 25 n'est pas adopté.)
(L'article 7, amendé, est adopté.)
En application de l'article 101 du règlement, le Gouvernement demande qu'il soit procédé à une seconde délibération de l'article 4 ter de la proposition de loi. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
La seconde délibération est de droit.
Je rappelle que le rejet des amendements vaut confirmation de la décision prise en première délibération.
Rappel au règlement sur le fondement de l'article 58 alinéa 1 ! Nous venons de recevoir l'amendement du Gouvernement et je vous demande une suspension de séance de deux minutes pour que nous puissions prendre le temps de le lire.
Rappel au règlement
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures trente-cinq, est reprise à vingt-trois heures quarante.)
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour présenter l'amendement n° 1 du Gouvernement.
Nous avons eu un bon débat sur bien des thèmes ce soir et en particulier sur celui des halls d'immeubles. Nous partageons tous le souci d'en assurer la tranquillité et d'améliorer l'efficacité des mesures répressives existantes. Dès lors, le fait de prévoir que les faits seront constitutifs d'un délit plutôt que d'une contravention de cinquième classe présente un réel intérêt même si la contravention peut paraître plus simple a priori. Tout d'abord, les outils juridiques dont disposent les forces de police et de gendarmerie en matière contraventionnelle restent limités – il est presque impossible, par exemple, d'obtenir une garde à vue ou une interpellation. Par ailleurs, la rédaction que je vous propose permettrait d'échapper au risque d'inconstitutionnalité –le rapporteur l'a évoqué tout à l'heure, je n'y reviens pas.
J'ajoute que la contravention est le plus souvent sanctionnée par une amende qui n'est dissuasive qu'à condition d'être payée. On mesure les difficultés auxquelles nous serions confrontés.
En l'état, je pense également que cette disposition nous permet d'aller au bout de l'excellent dialogue engagé avec le Sénat et qui a été souligné à plusieurs reprises au cours du débat.
Enfin, sur un certain nombre de points, la LOPPSI permettra de débattre et éventuellement d'améliorer, de compléter les dispositifs existants, y compris par des mesures contraventionnelles.
Je vous demande d'adopter cet amendement qui nous permettra de disposer d'un texte rapidement opérationnel et de répondre ainsi aux attentes de nos concitoyens.
Il y aurait une incompatibilité formelle avec le vote de l'article 4 ter la rédaction que nous avons adoptée tout à l'heure était maintenue. En tant que rapporteur de la LOPPSI je m'engage à rouvrir ce débat important qui touche un sujet grave. J'en parlerai avec le ministre de l'intérieur.
Monsieur le président, permettez-moi de savourer cet instant : de tout ce que l'on pouvait imaginer, on touche le sommet... Si je comprends bien le débat, tout le monde s'accorde sur le fait que le texte devrait plutôt être rédigé tel que nous l'avons proposé. Nous étions même prêts à en faire un délit, surtout en cas de récidive. Nous avions présenté des amendements en ce sens, mais qui ont été refusés en commission.
Tout le monde est pour, y compris le rapporteur et très certainement aussi l'ancien maire de Mulhouse. Malheureusement, pour des raisons purement idéologiques, vous ne supportez pas que l'opposition ait pris l'initiative de proposer une telle mesure et qu'elle soit depuis quelques mois, sur ces sujets-là, plus offensive que vous.
Et vous nous dites à présent que l'on va rouvrir le débat ? Si vraiment, monsieur le secrétaire d'État, vous considériez que la contravention n'était pas une qualification suffisante, vous pouviez proposer un amendement pour que l'occupation abusive des halls d'immeuble constitue un délit et tout le monde aurait été d'accord ! Je le répète, jamais vous ne parviendrez à démontrer que des jeunes ont empêché délibérément l'accès ou la libre circulation des personnes. Voilà ce qui empêche les forces de police d'intervenir aujourd'hui. Vous pourrez user de tous les synonymes possibles, « entraver », « empêcher », il reste que votre disposition n'est pas applicable, contrairement à celle que nous vous proposions.
Je vais, après cette séance, rentrer à Sarcelles où, dans une dizaine de cages d'escaliers, des jeunes empêchent les occupants de dormir. Des milliers de nos concitoyens sont dans cette situation et nous pourrions prendre un peu de temps pour en parler – d'autant plus que, comme l'a rappelé un député de l'UMP, c'est le Président de la République lui-même qui a souhaité que nous nous penchions sur cette question !
Soit, monsieur le président ! Si vous ne voulez plus qu'on en parle, n'en parlons plus ! Les électeurs apprécieront !
Je crois que je vous ai suffisamment laissé parler.
La parole est à M. Nicolas Perruchot.
À mon tour de m'étonner de cette deuxième délibération sur une affaire votée, et surtout des arguments développés. L'on nous dit à mots couverts que nous devons voter conforme au Sénat. Dans ce cas, à quoi servent les deux lectures ? Et à quoi sert notre assemblée s'il nous est interdit d'améliorer, le cas échéant, le travail de nos collègues sénateurs ? C'est tout de même ainsi que la République fonctionne depuis très longtemps, et cela a souvent permis d'améliorer des dispositifs législatifs qui étaient loin d'être parfaits.
Ou bien alors votons conforme et ne déposons plus d'amendements ! Mais dites-le nous clairement, nous gagnerons tous du temps !
L'argument me paraît un peu court, surtout sur un problème qui empoisonne la vie de milliers de gens depuis des années.
Quant à votre exposé des motifs, monsieur le secrétaire d'État, il a de quoi surprendre : les jeunes appréhendés risquent de pas être solvables…
Comment peut-on en arriver à écrire cela ?
Le début de l'exposé sommaire précise que le Gouvernement est « conscient du sentiment d'insécurité de nos concitoyens, alimenté par la privatisation des halls d'immeubles au profit de quelques bandes qui y mènent leur activité délictueuse ». Or pourquoi mène-t-on des activités délictueuses dans les quartiers ? Pour gagner de l'argent de manière un peu plus facile qu'en allant tous les matins bosser à l'usine. Il y a tout lieu de penser que ces gens-là doivent être solvables. L'argument ne tient donc pas !
Si le Gouvernement croit, grâce cette nouvelle rédaction du texte, pouvoir débarrasser les halls d'immeubles des bandes, les bras m'en tombent ! Franchement, pour avoir été confronté à ce problème pendant sept ans, je puis vous dire, à l'instar de notre collègue Pupponi, que l'on aura beaucoup de mal à expliquer à un juge que M. X ou M. Y a empêché délibérément l'accès au hall d'immeuble. Cela ne tiendra pas cinq minutes face à un magistrat qui aura sur la question une vision différente – et sans doute très juste.
Les garanties qu'on nous a données sur la LOPPSI me paraissent plutôt courtes. Je souhaite que le Gouvernement s'engage plus avant sur la reprise dans la LOPPSI du dispositif tel qu'il a été voté par l'Assemblée, ne serait-ce que par respect pour le vote que nous avons émis précédemment.
(L'amendement n° 1 est adopté.)
Pourquoi Mme Batho ? Rien n'y oblige ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) M. Pupponi peut très bien expliquer le vote du groupe socialiste !
Personne ne vous contraint à rester, mon cher collègue !
Depuis le début de la discussion en première lecture, le groupe socialiste a essayé d'appréhender le phénomène des bandes délinquantes tel qu'il se manifeste sur le terrain et en tenant compte des difficultés dont nous ont fait part les professionnels que nous avons auditionnés. Ainsi, nous avons formulé des propositions nouvelles.
Il n'y a pas de vide juridique aujourd'hui dans notre droit qui empêcherait de combattre les comportements de ces bandes violentes. Nous maintenons que ces phénomènes protéiformes sont tout à la fois le résultat direct de l'échec de la politique menée depuis 2002, le produit du durcissement et de la concentration géographique de l'insécurité engendrés par l'abandon de certains territoires et en particulier des banlieues, la conséquence d'interventions policières totalement inappropriées et, pour finir, le fruit de l'absence de politique de prévention.
Nous avons formulé quinze propositions concrètes : création d'une police de quartier, des contrats de sécurité scolaire, des groupes opérationnels dans les CLS, des tuteurs référents, des sanctions précoces pour les primo-délinquants, de la politique de prévention précoce… À chaque fois, l'UMP a voté contre, alors que ces propositions étaient inspirées par le bon sens, demandées par des élus locaux de toutes sensibilités politiques.
Ce soir encore, alors que nous étions parvenus, avec un certain nombre de collègues de la majorité, à faire voter un amendement sur l'occupation des halls d'immeubles, le Gouvernement demande une seconde délibération. C'est dire si ce qui vous inspire, n'est pas la recherche de l'efficacité dans le combat contre l'insécurité et contre les bandes délinquantes ni même le pragmatisme, mais bien plutôt le sectarisme vis-à-vis de l'opposition et, surtout, la nécessité de faire voter le plus rapidement possible une nouvelle loi contre l'insécurité – la seizième depuis 2002 ! –, une loi d'affichage elle aussi.
Loi d'ailleurs dépassée pour partie, sans doute, puisque le zapping législatif que vous nous imposez veut que l'attention se porte depuis ce matin non plus sur la présente proposition de loi sur les bandes, mais sur l'adoption en commission des lois de la disposition instaurant le couvre-feu pour les mineurs…
La création du délit d'appartenance à une bande violente connaîtra certainement le même destin que celui promis ce soir à la création d'un délit d'occupation des halls d'immeuble : ou bien cette disposition tombera en désuétude, ou bien le législateur sera obligé d'y revenir tant elle se révélera inapplicable.
Plusieurs dispositions du texte non conformes à la Constitution ont fort heureusement été toilettées par le Sénat. Il reste toutefois, à nos yeux, des dispositions contraires à la Constitution, en particulier celles de l'article 1er et de l'article 7 potentiellement applicables aux mouvements sociaux et aux mobilisations de la jeunesse.
L'occasion était offerte à la majorité et au Gouvernement de proposer une autre politique. Or ce texte ne répond à aucun vide juridique, n'apporte rien aux policiers et aux professionnels qui travaillent sur le terrain. Il ne s'agit que d'une loi d'affichage, j'insiste, et c'est pourquoi nous voterons contre. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Autant le débat que nous venons d'avoir sur l'occupation des espaces collectifs était d'ordre juridique et non idéologique, comme le prétend M. Pupponi, autant c'est bien à un affrontement idéologique qu'a tenté de se livrer Mme Batho à l'instant. Elle me paraît avoir tort, sur ces questions de sécurité, de se placer sur ce terrain où nous pourrions lui en remontrer.
Le fait que nous en soyons à la quinzième ou seizième loi concernant la sécurité n'est pas le sujet ; il s'agit de s'adapter constamment aux menaces nouvelles,…
…aux risques que les nouvelles formes de délinquance font peser sur nos concitoyens.
Ce sont vos lois qui constituent le plus grand risque pour nos concitoyens !
Il s'agit d'y faire face de façon évolutive.
La deuxième lecture a d'ailleurs permis l'amélioration du texte ; nous sommes ainsi parvenus à un dispositif équilibré grâce auquel nous pouvons mieux appréhender le phénomène des bandes et mieux assurer la sécurité dans les établissements scolaires.
Nous renforçons notre arsenal législatif en créant un délit contre les bandes qui utilisent le mode opératoire du groupement violent car les délinquants ont bien compris qu'en agissant en bandes, ils diluaient leurs responsabilités au point de bénéficier d'une quasi-impunité. Le même souci d'efficacité nous a conduits à requalifier cette infraction d'occupation abusive des halls d'immeuble, infraction sur laquelle nous aurons l'occasion de revenir de façon approfondie et sereine lors de l'examen de la LOPPSI. L'amendement adopté par nos collègues fragilisait grandement le dispositif initial : il ne s'agit pas de se contenter de condamner ceux qui occupent les halls d'immeuble, mais il s'agit aussi pour la police et la gendarmerie de pouvoir intervenir de façon coercitive.
L'interdiction de se cacher le visage permettra d'identifier et d'appréhender les casseurs qui s'introduisent dans les manifestations pour y semer le trouble, cela, dans le même esprit que les mesures complémentaires concernant ceux qui troublent les manifestations sportives.
Ce texte, en jetant des passerelles vers la LOPPSI, améliore également les moyens technologiques et opérationnels à la disposition des forces de l'ordre. Les enregistrements des interventions pourront être utilisés dans le processus judiciaire. Les agents de sécurité pourront désormais porter une arme de défense de sixième catégorie. Les forces de l'ordre pourront être autorisées par les bailleurs à accéder aux images des caméras de vidéoprotection.
L'opposition souhaitait rendre plus efficaces les dispositions contre l'occupation des halls d'immeubles, mais elle a refusé de nous suivre sur la question de la vidéosurveillance alors que cet outil indispensable permettra une action complémentaire et efficiente.
Les forces de l'ordre pourront mieux s'organiser grâce à la consécration de la police d'agglomération qui, j'espère, fera école dans d'autres métropoles que le Grand Paris.
Enfin, à propos des violences à l'école, il n'était pas question de réviser tout le système mais de renforcer la protection par rapport aux menaces, aux atteintes physiques, aux personnels et à leurs proches. Le texte sanctuarise les établissements scolaires de façon bien plus efficace.
L'insupportable, c'est ce qu'endurent les victimes, quel qu'en soit le statut : simple citoyen, locataire, élève, professeur, agent ou fonctionnaire de sécurité. Et c'est parce qu'il est déterminé à protéger ces victimes potentielles que le groupe UMP votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
Le groupe Nouveau Centre soutiendra cette proposition qui va dans le sens, Philippe Goujon vient de l'évoquer, d'une meilleure sécurité pour nos concitoyens. C'est un impératif de longue date. Si nous avons voté de nombreux textes sur la sécurité depuis quelques années, c'est aussi parce que la délinquance s'adapte, malheureusement, et parfois trop rapidement aux dispositions législatives.
Quand il s'agit de discuter sur le terrain ou quand il s'agit de résoudre des problèmes liés à la délinquance de bandes, je reste frappé par la très bonne connaissance du droit de ces hommes et de ces femmes – des jeunes, très souvent – qui nous contraint à trouver en permanence de nouveaux dispositifs pour mieux répondre à leurs agissements.
C'est pourquoi ce texte vise à donner de meilleurs moyens aux forces de l'ordre qui, dans leur travail quotidien, ont besoin d'un soutien législatif renouvelé. Aux magistrats, ensuite, de répondre différemment, parfois de façon plus répressive, aux violences en bandes qui sont source de nombreux tracas pour nos concitoyens qui en souffrent au quotidien – notamment les commerçants des cités.
Je ne reviendrai pas sur l'article 4 ter même si je regrette la position du Gouvernement. J'espère qu'à l'occasion de l'examen de la LOPPSI nous parviendrons à évoluer sur ce sujet d'importance et sur lequel la majorité présidentielle s'est engagée en 2007. Il faudra donc trouver les voies et moyens de tenir cet engagement. Ce soir fut donc une occasion ratée ; dont acte.
Il faudra aussi faire en sorte que les moyens législatifs que l'on donne aux responsables de sécurité, aux forces de l'ordre sur le terrain soient en totale adéquation avec l'évolution de cette délinquance en bande, évolution parfois très violente, souvent liée au trafic de stupéfiants et qui mérite toute notre attention.
Pour toutes ces raisons, et pour d'autres, le groupe Nouveau Centre apportera son soutien à ce texte.
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)
Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État. Mesdames, messieurs les députés, je vous sais gré d'avoir voté ce texte, et je remercie tout particulièrement votre rapporteur Éric Ciotti et votre commission des lois pour le très bon travail qu'ils ont réalisé et pour l'équilibre auquel ils sont parvenus dans leur dialogue avec le Sénat.
Ce texte, vous l'avez dit, est très attendu. Je suis persuadé qu'il contient des mesures concrètes – et ce disant, je m'exprime en tant que membre du Gouvernement et en tant qu'homme de terrain. Il nous permettra de répondre rapidement et plus efficacement à des phénomènes nouveaux que vous avez fort bien décrits, répondant ainsi aux attentes légitimes de nos concitoyens. Je m'en réjouis au nom du Gouvernement et je vous en remercie à nouveau.
Prochaine séance, 28 janvier 2010 à neuf heures trente :
Questions orales sans débat.
La séance est levée.
(La séance est levée à minuit.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma