SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE
SOMMAIREPrésidence de Mme Catherine Vautrin
1. Garde à vue
Article 6
Amendement no181
M. Philippe Gosselin, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés
M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République
Article 6 (suite)
Amendement no30
Article 7
Amendements nos6,63,166,167,7,31,168,199,200,32,237,120,177,92,94,232,8 rectifié,178,182,9,10,196,170,154,11,12,193,33,192
2. Ordre du jour de la prochaine séance
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à la garde à vue (nos 2855, 3040).
Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de cinq heures et trente-huit minutes pour le groupe UMP, dont cinquante-neuf amendements restent en discussion ; sept heures et quarante et une minutes pour le groupe SRC, dont trente-six amendements restent en discussion ; trois heures et trente et une minutes pour le groupe GDR, dont trente-deux amendements restent en discussion ; trois heures et vingt-quatre minutes pour le groupe Nouveau Centre, dont trois amendements restent en discussion ; et trente-quatre minutes pour les députés non inscrits.
Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des amendements, s'arrêtant à l'article 6.
Je suis saisie de plusieurs amendements sur l'article 6
La parole est à M. Michel Vaxès pour défendre l'amendement n° 181 .
Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, cet amendement vise à porter à une heure, au lieu de trente minutes, la durée de l'entretien préliminaire entre la personne gardée à vue et son avocat.
Pour nous, une telle durée est nécessaire. En effet l'avocat doit prendre connaissance du dossier et il n'est pas rare que la garde à vue intervienne après une longue enquête préliminaire : le dossier peut donc comporter des centaines de pages. Une garde à vue de vingt-quatre, quarante-huit voire quatre-vingt-seize heures ne saurait, pour se dérouler loyalement, n'être précédée que d'un entretien si court.
La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Une durée d'une heure nous paraît quelque peu excessive. Avis défavorable.
La parole est à M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Avis défavorable.
(L'amendement n° 181 n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Madame la présidente, je demande quelques minutes de suspension de séance.
Article 6
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue, est reprise à neuf heures trente-cinq,d.)
Article 6
La parole est à M. Dominique Raimbourg pour soutenir l'amendement n° 30 .
Cet amendement de précision porte sur le cumul des durées. Pour qu'il n'y ait pas de difficultés, le temps d'entretien doit repousser le moment de la première audition de la personne gardée à vue, donc s'ajouter au délai de carence.
Avis défavorable. Cet amendement nous semble compliquer les choses plutôt que les clarifier.
(L'amendement n° 30 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 6 est adopté.)
La parole est à M. Dominique Raimbourg pour défendre l'amendement n° 6 .
Nous abordons le difficile problème de l'accès au dossier. À cet égard il nous paraît nécessaire de préciser quelles pièces l'avocat doit pouvoir consulter.
Pour notre part, nous ne pensons pas que l'avocat puisse avoir le droit de consulter l'entier dossier de la procédure ; d'ailleurs celui-ci ne se trouve pas forcément entre les mains des enquêteurs, il peut n'être pas totalement achevé ou être réparti entre plusieurs enquêteurs.
La meilleure formulation possible à ce sujet me semble être celle de l'amendement n° 63 de Mme Karamanli selon laquelle l'avocat « a droit de consulter toute pièce du dossier exposant ou se rapportant aux indices concordants sur la base desquels la garde à vue a été décidée. »
Je sous-amenderais cependant cet amendement en écrivant plus simplement : « toute pièce sur la base desquelles l'interrogatoire va se faire ».
J'aimerais d'abord avoir l'avis de la commission et du Gouvernement sur les deux amendements.
Le texte, me semble-t-il, est équilibré. En effet, il prévoit que l'avocat a accès au procès-verbal de notification de la garde à vue – c'est la moindre des choses – ainsi qu'au procès-verbal de l'audition. Nous sommes, ne l'oublions pas, dans une phase d'enquête, dans une phase policière de recueil des preuves, et non dans une phase juridictionnelle.
La commission a estimé que ces amendements allaient trop loin et rompaient l'équilibre du projet.
Je crois qu'il ne faut pas se méprendre. Dans la plupart des cas, la garde à vue est, heureusement, une phase très courte : plus de 80 % des gardes à vue ne dépassent pas douze heures. Dans ce cas, le dossier n'est pas très épais ; en cas de flagrance, il n'y a pas de dossier du tout.
Le dossier se constitue donc au fur et à mesure, et on ne peut pas communiquer un dossier qui, par nature, n'existe pas. Il ne s'agit pas de cacher quoi que ce soit à l'avocat, mais on ne peut pas lui donner quelque chose qui n'est qu'en cours de constitution, puisque la garde à vue a justement pour objet d'aider à la constitution d'un dossier.
Je comprends donc bien le but poursuivi par M. Raimbourg, mais je pense que ces amendements devraient être retirés.
Je ne retire pas ces amendements.
J'ai écouté M. le garde des sceaux avec attention, et je suis tout à fait d'accord pour considérer qu'à certains moments, le dossier n'existe pas. C'est pourquoi nous voulons donner à l'avocat le droit de consulter non pas tout le dossier, mais les pièces sur la base desquelles va se faire l'interrogatoire. Il s'agit de lui permettre de consulter les pièces à partir desquelles l'enquêteur va poser des questions à la personne interrogée, la déclaration d'un témoin qui met en cause la personne, par exemple. Il ne s'agit donc pas de communiquer des documents qui n'existeraient pas, mais de montrer les pièces à partir desquelles l'interrogatoire va être réalisé.
Telle est d'ailleurs la règle en matière d'interrogatoire lors de la phase d'instruction. Je sais parfaitement que nous sommes dans une phase différente, mais la règle de la loyauté des débats veut que le conseil puisse regarder les pièces qui vont être invoquées par l'enquêteur lors de l'interrogatoire. Cela permettrait, me semble-t-il, d'éviter des discussions très complexes avec les barreaux, qui vont s'emparer de cet argument pour demander l'accès au dossier, ce qui – je rejoins M. le ministre sur ce point – n'est pas possible à ce moment-là de l'enquête.
(Les amendements nos 6 et 63 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Après la discussion que je viens d'entendre, je devine déjà leur destin ! (Sourires.)
L'amendement n° 166 vise à ce que l'avocat puisse consulter l'ensemble du dossier de procédure.
L'amendement n° 167 est un amendement de repli, qui tend à faire en sorte que l'avocat puisse avoir accès au certificat médical, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. Nous en avons parlé lors de la séance d'hier soir : le certificat médical doit avoir une valeur impérative. Or, je le répète, dans plusieurs cas, malgré le certificat médical, la garde à vue s'est poursuivie alors que la situation de santé du prévenu était incompatible avec les conditions d'incarcération.
Même avis.
La communication du certificat médical à l'avocat me semble aller de soi. Dans la pratique, personne ne peut s'opposer à cette consultation, d'autant que cela permet au conseil de faire des observations à l'OPJ sur l'état de santé de la personne interrogée.
Par ailleurs, je veux revenir sur l'application de la circulaire qui exige que l'ensemble des examens médicaux légaux soient désormais effectués à l'hôpital.
À cet égard, en effet, la presse locale de Loire-Atlantique, que j'ai lue avec attention, fait état de très grosses difficultés. Cela implique des transferts matériels de détenus et de charges qui sont extrêmement désorganisants. En outre, il peut être difficile de supporter d'être menotté et emmené devant des patients qui, eux, sont libres et d'être exposé ainsi à la vue de tous. Je me permets d'attirer l'attention, à l'occasion de ce débat, sur la désorganisation qu'entraîne une application très stricte de la circulaire.
Je reviens sur l'amendement n° 167 .
À la condition expresse qu'il ne s'agisse d'avoir accès qu'au certificat médical, – je crois que tel était bien le sens de l'intervention de notre collègue –, je pense pouvoir considérer que cela représenterait un progrès. Du reste, la lecture de certains considérants de l'arrêt Dayanan nous amène à une conclusion assez proche.
Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis et le rapporteur que je suis est prêt à illustrer le propos dans le cas d'espèce en donnant un avis favorable à l'amendement n° 167 .
Je suis convaincu et donc favorable également à l'amendement n° 167 .
Compte tenu de nos travaux de cette nuit sur le contenu du dossier médical, que l'avocat ait accès au certificat me paraît une bonne chose. Ainsi que vous l'avez rappelé à plusieurs reprises à l'occasion de ces débats, monsieur le garde des sceaux, l'avocat n'est pas l'ennemi de la procédure. Il est là pour assister quelqu'un qui est privé de sa liberté. C'est un auxiliaire de justice. L'adoption de cet amendement ne remettrait donc pas en cause l'équilibre de la procédure.
Ensuite je veux revenir sur le dernier propos de M. Raimbourg.
Mardi, dans le cadre des questions au Gouvernement, vous avez répondu, monsieur le garde des sceaux, à Olivier Jardé, un de mes collègues du Nouveau Centre, sur la convention qui a été signée avec le ministère de la santé. D'emblée, une difficulté se pose parce qu'on concentre les examens médicaux souvent dans le chef-lieu de département. Une fois les constatations faites au chef-lieu de département, que se passera-t-il après pour la garde à vue, pour la confrontation avec la victime qui aura été examinée ?
La circulaire a été publiée la semaine dernière, donc avant nos travaux parlementaires. Je crois qu'il faudra que, par voie réglementaire, toutes les conséquences soient tirées de ce que nous votons dans ce projet de loi relatif à la garde à vue.
Je remercie M. le rapporteur et M. le ministre d'avoir accepté l'amendement n° 167 et je remercie particulièrement mon collègue Dominique Raimbourg. Alors que j'avais présenté cet amendement comme un amendement de repli, il a su trouver les mots pour convaincre.
Permettre à l'avocat de consulter le certificat médical me paraît constituer un progrès. La procédure pourra éventuellement être stoppée si l'état de santé de la personne gardée à vue se révèle incompatible avec la garde à vue. Trop d'exemples ont démontré qu'il était indispensable d'apporter cette précision dans le texte.
(L'amendement n° 166 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 167 est adopté.)
La parole est à M. Dominique Raimbourg pour défendre l'amendement n° 7 .
Ayant écouté les explications données précédemment, je connais, comme mon collègue Noël Mamère, le funeste destin qui attend cet amendement. Néanmoins, puisque, grâce à la sagesse de M. le garde des sceaux et de M. le rapporteur, la procédure d'urgence n'a pas été déclarée, nous savons qu'il y aura deux lectures de ce texte.
J'appelle donc l'attention sur le caractère extrêmement mesuré de cet amendement, qui permettrait de lever toutes les difficultés et garantirait la loyauté du débat. Si, dans l'immédiat, ma proposition recueille un avis défavorable, je pense qu'elle mérite d'être méditée parce que sa formulation me paraît de nature à éviter toute difficulté ultérieure.
Je ne sais pas si ce destin sera funeste, en tout cas nous le laissons à la sagesse du Sénat.
(L'amendement n° 7 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Dominique Raimbourg pour soutenir l'amendement n° 31 .
Je laisse le rapporteur donner quelques explications. Je reprendrai éventuellement la parole ensuite, si vous le permettez, madame la présidente.
J'avoue que je suis assez intéressé par le premier alinéa de l'amendement, qui instaure une limitation d'une demi-heure pour la consultation du dossier. Ce laps de temps me paraît raisonnable ; il n'allonge pas les délais. En revanche, le second alinéa ne me convient pas. Je propose, c'est un nouveau signe d'ouverture et de notre volonté de travailler sereinement, que l'on ne garde que le premier alinéa.
Le rapporteur fait un geste d'ouverture sur cet amendement. Personnellement, je pense que l'amendement est un peu inutile : les trente minutes prévues me semblent largement suffire pour consulter les pièces du dossier. Celui-ci n'est pas très épais au moment où commence la garde à vue et les quelques pièces qui le constituent peuvent être examinées assez rapidement.
Cela étant, le Gouvernement ne s'opposera pas à l'ouverture manifestée par le rapporteur, à condition que l'auteur de l'amendement supprime le second aliéna.
Cet amendement vise à préciser que l'avocat, qui a déjà la possibilité de s'entretenir avec la personne gardée à vue pendant une demi-heure, dispose également d'une demi-heure pour consulter le dossier.
J'entends bien les propositions d'ouverture de M. le rapporteur, mais je remarque que cette demi-heure doit bien se caler quelque part. Elle ne peut pas être imputée sur la demi-heure de l'entretien. En l'occurrence, l'ouverture me semble donc plutôt être une fermeture puisqu'elle porte sur la limitation à une demi-heure mais pas sur l'imputation des délais.
Il faut trouver une solution. S'il est sage de limiter la durée de la consultation, il faut bien la placer quelque part, et cela ne peut pas être à l'intérieur de la demi-heure de l'entretien avec l'avocat.
Par ailleurs, si, en cas de flagrant délit par exemple, le dossier est très mince, ce n'est pas le cas dans le cadre d'une enquête : le dossier peut alors être extrêmement volumineux. La demi-heure que je suggère me paraît constituer un compromis. Il me semble difficile de descendre en dessous, mais il faut lui trouver une place dans la chronologie de la garde à vue de vingt-quatre heures ou, éventuellement, de quarante-huit heures.
Premier élément de précision, je crois qu'il conviendrait de rectifier l'amendement et d'écrire « trente minutes » plutôt qu'« une demi-heure ». C'est la formulation habituelle.
Par ailleurs, je serais prêt à déposer un sous-amendement qui supprimerait le second alinéa.
Sur le vote de l'amendement n° 31 , je suis saisie par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Michel Hunault.
Je me demande si nous ne sommes pas en train de réaliser un travail de commission.
Je comprends l'objectif de l'amendement de notre collègue Dominique Raimbourg. L'avocat a un temps pour discuter avec la personne gardée à vue, et il doit pouvoir consulter le dossier. Toutefois je me demande s'il est indispensable d'enfermer cela dans des délais, sans tenir compte de la complexité du dossier.
Il me semblait que c'était l'OPJ qui menait la garde à vue et que l'avocat était là pour assister. Encadrer la procédure dans des délais comme cela est proposé me paraît trop restrictif. Je préférerais qu'on parle d'un délai raisonnable. Il faut faire confiance aux parties et pouvoir agir en fonction des circonstances. La complexité des dossiers exigera peut-être, dans certains cas, d'aller au-delà de la demi-heure. Je ne suis pas certain qu'il faille nous enfermer dans une telle précision. Peut-être vaudrait-il mieux laisser le Sénat améliorer ce qu'on aura pu voter en première lecture à l'Assemblée.
Je partage l'opinion formulée par Michel Hunault.
D'abord, je crois qu'il faut éviter toute complexification de la procédure. Ces nouveaux délais, ces minutages risquent d'entraîner d'énormes complexités, lesquelles peuvent être source ensuite de recours ou d'annulations de procédure. Je suis donc plus que réservé sur la proposition.
Ensuite, n'oublions pas que nous sommes dans la phase non pas du procès mais de l'enquête qui commence. Or, si je compte bien, avant de pouvoir commencer à entendre une personne sur des faits qui seront certainement importants et sur lesquels des investigations capitales seront nécessaires – pour retrouver des gens ou en cas d'enlèvement – il faudra attendre au moins trois heures. Ce n'est pas raisonnable.
Je répète que nous ne sommes qu'au stade de l'enquête, moment où les premiers éléments sont capitaux. C'est dans les minutes qui suivent l'arrestation et après que les premières investigations sont commises que l'on va recueillir les éléments principaux.
Avec cette proposition, non seulement on complexifierait le dispositif, ce qui représenterait une source de nullité, mais, en plus, on retarderait la manifestation de la vérité.
Enfin, pourquoi l'avocat, malgré tous les droits qu'il peut avoir, aurait-il besoin d'autant de temps ? Pour consulter le dossier ? Il n'y a quasiment pas de dossier. Pour consulter les éléments de la procédure ? Ceux-ci sont forcément tenus. Il peut assister son client mais uniquement son audition parce que nous sommes aux premières minutes d'une enquête déterminante.
Tout en comprenant parfaitement que le client a droit à son avocat, dans les conditions qui sont amenées par le projet de loi, je considère qu'il est vital de ne pas complexifier le dispositif et de ne pas attendre avant d'entendre quelqu'un dont l'audition est indispensable pour la manifestation de la vérité. Je suis donc personnellement très opposé à cet amendement.
Cet amendement vise à instaurer un nécessaire compromis. Dans les dossiers graves, il n'y aura pas de problème de relations entre les enquêteurs et l'avocat, car les premiers seront suffisamment nombreux. C'est dans les dossiers plus quotidiens que la question risque de se poser.
Michel Hunault a eu raison de souligner que, en général, les parties trouvent une solution sur le champ. Nous souhaitons simplement que, si tel n'est pas le cas, non seulement l'avocat puisse s'entretenir au minimum une demi-heure avec le gardé à vue, mais aussi dispose d'une demi-heure pour la consultation des dossiers. Cela étant, cette consultation pourra très bien ne prendre que dix minutes. En général en effet, chacun cherche à gagner du temps et, au cas où quelqu'un voudrait en faire perdre, la durée de consultation serait de toute façon limitée à une demi-heure.
Cela me paraît un compromis raisonnable, mais je ne peux accepter la suppression du deuxième alinéa de l'amendement, car cela reviendrait à ne conserver que la limitation.
Puisque M. Raimbourg ne peut accepter de supprimer la dernière partie de son amendement, je suggère au rapporteur de retirer son sous-amendement et à l'Assemblée de rejeter l'amendement pour éviter d'alourdir trop les délais.
Je veux souligner que, au tout début de l'enquête, il n'y aura bien souvent, dans ce fameux dossier, que le certificat médical du médecin. Si l'on prévoit que la consultation pourra durer une demi-heure, je crains qu'une telle pratique ne s'institutionnalise, même pour les cas où il n'y aura absolument rien dans le dossier. En l'espèce, il n'y aura pas encore eu d'audition puisque nous serons à l'issue du fameux délai de carence que nous avons instauré hier soir et cette demi-heure supplémentaire ne fera que retarder les investigations. Voilà pourquoi les députés du groupe UMP rejetteront cet amendement.
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 31 .
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 43
Nombre de suffrages exprimés 41
Majorité absolue 21
Pour l'adoption 17
Contre 24
(L'amendement n° 31 n'est pas adopté.)
J'en viens à un amendement n° 168 sur le vote duquel je suis saisie, par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Noël Mamère, pour le soutenir.
Cet amendement est important car il correspond à ce que devrait être l'esprit du texte. En effet il conviendrait que celui-ci soit inspiré par les recommandations de la Cour de cassation et de nombreux arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, en particulier l'arrêt Dayanan contre la Turquie.
Le projet de loi ne prévoit pas que l'avocat « participe » aux auditions de son client, c'est-à-dire qu'il puisse intervenir au cours de ces auditions. Il se limite à préciser que l'avocat « assiste » à celles-ci. Or l'avant-projet de réforme du code de procédure pénale de 2010 transposait aux auditions des gardés à vue les règles régissant aujourd'hui les interrogatoires du mis en examen par le juge d'instruction.
La Cour européenne des droits de l'homme a été très précise sur le sujet, notamment dans l'arrêt Dayanan du 13 octobre 2009, de même que la Cour de cassation. Si l'on veut donner un sens juridique, politique au sens noble du terme, à la présence de l'avocat dès les premiers instants de la garde à vue, il faut que celui-ci puisse « participer » aux auditions, c'est-à-dire assister son client de façon efficiente en ayant la possibilité de poser des questions. Nous présenterons d'ailleurs par la suite un autre amendement qui s'inscrit dans la continuité d'une série d'arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme sur la participation de l'avocat non pas aux auditions, mais aux confrontations.
Accepter cet amendement serait conforme à l'esprit que vous prétendez défendre, monsieur le ministre, et au rôle que doit jouer l'avocat en assistant son client s'agissant notamment de ce que l'arrêt Dayanan appelle la discussion de l'affaire, ou la manière dont il peut aider un client en détresse.
Vous le savez, monsieur le député, je souhaite que l'avocat joue un vrai rôle, comme en témoignent nombre de mes amendements, mais, dans tous les cas, un avocat « assiste » son client. C'est la formulation habituelle. L'utilisation du verbe « participer » risquerait de laisser croire que l'avocat pourra intervenir librement, à tout bout de champ, et au final presque conduire l'audition. Ce n'est pas le but recherché. Donc, avis défavorable.
Même avis que la commission.
Nous sommes au coeur du projet de loi et je ne suis pas d'accord avec Noël Mamère.
Il ne faut pas faire dire à la Cour européenne des droits de l'homme ce qu'elle ne dit pas ! Celle-ci, s'appuyant sur la Convention européenne, exige les conditions d'un procès équitable et, surtout, concernant la garde à vue, les conditions permettant d'assurer la dignité de la personne privée de liberté et l'assistance d'un avocat. Tel est bien l'objet du projet de loi dont nous discutons.
Ce matin, nous avons déjà examiné une série d'amendements importants sur le vote desquels vous avez demandé des scrutins publics, ce qui est tout à fait votre droit, et concernant le temps de consultation du dossier, l'accès au dossier et, maintenant, le rôle de l'avocat. Or nous sommes dans une phase d'enquête et vous venez d'employer le mot « confrontations », monsieur Mamère. Ce n'est pas la même chose !
Dans le cas d'une confrontation, le rôle de l'avocat est différent. Dans la phase d'enquête, l'avocat, auxiliaire de justice, doit assister la personne privée de liberté, mais présumée innocente. Son rôle n'est pas d'entraver la recherche de la vérité par l'officier de police judiciaire. Si nous remplacions le mot « assiste » par le mot « participe », comme vous le proposez, nous donnerions à la présence de l'avocat une connotation que ne prévoit pas le texte et que – je parle sous le contrôle du garde des sceaux – ni la Convention européenne des droits de l'homme ni la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme n'impose aux États. Ce serait dénaturer l'esprit du texte.
Mon collègue Michel Hunault oublie une partie de la jurisprudence. Il évoque celle de la Cour européenne des droits de l'homme, notamment l'arrêt Dayanan, mais il oublie celle de la Cour de cassation, en particulier l'arrêt d'octobre 2010 qui précise très clairement que l'avocat « participe » aux auditions.
Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit, monsieur Hunault. Nous présenterons tout à l'heure un amendement sur la participation de l'avocat aux confrontations. En ce moment nous parlons des auditions, pas des confrontations ! Tant la Cour européenne des droits de l'homme, dans l'arrêt Dayanan, que la Cour de cassation française demandent à ce que l'avocat « participe ». Or participer, ce n'est pas assister.
Au cours de la discussion générale, nous avons été plusieurs à souligner que l'avocat ne pouvait être une sorte de spectateur impuissant lors de ces auditions. Il faut donc lui permettre de jouer son rôle, c'est-à-dire d'assister son client par sa participation. Assister en se contentant d'une simple présence à l'interrogatoire ne sert à rien. Il faut que l'avocat puisse participer à l'audition comme le demande la Cour européenne des droits de l'homme et comme l'exige la Cour de cassation.
Il s'agit en effet d'un sujet important.
Le projet de loi prévoit déjà des mesures pour les avocats, mais écrire, comme le propose M. Mamère, qu'un avocat « participe » à la garde à vue, cela signifie tout simplement qu'il participe à l'un des éléments fondamentaux de l'enquête, donc à l'enquête elle-même. Or cela est impossible car si, je le répète, l'avocat participe, dans les règles du procès équitable, au procès lui-même, en l'occurrence nous ne sommes pas dans le cadre d'un procès à égalité des armes – il faut le dire très clairement – ; mais dans le domaine de l'enquête à laquelle l'avocat ne peut pas participer, sauf à changer complètement de système.
Si nous suivions le raisonnement de M. Mamère, il faudrait non seulement que l'avocat puisse poser toute une série de questions lors des auditions, des confrontations, qu'il s'implique dans le dossier, mais aussi que le procureur de la République soit lui-même présent lors de ces auditions et confrontations. En fait, monsieur Mamère, vous voulez transposer aux tout premiers éléments d'une enquête les règles applicables lors d'un procès. Si tel était le cas, c'est très clair : il n'y aurait plus d'enquête. On aboutirait jamais car toutes les enquêtes seraient bloquées.
Il faut qu'elles se déroulent dans le respect des droits de chacun et que la police, sous l'autorité d'un magistrat qui est le procureur de la République, travaille dans les conditions fixées par le projet de loi. On ne peut aller au-delà du rôle qui est attribué à l'avocat par le projet de loi lequel est d'ailleurs, en cela, tout à fait conforme à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. Il va même au-delà puisque la Cour ne prescrit l'intervention d'un juge qu'après le troisième ou le quatrième jour, alors qu'elle aura lieu à la quarante-huitième heure dans notre procédure. Encore une fois, ne faisons pas dire à la CEDH ce qu'elle n'a pas dit !
Je voudrais que M. le rapporteur et M. le ministre précisent leur position.
Vous nous avez dit, monsieur le rapporteur, qu'il ne fallait pas soupçonner le texte d'être en retrait par rapport aux objections formulées par M. Mamère en précisant que l'avocat ne serait pas complètement passif puisqu'il aurait la possibilité de s'exprimer pendant les auditions. C'est en tout cas ce que j'ai entendu !
Noël Mamère vous a rappelé l'arrêt rendu le 19 octobre 2010 par la Cour de cassation, qui évoque la participation de l'avocat aux auditions. Je ne vois donc pas où est la différence entre l'amendement de M. Mamère et ce que suggère cet arrêt.
J'ajoute que la Cour européenne des droits de l'homme parle, de façon explicite, dans l'arrêt Dayanan, de l'assistance effective par un avocat, de la discussion de l'affaire, de l'organisation de la défense, du soutien de l'accusé.
Les conclusions que je tire de ce débat sont que non seulement, comme je vous l'ai dit hier, vous avancez à reculons s'agissant de la présence de l'avocat,…
Mais si ! Vous l'avez acceptée parce qu'il ne vous était pas possible de faire autrement en raison de la condamnation de la Cour européenne des droits de l'homme et des décisions du Conseil constitutionnel. Il vous était impossible de ne pas faire évoluer le régime de la garde à vue.
Désormais, vous admettez la présence d'un avocat, mais en voulant rendre muet le bavard !
Expliquez-vous donc clairement, car nous avons l'intention de soutenir cet amendement jusqu'au bout et avons demandé pour cela un scrutin public.
Ne faisons pas de confusion. L'avocat assiste son client, ce qui, naturellement, implique sa présence à ses côtés, mais il ne faudrait pas non plus – car ce n'est ni l'esprit de la garde à vue ni celui du texte – laisser penser qu'il intervient librement, quand il le veut. Ce n'est pas le cas ! Nous ne sommes pas au prétoire, où se livrent les plaidoiries, mais dans une phase d'enquête. Certes, l'avocat doit pouvoir s'exprimer, et il peut le faire à la fin de l'audition en posant des questions et en formulant des observations – il n'a donc pas un rôle passif, loin s'en faut –, mais il n'a pas à intervenir à tout bout de champ lors de cette phase d'enquête.
Vous avez par ailleurs cité l'arrêt du 19 octobre 2010. Or la Cour de cassation parle bien de « l'assistance » d'un avocat et, si elle emploie le verbe « participer », il me semble que c'est au sens d' « être présent ». Vous avez beau jouer sur une ambiguïté, je maintiens un avis défavorable sur cet amendement.
Nous sommes au coeur du problème.
M. Perben a souligné hier qu'il fallait que l'avocat soit utile. La vraie question est donc de savoir comment. Pour être utile, il doit obligatoirement pouvoir intervenir et participer, ce qui, pour un avocat, implique de pouvoir parler. Arrêtons donc de faire de la sémantique sur tel ou tel stade de la procédure ! Dès le début, et c'est l'essence même de la réforme, l'avocat doit être incontournable ; il doit pouvoir parler, participer, bref, faire son travail !
Vous avez beau être frileux, cette réforme doit s'appliquer. L'avocat ne doit plus se contenter d'être un confident ou un assistant social, comme c'était le cas auparavant. À combien de gardes à vue en effet avons-nous participé, au cours desquelles notre présence se limitait à un soutien psychologique, sans aucune intervention juridique de notre part ? Nous devons ici défendre les prérogatives des avocats pour qu'elles soient préservées lors de la garde à vue.
Je tiens à répondre à M. Vaxès qui veux nous prendre pour des écrevisses, le seul animal qui reste rouge même quand on le fait cuire !
Quoi qu'il en dise, le projet de loi qui vous est soumis comporte des avancées réelles. Il parle non de la présence mais de l'assistance d'un avocat.
Comme M. Mamère, je citerai la jurisprudence, qui définit le contenu de l'assistance fournie par un avocat à son client. Dans son arrêt du 19 octobre 2010, la Cour de cassation précise ainsi que M. X « a bénéficié de la présence d'un avocat mais non de son assistance » ; elle distingue donc bien entre les deux.
Or le projet de loi parle bien d'assistance, conformément à la décision du 19 octobre 2010, la chambre criminelle précisant : « dans des conditions lui permettant d'organiser sa défense et de préparer avec lui les interrogatoires auxquels cet avocat, n'a pu, en l'état de la législation française, participer », participer signifiant être présent à l'interrogatoire.
Vous avez également, monsieur Mamère, cité l'arrêt Dayanan de la CEDH. C'est un arrêt extrêmement intéressant car il définit le contenu de l'assistance. « Un accusé doit, dès qu'il est privé de liberté, pouvoir bénéficier de l'assistance d'un avocat », laquelle, précise la Cour, consiste en « la vaste gamme d'interventions qui sont propres au conseil. À cet égard, la discussion de l'affaire, l'organisation de la défense, la recherche des preuves favorables à l'accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l'accusé en détresse et le contrôle des conditions de détention sont des éléments fondamentaux de la défense ». Ils constituent l'assistance de l'avocat.
Le texte tel qu'il vous est proposé me paraît donc conforme et à la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation et à celle de la Cour européenne de Strasbourg, qui définissent parfaitement la notion d'assistance et montrent bien quelle doit être l'étendue du rôle de l'avocat. Il n'y a donc rien à changer.
Ce texte constitue une avancée importante en autorisant l'assistance effective d'un avocat au stade de l'enquête, donc lors de la garde à vue. Il me semble qu'il convient de lire l'alinéa 3 de l'article 7 à la lumière de son alinéa 9, qui interdit d'interpréter la présence de l'avocat comme une présence passive. L'alinéa 9 précise en effet qu' « à l'issue de chaque audition ou confrontation à laquelle il assiste, l'avocat peut poser des questions ». Soutenir que l'avocat n'a qu'un rôle passif d'alibi me paraît donc inexact. Le ministre vient d'ailleurs de nous préciser la portée de sa présence aux côtés de son client, à ce stade de l'enquête.
J'aurais besoin que le ministre nous apporte des précisions supplémentaires. En effet, il nous dit que l'avocat ne se contente pas d'assister mais qu'il peut intervenir. Or, selon l'alinéa 9, « à l'issue de chaque audition ou confrontation à laquelle il assiste, l'avocat peut poser des questions. L'officier ou l'agent de police judiciaire peut s'opposer aux questions de nature à nuire au bon déroulement de l'enquête. » Selon l'alinéa 10 ensuite, « à l'issue de chaque entretien avec la personne gardée à vue et de chaque audition ou confrontation à laquelle il a assisté, l'avocat peut présenter des observations écrites. »
J'aimerais donc voir clair dans cet article 7, car tout le monde n'est pas garde des sceaux et ne peut tout comprendre ! Comment pouvez-vous concilier le fait que l'avocat peut intervenir pendant qu'il assiste la personne en garde à vue, avec ces alinéas 9 et 10 ?
La rédaction de l'article est importante car elle va déterminer comment se dérouleront concrètement les auditions. Le texte doit permettre qu'elles se passent dans la sérénité, malgré les tensions du moment. Nous sommes, au stade de la garde à vue, dans une phase d'enquête, et il faut empêcher que l'avocat puisse répondre à la place de son client ou, le cas échéant, que des ténors du barreau puissent prendre l'ascendant sur des officiers de police judiciaire et qu'ils se substituent à eux pour mener l'audition.
La proposition du rapporteur, qui a suggéré en commission un amendement devenu l'alinéa 9, lequel permet à l'avocat de poser des questions en fin d'audition, équilibre le texte, permettant à chacun d'assumer pleinement son rôle mais uniquement son rôle.
Je tiens à remercier le garde des sceaux de son intervention et des précisions qu'il vient de nous donner, tandis que certains voudraient faire dire au texte ce qu'il ne dit pas, en minimisant la portée de notre vote.
La présence de l'avocat dans les lieux de garde à vue est un progrès considérable. En vous appuyant sur l'arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation, vous avez explicité quel était le rôle de l'avocat. C'est d'ailleurs sur le même arrêt que Noël Mamère s'appuie pour défendre un point de vue contradictoire. Il n'était donc pas inutile que vous énumériez les missions de l'avocat.
La rédaction retenue par la commission me paraît satisfaisante dans la mesure où elle confère à l'avocat un rôle réel, ce que rappelle la lecture de l'arrêt de la Cour de cassation. Je ne voudrais pas que nos collègues de l'opposition, qui demandent – légitimement – un scrutin public, prétendent que nous allons voter la présence d'un avocat qui ne servira à rien, car cet avocat aura bien son utilité, grâce à un projet de loi qui sait maintenir l'équilibre entre la recherche de la vérité et la protection de la personne gardée à vue.
« La conception du rôle de l'avocat retenue par le projet de loi, celle d'un avocat “taisant” pendant toute la durée des auditions de garde à vue, n'est ni compatible avec la jurisprudence européenne, ni conforme à la nécessité de renforcer le caractère contradictoire de notre procédure pénale et particulièrement de la phase de la garde à vous. ». C'est ce que vous écrivez, monsieur le rapporteur, à la page 133 de votre rapport !
Je souhaite expliquer la position du groupe socialiste à l'issue de ce débat important. La question soulevée par M. Mamère à travers cet amendement est légitime, et nous pouvons la partager quant à la suite.
J'entends bien les arguments de M. Garraud. Cependant, comme je l'ai indiqué mardi, on ne peut que douter de leur valeur réelle au vu de l'évolution des décisions de justice. Nous nous interrogeons donc vraiment sur ce que dira la Cour de justice européenne au sujet de la participation de l'avocat, comme au sujet de la récente directive qui a été mentionnée, d'ailleurs.
En même temps, si nous voulons interpréter le texte en allant au-delà de ce que le garde des sceaux a dit aujourd'hui, c'est toute la procédure pénale qui en sera affectée. On est bien obligé, en effet, de faire un parallèle entre la procédure d'instruction et la procédure de garde à vue. Il serait ainsi paradoxal que l'avocat ait plus de pouvoirs face aux policiers qu'il n'en a face au juge d'instruction. Actuellement, l'avocat pose des questions à la fin de l'audition par le juge d'instruction, lequel dirige les choses ; il ne peut intervenir en permanence.
Nous n'écartons pas qu'une évolution se produise, et c'est pourquoi la question soulevée par Noël Mamère a sa pertinence. Néanmoins nous ne voulons pas anticiper. Accorder le droit demandé par M. Mamère pour l'avocat pendant la garde à vue nous obligerait probablement à réécrire les articles 120 et suivants du code de procédure pénale sur le déroulement de l'instruction. Ce serait un changement de nature de cette procédure.
À ce stade, tout en jugeant légitime de soulever la question, mais compte tenu des dispositions du texte, suite au travail de la commission, sur la participation de l'avocat et les questions qu'il peut poser pendant la garde à vue, notre groupe ne participera pas au vote sur cet amendement, et préfère s'en tenir à l'équilibre atteint.
Nous maintenons notre demande de scrutin public sur cet amendement, dont la discussion qui vient d'avoir lieu prouve la nécessité.
Il s'agit pour nous de rien d'autre que de revenir à l'avant-projet de réforme du code de procédure pénale de mars 2010 qui aligne les conditions d'audition pendant la garde à vue sur celles de l'audition par le juge d'instruction. Réhabiliter cet avant-projet est profondément politique, certes, et M. Vidalies a raison : aller dans ce sens contribuera à revoir, non pas de fond en comble, mais de manière sensible le code de procédure pénale.
Néanmoins, une orientation globale se dessine avec l'arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation d'octobre 2010, même si j'ai entendu l'interprétation qu'en a donné le garde des sceaux, et avec l'arrêt Dayanan de la Cour européenne des droits de l'homme. Cette orientation consiste à définir de façon très précise la notion de participation de l'avocat. Tout est dans les mots, puisque nous ne donnons pas le même sens à l'assistance effective de l'avocat. Il nous paraît donc nécessaire de voter par scrutin public sur cet amendement, ne serait-ce que pour prendre date.
Nous allons donc procéder au scrutin public sur l'amendement n° 168 .
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 36
Nombre de suffrages exprimés 36
Majorité absolue 19
Pour l'adoption 6
Contre 30
(L'amendement n° 168 n'est pas adopté.)
Cet amendement vise à revenir sur le délai de carence en début de garde à vue, pendant lequel rien ne se passe dans l'attente de l'arrivée de l'avocat.
Nous voulons tous que l'enquête débouche le plus rapidement possible sur la manifestation de la vérité. Certaines enquêtes portent sur des faits très graves et l'on sait bien que les premières minutes peuvent être déterminantes pour la suite des événements. De ce fait, tout ce qui peut retarder le début de l'investigation me semble dangereux.
Je dirais même que c'est inutile, si l'on veut bien rapprocher cette suppression du délai de carence, que je demande, avec des dispositions que nous avons votées.
D'abord, la première chose que l'on notifie à une personne placée en garde à vue est qu'elle a le droit de garder le silence. Ensuite, la reconnaissance de culpabilité pendant la garde à vue ne peut servir seule à une condamnation ultérieure. La personne gardée à vue a donc la possibilité de se taire, et d'éventuels aveux ne la feront pas condamner.
Dès lors, je ne vois pas pourquoi on attendrait deux heures pour commencer à l'interroger, alors que le faire avant peut être indispensable pour la manifestation de la vérité. C'est le sens de cet amendement, qui ne porte en rien atteinte aux droits de la défense.
Ce sujet est très important, et je tiens à le traiter au fond.
Il ne servirait à rien d'introduire l'avocat dans cette phase de l'enquête qu'est la garde à vue, si on ne lui permettait pas de jouer un rôle effectif. Je suis pour que l'on respecte complètement et concrètement les droits de la défense. J'ai aussi indiqué à plusieurs reprises que je me sentais comptable de l'équilibre qui doit s'instaurer entre la défense et les forces de l'ordre. J'ai répété qu'il ne fallait pas casser une machine qui fonctionne et qu'il convenait donc de donner aux forces de l'ordre les moyens de travailler correctement. Elles ont toute notre confiance, cela ne souffre pas de discussion.
En même temps, on ne peut pas souhaiter la présence de l'avocat pendant la garde à vue et faire, d'une certaine façon, comme s'il n'était pas là. Or, dans le texte initial, l'avocat était « taisant » et ne prenait part à quasiment rien. Sur ce point, nous avons fait évoluer le texte : l'avocat pourra formuler des remarques et poser des questions, mais à la fin de l'audition.
Cela étant il me paraît aussi important, pour la loyauté de la procédure, de lui laisser le temps d'arriver. Sur le plan juridique, cela fait partie de l'environnement d'ensemble des droits de la défense : on ne peut pas les affirmer et ne pas permettre qu'ils soient exercés effectivement. Sur le plan pratique, il faut bien que l'avocat arrive, qu'il ait le temps peut-être de boucler le dossier sur lequel il travaille et, de toute façon, qu'il ait le temps matériel, en toute diligence certes, d'aller sur place. Or, si on se déplace rapidement à Paris – peut-être pas aux heures de pointe ou quand le métro est en grève, c'est une petite pique que je me permets de lancer ! – en province, il faut laisser le temps à l'avocat de bonne foi de parcourir un certain nombre de kilomètres. De ce fait, le principe du délai de carence n'est pas négociable. C'est l'avis de la commission, et c'est le mien, de façon très ferme.
En revanche, je veux bien qu'on discute de sa durée. J'avais pris des exemples en Gironde, le département le plus étendu avec ses 10 000 kilomètres carrés…
…et où le temps de déplacement est un peu long. Cela vaut dans d'autres départements. Si le délai de deux heures paraît très long car j'ai tenu compte d'exemples extrêmes, on peut le réduire.
Je suis donc prêt à présenter un amendement qui maintienne le principe du délai de carence ; qui le fasse partir du moment où l'avocat est avisé et pas de l'interpellation, ce qui n'est pas non plus négociable – il suffirait qu'on prévienne très tardivement l'avocat pour que toutes ces dispositions perdent leur sens – mais qui fasse passer le délai de carence à une heure. Cela paraît une durée moyenne. Elle provoquera peut-être des difficultés dans certains départements, mais je fais d'autant plus confiance aux barreaux pour s'organiser qu'ils m'ont indiqué qu'ils feraient le nécessaire.
Cela constituerait un moyen terme qui permettrait de mettre en place une procédure loyale et de faire passer dans les faits la réforme, tout en tenant compte de la remarque de M. Garraud. Il n'est en effet nullement dans mes intentions d'entraver le travail des forces de l'ordre, mais il est possible de concilier les impératifs du droit de la défense et ceux du droit à la sécurité.
À ce point de la discussion, je tiens à rappeler que le Gouvernement est extrêmement réticent sur le délai de carence, pour des raisons que M. Garraud a fort bien exposées.
Grâce à l'amabilité de son président, j'ai assisté à trois séances de la commission des lois et je dois reconnaître que, pour garantir ce qu'on a appelé la loyauté de la réforme, il faut accepter des dispositions qui donnent toute sa portée à la présence de l'avocat, autrement dit laisser à celui-ci le temps d'arriver.
Je suis sensible aux arguments du rapporteur, pour lequel le maintien du délai de carence est un principe nécessaire pour que les droits de la défense soient effectifs. Si l'avocat doit participer dès le début de la garde à vue, il faut lui laisser un peu de temps pour se rendre sur les lieux. Néanmoins il ne faut pas que ce temps soit trop long. J'accepterai donc l'amendement que le rapporteur vient de présenter, soit un délai de carence qui court à partir du moment où l'avocat est prévenu et qui serait d'une heure.
En conséquence, je demande à M. Garraud de retirer son amendement n° 199 au profit de l'amendement de M. le rapporteur, qui me semble constituer un bon compromis.
N'anticipons pas !
M. le ministre vient de donner son avis sur l'amendement n° 237 déposé en séance par le rapporteur. Néanmoins, nous étions dans une discussion commune et je donne d'abord la parole à M. Garraud pour défendre son deuxième amendement, le n° 200.
Dans le droit fil de l'amendement n° 199 visant à supprimer le délai de carence, le début de cet amendement dispose que : « Dès son arrivée dans les locaux du service de police judiciaire, l'avocat peut assister aux auditions en cours. »
En fait, nous n'avons pas besoin de tenir des comptes en secondes, en minutes ou en heures. La solution que je propose a le mérite de la simplicité ; elle permettrait d'éviter les écueils évoqués.
J'ai entendu la proposition du rapporteur et la question du ministre ; je reprendrai ultérieurement la parole pour dire si je retire ou non ces amendements.
Tout a déjà été dit.
Cette réforme est importante : nous voulons que les droits de la défense soient davantage respectés. Certes, nous sommes dans le cadre d'une enquête, mais il faut que ces droits soient effectifs.
Je suis évidemment sensible au fait que les forces de l'ordre doivent pouvoir travailler dans des conditions convenables, ce que ne permet pas un délai de carence trop long ; certains le qualifient même « d'anormalement long ». A contrario, un délai anormalement court ne permettrait pas à l'avocat d'exercer les droits de la défense.
Le Gouvernement fait donc preuve de sagesse en acceptant le compromis que je propose : symbole de l'état d'esprit du projet de loi et du caractère effectif des nouvelles mesures, le délai de carence serait conservé, mais il serait ramené à une heure. Parce que nous nous situons dans une phase d'enquête, nous ne pouvons qu'être sensibles aux arguments qui visent à préserver l'équilibre d'une procédure qui fonctionne. Il me semble que nous parvenons ainsi à un résultat satisfaisant.
Monsieur le garde des sceaux, je n'apprécie pas du tout la tournure que prend notre discussion.
Au nom du Gouvernement, vous avez déposé un amendement, avant l'article 1er, précisant que tout ce qui sera dit par une personne gardée à vue hors de la présence d'un avocat ne pourra pas être retenu contre elle. Nous avons longuement discuté de cet amendement qui a été adopté. Il s'agissait d'un signe de confiance qui donnait toute sa portée à la réforme.
Or, avec l'amendement de M. Garraud, nous changeons de cap. Il faut décidément que nous soyons vigilants jusqu'au bout ; nous avons l'impression que, d'une main, cet amendement reprend, ce que le projet de loi a précédemment apporté de l'autre.
Monsieur Garraud, si nous votions votre amendement, ce que nous avons adopté avant l'article 1er n'aurait plus aucune portée. Le progrès permis pas le texte serait remis en cause puisque, selon vous, le délai de carence est inutile.
Quant à l'amendement de repli du rapporteur, qui vous dit, monsieur Garraud, que vous n'avez pas raison mais que vous n'avez pas tort non plus, il tend à ramener le délai de carence à une heure. Or tout cela ne rime à rien, car, une fois que l'officier de police judiciaire aura prévenu le bâtonnier, il faudra que l'avocat puisse se déplacer en toute sérénité. Monsieur le rapporteur, vous avez cité le cas du département de la Gironde, mais il y en a une centaine d'autres. En milieu rural, il faut souvent une heure pour se rendre du chef-lieu de département à la brigade territoriale.
Monsieur le garde des sceaux, cette nuit même nous considérions ensemble que les brigades territoriales devaient rester des lieux d'auditions. Une heure, c'est insuffisant. Rendez-vous compte : il faut le temps que le bâtonnier prévienne l'avocat de permanence qui, toutes affaires cessantes, devra quitter son cabinet et prendre sa voiture pour un trajet d'une heure ou une heure et quart. Il arrivera sur les lieux de la garde à vue dans un état de stress sans avoir eu le temps de rien connaître du dossier.
Il faut que nous travaillions dans un climat de confiance. Avec des amendements de ce type, on instille le doute sur la volonté réelle du législateur de voter un texte d'équilibre et de progrès, alors qu'il s'agit pourtant bien de ce qui caractérise votre projet de loi.
Vous avez souhaité qu'une certaine unanimité se fasse autour de cette réforme. Nous avons travaillé dans cet esprit depuis le début de l'examen des articles. Dans un climat de confiance, vous avez accepté des amendements de l'opposition et d'autres du groupe centriste. Je crois que nous aurions intérêt à faire preuve de fermeté en ce qui concerne le délai de carence : il doit être de deux heures et si le rapporteur défend un amendement de repli, il ne peut pas prétendre que la commission y est favorable puisque nous n'en avons jamais discuté précédemment.
Je vais formuler quatre observations.
Premièrement, il ne faut pas toucher au principe du délai de carence. Je suis d'accord avec Michel Hunault : cette disposition engage le sens même du projet de loi.
Deuxièmement, il est absolument nécessaire d'être très précis en matière de délais. Un minutage est nécessaire car nous sommes à l'intérieur du temps contraint des vingt-quatre heures de la garde à vue. Dans une ambiance qui n'est pas de franche camaraderie, la souplesse ne peut être introduite que si nous prévoyons préalablement un cadre rigide de computation des délais.
Le délai de vingt-quatre heures est strict ; celui relatif à l'intervention de l'avocat doit l'être aussi. Il faut éviter que la loi donne lieu à des discussions oiseuses qui engendreraient des conflits permanents. Il est donc indispensable de prévoir un minutage très précis ; les enquêteurs et les avocats pourront ensuite trouver les moyens de travailler ensemble.
Troisièmement, il n'est pas possible de réduire le délai de carence à une heure. Il est faux de prétendre que le temps écoulé entre l'interpellation ou l'arrivée de la personne gardée à vue au commissariat ou à la brigade de gendarmerie, et l'arrivée de l'avocat ne serait que du temps perdu : il faut notifier les droits, prévenir la famille, organiser éventuellement un examen médical et procéder à d'autres investigations et formalités.
Présentée comme un compromis, la réduction du délai de carence n'est pas acceptable.
Nous connaissons nos départements : rien que pour le trajet, il faut une heure à un avocat habitant Bordeaux pour se rendre à la brigade de gendarmerie de Lesparre-Médoc, comme à celui de Valenciennes qui rejoint Aulnoy-Aymeries, ou au Nantais qui se rend à Châteaubriant.
Quatrièmement, je constate, comme Michel Hunault, que si l'on réduit le délai de carence, les gendarmeries ne seront plus des lieux de garde à vue. Or il est essentiel, pour le maillage du territoire et pour les gendarmeries, que ces dernières conservent ce rôle. Les gendarmes sont très attachés à leurs compétences de police judiciaire qui inclut la possibilité de placer une personne en garde à vue.
En touchant au délai de carence, nous mettrions à mal le projet de loi, l'avocat et la gendarmerie. Nous ne devons ni toucher au principe du délai de carence ni réduire ce dernier.
Le délai de carence a donné lieu à de nombreux débats au sein du groupe UMP. Il en est ressorti qu'il doit s'agir d'un principe intangible. Cette notion fondamentale correspond à l'esprit du texte, et je remercie le Gouvernement de nous avoir suivis sur ce sujet.
En ce qui concerne le début du délai, les avis divergent. Certains pensent qu'il doit courir à partir de l'interpellation. Cependant comment cela serait-il possible sans que l'avocat, qui n'a pas encore été saisi, le sache ? Le délai de carence ne peut commencer qu'une fois que l'avocat a été prévenu et qu'on lui a demandé d'assister le gardé à vue.
Il a été question que ce délai s'ajoute à celui de la garde à vue ; c'était inacceptable. Au nom d'un droit supplémentaire donné au gardé à vue, on l'aurait privé de liberté vingt-six heures au lieu de vingt-quatre. Cette option a été repoussée.
Pour ma part, je suis persuadé qu'il est possible que les forces de police et de gendarmerie s'organisent pour prévenir l'avocat au moment de l'interpellation. Puisque la jurisprudence prévoit que le fait d'emmener une personne sous la contrainte doit déboucher sur la garde à vue, rien n'empêche de demander immédiatement à la personne interpellée si elle souhaite être assistée d'un avocat. Le fonctionnaire de permanence au commissariat ou à la gendarmerie pourrait alors prévenir ce dernier.
Il m'a été rétorqué que, pour des questions d'organisation, les droits de la personne interpellée ne peuvent lui être notifiés que dans les locaux du commissariat ou de la gendarmerie et que l'avocat ne peut être prévenu qu'à ce moment. J'estime que cette organisation pourrait être différente : si l'avocat était prévenu dès l'interpellation, cela permettrait de computer le temps de trajet entre le lieu d'interpellation et le lieu de la garde à vue dans le délai de carence. Les deux heures prévues comprendraient alors le temps de transport, qui peut être assez long ; elles permettraient aussi d'accomplir certains des actes prévus par la procédure comme le recueil de l'identité du gardé à vue ou la réponse à certaines questions « neutres ».
Le délai de deux heures convient s'il commence à partir de l'interpellation. En revanche, s'il ne peut courir, comme le disent aujourd'hui les professionnels, qu'à partir du moment de l'arrivée de la personne interpellée sur les lieux de la garde à vue, une fois que ses droits lui ont été notifiés, alors, il faut le réduire à une heure.
En conséquence, en l'état, je me range à l'avis du rapporteur qui souhaite réduire ce délai à une heure. Je pense néanmoins que cette question sera de nouveau évoquée dans le cadre de la navette, que ce soit au Sénat ou, éventuellement, en deuxième lecture, par notre assemblée.
Chacun mesure combien ce moment de notre débat est important et surprenant.
L'essentiel n'est pas l'amendement de M. Garraud – notre collègue m'excusera – mais celui du rapporteur qui tend à ramener le délai de carence de deux heures à une heure, avec, semble-t-il, l'approbation du Gouvernement. Cette démarche est à la fois incohérente et dangereuse pour la sécurisation juridique du texte.
Parce que ce projet de loi ne va pas jusqu'au bout – l'histoire juridique tranchera en la matière –, vous avez pris la précaution de préciser dans l'article préliminaire du code de procédure pénale que les aveux formulés au cours d'auditions se déroulant en l'absence de l'avocat ne pourraient pas être retenus dans la décision finale.
Si vous avez jugé utile d'apporter cette précision, c'est parce que vous vous êtes aperçus que, même en prévoyant un délai de carence de deux heures, votre texte présentait un risque au regard des exigences de la jurisprudence. Vous avez donc voulu le sécuriser.
Toutefois quelle est la cohérence entre cet engagement pris dans l'article préliminaire du code de procédure pénale et la volonté d'allonger la période pendant laquelle une personne pourra être interrogée en l'absence de son avocat ? Vous voudriez nuire à l'efficacité des poursuites que vous ne vous y prendriez pas autrement ! En effet, au-delà de la question du rôle de l'avocat, c'est, in fine, la régularité de la poursuite, donc la condamnation, qui est en jeu.
Vous prenez ainsi le risque incroyable de favoriser la nullité des procédures.
Quant à la question du délai, elle est encore plus grave, car il s'agit là, non plus d'un risque, mais d'une certitude. En effet, on ne peut pas, en matière de procédure pénale, créer un droit dont il sera prouvé qu'il ne peut pas être effectivement exercé par telle ou telle partie de la population, ne serait-ce que par un seul de nos concitoyens. Votre texte sera donc forcément sanctionné.
Pourquoi la commission a-t-elle fixé un délai de carence de deux heures, monsieur le rapporteur ? Parce que c'est à peu de choses près, avez-vous observé, le temps maximum que mettra un avocat pour se rendre sur le lieu de la garde à vue. Vous avez notamment pris l'exemple de Soulac-sur-mer, qui se situe à l'extrémité du Médoc et où l'on se rend, en venant de Bordeaux, en une heure quarante-cinq.
Vous auriez pu citer également l'exemple des Landes, mon département, puisque, pour se rendre de Mont-de-Marsan, où se trouve le barreau, à Biscarosse, sur le littoral, il faut au minimum une heure trente. J'ajoute – cela peut paraître anecdotique, mais c'est important – qu'il s'agit de zones extrêmement touristiques. Ainsi, Biscarosse compte 12 000 habitants l'hiver et de près de 120 000 l'été. Les temps de circulation évoqués dans le rapport sont estimés en fonction de conditions ordinaires de circulation. Or, le 12 ou le 13 août, pour aller de Bordeaux à Soulac-sur-mer, ce n'est pas une heure quarante que l'on met, mais au moins deux fois plus, et pour aller de Mont-de-Marsan à Biscarosse, il faut au moins deux heures et demie.
Dès lors, comment les choses vont-elles se passer, monsieur le ministre ? Quand un avocat sera appelé par une personne placée en garde à vue, il se fera accompagner sur le trajet par un huissier, qui constatera qu'il lui est impossible de se rendre sur place en moins de deux heures et demie ou trois heures, et la procédure connaîtra d'énormes difficultés. Ce qui était valable avec le délai de deux heures – mais il faut fixer un délai – le sera davantage encore si l'on réduit celui-ci.
Pourquoi, tout à coup, revenez-vous en arrière ? Parce que la procédure pénale est prisonnière des débats internes à l'UMP : il n'y a aucun raisonnement, on coupe la poire en deux ! En effet, certains membres de la majorité ont lutté contre l'idée même d'un délai de carence. Néanmoins, une décision constructive a été prise par la commission. C'est pourquoi, subitement, vous nous présentez une espèce de jugement de Salomon, en proposant de réduire le délai de carence de deux heures à une heure, pour tenter de rassembler tout le monde.
On ne peut élaborer le droit de cette façon ; ce n'est pas acceptable ! Si cette proposition était retenue, non seulement le texte ne serait pas cohérent avec la démarche que nous avons suivie jusqu'à présent, mais il créerait une zone d'insécurité juridique et, de ce point de vue, vous prendriez une responsabilité politique considérable.
Il y a une nouvelle donne : l'avocat doit pouvoir être présent dès le début de la garde à vue et, au cours de celle-ci, la personne gardée à vue doit pouvoir être assistée par un avocat. Hier, M. le garde des sceaux a confirmé cette évolution, précisant – je reprends ses termes – qu'on allait dans cette direction avec enthousiasme. Ce matin, notre rapporteur a indiqué qu'il fallait mener cette réforme avec honnêteté et loyauté, et je souscris entièrement à ses propos. Malheureusement il y a toujours des virtuoses du rabot qui veulent faire en sorte que ces pétitions de principe aboutissent à réduire, voire à empêcher l'exercice de droits qui doivent pourtant être inscrits dans la loi.
Comment garantir l'assistance effective d'un avocat ? Qu'est-ce que la loyauté et l'honnêteté, en l'espèce ? C'est de permettre à l'avocat, une fois qu'il est prévenu, de disposer d'un délai suffisant pour rejoindre le poste de garde à vue, puis de s'entretenir avec son client. Cela demande au minimum une heure et demie, en dehors des périodes estivales évoquées à l'instant par M. Vidalies. Si l'on veut être loyal et honnête, il faut donc arrêter le super-rabot et faire en sorte que les textes soient en adéquation avec les principes. Sinon, comme l'a souligné M. Vidalies, les avocats, sachant que, de toute façon, ils ne pourront pas être à l'heure, ne se rendront pas au poste de garde à vue et soulèveront ensuite la nullité de la procédure. Voilà comment les choses se passeront, a fortiori avec les dispositions qui ont été votées hier.
Maintenons donc ce délai de deux heures. Si, au cours de la navette, il devait être réduit, il ne pourrait être inférieur à une heure et demie, sauf à annihiler les principes qui doivent être inscrits dans ce texte. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Je ne veux pas allonger les débats, car je partage les analyses de MM. Raimbourg, Vidalies et Houillon. En réduisant le délai de carence, non seulement vous créeriez une inégalité territoriale, mais vous limiteriez les possibilités pour l'avocat d'être présent.
Monsieur Garraud, le juge d'instruction instruit à charge et à décharge. Je m'étonne donc que le député que vous êtes ne plaide que dans un sens.
Voyons, mon cher collègue !
Depuis l'ouverture de ce débat, vous traînez des pieds, vous rechignez à accepter les recommandations de la Cour européenne des droits de l'homme.
Je vous invite donc à être plus équilibré dans vos interventions, afin que ce projet de loi, qui va plutôt dans le bon sens, ne soit pas, au terme de nos discussions, dénaturé.
Je vais à mon tour tenter de convaincre, sinon le rapporteur, du moins le Gouvernement qu'il n'était pas utile d'ouvrir un nouveau front dans un débat où ils sont déjà suffisamment nombreux. Je précise en passant à M. le ministre que le fait qu'il ait assisté aux réunions de la commission ne doit rien à la gentillesse du président de la commission : cette possibilité est prévue par la Constitution et elle est organisée par le règlement de l'Assemblée.
Cela n'enlève rien à la gentillesse du président de la commission ! (Sourires.)
Le président peut avoir beaucoup de qualités, mais il est inutile d'en rajouter.
En l'espèce, nous discutons d'un point sensible. Je fais crédit au rapporteur de vouloir parvenir à l'équilibre, mais cette volonté doit se vérifier dans les faits et se traduire par des décisions. Garantir des droits, c'est sympathique, mais l'on attend de nous que nous les rendions applicables.
Je n'ai pas le souvenir que le délai de deux heures ait fait l'objet de longs débats en commission. Nous n'avions pas de désaccord sur ce point. Chacun comprend bien, en effet, qu'il est impossible à l'avocat d'être présent, dans la seconde, au commissariat ou dans les locaux de la brigade de gendarmerie. Il faut donc lui laisser le temps de s'y rendre. La situation de différents départements a été évoquée par plusieurs d'entre nous. Il est en effet important de matérialiser les distances ; il en va du principe d'égalité des citoyens. On ne peut pas être assisté ou non d'un avocat selon que le commissariat où l'on se trouve est à dix minutes ou à deux heures du barreau. Pour ma part, je citerai le cas du Finistère : pour se rendre du barreau de Quimper, où sont inscrits 116 avocats, à la brigade de la presqu'île de Crozon, il faut une bonne heure et demie.
Par ailleurs, nous discutons, ici, de la première audition, mais je rappelle que l'avocat a le droit d'assister à chacune des auditions de son client par l'OPJ. Or, au cours des vingt-quatre ou des quarante-huit heures de la garde à vue, elles peuvent être au nombre de cinq à dix. Certes, le délai de carence ne vaut que pour la première audition, mais n'oublions pas le travail des avocats et pensons à l'instabilité dans laquelle se trouvera le gardé à vue, qui ne saura pas exactement quand son avocat sera présent ou non.
Ainsi que l'a parfaitement indiqué Alain Vidalies, votre proposition, monsieur le rapporteur, est complètement bancale. Le droit est, en l'espèce, absolument étranger à vos préoccupations. Vous cherchez en effet uniquement à apaiser les tensions qui sont apparues, les revendications qui se sont exprimées, depuis la découverte du texte. Vous croyez qu'en proposant une cote mal taillée, vous allez mettre tout le monde d'accord, mais c'est l'inverse qui va se produire : tout le monde sera mécontent, qu'il s'agisse des avocats, des OPJ, des magistrats ou des citoyens. Nous avons déjà suffisamment de raisons d'être mécontents, ne nous en donnez pas une supplémentaire.
Je vous invite donc à retirer votre amendement, qui, à l'évidence, sème le trouble. Depuis le début de la discussion, aucun autre sujet n'a donné lieu à autant d'interventions. Cela traduit bien la nature baroque, bancale, déséquilibrée de votre proposition, qui, au fond, crée une rupture d'égalité entre les citoyens.
J'abonde évidemment dans le sens des orateurs qui m'ont précédé, mais je souhaite revenir sur les propos de notre collègue M. Hunault et me placer sur un plan plus politique que juridique.
Nous avons le sentiment, avec la réponse qu'a apportée le rapporteur à M. Garraud, que ce texte, que vous prétendez fondé sur des valeurs que nous partageons, n'est qu'une variable d'ajustement dans les conflits internes à la majorité. Nous avons d'ailleurs de la chance, car certains ultras sont absents, et ne peuvent donc défendre leurs amendements, ce qui est heureux pour la République. Toutefois, il en reste encore quelques-uns, auxquels on essaie de donner des gages.
Si le Gouvernement acceptait de remettre en cause ce délai de carence, qui nous apparaît comme intangible, nous serions en droit de mettre en doute sa sincérité. Ainsi que l'ont très bien expliqué notamment M. Vidalies et M. Houillon, non seulement une telle disposition rendrait impossible l'assistance de l'avocat, mais elle accroîtrait l'insécurité juridique du texte, et vous risqueriez d'être confrontés à une série d'annulations de procédure. On ne peut pas faire entrer l'avocat par la porte en le réintroduisant dans la procédure de la garde à vue et en renforçant les droits de la personne placée en garde à vue, et le faire sortir par la fenêtre en usant d'artifices destinés à le cantonner à la place de spectateur impuissant qui est la sienne actuellement.
Soyons raisonnables ! Il me semble que nous avons su l'être depuis le début de la discussion, en évitant les postures idéologiques, l'obstruction et la surenchère. Mais comme l'a dit notre collègue Urvoas, il est normal que nous soyons nombreux à intervenir sur une disposition de cette nature, pour vous demander d'arrêter de casser ce texte – un texte auquel nous pourrions finalement être favorables, si vous ne cherchiez pas constamment à introduire de l'insécurité, à fragiliser le citoyen mis en garde en excluant ou en écartant l'avocat. L'opposition est vigilante sur ce point. Elle n'est d'ailleurs pas la seule à l'être, puisque même au sein de la majorité, un certain nombre de nos collègues sont très inquiets des gages que vous donnez avec complaisance aux plus ultras d'entre vous.
Je m'étonne, moi aussi, de voir cet amendement émaner du rapporteur lui-même. Tout se passe comme si tous les échanges effectués en commission étaient piétinés par l'initiative individuelle de M. Gosselin. Nous avons eu un débat sur le délai qui permettrait de respecter l'article 17 précisant que la présente loi est applicable sur l'ensemble du territoire de la République. Or, en proposant de réduire le délai accordé à l'avocat pour rejoindre la personne qu'il défend, vous donnez l'impression, monsieur Gosselin, de vouloir que la plupart des auditions démarre sans la présence d'un avocat. Ce faisant, vous trahissez l'esprit même du texte dont vous êtes le rapporteur.
Sur un ton plus léger, je veux vous donner un exemple qui devrait néanmoins vous éclairer, mes chers collègues. Lorsque nous siégeons ici même, il est très fréquent que l'opposition subisse des interruptions de séance annoncées pour une dizaine de minutes et qui durent en fait plus d'une heure, uniquement pour donner le temps à la majorité de rejoindre l'hémicycle et de défendre sa cause ! Vous devez donc être conscients du fait qu'il n'est pas toujours évident de rejoindre un lieu à un moment donné, si convaincu que l'on soit de la nécessité à s'y rendre. (« Excellent ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Le trajet de la buvette à l'hémicycle est plus long qu'on ne le croit ! (Sourires.)
Gardez cet exemple en mémoire au moment de vous prononcer sur cet amendement et, si vous êtes attachés à la défense des justes causes, faites en sorte que cette loi puisse être applicable sur l'ensemble du territoire de la République. À cet égard, le délai d'une heure qui est proposé constitue un affront et un empêchement évident à l'application de la loi sur l'ensemble du territoire. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Je ne peux pas laisser M. Mamère m'accuser de complaisance, pas plus que je ne peux laisser Mme Mazetier dire que j'ai piétiné le texte. (« Mais si ! » sur les bancs du groupe SRC.) Je rappelle que c'est à mon initiative que le délai de carence, qui n'était pas prévu au départ, a été instauré ! Le principe même du délai de carence n'est pas négociable, voilà pourquoi je suis défavorable à l'amendement de M. Garraud ! Ne me faites pas un procès d'intention alors que c'est moi qui ai introduit le délai de carence ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Par ailleurs, je suis en désaccord avec l'amendement n° 120 du Gouvernement, relatif au point de départ du délai dont dispose l'avocat pour rejoindre le lieu de garde à vue. On ne peut donc pas me reprocher de faire preuve de complaisance ni de piétiner le texte.
En revanche, j'estime qu'en ce qui concerne la durée elle-même, il peut y avoir un débat. Les principes, eux, sont non seulement sauvegardés, mais gravés ! M. Vaxès a dit tout à l'heure qu'il fallait bien que cela s'arrête à un moment donné. Différentes durées ont été envisagées : une heure, deux heures, voire une heure et demie, comme l'a proposé notre collègue Houillon. Je suis parfaitement conscient du fait que la durée peut constituer une difficulté sur certains territoires, en particulier en outre-mer : ainsi, la Polynésie s'étend sur un territoire de deux millions de kilomètres carrés, ce qui correspond à la surface de l'Europe.
Des dispositions sont effectivement prévues, mais il est évident que la durée pose problème.
Je suis sincèrement attaché à la conciliation et soucieux de trouver une solution d'équilibre.
En tant qu'élu rural, il m'importe que l'on puisse se déplacer dans les brigades territoriales. Cela dit, la durée peut faire l'objet de diverses interprétations, et il est impossible de se caler sur la durée la plus longue, ce qui poserait des difficultés en termes d'effectivité. Tel est le sens de ma démarche, qui ne justifie pas les anathèmes que certains se croient obligés de lancer.
Je vais maintenant demander à l'Assemblée de se prononcer sur les amendements en discussion commune.
Vos amendements sont-il maintenus, monsieur Garraud ?
Je vais les retirer, madame la présidente. Il me semble cependant que l'amendement consistant à préciser « que dès son arrivée dans les locaux du service de police judiciaire, l'avocat peut assister aux auditions en cours » porte la marque d'une certaine cohérence juridique – je ne vois pas, dans cet amendement, ce qui me vaut d'être qualifié d'ultra. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Après avoir entendu les différents intervenants, notamment M. le rapporteur et M. le ministre, qui ne sont pas favorables à cet amendement et lui préfèrent l'amendement n° 237 , je suis donc disposé à retirer mes amendements au bénéfice de celui du rapporteur. Je réserve toutefois la position que j'adopterai ultérieurement, en fonction du vote qui interviendra et, en deuxième lecture, en fonction de l'équilibre général du texte : il n'est pas exclu que je présente à nouveau mes amendements si celui du rapporteur n'était finalement pas retenu.
De même que le Gouvernement !
(L'amendement n° 32 est adopté.)
Nous en arrivons à l'amendement n° 237 du rapporteur.
Sur le vote de l'amendement n° 237 , je suis saisie par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Votre amendement est-il défendu, monsieur le rapporteur ?
Il est défendu, madame la présidente. Je crois que chacun dispose d'éléments suffisants pour se prononcer.
Je veux simplement citer une phrase prononcée par Robert Badinter, figurant dans un article du journal Le Monde du 6 novembre 2010 et qui paraît aujourd'hui prémonitoire. Selon lui, « l'une des dispositions les plus critiquables » du projet de loi préparé par Michèle Alliot-Marie est de prévoir « que le parquet puisse retarder l'arrivée d'un avocat pendant la garde à vue. » Nous avons parlé de frilosité tout à l'heure. M. Garraud n'a, lui, rien de frileux : au contraire, il ose tout, et je suis un peu déçu qu'il puisse aller aussi loin dans sa démarche.
Nous sommes tous conscients de la nécessité de concilier les impératifs de la défense de la personne mise en cause avec le travail des enquêteurs. Je présume que c'est la raison pour laquelle nous sommes en train d'essayer de trouver la meilleure durée possible pour concilier des objectifs contradictoires. Cependant, si je me réfère à ce que disait le garde des sceaux hier, les enquêteurs n'attendent pas l'arrivée de la personne mise en cause au commissariat ou à la brigade pour commencer leur enquête. Un certain nombre de formalités doivent être effectuées : des droits à notifier, des certificats médicaux à produire.
Il est donc faux de penser que les enquêteurs sont prêts à travailler sur le dossier de la personne mise en garde à vue dès que celle-ci arrive dans leurs locaux. Le débat sur la durée précédant le début de la première audition me semble donc faire abstraction de la réalité : dans les faits, que son avocat soit présent ou non, le mis en cause attend très souvent que les enquêteurs soient prêts à s'occuper de lui. Dans la grande majorité des cas, un délai de deux heures ne compliquerait en rien le travail des policiers. Le débat sur la durée du délai me paraît donc en grande partie formel.
Favorable, comme je l'ai déjà dit.
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 237 .
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 50
Nombre de suffrages exprimés 48
Majorité absolue 25
Pour l'adoption 22
Contre 26
(L'amendement n° 237 n'est pas adopté.)
Cet amendement est retiré, madame la présidente.
(L'amendement n° 120 est retiré.)
L'amendement n° 177 , que j'ai évoqué lors de la présentation d'un précédent amendement demandant la participation de l'avocat à l'audition, correspond à une jurisprudence fondée sur de nombreux arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, exigeant la participation – je dis bien la participation – de l'avocat aux confrontations et reconstitutions aux côtés de son client.
Cet amendement me paraît inutile en ce qui concerne les confrontations. Pour ce qui est des reconstitutions, il est un peu excessif : en pratique, les reconstitutions n'ont quasiment jamais lieu pendant le temps de la garde à vue, mais sont organisées dans le cadre de l'instruction, dans des délais permettant leur préparation. Je suis donc défavorable à cet amendement.
Même avis.
Le groupe SRC est favorable à cet amendement. Certes, il est rare que les reconstitutions soient organisées durant la garde à vue, mais ce n'est pas impossible. Par ailleurs, il peut y avoir des transports sur les lieux, qui sont partie intégrante de l'enquête. Dès lors que l'avocat est présent, comme il peut l'être dans le cadre de l'instruction, il est nécessaire de lui donner la possibilité d'assister à toutes les opérations susceptibles d'être à charge de son client.
(L'amendement n° 177 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 92 .
Cet amendement est-il défendu, madame de Salvador ?
Un délai de carence est prévu, et aucune question ne peut être posée tant que l'audition n'est pas commencée. Dans la mesure où il est inutile de limiter l'objet d'une question qui ne sera pas posée, je suis défavorable à cet amendement.
Même avis.
Je suis saisie d'un amendement n° 94 .
La parole est à M. le rapporteur.
Il s'agit de la suppression d'une précision inutile. Une confrontation est une audition. L'avocat assistant une personne gardée à vue pourra donc y être présent sans qu'il soit besoin que la loi le précise expressément.
(L'amendement n° 94 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 232 .
La parole est à M. Jean-Paul Garraud.
Tout à l'heure, nous avons eu une discussion intéressante et édifiante sur le délai de carence. Je pense être cohérent en indiquant que je suis par définition opposé à ce délai de carence. Pourquoi ? Sans refaire la discussion qui vient d'avoir lieu, je considère que la personne bénéficie, dès son placement en garde à vue, d'un certain nombre de droits, dont celui au silence, qui est important.
À travers cet amendement, je maintiens le souhait d'une disposition qui me semble tout à fait naturelle : « Dès son arrivée dans les locaux du service de police judiciaire, l'avocat peut assister aux auditions en cours ou aux auditions à venir. »
Tout à l'heure, il y a eu une grande discussion sur le délai. Finalement, l'amendement qui visait à revenir sur le délai de deux heures en le portant à une heure, avec l'accord du Gouvernement, a été rejeté en séance. J'ai retiré mes précédents amendements pour me rallier à celui du rapporteur, mais il a été repoussé. Je maintiens celui-ci : les droits de la défense sont respectés et en même temps les investigations seront diligentées dans les meilleurs délais.
(L'amendement n° 232 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 8 rectifié .
La parole est à M. Dominique Raimbourg.
Il s'agit en quelque sorte d'un amendement de repli sur la question de la consultation du dossier par l'avocat.
Il est prévu à l'alinéa 5 que, lorsque l'avocat se présente alors qu'une audition ou une confrontation sont en cours, celles-ci s'interrompent pour lui permettre de s'entretenir avec son client pendant une demi-heure.
L'amendement vise à préciser que l'avocat peut non seulement s'entretenir avec son client pendant cette demi-heure, mais en plus consulter le dossier. Cela paraît aller de soi, mais cette précision est importante : il ne doit pas y avoir seulement un entretien. Il ne faudrait pas que l'article puisse être interprété comme faisant perdre à l'avocat le droit de consulter le dossier dès lors qu'il arrive en retard ou qu'une audition est en cours. Les deux doivent être prévus. Il s'agit donc ici d'un amendement de précision.
Je répète ce que j'ai dit tout à l'heure : dans une mesure d'investigation qui se fait forcément dans une certaine tension, il est important de préciser le rôle des uns et des autres, afin d'éviter toute difficulté.
Il s'agit toujours du même souci d'effectivité des droits de la personne qui est gardée à vue. Comme vous le savez, j'y suis sensible.
Il est effectivement nécessaire de prévoir, dans le cas où l'avocat arriverait après l'expiration du délai de carence – la durée de ce délai est une autre question – et tandis qu'une audition est en cours, que celle-ci puisse être interrompue, si la personne gardée à vue le demande, pour permettre non seulement l'entretien de trente minutes avec l'avocat, mais aussi la consultation du procès-verbal d'audition. Cela me paraît logique. C'est du reste à ce titre que je confirme l'avis favorable que j'ai donné en commission.
Défavorable, car cet amendement me semble sans portée normative.
(L'amendement n° 8 rectifié est adopté.)
C'est un amendement de coordination.
(L'amendement n° 178 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 182 .
La parole est à M. Roland Muzeau.
Les dispositions dont nous demandons la suppression à travers cet amendement rendent possible une garde à vue sans avocat.
Elles sont donc contraires aux décisions du Conseil constitutionnel et de la Cour de cassation, ainsi qu'aux arrêts successifs rendus par la CEDH. Maintenir ces dispositions reviendrait en fait à compromettre la validation du texte par le juge constitutionnel. Cela expose également la France à de nouvelles condamnations.
La dérogation empêche l'application de l'avancée principale du texte. Elle donne au procureur de la République, qui est partie poursuivante, le pouvoir de handicaper l'autre partie en la privant de la possibilité de se défendre pendant la moitié de la garde à vue. Cette disposition est totalement contraire aux différents arrêts rendus par la CEDH contre la France. Elle est également contraire aux arrêts rendus par la chambre criminelle de la Cour de cassation le 19 octobre 2010, qui insistaient notamment sur le fait que les régimes dérogatoires ne doivent pas faire obstacle à la présence de l'avocat.
Il s'agit, en outre, d'une disposition inutile, parce que les OPJ et le procureur, en bonne intelligence, décident du moment du placement en garde à vue du suspect – hors cas de flagrance –, et ce en fonction des éléments recueillis au cours de l'enquête préliminaire. Les justifications mentionnées tombent donc d'elles-mêmes.
Si la garde à vue est susceptible d'entraver le « bon déroulement d'investigations urgentes tendant au recueil ou à la conservation des preuves », ou d'empêcher de « prévenir une atteinte imminente aux personnes », il suffit aux policiers de reporter le prononcé de la mesure.
De plus, insinuer que la présence d'un avocat au cours des douze premières heures de garde à vue pourrait entraver l'enquête, empêcher le recueil ou la conservation des preuves, ou bien permettre une atteinte aux personnes est lourd de sens quant à la vision gouvernementale de ceux qui sont chargés de défendre leurs clients !
La profession d'avocat est régie par des règles de déontologie précises. Je rappelle que les avocats sont liés par un serment et dotés d'instances ordinales. Le fait de permettre à la personne privée de liberté d'être assistée d'un avocat n'est pas de nature à empêcher les policiers de poursuivre leur enquête.
Par ailleurs, le texte dispose que le procureur pourra décider que l'avocat n'a pas accès aux procès-verbaux d'audition de son client. Cette mesure est totalement injustifiée et semble n'avoir d'autre but que d'empêcher les personnes gardées à vue de bénéficier d'une défense efficace et d'une procédure équitable.
Enfin, l'alinéa 8 autorise tout simplement les gardes à vue sans avocat dans le cas des délits et crimes punis d'au moins cinq ans de prison. Je rappelle que le simple fait, pour un collégien, de faire un croche-pied à un camarade de classe peut être passible de cinq ans d'emprisonnement car il s'agit d'un acte de violence volontaire sans incapacité totale de travail et d'un délit dont la victime est un mineur de quinze ans, commis à proximité d'un établissement d'enseignement.
La logique selon laquelle la gravité du délit justifierait d'affaiblir la défense de la personne mise en cause va à l'encontre de l'idée même de justice. Les personnes qui encourent des peines lourdes doivent au contraire bénéficier des meilleures garanties de défense et d'un procès équitable. C'est du moins la règle qui doit prévaloir dans un État de droit.
Pour toutes ces raisons, il est particulièrement important d'adopter cet amendement visant à supprimer les alinéas 6 à 8.
Comme vous le savez, les alinéas 6 à 8 de ce texte prévoient la possibilité que l'intervention de l'avocat soit différée de douze, voire vingt-quatre heures, pour des infractions de droit commun. Il s'agit toutefois d'une possibilité très strictement encadrée.
Tout d'abord, conformément à la jurisprudence de la CEDH, sont exigées « des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'enquête. »
Ensuite, dans tous les cas, une décision écrite, mais en plus motivée, est requise. Elle est prise par un magistrat– le procureur de la République pour les douze premières heures, le JLD pour un report de douze à vingt-quatre heures.
Par ailleurs, le report devra être motivé soit par la nécessité d'investigations urgentes pour le recueil ou la conservation des preuves, soit par un risque d'« atteinte imminente aux personnes ». Le calibrage est donc très particulier.
Enfin, le report de douze à vingt-quatre heures sera limité aux infractions punies d'au moins cinq ans d'emprisonnement.
Je crois donc que ces dispositions font partie intégrante de l'équilibre qui a été trouvé par la commission et que nous recherchons. On voit bien, d'ailleurs, que nos débats sont sereins, au-delà de quelques envolées. Cela montre que l'équilibre entre les droits de la personne et l'élucidation des infractions pénales n'est pas loin. Le fait d'adopter cet amendement constituerait une rupture. Voilà pourquoi la commission y est défavorable.
Je suis favorable à l'amendement de M. Muzeau. En effet, la dérogation prévue est une nouvelle attaque contre le texte, puisqu'elle supprime le rôle que doit jouer l'avocat auprès de son client.
S'agissant des infractions passibles de cinq ans d'emprisonnement, c'est exactement ce que nous avions formulé dans une proposition de loi que nous n'avons pas pu présenter dans l'hémicycle, mais que nous avions déposée sur le bureau de l'Assemblée. Cela permettrait de réduire singulièrement le volume des gardes à vue – je vous rappelle que nous en sommes aujourd'hui à 800 000.
Notre collègue M. Muzeau l'a très bien exposé : vous ne pouvez pas nous faire débattre d'un texte en l'accompagnant d'une série de dérogations et d'exceptions telles qu'elles remettent en cause sa philosophie.
Je pense aussi devoir dire à notre rapporteur que les dispositions actuelles de ce texte ne correspondent pas à ce qui constitue une jurisprudence constante de la Cour européenne des droits de l'homme : les dérogations que vous proposez ne sont pas conformes à ses arrêts. Cela veut dire que, si l'un des prévenus saisit la Cour, la France sera condamnée.
On voit bien, monsieur le garde des sceaux, que, même si l'on tire des bords sur un certain nombre de sujets, on va probablement aboutir à un texte équilibré et qui sera, grosso modo, compatible avec la jurisprudence, notamment celle de la CEDH.
J'y viens, mon cher collègue !
En effet, il y aura un talon d'Achille. Il faudra y revenir pendant la navette. Le problème n'est pas seulement qu'il y ait des dérogations – il peut toujours y en avoir. Le problème c'est que l'appréciation du déclenchement de ces dérogations est confiée à la partie poursuivante, à laquelle il appartiendra de délimiter les droits de la défense, selon sa propre appréciation. Cela, ce n'est tout simplement pas possible.
Il faut donc trouver une solution pendant la navette.
Il y a d'ailleurs un début de solution dans le texte puisque, pour différer la présence de l'avocat au-delà de la douzième heure, on fait appel au JLD. Il n'y aurait pas de souci avec ces dérogations si, même pendant les premières heures, on adoptait ce principe. Certes, j'entends bien que cela poserait des difficultés pratiques, mais sinon, sur ce sujet particulier – et c'est à peu près le seul problème résiduel –, chacun ici, à commencer très probablement par le M. le garde des sceaux, sait que nous serons effectivement condamnés, soit dans le cadre d'une QPC, soit par la Cour de cassation, soit un peu plus tard par la Cour européenne des droits de l'homme.
Il est tout simplement impossible de confier à la partie poursuivante le soin d'apprécier le périmètre des droits de la défense, c'est-à-dire de l'autre partie au procès.
M. Houillon a raison et nous soutenons l'amendement de M. Muzeau.
Nous entrons dans une discussion, dont on peut penser qu'elle va être longue, sur la question de la dérogation et de la définition du périmètre d'intervention de l'avocat. Il s'agit aussi de savoir qui peut décider de définir ce périmètre.
On se fragilise à l'évidence vis-à-vis de la CEDH si l'on prévoit des dérogations trop importantes. C'est le cas de celle, prévue à l'alinéa 8, qui permet en pratique de priver une personne de toute intervention d'un avocat pendant la garde à vue si celle-ci n'est pas prolongée et est limitée à vingt-quatre heures.
Alors que ce projet de loi réformant la garde à vue constitue un effort pour moderniser notre procédure, nous prenons avec ces dispositions un risque de censure trop important. Nous devons donc aller jusqu'au bout de la logique, c'est-à-dire affirmer que l'intervention de l'avocat est normale, qu'elle est la règle et écarter les dérogations.
Je ne suis pas du tout d'accord avec les propos que viennent de tenir M. Raimbourg et surtout M. Houillon, car l'on fait dire à la Cour européenne ce qu'elle n'a pas dit. Elle considère, comme la Cour de cassation, que le parquet français est en position de pouvoir contrôler la garde à vue. Le procureur de la République est un magistrat au sens de l'article 66 de la Constitution. Ce magistrat, qui est responsable de la direction de l'enquête, est tout à fait habilité, même par la Cour européenne des droits de l'homme, à contrôler les opérations de garde à vue. Ce serait une grave confusion que de faire croire que les règles du procès s'appliquent intégralement à l'enquête.
(L'amendement n° 182 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 9 .
J'indique dès à présent que sur le vote de cet amendement, je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Dominique Raimbourg, pour soutenir cet amendement.
Nous touchons là à ce que M. Houillon appelait tout à l'heure le talon d'Achille du texte.
J'entends bien ce que dit M. Garraud. Supposons que toute difficulté soit levée vis-à-vis de la CEDH et qu'à la suite d'une réforme du statut du parquet celui-ci ne voie plus sa qualité d'autorité judiciaire contestée. Il restera cependant impossible, quoi que l'on pense de la tradition française, de faire admettre à la CEDH que le parquet français n'est pas une autorité de poursuite. La distinction consistant à dire qu'il n'est pas une autorité de poursuite pendant la phase d'enquête et ne le devient que dans la phase judiciaire est sans doute incompréhensible pour un juge européen qui essaie de construire un droit européen en mélangeant un peu de droit anglo-saxon et de droit continental. Elle est d'autant plus impossible à comprendre que le droit français précise que le procureur dirige l'action de la police judiciaire. En conséquence, le parquet sera considéré comme une partie poursuivante. Or dans aucun droit au monde une partie ne peut limiter les droits de l'autre partie.
J'ai tout à fait conscience des difficultés que cela représente ? Je n'ignore pas que les 2 000 procureurs et substituts du procureur parviennent difficilement à mettre sur pied une permanence vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept. Je sais aussi que l'intervention du juge des libertés et de la détention sera difficile à mettre en oeuvre et qu'elle coûtera cher en termes d'effectifs, donc de moyens. En revanche, nous fragilisons beaucoup notre texte en ne prenant pas cette précaution essentielle qui consiste à confier à un juge du siège la décision de limiter la présence de l'avocat et la possibilité pour l'avocat de prendre connaissance de ces dossiers.
Je le répète, il est nécessaire, pour stabiliser l'ordre juridique de notre pays, que le Conseil constitutionnel soit saisi afin de préciser les choses une fois pour toutes et d'éviter toute insécurité juridique. C'est l'intérêt de tous, les poursuites ne devant pas s'effondrer à la suite d'un avis du Conseil constitutionnel ou de la CEDH qui condamnerait la France. Sur ce point, il faut faire le nécessaire, quitte peut-être à trouver un arrangement. Dans un premier temps, il pourrait s'agir du procureur puis, dans deux ou trois ans, du JLD. Cela nous permettrait de bénéficier de l'indulgence de la cour devant laquelle nous comparaîtrons, ce qui n'est jamais négligeable.
Cet amendement opère deux modifications : il supprime la possibilité de reporter de deux heures l'intervention de l'avocat et vise à confier au juge des libertés et de la détention la compétence de décider de la possibilité de déroger au délai de carence.
Comme je l'ai dit à M. Muzeau tout à l'heure, la possibilité de reporter l'intervention de l'avocat est strictement encadrée. Elle nécessite une décision écrite d'un magistrat, motivée par des raisons impérieuses tenant aux circonstances de l'enquête – nécessité d'investigations urgentes pour le recueil ou la conservation des preuves, ou risque d'atteinte imminente aux personnes. Il me semble qu'un équilibre a été trouvé et qu'il convient de ne pas le perturber.
Cela étant, comme l'a indiqué M. Raimbourg, il existe actuellement quelques difficultés quant à l'organisation judiciaire. La chaîne pénale ne permet pas de mettre en place immédiatement le dispositif proposé. Mais laissons cela de côté, car on pourrait m'objecter que là n'est pas l'essentiel.
Sur le plan juridique, la jurisprudence ne fixe aucune règle s'agissant de l'autorité qui peut décider le report de l'intervention de l'avocat. Elle exige uniquement « l'existence de raisons impérieuses tenant aux circonstances de l'enquête », c'est-à-dire une appréciation in concreto et non extérieure de ces raisons. Autrement dit, rien sur le plan juridique ne s'oppose en l'état à ce que le procureur de la République décide du premier report de l'intervention de l'avocat. Au contraire, si l'on croise cet élément juridique qui paraît évidemment très sérieux avec les inconvénients pratiques qui pourraient en découler, tout milite pour que le dispositif actuel s'impose.
Voilà pourquoi je suis défavorable à l'amendement n° 9 .
Monsieur Raimbourg, je trouve très intéressants les raisonnements que vous nous proposez. Je suis même parfois obligé de me retenir pour ne pas y céder.
Sur ce point, monsieur Urvoas, je ne parviendrai jamais à être aussi bon que vous ! J'ai vu qu'il vous arrivait de sortir pour ne pas mentir, et je vous félicite de cet effort.
Cela dit, monsieur Raimbourg, je ne partage pas votre raisonnement.
Je reconnais que le procureur est partie poursuivante. La Cour de Strasbourg l'a dit, et la Cour de cassation l'a redit le 16 décembre. Mais ce n'est pas parce que le procureur est partie poursuivante qu'il intervient : c'est parce qu'il mène l'enquête et contrôle la police judiciaire. Il sera donc totalement responsable de l'enquête et de la garde à vue pendant les premières heures.
Nous avons tous invoqué, au cours du débat, la Cour européenne des droits de l'Homme. Mais peut-être faut-il regarder comment les choses sont organisées dans les États voisins. Au Royaume-Uni, par exemple, c'est la police qui décide du report de l'intervention de l'avocat. Or, que je sache, personne n'oserait dire ici que ce pays n'est pas un État de droit et que les libertés fondamentales n'y sont pas garanties.
En France, on vous propose que ce soit un magistrat qui décide, mais dans un temps déterminé. La Cour européenne n'a jamais pris position contre cela, et elle laisse le droit interne régler la question. C'est la raison pour laquelle, je ne peux qu'être défavorable à votre amendement.
Je souhaite soutenir l'amendement n° 9 de M. Raimbourg.
Nous abordons là un point essentiel puisqu'il s'agit de déterminer le périmètre de la garde à vue et le rôle du juge des libertés et de la détention. En ce sens, nous ne pouvons que confirmer ce qu'a indiqué M. Houillon. À chaque fois que se posera une question prioritaire de Constitutionnalité et à chaque fois que la Cour de cassation sera saisie et éventuellement la Cour européenne des droits de l'homme, la France sera condamnée pour avoir fait de l'autorité poursuivante celle qui décide de la continuation ou non de la garde à vue ou de la dérogation à la présence de l'avocat. La précision souhaitée par M. Raimbourg n'est pas une coquetterie : c'est un élément essentiel que nous aborderons également avec les amendements suivants.
M. le garde des sceaux vient de nous expliquer qu'au Royaume-Uni, c'est la police qui décide du report de l'intervention de l'avocat. Mais il oublie de dire qu'en France il n'y a pas d'habeas corpus.
Quand j'entends cela, les bras m'en tombent !
Au Royaume-Uni, il y a un corps juridique et de droit largement plus ancien que le nôtre. Nous sommes précisément un certain nombre à demander, à travers ce texte, l'introduction d'un habeas corpus à la française.
Monsieur le ministre, ne faisons pas de politique politicienne car, jusqu'à présent, nos débats se déroulent dans de bonnes conditions. Mais vous faites une erreur en refusant ce type d'amendement et en vous obstinant à vouloir considérer le procureur comme un juge. En effet, ce n'est pas un juge mais un magistrat. Et c'est au juge indépendant de la hiérarchie de décider de la poursuite ou non de la garde à vue, de son contrôle, de sa légalité et de son périmètre. C'est sur ce point que nous allons nous battre, aussi longtemps que nous présenterons des amendements.
Ne donnez pas le sentiment que nous sommes arc-boutés sur une position idéologique. Il s'agit d'une position de principe car nous souhaitons renforcer de la sécurité de ce texte. Tant que vous ne suivrez pas ses arrêts et que vous considérerez le procureur comme un juge et non comme un simple magistrat qui porte atteinte à l'équilibre de la garde à vue, vous serez condamnés par la Cour européenne des droits de l'homme.
Manifestement, le Gouvernement et une partie de la majorité avancent avec des chaussures de plomb : vous êtes obligés de légiférer mais vous faites une réforme a minima. Or vous devriez y réfléchir à deux fois avant de repousser l'amendement de M. Raimbourg.
D'abord, pourquoi inventer un système ne prévoyant aucun recours contre la décision du procureur de la République – puisque c'est à lui que vous donnez cette responsabilité – de différer la présence de l'avocat pour une durée ne pouvant excéder douze heures ? Ce n'est pas rien de donner un tel pouvoir au parquet sans recours possible. Je vous souhaite bonne chance : vous créez, avec ce texte qui touche aux libertés individuelles fondamentales, aux libertés publiques, une décision insusceptible de recours – ce qui est rare dans notre droit.
Ensuite, un subtil raisonnement, par lequel vous tentez d'échapper aux décisions de la Cour européenne de justice, vous permet de distinguer un procureur chargé de l'enquête et un procureur partie au procès, en fait réuni dans la même personne, la même institution. Là encore, je vous souhaite bonne chance : ce type de raisonnement ne peut valoir que dans les réunions internes à l'UMP et, ici, qu'auprès de députés astreints à la solidarité majoritaire.
Évidemment, à ce stade, vous soulignez que la Cour n'a pas invalidé un tel raisonnement – certes, puisque personne n'a encore osé lui présenter un dispositif aussi extraordinaire –, mais lorsqu'elle découvrira la manière par laquelle vous essayez de contourner les effets juridiques de son arrêt sur le statut du parquet, pour le coup, elle vous ramènera à des considérations un peu plus réalistes sur le fait qu'on peut difficilement établir la distinction que vous proposez – qui n'est du reste en vigueur dans aucun autre pays.
Quant à l'argument final de M. le ministre, selon lequel la décision en question est, dans d'autres pays, du ressort de la police, si vous souhaitez modifier la procédure pénale pour établir un système accusatoire, alors changez de logique et n'allez pas piocher de temps en temps dans cette autre logique pour échapper aux incohérences de votre texte.
Vous semblez éprouver une vraie difficulté à donner au procureur un pouvoir de décision touchant aux libertés publiques sans aucun recours possible. Surtout, vous niez l'évidence selon laquelle, si le procureur est bien un magistrat, vous ne pouvez pas lui donner ce pouvoir exorbitant puisqu'il est partie au procès, et selon laquelle vous ne pouvez pas distinguer dans le temps les deux rôles confiés à la même institution. Cette question n'a jamais été tranchée et quand elle sera soumise à la Cour européenne, vous serez contraints de reprendre votre copie puisque vous êtes en train de nier des droits essentiels prévus par la Convention européenne des droits de l'homme.
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 9 .
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 48
Nombre de suffrages exprimés 48
Majorité absolue 25
Pour l'adoption 22
Contre 26
(L'amendement n° 9 n'est pas adopté.)
La parole est à M. Dominique Raimbourg, pour soutenir l'amendement n° 10 .
Il est défendu.
(L'amendement n° 10 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Paul Garraud, pour soutenir l'amendement n° 196 .
Défendu.
(L'amendement n° 196 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Cet amendement vise à donner la possibilité à l'avocat de consulter les procès-verbaux. L'alinéa 7 ne le prévoit pas – manière, ici aussi, de souligner la défiance que nourrit le Gouvernement vis-à-vis de l'avocat.
Le texte prévoit des restrictions à la consultation des procès-verbaux très encadrées. Il faudra donc pour y procéder des raisons impérieuses – dont on a une appréciation in concreto –, qui tiennent aux circonstances de l'espèce et motivées par la nécessité d'investigations urgentes. Ces raisons sont conformes à la jurisprudence de la CEDH.
Le texte tel qu'il est rédigé répondant donc à notre souci d'équilibre, la commission émet un avis défavorable.
Même avis.
Ce n'est pas faire preuve d'amour-propre, d'orgueil, que de souligner l'importance de cet amendement, d'autant que nous allons examiner ensuite un amendement du Gouvernement qui ne fait pas dans la dentelle, si je puis dire, puisqu'il accorde des dérogations injustifiables. C'est pourquoi j'insiste et alerte mes collègues sur la nécessité impérieuse d'accorder à la défense la possibilité de consulter les procès-verbaux.
Nous allons avoir une discussion serrée sur l'amendement présenté par le Gouvernement, qui vise à restreindre encore un peu plus le champ de ce texte. Vous évoquiez l'écrevisse : si elle rougit quand elle bout, elle pince fortement aujourd'hui. À l'évidence – car c'est désormais une évidence – que vous pratiquez le judo avec ce texte : à chaque fois vous trouvez une prise, vous tâchez de le faire tomber. Ainsi le videz-vous de son sens : vous revenez à la logique de l'aveu, mettez l'avocat à l'écart, fragilisez la défense.
Nous insistons donc sur la nécessité d'accorder à l'avocat la possibilité de consulter les procès-verbaux sans dérogation possible.
(L'amendement n° 170 n'est pas adopté.)
La parole est à M. le garde des sceaux, pour soutenir l'amendement n° 154 .
Cet amendement vise à donner davantage de souplesse à la procédure afin de renforcer son efficacité.
J'admire votre conception de la souplesse, monsieur le garde des sceaux !
Le Gouvernement propose que le report de la consultation par l'avocat de certains procès-verbaux soit décidé indépendamment du report de l'assistance de l'avocat et que ce report concerne les procès-verbaux d'audition et le procès-verbal de notification du placement en garde à vue et des droits qui y sont attachés.
Je suis désolé pour le Gouvernement mais la commission ne peut partager son point de vue. (« Ah ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Nous n'avons cessé de chercher un équilibre entre le respect des droits de la défense et la nécessité impérieuse pour les forces de l'ordre d'assurer la sécurité du pays – et, encore une fois, je leur accorde toute ma confiance. On ne peut cependant pas à ce point déshabiller l'avocat !
Accorder à l'avocat le droit de consulter le procès-verbal de notification du placement en garde à vue sans dérogation est bien le minimum.
Cette disposition permet l'exercice d'un contrôle minimum indispensable, sans lequel le droit de la défense est un vain mot. L'avocat ainsi autorisé à consulter le procès-verbal de notification pourra vérifier le bien-fondé de la qualification pénale, vérifier que l'infraction en question est bien punie d'une peine d'emprisonnement et donc que la garde à vue est justifiée. Il s'agit aussi de s'assurer que le gardé à vue a bien reçu notification de ses droits.
Autant je suis prêt, pour des raisons pratiques, à discuter des délais, autant ici, honnêtement, je considère que voter cet amendement reviendrait à amputer non seulement l'esprit mais la réalité du contrôle et des droits de la défense.
Mes chers collègues, je vous informe que je suis saisie par le groupe SRC d'une demande de scrutin public sur l'amendement n° 154 .
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Paul Garraud.
…que la phase de la procédure dont nous discutons est une phase d'enquête, que le juge intervient à la quarante-huitième heure, qu'il n'y a aucun problème avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme.
Avant la quarante-huitième heure, le patron de l'enquête judiciaire, c'est le procureur de la République,…
…sauf lorsqu'un juge d'instruction est saisi et pilote dès lors l'enquête judiciaire.
Il convient de donner une certaine marge de manoeuvre à l'enquête. Vous invoquez les principes ; nous y sommes tous attachés. Et nous n'oublions pas que nous sommes dans le temple de la démocratie puisque nous faisons tous en sorte d'établir la plus grande égalité possible entre les droits de la défense et ceux de la poursuite. Vous devez néanmoins comprendre qu'il s'agit d'un domaine très sensible, difficile, délicat, qui met en jeu la sécurité de nos concitoyens, la sécurité publique face à la délinquance et au crime. Or, parce que certains individus sont particulièrement dangereux, le procureur de la République doit disposer d'une marge de manoeuvre.
Affirmons-le très clairement : les droits des avocats ne se situent pas au même niveau que ceux des procureurs qui, en effet, dirigent l'enquête. Reste qu'en tant que magistrats, ils respectent les garanties des libertés individuelles. L'avocat ne peut disposer d'autant de droits parce que, malgré son rôle éminent, indispensable à ce stade de la procédure, il ne prendra toute sa place qu'au moment du procès. Au moment de l'enquête, il défend les seuls intérêts de son client.
Je ne saurais mettre en cause l'honnêteté, la déontologie des avocats mais, même de bonne foi, ils n'ont qu'une vue parcellaire de l'enquête. Des informations données à un avocat pourraient avoir une incidence catastrophique sur la suite de l'enquête. Je n'ose évoquer certains cas particuliers où certains avocats élaborent une stratégie peu respectueuse de l'éthique,…
…comme cela peut arriver avec certains policiers. Il convient de se montrer aussi sévère avec les uns qu'avec les autres.
Votre position n'est conforme ni à la réalité ni au droit : encore une fois, il revient au magistrat de diriger l'enquête.
L'amendement du Gouvernement indique clairement que le report de certaines consultations s'effectuerait sous la responsabilité d'un magistrat garant des libertés individuelles. C'est pourquoi il faut absolument voter cet amendement.
Monsieur Garraud, il ne s'agit pas ici de discuter du statut du procureur ni du fait qu'il défend les intérêts de la société. De plus, nous nous accordons tous pour considérer ses fonctions comme éminemment dignes.
Le texte donne au procureur la possibilité d'écarter l'avocat de l'audition pendant douze heures et donc aussi la possibilité de l'empêcher de consulter les procès-verbaux. Votre volonté est par conséquent satisfaite.
Le Gouvernement vise ici à dissocier la mise à l'écart de l'audition et l'impossibilité de consulter les procès-verbaux. Le rapporteur estime à juste titre que cela fait tout de même beaucoup. Si on écarte l'avocat de l'audition, on l'empêche du même coup de consulter les pièces mais on ne peut déshabiller complètement l'avocat ! Il paraît du reste normal que, quel que soit le cas de figure, il ait accès au procès-verbal de placement en garde à vue.
Les droits de la société paraissent correctement défendus par le texte tel qu'il est rédigé et il n'y a pas lieu de rogner davantage les droits de la défense de la personne gardée à vue.
J'ajoute que ce texte aura forcément du mal à s'appliquer. Si nous prévoyons trop de possibilités de déroger à l'intervention de l'avocat, ces dérogations deviendront la règle. Il faut donc être prudent.
Ce que dit Jean-Paul Garraud est en partie juste : que l'avocat puisse avoir accès à des pièces alors que le procureur ne les a pas paraît paradoxal. Il serait informé avant celui à qui les pièces étaient destinées, c'est-à-dire celui qui va poursuivre.
Mais puisque telle est la philosophie du texte, avançons. Je voudrais poser une question au ministre. Il veut permettre que l'OPJ puisse différer la transmission de ces pièces à l'avocat. Mais alors, à quoi pourrait avoir accès l'avocat si l'on peut repousser la consultation du PV de l'audition, du PV de notification du placement en garde à vue, et des droits y étant attachés ? Très concrètement, à quoi l'avocat pourra avoir accès ?
Notre collègue Urvoas a bien résumé la question. Par cet amendement, le Gouvernement propose finalement que l'avocat soit invité à venir, mais sans qu'on lui donne accès au procès-verbal de notification du placement en garde à vue, sachant par ailleurs qu'il pourrait s'entretenir avec son client. Il serait peut-être bon, monsieur le ministre, que vous précisiez aussi qu'il est interdit au client de dire à son avocat pourquoi il a été placé en garde à vue. Si votre logique, c'est que l'avocat ne doit pas savoir pourquoi son client est là, il faut aussi interdire au client de le lui dire. Cela me paraît imparable.
J'ignore qui est l'inspirateur de ce subtil amendement, mais ce qu'a dit le rapporteur, pour des questions de fond, pour des questions de droit, et tout simplement pour des questions de rationalité, mérite que l'on repousse cet amendement.
Si cet amendement du Gouvernement n'est pas adopté, nous serons dans la politique du tout ou rien : soit il y a report complet de l'intervention de l'avocat, qui n'a pas accès au dossier, soit il peut intervenir normalement.
Ce que nous propose le Gouvernement, finalement, c'est d'introduire une certaine souplesse. Dans les cas qui seraient un peu à la limite entre les deux, il serait nécessaire de permettre à l'avocat d'assister son client pour le conseiller, pour lui apporter un soutien, mais sans qu'il ait forcément l'ensemble des éléments en main, et ce pour le bénéfice de l'enquête. Cet amendement va donc permettre, dans certains cas, une intervention de l'avocat, même s'il n'a pas accès au dossier. Sans cette possibilité, la personne mise en cause n'aurait pas droit à un avocat du tout.
À partir du moment où l'alinéa 6 existe, l'alinéa 7 vient, d'une certaine façon, le modérer. Il serait donc cohérent de la part du groupe socialiste de voter l'amendement du Gouvernement, ce que fera le groupe UMP.
En réalité, il s'agit de dissocier l'assistance et la consultation du dossier. On permettrait l'assistance, et pas la consultation du dossier. Que dit la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme ? Elle parle d'assistance « effective ». Celle-ci suppose que l'avocat puisse prendre connaissance du dossier. Ou bien, dans le cadre du système dérogatoire, on reporte l'intervention de l'avocat et la prise de connaissance du dossier, ou bien on ne la reporte pas, auquel cas il faut qu'il y ait prise de connaissance du dossier.
En outre, sur un plan pratique – car il ne faut jamais oublier comment les choses se passent concrètement –, quelle va être la réaction de l'avocat à qui l'on ne permettra pas de prendre connaissance du dossier ? Il va tout simplement conseiller à son client d'utiliser son droit au silence et de ne rien dire. Il ne se passera rien du tout, et ce sera du temps de perdu.
Quant aux déclarations – mais j'en ai l'habitude – de mon ami Garraud sur le fait qu'il est dangereux de porter des procès-verbaux à la connaissance d'un avocat, il faudrait arrêter avec cette suspicion permanente qui s'exprime à longueur d'interventions. Il y a des règles déontologiques. L'avocat est un auxiliaire de justice. C'est comme cela qu'il faut apprécier les choses, sans avoir peur en permanence de l'avocat.
Je suis toujours inquiet pour la démocratie quand on a peur de l'intervention des avocats.
Enfin, bref. En tout état de cause, c'est indissociable : ou bien l'avocat intervient et il prend connaissance du dossier, ou bien son intervention est différée. Je crois que c'est aussi l'avis de notre rapporteur.
Je voudrais recadrer le débat, parce que je crois qu'il dérape légèrement. L'alinéa 7 de cet article 7 dispose que « le procureur de la République peut décider, à la demande de l'officier de police judiciaire, que, pendant la durée fixée par l'autorisation, l'avocat ne peut consulter les procès-verbaux d'audition de la personne gardée à vue ». Ce texte permet déjà d'interdire à l'avocat, pendant douze heures, d'avoir accès aux PV d'audition, c'est-à-dire à ce que la personne a déclaré.
Le Gouvernement nous propose un amendement tendant à permettre au procureur d'interdire, en plus, à l'avocat d'avoir accès au procès-verbal de notification de la garde à vue. Qu'y a-t-il dans ce procès-verbal ? Il y a, d'une part, les charges, c'est-à-dire ce qui est reproché à la personne, et d'autre part, la notification de ses droits. Pensez-vous que la République est menacée si l'on permet à un avocat d'avoir accès à un procès-verbal qui contient cela ? Je n'en suis pas très sûr.
Je trouve légitime que l'on puisse différer l'accès au PV d'audition, parce que nous sommes là dans le dossier, si je puis dire. Mais en plus de cela, le Gouvernement veut interdire l'accès au premier PV de notification. Je laisse à chacun le soin d'y réfléchir.
Le président de la commission n'est « pas très sûr » du bien-fondé de cet amendement. C'est une précaution oratoire que je peux comprendre : il est président de la commission. Le rapporteur, lui, insiste : l'accès de l'avocat au procès-verbal de notification du placement en garde à vue, c'est le minimum minimorum. Je pense qu'on ne peut pas faire moins, si l'on veut vraiment une défense effective. Encore une fois, la République n'est pas en péril. Ce serait même plutôt se grandir que de l'accepter.
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 154 .
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 46
Nombre de suffrages exprimés 46
Majorité absolue 24
Pour l'adoption 18
Contre 28
(L'amendement n°154 n'est pas adopté.)
L'amendement n° 11 vise à transmettre au juge des libertés et de la détention le pouvoir qui est actuellement confié au procureur de la République. C'est le débat que nous avons eu tout à l'heure.
L'amendement n° 12 , lui, propose de supprimer l'alinéa 8, qui porte sur les cas les plus graves. Cet alinéa permet d'interdire la présence de l'avocat pendant vingt-quatre heures dans les cas les plus graves, c'est-à-dire, en l'occurrence, les cas où le motif de la garde à vue est un crime ou un délit puni d'une peine supérieure ou égale à cinq ans d'emprisonnement.
Je reprends l'exemple qu'a cité M. Muzeau. Le jeune homme ou la jeune fille qui, dans une cour d'école, fait un croche-pied à un de ses camarades – ou à un de ses condisciples, qui n'est pas forcément un camarade – alors que celui-ci est mineur encourt une peine de sept années d'emprisonnement.
J'ai redit hier combien la définition des violences physiques était, et je vous prie d'excuser l'expression, « délirante ». Dans notre droit pénal, les circonstances aggravantes peuvent tenir à la qualité de l'auteur, à la qualité de la victime, ou au lieu de l'infraction. Quand on cumule ces trois types de circonstances aggravantes, on aboutit à des aberrations telles que celles qui ont été décrites par M. Muzeau. Dans ces cas-là, on pourrait interdire la présence de l'avocat pendant vingt-quatre heures.
La limite de douze heures, c'est un maximum. La repousser au-delà, cela me paraît déraisonnable.
J'ajoute que ce report sera décidé par le juge des libertés et de la décision, alors qu'on nous dit qu'il sera difficile de prévoir sa présence. Cette disposition est donc en contradiction avec l'argument sur les moyens d'application de ce texte.
Il faut revenir à la raison. Compte tenu de l'extrême sévérité des peines qui sont prévues dans le code pénal, et compte tenu de la facilité avec laquelle les circonstances aggravantes conduisent à alourdir les peines encourues, je propose la suppression de cet alinéa, qui ne me paraît pas nécessaire. Et je reprends l'expression de M. le rapporteur : la République ne sera pas en danger si le jeune homme dont parlait M. Muzeau peut bénéficier d'un avocat à partir de la douzième heure.
S'agissant de l'amendement n° 11 , je ne reviens pas sur ce qui a déjà été dit. Il s'agit toujours des mêmes conditions, notamment les raisons impérieuses. M. Raimbourg sait de quoi je veux parler. Avis défavorable, donc, pour les raisons déjà évoquées, et dans la même logique.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 12 . L'alinéa 8 prévoit un second report, soumis à des conditions beaucoup plus exigeantes que le premier. Il y a déjà les critères précédents, liés aux raisons impérieuses, lesquelles tiennent aux circonstances particulières de l'enquête. Il s'agit donc d'une appréciation in concreto. D'autre part, le motif du placement en garde à vue doit être un crime ou un délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement. Il s'agit donc de faits graves. Et surtout, la décision relève de la compétence du JLD. C'est une compétence que vous appeliez de vos voeux, monsieur Raimbourg.
J'entends bien qu'un problème pratique se pose, touchant à l'opérationnalité du JLD. Cet argument, il m'arrive moi-même de le mettre en avant. Mais cet argument vaut en général, parce que notre chaîne pénale n'est pas aujourd'hui organisée dans ce sens. Ici, nous sommes dans un champ beaucoup plus restreint. Voilà pourquoi l'avis est défavorable.
Même avis.
Je soutiens l'amendement n° 12 défendu par notre collègue Raimbourg, qui n'est pas anodin. Au cours de la discussion générale, nous avons été un certain nombre à dire que la présence de l'avocat était d'autant plus nécessaire que l'infraction était grave et pouvait entraîner des peines d'emprisonnement comprises entre trois et cinq ans, et même au-delà.
Avec cet alinéa 8, vous fragilisez encore un peu plus la position de la personne placée en garde à vue, qui risque une lourde peine. C'est la raison pour laquelle nous insistons sur la nécessité de ne pas reporter encore l'assistance de l'avocat. Si une personne placée sous contrainte a besoin d'être assistée, c'est bien celle qui est soupçonnée d'avoir commis une infraction lui faisant encourir plus de trois ans, voire plus de cinq ans d'emprisonnement.
(L'amendement n° 11 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 12 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 193 .
La parole est à M. Jean-Paul Garraud.
Cet amendement concerne toujours la possibilité de différer la présence de l'avocat, qui obéit à des règles très précises fixées à l'alinéa 8 de l'article 7 dont nous venons de parler. Lorsque la personne est gardée à vue pour un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans, la présence de l'avocat lors des auditions peut être différée sous des conditions très précises : en cas d'impérieuse nécessité, sur autorisation du juge de la liberté et des détentions statuant à la requête du procureur de la République.
Ce qui m'apparaît artificiel, c'est de limiter cette possibilité de différer la présence de l'avocat uniquement lorsque la personne gardée à vue encourt une peine criminelle ou une peine pour un délit puni d'un emprisonnement supérieur ou égal à cinq ans.
Il faut voir les choses telles qu'elles sont : nous en sommes au niveau de l'enquête, quelle que soit la peine encourue par la personne gardée à vue, ce n'est pas parce que cette personne encourt une peine de cinq ans ou moins que la réussite de l'enquête va en dépendre. Pour m'expliquer clairement : lorsqu'une personne est placée en garde à vue, nous en sommes au seuil de l'enquête. Ce qui importe alors est la réussite de l'enquête, nous sommes tous d'accord sur ce point. Que la personne encourt une peine criminelle ou délictuelle de plus ou moins de cinq ans d'emprisonnement, c'est la réussite de l'enquête qui compte. Ce butoir me semble complètement artificiel, surtout si l'on compare cela aux conditions de placement en garde à vue, qui sont très protectrices : il faut encourir une peine d'emprisonnement, et répondre aux critères de placement en garde à vue. Faire dépendre la réussite de l'enquête et la possibilité de différer la présence de l'avocat dans certains cas exceptionnels du quantum de la peine encourue me semble artificiel et risqué. En clair : ce n'est pas parce que l'on risque plus de cinq ans que la réussite de l'enquête doit en dépendre. C'est cela qui pose problème.
En pratique, comment voulez-vous, alors qu'une affaire démarre et que l'on recueille les premiers éléments d'une enquête, faire remonter un certain nombre d'investigations et différer la présence de l'avocat alors que c'est manifestement impérieux pour la nécessité de l'enquête et sa réussite ? C'est pour cela que je souhaitais qu'il ne soit pas établi de distinction entre crime ou délit pour pouvoir différer l'assistance de l'avocat auprès de son client.
Nous sommes dans une logique d'équilibre, qui a déjà été exprimée tout à l'heure. Je crois que l'on risquerait, avec cet amendement, de rompre cet équilibre, et il est nécessaire de prévoir des conditions plus strictes. Avec regret pour mon collègue Garraud, l'avis de la commission est défavorable.
Même avis. À moins que M. Garraud ne retire son amendement…
Nous ne pouvons absolument pas partager le point de vue de M. Garraud. Il nous dit que ce qui compte dans tous les cas, c'est la réussite de l'enquête, alors que, justement, nous devons trouver un équilibre entre la nécessité de réussir l'enquête et le respect des droits de la personne mise en cause. Autant nous pouvons comprendre que lorsqu'un crime particulièrement odieux a été commis, les droits de la personne puissent être bafoués, bien que, même si le crime est affreux, on ait le droit d'être défendu, autant lorsqu'il s'agit d'un délit mineur, on ne voit pas la raison pour laquelle on bafouerait ainsi les droits de la personne mise en cause.
Si l'on recherche dans le code pénal toutes les infractions punies de cinq ans d'emprisonnement, on trouve des choses d'une valeur extrêmement inégales. Placer la limite à cinq ans donne une ouverture assez large sur beaucoup de crimes ou de délits. Par conséquent, faire sauter ce verrou serait aller dans un sens répressif incompréhensible et qui ne respecte pas l'équilibre d'un procès pénal.
(L'amendement n° 193 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 33 .
La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas.
Cet amendement tend à garantir les conditions de dignité, de neutralité et de confidentialité des auditions des personnes gardées à vue tout en permettant une amélioration des conditions matérielles des auditions pour les enquêteurs.
C'est une invitation faite au Gouvernement pour qu'il nous rassure sur les moyens qu'il compte employer de façon à permettre la véritable application de cette réforme. J'avais dit lors d'une explication de vote sur une motion de procédure combien le chiffrage que le Gouvernement avait présenté à l'Assemblée nationale dans son étude d'impact paraissait fantaisiste. Comme je prédis des jours sombres à l'application de cette mesure à partir du 1er juillet 2011, cet amendement vise à faire en sorte qu'a minima, les usagers les plus réguliers des locaux de commissariat et de gendarmerie que sont les policiers et les gendarmes eux-mêmes, ainsi que les gardés à vue, puissent être traités de manière à garantir les droits.
Sur le fond, je suis d'accord avec presque tout ce qui est proposé. Oui, bien sûr, à la dignité des personnes. Oui à la sécurité, oui à la confidentialité, oui à la disponibilité des équipements d'enregistrement audiovisuels. Vous connaissez mon point de vue à ce sujet : il faut permettre leur utilisation lorsque la loi le prévoit, non pas pour les rendre systématiques. Il n'y a guère que sur le dernier point, l'absence de tout élément de nature à exercer une influence sur la personne, que je ne perçois pas bien la signification de l'amendement.
Ce sont des objectifs que je partage, mais comme tels, je ne pense pas qu'ils aient vocation à figurer dans la loi. Il s'agit là de questions d'équipement pour l'essentiel, de mise à niveau des locaux de police judiciaire, et pas de l'encadrement juridique de la garde à vue, dont nous sommes en train de discuter. Le débat permet de bien cadrer ces objectifs, il s'agit bien de dignité – c'est dit et cela figure dans nos travaux – mais cet amendement n'a pas sa place dans un texte d'encadrement. C'est uniquement pour cette raison que l'avis est défavorable.
M. Urvoas a présenté cet amendement comme un amendement d'appel, il reconnaît donc qu'il n'a pas sa place dans le texte en tant que disposition normative.
Je répète qu'il est certain que cette réforme va entraîner beaucoup de changements, culturels, de comportements, de manière de travailler, et elle va aussi nécessiter des transformations matérielles. Le Gouvernement en a parfaitement conscience.
Vous avez contesté la validité de l'étude d'impact. Elle a été faite à partir des chiffres qui ont été présentés par le ministère de l'intérieur, compte tenu des locaux existants, et validés en réunion interministérielle. Mais compte tenu des positions prises en première lecture à l'Assemblée nationale, je veillerai à faire réactualiser l'étude d'impact pour la seconde lecture.
Je suis saisie d'un amendement n° 192 .
La parole est à M. Jean-Paul Garraud.
Cet amendement concerne le cas de l'intervention de l'avocat au cours de l'audition du gardé à vue. Le texte prévoit à l'issue de chaque audition ou confrontation à laquelle il assiste que l'avocat puisse poser des questions. Il peut également adresser des observations écrites – c'est l'alinéa suivant.
Je souhaite simplement, dans le cadre de cet amendement, pousser l'avocat à être synthétique, à ramasser ses explications.
Nous connaissons bien les qualités des avocats, mais ils sont quelquefois un peu bavards. Puisqu'il s'agit pour l'avocat de poser des questions à l'issue d'une audition, cet amendement propose de limiter à quinze minutes la durée de cette intervention. Sinon, cela peut s'éterniser. C'est juste un souci pratique, car encore une fois, nous sommes au stade de l'enquête et chaque minute peut compter. Je ne veux donc pas retarder le bon déroulement de l'enquête.
Cela rejoint les préoccupations de notre collègue Raimbourg. La question est importante, il ne s'agit pas de donner un temps qui serait utilisé pour en gagner, justement.
De façon pragmatique, l'OPJ pourra mettre fin à l'audition s'il estime qu'il y a difficulté. De fait, cela trancherait la question. Ce point nécessite d'être travaillé, en l'état, l'avis est défavorable.
L'amendement peut être vu de deux côtés : c'est également une garantie de temps qui est donné à l'avocat pour pouvoir poser des questions. J'ai été très sensible aux propos de M. Raimbourg sur le minutage, nous sommes dans un temps donné qui est limité. L'amendement proposé par M. Garraud entre dans cette logique, c'est la raison pour laquelle je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée, une sagesse plutôt favorable.
Peut-être ai-je l'esprit mal tourné, mais je voyais le problème différemment. La vraie difficulté est celle de l'hypothèse, rare mais pas totalement impossible, de la manoeuvre dilatoire.
Cela consisterait à poser les questions de façon à utiliser le temps de la garde à vue.
Est-ce que le recours aux sanctions déontologiques de l'ordre sur ce type de comportements est suffisant, ou bien faut-il strictement limiter le temps ? Dans des dossiers importants, qui ont donné lieu à une audition très longue, si l'audition a duré quatre, cinq ou six heures, il semble difficile de limiter le temps à quinze minutes. Il y a là une difficulté.
En l'état, il faut rejeter cet amendement, mais il convient de réfléchir à des possibilités de se prémunir contre d'éventuels abus si l'on peut pressentir qu'ils vont exister.
Madame la présidente, je vois que le rabot est toujours à la manoeuvre. (Sourires.)
Concrètement, on ne peut pas fixer quinze minutes, d'autant que ce pauvre OPJ va devoir retranscrire. M. Garraud ne précise pas si le temps de retranscription est compris dans les quinze minutes ou pas. Nous voyons bien que nous nous dirigeons vers des inepties. Comme le dit M. Raimbourg, lorsqu'il y a une longue audition, il peut y avoir des questions qui prennent plus de temps. C'est bien normal, et cela fait avancer le contradictoire. Il ne faut pas enfermer cela dans un délai qui sera une source inutile de contentieux.
S'il y a des abus, l'OPJ peut mettre un terme à l'audition, et, d'autre part, ces choses se règlent effectivement par la déontologie et les instances disciplinaires de l'ordre si cette attitude était délibérée. Ne mettons pas de délai, ne compliquons pas les choses ! Il y a suffisamment de changements culturels qui vont s'opérer, n'allons pas ajouter des perturbations.
Les affaires sont différentes. Un certain nombre d'entre elles peuvent être complexes et nécessiter un long temps d'audition, plusieurs heures parfois. À l'issue de l'audition menée par l'OPJ, l'avocat peut estimer nécessaire de poser des questions, afin de démêler les fils. Limiter le temps à quinze minutes semble trop strict.
Il faut certes prendre en considération la possibilité de procédure dilatoire. La réponse se situe dans l'alinéa 9 : « L'officier ou l'agent de police judiciaire peut s'opposer aux questions de nature à nuire au bon déroulement de l'enquête… ».
De ce fait, si les questions ont un caractère dilatoire l'avocat pourra s'y opposer. Il aura la possibilité de mentionner les questions refusées au procès-verbal.
Il existe déjà dans le texte des garde-fous permettant d'éviter les excès. Je pense qu'il faut repousser l'amendement de M. Garraud, à moins qu'il ne décide de le retirer.
Monsieur Raimbourg, je vous remercie d'avoir compris la difficulté de ce point de droit et je suis heureux d'avoir posé une « vraie question ».
Nous abordons la police de l'audition, qui est un sujet délicat. Qui dirige l'audition ? Il faut regarder la réalité en face. Lorsqu'un avocat chevronné arrive dans un commissariat ou une brigade de gendarmerie, il peut exercer un certain ascendant sur l'officier de police judiciaire qui mène l'audition. C'est naturel, les avocats sont des professionnels aguerris.
Dans les affaires compliquées, on m'a fait remarquer que quinze minutes risquaient d'être un délai trop court. Je comprends cet argument. Mais dans l'alinéa suivant il est précisé : « l'avocat peut présenter des observations écrites. » Principalement, dans les affaires un peu compliquées, l'avocat peut parfaitement limiter les questions en fin d'audition au délai que je viens d'indiquer et présenter par la suite toutes les observations écrites qui seront jointes au procès-verbal.
J'ai entendu les arguments présentés par M. Houillon. Je ne les partage pas, cela n'étonnera personne. Il m'est reproché de mettre en place des délais qui risquent de compliquer les choses, alors que M. Houillon défendait tout à l'heure avec véhémence les délais de carence, les deux heures, l'heure, etc.
Ce que l'on me reproche à présent a été fait tout à l'heure.
Nous devons débattre dès maintenant de cette vraie question. Je comprends l'argumentation selon laquelle le texte sera examiné au Sénat, que nous aurons deux lectures. Je ressent un peu la même impression de satisfaction qu'hier, lorsque j'ai posé une question sur les auditions simultanées. Je crois que qu'il faut parler de ces points dès maintenant.
Pour ces raisons, je préfère maintenir l'amendement, même si je m'attends à être battu – mais on ne sait jamais ! – et discuter après. Je le répète – cela a été admis à gauche de notre hémicycle, – il s'agit d'une vraie question.
(L'amendement n° 192 n'est pas adopté.)
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Suite de la discussion du projet de loi relatif à la garde à vue.
La séance est levée.
(La séance est levée à douze heures cinquante.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma