Au nom du Gouvernement, vous avez déposé un amendement, avant l'article 1er, précisant que tout ce qui sera dit par une personne gardée à vue hors de la présence d'un avocat ne pourra pas être retenu contre elle. Nous avons longuement discuté de cet amendement qui a été adopté. Il s'agissait d'un signe de confiance qui donnait toute sa portée à la réforme.
Or, avec l'amendement de M. Garraud, nous changeons de cap. Il faut décidément que nous soyons vigilants jusqu'au bout ; nous avons l'impression que, d'une main, cet amendement reprend, ce que le projet de loi a précédemment apporté de l'autre.
Monsieur Garraud, si nous votions votre amendement, ce que nous avons adopté avant l'article 1er n'aurait plus aucune portée. Le progrès permis pas le texte serait remis en cause puisque, selon vous, le délai de carence est inutile.
Quant à l'amendement de repli du rapporteur, qui vous dit, monsieur Garraud, que vous n'avez pas raison mais que vous n'avez pas tort non plus, il tend à ramener le délai de carence à une heure. Or tout cela ne rime à rien, car, une fois que l'officier de police judiciaire aura prévenu le bâtonnier, il faudra que l'avocat puisse se déplacer en toute sérénité. Monsieur le rapporteur, vous avez cité le cas du département de la Gironde, mais il y en a une centaine d'autres. En milieu rural, il faut souvent une heure pour se rendre du chef-lieu de département à la brigade territoriale.
Monsieur le garde des sceaux, cette nuit même nous considérions ensemble que les brigades territoriales devaient rester des lieux d'auditions. Une heure, c'est insuffisant. Rendez-vous compte : il faut le temps que le bâtonnier prévienne l'avocat de permanence qui, toutes affaires cessantes, devra quitter son cabinet et prendre sa voiture pour un trajet d'une heure ou une heure et quart. Il arrivera sur les lieux de la garde à vue dans un état de stress sans avoir eu le temps de rien connaître du dossier.
Il faut que nous travaillions dans un climat de confiance. Avec des amendements de ce type, on instille le doute sur la volonté réelle du législateur de voter un texte d'équilibre et de progrès, alors qu'il s'agit pourtant bien de ce qui caractérise votre projet de loi.
Vous avez souhaité qu'une certaine unanimité se fasse autour de cette réforme. Nous avons travaillé dans cet esprit depuis le début de l'examen des articles. Dans un climat de confiance, vous avez accepté des amendements de l'opposition et d'autres du groupe centriste. Je crois que nous aurions intérêt à faire preuve de fermeté en ce qui concerne le délai de carence : il doit être de deux heures et si le rapporteur défend un amendement de repli, il ne peut pas prétendre que la commission y est favorable puisque nous n'en avons jamais discuté précédemment.