La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, la passion qui nous anime – passion de la vie publique et de la France – nous conduit parfois à nous exprimer avec un peu de force. Je vous appelle donc les uns et les autres, questionneurs sur tous les bancs et vous aussi, mesdames et messieurs les ministres, à respecter, autant que faire se peut, la mesure dans vos propos. Les Français nous en seront certainement reconnaissants. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Gwendal Rouillard, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Permettez-moi tout d'abord de vous dire ma colère et celle des Bretons face à l'échouage du cargo maltais sur les plages du Morbihan. Face à un tel niveau d'irresponsabilité, je demande au Gouvernement d'interdire purement et simplement la sortie en mer des navires en cas de risque majeur.
Cela étant dit, ma question s'adresse au Premier ministre. Depuis le vote de la loi LRU en 2007, nos universités connaissent une période de grave incertitude, et ce partout en France. Cela se traduit concrètement par l'incapacité, voire le refus d'un certain nombre d'entre elles de voter leur budget.
Puis-je vous rappeler les grands objectifs que vous aviez fixés en 2007, à savoir l'autonomie, la liberté et la responsabilité ? Que valent ces grands mots, ces grands principes, quand on en vient à la cessation de paiement et à la mise sous tutelle de plusieurs universités ? Nous étions censés avoir l'autonomie des universités ; nous n'avons obtenu, en réalité, que l'autonomie de la tutelle.
Monsieur le Premier ministre, il y a urgence. Le dossier est désormais entre vos mains. La crise que nous traversons est dure. Nous en mesurons les difficultés, mais des choix doivent être faits. Je vous demande de faire comme François Hollande… (Rires et Exclamations sur les bancs du groupe UMP. – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
…le choix de l'université et de l'éducation.
Dans une interview la semaine passée, le chef de l'État déclarait lui-même : « La croissance passe par l'autonomie des universités ». Mais qu'attend-il, qu'attendez-vous pour passer aux actes ? Nous avons déjà perdu trop de temps, monsieur le Premier ministre. Nous vous demandons donc, désormais, de passer aux actes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Monsieur le député, vous avez peut-être manqué un certain nombre d'épisodes depuis quatre ans. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Je vais donc vous rappeler nos actes – des actes qui vaudront mieux que les propos d'estrade que vous avez tenus.
Ces actes, ce sont un budget de l'enseignement supérieur et des universités en augmentation de 25 % au cours des quatre dernières années et des universités autonomes dont le budget d'ensemble est, pour la première fois, en excédent de 120 millions d'euros.
Ces actes, ce sont, encore ce matin, trente-six projets EQUIPEX couronnant l'excellence d'un certain nombre d'universités, que vous feriez mieux de souligner, qui ont été sélectionnés dans le cadre de l'appel d'offres fait conjointement avec le Commissariat général à l'investissement.
Ces actes, c'est, pour la première fois, un accompagnement de la masse salariale de nos universités pour les aider.
Oui, tout cela, ce sont des actes. Mais, monsieur Rouillard, ce sont surtout des actes qui devraient vous inciter à faire plus confiance aux présidents d'université.
Par vos propos, vous donnez l'impression que ces présidents n'ont pas été capables de gérer l'autonomie. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Cela, c'est votre choix.
Votre modèle est sans doute celui d'universités qui étaient sous la tutelle du ministère et qui, pour la moindre négociation, la moindre augmentation d'heures, le moindre investissement en faveur de leur patrimoine immobilier étaient obligées d'aller quémander.
Notre projet à nous repose sur la confiance. C'est un projet qui consiste à donner les moyens aux présidents d'université et à leur permettre de gérer leur établissement.
Je ne sais pas quels sont vos actes, mais ceux auxquels je fais référence reposent tout simplement sur un doublement des moyens donnés à nos universités par rapport aux dix années précédentes.
En cinq ans, nous avons fait deux fois plus que pendant les dix années précédentes.
Plusieurs députés du groupe SRC. Non !
La seule véritable question qui est posée, monsieur Rouillard, tient au fait que vous n'avez pas voulu voter la loi LRU…
Plusieurs députés du groupe SRC. Et nous avons bien fait !
….parce que vous ne faites pas confiance aux présidents d'université et aux universitaires. Nous, nous leur faisons confiance…
…et nous nous en donnons les moyens. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Éric Diard, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement et porte sur l'organisation du service et l'information des passagers dans les entreprises de transport aérien. En effet, si le droit de grève est un droit constitutionnellement garanti, il n'est pas absolu et doit respecter les autres libertés reconnues par la constitution, comme la liberté d'aller et de venir ou la liberté du commerce et de l'industrie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
En ce sens, j'ai déposé le 22 novembre dernier une proposition de loi cosignée par quatre-vingt-dix de mes collègues de l'UMP et du Nouveau Centre.
L'objectif de cette proposition est triple : sauvegarder l'ordre public dans les aéroports, améliorer l'information des passagers et renforcer le dialogue social.
Pour ce faire, il est proposé une obligation de déclaration individuelle préalable de participation à la grève, quarante-huit heures avant son déclenchement et pour le seul personnel dont le concours est nécessaire à la réalisation des vols ; une obligation d'information des passagers par la compagnie aérienne au plus tard vingt-quatre heures avant la grève ; enfin, la mise en place d'un mécanisme de prévention des conflits donnant aux salariés ou aux employeurs la possibilité de demander une négociation préalable au conflit.
Face à la situation de blocage dans plusieurs aéroports, que pensez-vous de l'examen d'une proposition de loi qui permettrait d'éviter à des personnes de ne pouvoir rejoindre leur lieu de travail ou leur domicile, ou à des familles de se retrouver bloquées dans les aéroports,…
…notamment lors de périodes festives et familiales comme celle de Noël ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Eric Diard, depuis plusieurs jours, nous faisons face à la grève des agents de sécurité dans les aéroports.
Ce sont des retards, des files d'attente et, dans certains cas, des annulations de vol, comme ce week-end et encore lundi à Lyon Saint-Exupéry.
Cette grève pose un problème de fond…
…en même temps qu'elle appelle des mesures d'urgence.
Sur le fond, avec M. Thierry Mariani, nous regrettons le choix de Noël pour cette grève, période où les familles se retrouvent. Le droit de grève est constitutionnel, certes, mais, comme vous le souligniez, il faut compter aussi avec la libre circulation des personnes.
Votre proposition de loi, monsieur le député Eric Diard, arrive à point nommé. Elle reçoit le soutien du Gouvernement. M. Thierry Mariani vous l'a dit. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Elle prévoit une négociation quarante-huit heures à l'avance, car il s'agit de pouvoir prévoir, pour les passagers mais aussi pour les opérateurs. Nous nous réjouissons qu'elle puisse être examinée par votre assemblée en janvier.
Cette crise, mesdames et messieurs les députés, appelle également des mesures d'urgence.
Nous déplorons que la négociation ait eu tant de mal à se mettre en place.
C'est la raison pour laquelle, en lien avec le ministre du travail, M. Thierry Mariani et moi-même avons nommé deux médiateurs, l'un pour Roissy et l'autre pour Lyon, afin de pouvoir débloquer la situation.
Mais, par ailleurs, le week-end de Noël approche. À partir de demain, de plus en plus de vols seront au départ. Aussi le ministre de l'intérieur, M. Claude Guéant, a-t-il demandé aux forces de police et de gendarmerie de se tenir prêtes à se substituer en tant que de besoin aux grévistes pour assurer les fonctions de sécurité.
Mesdames et messieurs les députés, le Gouvernement ne laissera pas les Français être pris en otage à l'occasion des fêtes de Noël. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le Premier ministre, aujourd'hui, se tient au siège de PSA un nouveau comité central d'entreprise.
Au printemps dernier, le PDG, après s'être augmenté de plus de 300 %, se félicitait des très bons résultats financiers de son groupe. La CGT révélait au même moment, malgré ces bons résultats, des fermetures de sites, dont celui d'Aulnay ! Depuis, j'ai interrogé à deux reprises M. le ministre de l'industrie. Il m'a répondu qu'aucun licenciement ni aucune fermeture de site n'étaient envisagés. Il avait, disait-il, des assurances de la direction de PSA.
Après des mois de déni, d'enfumage, la direction de PSA, à quatre jours de Noël, offre comme cadeau aux salariés et à leurs familles la confirmation de la suppression de 5 000 emplois en France, dont 1 900 CDI, notamment à l'usine d'Aulnay où les menaces de fermeture se précisent. On connaîtra peut-être au Nouvel an le détail des emplois touchés chez les prestataires, les intérimaires et les sous-traitants. Quel cynisme !
Mais cette manoeuvre est vouée à l'échec. Les salariés qui manifestaient jeudi sont déterminés à se battre pour leurs emplois et pour leur entreprise. Car ces salariés, contrairement à ces dirigeants qui sabordent notre industrie pour honorer leurs actionnaires, veulent travailler et produire en France !
Les six syndicats de PSA Aulnay se sont adressés au Président de la République pour lui demander, en le prenant au mot sur ses propos vantant la « marque France », de s'engager sur ce dossier. Ils demandent l'organisation d'une réunion tripartite entre l'État, la direction et les syndicats, pour aboutir à un accord assurant le maintien de tous les emplois et sites et l'attribution à Aulnay d'un nouveau véhicule d'ici 2016.
Monsieur le Premier ministre, allez-vous donner suite à cette demande qui vise au soutien de l'emploi industriel, ou allez-vous, une nouvelle fois, laisser sacrifier l'emploi industriel sur l'autel des profits ?
La parole est à M. Éric Besson, ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique.
Monsieur le président, madame la ministre, madame la députée, les mesures qui ont été exposées ce matin par PSA montrent que le groupe tient les engagements qu'il avait pris devant le Président de la République et le Gouvernement.
Aucune fermeture de site automobile, aucune mesure de licenciement, aucune mesure d'âge, aucun plan de départ volontaire n'est annoncé.
Comme son président s'y était engagé, les 1 900 salariés de PSA bénéficieront tous d'un suivi individualisé, de formations, d'aides à la mobilité ou de congés de reclassement.
Plus de la moitié d'entre eux se verra proposer de nouvelles opportunités professionnelles en interne. Les autres salariés qui ne souhaiteraient pas faire valoir leurs droits à la retraite quand ils le peuvent, bénéficieront de propositions en externe.
Je sais aussi que le sort d'Aulnay vous préoccupe particulièrement. Je vous ai reçue dès juin avec les élus concernés et je ne doute pas de votre bonne foi dans cette démarche. Mais la bonne foi, c'est aussi de reconnaître que le président de PSA a confirmé à plusieurs reprises que la fermeture d'Aulnay n'était aucunement d'actualité.
Ce site dispose avec la C3 d'un plan de charge qui va au moins jusqu'à 2014. Être de bonne foi, c'est donc distinguer des mesures temporaires…
actuellement prises à Aulnay du fait de la conjoncture – et la conjoncture est incontestablement défavorable – et le sujet de plus long terme du véhicule successeur de la C3.
L'après C3 dépend de la façon dont PSA pourra produire en France, de façon compétitive, des véhicules de petite taille. PSA en débat avec les syndicats. J'ai demandé d'accentuer l'information des élus locaux et de la représentation nationale, mais convenez avec nous, madame Buffet, que la compétitivité dépend de nombreux paramètres : de l'innovation, du coût du travail,…
…de la fiscalité, du financement de la protection sociale et, par exemple aussi, du prix de l'électricité qui, pour le groupe PSA, est très important. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, ma question concerne les conclusions des récentes Assises ferroviaires.
Vous savez combien les membres du Parlement sont attentifs à cette question, sur laquelle nous avons travaillé dans le cadre d'une récente commission d'enquête parlementaire. Je ne peux, dans le laps de temps qui m'est donné, évoquer toutes les questions qui se posent, l'avenir du TGV, les problèmes de gouvernance… Je traiterai de l'avenir de l'industrie ferroviaire, et plus particulièrement de la construction et de la réparation.
Au moment où le chômage est la première préoccupation des Français, il convient de tout mettre en oeuvre pour maintenir l'emploi et assurer la pérennité des emplois. J'aimerais donc savoir si le Gouvernement entend créer un fonds dédié, je pense à ce fonds de modernisation des équipements ferroviaires qui serait une contribution pour aider au regroupement de certains sites et conforter l'emploi.
Mais, au lendemain de la visite du candidat François Hollande à Saint-Nazaire, je ne peux pas ne pas évoquer l'action de la majorité pour maintenir l'emploi. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
C'est grâce à la création du fonds stratégique d'investissements, qui nous a permis de prendre une partie du capital, et grâce au plan de soutien à travers les commandes publiques notamment, que Saint-Nazaire compte encore des chantiers. Lorsque le Gouvernement et la majorité travaillent sur la création de fonds dédiés, nous pouvons maintenir les emplois et la pérennité de nos entreprises.
C'est donc avec confiance que je vous dis, madame la ministre, qu'il y a urgence à restructurer la filière pour assurer la pérennité de cette industrie qui fait honneur à la France. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
Monsieur le député, la filière du ferroviaire que vous évoquez représente 21 000 emplois en France, 21 000 emplois industriels, et plus de 4 milliards de chiffre d'affaires, dont 1 milliard à l'export. Cette filière, qui participe très efficacement à la croissance, à l'emploi et à l'équilibre de notre balance commerciale, rencontre en ce moment certaines difficultés, notamment dans le fret.
Le fret est morose. Nous cherchons à améliorer sa compétitivité et sa qualité de service pour lui permettre de reprendre des parts et d'atteindre les objectifs du Grenelle de l'environnement.
C'était un des objectifs des Assises du ferroviaire que vous avez évoquées et dont les conclusions ont été rendues le 15 décembre à Thierry Mariani et à moi-même. Ces conclusions sont très opérationnelles, elles concernent plusieurs territoires à travers la France, notamment le vôtre à Châteaubriant. J'en citerai quelques-unes :
Une commission industrie, présidée par Bruno Angles, a été mise en place. Nous allons lancer Fer de France, une organisation dont le but sera de gagner des marchés à l'export pour la filière ferroviaire française. Des mesures particulières sont préconisées pour la filière de la construction et la maintenance des wagons qui souffre beaucoup de la perte des parts de marché du fret par rapport à la route, vous en savez quelque chose, monsieur le député, puisque l'entreprise ABRF, qui emploie presque 280 salariés, est située dans votre circonscription, à Châteaubriant.
Pour renforcer cette filière, nous avons besoin de regrouper les ateliers ou de créer des partenariats entre eux, selon ce que préféreront les entreprises. Nous avons besoin de créer ces fameuses entreprises de taille intermédiaire qui manquent si cruellement à l'économie française. Ce sera fait avec le fonds de modernisation des équipementiers ferroviaires qui avait été annoncé par le Président de la République au mois de septembre. Nous travaillons activement avec Thierry Mariani et Éric Besson à le mettre en oeuvre. Il sera en place dès le mois de février. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Yves Durand, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, à la rentrée prochaine, toutes les académies, sauf une, subiront une nouvelle saignée de postes d'enseignants. Une fois de plus, vos tentatives de justification sont mensongères.
Vous prétendez être le premier recruteur alors qu'en ne remplaçant pas un enseignant sur deux, vous avez supprimé plus de 80 000 postes en cinq ans. En fait, monsieur le ministre, vous êtes le premier licencieur de France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Votre argument sur la baisse des effectifs est fallacieux, une fois de plus, puisque le nombre d'élèves augmente depuis plusieurs années après le boom des années 2000.
Quant à votre comparaison avec les années quatre-vingt-dix, qui pourrait faire sourire si ce n'était dramatique, sur le nombre d'enseignants par rapport au nombre d'élèves, elle ne tient pas puisqu'elle ne prend pas en compte les moyens affectés à l'aide aux élèves en difficulté. C'est d'ailleurs l'aveu de votre volonté de les supprimer, de supprimer l'éducation prioritaire, de supprimer les RASED.
Vous prétendez que cette saignée vous permet de mieux rémunérer les enseignants. Les jeunes qui désertent massivement les concours de recrutement vous répondent de même. Ils refusent de se voir imposer deux années supplémentaires d'études non payées, sans formation, pour quelques dizaines d'euros. D'autant plus qu'au bout de cinq ans, leur salaire sera gelé, comme pour tout fonctionnaire. Les enseignants français restent les plus mal payés d'Europe.
Contrairement à vos sempiternels discours d'autosatisfaction, l'école ne cesse de se dégrader, comme le montrent toutes les études, y compris celles de votre propre ministère. C'est d'ailleurs pour cela que vous en interdisez la publication.
Monsieur le ministre, nous exigeons un moratoire de ces suppressions de postes que rien ne justifie. L'école n'a pas besoin de bonimenteur, mais d'un Gouvernement qui investisse dans la jeunesse pour lui redonner confiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR. – Protestations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.
Monsieur le député, j'ai en effet entendu Mme Martine Aubry demander un « moratoire » sur la suppression des postes. Ce mot nous est étranger. Il nous est étranger parce qu'il est synonyme d'inaction. Cela vous ressemble tellement, monsieur Durand ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Nous, nous avons décidé d'agir pour moderniser le service public de l'éducation nationale,…
…et ça marche ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Je prendrai un exemple que vous connaissez bien. Dans l'académie de Lille, nous aurons, à la rentrée prochaine, 8 600 élèves de moins. Il n'est pas anormal que nous adaptions les effectifs d'enseignants.
Depuis 2005, les résultats progressent dans cette académie. Ils progressent au baccalauréat, ils progressent aux évaluations de CE1 et de CM2.
Ils progressent dans l'évaluation CEDRE.
Nous venons de communiquer les résultats : en 2003, 15 % des élèves ne maîtrisaient pas la lecture en entrant en sixième, ils sont aujourd'hui 13 %.
J'entends parler de « purge » du système éducatif.
Augmenter le salaire des enseignants de 18 % en cinq ans, vous appelez ça une purge ? Recruter 19 000 personnes, dont 80 % en CDI pour quarante années à la charge de l'État, vous appelez ça une purge ?
Augmenter le budget consacré aux enfants handicapés de 30 % l'année prochaine, vous appelez ça une purge ?
Monsieur Durand, face à cela, vous n'avez qu'une réponse, celle des moyens. Vous retardez. Je remarque d'ailleurs que le mot « moratoire » vient du latin morari qui signifie retarder. Vous retardez, monsieur Durand ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe NC.)
La parole est à M. Michel Grall, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, ma question s'adresse à madame la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
Madame la ministre, le cargo maltais TK Bremen, s'est échoué vers deux heures du matin, dans la nuit de jeudi à vendredi, sur les plages d'Erdeven, dans le sud du Morbihan.
Je tiens d'abord à vous remercier de votre prompte réaction, puisque vous étiez sur place le jour même dès 13 heures. Je tiens également à saluer particulièrement l'action des services de l'État – préfecture, gendarmerie, sapeurs-pompiers, affaires maritimes, marine nationale – ainsi que celle des services départementaux et communaux, tous mobilisés contre cette pollution.
Alors qu'une tempête majeure approchait, ce cargo a choisi de quitter son mouillage ; il s'est échoué et a laissé échapper une partie des 180 tonnes de fuel de ses cuves.
Devant cette nouvelle atteinte à notre système écologique, à notre économie et à notre image, trois sentiments dominent chez les Bretons : la colère, la solidarité, l'incompréhension.
La colère d'abord, douze ans après le drame de l'Erika, car ce cargo a délibérément choisi de reprendre la mer.
La solidarité ensuite, notamment à l'égard des ostréiculteurs et pêcheurs à pied de la ria d'Étel. Je salue la venue sur place, hier, de Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture et de la pêche, qui les a assurés du soutien total de l'État. Ce soutien, ils en ont besoin non pas parce que les huîtres sont touchées, mais parce que de nombreuses commandes sont annulées en cette période de fête. Les huîtres sont parfaitement saines et plus que jamais délicieuses.
L'incompréhension enfin. Deux enquêtes sont en cours. Comment expliquer qu'un commandant prenne la mer, alors que tous les départements de Bretagne sont en alerte météo, et qu'un avis de tempête a été largement diffusé ?
Madame la ministre, je vous le demande donc : est-il possible de faire évoluer la réglementation et d'étendre les pouvoirs des capitaineries afin d'interdire la sortie en mer d'un bateau en situation de risque ?
La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur Michel Grall, à nouveau, c'est la Bretagne qui est touchée, et c'est un gâchis écologique et économique.
En premier lieu, je vous confirme la solidarité du Gouvernement et de la nation. Je me suis rendue sur le site dès vendredi et Bruno Le Maire s'y est rendu hier pour vous dire que nous serions à vos côtés pour intervenir dans l'immédiat et par la suite. Nous avons mobilisé sans délai l'ensemble des moyens à terre et en mer. Le pompage des soutes a commencé et sera terminé dès vendredi. S'il était confirmé qu'on ne peut pas remorquer le bateau, il serait déconstruit sur place et nous travaillons pour que cela se fasse dans les meilleures conditions pour l'environnement.
Surtout, je tiens à ce que soient clairement établies les responsabilités, celles de l'armateur et du commandant. Il est prouvé que la capitainerie du port de Lorient avait proposé au commandant de rester au port. Mais comme le droit maritime le lui permet, il a finalement décidé d'appareiller. Nous voulons savoir pourquoi. Nous voulons aussi savoir pourquoi le TK Bremen, alors qu'il mouillait avec un autre bateau dans une zone protégée au large de Groix, a dérivé vers la plage. Pour cela, deux enquêtes sont ouvertes, une enquête judiciaire dans laquelle le commandant a d'ailleurs été mis en garde à vue, et une enquête technique. Quels que soient les résultats de ces enquêtes, ce sont l'armateur et son assureur qui paieront l'ensemble des frais, conformément au droit.
Vous m'interrogez également sur une possible évolution de la réglementation maritime. Aujourd'hui, effectivement, la capitainerie ne peut empêcher un bateau de sortir du port que s'il n'a pas terminé les formalités administratives ou si son état met manifestement en danger l'environnement ou l'équipage. Nous envisageons de modifier le droit maritime. J'ai demandé à mes services d'étudier la faisabilité d'une extension des interdictions de sortie du port pour motif météorologique. Je veux m'assurer que cette responsabilité nouvelle des autorités de police portuaire ne se substituera pas à celle du commandant ou de l'armateur. S'ils pouvaient se défausser sur elles, ce serait contre-productif.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, dans la Somme, et dans d'autres départements probablement, l'inspecteur d'académie et les inspecteurs de l'éducation nationale commencent à alerter les élus locaux sur les éventuelles fermetures de classes (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) ou sur – je cite la lettre que j'ai reçue en tant que maire – « les fragilités constatées concernant les effectifs des écoles ».
Or le 21 juin dernier en Lozère, le Président de la République a assuré que « le nombre de fermetures de classes n'excèdera pas le nombre d'ouvertures liées aux évolutions démographiques. ».
Beaucoup d'élus locaux – je suis du nombre –, de directeurs d'école et de parents d'élèves avaient interprété ces propos rassurants comme l'annonce d'un moratoire (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.) sur les fermetures de classes à la rentrée 2012. Je viens, grâce à vous de découvrir l'étymologie du terme…
C'était probablement un excès d'optimisme de notre part. Si l'on s'en tient aux propos exacts du Président de la République, en cas de baisse des effectifs, des fermetures de classes pourraient quand même avoir lieu dans les écoles maternelles et primaires. En revanche, si l'on se fie non à la lettre, mais à ce que je crois être l'esprit de ses propos, nous sommes en droit de penser que l'année 2012, sauf détérioration exceptionnelle de la démographie scolaire, sera une année sans fermeture de classes. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)
Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous donner votre propre lecture de cette déclaration présidentielle et nous indiquer la façon dont vous entendez la traduire dans les faits ? Envisagez-vous de faire preuve d'une tolérance toute particulière dans le calcul des effectifs à la prochaine rentrée scolaire avant de prendre vos décisions ? Votre réponse sera très écoutée et très relayée, notamment dans le monde rural. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et du groupe SRC et plusieurs bancs du groupe GDR.)
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur Demilly, je veux d'abord réaffirmer la priorité qui est celle du Gouvernement depuis le début du quinquennat, en faveur de l'école primaire. Nous avons voulu réformer l'école primaire pour la concentrer sur l'apprentissage des fondamentaux : il faut qu'un élève qui quitte le CM2 sache lire, écrire et compter. (« La question ! » sur les bancs du groupe SRC.) C'est tout l'esprit des nouveaux programmes, qui commencent à donner des résultats.
Vous devriez plutôt vous réjouir, monsieur le député.
J'ai cité précédemment les résultats de l'enquête CEDRE : Actuellement, 13 % des élèves ont des difficultés de lecture en entrant en sixième ; ils étaient 15 % il y a cinq ans. Nous allons donc dans la bonne direction.
Par exemple, l'instauration de deux heures d'aide personnalisée par semaine pour les élèves qui ont des difficultés de lecture permet d'y remédier avec les maîtres, dans les établissements scolaires. De même, faire bénéficier 245 000 élèves de stages de remise à niveau à la fin des vacances scolaires est une vraie réponse aux difficultés.
Quant à la démographie scolaire, sachez que nous attendions 10 000 élèves de plus dans le primaire à la dernière rentrée scolaire. Finalement, il y a eu 10 000 élèves de moins. Les prévisions démographiques sont donc toujours difficiles à apprécier.
Le Président de la République a pris un engagement. Mais il n'a jamais utilisé le mot de moratoire, mesdames et messieurs de l'opposition. Il a indiqué qu'il n'y aurait pas plus de fermetures que d'ouvertures de classes à la rentrée 2012. Ce que cela signifie, c'est qu'il y aura au total le même nombre de classes dans le primaire à la rentrée 2012. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Christian Paul, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, il est désormais confirmé qu'au cours des dernières années, des entreprises françaises ont vendu à des dictatures des matériels de surveillance de l'Internet permettant d'intercepter le courrier électronique, de pister la consultation des sites et de connaître l'usage fait par chacun des réseaux sociaux.
Ces armes électroniques sont à la fois des outils de guerre et des outils de police. Dans ces dictatures, avec l'aide de la France et le soutien de l'État, elles sont devenues des armes de basse police destinées à surveiller la population et à espionner l'opposition, les journalistes et les avocats.
Il s'agit de l'un des plus scandaleux manquements aux valeurs démocratiques au cours des années récentes. Pour la Libye du colonel Kadhafi, ces faits sont prouvés. Une liste des opposants surveillés grâce à ce matériel français est publique. Le rôle de M. Takieddine est cité dans la négociation de ces contrats, et l'on sait quelles relations il a entretenues au sommet de l'État et de l'UMP. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC. – Protestations sur plusieurs bancs du groupe UMP.) En Syrie, où le pouvoir torture et assassine, tout pousse à croire que ces technologies sont encore actives aujourd'hui.
Monsieur le Premier ministre, vous devez rendre des comptes (Murmures sur les bancs du groupe UMP)...
..à la représentation nationale, mais aussi à l'opinion mondiale et aux militants des révolutions arabes. Dix questions parlementaires sont restées sans réponse de la part du Gouvernement, et une commission d'enquête est demandée en vain à l'Assemblée nationale. Pourquoi ce silence assourdissant ? Ces faits et cette omerta abîment l'honneur de la France qui aurait dû, au contraire, soutenir les cyberdissidents. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Que savez-vous réellement de l'usage actuel ou passé de ces technologies de surveillance de l'Internet, en particulier en Syrie ? Quelles autorisations administratives ont été accordées ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Mitterrand !
Êtes-vous prêts à décider, dès aujourd'hui, d'un moratoire sur ces exportations et, pour l'avenir, à encadrer strictement leurs ventes et leur usage, à des États étrangers, mais aussi…
Monsieur Paul, votre temps de parole est écoulé.
La parole est à M. Gérard Longuet, ministre de la défense et des anciens combattants.
Monsieur le député, en qualité de ministre de la défense, je me sens l'obligation de m'efforcer de répondre à votre question...
..puisque vous semblez viser des matériels de défense.
La France est un pays parfaitement exemplaire pour ce qui concerne l'exportation de ces matériels.
De majorité en majorité, nous avons construit un dispositif qui permet de n'autoriser les exportations, qu'elles soient le fait de grandes entreprises ou de PME, que dans le cadre d'un contrôle extrêmement strict.
Depuis 1939, l'affaire n'est pas nouvelle, de CIEMG en CIEMG – je parle des commissions interministérielles des exportations des matériels de guerre –, nous autorisons ces exportations et nous contrôlons l'usage final du matériel.
Vous posez une question fondamentale car elle suppose l'existence d'un détournement d'emploi de tel ou tel matériel. En ce qui concerne les télécommunications, force est de reconnaître qu'à ce jour, aucune commission interministérielle des exportations des matériels de guerre n'a été sollicitée en la matière. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
S'il y a eu détournement de l'emploi de ces matériels, notre devoir est d'adapter l'administration des exportations des matériels de guerre. Mais pouvons nous imaginer à tout instant quels détournements peuvent avoir lieu ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous nous reprocherez bientôt de ne pas contrôler les exportations alimentaires ou celles de biens de d'équipements – pour les vêtements des troupes, par exemple. Ce n'est simplement pas possible.
Dans le cas particulier, je tiens à la transparence absolue : jamais la commission interministérielle n'a été sollicitée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Daniel Fasquelle, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, la Haute autorité de santé a fait état, le 24 mars 2010, d'une donnée statistique alarmante : dans notre pays, un enfant sur cent cinquante est atteint d'un trouble qui relève de l'autisme. Or force est de reconnaître qu'en la matière il reste beaucoup à faire.
Le diagnostic n'est posé en France qu'à l'âge de six ans alors qu'il devrait intervenir à l'âge de deux ans. La prise en charge des enfants dans le milieu scolaire, le développement des nouvelles méthodes éducatives et comportementales ont également pris beaucoup de retard. Quant aux autistes adultes, à défaut de structures adaptées, ils sont le plus souvent placés en isolement en hôpital psychiatrique, quand ils ne sont pas laissés à la charge de leurs parents.
Monsieur le Premier ministre, en cette fin d'année, vous devez choisir la grande cause 2012. En faisant le choix de l'autisme, vous enverriez un signal fort aux 600 000 familles touchées par ce handicap. La grande cause constituerait un formidable encouragement pour les associations qui pourraient ainsi lever des fonds afin de poursuivre et d'amplifier leur action. Elle permettrait de sensibiliser et de mobiliser l'ensemble des Français ainsi que de lutter contre les idées reçues.
Face à l'urgence et à la détresse de très nombreuses familles, répondrez-vous positivement à l'appel de l'ensemble des députés, toutes tendances politiques confondues, du groupe de travail de l'Assemblée nationale sur l'autisme, que j'ai l'honneur de présider, ainsi qu'à celui du mouvement « Ensemble pour l'autisme » qui réunit 1 000 associations de parents, pour faire de l'autisme, grâce à la grande cause nationale 2012, une priorité de santé publique pour la France et les Français ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, chacun connaît l'engagement de M. Daniel Fasquelle en matière d'autisme. Dès 2010, monsieur le député, vous aviez pris une initiative, en déposant une proposition de loi, pour que l'autisme soit reconnu grande cause nationale. Vous réitérez avec un très grand nombre de parlementaires siégeant sur tous les bancs de l'Assemblée. Je vous l'annonce : j'ai décidé que l'autisme serait la grande cause nationale pour l'année 2012. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Cette distinction est un message d'espoir en direction des personnes autistes et de leur famille. Avec cette cause nationale, nous voulons leur dire que nous allons combattre ensemble la méconnaissance et les préjugés qui ont longtemps régné en la matière dans notre pays. C'est ainsi que nous remplirons notre devoir collectif qui est de signifier à chaque personne autiste qu'elle a le droit au respect le plus absolu et à une insertion dans notre vie sociale.
L'attribution de ce label vient poursuivre les efforts engagés dans le plan autisme 2008-2010 qui a d'ores et déjà permis un renforcement de la connaissance scientifique, une amélioration du diagnostic et une diversification de l'offre sanitaire et médico-sociale. Ce plan nous a permis de progresser dans un secteur où la France accusait un retard inacceptable. Cependant, nous ne pouvons pas nous arrêter là. Mme Bachelot a chargé Valérie Létard d'une mission d'évaluation de la mise en oeuvre du plan 2008-2010. Pour ma part, je recevrai dans les prochains jours l'ensemble des représentants impliqués pour faire le point avec eux et voir quelles suites nous pouvons donner à ce plan.
En tout état de cause, grâce à la grande cause nationale, nous avons des moyens supplémentaires pour faire progresser les esprits et le coeur des Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Guillaume Garot, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, depuis des mois, vous ne cessez de nous expliquer que le triple A décerné par les agences de notation est synonyme de « bonne gestion », qu'il permet de nous assurer des taux d'intérêt raisonnables et de protéger la croissance économique ; il y a quelques semaines, c'était même devenu le « trésor national » des Français. Or, voilà quelques jours, vous avez déclaré que, s'il advenait, l'abaissement de la note de la France ne serait qu'une péripétie, une simple « difficulté de plus », selon les mots de M. Sarkozy, alors que nous savons que ce serait une très mauvaise nouvelle pour notre pays. Monsieur le Premier ministre, qui peut être convaincu par ce virage à 180 degrés ?
Au nom du triple A, vous avez imposé deux plans de rigueur.
Au nom du triple A, vous avez exposé durement les classes populaires, sans jamais demander les mêmes efforts aux plus fortunés.
Au nom du triple A, les Français vont payer plus cher la TVA sur leurs boissons, leurs livres ou leurs transports publics, et ils seront davantage taxés sur leurs mutuelles santé alors que les plus riches continueront de payer moins d'impôts sur la fortune.
Aujourd'hui, les Français nous disent leur amertume, car ils ont le sentiment d'avoir été bernés. Bien sûr, la crise frappe rudement (« Ah ! » sur les bancs des groupes UMP et NC) et oblige chacun, ici, plus que jamais, à un devoir de responsabilité. (« Très bien ! » sur les mêmes bancs.) Celle du Gouvernement est de dire la vérité aux Français et d'assumer son bilan. Or, ce bilan, c'est un million de chômeurs de plus et 600 milliards d'euros de dettes supplémentaires en cinq ans.
Monsieur le Premier ministre, vous menez la France tout droit à la récession, après avoir mené une politique terriblement injuste.
La parole est à M. François Baroin, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le député, je vous remercie de votre question. Elle me permet de rappeler la déclaration de l'agence Fitch, qui, la semaine dernière, a confirmé le triple A français…
…et intégré dans ses perspectives de réflexion la globalité de la zone euro. Ce faisant, elle a mis en lumière les fondamentaux de notre économie, qui bénéficie de sa diversification, d'une main-d'oeuvre qualifiée, d'un système bancaire solide, d'un taux d'épargne protecteur et de la stratégie suivie par le Gouvernement depuis plusieurs années…
Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Les Français parlent aux Français !
…pour sanctuariser l'équilibre de nos finances publiques et poursuivre la trajectoire de réduction des déficits.
Ce sont des faits, et ils sont rappelés, non pas par le Gouvernement, mais dans les attendus de l'agence de notation Fitch. Si certains n'en avaient pas pris connaissance, je profite de votre question pour le leur apprendre.
Par ailleurs, ce n'est pas au nom du triple A, monsieur le député, que nous avons réformé les retraites, mais au nom d'une certaine idée du respect, d'une part, du pacte entre les générations issu de la sécurité sociale d'après-guerre et, d'autre part, des générations qui nous ont précédés et qui ont permis, par leur travail, une augmentation de la richesse et une amélioration du confort des Français. C'est au nom de ces deux idées simples que nous avons réformé les retraites.
Ce n'est pas au nom du triple A que nous avons engagé une politique de réduction des déficits, mais au nom de la souveraineté nationale. Par esprit de responsabilité, nous avons choisi de préserver l'avenir des générations qui suivent…
…et de ne pas leur faire supporter le confort quotidien de nos contemporains.
Ce n'est pas au nom du triple A que nous menons une politique de désendettement. Celle-ci n'est pas une politique de rigueur, comme vous le dites injustement, mais une politique d'équilibre et de juste économie, au service de l'intérêt général.
Ce n'est pas au nom du triple A que nous souhaitons poursuivre cette politique, mais au nom d'une certaine idée du modèle social que nous avons en partage et que nous souhaitons préserver. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Lionnel Luca, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, le métier d'enseignant évolue et les modes d'appréciation de celui-ci également. Hélas, cela ne semble pas être le cas de certains syndicats, figés dans un corporatisme conservateur, voire réactionnaire. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Aujourd'hui, outre la transmission du savoir, l'enseignant se consacre à l'accompagnement des élèves dans le cadre du tutorat et de la remise à niveau, il participe à la vie scolaire des établissements, forme et accompagne d'autres enseignants.
À votre initiative, une large concertation s'est donc engagée, depuis quelque six mois, avec les enseignants, les chefs d'établissement et les inspecteurs d'éducation, en vue d'une amélioration de l'appréciation de la valeur professionnelle des enseignants, maintes fois réclamée par ces derniers. Il y a quelques jours, un projet d'arrêté qui donnerait au chef d'établissement un rôle primordial dans cette évaluation a été publié pour être débattu. Une désinformation simpliste veut faire croire à la disparition du rôle de l'inspecteur d'éducation, qui, il n'y a pas si longtemps, était encore très contesté par ceux-là mêmes qui semblent ne plus pouvoir s'en passer aujourd'hui.
Monsieur le ministre, je souhaiterais donc que vous nous indiquiez ce qu'il en est exactement, afin de donner une information véritable aux enseignants, dont il faut, par ailleurs, saluer l'engagement en faveur de la jeunesse de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.
Monsieur le député, le système actuel d'évaluation et d'appréciation professionnelle de nos enseignants est dépassé et injuste. Injuste, parce que, ainsi que vous l'avez très bien indiqué, il ne prend pas suffisamment en compte la diversité actuelle du métier d'enseignant et a peu d'impact sur la carrière des enseignants. Dépassé parce qu'il n'intervient qu'une fois tous les sept ans, dans des conditions que l'on peut considérer comme artificielles, dès lors que l'inspection se fait dans la classe. Il fallait donc faire évoluer tout cela.
Comme vous l'avez très bien dit, ce sont les enseignants qui sont les premiers demandeurs d'une évolution de leur appréciation professionnelle. Nous travaillons donc, depuis deux années, sur ce sujet avec les représentants des personnels. L'idée, c'est que ce soit celui qui connaît le mieux, au quotidien, l'action de l'enseignant, c'est-à-dire le chef d'établissement, qui émette un avis concernant l'appréciation professionnelle. Bien entendu, sur le plan de la connaissance technique, disciplinaire, il doit pouvoir s'appuyer sur les corps d'inspection, qui sont les plus compétents en la matière. Mais, encore une fois, c'est le chef d'établissement, proviseur ou principal, qui peut le mieux prendre en compte l'engagement au quotidien de l'enseignant, dans la vie scolaire, le soutien scolaire, le projet pédagogique.
Nous avançons dans cette direction, selon une méthode basée sur la concertation. Une organisation syndicale a signé un accord de méthode avec le ministère ; j'ai reçu, la semaine dernière, la CFDT. Nous ferons des propositions dans ce domaine parce que nous devons moderniser l'appréciation professionnelle de nos enseignants. Il s'agit de prendre en compte leur engagement et de valoriser leur métier. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Daniel Goldberg, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, le 9 août dernier, j'interrogeais le Gouvernement au sujet du versement supposé par la société i2e, devenue Amesys, filiale du groupe Bull, de commissions d'un montant de plusieurs millions d'euros à un ou plusieurs intermédiaires ayant favorisé la conclusion, en avril 2007, d'un contrat de technologies militaires à la Libye. Je demandais quelles poursuites avaient été engagées à l'encontre des sociétés et des personnes impliquées pour des faits proscrits par la loi depuis septembre 2000. Je n'ai obtenu aucune réponse.
Le 27 septembre, je questionnais ici même M. le ministre de l'intérieur sur ses liens supposés, entre 2004 et 2009, avec le régime du colonel Kadhafi, sur l'objet des visites qu'il aurait effectuées à Tripoli à l'automne 2005, précédant de peu celles de Nicolas Sarkozy, puis de Brice Hortefeux, des visites préparées par l'intermédiaire Ziad Takieddine. Je n'ai obtenu aucune réponse.
Depuis, plusieurs révélations tendent à démontrer que la vérité n'a pas été entièrement dévoilée. Le fait que le contrat signé en avril 2007, en pleine campagne présidentielle, avait reçu le plein soutien du ministre de l'intérieur de l'époque, Nicolas Sarkozy, n'y serait pas étranger.
Aujourd'hui, pouvez-vous nous dire précisément comment votre gouvernement est impliqué dans ce dossier ? Pouvez-vous nous dire précisément quelles ont été vos relations avec l'ancien régime libyen, notamment avec Abdallah Senoussi, alors chef des services secrets libyens et condamné en 1999 pour sa responsabilité dans l'attentat du DC10 d'UTA, aujourd'hui arrêté et poursuivi par la Cour pénale internationale ?
Avez-vous autorisé la vente en 2009 par i2e-Amesys d'un système de filtrage de l'Internet libyen – évoqué il y a quelques instants par Christian Paul –, système qui a permis d'espionner des opposants libyens dans le pays et à l'étranger ?
La représentation nationale doit être informée au sujet de ces faits ! En somme, monsieur le ministre, étiez-vous au courant de la réalité de ces transactions, ce qui serait déjà grave, ou bien en étiez-vous les décideurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Monsieur le député, j'ai déjà eu l'occasion de dire dans cette enceinte que, pour le bien de notre démocratie, il serait temps de mettre fin aux insinuations, aux amalgames, aux approximations et aux accusations sans fondement ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Aujourd'hui, je vous dis très clairement, en prenant mes responsabilités, que jamais le ministre de l'intérieur ni son entourage ne se sont occupés d'une telle transaction ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Ça ne suffit pas !
La parole est à M. Jean-Michel Ferrand, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation.
Monsieur le secrétaire d'État, depuis de nombreuses années, les entrepreneurs, commerçants ou artisans réclamaient un véritable statut pour l'entreprise individuelle, permettant de protéger leur patrimoine personnel sans avoir à passer par la constitution d'une société, qui représente une procédure plus lourde et inadaptée aux besoins des entrepreneurs individuels.
Depuis le 1er janvier 2011, c'est chose faite : les entrepreneurs individuels peuvent opter pour le statut d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée, que nous avons créé par la loi du 15 juin 2010. Ainsi, les biens affectés à l'activité professionnelle constituent les seuls gages des créanciers professionnels et les entrepreneurs individuels n'ont plus à exposer leurs biens personnels pour exercer leurs activités.
Il s'agit là d'une véritable révolution, qui libère le risque d'entreprendre et favorise la création d'entreprises. Toutefois, il ne faudrait pas que, dans la pratique, les banques restreignent l'accès au crédit de ces EIRL en exigeant des sûretés sur les biens personnels de l'entrepreneur ou une garantie de ses proches, ce qui serait contraire à l'esprit de la loi (« Bravo ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous indiquer quelles mesures vous envisagez de prendre afin de faciliter l'accès au crédit des EIRL ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation.
Monsieur le député, vous venez de rappeler que, depuis trente ans, les artisans de notre pays réclamaient d'être traités à égalité avec les chefs de grandes entreprises. Comme vous le savez, le Président de la République a tenu à ce que le dispositif protégeant le patrimoine personnel des artisans soit voté. Son adoption a constitué une véritable révolution – vous avez eu raison d'employer ce mot, monsieur le député…
Aujourd'hui, un artisan, une profession libérale ou un commerçant peut, en adoptant ce statut, protéger son patrimoine personnel comme le font les chefs de grandes entreprises.
Cependant, comme vous l'avez dit, il se peut que les banques se montrent trop timides pour prêter, dès lors que le patrimoine personnel de l'entrepreneur ne constitue plus une garantie du prêt. C'est pourquoi, monsieur le député, j'ai d'abord négocié avec OSEO et la SIAGI un système permettant la garantie des prêts à hauteur de 70 %. Pour les 30 % restants, j'ai négocié avec les banques.
François Baroin et moi-même avons réuni la fédération bancaire française, et nous avons signé un accord pour que, sur les 30 % restants, il ne soit pas pris de sûretés supplémentaires. Ainsi, aujourd'hui, un artisan, un commerçant ou une profession libérale choisissant le statut d'EIRL n'a plus de difficulté à emprunter (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Chacun doit prendre conscience de la chance que ce système représente pour les entrepreneurs de notre pays.
J'ajoute que vous avez voté, les uns et les autres, le principe de la neutralité fiscale dans le projet de loi de finances rectificative. Comme vous l'avez dit, monsieur le député, c'est une révolution. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Dans cent vingt-trois jours, ce sera le premier tour de l'élection présidentielle. (« Enfin ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Depuis plusieurs semaines, tous les candidats sont en campagne. Tous se déplacent à travers le pays pour développer leurs propositions. Tous engagent des dépenses qui figureront, le moment venu, dans le compte de campagne qu'ils devront déposer. Tous font financer leur campagne par l'argent de leur parti politique. Bref, tous se conforment aux mêmes règles. Tous sauf un : Nicolas Sarkozy.
Le chef de l'État prétend qu'il n'est pas candidat. En réalité, il se sert de sa fonction pour tenter de le faire croire.
Mais personne n'est dupe. Sous des prétextes artificiels, uniquement dictés par une préoccupation médiatique, il multiplie les visites qui sont autant de gestes électoraux.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Et Mitterrand ?
Aujourd'hui en Ardèche, hier dans le Val-d'Oise, avant-hier dans la Drôme, et le rythme s'accélère.
Avec René Dosière, depuis le 2 avril dernier, nous avons compté cinquante-trois déplacements du Président de la République. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Parfois même ce sont de vrais meetings où les militants UMP sont appelés à venir remplir les salles. On apprend ainsi que la fédération UMP du Var a affrété une quinzaine de cars pour le rassemblement de Toulon du 1er décembre.
Monsieur le Premier ministre, le principe d'égalité devant le suffrage et le principe de sincérité des élections sont les fondements de la démocratie. Allez vous agir pour que le Président sortant ne puisse pas continuer à profiter de son statut et à faire campagne avec l'argent de tous les contribuables ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. (« Ah ! » sur de nombreux bancs du groupe SRC.)
Monsieur Urvoas, depuis son élection en 2007, plusieurs fois par semaine, le Président de la République va à la rencontre des Français.
Il écoute leurs préoccupations, il leur explique la situation de notre pays et les enjeux auxquels nous avons à faire face. Il est dans son devoir de Président de la République.
Et ce devoir, il l'accomplira jusqu'au bout de son mandat. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Les défis formidables auxquels notre pays est confronté suffisent à le justifier.
Et, pendant ce temps, que faites-vous ? Vous créez une cellule de veille des déplacements du Président de la République (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) pour savoir si certaines dépenses liées à ses déplacements pourraient être imputées aux comptes de campagne.
Mais faites donc confiance, monsieur Urvoas, aux institutions de la République ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Il existe une Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.
C'est une autorité indépendante présidée par un ancien premier président de la Cour des comptes.
Cette autorité a été saisie du point que vous évoquez par M. Vaillant en sa qualité de mandataire de M. Hollande. Voici la réponse de cette autorité : « Si au cours des manifestations auxquelles il participe dans la période précédente l'annonce éventuelle de sa candidature à la prochaine élection, il est amené à exposer les éléments d'un programme de futur candidat,…
…le coût de l'organisation de ces manifestations devrait être réintégré ultérieurement aux comptes de campagne en tout ou en partie. »
« Ne paraissent pas devoir être inclus dans les dépenses des comptes de campagne les frais de transport du Président et de ses collaborateurs ainsi que le coût des mesures de sécurité et de protection lié à ses déplacements en raison de leur caractère indissociable de l'exercice du mandat présidentiel. »
Vous avez donc votre réponse, monsieur Urvoas. Encore une fois, faites confiance aux autorités, aux institutions de la République ainsi qu'à la justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Bernard Gérard, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, vous avez dévoilé ce matin, avec René Ricol, les 36 projets lauréats de la deuxième vague de l'appel à projets « Équipements d'excellence ». Cette annonce était très attendue de la part de toute la communauté scientifique, mais aussi de tous les acteurs de terrain, qui, comme moi, ont soutenu les projets portés sur leur territoire.
Ces équipements d'excellence s'inscrivent dans le cadre des investissements d'avenir – notre meilleure arme anti-crise. Sur les 35 milliards d'euros mobilisés au titre du grand emprunt national, 22 milliards sont en effet dédiés spécifiquement à l'enseignement supérieur et à la recherche.
Doté de 1 milliard d'euros, cet appel à projets vise à permettre aux laboratoires français d'acquérir des équipements scientifiques de pointe leur donnant la possibilité de réaliser des travaux de recherche au meilleur niveau mondial.
Lors de la première vague, pas moins de 340 millions d'euros avaient été attribués aux 52 lauréats.
Pour cette seconde vague, près de 270 projets ont été expertisés par un jury international indépendant, composé de scientifiques et d'experts internationaux. Trente-six ont été retenus pour recevoir des financements, et je me réjouis tout particulièrement que les projets lillois aient été récompensés de l'intense effort qu'ils ont fournis pour se hisser au meilleur niveau. Ces dotations vont en effet permettre à six laboratoires de la région Nord-Pas-de-Calais d'acquérir du matériel de pointe à même de générer des avancées technologiques importantes.
Ces résultats encourageants pour le Nord-Pas-de-Calais seront, je l'espère, consolidés par la seconde vague sur les laboratoires d'excellence attendue en janvier 2012.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous préciser quelle est l'analyse que vous faites de cette deuxième vague du point de vue scientifique et géographique et ce que vous allez faire pour permettre le déblocage effectif des fonds ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Monsieur Gérard, vous connaissez très bien ces sujets et vous avez plaidé inlassablement pour l'investissement à la fois dans la recherche et dans les universités. Les investissements d'avenir, ce sont 22 milliards d'euros qui sont concentrés pour permettre à nos chercheurs de se positionner au premier plan de la recherche et de la compétition mondiale.
La recherche, aujourd'hui, ce sont des équipes, ce sont des chercheurs de talent, ce sont des appuis sur nos organismes de recherche et nos universités mais ce sont aussi des équipements – la recherche moderne a besoin d'équipements.
En la matière, le système français souffrait d'une faiblesse. Soit nous financions les très grands équipements, soit les tout petits équipements. Mais les équipements d'excellence, ceux qui n'étaient pas au niveau des très grandes infrastructures mais qui restaient pourtant indispensables à l'échelle d'une équipe de recherche, n'étaient pas financés.
Le but des EQUIPEX est précisément d'investir dans ces équipements qui permettent de donner une avance à nos équipes de recherche. Prenons trois exemples.
Le premier est le projet GAP, à Poitiers, qui, dans le domaine de l'aéronautique, doit permettre d'inventer les futurs moteurs d'avions, avec des baisses de consommation de 15 à 30 %. Le deuxième exemple est le projet I2MC à Strasbourg, relatif aux nouvelles transmissions de maladies, dans le prolongement des travaux de notre Prix Nobel, Jules Hoffmann. Enfin, le projet FLUX, chez vous, monsieur le député, dans le Nord-Pas-de-Calais, est destiné aux futures méga-autoroutes de transmission de l'information avec des applications médicales.
Le Nord-Pas-de-Calais a eu une très belle moisson – très belle reconnaissance de l'excellence de votre région en la matière –, puisqu'elle a remporté pas moins de six EQUIPEX.
J'insisterai sur deux points : d'abord, ces équipements sont extraordinairement porteurs d'avenir et d'espoir ; ensuite, la République peut être fière de ses chercheurs parce qu'ils détiennent les clefs de notre sortie de crise. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
Investissements d'avenir pour l'enseignement supérieur et la recherche
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze sous la présidence de Mme Catherine Vautrin.)
La conférence des présidents, réunie ce matin, a arrêté, pour la semaine du 23 janvier 2012, les propositions d'ordre du jour suivantes :
Lundi 23 janvier, le soir :
Proposition visant à consacrer le droit au rapprochement familial pour les détenus condamnés.
Le mardi 24 et le mercredi 25 janvier, l'après-midi, après les questions au Gouvernement, et le soir :
Proposition sanctionnant la violation du secret des affaires ;
Proposition relative à l'information des passagers dans les entreprises de transport aérien ;
Proposition relative au don d'heures de réduction du temps de travail ou de récupération à un parent d'un enfant gravement malade.
Il n'y a pas d'opposition ?
Il en est ainsi décidé.
M. le Président a reçu de M. le Premier ministre une lettre l'informant que, la commission mixte paritaire n'ayant pu parvenir à l'adoption d'un texte sur le projet de loi autorisant l'approbation de la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Panama en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu, le Gouvernement demande à l'Assemblée de procéder, en application de l'article 45, alinéa 4, de la Constitution, à une nouvelle lecture de ce texte.
En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion, en nouvelle lecture, de ce projet de loi (n°s 4099,4107).
La parole est à M. le ministre chargé des affaires européennes.
Madame la présidente, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés, vous est soumise aujourd'hui, en deuxième lecture, la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Panama en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu, signée à Panama le 30 juin 2011.
Examinée en première lecture par le Parlement au cours de la semaine dernière, la convention a été approuvée par cette assemblée mais a reçu un vote négatif du Sénat. La commission mixte paritaire n'ayant pas pu aboutir, hier, à un accord, nous nous trouvons à nouveau réunis aujourd'hui.
Les raisons, invoquées mardi dernier devant vous par mon collègue Henri de Raincourt, pour lesquelles le Gouvernement a décidé de soumettre la présente convention à votre approbation demeurent d'actualité. Permettez-moi de vous en exposer à nouveau rapidement les enjeux.
Il est primordial que cette convention soit ratifiée avant la fin de l'année 2011, car, dans le cadre de la lutte engagée par la France contre les pratiques fiscales dommageables, il est essentiel de disposer au plus vite d'un outil qui permettra d'échanger des renseignements fiscaux avec ce pays emblématique, et ainsi d'apprécier sa volonté affirmée de se mettre en conformité avec les standards internationaux en matière de transparence fiscale.
Soyez assurés, mesdames et messieurs les députés, que la voie dans laquelle nous nous engageons avec le Panama est celle de l'exigence, de la transparence et de la vigilance. L'application de cet accord sera suivie avec la plus grande attention par les services de l'État et, s'il s'avérait que le Panama revienne sur ses engagements ou que l'assistance administrative en matière d'échange d'informations ne donne pas satisfaction, ce ne serait pas sans conséquence. La réinscription du Panama sur la liste française des États et territoires non coopératifs serait alors sérieusement envisagée. Il s'agit bel et bien ici de mettre le Panama face à ses responsabilités.
Les craintes exprimées lors de l'examen par le Sénat, si elles peuvent s'entendre, ne sont pas pour autant justifiées. D'une part, l'actuel gouvernement panaméen a pris, depuis plus d'un an, un tournant décisif en élargissant son réseau conventionnel en matière d'échange de renseignements fiscaux et en réformant largement sa législation interne en la matière. D'autre part, lors des négociations, la France a pris toutes les précautions nécessaires pour que l'accord puisse être effectivement appliqué et pour que des opérateurs ne puissent pas tirer parti des bénéfices de la convention pour aboutir à des exonérations totales, en multipliant les clauses anti-abus. Cette convention va donc bien plus loin que le simple modèle de l'OCDE. Le Panama a d'ailleurs accepté toutes les demandes françaises sans difficulté.
Il apparaîtrait, en outre, paradoxal qu'après avoir encouragé, pendant plusieurs années, le Panama à une plus grande transparence fiscale, l'on refuse de conclure avec lui un accord qui viendrait pourtant renforcer ses obligations en la matière.
Telles sont, mesdames et messieurs les députés, les principales observations qu'appelle la convention fiscale franco-panaméenne qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Martine Aurillac, rapporteure de la commission des affaires étrangères.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à la suite du rejet par le Sénat et de l'échec de la commission mixte paritaire, nous sommes à nouveau saisis du projet de loi de ratification de la convention fiscale entre la France et le Panama, signée le 30 juin 2011 à Panama et qui tend, comme vous le savez, d'une part, à éliminer les doubles impositions, d'autre part, à mettre en oeuvre une procédure d'échange de renseignements à caractère fiscaux avec le Panama.
Sur le premier plan, la convention ne soulève aucune objection, au contraire. Elle a été discutée sur la base de la proposition française et validée à l'issue d'un seul tour de négociation. Si bien que son contenu reflète tout à fait les intérêts de notre pays. Elle est largement inspirée du modèle de l'OCDE, ne contient même pas de dérogations généralement accordées aux États non membres de cette organisation et inclut de nombreuses dispositions, à la demande de la France, tendant à tenir compte des spécificités de notre droit fiscal et à prévenir les abus. Aucun article ne s'oppose à l'application des dispositifs français de lutte contre l'évasion fiscale. Le Sénat a d'ailleurs reconnu la qualité normative de cette convention.
Concernant l'échange de renseignements, la rédaction de l'article est conforme au modèle de l'OCDE, sauf pour ajouter que : « Chaque État contractant doit prendre les mesures nécessaires afin de garantir la disponibilité des renseignements et la capacité de son administration fiscale à accéder à ces renseignements et à les transmettre à son homologue. » Cette précision fait écho au processus de réformes engagé au Panama pour se conformer aux standards internationaux. Car c'est là que réside la divergence d'appréciation en première lecture entre l'Assemblée nationale et le Sénat.
Le Sénat, se fondant sur le dernier rapport d'évaluation du Forum mondial fiscal de l'OCDE, fait état de carences relevées dans la législation panaméenne pour demander à surseoir à la ratification. À la lumière des réformes adoptées entre-temps par le Panama, dont une partie n'avait pas été prise en compte par le Forum, qui a évalué le pays en 2010 pour son dernier rapport, notre assemblée a estimé, au contraire, que les réformes résiduelles à conduire n'étaient pas de nature à remettre en cause la ratification.
J'insiste sur le fait que le Gouvernement n'a pas traité la question à la légère. La signature de la convention a été retardée à la suite des conclusions de l'évaluation par l'OCDE en 2010, le temps que le Panama prenne les dispositions nécessaires pour amender son droit interne. Et c'est ce que le gouvernement panaméen a fait, ouvrant la voie à la signature et, désormais, à la ratification.
En juin 2010, une loi a été adoptée pour lever l'impossibilité de transmettre des renseignements qui ne sont pas utiles à l'administration pour l'application de sa propre loi fiscale. La loi « Connais ton client » a également été modifiée en février 2011 pour assurer la disponibilité des informations relatives à l'identité – ce qui est très important – des propriétaires et des bénéficiaires des sociétés offshore. Le Panama a également signé une convention d'échange d'informations avec douze partenaires dont les États-Unis, l'Espagne, le Mexique, la Corée du Sud, le Portugal, les Pays-Bas, l'Italie et la France. C'est ce critère qui a permis au Panama de sortir de la liste grise de l'OCDE en juillet dernier.
Par ailleurs, le Panama présente des garanties d'application de la clause d'échange de renseignements. Il existe une superintendance bancaire efficace, et l'administration fiscale a mis en place en son sein une nouvelle cellule spéciale chargée de l'application des accords fiscaux bilatéraux. Le Panama affiche aussi des progrès concrets avec d'autres pays : un programme de formation de l'administration fiscale a été engagé avec l'Espagne, et les premières réponses à des demandes de coopération et de transmission de données bancaires ont été apportées à plusieurs reprises au Mexique, à l'Espagne, à la Barbade et aux États-Unis.
Quelques obstacles à l'échange d'informations demeurent, il est vrai. Des modifications sont encore nécessaires concernant les obligations comptables des sociétés offshore et les actions au porteur. Mais un groupe de travail est en place pour faire aboutir rapidement les adaptations nécessaires du droit interne, et le Panama est très soucieux de recueillir un avis favorable de l'OCDE au cours d'une nouvelle évaluation qui doit se tenir début 2012. Cette évaluation tiendra compte, cette fois, de toutes les réformes qui auront été conduites depuis 2010. C'est elle qui conclura si la législation est en règle et si le pays est apte à passer à la phase 2 du processus d'évaluation, qui concerne l'application effective des accords.
Pourquoi ratifier la convention ? Parce que, comme je l'ai expliqué, le Panama a démontré sa détermination à conduire les réformes, que ce processus est largement engagé, qu'une coopération efficace est désormais envisageable et qu'il ne serait donc pas justifié de faire preuve de plus de réticence à l'égard de cet État que vis-à-vis d'un autre.
Pourquoi ratifier la convention dans des délais, il est vrai, très courts ?
Parce qu'à côté du processus d'évaluation de l'OCDE, il existe une liste noire française des États et territoires non coopératifs. Elle a justement été instituée par la loi de finances rectificative pour 2009, afin que la France dispose d'un mécanisme autonome d'évaluation et de sanctions. La mise à jour de la liste française est effectuée le 1er janvier de chaque année. Le Panama, avec lequel la France n'avait pas conclu d'accord l'an passé, y figure donc, alors que s'il avait accepté un simple accord d'échange de renseignements en 2009, celui-ci aurait sans doute été, comme de nombreux autres, signé rapidement, et la question de la présence du Panama sur la liste de 2012 ne se poserait même pas.
Mais le Panama a exprimé le souhait de négocier une convention complète, incluant donc l'élimination des doubles impositions. C'est une très bonne chose pour nos entreprises françaises qui s'implantent dans cet État, lequel a lancé de grands projets d'infrastructures pour les prochaines années. Je pense en particulier au métro de Panama et aux grands travaux du canal.
C'est donc pour permettre la sortie du Panama de la liste noire française qu'il nous faut ratifier la convention avant le 1er janvier 2012. Il est particulièrement favorable à nos intérêts de permettre, dès à présent, cette ratification afin d'offrir à nos entreprises une meilleure stabilité juridique. Je rappelle que ce sont elles qui créent des emplois et que nous nous devons de les soutenir.
Pour conclure, je tiens à insister sur le fait que la France s'est beaucoup engagée en faveur de la coopération fiscale et de la transparence, notamment depuis deux ans. Cette convention va dans le même sens. La réalité des efforts de conformité effective du Panama à ses engagements devra de toute façon être attentivement examinée, comme pour tous les autres pays. Le Panama est sous la double pression de la nouvelle évaluation du Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements à des fins fiscales de l'OCDE, et de l'appréciation que va réaliser notre pays de la qualité des coopérations qu'il a engagées, dans le plein exercice de sa souveraineté.
Le processus de sortie de la liste noire française est, de plus, entièrement réversible, puisque tout pays ne respectant pas ses engagements sera inscrit sur notre liste noire et se verra appliquer les sanctions correspondantes.
C'est sous le bénéfice de ces observations que je vous propose, chers collègues, de confirmer la position de l'Assemblée nationale et d'adopter ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre, chers collègues, la présente convention franco-panaméenne qui vise à empêcher la double imposition, a pour objet, ni plus ni moins, que de légitimer le statut de paradis fiscal du Panama.
Nous sommes ici dans l'hypocrisie la plus totale, puisque le chef de l'État répète inlassablement que « les paradis fiscaux, c'est fini » et que les États non coopératifs seront « mis au ban », alors qu'il resserre en réalité les liens avec eux et offre des réductions d'impôt à ceux qui choisissent d'y domicilier leurs filiales et leurs capitaux.
Ce constat est d'ailleurs partagé sur tous les bancs. En effet, nos collègues de l'UMP ont reconnu que l'objectif de cette convention était d'aider les investissements français au Panama, où certains groupes dirigés par des amis de M. Sarkozy ont décroché de juteux contrats. La droite sénatoriale a également montré des signes de gêne lors du débat du 15 décembre.
Ainsi, en entérinant cette convention, le Gouvernement allège la fiscalité des filiales françaises et facilite l'installation d'activités offshore au Panama.
Il faut pousser loin le cynisme pour voter ce texte, car en encourageant les défiscalisations, le Gouvernement et sa majorité contribuent à la détérioration des comptes publics.
Vous mobilisez le Parlement pour que les riches puissent au plus vite placer leurs capitaux dans les places financières internationales opaques, illégales. Sans traçabilité, les sommes placées au Panama échappent au contrôle des États et du fisc.
D'une main, vous faites avaler les pires plans de rigueur aux salariés, mais de l'autre vous faites voter au pas de charge des conventions de défiscalisation pour que les spéculateurs puissent profiter des largesses de certains pays.
À l'heure où toutes les recettes de l'État sont primordiales, et en premier lieu les recettes fiscales, voter ce texte est un non-sens. Ce type d'accords internationaux de défiscalisation participe à l'appauvrissement de l'État et légitime les pratiques les plus prédatrices.
Le deuxième objectif de ce texte est de permettre au Panama de sortir de la liste des paradis fiscaux et d'être donc reconnu comme « État coopérateur » en matière fiscale par les pays de l'OCDE.
En dépit des discours de condamnation des paradis fiscaux par l'exécutif français, il est à noter que le Panama n'a pas profité de la signature de cette convention pour s'engager à modifier sa loi sur les sociétés anonymes.
Comme l'explique maître Julia, avocat fiscaliste franco-panaméen à l'observatoire du droit panaméen : « Les projets de l'exécutif panaméen visant à la suppression des actions au porteur ou à l'instauration d'un système d'enregistrement de celles-ci comme aux îles Vierges britanniques n'ont pas eu de suites favorables à l'Assemblée nationale panaméenne.
« Le Panama ne sera donc pas en mesure de fournir des informations sur le propriétaire des actions mais uniquement sur le mandataire du bénéficiaire réel. Cette hypothèse a été prévue par la Convention, ce qui permet au Panama de ne fournir que l'adresse de ce mandataire, qui est le plus souvent un organisme de gestion de patrimoine situé dans un pays de l'OCDE ou dans un pays n'étant pas considéré comme un paradis fiscal, soumis "en principe" aux règles d'identification du client établies par l'OCDE. »
En d'autres termes, si nous sommes enjoints de voter cette convention pour soi-disant « laisser sa chance » au Panama, ce pays a d'ores et déjà trouvé le moyen de contourner législativement l'exigence d'identification des clients et de transparence bancaire. La démonstration de la rapporteure tombe donc à l'eau.
Ce point a d'ailleurs également été souligné par la présidente de la commission des finances du Sénat, avant que la chambre haute ne rejette le texte.
Dire que le Panama se montre plus coopératif, c'est tout simplement un gros bobard qui profite aux deux pays.
Il profite au Panama d'une part, qui peut ainsi sortir de la liste des paradis fiscaux et tirer profit de sa meilleure renommée internationale pour attirer encore plus de capitaux, alors même qu'il ne pratique aucun effort de transparence supplémentaire.
Il profite d'autre part aux groupes français, qui ne subiront plus les mesures de rétorsion des autorités panaméennes qui les excluaient de leurs appels d'offres au profit de sociétés belges ou espagnoles.
Ne comptez pas sur nous pour fermer les yeux sur cet aimable échange de bons procédés.
Pour les entreprises du CAC 40, il y a de l'argent à se faire au Panama, et cela n'a pas échappé au MEDEF. Celui-ci s'est en effet fendu d'un communiqué se félicitant de la venue en France du président panaméen Martinelli il y a trois semaines et de l'accord conclu avec son homologue Nicolas Sarkozy.
On peut y lire : « le président Martinelli a fait de la modernisation du Panama sa priorité. Plusieurs grands projets d'infrastructure s'inscrivent dans le cadre d'un vaste programme d'investissement (2010-2014) d'un montant de 13,6 milliards de dollars (métro de la capitale, aéroports, ports, routes, production et interconnexions énergétiques, extension des réseaux d'eau et assainissement,...) »
On sait qu'Alstom a obtenu la ligne 1 du métro de Panama. On voit que ces milliards de dollars, malgré leur provenance douteuse, mettent l'eau à la bouche du patronat français.
Mais, chers collègues, trouver des marchés à l'international pour les amis de M. Sarkozy ne saurait justifier que notre pays s'assoie sur les exigences de transparence financière. Permettre aux grands groupes de décrocher des contrats dans un État voyou, haut lieu d'évasion fiscale, c'est inacceptable.
Que ce soit au nom de l'emploi ou de tous les arguments que vous pourrez utiliser, nous vous invitons à un peu d'éthique en politique. Dans ce domaine, vous devriez écouter les arguments que vos collègues du Sénat ont développés.
Pour notre part, au Front de gauche, la question de la double imposition des filiales françaises au Panama ne nous préoccupe pas, et nous ne comprenons pas pourquoi ce texte nous est imposé avec une telle précipitation.
En revanche, nous nous soucions de nos concitoyens, des salariés, de ceux que la crise étrangle et qui ont aujourd'hui les pires difficultés à vivre correctement.
C'est la raison pour laquelle les députés communistes, républicains, citoyens et du parti de gauche voteront contre ce texte.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, après le rejet de ce projet de loi par le Sénat, après l'échec de la commission mixte paritaire,…
…l'occasion nous est donnée une seconde fois de débattre de l'opportunité de ce texte visant à approuver la convention fiscale entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Panama, signée le 30 juin 2011.
Ainsi que nous l'avons souligné en première lecture, ce projet de loi constitue une étape indispensable au renforcement des relations franco-panaméennes et participe de la mise en place d'un véritable dispositif de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales. Il s'inscrit dans une démarche de transparence fiscale initiée au niveau international par le G20, et dont la France a également fait l'une de ses priorités.
Dans le contexte de crise financière que nous connaissons tous, il est véritablement nécessaire de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales qui mettent en péril les recettes des États du monde entier.
Avec une économie en croissance et une situation stratégique, le Panama possède de nombreux atouts pour conforter sa qualité de pays émergent et devrait être considéré, dans les années à venir, comme un pays véritablement attractif.
Ce qui vient d'être dit concernant le Panama vaut pour toute l'Amérique centrale, zone que nous avons trop longtemps négligée et qui, à bien des égards, peut s'avérer importante sur un plan économique et stratégique. Au-delà du Panama, un certain nombre de ses voisins font preuve d'une dynamique économique et d'une croissance relativement importante. Pour ne citer qu'un exemple, la compagnie aérienne TACA située au Salvador voisin est la seule de toute les Amériques à utiliser exclusivement des appareils Airbus. Ceci mérite d'être souligné.
Il est important pour la France de reprendre le rôle qui est le sien dans cette partie du monde où nous avons soutenu un certain nombre de peuples qui essayaient de s'affranchir des dictatures auxquelles ils avaient à faire face. Finalement, capitaliser sur l'engagement qui a été le nôtre dans ces pays à l'époque est une impérieuse nécessité à laquelle chacun et chacune d'entre nous devrait pouvoir souscrire.
État en profonde mutation économique, le Panama a également pleinement pris conscience de la nécessité de s'ouvrir et de se conformer aux règles de l'économie mondiale s'il souhaite réaliser de grands projets d'infrastructures.
Dans un souci d'éviter toute fiscalité pénalisante, le renforcement de la présence économique de la France au Panama nécessite la conclusion de cet accord en vue d'instaurer un mécanisme d'élimination des doubles impositions.
Rappelons à ce titre que les liens et les relations entre la France et le Panama sont très anciens. La richesse de ce pays vient pour beaucoup du canal de Panama, au percement duquel la France a beaucoup oeuvré.
Le canal a bouleversé l'équilibre géostratégique de la région, et a également été très important pour le développement économique et l'ensemble des échanges entre le Pacifique et l'Atlantique, entre l'ouest de l'est des États-Unis ainsi qu'entre l'Europe et l'Asie.
Cet accord s'inscrit dans une continuité puisque le Panama a récemment démontré sa volonté d'adapter sa législation aux nouvelles exigences internationales en matière de transparence fiscale.
Il convient néanmoins de rester vigilants car certains obstacles à l'échange d'informations demeurent et la validation du passage de cet État en phase 2 par le Forum mondial sur la transparence et l'échange des renseignements à des fins fiscales de l'OCDE n'est pas garanti.
Malgré cette réserve, la convention soumise au débat de ce jour devrait permettre de conforter la décision de grands groupes, mais aussi de PME, de s'implanter dans ce pays et d'investir dans les grands projets d'infrastructures en cours.
D'autre part, cette convention a pour objectif d'éliminer le risque de double imposition, source d'incertitude pour nombre d'investisseurs.
Concrètement, cet accord définit avec précision les modalités de l'imposition des revenus, qu'il s'agisse des bénéfices des entreprises, des revenus immobiliers ou encore des revenus passifs.
La convention permet notamment d'éviter la force attractive de l'établissement stable, qui constitue l'une des composantes essentielles des paradis fiscaux, en prévoyant un dispositif législatif strict en la matière.
L'accord clarifie également les modalités d'imposition des dividendes en posant le principe de l'imposition dans l'État de résidence du bénéficiaire, auquel il peut être dérogé par un dispositif de retenue à la source.
Enfin, un article de la convention évoque les revenus de sociétés, dont la double imposition peut être éliminée par l'imputation, sur l'impôt français, d'un crédit d'impôt.
Par ailleurs, cet accord comporte une clause d'échange de renseignements conforme au modèle de l'OCDE et indissociable d'une politique de lutte contre la fraude en matière fiscale.
Au cours de ce débat, nous abordons un sujet éminemment important. Nous pouvons discuter de toutes les questions relatives à la moralisation de la situation bancaire internationale et à la lutte contre les paradis fiscaux de manière théorique dans un cadre multilatéral.
On peut en parler dans un cadre multilatéral tout en essayant, dans un cadre bilatéral, d'aller dans le sens d'une plus grande moralisation, car nous savons que nous sommes face à des réalités et qu'il y a lieu d'agir. C'est le sens de ce qui nous est proposé par le gouvernement français et le gouvernement panaméen. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
La promotion de la transparence (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) et de l'échange de renseignements à des fins fiscales doit demeurer une priorité de notre politique internationale. Le groupe Nouveau Centre et apparentés renouvelle donc son soutien à ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les historiens du futur se demanderont longtemps quelle mouche a piqué la majorité de gauche pour refuser un accord tout à fait légitime dans le cadre international dans lequel nous fonctionnons.
Du Sénat, bien sûr, vous m'aviez tous compris !
Cet accord répond à un double objectif. Il fait entrer dans la légitimité et la légalité internationale un État qui figurait sur la liste grise, et nous ne pouvons que nous en réjouir.
Mesdames et messieurs de gauche, il ne s'agit pas d'un accord virtuel, mais d'un accord qui fera loi entre les parties, et en vertu duquel chacune d'entre elles pourra demander des comptes à l'autre. Il ne s'agit pas de tirer des plans sur la comète. Nous avons là, en l'occurrence, des moyens pour demander des comptes à l'État avec lequel nous allons signer. C'est une évidence.
Le deuxième objectif, c'est qu'aujourd'hui personne ne peut faire grief à un gouvernement français, quel qu'il soit, de créer les conditions pour que nos exportations s'effectuent dans un cadre légitime et légal au regard du droit international public. Intenter des procès en prétextant qu'il s'agit d'un accord de circonstance, alors même qu'il est en cours de négociation depuis plus de deux ans, c'est faire preuve d'une singulière mauvaise foi.
J'ajoute qu'exporter crée du travail en France. Je m'étonne que des gens qui ont fait de la lutte contre le chômage un argument électoral crachent aujourd'hui sur un accord qui va conforter les exportations françaises. Il y a tout de même des limites à l'indécence et à la mauvaise foi !
C'est la raison pour laquelle le groupe UMP, sans aucune arrière-pensée, votera cette convention, qui renforce la légalité internationale. Nous serons évidemment tout aussi vigilants que vous pourrez l'être, car il en va véritablement des règles du droit international public, auquel nous sommes tous attachés. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est très rare que les conventions internationales, y compris dans le domaine fiscal, fassent l'objet d'une nouvelle lecture et de navettes s'étageant sur plus d'une semaine.
Il est vrai que cette convention France-Panama a suivi un parcours très singulier, qui témoigne des contradictions de la diplomatie française et du double langage élyséen. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Je voudrais rappeler la chronologie. Le 4 novembre dernier, le Panama était considéré comme un État peu fiable par le Président de la République. M. Sarkozy déclarait en effet à Cannes : « Nous ne voulons plus de paradis fiscaux. Le message est très clair. Les pays qui demeurent des paradis fiscaux avec la dissimulation financière seront mis au ban de la communauté internationale. » Il précisait : « Antigua-et-Barbuda, la Barbade, le Botswana, Brunei, le Panama, les Seychelles, Trinité-et-Tobago, l'Uruguay et le Vanuatu ne se sont pas dotés d'un cadre juridique adapté à l'échange d'informations fiscales », ajoutant même : « la Suisse et le Liechtenstein ne sont pas encore qualifiés ».
Le 24 novembre, Mme Pécresse, ministre du budget, confirmait le jugement du chef de l'État. À la suite de ces déclarations catégoriques, le gouvernement panaméen a suspendu, à titre de représailles, un contrat signé par la COFACE pour le financement du métro de Panama. Cette annonce a été faite par le ministère des affaires étrangères panaméen.
La décision de rejeter les services de la COFACE a été prise en vertu de la Constitution panaméenne, qui préconise des mesures de rétorsion, en cas d'agissements discriminatoires contre le Panama.
Mais depuis, M. Sarkozy a reçu, les 17 et 18 novembre, son homologue Ricardo Martinelli. À l'issue de leur entretien à l'Élysée, le président panaméen a fait une déclaration sur laquelle j'appelle à nouveau, mes chers collègues, votre bienveillante attention : « Une fois que la France aura approuvé la convention fiscale, sans doute avant la fin de l'année, le gouvernement français retirera le Panama de la liste des pays fiscalement non coopérateurs. » M. Hugues Goisbault, ambassadeur de France au Panama, a publiquement confirmé cette appréciation le 25 novembre.
Le quotidien économique La Tribune a décrit, au moment du G20, la situation pour le moins extravagante dans laquelle la diplomatie française s'est trouvée placée, le président français citant le Panama parmi les pays « qui ne se sont pas dotés d'un cadre juridique adapté à l'échange d'information fiscale.
« Deux semaines plus tard », écrivait le même quotidien, « le président du Panama, Ricardo Martinelli, a pourtant déclaré à l'issue de son entretien à l'Élysée que le président français lui avait assuré que la convention signée entre la France et le Panama le 30 juin dernier pour éviter les doubles impositions serait ratifiée par le Parlement français d'ici la fin de l'année. »
Le petit pays centre-américain sortirait ainsi de la liste française des États et territoires non coopératifs, mais non de la liste grise du Forum mondial fiscal de l'OCDE, qui sert de référence aux pays du G20.
Le Quai d'Orsay a cru bon de nuancer : « Le Président de la République s'exprimait à Cannes, comme président du G20, sur les paradis fiscaux ; il ne s'agissait en aucun cas d'une déclaration à titre national. » La France a en effet décidé de transiger vis-à-vis du Panama, lequel est loin d'être devenu vertueux en si peu de temps. Le Panama a des déficiences dans sa législation interne disposant de mécanismes protégeant l'information sur les propriétaires d'une société, ainsi que l'explique Pascal Saint-Amans, chef du secrétariat du Forum mondial fiscal de l'ODCE.
Concrètement, l'administration fiscale française pourra demander des informations, au cas par cas, au Panama, mais il n'est pas sûr que ces données, notamment la comptabilité des sociétés offshore, existent. Pourquoi donc tant de mansuétude envers le Panama ? « Pays dynamique, le Panama a de très grands projets d'infrastructure, comme l'élargissement du canal ou encore la construction du métro », signale le Quai d'Orsay. « Alstom va équiper cette première ligne du métro et d'autres industriels français avaient été irrités de ne pas obtenir une part du gâteau des vastes investissements du Panama pour moderniser son canal. » Cette dernière appréciation n'émane pas d'hommes politiques de gauche ni d'un journal du même bord politique, mais du quotidien La Tribune.
Nous avons souhaité, comme cela avait été fait lors de la première lecture, mettre à la disposition de tous les différents éléments objectifs du gâchis diplomatique que je viens de résumer. Nous aurions aimé, chers collègues, faire preuve d'indulgence et de compréhension, mais les explications mensongères du Quai d'Orsay (Protestations sur les bancs du groupe UMP),ainsi qu'un certain cynisme qui règne à l'Élysée, nous conduisent à refuser ce qui apparaît bel et bien comme un passe-droit. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre collègue Myard demandait, je crois, quelle mouche avait piqué les sénateurs de refuser la convention.
Peut-être la même que celle que Nicolas Sarkozy avait rencontrée sur son chemin, au début du mois de novembre,…
…lorsqu'il a eu des mots très durs sur la coopération financière avec le Panama. Peut-être la même qui, après avoir croisé Nicolas Sarkozy, avait heurté Mme Pécresse le 24 novembre, lorsqu'elle exposait toutes les raisons que la France aurait de refuser de ratifier cette convention. Depuis, la mouche semble s'être égarée de ce coté-ci pour aller ailleurs car, entre le 24 novembre et le 1er décembre, il a manifestement été décidé que cette convention fiscale devait être ratifiée en urgence. C'est le processus auquel nous assistons.
Notre collègue Myard noua a assurés que ce texte n'était pas un texte de circonstance, pour dire ensuite toute la bonne fortune que des entreprises pouvaient tirer de l'État du Panama pour peu que la France s'aventure à ratifier cette convention. Il me semble que nier le caractère de circonstance pour indiquer, dans le même propos, ce que les entreprises françaises peuvent espérer de bénéfices à l'export dans ce pays est contradictoire.
S'il s'agit d'un texte de circonstance, assumez-le ! S'il s'agit d'en rester au fond, c'est-à-dire au droit et aux principes internationaux, tels que la France les a toujours affirmés et réaffirmés, notamment lors des sommets de Londres et de Pittsburgh, alors il s'agit d'une autre lecture – qu'il faut peut-être avoir.
Ce texte a été paraphé en mai 2010, signé en juin 2011. Je viens de rappeler ce que les plus hautes autorités de l'État pouvaient en penser il y a encore quelques semaines, et voici maintenant que les mêmes demandent à la majorité UMP, qui soutient ces autorités, de ratifier ce texte sur lequel on peut quand même se poser quelques questions.
Demander au Panama de nous donner des renseignements qu'il n'est pas en mesure de fournir est pour le moins hypocrite – je retiens le mot de notre collègue François Loncle – puisque nous constatons l'absence d'un mécanisme d'identification des actionnaires. Comment l'État de Panama, ne pouvant identifier ses ayants droit, pourrait-il en communiquer l'identité à d'autres États et notamment ceux ayant passé une convention fiscale avec leur État ? Les sociétés doivent certes conserver une comptabilité pendant cinq ans, à l'exception des sociétés offshore immatriculées au Panama. Ainsi, donc, nous pourrons avoir la comptabilité de toutes les sociétés immatriculées au Panama sauf les sociétés offshore, et vous estimez que nous pouvons nous contenter de cela et ratifier en conséquence la convention. L'accès aux renseignements est limité, qui plus est, par le secret professionnel. Lors de la constitution d'une société anonyme, un avocat doit être nommé ; nous connaîtrons son nom, mais il se retranchera derrière le secret professionnel pour ne pas indiquer le nom des ayants droit.
Bref, l'opacité demeurera, même si certains, je le comprends, font semblant de croire qu'elle sera dissipée. Sans cadre juridique adéquat, la convention n'a en réalité aucune chance d'être appliquée.
Enfin, à une époque où la convergence avec l'Allemagne semble être le maître-mot de notre politique économique et fiscale, permettez-moi de vous informer, mes chers collègues, qu'à ma connaissance – mais peut-être le ministre me détrompera-t-il – et pour les raisons que je viens d'évoquer, l'Allemagne refuse de ratifier cette convention. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Mesdames, messieurs les députés, vous avez voulu opposer la question de la conjoncture et celle de l'accord proprement dit.
Sur le fond, il me paraît difficile de ne pas envisager une procédure de vigilance laquelle doit accompagner la ratification de cet accord.
Puisque vous avez voulu mettre en défaut M. le Président de la République ou Mme la ministre du budget, je vous rappellerai un certain nombre d'éléments.
Effectivement, monsieur Loncle, le Président de la République a évoqué la situation du Panama le 4 novembre dernier au G20 de Cannes. Son discours se fondait alors sur le rapport d'évaluation de la phase 1 du Forum fiscal mondial.
Publié il y a plus d'un an, ce rapport ne contenait alors aucune évaluation supplémentaire.
Depuis, le Panama continue de faire un certain nombre d'efforts, même si les choses méritent d'être suivies sur la transparence fiscale exigée par la communauté internationale.
C'est tellement grave qu'il n'a pas été autorisé à passer à la phase 2 !
Des accords ont été signés avec d'autres partenaires, pays européens ou États-Unis. Quant aux déclarations de Mme la ministre du budget, elles ne faisaient qu'illustrer le fait que la France applique des sanctions fiscales à l'encontre des États qui figurent sur la liste des territoires non coopératifs. Il n'y a donc aucune contradiction…
…entre les sanctions à l'encontre des pays non coopératifs et les accords amenant ces pays qui ont fait des efforts vers plus de coopération et de transparence fiscale. (Sourires sur les bancs du groupe SRC.)
Mesdames et messieurs de l'opposition, je vous rappelle que les usines Alstom de matériel roulant se trouvent dans la circonscription du partisan de la démondialisation qu'est M. Montebourg ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Il est difficile de s'opposer à des projets français à l'étranger lorsque, au plan local, on est confronté à des problèmes d'emploi et de croissance.
La logique exige que cet accord soit adopté.
Est-ce à dire qu'il serait logique aussi de vendre des armes à la Syrie ?
Au titre des explications de vote, la parole est à M. Jean-Pierre Dufau, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Force est de constater que cette convention, dont l'approbation nous est demandée selon la procédure accélérée et dans la précipitation, soulève bien des questions.
Dans le cadre de la lutte contre les paradis fiscaux, la convention avec le Panama illustre l'incohérence, la volte-face, le non-dit du Gouvernement français.
Incohérence quand, le 4 novembre dernier, le Président de la République, fustige les paradis fiscaux, proposant même de les mettre « au ban de la communauté internationale », et quand, selon le rapport sur la phase 1, le Panama n'est pas autorisé à passer à la phase 2, ce qui prouve qu'il fait bel et bien partie des paradis fiscaux.
Mais, les 17 et 18 novembre, M. Sarkozy recevait son homologue panaméen, M. Ricardo Martinelli. Et, comme par enchantement, une volte-face du quai d'Orsay et des autorités françaises fait que voici le Panama adoubé, ce que confirmait, au demeurant, le président panaméen : « Avant la fin de l'année, le gouvernement français retirera le Panama de la liste des pays fiscalement non coopératifs. » Pourtant, le 24 novembre, Mme Pécresse citait le Panama comme étant un État non coopératif figurant sur les listes noires ou grises.
Elle n'a sans doute pas été « briefée » à temps…
Qu'est-ce qui a pu, en quelques jours seulement, parer le Panama de toutes les vertus ?
Non pas l'adoption de lois ou de dispositions de nature à faire sérieusement progresser la lutte contre la fraude fiscale, mais plutôt un rapport de force avec l'État français.
Le projet de contrat du métro de Panama avec la société Alstom n'est pas étranger à ce revirement.
En effet, par mesure de rétorsion contre les rodomontades de M. Sarkozy lors du G20, les autorités panaméennes avaient rejeté les services de la COFACE et son prêt de 297,8 millions de dollars pour financer partiellement le métro, d'où la procédure d'urgence. Le déblocage du dossier passait par les fourches caudines de l'adoption de la convention fiscale. Dois-je ajouter en prime la discrète extradition, le dimanche 11 décembre, de l'ancien dictateur, Manuel Noriega, qui purgeait en France depuis 2009, une peine de sept ans d'emprisonnement – pour blanchiment d'argent ? Je laisse la conclusion au quotidien La Tribune du 25 novembre 2011 : « La France accorde un passe-droit au Panama. ».
Ce n'est pas moi qui le dis, mais La Tribune.
En effet, cet accord ne satisfait pas aux critères imposés par le Forum mondial. Le Panama ne remplit que trois des dix critères requis : la disponibilité des renseignements bancaires ; la compatibilité des mécanismes d'échange avec le respect des droits des contribuables ; le respect de la confidentialité des renseignements reçus. On pourrait ajouter d'autres éléments comme l'absence de mécanisme d'identification des actionnaires au porteur, l'absence de comptabilité des sociétés off-shore, trusts et fondations, etc.
On voit donc que, sur le fond, cette convention est incomplète et n'offre pas les garanties exigibles en la matière. Sur la forme, la précipitation et l'incohérence avec lesquelles le Président de la République et le Gouvernement ont traité ce dossier sont choquantes. C'est pourquoi, le groupe SRC est, en raison de vos errements, conduit à voter contre cette convention. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(L'article unique du projet de loi est adopté.)
Je n'ai été saisie d'aucune demande de scrutin public. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
M. le Président a reçu de M. le Premier ministre une lettre l'informant que, la commission mixte paritaire n'ayant pu parvenir à l'adoption d'un texte sur le projet de loi de finances rectificative pour 2011, le Gouvernement demande à l'Assemblée de procéder, en application de l'article 45, alinéa 4, de la Constitution, à une nouvelle lecture de ce texte.
En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion, en nouvelle lecture, de ce projet de loi (n°s 4100, 4104).
La parole est à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, après l'échec de la commission mixte paritaire, vous êtes aujourd'hui appelés à procéder à une nouvelle lecture de ce projet de loi de finances rectificative, avant, très vraisemblablement, de statuer en dernier ressort.
Ce collectif budgétaire marque, vous le savez, une étape essentielle dans notre effort de réduction des déficits. Cet effort, mesdames et messieurs les députés, il a commencé en 2010 et il se poursuivra jusqu'en 2016. Année après année, nous avançons ainsi sur le chemin du désendettement, en honorant scrupuleusement les engagements pris par la France.
Ces engagements, vous les connaissez : nous ramènerons notre déficit public à 5,7 % en 2011, puis à 4,5 % en 2012. Et grâce à ce texte ainsi qu'aux décisions que nous avons prises ensemble tout au long des derniers mois, la France sera au rendez-vous.
Elle le sera en 2011, avec un déficit du budget de l'État réduit de 36 % en l'espace d'une seule année.
Cette baisse de plus d'un tiers, mesdames et messieurs les députés, témoigne de notre constance et de notre réactivité.
De notre constance, tout d'abord, car cette amélioration du solde de l'État est le fruit de la stratégie qui est au coeur de notre politique budgétaire depuis trois ans. Cette stratégie, vous le savez, se résume très simplement : priorité absolue aux économies sur les dépenses.
Le budget 2011 prévoyait ainsi le gel en valeur des dépenses de l'État, hors dettes et pensions. C'était déjà sans précédent. Eh bien, non seulement nous avons respecté cette norme extrêmement exigeante, mais nous avons fait mieux, en réalisant 200 millions d'euros d'économies par rapport à ce plafond. Dès 2011, les dépenses de l'État baisseront donc en valeur et nous aurons ainsi pris un an d'avance sur le calendrier que nous nous étions fixé.
C'est le signe du sérieux et de la détermination de ce Gouvernement. Loin de prendre prétexte des circonstances pour relâcher nos efforts de maîtrise des dépenses, nous les avons poursuivis et accentués malgré le changement brutal de conjoncture et les imprévus qui émaillent toute exécution.
Car si nous tenons nos engagements, c'est aussi à notre réactivité que nous le devons. Face à une conjoncture marquée par une grande incertitude, nous avons, dès le 24 août, pris une première série de mesures, que vous avez adoptées au début du mois de septembre.
Conjuguées à notre effort de maîtrise des dépenses de l'État, ce sont ces mesures qui, malgré une croissance plus faible que prévu, nous permettent de ramener le déficit public à 5,7 % de la richesse nationale en 2011.
Et en 2012, nous serons au rendez-vous, comme nous l'avons été en 2011 Et nous le serons grâce au plan de retour à l'équilibre du 7 novembre, dont le dernier volet figure dans ce texte.
Ce collectif s'inscrit en effet dans la continuité des projets de budget de l'État et de la sécurité sociale : pris ensemble, les textes financiers forment un tout cohérent, car fondé sur une seule et même stratégie.
Cette stratégie, vous la connaissez, elle repose sur deux piliers. Le premier, je l'ai déjà évoqué, c'est la poursuite de notre effort d'économies dans l'ensemble de la sphère publique.
C'est la raison pour laquelle le projet de loi de finances pour 2012 prévoit une baisse sans précédent de 1,5 milliard d'euros des dépenses de l'État, d'une année sur l'autre. Quant à la loi de financement de la sécurité sociale, elle a fixé l'objectif national de progression des dépenses d'assurance maladie au niveau, historiquement bas, de 2,5 %, alors que la tendance naturelle est à 4,4 %.
Le deuxième pilier de notre stratégie, c'est le recours à des prélèvements ciblés, dans un double esprit d'équité et de préservation de la croissance.
Le ralentissement de l'activité mondiale a aujourd'hui un impact direct sur l'économie française. Mais nos fondamentaux sont solides, et les réponses extrêmement fortes apportées par la zone euro sont de nature à rétablir la confiance. Pour que le rebond soit possible, nous devons plus que jamais préserver notre potentiel de croissance.
Soutenir la croissance, la ranimer aujourd'hui, c'est limiter au strict nécessaire les efforts demandés aux Français et aux entreprises, en faisant d'abord peser la contribution à la réduction des déficits sur l'État et sur les administrations, nationales et locales. Ce n'est pas multiplier les nouveaux impôts sans cohérence ni vision d'ensemble, comme l'a fait le Sénat en créant ou modifiant 42 taxes, sans compter les 17 du projet de loi de financement de la sécurité sociale – 59 en tout – pour un total de 32 milliards d'euros d'impôts nouveaux.
Ces 32 milliards d'euros d'impôts supplémentaires viendraient casser tous les ressorts de l'activité économique, qu'il s'agisse de l'investissement des entreprises ou de la consommation.
Le deuxième principe de notre politique, c'est de répartir équitablement les efforts demandés aux Français et aux Françaises.
L'équité exige que les plus grandes entreprises et les ménages les plus aisés contribuent plus à l'effort supplémentaire de réduction des déficits – et ce sont elles qui acquitteront la plus grande partie des 5,2 milliards d'euros de recettes supplémentaires prévus par ce collectif.
Je pense ainsi à la majoration exceptionnelle de 5 % de l'impôt sur les sociétés, une mesure qui, vous le savez, pèsera sur les seules entreprises dont le chiffre d'affaires dépasse 250 millions d'euros. Elle ne concernera donc ni les PME ni les entreprises de taille intermédiaire, qui sont les plus exposées au ralentissement de l'économie, mais sera concentrée sur les plus grands groupes : 50 % du produit de cette majoration sera en effet acquitté par les sociétés au chiffre d'affaires supérieur à 2,5 milliards d'euros.
Les efforts que nous demandons aux Français seront, eux aussi, équitablement répartis. J'en veux pour preuve la hausse du prélèvement forfaitaire libératoire sur les revenus du capital ou bien encore le gel des barèmes de l'impôt sur le revenu, de l'impôt de solidarité sur la fortune et des droits de donation et succession. Pour l'essentiel, ces mesures pèseront sur les ménages les plus aisés – en particulier, sur les Français qui ont le plus de patrimoine.
Depuis le premier jour de cette crise, mesdames et messieurs les députés, le Gouvernement a tenu un discours de vérité : à la différence de l'opposition, qui prétend réduire les déficits sans que personne ait à faire le moindre effort, nous avons dit aux Français que chacun devra prendre sa juste part du désendettement du pays. Oui, sa juste part.
C'est pourquoi nous avons veillé à protéger les foyers les plus fragiles. Ainsi, la création d'un nouveau taux de TVA à 7 % n'aura aucun impact sur les prix des produits de première nécessité (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR), qui resteront imposés à 5,5 % : ni l'alimentation, ni l'énergie, ni les cantines scolaires, ni les biens et services destinés aux personnes handicapées ne seront concernés par le nouveau taux de 7 %.
Notre politique fiscale repose donc sur des principes simples et cohérents. À la différence du Sénat qui, en refusant d'agir d'abord sur les dépenses, condamne le pays à un choc fiscal, nous demandons aux Français des efforts mesurés et équitablement répartis.
Parce que nul ne doit pouvoir s'en exonérer, nous avons décidé ensemble, en première lecture, de renforcer encore les armes dont dispose notre police fiscale. Avec un objectif : celui de continuer à resserrer l'étau autour des grands fraudeurs, qu'il s'agisse de particuliers ou d'entreprises.
Les mesures que nous avons prises font du temps l'allié et non plus l'ennemi de notre police fiscale. C'est pourquoi nous avons porté de trois à dix ans le délai de prescription en matière d'avoirs non déclarés détenus à l'étranger.
De même, nous avons prévu de donner trois années au fisc pour poursuivre ses investigations liées à un pays lorsque celui-ci sort de la liste des paradis fiscaux : nos agents pourront ainsi aller jusqu'au bout de leurs enquêtes.
Et je veux remercier tout particulièrement de son soutien votre rapporteur général, Gilles Carrez,…
…dont chacun connaît l'engagement dans la lutte contre la fraude, lutte dont nous avons fait ensemble une priorité depuis près de quatre ans et qui porte tous ses fruits, avec plus de 16 milliards revenus dans les caisses de l'État en 2010.
Permettez-moi enfin, mesdames et messieurs les députés, de saluer l'esprit de coresponsabilité exemplaire dont l'Assemblée nationale a fait preuve en examinant ce collectif budgétaire.
Tout au long des derniers mois, nous avons dû prendre ensemble les décisions qui s'imposaient et le faire dans des délais parfois extrêmement contraints. Nous avons dû faire des choix, des choix qui n'étaient pas toujours faciles, mais qui étaient indispensables. Et ces choix, nous les avons faits ensemble.
Là où le Sénat a jugé utile de remettre en cause des mesures pourtant nécessaires pour préserver la crédibilité du pays, sans prévoir la moindre compensation, l'Assemblée nationale a conforté les grands équilibres de ce collectif et y a apporté sa marque, en l'améliorant et en le complétant.
Je pense, par exemple, au travail que nous avons conduit avec le rapporteur général sur la redevance d'archéologie préventive. Celle-ci sera désormais adossée à la taxe d'aménagement, ce qui devrait considérablement faciliter son recouvrement et accroître son rendement, sans remettre en cause l'exonération dont bénéficient les maisons individuelles. Je veux le souligner, il s'agit là d'une réforme importante qui permettra de tirer un trait sur les difficultés de financement à répétition que connaissait l'Institut national de recherches archéologiques préventives.
Ce collectif budgétaire refond également, grâce à Michel Bouvard, la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics, en la rendant plus graduelle et en encadrant le pouvoir de remise gracieuse du ministre du budget. Là aussi, je crois que nous avons su trouver le bon équilibre, en distinguant les procédures applicables en fonction de l'existence ou non d'un préjudice financier. Ce qui est en jeu, en effet, c'est bien la protection des deniers publics, une protection qui fonde ce régime spécial de responsabilité et qui est plus que jamais un impératif dans la période que nous traversons.
Mesdames et messieurs les députés, la France livre aujourd'hui une bataille : celle de la crédibilité. Et cette bataille est tout à la fois européenne et nationale. À tous les niveaux, nous agissons.
À l'échelle de la zone euro, tout d'abord, avec les décisions historiques prises lors du sommet des 9 et 10 décembre. Car la crise de confiance, c'est bien l'ensemble des États de la zone euro qu'elle frappe. Notre devoir était d'apporter des réponses communes et, grâce à l'engagement personnel du Président de la République et de la chancelière Angela Merkel, ce sont des réponses extrêmement fortes qui nous ont tous réunis.
Mais nul ne doit s'y tromper, mesdames et messieurs les députés : la convergence européenne vient compléter et renforcer notre action nationale, mais elle ne vient pas s'y substituer. Rien ne viendra nous dispenser de notre effort de réduction des déficits et nous avons le devoir de le poursuivre au rythme prévu.
Parce que ce collectif budgétaire permet au pays d'avancer sur son chemin de désendettement, parce qu'il apporte, avec sérieux et responsabilité, des réponses à la hauteur des enjeux et parce qu'il démontre une nouvelle fois la détermination de la France à tenir ses engagements sans peser sur la croissance, le Gouvernement vous demande de l'adopter, en rétablissant le texte issu de vos travaux. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, initialement, ce projet de loi de finances rectificative comportait vingt-six articles et, à l'issue de la première lecture dans notre assemblée, en comptait soixante-seize. Cela tient notamment au fait, madame la ministre, que le Gouvernement a fait adopter de très nombreux articles additionnels : il s'agit certainement du dernier collectif de l'année, probablement de la dernière loi de finances de la législature – même si ce n'est pas absolument sûr –, et ce texte sert un peu de voiture-balai. Le Sénat a ensuite voté conformes quarante-neuf de ces articles, en a modifié dix-neuf, en a supprimé huit et a adopté trente-cinq nouveaux articles. Ce sont donc soixante-deux articles que nous nous apprêtons à examiner aujourd'hui.
La commission mixte paritaire n'a pu aboutir, tout simplement parce que le Sénat a supprimé les mesures essentielles de ce collectif : je veux parler, d'une part, de l'instauration d'un taux réduit « normal » de TVA à 7 % et, d'autre part, de la non-indexation du barème de l'impôt sur le revenu, des droits de mutation à titre gratuit et de l'ISF.
Il faut bien comprendre que la mesure liée au taux de TVA est conçue pour protéger les familles les plus vulnérables.
Restent en effet taxés à 5,5 % les produits alimentaires, tous les produits ou services concernant les personnes handicapées et les services liés à l'énergie et au chauffage.
Nous en reparlerons, monsieur Le Fur. L'abonnement pour le chauffage, même au bois, est bien maintenu à 5,5 %.
S'agissant de la non-indexation du barème de l'impôt sur le revenu, il faut souligner le fait que cela concerne des ménages plutôt aisés ou moyens qui paient l'impôt sur le revenu.
Vous le voyez, ces mesures principales que le Sénat a rejetées sont conçues dans un souci de justice fiscale, pour protéger les plus vulnérables et demander un effort aux plus aisés.
Lors de la réunion de la commission des finances d'hier après-midi, nous avons rétabli, pour l'essentiel, le texte voté par notre assemblée.
Pour ce qui concerne les recettes, j'ai déjà évoqué le nouveau taux de TVA et le gel du barème de l'impôt sur le revenu. Je rappellerai deux autres mesures importantes : la majoration exceptionnelle de 5 % de l'impôt sur les sociétés dû par les entreprises dont le chiffre d'affaires excède 250 millions d'euros ; la hausse du prélèvement forfaitaire libératoire pour les dividendes et les intérêts.
Au total, ces mesures représentent 5 milliards d'euros de recettes supplémentaires, soit 5 milliards d'euros de déficit en moins.
Nous avons également été conduits à reprendre certaines dispositions adoptées au Sénat, souvent avec l'accord de l'opposition sénatoriale ou à son initiative.
Il s'agit tout d'abord de mesures concernant le FACÉ, le Fonds d'amortissement des charges d'électrification. Le Sénat s'est beaucoup inspiré de nos travaux et a prolongé notre réflexion de façon constructive, aboutissant à une réduction satisfaisante.
Il s'agit ensuite de la modification du régime de la taxe de balayage.
Il s'agit encore de l'actualisation de la taxe de séjour, sur laquelle j'appelle votre attention, madame la ministre. Comme vous le savez, ce sont les conseils municipaux qui décident de cette taxe en fixant un taux maximal. Depuis 2002, ce plafond – rarement atteint – reste fixé à 1,50 euro. Nos collègues sénateurs ont proposé de le porter à 4 euros ; considérant ce montant excessif, nous nous sommes ralliés à un plafond de 3 euros.
Il s'agit enfin de mesures plus techniques, que je citerai rapidement : exonération des plus-values réalisées par les entreprises de transport fluvial – un amendement auquel Alain Gest tenait beaucoup et qu'il n'avait pas pu défendre ici même ; ajustement des modalités de l'imposition de l'indemnisation des avoués, sujet important que nous aurions dû traiter dans cette assemblée ; réduction de la taxe d'aéroport avec l'instauration d'un abattement de 40 % pour les passagers en transit, en réponse à une demande formulée par Aéroports de Paris afin d'accroître la compétitivité de l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, dont le hub reçoit beaucoup de correspondances.
Au total, le texte qui vous est soumis rétablit le dernier volet du plan de réduction du déficit décidé par notre majorité, comme l'a très bien rappelé Mme la ministre.
Permettez-moi d'en faire un petit récapitulatif afin de montrer la cohérence du Gouvernement mais aussi de la majorité qui a suivi les propositions de ce dernier tout en cherchant à les améliorer.
Les mesures annoncées le 24 août par le Premier ministre, avec un rendement estimé à 10,5 milliards d'euros en recettes et à 2 milliards d'euros en réductions de dépenses, ont été inscrites soit dans la loi de finances rectificative de septembre dernier – vous vous souvenez sans doute de la réforme des plus-values immobilières –, soit dans la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale, lorsqu'elles portaient sur des économies.
Il s'agit de la limitation des reports de déficit des très grandes entreprises au titre de l'impôt sur les sociétés, du passage de 5 % à 10 % de la quote-part pour frais et charges, de la réforme de l'imposition des plus-values immobilières, de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de la taxe sur les boissons sucrées.
À ces recettes s'ajoute un premier train de réductions de dépenses : réduction d'un milliard d'euros des dépenses de l'État et de ses opérateurs, augmentation de la réserve de précaution, qui passe de 6 à 7 milliards.
Les mesures annoncées le 7 novembre ont un rendement estimé en 2012 à 5,2 milliards d'euros en recettes, auxquelles correspondent des dispositions du présent collectif, et à 1,9 milliard d'euros en réductions de dépenses, dispositions qui ne pouvaient pas figurer dans ce collectif et qui ont été réparties entre le projet de loi de finances pour 2012 et le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Il s'agit principalement de 600 millions d'euros d'économies supplémentaires pour l'État, de la fixation de l'ONDAM à 2,5 % au lieu de 2,8 %, de la limitation à 1 % de la revalorisation des prestations sociales et familiales et des allocations logement, ainsi que du raccourcissement de la phase transitoire de la réforme des retraites.
C'est à un chiffre que je voulais en venir : au total, entre le collectif de septembre, la loi de finances, la loi de financement et le présent collectif, l'effort structurel de réduction du déficit – grâce à des mesures de recettes et des mesures d'économies – s'élève à 20 milliards d'euros, soit un point de PIB. Jamais nous n'avions réduit le déficit de façon aussi forte !
Madame la ministre, je veux donc rendre hommage à votre ténacité : tout est mis en place pour que nous tenions notre objectif de ramener le déficit à 5,7 % du PIB en 2011. L'annonce en sera probablement faite dans le courant du mois de février. Il est essentiel que, dans les premières semaines de l'année 2012, la France soit capable de montrer à tous ses partenaires qu'elle a tenu ses engagements pour l'année qui s'achève. En 2012, grâce à toutes les mesures que je viens d'évoquer, le déficit ne sera plus que de 4,5 % du PIB – on retrouve là le point de PIB, les 20 milliards d'euros dont je parlais – puis de 3 % en 2013.
On ne dira jamais assez, mes chers collègues, que c'est la condition indispensable pour couvrir à des taux raisonnables les besoins de financement de notre pays, qui s'élèveront en 2012 à 180 milliards d'euros ; pour le seul premier trimestre 2012, un tiers de cette somme devra être obtenu auprès de nos créanciers. Si nous voulons conserver la confiance que ceux-ci ont toujours accordée à la France ces dernières années, il faut absolument que nous respections à la lettre les engagements que nous avons pris. C'est un véritable défi ; mais c'est indispensable.
On ne dira jamais assez, madame la ministre, à quel point vous avez eu raison de tenir la barre, et même de nous opposer parfois des refus. La commission des finances vous a, je crois, soutenue, même lorsqu'il n'était pas facile de refuser certaines dépenses supplémentaires.
Je termine en insistant sur la qualité des relations de travail qui se sont établies et en remerciant Mme la ministre et ses collaborateurs de leur constante écoute pendant cette période où les lois de finances se sont succédé à une cadence accélérée.
Il n'y a pas eu de hiatus, monsieur Brard, il n'y a pas eu de fausse note. Nous avons travaillé dans un esprit d'équipe. Je voulais le dire à cette tribune et vous en remercier, madame la ministre, ainsi que tous vos collaborateurs. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
J'ai reçu de M. Roland Muzeau et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Madame la ministre, M. le rapporteur général vient de conclure en disant qu'il n'y avait pas eu de fausse note. Mozart disait : écrire de la musique, c'est mettre ensemble les notes qui s'aiment. Eh bien, si cette définition est vraie, vous me permettrez de ne pas vous comparer à Mozart : il y a, me semble-t-il, une marge de progression, et peut-être même une déficience dans la maîtrise du solfège. (Sourires.) Madame la ministre, pour être tout à fait juste à votre égard, vous avez progressé, à la tribune, dans la maîtrise d'un instrument : la grosse caisse. (Rires sur les bancs du groupe SRC.) Parfois, il faut bien l'avouer, vous n'y allez pas avec le dos de la louche !
Il n'y a pas de petit instrument dans un orchestre, monsieur Brard.
Vous le revendiquez, madame la ministre, vous assumez, et j'en suis fort aise : il n'y a pas de sot instrument. Dans un langage plus châtié, on ne parle d'ailleurs pas de grosse caisse, mais d'un instrument à percussion.
C'est évidemment plus déférent, plus élégant, plus courtois, en un mot plus galant. (Sourires.)
Venons-en à notre propos.
L'INSEE a annoncé la semaine dernière que la France va entrer en récession à la fin de l'année 2011 ou au début de l'année 2012, et que la perspective de croissance de 1 % sur laquelle ce projet de loi de finances rectificative est construit sera « difficile » à atteindre. J'en prends le pari avec vous, madame la ministre : nous nous retrouverons bientôt pour un nouveau projet de loi de finances rectificative. Pourtant, depuis que je suis député – et cela commence à faire un certain temps –, jamais nous n'en avions vu autant ! Mais je crois que vous allez vous surpasser. Ne nous voilons pas la face : nous savons tous ici que nous n'atteindrons pas votre objectif.
Les premiers effets de votre politique de rigueur se font sentir, madame la ministre. Nous n'avons cessé de vous avertir que les politiques d'austérité n'entraînent que deux choses : la misère et la récession. Avez-vous entendu les responsables des Restos du coeur et des autres associations caritatives ? Ils disent la souffrance des familles qu'ils reçoivent. Comment, lorsqu'on est responsable politique, être sourd comme vous l'êtes à l'expression des souffrances des plus fragiles d'entre nous, et dont les enfants sont les premières victimes ?
Prenons l'exemple de la Grèce : après dix plans de rigueur plus drastiques les uns que les autres, le chômage atteint 18 % en 2011 et le FMI estime que l'économie grecque va encore se contracter de 6 % cette année et de 3 % en 2012 ; ce sera la cinquième année de récession.
Aujourd'hui, c'est au tour de la France d'être frappée de ces deux maux, et il suffit de faire ses courses pour constater que les prix augmentent : en un an, le panier de la ménagère a augmenté de 3,71 %. Voulez-vous que je vous donne quelques prix, madame la ministre, mes chers collègues ? Le café arabica en grains a augmenté de 17,6 % – vous me direz qu'on n'est pas obligé de boire du café. La margarine, qui remplace le beurre dans de nombreuses familles parce que c'est moins cher, a augmenté de 11,7 %. Les pâtes ont augmenté de 8,4 %, les petits pois de 6,2 %.
Pour les pêches, mon cher collègue, nous sommes un peu hors saison, et je pense qu'on ne doit pas consommer les fruits hors saison : cela altère l'environnement, car ils sont alors transportés par avion.
La pêche de Montreuil est en effet excellente : grâce à la finesse de nos paysans, elle libéra même la ville de Montreuil des cosaques qui l'occupaient indûment après les aventures napoléoniennes. Mais, monsieur le rapporteur général, vous me faites sortir de mon sujet. (Sourires.)
Le cola classique a augmenté de 3,4 % – qu'il soit classique ou pas, d'ailleurs, je n'en recommande pas la consommation. Vous avez pu constater vous-même ce que les excès de consommation de ce produit ont causé sur l'intellect de George Bush ! (Sourires sur divers bancs.)
Madame la ministre, si vous alliez dans nos HLM, et que vous parliez avec la population, vous constateriez combien les conditions de vie de nos concitoyens se dégradent. Venez à Montreuil, venez à Bagnolet ! Les gens font des efforts énormes pour payer leur loyer, et malgré cela les retards de paiement s'accumulent ; et quand on a payé le loyer, il ne reste pas grand-chose. Dans ces familles, le pain, les pommes de terre, les nouilles et la semoule sont les mets les plus ordinaires ; le bifteck, c'est rare, c'est très rare.
Vous le direz aussi à Dominique Strauss-Kahn !
Il faut le savoir, madame la ministre, et si vous n'en êtes pas convaincue, je vous inviter à venir avec moi rendre visite à ces familles, comme le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a fait, à propos il est vrai d'un autre sujet.
Vous ne rencontrez pas nos concitoyens, madame la ministre ; je veux parler de ceux qui se lèvent tôt, qui travaillent dur, ou bien qui voudraient bien pouvoir le faire mais qui sont privés de travail et livrés au chômage. Vous, les gens que vous rencontrez, ce sont les mêmes qu'à Toulon : ce sont ceux que l'on emmène en autocar, ce sont des militants UMP qui sont là pour faire la claque et applaudir à chaque mouvement de cils du Président de la République.
Pendant vos discours, les Français souffrent.
Vous portez la responsabilité de cette situation, madame la ministre : vous n'êtes pas seule dans ce cas, tout le Gouvernement porte cette responsabilité, mais vous y avez contribué. Il faut que les gens qui nous regardent sur internet ou depuis les tribunes sachent que c'est votre gouvernement qui a multiplié les cadeaux fiscaux faits aux riches – bouclier fiscal, ISF, niche Copé, et, madame la ministre, je vous épargnerai en ne posant pas la même question pour la vingt-et-unième fois, je sais qu'elle provoque chez vous le réflexe de Pavlov puisque vous la connaissez déjà. Après tous ces cadeaux, il manque dans les caisses l'argent que vous y avez pris pour remplir les coffres des privilégiés : 70 milliards d'euros par an !
C'est aussi votre gouvernement qui protège les paradis fiscaux : vous nous avez fait adopter des conventions inégales avec des États voyous, comme le Belize, ou qui sont sous la souveraineté britannique comme l'île de Man, ou encore avec Hongkong, avec le Panama tout à l'heure.
Je ne pense pas que Cuba soit un paradis fiscal ; ce serait pour moi une vraie nouvelle : si vous avez des éléments pour prouver ce que vous avancez, ma foi, je ne vois pas ce qui justifierait chez les uns ce que je condamne chez les autres.
Vous refusez de lutter contre les paradis fiscaux, et cette absence de volonté cause une perte de 20 milliards d'euros par an. C'est votre gouvernement qui a capitulé devant les injonctions des agences de notation. Nos chers collègues de l'UMP frétillent en ce moment : d'après l'agence Fitch Ratings, il n'y a pas de problème pour les trois ans à venir, même s'il faut faire attention dans l'avenir. Mais il faut dire aux Français ce que c'est que cette agence : malgré ce nom, qui n'est qu'une tenue de camouflage pour l'armée des financiers qui sont en campagne, il s'agit de Français. Qui est le patron de Fitch Ratings ? Madame la ministre, ne regardez pas la pointe de vos chaussures : c'est Marc Ladreit de Lacharrière, un copain du président. (Mme la ministre lève les yeux au ciel.)
Oh, je surveille mes fréquentations, monsieur Jacob : et ces gens-là, je ne risque pas de les fréquenter, car nous n'habitons pas les mêmes quartiers. Quand je le croiserai dans une rue de Montreuil, c'est que la révolution sera faite depuis longtemps, et qu'on l'aura obligé à travailler dans nos murs à pêches. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Mais qui est M. Marc Ladreit de Lacharrière ? Il faut éclairer l'opinion : il fait partie de ces gens qui, en septembre 2008, dans le premier discours de Toulon du Président de la République, étaient désignés comme les irresponsables, les incapables qui mettaient en danger la France et l'économie mondiale. Et comment cet homme a-t-il été sanctionné ? Par une légion d'honneur que le Président de la République lui a décernée l'année dernière. Et qui la lui a remise peu de temps après ? M. le Premier ministre.
Madame la ministre, vous ne figurez pas sur la photo,…
C'est faux. J'y étais.
…mais nous disposons d'une très jolie image sur laquelle Marc Ladreit de Lacharrière, ce prolétaire qui est à la tête de Fitch Ratings, se tient aux côtés de François Baroin.
Comment faire confiance à des gens comme cela ? Ce sont des gens qui spéculent contre la France du travail, et qui n'ont de liens qu'avec les gens du pouvoir qui défendent leurs intérêts. Les gens de Moody's et de Standard & Poor's ne font pas encore partie de vos copains, vous n'avez pas encore réussi cela ; mais l'affaire Fitch Ratings ne peut abuser que les nigauds, puisque cette agence est dirigée par quelqu'un qui fait partie de votre famille : le quitus qu'elle vous a délivré ne dit rien de la réalité. Tout cela n'est qu'affabulations et mensonges.
Vous leur racontez des balivernes, mais eux, ils croient ce qu'ils voient tous les jours.
Par qui sont élaborés vos éléments de langage ? Par un certain Patrick Buisson, ancien directeur du journal fascisant Minute, et actuellement conseiller très spécial du candidat Sarkozy.
Je ne reviendrai pas sur toutes les mesures que contient votre texte, heureusement corrigé par le Sénat qui a fait la démonstration qu'on peut trouver des ressources.
Je veux seulement vous donner une information, ainsi qu'à vos amis de l'UMP et du Nouveau Centre, dont la seule contribution dans les débats consiste à les rallonger sans les modifier. N'est-ce pas, monsieur de Courson ?
Vendredi dernier, nous étions réunis, à l'initiative de nos amis Allemands de Die Linke, avec des Tchèques, des Portugais et des Italiens, pour nous unir et faire face.
Ici, il a été question de germanophobie. Il est vrai que, lorsqu'on entend le président du groupe démocrate-chrétien au Bundestag déclarer : « Aujourd'hui, l'Europe parle allemand », cela rappelle de mauvais souvenirs.
Qui sont les premières victimes de cette espèce de renouveau de l'arrogance germanique ? Avant tout le peuple allemand qui souffre des mesures qui ont été prises. Nous en souffrons également, non parce que nous sommes Français, mais parce que nous subissons les mêmes politiques mises en oeuvre par Mme Merkel et M. Sarkozy, qui défendent les mêmes intérêts contre ceux qui travaillent.
J'ai été frappé d'entendre, vendredi et samedi dernier, à quel point la classe politique allemande rejette, comme ici, à la fois Mme Merkel et M. Sarkozy – là-bas, on parle du couple Merkozy.
Je vous donne rendez-vous aux mois d'avril et mai, monsieur Jacob. Vous verrez alors ce que les Montreuillois pensent de l'actuel Président de la République et de sa politique.
Puisque les puissants, les privilégiés s'unissent, nous avons décidé nous aussi de joindre nos efforts au-delà des frontières pour contribuer à la construction d'une Europe nouvelle qui redonne l'espoir à tous les peuples afin qu'ils puissent accéder au bonheur que vous leur contestez aujourd'hui. (« Oh là là ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Vous parlez comme ceux qui ont la bouche pleine à côté de ceux qui ont les assiettes vides. Pour notre part, nous voulons remplir les assiettes de ceux qui n'ont rien.
Au titre des explications de vote, la parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Nouveau Centre.
Nous aimons bien M. Brard parce qu'il nous fait rire, et nous allons probablement regretter de le perdre dans quelques mois. (Sourires.) Mais, sur le fond, on ne peut pas dire que ses propos soient d'une très grande portée en matière budgétaire. Est-il bien digne d'agiter la germanophobie ?
Je vous ai écouté, mon cher collègue !
Vous auriez plutôt pu dire que nous sommes tous frères – je croyais que c'était le cas, autrefois, dans l'Internationale communiste.
Pensez-vous encore que ce sont les agences de notation qui fixent les taux d'intérêt sur les marchés ? Mais, monsieur Brard, elles ne font, au contraire, que courir après la situation des marchés. Ne leur donnez donc pas plus d'importance qu'elles n'en ont.
Le groupe du Nouveau Centre votera contre la motion de rejet préalable.
La parole est à M. Christian Eckert, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Mes chers collègues, il ne vous aura pas échappé que, contrairement aux autres fois, le groupe SRC n'a pas déposé de motion de rejet préalable, le texte qui nous revient du Sénat étant plus proche de nos aspirations que celui que nous avait soumis le Gouvernement.
Nous nous sommes déjà exprimés longuement en première lecture, et nous le ferons encore cette nuit et demain matin s'il le faut.
M. Brard a développé à sa façon un certain nombre d'arguments tout à fait respectables. Il a évoqué notamment l'absence de lisibilité au niveau européen. Mes chers collègues, que vous le vouliez ou non, c'est bien la question de la souveraineté, notamment celle de nos assemblées délibérantes, qui est en jeu et qui prétend être une réponse à la crise qui frappe actuellement.
Il y a quelques mois, on nous parlait de sortie de crise, comme si c'était acquis. Or, que nous soyons de droite ou de gauche, nous constatons tous, dans nos circonscriptions, que les propos tenus sur la sortie de crise ne sont pas d'actualité, tant s'en faut.
Certes, M. Brard a caricaturé un certain nombre de choses : cela fait partie de ses habitudes. Cela dit, vos propos, madame la ministre, faisaient montre d'une certaine autosatisfaction qui ne me semble pas de mise compte tenu de la situation actuelle.
Le groupe SRC votera cette motion de rejet préalable. Toutefois, si elle n'était pas adoptée, nous aurions l'occasion de vous faire part plus précisément de notre appréciation sur ce texte.
(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.)
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les dernières notes de conjoncture de l'INSEE et de l'OCDE montrent que le cadrage macroéconomique sur lequel était basé la loi de finances initiale pour 2012, comme cette dernière loi de finances rectificative de l'année 2011, est aujourd'hui dépassé.
En effet, la croissance en 2011 devait être de l'ordre de 1,6 %, au lieu du 1,75 % prévu, et la croissance en 2012 devait être de l'ordre de 0,3 % au lieu du 1 % révisé. Au total, il manque 0,85 point de croissance pour 2012, soit 17 milliards d'euros de produit intérieur brut en moins, ce qui va se traduire par une perte de recettes de 8 milliards pour le budget de l'État et celui de la sécurité sociale. À ces pertes de recettes fiscales, il convient d'ajouter les surcoûts liés à la dégradation de la situation sociale et à la montée du chômage, soit 2 à 3 milliards. Ainsi, il faudra trouver une dizaine de milliards d'euros en économies supplémentaires ou en recettes additionnelles pour maintenir les déficits publics à 4,5 % du PIB en 2012.
L'existence d'une réserve de précaution de 6 milliards ne permettra de faire face que très partiellement à un tel besoin, puisque, comme l'explique notre excellent rapporteur général dans son rapport, il faut déduire de cette réserve 2,6 à 3 milliards à restituer aux administrations concernées, comme chaque année, au titre des guichets sociaux, subventions aux régimes de retraite. Ainsi, le solde disponible de la réserve ne s'élève qu'à environ 3 milliards et ne peut couvrir qu'à peine un tiers des besoins si l'on veut maintenir le déficit au niveau de celui voté dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2012.
Il faudra donc faire de 6 à 7 milliards d'économies supplémentaires dès le début de l'année. Il serait important que le Gouvernement précise dès maintenant quelles mesures il compte prendre pour maintenir le niveau de déficits publics à 4,5 % du produit intérieur brut en 2012.
La discussion et le vote qui nous réunissent aujourd'hui mettront un terme à un véritable marathon budgétaire. Ce collectif, que nous retrouvons aujourd'hui après son passage au Sénat, qui a décidé – c'est un grand progrès – non de le dénaturer comme il l'avait fait pour le projet de loi de finances pour 2012, mais bien de l'améliorer, aura été riche d'enseignements. Ainsi, la discussion de ce projet de loi de finances rectificative a montré, ce que nous centristes rappelons depuis longtemps, la difficulté de prévoir la conjoncture économique dans un monde où l'interdépendance économique et budgétaire ne fait que s'accroître d'année en année.
Pour la loi de finances rectificative, la majorité sénatoriale s'est moins ridiculisée que lors de la loi de finances pour 2012. En effet, je vous rappelle, mes chers collèges, qu'elle avait alors augmenté les impôts de 27 milliards et diminué les dépenses – tenez-vous bien – de 190 milliards. Nos amis de la majorité sénatoriale avaient en effet fermé le ministère des affaires étrangères, de l'éducation nationale, de l'environnement, de la culture, de l'agriculture, de la justice, de la recherche, de la solidarité, du travail et de l'emploi. Bref, ils avaient fait quelques coupes claires – 50 % de réduction de l'ensemble du budget de l'État – dans l'administration.
Mais pour ce texte, la sagesse sénatoriale est revenue. La Haute Assemblée a été bien plus raisonnable en se contentant de réduire de près de 800 millions d'euros les recettes et de réduire de plus de 600 millions les charges, c'est-à-dire qu'elle a réduit de 163 millions le déficit du budget général.
Restent pourtant quelques points sur lesquels le groupe du Nouveau Centre ne désarme pas, et je pense que le Gouvernement ne pourra, en toute logique, que nous donner satisfaction.
Madame la ministre, je souhaite m'arrêter quelques instants sur l'article 11 et la création d'un deuxième taux réduit de TVA. Comme vous le savez, cette question a déjà fait l'objet de débats passionnés sur nos bancs, tant sur ceux de la majorité que de l'opposition. Sur ce point comme sur d'autres, le groupe Nouveau Centre a successivement connu quelques satisfactions puis des déceptions.
Concernant les satisfactions, nous souhaitons rappeler l'importance de la mesure d'exclusion de la hausse à 7 % des cantines scolaires, qui constitue indéniablement un service de première nécessité. Cette même logique, le Gouvernement aurait pu la suivre concernant le transport scolaire. Outre que la distorsion entre la gestion en régie et la gestion déléguée créerait une augmentation du taux de TVA à 7 %, nous pouvons regarder le transport scolaire comme un produit de première nécessité. C'est pourquoi nous avons redéposé un amendement dans ce sens. En outre, l'assujettissement à la TVA du transport scolaire ne représente qu'un transfert de 20 à 30 millions d'euros entre les départements et l'État.
Je souhaite également évoquer la question de la TVA dans le bâtiment. Suite à un amendement que le Nouveau Centre a successivement déposé en première puis en deuxième lecture, la discussion en commission des finances est arrivée hier soir à un accord. En effet, il a été admis la nécessité de maintenir, de façon exceptionnelle, un taux de TVA à 5,5 % pour les devis enregistrés et quand un acompte a été encaissé avant le 20 décembre 2011. Cette mesure, que nous avons défendue et dont nous nous félicitons, répond à un double objectif de simplification et de sécurisation juridique des entreprises et des consommateurs.
Enfin, concernant la TVA, je souhaiterais, là encore, m'arrêter quelques instants sur la situation du livre. En effet, à défaut d'avoir maintenu un taux de TVA réduit de 5,5 % sur les livres, il est impératif, vu les spécificités du secteur, d'aménager l'application de la nouvelle TVA, en la reportant au 1er avril 2012. Considérant que l'opération de mise à jour des 700 000 références commercialisées par 10 000 éditeurs est particulièrement complexe du fait de la nécessaire mise à jour des systèmes informatiques, considérant qu'il faut tenir compte du stock important des librairies, sur lesquels des problèmes de perte de marge et de dépréciation se posent, et considérant que les libraires clôturent généralement leurs comptes le 30 mars, l'application au 1er avril permettra de commencer une nouvelle année comptable avec un nouveau taux. Ce n'est pas très différent des conclusions du rapport Racine, qui préconisait deux mois.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons que la TVA à 7 % ne s'applique aux livres qu'à partir du 1er avril 2012. Ce délai paraît raisonnable à une grande majorité des acteurs.
Concernant le Fonds d'amortissement des charges d'électrification, la rédaction qui ressort des travaux du Sénat m'invite à poser au Gouvernement quelques questions. En effet, de par l'article 76 de la loi du 16 décembre 2010 portant réforme des collectivités territoriales, la participation minimale d'une collectivité territoriale assurant la maîtrise d'ouvrage de toute opération de travaux, dont l'électrification, doit être de 20 % du montant total. Ainsi, considérant que les syndicats d'électricité ne sont pas assujettis à la TVA, le FACÉ ne peut, semble-t-il, les financer à plus de 66 % du coût TTC des travaux, c'est-à-dire à plus de 80 % du coût hors taxe.
Le groupe Nouveau Centre souhaiterait savoir si le FACÉ est tenu de financer à hauteur de 66 % les opérations de travaux, mais également si ce taux représente un plafond de participation ou si le FACÉ peut participer davantage. Bref, madame la ministre, nous voudrions savoir si ces 66 % représentent à la fois un plancher et un plafond de participation. Pour le reste des dispositions de l'article 7, le groupe Nouveau Centre se félicite que le Gouvernement ait écouté sa majorité.
Mes chers collègues, le Nouveau Centre a également redéposé un amendement, déjà adopté en commission des finances en première lecture, concernant la vente d'alcool pur par les pharmaciens. Il est en effet choquant que des pharmaciens se fassent redresser, alors même qu'ils avaient expressément reçu l'assurance du directeur des services douaniers qu'il ne saurait en être question.
En effet, par une lettre de 1999 adressée à l'ordre des pharmaciens, les douanes leur avaient indiqué qu'ils avaient « la faculté de vendre de l'alcool nature, en exonération de droits d'accises, aux professions médicales, ainsi qu'à des particuliers à titre d'antiseptique, dans le cadre de l'exercice officinal et en dehors de toute prescription médicale ». L'amendement en question a ainsi pour objet de préciser le texte du code général des impôts pour l'avenir et de régler les situations passées en revenant sur les contrôles qui auraient pu être contraires aux instructions du directeur des douanes. Il s'agit ainsi de répondre au défaut de communication que les services des douanes ont reconnu le 12 mai 2011. Cet amendement, qui ne vise qu'à une coordination entre le droit en vigueur et la réalité des faits, ne pourra, j'en suis certain, que recueillir un avis favorable du Gouvernement.
Pour finir, je tiens à rappeler le soutien du groupe Nouveau Centre à la mesure consistant en un abattement de 40 % pour le calcul de la taxe sur les véhicules de société de type flex-fuel. Afin d'obtenir l'assentiment du Gouvernement, j'ai déposé un amendement visant à ne pas appliquer cet abattement aux véhicules dont les émissions sont supérieures à 200 grammes par kilomètre, au lieu de 250 grammes dans la version initiale de la mesure.
En conclusion, le groupe Nouveau Centre appelle le Gouvernement à préciser dès maintenant comment il compte dégager 8 milliards d'euros d'économies ou de recettes supplémentaires pour s'adapter aux nouvelles prévisions de croissance et à soutenir les amendements que je viens d'évoquer. C'est donc à ces conditions que le groupe Nouveau Centre votera en faveur du projet de loi de finances rectificative pour 2011. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, vous me permettrez de reprendre l'une des dernières phrases de Charles-Amédée de Courson, car je ne sais pas par quel miracle vous allez trouver ces sommes. Pouvez-vous donc nous confirmer – ou infirmer – qu'il y aura bien une nouvelle loi de finances rectificative qui nous fera nous retrouver dès le début de l'année prochaine ?
Pour en revenir à notre texte, je commencerai par une citation de Patrick Artus, qui est, non pas un horrible gauchiste, mais un économiste reconnu de l'école libérale. Écoutez bien, madame la ministre, car, après tout, vous pourriez faire usage de ses conseils : « Il existe des freins substantiels à la croissance : la hausse des prix des matières premières ». Jusque-là, je pense que vous êtes d'accord ! Il évoque ensuite « les faibles perspectives de hausse salariale avec la montée du chômage ». C'est bien Patrick Artus qui dit cela, et non pas Pierre Laurent ou Jean-Luc Mélenchon. (Sourires.) Il poursuit en évoquant « un partage de la valeur ajoutée défavorable aux salariés ». C'est ce que nous disons depuis bien longtemps. Il évoque aussi « la très faible progression des crédits et, enfin, la réappréciation de l'euro depuis quelques mois. Sans oublier non plus les politiques budgétaires restrictives ». On parle de vous, madame Pécresse ! Et il portait l'estocade contre vos politiques en ajoutant : « La croissance sera donc insuffisante pour réduire les déficits publics ». Patrick Artus n'est pas connu pour ses dons de divination. Vous reconnaîtrez tout de même qu'il visait juste quant aux conséquences prévisibles et désastreuses de vos politiques budgétaires.
Après trois sommets européens, lors desquels les chefs d'État ont capitulé face aux puissances de l'argent et aux spéculateurs qui parient sur la misère des peuples européens, et deux plans d'austérité prenant aux personnes les plus défavorisées et aux classes moyennes 18 milliards d'euros de pouvoir d'achat, l'INSEE vient d'annoncer les vendredi 16 et lundi 19 décembre derniers deux statistiques parlantes sur la situation de notre pays.
Cet institut public prévoit une récession au quatrième trimestre 2011 et au premier trimestre 2012 et annonce un taux de chômage au-delà de 10 % pour l'année à venir. Voilà la situation dans laquelle nous plongent dix ans de gouvernement UMP et cinq ans de présidence de Nicolas Sarkozy. La France est exsangue, les inégalités de revenus se creusent chaque jour un peu plus, notre pays compte 8,5 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté et la France est lourdement endettée à cause des dizaines de milliards d'euros de cadeaux fiscaux que vous faites chaque année aux plus riches de ce pays.
Pourtant, d'autres politiques sont possibles. C'est ce que vous a démontré la majorité de gauche au Sénat, parlementaires communistes, républicains et citoyens en tête – ou avec, c'est selon –, par les modifications apportées au projet de loi de finances initiale pour 2012. J'ai d'ailleurs noté tout à l'heure que le rapporteur général disait en substance que les sénateurs avaient été assez sages. J'attends donc avec gourmandise la suite de la discussion pour voir, madame la ministre, ce que vous allez retenir des propositions sénatoriales.
Celles-ci ont permis d'obtenir 30 milliards d'euros de recettes supplémentaires – je suis d'ailleurs étonné que votre esprit inventif ne les ait pas trouvées plus tôt – en rétablissant l'impôt de solidarité sur la fortune, en taxant les rémunérations des traders, en mettant en cause les prélèvements libératoires et en diminuant de moitié le crédit d'impôt sur les dividendes, sans que cela pèse sur les classes défavorisées, ni même sur les classes moyennes.
Pourtant, madame la ministre, vous refusez pour l'instant d'écouter et d'adopter ces autres propositions, alors qu'elles permettraient d'obtenir 10 milliards d'euros de recettes de plus que vos deux plans d'austérité cumulés, sans qu'il en coûte à la France d'en bas par des augmentations sournoises de la TVA sur des produits de première nécessité ou encore par une taxation scélérate des complémentaires santé – qui met davantage encore en péril l'accès aux soins de nos concitoyens, alors qu'en 2011 un Français sur trois a renoncé aux soins à cause de soucis financiers.
Puisque nous sommes à la veille de Noël, c'est-à-dire dans une période propice au rêve, imaginons que je sois le dirigeant d'une agence de notation. Eh bien, je vous mettrais sans hésitation, pour votre gestion des finances publiques, la note maximale, un AAA, celui de l'austérité autoritaire la plus antisociale. (Sourires.)
Pour cette nouvelle lecture du projet de loi de finances rectificative pour 2011, quatrième du nom, le Gouvernement va adopter une stratégie identique à celle employée la semaine dernière. Le rapporteur général va nous proposer toute une série d'amendements destinés à rétablir ce texte dans la version initialement souhaitée par le Gouvernement, au mépris le plus total du débat démocratique. Ces amendements seront certainement votés sans hésiter par les députés de la majorité.
D'ailleurs, quand je vous regarde, mes chers collègues, avec toute l'amitié et l'affection que j'ai pour vous, vous me faites penser aux moutons de Panurge. Heureusement, vous avez un bon berger, le rapporteur général, qui veille, quand vous avez des velléités, à ce que vous restiez dans le rang.
Et, quand cela ne suffit pas, il y a François Jacob… (Rires.) Je veux parler de Christian Jacob et non du prix Nobel.
C'est un lapsus révélateur, comme vous diriez !
Révélateur, mais pas forcément à l'avantage de François Jacob, vous en conviendrez, car les deux ne se situent pas sur le même plan !
Il va être temps de conclure, monsieur Brard ; vous commencez à fatiguer !
Il y a une grande différence entre Jean-François Copé et Christian Jacob. Quand on voyait le premier arriver dans l'hémicycle, cela sentait son adjudant-chef qui faisait serrer les rangs. Avec Christian Jacob, ce n'est pas la même chose : c'est l'agriculteur, tout en rondeur. Quand une vache s'écarte du troupeau, il l'appelle gentiment par son nom. (Rires.)
On m'a interdit les graphiques et les objets, mais pas encore interdit les images rhétoriques, madame la présidente ! Ou alors, il faudra que vous me disiez comment vous comptez me faire taire.
Bref, avec l'un comme avec l'autre, le résultat est le même : les députés UMP ne tiennent pas du tout compte des intérêts de nos concitoyens.
Bien sûr que si, et vous le savez ! Contrairement à vous, je n'ai pas besoin de me convaincre moi-même. Je ne fais pas partie de la famille Coué, alors que, chez vous, il y a quelques adeptes ! (Sourires.)
Pour achever votre édification, je voudrais vous citer un économiste qui n'est pas vraiment marxiste : Milton Friedman. Il disait : « Rien n'est plus durable qu'un programme gouvernemental temporaire. » Au moins de ce point de vue, vous avez devant vous une certaine durée. Mais je ne parle pas de la durée de votre gouvernement !
Ce plan d'austérité devait être le dernier proposé. Or madame la ministre, je ne sais pas si vous êtes au courant, mais François Fillon lui-même, mardi dernier, lors d'une réunion du groupe UMP…
Vous savez que nous y avons des amis, qui nous racontent tout, c'est formidable ! (Sourires.) François Fillon, disais-je, a déclaré qu'il n'était pas exclu de devoir adopter un nouveau projet de loi de finances rectificative après les fêtes de fin d'année. Cela, vous ne vous en êtes pas vantés, mais le Premier ministre l'a dit. Or normalement, plus la parole vient de haut, plus elle a d'autorité. Il ne manque plus que celle du Président de la République.
Cet aveu du Premier ministre est bien la preuve que vos politiques d'austérité sont des engrenages sans fin qui conduisent à l'impasse. Elles nuisent à notre peuple comme aux autres peuples d'Europe.
Pour conclure, je voudrais paraphraser Thomas Hobbes en vous disant que l'austérité est un loup pour les Français. C'est pour cela que les députés du Front de gauche voteront contre ce nouveau plan d'austérité destiné à faire payer les conséquences de la crise aux personnes qui n'en sont pas responsables, alors que vous épargnez ceux qui se sont enrichis grâce à elle.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons en nouvelle lecture ce dernier collectif, dans un contexte certes difficile, mais qui nous permet de rappeler que c'est bien la dette excessive des États qui est la cause de la crise, et qui nous invite chaque jour à davantage de responsabilité et de réactivité. Le présent collectif s'inscrit dans cette démarche, avec un double objectif.
D'un côté, il y a la partie traditionnelle, qui dresse le bilan de l'année et effectue les ajustements habituels. De ce point de vue, il permet de souligner que nous avons respecté les objectifs pour l'année 2011.
De l'autre, il y a la mise en oeuvre d'un ensemble de mesures concernant les recettes, suite au plan annoncé par le Gouvernement le 7 novembre. Cette contrainte, dictée, comme chacun le sait, par les événements que nous connaissons au sein de la zone euro, est la condition nécessaire pour conserver la trajectoire de réduction du déficit public, qui sera de 5,7 % pour 2011 et de 4,5 % pour 2012, avec un objectif ultime : zéro déficit en 2016.
De ce point de vue, mes chers collègues, je tiens à souligner la réactivité du Gouvernement, qui a fait preuve de responsabilité en réagissant sans attendre et en proposant un ensemble de mesures particulièrement équilibrées. Ainsi, le plan du 7 novembre représente un total de 7 milliards d'euros d'économies en 2012 et de près de 65 milliards d'euros de dette évitée d'ici à 2016.
Certaines de ces mesures ont fait l'objet d'ajustements lors de leur examen à l'Assemblée nationale, comme l'a rappelé le rapporteur général. Mais l'ensemble proposé par le Gouvernement révèle à quel point la majorité est au rendez-vous de la responsabilité et de la vérité.
On ne peut en dire autant de la nouvelle majorité sénatoriale…
…dont le seul objectif paraît être de détricoter méticuleusement le travail effectué à l'Assemblée.
En sortant de l'Assemblée, mes chers collègues, le projet de loi de finances réduisait le déficit public de 2 milliards d'euros, le solde budgétaire étant ramené à 78,8 milliards d'euros. En sortant du Sénat, le texte était alourdi d'une trentaine de nouvelles taxes pour un montant de 32 milliards d'euros. Nos concitoyens apprécieront.
Les parlementaires de gauche ont choisi à l'évidence le déni plutôt que le courage…
…de la vérité, bien plus difficile !
Le Sénat a voté le projet de loi de finances rectificative après avoir supprimé la plupart des mesures issues du plan de retour à l'équilibre des finances publiques du 7 novembre. Or, ce plan permet un effort dosé sans peser sur la croissance. L'objectif est bien d'adapter la contribution de chacun en fonction de ses capacités, de préserver les plus fragiles et de laisser des marges de manoeuvre aux entreprises pour que celles-ci jouent le rôle qui est le leur sur le front de l'emploi.
Les sénateurs de gauche n'ont pas eu autant de scrupules : suppression du nouveau taux de TVA réduit ; suppression de la non-indexation du barème de l'impôt sur le revenu ; intégration des revenus tirés des dividendes dans le barème de l'impôt sur le revenu ; suppression de la possibilité pour les entreprises non cotées de racheter leurs propres actions, etc. La gauche accuse le Gouvernement de mener une politique d'austérité tout en votant 32 milliards d'euros de taxes supplémentaires en deux mois !
Cherchez l'erreur, mes chers collègues ! Au final, la gauche refuse le principe même d'une baisse des dépenses. L'augmentation massive de la fiscalité est donc la seule option proposée par le PS.
En réalité, l'atteinte de nos objectifs de rétablissement des comptes publics suppose non seulement beaucoup de responsabilité, mais surtout une nouvelle vision de la gestion publique. Celle-ci est mise en oeuvre par le Gouvernement avec un courage que je veux ici saluer – et je souhaite remercier Mme Valérie Pécresse de porter avec détermination cette gestion rigoureuse. Il faut mieux dépenser en sollicitant moins de déficit et trouver un équilibre juste afin de préserver la croissance, ce qui passe forcément par un effort dès lors que les circonstances l'exigent. Chacun doit contribuer, bien sûr en fonction de sa situation, à la maîtrise des dépenses publiques.
C'est pourquoi ce collectif propose une légère augmentation de la TVA en portant le taux réduit à 7 %, ce qui permet précisément, faut-il le rappeler, la poursuite de l'application d'un taux réduit.
C'est pourquoi ce collectif propose également le gel du barème de l'impôt sur le revenu et l'augmentation du prélèvement forfaitaire libératoire sur les dividendes et les intérêts – ce qui concourt, à l'évidence, à faire porter l'effort sur ceux qui sont le plus capable de le supporter, c'est-à-dire sur les contribuables les plus aisés.
La caractéristique essentielle de toutes ces mesures est qu'elles préservent le pouvoir d'achat des revenus moyens et modestes. C'était notre objectif, celui de la majorité et du Gouvernement. Comme l'a rappelé M. le rapporteur général lors de l'examen du projet en première lecture, les mesures qui concernent les ménages portent d'abord sur les revenus du patrimoine. Par conséquent, les ménages plus modestes, qui ont moins de patrimoine, sont moins touchés.
L'objectif est donc bien de sauvegarder le pouvoir d'achat et, avec lui, le moteur de la consommation.
Il est également absolument nécessaire de protéger la compétitivité de nos entreprises, en particulier celle des PME.
C'est pourquoi les mesures prises sur les entreprises ne concernent que les très grandes entreprises, comme la contribution exceptionnelle de 5 % sur l'impôt sur les sociétés pour celles dont le chiffre d'affaires est au-dessus de 250 millions d'euros.
Pour la gauche, la fiscalité sur les entreprises est la réponse à tout. Ces dernières semaines, le Sénat a augmenté l'impôt sur les sociétés de 50 %, soit 20 milliards de taxes supplémentaires qui pèsent sur toutes les entreprises,…
…qu'elles soient des PME ou des leaders du CAC 40, qu'elles investissent ou non, qu'elles embauchent ou non.
Comment, avec de telles propositions, la gauche peut-elle parler de justice fiscale ? Comment peut-elle prétendre au soutien à la création d'emplois tout en étouffant de façon aveugle les PME ? Cette question est toujours sans réponse !
Mes chers collègues, la majorité soutiendra ce collectif. Il témoigne sans conteste de la réactivité du Gouvernement et s'inscrit en cohérence avec les travaux de l'Assemblée depuis plusieurs semaines, avec un objectif prioritaire : rétablir nos comptes publics dont l'équilibre est à la base de la confiance que l'on peut avoir dans l'État français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Une phrase tout d'abord, madame la ministre, pour rappeler que l'examen de ce texte – de ces textes, devrais-je dire ! – se fait dans des conditions difficiles, presque inédites.
Ainsi, nous sommes amenés à sous-amender des amendements que nous n'avons pas toujours reçus. Vous ne pouvez que constater qu'au sein de cette assemblée, l'opposition a joué le jeu : nous n'avons pas fait d'obstruction, nous sommes venus régulièrement et le plus nombreux possible à toutes les séances de travail de façon, je pense, souvent constructive – en tout cas, plus constructive que vous n'avez parfois l'air de le dire.
Je voudrais également rappeler l'origine de ce collectif budgétaire, car n'oublions pas, mes chers collègues, que nous vous l'avions annoncé puisque nous avons toujours dit combien votre prévision de croissance, fixée dans le projet de loi de finances à 1,75 %, était illusoire. Vous vous êtes rendus à la réalité, mais pas encore à la réalité complète, puisque l'INSEE annonce la récession et que tous les observateurs macroéconomiques nous disent, vous disent, que vos prévisions ne seront pas tenues en 2011 et probablement encore moins en 2012.
Troisième remarque, madame la ministre, pour m'inscrire en faux contre vos propos sur le prétendu équilibre entre économies et réductions de dépenses. En première lecture, M. le rapporteur général écrivait lui-même dans son rapport que 60 % provenaient d'augmentation des recettes et 40 % de diminution de dépenses.
C'est 50-50.
Ce n'est pas aussi équilibré. D'ailleurs, certains de vos collègues et de vos soutiens parlementaires disent régulièrement qu'il faudrait inverser ces chiffres, c'est-à-dire faire du 60-40 plutôt que du 40-60.
Qu'ils fassent des propositions !
Quatrième remarque pour vous dire combien il est illusoire de dire, madame la ministre, comme vous l'avez fait à cette tribune, que ce projet de loi de finances soutient la croissance. C'est tout aussi extraordinaire que de prétendre, comme l'ont fait vos collègues que l'on a adopté, dans le récent accord de Bruxelles des mesures de soutien de la croissance ! Pour ma part, j'ai lu et relu cet accord et j'ai cherché en vain dans les journaux et dans les communiqués les mesures qui soutiennent la croissance. Je n'en ai pas trouvé !
Donc, la réalité est là, et il faut bien dire que, face à une situation dont nul ne nie la difficulté, vous prenez des mesures d'austérité qui cassent la croissance, parce qu'elles portent sur 60 % de prélèvements supplémentaires, mais portent aussi, la plupart du temps, sur les ménages.
J'évoque ici, bien entendu, les deux principales mesures de ce collectif. Quelles sont-elles ?
Premièrement, vous proposez le gel du barème de l'impôt sur le revenu. Pendant deux ans, à toutes les tribunes, vous avez déclaré qu'il n'y aurait pas d'augmentation générale des impôts. Vous avez déguisé certaines mesures pour pouvoir dire que vous ne faisiez pas d'augmentation générale mais uniquement des augmentations ciblées. Mais, mes chers collègues, nul besoin de sortir d'HEC pour comprendre qu'en gelant le barème de l'impôt sur le revenu, dans la mesure où les revenus augmentent, c'est l'ensemble des contribuables qui sera touché !
D'ailleurs, cela rapporte au budget de l'État 1,7 à 1,8 milliard de recettes supplémentaires. Pire, près de 200 000 foyers fiscaux supplémentaires seront désormais soumis à l'impôt sur le revenu, vous m'avez confirmé ce chiffre il y a quelques jours. Aujourd'hui, grosso modo, la moitié des foyers fiscaux ne sont pas imposables à l'impôt sur le revenu ; avec ce gel du barème, 200 000 foyers de plus y seront soumis. Ce ne sont pas les riches, ce ne sont pas les gros revenus, les gros patrimoines qui seront touchés – ceux-là y sont déjà ; ce sont effectivement les plus défavorisés, ceux qui ont le moins de revenus.
Parallèlement, cette entrée dans l'impôt sur le revenu, madame la ministre, vous le savez, signifie que des exonérations de taxe foncière, des exonérations ou des réductions de taxe d'habitation et de taxe sur l'audiovisuel – bref, un certain nombre d'avantages qui résultent du fait de ne pas être imposable sur le revenu – vont disparaître pour environ 200 000 foyers fiscaux.
Vous nous donnez une réponse fallacieuse, puisque vous nous dites qu'une mesure fait en sorte que l'impôt ne soit pas recouvré lorsqu'il est inférieur à 60 euros. Mais c'est ridicule de dire cela ! Car l'impôt de celui qui aurait dû payer 59 euros n'est effectivement pas recouvré, mais s'il passe, aujourd'hui, à 61 euros, il le sera ! Ce n'est pas donc pas du tout une mesure destinée à limiter l'effet de seuil…
L'effet de seuil est là : que vous le vouliez ou non, 200 000 foyers fiscaux vont entrer dans l'impôt sur le revenu en raison de votre gel du barème.
J'en viens à la TVA, mes chers collègues. Formidable ! Sur la TVA, vous tenez des discours extraordinaires ! Vous dites notamment que vous préservez les produits de première nécessité de son augmentation.
L'assainissement n'est-il pas un produit de première nécessité ? Vous laissez l'eau à 5,5 %, j'en prends acte, même si ce n'était pas si évident en première lecture. Je vous ai interrogée ainsi que M. le rapporteur général à de nombreuses reprises sur le sujet. Vous avez fini par dire à ce micro – c'est donc gagné – qu'il s'agit bien d'un produit de consommation, d'un aliment et qu'en conséquence, la TVA sur l'eau restera à 5,5 %. Dont acte.
Mais qu'en est-il de l'assainissement ? Si l'eau est un produit de première nécessité, convenez avec moi, compte tenu de notre démarche d'assainissement et d'épuration des eaux pour protéger l'environnement, que l'assainissement est aussi un produit de première nécessité !
Autre exemple, madame la ministre : les transports publics.
Je vous ai interrogée, lourdement parfois, sur les transports publics. Le STIF vient d'annoncer qu'il intégrerait la hausse de la TVA au 1er janvier. La SNCF également. Je vous ai interrogée sur les billets d'avions – même si, en ce moment, il ne vaut peut-être mieux pas parler de sujets qui fâchent… – et vous m'avez répondu que, là aussi, la hausse de la TVA s'appliquerait.
Les transports publics, quand on parle de la RATP et de la SNCF, ne sont-ils pas un produit de première nécessité ?
Les cantines d'entreprise, mes chers collègues, ne sont-elles pas un produit de première nécessité ?
Les travaux sur les logements ne sont certes pas toujours un produit de première nécessité. Cela dit, en termes de soutien à la croissance de l'activité, vous avez, je pense, tous reçu des associations professionnelles d'artisans de PME du bâtiment, qui vous ont dit combien ces dispositions étaient pénalisantes pour eux.
Sur le logement social, madame la ministre, vous avez pris une « mesurette » : les opérations déjà validées bénéficieront encore du taux de 5,5 %. C'est un petit raccord sur quelques mois pour quelques opérations. Mais le logement social sera touché dans sa réalisation par la hausse de la TVA, et lourdement ! C'est un aspect que l'on ne peut évacuer d'un revers de main.
Et que dire des ordures ménagères ? Si ce n'est pas un produit de première nécessité, mes chers collègues, franchement !
Vous ne pouvez pas dire, comme vous l'avez affirmé à ce micro il y a à peine une demi-heure, que la hausse de la TVA n'aura aucun impact sur les ménages défavorisés.
Avant-dernière observation, vous nous avez dit que nos collègues sénateurs avaient multiplié les taxes : trente-deux, plus dix-sept, moins douze. Vous ne manquez pas de culot ! Je voudrais vous rafraîchir la mémoire : qui a inventé la taxe sur les boissons sucrées ? Ce n'est tout de même pas le Sénat !
Qui a inventé la taxe sur les boissons faussement sucrées ?
Ce n'est tout de même pas le Sénat !
Qui a failli inventer la taxe sur les parcs à thème ? Un pas en avant, un pas en arrière. On a reculé et on l'a remplacée par autre chose.
Puis, la taxe sur les nuitées des hôtels de luxe ? On a avancé, reculé, puis on l'a remplacé par autre chose !
Mais, surtout, qui a décidé d'assujettir à l'impôt les indemnités journalières sur les accidentés du travail ? Qui a inventé la taxe sur les complémentaires santé ?
Cette taxe, ce n'est pas 40 ni même 100 millions, c'est deux années consécutives à 1,2 milliard par an, c'est-à-dire 2,4 milliards en année pleine, après vos deux dernières augmentations, sur les personnes qui paient la complémentaire santé.
Je conclus, madame la présidente.
Vous avez compris tout le mal que nous pensions de ce texte. Il existait d'autres façons de faire, que nous avons proposées en loi de finances ou à l'occasion des collectifs. Nous en proposerons de nouveau quelques-unes aujourd'hui.
Mais ma dernière question s'adresse à vous, madame la ministre.
La dernière fois que nous nous sommes vus, je vous ai demandé s'il y aurait un autre collectif budgétaire. En effet, M. Baroin avait annoncé en commission des finances, le rapporteur général était présent, un collectif budgétaire en janvier ou peut-être en février. Vous m'avez répondu qu'il n'en était pas question. Or j'ai lu dans Le Monde que le soir, au Sénat, vous aviez dit le contraire.
Je n'ai pas dit non.
Il y a quelqu'un qui se trompe. C'est peut-être moi mais je pense avoir plutôt une bonne mémoire.
En tout état de cause, ma question est simple : pourriez-vous avoir la décence, madame la ministre, de nous dire ce qu'il en est exactement.
Je l'ai déjà dit.
J'imagine, nous sommes fin décembre, que vous devez savoir s'il y aura ou non un prochain collectif budgétaire et à quoi il sera consacré : j'ai malheureusement quelques craintes à ce propos. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous examinons le projet de loi de finances rectificative pour 2011, ou plutôt nous examinons la quatrième loi de finances rectificative pour 2011, et ce alors que nous venons d'adopter, en nouvelle lecture, le projet de loi de finances pour 2012. Pour nos concitoyens comme pour un grand nombre de parlementaires, le rythme et la chronologie d'adoption de nos actes de prévision et d'adoption des recettes et dépenses de l'État finit par être, si ce n'est incompréhensible, du moins largement imprévisible.
Je souhaiterais formuler deux observations et une interrogation.
Ma première observation concerne la politique d'équité fiscale qui serait celle du Gouvernement. Ce plan représente, au total, 7 milliards d'euros d'efforts nouveaux pour 2012. Il offre un éventail de mesures qui viseraient, selon le Gouvernement, l'équité entre contribuables.
D'abord, la majoration exceptionnelle de 5 % du montant de l'impôt sur les sociétés. Cette mesure avait été refusée par le Gouvernement au Sénat il y a quelques semaines au motif d'un risque de fragilisation de l'activité économique.
Ensuite, le prélèvement sur les revenus du patrimoine. D'un montant de 600 millions, il n'améliore en rien la progressivité de l'impôt.
Quant au gel du barème de l'impôt sur le revenu, il va toucher les plus petits revenus. Pour sa part, le gel du barème de l'ISF, s'il conduit à augmenter le poids des prélèvements des hauts revenus, aura également pour conséquence de faire passer des foyers fiscaux dans la tranche supérieure d'imposition sans que l'on connaisse les effets précis. De façon plus générale, on constate que, sans indexation, l'impôt sera plus élevé dès lors que le contribuable est imposable. Cet effet sera particulièrement sensible, en proportion, pour les ménages modestes.
Enfin, l'augmentation du taux réduit de la TVA, qui rapportera à peu près 1,9 milliard d'euros en année pleine, correspond grosso modo au coût de la réforme de la baisse du barème de l'ISF votée par la majorité il y a quelques mois.
Parler d'équité dans ces conditions me paraît en décalage avec la réalité. Pour paraphraser Roland Barthes, ces mesures tendent à substituer l'impression de l'équité des contributions à la réalité de la justice fiscale.
Ma seconde observation porte sur l'affirmation répétée du Gouvernement selon laquelle « il n'existe aucune alternative crédible pour réduire nos déficits sans casser la croissance ».
Une analyse attentive de ce deuxième plan de rigueur montre que ce sont moins les dépenses qui baissent que les impôts et taxes qui augmentent. La situation des finances publiques reste pourtant inquiétante. En une décennie, la dette publique aura doublé, passant de 900 millions à l'été 2002 à 1 800 millions d'euros à l'été 2012.
Mais la cause n'est pas à rechercher dans la seule conjoncture, comme l'a très bien montré Pierre-Alain Muet lors de la discussion du projet de loi de finances initiale pour 2012. Elle réside dans les choix faits sous ces deux derniers quinquennats. Si la France se retrouve aujourd'hui dans une telle situation, c'est qu'elle n'a pas profité de la période de croissance qui a précédé la crise pour réduire ses déficits. Au contraire, elle les a même laissé dériver.
Vous ne pouvez pas dire ça ! Qu'a fait Jospin en 1997 ? Il a fait des économies sur la croissance.
Cette idée de faire des économies pendant les périodes de croissance est une vieille idée que l'on retrouve dans des textes sacrés. Je ne suis pas du genre à citer les textes des grandes religions mais je ne résiste pas à la tentation de vous rappeler l'histoire du pharaon qui fait un rêve de sept vaches grasses suivies de sept vaches maigres. Ce faisant, le gouvernement allait garantir des ressources pour des mauvaises années à venir. En effet, dans les sept années de vaches maigres où l'offre agricole diminua par rapport à la demande, le gouvernement de l'époque put vendre les produits agricoles excédentaires stockés. Au cours des quatorze années, les ressources furent d'abord stockées puis utilisées en période difficile. La Bible indique que cette politique fut un énorme succès.
Seulement, la France, aujourd'hui, fait le contraire. Elle a distribué sans compter au temps des vaches grasses. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Le Conseil des prélèvements obligatoires n'a-t-il pas repéré plus de 500 mesures dérogatoires fiscales et sociales dont un rapport de l'IGF a montré qu'elles étaient improductives pour la moitié d'entre elles, soit 50 milliards d'euros de dépenses fiscales et sociales ni justes ni efficaces ?
Aujourd'hui, en période de vaches maigres, vous choisissez de faire payer le prix de cette insouciance aux plus modestes.
Enfin, je voudrais formuler une interrogation sur les conséquences du nouvel accord européen.
Je ne reviendrai pas sur l'ensemble des éléments mais je souhaite quand même rappeler ici que ce que l'on appelait précédemment plan d'austérité, prévoyait moins de 3 % de déficit et moins de 60 % de PIB de dettes et était lié à un autre facteur : un objectif de croissance à 3 %. Aujourd'hui, les politiques d'investissements qui permettraient de retrouver ces 3 % ne sont pas là. Quelles sont vos propositions d'investissements ? Malheureusement, elles font défaut et les déficits s'aggravent sans cesse. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je veux d'abord remercier l'ensemble des orateurs qui viennent de s'exprimer et tout particulièrement votre rapporteur général, Gilles Carrez, qui a parfaitement remis en perspective ce projet de loi de finances rectificative qui vient parachever cette session budgétaire.
Une seule et même stratégie traverse en effet l'ensemble des textes financiers qui ont été soumis à votre examen au cours des derniers mois. Cette stratégie repose sur deux piliers.
Le premier, c'est la priorité absolue donnée aux économies sur les dépenses. Ce collectif en est la preuve, puisqu'il marque une baisse historique de 200 millions d'euros des dépenses de l'État. Pour la première fois depuis 1945, en 2011 les dépenses baisseront d'une année sur l'autre et, vous le savez, nous poursuivrons ces efforts avec une baisse de 1,5 milliard des dépenses de l'État et un objectif national de progression des dépenses maladie fixé à 2,5 % seulement.
Le second pilier de notre stratégie, c'est le recours à des prélèvements ciblés répartis dans un esprit d'équité. M. Jean-Pierre Brard, qui aime les bons auteurs, aurait dû écouter plus attentivement les propos du rapporteur général. Celui-ci a clairement dit que ces recettes sont « conçues dans un souci de justice fiscale pour protéger les plus vulnérables et demander un effort aux plus aisés ». Citez les bons auteurs, monsieur Brard, citez Gilles Carrez.
Si Christian Jacob est prix Nobel, Gilles Carrez mérite bien une mention… (Sourires.)
Preuve de cette justice fiscale, la majoration exceptionnelle de l'impôt sur les sociétés, qui pèsera sur les seules entreprises dont le chiffre d'affaires dépasse 250 millions d'euros.
Je pense également au gel des barèmes de l'impôt sur le revenu, de l'impôt de solidarité sur la fortune et des droits de succession et donation. Je le dis à Marietta Karamanli comme à Christian Eckert, par définition, ces mesures pèseront pour l'essentiel sur les Français les plus aisés : à prélèvements progressifs, effets progressifs. C'est 10 % des foyers qui paient 70 % de l'impôt sur le revenu. Les personnes vont changer de tranche : de cela, vous ne parlez pas !
Vous ne parlez pas de tous ceux qui vont passer à la dernière tranche de revenus avec le gel du barème. Vous ne vous focalisez que sur l'entrée de nouveaux foyers dans l'impôt sur le revenu, et vous ne parlez pas de ceux qui le paient déjà : seize millions de foyers sur trente-six. Les effets pèseront donc plus sur les foyers aisés, c'est évident.
Je pense enfin au nouveau taux réduit de TVA de 7 % dont, je le rappelle une fois encore à Jean-Pierre Brard, nous avons exclu les produits de première nécessité : l'alimentation, l'énergie, mais aussi les cantines scolaires à l'initiative de votre assemblée.
Tous ces efforts, qui reposent d'abord sur les économies en dépenses, permettront à la France d'avancer sur le chemin du désendettement.
J'entends le souci des parlementaires du Nouveau Centre de voir la France revenir au plus vite à l'équilibre. Mais, comme l'ont rappelé le FMI et l'OCDE, le Gouvernement a su trouver, au cours des derniers mois, le bon équilibre entre la nécessaire réduction des déficits et l'indispensable soutien à la croissance.
C'est pourquoi, comme l'a rappelé Yves Censi, nous devons continuer sur la même trajectoire avec des efforts bien dosés.
S'agissant du FACE, nous aurons l'occasion d'y revenir dans quelques instants et je vous apporterai bien entendu tous les éclaircissements que vous souhaitez mais je peux d'ores et déjà vous confirmer que les taux d'aide sur les montants toutes taxes comprises seront de 65 % en France continentale.
Permettez-moi également de souligner que le travail réalisé avec l'ensemble des parlementaires pour budgétiser le FACE est un exemple très concret de l'esprit de coresponsabilité qui nous a animés tout au long de ces travaux. Et je pourrais citer le très bon accord que nous avons trouvé, dans le projet de loi de finances rectificative, sur les modalités de la péréquation communale.
Tout à fait.
Monsieur Eckert, à propos du collectif, je vous demande de m'excuser mais je vais me répéter parce que j'ai déjà répondu à cette question la semaine dernière. Ce que vous a dit François Baroin, c'est que pour mettre en oeuvre l'accord de Bruxelles, un collectif budgétaire serait nécessaire pour permettre la création du mécanisme européen de stabilité.
Ce collectif budgétaire est nécessaire au premier semestre 2012, ce que j'ai rappelé au Sénat.
Il y aura un collectif au premier semestre 2012, pour mettre en oeuvre le mécanisme européen de stabilité.
Avant le mois de juillet, c'est l'obligation européenne.
Nos collègues et partenaires allemands ont prévu de le voter en juin. Je n'ai à ce jour aucune date à vous donner, aucune date retenue pour un collectif dans les mois qui viennent en 2012.
Je n'ai pas la date, je peux simplement vous dire que nous avons pris l'engagement de présenter ce collectif budgétaire avant juillet pour créer le mécanisme européen de stabilité.
N'essayez pas de me faire dire, ni au Sénat ni à l'Assemblée, ce que je n'ai pas dit. Je n'ai rien dit d'autre que ce que je viens de dire.
Je veux également dire une dernière fois à tous les parlementaires de la majorité et de l'opposition que le Gouvernement est conscient des contraintes qui ont pesé sur eux durant ces derniers mois. Ces contraintes sont liées à des circonstances dont chacun a pu constater qu'elles étaient vraiment exceptionnelles. Mais la qualité de nos débats n'en a pas été affectée. Je sais la charge de travail que cela a représenté pour vous, et je voulais, au nom du Gouvernement, remercier toute la représentation nationale et l'ensemble des administrateurs de la commission des finances pour le travail remarquable qui a été accompli et qui a été, il faut bien le dire, à la hauteur des enjeux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
J'appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles du projet de loi dans les conditions prévues par l'article 114, alinéa 2, du règlement.
Sur l'article 6, je suis saisie d'un amendement n° 15 .
La parole est à M. le rapporteur général.
L'amendement n° 15 vise à rétablir le texte voté par l'Assemblée nationale en première lecture, qui permet de financer les futurs radars pédagogiques.
Favorable.
(L'amendement n° 15 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 6, amendé, est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement, n° 16 , qui tend à supprimer l'article 7.
La parole est à M. le rapporteur général.
Il est proposé de conserver deux apports importants du texte du Sénat concernant le FACE.
Le premier concerne le renforcement de la représentation des collectivités locales. Il est proposé de passer d'un tiers actuellement à deux-cinquièmes de représentants des collectivités territoriales au sein du conseil du FACE.
Par ailleurs, ce point a fait l'objet de nombreuses interventions la semaine dernière ici même, je me souviens en particulier de celle de Jean Proriol, le Sénat a encadré les modalités de la répartition des aides, qui devra être arrêtée « en tenant compte de l'inventaire des besoins recensés tous les deux ans dans chaque département ».
Je vous propose en revanche de supprimer la disposition prévoyant la remise d'un rapport sur la transformation du compte d'affectation spéciale en établissement public. J'estime en effet, et nous étions nombreux de cet avis lorsque nous en avons discuté ici il y a quelques jours, que le compte d'affectation spéciale donne toutes les garanties nécessaires à la représentation nationale. Dès lors qu'il y aura un compte d'affectation spéciale, nous disposerons d'un projet annuel de performances et d'un rapport annuel de performances et nous saurons donc exactement comment le fonds est utilisé, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent puisque le FACE n'avait aucun statut et était « logé » au sein d'EDF, aucun compte n'étant rendu à la représentation nationale. Le compte d'affectation spéciale répond parfaitement aux exigences de la LOLF.
Favorable.
Charles de Courson a posé une question qui me semble assez pertinente.
Nous acceptons l'idée d'un compte d'affectation spéciale, et je pense que c'est très bien, monsieur le rapporteur général. La représentation des élus passe à deux cinquièmes, les taux sont encadrés et l'on a une disparité entre le taux rural et urbain, tout va bien.
La question qui se pose, c'est ce que veut dire le Sénat en parlant du financement d'une partie du coût des travaux. Cela concernant l'avenir du dispositif dans les territoires ruraux, j'aimerais avoir une réponse précise.
La question a été posée en commission des finances. Le Sénat a en effet parlé de financement partiel. En fait, cela renvoie aux précisions qu'a apportées la ministre il y a un instant, à savoir que le taux serait porté à 65 %. Cela veut donc dire que 35 % ne viendront pas du fonds.
Les amendements de l'article 7 en provenance du Sénat ont été adoptés de manière relativement oecuménique, pratiquement tout le monde les ayant votés. Ils complètent de manière satisfaisante pour les autorités concédantes le texte que nous avions adopté à l'Assemblée, qui marquait déjà un grand progrès en resserrant la fourchette des différents taux des contributions.
L'article 7 retient trois principes qu'il nous semble très souhaitable de ne pas remettre en cause dans cette nouvelle lecture. La loi indique les grandes catégories de travaux aidés par le FACE, travaux de développement, d'extension et d'adaptation, de renforcement, de sécurisation et d'enfouissement des réseaux de distribution d'électricité, alors que, dans la première rédaction, elle renvoyait au décret le soin de fixer les catégories de travaux en donnant ainsi un blanc-seing à l'administration pour les choix dans ce domaine. Comme l'a expliqué le rapporteur, on devra tenir compte pour la répartition des aides de l'inventaire des besoins réalisé tous les deux ans auprès des autorités concédantes. Enfin, les établissements publics maîtres d'ouvrage, c'est-à-dire les syndicats d'électrification, doivent détenir au moins deux cinquièmes des sièges au conseil. Sur quinze sièges, nos collectivités en détiennent cinq, cela leur en fera au moins un de plus.
Je vous remercie, monsieur le rapporteur général, de vous être rallié à cette rédaction, à l'élaboration de laquelle vous avez largement contribué au cours de la première lecture.
Il faut supprimer l'alinéa 27. Nous avions eu ce débat avec le Gouvernement en première lecture avec ceux qui hésitaient entre le CAS et l'établissement public. J'ai été étonné de voir que le débat avait repris au Sénat. Le dispositif du CAS est plus protecteur, nous l'avons déjà dit en première lecture.
(L'amendement n° 16 est adopté.)
(L'article 7, amendé, est adopté.)
La semaine dernière, nos collègues du Sénat ont eu la sagesse de supprimer les crédits relatifs au déménagement de RFI des locaux de Radio France.
J'ai le regret de constater que cette majorité, à l'inverse du Sénat, a choisi de réintroduire une mesure fermement combattue par les salariés. Ils sont mobilisés en nombre depuis des mois, et les quinze jours de grève imposés par l'entêtement de leur direction ont été très suivis. Je profite de l'occasion pour saluer leur action, car ils ont raison : un plan social et un déménagement ne constituent pas un projet d'entreprise.
Pendant plusieurs semaines, les membres de la mission sur l'avenir de l'audiovisuel extérieur de la France qui avaient été chargés d'y réfléchir ont été baladés. À ce jour, aucun rapport définitif n'a été soumis à nos collègues, au point qu'il est permis de penser que le sort de RFI avait été décidé avant même le début des travaux de cette mission.
L'avenir de RFI est auprès de Radio France, et non pas dans une fusion avec France 24. Il n'y a donc pas lieu d'organiser un quelconque déménagement, qui serait d'ailleurs une aberration au moins à deux titres. En cette période de disette budgétaire, il conduirait l'État à payer un loyer plus cher à un consortium privé de banques : l'inspection générale des finances a montré que le surcoût serait de 500 millions d'euros par an. Par ailleurs, les salariés ont déjà fait la démonstration magistrale de l'insalubrité des nouveaux locaux, en dépit de leur prix, et de leur inadaptation à leurs besoins professionnels.
L'avenir de RFI n'est pas non plus dans un nouveau plan social. Celui de 2009 s'était soldé par la perte de 206 emplois et il s'agirait aujourd'hui d'en supprimer 126 autres.
On voit bien qu'il s'agit de supprimer cette voix de la France qui est tellement appréciée à l'extérieur. Peut-être est-elle trop libre au regard du Palais !
C'est un amendement essentiellement technique qui vise à rétablir l'équilibre budgétaire adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, sous réserve du maintien de l'ajustement de la prévision de dotation de garantie de reversement des fonds départementaux de taxe professionnelle voté par le Sénat, avec une majoration de 6,7 millions d'euros.
Cet amendement tire les conséquences du rétablissement des crédits pour les futurs radars pédagogiques et rétablit le plafond de dépenses adopté en première lecture.
Il sera effectivement proposé de majorer de 45 millions les ouvertures de crédits relatifs à l'action audiovisuelle extérieure. Vous savez bien, monsieur Brard, que la fusion est indispensable si l'on veut maîtriser les dépenses de notre audiovisuel extérieur. Je pense au contraire que c'est une réforme intelligente, qui doit être conduite avec tout le doigté nécessaire.
Je trouve vraiment regrettable que Gilles Carrez ne fasse pas mention de ce qu'il a été obligé d'avouer dans son rapport : à propos de l'article 8, on peut y lire qu'à l'issue de l'examen du projet par le Sénat, le solde de l'État ressort en légère amélioration par rapport au texte voté par l'Assemblée nationale.
Il est dommage que vous renonciez à cette légère amélioration. Les recettes non fiscales, notamment, ont été revues à la hausse au Sénat, 18 millions d'euros étant affectés au désendettement. Vous avez décidé de mettre ces 18 millions dans des radars pédagogiques qui n'auront de pédagogiques que le nom alors que nous avions la possibilité de faire immédiatement une économie. Je regrette que le Gouvernement ait déposé un amendement de cette nature.
Je vous remercie, madame la ministre, des inscriptions complémentaires qui ont eu lieu au Sénat pour les fonds départementaux de taxe professionnelle. Ces crédits sont d'autant plus les bienvenus qu'ils pourront être reversés à des petites communes défavorisées conformément aux engagements pris lors de la réforme de la taxe professionnelle.
Le rapporteur général, à propos de RFI et de France 24, a expliqué qu'il s'agissait de maîtriser les dépenses, mais on sait bien que, dans l'esprit du Président de la République, maîtriser a un autre sens : c'est la muselière.
Vous le savez comme moi, RFI est très écoutée, notamment en Afrique, et a une voix libre, ce qui déplaît foncièrement aux tyranneaux de certains pays de la Françafrique qui sont souvent intervenus auprès du Gouvernement français, pour qui il faut donc mettre un terme à cette situation insupportable.
Or, la France, normalement, c'est la voix de la liberté pour tous ceux qui en sont privés, y compris dans ces pays. Quand RFI relate ce qui s'y passe, c'est autre chose que les informations données par TF1, par exemple, ou par d'autres radios plus ou moins officielles.
(L'amendement n° 70 est adopté.)
En conséquence, l'amendement n° 17 de la commission tombe.
(L'article 8 et l'état A, modifiés, sont adoptés.)
(L'ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2011 est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 18 .
La parole est à M. le rapporteur général.
Il s'agit de rétablir les 44,8 millions d'euros nécessaires au déménagement de RFI et de Monte Carlo Doualiya, qui se décomposent en 20 millions pour le volet immobilier et 24 millions au titre du plan social.
(L'amendement n° 18 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 9 et l'état B, modifiés, sont adoptés.)
Mes chers collègues, plusieurs sous-amendements venant d'être déposés sur l'article 11 du projet de loi, la discussion de celui-ci ainsi que celle de l'amendement n° 79 portant article additionnel après l'article 11 sont réservées en application de l'article 95 de notre règlement.
L'article 11 bis ne fait l'objet d'aucun amendement. Je le mets aux voix.
(L'article 11 bis est adopté.)
Madame la présidente, avec tout le respect que je vous dois, vous nous avez annoncé que la discussion de l'article 11 était réservée et vous ne nous avez même pas laissé le temps de voir de quoi traitait l'article 11 bis. Nous sommes tous d'accord pour aller vite mais nous nous attendions à discuter de l'article 11.
Puisque vous êtes passée directement à l'article 11 bis, nous aurions aimé avoir quand même un peu de temps pour en prendre connaissance. Avec tout le respect que nous vous devons encore une fois, nous apprécierions que les débats soient menés moins vivement lorsque survient une modification de cette nature.
Bien volontiers, monsieur Eckert. Je fais toutefois observer que vous devez avoir connaissance de la plus grande partie des sous-amendements à l'article 11 que j'ai mentionnés, car c'est votre groupe qui vient de les déposer.
Je rappelle par ailleurs qu'il n'est pas possible de s'inscrire sur un article qui a été supprimé par le Sénat.
Je suis saisie de deux amendements, nos 20 et 80 qui tendent à rétablir l'article 12 et qui peuvent être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. le rapporteur général.
L'amendement n° 20 rétablit la non-indexation du barème de l'impôt sur le revenu au titre des revenus de 2011 et de 2012, qui donneront lieu à impôt en 2012 et 2013. De plus, sont automatiquement liées aux revalorisations de l'impôt sur le revenu, au titre de la première tranche, celles de l'ISF et des droits de mutation à titre gracieux.
Néanmoins, l'amendement n° 20 qui a le même objet assurant une meilleure coordination avec le code des impôts, je retire l'amendement n° 80 à son profit.
Notre position n'est pas facile, reconnaissez-le. Il ne nous est pas possible de nous inscrire sur un article qui a été supprimé, c'est logique. Mais le rapporteur général défend un amendement qui « pèse » 1,7 milliard, concerne tous les assujettis à l'impôt sur le revenu et rend 200 000 foyers fiscaux imposables. Ce n'est pas anodin ! Et tout cela se fait en quelques secondes. Il faut être très complaisant pour accepter de telles méthodes de travail.
Quant à nos sous-amendements sur l'article 11, madame la présidente, ils ont été déposés il y a une heure. J'en connais le détail. Nous sommes tous conscients de la gravité de la situation financière dans laquelle dix ans de pouvoir de la droite nous ont conduits, nous sommes tous responsables et nous acceptions de nous livrer à cet exercice selon une méthode plutôt délicate. Cela étant, il ne faut pas exagérer.
(L'amendement n° 20 est retiré.)
(L'amendement n° 80 est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° 21 .
Cet amendement supprime l'article du Sénat pour revenir au texte de l'Assemblée en ce qui concerne l'aide pour les travaux à réaliser sur des logements situés dans des zones soumises à un plan de prévention des risques technologiques, à savoir un doublement du plafond antérieur avec maintien d'un taux de 30 % non soumis au coup de rabot.
Très bien !
(L'amendement n° 21 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° 22 .
Cet amendement de suppression de l'article tend à revenir au dispositif de l'Assemblée en ce qui concerne le plafonnement global des niches fiscales.
Favorable.
Le plafonnement porte sur une partie fixe et une partie variable. Je souligne que l'on a abaissé cette dernière de 6 % à 4 %, après être passé de 8 % à 6 % : en deux ans, on a divisé ce taux par deux, et pour la justice fiscale, il importe beaucoup plus de diminuer le taux proportionnel que de diminuer le montant fixe.
Vous êtes bien bon, monsieur de Courson, mais passer de 18 000 euros et 8 % à 18 000 euros et 4 %, ce n'est pas diviser le plafond par deux ! On a divisé par deux la part variable qui s'ajoute à un plafond d'un montant considérable de 18 000 euros.
D'autre part, je rappelle que le plafonnement ne porte pas sur toutes les niches, comme certains se plaisent à le proclamer à grand renfort de tambours.
Le rapporteur général, lui, a l'humilité de le reconnaître. Le plafonnement des niches, c'est 22 milliards, et le coup de rabot, 3,5 milliards.
C'est pourquoi les sénateurs ont abaissé le plafond de la part fixe à 10 000 euros. C'est déjà un gain d'impôt considérable.
Pour ce type d'emploi, ce ne sont certainement pas les personnes âgées dépendantes les plus fragiles qui atteignent le plafond.
(L'amendement n° 22 est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° 23 .
Cet amendement de suppression permet de revenir au texte voté par l'Assemblée.
Favorable.
Nous ne cesserons de rappeler le coût pour les finances publiques de la défiscalisation des heures supplémentaires : 4,5 milliards d'euros. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) L'Allemagne, que vous citez si souvent, a dépensé la même somme pour financer du chômage partiel et conserver des emplois. C'est cela qui fait la différence entre le taux de chômage en France et le taux de chômage en Allemagne ! Vous obstiner à maintenir cette défiscalisation des heures supplémentaires dans un projet de loi de finances rectificative en refusant d'entendre ce que vous disent les parlementaires socialistes, ainsi que ceux du groupe GDR, c'est irresponsable, compte tenu de la situation des finances publiques.
Ce débat, nous l'avons à chaque fois. Chère collègue, je vous en prie, un peu de modération. La défiscalisation avait deux objectifs, l'un économique, l'autre social. Atteindre l'objectif économique supposait que la croissance soit soutenue. Un an après l'entrée en vigueur de la mesure, ce n'a plus été le cas ; dont acte. Mais vous oubliez l'aspect social. Si l'on vous suivait, des millions de travailleurs modestes verraient leur salaire amputé…
Bien sûr que si. Qui bénéfice de cette exonération ? Pas les cadres supérieurs. Ce sont des travailleurs de l'industrie, des travailleurs du bâtiment…
…qui font des heures supplémentaires. C'est antisocial que de vouloir abroger cette disposition.
D'abord, ce ne sont pas des millions de salariés de l'industrie et du secteur privé qui bénéficient de ces heures supplémentaires défiscalisées : Malheureusement, il n'y a pas eu beaucoup plus d'heures supplémentaires, en raison de la situation économique. En revanche, des milliers et des milliers de demandeurs d'emploi restent au chômage à cause de cette mesure.
Pour ce qui est de protéger le pouvoir d'achat des salariés qui ont un emploi, nous avons beaucoup de propositions. Mais vous les refusez systématiquement.
Quand M. de Courson parle des travailleurs, il y a vraiment de quoi mourir de rire. Il parle d'une espèce qu'il ne connaît pas, sauf peut-être de façon livresque, et encore. (Protestations sur quelques bancs du groupe UMP.)
Mais il y a une façon très simple de ne pas encourir le risque qu'évoque, de façon toute théorique, M. de Courson. C'est d'augmenter les salaires. Ainsi, vous faites repartir la machine économique. C'est le b-a-ba de l'économie politique. Mais vous êtes dans l'aveuglement idéologique.
Ainsi, Mme Lagarde disait du haut de cette tribune que le développement économique tenait dans la finance. Ce qui prouve que Mme Lagarde, avec tout le respect et la sympathie que l'on peut avoir pour elle, n'a jamais rien compris à l'économie. Je lui avais d'ailleurs remis un exemplaire du Livre II du Capital pour parfaire sa formation, tant elle était lacunaire.
Je demanderai à nos collègues de l'opposition de faire preuve d'un peu de retenue sur cette question. Se mettre en colère ne suffit pas pour avoir raison. Parmi les nombreux Français qui bénéficient de l'exonération sur les heures supplémentaires, il y a un certain nombre de fonctionnaires de l'État et des collectivités locales, en particulier des enseignants…
…qui, grâce à ces mesures, connaissent depuis 2007 une amélioration de leur pouvoir d'achat. Mais vous n'en tenez pas compte, vous continuez à caricaturer. Un peu de retenue ! En tout cas, les enseignants auront noté que c'est une députée socialiste qui remet en cause cette disposition dont ils bénéficient et dont ils sont tout à fait satisfaits.
Dire que je ne connais pas le milieu ouvrier, comme l'a fait M. Brard, c'est prouver combien on connaît mal ma vie et ce que j'ai pu faire.
Absolument. Si tu veux le savoir, chez Citroën, à la chaîne, et aussi à l'usine de shampoing de Loréal à Aulnay, si tu connais. Alors, ne juge pas les gens sans connaître leur passé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je voudrais rappeler à Mme Mazetier et à M. Brard que la défiscalisation des heures supplémentaires est la seule mesure qui a eu un impact direct sur le pouvoir d'achat, car l'exonération portait aussi sur les cotisations salariales. Mais cela, vous oubliez toujours de le mentionner. Quand une majorité de gauche a mis en place des exonérations, c'était toujours sur les seules charges patronales. À aucun moment vous ne vous êtes préoccupés de l'impact possible sur les salaires. Nous, nous l'avons fait. Or vous connaissez sûrement l'écart entre salaire brut et salaire net, monsieur Brard : il est de 22 %.
Ce débat revient sans cesse en effet, mais il est important et il y a une vraie différence entre nous.
M. Geoffroy a mentionné que les enseignants et autres fonctionnaires étaient bénéficiaires de ce dispositif. Il a raison, on ne le souligne pas assez. Mais la question n'est pas là. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Vous avez fait le choix de geler les salaires des fonctionnaires...
Pas du tout !
..en tout cas du point d'indice salarial des fonctionnaires, notamment des enseignants, ce qui a pour conséquence une aggravation des inégalités.
Si les professeurs de classes préparatoires aux grandes écoles ont très largement bénéficié de votre mesure – ils sont tous agrégés et assurent tous des heures supplémentaires –, les jeunes enseignants, en revanche, de même d'ailleurs que l'enseignant lambda – ce qui dans la bouche de l'ancien enseignant que je suis n'a rien de péjoratif – n'ont pas bénéficié de cette mesure, ou alors dans des proportions extrêmement modestes.
Si vous aviez choisi de jouer sur le point d'indice des fonctionnaires, l'effet eût été tout autre. Mais vous avez fait un vrai choix politique.
Mes chers collègues socialistes, continuez, je vous en prie, ce débat : il est excellent pour nous ! Vous êtes en train de vous aliéner le monde ouvrier comme vous l'avez fait lors du débat sur les trente-cinq heures, en commettant les mêmes erreurs : vous conservez toujours l'idée que le travail est un gâteau que l'on partage et que ce qui est retiré à l'un est donné à l'autre. C'est une vue erronée de croire que donner des heures supplémentaires aux uns équivaut à retirer du travail aux autres, car le monde du travail est hétérogène : il est par exemple des métiers pour lesquels les employeurs ne trouvent pas de salariés. C'est pour cette raison qu'il faut des heures supplémentaires. C'est ainsi que nombre d'ouvriers du secteur agroalimentaire font des heures supplémentaires, comme quasiment tous les salariés du transport.
Que les députés socialistes poursuivent donc ce débat : c'est pour nous du pétrole que de relayer leur message dans nos circonscriptions ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
L'article 12 quater ne fait l'objet d'aucun amendement. Je le mets aux voix.
(L'article 12 quater est adopté.)
Nous revenons à l'article 11 précédemment réservé.
Je vous rappelle qu'il n'y a pas d'inscription d'orateurs possible sur cet article puisqu'il a été supprimé par le Sénat.
Je suis saisie de sept amendements, nos 19 , 5 , 4 rectifié , 1 , 6 , 7 et 8 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° 19 , lequel fait l'objet de plusieurs sous-amendements.
Cet amendement de la commission des finances rétablit le texte de l'Assemblée, avec toutefois, madame la ministre, deux modifications.
La première concerne la mise en place du délai d'application du taux réduit de TVA pour le livre. Après un long débat en commission, nous avons estimé qu'il fallait retenir un délai non de deux mois, comme le proposent le rapport Racine et le Gouvernement, mais de trois mois. Nous nous sommes notamment rangés à l'argument selon lequel, la clôture des comptes se fait, dans nombre de librairies au 31 mars.
La seconde modification a trait aux travaux dans les logements. Vous vous souvenez sans doute que Charles de Courson avait, à juste titre, soulevé le problème des devis destinés aux particuliers qui, après vérification, sont établis TTC. Si l'on ne prévoit pas de dispositions transitoires, l'entreprise aura donc à supporter le différentiel de taux entre 5,5 et 7 %. C'est pourquoi la commission des finances propose que le taux de 5,5 % soit maintenu, dès lors que non seulement le devis aura été signé avant le 20 décembre, mais que, de surcroît, un acompte aura été encaissé par l'entreprise.
Lors de la discussion en première lecture, nous avions imaginé un dispositif s'articulant, avant l'annonce du Premier ministre, le 7 novembre, autour de deux dates : celle de la signature du devis, et celle du paiement de l'acompte, avant la fin de l'année. Il nous paraît plus simple de ne retenir que la seule date du 20 décembre, avant laquelle le devis doit avoir été signé et l'acompte payé.
J'évoquerai un dernier point qui concerne le logement social. La commission a, sur ce point, examiné un amendement déposé par François Scellier, mais comme il traitait d'autres sujets, notamment de la TVA sur les produits alimentaires, nous n'avons pu l'adopter.
Si l'Assemblée suit la commission des finances, il resterait donc à résoudre les questions liées au logement social et aux produits alimentaires, toutes questions, je l'avoue, assez difficiles à régler. C'est d'ailleurs pourquoi nous n'avons pu prendre en compte les amendements, notamment de Louis Giscard d'Estaing, déposés en la matière.
L'amendement de la commission des finances ne porte donc, je le répète, que sur deux sujets : le livre et les travaux réalisés dans les logements.
La parole est à M. Charles de Courson, pour défendre l'amendement n° 5 .
L'amendement n° 5 concerne plus particulièrement les transports scolaires – qui sont une compétence des conseils généraux – afin de maintenir en leur faveur le taux réduit de TVA de 5,5 %.
Le Gouvernement a estimé le coût de cet amendement entre 20 à 30 millions d'euros. En d'autres termes, cela signifie que l'augmentation à 7,7 % du taux représente pour l'État une recette supplémentaire de 30 millions, mais, pour les conseils généraux, un accroissement équivalent de leurs charges, ce qui ne me semble pas très convenable.
La parole est à M. Marc Le Fur, pour défendre l'amendement n° 4 rectifié .
Cet amendement se décline également sous la forme d'un sous-amendement que nous retrouverons par la suite. Il concerne le bois de chauffage.
Qu'il me soit d'abord permis de saluer l'initiative de notre rapporteur général concernant le livre, qui nous permet de parvenir à une solution satisfaisante pour les libraires : ceux-ci se trouvaient, compte tenu de l'importance de leurs stocks et de la faiblesse de leurs revenus, dans une situation très compliquée. Monsieur le rapporteur général, ce que l'on a réussi pour le livre, nous devrions également le réussir pour le bois !
Il faut en effet traiter de manière équitable toutes les énergies : gaz, électricité, fuel et bois, ce dernier n'ayant aucune raison d'être défavorisé, d'autant qu'il est souvent utilisé par les plus modestes, en particulier dans le monde rural.
Le bois est par ailleurs l'une des sources d'énergie que nous devons privilégier pour des raisons environnementales et parce qu'il s'agit d'une ressource nationale.
Nous souhaitons donc maintenir à 5,5 % le taux réduit de TVA sur le bois de chauffage, contrairement aux propositions du Gouvernement et de la commission qui souhaitent le porter à 7 %.
On me rétorquera que la comparaison avec le gaz et l'électricité ne tient pas, dans la mesure où, pour l'un et l'autre, il existe une TVA à 5,5 % sur les abonnements et une TVA à 19,6 % sur la consommation. Certes, mais je compte sur votre attention et votre bienveillance, madame la ministre, monsieur le rapporteur général, pour trouver une formule qui soit raisonnable et permette de traiter la consommation énergétique peu ou prou comme la consommation alimentaire, c'est-à-dire au taux le plus favorable.
La parole est à M. Patrice Martin-Lalande, pour défendre l'amendement n° 1 .
J'ai déposé cet amendement avec Hervé Gaymard, Michel Herbillon, Christian Kert et Franck Riester. Il s'agit de faire bénéficier un nombre limité de services de presse en ligne du taux réduit de TVA appliqué à la presse imprimée. L'effondrement de plusieurs titres de cette dernière souligne en effet la nécessité de permettre sa mutation vers la presse en ligne.
Certes, une redéfinition de la TVA sur les services en ligne est prévue par l'Union européenne en 2015, mais il nous semble qu'attendre encore trois ans serait préjudiciable à la presse française. Il faut avancer sur la presse en ligne comme nous l'avons fait sur le livre numérique, d'autant qu'avec l'usage des tablettes qui se multiplie, ce qui n'était encore qu'une vue de l'esprit il y a quelques années est devenu une réalité. La presse se consomme aujourd'hui en ligne, comme en témoignent certains abonnements qui proposent conjointement une version imprimée et une version en ligne. Ne retardons donc pas ces mutations indispensables au pluralisme de la presse française. Nous ne pouvons pas attendre 2015.
La parole est à M. Charles de Courson, pour défendre l'amendement n° 6 .
L'amendement n° 6 est un amendement un peu technique. Il faut en effet savoir que parmi les produits agricoles non transformés, certains sont susceptibles d'entrer dans la composition d'un produit destiné à l'alimentation humaine et d'autres pas. Or, pour les premiers, le taux resterait à 5,5 % et, pour les seconds, le taux passerait à 7 %. C'est d'une extrême complexité, car un même produit peut avoir une double utilisation selon qu'il est destiné ou non à l'alimentation humaine. Comment voulez-vous qu'un agriculteur qui, par exemple, produit du blé, distingue dans sa livraison le blé destiné à entrer dans la composition d'un produit destiné à l'alimentation humaine de celui qui ne l'est pas ? Nous allons au-devant de contentieux et de contrôles sans fin ! C'est pourquoi nous proposons de maintenir un unique taux de TVA à 5,5 %.
L'amendement n° 7 , qui concerne le livre, est satisfait par l'amendement n° 19 , puisque, ainsi que l'a indiqué le rapporteur général, la commission a accepté de prolonger le maintien du taux de TVA à 5,5 % jusqu'au 1er avril 2012, portant ainsi le délai de ce maintien de deux à trois mois. Je retire donc l'amendement n° 7 au profit de l'amendement n° 19 .
(L'amendement n° 7 est retiré.)
Suite à une discussion que nous avons eue en commission, l'amendement n° 8 a été repris par le rapporteur général. Toutefois, il me semble que ce dernier devrait vérifier la rédaction de son amendement sur ce point, car je ne suis pas certain que le mot : « encaissé », employé au sujet de l'acompte, soit le bon.
J'entends bien, mais « réglé » me paraîtrait préférable, car on peut régler en espèces, par chèque ou par virement, alors qu'on n'encaisse que des espèces, me semble-t-il. Par ailleurs, j'aurais souhaité que l'on parle de « date d'émission », plutôt que de « date d'encaissement », afin de tenir compte d'éventuels délais qui ne sont pas maîtrisables. Néanmoins, si le rapporteur confirme que sa rédaction convient, je retirerai l'amendement n° 8 .
Divers sous-amendements portent sur le taux de TVA s'appliquant à certains produits alimentaires. Celui-ci vise à admettre les produits de confiserie artisanale et régionale au taux réduit de 7 %.
Je fais un bref rappel historique, pour ceux de nos collègues qui n'ont pas suivi les feuilletons précédents. Les produits de confiserie artisanale sont, aujourd'hui, au taux de 19,6 %, alors que d'autres produits de confiserie, notamment une partie de ceux qui sont confectionnés à base de chocolat ou de cacao, sont au taux réduit de 5,5 %. Je propose donc d'harmoniser les taux de TVA sur l'ensemble de ces produits, en abaissant de 19,6 % à 7 % le taux applicable aux premiers et en portant de 5,5 % à 7 % celui applicable aux seconds. En effet, actuellement, les produits de confiserie artisanale sont les plus pénalisés par les différences de taux, alors qu'en tant que produits alimentaires, ils auraient dû se voir appliquer un taux de 5,5 %.
Eu égard à la diversité des sujets traités et au nombre de sous-amendements en discussion, il me semble préférable de demander tout d'abord l'avis du Gouvernement et de la commission sur l'ensemble des amendements en discussion ; cette méthode me paraît de nature à clarifier nos débats.
La parole est à M. le rapporteur général.
S'agissant des transports scolaires, le refus de l'amendement n° 5 par la commission est lié à des considérations budgétaires. Certes, il ne s'agit que d'une trentaine de millions d'euros, mais nous avons accepté de faire un effort exclusivement pour les cantines scolaires. Lorsque nous avons eu cette discussion la semaine dernière, les choses ont été clairement dites par la ministre et je m'en suis tenu, en commission des finances, à la position qu'elle avait exprimée.
En ce qui concerne l'amendement n° 4 rectifié , qui porte sur le bois de chauffage, il a été décidé, monsieur Le Fur, que seuls les abonnements seraient maintenus au taux de 5,5 %. Vous avez cité l'électricité : l'abonnement à l'électricité demeure au taux de 5,5 %. Si cette électricité est produite à partir de bois, ce dernier bénéficiera du taux de 5,5 %, qui passe à 7 %. En revanche, l'uranium et le fioul seront au taux de 19,6 %. En matière de TVA, le bois bénéficie donc d'un traitement beaucoup plus favorable que les autres sources primaires d'énergie. Encore une fois, seuls les abonnements demeurent au taux de 5,5 %.
Le bois ne sera pas pénalisé puisqu'il va être comparé à ces produits primaires.
J'en viens, monsieur Martin-Lalande, à la question de la presse en ligne, qui fait l'objet de l'amendement n° 1 . Ma réponse sera la même que celle que je vous fais depuis plusieurs années : cette proposition n'est pas eurocompatible.
J'y viens. Il est vrai que, s'agissant du livre, le Gouvernement, tenant compte du travail de persuasion que vous avez accompli avec une très grande ténacité pendant des années, a souhaité faire pression sur la Commission et a pris de façon unilatérale une mesure d'alignement sur le taux réduit.
Toutefois – à moins qu'il ne change d'avis ce soir –, il n'a pas étendu cette mesure à la presse en ligne. Dans ce domaine, nous restons donc, hélas ! sous l'empire de la directive.
S'agissant des produits alimentaires tels que le blé ou le lait, j'ai compris – mais je ne suis pas spécialiste de ces sujets – que le lait destiné à l'alimentation des veaux, par exemple, serait à 7 %, alors que celui qui est destiné à l'alimentation humaine resterait à 5,5 % – sauf, peut-être, s'il s'agit de lait chocolaté et sucré. (Sourires.) Prudemment, la commission des finances a très vite refermé le dossier...
J'en viens ainsi, si vous le permettez, madame la présidente, au sous-amendement n° 72 de notre collègue Louis Giscard d'Estaing. Nous savons depuis longtemps que des confiseries telles que le nougat de Montélimar, les bêtises de Cambrai ou les anis de Flavigny sont – et ce n'est pas juste – à 19,6 %, alors que certains produits chocolatés, notamment ceux dont la teneur en cacao dépasse un certain taux, sont à 5,5 % – mais, là encore, je ne suis pas spécialiste de ces sujets. Autrement dit, si ça fond rapidement dans la bouche, c'est à 5,5 %, mais si ça fond difficilement, ça passe à 19,6 %. De même, les produits qui peuvent être mis dans la bouche en une seule fois sont à 5,5 %, alors que ceux qui nécessitent plusieurs bouchées sont à 19,6 %. (Sourires.) Vous voyez combien le sujet est complexe.
Peut-être ne vous en souvenez-vous pas, madame la ministre, mais, il y a trois ou quatre ans, Louis Giscard d'Estaing avait si bien plaidé la cause du chocolat...
C'est vrai.
…que nous avions abaissé à 5,5 % le taux de TVA applicable à toute une catégorie de produits, pour un montant d'une trentaine de millions d'euros. Aujourd'hui, il souhaiterait harmoniser les taux de TVA applicables à tous les produits de confiserie, arguant que les hausses compenseront les baisses. Mais comment une baisse de 19,6 % à 7 % pourrait-elle être compensée par une hausse de 5,5 % à 7 % ? A mon avis, la perte en ligne – c'est le cas de le dire – serait assez importante. Sur le sous-amendement n° 72 , je donnerai donc un avis défavorable.
Pouvez-vous nous donner également l'avis de la commission sur l'amendement n° 8 , monsieur le rapporteur général.
Mesdames, messieurs les députés, je souhaiterais, au nom du Gouvernement, vous mettre en garde contre la désorganisation de nos débats. En première lecture, la sagesse de l'Assemblée a été de soutenir la proposition du Gouvernement de porter le taux réduit de TVA à 7 %. Nous avons eu des débats sur ce qu'est un produit de première nécessité.
Guy Geoffroy, que je salue, a ainsi défendu avec beaucoup de panache la taxe sur les ordures ménagères, M. Eckert l'assainissement : nous avons parlé de tout. Mais un service public est forcément de nécessité publique ; sinon, ce ne serait pas un service public.
La définition du produit de première nécessité doit donc être très précisément circonscrite. Si nous abandonnons ce principe, nous ouvrons la porte à tous les débats. Et, dans ce cas, en effet, pourquoi pas le bois, la confiserie, la presse en ligne ou les transports scolaires ?
Là n'est pas la question, monsieur de Courson : l'assainissement et l'enlèvement des ordures ménagères aussi peuvent être obligatoires !
Il faut, monsieur de Courson, que vous restiez fidèle à la philosophie que vous avez acceptée et défendue en première lecture et qui nous a permis d'aboutir à un texte cohérent. Le taux réduit de TVA est aujourd'hui de 7 %.
J'émets donc un avis défavorable sur l'amendement concernant le transport scolaire. Objectivement, monsieur de Courson, je ne vois pas pourquoi il faudrait exclure le transport scolaire et pas les ordures ménagères, l'assainissement ou le transport urbain.
Et alors ? Combien de services publics se verront appliquer un taux de TVA à 7 % ? Que dire du portage des repas à domicile, qui fait l'objet d'un autre sous-amendement, ou les services à domicile pour les personnes âgées ?
Vous savez bien qu'il y aura, en outre, une différence entre les enfants des villes, qui emprunteront les transports urbains, assujettis à un taux de 7 %, et les enfants ruraux, qui emprunteront les transports scolaires assujettis à un taux de 5,5 %. Monsieur de Courson, notre dialogue est palpitant, mais sachez que, par cohérence – j'insiste sur ce point –, l'avis du Gouvernement ne peut être favorable à votre amendement. Sinon, le texte ressemblera à un gruyère à trous.
Concernant le bois de chauffage, Gilles Carrez a très bien répondu, monsieur Le Fur : seuls les abonnements demeurent à 5,5 %.
Eh non, mais les sources d'énergie ne sont pas au taux de 5,5 % ; elles sont en stratégie différenciée. Le bois est, de ce point de vue, privilégié par rapport à d'autres sources d'énergie.
La presse en ligne est un cas plus délicat. M. Martin-Lalande ne manquera pas de faire valoir, comme il l'a très brillamment fait en première lecture, que nous devrions respecter le principe de neutralité technologique. Ce principe, que nous défendons à Bruxelles sur le livre en ligne, devrait en effet nous conduire à prôner le taux de TVA très dérogatoire de la presse écrite, qui est à 2 %, à la presse en ligne.
Le problème, monsieur Martin-Lalande – je vous le dis aussi franchement que l'a fait Gilles Carrez –, est d'abord un problème communautaire. Nous défendons devant le Parlement européen – que nous espérons convaincre, notamment grâce à vous – le principe d'une baisse de la TVA à taux réduit sur le livre numérique. J'estime que nous devons nous concentrer sur ce premier combat, qui constitue un enjeu majeur pour la France, pour la politique du livre et, plus largement, pour la politique culturelle.
J'avoue qu'en première lecture, je n'avais pas vraiment été convaincue par votre amendement. Je considérais que la presse en ligne était avant tout un service et que, dès lors, elle devait se voir appliquer le taux s'appliquant à tous les services numériques en ligne. Depuis, j'ai pris le temps de réfléchir au problème…
…et je reconnais que l'arrivée des nouvelles tablettes numériques, qui permettent de lire un journal strictement identique à celui édité sous forme papier, conforte la position que vous défendez. Néanmoins, il me semble que si l'on veut avancer sur la question des biens culturels à taux réduit au niveau européen, il faut le faire pas à pas, en commençant par défendre notre position sur le livre. Lorsque nous aurons réussi à la faire valoir, nous aborderons la question de la neutralité technologique pour tous les biens culturels et pourrons alors livrer le combat de la presse en ligne, qui me paraît être un combat nécessaire.
Veillons à ne pas nous placer dans une position d'euro-incompatibilité au moment même où nous sommes en passe de gagner sur le livre en ligne. C'est pourquoi je vous avais proposé, en première lecture, d'étendre la mission confiée à Jacques Toubon, qui travaille à Bruxelles sur le livre numérique, en y adjoignant un travail de pédagogie sur la question de la fiscalité de la presse en ligne – question sur laquelle, vous le savez, certains de nos partenaires européens sont vent debout.
Pour ce qui est de l'amendement n° 6 de M. de Courson, relatif aux produits agricoles, nous en avons également déjà débattu en première lecture. Je serai très claire : nous ne pouvons pas exclure tous les produits d'alimentation animale du taux de 7 %.
Ce n'est pas logique. Les produits de première nécessité, correspondant à l'alimentation humaine, sont à 5,5 %, mais les produits d'alimentation animale restent à 7 %. C'est très simple : il suffit de savoir à qui l'on vend et pour quoi faire.
Bien sûr que si : le vendeur sait à qui il vend, et ce que l'acheteur va faire du produit qu'il achète.
La TVA est indiquée sur la facture de l'acheteur, qui sait bien pourquoi il achète le produit, donc à quel taux il l'achète ! C'est pourquoi je considère qu'il faut rejeter cet amendement.
En ce qui concerne l'amendement n° 8 , je suis favorable à la rédaction du rapporteur, qui propose une entrée en vigueur spécifique pour les travaux dans les logements. Je le dis à M. de Courson : prendre en compte la date d'émission du chèque ou du versement serait, à coup sûr, source de contentieux et de fraudes. Un chèque étant valable durant six mois, il est, par exemple, possible de l'antidater. Il nous paraît donc préférable d'en rester à la notion de versement encaissé, qui permet d'éviter les détournements et de sauvegarder les situations acquises, qui peuvent aujourd'hui se trouver fragilisées. De ce point de vue, l'amendement du rapporteur général est un très bon amendement.
Pour ce qui est justement de l'amendement n° 19 , je m'en remettrai à la sagesse de l'Assemblée. Nous avions proposé d'instaurer une période transitoire de deux mois pour les libraires, mais avec son coeur d'or et son goût pour les livres – un secteur qui nous est cher à tous –, le rapporteur a considéré qu'il valait mieux leur laisser trois mois, compte tenu des fêtes de fin d'année.
M. Giscard d'Estaing aura compris, à m'entendre, que je ne suis pas favorable à son sous-amendement n° 72 , même si la cuisinière qui sommeille en moi me porte à dire qu'il n'y a pas que ce qui fond vite dans la bouche qui est à 5,5 %, il y a aussi le chocolat de cuisine…
…un chocolat très utile !
Madame la ministre, vous avez parlé tout à l'heure d'une désorganisation des débats. Je vous rappelle que huit amendements faisaient l'objet d'une discussion commune, qu'ils visent à rétablir l'article 11 supprimé et que, parmi eux, l'amendement n° 19 comporte 18 sous-amendements. Tous ces amendements sont appelés dans l'ordre par la présidence, avec le concours des services de l'Assemblée.
Loin de moi l'idée de mettre en cause la présidence ou les services de l'Assemblée, madame la présidente.
Je voulais simplement souligner qu'il n'est jamais bon de vouloir faire trop de trous dans un gruyère.
À ce sujet, M. de Courson a peut-être aussi travaillé dans une fromagerie ? (Sourires.)
Il faut reconnaître qu'il n'est pas facile de débattre en même temps de plusieurs amendements et sous-amendements. À ce propos, je constate que nous n'avons pas encore évoqué ceux présentés par notre groupe, mais passons.
Au sujet de l'amendement proposant de revenir à 5,5 % sur les transports scolaires, que je soutiens, je m'étonne de l'argument budgétaire invoqué contre cette mesure, à savoir les 30 millions d'euros qu'elle coûterait. Mes chers collègues, vous n'avez pas eu les mêmes scrupules lorsque vous avez diminué l'ISF de 1,8 milliard d'euros il y a quelques mois !
C'est faux !
Comment pouvez-vous, aujourd'hui, renâcler devant 30 millions d'euros pour une disposition de première nécessité ? Et pourquoi refuser de sortir les transports scolaires du taux de 7 %, alors que vous avez accepté de le faire pour les cantines scolaires – ce qui, je m'empresse de le dire, était une très bonne chose : je ne voudrais pas que le souci de cohérence vous pousse à tout remettre à 7 % ! En tout état de cause, votre position est absolument incompréhensible !
Mais non !
Les transports scolaires sont totalement gratuits dans certains départements, partiellement dans d'autres. Dans la situation que l'on connaît, faisons en sorte de ne pas aggraver la charge des départements, surtout que cet argument du coût de 30 millions d'euros ne tient pas !
Je vous remercie de me donner la parole, madame la présidente : c'est la seule occasion dont je dispose de faire rebondir le débat sur le taux à 2,1 % sur la presse en ligne. Je reviendrai sur le livre lorsque j'aurai l'honneur de présenter le sous-amendement n° 88 à notre assemblée.
J'ai pris, dès la première lecture du projet de loi de finances pour 2012, l'initiative d'un amendement visant à ce que la presse en ligne bénéficie du taux super-réduit de 2,1 %, comme la presse imprimée. J'ai ensuite apporté mon soutien à la proposition de notre collègue Patrice Martin-Lalande en première lecture de la loi de finances rectificative pour 2011, dont nous effectuons la deuxième lecture. Ce faisant, j'ai successivement entendu trois réponses de Mme la ministre – la dernière étant celle qu'elle nous a faite il y a quelques instants –, et j'ai ainsi pu constater que son discours, évolutif, était de plus en plus favorable à l'idée d'un taux super-réduit de 2,1 %.
Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis !
L'argument de l'euro-compatibilité me paraît être mis en avant de manière quelque peu hâtive. En réalité, les choses sont assez complexes, d'abord parce que d'autres parlements que le nôtre ont déjà pris des initiatives en ce domaine – notamment le parlement suédois, avec une proposition de résolution. Par ailleurs, comme l'a rappelé Mme la ministre, le principe de neutralité technologique a été solennellement réaffirmé par la Cour de justice de l'Union européenne dans un arrêt Rank du 10 novembre dernier. Enfin, lors du récent Forum d'Avignon, la commissaire européenne en charge de la société numérique a préconisé un taux de TVA à 2,1 % sur la presse en ligne, afin de l'aligner sur la presse imprimée.
Incontestablement, les choses bougent en Europe. La discussion est sans doute beaucoup moins polémique que celle portant sur certains biens culturels, et peut-être eût-il fallu que, dès ce soir, le Parlement français adresse, lui aussi, un signe, forcément bienvenu à un moment où la presse française connaît une crise durable – je pense notamment à France Soir, aux Échos, à la Tribune, à L'Expansion – avec des pertes d'emplois et la disparition d'un certain nombre de titres en version imprimée. Je le répète, pourquoi ne pas franchir le pas dès ce soir, notamment en votant l'amendement n° 1 ?
(Le sous-amendement n° 72 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un sous-amendement n° 95 .
La parole est à Mme la ministre, pour le soutenir.
Les sous-amendements nos 95 et 96 sont relatifs aux produits antiparasitaires. En application du d) du 5° de l'article 278 bis du code général des impôts, les produits antiparasitaires bénéficient du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée au taux de 5,5 %. Cette mesure réduit le coût de la consommation finale de ces produits par rapport au taux normal et favorise donc leur consommation, qui est pourtant à l'origine de dommages environnementaux.
Le Gouvernement propose d'exclure les produits antiparasitaires du champ d'application du taux réduit de TVA, que ce soit 5,5 % ou 7 %. Ces produits seront donc soumis au taux normal de 19,6 %. Afin d'éviter d'imposer aux agriculteurs une avance de trésorerie, deux mesures sont néanmoins prévues. Il s'agit, d'une part, de permettre aux exploitants agricoles acquittant la TVA selon le régime des acomptes trimestriels de diminuer le montant des acomptes payés en 2012 du supplément de TVA qui leur sera facturé du fait du changement de taux ; d'autre part, pour les agriculteurs relevant du régime du remboursement forfaitaire et qui n'ont pas la possibilité de déduire la taxe ayant grevé leurs achats, il est proposé de relever les taux de remboursement. Ainsi, les taux de 3,05 % et de 4 % passeraient respectivement à 3,68 % et 4,63 % pour les ventes faites à compter du 1er janvier 2012.
La commission est favorable à ces sous-amendements, car il fallait vraiment résoudre le problème des produits antiparasitaires au taux de 5,5 %. Le problème principal est celui des agriculteurs.
Si je comprends bien, madame la ministre, vous nous proposez deux formules : pour les agriculteurs pouvant récupérer la TVA, on procède à un ajustement de l'acompte payé en 2012 ; pour les agriculteurs au forfait, un prorata moyen des dépenses de produits antiparasitaires par rapport à l'ensemble des produits dont l'acquisition a donné lieu à règlement de TVA est établi, avant que l'on ne réajuste le coefficient forfaitaire.
Cela étant, les choses peuvent varier d'une région à l'autre : sans doute prend-on en compte un coefficient moyen national ? En tout état de cause, l'essentiel est que la question des agriculteurs soit traitée, afin qu'ils ne subissent pas un surcoût du fait des prix de revient de leurs produits.
M. le rapporteur général a très bien compris : c'est effectivement à partir d'un taux moyen national que le taux a été calculé.
Je suis un peu étonné de ce sous-amendement arrivant en nouvelle lecture : si l'objectif poursuivi est de contribuer à réduire l'utilisation de produits antiparasitaires, ce n'est pas avec ces mesures que nous l'atteindrons, mais au moyen d'un effort continu. Au demeurant, cet effort, mis en oeuvre depuis plusieurs années, a déjà permis de réduire fortement l'utilisation des produits antiparasitaires – dans mon département, la réduction est de l'ordre de 40 % pour la production de betteraves.
Par conséquent, je ne comprends pas l'utilité de ce sous-amendement dans le cadre du présent débat sur l'augmentation du taux réduit de TVA de 5,5 % à 7 %. Nous discuterons ultérieurement de l'éventuelle révision de l'ensemble de la classification. En tout cas, la présente disposition me semble dangereuse.
Ensuite, le Gouvernement a proposé de relever le taux du remboursement forfaitaire qui concerne ceux qui ne sont pas assujettis à la TVA selon la procédure normale, mais qui s'acquittent de taux forfaitaires de remboursement, du reste très hétérogènes par rapport aux réalités. Les taux de 3,05 % et de 4 % augmenteraient de 15 % dans un cas et de 20 % dans l'autre. Or, madame la ministre, le poids des produits antiparasitaires est très variable selon les sous-filières agricoles.
Ainsi, le cas des fruits et légumes et de la vigne est très différent de celui des cultures de plein champ. La neutralité du dispositif n'étant donc en rien garantie, il convient de travailler sur la question avant de prendre une décision. Or il se trouve que nous l'examinons ici dans la précipitation. Aussi, au nom de mon groupe, voterai-je contre ce sous-amendement. Je souhaiterais d'ailleurs savoir combien une telle mesure rapporterait, madame la ministre.
Souvenez-vous : c'est pendant l'examen du projet de loi de finances que l'on m'a demandé de résoudre à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances rectificative la question des produits antiparasitaires taxés à 5,5 %.
Je confirme que la question a été abordée au cours de l'examen de la première partie du projet de loi de finances.
J'ai alors pris l'engagement de me présenter devant vous avec une solution. L'initiative n'en revient donc pas au Gouvernement, mais à ceux qui nous ont demandé de mettre fin au dispositif en vigueur. Aussi mettons-nous un terme au taux réduit applicable aux produits antiparasitaires.
Seulement, nous y mettons fin avec la volonté que les agriculteurs ne pâtissent pas de cette hausse de charges.
Cette mesure, pour répondre à votre question, rapportera sans doute une quinzaine de millions d'euros.
Je suis très heureux que Mme la ministre ait pu avancer un chiffre sur le rendement de cette disposition. J'en profite pour aborder un sujet voisin : les médicaments non remboursés, si j'ai bien compris les débats en première lecture, vont augmenter puisque le taux de TVA qui leur est applicable va passer de 5,5 % à 7 %. Pouvez-vous nous informer du coût de cette augmentation pour les gens qui achètent ces médicaments ?
Vous savez, monsieur Eckert, que si un médicament n'est pas remboursé, c'est parce que l'on considère qu'il rend un service médical insuffisant. Quant au taux des médicaments remboursés, dont le service médical est, lui, justifié, médicaments qui sont prescrits par les médecins, il est de 2,1 %.
En revanche, le taux de TVA des produits médicamenteux non remboursés, c'est-à-dire à service médical insuffisant, passe à 7 %.
Le prix de ces médicaments, de grande consommation, puisque non prescrits et non remboursés, dépendra de la politique du laboratoire qui les fabrique, à l'instar de toutes les autres industries qui décident ou non de répercuter la TVA sur le prix de leurs produits.
Comment voulez-vous que nous sachions produit par produit ce qu'une hausse de TVA va rapporter ?
Non, c'est différent, monsieur Eckert !
Parce qu'il s'agit d'un amendement ciblé dont il faut bien que je connaisse le coût pour pouvoir vous en informer.
Tâchons de ne pas nous fâcher, madame la ministre. En première lecture, j'ai fait référence au tableau qui figure pages 145 à 147 du rapport et qui, produit par produit, tente un chiffrage de la création du taux intermédiaire de TVA. Or ce tableau ne donne aucun chiffre pour plus de la moitié des cas.
C'est normal !
Et le rapporteur général – dont je salue le travail ainsi que le travail de ses services – nous a répondu qu'il était dans l'impossibilité de remplir toutes les cases du tableau compte tenu du peu de temps dont il avait disposé. Dont acte.
Mais une semaine a passé et, aujourd'hui, vous êtes capable de nous donner un chiffre pour les produits phytosanitaires, sachant qu'ici aussi les volumes sont variables, Charles de Courson l'a rappelé.
Je vous pose donc la question sur les médicaments non remboursés : combien représente le gain de TVA ? Si vous êtes capable de donner des chiffres pour des tas de produits, quel est donc ce chiffre pour les médicaments non remboursés dont je ne nie pas par ailleurs l'éventuelle inutilité ?
Votre raisonnement est spécieux, monsieur Eckert. Pour ce qui concerne les produits antiparasitaires, nous avons travaillé avec le ministère de l'agriculture pour examiner leur consommation par les agriculteurs. Nous sommes partis de la consommation globale pour, justement, calculer comment compenser la hausse de la TVA. Ainsi, grâce aux données fournies par le ministère de l'agriculture, nous avons réalisé un travail des plus approfondis.
Vous pensez bien qu'en ce qui concerne des produits de grande consommation le Gouvernement ne procède pas de la même façon. Il multiplie par sept l'ensemble de l'assiette pour mesurer le rendement du relèvement du taux de TVA à 5,5 %, soit, en l'occurrence, 1,8 milliard d'euros. Et nous n'allons pas, gamme de produits par gamme de produits voire produit par produit, vous dire à l'euro près combien cette mesure coûtera.
C'est en effet impossible puisque, selon que la TVA sera ou non répercutée, les données changeront. Si l'on prend l'exemple des livres, Frédéric Beigbeder l'avait lui-même théorisé dans un best-seller connu : le livre coûte toujours 19,99 euros,…
…en tout cas un prix toujours juste inférieur à la dizaine. C'est ainsi que le prix du livre est fixé.
Pensez-vous donc vraiment que l'augmentation du taux de TVA de 5,5 % à 7 % entraînera une augmentation correspondante du prix du livre qui passera de 19,99 euros à 20,50 euros ? Bien sûr que non. Selon leur politique tarifaire, producteurs et industriels n'intégreront, pour certains produits bien identifiés, qu'une partie de la hausse de la TVA.
Nous ne sommes donc pas en mesure, aujourd'hui, de savoir combien rapportera cette mesure produit par produit. On sait juste que son rendement approximatif est de tant. En effet, comment voulez-vous que je connaisse la consommation de médicaments qui ne sont pas prescrits par un médecin, qui ne sont pas remboursés ? Qui contrôle l'achat des médicaments non remboursés dans ce pays ? Personne !
La sécurité sociale peut vous renseigner sur la consommation des médicaments remboursés, mais pas sur les médicaments non remboursés !
La consommation de ces derniers relève du choix de l'individu. La France est un pays libre : on consomme ce qu'on veut et le Gouvernement ne sait pas ce que consomment les Français.
C'est donc ça : le Gouvernement ne sait pas !
(Le sous-amendement n° 95 est adopté.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir le sous-amendement n° 84 .
Ce sous-amendement vise à maintenir un taux réduit de TVA à 5,5 % pour les prestations de collecte, de tri et de traitement de déchets, les remboursements et rémunérations versées par les communes aux exploitants assurant les prestations de balayage des caniveaux et voies publiques.
Vous avez décidé de pénaliser l'ensemble des Français car peu nombreux sont ceux qui ne paient pas de taxe ou de redevance d'enlèvement des ordures ménagères. Si c'est le cas, c'est compensé par les impôts locaux. Reste que vous pénalisez presque tout le monde sur un comportement obligatoire pour des raisons qu'à cette heure-ci je m'abstiendrai d'évoquer – nous avons tous une démarche de tri sélectif, d'élimination, d'incinération, de retraitement…
Vous avez maintenu le taux réduit de TVA à 5,5 % pour les cantines scolaires et non pour les transports scolaires, pour l'eau, mais pas pour le tri des ordures ménagères. On ne comprend plus très bien votre cohérence. La seule chose que l'on comprend, c'est que cette mesure va rapporter 1,8 milliard d'euros qui seront payés par tout le monde.
Défavorable. Nous avons déjà eu ce débat à l'initiative de notre collègue Guy Geoffroy il y a quelques jours.
Défavorable.
Je confirme les propos de Mme la ministre : j'avais présenté un amendement regroupant toutes ces questions. Nous avons eu à cette occasion un débat très intéressant et pour le moins clarificateur. Le Gouvernement et la commission confirment la ligne très claire qui a été fixée et c'est la raison pour laquelle je ne défends pas d'amendement, me ralliant à ce qui a été très sagement décidé.
Une remise à plat de la fiscalité sur les ordures ménagères n'en reste pas moins nécessaire dans la mesure où elle est frappée d'un double impact : celui de la TVA que nous sommes en train d'augmenter et celui de la taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP, dont il est prévu qu'elle augmentera elle aussi – et pour de bonnes raisons puisqu'il s'agit de lutter contre l'accumulation d'activités polluantes.
Je rejoins donc, en m'abstenant de présenter un amendement, le souhait du Gouvernement et de la majorité ; reste que cette question ne doit pas être oubliée. Nous devrons prendre le temps, le jour venu, de l'examiner dans le cadre de l'ensemble de la fiscalité.
(Le sous-amendement n° 84 n'est pas adopté.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir le sous-amendement n° 85 .
Par ce sous-amendement, nous vous demandons, madame la ministre, de maintenir le taux réduit de TVA à 5,5 % pour les prestations de services fournies par les entreprises ou associations de services à la personne.
Vous avez toujours l'air de dire que nous sommes contre les services à la personne parce que nous avons demandé, par le biais de plusieurs amendements, un plafonnement de la déduction fiscale à laquelle donne droit le recours au service à la personne. Pour autant, le niveau que nous visons permettra à tout le monde d'en bénéficier, mais pas de façon excessive comme c'est malheureusement le cas pour les dévoiements déjà évoqués.
Votre prédécesseur, madame la ministre, a pénalisé, il y a un ou deux ans, les associations en remettant en cause l'exonération de cotisations sociales de l'ensemble de leurs personnels. Ces associations en sont par conséquent revenues aux allègements Fillon et tirent aujourd'hui le signal d'alarme. Vous revenez en outre sur la diminution de 15 points sur les déclarations forfait des entrepreneurs individuels à responsabilité limitée – tout cela est certes très technique.
Reste que vous donnez là, si j'ose dire, un coup supplémentaire puisque vous faites passer le taux de TVA de 5,5 % à 7 % dans un secteur où les prix sont au ras des pâquerettes : toutes les associations de services à la personne, souvent dépendantes des aides des conseils généraux, pratiquent des prix défiant toute concurrence. Forcément, la hausse envisagée sera répercutée sur les prix demandés à l'usager.
Vous souteniez en effet, tout à l'heure, à propos des médicaments non remboursés, que leur prix peut dépendre de la politique tarifaire de celui qui les vend. En ce qui concerne le type de services dont il est ici question, il n'y aura en revanche pas d'ajustement possible et la hausse, j'y insiste, sera directement répercutée sur les prix proposés aux usagers.
(Le sous-amendement n° 85 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir le sous-amendement n° 86 .
Il s'agit de faire bénéficier du taux de TVA réduit à 5,5 % la fourniture de logements et de nourriture dans les lieux de vie et d'accueil mentionnés à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles.
J'appelle à nouveau votre attention, et je réitérerai tout à l'heure pour le logement, sur les conséquences qui vont résulter de ce dispositif. Vous avez, j'en suis certain, pris connaissance du rapport de la Cour des comptes sur l'état de l'hébergement en France. Les dispositifs d'accueil concernent des lieux de vie pour les personnes accompagnées, qu'elles soient handicapées, âgées, en hébergement ou en maison d'accueil temporaire.
Tous ces dispositifs, ainsi que les prestations qui leur sont servies, notamment les repas, seraient fiscalisés au taux intermédiaire – je ne peux pas dire taux réduit car, pour moi, il restera toujours à 5,5 %. Je considère comme absolument inacceptable que la hausse de la TVA touche ces lieux qui abritent une action sociale au vrai sens du terme.
Le signe que vous êtes en train d'adresser aux acteurs, notamment aux associations qui connaissent des difficultés énormes et qui assument l'accueil dans ces foyers dédiés aux personnes les plus en difficulté, souffrant de handicap ou d'une incapacité d'autonomie, est catastrophique. À l'argument que la crise est partout, j'avais répondu qu'elle devait s'arrêter aux portes des logements pas encore construits qu'attendent nos concitoyens et à celles des lieux d'hébergement. C'est le sens de ce sous-amendement.
Madame la ministre, c'est une mauvaise manière que vous faites à tous les acteurs qui, à cet instant et durant cette froide nuit, à Paris et ailleurs, accomplissent, eux, le travail que la République, la collectivité nationale ne fait pas.
Très bien !
(Le sous-amendement, n° 86 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Patrick Bloche, pour soutenir le sous-amendement n° 87 .
Sans reprendre l'argumentation que j'avais développée en première lecture, je souhaite faire prendre conscience à notre assemblée des conséquences de l'augmentation du taux de TVA réduit de 5,5 % à 7 % pour toutes les entreprises du spectacle vivant qui comptent sur une saison qui a commencé au mois de septembre dernier et se terminera l'été prochain. Les programmes ayant été diffusés et les billetteries ouvertes depuis longtemps, ces entreprises de spectacle vivant ne pourront pas répercuter la hausse de TVA sur les spectateurs. De ce fait, leurs capacités de production et de diffusion s'en trouveront réduites dans un secteur où, comme vous le savez, les difficultés ne manquent pas.
(Le sous-amendement n° 87 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Patrick Bloche, pour soutenir le sous-amendement n° 88 .
Je reprends là la discussion sur l'augmentation du taux de TVA réduit de 5,5 % à 7 % pour le livre. J'ai bien suivi l'évolution intervenue depuis la première lecture, avec le délai de trois mois conduisant à ne faire entrer la mesure en application qu'au 1er avril 2012. Gardons toutefois à l'esprit que cette mesure reste antiéconomique. J'en ai la conviction.
Depuis bientôt trente ans que la loi sur le prix unique du livre est en vigueur, on a oublié ce qu'en était l'esprit. L'actuel ministre de la culture et de la communication, intervenant dans une émission télévisée il y a une dizaine de jours, a lui-même donné l'impression d'ignorer cette loi. Il a répondu à la journaliste qui l'interviewait : « Madame Lapix, avec 1,5 % de plus sur le prix d'un livre, vous aurez trente centimes de plus à payer ». C'est ignorer ce que signifie le prix unique du livre : ce n'est pas le libraire, celui qui le distribue, qui fixe le prix du livre, mais l'éditeur.
Or tout laisse à penser que les éditeurs ne vont pas répercuter la hausse de TVA. Si bien que Mme Lapix paiera toujours son livre au même prix, mais que ce sont les libraires, dont la marge bénéficiaire moyenne en France est de 0,3 %, qui supporteront cette hausse de 1,5 %. C'est donc vraiment une mesure antiéconomique.
Qu'elle s'applique au 1er avril n'est qu'un moindre mal. Même avec les fêtes de fin d'année, les stocks très importants des libraires ne seront pas épuisés dans les trois mois qui viennent. Certes, on leur offre un peu de souplesse, notamment pour les services informatiques et parce qu'ils clôturent leurs comptes au 31 mars, comme le rappelait le rapporteur général.
Vraiment, on aurait pu épargner au livre cette hausse de la TVA, ne serait-ce que parce que les libraires ne fixent pas le prix de vente des livres.
(Le sous-amendement n° 88 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir le sous-amendement n° 89 .
Il s'agit de reprendre les amendements que nous avions déposés en première lecture tendant à écarter du dispositif de hausse de la TVA à taux réduit les logements PLAI, c'est-à-dire les logements locatifs destinés aux publics les plus modestes, que ce soit en accueil logement ou en foyers spécialisés.
J'observe que l'amendement présenté par le rapporteur général reprend le dispositif initial et qu'il n'y a pas eu d'évolution de la part du Gouvernement. Nous considérions qu'il fallait préserver les PLAI de l'augmentation du taux de TVA à 7 % puisque ce sont les bailleurs sociaux qui assument la construction de ces patrimoines, dans le cas de l'acquisition en VEFA ou de l'achat à soi-même. Ces opérations de logement social ne sont équilibrées que par la participation des acteurs publics, y compris l'État, cet équilibre garantissant ensuite celui de l'organisme pour assurer le montant du loyer dans les plafonds imposés par la loi.
Le logement accessible aux plus défavorisés est un bien de première nécessité. Sous cette considération, nous avons sollicité l'exonération du dispositif de hausse de la TVA pour les logements très sociaux construits ou livrés aux organismes de logements sociaux.
(Le sous-amendement n° 89 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir le sous-amendement n° 90 .
Je trouve les arguments de M. le rapporteur général et de Mme la ministre un peu légers ! J'aimerais quand même qu'ils nous expliquent comment l'eau livrée propre et potable à domicile à 5,5 % peut en repartir taxée à 7 % pour l'assainissement. Les bras m'en tombent, je ne sais plus quoi dire ! Comment peut-on justifier ce type de disposition ? Je ne vais tout de même pas refaire, même si cela nous avait bien amusés, le sketch de la salade vendue avec ou sans les couverts. Mais le sujet est sérieux, mes chers collègues.
Tout le monde paie l'assainissement. Souvent même, dans la facture d'eau, puisque la plupart du temps c'est la même, la part de l'assainissement est supérieure à la part de l'eau potable.
Si cela correspond à la nécessité de protéger l'environnement et surtout la ressource en eau, comment justifier que l'eau sera taxée à 5,5 % et l'assainissement à 7 % ? J'attends vos arguments qui seront, je l'espère, plus étoffés que l'avis sibyllin que la commission et le Gouvernement émettent depuis un moment.
Tout simplement, monsieur Eckert, l'eau fraîche est bonne à boire, l'eau sale ne peut pas servir à la consommation. Avis défavorable.
Si l'eau fraîche est taxée à 5,5 %, à combien l'amour peut-il l'être, monsieur le rapporteur général ?
Défavorable.
Il se trouve que j'ai quelques activités dans le domaine, monsieur le rapporteur général. Je ne manquerai pas de reprendre, dans ma lettre aux abonnés, l'argumentation que vous venez de développer. Je pense qu'ils comprendront très bien d'être obligés de payer pour l'eau qu'ils achètent et pour celle qu'ils rejettent. Je retranscrirai vos paroles mot pour mot et cela vous fera de la publicité !
Si, pour l'assainissement et le tri des ordures ménagères, les factures augmentent de façon conséquente, ce n'est pas du fait de la hausse de la TVA de 5,5 % à 7 %. C'est parce que plusieurs lois, fort légitimes, telle la loi sur l'eau dans le cadre du Grenelle de l'environnement, les ont alourdi de 6 % à 7 % par an sur plusieurs années.
Ce serait donc acceptable pour des mesures d'intérêt général et environnemental, mais suspicieux lorsqu'il s'agit de tenir un cap fixé pour l'équilibre de nos finances publiques ? Il faut être raisonnable. Le coût pour le contribuable du passage de 5,5 % à 7 % est nettement inférieur aux coûts engendrés par les lois votées dans le cadre du Grenelle.
(Le sous-amendement n° 90 n'est pas adopté.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir le sous-amendement n° 94 .
Ce que dit notre collègue est un peu curieux. Sur le principe, recouvrer des taxes sur des services obligatoires pour tout le monde n'est pas la même chose que percevoir un impôt sur les revenus, les dividendes ou le patrimoine ; c'est un choix politique. Vous faites le choix politique de ponctionner les usagers de l'eau, tous les citoyens, par l'intermédiaire de la TVA que vous relevez. Assumez ce choix politique ! Pour notre part, nous considérons que la TVA n'est pas la mesure la plus juste en termes d'équité fiscale. L'impôt sur le revenu est un outil différent, qui ne touche pas les mêmes et pas de la même façon.
S'agissant du sous-amendement n° 94 , dont j'ai à peu près compris que son sort est scellé, il concerne les transports scolaires qui nous semblent autant nécessaires aux jeunes élèves que les cantines scolaires. Ce n'est pas votre appréciation. Le coût de la mesure s'élèverait, dites-vous, à une trentaine de millions d'euros. Certes, mais ce sont probablement les départements qui la supporteront en grande partie. Tout le monde appréciera !
(Le sous-amendement n° 94 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir le sous-amendement n° 91 .
La rédaction que nous suggérons pour l'article 11 tend à écarter du dispositif de revalorisation du taux réduit de TVA l'intégralité du logement social. Le coût de la mesure, que les acteurs du logement social vont assumer à compter du 1er janvier, a été estimé par leurs soins à environ 240 millions d'euros, auxquels s'ajoutera une somme pratiquement identique au titre des prélèvements directement effectués sur les organismes de logements sociaux. S'y ajoutera encore la baisse, dans la loi de finances de 2012, de la participation de l'État à la construction des logements PLUS et PLAI. La ligne budgétaire sur la surcharge foncière a pratiquement disparu dans le budget de l'État.
Cela signifie qu'on est en train de désactiver totalement l'accompagnement que l'État apportait aux organismes constructeurs de logements sociaux. Si je le regrette vivement, l'ensemble des acteurs du logement le dénonce, d'autant que la crise du logement n'a jamais été aussi aiguë.
Je termine en reconnaissant néanmoins que le Gouvernement a retenu notre amendement tendant au moins à ne pas mettre en instabilité les acteurs qui avaient négocié et monté des dossiers. Sont donc exclues du dispositif de revalorisation les opérations pour lesquelles une mesure d'agrément a été accordée avant le 1er janvier 2012.
Je regrette vivement que les effets de cet amendement aient été limités aux prêts locatifs aidés d'intégration.
M. le rapporteur général pourrait-il indiquer si le dispositif ne s'appliquera, en terme d'agrément, qu'aux PLAI, ou si, comme je le souhaite, le dispositif s'appliquera à l'intégralité du patrimoine locatif dans le cadre des agréments ?
La parole est à M. Christian Eckert pour défendre le sous-amendement n° 92 .
Les Français doivent savoir que la mesure que la majorité va voter entraînera l'augmentation des tarifs d'un peu moins de 1,5 % dans les transports publics de voyageurs, à savoir la RATP, la SNCF, ou les transports en région. Ce sous-amendement propose de revenir sur cette mesure, dont on peine d'ailleurs à obtenir une évaluation – je suis certain que Mme la ministre va encore nous dire qu'elle en est incapable. Dans l'exposé des motifs, nous faisons allusion à un coût de 84 millions d'euros, montant qui sera largement payé par les couches dites populaires, ce qui nous semble particulièrement injuste.
(Le sous-amendement n° 92 , rejeté par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. Louis Giscard d'Estaing, pour défendre le sous-amendement n° 73 .
Cet amendement aborde un autre sujet sur lequel nous souhaitons une simplification.
Mon sous-amendement n° 72 proposait une tentative d'harmonisation au taux de 7 % pour certains produits alimentaires. Il s'agit ici de résoudre la difficulté créée par la différence dans les taux de TVA qui pourrait apparaître pour les produits alimentaires préparés en vue d'une consommation immédiate. Tous les boulangers de France seront confrontés à une vraie difficulté si nous ne trouvons pas une solution pratique. Sont en effet concernés les produits que l'on peut emporter et consommer immédiatement – pizzas, quiches, sandwichs et tous produits que l'on peut trouver chez un artisan-boulanger ou pâtissier.
Si nous n'y prenons garde, trois taux de TVA pourraient s'appliquer à une formule à emporter : un taux de 7 %, pour le sandwich, un taux de 5,5 % pour la viennoiserie et un taux de 19,6 % pour la boisson, par exemple une bière. Cela aboutirait à une complication qui me semble excessive pour ces professionnels.
J'invite donc le Gouvernement à mettre en oeuvre sa volonté de simplification sur ces questions de produits alimentaires préparés en vue d'une consommation immédiate, en leur appliquant à tous le taux réduit de 5,5 %.
Avis défavorable à cet amendement qui pose, par ailleurs, beaucoup de problèmes.
En effet, il semble résoudre certains problèmes, mais il en soulève beaucoup d'autres.
Cet amendement soulève notamment le problème de la restauration rapide d'une manière générale, qui doit être considéré comme un tout, et un tout imposé à 7 %. Avis défavorable.
Il ne faut pas confondre la restauration, dont le taux de TVA sera porté à 7 %, et les produits alimentaires préparés en vue d'une consommation immédiate, qui ne sont pas consommés dans le cadre du magasin.
C'est le même cas dans les restaurants MacDonald's.
Je précise également que d'après mes informations, la simplicité est telle que le projet d'instruction fiscale présentant ce dispositif ferait vingt-six pages ! La solution la plus simple serait d'en rester à un taux unique de 5,5 %.
Vingt-six pages, ce n'est rien ! Pour la suppression de la taxe professionnelle, c'était quatre-vingt-dix-neuf pages !
(Le sous-amendement n° 73 n'est pas adopté.)
Cet amendement propose de rétablir la TVA à 5,5 % pour les travaux dans les locaux d'habitation. Dans une période où le secteur du bâtiment commence à souffrir, il paraît nécessaire, en soutien au bâtiment et particulièrement à l'artisanat, de maintenir ce taux de 5,5 %.
Je rappelle d'ailleurs que ce taux réduit de TVA avait aussi pour objectif de lutter contre le travail clandestin, et je crois qu'il y a bien contribué. Le risque de l'augmentation du taux de TVA à 7 % est qu'il aboutisse à un jeu à somme nulle pour l'État, mais qu'il représente malheureusement une augmentation importante pour les gens qui ont besoin de faire des travaux. Alors que nous encourageons la réalisation de travaux acoustiques ou thermiques en faveur du développement durable, nous demandons donc le maintien de ce taux à 5,5 %.
(Le sous-amendement n° 93 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
La parole est à M. François Scellier pour présenter le sous-amendement n° 74 .
Comme l'a sous-entendu le rapporteur général, ce sous-amendement complète l'amendement présenté par la commission des finances.
Il vise à maintenir le taux de 5,5 % de TVA pour les opérations de logement social en construction et rénovation qui sont visées à l'article 278 sexies du code général des impôts dès lors qu'elles ont obtenu une autorisation de l'État avant le 1er janvier 2012 ou, pour les autres opérations ne nécessitant pas d'autorisations, qu'un avant-contrat de vente, une demande de permis ou un acompte soit intervenu avant cette même date du 1er janvier 2012.
Avis favorable.
Afin de lever toute ambiguïté, j'aimerais que la ministre ou le rapporteur général nous confirme que le dispositif s'applique à l'intégralité des logements locatifs sociaux et pas seulement aux PLAI.
Des interprétations différentes de ce dispositif ont été données : le texte, tel qu'il est sorti de l'Assemblée, et tel que l'envisage M. Scellier, mentionne les dispositions relevant du logement locatif social toutes catégories confondues. Mais certains commentaires qui ont été faits donnaient une interprétation contraire.
En conséquence, les amendements nos 5 , 4 rectifié , 1 , 6 et 8 tombent.
L'article 11 est ainsi rétabli.
Prochaine séance, ce soir, à vingt-deux heures :
Suite du projet de loi de finances rectificatif pour 2011 ;
Projet de loi organique et projet de loi portant application de l'article 11 de la Constitution.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures quarante.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron