Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les dernières notes de conjoncture de l'INSEE et de l'OCDE montrent que le cadrage macroéconomique sur lequel était basé la loi de finances initiale pour 2012, comme cette dernière loi de finances rectificative de l'année 2011, est aujourd'hui dépassé.
En effet, la croissance en 2011 devait être de l'ordre de 1,6 %, au lieu du 1,75 % prévu, et la croissance en 2012 devait être de l'ordre de 0,3 % au lieu du 1 % révisé. Au total, il manque 0,85 point de croissance pour 2012, soit 17 milliards d'euros de produit intérieur brut en moins, ce qui va se traduire par une perte de recettes de 8 milliards pour le budget de l'État et celui de la sécurité sociale. À ces pertes de recettes fiscales, il convient d'ajouter les surcoûts liés à la dégradation de la situation sociale et à la montée du chômage, soit 2 à 3 milliards. Ainsi, il faudra trouver une dizaine de milliards d'euros en économies supplémentaires ou en recettes additionnelles pour maintenir les déficits publics à 4,5 % du PIB en 2012.
L'existence d'une réserve de précaution de 6 milliards ne permettra de faire face que très partiellement à un tel besoin, puisque, comme l'explique notre excellent rapporteur général dans son rapport, il faut déduire de cette réserve 2,6 à 3 milliards à restituer aux administrations concernées, comme chaque année, au titre des guichets sociaux, subventions aux régimes de retraite. Ainsi, le solde disponible de la réserve ne s'élève qu'à environ 3 milliards et ne peut couvrir qu'à peine un tiers des besoins si l'on veut maintenir le déficit au niveau de celui voté dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2012.
Il faudra donc faire de 6 à 7 milliards d'économies supplémentaires dès le début de l'année. Il serait important que le Gouvernement précise dès maintenant quelles mesures il compte prendre pour maintenir le niveau de déficits publics à 4,5 % du produit intérieur brut en 2012.
La discussion et le vote qui nous réunissent aujourd'hui mettront un terme à un véritable marathon budgétaire. Ce collectif, que nous retrouvons aujourd'hui après son passage au Sénat, qui a décidé – c'est un grand progrès – non de le dénaturer comme il l'avait fait pour le projet de loi de finances pour 2012, mais bien de l'améliorer, aura été riche d'enseignements. Ainsi, la discussion de ce projet de loi de finances rectificative a montré, ce que nous centristes rappelons depuis longtemps, la difficulté de prévoir la conjoncture économique dans un monde où l'interdépendance économique et budgétaire ne fait que s'accroître d'année en année.
Pour la loi de finances rectificative, la majorité sénatoriale s'est moins ridiculisée que lors de la loi de finances pour 2012. En effet, je vous rappelle, mes chers collèges, qu'elle avait alors augmenté les impôts de 27 milliards et diminué les dépenses – tenez-vous bien – de 190 milliards. Nos amis de la majorité sénatoriale avaient en effet fermé le ministère des affaires étrangères, de l'éducation nationale, de l'environnement, de la culture, de l'agriculture, de la justice, de la recherche, de la solidarité, du travail et de l'emploi. Bref, ils avaient fait quelques coupes claires – 50 % de réduction de l'ensemble du budget de l'État – dans l'administration.
Mais pour ce texte, la sagesse sénatoriale est revenue. La Haute Assemblée a été bien plus raisonnable en se contentant de réduire de près de 800 millions d'euros les recettes et de réduire de plus de 600 millions les charges, c'est-à-dire qu'elle a réduit de 163 millions le déficit du budget général.
Restent pourtant quelques points sur lesquels le groupe du Nouveau Centre ne désarme pas, et je pense que le Gouvernement ne pourra, en toute logique, que nous donner satisfaction.
Madame la ministre, je souhaite m'arrêter quelques instants sur l'article 11 et la création d'un deuxième taux réduit de TVA. Comme vous le savez, cette question a déjà fait l'objet de débats passionnés sur nos bancs, tant sur ceux de la majorité que de l'opposition. Sur ce point comme sur d'autres, le groupe Nouveau Centre a successivement connu quelques satisfactions puis des déceptions.
Concernant les satisfactions, nous souhaitons rappeler l'importance de la mesure d'exclusion de la hausse à 7 % des cantines scolaires, qui constitue indéniablement un service de première nécessité. Cette même logique, le Gouvernement aurait pu la suivre concernant le transport scolaire. Outre que la distorsion entre la gestion en régie et la gestion déléguée créerait une augmentation du taux de TVA à 7 %, nous pouvons regarder le transport scolaire comme un produit de première nécessité. C'est pourquoi nous avons redéposé un amendement dans ce sens. En outre, l'assujettissement à la TVA du transport scolaire ne représente qu'un transfert de 20 à 30 millions d'euros entre les départements et l'État.
Je souhaite également évoquer la question de la TVA dans le bâtiment. Suite à un amendement que le Nouveau Centre a successivement déposé en première puis en deuxième lecture, la discussion en commission des finances est arrivée hier soir à un accord. En effet, il a été admis la nécessité de maintenir, de façon exceptionnelle, un taux de TVA à 5,5 % pour les devis enregistrés et quand un acompte a été encaissé avant le 20 décembre 2011. Cette mesure, que nous avons défendue et dont nous nous félicitons, répond à un double objectif de simplification et de sécurisation juridique des entreprises et des consommateurs.
Enfin, concernant la TVA, je souhaiterais, là encore, m'arrêter quelques instants sur la situation du livre. En effet, à défaut d'avoir maintenu un taux de TVA réduit de 5,5 % sur les livres, il est impératif, vu les spécificités du secteur, d'aménager l'application de la nouvelle TVA, en la reportant au 1er avril 2012. Considérant que l'opération de mise à jour des 700 000 références commercialisées par 10 000 éditeurs est particulièrement complexe du fait de la nécessaire mise à jour des systèmes informatiques, considérant qu'il faut tenir compte du stock important des librairies, sur lesquels des problèmes de perte de marge et de dépréciation se posent, et considérant que les libraires clôturent généralement leurs comptes le 30 mars, l'application au 1er avril permettra de commencer une nouvelle année comptable avec un nouveau taux. Ce n'est pas très différent des conclusions du rapport Racine, qui préconisait deux mois.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons que la TVA à 7 % ne s'applique aux livres qu'à partir du 1er avril 2012. Ce délai paraît raisonnable à une grande majorité des acteurs.
Concernant le Fonds d'amortissement des charges d'électrification, la rédaction qui ressort des travaux du Sénat m'invite à poser au Gouvernement quelques questions. En effet, de par l'article 76 de la loi du 16 décembre 2010 portant réforme des collectivités territoriales, la participation minimale d'une collectivité territoriale assurant la maîtrise d'ouvrage de toute opération de travaux, dont l'électrification, doit être de 20 % du montant total. Ainsi, considérant que les syndicats d'électricité ne sont pas assujettis à la TVA, le FACÉ ne peut, semble-t-il, les financer à plus de 66 % du coût TTC des travaux, c'est-à-dire à plus de 80 % du coût hors taxe.
Le groupe Nouveau Centre souhaiterait savoir si le FACÉ est tenu de financer à hauteur de 66 % les opérations de travaux, mais également si ce taux représente un plafond de participation ou si le FACÉ peut participer davantage. Bref, madame la ministre, nous voudrions savoir si ces 66 % représentent à la fois un plancher et un plafond de participation. Pour le reste des dispositions de l'article 7, le groupe Nouveau Centre se félicite que le Gouvernement ait écouté sa majorité.
Mes chers collègues, le Nouveau Centre a également redéposé un amendement, déjà adopté en commission des finances en première lecture, concernant la vente d'alcool pur par les pharmaciens. Il est en effet choquant que des pharmaciens se fassent redresser, alors même qu'ils avaient expressément reçu l'assurance du directeur des services douaniers qu'il ne saurait en être question.
En effet, par une lettre de 1999 adressée à l'ordre des pharmaciens, les douanes leur avaient indiqué qu'ils avaient « la faculté de vendre de l'alcool nature, en exonération de droits d'accises, aux professions médicales, ainsi qu'à des particuliers à titre d'antiseptique, dans le cadre de l'exercice officinal et en dehors de toute prescription médicale ». L'amendement en question a ainsi pour objet de préciser le texte du code général des impôts pour l'avenir et de régler les situations passées en revenant sur les contrôles qui auraient pu être contraires aux instructions du directeur des douanes. Il s'agit ainsi de répondre au défaut de communication que les services des douanes ont reconnu le 12 mai 2011. Cet amendement, qui ne vise qu'à une coordination entre le droit en vigueur et la réalité des faits, ne pourra, j'en suis certain, que recueillir un avis favorable du Gouvernement.
Pour finir, je tiens à rappeler le soutien du groupe Nouveau Centre à la mesure consistant en un abattement de 40 % pour le calcul de la taxe sur les véhicules de société de type flex-fuel. Afin d'obtenir l'assentiment du Gouvernement, j'ai déposé un amendement visant à ne pas appliquer cet abattement aux véhicules dont les émissions sont supérieures à 200 grammes par kilomètre, au lieu de 250 grammes dans la version initiale de la mesure.
En conclusion, le groupe Nouveau Centre appelle le Gouvernement à préciser dès maintenant comment il compte dégager 8 milliards d'euros d'économies ou de recettes supplémentaires pour s'adapter aux nouvelles prévisions de croissance et à soutenir les amendements que je viens d'évoquer. C'est donc à ces conditions que le groupe Nouveau Centre votera en faveur du projet de loi de finances rectificative pour 2011. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)