La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
J'appelle, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi sur lesquels les deux Assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 1er.
La parole est à M. Serge Letchimy.
Madame la présidente, monsieur le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, monsieur le président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ce que j'ai entendu cet après-midi m'a déterminé à faire cette intervention en préambule à l'article 1er.
Je le dis à mes collègues – à ceux de la majorité plus qu'à ceux de l'opposition – : dans ce débat, il est deux mots qu'il faut absolument éviter. Il s'agit de « paternité » et de « certitude ». J'ai apporté un livre paru récemment, intitulé Antimanuel d'écologie, dont l'auteur est Yves Cochet, mais toute l'histoire du mouvement écologique le montre : des éveilleurs de conscience se lèvent chaque fois qu'un drame risque de se produire. Beaucoup d'hommes et de femmes ont ainsi mené des combats, parfois seuls, pour convaincre de la nécessité de changer de cap.
Si le groupe SRC a décidé de voter, en octobre dernier, en première lecture, le présent projet de loi, c'est qu'un consensus est nécessaire lorsque ça va très mal. Voilà pourquoi il faut sortir des certitudes. Par ailleurs, le débat doit être ouvert, même si cela prendra un peu de temps.
Des discussions ont eu lieu, dès 2007, qui ont permis de dégager quelques grandes notions rappelées tout à l'heure par Philippe Tourtelier, comme l'urgence écologique, la nécessité d'une gouvernance différente, qui ne soit pas que régionale, mais aussi nationale et mondiale, le renversement de la charge de la preuve ou encore l'exemplarité de l'outre-mer.
S'agissant de celui-ci, nous avons introduit, à l'article 1er, grâce à l'amendement 46 , une disposition qui permet aux départements et collectivités d'outre-mer d'intervenir plus directement au titre d'une gouvernance locale qui favorise l'appropriation collective des risques et des enjeux. Toutefois, il est indispensable de préciser qu'il faut absolument parvenir à décliner toute une série de dispositifs nous permettant d'atteindre des objectifs clairs qui ont nécessairement une dimension nationale et mondiale mais qui doivent également tenir compte des particularités. Je pense notamment à la biodiversité, au schéma minier guyanais, aux transports. Tout à l'heure, monsieur le ministre d'État, vous avez parlé de la construction de 400 kilomètres de lignes de transports collectifs. Mais quelle est la déclinaison possible pour les actions particulières et comment organiser cela avec les collectivités qui en seraient responsables ?
Je pense aussi à la biopiraterie qui confisque l'usage des plantes médicinales. Je pense aux moyens de mesurer le potentiel de ressources naturelles en le rapportant à l'action de l'homme, ce que M. Cochet appelle l'empreinte écologique, c'est-à-dire la biocapacité de la planète, des régions et des pays. Un groupe de travail a été mis sur pied afin d'avancer sur ce sujet et, de fait, il importe de combler notre déficit dans ce domaine.
J'évoquerai aussi la question du marché carbone. En la matière, je suis très inquiet, même si l'on a senti un souffle nouveau aux États-Unis avec l'arrivée de Barack Obama. En effet, compte tenu du rapport entre les gaz à effet de serre produits aux États-Unis et ceux produits en Afrique, le risque est grand de créer des inégalités extrêmement dangereuses.
Enfin, il ne s'agit pas uniquement de « décarboner » l'économie. Il ne s'agit pas seulement de verdir pour verdir, mais bien de changer de cap, d'aller vers une autre croissance. Albert Jacquard a souligné à quel point la course aux taux de croissance avait créé une situation dangereuse : pour lui, le compte à rebours a commencé et il faut sortir d'une logique de crédits infinis et de ressources éternelles pour s'attaquer à la question centrale qui est celle de l'habitabilité de la planète, du respect de la demeure humaine. En fait, comme l'indique Yves Cochet, il s'agit de se préoccuper de l'écoumène, c'est-à-dire de la relation de l'humanité à l'étendue terrestre, notion développée par Augustin Berque.
Ce que nous avons édifié ensemble devrait nous permettre de changer de culture, de mode de vie et surtout de nous préoccuper beaucoup plus de préserver non seulement la planète et ses ressources, mais bien aussi l'humanité tout entière. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je souhaite intervenir sur les problèmes liés à l'eau qui sont traités, notamment, dans le chapitre II du titre II du présent projet de loi, c'est-à-dire aux articles 24 à 27.
La directive-cadre européenne sur l'eau demande que d'ici à 2015 nous rétablissions ou maintenions un bon état écologique des masses d'eau, qu'elles soient superficielles, souterraines ou marines. Nous avons adopté des dispositions qui visent à atteindre cet objectif, ce qui, soit dit en passant, ne sera pas facile, puisque, à ce jour 70 % des masses d'eau du territoire national sont polluées. L'origine de ces pollutions est soit urbaine, soit industrielle, soit agricole. Dans les cinq années qui nous sont mesurées, il faudra donc s'atteler sérieusement à la tâche !
Le texte qui nous est soumis comporte une série de mesures relatives à l'assainissement ou à la surveillance que nous ne pouvons qu'approuver. Bien entendu, il s'agira de les mettre en application dans le cadre du Grenelle 2.
Outre des problèmes de qualité de l'eau se posent des problèmes quantitatifs que le réchauffement climatique ne fait qu'aggraver. Chacun sait que certaines régions du sud de la France – ce ne sera peut-être pas le cas cette année en raison des pluies abondantes qui sont tombées cet hiver et au printemps – commencent à manquer sérieusement d'eau. Les conflits d'usage apparaissent entre les usagers qui souhaitent de l'eau potable, les agriculteurs qui veulent pouvoir irriguer leurs terres et ceux qui se préoccupent du niveau des rivières pour pratiquer leur sport ou leur loisir favori.
En 2004, j'avais déposé une proposition de loi visant à ouvrir un crédit d'impôt aux personnes qui constitueraient des réserves d'eau pluviale. Il me paraissait important de permettre à chacun de stocker l'eau de pluie pour l'utiliser pendant les mois de sécheresse. Depuis, cette idée a fait son chemin puisque nous avons adopté, dans le cadre de la loi sur l'eau de 2006, des amendements qui accordent un crédit d'impôt de 25 % aux usagers qui réalisent des travaux de stockage de l'eau pluviale pour un montant de 8 000 euros, à condition que ces travaux soient effectués conformément aux normes fixées dans les décrets d'application et qu'ils soient confiés à des professionnels. Un arrêté de 2007 a réglé les usages extérieurs de l'eau pluviale et un autre de 2008 a essayé de codifier les usages intérieurs afin d'éviter des problèmes sanitaires.
Monsieur le ministre d'État, le crédit d'impôt ne s'appliquant que pour les dépenses payées entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2009, je me permets de vous demander si vous comptez proroger ce dispositif de trois ans, c'est-à-dire jusqu'en 2012.
A vous entendre, monsieur le ministre d'État, cette loi serait une grande loi, très vaste, qui bouleversera à la fois nos modes de pensée et d'action. Voilà pourquoi il faut un nouvel instrument de mesure qui ne peut pas être le PIB, celui-ci étant très imparfait, puisqu'il mesure à la fois des biens et des maux.
Les avantages de l'instrument que nous proposons à l'article 1er sont multiples. Tout d'abord, cet indice appelé empreinte écologique a fait depuis maintenant une quinzaine d'années l'objet de travaux scientifiques de bonne facture. Certes, il s'agit d'un indice agrégé, mais une défragmentation est possible pour aboutir à l'empreinte écologique « pâturage », à l'empreinte écologique « forêt » ou encore à l'empreinte écologique « urbanisation », etc. Par ailleurs, c'est un indicateur multiscalaire, c'est-à-dire qu'il peut aussi bien s'adapter à un individu qu'à un ménage, à un immeuble, à un quartier, à une ville, à un pays, à un continent ou à la Terre entière.
Vous allez me répondre que le Gouvernement lui-même s'intéresse à l'empreinte écologique, au travers de quelques officines, comme votre institut des statistiques.
Mais je sais aussi que cette notion a retenu l'attention de la commission Stiglitz qui oeuvre à la définition d'un indicateur plus exact de ce que l'on pourrait appeler le bonheur des nations.
Introduit par la grande conférence de Rio, le Sommet de la Terre, en 1992, le critère de l'empreinte écologique est aujourd'hui pris en compte par un certain nombre de pays et, en France, par le conseil général du Nord-Pas de Calais, les villes de Guingamp et de Besançon ou la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires. Il est en effet fort probable que cet indicateur mesure mieux que le PIB ou les autres indicateurs les effets de nos actes sur l'environnement.
Il présente de surcroît l'avantage d'être agrégé, donc unique, et clair, puisqu'il s'exprime en hectares par habitant et par an et permet ainsi des comparaisons.
Je conclurai en citant quelques exemples d'empreintes écologiques. Celle d'un habitant de la Terre s'élève en moyenne à 2,2 hectares par an alors que la biocapacité de la planète n'est que de 1,7 hectare par habitant et par an. Comme le président Chirac l'a dit à Johannesburg en 2002, nous vivons au-dessus de nos moyens ! Nous ne pouvons continuer à puiser ainsi dans nos réserves. Le développement durable nous impose de passer d'une économie de stocks à une économie de flux car notre capital initial s'épuise. Il nous faut changer de modèle et, pour cela, il faut changer d'étalon. Songez que les États-Unis ont une empreinte écologique de 9,6 hectares par habitant et par an, contre 1,6 pour la Chine, 5,6 pour la France, 2,6 pour le Mexique, 7,6 pour le Canada et 4,2 pour l'Italie.
Le concept fait aujourd'hui école et je vous demande d'adopter cet amendement qui donnera à cette loi l'instrument de mesure spécifique qu'elle exige.
Je pense que M. Cochet a également défendu les amendements 314 et 315 puisqu'il a évoqué l'empreinte écologique, l'amendement 291 se rapportant plus précisément au renversement de la charge de la preuve.
J'émets un avis défavorable à l'amendement 291 car la question est déjà traitée dans le texte – nous en avons d'ailleurs largement débattu en première lecture, en commission, à l'occasion d'un amendement qui, si ma mémoire est bonne, faisait la synthèse des réflexions de députés UMP et SRC et avait été adopté à l'unanimité.
Avis défavorable également sur les amendements 314 et 315 . Nous n'avons pas retenu la notion d'empreinte écologique car, outre la difficulté d'évaluer cette empreinte, nous restons attachés au concept de développement durable, qui repose sur un trépied : la pérennité économique, nécessaire à l'investissement ;le progrès social – rien ne sert d'investir si ce n'est pas pour apporter un mieux-être – ; et le respect de l'environnement.
Personne ne le conteste, les indicateurs actuels ne sont plus adaptés, et c'est pour cette raison que le Président a confié à Joseph Stiglitz la présidence d'une mission pour définir d'autres indicateurs que le PIB. Nous sommes ouverts à toute proposition.
Ce n'est pas une raison pour retenir un indicateur dont le nom est magnifique mais qui est une propriété privée, – ces droits n'ont fait l'objet d'aucun abandon – et qui a fait l'objet des plus extrêmes réserves de la part du Conseil économique, social et environnemental français pour des raisons de méthodologie. Je saisis parfaitement l'intérêt médiatique et politique du concept d'empreinte écologique mais il demeure que cet indicateur est scientifiquement compliqué et que le propriétaire refuse de le partager – ce qui est surprenant venant de gens qui se préoccupent du sort de la planète !
Attendons les conclusions du rapport Stiglitz. Je suis convaincu, comme vous, que nous retiendrons de nouveaux indicateurs mais sur celui-ci, en l'état, je ne puis qu'exprimer les plus extrêmes réserves.
Permettez-moi d'intervenir à mon tour sur la notion d'empreinte écologique. Des réserves ont été émises sur la méthodologie mais l'outil, très « médiatique », est aussi, indéniablement, très pédagogique. Est-il pour autant opérationnel ? J'en crains les effets pervers car il serait assez simple d'« améliorer » l'indicateur : il suffirait d'augmenter la productivité par hectare – et tous les moyens pour cela ne sont pas bons – ou de diminuer le nombre d'habitants, ce qui peut poser un certain nombre de problèmes dans un certain nombre de pays. Il serait prématuré de retenir ce seul indicateur. La commission Stiglitz semble d'ailleurs s'orienter vers une batterie d'indicateurs. Pour ma part, je m'abstiendrai.
Le fait que la notion d'empreinte écologique soit une propriété privée interdit-il au Parlement d'en débattre et au Gouvernement de prendre acte de l'évolution de la réforme des indicateurs ? Il me semble que nous sommes passés bien facilement à l'IDH sans savoir si cet indicateur permet de prendre des mesures satisfaisantes. Pourquoi ne pas trouver un synonyme d'empreinte écologique ?
Cela étant, le progrès doit être pour tous et la question des indicateurs est aussi celle des rapports que l'Occident entretient avec les pays en voie de développement. S'agissant par exemple du marché carbone qui permet à certains d'acheter des droits à émettre des gaz à effet de serre, prenons garde à ce que les pays du Sud ne soient pas perdants. L'empreinte écologique n'est pas destinée à un seul pays mais à l'ensemble de la planète. La France doit donner un signal fort en faveur d'un développement beaucoup plus équilibré qu'il ne l'est aujourd'hui.
Pour vous prouver, Madame la présidente, que je ne souhaite pas prolonger inutilement les débats, je n'interviendrai pas plus longuement sur les deux autres amendements que vous n'avez pas encore appelés, admettant qu'il s'agit d'un « paquet ».
Cela étant, s'il y a peut-être un problème avec le Réseau mondial et notre ami Mathis, que nous connaissons bien, qui est venu en France et qui y a travaillé, est-ce vraiment un obstacle ? S'il s'agit du meilleur indicateur au monde, l'argument de la propriété privée ne tient pas, il suffit de l'acheter ! Il ne va pas le vendre un milliard de dollars tout de même ! Le problème est ailleurs : cet indicateur est-il ou non meilleur que les autres ? Pour ma part, je pense qu'il est meilleur. Vous préférez aujourd'hui le bilan carbone parce qu'il présente l'avantage d'appartenir à tout le monde mais il reste très incomplet : il mesure moins de la moitié de ce que mesure l'empreinte écologique. Celle-ci, au contraire, est un indicateur pertinent pour votre loi en ce qu'il est fractal mais aussi susceptible d'être sectorialisé. Ce n'est certes pas parfait, mais c'est mieux que le bilan carbone car moins partiel !
Ma réponse vaudra aussi pour les trois amendements. L'empreinte écologique n'est pas l'indicateur idéal : outre que l'on n'arrive pas à le partager, de nombreux experts, considérant qu'il n'est pas abouti scientifiquement, lui préfèrent une batterie de douze indicateurs. Ce n'est pas parce que cet indicateur a un joli nom et que vous l'aimez que la représentation nationale doit suivre.
Je n'ai pas opposé l'empreinte écologique à un autre indicateur, j'ai simplement reconnu que nous aurons besoin de nouveaux indicateurs et que les études n'avaient pas encore abouti.
Lors d'une précédente discussion, sur votre proposition de loi, monsieur Cochet, vous avez critiqué la notion de développement durable….
…que vous vouliez remplacer par l'empreinte écologique. Non : l'empreinte écologique est un indicateur du développement durable mais il y en aura d'autres. Et je crois que les choses sont maintenant claires sur ce point !
(L'amendement n° 291 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 314 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 315 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 76 .
La parole est à Mme Frédérique Massat.
En tête de la loi, l'article 1er pose des principes mais nous ne saurions nous en tenir, pour promouvoir un nouveau modèle de développement durable, aux seules notions de respect de l'environnement et de diminution des consommations. L'amendement 76 vise donc à introduire celles de régulation et de redistribution permanente des ressources et des richesses. En effet, le marché est loin d'être vertueux et cet ajout permettra de mieux prendre en compte les besoins réels de nos concitoyens.
Monsieur le rapporteur, vous allez me répondre, comme vous l'avez fait en commission, qu'il s'agit là de questions théoriques. Ce serait oublier que nous sommes à l'article premier, lequel a pour objet de poser des principes.
Madame Massat, puisque je suis obligé de recourir à un second argument en vue de m'opposer à votre amendement, je vous rappellerai que l'alinéa 1 évoque la nécessité d'assurer « un nouveau modèle de développement durable qui respecte l'environnement et se combine avec une diminution des consommations en énergie, en eau et autres ressources naturelles ».
Il convient, dans le cas du Grenelle de l'environnement, d'en rester à l'objectif que résume le « trois fois vingt » – 20 % de baisse de la consommation énergétique, 20 % de baisse des émissions de gaz à effet de serre et 20 % d'énergies renouvelables –, et non pas, dans un tel cadre, de conduire une politique de compensations à caractère social. Une telle politique peut être nécessaire dans d'autres cas – nous l'avons évoquée notamment à propos de la tarification du gaz – mais, je le répète, tel n'est pas l'objet de l'article 1er, qui pose les principes du Grenelle de l'environnement.
C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable à l'amendement n° 76 .
Même avis.
Monsieur le rapporteur, le développement durable, ce n'est pas uniquement le « trois fois vingt » !
Dans la mesure où l'article 1er pose le principe, nécessairement symbolique et fort, d'un nouveau modèle de développement durable, il ne saurait être question de le limiter ! Sinon, il ne faut pas parler de développement durable !
Si on évoque un tel développement, il convient de le concevoir dans sa globalité, à savoir dans sa dimension non seulement économique mais également sociale. Vous faites à mes yeux une erreur en refusant d'inscrire cette dimension à l'article 1er.
Madame, je vous invite simplement à relire la dernière phrase de l'alinéa 3 qui évoque « le développement économique et le progrès social ».
(L'amendement n° 76 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 75 .
La parole est à Mme Geneviève Gaillard.
Cet amendement vise à substituer à la dernière phrase de l'alinéa 1, qui précise que la présente loi « assure une croissance durable sans compromettre les besoins des générations futures », la phrase suivante : « Ce modèle de développement durable doit permettre de répondre aux besoins du présent, en particulier des plus défavorisés, sans compromettre l'avenir des générations nouvelles ».
Tout d'abord, en ce qui concerne la forme, peut-on écrire qu'une loi « assure une croissance durable sans compromettre les besoins des générations futures » ? À mes yeux, c'est le « modèle de développement durable » que nous souhaitons instaurer qui peut assurer une telle croissance !
Ensuite, en ce qui concerne le fond, je rappelle que l'alinéa 1 précise que la présente loi « assure un nouveau modèle de développement durable » : le ministre d'État pourrait-il nous préciser de quel modèle il s'agit ? En effet, je n'ai pas le sentiment que nous soyons entrés dans un nouveau modèle de développement durable ! De plus, il convient de nous rappeler que ce sont les plus défavorisés qui font le plus souvent les frais d'un système fondé sur l'accroissement des bénéfices et la rémunération du capital. S'il appartient donc au développement durable en lui-même de répondre aux besoins du présent, il doit le faire en prenant également en considération les plus défavorisés, les problèmes d'environnement étant intimement liés aux problèmes sociaux et sociétaux.
Si nous ne procédons pas à la substitution de phrase proposée par l'amendement, nous persévérerons dans l'erreur, voire la faute, que nous commettons depuis longtemps, qui consiste à penser qu'environnement et problèmes sociaux sont totalement déconnectés, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
Le fait que la majorité recoure au mot « croissance » est révélateur d'une problématique que nous souhaitons évidemment corriger en vue d'adopter un texte qui réponde exactement à nos souhaits.
Madame Gaillard, je suis surpris de votre argumentation puisque la dernière phrase de l'alinéa 1, que vous voulez remplacer, provient d'un des amendements socialistes que j'ai acceptés en première lecture, amendement qui me semblait tout à fait conforme à la notion de durabilité. J'avais du reste précisé qu'à partir du moment où la croissance est durable, elle prend en compte les besoins des générations futures !
En ce qui concerne la notion de solidarité envers les plus défavorisés, je vous renvoie à l'alinéa 3 que j'ai déjà cité, lequel évoque « le progrès social ».
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a émis un avis défavorable.
Sans être certain d'avoir tout compris, je m'aperçois que ce sont les mots « croissance durable » avec lesquels vous êtes en désaccord.
Peut-être soulevez-vous ainsi le vrai problème que pose cette grande mutation : au fond, vous ne croyez pas au développement durable ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Je le dirai autrement si mes propos vous blessent : sachez, en tout cas, qu'ils ne dissimulent aucune malignité.
Lorsqu'on raisonne toujours sur le même modèle, on finit par penser que seule la décroissance est possible : dès lors, les mots « croissance durable » dérangent. Tel est, à mes yeux, le sens de votre amendement.
Au contraire, nous croyons réellement à la croissance verte et à la croissance durable et pensons que nous sommes capables d'une vraie rupture en termes de comportements, de technologies et d'écoconstruction.
Si le sens de votre amendement est celui que j'ai dégagé, sachez que j'y suis défavorable. Mais peut-être me suis-je trompé !
Vous vous êtes effectivement trompé, monsieur le ministre, car le développement durable est, lui aussi, une forme de croissance. Simplement, il inclut des facteurs supplémentaires à ceux qui entrent dans ce que vous nommez la « croissance durable ».
Le développement humain, compris dans son intégralité, inclut obligatoirement une forme de croissance. En revanche, si nous continuons de recourir au mot « croissance » sans évoquer le développement durable ou en séparant les deux notions, nous n'arriverons jamais à réaliser les souhaits que nous pouvons avoir en la matière. Le recours aux mots « croissance durable » n'a, à mes yeux, aucune signification. C'est le « développement durable » qui est important, car il entraîne obligatoirement la création de richesses qui ne sont pas toutes calculées à l'aune du PIB : il s'agit des richesses humaines et naturelles qu'il convient de défendre.
Je ne suis donc pas favorable à la décroissance : je suis favorable au développement durable !
(L'amendement n° 75 n'est pas adopté.)
Cet amendement concerne lui aussi la dernière phrase de l'alinéa 1.
Monsieur le ministre, les deux dernières phrases de cet alinéa, qui précisent que la présente loi « assure un nouveau modèle de développement durable » – je vous épargne le baratin qui suit –, ainsi qu'« une croissance durable sans compromettre les besoins des générations futures », ne sont que de la bouillie conceptuelle sans aucune pertinence politique.
Vos propos ne sont guère gentils pour le groupe socialiste auquel, je le rappelle, on doit cette dernière phrase grâce à l'adoption d'un amendement en première lecture !
Peut-être, mais peu importe !
Alors que le « développement durable » est déjà un oxymore dépourvu de sens – chacun le sait aujourd'hui ! –, lui associer la « croissance durable » me paraît totalement ubuesque ! « Croissance » signifie en effet – ce n'est pas M. Muet qui me démentira – que l'économie est affectée, tous les ans, d'un taux, certes plus ou moins variable, mais toujours positif ! Il s'agit donc d'une forme de croissance exponentielle. Adjoindre « durable » à « croissance » en feignant de croire qu'il en sera de même en 2100, en 2500 ou en 3000, c'est complètement idiot ! Monsieur le ministre, adopter une loi contenant ces deux phrases vous ridiculisera en Europe ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Ce n'est pas parce que vous en désaccord avec nous que cela vous autorise à nous insulter !
Supprimez ces deux phrases ! Elles n'ont aucun sens ! C'est du crétinisme neuronal ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Oui, je le maintiens ! Ce n'est plus une question d'idéologie, ni même de poésie : on nage dans le n'importe quoi ! Je le répète : supprimez ces deux dernières phrases, sans quoi vous serez ridicule !
Tel est le sens de notre amendement. L'« empreinte écologique » a au moins pour elle de bénéficier d'un petit fondement scientifique ! En revanche, ces deux dernières phrases sont nulles, archinulles ! Elles prouvent que leur auteur ne sait même pas ce qu'est une fonction exponentielle ou un taux de croissance ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Le « crétin » suit l'avis de la commission !
Comme cela a été rappelé, la « croissance durable » est un oxymore parce que la croissance ne peut pas être durable. En revanche, le « développement durable » n'est pas un oxymore parce que, comme l'a expliqué Geneviève Gaillard, il s'agit alors de passer du quantitatif au qualitatif.
Les mots « croissance verte », quant à moi, me conviennent, parce qu'ils traduisent la volonté d'inscrire la croissance dans le développement durable.
Je suis saisie d'un amendement n° 78 .
La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut.
La part qui, aux alinéas 6 et 7, a été réservée à l'outre-mer dans les principes fixés à l'article 1er me paraît insuffisante.
Monsieur le ministre, j'ignore notamment qui a écrit l'alinéa 6, mais vous ne devez pas être satisfait de sa rédaction : « Pour ce qui concerne les régions, les départements et les collectivités d'outre-mer, compte tenu de leurs caractéristiques environnementales et de la richesse de leur biodiversité, l'État fera reposer sa politique sur des choix stratégiques spécifiques qui seront déclinés dans le cadre de mesures propres à ces collectivités ». Pensez-vous que cette rédaction traduise une réelle ambition ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Pensez-vous vraiment qu'un alinéa aussi indigent fera rêver ? Il témoigne surtout d'un crétinisme neuronal ! (Sourires.)
Dans le crétinisme subliminal !
C'est la raison pour laquelle nous souhaitons inscrire le mot « ambition » dans le texte – du reste, M. Letchimy a signé l'amendement n° 78 – en insérant après l'alinéa 1 un alinéa disant que la présente loi « affiche une grande ambition pour les collectivités territoriales de l'outre-mer, qui contiennent une grande part de la biodiversité de la France. »
Vous qui suivez ces questions avec une grande compétence, monsieur le ministre, vous n'êtes pas sans savoir que la limite de la zone économique exclusive s'étend jusqu'à 200 milles autour de nos îles dans l'océan Pacifique,…
À combien, dites-vous ?
…à 200 milles, et que la limite d'extension du plateau continental atteint 350 milles suivant la convention de Montego Bay – je ne passe pas un examen ! Du reste, si vous contestez ces chiffres, nous nous verrons plus tard, monsieur le ministre. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Gentiment, cela va de soi !
Compte tenu du fait que cette extension représente quelque 10 millions de kilomètres carrés, il est nécessaire, à mes yeux, que l'article 1er évoque une « ambition » pour l'outre-mer – M. Letchimy et moi en avons discuté en commission et sommes tombés entièrement d'accord sur le sujet.
Même si nous avons réussi, en première lecture, à inscrire l'outre-mer aux alinéas 6 et 7, il convient, je le répète, de mentionner après l'alinéa 1 cette ambition pour l'outre-mer. C'est ainsi que la Guyane – une députée élue dans ce département est à nos côtés ce soir – contient une grande part de la biodiversité de la France, s'agissant par exemple des insectes. La biodiversité marine du Pacifique est de même très importante.
Vous n'avez pas souhaité que l'on discute en commission de cette partie de l'article 1er…
On a discuté de tous les articles et de tous les amendements ! On n'a pas adopté vos amendements parce qu'ils n'étaient pas bons !
Non, vous avez refusé de revenir sur certains articles ! D'ailleurs je lis ici : « Article 1er (Non modifié.) » Vous aviez décidé, a priori, de ne pas modifier certains articles.
Pour ma part, je pense que l'on peut améliorer des textes – je le dis sans agressivité – et que notre phrase améliorerait considérablement celui-ci.
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
Ce qui est en train de se passer me surprend. Je ne comprends plus rien !
Écoutez la perfidie du président ! (« Oh ! » sur les bancs du groupe UMP.)
On nous reproche de présenter des textes en urgence, excluant une discussion en deuxième lecture. J'accepte bien volontiers ces critiques.
Mais dans le cas présent, il s'agit d'une deuxième lecture et je ne comprends plus rien : vous présentez des amendements qui démontent vos propres amendements adoptés en première lecture. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Madame Gaillard, votre amendement remettait en cause un amendement socialiste que nous avions adopté. Quant à vous, monsieur Le Déaut, vous venez de défendre un amendement qui remet en cause les alinéas 6 et 7 que nous avons adoptés en commission, en première lecture, sur proposition de M. Letchimy ici présent.
Nous avons fait un effort pour aller dans le sens de la reconnaissance de l'outre-mer car ces observations étaient légitimes. Alors je ne comprends plus rien à ce qui passe ! Si vous avez des problèmes conceptuels, réglez-les ailleurs entre vous, mais ne consacrons pas notre temps à défaire en deuxième lecture ce que nous avons accepté de faire avec vous, sur la base de vos amendements, en première lecture ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Même avis.
Je voudrais formuler une confirmation, une observation et une demande que vous allez comprendre, monsieur le président Ollier.
Oui, mon amendement n° 46 , d'où sont sortis les alinéas 6 et 7, a été voté à l'unanimité en commission et ici.
Ce que je demande à M. Le Déaut de retirer, ce n'est pas son amendement mais son argumentaire qui me semble dépasser sa pensée. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Premièrement, puisque je risque d'être dans le cercle des crétins comme le ministre,…
…je vous sollicite pour que l'on abroge collectivement ce type d'expressions.
Merci, madame la présidente.
Deuxièmement, je voudrais donc dire à M. Le Déaut que je ne suis pas tout à fait d'accord avec son argumentaire. L'amendement que j'ai présenté et qui est contenu dans l'article 1er aux alinéas 6 et 7 est destiné à donner une vraie capacité de gouvernance aux collectivités locales d'outre-mer, au titre de l'article 73-3. Il s'agit d'un vrai débat de fond, c'est très important.
Cela revient à habiliter la Martinique, par exemple, à prendre des décrets et à faire des lois sur l'environnement et le développement durable – gardons cette expression même si elle est insatisfaisante –, étant entendu qu'il est difficile de dicter de Paris tous les comportements souhaitables vis-à-vis d'une culture nouvelle du développement : le risque, l'agriculture, etc.
Il nous reste à préciser le cadre de l'habilitation, afin de donner aux collectivités qui le souhaitent le pouvoir de légiférer sur ces sujets. Cela me semble indispensable. Mais, en attendant, ces alinéas ouvrent une vraie possibilité.
Ce que propose M. Le Déaut ne se situe pas à l'alinéa 7. Son amendement est très clair.
Il propose, après l'alinéa 1, d'insérer l'alinéa suivant : « Elle affiche une grande ambition pour les collectivités territoriales de l'outre-mer, qui contiennent une grande part de la biodiversité de la France. »
C'est après l'alinéa 1, il ne faut pas confondre ! Monsieur le président Ollier, il s'agit de deux choses totalement différentes. Mon amendement est immuable : il est voté, il est clair, on ne peut pas le changer !
Il est remarquable ! C'est vous qui avez employé l'expression d'outre-mer remarquable, monsieur Gest ! Parler d'un amendement remarquable, ce n'est pas produire un oxymore mais employer un synonyme tout à fait acceptable.
Cela étant entendu, l'article 1er et l'alinéa 1 donnent des grands axes et affirment des principes intangibles. Et c'est très important ce que dit M. Le Déaut. On lance le Grenelle de l'environnement, y compris le Grenelle de mer, en faisant l'affichage de l'outre-mer, sa biodiversité, sa richesse marine et terrestre. On dit une multitude de choses qui pourraient permettre à ces pays d'entrer dans le cercle correct d'un progrès social, humain et écologique, leur offrant d'autres perspectives en matière de développement tout court – création d'activité, etc. On ne peut pas faire et dire cela sans en faire un point fort. À cet égard, je trouve que la déclaration de M. Le Déaut est excellente et qu'elle ne gêne en rien parce que le Grenelle est justement fondé sur la richesse environnementale de l'Hexagone et de l'ensemble de l'outre-mer.
L'amendement de M. Le Déaut s'insérerait à la fin de l'alinéa 1 et non pas de l'alinéa 7 : il ne changerait pas ce que nous avons obtenu. Après la dernière phrase de l'alinéa 1 – « Elle assure une croissance durable sans compromettre les besoins des générations futures » –, M. Le Déaut propose d'ajouter : « Elle affiche une grande ambition pour les collectivités territoriales de l'outre-mer, qui contiennent une grande part de la biodiversité de la France. » Ce n'est pas un mensonge ! C'est une vérité, c'est clair, ça coule de source !
Excellent ! Serge Poignant pourrait me dire : c'est normal, c'est la vérité. Si c'est le cas, il vaut mieux l'écrire !
Cela permet aux administrations, notamment aux ministères et aux ministres, de ne pas oublier de se plier ce schéma pour chaque action technique, financière ou publique.
En conclusion, je dirai qu'il s'agit peut-être d'une voie nouvelle de responsabilité du développement pour l'ensemble de ces pays, afin qu'ils ne soient plus décrits comme des sociétés de consommation vivant de l'assistance.
Ce point fort ne change absolument rien, sinon vous seriez vous-mêmes en contradiction avec tous les documents que vous avez publiés sur papier glacé, et il donne une importance fondamentale et inoubliable aux régions et départements d'outre-mer. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Les questions abordées par nos collègues sont particulièrement importantes. Toutefois, je ne suis pas tout à fait d'accord avec la rédaction de l'amendement : vous n'abordez pas la question spécifique de toute une partie de l'outre-mer parce que vous vous référez aux collectivités territoriales d'outre-mer, comme l'alinéa 6 évoque « les régions, les départements et les collectivités d'outre-mer. »
Or une bonne partie de notre outre-mer possède un statut spécifique, notamment les Terres antarctiques et australes françaises et les îles dites « éparses » situées dans l'océan Indien et le canal du Mozambique.
Hier soir, lors de l'examen de la loi de programmation militaire, nous en parlions en relevant l'intérêt vital pour notre pays de pouvoir protéger toute sa zone économique exclusive.
L'îlot de Clipperton présente une autre situation très spécifique : il fait partie du domaine public de l'État sans avoir le statut de collectivité territoriale. Or les zones économiques exclusives de cet îlot, d'une grande biodiversité, sont plus étendues que celles qui sont liées à la métropole : près de 450 000 kilomètres carrés pour l'îlot de Clipperton contre quelque 340 000 kilomètres carrés pour la métropole. L'île Tromelin, située entre Mayotte et La Réunion, a une zone économique exclusive de 250 000 kilomètres carrés, sans pour autant faire partie d'une collectivité territoriale d'outre-mer.
Si l'on voulait vraiment toucher la totalité de nos 10,5 millions de kilomètres carrés de zones économiques exclusives – le deuxième domaine maritime du monde, après celui des États-Unis et très loin devant ceux de pays tels que la Grande-Bretagne ou l'Australie –, il faudrait tenir compte de la spécificité de ces territoires qui ne sont pas des collectivités et dont l'un fait partie du domaine public de l'État.
Il existe un enjeu de biodiversité très important dans ces secteurs. Cela méritait d'être souligné.
Je n'ai pas compris la réaction de M. Ollier à cet amendement à l'article 1 : les alinéas 6 et 7 étaient faits. Quant aux termes qu'on me reproche, je n'en ai pas la paternité ; c'est un autre parlementaire qui les avait employés tout à l'heure.
J'approuve les propos de notre ami Folliot, et je vais faire une proposition qui en tient compte. Il est très important d'inscrire dans l'article 1er, dans les grands principes, le fait que la grande zone de biodiversité de notre pays se situe dans l'outre-mer en général et pas forcément dans les collectivités.
Je propose par conséquent de rectifier ainsi mon amendement : « Elle affiche une grande ambition pour l'outre-mer qui contient une grande part de la biodiversité de la France. » Sensible aux arguments qui viennent d'être exposés, je supprime donc la notion de « collectivités territoriales ».
Avis défavorable (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC.) Dans cet article 1er, nous avons pris en compte tous les éléments nécessaires, et nous avions d'ailleurs adopté l'amendement de M. Letchimy à l'unanimité car, effectivement, cet article souffrait d'un manque qui a été ainsi comblé.
Je répète que l'objectif, dans le maximum de cas, est d'avoir des avis conformes avec le Sénat parce que nous sommes en deuxième lecture et que plus de 600 amendements ont déjà été adoptés. L'amendement proposé par M. Le Déaut n'apporte aucune idée nouvelle. La commission émet donc un avis défavorable à son sujet comme sur les amendements à l'article 1er qui suivent et qui relèvent du même esprit.
(L'amendement n° 78 , tel qu'il a été rectifié, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 77 .
La parole est à M. Philippe Tourtelier.
Cet amendement propose de compléter l'alinéa 2 par la phrase suivante : « Tous les grands projets publics seront désormais appréciés en intégrant leur coût pour le climat et leur coût pour la biodiversité. »
Nous demandons ce rajout faute d'avoir obtenu une réponse à cette question que nous avons souvent posée : pourquoi le Gouvernement ne gèle-t-il pas ses réorganisations de services publics, les cartes judiciaire ou hospitalière ? Pourquoi ne pas faire le point sur les conséquences environnementales de tous ces regroupements ?
En première lecture, vous avez répondu que cela remettrait en cause la carte judiciaire. Peut-être ! Nous n'en savons rien à l'avance, mais il faut regarder. Certains tribunaux des affaires sociales vont être supprimés, alors qu'une affaire ne peut être plaidée qu'en présence du justiciable : moins de TAS signifie plus de déplacements. Observons les effets !
En commission, M. le ministre m'a répondu que ce serait fait pour les bâtiments. Ce n'est pas la question ! Nous vous interrogeons sur les déplacements induits, sur les transports. Faisons les calculs et analysons-les ! Je serais taquin, à entendre le rapporteur. Ce n'est pas une réponse ! Pourquoi ne vous engagez-vous pas à faire cette analyse au moins sur les regroupements qui ne sont pas encore effectués, comme celui des TAS ? Nous voulons une réponse. Si vous ne le faites pas pour le climat, on peut s'inquiéter de ce que sera réellement votre défense de la biodiversité.
La rédaction que vous proposez, monsieur Tourtelier, est excellente, mais votre amendement est complètement satisfait par l'alinéa 2, qui inverse la charge de la preuve. Cette disposition, longuement débattue, fait la synthèse entre plusieurs propositions : la mienne, celle de votre groupe et celle défendue par le groupe UMP à l'initiative de Serge Poignant et d'Alain Gest.
Avis défavorable.
Même avis que la commission.
La réponse de M. le rapporteur est intéressante, mais j'aimerais avoir des précisions en rapport avec la question posée par Philippe Tourtelier. L'expression : « décisions publiques », retenue dans l'alinéa 2, vise-t-elle les seuls investissements ou aussi le fonctionnement, c'est-à-dire les services et les prestations aux usagers ? Si elle comprend bien ces deux aspects, on peut éventuellement se rallier à vos arguments ; si elle ne vise que les investissements, elle ne peut nous satisfaire.
La rédaction est on ne peut plus claire, monsieur Brottes : « Pour les décisions publiques susceptibles d'avoir une incidence significative sur l'environnement, les procédures de décision seront révisées pour privilégier les solutions respectueuses de l'environnement […]. »
Peut-être le Grenelle 2 ou certaines circulaires d'application pourront-ils préciser ce point, encore que ces dernières ne seront sans doute pas nécessaires en la matière.
Je ne suis pas sûr que l'on ait bien mesuré l'importance de cet article, ni sa gravité pour les décisions publiques. Apport considérable de l'Assemblée lors de la première lecture, il ne figurait pas dans le Grenelle, qui n'avait osé aller jusque là.
Il a été voté à l'unanimité, moyennant la prise en compte de la notion de « coût raisonnable ».
Cet article est probablement, à terme, le plus structurant du projet de loi ; il faut, je le répète, en prendre toute la mesure. Il y aura des alternances politiques, et nous avons tous le souci du développement raisonnable de notre pays. C'est un article lourd de conséquences, et je rends hommage à l'Assemblée de l'avoir introduit.
Je comprends, monsieur le ministre, que vous parliez de texte important : en matière d'investissements et de fonctionnement, les décisions publiques, est-il écrit, « seront révisées pour privilégier les solutions respectueuses de l'environnement ». De mon point de vue – mais j'aimerais que l'on me démente si je me trompe –, cela répond à la question posée par François Brottes, à laquelle n'avait pas répondu M. le rapporteur.
(L'amendement n° 77 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 79 rectifié .
La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut.
L'article 1er, monsieur le ministre, est un article essentiel du Grenelle de l'environnement. Même si les débats ont été passionnés en première lecture, notre assemblée a voté – à quatre exceptions près – le texte du Grenelle. En l'absence de procédure accélérée, la logique du débat parlementaire est d'enrichir le texte au fil des lectures à l'Assemblée et au Sénat. Il n'est à cet égard pas interdit de considérer que l'article 1er reste incomplet ; d'où le présent amendement.
Le réchauffement climatique est un problème qui exige une stratégie nationale, coordonnée au niveau européen, mais qui ne peut être résolu s'il n'est traité à l'échelle mondiale qui est la sienne. L'alinéa 4 évoque la coordination avec la « stratégie européenne » ; mais la coordination mondiale, notamment entre le Nord et le Sud, est indispensable. Nous en avons d'ailleurs parlé en évoquant l'outre-mer.
Une grande partie de la biodiversité se trouve dans les pays du Sud, pays souvent pauvres où n'a été menée aucune politique énergétique. Pourquoi, par exemple, le solaire n'a-t-il pas été développé en Afrique, de sorte que l'on ne peut y assurer la conservation des médicaments ? Pourquoi près d'un milliard de personnes n'ont-elles pas accès à l'autosuffisance alimentaire ? Ignorer les rapports Nord-Sud dans le présent article pour se borner à la référence européenne serait une erreur. Les principes fondateurs du Grenelle, c'est-à-dire le développement durable et la préservation de la biodiversité, devraient en tenir compte.
C'est le but de cet amendement, qui propose d'insérer, après l'alinéa 4, l'alinéa suivant : « La présente loi conforte la dimension développement durable comme une priorité de notre politique de coopération notamment dans les domaines de l'alimentation, de l'eau, de l'énergie, de la santé, de l'éducation et du respect de la biodiversité. » Voilà qui complèterait utilement l'article 1er qui, en effet, monsieur le ministre, est fondateur pour notre pays.
Défavorable. L'alinéa 3 prend en compte toutes les politiques publiques, y compris, bien sûr, la coopération internationale. Évitons les listes : on y oubliera toujours quelque chose. L'expression générique proposée par l'article suffit.
Même avis.
Je veux revenir d'un mot, monsieur le ministre, sur le débat précédent.
L'alinéa 2 est très précis, disiez-vous ; mais permettez-nous d'en douter : du point de vue juridique – et vous êtes un spécialiste –, qu'est-ce qui est « significatif » et « raisonnable » ? Est-ce quantifiable ? Parler de grande précision me semble un peu osé pour des notions qui ne sont pas sans rappeler la durée de refroidissement du canon du fusil.
Je veux appuyer les propos de M. Le Déaut, qui a défendu un amendement tout à fait fondamental.
Votre réponse, monsieur le rapporteur, ne me satisfait pas. La rédaction de l'alinéa 3 reste en effet trop vague par rapport à la perspective évoquée ; j'apporterai d'ailleurs, dans les prochains jours, la preuve que vous ne voulez pas vous y engager. J'ai en effet présenté quantité d'amendements en faveur d'une politique de coopération respectueuse des pays du Sud.
Nous en discuterons lors de leur examen en séance.
Vous ne voulez pas discuter, par exemple, des effets terribles, pour certains pays, de nos importations de biocarburants : faim, exode rural et désertification. Dans le domaine de la santé, des entreprises pharmaceutiques françaises choisissent d'abandonner la production de certains médicaments, trop peu lucrative, ce qui aura des conséquences tragiques pour des populations qui souffrent dans des pays en développement. Et l'on pourrait prendre bien d'autres exemples encore.
L'amendement n° 79 rectifié conforterait le texte et aurait toute sa place dans cet article qui, comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, est fondateur.
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
Puisque chacun argumente, je veux à mon tour dire un mot.
J'aimerais que les auteurs des amendements s'efforcent de rendre ceux-ci lisibles. Puisque vous jugez l'amendement exceptionnel, que signifie, en droit, « la dimension développement durable » ? Quand vous m'aurez répondu, peut-être pourrai-je approuver la mesure.
(L'amendement n° 79 rectifié n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 277 .
La parole est à M. André Chassaigne.
En effet, et je vais le démontrer.
Du sort qui lui sera réservé peut dès lors dépendre le vote de beaucoup de députés sur le projet de loi.
Vous trouverez toujours de bonnes raisons de ne pas le voter !
Le Sénat a opportunément complété l'alinéa 5, en introduisant un passage commençant par les mots : « et en rend compte chaque année […] », mais qui se conclut – et je me tourne notamment vers vous, chers collègues socialistes – par l'expression suivante : « au regard du principe de stabilité de la pression fiscale pesant sur les particuliers et les entreprises. »
Il s'agit d'une adjonction idéologiquement marquée, qui détourne l'esprit du texte d'origine. En outre, cette expression est en contradiction avec vos analyses, monsieur le ministre. J'ai sous les yeux un article fort intéressant sur l'étude d'impact du projet de loi de programme relatif à la mise en oeuvre du Grenelle. « Les objectifs ambitieux inscrits dans la loi Grenelle », écrivez-vous, « nécessiteront la mobilisation de moyens financiers conséquents. » Mieux encore, vous citez des chiffres : « Les grands chantiers du Grenelle (bâtiments, transports, énergie, déchets) représenteront près de 400 milliards d'euros d'investissements d'ici 2020 ; ils pourraient générer de l'ordre de 15 milliards d'euros de valeur ajoutée par an », soit un déficit de 25 milliards par an. Or, malgré cette démonstration qui se poursuit sur plusieurs pages, le Sénat appelle une écologie à coût zéro, ce qui, comme chacun le sait, est absolument impossible.
Si l'on peut donc admettre le début du texte ajouté par le Sénat, supprimons, à la fin de l'alinéa, les mots : « au regard du principe de stabilité de la pression fiscale pesant sur les particuliers et les entreprises. » On sait très bien qu'une telle référence, trop rigide, aurait un effet paralysant, et qu'elle repose sur un postulat idéologique qui remet en cause l'unanimité dont vous avez, monsieur le ministre, beaucoup parlé. Enfin, au plan constitutionnel, elle contrevient à l'article 4 de la Charte de l'environnement puisqu'elle nie, dans les faits, le principe du « pollueur-payeur ».
La commission est défavorable à cet amendement. Il me semble bon de prévoir que le rapport dont il est ici question est fondé sur le « principe de stabilité de la pression fiscale ». Il est toujours facile d'inventer des taxes, il est plus difficile et plus courageux de s'obliger à une politique de redéploiement. Nous avons essayé de bâtir toute la logique du Grenelle sur une politique d'incitation, plutôt que sur la pénalisation. C'est dans cet esprit que ce rapport sera rédigé. Nous avons tout intérêt à privilégier des politiques qui incitent les entreprises et les particuliers à investir, plutôt que de chercher à tout prix des coupables, à punir, et de faire en sorte que cela coûte davantage. Rappeler le principe de stabilité fiscale dans un rapport me semble une très bonne chose.
Monsieur Chassaigne, c'est fou comme la fin d'une phrase peut vous rendre aveugle à son début. À cause des simples mots « entreprises » et « stabilité fiscale », vous faites de cet article une lecture erronée.
Monsieur Chassaigne, vous voudriez vous faire croire à vous-même que cet article fait de la neutralité fiscale la règle ! Or ce n'est pas du tout ce qu'il dit. Certains amendements ont proposé de préciser que l'ensemble de la stratégie devait respecter le principe de neutralité fiscale. J'ai répondu que c'était extrêmement complexe, qu'il y avait du pour et du contre, que certains investissements étaient très productifs, que la dépense d'une année pouvait être extrêmement rentable une autre année. J'ai donc indiqué que le Gouvernement n'y était pas favorable.
En revanche, il me paraît légitime que la représentation nationale soit informée de l'effet qu'aura la mise en place du Grenelle sur les prélèvements des particuliers, qu'elle sache s'ils augmentent de 10 milliards ou s'ils baissent d'autant. L'expression « au regard de » me paraît assez claire. Je ne vois pas pourquoi le Parlement n'aurait pas un droit de regard sur cette stratégie.
Notre collègue Chassaigne a raison de souligner l'ambiguïté de cet article. S'il y était écrit « au regard notamment du principe de stabilité fiscale », on pourrait encore considérer que c'est là un élément d'analyse parmi d'autres. M. le ministre en conviendra, la fiscalité est aussi un élément dynamique : c'est vivant, cela peut avoir des vertus. Tout dépend de sa mise en oeuvre.
C'est le texte : « Le Gouvernement transmet […] un rapport annuel sur la mise en oeuvre des engagements prévus par la présente loi » !
Mais la « stabilité » – qui n'est pas la même chose que la « neutralité », et, à cet égard, votre explication est utile – peut impliquer une prise en compte du volume des prélèvements…
C'est une information !
…ou le maintien des modalités selon lesquelles ceux-ci sont organisés aujourd'hui. Si nous ne changeons rien à la fiscalité, je ne vois pas comment nous pourrons avoir une dynamique dans la prise de conscience et comment nous pourrons faire en sorte que certaines actions deviennent beaucoup plus vertueuses qu'elles ne le sont. La rédaction du Sénat, qui ne mentionne qu'un seul élément d'analyse, est très gênante : on a le sentiment que les choses sont figées et qu'on ne pourra pas utiliser la fiscalité comme élément dynamique.
Le français, c'est le français !
Si l'article 1er de ce texte, qui pose des principes et définit des objectifs, consacre cinq lignes à annoncer la rédaction d'un rapport au seul regard « du principe de stabilité de la pression fiscale », il manque d'ambition.
Tout à l'heure, le président Ollier souriait à propos de l'expression « dimension développement durable » – qui ne me posait aucun problème de vocabulaire.
Mais voilà que vous inventez un nouveau principe constitutionnel, de stabilité de la pression fiscale. Inscrire dans une loi une telle orientation politique, un tel principe de stabilité – qu'on peut certes respecter et partager –, cela me fait sourire bien davantage que la « dimension développement durable ».
On dit simplement que le rapport parle de cela ! Je ne comprends pas pourquoi l'information vous dérange !
(L'amendement n° 277 n'est pas adopté.)
L'amendement n° 80 est un amendement de Victorin Lurel qui apporte une précision pour l'application de l'article 73 de la Constitution.
Quant à l'amendement n° 81 , il mérite une attention particulière. Mme Berthelot parlait cet après-midi de la fabuleuse contribution de la forêt guyanaise en matière de captation de carbone. La richesse de la biodiversité marine et terrestre des départements d'outre-mer est considérable, en effet ; toutefois, alors que nous en étions convenus en commission, le texte ne prévoit à cet égard aucune évolution de la fiscalité locale. Aussi notre amendement propose-t-il qu'un rapport soit remis au Parlement concernant la prise en compte des richesses écologiques apportées par l'outre-mer dans le montant de la dotation globale de fonctionnement de ses collectivités. L'évolution de la DGF pourrait se faire par ce biais et donner à ces collectivités des moyens de mener des politiques de protection, de valorisation, de connaissance des richesses naturelles. La seule structure qui ait été mise en place est une fondation : on s'en remet donc au bon coeur des donateurs. Il faudrait faire un effort supplémentaire. Si, comme on le dit, 80 % de la biodiversité française se trouvent outre-mer, il serait utile de créer les conditions d'intervention des collectivités locales.
L'amendement n° 80 propose de compléter l'alinéa 6 en faisant référence à l'article 73 de la Constitution, mais cette référence figure déjà à l'alinéa suivant. L'amendement est donc satisfait, me semble-t-il.
Quant à l'amendement n° 81 , il demande un rapport sur l'évaluation de la biodiversité. Cela figure déjà à l'article 22, alinéa 4, où il n'est pas question d'un rapport, mais d'une étude sur les « dispositifs permettant d'évaluer et de valoriser les services rendus par la biodiversité à la collectivité et aux acteurs socio-économiques ». Cet article satisfait complètement l'amendement.
J'émets donc un avis défavorable à ces deux amendements, non pas que je sois contre, mais parce qu'ils sont satisfaits.
Même avis.
L'article auquel vous me renvoyez, monsieur le rapporteur, ne répond pas à notre préoccupation. Je parle d'une évolution de la fiscalité locale qui permettrait aux collectivités locales d'assumer leurs obligations.
Monsieur le ministre, vous parlez de paquet « énergie-climat ». Mais nous devons tenir compte d'une des dispositions fondamentales des politiques européennes, la subsidiarité. En l'occurrence, on ignore les politiques possibles à partir de l'application du concept de subsidiarité, qui permet de réaliser des actions au plus près du terrain, sur ce que l'on appelle des territoires pertinents. Comment voulez-vous que ces collectivités, qui doivent déjà assumer un mal-développement persistant, prennent en charge des politiques locales qui seront de plus en plus décentralisées, sans moyens supplémentaires ? Considérez-vous que, en matière d'environnement, d'écologie et de développement durable, la décentralisation acte III n'aura aucun sens ? Quand vous créez des périmètres sensibles ou d'autres formes de politiques liées à la protection marine et à la connaissance de la biodiversité, comment voulez-vous que ces collectivités y participent ?
Il existe une dynamique de richesse liée à l'or vert, la richesse verte, mais en aucune manière on ne tient compte de sa valorisation : je ne parle pas d'une valorisation pécuniaire, mais d'une valorisation fiscale, entrant dans des politiques que ces collectivités locales peuvent assumer sur place. Vous commettez une erreur en ignorant la difficulté pour ces collectivités locales de conduire de telles politiques, notamment lorsqu'elles sont situées à 7 000 ou 12 000 kilomètres de la métropole.
(Les amendements nos 80 et 81 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
(L'article 1er est adopté.)
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 2.
La parole est à M. Pierre-Alain Muet.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais rassurer M. le ministre : nous sommes pour le développement durable, qui implique, au moins pendant plusieurs années, voire plusieurs décennies, la croissance verte. En même temps, nous avons parfaitement conscience que, avec le réchauffement climatique, le modèle de développement économique que nous connaissons depuis la révolution industrielle va dans le mur. Diviser nos émissions de gaz à effet de serre par quatre à l'horizon 2050, c'est un défi que nul n'a jamais eu à relever dans l'histoire. Il suppose que nous utilisions tous les outils, tous les instruments à notre disposition, que nous nous attaquions au problème dans tous les domaines.
Une des conditions du développement durable – nécessaire mais, mon collègue Cochet le reconnaîtra volontiers, pas suffisante –, c'est que, dans le domaine économique, le prix des biens qui sont échangés sur les marchés prenne en compte le coût, pour l'humanité, de la destruction de l'environnement. Cela implique deux choses : que l'on fixe des contraintes quantitatives, des quotas d'émission, et un marché d'échange permet de donner une valeur à ces contraintes, ou que l'on introduise une taxe écologique – en l'occurrence une taxe carbone. Les pays qui s'attaquent réellement au réchauffement climatique utilisent d'ailleurs les deux instruments – le Danemark, la Suède, la Grande-Bretagne –, et il faut vraisemblablement, en effet, cumuler les deux.
On lit, dans l'article 2, que « l'État étudiera la création d'une contribution dite “climat-énergie” ». On a récemment entendu le Président de la République affirmer que cette contribution pourrait abonder un financement pérenne et remplacer, en partie, la taxe professionnelle. Il me semble qu'il y a urgence à mettre en place une taxe carbone. Lors du débat sur le projet de loi de finances rectificative concernant le plan de relance, le groupe socialiste a d'ailleurs proposé un amendement, que n'a pas voté la majorité, et qui comportait un tel dispositif.
Vous avez demandé à la commission présidée par M. Quinet un rapport qui fournit de bons éléments pour construire une telle taxe carbone : il indique que la valeur de la tonne de dioxyde de carbone est aujourd'hui de l'ordre de 32 euros, qu'elle devrait passer à 56 euros en 2020, à 100 en 2030 et entre 150 et 350 à l'horizon 2050.
Cependant, une taxation écologique n'a pas vocation à être pérenne, et je suis surpris que le Président de la République dise que cela pourrait abonder un financement pour les collectivités locales. Si elle est efficace, une taxe écologique fait disparaître son assiette. Sa logique n'est donc pas de rapporter à l'État sur le long terme.
D'autre part, en matière de taxation écologique, on a toujours buté sur une réalité : pour qu'une taxe soit incitative, il faut qu'elle soit forte ; si elle est forte, elle crée des difficultés. Pour les ménages, il faut compenser le coût de la taxe écologique par une part de redistribution : c'est la logique d'utilisation du deuxième dividende pour une politique redistributive qui permettrait par exemple aux ménages modestes de ne pas supporter le coût d'une taxe carbone. Pour ce qui est des entreprises, les pays qui ont mis en place des taxations écologiques efficaces – comme, je crois, la Suède – ont également suivi une politique redistributive. On peut imaginer qu'on taxe la consommation de carbone des entreprises et que, en contrepartie, on redonne une partie de cette taxe proportionnellement à l'emploi créé. Cela offre bel et bien un double dividende, y compris en termes incitatifs, puisque cela favorise les économies d'énergie tout en stimulant l'emploi. Il est urgent que nous ayons ce débat. Le groupe socialiste fera d'ailleurs rapidement des propositions dans ce domaine.
De tout cela résulte, en tout cas, que, pour être efficace, une taxation écologique doit être solidaire. Cette solidarité doit, du reste, être également appliquée à l'échelle internationale. À ce propos, l'article 2 mentionne le mécanisme d'ajustement aux frontières. Un tel dispositif est, certes, nécessaire si l'on veut que les échanges mondiaux incorporent le coût de l'émission de carbone pour l'humanité. Mais une contrepartie est nécessaire, laquelle pourrait prendre la forme du principe général énoncé dans l'amendement de M. Le Déaut, principe selon lequel les innovations destinées à lutter contre le réchauffement climatique dans les pays développés doivent être transmises au coût le plus bas aux pays en développement.
Enfin, il y a urgence. La situation économique actuelle contraint tous les pays du monde à mettre en oeuvre des plans de relance. Au reste, celui qui a été élaboré par le Gouvernement n'est, selon nous, pas suffisant ; il devrait représenter deux points de PIB, cette année comme l'année prochaine. Or, dans son rapport, Nick Stern estime que plus on attend, plus le coût de la lutte contre le réchauffement climatique est élevé et que si l'on y consacrait chaque année jusqu'en 2020 au moins 1 % du PIB, on parviendrait à inverser la tendance.
La situation actuelle nous offre donc, à cet égard, une opportunité formidable. En effet, les plans de relance pourraient comporter des mesures de croissance verte.
En conclusion, si l'article 2 traduit de bonnes intentions, les mesures qui l'accompagnent implicitement ne sont pas à la hauteur. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le ministre, il est évident – et je sais que vous en êtes convaincu – qu'il faut impérativement lutter contre le changement climatique actuel et à venir. Certes, d'aucuns rappellent que notre planète a déjà connu de multiples changements de ce genre. Mais leur échelle temporelle n'a jamais été celle des civilisations. Or, aujourd'hui, il est urgent d'agir, car nous sommes nombreux à croire qu'il en va de la survie de l'humanité. Les changements ont lieu sous nos yeux et, si nous ne réagissons pas – la France la première, car elle doit montrer l'exemple –, nous serons confrontés à des difficultés majeures : déplacements de populations, réfugiés climatiques, guerres de l'eau – j'en passe, et de pires encore.
Nos amendements, sur lesquels vous porterez, je l'espère, un regard bienveillant, soulèvent de nombreuses questions. Je veux parler notamment de la fonte dramatique de la banquise en Arctique, qui contribue, avec le pôle sud, à l'équilibre climatique de la planète. Je pense également à la plantation de végétaux pérennes, dont on sait qu'ils sont importants pour le stockage du carbone. Enfin, pour prolonger le propos brillant de notre collègue Muet, je tiens à dire qu'il est très urgent de créer une véritable taxe carbone.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaiterais évoquer un aspect du changement climatique qui n'est presque jamais abordé, mais qui mériterait d'être étudié. J'ai aujourd'hui cinquante-trois ans et j'ai vu le climat changer. Sur les territoires immenses où je vis, le tissu végétal a pris une importance considérable. Ainsi les forêts sont beaucoup plus étendues aujourd'hui qu'au Moyen Âge, de sorte que les prairies et les paysages disparaissent.
Surtout, on constate qu'après dix jours de soleil consécutifs, l'eau manque, alors qu'on pourrait penser que les nappes phréatiques se sont reconstituées, particulièrement au cours d'une année pluvieuse comme celle-ci. Pourquoi ? Parce que la végétation est si abondante que l'évapotranspiration est considérable : l'eau s'évapore à une vitesse phénoménale.
Moi qui observe la nature en rural et en banlieusard – à la différence de M. Cochet, qui l'observe en citadin…
Pardonnez-moi. Je voulais simplement dire qu'il y a deux manières bien différentes d'observer la nature. En tout état de cause, je constate que les précipitations sont beaucoup plus violentes et rapides. Mais on ne tient pas compte de ces éléments.
J'ajoute que nos aînés avaient l'habitude d'entretenir les cours d'eau, où ils trouvaient les matériaux nécessaires à l'entretien de leurs chemins et à la construction de leurs maisons. C'était en effet le temps béni où, faute de moellons, on utilisait des cailloux, de la chaux et des matériaux que l'on ramassait dans le gave. Or, aujourd'hui, avec toutes les lois existantes, notamment sur l'eau, nos cours d'eau sont devenus plus sacrés que le Gange. Les arbres peuvent y pousser, les couches de sédiments s'y superposer : il ne faut surtout pas y toucher. Or, lorsque les pluies sont abondantes, ils débordent. Vous qui savez beaucoup de choses, monsieur le ministre d'État, pouvez-vous m'expliquer pourquoi, alors que nous vivons une période prétendument sèche, les PPRI n'ont jamais été aussi étendus qu'aujourd'hui ? Tout est classé zone inondable !
Puisque j'ai l'immense honneur de faire partie de la représentation nationale et de m'exprimer ce soir – ce qui ne m'était pas arrivé depuis fort longtemps –, je souhaiterais que l'on se demande si les causes des changements que l'on observe ne sont pas multiples. Nos campagnes perdent leurs habitants et les arbres vont bientôt pousser dans nos cuisines et nos salles à manger. Cette végétation abondante pompe l'eau qui se trouve dans le sol, puis cette eau retombe sous la forme de pluies violentes, qui causent des cataclysmes en inondant les villes de plaine où elles font des ravages considérables. Il me semble que ce phénomène n'est pas tout à fait neutre. Et quand on sait que l'on n'a pas nettoyé certains cours d'eau depuis cinquante ans, au prétexte que cela pourrait nuire à je ne sais quelle libellule, il ne faut pas s'étonner que les catastrophes soient de plus en plus importantes.
J'en ai terminé, madame la présidente. Voilà la très modeste contribution, rurale et périurbaine, que je voulais apporter au débat.
Les amendements que j'avais déposés à l'article 2 sont tombés sous le coup de l'article 40, qui a été appliqué de manière extrêmement extensive – mais j'y reviendrai lorsque nous examinerons les articles 4 et 5. Néanmoins, je souhaiterais contribuer au débat sur cet article. En effet, celui-ci débute par une phrase forte : « La lutte contre le changement climatique est placée au premier rang des priorités. » L'importance du sujet est donc reconnue, même si l'on peut se demander s'il mérite vraiment d'occuper le premier rang des priorités. Le problème de la raréfaction des ressources du sous-sol, par exemple, qui n'est pas du tout abordé dans le projet de loi, pourrait également occuper cette place. Est-il en effet besoin de rappeler que les trois quarts de nos richesses proviennent du sous-sol ? Or, elles ne sont pas renouvelables : c'est du stock. Ainsi les économies de l'OCDE fonctionnent grâce au déstockage de ces ressources. Il suffit d'observer l'hémicycle : ces pierres magnifiques, par exemple, qui ressemblent à du marbre, c'est du déstockage. Et je ne parle pas de tous les éléments métalliques. Mais passons.
Le premier alinéa de l'article 2 reprend un engagement qui s'appuie sur des recommandations datant d'avant 2001. À cette date, en effet, le GIEC a publié un rapport, le TAR, qui préconisait – et cette préconisation a d'ailleurs été reprise par M. Raffarin lorsqu'il était Premier ministre – de diviser par quatre nos émissions de gaz à effet de serre. On a appelé cela le « facteur 4 ». Or, un peu comme le placement des touches sur la machine écrire, on en a parlé une fois et ce chiffre est resté.
Le problème, c'est qu'en 2007 – il y a déjà deux ans ! –, le GIEC a publié un autre rapport, l'AR4, dans lequel il préconise que la France divise ses émissions de gaz à effet de serre par douze, la Grande-Bretagne par vingt et les États-Unis par vingt-cinq. Vous pouvez faire non de la tête, monsieur le ministre : lisez donc l'AR4 ! La science avance tous les jours, notamment la climatologie et l'océanographie.
Et encore, ce rapport a été adopté à l'unanimité, c'est-à-dire que ses conclusions ont été lissées pour que tous les membres du GIEC acceptent de les signer. Vous imaginez bien que, sur ce type de sujet, l'Arabie saoudite, les États-Unis et la France ne sont pas forcément d'accord. Lorsqu'on les interroge dans leurs laboratoires, les savants vont beaucoup plus loin que ces compromis onusiens. Cela étant, les chiffres que j'ai cités ont fait l'objet d'un accord : ce sont ceux qui figurent dans le rapport AR4 et, plus précisément, dans le tableau MP6 du résumé pour décideurs.
Dès lors, se fixer pour objectif une division par quatre des émissions de gaz à effet de serre, en réduisant leurs rejets de 3 % par an jusqu'en 2050 – ce qui correspond à peu près à la racine quarantième de 75 % – n'a aucun sens. En outre, le changement climatique n'est pas un phénomène linéaire. Il est chaotique et ne peut faire l'objet que d'une modélisation approximative. Des sauts quantitatifs sont possibles et, du reste, prévisibles. On peut dire que le réchauffement se réchauffe lui-même ! Il y a en quelque sorte un effet boule-de-neige.
Vous inscrivez cela dans l'article inaugural en indiquant que le réchauffement climatique est le problème number one du XXIe siècle, mais que – manque de chance – nous travaillons sur des données qui ont dix ans de retard ! Votre article est faible. Monsieur le ministre, vous allez négocier à Copenhague et je vous souhaite bon courage, mais ne soyez pas en retard par rapport aux scientifiques que vous allez y rencontrer ! J'ai déjà dit que certaines formulations de l'article 1er étaient un peu risibles. S'agissant de l'article 2, nous sommes encore en retard sur ce qui se fait de mieux en matière scientifique.
Je souligne également la faiblesse des alinéas 11 et 12.
L'alinéa 11 part de la contribution « climat-énergie » qui est un dispositif interne à l'Union européenne – et, en l'occurrence, à la France : il faut le mettre en oeuvre.
L'alinéa 12 part de la taxe carbone, qui est une sorte de « pollutaxe », du type TVA, pour éviter le dumping social aux frontières de l'Europe.
Certains discours sur la contribution climat-énergie et la taxe carbone laissent à penser qu'il s'agit de la même chose. Or ce sont deux mesures totalement différentes, mais complémentaires, qu'il faut mettre en oeuvre. Il ne faut pas se contenter de dire : « Nous allons étudier la possibilité de la faisabilité d'un rapport » ! Ce sont de bons instruments de lutte contre le changement climatique, qu'il faut mettre en oeuvre sur-le-champ.
Je suis saisie d'un amendement n° 82 .
La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut.
Cet amendement tend à préciser deux alinéas introduits, l'un à l'Assemblée nationale, l'autre au Sénat, concernant la situation de la région arctique, laquelle joue un rôle important dans l'équilibre du climat.
L'alinéa 2 portant sur l'observatoire scientifique international de l'Arctique est issu d'un amendement que j'avais déposé avec Serge Poignant en première lecture, et que vous avez accepté, monsieur le ministre.
Notre collègue Christian Gaudin, au Sénat, a avancé sur la question des instances internationales compétentes et sur la réglementation qu'il faudrait mettre en place, l'océan Arctique devant se modifier dans les prochaines années : la fonte des glaces est passée en cinq ou six ans de 90 kilomètres carrés par an à 220 kilomètres carrés de fonte supplémentaire et il est permis de penser qu'en 2015, ce ne sera plus qu'un océan.
Il y a une vingtaine d'années, le Premier ministre de l'époque, Michel Rocard, à la suite d'une demande forte du Parlement où cette question avait été débattue, avait réussi à obtenir un traité international sur l'Antarctique. Alors que le traité de Washington indiquait la possibilité de faire valoir en Antarctique des revendications en termes d'exploitation minière, une réglementation internationale, à la demande de la France et de l'Australie, avait abouti au protocole de Madrid en 1991, lequel interdit toute exploitation minière en Antarctique.
S'agissant de l'Arctique, la situation est très différente aujourd'hui. D'abord, ce n'est pas notre pays et l'on peut se demander pourquoi traiter, dans un texte national, de questions qui ne sont pas nationales. En réalité, cela revêt une grande importance au niveau de l'Union européenne, car cinq pays riverains de la zone arctique – je ne parle pas du cercle polaire – les États-Unis, la Russie, le Canada, le Danemark via le Groënland, et la Norvège, ont des revendications territoriales très fortes sur une zone qui va peut-être devenir exploitable. Il est très important pour la planète de traiter de cette question.
L'amendement que nous vous présentons, monsieur le ministre, va un peu plus loin que celui de Christian Gaudin. Il propose en effet la création d'une commission internationale sur l'Arctique, ce qui a été fait dans le cadre du traité de Washington sur l'Antarctique, et il demande à la France – et à l'Europe – d'être un pays moteur sur la question de l'Arctique, comme elle l'a été sur celle de l'Antarctique.
Notre amendement diffère peu de celui de Christian Gaudin, mais il a l'avantage d'aller un peu plus loin et de montrer notre détermination à traiter d'une question fondamentale. Je n'ai pas développé le problème de la modification des courants marins, que l'on commence à observer aujourd'hui, du fait de la fonte des glaces arctiques. Je n'ai pas non plus parlé de certaines bombes climatiques qu'il pourrait y avoir dans ces zones polaires.
Notre amendement porte sur un sujet très important. Vous avez déjà accepté, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, d'introduire deux alinéas à l'article 2. Je souhaiterais les préciser afin d'aller un peu plus loin que l'amendement de Christian Gaudin.
Lors de l'année polaire internationale en 2008, tout le monde s'accordait à dire que l'urgence était la création de l'observatoire, laquelle est inscrite, comme vous l'avez rappelé, à l'alinéa 2 de l'article 2.
Vous demandez la création d'une commission internationale sur l'Arctique. Il existe déjà un conseil de l'Arctique, composé de huit pays, qui se réunit tous les six mois. Cela répond sans doute à votre préoccupation.
La France va soutenir la création d'un observatoire et il existe déjà le Conseil de l'Arctique, que je viens d'évoquer : créer une commission supplémentaire, selon moi, n'apportera rien de plus.
C'est un sujet majeur. C'est la raison pour laquelle le Président de la République a nommé Michel Rocard ambassadeur permanent et qu'il ne nous a pas semblé nécessaire de participer à la clôture de l'année polaire internationale au collège de France. J'estime que nous sommes dans le bon équilibre et à notre place.
Pour le reste, permettez-moi de dire un mot sur les amendements « professionnels » concernant les végétaux pérennes. Nous en avons examiné 150 en première lecture, et 130 au Sénat. En deuxième lecture, ce sont strictement les mêmes : c'est stupéfiant !
Je ne parle pas des végétaux pérennes, qui poussent difficilement dans cette région, mais seulement de l'article ! J'ai eu l'occasion d'en discuter avec Michel Rocard et j'ai participé, comme vous le savez, à la récente réunion du Collège de France, où je suis intervenu sur cette question.
S'agissant de l'Arctique, l'équilibre n'est pas atteint, dans la mesure où nous avons fait plus qu'atteindre l'équilibre pour l'Antarctique et où nous avons obtenu un bon résultat.
Ce n'est pas la même chose !
Monsieur le ministre, vous avez organisé en 2008, à Monaco, une conférence internationale sur l'Arctique. Tout en reconnaissant que vous avez fait progresser les choses, je vous dis qu'il faut faire un petit effort supplémentaire. Je ne suis pas critique à votre égard…
Je n'ai pas dit que vous l'étiez !
…et j'ai voté le Grenelle de l'environnement. Outre la nomination de Michel Rocard, j'estime que nous devrions nous engager davantage sur cette question. Aujourd'hui, la Russie a des prétentions territoriales : elle a pu, grâce à un sous-marin, planter un drapeau russe au Pôle nord. Avec les zones d'extension territoriale, ce sera sans doute, dans le futur, l'une des zones de conflit majeures, car de nouvelles routes maritimes vont s'ouvrir et certains pays voudront exploiter les ressources de ce territoire. Si nous restons muets sur cette question, il peut se produire des catastrophes majeures dans la région.
Je reconnais le travail accompli par M. le ministre, et je le dis publiquement aujourd'hui, dans cet hémicycle, mais je pense que nous pourrions aller un peu plus loin.
Je ne veux pas relancer la discussion, mais pour évoquer à mon tour la question essentielle de l'Arctique. Jean-Yves Le Déaut l'a rappelé, je voulais, moi aussi que soit créé un observatoire scientifique international de l'Arctique, car c'est une vraie question au plan international.
Parallèlement à tout ce qui est fait au plan national, avec le ministre, le Président de la République et Michel Rocard en tant qu'ambassadeur, nous avons, dans le cadre de l'Assemblée, décidé de créer un groupe d'études sur l'Arctique. Nous devrons y parler de ce que nous pouvons, nous, soutenir au plan international. L'Assemblée a aussi un rôle à jouer et nous sommes ici pour que ce groupe d'études fonctionne.
(L'amendement n° 82 n'est pas adopté.)
Cet amendement reprend une disposition présentée par un amendement adopté en première lecture, puis supprimée par le Sénat.
Notre amendement n° 2 propose que la plantation d'arbres et de végétaux pérennes soit encouragée, comme elle l'était lors de notre première lecture.
La parole est à Mme Françoise Branget, pour soutenir l'amendement n° 72 .
Il est important d'introduire à nouveau une référence au végétal, en la repositionnant d'une façon plus appropriée dans le texte.
L'Assemblée avait considéré que cet amendement répondait de manière globale aux préoccupations portées par de nombreux députés. En effet, il avait également pour objectif de rétablir la contribution du végétal à l'amélioration de l'environnement, qui avait été complètement omise dans cette loi qui fixe les principes de la politique nationale environnementale.
Les végétaux permettent de réguler la température intérieure des bâtiments situés à proximité et de réduire leur consommation d'énergie en chauffage ou en climatisation. En hiver, les végétaux jouent le rôle de brise-vent et diminuent l'infiltration d'air froid dans les bâtiments jusqu'à 50 %, ce qui correspond à des économies potentielles de chauffage de 10 à 12 %. En été, une bonne implantation d'arbres à proximité d'un bâtiment peut réduire la consommation de climatisation de 20 à 50 %.
On oublie aussi l'utilisation des plantes dans la dépollution des sols. C'est un élément important dans la phytoremédiation, qui est souvent utilisée aux États-Unis, mais pas encore en France. Toutefois, des expériences commencent à être menées. La phytoremédiation, peut être considérée comme un facteur de protection de l'environnement.
Défavorable, pour trois raisons.
D'abord, nous avons largement débattu de cette question en première lecture.
Ensuite, l'article 2 est basé sur l'objectif trois fois vingt.
Enfin, il y a dans le texte un article spécifique sur le bois et la forêt, l'article 29, qui fait largement référence à la contribution très importante de la forêt et de la politique forestière. Ce ne sont pas des plantations isolées qui peuvent avoir un impact sur le réchauffement. Cela étant, nous pouvons agir dans le cadre d'une politique globale et c'est ce que nous évoquons à l'article 29. Comme je vous l'ai expliqué en commission, cette question est traitée dans des articles sur lesquels, étant globalement en accord avec le Sénat, il ne nous semblait pas opportun de rouvrir le débat.
Aussi, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.
Défavorable.
Je ne retire pas mon amendement n° 2 , pour deux raisons.
En première lecture, nous avions, les uns et les autres, une dizaine ou une vingtaine d'amendements sur ce texte, qui répondaient à peu près à la même question. On nous avait dit à l'époque que notre premier amendement serait adopté, à condition de retirer ensuite tous les autres. Nous avons joué le jeu lors de la première lecture.
Cette disposition a ensuite été supprimée par le Sénat. Il n'y a aucune raison pour que nous retirions notre proposition. Je maintiens donc mon amendement, d'autant que le rapporteur semble s'en réjouir ! (Sourires.)
Je suis saisie d'un amendement n° 278 rectifié .
La parole est à M. André Chassaigne.
L'article 3 ne fait l'objet d'aucun amendement.
(L'article 3 est adopté.)
Sur l'article 4, je suis saisie d'un amendement n° 347 rectifié .
La parole est à M. André Chassaigne.
Défavorable.
(L'amendement n° 347 rectifié n'est pas adopté.)
Cet amendement n° 317 et le suivant me paraissent assez importants pour les raisons que je vais expliquer.
Il s'agit évidemment d'éviter d'introduire une modulation s'apparentant à une prime au chauffage électrique, qui, contrairement à ce que l'on croit, tend davantage à faire croître les émissions de gaz à effet de serre, si l'on considère la structure de production de l'électricité en France.
Je m'appuierai, pour étayer mon propos, sur un document diffusé en octobre 2007 par RTE et l'ADEME. Cette note de quelques pages est relative au calcul du contenu en CO2 du kilowattheure électrique et compare les avantages du contenu marginal et du contenu par usage sur une base historique. Un petit tableau, situé au milieu de la première page de ladite note, indique que l'électricité est produite à environ à 80 % en base par du nucléaire dans les régions tempérées tant qu'il n'y a pas d'appels de pointe. Il en va de même en été, puisqu'il est très difficile d'arrêter les centrales. On fait la promotion de la climatisation, ce qui est une aberration, mais il faut bien faire tourner les centrales ! Toutefois, dans les cinq, huit ou dix jours les plus froids de l'année, que se passe-t-il quand il y a beaucoup de chauffage électrique, comme c'est le cas en France ? Ce n'est alors pas du tout le nucléaire qui produit l'électricité, notamment vers dix-neuf heures quand les gens rentrent chez eux et qu'ils poussent les convecteurs. Le contenu en CO2du chauffage électrique explose. Dans la note de l'ADEME et de RTE, il est précisé que, pour les usages en « base », le contenu de l'électricité est à peu près de quarante grammes de CO2par kilowattheure, il est de soixante grammes pour les usages intermittents, de cent grammes pour l'usage de l'éclairage – le matin et le soir, notamment en hiver, où le jour est plus court – enfin, il est de 180 grammes de CO2par kilowattheure pour le chauffage. Ce que l'on appelle la monotone de charge – la monotone d'appel de l'électricité – n'est absolument pas assurée par le nucléaire pendant les dix jours les plus froids de l'année, mais par des centrales à flammes : charbon, gaz, pétrole. S'il reste peu de pétrole, il y encore beaucoup de charbon : c'est l'exemple de la grosse centrale – de 3 000 voire 3 500 mégawatts – de Cordemais dans l'estuaire de la Loire. Notre objectif est donc de lutter contre le chauffage électrique, qui est non seulement une bêtise sociale, économique et écologique, mais également une aberration thermodynamique. Nous demandons donc d'ôter la modulation pour ne pas avantager le gang des grille-pain ! (Sourires.)
Je suis très surpris de l'argumentation de M. Cochet et de son amendement qui vise à supprimer la modulation sur les cinquante kilowattheures.
Accepter votre amendement signifierait que la réalité géographique de l'ensemble de nos territoires n'est pas prise en compte. La modulation doit être bien évidemment possible parce que la température n'est pas identique selon que l'on se situe en zone méditerranéenne, en zone de montagne ou ailleurs. Moduler en fonction de la localisation des territoires ou de l'usage des bâtiments me semble être une mesure de bon sens. Or c'est précisément ce que vous voulez supprimer. Je ne comprends donc absolument pas la logique de votre amendement auquel la commission a donné un avis tout à fait défavorable.
Je répondrai en deux mots à M. Cochet. La dernière réglementation que vous avez soutenue était la RT 2000, qui ne prévoyait aucune obligation dans ce domaine. Je suis navré de vous le dire, moi qui ai imposé la RT 2005, qui comporte, elle, une obligation.
Le Grenelle de l'environnement comportait une ambiguïté, s'agissant de l'énergie primaire et de l'énergie finale. Le Parlement a opté pour l'énergie primaire, ce qui est un saut gigantesque.
La modularité normale existe dans toutes les réglementations. Il s'agit, évidemment, des zones climatiques et de l'intégration des gaz à effet de serre. Sur ce point, je ne vous suis pas, monsieur Cochet.
Par ailleurs, monsieur Cochet – pardonnez-moi mon esprit d'escalier – vos propos selon lesquels le GIEC aurait imposé à la France une division par douze sur le SPM-6 m'ont tracassé. À part vos propres calculs, qui sont sûrement frappés au coin du génie et de la cohérence, le SPM-6 ne dit rien de tout cela.
Je l'ai sous les yeux. Le GIEC n'a pas identifié la France, il n'a jamais mis « moins douze », mais il a donné un certain nombre de scénarios de référence strictement conformes que je tiens à la disposition de la représentation nationale. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Je sais ce que c'est : quand la conviction est appuyée sur des données scientifiques, elle finit par nous emporter tous. Cela m'arrive également. Quand on est convaincu, on fédère des éléments épars pour étayer sa conviction, par ailleurs indiscutable.
Nous sommes sur une mutation, convenez-en tout de même, qui est extrêmement puissante. Nous avons résolu l'ambiguïté du Grenelle. Nous avons tranché sur l'énergie primaire. Très franchement, cela mérite d'être soutenu ! (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Nous avons eu un très long débat en première lecture en commission et en séance. La première rédaction avait, en effet, été considérée comme ne répondant pas à toutes les conséquences possibles. À la fin du débat en séance, je me rappelle avoir défendu le retour au texte initial du Gouvernement, c'est-à-dire sans modulation. En conséquence, introduire une modulation vide de sa substance l'objectif poursuivi ici. Je soutiens donc l'amendement d'Yves Cochet.
Nous avons effectivement débattu sur le point de savoir comment considérer l'énergie et l'efficacité énergétique en tant que telle pour atteindre une consommation de cinquante kilowattheures, et également le facteur CO2. Nous avons opté, comme M. le ministre l'a souligné, pour l'énergie primaire et nous sommes parvenus à cette modulation. D'ailleurs, monsieur Cochet, si vous vouliez aller jusqu'au bout, il conviendrait également de supprimer la fin de l'article qui définit la notion de modulation.
Il fallait alors défendre cet amendement en même temps, si vous vouliez être logique jusqu'au bout !
Nous allons déjà nous prononcer sur cet amendement, monsieur Poignant !
Je suis donc opposé à cet amendement, puisqu'il convient de prévoir cette modulation parfaitement légitime. Nous n'avons pas fixé un autre seuil pour tant de grammes de CO2.
(L'amendement n° 317 n'est pas adopté.)
Je vous répondrai dès maintenant, monsieur Poignant, car cet amendement vise à supprimer dans la première phrase de l'alinéa 3, qui est assez longue, les mots qui expliquent la modulation.
Je reprendrai les propos que j'ai tenus, il y a quinze jours en commission – je demande à M. le président Ollier de m'en excuser, parce que cela l'a fait alors quelque peu bondir – et je citerai de nouveau des noms. Je ne mets en cause aucun des parlementaires présents ici, mais certains industriels qui, en France, font pression sur les pouvoirs publics. Je ne peux pas en dire plus. Je vais citer ces personnes pour justifier la suppression de cette phrase.
Il s'agit – et c'est un exemple qui n'est certainement pas unique – de la société Atlantic. Cette entreprise familiale emploie 3 000 salariés et fabrique des convecteurs électriques. Le PDG de cette grande entreprise de chauffage électrique se nomme Pierre-Louis François. En tant qu'ancien polytechnicien, il se rend à des amicales. Il n'est absolument pas anormal que les parlementaires rencontrent les forces vives de la nation, les entreprises, les associations et les syndicats. Je n'ai rien contre cela. Ce qui est anormal, c'est que ces associations, syndicats ou entreprises – ce que l'on appelle les lobbies – suggèrent des amendements tellement précis que cela favorise leur propre entreprise ! C'est le cas de la société Atlantic et de son président, M. Pierre-Louis François. Je prétends donc que c'est notamment sous l'influence de cette entreprise et de son président qu'a été introduite cette modulation, et ce par le biais d'un amendement présenté par M. Ollier, dont je ne mets pas en cause l'intégrité républicaine. Je dis simplement que c'est lui qui a proposé l'amendement et qu'il n'a pas été aboli, en dépit de mes demandes réitérées. Je vous demande donc maintenant de revenir sur cette disposition, à mon sens, catastrophique pour la lutte contre les gaz à effet de serre.
La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.
Je ne répéterai pas ce que j'ai dit en commission. Je reconnais que j'ai été excessif, parce que je me suis senti personnellement attaqué par les propos de M. Cochet. En effet, depuis vingt ans que je suis parlementaire, on n'a jamais pu dire que je prenais des positions en fonction de quelque lobby que ce soit. Jamais, monsieur Cochet, pas vous, pas ça ! Je l'ai effectivement très mal pris. Vous recommencez, même si c'est, je le reconnais, avec plus de courtoisie. Je ne connais ni la société Atlantic, ni M. François. Si ces gens ont le même bon sens que M. Jacob et moi, lorsque l'on a défendu cet amendement, tant mieux ! Je n'y vois pas d'inconvénient. J'ai agi, avec M. Jacob et la majorité, dans un souci d'équilibre. Cet équilibre est respecté. Je n'en dirai pas plus. Je ne rouvrirai pas cette polémique tout à fait stérile et stupide. Même si c'est avec courtoisie, vous avez tort, monsieur Cochet, de faire des amalgames qui donnent l'impression que certains, ici, légifèrent sous la pression de lobbies. Je ne le supporte personnellement pas. J'ai beaucoup d'amitié pour vous, mais je trouve intolérable cet amalgame qui crée la suspicion. Ce n'est pas ce qui donne une force à votre argumentation, j'en suis désolé. Je souhaite donc que cet amendement soit rejeté.
Je voudrais rappeler à M. Cochet qu'il n'est pas de tradition, dans notre hémicycle, de mettre en cause des parlementaires ou des personnalités. Je pense que ce débat n'a pas lieu d'être ce soir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement ?
Défavorable.
(L'amendement n° 318 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 279 .
La parole est à M. André Chassaigne.
Cet amendement a pour origine un problème de vocabulaire. En effet, quand on parle de bio-matériaux – et nous aurons sans doute aussi le débat sur les biocarburants –, il est sous-entendu que, pour des « bio-matériaux », le bilan énergétique est positif, ce qui n'est absolument pas le cas. Les « bio-matériaux » sont de nature extrêmement diverse. Certains sont effectivement d'une très grande efficacité, s'agissant du bilan énergétique, d'autres le sont moins.
Le texte parle de bio-matériaux sans conséquence négative pour la santé des habitants et des artisans. C'est très bien, mais je préférerais que l'on parle de bio-matériaux dont le bilan énergétique est positif et les garanties sanitaires assurées.
Défavorable. Je comprends la logique de votre amendement, monsieur Chassaigne, et j'en partage l'esprit, mais il aurait pour conséquence de limiter l'utilisation des bio-matériaux et on en reviendrait à des matériaux dont le bilan CO2 est moins favorable. Les bio-matériaux, de toute façon, sont préférable à l'acier ou au béton.
(L'amendement n° 279 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Pour revenir très rapidement à mon amendement précédent, il est normal que l'on cite des entreprises françaises. On s'occupe de l'intérêt général, de tout ce qui se passe dans la collectivité de notre territoire. On peut citer Total, EDF et des tas d'entreprises, et on peut même juger leur politique, celle de Renault, par exemple, qui fait la promotion des 4x4 et a sorti un Koleos l'an dernier, ou celle de PSA, qui sort ce que l'on n'appelle plus un 4x4 et dont je ne sais plus le nom. Il est normal de pouvoir critiquer la politique industrielle du Gouvernement quand elle ne nous plaît pas ou celle de certains industriels.
N'associez pas le nom de députés à ces politiques, cela crée de la suspicion.
Monsieur Cochet, je vous ai donné la parole pour défendre l'amendement n° 319 .
Cet amendement vise à terme à interdire le chauffage électrique. J'ai déjà expliqué pourquoi il n'était pas sain d'équiper nos bâtiments avec ce type de chauffage.
La demande de chauffage électrique, on le sait bien, est très fluctuante, avec parfois des pics de demande. On pourrait beaucoup plus lisser la courbe et la monotone de charge s'il n'y avait pas ce type de chauffage. Je ne suis pas très favorable au chauffage au gaz, on peut faire beaucoup mieux, mais, contrairement à ce qu'on pourrait croire, c'est le chauffage électrique qui émet le plus de gaz à effet de serre au moment des pointes, à peu près 1000 grammes par kilowattheure, environ 200 grammes de moins pour le chauffage au gaz.
Ce poids en carbone vient de la structure de production de l'électricité en France. Vers 1975, EDF a réussi à convaincre nos concitoyens, et sans doute les pouvoirs publics, que le tout-électrique, c'était formidable. La consommation de nos concitoyens a été multipliée par quatre en trente ans alors qu'il faudrait la diminuer par deux, ce qui est assez facile dans ce qu'on appelle le scénario négawatt.
C'est donc la raison qui me fait parler, bien sûr aussi la conviction, mais certainement pas la déraison et la passion.
Monsieur Cochet, je ne sais pas si c'est la déraison ou la passion, mais, en fait, c'est votre schizophrénie anti-nucléaire, que vous n'osez pas assumer.
Nous proposons aujourd'hui de passer de 130 kilowattheures, qui est la RT 2005, à 50 kilowattheures en 2010 ou 2012 selon le type de bâtiments, et en énergie positive à compter de 2020. C'est une étape extrêmement importante. Vouloir interdire tout chauffage électrique du jour au lendemain, cela n'a aucun sens.
(L'amendement n° 319 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Cet amendement vise à préciser les conditions sous lesquelles un permis de construire peut être délivré. Nous proposons de compléter le code de l'urbanisme afin de définir de façon normative des objectifs d'isolation des logements. Les mécanismes incitatifs sont utiles mais ne suffisent pas à promouvoir la transition énergétique des bâtiments.
(L'amendement n° 320 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 4 est adopté.)
Avec 25%, le bâtiment est le deuxième gisement de gaz à effet de serre en France derrière le transport et devant l'industrie. C'était donc un problème à prendre à bras-le-corps. C'est fait dans ce projet de loi, concrètement, et même très précisément pour une loi de programmation.
J'ai été assez stupéfait, notamment dans le débat sur l'article 1er, par la propension infinie de l'opposition à conceptualiser. Je comprends d'ailleurs leur décrochage par rapport à l'opinion publique quand nos concitoyens sont avides d'action concrète et demandeurs de pragmatisme. Vous conceptualisez, nous agissons. Franchement, nous ne sommes pas élus pour stimuler les organes de reproduction des insectes volants, nous sommes là pour changer l'ordre des choses et c'est ce à quoi nous nous attachons à travers cette loi de programmation, qui, avant même le Grenelle II, rentre déjà vraiment dans le concret.
Les objectifs sont chiffrés, planifiés. Ils impliquent tous les acteurs, l'État, les collectivités locales, les bailleurs, mais aussi les particuliers et, pour ce faire, les banques et les assurances. Le succès de l'éco-prêt à taux zéro montre que les Français sont prêts à suivre concrètement dès lors qu'on leur en ouvre la possibilité financièrement.
Je veux revenir un instant à la modulation de l'objectif de réduction de la consommation énergétique en fonction de la diminution des gaz à effet de serre, objectif qui n'est pas infondé quand l'urgence des urgences est à la lutte contre le réchauffement climatique.
Certains, je l'admets, dont moi, y ont vu le risque de déroger à cet objectif global au bénéfice exclusif de la source électronucléaire. Comme je l'ai dit en commission, je préfère le nucléaire au fossile mais je préfère le renouvelable au nucléaire. Cela dit, les éoliennes et les panneaux photovoltaïques alimentent des chauffages électriques, pas des chaudières à gaz. Ceux qui, comme moi, avaient des craintes ont été rassurés hier par le discours du Président de la République au Bourget-du-Lac. La France s'engage à fond dans les énergies renouvelables avec le même volontarisme qu'elle l'a fait il y a quarante ans dans le nucléaire.
Je terminerai mon propos sur l'article 5 en soulignant son intérêt social. Maire d'une ville qui compte 70% de logements sociaux, je vois trop bien tous les jours les difficultés de mes administrés à payer leurs factures d'énergie. Là, nous allions l'écologie, l'économie et le social. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Nous proposons une formulation beaucoup plus précise que celle qui est dans le texte. Nous voulons un engagement plus explicite, qui prenne en compte la totalité des gisements d'économies d'énergie.
En pratique, le chauffage représente environ les deux tiers ou 60% de notre consommation d'énergie, 75% parfois quand la maison est mal isolée. Dans les logements d'avant 1975, une grande majorité des logements en fait, la première réglementation thermique entraînait chaque année une perte moyenne de 330 kilowattheures par mètre carré. Maintenant, cela entraîne une surconsommation d'énergie en chauffage.
Dans son discours du 25 octobre 2007, Nicolas Sarkozy affirmait qu'il fallait doubler le nombre de bâtiments anciens rénovés chaque année, porter à 400 000 par an le nombre des logements anciens rénovés. Nous préférons une formulation explicite plutôt qu'un pourcentage.
Défavorable. Je comprends l'objectif, mais 80 kilowattheures, c'est impossible dans bien des cas. La moyenne du parc résidentiel est de 280 kilowattheures par mètre carré et par an, 400 dans certains cas. Pour arriver à 80, il faudrait raser des barres entières de logements. Si l'objectif peut être louable en soi, il n'est pas réaliste.
(L'amendement n° 321 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n 85 .
La parole est à M. Philippe Tourtelier.
Ce texte, monsieur Grosdidier, a été voté en première lecture à la quasi-unanimité. Je trouve donc vos propos un peu déplacés. Il n'y a pas les crétins d'un côté et ceux qui conceptualisent de l'autre. Nous pouvons tous être crétins à certains moments et conceptualiser à d'autres.
Monsieur Tourtelier, il y a des termes que l'on peut éviter dans cet hémicycle.
C'est un amendement qui m'apparaît extrêmement important car nous connaissons tous l'enjeu du bâtiment existant pour atteindre nos objectifs.
Dans la loi de 2005, nous avions déposé un amendement prévoyant un minimum de travaux obligatoires à la revente dans les bâtiments existants. Il avait été refusé pour ne pas déséquilibrer le marché du logement. Il n'y avait pas de risque à l'époque, mais je pense qu'il y en aurait maintenant.
Que fait-on pour le bâtiment existant ? Dans la première version, on allait étudier l'obligation. On étudie toujours pour savoir comment l'on va faire. Vous venez de refuser un amendement de M. Yves Cochet proposant 80 kilowattheures par mètre carré et par an, en expliquant que ce n'est pas toujours possible.
Je suis déjà intervenu en commission sur ce point. Il y a une solution, encore faut-il une volonté politique. Il existe des diagnostics énergétiques de sensibilisation qui ne servent à rien, que tout le monde est capable de faire. On divise les surfaces par la consommation et on a une étiquette. S'il y avait de vrais diagnostics énergétiques beaucoup plus approfondis sur le parc existant, qu'il soit individuel ou collectif, avec des propositions de travaux, chacun, dans son pavillon ou une copropriété, pourrait décider, en fonction du prix de revente, du confort ou des économies, de faire tels ou tels travaux. Pour cela, il faut avoir un diagnostic crédible et fiable. Or, pour l'instant, ce n'est pas le cas.
Quand, pour notre rapport à la commission des affaires européennes, nous sommes allés à la BEI, on nous a dit qu'elle était prête à aider les collectivités territoriales à financer des diagnostics énergétiques sur des immeubles ou des groupes d'immeubles comme on l'a fait pour les ravalements de façades.
Pour l'instant, on n'a rien prévu pour le bâtiment existant. En votant cet amendement, on enverrait au moins un signe très clair sur la volonté de le rénover, avant 2015, parce qu'il faudra du temps pour faire les diagnostics puis les travaux.
Défavorable. Pour les bâtiments publics, des obligations sont prévues. Pour les bâtiments privés, nous sommes dans une logique d'incitation, avec le prêt à taux zéro ou les incitations fiscales. Je ne pense pas que ce soit la meilleure chose de prévoir une obligation, notamment pour les ménages défavorisés.
Je suis favorable à ce que des études soient réalisées, mais vous entrez dans un logique d'obligation, qui n'est pas celle que nous souhaitons.
Même avis.
Il faut rappeler l'existence du prêt à taux zéro, des crédits d'impôt, de tout ce que le Gouvernement a mis en place. En outre, ramener des logements qui sont à 400 ou 300 kilowattheures par mètre carré et par an à 80 kilowattheures coûte 300 euros de rénovation par mètre carré. Il faut l'avoir à l'esprit.
Les deux réponses que je viens d'entendre étaient à côté de la plaque.
Tout d'abord, je n'ai pas parlé de 80 kilowattheures ; c'est justement parce que l'amendement de M. Cochet, sur les 80 kilowattheures, a été rejeté que je propose un diagnostic approfondi, qui tiendra compte de l'état des bâtiments, du territoire…
Ensuite, j'ai bien pris garde de ne pas parler d'obligation. Je me place dans votre logique d'incitation. Mais pour qu'une incitation soit effective, encore faut-il avoir une connaissance précise du bien.
Pour les logements individuels, l'éco-PTZ peut bien fonctionner, mais allez mettre d'accord des copropriétaires s'ils n'ont pas connaissance des pertes d'énergie ! Il faut rendre possible une connaissance approfondie des travaux à réaliser dans les copropriétés de façon que, lorsque la vente d'un logement a lieu, le propriétaire ou l'acquéreur soit au courant de ce qu'il en coûtera pour améliorer les performances énergétiques du bien. Cela n'est en rien contradictoire avec une amélioration globale du bilan énergétique de l'ensemble de la copropriété, et il n'y a aucune obligation.
M. Poignant a répondu à l'amendement de M. Cochet, et non à celui de M. Tourtelier. Si la réponse à l'un doit servir de réponse à l'autre, nous sommes dans un monde surréaliste !
Je me pose la même question concernant la réponse de M. le rapporteur. Répondiez-vous à M. Cochet, monsieur Jacob ?
Il faut qu'un diagnostic ait un sens.
La bataille se mènera en particulier dans les bâtiments collectifs privés anciens. Il est en effet particulièrement légitime de faire réaliser ce diagnostic dans les copropriétés, car cela incitera les gens à éviter les gaspillages de l'eau ou de l'électricité commune.
Le rapporteur et notre collègue Poignant ont répondu à un autre amendement, madame la présidente. Il faut mettre un peu d'ordre dans nos débats.
Merci de vouloir aider la présidence, monsieur Letchimy.
(L'amendement n° 85 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 281 .
La parole est à M. André Chassaigne.
Il s'agit de rendre service à M. le ministre d'État, l'actuelle rédaction de l'alinéa 2 étant plutôt vague, s'agissant des « surfaces les moins économes en énergie ». L'amendement précise de quels bâtiments il est question, à savoir, notamment, des logements anciens généralement construits entre 1948 et 1975, dans lesquels les économies réalisables seraient très importantes.
Défavorable. En voulant préciser, monsieur Chassaigne, vous excluez un grand nombre de bâtiments, notamment dans le secteur public, qui ne sont pas soumis à DPE.
Je suis saisie d'un amendement n° 282 .
La parole est à M. André Chassaigne.
Il est défendu.
(L'amendement n° 282 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 196 .
La parole est à M. Michel Bouvard.
Dans la même problématique, il est nécessaire, compte tenu de l'ampleur des travaux de rénovation à prévoir dans le parc social, de hiérarchiser et de prioriser. C'est l'objet du présent amendement, qui donne priorité, d'une part, aux logements dont la consommation excessive coûte le plus aux locataires et, d'autre part, aux logements les plus consommateurs, à savoir les catégories F et G.
Nous faisons face, sur le parc social, à un défi d'ampleur. Si nous ne conduisons pas un tel travail de hiérarchisation, nous ne pourrons pas assumer cette tâche avec des enveloppes budgétaires et des enveloppes de prêts financés par la collecte de l'épargne réglementée, dont nous savons qu'elle doit très prochainement assurer le financement des programmes de renouvellement urbain et de politique de la ville. La hiérarchisation proposée nous permet de cibler dans l'immédiat les réalisations les plus nécessaires.
(L'amendement n° 196 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 86 .
La parole est à M. François Brottes.
Dans la droite ligne de ce que vient d'évoquer notre collègue Michel Bouvard, dont nous avons voté l'amendement, sur l'idée de hiérarchiser la rénovation du logement social pour intervenir en priorité sur les logements qui le nécessitent le plus, nous proposons une mesure générale qui peut, quant à elle, concerner les logements nécessitant le moins d'interventions. Cela peut paraître contradictoire et je vais donc m'expliquer.
Certes, il faut placer l'argent là où il y en a le plus besoin – c'est l'objet de l'amendement de M. Bouvard que nous venons de voter –, mais il ne faut pas renoncer pour autant à faire en sorte que le maximum de logements sociaux puissent être immédiatement vertueux.
Le cas s'est présenté sur mon territoire de collectivités, prêtes à intervenir aux côtés d'organismes HLM pour cofinancer la réhabilitation et l'isolation de bâtiments, qui, parce que les bâtiments concernés n'étaient pas considérés comme prioritaires, se sont heurtées à un refus de l'organisme HLM.
C'est un peu idiot parce que l'intérêt du Grenelle, c'est de faire feu de tout bois pour que le maximum de locataires aient le minimum de dépenses d'énergie, qu'ils habitent dans du HLM ancien ou neuf. C'est pourquoi l'amendement n° 86 peut être tout à fait complémentaire de celui que nous venons d'adopter. Il s'agit d'encourager la totalité du parc et des bailleurs à faire le maximum d'efforts le plus vite possible. Hiérarchiser ne signifie pas qu'il faille d'abord réhabiliter l'ancien exclusivement.
Monsieur Brottes, j'entends bien votre argumentation, mais vous savez qu'au moment du Grenelle, un débat a eu lieu avec les OPHLM et que ce sont ces derniers qui ont choisi, plutôt que le dégrèvement, la solution des taux privilégiés et des subventions. C'est ce que nous avons repris à l'alinéa 9.
Il y a une limite à l'exercice.
La priorité retenue à l'alinéa 9 répond à la demande des OPHLM. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement est déjà opérationnel, car il a été voté dans la loi de mobilisation pour le logement.
Nous avions pris ici l'engagement de permettre à l'Union sociale pour l'habitat d'engager ce programme. M. Bouvard a souhaité préciser une hiérarchisation ; il n'y a pas de difficulté, sous réserve que l'on ne s'interdise pas de réaliser des opérations à 220 kilowattheures qui sont déjà prêtes.
Dans cet accord, monsieur Brottes, j'ai pris l'engagement de mettre à disposition un prêt au taux bonifié de 1,9 % et, compte tenu de la baisse des taux, de l'assortir d'un complément par l'élargissement de l'assiette de TFPB, qui porte l'effort de l'État en fonds propres à 20 % des opérations thermiques. L'amendement est donc parfaitement satisfait.
(L'amendement n° 86 n'est pas adopté.)
C'est un amendement extrêmement important. Il s'agit, d'une part, d'ajouter, à l'alinéa 12, après le mot « remboursement », le mot « intégral » et, d'autre part, de compléter l'article par l'alinéa suivant : « La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle. »
Si vous voulez réduire la facture énergétique, il faut comprendre que, pour de nombreux ménages, une mise aux normes est impossible s'ils ne sont pas aidés. Il convient d'éviter que les inégalités sociales se creusent. Cet amendement nous paraît essentiel pour assurer le succès du dispositif.
Je serai d'autant plus court que ma collègue vient de présenter la moitié de mes arguments. J'ajouterai quelques précisions chiffrées.
Actuellement, les ménages les plus pauvres consacrent 15 % de leurs revenus aux dépenses énergétiques, contre seulement 6 % pour les ménages les plus riches. En outre – je le sais bien puisque j'ai été rural avant d'être parisien –, un Parisien a une facture énergétique inférieure de 44 % à celle d'un habitant de commune rurale. Par ailleurs, le prix des combustibles fossiles a augmenté de 3 % par an, en euros constants, depuis 1995 ; cela va continuer, et ce même pour les autres énergies. Enfin, en 2006, la part des dépenses énergétiques des 20 % de ménages les plus pauvres était deux fois et demi plus élevée que celle des 20 % des ménages les plus riches. C'est pourquoi je propose, comme nos collègues, d'ajouter le terme « intégral ».
La logique de l'article consiste à utiliser les économies d'énergie pour rembourser les annuités. Il n'est pas possible de parler de remboursement « intégral », car cela dépend des comportements individuels. Une personne qui mettrait le chauffage à fond en gardant ses fenêtres toujours ouvertes ne pourrait entrer dans ce cadre, par exemple.
Si vous voulez empêcher tout prêt à taux zéro, votez cet amendement ! C'est simple comme bonjour. Si cela devient une condition du prêt, il n'y a plus de prêt.
Le premier mois, 2 000 prêts ont été attribués. Nous en sommes actuellement au rythme de 7 000 ou 8 000 par mois et je pense qu'en rythme de croisière, nous serons entre 25 000 et 30 000 par mois, d'ici à deux mois. Il ne faut pas rigidifier les choses, pour ne pas tuer le concept de prêt.
(Les amendements identiques nos 87 et 324 ne sont pas adoptés.)
Je suis saisie d'un amendement n° 284 .
Est-il défendu, monsieur Chassaigne ?
Oui. Il est du même ordre.
(L'amendement n° 284 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 74 .
La parole est à Mme Françoise Branget.
L'article 5 propose la mise en place d'un modèle-type de contrat de performance énergétique. Or tout dispositif uniforme s'avérerait très difficile d'utilisation pour de nombreuses TPE et PME du fait de la spécificité de chaque secteur. Sous couvert de l'unité, c'est en réalité la complexité qui risque de s'imposer. C'est pourquoi le présent amendement propose d'établir un modèle-type de contrat pour le logement résidentiel, un autre pour le collectif et un troisième pour le tertiaire.
J'avais émis un avis défavorable en commission, mais, en écoutant Mme Branget, j'aurais plutôt tendance à accepter son amendement. Je m'en remets à l'avis du Gouvernement.
La procédure du contrat de performance énergétique est utilisée pour les bâtiments publics. Un modèle simplifié pour les bâtiments privés constituerait une option intelligente. Nous sommes donc favorables à votre amendement, madame Branget.
(L'amendement n° 74 est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 73 .
La parole est à Mme Françoise Branget.
Cet amendement s'inscrit dans une approche plus ambitieuse et large des objectifs de ce fameux contrat de performance énergétique. En effet, on vise aussi bien une garantie de résultat que de moyens en matière d'efficacité énergétique. De plus, en remplaçant l'expression « travaux de rénovation » par « actions d'amélioration », l'amendement s'aligne sur le vocabulaire européen utilisé en matière d'efficacité énergétique. Dès lors, les acteurs économiques concernés seraient plus nombreux : les services de maintenance, d'exploitation, d'installation d'équipement et de rénovation de l'enveloppe seraient intégrés dans la réalisation de ces objectifs.
Très favorable. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)
(L'amendement n° 73 est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 285 .
La parole est à M. André Chassaigne.
Cet amendement a deux objectifs.
Le premier, c'est d'apporter un coup de pouce à la volonté gouvernementale de trouver les moyens financiers de conduire sa politique. En effet, M. le ministre d'État a souligné que la rénovation des bâtiments allait coûter de l'argent et qu'il faudra bien trouver les recettes pour financer ces investissements.
Le second objectif, c'est de taxer la spéculation immobilière en préparant la création d'une taxe sur les plus-values issues des ventes à la découpe. Vous le savez tous, la vente à la découpe, c'est la transformation d'un immeuble, bâti en pleine propriété, en une co-propriété divisée en plusieurs lots, pour une plus grande rentabilité. Les économistes estiment que celle-ci passe alors du simple au double – 8 % par an en moyenne au lieu de 4 %.
Instaurer, pour venir en aide à la politique du Grenelle de l'environnement, une taxe sur les conséquences d'une rentabilité qui s'appuie sur la spéculation, serait une bonne chose.
La taxe sur les ventes à la découpe est déjà prévue par la loi de 2006. Je ne pense donc pas qu'il soit opportun, dans le cadre du Grenelle, de revenir là-dessus.
Même avis que la commission.
(L'amendement n° 285 n'est pas adopté.)
Défendu !
(L'amendement n° 287 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 88 .
La parole est à M. François Brottes.
Il s'agit d'une antienne de ma part. Je souhaite vraiment que l'on avance pour parvenir à un contrat gagnant-gagnant entre le propriétaire et le bailleur. Pour le propriétaire qui investit pour parvenir à des économies d'énergie, toute la question est : où se situe le point de retour de mon investissement ? S'il n'a pas de garantie en la matière, il n'investit pas ; d'autant que ne vivant pas dans le logement, il n'a aucun intérêt a priori à faire baisser la facture énergétique du locataire. Quant au locataire, on peut lui expliquer que s'il paye un loyer plus cher, cela permettra à son propriétaire d'investir et donc qu'il aura, plus tard, une facture énergétique moins élevée ; mais s'il n'a pas de garantie concernant la baisse de sa consommation d'énergie, il n'y croit pas.
Pour que cet article 5 ne soit pas un marché de dupes, je propose que la charge nette pour le locataire, c'est-à-dire loyer plus charges, fasse l'objet d'une évaluation contradictoire qui serve de base à l'élaboration d'un programme d'investissements générant des économies d'énergie. Le financement résiduel de cet investissement et l'économie de charges qu'il génère feraient l'objet de la réactualisation du bail de manière à ce que le financement de l'investissement par le propriétaire et l'économie de charges pour le locataire soient l'un et l'autre sécurisés. Il y aurait ainsi une nouvelle donne qui permettrait au propriétaire de dire au locataire que puisque son investissement lui fait réaliser des économies d'énergie constatées, il est en droit de compenser la baisse des charges par une augmentation du loyer. Pour le locataire, la charge nette resterait la même. Cela peut paraître un peu compliqué, mais j'essaye d'être clair.
En l'état actuel, comme celui qui paye l'investissement n'est pas celui qui paye le loyer, on bute toujours sur la même question : celle de la répartition entre charges d'investissement et charges de fonctionnement. Il faut se donner les moyens de réfléchir autrement. Cet amendement vise donc à établir les bases d'une nouvelle réflexion sur la charge nette pour qu'il n'y ait pas de marché de dupes entre celui qui attend un retour sur investissement et celui qui attend une baisse de ses charges en matière de consommation d'énergie.
Monsieur Brottes, nous sommes engagés dans la voie de la concertation entre bailleurs et locataires. Les grandes fédérations ont commencé à discuter. Laissons avancer la concertation. Peut-être qu'elle n'aboutira pas et qu'il en résultera ce que vous proposez. Mais, aujourd'hui, il est préférable de laisser la concertation suivre son cours, et le Gouvernement prendra ses responsabilités si on n'arrivait pas à un résultat positif. Mais je pense qu'on va trouver le bon équilibre.
Sous réserve que la vie vérifie mes dires, je pense que nous avons résolu le problème puisque la loi portant engagement pour le logement prévoit la création d'une troisième ligne comptable « loyer-charges-économies d'énergie », établie sur la base d'un accord entre le propriétaire et le locataire. Ce dispositif permet au propriétaire de récupérer jusqu'à 50 % du montant des économies réalisées grâce aux travaux destinés à réduire la consommation énergétique.
On va voir si la vraie vie rendra ce dispositif parfaitement efficace. Si ce n'était pas le cas, comme nous avons tous le même objectif, je pense que nous serons d'accord pour en reparler. Mais, en l'état actuel des choses, ce dispositif semble donner satisfaction.
La notion de charge consolidée qu'introduit l'amendement de notre collègue François Brottes est très intéressante. Elle s'inscrit au coeur de la dynamique économies d'énergie. C'est le propriétaire qui investit et le locataire qui en profite. Il faut donc organiser contractuellement le partage des économies. Le ministre d'État dit que cette question est traitée. Je lui fais confiance. Mais je tenais à souligner que l'amendement était conceptuellement intéressant – et il faut être capable de conceptualiser. (Sourires.)
C'est trop d'honneur, cher collègue ! J'entends bien la réponse de M. le ministre d'État. Le dispositif existant est plutôt une avancée. Mais je sais, pour l'avoir expérimenté au niveau local, qu'en matière d'économies d'énergie, on a aussi besoin d'un dispositif d'accompagnement des locataires. En effet, dès l'instant où on dit aux gens que c'est mieux isolé et donc que leur facture va baisser, ils ont tendance à pousser le bouton du chauffage. Je ne sais pas si cette troisième ligne va répondre au besoin de responsabilisation que j'évoque. Le dispositif existant me semble moins vertueux que ma proposition, qui est plus normative et donc plus solide.
Cela étant, monsieur le ministre d'État, j'accepte que, dans le Grenelle I, nous en restions à la rédaction du Sénat, sous réserve d'inventaire. Il faudra, dans le Grenelle II, préciser les contours d'un nouveau type de bail pour que l'engagement entre le locataire et le propriétaire soit plus fort. Je retire mon amendement.
(L'amendement n° 88 est retiré.)
Peut-être cet amendement apparaîtra-t-il plus radical que l'amendement de M. Brottes car il est plus normatif. Nous proposons d'établir un droit des locataires au logement isolé. Si jamais un propriétaire n'avait pas compris le subtil contrat gagnant-gagnant proposé par M. Brottes ou par les dispositions actuelles qu'a exposées M. le ministre d'État, et qu'il refuse de mettre aux normes un chauffage ou de procéder à toute autre amélioration favorisant des économies d'énergie, le locataire lui-même pourrait faire effectuer les travaux, après avis conforme de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie. Il bénéficierait évidemment du crédit d'impôt et du prêt à taux zéro. Le coût de ces travaux, déductions faites du crédit d'impôt, pourra par convention être imputé par le locataire sur le montant annuel des loyers. Le droit au logement isolé participe tout à fait de la volonté d'économiser l'énergie.
Monsieur Cochet, le crédit d'impôt que vous proposez et le prêt à taux zéro existent déjà.
S'agissant du logement isolé, la rédaction de votre amendement présente un risque majeur : celui de se trouver dans une situation où les propriétaires refuseront tout simplement de louer.
Certes, monsieur Cochet, mais, à chaque fois qu'on rentre dans la logique que vous proposez, on risque de se retrouver confrontés à la situation où ils ne louent plus. Je ne pense pas que ce soit votre objectif. Avis défavorable.
Même avis que la commission.
On sait que dans certains domaines environnementaux, tels que les termites, l'amiante, le plomb, le droit des locataires au logement isolé existe déjà. Lorsqu'un locataire arrive dans son nouveau logement, le propriétaire a dû faire procéder à un diagnostic dans ces trois domaines. Notre amendement vise à prévoir un diagnostic thermique qui permettrait de constater que le logement est suffisamment isolé. C'est un droit qui ne serait pas excessif. Il existe déjà de nombreux diagnostics à fournir si l'on veut louer un logement, et je ne vois pas pourquoi les propriétaires refuseraient de louer en raison de ce nouveau diagnostic puisqu'ils perdraient de l'argent. La location s'effectuera ainsi dans de bonnes conditions environnementales.
Monsieur Cochet, l'obligation de diagnostic de performance énergétique – le DPE – existe depuis 2006,…
…de même que le diagnostic thermique. C'est fait. Votre amendement est satisfait.
(L'amendement n° 325 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 89 .
La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut.
Tout d'abord, une remarque générale : l'alinéa 17 mentionne, à juste titre, le diagnostic de performance énergétique, mais sans que cette notion ait été préalablement définie.
Parce que le DPE figure déjà dans la loi sur le logement, monsieur Le Déaut.
L'article 4 mentionne « la performance énergétique » ; l'alinéa 2 de l'article 5 dispose que « tous les bâtiments de l'État et de ses établissements publics seront soumis à un audit d'ici à 2010 […] à partir du diagnostic ainsi établi », mais on ne précise pas qu'il s'agit d'un diagnostic énergétique, même si c'est sous-jacent.
Le diagnostic de performance énergétique aurait dû, à mon sens, être précisé auparavant, mais, comme il n'intervient qu'à l'alinéa 17 sur une disposition concernant l'outre-mer, je précise, dans l'amendement n° 89 , que ce diagnostic doit être opéré « par des professionnels ou des sociétés agréées ».
C'est prévu.
Article L. 271-6.
Je peux me tromper, mais le Parlement est aussi là pour poser des questions.
Si vous m'assurez que le diagnostic de performance énergétique est déjà défini dans une réglementation thermique et qu'il doit être réalisé par des professionnels et des sociétés agréées, je retirerai mon amendement. En attendant, j'estime qu'il y a suffisamment de marchands de soupe dans ces domaines qui se développent pour qu'il soit nécessaire de préciser les choses dans la législation.
Monsieur Le Déaut, je crois que vous allez retirer votre amendement parce que les précisions que vous demandez figurent à l'article L. 271-6 du code de l'urbanisme. Cet article prévoit en effet que le DPE doit être réalisé par une personne présentant les garanties, les compétences et les moyens appropriés, avec une obligation de souscrire une assurance.
Même avis.
Les textes prévoient peut-être que les sociétés doivent être agréées, il n'en reste pas moins que l'indigence des rapports qui sont soumis en matière de diagnostic de performance énergétique est patent.
C'est vrai, comme dans tous les nouveaux métiers.
Je suis saisie d'un amendement n° 197 .
La parole est à M. Michel Bouvard.
Nous avons évoqué tout à l'heure le parc social ; là, il s'agit d'encourager, au travers de cet amendement, les travaux pour les logements locatifs qui appartiennent à des particuliers.
Compte tenu du coût important de ces travaux, même si l'estimation reste discutée, il est proposé de permettre une charge partiellement récupérable. Certes, une partie du financement nécessaire doit être trouvée dans les économies d'énergie que ces travaux permettront, mais les propriétaires d'immobiliers locatifs risquent de refuser ou de retarder l'engagement des travaux dès lors qu'ils supporteront, eux, le coût dont bénéficieront les seuls locataires. Un amortissement partiel de ces travaux à travers une nouvelle charge récupérable permettrait de rééquilibrer la balance et éviterait une situation de blocage.
Je vous propose de retirer votre amendement, monsieur Bouvard, parce que, le ministre l'a évoqué tout à l'heure, on répond déjà à votre souci et parce que la concertation va être engagée. Je vous propose d'attendre le Grenelle II et le résultat de la concertation pour voir à ce moment-là comment on peut prendre en compte la charge. Mais le ministre va vous répondre avec plus de précisions sans doute.
Il faut regarder si le décret pris dans le cadre de la loi du 25 mars 2009 correspond exactement à votre proposition. Si ce n'est pas le cas, il pourrait être modifié. En l'état, je vous propose de retirer votre amendement.
Convaincu par les arguments et étant très favorable aux concertations, je retire mon amendement.
(L'amendement n° 197 est retiré.)
Dans sa réponse à mon amendement précédent, M. le ministre m'a indiqué qu'il y avait déjà des diagnostics thermiques. Bien sûr, mais je ne demande pas d'autres diagnostics, je souhaite qu'on puisse faire valoir le droit à un logement isolé. Une fois le diagnostic effectué, le candidat locataire peut estimer que la location d'un logement qui serait à 500 kilowattheures par mètre carré et par an est trop onéreuse du fait des charges que cela entraîne. Il ne suffit pas d'avoir le diagnostic, il faut pouvoir s'en servir pour alléger les charges, car, pour un locataire, M. Brottes en a parlé, le coût global ce n'est pas simplement le loyer, c'est aussi les charges.
Dans ce même esprit, je propose d'envisager des obligations de travaux pour les propriétaires, en appui des mécanismes incitatifs déjà prévus dans la loi, avec un échéancier : un délai de huit ans pour les bâtiments tertiaires et un délai de quinze ans pour les autres bâtiments. C'est une proposition très soft.
Défavorable, j'ai déjà répondu.
(L'amendement n° 388 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 5, amendé, est adopté.)
Sur l'article 6, je suis saisie d'un amendement n° 90 .
La parole est à M. Philippe Tourtelier.
Nous sommes toujours dans la même problématique de l'urgence s'agissant des bâtiments existants. Mais comme vous refusez toutes nos propositions, je ne pense pas que l'on parvienne à trouver une solution.
Dans l'amendement précédent, je ne voulais pas obliger, j'incitais seulement et pour cela je demandais un diagnostic énergétique approfondi avec des propositions de travaux. Vous avez refusé, monsieur le ministre d'État, au motif que l'éco-PTZ montait en puissance, ce qui est une bonne chose. Mais si, en plus, les bâtiments publics de l'État ont une obligation d'être rénovés et les collectivités territoriales sont incitées fortement à rénover également, quelle main-d'oeuvre reste-t-il pour faire quelque chose dans les copropriétés ?
Si votre refus peut donc s'expliquer, il n'empêche que, compte tenu de l'urgence, il faut savoir où l'on va. C'est la raison pour laquelle nous proposons de fixer un délai – « six mois après la promulgation de la présente loi » – pour l'élaboration du programme pluriannuel de qualification et de formation des professionnels du bâtiment, le temps de s'assurer de ce qui est crédible par rapport aux objectifs qu'on a votés.
J'émets un avis défavorable parce que vous nous proposez de commencer six mois après la promulgation de cette loi alors que le projet de loi parle d'inciter « les acteurs de la formation professionnelle initiale et continue à engager, en concertation ». L'effet est immédiat. Pourquoi attendre six mois ?
Non, la rédaction du texte est aussi claire ;l'amendement n'apporte rien.
Quand on ne veut pas, on ne veut pas.
(L'amendement n° 90 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 6 est adopté.)
Sur l'article 7, je suis saisie d'un amendement n° 326 .
La parole est à M. Yves Cochet.
Nous abordons le chapitre de l'urbanisme, c'est-à-dire un domaine plus large que ce dont nous avons discuté jusqu'à présent. L'urbanisme peut être favorable ou non à des économies d'énergie.
Nous proposons une nouvelle formulation de l'alinéa 1 de cet article 7 parce que celui qui nous est soumis nous semble incomplet ; il ne parle que des groupements qui regroupent 50 000 habitants alors que nous pensons que ces plans climat-énergie territoriaux doivent concerner tout le monde.
Évidemment, il ne faut pas que ce soit violent, il faut que tout le monde puisse en discuter, mais toutes les communes et tous les habitants doivent être touchés. Un territoire qui ne se doterait pas d'un tel plan climat-énergie territorial prendrait un retard sur la gestion des consommations et des productions d'énergie et se priverait d'importantes capacités de développement. Aucun territoire, qu'on soit 50 000, regroupés ou pas, ne doit s'y soustraire, je pense notamment aux territoires ruraux, qui sont, bien souvent, des passoires thermiques parce que l'habitat y est un peu dispersé alors qu'en ville, on a moins de surfaces exposées au froid, au vent, aux déperditions.
La coopération intercommunale doit permettre de compenser la faiblesse des moyens d'action et ces PCET doivent être proposés à tout le monde.
Défavorable, nous préférons en rester aux engagements du Grenelle où l'on avait ciblé les plans climat sur les villes les plus importantes. C'est un principe de réalisme. Nous verrons après si nous pouvons aller plus loin. Aujourd'hui, restons sur les grandes agglomérations, là où il y a des concentrations urbaines importantes, pour ce plan climat. Cela n'aurait pas beaucoup de sens pour des communes de 150 ou de 500 habitants.
On peut les regrouper.
(L'amendement n° 326 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 91 .
La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut.
Monsieur le ministre, pour l'instant aucun de nos amendements n'a été accepté. S'il est un amendement qu'on souhaiterait voir accepté, c'est celui-ci.
En effet, dans le chapitre sur l'urbanisme, vous fixez comme objectifs la lutte contre la régression des surfaces agricoles et naturelles – c'est un bon objectif – et la lutte contre l'étalement urbain et la déperdition des énergies – c'est également un bel objectif. Mais vous savez que nous avons dans nos villes et nos régions beaucoup de friches industrielles ou militaires et dans la région que je représente, la Lorraine, les décisions qui viennent d'être prises de fermeture de régiments vont entraîner une augmentation de ces friches.
Vous indiquez, dans l'alinéa 1 de l'article 7, que vous souhaitez inciter les régions, les départements et les communes « à établir, en cohérence avec leurs documents d'uranisme et après concertation avec les autres autorités compétentes en matière d'énergie, de transport et de déchets, des “plans climat-énergie territoriaux” ». Nous pensons que la résorption des friches industrielles et des friches militaires fait partie de ces objectifs. D'ailleurs l'ADEME soutient déjà la résorption des friches industrielles. Plutôt que d'utiliser des surfaces agricoles nouvelles – un département français disparaît tous les dix ans du fait de l'urbanisation –, nous aimerions que des solutions soient trouvées pour dépolluer les zones polluées des villes ou que l'on utilise les friches militaires. Un tel objectif irait, selon nous, dans le sens du Grenelle de l'environnement.
Monsieur le ministre d'État, c'est à vous que je m'adresse : je pense que vous pourriez accepter cet amendement, car il s'inscrit dans la logique des objectifs que vous avez affichés.
J'ai bien entendu les arguments évoqués par M. Le Déaut. Simplement, l'État est déjà très engagé dans cette politique, notamment dans le cadre des contrats de projet où des engagements contractuels sont pris entre l'État et les régions. Par ailleurs, de nombreux établissements publics fonciers ont été créés, notamment dans votre région, en Lorraine, mais également en Rhône-Alpes. Votre proposition n'entre pas dans le cadre des priorités définies par le Grenelle, même si, je suis d'accord, on évoque l'artificialisation des sols.
J'émets donc un avis défavorable.
(L'amendement n° 91 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 92 .
La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut.
Défendu.
(L'amendement n° 92 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 293 .
La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.
Cet amendement vient de l'expérience douloureuse que nous avons eue, dans le grand Sud-Ouest, après la tempête Klaus de janvier 2009. Il a notamment fallu une semaine pour achever la remise en service de l'électricité.
Vous allez me demander ce que cette disposition vient faire dans un texte relatif à l'environnement. Je pense que l'environnement exige de prendre acte du fait qu'il faut s'adapter au changement. Or nous savons que le climat change, et que nous aurons de plus en plus d'accidents climatiques lourds.
Nous avons vécu une situation d'impréparation complète, interdisant un minimum d'autonomie électrique pendant l'accident climatique de janvier 2009.
L'amendement propose des choses très simples. Il faut identifier, commune par commune – et un maire peut très bien le faire –, l'ensemble des points stratégiques en ce qui concerne le réseau téléphonique, la desserte en eau potable et éventuellement le réseau électrique. Et il faut veiller à ce que soit doté d'un groupe électrogène chacun de ces points sensibles.
Encore une fois, j'ai vécu la gestion extrêmement chaotique de la distribution des groupes électrogènes par la préfecture du Lot-et-Garonne, qui, entre nous, faisait ce qu'elle pouvait. Je pense qu'il faut mettre de l'ordre, et de l'ordre au niveau législatif.
Le 6 février, le Premier ministre, François Fillon, avait rassemblé les élus des neuf départements concernés. Il s'était engagé, en disant qu'il y avait effectivement un vide juridique sur la question de savoir qui doit déterminer ce qui doit être protégé par un groupe électrogène et qui doit payer la facture. Il me semble que ce texte pourrait être un bon vecteur pour régler ce problème.
Vous savez, monsieur Dionis du Séjour, que nous avons eu cette discussion en commission, en présence du ministre. La commission avait considéré que si l'idée est louable, il est difficile de la mettre en application dans chaque commune. Dans des communes rurales, les investissements seront énormes. Or, on sait pertinemment que des utilisations concertées sont possibles.
En outre, cette question relève, de mon point de vue, d'un plan de protection des risques, lequel doit être défini au moins à l'échelle départementale, sous la responsabilité du préfet. Celui-ci a la capacité d'organiser l'ensemble des services de l'État et de les mobiliser par secteur prioritaire.
Voilà pourquoi je vous propose de retirer cet amendement, mon cher collègue.
Même avis.
Je comprends bien entendu l'objectif de cet amendement. Mais en le lisant, je pensais, puisque nous sommes à quelques minutes d'aller rejoindre les lits, à un dessein de Wolinski il y a quelques années. Une toiture est percée. Un personnage dit qu'il faut réparer la toiture, un autre dit qu'il faut déplacer le lit. En fait, cet amendement consiste en quelque sorte à déplacer le lit, c'est-à-dire qu'il ne fait pas apparaître les véritables responsables des problèmes qui se posent, notamment à la suite de tempêtes. Je pense en particulier à la disparition ou à l'éloignement des services publics, dont la conséquence est que les interventions sont aujourd'hui beaucoup plus longues et difficiles qu'elles ne l'étaient il y a quelques années. C'est une réalité.
Je suis allé sur place, j'ai rencontré des élus locaux, notamment dans le département des Landes. Qu'ont-ils dit ? Ils ont dit, par exemple, que les centres de distribution EDF n'étaient plus sur place, qu'il n'y avait plus la connaissance des réseaux, qu'il n'y avait même pas de chef d'équipe pour organiser, le matin, dans les communes, la recherche des lieux où les fils étaient tombés par terre, qu'il fallait parfois attendre plusieurs jours pour que des techniciens puissent venir. Il n'y a pas assez de personnel. Il n'y a plus de savoir-faire.
Les mêmes problèmes se posent avec les télécommunications. Dans nos communes, il y a parfois des maisons qui restent plusieurs semaines sans téléphone, tout simplement parce que, là aussi, avec la privatisation, il n'y a pas la connaissance des réseaux, il n'y a pas les techniciens de proximité. Il faut faire venir des entreprises extérieures – cela a été le cas, au lendemain de la tempête –, dans le domaine de l'électricité ou dans celui des télécommunications.
Cet amendement est séduisant, mais quand un toit est percé, je pense qu'il ne faut pas déplacer le lit : il faut réparer le toit.
L'image est sympathique, et il faut sans doute à la fois réparer le toit et déplacer le lit.
J'ai vu – et je voudrais sur ce point, si c'est possible, une réponse gouvernementale – la panique, l'anarchie dans la distribution des groupes électrogènes. Il ne faut pas nous raconter d'histoire. Cette affaire est sérieuse.
Le rapporteur nous dit, et il a peut-être raison, que le problème doit être géré à l'échelle départementale. Moi, je dis que personne ne connaît mieux sa commune que le maire.
Le rapporteur nous dit que cela coûtera cher. La dernière phrase de l'amendement est claire : « Les coûts d'installation, d'entretien et de contrôle de ces dispositifs d'urgence sont pris en charge par les entreprises responsables des réseaux. »
Nous devons agir. Il y a un vide juridique, comme le Premier ministre l'a dit. Qu'est-ce qu'on fait ? Si l'on me dit que ce vide juridique sera comblé au moyen d'un autre vecteur, je suis prêt à retirer cet amendement. Mais je veux que l'on me dise ce qui va se passer. J'ai vu, encore une fois, l'anarchie et l'inefficacité de l'organisation de l'État au lendemain de la tempête Klaus. Il y aura d'autres catastrophes climatiques. Il serait bon que nous progressions. Or nous n'avons pas progressé entre la tempête de 1999 et celle du 24 janvier 2009. Quelle réponse nous apporte-t-on, hormis les histoires de toits et de lits ?
Je suis assez d'accord avec André Chassaigne pour dire que l'une des réponses, c'est l'entretien des réseaux. Il y a des réponses plus fondamentales. Mais on n'empêchera pas un nouvel effondrement du réseau électrique, et la question des groupes électrogènes se posera. Nous devons faire un effort d'organisation. Quelle est la réponse de l'État, alors que nous sommes très mauvais sur ce sujet ?
Nous n'allons pas ouvrir ce débat, mais je comprends la préoccupation de M. Dionis du Séjour.
Il ne vous a pas échappé que, dans un premier temps, nous avons refusé le TURP justement parce qu'il n'y avait pas assez de financement pour la sécurisation, l'approvisionnement et l'enfouissement des réseaux. C'est la réponse principale à la question.
Par ailleurs, un plan général sur les points sensibles globaux existe déjà. J'essaierai par la suite, monsieur Dionis du Séjour, de vous donner une réponse un peu plus détaillée.
Cela étant, s'agissant des groupes électrogènes, je suis très prudent, car il ne vous a pas échappé que les principaux accidents mortels que nous avons eu à déplorer étaient dus à une mauvaise manipulation de ces groupes. Je ne suis pas du tout contre les groupes électrogènes, mais il faut que l'on regarde tout cela dans le détail. Je vous promets de vous informer plus avant.
Cet amendement va dans le sens d'un point au moins qui a été évoqué par M. Dionis du Séjour. À l'article 2, on nous a dit que la lutte contre le changement climatique était vraiment la première des priorités. C'est la grande affaire du siècle, en France et partout dans le monde.
Nous en sommes maintenant à l'article 7. Nous venons de parler, à l'alinéa 1, des plans climat-énergie territoriaux. Mais dans les documents du GIEC, il n'y a pas que la lutte contre le changement climatique, ce que les scientifiques appellent, en anglais, la mitigation. Il y a un autre volet, presque aussi important, qui est celui de l'adaptation.
Le changement climatique, ou du moins certaines de ses formes extrêmes, est inévitable. Même si l'on mettait en oeuvre une politique drastique visant à la mitigation, il y aurait de toute façon un changement climatique, parce que le phénomène est très inertiel : il y a eu des chaudières à charbon à Londres, en 1880, et les molécules sont encore là. Le phénomène est très lourd, et exige une adaptation.
Il faut certes lutter contre le changement climatique, et notamment contre l'augmentation des gaz à effet de serre, mais le changement climatique existe d'ores et déjà. Une politique d'adaptation me semble normalement devoir prendre sa place dans les objectifs d'urbanisme. Je suis étonné qu'il n'y soit pas fait référence dans les documents d'urbanisme, notamment dans les SCOT.
Monsieur Cochet, l'objectif visé par votre amendement est précisément celui des plans climat-énergie.
En outre, la proposition que vous faites figure clairement dans le Grenelle II, aux articles 6, 7, et 8, qui visent notamment les SCOT.
Même avis. Et en l'état, ces articles sont approuvés par la commission des affaires économiques du Sénat.
Je suis saisie d'un amendement n° 288 .
La parole est à M. André Chassaigne.
Défendu.
(L'amendement n° 288 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Défendu.
(L'amendement n° 328 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 329 rectifié .
La parole est à M. Yves Cochet.
Même avis.
(L'amendement n° 329 rectifié n'est pas adopté.)
Prochaine séance, aujourd'hui jeudi 11 juin, à neuf heures trente :
Suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.
La séance est levée.
(La séance est levée, le jeudi 11 juin 2009, à zéro heure cinquante-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma