La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
L'ordre du jour appelle la suite de discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif aux organismes génétiquement modifiés (nos 719 et 746).
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'amendement n° 321 à l'article 2.
La parole est à M. Claude Gatignol, pour soutenir l'amendement n° 321 .
Mon amendement n'a pas pour but, rassurez-vous, de dénaturer le texte qui nous est présenté, mais, au contraire de lui apporter des éléments de cohérence.
Plusieurs articles font référence à la réglementation des cultures végétales. Il s'agit donc de plantes améliorées par les biotechnologies. En remplaçant le terme générique, plutôt flou, voire suspect aux yeux de nombreux de nos concitoyens, d'« organisme » par le mot « plante » chaque fois que nous le pourrons, nous apporterons clarté, précision et information. Cet amendement a donc été déposé systématiquement à chaque article concerné.
En effet, le « matériel biologique » – pour reprendre le terme de la directive de 1998 que j'ai eu l'honneur de transposer en droit français, laquelle instaurait la brevetabilité du vivant, c'est-à-dire tout le génome animal et végétal – est seul concerné par l'utilisation en milieu confiné. Il peut s'agir de multiples organismes : des virus, des bactéries, des mycoplasmes, des champignons, des algues... En plein champ, en revanche, nous parlons bien de cultures végétales. Une plante, c'est une plante, qu'il s'agisse de céréales, des graminées, ou un arbre.
La parole est à M. Antoine Herth, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 321 .
, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. La commission a émis un avis défavorable, monsieur le président, trouvant l'expression trop restrictive. Le Haut conseil des biotechnologies a également vocation à s'occuper des biotechnologies en milieu confiné. La rédaction actuelle convient mieux.
La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, pour donner l'avis du Gouvernement.
Avis défavorable également.
Compte tenu des explications du rapporteur et comme un autre article du projet de loi prévoyait d'introduire dans le code rural un article spécialement consacré aux plantes génétiquement transformées, je retire mon amendement.
, et M. Patrick Ollier. président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Dites : défendu !
En cohérence avec la nouvelle appellation du Haut conseil, cet amendement souligne que ses missions ne se limitent pas à l'instruction de l'évaluation des demandes d'autorisation des organismes génétiquement modifiés. Sa compétence s'étend à l'ensemble du champ des biotechnologies, qui évolue rapidement. Certains signes laissent à penser qu'il y aura demain d'autres technologies que les OGM, je pense en particulier à la sélection assistée par marqueur, le système SAM, qui a fait l'objet de plusieurs articles.
Contentez-vous de le défendre !
Comme M. Chassaigne, nous pensons que la formulation actuelle est trop restrictive. Le Haut conseil devra se substituer à d'autres commissions, telles la commission du génie génétique et celle du génie biomoléculaire. Il faut donc, par souci de cohérence, mentionner tous ses domaines de compétence. Limiter sa capacité d'appréciation aux seuls OGM porterait atteinte à son pouvoir consultatif. Parmi ses attributions, le Haut conseil devra contribuer au dialogue entre la science et la société : il établira un rapport annuel d'activité à l'intention du Gouvernement, qui le transmettra au Parlement. Doit être de son ressort tout le domaine des biotechnologies, qui recouvre, selon la définition de l'OCDE, « l'application de la science et de la technologie aux organismes vivants, à d'autres matériaux vivants ou non vivants, pour la production de savoirs, de biens et de services. » Les biotechnologies, comme leur nom l'indique, résultent d'un mariage entre la science des êtres vivants – la biologie – et un ensemble de techniques nouvelles issues d'autres disciplines telles que la microbiologie, la biochimie, la biophysique, la génétique, la biologie moléculaire, l'informatique, la liste n'étant pas limitative.
Les OGM représentent une part, ô combien significative de ce domaine de connaissance, mais ils ne constituent que la partie émergée de l'iceberg des innovations génétiques. Il serait dommage, et même néfaste, de ne pas accorder au Haut conseil une mission d'études sur tous les effets de la transgenèse.
La commission s'est laissé convaincre par ces excellentes argumentations et elle émet un avis favorable.
Favorable également.
Je suis saisi d'un amendement n° 117 .
La parole est à M. François Grosdidier, pour le soutenir.
Cet amendement propose de remplacer « des » par « les », mais il va au-delà de la sémantique. Le Haut conseil doit être le seul compétent pour émettre des avis sur les risques et avantages des OGM car lui seul dispose de compétences pluridisciplinaires qui permettent une approche globale de la question, dépassant la toxicologie humaine ou la génétique moléculaire.
La commission a émis un avis défavorable. En fait, cet amendement serait une source de difficultés pour délimiter les compétences respectives du Haut conseil et des deux agences existantes, à savoir l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments – l'AFSSA – et l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé – l'AFSSAPS – qui ont d'autres compétences par ailleurs. Or nous avons grand besoin d'elles.
Je vous propose, pour cette raison, de retirer votre amendement, monsieur Grosdidier.
Cet amendement procède à une nouvelle rédaction de la fin du premier alinéa de l'article L. 531-3 du code de l'environnement, afin de supprimer la mention redondante de l'alinéa 15, inexacte de surcroît, de l'évaluation des bénéfices. Celle-ci ne doit pas porter uniquement sur les bénéfices en matière d'environnement et de santé publique. En outre, elle ne s'applique pas en cas d'utilisation confinée.
Par ailleurs, cet amendement entend préciser d'emblée que les avis et recommandations du Haut conseil des biotechnologies sont rendus publics, comme certains l'ont demandé avec insistance dans la discussion générale.
La parole est à Mme Frédérique Massat, pour soutenir le sous-amendement n° 372 .
Ce sous-amendement, qui renvoie à un amendement voté hier soir, prévoit que certaines zones, en raison de leurs écosystèmes ou d'autres de leurs caractéristiques doivent être exemptes d'OGM. Je pense aux parcs naturels régionaux ou aux réserves nationales.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir le sous-amendement n° 331 .
Mon sous-amendement est de cohérence avec le vote formidable d'hier soir.
La parole est à Mme Corinne Erhel, pour soutenir le sous-amendement n° 373 .
Ce sous-amendement complète l'alinéa 4 de l'article 2 en précisant que « le comité de biovigilance qui assure le suivi des mesures proposées par le Haut conseil reste une instance indépendante de celui-ci. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur les sous-amendements et sur l'amendement n° 20 ?
Compte tenu de l'adoption de l'amendement de François Grosdidier cet après-midi, il ne me semble plus d'actualité de pratiquer la spécialité territoriale, en distinguant les zones sans, celles avec et celles avec un peu d'OGM. Le principe est acquis.
Le Gouvernement est défavorable aux sous-amendements, et favorable à l'amendement de la commission.
Une question, monsieur le président, pour une fois.
Ont été mis en quelque sorte en discussion commune trois sous-amendements qui se rattachent bien à une même partie de l'article 2, mais qui sont de nature totalement différente. Est-ce faire oeuvre utile de les examiner en même temps ? Le rapporteur et le Gouvernement nous font chacun une réponse globale sur des sujets qui n'ont rien à voir les uns avec les autres. Ne peut-on pas faire autrement ?
Quand bien même, monsieur le président... Chaque sujet aurait mérité une réponse, ne serait-ce que pour les lecteurs du Journal Officiel. Cela étant, c'est vous qui organisez les débats, monsieur le président.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 372 .
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
Je mets aux voix le sous-amendement n° 331 .
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
Je mets aux voix le sous-amendement n° 373 .
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 9 .
La parole est à M. Christian Ménard, pour le soutenir.
Il me semble indispensable que le Haut conseil des biotechnologies soit habilité à expertiser les publications relatives aux expérimentations qui sont opérées par des tiers. Ces dernières années, les publications sur les OGM, orientées dans un sens ou dans l'autre, ont été légion. Elles ont influencé à tort la population et même certains médias. Le Haut conseil offre un recours : il est une référence à la fois neutre et capable de dire si telle ou telle publication est fiable ou non. C'était d'ailleurs l'une des principales propositions formulées par la mission parlementaire de 2004-2005.
C'est d'autant plus important que les publications ou les laboratoires ne sont pas toujours neutres. Tout à l'heure, notre collègue Yves Cochet parlait de la revue Nature, qui est ponctuellement subventionnée par Monsanto.
À mon tour de vous parler du CRIGEN, laboratoire fondé par Mme Corinne Lepage, ancienne ministre, qui est plutôt favorable à l'autre moitié de l'hémicycle. Il a reçu le soutien de Carrefour.
Je n'invente rien. Mme Lepage l'a elle-même avoué devant la mission parlementaire.
Carrefour a fait appel au CRIGEN car ce laboratoire était indépendant de ses fournisseurs ! Ce n'est pas la même chose !
Monsieur Grosdidier, s'il vous plaît.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 9 ?
La commission a émis un avis défavorable, même si la veille scientifique est l'une des fonctions de toute instance d'évaluation indépendante.
Même avis.
Cet amendement laisse penser que le Haut conseil statuerait sur l'ensemble des publications relatives aux biotechnologies – et Dieu sait si elles sont nombreuses ! Il faudrait beaucoup d'experts et d'ingénieurs, dans de très nombreuses disciplines, pour pouvoir le faire ! Ce serait une sorte d'autorité planétaire des biotechnologies, chargée de dire le vrai et le faux. Votre argument est excessif, monsieur Ménard ; je vous ai connu plus raisonnable ! Retirez cet amendement, qui est à la limite du ridicule scientifique. La mission que vous proposez au Haut conseil est proprement impossible.
Malgré l'amitié que je porte à Christian Ménard, je dois dire qu'en effet cet amendement ne se justifie pas, dans la mesure où les tâches que le Gouvernement a confiées au Haut conseil des biotechnologies sont déjà très importantes.
Néanmoins, dès lors que cet amendement a provoqué un vif débat entre deux membres de la majorité, je me dois, en tant que président de la mission d'information parlementaire sur les OGM, de dire la vérité : lors de son audition, Mme Lepage a effectivement indiqué que son association, CRIGEN, avait été soutenue par Carrefour – mais ce n'est certes pas un crime !
Non : elle a reçu commande d'expertises indépendantes des fournisseurs !
C'est bien ce que je dis : elle a été soutenue.
Cela a été consigné dans un rapport public. Comme Mme Jacquet nous l'avait confié à l'époque, Carrefour, qui voulait mettre l'accent sur la qualité des produits, aurait d'ailleurs souhaité pouvoir les étiqueter « sans OGM ». L'enseigne avait donc passé commande, comme vous dites, au CRIGEN – et personne n'y avait trouvé à redire.
Il est inutile de vous battre entre vous : tout cela se trouve dans un rapport de l'Assemblée nationale.
J'espère que le Gouvernement acceptera cet amendement, qui concerne simplement l'ordre de présentation des compétences du Haut conseil des biotechnologies. Il est en effet évident qu'avant de se saisir d'office ou à la demande d'associations de défense des consommateurs, de protection de l'environnement ou d'autres associations agréées, il doit rendre des avis sur chaque demande d'agrément ou déclaration. Je propose donc d'intervertir le 1° et le 2°, ce qui se fait dans la quasi-totalité des comités – je ne sais pas pourquoi on ne l'a pas fait ici, peut-être à cause du Grenelle de l'environnement et de considérations diplomatiques… Cependant, cette modification est infime, et si elle soulève une tempête à l'UMP, j'y renoncerai.
La commission a émis un avis défavorable – sans aucun esprit tempétueux. (Sourires.) D'autres amendements adoptés par la commission entrent en effet en concurrence avec le vôtre : notre position est cohérente.
En outre, j'attire votre attention sur le fait que, dans le 1° de votre amendement, vous soumettez les déclarations à l'avis du Haut conseil des biotechnologies. Bien évidemment, une déclaration ne supporte pas un avis : c'est un acte obligatoire pour tout porteur de dossier. Il y a donc également une incohérence sur le fond. Aussi, je vous suggère de ne pas vous arrêter dans votre élan et de retirer cet amendement.
L'amendement n° 383 est retiré.
Je suis saisi d'un amendement n° 8 rectifié .
La parole est à M. Christian Ménard, pour le soutenir.
C'est un amendement auquel je tiens tout particulièrement. En effet, les offices parlementaires, bien qu'étant représentés au comité de la société civile du Haut conseil, ne peuvent saisir eux-mêmes ce dernier. Étant donné que leur fonction principale est d'informer le Parlement, il serait tout à fait logique, voire nécessaire, que cette possibilité leur soit reconnue au même titre qu'aux associations, de consommateurs ou autres. Le contraire serait anormal.
La commission a retrouvé dans l'argumentaire de M. Ménard la sagesse qu'il avait apportée à ses travaux et a émis un avis favorable.
Même avis.
Je mets aux voix l'amendement n° 8 rectifié .
(L'amendement est adopté.)
Je constate qu'il est adopté à l'unanimité. Félicitations, monsieur Ménard !
Je suis saisi de trois amendements, nos 211 , 260 rectifié et 210 , pouvant être, malgré leur place, soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Noël Mamère, pour défendre l'amendement n° 211 .
Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, chers collègues, il s'agit – comme nous l'avions annoncé au cours de la discussion avant l'article 2 – de revenir à la rédaction initiale du projet de loi, laquelle permettait à tout citoyen de saisir le Haut conseil, sans qu'il ait besoin d'appartenir à une association ou un syndicat. Imaginons par exemple un paysan dont le champ, biologique ou conventionnel, serait contaminé par des cultures de plantes génétiquement manipulées…
Imaginons qu'il soit isolé au milieu d'un océan de parcelles PGM : il ne pourrait pas se constituer en association, personne d'autre ne pratiquant de cultures diversifiées, conventionnelles ou biologiques.
Il devrait donc pouvoir saisir le Haut conseil, comme toute personne physique devrait pouvoir le faire, sans appartenir à une association.
Notre amendement vise tout simplement à permettre à tout un chacun de se défendre, de se prémunir contre d'éventuels préjudices et d'en demander réparation, et à réintroduire le citoyen dans un projet de loi dont on nous vante la transparence et dont on nous dit qu'il répond à tous les critères fixés par le Grenelle de l'environnement ainsi qu'aux exigences de la convention d'Aarhus et d'autres prescriptions internationales. On ne cesse de parler de démocratie citoyenne, mais il est temps de la mettre en pratique ! Chacun ici y étant très attaché, cet amendement devrait faire l'unanimité.
La commission a émis un avis défavorable, non parce qu'elle voudrait se dédouaner d'une quelconque convention, comme celle d'Aarhus, mais parce qu'elle souhaite – certaines de ses propositions le prouvent – garantir le bon fonctionnement du Haut conseil.
C'est comme pour le Conseil constitutionnel : il est inutile que le citoyen le saisisse !
Si n'importe qui pouvait s'adresser directement à lui, cela supposerait qu'il soit La Poste en personne, et dispose d'une foule de fonctionnaires pour leur répondre !
Et encore, les fonctionnaires de La Poste sont de moins en moins nombreux !
Néanmoins, monsieur Mamère, nous avons souhaité permettre à tout citoyen de s'impliquer personnellement dans le débat : il peut le faire en interpellant les parlementaires, ceux-ci répercutant sa demande à l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques, ou en s'adressant aux associations,…
…qui ont été nombreuses à participer au Grenelle de l'environnement, où les citoyens en tant que personnes étaient représentés par leur intermédiaire ; par ailleurs, nous proposerons à l'article 9 un amendement – votre collègue Yves Cochet, qui a siégé à la commission des affaires économiques, peut en témoigner – visant précisément à améliorer le débat local et à transmettre le message par la voie administrative.
Nous disposons donc déjà de plusieurs dispositifs dont la vocation est d'organiser de façon pratique et efficace la participation des citoyens au débat, et de transmettre leurs inquiétudes au Haut conseil afin qu'il leur réponde à travers ses travaux. C'est pourquoi, je le répète, l'avis de la commission est défavorable.
Accordez-moi la possibilité d'en débattre !
Le texte du Gouvernement prévoyait en effet une saisine plus large. Mais un débat parlementaire n'est pas un simple affrontement au cours duquel chacun campe sur ses positions sans écouter l'autre, sinon il suffirait de compter au départ ceux qui sont pour et ceux qui sont contre !
La vraie question est celle de l'efficacité du Haut conseil, et vous savez le prix que j'y attache. Mon sentiment, suite au débat au Sénat et à l'avis de la commission, est qu'il faut se méfier des institutions qui n'ont pas à justifier du sort qu'elles réservent aux demandes dont elles sont saisies. Il n'y a pas trente-six solutions : soit le Haut conseil se saisit de toutes les demandes, quelles qu'elles soient, au risque d'être saturé ; soit – c'est le cas dans beaucoup d'institutions – il n'a pas à se justifier des suites accordées aux demandes et les trie, au rez-de-chaussée, sans contrôle démocratique ; soit enfin il justifie ses rejets, mais c'est une procédure très complexe.
Je vous le dis en mon âme et conscience : si nous étions à l'origine plutôt pour la saisine directe par les citoyens, dès lors que l'on souhaite que le Haut conseil se concentre sur sa mission et qu'il y a eu au Sénat un débat sur les associations autorisées à le saisir – je rappelle qu'au départ, le Sénat souhaitait que cette saisine soit réservée aux seules associations de consommateurs, mais le texte actuel l'a élargie à toute fédération, tout syndicat, toute association structurée de l'environnement, de consommateurs ou autres, sachant qu'il existe en France 350 000 associations agréées et 1 million reconnues, soit une pour soixante habitants, ou trente adultes –, la position de la commission me semble tout à fait raisonnable. Toute personne souhaitant saisir raisonnablement le Haut conseil pourra le faire, au prix d'un léger filtre démocratique. Et cela permettra au Haut conseil de se concentrer sur sa mission, plutôt que de consacrer l'essentiel de son temps à trier les demandes et à s'en justifier.
En outre, que les associations de protection de l'environnement soient ainsi impliquées dans cette affaire me semble conforme à la logique du Grenelle de l'environnement qui, je le rappelle, a vu le mélange de débats territoriaux particulièrement ouverts – réunissant près de 100 000 participants – et d'une nouvelle forme de démocratie représentative collégiale. On peut toujours critiquer la représentativité de ces cinq collèges, mais nous nous sommes efforcés de l'assurer, et je pense que ce texte est assez cohérent avec cette logique démocratique. N'en faisons donc pas un drame, et rangeons-nous à l'avis de la commission, pour le bon fonctionnement de l'institution.
La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 260 rectifié .
Les arguments développés par M. le rapporteur et M. le ministre d'État avaient déjà été présentés en commission. Étant, comme vous le savez, un homme de consensus, j'ai essayé de trouver une propositionsusceptible de mettre tout le monde d'accord – c'est mon côté léniniste : un pas en arrière pour faire deux pas en avant. (Sourires.) Pour éviter l'abondance de saisines directes, j'ai donc imaginé une solution consensuelle.
J'ai présenté, en commission, un amendement identique à celui de mes collègues Cochet et Mamère. Il propose une solution intermédiaire : un fonctionnement semblable à la saisine du médiateur de la République. C'est le député ou le sénateur auquel on s'adressera qui saisira le Haut Conseil. Cela constituera une sorte de filtre qui évitera l'abondance de saisines, tout en permettant aux parlementaires, qui sont au plus près de la population et du terrain, de connaître la nature exacte du problème en question. Ainsi pourront-ils accompagner de façon très concrète la demande du citoyen – par exemple un agriculteur – ayant constaté un problème à la suite d'une dissémination. Cette formule me paraît fort raisonnable. Il n'est pas douteux que nous pourrions nous accorder sur cette proposition, rédigée à la suite de l'échange que nous avons eu en commission des affaires économiques, de façon beaucoup plus consensuelle que pour les amendements dont nous avons discuté il y a vingt-quatre heures.
Nous pouvons, rationnellement ou logiquement, retourner l'argument de M. le ministre : il considère que les instances associatives, syndicales, parlementaires, autorisées à saisir sont déjà très nombreuses et que, si nous y ajoutons les citoyens – pas des citoyens in abstracto, mais des citoyens ayant intérêt à agir –, le comité risque une thrombose.
D'une certaine manière, ce raisonnement est assez faux. Dans la mesure où les instances sont déjà nombreuses, nous pouvons bien y ajouter les citoyens, dans un souci d'ouverture démocratique. C'était d'ailleurs ce qui était prévu dans le projet de loi initial…
Eh oui !
…et nous y étions favorables. Nous le répétons, nous voulons sauver le soldat Borloo et le soldat Kosciusko-Morizet. (Sourires.)
D'autre part, en plus de quinze ans, la Commission du génie biomoléculaire, qui pouvait être saisie par des citoyens, n'a jamais connu de thrombose : elle a travaillé et tout s'est très bien passé. Dans un souci de continuité, nous pensons que le Haut Conseil pourrait être aussi ouvert que la Commission du génie biomoléculaire. Ne vous inquiétez pas, monsieur le ministre, il ne sera pas débordé.
Ces amendements sont très importants. Nous avons vu qu'un amendement avait été retenu par la commission et par le Gouvernement, le terme de « participation » ayant été omis à l'article 1er. C'est toujours le même problème : le citoyen est complètement écarté du dispositif. Vous nous avez dit tout à l'heure, monsieur le rapporteur, que l'article 9 répondait à cette préoccupation. Peut-être ai-je des problèmes de vue, car il ne me semble pas que l'article 9 traite de ce sujet. Tel que vous nous l'avez présenté en commission, il prévoit une information qui peut être délivrée par les maires aux citoyens au moment où les essais sont en cours. Nous en sommes ici à un stade antérieur à celui des essais, dans une configuration totalement différente.
Plus de 72 % des Français sont angoissés par les OGM : nous devons leur ouvrir les portes de la transparence. Cet amendement permettrait de rassurer les citoyens et de ne pas laisser aux seuls organismes, que ce soient des associations ou des groupes d'experts, l'accès au Haut conseil.
Nous n'avons pas pris connaissance de l'avis de la commission et de celui du Gouvernement sur l'amendement n° 261 !
Nous ne parlons pas de l'amendement n° 261 , mais de l'amendement n° 260 rectifié .
Je le mets donc aux voix.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Monsieur le président, nous n'avons pas entendu l'avis du Gouvernement !
Monsieur Chassaigne, nous avons examiné, à votre demande même, ces amendements en discussion commune.
Voulez-vous que nous lisions le mot par lequel vous l'avez demandé, monsieur Chassaigne ?
Je suis saisi d'un amendement n° 261 .
La parole est à M. André Chassaigne, pour le soutenir.
La commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 261 , pour deux raisons. Nous venons d'adopter un amendement de M. Ménard, qui précise que l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques peut saisir le Haut Conseil des biotechnologies. C'est déjà une première instance qui nous représente. Vous, moi, n'importe quel parlementaire peut s'adresser à l'Office parlementaire pour lui demander de faire cette saisine à sa place.
, rapporteur. Mon cher collègue, je n'ai pas fini mon argumentation.
Le règlement de l'Assemblée nationale prévoit d'autre part que les parlementaires qui siègent à la commission des finances ont un pouvoir d'investigation sur place et sur pièces. Toute autre précision mériterait d'être examinée au regard de notre règlement. Il ne faut pas perturber le règlement de l'Assemblée nationale. C'est pourquoi la commission a rejeté cet amendement.
Même avis.
Je souhaiterais que nous prenions le temps de répondre convenablement aux questions posées par M. Chassaigne et d'analyser plus avant son amendement n° 261 . Un député est d'abord représentant du peuple ; il n'est pas représentant de l'Assemblée nationale. L'Office parlementaire représente chaque député ou chaque sénateur pour interpeller diverses autorités et entités de réflexion, mais, en tant que tel, il ne représente pas directement le peuple.
Je veux attirer votre attention, ainsi que celle de MM. les ministres, sur une disposition que nous avons prise concernant les centrales nucléaires et qui permet à tout citoyen d'interpeller le gestionnaire d'une centrale à travers la commission locale d'information et de surveillance, la CLIS. Il ne s'agit pas d'une interpellation directe de l'opérateur. J'entends bien l'argument de M. le ministre : s'il y a des tonnes d'interpellations, il n'y a plus de transparence, plus de réponse qualifiée. Il faut trouver un système, sinon de filtrage, du moins d'organisation du questionnement. Nous avons donc eu un débat, à l'occasion de l'examen d'un amendement, et nous avons estimé que ce serait une bonne idée de confier à la CLIS l'interpellation des opérateurs.
L'idée de notre collègue Chassaigne participe de cette démarche. En tant que représentants du peuple, les parlementaires sont habilités à recevoir des questions, à faire en sorte qu'elles puissent former une interpellation organisée, ce qui éviterait un fatras d'interpellations dans tous les sens. Cela me paraît très important, d'autant plus que nous ne sommes pas spécialement fiers de notre amendement n° 426 , que nous examinerons un peu plus tard. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Cela peut arriver et Mme Batho, qui en est cosignataire, partage mon analyse. Devoir récolter 10 000 signatures pour pouvoir faire une interpellation, c'est risquer de créer un problème là où il n'y en a pas vraiment. Nous avons trop attendu pour répondre aux questions que se posaient les citoyens, si bien que nous avons donné le sentiment d'une véritable opacité, d'un manque de transparence. Nous sommes donc prêts à retirer notre amendement n° 426 , au profit de l'amendement n° 261 de M. Chassaigne, pour les raisons que je viens d'évoquer. Sans vouloir polémiquer, je rappellerai qu'il est d'autres domaines dans lesquels nous avons pu trouver une solution permettant, malgré tout, de faire en sorte que le citoyen ait accès à l'interpellation tout en évitant que l'abondance des interpellations nuise à la transparence.
Nous avons le droit d'aller visiter les prisonniers, mais pas de saisir le Haut conseil !
Je crois que nous y gagnons, chaque fois que nous sommes plusieurs à réfléchir à une question dans cet hémicycle, et je remercie M. Brottes de nous avoir éclairés. Il a, je le sais, une longue expérience des sujets qu'il vient d'exposer et, en tout cas, une expérience plus longue que la mienne du fonctionnement de la commission des affaires économiques. M. le président, qui lui-même est chevronné, m'a suggéré qu'il serait peut-être opportun d'accepter votre proposition. Si M. Chassaigne en est d'accord, nous pourrions faire évoluer la position de la commission et proposer à l'Assemblée d'adopter son amendement.
Je suis saisi d'un amendement n° 101 .
La parole est à M. Bertrand Pancher, pour le soutenir.
Cet amendement qui, je le reconnais, est proche de celui défendu par l'opposition, permettrait de revenir à la rédaction initiale du projet de loi, afin de donner aux citoyens, aux côtés des représentants de la société civile, la possibilité de saisir le Haut conseil des biotechnologies. J'ai entendu les divers argumentaires qui ont été développés dans ce sens. Il me paraît important que les représentants des associations puissent poser des questions sur les organismes génétiquement modifiés, faute de quoi on limiterait le débat à une querelle d'experts. Nous trouverons toujours des experts, ou de prétendus experts, en désaccord avec l'avis général. C'est d'ailleurs sain, puisque c'est toujours ainsi que progresse la connaissance. Il est indispensable de permettre aux représentants de la société civile d'émettre des avis ou de faire des recommandations, car les débats ont vocation à s'articuler entre les différents acteurs, et il vaut mieux qu'ils aient lieu dans un système organisé plutôt qu'à l'extérieur, par voie de presse, et parfois dans des logiques d'affrontement qui desservent la démocratie moderne.
C'est le cas avec la version actuelle de cet article, mais il prive le citoyen de la possibilité de s'adresser directement au Haut conseil. Je voulais donc proposer que l'on réintroduise cette perspective, car exclure le grand public des débats ne conduira pas à combler le fossé profond qui interdit à nos concitoyens d'avoir une appréhension apaisée de la problématique des OGM. Quelle que soit la qualité des débats entre la communauté scientifique et les grands acteurs environnementaux que notre projet de loi va maintenant introduire, nous ne devons pas oublier d'associer toutes celles et tous ceux qui se sentent directement concernés. 70 % de nos concitoyens sont hostiles aux OGM, mais 90 % déclarent qu'ils ne savent pas ce que c'est. Cela pose donc question à chacun d'entre nous.
Je n'ignore pas – j'ai entendu les débats de tout à l'heure – que le Haut conseil risque d'être engorgé. Peut-être aurait-il été nécessaire d'envisager une saisine par voie de pétition, ce qui aurait nécessité une certaine préparation, car, dans un pays centralisé, ce serait une véritable révolution culturelle. Tout cela ne pourrait se mettre en place que progressivement.
Je crois toutefois qu'il faudra veiller à tout niveau à réintroduire la participation du public, maintenant ou ultérieurement, de façon systématique pour toute décision prise en matière d'OGM. C'était le sens de mon amendement.
J'ai entendu avec beaucoup d'intérêt l'argumentation de notre rapporteur en faveur d'une réintroduction de la participation du public. J'attends donc qu'il nous donne quelques précisions avant de retirer, le cas échéant, cet amendement.
Je vous remercie, monsieur Pancher, de cette intervention. J'ai eu l'occasion de visiter à plusieurs reprises, à titre privé, votre circonscription ; je sais, pour y avoir des amis, que ce genre de discussions s'y déroule et que vous-même, en tant que parlementaire, vous êtes amené à répondre à ces questionnements. Vous aurez cependant remarqué qu'à travers l'amendement Chassaigne que nous venons d'adopter, nous avons consolidé en quelque sorte le rôle d'interface du parlementaire que vous êtes, entre les préoccupations de vos concitoyens et les instances nationales, qui sont chargées d'apporter des réponses et d'éclairer le jugement des citoyens sur ces questions difficiles.
Pour cette raison, je vous propose de vous rallier à la position de la commission, qui n'a pas souhaité engorger le Haut conseil de ces possibilités d'intervention et de questionnement direct de tout citoyen. Il ne s'agit pas de les empêcher, bien au contraire, mais de les faire relayer par d'autres canaux. Je vous propose donc de vous joindre à nous et de retirer votre amendement.
La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques.
Je voudrais, à ce stade, dresser à l'attention de l'Assemblée, comme je le fais régulièrement dans les grands débats, un état de nos travaux pour que chacun soit informé avant de repartir, demain matin, dans sa circonscription.
Nous avons examiné, au terme de vingt-cinq heures d'un débat au demeurant extrêmement constructif, soixante-seize amendements sur les 476 amendements déposés sur ce texte.
Il nous reste donc 400 amendements à traiter. Voilà qui donne une juste idée du bon déroulement de nos travaux.
Je suis saisi d'un amendement n° 21 .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Favorable.
Je ne veux pas allonger nos débats, je voudrais juste interroger le rapporteur sur l'implication concrète de cet amendement. En effet, l'article L. 411-1 vise les associations agrées par décret tandis que l'article L. 421-1 vise les associations qui peuvent se constituer partie civile. L'amendement, qui vise à remplacer la référence à l'article L. 421-1 par la référence à l'article L.411-1, aura-t-il des conséquences sur la liste des associations de consommateurs qui pourront saisir le Haut conseil ?
Il s'agit d'un amendement rédactionnel qui permet de préciser les choses. Je sais que M. le ministre Borloo a beaucoup pesé dans le débat au Sénat sur ce sujet, mais il semblerait que, une fois n'est pas coutume, nos collègues sénateurs, qui se targuent d'être très précis dans les références d'articles qu'ils introduisent par le biais d'amendements, se soient trompés.
Je ne parle pas d'un sénateur en particulier, je parle de nos collègues sénateurs au pluriel.
Nous avons tenu à rectifier cette référence d'article car, dans leurs travaux, c'est bien à l'article L. 411-1 qu'ils faisaient référence. Cet article prévoit les conditions dans lesquelles les associations de défense des consommateurs peuvent être agréées après avis du ministère public compte tenu de leur représentativité sur le plan national ou local, ainsi que les conditions de retrait de cet agrément, qui sont fixées par décret.
Je suis saisi d'un amendement n° 22 rectifié .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Favorable.
Je mets aux voix l'amendement n° 22 rectifié .
(L'amendement est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 118 .
La parole est à M. François Grosdidier, pour le soutenir.
Cet amendement est essentiel, vital même puisqu'il s'agit de remplacer le mot « intéressant » par le mot « concernant », pour signifier que la Haute autorité peut être saisie ou s'autosaisir de toutes les questions affectant son domaine de compétence, et non uniquement de celles qui y sont strictement circonscrites.
La commission a saisi la vitalité de l'amendement et vous propose de l'accepter.
Favorable.
Il s'agit de supprimer, à la fin de l'alinéa 4 de l'article 2, les mots « en cas de risque », dans le but de clarifier les modalités de la saisine du Haut conseil. Limiter les cas de saisine ou d'autosaisine en cas de risque n'a pas de sens.
D'une part, il est bien connu que le risque zéro n'existe pas. La précision donnée dans le projet de loi est donc superfétatoire. D'autre part, le Haut conseil doit pouvoir évaluer le rapport entre les bénéfices et les inconvénients des OGM quelle que soit la nature des risques qui peuvent leur être liés : risques avérés, potentiels ou même simplement hypothétiques.
Pour supprimer toute ambiguïté et ne pas brider le champ d'investigation du Haut conseil, il est préférable de supprimer ces mots.
Je pense qu'aussi bien M. le rapporteur que M. le ministre seront intéressés par cette précision presque sénatoriale.
Les risques induits par les OGM ne sont pas potentiels, certains d'entre eux sont avérés, même si, par définition, un risque n'est jamais certain mais est du domaine du possible. Il est donc maladroit et de mauvaise sémantique de formuler la simple éventualité du risque.
Pour renforcer mon propos, et afin que la loi soit plus précise sur la définition même d'un risque, je vous propose une liste de risques environnementaux et sanitaires.
S'agissant des risques environnementaux, il y a d'abord la réduction de la biodiversité due à l'agressivité des caractères compétitifs que les plantes génétiquement modifiées ou les OGM expriment vis-à-vis de la flore et de la faune, par exemple sur les papillons.
Deuxième type de risque environnemental : la dispersion des transgènes par voie de pollinisation, avec risque de dissémination des gènes de résistance à des herbicides par exemple. Des « mauvaises herbes » pourraient devenir plus résistantes aux herbicides totaux. Elles apparaîtraient alors et nécessiteraient l'emploi de pesticides encore plus toxiques que le Roundup par exemple pour s'en débarrasser.
Troisième type de risque, la difficile coexistence de différents systèmes agraires : des cultures n'utilisant pas d'OGM peuvent être polluées, comme cela s'est produit, nous le savons depuis quelques jours, dans les Deux-Sèvres.
Quatrième type de risque : l'adaptation des prédateurs aux toxines transgéniques. Celles-ci deviendraient alors inefficaces et provoqueraient la destruction des insectes auxiliaires qui, eux, seraient utiles.
Cinquième type de risque : la modification possible des micro-organismes du sol.
Sixième type de risque : l'accentuation de la pollution par les pesticides.
Dans les risques sanitaires, je citerai le risque toxique lié à l'ingestion de pesticides par le consommateur.
Deuxième type de risque sanitaire : l'ingestion d'insecticides fabriqués par les plantes OGM dites pesticides, que l'on appelle les insecticides protéiques. Cela n'a pas été évalué alors que le risque sanitaire existe – et pour une fois M. Le Déaut est d'accord avec moi.
Troisième type : le risque microbiologique, avec une aggravation possible de la résistance aux antibiotiques transférés par les gènes marqueurs sur les humains.
Quatrième type : l'apparition de nouveaux virus pathogènes par recombinaison virale.
Cinquième type : les effets allergisants des OGM. Pour le moment, ceux-ci ont été très sommairement étudiés.
Sixième risque : les effets des OGM non prévisibles, qu'on appelle l'effet Pusztai, que M. Le Déaut connaît, c'est-à-dire le risque de modification de l'expression ordinaire des gènes. Nous ne savons pas exactement ce que le canon à gènes peut exciter comme gènes dormants.
Enfin, le risque des OGM lié au franchissement délibéré de la barrière des espèces.
Je m'arrêterai là pour ne pas être trop long, mais il existe également tous les risques dus à la contamination.
Je pense donc que, par souci de précision, il vaut mieux, comme le propose également M. Grosdidier, supprimer les mots « en cas de risque ».
Monsieur Cochet, votre exposé est extrêmement intéressant et fourni en exemples mais il ne nous a pour autant pas convaincus car, de fait, vous remettez en cause l'indépendance, le libre arbitre de ce Haut conseil des biotechnologies qui est justement chargé de déterminer les risques. Si vous aviez été jusqu'au bout de votre raisonnement, vous auriez dû proposer autre chose, par exemple qu'il y ait des mesures proportionnées aux risques. En l'état, votre raisonnement ne semble pas abouti et la commission a émis un avis défavorable sur votre amendement.
Monsieur Grosdidier, votre argumentation est différente. Peut-être avons-nous lu un peu vite le texte de loi. En réalité, il permet soit l'autosaisine soit la saisine du Haut conseil des biotechnologies par toutes les associations et tous les canaux que nous venons de préciser afin de statuer sur la demande et par là même de mesurer si, oui ou non, il y a un risque. Et ceci doit se faire très librement, sans que qui que ce soit intervienne sur le fonctionnement du Haut conseil, nous sommes bien d'accord. Mais, par la suite, l'article propose des mesures en cas de risque. C'est le Haut conseil qui estime si, oui ou non, il y a risque, et s'il y a risque on lui impose de proposer des mesures. Le texte tel qu'il a été adopté par le Sénat me semble très clair lorsqu'on prend le temps, comme nous le faisons maintenant, de l'étudier de plus près. Je vous invite donc à retirer votre amendement, monsieur Grosdidier.
L'avis du Gouvernement est identique à celui du rapporteur mais je voudrais distinguer deux points.
Il y a d'un côté les missions du Haut conseil, qui sont d'éclairer le public, sur la différence entre la trace et le taux de 0,9 % par exemple, et puis, de l'autre, la saisine, qui est extrêmement large puisqu'il est simplement dit que pour saisir il faut avoir un droit à agir et déclarer qu'il y a un risque.
Pour la première partie, qui concerne tout ce qu'on demande sur le fond à ce Haut conseil pour éclairer les Français, les institutions, l'exécutif et le Parlement, il n'est pas besoin de savoir s'il y a un risque, c'est juste la matière des biotechnologies qui est concernée. Concernant la seconde partie, le droit à agir, là, la logique de risque intervient.
Si les deux choses n'avaient pas été dissociées, j'aurais soutenu l'amendement, mais comme elles sont dissociées, je suis la position de la commission.
Les arguments que vous venez d'avancer, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, devraient éclairer les deux collègues qui ont défendu ces amendements. Néanmoins, le texte du projet de loi reste ambigu.
On a le sentiment que la saisine par certaines associations ou l'autosaisine du Haut conseil des biotechnologies ne peut intervenir qu'en cas de risque.
Non !
Monsieur le ministre, j'ai bien compris que ce n'était pas ce que vous vouliez dire, mais c'est ainsi que l'on peut le comprendre. Si j'étais à la place du rapporteur, je proposerais donc que les mots « en cas de risque » soient placés juste après « et ». La fin de l'alinéa 4 de l'article 2 se lirait donc ainsi : « et, en cas de risque, proposer toutes mesures de nature à préserver l'environnement et la santé publique ; ». Ainsi, il n'y aurait aucune ambiguïté.
Le Haut conseil devra informer même en l'absence de risque !
La rédaction actuelle donne le sentiment que « en cas de risque » s'applique à la totalité de ce que comporte l'alinéa, ce qui est une vraie ambiguïté.
Je ne sais pas si je peux le faire, mais le rapporteur, lui, le peut. Vous savez, j'ai l'habitude de proposer ici des choses sous la signature des autres ! Je suis un soutier dans cette affaire ! (Rires.)
Que de modestie !
La proposition de M. Brottes me paraît de nature à clarifier le texte. Je vous propose donc un amendement, n° 482 , ainsi rédigé :
« I. A la fin de l'alinéa 4 de l'article 2, insérer après le mot : " proposer ", les mots : " en cas de risque ".
« II. En conséquence, à la fin de l'alinéa 4, les mots : "en cas de risque " sont supprimés. »
Monsieur Mamère, vous qui êtes cosignataire de l'amendement n° 212 , qu'en pensez-vous ?
Nous sommes tout à fait d'accord avec cette proposition, car la rédaction actuelle du projet pourrait laisser entendre qu'il existe des OGM sans risques, ce que nous ne pouvons accepter. Yves Cochet vous a en effet déjà donné la liste des risques environnementaux et sanitaires que présentent les OGM.
Je suis saisi d'un amendement n° 213 .
La parole est à M. Yves Cochet, pour le soutenir.
Un problème se pose. Le champ scientifique d'étude et d'évaluation du Haut conseil des biotechnologies est extrêmement large. Celui-ci va notamment donner son avis sur les demandes d'autorisation de cultures d'OGM, comme feu la commission du génie biomoléculaire. Ensuite, c'est le politique qui prendra la décision. Cela dit, pendant quinze ans, chaque fois que ladite commission du génie biomoléculaire rendait un avis positif, le Gouvernement allait dans le même sens.
Mais arrêtez ! On change la règle !
En général, ce genre d'avis est donc plutôt suivi. Nous proposons, dans notre amendement, que le Haut conseil donne un « avis » – il ne s'agit donc pas de le transformer en tribunal – sur ce que l'on pourrait appeler les abus ou les irrespects de la loi. Vous pourriez me dire que le Haut conseil, qui n'a pas le statut de tribunal, n'a pas à se transformer en juge pour déterminer s'il y a eu abus ou irrespect, mais, je le répète, nous ne demandons pas qu'il procède à un jugement. Celui-ci sera rendu soit par les tribunaux s'agissant de ces abus ou irrespects, soit par les politiques s'agissant de la décision d'autorisation. Le Haut conseil ne ferait que rendre un avis sur chaque saisine déposée pour abus ou irrespect, mais cela élargirait ses compétences. Il me semble, monsieur le ministre, que vous devriez y être favorable.
Je vais vous donner un exemple très concret. Dernièrement, du maïs bio, hélas destiné à faire du pop-corn – cela dit, après tout, le pop-corn sera sans doute moins dangereux s'il est fait avec du maïs bio plutôt qu'avec du transgénique –, a été déclaré contaminé par des OGM dans une exploitation de Villiers-en-Plaine, dans le département des Deux-Sèvres. Si la dissémination en plein champ des OGM se développe, comme nous le craignons, ce type de cas va se multiplier et ce sont les tribunaux qui vont être saisis directement. Sans préjuger du pouvoir judiciaire, qui est indépendant en France, il me semble donc que le Haut conseil pourrait donner un avis sur les abus et les irrespect. Cela pourrait être, en quelque sorte, l'humus d'une jurisprudence civile que la justice pourrait utiliser lors des procès opposant les agriculteurs bio ou conventionnels aux firmes semencières.
Défavorable.
Je suis saisi d'un amendement n° 23 .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Cet amendement vise à supprimer, dans l'alinéa 5 de l'article 2, le mot : « , déclaration ». Nous avons déjà eu cette discussion avec M. Le Déaut tout à l'heure. Les déclarations d'utilisation confinée d'organismes génétiquement modifiés ne seront pas soumises à l'avis préalable du Haut conseil des biotechnologies qui sera cependant tenu informé de ces déclarations – précision qui sera apportée par un amendement ultérieur.
Favorable.
Je suis saisi d'un amendement n° 322 .
La parole est à M. Claude Gatignol, pour le soutenir.
Cet amendement rédactionnel, de précision et de cohérence, vise à substituer aux mots : « la dissémination volontaire », les mots : « la culture réglementée ». Il n'est nullement dirigé contre l'architecture du texte. En améliorant la rédaction, il contribuerait à la clarté, à la lisibilité du texte, dont il faciliterait la compréhension. Cela va dans le sens de la transparence voulue par le Gouvernement, et par nous tous, dans la droite ligne du Grenelle de l'environnement.
Lors d'un rapide débat en commission, un argument a été avancé pour tempérer un penchant à accepter mon amendement : « Il ne faudrait pas faire de la peine aux écrivains publics de Bruxelles », avait-on dit. Cela n'est pas du tout mon intention, puisque le sens de la directive est préservé. D'ailleurs, si j'avais à donner un titre à cet amendement, je pourrais l'appeler : « De Boileau à Antoine Herth », tout en citant aussi Lamartine et Tocqueville, qui ont siégé dans cet hémicycle.
Nous savons tous qu'il faut transcrire la directive, mais faut-il pour autant reprendre le mot à mot d'un texte à vocation intereuropéenne ? Je ne le crois pas. Il y a le fond, la forme et l'esprit. Bien entendu, nous respectons les orientations de la directive, mais rédiger en français un texte de la loi française est un devoir pour le Parlement et je ne crois pas que « dissémination volontaire » soit compris comme étant le fait de cultiver des plantes génétiquement modifiées. Ces cultures sont bien localisées, enfermées dans une parcelle elle-même limitée par des zones tampon. Il faut donc préciser les choses.
Enfin, et cela résulte bien du Grenelle de l'environnement, pour certifier ces cultures ouvertes, il faut préciser qu'il ne s'agit pas de dissémination. D'ailleurs, le mot « dissémination » figure dans l'article 3 du projet de loi, mais dans son sens réel, c'est-à-dire éparpillement. En outre, c'est l'expression anglaise deliberate release qui est utilisée dans la directive. Or deliberate se traduit par « réfléchie » et release pas tout à fait par « dissémination », car il s'agit ou de libérer un prisonnier, ou de relâcher un animal, ou d'émettre un gaz, la dissémination étant, en langage de biologie végétale, la libération de graines par distance.
Je n'irai pas plus loin dans ma démonstration pour respecter la loi, la sémantique et la langue française, mais je crois que nous pourrions faire un effort de rédaction. Monsieur le rapporteur, ma suggestion ne vient peut-être pas au bon moment et je suis prêt à envisager avec vous de placer cette expression là où il faut dans le texte, mais j'insiste : « la dissémination volontaire » ne correspond pas à ce que l'on entend par dissémination en termes techniques. C'est presque faire injure à la fois aux chercheurs, qui font de la recherche appliquée sur le terrain, et aux agriculteurs qui mettront en culture ce type de plantes améliorées dont nous attendons tous les bienfaits.
Nous avons eu cette discussion à plusieurs reprises en commission et dans les couloirs de l'Assemblée. J'entends bien vos arguments, monsieur Gatignol. Vous avez fait référence à la traduction d'une expression anglaise que je ne saurais répéter, car je ne suis pas très chevronné dans la langue de Shakespeare, mais je me suis livré au même exercice dans la langue de Goethe, que je maîtrise mieux. J'ai alors trouvé, dans les textes allemands, le mot Vertrieb qui vient du verbe vertreiben et correspond à « dissémination ». Cette traduction est donc communément admise par l'ensemble des pays européens. Nous sommes là aussi dans le prolongement de ce dont nous avons discuté tout à l'heure s'agissant de la nécessité d'informer le citoyen. Quand il y a une réglementation européenne, chaque citoyen européen doit pouvoir la comprendre dans sa propre langue. « Dissémination » est le mot qui a été retenu pour la France. La commission ne peut donc qu'être défavorable à cet amendement, mais nous allons voir si nous pouvons « disséminer » votre proposition à un autre endroit du texte tout en respectant les délais de confinement qui nous sont imposés par M. le ministre des relations avec le Parlement pour cette discussion !
L'expression « dissémination volontaire » est présente neuf fois dans l'article 9, mais puisque M. le rapporteur me dit qu'il veut bien revoir, d'ici à la fin du débat, la place de cette expression, je retire mon amendement.
Cet amendement propose d'encadrer plus précisément le délai dans lequel le Haut conseil devra rendre un avis sur chaque demande d'agrément, déclaration ou demande d'autorisation d'utilisation confinée ou de dissémination volontaire d'OGM.
Il propose par conséquent de rédiger ainsi la fin de l'alinéa 5 : « Les avis sont réputés défavorables s'ils ne sont pas rendus dans un délai de trois mois. »
Avis défavorable. Les délais sont déjà prévus par la réglementation européenne.
Sincèrement, je suis défavorable à l'amendement. Ces avis méritent d'être pesés de manière très sérieuse. Nous avons vu récemment à quel point il était difficile de faire jouer la clause de sauvegarde, qui impose d'argumenter dans le domaine extrêmement complexe des réglementations internationales.
Je comprends bien les raisons qui peuvent justifier un tel amendement, mais il ne me paraît pas raisonnable de l'adopter.
Je suis saisi d'un amendement n° 24 .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Oui.
Je suis saisi d'un amendement n° 25 deuxième rectification.
La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut, pour le soutenir.
L'amendement a été adopté par la commission. M. le rapporteur le défendra aussi bien que moi.
Puisque M. Le Déaut me demande de relayer sa pensée, je le ferai avec plaisir. Son amendement reprend une des propositions formulées en 2005 par la mission d'information de l'Assemblée nationale sur les enjeux des essais et l'utilisation des organismes génétiquement modifiés.
Je confirme qu'il a été accepté par la commission.
Avis favorable. L'amendement confirme du reste qu'on ne faudrait pas dire « les OGM », mais « des OGM », puisque ceux-ci doivent être traités au cas par cas.
Je mets aux voix l'amendement n° 25 deuxième rectification.
(L'amendement est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 240 .
La parole est à Mme Frédérique Massat, pour le soutenir.
Cet amendement pose à nouveau la question des délais. Il propose, tout en continuant de respecter ceux que fixe la réglementation communautaire, d'ajouter une précision.
Je m'aperçois qu'il s'agit du même amendement que l'amendement n° 239 , qui vient d'être rejeté. Je n'aurais pas dû vous donner la parole, madame Massat.
Non, monsieur le président, on ne peut pas considérer qu'il s'agisse du même amendement puisqu'il ne porte pas exactement sur le même passage du texte !
Compte tenu de ces précisions, je vous redonne la parole, madame Massat, pour avoir au moins le plaisir de vous entendre.
Cet amendement vise à préciser, tout en conservant le respect des délais fixés par la réglementation communautaire, que les avis sont réputés défavorables quand ils ne sont pas rendus dans un délai de trois mois.
Il ne vise par conséquent qu'à compléter la réglementation, et non pas, comme l'amendement n° 239 , à modifier les délais prévus par la réglementation communautaire.
Je suis saisi d'un amendement n° 406 .
La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut, pour le soutenir.
On l'a observé au Sénat : toutes les fédérations d'apiculteurs ont demandé qu'une étude soit réalisée sur les effets des cultures d'OGM sur le miel. C'est à quoi tend l'amendement, qui propose que le Haut conseil des biotechnologies rende un avis sur l'incidence des cultures de plantes génétiquement modifiées sur l'apiculture et évalue les préjudices résultant de la présence accidentelle d'OGM dans la production de miel.
On a entendu dire tant de choses à ce propos ! Il serait bon que, très rapidement, avant toute autre forme de réglementation, un avis clair soit rendu sur la question. J'espère que la commission, qui a d'abord rejeté l'amendement, l'acceptera et renoncera à la rédaction du rapporteur. Celui-ci est en effet revenu sur la rédaction proposée par le Sénat, et il a renvoyé la précision concernant les ruches à un autre article du texte. Or la solution proposée par notre amendement me semble meilleure.
La commission est défavorable à cet amendement. Ce n'est pas parce que l'apiculture ne nous intéresserait pas. Nous en avons, au contraire, discuté très longuement en commission, et nous avons déposé à ce sujet des amendements sur l'article 5, relatifs à la prise en compte d'éventuelles conséquences négatives des OGM sur l'activité apicole.
Mais le Haut conseil a toute compétence pour se saisir de n'importe quel sujet sur lequel le Gouvernement doit être éclairé, y compris les problèmes que rencontrent les apiculteurs. D'ailleurs, s'il faut aller dans ce sens, pourquoi ne pas allonger la liste de ses compétences ? M. Cochet a un jour parlé de saumons qui auraient été génétiquement modifiés. Pourquoi donc ne pas évoquer la pisciculture, voire la sylviculture ?
Le texte fixe clairement les fondements du travail du Haut conseil des biotechnologies. Cela suffit. C'est pourquoi la commission a repoussé cet amendement.
Je me contenterai de trois remarques simples.
Premièrement, le Haut conseil peut rendre un avis sur tout, y compris sur les apiculteurs. Mais prenons garde : chaque fois que, dans un texte de loi, nous désignons telle catégorie, nous excluons implicitement et juridiquement celles qui ne sont pas mentionnées. Tenons-nous en donc à un texte de principe.
Deuxièmement, l'article 5 prévoit une application pour l'apiculture.
Troisièmement, une mission a déjà été confiée, dans le cadre du Grenelle, à votre collègue Martial Saddier, sur l'apiculture et les abeilles.
Chacun a bien compris que le saumon a peu de chance de contribuer à une dissémination des OGM sur les cultures végétales. J'insiste sur ce point, parce qu'il est extrêmement sérieux. En réalité, si M. le rapporteur a souhaité que, plus loin dans le texte, il soit explicitement question des ruches, ce qui l'honore, c'est qu'il peut y en avoir à proximité de champs d'OGM.
Sans être spécialiste, j'ai cru comprendre que les abeilles, comme les oiseaux ou le vent, peuvent jouer un rôle dans le transport des OGM, ce qui justifie qu'on s'en préoccupe de manière spécifique.
Oui !
Ce n'est pas seulement le problème des apiculteurs ou de la production du miel qui est en cause, mais celui du rôle des abeilles qui peuvent, du fait de leur navigation, être un support de dissémination. Voilà pourquoi M. Le Déaut souhaite que l'on appelle spécifiquement notre attention sur ce point, qui n'a rien à voir avec le cas du saumon, pour reprendre l'exemple cité par le rapporteur.
Je suis saisi d'un amendement n° 385 .
La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut, pour le soutenir.
Permettez-moi une remarque au préalable : M. Cochet a raison de souligner que, dans le monde politique, le sort des saumons est important, car beaucoup de nos collègues aiment à remonter les courants.
Plus sérieusement, j'ai indiqué hier que l'activation de la clause de sauvegarde avait été rocambolesque. M. le ministre a contesté mon appréciation, mais je rappelle que l'on a activé cette clause sur la base d'un désaccord. Comme le président de la commission avait rapporté l'esprit, sinon les termes, d'un débat, quatorze scientifiques sur seize nous ont prévenu, le lendemain, par téléphone qu'ils n'avaient pas tenu les propos qu'on leur prêtait et qu'ils avaient été manipulés.
À propos de manipulation, d'ailleurs, je remarque moi-même une difficulté : M. Debré parle de génie génétique, M. Cochet de manipulation génétique et M. Brottes d'ingénierie génétique. L'adjectif est le même, mais le nom change !
Quoi qu'il en soit, il est évident qu'il y a eu confusion. Le Haut comité avait été créé en vue de l'activation de la clause de sauvegarde. Or une telle procédure n'était pas utile, monsieur le ministre : lors de la commission d'enquête, en effet, nous avons indiqué que nous étions favorables à un moratoire sur les cultures commerciales avant que la loi soit votée. L'argument vous permettait d'activer la clause de sauvegarde. Vous avez choisi une autre manière de procéder, qui vous permettra peut-être de disposer de meilleures garanties juridiques. Nous verrons.
Quoi qu'il en soit, à l'avenir, l'activation de cette clause doit être examinée par le Haut conseil des biotechnologies, qui doit rendre un avis. Si celui-ci est positif, la clause sera activée, comme l'avait annoncé le Président de la République, et le terme de « doutes sérieux » qu'il a utilisé est excellent. La clause sera activée si de tels doutes sont émis par le Haut conseil.
Voilà un amendement plein de bon sens, qui rejoint effectivement le point de vue du sénateur Legrand. Je suis sûr que M. Jacob y sera favorable.
La commission est défavorable : l'alinéa, tel qu'il est rédigé dans le projet de loi, se justifie pleinement, et préserve mieux que l'amendement le libre arbitre du Haut conseil.
Très sincèrement, je ne vous comprends pas, monsieur Le Déaut, ou alors je vous comprends trop. Vous essayez d'introduire dans le Haut conseil pour les biotechnologies une complexité comparable à celle à laquelle nous nous sommes heurtés pour faire jouer la clause de sauvegarde. D'ailleurs, vous avez avoué vous-même une faute passée, en rappelant que quatorze scientifiques sur seize ont déclaré avoir été manipulés par l'utilisation de l'expression « doutes sérieux ».
Ce que vous voulez, au fond, ce n'est pas que ce Haut conseil soit en situation d'apporter un éclairage scientifique et sociétal, mais qu'il soit enfermé dans l'obligation d'utiliser une expression à caractère politique et décisionnaire, ce qui empêchera ses membres de faire sérieusement leur métier.
Bien entendu, nous connaissons tous votre position. Il n'y a pas de problème à ce sujet et je comprends très bien que vous ayez défendu un tel amendement.
Mais prenez garde, il faut dire la vérité : si le Haut conseil est une autorité juridictionnelle, alors le pouvoir politique lui abandonne sa capacité de décision, disons plutôt qu'il la lui concède ou qu'il la lui transfère.
Dès lors qu'avec le « doute sérieux » vous introduisez une clef, vous savez très bien ce qui va se passer, monsieur Le Déaut ; pour ma part, je l'ai déjà vécu.
Soit le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif transfèrent à une Haute autorité la responsabilité politique en matière de biotechnologie – et dans ce cas votre système de clef s'applique –, soit cet organisme reste une instance plurielle sociétale d'analyse, d'expertise…
…d'évaluation, de remontée d'informations venant du monde entier. Elle évalue les coûts et les gains, les avantages et les inconvénients, et émet de vrais avis. Et dans ce cas, il faut la laisser aller jusqu'au bout de ses analyses sans lui imposer une clef conceptuelle ou politique.
Je crois qu'en adoptant cet amendement, nous tomberions dans un piège qui est de nature à tuer le concept même de Haut conseil. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je suis saisi d'un amendement n° 332 .
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le soutenir.
Les députés qui vous présentent cet amendement souhaitent renforcer le rôle du Haut conseil et lui permettre de prendre des initiatives en toute indépendance. Après l'alinéa 6 de l'article 2 du projet de loi selon lequel le Haut conseil des biotechnologies « procède ou fait procéder à toutes expertises, analyses ou études qu'il juge nécessaires », nous proposons d'ajouter : « par un organisme de recherche public, selon un protocole qu'il a défini et sous son contrôle. » Il s'agit de permettre au Haut conseil de demander des analyses ou des études complémentaires en fixant un cahier des charges et en contrôlant les procédures. Il aurait ainsi un véritable rôle d'expertise.
Nous en avons déjà débattu !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
Avis défavorable. Nous avons déjà réglé cette question grâce à l'adoption d'un système d'agrément.
Même avis.
Je suis saisi d'un amendement n° 26 .
La parole est à M. Antoine Herth, pour le soutenir.
Avis favorable.
Cet amendement a pour objet d'écrire, après l'alinéa 7 de l'article 2 du projet de loi, que les avis et recommandations du Haut conseil des biotechnologies font état des positions non consensuelles qui se sont exprimées. Ce mode de fonctionnement avait été adopté et apprécié lors du Grenelle de l'environnement. Nous pensons qu'il peut permettre d'émettre des avis éclairés car les sujets sur lesquels il y a débat sont mis en valeur.
La parole est à M. Philippe Tourtelier, pour soutenir l'amendement n° 241 .
L'amendement n° 241 a le même objet. Nous avons déjà eu cette discussion en commission où j'avais souligné que, pour avoir un débat dépassionné et rationnel, il était intéressant d'échanger des arguments. Nous avons le choix : le Haut conseil peut émettre un avis qui, sans autres commentaires, aura tout le poids de l'argument d'autorité ; il peut aussi faire état à côté de cet avis des éventuelles positions non consensuelles. C'est cette dernière solution que préconisait précisément le Grenelle de l'environnement.
Où avez-vous trouvé cela ?
J'ai le texte, il s'agit de la synthèse de la réunion du 10 septembre 2007 de l'intergroupe OGM.
Donnez-moi une page, le Grenelle ce ne sont pas des dates !
Je me réfère à la synthèse de la réunion de l'intergroupe OGM du 10 septembre qui est en ligne sur le site internet du Gouvernement. J'en ai une version papier et, si vous y avez apporté ultérieurement des modifications, c'est que l'on trouve n'importe quoi sur le site du Gouvernement !
D'ailleurs, vous nous aviez déjà fait le coup avec l'expression « produire et consommer sans organisme génétiquement modifié » qui s'est transformée en un droit de produire avec organisme génétiquement modifié ! Ce n'était déjà pas anodin, et maintenant, sur un second point essentiel en termes de démocratie vous voulez recommencer ! J'invite tous ceux qui m'entendent à aller consulter la synthèse de l'intergroupe OGM du Grenelle de l'environnement sur le site du Gouvernement, on y lit bien qu'il faut rendre compte des avis non consensuels.
Certainement pas, cette argumentation n'est pas correcte !
J'ai le document avec moi, monsieur le ministre. Je comprends que cela vous gêne. Vous dites vouloir la transparence et la démocratie, mais si vous souhaitez que les politiques soient bien informés, il faut qu'ils connaissent les termes du débat, il faut qu'ils sachent quelles questions ont été posées et quelles questions ne l'ont pas été ; quelles réponses ont été données et si d'autres réponses auraient pu l'être. C'est cela un débat rationnel !
Si on veut la transparence pour les politiques comme pour les citoyens, on peut et on sait le faire. Il est possible soit de publier les minutes des débats du Haut conseil, mais cela risquerait de nuire à l'expression des intervenants, soit, comme on le fait à l'Assemblée pour les missions d'information, de faire suivre les avis des positions qui les nuanceraient. Sans cela, si vous limitez le droit d'expression des membres de la commission, ce ne serait plus la transparence, mais l'opacité totale.
Pourtant, monsieur le rapporteur, il me semble qu'en commission, nous étions tous d'accord sur le fond. Certes, nous n'avions pas pu discuter de cet amendement à l'article 2 parce qu'il était déjà tombé, mais lorsque je vous avais interrogé, vous m'aviez répondu – le compte rendu de la réunion de commission en fait foi – que vous étiez d'accord avec moi et que vous réfléchissiez à un amendement permettant de répondre à cette question.
Pour les mêmes raisons que celles que j'ai données en commission, j'émets un avis défavorable aux amendements qu'ont défendus M. Tourtelier et Mme Fraysse. Cet avis ne concerne pas le fond de ces amendements mais leur place après l'alinéa 7 de l'article 2.
J'avoue, mais vous avez bien fait de le rappeler monsieur Tourtelier, qu'après nos longues heures de discussion sur l'article 1er, je n'ai pas préparé d'amendement pour reprendre votre idée à laquelle j'adhère. Nous pourrons le faire sous forme d'un sous-amendement à l'alinéa 15 de l'article 2 : les positions divergentes seraient transmises par son président avec l'avis du Haut conseil.
A ce sujet, je vous donne lecture d'un texte que l'Agence française de sécurité des aliments publie sur son site internet sous la forme d'un code de déontologie – la loi n'a rien imposé à l'AFSSA – au paragraphe intitulé « Le consensus est une résultante et pas un parti pris » : « Le traitement des controverses scientifiques dont est chargée l'agence implique d'affirmer le droit d'expression libre des opinions divergentes, sous réserve d'une argumentation scientifique solide les sous-tendant, et doit garantir l'expression publique de ces divergences dans les avis rendus. » Il s'agit bien là de l'idée que nous défendons collectivement. Nous la reprendrons dans un amendement qui portera sur des dispositions du projet de loi que nous examinerons ultérieurement. En attendant, je demande aux auteurs des amendements en discussion de bien vouloir les retirer.
Même avis.
L'amendement n° 339 présenté par Mme Fraysse est intéressant. Nous venons de le constater parmi nous, et c'est vrai également dans les milieux scientifiques, on ne peut pas dire que la question des biotechnologies en général, et celle des OGM en particulier, fasse l'unanimité. Il y a débat et controverse sur les bénéfices et les risques même parmi les chercheurs. Je connais M. Testard : voilà un grand savant qui n'est pas totalement convaincu par les OGM, alors que d'autres scientifiques le sont.
Nous ne sommes pas dans l'obligation de contraindre la réalité des accords pour donner une image unitaire et sereine de ce débat. Dans l'article 1er du projet de loi que nous examinons, il est question du principe de transparence. On ne va pas sauver les apparences en prétendant que les avis du Haut conseil sont unanimes et que tous les membres de celui-ci, notamment son conseil scientifique, sont totalement d'accord pour chacun de ses avis. La diversité des opinions est d'une certaine manière aussi intéressante que la biodiversité à propos de laquelle, Édouard Wilson écrivait en 1992 : « La diversité est une des plus grandes richesses de la planète, et pourtant, c'est la moins reconnue comme telle. »
Le public a le droit de connaître les éventuelles opinions discordantes des experts du Haut conseil. Il ne s'agit pas d'endormir les vigilances mais d'éveiller la réflexion, la curiosité et l'envie d'en savoir plus. La pluralité des opinions est essentielle pour l'avancée de la recherche, le Haut conseil rend des avis qui deviennent officiels mais ne doivent pas obligatoirement être unanimes.
J'avais déposé un amendement n° 102 dont on m'a dit qu'il était tombé, mais je voulais indiquer, sur la question dont nous parlons, qu'il me semble essentiel dans tout débat public de faire valoir les positions consensuelles comme celles qui ne le sont pas. Le rapporteur nous annonce que ces éléments seront précisés dans la suite du texte, j'en prends acte. Il faut en effet, par souci de transparence, que soient identifiés clairement, lors d'un débat, les points qui font consensus et ceux pour lesquels, le cas échéant, ce n'est pas le cas.
Je suis saisi d'un amendement n° 27 .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Cet amendement vise à simplifier la rédaction actuelle des dispositions relatives à la compétence du Haut conseil des biotechnologies en matière de surveillance biologique du territoire et à préciser le rôle de celui-ci.
Favorable.
Même si je ne suis pas toujours d'accord avec M. Grosdidier, je pense, comme lui, que l'article 2 pourrait être amélioré.
Il est prévu que, en vue de l'accomplissement de ses missions, le Haut conseil des biotechnologies puisse se saisir de toute question intéressant son domaine de compétence et proposer toutes mesures de nature à préserver l'environnement et la santé publique, rende un avis sur les demandes d'agrément, procède à des expertises ou à des avis, rende publics ses avis et recommandations, soit consulté sur le plan annuel de surveillance des OGM, mette en oeuvre des mesures d'évaluation des risques environnementaux, puisse mener des missions d'information – dont nous avons parlé tout à l'heure – et établisse un rapport annuel d'activité.
Or il nous semble que les missions du Haut conseil des biotechnologies pourraient être étendues, dans le droit fil du Grenelle de l'environnement. Je ne partage pas tout ce qu'a dit M. Cochet à propos des risques sanitaires, qui font peur à la population. Je pense notamment au risque de résistance aux antibiotiques, dont on ne parle plus aujourd'hui. En effet, ce ne sont pas les transferts horizontaux de gènes qui vont accroître ce risque, alors que, depuis des dizaines d'années, les antibiotiques sont mal utilisés, que ce soit en médecine animale ou en médecine humaine. Quant aux risques d'allergie, ils existent pour les OGM – et un certain nombre de cas ont été cités – comme pour tout aliment nouveau. Dans la Meuse par exemple, monsieur Pancher, il y a une dizaine d'années, deux personnes sont décédées des suites d'une réaction allergique au sésame, quand les boulangers ont commencé à utiliser cet ingrédient dans la fabrication de certains pains.
En revanche, le développement des OGM peut avoir des conséquences sociales, économiques et environnementales, et André Chassaigne a très bien dit que les conséquences économiques étaient même, sans doute, les plus importantes. Si, à l'avenir, on a besoin des biotechnologies, notamment pour résoudre le problème des engrais, il est évident que leur utilisation pourra avoir des conséquences économiques importantes, notamment dans les pays du sud. Utilisés dans la filière du coton, par exemple, les OGM risquent d'avoir une incidence sur le coût de production. Or si le prix du coton baisse en raison de la modification des rendements, cela aura des conséquences économiques importantes.
Le Haut conseil doit donc être chargé d'analyser les conséquences sociales et économiques de la dissémination volontaire. Lorsque j'ai plaidé, avec conviction, en faveur de cet amendement en commission, je n'ai pas été écouté. Pourtant, monsieur le ministre, cet amendement donnerait plus de poids au Haut conseil des biotechnologies, sans rien enlever à ce que vous avez écrit.
L'avis de la commission est défavorable. L'amendement est satisfait en ce qui concerne les conséquences environnementales, pour lesquelles l'évaluation des risques est obligatoire. Quant à l'analyse des conséquences sociales et économiques, elle relève essentiellement de la compétence du comité actuellement intitulé « de la société civile ».
Même avis que la commission.
Je suis saisi d'un amendement n° 242 .
La parole est à Mme Corinne Erhel, pour le soutenir.
Cet amendement vise à assurer, en vertu du principe de transparence, une égalité de traitement des demandes d'agrément et d'autorisation soumises au Haut conseil.
Le texte actuel est suffisant, puisqu'il dispose que le Haut conseil peut se saisir de toute question intéressant son domaine de compétence. Avis défavorable.
Défavorable.
Cet amendement vise à ajouter, dans l'alinéa 12 de l'article 2, après le mot « composé », les mots : « paritaires ». En effet, le comité de la société civile est le mieux à même de tenir compte des résultats scientifiques pour donner un avis éclairé sur les choix éthiques, sociaux et économiques. Il est le seul à pouvoir apporter, sur ces sujets, des éléments d'information et des questionnements non pris en compte par les travaux scientifiques existants. Ces avis et informations sont tout aussi importants pour éclairer la décision politique que l'avis des scientifiques, qui ne se prononcent qu'en fonction des connaissances scientifiques publiées.
Tout d'abord, je veux dire combien j'ai apprécié l'intervention de notre collègue Le Déaut, qui a rappelé la nécessité d'attribuer au Haut conseil un rôle d'évaluation des conséquences économiques et sociales des OGM.
Les différents amendements que nous proposons afin de rétablir la parité entre les comités visent à revenir à l'esprit initial du texte du Gouvernement, lequel ne donnait pas la priorité aux scientifiques sur la société civile. D'ailleurs, le comité de la société civile s'appelait initialement « comité économique, éthique et social ». Il était donc bien chargé, comme l'a demandé M. Le Déaut, d'évaluer les conséquences économiques, éthiques et sociales du développement des OGM.
Mais la priorité est désormais donnée aux scientifiques sur les représentants de la société civile. Nous sommes, dans ce domaine, très éloignés de ce qui se fait dans des pays voisins comme le Danemark, qui organise des conférences de citoyens afin d'associer ceux-ci aux grandes décisions qui engagent l'environnement et la société. On aurait parfaitement pu s'inspirer de ce modèle pour le fonctionnement de cette haute autorité.
En tout état de cause, nous estimons que le comité dit « de la société civile » mérite d'avoir autant de poids que le comité scientifique. La parité permettrait de garantir cet équilibre, qui a été mis en péril par le Sénat et que le Gouvernement devrait s'attacher à rétablir. C'est la raison pour laquelle nous avons déposé l'amendement n° 217 .
Le texte initial du Gouvernement était, disons-le simplement, plus paritaire…
… et la définition de la société civile différente. C'est tout l'intérêt d'avoir quatre lectures que de permettre de faire progresser les choses, de débattre, d'avancer.
J'ai cru comprendre que la commission déposerait un amendement visant à revenir à la dénomination initiale, et je l'en remercie. J'ai également cru comprendre qu'il serait proposé à l'Assemblée de réunir les deux comités dans une logique de formation plénière, et je m'en félicite. Cette évolution me paraît très heureuse car l'étanchéité serait absolument préjudiciable. J'ajoute que le Haut conseil organisera ses travaux dans le cadre de son règlement intérieur.
S'agissant des avis, j'ai noté que le rapporteur proposait que l'on s'inspire du modèle de l'AFSSA, qui ferait d'ailleurs l'unanimité sur ces bancs. En effet, le Haut comité n'est pas une autorité administrative, qui prend une décision tranchée, mais plutôt une instance qui rend des avis nuancés, lesquels peuvent même refléter des divergences. Pour autant, ces avis ne doivent pas forcément être exprimés de manière individuelle, car les personnalités compétentes peuvent souhaiter conserver l'anonymat sur un certain nombre de prises de position techniques. J'ai noté que le rapporteur se proposait de déposer un amendement, maintenant ou avant la deuxième lecture.
Sur ces points, nous nous rangeons à la position de la commission. Elle ne correspond pas tout à fait à une expression paritaire ou commune, mais l'on progresse. Peut-être que, d'ici à la deuxième lecture – et c'est l'intérêt d'avoir renoncé à la déclaration d'urgence –, nous continuerons à cheminer en ce sens.
Je souhaiterais faire un rappel au règlement concernant le déroulement de la séance. Tout à l'heure, nous avons retiré deux amendements portant sur les avis contradictoires des membres du Haut conseil, car le rapporteur nous a indiqué que la commission déposerait un amendement à ce sujet à l'alinéa 15 de l'article 2. Or, M. le ministre vient de nous dire que cet amendement pourrait être déposé lors de la deuxième lecture…
Un amendement sera donc bien déposé à l'alinéa 15. Je souhaitais juste le faire préciser.
J'avais déposé un amendement qui a d'abord été rejeté en commission, avant d'être repris par M. le rapporteur sous la forme de l'amendement n° 467 , dont je suis cosignataire. Toutefois, les arguments exposés en commission par M. Cochet à l'appui de l'amendement n° 400 me paraissent pertinents, ce qui me conduit à préférer cette rédaction. Si l'expression « comité économique, éthique et social » remplace avantageusement celle de « comité de la société civile », la dénomination « comité économique, écologique, éthique et social » me paraît encore meilleure dans la mesure où elle englobe la totalité du champ de compétence devant revenir à ce comité.
Par conséquent, je propose à M. le rapporteur et à M. le président de la commission de sous-amender notre amendement commun en y ajoutant le mot « écologique », ce qui permettrait de nous rassembler sur une position commune.
La commission est défavorable à cette proposition. Si je peux comprendre que vous préfériez votre propre rédaction, monsieur Le Déaut, je vous rappelle que l'usage commande plutôt de se rallier à l'amendement de la commission.
Sur le fond, l'introduction du terme « écologique » ne me paraît pas opportune, l'écologie étant la science des écosystèmes – qui n'intéresse pas seulement ce comité, mais l'ensemble du Haut conseil des biotechnologies. À moins, monsieur Mamère, qu'il ne faille voir dans ce terme l'indication d'un choix politique ?
Si je pose ces questions, c'est pour souligner les difficultés qu'elles suscitent, et montrer que l'amendement de la commission est beaucoup plus clair et impartial.
Il me paraît tout de même curieux de voir le ministre de l'écologie supprimer le mot « écologique » de l'intitulé de ce comité (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche)…
…mais nous commençons malheureusement à avoir l'habitude de telles réactions.
L'ajout du terme « écologique » constitue une précision supplémentaire qui permet de mieux qualifier le comité. Nous débattons d'une question touchant de très près à l'écologie, dans la mesure où les écosystèmes sont concernés au premier chef, et le fait que d'autres secteurs – économique, social et éthique – soient concernés n'y change rien. Dès lors, écarter le terme « écologique » ne nous paraît pas convenable.
La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques.
Si je m'efforce de ne pas intervenir trop souvent pour ne pas ralentir le rythme du débat, je me vois contraint, monsieur Peiro, de vous rappeler que nous avons déjà évoqué cette question en commission et qu'à l'issue d'une discussion d'une demi-heure, vous aviez donné votre aval à une rédaction commune, à laquelle M. Le Déaut s'est associé et que nous avons adoptée à l'unanimité.
Je ne parle que de la forme. Puisque M. Brottes m'adresse systématiquement des rappels au devoir de précision afin d'éviter toute dérive, permettez-moi de vous rappeler qu'en tant que président de commission, je suis tout autant attaché que vous à ce principe. Je trouve vraiment dommage que, pour faire un effet de séance, vous reveniez sur votre vote en commission. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Pour ma part, je demande que l'on revienne à la rédaction initiale du projet de loi et que l'amendement de M. Le Déaut soit rejeté.
Je suis saisi d'un amendement n° 130 .
La parole est à M. François Grosdidier, pour le soutenir.
L'amendement n° 130 précise : « Les deux collèges siègent ensemble et délibèrent en réunion plénière sur les dossiers relatifs à la dissémination volontaire et à la mise sur le marché d'organismes génétiquement modifiés, et formulent un avis commun. Les éventuels désaccords entre les deux collèges donnent lieu à un constat de divergences inscrit au rapport issu de la plénière. Le rapport précise également la nature et le détail des éléments de désaccord entre les deux collèges. La décision doit, en dernier ressort, être prise par le ministre en charge de l'écologie. Les comptes rendus des réunions sont publiés intégralement. »
Cet amendement a pour objet de permettre aux deux collèges de se réunir et d'échanger leurs points de vue dans leurs domaines de compétences respectifs. Les deux collèges doivent élaborer conjointement, en plénière – j'insiste sur ce point car je regrette que le Sénat ait cloisonné les deux comités –, l'avis que donnera le Haut conseil, garantissant ainsi la prise en compte des aspects éthiques, économiques et sociaux liés à l'utilisation des OGM, au même titre que les aspects scientifiques et techniques. L'évaluation de l'opportunité de cultiver ces organismes doit en effet s'apprécier dans la globalité du contexte social, économique et scientifique.
Afin de faciliter l'avancée des travaux lors des réunions plénières, rien ne fait obstacle à ce que le règlement intérieur du Haut conseil prévoie la désignation en séance plénière d'un bureau permanent, qui pourrait notamment être chargé de préparer les réunions. Pour des raisons pratiques, les dossiers d'OGM en milieu confiné seront traités par un sous-groupe.
Il est par ailleurs essentiel de garantir la transparence des débats par la publication intégrale des comptes rendus de réunion.
La commission a émis un avis défavorable. Elle a elle-même présenté un amendement sur le fonctionnement du Haut conseil des biotechnologies, que nous examinerons tout à l'heure.
Même avis.
Nous poursuivons avec cet amendement la discussion sur la publicité des débats, qui porte cette fois sur le fonctionnement du Haut conseil.
J'estime comme M. le ministre qu'il doit y avoir une part de liberté dans l'organisation des débats, et que la volonté de voir les deux collèges se réunir séparément dans un premier temps se justifie par la nécessité de disposer d'une part d'un avis de nature scientifique, d'autre part d'un questionnement de la société civile, avant que ces deux avis ne se rencontrent. Toutefois, les modalités de rédaction et d'expression de l'avis revêtent également une grande importance. Comme je l'ai déjà dit en commission, la science n'est plus ce qu'elle était au xxe siècle et, à cet égard, la formule d'Edgar Morin me paraît excellente : nous nous trouvons maintenant face à une science à la fois du complexe et du contexte. Il me semble que vous répondez au complexe en intégrant plus de spécialité scientifique dans le premier collège, et que vous répondez au contexte au moyen du collège de la société civile.
Là où je ne suis plus d'accord, c'est lorsque vous établissez une hiérarchie en donnant la prééminence au complexe – c'est-à-dire à l'avis scientifique – sur le contexte.
Qui va établir la synthèse des deux avis ? Que ce soit le président du Haut conseil – qui doit selon vous être un scientifique – ou le comité scientifique, la solution n'est pas satisfaisante. Il me semble préférable que la synthèse soit faite en commun, dans le cadre d'un partage de connaissances et d'une prise en compte des positions consensuelles comme des positions dissensuelles, ce qui répond à l'orientation définie par le Grenelle de l'environnement et paraît constituer le seul moyen d'éclairer votre décision tout en respectant la démocratie citoyenne. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Je suis saisi d'un amendement n° 219 .
La parole est à M. Yves Cochet, pour le soutenir.
La question de la confiance que l'on accorde aux membres du Haut conseil est une question que l'on ne peut manquer de se poser.
Or on a vu par le passé que certaines personnes appartenant à des académies de médecine ou de pharmacie avaient rédigé des avis à ce titre, alors même qu'elles ne paraissaient pas présenter toutes les garanties d'indépendance vis-à-vis des entreprises de biotechnologie. Il y avait donc une confusion d'intérêts entre l'intérêt général, censé être fondé sur des bases scientifiques, et l'intérêt mercantile.
C'est pourquoi il me paraît nécessaire de préciser que les membres des deux comités du Haut conseil doivent apporter des garanties d'indépendance totale vis-à-vis des entreprises de biotechnologie.
Sans vouloir stigmatiser qui que ce soit, je crois devoir vous donner un exemple des situations que je dénonce. Louis-Marie Houdebine, bien connu dans le milieu des biotechnologies, est directeur de recherches à l'INRA, mais aussi éditorialiste de la Lettre de l'INRA ; il a, par ailleurs, été membre de la commission du génie biomoléculaire pendant quinze ans. Or M. Houdebine est également propriétaire du brevet de la protéine fluorescente, une protéine mise au point à partir d'un gène modifié pour marquer toutes les cellules de l'organisme, celui d'un lapin par exemple, dans lequel il a été introduit. C'est ce que l'on appelle un biomarqueur – utilisé de plus en plus fréquemment par les biologistes depuis cinq ans. Son emploi est simple : introduit dans un organisme végétal ou animal, le gène suscite une production qui peut être facilement détectée sous la lumière ultraviolette. Si cette invention présente un intérêt scientifique, il est évident que M. Houdebine peut également en faire un usage commercial –, d'où un évident conflit d'intérêts eu égard aux fonctions qu'il exerce par ailleurs.
Je ne souhaite pas que ce type de conflit d'intérêts puisse se reproduire au sein du Haut conseil ; c'est pourquoi je vous propose de voter l'amendement n° 219 qui prévoit que des garanties d'indépendance soient demandées aux membres du Haut conseil.
Plutôt que d'alimenter la polémique que vous suscitez, monsieur Cochet, je me contenterai de souligner que votre amendement est satisfait, dans la mesure où il va de soi qu'il relève des règles de déontologie qui seront rappelées à l'alinéa 18 par le biais d'un amendement de la commission dont le président Ollier a pris l'initiative.
Même avis.
Je suis saisi d'un amendement n° 336 .
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le soutenir.
L'amendement n° 336 a pour ambition de démocratiser la nomination des membres et des présidents de chacun des deux comités du Haut conseil, ainsi que du président de ce dernier, tous nommés par décret du Premier ministre.
Si les membres du comité scientifique peuvent être choisis directement par le Premier ministre, en revanche il nous semble que les membres du comité de la société civile pourraient être nommés par le Premier ministre après avis des commissions du Parlement compétentes en matière d'agriculture et d'environnement.
S'agissant des présidences, les deux comités devraient pouvoir chacun présenter un de leurs membres comme président. Il en est de même pour le choix du président du Haut conseil qui devrait être, selon nous, proposé par l'ensemble des membres du Haut conseil réuni en session plénière. À nos yeux, il n'est pas indispensable que le président du Haut conseil soit un scientifique.
La commission a repoussé cet amendement qui résume bien la position du groupe GDR.
Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
Je mets aux voix l'amendement n° 336 .
(L'amendement n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 28 .
Il s'agit d'un amendement rédactionnel de la commission auquel le Gouvernement est favorable.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
Certes, le Premier ministre peut avoir son mot à dire sur la nomination des membres du Haut conseil. Mais au cours de mon expérience ministérielle, j'ai pu constater qu'il avait été parfois nécessaire de prévoir plusieurs réunions interministérielles pour nommer telle ou telle personne. Je me rappelle même avoir proposé la nomination de M. Le Déaut dans un comité des sages. J'ai considéré que M. Le Déaut était sage.
Pour garantir la pluralité des avis ministériels, nous proposons donc qu'un arrêté soit pris conjointement par les ministres chargés de l'agriculture et de l'environnement, après consultation des ministres de la santé, de la consommation et de la défense, car tous les sujets concernés peuvent avoir une incidence stratégique. Cet arrêté remplacerait le décret du Premier ministre.
L'amendement n° 29 est rédactionnel.
S'agissant de l'amendement n° 220 , j'avoue ne plus rien y comprendre. En effet, le décret a plus de force que l'arrêté. À quand les nominations par lettre recommandée avec accusé de réception ? (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Avis très défavorable !
Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
La parole est à Le M. Jean-Yves Le Déaut.
Je ne commenterai pas l'appréciation que vient de porter M. Cochet à mon égard. (Sourires.) Je déplore simplement qu'il ait oublié le ministre de la recherche dans sa liste.
J'accepte de sous-amender mon amendement pour corriger cet oubli, monsieur Le Déaut.
Je suis saisi d'un amendement n° 122 .
La parole est à M. François Grosdidier, pour le soutenir.
Cet amendement vise à préciser les modalités de sélection des membres des collèges constituant le Haut conseil des biotechnologies. Ceux du collège des experts seraient choisis sur appel à candidatures public. Quant aux membres du collège de la société civile – malgré la nouvelle formulation – , ils seraient sélectionnés sur la base des propositions faites par les structures membres de droit du collège.
Votre proposition est conforme à ce qui est prévu : appel à candidatures, d'une part, désignation par structure ad hoc, d'autre part. Cet amendement n'est cependant pas de nature législative, à notre sens. La commission l'a donc repoussé. Toutes ces précisions seront apportées par décret.
Le projet met en place un collège du Haut conseil composé de trois personnes, compétentes pour faire la synthèse des avis des deux comités. Nous le savons tous, il n'est pas facile de rédiger à quinze ou à vingt-cinq. Mais nous proposons que les membres des deux comités « siègent collégialement et délibèrent en séance plénière sur les dossiers relatifs à la dissémination volontaire et à la mise sur le marché d'organismes génétiquement modifiés. Ils formulent un avis commun qui n'est pas obligé de rendre compte d'une position consensuelle. »
Il s'agit de permettre aux deux comités de se réunir et ainsi d'échanger leurs points de vue, dans leurs domaines respectifs de compétences. En vue de garantir la production d'avis éclairés et prudents, notamment par la prise en compte des aspects éthiques, économiques et sociaux mis en jeu par l'utilisation des OGM, au même titre que les aspects scientifiques et techniques, les deux comités devraient élaborer conjointement l'avis que donnera le Haut conseil.
La commission a émis un avis défavorable. Nous proposerons tout à l'heure des dispositions pour régler cet aspect du fonctionnement du Haut conseil.
Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
Je mets aux voix l'amendement n° 221 .
(L'amendement n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 401 .
La parole est à Mme Corinne Erhel, pour le soutenir.
Cet amendement vise à renforcer l'indépendance des membres du Haut conseil afin qu'ils puissent exercer leur fonction sereinement et sans dépendre de personne.
Avis défavorable. Ce rédaction relève de l'interpellation du Gouvernement. M. Borloo va nous dire ce qu'il en pense.
Cela tombe tellement sous le sens…
Cette précision tombe peut-être sous le sens. Mais mon expérience au sein de la Haute autorité provisoire sur les OGM, dont les travaux ont débouché sur l'activation de la clause de sauvegarde, m'a permis de constater que les membres d'une autorité comme celle que nous mettons en place peuvent, si ce n'est recevoir des instructions, du moins aller au-devant de celles-ci par anticipation ou intuition.
J'ai ainsi en mémoire que, lors d'une conférence de presse, le Président de la République avait fait savoir qu'il activerait la clause de sauvegarde si la Haute autorité provisoire émettait des « doutes sérieux ». Le jour suivant, cette dernière a tenu une réunion et, comme par hasard, son président, M. Le Grand, est allé, le soir même, voir M. Borloo et Mme Kosciusko-Morizet pour leur dire qu'à l'issue des travaux réalisés dans la journée par les scientifiques, il avait des « doutes sérieux ». Cela a engendré une grande polémique, qui a d'ailleurs mis en difficulté les scientifiques qui faisaient partie de cette Haute autorité. Il n'est donc pas anodin de dire que, sous une forme ou sous une autre, toute instruction émanant du Gouvernement doit être bannie pour que l'indépendance du Haut conseil soit véritablement assurée.
Je suis saisi d'un amendement n° 123 .
La parole est à M. François Grosdidier, pour le soutenir.
Il s'agit de ne pas subordonner la désignation du président du Haut conseil à l'avis des commissions des affaires économiques de l'Assemblée nationale et du Sénat. La légitimité de cette instance repose en effet sur la compétence, l'indépendance, la diversité et la pluralité de ses membres. La nomination du président du Haut conseil par le Premier ministre ne doit donc pas être soumise à l'avis politique des commissions parlementaires. En outre, pourquoi prévoir l'avis de la commission des affaires économiques et pas celui de la commission chargée de la recherche et de la santé ? Cette disposition ne renforce en rien la crédibilité future du Haut conseil des biotechnologies. Cela ne pourra que nourrir des procès d'intention : nous allons donner à penser que, pour nous, le dossier des OGM se réduit à des enjeux économiques. Il est tout à fait légitime, en effet, – et sans risque de prévarication – que ces enjeux soient pris en compte dans les débats de la commission des affaires économiques. Mais, sauf à solliciter également la commission chargée de la recherche ou de la santé, je ne vois pas ce que cette disposition introduite par le Sénat va apporter au Haut conseil des biotechnologies. Je vois en revanche ce que cela peut lui ôter en crédibilité. Je le dis à mes amis, cette proposition risque d'alimenter la suspicion. Elle me semble d'autant moins d'actualité que la réforme des institutions prévoit la création d'une nouvelle commission spécifiquement chargée de l'environnement. Cela changera peut-être les termes du débat.
Votre réaction me surprend, monsieur Grosdidier. Je le rappelle, il s'agit là d'une décision prise par le Président de la République, dans le cadre de l'évolution de nos institutions. Dorénavant, toutes les nominations dans les organes, institutions, conseils, autorités dépendant du Gouvernement devront être soumises à l'avis des commissions parlementaires. C'est un progrès. Et je souhaite que le Haut conseil en bénéficie.
Vous ne voulez pas que la commission des affaires économiques ait à donner son avis : vous avez raison. Mais il se trouve qu'en l'occurrence, il s'agit de la commission des affaires économiques et de l'environnement.
Dès lors que cette commission est en charge de l'environnement, il est normal qu'elle donne son avis.
Et pourquoi pas la commission en charge de la santé ? Ou de l'agriculture ?
La commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire s'occupe également de l'agriculture. Il faudrait venir assister à ses réunions, monsieur Grosdidier. Elle traite aussi de la recherche scientifique. Son activité recouvre quatorze ministères. Du reste, comme elle comprend 146 membres – c'est la plus importante commission de l'Assemblée avec celle des affaires sociales –, il est prévu de la scinder en deux de façon, précisément, que l'environnement relève d'une commission spécialisée. Ce sera alors cette commission-là qui donnera son avis dans le choix des nominations. Je ne vois pas où est le problème.
Il faut voir tout cela au regard du rôle du Parlement. Nous ne sommes pas un Parlement croupion mais un Parlement acteur. Il est donc tout à fait logique – et j'en remercie le Président de la République – que nous puissions donner un avis sur ces nominations. Je souhaite en conséquence que votre amendement soit rejeté, monsieur Grosdidier.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien !
Il me semble qu'en l'occurrence, M. Grosdidier se trompe. En effet, tout ce qui peut renforcer le pouvoir du Parlement va dans le bon sens. On aurait d'ailleurs souhaité que le Président de la République procède ainsi pour la nomination du président de la SNCF.
Il est important, si on le peut, que les commissions compétentes se saisissent de certains sujets, et la commission des affaires économiques est en l'occurrence compétente pour l'environnement, l'agriculture et en partie pour la recherche – puisque l'enseignement supérieur et la recherche relèvent de deux commissions – si elle ne l'est pas pour la santé.
Les commissions doivent donc être consultées sur ces nominations. C'est ce qui se pratique dans les grands pays démocratiques, et votre opposition, monsieur Grosdidier, provient peut-être du fait que vous ne siégez pas à celle des affaires économiques…
Fort bien ! Tout ce qui ira dans le sens d'une discussion en commission sur les nominations aux grands postes de la République sera à mon sens un progrès.
La présidence de ce Haut conseil est très importante. La hauteur de vue, la qualité, la rigueur et l'autorité morale du président sont essentielles. Qu'il y ait donc un débat public et démocratique sur ce point-là – et c'est un membre de l'exécutif qui vous le dit – est une excellente chose pour le Haut conseil et notre démocratie.
Je suis saisi d'un amendement n° 243 .
La parole est à Mme Delphine Batho, pour le soutenir.
Je souscris à ce qui vient d'être dit sur la revalorisation du Parlement. Je pense cependant que la rédaction de cette disposition sur la consultation des commissions compétentes du Parlement est perfectible. Dans la mesure où il faut, en effet, que le Haut conseil soit présidé par une personnalité compétente qui ait toute l'autorité et la légitimité pour conduire ses travaux, l'aspect consensuel de sa nomination n'est pas anodin.
J'avais d'ailleurs cru comprendre que le Président de la République avait retenu nos propositions consistant à soumettre certaines nominations au Parlement, lequel aurait donné son avis à la majorité des trois cinquièmes. Notre amendement vise donc à soumettre la nomination du président du Haut conseil à l'avis des commissions compétentes du Parlement, qui se prononceraient à la majorité des trois cinquièmes.
L'avis de la commission est défavorable. À la complexité des sciences et aux évolutions de notre société, évoquées par vos propres collègues, madame Batho, il serait illusoire de vouloir répondre par une règle arithmétique. L'avis des commissions sera forcément l'aboutissement d'un dialogue complexe qui devra prendre en compte des avis divergents – nous le verrons lors de l'examen de l'alinéa 15.
Même avis.
J'observe à l'alinéa 14 de l'article 2 que, dans le cadre d'une recherche en milieu confiné, l'avis du comité de la société civile, redevenu comité économique, éthique et social, n'est pas requis et que seul l'est celui du comité scientifique.
Qu'un comité économique et social soit consulté sur des cultures plein champ va de soi puisqu'il est susceptible d'évaluer les apports éventuels de cette utilisation en termes économiques et sociaux ainsi que les risques d'éventuels flux de gènes qu'elle comporte. Son rôle est donc d'émettre un avis, après avoir arbitré entre intérêt économique et social et risques encourus.
Mais c'est aussi un comité éthique, ce qui implique d'aller au-delà de cette première approche. Il convient également de prendre en compte l'intérêt de toute recherche en milieu confiné, et son impact sur l'évolution des espèces, notamment dans les cas d'utilisation de gènes animaux sur des végétaux. Ainsi, les questions éthiques dépassent largement le cadre du plein champ et concernent tout aussi bien les milieux confinés.
Je propose donc la suppression de l'alinéa 14 qui me semble en contradiction très forte avec la dénomination de ce comité.
Avis défavorable. Il s'agit, dans cet alinéa, des utilisations confinées, qui font l'objet d'une transposition de la directive aux articles 7, 8 et 9 – articles qui constituent une véritable bible des usages en milieu confiné. Compte tenu des obligations auxquelles ils sont soumis, les utilisateurs en milieu confiné – les chercheurs des établissements publics, pour reprendre un exemple que vous affectionnez – devront souvent en référer au comité scientifique du Haut conseil des biotechnologies. Il en résultera pour les scientifiques de ce comité – c'est ce qui ressort de l'audition des anciens membres de la CGB – un véritable travail à la chaîne sur les dossiers de demande d'autorisation.
La question que vous posez est d'ordre plus général et elle est traitée dans un amendement de la commission. Je vous propose donc de retirer votre amendement et de vous joindre le moment venu à celui de la commission.
Même avis.
Oui, mais lorsque je me suis tourné vers vous pour vous la donner, vous discutiez avec vos collègues.
Il suffisait d'appeler mon nom, monsieur le président, c'est aussi simple que cela.
Je tenais simplement à dire que nous soutenons l'amendement présenté par André Chassaigne, parce qu'il pose un problème dont nous n'avons pas suffisamment débattu, celui de la nécessité à laquelle obéit la recherche : intérêt général ou marché ? C'est la raison pour laquelle il faut impérativement que la société soit consultée, sous quelque appellation que ce soit. Il faut que les citoyens puissent émettre leur avis et évaluer si la motivation de la recherche répond à l'intérêt du marché ou à l'intérêt collectif.
La rédaction actuelle constitue un recul par rapport au texte initial proposé par M. le ministre d'État, puisque seul est désormais consulté le comité scientifique. Or la recherche, au-delà de la nécessité sociale et des lois du marché, pose également des questions d'éthique ; et l'éthique, c'est aussi du ressort de la société.
Je suis saisi par la commission d'un amendement rédactionnel, n° 30.
Le Gouvernement y est favorable.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
Même avis.
Je suis saisi d'un amendement n° 125 .
La parole est à M. François Grosdidier, pour le soutenir.
La formulation de cet amendement devient inexacte en raison des votes précédents, mais il s'agissait de permettre au président du comité de la société civile de participer aux réunions du collège d'experts.
La commission a repoussé cet amendement, qui relève du règlement intérieur.
Même avis.
Il s'agit de supprimer l'alinéa 15 de l'article 2, pour permettre aux deux collèges de se réunir et ainsi d'échanger leurs points de vue, dans leurs domaines de compétences respectifs. Les deux collèges devraient élaborer conjointement, en plénière, l'avis que donnera le Haut conseil, garantissant la prise en compte des aspects éthiques, économiques et sociaux liés à l'utilisation des organismes génétiquement modifiés, au même titre que les aspects scientifiques et techniques.
Afin de faciliter l'avancée des travaux lors des réunions plénières, rien ne fait obstacle à ce que le règlement intérieur du Haut conseil prévoie la désignation en séance plénière d'un bureau permanent, qui pourrait notamment être chargé de préparer les réunions. Pour des raisons pratiques, les dossiers d'OGM en milieu confiné seront traités par un sous-groupe.
La commission ne souhaite pas supprimer l'alinéa 15 de l'article 2. Cependant la question que vous soulevez, monsieur Grosdidier, est traitée par son amendement n° 468 . Je vous propose donc de vous associer à cet amendement.
Le Haut conseil est donc constitué de deux comités. Nous proposons que chacun puisse assister aux réunions de l'autre, afin que les avis du Haut conseil soient plus homogènes et pour éviter d'avoir, d'un côté, l'avis du comité scientifique et, de l'autre, un avis différent du comité de la société civile, au détriment de la cohérence.
Ces échanges pourraient avoir une portée pédagogique, tant pour les représentants de la société civile que pour les experts scientifiques.
La parole est à M. François Brottes, pour soutenir l'amendement n° 244 .
La commission les a repoussés.
Le Sénat a beaucoup débattu de ce sujet et a essayé, probablement dans un élan excessif, d'enfermer le Haut conseil dans des règles très strictes ; je pense qu'il n'y est pas parvenu, et c'est tant mieux. Les membres du Haut conseil doivent avoir la possibilité de s'organiser comme ils l'entendent et de fixer eux-mêmes, entre eux et en bonne intelligence, leurs règles de fonctionnement. Celles-ci relèvent donc du règlement intérieur, monsieur Cochet, comme je l'ai dit à M. Grosdidier tout à l'heure.
Je vous ai parlé des règles de fonctionnement que l'AFSSA met en ligne. Nous le savons tous, cette instance rend des services considérables à la République en matière de risques sanitaires et nous a permis de traiter des problèmes extrêmement complexes comme celui de la vache folle, qui a marqué l'opinion publique.
Faisons confiance à ces instances : elles doivent pouvoir s'organiser comme elles le souhaitent afin d'être pleinement au service du Gouvernement.
Les débats parlementaires ont des vertus. Il n'est pas interdit au Parlement et au Gouvernement de donner des indications : la meilleure osmose possible entre les deux comités, sous cette forme ou sous une autre, en est une. Qu'il soit donné acte au Parlement de son souhait que soit organisé le mieux possible le règlement intérieur du Haut conseil.
Par ailleurs, l'amendement de la commission prévoyant que les deux comités siègent en séance plénière devrait vous donner satisfaction.
Je suis saisi d'un amendement n° 338 .
La parole est à M. André Chassaigne, pour le soutenir.
Avis défavorable de la commission et du Gouvernement.
Je mets aux voix l'amendement n° 338 .
(L'amendement n'est pas adopté.)
Le Gouvernement a le même avis.
Je mets aux voix l'amendement n° 323 .
(L'amendement n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n°387 .
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le soutenir.
Nous souhaitons rédiger ainsi les deuxième et avant-dernière phrases de l'alinéa 15 : « Après examen par ce dernier – le comité de la société civile –, les deux comités siègent ensemble en réunion plénière et élaborent conjointement un avis qui fait notamment état des positions non consensuelles. Le président du Haut conseil transmet l'avis du Haut conseil à l'autorité administrative. »
Nous voulons, nous l'avons dit, que la société civile et les scientifiques puissent échanger leurs points de vue et s'interpeller de façon franche. C'est une question de pédagogie. Les scientifiques ne se posent pas forcément les mêmes questions que les personnes issues de la société civile, qui n'ont pas reçu la même formation. Il est utile pour les scientifiques d'appréhender les préoccupations des citoyens, comme il est utile pour les citoyens d'entendre des réponses d'experts qui peuvent transmettre et faire comprendre des connaissances scientifiques.
C'est une question à la fois de fond et de forme. L'avis du Haut conseil doit être l'émanation de l'ensemble du travail des deux comités, demande qui a été formulée par les membres du Grenelle de l'environnement. Notre rôle est donc de tenir compte des préoccupations exprimées lors du Grenelle de l'environnement et de les transcrire dans la loi.
J'ai vraiment le sentiment qu'il y a une hésitation, une crainte à mêler la société civile aux différents avis. Mais nous ne risquons rien, au contraire ! Les citoyens sont des hommes et des femmes honnêtes, qui réfléchissent, et leur avis ne peut qu'enrichir la réflexion collective. Je ne comprends pas votre réticence.
La commission est défavorable à cet amendement, madame Fraysse. Nous avons nous-mêmes échafaudé une rédaction après diverses réunions et discussions. Je vous suggère donc, comme le ferait certainement M. Chassaigne, de vous y rallier et de retirer votre amendement.
Sur le fond, le Gouvernement est favorable à l'esprit de l'amendement puisqu'il rejoint la rédaction initiale du projet de loi. Pour reprendre l'expression de M. Cochet, il y a deux cultures et, à un moment donné, il y a une nécessité d'échanges. Cela me paraît indispensable. Nous sommes d'accord : il faut une réunion plénière.
C'est pourquoi la commission a mis au point et va présenter une rédaction qui prévoit une réunion plénière, dont les modalités sont déclinées dans une série d'amendements. Examinons-la attentivement. Elle me paraît conforme à ce que vous souhaitez, et je vous propose donc de retirer votre amendement, madame Fraysse.
Il faut un climat de confiance entre nous : chacun doit savoir que ce qui est dit est fait. Mme Fraysse ne siégeant pas dans notre commission, elle ne connaît pas nos habitudes de travail. Quand nous disons quelque chose, madame, nous le faisons !
L'amendement n° 468 à venir, que j'ai déposé avec MM. Jacob, Laffineur et le rapporteur, prévoit que le Haut conseil des biotechnologies se réunit en session plénière à la demande de son président.
Ou de la moitié de ses membres !
Tout à fait. Il devrait répondre à votre attente, madame Fraysse. Cette session plénière est déclinée dans cinq amendements.
Je ne le souhaite pas, mais je prends acte de ce qui vient de m'être dit.
J'ai été de ceux qui ont beaucoup insisté en commission sur la nécessité d'un travail du Haut conseil en séance plénière. Un amendement ultérieur y pourvoit. Nous avions effectivement convenu qu'une rédaction serait proposée par la commission des affaires économiques.
Cela étant, quelque chose ne colle pas : alors que nous prévoyons une séance plénière, vous maintenez, monsieur le rapporteur, un distinguo entre les deux comités, le comité scientifique devant émettre un avis et celui de la société civile de simples recommandations.
Rien ne justifie ce distinguo. Les deux comités doivent émettre un avis. Vous vous y refusez par principe.
Monsieur le président, nous avons besoin de nous concerter pour savoir comment seront organisés nos travaux, non pas pour ce soir puisqu'il a été décidé en conférence des présidents que la séance lèverait à une heure, mais pour la semaine prochaine.
Je vous demande donc de nous accorder une suspension de séance de cinq minutes.
Article 2
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à zéro heure vingt-cinq le vendredi 4 avril, est reprise à zéro heure trente.)
La séance est reprise.
La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l'amendement n° 224 .
Lorsqu'on lit la deuxième phrase de l'alinéa 15 – « Après examen de l'avis du comité scientifique, le comité de la société civile élabore des recommandations et peut à cet effet convoquer le président du comité scientifique et un membre de ce comité » –, on pourrait croire qu'elle relève, comme aime à le dire M. le rapporteur, du règlement intérieur du Haut conseil. Mais c'est une fausse impression parce qu'il existe une asymétrie et donc un déséquilibre entre l'« avis » du comité scientifique et les « recommandations » du comité de la société civile, qui ne pèsent évidemment pas le même poids. Un avis est fondé et la plupart du temps le Gouvernement le ratifie, comme il le faisait pour la CGB ; en revanche, les recommandations ont un air ineffable (Sourires) : la société civile, ce sont des philosophes qui vont recommander que l'on envisage tel ou tel principe éthique. Non ! Un rééquilibrage s'impose entre les représentants des sciences dures et les représentants de la société civile. Si les scientifiques émettent un avis, la société civile doit émettre un avis. C'est pourquoi nous recommandons de substituer, dans la deuxième phrase de l'alinéa 15, au mot : « recommandations », employé pour la société civile, le mot : « avis ».
Défavorable.
J'ai bien noté à la fois l'exposé des motifs de M. Yves Cochet et la question de M. le président : « Quel est l'avis de la commission ? », car vous nous avez habitués, monsieur Cochet, à ce que l'avis que j'exprime au nom de la commission vous inspire des votes allant dans le sens opposé. C'est un simple constat : je ne formule aucune critique sur vos votes.
Mes avis semblent donc avoir peu de poids. En revanche, j'ai senti dans le verbe employé par M. Cochet, qui me « recommande » d'être favorable à cet amendement, une insistance plus grande. (Sourires.)
J'ai beaucoup réfléchi à cette question en tant que rapporteur. J'ai également suivi à la télévision, autant que je l'ai pu, les débats du Sénat et j'ai mal compris la tension qui s'est instaurée à ce sujet, alors qu'il s'agit en vérité d'un non-sujet. On en a fait une affaire d'État :…
Vous nous dites, monsieur Cochet, que le Sénat a choisi d'affaiblir un des deux comités : je trouve au contraire qu'il le renforce du fait que dans le mot « recommandations », il y a « commander », qui est beaucoup plus fort qu'« émettre un avis ». (Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Tout le monde peut avoir un avis, mais des experts désignés par le Gouvernement dans le cadre du processus que nous avons précisé tout au long de nos débats et qui émettent des « recommandations », c'est à mon avis quelque chose de très fort qui mérite d'être souligné – ce que je fais (Sourires.)
Vous dites encore, monsieur Cochet, qu'il faut placer les deux comités sur un pied d'égalité en employant le même mot. J'en ai encore discuté avec vous, monsieur le ministre d'État, lors d'un moment de convivialité à l'occasion de la suspension de séance. Peut-être faut-il le faire, mais c'est un avis personnel.
M. le président de la commission me recommande de ne pas le faire : c'est effectivement la position de la commission. Si on examine les compétences et les expertises qui en relèvent, il y a, au sein du Haut conseil, d'un côté des scientifiques qui feront le même travail que celui que fait aujourd'hui la CGB, laquelle émet des avis en termes de risques pour la santé et l'environnement sur les demandes qui lui sont soumises, et les transmet ensuite au Gouvernement afin que celui-ci tranche en prenant une décision. Le mot « avis » est entré dans les habitudes du fonctionnement de ce type d'instances. De l'autre côté, il y a un comité que nous avons renommé « économique, éthique et social » et qui élabore des recommandations. Nous aurons donc des avis accompagnés de recommandations qui, dans le domaine économique, par exemple, relèvent d'une analyse que vous avez vous-mêmes recommandée sur les écosystèmes et les structures agricoles, et que nous avons inscrite à l'article 1er. Or de telles « recommandations », qui visent à une application pratique fondée sur des expériences de terrain, me semblent mieux comprises par le public sous ce terme.
Pour toutes ces raisons complexes, qui ne sont pas très claires – j'ai entendu votre remarque, monsieur Mamère –, je propose d'en rester à l'avis de la commission. De plus, l'urgence sur le texte ayant été abandonnée, il sera encore possible de réfléchir sur le sujet.
Monsieur Tourtelier, je répondrai plus tard à vos propos relatifs au Grenelle de l'environnement.
Revenant à l'amendement de M. Cochet, je tiens tout d'abord à faire remarquer que nous essayons d'avancer. Le Haut conseil – on peut le dire ainsi – est composé de deux collèges : personne ne le conteste. Le choix qui a été fait, c'est que le comité scientifique, composé de représentants de plusieurs sciences – c'est clair –, rende un avis à caractère scientifique à partir duquel le comité de la société civile élaborera des recommandations.
Laissez-moi terminer : nous pouvons échanger sans nous interrompre !
En droit français, monsieur Mamère, la recommandation vient après l'avis : c'est une opinion avisée. (Sourires.)
Ce texte fera l'objet de quatre lectures.
Si vous me démontrez qu'en droit français un avis est supérieur à une recommandation, je suis prêt à vous suivre : je suis même prêt à proposer au Sénat d'inverser les termes ! Mais je pense que vous avez objectivement tort.
De plus, puisque, dans certains cas, le Haut conseil siégera en assemblée plénière – mesure qu'un amendement de la commission prévoit d'introduire –, il conviendra de déterminer si cette assemblée plénière rendra des avis ou donnera des recommandations. Nous y réfléchirons en tenant compte de l'amendement du rapporteur et de la commission, si vous le votez, la forme d'expression de cette assemblée plénière pouvant être, je le répète, aussi bien un avis qu'une recommandation. De fait, contrairement à ce que vous pensez, ce qui vous préoccupe ce ne sont pas tant les mots eux-mêmes que ce que vous croyez être la raison pour laquelle le Sénat a introduit cette différence entre l'« avis » rendu par le comité scientifique et les « recommandations » élaborées par le comité de la société civile. C'est ce qui vous fait commettre une double erreur, sémantique et juridique.
Avis défavorable sur l'amendement n°224 .
Je mets aux voix… (Vives exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Je regrette, mes chers collègues, mais je mets aux voix l'amendement n° 224 . (Protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
(L'amendement n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 402 . (Protestations sur les mêmes bancs.)
La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut, pour le soutenir.
Non, monsieur le président, nous souhaitions intervenir sur l'amendement n° 224 .
Nous en sommes à l'amendement n° 402 .
Est-il défendu ? (Nouvelles protestations.)
L'urgence n'étant plus déclarée sur ce texte, il convient dès lors que chacun puisse s'exprimer. C'est d'autant plus nécessaire – je tiens à le souligner – que nous n'avons fait aucune obstruction et avons déposé des amendements groupés et non des amendements « dominos », ce que nous aurions très bien pu faire en vue de les défendre à tour de rôle. En contrepartie, monsieur le président, il convient au minimum que nous puissions répondre au rapporteur et au ministre d'État si vous voulez que le débat se poursuive sereinement. C'est la raison pour laquelle je demande que la parole soit donnée au moins au représentant de chacun des groupes s'il l'a demandée ainsi qu'aux députés qui en ont fait les premiers la demande.
C'est le président de séance qui décide de donner ou non la parole. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
C'est à moi de décider et nous en sommes à l'amendement n° 402 . (Protestations sur les mêmes bancs.)
…fondé sur l'article 58, alinéa 1.
Je ne dois pas révéler les propos tenus en conférence des présidents et je n'en ferai donc rien. Je dirai seulement que la conférence a relevé que ce texte comportait un certain nombre de sujets majeurs. Ainsi de la question de la Haute autorité ou du Haut conseil dont il a été dit qu'elle méritait un examen approfondi. Je tiens d'ailleurs à souligner que ni le ministre ni le rapporteur ne s'y sont opposés.
Sur un sujet aussi important – tout comme l'est celui de la responsabilité des agriculteurs, que nous aborderons plus tard –, il ne me paraît pas possible, monsieur le président, de court-circuiter les débats à ce point : je vous l'affirme avec solennité et sans remettre en cause vos prérogatives – vous n'êtes pas obligé en effet de nous donner la parole. (« Ah ! » sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
S'il n'est donc pas question de vous reprocher d'avoir dérogé au règlement, il serait cependant de bon aloi, alors que nous examinons des points considérés comme essentiels lors de nos discussions entre groupes, de nous laisser le temps du débat.
Je suis bien d'accord, monsieur Brottes, qu'il faut prendre le temps du débat. Et c'est bien pourquoi voilà quatre heures et quinze minutes que nous discutons de l'article 2. (Rumeurs sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gaucheet du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Il est donc difficile de soutenir que je ne vous ai pas laissé assez de temps. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous ne pouvez pas me reprocher d'avoir agi conformément à ce dont nous étions convenus en conférence des présidents.
La parole est à M. Noël Mamère.
Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 58, alinéa 3.
Je demande une suspension de séance parce que nous ne pouvons pas continuer dans ces conditions. Nous devons donc en discuter. Comme l'ont clairement dit MM. Peiro et Brottes, nous n'avons pas fait d'obstruction.
Nous essayons de travailler de manière constructive et nous ne voulons pas barrer la route au Gouvernement. Nous souhaitons seulement débattre, apporter notre contribution. Or vous ne nous permettez pas, monsieur le président, de le faire dans de bonnes conditions.
C'est la raison pour laquelle, pour apaiser les esprits, nous souhaitons une suspension de séance, en vous demandant, avec tout le respect que l'on vous doit, de bien réfléchir à la manière de conduire nos débats. Ce n'est pas parce que vous êtes pressé ni parce que, selon vous, quatre heures et quinze minutes de débat suffisent, que nous devons passer à la suite. Ce ne sont pas des heures de gaspillage, ce ne sont pas des heures d'obstruction, ce sont des heures de discussion, ne vous en déplaise.
Ne vous en déplaise également, l'opposition est rassemblée pour discuter de sujets essentiels qui engagent l'avenir de nos enfants, qui engagent le maintien de la biodiversité, qui engagent la qualité de notre environnement. Cela mérite très largement plus que quatre heures quinze minutes de débat et beaucoup mieux que ces petites fioritures procédurales.
Nous demandons donc une suspension de séance de cinq minutes.
Rappels au règlement
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à zéro heure quarante-cinq le vendredi 4 avril, est reprise à zéro heure cinquante.)
Nous en venons donc à l'amendement n° 402 .
La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut, pour le soutenir.
Nous tenons à vous rappeler, monsieur le président, que nous n'avons pas fait d'obstruction. Nous débattons d'un sujet très important qui est l'articulation des rôles du comité scientifique et du comité économique, éthique et social.
Sur ce point, le texte tel qu'il est rédigé ne me semble pas parfait car il dispose : « Après examen de l'avis du comité scientifique, le comité de la société civile – dont la dénomination initiale a été reprise – élabore des recommandations et peut, à cet effet, convoquer le président du comité scientifique et un membre de ce comité. » L'expression « peut convoquer » signifie que les deux comités ne travaillent jamais ensemble.
Si l'on veut agir de manière pluridisciplinaire, on doit considérer deux éléments.
D'abord, un avis scientifique et médical est nécessaire – scientifique sur les plantes génétiquement modifiées, et médical car tout le monde oublie que le Haut conseil des biotechnologies délivre des autorisations en matière de thérapie génique ou de thérapie cellulaire et une partie des autorisations relevant du secteur médical. Il convient donc qu'une personnalité choisie pour ses compétences scientifiques dirige ce comité scientifique.
Ensuite, la recommandation de la première Conférence des citoyens de 1998 – qui figure dans le rapport que j'ai rédigé la même année – estimait que la création d'un comité économique, éthique et social en sus du comité scientifique impliquait que les deux comités dialoguent. Cela signifie qu'il ne doit pas y avoir de hiérarchie entre eux. Je proposerai d'ailleurs un sous-amendement à mon amendement puisque j'ai écrit : « recommandations du Haut conseil des biotechnologies » alors qu'il s'agit d'avis dans les deux cas.
Ce détail montre d'ailleurs que, dans nos esprits, nous ne parvenons pas toujours à bien discerner le sens des mots « avis » et « recommandation ».
Il est évident qu'il faut prévoir une discussion sur le sens qu'on donne à certaines autorisations. La dangerosité doit être la première préoccupation d'un conseil scientifique : l'autorisation demandée est-elle dangereuse pour la santé et l'environnement ? Il convient ensuite de discuter de considérations économiques, sociales et éthiques. Ce dispositif suppose donc qu'à un certain stade de la réflexion, les comités travaillent en commun.
Or le texte tel qu'il est rédigé, et qui prévoit que le comité économique, éthique et social peut convoquer seulement le président et un membre du comité scientifique, n'est pas de bonne méthode. J'ai été l'un des promoteurs de ce comité économique, éthique et social il y a déjà dix ans et, si l'on en reprend l'idée, autant faire en sorte qu'il fonctionne au mieux.
Alors, si je ne tiens pas particulièrement à ce que l'on vote le présent amendement, prenez au moins l'engagement, monsieur le ministre, de discuter ce point avec nous. J'ignore quels arbitrages ont éventuellement été rendus, mais la rédaction du texte relève de l'amateurisme.
Quel « avis » allez-vous « recommander », monsieur le rapporteur ? (Sourires.)
La commission n'a pas adopté votre amendement, monsieur Le Déaut. Je reconnais cependant que vous ouvrez un vrai débat. En outre, bien qu'amateurs pour nombre d'entre nous, il faut croire que nous aimons ces discussions pour rester jusqu'à une heure aussi tardive dans cet hémicycle. M. Mamère l'a dit avec fougue.
Nous avons tenté d'aller dans votre sens et d'apporter des réponses aux questions que vous posez. C'est l'objet de l'amendement n° 468 de la commission et de celui que je vous ai promis d'insérer juste après l'alinéa 15 et qui précise qu'il est fait état des positions divergentes exprimées. Les deux idées contenues dans votre amendement se retrouvant dans les deux amendements que je viens d'évoquer, la commission émet donc un avis défavorable non pas sur le fond mais sur la formulation que vous proposez.
Même avis.
M. le rapporteur vient d'affirmer que nous étions en train de discuter d'un vrai sujet alors qu'à propos de la distinction entre « avis » et « recommandation », il avait parlé d'un non-sujet. Et pourtant c'est le même sujet ! (Sourires.)
Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est du Devos !
Tout à fait ! Cela évoque l'amendement n° 477 que le Gouvernement devait présenter et qu'il a retiré parce qu'il renvoie à la discussion sur le poids respectif des sciences dures et des sciences humaines.
Dans un premier élan salutaire, le Gouvernement avait souhaité modifier l'amendement du Sénat selon lequel le président du Haut conseil doit être un scientifique, en proposant la formulation suivante qui présentait l'avantage d'élargir le choix : « Le président du Haut conseil est choisi notamment en fonction de ses compétences scientifiques. » Vous auriez même pu l'élargir davantage, monsieur le ministre, en reprenant les qualités que vous avez énumérées précédemment : hauteur de vue, rigueur et autorité morale.
Ces qualités ne caractérisent pas intrinsèquement les scientifiques et peuvent aussi qualifier un philosophe ou un sociologue. Je dirais même qu'un sociologue disposerait de plus de compétences pour mener un débat, faire émerger les consensus, réduire les dissensus. Si l'on veut aller au bout de votre démarche et donner la pleine liberté – vous ne cessez d'en parler – au Haut conseil, il convient donc, dans un souci de clarté, de supprimer l'amendement du Sénat.
J'ai une question annexe : pour combien de temps le président est-il nommé ?
Nous sommes nombreux à avoir beaucoup travaillé sur ce texte. Nous nous sommes posé beaucoup de questions. L'un des grands intérêts de ce projet est justement la création de ce comité de la société civile qu'on appellera désormais comité économique, éthique et social. Je l'ai pour ma part considérée comme une avancée très importante issue des discussions de Grenelle. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est fondamental car ce comité va pouvoir intervenir sur des choix jusqu'à présent réservés aux seuls scientifiques.
Ainsi le comité de la société civile n'a pas à intervenir uniquement en termes de recommandations. Il est probable que ses membres ne seront pour la plupart pas favorables à la dissémination. Si bien que, dans un premier temps, j'avais même pensé présenter un amendement pour que ce comité anticipe, c'est-à-dire se réunisse en premier pour valider l'intérêt ou non de l'objet de la réflexion.
La société civile, dans mon esprit, devait avoir pour rôle de se prononcer sur l'intérêt même des choix envisagés : tel choix présente un intérêt sociétal ; tel autre pourra, peut-être, faire avancer le progrès, le bien-être. Voilà comment je voyais les choses.
Or, par une sorte de glissement, que ce soit dans le projet de loi ou même dans les amendements, on confie à la société civile un autre rôle. On veut lui donner de la force en prévoyant qu'elle fera des « recommandations », mais ce n'est pas cela qui est important. Au demeurant, je me demande quelles recommandations elle pourra faire par rapport aux questions de dissémination. Ce qu'elle attend, c'est qu'on l'interroge pour qu'elle puisse s'exprimer de façon très forte sur l'intérêt ou l'absence d'intérêt que présentent les projets.
À partir de là, que l'on retienne le terme d'avis ou celui de recommandation, c'est de toute façon une espèce d'habillage qui, en définitive, occulte le sens profond de l'intervention de la société dans la réflexion. C'est cela qui me semble important.
Je trouve ce débat fort intéressant. Très sincèrement, je crois que nous vivons un moment fort, parce que de cette discussion va probablement naître une évolution du texte. Comme le ministre l'a dit, il reste encore des navettes.
Monsieur Chassaigne, si nous avons voulu, et nous en assumons totalement la responsabilité, qui correspond d'ailleurs à celle du Sénat et du Gouvernement, qu'il y ait un comité scientifique, ce n'est pas uniquement pour le qualifier de scientifique. C'est parce que si nous voulons que le Haut conseil des biotechnologies joue son rôle d'alerte s'agissant des risques pesant sur la santé publique et l'environnement, il faut qu'il puisse émettre des avis pouvant être qualifiés de scientifiques au sens de la directive 200118, qui nous cale par rapport aux décisions européennes.
Il faut que ces avis – c'est ce que dit la directive, que nous aurions pu effectivement joindre au texte – soient scientifiques. Et pour qu'ils soient scientifiques, il faut qu'ils soient donnés par des scientifiques. Cela me paraît clair. Dès lors qu'ils doivent être donnés par des scientifiques, il faut que ceux-ci soient identifiés comme tels au sein du Haut conseil. Il faut donc créer un comité scientifique, qui donne un avis.
Et à partir du moment où l'on a créé un comité scientifique qui donne un avis, et ce pour répondre aux exigences de la directive européenne, comment va-t-on faire pour intégrer dans cet instrument d'évaluation les réflexions de ce qu'on appelait, dans le texte du Sénat, « la société civile » ? Il faut bien, pour cela, créer un second comité, celui qui est redevenu « économique, éthique et social ». Il faut bien créer deux comités séparés. Parce qu'un avis rendu par un comité mixte ne serait pas un avis scientifique au sens de la directive.
Je voudrais tout de même que l'on envisage les choses sous l'angle de la logique, et pas uniquement pour se faire plaisir. Sincèrement, s'il s'agit de se faire plaisir, je suis d'accord avec vous. Après tout, pourquoi ne pas imaginer que tout le monde se réunisse et émette un avis ? Ce serait très sympathique.
C'est moi qui le dis, pas vous, monsieur Le Déaut. J'imagine qu'on puisse le dire.
Donc, premier point, soyons d'accord pour qu'il y ait un comité scientifique.
Merci. On avance !
Dès lors qu'il y a un comité scientifique, où mettons-nous les experts qui se penchent sur les préoccupations de la société dite civile, ou sur les problèmes économiques, éthiques et sociaux ? Dans un comité économique, éthique et social. Vous êtes d'accord ? Parfait. On avance !
Le Haut conseil comprendra donc ce que l'on pourrait appeler deux « chambres ». Mais je suis d'accord avec vous : je ne peux pas imaginer que ces deux chambres puissent ne jamais se rencontrer. Je ne peux pas l'imaginer, parce que des personnes qui travaillent ensemble, dans les mêmes locaux, qui discutent des mêmes sujets, sont forcément conduites à se rencontrer.
À partir de là, et pour éviter d'en être réduit à ce que vient de dire notre collègue de la majorité, nous prévoyons une séance plénière. Oui, monsieur Le Déaut, l'amendement n° 468 prévoit une séance plénière, comme vous le souhaitez, et comme nous le souhaitons.
Pardonnez-nous, mais à cette heure-ci, en accord avec le Gouvernement et par rapport à ces exigences, nous ne savons pas aller plus loin.
S'il apparaît opportun d'affiner ce dispositif général que nous prévoyons, qui me semble cohérent, équilibré, et qui répond aux exigences de chacun, eh bien, monsieur Le Déaut, monsieur Brottes, monsieur Peiro, monsieur Chassaigne, monsieur Mamère, et vous, chers collègues de la majorité, nous pouvons toujours améliorer le texte à l'occasion des lectures à venir. S'il y a encore quelques modifications de détail à apporter pour faire en sorte que cet ensemble fonctionne mieux, nous le verrons au cours des navettes. Mais je crois que maintenant, il faut voter.
Ce que nous proposons me semble équilibré. Nous sommes de bonne foi. Et s'il faut faire des progrès, nous les ferons. Mais je demande que l'on statue sur ce que je viens dire, que l'on ne fasse rien de plus ce soir, mais que l'on fasse au moins cela. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
J'ai des scrupules à intervenir après le président Ollier. Mais je souhaite m'exprimer pour alimenter la réflexion avant la navette.
Je vous ai bien écouté, monsieur Tourtelier. Vous avez dit qu'il y avait au sein du Haut conseil un collège des sciences dures et un collège des sciences humaines. Vous avez même dit que l'on pourrait imaginer que sa présidence soit confiée à un sociologue. Cela signifie-t-il que vous n'avez pas lu le texte ?
Nous sommes devant un problème intellectuel. Pour vous, le comité scientifique est un comité des sciences dures, et l'autre comité serait celui des sciences sociales.
Mais le texte ne dit pas du tout cela ! Permettez-moi de vous le lire, parce que si nous avons du mal à nous comprendre, tout en étant de bonne foi, c'est parce que nous ne partons pas du même point de départ :
« Le comité scientifique est composé de personnalités désignées en raison de leur compétence scientifique et technique reconnue par leurs pairs, dans les domaines se rapportant notamment au génie génétique, à la protection de la santé publique, aux sciences agronomiques, aux sciences appliquées à l'environnement, au droit, à l'économie et à la sociologie. »
Le comité scientifique réunit donc l'ensemble des sciences, y compris la sociologie. Par conséquent, la personnalité qui préside le Haut conseil dans son ensemble peut être issue des sciences sociales.
Je le précise parce que vous avez l'air d'opposer les sciences dures aux sciences sociales, ou humaines. Ce n'est pas le sens du texte. À chaque fois que vous prenez la parole, il semble qu'à vos yeux, le comité scientifique, pour aller vite, c'est celui du génie moléculaire, et l'autre comité, c'est celui des sciences sociales. Ce n'est pas vrai. Le comité scientifique, justement, réunit l'ensemble de ces compétences.
Le seul problème qui reste à régler est de savoir s'il doit formuler des « recommandations » ou rendre des « avis ». Je vous dis, en toute bonne foi, que le mot de recommandation est plus fort. Regardons les choses du point de vue linguistique. Vous demanderez qu'on vous fasse une note, je le ferai aussi de mon côté, et puis nous verrons quel terme est le plus fort. S'il y a débat, nous nous accorderons sur un terme commun. Mais franchement, cette question ne me paraît pas être à la hauteur de l'enjeu.
Nous sommes effectivement devant un débat sérieux. À l'instant, M. le président de la commission nous disait que la directive européenne exige que l'avis rendu soit un avis scientifique.
Le problème, c'est qu'il faut, comme l'a dit aujourd'hui M. le ministre dans une émission matinale, une meilleure articulation entre les deux comités que celle prévue dans le texte adopté par le Sénat. Si j'osais employer ce terme, je dirais qu'il faut une forme d' « égalité » entre le comité scientifique, ouvert à toutes les sciences, et celui qui représente la société civile.
Le président Ollier nous dit que son amendement n° 468 répond à ce problème. Mais quand on le lit attentivement, on constate qu'il n'y répond pas du tout. Il ne prévoit pas une « séance » plénière mais une « session » plénière. On peut toujours jouer sur les mots, mais prévoir une « session plénière », cela signifie, selon moi, que les deux comités peuvent siéger ensemble peut-être une fois par an.
L'amendement défendu par Jean-Yves Le Déaut prévoyait une formation plénière pour délibérer sur les avis, tandis que l'amendement n° 468 prévoit que le Haut conseil des biotechnologies se réunit en session plénière afin d'aborder « toute question de portée générale », et pas du tout pour examiner les avis rendus par cette instance, cas par cas, pour chaque OGM, sur la dissémination.
Il y a là une énorme différence, ce que reconnaît d'ailleurs M. Ollier, puisque l'exposé sommaire de son amendement souligne que des cas de réunion plénière doivent être prévus « en dehors de l'analyse, au cas par cas, des demandes d'autorisation ». Nous voulons, quant à nous, que le comité de la société civile puisse, en commun avec le comité scientifique, émettre un avis sur les demandes d'autorisation.
Il y a là un vrai débat, sérieux et approfondi, que nous pourrons sans doute poursuivre lundi prochain, lorsque nous examinerons l'amendement n° 468 , dont j'espère qu'il sera sous-amendé.
Comme l'a prévu la conférence des présidents, nous allons maintenant interrompre nos travaux. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Le débat a eu lieu : allons au moins jusqu'à l'amendement de la commission !
Prochaine séance, lundi 7 avril 2008, à seize heures :
Suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, relatif aux organismes génétiquement modifiés.
La séance est levée.
(La séance est levée à une heure dix.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma