La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
Mes chers collègues, je suis heureux de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation du groupe d'amitié Irak-France, conduite par son président, M. Abdoulbari Al Zebary, député de Mossoul. (Mmes et MM. les députés, ainsi que les membres du Gouvernement, se lèvent et applaudissent.)
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le Premier ministre, la promesse de la fabrication d'une gamme de véhicules utilitaires en 2012 que nous avons obtenue à l'usine Renault de Sandouville constitue un progrès. Mais la seule poursuite de la production de la Laguna 3 et des deux modèles vieillissants Vel Satis et Espace ne permettent nullement d'assurer la charge de travail jusque-là.
L'usine ne travaille qu'une semaine sur deux. J'ai là un bulletin de salaire qui montre la perte de 350 euros en septembre sur un salaire de 1 600 euros.
Des plans de licenciements secs sont mis en oeuvre chez les équipementiers sous-traitants, à hauteur de 25 à 50 % des effectifs, alors que le Président de la République s'était engagé, au Havre, en répondant à mon interrogation, à ce que le soutien de l'État concerne les salariés sous-traitants comme les salariés de Renault.
Ma question comprendra trois volets.
L'État actionnaire ne doit-il pas, dès aujourd'hui, faire que Renault favorise le volume de voitures produites en France en mettant sur les chaînes de Sandouville les modèles Koleos et Infiniti que l'on importe ? Ainsi, toute la filière, sous-traitants compris, sera portée jusqu'en 2012.
N'y a-t-il pas nécessité morale, avant le partage des bénéfices substantiels entre les actionnaires, de compenser les pertes de salaires pour cause de chômage et, pour le moins, de commencer par les dividendes de l'État actionnaire ?
Enfin, monsieur le Premier ministre, vous et votre majorité découvrez depuis quelques semaines les vertus de l'économie réelle. À l'heure où l'État a le portefeuille à milliards ouvert, n'est-ce pas le moment pour lui d'en investir trois, trois seulement, pour acquérir la minorité de blocage, qui lui permettrait d'impulser avec Renault une véritable politique industrielle nationale créatrice d'emplois et plus généralement un plan de défense de l'industrie automobile et de ses salariés, en empêchant surtout l'entreprise de s'engager dans une nouvelle aventure américaine, comme on nous l'a annoncé ce matin ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Monsieur le député, nous ne découvrons pas soudainement l'économie réelle...
..et vous le savez très bien.
J'ai reçu l'ensemble des députés et les élus de la région concernée par les usines de Sandouville et de Flins, et Laurent Wauquiez a reçu les syndicats il y a quelques jours. J'ajoute que le Président de la République s'est rendu sur place.
L'industrie automobile, tant au niveau des constructeurs que des sous-traitants, connaît des difficultés dans le monde entier. Je note au passage que, grâce au plan bonus-malus, l'industrie automobile française a réussi à souffrir un peu moins que d'autres, et en particulier à voir ses ventes de véhicules, notamment de véhicules propres, continuer.
En ce qui concerne l'emploi, avec Laurent Wauquiez, nous allons mettre en place sur le site de Sandouville, à titre expérimental, le contrat de transition professionnelle...
..pour faire en sorte que le maximum de salariés – mille personnes sont concernées – puissent bénéficier de conditions de reclassement.
Nous allons aussi exiger que le plan concernant les seniors ne mette pas tout le monde dehors...
..mais soit très attentif au sort individuel de chacun d'entre eux. Plus de 50 % des salariés menacés sont âgés de plus de cinquante ans.
S'agissant du volet industriel, vous savez que le Président de la République a négocié avec Carlos Ghosn un certain nombre d'éléments concernant l'implantation en France de la fabrication de certains modèles. Ainsi, un nouveau véhicule utilitaire sera produit, à partir de 2012, dans l'usine de Sandouville. Quant à l'usine de Flins, il y a, là aussi, une sécurisation du site.
Sur ces deux sites, il y a un engagement très fort de l'État en matière industrielle en même temps que pour la politique de l'emploi, car nous ne laisserons pas tomber les salariés de Sandouville. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Ma question s'adresse à M. le ministre du budget et des comptes publics.
La crise financière, par son extrême gravité, impose d'ouvrir de nouveau le grand chantier de la lutte contre les paradis fiscaux.
La récente conférence, dont vous avez pris l'initiative avec votre homologue allemand, a été l'occasion d'affirmer une volonté politique forte de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales. Au-delà de l'Union européenne, cette lutte doit s'organiser à l'échelle mondiale. En effet, on ne peut, d'un côté, remettre de l'ordre dans le système financier européen et mondial et de l'autre, laisser en suspens la question des paradis fiscaux.
Ces paradis fiscaux ne pèsent pas moins de 10 000 milliards de dollars, ce qui signifie que chaque année, pour la France, le manque à gagner est de plus de 50 milliards d'euros.
Au moment ou l'État français apporte un soutien sans précédent au secteur bancaire, nous ne pouvons tolérer que certaines banques françaises conservent des filiales dans ces paradis fiscaux.
Le Nouveau Centre, très attaché à la transparence, à la sincérité et à la justice fiscale, et qui a toujours lutté contre les parachutes dorés et la fraude fiscale, veut vous aider à éliminer ces zones de non-droit. C'est dans cet esprit que je vous pose trois questions.
D'abord, quelles mesures la France envisage-t-elle de prendre pour lutter contre les paradis fiscaux, avec ses partenaires européens ?
Ensuite, quelles dispositions comptez-vous prendre à l'égard des établissements bancaires qui disposent de filiales dans un certain nombre de paradis fiscaux ?
Enfin, pouvez-vous me confirmer que, lors du prochain sommet économique mondial, la question des paradis fiscaux sera inscrite à l'ordre du jour ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Hier a eu lieu une conférence très importante – c'était une première sur le plan politique – au cours de laquelle, avec une vingtaine de pays de l'OCDE, nous avons relancé le combat contre les paradis fiscaux, c'est-à-dire ces pays qui pratiquent l'opacité financière et l'absence de fiscalité au détriment de la souveraineté des autres pays qui collaborent entre eux sur ce plan, comme il est naturel.
Nous y avons pris des mesures concrètes. La première est de publier dès le printemps une liste noire des paradis fiscaux ; ensuite que, sur cette base, la communauté internationale envisage des mesures de rétorsion fortes – cette lutte n'est pas à la portée d'un seul pays – pour mettre à l'index les paradis fiscaux et leur imposer de sévères contraintes.
Nous voulons également que la directive « Épargne » s'étende, au-delà des frontières européennes, aux centres financiers off shore, qu'elle s'étende à d'autres produits que ceux visés initialement, et s'étende enfin non plus seulement aux personnes physiques mais à toutes les sociétés, fondations et autres formes d'organisation propices à l'évasion fiscale.
C'est, je pense, une dimension que nous prendrons en compte dans l'ensemble des rencontres internationales. On ne peut vouloir moraliser le capitalisme financier et ne pas lutter avec beaucoup de détermination contre les paradis fiscaux. Nous y sommes bien déterminés. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et du groupe UMP.)
La parole est à M. Marc Bernier, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Madame la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative,…
…j'associe à ma question Jean-Marie Rolland et les nombreux députés qui ont travaillé sur la question dont je vais vous entretenir.
La santé est une préoccupation croissante de nos concitoyens : attente aux urgences, difficultés à trouver un médecin, détresse des personnes âgées qui ne peuvent plus rester seules à domicile. Les états généraux de l'organisation de la santé ainsi que les différentes missions que nous avons menées au sein de nos assemblées ont montré les graves problèmes que connaît notre système de santé.
Il nous faut parler de la désertification médicale, qui met à mal l'égalité de l'accès aux soins, ainsi que de la désaffection que rencontre la médecine générale. En effet, beaucoup de médecins généralistes vont prendre leur retraite dans les prochaines années et leurs jeunes confrères boudent cette filière. Aujourd'hui, 40 % des diplômés de médecine générale ne pratiquent pas cette discipline, mais préfèrent exercer l'homéopathie, l'acupuncture, la gériatrie ou autres.
Que faut-il faire ? Devons-nous augmenter le nombre de médecins, alors que nous n'avons jamais compté autant de professionnels de santé dans notre pays ? Comment les attirer là où l'on en a besoin ? Comment revaloriser la médecine dite de premier recours ? Comment favoriser la coopération entre professions médicales, entre ville et hôpital, entre public et privé ? Ne faut-il pas développer de nouveaux statuts d'exercice, confier des mandats de santé publique qui allieraient le préventif et le curatif ?
Madame la ministre, je ne peux que me féliciter de la discussion prochaine du projet « Réforme de l'hôpital, patients, santé et territoires », que vous avez défendu ce matin en conseil des ministres. Pouvez-vous nous dire comment vous comptez répondre à l'inquiétude légitime de nos concitoyens ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Monsieur Bernier, laissez-moi d'abord vous féliciter de l'excellent travail d'analyse pluridisciplinaire sur les questions de la démographie médicale, que vous avez réalisé avec M. Christian Paul dans une approche apolitique.
On compte en France 338 médecins pour 100 000 habitants, taux moyen bien plus élevé que dans les pays de l'OCDE où il est de 262 pour 100 000. Le problème que nous rencontrons est donc plus d'ordre qualitatif que quantitatif.
C'est la raison pour laquelle vous allez retrouver un certain nombre des préconisations qui figurent dans votre rapport – du reste approuvées sur d'autres bancs de l'Assemblée – dans le projet voté ce matin en conseil des ministres et que l'Assemblée va bientôt examiner.
Parmi elles, on mentionnera la création des agences régionales de santé qui, avec les élus locaux et les professionnels de santé dresseront un schéma régional d'organisation des soins ambulatoires pour définir des territoires de santé sur un mode non opposable, fondé sur le volontariat. Ces agences joueront par ailleurs le rôle de guichet unique des aides que peuvent recevoir les médecins qui s'installent. Elles détermineront aussi la permanence des soins. Enfin, elles apporteront des aides à des structures telles que les maisons médicales, où pourront exercer les jeunes médecins, qui aspirent à un tel exercice pluridisciplinaire.
Ensuite, comme vous le souhaitez, nous allons revaloriser la filière de médecine générale. Nous sommes à l'oeuvre, ma collègue Valérie Pécresse et moi-même, avec le concours des professeurs de médecine générale. Nous souhaitons que le numerus clausus, c'est-à-dire le nombre d'étudiants admis à la fin de leur première année, soit augmenté, particulièrement dans les zones désertifiées, puisque 70 % des jeunes médecins s'installent là où ils ont fait leurs études. Enfin, il s'agit de développer des modes alternatifs d'exercice.
Comme vous pouvez le constater, monsieur le député, vous trouverez les solutions que vous préconisez dans le projet que nous allons examiner dans quelques semaines. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, mais je voudrais tout d'abord rappeler au ministre Éric Woerth que la réunion dont il a parlé n'était pas la première à traiter des paradis fiscaux et que, avant 2002, bien d'autres démarches ont été entreprises par d'autres gouvernements. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le Premier ministre, les députés socialistes ont apporté leur soutien au projet de loi sur le Grenelle de l'environnement, en espérant que les intentions affirmées seront déclinées concrètement lors de l'examen du prochain projet de loi Grenelle II, et qu'elles seront financées.
Hélas, les premiers revirements n'ont pas tardé à surgir. Mais ils viennent de vos rangs !
Hier, les députés qui vous soutiennent ont supprimé, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, la prime transport, prime que vous claironniez sur toutes les ondes lors de la dernière flambée des prix des carburants. Par cet acte, ils ont ainsi contredit les engagements du Président de la République, les vôtres et ceux de votre gouvernement.
Rappelons que le dispositif étendait à tout le pays l'obligation pour l'employeur de prendre en charge la moitié des titres de transports collectifs, obligation actuellement en vigueur en Ile-de-France, et proposait une prise en charge facultative des frais d'utilisation d'un véhicule personnel, dans la limite de 200 euros par an.
Au moment où, sur les 360 milliards prévus, vous versez cash 10,5 milliards d'euros aux banques, sans prise de participation, sans places au conseil d'administration, bref, sans réelle contrepartie, les Français se sentent floués, bernés.
Pire encore, MM. Tian, Bur et Méhaignerie, auteurs de ce mauvais coup, disent vouloir privilégier les salaires directs que vous refusez d'intégrer dans un vrai plan de relance pour le pouvoir d'achat et pour l'emploi.
Une situation qui se résume ainsi : d'un côté, vous injectez des milliards bien réels pour l'économie virtuelle ; de l'autre, vous annoncez des primes virtuelles pour l'économie réelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Alors, une seule question, monsieur le Premier ministre. Après avoir refusé notre proposition de chèque transport, et alors même que chacun sait que les prix de l'énergie augmenteront dans la durée, allez-vous renier vos engagements pris dans le Grenelle de l'environnement ou allez-vous entendre les millions de Français qui sont dans le coeur de l'appareil productif ? Demanderez-vous à votre majorité de voter la prime transport ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le député, je ne sais pas si d'autres gouvernements avaient organisé une concertation pour lutter contre les paradis fiscaux, mais je constate que leur action n'a pas dû être très efficace, car ils ne se sont jamais aussi bien portés. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Quant à l'idée que nous apporterions une aide en fonds propres aux banques sans contrepartie, c'est évidemment un énorme mensonge, et vous le savez parfaitement, puisque nous prêtons aux banques, pour les aider à se refinancer, au taux de 8 %, qui va permettre de rémunérer l'effort qui est engagé par l'État tout en réamorçant la pompe du crédit. Là encore, vous racontez aux Français des histoires qui n'ont rien à voir avec la réalité (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP), simplement pour dissimuler le fait que vous n'avez rien proposé et que vous n'avez même pas eu le courage de soutenir le plan que nous avons proposé au système financier français.
Le Gouvernement souhaite que le Parlement se prononce sur sa proposition de prime transport. Pourquoi ?
D'abord, parce qu'il s'agit de réparer une injustice. Il y a en région parisienne une aide des entreprises pour les salariés qui bénéficient des transports publics. Il n'y en a pas dans le reste de la France. C'est une injustice. Eh bien, nous voulons que cette injustice soit corrigée. Et je pense que personne ne peut être contre cette proposition. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Deuxièmement, cette proposition s'inscrit dans le droit fil du Grenelle de l'environnement que vous avez approuvé hier dans ses principes, massivement – et je veux vous en féliciter –, puisqu'il s'agit d'encourager les salariés à utiliser les transports en commun.
Enfin, il s'agit d'ouvrir un nouveau champ de négociation sociale dans l'entreprise, puisque nous avons laissé au débat entre partenaires sociaux la question d'une aide pour les salariés qui n'utilisent pas les transports en commun dans les zones où ceux-ci ne sont pas présents.
Le Gouvernement est attaché à cette proposition, qui a d'ailleurs été débattue pendant près de trois mois avec les partenaires sociaux. Et il espère que la majorité comme l'opposition voteront le texte comme nous l'avons proposé. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Franck Reynier, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, le lycée que nous connaissons a beaucoup contribué à la démocratisation de l'accès au baccalauréat et aux études supérieures. Il s'est progressivement ouvert à toute la diversité de notre société et n'est plus ce lieu élitiste réservé aux élèves des classes les plus favorisées. Cette réussite est à mettre au crédit de la communauté éducative, et notamment des enseignants, qui ont accompagné ces évolutions avec beaucoup de dévouement.
Pourtant, dans les lycées, les quatre grandes filières semblent ne plus être adaptées à la réussite et à l'épanouissement scolaire de nos élèves, et apparaissent trop sélectives.
Par ailleurs, le choix d'une de ces filières ne correspond pas toujours aux besoins réels des élèves. La rigidité des parcours est en partie responsable des échecs observés à l'université, en raison d'une orientation souvent trop précoce et mal adaptée.
Faire le choix d'une filière plutôt que d'une autre, c'est se priver de certaines disciplines optionnelles, c'est s'interdire la polyvalence, c'est se conformer à un modèle qui ne correspond pas toujours aux besoins d'adaptation d'un monde du travail qui réclame toujours plus de compétence et d'efficacité.
Aujourd'hui, les Français expriment de nouvelles attentes : celle d'un meilleur accompagnement des élèves, celle d'une meilleure qualité de l'orientation, celle d'un suivi personnalisé qui permette à chacun de corriger ses erreurs et de combler ses lacunes à mesure qu'elles apparaissent. Ils ne comprennent pas que notre lycée, pour lequel nous dépensons beaucoup plus que tous nos voisins, ne soit pas en mesure d'assurer efficacement ces missions nouvelles.
Monsieur le ministre, vous avez présenté hier la future organisation de la classe de seconde. Pouvez-vous nous dire en quoi elle répond aux attentes des Français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur Reynier, je vous remercie d'avoir rappelé que le lycée français a été profondément évolutif ces dernières années, qu'il a su répondre à des besoins de la société en créant des filières technologiques ou le bac professionnel en trois ans et en s'adaptant sans cesse à l'évolution sociale.
Voilà pourquoi, alors que tout bouge tant autour de nous, je suis surpris que l'on puisse résister à l'idée qu'il faille, encore une fois, faire évoluer le lycée. Je l'ai connu moi-même comme professeur en province, puis à Paris.
Celui que j'ai connu au début de ma carrière et celui que nous voyons aujourd'hui ont beaucoup de différences.
Vous avez rapidement rappelé ce que nous voulons faire.
Nous voulons une organisation différente sur le plan de l'année – pas du tout par caprice. Pourquoi passer au semestre et abandonner le trimestre ? Tout le monde sait – tous ceux qui connaissent l'école – que le premier trimestre était très long : quatre mois, le second un peu plus court : un peu moins de trois mois, et que le dernier s'effilochait très rapidement. On n'avait pas le temps de rattraper les élèves qui étaient en très grande difficulté. Il fallait donc s'organiser par semestre, pour qu'on puisse voir, au milieu de l'année, où en sont les élèves qui se sont mal orientés, qui ne vont pas bien, et pour qu'on ait le temps de les amener vers d'autres formations, ou de les aider à progresser.
Ce n'est pas du tout une logique de zapping, comme je l'ai entendu dire par un ancien ministre de l'éducation nationale. C'est, au contraire, une logique qui lutte contre l'échec scolaire.
Je rappelle qu'aujourd'hui, en France, et seulement en France, 15 % des élèves de seconde redoublent. Pourquoi ? Parce qu'ils se rendent compte, au milieu de l'année, qu'ils sont mal orientés, qu'ils n'ont pas fait les bons choix, qu'on ne peut pas les aider. Ils sont donc maintenus dans la voie de l'échec et ils redoublent.
Notre lycée s'organisera autour de trois pôles : d'abord, des enseignements fondamentaux, grâce à nos enseignants – vous avez eu raison de rappeler qu'ils faisaient parfaitement leur travail ; ensuite, grâce à des enseignements spécialisés, que choisiront les élèves ; enfin et surtout, grâce à un accompagnement éducatif pour ceux qui en auront besoin, c'est-à-dire pour tous, parce que, au fond, tous les élèves ont besoin, aujourd'hui, que l'on personnalise leur travail, leur relation au savoir.
Il y a une logique entre ce que nous avons fait à l'école primaire : les fondamentaux, le soutien, l'accompagnement ; au collège : restaurer les programmes, faire de l'accompagnement éducatif ; au lycée : les enseignements fondamentaux, l'accompagnement et également le soutien personnalisé. Le nouveau lycée républicain est le haut de la pyramide d'une réforme complète de l'éducation nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Avant l'examen du projet de loi sur la modernisation du système de santé et après celui de la première partie du projet de loi de finances pour 2009, nous aurons à débattre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, autre texte essentiel s'il en est.
Ce projet, actuellement à l'étude en commission, est un texte volontariste en matière de redressement de nos comptes sociaux. Permettez-moi de rappeler, chers collègues, que le déficit de l'assurance maladie a, cette année, atteint son plus bas niveau depuis 2001 grâce à la maîtrise médicalisée tant en ville qu'à l'hôpital.
Nous devons poursuivre dans cette voie.
Au moment où nous examinons le budget de la France, le Gouvernement a tenu un langage de vérité et de transparence sur la crise financière et ses conséquences sur l'économie et l'emploi, ce dont nous le remercions. À quelques jours de l'examen du PLFSS, pouvez-vous, madame la ministre, nous indiquer quel serait l'impact de cette crise sur les comptes sociaux. Par ailleurs, l'objectif de retour à l'équilibre de ces comptes en 2012 vous semble-t-il toujours réalisable ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Un mot d'abord pour me féliciter de la qualité des travaux parlementaires que vous menez, monsieur le député, en matière de financement de la solidarité nationale, sujet dont vous êtes un spécialiste.
Plusieurs députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Parlons-en, de la solidarité nationale !
Vous avez eu raison, monsieur Door, de mentionner l'objectif de retour à l'équilibre des comptes, fixé par le Président de la République pour 2011. Nous nous engageons sur cette voie par le biais du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.
En 2008, le déficit a été ramené à 4 milliards d'euros. En 2009, nous avons l'ambition de l'abaisser à 3,4 milliards. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Nous avons, évidemment, tenu compte du contexte économique et financier lorsque nous avons, avec Éric Woerth, fixé un objectif de 2,8 milliards à la fin du mois de juillet. Mais pour tenir compte de la nouvelle donne économique, nous ramenons le déficit à 3,4 milliards en gardant néanmoins l'objectif de retour à l'équilibre en 2011.
Nous procédons donc à 4,2 milliards d'euros de redressement des comptes, partagés entre des recettes nouvelles et des économies, les recettes nouvelles représentant un peu plus de 2 milliards (Exclamations sur les bancs du groupe GDR), en mettant peut-être l'accent sur le milliard de reversement demandé aux organismes complémentaires.
Grâce à une meilleure prise en charge des affections de longue durée, les organismes complémentaires se sont constitué des marges de manoeuvre. Il est donc tout à fait normal que celles-ci soient, pour une petite part, reversées à l'assurance maladie. La Mutualité française a pris l'engagement de ne pas augmenter les cotisations des assurés.
Nous attendons un peu plus de deux milliards d'euros provenant des économies liées à la maîtrise médicalisée, mise en oeuvre selon des recommandations de la Haute autorité de santé. Nous escomptons des baisses de tarifs là où des professions de santé ont enregistré des gains de productivité – l'industrie pharmaceutique, la radiologie ou la biologie. Nous voulons aussi garantir que des nouveaux besoins de santé seront pris en compte.
Nous avons fixé un taux de progression des dépenses d'assurance maladie de 3,3 % et nous injecterons cinq milliards d'argent frais dans notre système d'assurance maladie, système de santé solidaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Dominique Baert, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Madame la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, dans nos campagnes et dans nos villes, une épidémie gagne : celle des licenciements. Chaque semaine, voire chaque jour, allonge le triste cortège des suppressions d'emplois.
Dans le Nord, Roubaix et son agglomération sont en état de choc : hier matin, lors d'un comité d'entreprise extraordinaire, La Redoute a annoncé ce qu'elle appelle un « plan de relance », en fait la suppression de 672 postes.
Ce plan, mes chers collègues, frappe toute la France. D'abord parce qu'il entraîne la fermeture de 81 boutiques, 81 lieux de rencontre où l'on dépose ses commandes, où l'on récupère ses colis. Toutes celles et tous ceux qui y travaillent sont au désespoir.
Dans autant de communes, un rideau de plus va être baissé. Ce sont des repères familiaux, des tranches de vie qui disparaissent ! France, c'est une partie de ton patrimoine qui fout le camp ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Si ce plan frappe toute la France, c'est aussi parce qu'il touche l'un des fleurons, sinon le fleuron national de la vente à distance !
Madame la ministre, votre politique économique qui, depuis maintenant plus d'un an, ne fait absolument rien pour soutenir les revenus et le pouvoir d'achat, donc la consommation des ménages, porte une part de responsabilité.
Mais l'essentiel, ce sont ces pertes d'emplois à La Redoute : 430 emplois dans les boutiques ; les emplois supprimés par l'externalisation des commandes par courrier, ou au sein des services administratifs ; tous ces intérimaires dont les contrats ne sont pas renouvelés et dont personne ne connaît le nombre, sans doute ô combien dramatique !
Dans ces conditions, il faut éviter le pire : on ne peut accepter ces licenciements sans réagir. Je voudrais donc vous poser trois questions.
Tout d'abord, quand le Gouvernement va-t-il comprendre que sa politique d'emploi et de perte de pouvoir d'achat fait fausse route ?
Ensuite, que compte-t-il faire, dans la récession qui s'engage, pour éviter l'effondrement de pans entiers de notre économie, telle la vente à distance, qui ne doit pas sombrer comme hier le textile ? Dans l'agglomération roubaisienne, des milliers de salariés de ce dernier secteur, devenus chômeurs, se souviennent des plans sociaux dramatiques de 2003-2004.
La vente par correspondance ne doit pas être le textile de demain !
Enfin – et ce sera ma dernière question, monsieur le président –, par quels moyens le Gouvernement entend-il réduire le nombre de licenciements prévus à La Redoute, et rassurer ainsi tous ces salariés, toutes ces familles en proie à l'inquiétude ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation.
Monsieur Baert, La Redoute est une entreprise emblématique, chère au coeur des Français. Nous partageons tous ici les inquiétudes que vous inspirent le plan annoncé par l'entreprise.
La Redoute, nous ne l'ignorons pas, constitue l'un des poumons économiques du département du Nord. Mais l'entreprise, longtemps pionnière dans le domaine de la vente à distance, est aujourd'hui confrontée à de profondes mutations économiques…
… que M. Baert semble ignorer. (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Les clients passent de plus en plus commande sur Internet, et ce type de commerce confronte la vente par correspondance à une concurrence nouvelle. La Redoute doit donc trouver de nouveaux modes de développement ; c'est ce qui a conduit l'entreprise à annoncer hier un plan de suppression de 672 emplois.
L'entreprise doit s'adapter aux nouveaux modes de consommation et aux attentes de ses clients. Quant au Gouvernement, monsieur le député, sa préoccupation constante est d'accompagner le mieux possible les mutations industrielles, lorsque l'évolution de la société les rend nécessaires.
Si les emplois évoluent, si les technologies changent, ce sont à nos yeux les personnes et les territoires qu'il faut aider et accompagner à long terme. C'est ce que nous ferons pour La Redoute, dont le plan de suppression des « points catalogue » s'étendra sur quatre ans. Nous travaillons déjà avec l'entreprise pour permettre un reclassement au cas par cas dans chaque département concerné et instaurer un dispositif de formation, de reclassement et d'externalisation.
Mais nous travaillons également à la revitalisation des territoires concernés, prévue par la loi de modernisation sociale adoptée par le Parlement, à laquelle La Redoute ne saurait se soustraire.
Vous le voyez, monsieur le député : ce qui mobilise le Gouvernement, ce qui guide son action, c'est la situation des personnels et des territoires concernés par ces mutations économiques. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-François Lamour, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, l'État s'attache à gérer les finances publiques de manière dynamique, en renforçant l'efficacité de chaque euro investi. L'argent public est rare, il s'agit donc de le dépenser avec discernement en offrant à nos concitoyens un service public de meilleure qualité. Et ce qui est valable pour l'État doit l'être aussi pour les collectivités locales.
Si les collectivités réalisent une part importante des investissements, l'augmentation de leurs dépenses annuelles dépasse de 2 % à 3 % l'inflation. Il leur arrive d'augmenter des dépenses dont la légitimité n'est pas toujours flagrante, je pense en particulier aux dépenses de communication et de fonctionnement. Malheureusement, dans les collectivités détenues par les socialistes, la compensation des dépenses nouvelles se fait par l'impôt, toujours plus d'impôt. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Je prendrai deux exemples puisque, semble-t-il, vous n'êtes pas convaincus.
L'État a permis aux régions de moduler une part de la taxe intérieure sur les produits pétroliers et celles qui sont de votre bord, mes chers collègues de gauche, ont choisi d'augmenter la fiscalité sur l'essence et le gazole : 500 millions d'euros ont ainsi été prélevés dans les poches des contribuables qui utilisent leur voiture pour aller travailler.
Mais la palme revient bien évidemment au maire de Paris avec 12 % d'augmentation de la fiscalité locale ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.) C'est un véritable coup de massue qui s'abat sur la tête des Parisiennes et des Parisiens. Pourtant, le service public municipal ne s'améliore pas. Les frais de fonctionnement explosent et le recrutement des agents de la ville de Paris s'est fait de manière particulièrement hasardeuse. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le ministre, je sais bien que les collectivités locales sont régies par le principe de libre administration, mais que comptez-vous faire pour que l'argent public dont elles disposent soit mieux géré et mieux dépensé au service de nos concitoyens ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Monsieur Lamour, je comprends votre indignation. Augmenter la fiscalité locale de manière spectaculaire et massive est un mauvais choix à un mauvais moment. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Jamais la fiscalité locale ne doit constituer, à ce niveau-là, une réponse à la problématique des dépenses publiques. Il est vrai que les régions, notamment les régions socialistes, ont montré le chemin en augmentant de plus de 35 % la fiscalité locale entre 2004 et 2007. La palme revient à la région Île-de-France, avec 60 % d'augmentation des impôts. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Il importe que les collectivités locales fassent en sorte que la dépense publique soit mesurée. Pourquoi n'imitent-elles pas l'État en limitant l'augmentation de leurs dépenses à l'inflation ? C'est une question qui n'est ni de droite ni de gauche : il s'agit simplement de maîtriser la dépense publique et nous devons tous ensemble y parvenir. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Je rappelle que, depuis plusieurs années, l'augmentation annuelle des dépenses des collectivités locales est de 14 milliards d'euros.
En outre, je précise que le déficit public, que nous cherchons à réduire avec le Président de la République et le Premier ministre, est l'addition du déficit de l'État, du déficit de la sécurité sociale mais aussi du besoin de financement des collectivités locales. Nul ne peut s'extraire de cette logique.
Enfin, le Président de la République, en présence du Premier ministre, a installé tout à l'heure un comité, présidé par Edouard Balladur, qui aura pour tâche de réfléchir à une meilleure organisation territoriale de notre pays dans le but de créer des services publics de proximité de meilleure qualité, d'éviter les empilements souvent dénoncés par nos compatriotes et de faire en sorte que l'argent public soit bien employé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à Mme Henriette Martinez, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Puisque vous êtes momentanément handicapée, madame Martinez, je vous invite à poser votre question assise à votre banc.
Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie. J'y associe la section française de l'Assemblée parlementaire de la francophonie, que j'ai l'honneur de présider par délégation du président Accoyer.
En pleine crise financière internationale, le Président de la République puis le Premier ministre ont conduit la délégation française au Sommet de la francophonie à Québec du 17 au 19 octobre, montrant ainsi l'engagement au plus haut niveau de l'État pour la francophonie.
Ce sommet, qui se réunit tous les deux ans, a rassemblé l'ensemble des soixante-huit États membres ou observateurs qui, sur les cinq continents, font rayonner la francophonie comme une force d'avenir, empreinte de conviction et d'action et en phase avec son temps, pour le développement d'une langue en partage, mais aussi des valeurs véhiculées par la langue française.
En marge du Sommet, divers engagements ont été pris, parmi lesquels la signature d'une importante convention relative à la Maison de la francophonie.
Monsieur le secrétaire d'État, puisque vous étiez à Québec pour la conférence ministérielle de la francophonie, puis au Sommet, je souhaiterais que vous informiez la représentation nationale en répondant aux deux questions suivantes.
Premièrement, quel est le bilan du Sommet de la francophonie ? Avez-vous en particulier le sentiment d'une cohésion réelle de la communauté francophone et de l'existence d'une approche commune des grands enjeux internationaux, qu'ils soient culturels, politiques ou économiques ? Comment la francophonie entend-elle peser face aux défis internationaux ?
Deuxièmement, quels sont les éléments les plus déterminants de la politique francophone française, et quelle place souhaitez-vous donner à la langue française dans votre combat pour le multiculturalisme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Alain Joyandet, secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie.
Permettez-moi d'abord, chère Henriette, de vous souhaiter un prompt rétablissement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Le Sommet de la francophonie, auquel ont participé le Président de la République et le Premier ministre, a été un grand sommet, organisé autour de deux grands sujets dont l'évocation, madame la députée, me permettra de répondre à vos deux questions.
En premier lieu, l'ensemble des États qui ont le français en partage ont été unis pour réaffirmer que la francophonie était bien au coeur de leur diplomatie. L'action de la France a été saluée, et notamment la réforme de TV5, elle-même au coeur de notre action diplomatique pour la francophonie.
Je veux insister sur votre deuxième question, et sur un événement majeur de ce sommet : à l'unanimité des soixante-huit chefs d'État et de gouvernement, une déclaration a été adoptée pour soutenir l'action de la France et du Président de la République dans ses efforts diplomatiques visant à refondre les institutions financières et économiques internationales. C'est donc l'ensemble de la francophonie, sur les cinq continents, qui a unanimement apporté son soutien au Président de la République française et à notre gouvernement, et salué leur action. Cette déclaration est d'autant plus importante qu'elle a été adoptée la veille de la rencontre du Président de la République avec le Président Bush, laquelle a abouti au succès que l'on sait.
Comme le montre ce succès diplomatique, c'est l'ensemble des continents qui soutiennent et encouragent l'action du Président de la République et du gouvernement de François Fillon. Nous n'attendons plus que le soutien du parti socialiste français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Jean-Paul Dupré, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question, à laquelle s'associent mes collègues Jean Launay et Henri Nayrou, s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
Je ne vous apprendrai rien en déclarant que la fièvre catarrhale sévit dans une grande partie de la France et de l'Europe. Mais ce dont vous ne semblez toujours pas avoir pris la mesure, c'est du désespoir que la maladie est en train de créer chez les éleveurs.
En effet, aucune disposition préventive n'a été prise pour éviter cette catastrophe économique, alors que le danger était connu depuis quatre ans, après les épidémies d'Europe du Nord, d'Espagne ou des départements corses.
Il vous appartient aujourd'hui de prendre, en urgence, des dispositions de soutien aux éleveurs, autres que celles très vagues évoquées à Cournon. Les éleveurs demandent clairement des reports de charges d'emprunt, des exonérations sociales et fiscales, mais également des majorations de l'indemnisation des pertes de cheptel, un prolongement de la mesure d'aide au maintien des broutards dans les exploitations, des précisions et un assouplissement des règles de déplacement des animaux à l'intérieur de la zone réglementée 1-8.
Il y va, monsieur le ministre, de la survie d'un secteur économique qui est également très durement touché par la situation catastrophique des producteurs de lait : l'un des rares secteurs excédentaires de notre balance commerciale, et dont l'importance n'échappe à personne, est aujourd'hui en difficulté, alors qu'un quart de l'humanité meurt de faim.
Allez-vous enfin répondre à cette juste demande de prise en considération que vous adressent nos éleveurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je vous prie de bien vouloir excuser Michel Barnier qui, dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne, est aujourd'hui au Parlement européen, à Strasbourg.
Vous évoquez, monsieur Dupré, la prochaine campagne de vaccination. (« Pas du tout ! » sur les bancs du groupe SRC.) Vous savez que, compte tenu de l'évolution du sérotype 1 et du sérotype 8,…
…le Gouvernement a décidé de lancer deux appels d'offres pour des vaccins 1 et 8 – cela intéressera M. l'ancien ministre de l'agriculture –, afin que les éleveurs français puissent bénéficier de doses en quantité suffisante. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Par ailleurs, je dois vous informer que la vaccination contre les sérotypes 1 et 8 sera obligatoire et simultanée pendant la période de prophylaxie en hiver, quand les animaux sont à l'étable.
Les résultats de l'appel d'offres pour le vaccin 1 nous permettent d'affirmer que nous disposerons des vaccins en quantité suffisante pour la totalité du cheptel entre novembre et avril. Pour le sérotype 8, l'ouverture de l'appel d'offres est prévue d'ici à une quinzaine de jours, mais les informations dont nous disposons nous laissent penser que nous aurons également les quantités suffisantes.
En ce qui concerne les aides économiques, auxquelles vous attachez de l'importance, monsieur le député, je rappelle que Michel Barnier a annoncé 30 millions d'euros de soutien.
Trois axes ont été retenus : l'aide au maintien, l'aide à l'engraissement et l'allègement des charges dans les situations les plus critiques.
Enfin, parallèlement, Michel Barnier travaille étroitement avec les organisations professionnelles pour déterminer, d'ici au 3 novembre prochain, les modalités de répartition entre ces trois axes, sans oublier les critères d'attribution.
Dernier élément : cette crise met en lumière la nécessité de travailler dans une meilleure concertation au niveau européen. Michel Barnier a présenté trois demandes prioritaires à la Commission européenne : le principe d'une politique vaccinale commune ; le maintien du soutien communautaire aux opérations de vaccination et à l'achat des vaccins – 100 % pour les vaccins, 50 % pour la vaccination – ; enfin, la révision de la réglementation sur les conditions de mouvement des animaux.
Vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement est totalement mobilisé dans la lutte contre ce qui, pour nos campagnes, représente un véritable fléau. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à Mme Claude Greff, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité.
Les personnes âgées ou handicapées sont parfois victimes de maltraitances – un phénomène complexe et encore mal connu, qui se manifeste le plus souvent par une succession de petits actes d'humiliation, de brutalité ou d'infantilisation.
Les victimes souffrent d'isolement et de blessures psychologiques, voire physiques. Or, la seule idée que ces personnes dépendantes puissent subir de tels traitements est insupportable. Notre avenir autant que notre passé sont pétris d'humanité. Finir sa vie en paix dans un environnement adapté est essentiel à l'être humain.
En février dernier, madame la secrétaire d'État, vous avez lancé un numéro d'appel unique, le 3977, qui doit permettre aux personnes âgées ou handicapées et à leurs familles de signaler toute situation de maltraitance et de bénéficier ainsi d'une prise en charge appropriée. Au terme de ses huit premiers mois de fonctionnement, quel bilan en dressez-vous ?
D'autre part, les médias ont relayé ces dernières semaines plusieurs cas de maltraitance en établissement : quelles mesures prendrez-vous pour répondre aux inquiétudes des personnes âgées et de leurs familles, mais aussi des professionnels qui, jour après jour, s'occupent de nos aînés ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité.
Madame la députée, le numéro 3977 a, depuis sa création en février dernier, reçu plus de vingt-deux mille appels relatifs à des cas de maltraitance, de négligence, de détresse ou d'isolement de personnes âgées vulnérables. Pour 74 % d'entre eux, ces appels concernaient des personnes vivant à leur domicile.
Cela étant, la majorité des personnes très fragiles et dépendantes – voire atteintes de la maladie d'Alzheimer – vivent en établissement et ont tout autant besoin d'être prises en compte. C'est pour elles que nous avons, au terme d'un travail de plusieurs mois, lancé le 16 octobre dernier une opération portant sur la bientraitance en établissement. L'État, en effet, doit être intraitable avec les situations de maltraitance. Il doit accompagner les établissements, les professionnels et les familles dans le cadre d'une mobilisation générale en faveur de la bientraitance.
Intraitables, nous le sommes : le rythme annuel des inspections a doublé – de cinq cents en 2006 à mille aujourd'hui. Demain, nous irons plus loin encore : 80 % des contrôles seront inopinés.
Mais notre volonté première est de travailler avec les établissements et les professionnels. Rappelons d'emblée que le nombre d'établissements maltraitants est loin d'être majoritaire, contrairement à ce que prétendent certains. Ceux-là sèment un doute injuste parmi les directeurs d'établissement et découragent inutilement les personnels. Au contraire, nous voulons nous appuyer sur eux, tant ils accomplissent un travail remarquable. Ainsi, chaque année, le directeur aidé de la famille, du médecin et de l'infirmier, remplira un document d'évaluation qui fera office de bilan de bientraitance. Cet outil fondé sur la confiance permettra à nos services de cibler et d'accompagner les établissements les plus fragiles. C'est grâce à cette logique de partenariat que nous atteindrons notre objectif : zéro maltraitance. Le Gouvernement a d'ores et déjà inscrit 300 millions d'euros pour 2009 afin de créer dix mille nouveaux emplois soignants.
Enfin, la clef de la bientraitance passe avant tout par les bons gestes et les bonnes techniques, pour l'acquisition desquels une véritable formation est nécessaire. En trois ans, nous voulons qu'une telle formation soit dispensée aux 250 000 professionnels en exercice dans les établissements, grâce à 20 000 agents – soit deux par établissement – déjà formés et capables de diffuser ces techniques auprès de leurs collègues.
Nous consacrerons 132 millions d'euros supplémentaires à cette formation.
Permettez-moi de conclure, monsieur le président…
C'est avec toutes les familles et tous les élus de ce pays, monsieur Ayrault, que nous gagnerons la bataille de la bientraitance. Zéro maltraitance : nous ferons tout pour atteindre cet objectif ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Chantal Robin-Rodrigo, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le ministre du budget, permettez-moi de vous dire qu'aucune collectivité locale de gauche n'a vu ses crédits de fonctionnement augmenter autant que ceux de l'Élysée, qui marquent une hausse de plus de 12 %. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) L'exemple devrait venir d'en haut !
Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie. Depuis des semaines, les Françaises et les Français sont informés des cours des marchés et des bourses internationales, mais aussi des milliards d'euros apportés par les gouvernements mondiaux pour consolider les réseaux bancaires. Ils ont, à juste titre, l'impression que rien ne se fait pour eux. (Plusieurs députés du groupe UMP se lèvent et quittent l'hémicycle.)
Mes chers collègues, les questions au Gouvernement ne sont pas terminées. Si vous choisissez de quitter l'hémicycle, faites-le discrètement.
Vous avez la parole, madame Robin-Rodrigo.
Selon un récent sondage, 59 % d'entre eux considèrent que le Gouvernement gère mal la crise économique.
Madame la ministre, la France est en récession. Nous avons enregistré en septembre un taux de faillite record, le plus haut depuis onze ans, le chômage ne cesse d'augmenter, le pouvoir d'achat des Français les plus modestes ne leur permet plus de boucler leurs fins de mois, du fait d'une augmentation importante des produits alimentaires, du gaz – à deux reprises –, et du fait de la hausse vertigineuse du prix de l'essence et, par voie de conséquence, du prix des produits dérivés et du coût du transport.
Comment peut-on accepter qu'aucune mesure ne soit prise pour contraindre les distributeurs à baisser les prix, au moment où le baril de pétrole est passé de 147 dollars en juillet à 67 dollars aujourd'hui, et où le prix à la pompe n'a baissé que de quelques centimes ?
Quand allez-vous saisir la commission de régulation de l'énergie pour réviser à la baisse les prix du gaz, qui ont augmenté de 10 % ? Quand allez-vous exiger des répercussions sur les prix alimentaires, alors que le cours du blé a baissé de 50 % ?
« Voilà les questions simples que se posent nos concitoyens. Ils exigent une répercussion de ces baisses, et ce n'est pas porter atteinte à la libre entreprise que d'exiger une transparence sur les prix. » Il s'agit d'une déclaration de M. Copé dans le journal Le Parisien, en date du 21 octobre.
Dans l'immédiat, et paradoxalement, la seule mesure prise par le groupe UMP en commission des affaires sociales consiste à supprimer la prime transport.
Madame la ministre, que comptez-vous faire pour exiger la répercussion des baisses sur les prix à la consommation, étant entendu que, pour l'aide aux transports, le Premier ministre s'est engagé à l'instant ? C'est un objectif sur lequel nous serons extrêmement vigilants, comme sur l'extension du versement transport aux communes touristiques, sujet…
Je vous remercie.(Protestations puis applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR.)
La parole est à M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services.
chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services. Madame la députée, tout ce qui est excessif est insignifiant. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je m'inscris en faux contre vos assertions concernant l'Élysée et les dépenses liées à la fonction présidentielle. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Vous avez insisté sur le manque de réactivité du Gouvernement. Je citerai l'exemple du prix de l'essence. En novembre 2007, Christine Lagarde, Luc Chatel et moi-même avons réuni les pétroliers, qui se sont engagés à lisser les hausses des prix du pétrole et de l'essence, et à faire en sorte que la répercussion soit immédiate en cas de baisse. Au deuxième trimestre de 2007, il y a eu une hausse du prix du baril, et donc du prix de l'essence, de près de 40 %. Les pétroliers ont répercuté cette hausse à hauteur de 85 % et l'ont donc lissée. Mais, depuis le mois de juillet, et vous le savez aussi bien que nous, le prix du baril a baissé de 50 % (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) et les pétroliers ont répercuté cette baisse au centime d'euro près.
Voilà, madame la députée, ce que je souhaitais dire, en réponse à votre question.
Prix de l'essence à la pompe
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt-cinq.)
J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 7, du règlement, sur le projet loi de finances pour 2009.
La parole est à M. Jean-Pierre Balligand.
Monsieur le président, monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, si je défends aujourd'hui la motion de renvoi en commission de ce projet de loi de finances, c'est parce que j'ai la conviction qu'il risque d'aggraver la crise que notre pays va devoir traverser au lieu de la soulager.
Je pourrais prendre de nombreux exemples dans ce projet de loi, mais j'ai choisi de centrer mon propos sur les relations de l'État avec les collectivités territoriales. Cela me permettra de revenir, monsieur le ministre, sur la réponse que vous avez faite, lors de la séance des questions au Gouvernement, et qui ne me convient pas. Les collectivités peuvent, en effet, jouer un rôle déterminant d'amortisseur de crise pour peu qu'on leur en donne les moyens. En assumant les trois-quarts de l'investissement public, elles sont, en effet, les seules à pouvoir encore soutenir le secteur du BTP dont on connaît le rôle moteur dans l'économie. Pourtant, ce projet de loi va diminuer les capacités d'investissement des collectivités locales.
L'équation est donc simple : soit ce projet va soulager la crise et cette motion de renvoi en commission doit être rejetée ; soit, et c'est ce que je me propose de vous démontrer, il va, au contraire, l'aggraver et il est nécessaire de renvoyer ce projet en commission.
Mon collègue Laffineur, député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, et moi-même avons récemment effectué une communication à nos collègues de la commission des finances sur les relations financières entre l'État et les collectivités. À cette occasion, M. de Courson a fait une remarque qui m'a paru intéressante – cela ne m'arrive pas souvent de le citer – et que je souhaite partager avec vous : « On peut [..] soit s'inspirer d'Alexis de Tocqueville qui fait de la responsabilité des élus locaux devant leurs électeurs le fondement de la démocratie locale, soit de Mme Margaret Thatcher qui avait pour objectif de contenir la dépense publique locale en accordant des dotations budgétaires aux collectivités territoriales et en donnant le minimum de marges de manoeuvre à des élus locaux considérés comme dépensiers. » « Contenir la dépense publique locale », « donner le minimum de marges de manoeuvre à des élus locaux considérés comme dépensiers », c'est précisément le chemin que vous suivez depuis plusieurs années. Avec ce projet de loi de finances, vous vous enfoncez encore plus loin dans cette voie. Votre manque de confiance dans les collectivités locales vous empêche ainsi de leur donner les moyens de jouer leur rôle d'amortisseur de la crise.
Quelles sont les orientations du projet de loi de finances et du projet de loi de programmation des finances publiques au regard des collectivités ?
Le principe, défini dans la loi de programmation, trouve sa traduction dans le projet de loi de finances. Cette orientation négative figure dans l'article 6 du projet de loi de programmation des finances publiques aux termes duquel, de 2009 à 2012, « …l'évolution de l'ensemble constitué par les prélèvements sur recettes de l'État établis au profit des collectivités territoriales et par les dépenses du budget général relevant de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » n'excède pas, chaque année, l'évolution prévisionnelle des prix à la consommation… ». En d'autres termes, le Gouvernement veut constituer une enveloppe avec l'ensemble des concours financiers de l'État vers les collectivités – à l'exception bien sûr, comme l'a remarqué le rapporteur général, des remboursements et dégrèvements d'impôts locaux et de la fiscalité transférée – et décide que cette enveloppe n'augmentera pas plus vite que l'inflation prévisionnelle des ménages.
Les conséquences de ce postulat, que l'on trouve dans la loi de finances, sont de deux ordres. Tout d'abord, le FCTVA est intégré dans l'enveloppe normée, ce qui conduit à geler ou à diminuer de nombreuses dotations. Le FCTVA – et je communiquerai les chiffres ultérieurement – a considérablement augmenté, du fait des nombreux investissements des collectivités en 2007, mais les dotations diminuent parallèlement pour figurer dans l'enveloppe normée de 2 %. Ensuite, la DGF est indexée sur la seule inflation prévisionnelle.
Première conséquence, l'intégration, pour la première fois, du FCTVA dans l'enveloppe dite normée entraîne la baisse de nombreuses dotations. Or ce fonds a été conçu et est considéré par de très nombreuses collectivités comme le remboursement de la TVA qu'elles acquittent en réalisant des investissements.
Bien sûr, nous savons que, sur le plan juridique, il n'existe pas au profit des collectivités un « droit à remboursement » de la TVA dont le Fonds serait la manifestation, mais c'est cependant dans cet esprit qu'il a fonctionné jusqu'à présent.
En conséquence, compte tenu de l'effort d'investissement soutenu des collectivités, qui réalisent les trois quarts de l'investissement public civil, il a toujours eu une progression dynamique. En 2009, il devrait ainsi passer de 5 192 millions à 5 855 millions d'euros, en augmentation de 663 millions, soit 12,8 % de hausse. Mais du fait de l'intégration du FCTVA dans l'enveloppe normée, cette hausse de 12,8 % – que l'État a bien évidemment encaissée –, nettement supérieure à l'inflation prévisionnelle fixée à 2 %, doit être compensée, pour respecter le cadre fixé par le Gouvernement, par le gel de certaines dotations et par la diminution d'autres.
Seront, par exemple, gelées la dotation globale d'équipement des communes et celle des départements, tandis que de nombreuses compensations d'exonérations de fiscalité locale, exonérations décidées par l'État, seront diminuées de 22,8 %.
Il faut d'ailleurs souligner que l'ensemble des élus du Comité des finances locales, quelle que soit leur appartenance, ont voté une motion pour refuser l'intégration du FCTVA dans l'enveloppe normée.
Seconde conséquence, l'indexation de la DGF sur la seule inflation prévisionnelle.
Depuis plus de dix ans, l'augmentation de la DGF était calculée en additionnant le taux d'inflation et le taux de croissance. C'était d'une certaine façon la reconnaissance de la contribution des collectivités locales à la croissance. Cela permettait également de compenser le fait que l'inflation à laquelle sont confrontées les collectivités est plus dynamique que celle des ménages, comme on peut le constater en regardant l'évolution du « panier du maire » calculé par l'AMF. En outre, cela permettait de renforcer les sommes consacrées à la péréquation, puisque la DGF est le principal moteur de la péréquation.
À ce titre, la DGF aurait dû, d'après les calculs du rapporteur général, augmenter d'un milliard d'euros. En réalité, cette hausse ne sera que de 800 millions. En effet, son augmentation sera désormais égale à la seule inflation prévisionnelle retenue par le projet de loi. Cette indexation ne permettra pas de compenser la perte de pouvoir d'achat des collectivités du fait du niveau d'inflation auquel elles seront confrontées. Pire, le projet de loi supprime le dispositif de « recalage » de la DGF. À court terme, cela permet certes d'éviter une diminution de la DGF de 67 millions d'euros en 2009 au titre de l'inflation constatée en 2007, mais, comme l'inflation de 2008 sera largement supérieure à celle qui avait été anticipée dans la loi de finances initiale, il aurait normalement dû y avoir sur la DGF de 2010 une hausse très nette et cela ne sera pas le cas. Ce manque à gagner pèsera aussi sur les années suivantes, puisque la DGF est toujours calculée par rapport au montant de l'année précédente.
Quelles sont les conséquences de cette orientation ?
Première conséquence, l'intégration du FCTVA aura un impact négatif.
Plus les collectivités investiront, plus leurs dotations diminueront. Compte tenu de leur difficulté à emprunter et du renchérissement du coût des emprunts, leur capacité d'investissement va diminuer. Or, dans la situation actuelle, ni la demande des particuliers ni celle des entreprises ne peuvent permettre de soutenir l'activité du secteur, essentiel pour l'économie, du bâtiment et des travaux publics. Ce budget présente ainsi un caractère procyclique, dans le sens où il risque d'avoir un effet négatif sur la croissance.
À moyen terme, l'intégration du FCTVA obligera à revoir les règles de fonctionnement du FCTVA lui-même. En effet, comme le remarque le rapport général, si rien n'est changé, les dotations qui doivent servir de variable d'ajustement seront épuisées après 2013. Il est donc vraisemblable que les règles de fonctionnement du fonds seront très rapidement revues, dans un sens restreignant l'éligibilité des dépenses d'investissement au fonds. C'est une manière feutrée de dire que, dès 2010, et nous le savons tous, nous aurons quelques désagréments sur ce point.
Pourtant, tout le monde s'accorde à souligner la nécessité de préserver les mécanismes de soutien à l'investissement des collectivités locales. C'est d'ailleurs l'un des points d'accord entre M. Laffineur et moi-même…
…qui a été le moins sujet à débat en commission des finances.
C'est pourquoi, une fois encore, au moment où les collectivités ont un rôle majeur à jouer pour amortir les conséquences de la crise, il nous paraît nécessaire, conformément à la recommandation des élus du CFL, d'exclure le FCTVA de l'enveloppe normée.
Seconde conséquence, nous allons vers un État prestidigitateur
L'intégration de toutes les dotations, y compris celles qui visent à compenser des charges imposées par l'État, dans une enveloppe à l'évolution plafonnée aboutit à des situations ubuesques, où l'État fait financer par les collectivités le coût des décisions qu'il leur impose.
On peut en citer deux exemples : les 5 millions d'euros du fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées, article 72 du projet de loi de finances ; l'indemnité de 6,3 millions d'euros, prévue dans le programme « Concours financiers aux communes et groupements de communes », pour indemniser les communes sélectionnées pour délivrer les nouveaux passeports sécurisés pour des citoyens ne résidant pas dans la commune.
Soyons clairs, des dotations de compensation ou remboursement aux collectivités seront créées, sans que ces dernières voient leurs dotations globales augmentées : mieux que l'État-pickpocket, c'est l'État-prestidigitateur !
Au total, ce projet de budget se traduit par un manque à gagner de 860 millions d'euros pour les collectivités locales. Et encore, ce chiffre, extrait du rapport général, ne prend pas en compte le coût d'autres décisions de l'État, comme, entre autres, le plafonnement de la taxe professionnelle.
C'est une décision inacceptable dans le contexte actuel des relations entre État et collectivités.
Tout d'abord, les collectivités locales sont utilisées de façon récurrente comme variable d'ajustement.
Si l'on peut comprendre que l'État n'ait pas, dans des circonstances difficiles, les moyens d'entretenir la croissance de certaines dotations, il faut tout de même rappeler deux éléments : premièrement, la situation budgétaire de l'État était déjà difficile avant la crise, et la rigueur imposée aujourd'hui aux collectivités locales trouve donc d'abord sa source dans les choix politiques du Gouvernement, ne l'oublions pas ; deuxièmement, de fait, celui-ci a commencé il y a bien longtemps à utiliser les collectivités comme variable d'ajustement, d'abord en leur faisant supporter le coût de son désengagement territorial massif, ensuite en instrumentalisant à son profit la fiscalité locale.
Le désengagement territorial, assumé ou non, place les collectivités face à des charges supplémentaires : les transferts de compétences et leur compensation inadéquate, comme le montre l'exemple des cartes d'identité ; le désengagement non assumé – les réformes des cartes judiciaire, militaire, hospitalière et la suppression à venir des gendarmeries – aura de grandes conséquences sur la situation de nombre de collectivités.
L'instrumentalisation de la fiscalité locale se manifeste de plusieurs manières. D'abord, le plafonnement de la taxe professionnelle, dont le coût repose sur les collectivités : 640 millions d'euros en 2007, et, pour un petit département comme le mien, l'Aisne, 3,49 millions d'euros en moins cette année. Ensuite, l'absence de réforme de la fiscalité locale, qui prive les collectivités des moyens d'assumer leur politique devant les électeurs, car il n'est pas possible d'assumer une hausse d'impôts quand ceux-ci sont régressifs socialement. Cela fournit d'ailleurs une arme facile à utiliser politiquement. Plutôt que de formuler des propositions de réforme de la fiscalité locale, le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement préfère préfacer des livres stigmatisant la gestion régionale. C'est effectivement plus facile.
Les causes de cette instrumentalisation, c'est la volonté « thatchérienne » de diminuer les dépenses des collectivités.
Le projet de loi de programmation des finances publiques n'aborde pas la question des ressources des collectivités locales. Le retour à l'équilibre des collectivités qu'il prévoit pour 2012 repose seulement sur la diminution du rythme de croissance des dépenses des collectivités locales.
Le président du groupe UMP a déclaré, à propos de la réforme des niveaux de collectivités, que nous avions sur les collectivités territoriales des réserves d'économies très importantes et que nous pouvions diviser de moitié les dépenses, les moyens et les impôts. Si des économies peuvent bien sûr être réalisées, il est irresponsable de prétendre diminuer de moitié les dépenses locales, en tout cas si l'on considère que, globalement, les collectivités locales doivent assumer autant de compétences qu'aujourd'hui. Il est d'ailleurs significatif qu'à droite, on ne parle de réforme des collectivités locales que pour baisser les impôts, le Président de la République l'a encore fait dans son discours de Toulon, et jamais pour améliorer les services offerts aux citoyens.
Dans ce contexte, la réforme de la fiscalité locale est pour nous un préalable à la diminution des dotations.
Une telle réforme est urgente.
Les collectivités dépendent en effet des dotations de l'État. En 2007, le budget des collectivités locales n'a dépendu qu'à hauteur de 26 % des contribuables directs, entreprises comprises. Cela crée une grande dépendance des collectivités à l'égard de l'État, ce n'est pas acceptable.
Les collectivités ont par ailleurs besoin de disposer d'une visibilité financière à l'échéance d'un mandat. Nous sommes au début des mandats communaux et des mandats des établissements publics de coopération intercommunale, il est nécessaire d'avoir cinq ans de visibilité financière.
En conséquence, cette réforme doit être menée en même temps et non pas après la réforme des compétences et des niveaux de collectivités.
On a toujours trouvé de bonnes raisons de repousser cette réforme. Il ne faut pas que le temps nécessaire à la réflexion sur les niveaux de collectivités soit la nouvelle « bonne raison » pour se satisfaire d'une absence de réforme d'ampleur.
Quel serait le contenu d'une telle réforme ?
Sans développer ici les points d'accord que M. Laffineur et moi avons essayé de proposer à la commission des finances, notamment sur la nécessaire spécialisation fiscale, je souhaiterais attirer votre attention sur deux points importants.
Premier point, une réactualisation des valeurs locatives dès 2009.
Il est nécessaire de conserver les valeurs locatives, moins sensibles à la conjoncture que les valeurs vénales, et de les réactualiser.
Cette réactualisation ne peut se faire « au fil de l'eau », parce que cela pénaliserait les collectivités les moins riches, qui sont celles où les mutations se font le moins fréquemment. Il ne serait pas acceptable de se fonder sur ce qui se passe dans la région parisienne, à Nice ou dans un certain nombre de grandes villes et d'appliquer le dispositif à toute la France.
La réactualisation est un préalable pour pouvoir apprécier les transferts de charge résultant d'une réforme fiscale. Notre groupe présentera un amendement en ce sens. Si le Gouvernement l'acceptait, ce serait un gage de sa volonté d'éviter l'asphyxie financière des collectivités locales.
Second point, la question de la taxe professionnelle.
Tout le monde reconnaît les inconvénients de la taxe professionnelle, qui pèse sur les investissements, donc sur la modernisation de l'appareil productif et sur le secteur industriel.
Cependant, la nécessité de rechercher un impôt qui ait moins d'effets nocifs sur l'économie, pour reprendre les termes du Président de la République, ne doit pas se faire à n'importe quel prix.
Le remplacement de la taxe professionnelle par un concours de l'État doit être exclu, parce que ce serait totalement déresponsabiliser les élus dans les choix d'implantation d'entreprises, notamment d'entreprises polluantes ou créant des désagréments pour la population. On le voit déjà dans certaines grandes agglomérations où, depuis qu'existe la taxe professionnelle unique, qui est un bon système, certaines communes refusent toute implantation nouvelle, du fait que la fiscalité est désormais partagée. Ce n'est donc pas la création d'un système de concours national qui résoudra le problème. Il s'agit d'une vieille idée du Conseil d'État, qui avait produit un rapport sur la fiscalité locale, il y a plus d'une dizaine d'années.
Je ne crois pas que cela soit de nature à favoriser la responsabilisation des élus locaux, à laquelle non seulement les élus socialistes, mais aussi un bon nombre de nos collègues sur d'autres bancs, sont attachés
En outre, si nous diminuons la fiscalité des entreprises, il faut éviter – c'est un principe qui se trouve dans le rapport Valletoux du Conseil économique et social, que les associations d'élus ont approuvé – que cela soit au détriment des ménages. Le ratio 55-45 du rapport doit être conservé.
Mon collègue Laffineur et moi-même préconisons donc d'asseoir l'impôt économique sur la valeur ajoutée. Les simulations ont été réalisées il y a peu, de manière assez neutre, par un haut fonctionnaire de l'État qui a conduit une mission sur le sujet. Cependant, cette valeur ajoutée devrait être territorialisée par des éléments physiques, pour limiter les risques d'optimisation comptable de la part de certaines entreprises.
Chers collègues, pardonnez-moi de m'être exprimé avec une certaine passion. Le sujet n'est pas neutre. Pour la première fois, nous nous trouvons, pour ainsi dire, garrottés. L'intégration du FCTVA dans une enveloppe normée de 2 %, aboutit à ce que j'ai démontré, à savoir à la diminution d'un certain nombre de dotations. Il faut donc préparer l'avenir et donner de la visibilité, et pour cela, il faut que la réforme de la fiscalité locale se fasse rapidement ; sinon, la situation ne cessera d'empirer d'une loi de finances à l'autre, et le garrot finira par provoquer l'asphyxie financière des collectivités territoriales.
Telles sont les raisons pour lesquelles j'ai demandé au nom du groupe socialiste le renvoi du texte en commission, pour que cette question soit davantage débattue qu'elle ne l'est du fait du blocage gouvernemental. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Plusieurs orateurs ont demandé la parole pour des explications de vote.
La parole est à M. Marc Laffineur, pour le groupe UMP.
Cependant, je crois qu'il a surtout prouvé qu'il ne fallait pas renvoyer le texte en commission (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) et au contraire se hâter de débattre pour pouvoir conduire une réforme de la fiscalité locale. C'est en tout cas comme cela que j'ai compris son discours.
Nous pouvons nous féliciter de ce que le Président de la République et le Gouvernement aient pris conscience du fait que la situation était devenue intenable et qu'une grande réforme de la fiscalité locale était nécessaire. Une telle réforme passe par une grande réforme des structures des collectivités, les deux étant liées. Dans le rapport que mon excellent collègue Balligand et moi-même rédigeons pour la commission des finances, nous montrons qu'une réforme de la fiscalité locale et des dotations implique la réforme du mille-feuilles administratif.
Ces cinq dernières années, 40 % de l'augmentation du budget de l'État a été consacrée aux collectivités locales, et le budget du FCTVA a augmenté de 5,7 % par an en moyenne. L'État ne peut continuer ainsi, d'autant moins que la péréquation au titre du Fonds de compensation n'est pas réellement péréquatrice, dans la mesure où plus une collectivité est riche et investit, plus elle reçoit, tandis que les collectivités qui n'ont pas les moyens d'investir ne reçoivent, par définition, aucune aide à l'investissement.
Il faut donc vite discuter du présent projet de loi, pour engager rapidement une réforme de la fiscalité locale qui permette d'assurer davantage de péréquation entre les collectivités et de les aider toutes à réaliser des investissements. C'est donc tout naturellement que le groupe UMP votera contre cette motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Le groupe SRC approuve les propos tenus par M. Balligand, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, comme M. Balligand l'a bien montré, les choix du Gouvernement aggravent les conséquences de la crise. Dans le cadre de l'enveloppe normée, notre collègue a évoqué le FCTVA. Nous pourrions mentionner également les amendes de police, qui ont été rajoutées dans l'enveloppe et dont le produit augmente ; on voit bien le tour de prestidigitation auquel se livre le Gouvernement !
En outre, M. Cahuzac a déjà eu l'occasion d'expliquer que les choix faits pour ce budget, notamment en ce qui concerne les hypothèses de croissance, le rendent inapplicable. Même le Gouvernement l'a reconnu : Mme Lagarde nous a dit que nous verrions où nous en sommes le 14 novembre. Le renvoi en commission paraît donc fondé ne serait-ce qu'à ce titre. D'ailleurs, M. Laffineur a lui-même dit qu'il reconnaissait le bien-fondé des remarques de M. Balligand.
Il serait judicieux de débattre à nouveau des points soulevés par notre collègue concernant la fiscalité locale. Toutes les associations d'élus – ADF, AMF et ARF – considèrent que cette fiscalité est obsolète, que toute visibilité financière fait défaut aux collectivités. Et encore n'a-t-il pas évoqué les problèmes de péréquation !
Enfin, si le Gouvernement a fait des annonces concernant la valeur locative à la conférence nationale des exécutifs, nous n'en savons guère plus que ce que nous a dit M. Balligand. Il conviendrait que nous en apprenions davantage.
Pour toutes ces raisons, le groupe SRC votera cette motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Notre collègue Jean-Pierre Balligand a présenté une excellente motion, comme d'habitude. De quelqu'un venant des terres de Saint-Just et de Babeuf, ce n'est guère étonnant ; il a été à bonne école et a bu un lait excellent.
C'est tout aussi excellent. Il ne faut pas choisir entre les révolutionnaires ; chacun a apporté sa pierre à l'Histoire.
Comme nous le savons, M. Laffineur est un soldat, une sentinelle gardienne du temple, qui avait, en la circonstance, bien du mal à justifier le refus d'un renvoi en commission. Parce que tous les ingrédients ont changé en quelques jours ; et s'il y a une année où le renvoi en commission est justifié, c'est bien cette année-ci ! Il n'y a aucun doute là-dessus.
Avons-nous bien compris ce que nous a dit M. Woerth hier ? Certes, le ministre est malin et pourrait nous faire la même remarque que faisait le précédent responsable de la Réserve fédérale à un journaliste qui lui disait avoir compris ses propos : « Si vous avez compris ce que j'ai dit, c'est que je me suis mal exprimé. » (Rires.) Je crains que M. Woerth ne soit sur la même ligne. Il nous a dit que le Gouvernement n'augmenterait en aucun cas les impôts et ne réduirait pas davantage les dépenses. En bon cartésien, je ne vois donc d'autre résultat possible qu'un creusement abyssal du déficit, déjà suffisamment impressionnant. Ce point justifierait à lui seul un retour en commission.
Le président de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment annonce 180 000 suppressions d'emploi dans sa branche. Cela n'a rien à voir avec les prévisions gouvernementales, et je serais tenté de croire le premier plutôt qu'un gouvernement dont les improbables prévisions se sont jusqu'à présent révélées défaillantes.
En commission des finances, ce matin, à l'occasion du rapport de notre collègue Marie-Anne Montchamp, nous avons appris, alors que l'on parle maintenant d'un trou de la sécurité sociale de 15 milliards, que les exonérations illégitimes se monteraient à 33 milliards, si l'on en croit Philippe Séguin. Vous voyez bien qu'il y a un problème.
Certes, ce n'est pas le sujet qui nous occupe spécifiquement aujourd'hui, mais les finances publiques ne sont pas dissociables, PLF d'un côté, PLFSS de l'autre. Ces questions méritent un examen global.
Tout à l'heure, M. le Premier ministre, en réponse à une question au Gouvernement, a soutenu que le Gouvernement demandait bel et bien des contreparties aux banques. Il ne fait aucun doute que l'argent consenti par l'État à ces dernières – 320 milliards plus 40 milliards – a sa place dans notre discussion générale. Vous constituez, pour gérer les 320 milliards, une société dont les représentants seront en majorité des banquiers. Comment, dès lors, allez-vous nous expliquer que vous exercerez le moindre contrôle sur cette société, alors que vous n'avez jamais exercé aucun contrôle sur les banquiers ?
Nous avons également appris quelque chose de très important, à savoir que, dans le cadre des recapitalisations, vous allez faire payer aux banques un taux d'intérêt de 8 %. Si je n'ai pas l'habitude de défendre les banquiers, pour le coup, je pense que, par les temps qui courent, il s'agit d'un taux quasiment usuraire, qui ne risque pas de contribuer au redémarrage de l'économie !
Par ailleurs, vous ne voulez pas entendre parler d'une remise en cause de l'indépendance de la Banque centrale européenne, mais le Président de la République invite à présent M. Trichet à des réunions, auxquelles se rend ce dernier sans barguigner.
Vous voyez donc que tout cela mérite réexamen. Et pour compléter le tableau, puisque Mme Lagarde, avec son à-propos habituel, nous a indiqué que les marchés reprenaient confiance, je signale que, si la Bourse de Paris a progressé hier de 0,78 %, elle chutait tout à l'heure de 4,95 %. Tout va bien, décidément ! Il est vrai que la baisse était de 8 % à Madrid, de 3,96 % à Francfort…
Monsieur le président, je voulais conclure d'une phrase, mais j'ai été interrompu à l'instant. À ce propos, je demanderai au collègue qui m'a traité de « boursicoteur » qu'il me donne des leçons pour acheter des actions, car je ne sais pas comment on fait.
Vous avez bien compris, monsieur le président, que nous votons favorablement à la motion de notre collègue Jean-Pierre Balligand. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Monsieur le président, mes chers collègues, vous ne serez pas étonnés que nous votions contre la motion de renvoi en commission. J'ai bien écoutéJean-Pierre Balligand, puisMarc Laffineur. Il semble que se dégage très largement la conviction qu'il faut une réforme urgente pour bien connaître le périmètre des collectivités et des différents financements. Pour ma part, j'appelle à un Grenelle de l'organisation des collectivités territoriales, pour arriver à s'y retrouver.
Mais, même si l'effort global de l'État en faveur des collectivités va s'élever à 93 milliards d'euros, le budget général ne concerne pas que les collectivités. Quel intérêt aurions-nous à retarder la discussion budgétaire ? Nous avons d'autres questions à débattre.
Les collectivités représentent tout de même 75 % des investissements publics civils !
L'hémicycle est le meilleur endroit où chacun pourra essayer d'apporter les corrections qu'il souhaite à ce budget. Le Nouveau Centre défendra plusieurs amendements qui visent à améliorer encore l'efficacité du budget qui nous est proposé. Je crois donc qu'il faut maintenant laisser place à la discussion des articles. C'est la raison pour laquelle nous ne voterons pas la motion de renvoi en commission.
(La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.)
J'appelle maintenant, dans le texte du Gouvernement, les articles du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012.
Je suis saisi d'un amendement de suppression, n° 17.
La parole est à M. Jérôme Cahuzac.
Cet amendement de suppression a toutes les chances de ne pas être adopté, mais il aura eu le mérite de permettre un débat sur la sincérité de cette programmation pluriannuelle. En effet, deux éléments nous paraissent pour le moins extrêmement contestables.
Premièrement, le budget pour 2009 repose sur une hypothèse de croissance de 1 % quand tout le monde s'accorde à reconnaître aujourd'hui que la croissance ne sera que de 0 % à 0,2 %, voire négative. En tout cas, personne ne croit à l'hypothèse retenue, pas même, j'en ai l'intime conviction, les membres du Gouvernement, qui défendent pourtant cet article.
Deuxièmement, l'hypothèse de croissance annuelle de 2,5 % en 2010, 2011 et 2012, est, elle aussi, extrêmement contestable. En effet, l'histoire nous enseigne que toute crise, quand son origine est immobilière – c'est le cas pour celle que nous vivons –, ne met évidemment pas un an ou deux à se résorber, mais bien davantage. Aucun exemple ne vient démentir cette affirmation. Penser que la croissance remontera à 2,5 %, dans notre pays, dès l'année 2010, c'est une conviction d'autant plus contestable que l'acquis de croissance à la fin de 2009 pour l'année 2010 sera extrêmement faible, s'il n'est pas négatif.
Nous proposons donc de supprimer cet article parce qu'il n'est pas bon, ne serait-ce que sur un plan symbolique, pour cette première application de la réforme constitutionnelle adoptée l'été dernier, de travailler de manière aussi virtuelle et déconnectée de la réalité.
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.
de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. La commission a rejeté cet amendement. L'intérêt d'une loi de programmation pluriannuelle, c'est de définir une trajectoire, qui, en l'occurrence, doit aller vers un retour progressif à l'équilibre. L'objectif n'est pas l'équilibre en 2012,…
…mais une diminution progressive du déficit. Je ne partage pas du tout le pessimisme de notre collègueJérôme Cahuzac.
Certes, nous traversons aujourd'hui une crise, mais les exemples de ces vingt dernières années nous ont montré que les sorties de crise peuvent s'accompagner d'une forte accélération de la croissance. Dès lors que l'on raisonne à l'horizon 2012, il est légitime de penser que des retards en début de période seront compensés par une accélération en fin de période. Pour 2009, le Gouvernement prévoit 1 % de croissance ; certains estiment que ce sera 0,5 %, d'autres parlent de 0,2 %. Dans une séquence chronologique qui va jusqu'en 2012, prévoir 1 % de croissance en 2009 ne me paraît pas déraisonnable.
J'ajoute qu'il ne s'agit pas, à l'article 2, d'objectifs impératifs, mais d'objectifs indicatifs. Le Gouvernement trace une direction : celle du retour à l'équilibre.
La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Le Gouvernement souhaite conserver cet article en l'état, pour plusieurs raisons qui ont été très bien exprimées par le rapporteur général.
On peut contester les hypothèses de croissance, mais, au moins, le Gouvernement met sur la table celles sur lesquelles il a construit sa loi de programmation pluriannuelle. Je rappelle que si la prévision de croissance pour 2009 apparaît, dans les semaines qui viennent, en fonction de la publication de nouveaux chiffres, différente de celle que nous attendons, nous reverrons les hypothèses de recettes, et nous en tirerons les conséquences. Nul ne peut savoir, par contre, ce que donnera 2010. Nous nous sommes donc situés pour cette année-là à un niveau de croissance que nous avons déjà connu. Je ne vois pas pourquoi nous changerions la trajectoire de finances publiques que nous avons choisie. Elle conserve, Dieu merci, une forme de réalisme, même pour 2009. Attendons de voir comment les choses évoluent pour l'année prochaine. S'agissant de 2010, je le répète, vous ne pouvez pas préjuger du taux de croissance.
Par ailleurs, je rappelle que d'autres hypothèses sont prises en compte, notamment celle de la réduction du niveau de dépenses publiques. Il n'y a pas que l'hypothèse de croissance à prendre en considération, ni dans la vie ni dans la trajectoire des finances publiques.
Si nous examinons une loi de finances pluriannuelle pour la première fois, des projections pluriannuelles avaient déjà été réalisées par l'État l'année dernière, et rendues publiques. Il s'agissait des indications données à la Commission de Bruxelles quant à l'évolution de nos finances publiques. À cet égard, il n'est pas exact de dire que la trajectoire est respectée. L'année dernière, les indications fournies à la Commission prévoyaient un retour à l'équilibre en 2012, ce qui n'est plus le cas dans le projet que nous examinons : le retour à l'équilibre n'existe plus puisqu'il est prévu un déficit budgétaire de 0,5 % du PIB en 2012.
De surcroît, rien dans les années précédentes, et pas davantage en 2008, ne nous permet de constater une amélioration de la situation budgétaire ou du stock de dette du pays. Au contraire, l'une comme l'autre s'aggrave, année après année, en dépit des intentions des pouvoirs publics. Car entre des intentions, que tout le monde sait sincères, et une réalité qui s'éloigne des prévisions, il y a largement matière à débat.
(L'amendement n° 17 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 23 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
M. le ministre nous dit qu'il s'agit d'une trajectoire qui serait valable même pour 2009, et que, pour 2010, il faut attendre et ne présager de rien. Mais à quoi sert-il de faire des prévisions si on ne présage de rien du tout ? S'il est au moins une certitude, c'est que la conjoncture peut varier.
Monsieur Woerth, vous pourriez être ministre de la francophonie puisque vous inventez de nouveaux termes dans une loi de finances, dont celui de « trajectoire ». Quant à M. le rapporteur général, il n'est pas en reste puisqu'il nous dit que nous sommes, en matière d'objectifs, dans « l'indicatif » et non dans « l'impératif ».
Tout cela ne me semble pas très sérieux. En outre, M. le ministre reconnaît qu'il y a déjà eu des crises. C'est le moins qu'on puisse dire ! Le cheminement du capitalisme est ponctué de crises.
Celui du communisme aussi, monsieur Brard !
Mais celle que le capitalisme connaît aujourd'hui n'a rien à voir avec les crises des vingt dernières années. Même si comparaison n'est pas raison, s'il y a une crise dont les prémices sont comparables à la crise actuelle, c'est celle de 1929.
J'en viens à notre amendement. Dès l'article 2 du texte apparaît la référence à l'Europe : « La programmation des finances publiques s'inscrit dans le cadre des engagements européens de la France. » C'est la référence directe aux principes libéraux que nous connaissons trop bien : pacte de stabilité, concurrence libre et non faussée, principe de libre circulation des capitaux, large application du droit du pays d'origine en cas d'activité économique dans un autre pays membre, indépendance de la Banque centrale, et j'en passe. Pourtant, nos concitoyens, en 2005, ont fait clairement savoir ce qu'ils en pensaient en rejetant, à une nette majorité, le projet de traité constitutionnel européen. Certes, la France a des engagements européens, inspirés des dogmes libéraux à l'élaboration desquels vous avez participé, et dont nous voyons aujourd'hui, avec la crise, quelques effets concrets. Mais de tels engagements ne sauraient occulter les principes qui sont inscrits dans notre bloc de constitutionnalité, qui doivent guider l'action publique, y compris en matière de politique financière – celle-ci n'étant que le moyen de cette action.
Il nous paraît donc nécessaire de faire mention, dans un texte qui servira de référence « indicative », comme dirait le rapporteur général, jusqu'en 2012, du préambule de la Constitution de 1946 qui énonce de nombreux droits sociaux, des « principes politiques, économiques et sociaux » comme « particulièrement nécessaires à notre temps ». J'ajoute qu'ils sont plus nécessaires que jamais, compte tenu de la situation de plus en plus difficile que vivent nos concitoyens. Il nous paraît également nécessaire de mentionner la Charte de l'environnement, qui énonce des droits environnementaux pour les habitants de notre pays. Il ne faut pas perdre de vue ces objectifs.
La commission a rejeté l'amendement parce que le texte dont nous débattons, monsieur Brard, est une loi de finances, et que les lois de finances sont faites pour traiter des finances. Chaque année est produite, dans le cadre du programme de stabilité, une prévision pluriannuelle relative aux finances publiques, qui est communiquée aux autorités européennes puisque notre pays appartient à la zone euro. Mais cette programmation pluriannuelle ne fait pas l'objet d'un débat parlementaire par le biais de l'examen d'une loi. Le très grand avantage de cette loi de programmation est de permettre un débat sur l'évolution de nos finances publiques, dans le cadre de l'examen d'un texte législatif. Celui-ci étant une loi de finances, il est normal que l'article 2 ne se réfère qu'aux engagements financiers que nous avons pris du fait de notre appartenance à la zone euro.
Avis évidemment défavorable. Nous faisons référence à nos engagements européens, ce qui me semble, bien sûr, suffisant.
(L'amendement n° 23 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 22 rectifié .
La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
Si j'ai bien compris l'argumentation de M. le rapporteur général, l'amendement no 22 rectifié entrant dans le cadre d'un projet de loi de finances, il a une chance d'aboutir…
Selon l'article 2, « la programmation des finances publiques s'inscrit dans le cadre des engagements européens de la France ». Dans ce contexte, l'effort demandé aux collectivités locales consiste à diviser par quatre leur besoin de financement entre 2007 et 2011, l'État devant réduire le sien de moins de 1,5 sur cette période. Compte tenu, d'une part, des fortes tensions sur les recettes des collectivités locales, notamment en matière de prélèvements sur recettes, et, d'autre part, du maintien de l'activité normative de l'État, génératrice de fortes hausses des dépenses des collectivités – même depuis la création de la commission consultative d'évaluation des charges –, il apparaît que l'effort demandé n'est pas équitablement partagé. Les collectivités locales n'ont d'ailleurs jamais été associées à la préparation de cet échéancier chiffré de programmation des finances publiques.
Il est donc proposé une répartition plus réaliste et plus équitable de l'effort demandé. Au moment où il faudrait accompagner les départements, qui gèrent les politiques sociales, aider les villes et l'ensemble des collectivités locales, qui représentent, rappelons-le, 75 % des investissements publics civils, on nous annonce des mesures restrictives sur le FCTVA et sur les dotations de l'État. Ces mesures vont réduire les marges de manoeuvre des collectivités.
D'ailleurs, vous auriez si bien perçu le problème, que vous semblez disposés à revenir sur la DSU en abandonnant une partie de vos principes, ce qui ne peut qu'être souhaitable. Précisons que les études de l'AMF tablent sur une augmentation de 2 % à 4 % minimum des impôts locaux pour 2009, dans tous les cas de figure et ce, sans prendre en compte la situation dans laquelle nous sommes. Dans ce contexte, il semble d'autant plus important de mieux répartir l'effort ; c'est le sens de l'amendement que nous vous soumettons.
D'abord, je voudrais remercier M. Sandrier d'avoir parlé de besoin de financement et non pas de déficit des collectivités locales.
On ne répétera jamais assez que le déficit de l'État n'équivaut pas au besoin de financement des collectivités locales. Le besoin de financement des collectivités locales est exclusivement lié à leurs investissements, alors que le déficit de l'État est largement imputable à des dépenses de fonctionnement. Je crois qu'il était utile de le rappeler.
Deuxième point : heureusement que les collectivités locales assurent, selon les années, entre 70 % et 80 % de l'investissement civil. Cela étant, je ne partage pas le pessimisme de M. Sandrier…
…parce qu'il faut se souvenir que, jusqu'en 2004, le besoin de financement des collectivités locales a été négatif. En fait, nous étions dans un cycle de désendettement, et les collectivités locales ont contribué à la baisse de l'ensemble des déficits publics pour des montants atteignant jusqu'à 0,2 % ou 0,3 % du PIB. Elles ont ainsi contribué à faire redescendre le ratio d'endettement au-dessous du fameux taux de 3 % du PIB, lorsque nous le dépassions. Sur la durée du cycle, il n'y a donc aucune raison pour que le besoin de financement des collectivités ne redescende pas, après un passage à 0,2 % ou 0,3 % depuis deux ou trois ans, monsieur Sandrier. C'est précisément l'objectif d'une loi de financement pluriannuelle de prévoir ce type d'évolution. Voilà pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
Le Gouvernement n'est pas favorable non plus à cet amendement, même s'il salue l'exercice comme le rapporteur. Je pense que nous avons correctement réparti l'effort…
Ce n'est pas de la modestie…
…ou de l'immodestie. C'est une réponse factuelle, sur le fond.
Nous avons fait une répartition qui impose des efforts à l'ensemble des administrations publiques, et il nous semble que l'effort demandé aux collectivités publiques est faisable, réaliste.
Il n'y a pas de raison de systématiquement reporter la charge vers l'État. Que ce dernier doive faire un effort, c'est évident puisqu'il représente une partie extrêmement importante du déficit. Cependant, le besoin de financement des collectivités locales se creuse au fil du temps, et nous devons aussi agir à ce niveau.
(L'amendement n° 22 rectifié n'est pas adopté.)
(L'article 2 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement de suppression, n° 24.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Ah, j'ai des regrets, monsieur le ministre ! Quand des banquiers viennent vous voir, vous leur dites : asseyez-vous et servez-vous ! Pour notre part, nous vous demandons peu de chose et c'est toujours niet !
Oh non, je ne m'y connais pas autant que nos collègues de droite, toujours pour la transparence mais seulement en russe ! Dès qu'on parle en français, ça ne marche plus, n'est-ce pas monsieur Woerth ?
L'article 3 a pour objet d'approuver le rapport annexé précisant le contexte, les objectifs et les conditions de réalisation de la programmation des finances publiques. Ce rapport n'est évidemment pas en situation d'être approuvé : il nécessite d'être totalement réécrit tant pour les perspectives qu'il trace, les objectifs qu'il énonce, que pour les moyens qui en prévoient la mise en oeuvre.
En ce qui concerne les objectifs à court et moyen terme, les hypothèses avancées manquent totalement de crédibilité, et semblent avoir été rédigées comme hors du temps, hors du réel. C'est Orson Welles, mais tourné vers le passé au lieu de l'être vers le futur !
Pour être un peu plus réaliste avec un minimum de peine, nous vous conseillons un simple copier-coller de certaines déclarations du Président de la République que vous adulez. Prenez, par exemple, celle du 25 septembre à Toulon que j'ai déjà citée hier : « Dire la vérité aux Français, c'est leur dire que la crise n'est pas finie, que ses conséquences seront durables (…) Dire la vérité aux Français, c'est leur dire que la crise actuelle aura des conséquences, dans les mois qui viennent, sur la croissance, sur le chômage, sur le pouvoir d'achat (…) Parce que cette crise financière, sans équivalent depuis les années trente, marque la fin d'un monde. » C'est vrai qu'elle marque la fin d'un monde : le vôtre !
Rien de tel dans le rapport que vous nous présentez, pourtant daté du 26 septembre, c'est-à-dire du lendemain du discours présidentiel. D'habitude, vous recueillez les saintes paroles pour les véhiculer immédiatement. Vous nous présentez un rapport aussi souriant que Mme Lagarde et aussi placide que M. Woerth ! On peut y lire au point 23 : « En 2009, la croissance se raffermirait progressivement en France, portant le taux de croissance annuel dans la fourchette de 1 % à 1,5 %. » Au point 24, vous indiquez : « Ce scénario de croissance pour 2008 et 2009 est un scénario prudent au regard des incertitudes qui l'entourent. » Voilà des morceaux d'anthologie qui méritent d'être étudiés dans les cours de finances publiques !
Malheureusement, tout n'est pas aussi irréel dans ce rapport. Les mauvais coups contre les collectivités territoriales, les systèmes de protection sociale, les hôpitaux ou l'éducation nationale, et la baisse des crédits des missions « Ville et logement » et « Travail et emploi » sont bien réels. C'est pourquoi nous vous proposons de refuser d'approuver ce rapport.
Avec placidité, nous le rejetons également.
(L'amendement n° 24 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 31 .
La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
Pour vous faciliter la tâche, monsieur le président, je vais défendre nos trois autres amendements, les nos 31, 30 et 32.
La maîtrise des dépenses des collectivités locales est un axe majeur de cette loi de programmation. Depuis plusieurs mois, les collectivités sont présentées comme largement responsables de la détérioration des finances publiques, et cela d'autant plus facilement et volontiers qu'elles sont majoritairement gérées par des élus de gauche.
Le point 45 du rapport énonce : « Les dépenses des collectivités locales devraient aussi être moins dynamiques à l'avenir, compte tenu notamment des effets d'un cycle d'investissement moins marqué que le précédent, d'une inflexion significative de la masse salariale et des dépenses sociales. » Le point 500 indique : « Les dépenses sociales devraient connaître une relative modération : l'évolution récente du RMI (diminution du nombre de bénéficiaires) et la mise en oeuvre du revenu de solidarité active à compter de juin 2009 créeront un contexte favorable à une plus grande maîtrise des dépenses sociales. »
De telles prévisions, au moment de l'arrivée de la récession économique avec ses conséquences en matière d'emploi et de pouvoir d'achat, sont absolument irréalistes ; tout le monde l'a bien compris. Chacun sait que les collectivités vont être fortement sollicitées par une population aux prises avec des difficultés croissantes. Les dépenses sociales, notamment celles qui ont été transférées, vont connaître une croissance rapide dans les mois à venir alors que, dans le cadre de la décentralisation, l'État se déleste de nombreuses charges.
N'oublions pas que les collectivités subissent déjà des transferts de charge divers, notamment en ce qui concerne l'établissement des passeports et des cartes nationales d'identité, ou lors des opérations de recensement de la population. Le Conseil d'État a eu l'occasion de sanctionner certaines de ces pratiques illégales. Il faut aussi tenir compte du coût, pour les collectivités, des normes imposées par l'État, sans compensation.
Nous proposons de tenir compte de ces réalités dans le rapport. Ce dernier évalue à 3,25 % l'évolution moyenne annuelle des dépenses des administrations publiques locales, hors impact de la décentralisation. Il s'agit d'un chiffre très contestable, calculé à partir d'une estimation tout à fait partielle du coût des dépenses décentralisées.
Dans ce contexte, alors que les collectivités peinent à trouver des financements à des taux acceptables et stables, vous décidez la suppression de la dotation de solidarité urbaine pour 238 communes – vous semblez vouloir revenir sur cette mesure, sous la pression des élus et des événements. L'introduction de plus de 660 millions d'euros au titre du Fonds de compensation de la TVA, qui ne figurait pas en 2008 dans l'enveloppe normée sujette au contrat de stabilité, est un subterfuge grossier. Nous proposons donc de supprimer une phrase du point 355 du rapport qui en fait une présentation pour le moins tendancieuse.
Tout aussi tendancieuse est la présentation, au point 504, du régime sec auquel vont être soumis les agents territoriaux, puisque la rédaction donne à penser que les collectivités cautionneraient ce mauvais coup contre le pouvoir d'achat des personnels territoriaux.
Enfin, il faut souligner que le rapport, au point 491, annonce crûment la couleur quant aux conséquences ultimes de cette loi de programmation : « Un recours accru à l'outil fiscal (augmentation des taux notamment) pourrait toutefois constituer une voie privilégiée par certaines collectivités ». Nous parlons ici de l'évolution des prélèvements obligatoires des administrations publiques locales. Ainsi, le contribuable local – les ménages – devra payer plus, étant précisé que la réforme de la taxe professionnelle mettrait les entreprises à l'abri de ce genre de désagrément.
Nous vous proposons donc d'adopter ces trois amendements.
(L'amendement n° 31 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Dans le débat sur l'évolution de la dépense publique locale, il faut bien entendu tenir compte des transferts de compétences.
Dans le paragraphe 488 du rapport annexé, il est indiqué : « Les dépenses des collectivités locales ont à champ constant (hors acte II de la décentralisation) progressé de 3,1 % par an en volume sur la période 2000-2007, soit sensiblement plus vite que le PIB. »
C'est vrai. Encore faudrait-il préciser deux choses. La première, c'est que certains transferts antérieurs à l'acte II de la décentralisation, et en particulier l'APA, n'ont pas été effectués à coût nul. Le taux moyen national de couverture de l'APA se situe aux alentours de 35 % à 38 %, selon les départements ; tout le différentiel a été financé sur la fiscalité locale. Quant au RMI, sa partie insertion – 18 % ou 20 % – est couverte par l'argent des contribuables. Par mon amendement, je voulais simplement rappeler que le 3,1 % intègre des transferts non compensés à 100 %, tant s'en faut ! Nos collègues de gauche qui ont déposé un amendement identique reconnaissent qu'ils étaient aussi à l'origine de cela. Que chacun porte sa part de responsabilité !
Deuxième facteur à prendre en compte : le coût des normes imposées par l'État aux collectivités locales.
Au sein du CFL, nous venons d'ailleurs de créer une commission pour essayer de surveiller et d'encadrer cela, et de freiner le mouvement qui contribue à augmenter les coûts continuellement. Il ne faut pas s'étonner d'aboutir à une forte hausse. Certes, cela n'explique pas la totalité des 3,1 %, bien entendu. Cependant, cela représente des sommes considérables : d'après le calcul effectué sur mon département, cela correspond à 25 points de fiscalité – hors nous n'avons pas augmenté la fiscalité. Savez-vous comment les départements ont tenu ? Grâce à l'augmentation des DMTO. Mais c'est fini ! D'ailleurs, le Gouvernement programme une chute de 10 % de ces droits l'année prochaine – proposition prudente qui risque d'être dépassée, même s'il existe une certaine inertie.
Si je reconnais que certaines collectivités ont exagéré, il faut aussi que l'État et les gouvernements successifs, de gauche comme de droite, balayent devant leur porte.
Tel est l'objet de l'amendement n° 28 .
La commission a repoussé les amendements nos 28 et 32 .
La loi de programmation ne remet nullement en cause les principes de compensation des charges transférées. Ces principes font l'objet d'une surveillance accrue de la part de la commission consultative d'évaluation des charges créée il y a quatre ans et qui est présidée par un élu. Cette commission a procédé à des rectifications par rapport aux propositions du Gouvernement, rectifications qui, depuis 2004, ont porté sur des centaines de millions d'euros.
L'APA avait été créée avant 2004 !
Nous disposons là, je crois, d'un bon dispositif de surveillance.
Comme vous l'avez rappelé, monsieur de Courson, un dispositif de surveillance des normes vient d'être mis en place, afin de limiter le coût des normes extérieures qui pèsent sur la dépense locale.
Monsieur Sandrier, l'article 6 de la loi de programmation des finances publiques donne une visibilité aux collectivités locales jusqu'en 2012 en indiquant que l'État s'engage à faire évoluer ses concours aux collectivités locales au même rythme que l'inflation, c'est-à-dire qu'il s'engage à ce qu'il n'y ait pas en quelque sorte de désengagement. Autrement dit, l'État adopte le principe que les concours aux collectivités locales seront maintenus en euro constant, c'est-à-dire qu'ils augmenteront chaque année de l'inflation. Quant aux crédits des ministères, leur évolution risque d'être nulle, en tout cas elle ne sera même pas égale à l'inflation.
Si je comprends bien, l'augmentation de 3,1 % des dépenses des collectivités locales n'intègre pas les transferts de charges, c'est-à-dire le RMI et l'APA, et si l'on indiquait le montant des charges de décentralisation, l'on aboutirait à un pourcentage plus élevé.
S'agissant des normes, le Nouveau Centre a beaucoup défendu cette idée et je pense qu'il a obtenu satisfaction puisque la commission d'évaluation des normes a été installée par le Comité des finances locales il y a un mois environ.
L'alinéa 488 du rapport ne dit qu'une partie de la vérité quant au dérapage des charges des collectivités territoriales. Si les dépenses des collectivités locales ont progressé de 3,1 % par an, hors « acte II » de la décentralisation, il ne faut pas oublier par exemple, que, lorsque l'APA a été créée, son financement était prévu à hauteur de 50 % par les collectivités et 50 % par l'État, contre deux tiers un tiers aujourd'hui environ. Il y a donc là une dérive. Sur ce pourcentage de 3,1 %, 1 % au moins correspond au dérapage de l'APA. Mais comme l'APA a été votée à l'unanimité, on peut s'en prendre à tout le monde.
Aussi notre amendement vise-t-il à demander à l'État d'arrêter de créer de nouvelles prestations, car on peut toujours faire des promesses à crédit, mais nous n'avons plus les moyens.
Il en va de même pour le RMI puisque la compensation porte sur la prestation RMI mais pas sur l'insertion. Dans mon département, le nombre de Rmistes a baissé de 10 %. Mais si la situation se dégrade, les dépenses des collectivités augmenteront.
Monsieur le ministre, si je ne suis pas toujours d'accord avec M. de Courson, je dois reconnaître qu'il a les pieds dans la glaise, voire dans la vigne (Sourires), alors que vous êtes dans la stratosphère. Revenez donc sur terre !
Comme l'a dit le rapporteur général, lorsqu'on a contrôlé les transferts de charges on s'est aperçu que le Gouvernement avait soustrait, subrepticement, plusieurs centaines de millions d'euros.
Si les amendements sont superfétatoires, comme vous le prétendez, attestez votre sincérité et acceptez-les. Faites preuve de bonne foi. Si vous les refusez, c'est bien que vous voulez poursuivre les turpitudes dénoncées par le rapporteur général en ne compensant pas, car c'est bien de cela qu'il s'agit.
Vous tenez un discours idéologique, c'est-à-dire que vous refilez les dépenses aux collectivités qui, elles, ne peuvent se retourner que vers les contribuables. Puis, vous les stigmatisez en disant qu'elles ne savent pas maîtriser les dépenses, alors qu'il s'agit en réalité de financer les transferts que vous n'avez pas exactement compensés, quoi que vous en disiez.
Monsieur de Courson, je ne vous propose pas de remonter à la Préhistoire. Nous sommes sous le Gouvernement de François Fillon...
Il me semble que le débat est un peu confus.
En fait, nous parlons du passé et non du futur. Par conséquent, nous devrions nous entendre.
J'ai sous les yeux un tableau sur la dépense publique et son évolution. Les dépenses des administrations publiques locales sont calculées avec transferts de compétences et hors transferts de compétences. Le chiffre retenu par le Gouvernement dans le rapport annexé est celui hors transferts de compétences. Les dépenses des collectivités locales ont augmenté de 3,1 % sur la période 2000-2007. Si on intégrait les transferts de compétences, on ne comprendrait plus rien, on mélangerait tout. Par exemple, le RMI n'y figure pas.
Je comprends bien l'appel du Nouveau Centre, mais il est satisfait dans la mesure où, au sein du Comité des finances locales présidé par M. Carrez, a été créée la commission d'évaluation des normes, elle-même présidée par M. Lambert. Il y a donc bien là une réponse opérationnelle du Gouvernement. Cette commission, composée d'élus de tous bords politiques, sera chargée de contrôler que des normes, que les gestionnaires des collectivités locales ne veulent pas se voir imposer, ne vont pas se déverser sur les collectivités locales, comme c'est le cas jusqu'à présent.
La rédaction de l'alinéa 488 me paraît donc juste et elle prend en compte une demande opérationnelle des collectivités, à savoir la création de cette commission.
(Les amendements identiques nos 28 et 32 ne sont pas adoptés.)
(L'article 3 est adopté.)
Nous passons à des amendements portant articles additionnels avant l'article 4.
Je suis saisi d'un amendement n° 11 deuxième rectification.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.
L'existence de ce projet de loi de programmation m'apparaît très positive, au-delà du contenu. Il permet une meilleure visibilité de la stratégie du Gouvernement s'agissant des finances publiques et contribue à la transparence. Je me réjouis que l'une des propositions que nous avions formulées avec Alain Lambert dans un rapport trouve là sa consécration après que notre nouvelle Constitution l'a prévu.
Pour avoir une vue cohérente et exhaustive de la stratégie des finances publiques, chacun conviendra qu'il faut pouvoir prendre en compte quatre indicateurs : l'évolution du solde de la dette publique et des administrations publiques que nous retrouvons à l'article 2, ainsi que l'évolution des dépenses publiques et des prélèvements obligatoires. Il me semble dommage que les deux derniers indicateurs ne se retrouvent que dans le rapport annexé. Voilà pourquoi je propose de remonter ces deux indicateurs, en l'espèce, celui de l'évolution des dépenses publiques, afin d'avoir une vue complète de la stratégie des finances publiques.
Je sais que le rapporteur général me répondra qu'il ne convient pas d'inscrire ces deux indicateurs dans le projet car ils incluent des prévisions de dépenses et de recettes des collectivités territoriales dont l'État n'a pas la maîtrise en vertu du principe constitutionnel d'autonomie financière des collectivités locales. Mais l'inscription d'objectifs qui visent l'ensemble des dépenses publiques, et donc pour partie celles des collectivités territoriales n'est en rien contradictoire avec ce principe d'autonomie des collectivités territoriales. D'ailleurs, je ferai remarquer que le solde des administrations publiques qui est inscrit à l'article 2 est bien la différence entre les recettes et dépenses de l'ensemble des administrations publiques qui incluent les recettes et dépenses des collectivités territoriales. Il me semblerait donc plus clair de faire « remonter » cet indicateur.
J'observe d'ailleurs que ces chiffres ont toujours été inscrits dans les programmes de stabilité communiqués à la Commission européenne et je continue de penser que le suivi de la stratégie des finances publiques gagnerait à ce que les objectifs d'évolution de ces deux indicateurs soient inscrits dans le projet lui-même. Tel est le sens de cet amendement.
Un long débat a eu lieu en commission sur ce sujet que le président Migaud a fort bien présenté.
S'agissant des dépenses, nous avons un scrupule. Il y a deux sortes de dépenses publiques, celles qui sont sous la responsabilité de l'État – les dépenses du budget de l'État et d'une certaine manière l'ONDAM – et celles des collectivités locales. C'est tellement vrai que l'article 72 de la Constitution prévoit la libre administration des collectivités locales, donc la possibilité, si elles le souhaitent, d'augmenter fortement ou moyennement leurs dépenses, voire de les diminuer.
Dans certains pays qui ont connu des problèmes de finances publiques, le pouvoir central a décidé de plafonner autoritairement les dépenses des collectivités locales. Ce fut le cas au Royaume-Uni, en Suède, au Canada. Mais dans le cadre de la Constitution française, dont l'article 72 garantit la libre administration des collectivités locales, nous nous sommes demandé s'il était raisonnable d'inscrire un objectif annuel d'évolution des dépenses publiques non plus dans le rapport, qui est indicatif, mais dans la loi elle-même, même si c'est une loi de programmation, qui n'est donc pas prescriptive.
Cela, étant, je reconnais bien volontiers comme le président Migaud que la maîtrise des dépenses publiques est l'élément central du retour à l'équilibre des comptes d'ici 2012. Il est donc très tentant d'inscrire un objectif d'évolution dans la loi elle-même.
Au terme du débat en commission, l'amendement a été repoussé. Mais j'en reconnais volontiers l'intérêt.
Le Gouvernement s'est aussi posé des questions à propos de cet amendement.
C'est assez naturel, puisque c'est la première fois que l'on présente un tel projet de loi de programmation. Et la discussion fait avancer, grâce au Nouveau Centre par exemple…
J'entends bien le raisonnement, toujours très strict, de M. Carrez. C'est même pour cela que nous vous présentons le projet de loi et un rapport joint. Dans la loi, on détaille les prévisions de dépenses de l'État, on fixe l'ONDAM pour l'assurance maladie, et pour les autres administrations publiques, en particulier les collectivités locales, qui ne relèvent pas de la responsabilité de l'État, on intègre un solde, pour obtenir l'indicateur auquel s'appliquent les critères de Maastricht. En revanche, on renvoie au rapport le détail de l'évolution de ces dépenses. Mais je reconnais que l'évolution des dépenses publiques est un indicateur que moi-même j'emploie souvent, car il illustre très bien l'effort que nous devons accomplir. Je serais donc tenté de suivre la proposition de Didier Migaud d'inscrire cet objectif dans la loi…
… mais de ne pas inscrire un objectif annuel, ce qui compliquerait le pilotage : mieux vaut inscrire un objectif moyen sur les trois ans. C'est ce que le Gouvernement propose.
Nous souhaitons tous que le dispositif d'encadrement soit inscrit autant que faire se peut dans la loi. Il en va de cet objectif global de dépenses publiques comme de l'objectif de dépenses fiscales. Fixer cet objectif dans l'annexe en affaiblissait la valeur. Effectivement, inscrire un objectif annuel obligerait à des ajustements. La proposition du Gouvernement d'inscrire un objectif moyen est la bonne solution.
Je suis assez proche de la pensée « woerthienne », avec une réserve. On devrait, à mon sens, constituer un bloc réunissant les dépenses de l'Etat, celles des ODAC – les organismes divers d'administration centrale – et celles des administrations de sécurité sociale obligatoires, c'est-à-dire les régimes de base. En revanche, il faudrait en exclure l'assurance chômage et les assurances vieillesse complémentaires qui ne sont pas de la responsabilité de l'État. C'est certes une petite partie seulement des dépenses, mais le PLFSS ne concerne que les régimes de base.
Inscrire l'objectif d'évolution de la dépense publique dans la loi est intéressant, car cet indicateur est effectivement au coeur de nos préoccupations, mais ce doit être à deux conditions. D'abord, monsieur de Courson, il faut couvrir tout le champ de la dépense publique. Si l'on commence à le morceler, pour exclure ce qui n'est pas de la responsabilité directe de l'État, on va multiplier les catégories. Vous évoquiez l'assurance chômage, j'évoquais pour ma part les dépenses des collectivités locales. L'intérêt, pour fixer le cap, est d'avoir en vue la totalité des 950 milliards de dépenses publiques. En second lieu, plutôt que de fixer une progression annuelle, mieux vaut s'en tenir à une moyenne, en l'occurrence à limiter l'augmentation à 1,1 % d'ici à 2012. Sous ces réserves, il est intéressant d'inscrire l'objectif d'évolution des dépenses dans la loi elle-même.
Je partage le raisonnement du rapporteur général, et je pense aussi, comme le Gouvernement, que mieux vaut inscrire une moyenne. Sinon, en cas de non-respect de l'objectif, il faudrait corriger la loi de programmation. Je suis donc favorable à l'amendement que suggère le Gouvernement.
Je suis saisi d'un amendement n° 15 rectifié .
La parole est à M. le président de la commission.
L'amendement n° 15 rectifié est de conséquence.
(L'amendement n° 15 rectifié , accepté par la commission et par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 1 .
La parole est à M. le rapporteur général.
Je suis saisi d'un amendement n° 25 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
La définition stricte des normes d'évolution des dépenses de l'État comme des collectivités territoriales et des organismes de sécurité sociale, dans un contexte économique et financier particulièrement mouvant et difficile apparaît artificielle, inopportune, voire impertinente. En effet, au moment où le Gouvernement nous demande d'adopter un cadre rigide et volontariste pour les finances publiques, il annonce que les prévisions affichées au début de la présente loi de finances devront être révisées, sans doute profondément, au terme de cette discussion. Comment prétendre se fixer des contraintes à l'échéance de quatre ans, quand on admet manquer de prévisibilité pour l'année à venir et devoir revoir les prévisions au bout d'un mois ? Je croyais que nous étions au pays de Descartes…
On veut donc enfermer les choix politiques dans un corset comptable au moment où la crise démontre que vos choix d'hier sont les erreurs d'aujourd'hui, et alors même que les indicateurs économiques sont loin d'être totalement fiables. Qui peut imaginer qu'en posant des règles dans une loi, fût-elle de programmation, nous allons contraindre la réalité à s'y plier ?
L'intervention publique est apparue comme une nécessité impérieuse, vitale, ces dernières semaines, et, selon toute probabilité, devra connaître demain de nouveaux développements que l'on ne peut évidemment pas s'interdire. C'est pourquoi nous vous proposons par l'amendement n° 25 de préciser que la fixation d'une norme de dépenses publiques ne porte pas atteinte au pouvoir du législateur, que la récente réforme constitutionnelle devait d'ailleurs renforcer, selon le discours gouvernemental.
Défavorable également. Cet amendement est sans objet car le législateur a toute liberté de revenir quand il le veut sur un texte qu'il a voté, y compris une loi de programmation.
(L'amendement n° 25 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 18 .
La parole est à M. Jérôme Cahuzac.
Nous avons bien compris que, pour le reste de la législature, l'évolution de la dépense publique sera limitée à l'inflation, pas plus. Il ne serait donc pas acceptable qu'une mauvaise hypothèse d'inflation conduise à une progression encore plus restrictive des crédits des politiques publiques que celle qui est liée à l'application de la norme « zéro volume ». M. Balligand en défendant la motion de renvoi en commission, et d'autres, ont déjà souligné que cette norme, quand elle s'applique aux dépenses des collectivités locales, est d'une extrême rigueur, d'autant que l'inflation des dépenses auxquelles elles doivent faire face est bien supérieure à l'indice officiel qui traduit l'inflation pour les ménages. Par l'amendement n° 18 , nous voulons prévenir une situation encore plus périlleuse pour les collectivités. Elle l'est suffisamment, point n'est besoin d'en rajouter.
La commission a repoussé cet amendement dans la mesure où il est satisfait. Le rapport lui-même prévoit en effet explicitement que si le taux réel d'inflation est supérieur à la prévision, les plafonds des missions peuvent être révisés à la hausse.
Il vaut mieux garder la liberté que permet l'article puisque les missions ne sont pas affectées de la même manière par l'inflation : quand des missions comprennent des prestations sociales indexées sur l'inflation, elles doivent automatiquement être revues à la hausse, tandis que pour d'autres, au contraire, l'inflation n'a pas vraiment d'impact. Voilà pour la programmation triennale des missions.
En outre, l'article 4 prévoit pour règle générale l'indexation sur l'inflation réelle avec un mécanisme d'ajustement. Je vous renvoie au rapport, qui est explicite sur ce point.
Si vos critiques, monsieur Cahuzac, sont tout à fait justifiées, je considère que le texte du Gouvernement répond à la question importante que vous posez.
L'alinéa n° 394 du rapport sur la programmation pluriannuelle des finances publiques pour les années 2009 à 2012 vous satisfait, monsieur Cahuzac, puisqu'il prend en compte un éventuel différentiel d'inflation ainsi que l'augmentation des dépenses, soit en l'indexant sur le taux d'inflation, soit en puisant dans les réserves inscrites au PLF.
Cette année, d'ailleurs, nous avions prévu un taux d'inflation de 1,6 % alors qu'il atteint 3,9 %...
Vous avez raison, je voulais dire 2,9 %. Je pensais au taux de croissance sans doute. (Sourires.) Celui de bonnes époques…
Le taux d'inflation étant donc de 2,9 % alors que les prévisions le situaient à 1,6 %, on ne révise pas pour autant les dépenses prévues dans le PLF, ce qui implique un effort supplémentaire de contraction, en tout cas de maîtrise de la dépense. En revanche, on révise des dépenses inéluctables comme la charge des intérêts de la dette, qui elle-même prend de plein fouet les dépenses d'inflation.
Une réponse opérationnelle est donc bien apportée par le projet de loi de programmation par le paragraphe n° 394.
Avec l'accord de mes collègues et convaincu par les explications du rapporteur et du ministre, je retire cet amendement.
(L'amendement n° 18 est retiré.)
(L'article 4, amendé, est adopté.)
Sur l'article 5, je suis saisi d'un amendement de suppression, n° 19.
La parole est à M. Jérôme Cahuzac.
La variation sur trois ans des crédits des politiques publiques proposée par cet article signe la remise en cause de politiques prioritaires comme le logement social, la politique d'emploi ou le développement durable. Cet article paraît dès lors imposer un cadre infiniment trop strict, nonobstant la capacité pour le législateur, rappelée par le ministre, de se saisir de toute occasion pour exprimer sa liberté en proposant des amendements ou en déposant des propositions de loi. Aussi proposons-nous de supprimer cet article.
Mais comme je l'ai fait valoir en présentant un précédent amendement de suppression, le débat que nous souhaitons avoir avec vous prévaut sur toute autre considération.
En examinant cet amendement de suppression, la commission a commencé par observer qu'elle ne souhaitait pas la suppression de M. Migaud. (Sourires.) En effet, la proposition de programmation triennale émane de nos collègues Didier Migaud et Alain Lambert, dans un rapport d'il y a deux ans qui demandait l'inscription des lois de finances annuelles dans le cadre d'une programmation pluriannuelle des crédits des missions, en l'occurrence sur trois ans.
Ainsi vous bloquez la progression des crédits pour le logement pendant trois ans !
Je suppose donc, monsieur Cahuzac, que vous contestez seulement les chiffres, ce que je comprends volontiers,…
…mais que vous approuvez le principe de la programmation pluriannuelle.
Reste que comme il s'agit de nos chiffres, en lesquels nous croyons profondément, la commission a rejeté l'amendement.
L'avis du Gouvernement est évidemment défavorable à cet amendement. Nos chiffres sont très bons puisqu'ils résultent pour chaque mission d'un travail en profondeur.
Nous avons discuté de chaque mission avec chaque ministre concerné. Nous avons également tenu compte de la révision générale des politiques publiques. Rien n'a été fait au hasard. Ces chiffres ne présentent aucun caractère déflationniste mais sont marqués au contraire par la maîtrise de la dépense publique, ce qui constitue plutôt une bonne nouvelle.
Quant au financement du logement, il faut évidemment distinguer ce qui relève de la partie budgétaire, que retracent les présents chiffres, et ce qui relève de la partie extrabudgétaire, loin d'être négligeable.
Nous avons conduit de profondes réformes en ce qui concerne le logement, et les crédits demeurent toujours aussi importants, voire progressent. Nous construisons plus de logements qu'à l'excellente époque où vous étiez aux manettes !
En toute sincérité, ces chiffres sont justes, nous utilisons l'ensemble des marges de manoeuvre à notre disposition dans la sphère publique au sens très large du terme, et c'est particulièrement vrai pour le logement.
Sur l'article 6, je suis saisi d'un amendement de suppression, n° 21 rectifié.
La parole est à M. Jérôme Cahuzac.
Si nous avons déposé cet amendement, c'est là encore pour solliciter des explications. Nous proposons de supprimer l'article 6 car la norme de variation des concours de l'État aux collectivités locales est trop restrictive et conduira à l'étouffement budgétaire de collectivités qui mettent en oeuvre – les chiffres varient – de 70 à 80 % de l'investissement public : Jean-Pierre Balligand a sur ce point emporté la conviction sur de nombreux bancs.
J'insiste sur l'extrême sensibilité des dispositions que nous nous apprêtons à examiner et probablement à voter, après que, nous l'espérons, nos amendements auront été pris en considération. Dans le contexte actuel, si les commandes des collectivités publiques diminuent ou cessent, notamment dans le secteur de la construction, du bâtiment et des travaux publics, les économies locales vont considérablement souffrir, tout comme, peu de temps après, l'économie nationale.
À la faveur de l'examen de cet article, l'Assemblée devrait réitérer son souhait de voir les collectivités locales soumises à un régime beaucoup moins sévère que celui proposé ici par le Gouvernement.
La commission a repoussé cet amendement, arguant que l'État garantira le pouvoir d'achat des collectivités locales jusqu'en 2012. Quelles que soient les vicissitudes du budget, jusqu'en 2012 inclus, les concours de l'État aux collectivités locales augmenteront au même rythme que l'inflation.
Cet engagement sécurise les collectivités locales. En effet, pour ce qui est du reste du budget de l'État, une fois défalquée l'augmentation du coût des pensions, du coût de la dette et du prélèvement de l'Union européenne, il ne reste aucune marge de progression pour l'ensemble des dépenses des ministères. En garantissant de la sorte les collectivités locales contre l'inflation, l'État ne se montre peut-être pas plus généreux avec elles que pour l'ensemble des missions de son propre budget, mais il leur permet tout de même de bénéficier d'une évolution plus favorable.
Monsieur Cahuzac, il n'y a pas, d'un côté, l'État qui dépenserait mal et, de l'autre, des collectivités dont les dépenses seraient bonnes. Le débat tend à la caricature tant on nous presse de protéger et protéger encore les collectivités locales tout en enjoignant à l'État de faire de son mieux pour gérer son budget. Il n'y a pas d'un côté des collectivités qui investissent et de l'autre un État qui n'investirait pas. La réalité n'est pas ainsi en noir et blanc.
Du reste, qu'écrire d'autre que ce qui figure dans le présent texte ? Nous devons bien écrire que nous essayons de maîtriser la dépense publique.
Pourquoi donc l'État ne donnerait-il pas son opinion sur les dépenses des collectivités qui sont des dépenses publiques ? Il a donc son mot à dire sur leur évolution, sans que cela nuise à leur autonomie. Les collectivités locales ont bien, en termes de synthèse, un niveau de dépenses publiques et de besoin de financement.
Maîtriser ce niveau d'une manière globale, macroéconomique, consiste à fixer un objectif. Avancer que cet objectif pourrait être supérieur à l'inflation reviendrait à déroger à une règle que nous nous efforçons d'imposer sur le long terme pour bien maîtriser la dépense publique. La thèse inverse, selon laquelle cet objectif pourrait être inférieur à l'inflation serait difficile à vendre aux collectivités locales.
L'inflation me semble être le bon niveau puisque c'est celui que se fixe l'État pour lui-même et qu'il s'agit aussi d'une garantie, le rapporteur l'a dit, pour les dépenses de collectivités locales qui entretiennent avec l'État un rapport ambigu depuis des années. Je pense donc que le présent projet est très bien rédigé.
Je comprends M. le ministre et M. le rapporteur général, mais tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes si l'État ne demandait pas sans cesse aux collectivités de financer jusques et y compris ses fonctions régaliennes.
Ensuite, nous sommes bien d'accord pour établir une norme de variation des concours de l'État aux collectivités. Seulement, elle ne peut pas sans cesse changer. Ce n'était pas la même auparavant puisqu'elle prenait en compte l'inflation plus le taux de croissance.
En effet : la moitié du taux de croissance.
Ce n'était donc pas la même norme. L'État peut certes la modifier. S'il donne une visibilité aux collectivités pendant cinq ans, ce que j'ai réclamé précédemment, c'est déjà une bonne chose. Toutefois, entre nous, il faut bien aussi que nous sortions de la gangue dans laquelle les différentes majorités ont mis les collectivités. À force de créer des dégrèvements, des compensations, on leur a retiré toute autonomie.
Et la part réelle de contribution des ménages et des entreprises ne représente plus que 26 % de la totalité de nos recettes. La situation est devenue impossible.
Je comprends la situation de l'État, mais si nous poursuivons ainsi, les collectivités locales vont finir par être étranglées : voilà bien le paradoxe. On peut accepter votre raisonnement à condition de ne pas les faire tomber dans l'obligation de financer les missions de l'État – avec un chantage à la clef, j'insiste sur le mot chantage.
Ainsi du transfert des compétences en ce qui concerne l'établissement des pièces d'identité. C'est monstrueux, quand on considère le montant compensé par l'État dans cette opération ! J'ai été entendu par le bureau de la Fédération des maires des villes moyennes en tant que président de l'Institut de la décentralisation. Faut-il considérer M. Bourg-Broc, Mme Cayeux, membres de l'UMP, comme des irresponsables, lorsqu'ils affirment que votre dispositif est inacceptable ? L'Association des maires de France a dit la même chose.
Nous en sommes arrivés au stade où il faut clarifier tout cela, et c'est pourquoi nous déposons des amendements. Vous avez une vision thatchérienne des choses, vous êtes devenus des thatchériens ! Le Président de la République ainsi que M. Copé ne cessent de dire des collectivités qu'elles ne savent pas gérer leurs budgets, qu'elles sont dépensières et qu'il faut donc fermer tous les robinets, leur retirer leurs marges de manoeuvre. C'est inacceptable ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Je comprends, comme Jean-Pierre Balligand, qu'on puisse appliquer une norme ; ce n'est pas scandaleux. En revanche, à partir du moment où le Fonds de compensation de la TVA est inclus dans l'enveloppe normée, que vous le vouliez ou non, les collectivités locales seront conduites à réduire drastiquement leurs investissements. C'est, au demeurant, ce qu'elles sont déjà toutes en train de faire.
Sincèrement, je ne crois pas – et je ne pense pas être le seul – que la période soit propice au ralentissement de leurs investissements.
Cette inclusion est inopportune. Nous en verrons bien les effets qui, de toute façon, ne tarderont pas à se produire. Reste qu'à l'occasion de l'examen de cet amendement et de ceux que nous avons déposés en commission, nous ne cesserons de répéter que l'inclusion du FCTVA dans l'enveloppe normée contraindra les collectivités à se mettre debout sur les freins pour arrêter tous les investissements.
Il ne s'agit pas de porter de jugement qualitatif sur l'opportunité ou l'inopportunité des investissements qui sont faits par ces collectivités. Tous les collègues qui, élus locaux par ailleurs, siègent dans cet hémicycle sont bien entendu persuadés que les leurs sont opportuns, si les autres peuvent être contestables. La vérité est que, dans l'écrasante majorité des cas, ces investissements sont judicieux et de qualité, même si, naturellement, certains peuvent être jugés excessifs. Mais on ne fait pas une politique uniquement pour empêcher le petit pourcentage d'investissements excessifs ou inopportuns qui ont pu être réalisés ici ou là, ou que certains se proposent de réaliser. Car, en réalité, c'est tous les autres que l'on frappe. Et cela, ni les investissements ni les élus qui en ont pris l'initiative ne le méritent.
(L'amendement n° 21 rectifié n'est pas adopté.)
Les collectivités paient la TVA sur les investissements qu'elles réalisent. Cette fiscalité ne donnant pas lieu à refacturation, quand les collectivités investissent, l'État bénéficie davantage de cette recette. C'est pourquoi a été créé le Fonds de compensation pour la TVA, par une disposition de la loi de finances rectificative de 1977, qui est toujours en vigueur et qui précise que les ressources du FCTVA sont destinées « à permettre progressivement le remboursement intégral de la TVA acquittée par les collectivités et leurs groupements sur leurs dépenses réelles d'investissement ».
Le FCTVA n'est ni une subvention, puisqu'il a un caractère automatique, ni un remboursement intégral, puisque certaines dépenses ne sont pas éligibles, ni une dotation globale, puisqu'il est lié aux dépenses effectuées. Il doit donc faire l'objet d'un traitement spécifique et ne peut rejoindre l'enveloppe des dotations de l'État, laquelle n'évolue qu'au rythme de l'inflation.
L'amputation de ce fonds aurait pour conséquence de mettre à mal les finances des collectivités locales, déjà lourdement pénalisées par nombre de mesures décidées ou prévues par la majorité.
Monsieur le ministre, vous savez combien, dans la discussion générale, nous avons insisté sur la difficulté que représentait l'intégration du FCTVA dans l'enveloppe des dotations de l'État. On va ainsi pénaliser considérablement les collectivités, et pas seulement les grandes. Quiconque a eu à bâtir le budget d'une petite commune sait que l'on intègre dans la programmation des opérations de l'année à venir les recettes attendues du FCTVA, sachant, je le rappelle, que les communes font une avance à l'État pendant deux ans, et les intercommunalités pendant six mois. En outre, le remboursement n'est pas total, car la TVA est payée à 19,6 % et récupérée à 15,43 %. Nul ne peut le contester : il y a un Δ, et ce Δ pénalise les collectivités.
C'est donc un premier point : est-il bon de pénaliser les collectivités ? Nous ne le pensons pas.
Deuxième point : le FCTVA n'est pas une dotation. C'est l'un des éléments dynamiques des recettes des collectivités locales. On pénaliserait ainsi celles qui entreprennent.
Troisièmement, cette mesure serait une erreur économique. On a besoin qu'un investissement fort soit réalisé par les collectivités. Elles ont prouvé que 73 % des investissements publics étaient de leur fait, alors que les investissements de l'État ont stagné. Et si cette part de leurs recettes venant du FCTVA n'est pas dynamique dans le temps, ce sont leurs investissements dans les prochaines années qui se trouveront amputés.
C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement visant à sortir le FCTVA de l'enveloppe des dotations de l'État.
Et je voudrais rappeler, monsieur Sapin, que le FCTVA augmente de 12,6 % en 2009 par rapport à 2008. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Mais ce n'est pas un cadeau ! Les investissements ont été faits, et la TVA a été perçue par l'État !
Ce débat doit être clarifié, et il est important.
Le maire de Chantilly, il dit ce que dit le ministre du budget. Cela facilite les choses.
J'ai bien entendu ce que vous avez dit tout à l'heure, monsieur Balligand, et qui est très intéressant. Mais ce qui compte, c'est de faire évoluer les choses. Nous ne pouvons pas en rester à cette idée d'enveloppe normée, parce que c'est une idée qui a beaucoup vieilli et qui n'a plus de sens. Cela fait des années que l'on parle de l'enveloppe normée. Renonçons à ce mythe ! De même que son périmètre, la règle gouvernant sa progression a évolué sans arrêt : cela a d'abord été le taux de croissance du PIB, puis la moitié de ce taux plus l'inflation. Tout cela a beaucoup changé dans le temps.
Le Nouveau Centre nous a appelés à plusieurs reprises, et à juste titre, monsieur de Courson, à élargir le champ de la norme de dépense, c'est-à-dire à soumettre de plus en plus de dépenses au contrôle, et à faire en sorte qu'il y ait de moins en moins de points de fuite. C'est ce que nous avons fait en intégrant les prélèvements sur recettes de l'Europe et des collectivités locales.
Le FCTVA entre désormais dans la norme de dépense de l'État, il ne lui est plus extérieur.
L'année dernière, nous avons abandonné – et nous l'avions dit clairement – l'idée d'une indexation sur une partie du taux de croissance. Vous me répondrez qu'actuellement, cela ne changerait pas grand-chose…
Bon, c'était la minute d'humour.
Nous avions également dit que nous allions, plutôt que de reprendre le débat chaque année, proposer une règle durable de protection des collectivités locales, à savoir que, dans la loi de finances pour 2008, sur un périmètre de 55 ou 56 milliards d'euros, nous assurerions l'augmentation au rythme de l'inflation.
Le FCTVA, nous ne voulons pas en changer la nature. On peut avoir un débat, on peut toujours en discuter, bien entendu. Rien n'est tabou, Dieu merci. Mais l'idée n'est évidemment pas, ni cette année ni l'année prochaine, de changer la vocation de ce fonds de compensation, qui est de rembourser la TVA que les collectivités locales acquittent sur leurs investissements. Nous considérons que ce qu'il faut d'abord mettre en valeur – et d'ailleurs, vous ne dites pas le contraire –, ce sont les investissements des collectivités locales. C'est ce que nous faisons en garantissant le remboursement de la TVA. Et en intégrant le FCTVA à l'ensemble de la norme de dépense, d'une certaine façon, nous faisons peser une contrainte sur les dépenses de fonctionnement des collectivités.
Nous sommes donc logiques avec nous-mêmes. D'un côté, nous mettons en avant l'investissement des collectivités locales, et nous disons que le Gouvernement paiera bien évidemment ce qu'il leur doit en termes de remboursement de la TVA sur les investissements. Et en 2009, c'est 660 millions d'euros de plus que cette année. Nous assumons donc parfaitement cette compensation, et nous le ferons encore l'année prochaine.
De l'autre côté, nous sommes tenus par les 2 % de l'inflation, et le FCTVA prend une partie de cette enveloppe. Nous réduisons donc à due concurrence l'aide au fonctionnement des collectivités locales.
Les choses sont donc claires : l'investissement est la première priorité, et le fonctionnement est la deuxième, la progression de l'ensemble ne devant pas dépasser les 2 %.
Nous sommes dans un monde où l'argent public est rare. Mais il n'est pas rare uniquement pour l'État. Il est rare pour tout le monde. C'est le même contribuable qui va payer, ici son impôt sur le revenu, là sa taxe foncière.
C'est le même contribuable et ce sont les mêmes services. D'ailleurs, le contribuable ne fait pas la différence, il voit des services publics fonctionner ou ne pas fonctionner. L'argent vient de la même poche, et cette poche est déjà, à mon avis, très largement sollicitée.
En fixant cette norme, nous n'empêchons pas les collectivités de jouer de leur autonomie, mais à ce moment-là, il faut qu'elles financent cette autonomie. Et nous leur assurons une garantie, qui est l'augmentation de l'enveloppe au rythme de l'inflation, avec en priorité numéro un la compensation de la TVA sur les dépenses d'investissement.
Monsieur le ministre, on ne me prend pas en flagrant délit de contradiction. Je n'ai cessé de dire qu'il fallait au maximum un parallélisme entre l'ensemble des transferts de l'État vers les collectivités territoriales et ce que fait l'État sur ses dépenses propres. Or l'ensemble des transferts, ce n'est pas 57 milliards dans le budget 2009, c'est 97 milliards. La différence, c'est, pour faire simple, les 18 milliards de dégrèvements, et les presque 22 milliards de transferts de fiscalité, qui ne sont d'ailleurs pas des transferts de fiscalité mais une affectation d'une fiscalité nationale, sans quasiment aucun pouvoir de modulation.
Au total, c'est donc bien 97 milliards. Et je rappelle, monsieur le ministre, que cette somme n'augmente pas de 2 %, mais de plus de 3 %.
Ma position, c'est de dire qu'il faut, pour y voir clair, une norme élargie à la totalité de ce que verse l'État aux collectivités : 97 milliards, sur un peu plus de 200 milliards de dépenses publiques locales. On en est presque à la moitié, globalement.
Pourquoi voulons-nous que le FCTVA sorte de l'enveloppe ? Parce qu'il vaut mieux dire la vérité sur la norme rétrécie que l'on nous propose : sur les 57 milliards de dotations, la progression n'est pas de 2 %, mais de 0,8 %. Et moi, je voterai pour les 0,8 %. Mais je préfère sortir le FCTVA pour éviter le débat malheureux né d'une note qui a été distribuée au CFL, une note qui n'avait d'ailleurs pas l'aval de M. Woerth, mes chers collègues. C'était un document de réflexion du ministère de l'intérieur, et non pas du ministère chargé du budget. Il n'y a donc aucun engagement du Gouvernement en la matière.
Il est souhaitable de clarifier les choses. Je pense qu'il ne faut pas toucher au FCTVA, qui est un pourcentage sur les investissements. En le sortant de l'enveloppe, on fait apparaître la réalité de la progression de celle-ci, c'est-à-dire 0,8 %.
Et si demain les investissements publics baissaient, monsieur le ministre, les versements du FCTVA n'entreraient pas dans la progression de l'enveloppe.
Voilà, monsieur le ministre, l'esprit de notre amendement. Il ne s'agit pas du tout de pousser à la hausse de la dépense.
Je remercie Charles de Courson, qui fait au moins l'effort d'être intellectuellement honnête. Nous allons voter son amendement sans aucun problème.
Ce que vous affirmez, monsieur le ministre, je suis désolé de vous le dire, n'est pas honnête. L'honnêteté commande de reconnaître que la progression des sommes versées aux collectivités n'est pas de 2 % mais de 0,8 %. Si le FCTVA entre dans l'enveloppe normée, on sait très bien ce que cela signifie. Cette année, vous n'y touchez pas trop. L'année prochaine, vous dites que vous n'y toucherez probablement pas. Mais nous n'avons aucune visibilité. Et nous savons qu'il y a des discussions à ce sujet entre les administrations des grands ministères. Toutes les associations d'élus sont au courant et essaient de suivre cette affaire, en particulier au CFL. Gilles Carrez ne dira pas le contraire. Même s'il est aussi rapporteur général !
Je compatis, monsieur le rapporteur général. Il faut être Gémeaux pour tenir dans une situation comme celle-ci. (Sourires.)
Je le rappelle à M. le ministre pour lui montrer dans quelle situation ubuesque nous sommes : les amendes de police entrent dans l'enveloppe normée, alors qu'elles ont augmenté de 60 % ! Cela n'a plus de sens.
Il vaudrait mieux dire que l'État ne peut plus financer les collectivités locales, et mettre la norme à 0,8 %, mais sans toucher au FCTVA. Pour quelle raison ? Quand on établit le budget d'une commune, on a besoin d'autofinancement : les 15,4 % de TVA que l'on récupère, c'est la machine vertueuse qui participe directement à l'autofinancement, même si l'on fait aussi, bien entendu, des efforts pour dégager sur le chapitre du fonctionnement des excédents qui viendront le grossir.
Nous sommes des maires. Nous ne sommes pas irresponsables. J'ai présidé un conseil général et je ne suis pas connu pour être dispendieux. Cela fait vingt-cinq ans que je suis maire et je n'ai pas augmenté les impôts depuis vingt-deux ans.
Arrêtez de nous dire que parce que nous sommes socialistes nous ne savons pas gérer. C'est indécent !
Ce n'est pas parce que vous êtes dans la majorité que vous devez systématiquement être de bons soldats et accepter l'inacceptable. L'inacceptable, c'est de ne pas dissocier le FCTVA du reste. Cela ne nous gêne pas de souscrire à la proposition de M. de Courson. Elle en vaut la peine, car elle correspond aux discussions transpolitiques que nous avons, quel que soit leur niveau, dans toutes les instances représentatives des élus.
Chacun doit prendre ses responsabilités, quitte à ce que le ministère dise : nous ne sommes pas à 2 %, mais à 0,8 %. C'est un autre débat. Cela a, au moins, le mérite de la clarté, et je pense qu'il est temps de faire preuve de clarté vis-à-vis des collectivités. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le ministre a indiqué clairement que le Fonds de compensation de la TVA ne diminuait pas.
Il reste dans l'enveloppe normée, ce qui paraît normal puisqu'elle s'applique à l'ensemble des transferts aux collectivités. Mais à aucun moment il ne diminue par rapport aux investissements réalisés deux ans auparavant par les collectivités locales.
De surcroît, l'année prochaine, cette intégration permettra de donner beaucoup plus pour le reste, puisque le Fonds de compensation de la TVA diminuera. En effet, une année d'élection, les communes ont normalement tendance à moins investir que les autres années.
Comment pourrait-on critiquer le Gouvernement d'agir ainsi ? Cela permet de montrer ce qu'il fait réellement pour les collectivités locales.
C'est un élu local en même temps qu'un parlementaire qui prend la parole, et nous sommes nombreux à être dans ce cas. C'est aussi quelqu'un qui est profondément attaché aux libertés locales, profondément décentralisateur, qui vous dit que nous ne pouvons pas sans cesse réclamer davantage de transferts du budget de l'État vers les collectivités locales.
Ce ne serait pas honnête de le faire. Chacun doit prendre sa part dans les difficultés que notre pays traverse. Nous savons que la maîtrise des dépenses publiques est un impératif d'ordre national.
Le taux de dépenses de fonctionnement de ma commune est sensiblement inférieur à la moyenne de la strate de population à laquelle elle appartient. Publiquement, je peux dire que j'ai encore des économies à réaliser et qu'évidemment, ma commune pourrait continuer à rendre les mêmes services et des services de meilleure qualité avec moins de dépenses qu'aujourd'hui. Mais ses dépenses de fonctionnement sont inférieures de moitié à celles de certaines collectivités de même taille, que je ne citerai pas.
Le Gouvernement ne veut pas – M. le ministre et Marc Laffineur l'ont dit très justement – supprimer le FCTVA, qui garde exactement le même mécanisme. Il veut nous inviter à faire des efforts de rigueur de gestion, dans une conjoncture où l'État ne peut pas donner plus, sans cesse et sans limite, aux collectivités locales.
M. Balligand a déploré que les collectivités aient aujourd'hui de moins en moins de recettes fiscales dans la part totale de leurs recettes. Il est vrai que cela présente des inconvénients. Avec les mécanismes de compensation, le premier inconvénient, c'est que l'État a été conduit, en masse globale, à augmenter continûment son concours aux collectivités locales, sans qu'il y ait de véritable maîtrise.
Ce sont les communes dont la fiscalité était la plus élevée – c'est-à-dire celles qui ne sont pas toujours, et de loin, les mieux gérées – qui ont bénéficié de cette manne automatique venant du budget de l'État.
Il est temps que cela cesse. Il est temps que la rigueur s'applique à tout le monde. Il est temps que nous soyons enfin tous responsables, parce que c'est l'intérêt général qui est en cause. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Personne dans cet hémicycle n'a à donner de cours de morale ni de leçons de maîtrise des dépenses publiques.
Je suis persuadé que nous pourrions trouver sur tous les bancs des exemples de très bonne gestion et de mauvaise gestion. Il suffit de consulter les rapports des chambres régionales, et éventuellement de la Cour des comptes, pour s'en apercevoir. Personne, donc, ne doit donner de cours de bonne gestion.
Personne, en tout cas pas moi, ne conteste la nécessité, dans le contexte actuel et pour les années à venir, de faire en sorte que les deniers publics soient bien employés – ceux de l'État ou ceux des collectivités territoriales.
Monsieur le ministre, ce qui nous paraît mauvais dans votre dispositif, ce n'est pas tant que l'État se fixe une règle, une norme quant à l'évolution des concours, en particulier en termes de fonctionnement, aux collectivités territoriales. Nous serions prêts à discuter de cette norme – 0,8 %, 1 %, 1,2 % –, comme vient de le demander l'orateur du groupe Nouveau Centre. Mais nous discutons là d'une norme faussée par la prise en compte du Fonds de compensation de la TVA.
Vous dites protéger les recettes d'investissement, parce que le FCTVA continuera à évoluer comme avant, et contraindre les dépenses de fonctionnement, puisque c'est la soustraction, le reste qui va au fonctionnement. Ce raisonnement n'est pas exact. Il l'est en année n ; mais il ne serait pas exact en année n + 1 et encore moins en année n + 2.
Pourquoi ? Les investissements des collectivités territoriales diminuent déjà aujourd'hui. Donc, le fonds de compensation va diminuer. Comme une contrainte de plus en plus forte pèsera sur ces collectivités territoriales dans les années qui viennent, les investissements des collectivités territoriales diminueront encore. Donc, le Fonds de compensation de la TVA va encore diminuer. Comme vous mettez tout cela dans une même norme, c'est l'inverse de ce que vous annoncez qui se produira.
Moins on aura à investir, moins il y aura de FCTVA, plus il y aura de concours aux collectivités territoriales pour le fonctionnement et plus vous encouragerez les dépenses de fonctionnement. C'est là qu'il y a un vice dans votre raisonnement. Il faut savoir séparer l'évolution des recettes d'investissement et l'évolution des recettes de fonctionnement. C'est ce que proposent les amendements identiques, que nous voterons.
C'est un débat très important, dont je voudrais saluer la qualité. Je ne suis pas sûr que nous aurions pu avoir l'année dernière ou il y a deux ans un débat aussi pertinent – je ne porte aucun jugement de valeur.
Nous réfléchissons. Nous avons des approches différentes, mais le débat évolue de manière très responsable, en prenant en compte la nécessité de bien maîtriser la dépense publique. Il ne faut pas montrer du doigt certaines collectivités locales. Il n'y a pas de méchantes collectivités et un bon État, ni le contraire.
Je crois profondément que cette règle est juste. Je ne dis pas que le Fonds de compensation de la TVA soit une dotation. C'est un remboursement. Mais, d'une façon ou d'une autre, c'est une dépense de l'État comprise comme telle dans l'ensemble des transferts de l'État.
Nous la plaçons donc en numéro un. Nous ferons bien le remboursement de la TVA aux collectivités locales, en fonction des investissements. On sait que cela peut évoluer d'une année à l'autre. C'est plus avant les élections, un peu moins après. En effet, de nouvelles équipes arrivent, et il leur faut du temps pour mettre en place leurs projets. De même, les cycles de vie des collectivités peuvent évoluer. On peut cependant considérer que l'investissement ne va pas souffrir de cycles de trop grande amplitude. En tout cas, c'est l'autonomie, et cela relève de la décision des collectivités.
Nous plaçons donc en numéro un les dépenses d'investissement, dont on rembourse la part de TVA. En numéro 2, nous mettons en solde, pour obtenir le taux d'inflation, les dépenses de fonctionnement, la DGF d'abord puis les autres.
Nous avons bien classé par ordre de priorité les remboursements et les dotations que l'État verse aux collectivités locales. Nous fixons une règle – l'évolution à hauteur de l'inflation – et à partir de là peut s'engager un débat responsable. On discutera ensuite de la TVA, du fonds de compensation, de la DGF. Mais cette règle permet à chacun de bien se repérer. La garantie d'évolution pour les prochaines années est acquise. Et je pense que l'État et les collectivités locales pourront alors avoir une relation décrispée et cesser de se jeter des anathèmes. Nous respecterons cette garantie, puisque nous l'inscrivons dans une loi de programmation pluriannuelle.
Après avoir écouté attentivement tous les intervenants, je trouve qu'il y a beaucoup de points de convergence.
C'est vrai, monsieur Balligand : quand, en 2009, le FCTVA augmente de plus de 12 %, les autres concours ne progressent que de 0,8 %. Il est donc nécessaire, dès lors que nous sommes tous attachés à un FCTVA qui favorise l'investissement, de prendre conscience que, d'un côté, il y a la mécanique du FCTVA, qui doit pouvoir jouer librement et, de l'autre, l'ajustement annuel des dotations.
En effet, comme l'indiquait M. le ministre, l'État est obligé, pour redresser ses propres comptes, de fixer une norme d'évolution de ses dépenses, parmi lesquelles l'ensemble des concours aux collectivités locales représente presque 70 milliards d'euros, soit pratiquement 25 % du total.
Du point de vue de la gestion, vous avez autant de communes de gauche que de communes de droite qui sont soucieuses de la dépense publique. Jean-Pierre Balligand évoquait le cas de sa ville, où les impôts n'ont pas augmenté depuis vingt-deux ans. Nous n'avons pas à nous octroyer, les uns et les autres, de brevets de bonne ou de mauvaise gestion. D'ailleurs, personne ne l'a fait.
Il est vrai, monsieur Sapin, que si, dans deux ans – on sait que les années d'élections, on reprend les programmes et on fait peu d'investissements –, le FCTVA diminue, cela donnera autant de marges pour les autres dotations.
Quelles sont les autres dotations ? Essentiellement la DGF. Le grand souci de la DGF est précisément de disposer de marges pour faire, non des dépenses de fonctionnement supplémentaires, mais de la péréquation. La Constitution a été réformée en 2003 pour y inscrire le mot « péréquation » parce qu'il y a de fortes inégalités entre les collectivités locales. Dès que nous disposerons à nouveau de marges de manoeuvre pour la DGF, nous augmenterons la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale, mais il n'y aura pas d'augmentation généralisée des dépenses de fonctionnement.
Le mécanisme est cohérent. L'État donne une visibilité aux collectivités locales jusqu'en 2012. Il garantit globalement leur pouvoir d'achat. L'augmentation sera identique au taux de l'inflation. Il revient à l'État de gérer au mieux. L'année où il y a un peu de marge sur la DGF, on fait de la péréquation ; l'année où il faut servir en priorité le FCTVA, on le fait au nom de l'investissement. Je crois que cette loi de programmation pluriannuelle propose un système parfaitement équilibré.
Je suis saisi d'un amendement de précision, n° 3, présenté par la commission.
(L'amendement n° 3 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 6, amendé, est adopté.)
Sur l'article 7, je suis saisi d'un amendement de suppression de l'article, n° 20.
La parole est à M. Jérôme Cahuzac.
L'article 7 est relatif à l'évolution de la dépense des organismes de sécurité sociale, notamment des dépenses d'assurance maladie.
Nous proposons des amendements de suppression des articles afin de provoquer un débat ; la discussion à laquelle nous venons d'assister est, du reste, la preuve que ce n'était pas inutile. En tout état de cause, cet amendement est pour moi l'occasion d'interroger le Gouvernement.
Vous paraît-il réaliste, monsieur le ministre, de retenir une norme d'évolution de l'ONDAM de 3,3 % ?
Mes deux autres questions portent sur les tarifs et le déficit hospitalier.
Premièrement, qu'en est-il de l'engagement formel pris par le candidat Nicolas Sarkozy d'augmenter d'un euro le tarif de consultation des médecins généralistes ? Les documents abondent – interviews, articles, propositions officielles, déclarations publiques – pour témoigner de cet engagement solennel et du calendrier fixé pour mettre en oeuvre cette proposition. Le candidat à la présidence avait, à l'époque, déclaré que cette augmentation devait intervenir le plus rapidement possible. Un an et demi après, toujours rien. Estimez-vous, monsieur le ministre, que les délais ont été tenus et que c'était ce qu'il fallait comprendre par « le plus rapidement possible » ? Si c'était le cas, cela nous conduirait à relativiser d'autres déclarations de ce type se référant à une telle conception du temps !
Deuxièmement, le déficit des hôpitaux se situe entre 700 et 800 millions d'euros, tous hôpitaux publics confondus. Ce montant, que vous confirmerez ou non, est-il pris en compte dans le calcul du stock de dettes du pays ? Pour ma part, je ne le pense pas, car je ne vois pas à quel titre il pourrait l'être. L'évolution de l'ONDAM à 3,3 % prévoit-il le financement de ce déficit ? Si tel n'est pas le cas, quelle solution envisagez-vous afin que les hôpitaux publics puissent se délester de cette charge qui finit par coûter très cher ?
J'espère que, vous ne vous contenterez pas dans votre réponse – pardonnez-moi de l'anticiper – de nous renvoyer à une loi qui a été récemment déprogrammée et dont nous ignorons quand elle sera examinée, ou encore au projet de loi de financement de la sécurité sociale dont nous allons débattre prochainement. L'article 7 du projet de loi de programmation des finances publiques, dont nous sommes saisis aujourd'hui, prévoit un ONDAM de 3,3 %. Ce pourcentage me semble tout à fait irréaliste, à moins de ne pas respecter des engagements électoraux !
Or vous avez justifié certaines dispositions au motif qu'il s'agissait d'engagements électoraux et que le Parlement devait s'en saisir pour cette raison. Il ne faudrait pas que la règle du deux poids deux mesures s'applique selon que certaines promesses vous arrangent plus que d'autres.
Qu'en est-il, d'ailleurs, du déficit extrêmement préoccupant des hôpitaux publics, d'autant que le projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit de mettre ces établissements sous tutelle ? L'ARH ou l'un de ses représentants administrerait les hôpitaux selon un système de double commande avec le directeur de l'hôpital, solution qui n'est pas un gage de bonne gestion pour nos établissements publics de santé.
La commission n'a pas adopté cet amendement. Une prévision de 3,3 % est nettement plus réaliste que celles qui ont été retenues par les précédentes lois de finances depuis 2005, où l'objectif de dépenses a largement été dépassé. Il semblerait qu'en exécution 2008 nous atteignions ce chiffre. On note qu'avec un certain ralentissement des dépenses remboursées par l'assurance maladie, la norme de 3,3 % n'est pas très éloignée d'une prévision réaliste, en tout état de cause plus réaliste que les années précédentes.
Monsieur Cahuzac, permettez-moi de vous répondre comme je l'entends.
L'objectif de 3,3 % est réaliste. J'ai essayé d'éviter deux écueils. La première erreur aurait été de fixer un ONDAM trop volontariste, et par là même irréaliste. Nous aurions eu plaisir à le voter, tout en sachant qu'il ne pouvait être tenu.
La deuxième erreur aurait été de fixer un ONDAM trop laxiste autorisant les secteurs de la santé à laisser dériver la dépense.
Nous avons donc retenu un ONDAM proche de celui que nous réaliserons, je l'espère, cette année, malgré l'effet « franchise ». L'ONDAM médicosocial de 6,5 % permet de respecter les engagements que nous avons pris quant aux ouvertures de lits par exemple. L'ONDAM pour l'hôpital est fixé à 3,1 % car nous pensons que l'efficience de l'hôpital est loin d'être atteinte. Le projet de loi de Roselyne Bachelot « Hôpital, santé, patients et territoires », qui sera sans doute présenté au début de l'année prochaine, tente de remédier à ce problème et vise à une meilleure gestion de l'hôpital, qui recèle des potentiels non exploités. À coûts inférieurs, on s'aperçoit que les hôpitaux étrangers délivrent des soins de qualité égale aux nôtres. Nous devons donc avoir de meilleures pratiques et resserrer la gestion.
La plupart des hôpitaux – excepté trois – sont en effet en déficit en raison d'un problème de gestion qu'il faut régler.
Je le répète, 3,3 % est un ONDAM réaliste, même s'il est difficile à atteindre. Je déplore – et j'ai toujours dénoncé cette pratique – que l'on considère comme normal, depuis dix ans, de dépasser l'ONDAM qui a été voté. On va même jusqu'à fixer un seuil d'alerte, très au-dessus de l'ONDAM !
Cette année, nous avons essayé de mieux respecter l'ONDAM, même si nous n'y sommes pas totalement parvenus. L'année dernière, il a été dépassé de trois milliards ; cette année, il le sera de 700 à 800 millions d'euros. C'est un progrès, même si je ne crie pas victoire. En tout état de cause, nous devons poursuivre dans cette voie et faire en sorte que le régime d'assurance maladie, dont les déficits se réduisent à un rythme trop lent, soit à l'équilibre dans les années qui viennent. Cet ONDAM correspond donc à la réalité, il permet au secteur médical de travailler dans de bonnes conditions et affiche un signal de maîtrise de la dépense.
Il va de soi que le ministre est libre de répondre comme il l'entend, il est même libre de ne pas répondre aux deux questions que j'ai posées !
Qu'en est-il de l'augmentation d'un euro des tarifs des médecins généralistes, conformément aux engagements pris par le Président de la République, auxquels vous êtes, semble-t-il, très attaché ?
Quant aux déficits des hôpitaux publics, ils appellent deux commentaires. Le stock de dettes – 700 à 800 millions d'euros – est-il comptabilisé dans le stock de dettes du pays ou est-il hors bilan ?
Je ne vous pose pas là une question déloyale. Je vous interroge parce que j'en ai parlé avec un certain nombre de collègues, notamment Charles de Courson. Or nous pensons tous les deux que le stock de dettes de l'hôpital est hors bilan. Je souhaite donc que vous acceptiez de me répondre mais, si vous ne le souhaitez pas, libre à vous.
Permettez-moi encore une remarque s'agissant des propos que vous venez de tenir. Vous faites porter l'intégralité de la responsabilité de ce déficit sur la mauvaise gestion des hôpitaux. Ce commentaire,…
…témoigne à mon sens d'une grave méconnaissance du fonctionnement du milieu hospitalier. Je vous engage à vous pencher sur le problème de la baisse des tarifs hospitaliers dès lors que les actes qui sont tarifés augmentent selon le principe de la lettre flottante. Au demeurant, le Gouvernement auquel vous appartenez semble avoir l'intention de la rétablir via le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Accuser les gestionnaires des hôpitaux d'être les responsables du déficit de 700 à 800 millions d'euros est excessif !
Je laisse à Roselyne Bachelot le soin de vous répondre sur l'augmentation d'un euro des tarifs des médecins généralistes. C'est au ministre de la santé qu'il revient de vous apporter cette réponse.
C'est Roselyne Bachelot qui discute avec les professionnels de santé. La décision se prendra en fonction d'un donnant-donnant, d'une maîtrise médicalisée.
La dette des hôpitaux n'est pas hors bilan, c'est de la dette publique.
Pour procéder à des paiements, l'hôpital s'endette et cet endettement est compris dans la dette publique.
Loin de moi l'idée d'accuser les gestionnaires des hôpitaux : telle n'était pas mon intention, et je vous remercie,monsieur Cahuzac, de me donner l'occasion de préciser ma réponse. Je n'ai pas dit que les gestionnaires des hôpitaux étaient responsables de 700 millions d'euros de dépassement. C'est l'ensemble de l'ONDAM, et, que je sache, l'hôpital ne dépasse pas de 100 %. Il y a bien d'autres éléments dans l'ONDAM, comme les soins de ville.
Mais je répète qu'il reste des marges d'efficience dans l'hôpital français. Et dire cela n'équivaut pas à une mise en accusation des gestionnaires, des médecins ou des personnels de santé qui, tous, font un travail formidable. Je connais bien et de près le fonctionnement de ces établissements. Je peux même vous dire que lors du tragique accident qui s'est produit à l'hôpital de Creil, mon beau-frère, chef du service de réanimation, a été grièvement brûlé par l'explosion d'une bouteille d'oxygène. Il est en ce moment hospitalisé au service des grands brûlés de Cochin !
Je n'accuse ni l'hôpital ni le personnel. Je dis seulement qu'il y a une marge d'efficience et que nous devons réconcilier la comptabilité et la qualité des soins. À force de vouloir dissocier les deux, on aboutira à réduire la qualité des soins. Mais il faut que les soins soient rendus à un prix acceptable et supportable pour l'assurance maladie, et donc pour l'ensemble des Français. Le projet de loi de Roselyne Bachelot va dans ce sens et permettra de mieux organiser l'hôpital. Un hôpital mieux organisé rendra des soins aussi bons, mais à un moindre coût.
(L'amendement n° 20 n'est pas adopté.)
(L'article 7 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 14 rectifié .
La parole est à M. le président de la commission des finances.
Les quatre indicateurs fondamentaux permettent d'avoir une vue cohérente de la stratégie des finances publiques suivie par le Gouvernement. Nous avons tout à l'heure parlé de la dépense publique. Il me paraît légitime que l'évolution des recettes publiques figure également dans le projet de loi. C'est un objectif, et il n'est pas question, comme pour la dépense ou les autres indicateurs, que cela soit considéré comme une obligation. Il est normal que l'on puisse apprécier l'objectif du Gouvernement en matière d'évolution des prélèvements obligatoires.
Nous sommes en train de construire un outil d'affichage des objectifs d'un gouvernement. Mon amendement tend à ce que cet outil de programmation soit le meilleur possible, sachant que je suis plus que réservé sur les tableaux et les chiffres qui sont retenus.
Je ne les approuve naturellement pas, et j'espère que des alternances feront pleinement vivre cette loi de programmation.
Par définition, l'alternance doit pouvoir se reproduire, ce qui est essentiel au bon fonctionnement de la démocratie. J'appelle naturellement de mes voeux la prochaine…
Cette loi permet au Gouvernement de définir ses objectifs. Or, une fois encore, il est particulièrement important de le faire aussi pour les prélèvements obligatoires, c'est-à-dire pour les recettes.
J'ai rectifié mon amendement afin de raisonner selon une moyenne sur la période, conformément à la proposition que vous avez formulée tout à l'heure, monsieur le ministre.
Monsieur le ministre, comme l'a fait tout à l'heure M. Migaud, je profite de l'occasion pour saluer l'excellent travail que vous avez accompli. Je pense que le président de la commission des finances ne me démentira pas.
Depuis plusieurs années, nous sommes confrontés à un problème : après avoir instauré des règles de gouvernance qui s'appliquent au volet « dépenses », nous voulions nous doter d'objectifs relatifs au volet « recettes », en particulier aux dépenses fiscales. Malheureusement, pour reprendre vos termes, les recettes sont « minées » – « mitées », aviez-vous même dit – par des mesures dont on apprécie mal la portée. Pourtant, pour assurer le retour à l'équilibre, il est nécessaire non seulement de maîtriser les dépenses, mais aussi de préserver les recettes.
Or, dans cette série d'articles relatifs aux recettes, vous nous proposez d'excellentes règles de gouvernance. Certes, au-delà des règles, une fois que l'on remplit les tableaux, des divergences sont possibles ; Didier Migaud vient d'en faire état.
S'agissant de son amendement, on en revient au débat de tout à l'heure à propos des dépenses : une partie des prélèvements obligatoires ne dépend absolument pas de l'État. Ainsi, au nom du principe de libre administration, ce sont les collectivités locales et elles seules qui votent les taux d'imposition locale, lesquels rejaillissent sur le montant des prélèvements obligatoires. De même, dans le domaine social, aucun des régimes complémentaires de sécurité sociale n'est directement géré par l'État, non plus que le régime de l'UNEDIC.
Par conséquent, et même si l'on en conçoit l'intérêt, faire « remonter » dans la loi l'objectif relatif au niveau des prélèvements obligatoires, qui figure déjà dans le rapport, revient sinon à prescrire, du moins à prévoir pour autrui.
Ma seconde objection – levée par la rectification que M. Migaud a apportée à l'amendement – était la suivante : une série d'objectifs annuels en la matière n'aurait guère eu de sens ; mieux vaut un objectif global.
Pour ces raisons, la commission a rejeté cet amendement relatif aux recettes, comme elle l'avait fait pour les dépenses.
Je tiens d'abord à remercier de leurs commentaires le président de la commission et le rapporteur général. Pour notre part, nous nous sommes efforcés de nous livrer à cet exercice le plus sincèrement et le plus efficacement possible. La présente loi n'aura d'utilité que si toute l'Assemblée nationale, et le Parlement tout entier, comme le Gouvernement, s'approprient cette volonté de projeter nos dépenses et nos recettes.
L'amendement de M. Migaud sur les prélèvements obligatoires est intéressant, mais je ne conçois pas tout à fait la situation de la même manière que tout à l'heure, à propos des dépenses. En effet, l'on parvient à peu près à orienter ces dernières – du moins celles de l'État, car, pour celles de la sécurité sociale, la logique de guichet qui prévaut généralement complique la tâche. On peut également avoir une vision macroéconomique des dépenses des collectivités locales, que nous venons d'évoquer ; on peut les orienter et en débattre. Mais il est beaucoup plus difficile de piloter les recettes. Le cas des prélèvements obligatoires est donc bien différent.
Par exemple, même sans rien changer au mode de calcul des prélèvements obligatoires, lorsque la situation de l'emploi s'améliore, la masse salariale augmente très rapidement – et tant mieux, car cela permet souvent de revenir à l'équilibre plus tôt que prévu –, ce qui, par le jeu des rentrées de cotisations sociales, entraîne une augmentation des prélèvements obligatoires.
Il en va de même lorsque, comme ces dernières années – mais pas cette année –, l'impôt sur les sociétés augmente beaucoup plus vite que le PIB, car l'accumulation de richesses, le nombre de créations d'entreprises et l'augmentation du chiffre d'affaires de celles qui existent sont alors beaucoup plus importants.
Ainsi, à règle constante, à périmètre constant, on peut constater une augmentation des prélèvements obligatoires qui n'est pas du tout de même nature que celle qui résulte de la modification des règles fiscales ou sociales.
À mon sens, les règles relatives aux prélèvements obligatoires sont donc au bon endroit ; les faire « remonter » du rapport vers la loi, comme le propose le président de la commission des finances, serait moins efficace que pour les dépenses. Avis défavorable.
Permettez-moi de ne pas partager votre point de vue, monsieur le ministre. Je comprends votre gêne ; je me souviens que Dominique Strauss-Kahn avait très brillamment expliqué il y a quelques années que le taux de prélèvements obligatoires auquel nous étions parvenus n'était pas exactement celui qui avait été affiché, du fait de critères qu'un gouvernement ne maîtrise pas toujours…
Le sens d'une loi de programmation n'est-il pas d'afficher des objectifs ? Or comment ne pas le faire s'agissant de l'évolution des prélèvements obligatoires, c'est-à-dire des recettes ? Sans les recettes, le dispositif est lacunaire ! Si l'objectif fixé n'est pas atteint, le Gouvernement – quel qu'il soit, puisque cette loi doit survivre aux alternances– devra s'en justifier.
Mais évoquer les finances publiques, afficher des objectifs en la matière, et occulter en quelque sorte les prélèvements obligatoires et le niveau des recettes, voilà qui serait incompréhensible pour nos concitoyens.
Je ne comprends donc pas vos craintes. Un objectif reste un objectif !
Mais, à l'heure où nous devons expliquer de manière pédagogique ce qu'est un budget, ce que sont des objectifs stratégiques en matière de finances publiques, nous aurons manqué une étape si nous raisonnons sur la dépense, sur le solde, et non sur les recettes et les prélèvements obligatoires.
Je l'ai dit en commission : je partage les réserves du ministre. S'agissant des dépenses, qui constituent la priorité, leur maîtrise durable, que nous appelons de nos voeux, repose sur la définition d'objectifs chiffrés permettant d'en dessiner l'évolution.
Je rappelle une évidence : avant les impôts, il y a les dépenses. Les impôts et les déficits résultent des dépenses publiques. Par comparaison avec les autres pays, notre principal problème est le niveau de nos dépenses rapporté à la richesse nationale ; nous devons progressivement le réduire.
La différence avec les recettes est sensible, pour les raisons que M. le ministre vient de rappeler, mais aussi parce que les recettes ne se limitent pas aux prélèvements obligatoires, aux impôts. En effet, le budget de l'État comporte une part non négligeable de recettes dites non fiscales. Ainsi, l'évolution des ressources globales ne correspond pas nécessairement à celles des ressources que l'on considère comme des prélèvements obligatoires.
En outre, les conventions en usage ne simplifient guère les choses. Ainsi – je parle sous le contrôle du ministre –, la redevance télévisuelle n'est pas comptabilisée dans les prélèvements obligatoires. (M. le ministre approuve.)
Les recettes sont donc beaucoup plus difficiles à identifier que les dépenses publiques. Je suis d'accord avec Didier Migaud pour dire que nous devons nous fixer des objectifs chiffrés, mais laissons-les dans le rapport au lieu de les faire « remonter » dans la loi.
Comme le président de la commission des finances, et comme, sans doute, nombre de mes collègues, je suis étonné. Cette loi pluriannuelle de financement annonce des trajectoires et fixe des objectifs. Comme d'autres, cette question avait fait l'objet d'engagements particulièrement solennels. Pourquoi ne pas les afficher dans la loi ?
Monsieur le ministre, à l'occasion de cet amendement, vous devez nous dire si, oui ou non, les prélèvements obligatoires vont baisser.
Je ne sais pas si personne ne peut le savoir, mais je sais ce qui a été promis : les prélèvements obligatoires devaient baisser de quatre points, c'est-à-dire de 72 milliards environ. Cette promesse n'est vieille que de quelques mois.
Est-elle rangée dans le placard des promesses non tenues – qui commence à se remplir (Sourires sur les bancs du groupe SRC) –, ou sera-t-elle intégrée à la perspective d'évolution des finances publiques que le pouvoir exécutif soumet au Parlement ? Oui ou non, le Gouvernement prévoit-il de l'inscrire dans cette loi pluriannuelle de financement ? De deux choses l'une : soit la promesse doit être respectée, auquel cas il faut l'intégrer, soit elle n'est pas intégrée au texte. Dans ce dernier cas, monsieur le ministre, doit-on en conclure qu'elle ne sera pas tenue au cours de cette mandature ?
On pourrait parfaitement le comprendre : qui, aujourd'hui, serait choqué d'entendre le Gouvernement l'annoncer ? Simplement, il faut le dire !
Et puisque les ministres et les orateurs de la majorité n'ont cessé d'affirmer que ce budget devait être à la fois un exercice de vérité et un budget transparent, la vérité et la transparence en matière de prélèvements obligatoires exigent que vous nous le disiez maintenant.
Je tiens à répondre une nouvelle fois afin d'enrichir le débat. Nous créons un nouvel outil – qui pourra certes survivre à toutes les alternances.
Soyons clairs : la question n'est pas d'inscrire ou non le taux de prélèvements obligatoires dans la loi, car il y figure déjà. En effet, le rapport annexé à la loi fait partie de celle-ci, même s'il est un peu plus compliqué de s'y référer.
Par ailleurs, votre assemblée a pu débattre du rapport annuel sur les prélèvements obligatoires au début de la semaine. Le Sénat a même prévu une séance spécifiquement consacrée à ce sujet. Et c'est un vrai sujet de finances publiques.
Mais, je le répète, il y a une différence de nature entre les dépenses et les modes de calcul des prélèvements obligatoires, et si Dominique Strauss-Kahn a invoqué les mêmes arguments, je ne peux que me sentir couvert.
Quant à savoir où ce chiffre trouve sa meilleure place, j'estime que, compte tenu des incertitudes qui l'entourent et du fait que le volant pour piloter les prélèvements obligatoires est beaucoup moins facile à manier que pour les dépenses, le rapport est une bonne solution.
S'agissant, enfin, de notre volonté politique, monsieur Cahuzac, elle est bien de stabiliser le taux de prélèvements obligatoires, comme le montre ce projet de loi. Si nous revenons à meilleure fortune, nous pourrons aller vers une diminution de ce taux. Nous voulons éviter toute mesure impliquant une augmentation massive des impôts, M. le Premier ministre et le Président de la République l'ont souligné à plusieurs reprises.
Nous avons donc une politique cohérente traduite de façon cohérente dans les rapports annexés au projet de loi.
Monsieur le ministre, je comprends votre raisonnement s'agissant de la différence de nature. Mais cela reste un simple objectif et vous avez souligné qu'il figurait déjà dans la loi puisqu'il était inscrit dans le rapport annexé. Cela ne devrait donc pas poser de problème de l'inscrire dans l'article lui-même.
Un budget, comme vous l'avez dit vous-même hier, ce sont des dépenses mais aussi des recettes. Et pour y voir clair dans la stratégie des finances publiques, il me paraît logique que nous disposions d'un indicateur relatif aux recettes. Or nous risquons d'en être privés si cet amendement n'est pas retenu.
Monsieur le président, je ne pense pas avoir abusé de votre indulgence en vous demandant trop souvent la parole, et vous savez que les débats budgétaires se déroulent bien, ceux de l'année dernière l'ont prouvé.
Après l'intervention du ministre, nous comprenons très clairement que l'objectif d'une baisse de 4 % des prélèvements obligatoires sur la durée de la mandature est, au moins temporairement, abandonné puisque le Gouvernement vise désormais la stabilisation. Voilà une annonce politique qui a son importance. Toutefois, elle ne nous surprend pas. Il fallait qu'elle soit faite. Dont acte.
(L'amendement n° 14 rectifié n'est pas adopté.)
En conséquence, l'amendement n° 16 rectifié tombe.
Je suis saisi d'un amendement rédactionnel de la commission, n° 4 rectifié.
(L'amendement n° 4 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n°5 .
La parole est à M. le rapporteur général.
Comme pour les dépenses et l'évolution des ressources, il s'agit de distinguer ce qui relève du budget de l'État de ce qui relève des comptes sociaux.
Le ministre a, si je puis dire, consolidé les comptes puisqu'il est chargé à la fois du budget de l'État et des comptes sociaux. Pour notre part, nous n'avons pas encore procédé à cette opération et nous en restons à une compartimentation, le budget de l'État relevant de la commission des finances, les comptes sociaux de la commission des affaires sociales.
Nous tenons à bien intégrer les règles de gouvernance fixées dans cette loi de programmation. Or ce ne sont pas tout à fait les mêmes qui s'appliquent à ces deux types de comptes. Cet amendement vise donc à séparer la séquence de recettes de l'État et celle des comptes de la sécurité sociale.
C'est vrai, monsieur le rapporteur général, que nous n'avons pas fait cette distinction car nous avons une vision synthétique des comptes. Votre proposition apporterait sans doute plus de précision. Cela étant, dans la gradation des avis du Gouvernement, je retiendrai la sagesse bienveillante.
(L'amendement n° 5 est adopté.)
(L'article 9, modifié par l'amendement n°5 , est adopté.)
Je suis saisi de deux amendements portant articles additionnels après l'article 10, nos 13 rectifié et 12.
M. le président de la commission pourra peut-être les présenter en même temps…
Certainement, monsieur le président.
L'amendement n° 13 rectifié porte sur les exonérations et abattements s'appliquant aux cotisations et contributions de sécurité sociale, l'amendement n° 12 sur les dépenses fiscales. Ce sont des sujets qui nous tiennent à coeur, à la commission des finances.
Si je conçois que l'on ne puisse fixer pour les dépenses fiscales une norme annuelle de progression de la même façon que pour les dépenses budgétaires, car elles sont de nature différente, il m'apparaît légitime que, dans le cadre d'une loi de programmation, on fixe des objectifs d'évolution de la dépense fiscale pour contribuer à mieux la maîtriser. D'autant qu'il ne s'agit pas d'une norme contraignante mais d'un cap à tenir, qu'il me paraît utile de préciser.
En nous fixant pour objectif à l'horizon de 2012 une progression des dépenses fiscales identique à celles des dépenses budgétaires, nous nous efforcerions de parvenir d'une année à l'autre à un contrôle de leur augmentation. Prenons un exemple. En 2009, si les dépenses budgétaires évoluent au même rythme que l'inflation, une progression spontanée des dépenses fiscales de l'ordre de 4 % est attendue, ce qui est considérable. Si cette hypothèse est vérifiée à la fin de l'année 2009, nous pourrions alors modifier les règles d'attribution des exonérations ou des dépenses fiscales ayant provoqué les plus importants dérapages, de manière à se rapprocher de l'objectif d'une progression identique. Il s'agit là d'une règle de gouvernance qui a, je crois, toute sa place dans ce projet de loi de programmation.
La commission ne les a pas retenus car ce qui prime pour nous, c'est la règle de gouvernance extrêmement contraignante selon laquelle tout euro perdu du fait d'une mesure de dépense fiscale – exonération ou abattement – ou de dépense sociale – abattement de CSG ou exonération de toute autre recette sociale –, en d'autres termes, disons-le mot, du fait d'une niche existante ou supplémentaire, devra être compensé par un euro d'économie. Cette nouvelle règle, il faudra s'y acclimater car elle nous obligera à être particulièrement rigoureux. À cet égard, je rappelle que la norme consistant à limiter la progression des dépenses à l'inflation n'est entrée dans le paysage budgétaire que très progressivement. Sa généralisation ne s'est pas faite en un seul budget. Nous l'avons d'abord appliquée aux dépenses stricto sensu, puis aux prélèvements sur recettes, enfin aux dépenses transférées à des opérateurs.
Le président de la commission des finances, qui est extrêmement vertueux, veut que nous allions encore plus vite. Selon lui, il faudrait non seulement poser le principe mais aussi fixer un objectif. Cela ne nous paraît pas raisonnable. N'oublions pas qu'il existe plus de 450 dépenses fiscales différentes représentant plusieurs dizaines de milliards d'euros.
Certes, monsieur le président de la commission, il est toujours possible d'aller plus loin, mais là, c'est vraiment un voyage vers Mars que vous nous proposez. Fixer un objectif de progression des dépenses fiscales sur trois ans nous paraît très difficile. Il y a beaucoup d'incertitudes.
Conformément au souhait du président de la commission, une alternance permettra de faire vivre de telles dispositions !
Nous l'exigerons, même !
Il faut élaborer une loi de programmation sincère, en y inscrivant des indicateurs auxquels on puisse se tenir pour mieux piloter.
Ce qui est important, ce sont les règles de gouvernance, que vient de rappeler le rapporteur général, mais aussi la fixation d'un objectif de dépense fiscale dans le projet de loi de finances. Le fixer à 4 %, ce serait trop, de mon point de vue. La dépense fiscale ne doit pas être trop dynamique et il importe, le cas échéant, de la freiner. C'est d'ailleurs ce que nous allons faire avec le plafonnement global des niches.
Ainsi, nous posons les règles de bonne gouvernance dans la loi de programmation pluriannuelle et fixons des objectifs chiffrés dans la loi de finances annuelle. Nous mettrons ensuite en place, au fur et à mesure, des instruments pour mieux maîtriser les évolutions.
Le fait que le ministre ait évoqué Mars et non pas la lune me laisse espérer qu'il évoluera.
Si l'on se fixe une règle de gouvernance s'agissant de la dépense budgétaire, je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions faire de même pour la dépense fiscale. Certes, un objectif annuel serait difficilement tenable, compte tenu de leur nature différente ; en revanche, à l'horizon 2012, cela me paraît raisonnable.
Je suis d'ailleurs persuadé, monsieur le ministre, que si vous n'étiez pas obligé de vous retenir, vous seriez plutôt favorable à notre proposition. Vous vous êtes en effet toujours montré soucieux de préserver la recette et notre disposition va en ce sens.
(L'amendement n° 13 rectifié n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 12 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 8 .
La parole est à M. le président de la commission.
Cet amendement vise à ce que nous puissions bénéficier d'une évaluation de l'efficacité et du coût des niches fiscales et sociales avant le délai fixé par la loi, autrement dit au 30 juin 2011. J'étais allé plus loin dans un premier temps mais la commission dans sa sagesse s'est ralliée à cette date.
Pourquoi pas ? Mais sachez que vous disposerez de moins d'informations. Compte tenu du temps que les données mettent à remonter, l'évaluation ne portera que sur les revenus pour 2009.
Sagesse, donc.
(L'amendement n° 8 est adopté.)
(L'article 11, amendé, est adopté.)
Sur l'article 12, je suis saisi d'un amendement n° 9 de la commission.
La parole est à M. le président de la commission.
L'amendement est pour ainsi dire rédactionnel.
Certaines choses vont mieux en les disant : il s'agit de préciser que le bilan en question sera présenté au Parlement bien avant le débat d'orientation budgétaire.
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(L'ensemble du projet de loi est adopté.)
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2009.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma