La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
La parole est à M. Joël Giraud, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le ministre chargé de la santé.
Chaque jour, nous constatons qu'assurer une offre de soins hospitaliers de qualité sur l'ensemble du territoire est loin d'être votre priorité. Vous avez laissé se propager les déserts médicaux avec un seul et unique objectif : réduire le poids de l'hôpital public de proximité, qui coûterait trop cher, au détriment de la qualité de l'offre de soins.
Cette politique de réduction de l'offre se traduit partout de la même manière : par la fermeture de services dans les petites structures. Vous fermez par dizaines des services de maternité, de chirurgie, d'urgences, transformant inexorablement les petits hôpitaux en centres de long séjour. Vous jouez à un jeu dangereux, en sacrifiant la santé de la population sur l'autel de la rigueur budgétaire ! Ces fermetures sont contre-productives, puisque les patients doivent aller se faire soigner dans des structures plus lointaines et déjà engorgées, notamment dans les services d'urgences complètement saturés de nos CHU.
Vous vous attaquez désormais aux urgences vitales, c'est-à-dire aux services de réanimation, ce que je vais illustrer par un exemple.
En effet, nous avons appris, stupéfaits, que, dans son projet de schéma régional d'organisation des soins, l'agence régionale de santé de Marseille envisageait la fermeture du service de réanimation du Centre Hospitalier de Briançon. Le motif invoqué est de ne pas laisser subsister sur le territoire d'unité de réanimation de moins de douze lits. Je rappelle à mes collègues, y compris à ceux de l'opposition, que 50 % des unités de réanimation sont concernés.
Ce projet funeste imposerait à Briançon un délai d'acheminement d'une heure trente à deux heures trente, quand il neige, pour se rendre au service de réanimation le plus proche, les moyens héliportés ne pouvant être mobilisés dans des conditions météorologiques perturbées, ce qui est fréquent, ou se révélant insuffisants lorsque les nombreux accidents de montagne imposent des rotations courtes pour sauver des vies.
Ce projet de fermeture semble ignorer que le temps est précieux lorsque le pronostic vital est engagé et qu'il est nécessaire d'hospitaliser une personne souffrant de traumatismes importants dans un service d'urgence, puis de réanimation dans un délai de trente minutes.
Enfin, dans le cadre de prétendues bonnes relations de la France avec ses voisins européens, comment l'ARS de Marseille peut-elle signer en juin 2010 avec son homologue du Piémont un accord intégrant les lits de réanimation d'une ville dans le SROS de ses voisins italiens pour les supprimer, ensuite, dans son propre schéma ?
Ma question est simple : allez-vous maintenir les unités de réanimation de moins de douze lits dans les régions difficiles d'accès ou condamner à mort les habitants de ces territoires, résidents comme touristes, par rupture de l'égalité d'accès aux soins ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à Mme Nadine Morano, ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, tout d'abord, permettez-moi d'excuser l'absence de M. Xavier Bertrand, qui accompagne M. le Premier ministre à une réunion du G20.
Monsieur Giraud, il serait bon de cesser d'inquiéter nos concitoyens, et de leur dire la vérité : notre système de santé est considéré comme le meilleur au monde.
Ce n'est pas Nadine Morano qui le dit, c'est l'OMS. Nous y consacrons 239 milliards d'euros, soit 12 % de notre produit intérieur brut.
Il est vrai que nous avons fait adopter au Parlement la loi Hôpital, patients, santé et territoires, que le groupe socialiste n'a pas votée (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), et qui est pourtant fondée sur un triple pilier : qualité des soins, sécurité des patients et bonne gestion. Ce que nous voulons aujourd'hui, ce n'est pas dépenser moins,…
…mais dépenser mieux !
Cessez d'opposer maîtrise des dépenses et qualité des soins. (Protestations sur les bancs du groupe SRC et GDR).
S'agissant de Briançon, une réflexion a été engagée, vous le savez, en vue de mutualiser les moyens et les plateaux techniques, en raison de la faible démographie médicale. Mais je veux vous rassurer, monsieur le député, la solution qui sera retenue garantira la qualité et la sécurité des patients pris en charge, tant pour ce qui est de la population résidente que pour ce qui est des touristes, et, je vous l'affirme, nous maintiendrons des lits de soins critiques à l'hôpital de Briançon.
Des lits de réanimation seront transformés en lits de surveillance continue et fonctionneront dans le cadre d'une complémentarité avec le centre hospitalier intercommunal des Alpes du Sud.
Un groupe de travail associant l'ensemble des acteurs est en train de travailler sur ce sujet, dans un esprit de concertation,…
afin de définir la solution la plus adéquate au bénéfice de nos concitoyens.
Je vous conseille de vous y associer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Jean-Claude Guibal, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, jeudi dernier, le parti socialiste a fait adopter au Sénat, à quatre voix près, la proposition de loi visant à accorder le droit de vote aux élections municipales aux étrangers qui ne sont pas membres de l'Union européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Ce très faible écart de voix démontre, s'il en était besoin, que, contrairement à ce qu'on voudrait nous faire croire, il n'y a pas consensus sur cette question !
Il n'y a pas consensus, en effet, parce que le droit de vote est attaché à la citoyenneté, et non pas au seul fait d'être contribuable.
Par son vote, le citoyen exprime son appartenance à la nation, nation dont il assume l'histoire et partage l'avenir.
Donner le droit de vote sans demander en contrepartie cette solidarité intime avec la nation et le peuple français, c'est affaiblir l'unité de la première et la cohésion du second.
En revanche, si un étranger éprouve un tel amour de notre pays qu'il souhaite en partager le destin et y exercer le droit de vote, une voie royale, si j'ose dire, s'offre à lui, celle qui consiste à demander la nationalité française.
À l'évidence, le parti socialiste est tellement empêtré dans ses préoccupations électoralistes qu'il en oublie l'héritage de notre histoire républicaine.
Et ce n'est pas la moindre des contradictions que ce parti qui prétend défendre la diversité s'empresse de la réduire en niant l'altérité de l'étranger. Comme il est paradoxal que ce même parti, qui se dit partisan de l'égalité, n'hésite pas à proposer la création d'une citoyenneté de seconde zone.
En réalité, le parti socialiste, en exhumant un texte voté il y a dix ans et en le faisant passer en force au Sénat, se livre à l'une de ces petites manoeuvres politiciennes auxquelles, à l'évidence, il n'a pas renoncé.
Aujourd'hui comme hier, quel meilleur moyen, en effet, pour gonfler le vote de l'extrême droite et réduire celui de la droite républicaine, que d'agiter le chiffon rouge du vote des étrangers en même temps que l'on plaide pour une immigration non maîtrisée et la régularisation des sans-papiers ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Monsieur le député, la position du Gouvernement est résolument hostile à la proposition de loi qui a été votée par le Sénat et a pour objet de donner le droit de vote aux étrangers aux élections municipales (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) ainsi, il faut le préciser, que le droit d'éligibilité aux fonctions de conseiller municipal.
Et cela pour deux raisons principales.
La première est que, en France et depuis des siècles, on vote parce qu'on est citoyen, et l'on est citoyen parce que l'on est Français. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Il n'y a pas de citoyenneté partielle, il n'y a pas de citoyenneté de résidence.
Être citoyen, c'est participer à la vie et au destin de la communauté nationale, et il ne suffit pas d'habiter dans un pays et de payer des impôts pour participer à ce destin commun.
Pour ceux qui veulent voter, il y a une voie, la naturalisation : 130 000 naturalisations par an sont accordées. Très franchement, je ne vois pas pourquoi nous donnerions un morceau de citoyenneté à ceux qui refusent d'en bénéficier de façon complète. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
La seconde raison est que l'éligibilité au conseil municipal permet à l'évidence une représentation communautaire, et une représentation communautaire ouvre tout simplement la voie au communautarisme ; or nous, nous refusons le communautarisme, parce que nous tenons à l'unité de nos valeurs et au mode de vie qui est le nôtre. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Et puis, comme vous, monsieur le député, le Gouvernement ne peut que constater que le parti socialiste ressort cette proposition avant chaque échéance électorale majeure.
Pourtant, il aurait eu cent fois la possibilité de la mettre en oeuvre lorsqu'il était au pouvoir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Comme vous, le Gouvernement constate que le parti socialiste propose la régularisation des étrangers qui se trouvent chez nous en situation irrégulière, et, comme vous, je ne peux pas évacuer le lien qui peut exister entre ces positions et les réflexions de cercles de pensée proches du PS qui disent tout simplement qu'il faut davantage d'étrangers qui votent pour qu'il y ait davantage de voix pour le PS. Les Français apprécieront ce cynisme. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme Huguette Bello, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, ma question porte sur l'impasse juridique dans laquelle se trouvent les vacataires de l'académie de La Réunion. Ces quarante agents, tous des femmes, cumulent des durées de service pouvant aller jusqu'à plus de dix ans, au point qu'il a fallu inventer, pour les désigner, l'étrange oxymore de « vacataires permanents ».
Au-delà de cette question de vocabulaire, il apparaît de façon indiscutable que ces agents doivent être considérés comme des contractuels non titulaires, et que leur contrat de travail doit être requalifié. La jurisprudence du Conseil d'État est sur ce point constante mais, au lieu de l'appliquer, le recteur de l'académie de La Réunion est en train de créer les conditions du licenciement, immédiat ou différé, de ces femmes. Dans sa volonté de ne pas appliquer les règles administratives, il a déjà lancé une procédure pour faire appel à une société de nettoyage privée. Et, pour l'heure, il vient de recourir aux forces de police contre ces femmes qui protestent contre un licenciement à la fois injuste et illégal.
Dans votre réponse au courrier que je vous ai adressé à ce sujet, monsieur le ministre, vous indiquez que ce dossier relève de la compétence du recteur. Or celui-ci vient de faire savoir qu'il ne lui revient pas de créer des emplois de titulaires. La confusion doit être dissipée d'urgence en rappelant au recteur ce qu'il feint obstinément de n'avoir pas compris, à savoir qu'il s'agit simplement d'appliquer à ces agents, qui travaillent de façon habituelle et permanente pour le rectorat, le droit relatif aux contractuels non titulaires.
Il est plus que temps de mettre un terme à l'angoisse et à la détresse de ces mères de famille qui non seulement n'ont pas été rémunérées selon leur véritable statut durant toutes ces années, mais encore sont désormais menacées de chômage. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.
Madame la députée, vous m'interrogez sur la situation des contractuels, et particulièrement sur les bénéficiaires de conventions de vacation sur l'île de La Réunion.
Il existe à ce jour dans cette académie 151 agents non titulaires qui sont répartis en deux grandes catégories : d'un côté, les contractuels proprement dits, au nombre de 114, qui bénéficient de contrats de dix mois lorsqu'ils sont affectés dans un établissement scolaire et de douze mois lorsqu'ils sont affectés auprès des services académiques, ou de contrats à durée variable lorsqu'ils effectuent des suppléances. Ces agents bénéficient de la sur-rémunération en vigueur à La Réunion et de congés identiques à ceux des titulaires.
La seconde catégorie est composée des bénéficiaires de conventions de vacation. Au nombre de trente-sept actuellement, ils sont employés selon les besoins pour des tâches administratives ou à des tâches d'entretien dans les services rectoraux et les établissements scolaires.
Ce qui s'est passé, c'est que certaines organisations syndicales, dont j'ai cru comprendre qu'elles n'étaient pas très éloignées de votre sensibilité politique (Exclamations sur les bancs du groupe SRC),ont exigé la requalification immédiate des conventions de vacation en contrats. Cela avait pour conséquence de percevoir la sur-rémunération et donc de doubler le coût pour le service du rectorat. Celui-ci était dans l'impossibilité de supporter ce coût ; il a donc mis un terme aux trente-sept conventions de vacation. Dix-neuf vacataires administratifs ont été reçus à ce jour par une commission présidée par la DRH et se sont vu proposer une intégration dans le vivier des contractuels. Pour les dix-huit vacataires restants, leur contrat ne sera pas renouvelé mais ils bénéficieront d'une indemnisation au titre de la perte de l'emploi. J'ai demandé au recteur de l'académie qu'un suivi individuel soit pratiqué pour ces agents. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre de l'économie, au cours de la dernière réunion du G20, le Président de la République a estimé que les pays les plus pauvres ne devaient pas être une nouvelle fois les premières victimes de la crise.
En accord avec l'Allemagne et de nombreux autres pays de l'Union européenne, le président a ainsi plaidé en faveur de la mise en place d'une taxe sur les transactions financières. Dans la crise des finances publiques que traversent tous les pays de la zone euro, cette taxe apparaît en effet, selon ses propres termes, « comme techniquement possible, financièrement indispensable et moralement incontournable ».
Aujourd'hui, nous pouvons considérer que ses contours ont été dessinés. Le Parlement européen en a voté le principe, la Commission européenne en a exprimé les modalités et, surtout, les dirigeants des deux premières puissances européennes se sont engagés publiquement à la mettre en oeuvre.
Selon les hypothèses retenues, une taxation de 0,1 % sur les actions et de 0,02 % sur les obligations permettrait de dégager une ressource de près de neuf milliards d'euros en Europe et de près de cinquante milliards d'euros si l'on inclut l'ensemble des pays participant au G20.
Au-delà de la mauvaise gestion des finances publiques des États, la crise que nous traversons aujourd'hui est aussi, nous le savons tous, le résultat des égarements d'une finance internationale incontrôlée. C'est pourquoi il s'agit d'une taxe morale car, plus une transaction sera spéculative, plus elle sera taxée.
Nous sommes tous conscients des responsabilités qui pèsent sur nous et, loin des prises de position politiques et médiatiques, défendre et voter un tel dispositif serait franchir un pas historique vers la responsabilité et l'équité.
Ma question est donc la suivante : le Gouvernement confirme-t-il son accord pour l'instauration de cette taxe dans le cadre européen et, si oui, accepte-t-il de la défendre auprès de ses partenaires lors de nos prochaines négociations ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
La parole est à M. François Baroin, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur Demilly, la réponse est oui, et nous le faisons déjà. Oui, la France est favorable à la mise en place d'une taxe sur les transactions financières.
Vous avez eu raison de rappeler l'initiative prise par la France dans le cadre de sa présidence du G20. Nous avons obtenu, sous l'impulsion énergique du Président de la République, un mouvement qui a traversé l'Atlantique, puisque le président Obama lui-même a accepté le principe d'une contribution financière permettant d'aider à résoudre la crise.
C'est dire si les esprits évoluent, si les lignes diplomatiques se déplacent et si le débat progresse.
Je rappelle néanmoins que cette question n'est pas neuve et que, depuis 2006, la France est aux avant-postes de la recherche de financements innovants, comme la taxe sur les billets d'avion ou celle sur les quotas d'émission de gaz et de substances polluantes. Celles-ci ont rapporté six milliards, et la France peut s'honorer du rôle moteur qu'elle a joué pour entraîner les autres pays. C'est vrai au sein du G20, où les discussions se poursuivront sous la présidence mexicaine, comme à l'échelle européenne.
Ce sont en effet la France et l'Allemagne qui ont proposé à la Commission un calendrier court, qui prévoit des avancées dès le premier semestre.
En novembre dernier, la Commission avait présenté un premier texte lors du conseil Ecofin. Je travaille avec mon homologue Wolfgang Schäuble sur une proposition qui complétera celle de la Commission. Le 23 janvier nous présenterons cette contribution franco-allemande ; nous espérons pouvoir fixer au cours du premier semestre et l'assiette – que nous souhaitons la plus large possible – et le taux. Nous ne faisons pas de l'affectation définitive des recettes un préalable à la discussion. Cette question sera sans doute abordée à la fin du second semestre de l'année 2012, de sorte que le dispositif puisse être opérationnel en 2013. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Marcel Rogemont, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Monsieur le Premier ministre, les Français s'interrogent sur la succession des propos tenus par le Président de République. Ainsi, en septembre la perte du triple A était une catastrophe.
En octobre, M. Sarkozy nous assurait du triple A, et aujourd'hui le perdre ne serait qu'une péripétie. Pourtant, dès maintenant, le taux d'intérêt de la dette française est deux fois plus élevé qu'en Allemagne.
À en croire M. Sarkozy, lundi 5 décembre, après un énième sommet, il s'agirait de l'accord franco-allemand le plus complet, permettant de « rétablir la confiance dans l'euro ». Malheureusement, nous avons déjà entendu de tels propos. Souvenons-nous de ces réunions, toutes de la dernière chance : le 11 mars, « enfin un gouvernement économique de l'Europe » ; le 10 mai, « les spéculateurs en seront pour leurs frais » ; le 21 juillet, « c'est une étape fondamentale » ; le 16 août, « toutes les mesures nécessaires pour préserver la stabilité de la zone euro sont prises » ; le 27 octobre, « est adoptée enfin une réponse globale et crédible à la crise » ; le 5 décembre, pour finir, il nous fait le coup du « grâce à nous, plus jamais ça ! »
Chaque fois, c'est le sommet de la dernière chance. Mais la dernière chance de quoi ? La dernière chance pour vous de masquer votre bilan catastrophique – 500 milliards de dette supplémentaire –, bilan qui va vous conduire une nouvelle fois à imposer un énième plan d'austérité à la France. Certes, mais pas à toute la France, car en 2012 certains bénéficieront encore du bouclier fiscal et de la division par trois du taux d'imposition sur la fortune.
La France n'a pas besoin de paroles mais de justice, sociale et fiscale ; la France a besoin de responsabilité ; la France a besoin de vérité. Ma question est donc simple : Quand direz-vous la vérité au lieu de la masquer sans cesse ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. François Baroin, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur Rogemont, vous mélangez beaucoup de choses. Permettez-moi simplement de rappeler l'esprit et le sens de l'accord de vendredi dernier, accord qui engage l'État. Il est le fruit d'une forte coordination entre la France et l'Allemagne, qui ont abordé côte à côte, et non face à face, ce rendez-vous de l'histoire.
Enfin, nous nous orientons vers une gouvernance économique intégrée qui, sans altérer l'idée que nous nous faisons de la souveraineté nationale, permettra de mieux la protéger par une meilleure convergence budgétaire, économique et fiscale. Il y aura donc plus de sanctions et davantage de coordination de nos politiques budgétaires, moins de dumping fiscal et social, à l'intérieur d'un périmètre au sein duquel nous devons également protéger, tel un bien précieux, notre monnaie des attaques des marchés.
La seconde avancée de cet accord, c'est évidemment la solidarité. Il a été décidé, sur proposition franco-allemande, d'accélérer le calendrier de mise en oeuvre du mécanisme européen de solidarité. La lucidité a conduit les chefs d'État et de gouvernement des vingt-six, à l'exception désormais singulière des Britanniques, à tirer les leçons de ce qui n'avait pas marché. Ce qui n'a pas marché, c'était de considérer que les investisseurs ou les épargnants pouvaient ne pas être remboursés suite à une décision des États. Il a donc été décidé que la Grèce resterait un cas isolé et que l'implication du secteur privé ne vaudrait que dans ce seul cas. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Les autres États européens se sont engagés à respecter leur signature et à rembourser les épargnants et les investisseurs.
Si vous ajoutez à ces décisions politiques l'initiative de la Banque centrale européenne de fournir pendant trois ans les liquidités nécessaires aux banques, vous obtenez un cocktail efficace à administrer à la zone euro. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour le groupe de l'Union pour un mouvement .populaire
Monsieur le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, après l'affaire Guérini dans les Bouches-du-Rhône, après l'affaire de la fédération socialiste de l'Hérault, c'est au tour de la région Nord-Pas-de-Calais (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) d'être entachée par les affaires du parti socialiste et de se retrouver sous les feux de l'actualité judiciaire.
En effet, dans le Pas-de-Calais, les révélations de M. Dalongeville, ancien maire socialiste d'Hénin-Beaumont, relayées par la presse, mettent gravement en cause les conditions de financement de la fédération départementale du parti socialiste.
Dans le Nord, l'affaire du Carlton met gravement en cause d'éminents responsables du parti socialiste, qui auraient bénéficié de prestations financées par un grand groupe de BTP. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Dans le Nord toujours, des questions se posent quant aux conditions d'attribution du marché public du Grand stade de Lille : en trois jours, de manière incompréhensible, on est en effet passé du projet Bouygues au projet Eiffage, tandis qu'au passage la facture pour le contribuable augmentait de plus de 108 millions d'euros. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Une plainte au pénal a été déposée dans ce dossier.
Alors que M. Hollande a été premier secrétaire du parti socialiste pendant onze ans, il semble tomber des nues, et son successeur à la direction du PS vient enfin de décider de mettre en place une commission d'enquête. Mais le temps des enquêtes internes au parti socialiste est dépassé, le temps est désormais aux enquêtes judiciaires.
Monsieur le ministre, dans ces affaires qui nuisent gravement à la réputation du Nord-Pas-de-Calais, pouvez-vous nous indiquer où en sont ces enquêtes judiciaires, et nous assurer que la justice pourra faire son travail sans entraves ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Monsieur le député, vous venez de le rappeler : un certain nombre d'affaires sont pendantes devant les juridictions de la cour d'appel de Douai. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Ces affaires concernent des cas de prise illégale d'intérêts, de corruption ou de favoritisme. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
S'agissant des procédures en cours, depuis que j'exerce mes fonctions de ministre,…
..je m'en suis tenu à une règle. J'entends bien la suivre jusqu'au bout : je ne commenterai donc aucune affaire en cours. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je veillerai en revanche à ce que la justice puisse travailler efficacement, dans la sérénité. C'est la règle que je me suis donnée ; je la suivrai. Je veillerai à ce que toutes les juridictions puissent travailler dans le calme et la sérénité, car c'est ainsi que doit travailler la justice.
S'il est normal que, dans la période où nous entrons, nos grands services publics soient des sujets de la campagne électorale, nous devons tous veiller à ce qu'ils n'en soient pas les instruments. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Bravo ! Chiche !
Monsieur le Premier ministre, ma question concerne l'avenir des retraites des Français.
«Pour les retraites, nous rétablirons l'âge légal à 60 ans » ; c'est ce que dit le projet du parti socialiste, consultable sur son site internet.
« Pour présider en 2012, il faudra de l'expérience, un courage à toute épreuve, la justice chevillée au corps pour rétablir la retraite à 60 ans » ; c'est ce que déclarait Martine Aubry, première secrétaire du parti socialiste, le 9 octobre 2011.
« Ceux qui n'ont pas quarante et une voire quarante-deux années de cotisations ne pourront pas partir à 60 ans. » Voilà en revanche ce que vient de déclarer lundi François Hollande, candidat socialiste à l'élection présidentielle. Mes chers collègues, depuis deux jours, le masque des faux-semblants est tombé. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
En proposant un départ anticipé pour les salariés ayant commencé à travailler à 18 ans, François Hollande valide les réformes des retraites de 2004 et de 2010 auxquelles les socialistes se sont opposés. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
La nouvelle mesure qu'il promet n'est ni juste, puisqu'elle ne règle rien des iniquités persistantes entre les différents régimes, ni réaliste dans la mesure où il en coûterait 20 milliards d'euros de déficits supplémentaires. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur Bataille, mes chers collègues, laissez M. Brindeau s'exprimer !
Comme on dit dans mon Vendômois, il faut arrêter de prendre les Français pour des berlots ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Or, sur le nucléaire, François Hollande et les socialistes prennent les Français, et accessoirement les Verts, pour des berlots. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Sur l'Europe, ils prennent les Français, et accessoirement nos partenaires européens, pour des berlots. (Mêmes mouvements.) Sur les retraites, le candidat socialiste prend les Français, et accessoirement ses propres amis politiques, pour des berlots. (Mêmes mouvements.)
Ces trois sujets méritent pourtant autre chose que l'ambiguïté, l'ambivalence et le mensonge.
Monsieur le Premier ministre, vous l'avez déjà dit dans un langage de vérité : la réforme de notre système de retraite devra être remise sur le métier. Au Nouveau Centre, nous proposons une réforme systémique fondée sur l'équité.
Merci monsieur Brindeau, votre temps de parole est épuisé.
La parole est à Mme Nadine Morano, ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le député, votre question illustre parfaitement les propos de Mme Aubry : « Quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup. » En l'occurrence, il y a une meute ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
En effet, s'agissant des retraites, jamais le parti socialiste n'a pris ses responsabilités. (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Le parti socialiste nous a annoncé qu'il allait revenir à la retraite à 60 ans mais, comme vous le savez, cette réforme est totalement infaisable car elle coûterait 87 milliards d'euros sur cinq ans ! Vous comprenez alors pourquoi François Hollande est extrêmement mal à l'aise avec cette proposition, au point qu'il vient de faire marche arrière. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Aujourd'hui, il nous annonce en effet que la réforme des retraites qu'il ferait adopter s'il était élu Président de la République s'appliquerait à ceux qui ont commencé à travailler à 18 ans. Mais cette réforme équivaudrait encore à dépenser 20 milliards d'euros !
Je fais appel à votre sens des responsabilités. Si nous n'avions pas fait voter la réforme de 2010, le déficit de notre dispositif de retraite s'élèverait en 2012 à 35 milliards d'euros. Nous avons eu le courage de mener cette réforme ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Dès 1993, nous avions eu le courage de faire voter la réforme Balladur. Déjà, vous promettiez à l'époque que vous l'annuleriez lors de votre retour aux affaires ; vous n'en avez rien fait. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup. C'est d'autant plus flou que M. Valls disait le 24 août 2011 dans Les Échos : « Il ne faut pas laisser croire aux Français que nous reviendrons à la retraite à 60 ans. » (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur Valls, ce sont vos propos : assumez-les ! M. Rogemont le disait tout à l'heure : la France a besoin de vérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme Catherine Vautrin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre de l'agriculture, en 2008, la Commission européenne a décidé de libéraliser les droits de plantation viticole à compter du 1er janvier 2016. Or, comme j'ai tenté de le démontrer dans le rapport que je vous ai remis en octobre 2010, les conséquences d'une telle décision seraient tout à fait dramatiques pour la filière viticole, dans l'ensemble de l'Europe.
Le 18 janvier dernier, le Président de la République a affirmé son opposition à cette libéralisation, comme l'a fait la Chancelière Angela Merkel à Stuttgart. Depuis, de très nombreux pays se sont déclarés contre cette mesure, rejoignant le combat mené par la France. À ce jour, treize États, représentant 201 voix et 66 % de la population, se sont clairement prononcés en ce sens. Toutefois, il semble que le commissaire Ciolos n'accepterait de rouvrir le dossier que si une majorité qualifiée se dégageait. Il manque, à ce jour, 54 voix ; c'est dire combien la position d'un État comme la Pologne sera importante.
Monsieur le ministre, vous qui êtes très engagé sur ce dossier, vous savez que les professionnels ont mené de nombreuses actions. La question qui se pose aujourd'hui est celle de savoir quelles sont celles qui peuvent encore être menées aujourd'hui, au niveau européen et, pourquoi pas, au niveau français, pour que le dossier soit rouvert et que soit assurée la pérennité des filières viticoles, tellement importantes pour l'économie agricole de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.
Madame la députée, je vous confirme que le Gouvernement français est totalement opposé à la libéralisation des droits de plantation viticole. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
En effet, nous refusons catégoriquement une politique qui conduirait à un dumping sur les prix, sur la qualité et sur la structuration de l'offre et qui ruinerait les efforts consentis par nos vignerons, partout en France, pour améliorer la qualité et l'offre des vins français, efforts qui nous ont permis de reprendre, cette année, la première place en matière d'exportation mondiale de vin.
Nous allons donc continuer à nous battre pour le maintien de ces droits de plantation, en suivant la même stratégie que celle que nous avons adoptée depuis le début. Nous allons, tout d'abord, définir, début janvier, une position franco-allemande, qui doit nous permettre ensuite de rallier les deux ou trois États qui nous manquent – je pense à la Pologne, à la Bulgarie et, éventuellement, à Malte – pour atteindre la majorité qualifiée et parvenir à renverser la position de la Commission.
Je vous le redis : nous n'accepterons jamais que l'on puisse planter du vin de Bourgogne à Bordeaux, du vin de Bordeaux dans le Languedoc-Roussillon et, pourquoi pas, du champagne sur les coteaux de la Garonne ou dans la vallée de la Rioja. Il n'en est pas question !
Notre position sur le maintien des droits de plantation viticole s'inscrit dans une stratégie agricole plus large en Europe. Nous refusons en effet la libéralisation des marchés agricoles et nous nous battons pour leur régulation. Ce que nous avons obtenu sur l'élevage ou sur le paquet lait – qui vient d'être adopté par la Commission et qui doit permettre aux producteurs de lait de bénéficier d'une visibilité sur les prix et sur la production –, nous l'obtiendrons aussi pour la viticulture.
La régulation des marchés européens, le parti socialiste en a rêvé, nous l'avons faite ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Olivier Dussopt, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le président, j'aurais aimé au préalable rappeler à M. le ministre de l'agriculture que c'est son collègue M. Barnier qui, au nom du Gouvernement français, avait voté la libéralisation des droits de plantation. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Cela dit, je veux surtout réagir aux insinuations scandaleuses de notre collègue du Nord, qui n'a pas craint d'être grotesque en reliant un fait d'actualité à un marché passé, il y a presque quatre ans, le 1er février 2008, par Pierre Mauroy. (« Et alors ? » sur plusieurs bancs du groupe UMP.) A un moment, je me suis demandé s'il n'allait pas évoquer les marchés du tunnel sous la Manche !
Ces insinuations sont scandaleuses. Elles montrent, chers collègues de la majorité, que vous avez fait le choix de mener une campagne de caniveau. (Rires et exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.) L'élection présidentielle vaut mieux que ça. Les Français veulent que l'on parle de leur quotidien, de vos échecs en matière d'emploi, de sécurité et de pouvoir d'achat. Si vous voulez parler de la justice, nous en parlerons également, mais pour rappeler sans cesse notre attachement à une justice indépendante et sereine, qui ne travaille pas sous l'oeil et l'influence du pouvoir.
Car s'il en est qui ont des comptes à rendre sur leur rapport avec la justice, c'est bien vous, mesdames et messieurs les membres du Gouvernement !
C'est vous qui vous intéressez d'assez près à l'affaire Takieddine pour qu'un ancien ministre de l'intérieur se permette d'appeler un de ses amis en garde à vue pour l'informer du contenu de procès-verbaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
C'est vous qui refusez de lever intégralement le secret défense sur l'affaire Karachi et qui refusez que la vérité éclate totalement, alors que, chaque semaine, un proche du pouvoir est placé en garde à vue. (Mêmes mouvements.)
C'est encore vous qui vous appuyez sur un procureur zélé pour freiner et délocaliser l'affaire Bettencourt, dès lors qu'une juge d'instruction s'y intéresse de trop près. (Mêmes mouvements.)
C'est vous aussi qui avez multiplié les nominations de proches dans les parquets comme dans les grandes cours, parfois contre l'avis du Conseil supérieur de la magistrature, et c'est votre ministre de l'intérieur qui justifie le recours massif aux fadettes et le viol du secret des sources journalistiques (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC), qui donne les procès-verbaux à la presse, voire en organise a diffusion.
Le débat sur la justice, qu'il s'agisse de son indépendance ou des moyens dont elle manque cruellement, nous l'aurons devant les Français. En attendant, quand la majorité cessera-t-elle de faire diversion pour éviter de parler du véritable bilan du Gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Monsieur Dussopt, on ne peut que profondément regretter la façon partisane dont vous abordez la question de la justice (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR), qui en dit long sur l'idée que vous vous faites de celle-ci. La campagne présidentielle doit être l'occasion de poser les véritables questions, notamment dans ce domaine, afin que les Français tranchent. La façon dont vous le faites, vous, n'est ni digne ni conforme à la réalité.
Vous avez évoqué l'affaire Karachi. Sur ce point, je répondrai deux choses. Tout d'abord, il y a une affaire ; le parquet l'a suivie et, à chaque nouveau développement, il a étendu la saisine des juges. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Ensuite, le Gouvernement a toujours veillé à déclassifier tous les documents nécessaires à la manifestation de la vérité. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe SRC.) C'est vrai ! C'est notre façon à nous de permettre à la justice de travailler dans l'efficacité et la sérénité.
Encore une fois, monsieur Dussopt, la façon dont vous abordez la question n'est pas la bonne. Je regrette que vous ayez choisi cette voie-là alors qu'il en est d'autres que nous pourrions suivre tous ensemble pour mettre en oeuvre le grand service public de la justice auquel les Français ont droit. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Éric Straumann, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
La France se distingue par un réseau ferroviaire d'ampleur, qui continue de se développer, comme en témoignent les investissements massifs en cours, grâce aux engagements du Gouvernement pris dans le cadre du Grenelle de l'environnement.
J'en veux pour preuve la mise en service, dimanche dernier, du TGV Rhin-Rhône, qui permettra le désenclavement de certains territoires, en particulier la Franche-Comté et l'Alsace. Ainsi les Parisiens disposeront-ils désormais de vingt et une correspondances quotidiennes pour rallier Colmar et visiter, par exemple, son marché de Noël. Dijon et Besançon sont maintenant à moins de deux heures du Haut-Rhin, Lyon à trois heures et Marseille à moins de cinq heures.
En parallèle, des investissements de rénovation du réseau ferroviaire sont engagés et vont aller croissant, dans un souci de sécurité et de modernisation. Nous ne pouvons que nous réjouir de ces avancées.
Ces deux éléments ont cependant entraîné, le 11 décembre dernier, des changements d'horaires sur plus de 85 % des lignes. Il s'agit là d'une première historique, autant dire un véritable « big bang », qui a pu avoir des impacts sur les déplacements de millions de clients de la SNCF. Je sais que la SNCF reste attentive aux situations que les élus peuvent faire remonter. Aussi, madame la ministre, pouvez-vous nous faire un point sur la mise en place de ces nouveaux horaires ?
La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
Monsieur le député, la mise en place de nouveaux horaires pour les trains à compter du 11 décembre a été une réussite. Ce n'était pourtant pas gagné d'avance car, comme vous l'avez dit, 85 % des horaires se sont trouvés modifiés, et nombreuses étaient les Cassandre qui nous annonçaient une catastrophe.
Thierry Mariani et moi-même avons tout de même pris la décision de modifier les horaires, en conscience et dans un esprit de responsabilité. Pour être risqué, le changement n'en était pas moins nécessaire, pour trois raisons.
Premièrement, la mise en service de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône, que vous avez évoquée, provoque des modifications étendues sur la circulation des trains, avec un effet domino. Deuxièmement, la multiplication des chantiers de travaux de rénovation des voies nécessite des aménagements d'horaires. C'est la conséquence de vingt ans de sous-investissement en matière d'entretien des lignes, qu'il nous faut aujourd'hui rattraper. Troisièmement, enfin, la mise en place du cadencement, qui permet une optimisation du réseau en augmentant le nombre de trains, se traduit également par des changements d'horaires.
La réussite de l'opération qui vient d'être mise en oeuvre, nous la devons aux hommes et aux femmes de la SNCF et de RFF, qui se sont mobilisés pour informer, mettre en ligne rapidement les nouveaux horaires, concerter, essayer de répondre au mieux aux attentes et sollicitations des usagers, que de nombreux parlementaires ont entendues et fait remonter.
Certes, il subsiste quelques difficultés, et nous avons demandé à la SNCF de rester vigilante dans les prochains mois. Une cellule de veille a été mise en place par la SNCF et RFF : le PC « nouveaux horaires », que Thierry Mariani a visité lundi.
Par ailleurs, Nicole Notat, médiatrice des nouveaux horaires, restera à l'écoute pour trouver des solutions dans les meilleurs délais : ainsi le prolongement du Paris-Orléans qui, partant de la gare d'Austerlitz à 23 heures 08, ira désormais jusqu'à Tours, ou encore les nouveaux arrêts TGV en gare d'Angoulême et de Lyon-Saint-Exupéry.
Bref, nous faisons en sorte de trouver des solutions pour que le TGV, le train quotidien, les transports en commun restent le mode de transport écologique le plus apprécié des Français. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Delphine Batho, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Monsieur le Premier ministre, hier, un ancien ministre a été placé en garde à vue pour être entendu dans l'enquête sur le financement illicite de la campagne présidentielle d'Édouard Balladur en 1995, en lien avec des contrats d'armement signés en 1994 (Protestations sur les bancs du groupe UMP), puisque la justice privilégie désormais la piste politico-financière dans l'affaire de l'attentat de Karachi, qui a coûté la vie de quatorze personnes.
Dans cette affaire, deux autres proches de Nicolas Sarkozy, M. Thierry Gaubert et M. Nicolas Bazire – auquel le Président de la République a d'ailleurs renouvelé sa confiance à la télévision le 27 octobre dernier – sont mis en examen pour recel et complicité d'abus de biens sociaux, de même qu'un intermédiaire bien connu des chefs de l'UMP, Ziad Takieddine.
Le 22 septembre dernier, l'Élysée a publié un communiqué de presse indiquant, au mépris des règles du secret de l'instruction, que « s'agissant de l'affaire dite "de Karachi", le nom du chef de l'État n'apparaît dans aucun des éléments du dossier ». Outre que c'est factuellement faux, il est établi qu'à l'époque où Nicolas Sarkozy était ministre du budget, son ministère a autorisé la création des sociétés Heine et Eurolux, sociétés-écrans basées dans un paradis fiscal et ayant servi à dissimuler l'argent des rétrocommissions. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe NC. Arrêtez ! C'est lamentable !
De nombreux indices démontrent que ces rétrocommissions présentent des liens avec le financement illégal de la campagne d'Édouard Balladur, dont Nicolas Sarkozy était le porte-parole. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) J'ajoute que cette affaire a donné lieu à une intrusion illégale dans le déroulement de la justice d'un ancien ministre, conseiller de Nicolas Sarkozy, chef de la cellule riposte de l'UMP, Brice Hortefeux, qui a cherché à prévenir l'un des protagonistes de sa prochaine mise en cause. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Malgré les entraves à la justice, malgré le secret défense qui n'est toujours pas levé – contrairement à ce que vous avez dit, monsieur le garde des sceaux –, à l'évidence l'affaire Karachi concerne Nicolas Sarkozy. ! (« Non ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Ma question est la suivante : que savait Nicolas Sarkozy, ministre du budget à l'époque, et quel a été son rôle ? Nous attendons vos explications !
La parole est à M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Madame la députée, je veux d'abord vous dire une chose toute simple : la longue liste de personnes mises en examen que vous venez d'énumérer est bien la preuve que la justice travaille librement ! Si elle n'était pas libre, nous n'aurions probablement pas toutes ces interrogations… Les magistrats conduisent leur enquête en toute liberté, en toute autonomie et en toute responsabilité. Si une personne se trouve aujourd'hui en garde à vue, c'est bien parce qu'un magistrat l'a décidé, et c'est sous son contrôle que se déroule cette garde à vue : le Gouvernement n'intervient pas dans le cours de la justice.
Je le répète, le garde des sceaux n'est jamais intervenu dans le cours de la justice…
…et les magistrats travaillent librement. C'est la vérité, j'en atteste devant l'Assemblée nationale !
Quel est le rôle de Nicolas Sarkozy dans cette affaire ? C'est à cette question qu'il faut répondre !
Vouloir faire un procès ici, alors qu'il doit être fait par les seuls magistrats, c'est mélanger les genres et nier l'indépendance de la justice. Nous veillerons, pour notre part, à ce que la justice reste dans son rôle et puisse faire son travail jusqu'au bout, dans le calme et la sérénité, car il n'appartient à personne d'autre qu'aux juges de mener leur travail, et ils le font fort bien ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Michel Bouvard, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. le ministre chargé des transports.
Lorsque le Président de la République a assisté, au printemps dernier, aux cérémonies du cent cinquantième anniversaire du rattachement de la Savoie à la France, il a réaffirmé la priorité que constitue la nouvelle liaison ferroviaire Lyon-Turin pour améliorer les relations ferroviaires entre la France et l'Italie et pour favoriser le transport modal.
Les travaux de modernisation du tunnel ferroviaire du Mont-Cenis, créé par Cavour il y a plus de cent cinquante ans, sont aujourd'hui achevés, pour un montant de 144 millions d'euros, permettant le passage des gros conteneurs par la voie ferrée. Parallèlement, grâce à la négociation que vous avez menée avec beaucoup de compétence et de ténacité, un accord a été trouvé avec nos partenaires italiens sur la répartition des coûts pour le tunnel de base, permettant à la France d'assumer 42,1 % de la dépense, contre 57,9 % pour la partie italienne. Cet accord permet le maintien des financements attendus de l'Union européenne, à hauteur de 671 millions d'euros, et d'engager les travaux.
En Italie, où le début du chantier avait beaucoup tardé, les travaux préparatoires sont aujourd'hui engagés dans la vallée de Suse. Les travaux dans la galerie de reconnaissance de la Maddalena commenceront dans les prochaines semaines.
Mes questions, monsieur le ministre, sont donc très simples. Tout d'abord, s'agissant du tunnel du Mont-Cenis, pourquoi, alors que les travaux sont achevés, la circulation des plus gros conteneurs n'a-t-elle toujours pas été activée et pourquoi le trafic se fait-il encore sur une seule voie ? S'agissant de l'accord franco-italien, dans quel délai l'avenant au traité de Turin nous sera-t-il présenté ? En effet, le Parlement devra le ratifier pour permettre le démarrage effectif des chantiers et le choix de l'opérateur. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Monsieur Bouvard, vous vous êtes toujours investi fortement dans ce dossier, qui constitue à la fois un vrai enjeu en matière de transport, avec la liaison entre les deux côtés des Alpes, mais aussi dans le domaine écologique, puisqu'il s'agit effectivement d'encourager de nouvelles formes de transport.
Où en est-on ? Vous l'avez dit vous-même, le projet de tunnel entre Lyon et Turin s'est heurté à une forte opposition en Italie. J'ai rencontré avant-hier mon nouvel homologue italien, M. Mario Ciaccia. Nous sommes arrivés, avec Nathalie Kosciusko-Morizet, à obtenir, le 10 novembre, un accord sur la clé de financement de ce fameux ouvrage, en garantissant les subventions européennes.
Compte tenu du déroulement des discussions avec mon homologue, cet accord devrait normalement être finalisé la semaine prochaine à l'occasion de la Commission intergouvernementale qui se tiendra mardi à Rome. Si le calendrier parlementaire nous le permet, ce que je souhaite bien sûr, il pourrait être présenté au Parlement au tout début de l'année prochaine, ce qui permettrait de le rendre définitif.
Pour ce qui est du tunnel ferroviaire du Mont-Cenis, la mise en service à deux voies au gabarit GB1 devrait elle aussi être faite, selon mon homologue italien, au tout début de l'année prochaine.
Plus largement, quand on fera le bilan des cinq dernières années, il apparaîtra que notre majorité aura lancé quatre nouvelles lignes TGV, relancé le projet de tunnel Lyon-Turin et enfin engagé le projet du canal Seine-Nord.
On pourra ainsi comparer ce que nous avons fait ensemble et ce qu'a fait une autre majorité : abandonner le canal Rhin-Rhône uniquement pour faire plaisir à des écologistes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Patrick Bloche, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture et de la communication.
Disparition, prévue demain, de la version papier de France Soir, avec à la clé quatre-vingt-neuf suppressions d'emplois sur cent vingt-sept, redressement judiciaire programmé lundi pour La Tribune, plan d'économies prévoyant trente à quarante départs volontaires pour Les Échos, dépeçage annoncé de L'Expansion dans le cadre d'un projet de restructuration intégrant L'Express : les mauvaises nouvelles se succèdent dans la presse française.
Elles touchent tout particulièrement les journaux d'information économique et financière, au moment même où, en pleine crise de la zone euro, nos concitoyens et les acteurs économiques ont plus que jamais besoin, pour se forger leur opinion, d'une presse pluraliste et d'un journalisme de qualité reflétant la diversité des analyses et des points de vue.
Après avoir trop longtemps été, soit passif, soit fataliste, le Gouvernement s'est risqué, par votre voix, monsieur le ministre de la culture et de la communication, à quelques commentaires d'une grande légèreté. Concernant France Soir, je vous cite : « c'est compliqué de demander à M. Pougatchev de remettre la main au pot ». Quant à la recherche actuelle d'un repreneur pour La Tribune, propriété de Mme Decamp, je vous cite encore : « C'est la dame qui est en train de suivre deux pistes différentes. J'espère bien qu'elle va y arriver ». Justement, monsieur le ministre : vous en avez dit trop ou pas assez, quand on sait que M. Soubie, ancien conseiller social de M. Sarkozy, est en embuscade pour la reprise de La Tribune !
Quelles sont donc ces deux pistes que vous évoquez et, surtout, quand allez-vous vous mobiliser pour sauver l'essentiel, à savoir l'indépendance de la presse à l'égard des intérêts économiques et le pluralisme de l'information ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication.
Monsieur le député, je ne vous ai pas attendu pour me mobiliser pour la presse, contrairement à ce que vous laissez entendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur certains bancs du groupe NC.)
Jamais l'État n'avait réformé si rapidement et si profondément le secteur de la presse, à l'heure où la communication et les médias sont confrontés à une révolution numérique sans précédent. L'État a consacré près de 580 millions d'euros en moyens nouveaux sur trois ans.
La presse enregistre des résultats prometteurs, contrairement à ce que vous dites, en bon adepte de la dépression culturelle permanente : redressement du chiffre d'affaires du secteur en 2010, chiffres de ventes qui affichent une hausse de la presse quotidienne nationale et progression générale de la presse d'actualité.
Néanmoins, dans ce climat, il est certain qu'un certain nombre de titres connaissent des difficultés. La Tribune, par exemple, si elle a prouvé, depuis sa création, qu'elle contribuait fortement à l'information économique de qualité, elle n'a jamais atteint l'équilibre financier. Une vingtaine de propositions, et non seulement deux, ont été déposées à ce jour, dont certaines envisagent un modèle bimédia. C'est encourageant sur la qualité et la crédibilité du titre.
Je viens de vous dire, monsieur Bloche : il y en avait deux au départ, il y en a vingt maintenant. Les choses évoluent dans un sens positif, et c'est notamment parce que le ministère de la culture et de la communication, que j'ai l'honneur de servir, s'en occupe !
France Soir subit, quant à lui, les conséquences d'une crise que l'on connaît depuis une vingtaine d'années et ce ne sont pas les 70 millions injectés par M. Pougatchev qui ont permis de redresser le titre. France Soir, c'est aussi une marque qui appartient à la mémoire de la France tout entière.
À ce titre, j'insiste auprès de M. Pougatchev pour qu'il prenne en compte toutes les difficultés, notamment celles des journalistes, pour lesquels nous avons créé une cellule particulière,…
…avec une convention signée avec deux ministères pour les aider à retrouver le plus vite possible un emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Rémi Delatte, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, ma question s'adresse à Mme Nadine Morano, ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle.
Madame la ministre, la loi du 24 novembre 2009, relative à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, a créé le droit à l'orientation professionnelle et prévu que l'exercice de ce droit s'appuie sur le service public de l'orientation.
La création du SPO part d'un constat. Les ressources en matière d'orientation sont de plusieurs types : les lycéens s'adressent aux conseillers d'orientation de l'éducation nationale, les étudiants aux services d'information et d'orientation professionnelle des universités, les jeunes demandeurs d'emploi aux missions locales, les autres demandeurs d'emploi à Pôle emploi ou à l'Association pour l'emploi des cadres, les personnes handicapées à Cap Emploi, sans compter les salariés qui trouvent des conseils auprès des organismes paritaires collecteurs agréés et des Fonds de gestion du congé individuel de formation. Or ces différents acteurs, malgré leur compétence, n'apportent chacun qu'une partie de l'information disponible, qu'il s'agisse des diplômes existants, de la situation actualisée de l'emploi ou des perspectives futures.
La mise en place du SPO vise donc à fédérer l'ensemble des ressources existantes, de manière à renforcer la capacité de réponse de chaque acteur. Dans le contexte économique actuel, son déploiement est donc très attendu : il favorisera l'orientation des jeunes et des demandeurs vers les métiers qui recrutent et leur apportera un conseil personnalisé et plus complet en matière de formation et d'orientation professionnelle.
Madame la ministre, quel bilan tirez-vous de la mise en oeuvre du SPO ? Où en est le processus de labellisation des sites dans les territoires ? Enfin, comment envisagez-vous le déploiement du SPO dématérialisé ?
La parole est à Mme Nadine Morano, ministre chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle.
Vous avez raison, monsieur le député, l'orientation et la formation professionnelle de nos concitoyens est un enjeu majeur : quel que soit son âge, où qu'il habite, quel que soit son niveau de formation, tout un chacun a besoin de trouver la bonne information pour s'orienter dans sa vie professionnelle et trouver des formations à des métiers qui recrutent.
Le service public de l'orientation est d'abord constitué d'un service dématérialisé, informatique, que nous avons lancé le 6 décembre dernier avec Robert Pitte, délégué à l'information et à l'orientation. C'est un travail interministériel, mené avec l'éducation nationale, l'enseignement supérieur et de la recherche, et mon ministère.
Ce site s'appelle « Orientation pour tous » ; chacun peut y apprendre quels sont les métiers qui recrutent, et lire les fiches d'information nécessaires. Nous avons voulu accompagner ce site d'un dispositif performant : un service téléphonique de premier accueil, avec un numéro de téléphone gratuit, le 0811 70 39 39, que vous pouvez appeler dès maintenant.
Pour aller encore plus loin dans l'accompagnement de nos concitoyens, nous avons décidé de labelliser des sites qui permettront d'accueillir les Français qui ont besoin des s'informer sur les métiers ou d'être réorientés, ou encore qui souhaitent créer leur entreprise. Dans chaque bassin d'emploi, des sites seront ainsi labellisés. Nous espérons en labelliser 350 dans les mois qui viennent. Plusieurs sites ont déjà reçu leur label ; je pense notamment au Campus des métiers, à Marseille, qui est déjà en fonction et qui marche très bien. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Gwendal Rouillard, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Je suis désolé, monsieur Cazeneuve, mais la parole est à Gwendal Rouillard. (Mmes et MM. les députés socialistes se lèvent et protestent très vivement.)
Mes chers collègues, je suis fort préoccupé de la dégradation de la qualité de nos débats. (Vives réactions sur les mêmes bancs.) Nous avons un règlement, les Français en sont témoins ; les questions doivent parvenir jusqu'à quatorze heures et uniquement jusqu'à quatorze heures. Dès lors, aucun changement n'est possible, sauf au bénéfice du président du groupe. S'il le souhaite, je lui donne la parole. (Exclamations prolongées sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur Ayrault, si vous le voulez, prenez la parole, mais je ne peux pas déroger à ce qui est déjà un arrangement destiné à permettre à chacun de s'exprimer. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) J'insiste sur la nécessité de respecter notre règlement !
La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.
Monsieur le président, ce n'est pas la première fois que je vous informe, en tant que président de groupe, que tel député en remplaçait un autre. Cela ressort de la responsabilité de chaque groupe parlementaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Les droits des groupes parlementaires sont inscrits dans la Constitution ; chaque groupe a la liberté de désigner les orateurs de son choix, et c'est la responsabilité du président du groupe de le faire ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Je vous dirai, puisque vous me laissez la parole, que je considère cette affaire, qui peut mettre en cause l'actuel Président de la République, comme particulièrement grave. (Vives protestations sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Vous avez entendu tout à l'heure les questions précises posées par Mme Batho, qui ont été écoutées dans un silence qui en disait long. Vous avez tout simplement empêché M. Bernard Cazeneuve de prendre la parole, pour la raison suivante : Bernard Cazeneuve a été le rapporteur de la mission d'information parlementaire sur l'affaire Karachi, et vous faites tout…
…pour qu'il ne puisse pas s'exprimer devant l'Assemblée nationale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. — Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Je regrette que vous ayez agi en partisan UMP et non en président de la représentation nationale tout entière !
Eh bien, dans ce cas, posez la question ! Posez la question !
Puisque vous ne la posez pas, nous avons terminé les questions au Gouvernement.
Procédure applicable aux questions au Gouvernement
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Jean Mallot.)
M. le Président a reçu de M. le Premier ministre une lettre l'informant que, la commission mixte paritaire n'ayant pu parvenir à l'adoption d'un texte sur le projet de loi de finances pour 2012, le Gouvernement demande à l'Assemblée de procéder, en application de l'article 45, alinéa 4, de la Constitution, à une nouvelle lecture de ce texte.
En conséquence, l'ordre du jour appelle la discussion, en nouvelle lecture, de ce projet de loi (nos 4028, 4071).
La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les députés, ce projet de loi de finances marque une étape décisive sur notre chemin de désendettement. Avec ce budget, la France va en effet ramener son déficit de 5,7 % de la richesse nationale en 2011 à 4,5 % en 2012, comme elle s'y était engagée.
Je veux, avant toute chose, saluer le courage et la détermination dont a fait preuve la majorité tout au long des derniers mois. Malgré le ralentissement de l'économie, ensemble, nous avons gardé le cap et pris toutes les mesures nécessaires pour réduire les déficits sans peser sur la croissance.
Et garder le cap, vous le savez, cela veut dire poursuivre nos efforts d'économies sur les dépenses. C'est notre priorité absolue. Vous venez de le constater lors de la discussion du collectif, nous avons d'ores et déjà pris un an d'avance sur notre objectif de réduction des dépenses de l'État d'une année sur l'autre. En 2011, les dépenses de l'État auront progressé de 200 millions de moins qu'en 2010. Pour aller plus loin encore en 2012, nous avons uni nos efforts, dans un esprit de totale coresponsabilité. J'en remercie le rapporteur général. Mais j'y reviendrai.
Le résultat, c'est un déficit de l'État réduit de 2 milliards d'euros à l'issue de vos travaux, avec un solde budgétaire ramené à 78,8 milliards d'euros, avant que le Sénat ne se penche à son tour sur ce texte, dans un esprit bien différent.
Car l'examen de ce budget 2012 a mis en lumière l'ampleur des divergences qui séparent la majorité de l'opposition, mais aussi l'Assemblée nationale du Sénat. L'échec, prévisible, de la commission mixte paritaire est venu le confirmer, parce que le Sénat a choisi de défaire plutôt que de faire. Il aurait pu participer à l'élaboration du budget de la France et renforcer ainsi l'unité nationale face à la crise. Il a préféré pratiquer la politique du contre-pied systématique et transformer ainsi la Haute assemblée en tribune de l'opposition.
Cette décision, je la regrette, car la France aurait été plus forte si nous avions pu forger un consensus solide sur la réduction des déficits. Mais cette décision aura au moins eu le mérite de démontrer qu'il n'existe aucune alternative sérieuse à la stratégie du Gouvernement. Le texte qui vous est transmis en est la meilleure preuve.
Le budget adopté par le Sénat est en effet un budget factice, voire un peu surréaliste, puisqu'il ne donne même pas à l'État les moyens de remplir ses missions essentielles : sur trente-deux missions, vingt-deux ont vu leurs crédits purement et simplement rejetés. Le Sénat aurait pu redéployer des dépenses au sein des missions, faire des choix, bref, affirmer une stratégie. Il s'est contenté de s'opposer purement et simplement. Le résultat, c'est un budget qui n'accorde pas le moindre euro ni à l'enseignement scolaire, ni à l'enseignement supérieur, ni à la justice, ni à la sécurité, ni même à l'écologie.
En revanche, les sénateurs ont jugé indispensable d'exonérer les collectivités territoriales de tout effort de réduction des dépenses.
Ce choix, nous ne le partageons pas. Nous pensons qu'aucun acteur public ne doit s'exonérer des efforts que nous demandons aux Français. Vous le savez, nous avions prévu une contribution des collectivités de 200 millions d'euros. Cette contribution était exactement proportionnelle au poids des dotations aux collectivités dans le budget de l'État et elle représentait une baisse d'un millième de la dépense publique locale.
Cet effort, que l'on peut qualifier de mesuré, le Sénat l'a jugé insoutenable et l'a remis en cause.
Il a même ajouté 450 millions de dépenses supplémentaires au bénéfice exclusif des collectivités. C'est une inégalité radicale. Aujourd'hui, l'État prend sa part de l'effort supplémentaire de réduction des déficits, la sécurité sociale également. Les collectivités ne peuvent pas être les seules à rester à l'écart. Elles doivent à leur tour s'inscrire dans cette mobilisation d'intérêt national.
Et puis, vous les aidez, les collectivités locales, en proposant de financer leurs achats de gilets pare-balles !
Je le dis très clairement, je suis prête à poser la question des normes qui pèsent sur les collectivités locales.
C'est la proposition de loi Doligé, que le Sénat, désormais de gauche, a retirée de son ordre du jour. Quel paradoxe ! Pourtant nous pourrions travailler avec les collectivités locales.
Nous pourrions alléger les normes, et, en retour, les collectivités deviendraient des acteurs pleins et entiers de la lutte contre les déficits. Ce serait un pacte entre l'État et les collectivités locales, qui mériterait d'être concerté, débattu, négocié.
Mesdames, messieurs les députés, vous le savez, aujourd'hui, tandis que l'État diminue le nombre de ses fonctionnaires, les collectivités, elles, continuent de recruter plus de 37 000 agents par an.
Et le résultat, c'est une masse salariale locale qui, hors mesures de décentralisation, a augmenté de 4,3 % par an entre 2006 et 2010, contre 0,9 % au sein de l'État.
Mais c'est en recettes que la Haute assemblée a donné la pleine mesure de sa créativité, avec pas moins de quarante-deux taxes créées ou modifiées. Ces quarante-deux taxes ou prélèvements sont venus s'ajouter aux dix-sept déjà votés par le Sénat dans le PLFSS, soit, au total, cinquante-neuf nouveaux prélèvements votés en deux textes !
L'alternative que vous n'avez cessé d'évoquer, mesdames et messieurs de l'opposition, le Sénat lui a donné son vrai visage : celui d'un choc fiscal de 32 milliards qui briserait net la croissance et amputerait le pouvoir d'achat de tous les ménages.
Et en matière de croissance brisée, vous en connaissez un rayon, madame la ministre !
Un seul exemple : les sénateurs ont alourdi de 20 milliards d'euros la fiscalité sur les entreprises, en augmentant de 50 % l'impôt sur les sociétés – 50 % en un an –, notamment en interdisant la déductibilité des intérêts d'emprunt à l'impôt sur les sociétés. Voilà une mesure qui rapporte visiblement beaucoup plus qu'ils n'escomptaient. C'est une hausse d'impôts insupportable – 50 % en un an ! –, qui pèserait sur toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, qu'elles investissent ou non, qu'elles embauchent ou non.
On est loin, très loin des promesses de campagne du parti socialiste. Vous nous annonciez une modulation à la baisse ou à la hausse de l'impôt sur les sociétés. Eh bien, la réalité, c'est que la seule modulation de l'impôt que vous connaissiez, en tout cas au Sénat, mesdames et messieurs de l'opposition, elle se fait à la hausse, et pour toutes les entreprises, petites ou grandes !
Ce choc fiscal, ce sont tous les Français qui en paieraient le prix. Je pense notamment à la remise en cause de la défiscalisation des heures supplémentaires, qui se traduirait par une perte de 450 euros pour 9 millions de Français qui travaillent plus pour gagner plus. Cette défiscalisation est une mesure dont nous savons qu'elle bénéficie à des salariés dont le salaire est en moyenne de 1 500 euros par mois, et particulièrement à ceux des petites et moyennes entreprises.
Et pourtant, mesdames et messieurs de l'opposition, les 35 heures auraient peut-être pu vous servir de leçon. Car ce n'est pas en partageant la pénurie que l'on créera de la richesse.
La durée effective du travail est de 35 heures en Allemagne, contre 38 heures en France !
Comme ce n'est pas en alourdissant les charges ou les impôts sur les entreprises que l'on créera des emplois. Le partage du travail, ça ne marche pas. Ça ne marchait pas en période de croissance, ça ne marchera pas plus en période de crise.
L'examen du budget par le Sénat aura donc eu une vertu, celle de montrer aux Français que votre projet, c'est la récession programmée. Car tous ceux qui refusent, sur ces bancs, de faire porter l'effort d'abord sur les dépenses, tous ceux qui refusent de parler de réformes et d'économies condamnent le pays à une cure d'austérité fiscale,…
…une austérité fiscale sans précédent : celle des sénateurs, celle de la gauche.
La seule stratégie crédible, c'est, je le crois, celle du Gouvernement et de sa majorité, celle qui est au coeur de ce budget, un budget que nous avons élaboré en toute coresponsabilité. Je veux remercier l'ensemble des parlementaires de la majorité pour le travail que nous avons accompli ensemble. Je pense en particulier aux présidents Christian Jacob et Yvan Lachaud.
Car ce projet de loi de finances, mesdames et messieurs les députés, est l'oeuvre commune du Gouvernement et de la majorité, réunis autour de principes clairs.
Le premier de ces principes, c'est la priorité absolue aux économies sur les dépenses. Parce que notre conviction, mesdames et messieurs de l'opposition, c'est que les efforts doivent d'abord peser sur l'État et sur les administrations. J'en veux pour preuve la baisse historique de 1,5 milliard d'euros des dépenses de l'État, prévue par ce budget. Ces économies, nous les avons décidées et réparties ensemble. Je veux remercier tout spécialement M. le rapporteur général, Gilles Carrez, qui a joué un rôle central dans la mise en oeuvre de ce fameux rabot, ainsi que les rapporteurs spéciaux de votre commission des finances.
Nous avons beaucoup travaillé ensemble pour identifier, ministère par ministère, mission par mission, les marges de manoeuvre dont nous disposions. Au nom du Gouvernement et en mon nom personnel, je tenais à vous dire que nous sommes reconnaissants au Parlement de s'être pleinement inscrit dans cette démarche de responsabilité budgétaire.
C'est elle qui nous a également conduits, à l'initiative d'Yves Deniaud dont je veux saluer l'engagement sur ces questions, à renforcer l'information du Parlement ainsi que nos efforts en matière de politique immobilière de l'État.
Vous le savez, nous avons déjà beaucoup fait dans ce domaine, notamment en fixant des normes de surface et de loyers pour toutes les administrations. Le résultat, c'est, pour la première fois, une diminution des surfaces immobilières occupées par l'État, de 3 %, soit près de 330 000 mètres carrés depuis 2008. Et nous allons continuer sur cette voie.
N'oubliez pas la hauteur sous plafond, comme à l'Élysée. Il faut aussi baisser les plafonds !
La bonne gestion, ce doit être la règle pour toutes les administrations et pour tous les acteurs publics. C'est pourquoi je veux remercier Gilles Carrez, mais aussi Michel Bouvard et Louis Giscard d'Estaing, avec lesquels nous avons créé un plafond d'emploi pour les autorités publiques indépendantes.
Nous avons également travaillé ensemble pour intensifier les efforts d'économies demandés aux opérateurs de l'État. Nous avons ainsi remis de l'ordre dans les taxes affectées dont ils bénéficient : leur dynamisme est parfois sans commune mesure avec leurs besoins réels et l'évolution des ressources de l'État.
Mieux calibrer leurs recettes, c'est notre objectif commun à travers, par exemple, le mécanisme de stabilisation du niveau de ressources de France Télévisions, un dispositif créé à l'initiative de Patrice Martin-Lalande, Jean-François Mancel, Michel Bouvard et Charles de Courson.
Ce travail approfondi sur les dépenses nous a aussi conduits à renforcer, lorsqu'il le fallait, les moyens de certains opérateurs. Je pense ainsi à l'EPARECA, l'établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux, qui joue un rôle central dans la politique de la ville et dont les ressources ont été augmentées grâce à Bernard Gérard, Laure de La Raudière, Hervé Novelli et Marc-Philippe Daubresse.
Tout au long de l'examen de ce projet, nous avons uni nos efforts pour améliorer l'efficacité de nos politiques publiques et rationaliser nos dépenses d'intervention. C'est dans cet esprit qu'avec Pierre Méhaignerie et Gilles Carrez, nous avons fait évoluer le prêt à taux zéro. En concentrant ce dispositif sur le neuf et en le plaçant sous condition de ressources, nous l'avons rendu plus efficace tout en diminuant son coût pour les finances publiques.
Cet effort de rationalisation, nous l'avons également poursuivi pour le bonus-malus automobile : grâce à Hervé Mariton et à Gilles Carrez, nous avons créé un compte d'affection spéciale qui garantira l'équilibre d'un dispositif dont l'efficacité ne fait aucun doute.
D'abord, donc, des économies sur les dépenses. Ensuite – et ensuite seulement –, des recettes complémentaires réparties équitablement. C'est notre stratégie et nous l'avons appliquée ensemble tout au long de l'examen du projet de loi de finances.
Car à la différence de l'opposition, qui voudrait multiplier les nouvelles taxes sans vision d'ensemble, notre politique fiscale repose sur deux maîtres mots : équité et compétitivité. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC.)
L'équité est au coeur de ce budget, avec la création de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus. Là aussi, c'est notre oeuvre commune et je veux saluer l'implication de votre rapporteur général,…
…ainsi que celle des députés du Nouveau Centre, dans la conception de cette nouvelle imposition : ce sont nos débats qui ont conduit à construire cette contribution autour de deux tranches et à la rendre applicable jusqu'au retour à l'équilibre budgétaire.
L'équité est également au coeur de notre effort de réduction des niches fiscales et sociales. Comme l'OCDE vient de le souligner une nouvelle fois, la meilleure manière de renforcer la justice fiscale aujourd'hui, c'est de réduire les avantages fiscaux et sociaux pour faire converger les taux réels et les taux faciaux d'imposition.
Mettre la réalité fiscale en accord avec nos principes : c'est précisément ce que nous faisons avec, par exemple, le plafonnement global des niches sur l'impôt sur le revenu. C'est ce gouvernement qui, le premier, aura mis un coup d'arrêt à l'optimisation fiscale des particuliers. Grâce aux députés du Nouveau Centre, en particulier à Yvan Lachaud et à Charles de Courson, nous avons renforcé une nouvelle fois la progressivité de l'impôt sur le revenu, en baissant ce plafond global.
Alors, je le dis à l'opposition, qui ne cesse d'en appeler à un « grand soir fiscal » : …
…là aussi, vous avez un quinquennat de retard. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Sous Lionel Jospin, un couple avec 1 million d'euros de ressources pouvait ne payer aucun impôt sur le revenu, à condition de choisir les bonnes niches. Avec le plafonnement global, ce même couple paiera au moins 340 000 euros d'impôt sur le revenu, contribution exceptionnelle comprise.
La réforme fiscale dont ce pays avait besoin, c'est donc ce gouvernement et cette majorité qui l'ont menée et qui la compléteront avec le projet de loi de finances rectificative.
Le deuxième maître mot de notre politique fiscale est la compétitivité.
À cet égard, la différence entre majorité et opposition est très claire : notre politique fiscale, raisonnée, ciblée et équitable, préserve la croissance et renforce notre compétitivité. Bref, elle est tout le contraire du programme de hausse permanente des impôts voulu par l'opposition : si celle-ci commence par les augmenter de 30 milliards d'euros en l'espace d'une seule année, je n'ose imaginer le niveau de pression fiscale qui serait atteint en cinq ans. Je sais en revanche que le pays, lui, ne le supporterait pas, pas plus que notre économie et nos emplois !
Le niveau des prélèvements obligatoires est plus élevé aujourd'hui qu'il y a cinq ans, madame la ministre !
C'est la raison pour laquelle, face à la crise, nous avons fait le choix de préserver tous les dispositifs fiscaux et sociaux qui soutiennent la croissance et l'emploi : je pense, par exemple, aux aides à l'emploi à domicile, ou bien encore aux allégements de charges sur les bas salaires, qui ont permis d'amortir partiellement le choc des 35 heures. Il s'agit pour nous de soutenir l'emploi peu qualifié, dans une période de croissance ralentie et de risque de chômage.
La baisse du coût du travail est la clef pour renforcer la compétitivité de notre pays et soutenir la création d'emplois. C'est pourquoi, avec Bernard Reynes et l'ensemble de la majorité, nous avons agi pour alléger les charges pesant sur l'emploi dans l'agriculture.
Vous le voyez, mesdames et messieurs les députés, l'Assemblée nationale a véritablement apporté sa marque à ce texte, en s'inscrivant dans une démarche résolument constructive.
Ensemble, avec courage, avec sérieux, avec responsabilité, nous avons élaboré un budget à la hauteur des enjeux. Un budget qui est une étape importante pour permettre à la France de respecter ses engagements de réduction des déficits. Un budget qui préserve une croissance encore vulnérable…
… et répartit équitablement les efforts entre tous les Français.
C'est ce budget marqué du sceau de la justice et de la crédibilité que le Gouvernement vous demande d'adopter, en rétablissant le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, initialement, le projet de loi de finances pour 2012 comportait soixante-six articles. En première lecture, notre assemblée en a ajouté près de quatre-vingt-dix. C'est donc un texte de cent cinquante-deux articles qui a été soumis au Sénat : soixante-seize ont été votés conformes, cinquante-trois ont été adoptés avec modification, vingt-trois ont été supprimés et quatre-vingt-dix nouveaux articles ont été ajoutés. Ainsi, nous devons examiner dans les prochaines heures pas moins de cent soixante-six articles.
Le Sénat a adopté un texte inconciliable avec les choix décidés par l'Assemblée nationale en première lecture. La commission mixte paritaire n'a donc pas abouti. Mais cela n'a pas empêché des échanges non seulement courtois mais aussi constructifs, j'y reviendrai.
L'une des raisons de l'échec de la CMP tient aux très nombreuses augmentations d'impôts que le Sénat a adoptées. Il a, en particulier, fortement accru les impôts sur les entreprises. Si je ne devais vous donner qu'un seul chiffre, ce serait celui-ci : 30 milliards d'euros d'augmentation d'impôts, dont 80 % pèsent sur nos entreprises.
Alors que la priorité est à la compétitivité et à l'emploi, aggraver de cette manière la fiscalité des entreprises n'est pas raisonnable.
Par ailleurs, nos collègues sénateurs ont repris certaines propositions émises ici même par l'opposition et que nous n'avions pas adoptées : indexation de la prime pour l'emploi, suppression de réformes fiscales inscrites dans la loi de juillet 2007 ou encore dans le collectif budgétaire de juin dernier.
En ce qui concerne les dépenses, le Sénat a supprimé toutes les économies que nous avions pu proposer. Dieu sait pourtant comme nous nous sentions frustrés, à l'issue de la première lecture, estimant que l'effort avait davantage porté sur les recettes, qui ont l'intérêt d'aboutir à un résultat à court terme, que sur les économies qui exigent un processus lent, s'inscrivant dans la durée.
Je ne citerai qu'un seul exemple. Nous avions demandé aux collectivités territoriales un effort de 200 millions d'économies. Moi qui préside le comité des finances locales, je peux dire en toute honnêteté que les budgets locaux peuvent absorber une telle réduction de dépenses, qui représente un millième de l'ensemble des ressources. En outre, il faut souligner que cette contribution était assez logique, puisqu'elle est proportionnelle à la part que les dotations aux collectivités locales représentent dans le budget de l'État, soit 20 %.
Vous me direz que le Sénat est la chambre des collectivités territoriales. C'est vrai, mais cela n'excuse pas tout. Non contents de supprimer ces économies, les sénateurs ont ajouté 350 millions d'euros de dotations supplémentaires !
Je suis certain que le président de l'Association des maires de France, dont je salue la brillante réélection, il y a quelques jours (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC)…
… – oui, vous pouvez applaudir M. Pélissard –, serait très heureux que l'État apporte ces dotations supplémentaires aux communes. Nous en serions tous heureux. Mais il faut aussi être responsable. Alors que la France connaît des déficits trop importants, le nécessaire effort de réduction doit être partagé. On ne dira jamais assez que sur 1 000 milliards de dépenses publiques, soit 56 % de la richesse créée chaque année en France, la part de l'État est de 350 milliards, celle des comptes sociaux de 450 milliards, et celle des collectivités locales de 220 milliards. Il est donc totalement légitime qu'elles participent à cet effort.
Je connais beaucoup d'élus locaux – plusieurs d'entre nous le sont – qui sont tout à fait prêts à assumer, aux côtés de l'État, la responsabilité de rétablir les comptes publics et d'assurer le désendettement de la France.
Plus d'impôts, pas d'économies, voire, au contraire, des dépenses supplémentaires : on ne pouvait se mettre d'accord avec le Sénat sur l'architecture générale du budget.
Cela étant, nous avons essayé d'échanger avec nos collègues sénateurs et nous avons repris, hier, en commission des finances, certaines de leurs propositions.
Je pense à la prorogation du droit fixe de publicité foncière pour les acquisitions réalisées par les organismes HLM, l'exonération de taxe foncière pour les propriétés bâties en faveur des logements conventionnés en tant que logements sociaux conformément à notre souci de favoriser le logement social que ce soit sous la forme de la location ou de l'acquisition.
Nous ne reprenons pas – et j'espère que Mme la ministre nous donnera son accord – la proposition du Sénat qui consisterait à restaurer la totalité du prêt à taux zéro dans l'ancien, mais nous souhaiterions, car c'est très important, que ce prêt puisse continuer de s'appliquer dans l'ancien pour l'acquisition par les locataires de leurs logements sociaux, en d'autres termes la vente de HLM à leurs occupants. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Nous avons également adopté une proposition émanant d'un amendement de notre collègue Pancher concernant la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, qui tend à y inclure une part incitative.
Comme le Sénat, nous nous sommes posé la question du maintien à 5 000 euros du plafond sur les droits d'enregistrement concernant les mutations de parts sociales d'entreprises. Est-il raisonnable, lors d'opérations de fusion-acquisition dans le cadre desquelles des échanges d'actions peuvent porter sur des milliards d'euros, que le droit d'enregistrement au titre de ces transactions soit limité à 5 000 euros ? Je ne le pense pas et c'est pourquoi nous vous ferons des propositions.
Le Sénat a beaucoup travaillé sur la question de la péréquation, le fameux Fonds national de péréquation des recettes fiscales intercommunales et communales – le FPIC –, qui avait été décidé en loi de finances pour 2011 et dont la mise en oeuvre est prévue en 2012. Le Sénat a apporté des améliorations importantes afin qu'il y ait une plus grande équité dans la répartition du prélèvement entre l'EPCI et les communes membres. Car il convient que soit prise en compte la richesse réelle de chaque commune. C'est pourquoi les prélèvements et les reversements du fonds de péréquation seront répartis entre l'EPCI et les communes membres en fonction du potentiel fiscal, et non plus des produits fiscaux. Nous répondons ainsi à une demande de notre collègue Michel Heinrich à laquelle il n'avait pas été donné suite. Or les simulations montrent qu'il avait tout à fait raison.
Plus grande équité, donc, dans le système de répartition, et prise en compte des communes pauvres dans des territoires assez aisés. Car la péréquation fonctionne par territoire.
Il n'est pas rare qu'au sein d'une intercommunalité, Bernard Perrut le sait bien, une commune soit à la DSU, et qui plus est, dans les premières, 150e, 176e. Il faut donc absolument prendre en compte cette réalité. À cet égard, l'amendement du Gouvernement, sur la base de la réflexion du Sénat, présente des éléments positifs.
Compte tenu de toutes les simulations, hypothèses, variations de paramètres, de curseurs que nous avons envisagées au titre du fonds de péréquation, il faut avancer prudemment. J'ai donc proposé hier à la commission des finances qui a bien voulu me suivre, que la marche gravie en 2012 porte le montant de ce fonds non pas à 250 millions d'euros, mais seulement à 150 millions d'euros.
Ensuite, conformément à la proposition du Sénat, un rapport précis nous sera remis pour le 1er septembre prochain, qui fera le bilan de cette première répartition et qui permettra, le cas échéant, d'apporter un certain nombre de corrections. Cela me paraît être une solution sage. Dans le même temps, je pense que nous devons mettre en place cette péréquation, même modestement, dès l'année 2012.
Je vous invite par conséquent, mes chers collègues, à voter ce projet de loi de finances pour 2012 tel que l'a rétabli la commission des finances. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
J'ai reçu de M. Roland Muzeau et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Il est vrai que nous approchons de Noël, et en vous écoutant avec beaucoup d'attention, madame la ministre, je me disais que ce n'était pas Alice au pays des merveilles, mais Valérie au pays des merveilles. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Je vous recommande d'écouter, sur Radio Classique, Ève Ruggieriracontant Pierre et le Loup. Elle y croit tellement que l'on finit par voir le loup, ainsi que Pierre. Alors que vous, vous y croyez si peu, que l'on voit bien que vous êtes dans un exercice obligé. J'ai de la compassion pour vous, madame la ministre,…
Gardez-la !
…et presque un esprit de solidarité pour l'effort que vous faites, qui témoigne d'un bel engagement au bénéfice d'une cause qui ne le vaut pas.
Alan Greenspan était un ardent défenseur d'une économie financiarisée. Il disait : « Nos modèles économiques n'ont jamais été vraiment assez bons pour appréhender un processus guidé en grande partie par un comportement irrationnel. » Nous nous retrouvons aujourd'hui pour examiner en nouvelle lecture le cinquième projet de loi de finances déposé depuis le début de l'année par le Gouvernement. Je crois que c'est un record absolu. Cinq tentatives pour parvenir à établir un budget « cohérent » : c'est à se demander si les docteurs du Gouvernement ne se sont pas trompés de diagnostic, ou plutôt s'ils n'ont pas prescrit de mauvais remèdes. Je vous propose de revenir à la saignée, que du reste vous pratiquez fort bien. Au rythme où vous saignez tout le monde, y compris les collectivités locales, l'anémie n'est pas loi.
En réalité, la réponse ne fait aucun doute, il s'agit bien d'un mauvais médicament. Le Gouvernement a inoculé au peuple de France le germe de l'austérité, dont on observe les ravages partout en Europe, du Royaume-Uni à la Grèce et de l'Italie à l'Irlande.
Cette nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2012, grandement modifié par les sénateurs, pourrait offrir un vrai débat démocratique sur la fiscalité de notre pays. Il n'en sera rien, même si le rapporteur général a entendu certaines propositions émanant du Sénat. L'UMP a préparé une mitraille d'amendements destinés à revenir au projet de loi initialement déposé et voulu par le Gouvernement.
Pourtant, les sénateurs – et le rapporteur général l'a reconnu – ont accompli un travail très important sur ce texte. Ils ont fait la démonstration, qu'il est possible d'obtenir pour le budget de l'État 30 milliards d'euros de recettes supplémentaires, sans engendrer les souffrances pour notre peuple qu'entraîne votre politique d'austérité, pendant que se repaissent les banquiers, les spéculateurs et les privilégiés, qui gagnent des milliards d'euros et ont l'outrecuidance, comme Mme Bettencourt, de ne pas participer au financement de l'État, en dissimulant tout ou partie de leur fortune en Suisse, ou au Panama, comme le facilite davantage encore la convention fiscale que le Gouvernement a fait adopter hier dans cet hémicycle.
Les sénateurs communistes et apparentés ont pris une place primordiale dans cette élaboration d'une autre politique fiscale, puisque leurs amendements ont permis d'adopter le rétablissement de l'impôt de solidarité sur la fortune, une taxation des rémunérations des traders, la mise en cause des prélèvements libératoires et une diminution de moitié du crédit d'impôt sur les dividendes, une niche fiscale de l'impôt sur le revenu. Ces premières mesures permettent à elles seules d'obtenir, pour le budget de l'État, une dizaine de milliards d'euros, sans que la France du travail ne soit mise à contribution.
Alors bien sûr, vous parlez de « hausses d'impôt ». Oui, ce sont des hausses d'impôt, mais en prenant l'argent là où il est, au lieu de le prendre dans les poches des familles moyennes et modestes.
Il serait dommage, madame la ministre, que vous ne sachiez vous inspirer des mesures préconisées par le Sénat. Les quelques mesures qui viennent d'être énoncées sont des mesures parmi d'autres, qu'il faut mettre en place et développer si l'on veut réellement combattre le déficit et l'endettement de notre pays.
L'UMP est directement responsable, par sa gestion du pays depuis dix ans, de la moitié de la dette française, c'est-à-dire de 900 milliards d'euros sur 1 800. Vous êtes directement responsables, avec les anciens ministres du budget de ces dix dernières années, de cette dette.
Comme je vous le rappelle lors de chaque projet de loi de finances, le Conseil des prélèvements obligatoires chiffre à 172 milliards d'euros le montant des niches fiscales et sociales dans notre pays. Il y a de la marge pour redresser l'équilibre de nos finances publiques.
Madame la ministre, votre gouvernement a érigé en feuille de route gouvernementale le principe énoncé par le docteur Knock, le personnage de la pièce de théâtre de Jules Romains : « Les gens bien portants sont des malades qui s'ignorent » Les Français peuvent être bien portants, mais c'est vous qui les rendez malades.
C'est ce que vous faites en instrumentalisant la question de la dette pour mener votre politique d'austérité antisociale, mais également lorsque vous parez de toutes les vertus le modèle allemand.
Je ne résiste pas au plaisir de vous lire la première phrase d'un article d'Arnaud Lechevalier publié dans le 300e numéro d'Alternatives Économiques : « Croissance faible, inégalités et précarité qui explosent, investissement en panne, démographie catastrophique…, l'évolution récente de l'Allemagne ne ressemble pas à une success story à copier d'urgence. »
Cela, vous le taisez lorsque vous faites référence à l'Allemagne. C'est un mauvais modèle, mais on sait que la droite, historiquement, a fait référence à l'Allemagne,…
… et je n'évoquerai pas de tristes périodes de notre histoire. Mais vous ne pouvez contester, monsieur Carré, que dans cette période, la droite faisait référence à l'Allemagne.
La gauche, monsieur Carré, fait référence à l'Allemagne, c'est vrai, mais quand il s'agit de la révolution de 1848, des spartakistes ou des Allemands qui ont résisté au nazisme. Là, nous faisons référence à l'Allemagne, tout comme nous travaillons aujourd'hui en coopération avec nos amis et camarades de Die Linke avec lesquels, le 1er décembre dernier, nous avons présenté en commun, le matin à l'Assemblée nationale, le soir au Bundestag, un projet de résolution européenne. Car nous, nous avons une vision pour le futur de l'Europe et nous pouvons pour cela nous appuyer sur les meilleures traditions du peuple allemand. Vous, vous choisissez toujours les mauvaises.
On apprend, dans l'article que j'évoquais, que l'Allemagne est – écoutez bien – le pays d'Europe qui a créé le moins d'emplois en vingt ans, que 2,5 millions de personnes y travaillent pour un salaire de moins de 5 euros de l'heure contre 9 euros en France, malgré la faiblesse du SMIC. En Allemagne, un emploi sur trois est un emploi précaire et c'est le pays d'Europe, à l'exception de la Roumanie et de la Bulgarie, où la hausse des inégalités de revenus a été la plus forte. Que ce soit votre idéal, cela ne m'étonne pas. Mais que, pour moi, cela puisse être un exemple, c'est tout simplement impossible !
Laurence Parisot, patronne du MEDEF, que vous aimez bien, déclarait le 13 septembre dernier qu'elle voulait « préparer des convergences » qui ne soient « pas seulement budgétaires et fiscales, mais aussi sociales ». Vous êtes pris les doigts dans le pot de confiture ! Car Mme Parisot, qui est un peu votre idole, dit tout haut ce que vous voulez faire. Je vois, sur vos bancs, les sourires entendus de M. Carré ou de M. Schosteck. On se comprend à demi-mot. Et nos deux collègues ont l'intelligence de ne rien dire, tant il est vrai que dans cette situation, mieux vaut se taire que de parler.
La vérité est que le modèle allemand a la fragilité d'une porcelaine. Je ne sais si elle est de Limoges ou de Meissen, mais cela ne tient pas. Plutôt que d'un modèle, il faudrait parler d'un mirage destiné à faire pression sur les salaires et les salariés français, d'un patient travail de culpabilisation de la France du travail, destiné à rogner sur ses acquis sociaux, pour, au final, servir les intérêts des actionnaires, des banquiers, des spéculateurs et du patronat.
Lorsque j'entends Mme Parisot vous féliciter, je pense à August Bebel, célèbre révolutionnaire allemand, qui disait : « Quand la bourgeoisie me félicite, je me demande quelle bêtise j'ai pu commettre. » Les félicitations de Mme Parisot suffisent à nous mettre en garde.
On comprend mieux pourquoi le MEDEF regarde avec les yeux de Chimène le modèle allemand. De ce point de vue, chacun de nos collègues de l'UMP a le regard de Rodrigue pour Mme Merkel. Et vous, madame la ministre, je vois que vous avez les yeux de Chimène pour Rodrigue, dans cette affaire.
Je m'en tiens à mon propos, monsieur le président, mais je regarde nos collègues et ce que je vois dans leurs yeux vaut tous les discours !
Je peux vous dire, au nom des députés du Front de gauche, que nous sommes fiers du modèle social français que nous avons mis en place en 1945, conformément au programme du Conseil national de la Résistance, et nous tenons à l'améliorer.
Je tiens à dire à tout censeur, tout inquisiteur qui serait tenté par l'idée de clore tout débat sur la politique allemande avant même qu'il n'ait commencé, que le procès en germanophobie qui a été ouvert relève de la malhonnêteté intellectuelle de celui qui se trouve à court d'arguments face à la vérité, même si je ne fais pas miens certains propos qui ont été tenus. Nous n'avons pas les mêmes amis en Allemagne, ni hier, ni aujourd'hui.
L'idée d'une politique d'austérité plus dure et plus rude que jamais se diffuse de la droite au centre de cet hémicycle. Ainsi, les salariés seraient les seuls à devoir supporter les conséquences de ce casino mondial à la spéculation effrénée, et à payer le prix d'une politique fiscale injuste, comme je l'ai démontré au début de cette intervention. Les salariés et les retraités ne portent aucune responsabilité dans cette folie spéculative, et pourtant ce sont eux seuls qui créent les richesses, et non ceux qui se goinfrent de dividendes, bonus et autres stock-options.
Lorsque certains partis politiques prônent une augmentation du temps de travail hebdomadaire à 37 heures payées 35, ils choisissent d'aggraver la crise. Plus de travail réparti sur moins de salariés, cela veut dire plus de chômeurs. La protestation, le sentiment d'injustice et de révolte grandissent aussi bien dans la fonction publique que dans les entreprises du privé.
Les salariés voient leur pouvoir d'achat diminuer et leurs difficultés augmenter à cause de vous. C'est le fait, par exemple, de l'augmentation de la TVA sur le lait ou sur le pain. Qui consomme le plus de pain ? Qui consomme le plus de riz ? Qui consomme le plus de semoule ? Ce n'est pas Mamie Bettencourt, qui, elle, a un régime comportant suffisamment de légumes et de fruits pour préserver sa santé. Ce sont les gens qui n'ont pas de sous. Ce sont eux que vous passez à l'essoreuse.
Qui vient d'augmenter le prix du gaz en prétendant qu'il s'agit du « respect de la loi » ? Rappelez-moi qui est l'actionnaire principal de Suez-Gaz de France ? C'est l'État ! L'État avait donc le pouvoir de ne pas augmenter le prix du gaz, mais il n'a pas pris de décision en ce sens. Au contraire, nous avons assisté à une mise en scène à la télévision laissant craindre une augmentation de 10 % afin que la hausse de 4,4 % finalement retenue provoque une forme de soulagement.
Jaurès disait que la Révolution avait laissé les Français rois dans la cité et serfs dans l'entreprise. La grande ambition de la droite est de laisser les salariés dans cet état de subordination. La droite n'est plus monarchiste, mais elle veut rétablir la corvée des gueux, des manants, des petits et des sans-grades dans le royaume de l'entreprise.
Je l'accorde à M. de Courson, les politiques dures et antisociales d'une droite jouant contre les intérêts du salariat ne sont pas l'apanage du Nouveau Centre, elles font partie du programme de toute la droite, du Front National au Modem, en passant par l'UMP.
Depuis hier et son déplacement dans l'usine de skis Rossignol de Sallanches, Nicolas Sarkozy se présente comme le champion du « produire français ». Il a déclaré : « Je préfère qu'on achète une voiture de marque étrangère produite en France plutôt qu'une voiture de marque française produite à l'étranger et vendue en France. »
Savez-vous ce qui se passe en réalité ? Quel est le principal actionnaire de Renault ? C'est l'État, qui y est représenté par deux administrateurs. Et depuis que M. Sarkozy est au pouvoir et que Carlos Ghosn dirige Renault, jamais on n'a autant sous-traité à l'étranger. Aujourd'hui, les deux tiers des voitures Renault achetées en France sont produites à l'étranger.
Ma conclusion est très simple : le Président de la République est un menteur. Et mentir, lorsque l'on est Président de la République est indigne du peuple français. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Attendez pour ce qui est de l'élégance ! Vous parlez beaucoup du triple A des agences de notation, dont vous rêvez. Cela me fait penser aux andouilles de ma Normandie natale, dont la qualité est mesurée à Vire en nombre de A. Et figurez-vous que trois A, c'est la meilleure note pour les andouilles.
Ne serait-ce pas plutôt cinq A ?
Non, madame la ministre, vous confondez avec les andouillettes. Ce n'est pas du tout la même chose. Je vois que vous n'êtes pas normande.
Mentir, quand on est Président de la République, c'est indigne du peuple français !
Dans les explications de vote sur la motion de rejet préalable, la parole est à M. Marc Goua, pour le groupe SRC.
Nous regrettons vivement que l'excellent travail réalisé par nos collègues sénateurs n'ait pas permis d'arriver à un consensus.
Les différentes propositions votées par nos collègues avaient au moins deux vertus : elles permettaient de nous donner des marges de manoeuvre en réduisant les déficits, ce qui est indispensable, tout le monde en conviendra ; et contrairement à un certain nombre de mesures que vous préconisez, madame la ministre, elles n'avaient pas d'effets récessifs, notamment parce qu'elles ne faisaient pas chuter la consommation qui est l'un des piliers de la croissance.
De plus, contrairement à ce qu'a indiqué le rapporteur, ces propositions, loin de constituer des mesures hétéroclites, étaient d'une grande cohérence. Certes, elles impliquaient des impôts supplémentaires. Il est possible de pousser des cris d'effroi, mais en 2012, le pourcentage des prélèvements obligatoires sera supérieur à ce qu'il était en 2007, et c'est le résultat de ce qu'a fait la majorité actuelle.
Ce budget pour 2012 n'atteint donc pas les objectifs fixés, qui étaient de faire baisser les déficits et de relancer la croissance indispensable. Comme ce budget est fondé sur une hypothèse de croissance de 1 %, alors que tout le monde révise cette hypothèse à la baisse, il est probable que les rentrées fiscales seront nettement moins importantes.
De plus, je crains malheureusement que nous ne perdions le triple A. D'ores et déjà, les taux d'intérêts sont en hausse, et cette hausse annihile complètement les effets des différents projets de loi de finances rectificative qui ont été votés.
Ce budget ne correspond pas à ce que nous souhaitons, et bien évidemment, il fera l'objet d'autres lois de finances rectificatives, comme le Premier ministre l'a déjà laissé entendre.
(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.)
J'ai reçu de M. François de Rugy une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du règlement.
La parole est à M. François de Rugy.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, je ne vais pas revenir longuement sur les discussions qui se sont tenues au Sénat.
Puisque je défends une motion de renvoi en commission, je souhaite parler de ce que le rapporteur général a fait au nom de la commission. Je remarque que son rapport tient en une seule page, et cela me semble suffisamment rare pour être souligné. C'est tout de même assez incroyable. Je vous invite à le vérifier, chers collègues : son rapport tient dans l'introduction.
En réalité, vous essayez d'évacuer en une seule page le travail de nos collègues sénateurs, et vous devez être bien à court d'arguments pour simplement écrire : « Le Sénat n'a voulu que témoigner de choix politiques qui s'opposent aux choix de la majorité de l'Assemblée nationale. »
C'est une réalité : la majorité sénatoriale, en effet, par ses choix, propose des mesures qui s'opposent aux choix de la majorité de l'Assemblée nationale.
En vérité, l'exercice auquel s'est livrée la nouvelle majorité sénatoriale est un peu un exercice de style. Nous savons bien qu'il s'agissait de faire un certain nombre de propositions concrètes, de contre-propositions, mais qu'il n'était pas possible de faire un véritable contre-budget, et nos collègues sénateurs l'ont reconnu lors de la discussion. S'il est un exercice qui relève de l'exécutif, c'est bien le budget, et tout le monde sait que c'est en cas de changement de majorité à l'Assemblée nationale, après les élections de 2012, qu'il serait possible de présenter une véritable alternative budgétaire. Celle-ci reposerait sur un certain nombre de mesures ponctuelles, s'agissant des niches fiscales, des recettes et des dépenses, mais surtout sur une réforme fiscale de grande ampleur qu'ont toujours refusé de mener ce gouvernement, en place depuis cinq ans, et cette majorité, au pouvoir depuis neuf ans et demi. Il vous faudra bien assumer devant les Français cette longue durée de dix années de gouvernement.
Je souhaite relever une phrase prononcée par Mme la ministre dans son introduction, d'autant plus que son discours s'est résumé à une longue énumération de salutations à l'égard des députés de la majorité. C'est très sympathique pour eux, mais il me semble que le rôle d'une ministre du budget, lors d'un débat budgétaire, doit aller un peu au-delà des salutations d'usage, qu'exige la courtoisie. Il devrait être d'apporter des arguments concrets, notamment sur le travail du Sénat.
C'est ce que j'ai fait en demandant le rétablissement du texte !
Madame Pécresse, vous avez déclaré que le projet du Sénat aurait pour effet de « briser net » la croissance. Ce sont vos mots. Vous ne manquez pas d'air ! Car pour ce qui est de « briser net » la croissance, vous vous y connaissez ! En l'occurrence, vous savez très bien où en est l'activité économique dans notre pays au terme de près de dix ans de majorité de droite, et depuis quatre ans et demi que Nicolas Sarkozy est Président de la République.
Vous avez dit aussi que « nous aurions pu travailler ensemble », avec les collectivités locales, sur les questions du budget, du déficit, de la dette. Mais que ne l'avez-vous fait ! En fait, vous n'avez jamais réellement souhaité travailler avec elles. M. Woerth, l'un de vos prédécesseurs, disait, dès 2007, que le problème en matière budgétaire résidait dans les dépenses des collectivités locales. Certes, on peut discuter de leur niveau d'endettement, mais reconnaissez que leur budget est toujours en équilibre.
Mais qui paie la dotation globale de fonctionnement ? C'est l'État ! Qui s'endette ? C'est l'État !
Mais la dotation globale de fonctionnement n'est pas la seule variable budgétaire d'une collectivité locale !
J'ai participé, lundi dernier, dans ma commune, au débat d'orientation budgétaire. Je peux vous dire que si l'on ne devait y parler que de la DGF versée par l'État, ça n'irait pas très loin puisqu'elle est gelée depuis plusieurs années et qu'elle ne suit pas l'inflation.
Elle est gelée depuis un an !
Quelques jours auparavant, j'avais assisté au débat d'orientation budgétaire de la communauté urbaine de Nantes. Là encore, et nos concitoyens le savent bien, on n'y parle pas que de la dotation globale de fonctionnement, mais de fiscalité. Nous assumons un certain nombre de choix en matière de dépenses, que nous maîtrisons, et en matière de recettes, que nous maîtrisons aussi. Vous pouvez d'ailleurs vérifier que nous n'augmenterons pas les taux durant les trois prochaines années.
En réalité, vous n'avez jamais voulu travailler avec les collectivités locales ni avec l'opposition. Nos amendements, depuis quatre ans et demi, sont systématiquement refusés, au seul motif qu'ils viennent de l'opposition. Or, vu la gravité de la situation dont vous êtes les principaux responsables, vous devriez, si nous étions dans une démocratie normale, tenir compte du Parlement, ce que Mme Merkel – puisque vous citez souvent l'Allemagne en exemple – est d'ailleurs obligée de faire.
En commission, le rapporteur général a bien vu que son diagnostic n'est pas si éloigné du nôtre. Malheureusement, la majorité se croit toujours obligée de soutenir le Gouvernement.
Si vous n'avez pas voulu entamer cette discussion républicaine, c'est parce que cela vous obligerait à revenir sur un certain nombre de dogmes, de totems auxquels vous restez agrippés depuis quatre ans et demi. Je pense, bien sûr, au paquet fiscal et à toutes les mesures complètement anachroniques que vous avez prises en cette période de difficultés budgétaires. Vous n'avez jamais voulu reconnaître les erreurs que vous avez commises au début du quinquennat, et que vous avez continué à commettre tout au long de la crise.
Nous avons déjà eu l'occasion de dire, lors des nombreux débats budgétaires que nous avons enchaînés depuis la crise de 2008, que vos budgets sont virtuels, et c'est le cas de ce projet de budget pour 2012. En effet, il est perpétuellement caduc. D'une certaine façon, vous êtes obligée de le reconnaître, puisque vous multipliez les projets de lois de finances rectificatives. Votre créativité a été sans limite puisque, pour la première fois, un projet de loi de finances rectificative était proposé avant même que le projet de loi de finances initial soit adopté. Du reste, cela vous a conduit à une acrobatie dans l'ordre du jour, et le rapporteur général s'est élevé contre ces méthodes en commission, puisque nous devions voter des modifications alors même que les dispositions que nous devions modifier n'avaient pas encore été définitivement adoptées.
On pourrait presque en rire si le sujet n'était pas aussi grave, si la réalité n'était pas aussi prégnante. Nos concitoyens le voient bien, la réalité budgétaire pèse de tout son poids sur l'ensemble de l'économie, c'est-à-dire sur les entreprises, les salariés et les contribuables.
Venons-en au bilan des cinq budgets que vous avez défendus depuis 2007.
D'abord, les prévisions de déficit ont été systématiquement sous-évaluées et les prévisions de croissance systématiquement surévaluées, et cela quelle que soit la situation économique, qu'il y ait crise ou pas.
Vous avez commencé le quinquennat avec cette phrase fétiche : « Travailler plus pour gagner plus ». Or, en application de ce mot d'ordre électoral, vous avez fait des cadeaux fiscaux qui, bien loin de favoriser le travail, ont favorisé l'économie de la rente, le patrimoine. Et vous avez persisté dans cette voie. J'y reviendrai.
En 2007, Nicolas Sarkozy disait aux Français : « Endettez-vous ! ». Si l'on ne voulait pas s'endetter c'est qu'on n'avait pas confiance en l'avenir ! Ses propos ont aujourd'hui une résonance particulière. Souvenons-nous qu'avant le déclenchement de la crise, le Gouvernement avait un projet de subprimes à la française. C'est ce qu'on appelait à l'époque le crédit hypothécaire. Pendant sa campagne, Nicolas Sarkozy disait qu'il fallait faire comme aux États-Unis, c'est-à-dire s'endetter indéfiniment en gageant ses biens propres.
On sait bien que cette sorte de cavalerie financière, appliquée à l'économie en général, nous a conduits à la crise en 2008. De façon plus modeste, on a vu à quel point vous avez freiné la réforme du crédit revolving.
Vous allez chercher des exemples aux États-Unis pour expliquer la situation de la France !
Ces rappels vous gênent. Pourtant, c'est la réalité ! Moi, je pense que l'heure du bilan a sonné, et qu'il est normal que l'on vous rappelle quels ont été vos engagements et votre politique depuis cinq ans.
En pleine crise, on l'a un peu oublié, vous avez lancé le grand emprunt. Du reste, vous n'étiez pas d'accord entre vous en la matière. On se souvient que M. Guaino avait entraîné une centaine de parlementaires à signer une tribune dans un grand journal français pour dire qu'il fallait au minimum 100 milliards d'euros. Le Premier ministre, que j'avais moi-même rencontré, puisqu'il avait reçu les dirigeants de tous les partis, avait indiqué, pour sa part, que le montant de cet emprunt ne devait pas dépasser 35 milliards. Depuis, on ne sait plus très bien où on en est. Quoi qu'il en soit, il y a quelque chose d'assez contradictoire à nous parler de rigueur après avoir lancé ce grand emprunt.
On va de plan de rigueur en plan de rigueur. Vous les multipliez. Et il s'agit bien de rigueur, puisque vous baissez les dépenses dans un certain nombre de domaines tandis que vous augmentez les impôts des classes moyennes. Mais, dans le même temps, comme vous êtes un peu fidèles à votre ligne de conduite de 2007, vous n'avez pas pu vous empêcher – c'est sans doute plus fort que vous – de faire, au mois de juillet dernier, un cadeau de 1,8 milliard d'euros à vos amis du premier cercle, en supprimant la moitié de l'impôt de solidarité sur la fortune.
Et vous le faites alors même que la gravité de la situation et l'ampleur de la dette sont connues et archi-connues.
En première lecture, vous avez même réussi à créer une petite niche fiscale supplémentaire, dont le coût est de 150 millions d'euros. En effet, vous avez accordé aux personnes non propriétaires de leur résidence principale de ne pas être taxées sur la plus-value à l'occasion de la vente d'une résidence secondaire achetée depuis plus de cinq ans.
Votre ligne de conduite consiste donc à accorder des cadeaux fiscaux aux plus aisés tout en continuant à nous parler de rigueur – c'est encore une contradiction –, au risque d'étouffer l'activité et d'augmenter le chômage.
Depuis maintenant quelques mois, vous avez décidé de résumer votre politique à un seul mot d'ordre : conserver le triple A. C'est ce que vous dites, madame la ministre, reprenant ainsi le discours de vos deux prédécesseurs, Mme Lagarde et M. Baroin. Le Premier ministre ne cesse de dire que la politique de la France est indexée sur ce seul indicateur. J'en suis étonné, et je veux souligner à quel point c'est dangereux.
Étonné, parce que vous ne pouviez pas ignorer, il y a quelques mois, que la situation de la France était tellement dégradée en matière de comptes publics que ce triple A ne tenait qu'à un fil.
Mais c'est également dangereux. Car vous savez que les agences de notation ne rendent de comptes à personne. En outre, avoir les yeux braqués sur le triple A, tel un horizon indépassable, c'est prendre le risque inconsidéré de voir les taux d'intérêt de la France augmenter. Et c'est ce qui se passe, puisqu'il y a restriction du crédit, ce qui est un comble en période de crise. En 2008, il n'y avait pas de restriction du crédit. Aujourd'hui, elle frappe l'État. Il y a d'ailleurs à cela une certaine logique : la crédibilité de l'État est tellement entamée depuis quatre ans et demi que les investisseurs, les prêteurs, ne lui font plus confiance. Mais la restriction du crédit frappe également les ménages, les collectivités locales et les entreprises, qui se retrouvent étouffés. Là aussi, votre bilan est catastrophique.
Un mot, enfin, sur le débat européen. Vous essayez de déplacer la discussion sur ce terrain en polémiquant, y compris avec les dirigeants de l'opposition et notamment avec François Hollande, alors que vous savez très bien que, dans six mois, les traités qui sont imaginés aujourd'hui – ils ne sont même pas encore signés – seront renégociés. Vous avez été systématiquement à contretemps sur le terrain européen, comme sur l'industrie, que vous faites semblant de défendre bien tardivement.
S'il y a bien une politique qu'il faut revoir entièrement, c'est bien la politique budgétaire et fiscale. Pour notre part, nous présenterons aux Français des propositions concrètes dans le cadre des prochaines élections. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Dans les explications de vote sur la motion de renvoi en commission, la parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour le groupe SRC.
Nous n'avons pas présenté de motion de rejet préalable puisque le texte qui nous revient du Sénat est bien meilleur que le projet de loi de finances initial déposé par le Gouvernement. En effet, plutôt que d'inventer une multitude de nouveaux impôts, comme vous le faites, madame la ministre, il supprime des niches fiscales.
Toutefois, nous voterons cette motion de renvoi en commission. Car le texte du Sénat mérite un vrai débat, et non ce à quoi nous avons assisté hier en commission des finances, où de nombreux amendements ont été discutés.
Monsieur le rapporteur général, je vous rappelle que l'une des propositions du Sénat a été puisée dans vos travaux. En effet, la niche Copé pourrait être tout à fait réformée, comme vous le proposiez, en prenant une assiette différente et en fixant un taux, ce qui éviterait ces effets d'aubaine considérables qu'elle entraîne. J'ai donc été quelque peu étonné que vous ne souteniez pas cette proposition.
Le texte du Sénat mérite un vrai débat, et il aura lieu lors de l'examen des articles.
Madame la ministre, votre politique ne se caractérise pas par l'équité mais par une profonde injustice. J'en veux pour preuve l'augmentation de la TVA, à partir du mois de janvier prochain, qui doit rapporter au final 1,8 milliard, alors que vous avez allégé l'impôt de solidarité sur la fortune du même montant au mois de juillet dernier.
Ces plans de rigueur successifs n'ont qu'un seul effet : casser la croissance sans réduire les déficits.
Nous voterons donc cette motion de renvoi en commission car nous considérons que la majorité aurait dû examiner plus attentivement le travail effectué par le Sénat. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Je reviendrai sur un point évoqué par M. de Rugy et dont nous débattons depuis des années. Vous avez avancé, mon cher collègue, que notre politique budgétaire facilitait la rente et non le travail.
Je suis désolé de vous préciser que c'est inexact : quand vous examinez l'évolution des cinq dernières années, nous avons considérablement réduit l'écart entre la fiscalité du patrimoine et celle du travail.
La disposition fiscalo-sociale sur les heures supplémentaires facilite-t-elle la rente ou le travail ?
Or vous voulez la supprimer ! Mais qui fait des heures supplémentaires ? Ne dites donc pas des contrevérités : ce dispositif ne favorise pas la rente mais bien le travail.
Par ailleurs, en ce qui concerne les revenus du patrimoine qui n'étaient pas au barème, nous avons remonté le taux forfaitaire, augmenté la CSG, la CRDS et les majorations,…
…si bien que l'écart que je viens d'évoquer s'est considérablement réduit pendant ces deux dernières années.
Vous pouvez critiquer notre politique, et c'est bien normal puisque vous êtes dans l'opposition, mais, j'y insiste, il ne faut pas dire de contrevérité : nous avons bien réduit l'écart entre la fiscalisation de la rente – des revenus du patrimoine, pour être plus précis – et la fiscalisation des revenus du travail.
Tout à fait !
(La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.)
Dans la discussion générale, la parole est à M. Charles de Courson, premier orateur inscrit.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, en examinant aujourd'hui ce projet de loi de finances pour 2012 en deuxième lecture, nous pouvons remarquer avec émerveillement que nos amis nouvellement majoritaires au Sénat nous ont offert pour les fêtes de fin d'année un superbe feu d'artifice fiscal.
Mais nous pouvons également nous apercevoir que notre nouvelle rapporteure générale du budget au Sénat, Nicole Bricq, a réussi un très beau tour de prestidigitation – fiscale s'entend. Elle est en effet parvenue à passer d'un déficit prévisionnel de 82 milliards d'euros en première lecture à l'Assemblée, à un excédent – tenez-vous bien, mes chers collègues – de 137 milliards d'euros…
Comment s'explique un tel résultat ? C'est très simple : la nouvelle majorité sénatoriale a augmenté les impôts de 27 milliards d'euros, soit de 9 %,…
…puis elle a diminué les dépenses de 190 milliards d'euros en votant contre tout une série de budgets – je vais y revenir.
Pour cela, nos amis sénateurs socialistes ont décidé d'augmenter l'impôt sur les sociétés de 18 milliards d'euros – excusez du peu –, soit 30 %, l'impôt sur le revenu de 3 milliards d'euros, soit 4,5 %, les droits d'enregistrement de 2,6 milliards, soit 16 %, et même la TVA de 1 milliard…
Vous me direz : à 180 milliards d'euros, on n'en est plus à un milliard près.
Ainsi, les recettes fiscales nettes sont passées de 273 milliards à 300 milliards d'euros – chiffre facile à retenir –, soit 9 % d'augmentation de l'ensemble des impôts.
Pourtant, améliorer les recettes ne signifie pas améliorer un budget. Le discours de discipline budgétaire tenu par les centristes, qui semble pénétrer de plus en plus cet hémicycle – on ne peut que s'en féliciter –, ne semble pas avoir encore atteint la nouvelle majorité du Palais du Luxembourg.
Mais, mes chers collègues, la majorité sénatoriale a fait encore plus fort que d'augmenter les recettes de 27 milliards d'euros : elle a réduit les crédits des missions d'environ 190 milliards d'euros.
Ainsi soyons conscients qu'il n'y a plus de budget du ministère des affaires étrangères ! Le Quai d'Orsay ? On ferme ! Il n'y a plus de budget du ministère de l'intérieur, on ferme ! Il n'y a plus de ministère de l'agriculture, on ferme – il n'y a plus de crédits ! Même chose pour la culture – on croyait pourtant que la gauche aimait la culture –, on ferme ! La recherche ? On ferme !
Il existait pourtant, sur ce dossier, un certain consensus. Pire, il n'y a plus de budget de la solidarité, du travail et de l'emploi.
Nous n'avons plus de justice, on ferme ! Plus d'enseignement non plus, plus d'écologie et même plus de publications officielles – à quoi servirait en effet un Journal officiel puisque, sans moyens, il n'y aura sans doute plus de lois ni de décrets, bref, plus rien.
Nous n'avons plus de justice, plus d'enseignement, disais-je, mais, rassurez-vous, nos amis sénateurs ont épargné la défense, ce qui est bien mais un peu juste.
Les mêmes socialistes qui ont sans cesse – écoutez bien : c'est formidable – dénoncé l'inflation fiscale de la majorité à travers la création de vingt-quatre taxes en cinq ans, ont réussi l'exploit d'en créer quarante-six en moins de deux mois !
Pour ces deux textes, le présent projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale, la nouvelle majorité sénatoriale mérite bien la médaille d'or de la créativité fiscale.
Mais revenons un peu plus en profondeur sur les dispositions votées par le Sénat.
En ce qui concerne les augmentations de recettes, nous n'avons que l'embarras du choix. Que ce soit en supprimant la loi TEPA, pour quelque 3 milliards d'euros de recettes supplémentaires – merci, au passage, pour les ouvriers de l'industrie, eux qui font des heures supplémentaires –, ou en supprimant le bouclier fiscal un an plus tôt que nous ne le prévoyions – un détail, sans doute –, la majorité sénatoriale s'est exclusivement engagée sur une voie de facilité.
En créant une tranche supplémentaire d'impôt à 45 %, alors que nous l'avons déjà créée – et d'une façon d'ailleurs plus dure que ce que propose la gauche puisque nous proposons 4 % supplémentaires mais sur l'ensemble des revenus, autrement dit sur une assiette plus large que celle de l'impôt sur le revenu –, ou en pérennisant définitivement la contribution exceptionnelle pour les hauts revenus, la majorité sénatoriale est peut-être cohérente avec le discours que les socialistes tiennent depuis longtemps sur les bancs de l'Assemblée comme sur ceux du Sénat, mais ses décisions aboutissent à des taux marginaux extrêmement élevés.
Aujourd'hui, le taux marginal supérieur est de 45 % auxquels on ajoute les quatre points de la contribution exceptionnelle et les 13,2 points de la CSG et de la CRDS, ainsi que les taxes additionnelles, soit, au total, un taux de 62 %. Nos collègues socialistes nous rappellent qu'il s'est élevé jusqu'à 75 % aux États-Unis, certes, mais c'était en pleine guerre ! Nous tombons donc de haut à considérer tout cela.
La cohérence du discours du parti socialiste d'opposition n'a d'égale que l'inconséquence d'une majorité sénatoriale qui a voté un budget qui est non seulement un contresens budgétaire et économique mais encore un danger économique. J'en veux pour exemple l'instauration d'un mécanisme de plafonnement des avantages fiscaux dont bénéficient les entreprises, d'une réduction de l'abattement applicable aux dividendes, et d'un déplafonnement des droits de mutation dus en cas de cession d'actions.
Les entreprises, déjà bien mises à mal par ces mesures, devront également porter le poids de l'augmentation du taux d'imposition des bénéfices sur les plus-values de cessions. La seule disposition favorable aux entreprises reste limitée : il s'agit du rétablissement du régime d'exonération de charges sociales pour les jeunes entreprises innovantes – que nous avons déjà voté, chers collègues socialistes, dans le cadre du collectif budgétaire.
Face à ce tsunami de mesures fiscales, je pourrais également vous parler de la suppression de la taxe sur les boissons sucrées, laquelle, le Sénat semble l'avoir oublié, présentait malgré tout l'avantage de financer une réduction des charges sociales dans l'agriculture. Je pourrais également vous parler de la baisse à 10 000 euros, sans part variable, du plafond global des niches fiscales, plafond dont je vous rappelle que nous l'avions déjà, à l'initiative du groupe Nouveau Centre, abaissé à 18 000 euros et 4 % du revenu imposable – contre 6 % auparavant –, ce qui, je pense, était déjà une avancée plus que significative.
Mes chers collègues, je voudrais vous rassurer, car cette nouvelle majorité sénatoriale, teintée de socialisme et d'écologisme, n'est pas cohérente dans ses propositions. Si elle fait voter l'augmentation de la fourchette du taux de la taxe sur les quotas de dioxyde de carbone pour 50 millions d'euros, si elle majore l'impôt sur les sociétés pour les sociétés pétrolières, si elle crée une réduction d'impôts pour les mêmes sociétés qui développent la recherche dans les énergies renouvelables, elle supprime l'exonération de taxe sur les produits énergétiques sur les biocarburants. À faire feu de tout bois, on prend de grands risques, et c'est bien le problème qu'a rencontré la majorité sénatoriale en votant ce budget totalement incohérent.
Une fois présentés les problèmes que nous rencontrerons en discutant ce texte, une fois exprimée la nécessité de rétablir l'équilibre et la justice fiscale dans ce budget, j'aimerais cependant m'arrêter sur quelques dispositions qui continuent à poser problèmes aux députés du groupe Nouveau Centre.
En ce qui concerne l'article 5, j'ai déjà critiqué devant vous, madame la ministre, ce que je considère comme une mesure anti-communautaire. En effet, l'objectif du Plan national d'allocation de quotas est de créer une contrainte sur les entreprises relativement à leurs émissions de gaz à effet de serre. Les entreprises reçoivent 90 % de leur besoin, mais trop de quotas ont été distribués en 2007 et il manque actuellement 30 millions d'euros de quotas pour financer l'achat des quotas pour les nouveaux entrants sur la période 2008-2012.
C'est pourquoi l'article 5 du texte prévoit de taxer le chiffre d'affaires des entreprises ayant bénéficié de quotas pour une quantité d'au moins 50 000 tonnes de dioxyde de carbone sur l'ensemble du PNAQ. Or nous considérons que cette taxe fragilise les entreprises et crée une distorsion de concurrence, que ce soit vis-à-vis des entreprises des autres pays européens, non soumises à cette taxe, ou, surtout, vis-à-vis des entreprises non européennes, puisque, à titre d'exemple, certaines entreprises de fertilisants, en plus d'être exposées à la « fuite de carbone », seraient soumises à cette taxe.
Ainsi, nous proposons – nous avons déposé un amendement en ce sens – que le montant de cette taxe soit plafonné. Nous avions tout d'abord souhaité la transformer en droit de créance, selon le modèle allemand, mais l'irrecevabilité de cet amendement au regard de l'article 40 nous a empêchés d'aller plus avant.
Il faut savoir que de son côté, l'Allemagne a adopté un mécanisme de restitution. En effet, en adoptant un tel mécanisme, elle a fait disparaître des quotas du marché, ce qui a fait monter les prix du marché de dioxyde de carbone et permis l'achat des quotas restants.
Mes chers collègues, au vu du texte qui nous a été présenté par le Sénat, il nous appartient maintenant de rétablir équilibre et justice fiscale dans ce budget, et je ne doute pas que nos collègues socialistes, ici même, à l'Assemblée, ne tomberont pas dans les travers qu'ont expérimentés leurs collègues sénateurs.
Prenons ainsi nos responsabilités et rétablissons un budget équitable et sincère, en espérant très honnêtement qu'à l'avenir nos collègues sénateurs socialistes décideront de travailler pour l'intérêt de notre nation, comme nous avions su le faire au moment de l'examen du projet de loi de finances rectificative à propos de Dexia. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, entendre notre collègue Charles-Amédée de Courson indiquer à ses collègues de gauche de quelle façon travailler pour l'intérêt général ne manque pas de sel.
Car on vous voit à l'oeuvre depuis 2001 et la Bérézina, c'est vous ! Depuis que vous êtes aux affaires, le pouvoir d'achat a baissé, le nombre des chômeurs a augmenté, l'autorité de la France dans le monde rayonne moins.
Elle rayonne quand même, et je vous rappelle que nous vivons une crise économique !
On rit de nous, dans certaines circonstances, à cause des prises de position du Président de la République, qui, à chaque fois, sauve quelque chose ! D'un sommet à l'autre, il va sauver l'Europe et il va sauver l'euro…
…et, à chaque fois, il faut recommencer, ce qui prouve ou bien qu'il est manchot, ou bien qu'il est inefficace, ou les deux.
Nous entamons la deuxième lecture de ce projet de loi de finances alors que les conclusions du sommet européen qui s'est tenu la semaine dernière dominent l'actualité économique. Les dix-sept États de la zone euro ont en effet décidé, vendredi dernier, de rédiger un traité intergouvernemental qui, dans les faits, va priver l'Union européenne et ses États membres de leurs politiques budgétaires, tout en continuant à amputer la Banque centrale européenne de ses prérogatives essentielles.
Ceux qui nous écoutent dans les tribunes, ceux qui nous regardent sur internet doivent savoir que vous êtes en train de vendre l'indépendance nationale en la remettant à Bruxelles,…
…à savoir aux intérêts des privilégiés qui pourront dire non à la France s'ils estiment que son budget est à refaire.
Les chefs de gouvernement n'ont jamais eu la légitimité des Parlements, mon cher collègue.
Heureusement que, de ce point de vue, le président du Bundestag, M. Lammert, au cours de la réunion qui s'est tenue vendredi dernier à Paris, a fait observer que l'on ne pouvait discuter du texte de Bruxelles puisqu'on n'en disposait pas, et que le dispositif mis au point par les chefs de gouvernement ne représentait que leurs propositions et qu'il reviendrait aux Parlements de disposer du devenir de ce texte.
Et le président Lammert, démentant de nouveau le Président de la République, a déclaré qu'il était impossible de l'examiner avant le mois de mars. Au plus tôt, ce serait pour le mois de juin. Un nouveau traité, ou quelle que soit l'appellation du texte en question, ne pourra devenir effectif que si tous les pays le ratifient, y compris l'Allemagne, évidemment.
En réalité, vous avez prévu d'inscrire dans le marbre des constitutions et d'assujettir à une autorité extérieure les choix politiques dogmatiques de la droite libérale et disciplinaire allemande, et des tenants de la soumission servile des politiques économiques aux intérêts bien compris d'une oligarchie financière toujours plus âpre au gain.
C'est un coup de force que cette réunion de Bruxelles, un coup de force inacceptable pour la démocratie.
Le projet de loi de finances que nous examinons aujourd'hui, s'il devait être rétabli dans sa rédaction initiale, s'inscrit dans la même logique : promouvoir une politique d'austérité qui ne se soucie aucunement de la croissance ni de l'intérêt général. La seule chose qui est générale, c'est l'austérité pour les plus modestes, avec l'augmentation de la TVA, y compris sur les produits de première nécessité. L'État va même s'enrichir sur les produits que nos concitoyens donnent avec générosité aux Restaurants du coeur !
Et pendant ce temps, les riches n'ont jamais été aussi riches. Comme le rappelait tout à l'heure un collègue socialiste – ce qui fait, madame la ministre, que je n'aurai pas l'impudence de vous interroger pour la vingt-huitième fois sans avoir de réponse –, grâce aux dispositions que vous avez prises, Mme Bettencourt paie 42 millions d'euros cette année mais n'en paiera plus que 10 l'année prochaine. Il faut que tout le monde le sache : les plus pauvres paient de plus en plus et les plus riches s'engraissent de plus en plus. C'est cela la vérité !
On comprend votre malaise, tout à l'heure, à la tribune : vous savez bien que toutes vos explications ne sont que fariboles pour amuser, endormir, anesthésier nos concitoyens, qui ne sont néanmoins pas dupes.
Vous avez voulu placer ce budget sous le signe de la réduction du déficit public et de « l'équité fiscale », comme vous dites. Or, qu'observons-nous ? Une fois de plus, vous avez fait le choix calamiteux de préserver les avantages fiscaux somptuaires que vous avez consentis aux privilégiés depuis des années afin de faire reposer 90 % de l'effort sur l'immense majorité de nos concitoyens, qu'il s'agisse des classes moyennes ou des ménages les moins favorisés.
Votre contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus est un gadget. Le fait est que vous avez, en juillet dernier, réduit l'ISF de moitié en l'amputant de 1,5 milliard d'euros, alors qu'il pourrait aujourd'hui en rapporter presque 7 en en élargissant l'assiette et le taux. Vous ne vous êtes jamais attaqués non plus, sinon en prenant des mesurettes avant tout destinées à donner le change, à la multitude des niches fiscales qui permettent aux revenus du patrimoine d'échapper à l'impôt ou de bénéficier de régimes dérogatoires.
Même chose concernant l'impôt sur les sociétés. Tout à l'heure, madame la ministre, vous avez sorti votre mouchoir et l'on sentait que les larmes de crocodile n'étaient pas loin. Mais vous ne démentirez pas que les groupes du CAC 40 ne paient, en réalité, que 8 % d'impôt sur les sociétés alors que les PME, elles, sont taxées à près de 40 %.
Même pour les entreprises, vous faites la différence entre petites et grandes, comme vous la faites entre Français riches et Français pauvres. Vous tondez toujours les mêmes, qui sont, il est vrai, plus nombreux, et vous réservez votre affection, qui n'a pas de borne, aux privilégiés. Quand on aime, on ne compte pas, n'est-ce pas ? Jamais nous ne vous suivrons sur ce terrain.
Notre rôle est de montrer comment vous essayez d'anesthésier notre peuple en racontant de belles histoires qui n'ont aucun rapport avec la réalité.
Les niches fiscales coûtent une fortune au pays. Si l'on compte les heures supplémentaires, la TVA à taux réduit sur la restauration, ce sont 71 milliards d'euros qui, selon la Cour des comptes et selon le rapporteur général du budget, n'ont servi à rien ! Ce sont simplement des cadeaux.
Madame la ministre, vous êtes-vous déjà demandé comment on fait pour vivre avec 450 euros par mois, comme la retraitée de la fonction publique territoriale de Montreuil à laquelle je pense ? Comment fait-on pour vivre quand on n'a que le SMIC, qu'on est une femme seule avec deux enfants à élever et un loyer de 600 ou 700 euros à payer ? Même avec quelques aides, comment vous faites pour joindre les deux bouts à la fin du mois ? Évidemment, vous n'avez pas de réponse, mais vous savez que cela existe.
C'est cette politique dure aux petites gens, implacable, que nous combattons et que nous combattrons dans les prochains mois. Pour les convaincre, nous expliquerons à nos concitoyens qu'en face de cette réalité terrible qu'ils connaissent, qui engendre souffrance, désarroi et parfois désespoir, vous faites, sans qu'ils le sachent toujours, des cadeaux et donnez des privilèges importants à ceux qui n'en ont pas vraiment besoin.
Pour rassembler tout l'argent dont vous avez besoin pour faire des cadeaux, vous tapez dans les services publics rendus à la population. Depuis 2007, vous avez supprimé 150 000 postes de fonctionnaires. Savez-vous ce que cela signifie dans les tribunaux, les hôpitaux, les écoles, les prisons et de multiples autres services ? Cela se traduit par des listes d'attentes, des services moins bien rendus, du stress pour les médecins et les infirmières dans les hôpitaux, avec les risques qui en résultent pour les patients. Il est vrai que les privilégiés ont leurs établissements, où ils sont bichonnés, ce qui n'est pas votre préoccupation pour les plus modestes des Français.
Nos collègues sénateurs ont fait un magnifique travail. Ils ont mis les pieds dans le plat…
…et apporté la démonstration qu'il était aujourd'hui possible de réaliser 30 milliards d'économies sans tomber dans l'austérité, sans coupe brutale dans les budgets de l'État et des collectivités, simplement en se fixant pour objectif plus de justice fiscale et en faisant contribuer ceux que vous dorlotez. Pour que les Français puissent avoir dans leur assiette autre chose que des lentilles, il faut en prendre un peu à ceux qui font des excès de caviar et de foie gras : il faut redistribuer. Mais là, madame la ministre, vous avez un problème : vous ne savez pas comment on fait des divisions justes ou, pour reprendre votre adjectif, « équitables ».
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, on en sait maintenant un peu plus sur le projet socialiste pour 2012.
Que feriez-vous sans le parti socialiste ! C'est une vraie béquille pour vous !
Elle est implacable : 32 milliards d'impôts supplémentaires, vingt-trois taxes nouvelles créées,…
…5 milliards de niches fiscales en plus, bref, l'addition est lourde. Ceux qui vont trinquer sont, bien sûr, le secteur industriel dont on a tant besoin, mais aussi, n'en déplaise à M. Brard, les classes moyennes. Le Sénat a, en effet, supprimé le moyen pour 9 millions de salariés français de bénéficier d'une détaxation et d'un allégement des charges sociales sur les heures supplémentaires. C'est ni plus ni moins que 22,67 milliards d'euros dont ont bénéficié les classes moyennes depuis 2007, ce qui représente en moyenne un salaire et demi en plus pour chaque personne pratiquant les heures supplémentaires. Ce pouvoir d'achat important, considérable, le Sénat l'a supprimé. D'après ce que je crois lire dans les journaux traditionnellement sensibles aux arguments de l'opposition, cela ennuie l'entourage du candidat du parti socialiste, François Hollande, qui cherche le moyen de réduire ce supplément de pouvoir d'achat que nous avons donné aux bénéficiaires des heures supplémentaires en envisageant, en contrepartie, une réduction au titre de l'impôt sur le revenu ou une réduction forfaitaire. On sent le malaise poindre dans l'opposition, car c'est une mesure populaire qui profite à 9 millions de salariés français ; la refuser sera sans doute une des grandes erreurs à mettre à son débit.
La copie du Sénat, nous allons l'examiner en nous en tenant à la ligne que nous suivons depuis 2007 : moins d'impôt pour tous, plus de compétitivité économique et davantage de justice sociale. Non pas la justice que décrit M. Brard, qui est électoraliste,…
…mais une justice fiscale qui bénéficie à tous les Français, pas seulement à ceux de Montreuil, monsieur Brard.
Tous les Français ont besoin d'une justice fiscale, tous les Français souhaitent pouvoir continuer à gagner davantage lorsqu'ils travaillent davantage. Tous les Français, surtout dans la situation économique que nous connaissons, ont besoin de pouvoir d'achat supplémentaire.
Le pouvoir d'achat, d'ailleurs, recommence à être l'une des préoccupations majeures des Français. Nous devons y veiller. Nous le faisons à travers l'ensemble des mesures de surveillance des prix, et surtout grâce aux mesures liées aux heures supplémentaires.
Telle est la logique que la majorité suivra pendant les quelques heures que nous consacrerons à cette nouvelle lecture du projet de loi de finances, dans le droit-fil de la commission des finances qui, sous la houlette du rapporteur général, a ramené au bon sens l'ensemble des mesures adoptées par le Sénat et apporté quelques ajouts dont nous pourrons discuter. C'est bien là la preuve, contrairement à ce que disait M. Brard, que la majorité fait régulièrement montre d'ouverture vis-à-vis de l'opposition.
En fait, c'était M. de Rugy, natif de la Loire-Atlantique, qui faisait ce reproche. Vous faites donc bien de parler d'huîtres.
La majorité tend régulièrement la main à l'opposition et, cet esprit d'ouverture qui nous caractérise, nous le montrerons au cours des prochaines heures.
Un mot sur les marchés. Tout à l'heure, M. Goua, en mauvais augure, annonçait que la France allait perdre son triple A, que ce serait la catastrophe. Il n'en est rien.
Un premier élément à prendre en compte est le taux de référence sur les marchés, c'est-à-dire le bon du Trésor à dix ans. En France, il était à 3,20 % ce matin contre 3,80 % il y a un mois.
Cela signifie que la situation sur le bon du Trésor français est en train de se détendre, grâce, il faut le dire, à la stratégie mise en oeuvre par Nicolas Sarkozy. Le chef de l'État, avec Angela Merkel, continue à construire une Europe renouvelée, avec des institutions plus fortes, présentes tant dans la zone euro qu'au niveau de l'Union européenne.
Cette stratégie commence à porter ses fruits. Si toutes les décisions ne sont pas encore entérinées – espérons qu'elles le soient le plus rapidement possible par l'ensemble des États de la zone euro et de l'Union européenne –, il y a déjà, sur les marchés, un signe de détente sur les taux qui est de bon augure pour le maintien de la notation française.
Cette notation procède de deux événements : les tendances sur les marchés et la stratégie déterminée par les gouvernements pour réduire l'endettement public, et en premier lieu les déficits publics. La France a arrêté une stratégie à 5,7 % du PIB pour 2011 et à 4,5 % du PIB en 2012. Nous tiendrons ces objectifs, quels que soient les aléas de la croissance.
Les derniers résultats de la situation économique de la France, ceux du mois de novembre, montrent un arrêt dans la décroissance. Du fait de la tendance internationale, la croissance française était en chute par rapport aux objectifs pour 2011. L'arrêt de cette chute au mois de novembre nous a fait entrer dans une période de stagnation, ce qui annonce deux bonnes nouvelles. La première, c'est que nous tiendrons bien les objectifs de réduction des déficits pour 2011 ; la seconde, c'est que le retour à une croissance plus forte sera peut-être au rendez-vous dès la fin du premier semestre 2012.
De sorte que l'hypothèse d'une croissance de 1 % en 2012 s'avère aujourd'hui plus que raisonnable. Si la tendance de novembre se confirme, elle devrait être dépassée. Nous n'aurons donc pas besoin d'utiliser les 6 milliards de crédits gelés pour le cas où la croissance se révélerait inférieure à 1 %. Un rapide calcul montre que 0,1 point de croissance en moins nécessite un milliard d'économies supplémentaires pour pouvoir tenir l'objectif de réduction des déficits en 2012. Si la croissance se maintient telle que les perspectives le laissent envisager au vu du résultat du mois de novembre, nous n'aurons pas besoin d'utiliser cette réserve : nous conserverons le cap de 1 % de croissance et d'une réduction du déficit à 4,5 %, et peut-être aurons-nous une bonne nouvelle.
Telles sont les dernières perspectives économiques. Elles sont plutôt rassurantes. Elles permettent de construire de façon confiante ce projet de loi de finances sur des hypothèses qui restent plus que jamais valables ; des hypothèses qui, il est vrai, doivent beaucoup à la détermination du Gouvernement et de Mme Valérie Pécresse à tenir les objectifs ministère par ministère. Chacun sait combien cette tâche est ardue et il y a lieu de rendre un grand hommage à Mme la ministre pour la pugnacité et la sagacité dont elle fait preuve pour tenir le cap de la réduction du déficit public.
Mes chers collègues, le groupe UMP votera bien évidemment ce projet de loi de finances, tout en faisant une simple observation sur la copie du Sénat : on ne peut croire qu'il y ait, d'un côté, les sénateurs socialistes, et, de l'autre, le candidat du parti socialiste. Nous savons très bien que tous les socialistes sont ensemble et que cela procède d'une stratégie bien arrêtée. Mais nous n'arrivons pas à nous expliquer le double discours tenu, d'un côté, par la majorité du Sénat, et, de l'autre, par le candidat socialiste à la présidence de la République française. Pourquoi ce dernier entretient-il en permanence l'ambiguïté sur ses véritables intentions ?
Ses intentions sont de pénaliser la classe moyenne française,…
…de pénaliser l'industrie et la compétitivité françaises. Qu'il le dise publiquement, de telle sorte que tout soit clair et que tout soit dit pour l'élection présidentielle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la ministre, monsieur le rapporteur général, le budget initial que vous allez rétablir à grand coup d'amendements n'avait qu'une ligne directrice : une austérité massive et aveugle. Comme l'ensemble de votre politique, il était, il sera marqué du sceau de l'injustice et de l'inefficacité.
Le Sénat vous offrait l'occasion d'en corriger l'injustice, de supprimer des niches fiscales, comme le conseillaient tous les rapports existants au lieu d'inventer de nouveaux impôts comme vous le faites dans ce projet de budget et dans les différents collectifs.
Cette occasion, vous l'avez écartée.
Le Sénat vous faisait des propositions pour remettre un peu d'efficacité dans votre politique économique et ne pas continuer à conduire des politiques en complet décalage avec la conjoncture économique. De la même manière, vous considérez que cela ne mérite pas discussion.
Il est vrai que ce budget, comme cela a été dit lors de la discussion au Sénat, est un budget assez paradoxal. Car, au fond, les grandes mesures de politique économique et la plupart des mesures fiscales qui auront un impact important – la hausse de la TVA, l'augmentation de l'impôt sur le revenu – ne se trouvent pas dans ce budget mais dans les collectifs. Madame la ministre, vous nous expliquez que votre force est la réactivité. Non, une politique cohérente d'un gouvernement est une politique qui s'exprime dans un budget construit sur des hypothèses plausibles. Quand nous avons commencé l'examen de ce budget, tout le monde savait que la croissance ne serait pas de 1,75 % mais de 1 %. Il fallait donc construire un budget reposant sur cette hypothèse, voire sur une hypothèse moins favorable. Cela aurait au moins permis d'avoir une vue d'ensemble de votre politique. Mais là, il nous faut faire un travail consistant à cumuler les effets des trois plans de rigueur successifs – car ce projet de budget en est, qui s'ajoute aux deux autres –, voire de quatre, car nous ne sommes pas sûrs qu'un nouveau plan de rigueur ne nous sera pas proposé prochainement !
Le budget dont nous discutons repose sur une croissance de 1,75 %. Le plan de rigueur qui sera examiné en deuxième lecture la semaine prochaine repose, quant à lui, sur une croissance de 1 %, quand on sait que celle-ci ne sera vraisemblablement, et malheureusement, que de 0,3 %. Vous prévoyez, dans le plan qui se discutera à nouveau la semaine prochaine un ajustement de 7 milliards d'euros pour tenir compte du fait que la croissance que vous retenez maintenant est de 1 % et non de 1,75 %,. Votre raisonnement – qui, lui, est juste – consiste à dire que quand on perd 0,1 point de PIB, on perd pratiquement 1 milliard de recettes. Mais le problème est que ce plan de rigueur qui sera discuté la semaine prochaine est déjà caduc. Car avec une croissance de 0,3 %, c'est à nouveau 0,7 point de PIB que nous aurons en moins. Par conséquent, cela vous conduira, sans doute, à envisager 7 milliards de prélèvements supplémentaires.
Vous nous dites qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter, car il existe une réserve. Cette réserve existe dans tous les budgets. Vous serez bien obligés de procéder à cet ajustement, car si vous ne le faites pas, le déficit sera plus élevé que prévu.
Cela montre à quel point votre politique qui consiste à courir continuellement après la réduction des déficits et après une croissance qui disparaît, en accumulant des plans de rigueur successifs qui cassent toujours plus la croissance, est une politique absurde. Elle ne converge que vers une croissance inexistante.
Le budget que vous allez rétablir, c'est une austérité massive du côté des dépenses, avec, en pleine explosion du chômage, une baisse de 12 % des crédits de l'emploi.
Le Sénat a eu raison de voter contre la plupart des missions qui étaient dans ce budget, parce que ces coupes aveugles dans les dépenses n'obéissent à aucune réflexion, ni macroéconomique, ni politique. On ne voit là aucune politique sélective. Vous vous contentez de couper, couper et encore couper, avec pour seul effet de casser la croissance.
Vous auriez pu préserver des mesures qui auraient permis d'accroître la compétitivité. Vous auriez pu mettre en oeuvre des mesures de soutien de l'emploi. Non, vous préférez couper massivement dans les dépenses, tout comme vous rabotez les niches fiscales au lieu de conduire une politique sélective et intelligente de suppression de ces niches, comme le propose d'ailleurs le Sénat.
Austérité massive du côté des recettes également. Je suis très étonné, madame la ministre, de vous entendre parler des augmentations d'impôts du Sénat. Car il fait ce que vous auriez dû faire. Nous disposons de nombreux rapports : celui du Conseil des prélèvements obligatoires, celui de l'inspection générale des finances, que vous avez demandé ; celui de Gilles Carrez, remis cet été, qui montre que des niches fiscales pourraient être supprimées sans avoir aucun effet négatif sur la croissance. Vous ignorez complètement ces rapports, pour inventer de nouvelles taxes. C'est l'un des deux domaines dans lesquels vous êtes champions : l'inventivité en matière fiscale, puisque vous avez créé une trentaine de nouvelles taxes. Et il s'agit bien de création de taxes et non de suppressions de niches. L'autre domaine, c'est l'inventivité en matière de lois de finances rectificatives. Vous en faites tous les mois. On ne sait quand les choses s'arrêteront.
Ce que fait le Sénat, c'est une politique cohérente. Nous savons très bien que nos impôts sont mités par des niches fiscales qui devraient être supprimées sans que cela ait aucun effet négatif. Que fait le Sénat ? Il supprime un certain nombre de niches sur l'impôt sur les sociétés. Nous savons tous ici que cet impôt est profondément injuste, que les petites entreprises, les PME, paient près de 33 %, contre 8 % pour les entreprises du CAC 40, et rien pour les plus grandes. On sait bien qu'il existe quelques niches qui leur permettent effectivement de s'exonérer de l'impôt sur les sociétés. Supprimer ces niches et rétablir un peu de justice fiscale, c'est aussi rétablir de l'efficacité. C'est ce que propose le Sénat.
Je n'en prendrai qu'un exemple : la niche Copé, sur laquelle le Sénat propose une mesure dont l'inspirateur est notre collègue Gilles Carrez, qui dit que l'assiette de la niche Copé pourrait être plus intelligente que celle retenue. Le rapporteur général proposait une assiette et un taux différents qui réduisaient fortement le coût de cette niche. C'est exactement ce que propose le Sénat. Quand j'ai posé la question à Gilles Carrez, il a reconnu, un peu embarrassé, que cela se ferait peut-être plus tard. Chaque fois que des mesures intelligentes sont préconisées…
…dans des rapports et que le Sénat cherche à les appliquer, vous nous dites que vous le ferez plus tard. Quand ? Nous verrons !
Cette austérité, vous la faites partager aux collectivités locales. Et cela, permettez-moi de dire que c'est particulièrement choquant, parce qu'elles ne sont en rien responsables de la dette. Leur dette représente 8 % du PIB depuis trente ans. Cela n'a pas bougé. Ce n'est pas la dette des collectivités locales qui explique la situation de notre pays, c'est l'incapacité de l'État, notamment des gouvernements de droite, à réduire les déficits. C'est le fait que vous ayez laissé exploser la dette. Je ne citerai que deux chiffres : en vingt ans, notre dette sera passée de 43 % du PIB, au début du gouvernement Balladur, à 86 %, puisque tel sera son montant en 2012. Elle aura doublé en pourcentage du PIB.
Nous avons connu des gouvernements de gauche et de droite. À ma connaissance, le gouvernement de gauche qui a succédé à celui d'Alain Juppé a trouvé en 1997 une dette supérieure à 60 % du PIB, et il l'a ramenée à 58 % en 2002. Donc, toute l'augmentation de notre dette, le doublement de notre dette depuis un quart de siècle, est le fait de gouvernements de droite. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Mes chers collègues de la majorité, n'oubliez pas que la dette n'est pas due principalement à la crise, mais à des politiques successives qui ont consisté à faire des cadeaux fiscaux aux plus fortunés, à crédit et en laissant la dette exploser. Voilà la réalité !
Cette politique d'austérité massive est une impasse. On sait très bien que l'on ne réduit les déficits par des politiques d'austérité, mais par des politiques macroéconomiques complètes qui soutiennent l'emploi, l'investissement et la croissance. Cela suppose une politique sélective.
Bien sûr qu'il faut réduire les déficits. Mais on ne les réduit pas en se contentant d'opérer des coupes brutales dans les dépenses et en augmentant les impôts. Car les augmentations, c'est vous ! Je rappellerai deux chiffres : vous avez consenti 75 milliards de cadeaux fiscaux cumulés depuis 2007. Quand on cumule sur toutes les années la loi TEPA, la baisse de la TVA sur la restauration, et autres mesures similaires, on arrive à 75 milliards. Depuis deux ans et jusqu'en 2012, vous aurez fait 43 milliards de prélèvements nouveaux. Si vous restez au pouvoir…
…vous allez battre un record de prélèvements obligatoires. Ce record, madame la ministre, il figure dans les textes de votre ministère. Il est dans la programmation pluriannuelle des finances publiques.
La réalité de votre politique a été de faire des cadeaux fiscaux quand tout allait bien et qu'il aurait fallu réduire le déficit – comme l'a fait l'Allemagne, qui est revenue à l'équilibre avant la crise et qui n'est pas dans la situation dans laquelle se trouve notre pays. Et aujourd'hui, le dos au mur, vous proposez des mesures fiscales brutales, des mesures de réduction de dépenses qui vont toucher tous les Français, notamment les plus modestes. Car j'ai encore en tête cette hausse du taux le plus faible de la TVA, dont nous reparlerons la semaine prochaine, et qui est la mesure la plus injuste que l'on puisse imaginer.
Je dirai, parce qu'il me faut approcher de ma conclusion…
…que ces plans de rigueur à répétition sont l'aveu de l'échec, de la faillite de votre politique. Le Président de la République devait « aller chercher la croissance avec les dents ». On voit aujourd'hui les dents, on n'a jamais vu la croissance. Cette politique de cadeaux fiscaux est aussi, aujourd'hui, une politique d'austérité aveugle. Vous la mettez en oeuvre, dites-vous, pour préserver le triple A.
Je vous répondrai que si cela fait longtemps que le Président de la République n'a plus la confiance des Français, vous n'avez aujourd'hui ni celle des Français, ni celle des marchés. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Juste quelques mots, monsieur le président, pour compléter l'excellente démonstration de mon collègue Pierre-Alain Muet.
Je n'ai pas entendu tout votre propos liminaire, madame la ministre, mais sur une partie en tout cas, je suis entièrement d'accord : « la croissance est encore vulnérable », avez-vous dit, et c'est exact : la croissance est encore vulnérable. C'est l'aveu que votre prévision de croissance n'est pas la bonne et que, immanquablement, vous allez connaître des difficultés dans l'exécution de ce budget pour 2012.
Certes, nous avons une réserve de précaution, de 7 milliards d'euros, ajoutez-vous, qui permettra d'absorber une éventuelle baisse de croissance ; mais, comme M. le rapporteur général l'a lui-même reconnu, la réserve de précaution est traditionnellement débloquée en très grande partie dès les premiers mois de l'exercice budgétaire…
Vous allez nous proposer de supprimer l'article 2, autrement dit l'indexation du barème de l'impôt sur le revenu. Je réitère ma question, puisque M. le rapporteur général m'a promis une réponse pour aujourd'hui : combien de nouveaux foyers fiscaux cette décision va-t-elle faire entrer dans l'impôt sur le revenu ? En commission, le rapporteur général a avancé, dans une estimation à la louche, un nombre entre 100 000 et 200 000 foyers fiscaux. Les services de Bercy ont dû travailler là-dessus. Sans doute pouvons-nous espérer une réponse ce soir.
Pour ces centaines de milliers de foyers qui vont entrer dans l'impôt sur le revenu, les conséquences ne seront pas anodines, car ces contribuables vont perdre le bénéfice d'un certain nombre d'autres exonérations liées à leur situation de non-imposable.
Pour ce qui est de la taxe sur les hauts revenus, dont vous vantez la sévérité sur toutes les tribunes, je me suis livré à un petit calcul. Pour une personne qui gagnerait vingt fois le SMIC par part…
…soit à peu près 21 000 euros, savez-vous à combien s'élèvera cette taxe sévère ? Soixante euros ! Le contribuable qui touche 21 000 euros par mois et par part, soit 252 000 euros par an, sera taxé à hauteur de 60 euros !
Un mot également sur la niche Copé : lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2011 en première lecture, vous nous avez appris, madame la ministre, que la niche Copé n'existait pas. Si tel est le cas, supprimez cette niche dont nous savons, cela a été dit et vérifié en commission, qu'elle coûte un certain nombre de milliards par an de cadeaux fiscaux aux plus grosses entreprises.
Je n'aurai pas le temps d'aborder au fond la question de la péréquation des dotations aux collectivités, car c'est très technique, mais je voudrais tout de même m'élever contre l'absence de simulations et autres documents sans lesquels les parlementaires ne peuvent légiférer en toute connaissance de cause sur des mesures qui touchent toutes les collectivités. Il ne faudrait pas que, au travers d'amendements probablement de bonne foi – nous avons tous le même souci d'équité et de justice, du moins je l'espère, sur ce point – on légifère à l'aveugle, au risque de commettre des erreurs. Rappelons que la niche Copé, par exemple, évaluée à 1 milliard d'euros par an au moment de sa création, aura finalement coûté cinq à six fois plus, et que la disparition de la taxe professionnelle que vous avez votée au profit d'autres taxes multiples et variées a, malheureusement, se sera au bout du compte traduite pour l'État par une dépense bien plus lourde que ce que vous aviez annoncé.
Je terminerai, pour respecter mon temps de parole, sur deux points très précis, qui paraîtront peut-être dérisoires par rapport à l'ensemble du projet de loi, mais qui, dans les deux cas, consistent en des pratiques de tuyauterie un peu compliquées – et même, à mon avis, inconstitutionnelles –, consistant à prélever sur des opérateurs de l'État des sommes que les mêmes opérateurs ont perçues auprès des contribuables.
Le premier article en cause, c'est l'article 63 qui ponctionne 300 millions d'euros sur le fonds de sécurisation des parcours professionnels. Voilà typiquement une « manip » particulièrement opaque, puisque ce fonds est financé par des contributions prélevées auprès des entreprises.
Le second article qui devrait éveiller l'attention de nos collègues, c'est l'article 16 bis, qui vous autorise à prélever en gros 100 millions d'euros à deux organismes : l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques, et l'Agence nationale des titres sécurisés.
L'ONEMA est financé en partie par les agences de l'eau et donc par les usagers de l'eau. En le ponctionnant, vous allez du coup affecter une part des taxes payées par les usagers à une tout autre destination, puisque vous allez les réintégrer dans le budget.
Pour ce qui est de l'ANTS, nous avions demandé, à l'occasion de la rédaction d'un excellent rapport produit par François Cornut-Gentille et votre serviteur, une étude à Ernst & Young à son propos. Je vous invite, madame la ministre, à la consulter, en tout cas à vous en faire communiquer les principaux comptes rendus : cela nous a permis d'identifier le fait que l'usager est le principal financeur de cette agence. Non seulement vous avez augmenté les droits de timbre sur les passeports ainsi que les montants sur les cartes grises, mais vous allez maintenant ponctionner 55 millions d'euros ! Je trouve cela proprement scandaleux.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les députés, nos débats portent leurs fruits et je veux remercier l'ensemble des orateurs qui viennent de se succéder à la tribune car nous avons désormais un point d'accord : on ne peut imaginer divergences plus radicales que celles qui séparent l'Assemblée nationale et le Sénat.
Le rapporteur général l'a parfaitement souligné, ce sont deux textes aux philosophies diamétralement opposées qui ont été adoptées dans les deux assemblées : d'un côté, le budget porté par le Gouvernement et cette majorité, un budget sérieux, crédible, parce qu'il donne la priorité à la baisse des dépenses et permet de franchir une nouvelle étape sur le chemin du désendettement, de l'autre, le texte voté par le Sénat, texte baroque pour certains, surréaliste pour d'autres, texte qui annule douze missions de l'État, empêchant de rémunérer la moitié de la fonction publique de l'État.
Mais l'essentiel de ce budget sénatorial, c'est quand même les 32 milliards d'euros d'impôts supplémentaires, 32 milliards dégagés grâce à l'adoption d'une kyrielle de prélèvements, de taxes, dont Charles de Courson a parfaitement démontré qu'elles n'avaient pas la moindre cohérence. C'est une mosaïque, une kyrielle, un patchwork de taxes ! Comme pourrait-il en être autrement ? Quand on vote quarante-sept nouvelles taxes en quelques jours, c'est sans doute que l'on n'a pas de stratégie d'ensemble et qu'on se contente d'empiler impôt nouveau sur impôt nouveau.
Madame la ministre, mettez de la conviction dans votre propos, vous ne semblez pas croire ce que vous dites !
Le texte du Sénat relève de l'exercice de style et je ne suis effectivement pas convaincue, monsieur Brard – vous avez raison sur ce point –, que ce choix soit le plus judicieux dans les circonstances exceptionnelles que nous vivons.
Une chose est sûre : cet exercice de style en dit long sur les options qui sont les vôtres. En réalité, vous n'avez pas de chemin alternatif de réduction des déficits. Pour une raison très simple : vous n'êtes pas prêts à donner la priorité aux économies. Vous n'êtes pas prêts à porter des réformes structurelles qui permettent de dépenser moins, ou de dépenser mieux.
Arrêtez de nous faire des procès d'intention ! Parlez de vous, pas de nous !
Nous, nous avons entrepris la réforme de l'État – la révision générale des politiques publiques entraînera 15 milliards d'euros d'économies d'ici à 2013 – la réforme de la carte militaire, la réforme de la carte judiciaire, la réforme des retraites.
Lisez mon rapport, monsieur Eckert, vous serez mieux informé.
Parce que vous refusez les réformes, vous seriez contraints d'imposer à la France un choc fiscal de 32 milliards d'euros en l'espace d'un an. La croissance ne s'en relèverait définitivement pas, monsieur Muet.
On est très loin de notre politique.
Notre politique, elle porte ses fruits, monsieur Muet. Vous avez oublié bien vite nos débats sur le collectif budgétaire. La réduction des déficits est un fait.
Entre 2010 et 2011, nous avons réduit le déficit de 36 %.
Et c'est avec ce projet de loi de finances que nous allons franchir la nouvelle marche vers le retour à l'équilibre.
Monsieur Eckert, nous avons une stratégie de long terme, qui traverse l'ensemble des textes financiers que vous avez examinés et qui reposent sur des efforts structurels.
Année après année, la France avance sur le chemin du désendettement, elle avance au bon rythme, celui qui permet de protéger la croissance et le pouvoir d'achat des Français, et d'abord celui des plus fragiles. Vous appelez de vos voeux un plan de rigueur beaucoup plus brutal. Qui l'aurait supporté ?
C'est pourquoi, aujourd'hui, monsieur Muet, nous demandons plus à ceux qui peuvent plus, à travers la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus – M. Eckert l'a citée mais il n'a parlé que d'elle.
À travers également le gel de l'impôt sur le revenu, le gel du barème de l'impôt sur la fortune, des droits de successions, la réforme du régime des plus-values immobilières, la hausse des prélèvements sociaux et fiscaux des revenus du patrimoine.
Ce n'est pas drôle pour ceux qui vont entrer dans l'impôt sur le revenu.
Au total, la justice fiscale est au coeur de tous les textes que vous venez d'examiner.
Ça, c'est un fait, c'est la réalité. À Jean-Pierre Brard, je veux dire qu'il prend ses aises avec la réalité.
À moins qu'il soit mal informé, ce dont je doute.
La TVA restera à 5,5 % sur les produits d'alimentation, y compris sur les cantines scolaires. Nous y avons veillé pour protéger les Français les plus fragiles. Et c'est pour cette raison aussi que nous avons exclu du champ des nouveaux taux l'énergie.
L'eau également.
Les biens et services destinés aux handicapés sont également exclus, comme les cantines scolaires à l'initiative de votre rapporteur général.
L'eau échappe à la hausse de la TVA ? Ou alors, le Gouvernement aura déposé un amendement !
L'équité est au coeur de notre politique, tout comme la compétitivité, Jérôme Chartier l'a parfaitement rappelé.
Un seul exemple : en cinq ans, nous aurons augmenté de 9 milliards d'euros le budget de l'enseignement supérieur et de la recherche – sur ce point, toutes les analyses concordent.
L'innovation est l'un des moteurs fondamentaux de notre croissance.
Parce que nous y avons fait des belles choses, monsieur Brard, des choses contre lesquelles vous avez voté, ce que vous devriez regretter.
On a besoin de gens courageux partout, monsieur Brard, aujourd'hui.
L'innovation est l'un des moteurs fondamentaux de la croissance. C'est l'une des clefs de notre compétitivité. Cette hausse sans précédent, c'est le Président de la République qui l'a voulue, ce que vous oubliez.
Le Sénat, à peine passé à gauche, a refusé de la voter.
Nos divergences, mesdames, messieurs les députés, sont donc très claires. Pour faire sourire et être gentille, j'ai qualifié le texte adopté par le Sénat de surréaliste et de baroque ; en réalité, je devrais dire qu'il est profondément irresponsable.
Son grand mérite, c'est qu'il prouve qu'il n'y a pas de stratégie alternative. La crédibilité dans la réduction des déficits est clairement du côté du Gouvernement et de la majorité.
Le refus de l'opposition de saisir la main tendue par le Président de la République sur la règle d'or de retour à l'équilibre budgétaire le prouve.
Depuis six mois, vous avez toujours un bon prétexte ou une bonne excuse pour ne pas voter le règle d'or. En juillet dernier, vous y étiez favorables, mais pour plus tard. Maintenant que la règle d'or s'impose comme une évidence partout en Europe…
…et qu'il semble urgent de l'adopter pour protéger les Français, notre économie, nos entreprises et notre système bancaire, vous vous défaussez à nouveau, au motif que la règle d'or que nous avons adoptée serait contraire à la règle européenne.
Mais qui peut le croire ? Notre volonté de retour à l'équilibre est clairement compatible avec le futur traité européen, et vous savez pertinemment que si vous manifestiez le moindre souhait de voter cette règle d'or, rien ne serait plus facile que de la compléter pour l'harmoniser totalement avec le futur traité.
Vous avez dit qu'elle était contraire, messieurs ; or elle va exactement dans le même sens et elle est totalement compatible. S'il faut la compléter et l'adapter, rien n'est plus facile, vous le savez parfaitement ! La vérité, c'est que vous cherchez encore un alibi, mais nous ne vous le donnerons pas, car nous pensons qu'aujourd'hui la situation est suffisamment grave pour que vous vous haussiez à la hauteur des intérêts nationaux et que vous preniez vos responsabilités. Nous n'avons pas besoin de divisions, mais d'union et de responsabilité collective. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
J'appelle maintenant les articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2012.
Madame la ministre, vous confondez la règle d'or et la règle du noeud coulant… Ce n'est quand même pas tout à fait pareil, à voir dans quel état on en sort !
Nous savons tous que l'impôt sur le revenu est théoriquement le plus juste, parce que le plus progressif. Il est d'autant plus juste que le nombre de tranches est élevé et les taux suffisamment échelonnés pour s'adapter aux capacités contributives des ménages.
Au nom de la concurrence fiscale et de prétendus critères d'attractivité qui n'ont jamais été étayés par la moindre démonstration, cet impôt a été régulièrement et volontairement l'objet d'attaques au cours des vingt dernières années. On est ainsi passé de treize tranches avant 1986 à sept tranches en 1994 sous le gouvernement Balladur, puis à quatre tranches en 2007, avec un taux marginal ramené à 40 % alors qu'il dépassait 65 % en 1982.
L'impôt sur le revenu a été dans le même temps mité de mesures dérogatoires, de niches fiscales dont la Cour des comptes souligne qu'elles ont, concernant l'impôt sur le revenu, augmenté de 142 % entre 2004 et 2009. Ces niches représentent un manque à gagner de 16 milliards d'euros au moins, si l'on en croit le rapport d'information de notre rapporteur Gilles Carrez, dont on connaît l'objectivité et la discrétion.
La priorité est aujourd'hui de redonner à cet impôt toute sa place, de supprimer les niches sans pertinence économique et sociale, et de créer de nouvelles tranches pour les fractions de revenu supérieures en fixant un taux marginal sensiblement plus élevé que l'actuel. La mesure de gel du barème, proposée le 7 novembre dernier par le Premier ministre, ne répond pas à cet objectif. Elle frappera essentiellement les salariés et les retraités, qui devront payer le principal de la facture adressée aux Français. Nous nous opposerons donc à l'amendement de suppression de l'article 2 proposé par la commission.
L'article 2, tel que rédigé par le Sénat, a le mérite de reprendre des éléments de la discussion que nous avions eue au sein même de cette assemblée sur des amendements émanant de la droite comme de la gauche, puisque certains de nos collègues de l'UMP proposaient une tranche à 46 %.
Le Sénat propose pour sa part d'instaurer une tranche à 45 % à partir de 100 000 euros, ce qui correspond à la proposition que nous avions faite. Il propose également, à travers d'autres articles et amendements, la suppression de nombreux dispositifs à cause desquels l'impôt sur le revenu n'est aujourd'hui plus progressif. On sait fort bien que, lorsque l'on monte dans l'échelle des revenus le taux d'imposition effectif baisse, en raison des niches fiscales mais aussi des prélèvements libératoires. C'est ainsi que les mille plus hauts revenus n'acquittent que 25 % de leurs revenus en impôts alors que la tanche marginale est à 41 %, tandis que les dix plus hauts revenus paient moins de 20 %.
Une réforme simple de l'imposition du revenu, qui élargisse l'assiette et rétablisse la progressivité, est donc nécessaire. C'est un débat que nous avons eu longuement et qui n'épouse pas strictement le clivage gauche-droite, puisque certains au sein de la majorité proposaient l'instauration d'une tranche à 45 ou 46 %. Dans la conjoncture actuelle, le Gouvernement aurait été bien inspiré d'entreprendre, au lieu de ses bricolages, cette nécessaire réforme de l'impôt sur le revenu.
J'ai deux questions très simples. L'article 2 concerne le barème de l'impôt sur le revenu ; j'aimerais donc savoir en premier lieu, madame la ministre, à combien vous estimez le nombre de foyers fiscaux qui deviendront pour la première fois imposables au titre de l'impôt sur le revenu du fait du gel du barème. Le rapporteur général a déclaré en commission que ce nombre était difficile à évaluer mais il l'estimait entre cent et deux cent mille foyers fiscaux.
Ma seconde question porte sur votre remarque de tout à l'heure et n'a rien à voir avec l'article 2, et je m'en excuse : pouvez-vous nous confirmer que la TVA sur l'eau restera à 5,5 % comme c'est le cas actuellement dans le projet de collectif budgétaire ? Ce serait une nouveauté…
Monsieur Eckert, nous ne connaissons pas le nombre exact de personnes qui seront soumises pour la première fois à l'impôt sur le revenu pour la bonne et simple raison que, dans une année qui s'annonce difficile pour les entreprises, nous pensons que les hausses de salaires seront sans doute plus modérées.
Mais l'ordre de grandeur que vous a donné le rapporteur est le bon. Vous savez cependant qu'en deçà de 60 euros, l'impôt n'est pas recouvré, et l'effet de seuil est lissé par cette disposition.
Pour ce qui concerne l'eau potable, je répète qu'il s'agit d'un produit alimentaire de base, d'utilisation courante, et que sa TVA restera à 5,5 %.
Sur l'article 2, je suis saisi d'un amendement de suppression de la commission, n° 98.
La parole est à M. le rapporteur général.
Il s'agit de supprimer l'article rédigé par le Sénat mais surtout de coordonner l'article 1er de la loi de finances pour 2012 avec l'article premier du collectif que nous avons examiné la semaine dernière.
En effet, dans le cadre du plan annoncé par le Premier ministre le 7 novembre dernier et dont la traduction se retrouve pour partie dans le collectif, il a été décidé de ne pas indexer le barème de l'impôt sur le revenu sur les deux exercices 2012 et 2013. Puisque nous avions voté comme chaque année cette indexation pour 2012, il convient de supprimer l'article 2 de la loi de finances initiale pour 2012, pour être cohérent avec le collectif que nous avons adopté la semaine dernière.
Avis favorable.
(L'amendement n° 98 est adopté.)
Sur l'article 2 bis, je suis saisi d'un amendement de suppression de la commission, n° 99.
La parole est à M. le rapporteur général.
L'amendement demande effectivement la suppression de cet article du Sénat qui concerne l'indexation de la prime pour l'emploi.
(L'amendement n° 99 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Madame la ministre, il faut que je vous le dise franchement : nous avons l'impression de prêcher dans le désert. Je pense à Moïse redescendant de la montagne et à ce qu'il advint de ceux qui adoraient le veau d'or, et dont le sort pourrait peut-être vous paraître un jour familier…
Mais nous avons, nous, les tables de la justice, aussi fortes que les tables de la loi, les tables de la fraternité…
Je vois, mon cher collègue, que nous commençons à vous évangéliser !
La majorité sénatoriale a adopté un amendement de nos collègues sénateurs qui confirmait notre volonté de voir disparaître le dispositif de défiscalisation des heures supplémentaires introduit dans la loi TEPA. Vous vous rappelez que la Cour et le rapporteur général avaient à l'époque conclu à la faible efficacité du dispositif.
Selon certains, la suppression de ce dispositif porterait atteinte au pouvoir d'achat des ménages les plus modestes et mettrait en cause l'emploi et la qualité de vie de millions de salariés. Je rappellerai simplement que, entre la défiscalisation des heures supplémentaires et l'absence de certaines cotisations sociales, ce sont 4,3 milliards d'euros de recettes fiscales et sociales qui ont été perdus. Au regard de cette somme, d'après les analyses les plus officielles, le bénéfice du dispositif pour le PIB ne s'élèverait qu'à 3 milliards d'euros. En clair, la mesure coûte plus aux caisses de l'État et de la sécurité sociale qu'elle ne leur rapporte !
Toutefois, nous pourrions aussi nous demander si la division de cette somme de 4,3 milliards d'euros par le chiffre de 9 millions de salariés ne donnerait pas une idée de l'impact de la mesure. Faisons d'ailleurs cette petite division : la portée du dispositif – exonérations patronales comprises, rappelons-le – est alors réduite à 500 euros environ par an et par salarié, soit 42 euros par mois. Autrement dit, la réalité de la mesure n'est pas aussi reluisante que M. Xavier Bertrand et l'UMP dans son ensemble cherchent à nous le faire croire !
En outre, ces fameuses heures supplémentaires pèsent sur certains droits dits « connexes ». Soyons clairs sur ce point : plus vous effectuez d'heures supplémentaires, moins le montant de votre prime pour l'emploi est élevé et moins vos impôts locaux seront plafonnés. Surtout, ne l'oublions jamais, une rémunération exonérée de cotisations sociales n'ouvre droit à aucune prestation. Travaillez plus et votre retraite sera plus faible : telle est la vérité de la loi TEPA et la devise de l'UMP !
L'article 2 ter supprime ce dispositif absurde dans la conjoncture actuelle de subvention aux heures supplémentaires. Non que dans l'absolu cette politique n'ait pas de sens ; elle pourrait avoir un sens en période de plein-emploi.
Je l'ai toujours dit ! Dans les années cinquante, quand la France manquait de travailleurs, les heures supplémentaires se pratiquaient massivement, et il n'était d'ailleurs pas nécessaire de les subventionner. Mais, en période de chômage, dépenser 4,5 milliards d'euros pour subventionner des heures supplémentaires dont tous les instituts de conjoncture montrent qu'elles ont pour effet de détruire des emplois est une aberration : ce qui est gagné par les salariés qui ont un emploi est perdu par les salariés qui sont au chômage, de sorte que l'effet sur le revenu est nul : n'importe quel institut de conjoncture vous le dira.
J'ajoute qu'un excellent rapport rédigé par notre vice-président Jean Mallot et notre collègue Jean-Pierre Gorges pointe les nombreux effets d'aubaine et préconise au minimum de supprimer la partie incitation aux entreprises, qui est une absurdité.
Je suis convaincu d'une chose, c'est que ce dispositif sera repris dans tous les cours d'économie comme un modèle d'hérésie économique ! En période de chômage élevé, c'est une arme de destruction massive de l'emploi.
Comment l'Allemagne a-t-elle fait baisser son taux de chômage dans la crise ? En réduisant le temps de travail !
Je rappelle que l'Allemand travaille en moyenne 35,5 heures par semaine quand le Français travaille 38 heures. On pratique outre-Rhin le Kurzarbeit, c'est-à-dire le « travail court », subventionné, de sorte que les salariés sont restés dans l'emploi au lieu d'être au chômage. Et si l'Allemagne a réussi à faire 3 % de croissance, c'est que ses salariés étaient en place.
Si vous aviez un minimum de réflexion économique, vous supprimeriez cette mesure absurde.
Si vous aviez une réflexion économique, jamais vous n'auriez fait les 35 heures !
Je sais bien que cette mesure est emblématique de votre politique du « travailler plus », mais quand une mesure emblématique est absurde, il faut y mettre fin.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement de suppression n° 100.
Cet amendement vise à supprimer l'article 2 ter qui conduirait à annuler l'excellente mesure de défiscalisation des heures supplémentaires.
Favorable
Monsieur le rapporteur général, ce n'est pas moi mais vous qui avez écrit dans un rapport très pertinent, publié peu de temps après la mise en place de la mesure en question, qu'elle n'avait pas prouvé son efficacité.
« Souvent femme varie, bien fol est qui s'y fie » entendait-on dire durant la Renaissance, époque à laquelle régnait la misogynie. Il serait tout de même dommage que l'on puisse vous appliquer la formule. (Sourires.) Vous devriez revenir à votre position première.
Monsieur Muet, votre présentation n'est ni honnête ni équilibrée.
Pour commencer, la mesure dont vous parlez a été prise avant le déclenchement de la crise. Vous auriez donc pu admettre qu'elle était économiquement défendable au moment de son adoption, même si la crise peut nous amener depuis à nous poser des questions.
Ensuite, cette mesure avait entre autres objectifs celui de soutenir le pouvoir d'achat des travailleurs pauvres. Qui fait des heures supplémentaires ?
Cette mesure a permis une distribution de pouvoir d'achat en faveur de plusieurs millions de salariés modestes car les activités qui utilisent ce dispositif ne font pas travailler des cadres supérieurs.
Vous oubliez donc de dire que si nous votions l'article 2 ter, nous priverions les catégories sociales les plus modestes d'un moyen d'assurer une amélioration de leur niveau de vie. C'est bien le problème que vous aurez si vous revenez au pouvoir si vous voulez abroger ce dispositif : on vous accusera d'être complètement antisociaux.
Je croyais que la gauche défendait le travail ; en fait, elle ne le défend plus depuis longtemps.
Si la gauche défendait le travail, ça se saurait ! Votre position montre une nouvelle fois que vous ne défendez pas le travail des gens modestes.
Dans la situation actuelle, l'effet de la mesure relative aux heures supplémentaires sur le revenu global est strictement nul parce qu'il y a, d'un côté, des salariés qui perdent leur emploi et, de l'autre, des salariés qui sont mieux rémunérés.
Quelles sont les solutions ? D'abord, mieux rémunérer les heures supplémentaires. Cela dissuadera l'employeur d'y avoir recours au lieu d'embaucher, et cela permettra aux salariés concernés d'être mieux payés. Il faut ensuite augmenter la prime pour l'emploi. Cela compensera en partie l'effet que les heures supplémentaires peuvent avoir sur le revenu de salariés que vous avez un peu oubliés.
Monsieur de Courson, je peux vous prouver qu'en appliquant simultanément ces deux mesures, on y gagne. On arrête de détruire des emplois et on arrête une politique imbécile.
Cette semaine, j'ai reçu une délégation de salariés d'une importante entreprise l'agroalimentaire de la région Bretagne, que M. Le Fur connaît bien. Plus de 85 % des personnes concernées perçoivent un salaire situé entre le SMIC et le SMIC plus 3,5 %.
Ces salariés m'ont expliqué combien il est dur de satisfaire les besoins d'heures supplémentaires lors des pics d'activité : ils regrettent de ne pas avoir plutôt de nouveaux collègues. Ils demandent aussi une revalorisation globale des salaires et, dans la mesure du possible, de la prime pour l'emploi.
Dans les grosses entreprises du secteur de l'agroalimentaire, l'activité est fluctuante : les périodes d'inactivité succèdent aux périodes d'activité intense. Le surplus de salaire versé grâce aux heures supplémentaires équivaut à une centaine d'euros par an. Compte tenu de la dureté du travail, le fait que les salariés se retrouvent dans l'obligation de faire des heures supplémentaires – et il s'agit souvent d'une obligation –, pose tout de même une véritable question.
Le phénomène est flagrant si l'on prend l'exemple du secteur de la distribution, et en particulier le cas de la grande distribution. On trouve d'un côté des salariés ayant signé des contrats pour un temps de travail inférieur à 35 heures et, de l'autre, ceux qui font des heures supplémentaires. Le partage défavorable du travail est à ce point évident et répandu que certains dirigeants de ce secteur envisagent même d'ouvrir la porte aux embauches.
On ne peut pas dire qu'en donnant 80 euros de plus par an à des salariés de la grande distribution, on prend vraiment en compte leur situation. On a par exemple oublié qu'en les faisant travailler le samedi, on les oblige souvent à dépenser cet argent pour faire garder leurs enfants. Ils attendent de nous que nous les aidions à avoir des salaires plus décents, y compris par rapport aux résultats de leur entreprise, plutôt que le bénéfice d'une défiscalisation qui est en fait en cadeau de l'État à leur employeur.
Il faut arrêter de nous faire pleurer sur ce que serait la disparition des heures supplémentaires. Dans ma circonscription, je vois défiler les chômeurs : je vous prie d'entendre que ce qui est attendu de nous tous dans des régions comme la mienne, mais probablement aussi sur l'ensemble du territoire, c'est avant tout la création d'emplois.
Madame Lebranchu, j'ai écouté votre témoignage avec attention et je connais votre sincérité.
Toutefois, pour ma part, j'ai une expérience qui est exactement l'inverse de la vôtre. À la fin de l'année 2001 et au début de l'année 2002, lors de rendez-vous dans ma permanence de Champigny-sur-Marne, ville difficile à la population très ouvrière, j'ai très souvent entendu mes interlocuteurs me dire : « Monsieur le député, depuis qu'il y a les 35 heures, on ne s'en sort plus. » En revanche, dans l'autre partie de ma circonscription, à Bry-sur-Marne ou au Perreux-sur-Marne, où résident plutôt des cadres moyens et supérieurs, les choses se passaient très bien. Les 35 heures se traduisaient surtout en termes de RTT.
J'ai essayé de comprendre ces ressentis radicalement opposés. Dans ma permanence de Champigny, on m'a répondu : « Nous ne pouvons plus faire d'heures supplémentaires, nous n'arrivons plus à nous en sortir. » Même si cela peut paraître paradoxal, les analyses faites à l'occasion de l'élection présidentielle de 2002 ont bien montré que le candidat socialiste s'était pour partie aliéné le vote ouvrier en raison des 35 heures.
Sans contester votre témoignage, madame Lebranchu, mais fort de mon expérience, je rejoins sans réserve la position de Charles de Courson. Ceux qui, demain, supprimeront la mesure de défiscalisation des heures porteront un coup très violent au pouvoir d'achat des plus modestes, en particulier à celui des ouvriers.
La caricature dont cette mesure fait l'objet au sein du parti socialiste me gêne terriblement.
Nous avons tous entendu un slogan de campagne qui parlait de « 75 milliards d'euros pour les riches ». J'ai vu une affiche prétendant que Nicolas Sarkozy avait fait, en cinq ans, « 75 milliards de cadeau aux plus riches »…
…dont 18 milliards au titre des heures supplémentaires. Autrement dit, selon le parti socialiste, les neuf millions de personnes qui effectuent chaque année 150 millions d'heures supplémentaires font partie des Français les plus riches. Dire cela, c'est insulter ces neuf millions de Français. Ils n'appartiennent certainement pas aux plus aisés d'entre nous mais plutôt à la classe moyenne. Grâce à cette mesure, ils ont réussi, en cinq ans, à toucher, en moyenne, un mois et demi de salaire supplémentaire. Il s'agit d'un vrai pouvoir d'achat supplémentaire.
Je voudrais que notre mesure ne soit plus caricaturée ; elle n'est pas un cadeau fait aux plus riches. Il est vrai que cet argument a servi de leitmotiv au moment de l'examen de la loi TEPA. Aujourd'hui chacun peut observer que ce n'est pas vrai.
J'observe par ailleurs ce qui semble être une divergence de fond au sein du parti socialiste entre les proches de M. Hollande, qui veulent conserver une partie de la mesure, et le Sénat qui veut la supprimer intégralement. Nous parlons sans doute d'une des mesures les plus emblématiques du premier quinquennat du chef de l'État : elle a concerné à la fois le pouvoir d'achat et les classes moyennes françaises. Je pense qu'il faudra la conserver et je crois que vous vous renierez.
Dans le projet présidentiel, M. Hollande sera bien obligé de faire amende honorable et de soutenir une mesure qui sert largement toutes les classes moyennes de notre pays.
J'invite Jérôme Chartier et Charles de Courson à lire attentivement le rapport d'information de nos collègues Jean Mallot et Jean-Pierre Gorges sur les heures supplémentaires défiscalisées, publié au mois de juillet dernier. Il montre que le dispositif en question est coûteux, voire ruineux…
…et improductif, inefficace, et qu'il empêche la création d'emploi dans les entreprises.
Il montre aussi et surtout ce que nous avons tous constaté sur le terrain en recevant des ouvriers dans nos permanences : il y a bien eu des heures supplémentaires défiscalisées sur la fiche de paie, mais par le fait qu'elles entraient dans le revenu fiscal de référence, certains ont perdu la prime pour l'emploi, ou vu diminuer leur prestation logement ou certaines prestations sociales. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Au final, vous avez fabriqué une série d'effets pervers : ce que vous avez donné d'un côté en augmentation de pouvoir d'achat, vous l'avez repris de l'autre en diminuant les prestations dont bénéficiaient les bas salaires.
Nous sommes partisans d'une meilleure rémunération des heures supplémentaires, qui se fondera sur la durée légale du travail. En revanche, nous voulons supprimer le dispositif que vous avez mis en place.
Le clivage qui nous divise sur le fond repose sur nos conceptions divergentes du marché du travail.
Vous restez dans la logique qui vous a déjà guidée lors de la conception des 35 heures. Pour vous, le travail est un gâteau que l'on partage. Dans ce cadre, votre raisonnement est logique : donner un peu plus de travail, via les heures supplémentaires, à ceux qui travaillent déjà équivaudrait à enlever des heures de travail potentielles à ceux qui sont à la recherche d'un emploi.
Notre conception est totalement différente : le travail crée le travail et l'activité génère une autre activité.
Vous faites une autre erreur conceptuelle : le marché du travail n'est pas unique : il est divers. Vous avez des secteurs dans lesquels les employeurs recherchent des salariés sans en trouver. Ils sont alors dans l'obligation d'avoir recours à des heures supplémentaires.
Mme Lebranchu citait le secteur de l'agroalimentaire ; c'est le cas dans une circonscription comme la mienne, sans doute l'une des plus ouvrières de France. Nous sommes à 5% de chômage. Les employeurs de ce secteur ne sont pas en mesure de trouver des salariés leur permettant de faire face à un pic momentané de production – phénomène positif par ailleurs. Les heures supplémentaires sont donc absolument indispensables.
Sur le plan social enfin, le rapporteur général l'a dit, les heures supplémentaires permettent souvent aux ouvriers d'accéder à la propriété, de payer la traite qui tombe régulièrement. Elles fournissent le petit plus dont ils ont besoin. Il est tout à fait indispensable de les conserver.
Contrairement à ce que beaucoup imaginent, ceux qui ont des salaires modestes bénéficient eux aussi de l'avantage fiscal. Le jeune ouvrier célibataire est très rapidement imposable. L'avantage fiscal joue dès que l'on gagne 1,2 ou 1,3 fois le SMIC.
Ils perdent la PPE, dites-vous : c'est un raisonnement par l'absurde qui ne tient pas. La prime pour l'emploi a été créée pour compenser des salaires exagérément modestes ; si des travailleurs sortent de cette trappe à bas salaires, c'est une bonne chose pour eux et pour les finances publiques de façon générale. Il faut absolument que nous conservions cette mesure.
Mon nom a été cité à plusieurs reprises pour évoquer le rapport d'information que j'ai déposé le 30 juin dernier avec M. Mallot. Tout le monde parle de ce document mais je ne suis pas sûr que tout le monde l'ait bien lu, même si dans les propos de chacun, il y a une part de vérité. Aussi voudrais-je apporter quelques précisions.
Ce rapport d'information porte sur les deux aspects de la mesure : l'aspect patronal et l'aspect salarial.
S'agissant du volet patronal, un effet d'aubaine a été mis en évidence, puisque la défiscalisation des heures supplémentaires apporte aux entreprises un avantage qu'elles peuvent cumuler avec les lois Fillon. Au demeurant, le Gouvernement propose de corriger ce double avantage.
S'agissant du volet salarial, la mesure avait pour objectif de créer un surcroît d'activité ; rappelons qu'elle a été prise en 2007, c'est-à-dire avant la crise. Quoi qu'il en soit, après le passage aux 35 heures, 9,5 millions de Français ont continué à travailler entre 38,5 et 39 heures – soit entre 3,5 et 4 heures supplémentaires – pour assurer le maintien de l'activité. Dès lors, pour ceux qui étaient dans cette situation, la défiscalisation des heures supplémentaires a incontestablement provoqué un effet d'aubaine ; c'est évident, mais c'est le ticket d'entrée à payer pour l'application de cette mesure. Certes, le retournement de conjoncture n'a pas permis de créer des heures supplémentaires, mais, ainsi que l'indiquait M. Muet tout à l'heure, si, demain, la croissance est de 2 % ou 3 %, le dispositif sera certainement plus efficace.
S'il faut absolument corriger le double avantage donné aux entreprises, il ne faut surtout pas revenir sur l'avantage donné aux salariés ; car si l'on y réfléchit, ces 9,5 millions de personnes n'ont pas profité du dispositif qui permet de travailler 35 heures payées 39, dispositif qui nous coûte 12 milliards d'euros, en raison des exonérations de charges sociales accordées aux entreprises pour compenser l'avantage de salaire ainsi donné au reste de la population active. Il s'agit donc d'un juste retour des choses : il est vrai que la défiscalisation des heures supplémentaires s'est jusqu'à présent traduite par un surcroît de pouvoir d'achat, mais, socialement, on ne peut pas revenir sur cette mesure.
Au reste, comme Jean Mallot et moi-même l'avons écrit dans le rapport, la véritable problématique réside dans la définition du niveau à partir duquel on estime qu'il y a heures supplémentaires. Tant que le texte d'août 2008, qui a entièrement révisé la durée du travail sans modifier le seuil de déclenchement des heures supplémentaires, ne sera pas complété, le débat se poursuivra pendant des années. En tout état de cause, il était nécessaire de dépenser ces quelques milliards pour ces 9,5 millions de personnes qui sont restées à 39 heures en dépit du passage aux 35 heures. L'effet d'aubaine n'est en fait qu'une régularisation de la situation antérieure, qui a été destructrice pour le pays. Politiquement, j'aimerais savoir qui, dans le contexte actuel, reviendrait sur cette mesure qui rapporte en moyenne 450 euros à chaque personne concernée.
Encore une fois, autant il faut revoir la part patronale, qui est cumulative, autant la part salariale me paraît être une mesure d'accompagnement dans une période de crise.
Ne pouvant m'exprimer sur ce dossier, je vous recommanderai simplement la lecture du rapport n° 3615 – un numéro que l'on retient facilement. (Sourires.)
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
La qualité exceptionnelle des deux auteurs du rapport, Jean Mallot et Jean-Pierre Gorges, nous oblige à tenir compte de ce qu'ils disent. Je remercie Jean-Pierre Gorges pour son intégrité intellectuelle, même s'il nous propose une nouvelle exégèse, qu'appelait forcément l'intervention de M. Chartier. On imagine que, pour la prochaine édition du rapport, il se livrera à une réécriture solitaire de celui-ci afin de formaliser le décryptage original qu'il vient de nous exposer. Honni soit qui mal y pense, monsieur Gorges, mais j'espère que ce n'est pas lié à votre investiture – je plaisante.
Tout à l'heure, M. Le Fur nous a indiqué que l'on considérait le travail comme un gâteau à partager et Mme la ministre nous a fait comprendre que l'on ne pouvait pas faire autrement. Mais elle nous ramène ainsi au Moyen Âge, en tout cas à une période antérieure à la Renaissance, lorsqu'on raisonnait selon le principe du tiers exclu : « C'est ça ou ça ». Depuis, il y a eu Hegel et Marx.
Vous, monsieur de Courson, je vous vois bien au Moyen Âge. Nous, qui sommes dans la modernité, nous pouvons concevoir que plusieurs solutions soient possibles. Ainsi je vous en propose une : plutôt que de dire que la suppression de l'avantage correspondant à la défiscalisation des heures supplémentaires aurait pour conséquence de réduire le revenu des salariés, augmentons les salaires : il n'y aura plus de problème !
Quand on observe la manière dont sont taxés les groupes du CAC 40, on voit bien qu'il y a de la marge et quand on constate les profits qu'ils réalisent, on prend conscience du problème que pose la répartition actuelle des richesses. La seule question qui vaille d'être posée, c'est celle de la répartition des richesses. Bien entendu, les PME ne doivent pas être traitées comme les grands groupes, mais la majorité utilise les PME comme un alibi pour mettre les grands groupes sous cloche et les préserver de la justice sociale qui menacerait les dividendes de leurs actionnaires.
Madame Pécresse, en tant qu'ancienne ministre de l'enseignement supérieur, la philosophie, vous savez ce que c'est. Je vous renvoie donc à une réflexion plus ouverte sur le réel, qui dépasse les concepts du Moyen Âge.
La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales, à qui je suggérerais de ne pas faire rebondir le débat. (Sourires.)
Soyez sans crainte, monsieur le président. Je souhaite simplement que le Gouvernement nous indique le montant des économies que les heures supplémentaires lui permettent de réaliser en prestations logement, en exonérations de taxe d'habitation et en prime pour l'emploi. J'ai en effet constaté que de nombreux salariés qui acceptaient des heures supplémentaires perdaient, en l'absence de défiscalisation, des prestations sociales relativement nombreuses.
Je souhaiterais donc connaître le solde financier. Je suis d'ailleurs certain que cet élément conforterait les propos de Jean-Pierre Gorges. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Je vous remercie d'avoir tenu parole, monsieur le président de la commission. Sur la forme, en tout cas ; je n'ai pas à porter d'appréciation sur le fond.
(L'amendement n° 100 est adopté.)
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 3.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, à qui je recommande de respecter, cette fois, son temps de parole.
Avouez que c'est difficile, monsieur le président, car je veux convaincre.
Vous êtes capable d'y parvenir dans le temps qui vous est imparti, mon cher collègue.
Pour l'instant, la preuve n'en est pas faite, hélas !
Nous avons proposé, tant à l'Assemblée qu'au Sénat, de supprimer la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, qui est, nous l'avons dit, un pur gadget destiné à faire oublier le cadeau exorbitant fait aux privilégiés à l'occasion de la réforme de l'ISF. Nous sommes d'autant plus hostiles à cette mesure que le rapporteur général va nous proposer de revenir à une rédaction qui fait de cette contribution une mesure occasionnelle, ou exceptionnelle, en tout cas nullement pérenne.
Cette mesure comptable ne poursuit en réalité aucun objectif de justice fiscale. Nous sommes, quant à nous, pour le renforcement de la progressivité de l'impôt sur le revenu, le rétablissement de l'ISF et l'élargissement de son assiette, afin que le capital soit taxé à la même hauteur que le travail. En 1932, Roosevelt porta le taux marginal de l'impôt fédéral américain à 63 %, puis à 79 % en 1936 et à 91 % en 1941, taux qui s'appliqua aux États-Unis jusqu'en 1964, avant d'être réduit à 77 %, puis à 70 % en 1970. Ainsi, pendant près de cinquante ans, des années 1930 jusqu'aux années 1980, jamais le taux supérieur d'imposition ne descendit au-dessous de 70 % et il fut en moyenne de plus de 80 %.
Il est vrai, madame la ministre, que, désormais, vous ne jurez plus seulement par l'oncle Sam, mais aussi par Angela Merkel. Néanmoins, je vous renvoie à vos anciennes références ; pour certaines d'entre elles, elles n'étaient pas si mauvaises que cela. Il en va de même, du reste, pour les délocalisés fiscaux.
Nous n'approuvons pas la création de cette taxe. Tout d'abord, j'en ai expliqué tout à l'heure le caractère purement cosmétique : si l'on gagne vingt fois le SMIC, on ne paiera que 60 euros par an… Ensuite, nous aurions préféré un système plus simple, plus lisible, car plus personne ne s'y retrouve dans le calcul de l'impôt. On a dit, en première lecture, qu'il s'agissait d'un nouveau type d'impôt, extrêmement complexe, non familialisé. Enfin, puisque je sais que vous allez nous répéter sans cesse que, n'ayant pas voté cette taxe, nous sommes, contrairement à vous, opposés à la taxation des hauts revenus, je rappelle que nous proposons, à la place de cette taxe cosmétique qui s'apparente en outre à une véritable usine à gaz, d'instaurer une tranche supplémentaire de l'impôt sur le revenu à 45 %. Je crois, du reste, que cette proposition était partagée au-delà de nos bancs.
Sur l'article 3, je suis saisi d'un amendement n° 101 de la commission.
La parole est à M. le rapporteur général.
Il s'agit de rétablir la contribution exceptionnelle, en y ajoutant une petite correction technique, pour améliorer le dispositif de lissage – je n'entre pas dans les détails – et éviter qu'il ne puisse donner lieu à des comportements d'optimisation fiscale.
(L'amendement n° 101 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Avouez que j'ai du mérite, monsieur le président : pour l'instant, pas plus Mme la ministre que nos collègues n'écoutent ce que je dis ; sinon, ils seraient convaincus.
À l'automne 2009, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2010, certains de nos collègues avaient proposé et fait adopter en catimini la suppression de l'exemption fiscale des indemnités versées aux salariés victimes d'accidents du travail ayant entraîné une incapacité temporaire de travail. Il s'agissait de réaliser une économie dérisoire de 230 millions d'euros de recettes fiscales – de mémoire – aux dépens des victimes d'accidents du travail, qui se voyaient ainsi punis deux fois. Nous avions fortement combattu cette mesure, dont nous ne partageons évidemment pas la philosophie. Nous avons obtenu la suppression de cette mesure inique au Sénat, mais notre rapporteur propose de la rétablir
Mes chers collègues, à votre avis, qu'est-ce qui coûte le plus cher à la collectivité : la non-imposition de ces indemnités ou la dégradation de la situation sanitaire d'une bonne partie de la population, à mesure que se développent le travail précaire et des conditions de travail irrespectueuses de la personne ? Je vous en laisse juge. Quoi qu'il en soit, nous nous opposerons bien évidemment à l'amendement de notre rapporteur général.
Je suis saisi d'un amendement n° 102 de la commission, tendant à supprimer l'article 3 bis A.
La parole est à M. le rapporteur général.
Il s'agit de revenir au dispositif créant une imposition partielle des indemnités journalières concernant les accidents du travail.
(L'amendement n° 102 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Les personnes qui suivent nos débats apprécieront, sans nul doute, ce qui vient d'être acté par le Gouvernement, à savoir le principe de taxer les accidentés du travail.
Pour ce qui est de l'article 3 bis B, nous savons tous que l'impôt sur le revenu n'a cessé de voir son rendement se dégrader, ces dernières années, notamment à la faveur de l'extension du champ des prélèvements forfaitaires libératoires.
Ainsi, alors que les revenus du capital et du patrimoine constituent de 11 % à 12 % de l'assiette de la CSG, ils ne contribuent plus qu'à hauteur de 3 % à 4 % à l'assiette de l'impôt sur le revenu. Ainsi, une personne vivant de ses rentes paie trois fois moins de contribution à la CSG. On a donc, d'un côté, un impôt sur le revenu rapportant moins de 60 milliards d'euros par an, de l'autre une CSG en augmentation, qui apporte à la sécurité sociale près de 89 milliards d'euros de ressources.
C'est ce décalage que le présent article introduit au Sénat se proposait de réduire, en revenant sur quelques-uns des prélèvements libératoires les plus significatifs, qui n'ont d'ailleurs d'intérêt que pour les contribuables dont le montant des revenus justifie pleinement d'y recourir. Ce prélèvement forfaitaire libératoire n'avantage que les contribuables aux revenus les plus élevés, c'est-à-dire ceux qui sont soumis à ce même taux marginal.
Si l'abattement de 40 % sur le montant des dividendes perçus se justifiait par le fait que les dividendes perçus avaient déjà été imposés au titre de l'impôt sur les sociétés – ce en quoi on pouvait voir une double imposition –, avec la diminution de l'impôt sur les sociétés, cet abattement n'a plus de sens.
Nous proposions, pour notre part, d'intégrer les revenus du capital dans l'impôt sur le revenu et de les imposer au barème, de façon à aboutir à une imposition progressive. C'était une solution beaucoup plus simple, lisible, compréhensible et juste, que le système du prélèvement forfaitaire libératoire, dont l'appellation même est absurde, en ce qu'elle laisse penser qu'il faut se libérer d'une contribution indue.
Je suis saisi d'un amendement de suppression, n° 103, de la commission.
La parole est à M. le rapporteur général.
L'amendement n° 103 propose effectivement de supprimer l'article 3 bis B adopté à l'initiative du Sénat, afin de conserver le prélèvement forfaitaire libératoire sur les dividendes.
Favorable.
(L'amendement n° 103 est adopté.)
Nos collègues du Sénat ont fait adopter l'article 3 bis C, qui vise à réduire de 40 % à 20 % le taux de l'abattement proportionnel sur le montant des dividendes perçus. Comme on l'a dit tout à l'heure, il y a, là encore, une ligne de clivage entre nous sur la question de savoir à qui il convient de faire payer prioritairement l'impôt : à ceux qui ont de l'argent ou à ceux qui n'en ont pas, et ne disposent pour vivre que de chiches moyens qui font les fins de mois impossibles.
Historiquement, le taux actuel de cet abattement, qui a remplacé l'avoir fiscal, pouvait se justifier quand le taux de l'impôt sur les sociétés était de l'ordre de 50 %. Ce dernier est aujourd'hui de 33,33 %, avec un taux effectif s'élevant toutefois plutôt à 12 % ou à 13 % – parfois encore moins.
On constate par ailleurs qu'en pratique, il est très faible pour les grandes entreprises du CAC 40. De plus, de nombreux bénéfices échappent à cette imposition, grâce à divers dispositifs, notamment la fameuse « niche Copé » dont la seule évocation fait frémir notre ministre, à tel point qu'elle persiste à affirmer qu'elle ne voit pas de quelle niche il peut bien s'agir !
Dans son rapport sur la progressivité et les effets redistributifs des prélèvements obligatoires sur les ménages, le Conseil des prélèvements obligatoires a estimé à quelque deux milliards d'euros, pour l'année 2009, le coût fiscal de cet abattement. Vous qui voulez faire des économies, en voici une belle à réaliser : il ne vous reste qu'à joindre l'acte à la parole pour être crédible !
Je suis saisi d'un amendement de suppression, n° 104, de la commission.
La parole est à M. le rapporteur général.
L'amendement n° 104 propose effectivement de supprimer l'article 3 bis C adopté à l'initiative du Sénat, afin de maintenir l'abattement proportionnel sur les dividendes.
Favorable.
(L'amendement n° 104 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 105 de la commission, tendant à supprimer l'article 3 bis D.
La parole est à M. le rapporteur général.
L'amendement n° 105 propose de maintenir la réduction d'impôt pour hébergement des personnes dépendantes, que nos collègues sénateurs voulaient transformer en crédit d'impôt.
Favorable.
L'article introduit par nos collègues sénateurs n'a pas pour objet, contrairement à ce que l'intervention de M. le rapporteur général peut laisser penser, de diminuer le bénéfice de la réduction d'impôt, mais seulement d'instaurer un crédit d'impôt, c'est-à-dire de permettre aux personnes non imposables de bénéficier d'un remboursement – ce qui, certes, nécessiterait la mise en oeuvre d'un dispositif de coordination avec l'APA pour aboutir à un système juste et équitable. Quoi qu'il en soit, l'article voté par le Sénat introduisait un avantage pour les personnes handicapées.
(L'amendement n° 105 est adopté.)
Mes chers collègues, en application de l'article 95 du règlement, la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire demande la réserve de la discussion de l'article 3 bis E.
La réserve étant de droit.
Sur l'article 3 bis F, je suis saisi d'un amendement n° 107 de la commission.
La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.
L'amendement n° 107 proposait de maintenir le taux du droit de partage à 1,1 % à compter du 1er janvier 2012. Je précise cependant que la disposition relative à l'augmentation du droit de partage de 1,1 % à 2,5 % a été prise lors du collectif de juin et qu'il est nécessaire d'apporter une modification technique importante au dispositif. Je vais donc retirer l'amendement n° 107 de la commission au profit de l'amendement n° 335 , que le président de la commission va présenter dans quelques instants.
Je veux dès à présent rappeler que l'augmentation du taux du droit de partage de 1,1 % à 2,5 % coûtera très chers aux personnes qui divorcent et qui, la plupart du temps, se trouvent dans une situation difficile.
Si j'ai bien compris, monsieur le rapporteur général, vous retirez l'amendement n° 107 de la commission ?
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir l'amendement n° 335 .
L'amendement n° 335 n'a pas pour finalité de revenir au texte de l'Assemblée, c'est-à-dire à un taux de droit de partage de 2,5 % ; il se borne à répondre à la situation difficile des personnes en instance de divorce avant l'entrée en vigueur de la loi de finances rectificative du 29 juillet 2011 instaurant le taux de 2,5 %, et pour lesquelles le jugement homologuant la convention de divorce ne pourra être rendu avant la fin de l'année.
En effet, ces personnes risquent de subir l'augmentation du droit de partage de 1,1 % à 2,5 % à compter du 1er janvier 2012, décidée lors de cette loi de finances rectificative, non pas de leur fait, mais uniquement en raison de la lenteur de la justice à tenir compte de la volonté de l'un des époux – ou des deux.
Il convient de remédier à cette situation. Si seul l'amendement n° 335 est adopté, cela rétablira de facto un droit de partage à 1,1 %...
…à 2,5 %, voulais-je dire, même si les termes de l'amendement ne le prévoient pas expressément.
Au risque de vous surprendre, le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 335 . En effet, l'engorgement de certains greffes est susceptible de provoquer des inégalités de traitement : des personnes ayant entamé une procédure de divorce au même moment peuvent se retrouver dans des situations inéquitables, certaines étant taxées à 1,1 % et d'autres à 2,5 %. Nous estimons qu'il n'est pas opportun d'augmenter le stress de personnes se trouvant déjà dans une situation douloureuse.
Nous voterons l'amendement du président Cahuzac (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP) mais je veux souligner que, faute d'avoir procédé aux études et évaluations nécessaires, nos collègues de la majorité n'ont sans doute pas mesuré la portée de leur décision lorsqu'ils ont porté le taux du droit de partage de 1,1 % à 2,5 %. Cela entraîne des situations extrêmement difficiles lors des divorces – le plus souvent pour les femmes, qui souvent se trouvent plus fortement pénalisées. À mon sens, il aurait mieux valu déterminer un montant du patrimoine divisé à partir duquel une augmentation du droit de partage pouvait être envisagée.
L'article 3 bis G introduit par nos collègues sénateurs vise à revenir au statu quo ante au sujet d'un dispositif coûteux et particulièrement injuste de la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, dite loi TEPA : celui relatif aux droits de mutation à titre gratuit.
Rappelons, mes chers collègues, que la proportion de successions imposées passerait, avec ce dispositif, de 5 % environ aujourd'hui à quelque 25 %. Comme avant 2007, le quart des successions seraient imposées à des taux n'ayant rien de confiscatoire, contrairement à ce qu'affirment certains. Rappelons que le patrimoine médian des Français s'établit à 117 000 euros. Dès lors qu'il y a au moins deux enfants, un tel patrimoine restera exonéré.
Avec deux enfants, un patrimoine d'un montant de 234 000 euros, aujourd'hui exonéré, sera taxé à 5,6 % au titre des droits de mutation à titre gratuit. Dans le même cas de figure, un patrimoine d'un million d'euros sera taxé à hauteur de 16,6 %, contre 13,3 % aujourd'hui.
C'est donc une simple mesure de justice sociale et nous nous étonnons que notre rapporteur général veuille la supprimer.
Je suis saisi d'un amendement de suppression, n° 108 , de la commission.
La parole est à M. le rapporteur général.
L'amendement n° 1083 propose de maintenir les allégements actuels des droits de mutation.
Favorable.
(L'amendement n° 108 est adopté.)
Madame la ministre, je suis très étonné que vous vous borniez à dire « favorable ». C'est comme ces gens qui ont des habitudes et à qui il manque parfois, lorsqu'on veut les emmener devant de nouveaux horizons, la curiosité pour mesurer ce qu'on leur offre. Par habitude, ils reviennent à leurs premières amours – dans votre cas particulier, l'amour des privilégiés. (Sourires.)
Au mois de juillet dernier, le Gouvernement a procédé, on s'en souvient, à un tour de passe-passe : supprimer le bouclier fiscal, devenu un véritable boulet politique, sans nuire aux intérêts de ses bénéficiaires. Votre majorité a ainsi substitué au bouclier fiscal une mesure de réduction très sensible du rendement de l'impôt de solidarité sur la fortune, en en modifiant le seuil et le taux.
Il va sans dire que cette mesure est en complet décalage avec les objectifs affichés de réduction des déficits, mais conforme à cette option préférentielle pour les plus riches, qui est, depuis 2007, la marque de fabrique du sarkozysme.
Vous avez ainsi mis tout bonnement hors du champ de l'impôt de solidarité sur la fortune plus de 300 000 contribuables qui y étaient jusqu'ici assujettis. Ces personnes disposent d'un patrimoine compris entre 800 000 et 1,3 million d'euros, ce qui doit représenter de cinq à dix fois le patrimoine moyen des Français
J'en profite d'ailleurs, madame la ministre, pour vous poser pour la vingt-neuvième fois la même question, à laquelle vous n'avez pas répondu pour l'instant, alors que cela éclairerait les gens qui nous regardent : est-il vrai que Mme Bettencourt paye cette année 42 millions d'impôts, sans compter les redressements fiscaux en cours, et que, l'année prochaine, elle ne paiera plus que 10 millions ?
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 109 , tendant à supprimer l'article 3 bis H.
Il s'agit, en supprimant cet article, de revenir au droit existant en matière d'impôt sur la fortune.
Favorable.
Je n'ai toujours pas de réponse à ma question… Depuis que je suis parlementaire, je n'ai jamais posé une question avec autant d'assiduité et de persévérance. Jamais je n'ai été confronté à un membre du Gouvernement qui fasse preuve d'autant d'entêtement pour ne pas répondre. Le fait de ne pas avoir de réponse à ma vingt-neuvième interrogation m'obligera incontestablement à poser la question une trentième fois !
Malheureusement, si ! (Sourires.)
En effet, je vais répondre à M. Brard ce que tous mes successeurs lui répondront avec la même gentillesse, la même sérénité, et en même temps les mêmes principes fondamentaux de la République au coeur : le secret fiscal participe du respect de la vie privée. Le secret fiscal, c'est comme le secret médical : la ministre du budget n'a pas le droit de l'enfreindre.
Monsieur Brard, je vous redonne la parole par bienveillance, pour répondre brièvement à Mme la ministre.
Je vous remercie, monsieur le président.
Madame la ministre, pour comparer le secret fiscal au secret médical, passez-moi l'expression, il ne faut pas manquer d'air! Avec le secret médical, vous touchez à l'intime. Quand il s'agit du secret fiscal pour les plus riches, vous touchez au coffre-fort, ce que je ne mets pas dans le domaine de l'intime !
Vous avez commis un lapsus révélateur : au lieu de parler de vos prédécesseurs, vous avez parlé de vos successeurs.
Mais l'injustice fiscale n'est pas inscrite de toute éternité dans les lois de la République.
Au demeurant, madame la ministre, je sais, moi, ce que vous payez comme impôt.
Ah ?
Eh oui ! Même si cela vous étonne, je sais ce que vous payez comme impôt quand vous allez acheter une baguette de pain. (Sourires.) Je ne vois pas pourquoi nous ne saurions pas combien Mme Bettencourt paie au total.
D'ailleurs, elle réclame même maintenant, paraît-il, de payer davantage d'impôts, certes sans nous dire si elle n'a pas oublié, dans l'établissement de la liste de son patrimoine, quelque île perdue au fin fond de l'océan Indien, du Pacifique ou ailleurs. Il serait donc légitime que nous le sachions.
Non, car il y a un volcan ! Elle aime les coins tranquilles… (Sourires.)
Madame la ministre, faire la transparence sur ce sujet relève de la démocratie, et non de la préservation de la vie privée. Quand on possède 15 ou 17 milliards d'euros, ce n'est plus de l'ordre de la vie privée : cela veut dire qu'on a gagné ses sous sur le dos de ceux qui travaillent !
(L'amendement n° 109 est adopté.)
Avouez, monsieur le président, qu'il est difficile d'être député quand on a une majorité aussi autiste ! (Sourires.)
Nous savons que la principale exonération de l'ISF concerne les biens professionnels. Elle touche les placements, mais aussi les biens, à la fois ceux qui sont nécessaires à l'exploitation sous une forme individuelle d'une exploitation industrielle commerciale, artisanale, agricole ou libérale, et les parts ou actions d'une entreprise, si leur détenteur exerce une fonction de direction effective.
La suppression de l'exonération des biens professionnels générerait au moins 15 milliards d'euros par an, mais cela imposerait également le capital productif. La difficulté vient de ce que, aujourd'hui, l'acception très large des biens professionnels est utilisée dans les schémas d'optimisation fiscale. Revoir cette exonération dans un sens plus réaliste économiquement, en évitant les effets d'aubaine, par exemple en la limitant aux seuls biens réellement nécessaires à la production, nous semble nécessaire.
Je me rappelle avoir fait un rapport dans lequel je proposais une nouvelle assiette de l'ISF. À l'époque, madame la ministre, et je sais que cela va vous étonner, je reçus l'appui, auquel je fus très sensible, du président Méhaignerie, parce qu'il est inspiré par la justice sociale, dont la justice fiscale n'est qu'une dimension particulière.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 110 , visant à supprimer l'article 3 bis I.
Il s'agit de rétablir les exonérations concernant les biens professionnels, absolument vitales pour le bon développement de nos entreprises et donc pour l'emploi.
Favorable.
Pensez-vous qu'il est vraiment indispensable de prendre une telle mesure pour la famille Peugeot, par exemple, qui s'apprête à supprimer plusieurs milliers d'emplois, alors que les dividendes sont plantureux ? Vous voyez bien que cela n'est pas justifié ! Par contre, une mesure qui tiendrait compte de la réalité des entreprises le serait parfaitement.
Je vous suggère vraiment, monsieur le rapporteur général, madame la ministre, de conférer avec le président Méhaignerie. Ce n'est pas que je veuille mettre la zizanie dans votre famille politique, mais vous devriez vous inspirer de sa sagesse et de son héritage humaniste.
Je suis d'accord avec lui ! (Sourires.) Cela mérite de figurer dans les annales…
(L'amendement n° 110 est adopté.)
Comme le suggère le président Méhaignerie, cela mérite de figurer dans les annales, en plus du Journal officiel ! Le sens de la justice, c'est comme un fil à plomb ; il n'y a plus, alors, des gens de gauche et des gens de droite. Force est pourtant de constater qu'il y a, à droite, des gens qui ne peuvent s'empêcher d'être du côté des privilégiés, comme s'ils en étaient les fondés de pouvoir – et ce « comme si » est peut-être de trop !
Quant à vous, monsieur de Courson, vous rappelez opportunément que vous n'êtes qu'un supplétif de l'UMP. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Comment cela, « non » ? On vous juge sur le réel, pas sur vos affirmations ou vos incantations !
La suppression, en juillet dernier, d'une tranche de l'ISF, avec un allégement des taux et le relèvement du seuil d'assujettissement de 800 000 euros à 1,3 million d'euros, qui intervient dès 2011, a eu pour corollaire, nous l'avons dit, la suppression du bouclier fiscal, qui, quant à elle, a été différée d'un an.
En conséquence, en 2012, la nécessité pour l'État de continuer à restituer les sommes induites par le bouclier fiscal va provoquer un besoin de recettes supplémentaires de l'ordre de 300 millions à 500 millions d'euros. Autrement dit, non seulement les quelque 1 900 ménages possédant plus de 17 millions d'euros de patrimoine vont bénéficier d'une réforme dont le coût total représente 1,9 milliard d'euros, mais ils bénéficieront par surcroît de 800 millions d'euros au titre du bouclier fiscal.
Imaginez l'indignation, le sentiment de révolte qui peuvent habiter les gens qui nous regardent, particulièrement ceux qui comptent parmi les millions de chômeurs – qui sont, en réalité, au nombre de 5 millions – dans notre pays, quand ils entendent que l'on va faire ce royal cadeau aux 1 900 ménages les plus favorisés !
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 111 , visant à supprimer l'article 3 bis J.
Nous proposons de garder le fonctionnement actuel du bouclier fiscal.
(L'amendement n° 111 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 112 , visant à supprimer l'article 3 bis K.
Il s'agit de conserver, tel qu'il existe aujourd'hui, le fonctionnement de l'aide juridictionnelle, sans l'étendre aux droits de plaidoirie.
Favorable.
On ne peut pas laisser passer sans rien dire de telles choses, comme si ce n'était rien du tout !
Vous avez, si ma mémoire est bonne, instauré une taxe de 35 euros pour toute entrée dans une procédure judiciaire, y compris devant les prud'hommes. Or, ce que l'on vous proposait dans cet article, c'était de ne pas faire payer à certains les 8,84 euros de droits de plaidoirie. Il est quand même assez scandaleux de voir que, pour payer le surcoût de la garde à vue – c'est ainsi que la disposition nous a été présentée –, vous avez instauré une taxe que doivent acquitter tous ceux qui font appel à la justice pour défendre leurs droits. Et vous allez jusqu'à refuser qu'on fasse cadeau de ces 8,84 euros à ceux qui ont droit à l'aide juridictionnelle ! Nous nous opposons bien sûr à cet amendement du rapporteur général.
(L'amendement n° 112 est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 113 .
Il s'agit, à travers cet amendement, de supprimer la limitation à 300 000 euros, introduite par le Sénat, concernant le maintien du dispositif d'exonération pour les personnes qui vendent un bien immobilier alors qu'elles ne sont pas propriétaires de leur résidence principale.
(L'amendement n° 113 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 334 .
Il s'agit ici des titres de sociétés civiles de placement immobilier offerts au public. Le présent amendement vise à ne pas appliquer, lors de la cession de ces titres, les nouvelles modalités de calcul que nous avions mises en place pour les SCPI.
(L'amendement n° 334 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 3 bis, amendé, est adopté.)
Cet article a pour objet de revenir sur une disposition du paquet fiscal, ou loi TEPA, de 2007, qui continue à être très coûteuse pour les finances publiques : le crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt.
Certes, le Gouvernement a décidé sa mise en extinction, mais il coûte encore très cher – 1,9 milliard d'euros en 2011 – car il ne prendra définitivement fin qu'en 2016. Or vous savez, madame la ministre, qu'il y a de fortes chances, si l'on appelle votre cabinet à cette date, que l'on nous réponde qu'il n'y a plus d'abonné au numéro demandé. (Sourires.) C'est donc s'engager sans perspective réelle que d'aller jusque-là.
De plus, cette disposition n'a eu aucunement pour effet de soutenir l'accession à la propriété. Elle n'a fonctionné que comme une subvention aux nouveaux propriétaires. D'ailleurs, selon le mode de calcul du crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt, plus le contribuable dispose de hauts revenus, plus la subvention est élevée.
Non content, donc, d'être onéreux, ce dispositif est injuste : en divisant par deux le montant des intérêts pris en compte pour le calcul du crédit d'impôt, l'article 3 septies permettra dès l'an prochain de réduire le coût de cette dépense fiscale improductive. Le gain attendu peut être évalué, selon la commission des finances du Sénat, à 900 millions d'euros en 2012 et à 800 millions d'euros en 2013. C'est là une raison suffisante pour proposer le maintien de cet article.
Je suis saisi d'un amendement de suppression, n° 114, de la commission.
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement porte sur le crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunts liés à l'acquisition de la résidence principale. Il vise à revenir au droit existant.
Avis favorable.
« Revenir au droit existant », monsieur le rapporteur général, ce n'est pas un argument ! Imaginons qu'en 1789, après la nuit du 4 août, un député de l'aristocratie ait proposé de revenir au droit existant… Vous le voyez, ce n'est pas un argument. (Sourires.) Le fait que vous n'argumentiez pas vaut démonstration.
Monsieur Brard, Mme la ministre vous a dit tout à l'heure qu'elle était tenue par le principe du secret fiscal, et elle avait raison. Nous sommes aussi tenus par un autre principe, et je sais que vous serez sensible à l'argument : celui de la non-rétroactivité. Or il s'agit ici d'intérêts d'emprunts qui concernent des logements qui ont déjà été acquis. Au moment de l'achat, l'acquéreur a réalisé un plan de financement. Acquérir sa résidence principale, c'est une décision importante dans une existence, et peut-être même la décision la plus importante. Or le plan de financement a été construit sur la base du droit fiscal tel qu'il était : voilà pourquoi je maintiens qu'il faut maintenir le droit fiscal existant, sans rétroactivité.
(L'amendement n° 114 est adopté.)
Nous avons entamé, il y a trois ans de cela, un travail sur les droits applicables aux cessions de titres. La majorité, avec le Gouvernement, a mis en place un dispositif doté d'un plafond de 5 000 euros.
Cet amendement propose d'améliorer ce système en faisant en sorte que la taxation des cessions de titres soit progressive et acceptable, et en obligeant les transactions à se réaliser sur le territoire national, afin d'être certains que cette taxe rapporte.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter le sous-amendement n° 341 .
M. le rapporteur général et moi-même proposons d'améliorer le dispositif en instaurant une progressivité. Jusqu'à 200 000 euros, la taxe serait de 3 % ; entre 200 000 et 500 millions d'euros, elle serait de 0,5 %, et au-dessus, de 0,25 %.
La commission est tout à fait favorable. Notre collègue Jérôme Chartier avait, il l'a rappelé, abordé ce sujet il y a quatre ans ; il estimait, à juste titre, que le plafonnement à 5 000 euros des droits d'enregistrement était probablement trop généreux : nous parlons de transactions qui peuvent se chiffrer en centaines de millions d'euros, voire en milliards ! Nous avions à l'époque recherché une solution, que nous n'avons pas pu trouver.
Nos collègues sénateurs ont proposé un dispositif qui a le mérite de la simplicité : la taxe serait ramenée de 3 à 2 % ; en revanche, elle ne serait plus plafonnée. Mais cela conduirait à une taxation très excessive au regard de ce que font nos voisins : un grand nombre d'entre eux ne taxent pas du tout ces transactions, ou alors à un taux très faible.
Le sous-amendement que Jérôme Chartier et moi-même proposons consiste à plafonner la taxe : elle serait de 3 % jusqu'à 200 000 euros ; ensuite, un peu comme pour le barème de l'impôt sur le revenu, nous créons des tranches supplémentaires, mais avec un taux tout à fait raisonnable : 0,5 % pour la tranche comprise entre 200 000 et 500 millions d'euros, et de 0,25 % au-delà de 500 millions d'euros.
Nous avons là, je crois, un bon équilibre, sur un sujet que nous connaissons bien depuis un certain nombre d'années.
Toutefois, il semble qu'il faille rectifier ce sous-amendement : la rédaction présente en effet des problèmes de références juridiques. J'ai eu beau répéter, plus longuement, ce qu'avait parfaitement expliqué Jérôme Chartier, nous n'avons pas eu le temps d'apporter les corrections nécessaires. (Sourires.) Peut-être, monsieur le président, pourrions-nous suspendre la séance pour quelques minutes : c'est un sujet important.
Article 3 bis E
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt heures.)
La séance est reprise.
Mes chers collègues, avant de poursuivre le débat, je vais donner lecture du sous-amendement à l'amendement n° 106 de la commission, qui portera le n° 341 rectifié.
« I. – Au deuxième alinéa, substituer aux mots :
« 2 % pour la fraction d'assiette correspondant à une valeur de cession d'au plus 250 000 euros et à 1 % pour la fraction d'assiette excédant cette valeur »
les mots :
« 3 % pour la fraction d'assiette inférieure à 200 000 euros, 0,5 % pour la fraction comprise entre 200 000 euros et 500 000 000 euros et 0,25 % pour la fraction excédant 500 000 000 euros ».
« II. – Compléter l'amendement par les sept alinéas suivants :
« Après l'alinéa 3, insérer les six alinéas suivants :
« I bis. – Le II de l'article 726 est complété par les cinq alinéas suivants :
« Les perceptions mentionnées aux 1° et 1° bis du I ne sont pas applicables :
« – aux acquisitions de droits sociaux réalisées dans le cadre du rachat de ses propres titres par une société ou d'une augmentation de capital ;
« – aux acquisitions de droits sociaux de sociétés placées sous procédure de sauvegarde ou en redressement judiciaire ;
« – aux acquisitions de droits sociaux lorsque la société cédante est membre du même groupe, au sens de l'article 223 A, que la société qui les acquiert ;
« – aux opérations entrant dans le champ de l'article 210 B du code général des impôts. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 106 et le sous-amendement n° 341 rectifié ?
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
Si l'articulation des droits d'enregistrement entre la taxation des cessions de parts de sociétés anonymes, les autres cessions de parts et les cessions de fonds de commerce méritent sans aucun doute une réflexion, l'option proposée dans votre amendement, monsieur Chartier, présente de multiples difficultés.
Pour commencer, cette taxe est sans équivalent à l'étranger.
Seul le Royaume-Uni taxe les cessions de titres. Le taux est aux États-Unis de 0,5 %. Encore existe-t-il de très nombreuses exceptions et le contexte fiscal global est beaucoup plus favorable aux entreprises.
La France se singulariserait, une fois de plus, par une taxation défavorable aux entreprises, au moment où nous avons besoin plus que jamais d'investisseurs. Car ce sont eux qui paieront cette fiscalité supplémentaire : or beaucoup d'entreprises cherchent à faire venir des investisseurs à leur capital, notamment les entreprises en redressement ou en difficulté.
Notre priorité absolue est de maintenir les activités industrielles sur notre territoire. Ce sera l'absolue priorité de l'année qui vient.
Cette taxe pèserait lourdement sur les entreprises. Vous en attendiez avec l'ancien taux, avant le dépôt du sous-amendement, plus de 400 millions d'euros ; en réalité, cette somme se récupérera sur un nombre très limité d'opérations. Je n'ai pas d'étude d'impact à ma disposition.
Non seulement cet amendement créerait un risque de délocalisation de cession existe, mais surtout – et c'est plus important – il poserait un problème pour les reprises d'entreprises en difficulté. Or les freins à la croissance de nos entreprises et les difficultés de reprise seront les sujets majeurs de politique économique, à partir du mois de janvier.
Nous regrettons et nous luttons, à juste titre, contre la désindustrialisation du pays. Nous devons prendre garde à ne pas voter une nouvelle taxe qui frappe les investisseurs.
Qui plus est, cette taxe pénalisera malheureusement dans les faits, même si je sais que ce n'est pas votre objectif, essentiellement les sociétés non cotées : les PME, les ETI, celles qui réalisent leurs transactions hors marchés, celles qui ne peuvent pas faire d'échanges de titres ou celles qui ne peuvent pas céder leurs titres dans une holding à l'étranger. Il y a quelques années, vous aviez adopté, avec une grande sagesse, les dispositifs Dutreil, qui reconnaissaient la nécessité de favoriser la transmission des entreprises. C'était un enjeu majeur pour tous nos territoires et notre économie, que viendrait contredire la taxe que vous proposez d'instituer aujourd'hui. Le souhait du Gouvernement serait plutôt de taxer les transactions financières spéculatives, au travers d'un projet de taxes sur les transactions financières, dont François Baroin vous a annoncé cet après-midi qu'il serait présenté dès le mois de janvier au Conseil européen.
Je dois néanmoins reconnaître, monsieur Chartier, que votre sous-amendement n° 341 rectifié améliore considérablement l'amendement n° 106 dès lors que les taux sont fixés beaucoup plus bas : 0,5 et 0,25 % c'est bien moins élevé que 1 % ou 2 %. Mais cela n'enlève pas le risque que nous ferions peser sur les entreprises, particulièrement cette année.
Si la commission, monsieur le rapporteur général, veut persévérer, le Gouvernement souhaite a minima que l'amendement soit adopté sous-amendé.
Mais, en tout état de cause, il ne saurait y être favorable.
L'amendement est moins pire si l'on baisse les taux…
Soyons clairs : les rachats d'entreprises en difficulté, les augmentations de capital, les échanges d'actions en numéraire, où personne ne verse de cash – cela existe aussi –, toutes ces opérations risquent vraiment d'être taxées, surtaxées. Au moment où de nombreuses entreprises en difficulté demandent à des investisseurs de venir, où les collectivités locales et territoriales se mobilisent énormément pour recueillir des subventions et décider les investisseurs à boucler les tours de table, il serait préférable, monsieur Chartier, de prendre le temps de la réflexion.
Madame la ministre, je voudrais vous rassurer. Le sous-amendement n° 341 rectifié répond à bon nombre de vos objections.
Pour commencer, les acquisitions de droits sociaux des entreprises en difficulté placées en procédure de sauvegarde ou en redressement judiciaire seraient purement et simplement exonérées : elles ne paieraient même plus le droit de 5 000 euros qui leur est actuellement réclamé.
Par ailleurs, toutes les acquisitions de droits sociaux, lorsque la société cédante est membre du même groupe – autrement dit lorsqu'on est à l'intérieur d'un groupe qui bénéficie du régime dit de l'intégration fiscale – seront également exonérées.
S'agissant des montants de fiscalité, pourquoi avons-nous exonéré les plus-values sur titres de participation – la fameuse niche Copé – à l'exemple de ce qui se fait dans la plupart des pays européens ? Parce que nous avions en France un taux à 19 %, quand il était ailleurs à zéro. Ce qui posait naturellement un gros problème.
Vous avez évoqué l'idée de loger ces actions dans une holding à l'étranger. Encore faudra-t-il, pour transférer ces actions dans cette nouvelle structure, acquitter la quote-part de 10 % au titre des plus-values sur titres de participation. Qui, appliqué au taux de l'impôt sur les sociétés à 33 %, fait 3,33 %.
En fait, que nous propose notre collègue Jérôme Chartier ? Premièrement, de maintenir le dispositif actuel pour les petites transactions, puisque, entre zéro et 200 000 euros, on reste au taux de 3 %. Ce qui représente donc au maximum 6 000 euros – à comparer aux 5 000 euros actuels, dont le montant n'a pas été actualisé depuis une quinzaine d'années. Les choses restent donc les mêmes.
C'est seulement au-delà qu'interviennent deux barèmes : pour la tranche comprise entre 200 000 euros et 500 millions euros, le taux serait de 0,5 % – c'est très inférieur aux prélèvements opérés au titre de la quote-part s'il fallait transférer les titres sur une autre structure juridique de type holding à l'étranger – et de 0,25 % au-delà de 500 millions d'euros. Certes, ce type de taxation n'existe pas dans un certain nombre de pays, mais il est à 0,5 % au Royaume-Uni. Et les exonérations prévues dans le sous-amendement correspondent à celles pratiquées au Royaume-Uni. Ce dispositif me paraît opérationnel.
L'enjeu budgétaire n'est que de 150 ou 200 millions d'euros. Mais nous avons l'occasion de corriger une anomalie alors que nous avons su passer des dizaines d'heures de discussions ardues sur une taxe que je ne citerai pas, pour un produit de quelques dizaines de millions d'euros…
Prenons le cas, devenu très habituel, d'une transaction de fusion-acquisition de quelques centaines de millions d'euros : elle est taxée à 5 000 euros. Je vous laisse imaginer ce que représentent les frais d'avocats sur une telle opération : de l'ordre de plusieurs dizaines de millions d'euros… Gardons à l'esprit les rapports entre les chiffres et les taux de taxes. Je suis le premier à avoir reconnu, à de nombreuses reprises à cette tribune, que nous avons une fâcheuse tendance, pour résoudre nos problèmes de court terme de réduction de déficit, à inventer plus spontanément de nouvelles taxes ou à augmenter les impôts, parce que cela rapporte plus rapidement, plutôt que de nous tourner vers des recherches d'économies possibles mais qui nécessitent la durée. Cela ne fait plaisir à personne. Mais cette fois-ci, je crois que nous avons mis au point une proposition soutenable et sans trop d'effets pervers.
Grâce à la nouvelle rédaction du sous-amendement par la commission des finances, les choses me paraissent plus simples : les exceptions prévues sont de nature à atténuer mon avis défavorable.
Si je comprends bien, vous seriez favorable au sous-amendement n° 481 rectifié ?
Non, monsieur le président. Je suis défavorable à l'amendement n° 106 qui risque de faire peser une nouvelle taxe sur les entreprises. Mais si, par malheur, l'Assemblée décidait de suivre le rapporteur général et Jérôme Chartier dans une démarche qui ne me paraît pas opportune cette année,…
…je leur demande instamment d'adopter le sous-amendement n° 341 rectifié .
C'est bien ce que j'avais compris.
La parole est à M. Charles de Courson.
Mes chers collègues, je ne suis pas favorable à cet amendement, même si le sous-amendement n° 341 rectifié atténue un peu le dispositif. Je n'y suis pas opposé sur le principe, mais économiquement, que va-t-il se passer ? On va revenir au vieux dispositif qui existait dans beaucoup de grands groupes.
Il leur suffira de faire porter leur participation dans une holding aux Pays-Bas ou en Belgique où l'on ne paie rien.
J'y reviendrai, monsieur le rapporteur général. Les grands groupes auront adopté un montage juridique qui leur permet de contourner la loi. Dès lors, qui va-t-on accrocher dans cette affaire ? Les petits groupes familiaux français.
Au lieu de dire non, que répondez-vous à mon argument ? Si j'étais le patron d'un grand groupe internationalisé, je mettrais toutes mes participations dans une holding en Belgique, en Allemagne…
Laissons M. de Courson développer son argumentation. M. Chartier pourra s'exprimer ensuite.
Cet amendement frappera les petits groupes familiaux, les groupes franco-français. Nous avons d'ailleurs déjà eu ce débat à propos de l'amendement Copé et beaucoup d'autres.
Se pose également un problème juridique, que les notaires nous ont signalé il y a quelque temps déjà. L'amendement n° 106 mentionne les cessions qui s'opèrent par acte passé à l'étranger. Soit. Mais comment pourra-t-on savoir que l'acte a été passé à l'étranger ? Il n'y a aucune obligation de notification… Vous ne pouvez vous en sortir que si vous renégociez les conventions avec un maximum d'États pour y réintroduire un dispositif d'information réciproque, ce qui n'existe pas en l'état actuel. Une nouvelle fois, on va prendre les petits mais les grands groupes y échapperont.
C'est pourquoi j'appuie le Gouvernement dans cette affaire. Certes, l'idée est sympathique, mais le débat n'est pas là. Le problème est que si l'on vote ce texte, on frappera uniquement les petits groupes familiaux.
La compassion de Charles de Courson est tout à fait sympathique, mais les grands groupes font déjà leurs affaires avec la bénédiction du Gouvernement. Cela ne changerait donc pas grand-chose !
Deuxièmement, vous avez parlé, madame la ministre, d'une taxe qui frapperait les investisseurs. Quelle horreur ! Mais si je ne me trompe pas, la France est la troisième ou la deuxième destination mondiale des investissements. Je ne pense donc pas que notre système fiscal serve d'épouvantail pour les investisseurs. En tout cas, cela ne se voit pas beaucoup.
Vous pensez que c'est avec ce que vous proposez que cela va le dégrader ? Jean-Pierre Gorges, vous êtes un collègue sérieux ; ne galéjez pas à cette heure. (Sourires.)
Troisièmement, Jérôme Chartier a dit quelque chose qui n'est plus exact en parlant de progressivité. À 499 millions d'euros, on paie 0,5 %, et à 501, on paie 0,25 %... On est dans l'arnaque. Une fois encore, plus on en a, moins on paie.
Je veux bien me tromper, mais démontrez-le. J'ai bien compris qu'il y a le barème : je n'ai pas dit que le pourcentage de 0,25 s'appliquait aux 500 premiers millions. Il n'empêche que vous réduisez le taux pour tout ce qui est au-delà.
Enfin, je n'ai pas le sentiment qu'il y ait de vrais risques de délocalisations pour ce genre de cessions, ou alors démontrez-le.
Quant à vous, madame la ministre, vous êtes extraordinaire... (Sourires) Tout le monde s'en était déjà rendu compte. Mais là, vous faites appel à l'exemple des États-Unis en disant que c'était moins cher.
Non. J'ai parlé du Royaume-Uni, ce n'est pas tout à fait pareil. Il y a l'Atlantique entre les deux.
Je conclus, monsieur le président.
Or lorsque j'ai parlé tout à l'heure de la fiscalité sur les hauts revenus en partant de Roosevelt, je ne vous ai inspiré aucune réflexion et je le déplore.
Vous avez effectivement parlé du Royaume-Uni, mais également des États-Unis, sauf erreur de ma part.
Il y a erreur de votre part.
Avec tout le respect que je lui dois, Charles de Courson se trompe.
Premier élément sur la cession et les précisions que l'on a apportées dans cet amendement comme nous l'avions fait s'agissant des transactions immobilières à l'étranger : le principe de l'attachement au territoire. Lorsqu'il y a une cession d'entreprise, il est très rare qu'un journal ou un média ne le sache pas.
Je ne sais pas comment cela se passe dans la Marne, mais dans le Val-d'Oise, je suis au courant de tout ce qui se passe en termes de cessions en lisant le journal. Et si je le sais, la Direction départementale des impôts le sait aussi. Par conséquent, l'argument selon lequel personne ne serait au courant d'une transaction ne vaut pas. Tout le monde en a connaissance et les salariés au premier chef, qui seraient bien inspirés d'en informer les directions compétentes.
Dès lors que tout est clair sur le plan juridique, ce qui n'était pas le cas, et que la loi précise que la transaction doit avoir lieu sur le territoire national, nous avons notre assiette fiscale.
Deuxième argument : la possibilité d'une délocalisation via des holdings. Sur ce point, Gilles Carrez a parfaitement répondu : cela coûterait mille fois plus cher à une personne de tenter la délocalisation que d'acquitter la taxe lors de la transaction. À l'inverse, si une entreprise étrangère achète une entreprise dans la Marne, elle paie 5 000 euros au moment de la cession des titres. On frise le ridicule… Regardez les honoraires des différents prestataires qui interviennent lors d'une opération de cession, quel que soit le montant : 100, 150, 200 millions d'euros ! Le seul à ne pratiquement rien prélever par le biais d'une taxe, c'est l'État français. Est-ce bien normal ? Nous ne le pensons pas. Au moment où nous devons réduire le déficit public, il faut rechercher des ressources, qui viennent généralement d'un flux. Il y a un flux constitué, à nous de le taxer de façon juste, progressive, comme le proposent l'amendement et surtout le sous-amendement. Nous avons là un véritable outil fiscal performant qu'il nous faut observer. Il est donc utile de l'adopter.
La parole est à M. Charles de Courson, pour une très brève intervention.
Pour ma part, monsieur Chartier, je ne sais pas, même en lisant le journal, quelles sont les transactions d'actions de sociétés implantées dans la Marne ou n'importe où ailleurs sur le territoire. Il n'y a aucune obligation de publicité.
Donc, je ne vois pas comment on peut le savoir. Notre collègue Chartier a peut-être des dons de divination ! Ce n'est pas mon cas.
Il n'y a aucune obligation, mon cher collègue.
Deuxièmement, monsieur le rapporteur général, admettons que je sois responsable d'un groupe qui a une filiale en France et que je veuille racheter une autre entreprise. Au lieu de la faire racheter par ma filiale française, je la fais racheter par la société holding. ; du coup, tout votre dispositif sera contourné. C'est pour cela que je dis que cet amendement est sympathique, mais il ne tient pas la route et il aboutira à taxer uniquement les petits groupes franco-français.
Monsieur de Courson, croyez-vous que ce groupe fera acquérir une entreprise par le biais de sa filiale à l'étranger ? Bien sûr que non ! S'il le faisait, il ne bénéficierait pas du havre fiscal français au titre d'un sujet que vous connaissez bien : la déductibilité totale des intérêts des emprunts !
La parole est à M. le président de la commission des finances, pour conclure le débat.
Monsieur Brard, il n'y a absolument aucune entourloupe ou arnaque, quel que soit le mot que vous ayez employé. Il s'agit d'un barème marginal, il n'y a donc pas d'entourloupe.
Monsieur de Courson, la défense des petits est un thème auquel nous sommes toujours sensibles. En l'espèce, ni les petits, ni les moyens, ni les gros n'ont à être défendus, puisque la taxation qui est proposée ne créera aucun frottement fiscal de nature à pénaliser les petits qui ne peuvent partir et exonérer d'autres qui le pourraient, à supposer qu'ils le souhaitent. Ne comparons pas ce projet de taxation avec celui qui prévalait il y a encore quelques années à 19 % : cela n'a rigoureusement rien à voir. L'argument du rapporteur général est à cet égard frappé au coin du bon sens.
J'indique enfin à l'ensemble de la représentation nationale qu'il s'agit d'un sujet sur lequel la commission des finances travaille depuis plus de deux ans, à l'initiative d'ailleurs de Jérôme Chartier. Nous sommes arrivés à un réel consensus dans l'esprit – nous savions qu'il fallait faire quelque chose – comme dans les faits puisque le texte qui vous est proposé, et qui, je l'espère, sera adopté, a rencontré un accord sinon quasi unanime, en tout cas très majoritaire au sein de la commission des finances, puisque seuls nos collègues du Nouveau Centre n'ont pas souhaité s'y associer. Voilà ce que je peux dire sans crainte d'être démenti.
(Le sous-amendement n° 341 rectifié est adopté.)
(L'amendement n° 106 , sous-amendé, est adopté.)
(L'article 3 bis E, amendé, est adopté.)
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures quarante-cinq :
Suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi de finances pour 2012.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures vingt-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron