La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, de la proposition de loi sur le repos dominical et les dérogations à ce principe (nos 1685, 1782, 1742).
Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de douze heures cinq pour le groupe UMP,…
…six heures trente pour le groupe SRC, cinq heures vingt-trois pour le groupe GDR, cinq heures trente-deux pour le groupe Nouveau Centre et vingt-deux minutes pour les députés non inscrits.
Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'amendement n° 58 à l'article 2.
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 58 .
Madame la présidente, monsieur le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, monsieur le ministre chargé des relations avec le parlement, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le président de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, cet amendement propose d'insérer à l'alinéa 7, après le mot « établissements », le mot « artisanaux ».
Nous avons regretté à maintes reprises l'absence d'étude d'impact concernant cette proposition de loi. Or les innombrables courriers que nous ont adressés les fédérations de commerçants des centres-villes ou d'artisans, ainsi que les déclarations de la CGPME, citées par M. Muzeau, nous font craindre qu'elle ne favorise le développement de commerces situés à la périphérie des villes et appartenant à de grandes chaînes de distribution. Vous avez encore la possibilité de prévenir ce risque en adoptant cet excellent amendement.
La parole est à M. M. Bernard Reynès, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.
Cet amendement est évidemment sympathique : nous sommes tous d'accord pour relancer l'artisanat et le commerce de proximité. Mais, si l'intention de ses auteurs est louable, j'hésite sur la mesure qu'ils proposent. Exclure des activités touristiques la vente de produits d'origine industrielle conduira-t-elle à relancer la fabrication artisanale de tours Eiffel miniatures ? L'amendement n'est pas du même niveau que ceux qui ont été examinés précédemment, ni à la hauteur de la qualité du débat que nous avons eu jusqu'à présent. Avis défavorable.
La parole est à M. Richard Mallié, rapporteur de la commission des affaires sociales.
La parole est à M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.
Le Gouvernement partage l'analyse et l'avis des rapporteurs.
Le Gouvernement prétend soutenir l'artisanat ; mais sitôt qu'il s'agit de passer aux actes, il lui tourne le dos ! Qui plus est, monsieur le rapporteur pour avis, il n'y a pas lieu d'ironiser sur la fabrication artisanale de tours Eiffel, dans la mesure où nous parlons du commerce de détail. Il ne s'agit pas de fabriquer quoi que ce soit, mais de savoir si l'article 2 s'applique au petit commerce dans les zones touristiques ou si c'est un nouveau cadeau à la grande distribution.
(L'amendement n° 58 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 90 .
La parole est à Mme Delphine Batho.
Cet amendement reprend la même proposition sous une autre rédaction.
La proposition de loi sur le travail du dimanche couplée aux dispositions de la loi de modernisation de l'économie, qui a complètement libéralisé l'urbanisme commercial, risque fort d'inciter les grandes surfaces – le critère des zones touristiques n'étant qu'un prétexte – à venir s'implanter dans les communes concernées C'est pourquoi l'amendement n° 90 propose d'exclure tous les commerces d'une surface de plus de 300 mètres carrés des dispositions de l'article 2.
La commission a repoussé l'amendement n° 90 . Certains commerces peuvent disposer d'une surface d'exposition de plus de 300 mètres carrés sans pour autant être des grandes surfaces au sens où on l'entend généralement. Pourquoi seraient-ils exclus des dispositions de l'article 2 ?
En cherchant à exclure certains commerces du champ d'application de la proposition de loi, l'amendement n° 90 tend en définitive à créer des inégalités de traitement…
…en fonction de la taille des entreprises ou de la nature de leur activité. Or rien ne justifie l'instauration de tels critères à l'heure où la volonté du Gouvernement est au contraire de simplifier…
…et de clarifier la législation relative au travail du dimanche.
Avis défavorable.
S'il est un point qui nous réunit tous, c'est la volonté de simplifier la législation. Et s'il en est un autre qui devrait nous mettre d'accord à ce stade de la discussion, c'est bien le fait que cette proposition de loi fait exactement le contraire... Pour généraliser à terme le travail dominical, vous mettez en place une véritable usine à gaz bien plus complexe encore ce qu'avait imaginé le rapporteur-auteur-compositeur du texte initial… Et aux conséquences si imprévisibles que le Gouvernement et sa majorité se gardent bien d'effectuer la moindre étude d'impact, de peur de découvrir ce qui les effraie. Si vraiment vous tenez à simplifier, le mieux serait de voter nos amendements de suppression.
(L'amendement n° 90 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 89 .
La parole est à M. Christian Eckert.
L'amendement n° 89 nous permet de rappeler que notre intention n'a jamais été de supprimer toute activité commerciale, le dimanche, dans les zones touristiques.
L'amendement ne vise qu'à réintroduire les dispositions du droit existant, qui autorisent, dans les communes touristiques, l'ouverture dominicale des commerces ayant une activité liée au tourisme. Vous, vous proposez d'y généraliser l'ouverture de tous les commerces, par une autorisation de droit sans aucune contrepartie ni même recours au volontariat.
Notre rédaction, qui tend à autoriser l'ouverture des seuls commerces dont l'activité touristique représente plus de 80 % du chiffre d'affaires annuel, relève du bon sens. Certains ont beau de se gausser, mais je serais surpris que des touristes japonais viennent par cars entiers acheter des téléviseurs ou des canapés dans un quartier de Paris.
Voire des Chinois, ou même des Brésiliens…
Une fois de plus, nous vous proposons une formule qui vous permettrait de réparer ce que vous avez cassé.
Permettez-moi une dernière remarque : Mon excellent collègue Jean Mallot a parlé d'usine à gaz. On pourrait croire que l'idée vient de lui, mais nous avons reçu certains renforts de poids. Plusieurs torpilles sont déjà passées sous la ligne de flottaison de cette proposition de loi, lancées d'un peu partout : interrogé jeudi sur France Inter, l'ancien premier ministre Dominique de Villepin a dénoncé « l'usine à gaz » que constitue cette réforme voulue par Nicolas Sarkozy pour « jouer à la politique ».
Il n'y a donc pas que les députés de gauche à s'opposer à ce texte. Et l'article d'où je tirai ces propos de M. de Villepin se poursuivait ainsi : « Rares étaient les députés UMP à intervenir dans l'hémicycle pour défendre le texte. » Chacun est libre de se taire. Mais voter cet amendement vous permettrait de réparer ce que vous avez cassé.
Monsieur Eckert, j'ai parfaitement compris votre intention, qui est louable. On peut se poser la question : est-on vraiment capable de définir un bien en lien direct avec l'activité touristique ? Craignant que cet amendement ne soit la source de nombreux contentieux, j'y suis défavorable.
C'est vrai. Un congélateur, un réfrigérateur, c'est incontestablement un bien en lien direct avec l'activité touristique…
Par cet amendement, nos collègues cherchent tout simplement à réduire à néant le texte présenté. Ils veulent revenir à la situation actuelle…
Nous, nous voulons avancer et nous souhaitons que désormais l'ensemble des commerces de détail soient ouverts. Avis défavorable.
Il s'agit encore une fois d'introduire des critères nouveaux qui rendraient la loi plus complexe, en feraient perdre l'esprit, et même, dans une certaine mesure, la dénatureraient. Le Gouvernement ne peut qu'y être défavorable.
Autant je reconnais que le ministre assume clairement sa position en disant que notre amendement trahirait l'esprit du texte, autant je ne peux accepter l'argument du rapporteur de la commission des affaires économiques qui dit comprendre l'amendement mais le trouver inapplicable. Nous reviendrons plus loin sur la définition des commerces alimentaires, puisque pour vendre ce texte qui sent l'embrouille, vous répétez qu'on en exclut les commerces alimentaires. Les hypermarchés ont des rayons alimentaires, mais aussi de vêtements, d'électroménager, parfois d'ameublement, d'équipement, de jardinage. Vous nous dites qu'on ne peut pas définir les activités en lien avec le tourisme ; comment ferez-vous pour les commerces alimentaires ?
La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques.
Je suis d'autant plus défavorable à cet amendement, qui constitue un retour en arrière, que cette disposition est l'une des principales du texte aux yeux de ceux qui s'occupent de tourisme en France. Rien n'est plus absurde, je le répète, dans une commune qui vit du tourisme, et dont le maire a fait une demande d'ouverture le dimanche, que de contraindre certains magasins à rester fermés, tandis que ne sont ouverts que ceux qui ont une activité en relation avec les flux touristiques. N'est-ce pas une aberration que, dans une galerie marchande de ville touristique, un commerce sur trois soit fermé à cause de cette réglementation inopportune ? Parmi tous les problèmes qu'il règle, le premier mérite de ce texte est de régler au moins celui-là. Il est de simple bon sens de permettre que dans les communes touristiques, dont l'activité est concentrée sur une saison, tous les commerces puissent fonctionner à cette période et créer richesse et emploi. Vraiment, vous devriez retirer cet amendement, pour laisser les communes touristiques travailler pleinement. Leurs élus, leurs commerçants, les salariés vont vraiment beaucoup vous en vouloir si vous ne voulez par permettre, avec nous, le progrès que propose ce texte.
(L'amendement n° 89 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 78 .
La parole est à Mme Delphine Batho.
Sur cette question de l'extension du nombre de commerces concernés par cette disposition, la majorité présente deux visions différentes. Celle du président Ollier est claire : il faut laisser ouvrir tous les commerces dans les communes touristiques. Mais j'ai cru en percevoir un autre son de cloche à propos de l'amendement n° 89 , où l'on nous a reproché d'introduire des termes nouveaux et insuffisamment clairs. Avec l'amendement n° 78 en tout cas, nous proposons des termes éprouvés et parfaitement clairs : il s'agit de revenir au droit en vigueur en ce qui concerne la définition du type de commerces qui peuvent être concernés par des dérogations au repos dominical.
Quant aux autres commerces, Monsieur Ollier, rien ne leur interdit d'ouvrir dans le cadre des dispositions générales qu'emporte l'autorisation préfectorale classique.
Non. Il s'agit, dans les dispositions en discussion, des commerces pour lesquels ne s'appliquent ni le volontariat des salariés, ni le doublement du salaire, ni le repos compensateur : pour nous, il ne doit s'agir que des commerces liés directement à l'activité touristique. Les autres commerces peuvent être autorisés à ne pas appliquer le repos dominical, mais dans ce cas sur la base du volontariat, avec double salaire et repos compensateur. C'est ce que propose notre amendement n° 78 .
Je suis navré, madame Batho, de devoir vous dire que ce n'est pas du tout ce que vous proposez : vous voulez rester à la situation actuelle en reprenant les termes exacts qui figurent dans le code du travail. Cela n'a rien à voir avec le doublement du salaire.
Non, vous proposez un amendement qu reprend les termes du code du travail, et vous dites que les autres commerces ne peuvent ouvrir que dans un autre cadre dérogatoire. Je vous ai déjà expliqué que cette autre dérogation se donne au titre de l'article L. 3132-20 du code du travail, et que le juge administratif nous a expliqué qu'il était impossible de l'appliquer au cas des commerces. Avis défavorable
Pourquoi ferait-on une loi pour en rester au statu quo, madame Batho ? Or c'est précisément ce que vous proposez. L'un des objets de cette loi est de sortir de la complexité que crée l'étrangeté de certaines définitions.
Par exemple, une librairie est-elle à caractère culturel ou non ? Tel vendeur de vêtements est-il ou non un créateur de mode ?
Si, si précisément elle a une activité culturelle. Ce que propose la loi, c'est sortir d'un statu quo trop complexe qui crée des distinctions bien difficiles à cerner.
Et la vente de congélateurs ? C'est pour y mettre le poisson qu'on pêche ?
Je suis frappé par cette obsession que vous avez pour les canapés, les frigidaires et les congélateurs…
C'est vrai, et les matelas parfois aussi.
Vous imaginez les bagages à main ? Ça ne va pas être commode ! (Rires.)
Quoi qu'il en soit, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Je voudrais qu'on en finisse avec cette caricature qu'on nous sert depuis hier, du touriste japonais qui viendrait s'acheter un canapé ou un frigidaire.
Une zone touristique est aussi fréquentée par des Français venant d'autres régions.
On ne peut exclure qu'ils puissent y peuvent acheter un vêtement, un costume, une jupe, quelque chose qui est en vente…
Par exemple !
…dans ces zones touristiques où les magasins sont ouverts. Qu'y a-t-il là d'absurde ?
Nos collègues cultivent l'excès et la caricature. Mais on peut considérer que l'ouverture dans ces zones touristiques peut servir aussi à nos compatriotes, pour venir y faire des achats.
Monsieur Mallié, ne dites pas que nous proposons rien. A un moment du débat, nous vous avons dit que si l'accord se faisait pour traiter de la même façon les salariés qui travaillent dans le commerce – il ne s'agissait pas d'étendre cela à tous les gens qui travaillent le dimanche – en leur assurant le doublement du salaire et le repos compensateur, alors nous serions prêts à regarder le reste. Nous vous avons proposé des amendements en ce sens, vous avez voté contre. Donc ne caricaturez pas notre position.
Quant à vous, monsieur le président Ollier, vous nous dites que dans une station, ce ne sont pas seulement les commerces liés directement à l'activité touristique, mais tous les commerces qui doivent pouvoir ouvrir le dimanche. Les commerces alimentaires aussi ? J'attends votre réponse avec beaucoup d'intérêt.
Enfin, nous débattons depuis trois jours pour savoir si l'on retient la commune touristique au sens du code du tourisme ou du code du travail et l'on nous présentera un amendement proposant l'appellation « d'affluence touristique » pour désigner les communes touristiques au sens du code du travail. Jusque là, les choses sont à peu près compréhensibles. Mais je voudrais qu'on m'explique ce que signifie, après l'alinéa 8 qui dispose que « la liste des communes touristiques ou thermales intéressées et le périmètre de zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente sont établis par le préfet sur proposition de l'autorité administrative… », l'alinéa 9 ainsi rédigé : « Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article. »
Alors, de deux choses l'une, soit nous discutons dans le vide depuis trois jours d'un décret qui n'existe pas encore et que vous nous annoncez dans la proposition de loi, soit, comme vous nous l'avez dit, le décret qui définit une commune touristique au sens du droit du travail, existe bien dans la partie réglementaire du code du travail. Si un texte réglementaire existe déjà, alors il faut supprimer l'alinéa 9 que je viens de vous lire relatif au décret en Conseil d'État. Si vous voulez mettre en oeuvre un autre décret d'application, alors il faut que le Gouvernement, le rapporteur, ou quelqu'un qui soit au courant, nous informe sur le futur contenu de ce décret et sur vos intentions. Sinon, même aux ordres, discuter dans le vide est tout de même extrêmement difficile.
Si un nouveau décret doit effectivement être pris et que vous ne nous dites pas quelles sont vos intentions, je ne vois pas comment, en connaissance de cause, quiconque pourrait voter cette loi sans connaître précisément le périmètre de cette disposition essentielle. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Je suis saisie d'un amendement n° 75 .
La parole est à M. Marcel Rogemont.
Alain Vidalies vient de poser une question extrêmement pertinente, et je m'aperçois qu'elle n'a pas eu de réponse !
Mais je suis prêt à répondre !
Mais nous l'attendons, monsieur le ministre. Si Mme la présidente veut bien vous donner la parole, je vous laisse tout loisir de vous exprimer avant que je ne présente l'amendement n° 75 .
Je ne demande qu'à répondre, mais vous savez très bien que les questions que vous me posez n'ont pas pour but d'obtenir des éclaircissements sur le règlement ou sur la loi – en ces domaines, vous êtes experts, en particulier M. Vidalies –, mais d'essayer de nous démontrer que cette proposition de loi ne doit pas être adoptée. Je ne suis pas complètement dupe de votre jeu !
Mais, puisque vous insistez, je vais vous répondre. Le décret visé par l'alinéa 9 de l'article 2 est le décret actuel. Si nous supprimions cet alinéa, les dispositions réglementaires en vigueur n'auraient plus de fondement et tout ce que nous proposons s'écroulerait – c'est du reste bien pour cela que vous nous suggérez de le faire.
Je vous le confirme.
La parole est à M. Marcel Rogemont pour soutenir son amendement n° 75 .
Je remercie d'abord le ministre d'avoir répondu clairement à Alain Vidalies et de lui avoir confirmé que le décret visé à l'alinéa 9 est bien le décret actuel.
L'amendement n° 75 vise à supprimer « les communes touristiques et thermales » dans la rédaction de l'alinéa 7 qui ne concernerait donc plus que les zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente.
En effet, plusieurs questions se posent.
Première question, il faut savoir quel type de commerces on défend. Selon des statistiques parues dans la presse aujourd'hui, 92 % des petits commerçants sont opposés au texte dont nous discutons. Ils savent très bien que celui-ci ne concerne pas leurs intérêts, mais ceux des grandes surfaces. Soit nous défendons cette myriade de petits commerçants, soit nous défendons un quarteron de grandes surfaces…
Malheureusement pas à la retraite, cher collègue… Du reste, si elles devaient la prendre, vu l'argent qu'elles gagnent, ce serait une retraite dorée ! Les petits commerçants, eux, ne font pas tous fortune au même rythme que ces quelques familles qui, en vingt ou trente ans, sont devenues les plus grosses fortunes de France.
Il faut donc savoir qui défend quoi, et quelle conception du commerce nous voulons mettre en avant. Si les communes touristiques et thermales sont visées dans cet article, tous leurs commerces pourront être appelés à ouvrir le dimanche, ce qui créera une distorsion de concurrence au détriment des petits commerçants. Quelles solutions devront-ils trouver pour lutter contre les grandes surfaces, alors qu'ils sont déjà actuellement en difficulté, notamment dans les centres villes ?
L'alinéa 7 pose une seconde question. À entendre les explications du président Méhaignerie au président Ayrault, rien n'est obligatoire, c'est au maire de demander au préfet le classement en commune touristique et donc de permettre l'ouverture des commerces le dimanche – exception faite de Paris, bien sûr. Certes, et j'en suis tout à fait d'accord ; mais reprenons, par exemple, le cas de Chasseneuil-du-Poitou – je vois que M. de Raincourt s'intéresse au Poitou, mais plusieurs de ses anciens collègues sénateurs y portent le même intérêt. Imaginons donc que le maire de Chasseneuil-du-Poitou, commune éminemment touristique,…
…demande à ce que sa ville soit classée comme telle : tous ses commerces pourraient donc, de droit, ouvrir tous les dimanches. Or, comme Catherine Coutelle le rappelait, Chasseneuil-du-Poitou jouxte Poitiers. La seule décision de son maire irait y foutre le bazar… (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Imaginons maintenant que, voyant le bazar que sa décision a mis à Poitiers, le maire de Chasseneuil se résolve à revenir en arrière. Le problème, c'est qu'il ne le pourra pas : vous renvoie à la décision de l'État quelques mois après la condamnation d'un Usines Center par la Cour d'appel de Versailles, confirmé en cassation le 31 janvier dernier. Le préfet a accordé une dérogation aux cent vingt commerçants concernés, au motif que la perte correspondant au chiffre d'affaires du dimanche, pourtant réalisé en toute illégalité, ne pourrait pas être compensé par une augmentation de l'activité en semaine !
Les décisions d'ouverture le dimanche dans les communes touristiques et thermales, fussent-elles prises de façon inopinée par une petite commune membre d'une grande agglomération, auront donc un caractère irréversible. Le mouvement ne pourra alors que faire tache d'huile, obligeant à devoir régler de plus en plus de problèmes semblables à celui qui se pose pour Richard Maillé à Plan-de-Campagne. Finalement, dans l'exemple que je vous donnais, on en viendrait à ouvrir tous les commerces dans l'ensemble de l'agglomération de Poitiers, ce qui a priori était contraire à la volonté des élus.
Pour résoudre ce problème, il faudrait au moins que le maire puisse revenir sur la décision d'ouverture le dimanche ; encore faut-il avoir la capacité de dire non après avoir dit oui, sachant qu'une équipe municipale n'est jamais sûre de sa réélection.
Monsieur Rogemont, je vous ferai remarquer que les commerces visés à l'article L. 3132-13 du code du travail…
…sont exclus de la proposition de loi.
Il s'agit des commerces de détail alimentaire qui ont le droit d'ouvrir le dimanche jusqu'à midi – notre texte ne les cite que pour fixer ce dernier horaire à treize heures.
Mon cher collègue, vous persistez à entretenir un amalgame. L'article L. 3132-13 concerne pour l'essentiel les grandes surfaces alimentaires qui ne sont pas intéressées par l'ouverture systématique du dimanche : elles ne voudraient ouvrir que quelques dimanches par an.
Leur raisonnement est économique : en effet, elles considèrent que leur chiffre d'affaires global ne progressera pas, mais qu'il sera seulement perçu sur sept jours au lieu de six. Autrement dit, elles verraient leurs charges augmenter tandis que leur chiffre d'affaires stagnerait. Elles n'y trouvent donc aucun intérêt. Cessez de vouloir faire peur avec ces arguments : le texte que vous mettez en cause ne concerne pas du tout les grandes surfaces.
Parlons maintenant de Chasseneuil-du-Poitou. (« Ah ! »sur les bancs des groupes SRC et GDR.) J'ai déjà répondu à notre collègue, député de cette commune, que cette dernière n'était pas une commune touristique au sens du code du travail. Le président Ayrault a de nouveau posé la question cet après-midi, ne recommençons pas sans arrêt !
Vous avez raison, elle peut l'être ; encore faut-il que son maire le demande…
Dans ce cas, nous en revenons au début de mon propos : les grandes surfaces – je ne donnerai pas de noms, mais tout le monde a compris de quels établissements nous parlions – ne sont pas concernées par ce texte.
Seulement pour ce qui touche à l'horaire de fermeture, qui passerait de midi à treize heures.
Avis défavorable à l'amendement n° 75 .
Nous avons déjà répété la même chose une bonne vingtaine de fois, me semble-t-il. Il est vrai que nous venons d'introduire des métaphores nouvelles, à commencer par celle du bazar à Poitiers, ville où, précisément, les Arabes ont été arrêtés par Charles Martel !
Cependant, cela ne changera rien au fond de la question. Cette proposition de loi vise clairement les communes touristiques et thermales crées en vertu du code du travail, et non en vertu des dispositions du code du tourisme : elles sont au nombre de cinq cents. Tout le reste est extrapolation ou autre théorie générale. Nous devons nous en tenir à ce qui est écrit dans la proposition de loi.
Tout en respectant tous les intervenants, j'ai tout de même le sentiment que nous avons donné un certain nombre de fois les mêmes explications et que les amendements qui se succèdent ne visent qu'à revenir sur quelque chose qui semble désormais acquis.
En tous les cas, le Gouvernement est évidemment défavorable à cet amendement.
(L'amendement n° 75 n'est pas adopté.)
Nous avons senti au cours de ce débat une certaine confusion – organisée ou pas, je laisse chacun en juger – entre les communes touristiques au sens du code du tourisme et les communes touristiques au sens du code du travail. C'est pourquoi je propose de modifier l'appellation de ces dernières en les dénommant « communes d'affluence touristique »
Cette distinction présenterait plusieurs avantages. Tout d'abord, elle permettrait d'éviter les confusions et les procès d'intention auxquels celles-ci donnent lieu depuis trois jours. Ensuite, elle diminuerait les risques de litiges que pourrait faire naître la rédaction actuelle, puisqu'en l'état actuel du texte, les commerçants situés dans une commune touristique au sens du code du tourisme pourraient croire de bonne foi que la dérogation au repos dominical est de droit. Au reste, non seulement les commerçants, mais aussi les salariés et les organisations syndicales pourraient faire cette erreur, puisque le parti socialiste lui-même se trompe.
C'est précisément pour cela que je propose cette appellation différente, monsieur Juanico : mon amendement permettra au moins à nos collègues socialistes de distinguer les communes touristiques relevant du code du travail de celles qui relèvent du code du tourisme.
La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques, pour soutenir le sous-amendement n° 348 .
Depuis quarante-huit heures, nous avons avec l'opposition un débat fort intéressant sur la confusion possible entre les communes touristiques dites du code du tourisme et les communes touristiques dites du code du travail. L'amendement de M. Vercamer est donc judicieux, puisqu'il permet d'éviter cette confusion en attribuant aux communes une appellation différente selon le régime dont elles relèvent. Je souscris dont tout à fait à l'intention.
Toutefois, il ne faudrait pas que ce souci de couper court à cette confusion ne conduise à d'autres débats, sur d'autres confusion. La notion, quantitative, de « commune d'affluence touristique » pourrait, me semble-t-il, conférer une sorte de valeur ajoutée à la commune qui bénéficierait de ce « label ». Pour avoir participé depuis quinze, voire vingt, avec quelques autres, de droite et de gauche –M. Francina, entre autres – à la construction du code du tourisme, je me souviens que nous avions souhaité alors conserver la même expression dans les deux codes, afin d'éviter toute compétition entre les deux classements. Or je crains que le label de « commune d'affluence touristique » ne suscite un attrait, une émulation, voire une certaine compétition entre les communes, qui les inciterait à y prétendre. Il me semble donc préférable de substituer au mot : « affluence », le mot : « intérêt ». Tel est l'objet de mon sous-amendement.
Cette nouvelle appellation concernerait les 36 000 communes de France !
Chaque commune présente un intérêt touristique : venez donc voir le port de Gennevilliers !
Depuis trois jours, d'un côté de l'hémicycle, on joue sur les mots pour entretenir la confusion entre les deux codes.
Je suis un peu ennuyé : pour éviter cette confusion, M. Vercamer propose judicieusement de modifier l'appellation des communes touristiques au sens du code du travail, c'est-à-dire celles qui sont visées par la proposition de loi. La commission a donc adopté l'amendement n° 324 . Malheureusement, le sous-amendement n° 348 n'a pas été examiné par la commission. Mais, à titre personnel, j'y suis favorable, dans la mesure où, sur le fond, il ne modifie en rien l'amendement adopté par la commission, tout en évitant, comme l'a très bien expliqué le président Ollier, de créer une compétition entre les communes.
Enfin, monsieur Muzeau, même si la France est un pays de tourisme, on ne peut pas dire que ses 36 000 communes sont touristiques.
Elles ont toutes un intérêt touristique ; et même s'il y a des communes où il n'y a rien à voir, il faut y aller pour s'en rendre compte ! (Sourires.)
Là-dessus, nous sommes d'accord : les 36 000 communes de France présentent à cet égard un intérêt touristique !
À Saint-Brieuc-de-Mauron, il n'y a rien, sauf un calvaire : c'est d'intérêt touristique !
On a évoqué à plusieurs reprises la difficulté de bien distinguer les communes touristiques qui relèvent du code du travail de celles qui relèvent du code du tourisme.
Monsieur Muzeau, laissez-moi achever ma démonstration. Cet amendement présente l'avantage de distinguer clairement les deux notions.
Oui. À la limite, le choix entre « affluence » et « intérêt » est secondaire : l'essentiel, c'est qu'une formule permette de distinguer lexicalement les communes qui relèvent du code du travail de celles qui relèvent du code du tourisme. À cet égard, il est préférable que les communes visées par la proposition de loi s'appellent « communes d'intérêt touristique », car le mot « affluence » figure dans les deux codes.
Certes. Cela permettra en tout cas d'établir une distinction ; c'est le but recherché. Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement n° 324 modifié par le sous-amendement Ollier .
Le fait qu'il y ait un calvaire à Saint-Brieuc-de-Mauron en fait-il une commune d'intérêt touristique ?
Le sous-amendement du président Ollier ne me pose pas de problème. L'important pour moi était de distinguer les deux appellations afin d'éviter l'amalgame ou les quiproquos, notamment dans les relations de travail. En effet, si un employeur croit, à tort, parce que sa commune est classée « commune touristique » au sens du code du tourisme, qu'il peut ouvrir le dimanche, cela risque de créer des conflits avec ses salariés, avec risque de préjudices, recours aux prud'hommes, etc. Personne n'aura rien à y gagner
J'ajoute que les membres du groupe socialiste, notamment M. Eckert, ne devraient y voir que des avantages, puisque aucune confusion entre le code du tourisme et le code du travail ne sera plus possible.
Depuis des mois, chers collègues, vous pataugez, ne sachant comment vous sortir de cette histoire de commune touristique. Vous savez aussi bien que nous, mais vous ne voulez pas l'admettre, que, sur ce point, le code du travail est encore moins précis que le code du tourisme et qu'un jour ou l'autre, tout cela éclatera.
En effet, si, jusqu'à présent, 497 communes seulement ont demandé à être classées « communes touristiques » au sens du code du travail, c'est tout simplement parce que ce label – qui permet de bonifier les recettes de la commune grâce à la dotation touristique – n'offrait pas la possibilité d'ouvrir les commerces le dimanche. Or ce sera le cas si cette proposition de loi est adoptée. Ce label présentera donc beaucoup plus d'intérêt pour les communes.
Parmi les diverses formules que vous avez cherchées, la meilleure est sans nul doute celle que vous avez finalement retenue. L'« affluence touristique », personne ne nous a expliqué la manière dont on allait la quantifier : de même que le refroidissement du fût du canon demande un certain temps, l'affluence touristique correspond à un certain nombre de touristes. Cette notion, nous dit-on, sera définie par décret ; soit.
Mais l'« intérêt touristique », c'est encore mieux ! Dans ma région, toutes les communes présentent un intérêt touristique. Marcel Rogemont évoquait Saint-Brieuc-de-Mauron, mais c'est le cas de pratiquement toutes les communes de Bretagne… Près de chez moi, par exemple, se trouve une croix mérovingienne classée. C'est le seul élément qui présente un intérêt touristique, mais il suffit à justifier que la commune soit considérée « d'intérêt touristique ». En retenant cette notion, vous ouvrez donc toute grande la porte à toutes les demandes, y compris aux moins justifiées. C'est cela que je ne comprends pas : vous vous êtes mis vous-mêmes dans la nasse et vous essayez d'en sortir, mais, comme dans les sables du Mont-Saint-Michel, plus vous mettez un pied pour vous en sortir, plus vous enfoncez les deux.
Et pourtant, le Mont-Saint-Michel, quoique d'intérêt touristique, n'est pas en Bretagne !
Bien que n'étant pas de la région Bretagne, j'y suis très attaché et je mesure l'intérêt touristique de toutes les communes de Bretagne – et d'ailleurs.
Monsieur le président Ollier, vous avez l'air très fier de la notion de « commune d'intérêt touristique ». Vous arborez la mine réjouie de celui qui croit s'être sorti d'une difficulté. Hier, M. le ministre a évoqué l'exemple nantais. La ville de Nantes, depuis toujours, avait un office du tourisme. Mais depuis que la communauté urbaine de Nantes a été créée, le 1er janvier 2001, l'office du tourisme n'est plus celui de la ville de Nantes : il est communautaire. Or les vingt-trois autres communes qui, par le biais d'un transfert de compétences à la communauté urbaine, participent à la vie de cet office du tourisme sont très attentives à ce que celui-ci ne promeuve pas seulement les attraits touristiques de Nantes, mais aussi les leurs.
Il est même arrivé que l'on reproche à la présidente de l'office du tourisme, une élue nantaise, d'oublier telle ou telle commune, où se trouvent, ici, un pont romain, là, un dolmen ou la maison de Jean-Jacques Audubon, peintre animalier célèbre.
Je le dis sans ironie. Quand vous menez une politique touristique à l'échelle d'une communauté, vous êtes obligé de promouvoir l'ensemble de ses attraits, et pas seulement la cathédrale, le château des ducs de Bretagne ou l'éléphant de Royal de Luxe, par exemple. Vous vendez aux touristes un « package », c'est-à-dire des itinéraires, sans vous préoccuper des frontières communales. Reste que vous serez toujours sur le territoire d'une commune : par conséquent, toutes sont en droit de revendiquer d'être classées « communes d'intérêt touristique ».
Nous en revenons donc toujours au même problème. Vous tournez en rond, sans parvenir à sortir du piège dans lequel vous savez être enfermés depuis le début.
La reconnaissance de la notion de commune d'intérêt touristique – une notion très large, comme le simple bon sens permet de s'en rendre compte – sera encore plus facile à admettre au titre du code du travail. Arrêtez de chercher sans cesse de nouvelles rédactions ! Après l'affluence et l'intérêt, qu'allez-vous encore nous trouver ? Revenez plutôt à la simplicité en retirant toutes ces dispositions ! Monsieur Mallié, pourquoi ne vous contentez-vous pas de régler votre problème avec Plan-de-Campagne, comme certains de vos collègues de la majorité vous l'ont conseillé en privé ? Cela nous permettrait de travailler plus sérieusement ? Arrêtez tout cela, je vous le redis, tant qu'il en est encore temps ! La lettre que je vous ai envoyée prend, à chaque heure qui passe, un peu plus de poids et ébranle les plus fortes certitudes au sein même du groupe majoritaire.
Je sais que mon temps de parole s'épuise et qu'il ne me reste plus guère qu'une dizaine de minutes, en tant que président de groupe…
Je suis allé jusqu'au bout de ce que je pouvais faire et je vous demande donc solennellement, monsieur le rapporteur, de sortir de l'erreur dans laquelle on vous a peut-être enfermé. Revenez à Plan-de-Campagne, ce ne sera déjà pas si mal !
La commission des affaires sociales a, comme c'est son droit le plus absolu, voté l'amendement de M. Vercamer. Personnellement, je n'ai rien demandé.
Certes !
Même si l'on se place du point de vue des personnes qui s'occupent des affaires touristiques, vous auriez raison, monsieur Ayrault, si le décret précisant les critères de choix changeait. Mais en vérité, rien ne change, si ce n'est l'appellation. Or c'est bien vous qui insistez, depuis deux jours, sur le risque de confusion entre commune touristique et commune touristique – ce que l'on peut comprendre, puisque la même appellation désigne deux choses différentes.
Alors que l'on vous fait plaisir en trouvant une appellation différente…
…afin de mieux distinguer les deux sortes de classement, vous trouvez encore le moyen de ne pas être d'accord.
Je répète que le concept d'affluence touristique, au lieu de résoudre le problème, peut susciter des difficultés au sein des communes touristiques et parmi les personnes dont le métier consiste à s'occuper de ces questions.
S'il ne s'agit de changer que le nom sans modifier le contenu, mieux vaut employer l'expression « commune d'intérêt touristique », qui ne provoquera aucune polémique, aucune compétition entre les deux classements, et ne suscitera aucune jalousie des uns vis-à-vis des autres. L'affluence est un concept quantitatif…
Exactement, monsieur Eckert. Quand on dirige une commune touristique, le seul intérêt est d'avoir de l'affluence sur sa commune. Avec le concept d'affluence, on entre dans une logique qui dépasse la loi et le règlement, qui fait entrer les communes dans une logique de compétition. Tout ce que je dis, c'est qu'il faut éviter cela. Pour distinguer les deux, on change le nom, mais pas le contenu ; ainsi, tout le monde sera content.
Je remercie une fois de plus le président Ollier d'accepter d'échanger. C'est finalement un des bons côtés de la réforme de notre règlement. Comme vous le voyez, je suis beau joueur !
Pas du tout : Mme la présidente, qui est toujours très rigoureuse, vient de me prévenir qu'il me reste, en fait, encore trente-neuf minutes de temps de parole. En parlant de mes talents de conteur, vous parliez également du compteur qui tourne, monsieur Ollier ! (Sourires.)
Je vous ai écouté – comme toujours – avec beaucoup d'attention, et je vous ai entendu dire quelque chose d'extraordinaire : le code du travail et le code du tourisme désignaient deux choses différentes par les mêmes mots : « commune touristique ». D'où un problème, qu'il fallait résoudre. La première solution consistait à introduire la notion de commune d'affluence touristique qui, par son imprécision, pouvait donner lieu à interprétation et contentieux. Vous proposez donc de passer à un autre concept, extrêmement précis cette fois : « commune d'intérêt touristique ». Quel changement ! On aurait enfin trouvé la solution ! En vérité, vous n'avez rien trouvé du tout et vous faites toujours face au même problème : la commune touristique au titre du code du tourisme doit répondre à un certain nombre d'exigences qui devront, de toute façon, toujours être satisfaites. Quant au code du travail, il reste le même.
Vous avez beau dire « commune d'intérêt touristique », franchement, croyez-vous que cela change quoi que ce soit ? À mon sens, cette notion serait même plus extensive que celle de commune touristique.
Jean Gaubert et d'autres vous l'ont dit : à l'évidence, les 36 000 communes de France sont toutes d'intérêt touristique.
Avant que le général de Gaulle ne s'installât à Colombey-les-Deux-Églises, qui osait soutenir que cette commune présentât quelque intérêt touristique ?
Peut-être y aurait-il eu débat à l'époque ; reste qu'aujourd'hui elle est d'intérêt touristique, historique, patrimonial, national, bien qu'il s'agisse d'une commune d'une extrême simplicité. Avant qu'une croix de Lorraine n'y ait érigée, aucun mémorial, aucun monument n'en a signalé le caractère remarquable, hormis la tombe très simple du général de Gaulle. Pourtant, qui douterait un instant du fait que Colombey-les-Deux-Églises puisse prétendre à la qualité de commune d'intérêt touristique ?
Vous êtes pris dans une tenaille dont vous ne parvenez pas à desserrer les mâchoires, et vous faites des efforts désespérés pour vous en sortir, inventant sans cesse de nouveaux concepts. Je comprends bien que vous n'avez pas demandé à être enfermé dans ce piège, monsieur le président Ollier, et que vous faites ce que vous pouvez. Le problème, c'est que vous ne faites plus du droit, mais de la littérature.
Monsieur le président Ayrault, je ne peux pas vous laisser dire ça ! Depuis trois jours, vous essayez de nous enfermer dans la nasse.
…en jouant sur les mots entre la définition du code du tourisme et celle du code du travail.
Un de nos collègues – M. Vercamer, seul au milieu de l'hémicycle –, doté d'un solide bon sens, nous fait une proposition qui vous dispensera de jouer sur les mots.
Vercamer, c'est le suppositoire de la majorité ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Nous faisons la loi ; il faut être sérieux, monsieur Ayrault. Depuis trois jours, vous nous bassinez avec le code du tourisme et le code du travail. Nous vous proposons de rester dans le code du travail et d'introduire une autre dénomination. Peut-être celle-ci vous déplaît-elle encore, peut-être estimez-vous que les 36 000 communes de France sont toutes d'intérêt touristique. Comme disait M. Muzeau, il y a toujours une bonne raison de se rendre dans une commune, ne serait-ce que pour vérifier qu'elle ne présente aucun intérêt touristique ! Mais soyons sérieux un instant : nous avons trouvé le moyen de sortir du débat sémantique où nous étions enfermés et de définir les choses de manière satisfaisante dans la loi, avant qu'un décret ne précise les critères d'application de la nouvelle notion introduite. Le code du travail est une chose, le code du tourisme en est une autre. Je vous demande donc, mes chers collègues, de bien vouloir adopter ce sous-amendement et cet amendement.
Alors, il y aura un nouveau décret ?
(M. Bernard Accoyer remplace Mme Danièle Hoffman-Rispal au fauteuil de la présidence.)
Mes chers collègues, si nous sommes d'accord, ne serait-ce que sur un point avec M. Mallié, c'est pour considérer que cette affaire est sérieuse. Depuis le début de nos débats, pratiquement toute la discussion a porté sur cette question, qui concerne plusieurs dizaines – voire plusieurs centaines – de salariés de notre pays.
Nous sommes au coeur de l'embrouille. L'objectif de la loi sur le tourisme adoptée en 2006 était d'aboutir à une « simplification du régime juridique du classement des communes touristiques ».
Voilà une intention avouée et louable : nous sommes en train d'en faire la démonstration, puisque nous sommes d'accord sur le fait qu'il existe des communes touristiques au sens du code du tourisme, et d'autres au sens du code du travail. Jusqu'à présent, tout le débat a consisté à savoir si le texte portait sur l'une ou l'autre des deux catégories.
Lors de l'examen du texte sur le tourisme en 2005, la rapporteure Hélène Tanguy a fourni une réponse figurant dans les comptes rendus, selon laquelle le premier degré de classement des communes touristiques – nous sommes dans le code du tourisme – entraîne la dérogation du repos dominical. C'est la troisième fois que je le dis, car ce point nous paraît essentiel. Vous avez le droit de contester, mais il paraît évident que vous avez des doutes. Pour vous en sortir, vous inventez donc une troisième, puis une quatrième notion : d'abord la commune d'affluence touristique, proposée par notre collègue Francis Vercamer, puis la commune d'intérêt touristique, sous-amendement du président Ollier. Je ne reviendrai pas sur le plan de la sémantique, où tout a été dit : affluence ou intérêt, l'intérêt à avoir de l'affluence, l'affluence conditionnée par l'intérêt, et caetera.
Il est normal que nous soyons méfiants en vous voyant ajouter, aux deux notions qui existaient déjà, une troisième immédiatement corrigée par une quatrième. Mais le plus grave, mes chers collègues, c'est que, comme l'a dit M. le ministre tout à l'heure, rien ne change – pour l'instant, du moins –, puisque l'on vise toujours le même décret.
M. le ministre a bien dit que le décret ne changerait pas. Soit. On pourrait poursuivre le débat sur la différence entre les deux notions codifiées, dont certains disent que l'une est plus large que l'autre.
Certains collègues de droite nous ont dit qu'il n'était pas question de voter un texte qui pourrait évoluer ultérieurement en dehors de la loi.
Car si la loi, pour être modifiée, doit passer par le Parlement, il n'en est pas de même des décrets auxquels elle renvoie. Je vous accorde le bénéfice de la bonne foi, monsieur le ministre, quand vous dites que le décret ne changera pas. Mais vous ne serez pas ministre éternellement…
Qu'apprends-je ? (Sourires.)
Un nouveau décret, qui ne serait pas soumis à l'avis des législateurs que nous sommes, pourrait totalement changer la donne. Depuis deux ans que je suis député, j'apprends à faire la différence entre ce qui ressort de la partie législative et ce qui relève de la partie réglementaire. Pour sécuriser le dispositif et rassurer le législateur, nous préférons souvent faire figurer dans la loi les définitions des termes qu'elle emploie. Pour votre part, vous préférez renvoyer à un décret, ce qui signifie qu'en adoptant cette partie – indépendamment du débat sémantique –, nous laissons la porte ouverte à toutes les modifications réglementaires possibles de la troisième ou quatrième version que vous venez d'inventer. Et cela, oui, ça sent très fort l'embrouille ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Si nous confions prochainement à un étudiant – au moins un thésard ! – le soin de rendre compte de l'avancée remarquable de nos travaux en matière de définition des communes touristiques au sens du code du travail et des communes touristiques au sens du code du tourisme, nul doute qu'il rencontrerait pour le moins quelques difficultés…
Le mieux est de repartir du texte d'origine puisque vous mélangez les noms et les qualificatifs de chaque groupe pour en faire une sorte de bouillabaisse juridique. Les résultats sont assez curieux. Commençons par le terme « affluence », qui existe déjà dans le code. Il s'applique cependant aux zones et non pas aux communes. Dans une première étape, vous évoquez donc des « communes d'affluence touristique ». Mais vous apercevant qu'il existe déjà des « zones touristiques d'affluence exceptionnelle », vous avez été amené à parler de « communes d'intérêt touristique » et de « zones d'affluence ». Comme cela, tout le monde est servi. C'est comme au tiercé, c'est juste,… mais dans le désordre.
Prenons les communes d'intérêt touristique. Si l'on s'en tient au dictionnaire, l'intérêt est défini comme « la qualité de ce qui retient l'attention ». Je vous souhaite bien du courage pour avancer à partir de là. Moi, je trouve que la ville de Mont-de-Marsan retient beaucoup l'attention. Pour l'affluence, ce sera une autre histoire…
Les choses se compliquent lorsque le Gouvernement nous indique qu'il ne va pas changer le décret. Dont acte. C'est une avancée et je l'enregistre comme un engagement. Le problème, c'est que le décret mesure, lui, l'affluence. (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe SRC.) Terrible ! Et ce préciser qu'il faut prendre en compte le rapport entre la population permanente et la population saisonnière, le nombre d'hôtels, et ceci, et cela… bref, l'affluence. Quelle oeuvre collective extraordinaire ! (Rires sur les bancs du groupe SRC.) Bienvenu chez les juges ! (Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.)
Cela me rappelle ma première expérience de parlementaire, ici même – il y a prescription, car cela remonte à fort très longtemps. Le texte portait sur l'aménagement rural et j'interrogeais un député car je ne comprenais pas très bien ce qu'il était en train de faire. Le rapporteur, qui était avocat, s'est retourné alors vers moi et m'a dit : « Arrête, tu vas tuer le métier ! » (Rires.) Eh bien, avec le texte que vous être en train d'élaborer, je crois franchement que les avocats et les tribunaux ont encore de beaux jours devant eux ! Cela n'est malheureusement pas très sérieux au regard du sujet dont nous débattons. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je suis saisi d'un amendement n° 264 .
La parole est à M. Marcel Rogemont.
Alain Vidalies a montré combien il était difficile de s'y retrouver dans tous ces méandres et ces délices… Je ne sais qui a compris ce que signifie vraiment le texte adopté in fine. Nous le verrons plus tard.
Pour l'heure, avec l'amendement n° 264 , nous souhaitons réduire la période pendant laquelle l'ensemble des commerces sont susceptibles d'être ouverts à la seule durée de la saison touristique. En imaginant qu'il soit utile de prévoir cette ouverture durant la saison, il nous paraît impossible de la maintenir toute l'année du fait des problèmes de distorsion de concurrence que cela entraînerait pour les communes situées à côté de ces communes thermales ou touristiques.
Notre amendement vise donc à préciser, à l'alinéa 7, que les dispositions permettant l'ouverture de l'ensemble des commerces d'une commune touristique ou thermale ne peuvent s'appliquer que pendant la saison, sachant que celle-ci peut varier selon les stations thermales ou touristiques. La période d'ouverture ne doit être possible que lorsque les touristes sont là.
La commission n'a pas retenu cet amendement. Rappelons le point d'entrée de la mesure : c'est la nécessité de simplifier le régime applicable dans les communes touristiques. Comme M. Eckert l'a reconnu lors de la défense de la motion de renvoi en commission, en pratique, il est malaisé de définir la notion de période touristique. Il a pris l'exemple de Paris, mais d'autres pourraient être cités.
En outre, chacun sait que, dans une commune touristique, en l'absence de touristes, les commerces n'ouvriront pas. Excusez cette lapalissade, mais il fallait le dire ! M. Vidalies l'a fait remarquer pour Biscarosse, et le président Ollier pour son ancienne commune, Serre-Chevalier.
S'il n'y a pas d'affluence, il n'y a plus d'intérêt, et réciproquement…
Cela montre que, sur le plan juridique, la notion de période juridique est floue et peu opérante. La preuve en est que certains amendements tendent à rétablir la référence à la période touristique, d'autres aux périodes touristiques, et d'autres, enfin, à la saison.
Monsieur le président, vous pouvez considérer que cette explication vaut pour la série d'amendements qui traiteront du même sujet. Je me contenterai de dire « défavorable » pour tous les autres.
Je constate une fois de plus une sorte de défiance à l'égard du principe de réalité. Il est clair que les commerces touristiques s'organisent en fonction de la présence de la clientèle. Il est peu vraisemblable que des commerces de moufles ou de passe-montagne fonctionnent en plein été à Canet-Plage. De même, on vendra peu de maillots de bain à Serres-Chevalier au mois de janvier,…
…même si l'on peut se baigner en piscine.
Cette volonté de contrôler, de spécifier, ne correspond pas à l'esprit de la loi. Il faut laisser le développement commercial touristique, et ses effets sur l'emploi, se faire naturellement. Laissons le sens de l'offre et de la demande fonctionner. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
Ce n'est pas si simple, monsieur le ministre, car on touche là à une disposition à haut risque. Peut-être avez-vous raison si l'on s'en tient uniquement à l'exemple d'une petite commune du littoral qui a beaucoup d'habitants l'été et peu l'hiver – ce sera l'inverse pour une petite commune de montagne. Mais votre raisonnement pèche lorsqu'on prend l'exemple d'une commune importante et touristique. La notion de saison a sa réalité. Ce n'est pas pour rien que cette législation existe depuis sept ans – donc y compris sous votre majorité – et n'a donné lieu à aucun scandale. Le dispositif était cohérent et protecteur. Une commune importante et touristique avait ainsi la possibilité d'ouvrir ses commerces le dimanche, uniquement pour certains articles, pour accueillir les touristes.
Avec votre texte, tous les articles seront concernés, ce qui pourra avoir pour conséquence d'attirer subitement des grandes surfaces franchisées. Surtout, ces commerces pourront être ouverts toute l'année. C'est le croisement de ces deux dispositions qui créent le danger. Dans les communes relativement importantes, cela pourra entraîner un appel d'air et une distorsion de concurrence non négligeable avec les communes voisines, et notamment celles qui ne seront pas classées touristiques. Il ne me paraît pas difficile de comprendre ce raisonnement.
Monsieur Mallié, M. le ministre nous a indiqué qu'il ne changerait pas le décret : dont acte. Mais pour expliquer pourquoi il ne devait plus y avoir de périodes touristiques, vous nous avez dit qu'il était difficile de déterminer une période car c'était flou et peu opérant. Le problème, c'est que le décret en parle : « Pour figurer sur la liste des communes touristiques ou thermales établie par le préfet, les communes doivent accueillir pendant certaines périodes de l'année… » Voilà que ces « certaines périodes » deviennent, dans la bouche du rapporteur, un concept « flou et peu opérant » qu'il faut supprimer de la loi. Il n'y a pas de raison de s'arrêter en si bon chemin !
Monsieur Vidalies, vous essayez depuis le début d'embrouiller les choses et de faire un rideau de fumée. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Cessez donc de lire ce qui n'est pas écrit ! Je vous redonne lecture de l'article R.3132-20 : « Pour figurer sur la liste des communes touristiques ou thermales établie par le préfet, les communes doivent accueillir pendant certaines périodes de l'année…
… une population supplémentaire importante en raison de leurs caractéristiques naturelles, artistiques ou historiques ou de l'existence d'installations de loisirs ou thermales à forte fréquentation. »
Il est seulement précisé que, pendant certaines périodes de l'année, il faut recevoir une affluence de population. Il n'est pas dit que cela doit être touristique pendant un certain temps.
Ce sont les périodes pendant lesquelles on va recevoir davantage de population. Cela ne veut pas dire que ce sera du tant au tant. C'est seulement un critère et il n'est pas utile de le changer. Le décret n'a pas à être modifié.
(L'amendement n° 264 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 91 .
La parole est à M. Christian Eckert.
Il est défendu.
(L'amendement n° 91 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Les communes touristiques, telles que les textes permettront de les définir, correspondent à une réalité économique. Néanmoins, il me gêne – je le dis en toute franchise à mon ami Mallié – que l'alinéa 7 rende le travail obligatoire le dimanche. Je souhaiterais un peu plus de souplesse.
S'il faut que dans certaines zones, telles que les a définies le rapporteur, les commerces puissent ouvrir le dimanche, il est souhaitable que cela se fasse, notamment pour des raisons sociales, sur la base du volontariat des salariés. Je propose donc de rédiger la fin de l'alinéa 7 de la façon suivante : « demander au personnel, à tout ou partie d'entre eux, de prendre le repos hebdomadaire par roulement. » Oui à l'ouverture le dimanche, mais sur la base du volontariat.
J'avoue ne pas bien comprendre les propos de Jacques Myard. Les emplois concernés ici correspondent à des tâches qui, structurellement, doivent être également effectuées le dimanche. Volontariat ou pas, il faut bien que l'employeur, à un moment donné, puisse s'organiser. Concevez-vous donc le dimanche comme un jour comme les autres, qui n'impliquerait pas de repos compensateur ? Je ne pense pas que ce soit ce que vous vouliez dire…
Si tel était le sens de votre amendement, mon avis serait évidemment défavorable, car c'est contraire à notre état d'esprit. Je vous renvoie à l'article L. 3132-3, dont nous avons longuement débattu cet après-midi et en vertu duquel, dans l'intérêt des salariés, le repos hebdomadaire est donné le dimanche.
Je partage l'avis du rapporteur. Dans l'état actuel du droit, les établissements qui bénéficient d'une dérogation au repos dominical du fait de leur appartenance à une commune ou à une zone touristique peuvent mobiliser leurs salariés le dimanche sans qu'il soit nécessaire que ces derniers manifestent leur volontariat.
Dans les communes ou les zones touristiques au sens du code du travail, l'ouverture des établissements le dimanche est une caractéristique inhérente à l'activité commerciale, amenée à répondre à une demande plus forte le week-end et a fortiori le dimanche. Le travail dominical est donc une composante intrinsèque et anticipée de l'emploi dans ces zones, par ailleurs clairement délimitées.
La proposition de loi ne change rien à cet état de fait ; elle modifie simplement le type d'établissements autorisés à déroger au repos dominical dans les périmètres touristiques. Vouloir que le travail du dimanche se fasse sur la base du volontariat dans les zones touristiques nous paraît donc une demande redondante par rapport à la situation de fait. C'est pourquoi le Gouvernement souhaiterait que Jacques Myard retire son amendement.
Retirer un amendement n'est pas dans ma conception des choses, monsieur le ministre !
À partir du moment où l'on étend la possibilité de travailler le dimanche, je souhaiterais que cela se fasse sur la base du volontariat. Vous dites que le travail le dimanche est inhérent à l'activité commerciale dans les zones touristiques. Je pense pour ma part qu'il y aura énormément de volontaires, car je présume que travailler le dimanche comporte aussi des avantages. Je ne vois donc pas en quoi mon amendement serait redondant. Il ne vise qu'à apporter plus de souplesse au dispositif.
Nous sommes opposés depuis le début à l'extension du nombre de communes pouvant autoriser l'ouverture de tous les commerces dans les zones touristiques. Mais vous persistez et signez, et cette extension vient d'être votée, dans un cadre nouveau et réinventé.
Cela étant, l'amendement de Jacques Myard présente quelques avantages. Pour commencer, il supprime la notion de dérogation de droit, puisque adopter son amendement supprime de fait l'expression « de droit », expression tout à fait essentielle puisqu'elle permet à l'employeur – j'attends toujours la réponse sur ce point – d'échapper à l'obligation de doubler le salaire sur les cinq dimanches du maire : pour l'instant, rappelons-le, dans une commune touristique, si les dérogations sont de droit, l'obligation de doubler le salaire sur les cinq dimanche du maire est en pratique abolie puisque tous les dimanches peuvent être travaillés et que les dimanches du maire n'existent plus.
Cet amendement a ensuite l'avantage, même si nous aurions préféré une autre formulation et la suppression de l'ensemble des dispositions concernant les communes touristiques, de préciser que l'on « peut » demander au salarié de travailler le dimanche. Là où je diverge d'avec Jacques Myard, c'est sur le nombre de volontaires ; nous pensons qu'ils ne seront pas forcément aussi nombreux qu'il le dit. Mais je peux me tromper, et l'on peut imaginer en effet que le volontariat permettrait au système de fonctionner.
Quoi qu'il en soit, je dois, monsieur le ministre, vous remercier de votre franchise, puisque vous venez de reconnaître que, dans les communes touristiques – dont on ne sait plus très bien à quoi elles correspondent, mais les juges en décideront –, il n'est pas question de volontariat. Votre parole sera extrêmement importante sur cette question.
Toujours à propos du volontariat, je voudrais pour conclure vous renvoyer à une déclaration de notre collègue Marc Le Fur. On a parlé ici ou là de licenciements pour refus de travailler le dimanche. Il y en a eu en janvier, et très récemment encore à Oyonnax, mais aussi dans un Géant Casino du sud de la France. Ce matin même à la télévision était interviewée une personne licenciée parce qu'elle avait refusé de sacrifier sa vie de famille pour gagner cinq euros de plus en travaillant le dimanche – les prud'hommes trancheront.
Interpellé donc sur l'un de ces licenciements au mois de janvier, Marc Le Fur, dont on connaît les positions, déclarait : « C'est l'exemple qui illustre nos craintes. Cette affaire témoigne de l'ambiguïté de la notion de volontariat. Cette sanction injustifiée illustre la force du lien de dépendance des salariés de la distribution ainsi que la nécessité, pour les salariés concernés par le travail du dimanche, d'être protégés par un mécanisme de contrôle fiable et indépendant. Voilà pourquoi nous sommes opposés à toute généralisation du travail le dimanche. Voilà pourquoi nous voulons une plus grande protection de ceux qui pourraient être amenés, exceptionnellement, à travailler le dimanche. Voila pourquoi la seule affirmation de prendre en compte le volontariat ne constitue pas une protection suffisante. »
Je livre ces propos à votre appréciation. L'amendement de notre collègue Myard ne nous satisfait pas entièrement, mais il peut améliorer les choses ; c'est pourquoi nous le voterons.
Puisque l'amendement de Jacques Myard pose le problème du personnel, je voudrais vous donner lecture d'un article, paru hier dans Le Républicain lorrain sous le titre « Rémunération doublée : le flou », et sur lequel j'aimerais avoir l'avis du rapporteur et du ministre.
« La rémunération du travail le dimanche, par rapport à un autre jour, n'est obligatoirement plus élevée en vertu de la loi actuelle que dans certains cas, et ne sera doublée que pour une partie des salariés si la proposition de loi du député UMP Richard Mallié est adoptée.
« Plusieurs syndicats ont critiqué l'instauration d'une nouvelle inégalité entre salariés travaillant le dimanche, qui ne toucheront pas les mêmes sommes suivant leur zone de travail.
« Par exemple, dans les commerces de détail, qui sont déjà autorisés actuellement à ouvrir cinq dimanches maximum par an sur dérogation du maire, le code du travail impose une majoration salariale et la proposition de loi Mallié prévoit que celle-ci aboutisse à une rémunération au moins égale au double de celle d'un jour de semaine et un repos compensateur. Mais, dans les communes et zones touristiques, pour lesquelles des dérogations préfectorales seront possibles toute l'année selon la proposition Mallié, aucune contrepartie obligatoire n'est prévue pour l'instant dans ce texte.
« Dans tous les autres cas, le fait de travailler le dimanche n'ouvre actuellement pas droit à être payé plus, sauf si les conventions collectives ou les accords collectifs dans l'entreprise prévoient une rémunération accrue. »
Cet article témoigne selon moi d'une bonne interprétation des dérives possibles, et les syndicats ne manqueront pas de mettre sur la table le question de l'inégalité salariale entre travailleurs.
La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques.
Cher Jacques Myard, j'ai le sentiment qu'une confusion s'est glissée dans l'exposé des motifs de votre amendement, et je souhaiterais que nous la levions ensemble.
Depuis deux jours, on essaie, à gauche de cet hémicycle, de créer la confusion entre les différentes catégories de classements. Or j'ai eu le sentiment à vous entendre que vous pensiez que la mesure que vous souhaitiez faire voter était d'application nationale.
Fort bien. Je vous répondrai donc sur les zones touristiques. Les choses s'y passent ainsi depuis qu'elles ont été créées. Dans une commune touristique, le but est de faire travailler l'ensemble des commerces sur une durée de temps réduite – deux ou trois mois, six mois au maximum – dans des conditions contraintes, ce qui implique notamment l'ouverture le dimanche afin de répondre au flux touristique. Dès lors, il est évident que l'hôtellerie, les commerce de bouche et tous les commerces employant des travailleurs saisonniers ont besoin d'organiser les congés hebdomadaires par roulement ; car si tous les salariés choisissaient de prendre leurs repos le même jour, l'établissement serait bien forcé de fermer. Le roulement des congés hebdomadaires est donc un mode d'organisation propre à l'activité touristique ; il permet d'assurer le bon fonctionnement d'un commerce tous les jours pendant la saison touristique.
Je voulais m'assurer que nous nous étions bien compris et vous suggérer de retirer votre amendement, qui pourrait se révéler problématique pour le fonctionnement des communes touristiques.
Je suis d'accord avec le président Ollier. Qu'il soit inhérent aux commerces situés dans les zones touristiques de devoir organiser le repos hebdomadaire par roulement, c'est tout à fait exact. Je crois cependant qu'à partir du moment où l'on étend le système sur le plan géographique, un peu plus de souplesse est nécessaire.
Il faut également trouver une forme de consensus, car nous savons très bien que, dans ce domaine, nous touchons à des choix de société.
Les dispositions applicables aux zones touristiques et thermales énoncées à 1'alinéa 7 de l'article 2 diffèrent sensiblement – c'est un euphémisme – de la version précédente de la proposition de loi sur le travail dominical.
Pour mettre un terme à certaines situations d'iniquité, vous nous proposiez, hier, de rester dans le cadre d'un régime de dérogations temporaires et individuelles, mais de l'encadrer moins sévèrement, en supprimant les conditions liées à la période d'activité touristique et à la nature des biens vendus.
Aujourd'hui, vous envisagez carrément de changer de catégorie de dérogation et d'en élargir le champ. Généralisé à tous les commerces de détail sans aucune considération de la nature des produits vendus, ce régime collectif sera désormais de droit. Cela signifie que tout commerce de détail situé dans une zone touristique pourra demain, sans aucune autorisation particulière, ouvrir le dimanche, tous les dimanches.
Ce n'est pas sans conséquence pour les salariés, dans la mesure où vous considérez que, l'ouverture dominicale n'ayant plus rien d'exceptionnel, ces jours travaillés n'auront pas à être payés double, ni à ouvrir droit à repos.
Face au risque bien réel d'extension, de multiplication du nombre de communes touristiques – je rappelle que le quartier de La Défense a récemment reçu cette appellation –, et pour répondre à nos critiques concernant l'absence de garanties pour cette catégorie de salariés, le conseiller du Président a estimé très sérieusement qu'il y avait beaucoup de garde-fous !
Il y en avait si peu dans le texte après son passage en commission, justement, que vous avez été contraints d'en ajouter au dernier moment. Ainsi, il n'est plus fait référence aux communes touristiques mais aux communes « d'affluence touristique ». Et l'on a même vu apparaître, il y a quelques minutes, l'expression « communes d'intérêt touristique », avec tous les aspects incongrus qu'a soulignés notre collègue Vidalies. Les organisations patronales et de salariés, enfin, sont invitées à négocier des contreparties. Autant de faux-semblants uniquement destinés à convaincre les derniers députés UMP récalcitrants, si tant est qu'il en existe encore à cette heure-ci !
Nous envisageons, pour notre part, un garde-fou bien plus solide. Notre amendement propose de rétablir, comme le prévoyait la proposition de loi « Mallié 3 », les autorisations préfectorales individuelles en lieu et place des dérogations de plein droit.
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 79 .
Notre collègue Muzeau nous propose en fait de revenir à l'autorisation individuelle. C'est la situation actuelle, où il faut décider si le commerce en question vend bien des articles correspondant aux critères liés à l'activité touristique. Il est donc normal que l'autorisation soit individuelle. Demain, dans la mesure où la dérogation vaudra pour tout le monde, l'autorisation individuelle n'aura plus lieu d'être. Pourquoi aurait-on à choisir, alors que tout le monde a le droit d'ouvrir le dimanche ? La commission est donc défavorable.
(Les amendements nos 46 et 79 , repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi d'un amendement n° 57 .
La parole est à M. Christian Eckert.
Il est défendu.
(L'amendement n° 57 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Il s'agit ici d'un débat que nous avons déjà eu, mais dont nous avons vu l'importance. Nous avons demandé que la possibilité d'ouverture des commerces dans les zones touristiques soit attachée à l'activité touristique. Nous avons eu un débat sur la nature des commerces, dont nous estimions qu'ils devaient être attachés à cette activité. Nous avons à présent le même débat sur la saisonnalité.
En réponse à l'amendement de M. Myard, le président Ollier nous a présenté toute une théorie, selon laquelle la dérogation vaudra pour quelques mois, et pas pour toute l'année.
Tel que votre texte est rédigé, les communes touristiques ne seront pas forcément des stations balnéaires ou de sports d'hiver. Bien sûr, se pose le cas de Paris, mais nombre d'autres villes ont un intérêt touristique qui dépasse le cadre de la saison.
Quoi qu'il en soit, nous souhaitons que, dans les endroits touristiques – si j'ai bien compris, il faut dire à présent : dans les communes « d'intérêt touristique » –, la possibilité d'ouvrir le dimanche ne soit accordée que pendant la ou les périodes d'activité touristique. Je crois que c'est parfaitement clair.
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l'amendement n° 73 .
Christian Eckert vient d'expliquer le fond de ces amendements, qui tendent à réduire aux périodes touristiques l'autorisation d'ouvrir le dimanche dans les zones d'intérêt touristique.
Il vient de prononcer le beau nom de Paris. Cela me permet de demander aux ministres et au rapporteur comment ils envisagent le traitement du cas de Paris après l'adoption de cette proposition de loi.
Paris…
À condition que nous fassions en sorte que Paris reste toujours Paris ! Victor Hugo disait – et je suis sûre que le ministre de Raincourt sera sensible à cette citation de son ancien collègue sénateur : « Le genre humain a des droits sur Paris. »
Tous les élus parisiens, et tous les Parisiens, considèrent que Paris appartient au monde entier, que le genre humain a des droits sur Paris. Or, ce texte, « à l'insu du plein gré » du rapporteur comme des deux ministres ici présents, aura une conséquence : la seule personne qui aura des droits sur Paris sera, non pas le Président de la République, mais le préfet.
Je crois que nous sommes tous convaincus, avec Victor Hugo, que le genre humain a des droits sur Paris, que la représentation nationale a des choses à dire sur Paris, qu'un Parisien vaut autant que tout autre Français. Deux millions de Parisiens, onze millions de Franciliens seront concernés, quoi qu'il arrive, par ce que nous déciderons de faire ou de ne pas faire s'agissant de Paris.
Cela mérite que nous précisions les choses, que nous les délimitions. Nous devons préciser s'il faut étendre légèrement le nombre de commerces pouvant ouvrir le dimanche dans les sept zones où les dérogations sont actuellement possibles, ou si tout Paris est désormais « d'intérêt touristique », auquel cas, dans tout Paris, tous les commerces, quel que soit leur type d'activité, pourront ouvrir le dimanche.
Vous mesurez bien, mes chers collègues, que si l'ouverture est possible tous les dimanches partout dans Paris, les bénéficiaires ne seront pas les commerces de proximité, ni ceux qui illustrent l'excellence artisanale française, mais des chaînes vendant des produits de fabrication étrangère, de très mauvaise qualité, qui ne représentent absolument pas l'image de la France, qui ne servent pas l'emploi en France, qui n'apporteront pas un sou de plus aux Français, et qui détérioreront la qualité de vie, non seulement des Parisiens, mais de tous les Franciliens.
Paris est la première destination touristique au monde. C'est pourquoi nous demandons des précisions sur ce que vous entendez par « périmètre » ou par « zone touristique ». Nous demandons tout simplement quel sort vous ferez à Paris. Nous demandons que la représentation nationale dise très nettement que ce n'est pas à un préfet de décider, de façon discrétionnaire, quels seront les périmètres ni si le périmètre s'étendra à la totalité de la capitale. C'est aux élus représentant les Parisiens, c'est aux chambres consulaires, c'est aux acteurs économiques de décider, de façon concertée, comme c'est le cas partout ailleurs, quelles zones pourront faire l'objet de dérogations et dans quelles conditions.
En demandant cela, nous servons les intérêts de toute la France, du commerce, et de la représentation nationale.
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 99 .
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous avez refusé l'amendement de M. Myard, qui aurait pu adoucir le texte, voire nous rassurer quelque peu.
Vous voulez nous faire croire aujourd'hui que c'est sur la base du volontariat que l'on va travailler le dimanche dans les petits commerces, pour gagner parfois une misère.
L'argument du choix de vie personnel, monsieur le ministre, ne tient pas. C'est l'idée qu'avance le Gouvernement : le travail dominical se ferait sur la base du volontariat ; il n'y aurait pas de problème de vie familiale ou sociale, dès lors qu'il s'agit d'un choix personnel.
Cet argument est tout simplement faux. Le travail dominical, tout comme les horaires décalés ou le temps partiel, est, dans la plupart des cas, subi. Selon un sondage que vous citez régulièrement, monsieur le rapporteur, les moins de trente ans sont très majoritairement favorables au travail le dimanche, et la courbe s'inverse après trente ans.
Oui, c'est vrai. Mais il faut pousser un peu plus loin le raisonnement, et expliquer pourquoi il en est ainsi. Jusqu'à trente ans, on a une vie plus indépendante, on n'a pas encore de charges de famille, on n'a pas encore décidé d'investir dans un bien immobilier. On est donc un peu plus libre d'aller travailler six mois quelque part, durant une saison, et six autres mois ailleurs – avec, sans doute, entre-temps, un passage par Pôle emploi.
Après trente ans, grosso modo, on commence à s'installer, et on n'a plus trop envie d'aller travailler le dimanche.
Or, quand on étudie les graphiques, on se rend compte qu'il n'y a pas de différence entre les taux de travail dominical, qu'il soit habituel ou occasionnel, selon la configuration familiale.
Voilà qui tend à montrer que l'affirmation des promoteurs du travail le dimanche, selon laquelle les salariés pourraient choisir en fonction de leurs contraintes familiales, est un faux espoir, pour ne pas dire une illusion.
Dans les faits, les données européennes montrent que, plus largement, le travail le dimanche touche de manière indiscriminée les personnes ayant la charge de jeunes enfants, aussi bien que celles libres d'attaches familiales. Cela ne correspond pas du tout au sondage que vous utilisez !
Accepter notre amendement n° 99 , qui tend à insérer à l'alinéa 7, après le mot : « roulement », les mots : « pendant les périodes touristiques, » permettrait aux personnes contraintes de travailler le dimanche de limiter les dégâts.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur-auteur-compositeur de la proposition (Sourires), les établissements de vente au détail ne devraient procéder de droit au roulement pour le repos hebdomadaire des salariés que pendant la période touristique. Je vais, pour étayer mon argumentation, et au risque de vous surprendre, citer une intervention du président Ollier lors de la troisième séance d'hier.
Le compte rendu des travaux de notre belle maison atteste de ses propos : « Le principe même de l'organisation d'une commune touristique, qu'elle soit balnéaire, de sports d'hiver ou verte, est fondé sur l'affluence des touristes que l'on fait venir… » Je ne veux pas rouvrir le débat sur les notions d'affluence et d'intérêt, débat qui a été tranché tout à l'heure par un vote malheureux, mais vous avez utilisé naturellement, hier, le mot « affluence » : cela veut peut-être dire quelque chose.
Vous avez dit également : « La commune touristique est fondée sur la saisonnalité. » C'est une notion que l'on retrouve d'ailleurs dans le décret d'application. Dans votre raisonnement, donc, tout se tient.
Nous pensons, quant à nous, qu'il faut limiter à la période touristique la dérogation au repos dominical. Qu'est-ce qui distingue une commune touristique d'une commune non touristique en dehors de la saison ? L'affluence ? Il n'y a plus d'affluence. L'intérêt ? Nous avons démontré que toutes les communes ont un intérêt. Je donnerai des exemples tout à l'heure.
En différenciant une commune touristique d'une commune non touristique au regard du repos dominical hors saison, vous facilitez l'effet « tache d'huile » et étendez en quelque sorte le recours au travail dominical. Dans mon beau département, il y a une commune dont vous ne contesterez certainement pas le caractère touristique et thermal : Vichy.
Je vous en prie, mes chers collègues !
Poursuivez, monsieur Mallot, et restez dans le sujet !
Vichy est une commune touristique et thermale. Si l'on permet l'extension généralisée, y compris hors saison, du travail dominical, la commune voisine de Cusset, dont l'intérêt touristique est incontestable puisqu'elle comporte des souterrains, revendiquera également, hors saison, cette classification compte tenu de l'intérêt de sa commune, etc. On imagine les glissements possibles.
Prenons encore l'exemple d'une autre commune de mon département, située au coeur d'un vignoble qui vient d'obtenir l'appellation d'origine contrôlée : Saint-Pourçain-sur-Sioule.
Elle a évidemment un intérêt touristique.
Qu'est-ce qui distingue, hors saison, ces trois communes ? Pas grand-chose.
Il y a évidemment un lien entre la période touristique et les produits que l'on vend pendant celle-ci. Dans les commerces de détail, hors période touristique, la distinction entre lunettes de soleil et lunettes de vue a nettement moins de sens qu'en période touristique. C'est pourquoi nous voulons à la fois circonscrire l'autorisation du travail dominical aux commerces vendant des produits liés au tourisme ou au thermalisme et la limiter à la période touristique ou thermale.
Telle est la cohérence de notre démarche. Votre cohérence est à l'opposé. Vous êtes pour la généralisation complète, toute l'année, à toutes les communes dès lors qu'elles présentent un quelconque « intérêt touristique » –, pour tous les produits, pour tout le monde. Ce n'est pas acceptable.
Lorsque vous en aurez pris conscience, vous voterez notre amendement !
Je voudrais faire une observation sur la saisonnalité.
Vous avez répondu sur ce point, monsieur Mallié, mais je souhaite rappeler que le décret retient, parmi les critères à remplir, celui de la population saisonnière. Mais, s'il y a lieu de calculer une population saisonnière, encore faut-il qu'il y ait une saison ! Le texte a vocation à s'appliquer sur toute l'année, mais on ne calculera la population touristique que sur la saison : voilà qui montre l'incohérence de votre démarche.
Que se passera-t-il, d'autre part, pour les communes ayant transféré – chose assez fréquente – la compétence « tourisme » à un établissement de coopération intercommunale ? Si une commune classée touristique pour la partie littorale fait, par ailleurs, partie d'un pays au sens de la loi sur l'aménagement du territoire, et qu'elle a transféré sa compétence, qui va l'exercer, comment et à quel niveau ? Le texte s'appliquera-t-il sur le seul territoire de la commune ? Le transfert est-il indépendant ? On peut le penser, mais ces questions méritent, à ce stade de nos débats, une réponse du Gouvernement.
L'application du texte sur toute l'année risque de créer des difficultés, même s'il est probable que ce sera moins vrai dans les communes isolées, où les conséquences seront ressenties uniquement par les salariés.
Le cas des communes touristiques proche de grandes agglomérations pose problème, et il faut l'évoquer dès maintenant, avant que vous ne soyez confronté, monsieur le ministre, à la réaction des élus. Lorsqu'un commerce est situé à cinq ou dix kilomètres d'une agglomération de plusieurs dizaines de milliers d'habitants où les commerces ne peuvent ouvrir le dimanche, il aura naturellement tendance à ouvrir tous les dimanches pour drainer la clientèle – on a évoqué tout à l'heure le cas Chasseneuil-du-Poitou par rapport à Poitiers, mais on peut trouver d'autres exemples, dans lesquels les victimes seront les commerces des grandes villes. Il faut donc bien réfléchir avant de se placer dans ces situations.
Prenons par ailleurs le cas d'une région que nous connaissons bien tous les deux, monsieur le ministre : le pays Basque. Sur la zone littorale, Biarritz et Saint-Jean-de-Luz sont des communes touristiques. Mais Bayonne ? Il y a continuité dans l'urbanisation, qui va d'ailleurs bien au-delà de Bayonne, mais toutes les communes de l'agglomération, qui compte environ 200 000 habitants et où il n'y a pas de séparation physique d'une commune à l'autre, ne sont pas classées communes touristiques. Si, à l'intérieur du périmètre, seuls les commerçants de Biarritz ou de Saint-Jean-de-Luz peuvent ouvrir tous les dimanches, on pourra, dans ces deux communes, vendre tous les jours tous les produits possibles, alors qu'aujourd'hui c'est à la fois limité dans le temps et limité à certains produits.
Ceux qui, avant nous, ont fait la loi, ne l'ont pas fait pour embêter le monde. Ils étaient confrontés aux mêmes difficultés. Ils ont donc installé des verrous. Ce sont ces verrous que vous voulez faire sauter, et ces difficultés que nous allons retrouver.
Il risque fort d'y avoir des transferts de clientèle qui n'ont rien à voir avec l'objectif recherché et qui, une fois que vous aurez fait sauter tous les verrous, aboutiront à des situations inextricables.
Il serait donc utile que, sur la question du transfert de la compétence « tourisme » à un établissement de coopération intercommunale, le Gouvernement nous apporte une réponse précise, car ce point n'est abordé ni dans le rapport, ni dans le texte même de la proposition de loi.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
Je me suis déjà exprimé tout à l'heure sur les amendements concernant la saison touristique. J'avais émis un avis défavorable.
En ce qui concerne, monsieur Vidalies, le transfert aux EPCI, il me semble simple de dire que le maire a compétence. Même si la compétence « tourisme » au titre du code du tourisme est transférée à l'EPCI, le maire gardera en tant que tel la compétence au titre du code du travail.
Je pense que M. le ministre vous apportera plus de précisions.
Pour la saisonnalité, j'en reste à ce que disais tout à l'heure.
Il me semble que les commerces n'ouvriront que si la clientèle est présente. Ce qui fait la saisonnalité, c'est la réalité commerciale tout au long de l'année. Les distinctions que vous proposez n'ajoutent rien, me semble-t-il, au raisonnement et à l'intention sur lesquels repose le texte.
Dans un certain nombre de villes moyennes, il est très difficile de délimiter la saison. J'ai été maire de Périgueux ; les saisons y sont très variables. Il y a le moment des truffes au mois de février, le marché aux grains un peu plus tard, puis la saison estivale, puis un très beau marché à la fin du mois de novembre. J'aurais donc du mal à définir ce qu'est la saison touristique en Dordogne. Les commerces ouvrent et ferment en fonction de la présence de la clientèle et des objets qu'ils vendent ou produisent.
En ce qui concerne la question complexe des établissements publics de coopération intercommunale, j'ai toujours compris que les compétences en matière de travail ne pouvaient pas être transférées d'une mairie à un EPCI. Par conséquent, lorsqu'une commune est classée touristique au titre du code du travail, elle ne saurait transférer cette compétence à l'EPCI, même s'il y a un office de tourisme commun, et qu'il s'agit d'une activité touristique au sens du code du tourisme – ce qui est le cas, monsieur Vidalies, je l'ai fait vérifier, pour Bayonne.
En effet.
Pour en revenir à la question de savoir s'il faut prévoir des conditions de saisonnalité, je ne vois pas l'intérêt d'introduire de telles précisions dans la loi, sauf à compliquer encore les choses. (Exclamations et sourires sur les bancs du groupe SRC.)
Avec cet amendement, nous en revenons à la notion de volontariat. Nous proposons, à la fin de l'alinéa 7 de l'article 2, de substituer aux mots : « du personnel » les mots : « des salariés volontaires qui ont exprimé par écrit leur volontariat pour travailler le dimanche ». Sont concernés les salariés travaillant dans les établissements de vente au détail situés dans les communes touristiques ou thermales et dans les zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente.
Le volontariat signifie un engagement libre et spontané. Or nous avons de sérieux doutes, car la proposition de loi introduit une inégalité et une injustice – deux poids, deux mesures – entre les salariés qui se trouveront dans les périmètres d'usage de consommation exceptionnel et tous les autres salariés. Les premiers se verront demander leur consentement, seront payés double et bénéficieront du repos compensateur. Les seconds, dans les communes d'intérêt touristique, n'auront pas le choix et ne bénéficieront d'aucune contrepartie.
Aussi, pour donner au volontariat un véritable contenu et mettre fin à l'inégalité entre salariés, posons-nous celui-ci en principe pour les salariés dans les communes d'intérêt touristique.
Cet amendement a également trait au volontariat. Depuis le début de la discussion, vous êtes visiblement très embarrassé, monsieur le ministre, et votre majorité est bien silencieuse, pour ne pas dire endormie. Vous pratiquez la désinformation – certains ont même parlé d'« embrouille » et d'« enfumage » – quant au caractère volontaire du travail et aux contreparties offertes. L'opération de désenfumage est à l'oeuvre, et révèle que tous les salariés du dimanche ne seront pas traités de la même manière selon qu'ils travaillent dans des communes touristiques ou dans les nouveaux périmètres d'usage de consommation exceptionnel. Ainsi, au sein des mêmes entreprises, les droits et garanties auxquels les salariés peuvent prétendre varieront selon la localisation de l'établissement.
Dans votre logique économique, vous allez jusqu'à oublier le principe d'égalité. Au nom de la liberté de consommer et de travailler, vous faites fi des protections collectives contenues dans le code du travail. Nous proposons de prévoir explicitement que, dans les zones d'affluence touristique et les communes thermales, le travail dominical se fasse également sur la base du volontariat. Nous vous donnons l'occasion de mettre le texte en accord avec l'esprit comme avec la lettre des propos présidentiels, et d'éviter la censure du juge constitutionnel.
Je me permets toutefois de préciser qu'il ne faut pas se leurrer quant au caractère prétendument volontaire du travail dominical ni, plus généralement, sur le recours croissant au volontariat en droit du travail. Nous savons que le volontariat est dévoyé par le lien de subordination qui lie le salarié à son employeur et que la liberté du salarié est largement contrainte par la nécessité économique. Le commerce est, en effet, un secteur essentiellement féminin, où 80 % des salariés travaillent à temps partiel, avec de bas salaires. Dans ces conditions, il est peu probable que les salariés aient réellement le choix de refuser de travailler le dimanche. C'est pourquoi notre amendement propose un certain nombre de garanties.
J'ai l'impression que certains de nos collègues n'ont pas entendu mes explications. Je vais donc rappeler qu'il y a deux sortes de dérogations : d'une part, les dérogations collectives et permanentes et, d'autre part, les dérogations individuelles et temporaires.
Les dérogations temporaires sont les PUCE et les cinq dimanches du maire.
J'ai dit : dans les PUCE et les cinq dimanches du maire. Dois-je répéter ?
Non !
Notre collègue Eckert semble n'avoir toujours pas compris, alors que je l'ai répété au moins soixante-dix fois.
Je rappelle que les dérogations individuelles et temporaires correspondent aux cinq dimanches du maire et aux PUCE ; dans ce cas, il est normal de fixer des contreparties.
Monsieur Rogemont, veuillez suivre les explications du rapporteur sans faire de commentaires !
Quant aux dérogations collectives et permanentes, elles correspondent à un certain nombre d'articles du code du travail…
Elles le deviennent (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) : nous sommes logiques avec nous-mêmes ! Les secteurs d'activité sont nombreux : industrie, commerce, santé, transports, et j'en passe. Chaque branche a conclu des accords collectifs ou un accord de branche. On ne peut s'amuser à tout défaire, sauf à complexifier le texte – ce qui est vraisemblablement ce que vous souhaitez. Vous n'avez que le mot « embrouille » à la bouche. En l'occurrence, c'est plutôt vous qui cherchez à tout embrouiller !
Avis défavorable, donc.
Nous avons, à diverses reprises, répondu à cette question, y compris tout à l'heure à propos de l'amendement de notre collègue Jacques Myard.
Un mot cependant sur le volontariat. Je me demande, puisque l'on parle d'« embrouille » et d'« enfumage », qui « enfume » qui ? Tantôt vous nous expliquez que le volontariat ne représente pas une vraie garantie car l'employeur exerce toujours une contrainte de fait. Tantôt vous expliquez, tout au contraire, qu'il faut étendre le volontariat parce que c'est une garantie. Il faudrait vous mettre d'accord : le volontariat est-il une fiction ou une garantie ? Je ne vois pas l'intérêt qu'il y aurait à généraliser une garantie que vous considérez comme une fiction.
Je souhaite, monsieur le ministre, que vous répondiez à une question simple. Comment distinguera-t-on les cinq dimanches du maire dans les zones touristiques où les commerces sont ouverts tous les dimanches sans rémunération supplémentaire ni repos compensateur ?
Ils n'ont plus lieu d'être ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
J'espère que vous répondrez également aux questions de Sandrine Mazetier relatives à Paris.
J'ai répondu des dizaines de fois !
Nous attendons avec impatience la réponse du ministre : que deviennent les cinq dimanches du maire dans les communes touristiques ? Seront-ils payés double ?
Ils n'ont plus de raison d'être !
Ils n'ont plus de raison d'être, avez-vous dit, monsieur le ministre. Vous confirmez donc que ce qui existait jusqu'à aujourd'hui…
Ce qui était possible jusqu'à aujourd'hui !
Jusqu'à présent, le maire pouvait, dans toutes les communes de France, accorder cinq dimanches.
Il pouvait aussi ne pas les accorder.
Certes, mais s'ils étaient accordés, ils étaient payés double ; cela a été confirmé, du reste, à l'article 1er, qui a permis de préciser cette notion. Or, vous venez, monsieur le ministre, de déclarer devant la représentation nationale que ces cinq jours n'avaient plus lieu d'être.
Dans ces situations précises !
Dans les communes touristiques, il n'y a donc pas lieu de payer double les dimanches.
Cette disposition n'existe que dans les périmètres d'usage de consommation exceptionnel.
Les salariés travaillant le dimanche dans les communes touristiques, qui étaient payés double jusqu'à présent, ne le seront plus. Je rappelle qu'il y a environ 500 communes touristiques…
Erreur ! Signet non défini.. …et environ 150 000 personnes concernées. Les Français apprécieront.
Puis-je vous poser une question, monsieur Eckert ?
Dans quelles communes touristiques y a-t-il un dimanche du maire ? Répondez-moi !
Au sens du code du travail !
Pour la clarté des débats, veillez à ne pas vous interrompre les uns les autres.
Prenons votre hypothèse, monsieur le ministre, même si nous avons un différend à ce sujet. Dans une commune balnéaire, touristique au sens du code du travail, où la saison touristique correspond à la saison d'été, il était fréquent, à Noël, que les maires accordent, de leur propre initiative, deux ou trois dimanches – où les salariés étaient payés double.
Vous venez de nous confirmer – mais vous aurez l'occasion de me contredire – que désormais tel ne sera plus le cas.
Je vous remercie de cette précision, monsieur le ministre, car nous l'attendions depuis un moment !
S'agissant maintenant de ce que vous avez dit de notre position à l'égard du volontariat, monsieur le ministre, je fais appel à votre expérience de parlementaire : il s'agit là d'amendements de repli. Nous avions d'abord proposé des amendements de suppression de l'article 2 : ils ont été rejetés. Nous avons ensuite défendu des amendements visant à supprimer plusieurs alinéas relatifs aux communes touristiques : ils ont été rejetés. Prenant acte du fait que vous persistiez dans votre refus, nous avons tenté de protéger les salariés autant que faire se peut – d'où notre vote en faveur de l'amendement de M. Myard – à travers la notion de volontariat, même si chacun s'accorde à reconnaître qu'elle n'est pas facile à mettre en oeuvre, surtout en période de tensions sur le marché de l'emploi. C'est pourquoi je me permets, monsieur le ministre, de préciser que si nous insistons sur la notion de volontariat à cet instant, c'est parce que vous avez refusé de nous suivre précédemment dans l'exclusion de certaines situations.
Toujours est-il que je vous remercie très sincèrement de nous avoir apporté cette précision sur l'application de la procédure des cinq dimanches du maire dans les communes touristiques.
S'agissant des dimanches désignés par le maire, vous avez répondu, monsieur le ministre, qu'ils n'avaient plus lieu d'être. Mais qu'en sera-t-il des commerces alimentaires concernés eux aussi par cette procédure ? Nous sommes face à une vraie difficulté, car ce que vous dites ne correspond pas au texte, lequel ne prend pas en compte la situation de ce type de commerces. Le champ de la procédure des cinq dimanches n'est en effet pas le même que celui de la proposition de loi. Votre réponse est donc incomplète.
Les grandes surfaces sont ouvertes lors des dimanches désignés par les maires – c'est bien la raison pour laquelle nous étions opposés à ce que le quota annuel passe de cinq à huit. Que va-t-il se passer ? Les commerces alimentaires pourront-ils ou non continuer d'ouvrir certains dimanches ? Et, s'ils restent ouverts, le principe du volontariat continuera-t-il de s'appliquer ?
(Les amendements nos 92 , 93 , 94 et 47 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi d'un amendement n° 141 .
La parole est à M. Christian Eckert.
Je profite de cette intervention pour vous reposer, monsieur le ministre, la question de notre collègue Alain Vidalies.
Vous avez reconnu, après plusieurs questions de notre part, que, dans les communes d'intérêt touristique, la procédure des dimanches désignés par le maire, ainsi que nous le soutenions depuis le début de nos débats, n'avait plus lieu d'être puisque l'ouverture était de droit pour tout le monde. Dans le même temps, la proposition de loi exclut de son champ d'application, au nom de la protection du petit commerce, les commerces alimentaires, comme vous l'avez répété maintes et maintes fois sur les ondes. Nous reviendrons sur leur cas, car nous avons là une divergence de conceptions.
Dans ces conditions, il importe de savoir si, dans les communes dites d'intérêt touristique, les commerces alimentaires pourront ouvrir ne serait-ce qu'un seul dimanche par an. La construction législative à laquelle vous êtes en train de vous livrer nous pousse à vous poser cette question simple.
Cet amendement prévoit que les commerces visés par la proposition de loi n'ouvrent que l'après-midi et pas le matin, alors que les commerces alimentaires peuvent ouvrir le matin et pas l'après-midi. J'avoue ne plus rien comprendre !
Notre texte repose au contraire sur une volonté de simplification, conformément à l'une des trois préconisations du Conseil économique et social visant à ce que tous les commerces puissent ouvrir en même temps.
L'avis de la commission est donc défavorable.
J'en viens votre question relative aux commerces alimentaires. Puisqu'ils sont exclus du champ de la proposition de loi, ils ne pourront ouvrir le dimanche, sauf le matin. S'agissant des grandes surfaces – je sais que ce sont elles qui vous intéressent –, je vais vous répondre très clairement : elles sont concernées par les cinq dimanches du maire.
M. le ministre a dit que la procédure n'avait plus lieu d'être pour les commerces concernés autorisés à ouvrir. Mais il faut bien que les commerces qui souhaitent ouvrir et ne le peuvent pas soient susceptibles de bénéficier des cinq dimanches du maire. Les grandes surfaces pourront bénéficier, si elles le veulent, de cette procédure, et leurs salariés seront alors payés double.
Vous avez souhaité nous embrouiller, comme vous le faites depuis le début, mais cela n'a pas empêché le ministre de bien vous répondre. Et sur la question précise des commerces alimentaires, j'ai pu vous répondre très précisément.
C'est de plus en plus clair !
(L'amendement no 141 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 76 .
La parole est à M. Christian Eckert.
Défavorable. Il n'y a pas de raison d'introduire une inégalité de traitement entre les salariés.
(L'amendement n° 76 , repoussé par la commission, n'est pas adopté.)
Il s'agit d'un amendement extrêmement important, monsieur le président, puisque plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de milliers de salariés sont concernés.
On ne sait plus très bien si, dans les zones touristiques, la procédure des dimanches du maire s'applique ou non. M. le ministre affirme qu'elle n'a plus lieu d'être. Nous en prenons acte.
C'est reparti !
M. Mallié, pour sa part, nous a indiqué que, les commerces alimentaires étant exclus de la loi, ils bénéficieront en quelque sorte de « nouveaux » dimanches du maire…
…alors que, pour les autres commerces, la procédure des dimanches du maire ne s'appliquera plus.
Nous le voyons, ce que dit le rapporteur n'est pas forcément ce que dit le ministre. Comme le disait Alain Vidalies : « Bienvenue chez les juges ! »
Admettons qu'une nouvelle procédure des dimanches du maire s'applique aux commerces alimentaires dans les communes d'intérêt touristique. On peut fort bien imaginer en effet qu'un maire, à la veille des fêtes de fin d'année, souhaite que les commerces de bouche soient ouverts un ou plusieurs dimanches afin de permettre aux habitants d'acheter de la dinde, du foie gras ou des huîtres. Qu'adviendra-t-il de leurs salariés ? Seront-ils payés double, conformément aux garanties réaffirmées dans l'article 1er ? La question se pose bel et bien, car la proposition de loi exclut de son champ d'application les commerces alimentaires !
Autre question. Toujours dans une commune d'intérêt touristique, prenons le cas d'un commerce d'appareils électroménagers – après tout, il y a aussi, dans ces zones, des commerces qui ne sont pas forcément destinés aux touristes.
Mes chers collègues, soyez attentifs, car nous sommes en train de vous démontrer que tout cela sent l'embrouille.
Dans le cas de commerces non alimentaires, il n'y a plus lieu d'appliquer le système des dérogations accordées par le maire dans ce type de zones.
Si je vous suis, monsieur le ministre, dans ce cas les salariés ne seront plus payés double puisqu'ils travailleront dans une commune touristique où la dérogation sera désormais permanente, alors qu'ils l'étaient auparavant. Voilà pourquoi nous estimons qu'il s'agit d'une loi de régression pour les commerces non alimentaires dans les zones touristiques.
M. Mallié affirme qu'il sera possible d'ouvrir les commerces alimentaires le dimanche dans les zones touristiques, grâce aux dimanches du maire. Mais, dans ce cas, les salariés ne pourront pas être payés double, puisque l'article 1er ne s'applique pas à ces commerces.
Les questions que nous posons ne sont pas politiciennes, mais techniques. En dehors de quelques effets de manches que je reconnais bien volontiers, mais qui ne sortiront guère de cet hémicycle en cette période estivale, nous avons prouvé, par notre comportement et nos amendements, que nous avons étudié ce texte, qui pose de nombreux problèmes et va se révéler inapplicable.
Les organisations syndicales sont très attentives à ces questions et font leur travail, comme nous faisons notre travail de parlementaires – la majorité fait ce qu'elle croit devoir faire, et je n'ai pas à juger de sa présence dans le débat. En tout cas, le ministre a eu la courtoisie de nous répondre très précisément.
Une fois de plus, nous vous lançons une bouée – c'est la quatrième – en vous proposant d'ajouter, après l'alinéa 7, l'alinéa suivant qui vous permettrait de sauver ce qui peut l'être : « Les contreparties accordées pour le travail dominical sont constituées, au minimum, pour chaque salarié privé du repos du dimanche, du bénéfice d'une rémunération au moins égale au double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente et d'un repos compensateur accordé un jour choisi par le salarié durant la semaine qui suit le dimanche travaillé. Ces dispositions sont d'ordre public. »
La disposition que nous vous proposons est claire : elle ne fait pas de distinction entre commerce alimentaire et non alimentaire, saison et hors-saison, zone d'intérêt et zone d'affluence. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. Eckert nous avait habitués à mieux en matière de dialectique. Il est pris en flagrant délit de confusion volontaire. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Quand il y a un régime d'exception, c'est là qu'interviennent les dérogations aux exceptions. Quand, dans une zone touristique, l'ensemble des commerces peuvent ouvrir le dimanche, c'est le droit commun qui s'applique à la zone. Par conséquent, il n'y a plus lieu de prévoir une dérogation d'une heure pour ces commerces qui peuvent ouvrir tous les dimanches.
S'agissant en revanche des commerces alimentaires qui ne sont pas concernés par ce droit commun puisqu'ils ne peuvent pas ouvrir, ils relèvent toujours du régime de l'exception qui peut être accordée par le maire. C'est d'une simplicité biblique !
Comme l'a fort bien expliqué Richard Mallié tout à l'heure, le régime d'exception s'applique pour autant qu'il n'est pas banalisé par le droit commun.
Très bien !
Le droit commun s'applique dans les zones touristiques pour l'ensemble des commerces, à l'exception des commerces alimentaires. Leur ouverture reste donc interdite, sauf quand le maire les autorise. De grâce, monsieur Vidalies, maniez un peu mieux la dialectique ! Quant à vous, monsieur Eckert, l'heure tardive vous a peut-être conduit à troubler les esprits... (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur Eckert, je le répète, vous êtes le roi de l'embrouille. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
C'est même un génie !
Monsieur Mallot, accordez-moi seulement deux petites minutes !
Dans les communes touristiques, actuellement, seuls peuvent ouvrir, grâce à une dérogation individuelle, les commerces qui vendent des articles de sport, de loisir ou culturels. De même, les commerces alimentaires peuvent ouvrir le dimanche matin.
En outre, le maire peut accorder le droit d'ouvrir, cinq dimanches par an, à l'ensemble des commerces.
Dorénavant, l'ensemble des commerces pourront ouvrir tous les dimanches, sauf les commerces alimentaires qui ne pourront ouvrir que jusqu'à treize heures.
Les grandes surfaces alimentaires vont demander à bénéficier des cinq dimanches du maire.
Si : les cinq dimanches du maire existeront toujours pour les commerces alimentaires.
Contrairement à ce que vous prétendez, les cinq dimanches du maire ne sont pas exclus de la proposition de loi, mais seulement des dispositions relatives aux PUCE et aux zones touristiques. Ainsi, les grandes surfaces alimentaires pourront ouvrir cinq dimanches par an si le maire le leur permet, et leurs salariés seront payés double.
Il n'y a pas d'embrouille, pas de magouille, pas de malice, pas de vice. Les choses sont dites très simplement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Voilà une explication claire !
Cet amendement, simple et extrêmement important, prévoit que, si le principe du repos dominical est d'ordre public, celui d'une rémunération double et d'un repos compensateur l'est également. C'est pourquoi nous proposons que les salariés privés de repos dominical perçoivent pour ce jour de travail une rémunération au moins égale au double de la rémunération normalement due pour une même durée et bénéficient d'un repos compensateur équivalent.
Mes chers collègues, vous m'accorderez que l'adoption de cet amendement permettrait de simplifier et de clarifier un débat fort confus.
La commission a repoussé ces deux amendements. J'ajoute que ce débat n'a rien de confus, n'en déplaise à ceux qui veulent le rendre tel.
Même avis.
Monsieur le président, je ne peux accepter que M. le rapporteur accusent certains députés de vouloir rendre ce débat confus. Les Français ont besoin de savoir. Toutes les dispositions ont été regroupées dans un seul article et vous avez mélangé des situations différentes, renvoyant les contreparties à des alinéas qui renvoient eux-mêmes à des articles. Vous avez « vendu » votre proposition de loi en prétendant, comme l'a fait M. Ollier en commission, que tout était basé sur le volontariat. Or vous avez dit ensuite à plusieurs reprises que tel ne serait pas le cas dans les communes touristiques, et vous avez rejeté tous les amendements, y compris ceux du groupe UMP, qui visaient à introduire cette notion de volontariat.
Vous avez dit également que tout le monde serait payé double. Mais vous avez reconnu que, dans les communes touristiques, communes qui seront désormais plus nombreuses, cette obligation n'existerait pas. Nous vous avons fait valoir que, dans lesdites communes, devenues maintenant « d'intérêt touristique », les commerces pouvaient actuellement ouvrir cinq fois par an sur autorisation du maire et que les salariés devaient être payés double. Monsieur le ministre, vous nous avez indiqué, ce que personne ne conteste, que dorénavant, ces cinq dimanches n'avaient plus lieu d'être, sauf peut-être pour les commerces alimentaires.
Cela veut dire que, pour les employés d'un commerce d'électroménager situé dans une commune touristique, il y aura perte de salaire. J'ajoute que l'on ne sait pas combien de salariés seront concernés par cette disposition, puisque aucune étude d'impact n'a été fournie.
Monsieur le ministre, j'aimerais que vous me confirmiez que les commerces alimentaires situés dans une zone touristique pourront ouvrir le dimanche matin jusqu'à treize heures sans avoir besoin de bénéficier de la dérogation accordée par le maire, et qu'il n'y aura donc pas lieu de payer double les employés.
Vous semblez avoir du mal à vous comprendre vous-même ! Vous ne suivez même pas le fil de votre pensée ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur Dell'Agnola, je crois avoir été plutôt correct avec la majorité, et je vous demande d'en faire de même avec l'opposition.
L'article L. 3132-13 du code du travail ne prévoit pas que doivent être payés double les salariés des commerces alimentaires qui travaillent le dimanche matin.
En revanche, le salarié qui travaillerait l'après-midi d'un des cinq « nouveaux » dimanches du maire, lesquels ne concernent plus que les commerces alimentaires, pourrait être payé double en vertu de l'article premier de votre proposition de loi. Confirmez-vous cette analyse ?
Je reconnais qu'il est plus difficile de se faire comprendre à cette heure avancée, mais nous débattons d'une loi qui concernera des dizaines de milliers de salariés. Je pense avoir été clair, et ceux qui ont lu le texte et suivi les débats m'ont compris. Nous souhaitons à présent obtenir des réponses. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
(Les amendements nos 80 et 48 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi d'un amendement, no 117 .
La parole est à M. Christian Eckert.
Défavorable. Il n'est pas question de limiter l'amplitude.
(L'amendement n° 117 , repoussé par la commission, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n°81 .
La parole est à M. Christian Eckert.
Défavorable. Nous en avons déjà discuté.
(L'amendement n° 81 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Nous l'avons bien compris, vous envisagez, dans les communes touristiques, de confier aux maires le pouvoir de décider seuls de l'ouverture des magasins le dimanche.
Vous avez cité le cas du maire de Saint-Malo qui aurait subordonné la demande de classement en commune touristique à la signature d'accords sur le travail dominical afin de garantir aux salariés un minimum de contreparties. Mais que se passera-t-il si le maire, pour complaire à certains entrepreneurs ou sous leur pression, ne fait pas preuve d'une telle sagesse ? Eh bien, les salariés travailleront le dimanche sans aucune contrepartie ! De surcroît, l'ouverture le dimanche sera de droit pour tous les commerces, toute l'année – et non pas seulement pendant la saison touristique comme c'est le cas aujourd'hui.
De telles disparités sont inacceptables, et nous refusons que l'arbitraire des maires fasse loi dans des matières aussi graves que le respect du droit du travail ou le travail dominical.
Il ne serait d'ailleurs pas beaucoup plus sage de confier au seul préfet le soin de fixer, sur proposition du maire, la liste des communes touristiques ou thermales et le périmètre des zones d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente.
Aussi notre amendement tend-il à soumettre la détermination de cette liste et de ce périmètre à l'avis consultatif des conseils municipaux, mais aussi à celui des organisations syndicales et professionnelles concernées. Nous aurions ainsi la garantie que les décisions du préfet n'auront pas de conséquence grave sur l'équilibre commercial des communes de l'ensemble du périmètre concerné ni sur la spécificité du travail dominical – salaire et repos compensateur.
Défavorable. Le maire décidera en fonction des circonstances locales.
(L'amendement n° 50 , repoussé par la commission, n'est pas adopté.)
La première proposition de loi déposée par M. Mallié laissait au conseil municipal le soin de proposer au préfet la liste des communes touristiques ou thermales intéressées et le périmètre des zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente. Vous avez subitement décidé, sans nous fournir la moindre explication, de confier ce pouvoir d'initiative au maire. Il est rare que la loi confère au seul maire une prérogative d'une telle nature – et nous nous interrogeons d'ailleurs sur la constitutionnalité de cette disposition, mais nous en reparlerons plus tard.
Quel objectif poursuivez-vous donc ? Pourquoi avoir fait de cette prérogative, dont les conséquences peuvent être graves, un pouvoir propre du maire ? Le texte ne le précise pas, mais je suppose que le maire agirait en tant qu'exécutif de la collectivité locale et non en tant qu'agent de l'État, sinon la situation serait encore pire ! Et pourtant, qui ne voit l'incohérence qu'il y a à conférer un tel pouvoir au maire, alors que le conseil municipal est appelé à voter pour lui consentir des délégations sur des sujets de bien moindre importance, et dont il devra rendre compte ?
C'est une question de démocratie, qui concerne les rapports du maire aussi bien avec sa majorité qu'avec son opposition. Je n'arrive pas à comprendre que l'on se repose sur un seul homme pour une décision d'une telle importance. Étant donné que nous ne vivons pas dans un monde parfait et que différents intérêts peuvent entrer en jeu, il est impensable de ne prévoir aucun contrepouvoir. La délibération collective, la transparence, sont les meilleures garanties que l'on pourrait apporter à cette démarche, qui mérite d'être portée à la connaissance de la population. Les salariés, les commerçants sont concernés par cette question tout autant que les élus locaux.
Il serait plus sage que vous reveniez sur votre décision. Même si nous ne sommes pas d'accord sur les objectifs, au moins pourrions-nous nous entendre sur la procédure. Persister dans cette voie serait ouvrir la porte à de multiples contentieux et difficultés, dont la moindre ne sera pas, pour le maire, d'avoir à gérer une décision qui, faute de transparence et de délibération, sera forcément suspecte. C'est un cadeau empoisonné que vous lui faites ! Il serait beaucoup plus facile pour lui d'engager cette démarche auprès du préfet s'il pouvait s'appuyer sur une délibération du conseil municipal.
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour soutenir l'amendement n° 83 .
Vous l'aurez après la présentation de l'ensemble de ces amendements, qui sont en discussion commune.
…d'autant qu'à Paris ce n'est pas le maire qui détiendra ce pouvoir, mais le préfet ! Sans doute cette disposition aura-t-elle échappé à notre rapporteur-auteur-interprète, car je ne peux croire que Richard Mallié imagine un seul instant que le préfet prenne seul, de manière discrétionnaire, une décision qui concernera plus de deux millions de Parisiens et de onze millions de Franciliens, soit un Français sur six.
Je ne vois qu'une seule explication. Le code du travail n'a pas été toiletté depuis 1973. Paris, qui n'avait pas encore de maire, était alors régi par la loi du 28 pluviôse an VIII, qui instituait pour la capitale un préfet ayant autorité sur l'administration, une assemblée sans pouvoir réel et des maires d'arrondissement nommés par le Gouvernement. Tout révolutionnaire que soit Richard Mallié, du moins à Plan-de-Campagne (Sourires sur les bancs du groupe SRC), ces scories de l'époque révolutionnaire ont dû lui échapper.
J'attends une réponse à la question que j'ai déjà posée : Paris est-il tout entier zone d'intérêt touristique ou non ?
J'aimerais par ailleurs recevoir l'assurance que les Parisiens ne seront pas bafoués dans leur représentation démocratique, et que c'est par négligence de rédaction que vous avez confié au préfet un choix qui pèsera sur la vie des salariés du commerce en Île-de-France.
La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 85 .
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour soutenir l'amendement n 289 .
Je souscris bien volontiers aux arguments que M. Vidalies vient de soulever, mais je préfère tout de même mon propre amendement, dont la rédaction, plus large, permet de mieux encadrer l'avis du préfet.
Si cet amendement, qui vise à consulter le comité départemental du tourisme, les syndicats d'employeurs et de salariés et les EPCI concernés, est adopté, toutes les précautions seront prises pour encadrer au mieux l'avis du préfet.
J'avais proposé, en commission des affaires économiques, d'ajouter les chambres consulaires, mais M. Gaubert, qui a cosigné cet amendement, m'a judicieusement signalé qu'elles étaient déjà représentées au sein des commissions départementales de l'action touristique.
Tout en notant les avancées contenues dans votre amendement, monsieur Reynès, je m'efforcerai de faire une présentation neutre de la question sans oublier, pour autant, de dire ce que je pense – à la fois de cette affaire en général et de votre amendement en particulier, qui repose finalement, lui aussi, sur l'idée que la décision ne peut être prise par le maire seul, puisqu'il prévoit de recueillir l'avis du comité départemental du tourisme, des syndicats, des EPCI, bref, de tout le monde, sauf du conseil municipal !
Nous ne pouvons, dès lors, que nous interroger : pourquoi avoir prévu une telle rédaction, alors même que le texte ne vise ni à être désagréable envers les conseils municipaux ni à écarter la démocratie locale ? Parce que c'est la seule façon de rédiger la loi pour qu'à Paris, in fine, ce soit le préfet qui prenne la décision et non le maire !
Tel est bien le problème, en effet. L'ensemble des conseils municipaux de France seront les victimes indirectes de votre choix, très politique, d'imposer, à Paris, la décision du préfet, c'est-à-dire du pouvoir politique dont il dépend, au détriment du conseil municipal. C'est la seule explication de la rédaction actuelle de l'alinéa 8.
Je remercie le rapporteur pour avis, qui a fait tout ce qu'il a pu : il n'en reste pas moins que ce choix vous conduit à consulter tout le monde, sauf les conseils municipaux, alors même que vous devriez les consulter en premier. Mais si la loi le prescrivait, alors l'initiative reviendrait au conseil municipal de Paris et non plus au préfet. Il s'agit là d'une question qui me paraît très grave sur le plan politique. C'est la raison pour laquelle j'attends d'autres explications que celles que je viens de fournir moi-même ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour défendre l'amendement n° 86 .
Quel est l'avis de la commission sur ces neuf amendements en discussion commune ?
La commission a émis un avis favorable à l'amendement, n° 289 , de M. Reynès, et défavorable à tous les autres amendements.
Monsieur Vidalies, vous prétendez que le texte a été rédigé en fonction de Paris ; ce n'est pas vrai.
Je sais qu'il vous sera difficile de le comprendre,…
…puisque je n'ai toujours pas réussi, au bout de trois jours, à vous faire comprendre le parallélisme des formes entre les dérogations collectives et permanentes, d'une part, et les dérogations individuelles et temporaires, de l'autre. Or il s'agit de nouveau, dans le cas présent, d'un parallélisme des formes avec les cinq dimanches du maire.
Le texte se réfère, sur cette question, à la personne qui, au titre de l'article L. 3132-26 du code du travail, décide déjà des cinq dimanches.
Je n'y suis pour rien si, à Paris, c'est le préfet qui prend la décision et non le maire, comme dans les autres communes. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) On ne va pas revenir là-dessus !
Vous l'avez dit vous-même : parce que Paris sera toujours Paris, parce que Paris, c'est la capitale de la France, parce que Paris a une vocation internationale, parce que Paris, enfin, n'a pas eu de maire durant des années ! Paris n'a un maire que depuis trente-deux ans. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Les Parisiens ne sont pas des citoyens de seconde zone ! Ce ne sont pas des mineurs !
C'est la preuve que vous avez peur des Parisiens et de leurs représentants !
Madame Mazetier, vous êtes une jeune élue. Le premier maire de Paris s'appelait Jacques Chirac. Il a été élu en 1977. Après lui, il y a eu M. Tiberi, puis M. Delanoë, le maire actuel. Or, bien qu'il y ait eu, depuis l'élection de M. Chirac, plusieurs gouvernements, de gauche comme de droite, aucun n'est revenu sur le statut du maire de Paris, y compris vos amis. Je ne suis député que depuis 2002 : ne me faites pas porter la responsabilité de cet état de fait ! Changer les compétences du maire de Paris prévues par son statut ne relève pas des miennes, et ce n'est pas, non plus, l'objet de ce petit texte !
Nous ne vous demandons pas de changer la loi PLM : il s'agit de l'article L. 3132-26 du code du travail !
En revanche, il existe un parallélisme des formes entre les cinq dimanches dits « du maire » et la demande de classement en commune touristique ou en zone touristique d'affluence exceptionnelle au titre du code du travail.
Je suis également favorable à l'amendement présenté par M. Reynès.
Je tiens à revenir sur la question du maire, puisqu'on a inféré, de la rédaction du texte, que nous cherchions à imposer le préfet de Paris au détriment du conseil municipal de Paris.
En tant que maire, j'ai toujours entendu dire qu'en droit administratif on distinguait les pouvoirs propres du maire de ceux du conseil municipal. Le maire a un pouvoir propre de police, notamment de police économique.
La police économique relève de la responsabilité politique et juridique du maire. Toutefois, c'est en vain que nous nous énervons sur cette question, car aucun maire ne prendra une telle décision sans avoir auparavant consulté son conseil municipal.
De toute façon, le maire, dans cette affaire, n'est que le solliciteur puisqu'il s'adresse ensuite au préfet et qu'il appartient à ce dernier de prendre la décision. Le débat a du reste permis de rappeler que des préfets n'ont pas accédé à certaines demandes des maires.
En ce qui concerne Paris, à moins que l'on ne décide de changer le code du travail, il y a prolongation des situations acquises, puisque le code du travail prévoit que, par décision du maire, le nombre des dimanches ne saurait excéder cinq par an. Quant à l'article 3132-26, il prescrit qu'à Paris cette décision est prise par le préfet. Il y a donc parallélisme des formes et prolongation d'une situation qui existe déjà dans le code du travail. Tout le reste n'est qu'un commentaire à caractère politique, que je respecte, mais qui ne saurait s'opposer au fait que la situation ante est comparable à celle qui est aujourd'hui proposée par le texte.
À la question : « Pourquoi le maire prend-il seul la décision ? », il y a donc deux réponses différentes. Pour M. le ministre, c'est en raison du « pouvoir de police économique » du maire. Or, il exerce ce pouvoir en tant qu'agent de l'État,…
…ce qui change complètement la nature de la décision et la responsabilité de la démarche. Je vous en donne d'autant plus volontiers acte que votre réponse met à néant toute l'argumentation du rapporteur,…
…y compris en cas de recours hiérarchiques exercés en matière de responsabilité.
Du reste, si le maire n'exerce pas ce pouvoir, c'est le préfet qui le fait à sa place.
Exactement !
M. Mallié, quant à lui, évoque le parallélisme des formes. Or, si, sur cette question, le code du travail est antérieur au 3 décembre 2008 – il a même quelques décennies ! –, en l'occurrence, le parallélisme des formes n'existe que depuis le 3 décembre 2008 puisque c'est à cette date, monsieur Mallié, que, sur cette même question, vous avez déposé une proposition de loi, adoptée à l'unanimité en commission, prévoyant que la décision reviendrait au conseil municipal !
N'inventez donc pas aujourd'hui le parallélisme des formes ! Il faut vraiment tout le génie inventif de vos collaborateurs pour avoir trouvé cette explication ! Il n'y a aucun parallélisme des formes, puisque cette expression ne signifie rien en la circonstance, la démarche relative au choix des cinq dimanches n'ayant aucun rapport avec celle prévue à l'article 2 de la proposition de loi !
Nous sommes, à ce stade du débat, dans un complet imbroglio : en effet, l'amendement, n° 289 , que vous soutenez, permettra de consulter, non pas le seul président de la communauté d'agglomération, mais le conseil communautaire dans son ensemble – il en sera de même pour la communauté urbaine –, dont les délégués délibéreront sur une décision qui sera prise par le maire, au nom de la collectivité locale, en vertu du parallélisme des formes, nous explique M. Mallié, et en vertu de son pouvoir de police économique qu'il exerce comme agent de l'État, nous explique pour sa part M. le ministre ! Le résultat c'est, je le répète, un extraordinaire imbroglio sur fond d'absolue incohérence !
Assumez donc le fait qu'il n'y a aucune explication rationnelle à votre contre-pied ! Expliquez-nous au moins, monsieur Mallié, même si vous prétendez que j'ai du mal à comprendre votre pensée – vous pourriez au moins saluer mes efforts –, en quoi ce parallélisme est évident, alors même qu'au mois de décembre 2008 vous avez soutenu et écrit le contraire ! La seule question est donc de savoir ce qu'il s'est passé entre le mois de décembre et aujourd'hui !
Je le dis non sans une certaine solennité : votre explication ne tient pas ! Sur le reste du texte, nous avons un désaccord politique de fond, que nous assumons. Dans ce cas précis, il s'agit d'autre chose. Si vous ne réussissez pas à nous donner d'autres explications que celles que vous nous avez fournies jusqu'à présent, alors, je vous le dis très clairement, d'autres que moi le feront, suscitant un écho d'une autre portée, du fait que leurs voix porteront plus que la mienne. Même si ce point n'a pas été le plus visible sur le plan médiatique, nous n'en sommes pas moins devant une question politique majeure. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
(Les amendements nos 8 , 7 , 82 , 83 et 85 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
(L'amendement n° 289 est adopté.)
Il est défendu.
(L'amendement n° 88 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 325 .
La parole est à M. Francis Vercamer.
L'amendement n° 325 va dans le sens des dérogations existantes, que j'ai déjà évoquées. Du reste, il s'agit plutôt d'un amendement d'appel, monsieur le ministre.
En effet, la modification du périmètre des villes touristiques changeant la donne de commerces qui, jusqu'à présent, n'étaient pas concernés, on peut imaginer que certaines entreprises se poseront la question de savoir si les accords relatifs aux contreparties, signés antérieurement dans le cadre – entre autres – des dimanches du maire, pourront être remis en cause du fait de cette modification, ou s'ils perdureront.
Je souhaite évidemment – tel est l'objet de cet amendement – que ces accords puissent continuer de s'appliquer, afin que les salariés ne perdent pas les contreparties obtenues, même en cas de changement de règle du jeu, lorsque le travail du dimanche deviendra de droit.
L'objet de cet amendement est de vous demander confirmation de ce point.
La commission a repoussé cet amendement, déjà satisfait par le droit en vigueur.
Même avis.
La parole est à M. Christian Eckert, pour défendre l'amendement n° 263 .
Il est défendu.
(L'amendement n° 263 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 87 .
La parole est à M. Christian Eckert.
Les communes « d'intérêt touristique » viennent d'être créées. Or nous ignorons la périodicité de la révision du décret qui en dresse la liste. Autrement dit, combien de temps la labellisation de ce nouveau type de communes sera-t-il valable ? Je n'ai pas obtenu de réponse.
De même que le code du tourisme prévoit que les labels « commune touristique » sont donnés pour cinq ans, nous proposons qu'après l'alinéa 8 soit inséré l'alinéa suivant : « La liste des communes touristiques ou thermales est revue tous les cinq ans. » Peut-être conviendrait-il, du reste, de sous-amender cette disposition pour remplacer « communes touristiques » par la nouvelle appellation de « communes d'intérêt touristique ».
La commission n'a pas retenu cet amendement. Votre idée n'est certes pas mauvaise, monsieur Eckert, mais vous souhaitez attendre cinq ans pour que la liste soit revue. La commission a retenu un amendement de son président qui prévoit, pour sa part, la mise en place d'un comité parlementaire de suivi, composé de parlementaires de toutes tendances politiques, qui remettra un rapport un an après l'entrée en vigueur de la loi.
Aussi je vous demande de retirer votre amendement, faute de quoi nous voterons contre, au profit de l'amendement du président de la commission, qui sera examiné in fine.
Même avis, même si l'intention des auteurs de l'amendement est louable. Ce point relève du domaine réglementaire et nous verrons par la suite, au moment de l'application de la loi, comment procéder.
Ne pas concéder un droit perpétuel paraissait pourtant de bon sens. Quand on gagne une élection municipale et qu'on n'est pas d'accord avec l'action de son prédécesseur, comment remettre en question une décision relative à la liste des communes d'intérêt touristique ?
On s'adresse au préfet !
Dont acte. Cette réponse vous vient spontanément, monsieur le ministre, comme elle aurait dû venir spontanément à ceux qui ont rédigé le texte.
Nous en sommes réduits pour l'instant à une sorte d'amendement verbal dont j'espère que le Sénat la transcrira, car nous avons là, pour le moment, un droit perpétuel.
Et si le maire change d'idée au vu d'une expérience qui se révèle négative, que faire ? Vous n'avez rien écrit en la matière. M. le ministre vient de répondre que le maire saisira le préfet pour qu'il prenne un arrêté dans le sens voulu.
La décision de déclassement devrait cependant obéir à d'autres critères que ceux, nombreux, retenus par la loi pour devenir une commune d'intérêt touristique. Il peut s'agir en effet d'une décision d'opportunité. Cette question n'a pas été examinée et je prends acte de la réponse du ministre, qui est sage et répare un oubli.
Aussi conviendrait-il, monsieur le ministre, de renvoyer à un décret d'application le principe que vous avez énoncé et qui devrait figurer dans la loi. La décision du maire ne porterait pas, dès lors, sur le déclassement au sens où les critères ne seraient plus respectés, mais au sens où il remettrait en cause sa démarche de saisine.
Il s'agit donc de combler cette lacune juridique en inscrivant ces précisions dans le texte.
J'ai du mal à suivre sur ce terrain M. Vidalies, qui me paraît d'habitude plus aguerri en matière juridique. Il évoque un « droit perpétuel », mais il n'y a pas de droit perpétuel : le droit s'applique tant qu'il n'est pas démenti. Tout le droit est fondé sur le principe selon lequel, dès lors qu'une règle est posée, elle s'applique tant qu'on n'y revient pas.
Quand, dans une ville, on prend des décisions en matière d'urbanisme ou de police, ce droit n'est pas limité dans le temps, il n'est pas fractionné : il s'applique jusqu'à ce qu'une nouvelle décision le modifie. Il n'existe par conséquent pas de « droit perpétuel ».
C'est également le cas des communautés d'agglomérations qui ne sont pas limitées dans le temps : dès qu'on intègre une communauté d'agglomération, il n'y a pas de limite, monsieur Vidalies, mais si une commune souhaite sortir d'une communauté d'agglomération dont elle ne partage plus les objectifs, il faut qu'elle fasse une demande en ce sens.
Quand, dans une ville, vous prenez une décision importante en matière d'urbanisme, ce n'est pas pour trois ans ou pour cinq ans. Le droit s'applique de manière continue jusqu'au moment où il est démenti.
Vous dites que pour revenir sur une décision, il convient de le demander au préfet. Or permettez-moi de vous rappeler la teneur de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles de juin 2006 concernant des magasins Usines Center. Le préfet, en février 2007, a accordé aux 120 commerçants concernés une nouvelle dérogation, estimant que « les ventes du dimanche, pourtant réalisées en toute illégalité, ne pouvaient pas être compensées par une augmentation de l'activité en semaine ». Le préfet met ainsi en avant le fait qu'un espace commercial a été créé aux termes d'un accord, et a produit du chiffre d'affaires.
J'ai du mal à imaginer de quelle manière nous pourrions revenir sur le droit implicite qu'ont les commerçants à travailler le dimanche, alors que, lorsqu'il s'agit d'un droit illégalement obtenu, on l'entérine.
Je ne vois pas comment un maire peut revenir sur sa décision d'accorder l'ouverture des commerces le dimanche, étant donné qu'un intérêt commercial, économique, a été créé. Je pose la question avec d'autant plus de force que ce texte de loi tend à pallier notre incapacité à régler l'affaire de Plan-de-Campagne. Un droit est acquis à un commerce, et l'on ne sait pas comment revenir sur ce droit acquis.
M. le ministre vient de répondre à Alain Vidalies qu'il suffira au maire de le demander au préfet, qui prendra la décision. Mais comment indemniser les commerçants qui auront réalisé un chiffre d'affaires important et qui feront valoir au préfet que sa décision attente à leurs activités ?
(L'amendement n° 87 n'est pas adopté.)
Prochaine séance, vendredi 10 juillet 2009 à neuf heures trente :
Suite de la discussion sur la proposition de loi sur le repos dominical et les dérogations à ce principe.
La séance est levée.
(La séance est levée, le vendredi 10 juillet 2009, à une heure dix.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma