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Séance en hémicycle du 4 décembre 2007 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Huguette Bello, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Huguette Bello

Ma question porte sur les accords de partenariat économique entre l'Union européenne et les pays d'Afrique, Caraïbes et Pacifique. Il est désormais officiellement admis, après cinq années de négociations, que l'échéance fixée initialement ne sera pas respectée : au 31 décembre 2007, il n'y aura pas d'accords de partenariat économique complets. Pour combler le vide juridique créé par cette situation, des accords intérimaires d'un an, portant sur le commerce des marchandises, sont en cours de signature.

Ce report est dû en grande partie à la contestation et aux inquiétudes suscitées par ces accords qui, pour répondre aux exigences de l'Organisation mondiale du commerce, doivent aboutir à une libéralisation progressive des échanges entre les pays ACP et l'Union européenne. Ces accords préoccupent également les départements d'outre-mer, qui sont en fait les régions européennes les plus concernées par ce partenariat économique : en tant que régions de l'Union, d'une part, et parce qu'ils sont situés à proximité géographique des pays ACP, d'autre part.

Seule région européenne de l'hémisphère sud, la Réunion est concernée par deux des six accords de partenariat économique. Leur application stricte se traduirait par l'ouverture sans quotas, sans droits de douane et sans réciprocité du marché réunionnais aux productions des pays voisins. À l'exception d'un nombre très limité de produits, comme le sucre, pour lequel quelques années de transition sont prévues, c'est l'ensemble des productions locales qui est gravement menacé. Un tel scénario engendrerait des délocalisations en série, des licenciements et un taux de chômage encore plus massif, situation qu'aucune loi-programme n'arriverait à inverser.

Pour faire obstacle à ces conséquences désastreuses, les élus de la Réunion demandent unanimement un traitement différencié pour les régions ultrapériphériques, comme permet de l'envisager l'article 299-2 du traité d'Amsterdam. Après la résolution adoptée en mai dernier par le Parlement européen, puis la proposition de règlement de la Commission européenne (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), le Conseil de l'Union vient de reconnaître la nécessité de prendre en compte les intérêts des régions ultrapériphériques au stade final de la négociation des accords de partenariat.

Debut de section - PermalienPhoto de Huguette Bello

Monsieur le président, je dispose, comme chacun d'entre nous, de deux minutes pour exposer ma question, laquelle traite tout de même des rapports entre la France et ses anciennes colonies ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Huguette Bello

Ces conclusions rejoignent celles des pays ACP regroupés au sein de la Commission de l'océan Indien.

À la veille de la présidence française de l'Union européenne, quelles initiatives le Gouvernement compte-t-il prendre durant cette année supplémentaire de négociations, pour que les accords de partenariat économique ne se traduisent pas inéluctablement par le déclin des régions ultrapériphériques françaises ?

Debut de section - PermalienPhoto de Huguette Bello

Prendre en compte la dimension géopolitique des départements d'outre-mer n'a jamais été aussi urgent. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.

Debut de section - PermalienJean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

Vous avez raison, madame la députée, nous vivons sous le régime d'accords intérimaires et nous voulons absolument aboutir à des accords de partenariat économique complets. Ces accords sont en effet une chance pour les départements d'outre-mer, car ils ont pour premier objectif leur développement et celui de leurs voisins.

Toutefois, le Gouvernement est pleinement conscient, vous l'avez souligné, des difficultés sectorielles que peuvent faire peser ces accords sur certains produits essentiels à l'économie des DOM. C'est la raison pour laquelle nous faisons preuve d'une grande vigilance, non seulement dans la négociation de ces accords, mais aussi dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce. Nous avons ainsi obtenu des engagements fermes de la Commission européenne quant à la protection des secteurs clés pour l'économie des DOM. Des mesures de sauvegarde, pourront être mises en oeuvre, notamment pour le sucre, jusqu'en 2018 et prorogées jusqu'en 2028. (Brouhaha sur divers bancs.) S'agissant de la banane, nous avons également obtenu un mécanisme d'alerte et de sauvegarde en cas de surplus d'importation de bananes sur le marché européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Un instant, monsieur le secrétaire d'État.

Mes chers collègues, je demande aux uns et aux autres de faire preuve d'un minimum d'attention et de politesse à l'égard des membres du Gouvernement et des députés qui leur posent des questions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Veuillez poursuivre, monsieur le secrétaire d'État.

Debut de section - PermalienJean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

Nous resterons particulièrement mobilisés pour que les dispositions essentielles au développement économique et social des DOM soient rigoureusement appliquées.

Je voudrais enfin vous assurer, ainsi que la représentation nationale, que l'Union européenne prend en considération les intérêts des DOM. Le nouveau traité reconnaîtra la spécificité des régions ultrapériphériques et leur donnera toute leur place dans l'Europe de demain. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Stéphane Demilly, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Interrogé hier matin sur Europe 1 à propos d'une possible délocalisation d'une partie de la production d'Airbus dans la zone dollar, le président d'EADS, Louis Gallois, a répondu en ces termes : « Je crois malheureusement qu'il ne faut plus employer le conditionnel. Il ne faut pas dire “il faudrait”, mais “il faudra”, parce que nous n'avons pas le choix. » Deux jours plus tôt, dans le journal Le Monde, le président de Dassault Aviation, lui aussi, déclarait que la démarche naturelle tendait à la délocalisation dans des zones dollar ou à bas coût, comme cela avait été fait par l'industrie de l'automobile.

Ces déclarations, émanant de deux des principaux patrons de l'aéronautique européenne, mettent en lumière les conséquences désastreuses de la parité actuelle entre l'euro et le dollar, et ce pour tout un pan de l'industrie européenne. Avec un euro à un dollar cinquante, Airbus comme Dassault sont très fortement pénalisés, car ils produisent leurs avions en euros forts et les vendent en dollars faibles. C'est évidemment une puissante incitation à délocaliser.

Cette nouvelle source d'inquiétude ne fait par ailleurs que renforcer l'angoisse bien compréhensible des salariés de certains sites d'Airbus, qui ne savent toujours pas à quelle sauce ils vont être mangés… Je fais allusion, vous l'avez compris, au processus d'externalisation prévu dans le plan Power 8, l'emploi du mot « externalisation » étant une manière pudique de dire « vente »…

C'est pourquoi ma question est double. Pouvez-vous nous dire quelles actions le Gouvernement compte entreprendre au plan européen pour apporter des réponses au problème, devenu crucial, de la parité euro-dollar ? Avez-vous des informations concernant le choix et le calendrier de désignation du repreneur des sites français d'Airbus – si toutefois cette triste orientation est maintenue ? L'attente est insupportable pour les milliers de salariés concernés. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de la consommation et du tourisme

Depuis le mois de juin, les évolutions du taux de change de l'euro et leurs implications industrielles ont été et demeurent un sujet de grande vigilance pour le Gouvernement.

Oui, monsieur le député, un euro trop fort peut être un problème, notamment pour celles de nos entreprises dont les coûts de revient sont formulés en euros et les ventes en dollars, tandis que leurs concurrents, eux, fabriquent et vendent en dollars. Comme vous, j'ai entendu les propos du président d'EADS sur le sujet et je comprends les interrogations qu'ils peuvent susciter chez les salariés et les sous-traitants d'Airbus.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de la consommation et du tourisme

Je les comprends d'autant mieux qu'elles s'ajoutent, pour les salariés des sites qu'Airbus compte céder en France, à l'attente du choix d'un repreneur. De par la loi, vous le savez, les premiers informés de ces évolutions par la direction seront les salariés, et nous espérons tous que cette annonce interviendra très prochainement.

Concernant la parité euro-dollar et l'évolution des taux de change, le premier à avoir dénoncé l'euro fort, c'est Nicolas Sarkozy (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) avant l'élection présidentielle. Avant l'été, nous étions bien isolés sur cette question et notre message d'alarme avait été accueilli, il faut le reconnaître, avec quelque scepticisme par la plupart de nos partenaires européens et sur l'ensemble de la scène internationale. Depuis, monsieur Demilly, les faits nous ont, hélas, donné raison. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de la consommation et du tourisme

Je ne vois pas de raison de nous en réjouir, mais je constate que notre position a fait école au cours des dernières semaines. Nos grands partenaires européens, et je pense ici aux propos de la Chancelière allemande, Mme Merkel, ont indiqué qu'ils partageaient nos préoccupations sur les effets actuels de l'euro fort. Il en est de même pour les employeurs européens, qui ont saisi de cette question l'ensemble de leurs ministres.

Les choses sont en train de bouger. Le message que nous portons aujourd'hui avec nos partenaires européens tient en trois points. D'abord, les taux de change doivent refléter les fondamentaux économiques, notamment en Asie.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de la consommation et du tourisme

Ensuite, une volatilité excessive des marchés est défavorable à la croissance. Enfin, la zone euro ne peut porter seule le poids de l'ajustement des déséquilibres mondiaux. Il me semble que nous sommes de plus en plus entendus,…

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de la consommation et du tourisme

…comme en témoignent les dernières réunions internationales qui se sont tenues à ce sujet. Vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement est totalement mobilisé, s'agissant tant de l'avenir de la filière aéronautique que de la parité entre l'euro et le dollar, laquelle est essentielle pour notre économie. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Gilles Carrez, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

L'une des principales raisons de la stagnation du pouvoir d'achat des Français, ce sont les 35 heures (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) imposées de façon autoritaire. Les 35 heures ont empêché les augmentations salariales et fortement réduit les heures supplémentaires. Au lieu de donner plus de pouvoir d'achat aux salariés, les 35 heures leur ont imposé du temps libre supplémentaire, mais du temps libre non payé.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Monsieur le Premier ministre, vous avez fait, avec le Président de la République, le bon diagnostic. Il faut travailler plus pour produire plus : c'est la croissance. Et il faut travailler plus pour gagner plus : c'est le pouvoir d'achat. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Sur votre proposition, la majorité a décidé d'exonérer les heures supplémentaires. Depuis le 1er octobre, il n'y a plus, sur les heures supplémentaires, ni CSG, ni cotisation salariale, ni impôt sur le revenu. Dans une PME, grâce à ces exonérations, un salarié au SMIC peut désormais bénéficier d'un treizième mois supplémentaire.

Mais plusieurs obstacles d'ordre juridique, liés au code du travail, empêchent le développement rapide des heures supplémentaires. Ces obstacles doivent être levés par la négociation entre les partenaires sociaux, mais aussi par des dispositions législatives.

Quels sont, monsieur le Premier ministre, vos propositions et votre calendrier pour que les heures supplémentaires, les RTT et les comptes épargne temps permettent aux salariés du privé, comme aux fonctionnaires, d'accroître le plus vite possible leur pouvoir d'achat ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, le pouvoir d'achat des Français dépend d'abord de la croissance, …

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…et la croissance dépend du travail et des investissements des Français. Nous avons pris cet été des mesures destinées à libérer le travail et à faciliter l'investissement. Les annonces faites jeudi dernier par le Président de la République vont dans le même sens.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Nous avons donc décidé de présenter un projet de loi qui sera examiné par le conseil des ministres la semaine prochaine et, aussitôt après, par votre assemblée. Il permettra de débloquer les fonds de la participation et de mettre en oeuvre – dans les entreprises de moins de cinquante salariés qui le souhaitent – une prime de mille euros défiscalisée et sans charge, au profit des salariés qui n'ont pas accès à la participation et à l'intéressement. Il permettra aussi le rachat des jours de RTT et la monétarisation des comptes épargne temps. Enfin, il conduira à indexer les loyers sur l'indice des prix à la consommation et non plus, comme jusqu'à présent, sur l'indice de la construction. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Parallèlement à la discussion de ce projet de loi, dont je souhaite qu'il puisse s'appliquer dès le début du mois de janvier, le ministre des comptes publics engagera une négociation avec les organisations syndicales de la fonction publique sur le rachat des jours de RTT et sur l'harmonisation progressive du régime des heures supplémentaires avec celui du privé. De son côté, le ministre en charge de la santé engagera une négociation avec les partenaires sociaux pour bâtir un plan de rattrapage des heures supplémentaires non payées dans la fonction publique hospitalière. Enfin, le ministre en charge du logement engagera avec les professionnels du secteur une concertation pour aboutir le plus vite possible à la réduction à un mois du dépôt de garantie et à la suppression des cautions, remplacées par un système d'assurance loyer.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

À la mi-décembre, nous réunirons, avec le Président de la République, une conférence sociale dont l'ordre du jour reprendra, pour une large part, les sujets que vous venez d'évoquer.

D'abord, nous souhaitons conditionner les allégements de charge à l'ouverture de négociations salariales dans les branches et dans les entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Ensuite, nous voulons assouplir les 35 heures…

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…en permettant que des accords d'entreprise viennent aménager les règles d'emploi des heures supplémentaires, et notamment autoriser le dépassement des plafonds fixés par les accords de branche. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Le troisième sujet concernera le dialogue social, la représentativité des organisations syndicales et les règles des accords d'entreprise – questions naturellement liées.

Quatrièmement, enfin, nous débattrons du travail dominical.

Le Gouvernement compte mettre en oeuvre dans les meilleurs délais les engagements pris par le Président de la République, car ils vont permettre d'augmenter le volume de travail des Français,…

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…la production et le pouvoir d'achat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Pouvoir d'achat

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Monsieur le Premier ministre, entre les propositions des socialistes et les annonces d'application lointaine et aléatoire du Président de la République jeudi dernier, il y a tout ce qui nous sépare pour améliorer le pouvoir d'achat des Français.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Avec la majoration de la prime pour l'emploi, le chèque transport obligatoire ou la baisse de la TVA sur les produits de première nécessité, nous avons proposé une répartition juste, simple et financée. Elle concernerait tous les Français et ses effets sur les revenus seraient immédiats et durables.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

Vous avez bloqué la progression des salaires avec les 35 heures !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

En revanche, avec votre nouveau montage autour des heures supplémentaires, ce sera le parcours du combattant pour espérer gagner un peu plus ! Il faudra attendre d'hypothétiques négociations salariales, s'en remettre au bon vouloir des entreprises pour racheter ou non des RTT, ou bien abandonner ses droits au repos dominical – sujet sur lequel vous vous êtes bien gardé d'insister, puisque ce que vous voulez en réalité, c'est faire travailler tout le monde le dimanche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

De l'aveu même du patronat, seule une petite minorité de salariés s'y retrouvera.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Oubliés, tous les autres : les salariés des petites entreprises, les travailleurs à temps partiel, les agents publics, les chômeurs, les retraités ! Eux, c'est sûr, n'auront rien ! (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Non, monsieur le Premier ministre, ce n'est pas en déshabillant les 35 heures que l'on va, comme par miracle, habiller la feuille de paye ! Et vous le savez d'autant mieux qu'étant au pouvoir depuis 2002, vous n'avez pu que constater que vos lois successives contre la RTT étaient autant de constats d'impuissance. Expliquez donc aux Français que ces lois ont dopé la croissance et le pouvoir d'achat ! Expliquez-leur pourquoi les caisses de l'État sont vides, comme l'a dit le Président de la République (« À cause de vous ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), alors que vous avez bien trouvé en juillet 15 milliards pour les plus fortunés ! Expliquez-leur pourquoi, en dépit de leurs efforts, ils n'ont pas droit à des mesures simples et justes, comme celles que nous vous avons proposées, mais dont vous refusez toujours de débattre !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Le candidat du pouvoir d'achat est devenu le président de l'austérité. Pour en sortir, acceptez donc d'en débattre avec nous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur plusieurs bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le Premier ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Godillots !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Pour débattre, monsieur le président Ayrault, il faut être deux. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Et il est difficile de débattre avec un groupe socialiste qui continue, jour après jour, à proférer des mensonges sur les « cadeaux » qu'aurait faits le Gouvernement aux plus favorisés. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Qui peut croire un instant que la défiscalisation des heures supplémentaires profite aux plus favorisés ? Qui peut croire un instant que les aides pour l'accession au logement leur sont destinées ? Si vous voulez un vrai débat démocratique, commencez par reconnaître la vérité ! (« Six milliards ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Si le pouvoir d'achat des Français est en berne, c'est parce que leur volume de travail est le plus bas de tous les pays développés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Nous avons donc entrepris, dès le mois de juillet, de remonter le niveau de travail des Français afin d'augmenter la production et de relancer la croissance. Les mesures annoncées par le Président de la République – dont j'ai dit qu'elles allaient être mises en oeuvre dans les toutes prochaines semaines, et non à une échéance lointaine, comme vous le prétendez – vont dans ce sens.

Parmi ces mesures, monsieur Ayrault, il y en a plusieurs qui rejoignent, disons-le, celles que vous avez proposées : l'indexation des loyers,…

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…la suppression des cautions,…

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

…conformément à un engagement de campagne du Président de la République – et je suis heureux d'apprendre que vous soutenez cette mesure –, ou encore la conditionnalité des allégements de charges, autre engagement du Président.

Pour le reste, monsieur Ayrault, vous proposez une conférence sur les salaires, et en particulier sur le SMIC. Mais quelle est la position du parti socialiste à ce sujet ? Pendant la campagne électorale, il voulait le porter à 1 500 euros, mais certains de ses membres éminents ont affirmé ensuite que c'était une bêtise ! La vérité, c'est que nous, nous l'avons augmenté de 20 % pendant les cinq dernières années, c'est-à-dire beaucoup plus que vous ne l'avez jamais fait ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Vous proposez aussi de baisser la TIPP, mais alors expliquez-nous pourquoi toutes les régions que vous dirigez sont en train de l'augmenter ! (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.) De même, vous nous proposez d'augmenter les petites retraites, mais vous refusez toutes les réformes visant à sécuriser le régime par répartition ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Enfin, vous voulez augmenter de 50 % la prime pour l'emploi. Mais pourquoi s'arrêter à ce chiffre ? Quitte à distribuer de l'argent qui n'existe pas et que les Français seront obligés de rembourser un jour, ne vous privez pas de faire des propositions encore plus démagogiques ! (Mêmes mouvements.)

La vérité, mesdames et messieurs les députés, c'est que le parti socialiste est cohérent avec ses orientations politiques, celles-là mêmes qui ont été repoussées à trois reprises par les Français, lors de trois élections présidentielles ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Christian Patria, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Patria

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Le dimanche 25 novembre, une jeune fille de vingt-trois ans, demeurant à Orry-la-Ville, dans l'Oise, est décédée des suites de ses blessures après une agression sexuelle. Cette victime a été retrouvée inanimée dans une rame du RER D, en gare de Creil, terminus du train. L'efficacité de la police a permis d'appréhender rapidement l'auteur des faits, un récidiviste, puisqu'il avait déjà commis une agression sexuelle en 1995 sur cette même ligne – une ligne où se confrontent la violence quotidienne d'une minorité et les très nombreux usagers qui n'en peuvent plus de ce sentiment d'insécurité permanent.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Patria

Madame la ministre, ma question est donc la suivante : quelles actions seront entreprises afin d'endiguer l'insécurité des lignes ferroviaires, notamment aux horaires de faible fréquentation ? Un tel drame ne doit plus se reproduire. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Après ce drame, mes pensées vont, comme celles de chacun d'entre vous, d'abord à la famille, à qui j'ai fait part de ma solidarité dans cette épreuve. Je veux ensuite, comme vous, sans doute, féliciter, pour leur réactivité et leur efficacité, les policiers et gendarmes qui ont élucidé ce meurtre odieux et arrêté son auteur. Nous n'en devons pas moins chercher à renforcer la sécurité des transports en commun, qu'utilisent chaque jour des centaines de milliers de Français, et plus particulièrement les Franciliens.

Depuis 2002, beaucoup a été fait, à commencer par la création du service régional de police des transports, qui coordonne l'action des policiers, des gendarmes et des agents de la RATP et de la SNCF. De même, les patrouilles de la brigade des réseaux ferrés contribuent chaque jour à sécuriser plus de mille trains et rames et plus de mille gares et stations, en portant une attention toute particulière aux endroits et aux horaires sensibles.

Mais il faut aller plus loin, nous le voyons bien. C'est la raison pour laquelle, avec l'aide de la RATP et de la SNCF, j'ai mis en place une salle de commandement unique, qui centralise, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, les images des caméras, et assure ainsi la meilleure réactivité possible.

Le développement de la vidéoprotection est une priorité, car elle permet à la fois de prévenir, d'agir et d'élucider. J'ai donc demandé aux transporteurs un effort à la fois quantitatif et qualitatif dans ce domaine. Ainsi, la RATP va porter son parc à 6 500 caméras d'ici 2009 ; la SNCF, quant à elle, va équiper très rapidement 140 de ses gares avec 3 300 caméras.

D'ici là, et parce qu'il faut aussi agir tout de suite, nous allons encore renforcer notre dispositif par une densification des patrouilles dans les lieux les plus fréquentés et aux moments les plus sensibles, particulièrement pendant les fêtes de fin d'année. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Bernard Depierre, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Depierre

Ma question s'adresse à Mme la ministre du logement et de la ville.

L'accès au logement est, avec l'emploi et l'éducation, une priorité pour tous nos concitoyens. Or, depuis quelques années, force est de constater que les dépenses contraintes et, en premier lieu, celles du logement, sont en augmentation. La hausse des loyers et des charges, combinée aux augmentations du prix de l'immobilier à l'achat, pèse sur le budget des familles. Les Français modestes, mais aussi des classes moyennes sont les premiers touchés.

Pour améliorer le pouvoir d'achat et faciliter l'accès au logement, le Président de la République a annoncé une série de nouvelles mesures que vient de rappeler M. le Premier ministre : diminution du dépôt de garantie de deux à un mois de loyer, mise en place d'un mécanisme de cautionnement par l'État pour faciliter l'accès au logement tout en rassurant les propriétaires et, enfin, indexation des loyers sur le seul indice des prix à la consommation. Ces pistes de travail nécessitent naturellement une phase de concertation avec les partenaires.

Depuis six mois, votre ministère a multiplié les initiatives. Des mesures importantes ont été prises pour renforcer l'accès à la propriété, mais aussi relancer le pouvoir d'achat. Je pense, bien sûr, à la déduction des intérêts d'emprunt pour l'acquisition de la résidence principale, à la réforme du permis de construire, au lancement de la construction de 470 000 logements et au budget pour 2008 encore amélioré.

Les récentes annonces du Président confirment que le pouvoir d'achat et le logement sont au coeur de toutes les préoccupations. En conséquence, madame la ministre, pouvez-vous nous préciser les modalités de mise en place de ces mesures et faire un premier bilan des dispositions déjà prises et auxquelles tiennent tous nos concitoyens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la ministre du logement et de la ville.

Debut de section - PermalienChristine Boutin, ministre du logement et de la ville

Monsieur Depierre, l'indexation des loyers sur l'inflation dès le 1er janvier, la suppression de la caution et d'un mois de garantie constituent effectivement un ensemble cohérent qui vise à rendre du pouvoir d'achat aux Français, et en particulier aux plus modestes.

À la demande du Président de la République et du Premier ministre, ces mesures seront très rapidement mises en place. Elles s'ajouteront aux autres décisions annoncées jeudi dernier par le chef de l'État et seront accompagnées, dès le 1er janvier, d'une extension de la garantie des risques locatifs à l'ensemble des publics fragiles. Cela permettra de renforcer la confiance des bailleurs, car ces dispositifs dépassés étaient le plus souvent source de contentieux.

Je réunirai dès cette semaine les représentants des professionnels concernés pour les écouter, pour évaluer l'équilibre d'ensemble et pour leur expliquer le détail des mesures arrêtées.

Quant au bilan des six premiers mois, je tiens à réaffirmer devant l'Assemblée nationale mon attachement particulier à la mise en oeuvre de la loi relative au droit au logement opposable. Les premières commissions départementales de médiation sont, d'ores et déjà, préfigurées et elles seront opérationnelles dès le 2 janvier.

Au lendemain de la décentralisation de mon ministère à Lyon, en septembre dernier, des mesures ont été engagées pour favoriser la vente et la fluidité du parc HLM, libérer du foncier constructible et soutenir l'accession sociale à la propriété. Ces mesures, monsieur le député, sont en phase ultime d'arbitrage et des textes vous seront soumis dès le début de 2008, afin d'atteindre les objectifs fixés par le Président de la République. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Alain Vidalies, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Monsieur le Premier ministre, vous avez répondu au président de notre groupe que les socialistes voulaient distribuer de l'argent qui n'existe pas. (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Votre problème, c'est que vous ne pouvez pas distribuer de l'argent qui n'existe plus, puisque vous avez déjà tout dépensé au profit des plus riches avec le bouclier fiscal ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. – Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Augmentation du SMIC et augmentation des salaires sont des mots que ce gouvernement refuse obstinément de prononcer. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Alors, pour faire semblant de répondre à l'attente de millions de Français sur le pouvoir d'achat, le Président de la République a fait beaucoup d'annonces éparpillées qui ne concernent, en réalité, que peu de salariés. Les chômeurs, les retraités, les salariés à temps partiel, ceux dont le temps de travail est annualisé sont totalement oubliés, et cela fait beaucoup de monde.

Pour les autres, le déblocage de la participation, déjà utilisé en 2004, n'a donné que des résultats très limités.

Quant au rachat des RTT, son objectif est, d'une part, d'évacuer une nouvelle fois la question de l'augmentation des salaires et, d'autre part, de poursuivre le démantèlement des 35 heures par la remise en cause de l'horaire légal. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Cette proposition est une véritable mystification dès lors que le Président de la République n'a évidemment pas précisé le taux de rachat de ces RTT. Chacun comprendra que, si le rachat se fait au taux ordinaire et non au taux des heures supplémentaires, ce sera une nouvelle brèche ouverte dans la définition de l'horaire légal. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Je rappelle que la seule fonction de l'horaire légal est de déclencher la majoration pour les heures supplémentaires et, lorsqu'il aura disparu, il n'y aura plus d'heures supplémentaires. Le mot d'ordre ne sera plus alors de « travailler plus pour gagner plus » mais de « travailler plus pour gagner moins.» (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur quelques bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Dans un entretien au Journal du Dimanche, le ministre du travail a vendu la mèche en indiquant : « L'objectif est de permettre à chaque entreprise, par accord majoritaire, de définir un nombre d'heures travaillées. »

Dès lors, monsieur le Premier ministre, je vous poserai deux questions précises : le rachat des RTT se fera-t-il au taux des heures normales ou à celui des heures supplémentaires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Le gouvernement envisage-t-il de remettre en cause l'horaire légal des 35 heures ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Monsieur le député, quand on commet une erreur, on n'est pas obligé d'y persévérer comme le font les socialistes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) On a aussi le droit en politique de faire preuve de bon sens, comme savent le faire les Français. Que veulent-ils aujourd'hui ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Ils veulent sortir d'une situation paradoxale. À cause des 35 heures, ils sont nombreux à ne pas vouloir ou ne pas pouvoir prendre leurs jours de RTT. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) En même temps, des entreprises sont obligées d'inscrire des provisions importantes correspondant à ces heures et ces jours.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Nous faisons, quant à nous, preuve de bon sens en partant de la situation dans les entreprises. Quelle est-elle ? (« Répondez ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Julien Dray

Il n'y a pas d'activité parce qu'il n'y a pas de pouvoir d'achat !

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Par accord entre l'employeur et les salariés, il sera possible d'échanger, de transformer et de monétiser les jours de RTT, le compte épargne temps ou le forfait jour – je pense notamment aux cadres.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. À quel taux ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Nous aurons ce débat avec les partenaires sociaux. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Nous présenterons également un projet de loi, comme l'a annoncé le Premier ministre. Ainsi, là où vous voulez imposer, nous donnons la liberté de choix, monsieur Vidalies ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) C'est la véritable différence entre nous ! Une seule journée de RTT en plus, ce sont tout simplement des centaines de millions d'euros pour le pouvoir d'achat au profit de l'économie française, de la croissance et des Français.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Sur toutes ces questions, il y a effectivement ceux qui s'enferrent dans le dogmatisme (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche) et ceux qui choisissent le pragmatisme ! Vous avez souhaité que les 35 heures soient imposées partout et pour tous de la même façon, nous ne voulons pas qu'elles soient un maximum, voilà la vérité ! À l'époque, votre décision a bloqué les salaires des Français, la nôtre va les améliorer. C'est toute la différence et elle n'est pas mince ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Il n'a pas répondu !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Bernard Deflesselles, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Deflesselles

En préambule, monsieur le Premier ministre, je veux vous dire tout le bonheur que nous avons à soutenir votre gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) La majorité le suit avec application et détermination, car il prend à bras-le-corps l'un des problèmes de notre société et de nos concitoyens : l'amélioration du pouvoir d'achat ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Deflesselles

Monsieur le secrétaire d'État chargé des transports, vendredi dernier, le Conseil des ministres des transports de l'Union européenne a pris une décision importante : lancer le programme Galileo. C'est le plus grand projet scientifique et technologique que l'Europe va mettre en oeuvre dans les trois prochaines décennies. Galileo est plus performant que le GPS américain, parce que plus précis et plus concret : si la précision du GPS américain est de dix mètres, celle de Galileo sera de l'ordre du décimètre. Galileo, c'est aussi l'entrée de l'Europe dans une bataille mondiale : celle de la radionavigation par satellite. C'est encore l'affirmation de notre autonomie technologique, en particulier face aux États-Unis, à la Chine, à l'Inde et à la Russie, qui vont se lancer dans cette bataille. Galileo, c'est enfin la confirmation de notre excellence en matière spatiale.

Dans ces négociations à vingt-sept, difficiles, longues, âpres et compliquées, la France a pris toute sa part. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'État, nous dire quels sont les termes de l'accord obtenu et quelles seront les applications concrètes de ce fabuleux projet pour l'industrie française et européenne ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des transports.

Debut de section - PermalienDominique Bussereau, secrétaire d'état chargé des transports

Vous avez raison de le dire, monsieur Deflesselles, c'est une belle victoire pour la France et pour l'Union européenne.

Quel sera le double apport de Galileo, si on le compare au système GPS ? Il garantira l'indépendance stratégique du continent européen, et ce par la mise en oeuvre d'une technologie beaucoup plus précise. Nous savons, en effet, que tous les Français utilisent aujourd'hui le GPS dans leur vie personnelle ou professionnelle.

L'accord s'est trouvé difficilement, parce que ce projet a posé un problème de financement, comme vous l'avez indiqué dans votre rapport rendu à ce sujet au nom de la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne. Les ministres de l'économie et des finances et les ministres du budget ont trouvé un accord financier ; l'Allemagne a adhéré à cet accord.

La dernière difficulté, réglée jeudi et vendredi à Bruxelles, résidait dans l'organisation de la répartition des marchés. Certains pays ont émis des craintes, car ils pensaient qu'ils ne seraient pas présents au moment de la distribution des marchés. Ils redoutaient, parlons clair, que les grandes industries, dont l'industrie aéronautique et spatiale française, se taillent la part du lion et qu'il n'y ait pas de répartition européenne. Nous avons surmonté ce problème et sommes également parvenus à un accord en la matière grâce à un mécanisme associant concurrence et équilibre entre les pays. Une ultime difficulté ayant été réglée avec l'Espagne, qui souhaitait que soit créé un centre de contrôle, l'accord a ainsi été atteint avec l'Italie, l'Allemagne et l'Espagne.

J'ai donc le plaisir de le dire à la représentation nationale : le système Galileo est sur les rails, ou plutôt dans les cieux. En 2013, les premiers satellites de la première constellation permettront aux Européens de bénéficier de leur propre système de radionavigation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jacques Alain Bénisti, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Alain Bénisti

Ma question s'adresse à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Monsieur le ministre, comme vous allez le constater, ce sera la cinquième question sur le pouvoir d'achat.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Eh oui ! Le Gouvernement a vidé les caisses !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Alain Bénisti

Mes collègues l'ont souligné, les uns après les autres, c'est effectivement le principal sujet de préoccupation des Français. Le Premier ministre nous a d'ailleurs confirmé tout à l'heure que c'était aussi la sienne.

La semaine dernière, lors de son interview télévisée, le Président de la République a annoncé un certain nombre de mesures concrètes destinées à l'ensemble des salariés. Les Français ont été attentifs à ces propositions, je dirai même rassurés. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Alain Bénisti

Mais les cinq millions et demi de fonctionnaires de notre pays ont le sentiment de d'avoir été quelque peu oubliés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Alain Bénisti

Pourtant, ils savent qu'après des années de traversée du désert, votre prédécesseur a fait voter en début d'année deux lois novatrices qui ont considérablement amélioré les conditions de travail et les perspectives d'évolution de carrière des agents des trois fonctions publiques, et ce avec l'aval de la majorité des syndicats.

Aujourd'hui, c'est le pouvoir d'achat qui est coeur de leurs préoccupations. Vous avez annoncé l'ouverture de négociations salariales avec les organisations syndicales et il semble qu'un certain nombre de pistes soient ouvertes pour garantir le pouvoir d'achat dans un premier temps et, dans un second temps, l'améliorer par des mesures incitatives comme les comptes épargne temps, la monétisation des RTT et la revalorisation des heures supplémentaires.

Pourriez-vous nous faire connaître le calendrier exact de ces négociations, leurs grandes orientations et, puisque vous êtes aussi ministre du budget, leur incidence budgétaire pour l'année 2008 ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique

Le pouvoir d'achat, le Premier ministre l'a rappelé, est au coeur des préoccupations du Gouvernement, et cela concerne évidemment les fonctionnaires, monsieur le député.

Après la nomination de François Fillon au gouvernement, j'ai ouvert des négociations avec les fonctionnaires, en liaison avec André Santini, pour montrer que c'était l'une de nos préoccupations mais aussi pour faire oeuvre de clarification, ce dont nous avons bien besoin en ce domaine. Les fédérations syndicales affirment en effet que le pouvoir d'achat des fonctionnaires a diminué de 6 % en six ans alors que, selon nous, quand on regarde l'ensemble de la feuille de paie d'un fonctionnaire, et l'INSEE l'a confirmé il y a quelques jours, il a augmenté de 2,4 % par an. C'est une moyenne : 25 % des fonctionnaires ont perdu, c'est vrai, du pouvoir d'achat, et 75 % en ont gagné.

Depuis le début du mois d'octobre, je me suis engagé avec les fédérations de fonctionnaires, au cours de conférences qui sont le lieu de discussions très approfondies, à faire en sorte que nous puissions progresser dans le domaine du pouvoir d'achat.

À la demande du Président et du Premier ministre, j'ai ouvert hier la première séance de négociation sur les salaires dans la fonction publique. Cette négociation est fondée sur deux principes.

Nous devons d'abord garantir le pouvoir d'achat des fonctionnaires, car on ne peut pas travailler pour l'État et perdre de l'argent ; il faut donc trouver un mécanisme.

Nous devons ensuite faire en sorte qu'il puisse augmenter, grâce au « travailler plus pour gagner plus » ou à la responsabilité individuelle. Je réunirai notamment les organisations syndicales pour discuter des propositions du Président de la République sur les comptes épargne temps et la majoration des heures supplémentaires. Pour 2007, quatre jours de CET peuvent déjà être monétisés, et de nombreux fonctionnaires utilisent cette possibilité.

Vous voyez donc, monsieur le député, que les fonctionnaires ne sont pas des oubliés du pouvoir d'achat, bien au contraire, et nous continuerons sur ce chemin avec les organisations syndicales en 2008. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Pierre Cohen, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Cohen

Je voudrais tout d'abord dire à M. Bertrand qu'il n'a pas répondu à M. Vidalies sur la durée légale du temps de travail. La question était : oui ou non, remettrez-vous en cause la durée du temps de travail ? (« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Eh bien, que le ministre le dise !

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Nicolas Sarkozy est venu à plusieurs reprises à Toulouse pour affirmer l'engagement de l'État dans le développement industriel d'EADS. Comme c'est le cas pour un grand nombre de ses promesses, nous ne voyons rien venir. Pire, les dirigeants d'EADS réclament un plan Power 8 Plus, avec peut-être encore plus de licenciements et une remise en cause de la sous-traitance, à un moment où des commandes d'avions ne cessent d'être signées.

Nous avons déjà dénoncé l'absence de politique industrielle au profit d'un pilotage purement financier. Ces jours-ci s'engage une nouvelle étape, encore plus inquiétante. Les dirigeants d'EADS, comme ceux de Turboméca et de Dassault, théorisent chaque jour davantage sur les bienfaits des délocalisations.

Alors que le Président de la République nous avait promis pendant la campagne électorale d'infléchir l'action de la Banque européenne pour avoir un euro plus compatible avec le dollar, on nous vante à présent les mérites des délocalisations industrielles dans les zones dollar. Cette stratégie est dangereuse pour l'emploi mais aussi pour le maintien du savoir-faire et pour le développement de la connaissance.

Comme le gouvernement précédent avec M. Breton, laisserez-vous abandonner toute stratégie industrielle au profit de stratégies purement financières ? Après « travailler plus pour gagner plus », allez-vous nous proposer à présent « gagner plus, c'est travailler ailleurs » ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur plusieurs bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de la consommation et du tourisme

Monsieur le député, le Gouvernement est convaincu que l'industrie française a un avenir, et l'industrie aéronautique en particulier. Cet avenir repose d'abord sur sa capacité à produire ce qui ne peut être produit mieux et moins cher ailleurs, il est tourné vers la production de valeur et s'appuie sur une innovation dynamique. Le Gouvernement soutient cette dynamique. Il a proposé au Parlement de tripler le crédit d'impôt recherche, et la représentation nationale a même souhaité aller au-delà.

Pour la filière aéronautique, que vous connaissez bien, de très belles opportunités s'ouvrent en France et à l'exportation.

La visite d'État du Président de la République en Chine ou les succès récents au salon aéronautique de Dubaï montrent que les carnets de commande d'Airbus se portent bien. La sous-traitance française bénéficiera d'ici à 2010 d'une augmentation des deux tiers de sa production. Elle se prépare d'ores et déjà pour la production du futur A 350.

Pour accompagner ces mutations, le Premier ministre a annoncé le 11 octobre un plan ambitieux de soutien à la filière de sous-traitance aéronautique. Doté de 1,5 milliard d'euros sur cinq ans, ce plan vise à permettre à nos entreprises de s'organiser pour répondre aux opportunités que je viens d'évoquer, en soutenant leur capacité d'investissement, en les accompagnant dans leur effort d'adaptation, en créant des fonds d'investissement et de garantie dès 2008. Vous le voyez, ce plan est au service de l'ensemble de la filière aéronautique.

Concernant les taux de change, j'ai indiqué tout à l'heure que les lignes bougeaient. Au G7 du mois d'octobre, les autorités américaines ont redit leur attachement à un dollar fort, et nous avons obtenu que le G7 adopte un langage plus ferme à l'égard de la Chine. Lors des réunions de l'eurogroupe de novembre et de décembre, les pays de la zone euro ont déclaré que des mouvements brusques des taux de change n'étaient pas souhaitables. Enfin, le Président de la République a abordé ces questions lors de ses déplacements en Chine et aux États-Unis.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de la consommation et du tourisme

Vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement est totalement mobilisé pour l'avenir de l'industrie aéronautique et sur la question des taux de change. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Christine Marin, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Marin

Le 10 octobre dernier, madame la ministre de l'intérieur, lors d'un violent incendie, le Nord, dont je suis élue, perdait un sapeur-pompier volontaire et, le 16 novembre, deux jeunes sapeurs-pompiers sont morts à Paris. Avec le Président de la République, vous leur avez apporté l'hommage de la nation et je vous en remercie,

Ces circonstances malheureuses nous rappellent toujours plus les vertus d'engagement et de citoyenneté qui sont celles des sapeurs-pompiers. Notre devoir est de faire en sorte qu'en aucun cas ces vertus ne soient gâchées.

Il faut pour cela traiter une question qui taraude les pompiers et concerne tous les Français, celle de l'efficacité des secours à la personne. Alors que le dévouement des hommes et des femmes est le plus grand possible, nous ne pouvons accepter d'être confrontés à des dysfonctionnements qui tiennent à un manque de clarté dans le partage des missions, notamment entre pompiers et hospitaliers.

Pour la prise en charge des victimes, il apparaît que les niveaux d'intervention sont insuffisamment différenciés entre les secours, qui doivent relever des pompiers, et les soins, qui relèvent du corps médical. Les pompiers manquent d'une liberté de décision propre dans des cas bien définis. Comment faire pour mieux graduer les réponses des services de secours ? Comment orienter au mieux les appels téléphoniques ? Comment réduire le délai moyen d'intervention des pompiers, notamment en zone rurale ? Quand on sait qu'en cas d'urgence vitale, les premières minutes sont décisives, on ne peut plus accepter que les pompiers mettent trois quarts d'heure à intervenir au lieu d'un, simplement par défaut de coordination entre les « blancs » et les « rouges », entre le 15 et le 18.

Chez les pompiers comme chez leurs partenaires hospitaliers, le dévouement, la compétence, les qualités humaines sont là. Les schémas d'organisation et les procédures ne doivent pas opposer les uns aux autres, il faut les utiliser au mieux, au service d'un seul intérêt, celui de la victime.

En ce 4 décembre, jour de la Sainte-Barbe, patronne des sapeurs-pompiers, ma question est donc la suivante: quelles mesures comptez-vous prendre pour améliorer l'organisation de notre système de premiers secours ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

En ce jour de la Sainte-Barbe, madame la députée, je veux moi aussi rendre hommage, au nom, je pense, de chacune et de chacun d'entre vous, au courage des sapeurs-pompiers et des démineurs. (Applaudissements sur de nombreux bancs.)

Au cours de cette année, en effet, dix d'entre eux ont perdu la vie en portant secours aux personnes. Ils nous rappellent le coût humain de notre obligation collective de sécurité à l'égard des Français.

Le secours aux personnes représente 70 % de l'action opérationnelle des pompiers. Il y a bien sûr des choses à améliorer.

La semaine dernière, avec Roselyne Bachelot, nous avons mis en place pour la première fois un comité qui associe les pompiers et les médecins urgentistes, et nous lui avons demandé de définir rapidement un réel partage des responsabilités dans le secours.

Il faut avancer, vite, et c'est la raison pour laquelle j'ai fixé trois missions à ce groupe : mutualiser les moyens, mieux coordonner l'action et mieux communiquer.

Dès 2008, une coordination régionale entre pompiers et SAMU sera organisée et des technologies modernes de communication seront mises en service pour faciliter leurs échanges. Enfin, une première équipe devra être envoyée immédiatement auprès de la victime afin d'évaluer la situation et de mettre en oeuvre une réponse graduée. Une expérimentation sera lancée, dès 2008 également, dans des départements volontaires.

Ainsi, madame la députée, nous répondrons à la fois aux besoins des Français et à l'engagement de celles et ceux qui n'hésitent pas à mettre leur vie en danger pour sauver celle des autres. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. François Loncle, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de François Loncle

Monsieur le Premier ministre, au lendemain des élections législatives russes, les constats et les accusations de fraude massive, de pressions et de malhonnêteté se sont multipliées en Russie et dans le monde, et voilà que le Président de la République française ne trouve rien de mieux que de se précipiter au téléphone pour féliciter chaleureusement M. Poutine,…

Debut de section - PermalienPhoto de François Loncle

…tandis que les dirigeants de l'Espagne, de l'Italie, de la Grande-Bretagne, des États-Unis et le gouvernement allemand, Mme Angela Merkel en tête, soulignent que ces élections n'étaient ni équitables, ni libres, ni démocratiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Pourquoi ce coup de téléphone pour le moins hâtif et imprudent ? Pourquoi cette caution supplémentaire à un régime de plus en plus autoritaire ? Voilà qui contredit totalement les propos de campagne, les engagements de M. Sarkozy, qui déclarait en mai dernier : « Ce n'est pas parce que la Chine et la Russie sont de très grandes puissances que l'on doit s'interdire de dénoncer les violations des droits de l'homme. » Et il fixait ainsi le grand objectif de sa politique étrangère : « promouvoir les droits de l'homme partout dans le monde ».

Alors, monsieur le Premier ministre, au moment où la Realpolitik semble céder la place à une dose de cynisme difficilement supportable, au moment où le Président Sarkozy s'apprête, lundi prochain, à accueillir le colonel Khadafi pour une visite d'État en France, seul de tous les pays de l'Union européenne à le faire (« Quelle honte ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.), quelle est votre appréciation sur ces manquements et ces dérives ? Allez-vous défendre la vocation universelle de la France, ses valeurs, les principes républicains, auxquels nous devrions ici être tous attachés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.

Debut de section - PermalienJean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

En ce qui concerne la Russie, monsieur François Loncle, nous avons demandé à ce que toute la lumière soit faite sur les allégations relatives aux contestations électorales.

Debut de section - PermalienJean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

Un grand pays comme la Russie ne doit avoir peur ni de la démocratie, ni des exigences de transparence qu'elle emporte.

Debut de section - PermalienJean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

Nous devions le dire : nous l'avons dit ! (« Non ! C'est faux ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) C'est le cadre du dialogue exigeant qui doit être mené entre l'Union européenne et la Russie. Le Président de la République l'a fait savoir au Président Poutine lors de son dernier déplacement.

En ce qui concerne la visite de M. Kadhafi, c'est le prolongement de celle du Président de la République en Libye en juillet dernier. Elle marque le retour de la Libye dans la communauté internationale, qui a été engagé avec le renoncement au terrorisme, l'abandon de tout programme nucléaire contraire aux engagements internationaux, l'arrêt des programmes d'armes de destruction massive,…

Debut de section - PermalienPhoto de Albert Facon

La fin de l'utilisation de chiens dans les interrogatoires ?

Debut de section - PermalienJean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

…et enfin la libération des infirmières bulgares et du médecin palestinien.

Debut de section - PermalienJean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

La France doit accompagner la Libye dans cette évolution.

Cette visite sera aussi l'occasion de conclure un certain nombre d'accords utiles au développement de ce pays et au mieux-être de sa population dans le domaine sanitaire, de l'eau, des télécommunications et de l'énergie.

Debut de section - PermalienJean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

La Libye est un partenaire méditerranéen. Elle doit prendre toute sa place dans ce cadre et nous souhaitons avoir avec ce pays, comme avec les autres,…

Debut de section - PermalienJean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

…un dialogue sans tabou, un dialogue franc, bref un dialogue politique.

Enfin, monsieur François Loncle, je souhaitais vous dire très clairement qu'il n'y a pas de contradiction entre la volonté de faire entendre partout la voix de la France en ce qui concerne la défense des droits de l'homme, et celle d'assurer notre développement économique et de sauvegarder nos emplois. (« Scandaleux ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Ce n'est donc pas seulement pour le bien-être des Libyens ?

Debut de section - PermalienJean-Pierre Jouyet, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

C'est d'ailleurs l'honneur de toutes les grandes démocraties. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – « Béni oui oui ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bataille

Leur honneur, c'est de ne pas être prêtes à tout pour de l'argent !

Élections en Russie ; visite du colonel Kadhafi en France

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Rudy Salles.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif au parc naturel de Camargue (nos 343, 407).

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est à M. le secrétaire d'État, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état, porte-parole du Gouvernement

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, en voyage officiel avec le Président de la République en Algérie, ainsi que celle de Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie, qui présente aujourd'hui, avec Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports, le plan de lutte contre les nuisances aéroportuaires.

Donner un avenir au parc naturel régional de Camargue et sauver en même temps ce qui est sans doute l'un des plus beaux joyaux de notre pays en termes de développement durable, tel est l'objet du projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter au nom du Gouvernement.

La Camargue – ce n'est pas à vous que je l'apprendrai, monsieur le rapporteur, vous qui la connaissez parfaitement – est un territoire d'exception, qui jouit d'une renommée internationale. Avec près de 100 000 hectares, il s'agit de la plus vaste zone humide de France et, même si nous n'en avons pas toujours conscience, de l'une des plus importantes du continent européen.

Avec sa biodiversité unique, la Camargue est bien un joyau, mais un joyau fragile, dépendant de la bonne gestion de l'eau et de notre capacité à lui assurer des atouts pour l'avenir et à le préserver.

Cet espace naturel accueille aujourd'hui des activités diversifiées : exploitation du sel, élevage de chevaux et de taureaux, riziculture, viticulture, pêche, chasse et tourisme – et aussi, tout simplement, promenades dont profitent les familles.

L'action coordonnée entre ces différentes activités est l'un des principaux défis – et sans doute aussi l'un des principaux miracles – de la Camargue, qui a su concilier dans un espace naturel aussi exceptionnel cette diversité d'usages et d'utilisations par l'homme.

C'est bien dans cette volonté de gestion durable et concertée entre tous les acteurs concernés qu'a été créé, en 1970, le parc naturel régional de Camargue. Cette initiative avait alors un caractère éminemment précurseur.

Or le parc est aujourd'hui confronté à l'un des moments les plus difficiles de son histoire, avec une situation juridique inextricable, fruit d'une longue série de contentieux qui pourraient, à terme, menacer l'avenir même de la Camargue.

Dès sa nomination, Jean-Louis Borloo a fait sienne la volonté de tous les acteurs locaux, dont vous avez été les relais, de maintenir le parc naturel régional de Camargue. Je sais, cher Bernard Reynès, combien vous aussi avez défendu cet attachement, non seulement par le travail d'écoute que vous avez accompli dans le cadre de votre rapport, en procédant à de très nombreuses auditions sur le terrain, mais aussi en tant qu'élu des Bouches-du-Rhône, qui connaissez bien cet espace et ses enjeux, ainsi que le devoir que nous avons tous, dans cet hémicycle, d'en assurer l'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, du groupe Nouveau Centre et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Je tiens aussi à saluer le travail accompli en ce sens par la région, dans le climat le plus consensuel possible.

Nous étions tenus par une date butoir qui ne laissait aucune place à la passivité ou à l'attente. En effet, si nous ne réglons pas cet imbroglio juridique, le 20 février 2008, le parc naturel régional de Camargue n'existera plus.

Pour que son classement de parc naturel régional soit renouvelé, une révision de la charte est indispensable. Qui aurait pu comprendre que nous manquions ce rendez-vous avec l'avenir à cause d'un imbroglio juridique qui, précisément, menace l'existence du parc ? Seule l'intervention rapide du législateur est à même de trancher ce sac de noeuds juridique. Nous avons donc, mesdames et messieurs les députés, besoin de vous.

La charte annexée au décret de renouvellement de classement du 18 février 1998 laisse en place la Fondation de Camargue, gestionnaire du parc depuis sa création, mais cette structure s'est révélée inadaptée et a été confrontée à d'importants dysfonctionnements, sur lesquels je ne reviendrai pas. Fin 2001, la gestion a été confiée à un groupement d'intérêt public, ou GIP, qui semblait la seule formule juridique publique permettant aux propriétaires privés d'être directement membres de la structure de gestion du parc. Vous le savez en effet, monsieur le rapporteur, l'un des enjeux importants consiste précisément à pouvoir associer les propriétaires privés à la bonne gestion du parc.

Toutefois – et c'est là que commence le contentieux –, par un arrêt du 23 juin 2004, le Conseil d'État a estimé que seul un syndicat mixte, et non un GIP, pouvait gérer le parc naturel régional de Camargue. Pour se conformer à cette décision du Conseil d'État, la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur, le département des Bouches-du-Rhône, les communes d'Arles et des Saintes-Maries-de-la-Mer, ainsi que les établissements consulaires, ont constitué un syndicat mixte, à l'instar de tous les autres parcs.

Dans un nouvel arrêt du 17 février 2007, le Conseil d'État a cependant considéré que ce changement d'organisme gestionnaire nécessitait la révision de la charte du parc. Les méandres du droit public ont parfois des secrets impénétrables ! (Sourires.) En conséquence, le décret du 9 novembre 2004, qui transférait de la fondation au syndicat mixte la gestion du parc a été annulé.

En tout état de cause, ce sac de noeuds juridique rend impossible une révision dans de bonnes conditions de la charte, et donc le maintien du classement du parc.

Dans ce contexte, seul le recours à la loi permet de trouver une issue juridique rapide. Je rappelle à ce propos que nous sommes confrontés à un défi, à une lutte contre le temps, puisque cette solution doit impérativement être trouvée avant l'échéance du classement du parc naturel régional.

Ainsi, nous entendons, avec ce projet de loi soumis à votre examen, concilier le droit commun, qui veut qu'un parc naturel régional soit géré par un syndicat mixte, le souci de ne pas remettre en cause le syndicat mixte de gestion constitué par les collectivités territoriales et les actes déjà pris par celui-ci.

Enfin, nous souhaitons concrétiser le voeu exprimé l'été dernier par l'ensemble des acteurs locaux et que vous avez, monsieur Reynès, très bien mis en valeur dans votre rapport, de sauver le parc et de voir des représentants des propriétaires privés participer aux instances délibérantes de ce syndicat mixte.

Nous ne devons pas, en effet, sous-estimer l'enjeu économique sous-jacent, car, j'y insiste, les dimensions économique et écologique ont été parfaitement conciliées : outre les 37 personnes employées par la structure de gestion du parc, on compte plus de 200 emplois associés dans les domaines de la protection de la nature et de la recherche scientifique. Parallèlement, plus de 20 millions d'euros de projets sont actuellement programmés par le parc sur ce territoire, dans des domaines qui vont de la gestion des eaux à l'agroenvironnement.

De nombreuses personnes comptent donc sur le projet de loi qui vous est aujourd'hui présenté et qui est un bon exemple illustrant à quel point le développement durable ne s'oppose pas au développement économique.

Remettons un moment en perspective l'enjeu qui s'offre aujourd'hui à nous : les parcs naturels régionaux sont l'un de nos meilleurs outils de gestion du territoire et de préservation du développement durable sur des territoires d'exception à l'échelle nationale.

L'expérience française des parcs naturels régionaux inspire aujourd'hui de nombreux pays d'Europe et du monde : il suffit pour s'en convaincre de voir les nombreux partenariats tissés ces dernières années avec des pays aussi divers que les États-Unis ou l'Allemagne.

Face aux défis que représente aujourd'hui la perspective du changement climatique, les acquis, l'expérience et le volontarisme des parcs – dont peu ont une expérience aussi forte que le parc de Camargue – doivent être mobilisés. Les parcs naturels régionaux devront donc jouer un rôle essentiel pour nous accompagner dans le travail engagé dans le prolongement du Grenelle de l'environnement, notamment en vue de la constitution de la trame verte nationale.

Vous l'avez compris, nous avons besoin d'un réseau fort, actif et structuré de parcs naturels régionaux. Celui de Camargue, qui est l'un de nos joyaux les plus précieux, représente un exemple parfait de conciliation entre développement durable et économie, un territoire dans lequel les hommes, à force de travail, ont accumulé une très forte expérience.

Le rendez-vous que nous avons aujourd'hui consiste simplement à être à la hauteur du travail et de l'expérience accumulés, pour leur permettre de se poursuivre dans l'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est à M. Bernard Reynès, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Reynès

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, chacun, dans cet hémicycle, connaît la Camargue pour la richesse de sa faune et de sa flore, mais aussi pour la force de ses traditions et la qualité de son terroir. On a généralement en mémoire, et c'est très bien, quelques images d'Épinal, comme les flamants roses dans le marais de Vaccarès ou des gardians en train de mener des taureaux. La Camargue a en outre une image reconnue dans le monde entier. C'est aussi la plus grande zone humide d'Europe, bénéficiant d'une biodiversité tout à fait exceptionnelle.

Chacun sait aussi que la Camargue est un espace fragile, qu'il faut protéger contre les menaces de toutes sortes, et elles sont assez nombreuses dans cette région. À l'heure où certains de nos collègues se penchent sur le problème du PCB dans le Rhône, comment ne pas évoquer les pollutions provenant de ce fleuve mais aussi les crues qu'il peut occasionner ? Rappelons, par exemple, qu'à l'occasion des grandes crues de l'automne 2004, de nombreuses digues ont cédé sur le petit Rhône, transformant la Camargue en véritable bassin de déversement, ce qui a occasionné des dégâts très importants. Comment ne pas évoquer enfin des menaces plus globales, comme la montée du niveau de la mer liée au réchauffement climatique ? Espérons, monsieur le secrétaire d'État, que le Grenelle de l'environnement saura apporter les réponses appropriées dans ce domaine.

En général, on connaît moins les dispositifs juridiques de protection de cet espace. Ils sont nombreux : il y a évidemment le parc naturel de Camargue, le site classé et la réserve naturelle de l'étang de Vaccarès, la zone Ramsar de la Tour du Valat et le classement de presque toute la Camargue en zone de protection spéciale au titre de Natura 2000.

Dernier élément, beaucoup moins connu encore et sur lequel j'aimerais vraiment insister en tant que rapporteur : la Camargue est un espace de projets et de développement économique. Les multiples dispositifs de protection du territoire doivent prendre en compte des activités essentielles à la région, qui forment à la fois son âme et son avenir. Je pense en particulier aux activités agricoles, qui représentent dans cette région 18 % des actifs, dans 132 exploitations, soit près de 30 % du territoire du parc.

Là-bas plus qu'ailleurs peut-être, il ne faut pas opposer agriculture et protection de l'environnement, car les deux se sont développés dans une harmonie remarquable depuis un siècle. Prenons par exemple la riziculture camarguaise, qui bénéficie à 95 % d'une « indication géographique de provenance » garantissant sa qualité. Pensons aussi à l'élevage extensif de taureaux et de chevaux, important dans cette région, et qui s'est imposé à lui-même des normes de protection de l'environnement particulièrement exigeantes. Pensons enfin à la saliculture, installée en Camargue depuis près d'un siècle : avec plus de 18 000 hectares, c'est la plus importante d'Europe, répartie sur les deux sites que sont les salins de Giraud et les salins d'Aigues-Mortes, et la dimension mondiale de la Compagnie des Salins du Midi est une fierté pour notre région.

Quant aux activités touristiques, elles constituent une source de revenus importants, dans le respect de la nature camarguaise puisque cette région a été l'une des premières à mettre en oeuvre le concept d'écotourisme.

Cette articulation entre protection, mise en valeur et développement a été excellemment assurée par le parc naturel de Camargue depuis sa création en 1970. Alors que nous fêtons les 40 ans de la création des PNR, il faut rendre hommage à cette structure juridique qui a su fédérer les initiatives locales et les élus autour de la mise en valeur d'un patrimoine naturel, dans le respect des spécificités d'une région. À cet égard, la Camargue est tout à fait exemplaire.

Pourtant, comme vous venez de le rappeler, monsieur le secrétaire d'État, l'avenir du parc est aujourd'hui menacé. Si rien n'est fait avant février 2008, non seulement la structure gérant le parc, c'est-à-dire le syndicat mixte actuel, devra être dissoute, mais le parc perdra également son label. Pis encore, un volet social très grave suivrait cette dissolution, puisque les salariés du parc devraient être mis au chômage, ce qui représenterait un coût social et une perte d'expertise humaine inacceptable pour la région.

Je ne reviendrai pas dans le détail sur l'imbroglio juridique qui a mené à une telle situation de blocage, car je l'ai déjà fait en commission et dans mon rapport ; l'analyse est assez fastidieuse et, pour tout dire, plutôt déroutante puisqu'elle met en évidence une suite d'annulations contentieuses assez impressionnante. Je me bornerai à rappeler que c'est une fondation qui a traditionnellement été chargée de gérer le parc de Camargue. Pour prendre en compte des évolutions législatives, un GIP a ensuite été créé en 2000, projet qui a été abandonné au profit d'un syndicat mixte dont l'existence est aujourd'hui remise en question. Après l'annulation par le Conseil d'État du décret transférant la gestion du parc de la fondation au syndicat mixte, en février de cette année, il y a tout lieu de craindre que l'arrêté de création du syndicat mixte lui-même soit annulé, courant janvier, par le tribunal administratif de Marseille.

Mais passons sur ces difficultés car je préfère me concentrer sur l'avenir. Cette loi représente une véritable opportunité pour le parc de Camargue. Non seulement elle permettra de débloquer la situation, mais elle assurera enfin la stabilité juridique nécessaire au parc tout en prenant en compte ses spécificités, notamment en organisant la représentation, dans le nouveau syndicat mixte, des différentes associations syndicales de propriétaires. Ainsi, l'organisme gestionnaire du parc redeviendra ce que certains ont appelé à juste titre « le Parlement de Camargue ». Depuis près d'un siècle, les habitants de la Camargue, principalement les grands propriétaires terriens, s'investissent en effet dans la gestion de cette région, de même que certaines entreprises historiques comme la Compagnie des Salins du Midi. Cette loi permettra enfin, à la différence des lois de 1995 et de 2006, de reconnaître le rôle primordial joué par ces différents acteurs dans la gestion du parc, et je ne peux que m'en féliciter.

En outre, et c'est également très important, le présent texte permettra au PNR d'avancer, et à la Camargue de redevenir un territoire de projets. Je voudrais mentionner rapidement certains d'entre eux, qui sont déjà à l'étude et qui pourraient être mis en oeuvre à très court terme.

Il y a d'abord la révision de la charte, qui a été commencée et est maintenant arrêtée faute d'avenir juridique clair et stable pour le parc. Rappelons que la charte est un document essentiel puisqu'il fixe les objectifs à atteindre en termes de protection dans les années à venir. Autant dire que c'est toute la politique du parc qui est suspendue à cette révision.

Il y a en outre le projet d'extension du parc sur sa bordure Est, entre Arles, Saint-Martin-de-Crau, Fos-sur-Mer et Port-Saint-Louis-du-Rhône. Cette extension à proximité d'une zone où les activités chimiques, et les pollutions qui y sont liées, sont importantes, est fondamentale à l'heure où le Grenelle de l'environnement propose l'extension des zones protégées et la mise en place d'une trame verte.

Enfin, 20 millions d'euros sont d'ores et déjà sur la table pour faire avancer différents projets, qui ne peuvent être encore engagés du fait de cette incertitude juridique. Ces 20 millions d'euros doivent permettre de faire avancer le contrat de delta, à hauteur de 14 millions d'euros ; le programme de gestion intégrée des zones côtières, à hauteur de 2 millions d'euros ; le programme de protection contre les crues du Rhône, pour 2 millions d'euros ; la mise en oeuvre des mesures agro-environnementales provenant des crédits européens, pour 1,5 million d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Reynès

Je tiens d'ailleurs à saluer le président de la région PACA, M. Michel Vauzelle, pour la participation de la région à ces projets.

Il faut donc aller de l'avant, et c'est ce que nous faisons avec ce projet de loi. À ce stade, je voudrais rendre hommage au Gouvernement :…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Reynès

…avec le déplacement sur le terrain de M. Jean-Louis Borloo et de Mme Kosckiusko-Morizet, il a pu donner une impulsion décisive en faveur de la solution du problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Il a fallu lâcher les flamants roses pour que le ministre se déplace ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Reynès

Il faut aussi rendre hommage aux différents acteurs de la Camargue, qui ont fait preuve d'un sens des responsabilités qui les honore. Ils ont clairement agi dans le souci de dégager un consensus, parfaitement mis en forme par ce projet de loi. De ce fait, le projet de loi nous propose une solution équilibrée, garantissant enfin la stabilité juridique du parc et permettant la représentation, au sein du syndicat mixte de gestion du parc, de tous les acteurs et de toutes les sensibilités.

On rappellera en outre que la fondation, qui est la structure historique de gestion du parc, n'est pas supprimée, mais restera le symbole de l'histoire, de la culture et des traditions de la Camargue et de ses propriétaires terriens.

Enfin, le nouveau syndicat mixte de gestion du PNR est conçu avec suffisamment de souplesse pour que l'adhésion d'une nouvelle commune puisse être envisagée, permettant ainsi d'accroître le périmètre du parc dans un avenir que l'on espère le plus proche possible.

Un texte équilibré, un texte présentant la souplesse nécessaire à la prise en compte des projets locaux et offrant au parc un cadre juridique pérenne : vous aurez compris que ce projet de loi n'appelle, de mon point de vue, aucune modification, mais peut-être simplement une précision du Gouvernement concernant l'article 3. Cet article fait en effet référence à un « syndicat », sans que l'on sache explicitement qu'il s'agit du syndicat mixte de gestion du PNR et non du syndicat de gestion des associations syndicales du Pays d'Arles. Une clarification est souhaitable sur ce point, monsieur le secrétaire d'État.

Conformément à la décision de la commission, je vous appelle, mes chers collègues à adopter le projet de loi sans modification, afin que la promulgation de la loi puisse avoir lieu dans les plus brefs délais et que l'avenir du PNR de Camargue puisse à nouveau être envisagé sous les meilleurs auspices et dans le cadre d'un consensus indispensable à son avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Dans la discussion générale, la parole est à M. Michel Vauzelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vauzelle

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, pour l'habitant de la Camargue que je suis – ne craignez rien, je ne vais pas larmoyer –, pour l'élu de ce territoire, hier en tant que maire d'Arles et conseiller général, aujourd'hui en tant que président du conseil régional de Provence-Alpes-Côte-d'Azur et député d'Arles, il y a une certaine émotion à monter à cette tribune alors que la représentation nationale va apporter la paix civile, si je puis dire, à ce territoire, ainsi que la sécurité juridique aux Camarguais. En cet instant, je pense aux travailleurs qui, vous l'avez dit, monsieur le rapporteur, donnent tout leur temps, avec beaucoup de compétence et un vrai militantisme, au service d'un territoire unique au monde et connu dans le monde entier, l'un des joyaux de notre patrimoine naturel.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vauzelle

Ce projet de loi constitue l'acte final d'une longue comédie juridico-politicienne qui aurait pu faire rire si elle n'avait été en réalité un drame pour la Camargue, pour les Camarguais, les Arlésiens, les Saintois et tous ceux qui, agriculteurs, riziculteurs, pêcheurs, éleveurs de taureaux, de chevaux, de moutons, ouvriers, habitants des villages de Camargue comme Salin-de-Giraud, Gageron, Salins ou Le Sambuc, souffraient de cette situation ridicule.

Il ne faut pas revenir sur le passé, mais je voudrais résumer l'imbroglio qui rappellera sans doute quelques souvenirs aux élus présents, et témoignera de notre attachement à la vie politique locale.

En 1994, déjà, Michel Barnier, ministre de l'environnement, avait menacé la Fondation du parc de Camargue de lui retirer son label. En 2000, le préfet de région m'informait que, le 21 mars, le Conseil d'État avait émis un avis défavorable sur la légalité de la fondation ; le ministre de l'intérieur confirmait l'illégalité des décisions prises par la fondation depuis 1998.

En 2001, le préfet de région lançait une concertation qui donnait lieu à un rapport prônant le remplacement de la fondation par un groupement d'intérêt public. En 2002, un arrêté du préfet de région créé donc le GIP, et le Gouvernement décide la dissolution de la fondation.

Changement de majorité, changement de gouvernement. Le nouveau gouvernement décide de maintenir la fondation et nomme un nouveau médiateur – un conseiller d'État, cette fois – dont le rapport n'a jamais été publié.

Le député de l'époque et un grand propriétaire font annuler l'arrêté du préfet créant le GIP. Nous nous retrouvons donc dans un vide juridique. En 2003, Roselyne Bachelot, nouvelle ministre de l'environnement, signe un arrêté interministériel – nous montons dans la hiérarchie ! – aussitôt attaqué par le même grand propriétaire, associé à un autre, plus grand encore : la Compagnie des Salins du Midi. Le Conseil d'État annule l'arrêté interministériel.

Ainsi, l'État condamnait l'action de ses préfets et de ses ministres, par l'intermédiaire du Conseil d'État. Face à une telle incohérence, plutôt que d'entamer une grève de la faim, j'ai décidé de quitter la présidence du parc.

En 2004, un nouveau décret ministériel tente d'apporter une solution ; il est aussitôt annulé par la Conseil d'État. À ce moment-là, il ne nous restait plus qu'à envisager un lâcher de moustiques devant le Conseil d'État ou une grève de la faim devant l'hôtel Matignon !

Fort heureusement, le député a changé – ce dont je me suis réjoui, à titre personnel – mais aussi le ministre. Je remercie M. Jean-Louis Borloo avec qui j'étais à Alger pour accompagner le Président de la République, ce matin encore. Je lui ai fait part de ma tristesse de ne pas le voir ici, cet après-midi, mais j'ai le meilleur des porte-parole devant moi, et c'est un honneur. Le premier geste de Jean-Louis Borloo a été de venir en Camargue, sur le terrain, pour chercher et trouver la solution juridiquement correcte, dans la concertation républicaine.

Mais il faut tout de même une loi – la Camargue mérite bien cela – et ce projet est remarquable par le consensus démocratique enfin obtenu. Aujourd'hui, nous sommes tous d'accord, après avoir travaillé ensemble, dans l'intérêt supérieur de la Camargue et de la région de Provence.

Je voterai donc de tout coeur ce texte qui confie – enfin ! – la gestion du parc naturel régional au syndicat mixte, conformément à ce qui existe pour tous les parcs de ce type. Deuxième aspect très important de ce texte : il pérennise les contrats des trente-six salariés du parc, qui font un travail tout à fait remarquable, et il confirme les actes administratifs passés du syndicat mixte. Enfin, ce texte permet la prolongation de la labellisation « parc naturel régional » jusqu'en février 2011.

Une seule inquiétude subsiste : il faut souhaiter que l'État surveillera bien les transferts de propriétés qui ont été payées par des crédits publics au profit de propriétaires privés. Il ne faudrait pas qu'aujourd'hui, ces propriétaires songent un instant à louer ou à vendre des biens acquis avec l'argent des contribuables.

Sans faire de lyrisme sur la Camargue, je voudrais simplement ajouter que ce texte que nous allons voter n'écarte pas toutes les menaces, à commencer par les risques naturels. Chacun se souvient des inondations terrifiantes qui ont frappé la Camargue puis, dix ans plus tard, la ville d'Arles dont des milliers d'habitants furent jetés à la rue – ou plutôt dans l'eau. Chacun se souvient de ces événements douloureux d'octobre 2003. Depuis, nous avons construit des digues pharaoniques, et le travail analysé par le plan Rhône, en bonne concertation avec l'État et les régions, devait permettre de terminer ce qui a été entrepris.

Mais l'eau et le Rhône ne représentent pas les seuls dangers, et je voudrais dire un mot sur la pollution de l'air. À quelques kilomètres de ce parc – que les flamants roses ont quitté pour la Sardaigne, depuis que la fermeture des Salins de Giraud les a privés d'étangs – le maire de Marseille a décidé de faire construire un incinérateur géant.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Deflesselles

Pas si géant que cela ! Il n'est pas plus gros que celui de Clermont-Ferrand !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vauzelle

Cet incinérateur constitue une menace cancérigène non pas tant pour les flamants roses – ils sont partis ! – que pour les Arlésiens et les habitants des bords de l'étang de Berre, tout autant que pour les oiseaux et autres gentils animaux de Camargue.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vauzelle

Le Rhône pose un autre problème. Avec Jean-Jack Queyranne, président de la région Rhône-Alpes, nous avons réclamé une analyse des PCB dans ce fleuve pollué, dont les préfets interdisent de boire l'eau – on n'était pas très tenté – mais aussi de manger les poissons qui pourraient y être pêchés.

Enfin, après quinze ans d'efforts et un peu de ridicule, les élus locaux, les habitants et les associations sont reconnus dans leurs droits et leurs devoirs. La République peut être fière de ce qu'elle a fait pour la Camargue. Naturellement, je voterai ce texte avec plaisir et reconnaissance envers le Gouvernement, M. le rapporteur et tous les Camarguais qui ont traversé ces années difficiles avec une infinie patience – et quelquefois un peu d'impatience, il faut bien le dire, compte tenu de notre caractère.

Nous devons rester tous vigilants pour que les choses se passent le mieux du monde, tant du côté de l'eau du Rhône que du côté de l'air environnant l'incinérateur futur, ou d'autres enjeux comme la bonne gestion de la dévolution des biens de la fondation.

Mais j'ai confiance et je remercie la représentation nationale d'aider les Camarguais à retrouver leur sérénité et leur dignité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaxès

Monsieur le président, monsieur le secrétaire État, chers collègues, le texte soumis à notre examen revêt une importance capitale pour l'avenir d'un territoire auquel je suis, comme tant d'autres, profondément attaché.

Nous sommes réunis pour approuver les termes d'un accord trouvé l'été dernier entre l'État et les acteurs locaux. Nous devons cet accord à vos efforts de médiation, monsieur le secrétaire d'État, et à la ténacité des Camarguais. Il met fin à un feuilleton chaotique qui menaçait la pérennité de l'un des fleurons du patrimoine naturel français et européen.

À l'heure où tant de menaces pèsent sur la préservation des zones humides en Europe, où l'Union mondiale pour la nature dresse le constat plus général de l'escalade de la crise de l'extinction des espèces sauvages, y compris en France, on ne peut oublier que la Camargue constitue l'un des plus riches sites naturels du bassin méditerranéen.

Ce territoire abrite près de la moitié des espèces d'oiseaux vivant en Europe, près de la moitié des espèces de mammifères sauvages vivant en France, le tiers des espèces d'amphibiens, 20 % de la flore française. La plupart de ces espèces sont protégées au niveau national et international. C'est donc peu dire que la Camargue est un formidable réservoir de biodiversité.

Comme la grande majorité des habitants et des élus de ce territoire, nous attendions le dénouement que vous nous proposez avec l'adoption de statuts qui vont, enfin, permettre de garantir la sécurité juridique du parc naturel régional de Camargue, d'en assurer la gestion et de préserver l'emploi de ses trente-six salariés.

La création d'un syndicat mixte et la représentation des propriétaires au sein du comité syndical constituent une avancée considérable. Cela dit, il conviendrait sans doute de définir plus clairement le rôle du conseil syndical, instance consultative. C'est une demande présentée notamment par des associations, telle la Ligue pour la protection des oiseaux, et à laquelle nous souscrivons.

Sans doute est-il illusoire de croire que ces nouveaux statuts suffiront, à eux seuls, à assurer la pérennité du parc naturel régional de Camargue. Son avenir dépend aussi des choix qui seront opérés localement, et sur lesquels l'État devrait avoir son mot à dire.

Je partage les propos tenus à l'instant par Michel Vauzelle au sujet des risques qui pèsent sur ce territoire. Et je voudrais en évoquer un autre : la réduction de l'activité de la Compagnie des Salins du Midi et, pire, son éventuelle fermeture qui pourrait remettre en cause l'écosystème camarguais.

La Compagnie des Salins du Midi et des Salines de l'Est, plus gros propriétaire de Camargue avec 14 000 hectares, et dont l'activité a, jusqu'à présent, participé à l'équilibre écologique de la zone humide, est en déclin, notamment à la suite de la fermeture de l'usine Arkema de Saint-Auban, qui était son plus gros client.

Pour ce territoire, les enjeux économiques, sociaux et écologiques sont majeurs, puisque l'avenir des Salins du Midi concerne aussi le bassin d'emploi de Salin-de-Giraud, dont 2 000 emplois dépendent – directement ou indirectement – de l'activité des Salins et de la société chimique Solvay. Sur les 128 emplois des Salins du Midi, seulement 46 seront conservés pour l'exploitation du site !

Mais c'est aussi une question qui intéresse la cohérence de la politique gouvernementale. À titre d'exemple, la réduction de l'activité des Salins a eu pour conséquence que, pour la première fois depuis trente ans, les flamants roses n'ont pas nidifié dans les marais camarguais, suite à l'interruption de la production de sel et du pompage de l'eau. Les marais camarguais sont, en effet, leur seule zone de reproduction en France.

Votre texte emporte notre totale adhésion. En soulevant toutefois ces quelques questions, je rappelle ce fait d'évidence que les parcs naturels régionaux ne sont, en aucun cas, des sanctuaires. Ce sont des espaces vivants dont la gestion suppose non seulement de dégager les moyens financiers et humains utiles à la réalisation des objectifs affichés en matière de développement durable et de préservation de la biodiversité, mais encore la mise en oeuvre de politiques nationales et locales cohérentes en matière d'aménagement du territoire et de développement économique.

Nous comptons donc, monsieur le secrétaire d'État, sur votre vigilance et sur l'attention durable du Gouvernement en faveur du dossier camarguais. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yvan Lachaud

Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, j'ai longtemps hésité à démarrer mon intervention par un morceau de tambourin car, avant d'être député, j'étais tambourinaire et je le suis toujours.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvan Lachaud

Aujourd'hui, il m'est fort agréable d'aborder le sujet du parc de Camargue. Le projet de loi qui nous est soumis est un peu particulier. Non seulement parce qu'il permet à des accents provençaux et languedociens de s'exprimer au sein de l'hémicycle, mais parce qu'il entend régler un cas d'espèce : le statut juridique de l'organisme gestionnaire du parc naturel de Camargue.

Ce texte est justifié par le contexte juridique excessivement complexe qui fait planer, à très court terme, une menace réelle sur la survie institutionnelle de ce parc, alors même que son territoire recouvre des espaces naturels d'une très grande diversité biologique, façonnés par la main de l'homme et dépendant des activités qui y sont pratiquées.

La Camargue est une zone humide située entre les deux bras du delta du Rhône. Elle est avant tout « une production sociale de nature ». Elle est, par sa nature et les aménagements que l'homme lui a apportés, un espace inféodé à l'eau. L'agriculture, la saliculture, la viticulture, la riziculture, la chasse, la pêche, l'élevage, l'exploitation du roseau ou le tourisme sont en effet autant d'activités économiques qui se rapportent à l'eau.

Le fonctionnement du système deltaïque réclame une gestion rationnelle et concertée de l'eau. C'est pour cette raison que le parc naturel de Camargue occupe une place centrale. C'est aussi la raison pour laquelle la Camargue est une terre complexe, mêlant logique conflictuelle et cohabitation harmonieuse. De l'avenir du parc dépend ainsi celui de la Camargue tout entière.

Conscient de la fragilité, mais aussi de la richesse de cette zone humide, les pouvoirs publics ont très tôt protégé ce territoire d'exception. Ainsi ne coexistent pas moins de quatorze statuts de protection différents de la Camargue. Parmi eux, on peut citer la réserve nationale de Camargue, classée en 1975, la réserve naturelle volontaire de la Tour du Valat, classée en 1984. La protection des espaces naturels se poursuit également à travers une politique d'acquisition foncière conduite par le département des Bouches-du-Rhône et le Conservatoire du littoral.

Au plan international, la spécificité et la richesse des espaces naturels de Camargue font également l'objet d'une reconnaissance spécifique à travers sept labels et le réseau Natura 2000. La France a ainsi adhéré, en 1986, à la convention de Ramsar en proposant la Camargue, et a également proposé, en 1977, le classement de la Camargue en réserve de biosphère.

Cependant, cette terre d'exception qu'est la Camargue doit aujourd'hui faire face à un contexte juridique et judiciaire à la fois complexe et incertain. Le parc naturel de Camargue est géré par une fondation que le décret du 12 décembre 1972 a reconnue d'utilité publique. Sa structure originale se justifiait par la spécificité du parc, à savoir un territoire caractérisé par la très forte mobilisation des grands propriétaires terriens. Cela a permis de privilégier un mode de gestion favorisant une participation active et majeure des acteurs camarguais, au-delà de l'État et des collectivités territoriales. Étaient ainsi parties prenantes dans la gestion du parc propriétaires, chasseurs, éleveurs, pêcheurs, riziculteurs, au sein d'une structure que d'aucuns appelaient « le Parlement de Camargue ».

Le décret du 18 février 1998 a renouvelé pour dix ans le classement du parc naturel régional et adopté la charte révisée sur la base des statuts de la fondation de 1979. Mais le classement du parc naturel régional de Camargue vient à échéance le 18 février 2008. Pour que le parc soit à nouveau classé, une révision de la charte est nécessaire, en application des dispositions du code de l'environnement. Or le parc naturel connaît une situation juridique très complexe depuis plusieurs années, situation qui porte gravement préjudice à ce territoire emblématique de notre pays.

Comme vous l'avez indiqué, monsieur le rapporteur, il avait été décidé en 2001 de confier à un GIP, un groupement d'intérêt public, la charge de mener à bien les travaux de révision de la charte du parc de Camargue afin, notamment, de permettre aux propriétaires privés de participer à la structure de gestion du parc. Bien que reposant sur une base juridique incertaine, la création du GIP est le résultat d'une concertation aboutie entre les différents acteurs locaux et témoigne de la capacité des Camarguais à trouver des compromis quand cela s'avère nécessaire.

Toutefois, le Conseil d'État, par une décision du 23 juin 2004, a estimé que seul un syndicat mixte, et non un GIP, pouvait gérer le parc. Une seconde annulation est ensuite intervenue ; il est donc indispensable, aujourd'hui, de stabiliser et de conforter la situation juridique du parc. En outre, au-delà du 20 février 2008, les plus graves menaces pèsent sur son existence même. En cas d'annulation de l'arrêté créant le syndicat mixte, celui-ci devra être mis en liquidation, ce qui entraînerait le licenciement des trente-sept salariés employés par le parc. On compte en outre plus de deux cents emplois associés. Un tel coût social ne serait pas acceptable, d'autant que, dans ces conditions juridiques difficiles, le personnel est très attaché au maintien du parc et à son bon fonctionnement.

Compte tenu des enjeux de préservation et de valorisation des espaces naturels de Camargue, de la renommée du parc au niveau international et des enjeux sociaux, il importe de tout faire pour ne pas en arriver là. C'est pourquoi l'adoption d'un projet de loi définissant une solution spécifique pour le parc naturel régional de Camargue s'avère nécessaire. Pour toutes ces raisons, le groupe Nouveau Centre estime que la voie législative est la meilleure des solutions. Il votera donc en faveur de ce projet de loi qui permet de stabiliser la situation juridique du syndicat mixte créé pour gérer le parc et de garantir, dans des conditions satisfaisantes, la représentation des propriétaires fonciers.

La volonté affichée par l'ensemble des parties prenantes est bien d'assurer une continuité entre la gestion de la fondation et celle du syndicat. Au-delà de l'adoption de ce projet de loi, que nous appelons de nos voeux, les pouvoirs publics doivent poursuivre leurs efforts en faveur de ce territoire d'exception, de manière à dynamiser encore davantage la gestion du parc – notamment en matière de patrimoine immobilier – et à faire face aux nouveaux défis de demain pour cette zone humide, tel le phénomène de tassement du delta.

Ainsi, nous souhaitons que soient mises en place un certain nombre de mesures : la rénovation de la police des eaux ; la poldérisation des bassins hydrauliques, notamment celui de Fumemorte ; la mise en place d'une gestion hydraulique globale dont le parc serait l'élément fédérateur ; le renforcement du rôle de l'Agence de l'eau, qui devrait davantage contribuer au financement des moyens mis en oeuvre pour réhabiliter la zone humide ; la lutte contre les inondations, qui, comme le rappelait M. le président de la région PACA, doit être une priorité absolue, notamment par la mise en place de canaux de dérivation.

Nous souhaitons aussi que, dans les mesures adoptées, soit portée une attention particulière – je le dis devant le député-maire du Grau-du-Roi – au littoral camarguais s'étendant du Vidourle du Grau-du-Roi jusqu'à Port-Saint-Louis-du-Rhône, car il subit de façon dramatique les assauts de plus en plus forts de la mer.

La Camargue n'est pas sans conflits : celle de demain n'échappera donc pas à la règle. Mais elle devra trouver un équilibre économiquement viable, sociologiquement harmonieux, écologiquement durable et juridiquement stable. Parce que ce projet de loi est une pierre importante dans la construction de cet équilibre, notre groupe le votera, et souhaite que les pouvoirs publics prennent conscience de l'importance de la préservation d'un territoire doté d'une si grande richesse naturelle et humaine. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Vandewalle

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, depuis leur création en 1967, les parcs naturels régionaux ont montré qu'ils étaient des acteurs originaux et remarquables de l'aménagement du territoire – si remarquables, d'ailleurs, qu'ils font école dans de nombreux pays.

Un parc naturel régional, c'est un territoire de projet, fondé sur une charte qui définit des objectifs politiques communs résultant d'une concertation approfondie. Son mode de gouvernance original associe tous les acteurs du territoire : communes, départements, régions, État, partenaires socio-économiques et associatifs. En quarante ans, un seul parc naturel régional a disparu, et ce pour des raisons objectives tenant à l'évolution qualitative de son territoire. Personne ne souhaite que le parc naturel régional de Camargue soit le second : telle est la finalité du projet de loi qui nous est soumis.

En effet, dans le cas qui nous occupe, tous les critères d'attribution du label « parc naturel régional » sont respectés. Tout le monde connaît ce territoire à la richesse patrimoniale exceptionnelle et incontestée, comme l'ont souligné les précédents orateurs, et souhaite pérenniser le parc. Or son avenir est compromis par une situation juridique inextricable qui, si elle n'est pas résolue rapidement, mettra en péril son existence à brève échéance.

Lors de sa création en 1972, les initiateurs du parc ont confié sa gestion à une fondation de droit privé. Ce mode d'organisation s'est, au fil du temps, révélé inopérant, et il a été à l'origine de nombreuses difficultés de gestion. En mars 2002, la fondation a donc été remplacée par un GIP dont la principale mission était de renouveler la charte. Mais, le 23 juin 2004, le Conseil d'État a annulé cette décision et indiqué qu'en application de la loi du 2 février 1995, seul un syndicat mixte pouvait conduire cette révision.

Un syndicat mixte a donc été créé en janvier 2005. La situation semblait réglée, mais le Conseil d'État a considéré, dans un arrêt du 19 février 2007, que ce changement d'organisme gestionnaire nécessitait la révision de la charte dans son intégralité et que cette révision aurait dû être conduite par le précédent gestionnaire, c'est à dire par la fondation. Le Conseil d'État a donc annulé le décret du 9 novembre 2004 qui autorisait le transfert de la fondation vers le syndicat mixte.

Bref, ce feuilleton juridique tourne en rond quelque part entre Kafka et Courteline. Une situation aussi ubuesque compromet l'avenir du parc naturel régional de Camargue, qui se trouve dans une impasse juridique. Privé d'un organisme de gestion légal, il est dans l'impossibilité de mener à bien le renouvellement de sa charte, laquelle arrive à échéance le 18 février prochain.

Faut-il rappeler que les conséquences d'une disparition du parc seraient lourdes pour la vie et l'économie locales ? Outre le dynamisme qu'il impulse en fédérant les efforts de tous, trente-huit personnes travaillent actuellement pour le parc, et l'on compte environ deux cents emplois associés. Si aucune solution ne devait être trouvée, ces personnels pourraient se retrouver au chômage et les nombreux programmes d'action du parc seraient interrompus ou retardés.

Vous l'avez tous compris, mes chers collègues, la loi est désormais le seul et unique recours pour sauver le parc. Comme l'ont clairement indiqué M. le secrétaire d'État et M. le rapporteur, le projet de loi vise d'abord à confier la gestion du parc naturel régional à un syndicat mixte, conformément aux dispositions actuelles du code de l'environnement et à la volonté clairement exprimée par les différents acteurs locaux. L'exception camarguaise n'a plus lieu d'être. Il convient toutefois de souligner une particularité : trois propriétaires siégeront au comité syndical au titre du syndicat mixte de gestion des associations syndicales autorisées du pays d'Arles. Cette disposition particulière se justifie par leur rôle dans l'histoire de l'aménagement de ce territoire. Parallèlement, l'article 4 donne au syndicat le temps nécessaire à la révision de sa charte en prolongeant le classement jusqu'au 18 février 2011.

Ce projet de loi, et je m'en réjouis en tant que représentant de la nation mais aussi de président d'un parc naturel régional, vise donc à inscrire le parc naturel régional de Camargue dans le droit commun, et ce afin d'assurer son avenir en respectant le souhait exprimé par l'ensemble des acteurs locaux : nous sommes tout à fait dans l'esprit des parcs naturels régionaux.

Il est à noter que l'éventuelle création de la commune de Salin sera compatible avec la présente loi. Cette nouvelle commune pourrait en effet, si nécessaire, trouver sa place dans le syndicat mixte en vertu des dispositions de l'article 3.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vauzelle

L'idée de créer cette commune est dépassée !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Vandewalle

Mes chers collègues, les journées nationales des parcs naturels régionaux ont eu lieu l'an dernier en Camargue. J'ai pu apprécier personnellement la motivation de tous les acteurs locaux et l'importance du travail accompli par le parc. Je me réjouis que la loi mette un point final à un feuilleton juridique qui n'a que trop duré.

Je tiens donc à saluer l'action du Gouvernement, qui a pris le problème à bras-le-corps avec la célérité qui s'imposait. Grâce à ce projet de loi, l'avenir du parc naturel régional de Camargue est assuré : c'est pourquoi le groupe UMP le votera.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, comme on l'a plusieurs fois rappelé, le projet de loi qui nous est soumis cet après-midi a pour objet de régler un cas particulier, celui du statut juridique de l'organisme gestionnaire du parc naturel régional de Camargue.

En effet, un contexte juridique et judiciaire complexe et incertain menace l'existence même du parc, qui fut en 1970, dans la chronologie des parcs, le troisième créé. D'après sa charte, il est géré par une fondation. Cette structure de gestion s'étant révélée inadéquate, il avait été décidé, en 2001, de confier à un groupement d'intérêt public la charge de mener à bien les travaux de révision de la charte du parc de Camargue, afin notamment de permettre aux propriétaires privés de participer à sa structure de gestion.

Le Conseil d'État estimait toutefois, dans son arrêt du 23 juin 2004, que seul un syndicat mixte pouvait gérer le parc naturel régional de Camargue – ce que confirma la loi n° 95-101 du 2 février 1995. Le GIP fut donc mis en liquidation et, par arrêté préfectoral du 1er décembre 2004, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, le département des Bouches-du-Rhône et les communes d'Arles et des Saintes-Maries-de-la-Mer créèrent un syndicat mixte.

Mais la coexistence entre la nouvelle structure et la fondation engendre des difficultés quotidiennes de fonctionnement qui ne peuvent perdurer. Ainsi, aucune convention de mise à disposition n'ayant été signée entre les deux organismes, le PNR, qui utilise les locaux, propriété de la fondation, peut être considéré comme occupant sans titre.

Deux recours ont été intentés en décembre 2004, l'un contre l'arrêté préfectoral de création d'un syndicat mixte, devant le tribunal administratif de Marseille, l'autre contre le décret modificatif de transfert de gestion du parc au syndicat mixte, devant le Conseil d'État. Dans son arrêt du 19 février 2007, ce dernier a annulé le décret du 9 novembre 2004, considérant que le changement d'organisme gestionnaire nécessitait la révision de la charte dans son intégralité, révision qui aurait dû être assurée, conformément à la réglementation en vigueur, par l'organisme gestionnaire du parc, en l'occurrence la fondation.

Depuis février 2007, le syndicat mixte expédie les affaires courantes et le trésorier-payeur général, dans l'attente d'une situation juridique plus claire, a accepté de régler les dépenses de fonctionnement et les salaires jusqu'en décembre 2007.

Aujourd'hui, face au risque d'annulation de l'arrêté créant le syndicat mixte et à la nécessité d'engager, dès le 20 février 2008, la procédure de révision de la charte, les plus graves menaces pèsent sur l'existence même du parc naturel régional de Camargue, alors que seul un PNR, nous le savons, est à même d'assurer la préservation, la gestion et le développement de ce territoire emblématique d'exception, modelé par l'activité humaine.

La Camargue se caractérise avant tout par la richesse biologique de ses écosystèmes. Située sur l'axe de migration des oiseaux du Nord de l'Europe, elle est à la fois une zone d'hivernage, une zone de nidification et une zone de halte migratoire. On y dénombre 398 espèces, soit plus de la moitié des espèces présentes en France, dont 132 espèces nicheuses.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

La Camargue est le seul site de nidification des flamants roses en France et le plus important de l'Ouest méditerranéen. Dix espèces d'amphibiens, soit 31 % de ceux répertoriés en France, et quinze espèces de reptiles sont présentes en Camargue, qui est aussi un site d'importance nationale pour la cistude d'Europe.

Enfin, 44 espèces de mammifères y sont recensées, sur les 109 répertoriées en France, dont quinze possèdent une valeur patrimoniale forte comme le castor, la genette, la musaraigne aquatique et le campagnol amphibie.

Sur le plan international, la spécificité et la richesse des espaces naturels de Camargue sont reconnues par sept labels, dont la convention de Ramsar et le classement en réserve de biosphère.

Mais cette zone humide naturelle d'intérêt majeur est en réalité un milieu artificiel géré par l'homme et dépendant étroitement d'activités agricoles telles que l'élevage extensif de taureaux et de chevaux, la riziculture et la saliculture qui ont façonné ses paysages.

Au-delà des péripéties juridiques, c'est bien le bilan du parc en matière de préservation et de mise en valeur du patrimoine naturel qui plaide en faveur de sa pérennisation. On peut citer la réserve nationale de Camargue qui, avec ses 13 000 hectares, est l'une des plus étendues d'Europe, et la réserve naturelle volontaire de la Tour du Valat, classée en 1984, d'une superficie de 1 071 hectares. On peut également citer les acquisitions foncières opérées par le département des Bouches-du-Rhône ou le Conservatoire du littoral, les conventions passées avec des partenaires institutionnels en vue de préserver et de mettre en valeur des espaces naturels, ou encore les sites Natura 2000 qui couvrent la totalité du territoire du Parc, sous l'autorité du président du comité de pilotage, opérateur des documents d'objectifs.

Outre sa portée symbolique, la perte du label de parc naturel régional anéantirait le bénéfice de plus de trente années d'action.

Je rappelle qu'au cours des dernières années, plusieurs contrats – dont le contrat de parc avec l'État et la région – ont permis d'engager des budgets annuels de près de 3 millions d'euros qui ont permis de financer cinquante programmes d'action chaque année. Plus de cinquante-cinq structures associatives et professionnelles ont participé activement à la définition et à la mise en oeuvre de ces programmes d'action par le biais des dix commissions de travail, du conseil de parc et de nombreux groupes de travail et d'animation. Une concertation sans précédent a d'ailleurs été organisée pour la révision de la charte du parc prévue pour 2008, et un projet d'extension du parc naturel régional a été lancé sur les territoires d'Arles-Mas-Thibert et de Port-Saint-Louis-du-Rhône.

Le partenariat engagé par le syndicat mixte, les collectivités et l'équipe technique a aussi permis le renouvellement par l'UNESCO de la réserve de biosphère à l'échelle de la grande Camargue biogéographique. Le parc a été lauréat des appels à projets nationaux pour la gestion intégrée des zones côtières. Il a aussi été désigné pôle d'excellence rurale et programme européen interrégional « Terre d'eau » . Il pilote en outre un contrat de delta, en vue d'une meilleure gestion de l'eau et des milieux aquatiques à l'échelle de la Camargue, avec le soutien financier des projets d'aménagement, et il est l'un des partenaires du plan Rhône pour un meilleur écoulement des eaux de crue vers la mer. Enfin, il anime des manifestations culturelles et pédagogiques ambitieuses et populaires.

Aujourd'hui, le territoire de Camargue a besoin d'une solution juridique pérenne. Après concertation de toutes les parties prenantes, le Gouvernement a retenu le recours à la loi, suggéré par la section du rapport et des études du Conseil d'État.

Le projet de loi qui nous est soumis, outre qu'il permet de satisfaire au droit commun qui veut qu'un parc naturel régional soit géré par un syndicat mixte, permet aussi de déroger aux règles de droit commun relatives à sa composition puisqu'il permet, comme l'avaient souhaité les acteurs locaux le 2 août 2007, à des représentants des propriétaires fonciers de participer aux instances délibératives du syndicat mixte, et non pas seulement aux instances consultatives.

Avec ce projet de loi, la structure juridique actuelle du parc est stabilisée. Nous contribuons ainsi au maintien et au développement de l'outil le mieux adapté aux problématiques de ce territoire exceptionnel. C'est pourquoi le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui vise en effet à sortir de l'impasse juridique dans laquelle est enlisé le parc naturel de Camargue depuis plusieurs années en prolongeant la validité de son classement jusqu'au 18 février 2011.

Ce texte a donc ceci de particulier qu'il n'existe que pour donner une issue à un cas d'espèce. Mais, malgré un objectif apparemment restreint, son vote permettra un triple dénouement : il mettra fin à la menace de licenciement des employés ; il garantira la préservation de l'espace ; il permettra au territoire camarguais de conserver son label. Les trente-sept employés se sont retrouvés face à une situation de conflit, dans l'incertitude totale quant à la légalité du statut de leur employeur et à la pérennité de leurs emplois.

Pour remédier à l'impossible coexistence entre un groupement d'intérêt public et une fondation, la solution proposée d'officialiser un syndicat mixte me semble la plus appropriée, et la logique commande qu'il soit constitué d'élus, d'instances officielles locales comme le département, d'acteurs socioprofessionnels du territoire, mais aussi, comme il est de tradition en Camargue, de propriétaires fonciers. Je ne m'attarderai donc pas sur le bien-fondé de ce texte, que j'approuverai.

J'aimerais toutefois poser quelques questions à M. le secrétaire d'État. Tout d'abord, l'article 3 prévoit que le retrait de l'autorisation du syndicat et sa dissolution « sont décidés selon les règles du droit commun ». De quel syndicat s'agit-il, les derniers alinéas de l'article 2 faisant référence à la fois au syndicat mixte de gestion des associations syndicales du pays d'Arles et au syndicat mixte de gestion du parc naturel régional ? Je souhaite que vous m'apportiez un éclaircissement, vous-même ou M. le rapporteur, sur cette imprécision rédactionnelle.

Enfin, pour mettre à profit les derniers instants de mon temps de parole, je voudrais évoquer quelques grands enjeux environnementaux qui caractérisent ce territoire. La Camargue est menacée par une pression démographique et immobilière toujours plus forte, car elle est devenue un lieu de villégiature, ce qui engendre un trafic routier en augmentation constante et une urbanisation de plus en plus dense. En particulier, le contournement autoroutier d'Arles porte une atteinte grave à l'intégrité écologique, à la faune et à la flore de la Crau et de la Camargue, son tracé traversant plusieurs sites protégés, notamment au titre du programme The Man and the Biosphere de l'UNESCO. Cet exemple nous rappelle à quel point les paysages et les ressources naturelles sont menacés par les prédateurs que sont le bitume et le béton…

Enfin, il m'est arrivé de séjourner en Camargue, où j'ai pu apprécier de magnifiques paysages, et de m'y baigner. J'ai été assez surpris de lire dans les journaux locaux qu'un taux anormalement élevé de radioactivité avait été décelé sur certaines plages des Saintes-Maries-de-la-Mer. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'État, nous préciser le taux et l'origine de cette radioactivité, de nature à inquiéter les touristes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Naturellement, monsieur le président ! Cela dit, compte tenu de toutes les avancées qu'il contient, j'invite mes collègues à voter en faveur de ce projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, malgré le talent indéniable du porte-parole du Gouvernement, auquel était déjà échu le soin de conduire ce débat au Sénat, je regrette l'absence du ministre d'État. J'aurais aimé qu'il nous entende, une fois n'est pas coutume, exprimer notre approbation unanime à l'égard de ce projet de loi, et qu'il entende l'opposition rendre hommage au travail accompli par M. Borloo et Mme Kosciusko-Morizet pour trouver une issue à une situation inextricable.

Ce projet de loi, attendu par tout un territoire, comme en a témoigné mon collègue Michel Vauzelle, est l'occasion pour le législateur de démontrer que la protection de l'environnement doit prévaloir sur toute autre considération et que nous sommes capables, pour la préservation d'un parc, de dépasser certains blocages, qu'ils soient politiques ou juridiques.

La Camargue est la première zone humide de France. Je suis moi-même l'élue d'une circonscription qui compte sur son territoire une partie de la deuxième zone humide de France. Il s'agit du Marais poitevin qui, il y a dix ans, a perdu le label de parc naturel régional. Michel Vauzelle a parlé, à juste titre, de drame potentiel, et je peux témoigner des conséquences d'une telle perte.

La première et la deuxième zone humide de France, si différentes du point de vue de leurs paysages, ont beaucoup de points communs, liés à leur richesse. À l'heure du Grenelle de l'environnement et de la nécessité de préserver la biodiversité, ces zones naturelles, façonnées par l'homme au fil des siècles, représentent des enjeux considérables. Mais ces espaces remarquables sont aussi fragiles car ils reposent sur des équilibres précaires et complexes.

Le Marais poitevin a donc perdu son label en 1996. En 1999, la France était condamnée pour non-respect de la directive « oiseaux ». En 2002, l'État a défini un plan d'action et pris un certain nombre d'engagements fermes, parmi lesquels la refondation d'un parc naturel régional.

C'est sur cette base que l'Europe a levé ses sanctions en 2005. Aujourd'hui, le processus de réécriture de la charte – avec enquête publique et délibération des collectivités territoriales – a été conduit à son terme et le dossier est depuis le mois de juin entre les mains de l'État. Il a été transmis officiellement au Gouvernement le 26 octobre dernier, c'est pourquoi je voudrais profiter de notre débat sur ce beau parc naturel de Camargue…

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

…pour élargir la discussion et vous interroger, monsieur le secrétaire d'État, sur le Marais poitevin. En effet, il faut éviter que ce territoire ne se retrouve demain dans une situation politique ou juridique inextricable comparable à celle de la Camargue.

Je voudrais donc savoir à quelle date le Gouvernement compte transmettre le dossier du Marais poitevin à la fédération national des parcs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La discussion générale est close.

La parole est à M. le secrétaire d'État.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de la consommation et du tourisme

Pour répondre aux députés qui se sont exprimés…

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de la consommation et du tourisme

…ainsi qu'à l'ensemble de la représentation nationale, je tiens d'abord à les remercier, sincèrement et chaleureusement, pour les propos tenus dans ce débat. Confrontés à une situation juridique relativement inextricable, les orateurs se sont montrés très précis tout en faisant preuve d'un grand sens de l'ouverture. Le climat constructif qui a régné sur l'ensemble des bancs de cet hémicycle est à la hauteur de l'enjeu et de ce qu'attend de nous aujourd'hui le territoire de Camargue.

Cher Bernard Reynès, permettez-moi de saluer le travail que vous avez effectué sur l'ensemble de ces questions. Vous avez été un défenseur efficace de la Camargue et votre mobilisation est à la hauteur de la richesse de ce territoire. Comme Yves Cochet, vous avez soulevé la question de l'interprétation du terme « syndicat » employé à l'article 3 du projet de loi. Il s'agit évidemment du syndicat mixte du parc naturel régional.

Monsieur Yves Vandewalle, je sais à quel point les questions relatives aux parcs naturels régionaux vous tiennent à coeur. Vous avez d'ailleurs fait un très bon tableau descriptif de ce label et montré son intérêt en vous servant de votre expérience du territoire du parc naturel régional de Chevreuse que vous avez transposé au cas de la Camargue. Vous avez raison de souligner que cet outil permet notamment de concilier des usages divers.

Monsieur Vauzelle, je tiens à saluer en vous un des acteurs majeurs des accords qui ont permis le 2 août dernier à l'ensemble des parties présentes de donner une nouvelle perspective au parc régional naturel de Camargue. Je voudrais souligner devant l'ensemble de la représentation nationale l'esprit constructif qui a été le vôtre. Votre attitude n'était pas motivée que par les liens personnels que vous entretenez avec la Camargue, elle l'était aussi par votre volonté de mettre en avant les intérêts supérieurs de ce territoire, au-delà des querelles politiciennes dans lesquelles les uns et les autres nous aurions pu sombrer.

Vous avez attiré l'attention du Gouvernement sur la question de la dévolution des biens de la fondation et vous avez raison. Il faudra que nous suivions attentivement ce sujet car ces biens ont été acquis pour l'essentiel avec l'appui des fonds publics. Une transaction est en cours et nous serons vigilants pour qu'elle se déroule dans les délais les plus brefs – c'est en effet cette dévolution qui permettra d'agir immédiatement – mais aussi dans le respect des conditions d'acquisition de ces biens.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de la consommation et du tourisme

Monsieur Vaxès, vous avez souligné que le parc régional naturel de Camargue ne devait pas être un sanctuaire. Votre vision constructive de ce territoire et votre souci de concilier sa préservation et son développement économique est particulièrement juste. Je souhaite également vous remercier pour l'écoute dont vous avez fait preuve sur ce sujet.

Je salue l'expertise d'Yvan Lachaud et à travers lui le travail fait par le groupe Nouveau Centre en faveur de la solution négociée entre Jean-Louis Borloo et les acteurs locaux. J'ai pris bonne note de vos propositions concernant des mesures à prendre dans le domaine hydraulique, relatives à la police de l'eau, à l'agence de l'eau, à la poldérisation mais aussi à la prévention contre les inondations. Je les relaierai auprès du ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables. Vous avez bien montré combien les territoires façonnés par l'eau étaient complexes.

Monsieur Yves Cochet, j'ai répondu à votre question sur le syndicat de l'article 3. Vous m'avez aussi interrogé sur d'éventuelles infrastructures routières : l'enquête publique est en cours, il faut laisser se dérouler la procédure de consultation. Vous me pardonnerez aussi de souligner, avec un petit clin d'oeil, qu'un baigneur même occasionnel et passionné par les territoires de zones humides ne fait pas un expert.

Monsieur Jean-Paul Chanteguet, vous connaissez aussi bien la Camargue que les zones humides de façon plus globale, grâce à votre région de la Brenne. Comme la Camargue, il s'agit d'un milieu extrêmement riche qui a fait l'objet en 1991, vous y avez fait allusion, d'une désignation au titre de la convention de Ramsar relative aux zones humides d'importance internationale. Je vous remercie du soutien que vous avez apporté à ce projet de loi au nom du groupe socialiste.

Madame Batho, comme vous l'avez remarqué, ce projet de loi porte bien sur la Camargue. Cette donnée ne m'empêche pas de répondre à votre question plus générale – et parfaitement légitime – sur l'avenir du Marais poitevin qui traduit une préoccupation des enjeux nationaux en matière de parc naturel régionaux. La demande de classement du Marais poitevin en parc naturel régional retient, soyez en assurée, toute l'attention du Gouvernement. Vous serez, bien entendu, tenu informée de l'évolution de ce dossier et je vous rappelle que l'État est le garant de la politique des parcs national régionaux. Il assume ce rôle à la demande des parcs naturel régionaux mais aussi des régions, comme en a témoigné la déclaration tripartite adoptée en mars 2003 par les trois partenaires de cette politique cogérée.

Où en est la procédure concernant le Marais poitevin ? Localement, elle a été menée à son terme et le projet de charte a été transmis il y a quelques jours par le préfet coordonnateur, celui de la région Poitou-Charentes. La décision s'appuiera sur l'examen attentif de trois questions essentielles. En quoi le contenu de la charte répond-il clairement aux ambitions du plan gouvernemental dont les objectifs ont été acceptés par toutes les parties prenantes ? En quoi le périmètre du projet de parc naturel régional, tel qu'il ressort de la délibération des collectivités territoriales, répond-il à l'exigence de cohérence en matière de gouvernance ? Enfin, en quoi le processus de construction du projet présente-t-il toutes les sécurités juridiques ? L'exemple de la Camargue nous montre que nous devons être vigilants sur tous ces points afin que les lendemains ne déchantent pas. Madame Batho, je conclurai en soulignant à quel point votre intervention était intéressante pour montrer les enjeux soulevés, au-delà de la Camargue.

Finalement, tous ceux qui sont intervenus dans ce débat avaient, à divers titres, des liens avec la Camargue, soit qu'ils vivent sur ce territoire ou à proximité, soit en raison d'engagements locaux en faveur des zones humides ou des parcs naturels régionaux, soit enfin plus généralement parce que les uns ou les autres sont préoccupés par l'environnement – c'est le cas d'élus de territoires éloignés de la Camargue voire de zones de montagne, comme moi.

La Camargue concerne l'ensemble de nos concitoyens et vous avez tous insisté avec raison sur la nécessité d'agir vite. Ce projet de loi nous permettra enfin de sortir d'une impasse. La Camargue fait décidément des miracles puisqu'elle nous a permis de travailler aujourd'hui dans un climat constructif et unanime. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Devant cette belle unanimité, j'appelle les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

Les articles 1 à 4 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article1er est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Je mets aux voix l'article 3.

(L'article 3 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Après l'article 4, je suis saisi d'un amendement n° 1 .

La parole est à Mme Delphine Batho, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Avant de présenter cet amendement, je voudrais dire à Laurent Wauquiez qu'il n'a pas complètement répondu à ma question. Je lui demandais si le Gouvernement allait transmettre le dossier du Marais poitevin à la fédération nationale des parcs. Mes chers collègues, je suis têtue et je l'assume, mais cette question n'est pas sans rapport avec le parc naturel régional de Camargue, car les zones humides sont les régions les plus menacés du monde. Aussi, lorsque est évoqué un espace remarquable tel que la Camargue, il n'est pas possible d'oublier la présence sur le territoire national de son frère – ou sa soeur – : le Marais poitevin.

Mon amendement n° 1 est un amendement d'appel. Il n'est pas destiné à perturber l'adoption conforme du projet de loi que nous discutons aujourd'hui mais à permettre que la volonté du législateur soit clairement exprimée. En effet, le 2 mai dernier, un décret a modifié les règles applicables aux procédures de classement en parc naturel régional. La question se pose donc de savoir si les procédures engagées avant la publication de ce décret relèvent de ces nouvelles règles. Le processus d'obtention du label « parc naturel régional » est long et peut prendre plusieurs années. Une fois arrivé à son terme, alors que l'État doit prendre un arrêté de classement en parc naturel régional, est-ce le droit en vigueur au moment du lancement de la procédure qui prévaut ou le droit modifié depuis par voie de décret ou par la loi ? Si ce problème juridique n'est pas clarifié, nous risquons de faire face à un très important contentieux. Il paraît donc nécessaire que le Gouvernement s'exprime pour bien préciser quelle était son intention lors de la publication du décret du 2 mai 2007.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Reynès

La commission a repoussé cet amendement pour deux raisons. L'une est plutôt formelle. En effet, il ne vous a pas échappé qu'il était urgent d'adopter ce projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Reynès

Une nouvelle navette avec le Sénat serait préjudiciable. Nous sommes confrontés à deux échéances, celle de janvier 2008, avec le risque de dissolution du syndicat mixte, et, bien sûr, celle de février 2008 avec la perte du label parc naturel régional de Camargue.

Une seconde raison porte sur le fond de cet amendement. Compte tenu du temps nécessaire à la révision de la charte d'un parc naturel régional, le vote de cet amendement conduirait à refuser de prendre en compte toute évolution législative ou réglementaire et à figer les chartes des parcs naturels régionaux au niveau du droit en vigueur au moment de leur élaboration : ce n'est pas envisageable. Le droit de l'environnement évolue souvent dans un sens très positif s'agissant des espaces protégés et les chartes doivent évoluer avec lui. Cet amendement remet en cause la révision des chartes.

Pour ces deux raisons, la commission a repoussé ces amendements.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de la consommation et du tourisme

Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement pour deux raisons. D'une part, si vous votiez le moindre amendement – et même si cet argument ne doit pas lier notre débat –, nous n'arriverions pas à aboutir à l'adoption de ce projet de loi avant la date couperet pour la fin du classement. Il faut être lucide : cela aboutirait à tuer le classement de la Camargue en parc naturel régional.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

J'ai dit qu'il s'agissait d'un amendement d'appel !

Debut de section - PermalienLuc Chatel, secrétaire d'état chargé de la consommation et du tourisme

Un amendement d'appel ! Tout ceci est très raffiné.

D'autre part, madame Batho, l'avis défavorable du Gouvernement concerne aussi le fond de votre amendement. Ce dernier vise à clarifier les règles de droit applicables à la procédure de classement et à les figer à la date à laquelle le classement est obtenu. En termes de droit public, cela serait difficile à gérer : cette cristallisation du droit applicable sera extrêmement complexe. Par ailleurs, le droit en matière environnemental a plutôt tendance à s'améliorer et il serait préférable d'introduire la souplesse dont nous avons besoin plutôt que d'empêcher les évolutions. Je ne tire pas les mêmes conclusions que vous de l'exemple de la Camargue : ce qu'il faut mettre en cause dans ce cas, c'est le manque d'adaptation à un droit en évolution, et non l'inverse. Votre « appel » a été entendu, j'espère que nous n'irons pas jusqu'au bout de la logique de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Je retire l'amendement n° 1 , mais je tiens à souligner que M. Wauquiez ne répond pas du tout à la question que j'ai posée.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, ratifiant l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative à la partie législative du code du travail (nos 190, 436).

La parole est à M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Monsieur le président, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les députés, ce n'est un secret pour personne : le code du travail est devenu particulièrement difficile à lire et donc à comprendre. Ce code, qui régit les rapports quotidiens entre employeurs et salariés, concerne pourtant plus de seize millions de personnes dans notre pays. Nous devons donc le rendre plus accessible et plus facile à utiliser.

Tel était l'objet des travaux de recodification lancés en février 2005, qui ont abouti à l'ordonnance du 12 mars 2007, adoptée en première lecture par le Sénat le 26 septembre dernier et qu'il vous est demandé aujourd'hui de ratifier. Elle est le résultat de plus de deux ans de travaux patients et concertés, menés par une mission composée de six agents travaillant à temps plein au ministère du travail dans un seul but : rendre le code du travail plus lisible et faciliter la vie quotidienne de ses utilisateurs.

Tout le monde s'accorde à reconnaître que le code du travail n'est pas un code comme les autres. Aussi toutes les garanties ont-elles été apportées pour que les travaux se déroulent dans les meilleures conditions, en bénéficiant des meilleures expertises possibles et de l'avis – je tiens à le souligner – d'un comité ad hoc de partenaires sociaux. Destinataires de la totalité des travaux de la mission de recodification, ces derniers ont été réunis à près de vingt reprises depuis le début des travaux. Ils y ont participé activement et ont fait part de leurs observations, article par article, démontrant en permanence leur souci de voir respecter la règle du droit constant, suggérant des améliorations ou des corrections qui, dans l'immense majorité des cas, ont été retenues.

Un comité d'experts a également été mis en place pour la circonstance, composé d'un membre honoraire et d'un magistrat en exercice de la Cour de cassation, d'un avocat spécialisé, d'un universitaire et d'un directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle. Également destinataires de l'intégralité des travaux, les experts ont répondu à toutes les questions de la mission ou se sont saisis eux-mêmes de toutes les questions soulevées par les travaux.

Enfin, tout le processus a été placé sous l'égide et le contrôle permanent de la commission supérieure de codification, qui a salué, dans son dernier rapport annuel, le caractère exemplaire de cette opération. Je tiens à le préciser, car j'ai lu et entendu, ces derniers jours, de nombreuses contrevérités, auxquelles je répondrai d'ailleurs point par point au cours du débat. J'ajoute que la commission des affaires sociales du Sénat s'est également félicitée, en première lecture, du travail accompli. Il ne s'agit pas d'adresser un satisfecit au gouvernement actuel ou au précédent, mais de montrer que nous avons respecté la logique du droit constant et que ce débat n'a donc rien de passionnel.

Par ailleurs, adoptant systématiquement le point de vue des utilisateurs – salariés, employeurs, organisations syndicales –, les codificateurs ont rédigé des articles plus courts et plus fluides pour les rendre plus compréhensibles. Le code a ainsi été réduit de 10 %.

Le Sénat, qui a adopté volontiers ce nouveau code en première lecture, l'a amélioré en votant un certain nombre d'amendements, soit pour intégrer dans l'ordonnance du 12 mars 2007 des textes parus concomitamment à cette dernière, soit pour corriger des erreurs matérielles, inévitables dans un projet d'une telle ampleur et qu'il convenait évidemment de rectifier pour respecter le droit constant.

Deux amendements importants visent à accompagner le changement que constitue l'arrivée de ce nouveau code. D'une part, la possibilité sera donnée aux conseillers prud'homaux de bénéficier d'une semaine de formation supplémentaire en 2008, afin qu'ils puissent notamment s'approprier le nouveau code. D'autre part, le code entrera en vigueur le 1er mai 2008, soit quatre mois après la parution de la partie réglementaire, programmée au tout début de l'année 2008, pour laisser le temps à chacun de se familiariser avec ce nouvel outil. Il fallait se donner le temps de l'appropriation, tout en limitant la période durant laquelle deux codes du travail vont, de fait, exister, afin de ne pas compliquer inutilement la vie des utilisateurs. À cet égard, la date du 1er mai représente un bon équilibre, même si certains y verront un symbole.

Quelques amendements vous seront soumis qui concernent soit des dispositions législatives modifiant le code du travail qui ont été adoptées depuis le vote du Sénat en première lecture – c'est le cas de certaines dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 –, soit des modifications qui se sont révélées nécessaires lors des travaux de recodification de la partie réglementaire, mais qu'il était impossible d'anticiper avant l'achèvement de ces travaux.

Par ailleurs, puisque le nouveau code changera les habitudes, j'ai d'ores et déjà pris des dispositions pour m'assurer de sa bonne diffusion et de son appropriation par tous les acteurs quotidiens de la relation de travail. Deux logiciels ont ainsi été développés par mes services, qui permettent d'assurer la correspondance entre les anciens et les nouveaux articles et de retrouver un article par mot-clef. Ils seront mis à la disposition du plus grand nombre sur Internet. L'un d'entre eux a déjà été adressé aux partenaires sociaux afin qu'ils puissent le tester.

J'ai également voulu déployer une centaine de formateurs référents sur tout le territoire, afin qu'ils forment à leur tour l'ensemble des agents des services déconcentrés du ministère du travail, mais aussi, bien sûr, les usagers et les partenaires qui en feront la demande sur le terrain. Des réunions ont commencé à se tenir, notamment à Chambéry, en Savoie, où, il y a quelques jours, un public de partenaires sociaux, d'avocats, d'utilisateurs du code a pu être informé des nouvelles dispositions. Une campagne de communication viendra bien sûr compléter l'édifice.

Mesdames, messieurs les députés, madame la rapporteure – je tiens à saluer votre travail –, parce que le droit doit être au service des hommes, nous vous présentons un code du travail rénové et rendu pleinement accessible. Proposer un outil plus simple au service de tous et dont l'appropriation est facilitée, apporter des éclaircissements sincères à toutes les questions de bonne foi : tel est l'esprit dans lequel nous vous présentons ce texte, que nous vous demandons d'approuver. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est àMme Jacqueline Irles, rapporteure de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Irles

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui, après qu'il a été voté par le Sénat le 26 septembre dernier, a pour objet de ratifier l'ordonnance du 12 mars 2007, qui instaure la partie législative du nouveau code du travail, c'est-à-dire de l'ancien code intégralement réécrit à droit constant.

Je rappelle que la réécriture du code du travail, ou sa recodification, a été lancée début 2005 par Gérard Larcher, alors ministre du travail, avec un objectif clair : mettre à la disposition des employeurs et des salariés une base juridique plus accessible dans la forme mais présentant, sur le fond, une continuité totale avec l'ancien code, selon le principe de la recodification à droit constant.

Le code en vigueur remonte à 1973 et a été depuis lors considérablement modifié et enrichi, si l'on peut dire, ce qui en a fait un document difficilement utilisable pour les non-spécialistes. On y trouve des articles de plusieurs pages et la numérotation est devenue impénétrable : par exemple, l'article L. 322-4-16-8 ne doit pas être confondu avec l'article L. 322-4-16 ni avec l'article L. 322-4-8.

Pendant presque trois ans, un travail considérable, qu'il convient de saluer, a été réalisé. C'est l'ampleur et la durée de cette tâche qui justifient le choix d'une recodification par voie d'ordonnance, après l'habilitation donnée au Gouvernement par le législateur. Au demeurant, le recours aux ordonnances est devenu classique, ces dernières années, pour traiter trois types de sujets techniques : l'extension et l'adaptation aux collectivités d'outre-mer des dispositions législatives nationales, la transposition des directives communautaires et, enfin, la codification.

Dans le cas présent, la méthode a été exemplaire et présente toutes les garanties de concertation et de qualité. Les travaux menés en amont par la direction générale du travail ont été revus par deux membres du Conseil d'État spécialistes du droit du travail, puis par un comité de cinq experts, avant d'être soumis à une commission constituée de représentants des partenaires sociaux et à la commission supérieure de codification. L'intervention des experts puis des partenaires sociaux est une spécificité de cette opération de recodification.

Le document issu de ces travaux, le nouveau code du travail, témoigne d'un effort très important de clarté et de pédagogie. Les frontières de champ entre les différents codes ont été revues et diverses dispositions non codifiées, comme la loi de mensualisation de 1978, ont été intégrées, afin que le code du travail se recentre sur son objet principal, le droit du travail, tout en couvrant ce champ plus exhaustivement. Le plan a été transformé et les articles raccourcis, afin que chacun d'eux ne soit consacré qu'à une seule idée. Certains d'entre eux, comme ceux relatifs au compte épargne-temps ou aux attributions du comité d'entreprise dans l'ordre économique, ont ainsi été découpés en plus de dix nouveaux articles.

Des définitions et des articles relatifs au champ d'application des mesures ont été introduits, des dispositions obsolètes ont été supprimées et la terminologie comme l'écriture ont été harmonisées et mises au goût du jour, ce qui était nécessaire, même si l'on perd le sel de certaines expressions. Ainsi les « chambres d'allaitement » deviennent les « locaux dédiés à l'allaitement » et le « contrat de louage de services » des journalistes n'est plus qu'un « contrat de travail ».

Enfin, la répartition des dispositions entre la partie législative et la partie réglementaire a été ajustée. Il convient en effet de rappeler que les codes comportent des dispositions législatives et des dispositions réglementaires. S'agissant du nouveau code du travail, la partie législative relève de l'ordonnance du 12 mars 2007, tandis que la publication par décret de sa partie réglementaire est attendue dans les mois qui viennent. Pour cette raison, l'entrée en vigueur du nouveau code, qui devrait être complet à cette date, est fixée au 1er mai 2008 dans le projet de loi tel que voté par le Sénat.

La question du partage entre la loi et le règlement est, nous le savons, une question sensible. C'est un point sur lequel le Gouvernement comme le législateur sont contraints par l'article 34 de la Constitution, qui définit ce qui relève de la loi, le reste étant renvoyé au règlement : la loi détermine seulement « les principes fondamentaux » du droit du travail et du droit syndical et fixe, plus généralement, les règles concernant les « garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques ». Ce qui n'est pas « fondamental » ne relève pas en principe de la loi.

La recodification a, pour cette raison, conduit à déclasser un certain nombre de dispositions, c'est-à-dire à les renvoyer à la partie réglementaire du nouveau code. Cependant, ces déclassements restent mesurés. Ils portent par exemple sur des mesures d'organisation administrative interne, sur des organismes purement consultatifs, sur la désignation des autorités administratives ou des juridictions compétentes dans tel ou tel cas de figure, sur des mesures chiffrées ou des listes de secteurs économiques où s'applique ou non telle ou telle réglementation.

Une entreprise aussi complète de réécriture, soumise à de tels impératifs de pédagogie, de clarté et de respect de la Constitution, impliquait nécessairement de faire des choix ; il n'est pas aisé, dans ces conditions, de garantir le respect absolu du principe du droit constant. Je veux cependant insister sur la qualité du travail mené – tant en termes de méthode que de résultat –, une qualité saluée quasi unanimement, notamment par les partenaires sociaux.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

À mes yeux, ils sont tous importants, monsieur Montebourg !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Irles

Ainsi, dans une contribution écrite qui m'a été adressée, l'UNAPL considère-t-elle que la recodification était vraiment indispensable et que les très petites entreprises pourront y voir un pas fait en direction de la simplification du droit du travail.

La CFDT estime pour sa part que « l'ensemble des partenaires sociaux a été convenablement associé aux travaux de recodification » et que « la consultation a été constructive » ; malgré certaines réserves, l'organisation porte « une appréciation globalement positive sur le travail effectué », qui permet une meilleure lisibilité du code. Le syndicat réfute par ailleurs « l'idée selon laquelle l'ordonnance ne respecte pas le principe du droit constant », tout en faisant observer qu'« évidemment la recodification n'est pas totalement neutre sur le plan du droit. Heureusement, serait-on tenté de dire, sinon, quel intérêt ? » (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Irles

« Le but poursuivi », ajoute la CFDT, « est bien d'améliorer la lisibilité de ce code pour ses utilisateurs. La réalisation de cet objectif implique nécessairement des conséquences sur la façon dont va être lu, interprété, puis appliqué le droit du travail ».

Cela dit, l'intérêt d'une loi de ratification est de permettre au législateur d'ajuster les dispositions soumises à son approbation. S'agissant d'une opération aussi ambitieuse que la recodification de l'ensemble du droit du travail, de nombreuses malfaçons étaient inévitables. En outre, l'ordonnance a été publiée en mars 2007, sans pouvoir tenir compte de toutes les lois promulguées peu avant – encore moins de celles ayant suivi sa publication – et affectant le code du travail. Pour cette raison, on ne s'étonnera pas que le présent projet de loi, qui comprenait déjà dans sa version initiale des corrections et des ajustements du nouveau code, ait été abondamment complété par le Sénat : le volume du texte a plus que triplé, l'article 3 qui ajuste le corps du nouveau code comptant désormais 224 alinéas !

Outre qu'il a changé la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance, donc du nouveau code, en la reportant au 1er mai 2008, le Sénat a adopté de nombreux amendements corrigeant des erreurs matérielles, des termes désuets, et surtout reprenant des dispositions de l'ancien code ou de diverses lois qui avaient été omises.

Il s'agissait aussi de prendre en considération quelques mesures législatives postérieures au dépôt du projet de loi, issues de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat. D'autres amendements du Sénat visent à assurer la continuité des dispositions de droit local applicables en Alsace-Moselle. Enfin, le Sénat a pris quelques options à portée « politique ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Irles

Il a ainsi jugé infondé le choix des rédacteurs de l'ordonnance de placer en deuxième partie du nouveau code les dispositions issues de la loi du 31 janvier 2007 relative à la modernisation du dialogue social, qui prévoient une obligation de concertation avec les organisations syndicales avant toute réforme du droit du travail. Techniquement, il était sans doute concevable d'insérer ces dispositions dans la partie consacrée aux relations collectives de travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Irles

Cependant, le Sénat a fait prévaloir le choix symbolique fait par le législateur de les placer en tête de l'ancien code et en a donc fait des dispositions préliminaires du nouveau code.

De même, le Sénat a rétabli dans le nouveau code la mention de « l'attitude patriotique pendant l'Occupation » parmi les critères de représentativité syndicale, non pas que cette mention obsolète puisse encore avoir une quelconque portée juridique, mais pour ne pas paraître préjuger la révision attendue prochainement de ces critères.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Irles

Il a enfin réintégré dans la partie législative du nouveau code des précisions quant aux conditions spécifiques du licenciement des journalistes qui avaient été déclassées en mesures réglementaires.

À son tour, la commission des affaires sociales vous propose un ensemble d'amendements qui s'inscrivent dans la même optique : aboutir à un nouveau code clair, lisible, mais dans le respect du droit constant. Comme vous le verrez, la plupart de ces amendements correspondent à des corrections de renvois et de numéros erronés ou de fautes de français, à des harmonisations terminologiques ou encore à des modifications rédactionnelles sur des points très techniques en vue d'assurer au mieux le droit constant.

La recherche du droit constant et de la lisibilité peut cependant conduire à des propositions plus substantielles. Pour la lisibilité du nouveau code, je vous propose ainsi d'y transcrire un article important de l'ordonnance de 1967 sur les titres ticket-restaurant, à savoir celui qui exonère les salariés d'impôt sur cet avantage en nature. Dans l'objectif du droit constant, je propose de reprendre une règle importante concernant les conditions de nullité des licenciements en cas d'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Madame la rapporteure, il faut conclure ! Si les temps de parole ne sont pas respectés, nous ne terminerons pas ce soir ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Baert

C'est important, d'entendre la rapporteure du projet de loi !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Irles

Je termine, monsieur le président. Une dernière série d'amendements visent à prendre en compte dans le nouveau code des mesures votées dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, du projet de loi de finances et de la loi du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile.

Enfin, la commission des affaires sociales a adopté un amendement reportant au 1er janvier 2009 l'entrée en vigueur du nouveau code. À titre personnel, je ne suis pas favorable à ce nouveau report, mais nous aurons l'occasion d'en débattre en séance.

Sous ces réserves, je vous propose naturellement d'adopter le présent projet de loi, qui rendra réellement plus accessible le droit du travail, tout en étant consciente de ce que cela implique comme responsabilité à l'avenir pour le Gouvernement comme pour le Parlement : éviter de multiplier les lois bavardes (Rires et exclamations),…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Irles

…inutiles, mal écrites ou mal coordonnées, afin que le code du travail et les autres codes restent des instruments de travail clairs pour ceux qui les utilisent. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Mes chers collègues, j'ai été très indulgent jusqu'à présent, mais je vous demande désormais de bien vouloir respecter strictement les temps de parole, car je serai intransigeant. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une exception d'irrecevabilité déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.

La parole est à M. Alain Vidalies.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, conformément aux dispositions de l'article 38 de la Constitution, l'article 84 de la loi du 9 décembre 2004 portant simplification du droit avait habilité le Gouvernement à adapter la partie législative du code du travail. L'article 92 de cette même loi prévoyait que l'ordonnance de codification devait être prise dans un délai de dix-huit mois. Ce délai n'ayant pas été respecté, l'article 57 de la loi du 30 décembre 2006 pour le développement et la participation de l'actionnariat salarié a prévu une nouvelle habilitation du Gouvernement à « procéder par ordonnance à l'adaptation des dispositions législatives du code du travail à droit constant afin d'y inclure les dispositions de nature législative qui n'ont pas été codifiées, d'améliorer le plan du code et de remédier le cas échéant aux erreurs ou insuffisances de codification. »

C'est dans ces conditions qu'est parue au Journal officiel du 13 mars 2007 l'ordonnance du 12 mars 2007 relative à la partie législative du code du travail. Le projet de loi qui nous est soumis vise à la ratification de cette ordonnance. Or l'ordonnance du 12 mars 2007 est intervenue au terme d'une procédure irrégulière.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Ainsi, elle n'a pas été précédée de la convocation de la commission nationale de la négociation collective, contrairement aux dispositions de l'article L.136-2 du code du travail qui précise que la commission nationale de la négociation collective est chargée d'émettre un avis sur les projets de loi, d'ordonnances et de décrets relatifs aux règles générales relatives aux relations individuelles et collectives, notamment celles concernant la négociation collective.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

L'ordonnance est également intervenue en violation des règles de l'article L.322-2 du code du travail qui imposait au Gouvernement la consultation du comité supérieur de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Ces irrégularités de forme, auxquelles s'ajoute le non-respect du principe de codification à droit constant, sont à l'origine d'un recours pendant devant le Conseil d'État. Manifestement, la procédure de ratification dont nous sommes saisis a pour principal objectif la validation rétroactive de l'ordonnance qui, ainsi dépourvue de son caractère réglementaire, échappera à la censure du juge administratif. Ne pensez pas qu'il s'agisse là d'une critique outrancière de l'opposition, puisque l'on trouve dans le rapport de Mme Irles cette phrase incroyable, qui devrait beaucoup intéresser le Conseil constitutionnel : « L'intérêt d'une loi de ratification, outre de rendre sans objet les recours engagés devant la juridiction administrative contre cette ordonnance en donnant une valeur législative à l'ordonnance qu'elle ratifie… » (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Cette phrase figurant en toutes lettres dans le rapport relatif au texte que nous examinons constitue l'aveu de la volonté du Gouvernement de court-circuiter le Conseil d'État, qui aurait très certainement censuré l'ordonnance si elle avait conservé son caractère réglementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

La procédure de codification peut présenter un intérêt à condition de répondre à certaines exigences, notamment le respect du droit constant et des principes constitutionnels de sécurité juridique et de lisibilité du droit.

La publication du code Dalloz de cette nouvelle partie législative du code du travail, intervenue avant même que nous ne délibérions (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche),…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

…est précédée d'un avant-propos rédigé par M. Christophe Radé, professeur à l'université de Bordeaux et membre du comité d'experts mis en place par le Gouvernement. Dans ce document qui sera mis à la disposition de l'ensemble des acteurs du monde du travail – employeurs, employés, auxiliaires de justice, magistrats – le professeur Radé déclare : « Même si on peut raisonnablement penser que dans l'immense majorité des cas la réécriture de certaines dispositions jugées obsolètes, la scission des articles les plus volumineux et le regroupement des dispositions jusque-là éparses ne devraient pas modifier leur interprétation, plusieurs mois, voire plusieurs années, seront sans doute nécessaires pour que ce nouveau code révèle tous ses secrets ». (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Si, comme l'écrit le professeur Radé, l'interprétation ne sera pas modifiée dans l'immense majorité des cas, c'est bien qu'a contrario elle le sera dans certains cas. Or le respect du droit constant devait conduire à ce que l'interprétation ne soit modifiée dans aucun cas.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Nous ne saurions nous satisfaire de la promesse qu'il n'y aura pas de modification « dans la majorité des cas ». Ce sont précisément les autres cas – ceux qui font que nous ne sommes plus dans une codification à droit constant – qui nous préoccupent !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Une codification censée améliorer l'accessibilité et la lisibilité du droit ne serait d'aucune utilité s'il fallait attendre des mois ou des années pour qu'elle révèle tous ses secrets. De quels secrets s'agit-il ? De secrets cachés par les rédacteurs ? D'une nouvelle interprétation induite par les changements de rédaction ? Cet aveu est révélateur de l'ampleur de la réforme, qui ignore le droit constant et organise insidieusement des changements d'interprétation.

À l'exception des experts ayant participé à sa rédaction, la doctrine fait d'ailleurs preuve d'une rare sévérité à l'égard de votre texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Ainsi, dans un article publié dans la Revue de droit social en avril 2007, le professeur Emmanuel Dockès, professeur à l'université de Lyon, écrit : « Cette réforme attise la curiosité la plus vive. En effet, bien qu'elle soit issue d'une habilitation pour recodifier, elle apparaît être la première décodification qui ait atteint ce point de maturité en droit français. L'opération a consisté en un long et difficile mélange des lois du droit du travail pour les étaler ensuite plus ou moins au hasard rajoutant ici et là quelques ornements complexes, inattendus, absurdes parfois. En définitive, l'oeuvre réalisée ne manque pas d'humour involontaire et l'esthétique choisie rappelle le meilleur incongru des tableaux de Jérôme Bosch. Le plan du nouveau code a préféré délaisser les rivages ennuyeux de la rationalité. L'inspiration se situe entre l'inventaire à la Prévert et la célèbre encyclopédie chinoise de Borges ».

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

C'est votre unique référence ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Avouez qu'il s'agit là d'une description peu ordinaire !

Dans un article publié par La Semaine Juridique, en mars 2007, Bernard Teyssié, professeur à l'université Panthéon-Assas évoque « un code dont les articles ont été souvent l'objet de réécriture ou ont explosé en plusieurs morceaux à la manière de l'article L.122-14-4, pièce majeure du droit du licenciement, d'où six articles jaillissent, éparpillés dans des chapitres ou sections distincts, exposés à une lecture parfois fort différente de celle jusqu'alors admise. Outre le peu d'attention prêtée aux prescriptions de la loi, l'indifférence des pouvoirs publics à l'impératif de sécurité juridique est déjà perceptible. Elle est manifeste lorsque la quasi-totalité des articles d'un code d'une pareille importance dans la vie de la cité sont offerts au jeu d'interprétations nouvelles au gré de leur réécriture, dislocation ou déplacement. Mais il y a mieux encore : de nouvelles dispositions sont induites de solutions jurisprudentielles, la transmutation est opérée en normes de caractère législatif. Contestable en soi, cette transmutation l'est d'autant plus qu'elle s'exerce de manière fort arbitraire au gré des préférences personnelles des rédacteurs du code ». Voilà une appréciation qui montre l'ampleur du débat !

Dans un article publié par la Revue de droit du travail, Alexandre Fabre, docteur en droit, et Manuela Grevy, maître de conférences à l'université Paris I, écrivent notamment : « La volonté des recodificateurs de rendre les textes davantage accessibles et intelligibles, guère contestable a priori, justifie certains choix discutables du point de vue de la cohérence juridique des règles. Plus encore, cette exigence masque parfois une finalité inavouée. Les réagencements pourraient être l'occasion de figer certaines questions, à tout le moins de rendre difficilement révisables certaines interprétations jurisprudentielles ou évaluations législatives récentes. »

Toutes ces critiques sévères – très sévères – émanent de spécialistes reconnus et révèlent que, sous couvert de recodification, nous sommes confrontés à une opération de démantèlement du code du travail et, dans tous les cas, à une démarche qui ne répond en rien aux objectifs d'une codification à droit constant. Pourquoi avoir déplacé des centaines d'articles vers le code rural pour les salariés agricoles, le code minier pour les mineurs, le code des transports pour les entreprises de transport, le code de l'énergie pour les salariés d'EDF-GDF, pourquoi avoir renvoyé les dockers au code des ports maritimes et certains enseignants du privé au code de l'éducation ?

Aucune habilitation, aucune règle ne peuvent légitimer une telle démarche. Comment parler d'accessibilité du droit quand on passe de règles communes rassemblées dans un seul code à des règles éparpillées dans neuf codes différents ? Outre que ce choix est un retour en arrière par rapport à l'histoire du droit du travail, chacun comprend que l'objectif réel est de diviser les salariés, d'atomiser les règles de droit social.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

La lisibilité n'est certainement pas au rendez-vous lorsque la volonté de n'énoncer qu'une règle par article aboutit à démembrer la règle établie.

Ainsi, l'article L.122-14-4 relatif aux indemnités dues en cas de non-respect de la procédure de licenciement a été éclaté en six articles qui ne se suivent même pas : L.1235-2, L.1235-3, L.1235-4, L.1235-11, L.1235-12, L1235-13.

En guise de simplification, l'ancien code de neuf livres est devenu un code avec huit parties. Il y avait 271 subdivisions, on arrive à 1 890 subdivisions. Il y avait 1 891 articles de loi, il y en a 3 652 !

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Eh oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Vous êtes vraiment très fort, monsieur le ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

L'une des difficultés majeures provient de la déclassification de très nombreux articles dans la partie réglementaire. Certes, le Conseil constitutionnel a reconnu la possibilité de cette déclassification à l'occasion d'une procédure de recodification. Mais il subsiste un problème juridique sur la règle retenue en l'espèce et un problème politique sur le contenu de la future partie réglementaire. Je veux rappeler ici que la codification à droit constant n'est pas une règle opposable au Gouvernement pour la partie réglementaire.

Autrement dit, après avoir déclassifié des dispositions de l'actuel code du travail dans sa partie législative, le Gouvernement pourra ensuite faire ce qu'il voudra, soit directement dans la codification de la partie réglementaire, soit plus tard, dans l'exercice de son pouvoir propre. Or notre assemblée n'a été ni saisie ni même informée du contenu de cette future partie réglementaire. Vous comprendrez notre crainte, pour ne pas dire notre suspicion.

Le choix des articles déclassifiés n'obéit, en l'espèce, à aucune règle intelligible au regard des dispositions des articles 34 et 37 de la Constitution. Pourquoi telle règle a-t-elle été déclassifiée dans le domaine réglementaire et pas telle autre ? Personne ne le sait. Aucune explication ne figure à l'appui de cette démarche qui concerne quand même près de cinq cents articles de l'ancien code !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Le texte que vous nous proposez ne respecte pas le principe de la codification à droit constant. Le Gouvernement a procédé à des ajouts purs et simples de normes qui excèdent les impératifs de cohérence des textes et d'harmonisation du droit. Ainsi, à l'article L.1251-1, le Gouvernement a défini la notion de travail temporaire et les contrats auxquels il donne lieu. Il s'agit de créations de droit ex nihilo, qui relèvent de la compétence exclusive du législateur et non pas du codificateur.

Le Gouvernement a également supprimé des dispositions en vigueur au moment de la publication de l'ordonnance. Ainsi à titre d'exemple, les articles L.140-6 et L.141-15 de l'ancien code qui confiaient aux inspecteurs du travail le contrôle de l'égalité salariale entre hommes et femmes et le contrôle des infractions aux dispositions régissant le SMIC ont été purement et simplement abrogés. Le Gouvernement a d'ailleurs dû reconnaître certaines erreurs, notamment les dispositions assez surprenantes qui avaient, pour les journalistes étrangers en mission en France, écarté la présomption de salariat, par une sorte d'application anticipée de la directive Bolkestein 2. Cela montre bien, en tout cas, l'absence de rationalité dans la démarche.

Malgré ces quelques rectifications intervenues au Sénat ou ici, nous considérons que le principe du droit constant est largement bafoué par de nombreuses dispositions. Ainsi, les peines de récidive ont disparu dans de nombreux articles. De même, certaines sanctions pénales ont été supprimées comme celles de l'ancien article L.153-1 qui prévoyait, d'une façon générale, les mêmes sanctions pour la violation d'accords collectifs étendus dérogatoires à la loi que pour la violation des dispositions législatives ou réglementaires en cause. Cette incrimination a tout simplement disparu du code. Nous sommes bien là dans le domaine législatif. Il ne s'agit absolument pas de recodification et nous attendons avec intérêt, sur ce point comme sur d'autres, les réponses du Gouvernement.

La compétence du conseil des prud'hommes est modifiée au profit d'une formule très générale qui peut donner lieu à toutes les initiatives, celle du juge judiciaire pour la résolution des litiges sur les heures de délégation des représentants du personnel ou pour les litiges portant sur l'application du forfait jour. Ce n'est pas neutre. Il n'était pas insurmontable d'écrire, comme dans le code actuel, que, pour ces questions éminemment au coeur du droit du travail, la compétence est celle du conseil des prud'hommes. Prévoir que c'est de la compétence du juge judiciaire parce qu'il faut englober l'ensemble de l'ordre judiciaire dans la rédaction, rend le texte peu lisible et, surtout, donne les moyens, demain, par simple décret d'application, de priver le conseil des prud'hommes d'un certain nombre de compétences qui lui sont aujourd'hui reconnues par la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Autre problème non négligeable, les décisions du conseil des prud'hommes pour la requalification des contrats à durée déterminée et des contrats de travail temporaire ne sont plus exécutoires de droit à titre provisoire. Aujourd'hui, par exemple, un salarié en contrat à durée déterminée qui a eu quinze à vingt contrats, et qui souhaite engager une procédure de requalification, va devant le conseil des prud'hommes et le contrat est requalifié. Même si la partie adverse fait appel, la décision est exécutoire de plein droit. Mais cette disposition a disparu du code. Elle touche pourtant au fond du droit. On ne peut objecter que cela relève du domaine réglementaire. C'est bien le législateur qui en avait ainsi décidé.

Les compétences de l'inspecteur du travail sur la médecine du travail, les contrats d'apprentissage, les infractions relatives aux entreprises de travail temporaire ont purement et simplement disparu. L'inspecteur du travail, dont l'indépendance est garantie par la convention de l'OIT, est parfois remplacé dans ses attributions par une autorité administrative qui ne présente pas les mêmes garanties.

Dans les principes généraux de prévention, les obligations des travailleurs sont traitées à égalité de norme avec les obligations des employeurs, au risque d'entraîner la remise en cause d'une jurisprudence largement établie. Les dispositions sur le contrat d'apprentissage sont non plus dans la partie du code sur les contrats de travail mais dans la sixième partie portant sur la formation professionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Les dispositions sur le travail du dimanche sont largement modifiées avec la suppression des procédures de consultation notamment des collectivités locales et, surtout, l'apparition parmi les critères justifiant les dérogations des « besoins du public ». Nous attendons avec intérêt les explications du Gouvernement.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

C'est déjà le cas !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

C'est une question de fond. Ce critère est largement critiquable. Aucune disposition législative ne permet à l'évidence cet ajout surprenant.

De même, le Gouvernement a exclu de l'ordonnance de codification les dispositions relatives à la clause de non-concurrence particulières à l'Alsace-Lorraine. On note aussi l'absence de l'article relatif au fonds pour l'emploi dans les départements d'outre-mer.

Cette liste, déjà fort longue, n'est pas exhaustive et révèle, à l'évidence, l'absence de respect du droit constant. Lorsque le Gouvernement est habilité à opérer une codification à droit constant sur le fondement de l'article 38 de la Constitution, il doit respecter les exigences constitutionnelles qui ont notamment été fixées par la décision du Conseil constitutionnel du 16 décembre 1999.

Le Conseil constitutionnel a notamment précisé : « Cette finalité répond à l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, qu'en effet l'égalité devant la loi énoncée par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et la garantie des droits requise par son article 16 pourraient ne pas être effectives si les citoyens ne disposaient pas d'une connaissance suffisante des normes qui leur sont applicables, qu'une telle connaissance est en outre nécessaire à l'exercice des droits et libertés garantis tant par l'article 4 de la Déclaration que par son article 5. »

Je rappelle que la jurisprudence constitutionnelle considère également que l'égalité devant la loi et la garantie des droits prévue à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ne seraient pas effectives si les citoyens ne disposaient pas d'une connaissance suffisante des règles qui leur sont applicables et si ces règles présentaient une complexité excessive au regard de l'aptitude de leurs destinataires à en mesurer utilement la portée.

Le rappel de ces principes a été notamment énoncé dans la décision du 29 décembre 2005 du Conseil constitutionnel invalidant une partie des dispositions relatives au bouclier fiscal.

S'agissant du code du travail, qui concerne la vie au quotidien de 21 millions de salariés et de toutes les entreprises, les principes de l'accessibilité et d'intelligibilité de la loi s'imposent avec plus de force.

Or ce texte, dont l'un des auteurs écrit en préambule qu'il mettra plusieurs années à révéler ses secrets et dont la doctrine souligne le caractère confus et éclaté, ne répond à l'évidence pas à ces exigences.

Prenons ainsi l'exemple des conventions de forfait. Dans la mesure où elles figurent actuellement dans la section consacrée aux cadres, leur extension aux salariés non cadres est envisagée comme une exception à la règle générale, qui réserve ce décompte particulier du temps de travail aux cadres. Or le nouveau texte choisit de codifier séparément la faculté de conclure des conventions de forfait avec des salariés non cadres. Si la mise en place d'un accord collectif reste toujours nécessaire, le contenu de cet accord devra-t-il respecter les clauses obligatoires prévues pour la mise en place d'une convention de forfait pour les cadres ? La réponse est évidente dans l'ancien code, puisqu'il s'agit du même article. Elle va au contraire entraîner une querelle d'interprétation dans le nouveau code. Cet exemple résume à lui seul toutes les critiques, dès lors que la loi devient manifestement confuse et que le droit constant est bafoué – à moins qu'il ne s'agisse là d'un des secrets dont parle l'auteur de l'avant-propos.

Sur la question de l'accessibilité, l'application de la règle « l'indicatif vaut impératif » a conduit les rédacteurs à supprimer dans le nouveau code toutes les formules impératives du type « l'employeur doit » ou « l'employeur est tenu de ». Je sais bien que cette rédaction est issue du guide de logistique, mais l'objectif d'accessibilité est-il atteint lorsqu'on substitue à des termes accessibles et intelligibles par tous les utilisateurs une rédaction empruntant une convention d'écriture connue de quelques-uns seulement ? Le résultat sera globalement inverse, avec des erreurs d'interprétation aussi bien chez les salariés que chez les employeurs, et donc des contentieux inutiles. Qui peut prétendre, dans ces conditions, que les objectifs d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi sont remplis ?

Le deuxième motif d'inconstitutionnalité est le non-respect du droit constant, dont j'ai donné de nombreux exemples. Dans sa décision du 16 décembre 1999, le Conseil constitutionnel a précisé que les modifications rendues nécessaires pour « harmoniser l'état du droit » doivent se borner à remédier aux incompatibilités pouvant apparaître entre les dispositions soumises à codification.

Or, lorsque le nouveau code n'inscrit la priorité d'embauche pour les salariés victimes d'un licenciement économique que dans le cadre des licenciements portant sur plus de dix salariés, il modifie le droit constant. Selon l'ancien code, en effet, tous les salariés victimes d'un licenciement économique bénéficiaient de la priorité de réembauche auprès de leur employeur ; dans la nouvelle rédaction, ce droit ne concerne plus que les salariés concernés par un licenciement collectif de plus de dix salariés. Ce n'est bien sûr plus du droit constant mais une régression sociale !

De même, lorsque les articles sur le temps de travail sont désormais intégrés à ceux sur la rémunération, c'est un choix politique qui modifie le droit constant. Que dire enfin de l'intégration de solutions jurisprudentielles dans le texte de la loi, alors que cette prérogative n'appartient qu'au Parlement et qu'elle ne peut résulter que du vote d'une loi, à l'issue d'une procédure législative normale. Vous m'avez bien compris : on trouve dans ce texte des solutions jurisprudentielles codifiées, alors que ce qui peut être inscrit définitivement dans un code, c'est uniquement ce que nous votons ici. La jurisprudence, en effet, est par définition susceptible d'évoluer, et des décisions juridiques n'ont pas vocation à s'inscrire dans la partie législative d'un code. C'est une démarche qu'ont dénoncée plusieurs commentateurs

En définitive, cette procédure de recodification est un rendez-vous manqué. Le texte est déjà largement critiqué, parfois incompréhensible. Il sera d'une utilisation complexe pour tous les acteurs de la vie sociale. Il ouvre la porte à des interprétations nouvelles et modifie parfois carrément le fond du droit. Aucun des impératifs fixés par le Conseil constitutionnel, au premier rang desquels le droit constant, la lisibilité et l'accès au droit, ne sont respectés. Dans ces conditions, je vous demande, mes chers collègues, de voter l'exception d'irrecevabilité présentée par le groupe socialiste radical et citoyen. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est à M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Monsieur le président, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les députés, une fois n'est pas coutume je répondrai à cette exception d'irrecevabilité depuis la tribune.

Je pense qu'il est encore possible, au début de ce débat, d'éviter un dialogue de sourds et de faire en sorte qu'on ne s'oppose pas.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Monsieur Montebourg, je fais le pari que nous pouvons nous écouter…

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

… et nous entendre.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

On a le choix : soit on s'oppose, argument contre argument, amendement contre amendement ; soit on accepte l'idée que la bonne foi est partagée sur ces bancs, et que cela doit permettre de se comprendre, comme je vous le proposais à l'instant.

Monsieur Vidalies, vous avez d'abord raison de souligner que la consultation de la Commission nationale de la négociation collective n'est pas nécessaire dès lors qu'il ne s'agit pas d'une règle nouvelle mais d'une codification à droit constant. Il en est de même pour le Comité supérieur de l'emploi. Le Gouvernement ne craint absolument pas les recours contentieux contre l'ordonnance, et la justice suivra son cours si elle est saisie.

Il n'y a pas non plus de secrets cachés dans ce code. Tout au contraire, la codification s'est faite de façon publique et ouverte, et je vous mets au défi de me citer une seule opération de codification n'ayant pas fait l'objet d'une concertation avec les partenaires sociaux et ayant été élaborée dans les seuls bureaux de la direction générale du travail ou ceux du ministère.

Je ne chercherai pas non plus à renvoyer dos à dos les professeurs de droit. Vous en avez cité quelques-uns, monsieur Vidalies, mais ils ne sont pas forcément représentatifs de l'ensemble de la doctrine « travailliste » française. Certains juristes sont par principe hostiles à toute évolution de la codification et en tiennent pour le statu quo. Or, si l'on part du constat – et peut-être me rejoindrez-vous sur ce point – que le code du travail est trop complexe, il faut le simplifier et le rendre plus lisible.

J'assume donc le fait que la recodification n'a pas été faite pour les professeurs de droit mais pour les usagers : les salariés et les syndicalistes comme les responsables d'entreprise. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Elle a été faite par des professeurs de droit pour être un outil à la disposition non pas des seuls spécialistes mais de tous les usagers.

Vous avez évoqué la séparation entre les différents codes, monsieur Vidalies, et je vous sais suffisamment connaisseur de la matière sociale et du droit du travail pour ne pas vous faire de faux procès en la matière, mais cette séparation répond à une logique simple : au code du travail les principes généraux du droit du travail ; aux codes spécifiques – le code rural, le code de l'éducation, le code des transports, que vous avez cités – les règles spécifiques.

Quant à la subdivision des articles, elle vise à réduire la taille disproportionnée de certains articles. Observez-les et vous verrez que c'est sans mystère et que nous n'avons pas trituré ces articles pour y enfouir des secrets, mais que nous les avons scindés pour les rendre d'un abord plus simple.

Pour la déclassification, que vous évoquiez également, la logique est tout aussi simple. Le ministère du travail et la Commission de codification ont appliqué le partage opéré par les articles 34 et 37 de la Constitution.

Vous parlez d'éventuelles saisines ou recours. Là encore, on peut se battre à coup d'arguments juridiques, mais la méthode de partenariat et de concertation que nous avons choisie devrait nous mettre à l'abri de tels procès.

Je voudrais aussi dire que notre démarche est résolument pragmatique et a consisté à maintenir dans le domaine législatif ce qui concerne la loi ; c'est le cas de l'inspection du travail et des prud'hommes.

La Commission supérieure de codification a été particulièrement vigilante sur la règle du maintien du droit constant. Admettons que vous ne fassiez pas totalement confiance au Gouvernement (« Serait-ce possible ? » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), reconnaissez malgré tout que la Commission supérieure de codification, mérite, elle, votre confiance !

Aucun peine de récidive n'a été supprimée. C'est l'article L. 132-10 du code pénal qui fixe le principe général des récidives, et rien n'a changé. Vous faites parfois un peu trop confiance à des articles de presse qui se sont prévalu, sans précaution, de la légitimité de l'inspection du travail alors qu'ils abordaient le sujet dans une logique quelque peu partisane.

La question du repos dominical est exemplaire. Soyez sans crainte : nous n'avons pas voulu en modifier subrepticement et insidieusement les règles à l'occasion de la recodification du code du travail. L'ancien code mentionnait à l'article L. 221-6 le repos « préjudiciable au public » ; le nouveau code parle, lui, dans l'article L. 3132-12, des « besoins du public ». Quel changement ! Il s'agit simplement d'une formulation beaucoup plus claire pour le grand public, et je suis preneur de toutes les simplifications de ce type. On peut, si vous le souhaitez, convoquer des experts en sémantique, mais reconnaissez plutôt que la modification que vous présentiez à l'instant comme scandaleuse n'est rien d'autre qu'une simplification.

Reste que, sur le fond, la loi dans notre pays est parfois confuse parce que trop bavarde. De l'avis de nombreux experts, il était donc nécessaire de la faire évoluer pour qu'elle réponde à l'attente des Français et surtout des salariés.

Vous avez également parlé du forfait. Or c'est un syndicat – particulièrement actif auprès des cadres, sans vouloir le citer – qui a demandé des dispositions communes aux forfaits cadres et non cadres. Nous n'avons donc fait qu'entendre les partenaires sociaux.

Concernant les conventions d'écriture, il serait triste que le législateur les refuse au profit d'un loi bavarde. L'indicatif présent traduit une obligation, sans qu'il y ait lieu de recourir aux termes « doit » ou « doit impérativement ».

Quant à la jurisprudence, elle n'a pas été transposée dans le code. Cet impératif s'est imposé à tous.

Je me suis efforcé de répondre aux points que vous aviez soulevés, et j'y reviendrai autant que ce sera nécessaire. Mais je demande à la représentation nationale de repousser cette exception d'irrecevabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Avant d'en venir aux explications de vote, j'annonce que, sur le vote de l'exception d'irrecevabilité, je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Dans les explications de vote, la parole est à M. Bernard Perrut, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Perrut

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le code du travail conditionne la vie quotidienne de l'ensemble de nos concitoyens et doit donc être lisible. Nous ne pouvons donc aujourd'hui que nous réjouir de le voir évoluer puisqu'il avait perdu en cohérence et en clarté.

Il y a quelques mois, nous avons, ici même, par la loi du 31 janvier 2007, apporté un élan supplémentaire à la modernisation du dialogue social. Ce projet de loi est donc important, puisqu'il faut aussi que ces dispositions sur le dialogue social et les conditions de travail puissent être connues des uns et des autres.

Seul bémol, cette codification, c'est vrai, va bouleverser les habitudes des praticiens, des juristes et des enseignants ; mais elle est essentielle.

Monsieur Vidalies, vous allez jusqu'à remettre en cause le travail qui a été effectué. Vous avez cité un certain nombre d'articles ; moi, je citerai un point de vue publié dans l'éminente revue Droit social : dans un article portant sur les enjeux de la recodification du code du travail, Jean-Denis Combrexelle et Hervé Lanouzière…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Perrut

…font une remarque très pertinente : « Jamais un ministère n'a consacré autant de moyens et pris autant de précautions dans une opération de codification ». C'est vrai, même s'ils étaient concernés par ce travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Perrut

Comment pouvez-vous remettre en cause le travail qui a été mené à plusieurs niveaux, qu'il s'agisse du premier cercle, c'est-à-dire de la mission de six personnes qui ont fait un travail important, des travaux du comité d'experts, qui a été saisi sur toutes ces questions, ou bien encore du travail des partenaires sociaux qui se sont totalement impliqués pour mettre en place ce nouveau code ?

Ce code a désormais un plan détaillé, didactique. Le parti pris a été de privilégier le point de vue de l'utilisateur potentiel, et il a conduit à des solutions résolument pratiques. Tous ces éléments que vous avez remis en cause il y a un instant ont été balayés par le ministre, qui a repris tous les points juridiques sur lesquels vous êtes intervenus et sur lesquels je ne reviendrai pas.

Aujourd'hui, ce code va pouvoir être appliqué tel qu'il est, avec une meilleure lisibilité, à travers une meilleure classification d'un certain nombre de rubriques, dans l'intérêt des salariés et des chefs d'entreprise.

Nous entendons dire très souvent que nos codes sont très complexes. C'est vrai. Gérard Larcher et aujourd'hui Xavier Bertrand ont eu le mérite de vouloir une simplification. Cette simplification est réclamée par nos concitoyens et les praticiens : c'est pourquoi le groupe UMP repoussera cette exception d'irrecevabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est à M. Francis Vercamer, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

Ce texte est plutôt une clarification qu'une simplification. Pour le Nouveau Centre, une simplification consiste à insérer dans le code du travail les règles fondamentales du droit du travail et à laisser aux partenaires sociaux, à la négociation collective, le soin de négocier les détails et de les inscrire dans les textes d'accords interprofessionnels élargis ou étendus ou à la convention collective.

Avec ce projet de loi, nous assistons bien à une recodification, donc à une clarification à droit constant, tellement à droit constant que le Gouvernement a même recodifié le texte de 2005, qui instituait le CNE, alors même que les instances internationales l'ont considéré comme illégal ! Si ça, ce n'est pas du droit constant, dites-moi ce qu'est du droit constant, puisqu'on a réinscrit dans le code quelque chose qui est considéré comme illégal !

Bien sûr, cette réécriture peut inciter à une nouvelle interprétation, et nous savons que le fait de réécrire un texte peut effectivement faire varier la jurisprudence. N'importe quel avocat ou juriste sait que la réécriture peut amener à une nouvelle interprétation, mais c'est la justice qui le dira et non pas M. Vidalies sur ces bancs.

Le Nouveau Centre ne votera pas cette exception d'irrecevabilité (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Il ne s'agit aujourd'hui que d'une première phase, celle de la clarification, en attendant une véritable simplification. Ce projet permettra une meilleure compréhension et donc une meilleure utilisation du droit, peut-être un peu moins de litiges en matière de droit du travail, dans l'attente d'une simplification du droit qui le rendra plus simple à utiliser.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est à Mme Martine Billard, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Monsieur le ministre, en vous écoutant tout à l'heure, je me disais : c'est fantastique, dans le monde du ministre, tout est beau, tout va toujours très bien et ceux qui ne sont pas d'accord sont toujours des méchants ! (Exclamations et rires sur certains bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Non, pas toujours !

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

On veut rendre le code plus lisible. Or parmi ceux qui doivent pouvoir lire le code figurent principalement les salariés ; je pense notamment à tous ceux des petites entreprises où n'existe pas de section syndicale, qui sont par exemple délégués du personnel non syndiqués – il y en a beaucoup dans les entreprises de notre pays, près d'un tiers des délégués du personnel, si ma mémoire est bonne, ce qui est plutôt beaucoup. Ces délégués ou ces salariés de PME qui, depuis des années, essaient tant bien que mal de se débrouiller avec le code du travail ne sont pas forcément contre un code du travail recodifié plus lisible, mais seront par contre très attachés au fait qu'il le soit à droit constant – car sinon eux n'auront pas d'aide pour connaître les modifications.

Monsieur le ministre, vous insistez en disant que c'est une codification à droit constant. En tout cas, l'ordonnance qui a été présentée au Sénat était tellement à droit constant que, depuis, que ce soit le Sénat, la commission de cette assemblée, vous-même au travers d'amendements du Gouvernement ou d'amendements portés par des collègues de l'UMP, vous avez été obligés de réintroduire un certain nombre d'articles parce que le texte de départ qui avait été présenté au Sénat n'était pas à droit constant. Nous donnerons des exemples tout au long du débat sur l'absence de droit constant.

Un exemple : l'unification du vocabulaire. Le problème est que cette unification au présent de l'indicatif souffre des exceptions, et que ces quelques exceptions concernent toujours les salariés mais jamais les employeurs. Il y a donc un problème, monsieur le ministre, et je vous invite à déposer au nom du Gouvernement, parce vous pouvez encore le faire, des amendements visant à rectifier ces quelques exceptions à la non-transposition à droit constant concernant l'indicatif, de manière à éviter des inquiétudes. Vous comprenez bien que nous nous posons des questions puisque s'agissant de l'employeur, il y a eu systématiquement recodification au présent de l'indicatif, mais que, s'agissant des salariés, ce n'est pas le cas !

Nous nous posons aussi des questions quand des dispositions sont transposées mot pour mot dans les entreprises de plus de 300 salariés, alors que pour les entreprises de moins de 300 salariés le contenu de l'article est renvoyé à un décret. Il est tout de même bizarre que, selon le seuil, selon le nombre de salariés dans l'entreprise, il y ait des différences. Ce n'est pas du droit constant et cela correspond à une bataille menée depuis des années par les organisations d'employeurs, qui veulent des dispositions différentes selon la taille des entreprises.

Sur le contenu des décrets, j'ai posé la question en commission à Mme la rapporteure qui m'a répondu que tout est pratiquement prêt et qu'il n'y a pas de problème. Mais dans le rapport, il est dit que « les déclassements – c'est-à-dire les renvois vers la partie réglementaire du code – opérés dans le nouveau code restent mesurés. » Or pratiquement 500 articles de loi sont transférés vers la partie réglementaire : excusez du peu ! La rapporteure nous dit que les travaux sont bien avancés et donc que l'adoption pourrait être faite dans peu de temps par la commission supérieure de codification.

Avouez quand même que, dans notre travail de législateur, nous ne sommes déjà pas à droit constant, et nous vous le démontrerons pendant tout le débat sur ce texte de loi. Nous n'avons pas les décrets pour voir si les transpositions de la loi dans la partie réglementaire respectent ce qu'avait souhaité le législateur les années précédentes. Je sais que vous n'êtes pas tenu, pour le droit constant, par les décrets, mais avouez que nous, législateurs, ne pouvons pas dire à nos concitoyens qu'il n'y a aucun problème, que nous pouvons voter les yeux fermés – comme vous avez essayé de le faire, monsieur le ministre, en tentant d'accélérer le vote de ce texte. Il était prévu au départ trois heures de débat. Vous n'aviez pas prévu que nous déposerions des amendements, et vous êtes très gêné car nous vous obligerons ainsi à débattre. Voilà pourquoi vous essayez de tout faire pour accélérer les débats, au point même de ne pas avoir demandé de suspension de séance tout à l'heure entre deux textes totalement différents, ce qui est une grande première dans cette assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

C'est moi qui décide de suspendre, pas le Gouvernement ! Ce n'est pas la première fois qu'il n'y a pas de suspension de séance entre deux textes.

Je vous rappelle que vous n'avez pas indiqué la position du groupe GDR sur la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Le groupe GDR votera bien entendu cette exception d'irrecevabilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est à M. Michel Liebgott, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Monsieur le président, il y a de l'électricité dans l'air ! Je ne sais pas si ce sont les propos d'Alain Vidalies qui ont déclenché l'ire de certains, au point que le ministre a décidé de monter immédiatement à la tribune pour remettre les choses d'équerre ! C'est dire à quel point l'intervention d'Alain Vidalies a été évocatrice, provoquant la panique dans le camp adverse ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Monsieur le président, je n'en rajouterai pas, si ce n'est pour dire que, oui, il y a de bonnes raisons pour que, aujourd'hui, le Gouvernement soit ébranlé par l'intervention de notre collègue. Mais, monsieur le ministre, ce qui nous surprend, c'est que vous le soyez ou que vous fassiez semblant de l'être ! Car si vous parcouriez la presse, en particulier la presse spécialisée, vous ne douteriez pas un seul instant que vous allez provoquer un séisme non seulement immédiatement, mais dans les mois et les années qui viennent. De ce point de vue, le titre de Libération est évocateur : « Le code du travail, un pavé remodelé, mais toujours illisible ». De cela, vous conviendrez facilement, car votre explication ne l'a pas rendu plus lisible !

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Il faut lire tout l'article !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Si certains se mobilisent aujourd'hui, c'est parce que, jusqu'à présent, tout s'est fait dans la clandestinité, dans le silence médiatique. On a beaucoup plus entendu parler de l'intervention du Président de la République promettant des augmentations de pouvoir d'achat, qu'on ne voit pas venir, mais je ne l'ai pas entendu parler de la recodification du code du travail, qui est pourtant très importante pour le quotidien des 21 millions de salariés. Le Gouvernement veut faire passer l'idée que cette recodification est une simple mesure technique ; après tout, ce sont des technocrates qui l'ont réalisée : vous avez rappelé tout à l'heure la composition de l'équipe. Or vous n'ignorez pas que ce sont souvent les textes les plus technocratiques qui intègrent les reculs les plus violents contre les droits acquis, en particulier, comme aujourd'hui, en matière de droit du travail.

Aujourd'hui, des inspecteurs du travail et un certain nombre de syndicats se mobilisent parce qu'ils ont compris quel était l'enjeu. Il en est de même d'un certain nombre d'avocats spécialisés dans ces affaires ; Alain Vidalies en est un parmi d'autres et, c'est vrai, il a levé le lièvre !

Comme Mme Billard l'a souligné, ce débat n'était programmé au départ que pour une petite séance de seize heures quinze à – au pire – dix-neuf heures. Puis nous nous sommes dit qu'il faudrait peut-être le prolonger dans la soirée, ce que nous allons sans doute faire. L'ordre du jour de l'Assemblée nationale imprimé aujourd'hui prévoit maintenant trois séances, soit une de plus demain matin. Pourquoi trois séances, alors qu'il n'en était prévu qu'une ? Pas parce que le Gouvernement ou la majorité UMP l'ont décidé, mais parce que de vraies questions se posent et que des amendements seront déposés tout à l'heure et démontreront qu'il n'y a, effectivement, pas de droit constant. Et il faudra que le Gouvernement prouve le contraire.

Ne nous en voulez pas si nous nous attachons à rendre ce texte plus lisible. Car c'est un texte illisible que vous allez donner à appliquer aux conseillers prud'homaux et aux directeurs des ressources humaines !

Je pense en particulier aux conseillers prud'homaux : en commission, nous avons adopté un amendement qui a rassemblé au-delà du groupe socialiste et repousse l'application du texte au 1er janvier 2009. Nous, nous ne sommes pas des technocrates, mais avant tout des élus représentant l'opinion publique, des gens de bon sens qui essayons de comprendre ce qui va se passer. Dans nos permanences, nous recevons des salariés en difficulté et nous nous disons que, si nous modifions le droit, il faut que ce soit pour le rendre plus lisible et plus simple. Il ne faut pas le détricoter. Il ne faut pas décodifier. Bien entendu, vous allez nous dire, une fois de plus, que l'on peut imaginer pire que cette entreprise de recodification.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Je termine, monsieur le président. En effet, le pire est devant nous : ce sont les prochains projets du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Nous essayons de faire de la lutte contre cette recodification l'un des derniers remparts contre la vague libérale qui risque de nous submerger. Les droits de 21 millions de salariés du privé sont en cause : c'est pourquoi nous nous battons, et c'est pourquoi nous voterons l'exception d'irrecevabilité défendue par Alain Vidalies. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Nous allons maintenant procéder au scrutin public, précédemment annoncé, sur l'exception d'irrecevabilité.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 105

Nombre de suffrages exprimés 105

Majorité absolue 53

Pour l'adoption 34

Contre 71

L'exception d'irrecevabilité est rejetée.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une question préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.

La parole est à M. Michel Liebgott.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai noté que l'intervention de mon collègue avait instantanément mobilisé toute l'attention du ministre.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Comme toujours !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Je ne peux que m'en féliciter, puisque, à un long silence médiatique, succède enfin une prise de conscience : le texte auquel nous sommes confrontés n'est pas un texte de seconde zone, mineur, purement technique, mais un texte important. On a évoqué tout à l'heure les tableaux de Jérôme Bosch : il est vrai que la recodification du code du travail est d'une extrême complexité car elle découle à la fois des lois, des règlements et de la jurisprudence. L'exercice est donc d'autant moins facile que, en réalité, on a cherché à noyer le poisson.

Je comprends que les libéraux qui soutiennent ce texte ne soient pas très à l'aise dans cet exercice, car, en réalité, ils sont en bien mauvaise compagnie. Le droit du travail, ce n'est pas le MEDEF ou le patronat d'hier, les maîtres de forges, qui l'ont construit. Il l'a été par les majorités de gauche…

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Pas toujours !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

…qui se sont succédé sur ces bancs et il a souvent été détricoté par les majorités de droite. En raison de l'omniprésence de la droite, ces dernières années, la recodification traduit des reculs sensibles des droits des salariés.

Je n'ai pas l'intention de refaire toute l'histoire et me contenterai de citer quelques personnages. Ainsi, il y a plus d'un siècle et demi, Louis Blanc publiait L'Organisation du travail, qui posait les jalons du droit du travail et prônait la création d'un ministère du travail. Cela paraît évident aujourd'hui, mais, pour certains, l'existence d'un tel ministère ne s'impose peut-être pas : pour eux, il pourrait fort bien n'être qu'une division technique, les orientations politiques étant secondaires en la matière, puisque c'est à l'offre et à la demande, aux entreprises, de gérer directement l'économie.

Waldeck-Rousseau a reconnu ensuite, en 1884, la légalité de l'association syndicale : à l'époque, d'autres s'y opposaient. Il y eut aussi Jean Jaurès, le Front populaire, Léon Blum.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Si l'on se souvient encore, aujourd'hui, des fameux accords de Matignon, c'est bien parce qu'ils ont frappé les esprits, parce qu'ils ont marqué, pour certains salariés – ceux qui, pour la première fois, purent partir en vacances –, le début d'une nouvelle vie. Je n'ignore pas qu'on instruit aujourd'hui le procès des 35 heures, au lieu de les abroger. Fera-t-on, un jour, le procès des 40 heures du Front populaire ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

C'est ce que vous souhaitez ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Pour ma part, je veux saluer ici ces avancées considérables…

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Je suis rassuré !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

…qui ont d'ailleurs été confirmées par de multiples gouvernements de gauche : je rappelle, pour ceux qui l'oublieraient et qui croient que la droite peut être sociale, que les congés payés ont été accordés par le gouvernement de gauche de 1936, par le CNR au lendemain de la guerre – même si le général de Gaulle ne fut pas pour rien dans cette décision –, par le Front républicain en 1956, en 1968 sous la pression populaire, en 1981, avec le premier Président de gauche de la Ve République. Mes recherches ne m'ont pas permis de retrouver une seule semaine de congés payés qui ait été accordée par une majorité de droite.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

En 1968 !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Charlemagne a inventé l'école, pas les congés payés !

Aujourd'hui, nous parlons de millions de salariés et les choses deviennent de plus en plus complexes. Nous sommes dans une économie mondialisée et nous devons avoir une productivité accrue : la concurrence oblige la France – nous en sommes bien conscients – à être performante. Or, contrairement à ce que l'on entend souvent dire, les salariés français – qui pourraient bien faire les frais de la recodification – sont parmi les plus productifs du monde. Le passage aux 35 heures a même contribué – beaucoup le reconnaissent – à l'augmentation de la productivité, car le travail a été exécuté plus rapidement. Sans doute la pression a-t-elle été aussi plus forte, mais les gens ont fait le choix de travailler plus vite, plus assidûment, pour pouvoir bénéficier d'un peu plus de temps libre. La vie n'est-elle pas un équilibre entre le temps travaillé et le temps libre ? On pourra toujours dire qu'on ne travaille pas assez. Mais reportons-nous au début du siècle passé : à l'époque, dans les régions industrielles, on ne jouissait pas d'une seule seconde de tranquillité, puisque l'on mourait en moyenne à soixante ans et qu'on travaillait dès quatorze ou seize ans.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Bien avant !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Toutes les régressions restent possibles et, si nous nous mobilisons sur ce texte, c'est tout simplement parce que nous ne voulons pas de ces régressions. Nous en avons trop connu, qui étaient souvent imposées par d'écrasantes majorités de droite. Nous allons donc résister, ici d'abord, à l'Assemblée nationale, puis en d'autres lieux, et jusque dans les conseils de prud'hommes, si tant est qu'il en existe encore suffisamment pour que les salariés puissent s'y défendre. Tout se tient, en effet, et, au moment même où nous recodifions, nous voyons disparaître divers outils du salariat.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Bien entendu, cette recodification n'est pas arrivée par hasard. Un ministre ne s'est pas levé, un matin, en se disant qu'il allait recodifier. Tout cela est venu de propositions technocratiques,…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

C'était avant Mme Parisot, mais elle se montre à la hauteur de ses prédécesseurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Je connais bien le baron, puisque je viens de Moselle, et je ne suis donc pas surpris de cette volonté de recodification. Elle a été imposée par le rapport Virville et l'Assemblée nationale ne vient qu'en bout de chaîne.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Parlons de la forme et de la méthode. Ce n'est pas un hasard que le Gouvernement ait procédé par ordonnances. Le Parlement a été totalement dépossédé de son pouvoir. On voulait imposer à l'Assemblée de ne débattre que deux ou trois heures, comme le Sénat l'a fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Moins longtemps que pour la loi sur les chiens dangereux !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Mais nous aurions pu débattre pendant des semaines. Je me souviens d'avoir passé, il y a quelques années, une nuit et des jours entiers à discuter de la chasse, sujet éminemment intéressant, mais qui ne l'est pas plus, je pense, que le droit de 20 millions de salariés. Nous aurions pu imaginer en débattre beaucoup plus longuement au sein de la commission des affaires sociales, pour bien comprendre ce qu'avait été ce travail de recodification. Malheureusement, nous n'avons pu y passer – au mieux – qu'une heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Je ne mets personne en cause, et sûrement pas le président de la commission, mais nous n'avons, en effet, auditionné personne et avons dû nous contenter de prendre acte du travail accompli par de très hauts fonctionnaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Le recours aux ordonnances n'est pourtant pas forcément un gage de réussite. Je vous renvoie à une pratique récente. Avec le recul, nous constaterons sans doute que cette recodification par ordonnance est sans doute une erreur, mais ce ne sont pas seulement les salariés qui la paieront, c'est tout le monde, le pays tout entier, par la multiplication des contentieux. De nombreux recours seront introduits, et pas seulement devant le Conseil d'État ou le Conseil constitutionnel : ce sont les individus eux-mêmes, ceux dont les droits auront été bafoués, qui remettront en cause cette recodification.

Pourtant, ces dernières années, les exemples n'ont pas manqué qui auraient pu vous instruire : ainsi, en instaurant le CNE, malgré les réserves que nous avions formulées, Dominique de Villepin s'est trompé. Comme vous, il avait voulu contourner le débat parlementaire. Il n'est jamais de bonne politique de contourner le débat parlementaire.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

C'est bien pour cela qu'il ne faut pas renvoyer en commission !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Monsieur le ministre, tout à l'heure, dans mon explication de vote sur l'exception d'irrecevabilité, j'ai un peu raillé le fait que vous soyez monté à la tribune : je me félicite cependant que le débat puisse se prolonger un peu plus longtemps.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Il faut que nous consacrions du temps à un tel texte. Lorsque la ratification de l'ordonnance a été présentée au Sénat, le 18 avril 2007, en pleine période d'élection présidentielle, personne n'imaginait que cela pourrait faire la une de l'actualité.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Mais, si l'on avait choisi cette période, n'était-ce pas pour que la recodification passe totalement inaperçue, dans le plus grand silence médiatique ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Il est deux périodes où il ne se passe rien : les grandes vacances et les deux mois qui précèdent une élection présidentielle. Je dis qu'il ne se passe rien : dans les débats parlementaires, peut-être, mais, en fait, il se passe beaucoup de choses.

Le Gouvernement a voulu éviter le couperet du Conseil d'État, qui aurait très bien pu annuler plusieurs dispositions ou, en tout cas, nous amener à en débattre. Sans cette crainte, on se serait donné un peu plus de temps. Après tout, cela dure depuis des années : on n'est pas à quelques semaines ou à quelques mois près. Il en va de même pour l'application du texte : on peut bien imaginer qu'elle attende le 1er janvier 2009, voire un peu au-delà. Cela ne perturberait aucunement l'ordonnancement des choses. Du reste, c'est à cette époque-là que seront élus les prochains conseillers prud'homaux et il ne serait guère logique d'appliquer ce nouveau droit du travail pour quelques mois, avec des conseillers prud'homaux sortants. Imaginez que nous introduisions dans le code général des collectivités locales des changements fondamentaux six mois avant une élection municipale : l'Association des maires crierait au scandale. Ce dont nous discutons aujourd'hui est peut-être moins médiatique, mais c'est à peu près le même cas de figure. Attendons que les nouveaux conseillers prud'homaux soient installés. Ils auront tout loisir de lire le texte, ses commentaires, d'être formés, puisqu'il me semble avoir compris qu'on va former des gens qui, peut-être, ne siégeront plus, alors que ceux qui seront élus et siégeront devront travailler tout seuls.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Mais peut-être espère-t-on aussi que, moins ils y comprendront quelque chose, moins il y aura de recours.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

C'est une technique comme une autre pour décourager les recours et, dans un second temps, faire échouer ceux qui se seraient entêtés.

On prétend que cette réécriture vise à la simplification. Alain Vidalies a déjà répondu à cet argument, et je ne m'attarderai pas, mais il faut du toupet pour considérer que l'on met en place un système à idée unique, alors que l'on ajoute 1 761 articles.

Il faudra nous expliquer comment on simplifie en ajoutant autant d'articles qu'il en existe déjà.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Il s'agit de subdivisions, monsieur Liebgott !

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Non ! Ça commence par le même préfixe, mais ce n'est pas pareil.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Dans la réalité du vécu du salarié et du conseiller prud'homal, c'est une complexité supplémentaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Il en va de même d'ailleurs avec ce fameux tableau de correspondance qui comprend 350 pages. Il ne s'ingurgite pas en trois minutes, il faut être hyperspécialisé pour s'y retrouver.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

D'autres que moi l'ont dit. On a évoqué tout à l'heure les propos d'un prof de droit, je me permets de le citer à nouveau. D'une certaine manière, il décrit les mois et les années qui vont venir : « Finalement, le nouveau plan a les qualité de ses défauts. Il finira d'interdire toute lecture du droit par des non-initiés. »

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Vous pouvez citer son nom ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Mais c'est le même que tout à l'heure ! Vous avez des références uniques !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

C'est parce qu'il est bon que nous le citons plusieurs fois. De plus, ceux qui ont travaillé le sujet sont tellement rares !

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Ce n'est pas bien ça !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

En effet, hormis les rares conseillers d'État qui ont été payés pour le faire, il y en a tellement peu d'autres qui ont été payés pour apporter la contradiction.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Nous aurions volontiers fait ce travail ici, en tout cas les spécialistes, mais nous n'en avons pas eu le temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Parce que le débat a été réduit à très peu de chose.

Je poursuis la citation : « Mais il devrait amuser des générations d'étudiants » – ça, ce n'est pas très grave, cela mettra un petit peu d'ambiance dans les facs.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Et ce sera une ambiance studieuse.

« Il devrait perdre les avocats généralistes, » – ça, c'est plus embêtant pour eux – « mais il ouvre de nouveaux marchés pour les spécialistes. Il découragera de nombreux conseillers prud'homaux mais devrait les inciter à résoudre les litiges indépendamment du droit, en équité… » Je m'arrêterai là dans les citations.

Je ferai simplement quelques commentaires sur la forme.

Tout d'abord pour rappeler haut et fort à cette tribune, et pas seulement dans une explication de vote, que nous sommes satisfaits que le bon sens ait prévalu en commission au point que l'on envisage de repousser l'application de ce texte au 1er janvier 2009. Nous ne sommes pas très exigeants, c'est une demande de simple bon sens qui nous paraît difficilement contestable, d'autant qu'elle a été adoptée en commission. Les conseillers prud'homaux en place aujourd'hui, comme d'ailleurs ceux à venir, ainsi que les inspecteurs du travail apprécieront sans doute unanimement le vote du Parlement s'il persistait en ce sens en séance plénière.

Toujours quant aux aspects formels, vous avez parlé, monsieur le ministre, d'une réécriture qui se serait faite avec la concertation active de tous les partenaires sociaux. Nous pourrions nous envoyer des tas d'arguments à la figure. Ce que je constate simplement, dans les dépêches récentes, c'est que tout le monde se plaint du manque de lisibilité, du manque de clarté, du manque de concertation.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Pas tout le monde !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Il est clair que le texte manque de clarté !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Ces déclarations étant publiques, le fait que les intéressés profèrent prouve qu'ils y croient. Ou alors, il faut leur faire un procès de double langage. En tout cas, en ce qui nous concerne, nous avons rencontré plusieurs syndicats qui se sont plaints d'avoir été auditionnés très rapidement, devant examiner plusieurs centaines d'articles quelquefois en deux ou trois heures de réunion. Alors, si la forme était bien respectée, sur le fond, ils ne pouvaient apporter les modifications qu'ils souhaitaient. Chacun sait bien que pour modifier des textes aussi complexes, il faut du temps.

Une réécriture qui rompt également un certain nombre de liens logiques du fait de la dispersion des articles, ce qui est relativement grave. Il nous semble que le droit du travail doit être un droit unifié, et ce droit n'est plus unifié lorsqu'il s'externalise.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Le PS non plus n'est pas unifié !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Le parti socialiste n'a qu'un seul premier secrétaire, monsieur le ministre. Et puisque vous me rappelez mon appartenance à un parti politique, je dirai que la diversité des opinions au sein du parti socialiste est source de richesses, alors que l'externalisation du droit du travail est un handicap pour tous les salariés. À la limite, ce qui touche le PS ne concerne que nous et nous sommes les seuls à pouvoir en juger.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Ah non ! nous avons besoin d'une opposition constructive !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Ne m'entraînez pas, monsieur le ministre, à changer de sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Cela pourrait laisser penser que nos propos vous gênent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Le ministre a peur du débat, il cherche à l'éviter.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

De toute façon, nous condamnerons jusqu'au bout cette externalisation qui va faire grossir d'autres codes.

C'est déjà compliqué, parce que nous allons doubler pratiquement le code du travail, mais, au point où nous en sommes, nous allons également doubler les autres codes.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Comme au PS le nombre de candidats !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

On prétend simplifier. En réalité, les salariés agricoles vont dépendre du code rural. Les assistants maternels, familiaux, éducateurs vont dépendre du code de l'action sociale et des familles. Les mineurs vont dépendre du code minier. Les salariés des entreprises de transport seront intégrés dans un code qui reste à créer. Idem pour les salariés d'EDF-GDF, pour les marins, pour les dockers…

Nous pensons qu'il faut un droit unifié du travail parce que tous les salariés doivent être égaux devant la loi et devant le règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

C'est le fondement même de notre pacte républicain et, au-delà, une question de lisibilité et de praticabilité. Nous allons devoir travailler sur des bureaux élargis.

Voilà pour ce qui concerne les aspects formels.

Sur le fond, cette réécriture, nous en sommes convaincus, et la discussion sur les amendements le démontrera, ne s'est pas faite à droit constant.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Nous voulons rectifier un certain nombre des dispositions qui nous sont proposées. Si nous n'avons que peu de temps à consacrer au texte, au moins soyons utiles et procédons à ces rectifications.

Il est vrai que contrairement à ce qui est prévu dans l'article 57 de la loi du 30 décembre 2006, en l'espèce que « le Gouvernement est autorisé à procéder par ordonnance à l'adaptation des dispositions législatives du code du travail à droit constant » – ce n'est déjà pas génial, mais enfin, admettons, c'est un sujet technique –, les modifications d'écriture proposées revisitent le droit du travail et tournent à l'inconstance ; et je vais en donner quelques exemples très concrets qui seront d'ailleurs repris dans la centaine d'amendements que nous avons déposés et qui sont des amendements de rétablissement. Nous ne cherchons pas à inventer, nous voulons appliquer le droit constant et rien d'autre, dans la logique même de la recodification.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Les peines de récidive sont quasiment supprimées pour les employeurs. C'est quand même assez extraordinaire : à un moment où on prône le civisme, où chacun s'emploie à demander plus de citoyenneté, moins d'incivilité, on voit apparaître ici ou là des mesures qui tendent à supprimer des dispositions pénales qui pourraient à un moment ou à un autre léser tel ou tel chef d'entreprise. Qu'il s'agisse de l'impératif de la négociation collective, de l'entrave au droit syndical, de l'exercice de la délégation syndicale, des droits des membres d'un comité d'entreprise ou des droits des membres d'un CHSCT, ou encore d'autres éléments, nous y reviendrons, la nouvelle rédaction ignore les peines de récidive. Nous, nous considérons qu'elles doivent être rétablies.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

C'est une question d'équité devant la justice pour l'ensemble des citoyens de ce pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Et lorsque les citoyens sont des salariés, nous leur devons cette équité à un double titre, en tant que citoyens et en tant que salariés.

Quant aux sanctions pénales, elles sont supprimées pour les employeurs. Pour plusieurs autres parties du droit du travail, notamment le temps de travail, les repos compensateurs, les oublis de déclaration, la violation des accords collectifs étendus, les sanctions pénales ont été littéralement supprimées. À croire que l'on cherche à protéger davantage l'employeur que l'employé. Pourtant, on sait que, par définition, dans le rapport entre employeur et employé, c'est l'employeur qui est forcément dominant. Si nous préconisons la négociation collective, nous voulons qu'elle se fasse si possible avec des sanctions équilibrées, qui ne disparaissent pas automatiquement pour le plus puissant, le dominant, l'employeur. Toutes les sanctions supprimées doivent être selon nous rétablies.

Peut-être anticipe-t-on d'une certaine manière sur la dépénalisation que Mme la garde des sceaux semble vouloir écrire. Ceci dit, que ce soit dans le cadre de la recodification ou de dispositions législatives à venir qui nous seraient proposées par le Gouvernement, nous y sommes opposés. Nous sommes de ce point de vue pour la tolérance zéro, il faut savoir être fermes avec tout le monde, comme vous l'êtes dans les autres domaines qui concernent les plus petits délinquants.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

C'est vrai. Cela devrait inciter le Gouvernement à ne pas réitérer cette épreuve de recodification.

Je dirai quelques mots du rôle des représentants du personnel. Nous avons déposé une quinzaine d'amendements de rétablissement du doit constant sur ce sujet ô combien important. Ils concernent notamment : le rétablissement de la consultation du comité d'entreprise pour augmenter la durée maximale du CDD en cas de commande exceptionnelle ; la procédure de contestation de vote d'un délégué syndical ; les modalités de l'élection des délégués du personnel en cas de désaccord ; le recours à une expertise demandée par le CHSCT. Sur tous ces points, la nouvelle rédaction est à peu près systématiquement ambiguë ou moins favorable aux salariés et à leurs représentants.

Cela nous semble grave pour les droits des salariés mais également pour l'avenir de nos entreprises. Or les entreprises ne fonctionneront bien que s'il y a des chefs d'entreprise volontaristes mais également des syndicats représentatifs. Si nous voulons faire progresser le taux de syndicalisation dans ce pays, il faut que les syndicats aient de réels pouvoirs. Si les pouvoirs attribués à ces syndicats sont en constante réduction, les salariés se demanderont pourquoi les syndicats existent, à quoi ils peuvent bien servir et pourquoi il faut y adhérer. Le modèle que nous souhaitons voir émerger dans notre pays est celui d'un vrai partenariat entre l'entreprise et ses salariés. Ce n'est pas en rognant de toutes parts les droits des représentants syndicaux que l'on favorisera un syndicalisme fort, à l'image de celui qui prévaut notamment dans les pays d'Europe du Nord.

C'est d'autant plus vrai en ce moment, où l'on voit arriver des textes importants dans le cadre du droit du travail, sur le contrat unique mais pas seulement, sur la sécurisation des parcours professionnels également. Il nous paraît important que les syndicats soient puissants. Pour l'être, il faut qu'on leur en donne les moyens et non qu'on les marginalise.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Vous voyez que nous nous rejoignons !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Sur ce point, nous sommes d'accord. Sauf que cette recodification ne nous semble pas aller dans ce sens.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

C'est normal, elle est à droit constant !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Nous en débattrons au moment de l'examen des amendements.

Il me faut parler aussi du rôle de la médecine du travail, des garanties des salariés en matière de santé, d'hygiène et de sécurité. Là aussi, nous voulons un équilibre, c'est un sujet essentiel. La pénibilité du travail est un élément d'autant plus important que nous sommes appelés à travailler plus longtemps.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

C'est courageux ce que vous venez de dire sur l'allongement de la durée du travail. Un peu solitaire, mais courageux !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Ce n'est pas forcément courageux, nous ne sommes pas aux affaires, c'est vous qui l'imposez. Il faut prendre acte du fait qu'on veut nous faire travailler plus, et en même temps créer des outils pour prévenir les différentes pathologies liées au travail.

La pénibilité du travail, la prévention des problèmes de santé dans le monde de l'entreprise sont des sujets essentiels qui préoccupent les salariés. Un certain nombre de professionnels ont travaillé sur ce sujet, je pense en particulier à Philippe Askenazy. Ils ont démontré facilement qu'il existait un lien évident entre le bien-être au travail et la productivité, donc l'intérêt de l'entreprise. Or tous les jours, en lisant les journaux, nous constatons, à travers des drames qui vont parfois jusqu'au suicide, qu'il existe aujourd'hui des failles dans certaines entreprises et peut-être dans notre droit.

La recodification, je le répète, modifie la rédaction de plusieurs articles s'agissant de ces sujets en proposant par exemple une reformulation ambiguë par rapport à la médecine du travail ; une obligation de sécurité également transférée sur le salarié ; une interdiction de travaux uniquement maintenue pour les femmes enceintes, pas pour celles qui viennent d'accoucher.

D'autres garanties disparaissent pour les contrats de travail, qui feront l'objet d'amendements car les modifications apportées par l'ordonnance vont profondément dénaturer le contrat de travail.

Le contrat d'apprentissage, qui figurait au début du code du travail, se retrouve désormais dans la partie consacrée à la formation professionnelle.

Le renouvellement de contrat pour les personnes titulaires d'un contrat aidé est en voie de disparition. Je ne reviens même pas sur les moins 25 % qui nous sont annoncés et dont on voit déjà les effets catastrophiques dans les associations sur le plan local. On oublie quelquefois que si le chômage baisse, du fait d'une évolution démographique, les chômeurs les plus en difficulté ne retrouvent pas de travail actuellement.

La décision de requalification par les prud'hommes d'un CDD en CDI ne sera plus exécutoire de plein droit en attendant un éventuel appel. Quant aux opérations de prêt de main-d'oeuvre, elles seront facilitées par le nouveau code.

Il faut probablement voir dans ces différents exemples, dont la liste est loin d'être exhaustive, les prémices du contrat unique cher au MEDEF et à son porte-voix présidentiel. On l'a encore constaté ces jours derniers !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Par ailleurs, la réécriture transfère les compétences du Parlement au Gouvernement. Je n'insisterai pas car cela a déjà été dit. Ce sont près de 500 articles qui vont ainsi échapper définitivement au Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Ce glissement du législatif vers le réglementaire me paraît en contradiction avec le renforcement des prérogatives du Parlement préconisé par le rapport Balladur. Cela dit, celui-ci deviendra-t-il un jour réalité ?

La réécriture qui nous est proposée modifie également l'architecture des responsabilités pour les prud'hommes et l'inspection du travail. Je sais bien que 63 conseils prud'homaux sur 271 sont appelés à disparaître, mais nous sommes choqués de voir que, dans le texte, le conseil des prud'hommes est remplacé par le juge judiciaire. Peut-être a-t-on déjà prévu leur disparition complète ; après tout pourquoi pas ?

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

C'est votre proposition ? Ce n'est pas ma position !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Je l'espère, mais c'est en tout cas, semble-t-il, l'intention de certains membres de votre majorité !

Si les inspecteurs et contrôleurs du travail se mobilisent c'est parce que la liste des atteintes à leurs missions est longue. L'inspection du travail est fréquemment remplacée par l'« autorité administrative compétente » – je n'interprète pas, je me contente de lire –, ce qui vise en général les directeurs départementaux du travail. Or, pour ces derniers, il n'y a pas de garantie d'indépendance comme pour les inspecteurs du travail. L'« autorité administrative compétente » pourrait tout aussi bien être le directeur du travail, placé dans une situation de dépendance hiérarchique directe.

Je ne reviendrai pas sur la suppression du FEDOM dont a parlé Alain Vidalies et qui sera de nouveau évoquée tout à l'heure.

S'agissant du droit appliqué dans les départements d'Alsace-Moselle, Mme la rapporteure a fait valoir l'obligation de procéder à droit constant pour rejeter nos amendements. Or une bonne partie de la recodification, et de la réécriture, n'est pas réalisée à droit constant. Cela n'est donc pas cohérent.

Cela dit, nous ne sommes pas naïfs. Nous savons que cette recodification est une nécessité technique, mais vous n'avez cessé de légiférer ces dernières années sur le droit du travail – trois projets de loi sur le temps de travail, ordonnance pour l'emploi, création du CNE, tentative avortée du CPE – et ce processus va se poursuivre avec le contrat unique. Finalement, il faudra sans doute travailler plus pour gagner autant. Nous, nous pensons que l'on peut travailler plus mais que, en l'état actuel du droit, il y a un déséquilibre entre le salarié et l'entreprise. Nous sommes inquiets, car cette recodification et les textes à venir vont accentuer encore l'écart entre les pouvoirs, de plus en plus réduits, du salarié et ceux, de plus en plus importants, du chef d'entreprise. Je vous propose donc d'adopter cette question préalable pour que nous puissions examiner ce texte de façon approfondie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

(Mme Catherine Génisson remplace M. Rudy Salles au fauteuil de la présidence.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Monsieur Liebgott, vos intéressantes remarques reposent sur un diagnostic erroné : l'initiative des grandes conquêtes sociales, que vous attribuez à un seul des courants qui animent la vie politique française (Sourires), est en réalité largement partagée. Ainsi, de toutes les grandes régions qui composent l'Union européenne, c'est la Bavière qui, au cours des cinquante dernières années, a le plus amélioré le pouvoir d'achat, la considération et le bien-être dont jouissent les ouvriers et les employés ! Comme l'affirmait Angela Merkel lors du congrès de la CDU-CSU à Augsbourg : « Lorsque la droite et le centre gouvernent ensemble depuis des générations, c'est là qu'ils obtiennent les meilleurs résultats » ! (Rires sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Je vous conseille donc simplement, monsieur Liebgott, de vous pencher sur ce qui a été fait au cours des cinquante dernières années et de vous rappeler cette phrase de Soljenitsyne : « Crois les yeux, pas les oreilles ». Alors, vous ferez sans doute preuve d'un peu plus d'humilité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Sur le vote de la question préalable, je suis saisie par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Dans les explications de vote, la parole est à M. Marc Dolez, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Si l'Assemblée adopte la question préalable, ce que nous souhaitons, cela nous évitera de délibérer sur le texte. Plusieurs raisons justifient le vote de cette motion. Ce texte ne répond pas aux objectifs qu'il est censé atteindre. Il n'est pas plus lisible. Il ne va pas faciliter l'accès au droit. Il ne respecte pas le principe du droit constant et nous avons multiplié les exemples à cet égard. De plus, il comporte des orientations particulièrement dangereuses, au premier rang desquelles l'externalisation de dispositions vers d'autres codes ou le déclassement de mesures législatives renvoyées au domaine réglementaire, à propos desquelles Bernard Teyssié, directeur du laboratoire de droit social de l'université Panthéon-Assas, parle de « chaos imposé au corps social » !

Pour éviter ce chaos, il faut immédiatement arrêter les frais en adoptant cette question préalable. Cela aurait d'ailleurs un avantage pour le Gouvernement et le Parlement, car cela permettrait, monsieur le ministre, de réexaminer sur des fondements sérieux une recodification en l'espèce peu pertinente et trop hâtive, mais dont nous approuvons tous le principe. Rien n'y fait obstacle, hormis la volonté de court-circuiter le Conseil d'État, comme Mme Irles en a fait elle-même l'aveu dans son rapport. Ce serait le bon sens dans la mesure où le nouveau code du travail ne devrait pas entrer en vigueur avant le 1er janvier 2009, donc pas avant les élections prud'homales de décembre 2008.

Une recodification digne de ce nom suppose deux conditions : l'affirmation du rôle protecteur de la loi, chargée de garantir les droits des salariés, ce qui aurait impliqué d'associer pleinement le Parlement à l'établissement du nouveau code ; la confiance des travailleurs et de leurs représentants syndicaux, qui ne s'est pas manifestée sur ce texte, contrairement à ce que vous avez affirmé tout à l'heure à la tribune, monsieur le ministre. Aucune de ces deux conditions n'étant satisfaite, j'invite l'Assemblée a voter cette question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

La parole est à M. Roland Muzeau, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Puisque M. le ministre se lasse d'entendre citer le même professeur de droit, je vais diversifier mes sources. Il y a quarante ans déjà, Marcel Waline écrivait : « Je l'ai toujours pensé : codification égale modification ».

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Mais c'est d'une recodification qu'il s'agit !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Plus récemment, des professeurs de droit ont confirmé, à l'occasion de la recodification du code du travail, que « la codification ou recodification à droit constant empruntait nécessairement la voie d'une modification de l'état du droit. »

Ces remarques rendent encore plus critiquable la méthode choisie par le Gouvernement pour mener cette recodification, les ordonnances, qui reviennent à dessaisir le Parlement, conduisant à faire naître un nouveau code du travail hors de tout débat parlementaire de fond.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Vous prouvez le contraire !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Lisibilité, accessibilité, tels étaient les objectifs affichés pour légitimer cette recodification, mais, dans le projet, il y avait plus. Questionné en 2005 sur ce projet, Antoine Lyon-Caen parlait « d'espoir suffisamment timide pour être à peine perceptible qu'un contenant revu remodèle le contenu, que des consensus plus ou moins explicites se forment sur des révisions substantielles. » Les reformulations, les changements de structures, les oublis et les glissements qu'opère le texte lui donnent raison.

Cette recodification du code du travail ne peut donc se comprendre en dehors d'un contexte où juristes et économistes auscultent depuis des années déjà notre législation sociale, à la plus grande satisfaction du MEDEF et des gouvernements successifs de droite, afin d'accréditer l'idée selon laquelle le droit du travail serait un obstacle au droit au travail.

Des rapports Cahuc, Blanchard, Camdessus ou de Virville et des quarante-quatre propositions du MEDEF à votre projet, monsieur le ministre, la philosophie est la même : il s'agit de simplifier le droit, autrement dit d'affaiblir l'ordre public social et de soumettre le droit du travail à d'autres domaines du droit, notamment au droit boursier.

Le groupe GDR votera donc naturellement cette question préalable. Si, par malheur, l'Assemblée ne fait pas de même, nous lui donnerons une nouvelle chance en soutenant une motion de renvoi en commission !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

La parole est à M. Yanick Paternotte, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Yanick Paternotte

Mes chers collègues, je vais essayer de vous convaincre le plus rapidement possible que la sécurité juridique est au coeur de ce projet de recodification dont nous sommes de chauds partisans. Il est important de remettre cet exercice, qui paraît un peu technique, voire, selon certains, académique, dans la perspective de donner plus de sécurité juridique car c'est la sécurité juridique qui donne du sens au code du travail. Ce droit est au carrefour de la protection des salariés et du développement économique.

Le droit du travail est né et s'est développé au croisement de l'efficacité économique et des droits des salariés. Il poursuit en effet deux missions essentielles : protéger le salarié placé dans une situation de subordination juridique et contribuer à une organisation efficace de l'activité économique des entreprises. Ces deux principes ne sont contradictoires qu'en apparence. La mobilisation effective de l'énergie et de l'intelligence des salariés au service de l'entreprise suppose que ceux-ci soient équitablement traités et voient leurs droits reconnus. A l'inverse, une réglementation trop détaillée de ces droits nuit au développement de l'activité, et donc à l'emploi des salariés que cette réglementation serait censée protéger.

Pour remplir ses missions, le droit du travail doit donc manifester au plus haut point le sens du compromis et de l'équilibre. C'est un droit qui est face à des situations très hétérogènes. C'est un droit de masse et un droit de la vie quotidienne dont les dispositions concernent des millions de salariés et des centaines de milliers d'entreprises, et qui appréhende des situations de fait extrêmement diverses.

Il s'applique dans les toutes petites entreprises comme dans les grands groupes internationaux. Il envisage aussi bien la situation du salarié en CDI à temps complet sur un site de production que celle du salarié travaillant à domicile ou du saisonnier alternant périodes d'activité et d'inactivité. En outre, chaque innovation, chaque modification doit, pour produire son plein effet, être connue et surtout comprise par ce très grand nombre d'acteurs dont il appelle à modifier les comportements.

De ces constats découle à l'évidence un impératif : il faut rendre ce droit accessible et lisible. La cohérence et la simplicité du droit du travail nécessitent donc un effort collectif, vigilant et opiniâtre. Or, de l'aveu de tous les acteurs, comme l'a démontré tout à l'heure M. le ministre, qu'il s'agisse des salariés, des entreprises, des partenaires sociaux, de l'administration ou des juges, le droit du travail est perçu aujourd'hui comme difficilement compréhensible, ce que d'ailleurs nul ne conteste, …

Debut de section - PermalienPhoto de Yanick Paternotte

…et par conséquent difficilement applicable.

Cette évolution tient sans doute à l'inflation de la production normative, imputable d'abord au législateur, mais aussi à l'instabilité de normes souvent remises en cause ou récrites avant même d'avoir été complètement intégrées par les acteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Le code du travail est modifié tous les six mois !

Debut de section - PermalienPhoto de Yanick Paternotte

Enfin, dans bien des cas, le contenu même du code s'avère inadapté à la réalité du monde du travail, péchant soit par excès de formalisme et de précision, soit, à l'inverse, par une généralité créatrice d'ambiguïté et d'insécurité juridique.

Debut de section - PermalienPhoto de Yanick Paternotte

Au total, le droit du travail ne remplit que très imparfaitement ses deux missions essentielles : protéger les salariés et favoriser le développement de l'emploi et de l'activité économique. À l'avenir, les accords collectifs seront appelés à jouer un rôle de plus en plus important.

Debut de section - PermalienPhoto de Yanick Paternotte

À titre d'exemple, le problème de la pénibilité ne peut pas être réglé de manière générale. Il doit être traité dans des accords de branche collectifs.

Comme l'a rappelé le Premier ministre, le dialogue social et sa rénovation sont au coeur de la réforme de notre pays. La culture de la négociation et du compromis doit remplacer celle du conflit. Demain, il faudra passer de la défiance à la confiance. C'est cela, la véritable rupture et la modernité.

Les parlementaires du groupe UMP souhaitent que la législation du travail gagne en lisibilité, dans l'intérêt de tous les partenaires sociaux. En simplifiant le code du travail, le Gouvernement avait manifestement à l'esprit un précepte de Montesquieu : « Le signe le plus avéré de la décadence d'une société est la prolifération des lois. »

Parce que le groupe UMP soutient ce texte, qu'il juge bon, il votera contre la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

La parole est à M. Francis Vercamer, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

À quoi bon donner la parole à un orateur du Nouveau Centre puisque le groupe UMP s'est déjà exprimé ?

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

Je l'ai indiqué tout à l'heure : pour le groupe Nouveau Centre, ce texte constitue une première étape…

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

…vers la clarification et la recodification. Elle permettra aux utilisateurs du code du travail – je parle non des juristes, mais des salariés et des employeurs – de mieux comprendre cette législation devenue illisible, voire obsolète, à force d'empilements et de contradictions.

Cette étape sera, je l'espère, préalable à une véritable simplification, qui allégera le code du travail, simplifiera des règles de droit parfois trop contraignantes pour le salarié ou pour l'employeur, et maintiendra un équilibre entre leurs droits.

Nous venons d'assister à un intéressant numéro de duettistes. M. Vidalies nous a assuré que le texte du Gouvernement, n'étant pas rédigé à droit constant, n'allait pas assez loin, tandis que M. Liebgott prétendait le contraire et réclamait que le Gouvernement revienne en arrière. Chacune des démonstrations était intéressante, mais, à mon sens, l'une des deux était de trop. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Quoi qu'il en soit, si les députés de l'opposition veulent modifier le code du travail, je leur rappelle que, aux termes de la loi sur le dialogue social, il faut commencer par une négociation entre les partenaires sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

Et je leur enjoins de procéder ainsi, s'ils veulent voter des amendements qui vont au-delà de la recodification que nous examinons aujourd'hui.

Quoi qu'il en soit, le groupe Nouveau Centre ne votera pas la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Nous allons maintenant procéder au scrutin public, précédemment annoncé, sur la question préalable.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 90

Nombre de suffrages exprimés 90

Majorité absolue 46

Pour l'adoption 30

Contre 60

La question préalable est rejetée.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Martine Billard.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je constate que ce texte nous est présenté avec beaucoup de précipitation.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Pas du tout ! Nous avons tout le temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Mais si, monsieur le ministre : le Gouvernement essaie de le faire voter au plus vite, tant il lui serait désagréable que nous prenions le temps de discuter d'un code qui concerne pourtant des millions de salariés.

Permettez-moi un bref rappel. En mars 2004, le MEDEF a publié quarante-quatre propositions sous le titre Moderniser le code du travail. Il reprochait d'abord à ce code un formalisme excessif, toujours à la charge de l'employeur. Il souhaitait également que le lien de subordination soit limité à la relation contractuelle visant à l'exécution de travaux sous les ordres d'une hiérarchie disposant d'un pouvoir disciplinaire destiné à assurer le bon fonctionnement de l'entreprise.

Si je rappelle la position qu'il avait prise alors, c'est parce que l'actuelle recodification s'inscrit dans un contexte précis. La remise en cause de l'unicité du code du travail fait écho aux déclarations de différentes fédérations professionnelles d'employeurs. Ceux-ci ont expliqué que, la situation n'étant pas la même sur tout le territoire national, l'existence d'un code du travail unique ne se justifiait pas et qu'il faudrait parfois le décliner, en fonction peut-être – que sais-je ? – des zones du territoire.

Certes, la recodification proposée ne va pas jusque-là. On ne pouvait pas aller aussi loin. Mais elle vise au moins un des objectifs que j'ai mentionné, puisqu'elle rompt l'unicité du code du travail, en renvoyant certaines catégories de travailleurs à d'autres codes.

Le principe du droit collectif est également en débat. De plus en plus souvent, en effet, certains affirment leur volonté que les relations entre employeurs et salariés soient régies non plus par un contrat collectif mais par un contrat individuel, comme si, dans l'entreprise, les uns et les autres étaient égaux. Le sujet revient constamment, porté tout à tour par le MEDEF et par nos collègues de la majorité, qui aiment répéter, même dans cet hémicycle, qu'il faut réduire la portée du code du travail. Parmi ces chantres du libéralisme, les moins extrémistes se contentent de prétendre qu'il faut remplacer les accords de branche par des accords d'entreprise. Les autres vont jusqu'à affirmer que le code du travail doit être vidé de son contenu collectif.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Est-ce votre position, madame Billard ? Ce n'est pas la mienne, en tout cas !

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Je parle de votre majorité, monsieur le ministre, où certains députés aimeraient que les relations entre employeurs et salariés soient régies par le code civil.

Le contexte actuel se prête également à la remise en cause de la durée légale du travail, conforme à la position du Gouvernement. En commission, Mme Lagarde nous a expliqué, au mois de juillet, que la limite de quarante-huit heures hebdomadaires imposée par les textes européens lui paraissait excellente. Elle semblait ne pas comprendre pourquoi la législation française maintenait des dispositions aussi archaïques que celle qui empêche les employeurs de faire effectuer aux salariés un tel nombre d'heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Mais nous avons de la chance : à l'égard des textes européens, la France n'a pas eu la possibilité d'utiliser l'opt out, qui permet de travailler plus. Cette disposition reste réservée, pour l'instant, à la Grande-Bretagne et à la Pologne, mais je suppose que Mme Lagarde souhaiterait qu'on y vienne assez vite.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Enfin, on observe actuellement une ultime remise en cause du code du travail avec la fin au droit au dimanche non travaillé. Ce point a fait aujourd'hui même l'objet d'une question orale au Gouvernement et, d'ici à quelques semaines, un projet de loi accentuera cette remise en cause.

La recodification n'intervient donc pas dans un contexte neutre. Il était normal que, sur les bancs de ceux qui pensent qu'il faut défendre aussi les intérêts des salariés, certains soient vigilants…

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

…et tentent de vérifier si l'engagement, pris par ordonnance, que la modification s'effectuerait à droit constant était respecté. Aux yeux du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, il s'avère que ce n'est pas le cas. Tout à l'heure, monsieur le ministre, interrogé sur la nouvelle formule du travail dominical, vous en êtes convenu.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Allons ! Sur ce point, vous êtes d'accord avec moi !

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Il en va de même en ce qui concerne l'unification des formulations, qui n'a pas été effectuée. Voulez-vous des preuves que le présent de l'indicatif n'a pas été utilisé partout et qu'il reste des formules impératives ? L'article 1232-1 dispose que tout licenciement pour motif personnel « doit être justifié ». La précision est importante. L'article 1233-82 indique que l'accord collectif détermine les conditions que « doit remplir » le salarié et, à propos du contrat d'apprentissage, l'article 1242-4 indique que « l'apprenti doit satisfaire » à telle obligation. La liste est longue, monsieur le ministre, de transpositions dont la rédaction n'a pas été unifiée. À cet égard, vous n'avez pas respecté vos engagements.

Par ailleurs, l'entrée en vigueur du code a été repoussée à la parution de la partie réglementaire, fixée au 1er mars 2008. Les délais impartis à l'origine n'ayant pas pu être respectés, il a fallu introduire en catastrophe un cavalier législatif dans un autre texte pour la retarder. La commission a voté un amendement demandant son report au 1er janvier 2009, ce qui me semble une bonne disposition. Non seulement les conseillers prud'homaux doivent être formés, mais tous les salariés doivent pouvoir prendre le code en main pour défendre leurs droits dans les entreprises.

Une grande incertitude demeure en outre sur la manière dont la jurisprudence interprétera les modifications proposées. L'ordonnancement des articles change, en effet, et une grande partie du vocabulaire consacré par les juges n'est pas reprise. On sait qu'un changement de termes peut modifier la jurisprudence.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

La partie législative du code du travail comprendra plus d'articles. Elle a d'ailleurs été diffusée, on l'a dit, par les éditions Dalloz, alors qu'elle n'a qu'une valeur réglementaire. Certes, le ministre m'objectera peut-être qu'il n'est pas responsable de cette publication.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Vous avez vu juste ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Mais il est significatif qu'un éditeur aussi renommé se sente autorisé à faire paraître ces textes, considérant qu'ils ont d'ores et déjà valeur de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Mme la rapporteure prétend que la plupart des partenaires sociaux saluent le résultat obtenu. Mais, quand on regarde son rapport, on découvre que la plupart des confédérations syndicales n'ont pas été auditionnées. La faute ne lui en incombe pas, j'en conviens, mais cette situation jette un doute sur la valeur des auditions auxquelles il a été procédé.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Mais celles-ci ne nous ont pas été transmises, comme nous l'avions demandé en commission.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

M. Muzeau serait-il tenté par l'exercice solitaire du pouvoir ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Vous allez semer la zizanie dans mon groupe, monsieur le ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Ce document intéressant tous les membres de la commission des affaires sociales, il est dommage qu'ils n'aient pas pu en disposer. Il est facile pour vous de prétendre que la majorité des partenaires sociaux sont d'accord ; nous, nous n'en savons rien.

En tout cas, compte tenu des déclarations que nombre d'entre eux ont faites aux médias, il semble que cet accord soit plus limité que ce qui est écrit dans le rapport.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

En outre, nous n'avons pas vraiment disposé, au Parlement, des moyens nécessaires pour mener un travail approfondi sur ce texte.

Pourtant, le code du travail constitue, depuis plus d'un siècle, l'élément régulateur des relations du travail dans notre pays. Il intervient directement dans la vie de millions de salariés qui, sans ce code, seraient parfois en difficulté dans leur relation avec l'employeur, voire dans l'incapacité de se défendre. On pourrait passer des heures à citer des exemples de non-respect du droit du travail dans les petites entreprises. Le code du travail est indispensable au salarié pour se défendre, opposer la loi à son employeur et le contraindre à la respecter. Car le lien unissant le salarié à son employeur est de subordination, et donc, par nature, inégalitaire.

Le code du travail est un élément fondamental qui permet d'imposer l'État de droit au sein des entreprises. Sa lisibilité est importante pour les juristes, comme l'ont évoqué la plupart des intervenants. Mais le code du travail est essentiel dans les entreprises ne disposant pas d'organisations syndicales, car les salariés doivent avoir les moyens de se défendre. Néanmoins, le code actuel n'est pas parfait et nous souhaiterions y inscrire d'autres avancées dans le cadre de négociations entre les partenaires sociaux, car force est de constater que, depuis cinq ans et demi, l'équilibre précaire existant entre employeurs et salariés a été constamment mis à mal.

Enfin, il est pour le moins désagréable que nous n'ayons pas eu le temps de discuter au fond de certaines remises en cause. Renvoyer à d'autres codes certaines catégories de salariés n'est pas anodin, monsieur le ministre, car le code spécifique en droit constant prime sur le code général. Nous avons eu de longs débats sur la durée du travail, pour les salariés du secteur des transports, par exemple. Dès lors que ceux-ci ne figureront plus dans le code du travail général et seront renvoyés à un code spécifique, on ne peut qu'être très inquiet sur ce qui les attend en matière de temps de travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Il est effectivement gravissime de morceler ainsi le droit du travail. Les organisations syndicales salariales ont bataillé durant des décennies pour obtenir l'unification du code du travail, quel que soit le type d'emploi salarié, le secteur ou la taille de l'entreprise. Ce que vous avez fait là, monsieur le ministre, je le répète, est gravissime.

Nous aurons l'occasion de revenir sur votre façon de respecter le principe du droit constant… Mais je citerai d'autres exemples de modifications qui ne sont pas faites à droit constant. Dès lors qu'il s'agit de rogner les droits des salariés, les régimes spéciaux, que vous dites inégalitaires, trouvent grâce à vos yeux alors que, dans d'autres cas, vous criez haro sur ces derniers ! Vous démantelez des protections communes, ce qui est loin de constituer une avancée progressiste.

Pour faire court,…

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Nous avons le temps !

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

…j'insiste sur le fait que tous les amendements présentés par les groupes de l'opposition sont à droit constant. Nous nous sommes appliqués à reprendre la rédaction des articles du code en vigueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Vous ne pourrez donc pas dire, monsieur le ministre, que les propositions faites par les députés du groupe GDR visent à modifier des dispositions existantes qui n'auraient pas respecté les négociations entre les partenaires sociaux.

J'évoquerai maintenant les inspecteurs du travail et les conseils de prud'hommes. La volonté du Gouvernement de ne pas augmenter le nombre d'inspecteurs du travail, si ce n'est à la marge, et de leur attribuer de plus en plus de missions ne laisse pas de nous inquiéter.

Quant aux conseils de prud'hommes, un article très important du code actuel prévoyait, pour modifier le lieu d'implantation des conseils de prud'hommes – ou pour supprimer ces derniers – l'obligation de consulter préalablement les collectivités locales et les syndicats de salariés et d'employeurs concernés.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Or, avec l'ordonnance de recodification, cette obligation a disparu. Quand on connaît le projet de la Chancellerie de supprimer soixante-trois conseils de prud'hommes, on ne peut que trouver bizarre la suppression de cette obligation !

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Allons donc ! Les décisions à ce sujet ont donné lieu à un avis qui a paru au Journal officiel en novembre !

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

S'agissant du temps partiel – qui concerne nombre de femmes –, votre projet comporte quelques petits défauts, sur lesquels je reviendrai lors de l'examen des amendements. La délégation aux droits des femmes de notre assemblée avait obtenu que les entreprises soient tenues de présenter au comité d'entreprise un rapport annuel sur le temps partiel dans l'entreprise. À la faveur de la démarche de codification, cette obligation a disparu pour les entreprises de moins de 300 salariés.

Au regard de l'argumentaire du MEDEF ou de la majorité présidentielle, selon lequel il ne faut pas faire peser trop de contraintes sur les petites entreprises, le fait de modifier les obligations selon la taille de l'entreprise n'est pas neutre, car la grande majorité des entreprises en France comptent moins de 300 salariés. Par conséquent, la majorité des entreprises françaises – ou ayant leur siège en France – n'auront plus l'obligation de remettre des indications précises sur le temps partiel dans l'entreprise, à moins que cela ne figure dans le décret. Mais, dans ce cas, pourquoi renvoyer à un décret ce qui est maintenu pour les entreprises…

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Cette disposition a été modifiée au Sénat à l'initiative de votre groupe !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Ma chère collègue, il faudrait vous acheminer vers votre conclusion.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Cela étant, je me félicite, monsieur le ministre, d'une avancée de notre commission. Le texte du Sénat ayant supprimé l'obligation, pour une entreprise disposant d'une installation nucléaire, d'avertir l'autorité de sûreté en cas de danger imminent, j'ai déposé un amendement pour rétablir, à droit constant, cette obligation. La commission l'a adopté et je m'en félicite, même si cette énormité devait à l'évidence être corrigée !

Tels sont les éléments que je défendrai au travers de nos amendements. Le risque d'erreur existe : vous avez vous-même déposé, monsieur le ministre, un certain nombre d'amendements visant à corriger des erreurs de rédaction, ce qui prouve que la transposition à droit constant ne va pas de soi. Vous ne pouvez donc nous accuser de vouloir transposer à droit constant, alors que vous-même avez dû revenir sur plusieurs de vos propositions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures dix.)

Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

Jean-Pierre Carton