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Intervention de Laurent Wauquiez

Réunion du 4 décembre 2007 à 15h00
Parc naturel régional de camargue

Laurent Wauquiez, secrétaire d'état, porte-parole du Gouvernement :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence de Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, en voyage officiel avec le Président de la République en Algérie, ainsi que celle de Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie, qui présente aujourd'hui, avec Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports, le plan de lutte contre les nuisances aéroportuaires.

Donner un avenir au parc naturel régional de Camargue et sauver en même temps ce qui est sans doute l'un des plus beaux joyaux de notre pays en termes de développement durable, tel est l'objet du projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter au nom du Gouvernement.

La Camargue – ce n'est pas à vous que je l'apprendrai, monsieur le rapporteur, vous qui la connaissez parfaitement – est un territoire d'exception, qui jouit d'une renommée internationale. Avec près de 100 000 hectares, il s'agit de la plus vaste zone humide de France et, même si nous n'en avons pas toujours conscience, de l'une des plus importantes du continent européen.

Avec sa biodiversité unique, la Camargue est bien un joyau, mais un joyau fragile, dépendant de la bonne gestion de l'eau et de notre capacité à lui assurer des atouts pour l'avenir et à le préserver.

Cet espace naturel accueille aujourd'hui des activités diversifiées : exploitation du sel, élevage de chevaux et de taureaux, riziculture, viticulture, pêche, chasse et tourisme – et aussi, tout simplement, promenades dont profitent les familles.

L'action coordonnée entre ces différentes activités est l'un des principaux défis – et sans doute aussi l'un des principaux miracles – de la Camargue, qui a su concilier dans un espace naturel aussi exceptionnel cette diversité d'usages et d'utilisations par l'homme.

C'est bien dans cette volonté de gestion durable et concertée entre tous les acteurs concernés qu'a été créé, en 1970, le parc naturel régional de Camargue. Cette initiative avait alors un caractère éminemment précurseur.

Or le parc est aujourd'hui confronté à l'un des moments les plus difficiles de son histoire, avec une situation juridique inextricable, fruit d'une longue série de contentieux qui pourraient, à terme, menacer l'avenir même de la Camargue.

Dès sa nomination, Jean-Louis Borloo a fait sienne la volonté de tous les acteurs locaux, dont vous avez été les relais, de maintenir le parc naturel régional de Camargue. Je sais, cher Bernard Reynès, combien vous aussi avez défendu cet attachement, non seulement par le travail d'écoute que vous avez accompli dans le cadre de votre rapport, en procédant à de très nombreuses auditions sur le terrain, mais aussi en tant qu'élu des Bouches-du-Rhône, qui connaissez bien cet espace et ses enjeux, ainsi que le devoir que nous avons tous, dans cet hémicycle, d'en assurer l'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, du groupe Nouveau Centre et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Je tiens aussi à saluer le travail accompli en ce sens par la région, dans le climat le plus consensuel possible.

Nous étions tenus par une date butoir qui ne laissait aucune place à la passivité ou à l'attente. En effet, si nous ne réglons pas cet imbroglio juridique, le 20 février 2008, le parc naturel régional de Camargue n'existera plus.

Pour que son classement de parc naturel régional soit renouvelé, une révision de la charte est indispensable. Qui aurait pu comprendre que nous manquions ce rendez-vous avec l'avenir à cause d'un imbroglio juridique qui, précisément, menace l'existence du parc ? Seule l'intervention rapide du législateur est à même de trancher ce sac de noeuds juridique. Nous avons donc, mesdames et messieurs les députés, besoin de vous.

La charte annexée au décret de renouvellement de classement du 18 février 1998 laisse en place la Fondation de Camargue, gestionnaire du parc depuis sa création, mais cette structure s'est révélée inadaptée et a été confrontée à d'importants dysfonctionnements, sur lesquels je ne reviendrai pas. Fin 2001, la gestion a été confiée à un groupement d'intérêt public, ou GIP, qui semblait la seule formule juridique publique permettant aux propriétaires privés d'être directement membres de la structure de gestion du parc. Vous le savez en effet, monsieur le rapporteur, l'un des enjeux importants consiste précisément à pouvoir associer les propriétaires privés à la bonne gestion du parc.

Toutefois – et c'est là que commence le contentieux –, par un arrêt du 23 juin 2004, le Conseil d'État a estimé que seul un syndicat mixte, et non un GIP, pouvait gérer le parc naturel régional de Camargue. Pour se conformer à cette décision du Conseil d'État, la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur, le département des Bouches-du-Rhône, les communes d'Arles et des Saintes-Maries-de-la-Mer, ainsi que les établissements consulaires, ont constitué un syndicat mixte, à l'instar de tous les autres parcs.

Dans un nouvel arrêt du 17 février 2007, le Conseil d'État a cependant considéré que ce changement d'organisme gestionnaire nécessitait la révision de la charte du parc. Les méandres du droit public ont parfois des secrets impénétrables ! (Sourires.) En conséquence, le décret du 9 novembre 2004, qui transférait de la fondation au syndicat mixte la gestion du parc a été annulé.

En tout état de cause, ce sac de noeuds juridique rend impossible une révision dans de bonnes conditions de la charte, et donc le maintien du classement du parc.

Dans ce contexte, seul le recours à la loi permet de trouver une issue juridique rapide. Je rappelle à ce propos que nous sommes confrontés à un défi, à une lutte contre le temps, puisque cette solution doit impérativement être trouvée avant l'échéance du classement du parc naturel régional.

Ainsi, nous entendons, avec ce projet de loi soumis à votre examen, concilier le droit commun, qui veut qu'un parc naturel régional soit géré par un syndicat mixte, le souci de ne pas remettre en cause le syndicat mixte de gestion constitué par les collectivités territoriales et les actes déjà pris par celui-ci.

Enfin, nous souhaitons concrétiser le voeu exprimé l'été dernier par l'ensemble des acteurs locaux et que vous avez, monsieur Reynès, très bien mis en valeur dans votre rapport, de sauver le parc et de voir des représentants des propriétaires privés participer aux instances délibérantes de ce syndicat mixte.

Nous ne devons pas, en effet, sous-estimer l'enjeu économique sous-jacent, car, j'y insiste, les dimensions économique et écologique ont été parfaitement conciliées : outre les 37 personnes employées par la structure de gestion du parc, on compte plus de 200 emplois associés dans les domaines de la protection de la nature et de la recherche scientifique. Parallèlement, plus de 20 millions d'euros de projets sont actuellement programmés par le parc sur ce territoire, dans des domaines qui vont de la gestion des eaux à l'agroenvironnement.

De nombreuses personnes comptent donc sur le projet de loi qui vous est aujourd'hui présenté et qui est un bon exemple illustrant à quel point le développement durable ne s'oppose pas au développement économique.

Remettons un moment en perspective l'enjeu qui s'offre aujourd'hui à nous : les parcs naturels régionaux sont l'un de nos meilleurs outils de gestion du territoire et de préservation du développement durable sur des territoires d'exception à l'échelle nationale.

L'expérience française des parcs naturels régionaux inspire aujourd'hui de nombreux pays d'Europe et du monde : il suffit pour s'en convaincre de voir les nombreux partenariats tissés ces dernières années avec des pays aussi divers que les États-Unis ou l'Allemagne.

Face aux défis que représente aujourd'hui la perspective du changement climatique, les acquis, l'expérience et le volontarisme des parcs – dont peu ont une expérience aussi forte que le parc de Camargue – doivent être mobilisés. Les parcs naturels régionaux devront donc jouer un rôle essentiel pour nous accompagner dans le travail engagé dans le prolongement du Grenelle de l'environnement, notamment en vue de la constitution de la trame verte nationale.

Vous l'avez compris, nous avons besoin d'un réseau fort, actif et structuré de parcs naturels régionaux. Celui de Camargue, qui est l'un de nos joyaux les plus précieux, représente un exemple parfait de conciliation entre développement durable et économie, un territoire dans lequel les hommes, à force de travail, ont accumulé une très forte expérience.

Le rendez-vous que nous avons aujourd'hui consiste simplement à être à la hauteur du travail et de l'expérience accumulés, pour leur permettre de se poursuivre dans l'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

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