Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Séance en hémicycle du 13 octobre 2008 à 16h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • bâtiment
  • chambre
  • chambres régionales
  • comptable
  • juridiction
  • logement
  • rénovation
  • utilité

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à seize heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi portant modification de dispositions relatives à la Cour des comptes et aux chambres régionales des comptes (nos 947, 1138).

La parole est à M. Éric Besson, secrétaire d'État chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique.

Debut de section - PermalienÉric Besson, secrétaire d'état chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique

Madame la présidente, je tiens tout d'abord à saluer votre première présidence de séance.

Mesdames et messieurs les députés, je vous prie de bien vouloir excuser Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, qui devait présenter ce texte : il a été retenu et m'a demandé de le suppléer au pied levé. Je le fais avec grand plaisir concernant un sujet important.

J'ai donc l'honneur de vous présenter en deuxième lecture ce projet de loi relatif à la Cour des comptes et aux chambres régionales des comptes tel qu'il a été adopté par le Sénat au mois de juin dernier.

Comme vous le savez, ce projet modifie en profondeur les procédures juridictionnelles devant les juridictions financières avec, pour objectif, de les mettre en conformité avec les évolutions de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme – la CEDH.

En quelques mots, il s'agit de renforcer la transparence, l'équité et l'impartialité des procédures mises en oeuvre devant les juridictions et d'accélérer le délai dans lequel les décisions sont rendues. Grâce à ce texte, les droits des justiciables seront mieux garantis, et cela sans préjudice pour la protection des finances publiques.

L'un des apports principaux du projet de loi est ainsi de séparer strictement les fonctions d'instruction, de poursuite et de jugement tout en rapprochant, par souci de simplification, les procédures appliquées au jugement des comptables patents – c'est-à-dire les comptables de droit – et des gestionnaires de fait – c'est-à-dire ceux qui exercent cette compétence sans en avoir le droit.

Dans le but de sécuriser la procédure et de raccourcir les délais de jugement, le projet de loi propose également de supprimer la règle du double arrêt – d'abord un arrêt provisoire, le comptable ayant été invité à faire part de ses observations en réponse, ensuite un arrêt définitif –, mettant ainsi fin à une règle en vigueur depuis deux cents ans !

À l'issue de la première lecture par les deux assemblées, deux sujets principaux demeurent en débat. Toutefois, les modifications proposées par le rapporteur, dont je salue ici la qualité et la précision du travail dans une matière, il faut bien le reconnaître, souvent aride, devraient permettre de parvenir à un texte susceptible de recueillir un vote conforme du Sénat.

La première question importante restant en discussion est relative à la nouvelle procédure juridictionnelle et, plus précisément, à la compétence du juge lorsque le procureur demande la décharge du comptable. En clair, le juge est-il tenu de suivre l'analyse du procureur lorsque celui-ci réclame la décharge du comptable ? Et comment préserver autant l'indépendance des magistrats du siège que la séparation des fonctions d'instruction, de poursuite et de jugement sans toutefois renoncer à une procédure simple et rapide ?

La seconde question restant en suspens concerne le régime de la gestion de fait sous le double aspect du délai de prescription et de la procédure de reconnaissance de l'utilité publique.

Sur ces deux questions, les travaux conduits par votre commission des lois ont permis de dégager des solutions que le Gouvernement juge satisfaisantes. Je laisserai évidemment au rapporteur Éric Ciotti le soin de les détailler.

Je souhaite toutefois apporter quelques précisions concernant la procédure de reconnaissance d'utilité publique de la gestion de fait.

Je le rappelle, cette procédure autorise les collectivités à se prononcer sur la nature d'utilité publique ou non des dépenses effectuées par un gestionnaire de fait. Ici même, il y a quelques mois, votre éminent collègue Charles de Courson avait proposé, et vous l'aviez suivi, de supprimer cette procédure pour lui substituer un simple avis de la collectivité.

Debut de section - PermalienÉric Besson, secrétaire d'état chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique

Le Sénat n'a pas souhaité vous suivre sur cette voie.

Tout en reconnaissant le bien fondé des critiques portées à rencontre de la procédure actuelle, il a estimé qu'une telle disposition portait atteinte au principe de libre administration des collectivités locales.

Debut de section - PermalienÉric Besson, secrétaire d'état chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique

Dans ces conditions, le Gouvernement estime que la solution équilibrée retenue par votre commission, qui maintient la procédure actuelle et un délai de prescription raisonnable permettant aux juridictions de constater et de sanctionner les gestionnaires de fait, est la voie de la sagesse. Je tiens du reste à ajouter que cette solution équilibrée n'exonère toutefois pas de mener une réflexion sur la procédure de gestion de fait elle-même inscrite dans une réflexion plus générale sur les nouveaux modes de responsabilité des gestionnaires publics.

Voici donc, dans ses grandes lignes, le texte qui vous est proposé.

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, je sais qu'au stade où nous sommes parvenus, ce texte, sous réserve des amendements de votre commission des lois, concilie à la fois respect des droits de chaque comptable et protection des finances publiques.

Nos débats et ceux du Sénat l'ont démontré : cet équilibre, qui répond aux exigences de la Cour européenne des droits de l'homme, n'était pas si facile à trouver et doit donc être préservé.

C'est pourquoi je compte sur votre soutien à tous pour voter ce projet de loi qui doit permettre de garantir à tous les justiciables l'application la plus complète des principes d'impartialité, de transparence, d'équité et de rapidité des décisions rendues. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Éric Ciotti, rapporteur de la commission de lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le Sénat a modifié le 5 juin 2008 le projet de loi relatif à la Cour des comptes et aux chambres régionales des comptes adopté en première lecture par notre assemblée le 10 avril 2008.

Je vous rappelle que cette réforme vise à refondre entièrement les procédures juridictionnelles devant la Cour des comptes et les chambres régionales des comptes. En effet, la jurisprudence récente de la Cour européenne des droits de l'homme a critiqué la procédure en vigueur contestant son caractère équitable pour le justiciable et critiquant sa longueur excessive.

Afin de remédier à cette situation, le projet de loi clarifie les modalités d'ouverture des instances, en supprimant notamment l'auto-saisine des juridictions financières et en confiant un rôle central au ministère public. Il raccourcit également les procédures, en supprimant notamment la règle traditionnelle du « double arrêt » ou du « double jugement » et renforce l'équilibre de la procédure contentieuse en généralisant les audiences publiques contradictoires et en excluant le rapporteur et le ministère public du délibéré. Il modifie enfin les règles relatives aux amendes, en supprimant les remises gracieuses dans ce domaine.

Au cours des débats en première lecture, les deux chambres du Parlement ont manifesté leur accord sur les grandes orientations de cette réforme. Ainsi, après une lecture dans chaque assemblée, sur les trente-six articles que compte désormais le projet de loi, vingt-quatre ont été d'ores et déjà adoptés dans les mêmes termes. La navette ne porte donc plus que sur douze articles.

De nombreuses dispositions du projet de loi ne restent en discussion que pour des motifs purement rédactionnels. Néanmoins, quelques divergences se sont manifestées entre députés et sénateurs, d'une part sur la nouvelle procédure juridictionnelle applicable devant le juge financier, telle que prévue aux articles 11 et 21 et, d'autre part sur la modification du régime de la gestion de fait, aux articles 16 bis et 29 ter.

Les articles 11 et 21 du projet de loi, qui fixent la procédure juridictionnelle applicable respectivement devant la Cour des comptes et les chambres régionales des comptes, ont fait l'objet de modifications importantes au Sénat, s'agissant de la procédure de décharge des comptables publics à l'égard desquels le parquet n'a pas conclu à l'existence d'une charge. En première lecture, l'Assemblée nationale avait maintenu l'exigence d'une ordonnance rendue par le juge du siège pour qu'un comptable puisse être déchargé de sa gestion conformément aux conclusions du parquet, à l'issue de la phase initiale d'instruction. Elle avait en revanche, pour clarifier la procédure, supprimé la possibilité, laissée à l'ordonnateur et au comptable, de contester cette ordonnance de décharge devant la formation de jugement, car les voies de recours ordinaires paraissent suffisantes pour faire face à des contestations qui devraient rester très ponctuelles.

Bien que cela n'ait pas été la décision initiale de sa commission des lois, le Sénat a décidé de ramener de six à deux ans, à compter de la notification de l'examen des comptes, le délai de prescription permettant au comptable d'être déchargé d'office de sa gestion, à défaut d'ordonnance de décharge intervenue dans ce délai. Or cette solution risquerait, comme l'a remarqué le rapporteur Bernard Saugey, lors de l'examen du projet de loi par le Sénat, d'être plus favorable au comptable en cas de doute du magistrat du siège sur la régularité des comptes, doute ayant conduit à une absence de décharge, qu'en cas d'accord du siège comme du parquet sur cette régularité, accord ayant conduit le juge du siège à rendre une ordonnance de décharge. Ce serait paradoxal. En effet, la décharge par prescription ne pourrait faire l'objet d'aucun recours, contrairement à la décharge par ordonnance du président de la formation de jugement.

Pour tenter d'éviter que des situations de doutes ne conduisent à de tels effets juridiques, la commission des lois vous propose un amendement précisant que le président de la formation de jugement peut demander qu'un rapport complémentaire soit établi afin que le parquet décide, au vu de celui-ci, de lui transmettre de nouvelles conclusions retenant une charge à l'encontre du comptable ou, au contraire, de maintenir ses premières conclusions ne retenant aucune charge. Sans remettre en cause le monopole du parquet sur l'engagement des poursuites, cet aménagement ciblé permettrait de mieux prendre en compte l'hypothèse de réticences du juge du siège motivées par des anomalies comptables d'abord passées inaperçues.

Le Sénat n'a, en revanche, pas modifié la nouvelle procédure contentieuse applicable devant les juridictions financières, destinée à mieux prendre en compte les exigences d'équité et de transparence récemment rappelées par la Cour européenne des droits de l'homme et recherchées par ce texte. Un consensus politique entoure ainsi le choix du législateur de garantir lui-même la publicité des audiences, la collégialité des décisions, l'absence du rapporteur et du parquet au délibéré, ainsi que, comme l'avait décidé l'Assemblée nationale en première lecture, le droit de l'ordonnateur et du comptable qui le demandent d'accéder aux pièces du dossier. Ces garanties constituent une avancée importante pour mieux garantir le respect des règles de l'État de droit devant les juridictions non judiciaires et honorer ainsi les engagements de la France envers les autres États signataires de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Des divergences de vues entre les deux assemblées sont par ailleurs apparues sur la question importante de la gestion de fait.

Le Sénat a tout d'abord supprimé l'article 16 bis, introduit en première lecture à l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Charles de Courson. Cet article avait pour objet de supprimer la procédure de reconnaissance d'utilité publique par l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement concerné des dépenses ayant donné lieu à gestion de fait.

Cette procédure fait en effet l'objet de fortes critiques, liées à l'allongement des délais de jugement qu'elle induit et au caractère parfois politique des décisions de refus de reconnaissance de l'utilité publique de certaines dépenses.

Tout en reconnaissant le bien-fondé des critiques portées à l'encontre de la procédure actuelle, le Sénat a estimé que sa suppression porterait atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales, en permettant à la chambre régionale des comptes de se prononcer sur l'utilité publique de dépenses, en lieu et place de l'assemblée délibérante. En effet, le principe de l'autorisation budgétaire est un élément essentiel de la libre administration des collectivités territoriales.

Dans ces conditions, le Sénat a estimé préférable que cette question fasse l'objet d'un examen d'ensemble dans le cadre de la réforme annoncée des missions des juridictions financières et des règles relatives à la responsabilité des gestionnaires publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

Face à cette opposition de principe, qui n'est d'ailleurs pas illégitime, certains auraient souhaité que nous vous proposions néanmoins de rétablir l'article 16 bis. La commission des lois ne vous le propose pas car il ne faut pas oublier que la raison d'être de ce texte est de rendre plus équitables les procédures juridictionnelles devant les juridictions financières. Il ne nous a donc pas apparu opportun de retarder la mise en oeuvre de cette réforme rendue indispensable par la jurisprudence de la CEDH en prolongeant des débats relatifs à des questions sans lien avec l'objectif initial du projet de loi.

D'ailleurs, par cohérence, nous estimons qu'il faut supprimer du projet de loi l'ensemble des dispositions concernant le régime de responsabilité des gestionnaires publics. Dans ces conditions, nous ne pourrons pas suivre le Sénat, qui a souhaité réduire, malgré l'avis défavorable du Gouvernement, de dix à cinq ans le délai de prescription en matière de gestion de fait. Ce délai avait déjà fait l'objet d'un considérable raccourcissement en 2001, puisqu'il était passé de trente ans à dix ans.

L'objectif affiché par le Sénat est d'harmoniser les délais de prescription avec le nouveau délai de cinq ans, adopté en matière civile par la loi du 17 juin 2008. Cependant, il semble difficile d'adopter le délai de droit commun en matière de gestion de fait, dans la mesure où il s'agit de gestions cachées qui ne peuvent être détectées qu'à l'occasion de contrôles approfondis de la part des juridictions financières.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

Or, le rythme des contrôles étant quadriennal, il est à craindre qu'un délai de prescription de cinq ans ne se traduise par une quasi-disparition des procédures de gestion de fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

Les gestions de fait, mon cher collègue, sont généralement plutôt dissimulées que publiques. C'est en tout cas ce qu'on peut constater dans la majorité des cas.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

Sous réserve de l'adoption des quelques amendements de la commission des lois que je vous présenterai, et qui devraient pouvoir être acceptés par le Sénat, je vous invite à approuver le projet de loi qui nous est soumis. Ce texte permettra à la réforme des procédures juridictionnelles d'entrer en vigueur dans les meilleurs délais et mettra ainsi la France à l'abri de nouvelles condamnations par la Cour européenne des droits de l'homme. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Dans la discussion générale, la parole est à M. René Dosière.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Monsieur le secrétaire d'État, en dépit de tout le plaisir que j'ai à vous retrouver, même si nous ne sommes plus du même côté, je dois vous faire part de mon regret de ne pas pouvoir interroger M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. C'est pour une raison toute simple et quelque peu personnelle : au Sénat, au cours de la discussion de ce texte, il m'a caractérisé comme « l'archéologue biblique de l'Assemblée ».

Debut de section - PermalienÉric Besson, secrétaire d'état chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique

C'est joli !

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

J'aurais voulu lui demander la signification de cette expression.

« Archéologue », je veux bien : dans une maison où on a le culte des précédents, avoir quelques notions d'archéologie n'est pas inutile. Ce n'est pas inutile non plus d'en avoir lorsqu'on s'occupe de finances locales. Mais pourquoi « biblique » ? Assurément le mot n'a rien d'insultant, mais le laïc que je suis aurait aimé obtenir quelques précisions. Est-ce lié au fait que j'avais commencé mon intervention en première lecture sous le signe de Péguy ? Est-ce lié dès lors à une réputation à cet égard erronée, de cet écrivain ? En tout cas, surtout dans cette conjoncture où on nous parle beaucoup d'argent, je ne manquerai pas au plaisir de citer cette phrase de Péguy, extraite de …L'Argent : « Comment imaginer cette monstruosité du monde moderne où l'on n'a jamais vu tant d'argent rouler pour le plaisir et l'argent se refuser à ce point au travail ? Et tant d'argent rouler pour le luxe et l'argent se refuser à ce point à la pauvreté ? » Je pense que M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté aurait apprécié cette formule. L'Argent a été écrit en 1913. Voyez que les choses n'ont pas beaucoup bougé !

Revenons plus directement à notre sujet.

C'est toujours avec un peu de nostalgie que j'évoque les procédures des chambres des comptes car je n'oublie pas que je me suis initié au respect de l'argent public dans les rapports de la Cour des comptes. D'autres collectionnent les timbres ou les montres : moi, je collectionne depuis 1965 les rapports publics de la Cour des comptes. À chacun son type de collection.

Je dois également reconnaître que c'est bien grâce à la lecture d'un rapport de la Cour des comptes en 2001, consacré au règlement du budget, que j'ai découvert l'existence de quelques anomalies dans la gestion du budget de l'Élysée, ce qui m'a conduit à approfondir le sujet et à permettre aujourd'hui à la Cour des comptes de contrôler la dépense de l'Élysée. Je lui souhaite du reste beaucoup de plaisir, mais nous en reparlons prochainement, lors de l'examen du budget des pouvoirs publics.

Je n'oublie pas non plus que la création des chambres régionales des comptes a constitué un très grand progrès dans le contrôle de l'argent public et, pour justifier ma réputation d'archéologue, je rappellerai que le Premier Président actuel de la Cour des comptes n'était pas un enthousiaste des chambres régionales : en tout cas, il ne souhaitait pas qu'elles aient autant d'autonomie.

Le passage au Sénat a permis d'améliorer partiellement ce texte sur les procédures juridictionnelles. Les améliorations portent sur deux points.

Tout d'abord, le projet de loi, une fois adopté, s'appliquera automatiquement à l'outre-mer sans faire l'objet d'ordonnances. Il est toujours souhaitable, s'agissant de l'outre-mer, de débattre directement de l'application des textes, sans passer par des ordonnances.

Il s'agit ensuite des procédures juridictionnelles, sur lesquelles je serai très bref, monsieur le rapporteur, puisque vous les avez évoquées. Le Sénat a atténué le texte, mais, à partir de sa réflexion, vous avez pu en commission trouver une formule nettement plus satisfaisante.

Je soulignerai d'autant plus volontiers ces améliorations que, comme Bernard Derosier l'avait noté lors de l'explication de vote du groupe socialiste en première lecture, ce sont ces deux points qui justifiaient alors à nos yeux un vote négatif. L'hypothèque de ces deux points étant désormais levée, nous pourrions aller jusqu'à un vote positif.

Nous pourrions…, naturellement si les deux points sur lesquels le Sénat a aggravé le texte étaient corrigés. J'évoque évidemment la gestion de fait.

En la matière, le recul le plus évident du Sénat consiste à réduire les délais. Je vous accorde, monsieur Goulard, que la gestion de fait ne consiste pas toujours en des détournements de fonds.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Vous ne pouvez pas, toutefois, ignorer que cela arrive de temps en temps – je vous donnerai des exemples. La gestion de fait est toujours liée à des procédures compliquées : aussi, le rythme quadriennal, qui n'est du reste pas toujours respecté, de l'examen des gestions par les chambres régionales des comptes ne permettrait plus de déceler la gestion de fait si le délai était réduit à cinq ans. C'est en ce sens que j'ai dit qu'à ce moment-là il s'agissait d'une véritable amnistie.

Déjà en 2001, les sanctions s'appliquant aux gestionnaires de fait ont été particulièrement atténuées. Il ne faudrait pas aller trop loin en la matière !

Fort heureusement, le rapporteur a présenté en commission un amendement, que nous avons soutenu, visant à annuler cette disposition. C'est déjà un bon point.

Il a en revanche accepté la suppression de la procédure de déclaration d'utilité publique par la collectivité. Elle avait été instaurée grâce à un amendement présenté par Charles de Courson, amendement qui avait reçu un accueil très enthousiaste du ministre et que l'Assemblée avait voté à l'unanimité. Il est dommage que cette disposition n'ait pas été rétablie. J'ai donc déposé un amendement visant à rétablir l'article 16 bis. Le vote du groupe socialiste dépendra de la réponse qui sera faite à cette proposition.

On nous annonce par ailleurs un texte beaucoup plus important sur la Cour des comptes et les chambres régionales des comptes. Il y a à ce sujet déjà beaucoup de rumeurs, sans que nous sachions quand ce texte annoncé comme plus complet sera présenté devant notre assemblée. Chacun sait que lorsqu'on annonce un texte global aux parlementaires, il faut toujours être prudent car les textes globaux sont tellement compliqués à mettre en oeuvre qu'on ne les voit jamais venir. Aussi vaut-il quelquefois mieux agir au cas par cas, pour autant que ce soit dans la même direction, afin d'être sûr que les réformes seront faites.

Afin de relayer les inquiétudes des chambres régionales à propos de ce texte, je tiens à souligner, monsieur le secrétaire d'État, que, pour les socialistes, ce texte ne devra pas franchir une certaine ligne, faute de quoi nous ne pourrions pas, quelles que soient ses autres dispositions, le soutenir : il s'agit de toute disposition qui tendrait à faire des chambres régionales des sections déconcentrées de la Cour des comptes – c'est l'idée, depuis 1982, du Premier Président : de ce point de vue, il n'en a pas changé. Je crois au contraire que les chambres régionales ne doivent pas être simplement des démembrements de la Cour des comptes et qu'elles doivent garder leur statut actuel. Par ailleurs, il ne faut surtout pas que leur mission d'examen de la gestion des collectivités locales puisse être en quoi que ce soit réduite, soit parce qu'on regrouperait les moyens, soit parce qu'on leur confierait d'autres missions ne leur permettant plus d'effectuer un tel examen. Compte tenu de l'ampleur des budgets locaux et de leur diversité, chacun a pu constater l'utilité des chambres régionales dans l'examen de la gestion des marchés, notamment pour déceler des anomalies, voire davantage que des anomalies si l'on fait référence à la gestion de Jacques Médecin à Nice ou, plus près de nous, à celle de Gaston Flosse en Polynésie.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Il y en a très certainement ! Il y a eu Angoulême, mais cela tenait à des raisons différentes.

Debut de section - PermalienPhoto de François Goulard

Il ne faut pas avoir la mémoire hémiplégique !

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Monsieur Goulard, les magistrats des chambres régionales sont totalement indépendants !

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Je vous laisserai donc le soin de citer des gestions de collectivités de gauche ! (Sourires sur les bancs du groupe UMP.)

Outre ces analyses qui ont permis à la justice pénale de se prononcer – encore qu'elle fasse preuve en Polynésie d'une particulière lenteur –, il convient surtout de souligner que les collectivités gagnent à analyser les rapports rendus par les chambres régionales car leur lecture est enrichissante pour les élus locaux eux-mêmes, notamment en termes de propositions.

Par conséquent, ceci ne peut en aucun cas être réduit au profit d'autres types de missions, d'autant plus que l'existence d'Internet permet aujourd'hui à tous les citoyens d'être au courant des rapports faits par les juridictions financières – ce qui n'était pas forcément le cas –, car les chambres régionales ne diffusaient pas toujours leurs rapports. Aujourd'hui, on peut les consulter. Il faut donc les maintenir.

M. Michel Bouvard rappelait – vous voyez, monsieur Goulard, que j'ai de bonnes références : MM. de Courson, Bouvard – que, dans le cadre de la LOLF, le Parlement pouvait maintenant débattre du rapport public de la Cour des comptes. Il souhaitait d'ailleurs que ce débat puisse avoir lieu, ce qui n'a pas été le cas jusqu'à présent. Je m'associe à sa démarche et je vous demande, madame la présidente, de bien vouloir transmettre cette observation à la présidence de l'Assemblée.

Mais encore faudrait-il que les parlementaires puissent être destinataires des rapports de la Cour des comptes. Nous avons beaucoup de difficultés à obtenir le rapport public, à moins d'aller l'acheter en librairie – je pense que ce n'est pas très convenable.

Il est quasi impossible d'obtenir le rapport de la Cour des comptes sur l'exécution du budget de l'État. Je n'ai toujours pas pu l'obtenir des services de l'Assemblée. Il m'a fallu l'imprimer à partir d'Internet ou aller l'acheter à la Documentation française. Je le dis, car cela fait trois ou quatre ans que cette situation perdure. On ne sait pas qui est responsable du fait que les parlementaires eux-mêmes, dès lors qu'ils ne sont pas membres de la commission des finances, n'ont pas accès au rapport de la Cour des comptes sur l'exécution du budget de l'année précédente. Je trouve que c'est un comble !

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Je formule publiquement cette remarque, après l'avoir faite oralement et par écrit, afin quelle puisse être prise en compte et que ce rapport, dont l'utilité est pourtant évidente, soit un peu mieux distribué. Telles sont les observations que je souhaitais faire sur le texte, avant que l'Assemblée n'aborde la discussion des articles.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de loi soumis à notre approbation s'inscrit dans le mouvement d'adaptation des procédures juridictionnelles nationales aux exigences d'une juridiction supranationale : la Cour européenne des droits de l'homme.

La jurisprudence récente de la Cour européenne des droits de l'homme a critiqué la procédure juridictionnelle appliquée devant la Cour des comptes et les chambres régionales des comptes contestant son caractère inéquitable pour le justiciable et critiquant sa longueur excessive. Nous sommes bien entendu favorables à rendre plus efficace et impartiale la procédure juridictionnelle. Les juridictions financières doivent assurer à leur procédure juridictionnelle toute la sécurité juridique nécessaire pour garantir aux justiciables un procès équitable au sens de l'article 6 de la Cour européenne des droits de l'Homme, dont nous partageons l'esprit et la lettre : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial… Le jugement doit être rendu publiquement… ».

Nous ne pouvons que nous réjouir que nos institutions financières, mêmes soumises à un régime spécial, ne puissent se soustraire à la règle de l'équité. Nous considérons donc que plusieurs dispositions du projet de loi vont dans le bon sens.

Le texte comporte des avancées en termes de garantie d'une procédure juridictionnelle financière plus équilibrée. Il clarifie les modalités d'ouverture des instances, en supprimant l'auto-saisine des juridictions financières et en distinguant clairement les fonctions de poursuite et de jugement : la procédure ne pourra être engagée que par un réquisitoire du ministère public.

Il raccourcit les procédures pour permettre au comptable d'être jugé dans « un délai raisonnable », en supprimant notamment la règle traditionnelle du « double arrêt » ou du

« double jugement ».

Il renforce 1'équilibre de la procédure contentieuse, en généralisant les audiences publiques contradictoires et en excluant le rapporteur et le ministère public du délibéré. Il modifie les règles relatives aux amendes, en supprimant les remises gracieuses dans ce domaine.

Pour autant, aux termes des débats en première lecture, il apparaît que les inquiétudes légitimes des professionnels s'agissant de la question de la prescription des faits susceptibles d'être poursuivis ne sont pas levées, loin s'en faut. On le verra tout à l'heure.

L'article 29 ter, adopté par le Sénat, réduit de dix à cinq ans le délai de prescription en matière de gestion de fait, alors même que ce délai avait déjà été considérablement diminué en 2001, puisqu'il était passé de trente ans à dix ans. Il n'est pas sérieux de vouloir harmoniser les délais de prescription avec le nouveau délai de cinq ans, adopté en matière civile par la loi du 17 juin 2008. Adopter le délai de droit commun en matière de gestion de fait est invraisemblable, dans la mesure où il s'agit de gestions cachées qui ne peuvent être découvertes qu'à l'occasion de contrôles de la part des juridictions financières.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

J'entends vos protestations, mon cher collègue !

Or, le rythme des contrôles est quadriennal et la complexité du contrôle est telle qu'il est à craindre qu'un délai de prescription de cinq ans ne se traduise par une quasi-disparition des procédures de gestion de fait. Pour notre part, nous considérons que les enjeux spécifiques liés à la comptabilité publique sont suffisamment importants pour qu'il ne soit pas procédé à un alignement des délais sur ceux qui sont pratiqués en matière civile. Nous devrions être d'autant plus vigilants qu'il s'agit des deniers publics et nous donner les moyens de leur juste affectation et du contrôle le plus rigoureux de leur utilisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Par ailleurs, au-delà de l'aspect technique du projet de loi, nous regrettons que ce texte ne s'inscrive pas dans le cadre de la réforme d'ensemble, annoncée depuis le 5 novembre 2007, date à laquelle le Président de la République avait demandé au Premier Président de la Cour des comptes de rédiger un rapport fixant les axes d'une réforme en profondeur des juridictions financières.

Face au secret, ou au silence, qui entoure cette réforme en profondeur, les professionnels s'inquiètent, et la représentation nationale reste, pour l'instant, dans l'expectative !

Alors que le Président de la République aime à dire que la révision constitutionnelle est synonyme d'amélioration de la condition du Parlement, ce cas particulier atteste, tout de même un peu, du contraire !

Près d'un an après l'annonce d'une telle réforme, il est inacceptable de ne toujours pas connaître la teneur exacte des propositions que le Président de la Cour des comptes a fournies au Président de la République concernant l'évolution de son institution.

Cette réforme revêt une importance majeure tant pour les citoyens que pour les agents publics au service des juridictions financières.

Les magistrats s'inquiètent, à juste titre, du regroupement des chambres régionales des comptes, que Philippe Séguin a évoqué à plusieurs reprises et qui se traduirait vraisemblablement par la constitution de nouvelles entités interrégionales. Perspective à mettre en relation avec le projet annoncé de reconfiguration des circonscriptions administratives.

Mais ce dossier, lui aussi, est frappé du secret. Signe parmi d'autres de la politique du fait accompli que mène le Gouvernement !

La réduction du nombre de chambres régionales des comptes laisse craindre, entre autres, qu'il n'en ressorte un affaiblissement de leurs capacités de contrôle de la gestion des collectivités locales.

Or, le contrôle des gestions publiques locales est une mission de service public indispensable à la démocratie locale.

Nous considérons que la réforme des juridictions financières ne doit pas être fondée sur la recherche d'économies structurelles. Elle devrait poursuivre l'objectif de permettre aux juridictions d'être plus efficaces et de remplir pleinement leurs missions actuelles et à venir, découlant de l'extension du champ de la certification et du renouveau des moyens d'audit des politiques publiques. Nous souhaitons, aujourd'hui, avoir un état des lieux des avancées de la réforme des juridictions financières ainsi qu'un calendrier précis de mise en oeuvre des dispositions qui nous sont promises.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Schosteck

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous ne pouvons que nous féliciter de l'adoption, le 5 juin dernier par le Sénat, du texte portant réforme de la procédure devant la Cour des comptes et les chambres régionales des comptes, sinon dans son ensemble, du moins pour l'essentiel.

C'est sur l'essentiel, en effet, que les deux chambres du Parlement se sont d'ores et déjà accordées, remplissant les deux principaux objectifs de la loi : d'une part, la simplification et l'harmonisation des procédures devant les juridictions financières, et, d'autre part, la mise en conformité avec les exigences de procès équitable et de délai raisonnable contenues dans la Convention européenne des droits de l'homme.

Sur ce point, d'autres ont dit avant moi la nécessité de cette réforme. Il était tout simplement devenu intolérable de voir condamner la France, fréquemment et durement, par la Cour européenne des droits de l'homme, à cause des procédures devant les juridictions financières. Nous savons bien que les manquements de l'appareil juridictionnel se font toujours au prix d'une bonne justice et aux frais du justiciable !

Il était donc de notre devoir d'y mettre fin. Ce n'est pas le moindre mérite de ce texte que de permettre tout simplement à la France d'honorer ses engagements internationaux en la matière.

Mais les dispositions qui demeurent aujourd'hui en discussion n'en sont pas moins d'importance et retiennent notre attention.

Sur le premier point en discussion, touchant à la procédure de décharge des comptables publiques, nous pouvons parler, monsieur le rapporteur, de vide juridique. Il n'est pas si fréquent, surtout en matière de procédures, que l'état du droit offre un vide juridique, une situation de blocage, comme c'est le cas ici. On ne peut, en effet, guère forcer le juge à rendre cette ordonnance, alors qu'il fait part, en conscience, d'un doute.

Mais, il n'est pas plus satisfaisant de passer outre l'exigence d'une ordonnance du juge par un système de décharge d'office par prescription. Tel est pourtant l'avis du Sénat, qui, dans un amendement, en a même diminué le délai.

Mais, outre que cette solution revient à passer par-dessus le juge, elle aboutit – nous le voyons – à une situation qui risque d'apparaître inéquitable. Or, le but de la loi que nous votons est de s'assurer que nous ne soyons plus condamnés.

L'amendement adopté par la commission nous en préserve, tout en faisant preuve, me semble-t-il, d'un très grand pragmatisme. Il se propose d'aider le juge qui se trouve, comme c'est le cas ici, empêché dans sa tâche à cause d'une rigidité trop grande de la procédure. C'est, vous le voyez, une solution souple. Elle est plus équitable mais aussi plus rapide, puisqu'elle sort le juge d'une situation de blocage. Plus d'équité, plus de rapidité : tels sont bien les deux objectifs de cette loi, et, pour cette raison, en cohérence parfaite avec l'ensemble du texte.

Le deuxième point qui est en discussion devant notre assemblée touche au régime de la gestion de fait, sous deux aspects.

D'abord, en ce qui concerne le maintien de la procédure de reconnaissance d'utilité publique des dépenses ayant donné lieu à une gestion de fait, la commission a décidé de suivre l'avis du Sénat et de maintenir cette procédure, dont la suppression, d'abord envisagée par notre chambre, portait atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales. Il revenait très justement au Sénat de défendre ce principe et notre chambre pourra se féliciter d'y participer, en adoptant, sur ce point, le texte de façon conforme.

Toutefois, en ce qui concerne le délai de prescription en matière de gestion de fait, la commission des lois a adopté l'amendement du rapporteur visant à maintenir le délai de dix ans, au lieu de cinq proposé par le Sénat. La prescription doit permettre de purger des situations encombrées, non de les liquider de façon déraisonnable. Or, pour des raisons de moyen, le délai de cinq ans compromettait la mise en oeuvre effective de la procédure de gestion de fait. Ne perdons jamais de vue, si possible, cette injonction du doyen Jean Carbonnier, qui était un homme de raison. Il disait : « Le droit est fait pour être appliqué ». Cela a l'air simple, mais, en votant l'amendement proposé par la commission des lois visant à maintenir à dix ans ce délai de prescription, nous donnons concrètement au droit les moyens de sa mise en oeuvre. Nous évitons que le contrôle en matière de gestion de fait ne devienne purement fictif. C'est un choix sain et de bon sens.

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera naturellement ce texte, sinon dans l'enthousiasme, du moins avec raison. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

J'appelle maintenant, dans le texte du Sénat, les articles du projet de loi sur lequel les deux Assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. François Goulard, inscrit sur l'article 3 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de François Goulard

À mon tour, je salue, madame la présidente, votre première apparition à la tribune de la présidence.

S'agissant de la gestion de fait, je souhaite rectifier une erreur qui a été commise par certains de nos collègues : la gestion de fait n'est pas, par nature, une gestion occulte. Il s'agit, pour une personne qui n'a pas la qualité de comptable patent, de s'ingérer dans le maniement des deniers publics. Lorsqu'il y gestion occulte ou dissimulation, on est dans le cadre d'une escroquerie, d'un cas de délinquance, d'une infraction pénale, et des sanctions sont prévues par les textes.

La gestion de fait est infiniment plus courante et, généralement, tout à fait transparente : telle association qui s'occupe d'une mission de service public dans des conditions qui n'ont pas été régulières peut se trouver en situation de gestion de fait, du moins son président et son trésorier, alors même que la subvention a été officiellement votée par l'assemblée délibérante.

J'en veux pour preuve la fameuse jurisprudence Chasseloup-Laubat ; en prenant la décision de faire fondre des canons pour ériger – geste des plus louables – une statue à son prédécesseur, un ministre de la marine a commis une gestion de fait en même temps qu'une infraction à la règle de non-affectation des recettes aux dépenses, mais, pour autant, le fait était public. Première observation.

Deuxième observation. À nous entendre cet après-midi, le débet ou la déclaration de gestion de fait seraient des actes courants rythmant la gestion des finances publiques dans notre pays. Je souhaite rétablir la vérité, puisque cela n'a pas été fait jusqu'ici, et souligner que nous sommes dans l'anecdote. La réalité de la gestion des finances publiques – et c'est heureux – n'est pas la mise en débet des comptables publics, ni la découverte de gestion de fait.

À cet égard, je souhaite appeler, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'attention sur le côté suranné de nos finances publiques. Nous sommes dans une période de réformes ; nous sommes à la recherche d'économies à réaliser. Or les règles qui régissent le maniement des deniers publics datent, pour l'essentiel, du XIXe siècle : il y a donc beaucoup à faire pour simplifier et sortir de règles anciennes qui, autrefois, avaient un sens mais sont aujourd'hui dépassées. Cette constatation s'applique à de nombreuses règles dont nous parlons aujourd'hui. Faut-il, par exemple, juger les comptes publics ? Cette question nous ramènerait quelques années en arrière, puisque le jugement des comptes publics remonte à 1317 ! Néanmoins, ne devrions-nous pas nous poser la question ?

Autre exemple : est-il utile que le comptable public pour les collectivités territoriales soit un agent de l'État, différent de celui qui tient les compte au sein de la collectivité territoriale ? Je vous rappelle qu'avant la dernière guerre, le comptable public, nonobstant la règle de séparation de l'ordonnateur et du comptable, était un agent municipal, ce qui simplifiait considérablement la tâche, puisque les deux comptabilités étaient tenues au sein du même service. Et que je sache, il n'y avait pas plus de fraudes qu'aujourd'hui. Au demeurant, celles-ci – on le sait – sont rarissimes et il existe des moyens de les contrecarrer. Réfléchissons à la manière de faire évoluer des systèmes anciens et, désormais, largement dépassés.

Le texte que nous examinons aujourd'hui a toute son utilité, puisqu'il nous met en conformité avec le droit européen et les traités souscrits par la France. J'estime, cependant, que nous aurions pu aller plus loin dans la recherche de réformes.

(L'article 3 bis est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

L'article 8 ne fait l'objet d'aucun amendement.

(L'article 8 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Sur l'article 9, je suis saisie d'un amendement n° 1 .

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienÉric Besson, secrétaire d'état chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique

Avis favorable.

(L'amendement n° 1 est adopté.)

(L'article 9, modifié par l'amendement n° 1 , est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

L'article 10 ne fait l'objet d'aucun amendement.

(L'article 10 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Sur l'article 11, je suis saisie d'un amendement n° 2 .

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

Cet amendement tend à modifier un point – qui a fait débat – concernant les procédures juridictionnelles. Le Sénat a introduit un délai de prescription de deux ans. L'Assemblée a préféré revenir sur ce dispositif qui lui paraissait difficilement applicable en raison de son caractère dangereux.

S'agissant de la Cour des comptes, cet amendement vise à simplifier et à clarifier les modalités de décharge d'un comptable public à l'initiative du ministère public, lequel, je vous le rappelle, a toute latitude d'ouvrir une instance.

Certains, notamment M. Dosière, se sont, en première lecture inquiétés à propos de la compétence liée du président de la formation de jugement. Il est donc proposé de permettre au magistrat du siège hésitant à rendre une ordonnance de décharge de demander la transmission au ministère public d'un rapport d'instruction complémentaire permettant, par exemple, de signaler des éléments non encore pris en compte dans les premières conclusions du parquet.

Debut de section - PermalienÉric Besson, secrétaire d'état chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique

Le Gouvernement est favorable à cet amendement.

(L'amendement n° 2 est adopté.)

(L'article 11, modifié par l'amendement n° 2 , est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

L'article 16 bis a été supprimé par le Sénat. Je suis saisie d'un amendement n° 8 rectifié .

La parole est à M. René Dosière, pour soutenir cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Il s'agit de rétablir l'article 16 bis voté à l'unanimité par l'Assemblée nationale avec avis favorable du Gouvernement, lequel, après avoir hésité, avait donné un avis favorable au vu de l'argumentation exceptionnelle de M. de Courson. J'espère qu'il en sera de même aujourd'hui.

J'en conviens, monsieur Goulard, la gestion de fait n'est pas forcément synonyme de malversation. Lorsque l'épouse du Président de la République disposait d'une carte bancaire permettant de retirer de l'argent sur le Trésor alors qu'elle n'avait aucune existence juridique, il n'y avait aucune malversation, mais seulement l'utilisation de l'argent public par quelqu'un qui n'avait pas qualité pour le faire.

Cela dit, il existe des situations beaucoup plus contestables. Parmi les gestions de fait qui ont été prononcées par les chambres régionales l'année dernière, les deux tiers concernaient la Polynésie française. Du reste, l'Assemblée de Polynésie sera, cette semaine, appelée à se prononcer sur l'utilité publique de la vingtaine de gestions de fait dont elle va être saisie. L'on peut craindre que la procédure soit utilisée de manière politicienne, le rapporteur ayant appelé l'attention sur ce fait : dès lors qu'un certain nombre de gestionnaires de fait sont issus de l'actuelle majorité de l'Assemblée de Polynésie, le caractère d'utilité publique des dépenses irrégulièrement maniées sera reconnu ! Les principaux auteurs échapperont au remboursement alors qu'il s'agit de situations particulièrement critiquables…

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

…qui pourraient faire l'objet, si la justice polynésienne fonctionnait comme en métropole, de procédures pénales.

Dans l'état actuel, la procédure présente plusieurs inconvénients. Demander à la collectivité locale de se prononcer sur l'utilité publique des dépenses n'a pas le même sens selon que l'on appartient ou non à la majorité et peut donner lieu à des règlements de compte politiques. L'amendement que je vous propose vise donc à supprimer cet inconvénient.

L'objet de ce texte vise à raccourcir les procédures. Or maintenir une délibération de l'assemblée, compte tenu de la possibilité de faire appel de cette décision, allonge considérablement les procédures de règlement des gestions de fait. L'amendement que je vous propose raccourcira les délais. Dès lors qu'il n'y aura plus qu'un simple avis, et non une décision, il n'est pas possible de saisir les tribunaux.

Certains s'opposent à cet amendement au motif qu'il ne garantirait pas la libre administration des collectivités locales. C'est une interprétation pour le moins abusive, car, si l'amendement est, à nouveau, adopté, les chambres des comptes seront au courant des positions défendues par les collectivités locales alors que, dans la procédure actuelle, elles peuvent s'abstraire des décisions prises par elles. Le texte qui a été voté par l'Assemblée remplaçait les délibérations de reconnaissance d'utilité publique par la possibilité pour les collectivités territoriales de voter un avis. La libre administration des collectivités locales n'est donc pas remise en cause.

Je souhaite que nous adoptions, sans plus attendre, ce texte. Repousser son adoption en raison de la présentation prochaine – on ne sait quand – d'un grand texte général sur la réforme des règles comptables n'est pas recevable. Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras !

Nous sommes aujourd'hui en mesure de raccourcir les délais des gestions de fait et d'éviter des règlements de compte politiques ! Certes, cela ne concerne qu'un nombre limité de cas, mais, au moins, cela aura le mérite d'exister. Attendre un autre texte n'est qu'un prétexte pour éviter de régler la question d'autant qu'en première lecture, tout le monde était d'accord !

Seul le Sénat, qui ne se considère pas comme étant une chambre d'enregistrement, n'est pas d'accord. Du sort qui sera réservé à cet amendement dépendra le vote socialiste. Pour notre part, nous considérons que l'Assemblée n'est pas une chambre d'enregistrement du Sénat !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

J'aimerais vous convaincre, monsieur Dosière, de ne pas conditionner votre vote sur un texte qui marque une avancée positive en matière de procédure juridictionnelle et que, par ailleurs, vous approuvez sur le fond, à l'adoption d'un amendement concernant un point de détail.

En dépit de votre argumentation, brillante comme toujours, le point que vous soulevez est mineur par rapport à l'économie générale du projet de loi. Comme vous, je salue l'action des chambres régionales des comptes et de la Cour des comptes dans l'assainissement des finances publiques locales. Il faut reconnaître qu'elles ont accompli un travail remarquable sur l'ensemble des collectivités locales. Vous avez tout à l'heure, à la tribune, cité un certain nombre d'exemples et l'on pourrait en citer d'autres. Le texte se fonde sur de multiples arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, dont l'arrêt Bernardini de 2006, du nom de l'ancien président du conseil général, qui appartenait à votre formation politique et avait contesté la durée de jugement. Il me semble donc que les actions ont été partagées et, quelle que soit la couleur politique de la collectivité concernée, positives.

D'autre part, la reconnaissance d'utilité publique ne revient nullement à une sorte d'auto-amnistie dont on offrirait la possibilité aux collectivités locales ou territoriales. Vous venez de citer l'exemple de la Polynésie ; mais je vous rappelle qu'en prononçant une reconnaissance d'utilité publique, une collectivité ne lie en aucun cas le juge des comptes. Le risque sous-jacent d'auto-amnistie que nous avions évoqué en première lecture et que nous condamnions, comme vous, n'existe donc pas. Il s'agit par conséquent d'un point mineur.

Nous avions beaucoup hésité en commission ; le Gouvernement avait émis un avis de sagesse sur ce dispositif ; le Sénat a avancé l'argument, que nous pouvons reprendre, de la libre administration des collectivités locales. De fait, le pouvoir d'autorisation budgétaire relève de la compétence stricte de ces dernières.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

Une disposition que nous évoquerons tout à l'heure à propos de l'article 29 ter me semble bien plus importante et bien plus inquiétante : je veux parler de la durée de la prescription. J'ai déposé un amendement visant à revenir sur ce point, bien plus dangereux. Celui dont nous discutons est, je le répète, mineur ; il ne modifie en rien les objectifs poursuivis par un texte dont vous pourriez, malgré mon avis défavorable sur cet amendement, approuver l'économie générale.

Debut de section - PermalienÉric Besson, secrétaire d'état chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique

Je souhaite tout d'abord remercier M. Dosière de son propos introductif : le plaisir qu'il disait éprouver à me retrouver est réciproque. Et si, comme il l'a noté, nous sommes désormais séparés par quelques travées – et peut-être un peu plus que cela –, je le constate avec lui, cela ne nous empêchera pas de dialoguer avec un grand plaisir.

S'agissant de la disponibilité des documents, qu'il a également évoqués dans son propos liminaire, la LOLF prévoit que les rapports sur l'exécution budgétaire sont remis aux commissions des finances. C'est, semble-t-il, ce qui a été fait ; vous le souligniez tout à l'heure, monsieur Dosière.

Quant au rapport public annuel, il est remis par le premier président au bureau de l'Assemblée ; en pratique, il est, me semble-t-il, envoyé aux députés, et mis en ligne – vous l'avez également souligné – sur le site de la Cour des comptes. Moi qui plaide pour le développement d'Internet et pour la dématérialisation de l'économie et de nos échanges, je ne saurais approuver qu'on en exige davantage de la Cour !

Votre amendement propose de rétablir l'article 16 bis dans la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. de Courson. Aux termes des dispositions en vigueur, lorsqu'une personne est déclarée comptable de fait, le juge financier demande à l'organe délibérant de la collectivité de se prononcer sur le caractère d'utilité publique des deniers irrégulièrement maniés. L'amendement de M. de Courson tendait à supprimer la procédure dite de reconnaissance d'utilité publique par une collectivité locale des dépenses ayant donné lieu à une gestion de fait, pour lui substituer un simple avis de la collectivité.

Toutefois, le Sénat, comme le rapporteur vient de l'indiquer, a estimé qu'une telle disposition était contraire au principe de libre administration des collectivités locales. Le Gouvernement ne juge donc pas souhaitable de rétablir l'article 16 bis dans la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale. Il ne méconnaît pas pour autant les inconvénients et les limites de la procédure actuelle ; voilà pourquoi il avait émis un avis favorable – vous l'avez rappelé, monsieur Dosière – à l'amendement de M. de Courson. Mais le Gouvernement est également attaché à l'égalité de traitement entre l'État et les collectivités locales ; or, je le rappelle, si cet amendement était adopté, les règles s'appliquant aux comptabilités de fait seraient différentes pour les collectivités locales et pour l'État.

Debut de section - PermalienÉric Besson, secrétaire d'état chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique

En effet, le Parlement conservera la possibilité de reconnaître l'utilité publique des dépenses ayant donné lieu à gestion de fait dans le cadre de la loi de règlement.

Cette question légitime n'en devra pas moins faire l'objet d'une réflexion plus large et d'un examen plus approfondi, dans le cadre de la réforme annoncée des missions des juridictions financières et des règles relatives à la responsabilité des gestionnaires publics.

Voilà pourquoi je souhaite, monsieur Dosière, que vous retiriez votre amendement ; à défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de François Goulard

Je veux dire à M. Dosière que, si soucieux soit-il de hâter les procédures, il y a des principes qui ont valeur constitutionnelle ! Il appartient de droit – et c'est un droit fondamental, constitutionnel – à l'assemblée délibérante d'une collectivité locale de reconnaître le caractère public d'une dépense ou d'une recette qui concerne cette collectivité, de même que, s'agissant de l'État, seul le Parlement peut reconnaître le caractère public d'une dépense, que celle-ci ait ou non été engagée régulièrement. Quel que soit votre désir de souplesse et de rapidité, on ne peut remettre en cause ces principes !

Proposer que l'assemblée délibérante d'une collectivité émette un avis constitue à mes yeux une monstruosité juridique, qui porte atteinte à un pouvoir fondamental de cette assemblée. On peut toucher à tout sauf, en ce qui nous concerne, à la Constitution ; or il s'agit d'un point constitutionnel.

Je regrette, monsieur Dosière, que vous ayez cru bon d'assortir vos propos d'une critique de fond envers le Sénat, dont le travail législatif est très souvent d'une qualité tout à fait exceptionnelle, et qui appelle régulièrement notre attention sur des questions pratiques ou juridiques fondamentales. Je pense pour ma part que c'est le Sénat qui est dans le droit, que c'est lui qui a raison. Cessons de critiquer systématiquement une assemblée depuis l'autre ; ce n'est pas là témoigner un grand respect à notre Constitution.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Oui, madame la présidente.

Monsieur Goulard, une brève explication de vote me donnera tout à l'heure l'occasion de vous répondre sur le cas du Sénat.

Pour l'heure, j'aimerais simplement demander au rapporteur une précision, car on lit tout ou presque – je ne parle pas de vos écrits, monsieur le rapporteur ! Dans le cas où la collectivité qui est saisie d'une demande d'utilité publique reconnaît l'utilité publique des dépenses, cette décision, dites-vous, n'engage pas la chambre régionale des comptes. Ce point, je le note, n'est pas discuté. Mais qu'en est-il dans le cas où la collectivité refuse de reconnaître l'utilité publique des dépenses ? Ai-je raison de croire que la chambre régionale des comptes est alors liée, si bien que celui qui a procédé à cette dépense est tenu de la rembourser et que la dépense ne peut être remise dans le budget de la collectivité ? Cette interprétation est-elle exacte ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

Votre interprétation est exacte, monsieur Dosière, sauf s'il s'agit de dépenses obligatoires. Le cas que vous évoquez pose effectivement un problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

Je vous prie tout d'abord d'excuser mon retard.

Magistrat, comme d'autres ici, à la Cour des comptes, je m'oppose formellement à la suppression de l'article 16 bis, issu d'un amendement de Charles de Courson que nous avions adopté à l'unanimité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

J'avais voté cet amendement comme nous tous et, je le dis en toute franchise, je ne comprends pas que l'on envisage d'y revenir.

Selon le rapport de M. Ciotti, « lorsqu'une personne est déclarée comptable de fait, le juge financier demande à l'organe délibérant de la collectivité de se prononcer sur le caractère d'utilité publique des dépenses irrégulièrement maniées ». Bien évidemment ! La loi de décembre 2001 n'a fait que formaliser la plus belle construction jurisprudentielle de la Cour des comptes.

Formé par le président de Mirimonde, j'ai moi-même présenté à la chambre des rapports relatifs à des déclarations de comptabilité de fait ; je ne vois pas en quoi nous allons restreindre ou entraver la procédure de gestion de fait ! M. Dosière a parfaitement raison : nous devons maintenir ce qui a été voté par l'Assemblée nationale.

Le rapporteur estime ensuite que « la procédure n'a malheureusement pas produit les résultats escomptés ». « L'intervention obligatoire de la collectivité contribue », écrit-il, « à l'allongement des délais, la délibération prise pouvant être attaquée devant le tribunal administratif » ; heureusement ! Ne revenons pas sur les règles d'intervention des juridictions financières et des tribunaux administratifs !

Enfin, vous ajoutez, monsieur le rapporteur, que « la procédure ne constitue nullement une garantie pour le comptable de fait » ; mais il ne s'agit pas de lui assurer une garantie ! Je le dis à tous mes collègues, les comptables de fait sont des personnes qui ont irrégulièrement manié des deniers publics ! On ne doit pas leur donner de garantie !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

Ne limitons pas les possibilités d'intervention offertes à la Cour et aux chambres régionales ! Ce serait prendre une mauvaise décision, opposée à l'action de la Cour et des chambres régionales, que nous sommes tous d'accord pour soutenir et pour encourager.

Et que l'on n'invoque pas, à propos de la comptabilité de fait, la remise en cause du principe de libre administration des collectivités locales : cela ne veut rien dire ! Songeons, je le répète, au vieil adage de l'Ancien régime : l'argent public brûle les doigts ; qui manie l'argent public de façon irrégulière doit être châtié sans aucune restriction !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

N'intervenons pas dans cette affaire, sans quoi l'Assemblée ferait une mauvaise opération politique et s'opposerait au droit et à toute la jurisprudence de la Cour des comptes. Je demande à mes collègues de me suivre sur ce point. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Sur l'article 21, je suis saisie d'un amendement n° 3 .

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

Il s'agit d'appliquer aux chambres régionales des comptes le dispositif dont nous avons discuté tout à l'heure s'agissant de la Cour, et qui permet au président de la formation de jugement de demander un rapport d'instruction complémentaire.

(L'amendement n° 3 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L'article 21, modifié par l'amendement n° 3 , est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Sur l'article 28, je suis saisie d'un amendement n° 4 .

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

Cet amendement vise à appliquer à la chambre territoriale des comptes de Nouvelle-Calédonie le même dispositif que celui prévu à l'amendement n° 3 .

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Peut-être pourriez-vous présenter également l'amendement n° 5 , monsieur le rapporteur ?

Debut de section - PermalienÉric Besson, secrétaire d'état chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique

Favorable.

(L'amendement n° 4 est adopté, de même que l'amendement n° 5 .)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisie d'un amendement n° 10 .

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienÉric Besson, secrétaire d'état chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique

Favorable.

(L'amendement n° 10 est adopté.)

(L'article 28, modifié par les amendements adoptés, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Sur l'article 29 bis, je suis saisie d'un amendement n° 6 rectifié .

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir cet amendement.

Debut de section - PermalienÉric Besson, secrétaire d'état chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Permettez-moi de revenir un peu en arrière car je n'ai pas pu faire cette observation auparavant.

L'article 28, de coordination, vise entre autres à renvoyer à un décret en Conseil d'État, plutôt que, comme cela se fait plus généralement, à des règlements, la fixation des délais dans lesquels le comptable communal doit, à Mayotte, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon, produire ses comptes devant la chambre territoriale des comptes.

À cet égard, je rappelle au Gouvernement que, lors de la première lecture de ce projet de loi devant notre assemblée, en avril dernier, j'avais évoqué le cas de la commune de Saint-Martin, devenue collectivité territoriale : soumise à la tutelle budgétaire de la chambre régionale des comptes depuis quinze ans, elle a accumulé un déficit de fonctionnement correspondant à 45 % de ses recettes de fonctionnement. Son comptable, pendant quinze ans, n'avait jamais remis ses comptes.

Celui-ci a dû, depuis, prendre sa retraite : paix à son âme ! Mais ce qui importe, c'est de savoir comment il a pu agir de la sorte sans que personne ne fasse d'observations. Qu'ont fait les trésoriers-payeurs généraux qui se sont succédé en Guadeloupe ? Qu'a fait la chambre régionale des comptes, qui doit normalement exiger la production des comptes de la part de ses comptables ? Qu'ont fait les différents préfets ? Comment tous ces responsables ont-ils pu laisser s'installer une situation aussi extravagante ? Cela explique peut-être pourquoi les finances de la collectivité de Saint-Martin ont été si mal gérées, encore que cela soit un bien grand mot, d'après le rapport de la chambre régionale des comptes ? Soit dit en passant, Saint-Martin est désormais représentée par un sénateur, qui vient d'être élu avec un écart considérable de 18 voix.

Comme je le disais, j'aimerais savoir quelles ont été les suites de cette affaire ? Des sanctions ont-elles été prises contre les responsables qui n'ont pas fait leur travail ?

J'imagine, monsieur le secrétaire d'État, que vous ne pouvez pas me répondre immédiatement sur ce point. Mais il se trouve qu'au Sénat, le 5 juin dernier, mon excellent collègue et ami Jean-Pierre Sueur a cité longuement mon intervention et posé les mêmes questions au ministre. Le ministre lui a alors répondu : « Sur cette affaire de Saint-Martin, je le reconnais, il faut tirer les choses au clair. Je vais donc faire procéder aux vérifications nécessaires et je vous enverrai à vous-même et à M. Dosière une réponse plus complète par écrit. » Plus de trois mois après, je n'ai toujours pas reçu de réponse.

Il s'agit pourtant d'une question sérieuse et, vous le savez, monsieur le secrétaire d'État, lorsque je suis une affaire, je n'ai pas l'habitude de lâcher prise avant d'avoir reçu une explication. Je vous repose donc la question. Si vous n'êtes pas en mesure d'y répondre aujourd'hui, j'espère que vous pourrez le faire dans un délai raisonnable. Certes, c'est un cas exceptionnel, mais il est suffisamment grave pour que l'on exige de savoir pourquoi une telle chose a pu se produire.

Debut de section - PermalienÉric Besson, secrétaire d'état chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique

Monsieur le député, à la suite de votre intervention et de celle de M. Sueur, le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement a interrogé le ministre du budget, Éric Woerth.

S'agissant de la personne s'étant mise en infraction avec les textes, j'ai sous les yeux sa réponse que je vous remettrai en mains propres si vous le souhaitez : à la demande du trésorier-payeur général, le comptable a été muté sur un emploi non comptable depuis le 31 décembre 2003. S'agissant des causes de cette situation, j'ai entre les mains des notes manuscrites évoquant l'isolement géographique et d'autres éléments. Une lettre vous sera très prochainement envoyée à ce sujet par M. Éric Woerth.

Sachez donc que vos interventions conjointes ont été suivies d'effets.

(L'amendement n° 6 rectifié est adopté.)

(L'article 29 bis, modifié par l'amendement n° 6 rectifié , est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Sur l'article 29 ter, je suis saisie d'un amendement n° 7 .

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Ciotti

Cet amendement vise à revenir sur une disposition adoptée par le Sénat, tendant à réduire de dix ans à cinq ans le délai de prescription en matière de gestion de fait. Nous proposons d'en rester à un délai de dix ans, qui nous paraît particulièrement raisonnable. Comme le soulignait Jean-Pierre Soisson, avec le talent qu'on lui connaît, cela permettra d'encadrer les procédures et de leur donner toute la force nécessaire pour sanctionner les comportements coupables.

Debut de section - PermalienÉric Besson, secrétaire d'état chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique

Le rétablissement du délai de prescription en matière de gestion de fait à dix ans constitue un élément très important dans la mesure où il est difficile d'établir une gestion de fait car elle ne peut être détectée qu'à l'occasion des contrôles menés par les juridictions financières, contrôles qui ont actuellement lieu tous les quatre ans.

Dans ces conditions, maintenir à cinq ans le délai de la prescription aurait eu pour conséquence de mettre fin aux gestions de fait qui, pour des raisons matérielles, n'auraient pu être détectées.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable à l'adoption de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

Autant j'étais défavorable à la position prise par le rapporteur à propos de l'article 16 bis, autant je suis tout à fait favorable à cette disposition.

La Cour a créé une procédure extraordinaire concernant des personnes maniant les deniers publics de manière irrégulière, que nous nous efforçons, après coup, de poursuivre. Or toutes les restrictions, toutes les entraves, y compris celles placées par le législateur, comme cela a été le cas tout à l'heure, vont à l'encontre du contrôle de ces gestions de fait.

Le professeur Lascombe, que je vous félicite d'avoir cité dans votre rapport, monsieur le rapporteur, dit bien que « le temps que la gestion de fait soit découverte et que la procédure s'engage, il faut souvent un temps assez long, surtout si l'on prend pour base celle de la commission des faits et non leur découverte ». Il ajoute : « La gestion de fait était déjà rare ; elle va devenir exceptionnelle si, par extraordinaire, elle ne disparaît pas ! »

Je voudrais attirer l'attention de mes collègues sur le fait que, en matière de gestion de fait, le point de départ de la prescription n'est pas la date de la production des comptes mais la date de l'acte constitutif de la gestion de fait. Or ces actes sont souvent cachés au juge financier et ne peuvent être révélés que longtemps après, à l'occasion d'un contrôle du juge financier ou d'un changement d'ordonnateur.

Pour ma part, j'étais favorable au maintien du délai de trente ans. Cinq ans est une aberration absolue. Dix ans est un moindre mal. Je voterai donc l'amendement du rapporteur. Toutefois, parce que vous avez refusé de maintenir l'article issu de l'amendement de M. de Courson, je voterai contre l'ensemble du texte.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

J'ai noté que le Gouvernement, en donnant son avis sur cet amendement, reconnaissait que la réduction du délai de prescription à cinq ans revenait à une disparition de la gestion de fait. Cela serait en effet une amnistie pure et simple.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Je me réjouis donc, avec mes collègues du groupe socialiste, que le rapporteur soit revenu sur cette disposition du Sénat. Dans le cas contraire, nous aurions voté contre le texte.

J'en profite pour dire à quel point j'ai apprécié les deux interventions de Jean-Pierre Soisson. Elles ont été très éclairantes, en particulier s'agissant de l'article 16 bis, que vous n'avez pas voulu rétablir.

Cela dit, le groupe socialiste s'abstiendra sur ce texte. Je vais m'en expliquer, ce qui me dispensera d'intervenir dans une explication de vote. Bien entendu, l'article 16 bis n'a pas la même importance que la disposition que nous nous apprêtons à voter. Au demeurant, il ne s'agit pas tant de l'article en lui-même que de la procédure utilisée. Contrairement à ce qu'a prétendu le Gouvernement, si vous ne voulez pas rétablir cet article, c'est tout simplement parce qu'une négociation a eu lieu avec le Sénat, qui votera conforme le texte en l'absence de cet article, car il ne souhaite pas revenir sur les délais.

Pour reprendre l'expression de M. Goulard, il faut avoir des principes. Et, pour ma part, j'ai un principe concernant le Sénat. Certes, comme je l'ai déjà souligné, celui-ci a amélioré le texte sur certains points, et, quand il le faut, je sais reconnaître à la Haute Assemblée toutes les qualités de son travail – M. Schosteck, qui a été sénateur, pourrait le confirmer, nous nous sommes souvent rencontrés à l'occasion de commissions mixtes paritaires. Mais il y a un point que je ne discuterai jamais : s'agissant du processus législatif, je ne mets pas sur un même pied l'assemblée élue au suffrage indirect et l'assemblée élue au suffrage universel. Par conséquent, dans cette affaire, ce que nous n'acceptons pas, c'est tout simplement que la volonté du Sénat l'emporte.

Ce texte pouvait très bien repartir au Sénat, où l'article 16 bis aurait d'ailleurs peut-être pu être adopté. Or le Gouvernement a préféré négocier pour gagner deux ou trois semaines alors que nous attendons ce texte depuis des années.

On aurait parfaitement pu respecter ce délai et faire en sorte que l'Assemblée nationale ait le dernier mot, conformément à notre Constitution. C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche s'abstiendra sur ce texte.

(L'amendement n° 7 est adopté.)

(L'article 29 ter, modifié par l'amendement n° 7 , est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

L'article 31 ne fait l'objet d'aucun amendement.

(L'article 31 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je ne suis saisie d'aucune demande d'explication de vote.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

Vote sur l'ensemble

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures trente, est reprise à dix-sept heures quarante.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement m'a fait connaître que l'ordre du jour des mardi 14 octobre, après-midi et soir, et mercredi 15 octobre, après-midi et soir, est ainsi fixé.

Mardi 14 octobre : après le débat préalable au Conseil européen, projet de loi de finances rectificative pour le financement de l'économie et, éventuellement, suite du projet de loi sur le Grenelle de l'environnement ;

Mercredi 15 octobre : après les questions au Gouvernement, suite de l'ordre du jour de la veille.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de programme relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement (nos 955, 1133, 1125.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Jeudi soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'amendement n° 59 rectifié à l'article 4.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Christian Jacob, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour soutenir l'amendement n° 59 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 59 rectifié .

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Le Gouvernement est favorable à cet amendement.

(L'amendement n° 59 rectifié est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Tourtelier

Monsieur le ministre d'État, la semaine dernière, on nous avait promis de nous donner aujourd'hui les renseignements budgétaires que nous avions demandés. Or nous ne les avons pas eus.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Ils ont été envoyés à M. Brottes ce matin.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisie d'un amendement n° 291 .

La parole est à M. Yves Albarello.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Albarello

L'amendement n° 291 tend à modifier l'article 4 pour faire référence à l'utilisation du bois énergie. L'alinéa 3 de l'article serait ainsi rédigé : « Toutes les constructions neuves faisant l'objet d'une demande de permis de construire déposée à compter de la fin 2020 présentent, sauf exception, une consommation d'énergie primaire inférieure à la quantité d'énergie qu'ils produiront à partir de sources renouvelables, et notamment le bois énergie. »

(L'amendement n° 291 , accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

En conséquence, les amendements nos 433 et 442 tombent.

Je suis saisie de deux amendements, nos 763 et 907 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l'amendement n° 763 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Un amendement concernant le bois énergie vient d'être adopté mais le bois est aussi un matériau. Conformément aux engagements du Grenelle d'octobre 2007, l'amendement 763 tend à introduire dans le texte la référence aux biomatériaux.

Cette disposition est d'autant plus importante que nous passons 80% de notre temps à l'intérieur et qu'il a été démontré que les biomatériaux étaient plus sains pour notre santé. Ainsi, l'utilisation de matériaux malsains pourrait expliquer que le nombre de personnes asthmatiques ait doublé en vingt ans. De surcroît, les pièces comme les véhicules, de plus en plus climatisés, hiver comme été, ne sont plus aérés. Cet hémicycle en témoigne.

Nous devons aujourd'hui promouvoir des biomatériaux comme le bois, la chaux, les oxydes naturels, les panneaux de fibre de bois pour isoler, le liège expansé, la cellulose, le lin, la laine de mouton, le chanvre, etc.

La parole est à M. Daniel Paul, pour défendre l'amendement n° 907 .

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Je serais favorable, monsieur Cochet, à votre amendement si vous retiriez la référence à l'« énergie grise » que nous n'avons pu définir avec précision.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Je suis d'accord pour supprimer de mon amendement les mots : « dont l'énergie grise sera faible et ».

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

L'amendement n° 763 est donc ainsi rectifié.

La parole est à M. Philippe Plisson.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Plisson

Madame la présidente, je profite du fait que nous parlons de « clim » pour évoquer son fonctionnement dans notre hémicycle.

Il serait, à mon avis, opportun que nous mettions nos actes en accord avec nos paroles, c'est-à-dire que nous supprimions cette « clim » qui, chaque fois que nous pénétrons ici, nous cause des sinusites ou des maux de gorge.

Si nous fermions la « clim », nous économiserions l'énergie et nous réduirions les dépenses de sécurité sociale.

Par conséquent, je demande instamment que la clim soit éteinte.

Je vous en remercie par avance.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Nous soutenons l'amendement d'Yves Cochet. Le drame du cancer de l'amiante témoigne de l'importance de recourir à des matériaux qui ne nuisent pas à la santé des habitants et des artisans.

Par ailleurs, cet amendement, tout en s'intégrant dans ce qu'on pourrait appeler le diagnostic climatique ou énergétique des bâtiments, tient compte des données environnementales et culturelles. Ainsi, en Guadeloupe, le cyclone Hugo a pu faire exploser des bâtiments en béton alors que des bâtiments en bois, très bien structurés et ventilés, ont résisté à des vents de 230 kmh.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

N'étant pas en séance lorsque vous avez commencé l'examen de l'article 4, je profite de cet amendement pour vous rappeler, comme je l'avais fait en commission, qu'en France, certaines commissions des normes sont très déséquilibrées en faveur des industriels, dont l'intérêt n'est pas forcément de se conformer le plus vite possible aux nouvelles normes car ils doivent amortir leurs machines et leurs matériaux. Nous devrons faire preuve de vigilance.

Par ailleurs, les normes européennes ne pourraient-elles s'appliquer directement sans passer par ces commissions, dont il avait été dit en 2002 que, trop nombreuses, il faudrait en éliminer ? Je n'ai pas consulté la liste des commissions supprimées, mais j'ai le sentiment que, depuis, il en a été créé davantage qu'il n'en a été supprimé.

Enfin, restons prudents dans l'utilisation du matériau bois. Soit l'on recourt à du bois dur, très souvent du bois exotique, et les prix de la construction augmentent, en particulier dans le Sud-Est asiatique – l'on construit ainsi en béton dans le Laos et au Vietnam car le bois est devenu très cher. Cette situation nous arrange bien, mais l'on ne peut pas parler de développement durable.

Soit l'on recourt à des bois tendres mais qu'il faudra traiter ; sinon, aucun artisan ne s'engagera sur une garantie décennale.

Je ne vous demande pas de me répondre immédiatement mais d'y réfléchir.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Monsieur le ministre, ce n'est pas la première fois, et sans doute pas la dernière non plus, que nous constatons des différences entre le texte issu des différentes négociations et tables rondes et celui qui nous est présenté aujourd'hui. Comment pouvez-vous expliquer ces « oublis » – je reste gentil en début de séance.

J'attire par ailleurs votre attention sur le fait que l'amendement n° 907 , ne faisant pas référence à l'énergie grise, pour les mêmes raisons que celles avancées par le rapporteur, devrait vous convenir.

(L'amendement n° 763 , tel qu'il vient d'être rectifié, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

En conséquence, l'amendement n° 907 tombe, de même que l'amendement n° 809 .

Je suis saisie d'un amendement n°640 .

La parole est à M. Philippe Tourtelier.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Tourtelier

L'amendement 640 tend à ce qu'une étude soit réalisée pour évaluer l'avantage d'un basculement des crédits d'impôts en faveur des accédants à la propriété contenus dans la loi TEPA au bénéfice des propriétaires bailleurs ou accédants à la propriété et des locataires qui entreprendraient des travaux pour se conformer dès 2009 aux objectifs du projet de loi.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Sur le fond, je suis d'accord avec cette disposition, mais elle est déjà prévue dans le projet de loi de finances. Avis défavorable.

(L'amendement n° 640 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisie d'un amendement n°513 .

La parole est à M. Christian Estrosi.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Estrosi

Pourquoi la loi fixe-t-elle des dates à partir desquelles les nouvelles constructions doivent répondre aux nouvelles normes ? Parce que nous devons dès aujourd'hui mener une politique incitative pour faire gagner le Grenelle de l'environnement, l'amendement n° 513 tend à ce que, pour tout bâtiment livré avec la fin 2020, il soit possible de déduire directement des impôts sur le revenu le surcoût, par rapport aux règlementations techniques en vigueur, d'une construction classée « bâtiment à énergie positive ».

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Il s'agit là d'un amendement d'appel pour le débat en loi de finances. Plutôt que d'émettre un avis défavorable, je souhaiterais, monsieur Estrosi, que vous le retiriez.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Même avis. Outre des avantages fiscaux pour la mise aux normes d'anciens bâtiments ou la construction aux normes, le projet de loi de finances prévoit que le taux du crédit d'impôt serait porté à 40% durant toute sa durée pour les personnes acquérant des logements classés « bâtiment basse consommation » ou des bâtiments à « énergie positive ».

Je vous propose de revoir ce point dans le cadre de la loi de finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Estrosi

Non. Fort de l'assurance ferme donnée par le Gouvernement que cette disposition figure bien dans le projet de loi de finances, je fais confiance à M. le ministre d'État et je retire mon amendement.

(L'amendement n° 513 est retiré.)

(L'article 4, modifié par les amendements adoptés, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est aux orateurs inscrits sur l'article 5 et, tout d'abord, à M. Jean-Yves Le Déaut.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

Nous abordons avec cet article les dispositions mettant en oeuvre la réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le parc des bâtiments existants. L'objectif est ambitieux : il s'agit de réduire les consommations énergétiques de 38 % d'ici à 2020.

J'en reviens à la question de Philippe Tourtelier, monsieur le ministre d'État, même si vous avez donné des assurances à l'un de nos collègues. Il est important en effet que nous sachions de quelle manière vous allez traiter, dans le projet de budget pour 2009, la question des bâtiments de l'État, celle du rôle dévolu aux collectivités territoriales et surtout celle des logements sociaux puisque vous souhaitez en rénover 40 000 au cours de l'année 2009.

Votre objectif est de ramener la consommation annuelle d'énergie à 150 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré. Or certains bâtiments consomment le double et nécessitent chacun de 15 000 à 20 000 euros de rénovation. Atteindre ce seul objectif coûterait donc 800 millions d'euros. Comment donc allez-vous financer cela ? Cette mesure est-elle bien inscrite dans le projet de loi de finances ? S'agit-il bien d'une priorité et les arbitrages en la matière ont-ils été rendus ?

Nous sommes d'accord avec vous sur le principe et l'objectif à atteindre. L'un de mes amendements allait même un peu plus loin, afin que nous montrions l'exemple, mais il a été déclaré irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution. Reste que vous entamez une réforme sans qu'on sache avec quels moyens. Pouvez-vous donc indiquer à la représentation nationale, monsieur le ministre d'État, puisque vous disposez d'éléments dont nous sommes encore dépourvus, quels arbitrages budgétaires ont été rendus pour financer cette disposition ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Si l'alinéa 5 de cet article retient en particulier mon attention, de façon liminaire et générale, je me référerai au discours tenu le 25 octobre 2007 par le Président Sarkozy, selon lequel, « l'enjeu majeur se situe dans les 30 millions de logements et bâtiments anciens – nous avons précédemment évoqué le bâtiment neuf, nous abordons maintenant le bâtiment ancien. Dans ces logements, poursuivait le chef de l'État, le budget des familles s'évapore par les fenêtres et par le toit. Nous allons doubler le nombre de bâtiments anciens rénovés chaque année et porter à 400 000 par an le nombre de logements anciens rénovés. Je veux que ce programme commence par les 800 000 logements HLM les plus dégradés. »

Nous pensons en effet indispensable que le présent texte comprenne une mesure très ambitieuse de rénovation des bâtiments anciens résidentiels et tertiaires. L'enjeu est en général méconnu : on préfère parler des normes des bâtiments à énergie positive ; cela fait « techno », moderne, mais il ne s'agit que de 1 % du bâti. La réalité, c'est que ce sont surtout les bâtiments anciens qui constituent des passoires et nécessitent un effort.

Par anciens, j'entends les bâtiments construits avant 1975, qui n'étaient soumis à aucune réglementation thermique, soit environ 17 millions de logements. Cette rénovation prendra trente ou quarante ans puisqu'elle doit être réalisée à l'horizon de 2050. Toutefois, si l'on souhaite diviser les émissions de gaz à effet de serre de ces logements par quatre, comme le dit le projet, qui s'en tient visiblement au rapport du GIEC de 2001, ou par douze, comme ce serait mon voeu car je me réfère, moi, au rapport du GIEC de 2007 – soyons résolument modernes, comme le demandait le poète… –, il faut combiner des mesures d'isolation et le recours aux énergies renouvelables. C'est techniquement possible mais se pose alors le problème des investissements à consentir, celui de la durée que l'on se consent et celui de la formation à dispenser aux artisans.

Reste que seule cette rénovation des bâtiments anciens pourrait permettre d'économiser 12 %, voire 15 % de l'énergie consommée en France et de réduire dans la même proportion environ les émissions de gaz à effet de serre, qui représentent en l'occurrence quasiment l'équivalent de celles produites par l'industrie et la moitié de celles générées par le parc automobile. Il s'agit donc d'un effort important.

Aussi, si l'on veut rénover ces quelque 20 millions de logements en quarante ans, il convient de le faire pour 400 000 par an. Il faut tenir compte, j'insiste, de problèmes de formation, d'investissements mais un plan de cette ambition permettrait, de surcroît, de créer 100 000 emplois locaux – autrement dit non délocalisables – pour quarante ans, dans l'artisanat du bâtiment, et de développer un savoir-faire dans les programmes d'isolation qui profiterait certainement par la suite à notre commerce extérieur. La France se grandirait donc par ce type d'initiative.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Nous abordons un sujet crucial. Je précise d'emblée que lorsque le texte fixe un objectif de réduction des consommations d'énergie du parc des bâtiments existants d'au moins 38 %, il s'agit d'une moyenne. L'ambition par logement est supérieure à 38 %, bien entendu.

En ce qui concerne les bâtiments de l'État et des établissements publics, cette obligation sera financée de deux manières. Il s'agit d'abord, dans chaque administration et dans chaque établissement public, d'établir des contrats de performance énergétique – comme ceux que nous utilisons au ministère de l'écologie –, c'est-à-dire un dispositif global de travaux entraînant une économie d'énergie de X euros, donnée que l'on multiplie par le nombre d'années d'amortissement afin de déterminer le financement correspondant. Ce n'est néanmoins pas suffisant pour tous les locaux. Il est donc prévu une montée en puissance jusqu'à 300 millions d'euros par an, et 100 millions d'euros dès 2009, au cas où il y aurait besoin de compléments budgétaires indépendamment des contrats de performance énergétique.

En ce qui concerne le seuil, qui implique – si le Parlement le vote – une obligation absolue de commencer immédiatement, il revient à l'État de s'organiser pour entamer ce chantier, véritablement gigantesque. Le Président de la République a d'ailleurs demandé – et cela a été décidé en conseil des ministres la semaine dernière – qu'une commission de suivi composée, notamment, de représentants du ministère de l'écologie et de celui du budget, veille au bon déroulement des procédures et du contrôle, bâtiment par bâtiment, de cet énorme programme public.

J'ouvre une parenthèse en ce qui concerne les normes, pour donner raison à M. Gaubert. Nous avons, en effet, pris du retard en la matière, comme d'ailleurs en ce qui concerne les documents techniques unifiés, qui n'ont pas été mis à jour depuis une vingtaine d'années. Nous sommes donc en train d'examiner la question des normes pour les matériaux, à partir des observations de M. Gaubert.

J'en reviens aux logements sociaux. Il s'agit bien de lancer les chantiers de rénovation thermique pour tous les logements sociaux en commençant par les plus dégradés de ce point de vue. Les professionnels membres des groupes de travail les ont parfaitement identifiés et estiment possible la montée en puissance que j'ai évoquée. L'État pourra attribuer des subventions pouvant atteindre 20 % du coût des travaux engagés par les organismes bailleurs. Le projet de loi de finances prévoit à cet effet la mise à disposition d'un premier prêt bonifié à long terme de la Caisse des dépôts et consignations, non pas à 4,2 % ni même à 3,7 % – ce qui est le minimum –, mais à 1,9 %. Le budget de l'État financera directement la partie correspondant à la tranche entre 1,9 % et 3,7 % et, dès la première année, 1,2 milliard d'euros seront ainsi mis à la disposition des organismes HLM.

Enfin, s'agissant des particuliers, deux types de dispositifs sont envisagés. Pour les travaux légers, courants, l'article 200 quater du code général des impôts sera modifié par le projet de loi de finances initial pour dégager un peu plus de 2 milliards d'euros de crédits d'impôt.

Pour les travaux lourds, dans les cas où les besoins sont massifs, a été mis en place le bouquet énergétique dans le cadre des crédits d'impôt liés au nouveau prêt à taux zéro – l'éco-prêt. Dès la première année, le projet de loi de finances initiale prévoit que l'État financera à hauteur d'un milliard d'euro le surplus de crédits d'impôt pour soutenir ces emprunts. C'est la condition minimale pour que, sur un crédit de cinq à sept ans selon l'état du bâtiment, l'amortissement de son emprunt soit égal ou inférieur à l'économie d'impôt réalisée. Nous nous sommes inspirés de la procédure la plus performante en Europe, à savoir la procédure allemande KWF. Nous avons même prévu de la doper un peu.

Le dispositif en question est donc global et défini en accord avec les professionnels. La vraie difficulté est que, dans le même temps, Etat et établissements publics vont faire un appel à une main-d'oeuvre qualifiée très importante car la réalisation des audits énergétiques doit commencer dès le 1er janvier. Les équipes d'analyse des travaux vont se mettre à l'oeuvre. Parallèlement, commencera la rénovation des logements sociaux et celle du parc résidentiel privé financée par l'éco-prêt à taux zéro.

Pour conclure, nous allons davantage rencontrer un problème d'adaptation de la formation à ce nouveau dispositif qu'un problème de financement.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisie de quatre amendements, nos 764 , 865 , 606 et 725 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l'amendement n° 764 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Cet amendement propose une nouvelle rédaction du premier alinéa car je ne suis pas convaincu par la disposition fixant à 38 % le taux de réduction moyenne des consommations énergétiques du parc de bâtiments existants d'ici à 2020. Certes, cette réduction est nécessaire, mais il convient de rappeler l'objectif indiqué par le Président de la République, consistant à doubler le nombre de bâtiments anciens rénovés chaque année à partir de 2012, soit 400 000 rénovations par an, en fixant la consommation annuelle d'énergie primaire par mètre carré à des valeurs inférieures à 80 kilowattheures.

En effet, si l'on ne raisonne qu'en pourcentage, on s'expose au risque d'opérations d'isolation mal faites qui, dans dix ans, se révéleront moins performantes que ce qu'on exigera alors. Ainsi, si l'on rénove des logements anciens, autant le faire sérieusement, non pas dans le but d'atteindre une consommation annuelle de 120 ou 150 kilowattheures par mètre carré, mais immédiatement de 80. Sans quoi, dans dix ans, on sera contraint de dépenser à nouveau de l'argent pour renforcer l'isolation des bâtiments. Quitte à rénover, autant le faire bien et non à moitié.

À propos des nouveaux instruments fiscaux ou financiers tels que le crédit d'impôt ou le prêt à taux zéro, que M. le ministre vient d'évoquer avec brio, permettez-moi de m'interroger : si les plus riches des particuliers qui rénovent un logement privé ancien peuvent avancer le montant des matériels et matériaux ouvrant droit à un remboursement l'année suivante au titre du crédit d'impôt, les petits propriétaires plus pauvres, quant à eux, ont rarement les moyens de payer le surcoût aux artisans en attendant ledit remboursement. Le prêt à taux zéro est-il donc automatique et intégral, de sorte que les pauvres qui possèdent leur logement puissent le rembourser grâce au crédit d'impôt qui leur permettrait ainsi de compenser le surcoût induit ? Si ce n'est pas le cas, seuls les riches pourront rénover les bâtiments anciens.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 865 .

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

J'ajouterai une question aux arguments fort bien exposés par M. Cochet : pourquoi, alors que le projet de loi initial fixait l'objectif de 400 000 rénovations thermiques annuelles pour descendre à 80 kilowattheures par mètre carré et par an d'ici à 2012, être passé à un pourcentage, celui de 38 % en l'occurrence ? Je devine que, la prise de conscience initiale aidant et le nombre de rénovations étant voué à s'accroître, le chiffrage en pourcentage des consommations vous est plus favorable que le nombre de rénovations effectuées. Toutefois, ne risque-t-on pas, avec cette rédaction, d'encourager les travaux d'économie d'énergie impromptus mais sans effet à long terme – du bricolage, en quelque sorte – alors qu'il vaudrait mieux privilégier les actions de fond, réfléchies et accompagnées ? Notre amendement n° 865 devrait vous permettre de justifier cette modification rédactionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Philippe Plisson, pour soutenir l'amendement n° 606 .

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Plisson

Nous partageons le même souci de précision quantifiée et souhaitons revenir à la fixation d'une valeur absolue de 400 000 rénovations thermiques annuelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Bertrand Pancher, pour soutenir l'amendement n° 725 .

Debut de section - PermalienPhoto de Bertrand Pancher

Ces amendements présentés en discussion commune nous satisfont, car ils reprennent un des engagements précis du Président de la République. Chacun se félicite de ces engagements et il nous revient de les traduire dans les textes de loi. Certes, l'objectif de 38 % de réduction des consommations d'énergie du parc existant est clair, mais il le serait davantage encore si l'article reprenait la teneur du discours du 25 octobre 2007. « Nous allons doubler le nombre de bâtiments anciens rénovés chaque année et porter à 400 000 par an le nombre de logements anciens rénovés », déclarait alors le Président de la République.

Une telle mention serait cohérente avec le reste de l'excellent article 5, qui est au coeur même du dispositif et qui reprend plusieurs engagements très précis issus du Grenelle, dont la réduction drastique des émissions de gaz à effet de serre. Le secteur du logement produisant à lui seul 23 % de ces émissions, soit soixante-dix millions de tonnes équivalent pétrole, nous serions à même de réduire l'ensemble de nos émissions de 20 % à 25 % d'ici à 2020 – ce qui nous permettrait d'atteindre nos objectifs européens !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

La commission a repoussé ces quatre amendements. Néanmoins, après avoir écouté les arguments des uns et des autres, je me rallie – à titre personnel – à la rédaction proposée par M. Pancher, qui en fait la meilleure synthèse. En effet, c'est un bon compromis qui a le mérite de rappeler l'objectif de 400 000 logements sans pour autant imposer un mécanisme contraignant qui, année après année, poserait de nombreux problèmes.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Permettez-moi d'abord de revenir sur l'objectif de 80 kilowattheures par mètre carré et par an, qu'évoquait M. Cochet. Vous pensez bien que je ne peux pas être soupçonné d'y renoncer. S'il n'a pas été retenu dans la rédaction du texte, c'est parce que de nombreux particuliers souhaitent procéder aux travaux de rénovation de leur logement par étapes, ne serait-ce que parce que les seuls frais d'huisserie peuvent être considérables. Nous préférons proposer un bouquet énergétique qui permettra à ceux dont les travaux sont validés dans le cadre de l'éco-prêt de procéder à des travaux réduits et néanmoins très efficaces, sans pour autant atteindre l'objectif de 80 kilowattheures.

Lors du Grenelle, plusieurs groupes de travail très exigeants ont largement étudié la question. La solution adoptée, renonçant à fixer une barre trop haute pour les particuliers, évite de soumettre l'obtention de l'éco-prêt au respect du seuil de 80 kilowattheures. En effet, ne serait-il pas dommageable de priver du financement prévu par l'État les particuliers souhaitant effectuer une première opération de rénovation qui ramènerait leur consommation de 400 à 170 kilowattheures ?

En revanche, l'idée de rappeler l'objectif de 400 000 logements rénovés par an me paraît raisonnable, car elle est fidèle à l'esprit du Grenelle et aux conclusions des groupes de travail. Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement de M. Pancher et défavorable aux trois précédents.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Je comprends le raisonnement de M. le ministre, mais le chantier, énorme, s'étend jusqu'en 2050. À cette date, il est vraisemblable que tout logement consommant encore 150 kilowattheures par mètre carré et par an sera considéré comme une passoire thermique ! Pourquoi, dès lors, effectuer une rénovation en deux fois alors qu'on pourrait le faire en une seule ? Sur trois ou quatre décennies, c'est même économiquement avantageux. Certes, entre une opération de rénovation visant à réduire la consommation de 150 à 80 kilowattheures et une autre de 400 à 150, le coût marginal de la première est bien plus important – d'où votre préférence pour une rénovation par étapes –, mais de nombreuses associations estiment qu'il vaut mieux bien faire du premier coup. Je maintiens donc mon amendement : mieux vaut faire des logements bien isolés que des logements moyennement isolés, comme ce sera le cas avec l'amendement intermédiaire de M. Pancher, accepté par M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

M. Cochet a raison : la bonne isolation des bâtiments est nécessaire. Toutefois, nous accepterons l'amendement de M. Pancher, car l'essentiel est de mentionner un objectif quantifié. L'objectif de 400 000 logements, fixé par la mission d'information parlementaire, fut repris par le Grenelle. En théorie, ce nombre équivaudra à une réduction de 38 %, mais il suffit seul à fixer un objectif clair. Nous retirons donc l'amendement n° 606 au profit de l'amendement n° 725 .

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

En effet, l'amendement n° 725 constitue un bon compromis qui fixe un objectif précis. J'ajoute qu'atteindre le seuil de 80 kilowattheures par mètre carré et par an représente souvent un coût très élevé, voire dissuasif. Dès lors, de nombreux particuliers préfèrent procéder par paliers – ce qui n'empêche pas de programmer la réalisation, à terme, de l'ensemble des travaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Tourtelier

Le groupe SRC accepte donc de retirer l'amendement n° 606 , mais permettez-moi d'anticiper sur la suite de nos débats : si la réalisation de travaux en plusieurs étapes peut se justifier pour des particuliers, ce n'est pas le cas pour le logement social. Nous vous proposerons donc un amendement semblable pour ce secteur, qui imposera d'emblée l'objectif de 80 kilowattheures par mètre carré et par an.

(L'amendement n° 606 est retiré.)

(L'amendement n° 764 n'est pas adopté.)

(L'amendement n° 865 n'est pas adopté.)

(L'amendement n° 725 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisie de deux amendements, nos 765 et 866 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Yves Cochet.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Nous venons de réintroduire dans le texte un objectif chiffré : c'est très bien. Soyons plus précis encore – sans pour autant tomber dans le domaine réglementaire. Comme pour les appareils électroménagers, il existe pour les bâtiments une nomenclature qui permet de les classer selon leur bilan énergétique. Ainsi, les bâtiments de classe A n'émettent que cinq kilogrammes équivalent CO2 par mètre carré et par an, tandis que ceux de classe G peuvent en émettre jusqu'à quatre-vingts ! De même, en matière de consommation d'énergie, les bâtiments de classe A sont les plus économes – moins de cinquante kilowattheures par mètre carré et par an – alors que ceux de classe G, très gourmands, peuvent en consommer plus de quatre cent cinquante.

Dans ces conditions, l'amendement 765 tend à préciser que les surfaces publiques visées à la deuxième phrase de l'alinéa 2 de l'article sont de classe F ou G.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l'amendement n° 866 .

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Défavorable.

Se limitant aux classes F et G, votre amendement est réducteur, monsieur Cochet. Dans le cas d'un bâtiment de classe E, qui correspond à une consommation comprise entre 230 et 330 kilowattsheures au mètre carré par an, on peut, avec peu de travaux, arriver à une réduction significative de la consommation. Il est donc dommage de limiter les engagements à ces deux classes. Dans d'autres cas, on peut, à très faible coût, obtenir des résultats très intéressants. Ne nous privons pas de cela !

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

L'engagement est bien de procéder à l'audit énergétique de tous les bâtiments de l'État et de tous les établissements publics. Il n'y a pas, dans ce domaine, de bâtiment qui soit considéré comme étant aux normes. Il y a un problème de coût et d'opportunité qui doit être pris en compte et l'idée est de le faire pour tous les bâtiments.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à M. Yves Cochet.

_ADT-->M. Yves Cochet. Je comprends, monsieur le ministre, mais en l'occurrence, nous parlons d'un délai de dix ans. Il n'est pas question de celui de quarante ans pour les 20 millions de logements. Vous avez identifié 800 000 logements sociaux qui sont véritablement de « grosses passoires ». Il s'agit de repérer de même, dans le privé, les « grosses passoires » et de tenter de réduire leur consommation énergétique dans les dix premières années, dans la mesure où le gain marginal est le plus fort.

Après, le gain marginal sera encore bon, mais moins que dans les classes F et G. Si toutefois vous voulez rajouter la classe E, je suis d'accord. Mon raisonnement est à la fois économique et écologique.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Sur un plan méthodologique, vous avez tout à fait raison, et c'est bien de cette façon que nous allons procéder concrètement. Mais nous n'allons pas reprendre dans la loi des étiquetages qui relèvent du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Oui.

Dans le privé, on aura droit à un prêt à taux zéro ou à un crédit d'impôt…

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Nous parlons des bâtiments appartenant à l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Vous venez de dire que, pour les bâtiments d'État, vous commencerez par ceux qui consomment le plus d'énergie.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Tous les bâtiments seront concernés, mais nous commencerons en effet par ceux-ci.

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Je retire l'amendement n° 866 .

(L'amendement n° 866 est retiré.)

(L'amendement n° 765 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisie d'un amendement n° 863 .

La parole est à M. Daniel Paul.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Cet amendement vise à supprimer la mention selon laquelle la rénovation des bâtiments de l'État sera modulée selon un programme adapté aux spécificités de chaque administration ou établissement public.

Monsieur le ministre, j'ai entendu ce que vous venez de dire. Mais, de fait, tout se passe comme si vous demandiez au législateur d'obérer chaque nouvelle disposition par des restrictions et des moyens de la contourner. Le projet de loi de mise en oeuvre du Grenelle devient ainsi une litanie de voeux pieux dont les modalités d'application ne sont pas détaillées ou sont aisément contournables.

Vous venez de le confirmer à M. Cochet, l'article 5 prévoit que seules les surfaces les moins économes en énergie pourront être rénovées. En tout cas, elles seront prioritaires, ce qui ouvre la porte à un toilettage minimal du parc public. En introduisant cette nouvelle modulation relative à la spécificité des administrations, la disposition se voit à nouveau affaiblie.

Qu'entendez-vous par « spécificité » ? Chaque administration est spécifique et pourra donc faire valoir un droit à un assouplissement, voire à une exemption du programme de rénovation. Après les annonces du Grenelle, vientle moment où des engagements, que beaucoup croyaient fermes et définitifs, sont remis en cause ou modulés en fonction des spécificités propres à chaque administration – et viendra bientôt le moment où ils seront aussi modulés en fonction des spécificités propres aux moyens budgétaires permettant de procéder à une rénovation. Mais cela, c'est pour les semaines et les mois à venir…

La suppression de cette mention permettrait que les administrations ne brandissent pas leurs spécificités pour repousser ou annuler la rénovation de leurs bâtiments et la mise en conformité de leur consommation énergétique avec les exigences du présent projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Défavorable, précisément pour des raisons de bon sens.

Ce texte n'est pas une litanie de voeux pieux, monsieur Paul. Au contraire, il est empreint de réalisme, dans la mesure où la nature des bâtiments – un atelier, un hôpital ou une école, par exemple – diffère en fonction de leur vocation. Que la spécificité de chaque administration et l'utilité de chaque bâtiment doivent être prises en compte pour ces rénovations, voilà qui ne me semble pas stupide, bien au contraire !

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

L'idée générale, c'est de diviser par deux les émissions de gaz à effet de serre. S'agissant, ensuite, de l'organisation, tous les bâtiments ne datent pas de la même époque : certains ont deux ans et, déjà, une consommation de 80 kilowattheures, quand, pour d'autres, elle s'élève à 250 kilowattheures ; certains accueillent du public et ne relèvent pas des mêmes règles que celles qui s'appliquent aux bureaux, certains ont des ateliers, d'autres encore ont une histoire qui peut rendre l'application du dispositif plus facile ou plus compliquée. Bref, il y a un objectif global, et il y a l'engagement, le financement de l'État – 100, 200, 300 millions par an, auxquels s'ajoutent les contrats de performance énergétique. À chaque administration, à chaque établissement public de rédiger son audit énergétique et d'être le plus efficace possible pour atteindre cet objectif.

J'estime que, derrière cette phrase, il n'y a que du bon sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Monsieur le ministre, vous nous donnez à chaque fois, en guise de réponse, une explication générale, sans doute pleine de bon sens, mais nous examinons un texte de loi, et les décrets d'application ne s'appuieront pas sur le bon sens, mais sur le texte qui aura été voté. Or celui-ci, si la majorité de notre assemblée vous suit, indique que cette rénovation aura pour objectif de réduire d'au moins 40 % les consommations d'énergie et d'au moins 50 % les émissions de gaz à effet de serre de ces bâtiments « selon un programme adapté aux spécificités de chaque administration et établissement public ».

J'ai bien entendu vos explications, monsieur le rapporteur ; une menuiserie, par exemple, a une spécificité. Mais cela doit-il figurer dans un texte de loi ? Il en va de même pour les hôpitaux, mais, au moment où ceux-ci sont confrontés à d'importantes difficultés budgétaires, ils vont pouvoir arguer du fait qu'ils n'ont pas les moyens de procéder à ces rénovations et que leur spécificité est de soigner les malades. Car, que sont ces spécificités ? Ce n'est pas sur les explications vagues, générales, que vous avez données tout à l'heure qu'on se fondera pour rédiger les décrets d'application, et encore moins lescirculaires qui suivront, lesquelles – compte tenu des coûts – s'appuieront strictement sur le texte qui aura été voté ici et qui parlera de spécificités.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

L'amendement de Daniel Paul me donne l'occasion de poser une question de fond à M. le ministre, concernant les spécificités.

Je vous donne un exemple. Je suis président de l'Abbaye des Prémontrés, qui est un centre culturel d'art et de rencontres, et, comme tout gestionnaire d'un établissement classé, je souhaite faire des économies d'énergie. Mais c'est impossible, car la « spécificité » du ministère de la culture fait que l'architecte des monuments historiques refuse, par exemple, l'installation d'un double vitrage. Le bâtiment a certes été refait dans les années cinquante, mais le double vitrage serait nécessaire à une meilleure isolation et ne dénaturerait pas le site.

Si nous inscrivons ces spécificités dans la loi, vous verrez, monsieur le ministre, qu'un grand nombre de ministères ou administrations, notamment celle des monuments historiques, utiliseront cet argument. D'ailleurs, un amendement de Michel Bouvard propose de tenir compte du classement au titre des monuments historiques. J'en suis d'accord, à condition que l'administration des monuments historiques se concerte avec votre ministère pour fixer des objectifs. Si les hôpitaux, d'un côté, les Monuments historiques, de l'autre, refusent toute mise aux normes énergétiques, nous allons arriver à des consommations très fortes, car il s'agit de bâtiments qui reçoivent du public.

Nous souhaitons, monsieur le ministre, que vous nous donniez une explication à ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

J'ai le sentiment qu'on « ergote », car, selon moi, le texte ne remet pas en cause les objectifs définis à la fin du paragraphe.

J'ajouterai une remarque sur l'alinéa 3. Les collectivités territoriales possèdent de nombreux bâtiments. Je n'ai pas les chiffres en tête, mais, en comptant les théâtres, les équipements sportifs, les écoles, les collèges et les lycées, cela représente sans doute un nombre impressionnant de mètres carrés. Je souhaiterais avoir quelques précisions, monsieur le ministre, sur la contrepartie, notamment en termes d'aides et d'incitations, que proposera l'État aux collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Je souhaite lever une ambiguïté. L'objectif n'est pas modulé en fonction des spécificités. Il est intégralement maintenu et fera l'objet d'une évaluation. C'est le programme d'action qui tiendra compte des spécificités. En bon français, cela ne modifie en rien les objectifs ! Si nous avions écrit : « Néanmoins, selon la fonction, l'objectif pourra être modulé », je comprendrais mieux. Mais tel n'est pas le cas. Nous aurions pu, d'ailleurs, ne pas parler du programme lui-même et en rester aux objectifs. C'est un souci de précision qui, semble-t-il, est susceptible d'entraîner une confusion. De la même façon, nous ne sommes pas obligés d'indiquer qu'il faut procéder dans l'immédiat à un audit énergétique…

(L'amendement n° 863 est adopté.) (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisie d'un amendement n° 766 .

La parole est à M. Yves Cochet.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

J'en reviens, comme toujours, soit au discours du Président de la République du 25 octobre 2007, soit à l'engagement n° 5 du Grenelle, dont je vous rappelle la teneur : « Rénovation thermique combinée à des travaux d'accès partout aux handicapés, avec un objectif de performance 2015 adapté à la nature des bâtiments et éventuellement à la taille des collectivités – les grandes villes et les régions s'engagent sur des objectifs renforcés. L'État s'engage à effectuer la rénovation de ses bâtiments dans les 5 ans. »

Donc, quand je propose de substituer au mot « dix » le mot « cinq », je ne fais que retranscrire un des engagements du Grenelle. Si l'on repousse les échéances en portant les délais au double, on donne le sentiment d'aller à reculons. L'an dernier, le délai était fixé à cinq ans, aujourd'hui, il est de dix ans. Revenons au Grenelle, comme vous le disiez la semaine dernière : « le Grenelle, tout le Grenelle, rien que le Grenelle ».

Je vous poserai deux questions, monsieur le ministre. Je me souviens qu'en août 2007, M. Fillon, Premier ministre, avait demandé à tous ses ministres de dresser un bilan carbone de leurs administrations avant le 1er janvier 2008. Disposez-vous, pour cette année, d'indications chiffrées et sérieuses pour toutes les administrations, puisqu'il y a maintenant dix mois que ce bilan devait être établi ? Je me suis, quant à moi, rendu sur le site du MEDAD : je n'y ai trouvé que des indications datant de 2004. Peut-être suis-je moi-même en retard…

Enfin, vous avez précisé que le MEDAD était exemplaire en ce domaine, pour les bâtiments qu'il gère. Je ne me suis pas rendu avenue de Ségur depuis longtemps. À combien de kilowattheures, par mètre carré et par an, en est-on actuellement là, monsieur le ministre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Sans être opposée sur le fond, la commission a émis un avis défavorable à cet amendement.

S'agissant du nombre de kilowattheures de l'avenue de Ségur, je laisse au ministre le soin de vous répondre.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

C'est effectivement à M. le ministre que j'ai posé la question !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

On pourrait aussi bien mettre un ou deux ans ! Un cap a été fixé. Nous essayons de nous assigner des objectifs techniquement crédibles. Voilà la raison pour laquelle un délai de dix ans a été fixé. Maintenant, on peut effectivement toujours faire mieux en matière de rénovations. Si tel est le cas, personne n'ira contre, croyez-le bien ! Tout le monde essaiera d'obtenir les meilleurs résultats dans les délais les plus raisonnables, c'est évident. Quant à multiplier par deux le nombre de logements et diviser par deux le délai, on peut certes continuer dans cette direction, mais il me semble que le délai prévu dans cet article 5 est tout à fait satisfaisant.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

S'agissant du bilan carbone, sur quinze ministères, sept ont déclenché les opérations, les appels d'offres ont été lancés et les entreprises choisies. L'objectif – le Président de la République l'a récemment rappelé lors d'un conseil des ministres – est que les quinze ministères aient fait ce bilan avant la fin de l'année. Tel est l'état précis.

Nous avons quitté les locaux de l'avenue de Ségur, qui seront vendus dans un mois et demi. Je ne peux donc pas répondre à votre question sur ce qu'est là la consommation en kilowattheures.

Enfin, votre troisième point s'avère plus problématique. Nous rencontrons, en réalité, un furieux problème de filière. Nous craignons que la pression exercée sur l'État et ses établissements publics pour la rénovation de leurs bâtiments ne provoque la formation d'un goulet d'étranglement, les professions de la rénovation ne pouvant répondre à la demande. Autant il s'agit d'une incitation pour le secteur privé – on peut discuter du nombre ; nous nous sommes accordés sur 400 000 logements sociaux –, autant c'est une obligation en ce qui concerne les bureaux. À partir de 2010, la pression portant sur les bureaux et sur tous les établissements publics d'État sera gigantesque. Quel est le niveau d'engorgement possible, raisonnable, souhaitable ? Telle est la question. Je ne suis pas expert en la matière. Le délai doit-il être de cinq, sept ou dix ans ? Le plus important, pour moi, est que les audits énergétiques débutent immédiatement. En effet, ce sera globalement rentable : ont été mis en place des financements et un prélèvement sur chaque administration à notre profit qui sera restitué pour paiement des opérations, de sorte que ces administrations ont objectivement intérêt à effectuer ces rénovations.

Vous considérez que le délai de dix ans est un peu long. Faut-il prévoir sept ans ? Le délai de cinq ans à compter de la date du débat nous paraît un peu court, en tout cas. Voilà, très franchement, l'état de ma réflexion.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Poignant

Il est pour moi nécessaire de faire le point avec le groupe UMP, madame la présidente. Je vous demande donc une suspension de séance d'un quart d'heure. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Rappel au règlement !

Article 5

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante, est reprise à dix-neuf heures cinq.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Je me demande, madame la présidente, si la majorité a réellement la volonté d'aboutir.

Cet après-midi, le président de la commission est venu me demander, ce qui est tout à fait légitime, comment nous pourrions faire pour terminer la discussion de ce projet avant l'examen du projet de loi de finances. Nous lui avons expliqué que, tout en n'ayant pas l'intention de censurer nos arguments, nous n'avions pas non plus l'intention de faire durer le débat pour le plaisir.

Nous sommes d'accord pour avancer vite, et c'est vrai, monsieur le ministre, que nous irions beaucoup plus vite si vous acceptiez nos amendements. (Rires.) Nous sommes parfois navrés de voir que des propositions de bon sens sont repoussées, mais nous ne pensions tout de même pas que la majorité irait jusqu'à faire de l'obstruction (Rires sur les bancs du groupe SRC.) Or c'est bien ce qui s'est passé tout à l'heure. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Alors que le débat se déroulait normalement, alors que vous dites les uns et les autres vouloir avancer, la majorité a soudain demandé une suspension de séance. Nous n'avons pas été dupes, nous savons bien qu'il ne s'agissait pas vraiment de réunir le groupe UMP, mais plutôt de le consolider. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gest

Nous réfléchissions à l'amendement de M. Cochet !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

On peut sourire de ceci ou de cela : reste que ce texte est important…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

…et nous devons avancer. Les principes démocratiques exigent que nous respections le fait majoritaire dans l'Assemblée. Pour une fois que l'opposition est majoritaire, je vous demande de respecter cette majorité. Mettons-nous tous sérieusement au travail en adoptant les amendements selon la règle de la majorité. Nous la subissons depuis déjà six ans,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

…vous pouvez bien l'accepter pendant quelques heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Diard

Si la majorité est là depuis six ans, c'est par la volonté du peuple !

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Ce n'est pas une raison pour légiférer à la baïonnette !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Diard

Monsieur Cochet, je comprends tout à fait votre volonté de faire avancer les choses, mais votre amendement a été rédigé avant que n'éclate cette crise financière qui nous a particulièrement touchés et, si fixer un objectif à dix ans nous paraît ambitieux, mais réalisable, le fixer à cinq ans nous semble totalement utopique. Nous ne sommes pas là pour faire de l'obstruction, nous devons être concrets et pragmatiques. Vous savez très bien que, compte tenu du contexte financier tendu, ce que vous proposez est totalement irréalisable.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Poignant

Votre réflexion était de bonne guerre, monsieur Gaubert. Cela étant, nous souhaitons nous aussi faire aboutir le projet le plus vite possible. Nous nous sommes réunis, nous avons estimé que cinq ans, ce n'était pas possible. Nous allons maintenant en rediscuter et avancer sur cette question puisque vous êtes d'accord pour avancer.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Cochet

Je suis très sensible aux arguments qui viennent de tous les bancs de cette assemblée et c'est pourquoi je vous propose, dans un esprit de conciliation, de rectifier mon amendement en remplaçant le mot « cinq » par le mot « huit », ce qui est un compromis.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Quel est l'avis de la commission sur cet amendement rectifié ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Je note votre effort de compromis, monsieur Cochet. J'ai expliqué tout à l'heure qu'il fallait faire preuve de réalisme. Dix ans était un délai tout à fait réaliste, cinq ans ne l'était pas. En huit ans, est-ce réalisable ? Honnêtement, je n'en sais rien et je me rallierai à la position du ministre.

Cela dit, nous aurons plusieurs débats sur les dates et les délais. Ce qui est important, c'est que nous avancions. Si vous voulez à chaque fois diviser les délais par deux, nous n'y arriverons pas.

Bref, si l'on peut se mettre d'accord sur huit, on ne va pas s'y opposer !

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Adresser un signal fort à l'ensemble de nos administrations est une bonne chose et la proposition de M. Cochet me paraît réaliste. J'y suis donc favorable. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

Je suis contre !

(L'amendement n° 766 , tel qu'il vient d'être rectifié, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 292 et 613 .

La parole est à M. Yves Albarello, pour défendre l'amendement n° 292 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Albarello

Cet amendement vise à compléter l'article 5 en demandant que soient pris en compte dans la mesure de la consommation d'énergie et des émissions de gaz à effet de serre les gains d'énergie et le stockage de carbone réalisés grâce à la plantation d'arbres et de végétaux pérennes.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La parole est à Mme Pascale Got, pour défendre l'amendement 613 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Got

Il s'agit de compléter les mesures internes aux bâtiments par la plantation d'arbres et de végétaux, dont nous connaissons les vertus en termes de captation de CO2. Il serait ainsi possible de faire d'une pierre deux coups, en renforçant les mesures internes par des mesures externes tout en améliorant l'esthétique de notre environnement quotidien. De nombreux pays, notamment en Scandinavie, ont adopté cette démarche pour l'ensemble des bâtiments publics ainsi que pour certains bâtiments commerciaux, ce qui ne nuit pas au paysage, bien au contraire !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Nous avons eu en commission un long débat sur ces amendements, dont les auteurs appartiennent d'ailleurs tant à l'opposition qu'à la majorité. La difficulté tient à la mesure du stockage de carbone. Si nous savons que les puits de carbone sont une réalité dans le cas de plantations suffisamment denses – il ne suffit pas de planter un arbre au fond de son jardin –, nous sommes incapables de mesurer précisément leur capacité de captation. Je ne suis donc pas opposé au principe d'une telle proposition, mais j'appelle votre attention sur le fait que nous ne disposons pas aujourd'hui des instruments de calcul qui nous permettraient de l'appliquer.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Comme le rapporteur, je souhaiterais que l'on m'explique comment le stockage du carbone sera calculé. Je n'ai pas d'a priori négatif sur la question ; je voudrais simplement que les auteurs des amendements précisent leur idée.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Cette formulation revient de façon récurrente dans la discussion ; peut-être pourrions-nous la ramasser un peu, plutôt que de la reprendre telle quelle à chaque fois. Par ailleurs, si je connaissais les végétaux annuels et les végétaux vivaces, je dois avouer mon ignorance en ce qui concerne les « végétaux pérennes » !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Tourtelier

Si je suis sensible aux remarques du ministre et du rapporteur, il me semble néanmoins qu'elles révèlent une certaine contradiction. Qu'il y ait une difficulté à mesurer le carbone stocké est indéniable. Cependant, lorsque nous avons discuté, à l'article 4, du fameux amendement Ollier rectifié et des émissions de gaz à effet de serre liées aux différentes énergies, et que vous avez introduit la possibilité d'une modulation en fonction de la teneur en CO2 de ces émissions, la question était exactement la même, puisqu'une telle mesure reste, elle aussi, largement problématique. Pourquoi donc nous opposer maintenant un tel argument ?

J'ai lu que sa rectification aurait vidé l'amendement Ollier de sa substance. Je ne suis pas du tout d'accord. La modulation en fonction des différentes teneurs vous permettra de faire ce que vous voulez.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Albarello

Ces amendements servent deux objectifs : la captation de carbone et les économies d'énergie. L'installation d'une toiture ou d'un mur végétalisé, que l'on encourage, par exemple, sur les sites à haute qualité environnementale, rend possibles des économies d'énergie. Ainsi, lorsque, dans le Midi, on effectue des plantations pour apporter de l'ombre et de la fraîcheur, on économise sur la climatisation. Il est important de bien voir cet aspect des choses.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Je reconnais que compter est extrêmement difficile dans ce genre de situation. Dans notre hémicycle même, cela compte, décompte et recompte ! (Sourires)

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Mais cela ne stocke pas beaucoup !(Sourires)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Je crois d'ailleurs qu'il sera difficile de compter demain après-midi, entre les 150 000 euros somptuaires de Fortis et les 200 000 euros dépensés hier soir par Dexia, qui organisait une belle soirée à Monte-Carlo sur l'argent que lui consent généreusement l'État. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) C'est dans Le Monde de cet après-midi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Monsieur le ministre, j'ai rencontré ce matin les promoteurs d'une installation, que je trouve très intelligente, de méthanisation du lisier et d'autres déchets verts. Ils ont imaginé de produire de la biomasse en épandant les eaux résiduelles peu chargées sur les sols à planter. Or, les services de l'État imposent que l'eau épandue soit stérile ! Cela réglera le problème de la mesure du puits de carbone : les plantations ne poussant pas, il n'y aura pas à effectuer la mesure plus d'une année…

Debut de section - PermalienPhoto de André Chassaigne

Comme l'ensemble des groupes, nous avons, nous aussi, reçu ces amendements pré-écrits, comme tombés du ciel (Sourires), et qui ont été repris par notre collègue sans la moindre modification, même d'une virgule. Il y a dans tout cela un côté un peu ridicule. Nous avons tous, dans nos circonscriptions, des représentants de la profession qui a envoyé ces amendements – dans la mienne, ils sont même en grand nombre. S'il m'arrive de reprendre des amendements, j'essaie cependant de les modifier un peu, pour ne pas les reprendre exactement comme je les ai reçus.

Le contenu des amendements est certes pertinent eu égard aux objectifs que nous poursuivons, même si nous aurions pu ajouter la possibilité, pour ceux qui souhaitent faire construire une maison, de ne pas couper la totalité de la végétation présente sur le terrain, ce qui répondrait à ces objectifs de manière comparable. Quoi qu'il en soit, en bon citoyen, je suis d'accord pour prendre en considération une proposition émanant de nos territoires, et je voterai donc ces excellents amendements, apparemment soutenus sur les différents bancs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

J'ai rêvé d'une grande loi d'orientation qui modifie les modes de production et de consommation, une loi qui s'impose et qui dure. Or, article après article, amendement après amendement, nous nous noyons dans les détails ! Où sont les principes ? Quelles sont les orientations que nos concitoyens retiendront ? Il n'y a plus rien ! Nous discutons certes de la plantation des arbres, et nous discuterons de tout ce que vous voudrez : des voitures qui s'arrêtent le long de la route, des gens qui vont faire pipi ou se désaltérer avec un chablis biologique… (Rires) Nous sommes dans l'absurde, et nous savons tous – du moins les plus sensés – que jamais cette loi, alourdie par une telle accumulation de détails, n'entrera en application !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

C'est la réalité ! Tenons-nous en plutôt aux principes ; définissons un cadre, une orientation générale. Ce que Jean-Louis Borloo avait voulu était formidable ; ce que j'avais entendu de la bouche du Président de la République, à l'Élysée, aussi ! Or, que trouvé-je aujourd'hui ? Des crottes de chien ! (Rires)

Je trouve insensé et inacceptable que l'Assemblée se noie ainsi dans les détails, et que mon rêve parte en fumée de CO2! J'avais rêvé d'autre chose, et je vous le dis en toute simplicité. Ressaisissez-vous, les gamins ! (Rires et exclamations sur divers bancs.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

M. Soisson vient d'avoir une poussée subite, mais au contraire de ce qu'il vient de dire, je ne crois pas que cette question soit un détail. Le Gouvernement souhaite agir dans les deux grands secteurs du bâtiment et des transports. Or, les forêts sont un autre secteur sur lequel nous pouvons agir, nonobstant les arguments « déjectifs » auxquels notre collègue a eu recours (Sourires).

Monsieur Soisson, qui a été un excellent ministre de l'agriculture, doit savoir qu'il y a aujourd'hui autant de réserves de carbone dans les forêts du monde que dans les rejets atmosphériques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Déaut

Eh bien, ces amendements posent un objectif global concernant les forêts. Monsieur Grouard, « pérenne » est un mot français, qui décrit une chose qui dure ; ce qui veut dire que si l'on plante un arbre, il ne faut pas le couper tout de suite.

Monsieur le rapporteur, nous ne sommes pas dépourvus d'outils pour mesurer la captation de carbone. Si nous nous dotions – c'est un rêve – d'un plan de reforestation des villes françaises, nous calculerions la surface sur laquelle nous entendons planter des arbres, et cette mesure nous permettrait de connaître les gains en carbone qu'il serait possible de réaliser. Vous connaissez le phénomène de la photosynthèse et vous savez que, lorsque l'on fabrique de la cellulose, des molécules de carbone qui se trouvent dans l'atmosphère se fixent dans cette substance. Dans le cadre d'un plan de reforestation, nous mesurerions la croissance globale des arbres chaque année, en fonction de ce que nous en savons dans nos climats tempérés, et nous connaîtrions ainsi la quantité de carbone captée.

C'est un point important, monsieur Soisson. Je pense que notre proposition aurait dû figurer à l'article 2, mais l'amendement qui y tendait a été refusé. C'est pourquoi j'ai co-signé l'amendement n° 613 – monsieur Chassaigne, vous qui, d'habitude, êtes si perspicace, auriez dû mieux le lire.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Got

Nous travaillons ici à une loi de programme, comme cela nous a été répété maintes fois depuis le début de nos débats. À ce titre, on pourrait considérer notre amendement comme un amendement de principe. Comme l'a dit M. Le Déaut, c'est une proposition positive, même si le calcul reste à affiner. À ce propos, je rappelle que nous n'avons pas vu, dans ce projet de loi, beaucoup d'indications chiffrées ni de précisions en termes de financement. Dès lors, je ne vois pas pourquoi on insiste tant sur ce problème de mesure de consommation d'énergie. (Approbations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Monsieur Le Déaut, je vous rappelle que la commission a adopté un amendement dont je suis l'initiateur et dans lequel je propose que la forêt soit prise en compte comme puits de carbone dans le cadre du calcul des quotas de carbone. Mais la définition d'une plantation pérenne est différente de celle d'une exploitation forestière, d'une forêt entendue comme un ensemble. Je vous l'ai dit : sur le fond, je n'ai pas d'objection de principe à votre amendement, mais la plantation pérenne peut se limiter à planter un arbre dans le fond de son jardin. Or nous savons pertinemment, vous comme moi, qu'alors, ça ne sert à rien ! Il serait plus utile de raisonner sur des massifs ; et encore faudrait-il préciser la nature des plantations car tous les arbres n'ont pas la même capacité de stockage en fonction de la gestion de la forêt. En effet, si la gestion est saine, elle permet d'entretenir le puits de carbone, mais si la forêt n'est pas entretenue, il peut y avoir l'effet inverse, et la forêt devient émettrice de gaz à effet de serre. C'est pourquoi j'ai un avis mesuré sur votre amendement. Mais, bien évidemment, je n'y suis pas radicalement opposé si l'on raisonne en termes de massif forestier et non pas à partir de plantations individuelles. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Nous examinons pour le moment le I de l'article 5, c'est-à-dire l'effort thermique concernant les bâtiments publics. Nous n'en sommes pas encore aux logements. L'idée de ces amendements identiques est d'encourager les administrations à planter de telle sorte que cela vienne dans une certaine mesure en déduction de l'effort thermique, mais je rappelle qu'il faudra, en tout état de cause, fournir cet effort : n'oublions tout de même pas que là est le sujet. Si vous souhaitez un peu moins d'effort thermique…

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire

Ces amendements reviennent pourtant à cela, monsieur Cochet, puisque, s'ils étaient adoptés, l'effort thermique demandé à une administration publique concernant ses bâtiments pourrait être partiellement allégé par la plantation de végétaux pérennes organisée par cette même administration. Une telle plantation devrait-elle se situer à côté du bâtiment, un peu plus loin, voire à dix kilomètres ? On n'en sait rien. Est-ce que ce serait le dispositif le plus efficace ? Je m'en rapporte à la sagesse de l'Assemblée. Mais je rappelle que nous sommes en train de débattre des normes thermiques des bâtiments publics.

Cela étant, développer les plantations, y compris dans le domaine public, me paraît une absolue nécessité.

(Les amendements identiques nos 292 et 613 sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Grouard

Moi aussi, j'ai voté contre, car le ministre a raison !

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Danièle Hoffman-Rispal

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite du projet de loi sur la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures trente-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma