La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (nos 4, 62).
Vendredi après-midi, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'amendement n° 425-" href="/amendements/4%2C62/425-">425 à l'article 7.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 425 .
Monsieur le président, madame la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, monsieur le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, mes chers collègues, c'est un vrai bonheur de reprendre la discussion ! Tout cela s'est, en fin de compte, fort bien articulé. Après avoir débattu, ce matin, du projet de loi portant règlement définitif du budget de 2006, nous avons poursuivi, cet après-midi, avec un débat d'orientation budgétaire et reprenons, ce soir, grâce à notre pugnacité, la discussion du projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat – le TEPA – ainsi nommé par antiphrase.
Il est formidable de constater que la mise en perspective de tout cela a un effet pédagogique quant à la profondeur et à la réalité de vos intentions : faire disparaître l'ISF, sans l'afficher ouvertement, déduire la CSG et la CRDS du calcul du bouclier fiscal, etc. Tout est dans l'impression que vous voulez donner. Il est très rare, madame la ministre, que vous critiquiez des économistes en vue qui ne partagent pas votre avis. C'est, en revanche, ce que votre collègue, M. Woerth, a fait cet après-midi. Les députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste ont atteint leur objectif, si l'on en juge par l'écho de nos débats dans la presse – du Figaro (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) à La Tribune, en passant par Les Échos, tous ont écrit ce qu'il fallait penser de votre projet de loi, à savoir qu'il était inefficace et offrait des cadeaux qui ne sont pas destinés aux contribuables.
Notre amendement vise d'abord à la morale, à l'éthique et à l'efficacité, puisqu'il propose d'éviter de dilapider les fonds de l'entreprise. Il s'agit de plafonner les éléments de rémunération, d'indemnités et d'avantages des dirigeants à vingt fois le montant du salaire mensuel moyen des salariés de l'entreprise, ce qui est tout à fait considérable ! Un smicard qui quitte son entreprise reçoit-il ne serait-ce que vingt fois le SMIC ? Bien sûr que non ! La mesure que vous nous proposez, comme nous l'avons déjà souligné, demeure très insuffisante, voire hypocrite, puisque, prétendant stigmatiser les dirigeants médiocres, elle laisse les autres s'engraisser sans frein. Nous pensons qu'il est indispensable de remettre véritablement à plat la question des émoluments des dirigeants d'entreprise, car si ceux-ci sont aujourd'hui prétendument mieux surveillés et plus transparents qu'autrefois, il est évident qu'en dépit des multiples scandales, qui ont fait la une de la presse ces dernières années, les rémunérations des patrons n'ont guère fléchi, bien au contraire ! Celles-ci se situent toujours à des niveaux faramineux, sans d'ailleurs qu'aucune référence à la valeur travail, que vous ne cessez pourtant d'invoquer, ne le justifie.
La moyenne des rémunérations des patrons du CAC 40 s'élevait en 2006, rappelons-le, à 2,2 millions d'euros, montant exorbitant – en dépit de fortes disparités – surtout quand la multiplication des plans sociaux en est le prix.
Sous le bénéfice de ces utiles observations, nous vous proposons donc de revenir à davantage de mesure. Je ne doute pas que cela permettra, en outre, à nombre de dirigeants d'entreprise français de garder les pieds sur terre, plutôt que de continuer à évoluer dans une bulle de chiffres, loin des réalités économiques.
Enfin, cet amendement serait un utile compromis. En effet, vous avez proposé d'ériger un droit d'exception, en écartant le législateur de ce qui se passe dans l'entreprise. Vous laissez au conseil d'administration, donc en dernière instance aux actionnaires, le soin de déterminer ce que vous appelez les critères de performance. Nous proposons, pour notre part, que le législateur se mêle de ces questions en définissant un critère qui moraliserait l'entreprise, milieu que vous connaissez, en effet, fort bien, madame la ministre, car s'il est, en effet, une critique que l'on ne peut vous faire, c'est d'ignorer ces réalités. Vous savez combien le niveau moral moyen y est très faible.
De m'interrompre ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
J'arrive au terme de mon propos, monsieur le président.
Mme la ministre connaît bien ce milieu. Elle sait parfaitement qu'il faut mettre des garde-fous. Suffisamment d'excès ont été relayés par les médias pour que l'on ne continue pas dans cette voie !
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.
La commission a repoussé cet amendement pour les raisons que j'ai d'ailleurs évoquées vendredi soir, alors que nous examinions des amendements du même type.
J'aimerais faire un bref rappel. Cette discussion s'est en effet déroulée il y a trois jours et, le week-end étant passé par là, nous l'avons peut-être oubliée. Ce projet de loi est extrêmement novateur parce qu'il lie les rémunérations différées à la performance.
Au contraire, il y a un contrôle, monsieur Brard ! En effet, le versement de la rémunération fixée quelques années auparavant, décidé par le conseil d'administration, est subordonné au respect de la performance. Ce dernier critère a été préféré à la fixation d'un plafond extrêmement difficile à justifier. En outre, nous avons adopté, vendredi après-midi, un amendement de Michel Bouvard qui plafonne la possibilité de déduire ces rémunérations différées du compte d'exploitation en charges à 1 million d'euros.
La parole est à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.
Pour les raisons que nous avons également eu l'occasion d'évoquer dans la soirée de vendredi, le Gouvernement est défavorable à cet amendement, car il persiste à considérer que les critères d'appréciation et l'appréciation elle-même relèvent de la compétence du conseil d'administration ou du conseil de surveillance et de l'assemblée générale des actionnaires s'agissant de la fixation des critères au moment de l'établissement du contrat, puis du conseil d'administration ou de surveillance pour l'évaluation des performances.
Donc, dans la logique de ce texte, il n'appartient pas au législateur de prévoir les critères et les modalités d'appréciation.
Vous avez la parole, monsieur Brard, mais je vous rappelle qu'aux termes de notre règlement, il s'agit d'une simple faculté.
C'est même quasiment l'effet de la simple bonté du président ! (Sourires.)
Madame la ministre, je suis fort satisfait de votre réponse qui confirme votre entêtement, ou votre persévérance, devrais-je dire, pour être plus aimable.
Je regrette vraiment, monsieur le président, que nous arrivions au terme de la discussion de cet article 7, alors même que Mme la ministre me répond enfin !
Je tiens, madame la ministre, à vous livrer cette citation d'Einstein pleine de sagesse, que vous illustrez parfaitement, et dont j'ai fait bénéficier M. Woerth cet après-midi : « Un préjugé est plus difficile à casser que l'atome. » Ainsi, préjugez-vous de la moralité de personnes dont vous savez qu'elles se retrouvent de conseil d'administration en conseil d'administration et ne se nuiront pas, quelles que soient les performances. En revanche, vous avez besoin de présenter un habillage à l'opinion. C'est ce que vous faites en nous proposant cet article 7.
Je suis saisi d'un amendement n° 427 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour le soutenir.
Vous êtes, nous avez-vous dit, madame la ministre, favorable à la diffusion de l'argent.
Pour être tout à fait fidèle à vos propos, vous avez parlé, lors de votre audition par la commission des finances, de « circulation de l'argent ». Nous défendons, pour notre part, la circulation du pouvoir, qui ne soit pas rester aux seules mains des actionnaires, donc de ceux qui possèdent le capital, au détriment de ceux qui produisent des richesses et qui – pour utiliser un vocabulaire qui vous est certainement familier – possèdent la force de travail. C'est d'ailleurs dans cette « force de travail » que se situe la valeur. Il serait équitable que le pouvoir soit partagé – c'est là une concession que je vous fais – entre les actionnaires et ceux qui travaillent.
Par cet amendement, nous proposons donc de soumettre le versement des indemnités ou avantages patronaux à l'avis conforme du comité d'entreprise.
Vous me répondrez, je le sais, madame la ministre, que deux représentants des salariés siègent au conseil d'administration. Mais, comme vous le savez, ils sont là pour la décoration, puisqu'ils n'ont pas le droit de vote ! Nous pensons, en effet, que ce type de consultation devrait entrer naturellement dans le périmètre de compétence des comités d'entreprise dont nous savons qu'ils ont vocation à être informés et consultés sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise.
Comment douter du fait que la cessation ou les changements effectifs des fonctions d'un dirigeant affectent directement la gestion et la marche générale de l'entreprise, au regard non seulement de l'importance des sommes en jeu et de l'impact que des pratiques prédatrices ont sur l'image de l'entreprise, mais aussi de l'exigence d'une information parfaite et transparente des salariés ? Vous traitez d'ailleurs aujourd'hui un dossier qui étaye mes propos : si les salariés du comité d'entreprise de EADS avaient disposé de tous les éléments et s'ils avaient été partie prenante à la décision, nous ne connaîtrions certainement pas une situation si difficile et qui est contraire à l'intérêt national comme à celui de l'industrie de l'aéronautique européenne.
Vous vous êtes souvent dite favorable à la participation des salariés ; notre proposition, qui milite en faveur d'une véritable participation et de la démocratisation du fonctionnement des entreprises, devrait donc vous réjouir. Nous ne doutons donc pas que vous nous approuverez cette concession à vos positions, madame la ministre !
La commission a émis un avis défavorable.
Monsieur Brard, je vous rappelle qu'en 2001, la majorité à laquelle vous apparteniez n'avait absolument pas envisagé de soumettre, dans le cadre de la loi relative aux nouvelles régulations économiques, les rémunérations des dirigeants et mandataires sociaux à un avis conforme du comité d'entreprise.
Le rapporteur général de l'époque avait même donné un avis défavorable !
Le projet représente un véritable progrès par rapport à cette loi en termes de transparence de la décision puisque, comme l'a reconnu à l'instant Jean-Pierre Brard, ces rémunérations différées devront faire l'objet, pour être versées effectivement, d'un accord du conseil de surveillance où siègent des représentants du personnel. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
J'hésite à donner une réponse puisque M. Brard l'a déjà anticipée !
Une semaine fructueuse et intéressante !
Deux représentants du comité d'entreprise siègent au conseil d'administration. Ils reçoivent donc l'ensemble des informations et des documents destinés aux administrateurs.
De plus, les critères d'appréciation de la performance des dirigeants sont réexaminés à chaque renouvellement de leur mandat et le conseil d'administration où siègent les deux représentants du comité d'entreprise en est informé.
Cela dit, je ne pense pas que la notion d'avis conforme puisse s'appliquer à l'avis d'un comité d'entreprise, qui ne peut être que favorable ou défavorable.
Je vous en remercie, mais c'est une invitation que je décline en l'espèce.
J'ajoute que nous n'avons pas besoin de ce type de dispositions pour poursuivre le dialogue avec les organisations représentatives des salariés. J'étais notamment cet après-midi avec des représentants du comité central d'entreprise d'EADS et l'ensemble des représentants des organisations syndicales pour évoquer avec eux la situation de la filière aéronautique et le changement de gouvernance au sein d'EADS et d'Airbus. Le dialogue, nous savons nous aussi le pratiquer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le rapporteur général, vous vous rappelez certainement qu'en 2001 – vous étiez certes dans l'opposition mais déjà très actif –, nous avons déjà défendu un amendement privilégiant les comités d'entreprise.
Vous connaissez la dure loi d'airain de la discipline de majorité. Bien qu'étant dans la majorité de la majorité, vous avez parfois dû avaler votre chapeau. Nous, nous ne l'avons jamais avalé parce que nous avons toujours défendu en séance les amendements auxquels nous croyions, et nos collègues socialistes sont là pour en témoigner, mais, quand on est la minorité de la majorité, on finit par s'incliner.
C'est dur parfois, effectivement, et Charles de Courson pourrait dire la même chose, mais nous ne sommes pas coupables si les comités d'entreprise n'ont pas plus de pouvoir. Quand la gauche reviendra, il faudra qu'elle corrige cette insuffisance.
Je suis saisi d'un amendement n° 3 rectifié , de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, saisie pour avis.
La parole est à M. Guy Geoffroy, pour le défendre.
, vice-président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Il s'agit, avec cet amendement auquel la commission des lois est très attachée, de donner une véritable assise juridique à la mission d'attestation des commissaires aux comptes concernant les rémunérations et avantages de toute nature versés à chaque mandataire social et, bien évidemment, la rémunération des dirigeants de société.
Cet amendement reprend une disposition qui vient d'assez loin puisqu'elle était inscrite dans les réflexions de la mission d'information que la commission des lois avait créée en 2003 sur la réforme du droit des sociétés. Elle avait d'ailleurs fait l'objet d'une proposition de loi de Pascal Clément, président de la commission à l'époque, et elle avait abouti dans le cadre de la loi du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie.
Lors de la codification de la partie réglementaire du code de commerce, cette disposition a été déclassée. Cet amendement tend à lui redonner valeur législative. Cela nous semble important dans la mesure où la mission de certification, qui n'a pas la même portée que la mission d'attestation, reste de nature législative, alors que la mission d'attestation, qui permet de mieux contrôler n'aurait qu'un caractère réglementaire.
Nous espérons que, comme la commission des finances, notre assemblée adoptera cet amendement.
Bien entendu, le Gouvernement partage pleinement l'objectif de la commission des lois…
…et souhaite la transparence et une bonne information des actionnaires, du public en général et, très clairement, la certification ou l'attestation par les commissaires aux comptes concourent à cette bonne information du public et des actionnaires.
Cela étant, l'article R. 823-7 du code de commerce prévoit en son 3° que les commissaires aux comptes « attestent spécialement l'exactitude et la sincérité des informations mentionnées aux trois premiers alinéas de l'article L. 225-102-1 ».
Une telle disposition réglementaire nous semble répondre à l'objectif souhaité, et j'aurais donc tendance à vous demander, monsieur Geoffroy, de retirer cet amendement. Si la commission des lois tient absolument à la faire passer en partie législative, le Gouvernement s'en remettra à la sagesse de cette assemblée.
J'aurais aimé savoir si l'amendement concerne les informations sur le montant de la rémunération et les avantages ou les informations ayant servi à la fixation de la rémunération.
, vice-président de la commission des lois. Les informations sur le montant de la rémunération et les avantages.
Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié .
(L'amendement est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 83 rectifié .
La parole est à M. le rapporteur général, pour le défendre.
Favorable.
Je mets aux voix l'amendement n° 83 rectifié .
(L'amendement est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 84 .
La parole est à M. le rapporteur général, pour le défendre.
Favorable.
Je suis saisi d'un amendement n° 85 , qui est également rédactionnel et auquel le Gouvernement est favorable.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 323 .
La parole est à M. Jean Launay, pour le défendre.
Cet amendement fait partie de toute une série que nous avions commencé de défendre vendredi, pour essayer de renforcer cet article 7, qui ne fait qu'une simple référence à la performance alors que le Président de la République, dans ses discours de campagne, avait appelé à la suppression des parachutes dorés.
Nous souhaitons définir les règles légales minimales que devrait respecter un comité des rémunérations pour participer à l'amélioration de la transparence et à la mise en place d'un meilleur gouvernement d'entreprise.
La solution retenue permet de définir un contenu minimal d'information, et nous posons deux conditions fortes afin d'assurer une forme de bonne pratique : la non-participation du président et des directeurs généraux à ce comité qui aura notamment la charge d'examiner les modalités de leur rémunération, et la production d'un rapport à l'assemblée générale sur les questions traitées par le comité.
La commission a rejeté cet amendement.
Le mieux est souvent l'ennemi du bien, monsieur Launay, et donner un statut juridique à un comité des rémunérations aurait pour effet de pousser les conseils d'administration ou conseils de surveillance à se défausser sur lui de ce type de problèmes. Si l'on veut vraiment avoir une unicité de décision et de responsabilité, ils doivent rester au niveau des dirigeants, des mandataires sociaux et des conseils d'administration ou de surveillance. En fait, les effets pervers d'une telle proposition l'emporteraient sur son intérêt immédiat.
Même avis.
L'objectif est de détacher le processus d'information de la fonction de président et de directeur général, non pas pour dissimuler les éléments, car le président ne peut pas ne pas les connaître, mais pour mettre de la distance.
Le document de l'institut Montaigne, qui a été cité à plusieurs reprises lors des débats de la semaine dernière par les uns et les autres, évoquait d'ailleurs les conditions dans lesquelles était fixée la rémunération.
À mon avis, l'objection présentée par le rapporteur général ne tient pas dans la mesure où c'est le conseil d'administration qui prendrait la décision, mais en s'appuyant sur le travail d'un comité auquel ne peuvent participer le président et les directeurs généraux.
Je suis saisi d'un amendement n° 327 .
La parole est à M. Jean Launay, pour le défendre.
Cet amendement prévoit que l'assemblée des actionnaires vote annuellement une délibération présentée par le conseil d'administration ou le directoire, pour fixer pour l'exercice à venir le rapport entre, d'une part, la plus haute rémunération et, d'autre part, la rémunération minimale versée à un salarié à temps plein dans l'entreprise.
Tout le monde a en mémoire ce qui s'est passé récemment à EADS et les sommes incroyables touchées par M. Forgeard, après des résultats aléatoires. Parler de critères de performance nous semble donc peu suffisant au regard du choc qu'une telle pratique a provoqué dans l'opinion publique et des attentes de celle-ci.
rapporteur général. Avis défavorable. Vous vous montrez là perfectionniste, monsieur Launay : il vaut mieux s'en tenir à ce qui a été prévu par la loi relative aux nouvelles régulations économiques, qui dispose que le rapport annuel fait état de l'intégralité des rémunérations.
L'avis du Gouvernement est également défavorable à cet amendement, considérant une fois de plus que c'est au conseil d'administration qu'il appartient de fixer la rémunération du dirigeant, comme il lui appartient de le révoquer ad nutum. L'article 7, dont nous débattons aujourd'hui, a simplement pour objet de déterminer les critères de performance en vertu desquels une rémunération différée est envisageable.
Votre amendement élargit son champ d'application au-delà de ce qui est prévu, ce qui nous amène à émettre un avis défavorable.
Cet amendement dispose que les sections syndicales d'organisations représentatives, comme le comité d'entreprise, bénéficient d'une information identique à celle délivrée aux actionnaires.
Même avis.
Cet amendement vise à lier à la mise en place ou au renouvellement d'un accord d'intéressement la possibilité d'offrir aux mandataires sociaux dirigeants de la société des formes de rémunération variable.
Par ailleurs, le travail d'évaluation de la performance future de l'entreprise réalisé lors de la mise en place d'un accord d'intéressement pourrait utilement inspirer les critères d'attribution de la part variable ou exceptionnelle de rémunération offerte aux mandataires sociaux.
Défavorable.
L'amendement n° 5 est un amendement de coordination, monsieur Geoffroy ?
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 379 rectifié .
L'article 7 vise à encadrer la pratique des « parachutes dorés », en posant des conditions de performance. La commission des finances, qui en a longuement discuté, a bien mesuré la difficulté de fixer de telles conditions. Essayons tout de même : on verra bien le résultat.
Le seul moyen véritable de combattre les abus en la matière, c'est la démocratie économique : soumettons aux assemblées générales d'actionnaires, puisqu'ils sont les propriétaires de l'entreprise, l'ensemble des éléments de rémunération des dirigeants. C'est le système que les Anglais viennent d'adopter, et qui sera applicable aux sociétés britanniques à partir d'octobre 2008. Si les actionnaires veulent surpayer les dirigeants, libre à eux : c'est leur argent après tout. Mais je crains fort que beaucoup de dirigeants n'aient quelques difficultés à justifier devant une assemblée de plusieurs centaines, voire quelques milliers d'actionnaires, certains parachutes dorés ou autres éléments de rémunération, qui n'existent en France que faute de transparence. Tout le monde connaît les us et coutumes des conseils d'administration des grandes entreprises, notamment de leurs comités de rémunération, aux mains d'une poignée d'administrateurs dits « indépendants », qui siègent dans de nombreux conseils différents. Dans ces conditions, je crains fort que les dispositions que nous sommes en train de voter ne soient insuffisantes.
Telle est l'idée de l'amendement : il s'agit de jouer le jeu de la démocratie économique. Je ne vois pas d'inconvénient à ce que les actionnaires fassent ce qu'ils veulent de leur argent, mais au moins qu'ils soient tenus au courant.
La commission a rejeté cet amendement. Je voudrais vous rappeler, monsieur de Courson, que la loi pour la confiance et la modernisation de l'économie a prévu que les rémunérations différées relèvent d'une convention réglementée, soumise à l'assemblée générale des actionnaires.
De surcroît, l'article 7 prévoit que la soumission à l'assemblée générale de ces conventions fera l'objet d'une résolution séparée pour chaque bénéficiaire d'une rémunération différée.
Enfin, le versement effectif de la rémunération différée, au moment du départ du dirigeant, sera soumis à l'avis du conseil d'administration. On voit que le progrès est substantiel. Notre proposition va même plus loin que le système britannique, en vigueur depuis une loi de 2006. En Grande-Bretagne en effet, si le conseil d'administration décide de la rémunération différée lors du contrat d'embauche, celle-ci est versée sans aucun contrôle par la suite. L'avancée substantielle par rapport au système britannique et par rapport à la loi pour la confiance et la modernisation de l'économie réside dans le fait qu'au moment du versement intervient à nouveau, non pas certes l'assemblée générale des actionnaires, pour des raisons faciles à comprendre, mais le conseil d'administration ou le conseil de surveillance.
Défavorable.
Très brièvement, monsieur le président : ce que vient de dire le rapporteur général n'est pas exact. En droit britannique, depuis la loi votée en 2006 mais applicable seulement en octobre 2008, pour être précis, ce sont les assemblées générales d'actionnaires qui pourront bloquer la décision du conseil d'administration.
La critique qu'on adresse au système français, c'est que, comme dans beaucoup d'autres systèmes, tout se passe à l'intérieur du conseil d'administration. Vous me dites qu'il y a un progrès : il est vrai que le texte essaie d'encadrer ces pratiques, notamment par une information de l'assemblée générale. Mais il ne donne pas à celle-ci le pouvoir de blocage qui existe dans le nouveau droit anglais. C'est cela que je propose : que les actionnaires aient le pouvoir de dire non s'ils jugent que ces rémunérations sont excessives.
Je mets aux voix l'amendement n° 379 rectifié .
(L'amendement n'est pas adopté.)
Je mets aux voix l'article 7, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 7, ainsi modifié, est adopté.)
Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l'article 7.
La parole est à M. Jean Launay, pour défendre l'amendement n° 319 .
Nous voulons par cet amendement compléter le code de commerce. Puisque, madame la ministre, c'est par la performance que vous justifiez les timides aménagements à la pratique des parachutes dorés que vous proposez, je vous pose la question : par qui est constituée la performance d'une entreprise ? Pour nous, la réponse est simple : c'est le fruit de la mobilisation de l'ensemble de ses salariés.
Dès lors, il est légitime de comparer la rémunération des salariés et celle des mandataires sociaux, et de constater que l'écart ne fait que s'accroître. Alors que le pouvoir d'achat des salariés modestes évolue de façon très limitée, les mandataires sociaux et une frange très restreinte des cadres bénéficient de mécanismes, tels que les stock-options, qui leur permettent, voire leur assurent, des rémunérations exceptionnelles d'une ampleur sans précédent.
Il est donc proposé d'assurer que l'ensemble des salariés bénéficient d'une part de la plus-value jusqu'ici réservée aux mandataires sociaux à travers les stock-options. Au moins la moitié de la plus-value d'acquisition des titres devrait ainsi, soit être rétrocédée sous forme d'un supplément exceptionnel de participation, soit faire l'objet d'un versement complémentaire par l'entreprise d'un montant équivalent.
La commission n'a pas adopté cet amendement. Je vous rappelle, monsieur Launay, que sous la précédente législature, nous avons voté, notamment dans le cadre de la loi pour la confiance et la modernisation de l'économie, d'une part des dispositions visant à favoriser le développement des accords d'intéressement, en particulier dans les petites et moyennes entreprises, d'autre part et surtout la possibilité de distribuer des actions gratuites à tout le personnel sans exception.
Vous proposez, monsieur le député, une répartition de la plus-value générée à l'occasion d'une levée de stock-options – dont je rappelle qu'il est un rapport contractuel entre le bénéficiaire de ces stock-options et la société – entre le bénéficiaire et la collectivité des salariés, au titre de la participation.
Le Gouvernement demande le rejet de cet amendement pour deux raisons. D'une part, il dénature un lien contractuel au bénéfice de tiers ; d'autre part, le régime de la participation ne peut s'appliquer que lorsqu'il y a un bénéfice net à répartir en vertu d'un accord de participation. Comme M. le rapporteur général vient de l'indiquer, la loi du 30 décembre 2006 a considérablement modifié ce régime pour en élargir le champ d'application et en faciliter l'usage.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire, pour défendre l'amendement n° 110 .
Pardonnez-moi, monsieur le président, madame la ministre, monsieur le haut- commissaire, chers collègues, d'être un peu plus long qu'à l'habitude, mais je tiens à expliquer l'intérêt des groupements d'employeurs.
Je ferai d'abord faire l'historique d'une disposition mal connue et qui fait souvent peur.
Non, monsieur le député, il n'y a aucune raison qu'elle fasse peur : un CDI dans un groupement d'employeurs vaut bien mieux qu'un CDI dans une entreprise.
Créés en 1985, les groupements d'employeurs ont pour objet principal de permettre aux entreprises qui en sont membres de recourir à des salariés mis à leur disposition par le groupement.
Cet outil à destination des entreprises, le plus souvent de forme associative, repose sur une conception du travail radicalement différente du modèle traditionnel, ce qui peut évidemment déranger.
Le groupement d'employeurs embauche des salariés qui sont ensuite mis à la disposition des entreprises membres. Les salariés sont titulaires d'un contrat de travail écrit, lequel a vocation à être à durée indéterminée. En fonction de la demande des entreprises, les salariés travaillent pour des durées variables, au sein des entreprises dites utilisatrices. Lorsque le besoin de l'entreprise est satisfait, le salarié est alors mis à la disposition d'une autre entreprise, et bénéficie ainsi d'une stabilité d'emploi grâce à un maillage d'entreprises sur un même territoire.
L'adéquation de cette formule à l'évolution économique et sociale du pays a notamment été soulignée par le Conseil économique et social, qui a jugé dans son avis de novembre 2002 que les groupements d'employeurs étaient bien un outil pour la croissance et l'emploi.
L'amendement propose de parfaire leur fonctionnement en supprimant les seuils d'adhésion. Afin de favoriser le développement des groupements d'employeurs, le législateur a progressivement permis à des entreprises aux effectifs de plus en plus importants de pouvoir adhérer à ces structures. De dix salariés en 1985, le plafond d'effectifs a été relevé à cent en 1987 puis à trois cents en 1993. Depuis l'entrée en vigueur de la loi Aubry II et de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, toute entreprise, quels que soient ses effectifs, peut adhérer à un groupement d'employeurs.
Néanmoins il existe encore une restriction : l'adhésion à un groupement d'employeurs des entreprises et organismes occupant plus de trois cents salariés est subordonnée à la conclusion, dans l'entreprise ou l'organisme concerné, d'un accord collectif ou d'un accord d'établissement définissant les garanties accordées aux salariés du groupement. Cette exigence constitue aujourd'hui un obstacle à l'adhésion des entreprises dont la masse critique permettrait un effet de levier au bénéfice du développement des groupements, et constitue également un obstacle à l'adhésion d'établissements locaux de grands groupes nationaux à des groupements qui pourraient irriguer tout un bassin d'emploi.
J'en donnerai deux exemples. Dans le bassin de Dreux, dans le Centre, le directeur d'un groupement d'employeurs veut faire adhérer à celui-ci des entreprises ou établissements de plus de trois cents salariés – laboratoires pharmaceutiques, entreprises de métallurgie, industries. Cela permettrait la création de quarante CDI en temps plein pour des fonctions de techniciens et surtout d'opérateurs qui le plus souvent sont assurées par accumulation de CDD ou de missions d'intérim. Dans ce cas, la création d'un groupement d'employeurs permettrait, d'une part de « déprécariser » l'emploi de ces opérateurs, et d'autre part de maintenir ces compétences au pays.
En région Nord-Pas-de-Calais, les grandes enseignes de la distribution souhaiteraient s'associer avec les autres enseignes des centres commerciaux pour proposer des postes de caissières, manutentionnaires et caristes. Cela permettrait là encore de créer des CDI temps plein et de « déprécariser » les emplois – je vous rappelle que les emplois de caissières sont souvent des temps partiels morcelés.
La commission des affaires économiques propose donc de supprimer, pour les entreprises de trois cents salariés et plus, l'obligation prévue à l'article L. 127-1-1 du code du travail de conclure un accord d'entreprise ou d'établissement préalablement à l'adhésion au groupement d'employeurs. Il faut noter que ces mêmes entreprises n'ont pas besoin de l'avis des partenaires sociaux pour recourir à l'intérim.
Cette réforme ne doit pas être perçue comme une tentative de limiter le rôle des institutions représentatives du personnel des entreprises adhérentes, d'autant moins que les groupements d'employeurs comptent des délégués syndicaux. Ainsi notre amendement propose également d'obliger ces entreprises à informer les institutions représentatives du personnel de la constitution et de la nature du groupement d'entreprise, dans des conditions identiques à celles actuellement applicables aux entreprises de moins de trois cents salariés.
En outre, les obligations prévues à l'article L. 432-4-1 du code du travail seront modifiées afin d'obliger l'employeur à tenir le comité d'entreprise informé du nombre de salariés mis à disposition par le groupement, ainsi que des motifs l'ayant conduit à recourir à ces personnels.
Sans méconnaître l'intérêt de cet amendement et du suivant, la commission des finances ne les a pas adoptés, suivant en cela une jurisprudence que j'ai évoquée mardi dernier. Le texte étant en effet complexe, la commission a décidé de n'examiner que les amendements qui avaient une relation directe avec ce texte. Or ces amendements relèvent plutôt d'un autre texte qui, je l'espère, sera examiné ultérieurement, et ne concernent pas directement l'article 7.
Le Gouvernement attache une importance toute particulière à ce type de structures, qui sont très intéressantes et auxquelles nous allons consacrer d'autres textes, dans un autre contexte.
Pour les mêmes raisons que celles qu'a évoquées M. le rapporteur général, il ne nous paraît pas souhaitable, en revanche, de modifier un texte du code du travail consacré à la notion de groupement d'employeurs, en raison notamment de la loi du 31 janvier 2007, qui prévoit que toute modification doit d'abord être soumise à concertation avec les organisations syndicales.
Je vous demande donc, monsieur le rapporteur pour avis, de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, le Gouvernement demande son rejet.
Je vous remercie, madame la ministre, de vos explications et de votre promesse. En effet, les groupements d'employeurs représentent un véritable gisement d'emplois, dont il faudra faire sauter les verrous pour qu'ils deviennent une vraie source d'emplois. J'espère qu'un prochain texte nous donnera l'occasion de procéder à une véritable adaptation de ces groupements.
Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement.
Et quel article du règlement a été violé ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Mes chers collègues, un amendement était en discussion, présenté par M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; M. le rapporteur général de la commission des finances, saisie au fond, a émis au nom de la commission un avis défavorable ; Mme la ministre a demandé au rapporteur de retirer l'amendement ; l'amendement a été retiré : nous passons à l'amendement suivant. Il n'y a pas d'incident.
Monsieur le président, je demande une nouvelle fois la parole pour un rappel au règlement.
Je suis saisi d'un amendement n° 111 .
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour le soutenir.
L'amendement n° 111 a pour objet de permettre à des collectivités d'adhérer à des groupements, au-delà de ce qui a déjà été accordé pour des emplois à caractère culturel et touristique.
Je retire cet amendement, dont les dispositions seront réexaminées dans le cadre d'un texte plus complet.
L'amendement n° 321 vise à appliquer aux plus-values réalisées dans le cadre des mécanismes des stock-options, qui représentent souvent des sommes considérables pour leurs bénéficiaires, un prélèvement de 8 %, dans des conditions comparables à celles qui s'appliquent aux prélèvements sociaux. Ce taux est celui qui a été choisi dans le cadre de la loi sur l'épargne salariale. Il est du niveau des prélèvements effectués au titre des cotisations vieillesse.
Cette taxe de 8 % sur les gains des stock-options pourrait alimenter le fonds de réserve pour les retraites, qui s'en trouverait d'autant mieux que son abondement a pris beaucoup de retard.
Avis défavorable. Je rappelle que l'article 4 du projet de loi comble un vide juridique lié aux stock-options. Le risque existait en effet que la plus-value générée lors de la levée de l'option puisse être affectée en franchise d'impôts dans le cadre d'une donation. Il s'agissait réellement là d'une mesure de moralisation.
La disposition proposée ici, qui consiste à quadrupler le taux d'imposition applicable aux plus-values réalisées lors de la levée de stock-options, ne nous paraît pas acceptable. Le Gouvernement souhaite donc que cet amendement soit rejeté.
Monsieur le président, puisque c'est probablement la dernière fois que je prends la parole au cours de cette séance, je tiens à vous remercier, ainsi que tous les présidents de séance. Je remercie également M. le rapporteur général du travail considérable qui a été accompli durant l'examen de ces sept premiers articles. Je remercie aussi les rapporteurs pour avis, MM. Taugourdeau, Tian et Huyghe, M. le président de la commission des finances, tous les parlementaires de la majorité qui ont prêté leur soutien aux débats fort intéressants menés sur ce texte jusqu'à des heures avancées de la nuit et, bien évidemment, les parlementaires de l'opposition, ainsi que les services de l'Assemblée nationale et toutes les équipes qui ont travaillé sur ces sept articles au sein de l'administration, toutes catégories confondues. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Madame la ministre, je vous remercie à mon tour pour votre disponibilité.
Je mets maintenant aux voix l'amendement n° 321 .
(L'amendement n'est pas adopté.)
Monsieur le président, il est regrettable que vous n'ayez pas donné la parole à un orateur de l'opposition qui vous la demandait – car tel était le sens du petit incident qui s'est produit tout à l'heure. Il aurait été intéressant, en effet, que l'opposition puisse s'exprimer sur l'amendement en discussion.
Je suis conscient que nous avons besoin d'avancer dans nos débats et il me semble précisément que ceux-ci se sont déroulés avec une grande sérénité au long de ces derniers jours. Il aurait donc été de bon commerce, comme on dit,…
…que M. Le Bouillonnec puisse s'exprimer au nom de l'opposition. Je vous demande de bien vouloir le reconnaître et de donner la parole à M. Le Bouillonnec. À défaut, je serai dans l'obligation de demander une suspension de séance, qui est de droit.
Monsieur Idiart, tout n'est pas de droit ! Je vous rappelle que l'amendement n° 110 a été retiré et que nous n'avons pas à débattre d'amendements retirés. Cela ne s'est jamais fait et nous n'allons pas commencer aujourd'hui à le faire.
En commission, M. Christian Jacob demandait que l'amendement soit examiné !
Au nom du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, je demande une suspension de séance.
La suspension est de droit. Nous reprendrons la séance dans cinq minutes.
Rappel au règlement
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-deux heures vingt-cinq, est reprise à vingt-deux heures trente.)
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 8.
La parole est àMme Marisol Touraine.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, mes chers collègues, nous abordons donc maintenant la discussion sur le revenu de solidarité active. Je voudrais dire à quel point la mise en place d'un dispositif qui permette de lutter contre la pauvreté des différentes personnes concernées, quel que soit leur âge, leur lieu de vie, leurs conditions de vie, qu'elle travaille ou qu'elle ne travaille pas, nous paraît une impérieuse nécessité. On estime en effet à six ou sept millions de personnes celles qui dans notre pays vivent en situation de pauvreté, ce qui paraît largement incompréhensible alors que nous sommes en train de voter un paquet fiscal sans précédent en faveur des catégories les plus favorisées de notre pays.
Monsieur le haut-commissaire, vous l'avez déjà entendu tout au long de la semaine dernière, mais je tiens à redire que le choc des symboles pèse lourd dans ce dispositif : 13 milliards d'un côté pour une poignée de favorisés,…
…25 millions à peine de l'autre pour 50 000 personnes, celles qui seront concernées par le dispositif d'expérimentation. On ne peut mieux dire à quel point vos priorités, ou celles de votre gouvernement, ne sont pas les nôtres. Et on peut s'interroger, permettez-moi de vous le dire, sur les raisons qui vous ont poussé à accepter, ou à souhaiter, que votre réforme visant à l'instauration d'un revenu de solidarité active soit inscrite dans le projet de loi que nous examinons.
Le dispositif est sans doute intéressant. Je suis convaincue de la nécessité d'accompagner ceux qui sont privés d'emploi vers la reprise d'un travail. Je parle d'accompagnement vers la reprise d'un emploi plutôt que d'incitation car ce dernier terme donne le sentiment que ceux qui seraient aujourd'hui au RMI ou au chômage refuseraient de prendre un emploi pour des raisons de convenance personnelle ou pour des raisons de facilité, alors que l'on sait bien que l'aspiration à la dignité, à l'intégration sociale, pousse ces hommes et ces femmes à rechercher un emploi.
Il n'empêche que le dispositif que vous nous proposez est différent de celui qui nous avait fait rêver, monsieur le haut-commissaire, car nous avions le souvenir de votre rapport, qui se voulait un grand plan de bataille contre toutes les pauvretés dans notre pays, tandis que votre dispositif s'est réduit comme peau de chagrin et ne concerne plus qu'une cinquantaine de milliers de personnes,…
…toutes aujourd'hui titulaires d'un minimum social. Notre première déception, c'est qu'il n'y ait pas précisément de dispositif de lutte contre la pauvreté de ceux qui travaillent, et qui pourtant ne parviennent pas à vivre décemment de leur activité.
Mais d'autres incertitudes pèsent sur votre réforme, incertitudes auxquelles nous aimerions bien avoir des réponses à l'occasion de ce débat.
Celui qui est au RMI et qui recevra un accompagnement fort vers la reprise d'un emploi, c'est celui qui trouvera un emploi à temps partiel. Car il n'y a aucun doute que s'il trouvait un travail à temps plein immédiatement, la question ne se poserait pas : il irait immédiatement vers l'activité. Celui qu'il faut aider et soutenir, c'est celui qui passera d'un RMI à un tiers-temps ou à un deux tiers-temps, à peine plus. Mais cela ne va-t-il pas favoriser le développement du travail à temps partiel, aux frais de l'État, alors que l'on sait qu'aujourd'hui une des sources de pauvreté, c'est le travail à temps partiel non consenti, non voulu, accompli surtout par des femmes, souvent vivant seules ? N'allez-vous pas aggraver cette situation avec votre dispositif ?
Deuxième question : pourquoi ne pas faire financer votre dispositif par la solidarité nationale ? Nous aurons l'occasion d'y revenir sur d'autres articles, mais je souligne que la solidarité envers d'autres catégories de la population, nous l'avons vu tout au long de la semaine écoulée, va être financée sur le budget de l'État, par l'ensemble de la nation, par l'ensemble des Français, alors que la solidarité envers les plus démunis, ceux qui aspirent à retrouver un emploi, sera financée uniquement ou en grande partie par l'aide sociale. Il y a là une forme d'injustice choquante.
Enfin, les éléments dont nous disposons montrent qu'il y a une grande incertitude sur la manière dont ceux qui entreront dans le revenu de solidarité active pourront en sortir. C'est la raison pour laquelle le principe d'une expérimentation, auquel nous avons souscrit puisque de nombreux départements de gauche sont déjà engagés dans ce processus, est absolument nécessaire. Mais, et ce sera ma dernière question : pouvez-vous nous donner la garantie que ceux qui sont entrés dans le dispositif iront jusqu'au bout sous le régime de l'expérimentation avant que vous n'étendiez les dispositions à l'ensemble des publics concernés ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le haut-commissaire, monsieur le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, la mise en place d'un revenu de solidarité active fait suite à une réflexion largement partagée qui tient compte de l'expérience acquise depuis la mise en place du RMI il y a bientôt vingt ans. Il n'est en effet pas possible de laisser tel quel un système où celles et ceux qui reprennent une activité peuvent voir leur revenu stagner, voire diminuer.
Ce qui pose donc aujourd'hui un problème, ce n'est pas tant le RSA lui-même que les zones d'ombre qui existent autour de sa mise en oeuvre et de l'évolution future de l'ensemble des minima sociaux. Nous vous avons largement écouté la semaine dernière, monsieur le haut-commissaire, mais il existe encore quelques questions demeurées sans réponse.
D'abord, il faut tout de même rappeler que vous avez évoqué 25 millions d'euros pour le RSA alors que le paquet fiscal est évalué entre 10 et 14 milliards d'euros. On avait pourtant entendu des estimations, au sein de la commission « Famille, vulnérabilité, pauvreté » que vous présidiez, dans une fourchette de 4 à 8 milliards – moins 2,65 milliards de compensation de la prime pour l'emploi –, alors que vous parlez de 25 millions d'euros ! Nous sommes tout de même devant des chiffres un peu perturbants par rapport aux nécessités que nous constatons tous les jours sur le terrain.
Comme je l'ai dit au début de l'examen de ce texte, il y a 1,2 million d'allocataires du RMI, et le RSA ne pourra concerner qu'une partie d'entre eux car les autres sont trop éloignés de l'emploi. Si votre objectif est de substituer le RSA à l'ensemble des minima sociaux – vous avez parlé d'une réforme, sans doute globale, des minima sociaux l'an prochain – j'exprime donc mon inquiétude. Nous souhaitons que cette expérimentation, qui est prévue pour trois ans, aille au bout de sa logique avant que d'autres réformes soient mises en oeuvre, afin que nous puissions avoir une évaluation parlementaire de ce qui a été réalisé qui nous permette d'aller tous ensemble plus loin. Car le RSA ne peut être un progrès social que s'il n'est pas utilisé par le Gouvernement et sa majorité pour remettre en cause les dispositifs d'aide aux plus fragiles. Je vous l'ai déjà dit, il existe des gens qui resteront éloignés du RSA : que deviennent-ils dans ce dispositif ?
S'agissant des départements, un certain nombre sont volontaires, y compris de gauche, nos amis ont envie de participer à cette expérimentation ; mais nous savons bien, depuis la pratique récente de la décentralisation, en particulier en matière sociale, qu'une forme de confiance est rompue entre l'État et les conseils généraux parce que les compensations financières n'ont pas suivi les transferts de compétence, malgré l'inscription de ce principe dans la Constitution. Nous avons vraiment besoin, pour bien évaluer ce texte, de connaître la compensation financière de l'État, y compris au niveau des moyens humains mis en place par les départements – car l'État doit aussi nous aider sur ce point. Toutes les réformes acceptées par les conseils généraux réclament des moyens supplémentaires qui, au-delà de l'impact de la mesure elle-même, aggravent nos budgets.
Nous avons aussi besoin de sincérité en termes de coût financier, car nous avons des chiffres un peu contradictoires, et que soit pris en compte tous les allocataires de minima sociaux concernés, et pas seulement les plus employables au détriment des autres.
Enfin, il faut que la mise en oeuvre du RSA s'effectue dans le cadre d'emplois au moins à mi-temps afin d'éviter l'effet pervers du temps partiel. Je pense à un secteur que je connais bien, celui de l'aide à domicile, où on voit des temps partiels subis qui ne sont même pas des mi-temps. Il faut éviter cet effet pervers parce que si les conseils généraux se substituent aux employeurs pour créer de l'emploi, cela créera à terme un problème dans ce pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le haut-commissaire, madame la ministre, en 2005, un certain président d'Emmaüs proposait dans un rapport que vient de citerMme Danièle Hoffman-Rispal la mise en oeuvre d'un revenu de solidarité active. Comment ne pas adhérer à un tel objectif ? Plusieurs programmes l'avaient d'ailleurs repris récemment.
Mais l'ambition du Gouvernement étant à terme de faire disparaître le RMI, on peut penser que les allocataires du RMI les plus éloignés de l'emploi seraient renvoyés aux collectivités locales, qui auraient à prendre en charge leurs problèmes de formation, de santé, de logement, de transport. Sans revenu minimum, ces personnes n'auraient plus aucun appui dans leurs efforts pour retrouver une autonomie sociale, hors le soutien des collectivités locales.
Nous en sommes, aujourd'hui, seulement à l'étape de l'expérimentation du RSA, qui ne s'adresse qu'à une fraction du public en situation de pauvreté. Cette version du RSA que, désormais haut-commissaire, vous présentez au nom du Gouvernement, est beaucoup moins ambitieuse que celle du rapport, où elle se situait en complément d'une politique de lutte contre les petits boulots, les contrats précaires, les emplois à temps partiel faiblement rémunérés et n'offrant pas de réelle perspective sociale. On comptabilise 1,3 million de travailleurs pauvres, qui ne sont pas majoritairement d'anciens RMIstes. Beaucoup d'entre eux sont des femmes qui ont des emplois à temps partiel de 20 à 25 heures, et qui se retrouvent en dessous du seuil de pauvreté. Ces personnes seraient les oubliés du RSA et de feu le RMI.
Pourtant, le rapport Hirsch appelait à développer une politique de revalorisation de ces emplois. Or non seulement une telle politique n'est pas évoquée, mais la politique de l'emploi développée par M. Borloo, qui n'est pas contredite par le gouvernement Fillon, va à l'opposé ! Évoquer des fabuleux gisements d'emplois dans les services à la personne en agissant essentiellement par des déductions fiscales pour les particuliers employeurs revient à parler de développement d'emplois à temps partiel contraint, parcellisé, précaire, sans formation, sans perspectives de carrière. Les élus locaux savent bien que ces emplois à domicile ne sont souvent que des expédients permettant la survie au jour le jour du foyer, même si, parfois, ils peuvent les sortir de cette précarité en les embauchant dans leurs effectifs municipaux ; alors même que certains accusaient cet après-midi, pendant le débat d'orientation budgétaire, les collectivités locales de trop embaucher, de trop dépenser !
Bien sûr, à court terme et pour certaines catégories d'allocataires sociaux, le RSA va avoir, espérerons-le, un effet positif. Mais à moyen et à long terme, deux dangers existent qui ne sont pas traités : d'une part, trop d'employeurs, dès lors qu'ils sauront que leurs salariés vont percevoir une allocation leur permettant de franchir le seuil de pauvreté, peuvent ne se sentir plus aucune responsabilité sociale ; d'autre part, les mêmes employeurs, poussés à multiplier les contrats à temps partiel contraint, risquent d'augmenter le nombre de ces emplois.
Où sont, monsieur le haut-commissaire, les mesures visant à accompagner le RSA dans cette politique dynamisée et sécurisée contre le temps partiel contraint, le travail précaire ou discontinu à laquelle appelait à l'époque votre rapport ? Où sont les modalités de pénalisation du temps partiel de petite durée qui devaient être étudiées par le Gouvernement ? Ce sont des motifs d'inquiétude pour les associations qui oeuvrent dans le secteur social et de l'insertion – que vous connaissez bien, monsieur le haut-commissaire ! Ce sont aussi les contradictions et les ambiguïtés que vous avez choisi d'assumer en entrant dans un gouvernement dont les premières décisions en matière fiscale, ainsi que, bientôt, celles concernant la protection sociale, nous amènent à nous demander combien de temps vous pourrez les assumer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Dans la presse, monsieur le haut-commissaire, vous avez déclaré : « Ce système est un complément indispensable de l'objectif plein-emploi du chef de l'État. On va réduire le chômage, mais pas “à la Thatcher” en faisant des travailleurs pauvres » – accusation faite au régime de Thatcher, puis à M. Blair. Mais je crois très sincèrement que vous vous trompez.
Après un paquet fiscal particulièrement bien garni pour les plus riches de ce pays, immédiatement après un article bienveillant sur les parachutes dorés des grands patrons, figurent, coincés en fin de texte, trois articles déclinant le concept du RSA. Quel signal politique fort ! Beau choc fiscal à 13 milliards d'euros : 3,7 milliards pour le nouveau régime des heures supplémentaires, 1,9 milliard au titre du crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt, 950 millions d'euros pour la suppression des droits de succession, 810 millions d'euros pour le bouclier fiscal… et 25 petits millions d'euros pour masquer la pauvreté laborieuse.
Laissons de côté les chiffres, ils parlent d'eux-mêmes, pour nous concentrer sur l'ambition du revenu de solidarité active, défendu par vous-même, monsieur le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.
Comment ne pas adhérer à l'objectif de réduire d'au moins un tiers, en cinq ans, le nombre de pauvres en France ? Mais, s'il y a consensus sur l'exigence de garantir à chacun – et aux bénéficiaires de minima sociaux en particulier – un gain de revenus lors de la reprise d'un emploi, il n'est pas interdit de se demander si l'État ne manifeste pas quelques tendances schizophréniques à intervenir pour compenser les conséquences négatives de ses propres politiques : compléter les revenus de ceux qui peinent à vivre dignement de leur travail, tout en contribuant à enfermer de nombreux ménages dans la pauvreté, en favorisant le développement des bas salaires.
Comme nous aurons l'occasion de le constater, au fil des articles et amendements, le dispositif est perfectible, notamment parce qu'il s'adresse uniquement aux bénéficiaires du RMI et de l'API, et non pas à l'ensemble des personnes à faibles revenus. Il exclut les travailleurs pauvres – rappelons qu'un tiers des SDF travaillent – et les jeunes de moins de 25 ans.
En outre, le RSA n'est pas dénué d'effets pervers pour les « oubliés » – déjà laissés pour compte de la défiscalisation des heures supplémentaires – et les collectivités territoriales.
Au-delà de toutes ces questions touchant aux modalités pratiques du dispositif ouvert à l'expérimentation, il convient d'en apprécier la philosophie dans le cadre, plus général, de la politique de l'emploi voulue par le Président de la République.
Les politiques de l'emploi et de lutte contre la pauvreté ne sauraient être menées indépendamment. Dans son rapport de 2006, le CERC démontre que « le constat statistique est sans ambiguïté, mais aussi sans grande surprise : plus on s'éloigne de l'emploi stable pour se rapprocher des zones d'emploi précaire et flexible ou des alternances entre chômage, emploi et inactivité, plus le risque de pauvreté s'accroît. »
Dans la mesure où l'emploi de qualité reste le premier rempart contre la pauvreté, sécuriser les revenus les plus faibles en favorisant le développement des contrats aidés ou à temps partiel, des emplois dans le secteur des services à la personne et autres petits boulots, à grand renfort d'exonérations de charges sociales, revient à poser un cautère sur une jambe de bois.
Le dogme de l'abaissement du coût du travail, tout comme le refus de revaloriser le salaire minimum, fabriquent de la misère et jouent contre l'amélioration de la qualité de l'emploi.
C'est donc en toute conscience que M. Sarkozy dégrade l'emploi pour les besoins du marché et tente, non pas de réduire les inégalités, mais d'entretenir un volant de travailleurs pauvres, en complétant leurs revenus par des prestations.
J'étais en train de le faire, monsieur le président !
Monsieur le haut-commissaire, vous aviez vous-même indiqué que le RSA devait « s'inscrire dans une politique de l'emploi dynamisée et sécurisée contre le temps partiel contraint, le travail précaire ou discontinu » et que « les modalités de pénalisation du temps à petite durée devaient être étudiées. » Ce sont vos propos.
Manifestement le Gouvernement ne s'engage pas sur cette voie. Dans ces conditions, il est à craindre que vos bonnes intentions ne conduisent, en fait, qu'à renforcer les mécanismes qui construisent la pauvreté et à obliger les bénéficiaires de minima sociaux à reprendre n'importe quel emploi, dans n'importe quelles conditions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le haut-commissaire, à la lumière du long débat que nous avons eu sur ce projet de loi, apparaît votre vision manichéenne des choses chers collègues de la majorité. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) D'un côté quelques milliers de personnes, parées de toutes les vertus et bénéficiant de toute votre attention, auxquelles il faudrait donner encore davantage de liberté pour qu'elles s'enrichissent un peu plus. De l'autre, des personnes stigmatisées, sur le thème de l'oisiveté notamment, ce qui me choque toujours. Pour avoir siégé dans une commission d'insertion locale depuis près de dix ans et en présider une depuis près de quatre ans, je sais que les choses sont un peu plus compliquées que cela.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Parce que nous n'y siégeons pas, nous, peut-être ? On le sait nous aussi !
Je demande à vérifier ! Je voudrais savoir combien d'entre-vous siègent dans les commissions ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Sans doute faut-il voir dans cette présentation, un amalgame qui fait écho à une campagne électorale développée sur le thème de l'assistanat. On tente de faire croire que les bénéficiaires de minima sociaux se complairaient dans une situation confortable. (« Ce n'est pas cela du tout ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Même avec les droits connexes, les exemples généralement évoqués ne constituent pas la majorité, loin s'en faut !
Il conviendrait de s'interroger sur le montant de salaires plutôt que sur celui des minima sociaux. (« Exactement ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Je constate, avec regret, que ce projet de loi et vos décisions concernant l'évolution du SMIC ne vont pas dans ce sens.
Pourtant, les chiffres de l'emploi publiés il y a quelques jours montrent que l'intérim, le temps partiel et les CDD prennent une place grandissante. Il faudra donc que les 1,2 million de bénéficiaires du RMI et les 200 000 allocataires de l'API se contentent des quelques mesures que vous nous proposez au travers de la mise en place du RSA. Du moins les quelque 50 000 à 55 000 personnes qui pourront prétendre à l'expérimentation.
Même si le principe du RSA – assurer l'augmentation des ressources d'une personne bénéficiaire d'un minima social qui prend ou reprend un travail – ne peut être que positif, la mesure donne l'impression de n'être qu'un alibi au coeur d'un projet de loi axé sur la distribution de cadeaux fiscaux aux plus aisés.
Nous nous interrogeons sur la finalité réelle de la mesure, au-delà de la phase d'expérimentation dont on a bien compris qu'elle sera généralisée avant la durée prévue de trois ans. Qu'adviendra-t-il de celles et ceux, très nombreux, qui ne sont pas capables de revenir sur le marché de l'emploi, si la suppression du RMI est l'objectif à atteindre ?
Pourtant, n'est-ce pas le rôle du service public d'offrir une solution à ceux qui pourraient revenir sur le marché de l'emploi ? Or, une nouvelle fois, les collectivités territoriales – et particulièrement les départements – vont être mis à contribution pour participer à cet effort de retour à l'emploi.
Quid des travailleurs pauvres qui étaient au coeur de votre rapport, monsieur le haut-commissaire, et qui sont totalement absents du dispositif que vous proposez ? Vous affirmez ne pas vouloir créer des travailleurs pauvres comme Mme Thatcher. C'est assez exact. Mais vous ne ferez rien pour celles et ceux qui travaillent et qui ne voient pas leur sort s'améliorer par rapport à la situation dans laquelle ils se trouvent lorsqu'ils perçoivent les minima sociaux.
Au total, nous avons le sentiment d'un dispositif qui aurait pu être intéressant, mais qui manque de moyens, de souffle et d'avenir pour ceux qui en ont le plus besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le haut- commissaire, chers collègues, comment ne pas s'accorder sur un projet qui veut réduire la pauvreté dans notre pays ? Nous pouvons, en effet, partager l'objectif qui vise à favoriser la reprise d'emploi et promet que chaque heure travaillée apportera un complément de revenu.
Lorsque l'emploi stable se fait plus rare et que la société française glisse, au fil des années, du salariat à la précarité, selon les termes du sociologue Robert Castel, ce sont les plus fragiles qui se retrouvent les premiers aux marges du marché du travail : les intérimaires, les saisonniers, les vacataires du service public, les jeunes sans formation, les salariés à temps partiel subi.
Aujourd'hui, 7 millions de personnes vivent au-dessous du seuil de pauvreté, mais leur situation s'apprécie en fonction de leurs conditions de logement, de leur lieu d'habitation ou de la composition de leur famille. Ainsi, pour qu'un couple avec enfant dépasse ce seuil, il lui faut disposer d'un SMIC et demi. Parmi ceux qui se trouvent au-dessous du seuil de pauvreté, on compte environ trois millions de travailleurs pauvres. Ce sont souvent des salariés à temps partiel subi, parfois des travailleurs indépendants.
En 2005, à l'issue des travaux de la commission « familles, vulnérabilité, pauvreté », monsieur le haut-commissaire, vous aviez élaboré quinze propositions ou résolutions, dont le RSA. Celui-ci visait tous les travailleurs pauvres, bénéficiaires ou non d'un minimum social, et avait pour ambition de porter tous les revenus au seuil de pauvreté.
Or, dans l'état actuel du texte qui nous est proposé, le RSA semble se résumer à une amélioration de l'intéressement, lequel a déjà été amélioré. Alors, bien des questions se posent encore.
De plus, l'expérimentation crée des inégalités qu'il faudrait rapidement corriger. Inégalité des revenus, tout d'abord. Pour le même nombre d'heures travaillées, les bénéficiaires du RMI ou de l'API vont atteindre le seuil de pauvreté, alors que les travailleurs pauvres non bénéficiaires vont demeurer au-dessous. Variation d'un département à l'autre, ensuite. Il faut apporter des garanties pour le barème monétaire du RSA. Et puis, il y a aussi la non-prise en compte des bénéficiaires du RMI qui créent ou reprennent une activité. Enfin, je crains une césure entre les pauvres qui travaillent et auront droit à un RMI augmenté d'un côté, et ceux qui ne peuvent travailler et resteront au RMI de l'autre.
La mise en place du RSA ne doit pas conduire à un blocage des revalorisations du RMI et de l'API. Nous devons aussi examiner la situation des travailleurs handicapés pour lesquels rien n'est prévu, alors que s'expriment de fortes attentes.
Nous espérons donc obtenir quelques assurances sur ces questions, au cours des débats, car nous sommes convaincus qu'il est important et indispensable d'avancer sur ce sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, je voudrais revenir sur le financement du RSA, pour appuyer les interventions précédentes. Ces derniers temps, nous avons assisté à une grand-messe...
…et à une distribution des indulgences aux plus riches des Français. Mais maintenant qu'elle est dite, on jette trois francs six sous aux plus nécessiteux.
D'ailleurs, au point où nous en sommes, monsieur le haut-commissaire, pourquoi trois francs six sous alors que six sous suffiraient ? Voilà le message que vous nous avez adressé en commission lorsque, constatant que le coût de l'expérimentation serait voisin de 50 à 60 millions d'euros, vous nous avez indiqué que vous auriez pu demander plus, mais qu'il fallait se montrer responsable et ne pas grever les finances de l'État, raison pour laquelle vous n'avez demandé que 50 % de la somme.
Il est vrai que demander 50 millions au lieu de 25 aurait été indélicat au moment où des milliards d'euros vont passent dans les poches de quelques-uns.
En 1968, un slogan courait sur toutes les lèvres : « Soyez réalistes, demandez l'impossible ! » Or, vous ne demandez même pas le possible ! Probablement parce qu'il ne s'agit que de nécessiteux, de sans-voix, de sans-travail.
Pourtant, M. Nicolas Sarkozy, ardent pourfendeur de l'esprit de mai 1968, n'affirmait-il pas pendant sa campagne : « Ensemble, tout devient possible » ? N'est-ce pas la déclinaison du slogan de mai 1968 ? Alors, ne demandez pas l'impossible, monsieur le haut-commissaire, mais tout simplement la possible version Sarkozy !
Mais le Gouvernement que vous servez n'applique ce slogan qu'aux plus riches. L'incroyable devient loi : pas assez d'argent pour les plus modestes, mais toujours plus pour les plus riches.
C'est pourquoi, monsieur le haut-commissaire, il importe, pour mettre un peu de morale dans ce texte, que vous réclamiez le coût exact de votre loi, sans en appeler au financement des conseils généraux. Vous allez me rétorquer : les conseils généraux vont dépenser plus aujourd'hui pour dépenser moins demain.
Cette chanson sur l'air de « Demain, on rasera gratis », le Gouvernement que vous servez nous l'a déjà chantée avec le RMI. Résultat : l'État doit la bagatelle de plus d'un milliard d'euros aux conseils généraux. Vous conviendrez qu'il se passera beaucoup de temps avant que les conseils généraux récupèrent cette somme grâce aux économies réalisées, demain, grâce au RSA.
C'est pourquoi, au nom de l'équité et de la morale, je vous exhorte à être responsable : ne demandez l'impossible, seulement le juste prix de votre expérimentation. Pas un sou de plus.
Merci, monsieur le haut-commissaire, de me rassurer sur ce point ; merci de ne pas être seulement le « bouche-trou » social à cinquante pour cent de cette loi inique ; soyez ce « bouche-trou », puisque les choses sont ainsi, mais au moins soyez-le à cent pour cent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur quelques bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le haut-commissaire, face au revenu de solidarité active, on est partagé entre plusieurs sentiments et tentations, entre déception et interrogation.
Je voudrais d'abord soulever un problème de principe. Comme je l'ai déjà dit, la présence du RSA à la fin de ce projet de loi a quelque chose d'incongru et même d'indécent : on dirait que ce gouvernement de droite se donne bonne conscience à bon marché en accolant à un lot ahurissant de cadeaux fiscaux pour les privilégiés de notre pays quatre articles dédiés à la pauvreté et aux bonnes oeuvres, le tout pour le coût astronomique de… 25 millions d'euros – à rapporter aux milliards d'euros pour les cadeaux que j'évoquais.
Je me garderai de toute caricature (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) : ce qui touche à la misère exige de la mesure.
De la mesure et de la décence, à commencer, mes chers collègues, par celle qui consiste à nous écouter.
Vous avez dit, monsieur le haut-commissaire, que vous portiez depuis dix ans le projet visant à mieux placer le curseur entre avantages et inconvénients, entre l'inconfort du RMI et les minima sociaux d'un côté et la réinsertion dans le travail de l'autre. Le risque est en effet de n'en prendre aucun : insensiblement, le RMI est devenu, pour près de deux tiers de ses bénéficiaires, le « RMS » – revenu minimum de survie. Vous tendez quelques perches à ces derniers : c'est bien, mais ce serait mieux encore si vous répondiez aux quatre questions précises que je veux vous poser.
Tout d'abord, estimez-vous logique que ce gouvernement ne consacre que 25 millions d'euros à une mesure moins médiatique et moins coûteuse que le bouclier fiscal, et pourtant plus liée au slogan « travailler plus pour gagner plus », lequel n'a plus guère de sens aujourd'hui ?
Deuxième question : avez-vous subi des arbitrages défavorables ayant raboté les moyens correspondant non pas à vos ambitions personnelles mais à celles de votre projet ?
Troisièmement, le RSA n'est-il pas trop calibré pour celles et ceux qui sont déjà les mieux placés pour prendre ou reprendre un emploi ?
Enfin, ce projet porte-t-il ou non en lui un risque – pour ne pas dire un poison –, à savoir la suppression du RMI, puisque l'on peut en prêter l'intention à un pouvoir ayant clairement choisi son camp social avec ce paquet fiscal ?
Je voudrais pour terminer évoquer devant vous, pour prendre date, un projet datant de 2002, année de notre défaite à l'élection présidentielle. Celui-ci prévoyait qu'une politique sociale ambitieuse et dynamique, celle dont devraient bénéficier les citoyens aujourd'hui visés par le RSA, devait inverser l'ordre des priorités : ce projet, le TMG – travail minimum garanti – consistait, en cohérence avec la Constitution, à donner un véritable emploi et un revenu au lieu d'un revenu de survie et d'un emploi hypothétique. Ce en quoi nous n'avons rien inventé, monsieur le haut-commissaire : un Chinois a dit un jour qu'il valait mieux, pour nourrir un homme, lui apprendre à pêcher que de lui donner des poissons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Je voudrais pour commencer vous dire, madame la ministre et monsieur le haut-commissaire, que nous soutenons l'idée du revenu de solidarité active. Sans doute vous souvenez-vous que Dominique Voynet, en tant que candidate des Verts à l'élection présidentielle, avait repris cette proposition dans son projet, de même que Ségolène Royal par la suite. La conversion de Nicolas Sarkozy nous paraît plus récente, mais enfin, mieux vaut tard que jamais !
La mesure nous paraît intéressante dans la mesure où elle permet peut-être de sortir, du moins l'espérons-nous, d'une conception un peu binaire entre, d'un côté, le travail – terme que l'on a tant « tartiné » à la droite de cet hémicycle – et de l'autre les minima sociaux, trop souvent brocardés. Je vous le dis donc clairement, monsieur le haut-commissaire : nous n'accepterions pas que le revenu de solidarité active serve de prétexte pour supprimer ou réduire les revenus de solidarité – j'insiste sur ce terme car, pour notre part, nous refusons de les assimiler à de l'assistanat. Ce n'est pas parce que les minima sociaux ou les allocations familiales seraient trop élevés que les personnes concernées ne retrouvent pas de travail : c'est d'abord parce qu'il n'y a pas d'emplois créés et que les salaires sont souvent trop bas.
Je veux vous dire à cette occasion que nous serons très vigilants au sujet des contrats de travail à temps partiel. Nous ne les contestons pas par principe : certaines personnes les choisissent et il arrive que des entreprises aient de vraies raisons de les proposer. Toutefois, malgré les efforts que nous avons déployés la semaine dernière, nous ne sommes pas parvenus à convaincre nos collègues de la majorité que beaucoup d'entreprises en abusaient et en faisaient un usage systématique, sans que l'organisation de leur production ne le justifie.
Nous attendons donc des garanties pour que le RSA n'ait pas d'effets pervers s'agissant du temps partiel imposé. Nous sommes d'accord pour l'expérimenter et serons à vos côtés. Je me permets de vous le dire, monsieur le haut-commissaire : je pense que vous aurez besoin de notre soutien. Lorsque l'on voit le budget alloué à cette mesure, on a franchement l'impression qu'il représente une goutte d'eau dans le projet de loi.
Je termine par une comparaison, monsieur le président : d'un côté, 25 millions d'euros pour la mise en oeuvre du RSA et 7 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté dans notre pays ; de l'autre, grâce à un article du présent texte, un chèque de 250 000 euros au titre du bouclier fiscal octroyé à 1 081 contribuables. Je tenais à rappeler ces chiffres quelque peu choquants.
Nous voterons donc les articles relatifs au RSA, mais nous attendons par ailleurs un vrai plan de lutte contre la pauvreté, dont nous comprenons bien, monsieur le haut-commissaire, que vous ne puissiez le présenter tout de suite. Nous n'en serons pas moins très vigilants et offensifs sur le sujet. Comprenez aussi que, pour vous soutenir, nous avons à surmonter certaines préventions, pour ne pas dire un haut-le-coeur : lorsqu'on lit, dans le magazine Marianne de cette semaine… (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Voici donc ce qu'a déclaré M. Myard : « 30 % [de réduction sur l'ISF], c'est une sucette pour les députés. Moi j'ai déposé un amendement de suppression totale. Mais cela va dans le bon sens. La porte est enfin ouverte grâce à deux disparitions, celle de Chirac de l'Élysée et celle de l'abbé Pierre de ce monde ». (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La parole est à M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.
haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. J'ai bien entendu, mesdames et messieurs les députés, l'expression de votre soutien – la dernière intervention en témoignait – et votre volonté que nous soyons fidèles à ce qui a été élaboré dès 2005. Il serait d'ailleurs paradoxal que les premiers pas franchis dans le cadre de l'expérimentation nous éloignent de l'objectif fixé. Celle-ci, bien au contraire, nous permet de tirer au plus vite des enseignements pour l'ensemble du rapport. Ce n'est pas seulement un jugement personnel : le symbole que vous évoquiez se trouve dans le fait que, dans la lettre de mission que m'ont adressée le Président de la République et le Premier ministre est affirmé l'objectif de réduction de la pauvreté que l'on a eu tant de mal à faire entrer dans la campagne électorale. Le symbole est que soit pris l'engagement de réduire la pauvreté de 30 % au terme de ce quinquennat.
Loin d'être pris à la légère, cet engagement s'articule selon deux priorités : d'une part la possibilité de donner un travail à ceux qui en sont privés ; de l'autre l'éducation, c'est-à-dire la formation et la qualification.
Voilà ce qui est mis en avant : ne l'oublions pas. Les débats ayant été vifs, sans doute n'avez-vous pas encore eu le temps de lire cette lettre, mais vous pourrez constater que la notion de travailleur pauvre y figure en bonne place. Les objectifs définis sont donc conformes à ce que nous pouvions attendre.
Nous devons maintenant avancer. Vous m'avez interpellé sur le symbole et le statut du RSA dans le projet de loi. Mais le symbole est précisément que, dans le premier texte de cette législature figurent des dispositions intéressant les allocataires du RMI et les bénéficiaires de l'API ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Qu'auriez-vous dit si cela n'avait pas été le cas ? La lutte contre la pauvreté exige de prendre des risques, et celui que nous avons pris est précisément d'ouvrir le débat que nous avons : si le présent texte ne contenait aucune disposition pour lutter contre la pauvreté, ce débat n'aurait par définition pas lieu !
Il aurait été tellement plus simple de ne rien faire ! Mais nous ne pouvions pas perdre de temps : demandez aux allocataires du RMI et à tous ceux qui ne parviennent pas à retrouver un travail ce qu'ils en pensent !
Et surtout, nous connaissions les limites auxquelles se heurtaient tous les conseils généraux, de droite comme de gauche, qui s'étaient lancés dans l'expérimentation alors même que l'État n'avait pas déboursé un centime pour les aider : plusieurs d'entre vous, sur tous les bancs de cet hémicycle, savent qu'il fallait faire vite, que chaque mois de retard compromettait le projet ainsi que l'ensemble de ses objectifs, notamment ceux qui concernent les travailleurs pauvres.
Vous vous demandez si les expérimentations vont créer de nouvelles inégalités. Mais il faut assumer notre démarche ! On s'est beaucoup interrogé au cours de ces derniers mois : faut-il agir tout de suite ou vérifier d'abord que le système fonctionne ? Mais poser la question, c'est déjà répondre aux effets pervers que vous redoutez ! Brûler les étapes, c'est précisément s'exposer à de tels effets sans pouvoir y remédier.
Premier effet pervers possible, sans doute le pire : malgré les bonnes intentions, le dispositif accroît la précarité et le travail à temps partiel. Eh bien c'est justement pour vérifier qu'il permet de créer de vrais emplois que nous le mettons en oeuvre progressivement. Second effet pervers envisageable, que nous n'avons que trop connu : un texte à vocation sociale que l'on juge par son coût au lieu de percevoir les bénéfices que peuvent en tirer les personnes concernées.
Le vrai problème, c'est qu'il n'y a pas de croissance ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous avez souligné que les marches qui comptent sont celles à venir, et vous m'avez promis un soutien que je ne considère pas comme un vain mot. Or ce qui nous permettra de franchir la prochaine marche est le travail engagé dès cette année. Comment pourrons-nous convaincre qu'il faut aller plus loin et consentir davantage de moyens, comment pourrons-nous convaincre que ce programme fait reculer la pauvreté, sinon par les résultats des programmes expérimentaux ? (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est parce que vous vous serez investis dans cette action – et je sais pouvoir compter sur vous – que nous pourrons nous appuyer sur des résultats, montrer les courbes décroissantes des personnes en difficulté ou aujourd'hui enfermées dans des dispositifs inadaptés, témoigner qu'il y a davantage de personnes qui vivent de leur travail et peuvent sortir des trappes à pauvreté ou à inactivité. C'est ensemble que nous prouverons aux argentiers qu'il faut y aller ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
L'État va-t-il de se défausser de son devoir de solidarité ? Si nous réussissons, au cours des prochains mois, à simplifier un dispositif complexe, reposant sur différents minima sociaux, nous entamerons des discussions avec les départements, qui choisiront soit de le piloter, soit d'en laisser la charge à l'État. Nous aborderons ce débat sans idée préconçue, en recherchant avant tout l'intérêt des publics concernés. Et nous y parviendrons. Nous verrons bien, alors, comment articuler solidarités locales et nationales pour obtenir une efficacité maximale.
Un dernier point me tient particulièrement à coeur : vous nous soupçonnez de vouloir réserver le RSA à certains, en oubliant tous les autres. Affirmer cela, c'est d'abord avoir mal lu le rapport ; c'est, ensuite, mal me connaître ; c'est, enfin, avoir une vision trop restrictive du revenu de solidarité active. Non, celui-ci n'est pas limité à la crème des allocataires du RMI !
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Si, c'est un peu cela quand même !
Non ! Ne vous méprenez pas sur ce que j'ai dit. La substitution du RSA au RMI a au contraire pour but d'éviter un système à deux vitesses.
En aucun cas il n'y aura le RMI pour les condamnés à vie à l'assistance, et le RSA pour les autres ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) C'est exactement l'inverse ! Tel était l'objet de nos discussions avec les associations et les syndicats que vous citiez, ainsi qu'avec les collectivités : il faut mettre en place un dispositif unique pour éviter de condamner pendant vingt ans à de « l'occupationnel » les exclus du système. J'en suis convaincu : les personnes que l'on juge les plus éloignées de l'emploi sont susceptibles de retravailler dès lors que la solidarité nationale ne les abandonne pas ! (« Tout à fait ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Bien sûr, nous trouverons des employeurs, grâce à l'économie solidaire, à l'économie sociale, aux entreprises d'insertion !
Ce n'est pas une vue de l'esprit, mais une réalité ! J'étais ce matin à Grenoble, où trente entreprises – que M. Migaud connaît bien – participent au dispositif « 100 chances – 100 emplois » qui permet à des personnes qui semblaient condamnées de retrouver un travail. Et l'on dirait à ces personnes, que de nombreuses entreprises aident à retrouver leur dignité, qu'elles n'ont plus aucune valeur et ne méritent aucune estime ?
Notre ambition est de ne pas condamner ces personnes et de les réinsérer par un vrai travail, un vrai emploi et un vrai salaire, quitte à le compléter, s'il est insuffisant, par la solidarité nationale et locale, afin de ne pas créer de nouveaux travailleurs pauvres.
Le projet de loi auquel nous travaillons et sur lequel nous reviendrons au cours de l'année a pour ambition – je l'assume – de faire en sorte que l'objectif de plein-emploi soit atteint, et le nombre de travailleurs pauvres moins important qu'aujourd'hui. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je suis saisi d'un amendement n° 133 .
La parole est à M. Roland Muzeau, pour le soutenir.
Cet amendement résulte de notre volonté d'une véritable rupture dans le traitement traditionnel de la pauvreté, qui représente un véritable échec – sur ce point, au moins, nous sommes d'accord avec M. le haut-commissaire.
Cette rupture doit se traduire par des actes et pas seulement par des mots, car il s'agit des conditions d'existence de plusieurs millions de personnes en France, autant que de la compétitivité de nos entreprises.
Le développement de l'emploi dépend en premier lieu du dynamisme de l'activité économique et de la façon dont la France et l'Union européenne font face aux contraintes extérieures résultant de la mondialisation ultra libérale. Depuis trop longtemps, les partisans du libéralisme soutiennent que le travail est d'abord un coût, que la recherche et la formation initiale et continue sont trop coûteuses et que l'on ne peut quasiment rien faire contre le dumping économique et social, les licenciements boursiers ou les OPA. On nous a pourtant affirmé, dans les années soixante-dix et quatre-vingt, que les licenciements d'aujourd'hui préparaient les emplois de demain. On a vu où cela nous a menés : plus de deux millions de chômeurs de moins en moins bien indemnisés, plus d'un million de bénéficiaires du RMI, de l'ASS, de l'API ou de l'AAH, et près de quatre millions de « travailleurs pauvres » !
Le phénomène des travailleurs pauvres est d'abord apparu en Grande-Bretagne sous l'effet des politiques de Mme Thatcher et de M. Blair. Pour l'anniversaire de ses dix ans de pouvoir, la presse a fait le bilan de M. Blair : un taux de chômage relativement modeste, mais des taux d'emplois précaires et de pauvreté extrêmement élevés, puisque 13 millions d'Anglais vivent en dessous du seuil de pauvreté.
Nous ne saurions condamner le RSA mais, il ne faut pas se leurrer, il ne modifiera qu'à la marge la situation des plus démunis. Nous doutons également – mais nous espérons nous tromper – de son influence sur le comportement des entreprises, sans lesquelles aucun recrutement n'est possible. Il faudrait une véritable révolution parmi les entrepreneurs. Or, ils en sont loin !
Par cet amendement, nous proposons de mettre en place à destination de l'ensemble des salariés un droit individuel à une sécurité effective de l'emploi et de la formation tout au long de leur vie professionnelle. Cela n'a strictement rien à voir avec les déclarations du candidat Sarkozy et du Président de la République, ni avec celles du Premier ministre, qui ont pour projet d'instaurer le contrat de travail unique en fragilisant et en précarisant le CDI.
Certaines de nos propositions n'ont pu figurer dans cet amendement, l'article 40 de la Constitution interdisant aux parlementaires de déposer des amendements générant des dépenses publiques, mais nous souhaitons vivement que les minima sociaux soient fortement augmentés et le SMIC porté à 1 500 euros. C'est la première des conditions nécessaires pour lutter contre la pauvreté en augmentant le pouvoir d'achat et en relançant efficacement l'économie.
Cet amendement vise également à initier un processus légal de consultation des partenaires sociaux lorsqu'il s'agit de dynamiser l'économie par le pouvoir d'achat – mais sur ce point, les discussions n'avancent guère – et à durcir les modalités de licenciement des salariés, aujourd'hui bien trop laxistes. Car, contrairement à ce que dicte la philosophie qui anime le Gouvernement, ce n'est pas en facilitant les licenciements que l'on favorise les embauches.
J'étais en train de le faire, monsieur le président. Vous devinez toujours mes pensées ! (Sourires.)
Les paragraphes suivants ont pour objectif de dissuader les actionnaires et les dirigeants des grandes entreprises de pratiquer des licenciements boursiers qui défrayent régulièrement la chronique en jetant à la rue des milliers de salariés qui, plusieurs années après, n'ont toujours pas retrouvé de travail – songeons à la souffrance des anciens salariés de Moulinex.
Vous voyez, monsieur le haut-commissaire, que nous ne manquons pas de propositions susceptibles de se substituer à celles, très insuffisantes, du Gouvernement.
La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, saisie pour avis.
rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Même avis : il s'agit en effet d'un amendement fourre-tout, qui reprend l'ensemble de vos propositions.
Vous y citez Tony Blair et un ensemble de dispositions sur le licenciement économique qui n'ont rien à voir avec le RSA. C'est pourquoi la commission des affaires culturelles vous propose de rejeter cet amendement.
Parmi tous ses inconvénients, cet amendement propose de supprimer le RSA : vous ne serez donc pas surpris que l'avis du Gouvernement soit défavorable. (Rires.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Non !
J'ai noté que les députés de l'opposition ne s'étaient pas manifestés contre l'article. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le président, nous souhaitons que notre débat se déroule dans de bonnes conditions. Il est inutile, vous l'avez vu, de vouloir précipiter la discussion. Au contraire, cela provoque des incidents de séance. Je ne vous demande pas une nouvelle suspension de séance, mais faites les choses comme il faut !
Je ne mets nullement en cause la présidence, mais s'agissant de l'article 8, je rappelle que les députés socialistes, s'ils sont d'accord sur le principe du RSA, condamnent la méthode et les conditions d'application, qui sont très éloignées, contrairement à ce qu'a dit M. le haut-commissaire, du rapport Hirsch. Je vous rappelle que Ségolène Royal et Dominique Voynet se sont prononcées en faveur du RSA au cours de la campagne pour l'élection présidentielle. Nous sommes donc cohérents. Nous voulons que cette discussion se poursuive, mais je tenais à préciser pourquoi le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche s'abstient sur l'article 8, afin que cela figure au Journal officiel. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine s'abstient également !
Monsieur le président Ayrault, vous savez que lors d'un vote à main levée, il est de pratique constante de ne jamais compter les abstentions. Mais je prends acte de votre mise au point et les choses sont maintenant claires.
On peut aussi demander un scrutin public ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je suis saisi d'un amendement n° 440 , portant article additionnel après l'article 8.
La parole est à M. François de Rugy, pour le soutenir.
Monsieur le haut- commissaire, si nous sommes favorables au RSA, nous considérons – je l'ai déjà dit – qu'il est nécessaire de mettre en place des garanties et des garde-fous pour éviter le recours abusif au temps partiel. Pour lutter contre l'existence de travailleurs pauvres, il faut que tous les salariés qui le souhaitent puissent travailler à temps partiel. On en est loin car, comme pour les heures supplémentaires, on ne leur en laisse souvent pas le choix. Mais soyons pragmatiques : nous proposons une modeste garantie, à savoir la contribution des employeurs qui auraient recours abusivement au temps partiel au fonds de solidarité créé par l'article 1er de la loi du 4 novembre 1982 et récemment étendu à l'allocation spécifique de solidarité, à l'allocation forfaitaire de rupture d'un CNE et à la prime de retour à l'emploi. Tel est l'objet de cet amendement.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Avis défavorable.
Votre amendement, monsieur de Rugy, vise à créer une taxe supplémentaire pour les entreprises, en l'espèce pour celles qui embauchent des salariés à temps partiel. Votre raisonnement, qui ne me semble guère subtil, consiste à encourager encore davantage le recours aux heures supplémentaires des salariés. En outre, cet amendement n'a rien à voir avec le RSA.
Un comité d'évaluation assurera le suivi des expérimentations et cherchera à déterminer si celles-ci conduisent à une augmentation du recours au temps partiel. Je puis vous garantir que cette variable sera prise en compte et qu'elle constituera un critère important de l'évaluation. Cela nous permettra de voir s'il est possible de mettre en place les mécanismes aptes à endiguer le risque que vous avez souligné.
Je suis pour ma part convaincu que, de même que l'on réussira à faire accéder les personnes dépourvues d'emploi à une première étape dans l'emploi. De même, les salariés à temps partiel parviendront à passer à temps plein. Mais cette conviction doit être mise à l'épreuve de l'expérimentation. C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Sur l'article 9, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à M. Marcel Rogemont.
J'ai bien compris que le revenu de solidarité active s'adressait aux seules personnes relevant du RMI ou de l'API, et non aux travailleurs pauvres. J'ai également compris que le texte qui instaure le RSA vise presque uniquement à qualifier l'intervention publique auprès de ces personnes. Le dispositif du RSA intervient dans le champ économique, mais on ne parle pas assez du contexte dans lequel on l'appliquera dans les entreprises. Parmi les nombreuses questions qui se posent, permettez-moi d'en poser deux.
Imaginons un employeur qui embauche pour quinze heures une personne relevant du RMI, la faisant ainsi entrer dans le dispositif du RSA. Pourquoi lui accorderait-il une augmentation de salaire ? L'impact de cette augmentation semblera modeste au salarié compte tenu de la garantie de ressources offerte par le RSA. De même, pourquoi l'employeur lui proposerait-il une heure ou deux de travail en plus lorsque cette augmentation du temps de travail n'aura que peu d'impact pour la personne qu'il emploie compte tenu de la garantie de ressources qu'offre le RSA ? Autrement dit, le RSA crée une trappe à travail très incomplet et mal rémunéré.
Imaginons maintenant une personne travaillant actuellement quinze ou vingt heures dans cette même entreprise. Elle va voir arriver quelqu'un qui travaille le même temps qu'elle, mais qui, relevant du RSA, aura des ressources supérieures aux siennes.
Comment pourrait-t-elle comprendre qu'une personne gagne plus qu'elle au seul motif qu'elle est passée par la case RMI ?
Vous devriez le comprendre : quelqu'un qui travaille à temps incomplet sera « contraint » – le terme n'est sans doute pas approprié ! – de passer par la case RMI pour bénéficier du RSA, et donc, de ressources supplémentaires. Bref, n'est-on pas en train de créer un effet d'aubaine, qui risque d'attirer vers le RMI des personnes qui n'auraient jamais pensé y recourir ? N'êtes-vous pas en train de créer une catégorie de travailleurs pauvres, et qui le resteront ? Pis encore, c'est aux conseils généraux qu'on va faire supporter le poids de tout cela, en leur laissant le soin de financer le dispositif ! Pouvez-vous, monsieur le haut-commissaire, me rassurer sur ce point ?
Par ailleurs, je reviens sur l'un de vos propos. Vous souhaitez que le RSA remplace le RMI. Or, dans le département dont je suis l'élu, l'Agence des solidarités nouvelles nous a dit que seuls 20 à 30 % des allocataires du RMI pourraient bénéficier du RSA. Que va-t-on faire des 70 % restants ? Soyons sérieux ! Nombre d'allocataires du RMI sont trop éloignés de l'emploi, simplement parce qu'ils n'ont jamais été employés.
Nous espérons tous que chacun puisse trouver un travail – nous sommes tous d'accord, que nous soyons de droite ou de gauche.
Actuellement, nous parvenons à aider certaines personnes, qui sont un peu moins éloignées de l'emploi, par le biais des chantiers d'insertion. Je précise au passage, monsieur le haut-commissaire, que, dans mon département, l'État a réduit le financement de ces chantiers et que le conseil général doit désormais compenser.
Bref, en généralisant le RSA, qui va renforcer le RMI, vous créez des problèmes nouveaux auxquels nous n'avons pas réfléchi. Vous dites qu'une expérimentation sera menée, mais il faut qu'elle aille jusqu'à son terme !
L'article 9 est extrêmement important, puisqu'il prévoit les conditions effectives de la mise en oeuvre du RSA, ainsi que, dans son libellé, la question du cofinancement par l'État et les conseils généraux. Les relations entre eux se sont notoirement dégradées ces dernières années et, comme l'a rappelé Marcel Rogemont, la charge du RMI s'est aggravée d'un milliard depuis le transfert de compétence.
S'ajoute à cela – et l'on a tendance à l'oublier – le surcoût des contrats d'avenir, qui avaient fait l'objet l'an dernier d'une négociation avec le ministre Jean-Louis Borloo, lequel avait donné son accord pour une participation de l'État à hauteur de 12 %. Nous n'en entendons plus parler aujourd'hui, alors que les contrats d'avenir sont un des outils qui ont contribué à réduire, au moins arithmétiquement, le nombre de demandeurs d'emploi.
La question des conditions du cofinancement par l'État et les conseils généraux est donc extrêmement importante. Or le texte ne précise pas qu'il sera assuré à 50 % par l'État. L'alinéa 5 indique seulement que la convention « peut prévoir » la prise en charge par l'État d'une partie du coût de l'expérimentation mentionnée au présent article, et cela dans le cadre de la loi de finances pour 2007. Si l'État dispose véritablement de ces 25 millions, pourquoi tant d'hésitations dans le libellé de cet article ?
Puisque le coût de cette expérimentation est de 50 millions d'euros et qu'il ressort de nos débats que vous n'êtes pas à quelques millions d'euros près, nous considérons qu'il relève de la responsabilité de l'État de financer cette expérimentation pour, ensuite, en faire l'analyse et la pérenniser si les résultats sont satisfaisants.
Je souhaite revenir sur les rapports, qui promettent d'être assez tumultueux, entre l'État et les conseils généraux ! Qu'il me soit permis de regretter deux choses !
Premièrement, cette majorité a une fâcheuse tendance à lancer des projets de grande envergure financière, sans engager de concertation approfondie avec les collectivités territoriales concernées (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)…
…puis à leur imposer de les financer, partiellement ou totalement. L'État s'attribue ainsi le rôle, parfait, de celui qui décide, mais qui fait payer les autres !
Deuxièmement, comme d'habitude, votre texte est ambigu sur les conditions de financement dont vient de parler M. Sirugue. Pour le RSA, vous avez dit que l'État financerait à hauteur de 50 %, mais ce n'est écrit nulle part… Le cinquième alinéa de l'article 9 indique que l'État « peut » prendre en charge une partie du coût de la mesure. C'est à la fois du Raffarin et du Copé dans le texte ! Le troisième alinéa de l'article 10 prévoit le financement de l'État, comme pour l'API. Nous aimerions avoir quelques éclaircissements…
Nous n'en faisons pas un principe, comme l'a rappelé le président Ayrault, mais il est préoccupant de faire payer par le contribuable, l'État ou les collectivités, une incitation financière, parce qu'il est avéré que le revenu tiré du travail est parfois inférieur au revenu d'existence accordé par la solidarité nationale. Le RSA fonctionnera comme une subvention aux employeurs, pour ne fournir que des « petits boulots » à temps partiel et très mal rémunérés.
C'est très différent du RMA, des contrats d'avenir ou autres contrats aidés, qui visaient à mettre le pied à l'étrier à des publics ciblés auprès d'employeurs potentiels qui, a priori et sans ces dispositifs, n'avaient pas besoin d'embaucher de nouveaux salariés. Or, avec le RSA, on va financer une partie du salaire à la charge de l'employeur pour un salarié dont il a besoin. Cela pose la question de la valeur minimale du revenu d'activité, et donc, du niveau du SMIC. L'allocation de solidarité est trop élevée, voire dissuasive, et, comme le Gouvernement et sa majorité n'ont pas le courage politique de le dire clairement, en proposant de réduire les minima sociaux, il invente cette solution alternative, qui sera rapidement à la charge des collectivités locales et qui consiste à faire payer par celles-ci un complément de rémunération.
Pour conclure, la question de fond qui se pose est celle-ci : doit-on faciliter le travail à temps partiel, sous-payé par l'employeur, complété par une allocation versée par la collectivité publique ? Ou faut-il revaloriser le revenu minimum du travail et revoir les dispositions des minima sociaux pour éviter les effets de seuil ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Nous en arrivons à l'examen des amendements à l'article 9.
Je suis saisi d'un amendement n° 14 .
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, pour soutenir cet amendement.
Il s'agit d'un amendement de précision visant à faire apparaître explicitement la durée de l'expérimentation, soit trois ans.
Favorable.
Mais permettez-moi de revenir sur ce qui vient d'être dit. Je veux tordre le cou à l'idée selon laquelle nous aggraverions la situation. Je citerai des chiffres précis qui reflètent la situation actuelle.
Prenons le cas d'une personne seule sans enfants qui travaille à quart de temps et qui, entre ce qui lui reste du RMI et ses revenus du travail, est à 759 euros. Dans le système actuel, si elle passe à mi-temps, elle va gagner 839 euros, soit 80 euros de plus. Dans le dispositif que nous proposons – et si vous votez ce texte, l'État l'appliquera au moins à l'API et le proposera aux départements – elle passera de 809 euros à quart de temps à 940 euros à mi-temps, soit un gain de 131 euros.
En passant du quart de temps à mi-temps, elle gagnera donc plus qu'aujourd'hui.
Par ailleurs, vous vous interrogez sur l'effet du RSA sur la disposition de l'employeur à augmenter le salaire. Mais quelle est donc l'incitation de l'employeur à l'augmenter quand tout est absorbé par la baisse du RMI ?
Je tenais à revenir sur ce point, parce que vous m'avez interrogé.
Il diminue, pourtant.
Par ailleurs, M. Sirugue est revenu à juste titre sur l'engagement du ministre de la cohésion sociale relatif à la prise en charge par l'État, à hauteur de 12 %, des contrats d'avenir. Que M. Sirugue, qui s'est étonné de ne plus en entendre parler de ce dispositif, se rassure : il en sera de nouveau question le 1er octobre.
À cette date, en effet, le ministre sera en mesure de le mettre en place.
Bien sûr ! Et vous observerez que, pour ma part, je ne mets pas en cause votre sincérité sur ces questions. Je sais, en effet, pour connaître tel ou tel, que tous les députés, quel que soit le groupe auquel ils appartiennent, souhaitent qu'on améliore la situation des personnes visées par ce texte. C'est pour cette raison que je leur fais confiance.
À cette fin, nous consentirons tous les efforts pour réussir, tenir nos engagements et mettre en place la compensation dès le mois d'octobre.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement a émis un avis favorable sur l'amendement n° 14 .
Je suis saisi d'un amendement n° 94 .
La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.
Avis favorable.
Je suis saisi d'un amendement n° 329 .
La parole est à M. Gérard Bapt, pour le soutenir.
Cet amendement vise à modifier le délai au terme duquel une personne peut entrer dans le dispositif si elle change de département, c'est-à-dire de bassin d'emploi. Alors que l'on réclame de toute part, pour notre économie, des salariés plus mobiles, le texte n'instaure-t-il pas, en l'espèce, une entrave à la mobilité des personnes ? Je comprends, certes, que l'on prévoie un délai raisonnable pour laisser à l'administration le temps de gérer leur déplacement ; mais, après avoir consulté des collègues présidents de conseil général, il m'a paru opportun de le réduire à trois mois, afin d'accélérer le retour vers l'emploi de ceux qui, en acceptant la mobilité, prouvent qu'ils veulent sortir d'une situation difficile.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Avis défavorable. Cette clause facultative a été demandée par les départements et négociée avec eux. Le délai de six mois est un maximum, qui peut être abrégé par les départements.
Avis défavorable. Afin d'éviter les effets d'aubaine dénoncés par l'opposition, nous disposons que, dans le cas du RSA, les conseils généraux auront la responsabilité de fixer eux-mêmes ce délai entre zéro et six mois. Je leur fais confiance pour prendre la bonne décision. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je suis saisi d'un amendement n° 441 .
La parole est à M. François de Rugy, pour le soutenir.
Cet amendement est conforme à l'esprit du revenu de solidarité active, qui vise, en les sécurisant, à inciter tous ceux qui le peuvent à reprendre un emploi salarié. Chacun sait, en effet, qu'accepter un contrat de travail, c'est prendre un risque.
Je profite de l'occasion pour rappeler que, contrairement à ce qui a été dit la semaine dernière – mais sans doute M. le haut-commissaire aura-t-il l'occasion d'en reparler avec la ministre de l'économie –, il existe de véritables freins à l'emploi qui n'ont rien, absolument rien à voir avec l'oisiveté. Je le répéterai chaque fois que l'occasion m'en sera donnée.
J'ai été élu dans l'agglomération de Nantes, où des études très précises ont été menées sur le rôle des transports et des déplacements. Quand on propose à quelqu'un qui perçoit le RMI ou de faibles indemnités des ASSEDIC un CDD dans une zone d'activité périphérique dans laquelle il est difficile de se rendre autrement qu'en voiture, il le refuse.
C'est exact.
C'est là un frein rédhibitoire à l'emploi. Dans une telle situation, en effet, nul ne prendra le risque d'acheter une voiture pour une durée déterminée.
C'est pourquoi nous proposons, par l'amendement n° 441 , de garantir au salarié qu'il retrouvera le bénéfice du RMI s'il perd son emploi pendant la période durant laquelle il percevra le revenu de solidarité active. La situation doit être évoquée, car les licenciements sont malheureusement de plus en plus fréquents. Sans polémiquer, je rappelle que le contrat « nouvelles embauches », dont on ne sait pas s'il survivra aux différentes procédures judiciaires en cours, prévoit qu'un salarié peut être licencié à tout moment sans même que l'employeur ait à justifier sa décision.
C'est pourquoi nous demandons, par cet amendement, que, lorsque le bénéficiaire d'un revenu de solidarité active perd son emploi, l'allocation du revenu minimum d'insertion soit intégralement rétablie sans délai.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
A priori, avis défavorable. L'esprit du projet de loi est clair. Il paraît évident que, lorsque quelqu'un perd son emploi, il retrouve le bénéfice du RMI. Il paraît donc inutile d'alourdir le texte, mais peut-être M. le haut-commissaire souhaitera-t-il apporter sur ce point une confirmation officielle.
Je confirme que cette disposition, selon laquelle tout allocataire du RMI qui perdrait son emploi serait aussitôt rétabli dans ses droits, figure dans la loi de 2006 relative au retour à l'emploi.
Fort de ce rappel, je vous suggère, monsieur le député, de retirer votre amendement. À défaut, j'en demanderais le rejet, pour éviter une redite par rapport à la législation actuelle.
Je suis saisi d'un amendement n° 328 .
J'indique d'ores et déjà que, sur le vote de cet amendement, je suis saisi, par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Marisol Touraine, pour soutenir l'amendement n° 328 .
Cet amendement vise à affirmer que le financement du revenu de solidarité active relève impérativement de la solidarité nationale, ce qui doit se traduire très concrètement par l'obligation pour l'État de compenser dans son intégralité le coût de l'expérimentation.
Le problème n'est pas strictement financier. Mais on a déjà rappelé que la dette de l'État envers les conseils généraux s'élève à plus d'un milliard d'euros. En outre, si le dispositif proposé est adopté, les conseils généraux devront payer deux fois. Non seulement ils acquitteront le supplément que représentera pour leurs finances l'instauration du revenu de solidarité active, mais ils devront également payer pour les allocataires actuels du RMI qui ne parviendront pas à trouver un emploi et seront progressivement amenés – le Gouvernement l'a reconnu lui-même – à dépendre uniquement des mécanismes d'aide sociale. Or nous craignons que, faute d'une croissance forte, ils ne parviennent pas tous à déboucher rapidement sur le marché du travail. Autant dire que le Gouvernement s'apprête à transformer le RSA en une nouvelle forme de contrat aidé, qui pèsera de manière accrue sur les finances des conseils généraux. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Par ailleurs, ces mesures, qui visent à permettre l'accès à l'emploi ou le retour vers l'emploi de personnes qui en sont éloignées depuis un certain temps, devraient, pour être cofinancées, faire l'objet d'une coresponsabilité. Or, à l'exception des contrats aidés, les politiques de l'emploi ne sont pas susceptibles de relever des conseils généraux.
C'est la raison pour laquelle il nous paraît nécessaire que le Gouvernement s'engage, comme il a su le faire pour d'autres dispositions de ce texte votées la semaine dernière, à financer sur le budget de la nation l'intégralité de l'expérimentation du revenu de solidarité active. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Avis défavorable. Le texte ne le précise pas, mais M. le haut-commissaire l'a expliqué oralement en commission : les conseils généraux, qui financent la totalité du RMI, ne supporteront que 50 % du RSA, dont l'État acquittera l'autre moitié. Un tel partage paraît équitable.
On m'a demandé si le Gouvernement garantissait qu'il aiderait tous les départements désireux de tenter l'expérience. Oui, il s'y engage. Nous y reviendrons à la faveur d'un autre amendement.
Pour ce qui est de financer la totalité de l'expérimentation, je rappelle que celle-ci est prise à l'initiative des conseils généraux : rien ne leur interdit d'aller plus loin, et de faire beaucoup plus. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Pour ma part, j'ai proposé que l'État prenne en charge la moitié du surcoût.
Il contribuera à financer tous les départements qui se porteront volontaires et qui, s'ils le souhaitent, conserveront la possibilité de faire plus.
Par conséquent, avis défavorable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.– Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Nous allons maintenant procéder au scrutin public, précédemment annoncé, sur l'amendement n° 328 .
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 93
Nombre de suffrages exprimés 93
Majorité absolue 47
Pour l'adoption 27
Contre 66
L'amendement est rejeté.
Je suis saisi de quatre amendements, nos 15 , 218 , 380 rectifié et 330 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 218 et 380 rectifié sont identiques.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, pour soutenir l'amendement n° 15 .
Dans sa rédaction actuelle, l'article 9 dispose que la convention « peut prévoir également » la prise en charge par l'État d'une partie du coût de l'expérimentation. Certains de nos collègues s'étant émus de cette formulation, nous proposons de lui substituer une rédaction plus précise, de nature à les rassurer : la convention « détermine les conditions de » la prise en charge par l'État d'une partie du coût de l'expérimentation.
La parole est à M. François Scellier, pour défendre son amendement no 218 .
« Prévoit » est plus précis et plus clair que « peut prévoir ». Quant à la formulation de l'amendement no 15 , selon laquelle la convention « détermine les conditions », elle reste assez vague.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement no 380 rectifié .
Le texte du Gouvernement, qui précise que la convention « peut prévoir » la participation financière de l'État, laisse entendre qu'elle pourrait ne pas la prévoir : il est donc préférable d'écrire « prévoit ».
La parole est à M. Marcel Rogemont, pour défendre son amendement no 330 .
Je ne reviens pas sur l'alternative entre « prévoit » et « peut prévoir ». Chacun comprend que l'impératif est nécessaire.
Nous souhaitons, par ailleurs, grâce à cet amendement inscrire dans la loi l'obligation pour l'État de financer l'expérimentation au-delà de sa première année.
Enfin, nous voulons que la totalité de la participation de l'État soit versée au département sous forme de majoration de la dotation de fonctionnement. Vous pouvez nous proposer un autre dispositif. L'essentiel, c'est que la solidarité nationale doit financer la totalité du surcoût engendré par cette politique de retour à l'emploi. En effet, nous avons déjà vu ce que deviennent les engagements financiers et sociaux de l'État. Ainsi, monsieur le haut-commissaire, au moment de la création des contrats d'avenir, l'État s'était engagé à en conclure un chaque fois que le département en signait un. Or, dans mon département, 71 % des contrats d'avenir ont été signés par le conseil général. Que fait l'État ? La loi doit préciser qu'il finance la totalité de cette expérimentation. À son issue, nous pourrons revoir les responsabilités financières de chacun lors de la discussion d'un texte de généralisation, mais, à ce stade, alors que cette expérimentation s'inscrit dans un texte qui distribue largement les crédits de l'État, je crois qu'il faut que l'État finance la totalité du dispositif.
Quel est l'avis de la commission saisie au fond sur ces quatre amendements en discussion commune ?
Le Gouvernement suggère le retrait des amendements nos 218 et 380 rectifié et 330 et s'en remet à la sagesse de l'Assemblée pour que soit adopté l'amendement no 15 .
L'amendement no 15 renvoie pour le financement de l'expérimentation à des conventions établies entre l'État et le département. Elles feront l'objet de négociations entre chaque préfet ou préfète et chaque président ou présidente de conseil général. D'un département à l'autre ce dispositif à caractère national pourra donc relever de conditions totalement différentes. Nous voterons contre cet amendement qui fait courir un risque important à l'égalité des territoires.
Je demande la parole pour un rappel au règlement, au titre de l'article 58, alinéa 1er, du règlement qui concerne l'organisation des débats.
La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour un rappel au règlement – si tant est qu'une disposition du règlement ait été violée…
Monsieur le président, je vous précise que l'amendement n° 330 ne se contentait pas de remplacer « peut prévoir » comme les trois premiers amendements, mais complétait également l'article 9 du projet de loi avec des dispositions relatives à la participation de l'État. Cet amendement était donc d'une nature différente…
…et le scrutin tel qu'il s'est déroulé nous pose un problème. Je tenais à vous le signaler, monsieur le président.
Je suis saisi d'un amendement n° 16 .
J'indique d'ores et déjà que, sur le vote de l'article 9, je suis saisi, par le groupe de l'Union pour un mouvement populaire et par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, pour soutenir l'amendement no 16 rectifié .
La commission des affaires culturelles a souhaité que les rapports qui feront le bilan de l'expérimentation, dont celui mentionné dans l'article 142 de la loi de finances pour 2007, aient une portée plus générale et traitent du RMI, qui concerne 1,2 million de Français. De nombreux membres de la commission des affaires culturelles s'interrogent en constatant, par exemple, que, sur une période de trois ans, 40 % des bénéficiaires du RMI sont constamment dans le dispositif et n'ont jamais signé de contrat d'insertion. Une étude approfondie sur le RMI et ses allocataires viendra donc compléter les éléments prévus sur le RSA.
Favorable.
Je mets aux voix l'amendement no 16 rectifié .
(L'amendement est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement no 338 .
La parole est à M. Dominique Tian, pour le soutenir.
Cet amendement répond à un souci de clarté juridique. Afin que l'expérimentation du RSA n'entraîne aucun litige inutile, il précise le régime juridique qui lui est applicable. Ce régime est identique à celui de l'actuelle prime forfaitaire d'intéressement servie aux bénéficiaires du RMI en matière d'attribution de la prestation, d'organisme débiteur, de prescription, d'indus, d'incessibilité et d'insaisissabilité, de fraude et de sanctions ainsi que de contentieux.
Par ailleurs, cet amendement prévoit qu'en cas de cumul de l'API et du RMI par un même foyer, situation possible mais peu fréquente, le RSA sera mis en oeuvre prioritairement au titre de l'API, donc à la charge de l'État. Cette décision protectrice pour les finances départementales est dans la droite ligne de ce qui a été prévu pour les primes forfaitaires d'intéressement de droit commun.
C'est un amendement très utile. Je remercie M. Tian de nous le proposer.
Nous sommes très favorables à l'amendement.
Nous allons maintenant procéder au scrutin public, précédemment annoncé, sur l'article 9, modifié par les amendements adoptés.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin sur l'article 9, modifié par les amendements adoptés.
Nombre de votants 88
Nombre de suffrages exprimés 88
Majorité absolue 45
Pour l'adoption 68
Contre 20
L'article 9, modifié, est adopté.
Deux orateurs sont inscrits sur l'article 10.
La parole est à M. Marcel Rogemont.
La durée de l'expérimentation est de trois ans, ce qui me semble suffisant pour tirer des enseignements de la mise en place du revenu de solidarité active. Pourtant, vous nous indiquez, monsieur le haut-commissaire, qu'une loi de généralisation sera présentée au Parlement pour une application dès le 1er janvier 2009. Compte tenu des délais de rédaction d'un projet de loi, au moment même où l'expérimentation va commencer, vous rédigerez donc déjà le texte qui la généralise ! Ce calendrier vous semble-t-il raisonnable ? N'est-ce pas un peu rapide, voire précipité ?
Cette expérimentation doit pouvoir vivre suffisamment longtemps pour que nous en tirions ensemble les enseignements. Nous ne pouvons accepter ce rythme effréné. Parce que les enjeux sont économiques – le personnel des entreprises est concerné – et financiers – dès lors que l'État ne prend pas en charge la totalité du financement du RSA –, les conseils généraux ont besoin de connaître l'impact de ces mesures qui engagent leurs ressources et ont été décidées par l'État. Or l'histoire nous apprend à nous méfier des décisions de l'État. Je ne reviendrai pas sur ce que je disais tout à l'heure des contrats d'avenir,…
…ni sur l'APA – vous avez raison, mes chers collègues. Le gouvernement de l'époque s'était engagé à financer la mesure à hauteur de 50 % et je crois qu'il n'en est aujourd'hui qu'à 30 % par rapport aux conseils généraux qui supportent 70 % de son coût. La promesse date de la loi de finances pour 2002,…
Les effets d'annonce, on les voit ; l'argent non ! Nous n'avons pas voté ce budget !
…les engagements ne sont donc pas tenus. Que vous n'ayez pas voté ce texte, c'est votre problème, mais c'était dans la loi de 2002.
Monsieur le haut-commissaire, nous avons besoin d'une clarification concernant les financements et du temps de l'expérimentation. C'est pourquoi je vous demande de repousser votre projet de loi de généralisation après l'expérimentation – et donc après 2009. Ce point me semble très important et risque, si on n'y prend pas garde, de perturber la mise en place du revenu de solidarité active et de jeter le voile du discrédit sur une idée que nous trouvons bonne. La décentralisation, monsieur le haut-commissaire, ce ne peut pas être l'État qui décide et les conseils généraux qui paient ! Les collectivités territoriales et surtout les conseils généraux ne sont pas les supplétifs financiers de l'action sociale du Gouvernement. Vous ne pouvez pas jouer la carte du social devant les caméras et dans les coulisses forcer les conseils généraux à payer vos largesses.
Mais oui, les conseils généraux ont été largement taxés avec les lois de décentralisation Raffarin.
Avec l'APA, nous avons été compensés à 27 %. Les conseils généraux de gauche étaient bien mieux compensés que ceux de droite : voilà l'égalité socialiste !
C'est pourquoi j'en appelle à votre sens des responsabilités, monsieur le haut-commissaire. Ne précipitez pas les choses ! Menons l'expérimentation et décidons ensemble, avec les conseils généraux, du moment opportun pour la généraliser !
L'article 10 soulève deux questions, monsieur le haut-commissaire.
S'agissant tout d'abord des délais, comme Marcel Rogemont, je m'interroge sur une expérimentation dont la durée est fixée à trois ans, mais qui serait généralisée, annoncez-vous, au bout d'un an. Comment peut-on généraliser un dispositif au bout d'un an alors que tout le monde convient que son expérimentation doit durer trois ans ?
S'agissant ensuite des conditions de l'expérimentation, si, comme j'ai cru le comprendre, les départements volontaires choisissent les bassins d'emploi qui réunissent les conditions les plus favorables à la réussite de l'expérimentation, comment pourra-t-on en tirer un enseignement juste pour la généralisation du dispositif, un an après, à l'ensemble des bassins d'emploi, y compris les plus fragiles ?
Nous en arrivons aux amendements à l'article 10.
Je suis saisi d'un amendement n° 135 .
La parole est àM. Roland Muzeau, pour le soutenir.
Nous avons vu, à propos de la réforme des successions, l'attention toute particulière que vous avez portée aux personnes handicapées – du moins en théorie. Telle n'est pas la situation dans nombre d'entreprises, en particulier dans toutes celles qui ne respectent pas l'obligation d'embauche qui leur incombe. Notre amendement a donc pour objet d'inciter fortement ces entreprises à respecter cette obligation en relevant le montant de leur contribution au fonds de développement pour l'insertion professionnelle des handicapés. Compte tenu de l'enthousiasme que vous avez manifesté il y a quelques jours, nous ne doutons pas que vous accueillerez favorablement cette proposition, que nous avions déjà faite dans le cadre de la révision de la loi de 1975 mais qui n'avait malheureusement pas été retenue.
Nous proposons donc que, dans la première phrase du quatrième alinéa de l'article L. 323-8-2 du code du travail, le nombre « 600 » soit remplacé par le nombre « 900 » et que, dans la dernière phrase du même alinéa, le nombre « 1 500 » soit remplacé par le nombre 1 607 ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Défavorable. Non pas parce que l'emploi des handicapés ne soit pas un souci, mais parce que, depuis la loi de 2005, la sanction est déjà très élevée, puisqu'elle est fixée à 600 fois le SMIC. En outre, cet amendement n'a aucun rapport avec le RSA, même si l'intention est louable.
Je souhaite tout d'abord répondre aux deux orateurs qui sont intervenus sur l'article 10. Ils nous reprochent de vouloir aller trop vite, mais je précise que l'étape suivante concernera les travailleurs pauvres et, je l'espère, les titulaires de l'allocation adulte handicapé, car les associations de personnes handicapées souhaitent qu'ils puissent bénéficier de ce dispositif. Comme nous voulons éviter que l'inégalité entre les différents publics perdure trop longtemps, nous devons franchir la première étape le plus rapidement possible.
Toutefois, nous devons donner à celles et ceux qui vont entrer dès maintenant dans l'expérimentation une visibilité sur trois ans, ce que ne permettent pas les dispositifs actuels. Si, comme nous l'espérons, la généralisation est plus rapide et plus favorable, ils pourront basculer dans le nouveau régime sans rien y perdre. Nous offrons donc deux garanties : d'un côté, une expérimentation suffisamment longue et, de l'autre, la possibilité d'une généralisation rapide.
En ce qui concerne l'amendement, comme nous envisageons la question des personnes handicapées sous un angle nouveau, nous ne pouvons pas donner un avis favorable à un amendement qui a aussi pour conséquence de supprimer des dispositions relatives au RSA.
Je suis saisi d'un amendement n° 86 .
La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.
Comme l'a indiqué tout à l'heure le haut-commissaire, l'expérimentation porte à la fois sur le RMI et sur l'allocation de parent isolé. S'agissant du RMI, les départements expérimentateurs seront volontaires. Or l'API ne dépend que de l'État. Il paraît donc plus prudent que, s'agissant de cette dernière, l'État ne soit pas lié par le choix des départements volontaires et qu'il ait la faculté, plutôt que l'obligation, de conduire l'expérimentation.
Le Gouvernement suit l'avis expert du rapporteur général : avis favorable.
Les bras m'en tombent ! Les départements se porteront volontaires pour expérimenter le RSA par contractualisation avec l'État, mais vous précisez, dans l'exposé sommaire de l'amendement, « qu'il est préférable de laisser au Gouvernement la souplesse de conduire cette expérimentation dans tous les départements volontaires pour celle prévue pour les bénéficiaires du RMI ou seulement dans une partie d'entre eux ». Ce qui revient à dire que, dans les départements volontaires, l'État pourra se désengager pour la partie qui lui incombe. C'est invraisemblable : ce contrat n'est ni égalitaire ni juste ! (« Absolument ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Permettez-moi de préciser les choses à propos de cet amendement qui, je le rappelle, a été adopté par la commission des finances.
L'exposé sommaire concerne l'API. Les départements mènent l'expérimentation au titre du RMI. Dans la rédaction actuelle, le Gouvernement prévoit que l'autre volet, qui concerne l'API, sera systématiquement expérimenté dans les départements volontaires pour le RMI. Il paraît plus raisonnable de supprimer ce caractère obligatoire. L'État décidera peut-être de suivre systématiquement les départements volontaires, mais il doit pouvoir s'abstenir s'il juge que, compte tenu des conditions locales, il ne paraît pas nécessaire de mettre également en place une expérimentation au titre de l'allocation parent isolé.
La proposition de M. Carrez est étonnante puisque, sous couvert de souplesse, elle aboutit à introduire une inégalité de traitement entre des catégories que la loi soumet au même dispositif. Sur un même territoire, les RMIstes pourraient bénéficier de l'expérimentation du RSA, alors que les titulaires de l'API, pourtant visés au même titre par la loi, ne le pourraient pas. Je crains que la disposition ne soit inconstitutionnelle. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je souhaite apporter un élément de clarification. S'agissant des allocataires du RMI, les conseils généraux sont entièrement libres de se porter volontaires ou non pour l'expérimentation et de choisir la partie du territoire sur laquelle ils souhaitent que celle-ci soit menée. Nous avions pensé, en rédigeant le projet de loi, qu'il pouvait être judicieux que, lorsqu'un département déclenche l'expérimentation pour les allocataires du RMI, l'État suive automatiquement pour l'API. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Ne voyez pas malice dans cet amendement ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
S'agissant des titulaires de l'allocation parent isolé, pour que le dispositif puisse fonctionner, il faut une adéquation entre l'action du conseil général et celle de la CAF et de l'État. Dans un territoire où cette adéquation n'existerait pas – le conseil général estimant, par exemple, que l'expérimentation concernant les allocataires du RMI représente trop de travail pour que l'on y ajoute celle portant sur les titulaires de l'API –, les deux dispositifs doivent pouvoir être dissociés.
L'amendement du rapporteur général permettrait simplement d'éviter que l'expérimentation concernant les bénéficiaires de l'API ne se fasse dans de mauvaises conditions, notamment lorsqu'un territoire connaît des difficultés particulières.
Encore une fois, n'y voyez pas malice ! Mais si, dans sa sagesse, l'Assemblée estime que les deux expérimentations doivent être liées, on se débrouillera.
Très majoritairement !
Or nous savons, monsieur Hirsch, que les femmes, et par voie de conséquence leurs enfants, sont particulièrement touchées par l'exclusion. Je ne citerai pas les chiffres qui figurent dans beaucoup de vos rapports sur la pauvreté : ce sont des millions d'enfants qui vivent dans la précarité. Pourtant, l'amendement exclut cette population, celle des femmes allocataires de l'API, que beaucoup de conseils généraux ciblent en priorité parce que leur situation est particulièrement préoccupante.
Votre raisonnement ne tient pas. En effet, dans les territoires choisis par les conseils généraux, on sait bien que, la plupart du temps, là où il y a chômage et exclusion, il y a en majorité des femmes seules avec enfants. Je ne vois pas pourquoi on exclurait une partie de la population, qui plus est les femmes. C'est absolument inadmissible et incohérent.
Permettez-moi de vous citer le deuxième alinéa de l'article 8 : « À titre expérimental, le revenu de solidarité active est mis en oeuvre simultanément » – j'insiste sur ce terme – « dans les conditions définies aux articles 9 et 10 de la présente loi pour les bénéficiaires du RMI et de l'allocation de parent isolé. » Vous nous proposez, monsieur le rapporteur général, de supprimer le caractère systématique de ces expérimentations simultanées pour ne pas obliger l'État. Mais s'il n'y a pas d'accord entre l'État et le conseil général sur la mise en oeuvre du RSA pour les allocataires du revenu minimum d'insertion et pour ceux de l'allocation parent isolé, il n'y aura pas d'expérimentation. L'engagement de l'État et des conseils généraux doit donc porter sur l'ensemble des publics visés à l'article 8. Pour que celui-ci soit appliqué, il ne faut pas laisser place à un désaccord entre l'État et le conseil général.
L'argument de notre collègue ne tient pas. En effet, contrairement à ce qu'il affirme, le deuxième alinéa de l'article 8 ne précise pas « dans chaque territoire » ou « dans chaque département »…
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. L'article dit « simultanément » !
…mais indique simplement que les expérimentations sont mises en oeuvres simultanément sur les deux populations désignées par les articles 9 et 10 qui en constituent la cible.
Pour la parfaite information de Mme Adam, je veux préciser qu'il existe aussi des hommes seuls avec enfants qui bénéficient de l'API.
Depuis le début, nous essayons de travailler en toute bonne foi : en l'occurrence, notre seul souci est évidemment que cette expérimentation réussisse.
Mais, alors que le haut-commissaire vous dit que l'État est prêt à participer au financement, vous restez figés dans une attitude de soupçon et refusez de relever le nez de vos comptes d'apothicaire, comme si la seule préoccupation des départements était d'ordre économique !
La faculté offerte est exclusivement liée au fait, comme vient de l'expliquer Martin Hirsch, que l'expérimentation sur tel ou tel territoire peut se révéler difficile – pour une raison ou pour une autre, qu'il s'agisse de la coordination des services ou de l'ingénierie sociale – à mener de front à la fois sur le RMI et sur l'API.
Mais, puisque, ce soir, mes chers collègues de l'opposition, vous vous refusez à adopter un autre mode de pensée que le soupçon systématique (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.– Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche) et que je tiens, comme le haut-commissaire, à ce que cette expérimentation réussisse, je consens, pour vous montrer que je suis de bonne foi, à retirer cet amendement. (« Merci ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Allez-vous enfin croire que nous ne passons pas notre temps à comploter ? (« Ce sont des apothicaires ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
J'espère que je ne serai cette fois soupçonné d'aucune mauvaise intention, en particulier par les juristes. (« Mais non ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Dans la mesure où il y aura plusieurs vagues de départements ou de territoires volontaires, cet amendement vise à ce que la liste de ceux-ci soit fixée par arrêté après la clôture des délais. La base juridique ainsi constituée permettra d'éviter d'éventuelles contestations ultérieures. Il n'y a, je le répète, aucune malice de ma part dans cet amendement.
Très favorable !
Je mets aux voix l'amendement n° 87 deuxième rectification.
(L'amendement est adopté.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Voilà ce que voulait en fait M. le rapporteur général ! (Sourires.)
Je suis saisi d'un amendement n° 88 .
La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.
Favorable.
Je suis saisi d'un amendement n° 339 .
La parole est à M. Dominique Tian, pour le soutenir.
Le VI de l'article 10 prévoit que les personnes qui cessent de bénéficier, en cours d'expérimentation, de l'allocation de parent isolé se voient maintenues dans leurs droits au RSA pendant une durée d'un an. L'API n'étant attribuée que temporairement et en fonction de l'âge des enfants, cette disposition protectrice a pour objet d'éviter que ne sortent de l'expérimentation et ne perdent le bénéfice de l'incitation financière à la reprise d'activité, des allocataires de l'API dont la situation de famille serait modifiée.
Le texte, en l'état, vise de façon très générale les différents changements de situation que peuvent connaître les allocataires. Cependant, la clause de maintien n'a vocation à jouer que dans un nombre limité de cas, à l'exclusion de ceux où la perte du bénéfice à l'API est liée à un retour à une meilleure fortune grâce à l'emploi.
Le présent amendement dresse donc la liste limitative des situations dans lesquelles doit jouer la clause de maintien, en visant les différents événements d'ordre familial susceptibles de modifier les droits à l'API – charge d'enfant, remise en couple – et apporte des précisions sur les règles applicables à ces cas de figure. En cas de reconstitution d'un couple, par exemple, il paraît légitime qu'il soit tenu compte des revenus du compagnon.
S'il faut fournir à Mme Adam une preuve de notre volonté d'aider les bénéficiaires de cette allocation, la voici : le Gouvernement est favorable à cet amendement.
Je me demande si la notion de « conjoint » n'est pas trop restrictive et recouvre bien l'intégralité des situations visées par cet amendement.
Non, je tiens simplement à m'assurer des intentions de M. le rapporteur pour avis.
Favorable.
Je suis saisi d'un amendement n° 149 .
J'indique d'ores et déjà que, sur le vote de l'article 10, je suis saisi, par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Roland Muzeau, pour soutenir l'amendement n° 149 .
L'article 10 traite de l'expérimentation du RSA pour les bénéficiaires de l'allocation de parent isolé – une expérimentation qui sera menée selon des modalités identiques à celle du RMI.
Le neuvième alinéa précise ainsi que cette expérimentation sera évaluée dans les mêmes conditions que l'expérimentation prévue par l'article 142 de la loi de finances pour 2007. Il revient donc aux départements participants d'adresser chaque année un rapport sur la mise en oeuvre du RSA, rapport contenant un certain nombre d'informations.
M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté a beaucoup insisté sur l'intérêt de l'expérimentation, sa volonté de faire du sur-mesure et la possibilité ainsi ouverte de faire évoluer le dispositif.
Au-delà des discussions sur le bien-fondé du nouveau dispositif, de nombreuses voix se sont élevées, notamment du côté des associations luttant contre la pauvreté et l'exclusion, pour s'inquiéter des effets pervers du dispositif, du risque selon l'UNIOPSS « de dualisation au sein des pauvres ».
Les deux ou trois ans dont nous disposons avant la mise en oeuvre de la réforme globale doivent effectivement servir à faire, si besoin, évoluer le dispositif. Pour cela, il importe que les départements concernés, les CAF, mais aussi les autres acteurs institutionnels et associatifs de terrain puissent faire remonter leurs expériences et leurs connaissances afin d'aider les départements dans leur démarche d'évaluation.
Notre amendement n° 149 vise donc à préciser que la composition du comité d'évaluation en charge de cet appui auprès des départements et de la concertation sur le sujet devra notamment comprendre les associations intervenant dans le domaine de l'insertion, de la lutte contre les exclusions.
Monsieur le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, vous avez la parole.
En indiquant que les associations en prise directe sur le terrain avec les problématiques d'insertion et de pauvreté doivent être partie prenante de l'évaluation de l'expérimentation du RSA, vous apportez des précisions de nature réglementaire. La commission, qui estime qu'il n'est pas opportun d'alourdir le texte avec des précisions de cet ordre, est par conséquent défavorable à cet amendement.
Le texte prévoit la présence de représentants de l'État, du département et des personnalités qualifiées. Nous avons estimé que les représentants du monde associatif pouvaient tout à fait entrer dans cette dernière catégorie, et c'est à ce titre que le président du collectif ALERTE, qui fédère l'ensemble des associations, a été appelé à siéger au comité d'évaluation. Votre préoccupation étant ainsi satisfaite, je vous invite à retirer votre amendement. À défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
Je regrette la décision du Gouvernement de ne pas donner un avis favorable à mon amendement, qui traduisait exactement la revendication exprimée par plusieurs associations, notamment celle de M. Hirsch. En revanche, je prends acte du fait que M. le haut commissaire admet le bien-fondé de ma demande et, au bénéfice de la mention qui en sera faite au Journal officiel, je retire mon amendement.
Favorable.
Nous allons maintenant procéder au scrutin public, précédemment annoncé, sur l'article 10, modifié par les amendements adoptés.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin sur l'article 10, modifié par les amendements adoptés :
Nombre de votants 72
Nombre de suffrages exprimés 72
Majorité absolue 37
Pour l'adoption 55
Contre 17
L'article 10, modifié, est adopté.
La parole est à M. François Scellier, pour soutenir le sous-amendement n° 482 .
Ce sous-amendement vise à reporter d'un mois la date limite de dépôt des dossiers pour les dix départements qui vont constituer la deuxième vague de candidats pour l'expérimentation.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir le sous-amendement n° 485 .
Je constate que le vote est acquis à l'unanimité.
Je mets aux voix l'amendement n° 97 , modifié par les sous-amendements adoptés.
(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)
Nous avons longuement discuté des critères de sélection qui permettraient de départager les départements, dans l'hypothèse où ils seraient plus de dix à se porter candidats. Le texte propose qu'ils soient sélectionnés sur un seul critère, celui du potentiel fiscal le plus faible – ce qui paraît insuffisant. L'amendement n° 384 propose donc deux critères supplémentaires, l'un relatif au poids de la population des bénéficiaires du RMI par rapport à la population totale du département ; l'autre relatif à l'effort réalisé par la collectivité en matière d'insertion.
J'indique d'ores et déjà que, sur le vote de l'article 11, je suis saisi, par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. François Scellier, pour soutenir l'amendement n° 220 .
La parole est à M. Marcel Rogemont, pour soutenir l'amendement n° 332 .
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 385 .
Même argumentation que mes collègues sur cet amendement identique aux deux précédents.
La commission s'est ralliée aux amendements identiques nos 220 , 332 et 385 , qui ont retenu deux critères : le potentiel fiscal, d'une part, et le nombre d'allocataires au RMI par rapport à la population totale, d'autre part. Elle a, en revanche, repoussé l'amendement n° 384 , qui avait prévu un troisième critère relatif aux efforts d'insertion.
En conséquence, l'amendement n° 392 tombe.
Nous allons maintenant procéder au scrutin public, précédemment annoncé, sur l'article 11, modifié par les amendements adoptés.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin sur l'article 11, modifié par les amendements adoptés :
Nombre de votants 71
Nombre de suffrages exprimés 52
Majorité absolue 27
Pour l'adoption 52
Contre 0
L'article 11, modifié, est adopté à l'unanimité.
Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l'article 11.
Je suis saisi d'un amendement n° 163 .
La parole est à M. Michel Diefenbacher, pour le soutenir.
Monsieur le président, je suis l'auteur d'une série d'amendements qui s'inscrivent dans une certaine cohérence.
Cette série d'amendements émane d'un député qui est par ailleurs président de conseil général. C'est à ce titre, en effet, que j'ai pu observer qu'il existait un certain nombre de failles dans le dispositif du RMI. Au-delà d'un coût très élevé pour les départements, la mesure alimente également l'idée dans l'opinion publique que certains bénéficiaires du RMI ne devraient pas percevoir cette allocation et que nombreux sont ceux qui restent durablement dans cette situation car ni eux ni les pouvoirs publics ne se donnent les moyens de trouver d'autres solutions.
Cela étant, je sais qu'une réflexion visant à réformer profondément le RMI est actuellement en cours. J'ai donc accepté de retirer les amendements nos 163 , 165 , 166 et 164 , pour ne conserver que les amendements nos 167 , 162 et 161 .
L'amendement n° 167 pose un problème à la fois de principe et de justice. Il tend à aligner les allocations versées aux personnes vivant sous le même toit, qu'elles soient ou non mariés. Supportant des charges identiques, elles doivent être traitées de la même façon. C'est une question d'équité.
La commission a rejeté cet amendement, non pas parce qu'elle l'a jugé inintéressant, bien au contraire, mais parce que, respectant la jurisprudence appliquée dès l'article 1er, elle a refusé tous les amendements connexes au texte de loi. Il s'agirait précisément ici de modifier les règles relatives au versement du RMI.
C'est son expérience de président de conseil général qui a conduit M. Diefenbacher à présenter cet amendement. Il a le souci de faire en sorte que les politiques conduites en faveur du RMI soient justes et ajustées. Je serai très heureux d'aller constater la situation dans le Lot-et-Garonne. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Nous verrons quels enseignements nous pouvons en tirer dans le cadre de la réforme globale que nous envisageons. En revanche, il me semblerait prématuré de modifier immédiatement tel ou tel élément du dispositif en vigueur. Avis défavorable, par conséquent. Je pense, monsieur le député, que vous comprendrez cette position.
J'accepte de retirer l'amendement n° 167 puisque vous le considérez comme un amendement d'appel, un appel à venir sur place, monsieur le haut-commissaire. (Sourires.)
Mesdames, messieurs les députés, les appels des autres départements seront également entendus ! (Sourires.)
Sans toucher aux garanties apportées en cas de suspension du RMI, cette procédure devant demeurer contradictoire, avec en outre la possibilité de se faire assister d'une personne de son choix, l'amendement n° 162 tend à revenir sur l'obligation de consulter la commission locale d'insertion, la CLI. Une telle procédure se justifie sans doute dans les grands départements, où une commission départementale ne pourrait pas véritablement apprécier les situations individuelles, mais elle alourdit le dispositif dans les petits. Laissons donc au président du conseil général le soin de choisir entre la consultation de la CLI et celle d'une commission départementale.
Défavorable.
Cet amendement part d'un constat : trop de personnes continuent de toucher le RMI alors qu'elles ont retrouvé un emploi.
Faute d'un échange satisfaisant d'informations, les organismes payeurs ne s'aperçoivent pas que certains bénéficiaires ne réunissent plus les conditions légales. Le texte actuellement en vigueur prévoit que les organismes payeurs – CAF et MSA – peuvent demander toutes informations utiles aux administrations financières, aux collectivités territoriales, aux organismes de sécurité sociale, de retraite complémentaire et d'indemnisation du chômage, organismes publics ou privés divers, mais pas aux organismes collecteurs de cotisations patronales et salariales. L'amendement n° 161 vise donc à compléter l'article L. 262-33 du code de l'action sociale et des familles sur ce point.
Cela étant, on m'a fait valoir que les organismes collecteurs de cotisations patronales et salariales devaient être considérés comme des organismes de sécurité sociale. Monsieur le haut-commissaire, si vous confirmez cette analyse d'un point de vue juridique, je retirerai cet amendement.
Je le confirme, monsieur le député.
Je laisse à M. Rogemont le soin de présenter cet amendement, qui a été adopté par la commission des finances.
Cet amendement demande un rapport d'évaluation sur l'expérimentation avant toute généralisation du RSA.
Favorable.
La commission a adopté l'amendement n° 92 relatif à la PPE sur proposition de M. Charles de Courson. Je lui laisse donc le soin de présenter cet amendement.
Nous constatons depuis des années que la PPE, versée à un quart de la population active, a pour seul effet de renforcer le pouvoir d'achat au lieu de stimuler l'emploi, ce qui était pourtant son but initial – objectif cher au président Méhaignerie. Nous demandons donc à l'État d'étudier un « branchement » direct de la PPE sur la feuille de paie afin de récompenser les bénéficiaires des minima sociaux qui reprendraient le travail. Il faut, dans le cadre de l'expérimentation, « brancher » la PPE sur le dispositif. L'État rembourserait ensuite aux départements la PPE. Pour réfléchir depuis des années à ce système, nous savons, monsieur le haut-commissaire, que ce n'est pas simple.
Le Gouvernement se penchera bien sûr sur la PPE dans le cadre de l'expérimentation du RSA, comme le demandent la commission des finances et le président de la commission des affaires sociales. Cela permettra de prendre en compte la situation des travailleurs pauvres. Faut-il pour autant remettre un rapport spécifique sur ce sujet ? Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l'amendement n° 382 .
Il s'agissait d'apaiser nos collègues, saisis d'émotion à l'idée que les départements pourraient être traités de façon différente, en proposant que le Gouvernement rende un rapport montrant qu'il traite avec égalité l'ensemble des départements expérimentateurs.
Le nombre de rapports devient décidément important. (Sourires.)
Monsieur le rapporteur général, souhaitez-vous ajouter quelque chose ?
Dans la mesure où nos collègues sont apaisés et où ces éléments d'information seront contenus dans le rapport d'évaluation générale, il me semble que l'amendement n'est plus indispensable.
Si le Gouvernement est disposé à inclure ces informations dans le rapport général, je retire mon amendement.
Il y aura un chapitre sur le sujet.
Notre amendement insiste sur la nécessité de favoriser, dès la promulgation de la loi, une politique de négociation entre les partenaires sociaux. En effet, le RSA n'est pas selon nous un minimum social. Il trouve son sens dès lors que des emplois sont créés dans des entreprises et qu'ils pourront être offerts aux titulaires de minima sociaux, en particulier du RMI ou de l'allocation parent isolé. Il nous semble donc absolument nécessaire, pour donner à ce revenu de solidarité active non pas le caractère d'un nouveau minimum social mais le caractère d'un véritable marchepied vers un emploi durable, que la mise en place de la loi s'accompagne de négociations collectives dans les entreprises.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles.
Il s'agit d'un amendement un peu fourre-tout. Il renvoie à la négociation collective salariale, ce qui est intéressant mais éloigné du RSA. Il n'est pas utile d'alourdir notre texte. L'avis de la commission des affaires culturelles est donc défavorable.
Dans les départements qui mettront en oeuvre l'expérimentation, nous nous engageons à faire en sorte que les entreprises, y compris celles du secteur solidaire, auquel nous sommes très attachés, participent à cet effort-là. Quant aux conventions collectives, c'est une réflexion qui devra avoir lieu au moment de la réforme. Notre avis est donc défavorable.
Ce que nous voulons, c'est que l'on parle du vrai travail dans les entreprises.
Mais c'est du vrai travail !
Vous avez tout à l'heure, monsieur le haut-commissaire, cité à plusieurs reprises les activités d'insertion. Ce sont naturellement des formes de travail, mais j'espère que vous n'imaginez pas un seul instant que le dispositif ne s'applique qu'à ces modes spécifiques de réintégration dans le monde professionnel. Nous avons là quelques craintes.
Vous n'avez pas à les avoir ! Ce n'est pas ce que j'ai dit.
La réflexion menée autour du dispositif du RSA, avant même les élections, a conduit à déterminer qu'il ne devait pas être un instrument ne servant qu'à mettre les gens dans des cases aux marges des cases vouées à l'emploi. Cet amendement a le mérite d'intégrer dans la réflexion sur le RSA la question du dialogue social et il exprime parfaitement notre souhait de voir l'ensemble du monde économique impliqué dans le retour à l'emploi.
Je suis saisi d'un amendement n° 467 .
La parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur, pour le soutenir.
Il s'agit, par cet amendement, d'éviter que la généralisation du dispositif ne soit adoptée avant que ne soit réalisée une évaluation devant le Parlement sur l'expérimentation des départements participant à la création du revenu de solidarité active.
Il est important que le Parlement puisse débattre sur la politique en faveur de l'emploi des personnes en situation d'exclusion et que la représentation nationale puisse vérifier la réalisation de ces objectifs avant de permettre la généralisation du dispositif proposé par ce texte de loi à l'ensemble des départements.
Nous avons exprimé cette même préoccupation au sujet d'autres textes, car il nous paraît important de s'assurer, par des rapports d'évaluation, que les expérimentations puissent être analysées et permettent d'avancer en évitant les écueils et en conservant ce qui a pu fonctionner de manière positive.
Cet amendement me semble satisfait, puisque nous avons adopté celui, identique, qu'ont présenté tout à l'heure M. Jean-Louis Idiart et M. Marcel Rogemont.
Nous ne pouvons donner d'avis favorable à cet amendement-là, mais nous nous engageons une nouvelle fois à faire en sorte que le Parlement dispose dès que possible d'un rapport d'évaluation complet, afin de pouvoir très vite passer à l'étape suivante.
Pour rendre service à la majorité présidentielle, pour l'aider à adopter un titre plus conforme à la tenue de nos débats depuis une semaine, pour lever enfin tous les soupçons et faire taire les procès d'intentions, nous vous proposons de rebaptiser ce texte « Projet de loi en faveur de la rentabilité financière, de la spéculation immobilière et de la restauration des privilèges ». (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Je la laisse à M. Brard, qui l'affectionne particulièrement. (Sourires.) Mais ce texte ne donne pas lieu à plaisanter, car il coûte beaucoup d'argent, environ quatorze milliards, dont vingt-cinq petits millions dévolus aux dispositions dont vous avez la charge, monsieur le haut-commissaire.
J'ai, comme d'autres collègues de l'opposition, dit combien nous avions eu le sentiment, pendant les quatre cinquièmes de nos débats, d'assister à une émission de téléréalité, dans laquelle tout était permis. M. Brard a parlé des riches qui avaient « le nez dans l'auge », et il avait raison.
Quel titre, dès lors, donner à ce projet de loi ? La Roue de la fortune ? Qui veut gagner des millions ? Combien ça coûte ?
Toutes ces émissions ont en commun de faire rêver le badaud, mais laissent à penser que, quand il y en a un qui gagne, il y en a cinquante millions qui perdent.
À partir de là, il nous semble de bon aloi de vous proposer ce changement de titre.
La parole est à M. Jean-Louis Idiart, pour soutenir l'amendement n° 201 .
Cet amendement avait été déposé en début de discussion, mais, en définitive, mieux vaut qu'il soit discuté à la fin des débats, car, après avoir examiné pendant une semaine une série de dispositions, que nous avons parfois qualifiées de cadeaux, et distribué des milliards ponctionnés sur nos recettes, nous pouvons prendre conscience aujourd'hui de l'immense décalage qui existe entre ces mesures et le RSA, qui arrive en fin de parcours.
En lisant dans la presse le compte rendu de nos débats, les Français vont progressivement s'apercevoir de ce qu'aura été le premier texte de la session : beaucoup de récompenses pour ceux qui ont été gentils avec vous, des récompenses dont il reste à voir à quoi elles vont être utilisées et comment elles vont peser sur nos déficits, tandis qu'il faudra, dans le même temps, examiner si elles ont convenablement aidé au redémarrage de notre économie et de la croissance. Nous en jugerons dans les mois à venir.
Si nous proposons cette modification de dénomination, c'est qu'il faut être cohérent : votre projet est un projet de loi relatif aux heures supplémentaires et à diverses dispositions fiscales.
Les heures supplémentaires ne sont pas payées aux parlementaires, et nous avons pourtant débattu parfois jusqu'à onze heures d'affilée.
Non, nous ne réclamons rien, parce que nous sommes des élus du peuple et que nous sommes fiers d'être ici.
Je veux simplement vous remercier symboliquement de la part de tous ceux qui, dans ce pays, vont pouvoir s'en mettre un peu plus dans les poches. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Pour les autres, ce ne sera qu'à titre expérimental. On aurait pu imaginer pourtant que les premiers articles de votre projet fassent, eux aussi, l'objet d'une expérimentation et qu'ils soient évalués en fonction des bons résultats sur l'économie et de la manière dont seront redistribuées les largesses que vous accordez. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La fatigue accumulée par nos collègues pendant ces dizaines d'heures supplémentaires, notamment la nuit, les a conduits à perdre de vue le sens profond, la finalité et la signification de ce texte, dont je rappelle qu'ils tournent autour de l'idée du travail de l'emploi et du pouvoir d'achat. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous avez perdu, mes chers collègues de l'opposition, le sens des réalités de ce texte, et je souhaite que nous revenions à son appellation première, qui est de loin la plus justifiée.
Monsieur le haut-commissaire, je pense que vous tenez au titre du texte ?
Il ne faut pas diminuer la portée de l'effort accompli, et je voudrais, en dépit des piques, revenir à quelque chose qui me tient particulièrement à coeur.
Je me souviens combien il fut difficile de faire admettre certains aspects du RMI, tant à droite qu'à gauche. Aujourd'hui, les deux côtés de l'hémicycle sont favorables au principe du RSA, et rien que cela justifie un beau titre.
Pour ma dernière intervention sur ce texte, je tiens à remercier tous les orateurs pour avoir défendu un certain nombre de principes. Nous nous sentons tous tenus à une obligation de résultat à travers les expérimentations.
J'adresse également mes remerciements à Gilles Carrez et à Dominique Tian qui ont soutenu, porté ce texte et permis d'en franchir les différentes étapes, ainsi que les présidents de commission, Didier Migaud et Pierre Méhaignerie, dont le travail et le soutien constants donnent de l'espoir, particulièrement à travers notre dernière discussion.
Je reviens sur ce dernier point. Nous recevons aujourd'hui énormément de courriers de personnes nous demandant si leur situation sera améliorée grâce à ce texte. Nous prenons aujourd'hui l'engagement que les différentes dispositions adoptées permettront au travail, à l'emploi et au pouvoir d'achat d'être considérés comme prioritaires.
C'est pourquoi je vous remercie de nous avoir soutenus. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Nouveau Centre.)
Avis défavorables sur les deux amendements.
Dans les explications de vote sur l'ensemble du projet de loi, la parole est à M. Jérôme Chartier, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
L'examen de ce texte s'achève, il faut le reconnaître, dans de bonnes conditions, un travail constructif ayant été possible sur les derniers articles.
Je tiens à remercier, au nom du groupe UMP, M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté pour son excellent travail. Si, aujourd'hui, notre discussion s'est déroulée dans d'excellentes conditions, tel ne fut pas le cas lors de la discussion générale, où, pendant l'intervention de M. Hirsch, j'ai cru entendre des propos ou déceler des manifestations sur certains bancs au mépris du respect qui doit être celui de l'Assemblée nationale envers un membre du Gouvernement.
Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Donneur de leçons !
M. Hirsch est allé de l'avant et le travail qu'il a accompli est très constructif, à l'image de ce projet de loi très ambitieux pour la France et qui traduit pas moins de neuf promesses présidentielles. Je rappelle une dernière fois les engagements pris avant l'élection présidentielle et qui sont tenus :
La détaxation et la défiscalisation des heures supplémentaires ;
La défiscalisation du travail étudiant, à hauteur de trois SMIC mensuels par an pour les moins de vingt-cinq ans ;
Le crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt immobilier pour l'achat d'une résidence principale, engagement très fort pris par Président de la République et tenu ;
Le régime des donations, qui permet de libérer des droits de succession pour toutes les familles de France, à l'exception des familles les plus aisées ;
Le bouclier fiscal, véritable appel lancé à tous les Français qui résident partout dans le monde pour leur dire que ce n'est plus une tare de gagner de l'argent en France ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Il fallait que cela soit dit !
Disposition essentielle : une réduction d'ISF jusqu'à 50 000 euros pour les contribuables qui investissent cet impôt dans des entreprises françaises. Ce projet de loi est fondateur non seulement pour la majorité présidentielle, mais aussi pour toute la nation française.
Autre engagement tenu : un encadrement très strict des parachutes dorés. (Rires sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Nous en avons encore discuté aujourd'hui de façon très complète. L'ensemble des avancées accomplies par cette majorité est à l'image de toutes les propositions de Christine Lagarde sur un sujet qu'elle connaît particulièrement bien et sur lequel beaucoup de points de vue se sont exprimés. Nous avons fait preuve de transparence et d'efficacité s'agissant du processus de décision des parachutes dorés. Certaines indemnités ont pu choquer naguère. Dieu merci, tel ne sera plus le cas à l'avenir.
Enfin, monsieur le président, j'aimerais faire une observation.
À plusieurs reprises, monsieur le président – mais vous n'avez pas présidé toutes les séances –, l'opposition a commis de nombreux excès à l'égard du règlement intérieur de l'Assemblée nationale.
Cela a conduit à une situation très particulière. Ainsi, afin de pouvoir avancer pour répondre à l'attente des Français qui attendent de l'action et de l'efficacité, la majorité a dû parfois faire preuve d'un très grand esprit adulte pour pouvoir subir les propos de l'opposition tout en s'interdisant de manifester sa désapprobation. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Que voulez-vous dire, que nous sommes des gamins ?
Vous croyez peut-être que nous sommes là pour dire « oui » ! Nous ne sommes quand même pas ici pour voter votre texte !
Restons, si vous le voulez bien, dans le cadre de l'explication de vote, monsieur Chartier !
Je crois donc qu'il devient urgent, comme vous l'avez souhaité, monsieur le président, de travailler sur le règlement intérieur de l'Assemblée.
Pour toutes ces raisons – sauf la dernière, monsieur le président, – le groupe UMP votera le projet de loi. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur Muzeau, vous avez déjà largement développé votre explication de vote dans le cadre de la défense de votre dernier amendement ! (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Non, nous aimons bien l'écouter !
La parole est à M. Roland Muzeau, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Merci, monsieur Rogemont, c'est gentil d'accueillir les « nouveaux » ainsi ! (Sourires.)
Nous arrivons aux termes de la discussion d'un texte qui, selon nous, compte parmi les plus dangereux et les plus inégalitaires qu'il nous ait été donné d'examiner au cours de ces dernières années, qui ne furent pourtant pas avares en duperies et mauvais coups.
Si votre texte prétend soutenir un projet de rupture et de changement, il prépare et organise en vérité une régression préoccupante dont les précédents font frémir tous ceux de nos concitoyens qui demeurent attachés à notre modèle social, aux principes fondateurs de notre République et aux idéaux de justice et d'égalité.
Ces précédents ont pour nom Reagan et Thatcher. Vous vous revendiquez d'ailleurs avec fierté de ce désastreux héritage. Mais en coulisse seulement. Car, sur la scène, vous continuez de prétendre au contraire servir l'intérêt général, vous soucier du pouvoir d'achat des plus modestes, être à l'écoute des classes moyennes. De semblables mensonges devraient vous faire rougir de honte.
Nous ferons les comptes après, et vous verrez combien pèse la langue de bois !
C'est vrai que je me laisse aller quand on me provoque ! (Rires.)
Il est proprement honteux, en effet, de prétendre permettre aux Français de « travailler plus pour gagner plus » quand vos mesures d'allégements de charges et les majorations de rémunération sur les heures supplémentaires, qui coûteront la bagatelle de quelque 6 milliards d'euros aux finances publiques, ne permettront nullement aux salariés de tirer de nouveaux fruits de leur travail : les salariés précaires qui voudraient travailler plus ne le pourront toujours pas, les salariés à temps plein qui ne souhaitent pas faire d'heures supplémentaires continueront d'y être contraints. Est-ce là ce que vous appelez réhabiliter la valeur travail ?
Il est honteux également de demander aux Français les plus modestes de signer un chèque aux plus riches.
Tout le volet fiscal de votre réforme se résume en effet à cela.
Le bouclier fiscal, qui vise à plafonner le poids des impôts directs à 50 % du revenu des 245 000 ménages les plus riches – en vérité, jusqu'à 39 %, les débats l'ont démontré – est présenté comme une invite aux hauts revenus à rester en France et aux émigrés « fuyards » fiscaux à y revenir. En quoi cette dépense de quelque 1,4 milliard d'euros va-t-elle être utile aux Français et à notre économie ? Vous qui êtes si prompt à dénoncer le poids des dépenses publiques, à vous ériger en garants de l'orthodoxie budgétaire, croyez-vous que la France puisse se payer le luxe de tels cadeaux fiscaux ! Qui va payer ?
Vous me direz que votre texte prévoit d'autres mesures qui bénéficieront bien à l'ensemble des Français. Parlons-en ! Il n'y a pas beaucoup d'argent !
Que pèsent les 40 millions d'euros de défiscalisation de l'emploi des étudiants au regard des 1,4 milliard d'allégements fiscaux que je viens d'évoquer ?
Que pèsent encore les 25 millions d'euros que vous allez consacrer à l'expérimentation du RSA au regard de vos scandaleuses mesures de quasi-suppression de l'ISF et de suppression des droits de succession, qui, là encore, n'intéresseront que les plus hauts revenus ?
Quant au crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunts immobiliers, ils représentent certes un effort financier de 3 milliards d'euros en année pleine, mais le risque – et nous l'avons souligné – est que ces sommes en viennent très tôt à alimenter la spéculation immobilière et que le gain pour les primo-accédants à la propriété fonde comme neige au soleil au profit des banquiers et des constructeurs.
Du point de vue de la stricte logique budgétaire et économique, on chercherait vainement à retrouver dans votre plan de réforme en actif, en activité supplémentaire pour le pays, ce que l'État a mis à son propre passif : les allégements d'impôts.
Comment s'étonner dès lors que Bruxelles juge « incompréhensible » un « choc fiscal » qui vise moins à relancer la croissance, la consommation et l'emploi qu'à servir des postures dangereuses d'inspiration purement idéologique ?
Vous l'avez compris, nous voterons résolument contre ce projet de loi. Nous nous sommes abstenus sur le RSA et, monsieur le haut-commissaire, j'ai bien noté que, dans votre explication, vous vous étiez cantonné par prudence à défendre le projet du RSA, mais pas l'ensemble du texte, et je vous en remercie.
Cela a été fait avant !
La parole est à M. Jean-Louis Idiart, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Le texte TEPA, que nous avons examiné la semaine dernière et encore aujourd'hui, est particulièrement injuste car il va servir essentiellement certaines catégories de nos populations. Dans le cadre de la présentation de ce projet, les premiers mots de Mme la ministre de l'économie et des finances sur le travail resteront comme un morceau d'anthologie qu'il faudra donner à analyser à de nombreux étudiants et experts car on peut y retrouver des tonalités qui datent du XIXe siècle ! Sa démonstration est l'exemple parfait du grand décalage qui existe aujourd'hui entre ce qu'elle a dit et ce que nous venons d'entendre sur le RSA. Il y a deux façons totalement opposées d'aborder globalement notre société. D'un côté, cette exaltation du travail et le rejet de ceux qui, s'ils n'ont pas cette conception-là du travail, sont en marge de notre société. De l'autre, le RSA, ou comment vous pouvez essayer, avec de tout petits moyens, d'aider certaines catégories de population à retrouver les voies de la dignité et du travail. La réalité de ce texte, ce sont, d'un côté, les 13 à 15 milliards qui seront distribués à certaines catégories de population et, de l'autre, les difficultés à intégrer aujourd'hui dans notre société d'autres catégories.
S'agissant des dispositions sur les heures supplémentaires, nous sommes intimement convaincus qu'elles créeront une distorsion très grave entre certaines catégories de population. Comme nous l'avons annoncé dans le cadre de l'exception d'irrecevabilité, ces dispositions ne sont pas conformes à l'esprit et à la lettre de la Constitution. Le Conseil constitutionnel pourrait donc en être saisi.
Avec le bouclier fiscal, vous avez essayé d'attaquer l'ISF par tous les bouts, sans avoir eu le courage de le faire de façon directe – à part M. Myard, qui a été le Saint-Jean Bouche d'Or dans cette affaire. Vous avez même déposé des amendements supplémentaires, comme l'amendement Copé, pour essayer de vider l'ISF de sa substance.
Notre discussion sur ce texte préfigure ce se passera pour notre pays dans les mois et les années qui viennent. Nous sommes persuadés que, d'ici à un an et demi ou deux ans, il faudra repayer les cadeaux que vous faites aujourd'hui. La discussion de la loi de règlement ce matin et le débat d'orientation budgétaire cet après-midi nous ont permis de réaffirmer qu'il nous faudra être particulièrement fermes sur nos différents équilibres budgétaires et sur la dette.
Il va bien falloir que certaines catégories paient tout cela,…
…soit parce que l'on supprimera des dépenses utiles à l'ensemble de la société, soit parce que l'on ira chercher des recettes nouvelles dans la poche du plus grand nombre. Le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche ne votera donc pas ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Mes chers collègues, le groupe Nouveau Centre votera en faveur de ce texte. Les différentes mesures qu'il contient vont dans la bonne direction, en encourageant le travail. C'est vrai du RSA, comme du système des heures supplémentaires, du travail étudiant, de la déduction des intérêts sur la résidence principale, du bouclier fiscal et des droits de succession.
D'autre part, nombre des amendements que nous avions proposés ont été retenus. Certes, deux amendements importants ne l'ont pas été : celui concernant l'inclusion de la CSG et de la CRDS dans le bouclier fiscal − mais nous verrons bien ce que décidera le Sénat − et celui concernant l'ISF. Nous pensions qu'il aurait mieux valu augmenter de 200 000 ou 300 000 euros l'abattement à la base plutôt que de porter de 20 à 30 % l'abattement sur la résidence principale – ce qui aurait été beaucoup plus efficace pour permettre à nos nombreux concitoyens de sortir du barème où ils ne sont entrés que parce que le logement qu'ils ont acheté il y a des années a pris beaucoup de valeur.
Le dernier point sur lequel nous avons été pour deux tiers entendus concerne le financement de ces mesures. Elles auront un coût de 11 milliards l'année prochaine et de 13 à 14 milliards l'année suivante. Nous avons proposé trois grandes mesures d'économie pour les financer. Le Gouvernement s'est déclaré très intéressé par la première, l'impôt minimum alternatif, et nous reprendrons ce débat dans la loi de finances pour 2008. La deuxième est la modification des relations entre l'État et les collectivités locales. Nous espérons bien que la troisième, la révision du système de prise en charge des cotisations sociales patronales sur les très grandes entreprises, que, pour le moment, le Gouvernement n'a pas retenue, connaîtra un meilleur sort.
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(L'ensemble du projet de loi est adopté. − Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Mardi 17 juillet 2007, à quinze heures, première séance publique :
Discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, après déclaration d'urgence, n° 63, renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs :
Rapport, n° 65, de M. Guy Geoffroy, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République ;
À vingt et une heures trente, deuxième séance publique :
Suite de l'ordre du jour de la première séance.
La séance est levée.
(La séance est levée, le mardi 17 juillet 2007, à une heure trente-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,
Jean-Pierre Carton