La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires (nos 1210 rectifié, 1441, 1435).
Ce matin, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'article 20.
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.
Mesdames et messieurs les députés, l'article 20 du projet de loi habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures de nature législative afin de réformer les conditions de création, d'organisation et de fonctionnement des laboratoires de biologie médicale.
La biologie médicale constitue, en effet, un élément essentiel du parcours de soins car elle est déterminante pour le diagnostic et le suivi des pathologies. Le niveau global de qualité de nos laboratoires est satisfaisant. Néanmoins, il nous faut bien reconnaître que l'on peut constater des insuffisances sévères, notamment dans l'application des procédures obligatoires d'assurance qualité. Or, la fiabilité des examens de biologie médicale est une exigence absolue, tant individuelle – car toute erreur peut entraîner des pertes de chances dramatiques pour les patients – que collective – par exemple, lorsqu'il faut éliminer des risques d'épidémies.
Il est donc impératif et urgent d'opérer une réforme structurelle et profonde : on ne peut laisser perdurer des défauts de fiabilité des examens de biologie médicale alors que le diagnostic et les décisions thérapeutiques qui en découlent dépendent de cette étape cruciale du parcours de soins. Cela est d'autant moins acceptable que des solutions existent pour améliorer la fiabilité des examens.
Si, dans certains secteurs, on réforme à tout va, il est impossible de dire que la biologie médicale a subi cet excès : la dernière réforme date de 1975, et elle ne concernait que les laboratoires privés. Trente-trois ans plus tard, l'organisation de cette discipline a été analysée minutieusement avec l'ensemble des acteurs concernés, pendant plus d'un an, et dans toutes ses composantes. La réforme que je propose résulte de ces travaux et s'intègre parfaitement dans le projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires. Ces grandes lignes, énoncées à l'article 20, doivent être débattues dans ce cadre.
J'ai bien sûr conscience que certains points peuvent susciter des préoccupations légitimes : je pense en particulier aux dispositions prévues au 6° de l'article 20, relatives à l'assouplissement des règles de détention du capital des laboratoires
Le capital des sociétés d'exercice libéral de biologie médicale est déjà ouvert à 25 %, et nous pouvons remercier Mmes et MM. les députés de gauche qui ont porté cette réforme. (Sourires sur les bancs des groupes UMP et NC.)
L'ouverture plus large du capital est dissociable de la réforme et n'en constitue pas le coeur. Plusieurs députés ont déposé des amendements visant à supprimer l'alinéa de l'article 20, relatif à ce sujet. Nous en débattrons, mais, sur ce point, je vous annonce d'ores et déjà que le Gouvernement s'en remettra à la sagesse des parlementaires.
Cette question étant clarifiée, je voudrais vous présenter les grandes lignes de la réforme des laboratoires de biologie médicale. L'habilitation permettra au Gouvernement de prendre des mesures visant une série de huit objectifs énoncés à l'article 20.
Premièrement, les laboratoires de biologie médicale publics et privés seront soumis aux mêmes exigences de fiabilité – il est d'ailleurs curieux que cette disposition n'ait pas été prise par la loi de 1975 –, ce qui permettra, notamment, d'éviter les examens redondants et d'améliorer la fluidité des parcours de soins.
Deuxièmement, la qualité des examens de biologie médicale sera mieux garantie grâce à la mise en place d'une procédure d'accréditation. Il s'agit de la modalité internationalement reconnue d'amélioration et de contrôle continu de la qualité, qui est déjà obligatoire pour tous les laboratoires qui participent à des travaux internationaux. Pour avoir une portée internationale, elle doit être menée par l'organisme national d'accréditation, à savoir le Comité français d'accréditation, le COFRAC. Évidemment, la Haute autorité de santé sera aux côtés du COFRAC pour veiller à la cohérence des procédures avec la politique de santé nationale.
Troisièmement, la réforme définira les missions du biologiste, du laboratoire et du personnel technique dans le parcours de soins du patient. Je prends le parti d'une plus grande médicalisation de la biologie – il s'agit en fait du principe cardinal de cette réforme. Le dialogue entre le clinicien et le biologiste sera renforcé et les volumes de prescriptions correspondront mieux aux besoins des patients et à l'évolution des connaissances scientifiques.
Un quatrième objectif – en parfaite cohérence avec la notion de territorialisation, essentielle dans le projet de loi – vise à assurer la pérennité de l'offre de biologie médicale dans le cadre de l'organisation territoriale de l'offre de soins. Une meilleure répartition territoriale de l'activité du laboratoire de biologie médicale est nécessaire et doit garantir le dialogue entre les cliniciens et les biologistes.
La réforme devra également éviter les conflits d'intérêts, et garantir l'autorité du biologiste responsable sur l'activité scientifique et technique du laboratoire de biologie médicale. Elle affirme la responsabilité du biologiste médical sur la qualité de toute la chaîne de production de l'examen et du prélèvement – qui constitue souvent le point faible de la chaîne de qualité – jusqu'au rendu du résultat. Vous examinerez des amendements visant à améliorer la rédaction de cet alinéa.
J'ai déjà traité des dispositions prévues au 6° de l'article 20, elles sont suivies d'un 7° qui prévoit d'adapter les missions des inspecteurs des laboratoires de biologie médicale, pour mieux optimiser leur rôle.
Enfin, un huitième objectif vise à adapter classiquement le régime des sanctions administratives et pénales aux dispositions de la réforme – il s'agit d'un passage obligé.
La réforme de la biologie médicale est très technique et comporte une cohérence globale qu'il importe de conserver. La finalisation du projet d'ordonnance se fera avec vous, et je vous invite à rejoindre le groupe de travail composé de parlementaires qui se saisiront du sujet. Tous les groupes politiques sont les bienvenus, comme je l'ai montré récemment en vous conviant tous à une réunion.
J'espère vous avoir convaincus de la nécessité absolue de commencer cette réforme au plus vite et, en conséquence, de celle de rejeter les amendements de suppression de l'article 20 – notamment compte tenu de mon engagement de m'en remettre à la sagesse de votre assemblée pour la suppression de l'alinéa assouplissant les règles de détention du capital. Ce point qui posait un problème à de nombreux parlementaires, sur tous les bancs, pourrait être mis de côté. Cela permettrait à la réforme, qui, dans sa globalité, a fait l'objet d'une longue concertation avec les professionnels, de conserver son entière cohérence.
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
Madame la ministre, que le statut des laboratoires de biologie médicale doive être réformé, nous n'en disconvenons pas : plus de trente ans nous séparent de la précédente réforme, et un toilettage est sans doute nécessaire. Qu'il s'agisse d'une matière complexe, nous ne le contestons pas non plus. Mais que cette réforme se fasse par ordonnance, sans que le Parlement ne puisse ni se prononcer ni amender votre texte, c'est une autre affaire !
Vous qui avez été longtemps députée, vous savez que le Parlement aime pouvoir se saisir de certains sujets, et améliorer les textes qui lui sont soumis. Votre réforme sera parfaite, nous n'en doutons pas,…
…mais nous pourrions la rendre remarquable.
Comment les parlementaires peuvent-ils accepter cette procédure ? Certes, la Constitution prévoit que les ordonnances doivent faire l'objet d'un projet de loi de ratification pour ne pas être caduques. Mais il suffit au Gouvernement de déposer ce texte pour que la ratification soit considérée comme effective, ce qui ne permet pas aux parlementaires d'amender les ordonnances.
Le passage par voie d'ordonnance est donc difficilement acceptable, surtout au moment où vous souhaitez revaloriser le rôle du Parlement.
La commission a d'ailleurs bien compris la difficulté de l'exercice, et elle a adopté un amendement de suppression de l'article. Le temps nous est compté : en votant cette suppression, nous pourrions passer directement à l'examen de l'article 21. (Sourires.)
Madame la ministre, plusieurs des dispositions que vous proposez pourraient faire l'objet d'un débat et être adoptées, moyennant quelques modifications.
Il en est ainsi de l'harmonisation des régimes juridiques des laboratoires publics et privés – ce point ne devrait pas poser de problème – ; de l'accréditation des laboratoires par un organisme indépendant, qui nous semble nécessaire, ou encore de la définition des missions du biologiste dans le parcours de soins.
Le rôle de ce dernier devrait d'ailleurs être valorisé, en amont comme en aval de l'analyse. Il pourrait ainsi, dans certains cas, selon les premiers résultats obtenus, orienter les examens et décider seul d'effectuer des examens complémentaires pour parvenir au diagnostic sans perte de temps – par exemple en cas d'anémie microcytaire ou macrocytaire. Le biologiste a donc un rôle à jouer dans le cadre de la coopération entre les professionnels de santé.
Certes, tous ces sujets sont techniques, mais ils sont importants. Les dispositions les concernant mériteraient d'être débattues, voire amendées : il n'y a aucune raison pour que le Parlement en soit dessaisi par voie d'ordonnance.
En revanche, la disposition relative à la détention du capital des laboratoires n'est pas acceptable en l'état.
Actuellement, les trois quarts du capital social doivent être détenus par le ou les directeurs et, dans le cas d'une société d'exercice libéral, plus de la moitié du capital social et des droits de vote doivent être détenus par les professionnels en exercice. Il s'agit là d'une sécurité indispensable, qui permet aux professionnels de santé de demeurer responsables de leur outil de travail.
Certes, la Commission européenne fait pression pour que le capital puisse être ouvert à des investisseurs non professionnels. Mais plusieurs instances sont en cours devant la Cour de justice des communautés européennes, et celle-ci n'a pas encore statué. Or il n'est pas impossible qu'elle reconnaisse la nécessité de garantir l'indépendance des professionnels de santé pour assurer une prise en charge appropriée des besoins de la population, comme l'a reconnu l'avocat général pour le médicament.
Il convient donc, à tout le moins, de supprimer le 6° de l'article 20. Sachant, madame la ministre, que, sur ce point, vous vous en remettrez à la sagesse de l'Assemblée, je ne doute pas que cette disposition sera supprimée.
Madame la ministre, ainsi que vous l'avez rappelé, la dernière loi relative au statut des laboratoires de biologie médicale date de 1975. Or, quel métier n'a pas évolué au cours des trente dernières années ? C'est particulièrement vrai de celui de biologiste, puisque, dans ce secteur, on est passé en quelques années de la manipulation des tubes à essai à la biologie moléculaire et aux nanotechnologies. Ce métier s'est ainsi affirmé dans la chaîne de soins.
La loi de 1991 sur l'ouverture du capital a permis de nouveaux modes d'exercice, mais force est de constater que le fonctionnement actuel des laboratoires d'analyses de biologie médicale génère beaucoup d'insatisfaction. Comment pourrait-il en être autrement quand on en est encore à devoir respecter un quota de techniciens et de biologistes en fonction de l'activité ? Cette réglementation désuète mérite donc un examen approfondi, et les dispositions du projet de loi, qui visent à moderniser la biologie médicale, me paraissent aller dans le bon sens.
Sans vouloir entrer dans le débat sur l'opportunité de légiférer par ordonnance, je rappellerai simplement que si l'on consacrait un projet de loi à la biologie, chaque profession médicale en réclamerait un. Mieux vaut donc une ordonnance, bien négociée avec l'ensemble des organisations professionnelles représentatives et soumise à l'examen du Parlement. Or tel est le cas avec cet article 20, puisque nous sommes appelés à nous prononcer sur sept points majeurs de la réforme, notamment le rôle médical du biologiste et la participation financière au capital des laboratoires. À ce propos, je veux saluer, madame la ministre, les efforts de concertation et de dialogue de votre équipe.
Le premier enjeu de cette réforme, c'est la qualité. À cet égard, je serai un peu moins sévère que vous. Je rappelle en effet que, dès 1978, sous l'égide de la Société française de biologie clinique, à l'hôpital Necker de Paris, ont été lancés les premiers contrôles de qualité, bien avant d'autres pays de l'Union européenne. Mais il est vrai qu'au moment où les labos se regroupent, où les diagnostics sont de plus en plus précis grâce aux nouvelles technologies, il convient d'aller plus loin. C'est pourquoi je suis favorable à l'accréditation, à une seule réserve près. Je souhaite que l'on évite de tomber dans les excès de la technocratie et de la paperasserie et que l'on veille à préserver le rôle scientifique du biologiste. N'oublions jamais, par ailleurs, que la médecine ne sera jamais une science totalement exacte.
Quant aux dérives capitalistes, elles existent déjà. Nous savons en effet qu'avec les chaînes de laboratoires, certains tubes font jusqu'à cinq cents kilomètres et que des réseaux de laboratoires sont détenus par des holdings. Pour autant, mes collègues ont eu raison de soulever le problème de l'assouplissement des règles de détention du capital, car l'ouverture de celui-ci n'est pas compatible avec l'amélioration de la qualité. Il convient donc de limiter l'entrée dans le capital des laboratoires, car ce sera un gage de qualité pour la biologie de demain. Nous connaissons les dérives actuelles de la profession, qu'il s'agisse des laboratoires boîtes aux lettres ou des transmissions d'analyse réalisées dans des conditions financières bien mal contrôlées. L'État lui-même, dans le cadre de ses appels d'offre, ferait bien de balayer devant sa porte.
Enfin, quel jeune biologiste peut actuellement accéder à la profession dans des conditions convenables ?
Encore une fois, madame la ministre, les dispositions que vous proposez vont dans le bon sens. Le regroupement de laboratoires permettra en effet d'avoir accès à la qualité et aux meilleures technologies, d'exercer à la fois dans le public et dans le privé – ce qui n'est quasiment pas possible aujourd'hui – et d'harmoniser les laboratoires publics et privés, bref de remettre la biologie au coeur du diagnostic et du suivi thérapeutique. Naturellement, il conviendra de coordonner le dispositif avec la définition des territoires de santé – je pense notamment aux solutions qu'il faudra trouver entre territoires limitrophes – et de se pencher sur les situations de monopole dans certains territoires ainsi que sur la manière dont on peut lutter contre la désertification médicale.
Je prends acte de votre engagement de rencontrer les parlementaires afin d'étudier avec eux et la profession la manière dont on peut bâtir la biologie du futur. Grâce à la meilleure liaison entre public et privé, nous pourrons limiter les dépenses de santé, en supprimant les actes redondants, et lutter contre la désertification médicale. Chacun a bien compris que cette réforme est un enjeu de santé publique. C'est un défi que nous devrons relever ensemble.
Au-delà de l'article 20 et de la question des laboratoires d'analyses médicales, c'est tout le problème du statut de la santé au niveau européen qui est posé : celle-ci est-elle ou non une marchandise ? En effet, suite à la plainte d'un grand groupe financier français, qui demande l'ouverture du capital des sociétés d'exercice libéral gérant des laboratoires d'analyse, la Commission a considéré que la réglementation française de ces sociétés constituait une entrave à la liberté d'établissement prévue à l'article 43 du traité constitutionnel européen.
La Commission persiste ainsi à considérer la santé comme une prestation de service ordinaire, alors que les services de santé ont été exclus de la directive sur les services dans le marché intérieur et qu'une future directive relative aux services de santé est en cours d'élaboration. Je rappelle en outre que l'article 152 du TCE garantit le principe de subsidiarité dans l'organisation des services de santé des États membres.
Ce ne sont pas les députés du groupe SRC qui s'opposeront à la nécessaire réforme du statut des laboratoires d'analyses médicales, comme en témoigne la commission Ballereau. Mais on ne peut que déplorer la méthode employée par le Gouvernement. En effet, non seulement celui-ci entend faire passer la réforme, notamment l'ouverture du capital des laboratoires, par voie d'ordonnance, mais il le fait alors qu'il y a quelques mois, dans le cadre de la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008, l'Assemblée nationale a réaffirmé que le capital social des sociétés d'exercice libéral ayant pour objet l'exercice d'une profession de santé ne peut être détenu au-delà de 25 % par des non-professionnels. Ainsi, le Gouvernement méprise le débat parlementaire en revenant, par ordonnance, sur une mesure que nous avons votée quelques mois plus tôt. C'est, hélas, quoi qu'il en dise, une parfaite illustration la conception que le Gouvernement a du rôle du Parlement.
Madame la ministre, vous avez annoncé que vous vous en remettriez à la sagesse de l'Assemblée sur le vote de l'amendement de suppression de l'alinéa 7 de l'article 20, et nous n'allons pas nous en désoler. Mais prenons garde à ce que nous faisons. En effet, les sociétés d'exercice libéral ne sont pas réservées aux seuls laboratoires d'analyses médicales ; elles sont utilisées par d'autres professions de santé. J'espère que l'alinéa 7 sera supprimé, mais je souhaite que si, un jour, nous avons à examiner une telle mesure, le Gouvernement nous laisse le temps d'en discuter dans le détail.
Je n'étais pas inscrit sur l'article 20, mais les arguments avancés par les orateurs précédents m'amènent à intervenir. C'est en effet le rôle même du Parlement dans une démocratie comme la nôtre qui est en jeu.
Nous avons passé, dans cet hémicycle comme à Versailles, beaucoup de temps à examiner un projet de révision constitutionnelle censé confier au Parlement un rôle plus important, de nature à rééquilibrer les pouvoirs du Président de la République. Or, force est de constater qu'il n'en est rien : il suffit de lire la loi adoptée par le Congrès pour s'en convaincre. C'est d'ailleurs pourquoi nous avons voté contre ce texte. La première de ses dispositions à être entrée en vigueur vise tout de même à permettre aux ministres qui quittent le Gouvernement de retrouver aussitôt leur siège à l'Assemblée, afin de leur éviter de devoir défendre leur bilan au cours d'une élection partielle !
Par ailleurs, nous constatons, depuis le début de la législature, qu'au moins tous les projets de loi importants ont fait l'objet d'une déclaration d'urgence, ce qui signifie une lecture dans chaque chambre. Le Gouvernement a même réussi un tour de force extraordinaire, en soumettant au Sénat un projet de loi, celui sur l'audiovisuel, dont une partie des dispositions étaient déjà appliquées ! Qu'on arrête donc de proclamer que l'on veut revaloriser le rôle du Parlement : nous attendons des preuves. Or, pour le moment, nous n'avons que des preuves de l'abaissement du Parlement.
Enfin, faut-il rappeler que le Gouvernement et sa majorité se sont débrouillés pour que le fameux article 13 du projet de loi organique, qui limite le droit d'amendement des députés, soit voté conforme au Sénat pour que l'Assemblée ne puisse pas en rediscuter ? Je précise d'ailleurs que les sénateurs ont exclu que cette disposition s'applique à la Haute assemblée. C'est tout de même un comble !
S'agissant de l'article 20, on prétend qu'une ordonnance est nécessaire pour réformer le statut des laboratoires d'analyses médicales. De deux choses l'une : soit il s'agit de mesures extrêmement techniques relevant du domaine réglementaire, et nous devons au moins examiner un projet de loi définissant le cadre de cette réforme, soit il s'agit de mesures importantes relevant du domaine législatif et nous devons en discuter. En commission, on nous a dit – cela doit figurer dans le compte rendu – que la matière étant très complexe, il fallait laisser faire les techniciens. Mais nous ne sommes pas plus bêtes que ceux qui rédigent les textes, et les électeurs nous ont élus pour que nous en discutions. Aucun argument sérieux ne justifie que le Parlement ne soit pas saisi d'un tel texte.
Madame la ministre, nous avons tous rencontré, dans nos circonscriptions des biologistes qui s'alarment de la réforme en préparation. Pourtant, tous sont convaincus de la nécessité de réformer la profession, ne serait-ce que parce qu'ils reconnaissent que leur efficience n'est pas optimale et que des artifices juridiques permettent de contourner la législation actuellement en vigueur sur la détention du capital. Sur le principe, nous ne sommes donc pas effrayés par l'article 20, exception faite de son alinéa 7.
Si ce que vous nous avez expliqué nous paraît de bon augure, vous conviendrez que vous nous demandez de vous accorder un blanc-seing, dans la mesure où une ordonnance n'a, à ma connaissance, pas vocation à être soumise au débat au Parlement. Il est donc nécessaire que nous prenions connaissance de ses modalités détaillées. Comme l'a dit notre collègue Jean Mallot, pour techniques qu'elles soient, les dispositions en question sont certainement à la portée des parlementaires qui débattent de ce projet de loi. Nous souhaitons par conséquent que nous soient fournies des explications aussi précises que possible afin de nous permettre de prendre position en toute connaissance de cause sur la question de l'ouverture au capital et sur les différents intérêts en présence.
La parole est à M. Jean-Marie Rolland, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
Je souhaite prendre la parole au sujet de l'article 20 afin de rappeler quelques points au sujet de cet article qui a suscité des inquiétudes auprès des professionnels. Peut-être certains éléments d'information faisaient-ils défaut lors de la discussion en commission, ce qui pourrait expliquer que plusieurs amendements aient été votés contre l'avis du rapporteur. Je vais donc m'efforcer de préciser la position qui est la mienne.
Je suis de ceux qui considèrent que la réforme des laboratoires est indispensable si l'on veut que les patients puissent bénéficier d'examens de la meilleure qualité possible, en particulier dans le domaine de la biologie. Cette réforme est inéluctable si l'on considère l'étendue des progrès qui ont été accomplis dans le domaine de la science et de la technique en biologie, mais aussi l'évolution en matière d'exigence des médecins et d'attente de la population depuis la dernière réforme de 1975. L'article 20 propose une réforme raisonnable et conforme à la tradition de nos laboratoires. L'excellent rapport de Michel Ballereau fait bien apparaître que pour réformer la biologie, deux chemins peuvent être empruntés : soit un modèle industriel, dans lequel les laboratoires se consacrent à titre principal aux activités d'analyse des prélèvements, soit un modèle valorisant le rôle médical du biologiste en amont et en aval de l'analyse. C'est ce choix, conforme à la tradition de la biologie française, qui a été fait, et auquel je suis personnellement très attaché. D'autres pays européens ont opté pour l'autre voie.
Parmi les craintes exprimées par les personnes que nous avons auditionnées ou rencontrées lors des dernières semaines, figurent celles relatives à l'ouverture du capital des laboratoires. Votre rapporteur partage les craintes de ceux qui ne souhaitent pas une telle ouverture et, afin que les choses soient claires, je précise qu'un amendement n° 1253 rectifié répondra à cette préoccupation. Une telle ouverture du capital n'est pas nécessaire. La Cour de justice des Communautés européennes doit préciser prochainement son interprétation du droit communautaire en la matière et mieux vaudra légiférer en pleine connaissance du droit communautaire applicable. L'ouverture du capital n'est pas non plus avisée : tant que la réforme structurante proposée par l'article 20 n'est pas mise en oeuvre, l'ouverture du capital conduirait à l'industrialisation, que nous ne souhaitons pas. Cela permettrait peut-être de diminuer certains tarifs, mais risquerait surtout de se traduire par un dérapage en termes de volumes d'examens, comme cela a été le cas chez nos voisins d'outre-Rhin qui avaient fait ce choix stratégique.
Enfin, le recours à l'ordonnance me paraît justifié pour trois raisons. Premièrement, il s'agit d'une réforme extrêmement technique. (« Ah ! » et sourires sur les bancs du groupe SRC.) J'en vois parmi vous qui affichent un sourire sarcastique, mais je les mets au défi de se colleter avec chacun des articles de cette réforme ! Deuxièmement, l'article 20 tel qu'il va vous être proposé – c'est-à-dire sans son alinéa 7 portant sur l'assouplissement des règles relatives à la détention du capital – fixe les orientations principales de la réforme. Troisièmement, enfin, je vous rappelle, mes chers collègues, la réforme constitutionnelle qui a été adoptée le 23 juillet dernier à Versailles. Aux termes de cette réforme modifiant l'article 38 de la Constitution, les ordonnances ne peuvent être ratifiées que de manière expresse, ce qui signifie qu'un rapporteur sera nommé et que l'ordonnance sera examinée en commission avant de faire l'objet d'un débat en séance publique.
Pour résumer, il est important de repousser les amendements visant à la suppression totale de l'article 20. En revanche, je vous proposerai d'empêcher toute ouverture du capital des laboratoires et de renforcer l'autorité des biologistes sur la direction des laboratoires.
Cette réforme de la biologie médicale est, dans son esprit, une réforme de la qualité des soins. Le rapport de Michel Ballereau, qui a été unanimement salué, y compris au sein de la profession, a été élaboré avec la participation des professionnels, des sociétés savantes, des élus – j'ai moi-même invité tous les élus concernés à des réunions de travail sur le texte et je souligne que personne ne m'a jamais fait part, lors de ces réunions, de son désaccord sur l'un des points techniques du texte.
Les seuls points ayant suscité des réserves portaient sur la gouvernance – précisément ce qui fait l'objet de notre débat préliminaire sur l'ordonnance, pour répondre à M. Préel et à M. Mallot. Je crois que nous devons faire preuve de prudence et nous garder d'extrapoler à partir des conclusions déposées récemment par l'avocat général dans deux affaires portées devant la Cour de justice des communautés européennes relatives au monopole des pharmaciens. Ne confondons pas entre les conclusions de l'avocat général et la décision de la Cour, qui n'a pas encore été rendue – d'autant que ces conclusions portaient sur les pharmacies d'officine. Or, le capital des pharmacies d'officine n'est pas ouvert aux non-pharmaciens. Il faut dire que dans ce contentieux européen, nous sommes très gênés par la décision que vous avez prise d'ouvrir le capital à 25 % – s'il peut être ouvert à 25 %, pourquoi ne le serait-il pas à 35 % ou à 45 % ? Nous nous retrouvons avec un vrai caillou dans la chaussure ! Nous verrons bien quelle sera la décision rendue par la Cour, mais gardons-nous bien de toute comparaison hasardeuse.
Philippe Vigier a souligné la qualité du travail effectué par les laboratoires de biologie. Si je ne nie pas que la qualité soit présente, force est de reconnaître qu'elle est inégale : les résultats d'une enquête portant sur plus de la moitié des régions montrent qu'environ dix laboratoires sont suspendus ou fermés chaque année pour insuffisance de qualité – un chiffre d'autant plus significatif que le nombre d'inspections est, on le sait, insuffisant. Sur le plan technique, les systèmes qualité s'imposant actuellement à tous les laboratoires sont le guide de bonne exécution des analyses et le contrôle national de qualité. La certification représente seulement une partie de l'accréditation délivrée par l'association Bio Qualité, une association de professionnels créée en 2002. Environ 2 800 laboratoires sont engagés dans la démarche Bio Qualité, une démarche intéressante et constituant un soutien méthodologique vers l'accréditation.
Philippe Vigier m'a également interrogée sur les situations de monopole. Ces situations existent déjà : il n'y pas d'un côté les capitalistes, de l'autre les biologistes !
C'est justement tout l'intérêt de ce que je vous propose, à savoir la médicalisation de la biologie médicale. Pour ce faire, j'inclus dans le texte un certain nombre de règles prudentielles qui devraient convaincre l'unanimité de votre assemblée. Ces règles prudentielles ont pour objectif de garantir l'autorité du biologiste responsable sur l'activité du laboratoire de biologie médicale, et de ne pas faire dépendre l'offre de biologie médicale sur un territoire de santé des aléas liés aux mouvements financiers. Il s'agira, outre l'instauration d'une taxation dissuasive des plus-values, d'éviter les conflits d'intérêts au moyen de règles d'incompatibilité et de l'interdiction de détention directe ou indirecte d'une fraction du capital social ; d'exiger l'identification des personnes morales et des personnes physiques détenant directement ou indirectement une fraction du capital social du laboratoire de biologie médicale ; de permettre au directeur général d'une ARS de s'opposer à la modification de structure d'un laboratoire si cette modification doit lui donner une position dominante qui fragiliserait l'offre de soins. Le schéma régional de l'organisation sanitaire définira le nombre de laboratoires et de sites souhaitables et constituera ainsi la doctrine de l'ARS, rendue publique. Il sera également proposé de permettre une pluralité de l'offre, une personne physique ou une personne morale ne pouvant détenir directement ou indirectement une fraction du capital social dans plusieurs laboratoires situés sur un même territoire de santé ou deux territoires de santé contigus.
Nous avons donc résolument élaboré, avec ce texte, une démarche prudentielle marquant une véritable avancée par rapport aux situations de monopole dénoncées à juste titre. J'ai bien noté, mesdames et messieurs les députés, que vous étiez particulièrement attentifs aux questions de gouvernance. Vous allez avoir la possibilité de voter un amendement de suppression qui devrait complètement vous rassurer. Grâce aux avancées qu'il comporte, ce texte devrait rassurer aussi bien la gauche que la droite de cette assemblée.
Enfin, je note qu'aucun de vous n'a remis en cause le remarquable travail technique qui a été effectué par les experts sous la conduite de Michel Ballereau, que je veux remercier.
Je profiterai de cette occasion pour répondre à Mme la ministre, qui n'a pas vraiment compris nos critiques ni complètement levé nos inquiétudes. La priorité des priorités n'est pas, pour nous, de rassurer les détenteurs de capitaux des laboratoires de biologie. Ce ne devrait pas être non plus le souci majeur du Gouvernement. Or vous avez beaucoup insisté, madame la ministre, sur le fait qu'il fallait rassurer un certain nombre de détenteurs de capitaux, certes modestes, à tout le moins s'agissant d'une profession qui a déjà connu des concentrations, des industrialisations. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Comme travestissement de mes propos, ce n'est pas mal !
Je n'ai pas l'impression de dire des choses très choquantes, chers collègues.
Eh oui ! On a bien compris que tel était l'objet de ces dispositions. Nous, nous ne sommes pas contre les riches, ni contre les petits, ni contre les gros. Nous sommes pour la justice et, en l'occurrence, nous voulons surtout que les choses fonctionnent bien pour les patients, car c'est toujours leur intérêt qui devrait nous guider.
Madame la ministre, je n'ai pas tellement noté cette préoccupation dans vos propos, même s'ils marquent une évolution sensible par rapport au texte initial (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP), dans le sens de la défense des petits riches. Certes, nous partageons votre empathie, mais le fait que les petits riches aient de l'avenir et puissent espérer vendre demain peut-être encore un peu plus cher les parts de leur laboratoire de biologie ne nous transporte pas vraiment ni ne nous rassure complètement.
Comme vous l'avez dit, au-delà de tout cela, il y a des contraintes européennes. Or, en biologie comme en pharmacie, des textes sont en préparation au niveau européen dont l'issue est incertaine, ce que nous ne saurions reprocher au Gouvernement. Mais cela montre la limite de nos propos aujourd'hui.
Pour le reste, je m'inquiète de la qualité et de la nature même des normes qui sont imposées. Bien sûr, nous souhaitons tous que ces dernières aillent toujours en s'améliorant. Il importe cependant qu'elles ne rendent pas « irréelle » la pratique de la biologie. De ce point de vue, je ne suis pas convaincu par le fait que l'organisme qui va être chargé des normes ait délégué une partie de l'autorité que nous avions confiée à la Haute autorité de santé. Les professionnels industriels seront représentés paritairement. À travers le jeu des normes, que nous avons à mon sens trop délégué au-delà de la puissance publique, il y a peut-être le risque de dérive d'un système que nous ne contrôlerons plus sur le fond.
J'ai souhaité répondre à vos interpellations, madame la ministre, lorsque vous avez évoqué le fameux seuil de 25 % . Comme si nous avions, nous, introduit, dans la société française la notion de capitalisme…
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Eh oui !
…ce qui, malgré les discours récents du Président de la République, est exagéré.
Il est vrai qu'en matière de nationalisation, cette majorité est en train de battre tous les records. Je ne sais si elle s'en targue sur le plan idéologique. Chers collègues, ne faites pas pour autant de nous les grands capitalistes qui ont introduit le ver dans le fruit.
Cela vous gêne ?
Ainsi, donc, madame la ministre, c'est cela que vous vouliez démontrer ! Nous sommes loin de l'efficacité du système de santé et proches des petits riches.
Je saisirai moi aussi cette occasion pour répondre à Mme la ministre qui nous a expliqué que le texte de l'ordonnance serait « extrêmement technique ». Merci du compliment : nous sommes des benêts et nous ne comprenons rien ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Ai-je dit cela ?
C'est assez cocasse ! Vous allez rédiger toute seule, avec l'aide de technocrates tout à fait respectables, un texte « extrêmement technique », puis vous allez nous le soumettre pour ratification. Mais nous n'aurons plus qu'à nous incliner devant ce texte « extrêmement technique » auquel nous ne comprendrons rien ! On ne peut pas invoquer un argument et son contraire dans la même phrase. Encore une fois, ou bien ce texte est « extrêmement technique » et il ne faut jamais nous le montrer, ou bien on peut l'examiner et, dans ces conditions, pourquoi n'en discuterions-nous pas en amont au lieu de nous contenter de le ratifier, les yeux fermés, en disposant à peine du droit de formuler quelques propos dans une discussion générale ?
Toujours aussi cocasse, vous nous reprochez, madame la ministre, de ne pas avoir formulé d'observations techniques sur le contenu du dispositif proposé par M. Ballereau dans son rapport. Mais ce rapport n'est pas à l'ordre du jour de ce débat ! Nous sommes saisis d'un article 20 censé vous autoriser à prendre par ordonnance des dispositions. Si nous étions entrés dans la discussion du rapport Ballereau et du dispositif que vous vous apprêtez à présenter, nous discuterions précisément du projet de loi dont vous ne voulez surtout pas que nous débattions. Soyez cohérente !
Pourquoi n'êtes-vous pas venu en discuter ?
De deux choses l'une : soit vous voulez qu'on discute du rapport Ballereau et du dispositif proposé pour réformer les laboratoires, et vous nous soumettez un projet de loi dont nous débattrons le temps nécessaire et avec le sérieux qu'il convient, soit vous souhaitez simplement qu'on vous donne un blanc-seing. Dans ce dernier cas, ne nous reprochez pas de ne pas aborder le fond. Allez au bout de votre démarche et assumez le fait que nous sommes trop bêtes pour comprendre le contenu de ce texte « extrêmement technique ». (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-Sébastien Vialatte, pour soutenir l'amendement n° 198 .
Madame la ministre, j'avais déposé cet amendement de suppression pour deux raisons. D'abord, une raison de forme car le recours aux ordonnances ne me paraissait pas indispensable. Mais le travail effectué par M. Ballereau, qui propose en effet un texte extrêmement technique, justifie peut-être cette procédure. Ensuite, une raison de fond du fait de l'ouverture du capital des laboratoires de biologie médicale. Je craignais en effet une industrialisation de la profession, qui se serait immanquablement traduite par une concentration des laboratoires et la désertification de divers territoires, et la position dominante de certains capitaux. Le fait que vous supprimiez l'alinéa modifiant les règles du capital m'incite à retirer cet amendement.
Madame la ministre, j'ai cependant été chagriné par les propos que vous avez tenus sur la qualité. Je rappelle que la profession de biologiste est la première, et la seule, des professions médicales ayant accepté un guide de bonnes pratiques opposables. Elle a également accepté la mise en place d'un contrôle national de qualité et se soumet très régulièrement à ces obligations de contrôle.
Pour le reste, je considère que votre texte va dans le bon sens, s'agissant notamment de la médicalisation de la profession. L'accréditation est une très bonne chose si la procédure n'est pas trop tatillonne et n'oblige pas les biologistes à passer plus de temps à rédiger des formulaires qu'à pratiquer la biologie.
Compte tenu de l'ensemble de vos propos, je ne voterai pas les amendements de suppression de l'article.
Le groupe GDR a déposé cet amendement de suppression car il considère que le Parlement doit pouvoir débattre et légiférer sur cet important sujet. Nous n'acceptons pas que la réforme de la biologie médicale soit renvoyée à une ordonnance.
Vous avez dit, madame la ministre, que cette réforme était un élément crucial du parcours de soins. Un de mes collègues a même déclaré qu'il s'agissait de bâtir la biologie du futur. Alors que les enjeux sont considérables, vous ne nous donnez pas le droit d'en débattre. Excusez du peu ! Il y a là une contradiction que nous ne saurions accepter. Même si vous avez fait une ouverture sur l'alinéa 7, cet article comporte encore des mesures extrêmement importantes, notamment à l'alinéa 2. Lorsqu'il s'agit d'harmoniser les dispositions applicables aux laboratoires publics et privés, souffrez que le Parlement puisse en débattre et s'assurer que cette harmonisation ne se fasse pas au détriment du public.
Votre argument massue consiste à dire que le débat est trop technique pour que nous puissions nous en saisir. Mon collègue Mallot vient de donner à l'instant les raisons pour lesquelles cet argument n'était pas recevable, comme n'est pas recevable celui selon lequel nous n'aurions pas transmis d'observations sur un rapport dont nous ne sommes pas officiellement saisis, comme n'est pas recevable l'argument consistant à dire que nous n'aurons qu'à participer au groupe de travail que vous constituerez. Nous sommes là pour faire notre travail. Et nous devrions, d'une même voix, sur l'ensemble de ces bancs, nous opposer à ce dessaisissement sur une question que vous nous présentez, encore une fois, comme tout à fait cruciale.
Enfin, monsieur le rapporteur, j'ai été surpris que vous repreniez les arguments du Gouvernement sur le caractère « technique » de ce projet. Si le Gouvernement déposait un projet de loi sur la réforme de la biologie médicale, la commission en serait évidemment saisie et aurait tout le loisir et la possibilité de passer le temps nécessaire sur un sujet considéré comme « technique » mais dont on voit bien les enjeux. Je rappelle qu'en vertu de la révision constitutionnelle, applicable depuis le début de la semaine, c'est sur le texte de la commission que devrait s'engager en séance le débat sur ce projet de loi. Le rôle du Parlement serait respecté et la commission effectuerait alors le travail nécessaire sur les différentes dispositions. C'est la raison pour laquelle j'invite l'ensemble de mes collègues, quels que soient les bancs sur lesquels ils siègent, à voter ces amendements de suppression.
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l'amendement n° 1353 .
Madame la ministre, vous avez déclaré vous en remettre à la sagesse de l'Assemblée à propos de l'alinéa 7, qui concerne la détention du capital. Certes, mais les règles de détention du capital ont une incidence sur tous les autres alinéas.
Elles ont une incidence sur l'alinéa 4 et l'efficience des dépenses de santé, car je ne suis pas sûre que l'ouverture du capital à des fonds d'investissements qui ne sont pas détenus par des professionnels de santé aboutisse obligatoirement à une diminution des dépenses. On sait bien que la libéralisation – puisqu'en l'occurrence il semble bien que la santé aille rejoindre la corbeille du marché – n'est pas toujours garante d'économies.
Elles ont une incidence sur l'alinéa 5 et l'organisation territoriale de l'offre de soins, car je ne suis pas non plus certaine qu'en ouvrant le capital des laboratoires à de grands investisseurs, dont le seul but sera de s'assurer des bénéfices financiers, on n'assiste pas à une raréfaction de l'offre.
Elles ont une incidence enfin sur l'alinéa 6, qui vise à éviter les conflits d'intérêts. Là encore, l'ouverture du capital des laboratoires d'analyses risque de se faire au profit de ces mêmes investisseurs qui ont déjà investi dans nos cliniques privées, avec ce que cela suppose de conflits d'intérêts si, par exemple, dans une même région, Blackstone investit à la fois dans des cliniques et dans des laboratoires d'analyses.
Il n'est donc pas très cohérent d'aborder la discussion de ces alinéas, avant celle de l'alinéa 7, qui détermine les conditions de l'ouverture du capital. C'est la raison pour laquelle je soutiens cet amendement de suppression déposé par le groupe SRC.
Ces amendements de suppression ont été adoptés par la commission contre l'avis du rapporteur. Il me semble en effet que cette réforme est indispensable et inéluctable, et qu'elle garantit la pérennité du modèle médical auquel nous tenons tous.
Sans revenir sur la procédure de recours aux ordonnances, je répète qu'il me semble nécessaire d'empêcher toute ouverture du capital des laboratoires et de renforcer l'autorité des biologistes. Je vous invite donc à repousser ces amendements.
Avis défavorable.
Monsieur Le Guen, je vous trouve sévère à l'égard de notre ministre, même si je ne suis pas le plus ardent de ses défenseurs.
Vous étiez là ce matin en fin de séance, mais, si vous étiez arrivé plus tôt, vous auriez entendu la ministre parler de contrôle, de cohérence et de transparence – autant de termes qui rejoignent nos souhaits.
Je partage votre inquiétude sur la nature des normes et celle du rapporteur sur la préservation de nos laboratoires. Il ne s'agit pas ici de « petits riches », monsieur Le Guen, mais d'empêcher la désertification de nos territoires en y assurant la survie de cette profession.
Une ouverture contrôlée du capital me semble donc importante, et c'est la raison pour laquelle je voterai contre ces amendements.
Voter cet amendement de suppression signifie qu'il nous faudra attendre une deuxième loi, mais dans combien de temps ? Tous ici, nous ne cessons de dire qu'il y a urgence à agir pour contrer l'accélération de la financiarisation de la biologie médicale à laquelle nous assistons depuis quelques mois. S'il nous faut attendre encore dix-huit ou vingt-quatre mois, demandons-nous quel stade aura atteint le démantèlement des laboratoires existants.
Il ne s'agit pas de la défense des « petits riches », monsieur Le Guen. Ce n'est pas nous qui avons voulu la loi de 1990, mais le système, victime de ses insuffisances et des dérives qu'elles entraînent, ne fonctionne plus aujourd'hui. D'autant que se posent également le problème de la qualité des soins et celui de l'harmonisation européenne et de la concordance des diplômes.
J'étais moi-même, au départ, défavorable à l'idée d'une ordonnance, mais, en tant que médecin, je songe à tous ces jeunes qui ont quitté la faculté et se demandent dans quelles conditions ils vont pouvoir exercer cette profession. Il faut donc faire vite.
Nos amendements restreignent l'accès au capital, car chacun sait qu'aujourd'hui il existe des holdings qui chapeautent les sociétés d'exercice libéral. Soit nous mettons un terme à cette dérive capitalistique, soit nous laissons les choses en l'état, mais alors, dans deux ans, la casse sera importante !
Que nos collègues qui militent contre l'industrialisation du capital aillent au bout de leur raisonnement. Deux ou trois grandes firmes peuvent fort bien assurer demain des prélèvements de proximité, et cette idée de proximité et de maillage des territoires est un faux argument. La vraie question concerne la « remédicalisation » de la biologie.
Je ne dis pas que cela soit facile, mais il s'agit du coeur du problème, car, je l'ai dit, pour ce qui concerne la production de soins de qualité, vous n'avez pas beaucoup d'arguments. La recherche de cette qualité pousse d'ailleurs à l'industrialisation et à la concentration du capital. D'autre part, vos marges de manoeuvre sont limitées en la matière, car, sans présumer des jugements européens, il me semble que la France campe sur une position plutôt isolée.
Si le problème n'est pas de savoir à quel prix les professionnels concernés vont vendre leur fonds de commerce – ce qui n'est pas le sujet qui nous occupe – mais de défendre cette profession, il faut s'attacher à repenser le statut et la manière dont, demain, le médecin biologiste exercera son métier.
Et le pharmacien !
Vous avez raison, madame la ministre. D'ailleurs, la réflexion est mieux engagée pour ce qui concerne la pharmacie que la biologie.
Efforçons-nous donc de « remédicaliser » la biologie plutôt que de combattre l'industrialisation, laquelle est inhérente au progrès technique. À moins que la recherche de la performance ne nous intéresse plus, mais avouez qu'il y aurait un paradoxe à exiger d'un côté des hôpitaux qu'ils restent dans les clous…
… sans exiger, de l'autre, une efficience maximum en matière de soins complémentaires.
La financiarisation des modes de production devrait enfin nous permettre d'être plus exigeants sur les tarifs, car nous avons bien vu, avec la mise en place de la T2A, que les cliniques qui ont profité de l'industrialisation des soins ont aussi profité d'avantages tarifaires – nous en avons déjà parlé et je n'y reviens pas, mais si les cliniques privées ont de meilleurs résultats que les hôpitaux, c'est sans doute parce que, grâce à l'industrialisation et à ces avantages tarifaires, elles ont réussi à dégager des marges financières.
Je suis saisie de quatre amendements, nos 130 , 579 , 1273 rectifié et 1252 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 130 , 579 et 1273 rectifié sont identiques.
L'amendement n° 130 est défendu...
La parole est à M. Philippe Vigier, pour défendre l'amendement n° 579 .
Nous souhaitons rendre au biologiste la place centrale qui lui revient. Pour cela, il ne doit plus être un simple exécutant mais, lorsqu'il est en charge d'un laboratoire, avoir la pleine autorité sur la gestion des ressources humaines, le choix des automates et des technologies à mettre en place. C'est à nos yeux un gage de qualité des soins. Notre amendement précise donc la rédaction de l'alinéa 6 sur les responsabilités du biologiste en charge d'un laboratoire.
La commission a repoussé ces amendements qui visent à garantir l'autorité du biologiste médical sur l'ensemble de l'activité du laboratoire, car ils seront satisfaits par l'amendement n° 1252 qu'elle a adopté.
Tout en souscrivant aux objectifs défendus par ces amendements, je préfère l'amendement n° 1252 , qui conserve la notion de biologiste responsable.
(Les amendements nos 130 , 579 et 1273 rectifié sont retirés.)
Cet amendement vise à établir l'autorité du biologiste responsable sur l'ensemble de l'activité du laboratoire, en proposant une rédaction juridiquement plus précise.
(L'amendement n° 1252 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Il s'agit de supprimer l'alinéa concernant l'assouplissement des règles de laboratoire. Mais le rapporteur a déposé un amendement identique et Mme la ministre a indiqué qu'elle s'en remettrait à la sagesse de l'Assemblée.
Nous en discutons depuis un moment : nous ne souhaitons pas l'ouverture du capital au-delà de ce qui existe aujourd'hui. Dans la mesure du possible, les professionnels doivent rester propriétaires de leur outil de travail.
La sagesse ayant été demandée, ces amendements seront votés, je n'en doute pas.
La parole est à M. Jean-Marie Rolland, pour défendre l'amendement n° 1253 rectifié .
C'est un amendement de suppression de l'alinéa. L'assouplissement des règles de détention du capital de laboratoires paraît prématuré pour deux raisons principales : d'une part, rien ne nous y contraint aujourd'hui puisque la Cour de justice européenne doit se prononcer prochainement ; d'autre part, tant que la réforme proposée par l'article 20 n'a pas été mise en oeuvre, l'industrialisation du secteur que nous sommes quelques-uns à craindre risque de se traduire par un dérapage des volumes d'examens. Je vous propose donc d'adopter cet amendement.
Notre amendement vise, comme les précédents, à supprimer l'alinéa 7 de l'article 20.
Mais ce n'est pas seulement pour les raisons qui viennent d'être indiquées – pas seulement parce que ce serait prématuré par rapport à l'évolution de la législation européenne, pas seulement parce que la réforme de l'article 20 n'est pas encore en application.
Le groupe GDR s'oppose sur le fond à un assouplissement qui serait, à l'évidence, synonyme de déréglementation capitalistique, et qui n'aurait pour conséquence que de transformer les laboratoires de biologie médicale en établissements à but lucratif, uniquement préoccupés de rentabilité – avec toutes les conséquences que cela pourrait avoir.
La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour défendre l'amendement n° 1354 .
Je soutiens bien sûr, comme l'ensemble de mes collègues de l'opposition, cet amendement de suppression.
Je voudrais ajouter un autre argument : se lancer dans l'ouverture du capital à des non-professionnels au-delà de 25 % pose la question de la sécurité des données personnelles de santé, dès lors que celles-ci tomberaient aux mains de groupes ayant aussi des activités d'assurance ou de prêt.
Ces grands groupes financiers, ces grands investisseurs – qui sont dans les cliniques et qui seraient dans les laboratoires – signeront aussi des contrats d'assurances : ils pourront sans doute, à un moment donné, se partager les données, puisque ce sont eux qui tiennent tout.
Ne nous lançons pas dans l'ouverture du capital de manière inconsidérée : au-delà des économies à court terme, nous mettrions le doigt dans un engrenage périlleux.
Sagesse.
(Les amendements identiques nos 505 , 580 , 1253 rectifié , 1291 et 1354 sont adoptés.)
En conséquence, les amendements nos 131 rectifié , 176 rectifié , 582 , 1314 , 1276 rectifié et 1327 tombent.
(L'article 20, amendé, est adopté.)
Sur l'article 21, je suis saisie d'un amendement n° 442 .
La parole est à M. le rapporteur.
Il s'agit de supprimer une mention inutile.
(L'amendement n° 442 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Précision rédactionnelle : pour que l'ordonnance prévue puisse comporter des dispositions de coordination, il paraît cohérent de ne pas limiter le champ des dispositions législatives qu'elle pourra modifier.
Avis favorable, sous réserve de l'adoption du sous-amendement n° 2027 .
Celui-ci permet en effet d'apporter les corrections nécessaires au dispositif de reconnaissance des titres de formation obtenus dans un État membre de l'Union européenne ou partie à l'espace économique européen, et pas seulement à la procédure de reconnaissance des diplômes obtenus dans un État tiers.
Je suis saisie d'un amendement n° 444 .
La parole est à M. le rapporteur.
Précision rédactionnelle.
(L'amendement n° 444 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 445 .
La parole est à M. le rapporteur.
Suppression d'une mention inutile.
(L'amendement n° 445 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 21, amendé, est adopté.)
Nous en arrivons aux amendements portant articles additionnels après l'article 21.
Avis défavorable, à défaut de retrait. J'ai longuement argumenté hier sur ce sujet – je suis certaine que M. Bur s'en souvient.
Je suis saisie d'un amendement n° 446 .
La parole est à M. le rapporteur.
Cet amendement a pour objet les aides consenties par les industries de santé aux associations agréées d'usagers du système de santé. Il apparaît que la transparence financière est absolument nécessaire à la crédibilité des associations d'usagers.
Je rappelle à nos collègues que, pour promouvoir cette transparence et compte tenu du rôle de plus en plus important des associations de malades, il a paru utile au législateur que soient connus les liens financiers qui pourraient exister entre les entreprises et ces associations.
Nous avons souhaité toute la journée clarté et transparence : il est important d'appliquer ce principe dans tous les domaines. La loi du 26 février 2007 prévoit la publication de ces aides, mais le décret d'application n'est pas paru : je profite de cet amendement pour vous interroger, madame la ministre, sur cette situation. Où en est-on ?
Cet amendement vise à rendre directement applicable l'obligation pour les entreprises commercialisant ou fabriquant des produits de santé de transmettre à la Haute Autorité de santé, pour publication, la liste des aides de toutes natures qu'elles ont versées aux associations de patients.
Il est évidemment indispensable de progresser vers plus de transparence dans ce domaine : cela a été dit sur tous ces bancs à propos des différents dossiers.
Toutefois, la liste intégrale des produits de santé potentiellement concernés par cette mesure dépasse à l'évidence très largement le champ de compétences de la Haute Autorité de santé, qui n'a à connaître que des produits de santé faisant l'objet de remboursements par l'assurance maladie.
En outre, votre proposition prévoit un délai très court pour la transmission par les entreprises concernées de la liste des associations de patients et du montant des aides qu'elles leur versent. Je remarque que cela concerne potentiellement un ensemble d'aides très vastes, financières, matérielles, de prestations de services, fournies par des milliers d'entreprises fabriquant et commercialisant des produits de santé.
On imagine donc les difficultés qu'il pourrait y avoir à mettre en oeuvre ces dispositions.
L'écriture d'un décret qui précise les modalités d'application de cette obligation de transparence est en cours. Une concertation a lieu avec les associations de patients et les entreprises représentatives du secteur afin d'élaborer le décret d'application prévu à l'article L. 1114-1 du code de la santé publique ; il est encore trop tôt pour vous donner une échéance précise, mais je pense que nous pourrions disposer du texte du décret au cours du deuxième trimestre de cette année.
Nous vivons décidément de grands moments dans cet hémicycle ! On veut de la transparence, mais une transparence quelque peu dirigée.
Si, bien évidemment, le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, votera l'amendement du rapporteur, je souligne que, lorsque nous avons voulu ce matin introduire de la transparence dans les interventions de l'industrie pharmaceutique dans la formation initiale et continue des médecins, comme dans les pratiques professionnelles, on nous a répondu que c'était beaucoup trop compliqué. Ainsi, pas de transparence. Mais pourquoi donc ce qui convient pour les usagers ne convient-il pas pour le corps médical, pour les professionnels de santé ?
Nous voterons donc cet amendement n° 446 , en insistant notamment sur les produits remboursés : cela nous aidera à parler d'éducation thérapeutique à l'article 22.
J'ai été l'auteur, lors de la transposition de la directive européenne sur le médicament en 2006, de cette disposition qui obligeait les laboratoires pharmaceutiques à rendre public leur soutien à des associations. Pourquoi ?
Il nous semblait relativement facile d'utiliser les associations – en jouant, de plus, sur la compassion – pour essayer d'influencer un certain nombre de décisions des pouvoirs publics. Je pourrais citer quelques exemples.
Cet article avait alors été adopté, mais cela fait maintenant trois ans. C'est parce que j'avais le sentiment que, décidément, les choses traînaient en longueur, que j'ai proposé à nouveau cet amendement : il s'agit de contraindre l'administration de la santé à avancer. On peut parfois avoir le sentiment que l'on essaye de jouer la montre, sur des sujets qui sont importants.
Nous avons, ce matin, abordé le sujet des prescripteurs – des enseignants en faculté de médecine aux animateurs de télévision. Je veux rappeler les efforts faits ces dernières années pour contraindre l'ensemble de la filière pharmaceutique à dépenser moins, notamment à travers une restriction drastique de la visite médicale : c'est de cette manière-là aussi, je crois, que l'on arrivera à améliorer les résultats – en évitant par exemple que certains médecins ne subissent cinq démarchages ou entreprises de promotion pour certains produits. C'est en cours : une charte, dont nous évaluerons le résultat, est en cours de préparation.
Cet amendement vise à contraindre l'administration à agir : les associations ne sont pas légion, tout comme les laboratoires. Il me semble qu'il doit être possible d'aboutir rapidement : je maintiens donc mon amendement.
Après les propos de Mme la ministre, je retirerais volontiers cet amendement, mais je ne suis pas le seul signataire. Dans ces conditions, j'invite chacun à la sagesse.
Au vu de mon intervention pour soutenir cet amendement, vous comprendrez qu'au nom de mon groupe, je souhaite le reprendre.
Il ne faut pas voler l'amendement de M. Bur !
Pour une fois qu'il résiste !
(L'amendement n° 446 est adopté.)
(Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je suis saisie d'un amendement n° 601 .
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
Depuis dix-huit mois, le salariat est autorisé par le code de déontologie. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 a d'ailleurs permis la prise en charge des actes effectués par le médecin salarié.
Afin d'apporter une sécurité juridique aux médecins entendant utiliser ce nouveau mode d'exercice, la loi doit mentionner clairement, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, qu'ils sont couverts par l'assurance de leur employeur médecin, que ce soit une personne physique ou morale.
Compte tenu des positions adoptées par la Cour de cassation en matière d'assurance et de responsabilité de la profession médicale qui est exercée à titre libéral ou salarié, une telle mention évitera toute incertitude et tout contentieux.
La commission a repoussé cet amendement qui vise à mettre l'assurance en responsabilité civile professionnelle du médecin salarié à la charge de son employeur. Une telle disposition soulève des questions de droit de la responsabilité complexes dès lors que le médecin salarié est indépendant dans l'exercice de son art.
Je suis navrée – je suis rarement en désaccord avec mon rapporteur – mais je suis favorable à l'amendement de M. Préel.
Monsieur Rogemont, un peu de sagesse. Je trouve votre intervention incisive, mais, comme vous intervenez beaucoup à propos des dentistes, cela ne m'étonne pas. (Sourires.)
(L'amendement n° 601 est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 2074 .
La parole est à Mme la ministre.
Cet amendement concerne les accords bilatéraux. Les projets d'accords bilatéraux en matière de reconnaissance des qualifications professionnelles permettent aux professionnels de santé qui le souhaitent d'acquérir une expérience professionnelle dans un autre pays mais également de satisfaire aux besoins de santé du pays d'accueil.
Cet amendement veut prévoir et organiser le cadre de reconnaissance des qualifications professionnelles pour les diplômes obtenus hors de l'Union européenne. Cette reconnaissance mutuelle repose sur l'existence d'un accord ou d'un traité et la signature d'un accord de reconnaissance mutuelle. La réciprocité est nécessaire afin que les deux États veillent à ce que l'accord fasse l'objet d'une application effective sur leur territoire.
Pour les professions paramédicales, les procédures d'examen seront identiques à celles prévues pour la reconnaissance des diplômes des ressortissants communautaires. Pour les professions médicales et pharmaceutiques, l'instruction des demandes de reconnaissance est confiée à l'ordre afférent.
La première partie de cet amendement a pour objet de rendre applicable l'entente portant sur la reconnaissance des qualifications professionnelles qui a été signée, le 17 octobre 2008, par le Président de la République et le Premier ministre du Québec. Quand à la seconde partie de cet amendement, elle doit permettre à la France de respecter son engagement avec l'État du Sénégal signé le 13 novembre 2008 relatif à la reconnaissance réciproque des qualifications professionnelles.
La commission n'a pas examiné cet amendement, qui a pour objet la reconnaissance mutuelle des titres et diplômes entre la France et le Québec pour les professions de santé. À titre personnel, compte tenu de ce qui vient d'être exposé par Mme la ministre, j'émets un avis favorable.
(L'amendement n° 2074 est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 1319 .
La parole est à M. Daniel Garrigue.
Cet amendement est l'occasion de relancer le débat sur la démographie médicale. Je l'avais déposé à l'un des articles qui abordaient déjà cette question et j'avoue ne pas avoir très bien compris pourquoi il s'est trouvé renvoyé après l'article 21.
L'idée est de reprendre en partie ce qui avait été proposé dans l'avant-projet de loi dans ce domaine, c'est-à-dire de permettre, dans le ressort de chaque caisse régionale d'assurance maladie, une discussion entre la caisse et les syndicats de médecins pour déterminer, en fonction de la situation de la démographie médicale et pour chaque spécialité, et par secteur territorial – il peut y avoir plusieurs secteurs du ressort d'une même caisse régionale –, le nombre de praticiens auxquels les règles de conventionnement sont susceptibles de s'appliquer.
Nous avons déjà suffisamment évoqué le problème de la démographie médicale et l'aggravation très forte que l'on ressent depuis quelques années dans certaines régions pour justifier que des mesures novatrices soient prises dans ce domaine.
En outre, l'idée d'une négociation entre les syndicats de médecins et les caisses régionales d'assurance maladie, c'est-à-dire l'idée d'une démarche conventionnelle, me semble une bonne idée. Je trouve dommage qu'elle ait été finalement abandonnée.
Il était souvent objecté que les contraintes ne s'appliqueraient qu'aux jeunes médecins. Mais rien n'interdit, dans ce type de convention, d'adopter une démarche intergénérationnelle.
Il est dommage que l'ambition de départ ait été abandonnée, car je pense que la proposition était une bonne réponse aux problèmes de la démographie médicale auxquels nous sommes tous confrontés. Elle était suffisamment souple et laissait une très large place à la discussion et à la négociation.
J'ai le sentiment de revenir vingt-quatre heures en arrière puisque nous reprenons le débat que nous avons eu hier. Entre-temps, nous avons adopté un amendement n° 2014 à l'article 15 qui reprend un certain nombre des propositions de notre collègue Daniel Garrigue. L'avis de la commission sur l'amendement n° 1319 avait été défavorable, mais, en réalité, je pense que l'amendement est satisfait par les dispositions que nous avons prises hier.
Nous revenons sur le débat de la démographie médicale, mais je vous rends attentif, monsieur Garrigue, au fait que cet amendement vise à ce que les caisses régionales d'assurance maladie négocient avec les syndicats médicaux les conditions de conventionnement des nouveaux médecins « dans la région ». Mettre le champ du conventionnement au niveau régional est intéressant, mais cela constitue une modification drastique de la structuration du lien conventionnel. Techniquement, vous ouvrez par exemple le champ à un tarif de consultation C différent selon les régions parce qu'une déclinaison régionale de la convention nationale ne concerne pas qu'un conventionnement des médecins.
Comme l'a rappelé votre rapporteur, nous avons bien entendu longuement discuté de ces questions. Nous avons fait un paquet global avec des solutions fortes – je vous renvoie, par exemple, à l'amendement que vous avez voté sur la régionalisation de bourses pour les jeunes médecins. Il n'est pas douteux que l'ARS d'Aquitaine mette en oeuvre un certain nombre de ces possibilités financières pour faire en sorte que, dans des régions désertifiées de Dordogne, on puisse installer des jeunes médecins. C'est un des éléments du paquet, il y en a bien d'autres – j'ai eu l'occasion de les détailler de façon très approfondie.
Compte tenu de ces explications et de ce que sous-tend votre amendement, je vous serais très obligée de le retirer, faute de quoi j'y serais défavorable.
Cela n'étonnera personne : nous sommes extrêmement reconnaissants à M. Garrigue de relancer, à ce stade du débat, la question délicate, et même douloureuse dans nombre de départements, du désert médical, de la démographie des professions de santé. Vous le savez, madame la ministre, nous ne vous tenons pas quitte. Vous avez parlé à l'instant de « paquet global » et de « solutions fortes ». Mais, à nos yeux, il s'agit d'un paquet partiel et de solutions tièdes, et même pathétiquement faibles au regard des ambitions que vous aviez énoncées.
Nous avons la conviction – je le répète avec une certaine gravité, maintenant que la machine majoritaire s'est mise en route et que M. Copé a ressoudé ses troupes autour de la liberté d'installation absolue pour les médecins – que les syndicats les plus corporatistes l'ont emporté. Ils feignent d'être agressés par votre projet de loi, mais c'est un jeu de rôles que l'on connaît bien.
M. Garrigue a totalement raison : il faut essayer par tous les moyens de remettre un peu d'ordre dans la répartition des professionnels de santé sur le territoire. Vous n'avez pas voulu la régulation par la loi ; essayons la régulation par la convention. Faut-il le faire à l'échelle régionale ? Sans doute la négociation devrait-elle s'amorcer à l'échelle nationale – et, là, je vous donne raison, madame la ministre – mais, aujourd'hui, il n'y a rien dans ces négociations, vous le savez bien. À tel point d'ailleurs que, durant un bref moment – cela n'a duré qu'une semaine – vous avez menacé les négociateurs conventionnels, qui étaient enlisés sur toutes ces questions et qui n'avaient pris aucune décision depuis des années, de prendre des mesures plus fortes dans la loi. Cela s'est terminé par le vote il y a plus de vingt-quatre heures, dans la nuit, de l'amendement baudruche qui a renvoyé à six ans un hypothétique contrat santé-solidarité dont personne ne sait ce qu'il contient.
Je considère donc tout à fait normal que l'on reprenne la discussion, et nous la reprendrons inlassablement parce que, madame la ministre, nous sommes ici par la volonté du peuple.
Non, ne parlons pas de baïonnettes.
Aujourd'hui, nous avons besoin d'avoir des réponses par la loi. Or, si le texte voté amène quelques avancées intéressantes en faveur de l'attractivité des professions de santé, il n'amorce pas la régulation nécessaire qui était souhaitée par la droite comme par la gauche parce que vous avez reculé.
Pourquoi ne pas amorcer une discussion que les professions infirmières ont su mener et conclure, ou que la profession des pharmaciens, que vous connaissez bien, a su mettre en place il y a un demi-siècle ? Si vous ne voulez pas le faire par la loi, acceptez au moins la proposition de M. Garrigue. Peut-être pourrait-elle être améliorée, mais au moins aurait-on l'impression d'avoir en main un moyen d'action concret.
En tant que député de Dordogne, monsieur Garrigue, vous êtes au coeur de ces problèmes. Vous connaissez le terrain. Vous savez qu'il faut parfois attendre huit, voire dix mois avant d'obtenir un rendez-vous chez un ophtalmologiste. Vous voyez les gardes s'organiser peu à peu sous la réquisition des préfets – comme l'on pouvait travailler ainsi ! Vous avez le courage de proposer des solutions par la régulation conventionnelle. Si le problème ne peut être résolu par la loi, qu'il le soit par la négociation ; mais encore une fois : ne renonçons pas à le traiter !
Je répète que c'est contre ma volonté que l'amendement vient en discussion aujourd'hui. Je souhaitais en effet le déposer sur les articles 14, 15 ou 16, qui traitent de la démographie médicale, et je regrette qu'il ne soit discuté qu'à l'article 21. Ce report, qui n'est sans doute imputable à aucune intention maligne, n'est pas logique.
Quoi qu'il en soit, le « nombre de praticiens » mentionné dans l'amendement correspond bien au nombre global de praticiens et non pas au nombre de nouveaux praticiens. Par ailleurs, la solution proposée n'a rien d'impératif, puisqu'elle reste conventionnelle.
Oui, vous proposez de régionaliser les conventions.
Autant dire que l'amendement laisse ouverte la discussion entre les représentants des caisses régionales de l'assurance maladie et ceux des syndicats de médecins. Ils ont suffisamment de connaissance du terrain et d'imagination pour apporter des réponses raisonnables à un problème qui, loin d'être spécifique à la Dordogne, se pose dans bien des régions et des banlieues.
L'amendement, j'en conviens, mérite d'être retravaillé. Mais le projet de loi sera prochainement examiné au Sénat. La discussion n'est pas close. Je considère donc qu'il n'y a aucune raison de retirer l'amendement. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)
(L'amendement n° 1319 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 1506 rectifié .
La parole est à M. Jacques Domergue.
L'amendement est motivé par d'excellentes intentions, puisqu'il propose de mettre à profit le séjour à la maternité pour apprendre les gestes de premiers secours. On ne peut être défavorable à cette proposition.
Reste que le contenu d'un tel enseignement ne dépend pas de la loi. J'invite donc les signataires extrêmement nombreux de l'amendement à vérifier que leur proposition sera prise en compte dans le cadre réglementaire.
Avis défavorable.
Compte tenu de ces explications, maintenez-vous l'amendement, monsieur Domergue ?
Je crois comprendre la démarche de nos collègues de l'UMP. L'amendement n° 1506 rectifié , qui propose d'inclure dans l'exercice de la profession de sage-femme l'enseignement obligatoire de la prévention des risques et l'apprentissage des gestes de premiers secours, a été défendu très brièvement par M. Domergue.
Ne l'enfoncez pas trop ! (Sourires.)
Peut-être ses explications nous auraient-elles permis de mieux comprendre la portée et l'intérêt de l'amendement. Intervient ensuite le rapporteur. Toujours enclin à formuler un avis personnel quand on voudrait entendre celui de la commission, il se déclare plutôt favorable à l'amendement, mais ajoute aussitôt que la proposition est de nature réglementaire. La ministre s'exprime à son tour, non moins succinctement que M. Domergue, pour émettre un avis défavorable.
Je peux m'expliquer plus longuement si c'est nécessaire.
À quel jeu jouent nos collègues ? Ils signent en grand nombre un amendement auquel ils semblent croire et le diffusent partout dans leur circonscription.
Tout le monde en fait autant, d'ailleurs : nous devons rendre compte de nos propositions. Ensuite, le rapporteur coupe l'herbe – il renvoie la disposition au règlement – et Mme la ministre arrache la racine, de sorte qu'il ne reste plus rien de l'amendement. La manoeuvre est claire : on affiche de bonnes intentions, on se couvre de gloire devant les sages-femmes.
Et l'amendement est finalement retiré par ses signataires, ce qui parachève leur forfait ! S'ils tiennent tant à leur proposition, mais que son contenu soit de nature réglementaire – ce qui n'est pas démontré –, ils peuvent insister auprès de Mme la ministre : c'est elle qui fait le règlement ! Mais M. Domergue se résout bien volontiers à la mort de son amendement.
Je veux bien donner quelques explications à M. Mallot pour clore le débat. Je suis cosignataire de l'amendement, que j'assume, mais son auteur est probablement le premier signataire, M. Depierre, qui nous a sollicités très largement, de manière à recueillir un grand nombre de signatures, ce qui est louable. Si nous sommes nombreux à avoir accepté de signer l'amendement, nous n'en avons pas mesuré toute la portée.
Considérant pour ma part que les gestes mentionnés dans l'amendement relèvent réellement du réglementaire, et que la proposition n'aurait pas une grande incidence sur le texte en discussion, j'ai trouvé plus sage de retirer l'amendement.
Peut-être suis-je plus simple d'esprit, mais je ne comprends pas comment on peut apprendre les gestes de premiers secours à l'occasion d'un accouchement. Qui s'agit-il de secourir : la sage-femme, le nouveau-né ou la parturiente ? (Rires sur tous les bancs.)
Les deux amendements visent à résoudre un problème de sécurité relatif à la dispensation de médicaments en établissement. Les médicaments étant souvent distribués au moment du repas, celle-ci n'est pas toujours sécurisée. D'où le recours à des doses préparées sous blister, c'est-à-dire sous plaquettes thermosoudées, de couleurs différentes pour le matin, le midi et le soir, avec mention du médecin prescripteur, du patient, du médicament et de la date de péremption du lot. Ce dispositif, qui améliore grandement la sécurité, existe déjà.
Cependant, la jurisprudence n'est pas stabilisée. Si la cour d'appel de Rouen a considéré que, lorsqu'on déconditionnait, puis reconditionnait le médicament, il fallait demander une nouvelle AMM, le tribunal de Pau a émis un avis différent. Il paraît donc souhaitable de régler le problème juridique.
J'ai compris, madame la ministre, qu'un décret est en cours de préparation, disposant que les plaquettes ne puissent comporter que sept jours, mais cela pose aussi problème. Il faudrait probablement utiliser des robots importants, ce qui exclut l'intervention des officines de quartier. Mieux vaudrait que le décret prévoie plutôt vingt-huit jours. Si vous m'assuriez qu'il était rédigé en ce sens, je me ferais un plaisir de retirer les deux amendements.
La commission a examiné avec attention l'amendement n° 608 , qui vise à autoriser la dispensation de médicaments par doses individualisées. Il permettrait de réaliser des économies, tout en accroissant la sécurité dans l'administration des médicaments. Mais une telle mesure ne relève pas de la loi.
M. Préel avait déjà abordé ce sujet lors de l'examen du dernier PLFSS. Il lui avait été répondu que des décrets et des arrêtés étaient sur le point d'être publiés.
Je me tourne donc moi aussi vers Mme la ministre, pour lui demander où en est l'élaboration de ces textes.
En fin connaisseur de ces sujets, M. Préel sait fort bien que ces dispositions relèvent du niveau non législatif, mais réglementaire. Cependant, comme il s'impatiente de certaines lenteurs administratives, je pense que, par cet amendement, il veut fouailler la volonté du Gouvernement.
Je souscris évidemment à sa volonté de clarification juridique en matière de déconditionnement et de reconditionnement des médicaments par le pharmacien d'officine, et je la comprends d'autant mieux, étant donné le lieu d'où je parle, comme dirait un psychanalyste.
Trois textes sont en préparation, dans le cadre de la mission confiée à M. Lancry, à commencer par un décret et un arrêté relatif aux bonnes pratiques de préparation des doses à administrer par le pharmacien. Ces textes concernent notamment les opérations de déconditionnement et de reconditionnement. Par ailleurs – pour répondre à l'amendement n° 609 –, un arrêté portant convention type entre un établissement pour personnes âgées dépendantes et un pharmacien pour l'approvisionnement en médicaments précisera les missions de chacun des acteurs, le lieu de préparation des doses à administrer étant laissé au libre du choix du pharmacien et de l'établissement. Dans l'état actuel des travaux, la sortie du décret pourrait intervenir fin mai ou début juin.
Mme la ministre peut-elle nous dire si les produits de substitution à l'héroïne que sont la buprénorphine haut dosage et le chlorhydrate de méthadone entreront dans le champ du décret, sachant que, sur demande du médecin, les pharmaciens sont obligés de les déconditionner ?
À ce stade de notre débat, je ne dispose pas de cet élément d'information. Je vous promets de vous l'apporter dans quelques heures.
Je suis saisie d'un amendement n° 818 .
La parole est à M. Étienne Mourrut.
L'amendement a été repoussé par la commission. Il a été satisfait par l'amendement n° 395 à l'article 14, que nous avons voté hier.
Le Gouvernement est favorable à l'esprit de l'amendement et en demande le retrait pour la raison indiquée par le rapporteur.
Cet amendement permet au Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies et à sa filiale de production d'utiliser du sang ne provenant pas de l'Établissement français du sang – EFS –, tout en réservant à celui-ci une priorité.
Cette filiale doit, en principe, utiliser le sang collecté par le Laboratoire français du fractionnement dans les conditions de sécurité et d'éthique prévues par la loi – le don du sang, par exemple est gratuit.
Toutefois, les dons de sang ne sont pas suffisants pour que cette filiale soit en mesure de produire suffisamment de médicaments nécessitant des groupes sanguins rares. Elle a besoin de sang particulier pour la production de sérum anti D, dont la demande est forte, ce sérum étant employé dans des cas assez fréquents de risques de réactions immunitaires de la mère lors de l'accouchement.
Dans le cas de certaines autorisations de mise sur le marché dérogatoires, des sociétés privées sont autorisées à commercialiser en France des médicaments issus de sang collecté à l'étranger, dans des conditions de sécurité strictes, garanties notamment dans le cadre des AMM.
C'est pourquoi cet amendement très technique permet à la filiale de l'EFS de s'approvisionner à l'étranger en cas de pénurie de sang au sein de l'EFS. Hors cas de pénurie, l'amendement précise très clairement qu'elle doit utiliser le sang collecté par l' Établissement français du sang.
L'amendement a été accepté par la commission.
Le sous-amendement prévoit que le capital de LFB Biomédicaments, filière française de fractionnement, est détenu, directement ou indirectement, à majorité par l'État ou ses établissements publics.
Je tiens à ce que cette entreprise soit majoritairement détenue par des capitaux publics, afin de garantir son indépendance.
Le sous-amendement n'a pas été examiné par la commission.
À titre personnel, j'y suis favorable. Cette précision me semble utile pour rassurer ceux qui pourraient craindre une privatisation du LFB.
L'amendement du rapporteur répond aux voeux des dirigeants du laboratoire et correspond aux nécessités de certaines urgences lorsque l'offre française de sang et de produits dérivés ne suffit pas à répondre aux besoins.
Le sous-amendement de Mme la ministre me semble particulièrement opportun. Il garantit que la modification de statut n'entraînera pas une privatisation du laboratoire.
(Le sous-amendement n° 2003 deuxième rectification est adopté.)
(L'amendement n° 1430 , sous-amendé, est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 447 .
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
Cet amendement a été adopté par la commission. Il tient à coeur à M. Jardé, orthopédiste, qui s'intéresse aussi beaucoup à la médecine légale.
Les missions de la médecine légale ont considérablement évolué au cours des dernières années. Aux missions traditionnelles, qui faisaient du médecin légiste le « médecin des morts », se sont ajoutées celles qui ont pour objet toutes les constatations médicales utiles aux procès judiciaires concernant aussi bien les auteurs que les victimes d'infractions.
Lorsqu'il n'y a pas de service de médecine légale dans un hôpital, des femmes ayant subi un viol sont obligées de se déplacer dans des conditions très difficiles, parfois assez loin.
Actuellement, ni les conditions d'accueil des personnes, ni la disponibilité d'une permanence médico-légale, ni même la qualité scientifique des constatations ne sont uniformément garanties sur le territoire national. Le caractère disparate de l'exercice de la médecine légale s'est accentué au cours des dernières années, avec la création de structures hospitalières remplissant ces missions sans aucun plan d'ensemble.
Pour améliorer l'exercice de la médecine légale au service des victimes et pour une bonne administration de la justice, il peut être envisagé, dans un premier temps, d'instituer un cadre permettant le regroupement et la coordination de structures existantes.
De plus, compte tenu des spécificités de la discipline « médecine légale » et notamment de sa mission essentiellement judiciaire, il est proposé d'offrir la possibilité à ces structures d'acquérir une dimension universitaire, afin d'insuffler une dynamique.
Madame la ministre, je me permets d'insister. De nombreux départements connaissent ce type de problèmes et il convient de les régler. Qui finance la médecine légale ? Le ministère de la santé ou le ministère de la justice ? Il faut répondre à ces questions, pour résoudre les problèmes rencontrés aujourd'hui par tous les établissements.
L'amendement a pour objet de créer des fédérations médicales interhospitalières en médecine légale.
M. Préel a exposé les raisons qui visent à cette création, mais n'a pas abordé le financement de l'activité des fédérations médicales interhospitalières, qui sont consacrées à la médecine légale.
La commission avait adopté cet amendement, sans apporter de réponse sur ce point précis.
Nous ne pouvons qu'être d'accord sur la structuration de la médecine légale dans notre pays. Une rationalisation est indispensable, même si les fédérations médicales interhospitalières peuvent déjà dans le cadre actuel regrouper tous types de structures, y compris celle de la médecine légale.
La précision que vous proposez impliquerait une procédure spécifique pour le regroupement des activités de médecine légale des centres hospitaliers, ce qui n'a pas de justification évidente.
Mais – c'est le point essentiel – cette affaire a une implication interministérielle évidente. Cette restructuration ne peut être faite qu'en concertation étroite avec la Chancellerie. Des discussions – j'emploie ce terme pour manier la litote – ont lieu sur le financement entre le ministère de la santé et la Chancellerie. En effet, le ministère de la justice doit payer les opérations de médecine légale. Cela relève à l'évidence, dans le cadre d'une procédure judiciaire, d'un financement du ministère de la justice.
Les négociations sont musclées, car la santé n'a pas à financer les opérations d'expertise dans le cadre de procédures judiciaires.
Je vous demande de bien vouloir retirer l'amendement, au bénéfice des travaux et des discussions que nous menons actuellement. Je veillerai à ce que ces travaux puissent aboutir rapidement à une organisation globale, y compris, comme le signalait le rapporteur, dans sa dimension financière.
Je voudrais vous aider. Je vous rappelle que lors, du dernier rapport sur les urgences médicales, tous les médecins qui se sont exprimés sur la médecine légale et sur sa nécessaire présence dans les services d'urgence ont unanimement dit qu'il fallait trouver des solutions.
La violence fait partie de notre société. On la trouve dans les hôpitaux et encore plus dans les services d'admission et d'urgence.
Madame la ministre, je comprends parfaitement votre réponse, qui correspond à la réalité. Si nous votions cet amendement, peut-être pourrions-nous vous aider et vous donner plus de force pour négocier avec la Chancellerie, ce qui n'est pas simple, il suffit de voir comment s'est passée la réforme de la carte judiciaire.
Je souhaite que cet amendement soit voté, car je pense que cela peut aider le Gouvernement.
Hélas ! monsieur Leteurtre, je crains que loin de m'aider, vous me complexifierez la tâche.
Actuellement, notre contentieux avec le ministère de la justice s'élève à 30 millions d'euros. Si, dans un texte « hôpital-patients-santé-territoire », il est mentionné que la structuration de la médecine légale revient au ministère de la santé, vous me privez de tous les moyens pour négocier.
Cette dimension trouble notre réflexion. L'amendement du rapporteur, soutenu par M. Leteurtre, nous paraissait excellent, compte tenu de la nécessité de chercher les responsabilités et du traitement des victimes. À Toulouse, nous avons traversé des événements pénibles auxquels était mêlée une personnalité politique estimable. Cela a donné lieu à des examens de médecine légale ubuesques, sur lesquels ont été fondées ensuite des accusations grotesques. Cela montre que des efforts restent à faire, y compris en milieu hospitalo-universitaire.
L'idée de la fédération me paraissait excellente, surtout parce que cela pouvait déboucher sur une dimension universitaire.
Mais Mme la ministre a introduit un élément qui nous trouble. Nous sommes en présence d'un conflit interministériel. Nous pourrions demander à entendre Mme Dati pour avancer sur l'amendement. Cela étant, je crains que mon souhait ne puisse être exaucé, sauf à attendre le successeur putatif de Mme la garde des sceaux. (Sourires sur plusieurs bancs.)
À l'occasion du prochain PLFSS, nous pourrions remettre l'ouvrage sur le métier.
(L'amendement n° 447 n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 598 .
La parole est à M. Claude Leteurtre.
Claude Leteurtre. Par décision du 16 juillet 2007, le Conseil d'État a annulé l'article Ier du décret du 7 mars 2006 relatif à la redevance due à l'hôpital par les praticiens hospitaliers à temps plein exerçant une activité libérale dans les établissements de santé.
S'ils le font dans un hôpital général, la redevance est de l'ordre de 30 % contre 40 % pour un praticien exerçant dans un CHU, comme les PU-PH. Il y a là une distorsion à laquelle il faut remédier. Cet amendement vise à modifier l'article L.6154-3 du code de la santé publique de manière à revenir à une situation plus équitable. Que l'on soit praticien hospitalier dans un hôpital général ou PH dans un CHU, le traitement doit être le même. Mais la redevance des PU-PH devrait rester fixée à 40 %.
La commission a repoussé cet amendement qui vise à recalculer la redevance due par les praticiens hospitaliers exerçant à titre libéral à l'hôpital, considérant qu'il n'y a pas lieu, au détour d'un amendement, de modifier le mode de calcul, équilibré, de la redevance due à l'hôpital pour l'utilisation du matériel et des locaux.
Je suis défavorable à l'amendement. Revenir à la situation qui prévalait avant le décret en Conseil d'État en modifiant le mode de fixation de la redevance, qui était calculée sur la base des tarifs conventionnels, ne me paraît pas justifié.
Actuellement, la redevance est proportionnelle au montant des honoraires effectivement perçus. Le Conseil d'État a écarté la notion d'occupation du domaine public, car le service rendu au praticien par l'hôpital est d'une autre nature que la simple occupation du domaine public. En effet, le praticien bénéficie des locaux, du personnel, du matériel de l'hôpital ainsi que de la notoriété de l'établissement. La redevance d'activité libérale revient à l'établissement employeur du praticien pour les raisons que je viens d'évoquer. Rien ne justifierait, pour la deuxième partie de votre amendement, monsieur Leteurtre, que les praticiens pratiquant des actes non tarifés soient exonérés de cette redevance.
Le rapporteur et Mme la ministre ont parfaitement raison. Le problème est réel. Mais nous ne pouvons pas le résoudre au détour d'un amendement. Cela suppose une discussion et, sans doute, d'autres dispositions législatives.
L'amendement de nos collègues part d'un bon sentiment dans la mesure où il vise à introduire davantage d'équité. Les disparités de rémunération entre les praticiens à spécialité équivalente, exerçant dans le public ou le privé, sont telles que la proposition de cet amendement n'est pas à la hauteur de la situation.
On a, récemment, par le biais d'un rapport, voulu faire le procès des médecins hospitaliers alors qu'une minorité pratique un exercice privé à l'hôpital et que la majorité d'entre eux le fait avec tact et mesure.
Je regrette, madame la ministre, que nous n'ayons pu discuter d'un amendement déposé par un collègue de l'UMP, en raison de son absence. Sa proposition consistait à limiter à 300 % du tarif de base le dépassement permis aux praticiens hospitaliers publics qui pratiquent l'exercice libéral à l'hôpital public. Voilà qui n'est pas sans conséquence sur la tarification commune. Entre les actes techniques et les actes purement cliniques, il y a tant de différences de rémunération – on parlait tout à l'heure des biologistes, mais on peut citer aussi les pédiatres et les psychiatres – que vous avez là l'occasion, madame la ministre, d'ouvrir, dans les mois qui viennent, un grand chantier de réflexion.
Je remercie M. Soisson de ses conseils, mais peut-être n'a-t-il pas suivi toute la discussion et qu'il n'a pas compris le bien-fondé de cet amendement.
Sa formulation n'est peut-être pas la meilleure, mais dans la mesure où nous avons créé un nouveau corps de médecin sous statut contractuel, il n'est peut-être pas inutile de traiter de la même manière l'ensemble des praticiens, y compris ceux qui relèvent d'un statut traditionnel, et d'introduire un peu de souplesse.
Suite à la décision du Conseil d'État, j'ai remodulé les taux de redevance de sorte qu'ils soient plus favorables à ceux qui pratiquent de faibles dépassements d'honoraires par rapport à ceux qui pratiquent des dépassements très élevés. Je pense que cette remarque est de nature à satisfaire Jean-Pierre Soisson, Claude Leteurtre et Gérard Bapt.
Je partage les réflexions de Gérard Bapt et de Mme la ministre.
Cela étant, j'appelle votre attention, madame la ministre, sur le problème des consultations des étrangers en France.
Parlez-vous des bénéficiaires de l'AME ?
Je parle des personnes qui ne résident pas sur le territoire national, sans considération de l'AME ou de tout autre dispositif.
Il faudrait prévoir un certain nombre de règles, mais également faire preuve de souplesse. Il arrive que nos services diplomatiques envoient des personnes étrangères, nécessitant des soins, à l'hôpital. Nous devons à leur égard adopter une attitude ouverte en nous situant dans une logique humanitaire.
Tout à fait.
Mais il arrive aussi que des personnes étrangères viennent en France en raison de l'attractivité de nos tarifs qui, heureusement, n'ont rien à voir avec ceux qui sont pratiqués dans d'autres pays !
Je souhaiterais que vous engagiez, dans la transparence, une réflexion globale, sur la rémunération des compétences, soit individuelles, soit de l'hôpital. Il y a là matière à réflexion, car certaines situations peuvent être choquantes.
Je m'y emploierai bien volontiers.
(L'amendement n° 598 n'est pas adopté.)
Après l'article 21
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures vingt-cinq, est reprise à dix-sept heures quarante-cinq.)
Après l'article 21
Je laisse à mon collègue Flajolet, rapporteur pour avis, le soin de présenter l'essentiel de cet amendement sur la télémédecine, car celui-ci relève également des attributions de la commission des affaires économiques.
Si vous en êtes d'accord, madame la présidente, je m'exprimerai pour ma part une fois que tous les amendements auront été présentés.
La parole est à M. André Flajolet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour soutenir l'amendement n° 223 .
À travers cet amendement, les préoccupations des deux commissions se rencontrent : l'efficacité des outils de santé pour ce qui est de la commission des affaires sociales, l'aménagement du territoire pour ce qui est de la commission des affaires économiques. Il vise en effet à donner une assise juridique à la pratique de télémédecine, laquelle permet d'optimiser le système de santé et d'accélérer le rythme des consultations.
Cela dit, je me rallie à l'amendement n° 1811 de la commission des affaires sociales, dont la rédaction intègre des précisions supplémentaires.
La parole est à M. le rapporteur pour soutenir l'amendement n° 1811 et donner l'avis de la commission sur les autres amendements en discussion.
Tous les amendements visent à encadrer le développement de la télémédecine en lui donnant un statut juridique plus clair et plus précis qu'aujourd'hui.
De récents travaux ont montré que la télémédecine contribuait à renforcer le maillage territorial de l'offre de soins et à améliorer la maîtrise des dépenses de transport sanitaire. Or actuellement, la télémédecine n'est définie que succinctement par l'article 32 de la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie. Pour favoriser son développement, il est proposé de lui donner un statut juridique plus précis et de l'inscrire dans le code de la santé publique.
La commission des affaires sociales a adopté l'amendement n° 1811 et rejeté les autres amendements, même s'ils poursuivent le même but.
Ce faisceau d'amendements tend au même but : donner une forme juridique à la télémédecine. Outil majeur, elle permet de coordonner, dans une démarche coopérative, le travail des acteurs de santé, favorise l'accès à des soins de qualité dans les zones sous-médicalisées et contribue enfin à lutter contre la désertification médicale en enrayant le processus de désaffection des installations dans ces zones.
L'encadrement juridique était nécessaire car son exercice pose des problèmes évidents de responsabilité professionnelle. Il importait de faire prévaloir des recommandations de bonnes pratiques car l'imprécision actuelle peut être source de contentieux.
Après que nous avons reconnu ensemble les bienfaits du développement des services du SAMU, je tiens à rendre hommage à notre ancien collègue, le professeur Lareng, qui fut président de l'organisation mondiale pour le développement de la télémédecine, laquelle constitue aussi un instrument de coopération médicale internationale.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements en discussion commune ?
J'approuve l'esprit de l'ensemble de ces amendements mais je préfère la rédaction de l'amendement n° 1811 de la commission.
J'aimerais tout simplement remercier Mme la ministre d'avoir accepté cet amendement très attendu. Les difficultés de mise en place et de régulation que rencontre la télémédecine l'avaient rendu nécessaire et c'est avec grand plaisir que je le voterai.
(L'amendement n° 1811 est adopté.)
Permettez-moi de préciser, au préalable, que cet amendement tient particulièrement à coeur à Olivier Jardé car il concerne le droit de la santé.
À la suite d'un accident de travail, le taux d'incapacité permanente notifié par la caisse peut être contesté devant les tribunaux du contentieux de l'incapacité non seulement par l'assuré social mais également par l'employeur dans la mesure où ce taux détermine le montant de la rente allouée au salarié et a une conséquence financière directe sur son propre taux de cotisation au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles. Ces juridictions doivent disposer des documents médicaux concernant l'affaire.
Or, si la caisse détient, en application des dispositions de l'article L. 441-6 du code de la sécurité sociale, le certificat initial et le certificat médical de consolidation, il n'en va pas de même pour le rapport d'incapacité permanente établi par le service du contrôle médical. Pour transmettre ce document, le praticien-conseil est confronté aux dispositions relatives au respect de la vie privée de la personne. Les caisses sont donc dans l'impossibilité de transmettre le rapport d'incapacité permanente aux tribunaux du contentieux de l'incapacité qui, dans de nombreux cas, déclarent inopposables à l'employeur la décision fixant le taux d'incapacité permanente de l'assuré en raison du défaut de communication.
Ces décisions d'inopposabilité ont pour effet de mutualiser sur la communauté des employeurs la dépense qui devrait être imputable au seul employeur responsable de l'accident du travail.
À la suite du débat engagé sur ce sujet à l'occasion de l'amendement qu'Olivier Jardé avait déposé lors de l'examen du PLFSS 2008, un groupe de travail, associant les représentants des institutions et services concernés, notamment le conseil de l'ordre des médecins, les caisses nationales d'assurance maladie et Olivier Jardé lui-même, a étudié les possibilités de concilier principe du contradictoire et respect du secret médical. La proposition formulée fait suite à ces travaux.
Tout d'abord, la chaîne du secret médical est assurée dès lors que le rapport médical ayant contribué à la fixation du taux d'incapacité de travail permanente est transmis au médecin expert désigné par la juridiction, sans que soient opposées au praticien-conseil les dispositions de l'article 226–13 du code pénal.
Ensuite, le principe du contradictoire est respecté puisque ce rapport est notifié au médecin que l'employeur aura mandaté à cet effet.
Enfin, bien que la victime de l'accident ne soit pas partie à l'instance puisque le taux de son incapacité est fixé par la caisse, il est prévu de l'informer de cette notification dans un but de transparence de la procédure suivie.
Cet amendement, qui résout un important problème, a fait l'objet d'un consensus en commission : nous n'attendons plus que l'avis favorable de Mme la ministre.
Notre amendement, identique au précédent, ne fait que reprendre la disposition votée dans le cadre du PLFSS, que le Conseil constitutionnel a par la suite considéré comme un cavalier. Je me réjouis que nous ayons à nouveau la possibilité de l'inscrire dans la loi, mais je ne suis pas certain, monsieur Préel, qu'elle soit susceptible de résoudre le problème posé.
Nous savons que des cabinets spécialisés dans la réduction des coûts, appelés cost killers, proposent, contre une rémunération forfaitaire à l'américaine, leurs services aux entreprises, notamment celles de plus de 200 salariés, pour leur éviter de payer trop de cotisations au titre de la branche ATMP. Dans son rapport, le conseiller d'État Fouquet avait déjà pointé du doigt cette pratique, qui se solde par une perte évaluée à 200 millions d'euros de recettes pour la sécurité sociale et la branche ATMP.
Cet amendement constitue une première avancée, qui pourra contrarier les pratiques de ces cabinets, qui ont engrangé d'énormes profits au cours de ces dernières années, tout particulièrement Alma Consulting Group. Mais cela ne nous dispense pas, madame la ministre, de réfléchir à une réforme de fond des cotisations de la branche ATMP.
Le système actuel n'encourage pas assez les entrepreneurs qui déploient de réels efforts de prévention des maladies professionnelles et des accidents du travail par rapport à ceux qui se contentent de la mutualisation. De surcroît, si on laisse les partenaires sociaux s'occuper de ces propositions de réforme, je crains fort que des blocages fassent perdurer la situation alors que dans certains pays, y compris aux États-Unis, une tarification davantage axée sur les efforts de prévention consentis par les employeurs a permis d'obtenir d'excellents résultats.
Ces amendements relatifs à la transmission d'informations médicales dans les contentieux d'incapacité sont de nature à faciliter le fonctionnement du dispositif qui fait peser sur chaque employeur une cotisation « accidents du travail – maladies professionnelles », en partie proportionnelle au nombre d'accidents du travail et de cas de maladies professionnelles dans les établissements dont il a la responsabilité.
La commission les a tous deux adoptés.
C'est un acquiescement enthousiaste à une procédure qui permet de respecter tout à la fois le principe du débat contradictoire et le nécessaire secret médical. En outre, elle permettra de contrecarrer les activités hautement condamnables des officines évoquées par M. Bapt.
Étant donné l'implication d'Olivier Jardé, je préférerai qu'il s'agisse d'un « amendement Jardé » mais l'avis est bien évidemment favorable aux deux amendements.
Je suis saisie d'un amendement n° 597 .
La parole est à M. Claude Leteurtre.
Cet amendement a pour but de renforcer la protection du secret professionnel.
Avec le codage des actes effectués et des prestations servies ainsi que la tarification à l'activité, les organismes d'assurance maladie disposent d'informations précises sur l'état de santé de l'ensemble de la population, qui notifient fréquemment la pathologie de l'assuré.
Il apparaît donc nécessaire vis-à-vis des assurés sociaux de garantir la confidentialité des données qui, si elles sont nécessaires aux organismes d'assurance maladie pour assurer la liquidation comptable des prestations, ne doivent pas pouvoir être accessibles et consultées par les agents en dehors de situations clairement définies et encadrées. L'accès et l'utilisation de ces données à des fins utiles de contrôle médical et plus largement de gestion médicalisée du risque doivent relever des seuls services médicaux de l'assurance maladie.
Or on constate hélas que les directions des caisses utilisent aujourd'hui ces données en dehors du contexte de liquidation et s'adressent aux assurés sociaux en évoquant, par exemple, les médicaments qu'ils prennent et leurs effets.
Par ailleurs, le décret du 9 février 2006 relatif aux modalités d'accès des médecins aux données portant sur les prestations servies par l'assurance maladie prévoit que l'accès par l'assuré social aux données médicales du web médecin autres que le protocole d'examen spécial relatif aux affections de longue durée s'exerce auprès des services administratifs des caisses, ce qui n'est pas acceptable.
Il convient donc de préciser les responsabilités respectives des services médicaux et administratifs de l'assurance maladie mieux que la loi actuelle ne le fait afin de mettre fin aux dérives actuelles.
Monsieur Leteurtre, je comprends bien votre souci de renforcer la confidentialité des données détenues par les caisses, mais le secret médical est déjà garanti par des règles strictes.
Votre amendement mériterait un examen approfondi parce que nous sommes soucieux de ne pas empêcher les caisses d'exploiter à des fins de gestion du risque, à des fins statistiques, les informations recueillies à l'occasion de la liquidation des prestations.
Comme vous le savez, les actions de gestion du risque font intervenir des non-médecins, par exemple des infirmières, qui sont tenus au secret professionnel qui n'est pas le secret médical.
Pour toutes ces raisons, la commission a rejeté cet amendement.
La disposition proposée part d'une bonne idée et, monsieur Leteurtre, vous avez raison de souligner des dérives condamnables étant donné l'arsenal juridique dont nous disposons : la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, les dispositions relatives au secret médical qui figurent dans le code de la santé publique avec les sanctions y afférentes. J'ajoute que l'ensemble des personnels des caisses est soumis au secret professionnel. Bref, toute une armature juridique protège à ce niveau la confidentialité des données.
Je me demande même si votre amendement ne pourrait pas avoir un effet pervers, c'est-à-dire aboutir à ce que les praticiens conseils soient désignés comme les seuls à être soumis au secret professionnel.
Je m'engage à rappeler cette obligation de secret professionnel pour certains et de secret médical pour d'autres dans une lettre d'instruction adressée au directeur général des établissements d'assurance maladie.
Madame la ministre, je vous remercie pour vos explications et votre engagement qui sera certainement efficace. Aussi, je retire mon amendement.
(L'amendement n° 597 est retiré.)
Je suis saisie d'un amendement n° 449 rectifié .
La parole est à M. Claude Leteurtre.
Cet amendement concerne le respect du secret médical et du secret professionnel qui doit entourer le malade, celui-ci devant se sentir pleinement garanti par ce secret.
La traçabilité des accès à l'historique des remboursements – web médecin – est un préalable indispensable à la mise en oeuvre de la consultation de la base de données médicales et à sa généralisation et il est impératif que les bénéficiaires de l'assurance maladie puissent y avoir accès. Cette faculté garantirait à chaque patient le respect effectif de la confidentialité des données figurant sur le web médecin, le respect des procédures mises en place, comme le respect de l'interdiction faite par la loi aux médecins qui ne délivrent pas des soins, les médecins de compagnie d'assurance en particulier, d'accéder à ces données. Or elle ne figure pas aujourd'hui, ni dans la loi, ni dans les décrets d'application et le Conseil national de l'ordre des médecins s'en est d'ailleurs ému publiquement.
Cet amendement reprend une disposition adoptée dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 qui avait été annulée par le Conseil constitutionnel.
Monsieur Leteurtre, vous souhaitez la confidentialité des données qui figurent dans le web médecin. Je précise que l'accès des médecins à l'historique des remboursements ne peut se faire sans l'accord du patient qui est acquis, de fait, tacitement lorsque le patient donne sa carte Vitale au médecin, ce qu'il est seul à pouvoir faire. Le patient a également accès aux traces concernant ses données de remboursement dans le cadre de la loi de 1978. Il peut donc vérifier le respect des consentements donnés et des habilitations nécessaires. J'ai donc le sentiment que le patient contrôle à la fois l'amont et l'aval du circuit de transmission des données, et que de ce fait votre amendement est satisfait.
(L'amendement n° 449 rectifié n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 604 .
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
À l'heure actuelle, pour les consultations réalisées en établissements et services médico-sociaux ou en médecine humanitaire par certaines associations telles Médecins du monde, qui prescrivent des examens complémentaires auprès d'autres professionnels, si le patient n'a pas été orienté vers ces consultations par son médecin traitant, il est considéré comme hors parcours de soins, ce qui est logique. Pour les consultations gratuites, cela n'a pas de répercussion mais pour celles qui ne le sont pas et pour tous les examens complémentaires éventuellement prescrits, cela a son importance puisque le patient est sanctionné par une majoration de sa participation financière. Or, pour ces consultations, imposer, notamment dans les associations de service humanitaire, l'étape supplémentaire du médecin traitant n'a guère de sens et serait contreproductive. Ces consultations particulières ont justement été créées pour pallier l'inadéquation des autres types de consultation.
Madame la ministre, je demande donc que les consultations effectuées auprès des associations humanitaires soient considérées comme étant hors du parcours de soins.
La commission a rejeté cet amendement, même s'il soulève un problème excellemment posé par M. Préel.
Il semble que, dans une première lecture, on puisse dire que la détermination des cas précis dans lesquels la majoration spécifique pour non-respect du parcours de soins coordonné est due relève plutôt de la convention médicale que de la loi. Mais je souhaiterais que l'on engage une réflexion sur ce dossier difficile. En tant que président du Conseil de surveillance du fonds CMU, je suis souvent interpellé par les organisations non gouvernementales sur le fait que des personnes en grande difficulté ne peuvent poursuivre un parcours de soins traditionnel.
Monsieur Préel, le code de la sécurité sociale prévoit déjà la possibilité pour les médecins salariés d'établissements ou de services médico-sociaux d'être désignés comme médecin traitant.
Concernant les consultations en addictologie que vous prenez en exemple dans l'exposé des motifs de votre amendement, là encore le code de la sécurité sociale prévoit l'exonération de la majoration des consultations et des actes assurés par un médecin dans une consultation hospitalière de tabacologie, d'addictologie, d'alcoologie, de lutte contre les toxicomanies. Ce dispositif permet ainsi d'orienter les assurés vers des professionnels de santé en dehors du parcours de soins pour des pathologies spécifiques.
Pour toutes ces raisons, je ne suis pas favorable à votre amendement.
Je voudrais préciser que parfois de vrais problèmes de posent. Vous avez expliqué que l'on pouvait choisir un médecin salarié comme médecin traitant. Mais dans la pratique, il me paraît difficile que le patient désigne un médecin de Médecins du monde comme médecin traitant. Lorsque ce médecin prescrit des examens complémentaires de biologie ou de radiologie, il faudrait, me semble-t-il, que ces examens n'entrent pas dans le parcours de soins habituel et soient exonérés de la franchise notamment.
(L'amendement n° 604 est adopté.)
Je suis saisie de deux amendements, nos 602 et 1941 rectifié , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Jean-Luc Préel, pour soutenir l'amendement n° 602 .
La loi de financement de la sécurité sociale 2006 a accordé la possibilité pour certains des titulaires du certificat de synthèse clinique et thérapeutique d'être dispensés des épreuves de vérification de leur maîtrise de la langue française et des connaissances limitant cette dispense à ces seules personnes.
Les titulaires du DIS, le diplôme de troisième cycle, ont des connaissances au moins équivalentes à celles des titulaires d'un CSCT, compte tenu des conditions pour pouvoir accéder à la préparation du diplôme de troisième cycle, lesquelles imposent d'avoir validé une épreuve de vérification des connaissances d'un niveau de deuxième cycle.
L'ensemble de leur formation de spécialité s'est effectué en France selon une maquette validée par les unités de formation et de recherche française, donc avec une traçabilité du cursus vérifiable.
Les titulaires du DIS dont la majorité sont français demandent donc simplement de pouvoir être dispensés des épreuves de vérification de la maîtrise de la langue française et des connaissances comme les titulaires du CSCT.
La parole est à M. Rogemont, pour soutenir l'amendement n° 1941 rectifié .
Les propos de M. Préel sont frappés au coin du bon sens et nous partageons son analyse.
Cet amendement vise à étendre le bénéfice de la mesure dérogatoire instituée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 aux médecins ayant obtenu un diplôme en France, comme le diplôme interuniversitaire de spécialité, et qui totalisent trois ans d'expérience professionnelle et justifient d'une fonction rémunérée au cours des deux ans précédant la publication de la loi.
Il y a là une reconnaissance tout à fait normale de l'implication de ces personnes dans le système de santé.
Ces amendements visent à exempter des épreuves de langue française les médecins et pharmaciens titulaires d'un diplôme interuniversitaire de spécialisation qui sont candidats à l'exercice de la médecine ou de la pharmacie en France du fait qu'il peut paraître inutile de vérifier les connaissances de praticiens étrangers déjà titulaires d'un diplôme français de spécialisation.
Je ne reviendrai pas sur les conditions dans lesquelles ces praticiens sont venus en France, à savoir dans le cadre d'échanges en vue d'acquérir une spécialisation devant servir dans leur pays d'origine.
La commission a rejeté les amendements nos 1941 rectifié et 602 au motif que la vérification des connaissances constitue la pierre angulaire de notre dispositif d'autorisation d'exercice et qu'il ne semble pas avisé de déplacer le point d'équilibre qui a été trouvé en la matière.
Défavorable.
Certes, il peut paraître inutile de vérifier les connaissances de praticiens étrangers déjà titulaires d'un diplôme de spécialisation français. Toutefois, ce diplôme, qui a été délivré dans le cadre de coopérations bilatérales en matière de formation médicale, ne saurait être substitué aux épreuves de vérification des connaissances.
Le dispositif actuel d'autorisation d'exercice est le fruit d'une concertation approfondie qui s'est déroulée tout au long de l'année 2006 avec l'ensemble des acteurs concernés. Sa pierre angulaire est la vérification des connaissances théoriques et pratiques, garante de la qualité des soins dispensés. Ainsi tout médecin étranger non titulaire d'un diplôme de médecine français ou d'un pays membre de l'Union européenne doit se soumettre à ces épreuves pour être autorisé à exercer.
J'ajoute que les praticiens installés en France depuis longtemps peuvent passer un simple examen au lieu d'un concours, les titulaires de DIS étant très nombreux parmi les lauréats de ces épreuves.
Enfin, dans le cadre de la présente loi, j'ai proposé de porter à trois le nombre de tentatives pour passer cet examen – il est jusqu'à présent de deux –, afin d'augmenter les chances de réussite de ces candidats, ce qui bénéficiera aux titulaires de DIS.
M. le rapporteur mêle deux problèmes qui sont liés mais ne sauraient, pour autant, recevoir la même réponse. Je suis allée récemment en Roumanie et au Mali : il est vrai que nous y sommes fortement interpellés sur le fait que de plus en plus de médecins de ces pays, et de bien d'autres, souhaitent exercer sur notre territoire. Cette tendance ne laisse pas de nous interroger car ces pays manquent eux-mêmes cruellement de médecins, mais ce ne serait pas, à mes yeux, une bonne manière de faire face au problème que de refuser l'amendement n° 1941 rectifié .
En effet, cet amendement vise à consacrer la pratique de confrères qui travaillent déjà aux côtés des médecins français et ont fait passer des examens avec eux.
Ces médecins étrangers vivent avec difficulté, voire comme une humiliation, de devoir être soumis à une telle vérification alors même qu'ils sont pleinement intégrés, notamment dans les équipes hospitalières.
Je soutiens donc cet amendement, refusant qu'on mêle les deux problèmes que j'ai évoqués.
(L'amendement n° 602 n'est pas adopté.)
(L'amendement n° 1941 rectifié n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 2081 .
La parole est à Mme la ministre.
Au cours de l'examen de la loi de finances initiale pour 2009, le Sénat avait adopté une mesure faisant obligation aux officines de pharmacie, aux pharmacies à usage intérieur et aux laboratoires de biologie médicale de collecter gratuitement tous les déchets d'activités de soins à risques infectieux – DASRI – produits par les patients en auto-traitement.
J'ai déjà l'accord de M. Bapt sur mon premier considérant : j'en suis très heureuse.
Un décret doit préciser les conditions de l'élimination de ces déchets, notamment les conditions de financement de celle-ci par les personnes qui mettent sur le marché des médicaments, dispositifs médicaux et dispositifs médicaux de diagnostics in vitro destinés aux patients en auto-traitement et conduisant à la production de ces déchets.
Cet amendement a pour objet de clarifier le périmètre de la collecte. La rédaction actuelle prévoit une obligation de collecte sur tous les déchets d'activités de soins à risques infectieux par les patients en auto-traitement. Il apparaît qu'un tel champ d'application ne devrait concerner que les déchets perforants et non les nombreux déchets qui ne posent pas de problème d'élimination particulier, comme les pansements usagés. De plus, la terminologie utilisée pour désigner les personnes concernées par le financement appelait quelques précisions.
Je souhaite toutefois rectifier l'amendement en substituant, à la première ligne du quatrième alinéa, le mot « Autorité » au mot « Conseil », le début de l'alinéa étant ainsi rédigé : « Un décret pris après avis de l'Autorité de la concurrence précise les conditions de l'élimination, au sens de l'article L. 541-2 du code de l'environnement… ».
La rectification a été notée, madame la ministre.
Quel est l'avis de la commission ?
Cet amendement n'a pas été examiné par la commission, mais j'y suis favorable à titre personnel.
Il permet en effet de clarifier utilement l'article 30 de la loi de finances pour 2009 puisqu'il précise que l'obligation de collecte des DASRI s'applique aux déchets piquants et tranchants.
Je tiens à confirmer que nous voterons votre amendement avec sa rectification, madame la ministre.
En effet, son adoption sera, à la fois, une source de satisfaction pour ceux des pharmaciens qui, à l'exemple de ceux de ma commune, s'étaient déjà organisés pour collecter les déchets piquants et donc potentiellement dangereux, et un soulagement pour les élus locaux vers lesquels les administrés se tournaient depuis la disparition des dispositifs obligatoires antérieurs, – certaines mairies ayant même mis à disposition une boîte à déchets, destinée notamment aux aiguilles des diabétiques.
Notre accord a paru vous ravir tout à l'heure, madame la ministre, mais il n'est que naturel à partir du moment où il y va de l'intérêt général bien compris.
(L'amendement n° 2081 , tel qu'il vient d'être rectifié, est adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 605 .
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
Cet amendement, dont la rédaction est toute simple, a pour objet de prévoir que « les statuts de médecin inspecteur de la santé et de praticien hospitalier qualifiés en santé publique seront harmonisés par décret. »
Chacun sait ici que les médecins inspecteurs de santé publique, qui sont aujourd'hui quelque 500, dépendent du ministère chargé de la santé. Ils sont affectés dans l'administration centrale, les agences – notamment de veille sanitaire –, les DDASS ou encore les DRASS. Leurs missions, qui sont aujourd'hui importantes, s'accroissent – il suffit d'évoquer les lois de santé publique, la surveillance des épidémies, l'addictologie ou la surveillance des hôpitaux.
Or ces médecins inspecteurs sont d'autant plus inquiets que quelque soixante-dix postes sont vacants et que, de plus, ils manquent d'infirmières et de secrétaires.
Ils demandent donc une revalorisation de leurs statuts, souhaitant notamment une harmonisation avec le statut de praticien hospitalier, ce qui devrait rendre possibles la mobilité et le décloisonnement.
Il est toutefois indispensable, étant donné l'importance de leurs missions, que les praticiens hospitaliers souhaitant opter pour un poste de médecin inspecteur soient qualifiés en santé publique, soit par l'internat, soit après avoir obtenu une qualification reconnue par la commission.
Si un protocole a bien été signé en 2007, sa mise en oeuvre, incomplète, est loin d'être satisfaisante puisque les postes fonctionnels de médecins inspecteurs régionaux risquent de disparaître avec les ORS et que, en dépit de l'application des taux de promus et promouvables, des blocages importants subsistent – trente et un promus pour 107 promouvables en 2008 et, semble-t-il, trente et un pour 111 en 2009. Le manque de visibilité est donc certain, à quoi s'ajoute le fait que la revalorisation indemnitaire se fera sur trois ans et non pas sur cinq, comme le prévoyait le protocole.
Par ailleurs, la publicité pour le recrutement a manqué d'efficacité puisque, sur vingt postes proposés en 2008, sept médecins seulement ont été admis.
De plus, la révision des missions des médecins inspecteurs, bien que prévue, ne semble pas avoir été mise en oeuvre, non plus que l'adaptation de la formation et du recrutement – les points 4 et 6 du protocole.
Or, du fait de l'importance de leurs missions s'agissant, notamment, de l'application des lois de santé publique et de la surveillance des épidémies, il me paraît nécessaire de disposer de médecins inspecteurs motivés et en nombre suffisant. C'est ce à quoi tend cet amendement en prévoyant l'harmonisation des statuts de médecin inspecteur de la santé et de praticien hospitalier qualifiés en santé publique.
Défavorable.
La commission a en effet considéré que ce n'est pas au détour d'un amendement qu'on peut traiter dans toute son ampleur un problème qui est bien plus compliqué que ce qu'a bien voulu laisser entendre M. Préel.
Les fonctions et les compétences des médecins inspecteurs de santé publique méritent d'être valorisées. C'est du reste ce à quoi je m'emploie et vous avez vous-même souligné que vingt postes ont été mis au concours en 2008. Il aurait peut-être été utile de préciser que leur nombre s'élève à trente pour 2009, ce qui représente une augmentation de 50 %.
Je continuerai évidemment de veiller à la bonne application du protocole d'accord qui a été signé avec les représentants des MISP et qui vient renforcer l'attractivité du corps.
Cet accord comprend plusieurs mesures, parmi lesquelles l'accélération des possibilités d'avancement entre les différents grades du corps, une revalorisation, dans la durée, du régime indemnitaire des médecins inspecteurs particulièrement significative, surtout dans les circonstances que nous connaissons, – plus 10 % en 2007, plus 7 % en 2008 et plus 7 % prévu pour 2009 – et la création d'un statut d'emploi dont l'indice terminal culmine à la hors échelle D. Ces efforts soutenus, qui constituent un ensemble très consistant, contribueront à renforcer les effectifs des MISP dont les compétences sont particulièrement précieuses pour conduire des politiques de santé publique.
C'est la raison pour laquelle, monsieur le député, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement : je travaille à atteindre les objectifs que vous proposez.
Non, madame la présidente, car mon amendement propose l'harmonisation des statuts, laquelle n'est pas prévue.
Nous voterons cet amendement, madame la présidente.
(L'amendement n° 605 n'est pas adopté.)
Nous avons passé beaucoup de temps à examiner le titre Ier et, en particulier, les conséquences de la gestion en quête de rentabilité que vous semblez vouloir instaurer à travers, notamment, la tarification à l'activité.
À cet égard, puisque cela concerne directement nos réflexions et donc nos prises de position, je souhaite évoquer un arrêté daté du 18 février 2009 et publié au Journal officiel le 27 février. Il bouleverse la prise en charge financière des pathologies nécessitant des traitements particulièrement coûteux. Chacun sait que ces traitements sont depuis longtemps remboursés aux établissements de santé en sus des dépenses d'hospitalisation et donc pris en charge à 100 %. La croissance annuelle de ces traitements innovants est importante puisque largement supérieure à 15 % en moyenne. Or l'arrêté mentionné plafonne à 10 % le taux d'évolution des dépenses de médicaments et de dispositifs médicaux inscrits sur la liste en sus des groupes homogènes de séjours dans le cadre de la T2A.
Au cas où, pour un établissement de santé, le taux de 10 % ne serait pas respecté, l'ARH, par la suite l'ARS, serait contrainte de réduire le remboursement de la part prise en charge par l'assurance maladie au titre de ces dépenses pendant un certain temps à concurrence du taux de 10 %. On peut craindre que cette disposition ait un impact non négligeable sur le comportement des établissements quant au traitement des malades concernés, notamment au cours de l'année quand, au bout d'un certain temps, les budgets sont consommés et qu'il faut racler les fonds de tiroirs. Les contraintes de gestion pourraient en effet être fortes au point de conduire à différer certains traitements, voire à ne pas les prodiguer comme il conviendrait.
Il n'est sans doute pas nécessaire d'en rajouter mais je souhaite que vous nous disiez, madame la ministre, ce qu'il en est exactement ; mes informations ne sont peut-être pas les bonnes, mais j'ai malgré tout bien peur que mes craintes ne soient fondées.
Je ne suis pas sûre, monsieur Mallot, qu'il se soit vraiment agi d'un rappel au règlement.
Christian Paul m'ayant interrogée sur les critères de zonage, je vais vous apporter des éléments d'information qui, du reste, intéressent tout le monde, même si ces précisions concernent des dispositions de nature réglementaire.
Je rappelle que, pour les médecins généralistes, le zonage en vigueur date de 2005 et ne concerne que les zones dites sous-dotées. L'objectif était de mieux cibler l'application des aides à l'installation, qu'elles soient d'État – par le biais de mesures fiscales –, de nature conventionnelle ou bien proposées par les collectivités territoriales. Ces zones sont au nombre de 357, correspondent à 4 078 communes et concernent 3,81 % de la population.
En 2008, j'ai souhaité, dans le cadre de la LFSS, modifier ce zonage pour couvrir l'ensemble du territoire national au moyen de cinq types de zones qui représentent cinq niveaux de dotation progressifs en médecins généralistes. La méthodologie retenue laissait volontairement une large part à la concertation locale et au développement des projets de santé du territoire. J'ai souhaité ne pas imposer un modèle mathématique figé et technocratique qui, aussi complexe qu'il puisse être, ne pourrait pas répondre aux spécificités locales.
J'ai ainsi retenu deux critères essentiels qui constituaient déjà le fondement du zonage en 2005 : la densité médicale et l'activité. J'ai laissé aux régions la liberté de complexifier le modèle à volonté et, surtout, je leur ai demandé de mener des concertations approfondies avec l'ensemble des acteurs de terrain afin d'adapter le zonage aux projets d'aménagement de l'offre de soins sur leur territoire. Il s'agit donc d'une démarche pratique et simple. Aussi semble-t-il paradoxal de voir certains demander de la souplesse tout en exigeant des critères de plus en plus élaborés pour une démarche que je souhaite pour ma part avant tout concrète, proche du terrain.
Les résultats de ce travail montrent que les zones les moins dotées recouvrent 16 % du territoire, 9 % de la population et seulement 7 % des médecins, alors que les zones les mieux dotées concernent 3,6 % du territoire, 6 % de la population et 9,6 % des médecins.
Je souhaite que ce zonage soit repris dans les SROS ambulatoires et qu'ils complètent le projet d'aménagement de l'offre de soins en désignant des zones sous-dotées dont il conviendra de renforcer l'attractivité et qui constitueront les sites prioritaires pour l'implantation des médecins boursiers dont nous avons déjà parlé, et des zones sur-dotées concernées par le dispositif de contrat de solidarité proposé par le rapporteur – deux mesures votées hier par l'Assemblée.
Pour aller plus avant dans la définition du socle des critères communs à l'ensemble des zones et des critères d'adaptation locale, j'ajouterai que ces critères doivent prendre en compte la densité de médecins – hors médecins à exercice particulier –, c'est-à-dire leur nombre rapporté à la population de la zone telle qu'elle est estimée par les derniers recensements de l'INSEE, le niveau d'activité des médecins en exercice mesuré par les honoraires, la part des médecins de plus de cinquante-cinq ans, pour anticiper les évolutions, enfin le pourcentage des personnes âgées de plus de soixante-quinze ans dans la population concernée.
Je suis disposée à introduire des critères optionnels qui permettront d'adapter le zonage aux spécificités locales. Ces critères pourront être de nature plus qualitative. Ils pourraient ainsi tenir compte de l'existence d'une offre alternative de proximité – centre de santé, consultation hospitalière, présence de spécialistes en accès direct –, de particularités géographiques ou économiques – on pense notamment aux zones touristiques sujettes à de fortes variations saisonnières, ou au classement du territoire en zones d'implantations dites fragiles, les ZRR, les ZUS, les 215 quartiers de la dynamique « Espoir banlieues », les zones de montagne ou encore les activités particulières comme le thermalisme.
Certaines régions pourront souhaiter prendre en compte des caractéristiques plus précises liées à l'état de santé de la population, comme la prévalence de certaines pathologies ou le pourcentage des personnes en ALD.
Bien sûr, pour mettre en place ce zonage, les régions doivent disposer d'une marge de manoeuvre, raison pour laquelle, à partir d'un socle commun, je souhaite une qualification à la carte afin de ne pas bâtir un modèle technocratique absurde. Ce point me paraît très important.
L'ensemble de ces critères garantit avant tout un accès géographique aux soins, sans toutefois permettre d'apprécier l'accessibilité financière à l'offre de soins, qui constitue pourtant l'une de mes priorités. Dès lors, l'existence d'une offre de soins suffisante en secteur 1 doit plutôt être prise en compte dans le cadre de l'élaboration des volets ambulatoires des SROS et de la contractualisation avec les maisons de santé pluriprofessionnelles, les centres de santé et l'ensemble des professionnels médicaux libéraux.
Ces considérations livrées à la représentation nationale, j'insiste sur la souplesse de la définition de ces zones et sur l'importance de la concertation. Veuillez excuser la longueur de mon intervention, mais je vous avais promis de vous exposer les critères de définition du zonage. Il me paraissait important de m'exprimer sur ce point au terme de l'examen du titre II.
Je suis saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels avant l'article 22.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l'amendement n° 224 .
Je ne voudrais pas commencer mon exposé sans souligner que nous abordons le titre III, intitulé « Prévention et santé publique ». De nombreux rapports ont alimenté cette partie du texte, qui ont montré l'utilité des études sur le terrain. Dans cette perspective, je souhaite que nous définissions un certain nombre de concepts.
Ainsi, l'amendement n° 224 vise à reprendre la définition de la santé telle que la donnait l'OMS en 1946.
La commission n'a pas retenu cet amendement. J'y suis cependant tout à fait favorable à titre personnel. Il me semble en effet important de reprendre cette définition symbolique qui date de plus de soixante ans mais qui mérite d'être reprise dans le texte.
Favorable.
Mon groupe est également favorable à la reprise de cette définition. Cette initiative heureuse du rapporteur pour avis se révèle d'autant plus importante que le contexte économique et social, d'un point de vue général aussi bien que d'un point de vue local – un site industriel vient par exemple de fermer dans ma circonscription –, affecte le bien-être physique, mental ou social des individus.
Cet amendement prend donc en compte le capital santé, idée renvoyant à celle d'une « santé durable ». La santé ne se réduit en effet pas seulement aux soins, mais, au-delà, concerne la façon dont l'environnement, l'activité, l'éducation et la promotion de la santé agissent sur les individus, d'où la nécessité de fonder notre système de santé sur la recherche du bien-être physique, mental et social.
Cette définition émane peut-être de l'OMS, elle ne m'en paraît pas moins idiote et inutile. Être en bonne santé, c'est évidemment être bien portant sur les plans physique, mental et social.
Le moment est venu d'en finir avec les vieilles définitions, les vieilles lunes et de mener un travail novateur. Reprendre une telle définition, j'insiste, est idiot ! Et ce n'est pas parce qu'elle a été établie par l'OMS que le code de la santé publique doit s'aligner, les mains le long du corps. Arrêtez donc !
Monsieur Soisson, jamais cette définition n'a été plus actuelle et à ce point novatrice. Aux États-Unis, de plus en plus de chaires de santé sociale sont créées.
Je ne pense pas que ce soit une question de richesse. C'est, en l'occurrence, affaire de conscience des problèmes de santé.
Cette définition est novatrice, disais-je les trois termes, « physique », « social » et « mental »…
…s'y présentent de manière assez équilibrée Et on constate de plus en plus, monsieur Soisson, que les paramètres sociaux l'emportent et que 60 % des éléments grâce auxquels nous sommes en bonne santé sont d'origine extérieure et majoritairement d'origine sociale.
Nous nous rallions bien sûr à l'introduction de cette définition dans le texte. Seulement, elle est tellement complète, forte, novatrice, qu'elle ne nous fait que davantage regretter l'insuffisance de ce volet de santé publique. Aussi souhaitons-nous qu'il soit largement complété.
Je remercie Jean-Pierre Soisson pour ses propos plus que mesurés. (Sourires.)
Cette définition s'inscrit en réalité dans un ensemble qui s'étend à tout le titre III.
Dans ma région, et je le dis après l'avoir auscultée d'une manière assez précise, beaucoup ignorent que leur patrimoine santé – je me distingue ici de Gérard Bapt, puisque j'évite le mot mathématique de « capital », lui préférant le mot de « patrimoine », beaucoup plus humain – est déjà largement compromis, faute pour eux d'avoir reçu une éducation nutritionnelle et comportementale.
D'autre part, il s'agit d'une région où, plus qu'ailleurs, pour des raisons historiques, je puis voir clairement que la santé, c'est aussi le mental et le social.
Je regrette donc, cher collègue Soisson, l'impulsion à laquelle vous avez obéi. Elle est peut-être due au fait que vous n'avez pas lu l'ensemble des amendements suivants, qui visent à faire en sorte que le titre III de ce projet de loi définisse à la fois des principes, un contenu, des objectifs et des moyens.
(L'amendement n° 224 est adopté.)
Comme je l'indiquais à l'instant, il s'agit ici d'introduire dans le texte une première définition importante, celle de l'éducation à la santé, qui doit notamment comprendre « la prévention comportementale et nutritionnelle ».
Il convient de lutter contre des fléaux sociétaux ô combien importants, qu'il s'agisse de troubles alimentaires ou d'addictions de toutes sortes, qui entraînent de graves dommages collatéraux.
Je pense même qu'il serait utile de disposer d'un véritable outil permettant d'accélérer l'ensemble de nos actions en faveur de cette éducation. J'étais allé jusqu'à imaginer qu'une fondation nous permettrait d'avoir des moyens supplémentaires...
La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire pour soutenir le sous-amendement n° 2044 .
Vous le voyez, le rapporteur et moi-même allons très vite, puisque ce sous-amendement prévoit, pour compléter l'excellent amendement de M. Flajolet, la mise en place de la fondation qu'il appelait à l'instant de ses voeux, afin de préparer la mobilisation de l'ensemble des moyens financiers destinés à soutenir l'éducation à la santé. Cette fondation pourra bien entendu faire appel aux contributeurs privés.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement et l'amendement ?
L'ensemble est quasiment parfait. J'invite mes collègues à adopter l'un et l'autre.
Je suis saisie d'un amendement n° 1723 .
La parole est à Mme Catherine Lemorton.
Même si l'on atteint maintenant des niveaux corrects de substitution, il reste encore des marges pour améliorer la prescription et donc la délivrance de génériques. Cet amendement vise à lutter contre les stratégies des industries pharmaceutiques qui ont pour objectif de contourner la prescription de génériques lorsqu'une molécule est sur le point de tomber dans le domaine public.
Un rapport préliminaire de la Commission européenne, rendu public le 28 novembre dernier, étudie la concurrence entre les entreprises innovantes et les entreprises de génériques.
Ce rapport insiste sur le fait que les brevets ont une position clé dans le secteur pharmaceutique car ils permettent aux entreprises de recouper leurs investissements, souvent très lourds, et d'être récompensées pour leurs efforts d'innovation.
Cependant, il constate aussi que les entreprises innovantes ont développé des stratégies, dites « boîtes à outils », d'instruments ayant pour finalité de s'assurer des flux continus de revenus pour leurs médicaments. Même s'il est possible que les retards dans l'entrée des génériques sur le marché aient d'autres origines, la mise en oeuvre réussie de ces stratégies peut avoir pour effet de retarder ou de bloquer une telle entrée. Les stratégies observées incluent les dépôts de brevets allant jusqu'à 1 300 brevets pour un seul médicament à travers l'Union européenne – c'est ce qu'on appelle les « grappes de brevets » –, l'engagement de différends avec les entreprises de génériques conduisant à près de 700 cas rapportés de litiges sur les brevets, ce qui retarde d'autant l'arrivée des génériques sur le marché. Ces stratégies touchent particulièrement la France.
Je vous demande donc, pour des raisons qui tiennent tout simplement à la nécessité d'économies pour les comptes publics de l'assurance maladie, d'accepter cet amendement.
La commission a rejeté cet amendement, estimant que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 avait déjà notablement élargi le répertoire permettant la substitution par le pharmacien d'un médicament prescrit par le médecin.
Je ne peux pas être d'accord avec l'amendement de Mme Lemorton.
Je suis bien entendu favorable à la substitution entre produits de même DCI. Cela étant, même si je connais les stratégies de contournement, l'élargissement de la possibilité de substitution entre équivalents thérapeutiques, c'est-à-dire entre médicaments différents d'une même classe thérapeutique, modifie considérablement les conditions de la substitution, en demandant au pharmacien de permuter des produits dont les substances actives sont différentes. La sécurité de la substitution n'est alors plus assurée. En effet, pour les molécules d'une même classe thérapeutique, les profils de tolérance peuvent être très différents, d'où des risques pour les patients en cas de substitution. Et l'absence d'équivalence entre les différentes doses entraîne des risques de surdosage ou de sous-dosage – mais Mme Lemorton connaît très bien tout cela –, avec des risques d'effets toxiques ou de perte d'efficacité thérapeutique.
Il ne me paraît donc pas souhaitable, pour la sécurité des malades, pour la sécurité des soins, d'étendre la substitution à l'ensemble des médicaments d'une même classe thérapeutique.
Je suis d'ailleurs assez surprise de voir Mme Lemorton, qui nous a dit qu'il ne fallait surtout pas de maîtrise comptable, avancer la notion d'économie pour préconiser une démarche qui n'est pas d'une totale sécurité.
Puisque vous avez parlé de la sécurité des génériques, madame la ministre, je ne peux pas résister à la tentation de sortir un peu du sujet. Je vous avais interpellée sous la forme d'une question écrite sur un point d'une modestie affligeante : je veux parler de la forme différente, et de la couleur différente, des médicaments génériques. C'est une matière dans laquelle il me semble nécessaire de réglementer.
Quand des patients prennent une dizaine de médicaments, qu'ils ne reconnaissent pas forcément, il peut arriver qu'avant de prendre leur voiture ils avalent un somnifère au lieu d'un médicament pour le coeur. Des problèmes de ce genre sont très fréquents, même si l'on en voit rarement de cette gravité – car quand de tels cas surviennent, on n'a en général pas l'occasion de rencontrer les patients concernés. Combien de fois n'ai-je pas rencontré des problèmes liés à la prise d'un médicament qui est jaune et sécable sous l'une de ses formes possibles de générique, alors qu'il est blanc et arrondi sous une autre ! Des confusions sont très fréquentes.
C'est une mesure très modeste que celle qui consiste à réglementer la présentation de ces médicaments. Cela permettrait de réduire beaucoup les problèmes d'iatrogénicité.
(L'amendement n° 1723 n'est pas adopté.)
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 450 et 1721 rectifié .
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 450 de la commission.
Je laisse à Mme Lemorton le soin de défendre ces deux amendements, madame la présidente.
Cet amendement nous permettrait d'être en cohérence avec l'article 22, qui traite de l'éducation thérapeutique. Le but est que le patient soit un réel acteur de sa santé.
On sait que les patients vont de plus en plus chercher des informations sur Internet. À cet égard, les chiffres sont éloquents : environ un patient sur cinq consulte Internet pour rechercher de l'information médicale ou de l'information de santé. Parmi les sites les plus connus, on peut citer : doctissimo.fr, qui n'est pas certifié et n'a pas de liens avec le monde institutionnel ; e-sante.fr, qui est certifié mais n'a pas non plus de liens avec le monde institutionnel ; tasante.com, très visité par les jeunes.
Si nous adoptons l'article 22 afin de permettre au patient de prendre conscience de sa maladie et de tout ce qu'il doit faire ou ne pas faire pour conserver le capital santé qui lui reste, il serait raisonnable de créer des hyperliens sur ces sites dits « de santé », de manière à mener à bien une action de santé publique cohérente.
Sagesse.
(Les amendements identiques nos 450 et 1721 rectifié sont adoptés.)
Je fais ce rappel au règlement en tant que co-président de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale. Vous savez que la MECSS travaille régulièrement sur différents sujets. L'un de ses derniers rapports est celui de notre collègue Jean-Pierre Door, consacré aux affections de longue durée, dont nous aurons peut-être l'occasion de reparler. Avant celui-ci avait été rendu public le rapport de Catherine Lemorton, Prescrire moins, consommer mieux.
Ce rapport faisait suite à un travail de plusieurs mois, incluant beaucoup d'auditions, et proposait quatre-vingt-douze mesures, adoptées par la MECSS à l'unanimité, comme le fut d'ailleurs le rapport lui-même. On sait que la MECSS est composée à la proportionnelle des groupes. Chacun d'eux s'est donc approprié ces propositions et a considéré qu'elles devaient être mises en oeuvre.
C'est d'ailleurs pour donner suite aux conclusions et aux propositions des différents rapports que nous établissons, les uns et les autres, dans différents cadres, que nous prenons des initiatives législatives, soit sous la forme de propositions de loi, soit sous la forme d'amendements, déposés à l'occasion des PLFSS ou de différents textes soumis à notre assemblée.
Le rapport de Catherine Lemorton a en particulier formulé toute une série de propositions visant à promouvoir les génériques et développer une automédication responsable. Il avait notamment proposé de lutter contre les stratégies de contournement des génériques. La première des propositions allant en ce sens était d' « encourager l'élargissement du répertoire des génériques ». C'était exactement l'objet de l'amendement n° 1723 présenté par Mme Lemorton. Je regrette que certains députés ayant approuvé le rapport qui contenait cette proposition n'aient pas eu la cohérence de soutenir cet amendement.
Cela fait un moment, en France, que les professionnels de santé, hospitaliers et ambulatoires, attendent une base de données sur les médicaments exhaustive, gratuite et objective.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 prévoyait qu'au 1er janvier 2003, l'AFSSAPS devrait avoir mis en oeuvre une banque de données administratives et scientifiques sur les médicaments et les dispositifs médicaux. Or, en 2007, la Cour des comptes constatait : « Pourtant si la HAS endosse les deux premières conclusions de l'étude, elle rejette la troisième sur la nécessité de produire cette information publique complémentaire ». Plus loin, elle indiquait : « Dans ce contexte, Thériaque – base mise en oeuvre depuis vingt-cinq ans – apparaît supérieure dans des domaines essentiels pour une base de données publique sur le médicament : indépendance à l'égard de l'industrie pharmaceutique, exhaustivité (Thériaque recense tous les médicaments disponibles en France, AMM ville et hôpital, les autorisations temporaires d'utilisation de cohorte, les autorisations temporaires d'utilisation nominatives et les préparations hospitalières de l'AP-HP), contenu (elle est la seule à faire figurer le SMR et l'ASMR du médicament) et gratuité. »
Si nous avons le droit d'indiquer notre préférence, celle de l'opposition va à la base Thériaque. En tout cas, il nous semble important que, d'ici au 1er janvier 2010, une base de données soit mise en oeuvre sur le territoire à l'intention de tous les professionnels de santé, puis soit mise en ligne pour le public.
La commission a adopté l'amendement n° 451 . À titre personnel, je m'étais montré réservé, considérant que la Haute autorité de santé n'est pas l'unique producteur et fournisseur d'informations sur le médicament. En outre, un portail d'information public, rassemblant les informations sur les médicaments, est en cours de constitution.
M. le rapporteur a indiqué à juste titre que la HAS n'est pas le seul producteur et émetteur d'informations. Je le remercie également d'avoir rappelé que j'ai présenté, il y a quelques semaines, le portail institutionnel auquel participent le ministère de la santé, l'AFSSAPS et la HAS, qui présente des garanties éthiques et va permettre un accès simplifié à toutes les informations sur les médicaments grâce à un travail de collaboration très important. Dans les toutes prochaines semaines, le public et les professionnels de santé pourront ainsi disposer gratuitement de l'ensemble des informations publiques sur les médicaments. Cette première version orientera vers les informations que l'on peut trouver sur les sites des instances partenaires et sur une base de donnée dénommée Thesorimed.
Voilà la raison pour laquelle je pense que ces amendements sont satisfaits.
(Les amendements identiques nos 451 et 1722 ne sont pas adoptés.)
Je suis saisie d'un amendement n° 1326 .
La parole est à Mme Catherine Lemorton.
Avant la mise sur le marché et l'inscription d'un médicament sur la liste des médicaments remboursables, il est important de réaliser des essais cliniques en rapport avec des stratégies thérapeutiques existant déjà pour la même pathologie. Mme la ministre a donné ici même l'exemple des sartans et des inhibiteurs d'enzymes de conversion. Dans ce modèle particulier de prescription, la tendance est d'aller vers ce qui peut apparaître comme une innovation thérapeutique, donc vers le plus cher, sans pour autant que l'amélioration du service médical rendu soit suffisante pour justifier une telle priorité.
Accepter cet amendement permettrait de clarifier un peu la situation.
(L'amendement n° 1326 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Comme les précédents, ces amendements poursuivent un but de simplification et de plus grande lisibilité, s'agissant de l'amélioration du service médical rendu.
Tout médicament ayant obtenu une AMM se voit attribuer une ASMR se situant sur une échelle de 1 à 5, le niveau 1 correspondant à la meilleure performance. Autrement dit, un médicament ayant une ASMR 5 n'apporte rien de plus que ce qui existe déjà.
Selon une étude de la CNAM parue en 2007, les médicaments de moins de trois ans, que l'on peut considérer comme des innovations, représentent une dépense de près de 1,4 milliard d'euros, soit 600 millions d'euros de plus qu'en 2006. Ils contribuent ainsi à l'équivalent de 85 % de la hausse totale des dépenses de médicaments sur l'année. Or un tiers de cette augmentation est liée à des innovations thérapeutiques ayant une ASMR de niveau 1, 2 ou 3, alors que 45 % concernent des molécules présentant peu, voire pas, d'amélioration du service médical rendu, avec des ASMR de 4 et 5.
Encore une fois, accepter ces amendements permettrait de préférer les vraies innovations thérapeutiques aux fausses qui grèvent le budget de la sécurité sociale. Vous le voyez, madame la ministre, je suis autant intéressée que vous par l'équilibre de nos comptes.
Pour ma part, j'y suis défavorable, car un tel dispositif aurait pour effet pervers d'amener les prescripteurs à choisir le produit à ASMR du niveau le plus élevé, ce qui n'est pas forcément la démarche thérapeutique la plus adéquate.
Si vous aviez accepté l'amendement précédent qui permettait de définir l'ASMR en fonction d'essais cliniques en rapport avec les stratégies thérapeutiques existantes sur la même pathologie, nous aurions l'arsenal complet. Je comprends qu'ayant refusé cette première disposition, vous refusiez maintenant celle-ci, mais ce n'est pas aller dans le bon sens.
(Les amendements identiques nos 452 et 1718 ne sont pas adoptés.)
Ce sont toujours de vrais rappels, vous le savez bien, monsieur Préel. Et vous en avez souvent bénéficié puisqu'ils permettent de recadrer les débats et de ne pas perdre le fil.
Je veux encore intervenir en tant que coprésident de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale. Vous savez que nous avons à coeur, depuis longtemps mais singulièrement depuis la révision constitutionnelle de juillet dernier, de développer dans cette assemblée la fonction de contrôle. Nous procédons à des travaux d'études et de contrôle, nous établissons des rapports d'information, nous constituons des missions d'information, des commissions d'enquête, toutes activités qui seront appelées à se développer dans les années qui viennent. Les députés vont rouler des mécaniques et, on va voir ce qu'on va voir, ils vont faire du contrôle sur pièces et sur place !
D'ores et déjà, sur le médicament, un tel travail de contrôle a été réalisé et a débouché sur le rapport important dont je parlais tout à l'heure. Ce rapport, établi par Catherine Lemorton et intitulé « Médicaments : prescrire moins, consommer mieux », a été adopté à l'unanimité de la mission et de la commission des affaires sociales que préside Pierre Méhaignerie ici présent.
Qu'y a-t-il dans ces propositions ? Dans la rubrique I « Améliorer l'encadrement de la vie du médicament et renforcer la sélectivité de l'accès au remboursement », au B « Renforcer les règles de l'admission au remboursement et à la fixation du prix des médicaments », figurent notamment une proposition 6, « Rendre obligatoire les essais cliniques contre comparateurs avant l'appréciation de l'amélioration du service médical rendu par la Commission de la transparence », et une proposition 7 « Établir un classement des médicaments par niveau d'ASMR », qui collent exactement aux deux amendements que vous venez de rejeter. La cohérence de ces mesures établie dans le rapport se retrouve dans la cohérence de ces deux amendements. Pour le coup, je vous engage à réfléchir à ce que vous faites, chers collègues de l'UMP, quand vous participez aux travaux de contrôle. Vous prenez des positions et vous les trahissez à la première occasion. Je ne comprends pas !
Je suis saisie d'un amendement n° 1719 .
La parole est à Mme Catherine Lemorton.
L'amendement est défendu.
(L'amendement n° 1719 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisie d'un amendement n° 1572 .
La parole est à Mme Michèle Delaunay.
Les médicaments et les dispositifs médicaux innovants sont extrêmement onéreux, notamment parce qu'il faut « éponger » l'investissement de recherche. Leur prix doit donc être réapprécié très régulièrement en fonction du volume vendu, car cet amortissement dure probablement bien au-delà de ce qui est nécessaire. Dès lors, nous devrions être beaucoup plus sévères et réviser régulièrement ces prix considérables.
À titre d'exemple, la moitié du budget de médicaments du centre de lutte contre le cancer de Bordeaux est avalée par cinq molécules seulement. Nous pourrions réaliser des économies considérables en adoptant une démarche « en escalier », c'est-à-dire d'évaluation et de déflation régulières de prix complètement délétères qui grèvent le budget de nos pharmacies hospitalières.
Avant que la commission ne donne son avis, j'ai réalisé, en entendant l'exposé de Mme Delaunay, que je n'avais pas répondu à une question de M. Mallot sur l'arrêté de 10 %.
L'intéressant dans les médicaments de la liste en sus, c'est que les établissements comparables ayant le même type de malades ont des dépenses extrêmement différentes. L'arrêté en question ne définit pas une enveloppe limitative, mais donne un taux indicatif d'évolution de la liste en sus. À 10 %, ce taux est très confortable. Il est fixé au début de l'année et, à la fin de l'année, on constate le taux d'évolution des établissements. L'agence régionale de l'hospitalisation entre alors en dialogue avec les établissements qui présentent des écarts très importants.
Ces écarts peuvent parfois s'expliquer, mais il arrive qu'ils n'aient aucune justification. Un dialogue constructif avec les établissements permet alors de s'interroger sur les causes de ces dérives, ou plutôt de ces écarts par rapport à la moyenne.
L'enveloppe de 10 % que vous évoquiez n'est donc pas limitative ; il s'agit bien d'un taux indicatif qui, en cas de dépassement, permet un échange constructif et une démarche de responsabilisation.
La commission n'a pas examiné cet amendement.
À titre personnel, j'y suis défavorable dans la mesure où l'encadrement des prix fait déjà l'objet d'une procédure extrêmement complexe.
Défavorable.
Nous proposons de faire des économies, et vous n'en voulez pas !
(L'amendement n° 1572 n'est pas adopté.)
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 22.
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
L'article 22 relatif à l'éducation thérapeutique du patient est extrêmement important car il inscrit dans la loi une nouvelle démarche. Celle-ci permet au malade de devenir réellement acteur de sa santé. Elle devrait se généraliser mais elle est indispensable pour les personnes atteintes de maladies chroniques. Celles-ci touchent un nombre de plus en plus important de Français : 15 millions de personnes sont aujourd'hui concernées, parmi lesquelles huit millions sont prises en charge au titre d'une affection de longue durée.
Avec l'éducation thérapeutique, il ne s'agit plus pour le médecin d'assener un diagnostic et de tendre une ordonnance à son patient. Il convient désormais que le praticien explique la maladie, ses causes, ses évolutions possibles, les divers traitements envisageables, leurs avantages, leurs inconvénients, et la raison de la stratégie choisie. Ce n'est qu'à ses conditions que l'observance, qui demande l'adhésion du malade, pourra être améliorée. Mais ce processus suppose des compétences, du temps et des financements.
Les pratiques d'éducation thérapeutique existent déjà dans le cadre d'équipes pluridisciplinaires, constituées le plus souvent à l'hôpital ou au sein de réseaux par pathologie. L'article 22 favorise leur développement dans le cadre du parcours de soins, en particulier en ambulatoire. Un décret déterminera les compétences ainsi qu'un cahier des charges.
Il faudra veiller à la mise en place rapide d'une formation adaptée. Tous les professionnels de santé doivent être concernés, même si le médecin demeurera, le plus souvent, le pivot du dispositif. Je pense à l'infirmière – surtout si l'on met en valeur, comme je le souhaite et comme cela existe dans de nombreux pays, l'infirmière clinicienne qui assure le suivi des maladies chroniques –, mais aussi au diététicien et au pharmacien. Chacun, dans son domaine de compétence, doit pouvoir participer à l'éducation thérapeutique.
Grâce à un cahier des charges national, cette dernière sera régionalisée. Les ARS signeront des contrats avec les promoteurs qui évalueront les programmes. Il faut espérer que les financements suivront – même si sur ce point nous avons toujours quelques doutes – et que l'éducation thérapeutique pourra se généraliser dans de bonnes conditions. Nous devons aller au-delà des déclarations de bonnes intentions, et faire le nécessaire pour que le malade devienne réellement acteur des soins. S'il adhère au traitement, il aura plus de chances d'être bien soigné et de guérir.
Madame la ministre, nous ne pouvons que saluer votre volonté d'inscrire enfin l'éducation thérapeutique dans la loi française.
Votre démarche est cohérente et répond à la définition que l'OMS donnait, en 1998, de l'éducation thérapeutique qui « a pour objet de former le malade pour qu'il puisse acquérir un savoir-faire adéquat, afin d'arriver à un équilibre entre sa vie et le contrôle optimal de sa maladie. L'éducation thérapeutique du patient est un processus continu qui fait partie intégrante des soins médicaux. Elle comprend la sensibilisation, l'information, l'apprentissage, le support psychosocial, tous liés à la maladie et au traitement. La formation doit aussi permettre au malade et à sa famille de mieux collaborer avec les soignants ». Heureusement que M. Soisson n'est plus dans l'hémicycle ! (Rires.)
L'enjeu de l'éducation est important puisque 8 millions de Français sont pris en charge par le régime général de l'assurance maladie pour des affections de longue durée. Ainsi, 2,5 millions de nos concitoyens souffrent d'un diabète, et 3,5 millions sont touchés par l'asthme. Aujourd'hui, des associations de malades entourent déjà ces patients, mais il est indispensable qu'elles puissent bénéficier d'un financement pérenne plutôt que de se demander, tous les ans, si leur budget sera reconduit.
L'éducation thérapeutique comporte trois composantes : l'observance des traitements, l'accompagnement du malade et de sa famille, et la prévention afin de préserver le capital santé dont jouit encore le patient. Deux pièges la guettent. D'une part, elle ne doit pas servir de marchepied aux groupes pharmaceutiques qui sont déjà acteurs de nombreux protocoles d'observance des traitements. Cet aspect n'est, en effet, qu'un des trois piliers de l'éducation thérapeutique. Dans le rapport que Christian Saout a remis à Mme la ministre sur l'éducation thérapeutique, ce dernier soulignait les dangers d'une telle interaction, tandis que l'IGAS avait déjà mis en garde les industries – et donc également le législateur – en ce qui concerne leur gestion des programmes d'observance des traitements.
D'autre part, l'éducation thérapeutique ne doit pas se transformer en outil de contrôle des patients, dont la démarche doit être volontaire. Il appartient au malade de prendre la décision d'entrer dans une stratégie d'éducation thérapeutique. À défaut, celle-ci sera vouée à l'échec.
L'éducation thérapeutique constitue un véritable enjeu de santé publique. Il importe qu'elle soit menée dans un cadre très clair, et j'espère que Mme Bachelot acceptera certains de nos amendements.
Madame la ministre, nous abordons le titre III du projet de loi, et je veux vous dire notre scepticisme en ce qui concerne vos choix en matière de prévention et de santé publique.
Sur ce sujet, vous avez choisi d'introduire quelques dispositions éparses et de portée extrêmement limitée dans un projet de loi qui, selon vos propres dires, a pour principal objectif de définir les principes de l'organisation future de notre système de santé.
Si le titre III du projet de loi avait défini des axes forts en termes de santé publique et qu'il avait proposé de nombreuses mesures, nous aurions compris votre démarche, mais ce titre est quasiment vide. La prévention est décidément la parente pauvre de notre politique de santé et votre projet de loi n'y change rien.
Mais, lorsque nous avons constaté comment vous contourniez les initiatives prises par les parlementaires, notre scepticisme s'est doublé d'incompréhension et même de colère. Puisque votre texte est vide, il était bien normal que des députés, qui venaient d'ailleurs de tous les bancs, déposent des amendements – comme, par exemple, sur la lutte contre l'obésité.
Or, vous n'avez rien trouvé de mieux à faire, en plein débat parlementaire, que de prendre des dispositions qui, préventivement pour ainsi dire, vident ces amendements de leur sens.
Vous avez ainsi participé à la signature d'une charte entre l'industrie agro-alimentaire et les chaînes de télévision. Celles-ci poussaient, en effet, des cris d'orfraie parce que certains députés ont souhaité limiter la publicité télévisée pour les produits alimentaires favorisant l'obésité. Vous avez donc fait passer l'objectif de santé publique sous les fourches caudines du lobby de l'agro-alimentaire : la méthode est cavalière.
Nous reviendrons sur le fond du problème puisque nous continuerons à nous battre et que, pour notre part, nous défendrons nos amendements sur le sujet. Le problème, madame la ministre c'est qu'il faudrait, pour que ces amendements aient un sens et une chance d'être adoptés, que vous reniiez la démarche que vous venez d'engager dans la charte dont un codicille prévoit qu'elle ne vaut qu'à droit constant. Vous vous êtes donc engagée avec les signataires de la charte en acceptant une condition qui précise que le Gouvernement ne prendra aucune mesure réglementaire, et que les parlementaires voudront bien rester cois et qu'ils n'auront pas la mauvaise idée de légiférer. Le président de la commission prétendait que nous pouvions toujours déposer des amendements, mais l'on voit bien que cela ne nous mène nulle part.
Madame la ministre, vous avez choisi de ne pas traiter de façon globale les grands enjeux de politiques de santé publique. Ne nous répondez pas qu'un projet de loi révisant l'actuelle loi de santé publique sera examiné dans quelques mois. Dans ce cas, il eût été préférable de ne pas traiter du sujet dans le projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires, et d'attendre ce texte.
Il est regrettable que le projet de loi ne dise rien des moyens qu'il faut consacrer à une politique de santé publique ni des nouveaux enjeux auxquels nous sommes confrontés. Ainsi, la question de la santé scolaire n'est même pas évoquée – comment parler de prévention sans traiter de l'implication du milieu éducatif ? –, pas plus que celle des nouvelles pathologies qui touchent le monde du travail, ou que les problèmes de santé causés par la dégradation de l'environnement.
Nous abordons donc la discussion du titre III du projet de loi avec beaucoup de tristesse, d'inquiétude et de scepticisme.
Madame la ministre, si le fait de reconnaître l'éducation thérapeutique dans la loi est une bonne chose, cela ne suffira évidemment pas à débloquer les moyens matériels et humains indispensables à la mise en oeuvre concrète de cette éducation.
En effet, à l'hôpital comme en ville, ces pratiques ne peuvent être rémunérées par le seul paiement à l'acte. À l'hôpital public, nous savons bien que le rythme imposé par la T2A et le désengagement financier de l'État ont réduit les crédits et le temps dédiés à la prévention. Les difficultés sont du même ordre pour la médecine de ville, puisque le temps que les médecins consacreraient à l'éducation thérapeutique diminuerait d'autant celui qu'ils consacrent aux soins. Il en est de même pour les infirmières, qui jouent également un rôle important auprès des malades pour leur permettre de comprendre et de prendre en charge l'affection qui les touche.
Il convient donc de réfléchir aux moyens de développer ces pratiques et d'aboutir à des solutions, en s'inspirant, par exemple, des préconisations des états généraux de l'organisation de la santé, tendant à élaborer un mode de rémunération complémentaire et à favoriser des formes d'organisation collective pluri-professionnelles.
J'ajoute que nous sommes également préoccupés par l'absence de dispositions précises concernant la formation et les compétences requises pour délivrer une éducation thérapeutique de qualité, protégée des intérêts privés. Ainsi, aucune proposition ne vise à développer la formation des professionnels de santé dans ce domaine. Quant aux compétences requises, l'alinéa 6 de cet article autorise le Gouvernement à les fixer par décret. Or le sujet lui-même, le retard pris et le déficit global de prévention dans notre pays sont trop importants pour que le Parlement se dessaisisse de cette question. Nous soulignons ce point avec d'autant plus d'insistance que nous connaissons la volonté des laboratoires pharmaceutiques d'intervenir dans ce domaine.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons, non seulement que le Parlement légifère sur les compétences requises en matière d'éducation thérapeutique, mais aussi que le principe de l'interdiction de tout contact, direct ou indirect, entre les entreprises pharmaceutiques et les patients soit inscrit dans la loi.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite du projet de loi sur la réforme de l'hôpital.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma