La séance est ouverte à 9 h 45.
Présidence de M. Jean-Luc Warsmann, président
Compte rendu d'une mission effectuée à MM. Didier Quentin, Philippe Gosselin et René Dosière.
Au retour d'une mission accomplie, avec mes collègues Philippe Gosselin et René Dosière, du 2 au 6 février dernier à Mayotte, nous souhaitons apporter à notre commission un éclairage concret sur le projet de départementalisation du statut de cette collectivité. Parler de Mayotte sans s'y être préalablement rendu serait en effet bien difficile. En effet, il faut avoir mesuré directement les attentes de la population, les grands progrès déjà accomplis, et ceux qui devront rapidement l'être pour réussir la départementalisation. Il s'agit d'un enjeu majeur pour l'avenir de nos compatriotes mahorais, car nous avons pu constater l'attente que suscite, chez les élus et dans la société civile, ce projet si longtemps différé.
Comme le permettait la loi organique du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer, ce changement de statut a été demandé par le conseil général de Mayotte dans une résolution adoptée, le 18 avril dernier, à l'unanimité. Il a également fait l'objet, à la demande du conseil général, d'un débat dans notre hémicycle et dans celui du Sénat mercredi et jeudi derniers. Le Président de la République a décidé que la population de Mayotte serait consultée sur ce projet le 29 mars prochain et devrait répondre à la question suivante : « Approuvez-vous la transformation de Mayotte en collectivité unique, appelée département, régie par l'article 73 de la Constitution, exerçant les compétences dévolues aux départements et régions d'outre-mer ? ».
Alors que l'Union africaine a adopté, voici deux semaines, un texte inacceptable – qui me paraît même, personnellement, scandaleux – qui condamne l'organisation d'un référendum à Mayotte, prétendument « occupée par une puissance étrangère », il me semble utile de dissiper par avance tout malentendu : quelle que soit la réponse apportée par la population à la question posée – qui ne concerne que notre organisation administrative interne –, Mayotte restera française. Elle l'est depuis 1841 et sa population a librement confirmé ce choix, à 64 % puis 99 %, lors des référendums de 1974 et 1976.
La départementalisation est un enjeu déterminant pour l'avenir de cette collectivité, qui sera désormais, si les électeurs de Mayotte répondent favorablement à la question posée, régie non plus par l'article 74 de la Constitution, consacré aux collectivités d'outre-mer (COM), mais par son article 73, relatif aux départements et régions d'outre-mer (DOM-ROM). Cette transformation statutaire entraînera des conséquences juridiques importantes, dont le remplacement du principe de spécialité législative par celui de l'assimilation législative : cela signifie que, sitôt la départementalisation effective, nos lois et règlements deviendront de plein droit applicables à Mayotte, sauf lorsqu'ils en disposeront autrement de façon expresse. Dans ce cadre, des adaptations législatives demeureront évidemment possibles et nécessaires – j'y reviendrai tout à l'heure. Mais il nous faudra d'abord examiner, avant la fin de l'année 2009, une loi organique modifiant l'actuel statut de l'île, puisque la collectivité départementale de Mayotte devrait devenir, comme le permet l'article 73 de la Constitution, une collectivité unique, tenant lieu à la fois de DOM et de ROM, dont le conseil général exercerait à la fois les compétences départementales et régionales. Il ne s'agit ici que de parvenir à une organisation simple, rationnelle et économe des deniers publics, car la superposition d'un conseil général et d'un conseil régional, disposant éventuellement de majorités politiques contraires, aurait bien peu de sens sur ce petit territoire de 374 kilomètres carrés.
Si le projet de départementalisation nous a semblé faire, a priori, l'objet d'un grand consensus politique à Mayotte – ses habitants l'attendent depuis plus de 50 ans –, il reste en revanche nécessaire de s'interroger sur le calendrier, les modalités et les conséquences d'un tel changement.
Il est clair que Mayotte n'est pas encore parvenue à un niveau de développement satisfaisant : l'habitat et la voirie y sont souvent très dégradés, les projets économiques trop dépendants du soutien des pouvoirs publics, le niveau d'instruction et la maîtrise de la langue française insuffisants – ne serait-ce que parce que l'école n'est devenue obligatoire qu'au début des années 1980. Ajoutons à cette situation le poids de l'immigration clandestine, qui représenterait environ 60 000 personnes, soit le tiers de la population insulaire, la jeunesse de la population – 54 % des habitants sont âgés de moins de 20 ans –, la quasi-absence de médecine libérale, de notaires, de cadastre à jour et, surtout, d'état civil fiable, et l'on mesure la longueur du chemin qui reste à parcourir. A cet égard, procéder dès 2011 à une départementalisation peut paraître bien ambitieux : c'est assurément un grand défi.
Cette ambition devrait favoriser une prise de conscience collective sur l'urgence de la situation et permettra d'accélérer les efforts entrepris pour remédier au retard de développement et aux dysfonctionnements administratifs. Si nous devions attendre la réunion de toutes les conditions avant de procéder à la départementalisation, celle-ci risquerait fort, comme par le passé, d'être continuellement différée. À Mayotte, le poids de la tradition, des habitudes, la tolérance ou le relativisme de l'administration et des élus ont trop longtemps conduit au fatalisme et la résignation, voire tout simplement à l'indifférence ; la départementalisation pourrait enfin donner un nouveau souffle à la volonté politique et l'ardeur réformatrice.
Bien sûr, les lacunes et les insuffisances sont encore nombreuses, et nous avons noté que les acteurs économiques et sociaux peinent encore à mettre en place, dans les conditions légales, des projets porteurs de développement à long terme, notamment en matière agricole, aquacole ou touristique. Nous avons aussi constaté avec inquiétude la persistance de graves difficultés matérielles dans la gestion de l'état civil, qui a été laissé dans un état de délabrement inimaginable jusque dans les années 1980 – comme nous l'avons constaté en visitant de service de l'état civil de la mairie de Mamoudzou, les registres de cette époque ne sont bien souvent qu'une pile de feuilles éparses, jaunies, et racornies, raturées, voire trouées, et presque illisibles !
Il n'en demeure pas moins que certains signes sont déjà encourageants. Les indicateurs économiques et sociaux sont mieux orientés : le nombre d'enfants par femme mahoraise a été ramené de 8,1 à 3,4 en trente ans et, en dix ans, le chômage est passé de 41 à 22 % de la population active. L'île a été progressivement désenclavée, tant sur le plan portuaire qu'aéroportuaire : la circulation aérienne a été multipliée par quatre depuis 1996, même si la liaison directe avec la métropole reste attendue. Mayotte dispose aujourd'hui, nous l'avons constaté, d'un centre hospitalier moderne et performant - qui a réalisé près de 8 000 accouchements en 2008, chiffre stabilisé depuis 2004. Entre 2003 et 2007, les effectifs de ce centre ont cru de presque 64 %. L'instruction s'étend avec une efficacité croissante : grâce au doublement des moyens alloués par l'État depuis 2003, elle concerne désormais 73 000 élèves (contre 43 708 en 1997), sur une population aujourd'hui estimée à 186 000 habitants. Les revenus augmentent, comme en atteste le doublement en six ans du salaire minimum, la modernisation de certains bâtiments ou le développement de l'automobile – il existe désormais des embouteillages à Mamoudzou !
Par ailleurs, la modernisation juridique entreprise en 2003 et en 2006, à l'initiative du député Mansour Kamardine, portent aujourd'hui leurs fruits. Les femmes disposent des moyens de s'émanciper du droit local – qui ne concerne plus que 10 % des naissances à Mamoudzou – et de se dégager du poids de traditions incompatibles avec les principes républicains inscrits dans notre Constitution : la polygamie a reculé ; le rôle juridictionnel des cadis, ces magistrats de droit musulman, s'est amoindri ; l'égalité des droits entre les hommes et les femmes est mieux assurée.
Enfin, grâce à la réforme de la législation des étrangers adoptée dans la loi du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration, ainsi qu'au renforcement des moyens alloués aux forces de l'ordre, la lutte contre l'immigration irrégulière a gagné en efficacité. Alors que le revenu par habitant est dix fois moindre aux Comores, en proie à une instabilité politique incessante – une vingtaine de coups d'État y ont été organisés en trente ans d'indépendance – et à des conditions sanitaires épouvantables, la stabilisation de cette immigration constitue déjà une performance remarquable : au cours des trois dernières années, près de 50 000 étrangers clandestins ont été éloignés et le nombre d'embarcations interceptées en mer a presque triplé, grâce notamment à la mise à disposition des forces de l'ordre de trois radars et de nouvelles vedettes rapides. La surpopulation que nous avons constatée dans le centre de rétention administrative et, surtout, la maison d'arrêt de Majicavo (où il n'existe que 90 places pour 239 détenus, essentiellement des passeurs), qui seront prochainement agrandis, sont la conséquence des succès enregistrés dans cette lutte.
Ces constats sont bien sûr encourageants, mais la départementalisation de Mayotte nous obligera à franchir de nouvelles étapes. La modernisation du droit local, dont l'article 75 de la Constitution nous interdit de remettre en cause l'existence même pour les citoyens qui n'y ont pas renoncé, devra être accentuée avant 2011 afin de respecter pleinement nos principes constitutionnels et les stipulations de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH). Comme nous le leur avons expliqué, les cadis ne pourront plus rendre la justice, mais uniquement jouer un rôle de médiation sociale ou d'expertise auprès des tribunaux de droit commun. En outre, les discriminations sexuelles en matière successorale devront prendre fin, l'âge légal du mariage devra être relevé de 15 à 18 ans pour les femmes et les répudiations, comme les nouvelles unions polygames, seront proscrites pour tous les mahorais, quel que soit leur âge.
La départementalisation ne pourra réussir que si une forte volonté politique et des moyens exceptionnels sont mis au service de quelques priorités stratégiques, telles que :
- la stabilisation de la démographie insulaire, grâce à la planification des naissances et au renforcement de la lutte contre l'immigration clandestine, car la densité de population dépasse déjà 500 habitants au kilomètre carré et ne pourra s'élever indéfiniment ;
- l'apprentissage de la langue française dans les écoles, dans lesquelles le nombre d'heures de cours prévues pour chaque élève demeure, paradoxalement, inférieur aux normes métropolitaines, du fait du manque de salles de classes ;
- la construction des infrastructures nécessaires au développement de l'économie productive, en particulier dans les secteurs prometteurs de l'aquaculture et du tourisme, car Mayotte peut s'appuyer sur un patrimoine naturel hors du commun – alors que la fréquentation touristique ne s'élève qu'à environ 30 000 personnes par an. Cela suppose notamment de doter l'aéroport de Pamandzi d'une piste longue, capable d'accueillir des avions assurant une liaison directe avec la métropole, comme cela est évoqué depuis de nombreuses années ;
- la mise en place d'un état civil fiable, comme nous l'avions déjà demandé en 2006 dans le cadre d'une mission d'information sur la situation de l'immigration à Mayotte. À cet égard, il est inadmissible que la Commission de révision de l'état civil (CREC), mise en place en 2001, ait été privée de présidence pendant 6 mois en 2006 et le soit à nouveau depuis le mois d'août dernier, ou encore qu'elle n'ait rendu l'an dernier que 746 décisions, alors que plus de 16 000 dossiers attendent encore sa décision. Il conviendra de la doter d'une présidence à temps plein – on nous a assuré que ce devrait être fait le mois prochain –, d'un secrétariat général à même de superviser l'instruction des dossiers par les rapporteurs, et de moyens informatiques lui permettant de communiquer directement avec la préfecture et les services communaux de l'état civil.
Il nous faudra, par ailleurs, faire preuve de souplesse et de discernement dans l'application du droit commun à Mayotte en 2011 : des adaptations législatives demeureront évidemment nécessaires en matière d'entrée et de séjour des étrangers, ainsi que de protection sociale.
L'élévation du niveau de vie qui résultera du processus de départementalisation et, je l'espère, de l'obtention du statut communautaire de région ultrapériphérique (RUP), réduira le différentiel entre Mayotte et La Réunion, île où résident déjà 20 000 à 30 000 mahorais, parfois mal acceptés. Mais à l'inverse, le différentiel de niveau de vie augmentera entre Mayotte et les Comores, ce qui pourrait accroître les flux migratoires au sein de l'archipel. Le développement de Mayotte, perçu comme un petit Eldorado par la population des Comores, implique donc d'offrir à ces dernières – et en particulier à l'île autonome d'Anjouan, distante de 70 kilomètres seulement – une aide au développement nettement supérieure, notamment en matière d'état civil et de santé. Nous avions d'ailleurs suggéré, en 2006, comme l'a rappelé la semaine dernière notre collègue Jean-Christophe Lagarde, de construire à Anjouan une maternité dotée d'équipements modernes et de doter celle-ci d'une équipe permanente de médecins français. Si la coopération entre États ne porte pas ses fruits, la coopération décentralisée offre encore des possibilités d'action, notamment pour la région Réunion qui peut trouver son intérêt à une stabilisation des flux migratoires.
La France de l'époque coloniale avait négligé Mayotte. Cette époque est bien révolue, en particulier grâce à la détermination des mahorais, et toutes les conséquences doivent en être tirées. Notre collègue René Dosière citait Charles Péguy, je ferai pour ma part référence à Paul Morand, selon lequel « la France est partout où l'on ne renonce pas ». Nos compatriotes de Mayotte sont pleinement français et attendent beaucoup de la République ; nous avons écouté leurs élus avec attention et ils nous ont semblé conscients des droits et des devoirs qu'impliquerait une départementalisation. À l'approche d'une échéance décisive pour l'avenir de Mayotte, il nous faut adresser à la population et aux élus de cette collectivité un message d'espoir et de confiance, mais aussi les appeler à l'action et à la responsabilité. Cet appel vaut aussi pour notre État, qui doit rapidement et énergiquement se donner les moyens de faire respecter à Mayotte les règles de droit. Alors que le consensus qui semble localement entourer le projet de départementalisation permet d'envisager sereinement l'issue du prochain référendum, les espoirs que cette démarche fait naître ne devront pas être déçus. Pour faire face aux retards prévisibles ainsi qu'aux risques pour la sécurité publique et la santé de nos compatriotes, comme pour juguler les dérives constatées, des moyens exceptionnels devront être engagés à Mayotte. Dans ces conditions, une départementalisation adaptée de Mayotte pourrait tirer le meilleur parti de ses atouts naturels et ses spécificités historiques et culturelles enrichir notre modèle républicain, afin que ce petit territoire devienne un jour le 101ème département français.
Sur le fond, je rejoins les observations qui viennent d'être formulées par notre collègue Didier Quentin à la suite de notre mission à Mayotte. Je regrette toutefois que le débat dans l'hémicycle sur ce sujet ait eu lieu la semaine dernière, dès notre retour, et avant même que nous ayons pu informer notre commission, car la précipitation peut conduire au désintérêt. Or, la situation qui prévaut actuellement dans les DOM antillais montre bien que l'on ne pourra pas créer un cinquième DOM dans l'indifférence métropolitaine. Lorsque nous serons saisis de la future loi organique modifiant le statut de Mayotte, notre commission devra donc rechercher une formule adaptée pour permettre à nos collègues d'étudier ces enjeux et de prendre conscience de leur importance.
La situation de l'état civil demeure le problème central auquel cette collectivité est confrontée. La responsabilité historique de la France est, dans ce domaine, extraordinairement lourde, car l'état civil comorien a également été très mal tenu avant que ces îles n'accèdent, en 1975, à l'indépendance. À cet égard, le processus de départementalisation, qui avait été engagé avec l'Accord sur l'avenir de Mayotte du 27 janvier 2000, se présente assez mal aujourd'hui, car les propositions relatives à l'état civil formulées en 2006 par notre commission, dans le cadre d'une mission d'information sur la situation de l'immigration en Mayotte, n'ont pas été mises en oeuvre, contrairement à celles qui concernaient la répression de l'immigration clandestine. La situation de l'état civil s'est au contraire dégradée, puisqu'une organisation ubuesque a été mise en place, comme en atteste l'absence de compatibilité des logiciels et l'impression de documents et leur transport, avant que leurs données ne soient à nouveau saisies manuellement, ce qui génère de nouvelles erreurs. De même, les agents publics chargés d'instruire les demandes et de délivrer les papiers ne semblent soumis à aucun contrôle, alors même qu'ils peuvent être soumis à de fortes influences. La situation de l'état civil à Mayotte est exceptionnelle et ne ressemble en rien à celle de la métropole : elle impose bien sûr des moyens adaptés, mais aussi une organisation administrative transversale, beaucoup mieux coordonnée.
J'ajoute que la fiabilité des listes électorales dépend également de celle de l'état civil – vous comprenez les motifs de ma grande réserve lorsque nous avions évoqué la possibilité d'élire à l'avenir un second député à Mayotte. Si les mesures requises ne sont pas prises pour régler ce problème, Mayotte, devenue département français, pourrait connaître dans une dizaine ou une quinzaine d'années une évolution beaucoup plus dangereuse encore que celle de l'actuelle Guadeloupe. Chacun doit donc s'employer à mettre un terme aux dysfonctionnements de l'état civil à Mayotte, qu'il s'agisse de l'État ou des maires, qui devraient s'investir dans ce domaine bien plus qu'ils ne le font aujourd'hui.
La départementalisation ne me semble pas envisageable si ce problème de l'état civil n'est pas réglé dans des délais très courts, avec des procédures innovantes. Cela suppose que les administrations centrales aient bien conscience de la gravité de ce problème, mais nous avions constaté en 2006 que les magistrats en fonction au ministère de la justice n'avaient aucune idée des difficultés concrètes rencontrées sur le terrain à Mayotte, par exemple pour l'utilisation des logiciels et la maintenance informatique.
Je connais Mayotte, pour y avoir séjourné moi-même à plusieurs reprises, même si je n'ai pas eu l'occasion d'y retourner depuis 7 ou 8 ans. La situation qui vient d'être décrite n'est pas nouvelle et correspond bien aux souvenirs que j'en ai gardé, même si la pression migratoire semble s'être renforcée depuis lors.
Même s'il convient de tenir compte des promesses de départementalisation qui ont été faites, un tel projet ne pourra aboutir tant que certaines questions ne seront pas réglées. À quelques jours du référendum prévu sur cette question à Mayotte, il faut rappeler que la solution des problèmes de Mayotte ne peut reposer sur la seule départementalisation de son statut. Jusqu'à présent, les progrès accomplis n'ont pas été à la hauteur de l'ambition affichée de créer un véritable département français sur ce petit territoire dont la gestion est si complexe, où les attentes de la population sont si fortes : les efforts les plus difficiles doivent encore être accomplis. À cet égard, la description de la situation de Mayotte qui vient d'être effectuée recueille mon adhésion, même s'il aurait été préférable qu'elle s'accompagne de propositions plus précises.
Le rapport de qualité qui nous a été présenté est pour nous très enrichissant. Il me semble que les déficiences de l'état civil à Mayotte nous exposent également à des difficultés dans notre action internationale, en particulier en matière d'adoption, question dans laquelle je me suis personnellement investi. En effet, notre pays ne cesse de donner des leçons sur la gestion de l'état civil à des États tels que le Népal, Madagascar, le Vietnam ou le Cambodge, et risque de ce fait d'être placée en porte-à-faux. Pour remédier à cette situation, des propositions très concrètes devront être faites, et le rapport qui nous est présenté appellera donc des suites au sein de notre commission, dans la perspective d'une future départementalisation de Mayotte.
La départementalisation ne pourra être un succès que si elle s'accompagne d'un plan de développement des Comores. En effet, il ne faut pas sous-évaluer les interactions entre la situation mahoraise et celle des Comores. On ne pourra par exemple résoudre le problème de l'état civil à Mayotte si les Comores n'évoluent pas.
D'autre part, il faudra savoir régler avec douceur et habileté le problème de la langue mahoraise, pour éviter que le développement de l'utilisation du français ne conduise à la disparition de cette langue locale.
Le fait que la départementalisation soit mise en place est, de mon point de vue, un grand progrès. Cela permettra à la loi française de s'appliquer pleinement à Mayotte, dans tous les domaines du droit. Comme mon collègue Yves Nicolin, je pense qu'il conviendra de contrôler rapidement l'application de la loi mettant en oeuvre la départementalisation et je suis prêt à participer aux travaux de la commission sur ce sujet.
Je suis d'accord avec Dominique Raimbourg lorsqu'il insiste sur le respect de la langue mahoraise. Toutefois, à l'heure actuelle, nombre de Mahorais, qui sont des Français, n'éprouvent pas le besoin de connaître le français, tandis que les Anjouanais, qui ne sont pas des Français, apprennent notre langue et la parlent souvent très bien...
Il faudrait que la départementalisation apporte une réponse au problème de la scolarisation et mette un terme au déficit de structures d'enseignement.
Concernant la langue mahoraise, qui comprend en fait deux dialectes – le shiboushi et le shimahorais -, on ne peut que constater le paradoxe étonnant relevé par René Dosière.
De manière générale, la situation de Mayotte a progressé. En matière d'enseignement, un effort extraordinaire est fourni puisqu'au moins un nouvel établissement du second degré est construit chaque année. Mais, bientôt, nous serons confrontés aux conséquences de cet effort : les jeunes diplômés, de plus en plus nombreux, ne trouveront pas forcément de travail sur place et n'auront d'autre solution que l'émigration vers la Réunion ou la métropole. En matière de santé, si des risques de dérive subsistent, le paludisme n'étant pas encore éradiqué, l'investissement dans l'hôpital de Mamoudzou, dont le budget dépasse 110 millions d'euros, est remarquable.
On peut rappeler à ce propos que l'effort total de la France en faveur de Mayotte avoisine 800 millions d'euros chaque année.
C'est pourquoi j'ai été très surpris par les récents propos tenus, à propos de la consultation du 29 mars 2009 prochain, par le colonel Kadhafi mettant en cause un prétendu « néocolonialisme » de la France à Mayotte.
La Commission autorise le dépôt du rapport d'information en vue de sa publication, conformément aux dispositions de l'article 145 du Règlement.
Puis la Commission passe à l'examen des articles du projet de loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet.
Avant l'article 1er:
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche prévoyant qu'un droit d'accès à Internet en haut débit est garanti à tout citoyen.
Ce premier amendement vise à prendre en compte une observation de l'ARCEP, qui considère que le projet de loi ne doit pas être un obstacle au développement du haut débit en France. Il permet de rappeler les objectifs du plan « France numérique 2012 », qui visent une couverture de tout le territoire à un tarif abordable.
On ne peut qu'être favorable au plan « France numérique 2012 », mais cet amendement n'est pas nécessaire pour permettre la réalisation de ce plan. Par ailleurs, instaurer un droit juridiquement opposable en la matière poserait de réelles difficultés, notamment au regard des incertitudes entourant la notion de tarif abordable.
La Commission rejette l'amendement.
Chapitre Ier Dispositions modifiant le code de la propriété intellectuelle
Article 1er (art. L. 331-5 à L. 331-22 du code de la propriété intellectuelle) : Coordinations et renumérotations d'articles du code de la propriété intellectuelle :
La Commission adopte un amendement du rapporteur complétant une référence.
La Commission adopte un amendement du rapporteur permettant la saisine de la Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI) lorsqu'une mesure technique de protection entrave l'accomplissement d'une procédure parlementaire de contrôle ou empêche la mise en oeuvre par les organismes du dépôt légal de l'exception de reproduction à des fins de consultation par le public d'une bibliothèque ou d'un service d'archives.
Puis elle adopte un amendement du rapporteur complétant une référence, ainsi qu'un amendement rédactionnel et un amendement du même auteur rétablissant le caractère explicite d'une abrogation supprimé par le Sénat.
La Commission adopte l'article 1er ainsi modifié.
Article additionnel après l'article 1er (art. L. 131-9, art. L. 332-1, art. L. 335-3-2, art. L. 335-4-2, art. L. 342-3-2 du code de la propriété intellectuelle) : Coordinations complémentaires liées à une renumérotation d'article codifié :
La Commission adopte un amendement du rapporteur portant article additionnel ayant pour objet de procéder à diverses coordinations dans le code de la propriété intellectuelle.
Article 1er bis (nouveau) (Intitulé du titre III du livre III du code de la propriété intellectuelle) : Affichage de la dimension préventive des procédures mises en place :
La Commission adopte l'article 1er bis sans modification.
Après l'article 1er bis:
La Commission est saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour ayant pour objet d'imposer une information précise sur la vente ou l'usage des oeuvres pour la rémunération des ayants droit.
Cet amendement obligera les utilisateurs à fournir aux organismes collecteurs le détail des titres diffusés, ce qui permettra d'établir une rémunération des ayants droit adaptée à l'utilisation des oeuvres.
Défavorable. Vous voulez définir un principe abstrait d'information, qui ne crée pas de droit nouveau pour les artistes-interprètes.
Je ne suis pas convaincu par votre argumentation que je vous invite à nourrir dans la perspective de la séance publique.
La Commission rejette cet amendement.
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche visant à intégrer dans le régime de la rémunération pour copie privée les applications de magnétoscopes dématérialisés à distance.
L'objet de cet amendement est de soumettre les nouveaux services d'enregistrement en ligne dématérialisés au versement d'une rémunération, proportionnelle au profit des ayants droit et déterminée par la commission prévue par l'article L. 311-5 du code de la propriété intellectuelle.
Défavorable. Les actes en cause sont non seulement des actes de reproduction mais également des actes de mise à disposition et de représentation, qui relèvent du droit exclusif des auteurs et des titulaires de droits voisins. D'autre part, les conséquences économiques d'une extension du périmètre de la copie privée seraient très importantes et néfastes pour d'autres secteurs, tels que la télévision de rattrapage ou la vidéo à la demande.
La Commission rejette l'amendement.
La Commission est saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour permettant aux organismes collecteurs de conclure des contrats généraux d'intérêt commun avec les utilisateurs.
Cet amendement permettra de faire prospérer le « streaming ». Il crée en effet une licence collective étendue, qui permettra d'avoir accès à un catalogue très large. Le Gouvernement doit explicitement faire le choix, soit d'apporter une aide aux sites d'offre légale, comme le propose cet amendement, soit d'avoir un texte déséquilibré qui ne comportera qu'un volet répressif.
Défavorable. Le développement de l'offre légale est souhaitable. Mais, pour que ce type d'offre se développe, il faut prioritairement un cadre légal qui empêche le téléchargement illicite. En outre, le dispositif que vous proposez excèderait les limites posées par le droit international.
J'invite tous mes collègues à aller voir un site de streaming tel que Deezer.com. Le téléchargement n'y est pas possible, mais seulement l'écoute des oeuvres. Mon amendement propose un système moderne, qui permet une rémunération des auteurs proportionnelle à leur écoute.
La démarche de M. Dionis du Séjour est pertinente. L'inconvénient du projet de loi est de se prétendre dissuasif mais d'être répressif, sans apporter un euro de plus aux artistes et aux créateurs.
Cet amendement permettrait de créer une rémunération équitablement répartie. Aujourd'hui, un accord est uniquement conclu avec le producteur, qui perçoit par conséquent l'essentiel de la rémunération.
Le vrai problème est l'insuffisance des revenus des sites de streaming. En effet, leur modèle économique repose sur les recettes publicitaires, qui sont faibles dans la mesure où d'autres sites offrent le même service de manière illégale. Pour développer les revenus des sites de streaming, il faut un cadre légal qui interdise le téléchargement illicite.
Je signale à ce propos que le président du site Deezer.com est favorable au projet de loi.
Je ne suis pas opposé à l'existence d'un volet répressif. Mais il faut bien que les auteurs se voient accorder une rétribution.
La Commission rejette l'amendement.
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche prévoyant qu'aucune restriction aux droits fondamentaux et aux libertés des utilisateurs de service de communication ne peut être imposée sans une décision préalable des autorités judiciaires.
Cet amendement ne fait que reprendre l'amendement n° 138 sur le Paquet télécom, adopté en première lecture par le Parlement européen le 24 septembre 2008 par 573 voix en sa faveur et seulement 74 contre son adoption. Il rappelle qu'aucune restriction aux droits fondamentaux et aux libertés des utilisateurs de services de communication au public en ligne ne peut être imposée sans une décision préalable des autorités judiciaires. Il s'agit d'une disposition à laquelle le groupe S.R.C. tient particulièrement.
Cet amendement est inapproprié. La France est déjà soumise aux exigences de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme en matière de respect des libertés fondamentales. De surcroît, le Conseil constitutionnel est appelé à concilier l'exercice des libertés, telle la liberté de communication, avec certains droits, comme le droit de propriété. Enfin, l'accès à Internet n'est pas à mon sens une liberté fondamentale.
Le rapporteur a posé hier de pertinentes questions à Mme le ministre, qui mettent en doute le mécanisme proposé par le projet de loi. Nous ne croyons pas que la lutte contre le piratage puisse puissamment favoriser le développement de l'offre légale.
Mais ici, nous abordons la question des droits fondamentaux. Il faut apporter des garanties essentielles aux internautes, car l'accès à Internet est un droit fondamental, qui permet de communiquer, de travailler, au même titre qu'une ligne téléphonique.
En cas de sanction par une suspension de son abonnement, l'internaute pourra former un recours devant le juge. Il y aura donc bien intervention du juge.
Il serait important de savoir à quel moment et dans quelles conditions la décision de suspension de l'accès à Internet s'appliquera.
La Haute Autorité aura la possibilité de suspendre l'accès à Internet. La personne intéressée pourra alors saisir le juge, mais il n'est pas prévu que le recours au juge soit automatiquement suspensif afin d'éviter que tous les internautes forment un recours dans le seul but d'engorger la Haute Autorité. Le juge décidera, en référé, si le recours a un caractère suspensif.
En référé, le juge statue dans des délais très courts, et sa décision est exécutoire même si elle est contestée. L'autorité judiciaire pourra donc rétablir rapidement un accès à Internet.
Le texte est moins précis que cela, car il renvoie simplement à un décret en Conseil d'État les conditions dans lesquelles les sanctions peuvent faire l'objet d'un sursis à exécution.
Le sujet est suffisamment grave pour que l'on souhaite que le juge intervienne préalablement à la suspension de l'abonnement.
Si le juge était saisi d'entrée de jeu, la justice, qui est déjà saturée, serait paralysée !
La Commission rejette l'amendement.
Article 2 (art. L. 331-12 à L. 331-22, art. L. 331-23 à L. 331-36 [nouveaux] du code de la propriété intellectuelle) : Institution d'une Haute Autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet :
La Commission est saisie d'un amendement de suppression de l'article de M. Patrick Bloche.
Notre groupe est opposé à la mise en place de la nouvelle autorité administrative indépendante. Nous défendrons donc une série d'amendements visant, sinon à éviter sa création, du moins à limiter au maximum les dommages que ce texte pourrait causer.
L'article 2 est le coeur du projet de loi. Je suis donc défavorable à cet amendement de suppression.
La Commission rejette l'amendement.
— Art. L. 331-12 du code de la propriété intellectuelle : Statut d'autorité administrative indépendante :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche précisant que la HADOPI doit respecter le droit à un procès équitable.
Il faut rappeler que la HADOPI doit respecter le principe du contradictoire, les droits de la défense ou encore la présomption d'innocence.
Ces principes s'appliqueront bien évidemment de plein droit. Le texte propose que la pédagogie précède la sanction. L'internaute qui télécharge illégalement reçoit une première recommandation. Parallèlement, l'offre légale est valorisée. Si l'internaute persiste dans son comportement, il reçoit un nouveau courriel, doublé d'une lettre recommandée avec accusé de réception. Ensuite, la Haute Autorité peut prononcer une sanction, qui peut être la suspension de l'accès à Internet.
La pédagogie repose aussi sur le rappel des droits. Or, parmi ces droits figure le respect de la présomption d'innocence.
Comme l'a indiqué le rapporteur, ces principes s'appliquent nécessairement de plein droit !
La procédure proposée ne respecte pas le principe du contradictoire. Lorsqu'un internaute recevra un premier avertissement, il ne saura même pas ce qu'on lui reproche exactement.
Il n'est pas utile de rappeler dans la loi les principes généraux du droit, même si, bien évidemment, nous partageons le souci qu'ils soient respectés.
Il n'est pas acceptable de laisser penser que le projet de loi remettrait en cause des droits fondamentaux. Les principes généraux du droit s'appliqueront. Il ne faut pas laisser croire qu'une procédure serait créée sans respecter les principes qui guident tout procès. Les internautes qui respecteront la loi ne recevront jamais de courrier de la Haute Autorité. Je suis d'accord pour que le texte soit amélioré sur les conditions dans lesquelles les personnes concernées seront contactées par la HADOPI, mais je conteste l'affirmation selon laquelle les principes généraux du droit seraient violés.
Le projet de loi est particulièrement pédagogique. Une première recommandation est émise, puis éventuellement une deuxième si l'internaute renouvelle son comportement dans un délai de six mois. C'est seulement après ces démarches qu'une sanction peut être prononcée.
J'approuve la philosophie de cet amendement. Il convient en effet que le droit à une procédure équitable soit respecté. En effet, ni l'envoi d'un courrier électronique, ni la réception d'une lettre recommandée n'offrent la possibilité de porter la contradiction. La recherche de l'identité d'une personne à partir de son adresse IP conduira nécessairement à des erreurs.
J'observe que l'expression « riposte graduée » relève de la terminologie militaire. Le Conseil constitutionnel a indiqué en 2006 qu'un tel dispositif n'était pas conforme à la Constitution. La dépénalisation de la procédure conduit à prononcer une sanction après avoir émis des avertissements. Le risque est donc que les internautes considèrent que tant qu'ils n'auront pas reçu un tel avertissement, leur comportement est légal. Le projet de loi aboutirait, dans ce cas, à l'inverse de l'effet recherché.
Je regrette mais le principe du contradictoire est respecté puisque les personnes reçoivent des messages et même une lettre recommandée ; ils peuvent donc y répondre.
Ces avertissements doivent être compris comme des mises en demeure, à la suite desquelles débutent les procédures contentieuses.
La Commission rejette l'amendement.
— Art. L. 331-13 du code de la propriété intellectuelle : Missions :
La Commission est saisie d'un amendement du rapporteur levant une ambiguïté rédactionnelle.
Il ressort clairement des intentions du Sénat que la HADOPI observe tant les utilisations illicites que les utilisations licites des oeuvres et objets protégés.
La Commission adopte l'amendement.
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche tendant à fluidifier les conditions de circulation des programmes audiovisuels.
Pour encourager le développement d'une offre légale, il faut s'assurer que la circulation des programmes audiovisuels n'est pas entravée. Ce dispositif n'a pas été adopté – en raison d'une égalité de votes – par la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.
Cet amendement est relatif à l'audiovisuel. Il n'y pas de lien avec les missions de la HADOPI. Je suis cependant prêt à approfondir cette question. En l'état, je suis défavorable à cet amendement.
L'industrie ne fait rien pour encourager l'offre légale. En libérant les droits et les contenus, nous favoriserions la consolidation d'une offre légale.
Je suggère le retrait de cet amendement dans l'attente d'une réflexion sur son amélioration.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour confiant à la HADOPI une mission d'observation et de régulation des prix de gros.
Cet amendement vise également à encourager l'offre légale. En effet, le problème du prix de la musique sur les plateformes légales se pose. Sur un prix de référence de 0,99 euro, un dixième du prix hors taxes est destiné aux auteurs, 70 % à 75 % vont aux producteurs et 5 % bénéficient à la plateforme de vente. Ce modèle est scandaleux !
Il faut obliger les producteurs à vendre les titres moins chers. Les frais de production, hors marketing, sont quasiment nuls dans l'économie numérique. Les experts indiquent que les titres pourraient être vendus entre 0,15 euro et 0,20 euro au public. C'est pourquoi il ne faut pas seulement doter la Haute Autorité d'une mission répressive. Il faut lui donner les moyens de réguler les prix de gros, sinon le projet de loi n'atteindra pas ses objectifs.
La HADOPI ne va tout de même pas prendre part à la fixation des prix des biens culturels numérisés, dont la détermination est libre. La vraie difficulté repose sur le fait que les sites légaux n'ont pas suffisamment de revenus à cause de l'attrait du téléchargement illégal. Grâce à ce projet de loi, l'offre légale va se développer et donc la concurrence va augmenter. Le prix des titres va baisser, comme le montre la politique actuelle d'Apple qui propose désormais des titres à 0,65 euro et non plus seulement à 0,99 euro.
Notre groupe soutient le volet répressif du texte. Pour autant, le téléchargement illégal n'est pas la seule cause du faible attrait des sites légaux. Le principal problème demeure le niveau anormalement élevé des prix. Rien ne justifie que l'on ne confie pas à la HADOPI la mission de réguler les prix de gros.
Si une mission d'observation peut être éventuellement reconnue à la Haute Autorité, celle-ci ne peut pas se voir confier des missions relatives au fonctionnement du marché. J'invite son auteur à retirer l'amendement dans sa rédaction actuelle.
L'amendement est retiré.
La Commission adopte deux amendements rédactionnels du rapporteur.
— Art. L. 331-13-1 du code de la propriété intellectuelle : Rapport au Parlement et au Gouvernement :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche complétant le contenu du rapport que devra rendre chaque année la Haute Autorité et prévoyant que le dispositif devra être supprimé en cas d'évaluation négative.
La loi DADVSI avait imposé la remise d'un rapport sur l'application de cette loi par le Gouvernement. Or, ce rapport n'a jamais été remis. Il aurait pourtant été utile au moment où nous commençons l'examen de ce projet de loi. L'amendement que notre groupe vous soumet vise à dresser un bilan de l'application des sanctions administratives que la HADOPI prononce, de manière à en évaluer l'efficacité.
Le projet de loi impose déjà la remise d'un rapport annuel par la Haute Autorité. Il ne semble donc pas utile d'en focaliser le contenu sur les sanctions de la HADOPI, au risque d'en restreindre le champ. De plus, votre amendement constitue une forme d'injonction du Parlement à l'égard du Gouvernement.
Grâce à la révision constitutionnelle qui va entraîner la rédaction systématique d'une étude d'impact pour chaque projet de loi, le problème soulevé par M. Patrick Bloche ne devrait plus se poser à l'avenir.
On pourrait faire une liste fort longue des rapports obligatoires qui n'ont jamais été remis…
La multiplication des rapports souvent non publiés est un phénomène inquiétant. Dans le cadre de la proposition de la loi sur la simplification du droit, j'ai fait le recensement de l'ensemble des rapports au Parlement et, avec l'accord des présidents de commission concernés, j'ai proposé la suppression de 107 rapports qui s'avéraient inutiles.
Je signale cependant qu'à l'occasion de l'adoption de la récente loi relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, le Parlement a encore créé une dizaine de nouveaux rapports, rarement à l'initiative de l'opposition du reste.
La Commission rejette l'amendement.
— Art. L. 331-14 du code de la propriété intellectuelle : Composantes :
La Commission adopte un amendement du rapporteur visant à indiquer précisément que le président du collège de la Haute Autorité est par ailleurs le président de la Haute Autorité, ainsi qu'un amendement de précision du même auteur.
— Art. L. 331-15 du code de la propriété intellectuelle : Composition et désignation des membres du collège :
La Commission est saisie d'un amendement du rapporteur réduisant de quatre à deux le nombre de membres de la Haute Autorité désignés par l'exécutif.
Il s'agit d'un amendement important car son adoption permettra de réduire le nombre de personnalités qualifiées désignées par l'exécutif, offrant ainsi la possibilité aux présidents des assemblées parlementaires de désigner chacun une personnalité qualifiée.
La Commission adopte l'amendement.
La Commission est saisie d'un amendement de M. Didier Mathus imposant la représentation des utilisateurs de réseaux de communications en ligne au sein de la Haute Autorité.
Il est important que les membres de la Haute Autorité ne défendent pas tous les mêmes intérêts. Il apparaît donc souhaitable de prévoir la représentation des internautes, qui sont les principaux concernés.
Tout d'abord, cet amendement me semble difficilement conciliable avec celui que nous venons d'adopter. Sur le fond, il faut laisser les ministres chargés de la consommation et des communications électroniques effectuer les choix les plus adaptés.
Concrètement, quels sont les utilisateurs de communications électroniques visés par l'amendement ?
Nous ne voulons pas encadrer excessivement le choix des ministres qui pourront, par exemple, retenir l'une des nombreuses associations représentant les internautes.
Laissons de la souplesse au dispositif en n'encadrant pas trop le pouvoir de nomination des ministres.
Je pense au contraire que ce sont les parlementaires qui font la loi. Nous devons donc participer à la « coproduction législative » chère au président Copé !
J'estime qu'en proposant que deux des membres soient désignés par les présidents d'assemblée parlementaire, nous avons déjà fait un pas significatif, qui n'a d'ailleurs pas été facile à faire accepter.
La Commission rejette l'amendement.
La Commission adopte un amendement du rapporteur, précédemment présenté, prévoyant que deux membres de la Haute Autorité sont désignés par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat.
La Commission est saisie d'un amendement du rapporteur prévoyant que le président de la Haute Autorité est nommé par décret après avis des commissions parlementaires compétentes.
Cet amendement vise à revenir au mode de nomination du président prévu initialement par le projet de loi, par décret, afin de permettre aux commissions parlementaires compétentes de se prononcer.
La Commission adopte l'amendement.
La Commission adopte un amendement du rapporteur supprimant la codification de dispositions transitoires.
— Art. L. 331-16 du code de la propriété intellectuelle : Composition et désignation des membres de la commission de protection des droits :
La Commission rejette un amendement de M. Patrick Bloche faisant passer de trois à quatre le nombre de membres de la commission de protection des droits.
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche prévoyant la présence d'un membre de la CNIL au sein de la commission de protection des droits.
Compte tenu de l'incidence de la procédure prévue par le projet de loi sur la protection de la vie privée, il semble indispensable qu'un membre de la CNIL fasse partie de la commission de protection des droits.
Je suis défavorable à cet amendement car la CNIL n'a pas vocation à contrôler cette procédure, elle doit seulement être saisie dès qu'une question relative au traitement de données personnelles se pose, ce qui sera systématiquement le cas.
Cet amendement est intéressant. En effet, il ne faut pas sous-estimer la complexité technique du dispositif qui est en train d'être mis en place. Par exemple, couper le signal Internet sans toucher à l'accès à la téléphonie ou à la télévision est très complexe. L'application de cette procédure aura donc des incidences sur les libertés et il importe d'assurer la meilleure conciliation entre l'efficacité du dispositif et le respect des libertés individuelles.
J'admets tout à fait qu'il s'agit d'un dispositif techniquement complexe à mettre en place, mais il faudrait alors suggérer plutôt de désigner dans la commission de protection des droits un membre de l'ARCEP plutôt que de la CNIL. De plus, la présence de magistrats au sein de la commission me semble une garantie très importante pour la prise en compte des libertés individuelles. Enfin, je redis que la CNIL sera saisie systématiquement dès que la mise en oeuvre du dispositif entraînera le traitement de données personnelles.
La Commission rejette l'amendement.
La Commission adopte un amendement du rapporteur supprimant la codification de dispositions transitoires ainsi qu'un amendement de coordination du même auteur.
— Art. L. 331-17 du code de la propriété intellectuelle : Incompatibilités professionnelles et patrimoniales des membres de la Haute Autorité :
La Commission adopte un amendement rédactionnel du rapporteur.
La Commission est saisie d'un amendement de M. Didier Mathus prévoyant un délai de cinq ans entre la fin de l'exercice de certaines fonctions dans l'industrie culturelle et une nomination au sein de la Haute Autorité.
La disposition que je propose s'inspire des règles applicables au CSA. Il s'agit d'éviter une perméabilité entre la Haute Autorité et l'industrie musicale.
La Commission rejette l'amendement.
La Commission adopte un amendement de coordination du rapporteur.
La Commission rejette un amendement de M. Patrick Bloche faisant passer de trois à cinq ans le délai pendant lequel un membre de la Haute Autorité ne peut pas prendre part à une délibération concernant une entreprise dans laquelle il a exercé.
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche prévoyant que les membres de la Haute Autorité fassent une déclaration d'intérêts au moment de leur désignation.
Cet amendement a pour but d'assurer l'indispensable indépendance des membres de la Haute Autorité et de prévenir tout conflit d'intérêts.
C'est une bonne idée et j'émets un avis favorable, sous réserve d'une modification rédactionnelle.
La Commission adopte l'amendement ainsi rectifié.
— Art. L. 331-18 du code de la propriété intellectuelle : Moyens humains et financiers mis à disposition :
La Commission adopte un amendement rédactionnel du rapporteur.
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche prévoyant que les rapporteurs chargés de l'instruction d'un dossier ne peuvent pas participer au délibéré de la décision.
La séparation des fonctions d'instruction et de délibération est un principe fondamental, protégé par l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme. Cet amendement permettra de le respecter.
La Commission rejette l'amendement.
La Commission adopte un amendement rédactionnel du rapporteur.
— Art. L. 331-20 du code de la propriété intellectuelle : Pouvoirs des agents publics de la Haute Autorité :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Didier Mathus supprimant les prérogatives particulières attribués aux membres de la commission de protection des droits et aux agents assermentés de la Haute Autorité par le projet de loi.
Les membres de la commission de protection des droits et les agents de la Haute Autorité se voient attribuer des pouvoirs par le projet de loi qui sont exorbitants au regard de la protection de la vie privée des abonnés.
Ces pouvoirs ne sont en rien exorbitants, ils s'inspirent de ceux dont disposent les agents de la CNIL ou de l'Autorité des marchés financiers.
Ces pouvoirs sont non seulement exorbitants mais aléatoires. Selon les cas, la Haute Autorité pourra soit délivrer de simples avertissements, soit déclencher très rapidement une procédure de résiliation de l'accès à Internet. Cela pose un problème d'égalité du citoyen devant la loi.
Le fait que les procédures ne débouchent pas systématiquement sur une recommandation me semble plutôt un point positif.
Le problème est que l'on ne sait pas sur quels critères certains feront l'objet d'une procédure et pas d'autres.
La transmission des recommandations se fera en fonction de critères qui seront dégagés par la commission de protection des droits.
La Commission rejette l'amendement.
La Commission adopte un amendement rédactionnel du rapporteur.
— Art. L. 331-21-1 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Accompagnement du développement de l'offre légale en ligne :
La Commission est saisie d'un amendement du rapporteur modifiant l'ordre des sous-sections de la section 3 et prévoyant que la Haute Autorité veille à la mise en place ainsi qu'à l'actualisation d'un système de référencement des offres légales en ligne.
Je propose que la partie sur les missions de la Haute Autorité relatives à l'observation et à l'encouragement au développement de l'offre légale en ligne soit codifiée avant les dispositions relatives aux sanctions.
En outre, dans un objectif pédagogique de mettre en avant une offre légale, l'amendement prévoit parmi les missions de la Haute Autorité la mise en place et l'actualisation d'un système de référencement des offres légales par les logiciels permettant de trouver des ressources sur les réseaux de communications électroniques. Cette mission s'inscrit en complément des efforts engagés par le CNC dans le domaine audiovisuel mais sa portée et son intérêt sont plus larges.
Je partage totalement la volonté du rapporteur. Toutefois je suggère d'inverser, dans le texte, l'ordre des termes « illicite » et « licite ». En effet, il me semble que mettre en avant le téléchargement licite est davantage dans l'esprit du texte. De plus, cela corrige une difficulté grammaticale.
La Commission adopte l'amendement ainsi rectifié.
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche prévoyant que la commission de protection des droits ne peut connaître des faits pour lesquels l'autorité judiciaire a été antérieurement saisie.
Cet amendement mérite un examen attentif car le projet de loi instaure une forme de double, voire de triple peine. Tout internaute passible de la procédure administrative instaurée par le projet de loi continuera à encourir une sanction pénale de 300 000 euros et trois ans d'emprisonnement. S'y ajoutera même une « sanction financière » puisque le paiement de l'accès à Internet ne sera pas interrompu par la suspension. Pour notre part, nous voulons éviter tout cumul entre sanction administrative et sanction pénale.
Il faut bien comprendre que les faits répréhensibles à l'origine de chaque procédure sont différents : dans un cas, la procédure pénale sanctionne une reproduction non autorisée assimilée à de la contrefaçon ; dans l'autre, la sanction administrative réprime le défaut de surveillance par un abonné de son accès à Internet. Il n'y a donc pas cumul. Par ailleurs, les procédures peuvent concerner deux personnes différentes, à savoir le pirate et l'abonné. Enfin le parquet demeure libre de l'opportunité des poursuites et peut orienter les ayants droit vers la HADOPI.
Certes, j'ai bien compris qu'il s'agit de deux procédures de nature différentes mais je ne comprends pas ce qui vous gêne dans l'adoption de cet amendement.
L'argumentation du rapporteur est parfaitement contradictoire avec l'exposé des motifs du projet de loi qui affirme que la procédure devant la HADOPI a vocation à se substituer aux poursuites pénales actuellement encourues. Vous nous dites que les deux procédures coexistent, il faut donc dans ce cas modifier l'exposé des motifs.
Je rappelle que les faits générateurs de chaque procédure sont différents et justifient des sanctions différentes. Le procureur de la République appréciera l'opportunité des poursuites pénales, de sorte que l'éventualité d'une double peine reste marginale.
Nous voulons clairement empêcher tout cumul de procédure en posant cette interdiction dans la loi.
La Commission rejette cet amendement.
Elle est ensuite saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour prévoyant que la commission de protection des droits peut être saisie par voie électronique.
Il s'agit d'indiquer, comme dans le code civil, que la commission peut être saisie par voie électronique, et non uniquement par un courrier classique. Le préciser évitera des contestations ultérieures de la procédure.
Cette précision n'est pas nécessaire puisque l'article 1316-1 du code civil prévoit déjà cette possibilité. Dans les faits, la commission sera quasiment toujours saisie par voie électronique.
L'amendement est rejeté.
— Art. L. 331-23 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Nécessité des mesures prises :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche indiquant que les faits susceptibles de constituer un manquement à l'obligation de surveillance de l'accès à Internet doivent être graves, précis et concordants et démontrer l'intention fautive de l'intéressé.
Le manquement à cette nouvelle obligation doit être caractérisé de manière précise. La Haute Autorité rencontrera beaucoup d'aléas, notamment technologiques, pour identifier le propriétaire de l'adresse IP. Or le dispositif remet en cause la présomption d'innocence.
Le manquement consiste simplement en un défaut de surveillance de l'accès à Internet. La question de l'intention de l'auteur ne se pose donc pas.
L'amendement est rejeté.
La Commission est ensuite saisie de deux amendements, respectivement de M. Patrick Bloche et de M. Jean Dionis du Séjour, écartant l'application des sanctions lorsque l'oeuvre téléchargée ne fait pas l'objet d'une offre légale de téléchargement.
Cet amendement irait dans le sens d'un lien vertueux entre l'augmentation de l'offre légale et la diminution du téléchargement légal, comme le souhaitait le rapporteur.
Aujourd'hui, on constate beaucoup d'anomalies, de rétentions d'oeuvres du répertoire, par exemple pour les Beatles. Cet amendement serait un signe fort de promotion de l'offre légale de téléchargement.
Il est souhaitable de développer l'offre légale, mais sans remettre en cause les droits exclusifs. Les ayants droit ne sont pas obligés de mettre leurs oeuvres à disposition, que ce soit sur Internet ou par tout autre moyen. Par exemple, certains ne le font pas car ils n'ont pas trouvé d'accord financier satisfaisant avec les plateformes de téléchargement légal. Leurs droits exclusifs, qui découlent du droit de propriété, ne doivent pas être remis en cause.
Les droits exclusifs ne seraient pas remis en cause ; l'internaute ne serait tout simplement pas sanctionné. Le fait de sanctionner un internaute pour le téléchargement d'une oeuvre qui n'est pas disponible légalement affaiblit la dimension pédagogique supposée du projet de loi. En l'absence de concurrence avec une offre légale, le téléchargement ne lèse personne.
Les ayants droit devraient proposer une offre légale pour pouvoir bénéficier du dispositif prévu dans le projet de loi. Dans le cas contraire, ce serait à eux de saisir les tribunaux et d'apporter des preuves du téléchargement illégal.
Le système proposé n'obligerait pas les ayants droit à proposer une offre légale. Il permettrait cependant d'accélérer la circulation des oeuvres culturelles. Aujourd'hui, le téléchargement légal ne permet pas une telle circulation de la culture car seuls les « blockbusters » sont proposés.
Le fait de légaliser le téléchargement lèse forcément les ayants droit, dès lors qu'ils ne souhaitent pas que leurs oeuvres soient diffusées par ce moyen.
Le projet de loi met en place un nouvel outil, aux frais de l'État, pour protéger les ayants droits. Qui cet outil doit-il protéger ? C'est un vrai débat.
On pourrait, par exemple, envisager de le réserver aux ayants droit qui ont proposé leurs oeuvres par téléchargement légal. À défaut, la première phrase de l'amendement de M. Dionis du Séjour, qui prévoit que la HADOPI doit apprécier l'existence et le contenu de l'offre légale en ligne avant de prononcer une sanction, pourrait être introduite dans la loi.
Je suis d'accord avec la proposition du président. Il ne serait pas acceptable de priver de protection légale les ayants droit qui n'ont pas accepté la diffusion par téléchargement légal. Mais il n'est pas inintéressant de donner un pouvoir d'appréciation à la HADOPI.
Je suis également de cet avis. Pour de nombreuses infractions, l'action publique n'est pas subordonnée à une plainte préalable de la victime. Si on attend que la victime se manifeste, on inverse la charge de la preuve.
Le dispositif de lutte contre le téléchargement illégal se compose d'un volet pénal et d'un volet administratif. On pourrait trouver un compromis en réservant ce dernier volet, qui va coûter à l'État, à ceux qui proposent une offre légale. Les ayants droit pourront toujours faire valoir leurs intérêts par la voie pénale. Ils ont les moyens de réunir des preuves et de saisir le juge, comme ils le font d'ailleurs aujourd'hui.
Dans ce cas, dans l'immédiat, je rectifie mon amendement pour maintenir uniquement sa première phrase.
La Commission rejette l'amendement de M. Patrick Bloche, puis elle adopte l'amendement de M. Jean Dionis du Séjour ainsi rectifié.
La Commission est ensuite saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour prévoyant l'instauration d'un numéro d'appel téléphonique gratuit auprès de la HADOPI.
Les coupures d'accès à Internet seront complexes techniquement. Les erreurs vont donner lieu à des contentieux avec les fournisseurs d'accès, alors même que c'est la HADOPI qui est responsable de ces mesures. Il convient donc d'instaurer un numéro vert pour permettre de demander des informations à la HADOPI.
Il est prévu de mettre en place une hotline téléphonique, mais il serait exagéré de prévoir sa gratuité alors que les personnes concernées se sont rendues coupables à plusieurs reprises de téléchargement illicite.
La Commission rejette cet amendement.
— Art. L. 331-24 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Envoi de recommandations pour faire cesser des actes de piratage ponctuels :
La Commission adopte un amendement du rapporteur réécrivant intégralement l'article L. 331-24 du code de la propriété intellectuelle afin d'en préciser la rédaction et d'en améliorer la cohérence.
En conséquence, sont devenus sans objet un amendement de M. Patrick Bloche prévoyant l'envoi de la première recommandation par lettre recommandée, un amendement de M. Jean Dionis du Séjour prévoyant que la recommandation doit mentionner la personne ayant signalé le manquement et un amendement de M. Patrick Bloche supprimant la disposition prévoyant que la recommandation ne mentionne pas le contenu des éléments téléchargés.
Sont également devenus sans objet deux amendements de M. Jean Dionis du Séjour et de M. Patrick Bloche prévoyant qu'une nouvelle recommandation n'est adressée qu'en cas de réitération de faits constitutifs d'infractions, plutôt que de faits « susceptibles de constituer » une infraction, ainsi qu'un amendement de M. Patrick Bloche rendant obligatoire l'envoi de la nouvelle recommandation par lettre recommandée, deux amendements identiques de M. Jean Dionis du Séjour et de M. Patrick Bloche permettant à l'abonné de contester la recommandation auprès de la HADOPI et un amendement de M. Patrick Bloche prévoyant qu'en cas de contestation, la HADOPI est tenue d'indiquer les oeuvres téléchargées illégalement ainsi que la date et l'heure de ces téléchargements.
— Art. L. 331-25 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Sanctions en cas de réitération d'actes de piratage :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche tendant à supprimer l'article L. 331-25 mettant en place la procédure de suspension d'accès à Internet.
La rédaction proposée par le projet de loi est disproportionnée par rapport au but de dissuasion recherché. Cette disposition prouve le caractère répressif et non pédagogique de ce texte.
Le rapporteur ayant émis un avis défavorable à cet amendement incompatible avec l'objet même du projet de loi, la Commission rejette cet amendement.
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche tendant à prévoir que la procédure de suspension d'accès à Internet ne peut être engagée qu'après l'envoi de trois recommandations adressées par lettre avec accusé de réception.
Le projet de loi prévoit que la procédure de suspension de l'accès à Internet peut être mise en oeuvre après l'envoi d'une seule recommandation par lettre recommandée avec accusé de réception. Cet amendement porte à trois le nombre de recommandations adressées avec accusé de réception avant l'engagement de la procédure.
Le projet de loi prévoit deux recommandations, dont une adressée avec accusé de réception, ce qui me semble suffisant. Je suis donc défavorable à cet amendement.
La Commission rejette cet amendement.
Puis la Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche tendant à prévoir la saisine par la Haute Autorité de l'autorité judiciaire pour la mise en oeuvre de la procédure de suspension d'accès à Internet.
Comme je l'ai déjà indiqué, la compétence exclusive du juge judiciaire pour toute mesure portant atteinte aux libertés individuelles constitue un principe constitutionnel qui doit être rappelé avec force. À cet égard, je rappelle la disposition adoptée par le Parlement européen sur le Paquet télécom, prévoyant l'intervention systématique de l'autorité judiciaire pour toute sanction.
Le rapporteur ayant émis un avis défavorable, la Commission rejette cet amendement.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la Commission adopte ensuite un amendement de M. Patrick Bloche tendant à prévoir que les différentes sanctions prévues par l'article L. 331-25 ne peuvent pas se cumuler.
Puis la Commission est saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour tendant à remplacer la sanction de suspension d'accès à Internet par une peine d'amende.
Je soutiens pleinement le volet répressif du projet de loi, ainsi que le volet relatif à l'organisation de la détection des actes illégaux de téléchargement. En revanche, je suis opposé à la sanction de suspension d'accès à Internet, cette solution présentant de nombreux inconvénients, notamment techniques. Par exemple, il sera très compliqué d'isoler la connexion à Internet d'un internaute également abonné au téléphone et à la télévision, ce qui aura pour effet de retarder l'application de la loi et de la rendre plus coûteuse.
J'estime que la sanction adaptée est l'amende et je ne comprends pas les raisons de son abandon. La voie suivie aujourd'hui par ce texte est un mauvais choix que nous regretterons, mais je ne me fais malheureusement pas trop d'illusions sur l'avis du rapporteur sur mon amendement.
L'amende est une sanction discriminatoire, qui atteint différemment les personnes sanctionnées selon leurs ressources. C'est également une sanction peu dissuasive. L'exemple de la sécurité routière illustre ce caractère peu dissuasif : tant que la seule sanction des infractions routières a été l'amende, la dissuasion était faible ; le permis à points s'est révélé nettement plus efficace en termes de dissuasion.
Le groupe SRC est réservé non seulement sur la procédure de suspension de l'accès à Internet mais aussi sur l'amende, raison pour laquelle nous ne voterons pas cet amendement.
L'amendement, mis aux voix, est rejeté.
Après avoir adopté un amendement rédactionnel du rapporteur, la Commission est saisie d'un amendement du même auteur visant à augmenter la durée minimale de la suspension d'accès à Internet dans le cadre de la procédure de sanction.
Cet amendement vise à rétablir une gradation dans la réponse au piratage instituée par le projet de loi, en restaurant un différentiel entre la durée minimale de suspension de l'abonnement à Internet, au titre des sanctions prononcées par la HADOPI, et la durée minimale de suspension à ce même abonnement pouvant être prononcée sur une base transactionnelle. L'alignement voté par le Sénat réduit à néant l'intérêt de la transaction pour les pirates, alors que cette procédure repose sur un engagement volontaire à ne plus réitérer de tels actes. En outre, il est indéniable que la réduction à un mois de la durée minimale de suspension de l'abonnement amoindrit la portée dissuasive et pédagogique de la sanction encourue. C'est pour ces raisons qu'une durée minimale de suspension de l'abonnement fixée à deux mois est proposée par le présent amendement afin de rendre au dispositif sa cohérence.
Je suis loin de partager l'avis du rapporteur sur le caractère plus pédagogique d'une sanction minimale portée d'un à deux mois.
L'amendement, mis aux voix, est adopté.
Après avoir adopté un amendement rédactionnel du rapporteur, la Commission est saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour tendant à supprimer la possibilité pour la Haute Autorité de décider une mesure de limitation des services.
La mise en oeuvre de la réduction des débits que suppose la limitation des services n'est pas possible à mettre en place sans faire disparaître l'accès aux autres services, et en particulier à la télévision. La sanction irait donc au-delà de la sanction prononcée qui ne doit toucher que l'accès à Internet.
La décision de prononcer cette sanction appartiendra à la HADOPI. Il convient de ne pas se priver de la souplesse permise par la mesure votée par le Sénat, qui permettra de graduer les sanctions.
L'amendement, mis aux voix, est rejeté.
Après avoir adopté un amendement rédactionnel du rapporteur, la Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche visant à limiter à quinze jours la durée maximale de la sanction de limitation des services.
Cet amendement vise à combler une lacune du texte qui ne prévoit pas de durée maximale pour la sanction de limitation des services, introduite par le Sénat.
Une durée maximale de quinze jours est beaucoup trop courte pour être dissuasive, mais je ne suis pas défavorable à réfléchir à déterminer la durée maximale de cette sanction.
Je ne suis pas hostile à la proposition du rapporteur de réfléchir ensemble à une durée maximale de cette sanction mais dans l'immédiat je maintiens l'amendement.
L'amendement, mis aux voix, est rejeté.
La Commission est ensuite saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour tendant à préciser la définition des mesures de nature à prévenir le renouvellement des actes de piratage.
Je suis favorable à cet amendement, sous réserve de le rectifier pour insérer dans le 2° de l'article L. 331-25, après le mot : « constaté », les mots : « , notamment un moyen de sécurisation figurant sur la liste définie au deuxième alinéa de l'article L. 331-30, ».
L'amendement ainsi rectifié, mis aux voix, est adopté.
Après avoir adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur, la Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche tendant à supprimer la possibilité de publication des sanctions décidées par la HADOPI.
À l'heure d'Internet, cette possibilité de publication des sanctions par voie de presse écrite paraît d'un archaïsme sidérant, d'autant plus que les critères de la publication de la sanction ne sont pas précisés par le projet de loi.
Cette possibilité pour la HADOPI de décider de la publication ou non de la sanction lui permettra de moduler celle-ci en fonction des circonstances et de la gravité du manquement.
Il n'est pas souhaitable de laisser autant de latitude à la HADOPI dans le choix de ses sanctions. Notre rôle en tant que législateur est précisément d'encadrer les pouvoirs attribués à cette autorité.
L'amendement, mis aux voix, est rejeté.
Puis la Commission rejette un amendement de M. Patrick Bloche tendant à tirer les conséquences de l'amendement précédemment rejeté de suppression du mécanisme de sanction de suspension de l'accès à Internet.
Après avoir adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur, la Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche tendant à donner un caractère suspensif au recours de l'abonné contre une décision de suspension d'accès à Internet.
L'importance des conséquences de la sanction encourue nécessite que celle-ci soit entourée de toutes les garanties. Dans ce cadre, il est donc primordial que le recours de l'abonné se voyant reprocher un manquement dans la surveillance de son accès à Internet soit suspensif.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette cet amendement.
La Commission est ensuite saisie de deux amendements identiques de M. Patrick Bloche et de M. Jean Dionis du Séjour tendant à prévoir que le juge qui annule une suspension d'accès à Internet peut indemniser l'abonné ayant été sanctionné à tort.
Si la juridiction estime la sanction infondée, il apparaît logique de prévoir que des dommages et intérêts peuvent être accordés pour réparer le préjudice subi par l'abonné.
Je suis défavorable à ces amendements, qui se contentent de répéter le droit commun de l'indemnisation. Il n'est pas nécessaire de prévoir expressément que le juge peut accorder des dommages et intérêts.
Les amendements, mis aux voix, sont rejetés.
— Art. L. 331-26 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Possibilité de transaction :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche tendant à supprimer l'article L. 331-26 instituant une procédure de transaction.
Cet amendement est la suite logique des amendements qui ont été précédemment rejetés. Je dois dire que, si je comprends la cohérence de la pensée du rapporteur pour s'opposer à la suppression de cet article L. 331-26, je suis en revanche déçu par son accueil sur certains autres amendements.
L'amendement, mis aux voix, est rejeté.
Après avoir adopté un amendement du rapporteur tendant à offrir à la HADOPI la possibilité de prévoir, dans le cadre d'une transaction, des contreparties de la part de l'abonné, la Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche prévoyant la possibilité pour l'abonné d'être assisté d'un conseil dans le cadre de la procédure de transaction.
La possibilité d'être assisté d'un conseil va de soi, sans qu'il soit besoin de le prévoir expressément.
Cela risquerait en outre de formaliser un processus dont le succès repose sur la souplesse.
Enfin, un numéro d'appel et une communication en direction des internautes seront mis en place pour les informer de leurs droits.
Si cette loi se veut pédagogique vis-à-vis des internautes, elle doit être claire et indiquer que la personne poursuivie peut se faire assister.
L'amendement, mis aux voix, est rejeté.
Après avoir adopté à l'unanimité un amendement de M. Patrick Bloche visant à éviter le cumul des sanctions, la Commission adopte trois amendements rédactionnels du rapporteur.
Elle adopte ensuite un amendement de M. Jean Dionis du Séjour précisant la nature des mesures destinées à prévenir le renouvellement des manquements par les internautes en visant précisément la procédure définie à l'article L. 331-30, après que son auteur l'a rectifié à la demande du rapporteur.
Puis, elle adopte, par cohérence, un amendement du rapporteur relatif à la fixation par la commission de protection des droits du délai dans lequel les mesures de prévention du renouvellement du manquement devront être prises.
Après avoir adopté un amendement rédactionnel du même auteur, elle est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche précisant qu'un décret en Conseil d'État, pris après avis de la CNIL, fixera la procédure de transaction que pourra proposer la commission de protection des droits.
Le texte prévoit d'ores et déjà qu'un décret simple précisera la procédure qui devra être suivie en matière de transaction. Je relève en outre que la CNIL n'a pas à intervenir en matière de transaction.
La Commission rejette l'amendement.
— Art. L. 331-28 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Cantonnement de la suspension de l'abonnement à l'accès aux services de communication au public en ligne :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour tendant à la suppression de l'article L. 331-28 et d'un amendement de M. Patrick Bloche supprimant les deux premiers alinéas de ce même article.
Il n'est pas admissible de demander à un consommateur dont on aura coupé l'accès à Internet de continuer à régler son abonnement intégral dans le cadre d'offres combinées. Le législateur aura honte d'avoir voté un tel dispositif ; j'insiste sur l'importance de cette question.
Cet article instaure une double peine : non seulement l'internaute est privé de son accès à Internet, mais on lui demande en outre de continuer à régler ses factures. Je doute que le Conseil constitutionnel valide un tel dispositif.
Les fournisseurs d'accès à Internet ne sont en aucun cas responsables des manquements des internautes avec lesquels ils ont signé un contrat. Les internautes doivent continuer à remplir leurs obligations contractuelles pendant la durée de leur engagement, sauf à faire peser sur les FAI des charges indues. J'ajoute que le dispositif mis en place par le projet de loi revêt un caractère pédagogique et qu'il invitera les internautes à ne pas souscrire un abonnement auprès d'un autre FAI, ce qui aurait pu constituer un moyen de contourner les sanctions.
Si c'était l'intérêt des FAI, ils soutiendraient le dispositif, ce qui n'est pas le cas. Ils ont bien compris la perte de temps et d'argent que la multiplication des contentieux engendrera pour eux. Sans compter que se posent des questions en matière d'offres multiples. En cas de coupure de l'accès à Internet, comment les FAI devront-ils facturer le maintien de l'accès à la télévision et au téléphone ? Je plaide pour une modulation des tarifs.
Je doute vraiment du caractère pédagogique pour l'internaute de l'obligation de payer pour un service dont il sera privé…
Je suggère qu'on réfléchisse à un système permettant que le paiement de l'accès à Internet soit simplement suspendu pendant la durée de la sanction et qu'il reprenne à la fin de celle-ci dans les conditions normales du contrat qui lie l'internaute à son fournisseur d'accès.
Un tel système permet la prolongation du contrat à due concurrence de la durée de l'interruption et ne lèse donc ni l'internaute qui paie pour le service rendu, ni le FAI.
Après que le rapporteur a accepté de réfléchir à une rédaction permettant de résoudre cette difficulté, la Commission rejette les deux amendements, ainsi qu'un amendement de repli de M. Patrick Bloche visant à ce que les sommes versées par les internautes ne le soient pas auprès des FAI mais servent à financer la création.
La Commission adopte ensuite deux amendements rédactionnels du rapporteur.
Puis, elle est saisie de deux amendements de M. Patrick Bloche et de M. Jean Dionis du Séjour visant à exclure la suspension de l'accès à Internet dans le cas où celle-ci devrait entraîner, pour des raisons techniques, la privation d'autres types de services inclus dans l'offre.
Les auditions ont montré qu'environ 10 % des foyers encourraient la suspension de l'accès à leur ligne téléphonique en cas de suspension de leur accès à Internet, situation qui n'est pas acceptable. Il faut donc prévoir la possibilité de ne pas appliquer la suspension tant que les contraintes techniques n'ont pas été surmontées. La ministre n'a rien dit d'autre hier lorsqu'elle a expliqué que le système ne serait appliqué qu'une fois les contraintes techniques levées.
La coupure de l'accès à Internet par les FAI étant très coûteuse en temps et en risques de contentieux, il faut les inciter à mettre en place des procédures alternatives. Celles-ci ne seront cependant pas en vigueur avant un ou deux ans. Il faut donc prévoir un régime transitoire, comme le propose mon amendement.
La rédaction du projet de loi est très claire : en matière d'offre dite « triple play », seul l'accès à Internet est interrompu ; pour le cas où subsisterait une difficulté technique, la suspension de l'accès ne serait pas prononcée mais remplacée par une mesure alternative : l'injonction d'installer un logiciel de sécurisation contre le téléchargement illégal.
La Commission rejette les deux amendements.
— Art. L. 331-29 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Modalités de mise en oeuvre de la suspension de l'abonnement à un service de communication au public en ligne :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche tendant à la suppression de l'article L. 331-29.
Cet article donne obligation aux FAI de suspendre l'accès à Internet de l'abonné dans un délai de quinze jours, délai totalement incompatible avec l'état des techniques, notamment dans les zones dégroupées : les FAI ne sont pas en mesure dans ces cas de suspendre uniquement la connexion à Internet sans affecter les autres services contenus dans l'offre.
L'efficacité du système mis en oeuvre par le projet de loi suppose l'implication de tous les FAI. Votre amendement porte le risque d'une rupture d'égalité entre les FAI qui joueront le jeu et ceux qui, en raison de contraintes techniques, resteront inactifs.
C'est le projet de loi qui crée une inégalité entre les FAI qui pourront jouer le jeu et ceux qui seront dans l'impossibilité technique de mettre en place les nouveaux mécanismes. Le texte est incohérent de ce point de vue. Il va obliger les FAI à être sanctionnés pour n'avoir pas pris de mesures qu'ils sont de toute façon dans l'impossibilité technique de prendre.
Il reviendra à la HADOPI de veiller au bon fonctionnement du système, en collaboration avec les FAI. Ceux-ci pourront, à titre transitoire, utiliser le système alternatif consistant dans l'injonction à la mise en place d'un logiciel de sécurisation.
La Commission rejette l'amendement, ainsi qu'un amendement du même auteur prévoyant qu'il revient à un juge d'ordonner la suspension et un amendement de M. Jean Dionis du Séjour prévoyant que le recours contre les décisions de la HADOPI est suspensif.
— Art. L. 331-30 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Liste des moyens de sécurisation efficaces :
La Commission adopte un amendement du rapporteur précisant les consultations auxquelles la HADOPI devra procéder avant de rendre officielles les spécifications fonctionnelles des moyens de sécurisation et supprimant l'établissement d'une liste officielle de ces spécifications. Elle est ensuite saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour précisant que les moyens de sécurisation devront être interopérables et mis à la disposition des consommateurs gratuitement.
Les moyens de sécurisation mis en place ne sauraient être gratuits, à l'image des logiciels de contrôle parental, mis à la disposition des consommateurs à titre payant, même si leur prix est modique.
J'en viens au second objet de l'amendement : l'interopérabilité. Je n'y suis pas favorable. Il faut laisser au consommateur sa totale liberté de choix en fonction de son système d'exploitation. L'interopérabilité n'est pas nécessaire pour les consommateurs et elle est trop contraignante pour les éditeurs de logiciels.
La Commission rejette l'amendement, puis adopte deux amendements du rapporteur, le premier visant à préciser que la HADOPI établit une liste labellisant les moyens de sécurisation, le second de nature rédactionnelle.
Elle rejette ensuite, par cohérence, un amendement de M. Patrick Bloche précisant que les moyens de sécurisation devront être interopérables et mis à la disposition des consommateurs gratuitement.
— Art. L. 331-31 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Répertoire national des personnes dont l'abonnement à Internet est suspendu :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche tendant à la suppression de l'article L. 331-31.
Cet amendement répond à notre grande préoccupation face à ce texte qui consiste à rééquilibrer protection de la vie privée et droits d'auteurs. Cet article établit un répertoire national des personnes faisant l'objet d'une suspension de leur connexion Internet, sorte de « liste noire » privative de droits, doublé d'un traitement automatisé des données personnelles qu'il contient. Tous les FAI ayant accès à ce répertoire, il est très clair qu'il ne revêt aucun caractère de confidentialité. La CNIL a d'ailleurs jugé disproportionnée l'atteinte portée à la vie privée par cette disposition.
Un traitement automatisé est nécessaire compte tenu du nombre d'avertissements envoyés chaque jour aux internautes, évalué à 10 000 ! La CNIL jouera son rôle de gardienne des libertés.
La Commission rejette cet amendement. Elle adopte ensuite trois amendements du rapporteur, le premier visant à préciser que les FAI vérifient à chaque renouvellement de contrat que l'internaute ne figure pas au répertoire national, le deuxième visant à leur permettre de vérifier le bien-fondé des réclamations de clients qui prétexteraient une interruption de l'accès à Internet pour demander une résiliation de leur contrat, le troisième de nature rédactionnelle.
— Art. L. 331-31-1 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Garanties en matière de consultation des informations contenues dans le répertoire des abonnés pirates :
La Commission adopte un amendement rédactionnel du rapporteur.
— Art. L. 331-32 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Mention des obligations auxquelles doivent se conformer les internautes en matière de droit d'auteur et de droits voisins dans les contrats d'abonnement :
La Commission adopte un amendement de précision du rapporteur, ainsi qu'un amendement de M. Patrick Bloche faisant obligation aux FAI d'informer leurs abonnés des sanctions pénales et civiles encourues en cas de piratage.
Elle adopte ensuite un amendement du rapporteur renforçant les obligations d'information que les FAI doivent à leurs clients, nouveaux abonnés comme clients anciens.
— Art. L. 331-33 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Conservation des données techniques par la commission pour la protection des droits :
La Commission adopte un amendement rédactionnel du rapporteur.
— Art. L. 331-34 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Traitement automatisé de données à caractère personnel sur les pirates :
La Commission adopte un amendement rédactionnel du rapporteur.
— Art. L. 331-35 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Mesures réglementaires d'application de la procédure d'instruction des dossiers :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour visant à tenir compte des coûts engendrés par le nouveau dispositif pour les FAI.
Il s'agit par cet amendement de préciser que la HADOPI est responsable de la mise en oeuvre de sa politique, y compris financièrement via un remboursement aux FAI des coûts engendrés pour eux.
Lors de son audition hier, la ministre a rappelé clairement la répartition des contributions demandées aux uns et aux autres. Elle a également indiqué qu'un dialogue allait s'engager à ce sujet avec les FAI à l'occasion de l'élaboration des décrets d'application de la loi.
La Commission rejette cet amendement.
— Art. L. 331-36 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Publicité des indicateurs de mesure fixés par décret :
La Commission adopte un amendement du rapporteur tendant à la suppression de cet article, par cohérence, puis rejette un amendement de M. Patrick Bloche obligeant la HADOPI à mettre à disposition des internautes une ligne téléphonique gratuite fournissant toute information nécessaire.
La Commission adopte ensuite l'article 2 ainsi modifié.
Après l'article 2 :
La Commission rejette un amendement de M. Patrick Bloche écartant toute poursuite pénale pour des faits dont la commission de protection des droits de la HADOPI a été préalablement saisie.
Article 3 (section 4 du chapitre Ier du titre III du livre III du code de la propriété intellectuelle) : Transfert à la HADOPI de la mission de régulation et de veille dans le domaine des mesures techniques de protection :
La Commission adopte un amendement de cohérence du rapporteur, puis l'article 3 ainsi modifié.
Article 4 (art. L. 332-1 et art. L. 335-12 du code de la propriété intellectuelle) : Suppression de dispositions explicitées par ailleurs :
La Commission adopte l'article 4 sans modification.
Article 4 bis (nouveau) (Intitulé du chapitre VI du titre III du livre III du code de la propriété intellectuelle) : Coordination rédactionnelle :
La Commission adopte un amendement de cohérence du rapporteur, puis l'article 4 bis ainsi modifié.
Article 5 (art. L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle) : Référé juridictionnel pour cesser ou prévenir le renouvellement d'une atteinte à un droit d'auteur ou voisin occasionnée via le contenu d'un site Web :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour, visant à assurer le respect de la règle de droit communautaire selon laquelle les fournisseurs d'accès à Internet ou les hébergeurs n'ont l'obligation ni de surveiller les informations qu'ils transmettent ou stockent, ni de rechercher des faits ou circonstances révélant des activités illicites.
L'article 5 du projet de loi permet au tribunal de grande instance d'ordonner « toutes mesures propres à prévenir ou à faire cesser » les atteintes aux droits d'auteur occasionnées par le contenu d'un site Internet. Cette rédaction très large est en profonde contradiction avec les termes de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, qui exempte les FAI de toute obligation générale dans ce domaine. Elle n'est pas davantage en phase avec la directive 200031CE du Parlement européen et du conseil du 8 juin 2000. L'amendement propose donc de renvoyer à l'article 6 de la loi du 21 juin 2004, qui fixe des limites protectrices.
Le projet de loi propose des mesures spécifiques à l'encontre des FAI pour faire cesser des atteintes au droit d'auteur sur Internet. Cet amendement les remettrait en cause, alors que la jurisprudence de la Cour de Cassation a conforté, au mois de juin 2008, l'efficacité du dispositif qu'il est question de préciser ici.
La Commission rejette cet amendement.
Puis, elle rejette un amendement du même auteur visant à solliciter directement l'auteur et, à défaut, l'éditeur d'un service offert sur Internet pour la mise en oeuvre de mesures destinées à faire cesser les atteintes aux droits d'auteur sur Internet.
Elle est ensuite saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche visant à soumette de telles mesures aux règles de subsidiarité définies dans la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique.
Cet amendement permettra de faire respecter le principe de subsidiarité : les prescriptions doivent d'abord concerner les hébergeurs et, à défaut, les FAI.
Je suis défavorable à cet amendement car il entraînerait une irresponsabilité juridique des FAI.
Il s'agit pourtant d'un principe fondamental ! S'il n'est pas respecté, une censure constitutionnelle est probable.
La Commission rejette cet amendement.
Puis, elle adopte l'article 5 sans modification.
Article 6 (art. L. 336-3, art. L. 336-4 [nouveaux] du code de la propriété intellectuelle) : Obligation et contrepartie pour l'abonné à Internet de veiller à ce que son accès ne soit pas utilisé dans le non-respect des droits d'auteur et voisins :
La Commission rejette un amendement de M. Patrick Bloche visant à supprimer cet article, son auteur ayant estimé qu'au prétexte de lutter contre le téléchargement illégal sur Internet, il impose une obligation généralisée de surveillance préventive des lignes d'accès à ce service.
— Art. L. 336-3 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Responsabilité juridique du titulaire de l'abonnement pour l'usage illicite de celui-ci :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche limitant aux seules personnes physiques titulaires de l'accès à Internet l'obligation de veiller à l'absence d'atteinte aux droits d'auteur.
Il convient de limiter les mécanismes de responsabilité juridique prévus dans cet article aux seules personnes physiques, afin d'éviter de lourdes conséquences pour les collectivités locales, les bibliothèques, les écoles ou les entreprises qui offrent un accès à Internet.
Il est indispensable de soumettre les personnes morales aux mêmes obligations que les personnes physiques dans ce domaine, faute de quoi le texte s'exposerait à une censure du Conseil Constitutionnel. Certaines de ces personnes morales, comme les bibliothèques, bénéficient par ailleurs, d'une réglementation spécifique.
Qu'adviendra-t-il, dans ces conditions, des accès à Internet offerts par de nombreuses communes, telles que la Ville de Paris, par le biais des réseaux Wi-fi ?
La technologie Wi-fi a pour seule singularité d'offrir un accès sans fil à Internet. Lorsqu'un téléchargement illégal est effectué par ce moyen, il est nécessaire que la HADOPI puisse enjoindre à la commune concernée de prendre les mesures requises pour faire cesser l'atteinte aux droits d'auteur.
Cette disposition engendrera des contentieux insensés ! Des logiciels de contournement seront mis en place et les députés eux-mêmes ne seront peut-être pas à l'abri d'une mesure de suspension de leur accès à Internet… Il est absurde de prêter des intentions de téléchargement illégal à des personnes morales. Cette loi sera donc inapplicable et inutile : elle n'aura eu pour seul effet que de se donner bonne conscience.
La Commission rejette cet amendement, puis adopte un amendement de précision du rapporteur.
Elle rejette ensuite un amendement de M. Jean Dionis du Séjour visant à exempter de responsabilité le titulaire de l'accès à Internet lorsque aucun moyen de sécurisation n'est disponible pour sa configuration.
Puis, elle adopte un amendement de précision du rapporteur.
— Art. L. 336-4 [nouveau] du code de la propriété intellectuelle : Transparence sur les caractéristiques essentielles des oeuvres et objets accessibles légalement :
La Commission adopte un amendement du rapporteur procédant à des coordinations et soumettant à l'obligation d'informer les consommateurs non plus les ayants droit, mais les éditeurs et les plateformes d'hébergement et de partage de contenus.
Puis, la Commission adopte l'article 6 ainsi modifié.
Après l'article 6 :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche visant à encadrer et limiter les mesures techniques de protection qui restreignent l'interopérabilité et l'usage de fichiers.
Je conteste l'analyse selon laquelle le projet de loi qui nous est soumis pourrait dynamiser l'offre légale sur Internet. Il est nécessaire d'inscrire dans la loi les règles qui permettront de parvenir progressivement à l'extinction des mesures techniques de protection.
Le Conseil constitutionnel a jugé, dans sa décision du 27 juillet 2006 sur la loi relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, que le législateur ne pouvait imposer aux auteurs la suppression de telles protections. Avis défavorable.
La Commission rejette cet amendement.
Article 7 (art. L. 342-3-1 du code de la propriété intellectuelle) : Coordinations au sein des dispositions relatives aux mesures techniques de protection mises en oeuvre par les producteurs de bases de données :
La Commission adopte un amendement du rapporteur réparant une omission de référence, puis l'article 7 ainsi modifié.
Article 7 bis : Mission de référencement des offres légales sur les moteurs de recherche confiée au Centre national de la cinématographie :
La Commission adopte un amendement du rapporteur supprimant cet article.
Après l'article 7 bis :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche tendant à créer dans le projet de loi un chapitre supplémentaire regroupant des « dispositions pour la mise en place d'une juste rémunération des ayants droit et le financement de la création » et d'un amendement du même auteur prévoyant un mécanisme collectif de rémunération des auteurs et artistes-interprètes.
Le projet de loi ne doit pas, suivant une interprétation variable de son article 2, être tantôt pédagogique, tantôt dissuasif, tantôt répressif. Il doit en revanche garantir une juste rémunération aux ayants droit, en répartissant équitablement les revenus générés par le téléchargement légal.
Mettre en place une rémunération collective des artistes entrerait en contradiction avec leur droit de négocier individuellement des contrats dans ce domaine, et ne serait pas conforme à nos obligations communautaires. Avis défavorable.
La Commission rejette ces deux amendements.
Puis, elle est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche contraignant l'ensemble des utilisateurs à fournir aux organismes collecteurs les statistiques précises des titres diffusés pour que la répartition soit réellement représentative de l'audience.
La philosophie des droits d'auteur est de protéger les plus petits contre les plus gros. Il est donc essentiel de définir des règles équitables de répartition des revenus issus du téléchargement légal. Cette répartition suppose que tous les utilisateurs puissent fournir des statistiques précises d'audience réelle.
Il serait regrettable de rejeter cet amendement, car il propose d'étendre à Internet des règles déjà applicables aux stations de radio : celles-ci sont obligées de transmettre à la SACEM des informations détaillées sur les contenus musicaux qu'elles ont utilisés afin d'établir la rémunération de leurs auteurs, sans que cela ne pose de problème.
La liberté offerte à chaque auteur de négocier individuellement ses droits et conditions de rémunération doit prévaloir. Avis défavorable.
La Commission rejette cet amendement.
Puis, elle est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche énonçant que la création musicale doit être soutenue et renvoyant à un décret la fixation de ses modalités de financement.
Nous sommes en période transitoire. Contrairement à la production cinématographique et audiovisuelle, qui bénéficie de nombreuses aides publiques, l'industrie musicale est entièrement dépendante du marché. Cet amendement vise à remédier à cette situation, en offrant aux créateurs musicaux un soutien financier public.
Il est effectivement nécessaire de soutenir la création musicale, mais cet effort suppose de mener préalablement une vaste concertation, ce que ne permettrait pas l'intervention du décret prévu par cet amendement.
La Commission rejette cet amendement.
Elle est ensuite saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche prévoyant que les organisations professionnelles mettent en place, par voie d'accord professionnel, une « contribution créative » pour la création musicale.
Plutôt que d'imposer par la loi une nouvelle rémunération des auteurs, cet amendement propose d'inciter les organisations professionnelles à négocier la mise en place d'une « contribution créative ». Ce mécanisme reposerait sur une contribution forfaitaire versée par les abonnés à un service de communication au public en ligne fournissant Internet à haut débit.
Cet amendement nous ramène au système, déjà largement débattu, en 2005 et 2006, de la « licence globale », c'est-à-dire à une vente forcée indépendamment de la consommation ! Ce mécanisme remettrait fondamentalement en cause la juste rémunération des offres artistiques auxquelles le public a librement adhéré.
Je ne suis pas surpris par cet avis défavorable du rapporteur, mais il devra renforcer son argumentation lors de l'examen du projet de loi en séance publique !
La Commission rejette cet amendement.
Chapitre II Dispositions modifiant la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique :
Article 8 (I de l'art. 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique) : Information des abonnés par leur fournisseur d'accès sur les moyens techniques permettant de les exonérer de leur obligation de surveillance :
La Commission adopte deux amendements du rapporteur, le premier rédactionnel, le second de précision, puis l'article 8 ainsi modifié.
Chapitre III Dispositions modifiant le code des postes et des communications électroniques
Article 9 (II de l'art. L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques) : Accès de la HADOPI à certaines données techniques des fournisseurs d'accès relatives au trafic sur le Web :
La Commission rejette un amendement de M. Patrick Bloche tendant à supprimer cet article, son auteur ayant estimé qu'il n'assure pas l'équilibre entre le respect de la vie privée et la protection du droit d'auteur.
Puis, elle adopte l'article 9 sans modification.
Après l'article 9 :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour confiant aux organisations professionnelle le soin de conclure un accord prévoyant la mise à disposition de leurs catalogues à la société Radio-France en contrepartie d'une rétribution équitable.
Cet amendement vise à stimuler l'offre légale de téléchargement pour les oeuvres musicales, en confiant à l'État la mise en place d'une offre en ligne par le biais du groupe Radio-France, tout en assurant aux auteurs et ayants droit une juste rémunération, dans des conditions prévues par voie d'accord professionnel. L'argument selon lequel la puissance publique ne pourrait intervenir dans ce domaine serait bien dérisoire, au moment même où l'État envisage presque de nationaliser certaines banques…
La Commission rejette cet amendement.
Chapitre III bis [nouveau] Dispositions modifiant le code de l'éducation
Article 9 bis (nouveau) (art. L. 312-9 du code de l'éducation) : Information des élèves sur les effets du piratage et de la contrefaçon ainsi que sur les sanctions qui en découlent :
La Commission adopte trois amendements du rapporteur, les deux premiers rédactionnels et le troisième de conséquence.
Puis, elle adopte l'article 9 bis ainsi modifié.
Avant l'article 9 ter :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour visant à réserver aux oeuvres cinématographiques disponibles dans une offre de service audiovisuel à la demande une part majoritaire des subventions versées par le Centre national de la cinématographie aux distributeurs de services de télévision.
Cet amendement vise à réserver aux distributeurs qui ont fait des efforts pour proposer des films sous la forme de services de médias audiovisuels à la demande une part des subventions accordées par le CNC.
Je partage l'objectif de cet amendement, mais il me paraît, en l'état, inapplicable. En effet, lorsque le CNC prend la décision de rendre certains producteurs cinématographiques éligibles à ses subventions, il lui est impossible de savoir lesquels proposeront leurs produits en ligne de manière légale.
Toutefois, il est vrai que la réflexion déjà engagée sur les conditions du soutien financier apporté par le CNC à la filière cinématographique devra être poursuivie et, le cas échéant, déboucher sur des évolutions en faveur de la VoD.
La Commission rejette cet amendement.
Chapitre III ter [nouveau] Dispositions modifiant le code de l'industrie cinématographique
Article 9 ter (nouveau) (art. L. 30-4 à 30-8 [nouveaux] du code de l'industrie cinématographique) : Modalités de fixation des délais d'exploitation des oeuvres cinématographiques :
— Art. 30-4 [nouveau] du code de l'industrie cinématographique : Délai pour l'exploitation des oeuvres cinématographiques par le secteur de la vidéo :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour ayant pour objet de porter à quatre mois le délai à compter duquel une oeuvre cinématographique peut faire l'objet d'une exploitation sous forme de vidéogrammes destinés à la vente ou à la location.
Cet amendement correspond à la première proposition du rapport Olivennes. Seuls les exploitants de salles de cinéma s'opposent à ce que les oeuvres cinématographiques fassent l'objet de DVD ou de vidéos à la demande au bout de quatre mois. Une seule partie irresponsable bloque ce que 47 autres parties ont signé. L'article 9 ter, dans sa rédaction actuelle, est humiliant pour nous et il faut que le Parlement se ressaisisse de la question.
Je propose, dans l'amendement suivant, que le délai dont conviendra l'accord professionnel devra figurer dans une fenêtre de trois à six mois, afin de pouvoir moduler le délai en fonction du succès du film. En l'absence d'accord, un décret fixera la chronologie applicable et devra prendre en compte la réalité économique du cinéma, qui peut conduire à ce que des films restent en salle plus de quatre mois.
La Commission rejette l'amendement. Puis la Commission adopte trois amendements du rapporteur, le premier ayant pour objet de fixer dans une fenêtre de trois à six mois le départ du délai d'exploitation des oeuvres cinématographique sur support vidéo physique, le deuxième rédactionnel et le troisième reportant à un mois après la publication de la loi, la date à compter de laquelle le décret pourra se substituer à l'accord professionnel pour les délais d'exploitation des oeuvres cinématographiques.
— Art. 30-5 [nouveau] du code de l'industrie cinématographique : Délai pour l'exploitation des oeuvres cinématographiques par des services de médias audiovisuels :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Jean Dionis du Séjour prévoyant que le délai de mise à disposition du public d'une oeuvre cinématographique par un éditeur de services de médias audiovisuels à la demande est de quatre mois.
Cet amendement est contraire à la directive sur les services de médias audiovisuels du 11 décembre 2007.
La Commission rejette l'amendement.
— Art. 30-6 [nouveau] du code de l'industrie cinématographique : Délai pour l'exploitation des oeuvres cinématographiques par des services de télévision :
La Commission adopte un amendement du rapporteur supprimant l'article 30-6 du code de l'industrie cinématographique introduit par le Sénat.
La Commission adopte l'article 9 ter ainsi modifié.
Article 9 quater (nouveau) : Accord du secteur des phonogrammes sur l'interopérabilité des fichiers musicaux et des catalogues d'oeuvres sans mesures techniques de protection :
La Commission adopte un amendement du rapporteur supprimant l'article. En conséquence, un amendement de M. Jean Dionis du Séjour proposant d'étendre la négociation interprofessionnelle aux offres de musique convergentes devient sans objet.
Après l'article 9 quater :
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche prévoyant que toute oeuvre cinématographique pour laquelle une aide du CNC est susceptible d'être accordée doit être destinée à une première exploitation sur un service offrant l'accès à des oeuvres cinématographiques sur demande individuelle.
Cet amendement reprend l'un des engagements des accords de l'Élysée de novembre 2007, visant à ce que les films bénéficiant d'une aide publique par l'intermédiaire du CNC soient disponibles en vidéo à la demande. Ce serait la meilleure façon de développer une offre légale.
La Commission rejette l'amendement. Elle examine ensuite un amendement de M. Jean Dionis du Séjour excluant de la protection juridique prévue par la loi sur le droit d'auteur et les droits voisins dans la société de l'information les mesures techniques empêchant la mise en oeuvre effective de l'interopérabilité ou s'opposant au libre usage de l'oeuvre.
Cet amendement devrait inciter les éditeurs de mesures techniques de protection à créer des dispositifs plus respectueux de la libre concurrence et des droits du public.
La Commission rejette l'amendement.
Chapitre IV Dispositions diverses
Article 10 : Dispositions transitoires et nécessaires à la transformation de l'Autorité de régulation des mesures techniques en HADOPI :
La Commission adopte trois amendements du rapporteur, le premier de coordination, le deuxième rédactionnel et le troisième fixant les modalités transitoires de constitution du collège de la Haute Autorité et de la commission de protection des droits.
Puis elle adopte l'article 10 ainsi modifié.
Après l'article 10 :
La Commission examine un amendement de M. Patrick Bloche prévoyant une information du consommateur sur la part du prix de vente revenant à la création.
Cet amendement propose un droit élémentaire. Le consommateur doit connaître la part du prix qui revient au créateur.
Même si cette idée est pédagogique, elle serait dans les faits très difficile à mettre en oeuvre, car le calcul est complexe. Je précise toutefois que le Gouvernement réfléchit aux modalités d'indiquer aux consommateurs la part du prix des supports physiques destinée à la rémunération pour copie privée.
La Commission rejette l'amendement. Puis elle examine un amendement de M. Patrick Bloche ayant pour objet, pour les bibliothèques, musées et archives, de coupler à l'autorisation de reproduction d'une oeuvre, une autorisation de diffuser la copie ainsi réalisée.
Il convient de corriger à la marge la loi sur le droit d'auteur et les droits voisins dans la société de l'information, pour permettre la conservation et la consultation sur place des oeuvres dans les bibliothèques, les musées et les services d'archives.
La loi sur le droit d'auteur et les droits voisins dans la société de l'information avait procédé à la transposition la plus extensive possible de la directive communautaire. Aller au-delà des dispositions existantes risquerait de contredire les exigences du test en trois étapes.
La Commission rejette l'amendement. Puis elle examine un amendement de M. Patrick Bloche ayant pour objet de créer une nouvelle section dans le code de la propriété intellectuelle relative au droit d'auteur des journalistes.
Cet amendement reprend une proposition formulée dans ses voeux à la presse par le Président de la République : donner force législative au document de compromis conclu par des représentants des éditeurs de presse écrite et des représentants syndicaux des journalistes et visant à adapter les droits d'auteur des journalistes à l'univers numérique. Nous avions cru comprendre qu'un amendement serait présenté par le Gouvernement pour ce faire, mais il semble finalement que cette solution ne soit plus envisagée. L'opposition se substitue donc au Gouvernement.
La ministre n'a pas exactement affirmé qu'elle ne présenterait pas d'amendement, mais plutôt qu'il restait encore du temps d'ici l'examen en séance publique pour examiner l'opportunité d'adopter un dispositif législatif. À titre provisoire, je donne donc un avis défavorable à cet amendement.
Comme vous vous inscrivez depuis la révision constitutionnelle dans la perspective d'une véritable coproduction législative, il serait cohérent que vous adoptiez cet amendement, sans attendre l'initiative gouvernementale.
Mais les états généraux de la presse se sont tenus à l'initiative du Gouvernement et il est logique que le Gouvernement souhaite, sur un sujet complexe, obtenir d'abord la conclusion d'un accord.
La Commission rejette l'amendement.
La Commission est saisie d'un amendement de M. Patrick Bloche créant un droit voisin au profit des producteurs de spectacles vivants.
Cet amendement vise à créer un droit voisin au profit des producteurs de spectacles vivants, à l'instar du droit dont bénéficient les producteurs de phonogrammes ou de vidéogrammes.
La création de ce nouveau droit risque de perturber l'équilibre économique de la filière. J'observe également qu'aucun autre pays européen ne connaît un tel droit. Il faudrait à tout le moins qu'une discussion soit organisée dans la filière. Enfin, rien n'empêche un producteur de spectacles vivants d'enregistrer ou de filmer les représentations pour ainsi disposer des droits du producteur de phonogrammes ou de vidéogrammes.
La Commission rejette cet amendement.
Article additionnel après l'article 10 (art. 15 de la loi n° 2006-961 du 1er août 2006 relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information) : Simplification des procédures de contrôle par les services de l'État des logiciels intégrant des mesures techniques permettant le contrôle à distance de fonctionnalités ou l'accès à des données personnelles :
La Commission adopte un amendement du rapporteur simplifiant les procédures de contrôle par les services de l'État des logiciels intégrant des mesures techniques permettant le contrôle à distance de fonctionnalités ou l'accès à des données personnelles.
Article 10 bis (nouveau) (art. 89 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, art. 70-1 et 79 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de la communication) : Abrogation de dispositions légales codifiées au code de l'industrie cinématographique :
La Commission adopte trois amendements du rapporteur, le premier fixant au 31 mai 2009 la date butoir d'application des dispositions transitoires, le deuxième tirant les conséquences de la renumérotation de l'article L. 311-11 du code de la propriété intellectuelle et le troisième abrogeant la loi n° 96-299 du 10 avril 1986 relative aux expérimentations dans le domaine des technologies et services de l'information.
La Commission adopte l'article 10 bis ainsi modifié.
Article additionnel après l'article 10 bis : Meilleure valorisation de l'offre légale de films et affranchissement des oeuvres musicales de leurs mesures techniques de protection :
La Commission adopte un amendement du rapporteur favorisant le développement de l'offre légale de films par le Centre national de la cinématographie et visant à la suppression des mesures techniques de protection pour la vente à l'acte d'oeuvres musicales en ligne.
Article 11 (art. L. 811-1 du code de la propriété intellectuelle) : Application outre-mer de la loi et de certaines dispositions du code de la propriété intellectuelle :
La Commission adopte deux amendements rédactionnels du rapporteur puis l'article 11 ainsi modifié.
Après l'article 11 :
La Commission examine un amendement de M. Jean Dionis du Séjour prévoyant que la loi entrera en vigueur six mois après l'adoption des décrets d'application.
Il faut donner du temps aux acteurs concernés pour mettre en oeuvre cette loi, notamment dans ses aspects techniques.
Il est évident que la mise en oeuvre de la loi nécessite un travail approfondi avec les fournisseurs d'accès à Internet. Pour autant, la rédaction proposée, qui conduit à ne rendre la loi applicable que dans un délai de six mois après la publication des décrets est surprenante.
La Commission rejette cet amendement.
Puis la Commission adopte le projet de loi ainsi modifié.
La séance est levée à 13 h 15.