La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
Nous commençons par une question du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, dans notre pays, tous les Français paient l'impôt, direct ou indirect. Le taux moyen d'imposition global est de 47 %. Il est de 40 % pour les plus modestes. Même lorsqu'ils sont exonérés de l'impôt sur le revenu, ils sont redevables de la TVA et de la taxe d'habitation.
Plusieurs députés du groupe UMP. C'est faux !
Ce taux d'imposition réel tombe à 33 % pour les 0,01 % les plus riches, qui jouent de toutes les niches fiscales pour éviter de contribuer à l'intérêt général. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe UMP. C'est faux !
Et voilà pourtant que, toutes affaires cessantes, vous proposez de fixer comme priorité absolue un nouvel allégement de l'ISF. L'abrogation du bouclier fiscal n'est en réalité qu'un rideau de fumée que vous avez tendu pour masquer un nouveau cadeau de 2 milliards d'euros quand le bouclier fiscal n'en coûtait que 700 millions. Les bénéficiaires de ce bouclier disposant d'un patrimoine supérieur à 20 millions d'euros payaient 280 000 euros d'ISF, ils n'en paieront plus que 100 000 après la réforme, c'est-à-dire que vous leur aurez fait un cadeau de 180 000 euros. C'est ça la justice fiscale que vous proclamez ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Ce sont ces fortunes que vous avez exonérées de toute contribution au financement du revenu de solidarité active. Pourtant, quand M. Copé parle de justice sociale, ce n'est pas pour suggérer de soumettre les grandes fortunes à leur devoir de solidarité nationale, c'est pour insinuer que les chômeurs en fin de droits qui, eux, ont cotisé pour le RSA, seraient les profiteurs des largesses de l'État. Ça, c'est un vrai scandale social. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Monsieur le Premier ministre, je vous pose une question grave (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) : pouvez-vous expliquer simplement aux Français votre conception de la justice et de l'équité, pouvez-vous indiquer à M. Copé quelle idée vous vous faites de la décence ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.)
Monsieur le député, la réforme de la fiscalité du patrimoine, sur laquelle vous allez débattre dans les prochaines heures et les prochains jours,…
Plusieurs députés du groupe SRC. …est un scandale !
…s'inscrit dans la cohérence de la politique économique du Gouvernement, politique qui nous a permis de sortir plus tôt et dans de meilleures conditions de la crise économique et financière qui s'est abattue sur le monde.
Pour lutter contre cette crise, nous avons été assez constants : nous avons fait à peu près le contraire de ce proposait le parti socialiste.
Lorsque vous nous demandiez de nationaliser les banques, nous avons choisi de leur prêter à 8 %. Cela nous a rapporté 2,5 milliards quand, dans tous les autres pays européens, le plan de sauvetage des banques a représenté un coût pour le contribuable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Quand vous nous proposiez de baisser la TVA pour relancer la consommation, nous avons choisi de relancer l'investissement. Résultat, la consommation s'est tenue dans notre pays, et nous sortons de la crise plus tôt que les autres, avec 1,5 % de croissance en 2010, 2 % étant désormais assurés pour 2011, avec même une prévision de l'OCDE à 2,2 %. La situation financière des pays ayant choisi les solutions que vous préconisiez, je pense en particulier à l'Angleterre sous le gouvernement travailliste, est dégradée…
…et leur croissance est moindre. Les Anglais ont vu leur notation mise sous surveillance au moment même où la nôtre était confirmée.
C'est vrai, monsieur Emmanuelli, il y a un pays qui fait mieux que nous, c'est l'Allemagne. Pourquoi fait-elle mieux que nous ?
Parce que, sous le gouvernement de M. Schröder, elle a lancé plus tôt les réformes que nous sommes en train de mettre en oeuvre en ce moment (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC), la réforme du marché du travail, la modération salariale et la baisse de la fiscalité, avec, en particulier, la suppression de la fiscalité sur le patrimoine.
C'est dans cet esprit de cohérence que nous travaillons aujourd'hui. Oui, monsieur Ayrault, la réforme de la fiscalité du patrimoine…
…s'inscrit dans un effort de rapprochement des pays de la zone euro et de l'Allemagne.
Vous me demandez quelle est notre notion de la justice sociale et de la justice fiscale, mais je vais vous parler de la vôtre.
Avez-vous pris des mesures contre les paradis fiscaux ?
Plusieurs députés du groupe UMP. Non !
Jamais !
Avez-vous pris des mesures contre les stock-options ?
Plusieurs députés du groupe UMP. Non !
Jamais. Non seulement vous n'en avez pas pris mais, je vous le rappelle à chaque fois que j'en ai l'occasion, vous avez même pris en 2000 des mesures pour alléger la fiscalité pesant sur elles. (Huées sur les bancs du groupe UMP.)
Enfin, en 1998, le gouvernement de Lionel Jospin a dû demander une deuxième lecture du projet de loi de finances pour obliger votre majorité à renoncer à la décision de faire entrer les oeuvres d'art dans l'assiette de l'impôt sur la fortune, et il a eu raison parce que cela permettait de protéger le patrimoine artistique de notre pays.
Sur la justice sociale et la justice fiscale, on entend le parti socialiste donner des leçons et dénoncer les riches : sur cette question, vous êtes peut-être croyants mais vous n'êtes pas pratiquants, et l'actualité nous l'a montré. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Jean-Claude Bouchet, pour le groupe de l'Union pour un mouvement. populaire
Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Tout d'abord, je tiens à remercier Jacques Remiller, président du groupe d'études sur les fruits et les légumes à l'Assemblée, pour son soutien.
Monsieur le Premier ministre, le week-end des 4 et 5 juin, le Vaucluse et le Nord des Bouches-du-Rhône ont littéralement été dévastés par une tempête d'une rare violence : 80 % des exploitants vauclusiens ont été touchés et les productions, bâtiments et matériels d'exploitation ont été ravagés. Autant dire que la saison 2011 est terminée avant même d'avoir commencé.
Cette tempête, alimentée par de la grêle, des vents violents, des tornades localisées et des trombes d'eau, a définitivement condamné toutes les récoltes. À titre d'exemple, 100 % de la récolte de cerises est perdue, 80 % de la récolte de pommes, et, pour les melons, plus de 90 % de la production de Cavaillon a été détruite.
Les répercussions sont terribles pour tous : exploitants, entreprises de la filière… Des milliers d'emplois sont mis en péril. Depuis plusieurs années, ce secteur survit. Des trésoreries sont aujourd'hui dans le rouge et peu d'exploitants sont en mesure de souscrire une assurance grêle ou une assurance récolte multirisques.
Monsieur le Premier ministre, au vu de cette situation dramatique, je compte sur vous pour l'obtention très rapide de l'état de catastrophe naturelle et la déclaration de calamité agricole. Cependant, il faut aller plus loin car les problèmes ne seront pas tous résolus. Il faut que la solidarité nationale soit exemplaire dès aujourd'hui.
Votre gouvernement et le ministre de l'agriculture n'ont de cesse de se battre pour améliorer les conditions de nos agriculteurs. J'invite d'ailleurs Bruno Lemaire à venir constater par lui-même l'état des cultures dans le Vaucluse et dans les Bouches-du-Rhône. Aujourd'hui, face à ce désastre, économique, social et humain, nos agriculteurs ont plus que jamais besoin de votre soutien immédiat. Pouvez-vous m'indiquer les mesures d'urgence que vous envisagez pour sauver la filière agricole ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le député, vous avez raison, les événements climatiques exceptionnels, d'une rare violence, les 4 et 5 juin derniers, ont probablement condamné la récolte pour cette année. Cela s'ajoute à l'actuelle crise sanitaire en Europe. C'est pourquoi il est évident que le Gouvernement, les pouvoirs publics, les autorités locales comme nationales, seront aux côtés des acteurs des filières touchées et durablement impactées pour l'ensemble de la récolte et de la saison.
Qu'a fait le Gouvernement dans l'urgence ? Nous avons demandé au préfet, dans les trois départements concernés, Bouches-du-Rhône, Vaucluse et Var, de réaliser un état des lieux, de mesurer la nature exacte de l'impact et de voir dès à présent quelles étaient les mesures opérationnelles qui devaient être prises pour que les exploitants de ces filières puissent prendre contact avec leurs assureurs.
L'épisode climatique étant spectaculaire, je rappelle les modalités. Nous allons déclencher le fonds national de garantie des calamités agricoles dans les toutes premières semaines. C'est un engagement du Gouvernement. Nous allons donc évaluer toutes les pertes de récoltes dues à la pluie pour les fruits et légumes, les pertes de fonds sur les serres maraîchères, les pertes de fonds sur les vergers et les dommages au sol. Là encore, vous ne pouvez que conseiller à celles et ceux qui sont venus vous voir, aux acteurs et représentants syndicaux des filières, de prendre contact avec leurs assureurs ainsi qu'avec les représentants de l'État. Le fonds sera déclenché et les assurances agricoles fonctionneront.
Ces événements doivent nous amener, à terme, à réfléchir ensemble à un mode assurantiel qui permette aux agriculteurs, quelles que soient l'exploitation et la filière, d'être prêts à parer à des phénomènes climatologiques exceptionnels. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Martine Billard, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le Premier ministre, Carrefour, géant de la grande distribution, voit ses bénéfices augmenter.
Mais grâce à des provisions exceptionnelles, le groupe cache la réalité de sa santé économique. Cela lui permettra de payer moins d'impôts.
Dans le même temps, la hausse des produits de première nécessité a été considérable, diminuant d'autant le pouvoir d'achat de nos concitoyens à petits ou moyens revenus.
La grande distribution continue aussi de pressurer ses fournisseurs, imposant des prix tellement bas que les agriculteurs en arrivent à vendre de fait à perte.
Pendant ce temps, les deux principaux actionnaires montent une opération financière afin d'empocher la coquette somme de 6 milliards d'euros. Bernard Arnault et Colony Capital n'auront pas de soucis à se faire pour boucler leurs fins de mois !
Les salariés du groupe devront, eux, se contenter d'une hausse de salaire de seulement 2 %, de toute façon prévue avec la réévaluation automatique du SMIC au 1er juillet, puisque l'immense majorité des employés, même après trente ans d'ancienneté, ne dépassent guère ce niveau de salaire.
Pour satisfaire les actionnaires avec des dividendes à deux chiffres, les salariés sont considérés comme une simple variable d'ajustement économique : 10 000 emplois ont été supprimés ces cinq dernières années dans le groupe. La généralisation du travail de nuit, le temps partiel imposé et les nouveaux modes d'organisation entraînent une dégradation dramatique des conditions de travail et une augmentation du stress des salariés.
Après ceux des hypermarchés, qui ont obtenu des avancées, ce sont les employés des supermarchés qui entrent dans l'action chez Carrefour Market. Pour l'heure, la direction refuse de répondre à leurs justes revendications.
Voilà où mène votre politique de cadeaux aux grandes entreprises : leurs patrons se sentent tout permis ! Les députés du Front de gauche proposent de taxer les sociétés qui abusent des contrats précaires et du temps partiel imposé, qui frappent particulièrement les femmes.
Monsieur le Premier ministre, au lieu de vous en prendre aux allocataires du RSA, quand allez-vous taxer la précarité organisée pour qu'enfin, les salariés retrouvent des conditions de travail dignes et des salaires à la hauteur de leurs besoins ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
Madame la députée, vous savez comment se passent les discussions chez Carrefour, ce que la direction propose, ce que les salariés demandent. La direction propose de 2 à 2,5 % d'augmentation et une réduction de 7 % sur les produits Carrefour. Les salariés demandent que cette augmentation de salaire soit rétroactive au 1er janvier, que les réductions sur les produits Carrefour soient plus importantes et que les salaires soient alignés sur ceux des salariés des hypermarchés Carrefour.
Si cette négociation annuelle obligatoire a lieu, c'est aussi parce que la majorité a voté en décembre 2008 un texte prévoyant qu'en l'absence de négociations les exonérations de charges ne seront pas au rendez-vous. (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
Vous pouvez dire non – il est vrai que vous n'avez pas voté ce texte – mais c'est aussi grâce à ce dispositif que la pression est plus grande qu'auparavant pour ouvrir des discussions sur les salaires.
Dans ce que vous avez dit, j'ai relevé un point important, qui constitue une vraie divergence entre nous. Vous pensez qu'il faut prendre par l'impôt alors que nous pensons qu'il faut répartir la valeur autrement, notamment grâce à une prime quand les dividendes augmentent. (Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.) Vous êtes dans la taxation, dans l'incantation. Nous souhaitons quant à nous – et sur certaines parties de votre discours nous ne sommes pas à des années-lumière de distance – que, si les bénéfices, si les dividendes progressent, les salariés aient davantage. (Mêmes mouvements.)
Plutôt que de rester dans les postures, vous pourrez, à partir du 14 juin, voter le texte relatif à la prime contre dividendes qui sera présenté par le Gouvernement et sa majorité. Cela fera un avantage de plus pour les salariés ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Ma question, à laquelle j'associe mon collèguePhilippe Vigier, s'adresse au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
La crise sanitaire provoquée par la bactérie E.coli est grave. Elle est grave d'abord parce qu'elle a entraîné à ce jour la mort de vingt-trois Européens et provoqué l'hospitalisation de plus de 2 700 personnes.
Elle est grave aussi parce que 1'identification de l'origine de la bactérie et de son transfert dans les aliments des hommes n'est pas encore établie, provoquant une inquiétude légitime de nos compatriotes.
Elle est grave enfin parce qu'elle est la cause d'une véritable défiance des consommateurs à l'égard des légumes : alors que la saison bat son plein, l'épidémie liée à la bactérie E.coli s'est traduite par des pertes considérables pour les maraîchers européens, les fruits et légumes ne trouvent plus preneurs, et les producteurs français ne sont pas épargnés. Le Nouveau Centre salue la décision prise aujourd'hui par la Commission européenne, à l'initiative notamment du gouvernement français, visant à établir un plan de soutien à hauteur de 150 millions d'euros pour compenser partiellement le préjudice subi par les producteurs.
Mais cette crise révèle aussi un grave dysfonctionnement du dispositif de sécurité sanitaire européen. La situation d'échec actuelle est en partie due au fait que les autorités sanitaires des seize lander – régions – allemands mènent leurs propres enquêtes de manière désordonnée, sans coordination avec les autorités européennes – l'EFSA – ou nationales – l'ANSES en France.
Monsieur le ministre, face à la gravité de cette crise, quelle action urgente le gouvernement français entend-t-il prendre pour améliorer au seul niveau pertinent, c'est-à-dire le niveau européen, la coordination de l'ensemble des autorités sanitaires ? (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
Monsieur le député, je tiens à vous dire qu'il y a une mobilisation dans l'ensemble des États s'agissant de cette bactérie, mais il est vrai que plusieurs informations successives ne se sont pas révélées exactes. Ainsi, la semaine dernière, j'indiquais qu'on n'était pas sûr – même les autorités allemandes ne l'étaient pas à 100 % – que le concombre espagnol soit à l'origine du problème, et les faits ont confirmé cette position. Aujourd'hui, nous sommes toujours dans l'attente des conclusions des études les plus sérieuses pour déterminer exactement quelle est l'origine de cette bactérie.
L'Allemagne vient de faire savoir par voie de presse que s'ajoutaient à ce drame deux nouveaux décès outre-Rhin, ce qui porte donc au niveau européen le total à vingt-cinq décès, dont un en Suède. En France, les personnes qui ont été contaminées ont toutes un lien avec l'Allemagne : que ce soit des touristes allemands ou des personnes travaillant dans ce pays. Nous avons aussitôt mis en place, avec Bruno le Maire pour l'agriculture et avec Frédéric Lefebvre pour la consommation, une cellule de veille, et l'ensemble des établissements de santé se sont mobilisés pour faire face, notamment pour prendre en charge les patients.
Mais vous raison : c'est au niveau européen qu'il faut une meilleure coordination, une meilleure prise en compte de la situation. J'entends, dès la fin de cet épisode dramatique, que nous tirions avec l'OMS et au niveau européen tous les enseignements de ces dysfonctionnements pour que nous puissions avoir la meilleure capacité de prise en charge possible.
Par ailleurs, j'ai vu avec le responsable du CNR – le Centre national de référence –, M. Weill, comment mettre en place un programme de recherche spécifique en France. Ce n'est pas la première fois que cette bactérie se manifeste : on l'a connu en Corée, il y a eu des publications en Allemagne en 2008. Après un tel épisode, on ne peut pas se permettre de faire comme si celui-ci n'avait pas eu lieu. Il nous faut davantage de renseignements et d'informations, et nous lancerons donc à cet effet un programme de recherche spécifique. C'est une question de sécurité sanitaire, mais c'est aussi une question de confiance. Voilà pourquoi c'est une question essentielle. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers.gauche
Mes chers collègues, je viens comme vous d'entendre le Premier ministre nous parler de la cohérence de sa politique. Entre le paquet fiscal de l'été 2007 et la réforme que vous faites aujourd'hui, il y a une incontestable continuité dans votre politique, monsieur le Premier ministre, mais où est la cohérence ?
Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Parlez-nous des 35 heures !
Dans la situation que connaît notre pays, où les salaires stagnent, où les revenus du patrimoine explosent, où les revenus du travail sont beaucoup plus imposés que ceux du capital – je ne fais que décrire des faits –, dans un contexte où plus on est riche, moins on paye d'impôt, on aurait pu s'attendre à ce que la suppression du bouclier fiscal soit l'occasion de réparer ces injustices…
…puisqu'il suffisait de le supprimer.
Eh bien non ! Vous en rajoutez en matière d'injustice. Vous allégez l'impôt des 600 000 foyers dont le patrimoine se compte en millions d'euros. Pour une petite partie d'entre eux – 10 000 –, l'allégement sera compensé par la suppression du bouclier fiscal, mais pour tous les autres, ce sera un gain net sans aucune contrepartie !
Eh bien, je vous le dis : dans la situation actuelle de notre pays, une réforme qui, en contrepartie de la suppression du bouclier fiscal, fait cadeau de plus du double de ce bouclier aux Français les plus riches est une réforme indécente. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
Monsieur le Premier ministre, s'il y a un domaine dans lequel vous êtes incontestablement croyant et pratiquant, c'est celui des cadeaux fiscaux aux plus riches de nos concitoyens ! (Mêmes mouvements.)
La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur Muet, ce qui vous gêne dans cette réforme, c'est qu'elle soit juste, équilibrée et équitable (Exclamations et rires sur les bancs des groupes SRC et GDR) ; ce qui vous gêne, c'est la savonnette que vous avez désormais dans la main car vous ne ferez croire à personne que cette réforme favorise telle ou telle catégorie de la population. (Mêmes mouvements.) Vous ne pouvez pas impunément porter en bandoulière, enfermé dans un dogme, une idéologie, une doctrine et un prêt-à-penser dépassés, l'idée qu'elle favoriserait les riches, utilisant par là même une terminologie de lutte des classes totalement hors du temps et qui ne correspond pas à l'esprit de compétitivité et de justice que nous poursuivons à travers ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Oui, il est juste de supprimer le bouclier – c'était notre objectif commun, me semblait-il – et, en conséquence, de modifier l'assiette de l'ISF. Il est en effet juste de donner les moyens à celles et à ceux qui en ont le plus à la fois de poursuivre leur effort de contribution dans cette période de réduction des déficits publics et de conserver cet argent en France pour investir dans l'économie, créer des emplois et maintenir la dynamique de croissance dans laquelle nous nous trouvons désormais.
Oui, il est juste également d'avoir trouvé des réponses équilibrées en faisant en sorte que ce soit les mêmes qui financent. C'est cela qui vous gêne : que ce soit les mêmes, ceux qui sont assujettis à l'ISF, qui vont financer cette réforme, et que pas un élément membre de la classe moyenne ne sera appelé à y contribuer.
C'est ainsi que nous avons atteint le juste équilibre. C'est bien la raison pour laquelle notre réforme vous ennuie et vous gêne. Vous parliez d'opération de communication… Que doit-on penser de la vôtre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Gilles Carrez, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre du budget et des comptes publics.
Nous examinons cette semaine la réforme de la fiscalité du patrimoine que vous avez longuement préparée en concertation avec les parlementaires.
Chers collègues, c'est une réforme profondément juste. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Grâce à la suppression du plafonnement de l'ISF mis en place par un gouvernement socialiste…
…et grâce à la suppression du bouclier fiscal, les Français les plus fortunés vont être mis à contribution. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Il n'y aura plus de chèque de remboursement de l'ISF. (Mêmes mouvements.)
C'est une réforme juste parce que, dès cette année, les quelque 300 000 contribuables qui ne sont assujettis à l'ISF qu'en raison de la flambée du prix de leur résidence principale, en seront exonérés.
C'est une réforme juste pour l'économie et pour l'emploi : enfin cet impôt n'aura plus les taux confiscatoires qui ont, pendant trop longtemps, conduit à la vente de nos entreprises familiales à des groupes étrangers et à la délocalisation des emplois. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le ministre, vous avez souhaité – et vous avez raison – que cette réforme soit budgétairement équilibrée et qu'elle ne pèse ni sur le déficit ni sur la dette de notre pays. Vous avez également souhaité que seuls les plus fortunés de nos compatriotes soient mis à contribution.
Pouvez-vous nous donner des précisions sur ce double équilibre budgétaire et politique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le rapporteur général, cher Gilles Carrez, je voudrais au préalable vous rendre un hommage particulier, à vous ainsi qu'aux vingt membres du groupe de travail que j'ai eu l'honneur d'animer sous l'autorité du Premier ministre avec Christine Lagarde.
Après six mois de concertation, de discussions et d'échanges nous sommes en effet parvenus à une solution consensuelle, n'en déplaise à la gauche de cet hémicycle qui essaie probablement de se faire pardonner beaucoup de choses en ce moment (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
L'équilibre consensuel sur lequel nous sommes parvenus porte d'abord sur la suppression du bouclier. Celle-ci était souhaitée par la gauche et une partie de la majorité et nous avons trouvé une solution : nous sommes tombés d'accord sur une modification de l'assiette de l'ISF. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Nous supprimons la première tranche de l'ISF car les contribuables y étaient entrés du fait de l'évolution du marché de l'immobilier au cours des quinze dernières années. C'est une question de justice.
Par cette réforme très simple, nous modifions l'équilibre général, faisant passer le nombre de tranches de six à deux : comprise entre 1,3 million et 3 millions d'euros, la première est taxée à 0,25 % ; la deuxième, au-delà de 3 millions d'euros, est taxée à 0,5 %. Il n'y aura pas non plus de perdants dans cette réforme, grâce à un lissage des effets de seuil.
Et puis, il a fallu trouver les modalités de financement. Là encore, je veux vous remercier. Nous avons écarté certaines pistes après les avoir examinées les unes après les autres. Nous ne remettons pas les biens professionnels dans l'assiette de l'ISF. La gauche les avait retirés – après tout c'était une bonne idée – et vous pourriez nous féliciter de la retenir. Nous écartons aussi les oeuvres d'art, retirées aussi à bon escient par la gauche. Nous avons écarté l'assurance-vie.
Nous avons retenu les modalités de transferts de l'imposition : elles portaient jusqu'à présent sur le stock de patrimoine et elles seront orientées sur le flux, sur la transmission du patrimoine. C'est en ce sens qu'il n'y a aucun cadeau puisque ce sont les mêmes qui paieront, un peu moins de leur vivant et un peu plus au moment de la transmission. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, et j'y associe mes collègues Français Sauvadet et Jean-Luc Préel.
Il y a un mois, les candidats à l'agrégation d'histoire planchent sur un texte présenté comme datant de 1415 mais qui est en réalité un plagiat publié en 1964. L'épreuve est annulée.
Il y a quinze jours, des étudiants passent un BTS en management. L'épreuve est annulée pour cause de fuites.
Mercredi dernier, 8 000 étudiants en médecine passent le concours de l'internat, c'est-à-dire le concours final des études de médecine. Le texte est confus ; l'épreuve est annulée et remplacée par une épreuve de réserve. En raison de fuites, l'épreuve est définitivement annulée.
Madame la ministre, comment en est-on arrivé là ? Quels sont les mécanismes de contrôle ? Des sanctions sévères vont-elles être prises ? Le Nouveau Centre souhaite que ces crises permettent l'étude d'une nouvelle réglementation des concours, prévoyant la possibilité d'éliminer certaines épreuves. Ces annulations se traduisent en effet par un gâchis humain pour les étudiants et par un gâchis financier tant pour les étudiants que pour les facultés.
À titre personnel, je m'interroge : doit-on former nos étudiants en médecine à passer des concours ou à être de bons médecins ? Le Nouveau Centre souhaiterait que l'on réfléchisse une fois pour toute sur la capacité à organiser un concours unique sur multisites. Pourquoi ne pas avoir, comme autrefois, des concours interrégionaux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Monsieur le député Olivier Jardé, nous tenons beaucoup au principe des concours, un principe républicain et méritocratique, devant lequel tous les étudiants doivent être placés sur un pied d'égalité.
L'égalité devant le concours signifie que tous les étudiants doivent plancher sur les mêmes libellés d'épreuve. C'est un principe républicain et constitutionnel.
Dans les cas que vous citez, qui sont de nature très différentes, il y a eu effectivement des fautes dans l'organisation du concours. Le Gouvernement a présenté ses excuses aux étudiants. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Maintenant ces épreuves doivent avoir lieu.
Avec le ministère de la santé, qui est responsable de l'organisation des concours de médecine, nous allons réorganiser les épreuves de lecture critique d'articles pour les examens classants nationaux, l'ancien internat de médecine. Il s'agit d'une épreuve cruciale pour la formation de nos futurs médecins car elle leur permet d'avoir un regard critique sur les articles qu'ils lisent. C'est une épreuve que nous avons mise en place dans le cadre des formations médicales.
S'agissant de l'agrégation d'histoire, le concours n'a pas été annulé et l'épreuve n'a pas été reportée. Tous les étudiants ayant planché sur la même épreuve, il a été considéré qu'ils avaient été placés sur un pied d'égalité. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Le ministre de l'éducation nationale a maintenu l'épreuve. Nous l'avons fait pour que les étudiants aient à subir le moins possible le contrecoup des erreurs qui ont été commises. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Christian Eckert, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, en début de séance, gêné probablement par la situation dans laquelle vous vous trouvez, vous avez déclaré, en réponse au président Ayrault, que votre réforme de la fiscalité du patrimoine a pour but de provoquer, comme dans d'autres pays, une baisse de cette fiscalité. Or, depuis hier soir, le ministre du budget nous…
…répète que sa réforme est équilibrée et que ce qui ne sera pas payé d'un côté le sera d'un autre côté par les mêmes.
Mais – cohérent, en effet, avec votre politique, monsieur le Premier ministre – vous avez déclaré que votre réforme a pour but la baisse de la fiscalité du patrimoine.
Nous aurions pu nous accorder sur la question de l'injustice fiscale, qui est bien réelle et reconnue : la fiscalité est différente selon qu'elle pèse sur les revenus du travail ou sur ceux du capital. Les niches fiscales, juteuses pour ceux qui les utilisent, comme la niche Copé, sont bien connues des fiscalistes qui conseillent les grosses fortunes.
Plusieurs députés du groupe UMP. Démago !
L'impôt sur les sociétés pèse beaucoup plus sur les PME que sur les sociétés du CAC 40.
Plusieurs députés du groupe UMP. C'est odieux !
En vous cachant derrière un rideau de fumée, vous avez décidé de soigner 1,6 % des contribuables : alors même que vous êtes allés prendre 135 millions d'euros dans la poche des accidentés du travail – c'est M. Woerth qui a fait cela – en fiscalisant les indemnités journalières (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR), aujourd'hui ce sont près de 2 milliards que les riches ne paieront plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le ministre du budget, la savonnette, nous l'avons dans la main, mais nous avons les mains propres. Vous, vous avez depuis longtemps glissé dessus. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) ‘
La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le député Eckert, la savonnette, vous l'avez : on vous la laisse, vous pourrez vous amuser avec !
Je crois que l'Assemblée est désormais pleinement informée des enjeux, des objectifs, du calendrier et de la cible atteinte. Vous n'arriverez pas à démontrer l'injustice de cette réforme.
De plus, la réforme est équilibrée.
Quand je me regarde, je me désole. Quand je me compare je me console. J'ai lu votre projet : il est vieilli, usé, fatigué ! Cela vous rappellera, là aussi, peut-être quelque chose.
Comment pouvez-vous avoir l'audace, le culot – d'acier – de porter, haut et fort, un projet qui a trente ans d'âge et qui est totalement inadapté à l'évolution du monde et à l'impact de la crise budgétaire et économique que tous les pays traversent ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Êtes-vous à ce point aveugles ? Ne franchissez-vous jamais les frontières ? Regardez ce qui se passe en Espagne. Votre ami Zapatero a baissé le traitement des fonctionnaires de 5 % et supprimé le treizième et le quatorzième mois de pension.
Regardez ce qui se passe au Portugal, en Grèce, en Irlande. Voyez le transfert qui est opéré de la dette privée sur la dette publique et les exigences des temps modernes. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Comment pouvez-vous, à quelques encablures de l'élection présidentielle, proposer un choc fiscal de 50 milliards aux Français ? Comment pouvez-vous proposer encore la création de 300 000 emplois publics ? Par qui seraient-ils financés, sinon par les contribuables ?
Alors, oui, travaillez et regardez ! Nous pourrons ensuite nous retrouver, mais sur un bilan sérieux, c'est-à-dire la gestion de l'après-crise. Nous avons, de ce point de vue, un acquis : l'action du Gouvernement, qui est l'action du Président de la République, et que nous comptons bien poursuivre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Daniel Mach, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire. J'y associe, si vous le permettez, Serge Poignant, président de la commission des affaires économiques, et l'ensemble des parlementaires des Pyrénées-Orientales. Elle porte sur la crise que subissent de plein fouet les maraîchers français et, plus spécifiquement, les producteurs de concombres.
La semaine dernière, le gouvernement allemand a procédé à des annonces alarmantes au sujet d'une bactérie détectée sur le concombre espagnol. Depuis, les agriculteurs européens et, en particulier, français se trouvent confrontés à une terrible mévente de leur production. La réaction des consommateurs a, en effet, été immédiate et la vente de concombres a baissé de 90 % et celle des crudités – et des légumes en général – de 40 %.
Ces déclarations, lâchées dans la précipitation et sans aucune certitude, sous couvert du principe de précaution, enfoncent notre agriculture, déjà très fragile, dans une nouvelle crise. Elles ont été relayées sans qu'aucun contrôle de leur véracité ne soit effectué.
Ces annonces désordonnées continuent aujourd'hui et, même si le concombre n'est plus accusé d'être porteur de la bactérie tueuse E. coli, le mal est fait. Les conséquences ont été dévastatrices pour nos producteurs français, et les réunions de crise se multiplient.
Ce sont des millions d'euros qui se sont évaporés des recettes de nos producteurs. La région Languedoc-Roussillon est la première productrice de concombres en France. Pour les Pyrénées-Orientales, la perte est chiffrée à 250 000 euros par jour.
Au-delà des responsabilités que chacun doit assumer, nos agriculteurs ont besoin d'un soutien très efficace pour passer ce cap. Une compensation des pertes leur serait évidemment précieuse, mais je sais, pour les avoir rencontrés, qu'ils souhaitent qu'une campagne publicitaire, relayée par votre ministère, rassure les consommateurs, afin de les inciter à soutenir l'agriculture française.
Face aux profondes et légitimes inquiétudes de nos producteurs, qui ne sont en rien responsables de la situation qu'ils subissent, quelles mesures compte prendre le Gouvernement pour soutenir cette filière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser M. Bruno Le Maire qui représente actuellement le gouvernement français au conseil extraordinaire des ministres européens réuni à Bruxelles pour examiner, précisément, la crise qui frappe le secteur des fruits et légumes.
La situation sanitaire est extrêmement grave en Allemagne, et l'ensemble des pays européens y porte, bien évidemment, une attention soutenue.
Il y a trois priorités dans l'urgence : apporter les soins nécessaires aux malades, trouver l'origine de l'épidémie et aider l'Allemagne dans la recherche de la source et de l'origine du développement de cette bactérie.
Un grave dysfonctionnement des dispositifs de sécurité sanitaire sur les aliments en Europe a entraîné une perte de confiance très brutale du consommateur. Vous en avez évoqué les conséquences : 95 % des volumes de concombres en France ne trouvent pas preneurs aujourd'hui. Pour l'heure, ils sont stockés et devront, si la situation ne se débloque pas, être purement et simplement détruits. À cela s'ajoute l'embargo sur les légumes européens annoncé par la Russie.
Nos producteurs ne sont pas responsables de cette situation, mais elle a pour eux des conséquences dramatiques : la perte de millions d'euros.
Bruno Le Maire s'est entretenu hier avec le commissaire européen chargé de l'agriculture. C'est l'enjeu du conseil extraordinaire qui se tient en ce moment.
Le ministère de l'agriculture travaille avec les opérateurs concernés à la mise en place, dans les tout prochains jours, d'une campagne de communication nationale, ce que vous souhaitez et ce qui va dans la bonne direction.
Mais il faudra aussi tirer tous les enseignements de cette crise, afin d'améliorer le système de sécurité sanitaire dans le périmètre européen. Il faudra certainement améliorer l'efficience de la détection des enquêtes sur l'origine des contaminations, vérifier la procédure de circulation de l'information au sein des États membres, renforcer la coopération entre eux et s'assurer d'une plus grande cohérence entre les différents dispositifs de contrôle. Il faudra également veiller à assurer la traçabilité, puisqu'il s'agit d'alimentation animale ou végétale. Là aussi, nous devrons tirer les leçons de cette crise. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, depuis plusieurs années, les plus fortunés – Jean-Marc Ayrault, Pierre-Alain Muet et Christian Eckert viennent d'en faire une nouvelle fois la démonstration – bénéficient de cadeaux fiscaux qui représentent plusieurs milliards d'euros. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Durant cette même période, des territoires ont été abandonnés par l'État, abandonnés avec de mauvaises excuses, la RGPP ou le non-remplacement de fonctionnaires partant à la retraite, abandonnés aussi du fait de l'absence de politiques d'État ambitieuses en termes de santé, d'éducation, d'habitat, d'économie ou de sécurité. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Là où vous abandonnez des quartiers, ils sont récupérés par le commerce de drogue et les trafics divers.
Dans certains quartiers de New York, les loyers atteignent les 50 000 dollars !
Et là où sont commis ces méfaits, monsieur le Premier ministre, naissent des situations dramatiques de violence urbaine, de guerre des gangs mafieux qui ont pour conséquence – vous devriez faire que cela n'arrive pas – d'empêcher, à Sevran, des enfants de sortir en récréation à cause du risque de balles perdues ou encore, à Saint-Ouen, d'obliger les parents d'élèves à une nouvelle mobilisation ce soir contre la violence. Vous apparaissez, monsieur le Premier ministre, impuissant face à cette restriction de la liberté de circuler, démissionnaire face à cette peur imposée par les caïds.
Comment ne pas être indigné, monsieur le Premier ministre, par ces milliards de cadeaux qui n'améliorent que la situation de quelques-uns quand cela a pour conséquence l'abandon de ces territoires où vivent des gens modestes et où les élus locaux sont laissés trop seuls pour affronter ces situations ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Face à tout cela, c'est de plus de policiers que nous avons besoin, de plus d'éducateurs, de plus de professeurs, de plus de médecins. Monsieur le Premier ministre, je vous le dis au nom du groupe socialiste : à la lumière de ce que je viens de vous décrire, à la lumière de ce que vivent nos quartiers, l'urgence n'est pas de satisfaire une nouvelle fois les plus fortunés et les plus riches, mais d'assurer la sécurité, l'éducation et la santé dans ces territoires que vous avez abandonnés.
Allez-vous donc changer, monsieur le Premier ministre, votre politique fiscale et budgétaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Permettez-moi tout d'abord de m'étonner, monsieur le député Bruno Le Roux, de la légèreté avec laquelle, en dénonçant la RGPP, vous évoquez l'indispensable maîtrise de nos finances publiques. Il en va pourtant du développement de notre pays. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Nous empruntons aujourd'hui à 3,6 % et chacun sait bien que ce taux conditionne le taux des emprunts des particuliers, des entreprises et des collectivités locales.
Il est vrai que votre légèreté est en cohérence avec le projet du parti socialiste, qui prévoit des dizaines de milliards d'euros de dépenses supplémentaires.
Il est vrai que le ministre de l'intérieur, comme les autres, est soumis à la règle du non-remplacement systématique des fonctionnaires qui partent à la retraite.
Je me réjouis de votre intérêt nouveau pour les effectifs de police parce que, lorsque vous avez décidé les 35 heures, cela s'est traduit par 8 000 suppressions d'emplois sans aucune compensation.
Je veux appeler l'attention de nos concitoyens sur quelques réalités. La réalité, c'est…
…peut-être que nous réduisons les effectifs, mais c'est aussi qu'en 2010 nous avons déploré 500 000 victimes de moins que lorsque vous étiez au pouvoir, un pouvoir dont vous étiez l'influent conseiller, monsieur Le Roux.
La deuxième réalité,…
…c'est que la délinquance ne cesse de reculer. En Seine-Saint-Denis encore, depuis le début de l'année, elle recule de 2 %, et ce n'est pas parce qu'il y a quatre fonctionnaires de moins à Sevran que cela change. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Ce qui change, en réalité, c'est la volonté de choisir le camp des victimes et de ne pas chercher des excuses aux délinquants (Protestations ininterrompues sur les bancs du groupe SRC), la volonté de doter la police et la gendarmerie des moyens juridiques et techniques de faire leur travail, moyens que vous leur avez toujours refusés, la volonté de toujours s'adapter. Quand vous proposez des recrutements qui ne sont pas finançables, nous, avant la fin de cette année, nous aurons 4 000 fonctionnaires de police et gendarmes de plus sur le terrain. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Huées sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Philippe Boënnec, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. Éric Besson, ministre de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique.
Monsieur le ministre, ce matin, un quotidien annonce que vous vous apprêtez à transmettre à la Commission de régulation de l'énergie le projet d'arrêté de gel des tarifs du gaz au 1er juillet 2011.
En avril dernier, le Premier ministre avait annoncé plusieurs mesures destinées à limiter l'impact de la hausse des prix de l'énergie sur le budget des Français. Le gaz, l'électricité et le carburant avaient ainsi retenu toute l'attention des pouvoirs publics.
Concernant le gaz, le Gouvernement a déjà mis en place un tarif social avec une réduction de 20 %. Ainsi, pour un foyer chauffé au gaz, le rabais est passé à 142 euros par an.
Ce gel des tarifs du gaz va donc permettre de recalculer la formule de réévaluation avec GDF Suez et la Commission de régulation de l'énergie.
En outre, je le rappelle, le Grenelle de l'environnement, dont notre majorité a pris l'initiative, permettra de poursuivre d'ici à l'année 2020 la réduction de la consommation d'énergie fossile grâce au soutien des énergies renouvelables et à l'amélioration de l'efficacité énergétique, ce qui favorisera la réduction des émissions de gaz carbonique.
Monsieur le ministre, dans un contexte international difficile, le Gouvernement se devait de prendre des décisions en matière de coût de l'énergie pour l'ensemble des ménages français, et je m'en félicite.
Pouvez-vous nous dire dans quelles conditions ces mesures seront prises ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Éric Besson, ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique.
Vous avez raison, monsieur le député Philippe Boënnec : le Gouvernement, comme l'avait annoncé ici même le Premier ministre, s'apprête à geler les tarifs du gaz.
Si nous n'avions rien fait, les tarifs du gaz auraient augmenté de 7 % le 1er juillet prochain.
Le problème est que le cadre tarifaire actuel, vous le savez, ne permet pas au consommateur de bénéficier de toutes les possibilités d'optimisation d'approvisionnement dont bénéficie actuellement GDF Suez.
Comme vous l'avez dit, je saisirai donc dès demain la Commission de régulation de l'énergie d'un projet d'arrêté gelant les tarifs du gaz à compter du 1er juillet 2011. Nous demanderons aussi à la CRE d'expertiser les coûts d'approvisionnement du marché français afin de modifier ce que l'on appelle l'équation tarifaire et d'établir une nouvelle formule tarifaire.
Vous avez bien voulu souligner que cette décision s'inscrit dans un cadre plus large : elle témoigne d'une volonté de protéger les consommateurs, notamment les Français les plus modestes, des conséquences de l'augmentation internationale du prix du pétrole et du gaz.
Je vous le rappelle, nous avons créé le tarif social du gaz en 2008 et nous l'avons revalorisé de 20 % le 1er avril dernier, nous avons augmenté de 10 % le 1er janvier dernier le rabais social de l'électricité, nous avons créé une prime à la casse pour le remplacement des chaudières au gaz et au fioul usagées pouvant aller jusqu'à 300 euros, nous avons lancé l'éco-prêt à taux zéro, dont le montant peut aller jusqu'à 30 000 euros, et nous avons mis en place un fonds de rénovation thermique des logements, doté d'un montant global de 1,35 milliard d'euros.
Sécuriser l'approvisionnement en pétrole et en gaz, assurer notre production d'électricité, notamment nucléaire, et, en même temps, veiller au pouvoir d'achat des Français et à la compétitivité de nos entreprises : voilà sur quoi est fondée notre politique énergétique. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Sandrine Mazetier, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, votre gouvernement présente une réforme de l'impôt sur la fortune – qui ne sera pas légère, monsieur Guéant ! –, au terme de laquelle 2 milliards d'euros manqueront aux recettes de la France. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe UMP.) Vous disiez pourtant vous-même, monsieur le Premier ministre, que notre pays était « en situation de faillite ».
Qui sont les bénéficiaires de ce cadeau fiscal ? D'après le magazine Forbes, ce sont en moyenne des hommes de soixante-quatorze ans et, pour l'écrasante majorité d'entre eux, ce sont des rentiers, assis sur des fortunes qu'ils n'ont pas réalisées eux-mêmes (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC), assis sur l'effort réalisé par d'autres. Ce ne sont ni des entrepreneurs, ni des créateurs, ni des inventeurs. Ce n'est pas la France qui se lève tôt.
C'est à cette poignée de rentiers que vous vous apprêtez à faire ce cadeau de 2 milliards d'euros. La France en a-t-elle les moyens ? Évidemment non. Il faut donc bien que quelqu'un paie. Et ce sont tous les autres Français, tous les autres contribuables qui vont payer, comme l'ont démontré mes collègues socialistes depuis le début de la séance. C'est aussi l'immense cohorte des justiciables qui devra payer. Car, pour financer la réforme de l'impôt de solidarité sur la fortune, vous créez une nouvelle taxe, mais vous ne le dites pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Assumez donc le fait que, désormais, tout justiciable, dans ce pays, devra acquitter une taxe de 35 euros pour espérer voir ses droits reconnus. L'immense cohorte des victimes de violences, des victimes du quotidien, des victimes de non-paiement de loyer, de non-paiement de pension alimentaire devra payer. Oui, nous, nous sommes du côté des victimes, pas vous ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Avec cette réforme, ce sont les Français qui paieront pour les milliardaires. Alors, comme votre cynisme n'a pas de limites, monsieur le Premier ministre, pas plus que la fortune de ces gens-là, je vous le dis, il y a décidément quelque chose…
La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Avec tout le respect que je vous dois, madame la députée, je me permets de vous dire qu'une addition de mensonges ne constituera jamais une vérité ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
L'amalgame et la confusion m'amènent à ne pas saisir précisément le sens de votre question…
Si vous m'interrogez sur la réforme fiscale, il me semble que nous avons apporté les éléments de réponse. Cette réforme est juste (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC), car elle supprime le bouclier fiscal et modifie l'ISF, ce qui nous permet d'atteindre le double objectif de justice sociale et de justice fiscale. Elle est juste, parce qu'elle respecte à l'engagement que nous avions pris : elle sera neutre pour les finances publiques. Pas un euro ne sera financé par quelqu'un qui n'est actuellement pas assujetti à l'ISF. C'est le deuxième mensonge que j'ai relevé dans votre intervention. Vous me permettrez d'en assurer une promotion qui est, je l'espère, la plus élégante possible !
Quant au domaine judiciaire, vous faites fausse route, car – avec l'enseignement supérieur et la recherche –, c'est, après arbitrage du Président de la République et du Premier ministre, l'un des deux budgets qui sont, non seulement sanctuarisés, mais en augmentation. Le budget de la justice a augmenté de plus de 4 %. Il y a eu des créations de postes de magistrats et de greffiers. Nous allons d'ailleurs examiner, dans le collectif budgétaire, les modalités budgétaires pour accompagner la réforme de la garde à vue.
Il me semble donc utile et peut-être précieux de choisir vos sujets, d'en choisir les angles, mais de ne pas tout mélanger ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Philippe Gosselin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Elle porte sur la réforme de la garde à vue, qui vient précisément d'être évoquée.
Le 1er juin, est entrée en vigueur la loi portant réforme de la garde à vue, votée le 12 avril dernier. Je rappelle que le Conseil constitutionnel avait censuré le régime actuel de garde à vue et donné au législateur jusqu'au 1er juillet pour prévoir une assistance effective de l'avocat. Nous sommes donc dans les temps, et je tenais à le souligner.
Le Parlement, dans son ensemble, a pris ses responsabilités, et le texte a été voté dans des délais très courts. Il permet de garder un équilibre entre droit de la défense et efficacité de l'enquête, dans l'intérêt de la société et des victimes, qu'il est important de ne jamais oublier.
Toutefois, dans son arrêt du 15 avril dernier, la Cour de cassation a fait valoir que l'assistance de l'avocat et le droit à garder le silence devaient entrer en vigueur immédiatement. Elle télescopait ainsi, de façon plus que particulière – c'est le moins que l'on puisse dire –, des arrêts récents, antérieurs, et surtout le vote du Parlement. La Cour s'est à nouveau prononcée, le 31 mai dernier, sur la légalité des gardes à vue antérieures au 15 avril.
Un groupe de suivi a été mis en place et a constaté, lors de sa première réunion, que les parquets et la majorité des barreaux avaient su s'adapter avec efficacité à cette entrée en vigueur précipitée. Sans doute y a-t-il encore quelques ajustements à faire, sans doute y a-t-il des différences entre les grandes agglomérations et les régions, et peut-être faut-il ici rassurer l'ensemble des acteurs, notamment parce que Mme Reding et la Commission européenne veulent faire de nouvelles propositions.
Ma question sera double. Alors que notre loi est désormais effective, pouvez-vous, monsieur le garde des sceaux, nous présenter un premier bilan de l'entrée en vigueur anticipée ? Par ailleurs, pouvez-vous nous éclairer sur les conséquences de l'arrêt de la Cour de cassation de mardi dernier quant aux procédures commencées avant l'entrée en vigueur de la loi ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Comme vous l'avez rappelé à juste titre, monsieur Gosselin, le Parlement a voté, le 12 avril dernier, une loi réformant la garde à vue, à la demande du Conseil constitutionnel, et a respecté un principe fondamental qui est celui de l'équilibre entre deux droits, également garantis par la Constitution : celui des droits de la défense et celui de la sûreté et de l'effectivité de la recherche de la vérité et des délinquants. Ce texte équilibré a été publié au Journal officiel du 15 avril.
Le même jour, l'assemblée plénière de la Cour de cassation, au titre de son contrôle de conventionalité sur la Convention européenne des droits de l'homme de 1950, a déclaré d'application immédiate deux règles : la présence d'un avocat et la notification du droit de garder le silence pour la personne gardée à vue.
Grâce au grand professionnalisme des services de gendarmerie et de police, des magistrats, de l'ensemble des auxiliaires de justice, les choses se sont bien passées. Il n'y a eu que peu d'incidents à la suite de ces décisions de justice.
Depuis le 1er juin, c'est la loi dans sa totalité qui s'applique. Il est trop tôt pour faire un premier bilan. À ce jour, 37 % des personnes gardées à vue ont demandé l'assistance d'un avocat et les avocats ont répondu à cette demande dans 60 % des cas. Ces chiffres sont en constante augmentation.
Le 31 mai dernier, comme vous l'avez indiqué, monsieur le député, la chambre criminelle de la Cour de cassation est revenue sur sa jurisprudence antérieure et a appliqué celle de l'assemblée plénière : elle a décidé que les auditions faites sans notification au silence et sans assistance d'un avocat étaient irrégulières. Cela ne veut pas dire que toutes les procédures sont irrégulières, mais que des nullités pourront être soulevées et qu'il appartiendra à toutes les juridictions d'examiner, dans chaque cas, ce qui a été produit par la garde à vue et devra être sorti de la procédure, et le reste qui pourra être conservé. C'est donc un gros travail pour les juridictions. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Michel Vergnier, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, le 1er mars 2011, je vous faisais part de mon inquiétude concernant le financement des hôpitaux de proximité. Vous m'avez répondu : « Rien de ce que vous dites, absolument rien ne correspond à la réalité et l'hôpital aura l'année prochaine plus de moyens. Le développement des missions d'intérêt général garantira la pérennité de mission de service public de l'hôpital. » Monsieur le ministre, il n'est pas agréable, comme cela devient une habitude, de se faire traiter publiquement de menteur. Je suis dans l'obligation de vous dire que les chiffres que j'ai scrupuleusement vérifiés démentent vos propos. (« Absolument ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Non seulement, pour le Centre hospitalier de Guéret, il n'y a pas d'augmentation des missions d'intérêt général, lesquelles baissent de 182 000 euros, mais les actions de contractualisation diminuent de 319 000 euros. Si j'ajoute à cela une aide diminuée de moitié – 750 000 euros de moins – pour le service de pédiatrie, ce sont bien des années difficiles qui attendent l'hôpital de Guéret.
Son déficit se situera autour de 1,2 million d'euros, en dépit de la bonne décision de réouverture du service de radiothérapie que vous avez prise. Avec le non-remplacement des congés maladie et maternité, les conditions de travail des personnels sont devenues très difficiles et aucune économie ne peut plus être réalisée dans ce domaine.
Il faut donc trouver de l'argent pour l'hôpital public. Entre les avantages exorbitants accordés à ceux qui reçoivent toujours plus et ceux qui n'ont pas les moyens de se faire soigner, il existe des marges de manoeuvre. Si l'on veut que tous les citoyens aient les mêmes droits aux soins en tout point du territoire, il convient de rechercher des coefficients de correction pour certains territoires dont l'activité ne pourra pas compenser la baisse des recettes. Ce problème doit être examiné sérieusement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
Monsieur le député, ce n'est pas parce que votre ton est moins polémique que la dernière fois (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) que vous dites la vérité. Je ne vois pas comment vous pouvez connaître le budget précis de l'hôpital de Guéret aujourd'hui, alors qu'il est fonction de l'activité et que nous ne sommes même pas à la moitié de l'année ! Je ne vois pas comment vous pouvez y parvenir ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je ne vois pas comment vous pouvez le savoir ! En effet, avec la tarification à l'activité, le budget est fonction de l'activité d'un établissement. Or si vous connaissez les résultats sur l'année alors que nous ne sommes qu'au moins juin, c'est que vous êtes devin ! En revanche, si vous cherchez à faire peur, si vous cherchez à inquiéter, je comprends votre discours. Mais, dans ce cas, pourquoi ne rappelez-vous pas que vous n'avez pas voté le PLFSS qui prévoit une augmentation de 2 milliards d'euros pour les hôpitaux français ? Il suffit de connaître précisément ce qui a été voté par le Parlement.
S'agissant des tarifs, il est vrai – et je l'assume – que je les ai diminués en début d'année, parce qu'il y aura une progression de l'activité. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.) J'assume également que les missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation – les fameuses MIGAC, terme technique dont tous ceux qui travaillent dans un hôpital connaissent la signification – nous permettront justement, contrairement aux années précédentes, de débloquer des fonds à la rentrée. Nous pourrons le faire parce qu'il y a une vraie transparence et de la visibilité. Nous sommes dans le cadre d'un service public de proximité. Je tiens à la tarification à l'activité et j'attache beaucoup d'importance aux missions d'intérêt général. Il ne sert à rien d'inquiéter et de chercher à alarmer les personnels.
Je ne connais, en France, aucun hôpital qui a dû être fermé faute de financements. Je ne connais pas non plus d'hôpital, en France, qui aurait été fermé au 30 novembre faute de financements. Je sais cependant que nous devons veiller aux dépenses. Je préfère, en effet, que nous maîtrisions notre avenir, plutôt que de nous voir imposer un jour des réformes, comme c'est le cas dans certains pays européens. L'irresponsabilité, c'est quand on ne décide pas ; la responsabilité, c'est quand on réforme. C'est ce que nous faisons pour préserver le service de santé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe NC.)
La parole est à Mme Fabienne Labrette-Ménager, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Les comportements de consommation des Français se modifient sans cesse en raison de l'évolution des nouvelles technologies d'une part, comme le formidable développement du commerce électronique, et en raison, d'autre part, des évolutions structurelles, avec, notamment, les grands défis énergétiques et le vieillissement de la population. Il est donc essentiel de poursuivre l'adaptation de notre droit de la consommation à ces évolutions.
Le Gouvernement a ainsi souhaité agir pour renforcer les droits et la protection des consommateurs et vous avez présenté, mercredi dernier en conseil des ministres, monsieur le secrétaire d'État, un projet de loi renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs. Au travers de ces mesures, vous prolongez l'action déjà menée par le Gouvernement depuis 2007. Je pense notamment à la loi Chatel de janvier 2008, à la loi pour le pouvoir d'achat de février 2008 et également à la loi de modernisation de l'économie d'août 2008.
Grâce aux mesures prises dans ce projet de loi, vous tentez surtout de répondre aux préoccupations quotidiennes des Français et d'agir sur les principaux secteurs de la vie courante : le logement, la santé, les télécommunications, l'énergie, la grande distribution et les assurances santé. Ces dépenses contraintes pèsent de plus en plus lourd sur le budget des Français. Elles représentent aujourd'hui un tiers de leurs dépenses contre 13 % en 1950.
Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous détailler les objectifs de ce projet de loi et ses principales mesures qui redonneront, nous n'en doutons pas, de la confiance aux consommateurs (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) et qui sont attendues par tous les Français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Je vous en prie, un peu de dignité ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Chère Fabienne Labrette-Ménager, vous avez parfaitement posé la question et vous avez rappelé à juste titre que la protection des consommateurs est une priorité de ce gouvernement. Vous avez évoqué la loi Chatel, la loi pour le pouvoir d'achat et la LME. Le devoir des femmes et des hommes politiques est d'être réactifs. Ils doivent s'adapter aux réalités et aux mutations. Et Dieu sait s'il y a des mutations en matière de consommation ! Permettre à notre droit de la consommation d'évoluer, tel est l'objectif de ce projet.
J'ai voulu appliquer en la matière une méthode un peu nouvelle. En effet, au lieu d'aller chercher des projets dans les tiroirs de l'administration ou de consulter les uns et les autres, j'ai tout simplement demandé à la DGCCRF de décortiquer les 92 500 réclamations des consommateurs concernant ce que vous appelez les dépenses contraintes (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC), mais que je nommerai plutôt les dépenses vitales ou les dépenses essentielles. Ces réclamations nous ont permis de mettre en place vingt-cinq mesures différentes dans onze articles, et qui portent sur des sujets aussi essentiels pour les Français que le logement, l'énergie, la santé ou la téléphonie mobile, avec, pour celle-ci, un dispositif de plus grande transparence et de meilleure mobilité.
Je constate d'ailleurs qu'un certain nombre de ces mesures font beaucoup débat dans le pays depuis que je les ai présentées. La suspension du paiement des factures a été très souvent évoquée par les consommateurs. Nous devons obtenir des réponses sur ce point. Enfin, nous devons veiller à ce que les préjudices cessent le plus rapidement possible. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Vous le voyez, mon objectif est de donner la possibilité au consommateur de reprendre le contrôle de ses dépenses. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, Françoise Olivier-Coupeau aurait eu cinquante-deux ans le 3 juillet. Le sort, la maladie en ont décidé autrement, rompant le fil d'une existence généreusement tournée vers les autres.
Confrontés à une pareille injustice, il ne nous reste d'autre ressource que de saluer le civisme et l'altruisme d'une collègue enlevée trop tôt, et trop vite, à notre affection. Je parle d'affection, car Françoise Olivier-Coupeau faisait partie de ces personnes radieuses qui, où qu'elles se trouvent, ont le don de susciter la sympathie autour d'elles.
Par-delà toutes les divergences en effet, celles et ceux qui ont approché Françoise Olivier-Coupeau ont été frappés par sa vitalité, son charisme, sa force de conviction, et par l'enthousiasme communicatif avec lequel notre collègue défendait ses idées, sans jamais se départir de cet esprit de tolérance et d'ouverture qui lui apporta l'estime de tous.
Titulaire d'une maîtrise de droit public et d'un DEA de droit européen, elle avait cependant gardé le goût des mots simples et des réalités. Françoise Olivier-Coupeau n'a jamais oublié qu'elle avait financé ses études en travaillant comme vendeuse.
Proche de ses concitoyens lorientais, elle a commencé sa vie professionnelle au sein d'une association d'éducation populaire. Dans le milieu très rude et très masculin des marins-pêcheurs, elle mit ses qualités humaines et ses compétences au service d'une cause d'intérêt public : la promotion de la formation continue.
En 1999, elle fut directrice de la communication de la communauté d'agglomération du Pays de Lorient, avant de diriger le service de presse de la région Bretagne, puis d'entrer, comme chargée de mission, au cabinet du président de région.
En 2007, elle se présentait aux élections législatives : sans détenir aucun mandat local, sans autre notoriété que sa réputation de battante, elle est alors élue députée du Morbihan. Dans sa profession de foi, elle se décrivait elle-même comme « une candidate qui se donnera sans compter ». Je peux dire, et nous le savons tous, qu'elle a tenu parole jusqu'au bout. Avec dévouement, avec assiduité, Françoise Olivier-Coupeau s'est consacrée de toutes ses forces à ses responsabilités de députée, refusant même de briguer tout autre mandat.
En seulement quatre ans, elle s'est fait connaître à l'Assemblée pour sa persévérance et pour son efficacité. Précise et concise, elle apportait en séance ce mélange de sérieux et de conviction qui avait assis sa réputation au sein de la commission de la défense nationale et des forces armées, dont elle suivait activement les travaux. Qu'il s'agisse des opérations extérieures de la France, de l'organisation de la gendarmerie ou de la politique à l'égard des anciens combattants, ses questions et ses interventions témoignaient d'une parfaite connaissance des dossiers.
Membre de la délégation de l'Assemblée nationale aux droits des femmes, membre du comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques, elle démontra vite sa capacité à s'investir dans toutes les questions d'intérêt général.
Appréciée pour son sens du dialogue et sa disponibilité, elle présida le groupe d'études sur les langues régionales, puis le groupe d'études sur l'Arctique à partir de 2009.
Françoise Olivier-Coupeau, députée dynamique, souriante et enjouée, avançait avec détermination en toutes circonstances. Alors qu'elle savait, depuis des années, ce qui menaçait sa santé et sa vie, jamais elle ne s'éloigna de son engagement politique ni de son activité parlementaire.
Partagée entre la souffrance et l'espérance, elle a lutté, jusqu'au bout, contre la maladie. Dans ce dernier combat, elle a mobilisé cette solidité, cette combativité et cette ardeur qui faisaient d'elle une députée exemplaire.
À son mari, à ses deux fils, Antoine et Philippe, aux siens, à ses camarades du groupe SRC, j'adresse, au nom de tous les députés de l'Assemblée nationale et en mon nom personnel, mes condoléances attristées.
Françoise Olivier-Coupeau a servi la République avec sincérité et véracité, sans autre souci que l'avenir de ses concitoyens. Nous saluons en elle une élue de la Nation qui a su mériter notre amitié et notre respect.
Monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, je vous cède la parole.
Monsieur Coupeau, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, le 4 mai dernier, Françoise Olivier-Coupeau s'en allait, terrassée à la suite d'un long combat contre le cancer.
Elle a affronté sa maladie avec ténacité et réalisme. Lorsque celle-ci se déclare, en 2005, Françoise ne baisse pas les bras, elle puise au contraire dans cette lutte la force de vivre ses engagements avec encore plus de détermination. Elle est ainsi élue pour la première fois députée du Morbihan en juin 2007.
Si sa vie est un exemple pour nous tous à bien des égards, elle représente aussi un espoir et une leçon pour tous nos compatriotes qui connaissent la maladie, la fatigue qu'elle engendre, et qui savent la force de caractère nécessaire pour la surmonter.
Cette maladie, elle ne l'a jamais cachée ni à ses collègues, ni aux habitants de sa circonscription. Elle savait l'issue fatale inévitable et cette pensée lui faisait mordre la vie à pleines dents. Sa disparition nous a privés d'une élue efficace, dynamique et enthousiaste.
Militante du parti socialiste depuis 1977, elle a longtemps travaillé à la communication de la ville de Lorient puis de la région Bretagne qu'elle chérissait tant. Auprès de Jean-Yves Le Drian, elle participe à l'action politique durant de nombreuses années avant de sauter le pas et d'être candidate à l'élection législative.
Après une campagne qu'elle qualifiera de passionnante, Françoise embrasse la carrière parlementaire avec un sérieux et un entrain qui font honneur à cette assemblée.
Je salue l'adversaire sincère et pugnace, toujours courtoise.
Membre de la commission de la défense, elle est de toutes les réunions, de tous les projets. Rapporteure de la mission d'évaluation et de contrôle sur le coût des opérations militaires extérieures de notre pays, elle se rendra notamment à Kaboul pour un voyage d'étude auprès des forces françaises. Elle s'est également battue pour la revalorisation de la gendarmerie.
Malgré les traitements qui, parfois, l'empêchaient de se consacrer entièrement à sa mission, elle vivait pleinement son mandat, dans l'hémicycle comme en circonscription, avec beaucoup de franchise et en affichant constamment un sourire communicatif.
Avec la disparition de Françoise Olivier-Coupeau, la République perd une représentante optimiste, travailleuse, persuasive et généreuse. Son combat et ses idées survivent à travers nos mémoires.
À ses collègues du groupe socialiste, radical et citoyen, à ses collègues de la commission de la défense, à sa famille et à ses proches, à son mari, Laurent, à ses fils, Philippe et Antoine, permettez-moi d'adresser au nom du Gouvernement mes très sincères condoléances.
(Mmes et MM. les députés, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, observent une minute de silence.)
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de M. Marc Laffineur.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2011 (nos 3406, 3501 et 3503).
La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les députés, je tiens à remercier les nombreux intervenants qui se sont exprimés dans la discussion générale sur ce projet de loi de finances rectificative et, plus particulièrement, sur la réforme de la fiscalité du patrimoine.
Encore une fois, cette réforme marque une étape importante dans la poursuite des engagements du Gouvernement. Réformer la fiscalité du patrimoine n'était pas une mission facile, mais nous sommes aujourd'hui parvenus à un texte équilibré, qui est l'aboutissement d'un travail commun mené avec les parlementaires de la majorité – je tiens encore à les en remercier – et le fruit d'une très large consultation. De façon générale, j'ai noté de nombreux soutiens, essentiellement du côté de la majorité, qui me vont droit au coeur et nous encouragent à poursuivre sur la voie des réformes engagées au cours de la législature.
Monsieur le rapporteur général, cher Gilles Carrez, votre soutien est essentiel et fut précieux au cours de ces mois de discussion, de réflexion, de préparation. Vous avez su trouver les mots pour résumer cette réforme : elle est effectivement équilibrée, cohérente et juste. Comme MM. de Courson, Chartier et Piron, vous avez salué l'initiative prise par le Gouvernement de constituer un groupe de travail et la très bonne collaboration qui a eu lieu en amont de cette réforme. Je vous retourne le compliment, car c'est aussi grâce à votre implication que nous avons pu parvenir à un texte équilibré, alors que, comme l'ont souligné MM. Chartier et Diefenbacher, les obstacles étaient nombreux et qu'il fallait du courage pour réformer un pan important de notre fiscalité un an avant l'élection présidentielle. Cette réforme, je le répète, est l'aboutissement d'un travail collectif, et je tiens à remercier tous ceux qui y ont participé.
Je remercie également Mmes Branget et Grosskost, ainsi que MM. Bouvard, Mariton, Censi, Vandewalle et Giscard d'Estaing, qui ont défendu la légitimité de cette réforme, qui vise à pallier les défauts de l'ISF, et souligné ses qualités : elle est simple, compréhensible par tous, juste – nous l'avons démontré – et, j'en suis convaincu, efficace économiquement.
J'ai noté que, pour MM de Courson et Mariton, il ne s'agissait pas du « grand soir » de la réforme de la fiscalité et que la France ne pourrait sans doute pas s'exonérer d'une suppression de l'ISF. Mais j'ai également retenu qu'ils reconnaissaient que la méthode était judicieuse et que la suppression du bouclier fiscal ainsi que la transformation de l'ISF en vue de le rendre plus compétitif sur le plan économique était une étape importante de la réforme en profondeur de notre fiscalité.
Du côté de l'opposition, j'ai, sans surprise, plutôt entendu des critiques portant sur le caractère injuste de la réforme ou l'insuffisance de son financement. Je remarque, monsieur le président de la commission des finances, que vous insistez tout particulièrement sur ce dernier point, et je vais y revenir plus en détail. On peut, bien entendu, avoir une opinion différente de celle du Gouvernement, mais, si j'entends des critiques de notre stratégie, je perçois très peu de propositions concrètes. De fait, le seul programme que j'entends exprimé sur les bancs de l'opposition, ce sont les hausses généralisées d'impôts,…
..pudiquement habillées par l'idée de « réhabiliter l'impôt », ce qui, rue de Solferino, signifie matraquer fiscalement les Français. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Or, je le redis, la hausse des impôts n'est pas une solution crédible pour notre pays. Au passage, je me permets de rappeler – puisqu'il faut lutter contre cette maladie chronique, l'amnésie, dont souffre la gauche de cet hémicycle –…
…que, lors de la grande crise, le Gouvernement, face à l'effondrement des recettes, a fait le choix d'augmenter la dépense publique, à travers le plan de relance, d'investir, avec le grand emprunt, et, surtout, de ne pas augmenter les impôts.
Nous tiendrons ce cap jusqu'à la fin de la législature, en privilégiant la réduction de la dépense plutôt que l'augmentation des prélèvements obligatoires. Il est tellement facile d'avoir pour ligne de conduite l'augmentation des impôts.
Nous ne sommes pas d'accord sur ce point : vous ne parviendrez pas à nous convaincre de la nécessité d'augmenter les impôts des Français – nous y sommes résolument hostiles –…
…et je désespère de vous convaincre de ne pas vous enfermer dans cette impasse.
Cette réforme est insuffisamment financée, affirment notamment M. Cahuzac, M. de Rugy, M. Sandrier, M. Garrigue, M. Eckert et M. Goua.
Monsieur Cahuzac, vous considérez, et j'en suis navré, que ce projet de loi ne respecte pas la loi organique qui prévoit que le surplus de recettes doit être affecté au désendettement. Ce n'est pas la position du Gouvernement. La réforme dégagera, en période de croisière, un surcroît de recettes de l'ordre de 200 millions d'euros par an, qui sera bien affecté au désendettement. Pour apprécier le respect de la condition fixée dans la loi organique, il faut prendre cette réforme dans sa globalité et ne pas retenir, comme vous le faites, chaque mesure individuellement.
Comme nombre de vos collègues de l'opposition – M. de Rugy, M. Sandrier, M. Garrigue, M. Eckert et M. Goua –, vous contestez également l'équilibre de cette réforme. Vous considérez que l'impact de la cellule de régularisation n'a pas été pris en compte dans l'appréciation du coût de la réforme de l'ISF. C'est faux. Si nous ne pouvons pas prendre, dans le produit attendu de l'ISF, la totalité des sommes perçues à ce titre dans le cadre de la cellule de régularisation, qui ne sont pas des recettes pérennes, nous avons toutefois tenu compte, dans nos chiffrages, des effets futurs de cette cellule sur l'ISF, à hauteur de 100 millions d'euros. Je précise, en outre, que 300 millions d'euros seront affectés au financement de la réforme pour l'exercice 2011.
Vous vous interrogez également sur les mesures de financement, qui ne seraient pas suffisantes. Sur ce point, le Gouvernement est absolument transparent : tous les chiffres, toutes les méthodes de chiffrage, figurent de manière détaillée dans les évaluations préalables. Le rapport est d'ailleurs très précis sur ce point. Vous constaterez que nous nous sommes fondés sur des hypothèses prudentes. Par exemple, pour la prévision du produit de l'ISF de 2012 – qui détermine le manque à financer de la réforme –, nous avons retenu un produit en hausse de 10 %, alors que la hausse n'était que de 5 % l'année précédente, précisément pour conserver un matelas de sécurité incontestable.
Cette réforme est injuste, avez-vous également affirmé : ce serait un « cadeau fait aux riches ». Je n'aime pas cette expression, qui a un parfum de lutte des classes.
Les plus fortunés, ceux qui ont la chance de posséder un patrimoine, grâce à leur travail ou à un héritage,…
…financent les politiques publiques par leurs contributions, mais aussi l'activité économique par l'investissement, qui crée des emplois.
M. Emmanuelli, M. de Rugy, Mme Filippetti, M. Balligand, M. Charasse, M. Carcenac, M. Durand : vous étiez nombreux, hier soir, sur les bancs de l'opposition, à entonner la même rengaine du cadeau fait aux riches. Il vous faudra une grande force de conviction pour expliquer qu'en supprimant le bouclier fiscal…
…ou en compensant l'abaissement de la fiscalité sur le stock de patrimoine par un alourdissement de sa taxation lors de sa transmission…
…est un cadeau fait aux riches – que nous qualifierons, quant à nous, de fortunés. J'ajoute que ce sont les mêmes, assujettis à l'ISF, qui financeront cette réforme équilibrée. C'est la raison pour laquelle j'ai dit tout à l'heure que la savonnette vous glisserait des mains : vous n'avez aucune prise.
Je ne peux accepter cette manipulation grossière, qui consiste à regarder les moins sans regarder les plus. Cette réforme est un paquet global.
J'essaie de trouver des arguments pour que vous nous accompagniez sur ce chemin, et je ne comprends pas que vous vous arrêtiez à mi-parcours. Vous vouliez la suppression du bouclier ? Vous l'avez, et, maintenant, vous la contestez. Où est la cohérence ?
Vous souhaitiez améliorer notre compétitivité économique, mais vous refusez de reconnaître les efforts que le Gouvernement fait en ce sens en modifiant l'assiette de l'ISF.
Au final, vous ne faites aucune contre-proposition – comme vous n'êtes pas avares de critiques, vous me permettrez cette formule élégante –, et c'est peut-être le principal reproche que le Gouvernement a à adresser à l'opposition.
Un autre débat nous éloigne de l'esprit de ce collectif budgétaire dominé par la réforme fiscale : la création d'une tranche supplémentaire à l'impôt sur le revenu. M. Piron, M. de Courson et M. Vigier sont revenus sur ce sujet. Ils connaissent ma position : le Gouvernement ne souhaite pas que cette contribution prenne la forme d'une nouvelle tranche d'imposition pour les hauts revenus.
Tout d'abord, notre ligne directrice en matière de gestion des finances publiques et de réduction des déficits, est précisément de ne pas augmenter les impôts. Même au plus fort de la crise, nous n'avons touché ni à la TVA, ni à l'impôt sur le revenu, ni à l'impôt sur les sociétés, ni aux prélèvements sociaux – CSG et CRDS – pour gérer la question de la Caisse d'amortissement de la dette sociale. Nous avons même fait des modifications institutionnelles afin d'atteindre cet objectif. Et nous tiendrons ce cap, puisque nous nous efforcerons de réduire les dépenses.
Dès lors, la proposition de créer une tranche supérieure à l'impôt sur le revenu, non seulement ne relève pas de la réforme de la fiscalité du patrimoine – elle doit plutôt s'inscrire dans une réflexion plus large sur le coût du travail –, mais est contraire à l'objectif du Gouvernement.
De surcroît, elle rate sa cible. Je ne doute pas de la sincérité de la démarche de ses auteurs et je salue la force des convictions de M. Piron, qui agit avec constance dans ce domaine, ainsi que de ses coreligionnaires,…
…mais le Gouvernement ne fait pas sienne leur conviction. Ainsi que je l'indiquais à l'instant, la création d'une tranche marginale n'atteindrait pas sa cible, puisqu'elle toucherait les 300 000 personnes qui payent 14 des 50 milliards que rapporte l'impôt sur le revenu et qui portent ainsi près de 40 % de l'effort collectif en la matière. J'ajoute que les deux tiers des contribuables qui seraient concernés par cette tranche marginale ne sont pas assujettis à l'ISF : ce sont majoritairement des cadres supérieurs, qui ne sont pas détenteurs d'un patrimoine et n'auraient aucune chance d'en détenir un avant de nombreuses années si la mesure proposée était adoptée.
Les trois raisons que je viens d'évoquer me semblent suffisamment fortes pour que nous nous éloignions de cette proposition, tout en respectant la conviction de ses auteurs.
Par ailleurs, je souhaiterais profiter de cette tribune pour répondre aux interventions de MM. Lurel et Saddier qui, chacun dans son domaine, ont évoqué des sujets particuliers.
M. Lurel a évoqué l'effet du rabot des niches fiscales sur le logement social. Lors de l'examen du projet de loi de finances, nous avions pris l'engagement de faire participer nos compatriotes ultramarins à la réduction des niches fiscales à un niveau acceptable pour eux. Toutefois, il n'a jamais été question de remettre en cause le dispositif dérogatoire au droit commun que constitue la défiscalisation, destinée à financer l'économie dans les territoires d'outre-mer, qui ont en moyenne trois plus de difficultés que la métropole : trois fois plus de retard en matière de logement social, un chômage trois fois plus élevé et une situation spécifique en matière de contrats aidés.
C'est la raison pour laquelle nous avions sorti le logement social du dispositif. Or, le décret d'application a excédé l'intention du législateur. Le Gouvernement s'engage donc à présenter un amendement afin de respecter l'engagement du Président de la République et l'esprit des mesures que nous avions prises dans la loi de finances pour 2011. Je précise que nous avancerons également sur le maintien de la défiscalisation dans un certain nombre de domaines, mais j'aurai l'occasion d'évoquer ce sujet dans les semaines qui viennent.
Monsieur Saddier, vous avez longuement évoqué la situation des travailleurs frontaliers suisses et leur rôle essentiel dans l'économie de la Savoie, du Jura et du Doubs. Je veux vous redire combien le Gouvernement est attentif à leur situation.
Le dispositif adopté en loi de finances rectificative pour 2010, élaboré conjointement avec les associations représentant ces travailleurs, a produit des effets non anticipés. Nous devons en effet déplorer, sur ce point, comme sur tant d'autres, une certaine instabilité, qu'il faut corriger. Je souhaite donc que les propositions gouvernementales, si elles vous agréent, s'inscrivent dans la durée, afin de rassurer les personnes concernées.
Le Gouvernement a travaillé, dès le mois de janvier, avec l'ensemble des élus et des associations des départements concernés pour élaborer une nouvelle forme de taxation des pensions en capital qui puisse s'appliquer à l'ensemble des pensions de ce type perçues par nos concitoyens, quelle qu'en soit l'origine, tout en répondant aux enjeux spécifiques franco-suisses.
L'amendement n° 1518 déposé par le Gouvernement répond à cette exigence par un dispositif équilibré : par l'application combinée d'une taxation au taux de 7,5 % et de l'abattement de 10% applicable aux pensions, les frontaliers auront la garantie de payer, dans tous les cas, un impôt inférieur à celui qu'ils auraient payé s'ils étaient taxés en Suisse. C'était bien le sens de l'engagement pris par le Gouvernement. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Pour mémoire, je rappellerai qu'en ma qualité de ministre du budget, je me suis engagé, au nom du Gouvernement, à mettre en place un groupe de travail qui nous permettra, au moment de l'examen de la loi de finances pour 2012, de débattre sur la problématique de la contribution sur les revenus exceptionnels.
D'autres sujets ont été abordés, notamment celui du Mediator. Je vous remercie, monsieur Cherpion, et avec vous la commission des affaires sociales, qui avez approuvé la démarche du Gouvernement, qui garantit une indemnisation rapide et efficace des victimes sans que le contribuable paie à la place du laboratoire. Vous avez souligné les améliorations apportées aux procédures habituelles qui vont en ce sens.
Monsieur Bapt, j'ai pris note de votre intervention ; Xavier Bertrand aura l'occasion de débattre avec vous du dispositif évoqué et des amendements que vous avez déposés.
Je sais que, hier soir, dans cet hémicycle, bien d'autres sujets ont été évoqués, sur lesquels nous aurons l'occasion de débattre, puisque de nombreux amendements ont été déposés. J'ai noté vos souhaits et j'en partage certains, comme ceux de M. Lamour et de M. Giscard d'Estaing sur le maintien de l'exclusion des oeuvres d'art de l'assiette de l'ISF. Vous connaissez la position du Gouvernement sur ce point que nous évoquerons dans quelques instants.
Sur d'autres, je suis plus réservé. Ainsi, monsieur de Courson, vous comprendrez que je ne puisse approuver votre proposition consistant à réintroduire un plafonnement de l'ISF : toute notre réforme a justement été construite pour supprimer toute forme de plafonnement, en travaillant sur les tranches et sur le juste calcul des taux. Je me permets donc de vous dire, par anticipation et à regret, que je serai défavorable à la restauration d'un plafonnement.
Je me suis efforcé d'être le plus sincère, le plus objectif et le plus précis possible, et je vous remercie pour la qualité du débat que nous avons eu hier soir. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
M. le ministre a terminé son intervention en disant qu'il s'était efforcé d'être « sincère et objectif », ce qui tient de l'incantation.
Mon cher collègue, vous avez un sacré culot de prétendre connaître la conclusion de mon propos, alors que je viens à peine de prendre la parole ! Cela augure mal du débat !
La bataille contre l'enfumage est engagée, et quand le ministre parle d'un texte simple et compréhensible par tous, je dois dire que ce n'est évidemment pas vrai ! Or, pour un bon déroulement de nos débats, il faut la vérité et la transparence – qui nous font toutes deux défaut !
Afin d'éclairer notre débat, j'aimerais que vous répondiez à deux questions, monsieur le ministre. Premièrement, je vous ai expliqué hier que Mme Bettencourt paie 40 millions d'euros d'impôts cette année, et qu'elle n'en paiera plus que 10 millions d'euros l'année prochaine. Est-ce vrai ou non ? En fonction de la réponse à cette question, vous dites ou vous ne dites pas la vérité !
Deuxièmement, je vais faire un peu de pédagogie politique, à l'intention des journalistes et des personnes qui assistent à nos débats depuis les tribunes – bref, à l'intention de l'opinion publique. Même si vous n'êtes pas sincère, il est une chose que l'on ne peut vous nier, je veux parler de votre grande intelligence (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP), une intelligence diabolique, toujours habillée d'un sourire sympathique et de connivence. Est-il vrai, monsieur le ministre, que le Gouvernement va demander aux riches de mettre 600 millions d'euros sur la table, tandis qu'il leur donnera 1,8 milliard d'euros sous la table ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Vous conviendrez, monsieur Brard, que votre intervention n'avait rien à voir avec un rappel au règlement.
Monsieur Brard, je vous remercie pour votre compliment, puisque je veux croire que c'en est un.
Vous avez raison de dire que je m'adresse à vous avec le sourire et avec sincérité. À ce propos, je regrette de ne pas avoir répondu, lorsque j'étais à la tribune, à votre défense de la motion de procédure hier soir. Puisque nous sommes en désaccord sur tout, il est évident que, sur cette question comme sur les autres, je ne partage pas votre point de vue. Je tiens cependant à vous le dire expressément afin que cela soit inscrit au Journal officiel.
Quoi que vous en disiez, monsieur Brard, il est possible de faire une présentation très simple de cette réforme. Le bouclier est supprimé ; l'ISF, qui comprenait six tranches avec des taux proportionnels, n'en compte plus que deux avec des taux progressifs et proportionnels. La première tranche, taxée à 0,25 %, porte sur les patrimoines situés entre 1,3 million d'euros et 3 millions d'euros ; au-delà, la deuxième tranche est taxée à 0,5%.
Le reste est financé de manière équilibrée, par le transfert d'une imposition qui pesait jusqu'alors sur le stock de patrimoine sur la transmission de celui-ci, par l'impôt sur les successions.
Vous reconnaîtrez avec moi qu'à l'échelle d'une vie, ce sont bien les mêmes qui paient, et vous ne pourrez donc pas dire, en conscience, que nous faisons un cadeau aux riches.
J'appelle maintenant les articles du projet de loi de finances rectificative pour 2011.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
Monsieur le président, conformément à la tradition, avant que ne s'engage le débat sur les articles, je souhaite dire un mot de la manière dont j'ai appliqué l'article 40 de la Constitution et les dispositions organiques relatives aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale aux 598 amendements originaux – 1 537 en comptant les amendements identiques – déposés en séance.
Une soixantaine d'amendements ont été déclarés irrecevables, soit 10% environ des amendements originaux, contre 15% lors de l'examen du dernier collectif budgétaire. Comme vous le savez, les amendements créant une perte de recettes pour les administrations publiques doivent être gagés. Les amendements ne comportant pas de gage – fort peu nombreux, mais cependant toujours présents, y compris sous la signature de parlementaires expérimentés – ont donc été déclarés irrecevables. Je précise à cet égard qu'un sous-amendement étendant la perte de recettes prévue par l'amendement auquel il se rapporte doit lui-même être gagé : le gage prévu dans le dispositif initial couvre la perte de recettes provoquée par l'amendement et uniquement cette perte de recettes.
Ont ainsi été déclarés irrecevables plusieurs amendements non gagés, proposés par M. Maillé et M. de Courson par exemple, tendant à accorder aux personnes physiques non domiciliées en France la possibilité d'opter pour un régime fiscal potentiellement plus favorable en matière de cession de métaux précieux, bijoux et objets d'art. Ces amendements auraient dû être gagés afin de couvrir la perte de recettes fiscales subséquente. Néanmoins, conformément à la tradition établie par mes prédécesseurs, j'ai fait preuve d'une grande souplesse en veillant à ce que soient réécrits des gages incorrectement formulés.
En revanche, les amendements créant ou aggravant une charge publique ont dû être censurés. Au-delà de l'intérêt qu'ils pouvaient par ailleurs présenter, j'ai donc dû déclarer irrecevables plusieurs amendements, notamment présentés par M. Bapt et ses collègues, tendant à étendre les possibilités d'indemnisation prévues à l'article 22 du collectif budgétaire. Je l'ai fait sans plaisir, croyez-le bien, mais l'article 40 le commandait.
Certains amendements proposaient ainsi d'enrichir au-delà du seul benfluorex la liste des produits dont la prise aurait engendré des déficits fonctionnels susceptibles d'ouvrir un droit à indemnisation. D'autres envisageaient d'étendre, au-delà des seuls « déficits fonctionnels », le champ des dommages imputables à la prise de benfluorex et pouvant, à ce titre, donner lieu à une indemnisation. D'autres, enfin, tendaient à supprimer le délai de prescription décennal qui constitue la règle de droit commun en matière de responsabilité civile.
Je me permets en outre de rappeler qu'en matière de charges, la lettre de l'article 40 est sans ambiguïté : il est rigoureusement impossible de compenser la création ou l'aggravation d'une charge par la création ou la majoration à due concurrence d'une recette. Tout « gage de charge » est non seulement inutile, mais prohibé.
Enfin, je me suis efforcé de faire respecter le domaine des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale. Ainsi, la moitié des amendements irrecevables ont été jugés comme tels car leurs dispositions n'avaient pas leur place en loi de finances et constituaient à ce titre des « cavaliers budgétaires ». Parmi eux figuraient des amendements proposant de plafonner les rémunérations des mandataires sociaux et des traders, ou qui encadraient l'activité d'achat-vente de métaux ferreux et non ferreux – des amendements fort nombreux et provenant, de manière très homogène, de l'ensemble de l'hémicycle – en complétant les dispositions afférentes figurant dans divers codes, notamment le code de commerce et le code monétaire et financier.
Certains amendements avaient, par ailleurs, un lien trop lâche avec le domaine des lois de finances pour être jugés recevables. Tel fut le cas d'un amendement de M. Tian proposant de modifier le régime des sociétés de domiciliation. Si l'exposé sommaire indiquait qu'une telle mesure aurait permis de lutter plus efficacement contre la fraude fiscale et sociale, ce lien était trop indirect pour emporter la recevabilité de l'amendement.
D'autres amendements, proposés notamment par Mme de La Raudière, envisageaient d'étendre le champ des exonérations de cotisations sociales prévues au bénéfice des « jeunes entreprises innovantes ». Or, cette perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée par le budget de l'État. Si certains peuvent juger regrettable le vote en loi de finances initiale pour 2011 de la suppression de l'avantage fiscal consenti aux jeunes entreprises, ce n'est, en tout état de cause, pas par le biais d'un tel amendement que nous pourrions revenir en arrière.
Ces amendements étaient irrecevables, quel que soit le point de vue adopté. Du point de vue de la charge : en étendant la compensation accordée par l'État, ils aggravaient une charge publique et entraient donc en contradiction avec l'article 40 ; du point de vue de la perte de recettes : provoquée par l'extension d'une exonération de cotisations sociales, cette perte de recettes était supportée par les seuls organismes de sécurité sociale ; enfin, une telle disposition n'ayant aucun effet sur l'équilibre du budget de l'État, elle ne relève donc pas du domaine des lois de finances et constitue alors un « cavalier budgétaire ».
Un tel cas est symptomatique de la double et forte contrainte qui pèse sur l'initiative parlementaire, les amendements devant respecter à la fois les dispositions constitutionnelles prévues à l'article 40 et les dispositions des lois organiques relatives aux lois de finances et des lois organiques relatives aux lois de financement de sécurité sociale.
Au total, je me suis efforcé d'appliquer l'article 40 avec le plus de souplesse et de discernement possible – sous votre surveillance, mes chers collègues. Certes, une soixantaine d'amendements ont été déclarés irrecevables. Toutefois, il reste encore plus de 530 amendements originaux en discussion – 1 477 en comptant les identiques – qui nous permettront, je l'espère, d'avoir un débat dense et nourri.
Monsieur le ministre, vous n'avez toujours pas répondu à ma question, mais je vous tiens au mollet comme un pit-bull, et je ne vous lâcherai plus ! Oui ou non, madame Bettencourt a-t-elle payé jusqu'à présent 40 millions d'euros d'impôt, et va-t-elle payer seulement 10 millions d'euros à partir de maintenant ?
C'est simple, c'est de la pédagogie politique ! J'attends une réponse de votre part, monsieur le ministre, pour que le masque soit arraché et que, derrière votre perpétuel sourire, nos compatriotes voient la réalité de votre politique !
Vous qui avez été maire de Montreuil, monsieur Brard, vous n'êtes pas sans savoir que les molossoïdes doivent être tenus en laisse et porter une muselière ! Je vous remercie donc de faire en sorte que mes mollets soient épargnés ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Ensuite, n'attendez pas du ministre qu'il lève le secret fiscal pour quiconque…
Non, je pense que vous n'aimeriez pas que le détenteur d'une autorité publique dévoile des informations au mépris de la protection d'une liberté publique individuelle essentielle.
Pour le reste, il est vrai qu'une fausse information, que vous vous employez à relayer, a été diffusée. Selon cette rumeur, ce serait « fromage et dessert » la même année, c'est-à-dire l'application des taux réduits, mais la mise en oeuvre intégrale du bouclier sur les revenus avec le taux de l'année suivante. C'est faux : la seule mesure qui s'applique pour cette année est la suppression de la première tranche, tout le reste, notamment la suppression du bouclier, ayant vocation à s'appliquer avec les nouveaux taux. Ne colportez donc pas de contrevérités, monsieur Brard !
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous abordons donc la réforme de la fiscalité sur le patrimoine. Depuis la mise en place, en 1981, de l'impôt sur les grandes fortunes, le contexte économique et social a bien changé.
D'abord, les grandes fortunes ont presque toutes quitté notre pays pour des pays limitrophes, qu'il s'agisse de la Belgique, de la Suisse ou encore de la Grande-Bretagne. Par ailleurs, le passage de l'impôt sur les grandes fortunes à l'ISF s'est traduit par l'instauration d'un impôt sur les économies et le logement des Français, en particulier sur la résidence principale. Voilà la réalité !
Depuis 2007, nous sommes un certain nombre à défendre l'exclusion de la résidence principale de l'assiette de l'ISF, en tant que facteur d'équité fiscale.
Depuis 2007, on nous dit d'attendre qu'ait lieu une réforme profonde. Eh bien, monsieur le ministre, au moment où le bouclier fiscal est supprimé, mais pas l'ISF, je vous dis que le compte n'y est pas !
Je regrette pour ma part – et nous sommes un certain nombre dans ce cas – que, alors que partout en Europe les gouvernements, de droite comme de gauche, ont supprimé l'impôt sur le patrimoine, ce qui est un facteur de relance de l'économie par l'investissement et donc de compétitivité, nous conservions dans notre pays cet impôt rétrograde qui nuit à la compétitivité.
Or que signifie aujourd'hui le fait d'être propriétaire de son logement ?
Pour un certain nombre de personnes ayant des revenus moyens, c'est la garantie d'avoir moins de charges au moment de la retraite, c'est-à-dire quand ils auront aussi moins de revenus.
Au moment où, dans un souci d'équité fiscale, vous nous dites à juste titre que les oeuvres d'art ne doivent pas entrer dans l'assiette de l'ISF parce qu'elles ne produisent pas de revenus,…
…les résidences principales, qui ne produisent pas non plus de revenus, doivent subir le même sort et ne pas être englobées dans l'assiette. L'aggravation de la fiscalité sur le flux est une sorte de double peine.
Je rappelle aux orateurs inscrits sur l'article, qui sont nombreux, que les interventions sont limitées à deux minutes.
La parole est à M. Jacques Domergue.
J'aborderai essentiellement le problème des oeuvres d'art, parce que le dépôt d'un amendement déposé a ouvert un débat à mes yeux légitime. Le fait de posséder pour plusieurs millions d'euros d'oeuvres d'art sans être assujetti à l'ISF ou sans avoir à payer d'impôts sur des plus-values pourtant considérables suscite légitimement le débat.
Je comprends tout à fait l'esprit de l'amendement qui a été déposé. Alors que l'on entre dans une période de réforme fiscale, il faut être extrêmement vigilant sur l'assiette de l'impôt et sur les recettes potentielles.
J'ai entendu les arguments, notamment ceux des acteurs du marché, des lobbyistes, ainsi que de certains ministres. Tous évoquent de concert le fait que, si l'on se mettait à taxer les oeuvres d'art, il y aurait un effondrement du marché,…
…que cela entraverait la créativité culturelle et que l'on aboutirait à une véritable aberration sur le plan culturel et économique.
Quant à moi, je serai plus mesuré car l'aberration réside peut-être aussi dans le fait que certaines oeuvres d'art se vendent aujourd'hui plusieurs millions, voire dizaines de millions d'euros aux enchères de par le monde, notamment en France, alors qu'à côté de cela certains artistes ont du mal à vivre.
L'aberration, c'est aussi la spéculation. Celle-ci est réelle et il ne faut pas la négliger. Elle ne profite finalement qu'à une poignée de collectionneurs, de marchands ou de commissaires-priseurs.
L'aberration, c'est qu'aujourd'hui un artiste qui veut exposer dans une galerie doit donner 50 %, voire plus, sur le produit de sa création.
L'aberration, c'est encore que les commissaires-priseurs prélèvent parfois 35 % à 40 % de la valeur d'un objet…
Ces aberrations, et j'en termine, si vous le permettez, doivent également nous entraîner à une réflexion sur le marché de l'art. Quelle est la place de l'artiste vivant, qui contribue pleinement au rayonnement culturel de notre pays ?
Je termine sur une idée qui mérite tout de même d'être avancée dans le débat.
La sanctuarisation sur le plan fiscal des oeuvres d'artistes vivants ou morts, par exemple sur une période de vingt ans, peut se concevoir. Mais on ne peut pas considérer de la même façon le problème des oeuvres d'art qui sont la propriété de certains collectionneurs qui bénéficient d'une exonération de plus-value…
…à partir du moment où elles sont détenues depuis plus de douze ans. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Vous essayez de tirer prétexte de la suppression du bouclier fiscal pour proposer un nouvel allégement de la fiscalité des contribuables les plus aisés dans des proportions considérables et scandaleuses.
Dans un premier temps, vous nous proposez de relever le seuil d'assujettissement de 800 000 euros à 1,3 million d'euros au motif de l'augmentation de la valeur de la résidence principale. Cet argument n'a que l'apparence du bon sens car la valeur de la résidence principale ne représente en réalité qu'à peine un tiers du patrimoine des quelque 300 000 foyers que vous exonérez d'ISF d'un trait de plume.
Second étage de la fusée, la suppression du barème progressif au profit de deux barèmes ridiculement bas. Cette révision du barème va se solder par la division par deux ou trois du montant de l'ISF acquitté par les plus fortunés. Cette réforme ne vise au fond qu'à étendre le bénéfice du bouclier fiscal à l'ensemble des millionnaires en euros, là où seuls 40 % pouvaient jusqu'ici en bénéficier. Ceux dont le patrimoine excède 17 millions d'euros pourront d'ailleurs continuer dans les faits à bénéficier des mêmes réductions d'impôts qu'avec le bouclier fiscal.
Quant aux fameuses compensations que vous tentez de mettre en avant, elles sont pour l'essentiel aléatoires, les autres étant de peu d'effet sur les plus riches. Vous faites donc un cadeau de 1,85 milliard aux 250 000 foyers les plus riches. Dès lors, il est inadmissible d'oser encore affirmer que votre réforme est juste et équilibrée. Les députés communistes, républicains et du parti de gauche voteront en conséquence pour la suppression de ce dispositif surréaliste, qui pousse à l'extrême votre parti pris en faveur de l'injustice fiscale la plus criante.
Le groupe Nouveau Centre est favorable à cet article, sous certaines réserves. La première, monsieur le ministre, concerne le problème du plafonnement. Vous n'avez pas à être désolé de ne pas être d'accord avec mon amendement. Le problème n'est pas là ; il est d'ordre constitutionnel. Au regard de l'article 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, interprété dans sa décision de 2007 par le Conseil constitutionnel, on ne peut pas prélever plus que votre revenu au titre de l'ISF, auquel s'ajoute l'IR et éventuellement d'autres impôts.
Je me tue à vous expliquer que, même en ayant réduit à 0,5 % le taux marginal de la seconde tranche du barème, il se trouvera des situations où ce sera encore le cas. À partir de là, je suis tout à fait d'accord pour dire que l'on peut discuter, non pas sur le principe du plafonnement, mais sur le taux, qui peut être établi à 70 %, 80 % ou encore 90 %. Mais, encore une fois, vous prenez un vrai risque constitutionnel. Vous savez que l'opposition va saisir le Conseil constitutionnel. Elle ne manquera pas de soulever ce problème. Je le répète donc : c'est là une première erreur.
Deuxièmement, il faut aller plus loin que ce que vous proposez – on en parlera tout à l'heure – sur l'amélioration de l'accès aux fonds propres pour les petites et moyennes entreprises, même si vous vous êtes montré ouvert à plusieurs amendements de la commission des finances.
Sur les oeuvres d'art, je suis au regret de dire à ceux de nos collègues qui ont voté cette disposition qu'elle est totalement inapplicable. Arrêtons donc de faire croire le contraire ! Car comment ferait-on, mes chers collègues ? Va-t-on payer une police des oeuvres d'art pour les inventorier, les évaluer et les contrôler dans les domiciles particuliers ?
Je croyais que nous étions pour une société de liberté !
Voilà les quelques réserves que j'avais à émettre, tout en précisant que, sur le dernier point, le Gouvernement a raison.
Ce que vient de dire notre collègue Charles-Amédée de Courson est fort intéressant car ce qu'il souhaite qu'on ne fasse pas pour les oeuvres d'art, il est possible de le faire pour les appareils de télévision !
Vos états d'âme subsidiaires ne nous intéressent pas !
Or je vois bien qui vous voulez protéger.
…qui trouvent un plaisir secret dans la contemplation solitaire d'oeuvres d'art qu'ils veulent garder pour eux tout seuls ! (Sourires.)
On nous dit que, si jamais l'on taxe les oeuvres d'art – et je précise que nous ne proposons pas de changement quant au caractère déclaratif –, celles-ci vont partir à l'étranger
Mais, comme dirait Jérôme Cahuzac, après tout, si elles sont destinées à une jouissance solitaire, que ce soit sur le territoire national ou à l'étranger, quelle différence ? Vous savez bien, mes chers collègues, que les oeuvres d'art sont l'objet de manipulations nombreuses. Elles permettent notamment de blanchir de l'argent sale.
Nous, nous voulons protéger la création contemporaine et le patrimoine. C'est pourquoi, dans nos propositions, figurent des dispositions fort précieuses, par exemple l'exonération des créations contemporaines et des oeuvres d'art qui sont présentées au public. Prenez, au hasard, M. Arnault ou M. Pinault. Ils ont des oeuvres d'art. Eh bien, dès lors qu'ils les présentent au public, ils deviennent les gardiens bénévoles de leur propre patrimoine, qui appartient néanmoins au patrimoine culturel universel. Des Modigliani, des Braque, des Matisse, des Picasso, ils peuvent en posséder autant que leur fortune le leur permet ; nous, dans notre mansuétude, nous proposons qu'ils ne soient pas taxés sur ces oeuvres dès lors qu'elles sont présentées au public qui n'a pas eu la chance d'accéder comme eux à la fortune.
Il faut pour cela que ces oeuvres soient présentées au public chaque année. Vous voyez que nos propositions sont bonnes. La preuve en est qu'elles ont été soutenues il y a quelque temps par la presse suisse, qui n'est pourtant pas suspecte d'être favorable à une fiscalité confiscatoire !
Cette législature s'achève comme elle a commencé : par un cadeau fiscal aux plus fortunés de nos concitoyens.
Vous avez, dans la loi TEPA, inventé le bouclier fiscal, au motif qu'il fallait empêcher qu'un contribuable travaille plus d'un jour sur deux pour l'État. Et puis vous vous êtes aperçus qu'il était impossible pour quelqu'un ayant seulement des revenus du travail d'être concerné par le bouclier fiscal. Vous avez donc commencé à douter. C'est pourquoi nous en arrivons à cette réforme, dont l'un des pans est la suppression du bouclier fiscal, que nous réclamons depuis l'origine parce qu'il est totalement injuste, mais que vous inscrivez dans une réforme encore plus injuste, parce qu'elle consiste à donner le double du bouclier fiscal aux Français les plus fortunés.
Cette réforme est-elle cohérente avec la situation que nous connaissons ? J'invite à cet égard M. Paternotte à lire le quatrième paragraphe de l'introduction du rapport, qui rappelle que nous sommes dans une situation où les revenus du capital augmentent, voire explosent, alors que les salaires stagnent. De plus, les revenus du travail sont beaucoup plus imposés que ceux du capital et, en raison des niches fiscales que nous connaissons tous, plus on monte dans l'échelle des revenus ou du patrimoine, plus l'imposition diminue. Dans cette situation, la réforme qui s'impose, c'est tout simplement la suppression sèche du bouclier fiscale.
Or que faites-vous ? Vous en rajoutez en matière d'injustice. Vous allégez l'impôt des 600 000 foyers dont le patrimoine se compte en millions d'euros. Certes, pour certains d'entre eux, les 10 000 foyers qui bénéficient du bouclier fiscal et paient l'ISF, il y aura peut-être une compensation. D'ailleurs, quand on lit attentivement le rapport, on a du mal à trouver cette compensation. Mais, pour tous les autres, c'est-à-dire pour les 590 000 foyers restants, c'est un cadeau fiscal pur et simple. Et ce n'est pas un petit cadeau !
Pour ceux qui ont plus de 16 millions d'euros de patrimoine, il est de 185 000 euros. Je vous le dis donc, mes chers collègues : dans la situation actuelle de notre pays, une réforme qui, en contrepartie de la suppression du bouclier fiscal, certes nécessaire…
…fait cadeau de plus du double de ce bouclier aux 600 000 Français les plus fortunés est une réforme indécente.
Je me suis livré à une lecture attentive du rapport qu'a signé Gilles Carrez. Quand je vous entends dire, monsieur le ministre, que la réforme est financièrement équilibrée, j'en ai froid dans le dos !
En effet, je lis que, par exemple en termes de trésorerie, les besoins sont estimés à 229 millions d'euros dès 2011 et à 556 millions en 2012. C'est un premier motif d'inquiétude. Le rapporteur nous dit que « le Gouvernement devra présenter, en projet de loi de finances pour 2012, les mesures fiscales permettant de couvrir le besoin de trésorerie ».
Concernant les recettes attendues, le rapporteur général indique qu'on substitue à un impôt qualifié de dynamique, puisque connaissant une progression de l'ordre de 11 % par an depuis 2002, des impôts dont le rendement n'est pas du tout assuré. Il écrit même : « À long terme, il n'est donc pas impossible que ce surplus de recettes s'érode progressivement. »
Je suis extrêmement inquiet dans la mesure où le rapporteur général annonce, dans les pages 14 à 20 du rapport, qu'il existe un gros risque pour que l'équilibre ne soit pas atteint, si tant est qu'on admette votre raisonnement, que nous contestons, selon lequel cette réforme sera payée par ceux-là mêmes qui en bénéficient.
Je vous invite, mes chers collègues, à considérer tous ces éléments fournis par le rapporteur général dont on connaît l'objectivité, qui contraste d'ailleurs avec la passion qu'il met à défendre ce texte aujourd'hui.
Je termine, monsieur le président.
Dès 2012, il faudra trouver 556 millions de trésorerie. J'aimerais, monsieur le ministre, que vous nous disiez où et comment vous allez les trouver.
Nous n'avons eu de cesse de dénoncer le bouclier fiscal tel qu'il nous est présenté depuis quatre ans.
Au début, nous étions un peu seuls et puis, au fil des semaines et des mois, notre avis sur cette mesure fiscale totalement injuste a rencontré un peu plus d'écho, au centre et à droite. Malgré tout, le chef suprême indiquait très clairement qu'il ne fallait pas faiblir et qu'il ne fallait pas pénaliser l'électorat pour lequel il avait beaucoup d'amitié. Mais à l'approche de 2012, la situation devient intenable. Le boulet fiscal est de plus en plus lourd à traîner. Il fallait donc le supprimer sans le supprimer et trouver des compensations.
La manipulation a été habile, le tour de magie exceptionnel. Vous avez exécuté une manoeuvre particulièrement astucieuse, sauf que personne n'en sera dupe. Tout le monde sait lire et compter et, au final, la manoeuvre ne rapportera peut-être pas autant sur le plan électoral que ce que vous escomptez. Tout simplement parce que ceux qui jugeront le plus sont ceux qui sont dans la difficulté aujourd'hui et que, pour eux, rien n'est fait. J'évoquais tout à l'heure les problèmes de santé, Bruno Le Roux a parlé des problèmes de sécurité, d'autres ont soulevé les problèmes de transport.
Pourtant, des financements existent. La Cour des comptes vous a indiqué que 15 milliards étaient disponibles très rapidement. Mais non, vous persistez et vous signez. Nous aussi, nous persistons et nous signons en vous disant que vous persistez dans l'erreur.
On dit souvent qu'on peut tout faire avec une hache, sauf tailler son propre manche. C'est pourtant ce que nos collègues de la majorité essaient de nous faire croire en indiquant que cette réforme aurait le grand mérite d'être financée par ceux qui vont en bénéficier.
On nous présente, en commission et encore ici, l'ISF comme un impôt « catastrophique ». Cela nous rappelle le cynisme de Mme Thatcher lorsque, il y a une trentaine d'années, elle disait qu'il fallait faire applaudir les baisses d'impôt par ceux qui n'en paient pas. Porter le seuil de l'ISF à 1,3 million d'euros va susciter dans la population, pas simplement dans les couches les plus modestes mais dans la classe moyenne, des réactions dont on pourra juger l'importance dans quelque temps.
Je terminerai en disant un mot sur les oeuvres d'art. Il faut bien avouer que notre pays pèse peu, hélas ! dans la création et sur le marché de l'art. Il se passe peu de choses en France, aujourd'hui, chez les galeristes et même chez les marchands. Je vous recommande la lecture de l'ouvrage écrit par deux journalistes, Danièle Granet et Catherine Lamour, sur le marché mondial de l'art : vous verrez que tout se passe à Bâle, Hong-Kong ou New York. Paris compte peu. Cela signifie que même l'exonération des oeuvres d'art n'a pas été très incitative pour développer la création et le marché de l'art.
Dans le contexte que connaît notre pays, où les revenus du patrimoine explosent et les salaires stagnent, où les revenus du travail sont encore plus imposés que les revenus du capital, la réforme que vous nous proposez paraît particulièrement indécente : vous ajoutez de l'injustice à l'injustice. En effet, la suppression du bouclier fiscal, que tout le monde souhaite maintenant ici, n'interviendra réellement et définitivement qu'en 2014 lorsque la réforme de l'ISF – qui se traduira par une réduction forte puisque, pour les tranches les plus élevées, l'imposition sera divisée par plus de trois – s'appliquera, elle, immédiatement. Il y a là matière à réflexion.
Avec la suppression du bouclier fiscal, vous mettez fin à une forfaiture, celle qui consistait à présenter le RMIste de l'Île de Ré comme redevable de l'ISF alors que ce cas-là n'existe pas dans la réalité. Cela vous servait à cacher le fait que vous faisiez des cadeaux. Vous avez commencé cette législature en faisant des cadeaux aux plus riches et vous la terminez de cette façon. C'est inadmissible.
J'en viens à l'intégration des oeuvres d'art dans l'assiette de l'ISF. Je crois qu'il est difficile d'aborder une telle question au détour d'un débat parlementaire. C'est une décision difficile à prendre. Si elle doit être prise, cela doit se faire en dehors de toute précipitation car cela concerne le patrimoine artistique de la France, pas simplement de l'art contemporain. Cela touche également la possibilité d'exposer des oeuvres possédées par des personnes physiques et la capacité qu'il y a à alimenter les musées de France avec les dations par exemple.
Bref, si nous devons légiférer dans ce domaine, c'est avec précaution et non dans la précipitation.
Je suis saisi des amendements identiques, nos 93 à 106 , 108 à 153 , 155 à 180 et 275 , tendant à supprimer l'article 1er.
Je constate que MM. Ayrault, Bacquet, Baert, Bapt, Bartolone ne sont pas présents en séance pour défendre leur amendement.
La parole est donc à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour défendre son amendement.
L'adoption de l'article 1er aurait des conséquences importantes. En effet, ses dispositions diminueraient fortement les recettes de l'impôt de solidarité sur la fortune en révisant en profondeur son barème et ses taux. Il entraînerait une nouvelle baisse de l'imposition sur le patrimoine des ménages les plus riches. Cet énième cadeau fiscal aux Français les plus aisés n'est pas acceptable et n'a aucune justification.
L'entrée dans le barème de l'ISF est relevée à 1,3 million d'euros alors qu'elle était jusqu'à présent à 790 000 euros. Le nombre de tranches de cet impôt est abaissé de six à deux et les taux de ce barème sont fortement réduits. La progressivité de cet impôt est donc totalement détruite.
En outre, la suppression affichée du bouclier fiscal que cette majorité a mis en place et que nous avons toujours combattu est un leurre. Outre le fait que ce dispositif continuera à coûter budgétairement aux finances publiques jusqu'en 2013, l'économie attendue de sa suppression future atteint à peine la moitié du coût de la diminution de l'ISF. Cette fausse réforme de la fiscalité du patrimoine constitue donc un cadeau fiscal de fin de législature après ceux contenus dans la loi TEPA d'août 2007.
Pour toutes ces raisons, il convient de supprimer cet article 1er.
Vous n'arriverez pas à nous faire croire que cette réforme est juste. Elle est juste scandaleuse.
Vous présentez une fausse réforme de la fiscalité du patrimoine qui constitue, cela a été dit avant moi, un véritable cadeau fiscal. Vous avez commencé cette législature par un cadeau fiscal aux ménages les plus riches, les plus aisés, vous terminez cette législature avec un autre cadeau. Décidément, pour vous, c'est une habitude.
Vous affichez avec l'enthousiasme des nouveaux convertis la suppression du bouclier fiscal mais c'est un véritable leurre. En effet, il en coûtera encore aux finances publiques jusqu'en 2013 et vous ne nous ferez pas oublier le fait que vous avez créé ce fameux bouclier fiscal.
Par ailleurs, l'article diminue fortement les recettes de l'impôt de solidarité sur la fortune, en révisant à la fois le barème et les taux. Cela traduit la parfaite injustice de votre proposition. Il représente une baisse de l'imposition sur le patrimoine des ménages les plus riches, un véritable cadeau dans la mesure où l'entrée dans le barème de l'ISF est relevée à 1,3 million d'euros alors qu'elle était jusqu'à présent à 790 000 euros.
En outre, vous proposez que le nombre de tranches de cet impôt soit abaissé de six à deux et que les taux de ce barème soient fortement réduits. L'idée qui se cache là derrière, c'est bien de faire un véritable cadeau aux ménages les plus aisés. Cela signe également la fin de la progressivité de cet impôt.
Pour toutes ces raisons, comme mes collègues, je propose la suppression de cet article 1er.
On ne peut pas, d'un côté, proposer de supprimer le bouclier fiscal, abandonner ce qui est faux, et, d'un autre côté, faire un cadeau aussi important aux ménages les plus aisés. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Pourquoi voulons-nous que cet article soit supprimé ? Tout simplement parce que son adoption vous permettrait de diminuer très fortement les recettes de l'ISF, en révisant à la fois son barème et ses taux. Il s'agirait d'une nouvelle baisse de l'impôt sur le patrimoine des ménages les plus riches comme nous le savons tous. Ce serait, une fois de plus, un cadeau fiscal aux Français les plus aisés. Cela n'est ni acceptable ni justifié.
Au prétexte de l'augmentation de la valeur de la résidence principale, vous relevez le seuil de l'ISF à 1,3 million d'euros alors qu'il était jusqu'à présent à 790 000 euros. Votre argument est fallacieux, vous le savez bien, puisque la résidence principale ne constitue même pas un tiers de la richesse des ménages les plus aisés.
Qui plus est, le nombre de tranches de tranches serait abaissé de six à deux tandis que les taux seraient fortement réduits. Cet impôt perdrait tout caractère de progressivité.
Enfin, vous affichez une pseudo-suppression du bouclier fiscal, mais tout le monde sait qu'il ne s'agit que d'un leurre.
En cette fin de législature, vous faites à nouveau un cadeau fiscal aux plus riches alors que tant d'autres sont aujourd'hui en grande souffrance sociale. Il s'agit d'un cadeau indécent, personne n'est dupe. C'est pourquoi nous sommes si convaincus qu'il faut supprimer cet article 1er. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je partage bien sûr le point de vue de tous mes collègues qui viennent de s'exprimer sur la suppression de cet article.
Vous nous avez indiqué que votre majorité avait beaucoup travaillé sur la fiscalité du patrimoine et vous nous proposez ce dispositif qui a pour objet de faire baisser la progressivité de l'impôt alors qu'un impôt juste est un impôt progressif. En même temps, vous nous expliquez que cet impôt était confiscatoire. Si l'ISF était confiscatoire, nous ne devrions plus avoir de matière à imposer. Depuis qu'il existe, cette matière devrait avoir complément disparu. Or on constate ces dernières années que la matière imposable existe toujours. On a certes dénombré quelques expatriés – en dix ans, de 1996 à 2005, il y en aurait eu 5 000 – mais, d'après ce qui se dit, il n'y en aurait plus.
Pour qu'un impôt soit juste, il faut qu'il soit progressif. En réduisant fortement sa progressivité, vous le détruisez. La suppression affichée du bouclier fiscal n'est qu'un leurre. C'est une fausse réforme que vous nous proposez. Dans ces conditions, nous proposons la suppression de cet article.
Au moment où, dans notre pays, on parle d'injustice sociale et fiscale, au moment où l'on parle d'une fiscalité difficile pour ceux qui veulent entreprendre, d'une fiscalité qui privilégie la rente, je m'étonne que le débat soit centré sur la fiscalité du patrimoine. Il y a des réflexions à mener en urgence sur la fiscalité : celle du travail qui est sans commune mesure avec celle qui frappe le capital ; celle des PME qui sont plus touchées que les entreprises du CAC 40.
Or que nous proposez-vous ? Non pas une réforme, mais des dispositions visant à remettre en cause l'ISF, un impôt sur le patrimoine.
La mesure la plus choquante pour nous est le passage de six tranches à deux tranches, qui aura pour effet de réduire considérablement l'impôt sur la fortune des plus riches. Ainsi, les 4 700 redevables qui détiennent chacun en moyenne plus de 10 millions d'euros de patrimoine vont voir leur impôt diminuer de 38 %. Quant aux très hautes fortunes, celles qui correspondent à un patrimoine d'environ 37 millions, leur imposition baissera de plus de 50 %.
Vous comprenez pourquoi nous demandons la suppression de cet article. Ce qu'attend aujourd'hui notre pays, c'est une fiscalité juste, une fiscalité qui donne le goût d'entreprendre à nos PME et PMI.
La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour soutenir son amendement.
Monsieur le ministre, vous supprimez le bouclier fiscal et dites alléger l'ISF. Cette réforme coûtera 1,8 milliard d'euros, soit le double de l'actuel bouclier, et favorisera moins de 2 % des contribuables. À toujours favoriser les mêmes, vous resterez le Gouvernement des plus riches. Êtes-vous conscient qu'il n'existe pas que des riches en France et que vous continuez à aggraver les injustices sociales ?
Vous expliquez le relèvement du seuil de l'ISF à 1,3 million d'euros par la hausse du coût de l'immobilier. Les loyers aussi augmentent, monsieur le ministre. Quelle politique avez-vous mise en place pour augmenter les aides au logement pour les familles ? Aucune !
L'accès à la santé est de plus en plus difficile, et nombreux sont ceux qui ne se soignent pas. En êtes-vous conscient ?
Vous avez supprimé l'école maternelle pour les moins de trois ans sans créer de places en crèches à la hauteur des suppressions. Connaissez-vous les difficultés financières de plus en plus importantes des familles monoparentales, dont les revenus se situent bien souvent en dessous du seuil de pauvreté ?
Monsieur le ministre, ayez une politique juste à l'égard de ceux qui en ont le plus besoin : supprimez l'article 1er et ne faites pas un nouveau cadeau fiscal aux personnes les plus aisées !
Parce que cette réforme de la fiscalité du patrimoine constitue un cadeau de fin de législature, après ceux consentis par la loi TEPA d'août 2007, nous souhaitons supprimer l'article 1er. Tout comme mes collègues précédemment, Alain Claeys vient, très clairement et brillamment, de décrire les dispositions en cause.
Nous dénonçons la suppression de l'ISF comme un leurre, et ce ne sont pas, monsieur le ministre, vos protestations, vos effets de manche, vos accusations à notre encontre qui changeront quoi que ce soit. Cette réforme n'est pas juste. À un moment où nos concitoyens souffrent, elle est scandaleuse et indécente. Croyez bien que nous ne manquerons pas de le leur faire savoir !
Monsieur le président, deux de nos collègues n'ont pas été appelés pour soutenir leurs amendements.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ils n'étaient pas là !
Sur une affaire aussi importante puisqu'elle porte sur des millions, des milliards même, d'euros, il est primordial que chacun puisse s'exprimer. Aussi, je souhaiterais que vous permettiez à Alain Cacheux et Guy Chambefort de défendre leur amendement.
Ne vous inquiétez pas, monsieur Eckert, je leur donnerai la parole. Afin de n'oublier personne, j'avais demandé que soit dressée une liste des présents, que j'appelais au fur et à mesure. Ceux qui auraient été oubliés pourront s'exprimer aussi.
Une nouvelle fois, l'allègement de l'impôt sur la fortune et la modification de ses règles d'application vont à l'encontre de l'idéal républicain de justice sociale que vous prétendez défendre. À nouveau, vous allez favoriser les plus aisés en diminuant l'imposition sur le patrimoine des plus riches. La progressivité de l'ISF n'existe plus.
Les inégalités sont très mal perçues par les Français qui considèrent que ce sont toujours les mêmes, les plus modestes, qui sont taxés. Les efforts, vous les demandez toujours aux mêmes, pour favoriser les plus privilégiés au détriment de l'intérêt collectif.
Dans nos communes et nos quartiers, le chômage des plus jeunes et des femmes progresse, la RGPP a mis en péril les services publics. Dans un tel contexte, cette réforme est inacceptable.
Vous proposez la suppression du bouclier fiscal, c'est donc que vous reconnaissez implicitement son effet pervers. Aujourd'hui, avec l'allègement de l'ISF, vous présentez un leurre financier et social. Faire passer le droit d'entrée de l'ISF à 1,3 million n'est pas compréhensible pour la plupart des Français. C'est une injure faite aux femmes qui travaillent à temps partiel, aux jeunes au chômage, aux chômeurs en fin de droits qui risquent de basculer demain dans la grande pauvreté.
Dans nos quartiers sensibles, dans nos communes, où près de 40 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, cette réforme est inacceptable et parfaitement indécente. C'est pourquoi nous demandons sa suppression. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Je voudrais rappeler, après d'autres, pourquoi nous demandons instamment la suppression de l'article 1er.
Pour la majorité, il s'agit de se débarrasser du boulet que constitue le bouclier fiscal. On pouvait tout au moins espérer que, dans cette réforme pompeusement dite de la fiscalité du patrimoine, le dispositif proposé serait équilibré. Or, si le bouclier fiscal est supprimé, l'impôt sur la fortune est considérablement affaibli.
Finalement, l'effort demandé à nos concitoyens les plus aisés est sans commune mesure avec ce que d'autres pays européens, en particulier la Grande-Bretagne, demandent aux catégories sociales équivalentes. En réalité, il s'agit d'un cadeau fait à nos concitoyens les plus aisés.
La semaine dernière, on nous faisait débattre de manière approfondie de la règle d'or permettant d'assurer un meilleur équilibre des finances publiques. Aujourd'hui, on nous présente une réforme qui va à nouveau aggraver le déficit puisque les recettes correspondantes sont renvoyées à des débats ultérieurs dont on peine à penser qu'ils se concluront positivement.
Ce n'est qu'une mesure de plus sur la longue liste de celles qui, depuis quatre ans, en particulier les niches fiscales, n'ont eu pour effet que d'aggraver le déficit budgétaire.
L'article 1er diminue fortement les recettes de l'impôt de solidarité sur la fortune en révisant en profondeur son barème et ses taux. Il constitue une nouvelle baisse de l'imposition sur le patrimoine des ménages les plus riches, un énième cadeau fiscal aux Français les plus aisés. Ce n'est ni acceptable ni justifié !
L'entrée dans le barème de l'ISF est relevée à 1,3 million d'euros contre 790 000 euros jusqu'à présent ; le nombre de tranches est abaissé de six à deux et les taux sont également fortement réduits. La progressivité de cet impôt est complètement détruite.
La suppression affichée du bouclier fiscal est un leurre. Outre que ce dispositif continuera à coûter budgétairement aux finances publiques jusqu'en 2013, l'économie attendue de sa suppression future atteint à peine la moitié du coût de la diminution de l'ISF.
Cette fausse réforme de la fiscalité du patrimoine constitue donc un cadeau fiscal de fin de législature, après ceux contenus dans la loi TEPA d'août 2007. Pour cela, il convient de supprimer cet article.
Le président du groupe SRC vient de me dire : « Démolis cet impôt ! » Oui ! Toutes les modifications apportées à l'ISF aujourd'hui visent à diminuer le nombre de contribuables qui y sont assujettis – jusqu'ici, ceux dont le capital atteignait 790 000 euros ; aujourd'hui, le seuil est remonté et les taux sont modifiés.
Les modifications apportées ne sont pas comprises par les contribuables. D'une part, un certain nombre de privilégiés vont être dispensés de payer cet impôt ; d'autre part,… On m'a communiqué des notes trop abondantes et trop précises. (Sourires.)
Vous aurez compris que le groupe SRC présente un amendement de suppression pure et simple.
De nombreux collègues avant moi l'ont dit, l'article 1er nous paraît particulièrement injuste dans la mesure où il donnera lieu à une baisse de l'ISF très largement supérieure à l'impôt que certains devraient avoir à acquitter du fait de la fin du bouclier fiscal.
Défendre cet amendement de suppression est l'occasion pour nous de dénoncer deux impostures. La première, qui revient régulièrement, consiste à dire que les bénéficiaires de votre réforme seraient pour l'essentiel des ménages modestes, en tout cas issus des classes moyennes. C'est évidemment faux.
Aujourd'hui, on est redevable de l'ISF à partir de 790 000 euros, après application des dérogations et exonérations. Demain, ce sera à partir d'1,3 million d'euros. Alors que le patrimoine médian dans notre pays s'élève à 110 000 euros, vous êtes en train d'expliquer à la moitié des ménages français qui font partie de cette catégorie, que pour les possesseurs d'un patrimoine de plus d'1,3 million d'euros, voir leur impôt baisser ne serait que justice. À leurs yeux, bien évidemment, cela participe plutôt de la plus grande injustice.
La seconde imposture ou contre-vérité, c'est que vous avez largement répété que cette réforme bénéficierait aux plus « petits » contribuables assujettis à l'ISF, sans rien changer pour les plus gros contribuables. C'est faux, puisque les 200 000 ménages qui possèdent un patrimoine de plus de 1,7 million d'euros verront leur ISF baisser de 80 % avec la réforme que vous mettez en place, ce qui s'explique par le fait que vous avez supprimé la progressivité de l'ISF en passant à deux tranches d'imposition.
Il y a quelques mois, deux sociologues ont publié un ouvrage intitulé Le Président des riches. Ils ne pouvaient trouver meilleur titre, eu égard aux exonérations de droits de succession ou au paquet fiscal voté en début de législature.
En un mot : vous supprimez sans doute aujourd'hui le bouclier fiscal mais, à la place, c'est une armure que vous offrez à ses détenteurs !
Je ferai trois remarques. La première porte sur l'argument qui consiste à dire que l'ISF est supporté par les petits propriétaires frappés par la hausse de l'immobilier. Or un propriétaire dont la résidence principale vaut 2,5 millions d'euros – ce qui n'est pas rien – et qui aurait emprunté pour la financer un million d'euros, n'est pas aujourd'hui, du fait de l'abattement de 30 %, assujetti à l'ISF.
Deuxièmement, vous prétendez que rien ne changera sauf pour les contribuables de la dernière tranche. Or, selon mes calculs, qui intègrent la disparition du bouclier fiscal, les économies réalisés par les contribuables assujettis à l'ISF vont de 100 % pour la première tranche à 19 %, 24 %, 20 % et 27 % pour les tranches suivantes, sauf la dernière.
Ma dernière remarque est plus politique. Monsieur le ministre, vous ne manquez pas d'air… (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Il n'y a rien d'injurieux dans cette expression, mes chers collègues !
Vous ne manquez donc pas d'air pour prétendre que nous sommes contre la suppression du bouclier fiscal. Ce que nous dénonçons, c'est que vous profitez de cette suppression pour réaménager l'ISF et faire, en fin de compte, des cadeaux aux plus fortunés, ainsi que nous en apporterons la preuve dans les heures et les jours qui viennent. Cessez donc de prétendre que nous sommes contre la suppression du bouclier fiscal.
Il faudrait, chers collègues de la majorité, dire la vérité aux Français et arrêter de jouer au bonneteau fiscal avec eux ! Vous avez entamé la mandature avec la loi TEPA, dont vous avez essayé de trafiqué les chiffres au point de faire croire aux Français les plus modestes qu'ils seraient concernés par le bouclier fiscal. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La loi TEPA n'a jamais coûté autant que ce que vous prétendez ; c'est vous qui trafiquez les chiffres !
Nous n'avons eu de cesse de clamer qu'il s'agissait d'une supercherie, de même que nous dénonçons aujourd'hui l'imposture de votre réforme. Les Français comprennent d'ailleurs parfaitement que celle-ci ne profitera qu'à une petite minorité et certainement pas aux plus grand nombre, notamment aux classes moyennes.
Alors que votre mandat touche à sa fin, vous affirmez clairement vos priorités, révélatrices d'une vision conservatrice de la société, qui privilégie la rente sur la dynamique, l'innovation et la création. Ce n'est pas comme cela que notre pays va avancer ! Vous voulez enfermer les Français dans leurs catégories plutôt que de les laisser créer de la richesse en allant de l'avant, selon une conception passéiste, qui nous ramène au xixe siècle. Vous vous voulez moderne, monsieur le ministre, mais vous incarnez une politique du passé ! En demandant la suppression de cet article, nous voulons vous remettre sur les bons rails.
Comptez sur nous pour porter, d'ici l'élection présidentielle et les élections législatives, ce débat devant les Français, qui ont déjà commencé à saisir la supercherie de vos méthodes, lesquelles consistent à affirmer une chose et à faire son contraire.
Monsieur le président, permettez-moi de vous faire remarquer, car vous ne pouvez avoir les yeux partout, qu'Albert Facon et Aurélie Filippetti étaient là avant moi.
Monsieur Gaubert, je vous ai donné la parole, prenez-la. Vos collègues s'exprimeront après.
Je voulais simplement vous aider à présider une séance qui n'est pas simple, monsieur le président.
Nous avons, dans ce pays un leitmotiv, selon lequel beaucoup de Français ne paient pas d'impôt. Mais ce que l'on oublie de dire c'est que, si beaucoup de Français, en effet, ne paient pas l'impôt sur le revenu, ils paient tous la TVA et la CSG ! Et en payant la TVA sur tout leur revenu, car ils le consomment en totalité, le taux d'impôt qu'ils acquittent est supérieur au taux moyen payé par les plus riches.
On a parfois avancé que le régime de M. Sarkozy ressemblait au thatchérisme. En réalité, ce n'est pas vrai car, avec sa poll tax, Mme Thatcher avait au moins fait en sorte que chacun paie le même pourcentage d'impôt, ce qui n'est pas le cas ici, puisque l'impôt des plus riches est plus faible en pourcentage.
En réponse à Jean-Marc Ayrault, M. Fillon a dit tout à l'heure fort justement que la politique du Gouvernement était cohérente avec les mesures prises depuis 2007. On ne peut qu'être d'accord avec cette affirmation : depuis 2007, vous n'avez en effet de cesse de culpabiliser les classes populaires et de faire des cadeaux aux plus riches. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Cet amendement demande la suppression des allègements que vous apportez à l'ISF. Il vise à supprimer un article qui diminue les recettes découlant de cet impôt.
Avec vous, la France d'en haut a le sourire. Vous distribuez des cadeaux, toujours des cadeaux, aux plus riches. Élu d'une circonscription ouvrière de la France d'en bas, la 14e circonscription du Pas-de-Calais dans l'ex-bassin minier, je ne peux accepter cette injustice fiscale ! Mes concitoyens vivent au jour le jour. Ils attendent désespérément un travail.
Ils subissent chaque jour la hausse des prix, et vos cadeaux fiscaux, qui se comptent en millions d'euros, les révoltent ! Après les parachutes dorés, le bouclier fiscal et les centaines de millions versés à Bernard Tapie, les familles de chez moi ne croient plus à la justice fiscale de notre pays ! Je pense en ce moment à toutes ces familles qui demandent à vivre dignement.
Quant à celle qui rêve de devenir députée de ma circonscription, Mme Le Pen, elle peut vous remercier, chers collègues de l'UMP, car votre politique lui donne un sérieux coup de main. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Cette réforme n'est pas financée. À l'heure, donc, où la majorité nous donne sans cesse des leçons de bonne gestion des finances publiques, nous pouvons vous rétorquer que vous n'avez qu'un principe, la procrastination budgétaire, qui consiste à toujours remettre au lendemain ce que vous ne savez pas réaliser aujourd'hui, à savoir l'équilibre des finances publiques. Avec un solde budgétaire négatif de 91 milliards d'euros, comme le ministre nous l'a dit hier, vous trouvez encore le moyen de faire aujourd'hui un cadeau fiscal monstrueux aux plus riches de nos concitoyens. Quelle impudence !
Était-il vraiment indispensable de diminuer le taux d'ISF des citoyens possédant un patrimoine d'une valeur de 16 millions d'euros, ou encore de ceux dont le patrimoine immobilier s'élève à 1,7 ou 1,8 millions d'euros hors dette, somme assez conséquente à laquelle on aboutit en tenant compte de l'abattement de 30 % sur la résidence principale, qui fait passer ce patrimoine en dessous du seuil de 1,3 million d'euros ?
Voilà qui va encore renforcer les inégalités dans notre pays ; je parle des inégalités sociales mais également générationnelles, car votre réforme conduit à faire financer par les plus jeunes et par les générations futures une dette creusée au profit des patrimoines les plus importants appartenant à la génération du baby boom. C'est déjà ainsi que vous aviez procédé en finançant votre réforme des retraites par le siphonage du fonds de réserve des retraites ou en piétinant allégrement les règles instaurées pour la CADES.
Une nouvelle fois, votre réforme consiste à reporter au-delà de 2013 le financement des cadeaux que vous faites aux plus riches !
Mon amendement vise à supprimer l'article premier de ce texte de loi de finances rectificative pour l'année 2011. La manière dont vous présentez votre réforme fiscale est peut-être habile, monsieur le ministre, mais elle est surtout un leurre, car cette réforme ne fait nullement progresser la justice fiscale, bien au contraire.
Vous supprimez enfin le bouclier fiscal, ressenti par nos compatriotes comme une forte injustice, mais vous adaptez l'ISF pour qu'une partie de ceux qui bénéficiaient de ce bouclier fiscal retrouvent la quasi-totalité des avantages qu'il leur apportait. De plus, alors que tous les discours ambiants invitent à la vertu budgétaire, cette réforme accentue au contraire le déséquilibre de nos finances publiques.
La fiscalité est le moyen, pour la puissance publique, de mieux répartir les richesses produites et de construire les actions de solidarité qui sont les vecteurs essentiels de notre pacte social et républicain. Il y a certes un grand chantier à ouvrir pour que notre système fiscal soit à la mesure des défis que notre économie et notre société doivent relever. Vos propositions, notamment celles contenues dans cet article, sont aux antipodes des réponses à leur apporter. C'est pourquoi je demande la suppression de cet article premier.
Comme l'a dit M. Gagnaire, il ne suffit pas de vouloir être moderne : quant on mène une politique injuste et archaïque, elle reste injuste et archaïque. Et la politique de votre majorité et de votre gouvernement est archaïque, monsieur le ministre !
Alors que le chômage est ce qu'il est, que l'on connaît la situation des comptes publics et que la France perd chaque jour des parts de marché pour son commerce extérieur, de qui parlons-nous ici ? Des 2% de ménages français les plus privilégiés ! Car, pour être aujourd'hui assujetti à la première tranche de l'ISF, il faut détenir au minimum un patrimoine de 790 000 euros, sachant que le patrimoine moyen des Français s'élève à moins de 150 000 euros par ménage. Il me semble donc que notre pays mériterait que l'on se concentre plutôt sur la fiscalité des échanges, la fiscalité du travail et, plus globalement, sur la fiscalité qui touche l'activité économique.
Vous proposez de supprimer un impôt qui semble juste et n'est pas confiscatoire, puisque le détenteur d'un patrimoine de 1,3 million d'euros n'a à acquitter qu'un impôt de 660 euros par an. Je suis persuadé qu'il y a beaucoup de contribuables à Troyes qui paient plus de 660 euros d'impôts par an, au titre de la taxe d'habitation ou sur le foncier bâti. Pour autant vous n'allez pas vous engager dans la suppression de cette forme de fiscalité.
Mais, pour 2 % des Français, vous engagez le pays dans un débat et une démarche anachroniques et injustes.
Le Président de la République nous avait annoncé lors de l'une de ses allocutions télévisées une ample réforme de la fiscalité du patrimoine. La vérité aujourd'hui est certainement moins exaltante pour celles et ceux qui espéraient cette vaste réforme.
Pourquoi voulons-nous la suppression de cet article 1er ? On nous dit tout d'abord que la réforme de l'ISF est financée. C'est faux : son coût est sous-évalué. Le Gouvernement a délibérément sous-estimé le coût de son cadeau qu'il chiffre entre 1 et 1,3 milliard d'euros. Or tous les experts, y compris le rapporteur UMP du budget, considèrent que la facture ne sera pas loin du double, proche des 2 milliards d'euros.
Une autre piste est évoquée : les 300 millions d'euros de la cellule de régularisation des contribuables qui ont triché sur leurs impôts. Les fraudeurs de l'ISF vont donc financer l'allégement de l'ISF dont ils bénéficieront dans l'avenir. En clair, ils paient d'une main, ils touchent de l'autre. C'est la justice vue de droite…
On nous dit par ailleurs que la réforme de l'ISF favoriserait les contribuables modestes. C'est faux : les millionnaires toucheront malheureusement le gros du pactole. La réforme concoctée par l'UMP prévoit de rehausser le seuil d'entrée dans l'ISF de 790 000 à 1,3 million d'euros de patrimoine. Ce relèvement de la première tranche aura pour conséquence d'exonérer 300 000 contribuables de cet impôt. La réduction du nombre de tranches remet en cause la progressivité donc la justice de l'ISF.
Quant aux taux, ils sont également fortement réduits.
Une nouvelle fois, les plus riches sont les grands gagnants de cette réforme. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Depuis quatre ans, nous demandons avec constance que soit supprimé le bouclier fiscal, marque emblématique du texte TEPA de 2007, lui-même péché originel de cette mandature. Le trouble a progressivement gagné les bancs de la majorité, au point que des critiques ont rejoint les nôtres, tant sur la nature des prélèvements pris en compte que sur le mode de calcul des revenus.
Le Gouvernement nous propose aujourd'hui d'aménager l'ISF et de réduire son produit d'un montant supérieur à l'allégement que procurait le bouclier fiscal. En résumé, vous nous proposez du donnant-donnant, mais toujours et uniquement pour quelques-uns.
Par ce tour de passe-passe, vous ôtez toute progressivité à l'ISF et vous réduisez de moitié son montant en supprimant les deux premières tranches du barème. Pour tenir compte des difficultés budgétaires et des tensions financières que vous avez largement contribué à créer, vous nous proposez des mesures visant à obtenir de nouvelles recettes censées équilibrer le dispositif mais nous nous interrogeons sur l'évaluation de ces recettes et sur leur solidité juridique. C'est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article qui aurait pour conséquence de diminuer les recettes de l'ISF.
Nous constatons enfin que la réforme de l'ISF s'appliquera pleinement en 2012 alors que les remboursements au titre du bouclier fiscal continueront. Vous minez le terrain financier et ce n'est pas responsable pour l'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
J'ai bien conscience que, grâce à cet article, monsieur le ministre, vous recevrez force louanges et embrassades lors de la prochaine réunion du premier cercle des donateurs de l'UMP.
Mais nous vous demandons de faire de la politique pour tous les Français et non plus seulement pour ce premier cercle de gens fortunés.
Puisqu'il a été démontré qu'il s'agissait d'un nouveau cadeau, je voudrais m'attacher à ses conséquences. Il y a quelques jours, je vous interrogeais sur ces milliers de demi-journées non remplacées dans les écoles primaires de la Seine-Saint-Denis. Vous m'avez fait valoir, monsieur le ministre, qu'une gestion saine des finances publiques était nécessaire. Or, en 2011, la mesure proposée coûtera 300 millions d'euros à l'État. Une telle somme aurait suffi pour faire en sorte que plus une seule demi-journée ne soit pas remplacée dans toute la région Île-de-France.
L'année prochaine, en 2012, nous en serons à 2 milliards, soit l'équivalent de près de quatre années de votre principe de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux ! Voilà des éléments concrets ! Au moment où vous nous parlez d'un État en cessation de paiements, d'un État qui ne parvient plus à maintenir la sécurité dans nos quartiers, d'un État qui n'arrive plus à assurer l'éducation de ses enfants dans les quartiers les plus difficiles, vous faites miroiter aux plus fortunés de notre pays 300 millions d'économie pour 2011 et 2 milliards pour 2012.
Ce sont ces données que je veux mettre en parallèle aujourd'hui, monsieur le ministre. Je ne veux pas me lancer dans une démonstration de technique fiscale mais simplement vous prouver que nous ressentons durement sur le terrain le cadeau que vous faites. Vous pourrez dire ce que vous voudrez, qu'il faut par exemple une bonne gestion des finances publiques, il reste que vous faites aujourd'hui la politique du premier cercle des donateurs de l'UMP contre ceux qui vivent dans les quartiers les plus défavorisés. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Plusieurs députés du groupe SRC. Cela n'a rien à voir !
Il y a des boucliers que l'on attend avec impatience. Pour la députée de Toulouse que je suis, il en est ainsi du bouclier de Brennus – on l'a eu cette année et j'en profite pour féliciter le Stade Toulousain. D'autres sont beaucoup moins acceptables, en particulier le bouclier fiscal. Je ne pense pas d'ailleurs qu'il soit très applaudi place du Capitole.
Vous parlez de réforme de l'impôt de solidarité sur la fortune, mais ce mot de « solidarité » veut-il dire encore quelque chose en France ? Plus on gagne d'argent dans ce pays, et moins l'on paie proportionnellement d'impôt.
Pas moins de 30 à 35 % de nos concitoyens se refusent des soins, mais vous ne semblez pas vous en émouvoir. Vous avez perdu tout sens des valeurs, toute échelle de valeur. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Vous mettez autant d'enthousiasme à voter un bouclier fiscal ou à faire semblant de le réformer qu'à décider de conditionner l'aide médicale d'État au paiement par de pauvres gens d'un droit de 30 euros ! Avec mon collègue Christophe Sirugue, nous en débattrons d'ailleurs bientôt avec M. Goasguen.
Vous mettez beaucoup moins d'empressement à revoir les franchises médicales et les dépassements d'honoraires.
Il y a quelques temps, vous avez eu une conduite indigne en me sifflant alors que je posais une question d'actualité. Au nom du groupe socialiste, nous nous sommes battus pour garder les écrits de l'Incorruptible ! Aujourd'hui, j'ai envie de dire que nous sommes revenus 220 ans en arrière : faudra-t-il un nouveau 4 août pour abolir les privilèges ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Je vous demande, en supprimant cet article, de faire un pas vers l'abolition d'une partie des privilèges de certains de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
En rédigeant cet amendement, nous nous sommes dit que le Gouvernement aurait finalement pu aller plus loin : pourquoi être resté à 1,3 million et ne pas être passé à 1,580 million ? Cela aurait été tout de même hautement plus symbolique lorsqu'on l'aurait traduit en francs : un milliard de centimes. C'est parlant pour nos concitoyens qui sont aujourd'hui en difficulté. C'est aussi significatif d'un Parlement en train de rejoindre un Gouvernement qui ne comprend plus la population, qui n'est plus en phase avec elle.
Ceux qui nous dirigent sont complètement coupés des réalités, ils ne savent plus combien coûte le fait de se nourrir chaque jour, de scolariser ses enfants, de se déplacer. Pis : il semblerait que les députés, et demain peut-être les sénateurs, de la majorité, ne sachent plus non plus ce que vivre difficilement veut dire. Nous ne sommes plus représentatifs de la population française, nous en sommes sociologiquement coupés.
À force de vivre dans le luxe, nous ne savons plus ce que c'est que de vivre, au quotidien, dans la difficulté. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Et cela, les Français nous le feront payer, soit en portant le Front national au plus haut niveau, soit, et je l'espère, en portant dans quelques mois aux affaires la majorité de gauche qu'ils attendent, qu'ils espèrent. Nous sommes fiers, quant à nous, des propositions que nous faisons sur les emplois jeunes, de ce que nous avons fait dans le passé, y compris les 35 heures, pour donner du travail à tout le monde.
Si la représentation nationale oublie le quotidien des Français les plus modestes, elle le paiera cher. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Toutes les bonnes raisons ont été données pour justifier la suppression de cet article et je me rallie pleinement aux propos qui ont été tenus, en particulier ceux de M. Michel Liebgott.
J'aimerais invoquer ici, en ce temple laïque, une raison morale de ne pas rejoindre votre philosophie. Souvenez-vous de l'apologue des deux évangélistes saint Luc et saint Matthieu : « À celui qui a, on donnera, mais à celui qui n'a pas on ôtera même ce qu'il a ». Les riches s'enrichissent et les pauvres s'appauvrissent. C'est exactement ce qui est à l'oeuvre. Un esprit simple, vrai et honnête vous dira que l'économie même de cet article plaide contre son adoption. Il n'est ni juste, vous le savez, ni efficace.
M. Liebgott a raison : des gens viennent nous voir dans nos permanences pour nous dire que les fins de mois sont difficiles, que la retraite n'est pas élevée, qu'il n'y a pas de subvention pour relancer l'activité et créer de la valeur ajoutée. Et ici, on travaille pour quelques centaines de personnes qui prospèrent sous le soleil. Il y aurait de quoi s'indigner, même si je ne veux pas sombrer comme certains d'entre nous dans l'indignation. Nous sommes manifestement confrontés à un problème de philosophie et vous ne vous rendez pas compte qu'il en va de la cohésion de la nation et de la République.
Faire cela, c'est poser le problème du consentement à l'impôt, donc à la République.
Cet amendement vise à supprimer l'article 1er de ce texte. Celui-ci diminue en effet fortement les recettes de l'ISF en révisant en profondeur son barème et son taux. Le relèvement du seuil d'entrée dans l'ISF de 790 000 euros à 1,3 million est de fait une augmentation beaucoup plus importante après l'abattement et les autres exonérations. Beaucoup plus injuste est le passage du nombre de tranches de six à deux et la réduction des taux qui détruisent totalement la progressivité de cet impôt. Plus le patrimoine est important, plus la réduction de l'ISF sera importante. Ainsi, le taux le plus élevé actuellement de 1,8 % serait rapporté – je parle encore au conditionnel – à 0,5 %, c'est-à-dire que l'ISF serait divisé par 3,6 pour les plus fortunés. La baisse de l'ISF représente une perte de recettes de 2 milliards environ. Vous profitez de la suppression du bouclier fiscal pour offrir un cadeau encore plus beau aux plus fortunés en révisant l'ISF. Ce cadeau représente trois fois le bouclier fiscal, ce qui est parfaitement injuste et inacceptable au moment où beaucoup de nos concitoyens sont confrontés à de graves difficultés.
Bruno Le Roux l'a rappelé : que pourrions-nous faire avec ces 2 milliards dont vous vous privez ? Beaucoup d'emplois dans l'éducation, dans la justice, dans la police pourraient être préservés, du lien social pourrait être restauré.
Le choix que vous faites est un véritable désastre pour notre pays.
Plusieurs députés UMP. Mais il a déjà parlé !
Vous le savez, c'est de la répétition que naît parfois la lumière et je pense, monsieur le ministre, mes chers collègues, que vous en avez besoin.
Du texte de notre rapporteur général surgissent parfois des éclairs de lucidité. Je cite souvent le quatrième paragraphe de son introduction qui rappelle que, dans la situation que nous connaissons – explosion des revenus du patrimoine, stagnation des salaires, déformation, pour reprendre ses termes, de la valeur ajoutée au profit des revenus du patrimoine –, un impôt sur le capital est parfaitement légitime. On attendait, après une telle déclaration, que cette majorité, consciente de la nécessité de cet impôt, mais aussi de sa modernité, agisse en conséquence. Cet impôt est moderne, nous dit le rapporteur général, parce qu'il est fondé sur la valeur nette du capital et sur des valeurs actualisées, contrairement à tous les impôts sur le patrimoine qui ont été supprimés dans l'histoire ou suspendus, comme en Allemagne, parce qu'ils étaient des impôts obsolètes, fondés sur des valeurs archaïques, à l'instar de notre taxe foncière. On aurait pu espérer, donc, que notre rapporteur général propose de supprimer le bouclier fiscal, ce qui correspondrait à la situation de notre pays où le pouvoir d'achat, même s'il reste stable en moyenne, baisse tout de même pour un quart des salariés, souvent les plus modestes.
Une réforme simple s'imposait : la suppression du bouclier fiscal. Que préférez-vous faire ? Certes, vous le supprimez mais en contrepartie, vous versez le double aux plus fortunés : les 600 000 foyers qui possèdent plus d'un million de patrimoine. Cette réforme est aujourd'hui particulièrement scandaleuse.
En juillet 2007, vous avez voté la loi TEPA et le bouclier fiscal pour, paraît-il, libérer de certains blocages le travail, les énergies et l'économie française. C'était un acte indécent. À constater la situation actuelle en matière de dette, de déficit, de chômage et l'état de la société, c'est devenu une faute impardonnable.
Le 7 juin 2011, à moins d'un an de la présidentielle, le Gouvernement, aligné sur l'Élysée, supprime le bouclier fiscal parce qu'il était devenu un boulet pour lui. Mais que les riches contribuables du pays se rassurent, l'UMP leur a réservé assez de nouveaux cadeaux dans la loi de finances pour qu'ils puissent conserver leurs privilèges exorbitants.
En bon français, cela s'appelle du cynisme et les Français vous donnent rendez-vous en 2012.
La politique fiscale creuse les déficits de l'État. C'est un cadeau pour les plus riches. Elle est aussi mauvaise pour les finances de l'État.
Déjà, l'élargissement en 2007 du bouclier fiscal avait coûté 600 millions d'euros, auxquels s'ajoutaient le coût des mesures relatives aux heures supplémentaires, aux droits de succession et aux donations,…
Vous voulez augmenter les droits de succession ? Il faudra l'expliquer aux Français !
…en plus d'autres dépenses concernant l'ISF des PME.
Par contre, le revenu des salariés modestes a continué à baisser. La baisse d'impôt des plus fortunés n'a pas stimulé l'économie, au contraire, les déficits publics ont augmenté.
La réforme que vous nous proposez tend à supprimer la première tranche de l'ISF, ce qui fera entrer 400 millions d'euros en moins dans les caisses de l'État. Alors que vous diminuez très fortement les crédits budgétaires de secteurs essentiels tels que l'éducation, l'emploi ou le logement, tout en supprimant des dizaines de milliers de postes de fonctionnaires, vous choisissez d'aggraver le déficit de notre pays et de faire un cadeau fiscal aux plus aisés.
Aussi, nous réclamons la suppression de l'article 1er.
Des cadeaux pour les mêmes, c'est indécent, inacceptable pour tous nos concitoyens qui souffrent, qui , chaque jour, se demandent comment sera fait le lendemain.
L'article 1er va fortement diminuer les recettes de l'impôt de solidarité sur la fortune en révisant le barème et les taux. Une nouvelle baisse de l'imposition sur le patrimoine des ménages les plus riches est un cadeau fiscal totalement incompréhensible. La suppression du bouclier fiscal, demandée depuis longtemps, est actée, mais c'est un écran de fumée puisque le seuil de l'ISF est relevé à 1,3 million d'euros, que le nombre de tranches passe de six à deux, avec des taux fortement réduits. Un tel cadeau est ressenti durement par nos compatriotes.
Ce cadeau fiscal de fin de législature trouvera certes un écho favorable auprès de vos amis, mais il sera ressenti par la très grande majorité de nos concitoyens comme la plus grande injustice de cette législature. Monsieur le ministre, revoyez votre copie en supprimant cet article.
Par cet amendement, nous demandons la suppression de l'article 1er. Nous regrettons en effet qu'une fois encore, vous favorisiez les Français les plus fortunés en faisant peser ces cadeaux sur les finances publiques, pourtant en grand déficit. Nous ne pouvons l'accepter.
Mes chers collègues, vous et moi recevons tous les jours dans nos permanences des personnes en grande difficulté. Comment pouvez-vous continuer à favoriser les plus riches quand une grande partie de nos concitoyens sont désespérés ? C'est de la provocation. Comment le faire comprendre à ceux qui sont mal logés, aux retraités qui ne peuvent plus se chauffer l'hiver, à ces familles qui n'ont plus que les Restos du Coeur pour pouvoir manger tous les jours, à tous les jeunes au chômage et j'en passe ?
C'est pourquoi nous insistons pour que soit supprimé cet article injustifié et injustifiable.
Cet amendement tend à supprimer l'article 1er.
Prenons le cas d'un contribuable ayant un patrimoine d'un million d'euros, qui, en raison de divers abattements, exonérations, déductions, n'est pas imposable à l'impôt sur le revenu. Avec un seuil à 790 000 euros, il payait 1 500 euros environ chaque année d'impôt sur la fortune. Avec un seuil à 1,3 million, il ne paiera plus rien et il aura droit à un abattement sur sa taxe d'habitation. Bref, il ne paie pas d'impôt sur le revenu – les services des impôts connaissent pas mal de gens comme lui –, il ne paiera plus d'ISF et il aura un abattement sur sa taxe d'habitation. Bonjour la justice fiscale !
Cet amendement est très différent de ceux présentés par mes collègues, moins dans sa rédaction, certes, vous l'aurez remarqué, que dans son explication. Avec l'article 1er, vous faites de nouveau un cadeau aux plus riches. Ainsi, vous avez commencé la législature par des cadeaux aux plus riches et vous la terminez par des cadeaux aux plus riches. La rigueur s'impose à tous les autres, salariés, collectivités locales, services publics. Elle s'impose partout, sauf à ceux que vous servez avec servitude.
Croyez-vous que les Français apprécient de voir, d'un côté, la baisse de la TVA sur la restauration, dont le coût est de 3 milliards, et, de l'autre, la suppression depuis 2002 de 80 000 postes dans l'éducation nationale, postes dont le coût représentait 3 milliards ? En période difficile, la responsabilité fiscale commande de faire preuve de justice fiscale et d'équité dans les efforts à réaliser. Diviser par trois l'imposition des plus riches au titre de l'ISF ne va pas dans ce sens.
Par ailleurs, le rapport de M. Carrez montre que cette réforme, même avec la suppression du bouclier fiscal, n'est pas financée, qu'il manque un milliard. Elle se traduira donc par plus de rigueur pour les familles modestes au profit des plus riches, alors qu'il est nécessaire de remettre la justice fiscale au coeur de nos décisions.
Nous attendions la correction d'une injustice fiscale, et nous en avons un doublement. Vous êtes prompts à être choqués par les minima sociaux mais vous ne l'êtes pas par les cadeaux fiscaux que vous donnez aux plus riches. C'est pourquoi il importe de supprimer l'article 1er.
Un rappel au règlement s'impose, sur la base de l'article 58, alinéa 1, de notre règlement.
Je suis signataire de l'un des amendements de cette série, tous différents les uns des autres, qui sont soumis à notre délibération mais, en raison de l'organisation de nos travaux, je n'ai pas pu arriver à temps dans l'hémicycle pour le défendre.
Monsieur Mallot, notre règlement est très clair, on défend son amendement quand on est présent. Si vous n'êtes pas là au moment où il est appelé, il n'est pas défendu. Votre propos ne relève pas d'un rappel au règlement.
Vous avez la parole.
Je vais vous expliquer pourquoi c'en est un. Vous connaissez le règlement mieux que moi, vous savez donc qu'une commission ne peut pas se réunir et travailler sur un ordre du jour pendant que nous sommes en séance publique.
J'ai été retenu en commission des affaires sociales où nous discutions d'une proposition de résolution du groupe Nouveau Centre, en infraction avec le règlement. C'est la raison pour laquelle je suis arrivé en retard, en dépit de mes efforts pour arriver rapidement. Je souhaiterais donc soutenir mon amendement, qui, vous en conviendrez, est très différent de ceux qui ont été présentés jusqu'à présent.
Je souhaiterais faire valoir que l'adoption de l'article 1er représentera un manque à gagner de 1 857 millions, ce qui grèvera les finances publiques, accroîtra la dette de notre pays, reportera la charge sur les générations à venir, notamment les plus faibles et ceux qui seront obligés de la financer, notamment par la TVA.
Ce n'était pas un rappel au règlement, monsieur Mallot.
La parole est à M. Christophe Sirugue, pour défendre son amendement.
Il y a des concomitances qui sont édifiantes, ou qui, en tout cas, nous en apprennent pas mal sur votre échelle de valeurs.
Lorsque l'on parle des faibles et, à votre initiative, du revenu de solidarité active, vous n'avez pas de limite pour imposer des contraintes pour justifier le versement d'une prestation de 460 euros par mois. Lorsqu'on parle des plus riches, en revanche, il est plutôt question de leur faciliter les choses. Ainsi, par cet article, vous remontez le seuil de l'ISF, modifiez les taux, réduisez le nombre de tranches. Bref, vous cherchez comment compenser votre retraite forcée sur le bouclier fiscal. Il y a, d'un côté, 460 euros sur douze mois, soit 5 520 euros par an, et, de l'autre, un seuil à 1,3 million d'euros.
Une loi juste telle que vous l'évoquez, une loi équilibrée, c'est une loi qui devrait se préoccuper d'abord de ceux qui en ont le plus besoin. Vous faites le contraire. Ce fut le cas en début de mandat, vous recommencez en fin de mandat. Vous confirmez que vous êtes là d'abord pour servir ceux qui vous mettent en place et non pour assurer l'équilibre indispensable dans ce pays.
Quelques mots pour vous faire part du sentiment de honte qui est le mien et du désespoir qui m'accable (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) devant tant de mépris à l'égard du peuple de France.
Cet article est tout simplement un non-sens au regard de l'actualité économique et sociale de notre République. Les Français sont dans une situation de plus en plus précaire, et vous semblez l'ignorer. La dette publique atteint des sommets, et vous voulez le nier. Pourtant, votre majorité s'apprête à faire un nouveau cadeau fiscal aux plus fortunés. La suppression de l'ISF n'est en réalité qu'un nouveau transfert fiscal, qui sera une nouvelle fois à la charge des plus démunis d'entre nous.
La suppression du bouclier fiscal, que nous souhaitons, va permettre aux plus riches de cumuler les avantages fiscaux qui leur sont réservés alors que, dans le même temps, les classes les plus modestes n'arrivent plus à joindre les deux bouts tant les prix des matières premières ne cessent d'augmenter, tant les salaires sont faibles et désespérément bloqués, conséquence directe de votre politique.
Pourtant, le Président de la République, dans son discours de 2007 sur la République, que, nous disait-il, il souhaitait irréprochable, se voulait l'homme de la nation et non celui d'un parti ou d'un clan. La réalité de son bilan est tout autre. Il me plaît ici de rappeler les paroles de Jean-Marc Ayrault, pour qui votre Président était et resterait le candidat et le Président des riches.
Le club des 370 plus gros donateurs de l'UMP, mis un peu en veille lors de l'affaire Woerth, repart de plus belle depuis quelques mois. Cette réforme est une nouvelle fois un cadeau à ce cercle qui rapporte annuellement plus d'un million d'euros au parti de la majorité. Ce cadeau, cette nouvelle réforme injuste et inégalitaire, n'a pour but que de remercier les généreux donateurs de l'UMP. C'est de la provocation, je le déplore au nom de tous ceux qui souffrent quotidiennement et qui n'ont plus aucun espoir à cause de votre attitude sectaire et méprisante. Je refuse de cautionner pareille indécence.
La parole est à M. Gérard Charasse, pour soutenir l'amendement n° 275 .
Cet amendement vise à supprimer l'allégement de l'ISF. Les raisons en sont multiples.
Une étude de Camille Landais, « Les hauts revenus en France (1998-2006) : une explosion des inégalités ? » fait apparaître une montée des inégalités de plus en plus forte dans notre pays. Les très hauts revenus se sont envolés au cours des vingt dernières années, les 0,01 % des Français les plus riches ont vu leurs gains augmenter de 40 % entre 2004 et 2007, soit quatre fois plus que ceux des 90 % des Français les moins riches.
Les inégalités de patrimoine sont plus fortes encore que les inégalités de revenu. On assiste à la résurgence d'une société d'héritiers. Pourtant, vous voulez encore diminuer la pression fiscale sur les hauts revenus et les gros patrimoines.
L'état des finances publiques devrait pourtant vous inciter à ne pas nous priver de ressources fiscales. Favoriser les baisses d'impôt à un moment où les ressources fiscales s'amenuisent est une erreur grave. Surtout, l'État sera de plus en plus sollicité pour assurer la transition écologique, investir dans la formation supérieure et la recherche, maintenir un service public de qualité, nous en avons déjà parlé.
Les réformes de la fiscalité du patrimoine conduites par le Gouvernement depuis 2007 ont eu pour conséquence une dégressivité de l'impôt qui s'accélère au sommet de l'échelle des revenus et des patrimoines – je l'ai déjà dit – et qui nuit fortement à la cohésion sociale. La défiance des contribuables face à l'impôt devient préoccupante. Elle est à la fois verticale, envers l'institution et l'État, accusé de favoriser les plus riches – nous avons vu en quoi c'était vrai –, et horizontale, envers les autres contribuables, soupçonnés de dissimuler au maximum leurs revenus et donc les impôts qu'ils doivent.
Il est nécessaire de sortir de cette logique de défiance pour revenir à une logique de consentement à l'impôt progressif.
Enfin, la logique menant à votre nouvelle réforme, l'abrogation du bouclier fiscal mis en place en 2007 en contrepartie de cet allégement de l'ISF, est pernicieuse. Le Gouvernement ne fait aucune concession puisque le résultat initialement souhaité, l'allégement de l'ISF, aura été atteint en quatre ans sans contrepartie. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission sur ces amendements.
La commission a rejeté ces amendements de suppression car la présente réforme est trois fois juste. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Elle est tout d'abord juste parce que les plus fortunés des Français vont payer davantage d'ISF. Aujourd'hui, plus ils sont fortunés, plus ils font jouer le plafonnement Rocard et le bouclier fiscal, et l'ISF qu'ils payent est en réalité dérisoire. Dès que cette réforme entrera en vigueur, les plus fortunés payeront davantage d'ISF.
Cette réforme est également juste pour 300 000 contribuables qui n'ont rien à faire dans l'ISF, où ils ne sont entrés qu'à cause de l'envolée du prix de l'immobilier de leur résidence principale au cours des dernières années. Cette analyse est du reste reprise presque mot pour mot par Michel Sapin dans une interview très intéressante qui vient de paraître dans Le Monde de cet après-midi. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
À la question : « Les socialistes reviendront-ils sur le seuil d'entrée porté à 1,3 million ? », Michel Sapin répond : « Pas forcément. Pour les "petits" patrimoines, dire qu'un certain nombre d'entre eux est entré dans l'ISF du fait du poids de l'immobilier, et notamment de la résidence principale, n'est pas complètement faux. » (Applaudissements et exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Le troisième argument, peut-être le plus important, c'est que cette réforme est juste du point de vue de l'économie et de l'emploi. On se demande souvent, dans notre pays, pourquoi, contrairement à l'Allemagne, nous n'avons pas d'entreprises de taille intermédiaire, d'ETI. C'est que, depuis bientôt trente ans, à cause de l'impôt sur les grandes fortunes (« Mais non ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR), à cause d'un ISF aux taux confiscatoires, nos entreprises familiales ont dû être, pour un grand nombre d'entre elles, vendues à des groupes étrangers. Les actionnaires minoritaires familiaux ne pouvaient pas payer un ISF confiscatoire ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Je pourrais, monsieur Emmanuelli, vous donner des exemples d'entreprises dans les Landes ! Ces entreprises ont été vendues à des groupes étrangers et les emplois ont été délocalisés. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Pourquoi tant de pays autour de nous ont-ils eu la sagesse de supprimer l'ISF : l'Allemagne, l'Espagne, la Suède, bref tous les pays européens ? C'était pour protéger leurs entreprises et leurs emplois, ce que vous n'avez pas su faire !
Il s'agit d'une réforme qui fera payer davantage les plus fortunés et qui sera au service de nos entreprises et du maintien de nos emplois sur le territoire national. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
J'ai écouté avec évidemment beaucoup d'intérêt les propositions des quelque quatre-vingts orateurs du groupe socialiste. Abstraction faite du caractère un peu répétitif d'une telle présentation,…
…je ne suis pas convaincu par l'argument. Comme je vous l'ai dit tout à l'heure lors de la séance des questions au Gouvernement, ce qui vous gêne, politiquement, dans cette réforme, c'est que le Gouvernement ne supprime pas l'ISF. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
C'est justement la force de cette réforme équilibrée – suppression du bouclier et aménagement de l'ISF – qui rend stériles, presque dérisoires, ces interventions répétitives. (Mêmes mouvements.) Vous ne convaincrez personne que la suppression du bouclier soit un cadeau aux plus fortunés. Vous ne convaincrez personne que le transfert de la fiscalité sur le stock du patrimoine vers la transmission du patrimoine soit un cadeau à quiconque, puisque nous sommes dans l'échelle du cycle de vie.
Si vous étiez sur un terrain moins dogmatique, moins idéologique, cette réforme pourrait parvenir à une forme de consensus, eu égard au fait qu'au lendemain de la crise nous avions à gérer une tension budgétaire, qu'il était par conséquent logique de demander aux plus fortunés d'entre nous…
…de continuer, par le biais d'une contribution spécifique acceptable, de financer la réduction des déficits publics. Peut-être que nos voies se seraient séparées à propos de la convergence fiscale franco-allemande, une convergence pour aboutir à terme – pourquoi pas ? – à une fiscalité du patrimoine globale et à la suppression de l'ISF comme dans tous les autres pays européens. Quoi qu'il en soit, à ce stade et sur cette réforme, aucun de vos arguments ne portera en profondeur. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Le rapporteur général a répondu sur le fond avec sa politesse légendaire. Je n'aurai pas cette politesse et je vous dirai le fond de ma pensée, qui est, j'en suis sûr, partagée par de nombreux collègues.
Ce que vous êtes en train de faire, dans l'opposition, est absolument dégradant pour le débat parlementaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations et rires sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Vous pouvez vous gausser, mais jamais, dans un débat de loi de finances, on n'a procédé de la sorte !
Lorsque je vois parmi vous quelqu'un qui prétend exercer un jour la magistrature suprême cautionner par sa présence cette démarche, eh bien, pardon de vous le dire, je trouve cela inacceptable et dégradant pour la démocratie. On ne peut pas procéder de la sorte ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, parce que les esprits doivent s'apaiser et nos débats reprendre un cours normal, loin des litanies dilatoires tout à fait absurdes, je demande une suspension de séance. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Article 1er
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures quarante, est reprise à dix-huit heures cinquante.)
J'ai demandé la parole pour répondre au rapporteur général parce que, pour des raisons qui m'échappent, il a mis implicitement en cause le département des Landes. Je pensais pourtant lui avoir expliqué en commission des finances que les transmissions d'entreprises ne se font plus comme il l'imagine. Je suis en mesure de lui citer au moins trois ou quatre cas dans mon département où la transmission s'est opérée par le biais d'un LBO familial : cela consiste à créer une holding, abondée à 20 % par le vendeur – en général le propriétaire – et à 80 % par un emprunt qui sera payé par l'entreprise, ce qui permet au vendeur d'endosser le montant de la valorisation de l'entreprise et à ses héritiers d'en rester propriétaires. Je vous l'ai déjà expliqué, monsieur Carrez.
Sur le fond, vous savez pertinemment que vous avez commencé ce septennat par une faute lourde : celle de la loi TEPA.
Mais cela nous paraît tellement long, monsieur le président du groupe UMP.
Et encore, vous n'en êtes qu'à la moitié des dix ans ! (Sourires sur les bancs du groupe UMP.)
Acculé, il vous fallait, monsieur le rapporteur général, débarrasser le paysage fiscal de cette faute. Vous étiez sollicité pour supprimer l'ISF, mais vous avez pensé que c'était politiquement risqué parce que vous aviez en mémoire les actes de M. Chirac à une autre époque. Vous avez donc cherché à vous débarrasser de ce bouclier encombrant tout en faisant malgré tout, au passage, un signe significatif en direction de certaines catégories de contribuables. C'est la raison pour laquelle on passe de 562 000 à 262 000 assujettis à l'ISF, en en évacuant 300 000 au passage.
Vous avez cité M. Sapin. Il est exact que dans Le Monde de cet après-midi, il reconnaît que certaines personnes sont entrées dans l'assiette de l'ISF par le biais de la valorisation de leurs biens immobiliers (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP), mais vous avez oublié de préciser qu'il n'en conclut pas qu'il faut les en extraire : au contraire, il faut les y maintenir. Quand vous citez quelqu'un, ayez la correction d'aller jusqu'au bout, ne vous limitez pas à ce qui vous arrange en omettant ce qui vous dérange. (« Eh oui ! » sur de nombreux bancs du groupe SRC.)
Puisque vous êtes en train de lire le journal, monsieur Carrez, regardez le titre de l'article !
Tout cela est grotesque. Vous êtes dans la difficulté parce que vous êtes en train de commettre une faute lourde contre l'équité fiscale, et vous savez qu'elle vous coûtera cher électoralement. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Vos exclamations ne changeront rien à la réalité.
Quant à M. Chartier – j'ai bien compris, comme tout le monde, qu'il parlait de moi quand il évoquait un candidat à la présidence –, je ne lui répondrai pas parce que tout ce qui est excessif est insignifiant ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Un dernier point : j'ai vu circuler une photo où, paraît-il, je fais un doigt d'honneur au Premier ministre. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je ne l'ai pas fait, et si mon geste a été interprété ainsi, j'en suis désolé. M. le président de l'Assemblée qui, lui, a regardé l'ensemble de la vidéo et avec qui j'en ai discuté, partage mon avis. Encore une fois, si mon attitude a pu choquer, j'en suis désolé. Que chacun sache que si j'ai quelque chose à dire à M. Fillon, cela ne sera pas par le biais d'un doigt d'honneur : je suis assez grand et j'ai suffisamment d'expérience pour lui dire ce que j'ai à lui dire sans faire de gestes inconvenants. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je trouve que notre collègueHenri Emmanuelli est un peu sévère avecJérôme Chartier qui, tout à l'heure, a fait le pompier. Il s'est accroché à la corde qui agite le bourdon de la cathédrale pour sonner le rappel de ses collègues de l'UMP qui avait déserté l'hémicycle. Telle était la réalité de son intervention : quand on n'a pas d'arguments mais qu'il faut faire preuve d'énergie pour sonner le rappel, les excès sont compréhensibles.
Gilles carrez, que nous connaissons bien et dont nous estimons la modération – qu'il a cependant rangée au placard aujourd'hui –, a défendu avec énergie, obsession, entêtement, l'ISF tel qu'il le voit. Il a parlé de ceux qui ont vendu leurs parts, leur société, devant un ISF confiscatoire, et qui sont partis. Mais qu'ont-ils vendu en réalité ? Ils ont vendu leur âme parce que ce ne sont pas des patriotes !
C'est la différence avec les Allemands : leurs groupes privilégient les sociétés allemandes sur les chantiers étrangers. Alors que chez nous, à une exception près, les grands groupes privilégient ceux qui leur ramènent le plus de petits sous, indifférents qu'ils sont à l'emploi. Nous touchons là à une question de principe, qu'il faudrait soulever au lieu de critiquer ce qui fait notre contrat social depuis plus de deux siècles. Celui-ci est assis sur des valeurs qui devraient être communes, l'éducation, la santé, et d'autres encore qui constituent le modèle français, complètement à l'opposé de ceux que vous et vos collègues défendez, des modèles qui s'inscrivent dans l'égoïsme de classe.
M. François Baroin dénonçait l'esprit de classe comme étant archaïque. Pourtant, c'est bien lui qui vous habite : vous défendez les vôtres, ceux qui plument la France, ceux qui plument les plus pauvres !
Monsieur le président, sentant que, touché par mes arguments, vous n'en pouvez plus de les écouter, je vais terminer en disant au ministre et aux collègues de la majorité qu'ils ne peuvent pas démontrer le contraire de ce que j'ai dit : d'un côté, vous prenez 600 millions d'euros, et, de l'autre, vous donnez 1,8 milliard d'euros. Votre entêtement, votre obsession sont le résultat de votre esprit de classe qui fait que, même en difficulté politique, vous continuez jusqu'au bout, avec acharnement, à privilégier ceux dont vous êtes les fondés de pouvoir ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, chers collègues, monsieur le ministre, je remercie M. Chartier d'avoir évoqué ma situation pour justifier son intervention. Mais le débat parlementaire mérite d'être respecté. Étant sur ces bancs depuis longtemps, depuis 1988,…
Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est trop !
…j'ai connu toutes les situations, tantôt dans la majorité, tantôt dans l'opposition. À chacun de ces moments, j'ai constaté que l'opposition a toujours trouvé des façons de s'exprimer qui méritent parfois d'être contestées, mais parfois d'être respectées. Sur la question fiscale, un sujet d'une telle importance, il n'y a jamais assez de débats pour connaître les effets des décisions que nous pouvons prendre ici.
Je pense que cette réforme rencontre trois difficultés.
La première, c'est qu'elle est partielle dès lors qu'on s'attaque à la fiscalité en abordant seulement le sujet des patrimoines. Quel que soit le sens de votre politique, monsieur le ministre, il est clair que vous vous mettez forcément dans une position contradictoire puisque vous allez alléger l'imposition sur les patrimoines tout en ne prenant aucune décision sur l'imposition des revenus, malgré quelques avis prononcés sur les bancs de la majorité.
Vous auriez pu considérer, au vu de la période que nous connaissons, qu'il fallait alléger l'imposition des patrimoines, mais frapper davantage certains revenus. Or vous n'en faites rien. Vous prenez donc la responsabilité d'alléger l'imposition des patrimoines les plus élevés.
Deuxième difficulté à laquelle vous êtes confronté : vous essayez de corriger une erreur qui a été introduite dès le début de cette législature, à savoir le bouclier fiscal. Votre majorité traîne ce fardeau depuis maintenant plus de quatre ans. Lorsque le Gouvernement a été interpellé dans cet hémicycle, je ne sais combien de fois, par les députés de l'opposition, vos prédécesseurs, puis vous-même, avez défendu avec la dernière énergie le bouclier, considérant même que c'était un élément de la stabilité fiscale et un moyen d'éviter l'évasion fiscale. Et maintenant, en fin de partie, en fin de mandature, vous le sacrifiez. Mais comme vous êtes soumis à des pressions – je ne veux pas ici les identifier –,…
…vous accordez à ceux qui étaient bénéficiaires du bouclier fiscal des avantages supérieurs à travers la baisse de l'impôt sur la fortune ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Très juste !
Si ce texte est adopté, vous rencontrerez un troisième problème : c'est au moment où le pouvoir d'achat des Français connaît, pour le moins, une stagnation, où les salaires ne progressent qu'au rythme de l'inflation, où les prélèvements fiscaux décidés pour l'année 2011 s'opèrent, où nous apprenons que les bonus bancaires n'ont pas été aussi importants en 2010 qu'en 2009, où les revenus des plus fortunés et les valeurs des patrimoines ont considérablement augmenté, que vous choisissez d'abaisser la fiscalité sur les plus favorisés.
Ce n'est plus le fardeau du bouclier fiscal que vous aurez à porter, mais le boulet de votre réforme fiscale. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je ne sais pas qui sera le candidat de la droite ni qui sera le candidat de la gauche à l'élection présidentielle, mais, au vu de cette réforme-là, je n'aimerais pas être à la place de celui de la droite. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Je remercie la majorité qui s'est dessinée autour du rejet de la demande de suppression de l'article. Avant qu'il ne parte, je voudrais dire à M. Hollande – dont je salue la présence – qu'il commet trois erreurs d'analyse, deux étant probablement liées à des souvenirs et la troisième à une espérance qui n'a pas trouvé de rendez-vous politique sur cette affaire.
Vous avez évoqué votre arrivée dans cet hémicycle en 1988, peu après avoir exercé des fonctions de conseiller au cabinet du président François Mitterrand. Lorsqu'il a instauré l'impôt sur les grandes fortunes en 1982, François Mitterrand a fixé le taux marginal à 1,5 %, mais à l'époque l'inflation était à deux chiffres et l'emprunt Delors à 16,75 %.
La gauche au pouvoir demandait aux plus fortunés de faire un effort sur 10 % de leurs revenus.
Avec le temps et l'exercice du pouvoir, vous avez commis une autre erreur que vous avez vous-même reconnue : vous avez augmenté la tranche marginale à 1,8 %.
Et puis, dans un éclair de lucidité – pour le coup ce n'était pas Mitterrand mais Rocard – …
…a été mis en place le plafonnement. Premièrement, vous ne pouvez pas sérieusement et durablement contester le bouclier en ayant instauré le plafonnement.
Deuxièmement, les temps ont changé, la situation économique a évolué. Si le taux marginal est actuellement fixé à 1,8 %, les obligations d'État sont rémunérées à 3,6 %. C'est-à-dire que l'effort demandé aux plus fortunés atteint 50 %, contre 10 % en 1982 quand la gauche était au pouvoir.
C'est donc une question de bon sens et non pas d'idéologie : en supprimant le bouclier, on modifie les taux de l'ISF. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Ne pas le voir, ne pas le comprendre, c'est tourner le dos à la compétitivité. Ne pas le voir, ne pas le comprendre, c'est en effet accompagner le projet socialiste qui porte sur une augmentation des dépenses publiques, sur la création d'emplois publics qui ne sera pas financée…
…et un choc fiscal que, en quatre années de pouvoir, Gouvernement et majorité ont toujours refusé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Pour faire honneur au débat, et puisque le ministre a bien voulu me répondre, je vais préciser ma pensée sur deux points.
Premièrement, lorsqu'ils supportaient les taux de l'IGF au début des années 1980, les patrimoines ne connaissaient pas de progression significative.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Bien sûr que si !
La valeur des patrimoines n'a connu d'envolée que depuis les années 1980-1990. Les taux pratiqués actuellement s'appliquent à des patrimoines qui s'apprécient continûment et beaucoup plus fortement que les revenus du travail.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Il a raison !
Ma seconde considération porte sur le plafonnement décidé au lendemain de la victoire de François Mitterrand en 1988, alors que le Premier ministre était Michel Rocard. Rappelons qu'un Premier ministre a plafonné le plafonnement en 1995 : il s'appelait Alain Juppé. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Cet échange de qualité permet d'éclairer cette honorable assemblée sur les enjeux politiques, techniques, économiques et de justice sociale.
M. Hollande a un droit de réponse : qu'il me permette d'avoir un droit de réplique, c'est l'usage et nous en terminerons de notre échange.
En ce qui concerne l'évolution économique et de la question du plafonnement, il est vrai que nous avons pris cette décision en 1995 – j'étais le porte-parole du Gouvernement d'Alain Juppé.
Nous avons commis une erreur que nous avons reconnue et que nous corrigeons aujourd'hui. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
En tant que leader respectable d'un parti respectable, je voudrais que vous reconnaissiez aussi que vous avez commis l'erreur de vous enfermer en permanence dans un dogme consistant à désigner du doigt des acteurs économiques et que ce que propose le Gouvernement est sage, responsable, juste, équitable et économiquement efficace pour notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Aurai-je la cruauté de rappeler certains éléments à nos collègues socialistes ? Qui a voté l'exonération de l'outil de travail ? C'est vous. Vous avez exonéré Liliane Bettencourt et mangé votre chapeau. C'est un certain Pierre Bérégovoy qui vous a fait avaler votre chapeau. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Pourquoi avez-vous fait cela ? Tout simplement parce que les dirigeants socialistes de l'époque se sont rendu compte que ne pas exonérer l'outil de travail conduisait à détruire la compétitivité.
Parlons des oeuvres d'art. Contrairement à ce qu'affirment certains polémistes, ce n'est pas Laurent Fabius qui a poussé à l'exonération des oeuvres d'art. Désolé, chers collègues, mais ce n'est pas la vérité historique. Il s'agit d'une décision de François Mitterrand. Pourquoi avez-vous adopté cette exonération et pourquoi voulez-vous, maintenant, revenir en arrière ?
Troisième exemple : le plafonnement. Vous avez voté pour cette mesure, à raison : il est impossible de créer un ISF sans plafonnement, à moins d'encourir la censure du Conseil constitutionnel. Pour ma part, je ne vous ai jamais critiqué sur ce point. On peut discuter sur le niveau du plafonnement, mes chers collègues, mais pas sur le principe. Nous avons d'ailleurs fait observer au Gouvernement qu'il fallait absolument un plafonnement, sinon les textes que nous sommes en train d'adopter seraient annulés par le Conseil constitutionnel – c'est du moins un risque majeur.
Dernier point : Alain Juppé a commis une erreur en déplafonnant le plafonnement, mais c'est un honnête homme et, moins de six mois plus tard, il a reconnu cette erreur. Il a même essayé de la réparer. Savez-vous qui l'en a empêché ? Le président de l'Assemblée nationale de l'époque, Philippe Séguin.
Vous le savez parfaitement, c'est dans la presse ! Vous trouviez que c'était excessif, mais, quand vous avez été dans la majorité, vous avez refusé de revenir à votre propre plafonnement.
Nous sommes dans un monde politique fou : quand elle est dans l'opposition, la gauche dit l'inverse de ce qu'elle fait lorsqu'elle est au pouvoir, et réciproquement. À un moment, il faut en sortir.
Dernière question : comment pouvez-vous penser que vous être les seuls à avoir raison dans cette affaire parmi tous les partis socialistes d'Europe ? Ouvrez les fenêtres ! (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
Nous sommes au coeur du débat ; il faut que la vérité éclate. (Rires sur les bancs du groupe UMP.) Il est très intéressant de constater que le ministre accepte le débat et je voudrais l'en remercier, car il existe vraiment une divergence fondamentale entre nous, malgré toutes les astuces oratoires de M. de Courson.
Il est vrai que si, d'un côté, vous supprimez le bouclier fiscal, de l'autre vous allégez l'impôt sur la fortune, allant presque jusqu'à le supprimer.
Comme ce ne sont pas forcément les mêmes contribuables qui sont concernés, votre argumentation ne tient pas, monsieur le ministre. Sur les quelque 14 000 contribuables protégés jusqu'en 2014 par le bouclier fiscal – rappelons qu'il va survivre deux ans –, à peine 10 000 paient l'impôt sur la fortune auquel sont assujettis 600 000 contribuables. Votre réforme ne touche pas ces gens-là, ou très peu d'entre eux, mais elle concerne 300 000 contribuables qui ne vont plus payer l'impôt sur la fortune. Quant à tous les autres, ils verront leur impôt sur la fortune considérablement baisser.
Pour terminer, je citerai des chiffres éloquents que vous ne pourrez contester : les 200 000 contribuables détenant 1,7 million d'euros de patrimoine verront leur impôt diminuer de 79 % ; les 1 900 foyers disposant d'un patrimoine de plus de 17 millions d'euros verront leur impôt diminuer de 370 000 euros en moyenne ; les très grandes fortunes qui possèdent environ 37 millions d'euros de patrimoine verront leur impôt baisser de plus de 50 % par rapport à 2009 ; le coût total de l'abaissement de l'ISF des personnes disposant d'un patrimoine supérieur à 17 millions d'euros s'élèvera à 700 millions d'euros, c'est-à-dire le coût annuel du bouclier fiscal.
Quand nous disons que vous profitez de cette astuce pour faire un nouveau cadeau fiscal, nous n'inventons rien, nous disons la vérité…
…mais cette vérité vous gêne, elle vous fait honte. Pour notre part, nous la dénonçons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Nous sommes là pour débattre, monsieur le président Ayrault. Puisque vous avancez des arguments, permettez-moi de les contester et d'essayer de les démonter méthodiquement, mais avec une certaine objectivité.
Bien sûr nous sortons 300 000 personnes de l'impôt de solidarité sur la fortune. C'est un choix assumé que nous faisons pour une raison très simple : en vingt ans, compte tenu de l'évolution du marché de l'immobilier, des gens ont été assujettis à l'ISF du seul fait qu'ils étaient propriétaires de leur résidence principale, sans que leurs revenus et leur situation personnelle aient changé.
Est-ce un élément d'injustice ? (« Non ! » sur les bancs du groupe UMP.) Comment pouvez-vous sérieusement parler d'injustice alors qu'il s'agit d'une simple adaptation du taux de prélèvements obligatoires tout confondu et de cette contribution exceptionnelle de solidarité sur la fortune vis-à-vis de gens dont les revenus n'ont pas évolué ?
Quant à la modification des tranches de l'ISF, elle répond aussi à un souci de justice. Si le bouclier – qui n'est, je le répète, que le petit-fils du plafonnement Rocard – a été mis en place, c'est parce que, une fois additionnés, les prélèvements étaient devenus confiscatoires. Dès lors que nous supprimons le bouclier, c'est-à-dire le petit-fils du plafonnement Rocard…
…il est logique et naturel de modifier l'assiette de l'ISF.
Je ne désespère pas de trouver les arguments pour vous en convaincre. J'ai compris que nous pouvions travailler durant tout le week-end.
J'espère que vous serez, les uns et les autres, présents au cours de ces heures de débat. Mais nous avons vraiment là une réforme juste, équilibrée, équitable, compétitive, et qui poursuit un seul objectif : dans la tension budgétaire actuelle, maintenir une contribution exceptionnelle de la part de ceux qui ont les moyens pour financer les politiques publiques dont nous avons besoin, tout en corrigeant les effets négatifs qui se sont révélés au fil du temps.
Vous n'avez pas souhaité les corriger, d'abord pour des raisons idéologiques – je le déplore une fois de plus – et ensuite par absence de courage quand vous étiez aux responsabilités. Mais le bon sens commandait d'atterrir sur ce type de réforme. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je suis saisi d'un amendement n° 84 rectifié .
La parole est à M. François de Rugy.
Cet amendement vise à rétablir un taux progressif pour l'impôt de solidarité sur la fortune.
Comme je l'ai indiqué hier soir dans la discussion générale, les écologistes ont compris que la suppression partielle de l'impôt de solidarité sur la fortune – c'est bien de cela qu'il s'agit – préfigure sa suppression totale dans les années à venir si la majorité reste inchangée. C'est l'intention affichée par le Président de la République, Nicolas Sarkozy.
Quant à nous, nous sommes favorables à une fiscalité sur le patrimoine et tous vos raisonnements un peu fumeux reposant sur la comparaison du taux de l'impôt de solidarité sur la fortune avec celui des emprunts d'État n'y changeront rien. La réalité, c'est que la valeur des patrimoines en France, ainsi que leurs revenus ont beaucoup plus augmenté, et beaucoup plus vite, que les salaires et les pensions.
Nous faisons également remarquer une fois de plus que l'impôt de solidarité sur la fortune, qui est un impôt sur le patrimoine et, pour partie, sur le patrimoine foncier, est un impôt plus juste que les taxes foncières qui existent aujourd'hui. Si on voulait réformer l'impôt sur le patrimoine, ce sont ces taxes qu'il faudrait revoir.
Nous plaidons pour une assiette large, intégrant les oeuvres d'art et une partie des biens professionnels. Lorsqu'un patron de PME est propriétaire de la majorité ou de la totalité de son entreprise, c'est un bien professionnel. Mais, quand un actionnaire détient 25 % d'une entreprise au simple motif qu'il est au conseil d'administration et qu'il y a une vague fonction, souvent fictive, il n'est pas acceptable que cela soit considéré comme un bien professionnel.
Nous sommes favorables à des taux progressifs et maîtrisés. L'échelonnement des taux de l'impôt de solidarité sur la fortune, que vous voulez supprimer pour ne plus retenir que deux taux – 0,25 % et 0,50 % –, était intelligent. Nous proposons des tarifs applicables de 0,25 % à 1,3 %, tout simplement pour que l'impôt de solidarité sur la fortune ait un rendement correct et dynamique. Contrairement à ce que vous affirmez depuis hier, cet impôt a montré sa double efficacité : d'une part, il permet de faire rentrer des recettes dans les caisses de l'État ; d'autre part, il n'a pas fait fuir les patrimoines de France, puisque, comme nous sommes nombreux à le rappeler, notre pays est le numéro un en Europe pour le nombre de millionnaires.
(L'amendement n° 84 rectifié , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
M. Muet avait levé la main pour demander la parole sur l'amendement n° 84 rectifié , monsieur le président.
Je ne pouvais pas la lui donner : j'avais déjà mis l'amendement aux voix. Je la lui donnerai sur l'amendement suivant.
Je trouve, monsieur le président, que c'est incorrect. Nous avons un débat sérieux sur un sujet fiscal qui concerne tous nos compatriotes…
Il me paraît difficile, monsieur Muet, de dire que j'ai été incorrect. Depuis le début de l'après-midi, j'ai laissé parler tous ceux qui le souhaitaient, et j'ai encore, à l'instant, laissé le débat se dérouler largement. Je ne peux pas accepter que vous mettiez en cause la présidence. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Vous avez la parole, pour défendre l'amendement n° 484 .
Monsieur le président, j'avais demandé à m'exprimer sur l'amendement défendu par M. de Rugy, qui pose une vraie question. Il visait en effet à rétablir une progressivité des taux que le Gouvernement supprime complètement. Nous savons très bien que l'ISF, comme l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, est complètement mité par un ensemble de niches fiscales, si bien que, malgré des taux allant jusqu'à 1,8 %, son rapport est extrêmement faible. Une réforme de l'ISF qui aurait du sens consisterait donc à élargir l'assiette de cet impôt.
C'est l'objet d'un certain nombre d'amendements. L'élargissement de l'assiette de l'ISF ferait de ce dernier un impôt efficace.
Que s'est-il passé depuis 2002 ? Vous n'avez cessé de supprimer la fiscalité qui pesait sur les plus-values du patrimoine, qu'il s'agisse du patrimoine immobilier ou du patrimoine mobilier, de miter l'ISF et de développer les possibilités d'échapper au barème de l'imposition du revenu sur les revenus du patrimoine, à tel point que notre fiscalité porte aujourd'hui sur le travail et très peu sur le patrimoine.
Il y a donc là un vrai sujet de débat. Nous avons besoin de rétablir une fiscalité cohérente sur le patrimoine, ce qui est l'inverse de ce que vous êtes en train de faire. La proposition de nos collègues avait donc un sens.
J'en viens à la défense de l'amendement n° 484 . Pour l'imposition du patrimoine, il convient d'avoir une assiette large et d'exonérer les biens professionnels définis au sens strict.
Comme Pierre-Alain Muet l'a rappelé, le parti socialiste, le groupe SRC et probablement d'autres collègues dans cet hémicycle sont favorables à des assiettes larges et à des taux progressifs.
C'est pourquoi nous avons déposé toute une série d'amendements sur la forêt. Sans doute nous dira-t-on que la situation dans ce secteur est difficile. Mais, si je me réfère au budget pour 2011, il en va de 52 millions d'euros.
D'autres amendements concernent les oeuvres d'art et je ne doute pas qu'ils susciteront des discussions encore plus passionnées.
Peut-être pouvons-nous envisager de sous-amender, pour essayer de trouver un terrain d'entente.
En tout cas, je le répète, ce que nous demandons, c'est une assiette large et des taux progressifs. Vous faites tout le contraire. L'assiette est mitée et il n'y a plus de progressivité, le nombre des taux étant réduit à deux.
L'article 885 H du code général des impôts permet d'exonérer de l'impôt de solidarité sur la fortune à concurrence de trois quarts de leur valeur, les biens ruraux loués par bail rural à long terme, les parts détenues de groupements forestiers, de groupements fonciers agricoles et de groupements agricoles fonciers.
Dans le contexte actuel, l'élu du département de l'Allier que je suis peut vous dire que cette disposition n'a aucune justification. Elle permet à des contribuables très aisés de réduire fortement leur imposition à l'impôt de solidarité sur la fortune. Ce dispositif fiscal constitue ainsi une réduction importante de l'assiette d'imposition à l'ISF. Il coûte 52 millions d'euros en 2011 au budget de l'État.
Dans la période de crise économique et sociale que nous connaissons, demander un effort à cette catégorie de contribuables est une mesure de justice. Elle se situe à l'opposé de celle du Gouvernement et de la majorité qui réduisent fortement l'ISF des plus riches en le faisant financer par l'ensemble des Français et en creusant l'endettement public.
Pour toutes ces raisons, il convient de supprimer cette disposition.
Quand on parle de la forêt, cela suscite toujours beaucoup d'émotion. Je vois M. Bouvard qui lève le bras pour demander la parole. Cela fait d'ailleurs un petit moment qu'il le fait, mais ce n'est pas moi qui préside la séance, monsieur Bouvard.
Compte tenu de l'état de la forêt aujourd'hui, notamment dans les Landes, personne ne sera imposable, à part, peut-être, la Caisse des dépôts et consignations. Après deux tempêtes, il ne reste en effet plus beaucoup de matière.
Mais, dans l'absolu, il n'est pas normal que ce type de bien échappe à l'impôt de solidarité sur la fortune, d'autant qu'il bénéficie d'un certain nombre d'avantages fiscaux : exonération de taxe foncière et de droits de succession. Le département des Landes en sait quelque chose. Je ne suis pas contre le fait que cela y soit, mais, dans l'état actuel des choses, cela risque d'être peu opérant.
C'est un sujet qui est venu en débat lorsque j'ai eu la responsabilité de présenter, au nom de la commission des finances, le budget de la forêt, lequel a maintenant disparu. La forêt a eu, pendant un temps, un budget propre, mais il a été fondu dans celui du grand ministère de l'agriculture, ce que je ne peux que regretter.
Comme l'a souligné mon collègue Henri Emmanuelli, il y a deux types de forêts. Les tempêtes successives qui ont touché la France ont eu des conséquences sur celles qui ont un rapport et qui sont incluses dans une logique économique. L'élargissement de l'assiette de l'ISF à celles-ci, avec une imposition progressive, n'aurait aucun sens.
Cependant, il existe d'autres forêts dont les propriétaires n'assurent pas l'entretien mais qu'ils réservent souvent pour des chasses privées, qui se révèlent d'une rentabilité très importantes et qui sont totalement exonérées de l'impôt de solidarité sur la fortune. C'est pourquoi il est proposé de les assujettir à l'ISF, même si cela ne rapporterait pas énormément puisque les sommes en jeu se montent à 52 millions d'euros.
Cet amendement a au moins le mérite de lancer le débat sur l'avenir de la forêt française et offre l'occasion de rappeler qu'il y a deux manières de la gérer : en faisant de la spéculation foncière ou en s'en servant comme outil de travail.
La France manque d'industries de transformation du bois. Elle a des ressources naturelles très importantes, mais les forêts sont insuffisamment exploitées, et donc entretenues. Au lieu d'être des ressources économiques, elles sont souvent utilisées comme une rente pour obtenir des allégements d'ISF.
Le bois des Vosges, par exemple, est exporté vers la Chine, et nous réimportons ensuite de ce pays des produits finis – des meubles, par exemple –, ce qui est extrêmement dommageable.
Une réforme de la fiscalité, notamment de l'ISF, sur les forêts permettrait de dynamiser un peu cette précieuse et formidable ressource dont dispose notre pays pour en faire un véritable atout économique. La filière bois doit, en effet, devenir l'un de nos investissements d'avenir.
Comme l'a indiqué Pierre-Alain Muet il y a quelques instants, vous n'avez de cesse, depuis de nombreuses années, de trouver des exonérations au paiement de l'impôt de solidarité sur la fortune que vous n'osiez pas, jusqu'alors, supprimer, même si c'était votre intention. Ainsi, l'article 885 H du code général des impôts permet d'exonérer de l'ISF, à concurrence de trois quarts de leur valeur, les parts détenues dans les groupements forestiers et les groupements fonciers agricoles et les baux ruraux à long terme.
Compte tenu de la réforme que vous mettez en oeuvre, cet article n'a plus aucune justification. De plus, comme l'ont souligné plusieurs collègues – et en particulier Henri Emmanuelli –, la valeur de ces biens a considérablement baissé du fait de problèmes climatiques que nous avons connus.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons d'abroger l'article 885 H.
Il me paraît important de rappeler que l'immense majorité des propriétaires forestiers ne sont pas assujettis à l'ISF. Est-il anormal, dès lors, de maintenir dans l'assiette de cet impôt les très grandes propriétés ou, plus exactement, les très grands actifs fonciers ou agricoles ? Même si, comme l'a souligné M. Cacheux, ils ne sont pas capitalistiquement productifs, ils constituent incontestablement une richesse, un actif, qui mérite de contribuer à la solidarité nationale.
Élu du Sud-Ouest, j'entends également les arguments avancés par un certain nombre de responsables de l'UMP, qui m'alertent sur le fait que la forêt est en danger. Ils sont d'ailleurs un peu gênés par vos propositions. Quant aux exploitants forestiers, ils expliquent que ce dont ils ont besoin, ce n'est pas une exonération de fiscalité ou un assujettissement à l'ISF, mais une vraie politique forestière et une réelle solidarité de la nation envers une profession qui a traversé bien des difficultés ces dernières années, pour des raisons climatiques.
Les dispositions de l'article 885 H participent bien sûr aux cadeaux que vous faites à des contribuables aisés. En l'occurrence, il s'agit de l'exonération, à concurrence des trois quarts de leur valeur, des biens ruraux loués, des parts détenues en nombre des groupements fonciers agricoles et des groupements agricoles fonciers. Cela permet aux contribuables aisés dont je parlais de réduire très fortement les sommes qu'ils doivent au titre de l'ISF. Une fois de plus, je le constate, c'est un cadeau qui est fait aux plus riches.
Voilà qui s'ajoute au fait que la réforme de l'ISF n'est pas financée et que la facture, on le sait, sera d'un peu plus de 2 milliards d'euros. Ce que vous ne dites pas, monsieur le ministre, c'est qui va payer. Nous aimerions que vous le disiez à nos concitoyens qui, pour la majorité d'entre eux, traversent actuellement de grandes difficultés dans leur vie, voire leur survie. C'est pourquoi nous souhaitons l'abrogation de l'article 885 H.
Ni M. Proriol ni M. Giscard d'Estaing ici présents ne me démentiront : l'Auvergne est une région forestière. Plus du quart de sa superficie est couvert par des forêts. Cet amendement revêt donc une importance particulière, et je crois que M. Giscard d'Estaing pourra s'exprimer tout à l'heure, d'autant que cet amendement est cohérent avec la démarche que le Gouvernement prétend adopter en affirmant vouloir supprimer le bouclier fiscal, même si nous avons compris qu'il n'en était rien, puisque le bouclier fiscal demeure dans le dispositif.
Nous voulons cependant aider le Gouvernement dans son affichage. L'article 885 H du code général des impôts mérite ainsi d'être abrogé, car il constitue lui-même une sorte de bouclier fiscal collectif pour les groupements forestiers, les groupements fonciers agricoles et les groupements agricoles fonciers.
On le constate à la lecture de l'exposé des motifs : à cause de la réduction d'assiette d'imposition à l'ISF prévue à cet article, le manque à gagner pour le budget de l'État est de 52 millions d'euros. L'un des précédents orateurs a évoqué tout à l'heure ce montant pour prétendre qu'il était faible. En réalité, il n'en est rien ; 52 millions d'euros, de nos jours, c'est beaucoup. Comparons-le au montant – une trentaine de millions d'euros – qui était restitué chaque année à Mme Bettencourt au titre du bouclier fiscal, nous voyons qu'il y a de quoi trouver des ressources largement comparables.
Je ferai d'ailleurs un commentaire sur cette question du remboursement. Tout à l'heure, nous avons eu un débat avec M. le ministre sur la notion de plafonnement. Il y a une différence de nature entre le fait de plafonner un impôt, c'est-à-dire de s'assurer que les sommes dont le contribuable est redevable ne dépassent pas un certain montant, et le mécanisme qui consiste à rembourser de l'impôt à quelqu'un qui, tous impôts confondus, aurait versé un impôt important.
Il est intéressant, monsieur le président, de noter que M. Mallié porte intérêt à nos démonstrations. Il ne manquera pas de nous répondre,…
…de même que M. Proriol et M. Giscard d'Estaing qui, je l'ai entendu tout à l'heure, s'intéressent beaucoup à l'Auvergne.
L'article évoqué exonère de l'ISF à hauteur de 75 % de leur valeur – pourcentage aberrant – les parts détenues, notamment par les groupements forestiers. On peut s'étonner et s'inquiéter d'une telle disposition, qui va coûter 52 millions d'euros en 2011 au budget de l'État. Accorder cela paraît inadapté et incohérent en cette période, car l'effort demandé est une mesure de justice. Il est indispensable de maintenir les différents groupements recensés dans l'assiette de la solidarité pour assurer les recettes d'équité.
Je retiens simplement – mais cela a certainement déjà été dit – que certains contribuables très aisés investissent dans la forêt pour réduire fortement leur imposition. Je suis – je l'ai déjà dit – contre les cadeaux injustes et injustifiés. J'estime qu'il n'est pas normal que l'on puisse protéger une catégorie, quelle que soit cette catégorie et quelle que soit la définition que l'on peut en donner, alors que la quasi-totalité des Français souffrent beaucoup de l'endettement public, que l'on va encore une fois, avec ce cadeau supplémentaire, éviter de réduire ou que l'on va aggraver.
La commission a rejeté ces amendements, qui sont vraiment caractéristiques de ce que dénonçait tout à l'heure le ministre. Nos collègues socialistes, lorsqu'ils sont dans l'opposition, disent exactement le contraire de ce qu'ils ont fait quand ils étaient aux responsabilités.
Ces amendements visent à supprimer toutes les exonérations : celles qui concernent les biens professionnels, celles qui concernent les terres agricoles et la forêt, celles qui concernent les oeuvres d'art.
Refaisons donc un peu l'histoire.
Un député du groupe Nouveau Centre. Quel dommage ! (Sourires.)
…mais il est bon, pour l'information de chacun, de rappeler ce qui s'est passé. À l'époque, la majorité socialiste créait l'impôt sur les grandes fortunes. Dès ce moment, la question de l'inclusion des oeuvres d'art dans l'assiette de l'impôt sur les grandes fortunes a suscité un débat. À la demande de certains socialistes dont je tairai les noms,…
…elles n'ont finalement pas été intégrées à l'assiette.
En 1983, les biens professionnels suscitent le même débat : faut-il ou non les exonérer ? Pour montrer l'improvisation de l'époque, je signale ce paradoxe : en 1982, les oeuvres d'art avaient été exonérées d'emblée, mais les biens professionnels avaient été inclus dans l'assiette. À la suite de ce débat, les biens professionnels sont à leur tour exonérés.
En 1984, un nouveau débat s'engage dans cet hémicycle. La majorité de l'époque se rend compte que, finalement, inclure les terres agricoles ou les forêts, dont le rendement est très faible, est une absurdité. Que font-ils ? Ils les exonèrent à hauteur de 75 % de leur valeur.
L'histoire continue, chers collègues. En 1988, nos collègues socialistes rétablissent l'IGF, en l'appelant ISF. Ils reprennent les mêmes exonérations, et les mêmes débats ont lieu. Faut-il ou non inclure les oeuvres d'art ? On décide de ne pas le faire.
En 1997, les socialistes reviennent aux responsabilités. Le gouvernement de l'époque est alors battu une première fois dans l'hémicycle parce que – M. Emmanuelli s'en souvient –…
…la majorité de l'époque – la commission des finances, en particulier – propose de ne plus exonérer les oeuvres d'art.
Cela a fait un véritable drame. C'était d'ailleurs l'objet d'un amendement de Jean-Pierre Brard, dont je me demande si je ne l'avais pas voté. (Sourires.) Que se passe-t-il ? Il y a une seconde délibération et, à force d'arguments, le gouvernement de l'époque convainc nos collègues qu'il ne faut surtout pas assujettir les oeuvres d'art à l'ISF.
Ce n'est pas à force d'arguments, c'est grâce aux feuilles roses de la seconde délibération !
Voilà ce que nos collègues ont fait quand ils étaient aux responsabilités, voilà ce qu'ils veulent aujourd'hui, sous prétexte qu'ils sont dans l'opposition, démonter point par point.
Nous voudrions leur demander d'abandonner un peu l'idéologie…
…et de se montrer un peu plus constants dans leurs convictions ; cela faciliterait un peu les choses. La commission émet donc un avis défavorable à ces amendements identiques.
Même avis.
Sur le vote des amendements nos 484 à 503 , je suis saisi d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je compléterai les arguments qui ont été développés par le rapporteur général pour en appeler finalement à une cohérence des votes que nous avons pu exprimer au fil de ces législatures sur la forêt française.
Sous le gouvernement de Lionel Jospin, la représentation nationale a adopté à l'unanimité une excellente loi, dont le rapporteur était François Brottes. À aucun moment dans la discussion de cette loi – où nous avons apporté de nouveaux avantages à la forêt française en termes de fiscalité, compte tenu, justement, de la faiblesse des rendements –, l'intégration du patrimoine forestier dans les biens exonérés d'ISF n'a été remise en cause. Certains débats ont même conforté cette approche.
Je ne développerai ni la question de la rentabilité, ni celle des risques afférents au réchauffement climatique – qui va nécessiter d'importants investissements d'adaptation de la forêt –, ni les problématiques découlant des tempêtes. Le mal dont souffrent les forêts françaises est lié à l'indivision. Si nous voulons une forêt industrialisée qui remplisse ses fonctions en matière de production de bois et en matière écologique, nous devons avoir de grandes propriétés forestières. Il faut donc lutter contre l'indivision. Or, en votant ces amendements identiques, nous conforterions l'indivision. Il y aurait en effet intérêt à rester dans l'indivision pour échapper à l'ISF et bénéficier des abattements de valorisation des investissements forestiers. Quand il y a indivision, il y a effectivement abattement. Il n'y aurait donc pas intérêt à acheter de grands domaines en pleine propriété ni à constituer des groupements forestiers avec des parts.
Cette disposition est exactement le contraire de ce qui est nécessaire à la forêt française, une disposition à rebours de tout ce que nous avons voté dans le passé, à l'unanimité.
Mes chers collègues, je suis un peu étonné de ces amendements identiques. Selon leur exposé des motifs, il n'y aurait aucune justification à ces abattements, qui ne sont pas – je le rappelle – de 75 %, mais de 75 % d'une valeur atteignant le montant de 100 000 euros au plus et, au-delà, de 50 %.
Quel est le rendement des terres louées à long terme, dont je rappelle que leur loyer est plafonné par des arrêtés préfectoraux, ce qui n'en fait pas un marché libre ? Il tourne autour de 1,1 % ou 1,2 % brut. Quel est le taux moyen de rendement des patrimoines ? Il est compris entre 3,5 % et 4 %. L'abattement correspond donc à l'écart de rendement relatif des terres et aussi des bois, le rendement de ces derniers, bien gérés, pouvant être de 1,1 % à 1,3 %.
Si vous supprimez cette exonération, que va-t-il donc se passer, mes chers collègues ? C'est très simple : une bonne partie des propriétaires vont vendre. Comment voulez-vous payer un impôt dont le taux s'échelonne actuellement entre 0,55 % et 1,8 % avec une rentabilité de 1,2 % ? Les propriétaires vendront donc, et les locataires seront obligés d'acheter, pour éviter qu'un autre ne le fasse, et le dispositif s'effondrera. Ainsi mettrez-vous en grande difficulté les exploitants non propriétaires. La disposition que tend à introduire votre amendement va à l'encontre des fermiers et provoquerait l'effondrement du marché du foncier.
Au passage, mes chers collègues, si un exploitant agricole propriétaire inscrit ces terres à son bilan, c'est un outil professionnel exonéré ; s'il ne les met pas à son bilan, il paie l'ISF. Tout cela est très cohérent ! (Sourires.)
Plusieurs députés du groupe Nouveau Centre. Il a raison !
J'ai remarqué, monsieur le rapporteur général, que, chaque fois que vous vous trouvez dans la difficulté, vous vous faites historien des socialistes. Hélas, vous réécrivez l'histoire des socialistes à votre manière. L'exonération de la forêt est prévue dès le départ. En 1984, je m'en souviens – c'est moi qui présentais le budget –, cela ne s'est pas passé comme vous l'avez dit, pas plus que pour les oeuvres d'art.
Depuis 2002 que vous êtes là, pourquoi n'avez-vous pas réparé nos erreurs, si nous en avons tant commis ? Cela commence à bien faire, cette justification systématique par des faits antérieurs, erronés qui plus est.
D'autre part, M. le ministre pourrait-il informer le Parlement de la progression des salaires et de la progression des patrimoines depuis 2002 ? Celle des premiers a été inférieure à 5 %, celle des seconds supérieurs à 10 %.
Aussi, monsieur le rapporteur général, quand vous nous faites larmoyer sur ces malheureux propriétaires d'un bien qui a pris de la valeur, vous oubliez, comme le ministre d'ailleurs, de parler de l'abattement de 30 % dont ils bénéficient. En réalité, aujourd'hui, si l'on parle de 1,3 million, c'est qu'il s'agit d'un bien de 1,7 million. Et quelqu'un possédant un bien de 1,7 million n'est tout de même pas à plaindre s'il paie 650 ou 1 000 euros d'impôt de solidarité sur la fortune !
Mais, comme d'habitude, et comme l'a toujours fait la droite, vous vous cachez derrière les petits pour essayer de protéger vos véritables amis, c'est-à-dire ceux qui ont des fortunes… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Ça suffit, monsieur Emmanuelli ! C'est un scandale ! Vous n'êtes qu'un donneur de leçons !
…qu'ils placent dans les fonds de gestion, dans le private equity, et qui récupèrent, non pas 3 %, monsieur de Courson, mais 15 ou 20 % par an !
C'est là que des fortunes énormes sont investies, et vous le savez. Pourtant, monsieur le rapporteur général, je n'ai pas entendu un mot sur ce sujet depuis le début de cette discussion. Ceux-là, vous ne les connaissez pas. Comme l'a dit l'un de mes collègues, vous ne les rencontrez que de temps à autre dans des réunions de généreux donateurs.
Depuis tout à l'heure, nous entendons parler d'idéologie, comme si c'était un gros mot. Or qu'est-ce que l'idéologie ? C'est un corpus d'idées permettant d'analyser la société et de formuler des solutions pour préparer l'avenir. Quels sont ces hypocrites qui disent ne pas avoir d'idéologie ? Ce sont ceux qui ont une idéologie perverse qu'ils ne veulent pas assumer, monsieur le ministre. C'est vous, à droite, les tartufes, qui ne voulez pas montrer ce que vous êtes véritablement. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Fillon, avant d'être Premier ministre, trouvait lui aussi que l'« idéologie » était un gros mot. Pour le rassurer, je lui avais dit un jour qu'il était l'un des idéologues du régime. Cela prouvait au moins qu'il avait des idées, alors que d'autres n'ont que des images d'Épinal ! Aussi, plutôt que de se jeter à la figure cette formule que vous voulez insultante, assumez votre idéologie : vous êtes du côté de ceux qui possèdent le capital et qui en veulent toujours plus.
Nous venons d'assister à une confrontation entre Charles-Amédée de Courson et Henri Emmanuelli, et il y a clairement deux positions, et deux classes sociales : il y a celle des châtelains, monsieur de Courson, et les autres ! Mais Charles-Amédée de Courson n'arrive pas à se défaire de l'héritage qu'il porte comme un boulet et cela me fait penser à une gravure de la Révolution où l'on voit le tiers état courbant l'échine sous le poids de l'aristocratie et du clergé.
Les héritiers des privilégiés sont toujours là ; mais nous aussi, nous sommes toujours là, sauf que, depuis, le peuple s'est éveillé, même si vous essayez de l'embrumer.
Je voudrais répondre à quelques arguments et, comme mon collègue Jean Mallot m'a invité à le faire, rappeler deux principes, notamment pour répondre aux propos d'Aurélie Filippetti et d'Henri Emmanuelli.
Dans notre pays, la forêt est soit privée, soit publique. Henri Emmanuelli a dit que la forêt ne valait plus grand-chose, compte tenu des tempêtes et autres aléas climatiques. Il l'avait déjà dit en commission des finances et, s'agissant des Landes, il sait de quoi il parle.
Pour ce qui est d'Aurélie Filippetti, je ne comprends pas très bien son argumentation. Il faut, dit-elle, encourager la filière bois en France et donc imposer davantage les propriétaires de la forêt privée. Je ne vois pas en quoi une telle mesure dynamiserait la filière bois.
Enfin, pour répondre à Jean Mallot, je rappellerai que, en Auvergne, en tout cas dans le Puy-de-Dôme – notre collègue Jean Michel, député de ce département, peut en témoigner –, la forêt est essentiellement communale et sous mandat de gestion de l'ONF. Il en est de même dans bien des départements. Aussi, lorsqu'on nous dit qu'il faut dynamiser la filière bois, je vous rappelle, monsieur Mallot, que vous siégez auprès du président du conseil régional René Souchon, qui a lancé une politique en faveur de la filière bois. Cela prouve que la filière bois a besoin d'être soutenue et encouragée financièrement, et que ce n'est pas en la taxant davantage que l'on va améliorer la politique forestière de la France. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
J'ai appartenu, de 1988 à 1993, à un gouvernement à majorité socialiste. Nous avons eu ce débat à plusieurs reprises, et notamment entre nous dans le gouvernement Rocard, en 1988, lorsque nous avons instauré le plafonnement – je m'honore d'ailleurs d'avoir proposé cette disposition.
J'ai ensuite été ministre de l'agriculture de 1992 à 1993. Nous avons à nouveau eu ce débat sur la forêt et nous avons tous conclu que nous ne pouvions pas revenir sur les exonérations.
Puis, Michel Bouvard l'a rappelé, une loi a été votée à l'unanimité. Je crois que nous ne pouvons pas revenir, aujourd'hui, sur des exonérations que les différentes majorités de cette assemblée ont examinées à plusieurs reprises en concluant toujours dans le même sens.
Nous ne pouvons pas développer une politique forestière en commençant par supprimer les quelques avantages que la forêt peut avoir dans notre pays.
Pour les oeuvres d'art – je n'aurai pas à le redire tout à l'heure –, il y a un marché international de l'art. Face à New York, Londres ou Bâle, Paris ne représente qu'une sous-préfecture de province. Si vous votez la suppression des exonérations dans ce domaine, vous ferez de Paris un chef-lieu de canton. Voilà la vérité ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur les amendements identiques nos 484 à 503 .
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 179
Nombre de suffrages exprimés 179
Majorité absolue 90
Pour l'adoption 58
Contre 121
(Les amendements nos 484 à 503 ne sont pas adoptés.)
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2011.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma