La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
Je suis heureux de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à une délégation de l'Assemblée nationale de la République d'Albanie, conduite par sa présidente, Mme Josefina Topalli. (Mmes et MM les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)
Mes chers collègues, je vois qu'un certain nombre d'entre vous arborent quelques « graffitis » sur leurs vêtements.
Cet hémicycle est le lieu du débat politique. Nous sommes ici précisément pour exprimer des convictions, des idées. Nous n'avons donc pas – je le crois profondément – à recourir à ce genre de méthodes pour exprimer quelque opinion que ce soit. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
La parole est à M. Albert Likuvalu, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le président, ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux et concerne la situation des droits de l'homme dans notre pays.
Mme Dati n'ignore pas que notre pays a célébré la semaine dernière le soixantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, puisqu'elle était à l'Élysée, aux côtés du Président de la République, lorsque celui-ci a défendu une « conception universelle » de ces droits. Du reste, son collègue des affaires étrangères en a profité pour suggérer la disparition du secrétariat d'État aux droits de l'homme.
Toutefois, ce soixantième anniversaire ne fut pas uniquement marqué par le long discours du chef de l'État sous les lambris de l'Élysée et par la petite phrase sibylline du ministre des affaires étrangères. En effet, de nombreux magistrats et parlementaires se sont rendus dans des établissements pénitentiaires pour dénoncer des manquements à la dignité humaine et des atteintes graves aux droits de l'homme. Mais cela, Mme la garde des sceaux semble l'ignorer, de même qu'elle semble ignorer que le commissaire aux droits de l'homme auprès du Conseil de l'Europe, M. Thomas Hammarberg, a déclaré il y a peu : « En matière de droits de l'homme, la France ne donne pas l'exemple. » M. Hammarberg s'inquiète notamment que rien n'ait changé depuis la parution, il y a trois ans, du rapport de son prédécesseur, qui dressait déjà un bilan accablant de la situation des droits de l'homme dans notre pays.
La surpopulation carcérale et la politique du chiffre en matière d'immigration figurent toujours parmi les principaux sujets d'inquiétude, auxquels il convient d'ajouter l'instauration récente de la rétention de sûreté, qui consiste à maintenir les criminels enfermés une fois qu'ils ont purgé leur peine.
Je mentionnerai également le refus persistant par la France de reconnaître les droits des peuples indigènes qui vivent sur son territoire, en Guyane et en Océanie, notamment à Wallis-et-Futuna.
Ma question est simple : en matière de droits de l'homme, le temps n'est-il pas venu pour la France de regarder la réalité en face ?
Notre pays ne serait-il pas plus crédible sur la scène internationale s'il était exemplaire et irréprochable ? Avant de donner des leçons au monde entier, pourquoi ne pas faire du respect des droits de l'homme au sein de notre République un impératif catégorique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le député, Mme la garde des sceaux, Rachida Dati, vous prie de bien vouloir l'excuser.
Vous interrogez le Gouvernement sur sa politique en matière de respect des droits de l'homme dans les prisons. Cette politique est l'une de ses priorités et elle repose sur trois principaux axes.
Premièrement, la France est engagée, depuis 2007, dans la mise en oeuvre des recommandations du Conseil de l'Europe, qui comprend notamment l'application des règles pénitentiaires européennes dans nos prisons. Concrètement, vingt-huit établissements pénitentiaires expérimentent ces règles et ont entrepris une démarche de labellisation.
Deuxièmement, le Gouvernement soumettra au Parlement un projet de loi pénitentiaire, dont vous savez qu'il comporte des avancées importantes en matière de droits des détenus, qu'il s'agisse du maintien des liens familiaux, de la possibilité d'élire domicile ou de l'aide aux personnes les plus démunies.
Troisièmement, nous menons une politique immobilière volontariste, qui nous conduira à construire, d'ici à 2012, 13 000 nouvelles places de prison adaptées aux standards européens, dont plus de 5 000 en 2009.
Enfin, dans la communication qu'elle a faite ce matin au conseil des ministres, Mme la garde des sceaux a rappelé la création du contrôleur général des lieux de privation de liberté par la loi du 30 octobre 2007, poste auquel M. Jean-Marie Delarue a été nommé en juin dernier. Il s'agit d'un outil de contrôle très important et totalement indépendant. Trente-trois lieux de détention ont été contrôlés depuis le mois de juin et le contrôleur a été saisi à 108 reprises. Le Gouvernement a ainsi fait progresser l'État de droit et renforcé les garanties offertes aux personnes privées de liberté, tout en se conformant au protocole facultatif de l'ONU, contre les peines et traitements inhumains ou dégradants.
La parole est à Mme Huguette Bello, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Ma question s'adresse à M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.
En accordant moins de 3 % du plan de relance de l'économie au soutien du pouvoir d'achat – 760 millions d'euros sur 26 milliards : les chiffres parlent d'eux-mêmes ! – le Gouvernement français, contrairement à d'autres pays européens, s'est bien peu soucié des classes moyennes et des plus modestes.
Une prime de 200 euros sera donc versée aux futurs bénéficiaires du revenu de solidarité active. Il aurait sans doute été plus simple et plus juste de la verser à tous les bénéficiaires des minima sociaux. Votre choix vous conduit en effet à exclure de l'attribution de cette prime les allocataires de l'allocation adulte handicapé et les petits retraités qui touchent le minimum vieillesse, deux catégories qui, vous en conviendrez, ne roulent pas sur l'or !
Face à cette situation, la question se pose de savoir si cette prime sera versée là où le revenu de solidarité active n'entrera en vigueur qu'en 2011, au lieu de 2009. Autrement dit, votre décision – prise contre l'avis de tous les élus ultramarins – de différer l'application du revenu de solidarité active dans les départements d'outre-mer ne va-t-elle pas priver de cette aide modeste ceux qui, dans ces départements, sont d'autant plus fondés à y prétendre que le coût de la vie y est plus élevé ? Je ne peux pas penser que vous laissiez passer une telle injustice ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.
Madame la députée, vous me demandez pourquoi la prime n'est pas versée uniquement aux allocataires de minima sociaux. La réponse est simple : c'est parce que nous avons voulu la verser beaucoup plus largement – notamment aux travailleurs pauvres, aux salariés modestes –, ce qui fait qu'elle bénéficiera à quatre millions de personnes au total.
Vous me demandez également si elle sera versée dans les départements d'outre-mer en avril prochain. La réponse est oui. La prime sera versée dans les départements d'outre-mer en avril prochain dans les mêmes conditions qu'en métropole.
Troisièmement, vous m'interrogez sur le sort des personnes touchant le minimum vieillesse ou l'allocation adulte handicapé. Ces personnes bénéficieront d'une revalorisation supérieure à l'inflation, avec un effort particulier en faveur des bénéficiaires du minimum vieillesse, comme l'a annoncé le Président de la République lors du déplacement qu'il a effectué à Compiègne au début du mois, la veille de la présentation du plan de relance.
Grâce au revenu de solidarité active au mois de juillet et à la prime de solidarité active au mois d'avril, ce sont déjà plus de 2,3 milliards d'euros qui vont être injectés dans le pouvoir d'achat des catégories les plus modestes. Ces mesures utiles seront complétées si nécessaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Ma question s'adresse à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
À l'initiative du groupe Nouveau Centre, un amendement avait été adopté par l'Assemblée nationale en première lecture du projet de loi de finances, à une très large majorité d'ailleurs : il s'agissait de mettre fin à une anomalie fiscale, l'octroi d'une demi-part supplémentaire en cas de rupture d'un couple, à la suite d'un divorce ou d'une cessation de PACS ou de concubinage. Le droit fiscal, en effet, n'a pas à récompenser ou à pénaliser fiscalement la rupture des couples.
Le Sénat a transformé cet amendement en supprimant progressivement la demi-part accordée à vie aux personnes qui ont élevé seules au moins un enfant pendant cinq ans. Ce n'était pas la position de l'Assemblée nationale.
En commission mixte paritaire, lundi dernier, la représentation nationale, à une courte majorité, est revenue avec sagesse à la position de l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Elle a donc maintenu la demi-part à vie pour les personnes ayant élevé seules au moins un enfant pendant cinq ans.
Ma question est limpide : cet après-midi, lors du vote de la loi de finances pour 2009, le Gouvernement soutiendra-t-il la position sage adoptée par la commission mixte paritaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Monsieur de Courson, vous avez évoqué un problème dont nous avons discuté abondamment dans cet hémicycle et devant la Haute assemblée. Il concerne la demi-part supplémentaire dont bénéficient à vie les parents qui ont élevé seuls un enfant. Cette décision est importante puisque l'avantage particulier accordé à ces personnes représente environ 1,7 milliard d'euros.
Cette disposition a évolué devant le Sénat. Mais la commission mixte paritaire est revenue à la position correspondant à votre amendement, monsieur de Courson (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP), qui tendait à maintenir le bénéfice de cette demi-part dès lors que le parent bénéficiaire pouvait apporter la preuve qu'il avait élevé seul cet ou ces enfants pendant cinq ans.
Le Gouvernement s'en remettra cet après-midi à la sagesse du Parlement. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.) Compte tenu néanmoins d'un certain nombre d'aspects, portant notamment sur l'équité fiscale et la parité entre les couples mariés et divorcés, nous espérons que, pendant l'année 2009, nous pourrons discuter de cette mesure qui n'est censée entrer en application qu'au début de 2010. Cet après-midi, en tout cas, nous nous en remettrons à la sagesse de l'Assemblée. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
La parole est à M. Pierre Lellouche, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'intérieur. J'y associe Jean-François Lamour, les élus parisiens de l'UMP et sans doute, compte tenu des circonstances, l'ensemble des élus parisiens.
Paris a été hier le théâtre d'une tentative d'attentat insolite mais grave. Insolite, parce que les explosifs découverts n'étaient pas connectés à un détonateur mais aussi parce que l'organisation qui a revendiqué l'attentat est inconnue et que sa phraséologie ne correspond pas à celle du terrorisme international de ces dernières années.
C'est aussi un événement grave, parce que les auteurs de cette tentative d'attentat ont montré qu'ils étaient capables de déposer des explosifs au coeur du plus grand quartier commercial d'Europe, où circulent chaque jour plusieurs centaines de milliers de personnes, et parce que cela s'est produit dans un contexte international ponctué depuis 2001 par les attentats de New York, de Londres, de Madrid ou, tout récemment, de Bombay.
Je sais, madame le ministre, que vous êtes entièrement mobilisée sur ce sujet puisque, il y a huit jours à peine, vous avez mis en place un dispositif de protection des quartiers les plus sensibles à Paris. Je veux au passage rendre hommage à la police parisienne et plus particulièrement au commissariat du IXe arrondissement, qui a fait hier la preuve de son efficacité.
Vous avez également tenu ce matin une réunion avec l'ensemble des acteurs de la sécurité à Paris. Je souhaiterais donc que vous informiez la représentation nationale sur l'état de l'enquête, les mesures que vous comptez prendre à court terme pour la période des fêtes, puis savoir quels sont, à moyen terme, les dispositifs supplémentaires dont il faudrait équiper la capitale – je pense aux caméras de surveillance, domaine dans lequel nous avons un certain retard par rapport à Londres.
Que comptez-vous faire enfin pour informer la population, car, sans faire ici de mauvaise querelle politicienne, je réclame depuis des années à la municipalité parisienne ce travail d'information de la population, mais en vain. (Protestations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Monsieur Pierre Lellouche, nous avons en effet découvert hier dans un grand magasin plusieurs bâtons de dynamite. Même s'il n'y avait guère de risque d'explosion puisque le système de mise à feu n'était pas connecté, nous devons rester vigilants face aux risques d'attentats : sans être plus menacés que d'autres, nous ne le sommes pas moins.
En cette période de fêtes, sensible parce que c'est un moment symbolique et parce que l'affluence dans les lieux publics y est particulièrement importante, tout doit être fait pour protéger nos concitoyens et leur permettre de faire leurs courses et de préparer le réveillon le plus sereinement possible.
C'est la raison pour laquelle, depuis le 1er décembre, 1 500 personnes sont venues renforcer les effectifs de sécurité à Paris ; à la suite des événements d'hier, j'ai pris la décision de leur adjoindre six compagnies mobiles supplémentaires et d'augmenter encore le nombre de militaires en place dans le cadre du plan vigipirate.
Ce matin, j'ai réuni au ministère la police, la gendarmerie, la préfecture de police de Paris mais aussi les représentants des grands magasins, de la RATP, de la SNCF et d'Aéroports de Paris. Plusieurs mesures ont été décidées pour renforcer la sécurité.
Les forces de l'ordre seront renforcées et nous appelons, sans psychose particulière, à une augmentation de la vigilance de chacun. La surveillance des entrées dans les établissements commerciaux sera resserrée et les contrôles aléatoires seront multipliés ; des fouilles auront lieu également dans les trains et les bus.
En marge de ce dispositif, appliqué également à Lille, Lyon et Marseille, une réunion sera organisée trois fois par semaine entre les responsables des magasins et la préfecture de police.
Ces mesures immédiates entrent naturellement en vigueur dès aujourd'hui. Doivent s'y ajouter des mesures de sécurisation à plus long terme.
J'ai décidé de rattraper le retard de la France en matière de caméras de surveillance, notamment par la mise en oeuvre à Paris du plan « Mille caméras ». Nous devons en effet nous donner les moyens de protéger nos concitoyens. Il nous appartient de leur permettre de passer les fêtes en toute tranquillité.
La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, je vous ai informé avant cette séance du sens de ma question. Ce n'est pas l'usage ; je l'ai fait aujourd'hui parce que la question que je vous pose touche à l'essentiel de ce qui nous est commun : la démocratie. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Je pèse chacun de mes mots. La réforme de la Constitution était censée rééquilibrer les pouvoirs et revaloriser le Parlement. C'était votre engagement ; c'était votre promesse. Cinq mois plus tard, le projet de loi organique remet en cause l'un des droits les plus sacrés de notre démocratie : le droit, pour les parlementaires, d'amender les textes. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Sans ce droit d'amender, aucun grand débat parlementaire n'aurait pu avoir lieu. Je pense aux débats sur le CPE, sur le paquet fiscal, sur les OGM ou sur l'audiovisuel public. Je me souviens aussi que la majorité d'aujourd'hui a été l'opposition d'hier…
…et qu'elle a elle-même usé de ce droit pour faire entendre sa voix – légitime – sur les nationalisations, les 35 heures ou le PACS.
Ne regardez pas ailleurs, monsieur Accoyer, c'est vous qui êtes responsable !
Pour limiter ce droit d'amender, vous proposez de revenir purement et simplement à un système abandonné il y a quarante ans. Pour se justifier, votre gouvernement invoque l'usage abusif que ferait l'opposition du droit d'amendement. (« C'est vrai ! » sur les bancs du groupe UMP.) Je vous le dis : c'est une véritable tartufferie ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
En trente ans, sept textes sur les 1 450 adoptés ont dépassé cent heures de débat. Il n'y en eut que sept, et par quatre fois ce fut à l'initiative de la droite ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Non, monsieur le Premier ministre, aucune loi n'a jamais été empêchée par le droit d'amendement ; aucune opposition n'a pu interdire à la majorité de faire voter ses projets ! Le seul abus que connaisse notre démocratie, c'est celui d'un exécutif autoritaire qui ne tolère ni la contradiction, ni les contre-pouvoirs, qu'ils soient syndicaux, médiatiques et maintenant parlementaires. (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Le 21 juillet dernier, devant les députés et sénateurs réunis en congrès à Versailles, vous avez défendu votre réforme de la Constitution en appelant, je vous cite, à une « réforme qui tempère les pouvoirs de l'exécutif en renforçant ceux du législatif » et vous aviez même défié « quiconque de trouver dans un seul de ces articles un recul pour les libertés » !
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. La question !
Monsieur le Premier ministre, ce sont bien les libertés et la démocratie qui sont en cause aujourd'hui à travers deux articles de votre projet de loi organique.
De nombreux députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Scandaleux !
Je vous remercie, monsieur Ayrault… (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le président, n'essayez pas de me couper la parole ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Voici ma question : monsieur le Premier ministre, je vous demande solennellement, au nom du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, de retirer du projet de loi organique les dispositions qui auraient pour effet de verrouiller les initiatives des parlementaires de la majorité comme de l'opposition.
Si vous ne le faites pas, je vous le dis avec gravité : vous aurez pris le risque d'ouvrir une crise politique majeure ! (Mmes et MM. les députés du groupe SRC se lèvent et, se tournant vers M. Ayrault, l'applaudissent longuement. – Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
La parole est à M. le Premier ministre. (Bruits sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Seul M. le Premier ministre a la parole !
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le président Ayrault, le projet de loi organique qui sera discuté devant votre assemblée – et que le Parlement pourra naturellement amender – est un texte qui respecte scrupuleusement les intentions du constituant.
Il institue un nouveau droit pour le Parlement : le droit de résolution, qui n'existait pas jusqu'ici dans notre Constitution. Il organise la présentation des projets de loi, prévoyant notamment la possibilité de débattre en séance du texte amendé par la commission : il s'agit incontestablement d'un pouvoir nouveau donné au Parlement.
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. À la majorité !
Eh bien oui, il y a dans ce parlement une majorité et une opposition : les Français en ont décidé ainsi, nous n'y pouvons rien !
Nous parlerons des traditions : j'y viens justement. Je suis dans cette maison depuis plus longtemps que vous, monsieur Glavany !
Ce texte, monsieur le président Ayrault, pose un cadre ; ensuite, dans ce même parlement, un autre débat aura lieu sur le règlement de chacune des assemblées, et en particulier celui de l'Assemblée nationale – avec tous les amendements que vous souhaiterez.
Ce que propose ce projet de loi, c'est de rendre possible – sans l'imposer – le recours à des procédures d'examen simplifié de textes sur lesquels un accord pourrait être trouvé en raison de leur nature.
Ce que propose ce projet, c'est de rendre possible une meilleure organisation des travaux en prévoyant un temps de débat. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Cela ne remet absolument pas en cause le droit d'amendement (« Si ! » sur les bancs du groupe SRC), qui est un droit constitutionnel, un droit protégé par la Constitution.
Mais déposer cent fois le même amendement, cela n'a rien à voir avec le droit d'amendement, cela n'a rien à voir avec la démocratie ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP, dont de nombreux députés se lèvent. – Applaudissements sur les bancs du groupe NC. – Vives protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Multiplier les incidents de séance, les interruptions, les demandes de suspension, cela n'a rien à voir avec le droit d'amendement, cela n'a rien à voir avec la démocratie ! (Mêmes mouvements.)
Il se trouve que j'ai siégé dans cette assemblée depuis 1981. Jamais sous un président socialiste nous n'avons eu la possibilité de déposer plusieurs fois le même amendement sous des noms différents ; c'était impossible, et je vous mets au défi de prouver le contraire ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Huées sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Vous aurez beaucoup de mal à faire croire à l'opinion publique que nous voulons museler l'opposition, parce que c'est notre majorité qui a proposé cette réforme de la Constitution qui vous permettra de connaître des nominations des hauts fonctionnaires, qui vous permettra de débattre de l'envoi des forces françaises à l'extérieur, qui instaure le droit de résolution, qui limite l'usage du 49-3, que certains de vos gouvernements ont tellement utilisé ! (Brouhaha sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Accoyer, fossoyeur !
Ce n'est pas moi qui ai dit un jour sur ces bancs : « Vous avez juridiquement tort parce que vous êtes politiquement minoritaires ». (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) En revanche, c'est cette majorité qui a donné des droits nouveaux au parlement ; elle continuera son oeuvre de modernisation dans le respect des droits de l'opposition et à l'écoute de l'opposition. (Mmes et MM. les députés des groupes UMP et NC se lèvent et applaudissent longuement. – Huées sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Serge Poignant, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, le Président français Nicolas Sarkozy aura marqué d'une exceptionnelle empreinte la présidence de l'Union européenne, comme l'a rappelé hier notre Premier ministre.
Sous son impulsion, le dernier Conseil européen des 11 et 12 décembre a abouti à des conclusions fondamentales : réactivation de l'application du traité de Lisbonne, plan de relance de l'économie européenne équivalant à 1,5 % du PIB, accord sur le paquet énergie climat.
Dans le même temps se tenait la conférence internationale sur le changement climatique à Poznan, sous l'égide de l'ONU. J'aimerais que vous expliquiez à la représentation nationale, et j'associe à ma demande mes collègues de l'UMP Bernard Deflesselles, Éric Diard et Michel Havard, qui vous y accompagnaient également, en quoi l'accord de Bruxelles, auquel vous avez très activement participé, était essentiel à la réussite d'un accord international à Poznan.
Vous arrivez aujourd'hui même de Strasbourg, avec le même succès. Nous avions débattu dans cet hémicycle du paquet énergie climat européen. Pouvez-vous nous confirmer l'engagement des Vingt-sept et informer la représentation nationale de l'avancée de la conférence de Poznan, dans la ligne de la feuille de route de Bali, en termes d'application de mesures d'adaptation, mais également de définition d'un calendrier et d'un programme pour préparer la conférence de Copenhague de décembre 2009 ? Nous espérons tous en effet un engagement mondial concret et historique à Copenhague pour l'après-Kyoto, à l'appui d'une vision partagée de lutte déterminée contre le changement climatique dans laquelle la France aura été un moteur. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Monsieur le député, le 17 décembre 2008, l'histoire retiendra qu'à onze heures quarante-cinq l'Europe est entrée de manière irréversible dans un double défi : le défi énergétique et le défi climatique. Il y a trois heures, au Parlement européen, les six textes qui avaient été négociés et adoptés à l'unanimité par les Vingt-sept au Conseil européen du 12 décembre, sous l'autorité du Président Sarkozy et avec François Fillon, ont été approuvés à une écrasante majorité par le Parlement européen.
L'écrasante majorité des plus de six cents parlementaires présents en séance ont approuvé en première lecture quatre directives en même temps et deux règlements complémentaires.
Je tiens à vous dire, mesdames, messieurs les députés, que cet événement est…
…une première dans le monde.
Jamais aucun pays ni aucun continent ne s'est engagé dans tous les éléments de son économie, de son industrie, à réduire ses gaz à effet de serre comme le fait l'Europe.
Ce succès, très honnêtement, et personne ne le conteste en Europe, est un succès de la France et de la présidence de Nicolas Sarkozy. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
C'est un succès à la fois de notre diplomatie et de nos ministères techniques. C'est un succès de la réorganisation de l'État français et du Gouvernement pour affronter ces défis.
Mais c'est également un succès de l'Assemblée nationale. En effet, si, dans tous les autres pays, des débats très durs ont eu lieu sur le plan intérieur, qui ont rendu compliqués ces accords pour les parlementaires européens et pour les gouvernements, en France cela n'a pas été le cas. Depuis le débat qui a eu lieu ici, depuis le vote solennel du Grenelle de l'environnement, notre pays avait choisi cette voie, nous étions dans l'unité nationale, nous étions dans l'union nationale et nous avons pu assurer une présidence avec le soutien de l'ensemble du peuple français.
À ce moment particulier, le jour même où le Président Obama annonce l'organisation de son équipe, c'est cette même méthode que nous allons employer, après le Grenelle en France, après l'accord de Bruxelles et de Strasbourg, pour réussir Copenhague dans un an. C'est vital pour l'histoire de l'humanité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Yves Censi, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Depuis la faillite de la banque Lehman Brothers, le Président de la République et le Gouvernement ont toujours tenu à nos concitoyens un langage de vérité (« Sur la croissance ? » sur les bancs du groupe SRC) sur la gravité de la situation et de ses conséquences : d'abord, pour l'argent des Français et pour notre système bancaire ; ensuite, pour l'activité et l'emploi dans notre pays.
Ce langage de vérité s'est doublé d'une réactivité sans précédent dans l'action. C'est pourquoi la majorité a pleinement soutenu le Gouvernement, l'aidant à traduire le plus rapidement dans la loi et dans les faits toutes les mesures nécessaires pour endiguer la crise financière et pour protéger nos concitoyens et nos entreprises. L'heure est grave. On aurait d'ailleurs pu espérer que l'opposition soutienne ces mesures, comme a su le faire l'opposition dans les autres pays européens.
Madame la ministre, par-delà la crise financière, nos concitoyens ont besoin de ce langage de vérité que vous avez toujours tenu avec le Premier ministre et le chef de l'État. Ils ont besoin d'y voir plus clair pour l'avenir, en surmontant les peurs qu'agitent en permanence ceux qui siègent à gauche de notre hémicycle.
Quelles sont, selon vous, les principales ondes de choc auxquelles les Français doivent s'attendre dans les mois à venir ? Et surtout, dans quelle mesure l'économie française est-elle en capacité de résister et d'absorber les conséquences de ces bouleversements ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
Monsieur le député, soyons clairs :…
…la zone euro est en récession. Sa croissance a été de moins 0,2 % au deuxième trimestre, de moins 0,2 % au troisième trimestre et sera probablement de moins 0,5 % au quatrième trimestre.
Toutefois, je l'ai dit, parce que j'ai toujours tenu un langage de réalisme et de vérité à nos concitoyens (Non ! » sur les bancs du groupe SRC), la France a connu, à la différence de la zone euro, une croissance de 0,1 % au troisième trimestre. Mais les prévisions de la Banque de France sont mauvaises : elle prévoit moins 0,7 % au quatrième trimestre.
Pour autant, nous n'avons pas changé nos prévisions de croissance, comprises entre 0,2 % et 0,5 %pour 2009, et ce pour deux raisons essentielles.
D'abord, nous savons très bien que la situation des entreprises se dégrade rapidement et brutalement. Nous en ressentirons les effets économiques et sociaux.
Ensuite, il n'aura échappé à personne que nous avons mis en place un plan de relance, que le Président de la République a présenté le 4 décembre à Douai. Un ministre, M. Patrick Devedjian, est désormais chargé de mener les opérations annoncées. Nous estimons à 1 % l'incidence de ce plan sur le produit intérieur brut. Mais d'autres pays de l'Union européenne ont engagé des plans de relance ou sont sur le point de le faire. Nous chiffrons à 0,5 % du produit intérieur brut leur impact sur l'économie française. Nous en attendons par conséquent un bénéfice, en dépit de la dégradation de la situation.
Nous avons été présents et nous avons agi très rapidement sur les plans financier, économique et social. Si la situation risque de se dégrader encore, elle trouvera le gouvernement français toujours présent sous l'autorité de François Fillon et sous l'inspiration de Nicolas Sarkozy. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Alain Vidalies, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, les droits du Parlement ne se résument pas aux droits de la majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La qualité d'une démocratie se mesure d'abord au respect de l'opposition, et à la place que cette dernière occupe.
Dès aujourd'hui, nous allons engager le débat sur la loi en faveur du travail du dimanche. Confrontés à la résistance de certains députés de la majorité, le Président de la République et l'UMP ont bidouillé un nouveau texte. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Surprise du jour : contrairement à ce que la presse a annoncé, le texte en question se révèle pire que la proposition de loi initiale. En effet, les zones comptant plus d'un million d'habitants sont toujours concernées, et le nombre de dimanches ouverts dans toute la France est passé de cinq à huit. Quant aux autres dispositions du texte, comme celles portant sur les zones touristiques, et celles visées par la notion d'usage constaté, elles sont maintenues. Voilà le résultat de la mainmise de l'Élysée sur nos futures délibérations !
La majorité a inventé la notion d'usage constaté. Les Français doivent bien comprendre que, grâce à cette formule, les infractions répétées par des magasins qui n'ont respecté ni les droits des salariés ni le droit de la concurrence, subitement devenues des « usages constatés », vont être amnistiées et légalisées. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Ils ont bafoué la loi mais, pour ces récidivistes, vous ne proposez pas de peine plancher : plutôt une prime à la délinquance ! (Mêmes mouvements.)
Le dimanche n'est pas un jour comme les autres. Nous ne voulons ni de la civilisation du caddie ni de la transformation du monde en une immense galerie marchande aseptisée.
Le dimanche doit rester un jour à part : celui du repos, des activités sportives, culturelles et cultuelles, de la rencontre avec sa famille et ses amis. Le dimanche doit rester le jour du vivre ensemble, et ne doit pas devenir celui du consommer toujours plus !
Vous savez parfaitement que ce texte n'a aucune justification économique.
Et puis, comment voter un jour le Grenelle de l'environnement, et adopter, la semaine suivante, une loi qui envoie des milliers de gens sur les routes le dimanche ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Le président du groupe UMP reconnaît lui-même que la dernière version de la proposition de loi ne constitue qu'une étape. Il ajoute : « Aujourd'hui, on n'est pas sur texte totalement finalisé, nous allons profiter de la trêve des confiseurs pour continuer d'y travailler. »
Alors, laissons-leur du temps ! Peut-être vont-ils comprendre que les Français ne veulent pas de ce texte,…
…que l'on peut qualifier, en faisant la synthèse de notre appréciation et des propos de M. Copé, de « bidouillage en devenir ». Il ne mérite rien d'autre qu'un retrait pur et simple. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur Vidalies, lorsque des salariés manifestent pour travailler, la majorité est interpellée. Ce n'est pas votre cas, mais cela ne fait que démontrer combien le parti socialiste est coupé des salariés et de la réalité. (Protestations sur les bancs du groupe SRC – Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Monsieur le député, j'ai entendu dans vos propos beaucoup de caricatures et de contrevérités. Pourtant, la démocratie que vous défendez de façon aussi virulente consiste aussi à présenter ses arguments sans caricaturer les positions de ceux qui ne sont pas d'accord avec vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Le dimanche est une journée exceptionnelle, et la majorité a souhaité qu'il reste une journée exceptionnelle. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Cela sera inscrit dans la proposition de loi de Richard Mallié.
Il n'y aura ni généralisation ni obligation. La majorité de l'Assemblée nationale a souhaité que le code du travail prévoie un droit de refus pour les salariés. Il s'agira pour eux d'une nouvelle liberté. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur Vidalies, vous ne pouvez pas caricaturer à ce point cette proposition de loi. Elle apporte des réponses sur tous les sujets que vous avez évoqués. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Que répondez-vous aux salariés de la circonscription de M. Valls – j'observe d'ailleurs que ce dernier ne porte pas l'autocollant qu'arborent les députés socialistes –, dans l'Essonne, qui demandent à travailler le dimanche ? La réponse figure dans la proposition de loi de Richard Mallié. (Mêmes mouvements.)
Que répondez-vous aux 95 % des habitants de la commune d'Éragny, dans le Val-d'Oise, dont Mme Dominique Gillot, ancien ministre socialiste, est la maire, qui ont fait savoir, en votant à bulletin secret, qu'ils voulaient travailler le dimanche ? (Mêmes mouvements.)
La réponse figure dans la proposition de loi de Richard Mallié.
Alors, de grâce, monsieur Vidalies, cessez d'utiliser la caricature !
Nous avions déjà compris que le parti socialiste avait beaucoup de mal à faire des propositions générales. Il est désormais clair que, au parti socialiste, lorsqu'il s'agit de répondre localement à des situations concrètes, il n'y a vraiment plus personne ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Pierre Lequiller, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Je tiens à vous féliciter, monsieur Le Maire, pour votre nomination au Gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) et je me réjouis que la commission des affaires étrangères vous auditionne dès cet après-midi au sujet du dernier Conseil européen.
Tous nos partenaires européens, de gauche comme de droite, ont salué hier, à Strasbourg la très grande réussite de la présidence de Nicolas Sarkozy. La réactivité de la présidence française sur la crise économique et financière s'est traduite par la réunion salutaire – la première du genre – des chefs d'État et de gouvernement de la zone euro en présence du président de la BCE et de Gordon Brown. Mais de nouvelles initiatives de relance européenne seront sans doute nécessaires. Que conviendra-t-il de faire, monsieur le secrétaire d'État, alors que ni la République tchèque ni la Suède, qui vont nous succéder, ne font partie de la zone euro ?
Au cours de cette présidence, le couple franco-allemand a donné de nombreuses impulsions, avec le traité de Lisbonne et le paquet énergie-climat, ou en matière d'immigration et de défense. Des divergences sont néanmoins apparues sur le terrain de la politique économique. L'Allemagne, traditionnellement attachée au principe de rigueur, est en outre dirigée par une grande coalition, qui aura à se soumettre à des élections en septembre 2009.
Comment entendez-vous travailler avec nos partenaires allemands pour rapprocher les points de vue, par exemple sur l'indispensable relance européenne dans un contexte de grave crise économique ou sur la TVA à taux réduit ? Comptez-vous réunir durant le prochain semestre le Triangle de Weimar – France, Allemagne, Pologne –, que la commission des affaires européennes tout entière considère comme essentiel pour l'Europe ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Bruno Le Maire, secrétaire d'État chargé des affaires européennes.
Vous avez raison, monsieur le président Lequiller, la présidence française a été à la hauteur des enjeux et des défis qu'elle a eu à affronter ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.– Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Face à la crise économique, elle a su imposer des règles de relance. Face à la crise financière, elle a su imposer des règles de bon comportement. Face à la crise en Géorgie et au risque de guerre, elle a su imposer la paix.
La présidence française n'impose rien ! Ce sont des délibérations collectives !
Hier, à Strasbourg, à gauche comme à droite, du parti communiste jusqu'au PPE, en passant par le parti socialiste et par son président, M. Schulz, la volonté et la réactivité de la présidence française ont été unanimement reconnues ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et plusieurs bancs du groupe NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur Gremetz, vous êtes le Cohn-Bendit de cette assemblée ! (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.– Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Vous êtes le seul à ne pas reconnaître la volonté et la détermination de la présidence française ! (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
Vous m'interrogez, monsieur Lequiller, sur la façon de poursuivre ce travail. Le défi est simple : en 2009, soit nous arrivons à poursuivre sur la voie d'une Europe politique, soit nous retombons dans les errements d'une Europe technique. Pour éviter cet écueil, nous devrons étroitement travailler avec la future présidence tchèque. J'ai reçu aujourd'hui le vice-Premier ministre de la République tchèque pour lui assurer que nous travaillerons main dans la main durant les six mois de sa présidence. Nous devrons travailler avec l'ensemble des autres États, petits ou grands ; nous devrons travailler également dans tous les formats, comme le Triangle de Weimar ; et nous devrons travailler, bien évidemment, avec l'Allemagne.
Le renforcement et la rénovation de notre relation avec l'Allemagne sont au coeur de la mission que le Président de la République et le Premier ministre m'ont confiée.
Il faudra de la patience, du dialogue, de l'écoute : comptez sur moi pour m'y atteler avec coeur et avancer dans cette direction. Il faudra aussi des résultats concrets, tangibles pour les citoyens : dans le domaine de la défense par exemple, où, avec Hervé Morin, nous souhaitons renforcer les liens franco-allemands ;…
..dans le domaine industriel aussi, où, avec Luc Chatel, nous essaierons de renforcer la coopération entre les industries française et allemande de façon à répondre aux attentes des salariés.
Monsieur le président Lequiller, la relation entre la France et l'Allemagne n'est pas un détail de la construction européenne : elle est le fondement de l'Europe politique que nous voulons tous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et plusieurs bancs du groupe NC.)
La parole est à Mme Valérie Rosso-Debord, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, mes chers collègues, avant de poser ma question, je veux dire combien j'ai été choquée et blessée par les propos de M. Ayrault. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Monsieur Ayrault, le droit d'amendement est un droit que nous partageons tous ici, que nous appartenions à l'opposition ou à la majorité.
Mais le droit d'amendement ne consiste pas à aligner cent amendements identiques ou qui ne se distinguent que par une virgule. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Le droit d'amendement, ce n'est pas l'obstruction systématique. Le droit d'amendement, ce n'est pas la caricature d'un Parlement auquel nous sommes extrêmement attachés. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) L'antiparlementarisme, mes chers collègues, est un mal qui nous guette tous ! (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
J'ai souvent honte de l'image que nous donnons tous, car je crois en la souveraineté nationale, dont chacun de nous détient une partie !
Je vous appelle donc à vous ressaisir et à donner une meilleure image de notre assemblée. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations et claquements de pupitres sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Veuillez poser rapidement votre question, Madame Rosso-Debord, car vous avez utilisé une bonne partie de votre temps de parole.
Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'État chargée de la solidarité.
Le vieillissement de la population n'est pas seulement un défi pour la médecine ou pour nos comptes sociaux : c'est un défi pour toute notre société (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR, qui couvrent quasiment la voix de l'oratrice), mais il n'intéresse évidemment pas le parti socialiste !
Ce défi quotidien nous oblige à agir et à proposer une solution d'accueil adaptée à nos aînés, en particulier quand est venu le temps de la dépendance. (Mêmes mouvements.)
Outre le maintien à domicile et le placement en établissement, une troisième solution existe (Les députés du groupe SRC désignent leur montre) : l'accueil familial des personnes âgées et handicapées au domicile d'un accueillant familial (Exclamations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe SRC), au sujet duquel vous m'avez commandé un rapport, madame Létard.
Toutes les personnes âgées et handicapées de France seront ravies de votre attitude, mesdames, messieurs les députés du parti socialiste !
Mme Rosso-Debord a parlé deux minutes : achevez votre propos, madame, et posez votre question ! (Vives protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Or le statut des accueillants est désuet et incomplet, et leurs conditions de travail peu valorisantes. (« Règlement ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la secrétaire d'État, à la suite du rapport que je vous ai remis, quelles propositions êtes-vous en mesure de soumettre à l'Assemblée nationale ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Mes chers collègues, je n'admettrai pas que vous remettiez en cause les temps de parole.
Monsieur Ayrault, voulez-vous venir vérifier la durée de l'intervention de Mme Rosso-Debord ? (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Deux minutes trente-deux secondes ! (Mêmes mouvements.)
La parole est libre : seul le temps est compté ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité.
Je vais essayer de répondre à la question que vient de me poser Mme Rosso-Debord sur l'accueil familial.
Il me semble en effet que tous ici, au Parlement, nous recherchons l'intérêt général dans le respect de règles du jeu évidentes (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), dont le droit d'amendement fait partie, comme l'a rappelé Mme Rosso-Debord. Faisons-le donc de manière constructive, et non en pratiquant le blocage ou l'obstruction.
Attendons quelques instants que le calme revienne. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Madame la secrétaire d'État, vous seule avez la parole.
Madame Rosso-Debord, nous vous avons confié le soin de rédiger un rapport sur l'accueil familial, qui reste insuffisamment développé alors qu'il offre une véritable alternative au maintien à domicile et au placement en établissement des personnes âgées et handicapées. (Mêmes mouvements.)
Il satisfait à la fois au principe de libre choix pour les personnes et à l'exigence de solidarité intergénérationnelle à laquelle Xavier Bertrand, Nadine Morano et moi-même sommes très attachés. (Mêmes mouvements .)
En effet, l'accueil d'une personne fragile, le fait de s'en occuper quotidiennement et de veiller à son bien-être permet non seulement à cette personne de se sentir comme chez elle et en sécurité (Mêmes mouvements), mais constitue également pour la famille qui l'accueille une richesse, un signe d'ouverture aux autres et un véritable atout, celui du lien intergénérationnel de solidarité.
Mais ce dispositif ne pourra se développer s'il n'est pas mieux encadré. Madame Rosso-Debord, forte de votre remarquable travail, des nombreux entretiens que vous avez menés auprès des associations et des déplacements que vous avez effectués, vous nous avez proposé une série de mesures que nous traduirons sans tarder par des propositions gouvernementales. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Je retiens notamment la création d'un mandataire renforcé qui permettrait de réguler la relation entre les personnes fragiles et l'accueillant familial et, naturellement, de sécuriser ces mesures ; le recours au chèque emploi-service pour améliorer le statut du remplaçant ; la simplification de la demande d'agrément, de sorte que l'absence de réponse dans un délai de quatre mois vaille désormais accord ; la création d'un label qualité pour l'accueil familial ; enfin, l'extension de ce dernier à d'autres publics fragiles ou ayant besoin de ce type de structure, notamment aux femmes victimes de violences.
Vous le voyez, madame la députée, ce travail riche trouvera une traduction concrète dès 2009.
Voilà un travail parlementaire utile, qui fera avancer les choses ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Pascal Deguilhem, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question, à laquelle j'associe mes collègues Valérie Fourneyron, Jean-Luc Pérat et Marcel Rogemont, s'adresse à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Comme l'année dernière, la France occupe en 2008 le cinquième rang dans le classement mondial des nations sportives, ce dont nous pouvons nous réjouir. Cette place est le résultat, entre autres, d'une politique héritée du général de Gaulle. L'organisation du sport et de la jeunesse dans notre pays, fondée depuis les années soixante sur l'intervention complémentaire de l'État, du mouvement sportif, des collectivités et des familles, a donné lieu à des succès continuels. Ce modèle, certes perfectible, nous est envié par bien des nations, mais votre gouvernement a choisi de le mettre à mal, de façon purement idéologique, en prenant prétexte de la revue générale des politiques publiques. Vous envisagez, par des décisions brutales, prises sans concertation, de déstabiliser cet équilibre en remettant en cause tous les secteurs sensibles de cette organisation : refonte de toutes les références du sport de haut niveau ; projet de fermeture de l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire et de quinze centres régionaux d'éducation populaire et de sport – les CREPS d'Ajaccio, Amiens, Chalain, Houlgate, Limoges, Mâcon, Dinard, Voiron, entre autres – ; disparition des directions départementales de la jeunesse et des sports ; privatisation du champ de la formation ; abandon des outils destinés aux pratiques sportives et éducatives de la jeunesse.
Madame la ministre, nous vous le disons, ces réformes sont inopportunes et mal conduites. Elles bafouent la démocratie et le monde associatif et sportif. Vous abandonnez vos missions essentielles de service public et reniez les missions éducatives des CREPS, qui occupent une place importante dans les territoires.
Le monde du sport et de la formation sportive est inquiet, il attend des réponses et se mobilise. Cette rétraction du périmètre d'intervention de l'État suscite également des inquiétudes chez les jeunes et leurs parents, les associations et les élus.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. La question !
Madame la ministre, vous qui vous plaisez à nous rappeler que le sport est un outil majeur en matière de santé publique, pouvez-vous nous indiquer quels établissements vous comptez fermer ou transférer, et plus largement quelle politique sportive vous comptez mener ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Monsieur le député, sachez qu'avec le secrétaire d'État chargé des sports, Bernard Laporte, j'ai entamé une réflexion sur la restructuration nécessaire du sport de haut niveau et du sport professionnel français. En effet, les derniers résultats des Jeux Olympiques nous ont montré, aux côtés de ses forces, les faiblesses de notre pays dans certaines disciplines où nous avons connu d'importantes déceptions. D'ores et déjà, certains pays, je pense entre autres au Royaume-Uni, nous ont dépassés. C'est la raison pour laquelle, après un travail d'analyse et de concertation, Bernard Laporte a présenté la semaine dernière les axes d'une remise en route du sport de haut niveau et du sport professionnel dans notre pays.
Espérons qu'il n'applique pas les mêmes recettes que pour l'équipe de France de rugby !
Dans le cadre de ce plan, nous avons proposé que les établissements sportifs dépendant du ministère deviennent de véritables campus sportifs de haut niveau. D'ores et déjà, la restructuration de l'Institut national des sports et de l'éducation physique, vaisseau amiral du sport français, a commencé. Les installations sportives seront remises à niveau et restructurées tout au long de l'année 2009 et leurs missions seront clairement identifiées.
Nous avons aussi analysé la situation des CREPS, dont la plupart, il faut le reconnaître, ont une action limitée en ce qui concerne le sport de haut niveau et des structures de formation souvent insuffisantes. Elles doivent remplir leurs missions de suivi médical, de préparation physique, d'entraînement, de recherche et d'accompagnement personnalisé. Parmi les vingt-quatre centres, quatorze ont vocation à devenir des campus sportifs de haut niveau, six à être restructurés, quatre à faire l'objet d'une analyse plus approfondie.
Je puis vous assurer, monsieur Deguilhem, que cette action sera menée en concertation avec le monde sportif et les élus locaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-Marie Binetruy, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question, à laquelle j'ai le plaisir d'associer Mme Josette Pons, députée du Var, s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire.
Lancé en décembre 2005, l'appel à projets « pôles d'excellence rurale » visait à soutenir des initiatives locales susceptibles de créer des emplois dans les territoires ruraux par des projets innovants et ambitieux bâtis autour de partenariats public-privé. 379 projets ont été labellisés, dont deux dans ma circonscription. Nous ne pouvons que nous réjouir du succès de ce dispositif qui a révélé le potentiel de croissance et d'innovation que recèlent nos territoires ruraux.
Monsieur le secrétaire d'État, trois ans après le lancement de cette initiative, pilotée à l'époque par Christian Estrosi, je souhaiterais vous poser deux questions.
D'abord sur l'avancée du programme et le bilan des actions menées. Vous aviez annoncé qu'une évaluation des pôles d'excellence rurale serait réalisée pour la fin de cette année. Qu'en est-il ? Quels premiers enseignements pouvez-vous tirer de la mise en oeuvre de cette politique ? Quel traitement est réservé aux pôles qui n'auraient pas engagé d'action avant la fin de cette année ?
Le second volet de ma question porte sur l'avenir de ces pôles. Vous avez évoqué à plusieurs reprises l'opportunité de donner une nouvelle impulsion à cette politique, avec l'objectif de favoriser les projets dont la thématique concourt à la mutualisation des services publics – relais de services publics, maisons de santé. Pouvez-vous nous confirmer le lancement et le volume d'un nouvel appel à projets en 2009, et nous préciser les thématiques prioritaires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Hubert Falco, secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire.
Monsieur le député, 379 pôles d'excellence rurale ont été labellisés de 2005 à 2008. L'évaluation de ces pôles que nous avons réalisée en juin 2008 a montré que 100 pôles n'avaient pas atteint leurs objectifs, objectif d'accueil des nouvelles populations, objectif de protection du patrimoine naturel et culturel, objectif de soutien aux entreprises.
À la suite de cette première évaluation et d'une relance, six pôles seulement n'auront pas rempli leurs objectifs à la fin de l'année. Nous allons leur octroyer un délai supplémentaire pour remplir leur mission. Le Premier ministre nous a demandé d'engager une réflexion interministérielle et d'élaborer un projet de relance de cette mesure ô combien essentielle pour le monde rural. Un projet sera proposé pour 2008-2011 avec un engagement de l'État aussi important que pour la première contractualisation, c'est-à-dire 235 millions d'euros.
À travers ces pôles, le monde rural a choisi opportunément de disposer de moyens importants et essentiels. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Nous avons terminé les questions au Gouvernement.
Mes chers collègues, avant de suspendre la séance, je vous souhaite les meilleures fêtes de fin d'année possibles.
Pôles d'excellence rurale
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt.)
L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble du projet de loi relatif à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision (nos 1209, 1267).
Avant de passer aux explications de vote, je donne la parole à Mme Christine Albanel, ministre de la culture et de la communication.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, nous sommes réunis pour le vote solennel d'une grande réforme culturelle, au plein sens du terme,…
…puisque, portant directement sur le principal média, la télévision, qui fait intégralement partie de la vie quotidienne des Français, elle les concernera tous sans exception,…
…ce qui n'a pas été le cas de beaucoup des grands projets culturels antérieurs.
Le texte bouleversera en effet l'offre de programmes, à la fois en termes d'horaires – les Français ont exprimé leurs souhaits en ce sens – et de contenus, puisque la contrainte de la publicité ne s'exercera plus sur les programmes et qu'il sera dès lors possible d'avoir à vingt-deux heures trente une deuxième partie de soirée ambitieuse,...
…voire une troisième partie.
De fait, cette réforme permettra de mettre en application de nombreuses mesures qui étaient en discussion depuis très longtemps et avaient fait l'objet de nombreux débats, comme la création, souhaitée par les uns et par les autres, d'une société unique, France Télévisions, sur le modèle de Radio France, avec différentes chaînes. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Vous avez vous-mêmes reconnu que c'était une grande idée, parce qu'elle créera une plus grande synergie, accroîtra la mutualisation et renforcera la cohérence, en vue de consolider et de rendre plus dynamique la gouvernance. Cette réforme, souvent évoquée, souvent approchée et jamais réalisée, va donc dans le bon sens.
Du reste, la gouvernance, elle aussi, avait fait l'objet de nombreux débats. La décision qui a été prise en la matière est celle de la cohérence et du courage, puisqu'elle repose sur un pacte de confiance entre l'actionnaire et les dirigeants de l'audiovisuel public, au travers du processus de nomination, que nous assumons complètement, confié à un État actionnaire qui choisit les dirigeants de l'audiovisuel public sous le contrôle du CSA et du Parlement, contrôle accompagné, au sein de celui-ci, d'un débat public qui n'avait pas lieu auparavant.
Par ailleurs, depuis la création de l'audiovisuel extérieur, les financements étaient éclatés à travers différentes sociétés qui n'entretenaient pas de grands liens entre elles. Aujourd'hui, une société unique permettra de regrouper les synergies et de renforcer la voix de la France, qui sera plus écoutée à l'extérieur, grâce à toutes les possibilités qui nous sont offertes – télévision, radio, Internet –, en fonction des zones d'influence et des zones d'action que nous nous donnerons. C'est, là encore, un grand projet.
L'État s'étant engagé de façon très décidée, ce projet de loi est financé, que ce soit dans le cadre du projet de loi de finances ou dans celui du projet de loi relatif à l'audiovisuel, notamment au travers des taxes prévues sur les télécommunications : le système a du sens, puisque ce secteur, qui est en pleine expansion, est de plus en plus créateur, diffuseur et producteur de programmes.
Nous avons eu trois semaines et demie de débats et d'obstruction. Il y avait, de la part de certains, une volonté de faire durer inlassablement la discussion plutôt que de proposer des idées. Nous l'avons regretté. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Toutefois, un grand nombre d'idées ont été exprimées,…
…notamment sur le financement.
Il serait intéressant de créer, en 2009, un comité de réflexion sur la redevance, qui a souvent été au coeur des débats.
Qu'est-ce que cela signifie, « créer un comité de réflexion sur la redevance » ?
Il nous permettrait de prolonger le travail de réflexion engagé.
En procédant à cette réforme, dans le cadre d'un vrai projet de loi culturel, nous prenons toutes nos responsabilités sur ce grand projet vraiment culturel.
Le temps est venu, pour France Télévisions, de construire et de recouvrer la confiance…
…et la stabilité. La réforme sera mise en oeuvre dès le 5 janvier prochain avec la suppression de la publicité si bien que, dès cette date, les Français pourront apprécier tous les soirs des programmes nouveaux. Ils seront de plus en plus nombreux à en être satisfaits et plutôt que de mesurer les attentes d'avant, il sera intéressant de mesurer la satisfaction d'après.
C'est la raison pour laquelle je vous propose de nous donner rendez-vous d'ici un an ou deux pour mesurer la satisfaction qu'auront nos compatriotes à pouvoir regarder une télévision publique ambitieuse, cohérente et riche...
..d'émissions de service public.
Nous avions déjà une bonne télévision publique et une bonne télévision privée : par cette réforme nous nous donnons les moyens d'être encore meilleurs et de réaliser toutes nos ambitions pour ce média qui est le plus aimé des Français et que nous aimons tous, nous aussi.
Voilà ce que j'ai envie de dire, in fine, à tous ceux qui aiment la télévision, particulièrement aux salariés de France Télévisions.
Je remercie tous les parlementaires qui, fidèlement, inlassablement, ont participé, jour et nuit, à ces longues semaines de débat. Je tiens à leur témoigner ma reconnaissance. Leur soutien a été précieux.
Je tiens également à remercier de tout coeur les membres de la commission spéciale, notamment son président, M. Jean-François Copé, et son rapporteur, M. Christian Kert, qui a conduit les débats avec une grande finesse et beaucoup de chaleur. Sans pouvoir les accélérer, il a toutefois permis qu'ils se déroulent dans les meilleures conditions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je remercie aussi les principaux orateurs, le vice-président de la commission spéciale, M. Patrice Martin-Lalande, M. Michel Herbillon ainsi que tous ceux qui ont pris la parole pour soutenir cette ambition que je souhaite collective.
Je remercie enfin l'opposition. Sa participation, toutefois, fut surtout sur le mode de l'obstruction, ce que je regrette. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP - Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le groupe NC.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « pas maintenant et pas comme cela ! » Voilà de quelle manière nous, centristes, résumons notre position sur ce projet de loi qui est à ce jour une occasion gâchée.
Il comporte deux parties majeures. La première est la réorganisation du groupe France Télévisions en entreprise unique. Sur ce premier chantier, nous vous apportons notre soutien. Le projet de loi reprend en effet les conclusions de la commission spéciale dont nous saluons le président – M. Copé – qui a réalisé un travail remarquable dans ce domaine.
Que voulons-nous faire de cette communauté humaine qui mobilise plus de 11 000 professionnels et réunit, chaque jour, plus de 10 millions de téléspectateurs avec une audience cumulée de 34 % ? Voilà la seule question, la véritable question à laquelle nous avons l'ardente obligation de répondre !
Le groupe Nouveau Centre exprime une ambition forte pour l'audiovisuel public français, l'ambition d'en faire un champion européen, l'ambition de maintenir voire développer sa part d'audience, enfin l'ambition d'une exigence de qualité, véritable signature du service public de l'audiovisuel.
Alors oui, dans cette perspective, la transformation du groupe France Télévisions en entreprise unique est indispensable pour dégager les marges de manoeuvre financières nécessaires à sa modernisation. Alors oui, la transformation de France Télévisions en média global – chaînes hertziennes, portail Internet avec télévision de rattrapage, vidéo à la demande, télévision mobile personnelle – est au coeur de cette stratégie ambitieuse. Elle est la seule urgence de votre projet.
Reste, ensuite, la suppression de la publicité sur l'audiovisuel public. Il s'agit, en soi, d'une bonne idée soutenue par les centristes depuis 2002, à condition qu'elle soit financée par l'évolution de la redevance. Nous considérons la solidité et le dynamisme de son financement comme déterminants pour l'avenir de l'audiovisuel public. Or, sur ce point, notre opposition est frontale avec les solutions retenues à ce jour.
Elle se résume simplement : « La suppression de la publicité, oui, mais pas maintenant ! » Supprimer 300 millions d'euros de recettes privées pour les remplacer par l'addition de deux prélèvements obligatoires et de quelques crédits budgétaires alors que nous entrons dans une crise économique majeure, dure, douloureuse pour la plupart de nos concitoyens, ce n'est pas une simple erreur de calendrier, c'est une faute politique. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Mes chers collègues de la majorité présidentielle – c'est surtout à vous que nous nous adressons aujourd'hui –...
..nous n'avons pas été élus en juin 2007 pour cela ! De nombreuses voix à l'intérieur de la majorité présidentielle se sont élevées pour réaffirmer cette évidence de bon sens.
C'est le cas de deux anciens Premiers ministres, Édouard Balladur et Jean-Pierre Raffarin, de notre rapporteur général du budget, Gilles Carrez, qui s'est exprimé courageusement dans ce sens au cours de la discussion générale, le cas aussi de nombreux députés de l'UMP, François Goulard, Claude Goasguen et bien d'autres, et c'est notre cas, nous, les centristes, vos partenaires de la majorité présidentielle.
Mes chers collègues du groupe UMP, l'issue du vote est entre vos mains ; juste avant le moment où vous appuierez sur le bouton pour signifier votre vote solennel, prenez deux secondes pour laisser résonner en vous cette question : « Et s'ils avaient raison ? »
Notre second message est tout aussi simple : « La suppression de la publicité, oui, mais surtout pas comme cela ! » Nous sommes en effet en totale opposition avec les solutions de financement retenues. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC, SRC et GDR.)
Créer, pour financer cette suppression, deux nouvelles taxes non affectées sur le chiffre d'affaires d'entreprises privées constitue également une faute majeure. En effet, recettes non affectées, elles précarisent dangereusement le financement de l'audiovisuel public. Elles sont d'une constitutionnalité douteuse. Elles sont illégitimes ! Franchement : taxer la téléphonie fixe et les envois de textos pour financer l'audiovisuel public, il fallait vraiment oser !
Enfin, elles sont anti-économiques car les opérateurs assujettis à ces taxes n'auront pas d'autre choix que de réduire leurs investissements ou de répercuter le montant prélevé sur le dos des consommateurs.
Tout au long de ces débats, si le groupe Nouveau Centre s'est parfois opposé à votre projet, dans le même temps, ses députés n'ont cessé de vous proposer un plan d'ensemble alternatif prévoyant l'application immédiate de la partie relative à la restructuration de France Télévisions, le report de la suppression de la publicité en sortie de crise, au 1er janvier 2012, le financement de la suppression de la publicité par une évolution modérée d'une redevance socialement plus juste, modernisée et étendue aux nouveaux supports de diffusion.
Vous ne nous avez pas entendus. Le Président de la République se montrera-t-il aussi réactif que sur le RSA ? Nous l'espérons et nous verrons bien ce que fera le Sénat. En l'état, nous vous le répétons : pas maintenant et pas comme cela ! Le projet qui nous est soumis n'a pas su intégrer le coeur et l'esprit de nos propositions.
Dans ces conditions, les députés du Nouveau Centre voteront majoritairement contre. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC, SRC et GDR.)
Plusieurs députés des groupes SRC et GDR. Bravo !
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en réalité, cette réforme de l'audiovisuel, la gauche en a toujours rêvé. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Non, nous n'avons certainement pas rêvé de Sarkozy à la tête de France Télévisions !
Et nous pensions sincèrement que l'opposition cesserait, pendant au moins quelques semaines, d'être figée dans son dogmatisme pour approuver, comme deux tiers des Français, la suppression de la publicité sur France Télévisions.
Eh bien, non : elle a voté contre. Ainsi, cette grande idée, c'est bien nous, et nous seuls, qui avons eu le courage de la mener à bien. (Rires sur de nombreux bancs des groupes SRC et GDR.)
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien !
Cette mesure est le pivot d'une grande ambition culturelle : en libérant la télévision publique du diktat de l'audimat, nous l'encourageons à faire preuve de davantage d'audace et d'innovation pour diffuser des programmes de qualité, populaires,…
…qui fédéreront tous les publics autour de thématiques trop souvent oubliées aux heures de grande écoute : l'Europe, l'environnement, l'économie, la science, la politique.
C'est aussi une nécessité économique. Des chaînes toujours plus nombreuses, rejointes par les nouveaux médias, se partagent désormais le marché publicitaire.
Pouvions-nous maintenir coûte que coûte le système ancien qui risquait d'appauvrir, année après année, l'ensemble du monde de l'audiovisuel et qui fragilisait France Télévisions ? Non. Que les chaînes privées soient soumises au marché publicitaire, c'est normal ; mais, pour la télévision publique, substituer aux recettes publicitaires aléatoires des ressources publiques garanties et pérennes,…
…c'est une idée de bon sens, qui aurait dû faire l'unanimité.
Le débat a réservé bien des surprises, et pas seulement à propos de la suppression de la publicité. On pensait au moins que l'opposition soutiendrait ce grand projet qu'est la création d'une entreprise unique…
…en lieu et place des 49 sociétés qui constituent aujourd'hui France Télévisions. Il n'en est rien : l'opposition, là encore, a voté contre. Contre une mesure demandée par les dirigeants de France Télévisions eux-mêmes ! Une mesure de bon sens, qui va permettre d'encourager les synergies et de renforcer le service public en lui donnant les moyens de s'adapter aux nouvelles technologies.
En réalité, durant plus de trois semaines, et 80 heures de débats, rien ne nous aura été épargné. Nous avons eu droit de la part de l'opposition à toutes les caricatures, toutes les contrevérités, tous les procès d'intention. Il y a tout de même des injures et des provocations que nous ne sommes pas prêts d'oublier et qui n'étaient pas vraiment à la hauteur des enjeux. (Murmures sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Je cite : « Montée de l'affairisme », « renforcement de la mafia de l'audiovisuel », « forfaiture », « retour au despotisme »,…
…« berlusconisation », « poutinisation », « brejnevisation » ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Ces mots sont-ils dignes d'un débat parlementaire moderne ? (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Nous retiendrons aussi vos innombrables amendements strictement identiques et vos amendements surréalistes. Que penser – et ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres – de ces 26 amendements censés autoriser la publicité pour le bar de ligne, le saumon, l'agneau, le poulet, la pomme, la banane… ? (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Voilà qui est constructif !
Enfin, nous retiendrons ces 50 suspensions de séance, ces 116 rappels au règlement, ces interventions interminables sans aucun rapport avec le sujet traité.
Nous regrettons profondément votre attitude, cette obstruction systématique que vous avez même érigée en théorie. Quelle image désastreuse du débat démocratique tel qu'il devrait se dérouler dans notre hémicycle ! Mes chers collègues de l'opposition, qu'avez-vous gagné en agissant ainsi ? En quoi avez-vous amélioré le projet de loi ? Quelles ont été vos propositions alternatives ?
Nous voici parvenus au terme d'un débat qui a commencé en réalité dès le 8 janvier, lorsque Nicolas Sarkozy a eu le courage de lancer cette réforme...
..et un débat passionnant, souvent passionné, tout au long duquel nous n'avons jamais oublié, nous, pour qui nous faisions cette réforme. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Nous la faisons pour les équipes de France Télévisions, à qui nous donnons des moyens sans précédent pour réaliser leurs ambitions ; pour les professionnels de la création, producteurs, réalisateurs, auteurs, acteurs, techniciens, journalistes qui contribuent au rayonnement de notre culture ; pour tous les Français, enfin, les téléspectateurs qui ont droit à une télévision publique de qualité.
Au terme de ce débat, le groupe UMP est fier d'avoir soutenu ce projet.
Il est fier d'avoir contribué à son élaboration en liaison avec le Gouvernement et en particulier Christine Albanel.
Veuillez maintenant indiquer quel sera le vote du groupe UMP, même si nous nous en doutons un peu.
Cette réforme est en effet un excellent exemple de coproduction législative. Les travaux de la commission présidée au printemps par Jean-François Copé ont permis de définir un nouveau modèle global pour la télévision publique, celui que prévoit ce projet,…
…qui permettra à France Télévisions de s'affirmer comme un grand groupe d'audiovisuel public.
Je termine, monsieur le président, mais notez que nous nous sommes heurtés à une forte obstruction !
Nous sommes fiers également d'avoir amélioré ce projet lorsque cela nous semblait nécessaire, aux côtés du président de la commission spéciale Jean-François Copé et de notre rapporteur Christian Kert. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
En prévoyant des clauses de rendez-vous pour assurer le suivi de la réforme et en demandant à France Télévisions…
Je conclus : oui, nous sommes fiers de cette réforme ; oui, nous avons prouvé qu'on pouvait la mener à bien sans faire payer l'usager.
Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera avec enthousiasme cette réforme sans précédent de l'audiovisuel public. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
Je fais annoncer le scrutin dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Didier Mathus, pour le groupe SRC.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes en effet confrontés à un bel exemple de coproduction : la coproduction d'un fiasco parlementaire entre le Gouvernement et sa majorité.
Quatre-vingts heures de débat, c'est long, certes, mais le sujet les méritait. Quelle curieuse idée a eue le Gouvernement de présenter ce texte selon la procédure d'urgence, en novembre, alors qu'il devait s'appliquer début janvier ! Le mépris du Parlement qui se manifeste à travers le choix de cette procédure a trouvé une juste réponse.
Oui, nous revendiquons ce combat parce que c'est la mission que nous ont confiée nos électeurs, celle de nous opposer – avec les moyens démocratiques dont nous disposons – aux projets qui nous paraissent néfastes pour notre pays – et le présent texte en fait partie.
Nous avons voulu alerter l'opinion et c'est chose faite puisque 75 % de nos concitoyens, selon les sondages, estiment que ce projet est une remise en cause de l'indépendance de la télévision publique.
Vous voilà donc au moment d'adopter, en pleine crise économique et financière, alors que la société craque de toutes parts, alors que les suppressions d'emplois se succèdent chaque matin par milliers, alors que l'État n'est même plus capable de faire face à ses missions publiques les plus élémentaires, vous voilà donc, oui, à la veille de dépenser 450 millions d'euros d'argent public, de créer deux taxes supplémentaires pour satisfaire les appétits de MM. Bouygues, Bolloré et leurs amis du Club du Fouquet's. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Ce projet a une double fonction : d'une part, substituer à la télévision publique une télévision d'État strictement soumise au pouvoir sur le plan politique et financier et, d'autre part, permettre aux amis du pouvoir, opérateurs de télévisions privées, de capter la totalité de la ressource financière du marché publicitaire.
Le plus grave réside, bien sûr, dans cette incroyable régression démocratique consistant à donner le pouvoir de nomination et de révocation des patrons de l'audiovisuel public au seul Président de la République. Aucun autre pays occidental, pas même l'Italie de Berlusconi, n'a envisagé un système aussi féodal, de mise au pas de l'audiovisuel public. Il s'agit d'un bond en arrière de vingt-cinq ans !
Cet archaïsme, cette vision poutinienne – oui, monsieur Herbillon, poutinienne – de la liberté de la presse méritait à elle seule que nous menions ce combat déterminé. Dès l'adoption de la loi, nous saisirons le Conseil constitutionnel de cette disposition choquante qui témoigne de la dérive narcissique et autoritaire du pouvoir présidentiel.
Le deuxième aspect de la loi, c'est bien sûr le hold-up perpétré sur les ressources financières de la télévision publique liées à la publicité. Ne nous interrogeons plus sur la mouche qui aurait piqué Nicolas Sarkozy le 8 janvier dernier, lorsqu'il a annoncé cette mesure. Cette mouche, nous la connaissons, elle a pour nom TF1, qui avait remis en décembre au Président de la République un Livre blanc , dont la loi d'aujourd'hui n'est finalement qu'un duplicata. Il est vrai que la droite française n'a jamais rien refusé à TFl. Elle n'en finira jamais d'honorer ses dettes électorales. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Le tarissement des revenus publicitaires de France Télévisions accentuera sa dépendance à l'égard du pouvoir, contribuera à l'appauvrir financièrement et enrichira dans des proportions considérables ses concurrents privés.
On comprend mieux votre dessein lorsqu'on met ce tarissement de la ressource publicitaire de la télévision publique en rapport avec les étonnants cadeaux faits aux chaînes privées : deuxième coupure de pub dans les films et les oeuvres audiovisuelles de fiction, rehaussement du plafond de volume de publicité autorisé, passage de l'heure d'horloge à l'heure glissante, légalisation de la publicité clandestine avec l'autorisation du placement de produit. Toutes les vannes de la publicité sont ouvertes pour TF1 et M6. Cette publicité, prétendument tyrannique pour la télévision publique, n'a d'un seul coup plus d'inconvénient lorsqu'il s'agit d'alimenter les caisses de MM. Bouygues et consorts !
La deuxième coupure autorisée dans les films est, à cet égard, une atteinte grave à l'intégrité culturelle. Nous sommes tristes d'avoir entendu une ministre de la culture, rompant avec la position de tous ses prédécesseurs, en faire l'apologie.
La télévision française, publique comme privée, avait jusqu'à présent, quoi qu'on en dise, une certaine tenue. Mais le mouvement que vous engagez, oui, c'est une berlusconisation du paysage audiovisuel français.
La télévision publique, inféodée, appauvrie, n'aura plus les moyens de financer des programmes à un niveau lui permettant de rester dans la course avec les grandes chaînes populaires généralistes. La télévision privée, elle, noyée sous un véritable déluge publicitaire, dérivera inévitablement vers les formes les plus commerciales, telles qu'on les connaît dans certains pays européens, comme l'Italie. Vous allez abaisser le niveau général de la télévision dans notre pays.
Monsieur Mathus, veuillez indiquer votre vote, même si l'on s'en doute un peu.
La télévision est un outil de connaissance, un outil de divertissement, un outil citoyen extraordinaire, mais à ce qui ne devrait ressortir que des affaires de l'esprit vous substituez l'esprit des affaires. C'est bien la marque de la république sarkozienne, où l'esprit de lucre est la seule boussole. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
C'est pourquoi le groupe socialiste vous invite à dire non, quatre fois non.
Non au cynisme social, en refusant de gaspiller 450 millions d'euros d'argent public pour une mesure inutile dans la période actuelle, quand tant de gens appellent à l'aide.
Non à l'asphyxie financière de la télévision publique et à sa transformation en télévision d'État.
Non à la dérive autoritaire et monarchique du pouvoir présidentiel.
Non, enfin, à cette régression démocratique sans précédent. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est, pour cinq minutes, à M. Patrick Braouezec, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici donc parvenus au terme de plus de trois semaines de débat sur ce projet de loi. Trois semaines de débat parlementaire durant lesquelles, il faut le reconnaître, il a été difficile d'obtenir des réponses de Mme la ministre ou des députés de la majorité aux légitimes questions que nous posions.
Il est assez difficile de parler dans ce brouhaha, monsieur le président.
Mes chers collègues, pouvez-vous, par respect vis-à-vis de l'orateur, regagner vos places dans le silence ?
Poursuivez, monsieur Braouezec.
Merci, monsieur le président.
N'en déplaise à ceux qui ont objecté le seul mot d' « obstruction » à nos amendements, à nos arguments, multiples et variés, fondés et construits, il n'est pas de notre responsabilité que ce texte ait été indûment inscrit en urgence.
Notre conception du travail parlementaire est en effet contraire à celle qui consisterait à se soumettre à l'improvisation destructrice d'un Président de la République qui a pris tout le monde à contre-pied en décidant de supprimer la publicité sur France Télévisions.
Car, nous l'avons dit : la suppression de la publicité, pourquoi pas ! Mais, comme l'a dit notre collègue Dionis du Séjour, pas comme ça. Pas dans des délais aussi courts. Pas sans avoir réfléchi à un financement pérenne et dynamique du service public audiovisuel.
Or, que constatons-nous ? Une compensation estimée, on ne sait comment, à 450 millions d'euros volatiles, abondés par des taxes dont il faudra vérifier la constitutionnalité, et alors que ce sont 800 millions d'euros qui sont indispensables à une fusion en une entreprise unique respectant les droits des salariés et à la suppression de la publicité. Somme que vous avez refusé de prendre en compte, madame la ministre.
Il est vrai qu'avec le débat d'hier soir et de cette nuit, vous nous avez prouvé que cet aspect de ce projet de loi, tout en étant destructeur pour France Télévisions, cachait une autre réalité : celle qui consistait à ce que les cadeaux de Noël que le locataire de l'Élysée a promis à ses amis des chaînes privées arrivent à temps.
Ainsi, les débats sur le placement de produit et l'introduction de la seconde coupure de publicité ont trahi la vraie nature de ce projet, madame la ministre : une conception consumériste et dégradée de la culture. D'un côté, vous feignez de défendre une télévision publique de qualité, mais faute de financement, vous la fragilisez. Et de l'autre, par les dispositions que votre majorité va voter dans un instant, vous favorisez le développement des télévisions privées sans gage de qualité, avec des facilités de financement.
Ainsi, il n'a jamais été question, dans ce projet de loi, d'améliorer le service public de l'audiovisuel, mais d'organiser finalement son enterrement, avec l'aval, conscient ou inconscient, contraint ou assumé, des parlementaires de la majorité !
Ce texte est aussi, et surtout, un alibi, puisque finalement la suppression de la publicité, l'un des premiers objectifs du projet de loi, a été décidée non par décret, comme vous l'auriez voulu jusqu'à votre prise de conscience de sa non constitutionnalité, mais par une décision que vous-même avez dictée au conseil d'administration de France Télévisions !
Mais il est vrai que ce projet de loi avait aussi pour but de placer l'audiovisuel public sous la coupe du Président de la République. Vous allez décider une reprise en main politique qui marque un retour de vingt-cinq ans en arrière, ce que 74 % des Français rejettent, ainsi que bon nombre de députés, même sur les bancs de votre propre majorité.
Les présidents des sociétés de l'audiovisuel public seront désormais nommés par Nicolas Sarkozy, ce qui condamne l'indépendance du service public. Il pourra également les révoquer s'ils ne lui donnent pas entière satisfaction. Un système qui laisse présager le pire...
On aligne donc France Télévisions sur les méthodes du privé : l'actionnaire décide. Exactement comme si France Télévisions, Radio France et la nouvelle AEF vendaient des avions ou des trains. L'État devrait être impartial et le Président de la République devrait être censé garantir cette impartialité. Malheureusement, aujourd'hui, et plus encore une fois ce projet de loi voté, il n'en est définitivement rien.
Nous nous souviendrons, madame la ministre, de ce débat, à gauche comme à droite. Car malgré ses insuffisances, mais grâce au débat sur nos amendements, grâce à notre opiniâtreté, à notre refus de renoncer à la liberté de résister à des ordres venus d'en haut, et grâce, il faut le dire, au règlement intérieur actuel de notre assemblée, nous avons pu alerter les citoyens sur les dangers de ce texte. Je dis cela, mesdames et messieurs de la majorité, pour que vous réfléchissiez bien à cet aspect de notre travail parlementaire. Car cette majorité finira bien, un jour ou l'autre, plus ou moins lointain, par redevenir l'opposition.
Vous l'avez compris, pour toutes ces raisons, les députés du groupe GDR sont farouchement opposés à une réforme improvisée, dont le financement repose sur des données fantaisistes et trop aléatoires pour la survie du service public audiovisuel français. Notre groupe s'oppose avec force à la reprise en main politique de l'audiovisuel public, et à cet ORTF d'un temps révolu.
C'est pourquoi nous voterons contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'ensemble du projet de loi.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 546
Nombre de suffrages exprimés 535
Majorité absolue 268
Pour l'adoption 293
Contre 242
(Le projet de loi est adopté.)
(Huées sur les bancs du groupe SRC.)
Vote sur l'ensemble
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinq, sous la présidence de M. Marc Laffineur.)
L'ordre du jour appelle la discussion du texte de la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 2009. (n° 1323)
La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur de la commission mixte paritaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, mes chers collègues, à l'issue de la première lecture à l'Assemblée nationale, le projet de loi de finances comptait 148 articles. Le Sénat en a adopté 86 dans les mêmes termes que notre Assemblée et en a ajouté 60. La CMP a donc été saisie de 121 articles encore en discussion. Elle est parvenue à un texte commun sur 113 de ces articles, en a supprimé huit et en a ajouté un. Le Gouvernement nous demande d'adopter le texte élaboré par la CMP, compte tenu de quelques coordinations ou précisions.
Ce texte tient compte des effets de la crise sur l'équilibre du budget pour 2009. Par souci de sincérité, le Gouvernement nous demandera d'adopter un amendement tendant à ajuster le déficit par rapport à celui qui était prévu initialement.
En matière de déficit, les choses ont beaucoup changé en quelques semaines. Au mois de septembre, le déficit prévisionnel inscrit au projet de loi de finances initial s'élevait à 52,4 milliards d'euros. En cours d'examen de cette loi de finances au Sénat, le Gouvernement a été conduit à ajuster les prévisions macro-économiques. Cela a eu un impact important sur la prévision de recettes, qui a été revue à la baisse de 6,8 milliards, et sur celle des dépenses qui, compte tenu de la réduction de l'inflation prévisionnelle de 2 % à 1,5 %, a pu faire l'économie de 1,4 milliard – 1,2 milliard au titre de la dette, près de 200 millions au titre des pensions. Le déficit alors annoncé était de 57,5 milliards d'euros.
Toutefois, nous avons adopté la semaine dernière le collectif budgétaire 2008, qui sera débattu au Sénat après-demain. Celui-ci prend en compte les dispositions fiscales du plan de relance, lesquelles vont peser à la baisse sur les recettes. Le déficit devra donc être ajusté à un niveau encore supérieur, niveau que je ne connais pas mais que le ministre nous indiquera.
En 2009, nous savons d'ores et déjà qu'une loi de finances rectificative interviendra dès le début de l'année. Le projet sera examiné par la commission des finances le lundi 22 décembre. Elle va encore majorer le déficit, mais cette fois au titre de l'exercice 2009. Cette majoration ne jouera donc pas dans l'ajustement du déficit que nous allons voter dans quelques instants.
Parmi les décisions de la commission mixte paritaire, je relèverai d'abord l'accord sur le plafonnement des niches fiscales. C'est un sujet sur lequel nous sommes nombreux à travailler depuis plusieurs années, notamment avec Pierre Méhaignerie. Nous avons enfin avancé et réussi à mettre un plafond à quatre niches fiscales qui n'en avaient toujours pas.
S'agissant de la niche dite « régime Malraux », nous sommes tombés d'accord avec nos collègues sénateurs pour revenir au plafond de 100 000 euros de travaux et pour adopter une majoration de taux – de 25 % à 30 % pour les zones de protection du patrimoine architectural et de 35 % à 40 % pour les secteurs sauvegardés. En ce qui concerne le régime outre-mer, nous avons adopté un plafonnement de l'avantage fiscal après rétrocession à 40 000 euros ou 15 % du revenu imposable. En matière de régime de la location meublée, le dispositif est recentré sur les vrais professionnels et nous avons introduit un mécanisme de réduction d'impôt plafonnée spécifique pour certaines résidences – résidences pour personnes âgées, de tourisme, de santé ou universitaires. Enfin, pour les monuments historiques, nous avons accepté la position de nos collègues sénateurs de ne pas garder un plafond pour les travaux réalisés dans les monuments historiques non ouverts au public.
En contrepartie, ils ont accepté des restrictions en matière de division. Ainsi, sauf exception, la mise en copropriété de monuments historiques ne pourra plus ouvrir droit aux incitations fiscales. Par ailleurs, a été introduit un engagement de conservation de ces monuments historiques pour bénéficier de l'avantage fiscal.
Mais le dispositif le plus important à nos yeux, sur lequel nous travaillons depuis des années, est le plafonnement global des niches fiscales. Nos collègues sénateurs ont accepté notre proposition d'un plafonnement de 25 000 euros plus 10 % du revenu.
La commission mixte paritaire a également abondamment débattu de la demi-part en faveur des personnes ayant élevé seules des enfants. Le Sénat proposait, une fois les enfants partis du foyer, de mettre en extinction cette demi-part pour tous les bénéficiaires sans distinction. Après une longue discussion, la CMP s'est entendue pour revenir à l'amendement de l'Assemblée accordant définitivement la demi-part aux personnes ayant réellement élevé seules des enfants pendant au moins cinq ans. Cette demi-part est une manière de reconnaître les sacrifices qu'ont été obligées de consentir les personnes, le plus souvent des femmes, qui ont dû élever seules leurs enfants, qui parfois se sont endettées ou n'ont pas pu faire les dépenses qu'elles auraient souhaité faire. En revanche, il nous a semblé que dans le cas d'un couple qui, ayant élevé ensemble ses enfants, se sépare alors que le dernier enfant est parti du foyer depuis plusieurs années, cette demi-part supplémentaire ne peut plus être accordée automatiquement. Cette situation ne relevant pas de la politique familiale, mieux vaut tarir cette demi-part et utiliser plutôt les crédits disponibles à améliorer, par exemple, l'accueil en crèche afin de soulager les jeunes ménages qui sont de plus en plus souvent deux à travailler et qui éprouvent de grandes difficultés à trouver des places.
C'est donc un recentrage sur les vrais besoins des familles qui doivent élever leurs enfants.
La CMP s'est également préoccupée d'encadrer le dispositif de réduction d'ISF pour investissement dans les PME lorsqu'il bénéficie à une holding. Ce dispositif de la loi TEPA a remarquablement fonctionné.
Il a permis en quelque sorte, d'anticiper sur la crise actuelle, qui a tari les moyens de financement, notamment bancaires, de nos PME.
Le fait d'avoir pu drainer, près d'un milliard d'euros, de fonds propres dans nos PME, dès la première campagne est un résultat remarquable. Mais, comme toujours lorsque de nouveaux dispositifs sont mis en place, il faut ensuite procéder à quelques réglages. Nous nous sommes aperçus qu'il fallait préciser les choses sur les montages en holding, qui bénéficient du taux maximum de réduction d'ISF de 75 %. Nous avons souhaité ne pas le faire immédiatement, car la campagne de mobilisation au titre de l'ISF à acquitter sur la base des déclarations à faire pour le 15 juin 2009 est déjà engagée. Nous avons décidé de reporter après cette date les nouvelles dispositions pour les investissements par le biais de holding. Le reste est inchangé. Pour être éligible, la holding ne devra pas compter plus de cinquante associés actionnaires et surtout n'accorder aucune garantie en capital aux associés en contrepartie de leur souscription, ni aucun mécanisme de sortie automatique au bout de cinq ans, parce que cet investissement, par le biais de l'incitation ISF, doit comporter un risque. Ce sont de vrais fonds propres avec une part de risques, qu'il ne faut pas annuler par tel ou tel montage.
La modification du régime fiscal du carried interest vise à ce que les gestionnaires de fonds soient incités à participer aux risques de la gestion de ces fonds, tout en restant soumis à une fiscalité équitable – celle des plus-values et dans certains cas celle des salaires.
Ensuite, nous avons enfin traité, du moins, je l'espère, un problème pendant depuis des années. Nous avions été obligés, dans le cadre de la réforme de l'impôt sur le revenu, de mettre en place un dispositif fort peu satisfaisant pour les travailleurs indépendants qui ne passent pas par un centre de gestion agréé, qui consistait à majorer artificiellement leurs revenus de 25 %. C'était très difficile à expliquer au contribuable, qui était, en quelque sorte, présumé minorer une partie de son revenu.
Monsieur le rapporteur général, je vous prie de conclure, vous avez très largement dépassé votre temps de parole.
Nous nous sommes mis d'accord sur le dispositif suivant lequel les experts comptables bénéficieront d'un visa fiscal, qui permettra à l'entreprise qui fait appel à eux de ne pas subir cette majoration de 25 %.
Les organismes de gestion agréés pourront se transformer en organismes comptables de gestion et assumer les mêmes missions. Cela devrait permettre de diminuer le nombre d'indépendants soumis à la majoration de 25 %. Mais nous devons, là encore, procéder à quelques réglages et nous avons décidé de différer l'entrée en vigueur du dispositif au 1er janvier 2010.
Nous avons souhaité que le dispositif de l'écoPTZ soit le plus efficace et le plus simple possible. En effet, ce dispositif, extrêmement intéressant, permettra aux ménages de bénéficier d'un prêt à taux zéro pouvant atteindre 30 000 euros pour faire exécuter dans leur logement des travaux permettant de réaliser des économies d'énergie. Il aura une durée unique de dix ans. Le cumul entre le prêt à taux zéro sur dix ans et l'éventuel crédit d'impôt sur le revenu pour les mêmes investissements sera impossible.
Quelques modifications ont été apportées aux crédits. Nous sommes tombés d'accord sur le fait qu'il fallait majorer les crédits de l'enseignement agricole.
Nous avons conclu un accord pour qu'il y ait un plancher minimal de 24 millions d'euros. Monsieur le ministre, nous vous demandons d'essayer d'aller au-delà de ce plancher, pour les crédits dévolus à l'enseignement technique agricole.
Monsieur le ministre, je tiens à vous remercier ainsi que l'ensemble de vos collaborateurs pour le travail extrêmement constructif que nous avons pu accomplir. C'est la position unanime de tous les collègues de la commission des finances. Nous avons beaucoup apprécié nos relations de travail, dans une période particulièrement difficile pour vous – nous en sommes conscients.
Je voudrais remercier tous mes collègues et le président de la commission des finances. Nous avons travaillé de concert avec lui sur un certain nombre de sujets, notamment le plafonnement des niches fiscales. Nous avons progressé, car nous partions de loin, et nous avons abouti à une solution. Il s'agit donc d'un travail collectif.
Je voudrais également remercier nos collègues de la commission des finances qui ont participé aux réunions.
Monsieur le président, je voudrais vous remercier d'avoir présidé un certain nombre de séances, ainsi que vos collègues.
Je voudrais remercier tous les collaborateurs de l'assemblée, en particulier ceux de la commission des finances, qui nous ont beaucoup aidés tout au long de nos travaux, ce dont je leur suis reconnaissant.
Je voudrais remercier la presse, qui a rendu compte de nos différents travaux.
Je souhaite que vous adoptiez, comme la commission des finances vous y invite, l'ensemble du projet de loi de finances pour 2009, compte tenu des amendements présentés par le Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
J'aurais dû faire ce rappel au règlement avant l'intervention du rapporteur général. Mais, monsieur le président, vous avez été si véloce pour donner la parole à Gilles Carrez et celui-ci ne l'ayant pas été moins pour monter à la tribune, je n'ai pas eu le temps de le faire.
Ce rappel au règlement concerne le déroulement de nos débats. La révision constitutionnelle devait, paraît-il, donner plus de pouvoirs au Parlement et plus de temps pour examiner les textes. Or, nous n'avons pas encore examiné le nouveau projet de loi de finances rectificative, qui viendra en commission lundi prochain. Il n'a pas encore été adopté par le Gouvernement.
Au lieu d'augmenter les délais nous permettant de procéder à un examen méticuleux, minutieux, attentif, on les réduit comme jamais. On ajoute dans ce temps la trêve des confiseurs, car, entre la dinde et le chapon, vous imaginez bien que nous allons examiner à table ce que contiendra ce projet de loi de finances rectificative !
J'appelle, au nom de notre groupe, l'attention de la présidence et du Gouvernement pour que l'on ne se réunisse pas le 6 janvier. Si nous étions amenés à le faire, sous la contrainte, je vous assure que découper la galette des rois, pour trouver qui a la fève, risquera de prendre du temps. Je pense que ce serait un acte de mauvais aloi pour commencer l'année 2009.
Je ne vais pas trahir un secret, monsieur le président, si je vous dis qu'il ne s'agit pas seulement de l'opinion du groupe GDR. Le groupe SRC s'exprimera et il est du même avis. Un certain nombre de nos collègues du Nouveau Centre pensent la même chose, et, si j'en crois la rumeur, il en est de même à l'UMP.
Peut-être le Gouvernement pourrait-il faire un effort pour écouter les députés et ne pas aggraver, au moins, nos conditions de travail et même anticiper, si possible, la mise en oeuvre de la révision constitutionnelle.
La parole est à M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.
Monsieur le président, j'ai eu l'occasion d'aborder ce sujet lors de la conférence des présidents et tout à l'heure avec le Président de l'Assemblée.
Le Conseil des ministres adoptera vendredi un premier collectif pour 2009. Nous l'examinerons, en commission des finances, lundi matin, en auditionnant M. Éric Woerth, ministre du budget, et M. Devedjian, nouveau ministre chargé de la relance.
Dès que les auditions seront terminées, nous procéderons à l'examen du texte.
Je conviens tout à fait que les conditions de travail parlementaire ne sont pas idéales, à partir du moment où le délai de dépôt d'amendements par rapport à la commission est fixé à samedi, soit le lendemain de l'adoption du texte par le Conseil des ministres.
L'examen du texte, en séance publique, est prévu mardi 6 janvier dès seize heures, le jour même de la rentrée parlementaire, comme vous l'avez rappelé, monsieur Brard. De ce fait, toutes nos procédures d'amendement seront, d'une certaine façon, réduites à néant si ce délai est respecté.
Je me suis entretenu avec M. Accoyer. Je crois qu'il est sensible à notre argumentation relative à la qualité de nos travaux. J'espère que nous obtiendrons un report de vingt-quatre heures pour l'examen de ce texte. Rien n'est encore fait, mais M. le Président s'occupe de cela avec le Gouvernement.
Je me permets d'insister pour que nous obtenions satisfaction, parce que cela permettrait aux groupes de se réunir, de procéder à un échange sur ce texte et à la commission des finances de tenir une réunion de travail. Ainsi, le rapporteur général pourrait disposer du temps nécessaire afin de prendre connaissance des amendements.
Je forme le voeu que nous obtenions ce délai. Au moment où l'on parle beaucoup de la qualité du travail parlementaire, il serait peu raisonnable de commencer l'examen du texte en séance publique le 6 janvier.
La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les députés, l'examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances signale d'habitude l'approche imminente de la fin de ce qu'il est convenu d'appeler le « marathon budgétaire ».
Mais 2008 est une année exceptionnellement grave sur le plan économique et financier. Le processus budgétaire n'y échappe pas. Nous avons déjà accompli tous ensemble beaucoup de travail, comme le rapporteur général l'a rappelé. La situation exige toutefois que nous poursuivions nos efforts. J'y reviendrai.
La crise économique a nécessité une grande réactivité de notre part. Nos textes financiers devaient traduire son impact. Ils devaient aussi mettre immédiatement en place les mesures indispensables à la juguler. Nous avons ainsi quelque peu bousculé la machine « bien huilée » de nos débats – c'était indispensable, et je vous en remercie.
La loi de finances rectificative pour le financement de l'économie, adoptée en octobre, était indispensable pour assurer le fonctionnement du secteur bancaire, ainsi que pour protéger les épargnants et les entreprises. La prise en compte des changements d'hypothèses macro-économiques, début novembre, était également nécessaire pour traduire la volonté du Gouvernement de laisser jouer les stabilisateurs automatiques. C'était la réponse la plus rapide que nous pouvions apporter à la crise que nous traversons.
Dans ces exercices successifs, j'ai scrupuleusement veillé, avec Christine Lagarde, à ce que l'information soit toujours la plus exacte possible, qu'elle soit le plus rapidement possible mise à votre disposition et de la manière la plus transparente qui soit. Grâce à la réactivité et aux efforts de tous, notamment de votre commission des finances et de son équipe, nous avons pu aboutir à cette dernière lecture. Si le travail parlementaire a été, plus encore que d'habitude, conséquent, la prise en compte des éléments exceptionnels liés à la crise ne nous a pas empêchés d'accomplir des tâches plus classiques. Il était en effet tout aussi important de continuer à améliorer notre fiscalité et à rechercher l'efficacité de la dépense.
S'agissant de la fiscalité, nous avons avancé de manière décisive – Gilles Carrez l'a rappelé – sur des points difficiles. Le premier d'entre eux concerne le plafonnement des niches fiscales. Les années précédentes, ce sujet soulevait beaucoup de débats, mais nous continuions à multiplier les dispositifs. Grâce au travail commun du Gouvernement et du Parlement, notamment de Didier Migaud et de Gilles Carrez, cette année marque une véritable rupture. Certes, nous continuons d'en parler, mais, surtout, nous agissons, nous légiférons, nous encadrons. Nous avons ainsi plafonné les niches qui ne l'étaient pas – les loueurs en meublé, le Malraux, les DOM-TOM –…
… en en profitant pour les simplifier et les transformer toutes en réductions d'impôt. L'Assemblée nationale et le Sénat sont parvenus à un accord juste sur le plafonnement global des niches en le fixant à 25 000 euros plus 10 % du revenu.
Ce PLF est également la traduction très concrète du Grenelle de l'environnement en matière fiscale. Vous avez en effet voté un ensemble de mesures fortes en faveur de l'environnement, notamment le dispositif « Éco-PTZ », les TGAP ou la taxe poids lourds.
S'agissant des dépenses budgétaires, nos échanges ont permis, comme toujours, d'améliorer des situations très délicates. Je pense, par exemple, aux exonérations de charges dans les zones franches urbaines. La commission mixte paritaire est parvenue, me semble-t-il, à élaborer un dispositif équilibré, qui demeure très attractif – puisque l'on passe de 2,4 SMIC à 2 SMIC en trois ans –, tout en étant coordonné avec les autres dispositifs.
Par ailleurs, nous accueillerons toujours avec bienveillance toute proposition des parlementaires visant à accroître la rationalisation de la dépense courante. Ce fut le cas pour les économies proposées par le président Accoyer sur le budget de votre assemblée, initiative qui a fait école au Sénat.
Nous ne nous sommes pas non plus opposés à l'initiative parlementaire sur la demi-part, que Gilles Carrez a évoquée tout à l'heure. Nous verrons, lorsque nous aurons un peu plus de recul, si, techniquement, la mesure peut encore être améliorée. Contrairement aux caricatures que j'ai pu entendre et lire ici ou là, votre objectif n'était pas de remettre en cause le bénéfice de cette demi-part pour les personnes qui ont élevé seules un enfant ; celles-ci continueront donc de bénéficier de cette mesure, il est important de le rappeler. En revanche, vous avez voulu empêcher que l'on puisse bénéficier de cette demi-part sans avoir jamais élevé un enfant seul.
Le bénéfice de la demi-part est donc maintenu dans la durée, sous certaines conditions, pour les personnes qui ont élevé seules un enfant et il est supprimé pour celles et ceux qui n'ont jamais élevé d'enfant seuls. Si, dans un an, cette mesure permet de réaliser quelques économies, je suppose que les fonds ainsi dégagés pourront être employés au service de la politique familiale.
Nous reviendrons, au cours de nos débats, sur deux points du texte issu de la CMP. Le premier concerne l'enseignement agricole, sur lequel je présenterai tout à l'heure des amendements visant, en substance, à augmenter ses crédits de 38 millions d'euros, lesquels seront financés, pour une part, par des redéploiements au sein des budgets de l'éducation nationale et de l'agriculture, le complément étant apporté par des crédits inscrits dans la mission « Provisions », à hauteur d'une douzaine de millions d'euros. Cette solution me paraît équilibrée.
Le second point concerne l'exonération de TGAP applicable aux installations de traitement de déchets qualifiées de « bioréacteurs », qui avait fait l'objet de débats confus et que nous avons clarifiée.
En accord avec les deux rapporteurs généraux des commissions des finances, je proposerai également quelques amendements pour rectifier des erreurs matérielles de la CMP.
En temps normal, notre débat après la CMP se serait essentiellement limité à ces quelques points. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Comme je vous l'ai dit, pour la première fois, le vote du PLF ne marque pas la finalisation du budget 2009. Les amendements au texte de la CMP que je vous présenterai ne se limitent pas à quelques sujets importants : ils modifient significativement le solde budgétaire. C'est la nécessité de mettre en place très rapidement le plan de relance, présenté par le Président de la République le 4 décembre, qui impose ces nouvelles modifications. Encore une fois, il nous faut agir vite, car la crise n'attend pas.
Les amendements que je vous présenterai visent à assurer la coordination avec les mesures que vous avez votées dans le collectif de décembre, que le Sénat commencera à examiner dès demain. Il s'agit du remboursement accéléré du crédit d'impôt recherche et du report en arrière de déficit, de la mensualisation du remboursement de la TVA, de l'amortissement exceptionnel des investissements et du doublement du prêt à taux zéro. Ces mesures auront un impact de 9,2 milliards d'euros sur les recettes de 2009.
L'aggravation de la crise et les mesures que nous avons prises pour y remédier font ainsi passer notre déficit budgétaire de 52,1 milliards, au moment du dépôt du projet de loi de finances, à 57,6 milliards, après la prise en compte des nouvelles prévisions macroéconomiques, soit une révision à la hausse de 5,5 milliards, due essentiellement à la diminution des recettes. Le Parlement l'a légèrement modifiée, de sorte que le déficit s'établit à 57,5 milliards d'euros.
Les ajustements que je vous propose de voter aujourd'hui visent notamment à tirer les conséquences des modifications intervenues en CMP, pour 300 millions d'euros, et, surtout, à prendre en compte l'impact des 9,2 milliards de mesures fiscales du plan de relance, que vous avez votées dans le projet de loi de finances rectificative. Cela porterait donc le déficit à 67 milliards d'euros.
Il nous restera encore une étape majeure à franchir, celle du collectif 2009, qui comporte le volet « dépenses » du plan de relance. Si vous votez ce collectif en janvier prochain, je vous précise – soyons le plus transparents possible – que 9,3 milliards d'euros en faveur de l'investissement, des entreprises, de l'emploi et de la solidarité viendront s'ajouter au déficit. Ils seront cantonnés dans une seule mission dédiée à la relance, qui sera pilotée politiquement par Patrick Devedjian et qui s'éteindra fin 2010. Le déficit budgétaire s'élèverait ainsi à 76,3 milliards d'euros.
Il faudra enfin tenir compte des trois milliards nécessaires au financement du Fonds stratégique d'investissement. Cette ouverture de crédits est un peu différente, puisque seront inscrits en regard des actifs financiers à due proportion. En incluant ce financement, le déficit budgétaire se monterait alors définitivement à 79,3 milliards d'euros.
Il s'agit, en termes techniques, d'un déficit contracyclique, qui résulte d'une politique budgétaire audacieuse, ambitieuse et cohérente, à la mesure des graves dangers que la crise mondiale fait peser sur notre économie. Mais il faut être très clair : ce n'est pas un chèque en blanc sur l'avenir. Ces sommes servent à financer des mesures de trésorerie cruciales, compte tenu de la conjoncture, mais temporaires. Elles permettent de financer des investissements, qui soutiendront la croissance potentielle de notre économie.
II ne s'agit donc nullement de remettre en cause ce qui a été longuement évoqué au cours de nos débats : les gains de productivité et l'amélioration de l'efficacité de la dépense sont acquis. Lorsque nous vous proposerons de voter définitivement la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques, vous constaterez que seul le déficit de 2009 sera réellement modifié : il atteindrait 3,9 points de PIB. Le déficit de 2012 sera, quant à lui, toujours proche de 1 point de PIB.
S'agissant du vote du plan de relance, qui est partagé entre deux collectifs, je souhaiterais répondre à ceux – et non des moindres – qui, il y a quelques jours, l'ont qualifié d'« unijambiste ». J'ai trop souvent salué la qualité de la présidence de Didier Migaud et des analyses de Pierre-Alain Muet pour qu'ils m'en veuillent de leur reprocher, même dans la presse, le caractère partiel de leur analyse. Notre politique budgétaire et notre politique économique reposent bien sur deux jambes solides : soutien aux revenus, d'une part,…
…efforts d'investissement, d'autre part.
Si le plan se focalise sur l'accélération de l'investissement, c'est parce qu'entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale, les transferts sociaux croîtront de plus de 3 % en volume, sans même parler du 1,5 milliard du RSA, préfiguré dès le premier semestre par la prime de solidarité active.
Je tiens à le redire avec force : c'est en mobilisant la politique monétaire, qui relève de la Banque centrale européenne, et la politique budgétaire, qui dépend des États, notamment celle de l'État français, que nous parviendrons à contrecarrer cette crise. Toutefois, il faut continuer à travailler d'arrache-pied pour trouver des gains de productivité dans le fonctionnement courant de l'État, afin de dégager des marges de manoeuvre et de nous inscrire dans l'assainissement durable de nos finances publiques, qui est le fil conducteur de notre politique.
Ce budget avait été trop vite qualifié de virtuel en octobre. L'ensemble des mises à jour intervenues au cours du débat montrent que, comme je m'y étais engagé dès mon premier discours, la discussion parlementaire est vivante. On peut, en bousculant un peu les habitudes, faire preuve d'une très grande réactivité.
Je vous remercie donc une fois encore pour tout le travail accompli au cours des derniers mois et vous donne rendez-vous en janvier, pour traduire dans la loi le plan de relance dont nos concitoyens, nos entreprises et notre économie ont besoin. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Didier Migaud, président de la commission mixte paritaire.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, à ce stade de notre discussion, je souhaite faire quelques observations.
Tout d'abord, je me réjouis du plafonnement global des niches fiscales, qui fait suite aux travaux de la mission que nous avons conduite, avec le rapporteur général, durant un semestre cette année. J'ai déjà eu l'occasion d'indiquer que je regrettais que le niveau de ce plafonnement soit un peu trop élevé. Après la réunion de la commission mixte paritaire, je déplore, de surcroît, que l'application de ce principe souffre déjà une exception importante, qui concerne les monuments historiques. Force est de constater que le plafond est déjà fissuré.
Par ailleurs, je regrette également l'absence de révision du mode de calcul du droit à restitution, que vous appelez le bouclier fiscal. On me rétorquera que certaines réductions d'assiette ont été transformées en réductions d'impôt.
Mais elles ne l'ont pas toutes été, monsieur le rapporteur, notamment celles relatives aux monuments historiques, les versements au titre de l'épargne retraite par capitalisation et certaines plus-values de cession mobilière.
Je fais donc observer qu'en 2009, des chèques de restitution d'impôt vont être adressés à des contribuables du fait de l'application de mesures conduisant à une réduction considérable de leur revenu imposable. Si je me félicite que vous ayez reconnu qu'il y avait là un vrai problème de justice fiscale, il me semble qu'il convient d'aller plus loin et d'agir en ce domaine. Je trouve surprenant que la majorité accepte de dépenser plusieurs millions d'euros au profit de contribuables auxquels elle n'avait pas vraiment l'intention d'offrir de tels avantages.
Il y a là un paradoxe qu'il nous faudra résoudre dans le courant de l'année 2009.
Je remercie M. le ministre de nous avoir fourni des précisions sur les comptes de l'année 2009. Nous savons maintenant que le déficit du budget de l'État sera bien supérieur à celui prévu en loi de finances initiale. M. le rapporteur général et moi-même observions récemment que le déficit, qui était de 35,6 milliards d'euros fin 2006, allait pratiquement atteindre 80 milliards d'euros fin 2009.
Je sais que la crise financière n'y est pas pour rien, mais tout de même, je crois qu'il faudra faire le tri parmi tous ces milliards qui, accumulés, constitue notre déficit.
Les mesures prises en collectif au titre du plan de relance aggravent le déficit d'un peu plus de 9 milliards d'euros et celles qui seront prises au titre du premier collectif de 2009 l'aggraveront encore. Il serait utile que vous nous fassiez connaître comment s'effectue la répartition de ce déficit entre État, collectivités locales et sécurité sociale que vous envisagez pour l'année 2009. Les dépenses d'investissement prévues au titre du plan de relance seront-elles uniquement le fait de l'État, qui n'y contribue actuellement qu'à hauteur de 23 ou 25 % ?
Enfin, comme vous l'avez dit, les stabilisateurs automatiques vont jouer en 2009, ce qui se traduira par une réduction des recettes et des dépenses. Les dépenses, notamment sociales, sont actuellement en augmentation en particulier pour l'assurance chômage. Dans une tribune parue dans un quotidien du soir, vous avez évalué la hausse des dépenses sociales à 17 milliards d'euros en 2009. Il serait intéressant que vous nous précisiez quelle sera, dans la dégradation des comptes, la part des stabilisateurs automatiques et celle imputable aux dépenses nouvelles résultant du plan de relance et des transferts sociaux.
J'ai lu avec attention cette tribune. Il me paraît nécessaire de vous donner quelques précisions, monsieur le ministre, puisqu'il semble que vous vous soyez mépris sur ce que Pierre-Alain Muet et moi-même avions voulu dire. Contrairement à ce que vous croyez, notre boussole est parfaitement orientée : nous n'avons jamais reproché au texte TEPA de soutenir le pouvoir d'achat, mais simplement contesté la réalité de son effet ! Ainsi, il nous paraît anormal que ce texte soutienne le pouvoir d'achat de certaines personnes qui n'en ont pas spécialement besoin au détriment d'autres qui, elles, en auraient réellement besoin.
De même, nous ne vous reprochons pas de faire la part belle à l'investissement, pour 2009 comme pour 2010, dans la mesure où il nous semble que notre pays souffre d'un problème d'investissement, de compétitivité et d'offre. Cependant, nous ne pouvons pas faire l'impasse sur le pouvoir d'achat.
Je cite un extrait de votre tribune : « Ils laissent également entendre qu'une relance de l'investissement porterait préjudice à notre commerce extérieur. Le raisonnement est spécieux ! Faudrait-il cesser d'investir plutôt que d'importer les équipements nécessaires ? » Mais ce n'est pas du tout ce que nous disons, et je vous retourne la question : faudrait-il refuser de soutenir le pouvoir d'achat d'une grande majorité de nos concitoyens au prétexte d'un déséquilibre du commerce extérieur ? (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Dommage, c'est intéressant ! Nous parlons tout de même du budget de la France !
Il est question de créer une mission qui irait de pair avec la création d'un ministère de la relance. J'aimerais savoir quel sera l'objet de cette mission, de quels programmes elle sera composée – je rappelle qu'il ne peut exister de mission monoprogramme –, quels indicateurs de performance seront inventés et quels crédits lui seront affectés ; en particulier, est-il prévu de lui transférer des crédits de missions existantes et, le cas échéant, selon quels critères ? Sera-t-on amené à évaluer une politique dont une partie des crédits sera inscrite dans une mission déjà existante et le reste dans la mission « relance » ?
En conclusion, je ne peux qu'exprimer mon scepticisme et mon inquiétude devant ce qui pourrait constituer un détournement de l'esprit de la LOLF. À trois semaines de débattre en séance publique du premier collectif de 2009, nous sommes encore dans le brouillard, monsieur le ministre. Il me semble que la représentation nationale doit pouvoir disposer de plus amples informations afin que le débat qui aura lieu début janvier soit le plus éclairé possible. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une exception d'irrecevabilité déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.
La parole est à M. Jérôme Cahuzac.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'exception d'irrecevabilité est un exercice difficile, comme le savent tous les parlementaires qui s'y sont déjà livré ; il est d'autant plus difficile lorsqu'il porte sur une loi de finances, tant il est rare qu'un texte de cette nature soit déclaré non conforme à la Constitution. Certes, il y a eu par le passé quelques rares exceptions, mais nul doute que le juge constitutionnel, s'il était saisi, validerait l'essentiel des articles de ce projet de loi de finances – ce que nous regrettons, tout en le reconnaissant lucidement.
Il est difficile également de s'exprimer au sujet d'une loi de finances comportant près de 90 articles lorsqu'on ne dispose que d'un quart d'heure pour cela. Je ne pourrai donc pas m'étendre sur le détail de telle ou telle mesure, comme l'ont fait M. le ministre, M. le rapporteur général et M. le président de la commission des finances. Je crois que nous pouvons d'ores et déjà nous accorder sur certaines données objectives, notamment celles relatives au déficit du budget de l'État. Voté initialement à une cinquantaine de milliards d'euros, ce déficit s'établira à un peu moins de 60 milliards d'euros si nous votons ce texte et, comme nous en sommes malheureusement tous convaincus, il atteindra au moins 80 milliards d'euros à la fin de l'année prochaine. C'est donc à un doublement du déficit budgétaire en deux ans que nous allons assister. Je ne suis pas sûr qu'une telle situation se soit déjà produite en France, même si, j'en conviens, il faut y voir pour partie les effets de la crise.
La crise est là, en effet, une crise que le pouvoir exécutif refusait encore de reconnaître il y a un an. Il y a quelques mois, certains membres éminents du Gouvernement nous expliquaient que la croissance ne serait pas touchée par la crise financière, de la même manière qu'ils avaient été incapables de prévoir l'ampleur de la crise économique et sociale qui avait précédé en début d'année, en dépit de l'explosion des chiffres du chômage au premier trimestre.
Face à la crise, tous les pays font jouer ce qu'il est pudiquement convenu d'appeler les stabilisateurs automatiques, admettant le principe qu'à défaut de disposer des ressources suffisantes pour relancer l'économie, il faut se résoudre à emprunter, donc à accroître les déficits. Au terme de ce processus, l'ensemble des États concernés – à l'exception de l'Italie – parviendront au niveau de déficit où nous nous situons actuellement. Cela est dû au fait que, ces dernières années, nous n'avons pas été aussi sages que la plupart de nos voisins européens. Nous sommes ainsi passés d'un stock de dettes inférieur à 57 % du PIB en 2001 à un stock qui atteindra probablement 70 % dans deux ans, voire dès l'année prochaine.
Au moment où la majorité précédant celle d'aujourd'hui – c'est-à-dire pratiquement la même – et les ministres d'alors laissaient déjà filer les finances publiques de la France, d'autres pays faisaient déjà preuve d'une plus grande sagesse, qu'il s'agisse de l'Allemagne, de l'Espagne ou de la Grande-Bretagne. Cette sagesse est aujourd'hui récompensée puisque, pour les pays concernés, le fait de laisser jouer les stabilisateurs automatiques portera la dette à un niveau très inférieur à celui que nous allons malheureusement atteindre au terme de plusieurs années d'imprévoyance, et que nous laisserons en héritage aux générations futures.
Il est d'ailleurs étonnant de constater un tel processus, car il est rare de voir les dettes s'accroître alors que les prélèvements augmentent en nombre ou en volume. Même si ce n'est pas la majorité actuelle qui a voté toutes les augmentations d'impôts et toutes les taxes mises en oeuvre depuis 2002, reconnaissez, mes chers collègues, que vous ne vous êtes pas montrés avares sur ce point ! (« Et les régions socialistes ? » sur les bancs du groupe UMP.) Vous avez décidé en 2004 d'augmenter la CSG pour les retraités imposables, d'augmenter la TIPP sur le gazole – c'est, me semble-t-il, à un ministre de l'économie nommé Nicolas Sarkozy que nous devons cette hausse de 2,50 euros par hectolitre, qui rapporte à peu près un milliard d'euros par an au budget –, d'augmenter le forfait hospitalier de près de 15 %, d'instituer un forfait d'un euro non remboursé par consultation, de mettre en oeuvre les franchises médicales, d'instaurer une taxe sur les mutuelles et une autre sur les fonds de participation débloqués par les salariés. Vous venez de voter, il y a quelques instants, deux nouvelles taxes sur la téléphonie mobile et sur Internet. Enfin, vous avez instauré, afin de financer le RSA, une taxe dite « sur le capital » mais touchant en réalité essentiellement les classes moyennes, puisqu'elle porte sur les assurances-vie et les loyers de petits appartements.
Tout cela fait beaucoup, l'énumération à laquelle j'ai procédé n'étant d'ailleurs pas exhaustive : on pourrait encore citer la taxe sur les véhicules polluants ou celle sur les crustacés, poissons et mollusques – puisque même ces créatures n'ont pu échapper à votre opiniâtreté. Il n'y a guère que les gobelets en plastique qui, jusqu'à présent, y aient échappé – très provisoirement, sans doute, car il vous faut bien trouver sans cesse de nouvelles ressources si vous ne voulez pas que la France reste le plus mauvais élève de la Communauté européenne.
Les déficits filent, les taxes s'accumulent, les prélèvements augmentent, et il paraît d'ores et déjà acquis que la promesse du candidat Nicolas Sarkozy de réduire les prélèvements obligatoires de quatre points de PIB – soit 76 milliards d'euros – ne sera pas tenue. Il serait temps que le Gouvernement reconnaisse clairement que cette promesse ne sera pas tenue lors de la mandature actuelle – à moins, monsieur le ministre, que la perspective de passer de 80 à 150 milliards d'euros de déficit budgétaire ne vous effraie pas. Les premiers milliards de déficit sont sans doute plus pénibles,mais une fois que le pli est pris… Il n'est donc pas exclu, au point où nous en sommes, qu'il se trouve une majorité parlementaire pour laisser les finances de l'État se dégrader à un tel point. Pour ma part, toutefois, je ne crois pas que nous en arriverons à cette situation, car je vous sais responsable, monsieur le ministre. J'espère donc que vous préférerez reconnaître clairement que cette promesse ne sera pas tenue.
Le déficit de la sécurité sociale va également s'aggraver, car ses finances sont extrêmement sensibles à l'évolution de la masse salariale. Alors que les déficits filent et que les taxes s'accumulent, les plans de licenciement sont chaque jour plus nombreux. On le constate dans tous les secteurs, qu'il s'agisse de la pharmacie – 700 emplois supprimés chez Pfizer, 900 chez Sanofi –, de l'informatique – 300 ou 400 emplois supprimés chez Hewlett Packard –, de l'industrie alimentaire – 300 emplois supprimés chez Amora –, du travail temporaire – près de 500 emplois supprimés chez Adecco –, de l'automobile – sans doute 15 000 à 20 000 emplois prochainement supprimés –, sans parler du chômage technique, avec les conséquences que l'on imagine sur la rémunération des salariés concernés, qui ne sont pas près de faire les heures supplémentaires dont vous attendiez tant de miracles pour la consommation et pour l'économie en général !
C'est également vrai pour Alcaltel-Lucent, qui s'apprête à licencier un millier de cadres. Il est à noter que tous ne sont pas remerciés dans les mêmes conditions, puisque Mme Patricia Russo devrait recevoir, pour prix de son incurie, quelque 6 millions d'euros sous forme de parachutes dorés et autres bonus.
Les déficits filent, nos enfants et nos petits-enfants paieront les dettes que nous allons leur laisser, les taxes se multiplient, mais les affaires continuent, pour la personne que je viens de citer, mais aussi pour le président d'une grande banque peu avare de leçons, notamment à l'égard des membres de notre assemblée, et qui n'a pas trouvé indécent d'exercer récemment ses droits sur des stock-options à hauteur de près de 1,5 million d'euros à son seul profit, alors même que son établissement est compromis dans des affaires que je qualifierai de peu glorieuses.
Oui, les affaires continuent, y compris pour l'État. À cet égard, la loi de finances a été l'occasion, pour beaucoup ici, d'être gênés par la position des pouvoirs publics – certains même ne l'ont pas comprise – qui dénoncent les patrons voyous mais se comportent parfois de la même manière. Était-il vraiment opportun qu'à la fin de cette année, l'État fasse un chèque de 400 millions d'euros à Bernard Tapie ? Était-il vraiment opportun, dès lors que ce chèque était fait, qu'une majorité, au Sénat, puis en commission mixte paritaire, refuse qu'au moins le préjudice moral évalué à 45 millions d'euros – chose ahurissante, invraisemblable et en vérité indéfendable – soit soumis au fisc ou aux prélèvements sociaux. Vous en avez décidé ainsi, chers collègues. Mais en ne votant pas cette loi de finances, vous pouvez faire comprendre au Gouvernement que trop c'est trop et que si les choses vont mal pour certains, il est choquant que les affaires continuent pour d'autres.
Dénoncer les patrons voyous dans un discours célèbre et plutôt convaincant, pouvait se comprendre. Mais que dire du comportement de l'État lorsqu'il récompense un homme qui a constitué un groupe industriel à la barre des tribunaux de commerce dans des conditions sur lesquelles tout le monde a préféré jeter un voile pudique, que personne n'a souhaité soulever ? Comment a-t-on pu attribuer cette somme invraisemblable à quelqu'un dont le groupe était en vérité en capilotade quand il a décidé d'arrêter d'exercer ses talents dans le monde des affaires pour commencer sa carrière dans celui de la politique ?
J'en sais quelque chose et n'en suis pas particulièrement fier, mon cher collègue !
Était-il vraiment opportun que plus d'une dizaine d'entretiens aient été accordés à ce personnage par l'actuel Président de la République ou ses collaborateurs afin de déterminer et la procédure particulière dont il a bénéficié, et le montant du préjudice, les fameux 45 millions d'euros ? Rien de tout cela n'était évidemment obligatoire. Peut-être un jour connaîtrons-nous la vérité. Il suffirait, mes chers collègues, que vous votiez la résolution demandant une commission d'enquête parlementaire pour qu'on sache pourquoi il a été décidé, par les plus hautes autorités de l'État, qu'une fois ses dettes remboursées, ce personnage se trouverait à la tête d'un patrimoine de 120 à 130 millions d'euros.
Cela fait beaucoup pour un homme qui, en réalité, a davantage dévasté le paysage industriel et économique de notre pays qu'il n'a contribué à l'enrichir.
Oui, et nous l'assumons ! Mais les 45 millions d'euros, c'est vous qui les votez, ce n'est pas nous ! Si cet homme finit riche, c'est grâce à vous. Assumez-le au lieu de vous en agacer !
Les affaires continuent alors que les licenciements prospèrent et que les comptes publics s'aggravent, toutes choses qui ne semblent choquer personne puisqu'on préfère rappeler ce qui fut contestable, et malheureusement fait il y a longtemps, plutôt que d'assumer ce qui est tout aussi contestable et qui, hélas, se produit aujourd'hui et avec votre concours, cher collègue Yves Censi.
Étant donné le contexte, on ne peut faire comme si cette histoire n'était qu'une péripétie et considérer que la République, bonne fille, s'en remettra. En effet, on ne pourra pas demander longtemps encore à nos concitoyens les efforts qu'on s'apprête à exiger d'eux. On ne pourra pas longtemps encore leur demander de continuer à supporter les souffrances que beaucoup d'entre eux endurent. Ils ont compris que ceux qui profitent sont toujours les mêmes. Or, au moment d'affronter une des plus graves crises de notre histoire, il n'est pas bon pour notre pays de rompre avec l'unité nationale, que vous avez souhaitée un moment, cette unité qui suppose que chacun fasse des efforts à concurrence de ses possibilités réelles et non pas supposées.
Voilà les raisons pour lesquelles le groupe socialiste ne votera pas cette loi de finances initiale qui, en tout état de cause – et qui l'ignore sur ces bancs ? – ne sera pas celle qui s'appliquera l'année prochaine puisqu'un premier collectif est prévu au tout début du mois de janvier.
Monsieur le président, il me reste trois ou quatre minutes. Mais je ne doute pas que je bénéficierai de l'indulgence que vous avez manifestée pour les orateurs précédents. Je vous promets que je n'en abuserai pas.
Poursuivons le dialogue sur les lois de finances, monsieur le ministre, la multiplication des collectifs et des lectures nous le permettra. Il ne s'agit pas pour nous de contester l'opportunité d'une politique de la demande, bien au contraire. Comme l'a très bien dit le président de la commission des finances, nous contestons en revanche le choix que vous avez fait avec le paquet fiscal. Cette politique de la demande s'adressait en effet à une population dont nous avons, certes, le devoir de nous préoccuper mais dont nous pensons qu'elle n'était pas celle dont il fallait prioritairement s'occuper. Passer de 90 à 95 % de successions totalement exonérées de droits, ce n'est pas récompenser le travail, c'est récompenser la rente. Cela représente chaque année 2 milliards d'euros. Or cette somme aurait pu servir plus utilement à investir. Vous finissez par le faire. Tant mieux.
Nous contestons toujours la mesure portant sur les heures supplémentaires. Dans la période de récession mondiale que nous connaissons, nous sommes d'ailleurs le seul pays à continuer à payer pour mettre en oeuvre une disposition dont l'une des conséquences est la destruction d'emplois. Aucun autre pays n'a adopté une telle mesure. Nous payons deux fois : pour les heures supplémentaires et pour les emplois détruits.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Nous payons pour les 35 heures !
Car tout cela débouche sur des contrats aidés ou des contrats de transition professionnelle. À cet égard, je regrette que ces contrats aient été insuffisamment budgétés par la commission mixte paritaire. En effet, les 26 millions d'euros votés en CMP ne suffiront pas, selon moi, pour répondre aux besoins de huit, neuf ou dix bassins d'emploi supplémentaires. Corrigez-moi si je me trompe.
Oui, dans la période actuelle, il faut prendre un certain nombre de mesures. Mais, sauf à creuser davantage le déficit, cela suppose de revenir sur des dispositions qui coûtent cher et qui ne marchent pas pour financer celles sur lesquelles nous pourrions nous entendre. Je pense notamment au doublement de la prime pour l'emploi, au moins pour l'année 2009. Il ne s'agit évidemment pas – vous nous en avez fait le reproche de façon injuste – d'utiliser plusieurs fois les 4 ou 5 milliards que coûtent les heures supplémentaires pour telle ou telle mesure. Choisissons : le doublement de la prime pour l'emploi, ou la multiplication des contrats de transition professionnelle. Que cet argent serve en tout cas à financer des mesures en faveur de celles et ceux qui devaient en bénéficier mais dont l'État ne peut aujourd'hui assurer le financement, faute de moyens.
Oui, une autre politique est possible.
J'ai presque terminé, monsieur le président.
Nous croyons aux baisses ciblées de TVA. Nous pensons que le doublement de la prime pour l'emploi toucherait bien plus de salariés que les mesures votées par le Parlement, malheureusement sans notre accord. Nous aurions en effet préféré pouvoir soutenir d'autres dispositions, compte tenu de la situation actuelle, peu propice, convenons-en, à des joutes politiques qui pourraient s'avérer stériles.
Oui, nous pensons qu'une autre politique est possible et nous ne désespérons pas, discussion budgétaire après loi de finances rectificative, collectif après loi de finances initiale, de vous convaincre un jour. Tel était le sens de mon propos. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Je serai bref car nous avons déjà eu plusieurs fois ce débat. Certes, la situation est difficile, mais nous en parlons beaucoup. En outre, la succession des textes et l'examen des amendements nous permettent de le faire en toute transparence.
Oui, les déficits vont se dégrader : ils passeront à quelque 79 milliards à la fin de l'année prochaine pour l'État. Aux 57 milliards prévus en fin d'examen du PLF « version normale », il faut en effet ajouter les résultats des différents votes intervenus et les deux versants du plan de relance, le versant fiscal et le versant budgétaire. Nous assumons ces chiffres. Il n'y a pas d'autres solutions : il faut une politique budgétaire active même si la situation financière de la France est plus difficile que celle d'autres pays.
Nous donnons également crédit au retour au presque équilibre des finances publiques en 2012, car les dépenses engagées sont réversibles et les dépenses courantes des administrations bien tenues. Le plan de relance, c'est de l'investissement, de la trésorerie et de la recherche.
Monsieur Cahuzac, Nicolas Sarkozy a effectivement parlé de quatre points de PIB de baisse des prélèvements obligatoires lorsqu'il était candidat à l'élection présidentielle. Mais il avait précisé que cela se ferait en deux législatures.
Il n'a pas dit que c'est forcément lui qui poursuivrait cette politique pendant un deuxième mandat. Il en décidera le moment venu. Sur dix ans, en tout cas, ce n'est pas impossible. Et comme, en termes de réforme, on fait en général ce qu'on dit,…
… vous pouvez, comme moi, avoir confiance dans ce propos. (Sourires.)
Vous avez égrené un certain nombre de nouvelles taxes. Mais vous avez oublié de dire ce qui a baissé. Le bilan entre ce qui augmente, ou ce qui a été voté ici – comme récemment encore sur l'audiovisuel –, et ce qui diminue est plutôt à la baisse sur trois ans d'une dizaine milliards, avec un solde négatif de prélèvements obligatoires. Voilà la réalité.
Nous le savons, nous avons des approches différentes. Il est inutile d'en débattre plus longuement. Nous assumons le plan de relance, comme l'ensemble des mesures qui ont été prises. Pour autant, nous ne lâchons rien de notre volonté d'assainir les finances publiques, celles de l'État, celles de la sécurité sociale. Nous associons les collectivités territoriales à cette politique. 2009 sera une année de relance, c'est notre priorité. Mais les autres objectifs ne sont en rien compromis.
Dans les explications de vote sur l'exception d'irrecevabilité, la parole est à M. Charles de Courson.
Comme l'a excellemment reconnu l'intervenant du groupe socialiste, il n'a nullement été question de l'inconstitutionnalité du texte dans son intervention. Or, comme tel est l'objet de l'exception d'irrecevabilité, nous voterons contre cette motion. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
Jérôme Cahuzac a défendu avec le talent qu'on lui connaît cette exception d'irrecevabilité. Il a mis en perspective la politique que vous conduisez et qui a été dessinée à l'occasion de l'élection présidentielle. À travers les différents budgets que nous sommes appelés à voter, vos orientations apparaissent clairement.
Hier encore, le candidat Nicolas Sarkozy nous expliquait, la main sur le coeur, qu'il fallait abaisser les impôts et les prélèvements obligatoires, qu'il fallait diminuer l'endettement de la France et les déficits publics. Mais le moment de vérité est arrivé. Certes, la crise, qui est encore devant nous, va détériorer l'ensemble des comptes publics. Mais ce ne doit pas être l'arbre qui cache la forêt. Comme l'a montré Jérôme Cahuzac, les déficits avaient commencé en effet à se creuser avant la crise. Les décisions que vous avez prises dès votre arrivée aux affaires – je pense notamment au bouclier fiscal – prouvent que vous n'avez pas été capables de voir ce qui s'annonçait.
Il eût été utile de se poser des questions sur telle ou telle orientation. Faut-il mettre en oeuvre une politique de l'offre ? Ou une politique de la demande ? On aurait pu avoir ce débat, le clivage entre la gauche et la droite pouvant, de ce point de vue, apparaître au grand jour. Mais finalement, et comme l'a expliqué Jérôme Cahuzac, vous avez opté pour la politique de la rente.
Alors qu'on nous demande de voter un déficit de 50 milliards d'euros pour 2009, il sera vraisemblablement deux fois plus élevé. Jamais dans l'histoire de notre pays, il n'aura été aussi important. Or les déficits d'aujourd'hui sont les impôts de demain.
En marge de ce texte de loi, je voudrais également évoquer les comptes sociaux. Lors du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, j'ai été l'un des rares à vous dire que vos orientations budgétaires étaient irréalistes, notamment parce qu'elles se fondaient sur des prévisions d'évolution de la contribution sociale généralisée et de la masse salariale erronées. Il est probable que le déficit des comptes sociaux sera plus proche des 20 milliards d'euros que des 17 milliards de votre estimation, et vous serez inévitablement appelés à corriger le tir en début d'année.
Nous sommes donc dans une situation extrêmement précaire. Et malheureusement, le prochain collectif budgétaire, dont nous allons débattre le 6 janvier prochain, ne résoudra pas la crise. Nous avons entendu, la semaine dernière, les parlementaires de la République fédérale, et ils nous ont dit qu'Angela Merkel considère déjà que le plan allemand – assez semblable au vôtre – doit être révisé.
Nous vous demandons donc, monsieur le ministre, de nous présenter un collectif budgétaire qui soit à la hauteur des enjeux et des difficultés. Nous vous proposons notamment d'abaisser la TVA ou encore de doubler la prime pour l'emploi.
Enfin, au moment où les collectivités locales sont, dans ce pays, les premiers investisseurs et assurent 80 % des investissements, revenez sur le pacte de croissance et de stabilité ; aidez-les au lieu de les étouffer.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste votera l'exception d'irrecevabilité.
Je voudrais remercier Jérôme Cahuzac des deux arguments qu'il nous a aimablement donnés pour ne pas voter cette exception d'irrecevabilité.
En premier lieu, comme l'a relevé Charles de Courson, M. Cahuzac n'a nullement démontré que son exception était juridiquement recevable. Par ailleurs, il nous a permis de nous souvenir qu'en d'autres temps, une gestion hasardeuse des finances publiques de notre pays s'était soldée pour une banque nationale par des pertes supérieures à 100 milliards de francs.
Voilà pourquoi il nous apparaît évidemment nécessaire de repousser cette exception d'irrecevabilité… irrecevable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
(L'exception d'irrecevabilité, mise aux voix, n'est pas adoptée.)
J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une question préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.
La parole est à M. Christian Eckert.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis des mois, les députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche ne cessent de dénoncer la politique économique et sociale du Gouvernement.
Cette politique menée depuis l'été 2007 se révèle, un an et demi après, un échec désastreux pour les Françaises et les Français. Au lieu d'aider les ménages les plus modestes, le Gouvernement les pénalise avec les franchises médicales, l'augmentation des prix des mutuelles ou des assurances. Pire encore, le bouclier fiscal est l'exemple même de votre politique inégalitaire, injuste et déraisonnée.
Aucun coup d'arrêt n'a été donné à votre politique d'injustice fiscale, de déréglementation des droits sociaux – nous y reviendrons ce soir –, de fermeture des services publics ou de précarisation des emplois : autant de choix politiques non seulement injustes, mais aussi très risqués, dont les principales victimes restent les personnes les plus vulnérables.
Il aura fallu que la crise frappe de plein fouet notre pays pour que vous vous décidiez enfin à tenter de réagir face à la dégradation de la situation économique et au développement de la précarité. Mais, au lieu de favoriser massivement l'investissement et la recherche pour aider les entreprises à préparer l'avenir, au lieu d'aider les salariés et les retraités à soutenir la consommation, la majorité, votre majorité, monsieur le ministre, n'a fait qu'accentuer les difficultés économiques et sociales.
Le Président de la République prétend que le paquet fiscal et les mesures prises en complément permettent aujourd'hui à notre pays de bien résister à la crise. Pourtant, en 2008, la croissance de notre pays sera inférieure à 1 %. Ainsi, la dernière enquête mensuelle de conjoncture de la Banque de France prévoit une perte de croissance au quatrième trimestre de cette année, avec un taux de moins 0,7 %. Pour l'ensemble de l'année 2008, alors que le Gouvernement nous annonçait 0,9 % de croissance il y a quelques semaines, les prévisions de la Banque de France tablent tout au plus sur 0,8 %.
Faire croire aux Français qu'il suffirait de travailler plus pour résoudre les difficultés économiques, alors que les entreprises ne peuvent fournir de travail supplémentaire à leurs salariés du fait de la conjoncture, est totalement mensonger. En outre, les heures supplémentaires ne résolvent en rien le problème du chômage ou de l'emploi précaire, deux fléaux sociaux contre lesquels le Gouvernement n'agit pas.
Ce déni de réalité de la part du Président de la République et de son gouvernement ont conduit le pays dans l'impasse. Ils ont mené une politique économique et sociale complètement inadaptée à la situation économique de la France, car elle était fondée sur des hypothèses totalement irréalistes. Ce budget, sur lequel nous devons nous prononcer définitivement aujourd'hui, en est la plus brillante démonstration. En effet, vous nous avez présenté une loi de finances qui retenait des prévisions de croissance et des objectifs de déficit et de dette totalement irréalistes, alors que la crise économique était avérée et faisait déjà sentir ses premiers effets. Faut-il rappeler que la dégradation des comptes publics a commencé avant la fin de l'année 2008, que le déficit du budget de l'État excédait déjà de 5 milliards d'euros les prévisions de 2007 et que les moins-values de recettes fiscales sont évaluées au minimum à 7 milliards d'euros en 2008 ?
Personne ne pouvait donc croire à votre loi de finances initiale, ni les économistes, ni vous-même, monsieur le ministre ! Mais vous n'avez pas voulu entendre les remarques des députés de l'opposition et avez même réussi la performance de débuter au Sénat l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2009 avec des objectifs économiques et budgétaires révisés, alors même que, parallèlement, l'Assemblée venait tout juste de voter les objectifs initiaux erronés, preuve, s'il en fallait encore une, que vous ne croyiez déjà plus à ce que vous tentiez de nous faire adopter. Dans ces conditions, qui peut encore accorder de la crédibilité à votre politique et à vos déclarations ?
Je souhaite maintenant revenir à certains dispositifs adoptés dans ce projet de loi de finances pour 2009. On pouvait s'attendre à une modification de votre politique, mais il n'en est rien. Vous prétendez oeuvrer pour soutenir la croissance dont notre pays à bien besoin en ces temps difficiles, mais vous faites tout le contraire ! Votre budget est un budget de rigueur.
La norme d'évolution des dépenses des collectivités territoriales choisie est draconienne : elle progressera de 1,25 % par an à partir de 2009, contre 4,25 % par an sur les dix dernières années, ce qui laisse présager le pire pour l'investissement des collectivités, qui représente plus de 73 % de l'investissement public de notre pays. Tenir cette norme d'évolution des dépenses signifie étrangler financièrement les collectivités.
C'est d'ailleurs ce que vous faites en intégrant le fonds de compensation de la TVA – et donc les investissements – dans les dotations sous enveloppe. Les dotations de l'État ne vont augmenter que de 1,1 milliard d'euros, et plus de la moitié de la hausse de l'enveloppe des dotations sera consommée par l'intégration du FCTVA, ce qui signifie qu'il ne restera plus que 440 millions d'euros pour les autres dotations, sans parler de celles, nombreuses, qui vont être gelées en 2009.
Par ailleurs, le PLF est construit sur une stabilisation des dépenses de l'État en volume. Cela signifie que la progression des dépenses par rapport à 2008 se limitera à la seule inflation. Compte tenu du montant des dépenses engagées en 2008, les dépenses du PLF pour 2009 sont en diminution de 1,2 % en volume. Vouloir réduire par deux la dépense publique jusqu'en 2011, alors que notre pays traverse une période de récession, est totalement inefficace et révèle votre dogmatisme en la matière.
Il n'est alors pas étonnant que de nombreux crédits budgétaires fassent l'objet de réductions drastiques, en contradiction totale avec les récentes déclarations du Président de la République et de certains ministres.
Ainsi, entre 2008 et 2011, la mission « Ville et logement », présentée comme une grande cause nationale, voit ses crédits d'engagement reculer de 5,3 % en euros courants, sans tenir compte de l'inflation ; les crédits de la mission « Écologie et développement durable », censés être un gisement de croissance, reculent de 7,69 % entre 2008 et 2011 ; de même, les crédits de la mission « Travail et emploi » sont réduits de 14,7 % sur la même période, la baisse atteignant 5 % pour la seule année 2009, tandis que les quelques mesures annoncées récemment vont vous contraindre à augmenter de nouveau ces crédits : que d'imprévisions dans votre politique ! Évoquons enfin, pour compléter ce funeste tableau, la suppression de dizaines de milliers de postes de fonctionnaires de l'État.
Voilà donc le projet de budget que vous nous demandez d'adopter, alors que notre pays se trouve dans une situation économique très grave.
Je ne peux terminer mon propos sans évoquer certains dispositifs particulièrement choquants, adoptés lundi dernier lors de la réunion de la CMP. Alors que chacun connaît la gravité de la situation économique de notre pays, vous n'avez rien trouvé de mieux que d'instaurer l'autocalcul du bouclier fiscal. Cela signifie qu'un contribuable pourra s'imputer lui-même sur l'impôt de son choix le droit à restitution lié au bouclier fiscal.
Personne ici n'est dupe, et il s'agit bien entendu de l'imputer sur l'ISF. De plus, ce mécanisme étant déclaratif, en cas de trop remboursé, la pénalité appliquée ne serait que de 10 %. On est bien loin des mesures de moralisation et de justice fiscale si souvent évoquées !
À ce sujet, je ne résiste pas au plaisir de vous rappeler, monsieur le ministre, un court extrait du débat du 13 juillet 2007 sur la loi TEPA. Je cite Mme la ministre de l'économie, répondant à une interpellation de notre collègue Jean-Pierre Brard : « Je vous l'indique de manière très ferme : il n'est pas question d'accepter le principe de l'autoliquidation. La restitution du trop-payé d'impôt s'effectuera dans les mêmes conditions qu'à l'heure actuelle, dans le cadre des contrôles habituels. »
De même, alors que les Français souffrent socialement et auraient bien besoin de mesures de soutien, vous n'avez rien trouvé de mieux que de relever de 76 000 à 100 000 euros la part des groupements fonciers agricoles éligibles à l'abattement de 75 % au titre de l'ISF.
Et comme si cela ne suffisait pas, vous l'avez indexée ! Vous indexez de façon automatique les dispositifs relatifs à l'ISF, alors que la prime pour l'emploi est gelée en 2009 et que vous refusez systématiquement nos amendements sur ce sujet.
Par ailleurs, tous vos discours sur la maîtrise de la dépense fiscale, qui – doit-on encore le rappeler ?– ont fait l'objet d'un consensus unanime de la commission des finances, s'effondrent. En effet, une énième niche fiscale est introduite à travers une exonération d'impôt de 25 % de la rétrocession d'honoraires attribués aux collaborateurs d'avocats exerçant des missions de prospection à l'étranger. Permettez-moi de douter du motif invoqué d'incitation à l'expansion de notre culture juridique hors de nos frontières.
Nous n'avons donc pas fini de payer le paquet fiscal, c'est-à-dire de servir les hauts revenus et la rente, comme votre politique le fait depuis 2007, au détriment de la croissance et du pouvoir d'achat de la majorité des Français !
C'est aussi de continuité et de persévérance dans l'échec, d'incapacité à maîtriser la situation qu'il convient de parler à propos de ce projet de loi de finances. Imprévoyance, injustice et inefficacité, voilà les maîtres mots de votre politique !
C'est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, de voter la question préalable. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Dans les explications de vote sur la question préalable, la parole est à M. Pascal Terrasse.
Je poursuis mon propos commencé tout à l'heure, puisque vous m'aviez pressé de conclure, monsieur le président.
La France est-elle plus sûre aujourd'hui qu'avant l'arrivée du nouveau Président de la République et de ce gouvernement ?
Oui !
Je n'en ai pas le sentiment, monsieur le ministre. Je ne parle pas, bien sûr, des risques de terrorisme, mais de la stabilité économique et financière. Nous nous trouvons, je crois, dans une situation extrêmement compliquée, extrêmement tendue du point de vue des équilibres financiers.
Alors que les Français ont aujourd'hui besoin de confiance – confiance dans leur Gouvernement, dans leur Président de la République –, on sent monter une colère sociale forte, chez les jeunes, chez les salariés, dans les organisations sociales et syndicales. Que nous disent aujourd'hui les Français ? C'est le sujet que je voudrais aborder.
Leur sentiment, nous disent-ils tout simplement, c'est qu'il y a deux poids, deux mesures : il y a une France qui s'en tire plutôt bien, qui bénéficie des largesses des gouvernants, des gestionnaires des comptes publics ; et puis il y a l'autre France, celle qui a du mal à boucler les fins de mois.
Dans ce budget, on voit bien les décisions prises, les orientations choisies : à chaque fois, elles vont dans la même direction. Comme l'a rappelé M. le rapporteur général, on aurait pu, cette année, aller plus loin dans le plafonnement des niches sociales et fiscales. Des efforts ont été faits, nous le reconnaissons ; mais pourquoi, au moment où la crise est la plus forte, n'avez-vous pas poussé plus loin dans cette direction ? Jérôme Cahuzac l'a rappelé, les Français s'interrogent sur l'avenir et voient en même temps les cadeaux qui sont faits, notamment à Bernard Tapie : 450 millions d'euros donnés à un seul homme, qui aurait subi quelque préjudice.
Tout cela, les Français le voient. Quelles réponses pouvons-nous leur apporter ? Voici quelques propositions que nous voudrions vous faire.
La prime pour l'emploi représente réellement du revenu sur la fiche de paie. Pourquoi ne pas la doubler ? Concrètement, vous pourriez le faire dès le prochain collectif budgétaire.
Les loyers sont aujourd'hui de plus en plus élevés. Il serait judicieux d'accompagner les locataires, grâce aux allocations logement. Il faudrait y réfléchir.
Enfin, il faut, à l'instar de nos amis britanniques, poser le problème de la TVA – non pas seulement en termes de pouvoir d'achat, mais parce qu'elle représenterait aussi un moyen pour les entreprises de disposer rapidement d'une trésorerie.
Voilà quelques-uns des choix que nous aurions souhaité faire. J'ajoute un dernier élément : les collectivités territoriales – régions, départements, communes – souhaitent toutes mettre en place des plans anti-crise dans les budgets qu'elles sont en train de voter. Elles veulent investir en 2009, mais elles nous disent que l'État doit les aider. Les difficultés dues au désengagement de l'État et à la mauvaise compensation de la décentralisation sont multiples – je n'y reviens pas. Les collectivités territoriales ont besoin d'un accompagnement financier, et je crains que la remise en cause du pacte de croissance et de stabilité ne pèse très lourdement sur elles.
Sur le plan de relance, enfin, les Français ont aussi besoin de confiance. On annonce 26 milliards d'euros. Disons-nous la vérité ? Bon an mal an, ce sont, dans le meilleur des cas, 4 à 5 milliards d'euros qui seront mobilisés. Vous serez, monsieur le ministre, appelé à faire un nouveau plan de relance, vraisemblablement au mois d'avril ou de mai.
N'attendons pas : il sera trop tard !
Voilà pourquoi nous voterons avec conviction la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je suis un peu étonné de l'argumentaire de notre collègue. Pourquoi ? M. Eckert nous parle d'imprévoyance ; mais enfin, on ne saurait reprocher au Gouvernement d'avoir ajusté plusieurs fois la loi de finances ! C'est la première fois qu'un Gouvernement le fait.
Voulez-vous que je sois cruel ? Je pourrais vous rappeler que fin 1992, au moment de l'élaboration du budget pour 1993, tout s'effondrait, mais que le ministre des finances de l'époque, de vos amis, continuait à dire : « Tout va très bien, madame la marquise ! »
Et le déficit public avait fini par atteindre 6,3 % ! Je pourrais aussi vous rappeler la fin d'une autre de vos mandatures, 1997-2002. On était en plein plongeon… (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Ce que je dis vous choque-t-il ? C'est pourtant la stricte vérité. Ne reprochez donc pas au Gouvernement d'avoir ajusté son budget ; inspirez-vous plutôt, si un jour vous revenez au pouvoir et si vous vous trouvez dans une telle situation, de ce qui est fait aujourd'hui. L'ajustement est ici progressif.
Vous dites qu'il faut doubler la prime pour l'emploi, qui représente 4 milliards, et utiliser la TVA. Vous êtes quand même un peu plus prudents que le Premier ministre anglais, puisque M. Cahuzac a dit tout à l'heure qu'une mesure générale de TVA lui semblait inappropriée – c'est du bon sens.
Quant aux mesures sectorielles, elles sont permanentes ! Regardons ce que nous avons fait sur les travaux dans les logements.
Pas du tout ! Tout le monde était d'accord ! Mais si l'Union européenne l'avait refusé, qu'aurions-nous fait ? C'eût été une catastrophe !
Je reviens sur le thème de l'injustice. Vous parlez sans cesse de la loi TEPA, mais vous ne dites jamais la vérité !
Deux tiers de ces dépenses servent à aider les couches moyennes, les travailleurs les plus modestes. Qui fait des heures supplémentaires ? Seraient-ce les cadres supérieurs ou les dirigeants ? (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR)
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Il a raison !
Vous voulez donc retirer 6 milliards aux travailleurs modestes !
Vous combattez aussi le crédit d'impôt sur les intérêts pour l'acquisition d'un logement. Mais ils sont plafonnés ! Qui sanctionneriez-vous en supprimant cette mesure ? Ce sont encore les couches les plus modestes – ce ne sont pas les gens aisés qui ont besoin de ce crédit d'impôt !
Vous essayez d'assimiler la loi TEPA à une seule mesure, celle du bouclier fiscal. Vous savez quelle a été la position du Nouveau Centre, qui était beaucoup plus modérée que celle du Gouvernement, puisque nous pensions qu'il ne fallait pas inclure la CSG dans le plafond. Mais de quoi discutons-nous ? Alors que l'estimation du coût fiscal s'élevait à 800 millions, nous ne serons pas même à 400 !
Ce n'est donc pas en supprimant la loi TEPA que vous financerez le doublement de la PPE – qui coûterait 4 milliards – ou des mesures à plusieurs milliards comme la baisse de la TVA de 19,6 % à 5,5 %. Je vous rappelle qu'il y a un état H : tout cela est très sérieux, très encadré.
Nous voterons donc contre cette question préalable.
(La question préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.)
(Mme Catherine Vautrin remplace M. Marc Laffineur au fauteuil de la présidence.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la majorité de droite du Parlement vient, une nouvelle fois, avec les conclusions de la commission mixte paritaire, de montrer sa grande complaisance pour tous les copains, et pour les riches contribuables en général.
L'auto-liquidation du bouclier fiscal, qui consiste à dire aux privilégiés : choisissez vous-même le montant des remboursements d'impôts auquel vous aurez droit, est un nouvel encouragement à la fraude, dont pourront d'autant mieux bénéficier les plus riches que l'administration fiscale verra ainsi ses possibilités d'intervention considérablement réduites.
En ouvrant la possibilité de déroger par décret aux obligations fiscales des gérants de fonds, la droite veut donner un blanc-seing au Gouvernement pour permettre à des financiers – qui ne sont pas imperméables à la spéculation – d'accéder plus facilement à de nouveaux allégements d'impôts.
L'arrangement juteux entre copains auquel la droite s'est livrée en supprimant l'obligation pour Bernard Tapie de s'acquitter de tout impôt ou charge sociale sur les indemnités qui lui ont été scandaleusement attribuées, au titre du préjudice moral, dans l'affaire Tapie-Crédit Lyonnais, en dit long, lui aussi, sur votre fascination pour l'argent et ceux qui en détiennent beaucoup trop.
Monsieur de Courson, vous étiez d'accord avec nous sur ce point ! Ne vous reniez pas !
L'amendement que notre assemblée avait adopté était un élément de moralisation, mais votre vertu d'un moment sera restée une pure velléité !
La demi-part supplémentaire dans le calcul de l'impôt sur le revenu pour les parents veufs, séparés ou divorcés va encore être restreinte et rabotée, alors qu'elle est déjà plafonnée et donc ne procure qu'un avantage très limité aux contribuables les plus modestes.
Quand nous examinons le projet de loi de finances, nous prenons date devant l'opinion publique plus que nous n'agissons sur le présent ; et nos concitoyens sont ainsi les témoins de débats politiques et idéologiques que vous supportez d'ailleurs de plus en plus mal et que vous rêvez de faire disparaître avec la réforme du règlement de l'Assemblée que vous concoctez.
Profondément idéologique, par exemple, fut l'incroyable discours de la droite au Sénat sur les malheurs des petits porteurs ayant décidé de vendre leurs actions, malgré la faiblesse des cours. Que n'avez-vous rappelé votre propagande sur les vertus formidables de l'actionnariat ! Vous n'avez d'ailleurs jamais réussi, mesdames et messieurs de la majorité, à expliquer clairement qui étaient ces supposés petits porteurs – victimes avant tout, rappelons-le une nouvelle fois, d'une idéologie au service d'une économie virtuelle !
Pour quelle raison la grande majorité des actionnaires ne fait-elle pas jouer le dispositif d'imposition séparée des plus-values ? Eh bien tout simplement parce que ceux-ci n'y ont pas intérêt. Pour avoir intérêt au régime particulier, il faut en effet acquitter un impôt sur le revenu dépassant 18 % de son revenu imposable, c'est-à-dire un peu plus de deux mois de salaire.
Sur cette question, nous sommes en présence d'une discussion de fond et donc profondément politique, car votre politique constante est de favoriser, dans le partage de la valeur ajoutée, les dividendes et le gros actionnariat au détriment des revenus du travail. Cette idéologie a conduit la majorité, en 2007, – nous ne le rappellerons jamais assez – à soutenir la très coûteuse et injuste loi TEPA qui a coûté plus de 14 milliards d'euros.
À l'époque, il s'agissait de traduire les promesses présidentielles du candidat Nicolas Sarkozy. Accélérer la croissance, travailler plus pour gagner plus, disait-il. Vous aviez la recette infaillible : la défiscalisation des heures supplémentaires ! Or le bilan de cette mesure, c'est un milliard d'euros de dépenses non réalisées, c'est-à-dire d'heures supplémentaires qui n'ont pas été effectuées. Dans le même temps, nous assistons à des suppressions massives d'emplois dans le secteur de l'intérim – 50 000 postes au deuxième trimestre ! Et désormais, de très nombreuses entreprises ont décidé des mesures de chômage technique ou multiplient les plans dits « sociaux », ce que chacun traduira bien évidemment par licenciements et précarité accrue.
Les salariés de Renault à Sandouville, d'Amora à Dijon ou de Peugeot à Sochaux ont peut-être fait des heures supplémentaires après la loi TEPA, mais aujourd'hui ils sont soit licenciés, soit en vacances forcées pour cause de chômage technique, avec d'importantes pertes de salaire.
Faut-il renforcer le bouclier fiscal pour faire en sorte que le capital soit toujours moins taxé ? Pas de souci, vous avez abaissé le plafonnement à 50 % du revenu et inclus de surcroît la CSG. Ainsi, environ 15 000 contribuables ont encaissé une restitution au titre du bouclier fiscal, mais moins de 500 d'entre eux se sont partagé 120 millions d'euros. En 2007, le bouclier fiscal a coûté plus de 246 millions d'euros, et la loi TEPA permettra aux plus aisés de bénéficier d'une remise encore plus importante. Les 7 millions d'euros remboursés par l'État à Mme Meyer, héritière des Galeries Lafayette, vont faire des petits ! Et tout cela pour quel résultat ? Une chute de la croissance et des promesses envolées.
Force est de constater que rien dans la politique menée par le Gouvernement n'a empêché le développement de la crise, la dérive des comptes publics, la hausse du chômage, la persistance d'un haut niveau d'inflation et les atteintes au pouvoir d'achat populaire.
Pour notre part, nous nous étions attachés, dans la discussion de ce projet de loi de finances, à proposer des mesures tendant à accroître le pouvoir d'achat des ménages salariés et à réintroduire de la justice et de l'efficacité dans notre fiscalité, pour favoriser l'économie de production de richesses, abandonnant enfin la primauté exclusive accordée à la financiarisation et à la spéculation. Mais vous avez balayé d'un revers de main nos propositions.
Baisser sélectivement la TVA ? Vous avez refusé. Financer les entreprises par un développement du crédit peu onéreux assis sur l'épargne populaire ? Ce n'était pas le moment et la Bourse, c'était tellement mieux ! Supprimer les niches fiscales bénéficiant exclusivement aux plus riches et aux grandes entreprises ? Que non, cela mettait en cause l'emploi !
En revanche, ce qui vous semble plein de bon sens, c'est de réduire encore la dépense publique mais, en même temps, d'accroître encore et toujours les dépenses fiscales ; c'est de supprimer plus de 30 000 postes de fonctionnaires, 14 000 postes d'enseignants et les RASED – on comprend pourquoi les lycéens sont dans la rue, on comprend pourquoi les IUT sont dans la rue, on comprend pourquoi les professeurs et les chercheurs sont dans la rue ; c'est de taxer les contribuables séparés, veufs ou divorcés modestes, plutôt que les contribuables assujettis à l'ISF – tout le monde n'a pas la chance, malheureusement, d'être actionnaire ou de pouvoir investir au mieux de ses intérêts, outre-mer par exemple ou dans le capital des PME ; c'est de diminuer le budget de la rénovation urbaine, de l'emploi, du logement.
C'est cela le budget pour 2009 ! C'est la France de l'affairisme, des gros portefeuilles boursiers, de l'optimisation fiscale, du parasitisme financier, que vous avez, encore une fois, défendue avec acharnement. Aujourd'hui, nous avons compté 46 000 chômeurs de plus en octobre, ce qui fait un total de plus de 2 millions et des centaines de milliers chômeurs supplémentaires sont attendus pour l'année prochaine ! Voilà votre bilan.
Vous devriez plutôt essayer de prendre des dispositions d'avenir pour que la France et notre jeunesse puissent se porter mieux demain !
Mais le monde du travail doit s'attendre, en 2009 encore, à de nouveaux sacrifices, puisqu'aux mesures fiscales que j'ai rappelées doivent s'ajouter les franchises médicales, les déremboursements, la baisse du niveau des retraites, la mise en cause de la retraite à soixante ans, avec cette proposition d'un relèvement à soixante-dix ans, et la hausse des impôts locaux, conséquence du reniement, par l'État, de la parole donnée aux collectivités locales. Une fois encore, vous allez les mettre à la diète pour solder les mauvais comptes de votre mauvaise politique, en leur transférant des charges et en réduisant leurs moyens.
Pour toutes ces raisons, les députés communistes et républicains voteront contre ce projet de loi de finances pour 2009 tel qu'il résulte des travaux de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe Nouveau Centre votera en faveur de ce projet de loi de finances pour 2009.
Pour plusieurs raisons.
Premièrement, même l'opposition le reconnaît, vous avez fait, monsieur le ministre, un incontestable effort de sincérité du projet de loi de finances, non seulement en termes de budgétisation mais également sur les dépenses, puisque celles-ci croissent comme l'inflation – hors intérêts de la dette et hors retraites, les dépenses sont stables.
Mais cet effort de sincérité doit être poursuivi.
En effet, comme l'indique la Cour des comptes, et vous l'avez reconnu vous-même, il reste un certain nombre de sous-budgétisations à hauteur de 1,5 ou 1,6 milliard. Vous me rétorquerez que, sur 370 milliards de dépenses, c'est peu. Certes, mais nous aurions quand même pu renoncer à ces sous-budgétisations, notamment en utilisant une partie de la réserve.
Et puis, il reste la dette de l'État à l'égard de la sécurité sociale. Vous avez certes enrayé son augmentation, en la stabilisant à 3 milliards d'euros, mais tout le monde est conscient qu'il faudra dans les deux ou trois années qui viennent la solder.
Deuxièmement, nous considérons que cet effort de maîtrise de la dépense ne doit pas être remis en cause par le prochain collectif budgétaire destiné à mettre en oeuvre les mesures fiscales contenues dans le plan de relance.
Vous connaissez les chiffres : le plan de relance de 26 milliards devrait s'élever, en réalité, à 18,5 milliards en comptabilité budgétaire et à 15,5 milliards en comptabilité maastrichtienne, du fait des créances des acteurs économiques sur l'État. Cet effort de maîtrise, j'y insiste, ne doit pas être remis en cause.
La troisième raison pour laquelle nous voterons pour ce projet de budget, c'est que, vous avez tenu compte, monsieur le ministre, d'un certain nombre de propositions formulées par le Nouveau Centre. Nous vous avons fait évoluer sur plusieurs points.
D'abord, sur le plafonnement des niches fiscales. Nous nous sommes beaucoup battus sur ce point. Votre collègue, Mme Lagarde, y était, on peut le dire, hostile, puis elle a évolué – à cause du financement, il est vrai, du RSA – et nous sommes parvenus à un compromis. C'est bien. La gauche elle-même le reconnaît, même si elle considère que nous ne sommes pas allés assez loin.
Le règlement définitif de la question prendra des années. Mais ce que nous avons voté constitue quand même un grand progrès. Je ne veux pas polémiquer avec mes collègues de gauche mais j'ai envie de leur demander pourquoi, alors qu'ils ont été au pouvoir à de nombreuses reprises, ils n'ont rien fait. Nous, nous avons pris des mesures ; c'est très bien, et tout le monde est d'accord là-dessus.
Ensuite, nous avons engagé la réforme des conditions d'octroi d'une demi-part supplémentaire. Le groupe Nouveau Centre a été à l'origine de la réflexion sur les abus de la demi-part pour les personnes qui en bénéficiaient à l'occasion d'une rupture. Le droit fiscal récompensait la rupture. C'était absurde, tout le monde l'a reconnu. Nous étions arrivés à une mesure équilibrée à l'Assemblée nationale, avant que le Sénat ne modifie cet équilibre. Heureusement, nous sommes revenus à la position de l'Assemblée nationale et je vous remercie, monsieur le ministre, d'avoir défendu la position de l'Assemblée.
Un autre domaine sur lequel vous nous avez entendus, c'est la fiscalité des PME. Un certain nombre de nos amendements, défendus d'ailleurs avec des collègues du groupe UMP, ont été adoptés : sur le développement à l'étranger des entreprises françaises ; sur les entrepreneurs individuels non adhérents à un organisme agréé, dont notre rapporteur général a longuement parlé ; sur la fiscalité des biocarburants. Le Gouvernement allait commettre une erreur sur ce point, il nous a écoutés, même si le débat a été un peu chaud – mais c'est normal, c'est la démocratie – et nous sommes arrivés à une solution équilibrée.
Dans la rubrique des regrets du groupe Nouveau Centre, je mettrai votre manque de compréhension envers nos propositions concernant les relations entre l'État et les collectivités territoriales et le FCTVA.
Il ne sert à rien de dire que l'ensemble des transferts de l'Etat au profit des collectivités territoriales augmentent de 2 %. Ils augmentent en réalité de 0,8 %, et la majorité présidentielle doit l'assumer.
Certes, le remboursement du FCTVA augmente de 6 % mais je pense qu'il n'est pas bon d'avancer ce chiffre de 2 %, FCTVA compris, pour des raisons comptables mais aussi parce que tout le monde doit faire des efforts. Il faut arrêter de mettre les collectivités territoriales dans une situation de dépendance. La vraie réforme, monsieur le ministre, et j'espère que le comité Balladur avancera sur ce point, serait de ne pas faire dépendre les collectivités territoriales de plus en plus de l'État, mais au contraire de leur redonner de l'autonomie et des responsabilités.
Autre regret : l'amendement sur le préjudice moral. Le groupe Nouveau Centre persiste à penser, comme beaucoup d'autres députés d'ailleurs, tant à droite qu'à gauche, qu'on ne peut pas continuer à exonérer totalement les préjudices moraux. Nous avions proposé un plafond de 1 million d'euros, ce qui nous semblait tout à fait raisonnable. Personne d'ailleurs n'a touché plus d'un million, sauf celui dont tout le monde parle, qui a obtenu 45 millions.
Nous reprendrons cette proposition dans le collectif, et j'espère, monsieur le ministre, que nous pourrons compter sur votre appui et qu'on ne nous opposera pas certains faux arguments tels que ceux qui nous ont été sortis en commission mixte paritaire.
Enfin, le groupe Nouveau Centre tient à rappeler la nécessité de rester vigilant quant au niveau des déficits publics. Nous étions partis d'un déficit à 52 milliards d'euros dans le projet de loi de finances, vous nous avez annoncé 69 milliards, mais en réalité ce sera 79 milliards, si on compte les plus de 9 milliards qui vont être ouverts dans le cadre du collectif dont nous allons attaquer l'examen le 6 janvier.
Tout à fait. Le déficit de la sécurité sociale s'élève à 10 milliards, mais il peut dériver très vite en cas de difficultés économiques, comme celles que nous allons connaître.
Le déficit risque d'atteindre alors 15, 16 ou 17 milliards d'euros, et il faut ajouter encore le déficit des collectivités territoriales, même si celui-ci est modeste au regard des autres.
Donc, mes chers collègues, le niveau de la dette va augmenter constamment et nous le paierons sous forme d'intérêts, avec des marges de manoeuvre de plus en plus réduites.
Malgré ces quelques regrets, le groupe Nouveau Centre, comme en première lecture, votera en faveur de ce projet de budget qui, grâce à l'adoption de certains de nos amendements, a connu plusieurs améliorations sur les plans tant de la justice fiscale que de l'efficacité économique et de l'environnement. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, quand nous avons débuté son examen, ce projet de loi de finances pour 2009 était déjà caduc dans ses hypothèses et complètement inadapté dans sa réalité. Charles de Courson vient de le rappeler, c'est, pour l'essentiel, un budget d'austérité, de rigueur, qui, en réduisant les dépenses, exercera un effet dépressif sur l'activité économique au moment précisément où il est nécessaire de relancer l'économie.
Je pourrais m'exprimer encore longuement sur ce budget mais, pour rester un peu dans l'actualité et poursuivre un débat que nous avons eu, monsieur le ministre, par voie de presse, je voudrais revenir sur la situation économique et sur le plan de relance, anticipant en quelque sorte notre discussion de lundi et du début de l'année prochaine.
Dans la crise que nous connaissons, il y a une face émergée : c'est la crise financière. Les exigences de rentabilité incompatibles avec la réalité économique n'ont tenu que lorsque le prix des actifs montait, mais le mouvement s'est brutalement inversé. Cela a provoqué une crise de dimension mondiale parce que la déréglementation financière avait dispersé un peu partout dans le monde des produits qui, habituellement, restent sous la responsabilité des banques.
Mais il y a aussi une face cachée, un problème que nous rencontrons dans notre pays depuis le début de l'année : c'est le pouvoir d'achat. Les exigences de rentabilité ont conduit beaucoup de ménages à s'endetter massivement, notamment aux États-Unis. La faible augmentation du pouvoir d'achat est une des causes de la crise : depuis dix ans le salaire moyen américain est stable alors même que les dépenses des ménages, en produits de consommation et en investissements, croissent. Dès lors, la demande a été en grande partie alimentée par de l'endettement. C'est également vrai dans notre pays, mais dans une moindre proportion. Derrière la crise financière se cache la crise du pouvoir d'achat.
La récession ou la quasi-récession que nous connaissons depuis le début de l'année en France est due à une baisse du pouvoir d'achat. Dans sa note de conjoncture d'octobre, l'INSEE indique que le pouvoir d'achat a baissé de 0,4 % au premier semestre de l'année et qu'il devrait encore baisser de 0,4 % au second semestre. Cela signifie qu'à la fin de l'année 2008, le pouvoir d'achat de l'ensemble des ménages aura baissé de 0,8 % par rapport à ce qu'il était en début d'année.
Cette baisse du pouvoir d'achat, dont l'origine est en partie extérieure, puisqu'elle est imputable au choc pétrolier, est due aussi au fait que, depuis dix-huit mois, ni le SMIC ni les retraites n'ont connu de hausse significative. Je maintiens donc, avec Didier Migaud, avec lequel j'ai signé une tribune dans Le Monde, que l'origine de la récession actuelle est la baisse du pouvoir d'achat, qui a engendré, au premier trimestre, une baisse de la consommation, laquelle s'est répercutée sur l'investissement et l'emploi au second trimestre, aggravant la baisse de la demande auprès des entreprises. Depuis la fin de l'été, les effets de la crise financière s'ajoutent à cette situation, mais le problème originel reste la baisse du pouvoir d'achat.
Par conséquent, un plan de relance cohérent aurait dû s'appuyer sur deux éléments. À des mesures d'investissement, principalement public, il fallait adjoindre une augmentation du pouvoir d'achat pour réduire non les conséquences de la crise – la baisse de l'investissement est une conséquence du ralentissement de la consommation et de la diminution du pouvoir d'achat – mais ses causes. Peut-être suis-je myope, monsieur le ministre, mais même en regardant à la loupe les mesures que vous avez annoncées, je n'ai rien vu de significatif à ce sujet.
Une autre mesure s'impose. Il faut remettre en cause l'absurde disposition de la loi TEPA permettant de subventionner les heures supplémentaires, au moment où notre pays connaît une baisse de l'emploi. La redistribution du pouvoir d'achat aux salariés qui ont un emploi a une contrepartie évidente, qui tient à un effet d'incitation : les 5 milliards d'euros dépensés pour favoriser les heures supplémentaires produiront une baisse de l'emploi, qu'a chiffrée un jeune économiste de l'INSEE. J'invite M. de Courson à lire son étude. Elle montre que 50 000 à 60 000 emplois pourraient être détruits par ces mesures.
Nous sommes donc face à un cas de figure exceptionnel : vous refusez de supprimer une mesure qui coûte 5 milliards d'euros et dont la suppression sauverait 60 000 emplois. En trente-cinq ans d'analyse économique, je n'ai jamais vu aucun gouvernement camper sur une telle position. On citera sans doute ce cas d'école dans les cours d'économie.
Cela n'a rien à voir ! Je développerai volontiers ce point, mais mon temps de parole n'est que de dix minutes.
Le plan de relance du Gouvernement est tout simplement un plan de soutien du pouvoir d'achat !
En supprimant cette mesure, vous économiseriez 5 milliards et sauveriez 60 000 emplois : c'est dire si elle est absurde. Je comprends pourquoi les ministres ne parlent plus de la loi TEPA, qui est profondément inégalitaire sur le plan de la redistribution, et, sur le plan de l'efficacité économique, complètement absurde.
Le Gouvernement prétend que, la relance du pouvoir d'achat aggravant le déficit extérieur, mieux vaut relancer l'investissement. Pour ce faire, il incite les entreprises, par le biais d'un amortissement accéléré, à acheter de l'équipement. Mais qui peut penser qu'elles vont investir quand la consommation et le pouvoir d'achat diminuent ?
Si vous aviez prévu un plan de relance cohérent, qui avance sur deux jambes, comme celui que nous avons souhaité, M. Migaud et moi – c'est-à-dire si votre texte prévoyait aussi des mesures en faveur du pouvoir d'achat –, le soutien à l'investissement aurait un sens, car vous créeriez en même temps la demande dont les entreprises ont besoin pour investir.
Si vous voulez relancer l'économie, monsieur le ministre, faites comme les autres pays : prévoyez un plan complet, avec une partie consacrée au pouvoir d'achat et l'autre à l'investissement.
La seule relance de l'investissement qui puisse être réalisée presque sans dégradation du commerce extérieur ni mesures d'accompagnement est l'investissement public.
…inexistant. Tout d'abord, 70 % de l'investissement public est fait par des collectivités locales importantes, c'est-à-dire des communautés urbaines.
Mais le dispositif de remboursement anticipé ne jouera pas pour les communautés urbaines, qui n'ont pas de retard de paiement.
Si vous voulez vraiment relancer l'investissement, prévoyez plutôt un dispositif par lequel l'État labellise et soutienne le financement des collectivités locales ou y contribue. Vous aurez alors un vrai plan de relance. Mais, en l'état, votre texte ne représente pas même le tiers d'un tel plan. Il y manque toute une partie sur le pouvoir d'achat, et celle qui concerne l'investissement n'est pas complète.
Vous avez non seulement la possibilité, mais le devoir de faire un vrai plan de relance !
La situation est suffisamment grave pour qu'on ne s'attaque pas seulement à quelques conséquences de la crise, mais à ses causes. D'où la nécessité d'une véritable politique de relance.
Afin de favoriser l'investissement public, il faut consentir un véritable effort en direction des collectivités locales. Mais je n'ai rien vu de tel dans votre plan de relance. Et ne parlons pas de votre budget pour 2009, tant il est éloigné de la réalité. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Il serait intéressant que vous consolidiez le budget avec le plan de relance. Nous verrions alors si celui-ci fonctionne vraiment. M. de Courson a dit qu'il présentait du moins un avantage : il ne change rien en matière de dépense.
N'est-ce pas la preuve qu'il ne s'agit pas d'un plan de relance, et qu'il relève, comme votre budget, d'une politique d'austérité ?
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je reconnais à M. Muet la qualité incontestable de grand économiste.
Mais elle est bien difficile à concilier avec le statut d'homme de l'opposition. Elle vous a souvent amené à vous renier, monsieur Muet, ce que j'ai regretté en vous écoutant. Je tenterai donc de rétablir quelques faits incontestables, auxquels vous ne pourrez que vous rallier.
Mais levons d'abord toute ambiguïté : le groupe UMP votera sans hésiter le texte de la commission mixte paritaire relatif à la loi de finances. Je me doute bien qu'une telle annonce crée une déception sur les bancs de l'opposition, mais, après six heures et quart de travail efficace, en union avec les parlementaires de la Haute assemblée, nous avons construit un texte qui a suscité un accord unanime et qui, tout en répondant aux attentes des Français, légitime le plan de relance du Gouvernement ainsi que la préparation du budget pour 2009. Si l'année s'annonce difficile, le budget, lui, sera solide, grâce au travail de la commission mixte paritaire.
Nous atteignons la fin de la discussion budgétaire dans un contexte économique particulièrement difficile.
Ce contexte économique difficile doit être appréhendé en même temps comme une source d'opportunités et de réformes structurelles pour notre pays et pour nos concitoyens.
Avant de revenir sur le contenu du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je rappelle qu'au terme de nos débats nous serons dotés d'un budget responsable, pragmatique et sincère.
En effet, le budget pour 2009 tiendra compte de l'environnement économique actuel, notamment des conséquences de la crise financière sur notre économie. Il sera fidèle aux engagements que nous avons pris devant les Français.
La crise que nous traversons n'altère ni notre volonté de réformer ni notre capacité à le faire, bien au contraire. Avec ce budget, nous mettons en oeuvre nos engagements en faveur du développement durable, de la compétitivité des entreprises, de la recherche et l'enseignement supérieur, et de la réforme de l'État.
Je veux maintenant revenir sur certains apports de la commission mixte paritaire. Nous avons encadré le régime fiscal applicable aux revenus des gérants des fonds communs de placement à risque et de sociétés de capital-risque, que l'on appelle communément les carried interest.
Je serais surpris que des députés aussi avisés ne connaissent pas ce terme ! L'objectif de cette mesure est de responsabiliser les équipes de gestion en créant une cohérence entre la performance générée par le fonds d'investissement et la mise initiale des gérants. Cette approche nous paraît judicieuse pour attirer l'épargne des gérants de ces fonds vers l'économie réelle. Une nouvelle fois, justice, équilibre et efficacité, principes chers à notre rapporteur, ont gouverné nos choix. Nous sommes particulièrement vigilants sur toutes les questions qui intéressent de près ou de loin le financement des entreprises.
Nous avons ensuite encadré les holdings d'investissement, qui permettent de réduire la facture d'ISF sans investissement réel dans une PME. Le problème a été soulevé, notamment par M. Migaud, en commission mixte paritaire. Désormais, ces holdings verront le nombre de leurs actionnaires limité à cinquante. Ces structures ne pourront donc pas multiplier le nombre d'épargnants investisseurs amateurs de carotte fiscale.
Nous avons également jugé nécessaire de revoir le dispositif vieilli octroyant une demi-part, après le départ du dernier enfant, à un parent n'ayant pas élevé ses enfants seul. Il s'agissait simplement de rétablir une justice fiscale…
…en avantageant les personnes ayant élevé seules leurs enfants, et le débat s'est naturellement focalisé sur la preuve de la charge familiale effective. La position finale défendue par Gilles Carrez est, une fois encore, une position d'équilibre et de justice.
Nous avons trouvé nécessaire de ne pas fiscaliser les indemnités journalières d'accidents du travail et de maladies professionnelles, mesure à laquelle tenaient tous les députés de la commission mixte paritaire. Les sénateurs s'y sont ralliés. Saluons l'esprit de cohérence qui a prévalu. Équilibre et justice sont nécessaires dans les périodes particulièrement difficiles.
Pour conclure, je veux souligner que le projet de loi de finances pour 2009 n'est pas un texte isolé. À quelques jours de la réunion de la commission mixte paritaire saisie du collectif budgétaire, ce texte est cohérent avec les divers projets de loi de nature financière que nous serons appelés à adopter dans les semaines qui viennent. Il s'inscrit en effet dans le cadre des réformes que nous avons entreprises et, surtout, du plan de relance dont nous commencerons à ressentir les effets dès le premier trimestre 2009.
Ainsi, avec le projet de loi de finances pour 2009, le projet de loi de finances rectificative pour 2008 – il doit être examiné en commission mixte paritaire le samedi 20 décembre – et le prochain collectif budgétaire dont nous débattrons dès janvier prochain, nous sommes armés pour enclencher la relance de notre économie au bénéfice de tous les Français.
En conséquence, j'espère que les députés de l'opposition rejoindront ceux du groupe UMP pour voter en faveur du texte adopté par la commission mixte paritaire.
Le suspense est insoutenable : nous annoncera-t-il que le groupe SRC vote le texte ?
Mes chers collègues, je vous le dis immédiatement : je vais sans doute décevoir M. Chartier. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Tel un Paganini du paradoxe, M. Chartier a voulu nous persuader qu'on pouvait considérer comme une avancée sociale le simple fait de ne pas reprendre une mesure d'injustice fiscale voulue par le Sénat !
Nous ne nous y laisserons pas prendre !
J'ai noté que notre collègue de l'UMP avait totalement fait l'impasse sur le déficit. Je le comprends, puisqu'il avait été l'un de ceux qui, lors des journées parlementaires de l'UMP, avaient poussé des cris d'orfraie, en rappelant les engagements européens de la France, lorsque M. Guaino avait déclaré que les vannes du déficit et de la dette étaient désormais ouvertes.
Alors, il s'agissait de l'un de vos compagnons, qui s'exprimait avant que l'oracle présidentiel ne fasse rentrer tous les parlementaires de l'UMP dans le rang.
Et puisque vous prétendez que la relance est déjà en cours, on se demande pourquoi il est nécessaire de la faire figurer dans le projet de loi de finances – hormis la modeste mesure portant sur les deux cents euros pour le RSA.
Les ministres déclaraient ainsi, dans cet hémicycle, que la loi TEPA était une mesure de relance : la baisse des impôts devait créer une augmentation de la demande. M. Muet a dit avec raison à quelle monstruosité économique pouvaient mener les dispositions de cette loi relatives aux heures supplémentaires. Plutôt que de créer un effet d'aubaine pour les entreprises, nous aurions choisi pour notre part de distribuer immédiatement du pouvoir d'achat en doublant la prime pour l'emploi. Cette relance du pouvoir d'achat est d'autant plus indispensable que le Bulletin de la Banque de France, qui vient de nous parvenir, montre comment – au-delà de la diminution de 0,8 % du pouvoir d'achat constatée par l'INSEE en 2008 – l'activité commerciale a diminué, surtout pour le petit commerce, alors qu'elle se maintient dans la grande distribution. Cela dit, une telle évolution correspond à votre volonté de destruction de l'emploi dans ce secteur, au profit de la grande distribution.
J'en viens au texte de la commission mixte paritaire. Sur la question de la suppression de la demi-part fiscale supplémentaire pour les personnes seules ayant élevé un enfant, le combat de l'opposition – elle était majoritaire parmi les opposants à la mesure – a permis d'empêcher que le Sénat ne porte une nouvelle atteinte aux droits sociaux.
Le dispositif en question rapporte pourtant moins de neuf cents euros aux personnes concernées ! Et je constate que, au cours du même débat, le Sénat n'a pas hésité à refuser de nous suivre dans notre volonté de plafonner les niches fiscales, et il a même permis le déplafonnement de la niche fiscale concernant les monuments historiques. Je note, monsieur Leroy que, sur ces questions, avec vos amis, vous n'avez pas toujours su résister.
Le plan de relance concerne avant tout les entreprises, mais qu'en est-il pour les donneurs d'ordres, notamment ceux du secteur public ? En la matière, la relance est entre les mains d'un ministre spécifique. On imagine déjà M. Devedjan, tel M. Soubise, avec sa chandelle, à la recherche de dossiers, dans les collectivités locales, pour relancer l'investissement public.
Pourtant, dans le même temps, vous imposez aux collectivités locales un budget de rigueur, alors qu'elles fournissent 75 % des investissements publics – dont 72 % sont le fait des communes et des intercommunalités. Quant à la norme que vous avez retenue pour l'évolution des dépenses de ces collectivités – une augmentation annuelle de 1,25 %, à partir de 2009 –, elle empêchera ces dernières d'investir comme elles le souhaiteraient. Je suis maire et, avec nombre de mes collègues, nous différons actuellement des investissements parce que nous sommes contraints budgétairement en raison de la baisse des dotations d'État et des incertitudes concernant nos capacités d'emprunt.
Nous voterons donc contre le texte de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances pour 2009. Comme nous l'avons déjà fait en CMP, nous continuerons de tenter d'infléchir votre politique économique dans le sens de la croissance, et en faveur d'une justice fiscale à laquelle vous avez décidé de tourner définitivement le dos. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La discussion générale est close.
La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget.
Madame la présidente, les différents orateurs ont été complets dans leurs commentaires. Ceux-ci n'appellent pas de réponses qui n'aient déjà été faites au cours de l'examen du projet de loi de finances.
Nous en venons au texte de la commission mixte paritaire. Conformément à l'article 113, alinéa 3, du règlement, je vais appeler l'Assemblée à statuer d'abord sur les amendements dont je suis saisie.
La parole est à M. le ministre.
Si vous le permettez, madame la présidente, je souhaite présenter globalement les vingt-quatre amendements déposés par le Gouvernement sur le texte de la commission mixte paritaire.
Les amendements nos 10 , 12 , 11 , 13 , 16 , 17 , 18 , 19 et 20 suppriment les gages prévus, respectivement aux articles 9 bis, 13, 13 bis, 22 bis, 42, 45, 48 ter, 49 et 82 bis.
L'amendement n° 21 à l'article 4 bis vise à rectifier une erreur matérielle sur les modalités d'entrée en vigueur du régime fiscal des parts de carried interest prévues par la commission mixte paritaire. L'amendement n° 22 concerne également la correction d'une erreur matérielle à l'article 62.
L'amendement n° 23 à l'article 9 a pour objet de supprimer l'exonération de TGAP applicable aux déchets traités dans des installations de stockage susceptibles d'être qualifiées de « bioréacteurs ». En effet, cette exonération paraît insuffisamment encadrée et conduirait à exonérer une proportion très importante des déchets entrant dans les centres de stockage. La situation de ces installations au regard de la TGAP sera réexaminée dans le cadre du projet de loi Grenelle II. Cet amendement est le seul qui revienne en substance sur les conclusions de la CMP.
À l'article 38, l'amendement n° 15 vise à fixer à 50 millions d'euros, en 2009, le découvert autorisé du compte de commerce «Gestion des actifs carbone de l'État ».
L'amendement n° 6 rectifié à l'article 16 et l'amendement n° 14 à l'article 17 visent à minorer les fractions de taux de la taxe intérieure sur les produits pétroliers affectées aux départements et aux régions pour la compensation financière des transferts de compétences prévus par la loi du 13 août 2004. Cette minoration vise à corriger des erreurs concernant la prise en compte du transfert des personnels du ministère de l'éducation nationale et du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.
L'amendement n° 2 à l'article 19 tire les conséquences, pour les prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales, de l'amendement du Gouvernement insérant un article 5 bis dans le projet de loi de finances rectificative pour 2008. En coordination avec cet article, il est nécessaire de prévoir, pour 2009, le niveau définitif des dotations des collectivités d'outre-mer de Saint-Martin et Saint-Barthélemy ; de fixer la baisse corrélative des dotations des collectivités qui leur transfèrent des charges, et de tenir compte de la récupération prévue du trop versé à Saint-Martin en 2008.
Pour tenir compte des ajustements concernant les fractions de TIPP et les prélèvements sur recettes, à l'article 35, l'amendement n° 7 ajuste les crédits de la mission «Relations avec les collectivités territoriales ».
À l'article 67, l'amendement n° 3 précise, tout en respectant l'intention de ses auteurs, la rédaction adoptée par la commission mixte paritaire, qui permet, pour les communes les plus fragiles, de retenir dans le calcul de leur DGF la croissance de leur population authentifiée par l'INSEE, en 2006 ou 2007.
À l'article 35, les amendements nos 4 , 1 et 5 portent respectivement sur les missions « Enseignement scolaire », « Agriculture » et « Provisions ». Ils ont pour objet de remplacer l'amendement adopté au Sénat à l'initiative de Mme Férat, qui prévoyait de transférer 48,5 millions d'euros de crédits de paiement et 21,15 millions d'autorisations d'engagement du programme « Enseignement scolaire public du second degré » vers le programme « Enseignement technique agricole ». Or, compte tenu de sa rédaction, cet amendement n'aurait pas eu les effets escomptés. Il aboutissait en effet à ce que les crédits transférés ne puissent être dépensés qu'à hauteur de 450 000 euros. Aussi, je vous propose d'adopter ces trois nouveaux amendements, qui ont pour objet de répondre aux préoccupations qui ont été exprimées au sujet du budget de l'enseignement technique agricole,…
…tout en préservant les moyens de l'enseignement scolaire.
Ces trois amendements prévoient en effet d'augmenter les crédits destinés à l'enseignement technique agricole de 38 millions d'euros par rapport à ce qui figurait initialement dans le projet de loi de finances. Ces crédits supplémentaires pourront notamment permettre de réduire le report de charges sur les établissements du « temps plein » et du « rythme approprié », et d'accélérer la revalorisation des dotations destinées aux établissements du « temps plein ». Cet abondement supplémentaire tient compte des capacités de redéploiement de la mission « Enseignement scolaire », pour douze millions d'euros, et de la mission « Agriculture », pour cinq millions d'euros, s'ajoutant au redéploiement de trois millions déjà effectué lors de l'examen du texte par le Sénat, le complément étant apporté par la mission « Provisions » à hauteur de 18 millions d'euros.
Toujours à l'article 35, l'amendement n° 9 majore de 30 millions d'euros les crédits du programme « Politique de la ville » afin de tirer les conséquences des modifications apportées en commission mixte paritaire à l'article 82, relatif aux zones franches urbaines.
Enfin, le principal ajustement porte sur la mission « Remboursements et dégrèvements ». Le Gouvernement a déposé un amendement n° 8 à l'article 35 qui tire les conséquences, sur le montant des crédits de cette mission, des amendements au projet de loi de finances rectificative pour 2008, adoptés à l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement dans le cadre du plan de relance. Il s'agit, d'une part, d'un amendement autorisant les entreprises à demander, au cours de l'année 2009, le remboursement immédiat de leur stock de créances liées au report en arrière de leurs déficits d'impôt sur les sociétés, et d'autre part, d'un amendement autorisant les entreprises à demander, au cours de l'année 2009, le remboursement de leur stock de créances liées au crédit d'impôt recherche.
Par ailleurs, dans cet amendement n° 8 , nous proposons de tirer les conséquences, dès aujourd'hui, du décret en Conseil d'État relatif à la mensualisation de la procédure de remboursement aux entreprises de leurs crédits de TVA, qui devrait être publié prochainement.
Au total, les trois mesures conduisent le Gouvernement, dans l'amendement n° 8 , à majorer les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » de 9,2 milliards d'euros.
En outre, cet amendement procède à la correction d'une erreur matérielle en minorant de 57 millions d'euros les dégrèvements de redevance audiovisuelle, afin de corriger une erreur et d'assurer la pleine cohérence avec les crédits inscrits sur le compte de concours financiers «Avances à l'audiovisuel ».
Enfin, avec l'amendement n° 24 , le Gouvernement vous propose de tenir compte, à l'article 34, article d'équilibre, des conclusions de la commission mixte paritaire ainsi que des dispositions du projet de loi de finances rectificative pour 2008 ayant un impact chiffrable sur l'équilibre du projet de loi de finances pour 2009.
Outre l'importante augmentation des remboursements et dégrèvements, et les divers ajustements mineurs de crédits que je vous ai indiqués, il convient de mentionner une minoration de 280 millions d'euros des recettes d'impôt sur le revenu du fait de la suppression, par la commission mixte paritaire, de l'assujettissement à l'impôt sur le revenu des indemnités journalières versées en cas d'accident du travail.
Enfin, nous tenons également compte de l'impact des dispositions du projet de loi relatif à l'audiovisuel. D'une part, la prise en compte de l'amendement voté par l'Assemblée conduit à réduire le taux de la taxe sur la publicité et à en minorer le montant attendu de 30 millions d'euros. D'autre part, le décalage de l'entrée en vigueur de la loi par rapport aux prévisions initiales conduit à minorer de 32 millions d'euros le produit attendu de la taxe sur les opérateurs de téléphonie.
Au total, le déficit s'établit à 67 milliards d'euros, 66, 986 milliards très précisément, soit une augmentation de 9,5 milliards d'euros par rapport au texte issu de la première lecture et de 14,9 milliards d'euros par rapport au projet initial du Gouvernement, compte tenu, pour l'essentiel, de la révision à la baisse des prévisions de croissance pour 2009 et des mesures fiscales du plan de relance de l'économie annoncé par le Président de la République.
Comme je vous l'ai indiqué, le volet budgétaire de ce plan fera l'objet d'un projet de loi de finances rectificative qui sera adopté, ce vendredi, en conseil des ministres, et devrait porter le déficit budgétaire à 76,3 milliards d'euros, 79,3 milliards d'euros si nous intégrons la dotation au fonds stratégique d'investissement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Compte tenu de la présentation générale de vos amendements, j'en déduis, monsieur le ministre, que vous souhaitez un vote global.
En effet, madame la présidente.
En application de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution, le Gouvernement demande à l'Assemblée de se prononcer par un seul vote sur l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission paritaire, modifié par les amendements qu'il vient de présenter.
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par les amendements n°s 10 , 12 , 11 , 13 , 16 , 17 , 18 , 19 , 20 , 21 , 22 , 23 , 15 , 6 rectifié , 14 , 2 , 7 , 3 , 4 , 1 , 5 , 9 , 8 et 24 .
(Le projet de loi de finances pour 2009 est adopté.)
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Discussion de la proposition de loi relative aux dérogations au repos dominical.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma