La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
Ma question s'adresse à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
La maladie d'Alzheimer constitue l'un des défis majeurs que doit relever notre société : il nous faut prendre en charge les malades de plus en plus nombreux, soutenir les familles financièrement et moralement, favoriser le maintien à domicile, mais aussi développer les accueils de jour, les accueils de nuit, les CANTOU, etc...
Joël Ménard a présenté un plan très complet et structuré. Qu'en est-il de sa mise en oeuvre ?
Les franchises médicales –au nom du Nouveau Centre, nous les avons critiquées, car elles ne responsabilisent pas nos concitoyens et reviennent en fait à taxer de 50 euros les patients atteints de maladies graves telles que le cancer, le sida ou la sclérose en plaques – doivent, en principe, rapporter 850 millions d'euros. Il était prévu que ces 850 millions participent au financement de la prise en charge de la maladie d'Alzheimer, des soins palliatifs et des urgences.
Certaines associations craignent aujourd'hui que cette somme se perde dans les comptes de l'assurance maladie et servent à réduire le déficit. Madame la ministre, pouvez-vous les rassurer et nous indiquer si ces 850 millions seront au moins partiellement reversés à la caisse autonomie pour financer le plan Alzheimer et quelle somme sera réservée aux soins palliatifs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Monsieur le député, vous avez raison de rappeler l'enjeu de santé publique que constitue la maladie d'Alzheimer. On dénombre 850 000 malades aujourd'hui, ils seront 1,250 million à l'horizon de 2020 : nous sommes bel et bien confrontés à un défi majeur.
À la fin du mois de janvier, le Président de la République a présenté un plan de 1,6 milliard de dépenses supplémentaires pour faire face à cette maladie.
Afin de financer le plan Alzheimer et les autres actions consacrées à l'Alzheimer, qui ne se réduisent évidemment pas uniquement à ces nouvelles dépenses, nous avions deux possibilités : soit augmenter les déficits, soit trouver des ressources nouvelles et des économies nouvelles pour flécher les crédits nécessaires vers cette maladie.
Grâce au système des franchises, nous avons pu, avec mon collègue Xavier Bertrand, augmenter l'ONDAM médico-social et donc les dépenses d'assurance maladie consacrées au médico-social. Vous le savez, monsieur Préel, pour être un des participants les plus actifs aux débats sur la loi de financement de la sécurité sociale : nous avons pu augmenter ces dépenses de près de 7 %, soit 600 millions de dépenses nouvelles pour la maladie d'Alzheimer.
Sur les 850 millions qu'ont rapportés les franchises médicales, 310 millions seront consacrés à l'Alzheimer et 540 millions aux deux autres priorités que sont le cancer et les soins palliatifs. Tels sont les premiers chiffres, monsieur le député, mais sachez que, à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, je préciserai euro par euro à quoi auront été consacrés les 850 millions de franchises. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse également à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Madame la ministre, ma question sera très courte. Elle concerne l'hôpital qui fait l'objet fréquemment, et de longue date, de critiques, mais aussi de motifs de satisfaction. Il est aussi évalué régulièrement par les médias grand public de manière parfois un peu contestable.
Chacun s'interroge sur l'avenir de l'hôpital, compte tenu des technologies médicales modernes, des besoins amplifiés de plus de sécurité et d'une croissance importante de la demande.
On évoque aussi un manque d'ambition, des difficultés d'exercice de la part des professionnels et un certain désenchantement du milieu hospitalier parfaitement décrit par notre collègue Couanau ; et ce alors que le plan Hôpital 2007, arrivé à son terme, est prolongé par le plan Hôpital 2012, l'un et l'autre positifs et bien reçus.
À la demande du Président de la République, la mission sur l'hôpital, conduite par le sénateur Gérard Larcher, vous a rendu son rapport définitif il y a quelques jours avec, semble-t-il, seize propositions qui vont permettre d'améliorer l'offre hospitalière sur tout le territoire national.
Il s'agit d'une réforme majeure, pragmatique, un véritable sang neuf apporté à la gouvernance. Elle est d'ailleurs soutenue par vos prédécesseurs de gauche comme de droite, par la FHF mais aussi la FHP et les praticiens hospitaliers. Cela mérite d'être souligné.
Je vous remercie, madame la ministre, de nous en donner les grandes orientations en matière d'efficience, de gouvernance et de complémentarité entre les divers secteurs hospitaliers, y compris privés et ambulatoires. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Monsieur le député, l'hôpital public est le joyau de notre système de santé. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Il mobilise chaque année un budget de 65 milliards d'euros, emploie un million de personnes et accueille chaque année 14 millions de patients dans ses services d'urgences.
L'hôpital, en particulier l'hôpital public, est confronté à des défis, que vous avez soulignés : essor des nouvelles technologies, qui requièrent des plateaux techniques de plus en plus développés et des équipes pluridisciplinaires ; vieillissement de la population ; crise dans la démographie médicale.
Afin de faire face à ces nouveaux défis, le Président de la République a confié à Gérard Larcher une mission prospective sur l'hôpital, dont je salue les travaux et dont les conclusions ont rencontré, vous l'avez dit, un très large consensus.
Le projet de loi de modernisation de la santé, que je vous présenterai à l'automne, reprendra un certain nombre de ces conclusions.
Première conclusion : il faut un patron à l'hôpital pour mettre en place le projet médical de l'hôpital et poursuivre la révolution qu'a constituée la gouvernance par pôles.
Deuxièmement, il faut rendre attractifs les métiers de l'hôpital et permettre la rémunération à l'acte d'une part de l'activité de certains praticiens hospitaliers si ces derniers le souhaitent. Il faut aussi valoriser les métiers paramédicaux, en particulier grâce à la mise en place du dispositif licence-master-doctorat.
Troisièmement, la communauté hospitalière de territoire permettra de mutualiser certains moyens en sauvegardant la structure hospitalière de proximité. Je l'ai dit et je le redis ici : aucun hôpital de proximité ne sera fermé, j'y veillerai ! Voilà les défis que nous allons relever ensemble, monsieur Door. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. François Hollande, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, les mauvais chiffres s'ajoutent aux mauvais chiffres. (« Oh ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) L'inflation vient de dépasser les 3 %. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
La consommation des ménages a reculé au mois de mars. Les mises en chantier de logements ont diminué de plus de 10 % au premier trimestre. La croissance de notre pays sera au mieux, disent les autorités européennes, de 1,5 %.
Nous sommes sous le coup d'un avertissement de Bruxelles pour déficit excessif. Le chômage vient de reprendre sa progression. Voilà l'état de l'économie française. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
L'indicateur du moral des Français vient d'atteindre son plus bas niveau historique.
Face à cette situation, votre ministre de l'économie et des finances ne cesse de répéter que tout va bien et qu'il y a pas de quoi nous inquiéter… C'est là plus qu'une erreur de communication : la révélation d'un mauvais pilotage de l'économie. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
C'est la question des prix et du pouvoir d'achat qui empêche nos concitoyens de retrouver confiance. Or votre décision d'augmenter, demain, le prix du gaz de 5,5 % – après les 4 % du mois de janvier, portant l'augmentation à 10 % – est une mauvaise nouvelle de plus pour les Français, en particulier pour les 8 millions qui se chauffent au gaz, sachant que le tarif social, qui n'est d'ailleurs toujours pas mis en oeuvre, ne concerne que 10 % d'entre eux.
Face au retour de l'inflation, monsieur le Premier ministre, je vous fais trois propositions à effet immédiat. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Première proposition : la baisse du taux de TVA sur les produits de première nécessité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Deuxième proposition : la mise en oeuvre – enfin – du chèque transport pour les salariés de notre pays, pour compenser la hausse du prix des carburants. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. -Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Troisième proposition : le gel du prix du gaz dès demain matin.
Et pour financer ces trois mesures, je propose d'annuler partiellement le paquet fiscal. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) La meilleure façon d'effacer une erreur, c'est d'en supprimer la cause ! Supprimez le paquet fiscal, monsieur le Premier ministre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur Hollande, vous voulez supprimer la défiscalisation des heures supplémentaires pour les ouvriers et les salariés (Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) qui ont souffert des trente-cinq heures et du blocage des salaires !
Vous évoquez les chiffres du chômage, comme si vous vous réjouissiez qu'il y ait une augmentation ce mois-ci (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.- Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.), alors que nous l'avons ramené à un taux que vous n'avez jamais réussi à atteindre ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Vous évoquez la consommation dans notre pays, qui se tient aujourd'hui relativement bien malgré une crise économique internationale. (Mêmes mouvements.)
Vous évoquez la croissance dans notre pays, qui se situe aujourd'hui dans la moyenne de celle des pays de la zone euro. (« Non ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Et vous proposez, pour faire face aux difficultés que nous rencontrons, des solutions qui n'existent pas, des solutions virtuelles !
Reprenons-les : vous nous proposez un taux de TVA réduit sur les produits de première nécessité. Mais c'est déjà le cas, monsieur Hollande ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Les produits de première nécessité bénéficient déjà d'un taux de TVA réduit ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Vous nous proposez de mettre en place un chèque transport qui a été un échec total (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche) et qui est contraire à tout ce que nous essayons, avec Jean-Louis Borloo, de mettre en oeuvre pour changer les comportements dans notre pays et faire face sérieusement au problème du réchauffement climatique. C'est tout à fait typique du débat entre nous : pendant des années, vous vous êtes parés des habits de la lutte pour l'environnement, mais qu'avez-vous fait ? Peu de chose ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Nous, avec le Grenelle de l'environnement, nous avons réussi à trouver avec la société française un accord qui nous permettra de franchir des étapes significatives dans la lutte contre le réchauffement climatique. (Mêmes mouvements.)
Vous avez réussi à généraliser les OGM ! Voilà ce que vous avez réussi !
Quant au prix du gaz, voulez-vous vraiment que le contribuable subventionne le gaz dans notre pays ?
Vous refusez l'évidence : le prix du gaz, que nous achetons à l'étranger, est lié à celui du pétrole. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La vérité, c'est que le parti socialiste n'a que deux discours : un discours conservateur – il est contre toutes les réformes que nous proposons – et un discours démagogique à l'égard des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Nouveau Centre.)
Le Gouvernement et la majorité sont fiers des cinquante-cinq réformes d'ores et déjà votées ou engagées dans notre pays. Vous, vous n'avez aucune raison d'être fiers ni de votre conservatisme ni de votre démagogie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le Premier ministre, vous êtes en pleine forme ! Ce que les Français savent moins, c'est que vous êtes un affectif et que vous aimez faire des cadeaux : les plus gros aux plus riches et des petits aux plus pauvres (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) : 15 milliards pour les privilégiés, seulement 25 millions pour les plus modestes ! Ainsi M. Forgeard, l'ancien patron de EADS, responsable de 10 000 suppressions d'emplois, est parti avec un chèque de plus de 8 millions d'euros. La riche héritière des Galeries Lafayette avait payé plus de 8 millions d'euros d'impôts ? Vous lui avez rendu 7,7 millions. Le patron de la Société générale perd 5 milliards d'euros sans le savoir ? Il est toujours en place ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
En face, les conditions de vie se détériorent, les produits de base coûtent de plus en plus chers, des émeutes de la faim éclatent ici et là dans le monde parce que les agrocarburants chassent les cultures vivrières et provoquent l'augmentation des prix alimentaires, tant et si bien que le blé, le riz, le maïs, le lait, la viande sont devenus inabordables. Chez nous, monsieur le Premier ministre, nous avons connu au mois de mars une augmentation des prix de plus de 3,2 % provoquée par la hausse des prix des produits alimentaires. Il est temps de réagir. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le Premier ministre, vous avez une occasion exceptionnelle, puisque nous allons présider l'Union européenne à partir du 1er juillet. Grâce au président de l'Assemblée nationale, nous avons rencontré avant-hier, à Dresde, des membres du bureau du Bundestag ? Deux vice-présidents nous ont demandé quelles étaient les priorités sociales de la présidence française.
Monsieur le Premier ministre, nous avons une proposition : pour améliorer le niveau de vie et le pouvoir d'achat non seulement des Français mais des centaines de millions d'Européens qui connaissent des fins de mois difficiles, ramenez à zéro le taux de la TVA sur les produits alimentaires et les médicaments. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le Premier ministre, nous allons présider l'Union ; prenez une mesure de justice sociale, une mesure qui fera honneur à la France.
Pour répondre à la préoccupation de nos collègues allemands, après vous être occupé des riches, allez-vous vous occuper des gens modestes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La parole est à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement.
Que de raccourcis, que de caricatures, que de démagogie !
Monsieur Brard, dois-je vous rappeler que la politique économique du Gouvernement est d'abord fondée sur un principe simple : la revalorisation du travail ? (Exclamations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Le Gouvernement veut que les salariés puissent mieux bénéficier des profits des entreprises. C'est pourquoi il a mis en place cette année la défiscalisation d'une prime de fin d'année de 1 000 euros dans les petites et moyennes entreprises. C'est pourquoi il proposera un texte en faveur du développement de la participation et de l'intéressement. C'est pourquoi le Président de la République promeut une règle simple des trois tiers de répartition des bénéfices.
Un tiers pour l'investissement de l'entreprise, un tiers pour les actionnaires et un tiers pour l'intéressement des salariés.
Par ailleurs, le Gouvernement a lancé depuis l'été une trentaine de mesures très fortes. L'objectif est double. D'une part, agir sur les revenus : lorsqu'un salarié qui gagne le SMIC travaille quatre heures supplémentaires par semaine, il touchera à la fin de l'année, le Premier ministre l'évoquait tout à l'heure, deux mois de salaire supplémentaires, ce qui représente bien une augmentation de son pouvoir d'achat. D'autre part, agir sur les prix, grâce à au projet de loi de modernisation de l'économie, que j'espère vous voterez.
Cette loi permettra une baisse des prix à la consommation. On ne peut pas à la fois réclamer des baisses de prix et ne pas accepter des mécanismes nouveaux qui permettront d'aligner nos prix sur ceux qui sont pratiqués partout ailleurs en Europe.
Mais de grâce, monsieur Brard, pas d'amalgame, pas de démagogie ! Le Gouvernement est mobilisé tout à la fois sur une politique juste de répartition des profits et sur une politique de lutte en faveur du pouvoir d'achat. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.C'est mou !
La parole est à M. Patrice Debray, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.), je suis souvent interpellé par de nombreuses entreprises de ma circonscription sur les délais de paiement qu'elles connaissent – ou subissent – de la part de leurs donneurs d'ordre. La situation est parfois dramatique, notamment pour les plus petites, et les chefs d'entreprise ont le sentiment, souvent à juste titre, de servir de variable d'ajustement en matière de trésorerie. La réalité, c'est qu'en France, les délais de paiement figurent parmi les plus longs d'Europe : nous sommes en moyenne à soixante-sept jours, soit vingt jours de plus qu'en Allemagne et trente jours de plus que dans les pays scandinaves.
La loi de modernisation de l'économie qui vient d'être présentée en conseil des ministres par Christine Lagarde prévoit de nouvelles mesures qui viendront encadrer ces délais afin de préserver la compétitivité des entreprises, notamment les plus petites. Les délais seront désormais ramenés à quarante-cinq jours fin de mois. Je ne peux que m'en féliciter, comme l'ensemble de mes collègues.
Reste néanmoins la question des délais de paiement dans le cadre de la commande publique. Nous sommes tous sur ces bancs attentifs à l'exemplarité de l'État, à plus forte raison quand cela impacte directement le développement de nos entreprises. Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le secrétaire d'État, quelles sont les intentions du Gouvernement en la matière ?
La parole est à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement.
Vous avez raison, monsieur Debray, l'État et les administrations sont souvent les mauvais élèves en matière de délais de paiement alors qu'ils devraient montrer l'exemple. L'État doit davantage aider les entreprises plutôt que leur mettre la tête sous l'eau. L'enjeu est vital pour les petites et moyennes entreprises, étranglées par le manque de trésorerie et des frais financiers énormes.
Le Premier ministre a annoncé avant-hier à Dijon que les délais de paiement maximaux des marchés publics de l'État allaient être ramenés de quarante-cinq à trente jours. C'est une mesure très importante et deux décrets sont parus hier au Journal officiel sur ce sujet.
Ces mêmes décrets ont fortement augmenté le taux des intérêts moratoires qui seront dus lorsque le délai de paiement n'aura pas été respecté. Ils prévoient en outre que ces intérêts de retard seront automatiquement versés aux entreprises sans qu'elles aient à en faire la démarche, ce qui est une réelle simplification.
Le Premier ministre a évidemment souhaité que ces pratiques s'étendent à l'ensemble des collectivités locales ; une démarche de concertation va s'engager entre Christine Lagarde, Hervé Novelli, Michèle Alliot-Marie et les représentants des collectivités locales concernées, car il nous faut aller vers des systèmes de paiement plus rapides et qui permettent un accès à la commande publique plus facile pour l'ensemble des PME de notre pays. C'est dire si le Gouvernement est mobilisé sur ce sujet.
Le projet de loi de modernisation de l'économie prévoit par ailleurs une réduction des délais de paiement de l'ensemble des entreprises : ils seront abaissés à soixante jours et des négociations par branche seront possibles pour aller encore plus loin.
Vous le voyez, nous avons vraiment pris en considération une demande qui était très pressante. Sur ce sujet, l'État se doit effectivement d'être exemplaire. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. André Wojciechowski, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. – Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.), que ce soit avec la mise en place du RSA, la reconduction de l'aide à la cuve ou encore l'exonération de la redevance télévisuelle pour un certain nombre de nos concitoyens, la majorité a à coeur de faire en sorte que les Français, tous les Français, notamment les plus modestes et les plus en situation de précarité, trouvent toujours une main tendue. Martin Hirsch l'a expliqué hier, le Premier ministre Fillon l'a confirmé tout à l'heure, le pouvoir d'achat doit être le problème de tous les politiques – ce devrait être le cas aussi de M. Hollande, s'il pouvait faire des propositions sérieuses.
Au moment où le coût des énergies flambe – je pense notamment au pétrole qui atteint les 120 dollars le baril, ce qui a un impact sur les prix des autres énergies dont le gaz – notre majorité a tenu à ce que soit mis en place un tarif social du gaz, sur le modèle de celui qui existe pour l'électricité.
Le Président de la République a indiqué, lors de son entretien télévisé de la semaine dernière, que personne ne serait laissé au bord du chemin. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous préciser les modalités d'application de ce tarif social du gaz et la rapidité avec laquelle vous allez le mettre en place ? Le Gouvernement avait annoncé qu'un décret pour l'instauration de ce tarif social serait publié incessamment, mais il n'a toujours pas vu le jour. Stoppons la valse des étiquettes. C'est un défi que nous devons relever ensemble, en confiance avec le Gouvernement et pour le contribuable français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur Wojciechowski, comme l'a indiqué tout à l'heure le Premier ministre, les cours du gaz sont indexés sur le prix du baril de pétrole et le Gouvernement a souhaité, monsieur Hollande, que la situation des moins favorisés soit prise en compte.
Christine Lagarde et Jean-Louis Borloo ont saisi le conseil d'État d'un projet de décret qui permettra la mise en oeuvre, à partir du 1er juillet prochain, d'un tarif social du gaz que la majorité a souhaité adopter.
Ce tarif social du gaz sera accessible aux titulaires de la couverture maladie universelle, ce qui représente 750 000 foyers, et automatiquement aux personnes qui bénéficient déjà du tarif social de l'électricité. Il sera proposé à tous les fournisseurs sans aucune distinction ni exception. Pour une famille nombreuse qui se chauffe au gaz, l'économie sera de l'ordre de 100 euros par an en année pleine.
Vous voyez, monsieur le député, cette disposition témoigne de l'attention du Gouvernement à destination des ménages les plus modestes sur le sujet de l'énergie où nous avons déjà agi, puisque l'aide à la cuve de fioul, d'un montant de 150 euros, a été accordée à plus de 680 000 ménages. Je rappelle en outre que dans le projet de loi de modernisation de l'économie figurent des mesures qui permettront d'abaisser les prix à la consommation grâce à une plus grande concurrence.
Vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement a fait un choix, il souhaite aider les familles les plus modestes, celles qui sont les plus victimes de cette hausse des matières premières et de cette augmentation du prix du gaz.
Le tarif du gaz sera une réalité dès le 1er juillet prochain. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Pierre Moscovici, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Le Président de la République, en visite officielle en Tunisie, a déclaré lors d'un dîner offert par le Président Ben Ali : « Aujourd'hui, l'espace des libertés progresse en Tunisie ».
Monsieur le Premier ministre, la Tunisie est un pays ami. Son bilan économique est l'un des plus brillants parmi les pays du Maghreb : sa classe moyenne se développe, la lutte contre la grande pauvreté est efficace, le statut de la femme y est en progrès, son taux de croissance est solide. Ces aspects sont incontestablement positifs.
Mais comment peut-on affirmer décemment que l'espace des libertés progresse en Tunisie alors que, depuis vingt ans, le régime est régulièrement épinglé par les ONG pour ses violations des droits de l'homme, alors que des actes de torture ont été récemment dénoncés par les Nations unies, alors que les militants des droits de l'homme sont traqués, alors que la censure est partout, alors qu'une mission de la Fédération internationale des droits de l'homme a été interdite d'entrée dans le pays pas plus tard que la semaine dernière (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), alors que les opposants politiques sont bâillonnés pendant que l'on installe un président à vie qui, à chaque mandat, obtient des scores hallucinants ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur quelques bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) C'est une contre-vérité absolue que de prétendre cela ! Pourquoi Nicolas Sarkozy en a-t-il rajouté, trahissant ainsi les démocrates tunisiens ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je m'étonne de votre surprise. En tout cas, nous ne la partageons pas.
Après la visite consternante du colonel Kadhafi reçu en grande pompe à Paris, après les félicitations adressées à Vladimir Poutine à la suite d'élections législatives qui n'ont été ni justes ni libres, après les très molles protestations contre les violations des droits de l'homme en Chine ou la répression au Tibet, on ne peut plus parler de tâtonnements ou d'erreurs de début de mandat. C'est une démarche volontaire, délibérée, consentie d'ignorer superbement la question des droits de l'homme dans nos relations avec les pays étrangers.
Le Président de la République avait critiqué la Realpolitik. Il avait promis une politique des droits de l'homme. Il avait même osé dire : « il n'y a pas de politique étrangère sans morale ». Nous sommes aujourd'hui très loin de ces promesses ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le Premier ministre, ma question est simple : croyez-vous vraiment que l'espace des libertés progresse en Tunisie ? N'est-il pas de votre devoir de dire la vérité, de dénoncer, contrairement à la complaisance du Président de la République, les violations quotidiennes des droits de l'homme en Tunisie et dans le monde ? C'est ainsi, et seulement ainsi, que la France serait elle-même et qu'elle serait à nouveau écoutée ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La parole est à M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État chargé des affaires européennes.
Monsieur Moscovici, ne comptez pas sur moi pour polémiquer sur un sujet aussi important à mes yeux. Je vous répondrai sur trois points.
Tout d'abord, la Tunisie n'est pas la Corée du Nord. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Faire une telle comparaison, c'est caricaturer la situation d'un pays ami de la France où des responsables politiques de tous bords se rendent ou se sont rendus régulièrement.
Ensuite, nous n'avons jamais caché que la France souhaitait qu'une évolution politique accompagne désormais les succès du développement économique et social, les progrès sur le statut de la femme ou la tolérance religieuse. Cette ouverture, c'est aux Tunisiens eux-mêmes d'en fixer le rythme, le contenu, les modalités, mais elle est aujourd'hui indispensable et possible.
En disant cela, je ne fais que reprendre mot pour mot ce que disait Hubert Védrine, alors ministre des affaires étrangères, devant cette assemblée, et M. Moscovici s'en souvient parfaitement ! Qu'il y ait des insuffisances et des progrès à faire, personne ne le conteste, mais ce n'est pas en les stigmatisant, en s'érigeant en donneur de leçons que l'on fait avancer les choses ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Le Président de la République a parlé de la nécessité d'élargir les libertés et la question des droits de l'homme a été abordée durant cette visite par Rama Yade notamment.
Enfin, et c'est le plus important, c'est par le renforcement des liens avec l'Union européenne et les exigences en matière de droits de l'homme que ce dialogue impose, c'est par la construction d'une Union pour la Méditerranée que nous ferons progresser l'État de droit. Telle est l'ambition de tous les démocrates, la vôtre comme la nôtre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à M. Jean-François Chossy, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. J'y associe mes collègues Valérie Rosso-Debord et Gérard Cherpion, qui ont travaillé avec moi sur le sujet dans le cadre d'une mission qui nous a été confiée par le président Copé.
Madame la secrétaire d'État, les nombreuses associations que nous avons rencontrées souhaitent voir reconnaître au polyhandicap sa spécificité. En effet, le polyhandicap n'est pas le multihandicap, ou deux ou trois handicaps à la fois : c'est un handicap bien particulier, qui entraîne une grande dépendance nécessitant un accompagnement constant tout au long de la vie, à chaque minute de la vie. Nous avons mis en évidence le manque de professionnels qualifiés et de formation, tant pour les professionnels que pour les accompagnants « naturels » – les parents, la maman, le plus souvent, qui reste au chevet de l'enfant, de l'adolescent sans savoir vraiment, si ce n'est ce qu'elle a appris « sur le tas », ce qu'il faut faire pour l'accompagner dans les meilleures conditions.
Le 10 juin prochain se tiendra la Conférence nationale du handicap, conformément à la loi du 11 février 2005, et j'espère bien que vous pourrez, dans ce cadre, nous présenter un plan « polyhandicap », comme vous allez probablement nous présenter bientôt un plan pour les autistes, plan susceptible d'apporter des réponses concrètes à des préoccupations qui sont extraordinaires.
Outre le manque de personnels, il y a également un manque de places en établissements spécialisés. L'accompagnement des polyhandicapés passe par un suivi constant. Alors que faire ? Faut-il créer un statut de la personne polyhandicapée ? Faut-il une charte reconnaissant sa spécificité ? Faut-il, au contraire, comme je le crois, mettre en place un plan performant qui permette à la fois de flécher les financements, d'identifier les places en établissement, de créer des places d'accueil temporaire, qui permette en tout cas de créer, par la solidarité, ce qui aujourd'hui est encore considéré avec compassion ou émotion. C'est de solidarité nationale qu'il s'agit. C'est l'essence même de votre ministère, de votre travail. Je compte sur vous, madame la secrétaire d'État, pour apporter les bonnes réponses à ces questions compliquées ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité.
Monsieur Chossy, je m'adresserai aussi à Mme Rosso-Debord et à M. Cherpion, qui vous ont accompagné dans ce remarquable travail parlementaire. Celui-ci sera une aide très précieuse pour le comité de suivi de la mise en oeuvre de la loi sur le handicap, dans le cadre de la préparation de la conférence du 10 juin.
Vous avez raison de dire qu'il nous faut absolument aborder la question du polyhandicap de façon spécifique, car nous avons affaire à une situation qu'il faut prendre en charge dans sa globalité, sous tous ses aspects. Sans dévoiler ce qui sera présenté le 10 juin ni préjuger des contributions du comité de suivi, je peux d'ores et déjà vous donner quelques orientations.
Tout d'abord, la création de places dédiées aux polyhandicapés est une priorité pour le Gouvernement. Celui-ci est en train de finaliser un plan pluriannuel de création de places dans lequel seront réservées, fléchées comme vous l'avez dit, un certain nombre de places pour les personnes polyhandicapées.
Ensuite, nous nous attacherons à tous les aspects d'une prise en charge de qualité : formation, projet d'établissement, plateau technique. Nous sommes en train de sortir un décret spécifique pour les adultes poly-handicapés, qui manquait alors qu'il existe pour les enfants. Ce décret a reçu un avis favorable du Conseil consultatif des personnes handicapées et il sortira dans les jours qui viennent.
Par ailleurs, nous travaillons sur une tarification qui serait délivrée en fonction de la lourdeur du handicap. C'est un sujet essentiel pour le polyhandicap.
Enfin, dernier point important à mes yeux, au-delà de la simplification des démarches pour les familles, qui fait l'objet d'un travail avec les maisons départementales pour les personnes handicapées, nous allons nous investir pleinement, avec Xavier Bertrand et Nadine Morano, dans l'accueil des enfants handicapés en crèche. La petite enfance est un sujet qui est au coeur de nos préoccupations. La CNSA et de la CNAF nous remettront fin mai les conclusions de leur travail remarquable sur ce thème. Cela nous permettra d'alimenter une véritable politique du droit opposable à la garde d'enfants qui n'exclue personne, et certainement pas les enfants handicapés. Vous le voyez, les objectifs sont ambitieux ! Ils nous passionnent ; ils nous motivent. Cette question du handicap mérite votre soutien à tous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. François Vannson, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Elle concerne la question des dons d'organes, et en particulier des greffes de coeur.
Le 27 avril 1968, le professeur Cabrol réalisait la première transplantation cardiaque en France. Ce fut une fierté nationale et le début d'une incroyable aventure. Or, force est de constater que, quarante ans plus tard, en dépit de l'excellence de nos chirurgiens, un nombre croissant de malades reste malheureusement en attente d'une greffe d'organe.
En 2006, plus de 12 400 personnes ont eu besoin d'une greffe pour mieux vivre, ou tout simplement pour survivre. Ce nombre augmente chaque année du fait non seulement de l'allongement de la durée de vie, mais aussi, il convient de le souligner, d'un manque de greffons.
Face à cette situation de pénurie que connaît notre pays, il me semble indispensable de familiariser l'opinion à ces questions sensibles et de favoriser les échanges sur les souhaits de chacun. L'objectif est de faire en sorte que les familles, lorsqu'elles seront confrontées à ces situations difficiles, puissent prendre leur décision en toute sérénité.
Madame la ministre, parce que le drame de la mort peut aussi, grâce au savoir de médecins dévoués, devenir une source de vie pour des malades en situation critique, j'aurais aimé connaître les décisions concrètes que vous avez l'intention de prendre afin d'augmenter le nombre de greffes et d'améliorer la qualité des greffons prélevés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Monsieur Vannson, le don d'organes, de gamètes, de tissus ou d'éléments du sang est un don de soi et un acte de solidarité. Je tiens donc à saluer l'action de nombreuses associations qui oeuvrent en ce sens. Je pense notamment à celles qui encouragent le don de plaquettes et sauvent ainsi des enfants atteints de leucémie. Je participerai d'ailleurs le 18 mai, peut-être avec certains d'entre vous, à la Journée de mobilisation pour le don de plaquettes avec l'association Laurette Fugain. Les principes de notre législation en la matière sont les suivants : le consentement présumé – chacun est réputé être d'accord pour le don d'organe, à moins qu'il ait inscrit son nom dans le registre tenu par l'Agence de biomédecine –, la gratuité et l'anonymat.
Les dons d'organes, d'éléments tissulaires et de cellules ont augmenté de près de 40 % entre 2000 et 2006. On compte vingt-cinq donneurs pour un million d'habitants en France, ce qui est relativement important, mais encore très inférieur à ce que l'on peut constater par exemple en Espagne – trente-quatre donneurs pour un million d'habitants. Il faut donc informer sur le don d'organes, en parler, et nous avons déjà lancé des opérations en ce sens. Il faut aussi améliorer les possibilités de dons, que ce soit à partir des donneurs vivants, qui ne représentent que 9 % des dons d'organes, proportion qui pourrait être portée à 30 %, des donneurs décédés à coeur battant.
Permettez-moi enfin de saluer les chirurgiens préleveurs et de rendre hommage à la mémoire de ceux qui sont décédés dans le tragique accident de Besançon.
J'ai tenu à ce qu'une assurance spéciale couvre les chirurgiens préleveurs. De ce fait, leurs familles auront droit à un capital décès et leurs enfants à une rente éducation. L'ensemble des chirurgiens préleveurs sera couvert par une assurance souscrite par mon ministère.
Je salue enfin la remarquable école lyonnaise, comme vous l'avez fait vous-même au début de votre intervention, qui a réussi le superbe exploit que représente la greffe d'une partie de la face. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. Hervé Féron, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, la branche famille du projet de loi de financement de la sécurité sociale est financièrement bénéficiaire et doit être garante de la solidarité nationale. Pourquoi, alors, se servir dans cette caisse, si ce n'est pour réparer vos erreurs volontaires comme le paquet fiscal de 15 milliards d'euros voté l'été dernier ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Pourquoi déstabiliser les politiques familiales ?
Quand nous dénonçons la baisse des allocations familiales, la secrétaire d'État à la famille répond que le mensonge est énorme et que le débat a déjà eu lieu. De fait, rapporteur du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour la branche famille, j'avais annoncé dans ce même hémicycle, dès le 7 novembre 2007, que les exercices d'équilibriste du Gouvernement allaient entraîner la perte sèche de 80 millions d'euros en année pleine pour les familles, 80 millions qu'il cherche maintenant à économiser en reportant la majoration des allocations familiales de l'âge de onze ans à celui de quatorze ans !
Alors que ma question s'adressait au Premier ministre, c'est le ministre du travail qui m'avait répondu en affirmant que rien ne serait changé…
…et en recourant à l'attaque personnelle à défaut d'argumentation.
Aujourd'hui, on sait qu'il y a eu tromperie : le ministre est pris la main dans le pot de confiture ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Cette baisse était écrite noir sur blanc dans l'annexe 9 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008.
À présent, la secrétaire d'État nous assure qu'il s'agit d'un rééquilibrage à quatorze ans et que les familles ne perdront rien, voire qu'elles auront plus. C'est faux ! La réforme induira un manque à gagner de 586,56 euros par enfant, puisque la perte entre onze et quatorze ans sera plus importante que le gain entre quatorze et seize ans. Un enfant de onze ans pourrait faire le calcul !
Votre vision des politiques familiales est purement comptable. Votre but est l'économie et non plus l'aide aux familles. Vous avez la volonté de briser un des piliers de la solidarité nationale. Mais, monsieur le Premier ministre, savez-vous ce qu'est la douleur des parents quand ils font les courses familiales et que le prix du caddie augmente ?
Allez-vous abandonner ces attaques hasardeuses faites aux familles, comme vous avez reculé sur la carte « famille nombreuse » ? Avez-vous encore une politique familiale cohérente, visible et solidaire ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille.
Monsieur le député, c'est vous, en vérité, qui êtes pris les mains dans le pot de confiture (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), tout simplement parce que votre vision de la famille est idéologique !
Dois-je vous rappeler qu'en 1998, sous le gouvernement Lionel Jospin, c'est vous qui vous êtes attaqués aux allocations familiales, que vous vouliez mettre sous conditions de ressources ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Dois-je vous rappeler que vous vous êtes attaqués au quotient familial, pénalisant ainsi 400 000 familles ? Dois-je vous rappeler que vous vous êtes attaqués aussi à l'allocation de garde d'enfant à domicile, ce qui n'a eu pour conséquence que de développer le travail au noir ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Notre vision de la politique familiale n'est pas idéologique, comme la vôtre, mais pragmatique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Quel objectif poursuivons-nous, Xavier Bertrand, Valérie Létard et moi-même ? C'est tout simplement de respecter les engagements du Président de la République, parce que nous devons répondre aux besoins des familles. Or une étude du CREDOC, qui date de 2006, rappelle que, depuis 1990, plus de 70 % des familles demandent des services et des équipements.
Pour leur permettre de concilier vie familiale et vie professionnelle, notre objectif est de fournir aux parents les équipements dont ils ont besoin. Ainsi, nous devons créer 400 000 places de garde d'enfants. Vous parlez de pouvoir d'achat (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine), mais le plus important, en la matière, n'est-il pas d'avoir un travail ? C'est pour cela que nous voulons créer ces places.
Quant au rééquilibrage des aides, à l'adolescence, dois-je vous rappeler aussi, puisque vous semblez l'oublier, que les études du CREDOC, celles de l'INSEE et le rapport de la Cour des comptes nous ont demandé d'apporter plus ? C'est pourquoi les aides versées à l'âge de quatorze ans ne seront pas alignées sur celles qui l'étaient à onze, mais à seize ans. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) La majoration interviendra à un âge qui représente le seuil de l'adolescence et à un moment où les familles ont davantage de besoins. Vous le voyez : pour nous, la politique familiale doit s'entendre d'une manière globale.
Mais, puisque vous réclamez sans cesse de l'aide pour les familles les plus modestes, pourquoi ne rappelez-vous pas, monsieur le député, que nous venons de signer un décret…
…qui permettra à 62 000 familles modestes de percevoir 50 euros de plus par mois, soit 600 euros de plus par an ? Un budget de 60 millions d'euros assurera aux familles modestes un complément de gain familial. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Pour vous, l'aide aux familles modestes, c'est « paroles, paroles » ; pour nous, c'est toujours de l'action. (Huées sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.– Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Gérard Millet, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à Éric Besson, secrétaire d'État chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le secrétaire d'État, à la demande du Premier ministre, vous avez lancé la semaine dernière un exercice de diagnostic stratégique appelé « France 2025 », qui constitue une réflexion sur ce que sera notre pays dans quinze à vingt ans.
C'est la première fois depuis 1992, c'est-à-dire depuis l'abandon du Plan, que la France se livre à une réflexion stratégique. Nous nous en réjouissons car, pour se réformer, pour se transformer, notre pays a besoin de se projeter dans l'avenir et de tenir compte de l'évolution du monde. Nous avons besoin de cette vision prospective : ainsi que le montre un article paru à l'été 2007 dans la revue de l'Université de Harvard, les pays les plus compétitifs sont ceux qui consacrent le plus d'attention à la stratégie. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Concrètement, pouvez-vous nous dire comment sera conduit ce diagnostic stratégique ? Les partenaires sociaux et les parlementaires y seront-ils associés ? Quand pensez-vous proposer au Premier ministre les résultats de vos travaux ? Enfin, quelles premières conclusions tirez-vous du document que vous venez de rendre public sur l'état des lieux de la France en 2008 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Aucunes !
La parole est à M. Éric Besson, secrétaire d'État chargé de la prospective, de l'évaluation des politiques publiques et du développement de l'économie numérique. (Vives exclamations et huées sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le député, vous avez eu raison… (Huées sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Mes chers collègues, je vous demande un peu de respect. Dans cet hémicycle, chacun doit pouvoir s'exprimer, les membres du Gouvernement comme les députés.
Vous avez eu raison, monsieur le député, de souligner que les pays les plus compétitifs – le Canada, le Danemark, la Finlande, le Royaume-Uni – sont ceux qui ont su, grâce à la prospective, s'adapter à la mondialisation et anticiper les réformes nécessaires en associant leurs concitoyens à la nécessité du mouvement. (Exclamations continues et huées sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
L'exercice France 2025vise à permettre à notre pays de s'adapter à la mondialisation, de renforcer sa compétitivité, tout en maintenant un haut niveau de protection sociale. (Exclamations et huées ininterrompues sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le secrétaire d'État, permettez-moi de vous interrompre un instant.
Mes chers collègues, convenons que chacun a le droit de s'exprimer dans cette enceinte. (Chahut sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Je vous demande, une fois qu'une question a été posée, d'écouter la réponse du Gouvernement.
Tous les parlementaires ont reçu ou vont recevoir aujourd'hui un document qui permet de dresser un état des lieux de la France en 2008, auquel nos concitoyens peuvent accéder sur le site du Premier ministre ou sur le sitewww.prospective.gouv.fr. Il s'agit d'un tableau de l'état de notre pays, de nos forces et de nos faiblesses.
Pour répondre très concrètement à votre question, avant le fruit de notre réflexion au Premier ministre, à la fin de l'année, nous allons travailler pendant six mois avec les parlementaires, avec des experts et avec tous les partenaires sociaux, puisque tous ont accepté de s'associer à notre démarche. Nous allons tenter de bâtir ensemble des scénarios, des pistes de réforme ou d'adaptation, pour que, en 2025, la France soit à la fois forte et solidaire. (« À la soupe ! » et huées continues sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Nous allons donc entreprendre ce que les Britanniques, les Finlandais et les Danois font régulièrement, tous les quatre ans en moyenne, et nous garderons à l'esprit la formule de Tony Blair (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche) : « La mondialisation est une chance pour les pays en mouvement, un risque pour les pays immobiles. » Nous devons mettre la France en mouvement.
Encore un mot, si vous me le permettez, monsieur le président : j'ai vu François Hollande appeler à l'instant les députés socialistes à réagir. (Protestation de M. François Hollande.) Ce n'est tout de même pas une citation de Tony Blair qui l'a mis dans cet état !
Vous venez, mes chers ex-camarades (Huées ininterrompues sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.– Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), de découvrir, quarante ans après les Allemands, l'économie sociale de marché. (Mêmes mouvements.) Rassurez-vous, monsieur Hollande : dans vingt-cinq ans, les députés de votre groupe accepteront peut-être la prospective et la stratégie. Tel est le rythme auquel progresse aujourd'hui le parti socialiste ! (Les députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire se lèvent et applaudissent. – Tumulte et claquement de pupitres sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche quittent l'hémicycle.)
La parole est à Mme Jeanny Marc, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse au premier des ministres, quand bien même je sais que, peut-être, il ne daignera pas me répondre. Pourtant, toutes les familles de France et d'outre-mer ne manqueront pas de prêter une oreille attentive au sujet sur lequel je veux interpeller avec solennité le Gouvernement.
Le pouvoir d'achat des Français s'érode incontestablement Pourtant, dans un contexte auquel vous n'osez pas donner le nom de rigueur et d'austérité, les familles, particulièrement les plus modestes, voient le Gouvernement mettre, une fois de plus, sans vergogne, la main dans leur portefeuille. En effet, après l'assaut contre la carte « famille nombreuse », sans discussion, sans concertation, sans négociation, le montant des allocations familiales est désormais diminué, depuis hier, du fait de la publication de deux décrets qui ont instauré la majoration unique de ces allocations à l'âge de quatorze ans à compter du 30 avril 2008.
Chaque famille comprendra aisément que les allocations auxquelles elle peut prétendre vont bel et bien diminuer de 600 euros par enfant et par an ; 138 millions d'euros seront ainsi économisés sur leur dos ! Sur ces économies, seuls 90 millions seraient réinjectés en faveur des familles ayant des enfants en bas âge. Ce sont donc 48 millions de pertes sèches que vous infligez aux familles.
Oui, mesdames et messieurs de la majorité, vous aviez dit aux Français, pendant la campagne présidentielle : « Ensemble, tout devient possible. » J'ajouterai : même dépouiller les familles, singulièrement les plus modestes, vous est aussi possible ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Nos concitoyens admettent de moins en moins que l'on modifie la politique familiale de notre pays, comme on faisait autrefois avaler l'huile de foie de morue aux enfants, en faisant diversion entre chaque cuillerée. Vous vous attaquez aujourd'hui aux allocations familiales, expression d'une solidarité encore perceptible outre-mer. Demain, viendra le tour de l'allocation de rentrée scolaire, et j'en passe.
Monsieur le Premier ministre, je vous demande de considérer l'inquiétude des familles de France, qui ont le moral au plus bas, sans oublier celles qui résident outre-mer, et d'accepter de retirer ce décret qui pénalise les enfants de tous les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille.
Madame Jeanny Marc, je voudrais vous le dire avec beaucoup de solennité : l'outre-mer, et singulièment la Guadeloupe, est aussi une préoccupation constante de la politique familiale du Gouvernement.
Dans le cadre de cette politique, nous avons décidé de mettre en place l'engagement du Président de la République relatif au droit opposable à la garde d'enfant, et nous venons de débloquer cinquante millions d'euros afin de créer, d'ici à la fin de l'année 2008, quatre mille places de crèche supplémentaires. Nous réfléchissons ainsi à l'accompagnement des familles, car il faut leur permettre de concilier activité professionnelle et vie familiale. Dois-je rappeler que la Guadeloupe connaît un taux de chômage de 24 %, et que ce chiffre atteint 56 % pour les femmes ? Confrontés à ce taux extrêmement élevé, nous souhaitons apporter des réponses en matière de garde d'enfants.
Madame la députée, vous citez des chiffres, mais l'estimation minimale du coût de la mise en place du droit opposable à la garde d'enfant – l'objectif étant de permettre la création de 400 000 places de crèche d'ici la fin du quinquennat – est de l'ordre de 1,5 milliard d'euros. Vous le constater, nous disposons de moyens très importants pour mener à bien cette politique.
Vous évoquez le recentrage des allocations familiales vers l'adolescence. Les associations familiales que j'ai reçues nous ont demandé de faire porter l'effort sur l'adolescence, parce qu'un adolescent coûte beaucoup plus cher dans le budget des familles.
Nous sommes interpellés sur la modulation des allocations rentrée scolaire. Là aussi, les familles ont souhaité qu'un effort supplémentaire soit fait pour l'entrée au collège, mais également au lycée. Nous menons actuellement des concertations sur ces sujets, car, avec Xavier Bertrand, notre objectif est de répondre à ces problèmes en menant une politique familiale équitable, juste et tournée vers les plus modestes.
Enfin, vous l'avez souligné, madame la députée, de nombreuses femmes sont à la recherche d'un emploi, commencent tôt ou finissent tard dans des emplois aux horaires atypiques ou décalés. En travaillant sur la diversité des modes de garde, comme nous le faisons, nous leur apportons une réponse par des mesures adaptées, comme la possibilité de bénéficier d'une assistante maternelle à domicile.
Tous ces moyens attendus par les familles, nous les déploierons parce que la politique familiale doit s'entendre d'une manière extrêmement globale. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Politique familiale
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Marc Le Fur.)
L'ordre du jour appelle la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif à la lutte contre le trafic de produits dopants (n° 773, n° 818).
La parole est à M. Bernard Laporte, secrétaire d'État chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, à l'approche de l'événement sportif mondial que sont les Jeux olympiques, on ne saurait passer sous silence l'obligation qui est la nôtre de mettre tous les moyens en oeuvre pour protéger au mieux le sport contre la menace permanente que représente le dopage.
La lutte contre le dopage est un enjeu majeur pour le monde du sport comme pour l'ensemble de nos sociétés et notre pays se doit de montrer l'exemple en la matière, comme il l'a déjà fait à maintes reprises. On peut notamment citer la loi du 23 mars 1999, qui a permis de mettre en place un suivi médical longitudinal des athlètes et de sanctionner pénalement la cession et l'offre de produits dopants, ou la loi du 5 avril 2006, qui a institué l'Agence française de lutte contre le dopage. Plus récemment, l'impulsion française dans la mise en place du « passeport sanguin » a été, malgré les difficultés rencontrées récemment, une nouvelle preuve de la forte volonté politique de la France de combattre le dopage.
Pour autant, la législation de notre pays souffre de certaines lacunes, qui empêchent de lutter de la manière la plus efficace contre le trafic de produits dopants. Le cas de l'affaire Puerto, qui s'est produit en Espagne, est à ce titre révélateur. Si un cas similaire – c'est-à-dire la saisie de plusieurs centaines de poches de sang congelé et de plasma sanguin – s'était produit en France, nous n'aurions disposé d'aucun instrument juridique pour poursuivre et sanctionner pénalement les responsables de ce trafic.
À l'heure actuelle, en effet, la détention ainsi que les autres actions caractérisant un trafic – c'est-à-dire la production, le transport, l'importation et l'exportation de produits dopants – ne peuvent être réprimées, puisque seules la cession et l'administration de produits constituent des infractions condamnables pénalement.
Les limites de la législation française actuelle ont également été mises en lumière lors du dernier Tour de France, notamment par l'affaire Vinokourov, coureur contrôlé positif à une transfusion homologue. Le procureur de Pau a bien diligenté une enquête dès la révélation des faits ; mais il s'est révélé impossible d'entamer une enquête en flagrance, autorisant les enquêteurs à perquisitionner les chambres et les véhicules.
Ces simples exemples démontrent que les services de police judiciaire ne disposent pas des outils qui leur permettraient de faire face à la réalité des modes opératoires des trafiquants. Il est ainsi très difficile, comme en témoigne l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique, de procéder aux perquisitions, saisies ou gardes à vue, pourtant indispensables pour démanteler des filières.
C'est pourquoi les parquets ont le plus souvent recours, pour fonder de telles poursuites, à des qualifications pénales issues d'autres législations que le code du sport, en particulier celles relatives à la répression des trafics en matière de stupéfiants ou de médicaments. Toutefois, ces dispositions ne peuvent pas s'appliquer à l'ensemble des méthodes et procédés dopants utilisés, notamment aux transfusions sanguines. Le nombre d'affaires traitées est ainsi très faible et les sanctions associées non dissuasives.
Le présent projet de loi a donc pour objet principal de créer les infractions pénales nouvelles de production, détention, transport, importation et exportation de produits dopants, dans le but de démanteler les trafics. Il prévoit ainsi une peine maximale de cinq ans de prison et 75 000 euros d'amende en cas de détention en vue d'un trafic. Cette peine est ramenée à un an de prison et 3 750 euros d'amende dans les cas d'infraction commise par un sportif en vue de son usage personnel.
Cette distinction permet de réaliser le meilleur compromis entre fermeté absolue envers le trafiquant et prise en compte de la condition particulière du sportif. Elle permet de ne pas assimiler les sportifs intègres à des délinquants, tout en sanctionnant durement les tricheurs. Elle permet surtout d'être inflexible envers les trafiquants, qui constituent la cible prioritaire. Bien entendu, toutes les formes de détention médicalement justifiées – autorisation d'usage thérapeutique, pharmacie familiale – ne feront pas l'objet de sanctions.
Le projet de loi rassemble également diverses dispositions visant à harmoniser notre législation la réglementation internationale à la suite de la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport, ainsi que des dispositions permettant de tenir compte des décisions disciplinaires prononcées par les autorités de la Nouvelle-Calédonie qui empêchent le sportif concerné de concourir sur le territoire de la République.
D'une façon générale, comme le montre l'excellent travail du rapporteur, M. le député Depierre, ce projet de loi doit permettre de pallier les insuffisances de la législation actuelle et de nous doter des outils indispensables pour lutter de manière plus efficace contre les trafics de produits dopants. Son adoption est donc une nécessité impérieuse pour l'ensemble du sport français, ainsi que pour les compétitions qui se dérouleront sur notre sol. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
La parole est à M. Bernard Depierre, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'Assemblée nationale est saisie en première lecture du projet de loi relatif à la lutte contre le trafic de produits dopants. La lutte contre le dopage n'est certes pas nouvelle en France. Depuis la loi du 1er juin 1965 jusqu'à la récente loi du 5 avril 2006, qui a institué l'Agence française de lutte contre le dopage, en passant par celles du 28 juin 1989 et du 23 mars 1999, les pouvoirs publics se sont livrés à un combat sur le front de la prévention, de la dissuasion et de la répression.
Le présent projet de loi entend donc renforcer l'efficacité de la lutte contre le dopage, qui est un enjeu majeur pour l'éthique sportive et la santé publique. Parce que la France a fait le pari d'une législation évolutive, il convient aujourd'hui, tout en reprenant les interdictions de faits de dopage déjà existantes, de franchir une nouvelle étape.
Les dispositions proposées sont pragmatiques. En introduisant une nouvelle infraction pénale de détention de produits dopants et en complétant la liste des incriminations pénales en matière de trafic, le projet de loi entend améliorer la législation française, pour prendre en compte de manière plus large les faits de dopage et, tout particulièrement, le trafic de produits dopants.
Trop souvent en effet, en dépit des avancées réelles réalisées ces dernières années, les différentes autorités en charge des contrôles se trouvent juridiquement démunies dès lors qu'il s'agit d'effectuer des perquisitions, saisies ou gardes à vue pour réprimer la détention de produits dopants. Or ces outils juridiques sont indispensables pour démanteler les filières.
Certaines difficultés doivent être plus particulièrement évoquées. Tout d'abord, seuls les produits dopants classés comme vénéneux au sens de l'article L. 5 132-1 du code de la santé sont soumis à des règles particulières de détention. Par ailleurs, le cas particulier du sportif et de son environnement est insuffisamment pris en considération. Or, le sportif n'est pas seul. Tous les spécialistes insistent aujourd'hui sur la nécessité de tenir compte de son entourage : parents, coéquipiers, médecins, thérapeutes, dirigeants, avocats, agents, sponsors. Cette nécessité a été mise en évidence par les grandes affaires de dopage des dernières années, à commencer par l'affaire Festina lors du Tour de France de 1998.
En pratique, dans le cadre d'une procédure judiciaire visant le démantèlement d'un trafic de produits dopants, c'est sur le fondement des seules dispositions du code de la santé publique que peut être intentée une action. Aux termes de l'article L. 5 132-1 de ce code, sont définies comme « substances vénéneuses » les substances dangereuses, à savoir les substances toxiques, nocives, corrosives, irritantes, stupéfiantes, psychotropes et celles définies comme présentant un danger direct ou indirect pour la santé. Or ce dispositif se révèle insuffisant pour réprimer les trafics de produits dopants. En effet, si une part importante de ces derniers entre dans la définition des substances vénéneuses, ce n'est pas le cas de tous : les transfusions sanguines en particulier ne tombent pas sous le coup de cet article.
Outre le fait qu'il vise à combler un vide juridique, le projet de loi entend prendre en compte la réalité internationale du dopage. Le trafic est en effet favorisé par le développement des échanges sur Internet et par des réseaux impliqués dans la criminalité internationale. La France a ratifié, le 5 février 2007, la convention internationale contre le dopage dans le sport, établie dans le cadre de la Conférence générale de l'UNESCO le 19 octobre 2005. Cette convention, qui est entrée en vigueur le 1er avril 2007, s'appuie sur le code mondial antidopage établi par l'Autorité mondiale antidopage.
En outre, la Conférence de Madrid, organisée du 15 au 17 novembre 2007 par l'Agence mondiale antidopage, a prévu l'entrée en vigueur d'une version révisée du code mondial antidopage au 1er janvier 2009. Or, l'article 2.6 du code mondial antidopage révisé prohibe « la possession par un sportif en compétition d'une méthode interdite ou d'une substance interdite, ou la possession hors compétition par un sportif d'une méthode interdite ou d'une substance interdite hors compétitions, à moins que le sportif n'établisse que cette possession découle d'une autorisation d'usage à des fins thérapeutiques [...] ou ne fournisse une autre justification acceptable ». Cette dérogation pose d'ailleurs un problème qu'il faudra résoudre un jour ou l'autre.
Quoi qu'il en soit, en droit public français, si une convention internationale a une valeur supérieure à la loi, elle n'est pas pour autant d'application directe : un acte législatif ou réglementaire est requis. La France se doit donc, plus que jamais, de conformer sa législation aux dispositions internationales. Cela semble d'autant plus impératif que le trafic de produits dopants, à l'heure du développement des échanges via Internet et des réseaux de crimes organisés transnationaux, revêt une dimension internationale, comme l'a mis en évidence en février 2007 la remarquable étude réalisée par Alessandro Donati sur le trafic international de substances dopantes.
Le présent projet de loi prévoit donc à titre principal deux nouvelles infractions en matière de dopage. D'une part, il crée une infraction nouvelle de détention de produits dopants pour tout sportif, en l'absence de raison médicale dûment justifiée, infraction punie d'un an d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende. D'autre part, il crée une nouvelle infraction de trafic de produits dopants, définie comme le fait, pour toute personne, de produire, fabriquer, importer, exporter, transporter, détenir ou acquérir, aux fins d'usage par un sportif, en l'absence de raison médicale dûment justifiée, des produits dopants. Cette infraction est punie de cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende, la peine étant portée à sept ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende lorsque les faits sont commis en bande organisée ou à l'égard d'un mineur.
Dans un souci d'exhaustivité, le projet de loi complète parallèlement la législation contre le dopage animal en créant une infraction de trafic de produits dopants destinés aux animaux.
Par ailleurs, il améliore la procédure d'exercice des missions de police judiciaire lors des contrôles antidopage, en prévoyant une information « sans délai » du procureur de la République dans le cas où une infraction est constatée. En outre, les fonctionnaires relevant du ministère chargé des sports et les autres personnes agréées par l'Agence française de lutte contre le dopage pourront désormais être requises par le procureur de la République, le juge d'instruction et les officiers ou agents de police judiciaire afin de leur prêter assistance.
Le projet de loi complète également la procédure existante d'échanges d'informations entre autorités administratives en prévoyant l'inclusion des agents de l'administration des impôts ainsi que de l'Agence française de lutte contre le dopage. À cet égard, il faut rappeler le succès du modèle australien, qui a favorisé de manière exemplaire, avec la création en 2006 d'une nouvelle agence antidopage, les échanges d'informations entre autorités antidopage et gouvernementales.
Enfin, l'Agence française de lutte contre le dopage se voit dotée des pouvoirs d'exercer les droits de la partie civile lorsque des poursuites sont engagées en application de la législation antidopage, sous la réserve qu'elle n'exerce pas à l'égard de la même personne et s'agissant des mêmes faits ses pouvoirs de sanction.
Mais ce projet de loi contient également des dispositions destinées à assurer certaines coordinations et précisions dans le code du sport. Il procède ainsi à la consécration de la dénomination de l'Agence mondiale antidopage, compte tenu notamment de l'entrée en vigueur en France de la convention de l'Unesco contre le dopage depuis le 1er avril 2007 ; il ajoute la précision selon laquelle l'Agence française de lutte contre le dopage peut diligenter des contrôles pendant les compétitions et manifestations sportives organisées par toute fédération sportive ; il ouvre la possibilité pour l'Agence de décider du caractère suspensif ou non de sa saisine après l'intervention des décisions disciplinaires des fédérations ; enfin, il consacre l'infraction constituée par le fait de ne pas respecter les décisions au titre de ses pouvoirs de sanction, non plus seulement de l'Agence française de lutte contre le dopage mais aussi de toute fédération sportive, dans un souci de cohérence.
La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a souhaité inscrire ses travaux dans la perspective pragmatique tracée par le projet de loi. Aussi a-t-elle, pour l'essentiel, adopté des amendements destinés à améliorer les dispositions proposées sans en remettre en cause les principaux équilibres. Nous y reviendrons plus en détail lors de la discussion des articles.
La commission s'est naturellement prononcée, de ce fait, en faveur de l'adoption de ce projet de loi qui, à n'en pas douter, favorisera une lutte efficace contre le trafic de produits dopants. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une question préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.
La parole est à M. Alain Néri, pour une durée qui ne saurait excéder trente minutes.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous sommes aujourd'hui réunis pour aborder un problème de société qui prend de plus en plus d'importance en France, en Europe et dans le monde, le fléau du dopage.
Nous aurions souhaité, monsieur le secrétaire d'État, pouvoir débattre de votre projet de loi dans des conditions plus sereines et moins rapides. Vous avez cru bon de déclarer l'urgence sur ce texte, mais, en l'occurrence, il s'agit plutôt de précipitation ! Nous avons été destinataires de votre projet de loi il y a moins de trois semaines et, l'Assemblée nationale ayant interrompu ses travaux pendant une semaine, nous avons disposé de fort peu de temps pour procéder aux auditions qui nous semblaient nécessaires.
La France est à la pointe du combat contre le dopage depuis un certain nombre d'années. La première loi a été rédigée sous le ministère d'Edwige Avice en 1984…
Nous avons eu ensuite la loi Bambuck en 1989, puis la loi de Mme Buffet en 1999 et la loi de M. Lamour en 2006. À chaque fois, nous avions eu le temps de discuter, d'auditionner, d'avoir des débats de fonds sur le problème. Pour votre part, vous avez choisi la précipitation : le triste spectacle des travées clairsemées de notre hémicycle, en cette veille de 1er mai, en est la conséquence. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Votre projet de loi appelle un certain nombre de réflexions et de réserves de notre part, monsieur le secrétaire d'État. Les divers projets de loi relatifs au dopage qui nous ont été soumis précédemment avaient tous un triple objectif : la prévention, l'éducation, les sanctions. Car il ne faut pas perdre de vue que, outre le problème d'éthique que pose la tricherie dans le sport, nous avons également affaire à un problème de santé publique. Or, ce texte ne propose que des mesures répressives.
Par ailleurs, le dopage, s'il est souvent médiatisé, ne concerne malheureusement pas que les sportifs de haut niveau. Toutes les catégories de pratiquants sont touchées, des professionnels aux amateurs, y compris les amateurs non licenciés. Si ce n'est pas, dans ce dernier cas, l'appât du gain qui les motive, mais simplement la volonté de dominer, même s'il ne s'agit que d'un match de tennis amical ou d'un jogging avec le voisin, cela n'en donne pas moins lieu à des dérives importantes.
Enfin, les jeunes, y compris les très jeunes, sont également victimes du dopage – une situation parfois induite par le comportement coupable des familles ou de certains dirigeants qui ne font pas leur travail convenablement. Pour toutes ces raisons, il nous semble que le problème du dopage aurait mérité d'être traité autrement que dans la précipitation.
Cette précipitation est malheureusement le reflet de ce que tend à devenir le travail parlementaire : sitôt qu'un problème se pose, voire dès qu'il risque de se poser, on essaie d'y remédier par un texte de loi. En l'occurrence, l'approche de l'été et du Tour de France n'est sans doute pas étrangère à la volonté de certains de disposer rapidement d'un texte de circonstance, au détriment du texte de réflexion et d'efficacité qu'aurait mérité le sujet.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Il n'y a pas que le vélo !
Vous avez raison : le sport cycliste, qui n'est pas le seul à être en cause, est trop souvent montré du doigt, alors que cette discipline est l'une de celles ayant fait le plus dans la lutte contre le dopage. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Ainsi, les cyclistes ont été les premiers à accepter les contrôles antidopage urinaires et sanguins et le suivi longitudinal. Ce sont eux qui ont décidé de mettre en oeuvre, à partir de cette année, le passeport sportif. Mais il est évident que plus on multiplie les contrôles dans une discipline donnée, plus on trouve de cas de dopage ! À l'inverse, on ne trouve pas grand-chose dans les disciplines où très peu de contrôles sont effectués.
Comme je l'ai déjà proposé à plusieurs reprises, il me semble que le nombre de contrôles devrait être proportionnel au nombre de pratiquants. Toutefois, nous partageons tous la préoccupation de lutter contre le dopage, et il n'est pas question de défendre des positions laxistes. Au contraire, il est essentiel de faire preuve de rigueur.
Il y a, dans le rapport de M. Depierre, un passage expliquant que l'on assimile les pourvoyeurs de produits dopants à des trafiquants de drogue. J'avais défendu la même position dans un amendement présenté lors de l'examen du projet de loi de Mme Buffet : les pourvoyeurs sont des marchands de poison qui mettent la vie des sportifs en danger, et qu'il convient à ce titre d'éradiquer. Mon amendement – qui avait été adopté – proposait que tous les pourvoyeurs s'adressant à des mineurs ou exerçant leur coupable activité en bande organisée se voient appliquer la même jurisprudence que les trafiquants de drogue, à savoir le doublement de la peine. Je me félicite que cette mesure soit reprise, mais cela ne constitue pas vraiment une avancée.
Non, puisque le projet de loi prévoit seulement d'aggraver la peine d'emprisonnement en la faisant passer de cinq ans à sept ans. Il n'y a donc pas de doublement de la peine.
En fait, vous n'abordez pas le véritable problème, monsieur le secrétaire d'État – comment le pourriez-vous, dans cette précipitation ? Le vrai problème, c'est que les procédés de dopage ont beaucoup évolué ces dernières années. Il est déjà loin le temps où amphétamines et corticoïdes étaient facilement détectés à la fin de la compétition – ou au cours de celle-ci, quand elle se déroulait sur plusieurs jours ! Les techniques de dopage sont beaucoup plus sophistiquées et l'on voit désormais des sportifs ayant recours au dopage se rendre au contrôle à l'issue de la compétition le sourire aux lèvres, en se moquant, sûrs de ne pas être pris : si un protocole de dopage adéquat a été mis en oeuvre, toute trace de produit dopant a disparu depuis longtemps au moment où le contrôle s'effectue.
C'est pourquoi j'ai toujours milité pour que soient multipliés les contrôles inopinés pendant les phases de préparation, ces phases durant lesquelles certains athlètes disparaissent comme par miracle des compétitions. Deux mois avant une grande compétition, certains s'évanouissent dans la nature, sans laisser le moindre renseignement permettant de les joindre, comme ils devraient normalement le faire. Ainsi Michael Rasmussen n'avait-il jamais été contrôlé positif, ayant soi-disant « oublié » de se présenter aux convocations en vue de contrôles antidopage. Et personne ne savait où il était : alors qu'il prétendait se trouver au Mexique, il était aperçu dans les Dolomites, en Italie ! Un cas troublant d'ubiquité !
On pourrait trouver d'autres exemples aussi célèbres. Il faut donc multiplier les contrôles inopinés pendant les périodes de préparation. Si nous voulions nous montrer vraiment efficaces, c'est maintenant qu'il faudrait procéder aux contrôles inopinés des athlètes sélectionnés pour les jeux Olympiques. Il en va de même pour le Tour de France. Cela ne signifie pas qu'il ne faudra pas réaliser quelques contrôles pendant les épreuves elles-mêmes, car certains petits malins pourraient en profiter pour se livrer à une tricherie moins sophistiquée mais peut-être tout aussi efficace.
Monsieur le secrétaire d'État, il est urgent de mener une réflexion sur les moyens de multiplier les contrôles inopinés pendant les périodes de préparation. Je participais hier soir à un débat sur La Chaîne parlementaire où certains avocats sont allés dans le même sens que moi en affirmant que, dans certaines disciplines, on peut nourrir des doutes quant à la préparation des athlètes pendant la période qui précède les grandes compétitions. C'est pourquoi j'aurais souhaité que des propositions en la matière figurent dans le texte.
En ce qui concerne les détenteurs de produits dopants, dans notre esprit et, donc, dans les textes, nous avons toujours fait la différence entre les pourvoyeurs – ceux qui représentent vraiment un danger – et les sportifs – considérés le plus souvent comme des victimes.
Or pourquoi a-t-on recours au dopage ? Bien entendu, il y a l'argent, mais il y a aussi, je l'ai dit, la gloriole de celui qui affirme vouloir absolument gagner, même si je m'interroge parfois sur le fait de savoir quel plaisir on peut bien retirer d'une victoire, quelle qu'elle soit et quel que soit le niveau de la compétition, quand on sait que ce ne sont pas ses propres mérites mais ceux d'un médicament qui ont permis de l'emporter. On ne doit pas, à mon sens, en retirer beaucoup de satisfaction – tout au moins je l'espère. Il n'en demeure pas moins que la gloriole existe.
On se dope aussi à cause de l'argent. La marchandisation du sport qui, qu'on le veuille ou non, existe, se mesure d'abord au fait qu'il y a trop d'argent dans le sport et pas assez d'argent pour le sport. Ce n'est certes pas entièrement de votre ressort, monsieur le secrétaire d'État ; en effet, depuis le temps que nous siégeons ici, certains d'entre nous n'ont cessé de dénoncer la faiblesse du budget du sport.
Sur ce point, nous sommes unanimes. Reste qu'il y a trop d'argent dans le sport quand on considère les sommes faramineuses en question. Et heureusement qu'elles sont données en euros, parce que, si la population avait parfaitement conscience du montant des salaires de certains sportifs professionnels, ce serait un tollé général.
Pourquoi se dope-t-on ? Parce que l'on sait bien que la carrière d'un sportif est relativement courte et que, puisqu'il faut engranger et engranger encore, on doit multiplier les compétitions. On s'aperçoit bien que c'est devenu presque pire que dans les films de Charlie Chaplin : les cadences sont infernales, les calendriers s'allongent, le nombre de compétitions se multiplie. Et il n'y a jamais eu autant de blessures dans toutes les disciplines sportives que depuis que des médecins s'occupent des différentes équipes : il y a de quoi se poser des questions.
En outre, même si nous ne sommes que des béotiens, n'étant pas tous médecins, nous voyons certains athlètes tant évoluer qu'on ne les reconnaît plus au bout d'un an, après qu'ils ont pris dix ou quinze kilos de muscles, voire davantage.
On ne nous fera pas croire que c'est uniquement en soulevant de la fonte !
La volonté de dopage est donc, dans ce cas, manifeste : il s'agit d'améliorer toujours plus ses performances, de participer à toujours plus de matches, d'assister à toujours plus de rencontres, pour essayer de garder sa place.
Monsieur le secrétaire d'État, vous comprenez bien que nous ne pouvons pas accepter un tel comportement contraire à notre idée du sport. Pour nous, le sport est avant tout un facteur de développement physique, intellectuel, un facteur de lien social. Or nous nous trouvons dans une situation inacceptable.
Que faire ? Vous entendez poursuivre celui qui aura quelques produits dopants dans sa valise, car « ce n'est pas bien ». Reste, comme le reconnaissait le rapporteur Bernard Depierre, que celui qui aura trois cachets au fond de sa poche et celui qui transportera deux ou trois caisses de produits n'en feront pas tout à fait le même usage. On peut en effet suspecter celui qui transporte deux ou trois caisses d'être un pourvoyeur. Les textes en vigueur permettent ainsi de poursuivre le sportif pourvoyeur.
On disposait ainsi du moyen de prendre en flagrant délit ceux qui se moquaient vraiment du monde, et cela ressemblait plutôt à un mauvais feuilleton. Ainsi, quand M. Rumsas, par l'intermédiaire de sa femme, expliquait que les produits qui remplissaient le coffre de sa voiture étaient destinés à soigner sa belle-mère,…
…c'est qu'il devait en effet aimer sa belle-mère – ce qui arrive, monsieur Rochebloine.
D'autres, dans la même situation, nous expliquaient que c'était pour soigner leur chien.
Or nous n'en étions tout de même pas à condamner le chien ! Il faut là aussi savoir raison garder.
En revanche, je suis très inquiet car le texte n'aborde à aucun moment la raison la plus évidente de la triche. En effet, qu'est-ce qui permet la triche ? Simplement l'absence de courage et de volonté pour condamner les autorisations d'usage à des fins thérapeutiques. C'est la plus grande hypocrisie qui soit et elle ne date pas d'aujourd'hui. Je me souviens que, lorsque j'étais rapporteur de la loi Buffet, j'avais eu l'occasion de consulter les registres de contrôle d'antidopage : à l'époque, lorsque M. X était contrôlé positif on estimait déjà que ce n'était pas grave, puisqu'il bénéficiait d'une autorisation d'usage à des fins thérapeutiques. Et encore a-t-on pu découvrir que, dans certains cas, une telle autorisation était antidatée.
C'est inacceptable et l'on sait bien que tous les athlètes qui le souhaitent trouveront toujours un médecin complaisant pour leur délivrer une autorisation d'usage à des fins thérapeutiques. S'ils ne le trouvent pas du premier coup, ils consulteront un deuxième médecin, voire un troisième et même au-delà. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.) Je dirai même plus : ils ne bénéficieront pas alors d'une ordonnance de complaisance, mais d'une ordonnance de complicité.
L'attaque est dure ! À travers moi, le corps médical proteste ! (Sourires.)
N'ayons pas peur des mots, nous sommes en face d'un tel fléau qu'il faut dire les choses clairement.
Caricature, dites-vous ! Comme si l'habitué de nos débats que vous êtes, monsieur Rochebloine, n'était pas au courant ! Simplement, j'insiste, il faut avoir le courage de le dire !
Il s'agit de ne pas dissimuler la vérité parce qu'elle est trop grave.
Nous devons absolument dire que nous allons interdire les autorisations d'usage à des fins thérapeutiques. En effet, un sportif professionnel bénéficie du statut de salarié. Quand on est salarié et qu'on tombe malade, on prend un congé de maladie et l'on ne se rend pas au travail.
Ainsi, quand on est un sportif professionnel et que l'on est malade, on ne va pas travailler, même si l'on considère comme dramatique d'attraper une angine, par exemple, à seulement deux jours de l'épreuve. Cela peut malheureusement arriver. Imaginez que le sportif tombe dans les escaliers de son hôtel juste avant la finale des jeux Olympiques et se foule une cheville : que fait-on ?
Il ne disputera pas la finale, c'est ainsi. J'ai même vu, monsieur Laporte – vous n'étiez pas encore secrétaire d'État, mais déjà entraîneur de l'équipe de France – ce malheureux Castagnède se blesser au talon d'Achille à l'échauffement, derrière les poteaux. Nous l'avons tous regretté, mais il n'a pas pu disputer le match. Ce sont les aléas de la vie.
En revanche, dans le cas d'un sportif amateur malade, ce n'est pas dramatique si, le dimanche, il ne participe pas à la compétition. Il attendra le dimanche suivant. Finissons-en avec l'hypocrisie.
Or le projet prévoit que, si l'on prouve que l'on bénéficie d'une autorisation d'usage à des fins thérapeutiques, on ne sera pas poursuivi, même en cas de détention de produits dopants. Rassurez-vous, le nombre de ces autorisations va se multiplier et j'en crains l'inflation en particulier chez les sportifs provenant de l'étranger et vis-à-vis desquels vous vous trouverez bien incapables de prendre quelque sanction que ce soit.
Votre texte est donc inadapté, il ne permet pas d'avancées suffisantes ni de mener une réflexion sur le fond. C'est pourquoi nous avons déposé cette question préalable, considérant que le dopage reste un vrai problème d'éthique. Tous, nous souhaitons que le sportif soit le meilleur grâce à son travail, à son entraînement et que ce ne soit pas le meilleur produit pharmaceutique qui remporte la victoire.
Il me reste sept minutes !
Du point de vue de la santé publique, nous devons d'ailleurs tenir compte du fait que les jeunes comprennent difficilement que certains parviennent à des situations privilégiées et ils sont prêts eux-mêmes à se doper et à mettre en cause leur santé. Déjà à cette tribune, Jean Le Garrec, alors président de la commission des affaires sociales, avait déclaré, citant Michel Crauste, l'ancien troisième ligne du football club lourdais et membre de l'équipe de France, qu'ils feraient de vilains vieux. Je l'avais interrompu en lui disant que, malheureusement, ils ne feront pas de vilains vieux car ils ne feront pas de vieux du tout ! L'espérance de vie des sportifs qui se dopent est fort réduite…
Or, parce que c'est un devoir pour la représentation nationale que de défendre la santé publique, nous devons lutter contre le dopage. C'est pourquoi nous vous faisons d'ores et déjà des propositions en prévision d'un futur texte dont la discussion laisserait plus le temps à la réflexion, au débat, aux auditions, un texte qui prévoirait donc un dispositif plus efficace, non seulement pour multiplier les contrôles inopinés, mais aussi plus radical pour supprimer les autorisations d'usage à des fins thérapeutiques.
Prenez les jeux Olympiques d'Atlanta : 80 % des athlètes étaient asthmatiques ! C'est tout de même formidable… Ils avaient tous droit à de la Ventoline. Aussi faudrait-il presque se réjouir d'avoir un gosse asthmatique : il est promis à un avenir d'athlète de haut niveau !
On se moque du monde. Nous devons donc faire preuve du plus grand sérieux et nous souhaitons une lutte antidopage rigoureuse, efficace, qui passe par des mesures pratiques, comme la multiplication des contrôles inopinés pendant les périodes de préparation, avec l'obligation de se présenter à ces contrôles. Deuxièmement, il convient d'écarter les autorisations pour usage à des fins thérapeutiques.
Et puis, monsieur le secrétaire d'État, quand on parle d'efficacité dans la lutte contre le dopage, il faut aussi s'en donner les moyens. Or, je suis malheureusement obligé de constater que si, en 2002, le budget prévoyait de consacrer 24 millions d'euros à la lutte contre le dopage, en 2005, cette somme était réduite à 19 millions d'euros, et en 2008 à 15 millions d'euros. Par conséquent, monsieur le secrétaire d'État, en prévision du prochain budget et des prochains débats que nous aurons, je vous invite fermement à augmenter les crédits de la lutte contre le dopage. Ce sera aussi, je crois, une façon de faire en sorte que ce soient les qualités physiques et mentales qui permettent de remporter la victoire, et non pas les produits pharmaceutiques. C'est ce que nous voulions, rappelez-vous, lorsque nous conduisions, avec le CNOSF, la campagne pour un sport propre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Nous en venons aux explications de vote sur la question préalable.
La parole est à M. Guénhaël Huet, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Les propos de notre collègue Néri, tant sur le fond que sur la forme, laissent penser qu'il a une solide connaissance du fait sportif, de la compétition sportive et de la pratique sportive de manière générale. Vous me permettrez tout de même de vous dire, mon cher collègue, que, notamment à la fin de votre intervention, ils comportaient une part d'exagération que l'on ne peut que regretter.
C'était également une exagération que d'estimer, comme vous l'avez fait au tout début de votre discours, que ce texte nous est présenté de façon précipitée, voire de façon aléatoire. Tel n'est pas le cas. Dire cela, c'est oublier l'arsenal législatif et réglementaire qui existe déjà. Le projet de loi qui nous est présenté ne remet pas en cause les dispositions en vigueur, il ne fait que les compléter.
Ce texte nous permet également de nous adapter aux règles internationales. C'est important et vous l'avez d'ailleurs souligné vous-même.
Il n'y a donc aucune espèce de précipitation dans le fait de soumettre aujourd'hui ce texte à notre assemblée.
Vous avez parlé de la prévention. Elle n'est aucunement remise en cause dans ce projet de loi. Il y a certes un renforcement de l'arsenal répressif. Mais, si vous vous adressez aux fédérations sportives, toutes vous diront qu'elles attendent une intervention des pouvoirs publics, parce qu'elles ne peuvent pas, à elles seules, juguler ce fléau qu'est le dopage. Depuis des années, un certain nombre de fédérations disent aux pouvoirs publics qu'il faut intervenir, et réclament notamment que les pouvoirs des juges soient renforcés. C'est exactement ce que fait ce projet de loi.
Comme vous l'avez dit, le dopage – qui est, vous me l'accorderez, un phénomène très ancien – a beaucoup changé. À coup sûr, les sportifs ne se dopent plus aujourd'hui comme ils le faisaient il y a trente ou cinquante ans. Les techniques de dopage ont beaucoup évolué. Ce projet de loi nous propose donc, outre une adaptation aux règles internationales, comme je le disais à l'instant, une adaptation de notre législation aux nouvelles formes de dopage. Voilà l'objet de ce texte, qui introduit dans notre droit des incriminations, des délits, des peines supplémentaires.
Il le fait en distinguant avec beaucoup de justesse et de justice la situation du sportif et celle du non-sportif, l'un encourant une peine d'un an d'emprisonnement et l'autre une peine de cinq ans. Cette disposition me semble particulièrement juste, et mérite d'être soutenue.
Vous avez évoqué la marchandisation du sport. On peut vous rejoindre sur ce point. Bien sûr, elle existe. Dans certaines disciplines, elle est même tout à fait excessive. Je voudrais néanmoins vous rappeler, d'une part, que ce n'est pas là un phénomène nouveau.
D'autre part, et je pense que vous et les collègues qui siègent à vos côtés serez sensibles à cet argument, le sport a été, et continue d'être, un ascenseur social. La télévision a retransmis hier un grand match de football : dans l'une des équipes évoluaient deux joueurs français issus de la même cité et qui, sans le sport, ne seraient pas devenus ce qu'ils sont.
Je vous rejoins donc pour critiquer une certaine forme de marchandisation du sport. Ce point fera, je crois, l'unanimité. Mais restons prudents, car, dans notre société, le sport reste un véritable ascenseur social.
Vous avez évoqué les autorisations pour usage à des fins thérapeutiques. Je suis prêt à souscrire à votre formule, qui distingue les certificats de complaisance et les certificats de complicité. Mais prenez garde, cher collègue : l'arrêt de travail d'un sportif professionnel et celui d'un salarié classique, ce n'est pas du tout la même chose. Après avoir cessé, durant trois semaines, de vous rendre à votre bureau ou à votre usine parce que vous étiez souffrant, vous retrouvez votre poste de travail, et il n'y a aucune différence. Par contre, le sportif qui arrête trois semaines ne perd pas trois semaines, mais trois mois, six mois, parfois toute une saison. On ne revient pas comme cela, du jour au lendemain, au très haut niveau. Ce n'est pas du tout la même chose.
Qu'il faille faire attention aux abus auxquels peuvent donner lieu les autorisations pour usage à des fins thérapeutiques, personne n'en disconviendra. Mais elles sont déjà assez contrôlées. Elles peuvent l'être encore plus par les fédérations sportives. Elles requièrent même souvent l'agrément des médecins du sport. Mais gardons-nous d'être excessifs en proposant la suppression pure et simple de toutes les autorisations. Nous risquerions fort de mettre à mal des carrières entières. Quand on perd trois mois, on perd une saison, et quand on perd une saison, on perd parfois toute sa carrière.
Pour toutes ces raisons, le groupe UMP votera contre la question préalable, et j'invite nos collègues à voter le texte qui nous est proposé par M. le secrétaire d'État. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Régis Juanico, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Je résumerai très brièvement les raisons pour lesquelles nous voterons la question préalable que vient de défendre notre collègue Alain Néri.
La première, c'est la précipitation, ainsi que les conditions déplorables dans lesquelles ce texte a été préparé et discuté, et dans lesquelles nous en débattons aujourd'hui.
À l'heure où il est beaucoup question de la revalorisation du travail parlementaire et des droits du Parlement, nous devons constater une fois de plus que la représentation nationale – et cela devient une fâcheuse habitude – a été quelque peu négligée. Et nous n'avons toujours pas compris, du moins de ce côté-ci de l'hémicycle, pourquoi ce projet de loi a fait l'objet d'une déclaration d'urgence.
Nous avons plutôt l'impression d'un texte bâclé, qui relève plus d'une opération de communication avant la Grande Boucle de cet été que d'un réel souci d'améliorer l'efficacité de la lutte contre le dopage.
Nous sommes d'autant plus étonnés que ce texte est censé s'inscrire dans le cadre du nouveau code mondial antidopage, dont on nous dit qu'il va peut-être connaître des évolutions d'ici les jeux Olympiques, c'est-à-dire dans cent jours, notamment sur la question du recours aux autorisations pour usage à des fins thérapeutiques à l'entraînement.
Nous allons donc légiférer à travers un texte qui, outre qu'il est imprécis et incomplet, risque de devenir caduc quelques semaines après son adoption.
Une deuxième raison nous pousse à voter la question préalable : ce texte ne comporte pas de garanties en termes de moyens humains et financiers pour l'accompagner et rendre réellement plus efficaces les outils dont disposent les pouvoirs publics dans la lutte contre le dopage.
L'efficacité de ces outils nécessite que les crédits budgétaires soient à la hauteur des besoins, ce qui, vous en conviendrez, est encore loin d'être le cas. Comme nous l'avions dit l'automne dernier à l'occasion de la discussion budgétaire, et comme Alain Néri vient de le rappeler, les crédits consacrés à la prévention par le sport et à la protection des sportifs sont en stagnation. Notre collègue a cité le chiffre de 15 millions d'euros, conséquence d'une baisse qui s'est poursuivie depuis plusieurs années. Les crédits consacrés au suivi de la santé des sportifs sont, quant à eux, en nette diminution.
Pour ce qui est de l'AFLD, ses responsables déplorent publiquement le manque de moyens humains et financiers – les crédits consacrés à l'Agence ont été de 7,3 millions d'euros cette année – et craignent d'être accaparés par les tâches administratives qui seront liées à l'explosion des demandes d'autorisations pour usage à des fins thérapeutiques que ce texte risque d'entraîner. La mission première de l'Agence est d'être sur le terrain pour exercer ses missions de contrôle des sportifs.
Troisièmement, nous regrettons, dans ce texte essentiellement répressif, l'absence d'un volet fort de prévention, notamment en direction des jeunes sportifs.
Enfin, nous aurions souhaité un travail plus approfondi pour mieux répondre à la nécessité d'une coopération et d'une coordination, au niveau européen, de la lutte contre le dopage.
Sur ce point, des avancées ont été réalisées récemment. À travers le Traité de Lisbonne, la spécificité du sport a, pour la première fois, été reconnue. Ce texte fait de la promotion de l'équité et de l'ouverture des compétitions des objectifs de l'Union européenne.
Le Livre blanc de la Commission européenne, en juillet 2007, a fait lui aussi des propositions, assez timides il est vrai, puisqu'il évoquait, a minima, une coordination et des échanges d'informations au sein des grands réseaux européens rassemblant les organisations nationales.
Enfin, la semaine prochaine, le 7 mai, sera adopté le rapport du Parlement européen sur le Livre blanc de la Commission.
Ma collègue Arlette Franco et moi-même, dans le cadre de la délégation pour l'Union européenne, avons d'ailleurs fait des propositions – tout comme le Conseil de l'Europe, cher François Rochebloine – pour affirmer un modèle européen du sport.
La dimension européenne du texte aurait pu être mieux affirmée, par exemple à l'article 5, qui ajoute à la liste des administrations pouvant échanger des informations et des renseignements les agents de l'administration des impôts et les agents de l'Agence française de lutte contre le dopage.
Au moment où l'Agence mondiale antidopage envisage de signer un protocole d'accord avec Interpol, on aurait pu inscrire dans ce texte l'idée d'une meilleure coordination avec les administrations ou les agences européennes. Car, on le sait bien, le phénomène du dopage ne connaît pas de frontières.
Pour toutes ces raisons, monsieur le président, le groupe socialiste, radical et citoyen votera la question préalable défendue par Alain Néri. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
La parole est à M. François Rochebloine, pour le groupe Nouveau Centre.
Cette question préalable nous a permis de constater une fois de plus l'étendue des connaissances de notre collègue Alain Néri. Nous fréquentons depuis plusieurs années déjà au sein de notre assemblée, et il arrive que nous nous retrouvions sur certains points.
Je regrette que la procédure d'urgence ait été utilisée. Mais, malgré tout, ce texte va dans le bon sens. C'est pourquoi, comme je le dirai tout à l'heure, le groupe Nouveau Centre le votera.
La première partie de l'intervention d'Alain Néri, je l'ai trouvée très positive, très constructive. Et puis, dans la deuxième partie, peut-être emporté par son élan,…
…notre collègue est devenu quelque peu excessif et caricatural. C'est dommage, parce que la première partie de son intervention était, je le répète, très positive.
Je pense qu'il est inutile de perdre plus de temps. Cette question préalable, c'est le règlement de notre assemblée qui le veut, a donné à notre collègue Néri l'occasion de s'exprimer pendant une demi-heure supplémentaire. D'autres ont eu recours à ce moyen par le passé. Personne ne saurait lui en vouloir.
Le groupe Nouveau Centre votera contre cette question préalable, de façon que nous puissions passer très rapidement à la discussion générale puis à la discussion des articles, même si je regrette le recours à une procédure d'urgence qui aurait pu être évitée.
Je mets aux voix la question préalable.
(La question préalable n'est pas adoptée.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, chers collègues, l'actualité nous le démontre chaque jour : loin d'être un sanctuaire, le sport reproduit largement les dérives de notre société, comme il se fait la caisse de résonance de ses espoirs et de ses avancées. Si l'on peut se féliciter que de nombreuses disciplines se mondialisent, se féminisent et se démocratisent, et que le sport en France porte l'image de la nation dans sa diversité, on constate qu'il n'échappe pas à la violence, au culte de la performance, à la domination de l'argent et à l'instrumentalisation politique.
Nous sommes nombreux à espérer l'éradication de ces dérives, à croire en un sport qui, en tenant toute sa place et rien que sa place, trouverait toute son utilité sociale simplement pour ce qu'il est : un facteur de plaisir, d'épanouissement personnel et de joies collectives. C'est grâce à ce qu'il est et non par ce que l'on veut en faire, que le sport pourra être un vecteur de réussite individuelle et collective. À ce titre, je tiens à saluer le travail du mouvement sportif et du comité national olympique français pour sauvegarder les valeurs et les objectifs du sport. Je me souviens ainsi du relais contre le dopage, organisé il y a quelques années par le CNOSF, comme je salue aujourd'hui l'engagement des athlètes français « pour un monde meilleur ».
Notre responsabilité politique, c'est de relayer cette action en protégeant autant que possible le sport contre les tentatives de marchandisation et de déstabilisation dont il peut être l'objet. Je pense au combat contre le dopage comme à celui mené il y a dix ans pour la reconnaissance de l'exception sportive en Europe, dans le traité de Nice. Je pense au combat à livrer pour protéger le droit à l'information sportive, mis à mal par la privatisation du droit à l'image par les grands opérateurs de télévision et de télécommunication et par le comportement de certains responsables sportifs. Je pense – actualité oblige – à la nécessité de protéger les jeux Olympiques et le mouvement sportif pour ce qu'ils sont. Nous savons tous que les JO ne sont pas, hélas, sans défauts et qu'ils sont tenus par des enjeux de pouvoir et des enjeux économiques. Nous devons faire fructifier ce qui reste de l'esprit olympique, qui est un moyen fort de délivrer un message de paix, de coopération et d'échange entre les peuples. Je me souviens des délégations de pays en conflit défilant sur un même stade lors des cérémonies d'ouverture, des Corées réunies pour une Olympiade en une seule délégation ou des femmes afghanes bravant tous les interdits pour être présentes aux Jeux.
La force du sport et de l'esprit olympique peut, demain, faire renaître les plus beaux rêves et faire vivre les plus belles valeurs de fraternité et de liberté. Je veux ici saluer l'équipe de France et me réjouir de la nomination de son capitaine, Tony Estanguet. Je sais qu'elle portera haut et fort ces valeurs.
Cette volonté de protéger le sport et de lui donner toute sa place dans notre société explique la façon dont je conçois le combat contre le dopage. J'ai aujourd'hui la même exigence que lorsque j'ai défendu à cette tribune la loi du 23 mars 1999 relative à la protection de la santé des sportifs et à la lutte anti-dopage, au nom de la santé des sportifs comme de leur bien-être psychologique, qui sont incompatibles avec l'aliénation que représentent la prise de produits dopants, la pression de la performance et la soumission aux intérêts financiers qui gangrènent le sport. C'est toujours guidée par cette exigence que je vois d'un bon oeil certaines des dispositions qui nous sont présentées aujourd'hui, et avec inquiétude certaines autres.
Ajouter la détention de produits dopants à la liste des violations de la réglementation antidopage, en conformité avec les principes du nouveau code mondial antidopage, est une avancée réelle. Elle devrait permettre, comme vous l'avez souligné, monsieur le secrétaire d'État, de remonter et de démanteler avec une plus grande efficacité les filières de distribution. Le code mondial antidopage prévoit que la détention de produits dopants par un sportif est passible, au même titre que la prise de tels produits, de deux années de suspension. C'est une peine dont j'approuve autant la sévérité que la logique.
En revanche, ajouter, comme vous le proposez, à cette sanction sportive une condamnation pénale pouvant donner lieu à un emprisonnement de un an m'inspire davantage de réserves. Une privation de liberté est lourde de sens, et je ne vois pas en quoi elle pourrait être une solution au problème du dopage pour un sportif. Franck Vandenbroucke, brisé par le dopage et par d'autres conduites dangereuses, dont un grand journal sportif racontait aujourd'hui l'histoire, mérite-t-il la prison ou doit-il, au contraire, être aidé à se sortir de ces conduites dangereuses ?
On risque aussi de passer sous silence, comme pour l'exonérer, le contexte général du sport actuel, où le sportif est autant – si ce n'est plus – une victime de logiques qui le dépassent qu'un coupable ou un tricheur dans un environnement sain. Les joueurs professionnels ne sont pas responsables des cadences qu'on leur impose. Quand j'entends le président de Provale, le syndicat des joueurs de rugby, dire à propos du calendrier imposé aux joueurs de rugby professionnels – qui a été qualifié ce matin de « monstrueux » par Serge Simon, ancien responsable des joueurs : « Si l'on continue comme ça, je vais dire aux mômes, les gars chargez-vous, et chargez-vous épais ! », j'aimerais qu'on ne se contente pas de l'écouter, mais qu'on agisse. Ces cadences sont une menace pour l'intégrité physique des joueurs et une incitation au dopage. J'aimerais qu'on l'entende et qu'on ne conçoive plus les calendriers à l'aune des contrats avec les médias ou les sponsors.
Ce ne sont pas les sportifs qui sont responsables d'une organisation du sport autour de règles économiques et financières. Quand le président de l'Union des clubs professionnels de football, Gervais Martel, écrit que l'année 2007 fut une bonne année pour le football professionnel français parce que le résultat net cumulé des clubs professionnels est de 47 millions d'euros et parce que « la vente de joueurs a permis que la balance commerciale française soit positive », je me demande où sont les intérêts des sportifs, la protection de leur santé et la simple passion du jeu.
Vous avez raison, il ne faut pas comparer le sportif au salarié. Pour un sportif, l'arrêt peut signifier la remise en cause de toute sa carrière. Il faut donc d'autant plus le protéger des dérives marchandes et lui donner des garanties pour protéger sa santé physique et son intégrité psychique. Tout l'environnement est concerné par le dopage et on ne réglera pas le problème en insistant sur la seule responsabilité personnelle et pénale du sportif. Pourquoi ne pas en rester à la sanction sportive tout en augmentant les peines pour les pourvoyeurs, incitateurs et autres responsables et comptables, souvent présents dans l'entourage du sportif ou de la sportive ? Jusqu'à présent, la loi française a toujours privilégié la sanction sportive et la responsabilité du mouvement sportif. Votre projet de loi amorce-t-il une autre démarche consistant à suivre le modèle italien, où la sanction est uniquement pénale ?
Je m'interroge d'autre part sur les pouvoirs dévolus aux agents du ministère des sports. En faisant de la détention de produits dopants un délit et en précisant leurs compétences, vous risquez de transformer profondément leur mission et de leur attribuer une fonction pour laquelle ils ne sont pas formés. Aussi, je préconiserai en cette matière une grande prudence.
Enfin, ma dernière interrogation concerne le sport de masse et les moyens budgétaires consacrés à son encadrement et à la formation des bénévoles, dont le rôle éducatif dans l'effort de prévention est de dissuader les jeunes, voire les adultes, d'adopter ces conduites dangereuses.
Monsieur le secrétaire d'État, j'espère que le débat apportera des réponses à ces trois questions et permettra à mon groupe de voter ce texte.
Soyez certain, quelle que soit l'issue du débat, que mon engagement dans le combat contre le dopage restera entier. Je me tiens disponible pour toute mobilisation allant dans ce sens. À moins de cent jours des jeux Olympiques de Pékin, ce débat prend tout son sens : agir pour que le sport redevienne facteur d'épanouissement. C'est ce dont nous rêvons pour cette Olympiade. (Applaudissements sur tous les bancs.)
Monsieur le secrétaire d'État, je commencerai cette intervention en vous félicitant et en vous remerciant d'avoir tenu vos engagements. Il y a quelques mois, en effet, vous nous promettiez ce projet de loi pour le premier semestre 2008 : nous voilà réunis pour cette occasion, malgré un calendrier particulièrement chargé.
La France, grande nation sportive s'il en est, a toujours été très au fait de la lutte contre le dopage. Depuis 1975 et la loi Mazeaud, le législateur s'est efforcé d'adapter les outils juridiques aux évolutions rapides des techniques de dopage. Les gouvernements successifs ont toujours mené une politique publique volontariste. Je vous félicite de suivre le même chemin.
Malgré tous ces efforts, l'expérience a fait apparaître certaines lacunes et vous avez cherché des solutions efficaces pour y remédier. La création du délit de détention et la pénalisation du trafic permettront un travail plus global sur les filières de trafic, du producteur jusqu'au consommateur final. Tout le monde est responsable, et la répression, même si elle ne doit pas être le volet central d'une politique efficace, est incontournable. Vous complétez ainsi utilement les outils juridiques au service de la lutte contre le dopage et nous ne pouvons que nous en féliciter. Vous prouvez ainsi votre attachement, et je vous en remercie, à un sujet qui me tient particulièrement à coeur. Le dopage est un véritable fléau qui porte atteinte à l'image et à l'esprit du sport, sans parler de la santé des sportifs.
Je souhaite que l'on puisse revenir à des compétitions peut-être moins spectaculaires et moins rapides, mais où l'esprit du sport sera respecté pour le bien-être des sportifs et la joie du public. Nous savons tous que cela est possible.
Si je reconnais que ce texte propose des solutions efficaces à des problèmes concrets – il est en effet difficile et complexe de mettre en place des politiques efficaces dans ce domaine –, je regrette toutefois qu'il persiste à donner du dopage dans le sport une vision partielle. Pourquoi le Gouvernement a-t-il déclaré l'urgence sur un texte qui peut et doit s'appliquer à tout type de compétition et à tout moment de l'année ? Certes, le Tour de France arrive dans quelques mois. Et là, mon sang ne fait qu'un tour. (Sourires.) Je veux une nouvelle fois dénoncer l'hypocrisie qui règne sur le sujet du dopage. Ce sont toujours les mêmes disciplines et les mêmes sportifs qui sont montrés du doigt et stigmatisés. Je vous avais d'ailleurs posé une question à ce sujet, il y a quelques semaines, monsieur le secrétaire d'État. Comme si le dopage était l'apanage des seuls cyclistes, athlètes et nageurs. C'est inacceptable ! C'est une évidence et M. Néri l'a dit, plus il y a de contrôles, plus il y a de chances de démasquer les fraudeurs. Il en existe partout : on les trouverait si on se donnait la peine de les chercher !
Vous l'avez vous-même reconnu, monsieur le secrétaire d'État, au regard du nombre de licenciés, le cyclisme est beaucoup plus contrôlé que le football, discipline que j'aime particulièrement, venant de la région de Saint-Étienne. Est-ce vraiment normal ? N'est-ce pas la preuve qu'on cherche volontairement à cantonner le dopage à la pratique de quelques sports ? Une telle stratégie peut avoir des conséquences désastreuses pour certaines disciplines qui pâtissent des habitudes répréhensibles de quelques-uns.
Que dire des sportifs eux-mêmes, qui sont mis dans le même sac que les fraudeurs et dont les carrières peuvent être brisées sur de simples allégations ou dénonciations – on l'a vu dans l'athlétisme – sans qu'ils n'aient jamais pu avoir l'occasion de prouver leur innocence ?
Je pense bien sûr aux cyclistes qui ont fait l'objet, depuis quelques années, d'un véritable acharnement médiatique et d'une chasse aux sorcières sans précédent. Et l'on continue aujourd'hui à les montrer du doigt, à l'occasion de ce texte. C'est injuste, me semble-t-il.
Le cyclisme et l'athlétisme sont les disciplines les plus stigmatisées, alors qu'elles sont celles qui oeuvrent le plus pour lutter contre le dopage…
…et se débarrasser des mauvais éléments qui ternissent l'image de tout le sport, et pas seulement celle de leur discipline.
À ce sujet, je me permets de signaler, pour ceux qui l'ignoreraient, que, lors du dernier Paris-Nice, où des contrôles nombreux et rigoureux ont été effectués par l'Agence française de lutte contre le dopage, aucun coureur n'a été reconnu positif.
La course a été ouverte et les Français se sont montrés, comme on dit dans le jargon cycliste. Nous assistons à un changement de culture. C'est une grande satisfaction pour le cyclisme et le sport français.
Depuis le début de l'année 2008, il y a eu plus de contrôles positifs dans le rugby – pardon, monsieur le secrétaire d'État, mais vous le savez – que sur l'ensemble du Tour de France 2007. Et, pourtant, on en a beaucoup moins parlé.
Nous devons absolument considérer l'ensemble des sportifs et toutes les disciplines de la même manière et sur un pied d'égalité face au dopage. C'est impératif pour que la politique soit efficace. Pas de discriminations !
Regardons les choses en face et ayons le courage de faire le grand nettoyage au sein du sport français. Il faut imaginer et mettre en place des procédures adaptées, assurant le respect des règles du sport, mais garantissant également les droits des sportifs.
La politique de santé publique, à travers la protection de la santé des sportifs, est en cause. Il n'y a donc pas à faire de discrimination entre les disciplines. Je continue, d'ailleurs, à me demander si nous pourrons connaître un jour les noms des sportifs impliqués dans l'affaire Puerto. Seuls des noms de cyclistes ont été divulgués, mais nous savons tous que cette affaire allait bien au-delà du cyclisme professionnel. Ce serait un grand pas en avant dans la lutte contre le dopage de mettre sur le même pied d'égalité tous les sportifs, je le répète, quelle que soit leur discipline – tennis, football – qui pourraient être impliqués dans cette vaste affaire de dopage.
Tous, sportifs, public, autorités sanitaires, médecins, souhaitent un sport propre, fût-ce au détriment du spectaculaire, j'en suis convaincu. Donnons-nous les moyens d'y parvenir. Voyons grand pour le sport, avec les 16 millions de licenciés en France et les 25 millions de pratiquants.
Je regrette, monsieur le secrétaire d'État, que ce texte n'aborde pas le problème dans sa globalité et qu'il ne soit pas question des AUT – les autorisations d'utilisation à des fins thérapeutiques. Je trouve cela regrettable, car le dispositif des AUT est intimement lié à la détention et au trafic – vous le savez, monsieur le secrétaire d'État.
Nous sommes tous d'accord sur la nécessité d'une révision de ce système qui a perdu de son efficacité et par là-même de son sens. Quand on sait qu'aux jeux Olympiques d'Atlanta – cela a été rappelé par Alain Néri – 80 % des athlètes disposaient d'une AUT pour la Ventoline, on voit bien qu'il y a là un vrai problème. Cela explique la révision en cours de ce système par l'Agence mondiale antidopage. Le projet que nous examinons n'en tient pas compte et il en résulte, à mon avis, quelques difficultés.
Tout d'abord, il crée un délit de détention de substances dopantes, sans faire de distinction quant à la gravité et à la dangerosité des substances. Dès lors, l'AFLD sera amenée à faire face à une explosion de la demande d'AUT, et ce pour des médicaments prescrits par ordonnance et médicalement justifiés – je pense notamment à la Ventoline.
Dès lors, soit il faut augmenter les moyens de l'AFLD à due proportion, soit il faut modifier le système des AUT,…
…et, en période de difficultés budgétaires, je crains que le choix ne soit rapidement fait.
Une solution serait, dans l'esprit du code mondial, de rendre licite la détention par la présentation soit d'une AUT, comme le texte le prévoit, soit d'une prescription médicale.
D'autres pistes d'améliorations sont possibles. On pourrait ainsi permettre à l'AFLD de reconnaître, par le biais de conventions, les AUT délivrées par des fédérations internationales ou d'autres agences. Ce n'est pas le cas aujourd'hui et cela pose de nombreux problèmes. C'est d'ailleurs, encore une fois, un principe établi par le code mondial antidopage. Ce système permettrait plus de souplesse et de rapidité.
Cette question des AUT est l'un des exemples de la nécessité d'une vraie coordination mondiale des politiques de lutte contre le dopage et d'une véritable intégration de ces principes supérieurs dans notre réflexion et notre législation. Or, à l'inverse, ce texte, destiné en premier lieu au Tour de France, est la preuve du caractère souvent trop franco-français de nos approches.
Nous devons être les acteurs de la coopération internationale dans ce domaine. Monsieur le secrétaire d'État, vous l'avez vous même reconnu, nous n'avons aucune prise sur ce qui se passe dans les autres pays, et parfois même dans le nôtre. On peut facilement imaginer des cas où, dans une grande compétition, le gagnant, licencié d'une fédération étrangère, convaincu de dopage soit sanctionné sans pour autant que l'AFLD ou qui que ce soit d'autre puisse le suspendre ou le déclasser.
Ainsi s'explique la création de l'Agence mondiale antidopage, chargée de rédiger le code mondial et de coordonner les différentes actions et les différentes législations nationales en la matière pour les rendre plus efficaces.
Aujourd'hui, le code mondial, dont nous avons accepté les principes, est en pleine révision. La nouvelle version devrait entrer en vigueur dans un peu plus de six mois. Elle rendra certainement obsolètes un certain nombre de dispositions actuelles.
Devrons-nous réclamer encore, dans un an, une nouvelle loi pour nous mettre en phase avec les autres législations et les règles mondiales ? C'est un nouveau motif pour déplorer, me semble-t-il, la déclaration d'urgence.
Pour terminer, je me permettrai de faire une proposition destinée à améliorer ce projet. Puisque les textes existants reconnaissent d'ores et déjà la différence entre les produits interdits et les produits dits « spécifiques » en matière de sanctions administratives, il semblerait logique d'appliquer une telle classification au délit de détention créé par le texte.
Certains produits, parce qu'ils sont moins dangereux, moins dopants et simplement très présents dans bon nombre de médicaments du quotidien – corticoïdes –, devraient bénéficier, me semble-t-il, d'un régime de détention particulier. Les sanctions devraient être aménagées, notamment si le détenteur des produits peut prouver, par exemple, qu'il n'y a pas objectif de dopage. Il semble évident de ne pas mettre sur un pied d'égalité la Ventoline, d'une part, et l'EPO, de l'autre,…
…tant en termes d'efficacité dopante que de dangerosité pour la santé.
Il en va de même pour le trafic. Dans la définition de la faute et de la sanction pour détention de produits, vous établissez une distinction entre un sportif et son entourage. Il semblerait plus judicieux de faire de même avec les produits, sans que cela nuise pour autant à votre objectif.
Monsieur le secrétaire d'État, le groupe Nouveau Centre vous apportera son soutien sur un texte qui propose des outils que nous considérons utiles dans la lutte contre le dopage. Mais nous continuons également d'espérer que la vision qui détermine la politique de lutte contre le dopage sera élargie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, depuis de longues années, le dopage est un mal qui ronge insidieusement le sport. Au-delà de quelques affaires à sensation, qui ont touché quelques disciplines populaires et médiatiques, il est à craindre – et c'est un euphémisme – que le mal ne soit profond et que la quasi-totalité des sports ne soient gangrenés par l'utilisation très diversifiée de substances illicites.
Quel rapport y a-t-il, en effet, entre le dopage d'un athlète qui a besoin de puissance sur une courte durée, et le dopage d'un athlète qui a besoin d'endurance et de résistance et qui travaille donc sur la durée ? À cet égard, il faut se méfier de l'arbre qui cache la forêt. En effet, la mise en accusation systématique et quasi exclusive de quelques disciplines est à la fois très injuste et très dangereuse. Elle est très injuste car elle incrimine de façon outrancière deux ou trois sports, et très dangereuse parce qu'elle nuit à l'efficacité de la lutte contre le dopage, certains sports n'étant que très peu, voire pas du tout contrôlés.
Il faut donc, en premier lieu, se défier et se méfier des jugements trop rapides qui tendraient à faire croire que le dopage est le triste privilège d'un petit nombre de disciplines.
Plus grave encore, il apparaît que le dopage n'est pas non plus l'apanage des sportifs professionnels, bien rémunérés par des employeurs, qui exigeraient d'eux en contrepartie un niveau et un renouvellement de performances qui seraient autant d'incitations à l'usage de produits dopants.
Force est au contraire de constater que le dopage est également présent dans les rangs des sportifs amateurs, voire dans ceux des sportifs très occasionnels. La pratique du dopage devient dès lors beaucoup plus dangereuse, car nous savons tous que le suivi médical des sportifs amateurs est souvent très aléatoire et très insuffisant, à l'inverse de l'encadrement mis en place au sein de disciplines et d'équipes sportives professionnelles très structurées.
En tout état de cause, quelle que soit la discipline, qu'il s'agisse de sportifs professionnels ou de sportifs amateurs, le dopage est la source de deux maux majeurs que le législateur ne peut ignorer.
En premier lieu, le dopage porte atteinte à l'éthique, qui est un élément si indissociable du sport qu'il en constitue la définition même.
En second lieu, le dopage porte atteinte à la santé, à l'intégrité physique et à l'équilibre psychologique du sportif. Il revient donc au législateur à la fois de préserver l'éthique et de protéger le sportif. Le projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui vise bien ces deux objectifs. Il s'agit, en effet, d'un projet qui s'inscrit d'abord dans la continuité de la lutte contre le dopage.
La première définition légale du dopage date de 1965. Il s'agit de la loi du 1er juin réprimant l'utilisation de substances « destinées à accroître artificiellement et passagèrement ses possibilités physiques et susceptibles de nuire à sa santé ».
La loi du 28 juin 1989 précise cette première définition en intégrant les progrès, si on peut les appeler ainsi, des formes de dopage. En effet, le nouveau texte prohibe non seulement l'utilisation des substances dopantes, mais également l'utilisation de celles qui ont pour but de masquer ces mêmes substances dopantes. Cette définition sera reprise par la loi du 5 avril 2006 et intégrée dans l'article L. 232-9, du code du sport.
L'évolution législative montre donc que l'adaptation est la condition nécessaire à l'efficacité de la lutte contre le dopage. Cette adaptation a également nécessité l'édiction de règles internationales dans le cadre du code mondial antidopage, adopté lors de la conférence de Madrid en novembre 2007. Il serait, en effet, vain et très illusoire de se limiter à des réglementations nationales très étanches…
…au risque très évident de créer des distorsions aussi inévitables qu'insupportables entre les sportifs de différents pays, alors même que ces sportifs ont vocation à s'affronter à l'occasion des compétitions internationales.
Aussi nous faut-il – mais je sais que c'est votre point de vue, monsieur le secrétaire d'État – soutenir l'action de l'Agence mondiale antidopage.
La nécessité d'adaptation implique donc de créer une infraction de détention de produits dopants et d'accroître le nombre des incriminations en matière de trafics, en y incluant, comme vous nous le proposez, la fabrication, la production, l'importation, l'exportation et le transport illicites de produits interdits.
Enfin, le souci de protéger les sportifs eux-mêmes justifie la disposition de l'article 8 du texte, qui prévoit pour ces sportifs une peine de un an, donc beaucoup moins élevée que celle fixée pour toute autre personne convaincue de trafic de produits dopants.
Le même souci de protection des sportifs justifie aussi la disposition de l'article 13 du projet, qui prévoit que le titulaire d'une autorisation à usage thérapeutique ne peut être poursuivi devant le juge répressif pour la détention de produits dopants. Il ne faut pas confondre l'arrêt de travail d'un salarié classique, relevant du droit commun, et l'arrêt de travail d'un sportif, notamment s'il s'agit d'un sportif professionnel.
Enfin, monsieur le secrétaire d'État, le projet que vous nous présentez est bien adapté à la réalité et à l'actualité du dopage. Il représente un juste équilibre entre la nécessité de réprimer des comportements déviants et le devoir qui est le nôtre de défendre l'intégrité des athlètes et l'éthique sportive.
L'équilibre, la mesure, mais également la détermination de ce texte doivent permettre de progresser dans la lutte contre le dopage pour l'ensemble des sports.
Il s'agit aussi d'un texte que j'oserai qualifier d'existentiel même si, dans les semaines et les mois à venir, il pourra être modifié compte tenu de l'ajout de nouvelles règles internationales. Quel est, en effet, le texte qui, une fois pour toutes, peut être considéré comme achevé ? Tous les textes ont vocation à être modifiés. En tout état de cause, son adoption par notre assemblée, monsieur le secrétaire d'État, constituera une grande avancée de notre droit positif en matière de lutte contre le dopage. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues : « J'trouve que c'est une victoire, parce que j'en suis sorti vivant. » Permettez-moi, monsieur le secrétaire d'État, de détourner cette citation guerrière de Dorgelès, car elle évoque bien ce que représente pour moi le dopage.
Nulle compétition ne vaut qu'on y laisse sa vie et sa santé. C'est dire l'importance de notre débat d'aujourd'hui Nous sommes tous, sur ces bancs, unanimes pour dire qu'il faut impérativement lutter contre le dopage. Notre siècle a sept ans et la France est à la pointe du combat. Cela tient à l'action d'un certain nombre d'éminents ministres, sous divers gouvernements, qui ont oeuvré dans ce sens, quelle que soit leur couleur politique : je pense à Marie-George Buffet ou à Jean-François Lamour. Grâce à une action gouvernementale déterminée, grâce aussi au combat des parlementaires, nous sommes aujourd'hui à la pointe dans la lutte contre le dopage. Nous sommes tous, ici, amoureux du sport. Je suis un jeune parlementaire, mais je sais que les plus anciens ont beaucoup fait dans ce domaine.
L'Agence française de lutte contre le dopage, exceptionnelle, est adossée à un laboratoire – celui de Châtenay-Malabry –, qui est probablement le meilleur au monde. Son conseil scientifique est remarquable, et reconnu au niveau international. Le financement de ce laboratoire est une donnée essentielle.
Pour en avoir parlé avec le remarquable président de l'Agence, Pierre Bordry, je puis dire que, avec cette loi, nous risquons de voir les fameuses autorisations à usage thérapeutique proliférer. Rien qu'à l'annonce du texte, elles ont été multipliées par dix. Nous aurons même des milliers de demandes. On connaît le sérieux de l'Agence française de lutte contre le dopage par rapport à ces autorisations : les autorisations abrégées disparaîtront dans les mois à venir, on peut l'imaginer et le souhaiter. Quant aux autorisations étudiées avec soin, elles se multiplieront. On risque d'assister à une véritable foire à l'autorisation d'utilisation des produits. C'est ennuyeux. L'Agence française n'aura pas les moyens de répondre à ces demandes. En outre, dans l'esprit, ces autorisations n'ont plus lieu d'être, vous l'avez rappelé, monsieur Rochebloine, et il est regrettable que l'on n'en parle pas davantage dans ce texte.
Dans le sport, l'enjeu, c'est la victoire. Mais, en l'occurrence, pour gagner la lutte contre le dopage, il faut attaquer au bon moment, monsieur le secrétaire d'État, et viser la victoire. Or le calendrier n'est pas bon, Mme Buffet, M. Néri et M. Rochebloine l'ont rappelé. L'Agence mondiale de lutte contre le dopage produira un certain nombre de textes. Le code mondial contre le dopage entrera en vigueur le 1er janvier 2009. On observe que les mentalités anglo-saxonnes évoluent dans ce domaine. La proximité des jeux Olympiques change également la donne. Dans ces conditions, il est probable que la plupart des décisions qui vont être prises dans le cadre de cette loi se révèleront obsolètes et que demeureront seulement les aspects les plus négatifs.
Nous aurions gagné à travailler ensemble d'une manière plus sereine, en prenant notre temps, mes chers collègues, d'autant que le sujet est consensuel. L'urgence, certes, nous l'avons tous reconnu, c'est le Tour de France. Mais cette urgence stigmatise un sport, le cyclisme, ce que, pour ma part, je déplore. Je suis, la semaine prochaine, le médecin des Quatre jours de Dunkerque. Monsieur le secrétaire d'État, vous qui, la semaine dernière, avez nagé à Dunkerque, je vous invite à venir y faire un peu de vélo la semaine prochaine ! (Sourires.)
On montera à Cassel ; on pourra même passer par Bergues, si vous le souhaitez !
Ceux qui connaissent le monde cycliste savent que les coureurs cyclistes ne sont pas des délinquants. Ce sont des sportifs exceptionnels, en particulier – au risque de paraître un peu « franchouillard » – les coureurs français, qui ne se battent pas toujours à égalité de chances, mais néanmoins avec beaucoup de courage.
La caractéristique du cyclisme est d'être un sport itinérant. Il est donc bien plus facile d'arrêter un fournisseur de produits dopants dans une caravane cycliste : c'est du reste ce qui s'est passé lors de l'avant-dernier Tour de France. Je ne voudrais pas que cette spécificité stigmatise les coureurs cyclistes.
En effet, monsieur Rochebloine, vous avez raison d'en parler. Les contrôles, réalisés avec un grand sérieux par l'Agence française de lutte contre le dopage, selon les normes françaises, n'ont révélé aucun contrôle positif.
Le projet de loi distingue deux catégories : d'un côté, les produits dopants durs, puissants, comme l'EPO, l'hormone de croissance, les anciens corticoïdes, anabolisants encore en usage du fait de leur faible coût, hélas ; de l'autre, les produits plus classiques que l'on trouve dans n'importe quelle armoire à pharmacie.
En fait, les sportifs sont soumis à une double peine, car ce ne sont pas forcément les sportifs délinquants qui possèdent une bombe de Ventoline dans leur pharmacie, laquelle peut être destinée à un membre de leur famille. Ce n'est pas parce qu'on a un couteau dans sa ménagère, qu'on assassinera forcément sa belle-mère, même celle de Rumsas ! (Sourires.) Bref, une dérive est possible et, à cet égard, j'indique que les autorités de police et de gendarmerie se disaient gênées par rapport à ces perquisitions qui conduiraient à des condamnations, et donc à une double peine.
Un autre point me tient à coeur. L'EPO et les hormones de croissance supposent une production de ces substances. Je suis, pour ma part, partisan d'une véritable traçabilité de ces produits. À l'heure actuelle, l'EPO biosimilaire est totalement indétectable, de même que les doses filées. Quant à l'hormone de croissance, que j'ai beaucoup de difficulté à obtenir – tant les démarches administratives sont lourdes – pour faire une injection à un enfant qui en a besoin, sa durée de vie est tellement courte qu'elle ne peut se détecter que dans les deux heures suivant son administration. Seule une réelle traçabilité permet de détecter et de contrôler ces substances issues des laboratoires. Par ailleurs, ces médicaments merveilleux ont fait faire des progrès exceptionnels à la médecine.
J'appelle votre attention, monsieur le secrétaire d'État, sur le fait que l'EPO tombera bientôt dans le domaine public –comme Debussy (Sourires). La traçabilité sera donc rendue plus difficile. Si tous les laboratoires se mettent à produire de l'EPO, le contrôle sera difficile. Nous devrions encourager la traçabilité en collaboration avec les laboratoires. En 1794, le président du tribunal révolutionnaire avait dit à Lavoisier : « La Révolution n'a pas besoin de chimistes », avant, hélas, de le conduire à l'échafaud. De fait, nous avons besoin, nous, de chimistes pour lutter contre le dopage, ainsi que de la collaboration des grands laboratoires.
Il s'agit là d'une autre compétition. Je pense qu'ils seraient d'accord pour y participer avec nous. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, alors que cet été sera marqué par d'importants événements sportifs nationaux et, surtout, internationaux, la question du dopage continue à entacher le sport. Une nécessité de premier ordre s'impose donc : la lutte contre le dopage, qu'il faut poursuivre.
Le sport a aujourd'hui une fonction éducative et sociale importante dans notre société, et cette reconnaissance passe nécessairement par l'exemplarité du sportif. Un sondage IFOP a révélé que, pour 84 % des personnes interrogées, le dopage était inadmissible, car il compromet l'image du sport auprès des jeunes. S'il est nécessaire de se distancer par rapport à une pensée selon laquelle tous les sportifs seraient dopés ou complices, il est important de rappeler que 99 % des sportifs sont propres.
Cependant, il est indéniable que le problème du dopage affecte tous les sports à tous les niveaux de pratique, justifiant ainsi les efforts continus et le renforcement de la lutte contre le dopage.
Après les lois de 1965, 1989 et 1999 prohibant l'utilisation de produits dopants par les sportifs, la loi du 5 avril 2005 a permis un accroissement des moyens sans précédent. Cette loi du 5 avril 2005 répondait à un triple objectif : tout d'abord, améliorer les outils et le cadre juridique de la loi contre le dopage, pour rendre plus performant le dispositif national ; ensuite, harmoniser ce dispositif national avec le nouveau cadre international, en tenant compte de la création de l'Agence mondiale antidopage et du code mondial antidopage ; enfin, renforcer la protection de la santé des sportifs.
Cette loi a tout d'abord institué une autorité administrative indépendante, l'Agence française de lutte contre le dopage, chargée de veiller à l'efficacité et à l'effectivité de cette lutte, en regroupant les fonctions de plusieurs entités.
Cette agence exerce ses responsabilités dans six domaines complémentaires : l'organisation des contrôles anti-dopage ; les analyses des prélèvements ; le suivi des procédures disciplinaires et, par corrélation, la délivrance des autorisations d'utilisation à des fins thérapeutiques ; les actions de recherche ; les actions de prévention ; la présence internationale et la fonction de conseil des fédérations et du Gouvernement dans la lutte contre le dopage.
Un réseau de vingt-quatre médecins conseillers a été mis en place auprès des directeurs régionaux et départementaux de la jeunesse et des sports, permettant d'appliquer la politique nationale médico-sportive dans chaque région.
Les moyens financiers sont également en pleine croissance : ils ont augmenté de plus de 300 % en dix ans pour atteindre 22,24 millions d'euros en 2006 contre 5,64 millions d'euros en 1997. Nous avons rappelé tout à l'heure qu'Édouard Landrain a été partie prenante dans la lutte contre le dopage.
À mon tour, je salue sa mémoire .
Cette augmentation a permis de soutenir l'Agence française de lutte contre le dopage, grâce à un programme national de contrôles, d'analyse des échantillons – plus de 9 000 en 2005 – et de recherche sur les méthodes de détection, ainsi que la réalisation de ses missions disciplinaires ; d'augmenter le nombre d'analyses de prélèvements urinaires ; de mettre à disposition des sportifs et de leur entourage une antenne médicale dans chaque région ainsi qu'un dispositif national d'écoute téléphonique ; de soutenir les fédérations dans le cadre du suivi médical des sportifs de haut niveau, de l'encadrement médical des compétitions et des actions de prévention ; enfin, de mettre en place une stratégie de la prévention du dopage en coordonnant l'ensemble des acteurs concernés.
Cependant, avec le recul, il est apparu qu'une amélioration de la loi était nécessaire afin de mieux protéger le sportif tout en pénalisant le trafic de produits dopants.
Le texte de 2005 comporte des lacunes dans la lutte contre le trafic de produits dopants. En effet, les textes actuels ne concernent que la cession et l'offre de produits dopants. Un double réajustement est nécessaire.
La disposition actuelle ne permet pas de procéder à des perquisitions, saisies ou gardes à vue, ce qui est pourtant indispensable pour démanteler les filières. L'ensemble des procédés dopants utilisés n'est pas visé par la loi actuelle : ainsi, le dopage par transfusion sanguine n'est pas puni par cette loi.
Ensuite, il faut harmoniser le droit français avec les règles internationales. La France a ratifié en février 2006 la convention internationale contre le dopage dans le sport et a adhéré aux principes prônés par le code mondial anti-dopage, adopté lors de la conférence de Madrid, en novembre 2007, qui doit entrer en vigueur le 1er janvier 2009. Le projet de loi permet de se conformer aux engagements internationaux de la France.
Nous devons également améliorer les moyens de lutter contre le dopage. Le projet de loi prévoit de renforcer la lutte contre le trafic : il introduit la notion de détention de substances ou procédés dopants dans le code du sport. La détention, sans raison médicale dûment justifiée, de substances ou procédés dopants par le sportif en vue de son usage personnel est prohibée. En outre, l'interdiction faite à toute personne de détenir des produits dopants est étendue à leur production, leur fabrication, leur transport, leur importation, leur exportation et leur acquisition, aux fins d'usage par un sportif sans raison médicale dûment justifiée. C'est désormais le trafic de produits dopants dans sa globalité qui est ainsi soumis à sanctions.
Le volet relatif à la répression est conservé : les sanctions pénales à l'encontre des trafiquants et des pourvoyeurs peuvent aller jusqu'à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende, avec circonstances aggravantes lorsque les faits portent sur d'un mineur ou sont commis en bande organisée.
Par ailleurs, cette loi renforce les prérogatives de police judiciaire des agents relevant du ministre chargé des sports et des personnes agréées par l'Agence française de lutte contre le dopage en vue de rechercher et de constater des infractions pénales. Ainsi, ces personnes sont désormais habilitées, sur autorisation judiciaire, à geler et à mettre en sécurité les objets relatifs aux infractions et à constater les infractions.
Enfin, il importe de ne pas stigmatiser les sportifs, comme divers orateurs l'ont souligné. En dissociant, au niveau des peines, sportifs et membres du trafic, la loi cherche à rappeler que les sportifs, avant d'être les bénéficiaires de ses produits, en sont avant tout les victimes. Il s'agit ainsi de les sanctionner sans pour autant les stigmatiser. L'article 6 prévoit un an d'emprisonnement pour tout sportif qui détient un produit dopant pour son usage personnel, peine allégée par rapport à celle qui serait appliquée à toute autre personne. Comme il a été dit, des problèmes d'éthique se posent également.
« Toujours plus haut, toujours plus loin, toujours plus vite » : tels sont les buts, fort louables, de tous les sportifs et plus particulièrement des sportifs de haut niveau. À l'heure où le sponsoring est de plus en plus présent, où le résultat est lié, entre autres, à l'hygiène de vie et à la qualité de l'entraînement, il convient que le dopage, solution de facilité, soit combattu avec une très grande fermeté, afin que le sport garde ses lettres de noblesse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le secrétaire d'État, partant du constat, que je partage amplement, selon lequel la nouvelle législation sur le dopage s'avère incomplète sur plusieurs points importants, même si ses principes fondamentaux sont posés, vous vous étiez engagé à la faire évoluer, lors des débats sur le projet de loi de finances pour 2008. Je note avec plaisir que vous tenez vos promesses, du moins sur ce sujet. Voilà un bon point. Mais cela va-t-il durer ? (Sourires.)
Nous attendions vainement les bienfaits escomptés de l'agglomérat ministériel santé-sport. En voilà une première manifestation, qui émane davantage de Bernard Laporte que de Roselyne Bachelot. Cela n'est pas gênant en soi mais c'est étonnant : ce texte, tourné vers les perquisitions et les sanctions plutôt que vers la prévention et la recherche médicale, rapproche le ministère des sports de la place Beauvau et l'éloigne de l'avenue de Ségur. Mais Mme Alliot-Marie ne désapprouverait sans doute pas votre retour à l'Intérieur, monsieur le secrétaire d'État.
Plus sérieusement, nous espérions un renforcement des moyens financiers dévolus au pôle sport-santé. Or nous devons encore déplorer des carences. J'espère que ce gouvernement s'engagera à terme à dégager un budget à la hauteur des enjeux et à traduire dans les faits la synergie qu'il a tant vantée.
Ce texte sur le dopage est le sixième en quarante-trois ans, il intervient seulement deux ans et vingt-cinq jours après que Jean-François Lamour nous a présenté son projet de loi, ce qui donne la mesure de la pathétique course de vitesse entre les gendarmes et les voleurs, entre volontarisme et fatalité, entre le vice et la vertu.
Le moment était-il bien choisi ?
Pour ce qui est du calendrier parlementaire, il y avait sûrement mieux à faire que d'examiner ce texte, très « grand public », une veille de pont du 1er mai.
Pour ce qui est du calendrier sportif, nous voyons bien se profiler, à l'approche du Tour de France et des jeux Olympiques de Pékin, l'un de ces bons vieux plans de communication officielle.
Pour ce qui est du contexte institutionnel, il faut rappeler que la France a toujours été à l'avant-garde du combat contre le fléau du dopage, même si la majorité actuelle était hier aussi enthousiaste en ce domaine que sur les OGM aujourd'hui. N'est-ce pas, madame Buffet ?
D'autant que nous avons beaucoup travaillé sur le texte de Mme Buffet !
Depuis la conférence de Madrid, en novembre 2007, le code mondial anti-dopage a beaucoup évolué en matière de sanctions, de contrôles inopinés et d'autorisations à usage thérapeutique et il est clair que les pays signataires de la convention de l'Unesco se trouvent dans l'obligation d'adapter leurs réglementations.
Mais je ne sais toujours pas à quelle sauce il convient d'accommoder le terme «urgence » ? La seule urgence qui vaille pour moi est celle de se doter de moyens : tout d'abord, des moyens à la mesure des enjeux que représentent le développement sportif durable et l'éthique, ou toute autre exigence analogue, porteuse de beaux sentiments ; ensuite, des moyens financiers pour la recherche fondamentale et pour la recherche des délits et des délinquants, car ils ne sont toujours pas au rendez-vous – je l'avais dénoncé à cette tribune, le 7 novembre 2007, comme je le fais de manière répétée depuis 2002 ; enfin, des moyens pour organiser des forces de prévention, de dissuasion et de sanction.
Je ne fais pas partie des âmes sensibles qui s'attendrissent devant le sort des sportifs, champions ou pas, considérés comme les pauvres victimes du système alors qu'ils sont également coupables et, à double titre : coupables de tricherie devant la morale sportive et témoins transis de leur propre déchéance physique et psychologique. Qu'on leur tende la main, c'est nécessaire quand le délit est isolé et qu'il renvoie à la misère humaine et à la rédemption, mais qu'on les recherche et qu'on les punisse s'ils agissent en bande organisée dans un esprit de lucre caractérisé, il n'y a rien à redire.
Dans ces conditions, l'alternative est simple : soit l'on supprime les références pénales dans le code du sport et l'on considère que le sujet doit être traité dans le cadre du droit commun ; soit on améliore l'arsenal pénal au sein du code du sport. Vous avez choisi la deuxième solution, et je m'en félicite. Je préfère, en effet, que le dossier d'un sportif dopé soit traité dans sa globalité : par les fédérations pour ce qui concerne les sanctions sportives et par les juges qui, grâce aux dispositions que nous voterons ici, pourront apprécier les diverses situations à leur juste mesure, dans un contexte juridico-sportif. Il n'entre pas dans nos intentions d'envoyer en prison tous les sportifs convaincus de dopage – comme en Italie –, mais bien de traquer les filières qui sont organisées par des gens sans scrupules, parfois même au sein des populations sportives.
Si, dans son approche globale, votre projet de loi nous paraît convenable, il suscite des réserves de notre part sur plusieurs points. D'abord, le texte a manifestement été rédigé à la hâte, comme en attestent les quinze amendements rédactionnels qu'a dû déposer notre rapporteur. Ensuite, il ne fait pas la distinction entre les divers niveaux des substances prohibées et ne fait pas preuve d'un zèle démesuré s'agissant des autorisations à usage thérapeutique, les célèbres AUT. En la matière, les exceptions semblent devenues la règle : comme chacun sait, il y a beaucoup de rugbymen asthmatiques dans l'hémisphère sud, sans doute du fait de l'air des hauts plateaux ! Il en va de même pour ce qui est de la crédibilité des contrôles complémentaires, pourtant prévus à l'article L. 332-2 du code du sport, et de l'appréciation que pourront porter les juges sur les AUT délivrées à l'étranger. En outre, à peine rédigé, ce texte risque de subir des modifications en raison de la suppression annoncée des AUT abrégées avant les jeux Olympiques de Pékin.
Enfin, même si cela ne relève pas directement du texte, il convient de rappeler que le programme de contrôle du dopage de l'Agence mondiale anti-dopage est l'un des éléments-clés de la promotion et de la coordination de la lutte contre le dopage dans le sport au niveau international. Aussi convient-il d'être particulièrement attentif aux différentes avancées proposées en termes de coopération internationale.
Autre instance de poids dans le cadre de la coopération internationale, l'Union européenne doit prendre toute sa place dans ce combat. Il faut se rappeler que le Livre blanc sur le sport, rendu public par la Commission européenne en juillet 2007, a abordé les questions de coopération européenne en matière de lutte contre le dopage. En tant que rapporteur spécial du budget de la jeunesse, des sports et de la vie associative, j'ai déjà eu de multiples occasions d'exprimer mon souhait de voir la présidence française de l'Union européenne faire de cette lutte une de ses priorités en matière sociétale. Et nous vous invitons, monsieur le secrétaire d'État, à faire avancer cette cause.
Il y avait urgence à traiter efficacement le problème du dopage des sportifs et des animaux, mais, à la lecture de ce texte, on peut dire qu'il est parfois préférable de se hâter lentement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ce débat n'est pas une discussion sur la place du sport dans la société contemporaine, mais vous me permettrez, avant d'en arriver au texte lui-même, de faire un détour par quelques considérations générales.
Le sport réclame, pour son exercice même et pour la préservation de son image et de son attractivité, que trois conditions soient remplies : l'égalité des chances entre les participants sur la ligne de départ, la loyauté de ces mêmes participants les uns vis-à-vis des autres, l'impartialité des personnes qui doivent juger et estimer les performances réalisées. Or le dopage conduit inévitablement à réduire à néant l'égalité entre les participants et la loyauté qui doit les animer. C'est la raison pour laquelle, il constitue une nuisance objective pour le sport dans son ensemble ainsi que pour l'image qu'il donne de lui-même dans notre monde.
Certains se seraient sans doute volontiers contentés d'en rester à ces constats, maintes fois formulés. Mais la réflexion sur le sport menée par les sociologues, les philosophes et les psychologues suscite bien d'autres sujets d'interrogation. Certaines critiques se concentrent sur le sport comme signe par excellence de la dérive capitaliste de la société contemporaine. Michel Caillat, professeur à l'université d'Orléans, évoque ainsi sa pratique et son instrumentation aux fins de lucre. D'autres, comme Georges Vigarello, voient dans le phénomène sportif et dans le dopage en particulier une « illusion individualiste propre à notre temps » : « Le sentiment partagé par nombre d'acteurs dans une société individualiste de pouvoir indéfiniment agir sur leur propre corps, celui de pouvoir échapper à tout enracinement physique. […] Rien d'autre qu'un des effets du lent mouvement d'émancipation de la sphère privée, avec ses possibles illusions et naïvetés ». « Le dopage, conclut-il, n'est finalement que la formule la plus courante donnée à ces pratiques répandues visant à la modification et à l'amélioration de soi-même ».
On pourrait en rester à ces constats, qui sont très justes. Mais il y a nécessité de prendre en compte une évolution lente mais réelle s'agissant du dopage : d'un simple jugement sur sa légalité, nous passons à une appréciation sur ses effets sur la santé publique. C'est ce qui nous réunit aujourd'hui.
J'ai bien compris les objections de certains de nos collègues socialistes sur la nécessité de maintenir l'effort d'éducation et de prévention. J'irai dans leur sens, en ajoutant qu'il doit se faire sentir très tôt, à l'échelon des clubs. Il ne s'agit pas simplement de faire attention aux produits consommés mais aussi de faire comprendre ce qu'est la victoire et à quoi elle sert. Certes, comme l'a souligné Guénhaël Huet, c'est une tragédie pour un sportif professionnel, qui s'est entraîné sa vie durant, d'interrompre sa carrière pendant trois mois, mais jouer sa vie ou l'équilibre de sa famille sur un seul set sur un court de tennis de banlieue quand on a dix ans n'est pas moins dramatique. Il faut donc être vigilant car tout cela existe.
Il est difficile pour lutter contre le dopage de se contenter du seul plan de la légalité des pratiques. Il importe de s'attaquer en même temps, sur le plan de la culture et de l'éducation, à ce que Marie-George Buffet appelait le culte de la performance ou de la victoire à tout prix, car tout cela est lié.
Enfin, l'impératif de santé publique est de plus en plus présent dans la relation des phénomènes de dopage. Ce texte a deux vertus principales qui justifient, de mon point de vue, de le soutenir pleinement.
Premièrement, il tire les enseignements de l'expérience Festina dont les malheureux événements ont eu lieu voilà bientôt dix ans. Nous avions découvert alors tous ensemble que la douane et la police avaient fait bien mieux et bien plus vite que l'ensemble des autorités sportives qui avaient pourtant diligenté des contrôles en la matière. Le Gouvernement a pris acte que l'intervention claire des pouvoirs publics est devenue parfaitement nécessaire, notamment au vu du comportement d'un certain nombre d'acteurs internationaux. Je ne désignerai pas telle ou telle fédération en particulier, ne voulant pas m'attirer les foudres de M. Rochebloine, mais il faut admettre que le comportement de l'UCI n'est pas des plus exemplaire en la matière.
Deuxièmement, cette intervention est rendue nécessaire par les enjeux de santé publique qui affectent désormais toutes les populations, tous les âges et toutes les disciplines, tous les types de compétition et toutes les régions. Il est hautement nécessaire que la lutte ne se concentre plus seulement sur le plan intellectuel ni éducatif mais sur les trafiquants et les filières. Le texte prévoit des sanctions que certains d'entre vous jugent trop lourdes. Même si l'on peut comprendre que stigmatiser un sportif qui consomme n'est pas tout à fait l'attitude qui convient, il est nécessaire de prendre des sanctions, au nom des enjeux de santé publique, de l'exemplarité et tout simplement en raison de l'infraction commise.
Ce signe politique fort envoyé au monde sportif et au-delà à l'ensemble des trafiquants et des fournisseurs nous conduit à devoir voter ce texte, en rappelant que le sport est fait pour l'homme et non l'homme pour le sport ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Michel Ménard, dernier orateur inscrit dans la discussion générale.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la lutte contre le dopage est un enjeu majeur de santé publique pour les sportifs de haut niveau mais aussi pour tous les sportifs et en premier lieu pour les enfants. Dès lors, il est bien normal d'adapter, d'améliorer régulièrement la législation.
Nous ne pouvons que souscrire à toute volonté de lutter contre le dopage. Malheureusement, le projet qui nous est soumis ne répond que très partiellement à cet objectif. C'est dommage car nous pourrions nous retrouver, unanimement, sur un texte bien travaillé.
Par ailleurs les conditions dans lesquelles nous sommes amenés à travailler sur ce texte sont déplorables. Pourquoi en effet examiner ce projet en urgence alors qu'il nous faudrait du temps pour échanger avec les différents acteurs concernés que sont le monde médical et le mouvement sportif ?
Par ailleurs, comment se satisfaire de l'examen de ce projet en commission en moins d'une demi-heure ? Certes ce n'est pas le seul texte étudié dans ces conditions, mais voilà une fois de plus un exemple qui montre de quelle manière les projets de loi arrivent en discussion en séance publique.
Sur le fond, je regrette que la lutte contre le dopage ne nous soit présentée que sous l'aspect répressif. En effet, le texte ne prévoit aucune mesure nouvelle en termes d'éducation et de prévention.
À l'image de beaucoup d'autres textes qui nous sont soumis depuis quelques mois, c'est la répression qui est renforcée, sans discernement.
Bien sûr, introduire une infraction pénale de détention de produits dopants peut aider les enquêteurs à remonter et à démanteler une filière. Mais prévoir un an d'emprisonnement pour un sportif détenteur d'un produit quel qu'il soit est anormal et inadapté. Bien sûr, il est nécessaire de compléter la liste des incriminations pénales en matière de trafic concernant la fabrication, la production, l'importation, l'exportation et le transport de produits interdits, bien sûr la sanction est parfois nécessaire, mais les actions de prévention doivent être privilégiées et renforcées.
Alain Néri l'a rappelé tout à l'heure, il n'est pas question d'être laxistes. Il faut, au contraire, faire preuve d'une grande sévérité à l'encontre des tricheurs et des trafiquants. Mais, même le mouvement sportif, qui est favorable à la lutte contre le dopage, est très réservé sur ce texte – et il a raison – parce que l'infraction de détention de produits dopants risque de s'appliquer indifféremment, quel que soit le produit et quelle qu'en soit la quantité.
En quoi la pénalisation d'un sportif possédant à son domicile un médicament vendu en pharmacie traitant des difficultés respiratoires permettra-t-il de remonter une filière ? On voit bien là qu'il y a un risque de stigmatisation des sportifs sans pour autant être plus efficace dans la lutte contre le dopage.
Premier regret donc : un sportif risque d'avoir la même sanction, qu'il possède des produits « lourds » ou un médicament courant dans sa pharmacie familiale.
Deuxième regret : ce projet de loi aurait dû être l'occasion de clarifier les règles d'utilisation des AUT, ces médicaments qui peuvent être pris par les sportifs dès lors qu'il y a prescription médicale. Or il n'en est rien. Pourtant, nous savons tous que ces autorisations à usage thérapeutique sont l'occasion pour certains sportifs de prendre en toute légalité des produits médicaux améliorant la performance, donc de tricher.
J'aurais souhaité que l'utilisation de ces AUT soit beaucoup mieux encadrée. Des solutions existent si nous en avons la volonté.
Bien sûr, un sportif peut être amené, comme tout un chacun, à se soigner. Mais cela doit être limité dans le temps, avec une possibilité de contrôle. Pourquoi ne pas prévoir qu'un usage prolongé etou répété d'un produit soit contrôlé par un service indépendant, sous la responsabilité de l'État ? Quand un salarié bénéficie d'un arrêt maladie, prescrit par son médecin traitant, il est bien rare qu'il soit contrôlé si c'est exceptionnel. Par contre, la sécurité sociale vérifie les arrêts à répétition. Il pourrait, il devrait en être de même pour les AUT, afin de s'assurer que ces autorisations ne sont accordées que dans des cas médicaux indispensables pour la santé et non pour améliorer la performance.
Comme l'a rappelé Alain Néri, il est nécessaire de multiplier les contrôles inopinés. Actuellement, nous sommes dans une situation d'hypocrisie, et il en est de même dans les autres pays. L'enjeu pour les sportifs recourant à des produits dopants est de rester sous le seuil autorisé, d'effacer les traces de dopage avant la compétition, de légaliser la consommation de tel ou tel produit par une autorisation médicale.
Enfin, comment ne pas regretter que le budget de l'État consacré à la lutte contre le dopage diminue d'année en année : 24 millions d'euros en 2002, 15 millions d'euros en 2008, soit en euros constants une enveloppe divisée par deux ? La lutte contre le dopage est un enjeu de santé publique qui nécessite des crédits budgétaires à la hauteur de la lutte qu'on entend mener.
En conclusion, monsieur le secrétaire d'État, vous nous soumettez un texte imprécis, incomplet, examiné en urgence avant le Tour de France, un texte qui ne répond en rien aux attentes du mouvement sportif. Franchement, le présent projet de loi est à reprendre totalement, tranquillement, en concertation avec tous les acteurs concernés.
L'adopter en l'état serait vraiment manquer une occasion, ce serait uniquement un affichage politique, sans volonté de s'attaquer vraiment au problème auquel nous sommes confrontés, qui est pourtant un enjeu majeur de santé publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La discussion générale est close.
La parole est à M. le secrétaire d'État, chargé des sports, de la jeunesse et de la vie associative.
Mesdames, messieurs les députés, je vous remercie pour votre participation.
Un des sujets les plus largement évoqués est celui des autorisations d'usage à des fins thérapeutiques, qui ont été créées par l'Agence mondiale antidopage. La loi nous interdit donc de les interdire, si je puis dire ; on peut seulement en encadrer la pratique. L'un de mes joueurs de la Coupe du monde de rugby, Yannick Nyanga, est asthmatique et a en permanence des AUT. Il serait tout de même rude de lui interdire de faire du sport !
Les joueurs bénéficiant d'AUT doivent être contrôlés par un service indépendant !
En effet, il faut savoir raison garder. Cela dit, la recrudescence des AUT existe déjà.
Pour avoir baigné dans le milieu sportif pendant quinze ans, je sais que les médecins ne signent pas des certificats de complaisance. J'ai des amis qui ont été médecins au PSG ou à Marseille, et je peux vous garantir qu'ils n'en font pas car ils mettraient leur responsabilité et leur carrière en jeu. Que cela existe dans d'autres pays… Je ne peux pas parler de ce que je ne connais pas.
Mais pas à Sydney ou à Athènes !
Mme Buffet souhaite exclure du champ pénal la détention de ce qu'on appelle les « substances spécifiques » et a déposé un amendement en ce sens. Personnellement, je n'y suis pas favorable. Le code mondial de l'antidopage a créé une liste et nous devons nous y tenir. Il n'est pas question de créer un dispositif franco-français.
Quant au calendrier, madame Buffet, je suis pleinement d'accord avec vous : les joueurs sont trop sollicités. Mais il est impossible de régler cela par la loi. Il faut seulement sensibiliser les fédérations françaises et internationales. Vous avez cité de Serge Simon, que je connais bien, puisque j'ai joué avec lui. Il est convaincu – et c'est un médecin – que les joueurs sont trop sollicités. Le rugby est un sport très difficile, très contraignant, qui demande de la récupération, de la régénération et de la préparation. C'est le cas du cyclisme aussi : je vais essayer de ne pas mécontenter les nombreux amateurs qui sont ici et qui se plaignent que les contrôles se concentreraient sur ce sport. Et je me bornerai à relever que les efforts que font les coureurs dans un Paris-Nice ou pour gravir le Mont Ventoux ne sont tout simplement pas comparables avec ceux que l'on demande aux footballeurs. Malheureusement pour le cyclisme, les gros scandales ont vu le jour dans ce sport. On ne peut donc pas me dire qu'il ne faut pas contrôler le cyclisme.
C'est vrai. Le rugby est un sport qui demande beaucoup d'efforts. Et s'il faut être vigilant sur un sport, c'est bien sur celui-là, j'en suis pleinement convaincu.
Effectivement, monsieur Rochebloine.
En tout cas, je suis persuadé qu'il n'y a pas beaucoup de dopage dans le football. C'est un sport d'endurance qui ne nécessite pas beaucoup de force.
Veut-on vraiment combattre le fléau du dopage ou non ? Certes, il doit y avoir des sportifs « victimes », mais pour bien les connaître, je peux vous dire qu'ils sont moins nombreux que vous le pensez. Eux aussi seront mis devant le fait accompli. S'ils sont pris avec un produit destiné à un usage personnel, ils seront sanctionnés. C'est dur pour moi qui aime les sportifs, mais si on veut vraiment combattre ce fléau, il faut les mettre devant leurs responsabilités et arrêter de dire que ce sont des victimes car, croyez-moi, ils le sont de moins en moins. Ils savent mieux que nous ce qu'il faut faire et surtout ils sont bien conseillés. Ils joueront le jeu avec nous.
Cela dépend de quel côté on se place ! (Sourires.)
Effectivement, mais on aurait pu aussi proposer une suspension de six ans, voire une radiation à vie. Croyez-moi, une fois la loi en vigueur, ils seront vigilants et ils nous aideront à éradiquer ce fléau. Arrêtons aussi de dire que les sportifs sont des victimes, ce sont aussi les premiers fautifs. Et vous savez pourtant que je les aime !
J'appelle maintenant, dans le texte du Gouvernement, les articles du projet de loi.
Sur l'article 1er, je suis saisi d'un amendement n° 1 .
La parole est à M. Bernard Depierre, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour le soutenir.
Cet amendement, de précision, vise à lever une ambiguïté rédactionnelle, en prévoyant expressément que la raison médicale invoquée peut être justifiée par la présentation d'une AUT – autorisation pour usage à des fins thérapeutiques –, mais aussi par tout autre moyen.
Avis favorable.
M. le rapporteur a bien perçu les insuffisances de ce texte. Il prévoit la présentation d'une AUT ; nous pensons que ce sera inopérant : le problème des AUT doit être traité au fond, et non de manière superficielle. C'est pourquoi le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche ne votera pas cet amendement.
Je suis saisi d'un amendement n° 2 .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Il s'agit d'un amendement de conséquence de l'amendement précédent, procédant à une coordination entre les alinéas 3 et 7 de l'article 1er.
Favorable.
Je mets aux voix l'article 1er, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 1er, ainsi modifié, est adopté.)
Sur l'article 2, je suis saisi d'un amendement n° 24 .
La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour le soutenir.
Monsieur le secrétaire d'État, je souhaiterais par cet amendement que vous apportiez une précision qui me paraît importante, à savoir que, dans l'alinéa 2 de cet article, le terme « personne » englobe les personnes tant physiques que morales. Il ne s'agit pas, bien sûr, de stigmatiser les clubs de boules ou les valeureux organisateurs bénévoles, de province comme de banlieue…
Néanmoins, dans un souci de cohérence, et dans la mesure où ce texte souhaite s'attaquer à l'ensemble des filières, jusqu'à leur terme, j'aimerais que vous nous apportiez cette précision. Dans la mesure où vous le feriez, je serais tout à fait disposé à retirer cet amendement.
Cet amendement pose une vraie question, mais la commission l'a jugé superflu. En effet, il existe déjà, dans le code du sport, un régime très complet de responsabilité spécifique aux personnes morales. L'article L.232-28 prévoit notamment des peines d'amende distinctes de celles applicables aux personnes physiques, par renvoi aux dispositions du code pénal, ainsi que des peines d'interdiction d'exercice de l'activité professionnelle concernée. Le projet de loi ne change rien à ce régime pénal. L'amendement n° 24 a donc été repoussé par la commission.
Il est préférable de suivre l'avis de la commission.
Étant donné qu'il m'a semblé comprendre que le texte s'appliquait aussi bien aux personnes physiques qu'aux personnes morales, puisqu'il renvoie à d'autres articles du code du sport, je retire mon amendement.
Cet amendement de précision vise à lever une ambiguïté rédactionnelle : il prévoit expressément que la raison médicale invoquée peut être justifiée par la présentation d'une AUT, mais aussi par tout autre moyen.
Favorable.
Je mets aux voix l'article 2, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)
Sur l'article 3, je suis saisi d'un amendement n° 6 .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Cet amendement vise à clarifier la procédure d'information créée par l'article 3 : il précise que l'information du procureur de la République peut se faire par tout moyen.
Favorable.
Sur l'article 4, je suis saisi d'un amendement n° 7 rectifié , de précision, présenté par la commission et qui fait l'objet d'un avis favorable du Gouvernement.
Je mets aux voix l'amendement n° 7 rectifié .
(L'amendement est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 11 .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Cet amendement prévoit, dans un souci de pragmatisme, qu'en l'absence de tout responsable des lieux dans lesquels interviennent les contrôles, l'ordonnance sera notifiée après la visite, sur le modèle de la procédure existant en matière fiscale.
Favorable.
Je suis saisi d'un amendement n° 12 .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Cet amendement vise à prendre en considération une jurisprudence récente de la Cour européenne des droits de l'homme, qui, je le rappelle, avait condamné la France au titre des procédures de visites domiciliaires fiscales.
En effet, les ordonnances d'autorisation de visites prévues à cet article ne sont pas susceptibles d'appel. Un dispositif de refonte des procédures du droit de visite et de saisie mentionnées aux articles L. 16 B et L. 38 du code des procédures fiscales est actuellement à l'étude. De manière à favoriser la cohérence des différentes procédures applicables en matière de visites, tout en répondant aux exigences du droit européen, cet amendement propose de renvoyer à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales la détermination des recours pouvant être formés contre l'ordonnance du président du tribunal de grande instance autorisant, dans le cadre de ce texte, la saisie.
Favorable.
Je suis saisi d'un amendement n° 13 .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Il s'agit d'un amendement de coordination, qui vise à faire figurer dans les deux articles L. 232-14 et L. 232-19 du code du sport la référence à la même procédure d'information du procureur de la République et d'établissement des procès-verbaux à la suite des contrôles.
Favorable.
Je suis saisi d'un amendement n° 14 .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
C'est un amendement de précision qui, en visant les seuls agents relevant du ministre chargé des sports et les personnes agréées par l'agence mentionnés à l'article L. 232-11, exclut de la procédure les officiers et agents de police judiciaire.
Favorable.
Je mets aux voix l'article 4, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 4, ainsi modifié, est adopté.)
Je mets aux voix l'article 5, modifié par l'amendement n° 16 .
(L'article 5, ainsi modifié, est adopté.)
Sur l'article 6, je suis saisi d'un amendement n° 22 .
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour le soutenir.
Comme il semblerait qu'on ne veuille rien changer à la pénalisation de la détention de substances par les sportifs, cet amendement vise au moins à exclure du champ pénal la détention de « substances spécifiques », c'est-à-dire de produits pouvant être facilement trouvés au domicile de toute personne, y compris d'un sportif et de son entourage.
Cet amendement aurait pour effet de créer de nouvelles listes, en plus de la liste internationale aujourd'hui appliquée par la France. Or la gestion d'une nouvelle liste pose des difficultés techniques. De plus, le processus d'élaboration de la liste de l'AMA est international : comment justifier que la France se dote d'une liste propre ?
Par ailleurs, l'objet du projet de loi étant le démantèlement des trafics, les quantités détenues interviendront de manière prépondérante pour déterminer les sanctions. En matière pénale, la dimension morale de l'infraction est toujours prise en compte : en pratique, les sportifs ne seront poursuivis que s'il est établi qu'ils avaient bien l'intention de se doper.
Enfin, cet amendement pose problème car il fait référence aux « substances spécifiques » ; or cette notion ne figure plus dans la nouvelle version du code mondial qui entrera en application au 1er janvier prochain, et qui établit un régime quelque peu différent de « substances spécifiées ». La commission n'a donc pas retenu cet amendement.
Même avis. J'avais déjà répondu à Mme Buffet sur ce point tout à l'heure, et M. Depierre a très bien expliqué pourquoi nous sommes défavorables à cet amendement.
L'article 7 ne fait l'objet d'aucun amendement.
Je le mets aux voix.
(L'article 7 est adopté.)
L'article 8 ne fait l'objet d'aucun amendement.
Je le mets aux voix.
(L'article 8 est adopté.)
L'article 9 ne fait l'objet d'aucun amendement.
Je le mets aux voix.
(L'article 9 est adopté.)
Sur l'article 10, je suis saisi d'un amendement n° 17 .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Cet amendement vise, s'agissant du champ des contrôles de l'Agence française de lutte contre le dopage, à prendre en compte les compétitions et manifestations sportives organisées non seulement par les fédérations, mais aussi par les unions de type scolaire ou universitaire visées par l'article L. 131-2 du code du sport.
Favorable.
Je suis saisi d'un amendement n° 27 .
La parole est à M. Denis Jacquat, pour le soutenir.
Il s'agit de respecter nos engagements internationaux – qu'on ne peut, en l'occurrence, ignorer, vu qu'ils ont été signés à Paris !
La commission a accepté cet amendement qui apporte une précision utile et lève une difficulté liée à un défaut de coordination internationale. J'ajoute qu'il faut distinguer cette démarche ponctuelle d'une réflexion d'ensemble sur le régime des AUT, qui, bien que souvent évoquée ce soir, n'est pas l'objet de ce texte.
Favorable.
Adopter cet amendement, c'est aggraver encore un peu plus les choses en matière d'autorisations pour usage à des fins thérapeutiques. Vous allez encourager la multiplication des demandes d'AUT ! En particulier, il sera encore plus facile aux sportifs étrangers de pénétrer sur le sol français avec des substances interdites.
Je souscris entièrement à ce que disait tout à l'heure notre collègue Poisson : dans le sport, une chose doit être maintenue envers et contre tout, c'est l'égalité des chances. Cet amendement va à l'encontre de cette volonté. Ce serait rendre un mauvais service au sport que de l'adopter.
Nous sommes plusieurs ici à bien connaître les problèmes du dopage, car cela fait de nombreuses années que nous en débattons. Comme un précédent orateur, j'ai réalisé moi-même un certain nombre de contrôles antidopage. Nous savons bien qu'il y a en permanence une course entre les laboratoires et ceux qui conseillent les sportifs – même si, comme l'a souligné M. le secrétaire d'État, ces derniers sont de mieux en mieux informés sur le dopage et les substances qu'ils peuvent, ou non, prendre.
Un problème que nous connaissons bien se pose toutefois aujourd'hui dans notre pays, où nous sommes parfois confrontés à des sportifs étrangers qui sont entrés sur le territoire avec des substances interdites en prétextant que les listes de leur fédération nationale ne correspondent pas aux listes des fédérations internationales.
Il convient de faire cesser une telle hypocrisie, d'autant que l'AMA a été mise en place : ces sportifs doivent désormais savoir que des règles existent dans leur pays et qu'ils ne peuvent plus faire preuve de mauvaise foi en entrant sans ordonnance sur notre territoire avec de tels produits.
Alors que M. le secrétaire d'État a rappelé qu'en France très peu de personnes, parmi lesquelles, il est vrai, des médecins, ont été impliquées et condamnées, toutefois, monsieur Néri, vous avez eu raison de préciser que certains pays étrangers font preuve d'un vrai laxisme. Or, si nous voulons lutter contre celui-ci, il faut à la fois respecter nos engagements internationaux et s'étonner publiquement que ces mêmes pays comptent un nombre supérieur à la moyenne de personnes asthmatiques ou allergiques, car c'est en dénonçant publiquement les problèmes que nous parviendrons à les résoudre. Au contraire, si nous restons confinés dans nos hémicycles, dans des cercles restreints ou dans nos fédérations, nous ne le pourrons pas.
Un député, me semble-t-il, du groupe socialiste, a rappelé que toutes les mesures seraient prises dans le cadre d'une réglementation internationale. Sachez que François Rochebloine et moi-même sommes au Conseil de l'Europe très attentifs sur le sujet car il est très difficile, croyez-moi, de résoudre les difficultés que nous rencontrons avec nos homologues étrangers pour imposer, dans le cadre des règlements internationaux, des règles uniformes pour tous les pays.
Cet amendement permet de faire un pas en ce sens, puisqu'il vise à appliquer les règlements internationaux que nous avons signés. Il est, je le répète, de notre devoir de continuer à dénoncer toute dérive éventuelle.
Je ne voudrais pas qu'on désespère ceux qui sont à la pointe de la lutte contre le dopage, notamment ceux qui ont pris des engagements.
Je pense au cyclisme, qui fait partie des premiers sports dont les équipes ont signé des chartes. Rappellerai-je que l'an dernier, lors du Tour de France, les coureurs français ont organisé un sitting pour dénoncer avec beaucoup de courage l'inégalité de traitement et donc l'inégalité des chances entre les équipes, en raison du dopage organisé de certaines d'entre elles ? Or cet amendement précise très tranquillement : « Par ailleurs, cette disposition permettra de répondre aux inquiétudes des sportifs étrangers pénétrant sur le sol français avec des substances interdites : leur AUT ainsi reconnue constituera une forme de détention autorisée », ce qui signifie que les compétitions seront désormais à deux vitesses !
Vous allez décourager les sportifs et les équipes français qui font un effort considérable en la matière ! C'est pourquoi, je le répète, nous voterons contre l'amendement n° 27 et je demande à la représentation nationale de le rejeter.
Je mets aux voix l'article 10, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 10, ainsi modifié, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 18 à l'article 11.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir,
Oui, monsieur le président.
Je mets aux voix l'article 11, modifié par l'amendement n° 18 .
(L'article 11, ainsi modifié, est adopté.)
L'article 12 ne fait l'objet d'aucun amendement.
Je le mets aux voix.
(L'article 12 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 19 .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
Oui, monsieur le président.
Je suis saisi d'un amendement n° 28 .
La parole est à M. Denis Jacquat, pour le soutenir.
Cet amendement vise à mentionner dans la loi les manquements aux obligations de localisation des sportifs de haut niveau désignés par l'AFLD en vue d'appréhender plus facilement les auteurs de trafics de produits dopants.
Il est en effet très important non seulement de rechercher les personnes détenant, par exemple dans leur voiture, des produits dopants, mais également d'anticiper un tel trafic en localisant les sportifs concernés puis, si nécessaire, d'appliquer les sanctions administratives prévues.
Je pense, monsieur Néri, que vous ne pourrez qu'être favorable à cet amendement, puisque vous êtes un pionnier dans ce domaine,
Favorable.
La commission trouve en effet cet amendement très intéressant du fait qu'il apporte une précision utile à l'article 13 relatif au régime des sanctions disciplinaires.
Il faut en effet pouvoir localiser les sportifs si on veut les contrôler.
Favorable.
…et avec enthousiasme un tel amendement, et ce pour une simple raison : pour être efficace, il convient de faire des contrôles inopinés, notamment durant les périodes de préparation, ce qui implique la localisation des athlètes de toutes les disciplines. Cet amendement va donc parfaitement dans le bon sens et nous le voterons volontiers !
Je mets aux voix l'article 13, modifié par les amendements adoptés.
(L'article 13, ainsi modifié, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 20 rectifié .
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir.
rapporteur. Cet amendement vise à inverser la présentation retenue par l'article 14 en prévoyant qu'en principe la saisine de l'Agence n'est pas suspensive, de façon à favoriser une exécution aussi rapide que possible des décisions prises par les fédérations – ce qui n'est pas toujours le cas. Ce n'est que par exception que l'Agence pourra, si elle l'estime opportun, décider du caractère suspensif de sa saisine.
Favorable
Je mets aux voix l'amendement n° 20 rectifié .
(L'amendement est adopté.)
Je mets aux voix l'article 14, modifié par l'amendement n° 20 rectifié .
(L'article 14, ainsi modifié, est adopté.)
L'article 15 ne fait l'objet d'aucun amendement.
Je le mets aux voix.
(L'article 15 est adopté.)
L'article 16 ne fait l'objet d'aucun amendement.
Je le mets aux voix.
(L'article 16 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 23 , portant article additionnel après l'article 16.
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour le soutenir.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, en amont du dopage il y a bien souvent la fabrication illicite de drogues, de stimulants de synthèse ou de dérivés amphétaminiques, élaborés frauduleusement à partir de produits chimiques détournés clandestinement de leurs utilisations légales.
C'est ainsi que le commerce intérieur et extérieur de plusieurs substances chimiques, communément dénommées précurseurs chimiques, qui peuvent servir à la fabrication illicite de drogues, fait l'objet d'un contrôle international en application de l'article 12 de la convention des Nations unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes adoptée le 19 décembre 1988 à Vienne.
Au plan communautaire, une réglementation modifiée à plusieurs reprises depuis sa mise en place en 1990 a été consolidée et développée dans deux règlements du Parlement et du Conseil européens publiés en 2004, l'un pour la surveillance du marché intérieur, l'autre pour le contrôle du commerce extérieur, ainsi que par un règlement de la Commission du 27 juillet 2005.
Au niveau français, une loi, adoptée à l'unanimité par l'Assemblée, avait été promulguée en 1996 en vue de préciser certaines dispositions nationales d'application, telles que les pouvoirs des services de contrôle ou les sanctions applicables en cas d'infraction. Cette loi doit être adaptée aux nouvelles dispositions du droit européen qui sont entrées en vigueur dans l'ensemble de l'Union européenne le 18 août 2005.
Des modifications doivent donc être apportées. Il ne s'agit pas, bien au contraire, de revenir sur les principes du contrôle, mais de mettre en application des améliorations techniques qui, au demeurant, ont déjà fait l'objet d'une large concertation entre les administrations concernées ainsi que d'une consultation des professions fabriquant, important ou utilisant les produits chimiques en cause.
En pratique, dans le sens d'une meilleure harmonisation européenne, donc d'une plus grande efficacité, il s'agit essentiellement de modifier la loi actuelle par l'élargissement du champ d'action de cette loi à certaines substances dites « non-classifiées », l'encadrement de la déclaration de soupçons à laquelle sont tenus les opérateurs en cas de commande ou d'événement anormal, l'extension des pouvoirs de contrôle de l'administration et la suppression des articles de loi désormais couverts par les règlements européens.
Ce dispositif, qu'il est urgent de mettre en application, est un outil juridique essentiel dans la lutte contre la fabrication illicite de plusieurs produits dopants, pour la mobilisation à cette fin des entreprises et pour la coopération européenne en la matière.
Il y a urgence, en effet, non seulement parce que nous ne pouvons pas nous permettre de prendre du retard sur les méthodes employées par les trafiquants, qui s'enrichissent au mépris de la santé de nos populations et en particulier des jeunes et des sportifs, mais également parce qu'il est nécessaire que nous soyons bien en phase avec nos partenaires européens dans cette lutte menée en commun contre les usages détournés et nuisibles à la santé des substances chimiques. Du reste, nous ne pouvons ignorer le rappel à l'ordre que la Commission européenne vient de nous adresser et dont nous devons faire le plus grand cas alors que nous accédons tout prochainement à la présidence européenne.
C'est pourquoi le Gouvernement a déposé devant votre assemblée cet amendement que je vous demande de bien vouloir adopter.
Favorable.
Il convient en effet de saluer le souci d'harmonisation du droit français avec le droit communautaire à quelques semaines de la présidence française de l'Union européenne, d'autant que cet amendement permettra de lutter plus efficacement contre le trafic des produits dopants.
Je suis saisi d'un amendement n° 26 rectifié , portant article additionnel avant l'article 17.
La parole est à Mme Muriel Marland-Militello, pour le soutenir.
Cet amendement est conforme à l'objectif poursuivi par le projet de loi, à savoir la lutte contre les produits dopants, qui ne saurait naturellement concerner que le dopage humain mais doit également s'attaquer au dopage animal. Je me réjouis du reste de voir que le législateur ne néglige pas cet aspect du dopage.
Si j'ai bien compris l'esprit du projet de loi, il ne s'agit pas en effet de lutter contre le seul dopage sportif mais contre tous les trafics de produits impliqués essentiellement dans le sport.
C'est la raison pour laquelle les députés qui ont cosigné cet amendement ont souhaité ne pas réserver la lutte contre le dopage animal aux seuls événements qualifiés de sportifs. Si nous souhaitons véritablement enrayer le trafic de produits dopants, il est nécessaire de permettre aux autorités de rechercher ces procédés ou ces substances lors de toutes les manifestations publiques utilisant des animaux. Il ne s'agit pas, je le précise, d'imposer à l'Agence française de lutte contre le dopage d'effectuer systématiquement des contrôles mais de lui permettre d'en faire.
Défavorable.
En effet, cet amendement, qui poursuit un objectif légitime, paraît peu opérant, car il étend sans limites précises et donc de manière floue le champ du dopage animal. La commission s'est interrogée sur « les activités mettant en scène des animaux », visées par l'exposé des motifs, et pense qu'à se montrer trop imprécis, on risque d'en venir à sanctionner des comportements très éloignés du dopage, et ce contre la volonté même des auteurs de l'amendement.
Madame la députée, nous avons longuement discuté de la question et je sais à quels animaux vous faites référence : il s'agit notamment des animaux de cirque.
Je vous propose de retirer votre amendement au bénéfice d'une réunion que nous ferons ultérieurement sur le sujet.
Monsieur le secrétaire d'État, je vous fais confiance, parce que je suis convaincue que vous la méritez.
En conséquence, si vous m'assurez que nous pourrons, au cours d'une réunion de travail, établir une hiérarchie des pratiques correspondant ou non à des dopages avérés, je veux bien retirer mon amendement.
Je suis saisi d'un amendement n° 21 rectifié à l'article 17.
La parole est à M. le rapporteur, pour le soutenir,
Oui, monsieur le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 21 rectifié .
(L'amendement est adopté.)
Je mets aux voix l'article 17, modifié par l'amendement n° 21 rectifié .
(L'article 17, ainsi modifié, est adopté.)
L'article 18 ne fait l'objet d'aucun amendement.
Je le mets aux voix.
(L'article 18 est adopté.)
L'article 19 ne fait l'objet d'aucun amendement.
Je le mets aux voix.
(L'article 19 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 25 , portant article additionnel après l'article 19.
La parole est à M. Jacques Myard, pour soutenir cet amendement.
Les chevaux sont des sportifs de haut niveau qu'on sélectionne, monsieur le secrétaire d'État, comme les joueurs des équipes de rugby. Il existe des épreuves de sélection pour jeunes chevaux jusqu'à six ans dans tous les sports équestres.
Actuellement, un certain nombre de contrôles du dopage sont effectués par la Société hippique française, mais la base légale de ces contrôles est loin d'être évidente. Pour éviter des problèmes à l'avenir, je défends donc cet article additionnel qui prévoit que la SHF puisse effectuer les contrôles antidopage lors des épreuves de sélection, notamment pour l'amélioration génétique des équidés, ce qui permettra aux sélections d'être réalisées dans des conditions d'équité, d'égalité et de totale sérénité.
La commission comprend le souci qui a inspiré cet amendement, à savoir prendre en considération la question des animaux trop jeunes pour courir dans les compétitions organisées par la fédération, mais sa rédaction ne lui semble pas assez précise, notamment sur les compétences respectives de l'Agence française de lutte contre le dopage et de la Société hippique française.
La commission a donc repoussé l'amendement. Elle se tourne néanmoins vers le ministre afin qu'il nous apporte la réponse la plus adéquate.
Avis défavorable.
Je m'étonne de votre réponse, monsieur le secrétaire d'État, car cet amendement avait été évoqué par un certain nombre de vos services.
Il est nécessaire de donner une base légale à ces contrôles antidopage car il existe un réel problème aujourd'hui. Je maintiens donc mon amendement, qui pourra d'ailleurs être amélioré lors du passage du texte au Sénat.
Monsieur Myard, je vous propose également une réunion de travail. Je ne vois pas pourquoi vous n'y auriez pas droit ! (Rires.)
L'article 20 ne fait l'objet d'aucun amendement.
Je le mets aux voix.
(L'article 20 est adopté.)
Dans les explications de vote, la parole est à Mme Marie-George Buffet, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
L'objet de la lutte contre le dopage est de permettre à chaque homme, chaque femme qui veut pratiquer une activité sportive pour son épanouissement personnel, pour des succès collectifs, pour un dépassement de soi, de le faire en préservant son intégrité physique et psychique. Nous sommes tous, je crois, motivés dans ce combat.
C'est le sportif qui doit être mis au coeur de nos préoccupations. Vous semblez sourire quand je parle de victimes. Mais il faut avoir vu et entendu les témoignages de certains coureurs cyclistes, de leur compagne, de leurs proches pour mesurer la pression qui s'exerce au sein d'une équipe sur de jeunes coureurs. Il faut savoir ce que c'est que de devoir tenir son rang dans la compétition, malgré un calendrier sportif extrêmement chargé, pour ne pas être mis sur la touche et, peu à peu, disparaître des premiers rangs des joueurs. Le constat est le même pour le football ou le rugby – j'ai d'ailleurs appris qu'aucun sport n'était exempt de ces pratiques de dopage.
Je parle donc de victimes parce que, peu à peu, le système fait pression sur les joueurs pour les amener à utiliser des produits dopants. Il faut donc agir sur le système.
Il faut, bien sûr, condamner les pourvoyeurs, les membres de l'encadrement, y compris les médecins ! On connaît des exemples, dont un qui donne encore des leçons et accorde toujours des interviews dans les journaux malgré les charges qui pèsent sur lui.
Il faut également desserrer l'étau autour des sportifs, en finir avec les calendriers monstrueux dont parle mon ami Serge Simon, faire pression sur les fédérations. Un ministère a la possibilité, au moment où il discute des subventions et des moyens qu'il met à la disposition des fédérations, de peser sur ces calendriers. Il y a aussi l'action internationale et européenne, les discussions avec les représentants des organisations internationales sportives. J'ai lu les textes de M. Platini ou d'autres qui sont sensibles au problème. Profitons-en, débattons avec eux pour savoir comment corriger ces calendriers sportifs.
J'ai parlé tout à l'heure du témoignage, dans un journal sportif de ce matin, d'un ancien coureur ayant pris des produits dopants. Les produits dopants en eux-mêmes n'étant plus nécessaires après la compétition, il est passé à d'autres produits et a connu une descente aux enfers détruisant sa vie professionnelle que familiale.
Il faut donc des sanctions sportives pour ces tricheurs que rien n'excuse, mais ce n'est pas la prison qui sortira ces hommes et ces femmes de la situation dans laquelle ils sont tombés sous la pression.
Je vous ai posé toutes ces questions qui me tiennent particulièrement à coeur. J'espère que ce débat se poursuivra, que cette loi sera évaluée comme il se doit – on n'évalue d'ailleurs jamais assez nos lois –, mais les réponses que vous m'avez apportées ce soir me conduiront pour l'heure à m'abstenir sur ce texte.
Nous arrivons à la fin d'un débat qui n'en a pas été un puisque nous n'avons pas pu aller au fond des choses. Je le regrette profondément car c'est la première fois, mes chers collègues, que nous ne voterons pas à l'unanimité un texte de loi sur le dopage.
Nous souhaitons tous renforcer la répression du trafic des produits dopants. Lors de l'examen des lois précédentes sur le sujet, nous avons toujours mis en avant la nécessité d'être intraitables avec les pourvoyeurs, qui sont de véritables trafiquants de drogue mettant en péril, par leur action perverse, la santé physique et morale de nos jeunes, avec toutes les conséquences à long terme que cela peut avoir sur leur vie d'homme, comme l'a très justement souligné Marie-Georges Buffet.
Nous ne pouvons pas nous contenter de ce que vous proposez, à savoir une simple mesure de pénalisation à l'encontre des sportifs. Nous sommes d'accord en revanche, et à 100 %, pour renforcer l'action pénale contre les pourvoyeurs, afin de détruire les filières – nous l'avions d'ailleurs fait dans les lois précédentes en assimilant le pourvoyeur à un trafiquant de drogue et en doublant les peines.
Nous ne dirons pas que le sportif qui se dope est simplement une victime. Marie-Georges Buffet a décrit avec beaucoup d'émotion la situation, et je la comprends car j'ai moi-même connu personnellement des jeunes sportifs qui ont vécu ce drame !
Il y a une chose qui est particulièrement perverse dans le dopage : il crée chez beaucoup de sportifs une accoutumance.
Une fois leur carrière sportive terminée, certains continuent à se doper parce que leur corps le réclame. Il s'agit donc d'un véritable empoisonnement tant physique que psychique.
Ce n'est donc pas avec un an de prison que nous résoudrons le problème, d'autant plus que si les sportifs en question étaient incarcérés, ils se retrouveraient au contact de trafiquants, ce qui aggraverait leur cas.
L'urgence dans laquelle nous avons examiné ce texte ne nous a pas permis d'aller jusqu'au bout de la réflexion, en particulier d'aborder le problème et les moyens de lutte contre le dopage. S'agissant des autorisations à usage thérapeutique, oui, j'ai un peu forcé le trait,…
…mais je l'ai fait volontairement pour interpeller la représentation nationale, pour lui faire prendre conscience de l'existence d'un réel problème. Je l'ai d'ailleurs dit en commission. Nous ne pouvons pas être absents d'une réflexion profonde et devons prendre une véritable décision.
Il est également indispensable de renforcer les contrôles inopinés pendant les périodes de préparation car, vous le savez tous, c'est là que cela se passe !
Il me semble qu'il faut maintenir la règle de la sanction pénale pour les pourvoyeurs et la sanction sportive pour les sportifs.
La tricherie est condamnable parce qu'elle est contraire à l'éthique. Un sportif dopé n'a pas gagné grâce à sa valeur. Sa victoire lui a-t-elle apporté du bonheur ? Je n'en suis pas sûr, surtout s'il est conscient que ce n'est pas sa performance qui lui a apporté le succès. Par contre, il a privé d'autres sportifs du plaisir d'une victoire parfaitement méritée, d'une performance résultant de leur travail, physique, mental, de préparation.
Ne pourrions-nous pas prévoir pour ces tricheurs une sanction sportive ? Le retrait de la médaille, par exemple, même plusieurs années après. Je suis persuadé que lorsqu'il a été demandé à Riis de rendre son maillot jaune, il a eu beau faire le flambard, cela a dû lui faire mal ! Mais il méritait cette sanction !
Peut-être faudrait-il assortir cette sanction sportive de sanctions financières, en demandant aux sportifs incriminés de rembourser l'argent indûment gagné, je dirai presque l'argent volé !
Monsieur le secrétaire d'État, si le temps nécessaire avait été pris pour préparer ce projet de loi, nous aurions pu, ensemble, avoir cette discussion et, j'en suis sûr, apporter des solutions que nous aurions adoptées à l'unanimité. Ce texte est insuffisant.
Je m'interroge sur cette précipitation, sachant que l'Agence mondiale antidopage a fait part de son intention de modifier le code mondial antidopage sur la question des AUT, et ce avant les jeux Olympiques de Pékin. Ils s'ouvrent dans cent jours, monsieur le secrétaire d'État. Il n'y avait donc pas urgence !
Nous éprouvons donc ce soir un peu d'amertume et de déception car nous serons dans l'obligation de nous abstenir sur votre texte. Nous le regrettons car si nous avions eu le temps d'aller au fond de la discussion, je suis persuadé que nous aurions tous ensemble adopté des mesures nouvelles pour permettre au sport de retrouver ses vraies valeurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
La parole est à M. François Rochebloine, pour le groupe Nouveau Centre.
Je déplore qu'un texte comme celui-ci ne recueille pas l'unanimité puisque aussi bien le groupe de la Gauche démocrate et républicaine que le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche ne s'associent pas à la démarche. Alain Néri l'a rappelé tout à l'heure, les précédents projets de loi de lutte contre le dopage avaient fait l'unanimité. Ils n'étaient certes pas parfaits mais nous avions su nous rassembler pour exprimer un vote positif. Ce n'est pas le cas aujourd'hui, je le regrette parce que nous donnons au monde sportif une mauvaise image.
Comme je l'ai annoncé dans la discussion générale, le groupe Nouveau Centre votera ce texte, même si, je l'ai dit, la procédure d'urgence ne nous semblait pas indispensable : nous aurions pu attendre.
Cela étant, le texte qui nous est soumis contient des dispositions positives et les amendements adoptés vont dans le bon sens, je pense notamment à un amendement de Denis Jacquat. L'amendement de Jacques Myard, que j'ai voté, allait lui aussi dans le bon sens, mais l'Assemblée ne l'a pas adopté.
Alain Néri, pour qui j'éprouve malgré tout beaucoup d'amitié – heureusement – a beaucoup parlé d'équité. Il a raison, mais si on ne sanctionne pas fermement certains sportifs, lorsqu'on ne peut pas faire autrement, il n'y a plus d'équité. Nous devons ainsi faire preuve d'un certain courage.
Quant à Mme Buffet, qui a été en charge de ces responsabilités durant de nombreuses années et qui a oeuvré efficacement dans ce domaine, elle a parlé des fédérations. J'ai envie de lui demander le poids qu'elle pense avoir eu sur toutes les fédérations. Elle se souvient certainement des difficultés auxquelles elle a dû faire face, et nous savons que ses successeurs sont et seront confrontés aux mêmes problèmes.
Je ne dis pas pour autant qu'il ne faille pas agir auprès des fédérations – et je sais que le secrétaire d'État en charge des sports, en tant qu'ancien sportif de haut niveau, se sent particulièrement concerné. Les compétions de rugby par exemple sont de plus en plus rapprochées, et nous nous souvenons des difficultés éprouvées par l'équipe de France lors de sa préparation pour la Coupe du monde, ou par les clubs pour jouer la coupe d'Europe. Nous savons que les risques de blessure sont dès lors de plus en plus probables. Je ne jetterai donc aucun anathème dans ce domaine. Simplement, je crois que nous devons essayer d'être le plus efficaces possible.
En tout cas, je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, pour ce que vous proposez de faire à travers ce texte. C'est une avancée. Il faut continuer dans cette voie, et nous sommes là pour vous encourager. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La parole est à M. Guénhaël Huet, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Si nous avons bien compris que le projet de loi ne serait pas adopté à l'unanimité, je crois que nous pouvons affirmer qu'au moins nous sommes unanimes ce soir dans notre volonté de lutter contre le dopage ; c'est déjà beaucoup. J'ai à ce propos apprécié le ton très juste de l'intervention de Mme Buffet tout à l'heure, comme j'ai apprécié la touche que M. Néri a apportée au débat. Le projet de loi qui nous est soumis nous permettra justement de lutter efficacement contre le dopage.
D'abord, il a une utilité juridique. Il renforce peut-être de façon trop marquée, c'est vrai, l'arsenal répressif mais les sportifs eux-mêmes ainsi que les fédérations sportives demandent aux pouvoirs publics de les aider à lutter contre le dopage.
C'est notre responsabilité.
Ensuite, ce texte est très utile sur un plan pédagogique parce qu'il envoie un message fort non seulement aux sportifs mais surtout à ceux qui gravitent autour des sportifs, à ceux qui n'ont pas une conscience claire de l'éthique sportive, à ceux qui ont peu de scrupules et qui profitent de la faiblesse ou des besoins momentanés des sportifs.
Par ailleurs, il s'agit d'un texte d'adaptation de notre droit positif aux nouvelles pratiques et aux nouvelles formes de dopage. Chacun sait, Mme Buffet et M. Laporte mieux que d'autres, que le dopage change toujours de visage et que nous devons constamment nous adapter. Peut-être est-il trop tôt mais, en même temps, il faut faire quelque chose maintenant, quitte à y revenir plus tard. J'ai employé tout à l'heure le terme « existentiel » pour qualifier ce texte parce que, pour moi, ce texte a une vie devant lui et qu'il faudra sans doute revenir dessus.
Il s'agit également d'un texte d'adaptation aux règles internationales, parce que c'est indispensable. Nous intervenons dans des compétitions internationales, nous ne pouvons pas ne pas intégrer les règles internationales, sinon l'exercice auquel nous nous livrons cet après-midi serait un peu vain.
Enfin, ce projet de loi présenté par le secrétaire d'État est un texte équilibré, entre la nécessité de préserver l'éthique sportive et la nécessité de protéger les sportifs eux-mêmes. C'est très important.
Au final, ce texte constitue un réel progrès de notre droit positif en matière de lutte contre le dopage, même si, j'insiste, il faudra y revenir – mais aucun texte n'est définitif, aucun texte n'est parfait.
Pour toutes ces raisons, le groupe de l'UMP votera ce projet de loi de lutte contre le trafic de produits dopants. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(L'ensemble du projet de loi est adopté.)
Prochaine séance, mardi 6 mai, à neuf heures trente :
Questions orales sans débat.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures vingt.)
Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma