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Intervention de Bernard Laporte

Réunion du 30 avril 2008 à 15h00
Lutte contre le trafic de produits dopants — Discussion d'un projet de loi après déclaration d'urgence

Bernard Laporte :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, à l'approche de l'événement sportif mondial que sont les Jeux olympiques, on ne saurait passer sous silence l'obligation qui est la nôtre de mettre tous les moyens en oeuvre pour protéger au mieux le sport contre la menace permanente que représente le dopage.

La lutte contre le dopage est un enjeu majeur pour le monde du sport comme pour l'ensemble de nos sociétés et notre pays se doit de montrer l'exemple en la matière, comme il l'a déjà fait à maintes reprises. On peut notamment citer la loi du 23 mars 1999, qui a permis de mettre en place un suivi médical longitudinal des athlètes et de sanctionner pénalement la cession et l'offre de produits dopants, ou la loi du 5 avril 2006, qui a institué l'Agence française de lutte contre le dopage. Plus récemment, l'impulsion française dans la mise en place du « passeport sanguin » a été, malgré les difficultés rencontrées récemment, une nouvelle preuve de la forte volonté politique de la France de combattre le dopage.

Pour autant, la législation de notre pays souffre de certaines lacunes, qui empêchent de lutter de la manière la plus efficace contre le trafic de produits dopants. Le cas de l'affaire Puerto, qui s'est produit en Espagne, est à ce titre révélateur. Si un cas similaire – c'est-à-dire la saisie de plusieurs centaines de poches de sang congelé et de plasma sanguin – s'était produit en France, nous n'aurions disposé d'aucun instrument juridique pour poursuivre et sanctionner pénalement les responsables de ce trafic.

À l'heure actuelle, en effet, la détention ainsi que les autres actions caractérisant un trafic – c'est-à-dire la production, le transport, l'importation et l'exportation de produits dopants – ne peuvent être réprimées, puisque seules la cession et l'administration de produits constituent des infractions condamnables pénalement.

Les limites de la législation française actuelle ont également été mises en lumière lors du dernier Tour de France, notamment par l'affaire Vinokourov, coureur contrôlé positif à une transfusion homologue. Le procureur de Pau a bien diligenté une enquête dès la révélation des faits ; mais il s'est révélé impossible d'entamer une enquête en flagrance, autorisant les enquêteurs à perquisitionner les chambres et les véhicules.

Ces simples exemples démontrent que les services de police judiciaire ne disposent pas des outils qui leur permettraient de faire face à la réalité des modes opératoires des trafiquants. Il est ainsi très difficile, comme en témoigne l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique, de procéder aux perquisitions, saisies ou gardes à vue, pourtant indispensables pour démanteler des filières.

C'est pourquoi les parquets ont le plus souvent recours, pour fonder de telles poursuites, à des qualifications pénales issues d'autres législations que le code du sport, en particulier celles relatives à la répression des trafics en matière de stupéfiants ou de médicaments. Toutefois, ces dispositions ne peuvent pas s'appliquer à l'ensemble des méthodes et procédés dopants utilisés, notamment aux transfusions sanguines. Le nombre d'affaires traitées est ainsi très faible et les sanctions associées non dissuasives.

Le présent projet de loi a donc pour objet principal de créer les infractions pénales nouvelles de production, détention, transport, importation et exportation de produits dopants, dans le but de démanteler les trafics. Il prévoit ainsi une peine maximale de cinq ans de prison et 75 000 euros d'amende en cas de détention en vue d'un trafic. Cette peine est ramenée à un an de prison et 3 750 euros d'amende dans les cas d'infraction commise par un sportif en vue de son usage personnel.

Cette distinction permet de réaliser le meilleur compromis entre fermeté absolue envers le trafiquant et prise en compte de la condition particulière du sportif. Elle permet de ne pas assimiler les sportifs intègres à des délinquants, tout en sanctionnant durement les tricheurs. Elle permet surtout d'être inflexible envers les trafiquants, qui constituent la cible prioritaire. Bien entendu, toutes les formes de détention médicalement justifiées – autorisation d'usage thérapeutique, pharmacie familiale – ne feront pas l'objet de sanctions.

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