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Intervention de Bernard Depierre

Réunion du 30 avril 2008 à 15h00
Lutte contre le trafic de produits dopants — Discussion d'un projet de loi après déclaration d'urgence

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Depierre, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'Assemblée nationale est saisie en première lecture du projet de loi relatif à la lutte contre le trafic de produits dopants. La lutte contre le dopage n'est certes pas nouvelle en France. Depuis la loi du 1er juin 1965 jusqu'à la récente loi du 5 avril 2006, qui a institué l'Agence française de lutte contre le dopage, en passant par celles du 28 juin 1989 et du 23 mars 1999, les pouvoirs publics se sont livrés à un combat sur le front de la prévention, de la dissuasion et de la répression.

Le présent projet de loi entend donc renforcer l'efficacité de la lutte contre le dopage, qui est un enjeu majeur pour l'éthique sportive et la santé publique. Parce que la France a fait le pari d'une législation évolutive, il convient aujourd'hui, tout en reprenant les interdictions de faits de dopage déjà existantes, de franchir une nouvelle étape.

Les dispositions proposées sont pragmatiques. En introduisant une nouvelle infraction pénale de détention de produits dopants et en complétant la liste des incriminations pénales en matière de trafic, le projet de loi entend améliorer la législation française, pour prendre en compte de manière plus large les faits de dopage et, tout particulièrement, le trafic de produits dopants.

Trop souvent en effet, en dépit des avancées réelles réalisées ces dernières années, les différentes autorités en charge des contrôles se trouvent juridiquement démunies dès lors qu'il s'agit d'effectuer des perquisitions, saisies ou gardes à vue pour réprimer la détention de produits dopants. Or ces outils juridiques sont indispensables pour démanteler les filières.

Certaines difficultés doivent être plus particulièrement évoquées. Tout d'abord, seuls les produits dopants classés comme vénéneux au sens de l'article L. 5 132-1 du code de la santé sont soumis à des règles particulières de détention. Par ailleurs, le cas particulier du sportif et de son environnement est insuffisamment pris en considération. Or, le sportif n'est pas seul. Tous les spécialistes insistent aujourd'hui sur la nécessité de tenir compte de son entourage : parents, coéquipiers, médecins, thérapeutes, dirigeants, avocats, agents, sponsors. Cette nécessité a été mise en évidence par les grandes affaires de dopage des dernières années, à commencer par l'affaire Festina lors du Tour de France de 1998.

En pratique, dans le cadre d'une procédure judiciaire visant le démantèlement d'un trafic de produits dopants, c'est sur le fondement des seules dispositions du code de la santé publique que peut être intentée une action. Aux termes de l'article L. 5 132-1 de ce code, sont définies comme « substances vénéneuses » les substances dangereuses, à savoir les substances toxiques, nocives, corrosives, irritantes, stupéfiantes, psychotropes et celles définies comme présentant un danger direct ou indirect pour la santé. Or ce dispositif se révèle insuffisant pour réprimer les trafics de produits dopants. En effet, si une part importante de ces derniers entre dans la définition des substances vénéneuses, ce n'est pas le cas de tous : les transfusions sanguines en particulier ne tombent pas sous le coup de cet article.

Outre le fait qu'il vise à combler un vide juridique, le projet de loi entend prendre en compte la réalité internationale du dopage. Le trafic est en effet favorisé par le développement des échanges sur Internet et par des réseaux impliqués dans la criminalité internationale. La France a ratifié, le 5 février 2007, la convention internationale contre le dopage dans le sport, établie dans le cadre de la Conférence générale de l'UNESCO le 19 octobre 2005. Cette convention, qui est entrée en vigueur le 1er avril 2007, s'appuie sur le code mondial antidopage établi par l'Autorité mondiale antidopage.

En outre, la Conférence de Madrid, organisée du 15 au 17 novembre 2007 par l'Agence mondiale antidopage, a prévu l'entrée en vigueur d'une version révisée du code mondial antidopage au 1er janvier 2009. Or, l'article 2.6 du code mondial antidopage révisé prohibe « la possession par un sportif en compétition d'une méthode interdite ou d'une substance interdite, ou la possession hors compétition par un sportif d'une méthode interdite ou d'une substance interdite hors compétitions, à moins que le sportif n'établisse que cette possession découle d'une autorisation d'usage à des fins thérapeutiques [...] ou ne fournisse une autre justification acceptable ». Cette dérogation pose d'ailleurs un problème qu'il faudra résoudre un jour ou l'autre.

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