Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Séance en hémicycle du 21 juillet 2009 à 15h00

Résumé de la séance

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Sommaire

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, je suis heureux de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation de parlementaires canadiens, conduite par Mme Lise Bacon, présidente de la section canadienne de l'Association interparlementaire Canada-France. (Mmes et MM. les députés ainsi que les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

Photo de Bernard Accoyer

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Annick Girardin, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Girardin

Comme vous le savez, monsieur le secrétaire d'État aux affaires européennes, des négociations viennent d'être entamées entre le Canada et l'Union européenne en vue d'un accord de libre-échange.

Sans remettre en cause l'importance capitale de cette négociation, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les enjeux particuliers qu'elle comporte pour Saint-Pierre-et-Miquelon, morceau de France et d'Europe au large du Canada.

Cette négociation ne peut se faire sans prendre en considération l'existence de notre archipel au large des côtes canadiennes, ni placer celui-ci en position d'être la tête de pont, naturelle et incontournable, de l'Europe dans ses échanges avec le Canada.

À l'heure des états généraux, ou encore des travaux du Grenelle de la Mer, où chacun s'accorde à dire que c'est à travers la mise en valeur des bassins régionaux que les territoires d'outre-mer peuvent espérer survivre et se développer, comment pourrait-on comprendre que Saint-Pierre-et-Miquelon soit oublié par cet accord ?

Au moment où la Commission européenne elle-même, dans son Livre vert sur l'avenir des relations de l'Union avec ses pays et territoires d'outre-mer, pose d'ores et déjà les conditions du renforcement de leur position régionale en s'appuyant sur les atouts du statut européen, comment accepter que, dans un accord aussi important, le rôle de Saint-Pierre-et-Miquelon en tant qu'acteur privilégié des relations entre le Canada, la France et l'Union européenne ne soit pas réaffirmé ?

Enfin, alors que je me félicite – comme l'ensemble de l'archipel – de l'engagement résolu de l'État sur le dossier du plateau continental franco-canadien qui doit nous permettre d'aboutir, enfin, à une zone économique cogérée en bonne intelligence par nos deux pays, comment croire que la France pourrait, par simple négligence, compromettre définitivement les possibilités de développement économique de l'archipel ?

Monsieur le secrétaire d'État, face à l'importance de ces enjeux pour l'avenir de notre archipel dont l'atout est justement d'être la France et l'Europe en Amérique du Nord, pouvez-vous me confirmer que la préoccupation des Saint-Pierrais et des Miquelonnais sera prise en considération à Paris, et défendue par le gouvernement à Bruxelles, dans la négociation de l'accord de libre-échange avec le Canada ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État chargé des affaires européennes.

Debut de section - PermalienPierre Lellouche, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

Madame la députée, vous avez tout à fait raison (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC) de souligner l'importance de Saint-Pierre-et-Miquelon, et je vous en remercie. L'archipel français que vous représentez dans cette Assemblée est bien, pour reprendre votre expression, « un morceau de France et d'Europe au large du Canada , qui a en effet vocation à devenir la tête de pont de l'Union européenne dans ses relations avec le Canada ; il participe pleinement aussi de la vocation maritime de la France, qu'a rappelée il y a quelques jours à peine le Président de la République dans son discours du Havre.

Je tiens donc, au nom du Gouvernement, à vous rassurer et à vous dire que les préoccupations des Saint-Pierrais et des Miquelonnais seront effectivement prises en considération, qu'il s'agisse du traitement du dossier du plateau continental franco-canadien ou de la négociation en cours de l'accord de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada.

S'agissant du premier point, la France a déposé le 8 mai dernier, à New York, une demande d'extension de son plateau continental. Je saisis cette occasion, et celle de la présence d'une délégation canadienne, pour rappeler que le Gouvernement français encourage fortement le Canada à ratifier le plus rapidement possible le traité de 2005 sur l'exploitation des champs d'hydrocarbures transfrontaliers – la France l'a fait dès 2007.

Quant aux relations entre l'Union européenne et le Canada, leur renforcement a été décidé l'année dernière, pendant la présidence française. Les négociations ont commencé le mois dernier. Elles feront preuve d'un souci d'équilibre et respecteront, je l'espère, les intérêts de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Permettez-moi enfin de souligner les efforts faits par le Gouvernement pour favoriser le développement économique de votre archipel.

Debut de section - PermalienPierre Lellouche, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

La commission mixte doit se réunir cet automne, chez vous. Nous en attendons des résultats concrets. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Maurice Leroy, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Monsieur le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse, les jeunes de seize à vingt-cinq ans de notre pays attendent de nous tous ici, quel que soit le banc sur lequel nous siégeons, que nous leur redonnions espoir en l'avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Ne vous tracassez pas, cela ira encore après, monsieur Muzeau.

Les jeunes connaissent de nombreuses difficultés pour s'insérer durablement dans la vie active. Ils se retrouvent trop souvent démunis de ressources. Ils sont les plus touchés en cette période de crise.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Le Président de la République et vous-même avez pris toute la mesure de l'urgence de la situation, notamment pour lutter contre le chômage.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Les députés du Nouveau Centre saluent l'ampleur du travail réalisé et vous soutiennent. Nous demandons que vos propositions soient mises en oeuvre le plus rapidement possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Leroy

Monsieur le haut-commissaire, le Gouvernement envisage-t-il, comme cela avait été annoncé, de soumettre au Parlement un projet de loi sur une politique globale en faveur de la jeunesse et, si oui, dans quel délai ? Quelles en seront les propositions fortes, et pour quel coût total ? Les jeunes attendent votre réponse. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse.

Debut de section - PermalienMartin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse

Monsieur Leroy, vous l'avez souligné à juste titre, un processus de concertation extrêmement important a été conduit pendant quatre mois. Ce processus, auquel des membres du Parlement ont participé, a fait émerger plusieurs propositions reprises dans un Livre vert qui a été transmis à chacune et chacun d'entre vous.

Ce livre contient un corpus de réformes qui peuvent aider les jeunes à s'en sortir. Je pense à la reconnaissance et à la valorisation de la compétence des jeunes dès les premiers âges de l'école, à la création du service public d'orientation, à la mise en place d'un service civique que vous avez été nombreux à réclamer,… (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

C'est surtout de salaires décents dont les jeunes ont besoin !

Debut de section - PermalienMartin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse

… aux mécanismes permettant d'accélérer l'intégration dans l'emploi.

Ce corpus doit être discuté, mais il est d'ores et déjà soutenu, c'est cela sa force, par des gens, bien que ne défendant des lignes différentes au départ, se sont mises d'accord sur quelques principes qu'elles sont résolues à faire appliquer.

Ces propositions sont sur la table, elles ont fait l'objet d'une concertation. Elles doivent maintenant être mises en oeuvre. Vous l'avez souligné, je suis plutôt d'un naturel inquiet compte tenu des sujets dont je m'occupe en général, c'est-à-dire les populations les plus en difficultés ; mais il me semblait important que ces propositions vivent, qu'elles soient portées et défendues avec vigilance.

J'ai vu hier le Président de la République et le Premier ministre à ce propos. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienMartin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut commissaire à la jeunesse

Le Président de la République m'a rappelé que les engagements qui avaient été pris sur le revenu de solidarité active avaient été tenus, non sans difficultés parfois – vous le savez, monsieur le député, en tant que président du conseil général du Loir-et-Cher. Autrement dit, les propositions sérieuses et utiles aux jeunes passeront, et je suis content de pouvoir compter sur votre soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Glavany

Timides, les applaudissements de la majorité !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Alfred Marie-Jeanne

Madame la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, le département scientifique interfacultaire, pôle physique-chimie de Martinique, annonce n'être plus en mesure d'assurer, pour la rentrée 2009-2010, la deuxième et la troisième années par manque de moyens matériels et humains. Les étudiants seraient incités à s'orienter vers d'autres académies.

Le développement dont on parle tant ces temps-ci, dans le cadre des états généraux en cours, passe nécessairement par la mise en place et le maintien des structures de pointe dans le domaine scientifique. Qui plus est, on sait combien il peut être difficile pour certains parents de financer les études de leurs enfants hors Martinique. Le maintien de ce pôle et des enseignements qui y sont dispensés me paraît donc plus que jamais indispensable.

Madame la ministre, un tel enjeu ne mérite-t-il pas une réponse positive de votre part ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur quelques bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Monsieur le député, vous m'interrogez sur la décision qu'a prise l'université Antilles-Guyane – dont je rappelle qu'elle est répartie sur trois sites, un à la Martinique, un à la Guadeloupe, un en Guyane – de centraliser sur son pôle guadeloupéen la troisième année de chimie et de physique de la Martinique.

Soyez assuré que cette décision a été prise pour des motifs d'organisation du fonctionnement de l'université et non pas pour des motifs budgétaires. (Rires sur les bancs du groupe GDR.) En effet, le budget de l'université Antilles-Guyane pour 2009 a augmenté de 1,5 million euros, c'est-à-dire de 9,6 %, ce qui représente une progression de ses moyens de fonctionnement totalement inédite.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Ce regroupement a été motivé par l'insuffisance du nombre d'étudiants martiniquais en physique-chimie. Vous savez que la désaffection pour les premiers cycles scientifiques est, malheureusement, une réalité en métropole comme outre-mer.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Il s'agit d'une décision équilibrée : au départ, l'université avait prévu de fermer l'ensemble du premier cycle, autrement les première, deuxième et troisième années de physique-chimie, sur le site martiniquais. Nous avons souhaité que la première et la deuxième années puissent se poursuivre de façon que cette filière reste présente en Martinique.

Sachez enfin, monsieur le député, que je serai très vigilante et que je donnerai au CROUS guadeloupéen des instructions pour que les quinze étudiants martiniquais concernés soient bien accueillis en Guadeloupe. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Franck Riester, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Ma question s'adresse à M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Monsieur le ministre, l'Assemblée a commencé ce matin l'examen du projet de loi relatif à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet. Je tiens d'ailleurs à vous remercier pour votre brillante intervention en séance. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Ce projet de loi, dit HADOPI 2, prend acte de la décision du Conseil constitutionnel et complète le dispositif de la riposte graduée. Ainsi, ce sera au juge de prononcer la suspension de l'abonnement internet, et non plus à la HADOPI. Le reste de la procédure de riposte graduée, notamment l'envoi de deux avertissements préalables à toute sanction, a d'ailleurs été approuvé par le Conseil constitutionnel, puis promulgué dans la loi du 12 juin 2009.

Le texte est aussi, et avant tout, une formidable chance pour les créateurs de notre pays. En posant un cadre juridique clair, en refusant la loi de la jungle, son approche préventive et pédagogique de lutte contre le téléchargement illégal donne à la création culturelle les moyens de s'adapter au défi du numérique et de faire émerger de nouvelles sources de financement.

Aussi, monsieur le ministre, alors que le monde de la culture, notamment les milliers d'hommes et de femmes qui travaillent dans les filières culturelles de notre pays et font vivre notre exception culturelle, attend cette loi avec impatience et s'exaspère de l'obstruction stérile de l'opposition,…

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

…pouvez-vous nous rappeler l'ambition de ce projet de loi et nous dire en quoi la riposte graduée, réponse pragmatique et pédagogique au fléau du piratage sur internet, permettra de réconcilier durablement internet et création ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Monsieur le député, à vrai dire, je ne comprends pas l'absence de soutien de certains députés au dispositif du Gouvernement, tel qu'il résulte du nouveau projet de loi et de la loi déjà promulguée. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Ce dispositif confie à une autorité publique indépendante composée de magistrats le soin d'adresser aux internautes des avertissements essentiellement pédagogiques, tout en préservant leur vie privée. Il constitue la dernière chance pour une filière comme la musique, dans laquelle 99 % des entreprises sont des PME employant moins de vingt salariés. Il réalise un consensus durable dans le monde de la culture. J'ai rappelé ce matin qu'une pétition signée, rien qu'en France, par quarante cinéastes de renom et 10 000 artistes et techniciens de la musique, avait reçu l'appui de 4 000 labels indépendants européens.

Ces deux lois sont réalistes. Elles créent un nouvel état d'esprit chez l'immense majorité des internautes. Pour cela, nous avons mis toutes les chances de notre côté. Un accord unanime a été conclu entre les industries culturelles et les fournisseurs d'accès à internet,…

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

…je veux parler des accords de l'Élysée, avancée historique pour l'offre légale, puisque les films en DVD et VOD sont disponibles au bout de quatre mois.

Nous ne réglerons pas tout, mais notre objectif sera atteint. Nous créons un vrai changement dans l'état d'esprit de nos concitoyens. Je ne comprends pas que ceux qui défendent la régulation en matière sociale et économique deviennent des partisans du laisser-faire le plus débridé, dès qu'il s'agit d'internet. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Delphine Batho, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Monsieur le Premier ministre, c'est une bonne chose que le Président de la République ait bien voulu que la Cour des comptes se penche sur les dépenses de l'Élysée. Mais la transparence ne peut s'arrêter en si bon chemin.

Dans son rapport, en effet, la Cour des comptes met en exergue certaines dépenses en matière d'études d'opinion, révélant que l'Élysée a passé une convention avec un cabinet d'études pour un coût de près de 1,5 million d'euros, montant qualifié d'« exorbitant au regard des règles de l'exécution de la dépense publique. »

De plus, ce cabinet – il s'agirait du cabinet Publifact de M. Buisson – a facturé à l'Élysée, pour 392 288 euros, des sondages OpinionWay, dont les résultats ont été publiés par Le Figaro et LCI. S'y ajoutent près de quinze autres études payées par l'Élysée, à propos desquelles la Cour des comptes indique que « le document remis à la Présidence était identique à celui publié par des organes de presse ». (« Scandaleux ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Il y a donc deux hypothèses.

Soit l'Élysée a payé des sondages pour les faire publier dans certains médias, ce qui met en lumière un système de connivence entre le pouvoir, son cabinet de conseil, un institut de sondages et certains médias, dans le but, non pas d'étudier l'opinion publique, mais d'influencer le débat politique. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) La société des rédacteurs du Figaro s'en est d'ailleurs vivement inquiétée.

Soit, comme l'indique Claude Guéant, l'Élysée a payé des sondages qui étaient également payés par certains médias. Dans ce cas, il s'agirait d'une affaire de surfacturation, voire de fausse facturation. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Monsieur le Premier ministre, il serait normal que les députés que nous sommes sachent ce qu'il en est. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement.

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Madame la députée, vous savez parfaitement que la Présidence de la République a toujours commandé des sondages. Ceux auxquels vous avez fait allusion ont fait l'objet d'une convention claire et transparente parfaitement respectueuse du code des marchés publics, et aucun d'entre eux n'a donc été financé par le budget de l'Élysée. C'est si vrai que les médias dont vous avez cité les noms se sont déclarés disposés à fournir à la Cour des comptes les factures nécessaires. (« Les fausses factures ? » sur les bancs du groupe GDR.) Telle est la réalité des faits.

Vous avez commencé votre propos en reconnaissant, à juste titre, que le Président de la République était le premier à avoir voulu un budget pour 2009 complet, consolidé, présenté et voté par le Parlement. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) En outre, il a souhaité, alors que rien ne l'y oblige, que les comptes soient examinés par la Cour des comptes et que les conclusions de celles-ci soient rendues publiques. Vous n'avez donc aucun motif de vous émouvoir.

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Plutôt que d'influencer l'opinion par des sondages, nous pensons qu'il est préférable de gagner sa confiance par des propositions crédibles. Le reste n'est, de notre point de vue, que fantasmes et vaines polémiques. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Cécile Dumoulin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Dumoulin

Monsieur le secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme, chers collègues, au petit jour, un terrible incendie a détruit un pavillon de Mantes-La-Jolie, prenant dans leur sommeil les vies de trois enfants et de leur maman. Seul le père et une fillette de onze ans ont pu échapper aux flammes grâce à l'aide de leurs voisins.

Je tiens à témoigner mon émotion et celle de la représentation nationale aux proches des victimes et à les assurer du soutien des élus de la ville, dont je suis la première adjointe. Je m'associe à la peine de la famille et des amis, et à l'hommage qui leur sera rendu cet après-midi par leur communauté à Mantes-la-Jolie.

Je salue l'intervention rapide des services de police et des pompiers ainsi que le courage de l'agent de police blessé en tentant de porter secours aux personnes encore prisonnières des flammes.

L'enquête en cours s'oriente, sous toute réserve, vers une cause accidentelle.

Chaque année, plus de 400 décès sont ainsi causés par des incendies d'habitation, en particulier la nuit, faute de dispositif d'avertissement.

Aussi le Gouvernement a-t-il décidé de renforcer la sécurité des logements de plus de quinze ans et de soumettre les transactions immobilières à l'obligation d'établir un diagnostic concernant l'état des installations intérieures de gaz naturel et d'électricité.

En outre, l'année dernière, l'Assemblée nationale s'est engagée dans un processus législatif visant à obliger chaque propriétaire ou occupant d'une habitation à installer et à entretenir au moins un détecteur avertisseur autonome de fumée. Dans tous les pays où ce dispositif est obligatoire, on constate une diminution du nombre des décès.

Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous nous indiquer quand cette disposition entrera en vigueur ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Sitôt que la commission mixte paritaire se sera réunie !

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Dumoulin

Envisagez-vous de prendre d'autres dispositions en faveur de la sécurisation des habitations? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme.

Debut de section - PermalienBenoist Apparu, secrétaire d'état chargé du logement et de l'urbanisme

Madame la députée, je partage votre émotion et je tiens d'abord, au nom du Gouvernement, à présenter nos sincères condoléances à la famille et à ses proches. Nos pensées vont évidemment en premier lieu au père et à sa fillette qui ont survécu à ce drame. Je tiens également à souligner le courage des pompiers et des forces de police ainsi que des voisins qui sont intervenus, mais en vain.

Vous m'interrogez sur les moyens que le Gouvernement compte mettre en oeuvre pour prévenir ces incendies qui causent 400 décès par an. L'Assemblée nationale avait adopté une proposition de loi visant à rendre obligatoire l'installation d'un détecteur de fumée dans les habitations. Ces dispositions avaient été reprises par amendement dans la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre les exclusions, que vous avez examinée il y a quelques semaines, mais elles ont été censurées par le Conseil constitutionnel.

Au-delà de la mise en place de dispositifs contraignants de ce type, je crois indispensable de mettre surtout l'accent sur la prévention, l'information et la formation, comme le font d'autres pays. Ainsi, en Grande-Bretagne, le dispositif de prévention très efficace mis en place a permis une baisse significative du nombre de décès liés aux incendies d'habitation chaque année. C'est pourquoi, avec Brice Hortefeux et Jean-Louis Borloo, nous souhaitons lancer à l'automne une vaste campagne d'information pour sensibiliser nos compatriotes aux risques d'incendie. Bien évidemment, nous y associerons la représentation nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Patrick Braouezec, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Je me fais ici l'écho des préoccupations de nombreux maires et associations d'Île-de-France. Depuis des années, les populations roms se voient chassés d'une commune à l'autre. Le problème est plus sensible en Île-de-France, notamment en Seine-Saint-Denis et dans la communauté d'agglomération que je préside. Les habitants des quartiers concernés comprennent mal ces déplacements forcés et ces installations précaires. Ces dernières sont souvent le lieu de drames comme des incendies qui ont déjà fait plusieurs morts, dont des enfants. De surcroît, les expulsions répétées, sans vraie solution de relogement, entraînent des ruptures dans les soins, le suivi médical et la scolarisation. Pourtant, les textes de qualité élaborés au niveau européen apportent des réponses adaptées et humaines pour les familles roms ; mais ils ne sont pas appliqués en France.

Ajoutons que les Roms sont non seulement régulièrement expulsés, mais également victimes d'exactions graves. Tout se passe comme si les pouvoirs publics en France étaient décidés à obtenir leur départ par tous les moyens.

La présence en France de populations roms en situation de grande précarité exige d'autres réponses qu'une politique d'expulsions. Mais les communes ne peuvent rester seules face à ce problème ; l'État doit jouer pleinement son rôle.

Monsieur le ministre, il revient au préfet d'Île-de-France, pour répondre aux demandes de nombreux maires et associations, d'organiser une table ronde pour trouver des solutions d'accueil dignes et à même de permettre l'intégration de ces populations. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Éric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Debut de section - PermalienÉric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Monsieur le député, vous avez raison : certaines populations roms vivent aux abords de nos villes dans des conditions inhumaines, et cette situation est inacceptable. Hier, le tribunal de grande instance de Bobigny a reconnu illicite l'occupation d'un terrain tout en rejetant le recours de l'État comme étant mal orienté. De ce fait, un nouveau recours va être formé.

La politique du Gouvernement doit allier fermeté et humanité.

La fermeté, c'est de ne pas admettre que des personnes occupent des terrains et des bâtiments en toute illégalité et par la force, et s'y maintiennent alors que les conditions de vie y sont insalubres et indignes.

Debut de section - PermalienÉric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

L'État continuera donc à accorder le concours de la force publique pour faire évacuer ces lieux.

L'humanité, c'est de proposer à ces personnes de façon systématique, une aide au retour volontaire et un hébergement d'urgence. C'est bien ce que nous faisons. Ainsi la totalité des 250 personnes qui s'étaient installées au camp du fort de La Briche, où un incendie a eu lieu il y a quinze jours, ont bénéficié d'un hébergement de ce type.

Quant à l'aide au retour volontaire, elle est de plus en plus utilisée. Elle l'a été trois fois plus en 2008 qu'en 2007. Huit mille Roumains, pour la plupart des Roms, en ont bénéficié cette année-là, dont deux mille pour la seule Seine-Saint-Denis. Par ailleurs, la France a financé en Roumanie un dispositif de soutien à l'activité économique, pour un montant de 400 000 euros en 2008, ce qui n'est pas rien.

Face à cette question complexe, le Gouvernement agit avec détermination et humanité. Quant à l'organisation d'une table ronde, pour ma part et avec mes collègues, puisque cela relève d'un accord interministériel, j'y suis tout à fait disposé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Olivier Carré, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Carré

Ma question s'adresse à M. le ministre en charge de la mise en oeuvre du plan de relance.

Le plan de relance porte ses fruits. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Malgré un environnement détestable, les premières étapes ont été franchies avec succès, et cela se traduit déjà par des réalisations concrètes sur tout le territoire, grâce aux mesures destinées à soutenir prioritairement l'investissement et l'emploi.

À ce stade, je ferai trois remarques et poserai une question.

Rarement les outils modernes de gestion des politiques publiques auront été autant mis à contribution que, depuis six mois, avec l'action de votre ministère.

Rarement la gestion par mode « projets » a été autant mise en avant pour mobiliser les agents publics de l'ensemble des autres ministères, notamment du corps préfectoral, prouvant, par là même, la cohésion et l'efficacité du Gouvernement dirigé par M. le Premier ministre.

Rarement, enfin, le grand public et nous-mêmes, élus du peuple, avons pu disposer, avec autant de transparence, des informations pertinentes permettant de suivre, au jour le jour, votre action que je qualifierai en trois mots : réactivité, transparence, efficacité.

Vous avez associé sept parlementaires à la conduite de votre action durant ces premiers mois, grâce à une mission qui vient de s'achever et qui permet, d'ores et déjà, de dresser les premières évaluations d'un plan qui n'a que six mois.

Monsieur le ministre, nous vous avons déjà interrogé sur l'avancement du programme, et vous avez vous-même déposé, en ce début de juillet, un deuxième rapport au Parlement sur le sujet. Je souhaite toutefois que vous puissiez, dès aujourd'hui, faire part à l'ensemble de la représentation nationale de l'ampleur des engagements pris et des objectifs d'ores et déjà atteints. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Patrick Devedjian, ministre en charge de la mise en oeuvre du plan de relance.

Debut de section - PermalienPatrick Devedjian, ministre en charge de la mise en oeuvre du plan de relance

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député, le plan de relance fonctionne maintenant à plein régime. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

En six mois, 13,2 milliards d'euros ont déjà été injectés dans l'économie ; 550 chantiers pilotés par l'État ont été ouverts, qui donnent du travail à un grand nombre d'ouvriers et d'employés. Quant au dispositif de remboursement de la TVA, il a connu un grand succès puisque 54,5 milliards d'euros, soit deux fois le montant du plan de relance, sont actuellement investis dans l'économie et montreront toute leur efficacité dès la rentrée. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Ces mesures pour l'investissement se sont accompagnées de 350 000 embauches dans les très petites entreprises qui bénéficient du dispositif « zéro charge », mais aussi de 230 000 primes à la casse qui ont permis d'augmenter la production des constructeurs français – Peugeot a repris les trois huit à Sochaux. En outre, des prêts garantis par OSEO à hauteur de 1,468 milliard d'euros ont bénéficié à 8 500 entreprises, qui ont ainsi été sauvées et ont donc maintenu leurs emplois. Le Fonds stratégique d'investissement intervient dans un certain nombre d'entreprises d'avenir, comme Heuliez qui peut ainsi développer son projet de voiture électrique.

Par ailleurs, des mesures ont aussi été prises pour la solidarité : 200 euros ont été distribués à tous les bénéficiaires du RSA et 150 euros ont été versés au mois de juin à trois millions de familles.

Vous le voyez : ça fonctionne à plein ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Pierre Dufau, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Dufau

Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'emploi, vous avez annoncé ce matin, avec M. Charpy, que Pôle emploi transmettrait 320 000 dossiers de placement de demandeurs d'emploi à des sociétés privées. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Cette annonce est un aveu : aveu que la fusion autoritaire, précipitée et mal préparée, sans moyens suffisants, de l'ANPE et des ASSEDIC, est un échec du Gouvernement ; aveu que les relations de Pôle emploi avec le tissu économique sont négligées faute de temps disponible de la part des agents ; aveu que la promesse d'un accompagnement personnalisé de 60 à 80 demandeurs d'emploi par chaque agent du service public se révèle mensongère puisque, faute de moyens, chaque agent gère en fait plus de trois cents dossiers ; aveu, enfin, que la privatisation du service public de l'emploi est en marche – il faut dire qu'il s'agit là d'une constante de ce Gouvernement qui ne recrute plus suffisamment de fonctionnaires, comme c'est le cas dans l'éducation nationale et dans bien d'autres secteurs.

Il est paradoxal et inquiétant que l'indemnisation et l'accompagnement des demandeurs d'emploi deviennent un marché juteux pour des officines privées.

Monsieur le secrétaire d'État, quand allez-vous réagir face à l'augmentation du nombre de chômeurs, en dotant Pôle emploi des moyens nécessaires ? Si vous ne le faites pas, dites-nous alors si votre volonté est bien de sacrifier une partie du service public de l'emploi, au bénéfice du secteur privé ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député, Pôle emploi résiste mieux dans cette période de crise que ne l'avait fait le logiciel ANPE-ASSEDIC en 1993 – vous auriez pu commencer par le rappeler. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

En revanche, certains éléments doivent être améliorés. Tel est l'objet du plan d'action que nous avons présenté ce matin avec Christian Charpy et Dominique-Jean Chertier. Il comporte trois priorités. Tout d'abord, assurer une meilleure indemnisation et mettre à profit la période d'été pour qu'aucun dossier ne soit en retard au 1er septembre. Ensuite, mieux assurer l'accueil des demandeurs d'emploi, notamment grâce à des recrutements supplémentaires – vous auriez pu en parler – et à l'amélioration du fonctionnement du numéro d'appel unique 3949.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Ce n'est pas du tout une réponse à la question !

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Enfin, nous ferons en sorte de mieux accompagner les demandeurs d'emplois en reconversion, notamment en améliorant l'offre de formation – nous avons des progrès à accomplir sur ce plan.

Pour la réalisation de ce plan, nous avons besoin de tout le monde et aucune piste ne peut être négligée. À la demande du Premier ministre et de Christine Lagarde, nous avons donc exploré toutes celles qui sont susceptibles de répondre rapidement à nos attentes.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Premièrement, il nous faut améliorer l'efficacité de Pôle emploi ; c'est ce que nous essayons de faire, mois après mois.

Deuxièmement, il nous faut améliorer le recrutement et augmenter les effectifs de Pôle emploi. Ils seront opérationnels à la rentrée.

Troisièmement, nous devons améliorer les partenariats, notamment avec les missions locales, et nous appuyer aussi – cela ne me semble pas être un crime – sur les agences d'intérim. Pourquoi ? Parce qu'elles disposent de personnels efficaces et compétents qui sont déjà en mesure d'accompagner les demandeurs d'emplois. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Vous manifestez l'intention de faire de ce dernier point un sujet de polémique. Je rappellerai seulement que tous les partenaires sociaux ont validé le principe du recours aux agences d'intérim et que le conseil d'administration, au sein duquel tous les syndicats sont représentés, a fait de même.

Tout cela montre bien que, dans cette crise, le parti socialiste est enfermé dans son idéologie et dans une opposition systématique (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), tandis que les partenaires sociaux font preuve de beaucoup plus de bon sens et d'esprit constructif. Les demandeurs d'emploi jugeront ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Michel Raison, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Monsieur le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation,…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

…il y a un an, vous nous avez proposé, avec Christine Lagarde, de faciliter la création d'entreprise. Nous avons ainsi adopté, dans le cadre de la LME, le statut de l'auto-entrepreneur.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

Entré en vigueur le 1er janvier dernier, ce statut connaît un vif succès. Celui-ci me réjouit, car il démontre le désir d'entreprendre de nombre de nos concitoyens,…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Raison

…dont la tâche est facilitée par une simplification administrative positive. Ce succès démontre également le dynamisme des Français, qui, malgré la crise économique, croient en l'avenir, grâce à la politique conduite par le Gouvernement de François Fillon.

Il me serait agréable, monsieur le secrétaire d'État, que vous puissiez nous communiquer quelques chiffres à ce sujet – qui pourraient, du reste, égayer la fin de notre session extraordinaire !

Toutefois, ce désir d'entreprendre ne doit pas faire oublier les responsabilités qui incombent à chaque entrepreneur. Dans les secteurs du bâtiment et de la restauration notamment s'appliquent des normes de sécurité, notamment sanitaire, précises, non seulement indispensables pour les consommateurs, mais également à même d'éviter les distorsions de concurrence. Ainsi, la plupart des travaux de bâtiments sont garantis par une responsabilité décennale. Or une telle garantie n'est pas prévue pour les auto-entrepreneurs, alors que leur activité peut cesser sans formalité.

Monsieur le secrétaire d'État, vous avez mis en place, avec les professionnels concernés, un groupe de travail afin de faire évoluer le statut de l'auto-entrepreneur. Nous souhaiterions, avec mes amis Dino Cinieri et Jean-François Chossy, que vous nous précisez où en est cette réflexion. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Monsieur le député Raison, ce matin, l'INSEE a rendu public le nombre des créations d'entreprise enregistrées au mois de juin : pour la première fois depuis la création de l'INSEE, nous avons dépassé le chiffre de 50 000. C'est un record, qui porte à 272 000 le nombre des entreprises créées durant le premier semestre de cette année.

Ainsi que vous l'avez indiqué à juste raison, ce résultat est largement dû, certes à l'esprit d'entreprise des Français, mais également au nouveau statut ultra-simplifié de création d'activité, que le Parlement a adopté à l'article 1er de la loi de modernisation de l'économie. Ce statut nous permet d'espérer le chiffre de 500 000 créations d'entreprise au cours de l'année 2009, ce qui serait un nouveau record.

Avec Christine Lagarde, nous avons évidemment été très attentifs aux remarques ou aux inquiétudes exprimées par les artisans, notamment par les organisations professionnelles du bâtiment. Nous avons ainsi créé un groupe de travail, auquel j'ai proposé deux aménagements importants qui, en donnant satisfaction aux organisations professionnelles, devraient permettre de ramener la sérénité dans un secteur primordial de notre économie.

Premièrement, les auto-entrepreneurs devront, comme tous les artisans, faire la preuve de leurs qualifications professionnelles lorsqu'ils exerceront dans les métiers soumis à qualification.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Deuxièmement, l'immatriculation au répertoire des métiers sera automatique. Ces aménagements, monsieur le député, sont de nature à satisfaire les artisans, sans briser l'élan de la création d'entreprise. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Gisèle Biémouret, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Biémouret

Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'emploi, il y a quelques mois, vous avez lancé le Plan 2 des services à la personne, destiné à compléter le plan de cohésion sociale. L'intention était louable et la perspective magique : n'annonçait-on pas la création de plusieurs centaines de milliers d'emplois ?

Certes, il s'agit d'un secteur où les besoins, considérables, ne feront que croître. Mais cette volonté de créer des emplois à tout prix masque une réalité moins remarquable en situation de crise. La logique visant à déréglementer le système a en effet abouti à la précarisation de milliers d'emplois, occupés essentiellement par des femmes, à des salaires très bas. Quant aux services à la personne dits de confort, qui bénéficient aux ménages aisés, ils sont subventionnés par des aides publiques coûteuses.

Cette évolution se fait au détriment de la qualité des emplois créés. En effet, quel avenir réserve-t-on à ces salariés, en termes de qualité de vie et de retraite ? Selon l'Agence nationale des services à la personne, ces emplois représentent à peine dix heures hebdomadaires. Même si le RSA vient compléter le revenu de cette nouvelle catégorie de « serviteurs », ce type de situations ne permet pas d'espérer voir leur quotidien s'améliorer.

Le recours systématique à des campagnes de communication sophistiquées et coûteuses ne suffit pas à masquer l'échec du plan de cohésion sociale et de la politique sociale que vous menez depuis 2002. Celle-ci révèle votre incapacité à donner du sens à la priorité de la politique de l'emploi. Aucune de vos réformes, aucune de vos décisions ne prend réellement en compte les personnes et leurs conditions de vie.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Biémouret

Dès lors, monsieur le secrétaire d'État, que comptez-vous faire pour dépasser le mirage social que vous avez créé et doter enfin les services de l'aide à la personne d'emplois dignes de ce nom ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Madame la députée Biémouret, ainsi que vous l'avez rappelé avec objectivité, en cette période de crise, de nombreux emplois peuvent être gagnés dans le secteur des services à la personne : cette année, plus de 100 000 emplois pourront encore être créés.

Avec Christine Lagarde, nous avons donc veillé à conforter cette dynamique, en proposant notamment des chèques emploi universels, financés par l'État. Opérationnels depuis le 1er juillet, ils sont destinés aux ménages modestes, qui, jusque-là, n'avaient pas accès aux services à la personne, et ont déjà fait l'objet, depuis le début du mois, de 10 000 demandes.

Par ailleurs, vous avez raison, madame, il est hors de question d'acheter le développement des services à la personne au prix d'une plus grande précarité. C'est pourquoi, avec Laurent Hénart, nous avons réfléchi, dans le cadre de la deuxième étape des services à la personne, à une amélioration de la nature de ces emplois qui, vous l'avez souligné, sont souvent des emplois féminins.

Nous souhaitons ainsi mettre en place des dispositifs opérationnels en faveur de ces salariés. Il s'agit, tout d'abord, de leur permettre d'accéder à une véritable offre de formation : les emplois de service à la personne ne doivent pas être sous-qualifiés. Nous veillerons, ensuite, aux débouchés qui peuvent leur être offerts, notamment dans le secteur médico-social. Nous entendons également mener une politique destinée à améliorer la couverture sociale, en faisant en sorte qu'une convention soit négociée dans le secteur, et à prévenir les risques.

Ces différentes actions très concrètes feront l'objet – cela a été négocié avec le secteur – d'un baromètre de suivi de la qualité des emplois. Je vous propose d'ailleurs de vous y associer, si vous le souhaitez, pour l'année à venir, afin que nous puissions suivre ensemble ces améliorations.

Le secteur des services à la personne permet de créer des emplois, mais nous n'accepterons pas que cela se fasse au prix d'une plus grande précarité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Morisset

Ma question s'adresse à M. le ministre chargé de l'industrie. Il y a quelques jours, le 8 juillet dernier, le tribunal de commerce de Niort validait le plan de reprise de l'équipementier et constructeur automobile Heuliez.

En sauvegardant 600 emplois – de nombreux salariés restant toutefois, il est vrai, sur le bord du chemin –, ce plan de reprise constitue une étape importante devant permettre le redressement de l'entreprise. C'est donc une bonne nouvelle pour l'emploi, pour le département des Deux-Sèvres et pour notre pays.

Cette décision met un terme à deux ans d'incertitudes. Nous la devons à une forte implication des ministres de l'industrie : Luc Chatel, qui a suivi en permanence ce dossier et s'est déplacé à deux reprises sur le site, et vous-même, monsieur le ministre, dans la décision finale. Nous la devons aussi à la forte mobilisation des différents partenaires, notamment des collectivités locales et territoriales.

Nous pouvons donc nous réjouir du sauvetage de cette entreprise, fleuron de notre industrie. Il conviendra toutefois de veiller à la concrétisation des engagements des repreneurs industriels et de leurs partenaires financiers. Monsieur le ministre, le plan de relance mis en place par le Gouvernement, et géré au quotidien avec efficacité par Patrick Devedjian, permet de produire l'activité utile à nos territoires et de sauvegarder ainsi des emplois menacés.

Nous avons voté l'ensemble des textes que le Gouvernement nous a proposés pour contribuer à une relance efficace de notre économie. Nous avons été unis, sur les bancs de la majorité, pour soutenir le plan de relance. L'opposition a, quant à elle, beaucoup critiqué, beaucoup commenté, et s'est peu engagée ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Je vois dans cette actualité une illustration de l'efficacité des mesures décidées par le Président de la République et par le Gouvernement pour faire face à la crise. Aujourd'hui, monsieur le ministre, pouvez-vous nous préciser les conditions d'intervention de l'État dans le soutien de l'entreprise Heuliez et les garanties envisagées pour s'assurer du respect des engagements des repreneurs industriels et de leurs partenaires financiers ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

Monsieur le député, je sais avec quelle énergie vous avez défendu, dans votre département, l'entreprise Heuliez, plongée depuis deux ans dans une situation difficile.

Heuliez est – faut-il le rappeler ? – l'un des fleurons de l'industrie automobile française. C'est une entreprise tournée vers l'innovation, notamment avec le développement du véhicule électrique. Elle montre, par son exemple, que tout peut devenir possible pour trouver un nouvel avenir lorsque l'État, les salariés et leurs représentants, les chefs d'entreprise et les collectivités locales savent unir leurs efforts.

En veillant à ce juste équilibre entre l'association des mesures du plan de relance suivi par Patrick Devedjian et le positionnement que Christine Lagarde et moi-même maintenons sur des enjeux stratégiques en matière d'innovation industrielle, nous avons pu trouver une solution efficace, que vous avez vous-même défendue.

Il est important de rappeler que c'est l'État qui a apporté 10 millions d'euros au capital d'Heuliez à travers le Fonds stratégique d'investissement ; que c'est encore l'État qui, par le biais d'OSEO, a apporté 3,5 millions d'euros en faveur de la recherche et du développement ; que c'est toujours l'État qui a pris des mesures de chômage partiel afin de permettre à l'entreprise de traverser cette période difficile ; que c'est enfin l'État qui a apporté un soutien à la vente de véhicules électriques en instaurant une prime à l'achat de 5 000 euros…

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

…et qui a instauré le contrat de transition professionnelle, contrat qui permettra à tous les salariés qui ne resteront pas dans l'entreprise de bénéficier du maintien de 90 % de leur salaire pendant un an, ainsi que d'un accompagnement vers un nouvel emploi.

Nous avons fait, monsieur le député, un double choix : celui de l'ouvrier et de son savoir-faire, et celui de l'innovation industrielle. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Régis Juanico, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Dans quelques jours, au terme d'une longue session parlementaire, nos collègues députés auront droit à quelques jours de congés bien mérités, dont ils profiteront, dans leur grande majorité, pour partir en vacances.

Cette chance, une majorité de nos concitoyens ne l'auront pas. Selon les dernières études parues, plus de 50 % des Français ne partiront pas en vacances cet été, soit une progression de dix points par rapport à l'an dernier, en raison de la crise. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Quant aux Français les plus modestes, qui gagnent moins de 1 200 euros net par mois, ils seront 82 % à rester chez eux. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Chaque année, plus de 3 millions d'enfants ne partent pas. C'est une inégalité sociale majeure : le départ en vacances, quand il s'agit d'un temps de vie collectif, synonyme de mixité sociale, d'apprentissage des règles de vie en société, d'ouverture aux autres, constitue un moment essentiel dans la construction d'un enfant – et, plus largement, d'un citoyen.

Le premier obstacle au départ en vacances, nous le savons tous, c'est le coût financier des séjours. Des dispositifs d'aide au départ existent déjà, grâce aux caisses d'allocations familiales, aux comités d'entreprise ou aux collectivités locales, mais ces aides sont dispersées et insuffisantes : seuls 20 % des jeunes de 5 à 19 ans sont concernés. C'est à l'État de s'engager pour faire du départ en vacances un droit effectif.

Monsieur le Premier Ministre, vous répétez souvent que les socialistes n'ont pas d'idées. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Sur cette question, nous avons une proposition simple et juste. Notre groupe a déposé, il y a un an, une proposition de loi visant à instaurer une aide au départ en vacances de 200 euros minimum pour les 3 millions d'enfants et d'adolescents qui n'ont pas accès aux vacances. Cette proposition de loi est soutenue par une plate-forme de soixante associations nationales et par de nombreux parlementaires de toutes sensibilités.

Ma question est simple : au moment où votre Gouvernement refuse tout coup de pouce au SMIC et à l'allocation de rentrée scolaire, êtes-vous prêt à soutenir cette mesure de justice sociale, créatrice d'emplois sur l'ensemble du territoire dans le secteur du tourisme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Huées sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Comme vous le savez, monsieur le député, l'aide publique au départ en vacances s'exerce à travers deux moyens : d'une part le chèque-vacances, d'autre part les actions menées par l'Agence nationale pour les chèques-vacances.

Il y a quelques jours, le Parlement a adopté une disposition très importante visant à étendre la diffusion des chèques-vacances aux entreprises de moins de 50 salariés. Cette mesure a été votée sur tous les bancs de cette assemblée, ce dont je me réjouis. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Il y avait jusqu'à présent une injustice, à laquelle nous allons mettre fin, et qui faisait que les 8 millions de salariés travaillant dans les petites et moyennes entreprises n'avaient pas droit aux chèques-vacances.

Ce n'est toutefois pas suffisant, et vous avez raison de penser qu'il faut faire plus et mieux. C'est pourquoi l'Agence nationale pour les chèques-vacances conduit déjà des politiques fortes en matière d'aide au départ en vacances en direction d'un certain nombre de personnes, et notamment des jeunes. Je veux saluer ici l'action « Des vacances, moi aussi ! », menée par Fadela Amara avec le soutien de l'Agence, et grâce à laquelle 10 000 jeunes pourront partir. Quant à l'opération « Seniors en vacances » de l'ANCV, elle permettra, à terme, à 100 000 personnes âgées de partir, elles aussi, en vacances.

Mais il faut faire encore mieux, c'est pourquoi j'ai décidé de consacrer les prochaines Assises nationales du tourisme, en octobre prochain, au tourisme social. Je crois qu'il faut repenser le tourisme social, qui n'est plus celui des années 1960, mais celui des années 2010. Toutes les contributions seront les bienvenues, pourvu qu'elles soient aussi réalistes que possible ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Madame la secrétaire d'État chargée de l'écologie, le Grenelle de la mer s'est achevé la semaine dernière et a débouché sur des propositions consensuelles et néanmoins ambitieuses, notamment en matière d'énergies renouvelables, de pêche durable ou de protection de la biodiversité marine. Alors que le Président de la République vient d'annoncer au Havre l'émergence d'une nouvelle stratégie maritime pour la France, je souhaiterais vous interroger sur un aspect particulier de notre gestion de la mer : la qualité des eaux de baignade, sachant que les pollutions des eaux sont majoritairement dues à des phénomènes terrestres.

Cette question est particulièrement d'actualité en cette période estivale où nos communes du littoral accueillent de nombreux touristes, avec le souci d'assurer une bonne qualité des eaux pour tous les publics et notamment les enfants.

La directive européenne du 15 février 2006 fixe de nouvelles obligations pour améliorer la qualité des eaux de baignade, l'information du public et la surveillance. Ces objectifs devront être atteints d'ici à 2015. Or de nombreuses communes n'ont pas encore pris la mesure de ces nouvelles exigences, indispensables à la bonne santé des baigneurs : à croire certaines simulations, 10 % des plages se retrouveront interdites en 2015 si rien n'est fait d'ici là.

Les communes ont donc tout intérêt à agir d'ores et déjà pour se mettre en pleine conformité avec les nouvelles exigences fixées par la directive. Elles y sont prêtes pour autant qu'on puisse leur garantir un véritable système de labellisation pertinent traduisant l'essentiel, à savoir la qualité des eaux.

Madame la secrétaire d'État, ma question est donc la suivante : que comptez-vous faire pour aider les collectivités locales à se conformer à ses nouvelles règles et comment pouvez-vous garantir des évaluations et un label dont la légitimité ne pourrait être remise en doute ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.

Debut de section - PermalienChantal Jouanno, secrétaire d'état chargée de l'écologie

Monsieur le député, vous avez raison, la qualité des eaux, et notamment des eaux de baignade, est une préoccupation croissante de nos concitoyens. La nouvelle réglementation, qui sera applicable à compter de 2015, est une très belle illustration de la nécessité de protéger l'environnement pour protéger l'homme.

Cette réglementation constitue un très gros enjeu à la fois sanitaire, écologique et économique. Si nous l'appliquions aujourd'hui, 10 % des 3 200 plages et sites de baignade n'atteindraient pas le niveau de qualité jugé suffisant pour les eaux de baignade. Il y a donc un gros travail à faire en amont pour être en mesure de respecter la réglementation d'ici à 2015.

Mais il s'agit là d'une vraie amélioration pour nos concitoyens. L'objectif est de diviser par deux le risque de contracter des maladies en se baignant. Par ailleurs, les prélèvements seront effectués non plus en plein hiver mais au coeur de la période estivale. Enfin, et vous l'avez dit, ce plan implique des actions en amont. Grâce au plan d'assainissement décidé par Jean-Louis Borloo, d'ici à la fin de l'année 2011, toutes les grandes stations d'épuration seront aux normes.

Il faut prendre un temps d'avance car le travail va commencer dès 2011. Avec l'Association nationale des élus du littoral et l'Association nationale des maires de stations classées et communes touristiques, nous avons mise au point un référentiel qui permet à ces communes d'engager une démarche de certification. Aujourd'hui, neuf communes et trente-cinq sites de baignade se sont engagés, et le premier certificat a été remis hier à la commune de Cavalaire, dans le Var. Permettez-moi de tirer un coup de chapeau à ces neuf communes qui vont « essuyer les plâtres » s'agissant de la mise en oeuvre de cette réglementation. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Marcel Rogemont, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Ma question s'adresse au Premier ministre.

Vous avez décidé de dépenser 3 milliards d'euros pour baisser la TVA sur la restauration et ce, en pure perte. On ne note en effet aucune création d'emploi, aucune amélioration des conditions de travail ou de rémunération des salariés, aucune baisse des tarifs, ou si peu, puisqu'une large majorité de restaurateurs n'a même pas baissé le prix du sucre pour le café. Bref, 3 milliards pour rien !

Les Françaises et les Français ne comprennent pas pourquoi vous avez refusé notre proposition visant à augmenter les petites retraites pour seulement quelques centaines de millions d'euros alors que 3 milliards étaient disponibles.

Les Françaises et les Français ne comprennent pas pourquoi vous refuser de donner 800 millions pour les hôpitaux alors que ces derniers vont être obligés de supprimer 20 000 emplois alors que 3 milliards étaient disponibles.

Les Françaises et les Français ne comprennent pas pourquoi vous allez supprimer 15 000 emplois dans l'éducation nationale, tant et si bien que la sécurité dans les écoles n'est même plus assurée, alors qu'on peut financer près de 100 000 emplois de fonctionnaires avec 3 milliards, et que vous les aviez !

Les Françaises et les Français doivent savoir que le budget du ministère de la culture est de 2,7 milliards d'euros : autrement dit, que vous donnez aux restaurateurs davantage que pour l'action de l'État en faveur de la culture… C'est scandaleux.

Les Françaises et les Français ne comprennent pas pourquoi vous vous acharnez sur une mesure qui ne profite qu'aux restaurateurs alors qu'il y a tant de misère autour de nous.

Quand allez-vous mettre fin à cette gabegie ?

Ma seconde question vient du fait qu'un de vos ex-ministres a adressé un bulletin d'adhésion à l'UMP à chaque restaurateur en même temps que vous annonciez cette mesure inique pour la France. (Huées sur les bancs du groupe SRC.) Combien, avez-vous eu d'adhésions supplémentaires à l'UMP avec ces 3 milliards d'euros ? Le chiffre de 400 à circuler : cela fait 7,5 millions d'euros pour chaque adhésion supplémentaire. C'est scandaleux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Monsieur le député, je vais vous parler, quant à moi, de TVA. Mais je vais d'abord rectifier les chiffres : il s'agit non pas de 3 milliards d'euros mais de 2,5 milliards d'euros. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) En contrepartie de cette somme, considérable, nous avons demandé trois engagements fondamentaux.

La première catégorie d'engagements est d'ordre social. Le 22 juin, trois avenants ont été conclus à la convention collective des cafés, hôtels, restaurants, portant en particulier sur la prévoyance et la protection des salariés. Un nouvel avenant, actuellement à la signature des organisations syndicales, porte sur la grille des salaires des personnels dans les cafés, hôtels et restaurants. Les engagements en matière de salaire et de protection sociale ont donc été tenus.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Non !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

La deuxième série d'engagements, et c'est à celle-ci que vous faites souvent référence, avait trait aux prix. Je vous rappelle que j'avais fait faire un relevé préliminaire. Nous disposons donc d'une batterie de 23 500 relevés de prix. Dès la première semaine d'application, c'est-à-dire entre le 6 et le 9 juillet, mes services de la DGCCRF ont commencé à procéder à des relevés dont il résulte qu'au bout de sept jours seulement, 50 % des cafés, hôtels et restaurants avaient appliqué la mesure de réduction des prix.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Pour un tiers de ces prix, la baisse était supérieure à 10 %.

La troisième catégorie d'engagements portait sur les investissements. Vous m'accorderez qu'au bout de trois semaines de mise en oeuvre de l'accord, il est difficile de vérifier si les engagements dans ce domaine sont tenus.

Je vous indique néanmoins que, demain, Hervé Novelli présidera le premier comité de suivi, soit trois semaines après la mise en place de la disposition. La représentation nationale participera à ce comité de suivi puisque deux députés et deux sénateurs y siègeront. Nous verrons bien si les engagements sont tenus. Je vous rappelle que les grands arbitres de cet accord, d'une nature un peu nouvelle, je vous l'accorde, seront les consommateurs. Nous les mettrons en mesure de juger si, oui ou non, les restaurateurs appliquent les règles. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous en avons terminé avec les questions au Gouvernement.

TVA à taux réduit dans la restauration

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

L'ordre du jour appelle les explications de vote des groupes et le vote par scrutin public, après engagement de la procédure accélérée, sur l'ensemble du projet de loi relatif à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie (nos 1628, 1793, 1700).

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Pour le groupe SRC, la parole est à M. Michel Issindou.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Issindou

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État chargé de l'emploi, mes chers collègues, le Président de la République l'avait promis : cette réforme de l'orientation et de la formation professionnelle tout au long de la vie devait être l'une des grandes affaires de son septennat.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Issindou

Mais le projet de loi sur lequel nous allons nous prononcer est bien loin de l'ambition affichée : la montagne annoncée va accoucher d'une souris.

Pourtant, le diagnostic sur une nécessaire réforme est partagé pour tous les acteurs de terrain. Les rapports Carle et Guégot ont bien relevé les insuffisances du dispositif. Le rapport Ferracci de juillet 2008 indiquait quant à lui les pistes à suivre : renforcer le lien emploi-formation ; rendre la formation accessible à ceux qui en ont le plus besoin, les jeunes, les seniors, les demandeurs d'emploi, les salariés des TPE ; simplifier la lisibilité et l'accès aux très nombreux dispositifs de formation.

En juillet 2008, vous avez demandé aux partenaires sociaux de s'accorder sur les éléments d'une réforme. Fait remarquable, ils ont, le 7 janvier 2009, signé à l'unanimité un accord reprenant une grande partie des rapports précédemment cités. Cet accord entre partenaires était ambitieux. Il prévoyait notamment l'instauration de la formation initiale différée, la concrétisation de la portabilité du droit individuel à la formation, la création du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels destiné aux publics les plus fragiles.

À partir des diagnostics et de cet accord entre partenaires sociaux portant les prémices d'une véritable sécurisation des parcours professionnels, tout était réuni pour aboutir à la grande réforme attendue. Et c'est là que tout se gâte, monsieur le secrétaire d'État ! Vous présentez un projet de loi très éloigné de l'accord du 7 janvier 2009, alors que les réformes précédentes, notamment la réforme fondatrice de 1971, reprenaient fidèlement les accords entre partenaires. La sanction est immédiate : votre texte est sèchement retoqué par le Conseil national, le 14 avril 2009.

Pourquoi ce désaveu ? On le comprend aisément, et les débats de la semaine passée ont mis en lumière cette déception collective. Le projet de loi manque par trop d'ambition, notamment en « oubliant » de reprendre deux points majeurs pour une grande réforme : il ne crée pas un vrai service public d'orientation ; il ne crée pas un droit à une formation initiale différée, alors même que plus de 150 000 jeunes sortent tous les ans sans diplôme du système scolaire.

Tout votre texte est marqué par le retour en force de l'État dans tous les rouages.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Issindou

Au moment où l'on s'efforce de clarifier les compétences entre tous les niveaux d'administration – le projet de loi issu du rapport Balladur devrait l'illustrer dès septembre prochain –, vous instaurez du copilotage aussi bien au niveau du fonds paritaire que des régions. Or, l'on sait ce que valent les copilotages en termes d'efficacité…

Dans le premier cas, vous manifestez peu de confiance, dans les partenaires sociaux, en leur disant qu'en cas de désaccord sur l'affectation des fonds, c'est l'État qui tranchera par décret. Quant aux régions, qui ont pourtant reçu compétence pleine et entière depuis 2004, vous les mettez quasiment sous tutelle. Là aussi, votre défiance, que l'on peut politiquement comprendre, est des plus mal venue, tant il est manifeste aux yeux de tous que l'échelon régional est, du fait de la proximité, le bon niveau de réponse.

Autre mauvais exemple de ce projet de loi, le démantèlement programmé de l'AFPA. En l'amputant de neuf cents de ses conseillers psychologues au profit de Pôle emploi, en refusant de vous battre pour que la formation professionnelle sorte du champ concurrentiel, vous la condamnez, à terme, à disparaître.

Mais tout cela va finalement dans le sens que vous souhaitez. En mettant sous tutelle les régions et les partenaires sociaux, vous recentralisez la formation professionnelle, avec une ambition à peine dissimulée au cours des débats : créer un grand service public emploi-formation autour de Pôle emploi, dont on connaît les limites actuelles.

Monsieur le secrétaire d'État, vous ne réglerez pas de la sorte la forte montée du chômage. Vous citez souvent la nécessité d'une conversion éclair d'un métier à l'autre par une formation accélérée. La formation tout au long de la vie relève d'une autre approche, beaucoup mieux construite et s'inscrivant dans la durée. La formation n'est pas l'arme anticrise immédiate dont vous rêvez. Elle doit donner à notre pays des salariés bien formés, en instaurant – pourquoi pas ? – une obligation de formation, formation qui permettra à notre économie d'amplifier sa compétitivité et sa capacité d'innovation, mais qui donnera aussi à chaque salarié les moyens d'affronter sans angoisse excessive les aléas de la vie professionnelle. C'est à eux que nous devons une réforme ambitieuse !

Votre texte est sans ambition et passe à côté de l'objectif, C'est pour cette raison que le groupe SRC votera contre votre projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Pour le groupe GDR, la parole est à M. Jean-Paul Lecoq.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Monsieur le président monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, « les services de Bruxelles considèrent que la formation est une activité économique et qu'à ce titre elle est soumise à la concurrence ; […] honnêtement, je ne crois pas à nos chances d'obtenir une majorité pour changer ce point au niveau européen. » Tel est le type d'arguments derrière lesquels le Gouvernement s'est retranché durant la discussion du projet de loi relatif à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, soumis à notre vote aujourd'hui. Doit-on en conclure que vous n'êtes plus capables de négocier quoi que ce soit au niveau européen, depuis la fin de la présidence française de l'Union ?

Plus sérieusement, il apparaît qu'en défendant ce texte vous ne vous êtes pas écartés d'un iota de l'objectif stratégique que les dirigeants européens ont fixé en 2000 à Lisbonne, à savoir « faire de l'Europe l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde d'ici à 2010 ». Cette stratégie, les députés communistes, républicains, du parti de gauche la récusent car elle est un prétexte pour, dans les faits, inscrire l'éducation et la formation professionnelle dans les critères marchands de la mondialisation.

Nous pensons que la formation professionnelle, tout comme l'école, ne peut avoir pour finalité de reproduire une élite au pouvoir d'un côté et une masse de travailleurs flexibles et adaptés au marché de l'autre, mais qu'elle doit au contraire permettre l'émancipation de tous en formant des esprits critiques et créatifs.

Aussi, si nous partagions votre objectif de rendre plus cohérents et transparents les dispositifs de formation professionnelle et de permettre un meilleur accès à la formation professionnelle des personnes qui en sont le plus souvent écartées, nous pensons, d'une part, que vous n'avez pas vraiment tiré les conclusions de votre responsabilité dans la situation actuelle et jugeons, d'autre part, que le texte n'est pas à la hauteur des attentes qui peuvent s'exprimer dans le monde du travail.

Votre projet de loi s'inscrit, ne l'oublions pas, dans un contexte marqué par le désinvestissement financier de l'État que vous organisez dans le domaine de l'éducation nationale, et donc de la formation initiale. À cet égard, vous avez refusé de transposer le « droit à la formation initiale différée » pour les salariés sortis du système scolaire sans diplôme, droit qui figurait pourtant dans l'accord national interprofessionnel signé par les partenaires sociaux.

Votre prétendue sécurisation du parcours professionnel ne s'est quasiment traduite dans les faits que par l'inscription de la « portabilité du droit individuel à la formation ». Cela reste insuffisant et bien éloigné du système de sécurité de l'emploi et de la formation que nous défendons et qui, grâce à la création d'un nouveau statut du travail salarié, permettrait à chacun de se voir garantir son contrat de travail, mais aussi son salaire et ses droits associés, tels que 10 % du temps de travail consacrés à la formation professionnelle.

En outre, la création du fonds de sécurisation des parcours professionnels par regroupement des OPCA nous inquiète : auriez-vous l'intention de ponctionner les fonds destinés à la formation professionnelle, comme vous l'avez fait avec le 1 % logement, afin de faire face à l'urgence du chômage ?

Vos actes n'ont pas non plus rejoint vos prétentions lorsque vous avez rejeté nos propositions. Vous avez refusé d'adopter un droit plancher de dix heures de formation par an pour les salariés à temps partiel ; vous avez également refusé d'étendre aux entreprises de moins de cinquante salariés la possibilité, pour les salariés de plus de quarante-cinq ans, de bénéficier d'un entretien professionnel les informant sur leurs droits en matière d'orientation et de formation.

Enfin, si vous avez prétendu qu'il était hors de question de démanteler l'AFPA, c'est bien la dissolution de ses missions que vous organisez concrètement avec le transfert de ses personnels à Pôle emploi avant le 1er avril 2010. Or ce qui se passe aujourd'hui sur le terrain avec le nouveau service public de l'emploi nous fait redouter le pire pour l'avenir.

Nous aurions aimé que ce projet de loi aboutisse à une modernisation des services publics de l'orientation et de la formation et à la création d'un grand service public. Repoussant nos amendements qui allaient dans ce sens, vous n'avez pas craint de prétendre avec mauvaise foi qu'ils nous entraînaient au devant de difficultés juridiques au moment de la transposition de la directive services, alors que vous avez tout pouvoir pour exclure la formation professionnelle du champs des activités qu'elle vise !

Votre attitude, que je me permets de qualifier d'hypocrite, et vos propositions, qui relèvent de l'affichage plutôt que d'une véritable ambition pour la formation professionnelle de notre pays, conduisent donc les députés communistes, républicains et du parti de gauche à rejeter ce texte ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je fais d'ores et déjà annoncer le scrutin dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Pour le groupe Nouveau Centre, la parole est à M. Francis Vercamer.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

Le groupe Nouveau Centre tient à rappeler son attachement à la formation professionnelle, qui est un élément déterminant de nos politiques de l'emploi. Dans une société où la mobilité professionnelle est de plus en plus importante, il est essentiel de permettre aux salariés de se former tout au long de leur parcours et de s'adapter en permanence aux évolutions du marché du travail et aux réalités des bassins d'emploi. Par ailleurs, dans un contexte de crise, le ralentissement de l'activité doit permettre aux salariés de valoriser leurs compétences à travers la formation. De même, la formation professionnelle doit permettre aux demandeurs d'emplois d'acquérir les connaissances qui permettent l'accès à de nouveaux métiers.

Attendu avec impatience, issu du dialogue social, le texte qui nous est soumis, reste en deçà de nos attentes sur quelques points, comme le droit à la formation initiale différée, inscrit dans les accords issus du dialogue social en 2003 et 2009, et qui aurait pu être enfin consacré par la loi. Ce texte aurait également pu être l'occasion de repenser la question du financement de la démocratie sociale, point que nous considérons déterminant, et d'aborder la question de la formation des dirigeants d'entreprises. Nous aurions pu enfin étendre le bénéfice de la portabilité du DIF, en cas de démission du salarié, en dehors des seuls cas de démission « légitime », et nous aurions souhaité que l'employeur puisse choisir son organisme collecteur. Le sujet a fait débat, et il serait utile de réfléchir à l'opportunité d'une telle mesure avant l'examen du texte au Sénat. Pour finir, je crains que ce texte ne règle pas la question de la gouvernance de la formation professionnelle. Il est pourtant essentiel de se doter d'une véritable instance de concertation et de pilotage au niveau régional et territorial.

Toutefois, ce projet de loi constitue une étape importante qui traduit de très nombreuses avancées. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Sans être exhaustif, je pense notamment à la portabilité du droit individuel à la formation, à la création du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, à la consécration du droit à l'orientation et à la préparation opérationnelle à l'emploi.

Par ailleurs, le Nouveau Centre a vu un grand nombre de ces amendements intégrés à ce projet de loi (Mêmes mouvements) : la portabilité du DIF étendue aux salariés en CDD ; l'élargissement du champ du passeport formation, qui devient un passeport orientation et formation ouvert dès la formation initiale ; la prise en compte des modalités d'accès à la formation professionnelle dans les zones transfrontalières ; la possibilité de financer, via le fonds paritaire, des actions de formation en direction des salariés à temps partiel, et surtout des personnes éloignées de l'emploi ou ayant conclu un contrat unique d'insertion ; l'affectation des excédents financiers des OPCA au financement d'actions entrant dans le champ d'intervention du fonds paritaire ; l'affirmation du principe selon lequel l'employeur est libre de choisir l'organisme de formation auquel il confie ses salariés.

Pour conclure, cette réforme, élaborée en lien étroit avec les partenaires sociaux, est au coeur de notre conception de la sécurisation des parcours professionnels. Ce projet de loi constitue une étape déterminante vers un système de formation professionnelle efficace, qui apporte des réponses personnalisées aux difficultés d'accès à l'emploi de nos concitoyens et soit plus en phase avec les réalités de nos territoires.

Pour toutes ces raisons, le groupe Nouveau Centre votera en faveur de ce texte…

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

…en espérant qu'il soit adopté à une large majorité, conformément au consensus qui a présidé à la conclusion de l'ANI du 7 janvier, ainsi qu'aux débats constructifs que nous avons eus dans cet hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Goasguen

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la formation professionnelle, qui existe depuis plusieurs décennies, n'a pas connu en France le succès que son mode de financement exceptionnel aurait pu laisser penser. En effet, alors que nous avons le meilleur système de financement en matière de formation professionnelle, les résultats ne sont pas à la hauteur. De ce point de vue, les partis d'opposition seraient mal venus de reprocher à ce texte ses choix courageux. À plusieurs reprises, nous avions déjà tenté, mais en vain, de modifier les structures de la formation professionnelle : trop longtemps bloquée dans le paritarisme – ce qui arrangeait certaines situations dans la gestion de l'État puis dans la gestion des régions –, elle a souffert de divisions qui n'ont pas contribué à faire son succès.

Ce texte a au moins l'éminent avantage d'apporter des pistes pour faire évoluer le système. Si ce n'est sans doute pas le dernier que nous aurons à voter sur le sujet, ce texte est bon pour trois raisons.

D'abord, après un accord des partenaires sociaux, nous avons obtenu la création d'un véritable fonds qui permettra de diversifier la formation professionnelle, en particulier en direction de ceux qui en ont le plus besoin et qui étaient jusqu'à présent délaissés par le système, c'est-à-dire ceux qui sont en dehors de la structure professionnelle et qui recherchent un emploi.

Ensuite, une certaine transparence est désormais organisée dans le cadre de la formation professionnelle, la réforme des OPCA en étant un des aspects très importants.

Enfin, nous avons la volonté d'aboutir à une formation professionnelle de qualité. À cet égard, je tiens à dire à tous mes collègues, sur quelques bancs qu'ils siègent, combien il est important d'être rigoureux, sévère, voire impitoyable, car, dans le passé, la formation professionnelle a été trop souvent aux mains de gens qui n'étaient pas compétents. Il est important que la formation professionnelle soit assurée par des gens compétents en direction de ceux qui en ont besoin.

Monsieur le secrétaire d'État, vous avez recentré le débat sur l'emploi. Contrairement à ce que prétendent nos amis socialistes, il n'y a pas de remise en cause de la primauté des régions sur la formation professionnelle, seulement une coordination qui privilégie le problème de l'emploi par rapport aux autres attributions de la formation professionnelle. Dans la situation où nous sommes, il était important de faire ce choix courageux, ce choix d'avenir. Vous l'avez fait, c'est la raison pour laquelle le groupe UMP votera sans ambiguïté le texte que vous proposez. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'ensemble du projet de loi.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 493

Nombre de suffrages exprimés 486

Majorité absolue 244

Pour l'adoption 311

Contre 175

(Le projet de loi est adopté.)

(Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Vote sur l'ensemble

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures trente-cinq, est reprise à seize heures quarante-cinq.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet (n° 1841.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Ce matin, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.

La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Martin-Lalande

Monsieur le président, madame la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, monsieur le ministre de la culture et de la communication, mes chers collègues, si l'on peut se réjouir de la promulgation de la loi du 12 juin 2009 et de la loi complémentaire discutée aujourd'hui, qui va dans le bon sens sur plusieurs points, il n'en faudra pas moins dépasser très rapidement ces deux textes de circonstance destinés à juguler l'inquiétante hémorragie de financement de la création.

La loi du 12 juin 2009 va enfin permettre de mettre en place un dispositif pédagogique de prévention contre le téléchargement illégal et favoriser le nécessaire développement de l'offre légale.

Quant à la loi complémentaire, elle présente l'avantage de réintroduire le juge dans le prononcé de la sanction et d'exclure les communications privées du champ des communications électroniques pouvant faire l'objet d'une surveillance.

Malheureusement, quelques points faibles demeurent.

Ainsi, l'Institut national pour la recherche en informatique et automatique – INRIA – a expliqué, lors de son audition par le groupe d'études sur l'internet, qu'il serait impossible de suspendre ou de restreindre l'accès à internet, et ce pour trois raisons.

Tout d'abord, les internautes pourraient a priori contourner l'interdiction par le cryptage systématique des contenus – même si la nécessité de détenir des clés limite l'usage du cryptage pour les échanges de masse –, ou par la récupération de ces contenus dans des lieux publics physiques – bornes wifi, cybercafés, etc. – ou virtuels qui seraient anonymisés.

Ils pourraient aussi, a posteriori, contourner la décision de suspension en utilisant d'autres points d'accès ou en utilisant des machines piratées à l'insu de leur propriétaire.

Ensuite, la suspension de l'accès à titre vraiment individuel à l'internet suppose un dispositif de contrôle individuel des identités électroniques, dont les conséquences du point de vue des libertés fondamentales dépasseraient largement le contexte de la protection des oeuvres artistiques.

Enfin, la restriction d'accès à l'internet ne serait efficace qu'à condition de prendre les mêmes mesures sur le plan international. Il devient urgent de faire avancer une régulation mondiale de l'internet. Quelles sont les intentions du Gouvernement en ce domaine ?

Je vous rappelle par ailleurs, madame la ministre d'État, qu'il est techniquement impossible de suspendre l'internet sur certains points du territoire, car l'on suspendrait du même coup l'accès à la télévision ou au téléphone sur IP. Allez-vous appliquer, au cas où elle serait retenue, cette sanction sur le reste du territoire ? L'inégalité face aux possibilités technologiques peut-elle justifier l'inégalité face aux sanctions, selon que l'on se trouve dans une zone dégroupée ou non ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Martin-Lalande

S'il faut attendre la résolution de ce problème technologique, pendant combien de temps la sanction par la suspension sera-t-elle inapplicable ?

Pour toutes ces raisons, et celles que j'ai développées en mars dernier, je regrette à nouveau que l'amende ne remplace pas systématiquement la suspension.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Martin-Lalande

J'étais déjà intervenu, en effet, pour faire reconnaître le droit d'accès à l'internet, pour faire sanctionner le téléchargement illégal par l'amende plutôt que par la suspension, pour que soit défini un nouveau modèle de financement de la création culturelle à l'ère numérique.

Je suis heureux que ces préoccupations fondamentales aient été validées.

En effet, le Conseil constitutionnel, dans sa décision de principe du 10 juin dernier, a proclamé le droit de se connecter à l'internet, protégeant ainsi la liberté du citoyen récepteur d'informations et celle du citoyen émetteur d'informations.

J'ai par ailleurs noté avec beaucoup d'intérêt que notre nouveau ministre de la culture et de la communication s'était engagé, en commission et ce matin en séance, à définir un nouveau modèle de financement. Dans cet état d'esprit, j'ai proposé un amendement pour que le Gouvernement remette au Parlement, dans un délai d'un an ou un peu plus, un rapport sur l'état d'avancement d'une telle définition.

J'espère que nos travaux permettront d'améliorer ce projet de loi, que je voterai d'autant plus facilement qu'il sera un simple texte de sauvegarde, rapidement remplacé par un modèle durable de financement de la création sur l'internet.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Nous voici donc face à la deuxième version de la loi HADOPI. Il est impressionnant de voir avec quelle obstination vous revenez à la charge, avec la même stratégie de communication, les mêmes mots, les mêmes parallélismes, parfois déroutants, alors que le Conseil constitutionnel a rendu une décision extrêmement claire sur la première version de la loi.

Pas plus que le précédent, nous ne soutiendrons votre texte.

Quoi que vous en disiez, je vous le dis sans détour, ce projet de loi n'est pas bon. Il n'est pas favorable aux artistes, il entérine une vision répressive incompatible avec l'exercice des libertés fondamentales, dont internet fait partie, et il est déjà obsolète techniquement.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

À ne considérer que le volet sanction du téléchargement illégal, vous en oubliez l'objet principal : la rémunération de la création. Les artistes sont mal rémunérés, puisque seule une partie infime du prix du CD ou du titre téléchargé leur revient. Mais vous reportez cette réflexion à un troisième volet qui sera étudié après le vote de la loi. Nous ne sommes pas d'accord.

De plus, on voit bien ici la conception de la culture à protéger du Gouvernement, puisqu'au final, seulement 1 000 films et 10 000 titres musicaux seront surveillés – vous avouerez que 10 000 titres, c'est peu, au regard de l'ensemble de la création musicale en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Votre projet de loi est construit sur une logique répressive. Là est notre principale divergence. Nous refusons de ne considérer les internautes que comme une horde de fraudeurs potentiels. Nous estimons, et cela est totalement absent de votre réflexion, que c'est l'ensemble du système qui doit être intégralement repensé pour tenir compte des évolutions des comportements liés au développement d'internet.

Nous avons d'ailleurs fait des propositions pour instaurer une contribution créative, créer un fonds de soutien à la création, réaffecter la taxe payée par les fournisseurs d'accès à internet pour France Télévisions au financement de la création.

La liste n'est évidemment pas exhaustive, et je ne m'attarderai pas sur ce qui a été brillamment développé par mes collègues. Une fois de plus, vous avez refusé le débat.

De surcroît, malgré la censure du Conseil constitutionnel, vous replongez dans les mêmes travers.

Vous maintenez le principe même de la suspension de l'accès à internet. Elle aura beau être prononcée par un juge, elle n'en imposera pas moins une double peine aux internautes et à toute leur famille.

Vous introduisez une infraction, la « négligence caractérisée », qui risque de sanctionner l'abonné alors même qu'il ne se sera livré à aucun acte illégal.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Votre texte présente en réalité tous les défauts de la version précédente. La suspension de l'accès à internet est un non-sens et constitue une sanction incongrue.

Votre projet de loi est déjà obsolète. Vous ne paraissez pas d'accord avec nous sur ce point, monsieur le ministre.

Je ne m'étendrai pas sur les différents modes de transmission de fichiers entre particuliers, ce serait bien fastidieux. Il est certain, en revanche, que tout cela progresse bien vite.

Les positions de l'INRIA, interrogé dans le cadre du groupe d'études parlementaire sur internet, ou bien celles des opérateurs ou des équipementiers télécoms, méritent d'être entendues : le dispositif sera complexe à mettre en oeuvre, difficile, inégalitaire sur le plan territorial et déjà largement dépassé au moment de sa mise en application effective.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Et je réitère mon étonnement face à l'absence de la secrétaire d'État à l'économie numérique durant toute la procédure d'examen des textes HADOPI 1 et HADOPI 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

Le numérique fait partie du plan de relance et fera semble-t-il partie des chantiers concernés par le grand emprunt. Dès lors, la suspension de l'accès à internet est un mauvais symbole pour un pays qui se veut d'excellence numérique. Vous avouerez que votre politique est contradictoire.

Au final, nous voici avec un dispositif qui coûtera très cher – fonctionnement de la HADOPI et ajustements techniques sur les réseaux dont on ne sait toujours pas qui paiera la facture – et un texte qui risque d'être inapplicable, sans compter les risques d'une nouvelle censure des sages.

Une loi élaborée en deux semaines, examinée à la hâte avec des délais scandaleux d'un point de vue parlementaire : est-ce bien sérieux ?

Ce débat de société, débat Politique avec un grand P, appelle une réponse innovante et non un échafaudage complexe et instable. Je vous remercie. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Françaix

Très bien, le ministre va abandonner !

(M. Marc Laffineur remplace M. Bernard Accoyer au fauteuil de la présidence.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

« Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : " La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi " ; qu'en l'état actuel des moyens de communication et eu égard au développement généralisé des services de communication au public en ligne ainsi qu'à l'importance prise par ces services pour la participation à la vie démocratique et l'expression des idées et des opinions, ce droit implique la liberté d'accéder à ces services »

Mes chers collègues, vous aurez tous reconnu la décision du Conseil constitutionnel du 10 juin 2009, qui fonde notre droit de l'internet. HADOPI 2, tout comme devront le faire les lois qui suivront, s'efforce donc d'en respecter la lettre.

Mais HADOPI 2 n'est pas seulement la fille de la décision du Conseil Constitutionnel. Elle est aussi celle de la volonté présidentielle exprimée à Versailles le lundi 22 juin, et je me réjouis d'avoir les mêmes références que mon collègue Franck Riester.

« C'est aussi », disait le président de la République, « l'avenir de notre culture que je défends, l'avenir de la création. Voilà pourquoi, j'irai jusqu'au bout. »

Mes chers collègues, tout le débat sur HADOPI 2 est contraint entre ces deux citations.

Pourtant, après la décision du Conseil constitutionnel, qui « sanctuarise » l'accès à internet, le Gouvernement aurait pu saisir l'opportunité de refonder la loi HADOPI, en laissant tomber une fois pour toutes l'impasse de la coupure de l'accès à internet.

Un autre choix a été fait, celui de l'entêtement.

Vouloir à tout prix cette sanction, dont nous avons pendant des heures et des heures, et avec tant d'autres, sur tous les bancs de l'Assemblée, démontré les inconvénients techniques, financiers, juridiques et symboliques, conduit à une nouvelle impasse.

Aujourd'hui, au bout de ce parcours chaotique, je me pose une seule question simple : pourquoi ? Pourquoi cette obstination à prendre une mesure qui a profondément divisé le pays et condamnera inévitablement la loi HADOPI à l'inefficacité ?

Confier au juge le traitement de ce délit de masse vous conduit à nouveau dans une impasse.

Madame la garde des sceaux, vous en êtes pleinement consciente, une justice sereine exige du temps. Et du temps, vous n'en aurez pas pour juger les 50 000 dossiers que l'étude d'impact gouvernementale prévoit.

HADOPI 2 tente donc de résoudre cette contradiction originelle et aboutit finalement à confier la pré-enquête aux agents assermentés de la commission de la protection des droits, privant ainsi le juge de son pouvoir d'instruction, à utiliser la procédure du juge unique, alors que la collégialité des juges est une composante majeure de la sécurité juridique – le vieil adage ne dit-il pas « juge unique, juge inique » ? –, à utiliser les ordonnances pénales, c'est-à-dire un jugement rendu sans débat préalable et contradictoire.

Bref, ce dernier avatar de la loi HADOPI tente de trouver une solution à cette équation impossible : gérer la contradiction sous-jacente entre la décision constitutionnelle et la volonté présidentielle.

Il est à craindre que vous n'y arriverez pas,

Et pourtant, j'ai envie de dire, ici, depuis la tribune de l'Assemblée nationale, à notre Président de la République et au Gouvernement : « Chiche, avec vous, nous irons jusqu'au bout ! »

Mais de quoi s'agit-il ? Jusqu'où devons-nous aller?

Une dernière fois, à cette tribune, j'affirme qu'il y a de la place pour une loi HADOPI efficace à court terme, qui fasse d'un système d'amendes proportionnées aux infractions commises la sanction finale de ce dispositif.

M. Jean Dionis du Séjour.

Et j'oserai dire que c'est le rôle des députés libres de la majorité présidentielle…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

…de dire au Gouvernement et au Président : oui, il est possible d'aller jusqu'au bout, oui, il est possible de réguler internet sans ce geste castrateur qu'est la coupure de l'accès, oui, il est possible de réconcilier artistes et internautes sur un modèle pérenne.

Madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, vous arrivez dans vos ministères respectifs avec une incontestable crédibilité. C'est un capital précieux, qui doit être mobilisé au profit de chantiers d'avenir, pour lesquels vous pourrez compter sur nous. Or on vous demande aujourd'hui d'achever un travail contestable et contesté.

D'autres que vous ont choisi de rester sur cette loi-Titanic, sur la voie de l'Atlantique Nord. Ici, l'orchestre ne joue plus depuis longtemps, et rares, très rares sont les partisans du projet de loi.

Si HADOPI 2 devient le catalyseur d'un nouvel équilibre plus respectueux des droits d'auteur, j'en serai heureux et je reconnaîtrai publiquement m'être trompé.

Toutefois, si, comme je le crois en conscience, cette loi se révèle un échec, j'aurai pour seule satisfaction d'avoir accompli mon devoir, en ayant porté une parole libre à l'intérieur de la majorité présidentielle, en vue de prévenir le Gouvernement des difficultés qu'il rencontrerait. Alors oui, sauf modification substantielle du texte au cours de nos débats, je voterai contre le projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Suguenot

Monsieur le président, madame la ministre d'État, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous voilà de nouveau réunis pour le feuilleton HADOPI.

Il ne faudrait pas, madame le ministre d'État, monsieur le ministre, que par la volonté farouche de sanctionner, on parvienne à l'effet inverse de celui qui est recherché et qui doit être, à mon sens, de responsabiliser l'internaute dans le cadre du respect des libertés individuelles.

Le coeur de la loi HADOPI a été censuré par le Conseil constitutionnel, qui a considéré que l'accès à internet était une des conditions indispensables à l'exercice de la liberté énoncée dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : « Tout citoyen peut parler, écrire et imprimer librement ». Seul un juge peut décider d'une coupure de l'accès à internet : ceux qui ne le croyaient pas lors de HADOPI 1 en ont été pour leurs frais.

Le Conseil constitutionnel a également rappelé que le principe de la présomption d'innocence interdit au législateur de renverser la charge de la preuve en obligeant l'abonné à prouver qu'il n'est pas coupable. Cette décision est fondatrice, car elle orientera durablement notre droit : c'est en s'appuyant sur elle que nous devons élaborer une nouvelle solution établissant un équilibre entre la liberté des internautes et la légitime protection des droits d'auteur.

Cette exigence est nécessaire – nous en sommes convaincus – et urgente. Certains de mes collègues de la majorité et moi-même n'avons eu de cesse de prévenir vos prédécesseurs des risques juridiques que comportait la première version. Nos interventions multiples et nos amendements avaient alors constitué autant de mises en garde contre les risques d'inconstitutionnalité du texte. Du reste, certains de ces amendements sont repris dans le présent projet de loi. Nous avions vu juste.

Ne vous y trompez pas, madame la ministre d'État, monsieur le ministre, nous ne souhaitons qu'une seule chose, c'est que ce nouveau texte corrige le premier et soit applicable. Il n'a toutefois pas l'air d'en prendre le chemin !

Tout le système du premier texte reposait sur des sanctions de masse. Or l'introduction du judiciaire a vidé le texte de cette dérive contraire à notre principe de personnalisation des peines.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Suguenot

Il faut donc aller aujourd'hui dans la direction qu'a suggérée le Conseil constitutionnel et ne pas chercher à contourner sa décision.

Certains de mes collègues de la majorité et moi-même présentons des amendements qui recevront, je l'espère, votre approbation, car si le projet de loi est de nouveau retoqué par le Conseil, cela signifiera que le Parlement légifère mal, et sans doute trop.

Personne dans la majorité ne souhaite cela, et c'est pourquoi il faut corriger certaines des dispositions du texte, encore trop imparfait.

La plus grave difficulté du projet actuel réside dans la preuve. La seule adresse IP, que les agents assermentés rechercheront pour identifier les personnes susceptibles de voir leurs abonnements suspendus, n'est pas suffisante pour établir de manière probante qu'une infraction est constituée. L'internaute ordinaire ne sait pas et ne pourra pas totalement protéger l'accès à son adresse IP. Condamner un internaute dans ces conditions revient à créer le délit non intentionnel de défaut de protection, ce qui est inimaginable au regard des règles traditionnelles de notre droit. Cela correspondrait à un « délit de ne pas faire », qui serait une grande première.

La présomption de culpabilité demeure dans le texte et il faut absolument s'en défaire en l'inversant, pour respecter le principe souverain de la présomption d'innocence.

Cela dit, nous devons nous projeter dès aujourd'hui dans l'après-HADOPI et travailler à une solution d'avenir. Je m'adresse au nouveau ministre de la culture, espérant qu'il sera très attentif aux propositions qui sont faites par les uns et par les autres.

Je pense qu'il aurait été, du reste, plus opportun d'inverser la démarche et de commencer par le chantier de la rémunération des créateurs, du financement des entreprises culturelles et du développement des offres légales – l'aventure « DADVSI » ayant dû, pour une fois, servir de leçon.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Suguenot

Tracer les fondations de l'avenir passe déjà par le respect de la volonté des artistes du choix de la commercialisation de leurs oeuvres et par la commercialisation forfaitaire, par abonnement ou licences collectives, car dans un monde d'échange numérique permanent les biens immatériels ne peuvent être commercialisés selon les paradigmes traditionnels. Ils sont duplicables à l'infini, sans perte de qualité et pour un coût quasi nul, et leur consommation est « non rivale ».

Les pistes les plus pérennes passent également par le financement publicitaire, la protection par le contrat et un marché dynamisé par des prix compétitifs. Enfin, les systèmes de mesure d'audience sur le net doivent être développés, la rémunération des artistes se faisant alors en fonction du succès réel de leurs oeuvres, ce qui ne serait que justice.

Le Parlement et sa majorité s'honoreraient ainsi de se prévaloir du caractère fondateur de la décision des sages pour réorienter efficacement la loi HADOPI et travailler à la conception de modèles économiques novateurs, où artistes et internautes joueront enfin, de concert, la même partition, qui, je l'espère, ne sera pas celle du Titanic.

Je vous demande, madame la ministre d'État, monsieur le ministre, de chercher avec nous les éléments d'un consensus au lieu d'entamer la litanie des Papes – « HADOPI 1, Pie II, Pie III, Pie XII : pourquoi pas « Libellule ou Papillon » ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Aurélie Filippetti

Monsieur le ministre de la culture et de la communication, je voudrais vous remercier d'avoir, ce matin, au sein de notre assemblée, remis de la culture dans un débat qui n'aurait jamais dû s'en éloigner. Car c'est bien de culture et de création qu'il devrait être question aujourd'hui, malgré l'austérité du texte que vous nous proposez. De culture, c'est-à-dire de la manière de la soutenir et de la favoriser dans un univers numérique qui change chaque jour nos usages, nos pratiques et notre rapport aux oeuvres.

Monsieur le ministre, vous avez convoqué Platon à cette tribune, à travers le livre II de La République. J'aimerais que nous en poussions la lecture jusqu'au livre VII. Comme vous le savez, le philosophe y développe l'allégorie de la caverne : des hommes enchaînés dans un lieu souterrain, dos à la lumière, ne voient pour toute réalité que des ombres projetées sur la paroi par le feu qui brûle derrière eux. La réalité est ailleurs, dans la lumière aveuglante du soleil absent.

Depuis le 23 juin dernier, je crains, monsieur le ministre, que vous ne soyez enchaîné dans la caverne de la rue de Valois.

Filant la métaphore que vous avez entamée ce matin, nous ne pourrons pas ne pas évoquer deux ombres qui planent sur cette caverne.

Il s'agit tout d'abord de celle de Renaud Donnedieu de Vabres, que vous avez omis de citer parmi vos prédécesseurs. Il restera comme le ministre des mesures techniques de protection – MTP –, présentées comme le saint Graal technologique, avant d'être piteusement abandonnées par les lobbies qui avaient aidé à la préparation de la loi « DADVSI ».

Il s'agit ensuite des mânes de Gygès. Platon en fait un berger qui utilise un anneau magique pour tuer le roi Candaule et prendre sa femme en même temps que le pouvoir. Or, chez Hérodote, il n'y a pas plus de clic que de magie. Dans le livre premier de son Histoire, Hérodote présente, avant Platon, un Gygès forcé par Candaule d'observer la nudité de son épouse pour en vérifier la beauté. Se considérant comme outragée, la reine contraint Gygès à choisir entre la mort ou l'assassinat du roi. Après avoir tenté de fléchir la reine, Gygès se résout à tuer Candaule. Vous avez également oublié de préciser, monsieur le ministre, que, parvenu sur le trône de Lydie, Gygès sera le mécène de Delphes, cité d'Apollon et des arts. Vous le voyez : le monde est différent hors de la caverne.

Poursuivons le défilé des ombres de la rue de Valois : maintenant s'avancent celles des chiffres qui dansent sur les murs et dans vos discours : 450 000 films téléchargés par jour en France. D'où vient ce chiffre étonnant, de quelle expertise indépendante, fondée sur quelle méthodologie ? Où sont les études qui le confirment ? La seule étude contrôlable sur le téléchargement illégal dont nous ayons connaissance a été menée à Paris XI. Elle indique que les internautes qui téléchargent le plus sont également ceux qui achètent le plus de CD et de DVD.

Debut de section - PermalienPhoto de Aurélie Filippetti

Ainsi, la baisse de la vente de CD ne serait liée qu'au téléchargement illégal et n'aurait rien à voir avec la baisse du pouvoir d'achat des Français ou avec la pollution apportée par les MTP, qui vont jusqu'à empêcher la copie privée. C'est l'autarcie économique au sein de la caverne de la musique !

Chiffres fantomatiques encore que ceux des pétitions, que vous égreniez ce matin. Comme l'a montré l'association La Quadrature du Net, la pétition portée par la SACEM, qui recueillait en avril un peu plus de 9 000 signatures, a été réalisée sans qu'aucun contrôle de la réalité des signataires soit effectué. La moitié des prétendus signataires contactés par l'association ne confirment pas leur signature. Des ombres ont ainsi pu signer cette pétition dans laquelle on retrouverait les noms de Gilbert Montagné, Nicolas Sirkis ou Marc Cerrone, qui ont publiquement contesté leurs signatures ou pris position contre la loi HADOPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Aurélie Filippetti

En revanche, monsieur le ministre, à l'extérieur de la caverne d'autres pétitions circulent. Je pense notamment à celle qui a été signée par Chantal Akerman, Victoria Abril, Catherine Deneuve et Chiara Mastroianni dans Libération, le 7 avril. Les signataires prennent la révolution numérique pour la chance qu'elle est et précisent qu'« il est temps d'accepter et de nous adapter à ce nouveau monde où l'accès à la culture perd son caractère discriminatoire et cesser de vouloir en faire une société virtuelle de surveillance où tout un chacun se sentirait traqué ».

Évoquons une dernière ombre désignée à la vindicte des hommes enchaînés : celle du « négligent caractérisé ». Mesurez les conséquences de cette invention.

Debut de section - PermalienPhoto de Aurélie Filippetti

Elles ne seront pas uniquement juridiques, elles seront également humaines : la première victime sera l'internaute vertueux, le citoyen même que Platon défend dans le livre II de La République que vous évoquiez ce matin. Elles seront, de plus, économiques : le dispositif technique que proposera la HADOPI devra correspondre à un type précis de configuration informatique sous peine d'inefficacité totale.

Debut de section - PermalienPhoto de Aurélie Filippetti

Monsieur le ministre, selon un proverbe grec, « celui qui pille avec un petit vaisseau, on le nomme un pirate, celui qui pille avec un grand navire s'appelle un conquérant ». Vous êtes en charge de penser le changement de la culture : pensez aux créateurs plutôt qu'aux conquérants ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Gérard

Monsieur le président, madame la ministre d'État, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ainsi, internet est un droit essentiel : donc acte ! Ni l'eau ni l'électricité, ni même le téléphone ne le sont, mais internet, si !

Il n'en reste pas moins que 450 000 films sont téléchargés illégalement chaque jour. Ce chiffre alarmant doit nous conforter dans notre volonté de faire respecter les droits d'auteur sur internet en favorisant une prise de conscience de la société sur ce phénomène de masse qu'on ne saurait cautionner.

Faut-il attendre la chute de notre industrie culturelle et la mort de ses activités pour agir ? Existe-t-il une solution idéale, parfaite, qui permettrait de sécuriser à 100 % un réseau informatique ouvert ? Connaissez-vous une loi idéale, parfaite, c'est-à-dire efficace à 100 % ? Non, me répondrez-vous : il y aura toujours des gens pour l'enfreindre ou lui trouver une faille. Faut-il pour autant, comme le fait l'opposition, défendre le libéralisme sur la Toile, alors que cette même opposition le combat dans la vie réelle ? De nouveau, la réponse est non.

La réponse de la majorité est claire et pragmatique : les réseaux numériques sont un formidable véhicule des biens culturels dès lors qu'ils sont encadrés et sécurisés, et que le droit d'auteur y est respecté. Nous ne pouvons, au nom de la liberté individuelle, permettre des usages qu'on réprime en dehors de la Toile.

Certes, la révolution numérique nous impose de revoir nos modes de pensée, de communiquer et de consommer. Toutefois, cette évolution ne peut se faire sans règle, en allant à l'encontre du droit de propriété intellectuelle et artistique, fondement de l'exception culturelle française dont nous sommes si fiers à l'international et qui fait vivre de nombreux acteurs du secteur.

Le dispositif que propose le Gouvernement pour lutter contre le piratage et sur lequel nous travaillons depuis maintenant plusieurs mois est donc une première étape, capitale pour la régulation de l'évolution en matière de diffusion des oeuvres culturelles sur internet.

Cette première étape est nécessaire pour la mise en place d'une politique culturelle numérique ambitieuse, abordable et accessible à tous.

Car notre débat autour du téléchargement a le mérite de poser la question de la propriété intellectuelle et d'inciter l'internaute à adopter un comportement citoyen sur la Toile. Il est essentiel de faire comprendre notre démarche à l'opinion publique, une démarche pédagogique et non punitive, comme certains voudraient le faire croire.

Le texte traite des modalités d'application de la loi Création et internet et donc essentiellement de la sanction qui, rappelons-le, ne devra être prise qu'en dernier ressort, la sanction n'étant pas une fin en soi. Les avertissements devraient représenter un préalable efficace.

Demeure également tout le volet pédagogique du dispositif ainsi que la volonté d'oeuvrer pour le développement d'une offre légale plus riche et plus attrayante.

On ne peut sur ce point que se féliciter de la conclusion d'un accord interprofessionnel pour une réduction de la chronologie des médias, qui est un apport pour le public qui pourra désormais visionner un film en vidéo à la demande quatre mois après sa sortie en salle au lieu de sept mois et demi.

Enfin, l'opposition a dénoncé l'absence de vision globale de la majorité. Cette accusation est fausse et sert de nouveau à alimenter la polémique puisque le ministre de la culture a récemment annoncé le lancement d'une vaste concertation avec les acteurs de la culture sur la rémunération pérenne des créateurs et des artistes.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Gérard

Cette démarche intelligente et pragmatique montre que la question du financement de la création et de la production n'est pas laissée de côté par la majorité qui entend, par le présent texte, répondre au téléchargement illégal. En effet, si nous laissions faire, nous prendrions le risque qu'à terme, en raison de l'affaiblissement de l'exception culturelle française, les contenus à télécharger s'amenuisent.

Certains s'acharnent contre l'idée même de ce texte pour goûter peut-être à des gloires éphémères. Nous sommes pour notre part favorables à la loi HADOPI parce que nous défendons la création artistique face à la récréation politique et médiatique dans laquelle se complaît malheureusement une opposition à bout de souffle, frileuse à toute évolution, c'est-à-dire opposée à la modernité.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le ministre de la culture, la grandiloquence et le lyrisme n'ont pas raison de tout et surtout pas du réel. Pour continuer la métaphore filée par Aurélie Filippetti, votre problème est bien le réel. Et la réalité, c'est que cette loi liberticide portée par un ministre de la culture va attenter aux libertés fondamentales et, au fond, à l'intérêt des artistes.

Arrêtez le massacre ! Ce n'est plus de la détermination mais de l'acharnement thérapeutique. Ce n'est plus un projet de loi, mais un chemin de croix.

Reprenons l'histoire. Au commencement était la loi « DADVSI » de 2006, grand moment de pitrerie législative, censurée – déjà – par le Conseil constitutionnel, loi inapplicable et inappliquée. Déjà, le ministre de l'époque nous expliquait que la France ouvrait la voie au monde entier. Il s'agissait alors de sanctuariser les DRM comme réponse ultime à la question des droits d'auteur sur internet. On sait ce qu'il en est advenu : les DRM ont disparu, relégués par les opérateurs eux-mêmes au cimetière des illusions technologiques.

Or c'est avec la même arrogance, la même suffisance, le même aveuglement, qu'a été conduite l'aventure HADOPI. Après plusieurs semaines de débat, un premier rejet par l'Assemblée nationale, une seconde délibération sous la contrainte élyséenne, après la censure du coeur du dispositif par le Conseil constitutionnel, voici donc HADOPI 2. Certes, le canard est toujours vivant mais si mal en point que vous repoussez l'adoption du texte au mois de septembre, de crainte d'une dernière déconvenue estivale.

Faut-il que le lobby du show-biz soit si puissant auprès du Président de la République pour que la droite persiste ainsi contre tout bon sens ? Car la seule et vraie question reste bien de savoir pourquoi la droite française imagine, seule au monde à suivre cette démarche, pouvoir mettre en place une politique de répression massive et automatisée pour répondre à la révolution numérique.

L'exemple des DRM devrait vous faire réfléchir. La tentation d'ériger une ligne Maginot technologique contre cette belle utopie sociale de la révolution numérique est d'ores et déjà vouée à l'échec. Autant construire des digues de sable pour contenir la marée montante ! On pourrait même en sourire tant cette démarche traduit – comme votre discours de ce matin – une incompréhension radicale de l'ère numérique.

Malheureusement, les conséquences de votre tentative sont des plus inquiétantes pour les libertés fondamentales, car tout le dispositif repose sur une surveillance généralisée de la Toile, qui plus est confiée à des sociétés privées – véritable menace pour nos libertés.

En matière de création, monsieur le ministre de la culture, alors que la révolution numérique représente une chance extraordinaire – grâce à la multiplication colossale des échanges –, le Gouvernement ne trouve pas mieux que d'emboîter le pas aux industriels qui tentent de préserver coûte que coûte leur rente et leurs modèles anciens. Ils sont prêts à tout pour cela, quitte à créer un appareil répressif quasi orwellien.

La question posée n'est pas médiocre. Alors que la Toile a permis une explosion des échanges, comment faire pour engranger cette avancée du bien-être collectif tout en inventant le nouveau modèle économique qui permettrait de rémunérer les créateurs ? Avec une contrepartie équitable, la mise à disposition quasi illimitée de la plupart des contenus culturels constituerait un formidable progrès pour la société.

Au lieu de cela, vous appelez à la rescousse des technologies de surveillance pour protéger des intérêts privés en proie à la crise de leur modèle économique, crise du reste toute relative, et les propos que vous avez tenus ce matin à ce sujet mériteraient d'être largement nuancés : jamais le cinéma français ne s'est aussi bien porté et jamais le chiffre d'affaires global de la musique n'a été aussi important. Seul le support physique, le disque, et son mode de distribution sont en crise, non la musique. Mozart a fait de la musique avant Universal et je suis à peu près convaincu qu'il y aura d'autres musiciens après Universal.

Ce texte porte, en outre, une grave atteinte à la philosophie même de l'internet et à son apport formidable. Ce qu'il y a derrière cette bataille, c'est la volonté des multinationales de l'industrie du loisir de transformer le réseau d'échanges que constitue d'abord la Toile en réseau de diffusion commerciale. Et sous couvert de la défense de la propriété intellectuelle, c'est surtout la voracité financière et la soif d'appropriation qui sont à l'oeuvre.

L'extraordinaire développement des échanges en dehors de la sphère marchande qu'a constitué internet est insupportable pour les majors. Cette manne leur a échappé et ils souhaitent mettre la main dessus avec votre concours.

Le droit d'auteur a été inventé par Beaumarchais pour protéger les artistes contre les marchands. C'est l'inverse aujourd'hui : il est utilisé par les marchands contre les artistes et leur public.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Monsieur le ministre, j'ai été assez triste de vous entendre ce matin prendre le parti des marchands contre celui de la création. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Mais où sont les députés du groupe UMP favorables au texte ?

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Ne vous inquiétez pas, ce qui compte, c'est le vote !

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

Monsieur le président, madame la ministre d'État, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons cette semaine me pose un certain nombre de problèmes. Bien qu'étant dans la majorité sans aucune ambiguïté,…

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

…j'estime de mon devoir de parlementaire d'exprimer mon opinion et mes réserves sur un texte venant du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

Je ne reviendrai pas sur les aspects techniques qui ont déjà fait l'objet d'amples débats lors de l'examen du texte HADOPI ; reste que les problèmes évoqués alors n'ont pas disparu et le texte sera toujours aussi inapplicable techniquement, même si là n'est plus tellement le sujet.

Ce nouveau texte suscite d'autres réserves, de nature constitutionnelle. J'ai une analyse qui peut ne pas être partagée par tous, mais il faut quand même reconnaître que les remarques que j'avais formulées, avec d'autres députés, sur le texte HADOPI 1 ont été validées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 10 juin 2009.

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

Ce texte, j'insiste, pose de gros problèmes, car sa finalité est de maintenir la logique du texte initial tout en tenant compte de la décision du Conseil constitutionnel, ce qui est intenable.

En effet, la décision du Conseil constitutionnel n'est pas seulement juridique, elle est également politique. Le Conseil l'a clairement dit : la HADOPI n'a qu'un rôle préalable à une procédure judiciaire et en aucun cas ne doit être chargée de prononcer ou de faire exécuter des sanctions.

Une première porte a été fermée, que ce texte s'emploie à rouvrir.

Une autre porte a été fermée, et à double tour, celle de la présomption de culpabilité de l'abonné en ce qui concerne la sécurisation de son accès à internet. Or l'article 3 bis rétablit de manière implicite cette présomption de culpabilité, seule manière de rendre opératoire le délit de non-sécurisation de l'accès internet.

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

Au passage, par une acrobatie juridique risquée, ce texte crée, pour une série de contraventions dont la liste n'est même pas close, une peine complémentaire qui constitue une atteinte à un droit que le Conseil constitutionnel vient de reconnaître comme constitutif de la liberté d'expression.

Pour moi, le message du Conseil constitutionnel est clair : on peut suspendre un accès à internet, mais pas n'importe comment et surtout pas pour n'importe quoi. Ce texte n'a donc aucune chance, selon moi, d'être promulgué, car il se heurtera une seconde fois à l'obstacle du Conseil constitutionnel. En tant que député soucieux de la qualité de la législation, cela me désole.

Ce qui compte maintenant, c'est l'après-HADOPI. Monsieur le ministre, vous avez annoncé une grande concertation sur le financement de la création et j'en suis heureux, mais n'aurions-nous pas dû commencer par là ? Je me tiens à votre disposition pour travailler sur le volet numérique de cette concertation. Nous sommes d'accord sur les bases : la propriété intellectuelle doit être respectée et internet ne doit pas devenir une zone de non-droit.

Le vrai sujet est de savoir comment parvenir à mettre en oeuvre le dispositif qui le permettra. Les épisodes DADVSI et HADOPI ont clairement montré que vouloir faire plier la technologie pour la faire entrer dans les cases du droit est une voie sans issue.

Les bouleversements technologiques apportés par internet nécessitent une adaptation du droit dans de nombreux domaines et en particulier celui de la propriété intellectuelle. Cela ne concerne pas que la musique et la vidéo mais aussi les textes. On sort donc du strict cadre des téléchargements.

Aujourd'hui, deux conceptions de la propriété intellectuelle s'affrontent sur internet. La première est portée par les ayants droit qui visent à maximiser leurs gains. C'est cette philosophie qui sous-tend les textes DADVSI et HADOPI et selon laquelle le consommateur doit payer pour tout : acquérir l'oeuvre, mais aussi l'utiliser, et encore, dans des conditions restrictives. On lui demande sans cesse de passer à la caisse, avec sans cesse la menace de poursuites, rendues crédibles par le fait que sur internet, tout se voit, tout est repérable.

C'est un frein à l'innovation et surtout, cela heurte les consommateurs et les utilisateurs qui ont le sentiment d'être rackettés.

L'autre conception est celle portée par certains internautes évoluant notamment dans le monde du logiciel libre, et va dans le sens inverse. Elle s'est construite essentiellement sur la propriété intellectuelle en matière de logiciels. Elle n'est pas forcément parfaitement adaptée pour d'autres contenus.

C'est le point de vue de l'ayant droit contre celui de l'utilisateur. Les deux sont légitimes et défendables et c'est à nous, politiques, de trouver un compromis acceptable pour tous.

Voilà le vrai sujet, chers collègues ; nous mettrons peut-être beaucoup de temps pour y arriver, mais nous ne pourrons faire l'économie de ce débat-là. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, mes chers collègues, en cette fin de session estivale, nous allons devoir réexaminer un troisième projet de loi consacré à l'utilisation d'internet. Après le travail dominical, le projet HADOPI 2 est destiné à satisfaire le curieux sens des priorités du Président de la République, mais nous avons été prévenus : le projet, défendu conjointement par Mme la garde des sceaux et M. le ministre de la culture, constitue un marqueur politique sur lequel l'UMP n'a pas le droit de reculer.

Nous aurions toutefois aimé entendre toute la diversité de la réflexion gouvernementale sur le sujet, et notamment Mme la secrétaire d'État chargée de l'économie numérique. D'abord, après avoir réuni des professionnels du secteur culturel pour réfléchir à de nouvelles formes de rémunération des artistes, Mme Kosciusko-Morizet a carrément déclaré que la loi sur le téléchargement était « un échec collectif » lors d'un chat sur le site Bakchich. Ensuite, votre collègue du Gouvernement en a profité pour redéfinir sa vision de l'après-HADOPI : « Pour la suite, j'essaie à la fois de travailler, avec le monde de la musique, à développer l'offre légale, faire qu'elle soit intuitive, impulsive, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, même si de très nombreux modèles économiques, parfois innovants coexistent. Et aussi de travailler avec les autres secteurs potentiellement « impactés » par le numérique, pour qu'ils ne se laissent pas « cornériser » eux aussi. »

On ne saurait mieux dire !

Après la censure du Conseil constitutionnel, vous auriez pu instaurer un moratoire mais, pour satisfaire aux oukases du Président de la République, vous avez décidé de faire examiner ce texte en plein été en déclarant l'urgence avec toujours la même obsession, celle de contrôler l'internet.

Ce nouveau projet est tout entier placé sous le signe du contournement. Contournement, d'abord, de la décision du Conseil constitutionnel. Le texte ignore le fond des objections formulées par le Conseil, qui s'inquiétait notamment des menaces que fait courir aux libertés publiques la tentation du contrôle de l'internet. HADOPI 2 n'est qu'un bricolage hâtif destiné à passer outre la décision du Conseil constitutionnel.

Contournement, ensuite, de la difficulté que rencontre le Gouvernement pour déterminer le point d'équilibre entre la protection du droit d'auteur et la protection de la liberté de communication. Celle-ci est renvoyée au juge, qui devra statuer cas par cas, selon une multitude de critères que la loi n'encadre pas.

Contournement encore du droit au procès équitable, avec le recours à la procédure du juge unique et aux ordonnances pénales en matière de délits et de contrefaçons. Cette procédure, qui exclut l'enquête judiciaire, n'apporte aucune réponse au problème du renversement de la charge de la preuve, pourtant plus que sujet à caution. Inévitablement, des innocents seront condamnés, et de cela vous ne parlez jamais !

Contournement aussi du principe de séparation des pouvoirs, avec une autorité administrative chargée de constater les infractions, de les instruire, de notifier et de suivre les condamnations. Le juge est invité à statuer sur la base des procès-verbaux qu'établira la HADOPI.

Contournement, enfin, de la procédure simplifiée des ordonnances pénales, qui bloque normalement l'accès aux dommages et intérêts.

Mais surtout, ce nouveau projet de loi se situe aux antipodes du monde réel, puisque vous persistez dans la coupure d'accès aux moyens de communication, et que vous allez provoquer des thromboses dans l'appareil judiciaire, qui a pourtant bien d'autres urgences à traiter.

Que de renonciations pour défendre un modèle que tout le monde sait désormais dépassé et condamné !

Monsieur le ministre, avec ce combat d'arrière-garde, vous faites perdre un temps considérable à la recherche d'un nouveau modèle économique et à la nécessaire adaptation des droits d'auteur à l'ère numérique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Vous faites perdre un temps considérable aux artistes, à la création et à la diffusion de la culture. L'enjeu, monsieur le ministre, c'est de construire le modèle de financement de la création à l'ère numérique, et non pas d'essayer de contenir par tous les moyens le déploiement des nouvelles technologies et des nouveaux usages qu'elle ouvre.

En France, l'offre légale est encore embryonnaire et le Gouvernement est encore obsédé par le partage de fichiers. Aux États-Unis, de grands groupes comme NBC et News Group ouvrent déjà leur catalogue de musiques et de films aux internautes via leur plateforme commune hulu.com, gratuitement et en streaming, en se rémunérant grâce à la publicité.

Au lieu de cela, vous nous invitez à pénaliser le partage de fichiers alors qu'il s'agit déjà d'un mode de diffusion de la culture dépassé. Vous défendez une industrie culturelle qui tente d'en rester au stade du support physique. Vous avez non pas un, mais deux trains de retard.

Ce vain bricolage que vous nous soumettez retombe évidemment, et nécessairement, dans les travers du texte précédent. Vous ne parviendrez pas à défendre de manière pérenne le principe du droit d'auteur tant que vous considérerez internet comme une menace et un danger.

Pour conclure, je voudrais inviter nos collègues de la majorité, assez peu présents à cette heure-ci de la journée, à ne pas céder à l'oukase présidentiel qui a présidé à la rédaction de ce rafistolage législatif, en attendant mieux à l'automne, nous a-t-on dit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Cette loi est définitivement inefficace, de mauvaise foi, et montre que l'industrie du disque ne connaît pas l'internet. Plus que vous, nous souhaitons une juste rémunération des auteurs et des créateurs, et dans le même temps nous ne pouvons sacrifier la moindre parcelle sur le champ des libertés publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Mes chers collègues, montrez votre exigence de légiférer sur la réalité du monde tel qu'il est et non pas tel qu'il était il y a cinq ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Françaix

Madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, nous voilà donc de nouveau sur ce texte rafistolé à la va-vite, retoqué par le Conseil constitutionnel, désavoué par les parlementaires européens, critiqué par une majorité de citoyens, désapprouvé par bon nombre d'artistes. Ce texte, tout le monde le sait, est à côté de la plaque. Oui, mais voilà, c'est la volonté du Président de la République. Alors, madame la ministre, monsieur le ministre, allons droit dans le mur en klaxonnant !

Tout le monde le sait, il aurait fallu se donner du temps pour accompagner les évolutions culturelles de la société, plutôt que de s'y opposer.

Il aurait fallu réfléchir sur les usages culturels induits par internet, qui ne peuvent plus être réglementés comme à l'époque de Malraux et de Jack Lang, loin des groupes d'intérêt privés qui ont tout obscurci.

Il aurait fallu légiférer sur les usages numériques, en faveur de l'intérêt général.

Il aurait fallu dépasser le simplisme du piratage, et parler de la possibilité de partage des fichiers numériques.

Il aurait fallu reconnaître les échanges sur internet, en finançant vraiment – mais vraiment ! – la création.

Il aurait fallu chercher des revenus pour la création, et pas seulement pour les éditeurs.

Il aurait fallu réinventer l'exception culturelle.

Cela se fera « plus tard ». En tout cas, c'est ce à quoi nous convie M. le ministre de la culture. Pourtant, avec un peu d'imagination – et vous n'en manquez pas, monsieur le ministre –, on aurait pu mettre en oeuvre des solutions alternatives permettant d'assurer la protection des droits fondamentaux du public et la rémunération des créateurs sans piétiner les droits des internautes, dans le seul but de maintenir des modèles obsolètes.

Car, monsieur le ministre, nous ne sommes pas là pour défendre, dans un combat d'arrière-garde, les moines copistes en guerre contre Gutenberg, ni les producteurs de chandelle qui se plaignaient de la concurrence déloyale du soleil. Nous ne sommes pas là non plus pour défendre les avantages des marchands. Vous n'êtes pas là, non plus, pour défendre un corporatisme souvent déphasé.

Madame la ministre d'État, une réponse purement répressive face au piratage organisé ou la multiplication de verrouillages techniques qui seront toujours dépassés ne peuvent ni endiguer l'essor des réseaux d'échanges de copies de fichiers musicaux ou de films, ni répondre aux aspirations qu'ils révèlent : désir de partage, formation de nouveaux publics, espaces qui peuvent redonner aux productions indépendantes une place que la surconcentration des industries culturelles et la politique de plus en plus restrictive des majors tendent à leur refuser.

Vous le savez bien, l'industrie du disque n'a pas su ou pas voulu s'adapter. Elle n'a pas su jouer le rôle d'émergence artistique. Et aujourd'hui, elle vous demande d'éponger la mer avec une serpillière.

Et puis, le nombre restreint d'artistes qui ont accès aux modes de diffusion massive ne peuvent prétendre représenter à eux seuls la création.

Oui, la recherche de la meilleure rémunération de l'artiste est centrale, mais ce n'est pas la préoccupation de la loi HADOPI, qui n'y changera rien. La révolution des usages est incontournable. La libre diffusion des oeuvres est inéluctable.

Quand une loi déchire à ce point, madame la ministre, monsieur le ministre, c'est qu'elle n'est pas bonne. D'ailleurs, monsieur le ministre, vous vous en êtes rendu compte, puisque vous nous proposez de voter à la va-vite ce texte, qui n'est « pas très important », pour parler à la rentrée des vrais problèmes : « HADOPI 3 ». Je suggère d'inverser l'ordre des choses, et je pense que nous y gagnerions tous.

Monsieur le ministre de la culture, vous aviez mieux à faire. Face aux réductions drastiques des moyens de l'État en faveur d'une politique culturelle, face aux dérives populistes, vous avez mieux à faire que de défendre ce projet : penser notre politique culturelle au sein de l'Union européenne ; affirmer la place de l'artiste dans la société ; faire de ce ministère un élément essentiel de la construction sociale et de la citoyenneté ; faire le pari de l'éducation artistique ; encourager la diversification des expressions artistiques ; élargir les publics et lutter contre les clivages culturels.

Mais c'est trop long ! Et ce texte ne peut pas attendre, même si le Gouvernement attendra quand même, puisqu'il a décidé de ne le faire voter qu'au mois de septembre, ce qui contredit d'ailleurs l'idée que les députés socialistes retarderaient l'adoption des textes. C'est le Gouvernement qui, cherchant une majorité, ne fera voter celui-ci qu'au mois de septembre.

Voilà ce que l'on attendait de vous, monsieur le ministre, quand on connaît votre attachement à la culture, quand on connaît votre farouche volonté d'être proche des artistes. Ne vous entêtez pas. Sinon, vous apparaîtrez, injustement, comme le porte-parole, le porte-voix, des people et du showbiz. Et cela, nous ne le souhaitons pas, ni pour le ministre de la culture, ni pour la France.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Françaix

Je conclus avec Molière, si vous me le permettez, monsieur le président : monsieur le ministre, qu'alliez-vous faire dans cette galère ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Souchet

Monsieur le président, madame la ministre d'État, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi complémentaire que nous étudions aujourd'hui est évidemment d'une importance capitale pour le quotidien de millions de Français.

À la suite de la censure du Conseil constitutionnel, le nouveau texte permet à la justice de recourir à des procédures simplifiées par la voie d'ordonnances pénales, et devant le tribunal correctionnel siégeant à juge unique. Les atteintes aux droits d'auteur et droits voisins commises sur internet pourront être sanctionnées par la suspension de l'abonnement.

Les réserves qui ont été les nôtres sur le projet de loi HADOPI se reportent tout naturellement sur HADOPI 2, dès lors que la même logique l'inspire, que la même approche a été retenue et que l'ensemble du dispositif initial est reconduit, à l'exception de son volet pénal. HADOPI 2 n'apporte pas non plus de réponse convaincante à la question du respect de la propriété intellectuelle sur internet : il est, en effet, déjà obsolète avant même son entrée en application. Pourquoi ? À cause de la multiplication des sites de contournement qui se mettent en place : sites opérant un changement automatique d'adresse IP dès que l'internaute s'y connecte ; sites permettant le cryptage des fichiers avant téléchargement ; sites détournant les réseaux VPN de leur usage initial. Le contournement de la loi est donc déjà en marche.

Adopter ce projet en l'état, c'est donc accepter de porter atteinte à la crédibilité du processus législatif lui-même. Ce n'est pas sain. Seules durent les lois qui sont applicables et qui peuvent être respectées.

Le second motif d'inquiétude, c'est que ce soient les particuliers les moins aguerris à l'usage d'internet, et en particulier les familles, qui soient les plus pénalisés, et non les pirates les plus avertis, lesquels auront toujours la possibilité d'usurper l'identité d'un internaute et de lui faire porter la responsabilité d'actes de piratage qu'il n'a pas commis.

À partir du moment où il est possible d'utiliser la connexion d'un tiers pour télécharger illégalement, il y a un risque que la loi sanctionne les victimes au lieu de sanctionner les coupables. Les « voyous de la toile » pourront donc continuer à vivre du téléchargement illégal en toute impunité.

Pour autant, la production culturelle doit être défendue et ne pas être livrée aux pilleurs de la toile. Il convient donc d'envisager des solutions alternatives.

Dans un premier temps, il faut garantir aux internautes que leur anonymat ne sera pas menacé. C'est pourquoi nous sommes favorables à l'amendement, déposé par M. le rapporteur, qui prévoit d'exclure la surveillance des e-mails.

À moyen terme, nous devons déjà songer à l'après-HADOPI, car je suis convaincu que cette loi montrera très vite ses faiblesses.

Mon sentiment est que pour répondre aux deux problématiques que sont le respect du droit d'auteur et la garantie des droits des internautes, nous ne pouvons pas faire l'économie de la mise en place d'une licence globale de téléchargement, en veillant bien entendu à ce qu'il n'y ait pas rupture d'égalité.

L'industrie musicale s'ouvre peu à peu à cette idée en découvrant le potentiel économique qu'elle représente. Ainsi, l'ancien président du conseil d'administration de la SACEM expliquait récemment qu'il était favorable à cette formule : « Il ne s'agirait évidemment pas de légaliser l'échange sauvage de fichiers via le peer-to-peer, mais de fournir une licence qui donnerait accès à des sites de téléchargement correspondant aux différents fournisseurs d'accès et fournis en fichiers sains par les producteurs, où l'abonné pourrait télécharger toutes les oeuvres qu'il voudrait ».

L'instauration d'une taxe de l'ordre de 6 euros, par exemple, payée pour une moitié par le fournisseur d'accès à internet et pour l'autre par son client, serait économiquement viable. Si l'on prend en compte les 18 millions d'abonnés haut débit en France, une telle disposition permettrait au marché du disque de doubler le volume de ses recettes, pour atteindre 1,3 milliard d'euros par an, sans pour autant menacer la liberté des internautes.

Cette évolution des mentalités s'observe également à l'étranger. Aux États-Unis, par exemple, Warner Music travaille depuis maintenant quatre mois à un projet de licence globale, en collaboration avec les fournisseurs d'accès internet, ce qui confirme que cette voie mérite d'être sérieusement explorée.

En définitive, cette loi HADOPI 2 risque de poser plus de problèmes qu'elle n'en résoudra, et le moment viendra inéluctablement où nous devrons substituer à un dispositif de surveillance un système de licence globale crédible et applicable, permettant de rémunérer les artistes sans attenter à la liberté des internautes.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Y a-t-il quelqu'un de l'UMP pour défendre le texte ?

(M. Bernard Accoyer remplace M. Marc Laffineur au fauteuil de la présidence.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La discussion générale est close.

La parole est à M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Je voudrais d'abord remercier les orateurs de m'avoir fait voyager de la galère de Géronte au Titanic où les violons ne jouent plus, en passant par la Caverne où je ne vois que des ombres.

Sorti de ces trois lieux, cependant, je peux vous faire part des reflets que j'y ai vus. D'abord, il n'y a pas d'oukase présidentiel. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Il n'y a pas d'oukase présidentiel.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Le projet de loi HADOPI 2 est soutenu, je vous le rappelle par la majorité des artistes et des créateurs.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Je ne travaille pas pour les marchands.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Je ne travaille pas non plus pour les grands groupes, ni non plus pour ce monde de super-industriels…

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

…dont vous nous rappelez sans cesse la présence. Je vous précise à nouveau que 90 % des industries musicales sont constituées de PME de moins de vingt salariés.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Je vous précise enfin que si certains artistes en grande minorité sont passés de l'autre côté,…

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

… beaucoup d'entre eux, depuis, se sont rétractés.

Plusieurs députés du groupe SRC. Donnez des noms !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je vous en prie, mes chers collègues. Seul M. le ministre a la parole.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Je ne donne pas de noms. Mais si vous vous informez, vous le saurez.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Monsieur Bloche, je ne citerai pas de nom par discrétion.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Mais si !

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Je souhaite assurer, de surcroît, l'équilibre entre la liberté de communiquer des internautes et le droit de propriété des créateurs et des artistes.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

La refondation de la rémunération des créateurs passe d'abord par le traitement du piratage.

Pour ce qui est de l'observation faite par M. Martin-Lalande, 95 % du territoire pourrait être concerné par la suspension, 100 % d'ici un an.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Enfin, la suspension est efficace. Elle est malheureuse, mais elle est efficace.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Certains de vos amis reviennent de Corée, aujourd'hui.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

De Corée du Sud. La Corée du Nord, je vous laisse y aller ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Nous irons ensemble, j'adore les pays exotiques !

La Corée applique la suspension, applique une législation encore plus dure que celle qui vous est proposée, afin de défendre le cinéma coréen. Que je sache, la Corée du Sud n'est pas une dictature.

J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt l'intervention de chacun d'entre vous.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

M. Françaix m'a dessiné un programme d'intervention pour les mois prochains, que je trouve très intéressant mais auquel je ne pourrai m'atteler que lorsque j'aurai terminé avec vous l'examen de ce projet de loi et que celui-ci aura été voté. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires culturelles, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, mesdames et messieurs les députés de l'opposition, en vous écoutant, j'ai eu l'impression de me retrouver dans chacun des débats auxquels j'ai participé sur des textes.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

En général, les députés UMP vous soutiennent !

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

« Attendez ! », « Retirez ! », « Reportez ! », « Renvoyez ! », c'est le leitmotiv quel que soit le texte présenté. Comme si, mesdames et messieurs les députés de l'opposition, vous aviez un vrai problème…

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

…avec l'évolution de notre société et avec l'évolution nécessaire de la législation, …

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

…pour permettre à la société française d'être en phase avec l'évolution mondiale.

Cela va peut-être paraître paradoxal, mais vous qui, pendant si longtemps, avez voulu vous présenter comme des progressistes, permettez-moi de vous dire que vous adoptez là des attitudes totalement conservatrices (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) et, pour tout dire, réactionnaires. (Protestations sur les mêmes bancs.)

S'il y a une réaction dans cet hémicycle, elle se trouve bien sur le côté gauche. Il est temps que vous en preniez réellement conscience.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Permettez-moi de vous dire que les Français, eux, ont bien compris que vous manquiez totalement de programme, …

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

…que vous manquiez d'idées et qu'à partir de là, la seule chose que vous sachiez faire, c'est vous opposer systématiquement à tout, …

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

… avec des arguments qui laissent parfois pantois tant ils sont contradictoires. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Vous pouvez continuer à crier, cela ne me dérange pas, ce n'est pas mon problème.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Vous avez eu le temps de parler. Je vous ai même écoutés ! C'est d'ailleurs la raison pour laquelle je peux vous parler ainsi en ce moment, car j'ai bien écouté chacun et chacune d'entre vous.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Votre attitude sur internet est très caractéristique. J'ai entendu un certain nombre d'attaques contre la règle de la suspension. Parfois, il y avait des arguments. Mais, derrière les arguments développés par la plupart d'entre vous, j'ai surtout perçu une volonté de ne mettre aucune régulation sur internet.

Plusieurs députés du groupe SRC. C'est le contraire !

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Internet ne doit être, pour un certain nombre d'entre vous, que liberté.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

D'ailleurs, je vous ai entendus parler d'attitude « liberticide », dès que l'on voulait mettre un certain encadrement. (« Mais non ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Eh bien, mesdames, messieurs les députés, ce n'est pas ma conception des choses.

Bien entendu, internet est un formidable espace de liberté, et doit le demeurer !

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Mais ce doit être aussi, et pour les internautes et pour ceux qui l'utilisent, un espace de sécurité. Il faut bien voir que la liberté est liée à un minimum de sécurité, et donc de règles qui permettent de sanctionner notamment un certain nombre de dérives, car des dérives, il y en a.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Pendant les deux ans, que je viens de passer au ministère de l'intérieur,…

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

…j'ai eu diverses occasions de parler avec certains d'entre vous des problèmes de la cybercriminalité. À vous écouter, il s'agirait là de mesures liberticides. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Pardonnez-moi, mais la pédopornographie par internet, il me semble que cela mérite effectivement des sanctions et donc un encadrement.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

L'ensemble de la cybercriminalité et les escroqueries sur internet, c'est exactement la même chose.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Nous avons toujours voté contre la pédopornographie. Vos propos sont honteux !

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Vous pouvez vous agiter, monsieur Bloche, cela ne change rien quant à la réalité de ce que vous avez dit. Vous ne risquez qu'une chose : y perdre votre voix.

En ce qui concerne les sujets dont nous traitons aujourd'hui, le véritable problème est de savoir si l'on doit autoriser sur internet des violations de la loi qui sont sanctionnées partout ailleurs. C'est purement et simplement cela.

Est-ce qu'il y a vol lorsqu'il y a transgression de la propriété littéraire et artistique ? C'est le problème qui se pose aujourd'hui.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

J'ai entendu dire : « Il vaut mieux avoir une sanction financière, une amende, plutôt qu'une suspension d'internet. » Je peux admettre ce genre de raisonnement, même si, sur le fond, je considère que ce n'est pas la bonne solution et qu'il faut prendre en compte la psychologie de ceux qui fraudent pour les toucher plus directement et pour être plus efficace.

Mais ce n'est pas ce que j'ai entendu chez vous. Votre raisonnement était au contraire : « Il ne faut pas qu'il y ait de règles qui s'appliquent. »

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Et cela, ce n'est pas possible.

Je crois, en effet, que le texte qui est aujourd'hui soumis à votre examen, mesdames, messieurs les députés, correspond à une réelle nécessité. Je rejoins totalement Philippe Gosselin pour dire que le téléchargement crée ou a créé des ravages dans l'industrie du disque et du DVD notamment.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Ce sont des supports dépassés. Cela n'a rien à voir !

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Ces ravages ne touchent pas simplement des intérêts économiques. Dès qu'il y a des problèmes économiques et financiers, vous ressortez immédiatement vos vieilles lubies et vos vieux fantômes ou fantasmes.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Mais il faut bien que vous preniez conscience que derrière les problèmes économiques, il y a surtout des problèmes d'emplois qui doivent être réellement pris en compte.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Je remercie M. Lachaud d'avoir rappelé tout cela et d'être particulièrement lucide en la matière. Je n'ai pas trouvé la même lucidité chez M. Paul.

Ce texte est pleinement respectueux des libertés, de toutes les libertés et des exigences du Conseil constitutionnel. Je ne développerai pas ce point, puisque, vous l'avez dit ici comme en commission, je sais très bien que nous allons le retrouver dans la discussion des articles et des amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Comme d'habitude, monsieur le président, l'article 58-1, à moins que vous ne les ayez renumérotés avec le nouveau règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Vous devez vous référer à un autre article, pour nous préciser quel est l'article qui n'a pas été respecté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous maîtrisez la table de conversion mieux que personne, monsieur le président. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 58, premier alinéa.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

C'est un appel à exposer l'article qui n'est pas respecté. Qu'est-ce qui n'a pas été respecté dans la procédure et qui justifie un rappel au règlement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mme la ministre a fait un amalgame tout à fait inacceptable, lorsqu'elle a dit que l'opposition n'était pas d'accord pour lutter contre la cybercriminalité en évoquant la pédophilie.

Quand on veut noyer son chien, on dit qu'il a la rage. C'est dire la faiblesse des arguments du Gouvernement. Mais nous l'avions compris.

Mme Alliot-Marie, ce matin, nous a dit : « Je ne bougerai pas. » En l'entendant, me sont venues à l'esprit les falaises d'Étretat.

Si vous regardez les falaises d'Étretat, madame la ministre, que voyez-vous ? Que la mer en a eu raison, puisque dans la falaise, il y a un trou, qui donne d'ailleurs cet arc magnifique.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Monsieur Brard, cela n'a rien à voir avec la procédure. Je vous demande de conclure, car le règlement ne vous autorise pas à intervenir en dehors du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le président, si nous voulons un débat paisible, serein et constructif, il faut que Mme la ministre se méfie des excès.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Gosselin

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Michèle Tabarot, présidente de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.

Rappel au règlement

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures, est reprise à dix-huit heures cinq.)

Rappel au règlement

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 58, alinéa 2. Je souhaiterais connaître les conditions dans lesquelles le président de séance exerce son droit à retirer la parole aux membres de l'Assemblée qui demandent à s'exprimer dans le cadre d'un rappel au règlement.

Je souhaite, monsieur le président, connaître votre interprétation du texte, qui fixera la règle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Je m'exprimerai dans le cadre des deux minutes qui me sont imparties aux termes de l'article 58, alinéa 5.

Vous avez tout à l'heure, monsieur le président, demandé à nos collègues Jean-Pierre Brard et Philippe Gosselin de préciser l'article du règlement sur lequel ils fondaient leur intervention. Nulle part dans l'article 58, je n'ai lu qu'il fût nécessaire de rappeler l'article du règlement sur lequel nous nous fondons pour évoquer l'organisation générale de nos travaux.

Monsieur le président, votre jurisprudence personnelle marquera les conditions dans lesquelles nous allons débattre dans les années à venir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Je souhaite donc savoir sur quel article vous vous fondez pour demander à au député de préciser l'article sur lequel il s'appuie pour faire un rappel au règlement.

Il peut y avoir des demandes de rappel au règlement, liées à l'interprétation d'un article ou au déroulement des débats, qui requièrent que le député s'explique.

Au nom de mon groupe, je souhaite, monsieur le président, que vous nous indiquiez comment s'appliqueront les nouvelles dispositions de l'article 58, qui ne sont d'ailleurs nouvelles que pour partie.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Deux alinéas de l'article 58 régissent les demandes de rappels au règlement. Aux termes de l'alinéa 1 : « Les rappels au règlement et les demandes touchant au déroulement de la séance ont toujours priorité sur la question principale ; ils en suspendent la discussion. La parole est accordée à tout député qui la demande à cet effet soit sur-le-champ, soit, si un orateur a la parole, à la fin de son intervention. »

L'alinéa 2 répond précisément à votre question, monsieur Le Bouillonnec : « Si, manifestement, son intervention n'a aucun rapport avec le règlement ou le déroulement de la séance, ou si elle tend à remettre en question l'ordre du jour fixé, le Président lui retire la parole. »

C'est exactement ce qui s'est passé, monsieur le député. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Pour retirer la parole à quelqu'un, il faut au moins savoir de quoi il parle ! Or vous avez purement et simplement empêché M. Gosselin de parler !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

J'appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte de la commission. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

J'ai demandé la parole pour un rappel au règlement, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous abordons les amendements portant articles additionnels avant l'article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Vous bafouez déjà le règlement ! C'est la caporalisation de l'Assemblée nationale !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je suis saisi de neuf amendements identiques, nos 249 à 257 .

La parole est à M. Patrick Bloche pour soutenir l'amendement n° 249 .

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Je prends la parole, monsieur le président, car si je ne le faisais pas, vous considéreriez que l'amendement est défendu !

Le rappel au règlement de notre collègue Jean-Yves Le Bouillonnec, sur lequel Christian Paul souhaitait rebondir, reste fondé, monsieur le président ! En outre, je fais observer à Mme la garde des sceaux qu'elle a eu un sacré culot, si je puis me permettre de m'exprimer ainsi, en répondant comme elle l'a fait. Sur onze orateurs inscrits appartenant à tous les groupes politiques, dix se sont exprimés contre le texte, et un seul pour ! Dès lors, laisser entendre qu'une majorité puissante et solidaire était derrière vous est pour le moins exagéré.

J'en viens à notre amendement, qui vise – et cela s'adresse tout particulièrement à M. le ministre de la culture – à rappeler que le droit d'auteur, depuis Beaumarchais, c'est la défense du petit contre les gros ! De l'auteur, de l'artiste contre les marchands.

Nous souhaitons donc que chaque Français lorsqu'il achètera une oeuvre sur support physique ou lorsqu'il téléchargera une oeuvre sur internet, connaisse exactement le prix qui revient à l'auteur, à l'artiste interprète. Ce prix est aujourd'hui ridicule. Par cet amendement, nous souhaitons que soit prise en compte la dimension redistributive dans un modèle économique en transition.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Christian Paul, pour soutenir l'amendement n° 250 .

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

À mon tour, je souhaite répondre à Mme la garde des sceaux.

Vous n'avez pas pu, madame la garde des sceaux, assister à l'ensemble de la discussion générale, ce que je peux comprendre - mais M. Bockel, le ministre des prisons (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), était à votre place au banc du Gouvernement ce matin. Si vous aviez pu être présente, vous auriez clairement entendu que les socialistes n'étaient pas partisans du laisser-faire. Ce n'est pas notre tradition, et pas davantage notre position par rapport à internet ou aux problèmes liés à la diffusion culturelle sur internet : nous proposons, au contraire, de nouvelles régulations.

Par l'amendement n° 250 , nous faisons apparaître que la rémunération des artistes n'est pas décente. C'est bien la preuve que nous proposons de nouvelles règles du jeu, mais, visiblement, ces questions n'intéressent pas le Gouvernement, et ce depuis des années. De ce point de vue, le nouveau ministre de la culture s'inscrit dans une lignée de ministres de la culture qui ont considéré qu'il était plus facile et plus pratique de faire de l'internaute un bouc émissaire que de poser les vrais problèmes, qui tiennent aujourd'hui au rapport de forces déséquilibré entre les opérateurs de télécommunications, les grands de l'informatique, comme Google ou Apple, et les artistes, souvent laissés pour compte.

Notre amendement a pour objectif d'encourager une meilleure répartition des revenus en faveur des créateurs. Je voudrais qu'on m'explique, madame la garde des sceaux, en quoi ce n'est pas de la régulation, en quoi ce ne sont pas de nouvelles règles ni une défense exigeante et moderne des droits d'auteur !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Didier Mathus, pour soutenir l'amendement n° 251 .

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

La répartition des revenus entre les créateurs, d'une part, les producteurs et les distributeurs, d'autre part, est une des questions essentielles de ce texte. Or le projet qui nous est soumis fait l'impasse sur cette question : rien pour les créateurs, pas le moindre euro supplémentaire pour la création dans ce texte qui porte si mal son nom !

Il y a tout lieu d'être inquiet, car l'évolution des pratiques, avec les plateformes légales de diffusion de fichiers sur internet, accentue la disparité et l'inéquité, qui existaient déjà avec les supports physiques, entre les créateurs et les multinationales du loisir que sont, par exemple, les majors du disque.

Notre amendement tend à clarifier les choses. Il faut au moins que l'on sache combien revient à qui, chaque fois que l'on achète un disque, un DVD ou un fichier numérique.

On sait que les maisons de disques ont vu proportionnellement augmenter leurs bénéfices sur les titres vendus sur les plateformes de téléchargement légal, du fait qu'elles n'ont pas à supporter les frais de fabrication et de distribution liés aux supports physiques.

Nous voulons qu'il y ait plus d'argent pour les créateurs et les artistes : c'est l'un des enjeux de nos débats, comme nous l'avons montré lors de l'examen de la loi HADOPI. Or vous allez conforter la part croissante que prélèvent les maisons de production, au détriment de la création.

Cet amendement vise à donner aux consommateurs une information indispensable sur ces pratiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Louis Gagnaire, pour soutenir l'amendement n° 252 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Après les supercheries à répétition dont nous avons été témoins dans cet hémicycle, notamment de la part de votre prédécesseur, monsieur le ministre, nous estimons que les utilisateurs d'internet comme les acheteurs de disques et de DVD ont le droit de savoir où va l'argent. Vous prétendez, à travers cette loi, défendre les artistes et la création. Or nous savons tous que c'est faux.

Je donnerai quelques chiffres. Sur les 99 centimes que coûte le téléchargement d'un titre sur une plateforme légale, 2 centimes seulement vont à l'interprète et 2 autres centimes vont à l'auteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Contrairement à ce que vous avez essayé de nous faire croire, l'argent ne va pas aux artistes. En réalité, ce texte contribue à enrichir les majors du disque, qui défendent un système à bout de souffle, alors qu'il faudrait tenter d'imaginer un autre modèle, à l'instar des Américains.

Dès lors que ces informations seront inscrites clairement sur chacun des supports concernés pour chacun des usages, nous aurons beaucoup avancé, ce qui nous fera sans doute passer plus vite à « HADOPI 4 ».

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Pascale Crozon, pour soutenir l'amendement n° 253 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Cet amendement est extrêmement important puisqu'il permettra d'informer les consommateurs de la part qui revient à la création dans le prix de vente d'un disque ou d'un DVD. Ils seront d'ailleurs certainement très surpris de constater que cette part n'est pas à la hauteur de ce qu'ils pensent, ni même de ce qu'ils souhaiteraient.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir l'amendement n° 254 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Depuis le début de nos débats, il y a plusieurs mois, la question du financement de la création a été posée de manière contradictoire. Le Gouvernement, alors représenté par Mme Albanel, a affirmé qu'il défendait les droits d'auteur et nous a reproché de les mépriser parce que nous contestions les modalités de mise en oeuvre du dispositif qu'il proposait. Nous récusons ce grief, qui n'est en vérité qu'une posture.

Le fond du problème, c'est que si une partie des artistes soutient ce texte, c'est parce que les majors le soutiennent, car il maintient l'écran de fumée qui empêche de connaître la réalité des droits que perçoivent les auteurs, méprisés par ceux-là même qui les produisent, les distribuent, les diffusent.

Si le Gouvernement avait réellement à coeur de protéger le droit d'auteur, il commencerait par rendre public le montant des droits qui reviennent aux artistes quand un consommateur achète l'une de leurs oeuvres. Ce serait un acte de courage que de montrer comment s'opère la dilution des droits des auteurs à travers tous les intermédiaires et toutes les sociétés qui s'approprient leur art pour s'enrichir.

Avec cet amendement, nous vous lançons un défi : si vous défendez vraiment le droit d'auteur, commencez donc par dire aux Français quelle part revient aux artistes quand ils achètent une de leurs oeuvres ! (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Olivier Dussopt, pour soutenir l'amendement n° 255 .

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Dussopt

Depuis le début des débats sur les lois HADOPI, une posture systématique a été adoptée, consistant à renvoyer dos à dos la protection des droits d'auteur, la lutte contre le piratage, le financement de la création et la rémunération des artistes. La ministre précédente a maintenu cette posture, et je crains que le nouveau ministre ne la suive dans cette voie.

Pourtant, le texte n'apporte aucune solution en matière de financement de la création culturelle, ce que le nouveau ministre reconnaît lui-même, si j'ai bien lu les comptes rendus de la commission, dans laquelle je ne siège pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Dussopt

Avec cet amendement, nous voulons faire oeuvre de pédagogie. Indiquer systématiquement quelle part revient à un auteur dans la vente de chaque support culturel commercialisé permettra de démontrer aux consommateurs qu'une part prépondérante de ce qu'ils paient va, non aux artistes, mais aux majors et aux différents distributeurs, qui réalisent des marges commerciales sur des oeuvres artistiques. À ce moment-là, nous pourrons ouvrir d'autres débats sur la licence globale, la possibilité de rémunérer les artistes sur la base de leur travail et la manière d'éviter qu'ils soient spoliés. Ainsi vous ne pourrez plus faire croire qu'un système répressif, fondé sur des sanctions et des privations de libertés, au premier rang desquels la liberté de communiquer, peut constituer une solution au financement de la création.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Michel Françaix, pour soutenir l'amendement n° 256 .

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Françaix

Je me demande si je n'ai pas été un peu sévère tout à l'heure à l'égard de M. le ministre de la culture. J'en ai presque des remords. (Sourires.)

Le ministre m'a repris vertement en me rétorquant qu'il n'était pas le ministre des majors ou des marchands, et qu'il lui serait facile de démontrer qu'il était avant tout le ministre des artistes. Je suis tout prêt à le croire, mais j'attends des preuves.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Françaix

Je lui suggère donc de reprendre à son compte notre amendement : il lui permettrait de nous prouver sa volonté d'assurer une part plus importante de rémunération aux artistes. Dès lors, je m'en voudrais d'avoir tenu de tels propos et je ferais amende honorable.

Je n'attends donc plus que M. le ministre nous le confirme simplement car, comme chacun sait, il n'y a aucune mesure entre les mots et les faits : pour les mots, nous savons qu'il les utilise admirablement, mais pour les faits, il lui reste à donner des preuves.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Marcel Rogemont, pour soutenir l'amendement n° 257 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Internet met en jeu la question de l'économie de la culture, le financement de la création. Vous-même en avez convenu, monsieur le ministre, lorsque vous nous avez reçus. Mais, alors que nous souhaitions que cette question soit placée au coeur de notre débat d'aujourd'hui, vous l'avez renvoyée à plus tard.

Dès lors, il est important de pratiquer une certaine pédagogie en rappelant à tous nos concitoyens ce qui revient aux artistes lorsqu'ils font l'acquisition d'un DVD, d'un CD ou d'un titre en ligne. À cet égard, notre collègue Gagnaire rappelait à juste raison que sur les 99 centimes que coûte l'achat d'un titre en ligne, 2 centimes seulement vont à son créateur.

Vous conviendrez avec moi que cette information est révolutionnaire. Il est évident que si nos concitoyens savaient qu'à peine 2 % du prix de vente d'un titre acheté en ligne revenait à l'artiste, la question de l'économie de la culture ne serait pas renvoyée à demain, monsieur le ministre, mais serait examinée en urgence.

C'est pour rappeler cette urgence que je défends cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Franck Riester, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, pour donner l'avis de la commission sur ces amendements identiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Avis défavorable. (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Je dirai tout d'abord qu'il ne faut pas opposer systématiquement producteurs et artistes.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Les artistes ont besoin des producteurs, lesquels ont besoin eux aussi d'être rémunérés : ce sont eux qui détectent les nouveaux talents et les promeuvent.

S'agissant, monsieur Rogemont, de l'information que vous nous avez livrée, elle est effectivement révolutionnaire, puisqu'elle est totalement erronée. Aujourd'hui, la rémunération des artistes interprètes et des auteurs va, pour les supports numériques, de 15 à 20 centimes d'euro sur les grandes plateformes de téléchargement légal jusqu'à 50 ou 60 centimes d'euro pour les nouvelles sociétés de distribution de musique numérique. Vous pourrez en avoir la confirmation auprès de sociétés telles que Believe, qui soutient d'ailleurs ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

En voulant apporter trop de preuves, vous vous ridiculisez !

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Affirmer que les artistes ne touchent que 4 centimes quand un titre est acheté 99 centimes, c'est dire une contrevérité.

Enfin, si je partage votre volonté d'informer le plus possible les consommateurs, j'estime que le dispositif que vous proposez ne peut être mis en oeuvre dans la pratique.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Parce que chaque artiste interprète est lié par un contrat spécifique à sa maison de production. Ce serait une véritable usine à gaz, tant il y a de cas différents.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

En revanche, informer les consommateurs sur la rémunération pour copie privée liée à l'achat d'une clé USB, un CD ou un DVD fait partie des projets du Gouvernement.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Je m'en voudrais, monsieur Françaix, d'avoir suscité des remords dans votre conscience. Je reconnais avec plaisir que ces amendements partent d'une bonne intention : faire prendre conscience aux acheteurs de CD ou de DVD qu'ils rémunèrent les créateurs.

Dans le même esprit, je vous indique, à la suite de M. le rapporteur, que le montant de la rémunération pour copie privée sera prochainement affiché sur tous les supports assujettis.

Mais ce qu'il est possible de faire avec la rémunération pour copie privée, calculée de façon forfaitaire selon un barème réglementaire, est beaucoup plus difficile à mettre en oeuvre pour les droits d'auteur et les droits voisins, car leurs montants varient dans des proportions considérables. Le prix du CD ou du DVD n'est que le dernier maillon d'une série de contrats entre un grand nombre d'intervenants.

Je suis donc défavorable à ces amendements. Nous pourrons toutefois étudier ensemble la meilleure façon d'établir une plus grande transparence. Je vous rappelle en effet qu'après l'adoption du présent texte j'entamerai une nouvelle étape de mon action, consacrée notamment à la rémunération des créateurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Croyez-vous donc que Son Altesse Impériale va vous laisser faire ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Que de déceptions et de contradictions dans ces réponses !

La vente de musique en ligne a abouti à ce qu'il y a plus d'argent à répartir – même si les coûts de productions des supports physiques, CD et DVD, subsistent. Or, force est de constater que les producteurs se sont taillé la part du lion.

Ne vous méprenez pas : nous défendons les labels indépendants de façon constante, ainsi que nous l'avons démontré à de multiples reprises, dans les débats précédents comme dans celui-ci. Et, pour cela, nous avons même déposé un certain nombre d'amendements visant à ce que la musique soit soutenue comme le cinéma, ce qui n'est pas le cas en France aujourd'hui.

Vos arguments sont autant d'arguties, qui visent à protéger ceux qui mettent les artistes sous pression – et si certains contrats sont juteux, d'autres le sont beaucoup moins.

Le souci de transparence qui nous anime devrait permettre que chaque consommateur prenne conscience du prix de la création, et surtout de la répartition de la contribution au financement de la culture que verse chacun d'entre nous lorsqu'il achète un CD, un DVD, ou de la musique en ligne.

(Les amendements identiques nos 249 à 257 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je suis saisi d'un amendement n° 181 .

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le ministre, nous venons d'entendre votre réponse : « Votez d'abord, on vous donnera satisfaction ensuite. » Mais on ne nous la fait pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Il apprend vite les coups tordus, c'est vrai. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Madame Alliot-Marie, vous faites mine d'être outragée, mais vous savez bien, vous qui avez quelques heures de vol dans cet hémicycle (Protestations sur les bancs du groupe UMP), que c'est la vérité !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Gosselin

Des heures de vol, il y en a ici qui en ont beaucoup !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Chacun sait, dans cette assemblée, que Mme Alliot-Marie est une ministre que l'on peut certes combattre pour les idées qu'elle développe, mais que l'on respecte pour la personne qu'elle est. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.) Elle est respectable par ses engagements, et l'on ne saurait en dire autant de certains ministres qui changent d'engagements pour conserver leur strapontin ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mais tel n'est pas l'objet de notre amendement.

Vous avez dit, monsieur le ministre, que nous nous retrouverions après le vote du texte. Mais vous n'avez, vous le savez bien, aucune marge de manoeuvre sur ce texte ! Le Président de la République l'a dit dans son discours de Versailles, et il l'a redit, dans les mêmes termes, à la fin de sa rencontre avec le groupe dit « G24 », le groupe des douze députés et douze sénateurs qu'il rencontre de temps à autre sur le thème de la crise.

Vous qui êtes un homme de plume, monsieur le ministre, vous mesurez d'ailleurs la différence de style entre le discours de Versailles…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Votre temps de parole est néanmoins épuisé. Concluez.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je vous prie de bien vouloir m'excuser : j'oubliais que nous fonctionnions sous le régime du nouveau règlement. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je voulais simplement dire qu'il nous semble important de compléter l'article L. 312-6 du code de l'éducation dans le sens que propose notre amendement. J'espère, monsieur le ministre, que vous ne nous renverrez pas à la Saint-Glinglin.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Défavorable : cet amendement est satisfait par la rédaction actuelle de l'article L. 312-9 du code de l'éducation.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Défavorable également : la loi du 12 juin 2009 a introduit une sensibilisation des élèves aux dangers pour la création que comporte l'utilisation illicite d'oeuvres protégées par le droit d'auteur.

Il est à ce titre essentiel de bien faire le lien entre la création artistique et le téléchargement. C'est pourquoi la loi organise désormais une information spécifique dans le cadre de l'enseignement artistique.

Si cette information ne doit pas occulter l'existence d'offres sous licence libre, elle ne doit pas être orientée spécifiquement vers la mise en valeur des contenus et oeuvres sous licence ouverte et libre. Le principe de la liberté pédagogique doit ainsi prévaloir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le ministre, ce que vous venez de dire est fort éloquent : on n'aurait donc pas le droit de valoriser l'accès à ce qui est libre et gratuit ? Voilà qui revient à favoriser ce qui n'est ni libre, ni gratuit.

Monsieur le ministre, vous qui êtes un homme de culture, vous savez bien que la culture n'est pas une marchandise ! Comment pouvez-vous privilégier la marchandise sur ce qui est accessible, librement, à ceux qui sont dépourvus de moyens financiers ?

Que les gens de l'UMP soutiennent ce point de vue, cela ne nous étonne pas (Protestations sur les bancs du groupe UMP), mais je ne mélange pas M. Mitterrand avec l'UMP – jusqu'à preuve du contraire !

(L'amendement n° 181 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je suis saisi d'un amendement n° 192 .

La parole est à Mme Martine Billard.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Monsieur le ministre, j'ai été choqué par vos propos. Il ne faut pas écouter systématiquement vos conseillers !

L'article L. 312-6 dispose que « les élèves reçoivent une information sur les dangers du téléchargement ». C'est bien là une injonction pédagogique orientée – même si, en elle-même, elle n'est pas choquante.

Vous avez nié être le défenseur des majors. Or il y a aujourd'hui des auteurs qui font le choix de mettre à disposition gratuitement leurs oeuvres sur internet, notamment parce qu'ils considèrent qu'ils toucheront plus de public par ce moyen qu'en demandant un paiement. C'est un choix qu'ils font !

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Oui, c'est un choix – mais cette renonciation au droit patrimonial n'implique pas qu'ils renoncent aussi au droit moral de l'auteur. C'est bien pour cela qu'il est important de préciser qu'il existe des licences libres !

Il faut accoutumer les jeunes à l'idée que tout n'est pas autorisé. Ce n'est pas seulement un problème de paiement, c'est aussi un problème de respect du droit moral de l'auteur : il faut vérifier sur internet s'il y a un droit à payer, s'il y a un droit moral à respecter, ou si les personnes qui mettent à disposition des oeuvres sur internet acceptent que celles-ci soient librement copiées.

Je pensais que vous, monsieur le ministre, en tant qu'homme de culture, vous pourriez comprendre cette proposition. Ce n'est pas une injonction pédagogique : il faut dire aux jeunes qu'il est possible de télécharger gratuitement des oeuvres dont les auteurs ont souhaité qu'elles soient en accès libre. C'est ce que prévoient des licences comme Art libre ou Creative Commons.

Cet amendement est donc très important.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Pierre Brard. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous n'allez pas vous en sortir par le silence ! Vous fuyez le débat, et ce n'est pas acceptable.

Nous voulons, en particulier, débattre des conditions de rémunération de la création. Mme Alliot-Marie nous a chanté tout à l'heure les mérites du volet répressif, oubliant simplement la censure du Conseil constitutionnel. Mme Albanel avait les mêmes certitudes, qui ont été bien vite désarticulées par les sages du Conseil – et nous n'avons qu'à nous louer de la rectitude de Jean-Louis Debré, de Jacques Chirac, de Valéry Giscard d'Estaing.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Gardiens du temple républicain, ils sont bien meilleurs là où ils sont maintenant, que là où ils furent dans le passé ! (Sourires.)

Mes chers collègues de l'UMP, vous les vitupérez aujourd'hui parce que vous n'avez plus de prise sur eux ! Là où ils sont, ce sont des hommes libres, des femmes libres,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

… à la différence de vous, qui êtes aujourd'hui sur les bancs de l'UMP ou du Gouvernement !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Boënnec

Le délire a ses limites, tout de même !

(L'amendement n° 192 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je suis saisi d'un amendement n° 193 .

La parole est à Mme Martine Billard.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Pour nous, cette question de l'information des jeunes est très importante.

Monsieur le ministre, vous avez dit que vous ne vouliez pas d'injonction pédagogique. Je regrette, au passage, que ce principe n'ait pas toujours été appliqué, notamment par le ministre de l'éducation précédent – nous avons tout de même entendu de M. Darcos beaucoup d'injonctions pédagogiques. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Nous proposons donc de rappeler que « l'information est neutre et pluraliste. » Souvenons-nous d'une célèbre plaquette, distribuée dans les écoles avant même le vote de la loi « DADVSI », et qui anticipait celui-ci !

Même si vous arrivez aujourd'hui, il y a donc une histoire, et elle n'est ni neutre, ni pluraliste. Voilà pourquoi il est important, dans le cadre de la formation, de dire qu'il ne faut pas télécharger sans respecter le droit d'auteur, mais aussi de dispenser d'autres informations sur la culture et sur l'utilisation d'internet.

C'est pourquoi nous insistons sur le fait que cette information doit être « neutre et pluraliste ». Cette affirmation n'est pas neutre, si j'ose dire. (Sourires.)

Monsieur le ministre, je pense que vous ne pouvez qu'accepter un tel amendement. Sinon, on finirait par se demander si l'information ne sera pas orientée dans un seul sens, au lieu d'être destinée à enseigner à nos jeunes toute la richesse que peut représenter internet.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Défavorable. Nous partageons évidemment votre volonté de disposer d'une information neutre et pluraliste. Mais elle va de soi... (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

…car il faut faire confiance aux professeurs. Ceux-ci exerceront leur métier en délivrant une information neutre et pluraliste, dans le respect des valeurs qui sont les leurs. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Je vous rappelle que l'article L. 312-6 dispose que « les élèves reçoivent une information sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites d'oeuvres ou d'objets protégés par un droit d'auteur ou un droit voisin pour la création artistique ». Les professeurs le feront, comme ils sont habitués à le faire, d'une façon neutre et pluraliste.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Madame Billard, je vous écoute avec beaucoup d'attention, et vous dites beaucoup de choses extrêmement intéressantes. Je ne vous le dis pas pour vous faire plaisir, mais parce que je le pense vraiment.

Cependant, je me range très facilement à l'avis de M. le rapporteur, qui a rappelé le principe essentiel de la liberté pédagogique. Les professeurs, les maîtres, les instituteurs sont parfaitement, je crois, à même d'informer et de mettre en garde leurs élèves sur ces sujets.

Je suis donc défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Monsieur le ministre, je ne mets pas en cause les enseignants, je leur fais totalement confiance. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.) Le problème, c'est que les enseignants reçoivent de plus en plus d'injonctions de leur ministre...

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Non !

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

…et que les injonctions du ministre sont passablement orientées. Je prendrai juste l'exemple de l'enseignement de l'économie : on sait très bien qu'un lobbying est à l'oeuvre pour que cet enseignement transmette une vision plus positive de l'économie, plus inspirée par le MEDEF. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Dans ces conditions, vous comprendrez, monsieur le ministre, que nous souhaitions qu'une garantie soit donnée aux professeurs, afin qu'ils puissent, en cas d'injonctions pédagogiques de leur ministre, se référer à la loi pour rappeler que l'information doit être neutre et pluraliste. Si la loi ne dit rien de la sorte, un ministre pourra donner des injonctions orientées vers la seule dénonciation du téléchargement illégal et non vers la mise en valeur de la richesse d'internet, les possibilités d'utiliser des licences libres et le fait de pouvoir mettre des oeuvres gratuitement à disposition du public.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je suis saisi de dix amendements pouvant être soumis à une discussion commune : les amendements nos 549 à 557 , qui sont identiques entre eux, et l'amendement n° 180 .

La parole est à M. Patrick Bloche, pour soutenir l'amendement n° 549 .

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Nous devons, parce que nous sommes la représentation nationale, penser aux artistes, à tous les artistes. C'est d'ailleurs pourquoi nous avons été gênés lorsque, à la suite de notre recours devant le Conseil constitutionnel contre HADOPI, le Gouvernement a en quelque sorte avoué que la Haute Autorité ne surveillerait que 1 000 films et 10 000 phonogrammes. Il s'ensuivra, de fait, une discrimination inacceptable entre les artistes dont on jugera qu'il faut surveiller leur oeuvre pour qu'elle ne soit pas téléchargée illégalement et tous les autres, c'est-à-dire, en fin de compte, le plus grand nombre.

Le souci, partagé par notre groupe et par l'opposition, de ces artistes que le Gouvernement et sa majorité oublient trop souvent nous a amenés à déposer cet amendement, dont l'objectif est de mieux répartir les revenus tirés de la vente de musique en ligne ou de sa diffusion sur les sites de téléchargement financés par des recettes publicitaires. Nous pensons tout particulièrement aux artistes interprètes, qui figurent parmi les grands lésés. Au moment de la répartition, ils sont trop souvent oubliés, et leurs revenus par trop limités.

Nous voudrions, à travers cet amendement, mettre de la justice sociale dans le monde de la création, pour que les producteurs s'y retrouvent, mais également tous les créateurs et tout particulièrement les artistes interprètes.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Christian Paul, pour soutenir l'amendement n° 550 .

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Monsieur le ministre, nous sommes très étonnés de voir de quelle façon, à peine arrivé rue de Valois, vous cédez au mouvement de fuite en avant. Vous nous avez en effet demandé hier de vous laisser organiser ce dispositif de surveillance et de sanction avant que ne viennent des temps meilleurs où l'on pourra, dites-vous, parler des choses sérieuses, c'est-à-dire de la façon de financer la création à l'ère numérique.

Nous n'avons guère de raison de vous croire, monsieur le ministre. Cela fait cinq ans maintenant que les artistes entendent la même chanson, qu'on leur promet des lendemains meilleurs : c'était le cas au moment de la loi « DADVSI », c'était bien sûr le cas avec la loi HADOPI, mais les ministres passent et la situation ne s'améliore pas. Donc, si nous sommes extrêmement intéressés par votre propos, nous sommes malgré tout très prudents, et ce pour trois raisons qui semblent démontrer que la porte s'est déjà refermée sur vos bonnes intentions.

D'abord, vos caisses vont vides. Le budget de soutien à la création s'est encore appauvri en 2009. Il suffit d'ailleurs de passer quelques heures au festival d'Avignon pour entendre le cri d'angoisse des créateurs et des comédiens, de tous ceux qui vivaient jusqu'à présent du spectacle vivant.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Ensuite, les fournisseurs d'accès ont opéré un hold-up au moment de la loi sur l'audiovisuel public alors que plusieurs centaines de millions d'euros par an auraient alors pu, à l'évidence, servir à soutenir la création.

Enfin, après avoir organisé la sanction, il sera difficile de venir demander aux internautes de contribuer à la création.

Voilà, la porte est en train de se refermer. Vous n'avez plus de marge de manoeuvre, et je crois que nous ne sommes pas près, et les artistes pas davantage, de voir ce volet imaginaire que vous évoquez.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Didier Mathus, pour soutenir l'amendement n° 551 .

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Monsieur le ministre, vous convoquiez ce matin à la tribune les mânes de Michel Serrault, d'Édith Piaf, d'Arletty,…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

…et cet après-midi, verrouillé par le dispositif majoritaire, vous refusez la moindre avancée sur la rémunération et l'intérêt des créateurs. C'est totalement contradictoire. La position dans laquelle vous vous êtes mis est en fait intenable aujourd'hui.

Cet amendement a un but très précis. Il y a un peu plus de trois ans, en décembre 2005, lors de l'examen de la loi « DADVSI », un amendement émanant des rangs de l'UMP et un amendement émanant des rangs socialistes étaient adoptés, au terme d'une discussion commune, qui instauraient la licence légale. Branle-bas de combat : le ministre de l'époque, M. Donnedieu de Vabres, avait convoqué sa majorité, avec l'appui du Premier ministre, pour revenir en arrière. J'observe que si cette licence légale, que vous brocardiez ce matin à la tribune, avait été maintenue, près d'un milliard d'euros auraient été distribués aux créateurs depuis 2006. Cet argent a disparu, il est allé dans d'autres poches – en tout cas, pas dans celles des créateurs.

Qu'a-t-on vu depuis 2006 ? Ce que nous proposions sous la forme de la licence légale, avec une rémunération pour les artistes et les créateurs, a été institué par les majors, à commencer par Universal aux États-Unis. Il s'agit d'une forme de licence légale privée, avec des sites de libre accès financés par la publicité.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Les artistes, quant à eux, n'ont droit à aucune rémunération sur cette forme de licence légale privée. Et celle-ci tend à se multiplier parce que, vous le savez bien au fond de vous-même, la consommation gratuite de flux est le modèle aujourd'hui dominant sur internet. Il faudra bien trouver une réponse économique à cette anomalie. Cet amendement a pour but de la corriger, et je n'imagine pas, monsieur le ministre, que vous puissiez vous y opposer.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Louis Gagnaire, pour soutenir l'amendement n° 552 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Nous reviendrons inlassablement sur le fond de cette question et sur cette supercherie qui consiste à essayer de faire croire aux artistes que cette loi est faite pour mieux les rémunérer, car tout le monde sait bien, en vérité, qu'il ne s'agit pas de cela, mais de satisfaire quelques artistes seulement, une poignée de happy few proches du pouvoir (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) et quelques majors.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Cela ne vous plaît pas qu'on appuie là où ça fait mal !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Cela ne concerne pas la multitude d'artistes qui vivent de petits boulots, qui essaient de se faire connaître gratuitement sur internet pour stimuler la fréquentation de leurs spectacles et de leurs concerts. Vous savez très bien que c'est comme cela que cela se passe, mais peut-être ne fréquentons-nous pas les mêmes artistes, monsieur le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Ce qui est clair, c'est qu'il existe une réelle discrimination entre les artistes. D'un côté, il y a ceux qui seront largement rémunérés, qui n'ont pas de problèmes de fin de mois, et, de l'autre côté, il y a les autres, la majorité, ceux que nous ne cesseront de défendre, ceux que les collectivités territoriales aident, ceux qui se plaignent de la baisse constante des financements de l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Il s'agit de trouver des moyens pour rémunérer à sa juste valeur le travail de création des artistes.

J'imagine que, comme d'habitude, le rapporteur et le ministre vont opposer une fin de non-recevoir à notre proposition, puisqu'ils sont a priori contre tout ce que nous disons. Il se trouve cependant que, de temps en temps, on nous donne raison. C'est ce qu'a fait le Conseil constitutionnel sur un certain nombre de points.

Il serait donc préférable que vous changiez rapidement de posture, sans quoi vous irez droit dans le mur, monsieur le ministre. Il serait désastreux pour vous que connaissiez le même sort que celle qui vous a précédé sur ce banc.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est pour votre bien qu'on vous dit ça, monsieur le ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Alain Néri, pour soutenir l'amendement n° 553 .

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Les amendements que nous vous proposons suivent la ligne de conduite que nous avons adoptée depuis très longtemps.

Monsieur le ministre, vous êtes, comme nous, de ceux qui ont considéré que les budgets de la culture étaient insuffisants. Ce sont des gouvernements de gauche, dès 1981 – cela vous rappelle certainement quelque chose – qui ont porté le budget de la culture à 1 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Je crois me souvenir que, sous la présidence de François Mitterrand, vous étiez de ceux qui applaudissaient à juste titre à cette mesure.

Nous sommes dans cette même ligne de défense de la culture pour tous. Ce droit à la culture pour tous, mes chers amis, passe aussi par le droit à la création. Défendre le droit à la création, c'est défendre la culture de notre pays. Nous avons toujours été en avance dans ce domaine. Dans nos collectivités locales, à travers les budgets des conseils généraux et des conseils régionaux, nous aidons la création.

Beaucoup d'artistes auront besoin et ont besoin d'internet pour pouvoir se faire connaître. Nous souhaitons qu'ils puissent être rémunérés pour continuer à exercer leur action, car c'est à travers eux que la culture est une culture vivante. Monsieur le ministre, aidez-nous, aidez les artistes à continuer à faire vivre la culture dans ce pays !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir l'amendement n° 554 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Madame la garde des sceaux, monsieur le ministre, par cet amendement nous voulons vous placer au pied du mur. Puisque vous invoquez la protection et la juste rémunération des auteurs, nous vous proposons d'éviter que la situation actuelle ne sombre dans les errements que dénonçait il y a quelques instants Didier Mathus s'agissant des sites privés qui sont financés par la publicité et qui diffusent sans que les auteurs soient rémunérés.

Cet amendement va tellement de soi que je ne comprendrais pas, monsieur le ministre, que vous n'y adhériez pas : « Les auteurs et artistes interprètes des oeuvres fixées sur phonogrammes ou vidéogrammes ont droit à une rémunération liée aux recettes générées par la commercialisation d'espaces publicitaires effectuée directement ou indirectement par les services de communication au public en ligne ou toute autre personne qui procèdent, à titre habituel, à la mise à disposition par tous moyens, y compris la location et la vente, desdites oeuvres, à titre gratuit ou onéreux, sur des réseaux de communications en ligne. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

L'alinéa 2 indique par ailleurs que la rémunération est due indépendamment des droits moraux.

Monsieur le ministre, nous ne faisons ainsi que prendre la défense du droit d'auteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Notre proposition éviterait le tsunami qui nous arrive des États-Unis et qui va nous submerger. Si vous ne bondissez pas sur cette occasion, demain, il sera trop tard. Nous l'avons dit lors des débats précédents : ne croyez pas qu'une ligne Maginot empêcherait un Tchernobyl ! Et si vous n'y prenez pas garde, demain les auteurs viendront vous accuser, malgré tout ce que vous prétendez aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Olivier Dussopt, pour soutenir l'amendement n° 555 .

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Dussopt

Je ne reprendrai pas l'excellente démonstration de mon collègue Le Bouillonnec. Je me contenterai de souligner que cet amendement vise simplement à permettre aux créateurs, aux artistes, de profiter des flux financiers induits par la publicité sur les différents supports afin de rémunérer la création et leur travail.

Cet amendement assure une vraie justice dans la rémunération. Il pourrait être consensuel, Didier Mathus l'a souligné, puisqu'il s'agit de mettre à contribution ces flux dont on constate le développement quelque peu anarchique. D'autres textes, comme le projet de loi sur les jeux d'argent et de hasard, se traduiront par une multiplication de la publicité. Mais surtout, cet amendement est cohérent avec la démarche d'ensemble du groupe SRC.

Nous avons soutenu, par exemple, que les recettes de publicité sur internet devaient financer la suppression de la publicité sur France Télévisions ; la majorité a fait un autre choix. À chaque fois, nous avons dit qu'il fallait taxer ces flux financiers pour assurer le financement de la création, le financement d'un service public de l'audiovisuel.

Aujourd'hui, nous vous proposons de financer la création artistique en mettant la publicité à contribution ; nous restons, ce faisant, dans une cohérence qui tranche singulièrement avec la manière chaotique dont la majorité nous propose d'examiner le texte : les ministres changent, les votes sanctions s'accumulent, les sages censurent… Dans cette vague qui emporte tout, seul le rapporteur reste debout. Je salue ses talents certains d'équilibriste, mais je crains que le tsunami évoqué par M. Le Bouillonnec n'ait déjà emporté un texte continuellement mis en défaut par les juristes et les internautes.

Je vous suggère donc de saisir l'occasion que nous vous offrons de travailler à améliorer la rémunération des auteurs et des créateurs. Nos amendements ne rendront peut-être pas le texte acceptable, mais ils apporteront du moins un début de solution au problème des artistes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Michel Françaix, pour soutenir l'amendement n° 556 .

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Françaix

Tout à l'heure, monsieur le ministre, vous avez fait allusion à Arletty. Ni vous ni moi n'avons une gueule d'atmosphère, c'est entendu.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Françaix

Je regrette que l'atmosphère ne soit pas la même, lors de certains échanges informels et pendant le débat. À la tribune, vous nous expliquez qu'il faut vous faire confiance, que nous devons voter ce texte à la sauvette et que, bientôt, une loi « HADOPI 3 », à laquelle nous serons associés, nous mettra tous d'accord. Et, soudain, quand vous siégez au banc du Gouvernement, le ton change.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Françaix

Peut-être recevez-vous des instructions. Peut-être, psychologiquement, n'êtes-vous plus le même homme. Quoi qu'il en soit, nous regrettons de nous heurter soudain à une étroitesse d'esprit à laquelle vous ne nous avez pas habitués.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Françaix

Beaumarchais a défendu le droit d'auteur pour protéger l'artiste du marchand, ou plutôt le dramaturge, de la Comédie française. Les marchands d'aujourd'hui et les fournisseurs d'accès ne sont-ils pas plus puissants qu'elle ? C'est pourquoi, aujourd'hui, le droit d'auteur mérite d'être défendu plus encore qu'au XVIIIe siècle.

J'ai cité la Comédie française ; ne nous entraînez pas dans La Divine Comédie de Dante. Laissez-nous croire que vous défendez un tant soit peu certaines valeurs auxquelles nous tenons ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Marcel Rogemont, pour soutenir l'amendement n° 557 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Je m'adresserai à M. le ministre, puisque Mme la garde des sceaux ne s'intéresse qu'à l'aspect juridique et répressif…

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

…du texte. Je veux lui rappeler un fait important. Le Gouvernement, qui consacre 2,7 milliards d'euros à la culture, en abandonne 3 aux restaurateurs. Un tel choix n'est-il pas étonnant ? Nul doute, monsieur le ministre, que nous vous retrouverons à nos côtés pour réclamer que l'on accorde davantage d'argent au premier secteur et un peu moins au second.

Puisque, sur internet, une part essentielle des plans d'affaires des services en ligne est financée par la publicité, serait-il indécent d'y voir un moyen de financer la création, à l'heure où les crédits de votre budget sont limités ? Comment ne pas établir un lien entre le chiffre d'affaires généré par la diffusion d'un produit culturel et la personne qui l'a créé ? L'art est une source de financement plus sûre qu'une injonction à Bercy.

Nous proposons donc de solliciter les services de communication en ligne, comme tout autre bénéficiaire de recettes publicitaires, pour financer la création. C'est un moyen comme un autre de trouver de l'argent pour la culture.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 180 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Il ne vous aura pas échappé que l'amendement que je présente était déjà à l'ordre du jour de nos discussions sur la première mouture du projet de loi HADOPI. Il vise à montrer une nouvelle fois combien les députés de l'opposition sont soucieux de proposer de nouvelles solutions alternatives pour financer la création diffusée sur les réseaux à l'ère numérique.

Au moment où nous cherchons une meilleure répartition des recettes publicitaires, certains sites gratuits de téléchargements légaux vivent des revenus de la publicité qui rémunèrent producteurs et éditeurs, mais très rarement les auteurs ou les interprètes. Le problème de répartition des recettes est réel. Si nous souhaitons que ces sites de téléchargement légal puissent continuer à exister, nous considérons qu'une meilleure répartition de leurs recettes publicitaires peut être envisagée.

Cet amendement est tout à fait dans l'air du temps. Quand on parle de création, il ne faut pas seulement songer à la protéger, mais avoir une vision d'avenir et prévoir de nouvelles évolutions. Ainsi, le streaming est déjà en passe de supplanter la pratique du téléchargement que le projet de loi propose de réprimer.

Vous nous rétorquerez peut-être que l'amendement est hors sujet. Nous ne sommes pas de cet avis, puisqu'il peut sans aucun problème s'articuler avec HADOPI et HADOPI 2. Il vous permettrait d'ailleurs de sauver la face en ménageant pour la création artistique de nouvelles ressources, que les deux projets n'ont nullement prévues.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Défavorable.

Nous sommes convaincus de la nécessité d'augmenter la rémunération des créateurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

C'est la raison pour laquelle nous avons rédigé ce texte. Nous sommes certains que, si les internautes renoncent au téléchargement illégal, devenu massif dans notre pays, le téléchargement légal pourra financer la création, au même titre que les revenus globalement issus d'internet.

Mais vous avez raison, monsieur Rogemont, de poser le problème de la répartition de la rémunération entre les différents acteurs de ces filières. C'est une question fondamentale dont il faut discuter en permanence.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Cela suppose un débat approfondi entre les professionnels du secteur, car il faut respecter les droits moraux et patrimoniaux des créateurs,…

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

…ainsi que la liberté contractuelle. Le débat doit avoir lieu sous l'autorité du ministre et en collaboration avec les commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat.

J'ajoute, monsieur Brard, que la taxation des revenus publicitaires, qui peut paraître séduisante, serait extrêmement difficile à mettre en oeuvre. Les régies publicitaires sont le plus souvent à l'étranger. Taxer uniquement les entreprises de ce secteur implantées en France reviendrait à pénaliser les start up françaises.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Certains pays étrangers réussissent pourtant à les taxer !

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Défavorable.

J'ai noté plusieurs arguments intéressants, mais je veux d'abord répondre sur certains points de détail : il n'y a pas de fuite en avant, je ne reçois d'instruction de personne, les caisses ne sont pas vides.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

La loi sur l'audiovisuel public n'a pas sa place dans notre discussion. Quant au sort auquel vous me prédestinez, le tsunami, Tchernobyl et autres maléfices,…

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

…je m'en occuperai moi-même. (Sourires.)

Monsieur Françaix, l'atmosphère n'a pas changé entre nous. Le sujet qui vient d'être abordé est un vrai sujet,…

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

…mais le Gouvernement ne peut être favorable à un amendement qui créerait un prélèvement sur les recettes publicitaires des services en ligne au bénéfice des artistes interprètes et des auteurs, et ce pour deux raisons.

D'abord, c'est de manière globale que la question de la rémunération des ayants droit doit être abordée. La mesure catégorielle proposée pour les interprètes et les auteurs modifierait l'équilibre des relations contractuelles, notamment avec les producteurs à qui sont cédés les droits d'exploitation. Il faut que les acteurs aient ensemble une discussion, que je suis prêt à animer et à laquelle j'espère que vous participerez.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Ensuite, les effets d'un tel prélèvement doivent être étudiés. La mesure risque en effet de réduire l'intérêt qu'ont les opérateurs à diffuser des oeuvres, notamment celles qui pourraient susciter moins de recettes publicitaires. Le risque d'un tel effet pervers, dont pâtiraient les indépendants, doit être examiné avec soin. Nous en parlerons donc lorsque nous aurons adopté la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Au titre de l'article 100-7 du nouveau règlement, je donne à présent la parole à un orateur défavorable aux amendements.

La parole est à M. Philippe Gosselin.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Gosselin

Sur le fond, nous partageons l'avis du rapporteur et du ministre. Quant à la forme, je fais remarquer à nos collègues socialistes que nous n'en sommes qu'à la deuxième salve, sur quatre-vingts, de neuf amendements identiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Gosselin

Il n'y a donc aucune atteinte à la liberté d'expression ou au droit d'amendement, et nous allons devoir vous écouter, ou plutôt vous supporter encore longuement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Gosselin

Quoi qu'il en soit, nous ne voterons évidemment pas ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Le règlement dispose qu'un orateur peut répondre à la commission et au Gouvernement. En l'espèce, je vais donner la parole à deux orateurs, le premier pour la série d'amendements identiques nos 549 à 557 , le second pour l'amendement n° 180 .

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Si nous avons évoqué à plusieurs reprises la ligne Maginot, c'est que nous sommes convaincus, comme certains députés de la majorité, que la loi n'est pas applicable. L'un d'eux a reconnu ce matin qu'il voterait ce texte auquel il ne croit guère. Mais pourquoi adopter une loi que l'on sait inapplicable pour des raisons tant techniques que juridiques, notamment eu égard aux exigences du droit européen ? Sur ce point, nous sommes en désaccord fondamental avec vous. Si le Gouvernement et la majorité faisaient preuve d'un tant soit peu de lucidité, ils renonceraient à cette fausse réponse. C'est ce que nos amendements vous proposent de faire.

Pour ma part, je suis très surpris de la position du rapporteur, qui vient de reconnaître que la rémunération des auteurs et le financement de la création posent un véritable problème. Pourquoi prétendre que la loi le règlera, puisqu'elle n'apportera pas un centime supplémentaire à la création culturelle ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Vous l'avez d'ailleurs reconnu, monsieur le rapporteur, tout comme vous, monsieur le ministre, en nous recevant hier soir, et vous venez de faire une allusion trop brève à ce problème.

La vraie question est celle du financement de la création culturelle. Le ministre l'a reconnu, allant même jusqu'à envisager un débat où nous serions conviés. C'est bien là la question première, et celle que ce texte ne traite pas. C'est pourquoi nous ne cessons de répéter notre conviction profonde, et c'est pourquoi nous multiplions les amendements qui offrent des solutions.

Selon vous, monsieur le ministre, l'audiovisuel n'a pas sa place ici. Mais si ! Lors du débat sur l'audiovisuel public, nous avons dénoncé le fait que vous vous priviez d'une recette qui aurait pu servir à rémunérer les auteurs et qu'on a utilisée, en partie, pour combler les trous du budget de la communication. Cette responsabilité qu'a prise votre prédécesseur, c'est la politique culturelle à laquelle vous êtes attaché, l'ambition culturelle pour la France dont vous n'avez cessé de proclamer être le défenseur, qui en pâtit. Là est le vrai débat. Nos amendements ne sont donc pas des arguties, ils abordent des questions de fond, auxquelles nous attendons des réponses

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Avec les réponses négatives du ministre et du rapporteur sur ces amendements, les masques tombent. Ce dont nous parlons, c'est de régulation, et il n'est pas de secteur plus régulé en France que le financement de la culture. Nous venons d'ailleurs de voter à l'unanimité, à l'Assemblée et au Sénat, la réduction de la chronologie des médias. Certes, par la suite, la société des auteurs n'a pas signé l'accord, mais on voit bien que le législateur doit régulièrement intervenir. On ne peut donc, comme l'a fait le rapporteur, renvoyer à des accords hypothétiques, lointains, alors qu'on sait bien que le contexte est souvent passionnel et les rapports de forces très déséquilibrés. L'objet de ces amendements est de revenir à l'essence même du droit d'auteur et de tenir compte du fait qu'actuellement les artistes interprètes ne reçoivent pas des sites qui vivent de recettes publicitaires les rémunérations dues aux créateurs.

Repousser cette question à plus tard, c'est refuser la régulation que nous vous proposons. Les choses sont claires : à gauche de cet hémicycle, il y a ceux qui veulent réguler, à droite, ceux qui ne le veulent pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le président, vous aviez promis de me donner la parole !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Monsieur Brard, j'applique le règlement. Deux orateurs ont répondu. Vous aurez la parole tout à l'heure.

(Les amendements identiques nos 549 à 557 ne sont pas adoptés.)

(L'amendement n° 180 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je suis saisi de dix amendements pouvant être soumis à une discussion commune : les amendements nos 531 à 539 , qui sont identiques entre eux, et l'amendement n° 740 .

La parole est à M. Patrick Bloche pour défendre l'amendement n° 531 .

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Cet amendement a valeur de test. C'est à nouveau un amendement de régulation. Dans ce domaine de la diffusion culturelle, et en particulier de la radio, il existe des circuits financiers importants qui produisent des recettes, lesquelles ne sont pas réparties de façon équitable. Certes, les ayants droit sont censés être rémunérés. Mais certains le sont quand d'autres ne le sont pas, et certains le sont plus que d'autres. Il existe, me direz-vous, des accords dans le secteur, mais notre amendement ne vise pas à s'y substituer : il vise à accroître la transparence en fournissant les statistiques qui permettront une répartition équitable et proportionnée des recettes tirées de certains modes de diffusion des oeuvres. Or cette information est actuellement absente ou partielle. L'ensemble des utilisateurs doivent fournir aux collecteurs des statistiques précises sur les titres qu'ils diffusent pour que la répartition soit fonction de l'audience.

Je ne doute pas que ceux qui se sont élevés contre une répartition forfaitaire de la contribution créative voteront cet amendement des deux mains.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Christian Paul, pour défendre l'amendement n° 532 .

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Patrick Bloche ayant parfaitement défendu cet amendement, je reviendrai, monsieur le ministre, sur certains de vos propos de ce matin et de cet après-midi. Vous nous avez asséné comme une vérité d'évidence ce qui est loin d'en être une pour nous, à savoir que les artistes soutiennent massivement la loi. Vous avez cité des artistes qui ne sont plus de ce monde, comme Arletty ou Serge Gainsbourg. Vous avez cité aussi Pierre Arditi et Juliette Gréco. Mais nous pouvons, à notre tour, citer nombre de jeunes artistes français qui ont pris une position très radicale contre cette loi, comme Jeanne Balibar ou Louis Garrel, qui sont venus dire ici même leur opposition, sans qu'on ait à leur arracher leur signature. Et, il y a quelques jours, la grande Jeanne Moreau disait que « HADOPI, c'est du vent, une loi sans fondement et inapplicable ».

J'ai donc envie d'adresser un reproche, non à vous, qui arrivez et trouvez dans la corbeille cette mauvaise loi, mais au président de la République, qui divise pour régner. C'est même son mode de gouvernement. En politique, il l'applique en toutes choses. Eh bien, nous aimerions que ce mode de gouvernement ne s'applique pas à la culture, et qu'on ne divise pas les artistes français comme le fait ce gouvernement depuis des années. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Didier Mathus, pour défendre l'amendement n° 533 .

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

La pédagogie est l'art de la répétition, et chacun de nous, en présentant cet amendement à sa façon, essaye de vous faire partager son ardente conviction que la rémunération des créateurs doit être au centre de toute réflexion sur le nécessaire compromis financier à établir entre la création, les internautes et la solvabilité du système économique. Malheureusement, le Gouvernement passe à côté de ce compromis et s'en tient à une position partielle, consistant à conforter les rentes de situation d'industriels qui se trompent d'époque et n'ont pas su renouveler leur offre économique.

Cette loi n'aborde la création que sous l'angle de la répression et sous celui d'une illusion technologique, comme l'ont été les DRM il y a trois ans. On sait que, déjà, tous les dispositifs destinés à contourner la traçabilité que prétendent établir les sociétés de droits sont opérationnels. Il en va ainsi de logiciels qui permettent de changer les adresses IP automatiquement, de façon aléatoire, toutes les trente secondes ou toutes les minutes.

Ce projet sera donc sans effet, et surtout, il manque à sa mission principale qui serait de conforter l'exubérance créative qu'a favorisée le web, permettant une formidable extension de la sphère culturelle. Comment mieux rémunérer les créateurs, comment les rémunérer tout court, même, car dans certains cas leur rémunération est inexistante, ou en tout cas bien peu digne. Vous ne répondez pas à cette question.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Louis Gagnaire pour défendre l'amendement n° 534 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Monsieur le ministre, nous allons passer beaucoup de temps ensemble, pour votre premier passage devant l'Assemblée nationale. Mais nous ne sommes pas là pour perdre du temps (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), nous sommes là pour débusquer les faux arguments que vous employez depuis le début. Il s'est dit beaucoup de mensonges, et aux artistes d'abord, ce qui n'est pas acceptable. D'ailleurs, monsieur le ministre, nous constatons depuis ce matin que votre engagement en leur faveur commence à faiblir puisque vous vous alignez systématiquement sur le rapporteur, lequel, certes, a de l'entraînement, avec 60 heures de débats derrière lui.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Je vous invite donc à ne pas croire tout ce que dit le rapporteur, qui s'est déjà trompé plusieurs fois, et à écouter plutôt ceux qui, au sein du groupe UMP, adoptent le même point de vue que nous.

Dans la discussion générale, j'ai évoqué la variété des opinions au sein du Gouvernement. J'aimerais avoir votre avis, par exemple, sur celle de Mme Kosciusko-Morizet qui est très originale…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Sur la loi HADOPI, nous pourrions la reprendre mot pour mot. J'aimerais donc avoir des éclaircissements, et la certitude que votre engagement en faveur des artistes est sincère.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Corinne Erhel, pour défendre l'amendement n° 535 .

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Erhel

À force de vous concentrer sur la sanction, vous avez oublié la question de la rémunération de la création, que vous reportez même à un débat à l'automne.

D'autre part, ce texte touche à la création et au droit pénal, mais aussi à l'économie numérique. Or, depuis le début de la discussion du projet HADOPI 2 et même, déjà, de celle de HADOPI, nous n'avons toujours pas eu l'éclairage nécessaire sur ce volet, aussi indispensable que les autres.

Notre amendement vise, pour assurer une meilleure répartition des sommes collectées, à réunir un certain nombre de données statistiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour soutenir l'amendement n° 536 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Nous essayons de placer le droit d'auteur au coeur du débat.

Puisque les gouvernements successifs qui défendent ce texte allèguent que le droit d'auteur est pour eux une obsession, nous avons décidé de revisiter les questions qui se posent à ce sujet. Ainsi, nous vous mettons en face des réalités que connaissent les auteurs, et pas seulement ceux que vous fréquentez, mais aussi ceux que nous rencontrons. Or les auteurs mettent actuellement en cause les conditions dans lesquelles se fait la répartition des produits des ventes de leurs oeuvres, quels que soient les supports ou les modes de diffusion. Voilà le problème de fond !

Monsieur le ministre, vous nous annoncez que vous allez réfléchir au sujet. Certes ! Nous ne doutons pas de votre bonne foi, et il ne nous appartient pas de déterminer si vous aurez la capacité de faire bouger les choses, mais je vous rappelle que ce gouvernement succède à bien d'autres. Depuis 2002, c'est-à-dire depuis sept ans, les mêmes questions ont déjà été posées, et nous avons argumenté à plusieurs reprises pour que le droit d'auteur soit revisité. Nous l'avons encore fait, sans cesse, et sans succès, lors de l'examen du projet de loi, tant dans la partie censurée par le Conseil constitutionnel que dans celle qui ne l'a pas été.

Finalement, aujourd'hui, monsieur le ministre, vous finissez par nous répondre que ces questions sont pertinentes, que vous les examinerez, et vous nous invitez même à participer à ce travail – ce dont nous vous remercions. Seulement, ici, nous faisons la loi, et il faut la faire tout de suite, monsieur le ministre ; c'est pourquoi nous vous invitons à constater le bien-fondé de ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Olivier Dussopt, pour présenter l'amendement n° 537 .

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Dussopt

Depuis que nous avons commencé la discussion des articles, nous avons tout d'abord défendu un amendement visant à assurer la transparence en ce qui concerne la part des recettes versées aux créateurs, et nous avons ensuite voulu qu'une nouvelle recette leur soit destinée, en mettant à contribution les revenus de la publicité. Quant à cet amendement, il vise à obtenir une répartition plus juste des recettes de la création, entre les artistes et les créateurs.

Systématiquement, nous faisons donc des propositions pour un financement de la création plus juste, plus transparent et, finalement, plus en phase avec la réalité et les besoins des créateurs. Malheureusement, la commission et le Gouvernement nous font immanquablement la même réponse : avis défavorable !

Pour faire écho aux remarques de certains de nos collègues sur la pédagogie de la répétition, je vais confirmer à Mme la garde des sceaux et à M. le ministre que nous allons continuer. Nous allons nous répéter, pour la simple et bonne raison que M. le ministre nous a donné espoir ; il nous a donné foi dans la répétition.

En effet, à force de répéter depuis quinze jours qu'il travaille sans instructions et en totale liberté, n'a-t-il pas fini par se convaincre lui-même que c'était vrai ? (Rires sur les bancs du groupe SRC.) Il a même fini par se convaincre que les caisses de l'État n'étaient pas vides ! Voilà qui illustre les vertus de la répétition.

À notre tour, nous nous répéterons donc pour le convaincre de la justesse de nos arguments qui, je l'en assure, reposent bien plus sur la réalité que les illusions qu'il peut encore entretenir pour quelques semaines.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean Mallot, pour présenter l'amendement n° 538 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Cet amendement extrêmement précis fait référence à l'article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle, relatif aux droits à rémunération des artistes interprètes et des producteurs en cas d'utilisation des phonogrammes publiés à des fins de commerce.

Selon cet article, cette rémunération « est assise sur les recettes de l'exploitation ou, à défaut, évaluée forfaitairement dans les cas prévus » ; elle « est répartie par moitié entre les artistes interprètes et les producteurs de phonogrammes ». Il est par ailleurs prévu que « la rémunération prévue à l'article L. 214-1 est perçue pour le compte des ayants droit et répartie entre ceux-ci par un ou plusieurs organismes ».

Mon amendement, cosigné par M. Françaix, Mme Lebranchu et quelques autres, propose de préciser ce dispositif afin que la répartition des recettes ne soit pas forfaitaire et que, en tout cas, elle ne se fasse pas sur la base de statistiques imprécises. Nous voulons que les passages à la radio, en particulier, soient soigneusement recensés, calculés et évalués afin d'obtenir une juste répartition entre les ayants droit.

Pour conclure, je voudrais exprimer ma grande perplexité devant le silence des ministres, et, notamment, devant celui du ministre de la culture – au passage, je constate que les ministres passent, mais que les conseillers restent. Le ministre nous a dit qu'il voulait s'intéresser à la rémunération des artistes, mais qu'il voulait le faire « plus tard ». Or nous avons déposé des amendements, et celui que je présente vise à faire en sorte que les rémunérations soient établies de façon précise.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

M. le ministre est au pied du mur : il sera forcément favorable à son adoption.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Marcel Rogemont, pour soutenir l'amendement n° 539 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Ce texte pose la question de la rémunération des créateurs à l'heure d'internet, dans un contexte où le marché de la culture est régulé et réglementé de façon législative ou contractuelle.

Cependant, il importe, à chaque fois que cela est possible, de parvenir à plus de transparence afin d'ajuster les rémunérations des artistes. En effet, lorsque les oeuvres sont diffusés dans certains médias, et qu'elles font l'objet de licences, de rémunération proportionnées ou de forfaits, certains ayants droit ne sont pas rémunérés pour l'usage global de leur oeuvre. Le phénomène est récurrent. Ainsi, lorsqu'une radio signe un accord de licence ou de forfait avec un organisme collecteur, elle paie une somme fixe, quels que soient les artistes diffusés. L'organisme collecteur a ensuite la charge de redistribuer ce montant aux ayants droit, au prorata des passages à la radio. Or cette information est souvent partielle, voire absente.

Cet amendement vise à contraindre l'ensemble des utilisateurs à fournir aux organismes collecteurs les statistiques précises des titres diffusés afin que la répartition des droits soit vraiment en rapport avec la diffusion. Il s'agit d'assurer une rémunération aussi juste que possible des créateurs, qui dépende vraiment de l'utilisation de leurs oeuvres.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je suis saisi par M. Jean-Pierre Brard d'un sous-amendement, n° 899 , à l'amendement n° 534 . La commission l'a-t-elle examiné ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Le Gouvernement demande-t-il l'application de l'article 44, alinéa 2, de la Constitution ?

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état

Non, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Puisque le Gouvernement autorise sa discussion, la parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je remercie Mme la ministre pour sa mansuétude. Même si elle a affirmé que, sur ce texte, elle ne bougerait pas, elle consent, dans sa grande bonté, à m'écouter. (Sourires.)

L'amendement de nos collègues socialistes est excellent, mais on ne peut pas s'en remettre aux seuls collecteurs. Pour la communication d'informations précises, encore faut-il que celles-ci soient publiques ; en matière de transparence, cela change tout.

Puisque je n'ai pas encore épuisé mon temps de parole, je voudrais attirer l'attention de M. le ministre sur plusieurs points. Il a un « collaborateur-souffleur » qui était déjà celui de Mme Albanel ; on sait comment cela s'est terminé ! (Sourires.) Monsieur le ministre, je dis cela pour votre bien.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Monsieur Brard, je vous rappelle qu'il n'est pas d'usage de s'en prendre aux fonctionnaires ou aux collaborateurs des ministres. Je vous demande de revenir au fond.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le président, il s'agissait d'une remarque amicale et presque affectueuse…

Ces dernières années, la loi « DADVSI » fut inefficace, La loi HADOPI fut défendue avec énergie, et invalidée sans gloire. Vous avez demandé que le vote solennel n'ait lieu qu'en septembre. J'appelle donc tous les internautes à suivre nos discussions et à se mobiliser dans le temps qui nous séparent de ce vote. Qu'ils emmènent leurs écrans sur les plages,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…qu'ils expliquent partout ce que vous êtes en train de faire !

Vous aviez fait voter le CPE, mais il ne fut jamais appliqué ; il en ira de même de HADOPI 2 !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

La commission ne l'ayant pas examiné, j'émets un avis personnel.

J'y suis défavorable car cette information est de nature confidentielle. Elle est contenue dans les accords de licence ou de forfait, et la rendre publique changerait non seulement la portée de ces accords, mais aussi celle de l'amendement de M. Gagnaire.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

(« Ah ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Je serai bref : avis défavorable. (« Oh ! » sur les mêmes bancs.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 740 .

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Je serai sans doute un peu plus longue... (Sourires.)

Monsieur le ministre, vous nous décevez, car vous mettez vos pas dans ceux de votre prédécesseur. C'est dommage, d'autant que cela ne lui a finalement guère réussi…

Vous avez refusé la licence collective sous prétexte que la répartition serait trop complexe. C'est d'ailleurs l'argument qui est constamment opposé à ceux qui préconisent cette solution. Toutefois, vous devriez écouter certains de nos collègues qui, hostiles lors des débats sur la loi « DADVSI », reconnaissent aujourd'hui que nous serons obligés d'y venir. La SACEM admet d'ailleurs elle aussi qu'il faudra peut-être se poser la question.

L'argument, en vérité, se justifie d'autant moins que l'amendement du groupe GDR, analogue à ceux présentés par nos collègues du groupe SRC, cherche à améliorer l'information relative à la répartition des rémunérations concernant les oeuvres diffusées aujourd'hui légalement sous un régime de licence ou de forfait. En effet, actuellement, les ayants droit n'obtiennent pas une rémunération en rapport avec l'usage de leur oeuvre.

On ne peut pas, d'un côté, nous refuser la licence collective en prétextant des difficultés de répartition et, de l'autre, refuser de simplifier et d'améliorer la répartition actuelle, évolution dont le seul objectif est de permettre aux auteurs d'obtenir une rémunération qui corresponde à la diffusion réelle de leur oeuvre, et pas seulement à des estimations.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements en discussion commune ?

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Défavorable. D'une certaine façon, en effet, ces amendements sont déjà satisfaits par notre droit.

L'article L. 214-3 du code de la propriété intellectuelle prévoit en effet une obligation de fournir des relevés d'utilisation des oeuvres. Cette obligation est désormais systématiquement rappelée et précisée, voire assortie de contreparties, dans les décisions de la commission chargée de fixer le barème de la rémunération dite équitable, qui a valeur réglementaire.

Les sociétés ayant en charge la répartition de la rémunération équitable utilisent des critères de répartition précisés dans leur statut ou dans des barèmes contrôlés par la commission permanente de contrôle placée auprès de la Cour des comptes.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Je n'ajouterai rien à ce qu'a dit M. le rapporteur ; nous avons les mêmes arguments.

Je voudrais toutefois dire quelques mots. Je ne peux pas admettre l'idée, avancée par un des honorables députés de l'opposition, selon laquelle mon soutien aux créateurs fléchirait. C'est très mal informé. C'est très faux. C'est à la limite de la malveillance…

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Pour tout dire, ce n'est pas bien du tout. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Que les choses soient bien claires entre nous : ce n'est pas parce que j'essaie d'être courtois et aimable que mes convictions en sont entamées de quelque manière que ce soit.

On m'a expliqué l'importance de l'usage pédagogique de la répétition, et je suis très heureux de pouvoir vous dire que j'y souscris tout à fait. Je répéterai donc moi-même les mêmes choses autant qu'il vous plaira de les entendre – ou de ne pas les entendre. Dans ce domaine, ma patience est sans limites. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Marylise Lebranchu, pour répondre à la commission et au Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marylise Lebranchu

Monsieur le ministre, notre patience étant également sans limites, nous allons passer d'excellents moments. Je vous donne acte que vous souhaitez soutenir la création, mais cela fait tout de même des mois que nous expliquons qu'une loi qui, in fine, en appelle au pénal ne rapportera pas un centime à la création.

Debut de section - PermalienPhoto de Marylise Lebranchu

Or, étant donné l'état actuel des comptes de la France, je ne vois pas très bien comment vous pourriez convaincre le Premier ministre d'ouvrir une nouvelle dépense à la rentrée pour soutenir la création. C'est pourquoi nous vous proposons un système qui, ailleurs, fonctionne. Cet amendement témoigne de notre bonne foi : nous souhaitons améliorer la rémunération de la création.

Vous le savez sans doute encore mieux que nous, monsieur le ministre, les créateurs – chanteurs, auteurs de théâtre, écrivains – que nous rencontrons râlent parce que leur rémunération ne leur semble pas juste. S'ils sont aussi nombreux à se plaindre, on peut tout de même se permettre de déposer un amendement pour faire en sorte que ce mode de rémunération soit plus juste, plus transparent et plus efficace.

De toute façon, puisque le xxie siècle qui commence sera celui de la régulation du Net, la rémunération que nous proposons depuis le départ verra sans doute le jour. Dès lors, autant rendre celle d'aujourd'hui plus juste pour que celle de demain soit non seulement efficace, mais également juste. Nous ne faisons pas de procès d'intention. Nous estimons que la porte qui a été ouverte est la mauvaise, alors que cet amendement permettrait d'améliorer l'existant et envisager l'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

(Le sous-amendement n° 899 n'est pas adopté.)

(Les amendements identiques nos 531 à 539 ne sont pas adoptés.)

(L'amendement n° 740 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je suis saisi d'un amendement n° 179 .

La parole est à Mme Martine Billard.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Cet amendement, qui s'inspire du dispositif en vigueur dans certains pays d'Europe du Nord, vise à offrir aux sociétés de perception et de répartition des droits la possibilité – qu'on ne me réponde donc pas qu'il s'agit de réintroduire la licence collective – d'adopter un système de licence collective étendue, lequel bénéficierait aux ayants droit associés qui le souhaitent, chacun d'entre eux pouvant refuser d'y participer. Il s'agit donc bien de créer, sur la base du volontariat, des possibilités de rémunération nouvelles.

J'ajoute que le rapporteur vient d'indiquer que les moyens de vérifier la diffusion des oeuvres dans le cadre de forfaits seraient améliorés. Aussi l'argument, souvent avancé par la majorité, selon lequel la licence collective ne peut pas être mise en oeuvre en raison de l'impossibilité de répartir les droits, tombe-t-il.

Dès lors, et puisque le dispositif que nous proposons est, je le répète, facultatif, je ne vois pas pourquoi vous refuseriez cet amendement. Je précise que si nous souhaitons l'inscrire dans la loi, c'est pour éviter qu'il ne fasse l'objet de recours, notamment au nom du respect de la concurrence.

Tel est le sens de cet amendement auquel, je l'espère, vous serez favorable, monsieur le ministre, puisque, encore une fois, il est fondé sur le volontariat et a pour objectif d'améliorer la rémunération des auteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Défavorable. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Nous sommes évidemment favorables à tout nouveau mode de financement de la création, mais laissons le ministre mener sa réflexion avant de nous engager plus avant dans ce type de propositions innovantes !

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Défavorable. Cet amendement n'est pas favorable aux titulaires de droits voisins. Il les prive du libre choix du mode de diffusion et de rémunération de leurs prestations en ligne.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Le mécanisme de licence collective étendue, comme le révèle le texte de l'amendement, prive en effet les producteurs et les artistes du plein exercice de leur droit de propriété, en particulier ceux qui ne sont pas associés des sociétés de gestion collective. Une société pourrait donc conclure un contrat avec des utilisateurs de l'oeuvre sans avoir recueilli l'accord préalable des artistes concernés, et ceux-ci n'auraient alors que la faculté de s'y opposer a posteriori.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Cette perte de contrôle risque de réduire les efforts des producteurs en vue de mettre en place des plateformes innovantes de diffusion, ainsi que les revenus des créateurs et des artistes.

Cet amendement n'est pas davantage favorable aux utilisateurs, puisqu'il compliquerait la délivrance des licences d'autorisation pour les nouveaux services en ligne, en instituant un régime propre aux services commerciaux. Les utilisateurs se verraient par ailleurs contraints, en cas d'opposition formulée par un artiste ou un producteur, de cesser toute exploitation, sous peine de voir leur responsabilité engagée et d'engager des négociations avec chaque titulaire de droits sur une base individuelle.

La gestion collective est, certes, un moyen de défense des intérêts des artistes, mais elle ne doit pas limiter la protection des intérêts des titulaires de droits voisins, qui doivent demeurer libres de décider de leur stratégie économique et du meilleur moyen de constituer de nouvelles offres légales au bénéfice du public, en particulier concernant les services en ligne, qui constituent le mode de distribution de l'avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le rapporteur, vous fûtes bref. Quant à vous, monsieur le ministre, vous fûtes inexact. Les plateformes actuelles seraient-elles illégales ? Il faut que vous nous le précisiez.

Il me semble que vous n'avez pas lu l'amendement. En effet, qu'est-il écrit ? « La licence collective étendue bénéficie à l'ensemble des ayants droit, associés ou non, de la société signataire. Les ayants droit peuvent s'opposer individuellement au bénéfice d'une licence collective étendue, pour tout ou partie de leurs oeuvres, phonogrammes ou vidéogrammes. Une fois ce droit notifié à la société ayant mis en oeuvre ladite licence, cette dernière s'engage à communiquer l'information dans le mois qui suit aux utilisateurs signataires de la licence collective étendue. Les utilisateurs s'engagent alors à ne plus diffuser, sous quarante-huit heures, les oeuvres en question ou à engager des négociations individualisées avec l'ayant droit concerné. »

Monsieur le ministre, que nous ne soyons pas d'accord, c'est une chose. Que vous fassiez dire à notre texte exactement le contraire de ce qu'il dit, c'est très étonnant de votre part. Si c'est ainsi que vous concevez le dialogue qui aura lieu après l'adoption de la loi, merci bien ! Vous pouvez nous dire que vous n'avez pas reçu d'instructions. De toute façon, elles sont inutiles, puisque vous tordez le cou aux propositions que nous faisons en faveur des internautes et des créateurs. Cette manière de faire, monsieur le ministre, n'est pas convenable.

(L'amendement n° 179 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je suis saisi d'un amendement n° 191 .

La parole est à Mme Martine Billard.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Cet amendement a trait au chapitre de la loi « DADVSI » concernant les mesures techniques de protection, également appelées DRM. Lorsque, au cours de l'examen du projet « DADVSI », nous nous sommes opposés à ces mesures, qui constituaient le noyau du texte, on nous a répondu que nous n'y comprenions rien, puisqu'elles représentaient la solution idéale qui permettrait de régler le problème des droits d'auteur et du piratage sur internet.

À l'époque, monsieur le ministre, de nombreux auteurs – plus nombreux encore que pour la loi HADOPI – avaient apporté leur soutien à ce projet de loi, ce qui n'a pas empêché le Conseil constitutionnel d'invalider un certain nombre de ses dispositions relatives aux DRM. Au reste, le modèle commercial qui se développe actuellement tend à délaisser les DRM, qui, comme nous l'avions dit à l'époque, empêchent les échanges en rendant les utilisateurs dépendants d'un certain type de matériel. L'histoire nous a donné raison.

Lorsque nous avons examiné le projet HADOPI, de nombreux artistes ont soutenu celui-ci avec autant d'enthousiasme qu'ils avaient soutenu le projet « DADVSI ». Or le Conseil constitutionnel a, une fois de plus, donné raison à l'opposition et à un certain nombre de députés de la majorité, qui avaient soulevé les risques d'inconstitutionnalité du dispositif – bien entendu, il ne s'est pas prononcé sur les problèmes d'applicabilité de la loi.

Monsieur le ministre, il serait donc utile d'écouter les députés et les internautes qui s'y connaissent en informatique…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Merci, madame Billard.

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

Défavorable. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Madame Billard, vous soulignez l'une des difficultés que pose notre code de la propriété intellectuelle, qui peine à concilier le droit de développer des mesures techniques de protection avec la nécessaire interopérabilité. C'est une des missions qui étaient dévolues à l'ARMT. Celle-ci devenant la HADOPI, c'est à cette dernière qu'il reviendra de veiller à l'interopérabilité des dispositifs.

Par ailleurs, votre amendement est contraire à la directive 200129CE et à la décision du Conseil constitutionnel du 27 juillet 2006. En effet, la législation communautaire prévoit une protection juridique des mesures techniques de protection – les DRM –, même lorsque celles-ci ne sont pas interopérables. Si la loi protège le statut des DRM, elle n'oblige pas les ayants droit à y recourir, pas plus qu'elle ne le leur interdit.

L'interopérabilité sera garantie par la HADOPI, au même titre que le faisait l'ARMT, même si, encore une fois, il est difficile d'arbitrer entre la protection des mesures techniques de protection et l'interopérabilité.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

L'avis du Gouvernement est défavorable. L'amendement proposé est en effet incompatible avec les obligations communautaires de la France, puisque la directive de 2001 sur le droit d'auteur impose aux États membres de protéger les mesures techniques de protection des oeuvres. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 27 juillet 2006 sur la loi du 1er août 2006, dite « loi DADVSI », a jugé que le législateur ne pouvait imposer aux auteurs la suppression de telles protections. Bien entendu, la directive précitée ne contraint pas les producteurs à mettre en place de telles mesures techniques. À cet égard, vous n'êtes pas sans savoir que la quasi totalité de l'offre de musique téléchargeable à l'acte était disponible sans verrou pour les internautes avant même le vote définitif de la loi « Création et Internet », grâce, déjà, aux accords de l'Élysée.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Non, ce n'est pas grâce aux accords de l'Élysée !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

C'est du storytelling. Vous réécrivez l'histoire !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Patrick Bloche pour une courte intervention, à titre exceptionnel – car, en principe, seule une prise de parole contre l'amendement serait de droit.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Je vous remercie de me donner la parole, monsieur le président. Comme vous avez pu le constater, jusqu'à présent nous ne sommes pas intervenus de manière abusive. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Je trouve un peu « culotté » de la part du ministre d'invoquer l'Union européenne et sa législation pour repousser l'excellent amendement présenté par Mme Billard, alors même que, durant la discussion de la loi HADOPI, le Gouvernement a tenu le discours contraire : lorsque nous faisions référence à des rapports ou des amendements adoptés à la quasi-unanimité par le Parlement européen – je pense notamment à l'amendement Bono, dont l'adoption à 88 % a été confirmée lors d'un second vote –, on nous répondait que cela ne comptait pas et qu'il n'y avait pas lieu de s'y attarder ! Le Conseil constitutionnel s'est, lui, intéressé à l'amendement Bono au moment de rendre sa décision du 10 juin dernier, puisqu'il en a même fait le fondement de sa décision.

Je trouve un peu facile de jouer sur les deux tableaux comme vous le faites, appelant l'Europe à la rescousse lorsque vous en avez besoin et l'oubliant quand cela vous arrange.

(L'amendement n° 191 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je suis saisi d'un amendement n° 258 .

La parole est à Mme Martine Billard.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

L'amendement a pour objet de supprimer le troisième alinéa de l'article L.331-7 du code de la propriété intellectuelle. À notre sens, cet alinéa portant sur la protection des DRM porte atteinte au droit d'auteur.

En effet, l'auteur du logiciel qu'est un DRM possède des droits. Tel qu'il est rédigé, l'alinéa permet de refuser que le DRM soit interopérable, même si l'auteur veut qu'il le soit. Or, le droit d'auteur sur un logiciel de DRM est un droit d'auteur à part entière, qui n'a pas à être restreint.

Le débat va d'ailleurs se poser dans les mêmes termes au sujet des logiciels de sécurisation de la connexion internet – indépendamment du principe même de ces logiciels. Nous avions demandé, lors du débat sur HADOPI, si ces logiciels seraient interopérables, mais nous n'avons pas obtenu de réponse. Comment les internautes utilisant des logiciels libres vont-ils faire si les codes source de ces logiciels ne peuvent pas être rendus publics ? Cela empêcherait une partie de nos concitoyens de répondre à l'obligation de sécurisation et introduirait donc une discrimination devant la loi entre ceux qui achèteront des logiciels de sécurisation commercialisés par les développeurs habituels et ceux qui, utilisant des logiciels libres, se trouveront dans l'impossibilité de respecter l'obligation à nouveau introduite par HADOPI 2.

Comme vous le voyez, cet amendement a une portée assez large et se trouve, notamment, porteur d'implications pour l'avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

La commission est défavorable à cet amendement qui, s'il était adopté, priverait la HADOPI de l'un de ses moyens les plus efficaces pour assurer l'interopérabilité des DRM…

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Riester

…avec les supports de lecture d'oeuvres ou d'objets protégés. Par attachement à cette notion d'interopérabilité, la commission défend le maintien des dispositions de l'actuel article L.331-7 du code de la propriété intellectuelle.

J'ajoute que le Conseil constitutionnel, lors de sa décision du 27 juillet 2006, n'a rien trouvé à redire à cette disposition.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Vous ne serez sans doute pas étonnés d'entendre que je suis défavorable à cet amendement, pour les raisons que M. le rapporteur vient d'exposer. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Nous n'avons pas bien compris, pourriez-vous nous les répéter ?

(L'amendement n° 258 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi relatif à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet (1841).

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma