Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Séance en hémicycle du 19 juin 2008 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • généraliste
  • hospitalier
  • hôpital
  • médecin
  • médecine
  • patient
  • prévention
  • sanitaire

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

L'ordre du jour appelle le débat sur l'organisation du système de santé en France.

L'organisation de ce débat ayant été demandée par le groupe de l'Union pour un mouvement populaire, la parole est au premier orateur de ce groupe, M. Jean-Marie Rolland, pour cinq minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Rolland

Monsieur le président, madame la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative, mes chers collègues, notre système de santé garantit à chaque Français un très haut niveau de protection sociale. Ce système, tout à fait original, repose sur un équilibre unique : il privilégie à la fois une prise en charge collective du risque et le libre choix du médecin par le patient. Ce modèle fondé sur la solidarité, nous pouvons – nous devons – collectivement en être fiers : il garantit à la très grande majorité de nos concitoyens l'accès à des soins de qualité, mais aussi au progrès médical.

Ce système a fait la preuve de son efficacité. Les résultats sont là. L'assurance maladie prend en charge 78 % des dépenses, voire plus de 90 % pour les patients en ALD : c'est le taux le plus élevé d'Europe et l'un des plus élevés du monde. Notre pays dispose d'un taux de professionnels de santé par habitant parmi les plus importants et d'un maillage dense du territoire en termes d'établissements hospitaliers. À 80,3 ans, l'espérance de vie des Français est supérieure de deux ans à celle de la moyenne des pays de l'OCDE ; de 1960 à 2004, cette espérance de vie s'est accrue de dix ans.

Faut-il pour autant se contenter de ce satisfecit ? Non, bien entendu. Notre système connaît des fragilités croissantes : fragilités sanitaires, fragilités sociales et territoriales, fragilités financières, auxquelles s'ajoute la nécessité de s'adapter.

Je citerai quelques-unes des plus évidentes de ces fragilités : l'apparition de déserts médicaux dans les zones rurales, mais aussi péri-urbaines ; l'augmentation des dépassements d'honoraires qui limitent l'accès aux soins pour certains de nos concitoyens ; l'engorgement des urgences médicales qui désorganise toute la chaîne de soins ; les faiblesses de notre système de prévention qui font, par exemple, que la mortalité prématurée reste, en France, l'une des plus élevées de l'Union européenne.

Notre système de santé doit aussi répondre aux nouveaux besoins de la vieillesse et de la dépendance : d'ici à 2015, le nombre de personnes âgées de plus de quatre-vingt-cinq ans passera de 1,3 million à 2 millions.

Enfin, et malgré la réforme de 2004, le déficit de nos comptes sociaux reste préoccupant, d'autant plus que la hausse des dépenses de santé est une tendance de fond et qu'elle est supérieure à l'évolution du produit intérieur brut.

Pour rester un des meilleurs du monde, notre système de santé doit relever ces défis, consolider et amplifier les résultats obtenus avec la réforme de 2004. C'est pourquoi le Président de la République a souhaité engager une réforme d'ensemble de notre système de santé, et en particulier de l'offre de soins. Il a défini le cap, les orientations stratégiques, dans plusieurs discours fondateurs : en septembre 2007 devant l'Association des journalistes de l'information sociale, à Bordeaux en octobre 2007 ou encore à Neufchâteau, en avril dernier, pour l'hôpital.

Depuis un an, madame la ministre, vous avez écouté, consulté, réfléchi, pour et avec les acteurs de notre système de santé – professionnels, industriels, usagers. Les états généraux de l'organisation de la santé, qui se sont tenus à Paris et en province, ont été un temps fort pour évoquer avec les professionnels de santé leurs difficultés et leurs attentes, que ce soit en termes de modes d'exercice ou de rémunération.

De très nombreuses contributions sont aussi venues alimenter votre réflexion, dont certaines, essentielles, sont issues des travaux de nos collègues : le rapport de la mission d'information parlementaire sur les agences régionales de santé, conduite par Yves Bur, et celui, sur les inégalités territoriales, que vous a remis André Flajolet. Je me dois aussi de citer le rapport du préfet Ritter sur les ARS et celui, unanimement salué, de Gérard Larcher sur les missions de l'hôpital.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Il faut se méfier de ce qui est unanimement salué !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Rolland

À ce stade de la concertation, il paraît important que notre assemblée soit pleinement associée à cette réforme très attendue sur le terrain. C'est pourquoi le groupe UMP a souhaité inscrire, dans le cadre de ses séances d'initiative parlementaire, ce débat sur l'organisation de notre système de santé. Il doit nous permettre de préparer, sur ce sujet comme sur d'autres, la coproduction législative chère au président de notre groupe et, au-delà, à tous les membres de cette assemblée.

Ce débat est non seulement utile, mais indispensable. L'intérêt qu'il a suscité au sein de notre groupe montre toute l'attention que les membres de notre assemblée portent à la politique de santé. Il renvoie à une problématique générale, souvent évoquée dans nos circonscriptions : comment assurer un égal accès de tous à des soins de qualité sur l'ensemble du territoire ? Cela se traduit par des questions très concrètes : comment assurer la permanence des soins ? Comment pallier la pénurie de médecins sur un territoire ? Comment répondre au phénomène de files d'attente à l'hôpital ? Comment répondre à l'isolement, parfois à l'épuisement des professionnels de santé ?

D'ores et déjà, madame la ministre, vous avez indiqué la philosophie générale et l'architecture de cette réforme de notre système de santé. Elle doit se traduire par l'examen à l'automne du projet de loi « Patients, santé et territoires », qui s'articulera autour de quatre volets : un volet « santé publique », qui doit permettre de mettre en place une véritable politique de prévention dans notre pays – je pense notamment à la santé des jeunes et à celle des femmes – ; un volet « établissements de santé », qui engage la réforme de l'hôpital public ; un volet « agences régionales de santé », clé de voûte du dispositif, qui a fait l'objet de développements importants lors du troisième conseil de modernisation des politiques publiques du 11 juin dernier ; enfin, un volet « accès de tous à des soins de qualité ». Ce dernier volet me semble essentiel. Il renvoie à l'indispensable réforme de l'offre de soins de premier recours sur laquelle je veux dire un mot pour terminer.

Mon expérience de médecin généraliste de campagne me montre combien il est urgent de réorganiser notre chaîne de soins et de proposer à nos concitoyens, en ville comme à l'hôpital, des réponses graduées. Les urgences hospitalières, par exemple, constituent encore souvent un goulet d'étranglement dans la filière de soins. Le nombre de passages dans ces services a doublé entre 1990 et 2004. Il est important d'assurer par la réforme une meilleure reconnaissance des missions des médecins généralistes. La réforme de 2004, qui en a fait un pivot du système de soins, a constitué une avancée, mais elle n'est pas suffisante. C'est, je crois, un aspect essentiel de la réforme.

Au-delà de ce sujet qui me tient à coeur, diverses questions sont posées, sur lesquelles nous souhaitons, madame la ministre, que vous puissiez nous faire part de l'avancement de votre réflexion. Ainsi, pourriez-vous nous éclairer sur la gouvernance des ARS, dont il a été beaucoup question au cours des derniers mois ? À qui en sera confiée la présidence, la direction générale ? Quelles garanties seront apportées au secteur médico-social, qui craint d'être noyé dans le sanitaire ? Comment rassurer les fonctionnaires des actuelles DDASS et DRASS sur cette réforme aussi indispensable qu'ambitieuse ? Surtout, quelles garanties pouvez-vous nous donner que la gestion du risque, conduite avec un certain succès par l'assurance maladie, sera accentuée, en particulier à l'hôpital ?

Notre collègue Jean Leonetti parlera beaucoup plus longuement de l'hôpital tout à l'heure. Pourriez-vous nous indiquer l'état d'avancement des négociations conventionnelles bipartites entre l'UNCAM et les syndicats de médecins sur la démographie médicale, sur les dépassements d'honoraires, sur le très attendu secteur optionnel ?

Pierre Morange évoquera, quant à lui, la réforme de l'organisation de notre système. Il nous faudra en effet réfléchir à son financement : le récent avis du comité d'alerte, qui chiffre le dépassement de l'ONDAM entre 500 et 900 millions d'euros, souligne l'urgence de cette réflexion.

Comme vous pouvez le constater, madame la ministre, la réforme est attendue avec impatience par les acteurs de terrain, qu'ils soient professionnels de santé ou simples usagers du système de santé. Elle devra libérer et encourager les initiatives innovantes, garantir à tous la qualité des soins et le respect des principes de solidarité et de responsabilité auxquels nous sommes attachés, et, surtout, redonner confiance à ceux qui peuvent avoir des doutes. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Mes chers collègues, j'ai laissé M. Rolland parler plus longtemps qu'il ne l'aurait dû, mais, les orateurs inscrits dans le débat étant nombreux, je ne pourrai pas faire preuve chaque fois de la même tolérance. Moi-même, je prendrai tout à l'heure la parole dans ce débat et j'espère que me sera appliquée la même règle.

Chacun doit respecter son temps de parole : mettons-nous d'accord sur cette règle.

Pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, la parole est à Mme Catherine Lemorton, pour cinq minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le présent débat sur l'offre de soins ne pouvait laisser de côté le cas des franchises médicales qui, quoi qu'en dise le Gouvernement, constituent le symbole de sa volonté de démanteler notre système de solidarité nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Commençons par un rappel : ces franchises ne sont pas isolées dans une masse de propositions positives et efficaces. Elles s'inscrivent au contraire dans un plan déjà bien établi qui, depuis 2004, s'appuie en partie sur les malades pour financer la protection sociale : déremboursement des médicaments dits de confort, participation forfaitaire pour chaque visite chez le médecin ou chaque acte paramédical, forfait de 18 euros pour tout acte d'un montant supérieur à 91 euros, dossier médical personnalisé coûteux pour la collectivité et qui, jusqu'à présent, s'apparente surtout à une usine à gaz – encore une belle idée de M. Douste-Blazy !

C'est un inventaire à la Prévert de vos actes négatifs que nous pourrions établir. Les nouvelles franchises médicales en sont aujourd'hui une autre preuve. Injustes, inacceptables, irresponsables, elles mettent en place le négatif des propos qu'avaient tenus les ministres lorsqu'ils les avaient présentées. Ainsi, lorsqu'on entend : « responsabilisation des assurés », « promotion de notre système par répartition », « renforcement du système de solidarité nationale », il faut en fait comprendre : « démantèlement du système français », « instauration d'un modèle individualisé de type anglo-saxon », « culpabilisation des malades et des assurés sociaux ». (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

La seule franchise qui nous aurait intéressés, c'est celle qu'aurait dû avoir le Gouvernement pour avouer son véritable dessein. Comment expliquer aux bénéficiaires du minimum vieillesse, des allocations aux adultes handicapés,…

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

…aux accidentés du travail, aux personnes atteintes de maladies professionnelles, la mise en place de ces coûts supplémentaires ? Comment cette mesure va-t-elle responsabiliser – puisque, décidément, ce terme vous est cher – les 13 % de Français qui se privent déjà de soins par manque d'argent ? Comment accepter l'argument cynique, mais qui constitue pourtant votre caution de justice sociale, de l'exonération de ces franchises pour les bénéficiaires de la CMU quand on connaît les difficultés qu'ils éprouvent déjà, avec le refus de prise en charge par certains médecins, l'impossibilité de payer les dépassements d'honoraires, qui représentent tout de même 2 milliards d'euros sur les 19 milliards d'honoraires perçus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Injustes, irresponsables, inacceptables, ces franchises sont également impossibles à analyser pour l'instant. Aucune étude crédible n'ayant encore été menée, on croit rêver lorsqu'on entend de hauts responsables évoquer, début mai, un « effet franchises » positif pour justifier une baisse de la consommation des médicaments. La raison devrait inciter ces responsables à patienter plutôt qu'à s'en remettre à la méthode Coué.

D'autant plus que de vraies questions pourraient aussi exciter leur sagacité : combien d'autres de nos concitoyens, en plus des 13 % déjà évoqués, vont se priver de soins faute de pouvoir payer ? Où est la responsabilité du patient dans la quantité et le coût des médicaments prescrits, alors que, me semble-t-il, c'est toujours le médecin qui prescrit les médicaments et signe les ordonnances ? Pourquoi un tel renversement de charge ?

L'automédication est encore un des sujets sensibles évacués par le Gouvernement. Une fois de plus, madame la ministre, vous employez le mot quasi mystique de « responsabilisation ». En responsabilisant les patients, qui pourront accéder librement à des médicaments, vous instituez un formidable paradoxe : d'un côté, les médicaments remboursés que les Français consomment trop ; de l'autre, l'accès facilité – donc la surconsommation – pour les médicaments déremboursés.

Pour augmenter l'automédication, il faudrait préalablement mener une véritable politique d'information, d'éducation thérapeutique, indépendante et transparente, ce que le Gouvernement ne semble pas disposé à faire.

Qui se cache donc derrière le libre accès ? Allons-nous voir le libre accès se transformer rapidement en libre-service ? Les intérêts de grands groupes économiques privés vont-ils prendre le pas sur la santé de nos concitoyens ? Ces questions méritent des réponses claires, franches, sans démagogie. Car – soyons honnêtes – la récente campagne d'une chaîne d'hypermarchés n'est pas de nature à nous rassurer.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

On risque d'accentuer les inégalités sociales et territoriales dans l'accès à l'automédication.

Est-il juste de dérembourser des classes thérapeutiques entières sans alternatives remboursables ? Notre Président de la République, si prompt à regarder de l'autre côté de l'Atlantique, serait bien avisé de s'emparer des thèmes évoqués dans le débat présidentiel américain.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Caricature !

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Écoutez, parce qu'on va droit dans le mur.

S'y pose en effet la question de l'accès aux soins de 50 millions d'Américains sans couverture sociale et l'on se demande si l'automédication, responsable de centaines de milliers d'accidents iatrogéniques, ne doit pas être remise en cause ?

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Lemorton

Au lieu de s'interroger sur ces saines questions, ce gouvernement n'agit que pour l'application d'une politique fondée sur la réalisation d'économies, au détriment des assurés malades, et sans aucune visée de santé publique.

Cette politique va à rencontre de la bonne santé de nos concitoyens. Comptez donc sur les députés du groupe SRC pour la dénoncer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Nous sommes en progrès, mais nous n'avons pas encore atteint l'objectif de respect du temps de parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Si personne n'interrompait les orateurs, évidemment, nous irions beaucoup plus vite. (Sourires.)

Pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, la parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour quinze minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, lorsque l'on interroge les Français sur leurs préoccupations, leurs attentes et leurs priorités, ils placent immédiatement derrière la lutte contre le chômage, la préservation de leur système de santé et de protection sociale. C'est dire s'ils y sont attachés.

Ce système, hérité du Conseil national de la Résistance, révolutionnaire lors de sa mise en place au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, garde toute sa pertinence aujourd'hui, en termes tant de solidarité, d'équité que d'efficacité.

En termes de solidarité, d'abord, puisque chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins.

En termes d'équité, ensuite, car, jusqu'ici, la France était un pays dans lequel les citoyens, quelle que soit leur région, bénéficiaient de soins de qualité et pouvaient y accéder quel que soit leur milieu social ou leur statut, qu'ils aient ou non la nationalité française, qu'ils aient ou non des papiers « en règle ».

En termes d'efficacité, enfin, puisque dans notre pays, l'espérance de vie est l'une des plus élevées du monde et le taux de mortalité infantile l'un des plus bas, alors que le montant des dépenses de santé par rapport au PIB reste très raisonnable, autour de 11 %, comparable à celui d'un pays comme l'Allemagne, et en tout état de cause nettement moins élevé qu'aux États-Unis, eldorado du libéralisme et des assurances privées. Les États-Unis consacrent en effet 14 % de leur PIB aux dépenses de santé, pour des résultats très modestes, puisque 42 millions d'Américains, soit près de 15 % de la population, sont sans aucune assurance maladie, que l'espérance de vie y est très inférieure à la nôtre et le taux de mortalité infantile deux fois plus élevé.

Pour autant, ces observations ne signifient pas que notre système est sans faille et qu'il ne mérite pas d'être revisité dans le but d'être amélioré et modernisé.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

C'est déjà un point positif !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Il s'agit d'en conserver les fondamentaux pour les adapter à la société d'aujourd'hui…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Très bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

…afin de préserver ses caractéristiques essentielles, c'est-à-dire la solidarité, l'équité et l'efficacité, auxquelles nos concitoyens sont à juste titre si attachés.

Malheureusement, c'est pratiquement, point par point, le contraire de toutes les dispositions que vous prenez.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Voilà que ça dérape !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Avec la mise en place des franchises médicales (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), qui sont venues s'ajouter au forfait hospitalier, à la participation forfaitaire de 1 euro, au ticket modérateur, au forfait de 18 euros pour les actes de plus de 98 euros, sans compter les déremboursements de médicaments, vous pénalisez les plus modestes jusqu'à empêcher leur accès aux soins.

Avec la mise en place de la tarification à l'activité et l'alignement du mode de fonctionnement des hôpitaux publics sur le privé, vous aggravez la situation financière des hôpitaux publics, dont les déficits cumulés ont atteint l'an dernier 800 millions d'euros.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Non : 500 millions d'euros !

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Il est vrai que 300 millions, ce n'est rien !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Peut-être êtes-vous satisfaite d'avoir 500 millions d'euros de déficit. Mais moi, cela ne me satisfait pas.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Non, je ne suis pas satisfaite. Mais ce n'est pas la peine de donner un chiffre faux !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Pendant ce temps prospèrent les cliniques privées, dont le chiffre d'affaires augmente autour de 8 % par an de façon constante depuis bien des années, permettant à certaines d'entre elles, comme la Générale de santé, d'arroser leurs actionnaires de dividendes exceptionnels. Vous fermez maternités et hôpitaux de proximité, provoquant de véritables déserts médicaux où les praticiens ne peuvent pas exercer sereinement leur profession.

Cette philosophie de la rentabilité à tout prix pousse les établissements hospitaliers à privatiser certaines de leurs prestations.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Comme si faire le ménage dans un hôpital ou servir des repas tenant compte des régimes selon les pathologies et les traitements en cours relevait d'un banal service.

L'absence de personnel formé pour ces activités spécifiques en milieu hospitalier conduit à une baisse de la qualité de prise en charge, et même, parfois, à des erreurs qui peuvent être graves.

Avec la pénurie de médecins, dont personne ne peut sérieusement soutenir qu'elle n'était pas prévisible car la science statistique est enseignée depuis longtemps dans notre pays, vous accentuez les inégalités territoriales d'accès aux soins.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vitel

La pénurie était également prévisible quand vous étiez au pouvoir !

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Il y a six ans, vous étiez au pouvoir !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Et ces inégalités sont encore aggravées par le retard pris et maintenu de la filière de formation des médecins généralistes.

Car, si nous saluons tous ici, dans une belle unanimité, leur place et leur rôle essentiel, force est de constater que les moyens financiers permettant des évolutions concrètes significatives ne sont pas au rendez-vous.

Au lieu de traiter le problème dans toute sa dimension, les mesurettes concoctées en petits comités à l'ombre des ministères non seulement sont inefficaces, mais aboutissent à des gâchis. Je vise les 8,3 millions dépensés l'an dernier pour soi-disant favoriser la démographie médicale dans certains secteurs sous-dotés et qui ont abouti à l'installation de quinze nouveaux médecins ! Un rapport coût-efficacité pour le moins discutable.

Toutes les modifications de financement de notre système de protection sociale que vous mettez en place conduisent à l'accentuation de l'étatisation et de l'iniquité, qu'il s'agisse du financement par l'impôt – avec la CSG qui fait contribuer au même niveau tous les citoyens, y compris les plus modestes puisque les retraités et les smicards, par exemple, n'en sont pas exonérés, à la différence des sportifs de haut niveau et des bénéficiaires de stock-options et d'attributions d'actions gratuites – ou des exonérations de cotisations sociales patronales,…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Ah ! je me demandais si on allait y arriver.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

…qui n'ont pas prouvé leur efficacité et qui ne sont donc rien d'autres que des cadeaux au patronat – 28,7 milliards d'euros en 2007, 32,4 milliards cette année, soit une progression de 12,9 %.

À cette liste des cadeaux aux amis, il faut ajouter le refus persistant de faire contribuer les revenus des placements financiers des plus aisés de ce pays.

C'est à croire que ceux-là, contrairement aux praticiens, aux patients, aux chômeurs et à tant d'autres, n'ont pas besoin d'être « responsabilisés » !

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Avec vous, c'est sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Toutes ces mesures ne sont pas seulement inéquitables, ce qui est déjà beaucoup, mais elles privent au surplus les caisses de la sécurité sociale de ressources précieuses.

Finalement, on peut dire sans exagération que vous cultivez le déficit des comptes sociaux pour mieux mettre à mal notre système.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Ce n'est pas possible d'entendre des chose pareilles !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Vous vous en servez en les dramatisant auprès de nos concitoyens pour leur faire accepter vos choix de fond, qui consistent à livrer les dépenses de santé aux assurances et, plus largement, au secteur privé.

Nous pourrions pourtant, dans un pays comme la France, faire le choix de garder les principes de fond du système solidaire plutôt que de les brader sur l'autel de la finance. Nous sommes dans un pays qui a les moyens de les financer, à condition bien sûr d'en avoir la volonté et le courage politique.

La question du financement est évidemment au coeur du débat.

D'abord, il faudrait en finir avec les exonérations de cotisations sociales patronales, que la dernière loi de finances a évaluées à 32 milliards d'euros alors que, je le répète, elles n'ont pas prouvé leur efficacité.

Ensuite, et dans un souci d'équité, on pourrait mettre à contribution les revenus des placements financiers. S'ils étaient taxés au même taux que les salaires, ils rapporteraient près de 20 milliards par an à la sécurité sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Cela permettrait aussi de revaloriser le travail, un souhait qui semblait être cher à notre Chef de l'État.

On pourrait également valoriser le travail en modulant l'assiette des cotisations sociales patronales. Quand on pense qu'aujourd'hui les entreprises qui embauchent, qui créent de l'emploi et contribuent à la lutte contre le chômage, paient davantage de cotisations que celles qui licencient pour augmenter leur rentabilité financière, on se dit que quelque chose ne va pas !

Nous proposons depuis longtemps d'inverser cette politique, en allégeant la cotisation des entreprises qui embauchent, qui augmentent les salaires versés à leurs employés, et en pénalisant celles qui, bien qu'en bonne santé, licencient pour enrichir leurs actionnaires.

Concernant les hôpitaux, il est nécessaire de revenir sur la généralisation de la T2A, qui pousse au développement des seules activités lucratives et aboutit à creuser un peu plus le déficit des centres hospitaliers.

Par ailleurs, les hôpitaux sont soumis à des obligations de service public, comme les urgences, la permanence des soins et l'accueil de tous, ou la formation des futurs médecins, mais également de tous les personnels soignants.

Or ces missions ne sont pas suffisamment prises en compte par les enveloppes prévues à cet effet, je vise les MIGAC et les MERRI, les missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation et les missions d'enseignement, de recherche, de référence et d'innovation, qui sont nettement insuffisantes, et dont la Fédération hospitalière de France demande qu'elles soient revalorisées.

Enfin, concernant les professionnels de santé, il y a urgence à revoir les conditions de leur formation, le contenu de leurs activités et leur mode de rémunération.

Les infirmières tout d'abord, qui réclament depuis des années une revalorisation de leur profession, avec l'intégration de leurs études dans le cursus européen licence-master-doctorat. Cela serait légitime, puisque leurs études durent trois ans et demi et qu'elles ne sont valorisées qu'au niveau d'un bac plus 2.

Il y a un an, lors de l'examen du projet de loi relatif aux libertés des universités, vous aviez promis, madame la ministre, par l'intermédiaire de votre collègue Mme Pecresse, l'organisation d'une concertation sur cette demande. J'aimerais que vous nous précisiez où nous en sommes. L'intégration des infirmières et des sages-femmes dans le cursus LMD est-elle toujours d'actualité, et, si oui, selon quelle échéance ?

Quant aux médecins, il est indispensable et urgent de dégager des moyens suffisants pour permettre un enseignement de la spécialité de médecine générale au même niveau que les autres spécialités. Force est de constater malheureusement que les actes n'ont pas été à la hauteur des promesses formulées, puisque seuls huit nouveaux postes d'enseignant de médecine générale ont été créés en 2008.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Il ne suffit pas de saluer, comme je l'ai si souvent entendu ici, le médecin généraliste pour son rôle essentiel d'orientation et d'appréhension du patient dans sa globalité.

Il faut lui donner les moyens d'exercer dans de bonnes conditions et dans toutes les régions du pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Pivot de notre système de santé, il est le véritable coordinateur du parcours de soins. Son mode de rémunération devrait en tenir compte.

Ainsi, plutôt que d'autoriser sans limite les dépassements d'honoraires, qui ont doublé en quinze ans selon un rapport de l'IGAS publié l'an dernier, pour une somme de 2 milliards d'euros sur les 19 milliards d'honoraires perçus, deux tiers de ces dépassements restant à la charge des patients après l'intervention des mutuelles, il serait plus efficace de réfléchir avec la profession à d'autres modalités de rémunération que le seul paiement à l'acte, de surcroît peu valorisé.

De ce point de vue, la conception qui présidait à l'option médecin référent, dont je regrette vivement la suppression, était intéressante.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Elle n'intéressait pas les médecins !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Elle permettait, à côté du paiement à l'acte, de dédommager de manière forfaitaire le médecin pour des activités qui ne sont actuellement pas prises en compte.

J'étais la semaine dernière à un colloque organisé par Espace généraliste. J'y ai entendu des pistes de réflexion et des propositions très pertinentes. Il est dommage que le ministère de la santé et l'UNCAM n'aient pas jugé utile de participer à cette rencontre.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Nous voyons des représentants d'Espace généraliste tous les mois !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

Rémunérer le temps consacré par les médecins à l'élaboration des dossiers, au suivi des patients, à la prévention et à l'éducation à la santé est à la fois juste et nécessaire. Nous lançons un plan de lutte contre l'obésité, mais, si les médecins n'ont ni le temps ni les moyens de s'en occuper, il ne pourra pas aboutir. Ces nouvelles formes de rémunération existent dans la plupart des pays développés. Aux États-Unis, dans le temple de la médecine libérale, le paiement à l'acte ne représente plus qu'un tiers de la rémunération des généralistes.

Telles sont, madame la ministre, mes chers collègues, nos propositions…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Il n'y en a pas beaucoup !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Fraysse

…pour moderniser notre système de santé tout en préservant ses qualités de solidarité, d'équité et d'efficacité. Elles réclament de l'audace. Elles réclament surtout une volonté politique. Contrairement à tous les beaux discours sans cesse répétés, vos choix et les mesures qui en découlent visent non pas à faire baisser les dépenses de santé, mais à permettre aux assurances privées et aux marchés financiers de mettre la main sur les 11 % de PIB que les Français consacrent à leur santé.

Cette situation est de plus en plus visible et comprise par nos concitoyens, au point que les médecins libéraux eux-mêmes ont récemment fait circuler une pétition pour « protéger le secteur de la santé des appétits financiers ». C'est dire combien, au-delà de leurs différences, ils tiennent, eux aussi, à une certaines éthique de leur profession. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Pour le groupe Nouveau Centre, la parole est à M. Jean-Luc Préel, pour quinze minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Préel

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la santé est l'une des préoccupations majeures des Français. Si nous sommes encore bons pour le curatif, nous sommes toujours très médiocres pour la prévention et l'éducation à la santé. Des progrès sont donc absolument nécessaires dans ces domaines.

Il faut améliorer notre système de santé en prenant en compte tous les facteurs contribuant à l'équilibre, au bien-être de la personne, à son intégration épanouie dans la société. Nous devons donc veiller à l'environnement, à l'éducation à la santé et à la prévention.

Notre système de soins connaît aujourd'hui une grave crise organisationnelle, morale et financière. Notre devoir est de veiller à permettre l'égal accès de tous à des soins de qualité sur l'ensemble du territoire dans le cadre d'un financement solidaire.

Or, aujourd'hui, nous sommes inquiets. En effet, il existe des inégalités très fortes en termes d'accès aux soins sur le territoire avec des zones dépourvues de médecins généralistes ou de spécialistes de secteur 1. Il est, hélas ! préférable d'avoir un bon carnet d'adresses si l'on souhaite être pris en charge rapidement par un professionnel compétent.

Je ne m'étendrai pas sur la description de la situation qui est connue de tous et a fait l'objet de nombreux colloques, de nombreux rapports.

Nous devons essayer d'améliorer notre système de santé. Madame la ministre, vous préparez un projet de loi qui devrait être débattu à l'automne. Ce texte, outre des mesures sur la sécurité sanitaire et la biologie, traiterait essentiellement de l'organisation du système, des établissements de santé, de la médecine ambulatoire, y compris notamment la démographie et la permanence des soins.

L'organisation du système de santé n'est bien entendu pas une fin en soi, mais une bonne organisation est nécessaire. Cette réforme conduit à la création des agences régionales de santé. Pour défendre cette idée depuis de très nombreuses années, je m'y rallie bien volontiers.

Le but à ne pas perdre de vue est d'avoir un seul responsable de la santé au niveau régional. C'est l'objectif afin de remédier à quatre absurdités : la séparation soins et prévention, qui a été aggravée par la création des GRSP, la séparation entre ville et hôpital, la séparation entre sanitaire et médico-social, la non-fongibilité des enveloppes.

De plus, la création de l'ARS ne doit pas conduire à une structure supplémentaire. Elle doit, dans le même temps, permettre de supprimer tous les doublons et les structures devenues obsolètes.

Le périmètre de l'ARS fait, semble-t-il l'objet d'un quasi-consensus. L'agence doit couvrir l'ensemble du soin, c'est-à-dire supprimer la coupure incompréhensible entre les établissements et la médecine de ville permettant de prendre en compte l'accès aux soins, la permanence, les urgences, les réseaux, les prescriptions hospitalières.

L'agence doit comprendre la prévention et l'éducation à la santé, parent pauvre de notre système de santé, car la séparation actuelle entre prévention et soin est absurde. Un médecin, au cours d'une consultation, fait du soin, de la prévention et de l'éducation. Il faudra veiller à un financement accru et pérenne de ces actions de prévention.

L'agence doit avoir la responsabilité du volet sanitaire du médico-social, notamment celui concernant les personnes âgées. Il n'est pas possible de séparer le financement des services de soins à domicile, des cantous, des services de longue durée. La nécessité de filières gériatriques est urgente : accueil aux urgences, services spécialisés, lits d'aval, cantous, etc.

Je me permets d'insister sur la nécessité d'inclure la formation des professionnels de santé dans la compétence des ARS. Nous connaissons des problèmes démographiques en raison notamment d'un manque d'anticipation, d'une non-prise en compte des besoins au niveau régional. Or, de 80 % à 85 % des professionnels restent dans la région où ils ont été formés.

Il est souhaitable de mettre en place un numerus clausus régional par spécialité en s'appuyant sur les travaux d'observatoires régionaux de santé renforcés, qui définiront les besoins pour chaque spécialité pour les dix prochaines années, temps de formation d'un médecin.

Enfin, il est nécessaire que le Parlement vote des ORDAM sur des critères objectifs pour aboutir à la fongibilité des enveloppes.

Cependant, quatre problèmes demeurent : la place de l'assurance maladie, la « démocratie sanitaire », le bouclage national et la suppression des structures doublons.

S'agissant de la place de l'assurance maladie, la réforme Juppé permet au Parlement de débattre de l'ONDAM, c'est-à-dire des seules dépenses remboursables par le régime général, laissant de côté l'accès aux soins sur le territoire, les dépenses prises en charge par les complémentaires, le reste à charge, la prévention et l'éducation à la santé. La place de l'assurance maladie dans la santé est donc très partielle.

La réforme de 2004 a étatisé l'assurance maladie. Elle n'est plus gérée par les partenaires sociaux – l'a-t-elle d'ailleurs jamais été ? Le directeur général a les pleins pouvoirs pour gérer l'ONDAM qui lui est confié par le Parlement – ou par le Gouvernement ! Quelle est la légitimité de l'assurance maladie ? N'est-elle pas une agence atypique ?

Il est nécessaire de confier le contrôle médical pour la ville et l'hôpital aux ARS. Sinon, quel serait leur pouvoir ? Elles doivent également disposer de l'informatique pour connaître l'activité indispensable à l'organisation des soins. Un vrai INSEE de la santé régionalisé serait une excellente solution pour recueillir les données et les fournir aux personnes et aux organismes intéressés. L'assurance maladie garderait le rôle de remboursement – rôle qu'elle tient parfaitement.

Le deuxième problème est celui de la démocratie sanitaire. Le directeur de l'ARS ne doit pas être un préfet sanitaire. Il doit être contrôlé par un organisme démocratique. Les conférences régionales de santé demeurent des grand-messes. Avec le Nouveau Centre, je souhaite de vrais conseils régionaux de santé,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Préel

…réunissant tous les partenaires de la santé, professionnels, établissements, associations de malades et d'anciens malades.

Les membres doivent être élus pour avoir la légitimité par collèges pour permettre une juste répartition – Union régionale des médecins libéraux et Union régionale des professionnels de santé. Leur mission serait de contrôler l'exécutif régional qui rendrait compte de ses actions, de définir les besoins à partir des travaux des observatoires régionaux de santé, et de gérer l'ONDAM régionalisé.

Le but de ces conseils régionaux de santé est triple : assurer une « démocratie sanitaire » avec un contrôle de l'exécutif, veiller à l'adéquation entre l'offre et les besoins, aboutir à une réelle maîtrise médicalisée des dépenses de santé. En effet, dans un tel système, les professionnels de santé seraient associés en amont des décisions et en aval de la gestion. Ils seraient donc responsabilisés. J'insiste sur ce point, car c'est la seule méthode pour aboutir à une réelle maîtrise médicalisée.

Troisième problème : le bouclage national. L'État doit veiller à la sécurité sanitaire et à l'égal accès aux soins. Une coordination nationale des ARS est donc nécessaire. L'idéal serait une agence nationale héritant des directions du ministère – direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins, direction générale de la santé, direction de la sécurité sociale.

En effet, si la création des ARS est souhaitable pour aboutir à un responsable unique de la santé, le risque est grand d'aboutir demain à une triple commande – coordination nationale des ARS, UNCAM, ministère – et de maintenir séparées les enveloppes ville-hôpital-médico-social. L'efficacité d'un tel système serait dès lors fort modeste et la réforme tant attendue pourrait être contre-productive.

Le deuxième point important de votre projet de loi, madame la ministre, est la nouvelle réforme hospitalière. Les établissements de santé jouent un rôle majeur dans notre système de soins. Nous disposons de deux réseaux, public et privé, financés tous deux par la collectivité nationale. Nous connaissons non seulement leurs difficultés financières, mais aussi leurs difficultés à répondre à l'afflux de patients aux urgences, à l'accueil et à l'orientation des personnes âgées, à assurer l'activité programmée et l'urgence.

De nombreux postes hospitaliers sont vacants aux urgences, en hémodialyse – je vous ai récemment interrogée sur ce point, madame la ministre –, en radiologie. Le temps médical est mangé par les commissions et la « réunionnite ». Le statut ne favorise pas les meilleurs. Une réforme de la gouvernance et la mise en place de pôles est en route, mais la remarquable mission de M. Gérard Larcher montre qu'il faut aller plus loin. Je souhaite que ses préconisations soient prises en compte pour répondre à l'exigence de sécurité, de qualité et d'efficience.

L'idée de communautés hospitalières de territoire est intéressante. Ce projet prévoit une direction unique et un programme d'investissement commun. Or un établissement pourrait participer à deux territoires : un territoire avec les hôpitaux locaux et un territoire plus vaste avec l'hôpital de référence. Ces deux territoires fonctionnels seront-ils compatibles ? Nous aurons besoin de souplesse. Il en est de même lorsque le plateau technique est commun à un établissement public et un établissement privé.

J'aurais préféré un fonctionnement en réseau entre les CHU, l'hôpital de référence du secteur et les hôpitaux locaux.

La mise en place d'un directoire, avec un vrai directeur, est nécessaire. Un établissement a besoin d'un chef, mais qui écoute les équipes médicales.

J'aurais souhaité un renforcement du conseil d'administration, avec participation de la collectivité aux investissements, pour renforcer la responsabilité des élus et assurer une plus grande autonomie des établissements. Il est nécessaire de faire évoluer les statuts du personnel, notamment des médecins, vers des contrats prenant en compte la pénibilité, la responsabilité et la motivation. Il est envisagé qu'ils soient optionnels. Leur généralisation doit être très rapide.

Les médecins libéraux et hospitaliers généralistes et spécialistes doivent être mobiles et doivent pouvoir exercer également dans les hôpitaux locaux permettant le suivi des patients, pour le diagnostic ainsi que pour les traitements comme les chimiothérapies. Il convient de veiller à une bonne couverture du territoire avec le souci de la sécurité et de la qualité des soins.

Notre double réseau public et privé est sans doute une chance, mais il convient de veiller à l'équilibre et de se soucier, comme l'évoque Gérard Larcher, de la pérennité du capital des cliniques aujourd'hui achetées par de grands groupes financiers.

Il conviendrait également de renforcer la place du projet médical dans les établissements privés et de la CME pour que le financier ne pousse pas à la sélection des médecins, des activités et des malades. Favoriser l'investissement d'acteurs institutionnels serait certainement nécessaire.

S'agissant de la médecine ambulatoire, le problème majeur est celui de l'offre de soins de premier recours. Le problème n'est pas uniquement médical, car il concerne toutes les professions de santé. Une mission parlementaire étudie actuellement cette question d'une très grande complexité. En effet, nous constatons de grandes inégalités sur le territoire en termes non seulement de morbidité, de mortalité, de démographie des professionnels de santé, mais aussi d'accessibilité financière.

Les dépassements d'honoraires – qu'il ne faut pas confondre avec les dessous-de-table, totalement inadmissibles, qui doivent être sanctionnés – constituent un réel problème. Ils existent en ville et à l'hôpital, et doivent être encadrés et contrôlés. Mais la vraie solution serait, à mon sens, une rémunération juste des actes et des techniques, remboursée par l'assurance maladie.

De même, il n'est pas normal qu'une partie des charges sociales soit assumée, comme c'est le cas aujourd'hui, par l'assurance maladie. La rémunération du professionnel de santé devrait lui permettre de financer lui-même sa protection sociale. Dès lors, tout serait plus clair.

Les mentalités ont beaucoup évolué. Les jeunes, notamment, souhaitent un mode d'exercice et de financement de l'activité différents.

L'organisation autour du médecin généraliste est nécessaire, mais certains spécialistes remplissent parfois cette fonction de premier recours.

La formation initiale doit être revue et les préconisations du rapport Bach pourraient être mises en oeuvre. Cependant, le plus important est d'aboutir à une adéquation entre les diplômes et les besoins. À cet égard, une régionalisation est souhaitable. Elle permettrait de mieux prendre en compte les besoins des dix prochaines années. Je souhaite donc un numerus clausus régional, établi à partir des observatoires régionaux de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Préel

En effet, le national a été incapable d'anticiper les changements de mentalités, de mode d'exercice ou la féminisation.

Il convient également de veiller à l'adéquation des places de l'examen classant aux postes réellement proposés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Préel

La mise en place de la filière généraliste devient urgente, le nombre de postes d'interne, de chef de clinique et de professeur étant aujourd'hui ridiculement bas. La mise en oeuvre du stage chez le généraliste est elle aussi indispensable.

Je plaide pour un double stage obligatoire de trois mois en ville et de trois mois en zone rurale. Il est en effet nécessaire que l'étudiant puisse, aux côtés de maîtres de stages motivés, découvrir et apprécier son futur mode d'exercice.

Je ne reviendrai pas sur la nécessité de diminuer les tâches administratives qui rebutent les professionnels de santé, dont la vocation est de soigner.

Par ailleurs, les mesures incitatives à l'installation sont récentes et insuffisantes. Des expériences sont en cours, comme l'octroi de bourses contre l'engagement de s'installer en zone déficitaire. Mais la rémunération majorée de 20 %, peu utilisée, l'est surtout par des médecins installés. Alors qu'elle est limitée aux cabinets de groupes en zone déficitaire, elle devrait être accessible à tous et pourrait être complétée par une mesure inverse dans les zones excédentaires.

Les mentalités ont changé. Les jeunes ne veulent plus exercer seuls. C'est pourquoi les maisons de santé pluridisciplinaires semblent répondre à un réel besoin. Il est nécessaire qu'elles soient l'aboutissement d'un projet médical de territoire, communal, cantonal, ou autre, et non une construction par la collectivité, proposée « clés en main ».

L'évolution du mode de rémunération en vue d'aboutir à un système mixte combinant forfait et rémunération à l'acte semble également faire consensus.

J'insiste sur l'importance d'une nouvelle répartition des tâches, pour ne pas parler de compétences, entre les diverses professions de santé. Elle est nécessaire afin d'améliorer la qualité de la prise en charge et de l'efficience. Ainsi, nous avons besoin d'infirmières cliniciennes pour le suivi des maladies chroniques, notamment de l'obésité, de l'asthme ou de l'hypertension. Elles permettront de libérer du temps médical.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Préel

Le rôle du pharmacien dans la prévention et le suivi doit être reconnu. De même, nous avons besoin d'aides soignantes libérales pour que les infirmières se consacrent aux soins et non aux toilettes, ce qui nécessite bien entendu de revoir la rémunération des actes.

Madame la ministre, je n'ai pu, dans ce laps de temps trop court, qu'effleurer les problèmes de notre système de santé. Mais le projet de loi que vous nous proposerez à l'automne devrait permettre de l'améliorer. Le but est bien de permettre l'égal accès de tous à des soins de qualité, dans un système de financement solidaire.

Je n'ai pas évoqué les problèmes de financement. Mais, à cet égard, deux points me paraissent majeurs : ne pas reporter les déficits sur les générations futures, et aboutir à l'efficience, pour continuer à cotiser en fonction de ses revenus tout en étant soigné en fonction de ses besoins.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Préel

Il faut donc bien placer le curseur entre le régime de base, les complémentaires et le reste à charge. Je souhaite vivement que le futur projet de loi permette de réels progrès. J'y serai très attentif.

Madame la ministre, je vous remercie de votre écoute, et j'attends avec intérêt les réponses que vous apporterez aux questions qui vous sont posées. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour dix minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Madame la ministre, je tiens d'abord à remercier mes collègues pour l'important effort de réflexion engagé par plusieurs d'entre eux depuis quelques mois. Leurs conclusions et celles de votre ministère doivent se rejoindre.

Depuis le début du débat, j'ai entendu deux mots clés : démantèlement et adaptation. Si l'on aborde la discussion sur la santé, à laquelle chacun doit apporter sa contribution positive, en caricaturant la position du Gouvernement et en ne parlant que de démantèlement, je crois que nous n'irons pas loin dans notre effort collectif, tant il est vrai que le vieillissement est un enjeu auquel nous devons tous faire face.

À ce sujet, je rappellerai une phrase de Jacques Delors.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est vous qui n'en avez pas voulu !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Leonetti

Souvenez-vous que vous lui avez préféré Jospin !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Dans son rapport pour le Centre d'études sur les revenus et les coûts, il indique que « dans les quinze dernières années, l'essentiel de l'effort de productivité de la nation a été absorbé par les dépenses socialisées, au détriment de l'amélioration du pouvoir d'achat direct et de la compétitivité de la France ». Parmi les quinze pays européens, la France est en passe de devenir celui dans lequel le poids de l'État providence est le plus lourd, et ce au moment où nos compatriotes attendent une forte amélioration du salaire direct.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Il faut garder cette préoccupation en tête, parce qu'on ne peut isoler les problèmes, parlant tantôt de la santé, tantôt d'autre chose, sans relier nos différentes exigences les unes aux autres.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Mais la santé pèse très lourd sur le pouvoir d'achat !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Sur le diagnostic, tout le monde est d'accord : la santé est devenue la deuxième ou la troisième préoccupation des Français. La plupart de nos compatriotes expriment leur confiance dans les professionnels de la santé, en dépit de certains abus, et leurs attentes fortes en matière de qualité et d'égal accès de tous aux soins – le rapport Flajolet apporte sa contribution sur ce point. Mais ils disent aussi leur inquiétude quant au poids du déficit et à la nécessité de trouver des recettes.

Pour assurer à la fois un haut niveau de qualité, un égal accès aux soins et une maîtrise financière, des adaptations sont nécessaires à deux niveaux. Il faut articuler les principes de solidarité et de responsabilité, et introduire par ailleurs des efforts de performance dans un système qui en a besoin.

Sur le premier point, nous devons trouver un juste équilibre pour le recours au financement solidaire. En la matière, nous sommes restés au même niveau depuis quinze ans, puisque 77 % des dépenses collectives restent prises en charge par la solidarité. Mais celles-ci ont été absorbées en particulier par les affections de longue durée, parfois au détriment d'autres pathologies. Notre principe est la stabilité. Je crois que toute la nation peut s'accorder sur l'objectif de consacrer à la santé 1 point de plus, au cours des prochaines années, que l'évolution de la richesse nationale. Mettons-nous d'accord sur ce point de croissance supplémentaire et consentons ensuite des efforts de responsabilité pour l'affecter à bon escient.

À cet égard, méfions-nous, madame la ministre, des exonérations de cotisations sociales. La tentation est grande, aujourd'hui, pour les entreprises, de compléter un salaire peu élevé, proche du SMIC, pour bénéficier le plus possible des allégements de cotisations sociales, par bien des recettes indirectes : CESU, tickets-restaurant, intéressement et participation, tous éléments qui ne sont pas soumis à cotisations sociales. Nous aurons bientôt un débat sur l'intéressement. Veillons à ce que l'excès d'exonération de cotisations sociales ne pèse pas sur l'équilibre des dépenses de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Le deuxième point sur lequel il faut s'adapter concerne le reste à charge. Je crois que nous sommes contraints au bouclier sanitaire, si l'on veut que l'effort pour la santé soit partagé par tous de manière équitable.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

De quel bouclier parlez-vous ? Et qui protégera-t-il ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

L'aide aux complémentaires de santé pourrait être améliorée. On constate parfois dans ce domaine un défaut d'information ou d'organisation.

En outre, il faut mener une réflexion pour restreindre les dépassements d'honoraires. Je n'ignore pas qu'il s'agit d'un problème délicat, dont les comparaisons internationales montrent toute la complexité, et qui pose le problème du choix du lieu de travail.

La responsabilité doit être le corollaire de la solidarité, principe qui s'adresse à tous, et d'abord aux assurés, qui doivent jouer une part active dans la gestion de leur capital santé. Pourquoi serait-ce à la collectivité de prendre en charge certaines dépenses qui relèvent d'un manquement à la discipline que chacun devrait observer ? Les patients doivent utiliser le système de soins de manière éclairée. Les décisions prises en matière de médicaments étaient nécessaires. Quant aux professions, elles doivent revenir à la pratique du juste soin et du juste prix. Enfin, dans les institutions, y compris dans les hôpitaux, il y a, chacun le sait, des marges de productivité. La nécessité implique la mise en place d'une culture de la responsabilité et l'implication de tous les acteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Ils permettent d'engager des efforts de prévention, notamment pour lutter contre l'obésité, et de réfléchir sur les maisons pluridisciplinaires de santé, l'hospitalisation à domicile ou le respect des référentiels et des bonnes pratiques. L'effort mené au niveau des territoires doit amener chacun à prendre conscience de sa propre responsabilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Le principe de responsabilité et la recherche de performance doivent nous conduire, comme l'a indiqué tout à l'heure M. Préel, à réfléchir sur les agences régionales de santé. Fixer un objectif de dépenses de santé au niveau régional par un ORDAM me paraît nécessaire. Prévoir une modulation au niveau des ORDAM, qui prenne en compte les adaptations nécessaires, irait dans le sens de la responsabilité. Nous avons été un certain nombre à le demander il y a quatre ou cinq ans, dans le débat préalable. Pourquoi ne pas engager rapidement des expérimentations dans ce domaine ? Je suis convaincu que le principe de responsabilité au niveau régional sera mieux à même d'alléger le poids des corporatismes, qui se fait sentir au niveau national.

Un dernier mot sur les agences régionales de santé. Le rapport d'Yves Bur l'a démontré : pour la gouvernance du système, si l'on veut un pilotage unifié et responsabilisé, qui rassemble les forces de l'assurance maladie et de l'État, il faut attribuer une place importante aux partenaires sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

L'étatisation des agences régionales de santé ne répondrait pas à l'exigence de prise en compte de la responsabilité de chacun. C'est pourquoi, personnellement, je pense qu'il faut attribuer une place importante aux partenaires sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Je ne suis pas convaincu qu'il faille faire présider le conseil d'administration des agences régionales de santé par le préfet de région.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Cette présidence pourrait à mon sens être assurée par un représentant des partenaires sociaux ou des personnalités qualifiées. Je reste attaché à un principe général : donnez des responsabilités aux gens, et vous les changez, même s'ils ne partagent pas toujours votre sensibilité. Je pense que c'est un point sur lequel beaucoup de nos collègues pourraient se retrouver.

Je terminerai en soulignant qu'il faut écouter ce que nos voisins européens disent de nous. En France, affirment-ils, les politiques publiques ne souffrent pas d'une insuffisance de moyens, mais d'un empilement de structures et d'une confusion de leurs objectifs. La France leur semble sur-administrée et sous-organisée. Quant aux investisseurs internationaux, ils considèrent qu'il ne faut pas aller chez nous parce que tout y est trop compliqué.

Dans notre système de santé, madame la ministre, il faut un système de responsabilité lisible, unifié et simplifié. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Monsieur Méhaignerie, vous avez été d'une ponctualité remarquable, ce qui augure bien de la gestion des comptes sociaux ! (Sourires.)

La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, le moment est venu pour nous de rénover en profondeur notre organisation sanitaire.

Animée par la ferme conviction qu'il faut sans tarder nous donner les moyens de relever les défis auxquels notre système de santé est confronté, j'inscris mon action dans la perspective globale de cette politique de modernisation dont le pays a besoin.

S'il faut rénover notre système de soins, c'est pour préserver le pacte de 1945, ne pas léguer aux générations futures une dette impossible à régler et permettre à nos concitoyens de ne pas redouter la perspective d'une médecine à plusieurs vitesses.

Ma politique de santé, tout en intégrant les contraintes de l'efficience, en raison même du principe de solidarité entre les générations, est d'abord une politique de justice. Elle ne procède en aucun cas d'une vision strictement utilitariste.

Mon projet de réforme obéit ainsi à trois exigences : l'exigence d'égalité, l'exigence de responsabilité individuelle et l'exigence de responsabilité collective, autrement dit une exigence de solidarité.

Tout en restant fidèle à ces principes, la réforme du système de santé devra relever quatre défis.

Tout d'abord, un défi de santé publique en raison du poids grandissant des pathologies chroniques, mais aussi des conséquences induites par le vieillissement de la population.

Ensuite, un défi économique relatif à la justice entre les générations, qui implique d'équilibrer nos dépenses et d'améliorer leur efficience.

Un défi de démocratie sanitaire, qui implique d'assurer une égalité réelle dans l'accès aux soins en endiguant notamment la dramatique avancée des déserts médicaux en zones rurales et péri-urbaines…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Enfin, un défi d'organisation, pour remédier à l'enchevêtrement actuel des compétences, à la balkanisation des structures, au gaspillage de moyens, de talents et d'énergies.

Notre réforme vise ainsi à assurer pour longtemps et à chacun l'accès à des soins de qualité. Les Français savent que la réforme est nécessaire. Ils sont fiers, à juste titre, d'un système de santé qui offre un très haut niveau de protection sociale ; ils en connaissent aussi très concrètement les fragilités.

Tous ceux qui, pour une simple entorse, ont attendu de longues heures aux urgences, un dimanche matin, parce qu'aucun médecin de garde n'était joignable, sentent bien que quelque chose doit changer.

De même, à la campagne, nos concitoyens se représentent clairement la nécessité de la réforme lorsque leur généraliste prend sa retraite et que personne ne vient le remplacer.

La réforme est donc nécessaire. Mais la réforme attendue n'est pas une énième réforme technocratique, sans épiderme et sans âme, imposée d'en haut.

C'est pourquoi, j'ai voulu travailler avec vous, bien en amont, sur un projet de loi qui, pour être utile et nécessaire, doit répondre aux attentes réelles de nos concitoyens dont, mieux que personne, vous connaissez les préoccupations concrètes. Sur ce texte, j'ai voulu faire avec vous de la « coproduction ».

Je remercie les orateurs des groupes politiques, et tout particulièrementM. Jean-Marie Rolland etM. Jean-Luc Préel pour la qualité de leurs interventions. Je regrette que les socialistes n'aient pas saisi l'opportunité de ce débat pour nous soumettre ne serait-ce qu'une seule proposition. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Odile Bouillé

et Mme Catherine Lemorton. Supprimez les franchises fiscales : la voilà notre proposition !

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Il n'y avait pas une seule proposition dans votre intervention, madame Lemorton.

Je comprends que le rôle de l'opposition soit de critiquer et de polémiquer – vous l'avez parfaitement tenu –, mais devant les défis auxquels nous sommes confrontés, nous aurions pu attendre de votre part des propositions. Or il n'y en a pas eu une seule.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Et Mme Fraysse s'est inscrite dans le même registre.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Même dans l'opposition, on s'honore à faire des propositions. Dommage que ce n'ait pas été le cas, car je pense que de bonnes idées peuvent venir de tous les côtés de l'hémicycle. (« Supprimez les franchises ! » sur de nombreux bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Mesdames, messieurs les députés, nous faisons aujourd'hui un constat identique. Les difficultés que connaît aujourd'hui notre système de soins ne sont pas passagères et conjoncturelles. Elles sont les symptômes d'un dysfonctionnement douloureusement éprouvé par tous : par les patients, tout comme par les professionnels de santé. Et ces difficultés ne datent pas d'hier !

En dépit des dépenses bien supérieures à celles qui y sont consacrées dans les autres pays de l'OCDE, les personnels hospitaliers sont sous pression. Les différentes rencontres, les nombreuses visites que j'ai pu faire m'ont toujours laissé cette impression étrange d'un extraordinaire dévouement mêlé de lassitude, le sentiment d'une grande fatigue. Pourtant, le personnel hospitalier a augmenté de 10 % depuis dix ans.

Le problème se pose-t-il en termes d'insuffisance de bras ou d'organisation et de management ?

De même, en dépit du fait que notre tissu hospitalier soit un des plus denses du monde, les usagers se plaignent de ne pas toujours disposer des structures hospitalières nécessaires. Pouvons-nous rester sourds à ces demandes ? Comment y répondre ?

En ce qui concerne le nombre de médecins de proximité, les données chiffrées révèlent aussi de réels problèmes et d'éloquents paradoxes. En France, en dépit de la forte densité de médecins – le nombre de médecins par habitant n'a jamais été aussi élevé et notre densité médicale est l'une des plus élevées de l'OCDE –…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

…des zones entières du territoire souffrent d'une cruelle carence de médecins.

Dans les campagnes et dans les banlieues les moins favorisées, la désertification médicale progresse et les disparités territoriales se creusent.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Doit-on considérer comme une fatalité le développement de ces inégalités ?

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Comment résoudre ces problèmes de répartition ?

Considéré sous l'angle financier, l'accès aux soins est paradoxalement plus coûteux qu'il n'y paraît. En dépit de dispositifs très protecteurs comme la CMU et l'AME, en dépit d'un taux de prise en charge publique parmi les plus élevées au monde, il faut encore parfois payer 200 euros de sa poche pour accoucher.

Les dépassements tarifaires sont nombreux.

Certains médecins refusent de prodiguer leurs soins aux bénéficiaires de la CMU. Comment subir plus longtemps de telles contradictions ?

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Le paradoxe français semble ainsi imprimer partout sa marque.

Je n'ai pas évoqué, pour ne pas assombrir encore le tableau, le fameux « gouffre de la sécu », mais Pierre Méhaignerie l'a très opportunément évoqué.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Boisserie

Voilà le bilan de six ans de gouvernement de votre majorité !

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Loin de moi l'intention d'agiter des spectres pour mieux masquer la vanité de l'action publique. Mais les chiffres sont là, insistants, tenaces : depuis près de vingt ans, l'équilibre des comptes n'est pas assuré. C'est une génération de déficit. Faudra-t-il une génération pour en sortir ?

Les chiffres impressionnent. Le constat est quelque peu amer. Pourtant, si j'invoque ainsi les faits, ce n'est pas pour mettre en exergue l'emprise d'une sorte de fatalité. Si j'ai voulu rappeler les contraintes qui sont les nôtres, c'est précisément pour les distinguer des exigences qui sont celles d'une politique de santé responsable.

Les principes de mon action sont ceux qui se trouvent au fondement de notre pacte républicain. Mais ces principes, nous ne pouvons pas nous satisfaire de les invoquer de manière incantatoire. Notre défi est précisément d'en assurer l'effectivité. Tel est le sens de la réforme que les Français attendent.

Ainsi, pour que l'égalité d'accès aux soins s'incarne dans les faits, il faut d'abord considérer chaque patient, non pas comme un malade parmi d'autres, mais comme un être social, saisi dans sa globalité.

Être égaux, ce n'est pas être identiques. Nous ne pourrons assurer concrètement, et améliorer pour chacun, les conditions de l'accès aux soins, qu'en tirant les conséquences nécessaires de la gradation des besoins de santé.

La gradation des besoins appelle une gradation des soins, qui appelle elle-même une gradation des structures. L'adaptation de l'offre de soins aux besoins suppose ainsi de redéfinir les conditions d'une plus juste répartition des structures de soins sur le territoire.

On ne fait pas systématiquement appel au même hôpital pour des soins de suite et une prothèse de hanche. Ces différents niveaux appellent des réponses graduées.

Chacun doit avoir recours au bon niveau de soins, en fonction de ses besoins : des hôpitaux de proximité pour les soins courants, les consultations et les séjours longs ; des centres hospitaliers équipés de plateaux techniques performants, et dotés d'équipes spécialisées pour les actes invasifs ; des CHU pour les pathologies complexes, et des centres de référence pour les pathologies rares et les prises en charges pointues. Une opération chirurgicale planifiée peut donner lieu à un déplacement plus important qu'une urgence.

Je ne défendrai donc pas abstraitement le principe d'une égale proximité de toutes les structures. Ceux qui défendent ainsi cette pseudo-proximité, au nom d'un principe d'égalité purement incantatoire, participent, au contraire, au maintien et au renforcement de l'inégalité réelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Ceux qui ont accès à l'information, quand ils sont en mesure d'apprécier les limites de la proximité, n'hésitent pas à se faire soigner là où ils jugent plus indiqué de le faire.

En revanche, dans l'urgence, chacun, quels que soient ses revenus et son niveau d'information, se trouve à égalité. C'est pourquoi je veux favoriser l'accès de tous aux services d'urgence, répondant à un besoin réel de proximité.

L'exigence d'aménagement du territoire est une exigence légitime et, je le répète, je ne fermerai aucun hôpital de proximité,…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

…mais j'adapterai les établissements aux besoins réels de la population et aux exigences de la sécurité et de la qualité des soins. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Améliorer les conditions d'accès aux soins permettra d'assurer concrètement le principe de leur permanence sur le territoire.

Les gains d'efficience recherchés par toutes ces réformes ne sont pas une fin en soi. Nous ne poursuivons qu'un seul but : redonner toute sa substance au principe d'égalité, impliquant, pour chaque Français, la possibilité de bénéficier de soins de qualité.

Je pense aux plus démunis, bien sûr, qui seraient les premières victimes de la dégradation d'un système de santé négligeant d'assurer l'effectivité des principes qui le régissent. À cet égard, il faut tout faire pour lutter contre la pratique scandaleuse et insupportable du refus de soins. Le projet de loi « Patients, santé et territoires » intégrera cette exigence.

Il faut aussi combattre la pratique illégitime de certains dépassements d'honoraires. Je n'ai pas attendu ce projet de loi pour m'y atteler : la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 comportait déjà des dispositions en ce sens. Les décrets et l'arrêté concernant ces mesures sont en cours de préparation. Pour répondre à M. Méhaignerie et à Mme Fraysse, l'obligation d'information sera également prévue par un arrêté qui sortira en juillet prochain. Je propose que cette obligation joue à partir du seuil de 80 euros. Quant aux deux décrets d'application relatifs aux sanctions en cas de refus d'affichage et de pratique du non-acte et de la non-mesure, ils seront prêts l'un en juillet, et l'autre en juin.

Mais je pense aussi à tous ces Français qui, par choix ou par obligation, n'habitent pas au coeur des villes, et qui, dans les zones péri-urbaines ou rurales, ne sauraient être exposés au risque de la désertification médicale.

La question de la démographie médicale n'est pas un sujet de spéculation abstraite. Près de 4 millions de Français éprouvent de réelles difficultés à trouver un médecin, alors même que la densité de médecins par habitant est, je le disais, une des plus élevées de l'OCDE. Doit-on laisser, sans rien faire, se perpétuer une telle aberration ?

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Il faut optimiser l'organisation du travail des professionnels de santé pour libérer du temps médical.

Les jeunes généralistes ne veulent plus exercer comme dans le passé. Ils veulent exercer en groupe avec d'autres médecins et d'autres professionnels de santé pour partager et mieux soigner. Ils ne veulent plus brasser du papier et veulent se concentrer sur leur fonction de soignant.

La loi leur permettra, en créant des maisons de santé, et en favorisant le partage des tâches, de libérer du temps médical, du temps pour soigner. Vous l'avez constaté, j'ai largement anticipé ces mesures dans la dernière loi de financement de la sécurité sociale.

La qualité du service rendu et l'égal accès aux soins dépendent donc, très concrètement, de l'organisation globale des ressources. Nous pourrons assurer les conditions d'une égalité réelle, redonner toute sa chair au principe de responsabilité individuelle et faire en sorte que la solidarité ne soit pas un vain mot.

Il faut réformer pour ne pas subir plus longtemps l'engrenage d'une mauvaise gestion, dont les plus précaires, les plus vulnérables sont toujours les premiers à ressentir les contrecoups. C'est en ce sens que je veux faire évoluer la tarification à l'activité instaurée depuis 2005.

Sans doute ce dispositif, en mettant fin à la logique d'enveloppe, constitue-t-il un progrès indéniable du mode de financement des hôpitaux.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Toutefois, il ne s'agit en aucun cas d'une restriction des budgets hospitaliers. Je rappelle que l'ONDAM hospitalier a progressé de 3,2 % cette année, c'est-à-dire plus que la richesse nationale.

Pour les 625 établissements hospitaliers qui ont vu leur tarification pour les soins de courts séjours – médecine, chirurgie, obstétrique – passer intégralement à la tarification à l'activité, la redistribution des enveloppes correspond à une mesure de justice : 380 établissements ont vu leur budget progresser, et 230 l'ont vu diminuer. Il est absolument inadmissible, que, pour les mêmes soins, pratiqués de la même façon, il ait existé de tels écarts.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

C'était donner une prime aux établissements mal gérés.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

La T2A est un élément de justice et de bonne gestion.

Cependant, dans un esprit d'équité, je souhaite au moins introduire deux inflexions visant à mieux prendre en compte la situation de précarité de certains patients, et à mieux assurer la rémunération des prises en charge les plus lourdes qui peuvent toucher tout un chacun.

Le modèle actuel de tarification à l'activité ne tient pas compte de la situation sociale de certains patients. Or un grand nombre d'études mettent en évidence que la durée de séjours de ces patients est supérieure à la moyenne, toutes catégories sociales confondues.

Il faut veiller à ce que le modèle de financement ne dissuade pas les établissements hospitaliers d'accueillir les populations les plus fragiles, ce qui serait contraire au principe de solidarité qui m'anime.

Je veux accroître les ressources allouées aux établissements qui accueillent une proportion importante de patients en situation de précarité. Poursuivant le même objectif de justice, j'ai décidé de faire évoluer la tarification des prestations. Une version dite « version 11 » prévoit ainsi l'introduction de niveaux de sévérité qui permettront de mieux rémunérer les prises en charge les plus lourdes.

Le retour à l'équilibre financier des hôpitaux est une priorité. Cet objectif ne répond pas à une logique comptable, mais à une exigence de justice et de solidarité entre les générations.

L'architecture du projet de loi « Patients, santé et territoires », dont je veux vous exposer le sens et la philosophie générale, reflète clairement nos priorités et notre objectif essentiel, qui est d'assurer à chacun, sur tout le territoire, l'accès effectif à des soins de qualité.

Le titre Ier du projet de loi, qui en comprendra quatre, traitera de la prévention et de la santé publique. Jean-Luc Préel a raison de déplorer que notre système de santé ne soit pas assez tourné vers la prévention. Aussi souhaitons-nous renforcer les politiques menées dans ce cadre, en nous appuyant notamment sur les conclusions du rapport d'André Flajolet, que je remercie pour le travail qu'il a effectué. Il s'agit de prendre en compte des problèmes très concrets de santé publique, dont se soucient toutes les familles qui sont directement confrontées à ces difficultés et qui ont parfois le sentiment que la prévention aurait pu épargner à leur enfant bien des problèmes. De nombreuses dispositions répondent à ces préoccupations : lutte contre l'obésité, l'alcoolisme et le tabagisme, amélioration de l'accès à la contraception et à l'IVG ainsi que du suivi gynécologique, prévention des maladies liées à l'habitat.

Vous avez raison, madame Fraysse : il faut développer des modes de rémunération alternatifs au paiement à l'acte, et j'y suis décidée.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

J'avais abordé ce sujet dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale, mais il me fallait stabiliser la question de la permanence des soins avant d'organiser ces nouveaux modes de rémunération. Nous sommes actuellement en train de préparer les textes qui permettront de les mettre en oeuvre.

Le titre II, qui aura pour objet de favoriser l'accès de tous à des soins de qualité, sera notamment consacré à la refondation de la médecine générale de premier recours, à la réforme de la formation continue et au développement de nouvelles modalités d'exercice. Ce titre reprend ainsi une grande partie des conclusions des états généraux de l'organisation de la santé, qu'il s'agisse du développement des maisons de santé pluridisciplinaires, dont Jean-Claude Flory notamment a beaucoup parlé (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche),...

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

..ou de la revalorisation de la filière de médecine générale.

Pour répondre aux nombreuses questions qui m'ont été posées à ce sujet, je précise que cette filière a été créée par la loi du 8 janvier 2008 et que les décrets portant sur les statuts universitaires sont en cours d'élaboration au ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. Un décret est également en préparation en ce qui concerne la partie soins de l'activité. Par ailleurs, nous avons signé, avec Valérie Pecresse, un courrier commun dans lequel nous précisons nos objectifs, lesquels sont clairs : installation de la filière sur cinq ans, avec deux cents postes en jeu.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Le titre II intégrera également la réforme de la biologie médicale qui, vous le savez, fait l'objet depuis plusieurs mois d'une concertation importante, coordonnée par Michel Ballereau.

Le titre III du projet de loi, qui a trait à la modernisation des établissements de santé, prend acte des conclusions établies par Gérard Larcher dans le rapport que je lui ai commandé sur la modernisation de l'hôpital. Trois questions seront plus particulièrement traitées dans ce titre III. La première concerne la gouvernance de l'hôpital. Il faut en effet que celui-ci ait un patron, pour en finir avec la situation actuelle, souvent dénoncée par le Président de la République en ces termes : à l'hôpital, tout le monde peut dire non, mais personne n'a la possibilité de dire oui.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Ce patron sera chargé de mettre en oeuvre le projet médical – j'insiste bien sur ce terme – de l'établissement de santé. L'hôpital sera par ailleurs doté d'un conseil de surveillance, dont le vice-président sera le président de la commission médicale d'établissement, de façon à assurer un équilibre entre la nécessaire bonne gestion et la mission de l'établissement de santé, qui est de dispenser des soins.

La deuxième question concerne les communautés hospitalières de territoire, qui auront à organiser la gradation du soin hospitalier entre les quatre niveaux que j'ai évoqués tout à l'heure.

La troisième question est celle de l'attractivité des métiers de l'hôpital. Nous rencontrons en effet de véritables difficultés pour attirer les meilleurs à l'hôpital. Certaines dispositions concerneront donc la rémunération des médecins hospitaliers. Ceux qui voudront rester soumis au statut de la fonction publique hospitalière le pourront, mais si certains souhaitent faire plus et différemment, ils pourront bénéficier de modes de rémunération contractuels. J'ajoute que certaines dispositions porteront sur le LMD. Cette procédure concernant presque tous les métiers paramédicaux, une importante concertation et un dialogue social approfondi sont nécessaires.

Le titre IV sera consacré à la mise en place des agences régionales de santé, qui permettront d'introduire enfin clarté, efficacité et efficience dans le fonctionnement de notre système de soins. Jean-Marie Rolland, Jean-Luc Préel et Pierre Méhaignerie m'ont fait de nombreuses propositions sur le sujet et je les en remercie, même si je ne pourrai répondre à tous. La création des agences régionales de santé procède d'un choix stratégique fondamental, qui vise à renforcer le pilotage territorial au plus près des besoins de la population.

Les ARS obéiront donc à deux grands principes constitutifs : elles réuniront les services de l'État et de l'assurance maladie, afin d'assurer un pilotage unifié, et devront favoriser la responsabilisation de tous les acteurs, dans le cadre d'un pilotage responsabilisé. La finalité de cette réforme structurelle est bien, Pierre Méhaignerie, de renforcer l'ancrage territorial des politiques de santé, qui doivent être mieux adaptées aux besoins locaux, et d'assurer une répartition plus juste de l'offre de soins, pour lutter notamment contre les déserts médicaux, dont pâtissent un trop grand nombre de Français.

Vous avez proposé, avec Jean-Luc Préel, la création d'un ORDAM. C'est une piste intéressante, mais je veux conserver la possibilité de piloter au plan national les ONDAM sectoriels, qui est le seul moyen de mener une véritable politique en matière de dépenses de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Morange

Très bien !

(M. Marc Laffineur remplace M. Jean-Marie Le Guen au fauteuil de la présidence.)

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Parce que nos concitoyens ne sont pas également armés pour affronter des parcours de soins à la cohérence incertaine, il faut battre en brèche la logique du cloisonnement ; les ARS y contribueront.

Celles-ci veilleront enfin à assurer la simplification du système de santé – qui est le plus complet mais aussi le plus complexe –, actuellement éclaté entre de multiples organismes, et à offrir un interlocuteur unique aux acteurs du système et à nos concitoyens, qui s'y perdent. Je veux que la stratégie des ARS soit une stratégie « gagnant-gagnant » : gagnant pour le malade, qui est au coeuvre.

Je le répète, aucune mobilité ne sera imposée. Les ARS sont une chance pour les personnels, qu'ils viennent de l'assurance maladie ou de l'administration d'État, qui y trouveront de nouveaux parcours de carrière. Je mène d'ailleurs actuellement, avec le secrétaire général du ministère, Jean-Marie Bertrand, un dialogue social approfondi avec l'ensemble des personnels pour que cette réforme soit une véritable chance pour eux.

Quant au calendrier, je tiens à ce que vous sachiez que l'heure est encore au recueil des contributions. Je reprendrai toutes les propositions qui m'auront été faites, car aucune contribution ne saurait être considérée, à ce stade, comme intempestive. Si je n'ai pas l'intention de préempter l'agenda des assemblées et les décisions du Gouvernement, je souhaite néanmoins que nous soyons prêts à défendre ce texte à la mi-septembre.

En ce qui concerne les ordonnances, la question est en débat. (Murmures sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Il est bien entendu exclu de priver la représentation nationale de son libre-arbitre et de l'examen des articles de principe. Cependant, j'attire votre attention sur le fait que nous aurons sans doute à examiner plusieurs centaines d'articles de coordination technique pour la création des ARS. Il me paraît donc évidemment plus simple de procéder par ordonnance,…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

…tout en vous associant étroitement à sa rédaction. Cette ordonnance ne portera pas sur les points principiels. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Je précise, monsieur Méhaignerie, qu'il s'agit d'un projet de loi d'organisation, et non d'un texte financier. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, ainsi que du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Nous aurons donc bien sûr l'occasion de débattre de tous les points que vous avez soulevés lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009. Nous tiendrons alors le plus grand compte des observations que vous avez formulées avec Jean-Marie Rolland et Jean-Luc Préel. J'aurais bien volontiers examiné celles de Mme Lemorton et de Mme Fraysse, mais je ne peux en tenir compte puisqu'elles n'en ont fait aucune. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, ainsi que du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Pour répondre aux grands enjeux de santé de notre pays, il fallait une réforme globale et ambitieuse. Les signes préoccupants d'une fragilité qui risque de menacer à terme la qualité et la sécurité des soins si nous ne faisons rien inquiètent nos concitoyens. C'est pour eux, mesdames, messieurs les députés, que nous construirons ensemble la loi « Patients, santé et territoires », pour leur santé et celle de leurs enfants. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Nous allons maintenant continuer d'entendre les orateurs inscrits dans le débat.

La parole est à M. Yves Bur, pour cinq minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Bur

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ne disposant que de quelques minutes pour aborder un domaine aussi vaste et complexe que la santé, je me contenterai de quelques réflexions destinées à alimenter le débat qui précédera l'examen du projet de loi « Patients, santé et territoires » et de celui de financement de la sécurité sociale.

Nous avons longtemps pensé que les problèmes auxquels était confronté notre système de santé étaient essentiellement, sinon uniquement, financiers. Cette approche a conduit les majorités successives à ne proposer que des réponses partielles, pour contenir la dépense ou accroître les recettes. Aujourd'hui, nous prenons conscience que notre système de santé est confronté à une crise structurelle. Celle-ci met fin au mythe du meilleur système de santé, qui nous dispensait de toute analyse lucide de son état. Pour en arriver là, il aura fallu que la crise de l'offre, la rareté du temps médical et la dégradation de l'attractivité de l'hôpital public imposent leur réalité aux acteurs et aux décideurs.

Les défis qu'il nous faut relever sont multiples.

Tout d'abord, nous devons mettre en place une nouvelle organisation de l'offre de soins, qui doit prendre en compte la rareté du temps médical et celle de l'offre paramédicale, trop longtemps marginalisée. Le risque de voir s'étendre les déserts médicaux jusqu'aux portes des grandes agglomérations est bien réel et le problème ne se réglera pas aisément, même avec les maisons médicales, que l'on évoque comme pour éloigner le spectre d'une autre forme de régulation, dont nous avons du mal à concevoir les contours et qui ne pourra concerner que les jeunes professionnels. Est-il encore concevable que les urgences hospitalières publiques assurent seules la permanence des soins tout au long de l'année parce que les autres acteurs de la santé ont déserté ? Cette situation ne sera pas viable durablement.

Autre défi : le problème de la qualité des soins, qui n'est pas encore résolu, malgré certaines avancées. Les bonnes pratiques doivent encore, en grande partie, être ancrées dans les différentes formes d'exercice et garanties à tous les assurés, quelle que soit leur condition sociale.

Nous devons également relever le défi de la santé publique, car les difficultés d'accès à des soins de qualité sur l'ensemble du territoire et pour tous les Français auront inévitablement des répercussions sur l'état de santé de notre population, en particulier de ses couches les plus fragiles. En outre, le vieillissement de la population imposera des missions nouvelles au système de soins, lequel souffre déjà de son impréparation pour faire face à la nouvelle donne démographique du grand âge, qui perturbe le bon fonctionnement de l'hôpital, engorgé par des malades âgés insuffisamment pris en charge en aval en raison d'une inadaptation aux besoins.

Il nous faut, par ailleurs, réformer la gouvernance, qui pâtit d'un pilotage aussi inadapté qu'illisible.

Il faut, enfin, décloisonner et mieux coordonner l'engagement des différents acteurs autour d'un parcours thérapeutique plus cohérent et plus efficient.

Le défi est également financier, car il faut que la solidarité continue à venir en aide à ceux qui sont confrontés à la maladie. À cet égard, le débat que j'ai lancé sur la gestion du risque et l'obligation d'optimiser la dépense collective dans le cadre de la nouvelle gouvernance n'aura pas été inutile, car il a rappelé à chacun l'impératif de la « soutenabilité » du coût de la santé.

Relever ces défis n'est donc pas une mince affaire. Notre tâche s'apparente aux travaux d'Hercule, tant nous pouvons avoir le sentiment d'un éternel chantier ou d'un marathon sans fin.

Je terminerai par quelques remarques sur la méthode et les objectifs.

Tout d'abord, nous ne devons pas tomber dans le travers qui consisterait à apporter à ces problèmes une réponse technocratique, en oubliant que notre but est bien d'améliorer le parcours du malade à travers un système de soins plus cohérent et de lui garantir l'accès aux soins, la qualité et la sécurité sur l'ensemble du territoire. Il nous appartient également d'associer au niveau des territoires les acteurs de la santé dans le cadre d'une démocratie sanitaire redynamisée.

Ensuite, la mise en oeuvre d'une nouvelle gouvernance ne doit pas se limiter à la construction d'une nouvelle organisation. Il s'agit avant tout d'installer une nouvelle culture de la responsabilité, fondée sur des objectifs, sur le contrat, qui engage, et sur une évaluation qui valide les progrès, validation qui ne devra pas rester sans conséquences sur le devenir des acteurs mis en situation de responsabilité.

À défaut, nous prendrions le risque d'installer une administration de la santé inopérante et susceptible de dériver vers un « Gosplan » sanitaire d'un autre âge. Cette nouvelle culture de la responsabilité devra impliquer le Parlement, au moyen de rendez-vous annuels qui ne pourront rester cantonnés au cadre strictement financier du PLFSS, mais qui devront inévitablement porter sur le plan organisationnel – comme ce sera le cas dès cette année – afin de permettre d'ajuster en continu notre système de santé aux exigences futures.

Enfin, madame la ministre, nous devons trouver le courage de bousculer tous les conservatismes et les corporatismes qui ont trop souvent paralysé notre système de santé au nom de grands principes ayant pourtant montré leurs limites, voire leur inefficacité face au défi que constitue la remise en bon ordonnancement de notre système de santé. Relever ce défi exige un renouvellement profond des modes d'exercice et de prise en charge des patients à la ville comme à l'hôpital. Nous avons l'obligation de réussir cette refondation au bénéfice de nos concitoyens, nonobstant le risque de déplaire à tel ou tel corporatisme. Vous pouvez compter sur nous pour réussir ce projet au service de la santé des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour dix minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il y a quelque chose de surréaliste dans notre débat, qui me fait penser à une scène d'opéra où l'on voit des hallebardiers qui scandent : « Marchons, marchons ! », tout en restant sur place !

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. L'immobilisme, ça vous connaît !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

N'est-il pas encore plus surréaliste de voir nos collègues très impliqués en 2004 dans la réforme de M. Bertrand et de M. Douste-Blazy, alors présentée comme la mère de toutes les réformes, la réforme des réformes, celle qui allait sauver notre pays, reconnaître quatre ans plus tard que cette réforme a échoué ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La majorité n'ayant rien fait depuis 2003, notre système est à bout de souffle, la confiance et la mobilisation des acteurs de santé se sont émoussées, et l'hémorragie financière de la sécurité sociale se poursuit.

Le diagnostic est clair : les inégalités en matière de santé progressent ; la dégradation de l'accès aux soins est évidente, tant du point de vue financier – qu'il s'agisse du problème des dépassements d'honoraires ou du recul de la couverture sociale sur bien des points – que du point de vue géographique, ce dont les élus sont nombreux à pouvoir témoigner ; enfin, les inégalités se font également ressentir dans l'accès aux informations permettant une bonne utilisation de notre système de santé.

Au-delà de cette dégradation de l'accès aux soins, nous constatons aussi un choc démographique et, plus largement, le malaise des médecins et de toutes les professions de santé. Nous avons là tous les ingrédients d'une crise profonde et si nous n'intervenons pas rapidement et en profondeur, l'inaction prolongée des années passées va aboutir – je prends la responsabilité de le dire – à une grave crise sanitaire d'ici à quelques années, d'autant que les pouvoirs publics sous-estiment largement les différents éléments que je viens de décrire.

Quelles sont les causes de la situation actuelle ? La plus fondamentale tient sans doute au fait que nous n'avons pas su prendre conscience des métamorphoses qu'ont subies la médecine et l'exercice médical. De ce fait, nous nous obstinons à défendre un système de soins – sans même parler des problèmes de santé, notamment de la prévention et de la santé publique, que je n'ai pas le temps d'évoquer –, une conception de la médecine et de l'acte médical complètement dépassés.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

C'est vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Alors que notre système a été conçu pour faire face à des pathologies aiguës et souvent aléatoires, nous avons aujourd'hui affaire à des affections majoritairement chroniques. De même, nous sommes confrontés à des patients dont le niveau d'éducation et d'exigence a beaucoup progressé, ainsi qu'à une véritable révolution des sciences du vivant, notamment dans le domaine de la génétique. Tous ces changements font que notre système n'est plus en phase avec la réalité.

Une fois le diagnostic établi, c'est à un changement profond que nous devons procéder : la réforme doit être globale ! En cela, que n'appliquez-vous les consignes du Président de la République ? Il ne s'agit pas de faire une petite réforme de-ci de-là, mais d'investir dans une réforme globale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Pour autant, il convient d'établir des priorités. L'aspect comptable n'est pas le seul à prendre à considération : ne refaisons pas la réforme de 2004 en plus sévère ! Certes, il y a un investissement à effectuer, mais nous devons savoir réformer là où cela s'impose, placer la santé avant les soins, et les soins avant la comptabilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Leonetti

Mais il a voté Sarkozy, ce n'est pas possible !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Il faut aller jusqu'au bout et dire la vérité à nos concitoyens, au lieu de commencer par affirmer que le niveau actuel des prélèvements obligatoires constitue un mur infranchissable et que nous ne leur demanderons aucun effort supplémentaire, d'autant qu'ils sont les premiers à vouloir investir dans leur santé – et ils ont bien raison, car c'est l'avenir de notre société ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche). La santé permet en effet de développer le potentiel humain et constitue l'un des éléments majeurs du développement économique d'une société moderne.

Quelles sont les réformes à mener ? Elles sont relativement simples, mes chers collègues, et il faut juste avoir le courage de les engager. La première des réformes est purement technique, mais néanmoins profonde : il faut opérer très rapidement un transfert de charges et de compétences entre les professionnels de santé. Ce transfert, qui constitue une priorité absolue, doit s'opérer dans le cadre d'une véritable politique des ressources humaines : il faut valoriser les parcours professionnels, requalifier, réinvestir un certain nombre d'acteurs.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Nous le faisons déjà !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Ainsi, il convient de faire en sorte que les infirmières, qui ont actuellement tendance à déserter le système de santé, soient incitées à y revenir, grâce à une revalorisation de leur parcours.

De même, la question des pharmaciens n'est pas seulement celle de la distribution du médicament : il faut conforter ces professionnels de santé dans leur mission en leur donnant de nouvelles compétences. Arrêtons de les traiter comme de simples commerçants, mais réinvestissons-les dans notre système de soins !

La deuxième réforme à mener concerne l'exercice médical. Madame la ministre, vous devez mettre fin à la convention médicale actuelle, dispendieuse, tournée vers le passé et totalement inefficace. Dans le cadre de cette convention, on discute aujourd'hui de tel ou tel avantage, ce qui correspond bien à l'optique corporatiste et clientéliste dans laquelle elle a été conclue. C'est du temps et de l'argent perdus ! Mettons fin à cette convention qui se trouve complètement à côté de la plaque et interrogeons-nous sur ce que doit être une politique conventionnelle moderne. À ce sujet, vous seriez bien inspirée de relire ce que disait la loi du 4 mars 2004 au sujet des relations entre l'assurance maladie et les professionnels de santé. Nous aurions intérêt à revenir à ce type de structure conventionnelle.

La troisième réforme doit consister à élaborer un nouveau volet de la loi relative aux droits des malades, ce qui constituera un élément majeur de la modernisation de notre système de santé. Si le caractère fondamental des droits individuels est aujourd'hui reconnu, il convient désormais d'introduire des droits collectifs. Il relève de notre responsabilité politique, morale et même juridique – je suis en effet pour l'instauration d'un droit opposable –, que l'ensemble de nos concitoyens puisse bénéficier d'un accès aux soins dans des conditions garanties de qualité des soins et d'information, d'accessibilité géographique, en distance ou en délai, le tout pour un coût raisonnable. Pour cela, nous devons mettre en oeuvre un deuxième volet de la loi relative aux droits des malades permettant la défense de ces droits collectifs.

Tout cela ne se fera pas sans la volonté d'investir financièrement dans la santé, point sur lequel nous devons également débattre. La responsabilisation des malades ne peut se résumer à la culpabilisation et à la pénalisation de ceux-ci. En effet, s'il existe quelques cas d'hyperconsommation, dont les malades sont rarement responsables, nous savons qu'il y a également des poches massives de sous-consommation : en dissuadant de façon non ciblée l'accès aux soins, nous écartons les plus fragiles de l'accès aux soins, ce qui dégrade encore l'état de santé général de la population. La majorité doit cesser de galvauder la notion de responsabilisation en reprochant globalement aux usagers de trop se soigner. En revanche, une action pédagogique d'ampleur est à mener au sujet du bon usage des soins, ce qui appelle plusieurs développements, que je ferai en une autre occasion. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour cinq minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, cette séance d'initiative parlementaire relative à l'organisation des soins, souhaitée par l'UMP est très utile à plusieurs titres.

D'abord, elle survient après les rapports sur la réforme hospitalière, sur les inégalités territoriales, sur les agences régionales de santé, mais aussi après les états généraux de l'organisation des soins, que vous venez de nous décrire, madame la ministre. Ensuite, ce débat est peut-être à considérer comme le point de départ d'une réforme en profondeur de notre système de santé, voulue par le Président de la République, et que vous nous proposerez dans quelques semaines. Nous aurons l'occasion d'en débattre prochainement.

Je souhaite ce matin témoigner de l'ampleur de la crise démographique ou, plus concrètement, de la crise de la médecine ambulatoire, qui rend souvent difficile l'accès à un médecin. Nous sommes tous d'accord pour faire le constat d'une certaine désorganisation démographique, ce qui nous oblige à relever le défi consistant à procéder à une amélioration de l'accès des soins sur l'ensemble du territoire, afin de faire reculer le « désert médical ». La réponse médicale apportée doit être de qualité, que l'on habite dans un quartier d'Orléans ou dans un chef-lieu de canton comme Briare, dans ma circonscription.

(M. Jean-Marie Le Guen remplace M. Marc Laffineur au fauteuil de la présidence.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

La France occupe une place paradoxale en Europe : plébiscitée pour la qualité globale de son système de soins, elle recèle également le plus grand nombre d'inégalités territoriales de santé, ce qu'a parfaitement décrit André Flajolet. Parmi les régions les plus défavorisées – le mot n'est pas trop fort –, je peux témoigner du cas de la région Centre, que vous avez, madame la ministre, récemment honorée de votre visite en y rencontrant élus et professionnels de santé, du milieu hospitalier comme de l'ambulatoire.

À ce jour, dans le département du Loiret, la densité de médecins généralistes est de 73,7 pour 100 000 habitants, contre 88,9 en France ; celle des spécialistes est de 66,3 contre 87,9. Ainsi, nombre de bassins de vie recensés par la mission régionale de santé sont dépourvus de médecins, mais aussi de dentistes, d'infirmiers et de kinésithérapeutes. Autre chiffre choc : 137 médecins pour 100 000 habitants dans le département, contre 194 dans la région PACA.

Nombre d'élus locaux s'arrachent les cheveux pour que s'installent sur leur territoire d'hypothétiques médecins généralistes, y compris en provenance d'Europe centrale – de Roumanie et de Pologne – ou d'Afrique. Les cabinets de recrutement sont sollicités, et le conseil général, de son côté, orchestre toute une série d'aides matérielles et financières. Mais les résultats restent nettement inférieurs aux espérances. Citons, à titre d'exemple, Nogent-sur-Vernisson, superbe commune pour laquelle quatre médecins contactés en Europe centrale se sont désistés au dernier moment.

Comme je l'ai dit lors de mon audition devant les états généraux de l'organisation des soins, je m'inscris en faux contre l'idée que le manque d'attrait des territoires serait le motif principal de cette désaffection. Le Loiret en effet est un territoire proche de la région parisienne et des facultés ; il est sociologiquement, économiquement et géographiquement privilégié, et ses richesses touristiques et paysagères sont appréciées.

Or, malgré cet état sympathique des lieux, les professionnels de santé installés depuis plusieurs décennies assistent à une certaine dégradation de leurs conditions de travail, moins liée à leur situation financière qu'à l'anxiété due au surmenage et à l'absence de visibilité en ce qui concerne leur avenir mais aussi celui de leurs patients.

La question de la couverture des besoins de soins auxquels devront répondre demain ces praticiens est posée, notamment si l'on considère le rôle que seront amenés à jouer les médecins généralistes en matière de premiers secours, mais aussi, compte tenu des transferts d'activités, dans les domaines de la prévention, du dépistage ou du suivi des pathologies chroniques, sans parler de leur intégration dans les réseaux ou de la permanence des soins.

Cette dernière s'est largement effondrée et reporte ainsi les usagers vers les urgences hospitalières, bien que certains médecins aient su avec volonté s'organiser en maisons médicales de garde, ce dont nous pouvons leur savoir gré. Vous en avez visité une dernièrement, madame la ministre, toujours dans ma circonscription, à Montargis. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

Sa force a été de réunir une cinquantaine de médecins généralistes pour assurer la permanence des soins, dans un lieu unique, proche du centre hospitalier.

Si ce n'est donc pas, à mon sens, l'attractivité du territoire qui est principalement en cause, il faut s'interroger sur la mutation importante subie par la médecine généraliste libérale depuis vingt ans, et sur les évolutions sociétales qu'elle connaît, qu'il s'agisse des questions de disponibilité et de temps libre, de la vie familiale, du rôle des médias, de la défiance que suscite la profession, mais aussi du tropisme prononcé vers les villes, facilité par la liberté d'installation.

La médecine est un métier prestigieux – j'étais moi-même médecin – pour 58 % des Français qui la placent en tête de leur classement des meilleurs métiers. Pourtant, la profession de médecin généraliste est menacée. Elle peine à se renouveler, comme en témoigne les 40 % de postes de médecine générale non pourvus en 2006. Il est donc nécessaire et indispensable de trouver les voies et les moyens de redonner aux jeunes générations l'envie d'exercer la médecine générale, et ce dès l'enseignement, ce qui nécessite des solutions concrètes et applicables.

Aujourd'hui, les difficultés d'accès aux soins, le cloisonnement entre la ville et l'hôpital, les carcans administratifs qui paralysent, le manque d'attractivité de la médecine générale mais aussi les difficultés que rencontrent les infirmières libérales sont autant d'éléments qui plaident pour une réforme du système de soins.

Face à toutes ces interrogations, vous avez raison, madame la ministre, de définir les missions du médecin de premier recours, sa place dans la chaîne continue des soins, le dépistage, la prévention et l'éducation sanitaire. Vous avez également raison de moderniser notre système de santé, et la mise en place d'une organisation fonctionnelle entre disciplines des professionnels de santé de proximité dans des pôles de santé apparaît comme une avancée réelle.

Il faut aussi privilégier les mesures qui visent à valoriser et améliorer l'exercice de cette profession : ce doit être notre ambition. Mais surtout, nous ne pouvons plus ignorer qu'aucun bénéfice à moyen et long termes ne sera possible sans une meilleure répartition sur le territoire. Voilà notre défi.

J'appuie, madame la ministre, l'ouverture des chantiers que vous proposez pour sauvegarder en urgence notre système de santé bien malade et dont l'état s'aggrave d'année en année. Vous nous avez d'ores et déjà donné quelques indications ; je ne doute pas que vous en fournirez d'autres. Votre démarche sera, dans les semaines à venir et les mois qui précèdent le PLFSS pour 2009, sous les feux de l'actualité. C'est bien normal, car c'est une grande préoccupation des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Flory

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, le sujet qui nous réunit aujourd'hui est l'une des préoccupations majeures de nos concitoyens.

Nous sommes en effet confrontés à de profondes évolutions démographiques, mais aussi thérapeutiques. La nécessité de performances accrues sur certaines pathologies associée à l'obligation de conforter la sécurité médicale sur tous les territoires donnent toute sa légitimité à la réflexion engagée pour rendre plus performant notre système de soins.

Dans cette démarche, les approches nationales, souvent globalisantes, doivent aussi tenir compte des particularités territoriales. Chaque territoire de santé, chaque bassin de vie doit donc faire l'objet d'une analyse spécifique en termes d'organisation de l'offre de soins.

Certains critères doivent être pris en compte pour définir le type de services à apporter pour garantir un accès aux soins optimal aux femmes et aux hommes de nos territoires. Si des critères quantitatifs de densité d'offre et de population couverte ont une certaine pertinence en zone urbaine, ils méritent d'être complétés par des critères plus qualitatifs, en particulier dans les zones rurales et périurbaines

En effet, certains territoires cumulent des caractéristiques qui influent sur le niveau d'offre de soins nécessaire. Je pense notamment, étant élu dans une circonscription de cette nature, à des espaces ruraux, enclavés, à la population âgée, au tissu économique et social parfois fragilisé, mais qui peuvent aussi connaître une fréquentation touristique significative soutenue par la pratique de sports de nature à risque. Tout cela se traduit par une intensité plus forte des risques sanitaires, qui conforte la nécessité d'une analyse qualitative plus poussée, d'autant que doit également être prise en compte la question du temps d'accès aux premiers secours et aux premiers soins à domicile, avant une éventuelle orientation vers les services hospitaliers adaptés.

Journées à rallonge, gardes à répétition, vacances sporadiques… le quotidien des médecins et de l'ensemble des professionnels de santé dans certains territoires en voie de désertification médicale doit également être pris en considération. À cet égard, l'impulsion donnée par l'État et par vous-même, madame la ministre, aux structures communes telles que les maisons de santé mérite d'être soulignée et amplifiée, même s'il ne s'agit là que d'une partie de la réponse à apporter.

En complément de ces données spécifiques, il est impératif de tenir compte du temps d'accès au plateau technique de soins le plus proche. Certains experts ont évoqué un temps maximal d'accès qui ne devait pas excéder 45 à 50 minutes pour certains services de soins critiques ; vous avez vous-même évoqué il y a quelques jours des délais de 20 à 25 minutes pour 80 à 90 % de la population.

La classification et donc l'offre de soins apportées sur chaque plateau technique doivent être analysées en fonction des particularités locales.

Pour prendre l'exemple concret, central et sensible, des services de soins critiques, trois niveaux généralistes existaient avant 2002 : la réanimation, les soins intensifs et la surveillance continue, le niveau « soins intensifs » pouvant correspondre à certains établissements hospitaliers de taille intermédiaire.

Le décret du 5 avril 2002 a limité à deux niveaux généralistes – réanimation et surveillance continue – la classification des services et donc l'offre de soins correspondante, avec, à la clef, des contraintes beaucoup plus lourdes pour les établissements concernés. Ainsi, aujourd'hui, certains établissements hospitaliers de taille moyenne éloignés d'autres centres référents doivent assurer des soins qui excèdent les missions accordées aux seules unités de surveillance continue.

Avant 2002, certains de ces établissements auraient pu relever d'une classification en soins intensifs généralistes de leurs services. Aujourd'hui, ils ne peuvent pas relever de la seule classification en surveillance continue. Les risques, parfois cumulés, que je viens d'exposer motivent une classification adaptée en réanimation dans le cadre du texte réglementaire actuellement applicable. Afin de faire face à des configurations démographiques, géographiques et sociologiques spécifiques, ils devraient donc pouvoir bénéficier d'une analyse spécifique de leurs contraintes et des besoins de la population en termes de santé publique.

Parmi les 1 100 établissements publics de santé que compte notre pays, quelques dizaines – probablement moins – relèvent ainsi de territoires qui cumulent un certain nombre de handicaps. Ils ont été identifiés dans le cadre d'études récentes.

Sur le plan budgétaire, et afin de conforter les plateaux techniques de ces établissements, une bonification de la tarification qui leur est appliquée me paraît opportune pour qu'ils remplissent convenablement leurs missions.

La recomposition de l'offre de soins en cours doit donc tenir compte des particularités des territoires, en priorité lorsque ceux-ci sont exposés à un cumul de contraintes. Ensemble, madame la ministre, il nous appartient de garantir l'égalité devant la santé, pour tous et en tout point du territoire national. Je sais que c'est votre engagement et je vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Boisserie

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je vais vous parler de l'école. Le rôle de l'école est avant tout l'éducation. Cependant, parce qu'il existe un lien réel entre santé et éducation, et parce que les établissements scolaires sont fréquentés quotidiennement par tous les enfants, il appartient aussi à l'école, espace de socialisation et de pratique de la citoyenneté, de veiller à leur santé et de les aider à adopter des comportements qui la préservent.

Santé et éducation sont donc étroitement liées, et constituent ensemble le socle sur lequel s'appuie une dynamique de la réussite. L'éducation contribue au maintien et à l'amélioration de la santé des Français en procurant les moyens nécessaires.

La prise en compte de la santé des élèves ne peut être l'affaire de quelques spécialistes mais concerne au contraire l'ensemble de la communauté éducative. Il est de ce fait impératif que le Gouvernement donne les moyens, tant sur le plan financier que sur celui du personnel, pour doter l'école d'une véritable politique de santé.

Or que constatons-nous aujourd'hui – et ce n'est pas nouveau ? Les syndicats d'enseignants, les associations de parents d'élèves, les services de l'éducation nationale nous ont alertés sur un certain nombre de problèmes, notamment le déficit considérable de médecins scolaires mais aussi d'infirmières.

Permettez-moi de vous rappeler, madame la ministre, les visites obligatoires à l'entrée du CP et du CE2, pour le poids et la taille, en 6e ainsi qu'en 1re année de lycée professionnel. Or, dans de nombreux établissements, ces visites sont inexistantes ou largement décalées dans le temps. Il y a pourtant des cas particulièrement sensibles qui mériteraient d'être décelés très tôt et pour lesquels les manque de soins engage l'avenir des enfants.

L'éducation nationale manque effectivement de praticiens, et c'est souvent les infirmières qui acceptent d'assurer certaines missions qui ne sont pas les leurs.

En effet, dans l'urgence elles transmettent aux médecins les cas les plus graves, les cas les plus urgents.

Manque de médecins aussi parce que, il faut bien le dire, manque d'attractivité de l'offre. En effet, certains sont recrutés comme vacataires ; il y a donc précarité. Par ailleurs, il est nécessaire d'offrir une rémunération acceptable, et je comprends parfaitement que certains préfèrent faire leur carrière ailleurs.

Et puis, au risque de vous faire gratter, madame la ministre, vous qui êtes une élue de terrain, vous savez bien ce qui se passe pour les poux à l'école ! Rien ou presque rien !

En outre, les communes doivent souvent se substituer à l'État défaillant, vous l'avez vous-même reconnu, afin d'éduquer les enfants. Il en est ainsi de ma commune, que j'administre, comme de beaucoup d'autres. Elle s'est engagée dans le programme EPODE.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Ça, c'est très bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Boisserie

Merci.

Ce programme propose des actions concrètes et visibles de prévention. Ces dernières sont mises en place à l'échelle locale pour sensibiliser la collectivité, informer et mobiliser les médecins, les enseignants, les parents..., afin de favoriser le dépistage précoce et proposer un outil d'aide à la prise en charge. Et nous avons déjà des résultats très positifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Boisserie

L'objectif est d'encourager la pratique d'activités physiques régulières et de sensibiliser la population à une alimentation diversifiée et structurée, conformément aux recommandations actuelles du Programme national nutrition santé, le PNNS.

Pour être digne de sa mission éducative, l'école doit assurer aux élèves, tout au long de leur scolarité, une éducation à la santé en articulation avec les autres enseignements. Certes, il y a eu certaines avancées : en 2003, le contrat cadre entre le ministère de l'éducation et celui de la santé qui a mis en place un programme quinquennal de prévention et d'éducation ; et lors de la rentrée 2006, le décret relatif au fonctionnement des établissements publics locaux d'enseignement qui a inscrit le comité d'éducation à la santé et à la citoyenneté dans le pilotage de chaque établissement scolaire du second degré. Mais ce n'est pas suffisant. Le nombre d'actions structurées et pérennes reste limité et leur efficacité demeure difficilement évaluable en termes de santé publique.

Il me semble qu'une approche globale de la santé scolaire doit être privilégiée, en lieu et place des interventions fragmentaires actuelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Boisserie

Il y a donc nécessité absolue de mettre en place des services de santé stables, des équipes pérennes en milieu scolaire, des médecins scolaires qui ne soient plus des médecins « volants ».

En résumé, le Gouvernement se doit de mettre en place rapidement une véritable politique de santé scolaire, car elle est un investissement sur l'avenir de notre pays.

Permettez-moi aussi, madame la ministre, en tant que président de conseil d'administration d'un centre hospitalier plutôt rural, de vous rappeler, encore une fois, nos inquiétudes et nos attentes.

Enfin, sur la carte de garde des médecins, au nom de la sécurité de nos concitoyens, je vous demande de ne pas retenir le seul critère de population, mais d'être réaliste et de tenir compte des distances et, par conséquent, des temps d'intervention des médecins libéraux.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Évidemment !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Boisserie

Mais ce n'est pas dans les hypothèses étudiées actuellement, madame la ministre. Nous comptons donc sur vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Merci, monsieur Boisserie, d'avoir respecté très précisément votre temps de parole.

La parole est à M. André Flajolet.

Debut de section - PermalienPhoto de André Flajolet

Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, faut-il de nouvelles réponses pour redonner sens et contenus à la démocratie sanitaire sur l'ensemble du territoire national ? Comment répondre à la diversité et à la complexité des problèmes de prévention et d'accès aux soins ? Comment réduire les inégalités culturelles et sociétales dont les personnes sont à la fois acteurs et victimes ?

Ces questions sont au coeur du projet de loi « Patients, santé et territoires », et ce débat fait partie des travaux préparatoires et des lieux privilégiés d'écoute et de dialogue.

Pour ma part, je veux insister sur l'indispensable organisation de la prévention comportementale et nutritionnelle, tant sur le plan individuel que collectif.

Si chacun a, sans toujours en avoir une réelle conscience, un patrimoine santé, ce dernier connaît, parfois même avant la naissance, des dépréciations qui peuvent conduire très vite à l'entrée dans le système de soins.

Aussi, je suis convaincu qu'il nous faut mettre en place, d'une part, une politique dynamique de la prévention à tous les niveaux dès la petite enfance, avec le tissu associatif et les collectivités, dans le cadre scolaire pour un réel dépistage des difficultés d'origine bucco-dentaire, auditive ou visuelle, et, d'autre part, la promotion des bonnes pratiques sportives et nutritionnelles – car l'obésité est un fléau – au coeur des entreprises, pour lutter contre le stress, les troubles musculo-squelettiques ou le bruit, mais aussi dans les réseaux gérontologiques pour reculer le plus loin possible le recours à l'institution.

Parce que notre système de santé est lui-même malade, il nous faut construire de nouvelles infrastructures sanitaires, avec la possibilité de créer de réelles communautés de santé, en particulier dans les secteurs sous-denses comme certaines zones rurales ou zones urbaines sensibles, inventer une gouvernance alliant la fonction régalienne de l'État et les volontarismes de proximité des collectivités au sein du GRSP, établir des projets partagés pour gagner en efficacité et lisibilité, réduire les coûts de réparation par une meilleure organisation et une meilleure coordination des niveaux de prévention et de connaissance, et répondre ainsi à la définition de l'OMS, qui définit la santé comme « un état de complet bien-être physique, mental et social et [qui] ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité ».

Votre département ministériel, madame la ministre, comprend la santé et le sport, et je vous propose de créer un vrai métier de préventionniste ou d'éducateur médico-sportif, acteur de santé publique, de recréation du lien social et de prise de conscience des règles sociétales. Le monde de la santé en a besoin, de nombreux étudiants l'espèrent, les collectivités et associations l'attendent vivement, et le budget de la sécurité sociale s'en portera mieux à court terme.

La région Nord-Pas-de-Calais, dont je suis originaire, subit plus que d'autres les inégalités territoriales de santé,…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

C'est vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de André Flajolet

…tant en ce qui concerne la disponibilité des soignants que l'espérance de vie des soignés, et s'est investie financièrement pour tenter de corriger cette situation.

La région Nord-Pas-de-Calais et ses collectivités sont disponibles, sur le principe, pour être partenaires de votre projet d'avenir dans l'expérimentation d'une vraie politique de prévention comportementale et nutritionnelle, le soutien aux communautés de santé dans les territoires de proximité confrontés à l'insuffisance de la présence des soignants, la réalisation de communautés hospitalières publiques associant ensuite des secteurs privés non lucratifs et lucratifs pour assurer une couverture efficace d'un bassin de vie, l'expérimentation de nouveaux métiers comme les orthoptistes et les infirmières spécialisées en particulier en santé mentale, la reconnaissance d'un statut pour les animateurs des plans territoriaux de santé, de nouvelles pratiques préventives en médecine du travail.

Nous manquons dans le Nord-Pas-de-Calais de spécialistes, qui ne restent pas en région : il nous faut une régulation en fonction des besoins. Nous manquons de généralistes dans certains secteurs géographiques : nous aspirons à une prise de conscience, lors des études, de la nécessité d'assumer des missions de santé publique. Nous avons des indicateurs de cancer importants : il faut renforcer les campagnes de dépistage.

Ces constats supposent, madame la ministre, un projet partagé pour que l'État soit garant d'un égal accès aux soins, et les élus territoriaux solidaires de cet enjeu de santé publique attendent de vous un traitement inégalitaire pour la région Nord-Pas-de-Calais, exprimé par un soutien financier exceptionnel et durable afin d'effacer ces injustices du point de vue humain et collectif. Je ne doute pas de votre volonté d'accéder à ce contrat de confiance, et je vous en remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Merci, monsieur Flajolet, d'avoir respecté à la seconde près votre temps de parole.

La parole est à M. Pierre Morange.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Morange

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, les ordonnances de 1945 ont eu pour objectif de concrétiser la solidarité républicaine par la mise en place d'une sécurité sociale à vocation universelle où chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins.

Cette époque fut marquée par une croissance forte, un taux de chômage faible, une entrée précoce dans le monde du travail, un départ à la retraite plus tardif qu'aujourd'hui, une espérance de vie plus limitée qu'actuellement et un nombre de bénéficiaires plus réduit. Depuis, la croissance a diminué de moitié, le taux de chômage a doublé, l'entrée dans le monde du travail est plus tardive, le départ à la retraite plus précoce, l'espérance de vie a augmenté de près de quinze ans et le nombre des bénéficiaires s'est accru.

Le déficit chronique, en particulier de l'assurance maladie, a pu être réduit de moitié grâce à l'action gouvernementale, mais ne peut nous satisfaire tant le retour à l'équilibre s'impose pour, à la fois, sécuriser notre système de solidarité et ne pas transmettre une dette aux générations suivantes.

La mondialisation de l'économie, avec son cortège de transferts de centres de production, le renchérissement des matières premières, tout particulièrement de l'énergie, et l'instabilité financière font courir un risque de récession, notamment pour nos sociétés dites développées, sans évoquer les exigences européennes. Le retour à l'équilibre de nos comptes sanitaires et sociaux n'en est donc que plus urgent.

La complexité de notre système de soins, son cloisonnement, son défaut de coordination, le vieillissement démographique, l'accroissement du coût de la technologie entre autres facteurs ont été maintes fois soulignés. De nombreux plans de sauvetage ont été proposés ; ils n'ont pu que très partiellement répondre à ces défis par manque de constance ou de moyens.

C'est donc la raison d'être de notre débat au sein de notre hémicycle afin de fournir une solution durable aux Français en matière de prise en charge sanitaire. Le texte gouvernemental qui nous sera présenté à l'automne a cette ambition en proposant : un dispositif de santé publique cohérent, afin que la prévention ne soit plus ce parent pauvre tant de fois décrié ; une coordination réelle entre les soins ambulatoires et hospitaliers permettant une gradation du parcours de soins au service du patient, associé à un décloisonnement entre les secteurs sanitaire et médico-social ; une clarification opérationnelle de la gouvernance et de la gestion hospitalière ; une protocolisation effective des stratégies diagnostiques et thérapeutiques avec une responsabilisation efficace des prescripteurs, associées à une prise en compte de la formation des professionnels de santé et une meilleure répartition des tâches pour pallier la désertification des territoires ; enfin, une régionalisation de l'organisation de notre système de soins, afin de mettre en place une véritable coordination des différents acteurs.

La vision globale de votre projet, madame la ministre, est un gage de succès. Toutefois, sa mise en oeuvre nécessitera du temps et la rationalisation des moyens humains, techniques et financiers qui la sous-tend ne participera à l'équilibre des comptes qu'à moyen terme. Or le déficit actuel ne peut attendre ce terme.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Morange

Il importera donc que, au sein du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, soient proposées également des mesures de court terme qui permettent d'y répondre. De nombreux rapports ont souligné tout à la fois la hauteur remarquable de la prise en charge de l'assurance maladie obligatoire, de l'ordre de 77 % depuis une dizaine d'années – les complémentaires en assurant près de 13 % – et l'importance du reste à charge pour les patients, notamment pour les frais d'optique et les frais dentaires.

Une réflexion, à mon sens, s'impose concernant le transfert de quelques points de l'assurance maladie obligatoire vers les complémentaires, associé à un relèvement de la prise en charge en matière dentaire et optique et à un renforcement de la mise en oeuvre de la complémentaire santé. Sur ce point, le risque d'une majoration des primes d'assurance complémentaire pourrait être relativisé, à la lumière du récent rapport de la Cour des comptes rendu à ce sujet.

C'est ainsi que nous pourrons assurer l'égal accès à des soins de qualité pour tous les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Merci, monsieur Morange, d'avoir parfaitement respecté votre temps de parole.

La parole est à M. Christian Paul.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Monsieur le président, madame la ministre, mesdames et messieurs les députés, la qualité d'un système de santé qui se prétend l'un des meilleurs au monde peut se briser net quand les inégalités se creusent dans la France de tous les jours. Notre système de santé craque de toute part ; il faut le réformer en profondeur, avec une vraie vision des besoins de la population – en particulier de celle qui vieillit – et de l'organisation de la santé sur les territoires.

Toujours, les crises frappent les plus faibles et les plus isolés.

Devant la santé, la prévention et les soins, les Français sont profondément inégaux pour trois raisons : financières, culturelles et géographiques.

Financières, d'abord. Sur la liste noire de cette législature, figureront les franchises – Catherine Lemorton l'a dit ce matin –, les tarifs, qui ne connaissent plus de limites quand le privé devient le seul recours, les écarts d'honoraires et de rémunération les plus indécents, signes d'un système qui a perdu son gouvernail et beaucoup de son éthique.

Des raisons culturelles, ensuite, parce que la prévention, la santé publique, la médecine scolaire, la médecine du travail ont vu leur maillage régresser.

Des raisons géographiques, bien sûr, car le désert médical est en expansion accélérée dans les campagnes, mais aussi dans les villes.

Madame la ministre, vous vouliez des propositions : en voici !

Avec le groupe socialiste, nous abordons ce débat avec un plan de bataille contre le désert médical. La formation, l'organisation, les rémunérations, le financement : comme l'a dit Jean-Marie Le Guen, c'est un chantier global.

L'État doit prendre, avec le concours de l'assurance maladie, au moins sept engagements devant les Français, non pas mezza voce, mais avec force.

D'abord, créer des normes de délai d'accès aux soins est vital. Or la loi est muette sur ce point. Les Français réclament, à juste titre, que la République rétablisse l'égalité par la loi, qui doit dire clairement qu'on ne saurait être, au XXIe siècle, à plus de trente minutes d'un SMUR ou à plus de quarante-cinq minutes d'une maternité. Et cela vaut pour l'ensemble de l'offre de soins.

Ensuite, il faut mettre en place un pilotage régional qui tourne le dos à l'impuissance et à l'autocratie. Que les agences régionales de santé mettent fin à l'empilement des structures, c'est bien, mais pas pour y substituer un pouvoir sans partage et « bunkerisé ». Les collectivités locales et régionales, les territoires, les usagers y ont leur place ; nous en débattrons.

La définition d'une stratégie des formations est également une urgente obligation. Non seulement les numerus clausus doivent être encore assouplis, mais finement adaptés aux besoins de chaque région, discipline par discipline, et plus seulement dictés par les besoins des CHU. Ce serait du jamais vu. J'aimerais décerner une mention spéciale pour la création – enfin ! – de la filière universitaire de médecine générale, médecine noble mais si maltraitée à l'université que plusieurs générations d'étudiants l'ont fuie. Toutefois, la durée des stages obligatoires en ambulatoire doit être plus longue. Surtout, il faut dès maintenant des enseignants titulaires et associés en nombre suffisant : non seulement on est loin du compte dans vos propositions, mais Mme Pecresse semble s'y opposer.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Priorité doit être donnée au niveau national aux installations dans les zones déficitaires, à condition de ne pas décréter des zonages hors-sol, avec des critères terriblement incomplets. Or le projet de zonage qui vient d'arriver dans nos régions est l'un de ces messages paradoxaux dont vous avez le secret. L'aide que vous prévoyez d'allouer aux maisons de santé est dérisoire : elle ne couvre même pas la TVA que les collectivités qui les construisent doivent reverser à l'État. Il faut recourir à l'incitation, mais aussi à la coercition lorsque c'est nécessaire. La liberté d'installation n'est pas un dogme. Mais s'il doit y avoir coercition, elle doit concerner d'abord le secteur 2 là ou il a l'exclusivité, les dépassements d'honoraires et les disciplines excédentaires en étudiants par rapport aux besoins. Là serait le courage, plutôt que de dissuader du choix de la médecine générale des jeunes qui hésitent, qui doutent et auxquels il faut faire découvrir ce métier.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Pourquoi ne l'ont-ils pas dit pendant la grève des internes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Il est temps d'accorder aux généralistes, hussards abandonnés de notre système de santé, la reconnaissance, qu'ils ont longtemps attendue, de leur statut, de leurs missions et de leur rémunération. C'est ainsi que la médecine de premier recours redeviendra attractive, y compris dans les zones déficitaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Une mutation radicale des conditions d'exercice des professions de santé doit être opérée. L'heure est aux regroupements, aux réseaux de santé sur les territoires, aux délégations et au partage des tâches, au travail en équipe.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Ce sera dans la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

L'heure est également à la transformation, longtemps combattue, des modes de rémunération, vers des formes mixtes associant au paiement à l'acte un forfait permettant d'assumer des missions d'intérêt général – prévention, dépistage, permanence des soins –,…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Nous sommes d'accord.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

…rendues totalement facultatives par M. Mattei en 2003, ce qui a beaucoup contribué à la désertification médicale. (« C'est vrai ! » et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Enfin, nous attendons un maillage hospitalier qui reprenne confiance. Aujourd'hui, l'hôpital, petit ou grand, souffre d'asphyxie humaine et budgétaire. Chaque fois qu'un hôpital public est déstabilisé, le territoire s'enfonce dans le désert médical, car les médecins s'en détournent. Il faut trouver le bon équilibre entre sécurité et proximité, dans un esprit de responsabilité, sans défendre l'indéfendable, mais sans restructurer à l'aveugle. Les Français n'acceptent plus les restructurations à la hache, que vous menez aujourd'hui avec beaucoup d'amateurisme technocratique, une concertation de façade et un discours sur la sécurité sanitaire qui, au nom du mieux, fait parfois le mal. Nous l'avons tous vérifié, quand ces restructurations brutales cassent des équipes médicales plébiscitées par la population, sans évaluation loyale de leur savoir-faire, au nom de critères partiaux et abstraits. Je veux parler ici, au nom de plusieurs dizaines de petits hôpitaux, de Carhaix à Lannemezan, de Clamecy à Châtillon-sur-Seine.

Parfois fragilisés, c'est vrai, ils sont souvent portés par une qualité humaine et technique qui n'a pas à rougir des comparaisons avec les grands centres hospitaliers. Leurs missions sont différentes, respectons-les.

Madame la ministre, l'honneur en politique, c'est parfois de savoir venir sur le terrain, là où c'est difficile, et de ne pas se protéger derrière les paravents d'un pouvoir que vous savez, comme moi, éphémère. Le vrai courage, c'est d'y aller, d'écouter, de comprendre et d'aider à reconstruire.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Votre mission est difficile, je le sais, mais vous seriez respectée et écoutée si vous saviez échapper aux conformismes bureaucratiques, à la pensée unique qui pousse à l'hyperconcentration hospitalière, aux corporatismes et aux clientélismes qui ont paralysé la politique de santé de votre majorité pendant des années. Les Français attendent de vous et de nous une action énergique contre le désert médical, car des millions d'entre eux vivent comme une rupture dramatique cette privation progressive du droit à la santé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Monsieur le président, j'espère bénéficier de la même clémence que M. Paul, qui n'a pas respecté son temps de parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

J'essaie de compenser les dépassements, non seulement entre les orateurs, mais entre les groupes. Vous reconnaîtrez que ma tâche est complexe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Madame la ministre, sachant que tout ministre entrant dans ses fonctions s'empresse de faire sa propre réforme, nous avons été rassurés d'entendre qu'il n'en était pas question pour vous. D'autant que celle de 2004 n'est pas encore totalement mise en oeuvre, je pense en particulier au dossier médical partagé.

Nous sommes réunis aujourd'hui – et je vous remercie de donner la parole aux parlementaires sur ce sujet – parce que notre système de santé est affecté d'un véritable paradoxe. Non seulement il coûte cher et est déficitaire, mais, contrairement à hier, il ne répond plus aux exigences de santé publique que sont en droit d'attendre nos concitoyens. Là est le véritable problème.

Quels sont les objectifs de la réforme que vous allez mettre en place ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vergnier

Vous venez de dire qu'il n'y aura pas de réforme !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

D'abord, maîtriser les dépenses de santé de manière médicalisée et non comptable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Des deux côtés de l'hémicycle, on ne peut qu'y être favorable. Chacun de nos concitoyens, y compris parmi les plus modestes, doit pouvoir avoir accès à des soins de qualité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Cela suppose de procéder à des réorganisations afin de corriger certaines dérives graves.

La première d'entre elles est la démographie médicale, qui présente aussi un aspect paradoxal : il n'y a jamais eu autant de médecins sur le territoire, et pourtant on n'en a jamais autant ressenti l'absence dans des secteurs considérés comme des déserts sanitaires, en milieu rural comme en milieu urbain. La raison à cela est connue : il n'y a pas de gestion réelle des effectifs médicaux. La liberté d'installation, à laquelle les médecins sont très attachés, ne justifie pas que chacun puisse s'installer n'importe où.

Le principe du conventionnement collectif tel qu'il a été mis en place – je suis d'accord avec M. Le Guen sur ce point, même si je le dis de manière moins excessive –,…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vergnier

M. Le Guen est pourtant un homme très mesuré ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

…montre aujourd'hui ses limites. Comment comprendre que l'assurance maladie permette à des médecins de s'installer dans des zones saturées quand les mesures incitatives prises depuis plusieurs années se montrent peu efficaces dans les secteurs désertifiés ? Une véritable gestion des effectifs médicaux sur l'ensemble du territoire me paraît donc indispensable.

Je ne voudrais qu'on en revienne à une opposition entre la gauche pro-généralistes et la droite pro-spécialistes. Puisque le médecin généraliste était au coeur de la réforme de 2004, il faut définir ses missions plutôt que de se battre pour savoir si la médecine généraliste doit devenir une spécialité. Le généraliste est la plaque tournante du système de soins français. Bien sûr, il ne peut pas être compétent dans tous les domaines, mais son rôle est primordial dans l'organisation du système sanitaire, dans la gestion des flux, dans l'orientation des patients. Et cela n'est pas pris en compte dans les études médicales aujourd'hui. Ce n'est pas dans l'hôpital public que le généraliste va se former, mais sur le terrain, dans les cabinets.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

C'est cette formation, absolument indispensable, qui permettra d'optimiser notre système de santé.

Une deuxième dérive peut être observée dans l'utilisation des ressources disponibles. Il faut envisager d'urgence des transferts de compétences. Par exemple, pour remédier au manque de plages horaires en ophtalmologie, pourquoi ne pas faire appel aux optométristes, qui peuvent régler des problèmes de vue ? Il n'est pas vrai qu'on manque d'ophtalmologistes. Le recours aux transferts de compétences permettra de dégager du « temps médical » – je ne sais plus qui en a parlé. (« C'est M. Le Guen ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Si c'est M. Le Guen, il n'y a pas de problème…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Moi aussi !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

D'autant que Mme la ministre est d'accord aussi sur ce moyen de raccourcir les temps d'accès aux soins. Aujourd'hui, c'est indispensable et urgent.

En revanche, s'agissant de l'organisation territoriale des hôpitaux, je ne suis pas d'accord avec M. Paul. Aujourd'hui, la technicité des plateaux techniques, des blocs opératoires est telle qu'on ne peut pas tout faire partout.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Si nous voulons que nos compatriotes aient accès à des soins de qualité, il est indispensable de hiérarchiser.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Mieux vaut investir dans des infrastructures routières ou dans des rotations d'hélicoptères que de maintenir artificiellement une maternité comme à l'hôpital de Clamecy, dont on sait que certains médecins qui y travaillent vivent à l'étranger.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

C'est faux ! Cela n'existe plus depuis des années. Vous ne faites que colporter des rumeurs, c'est de l'incompétence et de l'intoxication !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Il faut oser le dire, mettre les pieds dans le plat : vous défendez l'indéfendable !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vergnier

Et vous, vous voulez remplacer les hôpitaux par des routes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Enfin, sur l'aspect financier, la profession médicale subit en permanence l'opposition entre public et privé, qu'il s'agisse des médecins ou des hôpitaux. Il faut rapprocher les deux cultures, qui ont chacune des points forts et des points faibles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Sur le plan de la rémunération comme sur celui de l'activité, pour décloisonner les deux structures, il est indispensable que le mode de rémunération des professionnels de santé s'inspire des bons aspects des deux secteurs en laissant de côté les mauvais. Par définition, la rémunération à l'acte est inflationniste et le salariat n'incite pas au dépassement de soi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

C'est la raison pour laquelle il faut mixer les deux systèmes de rémunération, pourquoi pas sur la base de contrats régionalisés fixant des objectifs de dépenses de santé et des ONDAM régionaux, pour qu'enfin la santé se rapproche des malades.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Nous diffuserons votre intervention dans tout le pays ! C'est incroyable !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Domergue

Vous avez fixé l'objectif du retour à l'équilibre en 2012. Je suis convaincu que, sans augmenter les prélèvements sociaux – sur ce point, je suis en désaccord avec M. Le Guen –, on pourra améliorer l'accès aux soins et leur qualité pour tous, grâce à la réorganisation de notre système de santé et surtout à du courage. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Mes chers collègues, constatant un laisser-aller certain dans le respect des temps de parole, je vous invite à vous ressaisir et vous en tenir au temps qui vous est imparti.

La parole est à M. Marc Bernier.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Bernier

Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, je me réjouis de la tenue de ce débat sur l'organisation de notre système de santé, qui montre combien le Gouvernement, et vous-même en particulier, madame la ministre, est conscient de l'urgence des mesures à prendre. J'ai fait de cette question l'un des chevaux de bataille de mon mandat parlementaire. Dès 2003, j'ai préparé un rapport sur l'équité des Français devant l'offre de soins, au nom du groupe d'études sur les professions de santé, dont plusieurs propositions avaient été reprises dans le projet de loi de développement des territoires ruraux.

Madame la ministre, vous avez organisé en avril dernier les états généraux de l'organisation de la santé, dits EGOS, dont la qualité a été reconnue par tous. Ils ont été l'occasion de montrer que les acteurs de terrain ont été entendus en haut lieu et que c'était bien la réorganisation de la médecine de premier recours qui garantira l'égal accès aux soins.

L'état des lieux, nous le connaissons : notre population est vieillissante et donc de plus en plus demandeuse de soins ; l'offre de soins est affectée par une mauvaise répartition sur les territoires, qui n'est pas due au manque de médecins ; les professions de santé connaissent un malaise profond, en particulier les médecins généralistes, qui subissent des contraintes administratives excessives, peinent à mener de front vie professionnelle et vie familiale – aspiration bien légitime – et à dégager des temps de formation et de coordination ; la médecine générale souffre d'une mauvaise perception par les étudiants, qui choisissent souvent cette spécialité par défaut.

Les problèmes d'accès aux soins ont, selon moi, trois dimensions.

Premièrement, une dimension géographique : les Français ont besoin de médecins, d'infirmiers, de chirurgiens dentistes et de professions paramédicales qui ne soient pas trop éloignés de leurs lieux de travail ou d'habitation.

Deuxièmement, une dimension temporelle : il n'est pas normal qu'il faille plusieurs mois pour obtenir un rendez-vous chez un ophtalmologiste, ou plusieurs jours pour voir son généraliste, sans parler des visites à domicile, qui deviennent une « denrée » très rare.

Troisièmement, une dimension financière : à quoi servirait-il de négocier âprement les tarifs de base de l'assurance maladie si l'on ne trouvait plus de médecins qui les appliquent ? (« Tout à fait ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Je n'aborde pas le sujet des dépassements d'honoraires, qui ont déjà été évoqués ce matin.

En mars dernier, j'ai été nommé rapporteur de la mission d'information sur l'offre de soins sur l'ensemble du territoire, chargée de formuler des propositions opérationnelles en vue de la loi « Patients, santé et territoires ». Nous travaillons de façon constructive avec le président de cette mission, notre collègue Christian Paul, faisant fi des clivages politiques, je le répète. Nous menons des auditions passionnantes, qui montrent, s'il en était besoin, l'urgence des mesures à prendre.

Parmi les sept propositions énoncées tout à l'heure par M. Christian Paul, j'ai reconnu beaucoup de messages transmis par les personnes auditionnées.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Bernier

Je ne peux vous livrer le détail de nos réflexions. Mais je voudrais cependant vous donner, à titre personnel, les grandes orientations et évoquer certaines propositions sur lesquelles nous travaillons.

Il faut impérativement revaloriser la spécialité de médecine générale. C'est ce que vous avez proposé, madame la ministre, lors des EGOS, puisque vous envisagez d'inscrire dans le code de la santé publique une définition de la « médecine générale de premier recours », du métier de généraliste et du SROS ambulatoire. Nous y reviendrons.

On pourrait aussi proposer – cette idée provient des auditions – aux médecins généralistes des « contrats » ou des « mandats de santé publique ». Nous pouvons avancer dans ce domaine. Ce sujet a été abordé plusieurs fois, notamment par les jeunes médecins, les futurs médecins, qui sont prêts à accepter des mandats de santé publique. Ils sont beaucoup moins attachés que leurs aînés au paiement à l'acte.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Bernier

Il faut aussi modifier la formation des professionnels de santé, pour les rapprocher le plus tôt possible des zones déficitaires et leur faire découvrir la médecine générale. Pour cela, on pourrait développer les stages en deuxième et en troisième cycle des études médicales auprès des médecins libéraux, des maisons des santé pluridisciplinaires, des réseaux de santé et des structures d'hospitalisation à domicile, dont on parle peu. La pratique généraliste et le travail en équipe conviendraient aux jeunes en formation.

Il faut instituer une politique plus dynamique de recrutement des professionnels dans les zones sous-dotées. Qu'est-ce qu'une zone déficitaire ? Le nombre de médecins par habitant n'est pas un critère suffisant.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Bernier

Il faut tenir compte du nombre de médecins âgés de plus de cinquante-cinq ans, du nombre d'actes par praticien, de l'âge de la population et notamment des personnes âgées de plus de soixante-quinze ans, …

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Bernier

…de l'éloignement du centre hospitalier structurant et d'une maison de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Bernier

C'est un sujet majeur. Nous sommes en parfaite harmonie avec Christian Paul. Cela mérite certainement, monsieur le président, que vous m'accordiez deux ou trois minutes supplémentaires. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Il fallait faire part à votre groupe de votre volonté de disposer d'un temps de parole plus long.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Leonetti

Monsieur le président, soyez indulgent. Vous-même, tout à l'heure, avez dépassé votre temps de parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Bernier

Il conviendrait de dissocier les deux actions : « venir exercer » et « s'installer ». Ce sont deux choses totalement différentes. Il faut développer les statuts alternatifs à l'installation.

Enfin, il faudrait faire au niveau national ce que nous sommes parvenus à réaliser en Mayenne. Dans ce département, où la mission doit se rendre cet après-midi, la situation était préoccupante. Grâce à un travail ambitieux sur le plan départemental, réunissant les élus et les professionnels, nous sommes parvenus à briser les tabous et à innover. Le principe réside dans le projet médical, et non dans la construction des structures.

Ce plan mayennais recouvre trois axes principaux.

Premièrement : couvrir les besoins de santé, à l'échelle d'un bassin de vie, autour d'un hôpital local – le pôle de santé – qui rassemblerait plusieurs maisons de santé pluridisciplinaires.

Deuxièmement : engager une politique active en faveur de l'accueil des stagiaires.

Troisièmement : améliorer la stratégie de communication, en instaurant notamment un guichet unique.

Je n'ai pas évoqué les mesures contraignantes en matière de liberté d'installation, car je pense qu'il ne faut pas en arriver là.

Moderniser notre système de soins pour garantir à tous un égal accès à des soins de qualité, tout en offrant de meilleures conditions de vie et de travail à nos médecins sera, je pense, l'objet de la future loi « Patients, santé et territoires », que beaucoup nomment déjà la loi Bachelot. Elle constituera une chance historique pour l'avenir de notre système de santé. Je serai à vos côtés, madame la ministre, pour défendre ce texte, à l'automne prochain. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Avant de vous donner la parole, monsieur Renucci, je suis contraint de rappeler que les orateurs doivent respecter le temps de parole qui leur est imparti, alors même que – j'en suis certain – tel sera votre cas. (Sourires.)

Vous avez la parole, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Renucci

Monsieur le président, votre rappel est, en ce qui me concerne, inutile, car je vais respecter mon temps de parole.

Madame la ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, l'hôpital public vit un paradoxe. Il bénéficie d'une grande confiance de la part de la population, comme le montrent les enquêtes d'opinion sur les services publics. En effet, dans un sondage de juin 2007, 81 % des sondés se déclaraient satisfaits. Dans le même temps, tout le monde s'accorde à dire que la situation n'a jamais été aussi grave : perte de moral des hospitaliers, difficultés de fonctionnement, crise financière. Ce paradoxe s'explique en grande partie par le dévouement exceptionnel des personnels hospitaliers, qui, dans leur grande majorité, continuent de faire face aux obligations et sollicitations, pourtant toujours plus lourdes.

Mais force est de constater que leur sens aigu du service public ne suffit plus à masquer la crise. Il est donc plus qu'urgent de prendre toutes les dispositions nécessaires pour relever les défis et engager la modernisation de l'hôpital. Nous savons que les réformes exigent un financement et ont donc un coût.

Si l'hôpital public demeure un pilier de l'offre de soins de qualité de notre pays, il ne se sauvera pas tout seul. Il faut repenser l'offre de soins dans son ensemble. L'hôpital doit aller plus loin en matière de réorganisation. Il existe des conditions préalables à son succès.

Premièrement, il faut que les pouvoirs publics assument pleinement leurs missions de régulation et régler préalablement la question de la démographie médicale. On constate une disparité très forte entre les rémunérations de certains professionnels, ce qui est mauvais en termes d'attractivité de l'hôpital.

Ensuite, l'hôpital a besoin de coordination et de cohérence territoriales. Les futures agences régionales de santé doivent s'attacher à rendre efficientes les communautés hospitalières de territoires. Le dispositif doit permettre de regrouper les forces, de mutualiser les compétences et d'apporter ainsi une réponse aux besoins de la population : la permanence des soins et des tarifs opposables pour toute personne, quel que soit son revenu.

Sans entrer dans le détail, les ARS doivent assurer une réelle coopération entre l'assurance maladie et l'État, assurer la cohérence du dispositif entre l'hôpital, les professionnels libéraux et le secteur médico-social, qui font partie intégrante de la chaîne de soins.

Deuxièmement, il faut fixer des perspectives financières crédibles qui permettent d'assurer les missions de service public attendues par nos concitoyens. L'hôpital public est dramatiquement sous-financé. Le déficit programmé est évalué à plus de 800 millions d'euros. L'ONDAM hospitalier voté est très en deçà des besoins liés à la seule reconduction des moyens au niveau national et à l'application des nouvelles mesures. Nous espérons que la préparation du PLFSS pour 2009 marquera, sur ce point, une évolution.

La santé a un coût, nos concitoyens doivent le comprendre et notre système de protection l'assumer. Mais ce coût doit être équitablement réparti entre secteur privé et secteur public.

Reprenons l'exemple de la T2A, l'hôpital assume seul les missions d'intérêt général, quand le secteur privé se trouve libre de contraintes. Cette réforme, qui se voulait équitable dans ses intentions, a plongé les établissements dans des situations indescriptibles.

La perspective d'une convergence avec le secteur lucratif est un leurre. Il faut – c'est une piste que je vous propose – financer, sur une base forfaire, les missions de service public, chiffrées à plus de 40 % des coûts de l'hôpital.

Mes chers collègues, l'hôpital public doit aller plus loin dans la rénovation de son organisation hospitalière. Depuis une dizaine d'années, les personnels hospitaliers se trouvent confrontés à un déferlement ininterrompu de réformes, toutes plus structurelles les unes que les autres : les emplois des ARH, l'accréditation, la certification, les lois de sécurité sanitaire, la réforme de la T2A.

Mais pour que la réforme se transforme en succès pérenne, il faut oser engager la réforme de l'offre de soins et assumer le coût financier de la santé devant l'opinion publique. J'ai conscience que même si ces conditions sont remplies, elles ne seront pas suffisantes. Elles doivent aboutir à la restructuration de l'offre hospitalière elle-même. Bien des aspects stratégiques de l'appareil de soins sont concernés : urgence, maternité, chirurgie, traitement du cancer, prise en charge de la gérontologie. Seules ces réformes permettront l'allocation optimale effective des ressources de notre assurance maladie.

Cette restructuration devra tenir compte des contraintes techniques liées à la sécurité des soins, mais aussi des aspirations de nos concitoyens, qui souhaitent que des soins de qualité soient dispensés sur l'ensemble du territoire.

Le rapport Larcher ouvre des pistes intéressantes – qui, je l'espère, ne seront pas toujours contradictoires – sur les mesures d'amélioration de la gestion interne. Nous sommes favorables à la simplification du fonctionnement administratif des établissements, à laquelle les acteurs aspirent et qui doit déboucher sur plus d'autonomie. Nous concevons que cette autonomie entraîne une plus grande responsabilité individuelle et collective des acteurs. Je crois qu'il faut assouplir les contraintes administratives. Il doit être possible, dans le cas par exemple des groupements d'intérêts, de rapprocher, quand c'est nécessaire, investissements publics et privés, sans substituer l'un à l'autre, à condition de respecter les principes de service public.

Il faut simplifier et clarifier les structures de fonctionnement de l'hôpital. Concernant les contraintes multiples existant au plan des tâches administratives, il faut mener la concertation avec les partenaires sociaux de l'hôpital, afin d'aboutir aux simplifications de bon sens, qui peuvent, en grande partie, se faire au sein même des établissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Renucci

Dans tous les cas, plus d'autonomie implique plus de responsabilités. Nous avons la conviction que cette direction est la bonne. En clarifiant le rôle du conseil d'administration, du président, du directeur, des médecins hospitaliers, qui assument la responsabilité des soins, il faut construire des complémentarités efficaces entre…

(Mme la ministre mime le serrage de boulons.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Non ! Sur le principe, monsieur Renucci, ce n'est pas au ministre de définir le temps de parole des parlementaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Renucci

Madame la ministre, vous nous avez reproché tout à l'heure notre manque de propositions. J'aborde le sujet de l'hôpital avec beaucoup d'humilité. Le « H » de l'hôpital signifie humilité. Chacun doit apporter sa pierre pour bâtir l'hôpital. Il n'y a pas des pierres de gauche et des pierres de droite. Les malades n'ont pas d'opinion politique. Ils ont simplement besoin de soins. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Je vous remercie, monsieur Renucci, d'avoir su concilier votre temps de parole et l'exposé de vos propositions.

La parole est à M. Philippe Vitel.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vitel

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il y a quelques semaines, Gérard Larcher a remis au Président de la République son rapport sur les missions de l'hôpital.

Il recommande de préserver l'avenir de l'hôpital, en garantissant son dynamisme. Il déclare : « L'hôpital public a de vrais atouts : une activité diversifiée, des pôles d'excellence, un personnel investi et motivé par les valeurs du service public. Son rôle dans l'offre de soins est majeur. Il rencontre toutefois de réelles difficultés. Une situation de concurrence de fait avec les autres offreurs de soins, rendue accrue par la convergence des modes de financement, exige de veiller au maintien de son dynamisme et de renforcer sa capacité d'adaptation. »

Gérard Larcher évoque ses craintes en termes d'attractivité de l'hôpital public, les difficultés de gestion réelles et les rigidités en matière de ressources humaines. Il propose de faire évoluer les règles de gouvernance internes des hôpitaux publics, afin de permettre un meilleur exercice par chacun de ses responsables, de donner de la souplesse aux règles de gestion, en définissant des principes de responsabilisation accrue des gestionnaires avec une exigence accrue en matière de sincérité des comptes, de renforcer l'attractivité des métiers de l'hôpital, en permettant aux hôpitaux de développer une gestion dynamique des ressources humaines.

La Cour des comptes, dans son rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007, dénonçait la non-fiabilité des comptes des hôpitaux. Elle évoquait une régularité comptable contrariée par la contrainte budgétaire, des déficits masqués, des excédents occultés, des actifs et des passifs méconnus et surtout des outils de comptabilité analytique insuffisants.

Alors même que la réforme de la tarification suppose une connaissance fine, par service et activité, des coûts internes, les outils d'analyse ou de ventilation de ces coûts restent le plus souvent embryonnaire ou insuffisamment fiables.

La politique d'achat des médicaments y est épinglée. Les écarts de prix entre établissements sont couramment de un à trois, parfois jusqu'à dix, révélant des modalités de négociation insatisfaisantes. Le rapport note que les comportements d'achat dans le secteur privé paraissent souvent plus professionnels.

En mai 2006, la Cour des comptes dénonçait l'opacité et la lourdeur de la gestion des ressources humaines, révélant que l'hôpital public était incapable de comptabiliser précisément ses effectifs, que le flou régnait sur le temps de travail, l'application des 35 heures ayant amené la création de 38 000 postes non médicaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vitel

C'est la réalité !

Malgré cela, les établissements manquent de personnel, car les disparités sont énormes, selon les hôpitaux et les régions, et même entre services d'un même hôpital, alors que les dépenses de personnel, qui représentent plus de 70 % des dépenses dans le public, contre 50 % dans le secteur privé, représentent, au total, plus du quart des charges de l'assurance maladie.

Aujourd'hui, madame la ministre, une profonde réforme de l'hôpital public, notamment en matière de gestion des ressources humaines, est plus que jamais nécessaire. Aucune convergence n'est possible si l'hôpital public ne réalise pas des économies importantes, lesquelles passent irrémédiablement par une rationalisation de la gestion des personnels.

En ce qui concerne les recettes, un préalable méthodologique doit conditionner les principes affichés par la tarification à l'activité : une plus grande médicalisation de la mise en oeuvre du financement, une meilleure équité du traitement des établissements, une plus grande responsabilisation des acteurs, un développement des outils de pilotage médico-économique, le fondement même de la T2A impliquant une lecture médicale et, conjointement, économique des activités.

Tous les hôpitaux publics ne sont pas inflationnistes et toutes les cliniques privées ne sont pas vertueuses. Toutefois, l'analyse des données de trente groupes homogènes de séjour qui totalisent le plus de dépenses – 33 % des séjours et 24 % de la facture – nous montrent que l'échelle publique coûte en moyenne 60 % de plus que l'échelle privée. Cette simple constatation nous confirme qu'une convergence intelligente aura un impact significatif sur les dépenses de santé, à condition que l'on mette en place une convergence qui permette une diminution des dépenses de santé et non une simple redistribution des cartes à budget constant.

L'IGAS retient l'hypothèse de la convergence vers le secteur le plus efficace, qui, à ses yeux, est le secteur privé.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vitel

Il convient toutefois de tempérer cette affirmation en n'excluant pas de revaloriser certains actes du privé pour éviter l'abandon progressif de ces activités et leur transfert vers le public à coût, bien sûr, plus élevé. Cela s'appelle la convergence vers le plus cohérent, la vraie cohérence tarifaire impliquant, en effet, d'étudier précisément pour chaque groupe homogène de séjour le prix de revient réel des actes, ce qui n'a jamais été fait en France, et de définir la marge raisonnable nécessaire à un établissement privé ou public pour faire face à ses charges courantes et financer ses investissements. Un tel système n'exclut pas les dotations spécifiques pour l'égalité d'accès aux soins de tous les citoyens sur tout le territoire.

Nous avons à la fois besoin d'un hôpital public efficace et de qualité et d'un secteur privé qui puisse assurer un juste équilibre entre la qualité de service et la nécessaire efficacité économique. De nombreux hôpitaux publics sont prêts à relever le défi de l'efficacité et de nombreuses cliniques privées sont prêtes à relever le défi d'une égalité de mission en contrepartie d'une égalité de moyens. Une réelle complémentarité passe par une saine concurrence qui permettra une meilleure utilisation des deniers publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vitel

Madame la ministre, mes chers collègues, l'article 15 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen trouvera toute sa raison d'être. En effet, nos collègues de l'époque ont, à cette tribune, décrété, le 26 août 1789 : « La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration. » (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Boënnec

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la permanence des soins est un sujet d'inquiétude pour beaucoup de nos concitoyens et pour de nombreux élus locaux. Dans certains cas, cette inquiétude est justifiée, mais, dans d'autres cas, elle peut être excessive. Ce service public n'est pas rendu à la population de manière égalitaire ou équitable sur l'ensemble du territoire, car il existe des zones « noires » de blouses « blanches » (Sourires), en particulier dans les zones rurales ou suburbaines.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Boënnec

En matière de permanence des soins, il existe bien une médecine des villes et une médecine des champs. Beaucoup s'accordent à dire que la permanence des soins est fragile, coûteuse, peu fiable, l'article 27 n'ayant pas, loin de là, réglé les problèmes.

La médecine de premier recours souffre d'une grande désaffection de la part des professionnels de santé en raison de son caractère anxiogène, mais aussi du fait d'une démographie médicale qui s'est féminisée,…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Boënnec

…d'habitudes sociétales nouvelles et d'un manque de reconnaissance .

L'instauration des agences régionales de santé doit clarifier la dichotomie entre l'organisateur de santé, l'État, et l'organisme chargé de la bonne efficience des dépenses, l'assurance maladie.

Cette agence, sous l'autorité de son directeur, et par le biais d'une gouvernance regroupant les différents acteurs, doit définir un schéma régional avec une enveloppe financière et une culture de l'évaluation et des résultats.

Permettez-moi de vous proposer quelques suggestions.

Favorisons le contrat, certains diront le contrat volontaire, même si, pour ma part, je considère qu'un contrat est, par nature, un acte volontaire.

Soyons innovants, élargissons ces contrats aux professionnels formés et compétents, selon un pragmatisme territorial : les médecins libéraux, mais aussi SOS médecins, les SDIS, les médecins correspondant du SAMU et, plus encore, les jeunes retraités, les praticiens hospitaliers en dehors de leur travail habituel, les internes des urgences, en particulier pour la période de la nuit profonde ou pour les actes médico-administratifs.

J'ai quelques questions à formuler : quelle sera l'articulation entre les agences régionales de santé et l'action et la responsabilité du préfet en matière de sécurité sanitaire ou de réquisitions, par exemple ?

Faut-il un numéro d'appel unique et lequel ? Le 112, le 15, le 18, des numéros d'appel comme celui de SOS médecins ou un numéro européen, par exemple ?

La régulation doit-elle être effectuée par un médecin libéral ou doit-elle associer un libéral et un urgentiste ?

Le conseil de l'ordre des médecins doit-il établir une liste des médecins assurant la permanence des soins ou se recentrer sur l'application du code de déontologie ?

La délégation des tâches, en particulier vers les infirmières, sera-t-elle d'actualité ?

Le patient doit rester au centre du dispositif, mais, lui aussi, doit participer à son amélioration par une information, une pédagogie adaptée.

Je vous remercie d'avance, madame la ministre, pour les précisions que vous pourrez nous apporter sur ces différentes interrogations et je tiens à saluer votre franchise intellectuelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Boënnec

Madame la ministre, vous le savez, nous sommes à vos côtés pour mener à bien cette réforme. De nombreuses contributions de notre assemblée et du Sénat ont été réalisées ou sont en cours pour vous aider dans cette tâche. Connaissant vos compétences et votre détermination, je vous fais toute confiance pour améliorer notre système de santé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je vais tâcher, en cinq minutes, de parler de ce chef-d'oeur du système de soins. Il faut promouvoir et valoriser l'exercice de la médecine générale par l'exercice de groupe, la diversification des modes de rémunération, le transfert des compétences, la télémédecine, la continuité des soins de premier recours avec l'hôpital – M. Christian Paul en a parlé.

La médecine générale doit être considérée comme une spécialité à part entière, ce qui n'est pas acquis. Admettez, madame la ministre, que l'épreuve de force à laquelle on assiste devant les commissions de la CNAM pour faire passer la consultation de C en CS n'améliore pas l'ambiance générale.

Qu'en est-il de la valorisation de la médecine générale pendant les études, notamment le stage de second cycle dont la mise en place a été annoncée en 2006 ? Le Quotidien du médecin ne titrait-il pas, ces derniers jours, « l'impossible mise en place du stage de médecine générale en second cycle » ? Or il est bien évident que ce stage ne peut être mis en place dans les conditions actuelles, notamment en raison du nombre insuffisant d'enseignants associés.

Qu'en est-il de la filière universitaire de médecine générale adoptée, à l'unanimité par notre assemblée, il y a peu de mois, ce qui prouve que l'opposition peut être constructive lorsqu'elle considère que les mesures adoptées sont bonnes ? Seulement huit postes d'enseignants associés, soit l'équivalent de 3,5 postes à temps plein, ont été annoncés. Aucune création de postes de chefs de clinique de médecine alors qu'il n'en existe que douze, n'est prévue.

En matière de formation, la situation est catastrophique, même si vos annonces nous quelque peu rassurés, madame la ministre. En réponse à une question de notre collègue Jardé, Mme Pecresse s'est engagée sur la création de huit postes en 2008. À ce rythme, il faudrait plus de deux siècles pour amener la médecine générale au niveau des spécialités techniques en matière d'encadrement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Leonetti

Ne parlez pas de chiffres, ce n'est pas cela le problème !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Pour les cinquante postes par an sur quatre ans dont vous avez parlé, il ne faudra plus que vingt-cinq ans pour y parvenir ! Mais j'imagine que cela se fera par redéploiement. Il faudra beaucoup de volonté politique pour que les structures ministérielles imposent le redéploiement de postes d'enseignants des spécialités techniques vers la médecine générale.

Sur le plan de la démographie médicale, c'est une discipline sinistrée ! Plusieurs de nos collègues, sur tous les bancs, l'ont fait remarquer. Les médecins généralistes ont, en moyenne, cinquante-deux ans ; ils sont aujourd'hui 50 000, mais leur nombre diminue depuis trois ans déjà. Au cours des dix ans qui viennent, 5 % des effectifs, soit 2 500 par an, partiront à la retraite, soit la moitié des effectifs actuels. Or, en 2004, seules 370 installations de jeunes médecins ont été comptabilisées.

Certes, vous avez augmenté le numerus clausus : 3 500 étudiants pour le diplôme d'études spéciales de médecine générale. Mais un tiers seulement des étudiants qui s'engagent dans cette voie s'installeront comme généralistes. L'augmentation du numerus clausus permettra, au mieux, d'aboutir à 1 100 installations dans six ans, alors que 2 500 départs à la retraite sont prévus. Pour parer à la catastrophe sanitaire annoncée, il faut prendre les mesures pour que 80 % de cette cohorte d'étudiants de médecine générale s'installent dans l'exercice ambulatoire. Vous n'en prenez pas le chemin car vous ne faites rien pour rendre l'exercice de la médecine générale plus attractif. Les efforts des collectivités locales pour favoriser l'installation matérielle des jeunes médecins ne suffiront pas. Il faut valoriser et enrichir le champ et la qualité de l'exercice de la médecine générale pour en augmenter l'intérêt et l'attractivité. Il faut faire du médecin généraliste l'acteur de base de santé publique dans le cadre d'un effort de réorientation de notre système de santé, principalement tourné vers les soins, vers une nouvelle approche, une approche sociétale de santé durable, accordant davantage de place à la prévention, à l'éducation sanitaire, à la santé environnementale, à la santé au travail et à l'école. Cette approche nouvelle est indispensable ; à cet égard, la médecine générale, la médecine de proximité constitue un atout décisif. Nous avions voté la création de la filière universitaire de médecine générale le 8 janvier 2008.

Les moyens mis à la disposition de la filière universitaire de médecine générale sont insuffisants pour permettre le déploiement de ces structures pluridisciplinaires de proximité. Cependant, chaque fois que vous nous proposerez des mesures positives, nous les soutiendrons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la qualité et la pérennité de notre système de santé sont une des grandes préoccupations des Français, tous les intervenants l'ont rappelé.

Pourtant, celui-ci n'est pas suffisamment efficace eu égard à sa mission qui est d'apporter à l'ensemble de la population une réponse à la fois solidaire et équitable en matière d'accès aux soins. La croissance exponentielle des dépenses de santé, pas véritablement maîtrisée, n'est pas soutenable pour le budget.

De surcroît, une gestion partagée entre l'État, l'assurance maladie et les collectivités territoriales se révèle, dans les faits, inefficace, car dispersée.

Dans ce contexte, la mise en place des agences régionales de santé, souhaitée par le Gouvernement, et que vous défendez avec conviction et détermination, madame la ministre, qui prône un pilotage unifié et responsabilisé, devrait contribuer à mieux structurer et maîtriser l'offre ambulatoire, à engager les restructurations permettant une meilleure efficience, et à reconsidérer l'offre hospitalière au profit du médico-social.

C'est ce dernier point que je souhaite particulièrement développer. Il me semble en effet indispensable de constituer des ARS à périmètre large, incluant tout le champ de la santé, y compris la médecine de ville et surtout le secteur médico-social.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

Beaucoup en conviennent, l'intérêt de cette solution est manifeste. Cela permettrait d'apporter aux personnels hospitaliers un savoir-faire utile à la prise en charge de populations spécifiques comme les personnes âgées, dont le nombre ne cesse de croître, ou les personnes handicapées. Avant tout, cette solution contribuerait à une meilleure organisation des parcours de soins et éviterait l'engorgement des services d'accueil des urgences, trop souvent confrontés à des hospitalisations inutiles et coûteuses, faute de places dans les structures médico-sociales d'aval.

L'organisation du parcours du patient et l'articulation entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social posent problème, nous le savons. C'est pourquoi un grand nombre d'acteurs considèrent qu'un pilotage conjoint de l'hôpital et des structures médico-sociales d'aval permettrait de fluidifier le parcours des patients et de réaliser des économies substantielles. Je rejoins cette analyse : le secteur sanitaire et le secteur médico-social doivent pouvoir constituer un champ professionnel cohérent, correspondant à une vision globale de la santé publique.

Dans cette perspective d'unification, plusieurs pistes sont envisageables. Les personnes âgées devraient ainsi être mieux orientées vers le court séjour, les soins de suite, les unités de soins de longue durée, la géronto-psychiatrie, les établissements pour personnes âgées dépendantes, les accueils de jour pour les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer. De la même façon, il conviendrait de mieux organiser la prise en charge du handicap psychique grâce à une meilleure articulation entre la psychiatrie, les maisons d'accueil spécialisées, les MAS, et les foyers d'accueil médicalisés, les FAM.

À ce stade de la réflexion, il me semble important d'évoquer l'aspect financier de la création de ce pôle sectoriel médico-social au sein des ARS. Le secteur social et médico-social représente quelque 35 000 établissements et services sociaux et médico-sociaux, allant de structures lourdes comme les EHPAD à des structures légères, s'apparentant presque à des structures de services à la personne. Pour savoir précisément quelles catégories d'établissements et de services médico-sociaux les ARS devront piloter, M. Philippe Ritter propose dans son rapport de choisir comme critère leur financement total ou partiel par l'assurance maladie, ce qui revient à retenir surtout les établissements et services concourant à la prise en charge des personnes âgées et des personnes handicapées. Je m'associe pleinement à cette proposition.

En outre, certains acteurs plaident en faveur d'une intégration différée du secteur médico-social dans le périmètre des ARS, pour lui laisser le temps de se restructurer grâce à une réforme de la tarification, une professionnalisation des acteurs et une restructuration de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

Enfin, madame la ministre, même si vous nous avez donné quelques indications à ce propos, permettez-moi d'insister sur la nécessité de valoriser les professionnels paramédicaux et leur travail.

Au regard de l'importance des enjeux d'avenir, il est essentiel de veiller à ce que le secteur médico-social retrouve son attractivité. Les personnels doivent être préparés au mieux à la prise en charge des populations bénéficiaires, d'où la nécessité de recruter des personnels qualifiés, mais également de reconsidérer les formations initiales – vous avez évoqué le LMD – et continues et d'oeuvrer à la professionnalisation de l'ensemble des personnels salariés.

Cela peut passer notamment par une réduction du coût des études d'aide-soignante ou de masseur-kinésithérapeute, par la promotion de l'apprentissage pour les plus jeunes et le développement de la formation en alternance pour les adultes, enfin par la validation des acquis d'expérience. Des campagnes de communication pourraient, par ailleurs, mettre en lumière la richesse et la diversité des métiers du secteur et valoriser le rôle essentiel qu'ils jouent au service de la collectivité nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

Il faut redonner confiance à ces personnels et les protéger des difficiles conditions d'exercice inhérentes à ces métiers. L'épuisement professionnel et le stress doivent faire l'objet d'une prévention et être mieux pris en compte, à travers la concertation, le soutien et la mise en place d'organisations du travail et de parcours professionnels évitant toute exposition continue. C'est un sujet auquel je suis particulièrement attachée, après avoir participé à la récente mission d'information sur la pénibilité au travail, conduite par notre excellent collègue Jean-Frédéric Poisson dont le rapport vient d'être publié. Il convient, enfin, de chercher à fidéliser les personnels, une forte rotation étant incompatible avec la pérennisation d'interventions sanitaires et sociales de qualité.

Recomposer l'offre hospitalière au profit du secteur médico-social, tel est donc l'un des enjeux cruciaux pour l'avenir de notre système de santé. J'espère que dans le cadre du débat que suscitera la création des ARS, nous pourrons explorer cette piste, avec pour perspective la valorisation tant attendue des professions médico-sociales (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Debray

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'existence de services de santé de qualité est une priorité aux yeux des citoyens européens. Le droit aux soins est reconnu dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et les systèmes de santé et les politiques sanitaires des différents États membres de l'Union européenne n'ont jamais été aussi liés. Parmi les multiples raisons de cette évolution, il faut citer, entre autres, la libre circulation des patients et des professionnels de santé, les attentes du grand public ainsi que la diffusion de nouvelles pratiques et techniques médicales grâce aux technologies de l'information. Dans cette perspective, la Commission européenne a invité des ministres des États membres et des représentants de la société civile à prendre part à un processus de réflexion de haut niveau sur la mobilité des patients et l'évolution des soins de santé dans l'Union Européenne.

La comparaison des systèmes de soins de nos voisins européens nous permet d'identifier échecs et réussites. C'est en m'inspirant de ces dernières que je formulerai ici des propositions, à travers deux thèmes qui me tiennent à coeur : la chirurgie ambulatoire et l'interaction entre la médecine publique et la médecine privée.

La chirurgie ambulatoire constitue une alternative à l'hospitalisation dite traditionnelle, qui nécessite un hébergement après anesthésie. Des études menées en 2004 par l'assurance maladie en collaboration avec des établissements de santé ont démontré que 80 % des actes chirurgicaux pourraient être réalisés sous forme ambulatoire en France, moyennant certains progrès en termes d'organisation.

En 2003, la France était l'avant-dernier pays de l'OCDE en matière de développement de la chirurgie ambulatoire. La proportion des actes éligibles pratiqués en ambulatoire atteignait 94 % aux États-Unis, 61 % en Allemagne et 78 % au Danemark, contre 40 % seulement en France. Le Royaume-Uni a intégré la promotion de la chirurgie ambulatoire dans ses programmes dès les années soixante-dix. Aux Pays-Bas, au Danemark, en Espagne et au Portugal, ces alternatives se sont surtout développées à partir du milieu des années quatre-vingt et quatre-vingt-dix. En outre, dans notre pays, le secteur public souffre d'un retard par rapport aux établissements privés. En 2005, sur 18 actes suivis, la part de la chirurgie ambulatoire représentait, en moyenne nationale, 33 % pour le secteur public contre 46 % pour les cliniques privées.

Face au retard français dans ce domaine et au potentiel de développement considérable, les pouvoirs publics et l'assurance maladie se mobilisent pour inciter les établissements de santé à développer la chirurgie ambulatoire. Dans son plan d'action pour 2007, la Caisse nationale d'assurance maladie l'a ainsi présentée comme une priorité absolue.

La chirurgie ambulatoire présente, en effet, de multiples avantages. D'abord, en limitant la durée du séjour hospitalier, elle divise par cinq les risques d'infections nosocomiales. De plus, elle place les patients au coeur du système, pour leur plus grande satisfaction. Les enquêtes montrent que, pour une large majorité, les assurés sont favorables à une prise en charge ambulatoire : 90% des patients se sont ainsi déclarés satisfaits, à l'issue d'une intervention sous cette forme, et 81 % des Français seraient prêts à y recourir.

En outre, elle présente un intérêt économique. Elle mobilise moins les ressources humaines et matérielles que la chirurgie classique, diminue durée et frais d'hébergement et allège la prescription médicamenteuse. En outre, une incapacité post-opératoire moindre permet de réduire la durée de l'arrêt de travail et favorise une meilleure réinsertion familiale et scolaire.

Quant à l'interaction entre la médecine publique et la médecine privée – priorité déjà abordée par les précédents orateurs –, il convient de la favoriser. D'une part, cela permettrait de soulager l'hôpital par une meilleure prise en charge du patient pour lequel les soins ne nécessitent pas forcément une hospitalisation ; d'autre part, cela contribuerait à alléger les services d'urgences encombrés par des patients s'y rendant pour une pathologie bénigne comme une grippe, une plaie superficielle, une petite fracture, de la fièvre ou toute autre pathologie ne nécessitant pas d'hospitalisation.

Cela suppose de développer les maisons médicalisées pluridisciplinaires privées et d'en optimiser le fonctionnement, en particulier dans les zones rurales et semi-rurales, aujourd'hui victimes de la désertification médicale.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Debray

Ces structures joueront un rôle primordial dans l'organisation des gardes de nuit et de week-ends, en partenariat avec le 15 et les services de régulation tels que les associations de coordination et de régulation libérale.

Accueil et modes d'intervention seront ainsi harmonisés. L'orientation du patient se fera, selon les cas, soit vers les urgences hospitalières, soit vers les maisons médicalisées, soit vers le médecin de garde libéral, qui, en outre, pourra bénéficier des services adaptés mis en place dans ces structures – standardistes, matériel de soin performant – pour assurer, sans se déplacer, le service de garde.

À l'instar de ce qui ce pratique dans les pays scandinaves, les maisons médicalisées regroupant différentes catégories professionnelles – médecins, kinésithérapeutes, infirmières –, dispenseront les soins nécessaires, assureront la coordination de l'accès aux soins et favoriseront le travail en équipe pour recentrer le service des urgences hospitalier sur ses missions fondamentales.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Debray

Madame la ministre, vous pouvez compter sur ma détermination, ma force et mon énergie pour défendre à vos côtés le projet de loi que vous nous présenterez en octobre prochain dont 1'objectif, fixé par le Président de la République, est de pérenniser notre système de santé pour garantir à nos concitoyens un égal accès à des services de soins de qualité, partout sur le territoire national, tout en maîtrisant les dépenses. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La parole est à M. Jean Leonetti, dernier orateur inscrit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Leonetti

Au terme de ce débat riche et très constructif, je souhaiterais centrer mes propos sur la réforme des hôpitaux publics.

Il n'y aura pas de fermeture d'hôpitaux, avez-vous affirmé, madame la ministre. Mais, sans réforme, nous sommes convaincus qu'il y en aura. Les professionnels hospitaliers attendent donc cette réforme plus qu'ils ne la redoutent.

Les hôpitaux ont un fonctionnement spécifique : ils sont ouverts à tous, tout le temps, et partout sur notre territoire. Ils ne sélectionnent pas leurs malades, …

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

C'est la géographie qui sélectionne les malades !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Leonetti

…ils ne choisissent pas les pathologies, ils accueillent toutes les détresses – physiques, morales ou sociales.

Si l'hôpital est en crise, c'est probablement du fait de l'ambition et de l'ampleur de sa mission.

Son attractivité est fragilisée. Les jeunes médecins préfèrent l'exercice privé, généralement plus rémunérateur et moins contraignant. Quand on sait que les radiologues du secteur privé ont une rémunération supérieure de 350 % à celle des radiologues du secteur public, il faut qu'ils aient la foi chevillée au corps pour continuer à exercer.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Vous savez ce qu'il reste à faire : remettre de l'ordre !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Leonetti

Comme vous l'avez proposé, madame la ministre, nous devons, sous certaines conditions, rémunérer les agents hospitaliers et les personnels soignants à l'activité. Il serait anormal de donner aux hôpitaux des règles de financement à l'activité sans en faire bénéficier ceux qui contribuent le plus à les faire vivre. J'irai même jusqu'à dire que le système actuel est archaïque et qu'un intéressement à l'activité hospitalière devrait progressivement être instauré.

La concurrence doit laisser place à la complémentarité. Aujourd'hui, la concurrence joue non seulement à l'intérieur du secteur public mais aussi à l'intérieur d'un même établissement public. Cependant, le fait qu'il y ait un pilote unique, le directeur, devrait aboutir à une vision plus globale au sein de chaque établissement et les communautés hospitalières de territoire contribueront à une plus grande cohérence entre les secteurs hospitaliers. Comment tolérer, dans le cadre du financement à l'activité, qu'un hôpital puisse être concurrencé par un autre, dans un rayon de vingt kilomètres ? Cette déperdition d'énergie préjudiciable aux patients et aux équilibres financiers, il nous faut l'éviter.

Entre secteur public et secteur privé aussi, la concurrence doit faire place à la complémentarité. D'ailleurs, le financement de tous les soins n'est-il pas public ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Dans le privé, il y a aussi des actionnaires !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Leonetti

Y a-t-il des malades privés et des malades publics ? Non, il y a des malades tout court, et votre réforme doit veiller à ce que tous bénéficient, sur l'ensemble du territoire, de la même possibilité d'accéder à des soins de qualité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Leonetti

Il est important d'admettre que des monopoles privés à buts lucratifs, financés presque exclusivement par des fonds de pension, ne peuvent constituer l'armature d'un maillage cohérent du service public de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Il n'est jamais trop tard pour s'en apercevoir !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Leonetti

Nous devons créer un bouclier géographique de santé publique, qui garantisse une stabilité durable.

Il faut aussi clarifier les missions et les financements de l'hôpital. La tarification à l'activité est un outil important, et il est normal qu'un hôpital faisant preuve d'une activité soutenue dispose d'un financement plus important qu'un autre dont l'activité est minime. N'oublions pas que c'est principalement dans le secteur hospitalier que sont accueillies les populations les plus fragiles, qui se trouvent dans la plus grande précarité, et que sont traitées les pathologies les plus complexes et les plus graves. Dans le cadre des missions d'intérêt général, cette surcharge hospitalière doit être mieux prise en compte.

Le corollaire aux nouvelles contraintes, c'est davantage de souplesse et d'autonomie. Rappelons qu'un scanner s'implante en quatre mois dans le secteur privé, et, du fait de contraintes spécifiques, en vingt-quatre dans le public.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Leonetti

Il convient aussi de mieux évaluer les missions d'enseignement et de recherche. Surtout, il faut relever les défis posés à notre société par la dépendance, le grand âge, le handicap et les soins palliatifs – dont vous avez, madame la ministre, présenté un plan de développement il y a quelques jours, à Bourges, avec le Président de la République.

En médecine, paradoxalement, tout ce qui est possible n'est pas obligatoirement nécessaire, et tout ce qui est possible n'est pas forcément utile : on peut faire moins et mieux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Leonetti

Parfois – et vous l'avez rappelé devant les unités de soins palliatifs, madame la ministre –, mieux traiter, et traiter de manière plus humaine, c'est traiter de manière moins technique. Si la tarification à l'activité est un bon outil, elle a aussi ses limites : nous ne pouvons à la fois condamner l'acharnement thérapeutique et le financer en prenant des mesures qui risquent d'encourager l'inflation des soins.

C'est pourquoi la réforme que vous nous proposez, madame la ministre, permettra, à mon avis, de répondre à cette double exigence de qualité et d'égalité, en relevant le défi majeur pour notre société qu'est la couverture sanitaire de tous nos concitoyens. Ce n'est pas un texte de plus, mais une mutation des mentalités et des comportements, et c'est pourquoi nous avons confiance en son efficacité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Monsieur le président, je vous remercie d'avoir laissé les parlementaires parler quarante-cinq minutes de plus que ce qui avait été prévu. Je crois que ce temps supplémentaire était nécessaire afin que chacun puisse s'exprimer comme il le souhaitait.

À l'issue de ce débat, les différents orateurs voudront bien m'excuser de ne pouvoir leur répondre, en quelques minutes, dans le détail. Toutefois, je voudrais faire une observation, un constat, une interpellation et rappeler une exigence.

L'observation, c'est que lorsqu'on quitte le champ de la polémique et de la critique, il y a une très grande synergie entre les préconisations qui proviennent de tous vos bancs.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Je tiendrai le plus grand compte de vos observations et de vos conseils dans l'élaboration, que je souhaite conduire avec vous, de la loi.

Le constat, c'est que, contrairement à ce qui a été dit sur certains bancs, la France possède un taux de couverture solidaire des dépenses de santé parmi les plus élevés au monde : l'assurance maladie prend en charge 78 % des dépenses, les organismes complémentaires 12 % ; seulement 8 % de nos concitoyens ne bénéficient pas d'un organisme complémentaire. Nous atteignons donc un taux de couverture solidaire de nos dépenses d'assurance maladie de 90 %, ce qui nous place en tête parmi les pays qui nous sont comparables. Je souhaite que ce haut niveau de prise en charge solidaire soit non seulement maintenu, mais amélioré – je pense plus particulièrement aux 8 % de nos concitoyens qui ne bénéficient pas d'un organisme complémentaire. Je m'emploie à ce que l'accès à la complémentaire santé et son niveau de prise en charge soient améliorés.

L'interpellation, c'est de savoir si nos dépenses de santé doivent être augmentées. La part de la richesse nationale consacrée à notre santé doit-elle être accrue ?

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Je suis persuadée que oui. Cependant, cela ne nous dispense pas d'une réflexion préalable. Il ne faut pas que cette prise en charge supplémentaire, le fait de consacrer plus d'argent à la santé, soit utilisée comme un moyen de masquer nos insuffisances, voire comme une échappatoire pour ne pas mener les réformes nécessaires. Car oui, bien sûr, des réformes quantitatives et qualitatives doivent être entreprises pour améliorer notre système de santé. Menons d'abord ces réformes ! Ensuite, dans le cadre d'un débat national que nous proposerons aux Français, nous examinerons quelle part de la richesse il faut consacrer à ces dépenses de santé. Il faut être lucide, et dire la vérité : l'argent qu'on consacre à la santé, dans la richesse nationale, c'est autant qu'on ne consacrera pas au logement, à la voiture, aux loisirs ou aux vacances !

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Il faut donc être honnête quand on dit qu'on dépensera davantage d'argent pour la santé. Le débat doit être posé avec beaucoup de clarté et en toute transparence.

Enfin, l'exigence que je veux rappeler nous réunira, je crois, tous : la politique de santé et les réformes qu'appelle la sauvegarde de notre système ne sauraient être traités par appartements. On l'a dit : les lits de court séjour ne sont occupés qu'à 30 % alors qu'on ne trouve pas de place pour héberger une personne âgée atteinte de la maladie d'Alzheimer ; les urgences des hôpitaux sont encombrées alors qu'on ne trouve pas de médecin de permanence en ville. La question doit être traitée de façon globale. Beaucoup d'entre vous ont choisi d'approfondir un aspect particulier – il est vrai que, pour la plupart, vous ne disposiez que de cinq minutes pour vous exprimer.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative

Il va maintenant falloir, dans les groupes de travail, qu'experts et représentants du Gouvernement rassemblent cette brassée de propositions, parce que la réforme de notre système de santé ne se fera que de manière globale, dans le respect de l'esprit de 1945 auquel je suis profondément attachée : un souci de justice, d'équité, de solidarité et d'efficacité. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, du projet de loi relatif à la lutte contre le trafic de produits dopants ;

Discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative à l'organisation des transports scolaires en Île-de-France ;

Discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, modifié par le Sénat, portant diverses dispositions d'adaptation du droit des sociétés au droit communautaire ;

Discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi, modifiée par le Sénat, créant de nouveaux droits pour les victimes et améliorant l'exécution des peines.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures cinquante-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma