La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
La parole est à Mme George Pau-Langevin, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le président, ma question s'adresse à Mme la ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Une affaire survenue dans le 20ème arrondissement de Paris, la semaine dernière, a provoqué une vive émotion. Trois adolescentes du collège Gambetta se sont retrouvées placées en garde à vue durant une dizaine d'heures dans un commissariat, à la suite d'une bagarre survenue la veille non loin de cet établissement scolaire qui, contrairement à ce qui a été indiqué dans la presse, est situé dans un quartier plutôt agréable, dont la population scolaire est très diversifiée et où 1a situation n'est nullement catastrophique.
Une bagarre, c'est assez banal. Ce qui l'est moins, c'est la suite. Deux adolescentes ont été interpellées le lendemain matin, au collège, par la police qui est allée chercher la troisième chez elle, le mercredi matin, alors qu'elle dormait encore, et l'a emmenée en survêtement. Tout le monde a été placé en garde à vue et la troisième adolescente aurait même été menottée durant son transfert dans le 18ème arrondissement, ce qui serait tout à fait contraire aux prescriptions du code de procédure pénale.
Ce déploiement de forces semble aux parents, et à nous-mêmes, parfaitement disproportionné. N'aurait- il pas été suffisant de convoquer au commissariat les mineures accompagnées de leurs parents pour comprendre ce qui s'était passé et prendre les mesures éducatives ou répressives nécessaires ?
Nous sommes tous préoccupés par la montée de la violence dans les quartiers. Nous savons que la tâche des fonctionnaires affectés dans le Nord-Est parisien n'est pas toujours facile, car il existe des points durs de délinquance difficiles à juguler, et vous y supprimez des antennes et des postes.
Mais pour dissimuler l'échec des politiques, faut-il se réfugier derrière une politique du chiffre qui occasionne les pires dérives ? Nous devons réserver la garde à vue aux cas pour lesquels elle est indispensable en raison de la gravité des faits ou parce que la personne a cherché à se soustraire à la justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Quand allez-vous prendre des mesures pour qu'il y ait concours effectif d'un avocat et pour que les mineurs de seize ans ne soient placés en garde à vue que de manière exceptionnelle ?(Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Madame la députée, je vais vous répondre au nom de Mme la garde des sceaux, qui est actuellement en déplacement pour des obsèques.
Sur tous ces bancs, nous sommes d'accord sur deux choses : d'abord, la garde à vue doit conférer certains droits ; ensuite, le système français en la matière est très perfectible.
S'agissant des faits eux-mêmes, il faut attendre le résultat de l'enquête qui a été diligentée par la Direction des services pour savoir exactement ce qu'il en est des conditions de cette arrestation.
En effet, les éléments dont nous disposons peu à peu montrent qu'il y a eu respect des droits de cette jeune fille au moment de son arrestation, de son transfert et lors de sa présence au commissariat, mais nous verrons cela.
Plus généralement, qu'il s'agisse de mineurs ou de majeurs, la réforme est aujourd'hui engagée, et les groupes parlementaires de la majorité et de l'opposition travaillent sur cette question. Le Gouvernement, sous l'autorité du Premier ministre, avec Mme la garde des sceaux et le ministre de l'intérieur, fait actuellement un travail de fond pour parvenir à une réforme équilibrée. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Il convient en effet d'améliorer les droits de la défense, le respect de l'intégrité et des droits des personnes. Il faut également que les magistrats et les policiers puissent travailler dans de bonnes conditions sur le terrain pour une meilleure justice et pour plus de sécurité. Il ne faut pas que les délinquants aient davantage de droits que les victimes. Nous allons vers une réforme équilibrée et nous la ferons ensemble.
La parole est à M. Richard Dell'Agnola, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Hier, à Thiais, un groupe d'individus a pénétré dans un gymnase pour s'en prendre à un élève pendant un cours d'éducation physique. Cette agression brutale ressemble à un règlement de comptes, la victime étant malheureusement bien connue pour des faits similaires.
Pourtant, le lycée Guillaume Apollinaire, inauguré il y a moins de dix ans, n'est pas répertorié comme un établissement à risques par l'inspection d'académie. Il est équipé de vidéosurveillance et c'est peut-être la raison pour laquelle l'agression a eu lieu à l'extérieur de l'établissement, dans un gymnase tout proche. La violence et les affrontements entre bandes se déplacent et l'école n'est plus un sanctuaire. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Après d'autres incidents observés récemment, ce problème est posé à tous : parents, élèves, enseignants, collectivités territoriales et État. Il faut y répondre sans surenchère, mais avec le souci de s'attaquer ensemble à ces phénomènes pour les neutraliser.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, vous avez annoncé pour le début avril des états généraux sur la sécurité à l'école. Pouvez-vous nous indiquer les mesures qui ont déjà été prises dans ce domaine et comment vont s'organiser avec toute la communauté éducative ces états généraux pour trouver des réponses à l'inquiétude de ceux qui souhaitent, légitimement, mettre l'école à l'abri de la violence pour qu'elle assure la belle mission qui est la sienne ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.
Avant de répondre, je veux adresser mes sincères condoléances à l'ensemble des familles des victimes de l'accident de car qui s'est produit ce matin en Italie lors d'un voyage scolaire d'un lycée de Dordogne. Je les assure du soutien du Gouvernement et de la représentation nationale face à cette tragédie.
Ce qui s'est passé hier au lycée Apollinaire de Thiais est intolérable. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
L'idée qu'une bande armée entre dans un lycée pour un règlement de comptes à l'encontre d'un lycéen est inacceptable. Face à cette situation, l'ensemble de la communauté éducative fait front, et je tiens, à cet égard, à saluer le courage et le sens des responsabilités des enseignants. Je souhaite également rassurer les parents d'élèves : l'école n'est pas devenue dangereuse du jour au lendemain ; treize millions d'élèves vont aujourd'hui à l'école sans que cela ne pose de difficultés.
Si ces actes de violence extrême sont rarissimes, ils n'en sont pas pour autant tolérables. C'est la raison pour laquelle il faut nous mobiliser. Je refuse la fatalité face à la violence à l'école. L'éducation nationale prend ses responsabilités, mais la sécurité à l'école est également l'affaire de tous. C'est pourquoi, début avril, après les échéances électorales, tous les acteurs concernés par ces questions – éducation nationale, police, associations, sociologues et psychologues – pourront se retrouver afin d'avancer ensemble et permettre de sanctuariser nos établissements.
Comme vous le voyez, la mobilisation générale a été déclarée contre la violence à l'école. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe NC.)
La parole est à Mme Martine Billard, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Près de six Français sur dix se prononcent contre le recul de l'âge de départ à la retraite au-delà de soixante ans, et plus d'un sur deux est opposé à l'allongement de la durée de cotisation. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La réforme des retraites de 2003 a provoqué une baisse des pensions avec le calcul sur les vingt-cinq meilleures années et l'indexation sur les prix et non plus sur les salaires.
Vous voulez repousser l'âge de départ en retraite et allonger la durée de cotisation. Toutes ces mesures provoqueront inexorablement une nouvelle baisse des retraites malgré vos dénégations. Or celles et ceux qui, aujourd'hui, peuvent partir à soixante ans sont justement celles et ceux qui ont commencé à travailler très jeunes. Les obliger à travailler plus longtemps serait donc injuste, d'autant plus que, comme le MEDEF, vous refusez de reconnaître l'existence de métiers pénibles, renvoyant chaque salarié à son état de santé individuel.
Cette proposition relève de plus d'une grande hypocrisie : six salariés sur dix sont hors emploi au moment où ils liquident leur retraite et les mesures homéopathiques pour l'emploi des seniors prises par les gouvernements depuis 2002 n'y ont rien changé. Le patronat continue à se débarrasser avant l'âge de la retraite des salariés âgés qu'il ne considère plus assez rentables.
Vous justifiez ce report par comparaison avec l'âge de départ en retraite dans les autres pays de l'Union européenne. Vous oubliez simplement de préciser que la France n'a pas les mêmes problèmes démographiques. La question se pose donc dans des termes différents.
La solution au financement des retraites existe.
Il est normal que, dans une société où il y a plus de retraités, la part de la richesse nationale qui leur est consacrée augmente. Le tabou qui doit sauter est celui de l'augmentation des cotisations patronales ainsi que la taxation des revenus du capital. Il est temps de rééquilibrer la part de la rémunération du travail dans la valeur ajoutée. Monsieur Wauquiez l'a indiqué ce matin comme piste possible.
Monsieur le Premier ministre, allez-vous procéder à ce rééquilibrage ? (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes GDR et SRC.)
La parole est à M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.
Pourquoi n'y a-t-il qu'en France que la gauche n'accepte pas l'idée que le vieillissement de la population entraîne forcément une relecture de notre système de pensions et de retraites ? (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Pourquoi, même dans des pays dirigés par des socialistes tels que l'Espagne, la Grande-Bretagne ou la Grèce – M. Papandréou est président de l'internationale socialiste – on accepte d'ouvrir ce débat sereinement, alors que, en France, vous ne proposez rien d'autre que d'augmenter les cotisations et de ne pas toucher à l'âge du départ légal à la retraite ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Cette vision n'est pas raisonnable, et elle est irresponsable à l'égard des générations futures. (« Très bien ! » sur les bancs des groupes UMP et NC. - Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) C'est une vision qui parle des acquis sociaux sans prendre en compte le premier d'entre eux : le devoir de ne pas faire porter à nos enfants et à nos petits-enfants le fardeau de notre irresponsabilité. (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Par ailleurs, à propos de la question des seniors, permettez-moi de vous dire qu'elle a déjà été longuement abordée, y compris par les partenaires sociaux.
Comme vous le savez, les entreprises qui n'ont pas négocié un accord sur l'emploi des seniors au 31 décembre, sont frappées par une pénalité de 1 % de la masse salariale. Cela étant il ne faut pas que le travail des seniors soit un moyen de se détourner de ses obligations. Il n'est pas acceptable que des entreprises en bonne santé financière utilisent les facilités sociales et fiscales des plans de sauvegarde pour l'emploi normalement destinés aux entreprises en difficulté pour faire financer par le contribuable ou le cotisant social une partie des annuités de départ à la retraite de ces seniors.
Vous le voyez, nous sommes vigilants, mais nous devons une réforme aux générations futures. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC. - Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
À l'issue d'une réunion qui s'est tenue il y a quelques jours à Bercy, les cinq plus grandes banques françaises – le Crédit Agricole, BNP-Paribas, la Société Générale, BPCE et le Crédit Mutuel – se sont engagées à consacrer, en 2010, une enveloppe de 38 milliards d'euros aux crédits d'investissement des petites et moyennes entreprises et des très petites entreprises. Les banques ont indiqué également qu'elles réduiraient les délais de décision sur les crédits, en les ramenant à une dizaine de jours.
Si l'engagement sur le crédit d'investissement est essentiel, il ne doit pas masquer la question du crédit de trésorerie, cruciale pour la survie financière des PME et des TPE. En effet, ce qui est vraiment dangereux, c'est que des entreprises, alors qu'elles marchent bien, font du chiffre d'affaires et enregistrent des commandes, boivent la tasse parce que les clients ne payent pas, qu'il faut régler les fournisseurs, et qu'à ce moment-là, les banquiers regardent ailleurs ou, pire, ne répondent plus. Ainsi, aujourd'hui, de nombreux patrons de petites entreprises sont au bord de l'asphyxie et la médiation du crédit, hélas ! ne suffira sans doute pas à les sauver.
Récemment, le Président de la République n'a d'ailleurs pas caché son inquiétude, en reprochant sévèrement aux banques de restreindre les offres de crédit aux entreprises.
Toutes les banques qui ont bénéficié du plan de soutien public au moment de la crise s'étaient engagées, en octobre 2008, à faire progresser leurs encours de crédit de 3 à 4 % en 2009. Or ceux-ci n'ont augmenté en moyenne que de 2,7 %. Le Crédit Mutuel et le Crédit Agricole, par exemple, n'ont pas souhaité communiquer le chiffre de l'évolution de leur crédit. Dans ce contexte, l'inquiétude grandit chez les chefs d'entreprise et risque de peser fortement sur l'emploi si les banques continuent de gérer ces encours de crédit avec autant de frilosité.
Quelle aide l'État compte-t-il apporter dans les prochaines semaines à la trésorerie des petites et moyennes entreprises et envisagez-vous des mesures particulières pour soutenir ces dernières ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
La parole est à M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.
Monsieur le député, votre question montre votre connaissance de la situation qui prévaut sur votre territoire, notamment dans la région Centre, où vous officiez. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Depuis 2008, nous avons fait preuve d'une grande réactivité. En effet, la France a été le seul pays de l'Union européenne à engager, dès octobre 2008, un plan de soutien au financement des petites et moyennes entreprises. Je ne rappellerai pas l'ensemble des mesures qui ont été prises. Toutefois, concernant la trésorerie, je tiens à souligner le rôle joué par OSEO en matière de garantie de trésorerie, ainsi que les dispositions de la loi de modernisation de l'économie relatives à la réduction des délais de paiement et la couverture publique pour l'assurance-crédit. Sur le segment de la trésorerie, nous avons donc agi.
Nous agissons également pour soutenir les entreprises en difficulté. En effet, la médiation du crédit a joué, aux dires de tous, un rôle très important et OSEO est un agent public très efficace en matière d'accès au crédit de court terme et de moyen terme.
Le Président de la République a annoncé récemment qu'il demanderait à rencontrer les banques, afin que les engagements qu'elles ont pris, notamment en faveur des petites et moyennes entreprises, soient tenus.
Demain, nous entamerons une discussion sur un statut révolutionnaire (Exclamations et rires sur les bancs des groupes SRC et GDR), qui permettra aux artisans et aux commerçants de voir leur patrimoine personnel protégé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Nous aurons l'occasion de montrer que nous pouvons substituer à la caution personnelle des entrepreneurs une caution publique afin que, dans ce pays, les artisans, les commerçants et les patrons de PME puissent développer leur entreprise. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Mes chers collègues, monsieur le secrétaire d'État, comme chacun le sait, il n'y a ici que des députés de la nation. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. René Rouquet, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, hier, un élève du lycée Guillaume-Apollinaire de Thiais a été agressé au cutter par six individus. Ce nouvel incident grave, le troisième dans le Val-de-Marne depuis le début de l'année, intervient après la mort d'un élève, le 8 janvier, au Kremlin-Bicêtre, et l'agression survenue le 2 février au lycée Adolphe-Chérioux de Vitry.
Depuis deux semaines, les enseignants, les élèves et les parents se mobilisent avec dignité et responsabilité pour exprimer leur préoccupation face à la dégradation des conditions de sécurité, d'accueil et de travail à l'école. Ils vous demandent de leur accorder les moyens humains nécessaires pour répondre à l'incivilité et à la violence quotidiennes dans l'éducation nationale, alors que vous avez supprimé 30 000 postes en deux ans.
Monsieur le ministre, vous avez jusqu'ici refusé de nommer les onze assistants d'éducation réclamés par les enseignants de Chérioux. Ceux-ci ne font pourtant que demander un nombre de surveillants identique à celui qu'ils avaient voilà dix ans, sous le gouvernement Jospin. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
À Thiais, à Vitry, dans ma commune d'Alfortville comme partout ailleurs, le même malaise, les mêmes revendications s'expriment dans les écoles, les collèges et les lycées de la République : comment préparer l'avenir de nos enfants quand on ne remplace plus les enseignants absents et qu'on ne forme plus les personnels ?
Monsieur le ministre, vous avez annoncé des états généraux sur la sécurité à l'école, mais celle-ci est en état d'urgence. Les enseignants de France ont le soutien de tous nos concitoyens ; il ne leur manque qu'une chose : la confiance de leur ministre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le député, c'est précisément parce que le Gouvernement est pleinement mobilisé sur la question de la sécurité (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) que, dès le mois de septembre, avec Brice Hortefeux, nous avons lancé un plan de sécurisation des établissements.
Il y a quelques jours, nous avons décidé d'en accélérer la mise en oeuvre puisque, d'ici à la fin du mois de mars, l'ensemble de nos équipes mobiles de sécurité seront installées ; cinq cents postes ont été créés à la rentrée dernière.
Nous avons également décidé d'accélérer le diagnostic dans tous les établissements, soit 12 000 collèges et lycées. Nous saurons ainsi, avant la fin de l'année scolaire, comment améliorer la sécurité de chaque établissement. Nous avons nommé, dans chaque lycée et chaque collège, un référent police et gendarmerie. Nous formerons, d'ici à la fin de l'année, les 400 chefs des établissements les plus sensibles de France.
Oui, monsieur le député, le Gouvernement est pleinement mobilisé sur la question de l'insécurité. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
S'agissant des moyens, vous devriez écouter davantage vos responsables politiques. J'ai en effet entendu Mme Aubry déclarer, il y a quelques mois, qu'il ne suffirait pas d'injecter des moyens pour que l'école se porte mieux. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Quant à M. Hollande, il a indiqué récemment que ce n'était pas qu'une affaire de moyens. (Mêmes mouvements.) Pour une fois, je partage leur avis.
Il est temps que nous nous mettions tous autour de la table pour traiter la question de l'insécurité à l'école et que chacun apporte ses propositions. Il s'agit de travailler à la fois sur la prévention, la dissuasion et l'accompagnement de nos personnels.
Monsieur le député, la sécurité de nos 13 millions d'enfants mérite mieux qu'une petite polémique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Frédéric Reiss, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, lors du sommet social de l'Élysée, le Président de la République a rappelé la nécessité de procéder de façon urgente à une réforme de nos retraites.
Comprise et acceptée par l'opinion publique, la réforme de retraites de 2003, dite réforme Fillon, alignait les durées de cotisation du public et du privé avec l'objectif de parvenir à quarante et une annuités en 2012. Elle tenait également compte des carrières longues.
Aujourd'hui, il nous faut tout à la fois garantir le pouvoir d'achat des retraités, prendre en compte la pénibilité, la durée d'activité, et permettre à nos enfants et petits-enfants de continuer à bénéficier du système le plus équitable : celui de la retraite par répartition.
Alors que l'espérance de vie s'allonge d'un trimestre par an, ce dont on ne peut que se réjouir, et qu'une retraite sur dix n'est plus financée, le Président de la République a rappelé qu'il est de notre devoir de prendre nos responsabilités sur ce sujet tout en donnant le temps nécessaire au débat.
Le groupe UMP a décidé le lancement d'un chantier retraite coprésidé par Jean-François Copé, Pierre Méhaignerie et François Sauvadet. Il veut ainsi apporter sa pierre à l'édifice de cette réforme qui fera l'objet d'une concertation d'avril à juillet prochain. Le Parlement sera ensuite saisi d'un projet de loi dont il débattra à partir du mois de septembre.
Monsieur le ministre, le Président de la République vous a chargé de mener cette concertation. Pouvez-vous nous en dire davantage sur son déroulement et sur les pistes que le Gouvernement entend privilégier pour mener à bien cette importante réforme ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.
Monsieur Frédéric Reiss, comme vous venez de l'indiquer, le Président de la République, à la suite du sommet social…
…qui s'est tenu hier dans une très grande sérénité et dans un esprit de très grande responsabilité, a clairement indiqué qu'en matière de retraite nous procéderions en trois étapes.
Une première étape sera consacrée au diagnostic fourni par le conseil d'orientation des retraites. Le 14 avril prochain le travail de cette organisation paritaire nous aidera à connaître la vérité des chiffres.
Dans une deuxième étape viendra la phase de concertation. Le Président de la République a indiqué qu'elle se déroulera entre le mois d'avril et la fin de l'été.
Enfin, viendra le temps de la décision : au mois de septembre le Parlement, aura à débattre d'un projet de loi.
En matière de retraite, nous disposons de trois leviers.
Il s'agit tout d'abord de la baisse des pensions. Elle n'est pas envisageable,…
Ce n'est pas cette solution que le Président de la République et le Gouvernement ont choisie depuis le début de cette mandature. Bien au contraire, nous avons revalorisé les pensions les plus modestes (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.), et nous avons fait en sorte qu'il en soit de même pour le minimum vieillesse, les pensions de réversion et les pensions agricoles.
Ensuite, vient le levier de la hausse des recettes. Serait-il raisonnable de renchérir le coût du travail dans un pays dont le taux de cotisation est déjà l'un des plus élevés d'Europe ? Il faut rompre avec ce réflexe frénétique consistant à créer des taxes nouvelles (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.), y compris à la demande de ceux qui n'ont pas voté les prélèvements sur les stocks options, sur les retraites chapeaux ou sur les parachutes dorées. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
En conséquence, vous voyez bien qu'il faudra tout simplement travailler plus longtemps ; il s'agit du troisième levier. Nous allons nous concerter ; nous allons en discuter, et je suis heureux que le groupe UMP vienne nous rejoindre pour cette coproduction afin que nous soyons prêts pour le mois de septembre prochain. (Applaudissements sur divers bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Yves Cochet, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Madame Lagarde, pouvons-nous comparer les actes et les discours du président Sarkozy et du Gouvernement concernant, d'une part, le Grenelle de l'environnement et, de l'autre, le grand emprunt de 35 milliards d'euros ?
On se souvient du discours enflammé du Président de la République, le 25 octobre 2007, sur le Grenelle de l'environnement. Pour mémoire, je vous en cite un extrait : « Je veux que le Grenelle soit l'acte fondateur d'une nouvelle politique, d'un new-deal écologique en France, en Europe et dans le monde. Cette nouvelle politique c'est une politique d'investissement ; cette nouvelle politique c'est une politique pour refonder la démocratie. » (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Très bien ! Tout cela aurait été très bien si cela avait été suivi d'effets.
Le 14 décembre 2009, bien imprudemment, le Président Sarkozy a lancé un grand emprunt. On se disait que l'essentiel de l'investissement irait au Grenelle. Pas du tout ! Des milliards d'euros vont être distribués à l'aéronautique, à la voiture ou au nucléaire !
Quant au meilleur du Grenelle, la rénovation thermique des bâtiments abritant les logements dégradés des personnes les plus défavorisées pour lutter contre la précarité énergétique, n'y sont consacrés que 500 millions d'euros, c'est-à-dire un soixante-dixième du grand emprunt.
Madame la ministre, il s'agit bien d'une énième contradiction du Président Sarkozy ; cette fois, comment l'expliquez-vous ? (Applaudissements sur divers bancs des groupes GDR et SRC.)
La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.
Monsieur Yves Cochet, j'ai essayé de vous écouter le plus attentivement du monde, mais j'ai eu du mal à suivre votre raisonnement (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
Le Président de la République a fait le Grenelle ; nous l'avons fait tous ensemble. Pour la mutation écologique et technologique de notre pays, les investissements prévus s'élèvent globalement, secteurs privé et public confondus, à 440 milliards d'euros, soit le montant le plus élevé du monde.
Par ailleurs, il y a le grand emprunt. Sur un total de 35 milliards d'euros, 8,6 milliards relèvent du ministère que j'ai l'honneur de diriger. Monsieur Cochet, je suis navré de devoir vous rappeler que l'essentiel de cette somme est consacré aux énergies renouvelables, pour 2,6 milliards ; à la rénovation thermique des bâtiments, pour 500 millions ; aux véhicules décarbonés, c'est-à-dire sans carbone, électriques ou hybrides, pour 1,4 milliard.
En ce qui concerne le nucléaire, il est prévu, dans le cadre des renouvellements, de construire des centrales qui seront cinquante fois plus performantes en énergie que les anciennes pour ce qui concerne l'utilisation de l'uranium. Le financement du réacteur nucléaire Jules Horowitz de Cardache, sans lequel aucun IRM ne pourra bientôt plus être pratiqué en Europe, est également prévu. Il s'agit d'une décision scientifique et médicale. Nous respectons parfaitement le Grenelle de l'environnement. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Jean-Michel Fourgous, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale.
Monsieur le ministre, je veux d'abord vous remercier d'être venu sur le terrain, à Élancourt, pour écouter à la fois les élèves, les parents, les enseignants et les inspecteurs, et pour recevoir le rapport parlementaire sur la modernisation de l'école par le numérique, que j'ai piloté avec M. Pascal Cotentin, grand expert du numérique en France.
L'école de demain peut devenir l'école d'aujourd'hui grâce à vous, avec votre soutien pour accélérer ce changement nécessaire pour notre compétitivité.
Déjà, dans l'enseignement supérieur, on constate la réussite de la modernisation des méthodes d'enseignement, pilotée avec talent et passion par Valérie Pécresse. Les technologies numériques transforment radicalement le métier des enseignants, le temps scolaire, les manuels scolaires, les programmes. Bref, le numérique est en train de révolutionner la pédagogie de demain !
Moins de cours frontal, magistral, plus de pédagogie par projet et de suivi individualisé : l'enseignant passe du rôle d'acteur à celui de metteur en scène, tandis que l'élève devient acteur et coproducteur de son apprentissage. De plus, le numérique lutte contre l'échec scolaire, contre l'absentéisme, contre l'ennui à l'école ; il augmente la concentration, la participation et surtout la motivation des élèves.
Aujourd'hui, le sujet fait consensus – ce qui est rare, monsieur le ministre ! Une question fondamentale se pose : comment peut-on accompagner et surtout accélérer cette modernisation de l'école et de la pédagogie de demain, donc la réussite de nos enfants et de notre pays ?
La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le député, vous avez remis hier votre rapport au Premier ministre, et je veux vous féliciter pour la qualité du travail que vous avez initié dans votre commune d'Élancourt, une commune pionnière en matière d'usage du numérique à l'école.
Vous avez raison de le dire, le numérique permet d'abord d'améliorer les résultats scolaires, comme le montrent toutes les études, en particulier celles portant sur les enfants rencontrant des difficultés d'apprentissage. Par ailleurs, le numérique constitue une vraie réponse en termes d'amélioration de l'apprentissage des langues vivantes. Vous savez que nous avons fait de l'apprentissage des langues au lycée une priorité : dans ce domaine, le multimédia, le numérique, la visioconférence, le travail avec des locuteurs natifs, les baladeurs…
…vont nous permettre, grâce à l'amélioration des techniques, d'obtenir de meilleurs résultats.
Le numérique permet aussi d'adapter notre enseignement à la situation de chaque élève et d'élargir le champ pédagogique des enseignants. Il constitue donc une vraie avancée.
Monsieur le député, dans le cadre du plan de relance, le Premier ministre avait décidé d'équiper les écoles rurales : 6 700 de nos communes rurales sont en voie d'équipement numérique – tableaux blancs interactifs et ordinateurs portables. Avec vos propositions, le Gouvernement va aller plus loin en élaborant un plan numérique à l'école pour l'ensemble du système éducatif. Il portera sur un partenariat avec les collectivités locales en matière d'équipement des lycées et des collèges, mais aussi, puisque c'est du ressort de l'éducation nationale, sur la formation de nos enseignants et la constitution de ressources pédagogiques beaucoup plus larges, qui seront mises à disposition de l'ensemble de la communauté éducative.
Monsieur le député, merci pour votre travail, qui va nous aider à passer le cap du numérique à l'école et permettre à celle-ci de changer de siècle. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Alain Vidalies, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, depuis des semaines, à nos multiples questions sur l'emploi, sur la fonction publique, sur les retraites, sur les chômeurs en fin de droits, vous nous renvoyez au sommet social du 15 février. Or, que s'est-il passé hier ? Rien, ou presque rien. Personne n'est dupe : le seul objectif du Gouvernement était de passer le cap des élections régionales. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Alors que les Français attendent des réponses urgentes face à la crise, vous avez choisi de mettre en place un écran de fumée qui se dissipera après le 21 mars pour révéler la dureté de vos véritables intentions.
Ce sommet social est un rendez-vous manqué, car pour vous il n'y a aucun enseignement à tirer de la crise, ni aucune urgence à répondre à la situation de ses premières victimes. Pour les chômeurs en fin de droits, il n'y aucune raison d'attendre encore, alors qu'ils vont être 600 000 à se retrouver en situation d'exclusion sans aucun revenu.
Face à la proposition du Parti socialiste de créer une allocation solidarité crise, le Président de la République a répondu qu'il refusait une allocation d'assistance de plus. Il s'agit non pas d'une assistance, mais d'une réparation due aux premières victimes de cette crise ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Vous ne tirez aucun enseignement de cette crise : vos convictions d'hier nourrissent toujours votre politique d'aujourd'hui ! Comment ne pas remettre en cause des politiques aussi désastreuses que l'encouragement sur fonds publics des heures supplémentaires, quand le chômage explose ; le démantèlement du nombre et du statut des emplois publics ; une politique fiscale au profit de quelques-uns, qui prive l'État de ses moyens d'action ?
Les Français l'ont compris : le pire est à venir, et c'est aux ménages que vous allez adresser la facture de la crise, qui sera aussi la facture de votre politique. Vous nous annoncez un projet de loi sur les retraites en septembre. Ce débat est au coeur de notre pacte social, tout simplement parce que la retraite est le patrimoine de ceux qui n'en ont pas.
Plutôt que d'un débat hasardeux sur l'identité nationale, la France a besoin aujourd'hui d'un débat sur notre contrat social ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.
Monsieur Vidalies, comment pouvez-vous dire que le Gouvernement ne se préoccupe pas de politique sociale ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Comment pouvez-vous dire que nous n'avons pas les yeux ouverts sur les générations futures, alors même que vous refusez de proposer quoi que ce soit pour régler le problème des retraites (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP)…
…si ce n'est, comme d'habitude, de taxer, et taxer encore ! Si vous voulez taxer l'épargne des Français, leur CODEVI, leur plan d'épargne logement, leur livret A, dites-le ! Si vous voulez taxer une fois de plus les charges sociales, dites-le ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous connaissez pourtant le sujet, monsieur Vidalies, et vous savez bien qu'aujourd'hui, diminuer les allégements sur les charges sociales aurait pour conséquence de créer 800 000 chômeurs supplémentaires !
Par ailleurs, vous dites qu'il faudrait taxer les deux milliards d'euros de stock-options distribuées chaque année. Mais celles-ci supportent déjà l'impôt, une taxe spéciale que nous avons créée. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Il faudra que vous m'expliquiez comment, en créant une nouvelle taxe sur une assiette de deux milliards d'euros, on va régler un déficit de 30 milliards d'euros !
Je vous le dis, ce n'est pas en créant des taxes supplémentaires à la charge, une fois de plus, des générations futures, que nous allons régler les problèmes. Je vais vous faire une proposition : pour régler le problème des retraites, on devrait taxer ceux qui ont des idées de taxes ! (Huées sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'emploi, vous connaissez les inquiétudes de nos concitoyens qui ont été parmi les premières victimes de la crise et n'ont pu retrouver un emploi. Cette année 2010 va voir leurs droits à l'assurance-chômage toucher à sa fin.
Alors que le Président de la République a tenu hier un sommet social à l'Élysée, je souhaite que vous précisiez autant que possible à la représentation nationale quelle feuille de route a été proposée aux partenaires sociaux sur ce sujet et, notamment, comment le Gouvernement va assurer à nos concitoyens dont la situation est particulièrement fragile les moyens concrets de rebondir ?
Je sais qu'une solution rapide – la reconduction de l'allocation équivalent retraite – semble se confirmer pour les chômeurs de moins de soixante ans arrivant en fin de droits en 2010 mais ayant déjà tous leurs trimestres de cotisation retraite. Pouvez-vous nous préciser concrètement sous quelle forme elle sera proposée ?
En outre, pour tous ceux dont la vie professionnelle est loin d'être terminée, qui attendent de retrouver un emploi et qui le demandent à juste titre, pouvez-vous nous préciser quelles sont les pistes privilégiées, quels seront la méthode et le calendrier précis ?
Ce dossier est particulièrement important pour nos concitoyens ; il mérite toute notre attention. Je sais que vous mettez tout en oeuvre pour que les négociations réussissent. Nous sommes derrière vous, monsieur le secrétaire d'État, contrairement à nos collègues de l'opposition ! (Applaudissements sur divers bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.
Mme Marie-Chrsitine Dalloz, vous l'avez rappelé : hier, le Président de la République et le Premier ministre ont tenu une grande réunion d'agenda social avec l'ensemble des partenaires sociaux. Bien sûr, il y était question de retraite, mais le premier thème que le Président de la République a souhaité aborder, c'est celui de l'emploi, avec trois dominantes.
Premièrement, en 2009 comme en 2010, l'emploi sera notre priorité. Les mesures que nous avons adoptées – vous les connaissez parfaitement puisque vous travaillez beaucoup sur ce sujet – nous ont permis d'amortir mieux que nos voisins le choc de la crise. Il est temps de faire un bilan d'étape pour voir les domaines où il faut renforcer nos outils et ceux où il convient peut-être de corriger le tir. Ce sera fait en avril avec les partenaires sociaux.
Deuxièmement – vous en avez parlé –, il y a les mesures de justice pour ceux qui ont été victimes de la crise. À chaque fois qu'il y a eu des victimes, nous avons essayé de répondre : …
…répondre pour ceux qui ont été licenciés, avec les reconversions professionnelles ; répondre pour les seniors, avec Xavier Darcos, en essayant de se battre pour leur emploi ; répondre avec la reconduction de l'AER, comme vous l'avez mentionné, qui a été décidée hier et qui permettra d'apporter une réponse aux demandeurs d'emploi qui sont proches de la retraite ; enfin, répondre sur le sujet des demandeurs d'emploi en fin de droits.
Sur ce sujet, nous n'allons pas attendre, puisque, dès aujourd'hui, nous avons commencé la concertation avec les partenaires sociaux. Le but est d'aboutir avant la fin du mois de mars, c'est-à-dire avant que le problème devienne récurrent, notamment vers la fin du mois de juin.
Troisièmement – et il s'agit là d'une leçon –, nous poursuivrons notre action dans un esprit de dialogue social. Trop souvent, le dialogue social à la française, c'était : pas de dialogue social ! Souvenons-nous seulement que, il y a à peine dix ans, quand Martine Aubry était responsable de la politique de l'emploi, les 35 heures avaient été adoptées sans concertation (Protestations sur les bancs du groupe SRC) et que la réforme de l'assurance chômage, voulue par les partenaires sociaux, avait été retoquée par la ministre.
Heureusement, du chemin a été fait depuis ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Philippe Martin, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le secrétaire d'État chargé des affaires européennes, je veux revenir sur la spéculation qui sévit actuellement en Europe contre des États de l'Union.
Comme vous sans doute, mes chers collègues, j'ai en mémoire les mots prononcés par le Président de la République au sortir de la crise financière : « Rien ne sera plus jamais comme avant ! » (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Le capitalisme allait être moralisé, les paradis fiscaux dynamités, les bonus encadrés et les salaires des grands patrons maîtrisés.
Mes chers collègues, soyons justes avec le chef de l'État et donnons-en lui acte : il a dit vrai. Aujourd'hui, rien n'est plus comme avant, puisque tout est pire ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Non seulement les traders se distribuent des bonus extravagants ; non seulement les patrons s'octroient des retraites chapeaux ressemblant de plus en plus à des panamas, (Sourires) mais les banques, ces banques que, malgré nos mises en garde, vous avez renflouées sans véritables contrôles et sans réelles contreparties, mordent aujourd'hui la main de ceux qui les ont sauvées.
Tout cela se déroule sous le regard incrédule de celles et ceux qui sont les véritables victimes d'une spéculation sans fin, et dont la vie quotidienne rime avec surendettement, chômage et précarité.
À travers ma question, monsieur le secrétaire d'État, je ne cherche même plus à savoir ce que vous comptez faire pour remédier à un tel scandale. De G20 en G20, les Français ont compris que c'est surtout leurs espoirs qui étaient vains. (Sourires.)
Ma question est plus simple : quand allez-vous admettre que, pour sauver les nantis de la finance, vous avez sacrifié tous les damnés de la terre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.)
La parole est à M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État chargé des affaires européennes.
Monsieur Philippe Martin, je vous demande d'abord de bien vouloir excuser l'absence de ma collègue Christine Lagarde, retenue à Bruxelles par le conseil ECOFIN.
Face à l'agitation des marchés financiers contre la Grèce,…
…membre de la zone euro, je veux m'en tenir au fond, si vous le voulez bien, et éviter toute polémique idéologique. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Le conseil européen informel du 11 février, réuni sur l'initiative de M. Van Rompuy, a réussi, grâce à la détermination de la France et de l'Allemagne, à adopter une déclaration politique ferme sur cette situation. Cette déclaration se décompose en trois points principaux.
Premièrement, le conseil européen a rappelé que tous les États membres ont une responsabilité partagée pour que la stabilité économique et financière de la zone euro soit respectée.
Deuxièmement, le conseil européen a soutenu les engagements solennels pris par le gouvernement grec de mettre en oeuvre toutes les mesures nécessaires, y compris – j'insiste sur ces termes – l'adoption de mesures additionnelles pour que les objectifs ambitieux de réduction des déficits de 4 % en 2010 soient effectivement remplis. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Ce n'était pas du tout la question ! M. Martin ne vous a pas parlé de la Grèce !
Troisièmement, ces engagements seront surveillés de près par la Commission, en liaison avec la BCE et en s'appuyant sur l'expertise du FMI. En ce moment même, les recommandations préparées par la Commission et adressées au gouvernement grec sont étudiées par le conseil ECOFIN. Une surveillance mensuelle de ces engagements sera menée à bien, avec un premier rendez-vous dès le mois de mars.
Cela montre que la zone euro est aujourd'hui sérieusement et fortement encadrée par les règles du pacte de stabilité. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Cette crise illustre la volonté du Président de la République et de la Chancelière allemande d'aboutir à un véritable gouvernement économique de l'Europe. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-Paul Anciaux, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre de l'agriculture, à l'initiative de la Commission européenne, une révision de la délimitation des zones défavorisées simples est en cours. La France doit faire de nouvelles propositions de zonage.
La Commission européenne a décidé de redéfinir les critères de classement, en supprimant les critères socio-économiques, qui n'ont pas évolué depuis la définition des zones, et dont l'hétérogénéité entre États membres entraîne un manque de transparence et des disparités de traitement.
À la suite de ce constat, huit nouveaux critères liés au sol et au climat ont été proposés. Parmi ces critères, certains ne sont pas pertinents pour le département de Saône-et-Loire, notamment les critères relatifs au sol. On note également que d'autres critères sont sujets à des interprétations aléatoires des différents États membres.
Le territoire agricole de Saône-et-Loire est classé à 83 % en zone défavorisée. Ce statut conditionne le versement d'aides nombreuses – l'indemnité compensatoire de handicaps naturels, la dotation aux jeunes agriculteurs, l'attribution de prêts bonifiés pour les jeunes agriculteurs – ce qui représente pour la Saône-et-Loire un total d'environ 11 millions d'euros.
Maintenir ce niveau d'aide est un enjeu majeur pour l'installation des jeunes éleveurs dans des zones difficiles. Une exploitation agricole en Saône-et-Loire génère sept à huit emplois induits. Veiller à ne pas pénaliser les exploitations d'élevages extensifs, c'est conserver un tissu rural vivant et dynamique.
Il est aujourd'hui indispensable d'apporter, comme nous pouvons le faire, des aménagements aux conditions proposées par la Commission européenne.
Dans la révision en cours, ne pas prendre en compte la spécificité des grandes surfaces herbagères, où sont produites les meilleures races à viande mondiales, ce serait montrer l'absence de volonté de rassurer et d'encourager cette filière.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous préciser la position de la France sur ce dossier important pour le devenir des grands bassins allaitants ?
La parole est à M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Derrière votre question se profile un choix grave et simple : voulons-nous regrouper les exploitations agricoles françaises et ne maintenir une activité agricole que sur une partie de notre territoire, ou voulons-nous au contraire maintenir une activité agricole partout, y compris dans les zones difficiles ? C'est évidemment le second choix que fait le Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Pour cela, il faut apporter aux zones défavorisées des compensations sous forme de ICHN.
Actuellement, 80 % de ces aides vont aux zones de montagne : ces indemnités seront intégralement maintenues. Pour les 20 % d'aides qui touchent les zones défavorisées simples, les zones de piémont, et donc votre département, un zonage est en cours de redéfinition sur la base de critères qui nous ont été fournis par la Commission européenne.
Ces critères ne sont pas satisfaisants : ils aboutissent à la diminution de moitié des zones défavorisées simples et des aides qui leur seront apportées, ce qui n'est pas acceptable. J'ai donc mis en place un groupe de travail pour redéfinir ces critères et faire en sorte que le zonage soit plus favorable aux zones défavorisées simples et aux zones de piémont. Vous serez naturellement tenu étroitement au courant du résultat de ces travaux.
De manière plus générale, ce n'est pas au moment où l'agriculture française souffre qu'il faut alléger les aides qui lui sont apportées. Il faut au contraire les renforcer, à l'échelle nationale comme à l'échelle européenne. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, les jeunes sont les premières victimes de la hausse du chômage et des inégalités.
Le chômage des moins de vingt-cinq ans touche un demi-million de jeunes, après avoir bondi de 20 % en un an. Les jeunes sont également les premiers frappés par la crise : derniers arrivés, ils sont aussi les premiers sortis. Et je ne parle pas des jeunes des quartiers populaires qui, eux, ont près de deux fois plus de difficultés que les autres à accéder à un emploi stable.
Les inégalités se creusent : un logement trop petit pour un jeune sur trois, découverts bancaires pour un sur cinq ; aujourd'hui, 45 % des pauvres ont moins de vingt-cinq ans.
Vous allez nous répondre : RSA jeunes – mais il ne touche qu'une minorité de jeunes, ceux ayant déjà travaillé deux ans dans les dernières trois années. Vous allez nous parler des 135 millions d'euros consacrés aux jeunes en difficulté dans le budget 2010, somme dérisoire à côté des milliards redonnés aux plus riches au travers du paquet fiscal et du bouclier fiscal.
La promesse du candidat Sarkozy en 2007 de proposer à chaque jeune une formation débouchant sur un emploi s'est évanouie dans le brouillard des annonces sans résultats.
Si les banques, et surtout leurs clients, valaient bien un plan, la jeunesse de notre pays vaut bien un programme volontariste à la hauteur des ambitions que nous devons avoir pour que les jeunes ne vivent pas moins bien que leurs aînés.
La politique du Gouvernement consiste depuis deux ans à annoncer des plans. Monsieur le Premier ministre, ma question est simple : y aura-t-il un vrai programme, avec des moyens réels pour lutter contre le chômage et la précarité des jeunes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.
Nous travaillons d'arrache-pied sur l'insertion professionnelle des jeunes, avec les partenaires sociaux, avec Martin Hirsch, avec Fadela Amara, avec Xavier Darcos, avec Luc Chatel – tous ensemble.
Je vais essayer de vous expliquer les mesures qui ont été adoptées, mais surtout – c'est ce qui vous intéresse – les résultats. Et nous allons parler ensemble de résultats.
Parlons d'abord du RSA jeunes : vous y étiez vous-même favorable. C'est la première fois que nous mettons en place un dispositif sans discrimination en fonction de l'âge, un dispositif simple : que vous ayez plus ou moins de vingt-cinq ans, vous avez les mêmes droits si vous êtes dans la même situation.
Avec Valérie Pécresse, nous nous sommes battus pour faire en sorte que les bourses qui financent les études soient améliorées.
Avec Fadela Amara, nous avons renforcé les dispositifs en faveur des quartiers difficiles. Pour la première fois – voilà un résultat –, le taux de chômage des jeunes des quartiers difficiles n'a pas augmenté pendant une crise ; il a même reculé. (Exclamations sur de nombreux bancs des groupes SRC et GDR.)
Nous nous sommes battus en matière d'apprentissage. Au début de l'année, l'apprentissage était en recul de 20 %. Avec l'aide des chambres de commerce et d'industrie, avec l'aide des commerçants et artisans, nous avons pu redresser la barre et l'année s'est achevée sur une hausse de 3 %. Voilà encore un résultat !
Voilà enfin un autre résultat : l'année s'était ouverte, vous avez raison, sur une hausse très inquiétante du chômage des jeunes. Depuis juin, mois après mois, nous avons fait reculer le taux de chômage des jeunes.
Je ne vous dis pas que ces résultats sont rassurants. Il reste encore tout un travail à faire. Mais les premiers résultats sont là. Hier, nous avions autour de la table des partenaires sociaux responsables pour discuter des retraites : l'emploi des jeunes ne doit pas non plus être un terrain de jeu pour la politicaillerie. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) En matière d'emploi comme de retraite, nos compatriotesjugeront ceux qui sont au rendez-vous de l'intérêt général ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. — Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à Mme Béatrice Pavy, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Madame la secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité, la mort tragique de la petite Marina, en août dernier, a suscité une vive émotion dans la France entière, plus particulièrement dans mon département, celui de la Sarthe.
Conformément à la loi du 5 mars 2007, réformant la protection de l'enfance, et aux procédures en vigueur, les services sociaux ont été amenés à connaître la famille de l'enfant et à la suivre, notamment à la suite du signalement réalisé auprès du procureur de la République et des informations préoccupantes transmises à la cellule départementale de recueil, de traitement et d'évaluation. Les professionnels sont intervenus selon les exigences de leur métier respectif, dans le respect des droits de la famille et des obligations qui leur incombent.
Néanmoins, la protection de l'enfance, eu égard aux enjeux notamment humains qu'elle recouvre, relève d'un exercice particulièrement délicat pour l'ensemble des professionnels appelés à oeuvrer en ce domaine.
En France, ce sont près de 100 000 enfants qui sont déclarés en danger. Dans mon département, plus de 2 000 signalements sont recensés, dont 1 100 sont jugés inquiétants et font actuellement l'objet d'un suivi particulier des services sociaux.
Afin que les conseils généraux puissent poursuivre leur mission en faveur de la protection de l'enfance, il est primordial de comprendre et, si nécessaire, de faire évoluer le fonctionnement de nos organisations, tant en interne que dans le partenariat institutionnel.
Si la loi du 5 mars 2007 a largement amélioré le dispositif de signalement en abrogeant le secret professionnel et le libre échange des données, il est indispensable de mieux organiser la transmission de l'information entre les acteurs et de fixer les limites de la protection administrative.
Je sais que débutent aujourd'hui les états généraux de l'enfance, qui réunissent le Gouvernement, les représentants des conseils généraux en charge de la protection de l'enfance et les associations. Je souhaiterais, madame le secrétaire d'État, que vous nous présentiez les grands axes de ces états généraux et que vous nous précisiez quelles dispositions vous entendez prendre en faveur de la protection de l'enfance, afin qu'ensemble, nous puissions éviter de tels drames. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité.
Madame la députée, Dylan, Enzo, Marina, autant de prénoms au destin tragique qui ne pouvaient nous laisser indifférents. C'est pourquoi le Président de la République… (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
…a décidé, le 20 novembre dernier, lors de la célébration du vingtième anniversaire de la convention internationale des droits de l'enfant, de tenir des états généraux…
…consacrés à l'enfance fragilisée.
Comme vous l'avez souligné à juste titre, le cas de la petite Marina aurait pu être évité si nous avions eu, dans notre pays, une meilleure transmission de l'information, de département à département, de commune à commune, entre tous les acteurs concernés par le signalement d'un enfant en situation de danger.
Nous avons souhaité commencer par mettre en place une méthode.
Nous allons travailler avec des ateliers thématiques pendant trois mois. Au terme de ce délai, nous rendrons nos travaux et le Président de la République viendra clôturer lui-même ces états généraux de l'enfance. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Cinq ateliers sont prévus : le premier aura pour but d'améliorer la fluidification et la transmission de l'information préoccupante ; le deuxième cherchera à positionner le travail social parce que les travailleurs sociaux – ils nous le disent – ont besoin d'être au plus près des familles et d'être un peu moins pris par le travail administratif ; le troisième s'attachera à voir comment accompagner les parents dès le premier mois de l'enfant parce que, lorsqu'une famille est en situation de fragilité, tout se joue, nous le savons, dès les premiers jours, voire les premiers mois de la vie.
Le quatrième atelier s'appliquera à mieux prendre en compte la situation des enfants qui vivent en situation de pauvreté tandis que le cinquième cherchera à lutter contre les jeux dangereux, parce que treize décès l'année dernière à cause de ces jeux dangereux, c'est, pour nous, inacceptable. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Olivier Dussopt, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question, à laquelle s'associe mon collègue Pascal Terrasse, député de l'Ardèche, s'adresse à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Madame la ministre, le 26 janvier, vous avez déclaré, ici même, à propos de l'avenir des sites délocalisés des IUFM : « L'avenir de ces antennes de proximité est assuré » en promettant notamment que les IUFM seraient affectés à l'organisation des stages, de la formation continue et à l'accueil des professeurs des écoles en formation.
Aujourd'hui, je constate que vous avez menti (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) : en pensée, en parole, par action ou par omission, vous ne nous avez pas dit la vérité. (Applaudissements sur divers bancs du groupe SRC.)
J'ai là un courrier du président de l'université Joseph Fourier de Grenoble, daté du 9 février dernier, qui considère comme « inévitable » la fermeture du site de l'IUFM de Privas en Ardèche à la rentrée 2010. Il précise que cette « décision de fermeture », je reprends ses mots, est due au fait que la mise en place de masters pour les étudiants se traduira par la mobilisation d'un nombre important d'enseignants chercheurs sur les sites conservés et que, faute de moyens, cela ne lui permet pas de maintenir chacun des sites actuels de l'IUFM qu'il dirige depuis son université.
Madame la ministre, le décalage entre votre discours électoral et la réalité de votre politique est insupportable.
Alors que, lors des assises des territoires ruraux, le Gouvernement nous a promis de tout faire pour le développement des territoires comme l'Ardèche, aujourd'hui c'est, encore une fois, la suppression d'un service public que vous nous annoncez, en contradiction avec votre engagement de concertation mais surtout avec les efforts déployés par les élus locaux, notamment Yves Chastan, maire de Privas, et Hervé Saulignac, conseiller général, qui se sont inscrits dans un partenariat, illustré par les travaux de rénovation déjà réalisés par le département de l'Ardèche.
Cette décision est d'autant plus inacceptable que le département de l'Ardèche a déjà payé un lourd tribut à la révision générale des politiques publiques.
Madame la ministre, de deux choses l'une : soit vous assumez ne pas avoir dit la vérité le 26 janvier dernier devant nous, et vous nous dites combien d'antennes d'IUFM vous allez fermer, soit vous revenez sur cette décision de fermeture, et vous nous dites quelles seront les formations dispensées sur le site de Privas en septembre 2010. Les collectivités locales y sont prêtes. Elles attendent votre réponse. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)
La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Monsieur le député, la réforme de la formation des maîtres, qui va faire passer leur recrutement à bac plus 5, est une bonne réforme. (« Non ! Non ! sur les bancs du groupe SRC.) C'est une réforme qui bénéficiera à la fois aux futurs enseignants, qui auront plus de compétences et plus de connaissances, et aux futurs élèves.
Vous m'interrogez plus précisément sur l'avenir des antennes IUFM dans le cadre de cette réforme.
Comme vous le savez, depuis la loi 2005, dite loi Fillon, les IUFM ont été intégrés dans l'Université, à la satisfaction générale. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Je le dis et le répète devant la représentation nationale : l'avenir de ces pôles universitaires de proximité est assuré.
Plusieurs députés du groupe SRC. C'est faux !
En effet, dans le cadre de la réforme, ces antennes d'IUFM, assureront le suivi des stages des étudiants avant le concours et la formation continue des maîtres après le concours.
Il y aura, dans chaque académie, y compris dans celle de Grenoble, une réunion autour du recteur, avec les élus, avec le président de l'université de Grenoble, avec les directeurs d'antenne d'IUFM (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)…
…pour élaborer en concertation un schéma académique de la formation des maîtres.
C'est dans ce cadre que sera discuté l'avenir du pôle universitaire de proximité de Privas.
Je suis certaine que les élus, la communauté universitaire et l'ensemble des enseignants de l'IUFM sauront trouver un avenir à ce pôle universitaire de proximité de Privas. (Applaudissements sur divers bancs des groupes UMP et NC.)
Iufm
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt.)
Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean-Christophe Lagarde pour le groupe Nouveau Centre.
Ce texte que nous avons examiné la semaine dernière marque un certain nombre d'inflexions, d'orientations, dans la stratégie du Gouvernement pour renforcer la sécurité intérieure de notre pays. Des mesures sont ainsi prises pour adapter les équipements, fidéliser les personnels sur les territoires, en particulier les plus difficiles, renforcer la gestion mutualisée des services communs de la police nationale et de la gendarmerie, qui restait insuffisante malgré la décision prise voici quelques années de les rapprocher. Citons encore le développement, après l'expérience démarrée en Île-de-France autour de ce qui fut l'ancienne préfecture de police de Paris, de la police d'agglomération pour répondre à de nouveaux enjeux tant il est vrai que l'organisation administrative de la police ne correspond pas à l'évolution de la délinquance ; le développement encore de la vidéoprotection – la France était particulièrement en retard en la matière avec seulement un peu plus de 20 000 caméras au service des forces de police ; de la police technique et scientifique afin, à nos yeux, de faire passer progressivement notre système policier et judiciaire de la culture de l'aveu à celle de la preuve. À toutes ces dispositions s'ajoutent d'autres innovations technologiques comme la visioconférence qui doit permettre de limiter les charges indues de la police et de la gendarmerie.
Votre texte compte également un certain nombre d'outils nécessaires qui permettront de moderniser les fichiers, de s'adapter aux nouvelles formes de délinquance telles que la cybercriminalité, la vente à la sauvette, le trafic de métaux, de lutter contre l'insécurité routière ou de réprimer plus sévèrement encore les agressions contre les personnes âgées.
Je tiens par ailleurs à saluer l'ouverture dont le Gouvernement a fait preuve à l'égard des amendements des parlementaires, en particulier ceux du Nouveau Centre. Le fait est suffisamment rare pour être souligné.
Pour toutes ces raisons nous voterons ce texte, proposé par le Gouvernement et amendé par notre Assemblée.
Permettez-moi cependant, monsieur le ministre, d'appeler votre attention sur trois points, à commencer par la nécessité, sur laquelle nous avons déjà insisté lors des débats, de geler la RGPP à l'égard de la police nationale et de la gendarmerie qui ont reçu pour mission de garantir la sécurité de nos concitoyens.
L'on ne peut donner toujours plus de missions et exiger toujours plus d'efficacité tout en ne cessant de réduire les effectifs.
Nous insistons ensuite, avec M. Philippe Folliot, sur le fait que la réorganisation territoriale de la gendarmerie nationale ne saurait être décidée sans concertation avec les élus locaux. L'évolution a beau être très certainement inéluctable et sans doute nécessaire, ses conséquences doivent être mesurées sur le terrain. Nous vous avons mis en garde lors des débats, monsieur le ministre, contre les difficultés qui pourraient naître d'une absence de concertation.
Enfin, alors que ce texte met en place une stratégie renforcée basée sur les nouvelles technologies, la mutualisation des moyens, la fidélisation des personnels, il convient de laisser aux forces de police et de gendarmerie le temps de s'adapter aux lois que nous votons. Une pause législative serait bienvenue en la matière pour que cette stratégie, dont nous sommes convaincus qu'elle peut s'avérer efficace, puisse se traduire dans les faits, au sein des commissariats et des brigades de gendarmerie.
Une part essentielle du texte, pas forcément celle qui fut le plus débattue d'ailleurs, consiste à inciter les policiers et les gendarmes à rechercher moins l'aveu que la preuve, c'est-à-dire à rapprocher leurs méthodes de celles qui se pratiquent dans beaucoup de pays du monde et qui présentent l'avantage de mieux protéger nos concitoyens contre d'éventuelles erreurs. Cela demande du temps, le temps de former dans les écoles, le temps de transformer la manière d'enquêter, le temps de s'approprier les nouveaux outils que nous voterons dans quelques instants. Laissons-leur ce temps. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
Au terme des débats très riches que nous avons eus la semaine dernière, ce texte, avec bien sûr les améliorations que nous y avons apportées – plus d'un quart des amendements ont été acceptés par le ministre, ce dont je le remercie – s'adapte parfaitement aux nouvelles formes de délinquance, et surtout met à la disposition des forces de l'ordre mais aussi de la justice, des outils efficaces issus des nouvelles technologies qui leur permettront de lutter plus efficacement contre les délits du XXIème siècle.
Ce texte apporte des réponses claires, notamment en matière de lutte contre l'usurpation d'identité – pas seulement sur internet –, ou de lutte contre les jeux dangereux à l'école. Il offre désormais aux régions la possibilité de contractualiser avec l'État pour des actions de prévention de la délinquance dans les lycées et les transports. Il étend le régime de la vidéoprotection qui a apporté la preuve de son efficacité dans les enquêtes policières. Il renforce les sanctions contre les infractions les plus graves au code de la route et qui coûtent la vie à bon nombre de nos concitoyens. Il aggrave les peines encourues pour les vols commis à l'encontre des personnes les plus vulnérables. Il créé de nouvelles synergies entre la police municipale et la police nationale qui met fin à des vides juridiques. Voilà autant de mesures qui faciliteront le travail des forces de police et rendront leur action encore plus efficace et performante.
Oui, monsieur le ministre, nous pensons que la performance ne passe pas seulement par l'augmentation des effectifs contrairement à ce qu'ont inlassablement martelé nos collègues de l'opposition. Elle passe d'abord et avant tout, tout le monde peut s'accorder sur ce point, par une meilleure organisation des effectifs sur le terrain…
…comme c'est le cas avec la création des polices d'agglomération qui a fait ses preuves en région parisienne et par la mise en place d'outils technologiques modernes. Cela va de pair.
Je l'évoquais tout à l'heure, nos débats ont été riches, même si je déplore que des intérêts plus dogmatiques que pragmatiques aient guidé certains propos. Les questions de sécurité publique doivent dépasser les clivages politiques : il s'agit de permettre aux forces de l'ordre de mieux travailler en leur accordant la possibilité d'utiliser enfin les technologies modernes qui s'offrent à eux.
Le groupe UMP appelle de ses voeux cette modernisation et soutient ces nouvelles mesures qui vont dans le sens du renforcement de la lutte contre l'insécurité de nos concitoyens, et en particulier les mesures qui concernent la délinquance des mineurs dont on a encore beaucoup parlé aujourd'hui.
C'est pourquoi le groupe UMP votera sans état d'âme ce texte qui s'adapte totalement aux nouvelles formes de délinquance et entend répondre aux besoins légitimes de sécurité de l'ensemble de nos compatriotes. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
Le scrutin sur le texte est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Manuel Valls, pour le groupe SRC.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons débattu de la LOPPSI dans un contexte marqué, depuis 2002, par une augmentation de 32 % des violences à l'encontre des dépositaires de l'autorité, de 14 % vis-à-vis des personnes et par une hausse de près de 50 % des violences physiques gratuites. Ces chiffres signent un échec, celui de Nicolas Sarkozy (« C'est faux ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP), qui s'occupe de la sécurité depuis 2002. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Cet échec est celui d'une orientation politique donnée aux forces de l'ordre à qui nous voulons rendre hommage. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Reste que votre politique du chiffre est clairement invalidée par la réalité. Malheureusement, la même logique a présidé à la conception de la LOPPSI.
Cette méthode, qui a pu connaître un apparent succès médiatique à ses débuts, dès lors qu'il s'est agi de traiter des dossiers « à chaud », a entraîné une inflation législative sans précédent : en moins de huit ans, dix-sept textes de loi ont été discutés et adoptés dans ce domaine et vous persistez, monsieur le ministre, dans la même logique – comme le montre l'idée inefficace d'un couvre-feu pour les mineurs de moins de treize ans. Malheureusement – et les Français ne s'y trompent pas –, cela ne marche plus.
La délinquance de tous les jours, les cambriolages, les agressions, les phénomènes de bande, la prolifération des armes à laquelle vous ne vous attaquez pas, la violence très inquiétante d'un certain nombre de mineurs, les agressions à l'école, la souffrance des victimes, illustrent une dérive générale de la société que personne ne peut ignorer.
Pour faire face à cette situation, nous avons refusé de jouer le jeu de la confrontation dépassée entre les tenants de l'excuse absolutoire qui considèrent qu'il n'y a que des victimes, et les partisans de la répression aveugle dont le seul souci est d'éliminer les auteurs de la délinquance, bref, entre les angéliques et les sécuritaires.
Les orateurs du groupe SRC se sont situés sur le seul terrain de la réalité des chiffres (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe UMP), réalité que vivent les Français, avec pour seul souci celui de l'efficacité. (« Il a raison ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Si nous avons approuvé telle ou telle mesure, nous avons dénoncé celles qui sont inefficaces ou dangereuses pour les libertés ou pour la liberté des collectivités territoriales. Nous vous avons proposé de mener une politique de sécurité moderne, mais vous avez refusé de nous entendre, de revoir votre stratégie ; vous n'avez pas écouté ceux qui, depuis 2002, vous rappellent que la suppression de la police de proximité est le péché originel de Nicolas Sarkozy en matière de sécurité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Delphine Batho vous l'a dit : nous en sommes revenus à une police des années soixante, coupée de la population, hiérarchisée, centralisée, orientée sur la seule expertise technique – d'où le malaise qui affecte la police nationale.
Les suppressions de postes ? J'ai encore à l'esprit, chers collègues, les interventions de la droite, de Nicolas Sarkozy en particulier, demandant au ministre de l'intérieur Daniel Vaillant de « mettre du bleu dans les quartiers » quand, aujourd'hui, vous expliquez que les effectifs ne constituent pas une question importante, que la vidéosurveillance va tout régler et que vous êtes sur la bonne voie. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.) Non ! Il y a échec !
Les UTEQ sont une mesure de replâtrage et nous savons tous que le ministre de l'intérieur est en train d'en préparer la suppression. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Votre façon de vous défausser sur les collectivités territoriales ne trompe personne et il aurait fallu poursuivre le débat jusqu'au bout sur le rôle de la police municipale.
Comparez les chiffres depuis 2002 avec ceux d'avant et vous verrez bien la différence !
Nous avons senti le malaise qui parcourait les rangs de la majorité qui voit bien que cette politique est vouée à l'échec et que la fuite en avant du ministre de l'intérieur est condamnée par les Français.
En vous demandant de faire avant tout de la lutte contre les violences faites aux personnes, notamment les plus vulnérables, un objectif majeur de la politique de sécurité de l'État, de faire du déploiement d'une police de quartier une priorité absolue, en vous rappelant les missions dissuasives des forces de sécurité intérieure, en vous incitant à déconcentrer les responsabilités pour adapter les stratégies territoriales de sécurité aux besoins, en vous suggérant d'évaluer de façon constante l'efficacité des forces de l'ordre, en vous demandant, enfin, comme vient de le faire le groupe Nouveau Centre, de cesser de geler les postes, nous vous avons proposé une politique alternative.(Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Vous n'avez pas emprunté cette voie et c'est la raison pour laquelle nous voterons contre ce projet de loi. (Applaudissements nourris sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous allons nous prononcer sur ce texte présenté par le ministre de l'intérieur comme la seconde loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure alors que, depuis 2002, si Manuel Valls en a compté dix-sept, j'ai dénombré pour ma part quinze textes sur le même sujet.
Nul doute que celui-ci n'aura pas plus d'effets que les précédents et que nous en aurons bientôt un seizième ou un dix-huitième selon le décompte choisi.
S'agit-il vraiment de protéger davantage les citoyens ou bien d'un effet d'annonce alors que les élections régionales approchent ? Nous sommes nombreux sur ces bancs à pencher pour le second terme de l'alternative. Cette loi pourra-t-elle d'ailleurs être appliquée avant cette échéance ? En effet, le Gouvernement a oublié de notifier la LOPPSI à Bruxelles, conformément à la directive n°98-48 de la Commission, en date du 20 juillet 1998. À moins que le Gouvernement ne brandisse la menace de l'imminence de risques graves et imprévisibles pour la sécurité et l'ordre public, notamment pour la protection des mineurs.
Quoi qu'il en soit, il faut bien constater que ce projet est conforme à l'idéologie primaire et dangereuse qui préside depuis plusieurs années au traitement des questions de sécurité. Il y a de quoi s'inquiéter quant à l'évolution de la société. Dans quel monde voulez-vous faire vivre les hommes et les femmes de ce pays ?
À cause de votre refus de la discussion, nous avons assisté à une parodie de débat, indigne des valeurs démocratiques que nous sommes censés défendre, alors que ces questions préoccupent à juste titre nombre de nos concitoyens. Il est invraisemblable de ne penser qu'à dresser les gens les uns contre les autres, avec pour seul objectif de surveiller et punir.
Surveiller dans les moindres recoins : plus aucun lieu de l'espace public ne doit échapper à l'oeil de Big Brother. Nous pensions y échapper mais il vient, grâce au Gouvernement, d'acquérir son droit de cité. À cause de ce projet, toutes les entreprises privées vont pouvoir implanter sur la voie publique des systèmes de vidéosurveillance. Les préfets pourront, quant à eux, autoriser la mise en place de tels dispositifs « en cas de manifestation de grande ampleur présentant un risque pour l'ordre public ». L'objectif est clair : généraliser la surveillance des espaces publics au nom d'une efficacité d'autant plus hypothétique que le fameux exemple anglais s'apparente à un véritable fiasco.
Pourquoi ne pas écouter et analyser les constats élaborés par ceux qui ont déjà mesuré les limites de la folie sécuritaire ?
L'obsession du fichage policier marque également ce projet. Non content de reconduire les dispositifs actuels, pourtant détournés de leurs objectifs initiaux, truffés d'erreurs et incontrôlables, le Gouvernement veut les interconnecter et même les étendre.
Que dire par ailleurs du couvre-feu pour les mineurs de moins de treize ans qui ne manquera pas d'engendrer des contrôles d'identité abusifs ? Je ne reviendrai pas sur ce qui vient d'arriver à la jeune Anne, âgée de quatorze ans, victime d'une garde à vue entachée d'un acte arbitraire commis par plusieurs agents détenteurs de l'autorité publique, contrairement aux dispositions de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme.
Avez-vous si peur des jeunes que votre seul projet consiste à les maintenir enfermés ? Leurs parents aussi vous font peur : en cas de manquement à leurs devoirs, ils seront soumis au contrat de responsabilité parentale ; vous renforcez en cela la pénalisation de familles qui vivent déjà de grandes difficultés.
Que dire encore de l'inquiétante ébauche d'un traitement administratif des mineurs délinquants par la transmission systématique au préfet et au président du conseil général de toutes les décisions judiciaires les concernant ?
Les internautes ne sont pas oubliés avec le filtrage policier des sites internet, aussi inefficace que lourd de menaces pour les libertés individuelles.
Même le conducteur voit réintroduites les peines automatiques en matière routière.
Je ne serais pas complet si je ne signalais la création d'une milice policière baptisée « réserve civile » et si je ne mentionnais pas l'augmentation des pouvoirs de la police municipale.
Et l'on ne saurait oublier que ce projet veut imposer une justice virtuelle, délocalisée et déshumanisée, ce qui est contraire au droit à un procès équitable.
Ainsi, le Gouvernement, faute de pouvoir répondre aux causes réelles des insécurités – je pense au chômage, au manque de formation, aux problèmes liés à l'école et à l'éducation, au mal-logement – dessine les contours d'un nouveau pays où la répression serait la meilleure des préventions. Pour toutes ces raisons, le groupe GDR ne votera pas ce projet attentatoire aux libertés privées et publiques et qui ne réglera en rien les problèmes qu'il est censé résoudre. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'ensemble du projet de loi.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 529
Nombre de suffrages exprimés 526
Majorité absolue 264
Pour l'adoption 312
Contre 214
(Le projet de loi est adopté.)
Vote sur l'ensemble
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quarante, est reprise à seize heures cinquante, sous la présidence de Mme Danielle Bousquet.)
L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de MM. François Baroin et Jack Lang visant à modifier la procédure de huis clos devant la cour d'assises des mineurs (nos 1816, 2275).
La parole est à M. François Baroin, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État à la justice, mes chers collègues, le principe de la publicité des débats judiciaires est une règle fondamentale pour les libertés publiques et constitue l'un des piliers des sociétés démocratiques. En France, nous le savons, la justice est rendue « au nom du peuple français » : il est donc essentiel que les citoyens puissent exercer un contrôle sur les conditions dans lesquelles elle est rendue.
Reconnu dès la Révolution par l'Assemblée constituante, puis, plus récemment, par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ce principe connaît un certain nombre d'exceptions. Les victimes d'infractions sexuelles bénéficient de plein droit du huis clos si elles en font la demande, afin de leur permettre de préserver leur intimité. Les mineurs jugés par des juridictions pour mineurs le sont selon les règles de la publicité restreinte : seuls peuvent être présents leurs proches et les professionnels de l'enfance chargés de leur suivi ; la présence de la presse et du public est écartée.
Cette règle de protection des mineurs s'applique y compris lorsque la personne poursuivie, mineure au moment des faits, est devenue majeure au moment du procès. Or cette situation est la règle devant les cours d'assises des mineurs et est extrêmement fréquente devant les tribunaux pour enfants. En 2008, 98 % des mineurs de 16 à 18 ans jugés pour crimes l'ont été alors qu'ils étaient devenus majeurs ; ce taux était de 44 % devant les tribunaux pour enfants.
Il y a une dizaine d'années, la règle de la publicité restreinte, appliquée aux mineurs quel que soit leur âge au moment de leur procès, avait montré ses inconvénients à l'occasion de ce que l'on a appelé l'affaire Dils. Souvenons-nous, M. Dils, condamné par une cour d'assises des mineurs, avait bénéficié d'une révision de sa condamnation et avait été renvoyé devant une nouvelle cour d'assises des mineurs, alors qu'il était âgé de plus de 30 ans. Il souhaitait que son procès puisse être public, mais la loi ne lui donnait alors pas cette possibilité. Après sa condamnation par la cour d'assises des mineurs du Rhône au terme d'un procès tenu sous le régime de la publicité restreinte, c'est un député socialiste, M. Jean-Pierre Michel, qui, à juste titre, avait fait adopter un amendement permettant que, à la demande d'un mineur devenu majeur au jour de sa comparution, le procès devant une cour d'assises des mineurs puisse être public. Lors de son procès en appel, tenu publiquement grâce à la modification législative dont le premier procès après révision avait montré la nécessité, M. Dils, on s'en souvient, avait été acquitté.
Cette présentation des dispositions légales applicables aux procès des mineurs devenus majeurs et de leur genèse nous rappelle également que le législateur doit savoir être à l'écoute des aspirations de la société. C'est aussi son devoir, sa responsabilité, que de proposer les modifications dont l'actualité fait apparaître la nécessité. A ceux qui disent que le texte dont nous abordons l'examen est une loi de circonstance, je réponds que, presque tous les jours, ce sont les circonstances qui éclairent l'exigence, pour le législateur que nous sommes, de remédier aux faiblesses du droit.
En juin 2009, était jugée devant la cour d'assises des mineurs de Paris une affaire dont la particulière gravité avait créé une émotion extrêmement forte parmi nos concitoyens : l'affaire dite du « gang des barbares », dont la victime, Ilan Halimi, avait été torturée et assassinée dans des circonstances particulièrement abominables.
Comme le procès Dils quelques années plus tôt, celui du gang des barbares a révélé une difficulté soulevée par les règles applicables lorsqu'un mineur poursuivi est devenu majeur au moment du procès. Les vingt-sept accusés étaient majeurs au jour de l'audience, mais deux d'entre eux étaient mineurs au moment des faits. La complexité de l'affaire et le rôle joué par ces deux mineurs avaient conduit à ne pas disjoindre l'affaire, tous les accusés étant en conséquence renvoyés devant une cour d'assises des mineurs. La règle de la publicité restreinte était donc applicable, alors même que la majorité des accusés étaient majeurs au moment des faits et auraient dû être jugés publiquement.
La seule possibilité pour que ce procès se déroule publiquement aurait été que les deux accusés mineurs au moment des faits acceptent la publicité, ce qui ne fut pas le cas.
Afin de résoudre cette difficulté d'ordre général, mise en évidence par une affaire particulière, nous avons déposé, avec mon collègue Jack Lang, que je salue, une proposition de loi tendant à modifier les règles de publicité applicables devant les cours d'assises des mineurs lorsqu'elles jugent des personnes devenues majeures, afin que la décision sur le régime de publicité applicable n'appartienne plus au seul accusé mais soit soumise à une appréciation de la cour en début d'audience.
Après plusieurs mois de travail, notre commission a retenu un certain nombre d'enseignements susceptibles de bonifier notre élan de départ. Nous avons entendu de nombreux magistrats et avocats spécialistes des mineurs et des représentants des juridictions criminelles, qui ont une certaine expérience en la matière, mais qui sont aussi soucieux de la préservation de l'anonymat et de la protection du droit des mineurs.
Après un débat de qualité, la commission des lois est parvenue à un texte marqué par l'équilibre entre les deux grands principes régissant le sujet qui nous intéresse : le principe de la publicité des débats judiciaires, d'une part, et le droit à la protection des intérêts des mineurs, d'autre part.
Les travaux que j'ai eu l'honneur de mener en tant que rapporteur m'ont amené à la conclusion que la publicité restreinte, qui est aujourd'hui un droit absolu du mineur – y compris lorsqu'il est devenu majeur – pouvait et devait être conciliée avec d'autres intérêts, susceptibles de remettre en cause son application pour les mineurs devenus majeurs.
Il s'agit, d'abord, de l'intérêt de la justice elle-même, qui peut commander que, dans un souci de pédagogie vis-à-vis de tous, certains procès soient publics. Je crois à la vertu pédagogique du procès. Je crois aussi à la nécessité de créer un cadre de droit permettant à la société, par exemple dans l'affaire du gang des barbares, de comprendre comment un tel drame a pu se produire dans une cité, avec autant de personnes en cause. Celles-ci, au cours du procès, ont nourri un double sentiment d'injustice, qui fut ressenti en particulier par la famille d'Ilan Halimi : l'injustice qu'a constituée sa disparition dans les conditions que l'on sait, sur lesquelles je ne reviens pas, a été doublée du sentiment qu'une forme de loi de silence s'imposait à travers l'application du droit conduisant au huis clos, sans faculté pour la cour d'offrir au public, et notamment aux journalistes, la possibilité de suivre les travaux de l'audience.
Il s'agit ensuite de l'intérêt d'autres coaccusés majeurs. Dans cette même affaire, par exemple, les accusés majeurs ont été privés de leur droit à un procès public par la seule décision des coaccusés mineurs au moment des faits. Il s'agit enfin de l'intérêt des victimes, celles-ci pouvant légitimement estimer que l'oeuvre de justice nécessite une audience publique.
La conciliation entre d'une part, le droit de l'accusé mineur au moment des faits à la publicité restreinte, et, d'autre part, ces autres intérêts, a été le fil conducteur de notre réflexion. Contrairement à ce qui est dit ici ou là, cette conciliation ne pose pas de difficulté sur le plan du respect par la France des engagements internationaux auxquels elle est partie, et plus particulièrement de la convention européenne des droits de l'homme. En effet, l'article 6 de la CEDH, qui proclame le principe de la publicité des débats judiciaires, admet qu'il puisse être dérogé à ce principe « lorsque les intérêts du mineur l'exigent ». La CEDH n'impose pas la publicité restreinte pour les mineurs, mais permet seulement d'appliquer un tel régime si les intérêts du mineur l'exigent. La publicité restreinte peut donc être écartée au profit de la publicité si d'autres intérêts avec lesquels elle est conciliée le requièrent, ce qui est le cas lorsque le mineur est devenu majeur au jour de son procès. Et l'on doit à la vérité de reconnaître que c'est aujourd'hui le cas général. Il est très rare – on n'en a que quatre exemples, dans un passé récent – que les accusés mineurs au moment des faits soient toujours mineurs à la date de leur comparution. Cela est dû, naturellement, à la lenteur des procédures, mais le fait est que ces derniers cas de figure sont marginaux.
Je rappelle que les règles qui permettent la publicité dans certains cas existent dans plusieurs pays européens.
Dans le cadre de la recherche de cet équilibre, le texte adopté par la commission des lois a tout d'abord réaffirmé le principe de la publicité restreinte pour les mineurs devenus majeurs au jour de leur procès. Le maintien de ce principe est en effet conforme à la nécessité de préserver une spécificité au statut pénal des mineurs, afin de tenir compte de leur âge au moment des faits. Ce texte ne procède donc pas de la volonté d'aligner de manière automatique et systématique le droit commun sur le droit des mineurs, ou l'inverse. Je le dis pour celles et ceux qui auraient besoin d'être rassurés. Leur souci est par ailleurs légitime, et cette question fera l'objet de débats, dans quelques mois, à l'occasion d'autres textes fondamentaux.
Toutefois, si le principe de la publicité restreinte pour les mineurs devenus majeurs est réaffirmé, la proposition de loi aménage les conditions dans lesquelles il peut y être dérogé : dorénavant, le ministère public, l'un des accusés ou la partie civile pourront demander la publicité. En cas d'opposition de l'une des parties à la publicité des débats, c'est la cour qui devra statuer par une décision spéciale et motivée, en prenant en considération, ce qui me semble très important, les intérêts de la société, de l'accusé et de la partie civile, après un débat au cours duquel auront été entendus le ministère public et les avocats des parties.
Soucieuse que des circonstances particulières tenant à un besoin de protection renforcée de certains mineurs puissent être prises en compte, la commission a également prévu que, dans le cas où la personnalité de l'accusé mineur au moment des faits rendrait indispensable que, dans son intérêt, les débats ne soient pas publics, la cour devra ordonner que l'audience sera soumise au régime de la publicité restreinte.
En troisième lieu, la commission a étendu les nouvelles règles de publicité décrites ci-dessus aux audiences du tribunal pour enfants. Si la cour d'assises des mineurs est le lieu où doivent se rendre les décisions de justice sur des éléments criminels particulièrement abominables, il était difficilement concevable, par un parallélisme des formes, de ne pas aligner la proposition sur le tribunal pour enfants. Celui-ci, qui juge les délits commis par les mineurs de treize à dix-huit ans, mais aussi les crimes commis par les mineurs de treize à seize ans, est en effet susceptible de rencontrer les mêmes situations que la cour d'assises des mineurs. La cohérence juridique nous a donc conduits à rendre cette proposition plus souple.
Enfin, la commission a jugé indispensable de renforcer les sanctions encourues par les personnes qui violent l'interdiction de publication des comptes rendus des débats des juridictions pour mineurs.
Je m'y emploie, madame la présidente. Et pour conclure sur l'un des éléments de l'équilibre fondamental de ce texte, je rappelle que nous allons vers plus de sanction à l'encontre de ceux – organes de presse ou internet – qui diffusent la photo ou le nom des mineurs accusés devant une cour d'assises. À travers les auditions, il est apparu de façon spectaculaire que l'anonymat qui protège le mineur, qui permet aussi à la théorie du pardon et de l'oubli de trouver à s'appliquer, avait volé en éclats, comme le secret de l'instruction à une certaine époque. C'est la raison pour laquelle le texte propose de punir les infractions d'une amende de 15 000 euros, renforçant ainsi très substantiellement la sanction.
Tels sont les éléments de réflexion et les points d'équilibre. À celles et ceux qui voient une éventuelle remise en cause du droit, je dis que c'est le point de départ d'une évolution non pas dictée par l'émotion mais devenue légitime. Le texte est équilibré : d'une part, il assure l'évolution nécessaire pour permettre aux magistrats de décider souverainement – c'est le verrou de sécurité. Rien ne dit, d'ailleurs, qu'en appel de l'affaire Fofana, la cour arbitre dans le sens d'une publicité plus large. Ce sera sous l'autorité des magistrats. D'autre part, la protection des mineurs est renforcée, ce qui entre dans la perspective de la non-fusion entre droit commun et droit des mineurs. Voilà de quoi rassurer ceux qui se sont exprimés, qui ont participé avec moi aux auditions, ce dont je les remercie, ainsi qu'aux travaux de la table ronde qui a été, je crois, très éclairante. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Madame la présidente, monsieur le rapporteur, cher François Baroin, mesdames et messieurs les députés, permettez-moi tout d'abord de saluer, au nom du Gouvernement, l'initiative prise par MM. François Baroin et Jack Lang. Le consensus exigeant qui a présidé à vos travaux renforce l'importance et l'intérêt de la démarche de modernisation dans laquelle vous vous êtes engagés. Je salue également l'implication de la commission des lois dans l'important travail collectif, notamment d'auditions, et plus généralement l'intérêt que l'ensemble des députés ici présents porte à cette démarche.
En droit pénal, comme dans toutes les branches du droit, toute règle de procédure porte une certaine vision du procès, une certaine conception de la justice, une certaine idée de la société. Le huis clos a longtemps été la règle en cour d'assises des mineurs. Cette règle répond à un besoin de protection, en raison de la vulnérabilité supposée des parties au procès et de la nature des faits en cause. Elle correspond aussi à une volonté de discrétion sur des affaires particulièrement douloureuses.
Aujourd'hui, les évolutions de la société nous conduisent à en reconsidérer la portée. Le secret qui entoure les procès concernant les mineurs n'est pas toujours compris dans une société où la transparence est devenue une exigence démocratique. La publicité est inséparable des règles du procès équitable, au sens de la convention européenne des droits de l'homme, vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur. Les Français attendent du procès qu'il joue tout son rôle pédagogique, en portant son intervention et son action à la connaissance du public, y compris par la voie des médias.
Le besoin de protection d'un mis en cause mineur au moment des faits n'est plus compris dans les cas où les personnes concernées sont devenues majeures au jour du procès. Aujourd'hui, le huis clos est de droit dès lors que l'accusé était mineur au moment des faits. Cette règle n'est pas adaptée aux affaires pour lesquelles l'intérêt de la société commande un procès pédagogique et une sanction exemplaire. Des exemples particulièrement dramatiques ont été cités. L'ensemble des intérêts en cause doit être pris en compte. Une partie doit pouvoir réclamer la publicité des débats.
Je ne reprendrai pas le mécanisme que le rapporteur a fort bien développé à l'instant ; il me paraît parfaitement cohérent et équilibré. Une telle mesure est à la fois réaliste et protectrice des victimes : réaliste, parce qu'elle permettra une application au cas par cas de la règle de publicité de l'audience, et donc de la visibilité du procès ; protectrice des victimes, car, en confiant la décision au juge, elle empêche que l'organisation du procès ne dépende du seul droit de l'accusé.
Ces règles ont donc vocation à s'appliquer à la cour d'assises des mineurs et au tribunal des enfants. L'amendement à ce propos me paraît légitime. En adaptant la règle de publicité des débats, la proposition de loi s'inscrit dans le strict respect du principe de spécificité du statut pénal des mineurs. Le Conseil constitutionnel a rappelé à plusieurs reprises la valeur constitutionnelle de ce principe.
La spécificité des règles de publicité de la justice des mineurs demeure. S'agissant des mineurs au moment des faits et au jour du procès, la règle demeure celle du huis clos. Peu importe que ces cas soient nombreux ou pas, c'est une question de principe. Dans le cas des mineurs au moment des faits devenus majeurs au jour du procès, il reviendra in fine au juge de choisir entre publicité et publicité restreinte. Là non plus, je ne reprends pas l'explication fort claire que vous avez donnée, monsieur le rapporteur, sur les conditions dans lesquelles s'exercera ce choix.
Une protection renforcée de l'identité des mineurs est le corollaire de l'assouplissement des règles de publicité. La publicité des débats n'implique pas le droit de divulguer dans la presse l'identité des mineurs en cause. Il est logique que la protection de l'anonymat soit renforcée, dans le respect des principes de la justice des mineurs. Là aussi, vous avez rappelé les sanctions prévues le cas échéant.
Mesdames et messieurs les députés, la proposition de loi repose sur un juste équilibre entre transparence du procès et respect de la spécificité du statut pénal des mineurs. Elle s'inscrit en parfaite cohérence avec les réformes qui moderniseront notre justice pénale. Notre responsabilité est de construire ensemble une justice moderne, à l'écoute du justiciable, proche de ses attentes et de ses préoccupations, respectueuse des grands principes du droit. La route est longue, mais la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui en pose un des jalons. Je vous remercie de cette initiative que le Gouvernement soutient. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous débattons aujourd'hui du régime de publicité applicable devant les juridictions pour mineurs à la faveur de l'examen d'une proposition de loi de nos collègues François Baroin et Jack Lang. Prenant la parole au nom des députés du Nouveau Centre, je voudrais avant tout insister sur un point : le simple fait de voir désormais des sujets, pour certains sensibles et graves, pour d'autres complexes et techniques, traités par des textes d'origine parlementaire, prouve, si besoin était, le bien-fondé de la révision constitutionnelle que nous avons adoptée voilà un peu plus d'un an.
La publicité des débats judiciaires constitue, dans toute démocratie reposant sur la séparation des pouvoirs, un principe intangible et une garantie pour le justiciable. Cependant, dès lors que des mineurs sont en cause, il convient de concilier cette nécessaire transparence des débats avec la spécificité des intérêts en jeu, notamment la capacité des mineurs, victimes ou prévenus, à dépasser pour leur vie future le choc que peut constituer le procès.
Tournant le dos à l'ordre ancien, la première assemblée constituante a fait du caractère public du procès un principe général, gage de l'indépendance et de l'impartialité de la justice. En 1950, un an après sa création, les États membres du Conseil de l'Europe en ont fait l'un des éléments constitutifs d'un procès équitable, en inscrivant à l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial. »
Si ce principe est bien de portée générale, il n'en est pas pour autant d'application absolue. Ainsi que l'a rappelé le Conseil constitutionnel, des circonstances particulières peuvent nécessiter que certains débats se tiennent à huis clos, y compris lorsque le jugement peut conduire à une privation de liberté. À ce titre, l'actuel article 306 du code de procédure pénale vise expressément les cas de viols, de tortures et d'actes de barbarie accompagnés d'agressions sexuelles, où le huis clos peut être prononcé afin de protéger l'intimité de la victime.
Devant les juridictions pour mineurs, c'est une autre logique qui prend le dessus, celle de la protection dont ceux-ci doivent bénéficier, y compris lorsqu'ils se trouvent en position d'accusé ou de prévenu. Au sein de notre ordre juridique, l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante est ainsi venue poser, bien avant la convention internationale des droits de l'enfant de 1989, le principe fort de la spécificité du traitement pénal des mineurs. Ainsi, si l'enfant est bien responsable de ses actes, dès lors qu'il dispose du discernement nécessaire, il n'en demeure pas moins que la réponse de la société se doit, eu égard à sa capacité de redressement, de faire primer l'éducation, et par là la prévention d'une éventuelle récidive, sur la sanction.
Ce principe a pour corollaire celui de la publicité restreinte des débats judiciaires intervenant devant les juridictions pour mineurs. À la différence du huis clos, certaines catégories de personnes, limitativement énumérées au sein de l'ordonnance de 1945 comme ayant un intérêt à l'affaire, sont alors admises à assister à l'audience, à l'exclusion de toutes les autres. Avec ce principe de publicité restreinte, il s'agit bien pour la société d'offrir au mineur, en dépit des fautes dont il est accusé, le bénéfice d'une relative discrétion, afin qu'il ne se trouve pas, à l'occasion de son procès, livré en pâture à l'opinion publique.
Dans la droite ligne des conclusions de la commission Varinard, chargée par le Gouvernement de proposer une réforme de la justice des mineurs, il ne s'agit pas, avec cette proposition de loi, de remettre en cause le principe fondamental que constitue dans notre droit interne la spécificité du traitement pénal des mineurs. J'ai cru comprendre, monsieur le rapporteur, qu'en commission des lois, certains ont voulu faire dire à votre proposition ce qu'elle ne disait pas. Il importe donc de recadrer le débat.
Pour autant, il s'agit aujourd'hui de répondre à une situation qui, à bien des égards, a pu apparaître comme une anomalie de notre droit, à l'occasion d'un procès ayant récemment défrayé la chronique. Si, de manière somme toute logique, la règle de la publicité restreinte peut s'appliquer à des procès contre des majeurs mis en cause pour des faits commis avant leur majorité, il n'en demeure pas moins qu'il s'agit à ce jour d'un choix laissé au seul prévenu – c'est ce sur quoi veut revenir la proposition de loi. En d'autres termes, aujourd'hui, en vertu du dernier alinéa de l'article 306 du code de procédure pénale, c'est au prévenu, mineur au moment des faits mais majeur à l'ouverture des débats, qu'il appartient de décider, de manière totalement discrétionnaire, du régime de publicité auquel sera soumis son procès.
Loin d'être isolée, cette question se pose en réalité dans une grande majorité des affaires dont ont à connaître les juridictions pour mineurs. Ainsi que l'a indiqué notre rapporteur, en 2008, 98 % des personnes condamnées par les cours d'assises des mineurs ont été jugées alors qu'elles avaient atteint leur majorité. Toutes ces personnes ont ainsi pu décider elles-mêmes du caractère public ou non de leur procès, sans que les représentants des victimes ou même le ministère public aient eu leur mot à dire.
À l'heure où nous ambitionnons de bâtir une procédure pénale à la fois plus respectueuse des libertés publiques et individuelles, mais aussi des droits des victimes, cette situation nous interroge en ce qu'elle fragilise à bien des égards l'adhésion de la société à la spécificité du traitement pénal des mineurs et, par là, à la pérennité même de ce principe.
C'est pourquoi je tiens à saluer, au nom des députés du Nouveau Centre et en mon nom, monsieur le rapporteur, l'équilibre dont est empreint ce texte dans sa version issue des travaux de notre commission des lois. Si le principe de la publicité restreinte n'est pas remis en cause, il n'appartiendra cependant plus au seul prévenu de décider du régime de publicité de son procès, puisque c'est désormais au juge qu'il reviendra de trancher, une fois que les intérêts en présence auront été pris en compte dans leur globalité.
Cette solution permettra ainsi, tout en maintenant intacte la spécificité des débats se déroulant devant les juridictions pour mineurs, de prendre en la matière enfin en compte les intérêts des victimes comme de la société elle-même. C'est ce qu'il faut retenir, me semble-t-il, de cette proposition de loi assez consensuelle.
Je veux également évoquer le renforcement des sanctions encourues en cas de divulgation de l'identité ou de publication d'éléments relatifs à des procès mettant en cause des personnes mineures au moment des faits. Il m'a semblé, monsieur le rapporteur, que vous aviez dû abréger sur ce point votre exposé en raison du temps imparti. Si nous saluons l'aggravation des peines encourues, qui seront ainsi portées de 3 750 euros à 15 000 euros en cas de manquement, nous n'en maintenons pas moins des réserves quant à leur caractère effectivement dissuasif pour certains organes de presse. Je crois qu'il faut en appeler à la responsabilité de chacun lorsque l'on traite des dossiers dans lesquels des mineurs ont été mis en cause.
Sous cette réserve, les députés du Nouveau Centre apporteront leur soutien à cette proposition de loi.
Le Gouvernement et le Président de la République à l'occasion de ses voeux se sont engagés à réformer le code de procédure pénale.
Nous aurions pu penser que c'était un élément d'une réforme à venir.
Je me suis néanmoins réjoui, tout à l'heure, que la réforme des institutions ait permis de donner des initiatives aux parlementaires. Dans ce cadre, nous examinons cette proposition de loi, à laquelle le groupe Nouveau Centre apporte son entier soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et du groupe UMP)
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi déposée par nos collègues François Baroin et Jack Lang que le groupe UMP a souhaité inscrire à son ordre du jour dépasse les clivages traditionnels que l'on peut connaître quelquefois dans cet hémicycle.
François Baroin et Jack Lang n'ont jamais caché que leur initiative faisait suite au déroulement du procès qui s'est tenu devant la cour d'assises des mineurs de Paris et qui a reconnu Youssouf Fofana, chef du « gang des barbares », coupable de l'assassinat et des tortures perpétrées à l'encontre d'Ilan Halimi.
Lors de la table ronde que le président de la commission des lois Jean-Luc Warsmann a souhaité organiser sur cette proposition de loi, le rapporteur a parfaitement expliqué qu'au-delà de l'émotion suscitée dans l'opinion publique, cette affaire particulière avait mis en évidence une défaillance de notre législation qu'il nous appartient de rectifier aujourd'hui.
Notre rapporteur et M. le secrétaire d'État ont parfaitement replacé cette proposition de loi dans la perspective de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme en particulier, qui dispose que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue publiquement ».
Si ce principe du droit européen constitue également l'une des règles fondatrices de notre République, il n'en est pas pour autant, comme tous les principes, absolu et peut recevoir des exceptions lorsque d'autres intérêts justifient que la publicité soit supprimée ou atténuée.
Monsieur le rapporteur, vous citez à juste titre, dans votre rapport, le troisième alinéa de l'article 306 du code de procédure pénale qui prévoit des exceptions lorsque les crimes jugés mettent en jeu l'intimité de la victime.
Au-delà, et c'est naturellement ce qui nous intéresse aujourd'hui, la publicité des débats judiciaires reçoit une deuxième exception s'agissant des crimes et délits commis par des mineurs. Cette règle de la publicité restreinte pour les audiences concernant des mineurs est fondée sur la volonté de protéger les mineurs des regards du public et de ne pas empêcher leur réinsertion future.
Cependant, monsieur le rapporteur, et c'est ce qui a motivé la démarche que vous avez entreprise avec notre collègue Jack Lang, la réalité des audiences des cours d'assises des mineurs pose souvent la question de l'adéquation des règles relatives à la publicité restreinte avec les aspirations démocratiques légitimes à ce que la justice soit rendue publiquement.
Du fait des délais nécessaires à l'instruction et au passage en audience des affaires, la très grande majorité des accusés jugés par les cours d'assises des mineurs le sont après leur majorité. Ce fut le cas en 2008 pour presque 100 % des affaires.
De surcroît, la conception très stricte des exceptions au principe de la publicité restreinte aboutit à ce que le droit à la protection du mineur ne puisse être concilié avec d'autres intérêts qui devraient conduire à ce que les audiences soient publiques.
Votre proposition de loi, que vous avez enrichie après son dépôt et après les auditions que vous avez menées dans le cadre de votre rapport, vise à modifier ces règles de publicité, comme vous nous l'avez démontré dans le détail il y a quelques minutes.
Bien entendu, la table ronde que la commission des lois a organisée, et qui constitue une bonne initiative, a permis à certains de nos collègues, y compris dans notre majorité, de faire part de leurs interrogations. D'autres ont émis une critique plus dure. Je crois, pour ma part, que cette proposition de loi, telle qu'elle ressort des travaux de notre commission, largement amendée, ne mérite pas les manifestations d'indignation que nous avons pu lire ici ou là.
Il faut s'en tenir à la réelle portée de ce texte. Il s'agit de transformer la publicité restreinte une simple faculté, placée sous le contrôle du juge. Il en va de même de la publicité qui dépend aujourd'hui de la demande du mineur devenu majeur au moment du procès et dépendrait désormais d'une décision du juge. En tout état de cause, il ne s'agit donc pas de procéder à une réforme d'ensemble du droit pénal des mineurs.
Nous avons tous en tête, au-delà du procès Fofana, des exemples de certaines affaires dans lesquelles, même si l'auteur était mineur au moment des faits, les agissements étaient si graves qu'ils interpellent la société tout entière.
Aussi, il ne me semble pas contradictoire de défendre la spécificité de la justice des mineurs, à laquelle je suis attaché, et de soutenir cette proposition de loi. C'est en tout cas mon sentiment, qui, je l'espère, sera partagé sur l'ensemble de nos bancs au moment du vote.
Le texte présenté ne stigmatise aucun principe. Il est équilibré et mérite donc d'être adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cette proposition de loi prend le contre-pied des règles fondamentales qui régissent depuis toujours la justice des mineurs.
Devant la cour d'assises des mineurs le principe applicable est non le procès public tel qu'il est organisé pour les majeurs, mais une publicité restreinte ; assistent et participent au débat les parties aux procès ou des intervenants précisément désignés.
Cette règle a été mûrement réfléchie et adoptée parce que si cruel que soit le crime reproché à l'accusé, sa jeunesse et le fait qu'il s'agisse d'une personnalité en construction incitent à prendre en compte ses possibilités de réinsertion, d'amendement et de tabler plutôt sur l'avenir.
Certes, l'affaire qui est à l'origine de cette proposition de loi nous a tous saisis d'effroi. Il n'y a pas une mère de famille qui n'ait partagé les affres et la douleur de la famille de la victime devant ce drame inhumain. De plus, ce drame est survenu de manière aléatoire, puisque Ilan Halimi n'est pas mort pour des faits particuliers qu'il aurait commis, mais pour ce qu'il était censé incarner.
Je comprends que l'on ait envie de faire quelque chose devant des faits aussi graves. Mais il faut se demander si la procédure, telle qu'elle a fonctionné, n'a pas rendu compte de l'émotion qui a saisi l'opinion devant ces faits. Les condamnations prononcées sont lourdes, ce qui montre que les jurés ont compris. Le principal accusé a été condamné à la perpétuité. Pour les mineurs, le garçon a été condamné à quinze ans d'emprisonnement et la fille à neuf ans. Dans cette affaire, la publicité restreinte n'a pas signifié le laxisme.
Va-t-on, à cause d'une affaire particulière, remettre en cause la situation de la plupart des jeunes, jugés en cour d'assises, puisque, comme nous l'avons vu lors de l'examen du dossier, la plupart des mineurs jugés par la cour d'assises des mineurs sont majeurs au moment du jugement ? On est en train de retourner la règle pour l'essentiel des personnes qui passeront devant la cour d'assises des mineurs. Il me semble assez choquant de procéder par une simple proposition de loi. En effet nous ne pouvons pas bénéficier d'une étude d'impact sur les incidences de cette modification législative, contrairement à ce que permet la réforme.
Tous les spécialistes que nous avons entendus en commission des lois ont exprimé tout le mal qu'ils pensaient de la règle telle qu'elle était appliquée. Il me semble – le conseil des barreaux l'a rappelé – que légiférer en réaction à un événement, fût-il dramatique, ne peut pas produire une norme de qualité.
Conscient de la difficulté, notre collègue Baroin a donc modifié quelque peu son texte initial et confié aux magistrats la possibilité de décréter ou non la publicité en fonction des éléments du dossier. Je pense que vous alourdissez ainsi la charge qui pèse sur les magistrats, déjà confrontés dans des affaires de cette nature à des responsabilités particulièrement exigeantes.
En l'espèce, qui peut dire si la publicité restreinte des débats a joué un rôle négatif ? Tous ceux qui ont participé aux débats répondent que ce furent des débats de qualité. Les avocats ont estimé, au contraire, que la publicité restreinte avait joué un rôle dans la qualité des débats.
L'avocat général Bilger, qui a prononcé un réquisitoire particulièrement lourd contre cette proposition de loi nous a dit que nous avions eu affaire à un procès exemplaire, présidé par une présidente irréprochable avec un jury exemplaire, qui s'est concentré sur l'essentiel.
Il faut rappeler que, dans le cadre de nos règles, nous sommes extrêmement réticents devant une publicité concernant les informations relatives à l'identité des mineurs, qu'ils soient victimes ou auteurs des faits en cause. Vous fixez des limites selon lesquelles il ne pourra pas être donné d'informations sur les mineurs en cause. Mais à partir du moment où la presse sera dans le prétoire, ces garanties me semblent particulièrement illusoires.
L'ordonnance de 1945 avait été adoptée avec en exergue ce beau principe : « La France n'est pas assez riche d'enfants pour négliger tout ce qui peut en faire des êtres sains. » J'ai le sentiment que nous portons, aujourd'hui, sur nos jeunes un regard bien différent, puisque nous les voyons plus souvent comme des fauteurs de troubles ou des êtres menaçants que comme des jeunes qu'il faut protéger.
Nous souhaitions justement avec ce type de procédure ramener les jeunes vers davantage d'humanité et ne pas les écraser définitivement sous le poids d'un acte, même horrible.
On vient nous dire qu'il faut faire une exception, changer la règle parce que, en l'espèce, la publicité peut constituer une réparation pour la famille. Permettez-moi d'en douter. La famille d'Ilan Halimi a, au contraire, exprimé sa souffrance d'avoir vu les images du visage tuméfié de leur fils ou de leur frère dans la presse. Qui peut dire si, demain, à l'occasion de procès public, la presse ne pourrait pas à nouveau se repaître d'images ou de propos insoutenables ?
Malgré le respect et la compassion que je ressens pour cette famille, le raisonnement qui sous-tend cette proposition de loi me semble assez étonnant. Il me paraît aller à l'encontre de tout ce que les organisations luttant contre l'antisémitisme et le racisme font depuis des années pour lutter contre des propos ou des actes qui leur semblent odieux.
L'essence même de notre législation contre le racisme est précisément d'empêcher la diffusion ou la prolifération de propos, d'écrits racistes ou antisémites. La loi de 1881 a été modifiée en ce sens. Aujourd'hui encore, pourquoi interdit-on la vente de Mein Kampf ou du Protocole des Sages de Sion, si ce n'est parce que l'on craint l'effet que peut avoir sur des esprits faibles la diffusion d'écrits de cette nature ?
Lorsque la loi permet de ne pas diffuser des propos racistes ou antisémites, on la modifie pour en faciliter la diffusion : c'est incompréhensible !
Selon maître Szpiner c'est le silence qui a tué Ilan Halimi. J'ai pour ma part lu le bouleversant témoignage de Ruth Halimi sur les trois semaines de calvaire enduré par son fils. Elle met en cause le silence ou l'indifférence de divers participants à cette affaire, notamment celui de la jeune fille qui a servi d'appât. Elle exprime surtout son incompréhension devant la stratégie adoptée durant ces trois longues semaines par la police qui dirigeait les contacts, les entretiens avec les ravisseurs et qui, à diverses reprises, n'a pas exploité au mieux les informations ou qui a suggéré des réponses qui allaient à l'encontre de ce que la famille aurait voulu faire. Maître Martine Scemama, avocate de l'un des accusés a estimé que le huis clos avait aussi pour but de ne pas répondre publiquement d'une enquête ratée.
Si terrible que soit cette affaire et si révoltants que puissent être les raisonnements et les préjugés ayant abouti à ce crime gratuit, je m'interroge sur la raison de faire une telle exception aux principes qui fondent depuis des années la lutte que nous menons dans ce pays contre le racisme et l'antisémitisme.
Je rappelle que la résolution adoptée par le Parlement européen sur le souvenir de l'holocauste, de l'antisémitisme et du racisme du 13 octobre 2005 a insisté sur l'importance du souvenir, de l'éducation et sur la nécessité de rappeler les crimes affreux auxquels ont abouti ces idéologies de haine tout en insistant aussi sur la nécessité de ne pas faire trop de publicité à ces préjugés : « Il faut un dialogue permanent avec les médias au sujet de la contribution tant positive que négative, que les informations qu'ils diffusent et leurs commentaires peuvent apporter à la perception et à la compréhension de ces problèmes. » Le Parlement européen invite donc à la prudence.
Quelle est notre position par rapport à cette proposition de loi de circonstance ?
Nous devons garder vivant le souvenir de cette atroce affaire dans nos mémoires ; nous ressentons tous cette nécessité, mais, plutôt que de changer les règles et de répondre par la publicité des débats, je préfère la réponse apportée par le conseil de Paris qui a décidé, sur la proposition de Karen Taïeb, de donner le nom d'Ilan Halimi à une rue ou à un jardin de Paris du 12e arrondissement où le jeune homme a habité. C'est ainsi que l'on peut faire vivre son souvenir. Notre société ne peut répondre à la violence et à l'ignominie en enfreignant elle-même les règles dont elle a souligné l'importance. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, délibérément ou non, cette proposition de loi s'inscrit selon nous dans le prolongement de la longue liste des réformes remettant en cause la spécialisation de la justice des mineurs.
Parmi les plus récentes, citons les peines planchers, la composition pénale, la généralisation des procédures de jugement rapide ou les exclusions de l'atténuation des peines. Le pire reste à venir avec la préparation par la chancellerie du nouveau code de justice pénale des mineurs. D'après la version dont nous avons eu connaissance, elle vise à transformer le travail éducatif de long terme en des mesures de contrôle sur de courtes durées, à marginaliser le juge des enfants et à introduire un statut pénal dès l'âge de dix ans. Bref, pour aller à l'essentiel, elle prépare une régression sans précédent depuis l'inspiration profondément humaniste qui avait abouti à la rédaction de l'ordonnance de 1945.
Pourquoi présenter ce texte aujourd'hui ? Pourquoi tant de précipitation puisque cette réforme de procédure devrait logiquement trouver sa place dans la réforme de bien plus grande ampleur annoncée par le Gouvernement ?
La réponse à cette question nous a été clairement apportée mercredi dernier en commission des lois, mais pas par la chancellerie, les auteurs du texte ou nos collègues de la majorité parlementaire. Aussi inconvenant que cela puisse paraître, la réponse nous a été apportée de l'extérieur par l'avocat de l'une des parties au procès en appel du gang des barbares dont nous avons tous en mémoire l'incroyable cruauté. En effet, à l'occasion de sa participation à une table ronde fort judicieusement organisée devant la commission des lois par notre rapporteur, maître Szpiner a explicitement revendiqué que le procès en appel prévu du 25 octobre au 17 décembre prochain devait échapper à la procédure de publicité restreinte au motif, selon lui, que la médiatisation de cette affaire éviterait « que d'autres jeunes se lancent dans une telle aventure et qu'Ilan ne soit pas mort pour rien. » En d'autres termes, cette médiatisation aurait quelques vertus préventives et pédagogiques. C'est son opinion ; qu'il en assume l'entière responsabilité. Pourtant, le résultat d'une telle médiatisation pourrait aboutir exactement à l'effet inverse et que « sur des esprits fragiles et vulnérables, cela ne fasse qu'attiser les haines ? », comme le dit d'ailleurs fort justement Mme Catherine Sultan présidente de l'Association nationale des magistrats de la jeunesse et de la famille. Telle est aussi notre opinion.
Convenons au moins que l'opportunité d'une publicité de ce procès fait débat, au sein même des professionnels de la justice comme dans cette assemblée, et qu'il serait plus sage que la représentation nationale se donne le temps de pousser plus avant sa réflexion. Il serait en effet dramatique qu'à son corps défendant, l'initiative législative participe à l'exacerbation des haines et aux tragiques violences sur lesquelles ces haines pourraient déboucher.
Au fond, dans cette affaire particulière, la seule certitude que nous ayons est que cette publicité pourra sans doute servir les intérêts d'un avocat dont beaucoup penseront qu'en utilisant des faits sordides, il serait l'un des coproducteurs de ce texte. Le laisser penser serait d'abord désobligeant pour leurs auteurs, pas très flatteur pour l'avocat en question, mais, de surcroît, déshonorant pour notre assemblée.
Pour cette raison circonstancielle, nous plaidons au moinspour le renvoi de l'examen des dispositions de cette proposition dans le cadre plus général de la réforme annoncée de la justice des mineurs. Cependant si, pour des raisons que je n'ose imaginer, vous persistiez, avec votre majorité, dans votre volonté d'adopter ce texte au terme de cette séance, vous pourriez au moins lever tous les soupçons qui pèseront immanquablement sur vos intentions en ne programmant pas son entrée en vigueur à la veille du procès en question.
Voila pour ce qui me paraît relever des circonstances. Il faut maintenant s'en détacher totalement pour en venir au fond, autrement dit, aux conséquences que l'on attend en général des évolutions législatives décidées ici.
Comme l'a rappelé le président de l'Association nationale des praticiens de la cour d'assises, M. Henri-Claude Le Gall, « la règle actuelle concernant l'organisation des débats devant la cour d'assises des mineurs vise à assurer une protection particulière aux mineurs mis en cause, en leur assurant une certaine discrétion. Il s'agit d'éviter que certaines erreurs de jeunesse ne soient étalées sur la place publique alors que certains procès se déroulent très longtemps après la majorité du mis en cause » et de citer l'exemple d'une affaire concernant une infraction d'attouchements sexuels commise par un mineur de seize ans et qui fut jugée quand l'intéressé en avait quarante et un. En effet, si la justice des mineurs doit répondre aux actes délictueux et s'attacher toujours à ce que la justice s'accomplisse, elle doit le faire en garantissant au mineur les meilleures chances de réinsertion et éviter toute stigmatisation.
C'est pour ces raisons que les articles 14 et 20 de l'ordonnance du 2 février 1945 posent le principe de la publicité restreinte. Dans sa décision du 29 août 2002, le Conseil constitutionnel a rappelé la valeur constitutionnelle de ce principe. La recommandation du conseil des ministres des États membres de l'Union européenne relative aux mineurs délinquants pose le principe du droit au respect de la vie privée des enfants. L'article 40 de la convention internationale des droits de l'enfant impose de promouvoir l'adoption de lois et de procédures spécialement conçues pour les mineurs délinquants dont le but est de faciliter leur insertion dans la société. En 1993 et de nouveau en 1999, la Cour européenne des droits de l'homme a confirmé que la minorité de la personne poursuivie permet d'écarter la publicité des débats.
On mesure ainsi combien le souffle vertueux de l'ordonnance de 1945 a inspiré, jusqu'aux plus récents, les textes de portée internationale sur ce sujet. Faudrait-il aujourd'hui accepter d'être mis à l'index de la communauté européenne en remettant en cause la spécificité de la justice des mineurs ?
L'émotion suscitée par cette proposition de loi a été telle qu'elle a conduit notre rapporteur à modifier le dispositif initialement prévu afin de réaffirmer le principe de la publicité restreinte pour les mineurs devenus majeurs, le maintien de ce principe lui paraissant conforme à la nécessité de préserver une spécificité au statut pénal des mineurs en tenant compte de leur âge au moment des faits. Dont acte !
Pour autant, en ouvrant considérablement les possibilités d'y déroger, ne risquez-vous pas, par une autre voie, de fragiliser, jusqu'à l'anéantir, ce même principe ? Nous le croyons.
En effet, désormais ce ne sera plus seulement le prévenu mineur ou l'accusé mineur devenu majeur qui pourra demander la publicité des débats, le parquet etou la partie civile, sans doute sur les conseils et par l'intermédiaire de ses avocats, en auront également la faculté. Autant dire qu'elle risque d'être systématiquement demandée, que s'ouvrira alors un procès dans le procès et que la cour qui, en cas d'opposition de l'une des parties, devra statuer en « prenant en compte les intérêts de la société de l'accusé et de la partie civile », le fera sous la pression d'une opinion publique partielle et partiale. Dans ces conditions, le populisme pénal trouvera un boulevard sur lequel il pourra très aisément se déployer avec des conséquences dramatiques dont le procès d'Outreau a été l'illustration ! Pourtant, il ne devrait pas être demandé au juge de hiérarchiser des principes aux finalités différentes. Seule la spécificité du statut pénal des mineurs devrait guider la décision de la cour.
J'ajoute que les dispositions que vous préconisez contribueront à renverser le regard que notre société porte sur sa jeunesse. Ce renversement est lourd d'immenses dangers car, à l'évidence, il attisera les violences plus qu'il ne les supprimera.
Dans la mesure où ce n'est sûrement pas ce que vous souhaitez, et que les questions soulevées par votre texte font toujours débat et que ce débat aura lieu à l'occasion de l'examen de la réforme prochaine de la justice pénale des mineurs, je vous invite à choisir la voie de la sagesse en le retirant et à en renvoyer l'examen à cette échéance.
Si vous ne le faites pas, vous laisserez les circonstances prendre le pas sur le fond et, dans cette hypothèse, nous n'aurons d'autre choix que de voter résolument contre votre proposition de loi qui abandonne la publicité restreinte, principe fondamental de la justice des mineurs auquel nous sommes profondément attachés. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. André Vallini.
M. André Vallini. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'ordonnance du 2 février 1945 a plus de soixante ans et il est toujours utile de rappeler ce texte emblématique qui affirme que la justice des mineurs doit être gouvernée par des principes intangibles : spécialisation des magistrats, primauté de l'éducatif sur le répressif, prise en considération de la personnalité de l'enfant, individualisation et atténuation de la peine liée à la minorité.
Depuis ce texte fondateur, la nécessité d'un droit pénal spécifique a été plusieurs fois réaffirmée dans de nombreux textes internationaux comme la Convention internationale des droits de l'enfant et souvent rappelée par la Cour européenne des droits de l'homme. Dans notre droit interne, le Conseil constitutionnel lui-même a affirmé dans une décision du 29 août 2002, que la spécificité du droit pénal des mineurs constitue un principe fondamental. Cette décision visait explicitement la règle de publicité restreinte qui nous occupe aujourd'hui avec cette proposition de loi qui remet en cause la procédure du huis clos devant la cour d'assises des mineurs.
Posons-nous une question simple : pourquoi le huis clos ? La réponse des législateurs de 1945 était simple elle aussi : pour éviter que des fautes de jeunesse soient étalées sur la place publique alors que certains procès se déroulent après la majorité du mis en cause.
La justice pénale des mineurs doit, bien sûr, répondre et sanctionner aussi sévèrement que nécessaire les actes délictueux, mais elle doit également contribuer au relèvement éducatif et moral des enfants délinquants et, pour cela, elle doit leur garantir les meilleures chances de réinsertion en évitant toute stigmatisation tardive.
Le huis clos est donc conforme à l'intérêt du mineur même devenu majeur. Il présente un autre avantage : il peut garantir la sérénité et le bon déroulement des débats devant le tribunal ou la cour d'assises.
Je veux rappeler les propos de maître Dominique Attias, avocate spécialiste du droit pénal des mineurs devant la commission des lois, qui nous a expliqué que la publicité des débats lors du procès du gang des barbares aurait surtout servi le goût de la provocation de l'horrible Youssouf Fofana et lui aurait offert une tribune pour exprimer sa haine de la justice, de la société, de l'humanité.
Elle a ajouté qu'au cours de ce procès auquel elle a participé en tant qu'avocate, les débats ont été très approfondis, ce qui aurait été sans doute impossible s'ils avaient été publics.
Devant la commission des lois le même jour, Mme Catherine Sultan, présidente de l'Association nationale des magistrats de la jeunesse et de la famille et M. Henri-Claude Le Gall, président de l'Association nationale des praticiens de la cour d'assises nous ont dit que la réforme proposée n'allait pas dans le sens de l'intérêt des mineurs et qu'elle n'améliorerait pas la qualité de la justice rendue.
J'ajoute que si la commission Varinard a retenu le principe de la publicité restreinte au titre des principes directeurs de la justice pénale des mineurs, son silence sur le cas spécifique des mineurs devenus majeurs n'indique pas, monsieur le rapporteur, sa volonté que soit remis en cause le principe de la publicité restreinte.
Alors même que nous attendons deux grandes réformes, celle de la justice pénale des mineurs et celle de la procédure pénale, il est inutile de multiplier les lois pénales de circonstances, y compris et surtout, quand elles sont dictées par l'émotion, même si celle-ci est légitime.
Enfin, comme l'a souligné M. Muzeau, nous assistons plus généralement, depuis 2002, à l'alignement progressif du droit pénal des mineurs sur celui des personnes majeures et à la remise en cause de la spécificité du régime juridique applicable aux premiers. Ce texte en fournit malheureusement une nouvelle illustration ; voilà pourquoi nous voterons contre. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La discussion générale est close.
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Baroin, rapporteur. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, monsieur le président Copé – que je remercie du soutien qu'il a apporté d'emblée à cette proposition de loi –, je répondrai brièvement aux intervenants avant de laisser la parole à M. le secrétaire d'État.
Monsieur Hunault, je vous remercie tout d'abord de votre participation à notre table ronde, comme je remercie toutes celles et tous ceux qui ont contribué à nos travaux, auxquels nous avons convié davantage d'opposants au texte que de partisans, dans un esprit d'équilibre. Il s'agissait de traiter le plus objectivement possible un sujet sensible, qui fait l'objet de positions également respectables même si tel point particulier peut susciter un désaccord. Vous avez fait part de vos convictions et identifié l'équilibre auquel parvient le texte, lequel ne remet pas profondément en cause la justice des mineurs. Je vous en sais d'autant plus gré que vous êtes un praticien du droit qui sait de quoi il parle.
Je remercie d'un même élan M. Nicolin, qui a donné la position du groupe UMP, et fait part de son soutien. Son point de vue permet de sortir de l'amalgame souvent entretenu par M. Muzeau, parfois relayé par Mme Pau-Langevin, repris enfin par M. Vallini, et selon lequel la levée du huis clos ou la prise de distance envers le principe de publicité restreinte feraient voler en éclats le droit des mineurs.
En effet, qu'il s'agisse du procès Fofana ou d'un autre fait divers, si l'on peut le qualifier ainsi, d'un autre drame qui endeuille des familles, qui alerte la société et oblige la justice à trancher pour l'apaiser, ce n'est pas parce que ce texte sera voté que l'anonymat sera levé si la cour n'en décide pas ainsi, ou que les mineurs ne seront pas protégés. Ainsi que je l'ai indiqué à la tribune, c'est en permettant aux mineurs d'être pardonnés par la société, sinon par les familles des victimes, et de tomber finalement dans l'oubli que l'on assure véritablement leur protection. Ainsi peuvent-ils se reconstruire après une expérience douloureuse et bénéficier d'une seconde chance même s'ils ont commis le plus abominable des crimes. Nul ne pourrait le nier.
Par facilité de langage, par peur de ce qui pourrait arriver ou par simple posture, vous oubliez donc le texte qui vous est soumis. En effet, si vous en restiez à ce texte, rien ne vous empêcherait de vous rallier à notre position. Vous avez préféré évoquer un autre débat, ce que je me suis gardé pour ma part de faire, madame Pau-Langevin, car il ne s'agit pas de refaire ici le procès Fofana, ni de dresser les communautés les unes contre les autres. Néanmoins ce n'est pas en pratiquant la politique de l'autruche que l'on efface les faits, et ce n'est pas parce que nous nous tairons que ces faits n'auront pas existé.
N'ayons donc pas peur d'une procédure qui protège les mineurs de l'anonymat. Aux journalistes de faire leur travail (Exclamations sur les bancs du groupe GDR) et de faire en sorte de n'être pas seulement présents au début et à la fin du procès, et réduits, dans l'intervalle, aux positions des avocats, nécessairement subjectives puisqu'ils s'efforcent d'assurer la défense de leurs clients, sans en épouser la cause.
Enfin, comment ne pas entendre le cri de la famille Halimi, qui est aussi un message ? (Mme Pau-Langevin approuve.) Il est de notre devoir et de notre responsabilité, comme législateurs, de nous adapter, au nom de la société.
Tout ces éléments me semblent de nature non de remettre en cause le texte, mais de nourrir notre réflexion. N'ayez crainte : le vote de ce texte ne compromettra les principes auxquels vous êtes, comme nous, attachés, mais il permettra à la cour, lorsqu'un drame touchera la société tout entière, d'ouvrir le procès au nom du peuple français et en réponse à une demande des familles, et d'opposer la transparence à la loi du silence. Ce faisant, le texte n'altérera nullement ni le parcours ni les possibilités de réinsertion des éventuels condamnés. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, je compléterai d'abord les propos sincères et extrêmement convaincants du rapporteur par quelques éléments factuels que je n'ai pas évoqués précédemment et qui nous éclairent sur le nombre de procédures susceptibles d'être concernées par cette disposition.
En 2008, 233 procès d'assises en premier ressort et 23 en appel concernaient des mineurs ; en moyenne, les condamnations ont été prononcées cinq ans après les faits en premier ressort et sept ans et demi après les faits en appel. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Ainsi que M. Hunault l'a rappelé à juste titre, le Conseil constitutionnel a autorisé des exceptions au principe de publicité restreinte applicable aux mineurs. On l'a dit, ces exceptions seront strictement encadrées.
Monsieur Nicolin, nous avons effectivement voulu concilier l'impératif de protection des mineurs et d'autres principes, notamment celui du droit à l'information. Voilà pourquoi la publicité ne fait plus l'objet d'une demande à la discrétion des accusés, mais devient une simple faculté offerte au juge.
Madame Pau-Langevin, je vous ai attentivement écoutée ; contrairement à ce que vous avez laissé entendre, la publicité vise non à rendre une décision plus ou moins laxiste, mais, comme le rapporteur l'a fort bien souligné, à garantir la vertu pédagogique du procès, lequel doit faire prendre conscience à la société des maux qui l'affectent.
Monsieur Muzeau, la convention internationale des droits de l'enfant de 1989, que vous avez évoquée à juste titre, ne contredit pas la démarche engagée, notamment en ce qui concerne la publicité du procès pénal dans des conditions strictement encadrées. Cette publicité du procès équitable est donc compatible avec l'exigence de protection des mineurs.
Enfin, monsieur Vallini, je ne reprendrai pas toute votre argumentation ; comme plusieurs de vos collègues sur tous les bancs, vous avez rappelé à juste titre la spécificité de la justice des mineurs ; mais n'oublions pas qu'il existe des affaires mixtes, impliquant des accusés majeurs et mineurs. Ainsi, lors du procès de l'horrible affaire Fofana, que vous avez tous évoquée, vingt-six accusés étaient majeurs, deux mineurs.
Cet aspect plaide également en faveur de la proposition de loi qui vous est soumise, et qui constitue assurément un progrès, tout en respectant nos principes fondamentaux.
J'appelle maintenant les articles de la proposition de loi dans le texte de la commission.
Je suis saisie d'un amendement n° 1 , portant article additionnel avant l'article premier.
La parole est à Mme Sandrine Mazetier.
Mme Sandrine Mazetier. Monsieur le rapporteur, vous n'avez pas attendu la réforme du code de procédure pénale, ni même celle de la justice des mineurs, pour rédiger votre proposition de loi. Je me permets donc de m'appuyer sur votre texte pour anticiper à mon tour sur de futurs débats essentiels et passionnants.
J'appelle l'attention du législateur et de toute la société sur le fait qu'aujourd'hui, malgré la loi et les dispositions du code de procédure pénale, une instruction tout entière peut se dérouler sans que la famille ou la victime ne soit reçue par le juge d'instruction, en particulier lorsque la personne mise en cause ou la victime est mineure.
C'est à cet état de fait que tend à remédier mon amendement, qui ne me semble pas incompatible avec la proposition de loi.
Madame la présidente, je profite de l'occasion pour vous demander par avance l'application de l'article 49-13 de notre règlement afin de formuler une explication de vote personnelle.
Madame Mazetier, le reproche que vous adressez à ce texte pourrait vous être renvoyé à propos du texte socialiste sur la garde à vue : vous n'avez pas davantage attendu la réforme du code de procédure pénale pour débattre de ce sujet que nous ne l'avons attendue pour modifier l'équilibre des règles de publicité restreinte. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Cela ne m'empêchera pas de me prononcer en toute objectivité sur cet amendement, que la commission a repoussé, pour trois raisons.
Tout d'abord, vous l'avez reconnu vous-même, le lien entre cet amendement et le texte paraît assez ténu : alors que la proposition de loi a pour objet les règles de publicité devant les juridictions pour mineurs, donc au stade du jugement, l'amendement porte sur l'information des victimes au cours de la phase d'instruction. Il ne s'agit donc pas de la même étape du travail judiciaire.
En outre, vous tentez de façon quelque peu artificielle de lier votre amendement à l'objet du texte en limitant ce droit nouveau aux mineurs victimes de crimes relevant de la cour d'assises des mineurs, c'est-à-dire de crimes commis par des mineurs âgés de seize à dix-huit ans. Or, si l'on considère que la victime doit être mieux informée de l'avancement de la procédure, pourquoi limiter ce droit à l'information aux victimes de faits commis par des mineurs âgés de seize à dix-huit ans ? Pour quelle raison la victime d'un fait commis par un majeur ou par un mineur de moins de seize ans ne pourrait-elle pas bénéficier de cette information ? Par conséquent, l'amendement crée une inégalité entre les victimes en fonction de l'âge de l'auteur des faits ; au fond, vous le savez fort bien. Il est donc plus que discutable d'un point de vue technique.
Enfin, je ne vous rappelle pas le détail de l'article 90-1 du code de procédure pénale, qui dispose que « si la partie civile le demande, l'information relative à l'évolution de la procédure prévue par le présent article intervient tous les quatre mois, et la partie civile est convoquée et entendue à cette fin par le juge ».
Même avis, pour les mêmes raisons.
Madame Mazetier, l'explication de vote individuelle n'existe que dans le cadre du temps programmé, qui ne concerne pas ce texte.
Vous avez toutefois la parole pour répondre à la commission et au Gouvernement.
Monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, il est effectivement prévu depuis 2007 que la partie civile soit informée du déroulement de l'instruction par le juge d'instruction. Mon amendement n'introduit donc aucune inégalité entre victimes majeures et mineures. Simplement, ces dispositions inscrites dans le code de procédure pénale ne sont manifestement pas respectées ; en outre, cette information peut être fournie par simple lettre. Or, souvent, dans le cas de délits ou de crimes relevant de la cour d'assises des mineurs, les mineurs se connaissent, et la famille peut à juste titre contribuer au bon déroulement de l'instruction, y compris en informant le juge d'instruction lui-même.
Pourtant, le mot « mineur » ne figurant pas dans ces alinéas du code de procédure pénale, une affaire peut, je le répète, être entièrement instruite sans que la famille de la victime ne soit reçue ni informée par le juge d'instruction.
Cet amendement est très important, et je comprends la préoccupation de notre collègue.
Toutefois, comme l'a indiqué le rapporteur, nous allons débattre dans quelques semaines de l'ensemble du code de procédure pénale. Or, si un sujet peut tous nous rassembler, c'est bien la considération des victimes, mineures ou non. Néanmoins votre amendement, ma chère collègue, est assez restrictif, puisqu'il distingue victimes mineures et non mineures. On sait pourtant que, au cours une procédure, la défense des intérêts d'une partie civile, a fortiori mineure, peut demander à être entendue et informée par le juge d'instruction.
Ne dénaturons donc pas l'objet de notre débat, qui porte très précisément sur la question de savoir si l'on doit ou non rendre public les procès en cour d'assises des mineurs.
Tout à l'heure, dans la discussion générale, François Baroin a pris soin de rappeler ce que n'était pas sa proposition de loi car certains ont prétendu lui faire dire ce qu'elle ne voulait pas dire. Si nous commençons à nous attaquer, par voie d'amendement, à des points majeurs du code de procédure pénale, nous sortirons du cadre de la discussion qui nous occupe cet après-midi.
(L'amendement n° 1 n'est pas adopté.)
Avis défavorable à cet amendement qui tend à limiter les éléments devant être pris en compte par la cour d'assises des mineurs pour décider du régime de publicité applicable à la nécessaire protection de la vie privée du mineur devenu majeur, afin de favoriser notamment sa réinsertion sociale.
Si cet amendement était adopté, seul l'intérêt du mineur devenu majeur serait pris en considération par la cour d'assises. Or nous souhaitons que l'ensemble des parties prenantes ait voix au chapitre et que la cour décide ensuite souverainement du régime applicable.
Les articles 3 et 4 ne font l'objet d'aucun amendement.
(Les articles 3 et 4, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, j'indique à l'Assemblée que, conformément aux conclusions de la commission, son titre est ainsi rédigé : « Proposition de loi relative au régime de publicité applicable devant les juridictions pour mineurs ».
Par ailleurs, sur le vote de l'ensemble de la proposition de loi, je suis saisie par le groupe de l'Union pour un mouvement populaire d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Nous en venons aux explications de vote.
La parole est à M. Jacques Valax, pour le groupe SRC.
Une fois de plus, je déplore d'avoir à le dire, nous allons légiférer sous le coup de l'émotion. Une fois de plus, notre travail se calque sur l'actualité médiatique. Une fois de plus, des groupes de pressions nous prennent en otage pour faire passer leur message.
Je le dis haut et fort : donnons de la hauteur au travail parlementaire, évitons les propositions de circonstance. Ne légiférons pas au cas par cas, donnons-nous plutôt le temps de la réflexion d'autant que, je veux le souligner en toute objectivité, le Parlement a entrepris un long travail de réforme de l'ensemble de la procédure pénale, qui comprend nécessairement la refonte totale de la justice pénale des mineurs. Ce long travail d'auditions, de concertation et de consensus nous permettra de faire avancer efficacement les mesures nécessaires au bon fonctionnement de notre justice, une vraie justice, équilibrée et humaine, tenant compte de la spécificité des problèmes posés par les mineurs.
Aujourd'hui, je voudrais vous éclairer sur les méfaits que risque d'engendrer cette proposition de loi, qui participe à mes yeux à la politique spectacle de ce gouvernement, et exposer les raisons de notre vote.
Tout d'abord, les nouvelles dispositions feront que le procès public deviendra la règle, tandis que le huis clos deviendra l'exception. Elles conféreront aux juges un « pouvoir embarrassant » selon les mots d'André Vallini. La cour sera, de façon certaine, prise en otage.
Au nom de la transparence, la justice se fait dicter ses choix, comme si, pour être crédible, elle se devait d'être relayée voire surveillée par les médias.
De plus, votre proposition de loi opère un grignotage supplémentaire de l'ordonnance de 1945. Cette dernière est pourtant le résultat d'un consensus d'après-guerre selon lequel la justice applicable aux adultes ne peut être adaptée aux mineurs – son article 14 est clair à cet égard. Les mesures qu'elle contient se justifient par la nécessité de protéger les mineurs, qu'ils soient turbulents, sauvageons ou carrément barbares.
Un mineur est et doit avant tout être considéré comme un être en construction, par essence réadaptable. Il doit pouvoir commencer sa vie d'adulte sans avoir à supporter le poids des actes commis dans son enfance. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) La solution la plus protectrice pour les majeurs est la publicité ; pour les mineurs, c'est le secret.
Il me revient ici en mémoire les visages apeurés, défaits, des jeunes délinquants que je devais défendre devant le tribunal. Pour la plupart, ils étaient terrorisés à l'idée de comparaître devant leurs juges. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
N'en déplaise à la majorité, ces mineurs étaient tétanisés à l'idée de devoir raconter devant des visages inconnus leur vie, leurs souffrances, leurs faiblesses, leurs défauts, en un mot, leurs fautes. Le huis clos était la règle, ce qui permettait tant soit peu la confiance et la confidence. La parole était facilitée et l'échange pouvait avoir lieu entre le juge et celui qui attendait qu'on lui rappelle la règle. Car nous aussi, nous sommes respectueux de cette règle qui fait que nous pouvons continuer à vivre en société.
C'est cet ensemble de pratiques, frappées du sceau de l'humanité, que vous voulez démolir.
Nous socialistes, attachés depuis toujours à l'apport qualitatif du travail parlementaire dans l'élaboration des lois, nous demandons le rejet de cette proposition de loi, texte de circonstance, loi à la carte, loi d'émotion. Néanmoins, nous prendrons activement part aux débats et aux travaux sur la réforme de la procédure pénale qui doit se tenir cette année.
En attendant, mesdames et messieurs les députés, vous qui comme moi respectez cette chambre et les électeurs, ne tombez pas dans les travers de la course aux faits divers. Légiférons ensemble avec sérénité.
Voilà toutes les raisons pour lesquelles le groupe socialiste, radical et citoyen votera contre cette proposition de loi.
Monsieur Valax, je vous ai écouté avec beaucoup d'attention expliquer le vote du groupe SRC : pas une seule fois, vous n'avez employé le mot « victime ». (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Or l'un des objectifs de cette proposition de loi est de permettre au président de la cour d'assises de lever le huis clos dans l'intérêt et à la demande des victimes. Il ne s'agit pas d'une loi de circonstance. Il faut savoir que 98 % des arrêts des cours d'assises pour mineurs concernent des personnes mineures au moment des faits devenues majeures. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) La prise en compte de l'intérêt des victimes est l'un des éléments importants de cette proposition. Cette préoccupation a animé le rapporteur.
Je vous ai écouté avec attention, j'aimerais que ce soit réciproque.
Cela dit, comme vous le soulignez, l'ouverture de l'audience aux journalistes pose un vrai problème : l'exploitation possible de certaines affaires. Toutefois, la proposition de loi, à la suite du travail en commission, prévoit de sanctionner les manquements au respect des garanties visant à protéger les mineurs, qu'ils soient prévenus ou victimes.
Il s'agit d'un véritable texte d'équilibre, que le groupe Nouveau Centre votera. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
Légiférer dans la sérénité, certes, monsieur Valax. Mais il me semble que certains propos outranciers sont de nature à troubler cette sérénité.
Il fallait vous inscrire dans la discussion générale si vous vouliez vous exprimer, monsieur Le Bouillonnec. Or vous n'étiez pas là.
Franchement, devant de tels propos, il y a de quoi être surpris.
J'aimerais revenir sur l'assertion selon laquelle notre assemblée légifère dans l'urgence, sous le coup de l'émotion. Il me semble que l'on devrait plutôt parler de la préoccupation de tous les instants des élus que nous sommes pour améliorer notre droit, et du souci qui nous anime de répondre tant à l'intérêt général qu'aux besoins de nos concitoyens. Faire la loi, ce n'est pas seulement travailler sur le long terme, c'est aussi apporter des améliorations dans le quotidien de nos concitoyens.
Cette proposition de loi répond précisément à un besoin et a, à ce titre, sa légitimité.
Par ailleurs, ce texte ne remet absolument pas en cause les intérêts des mineurs délinquants. C'est le juge qui décidera si, oui ou non, la procédure devra se dérouler à huis clos. Il s'agit d'un texte d'équilibre qui permettra de donner une dimension publique à certains procès, ce qui n'était pas possible auparavant.
Quelle différence y a-t-il entre le fait de juger un délinquant âgé de dix-neuf pour un crime commis à dix-huit ans, et un délinquant âgé de dix-huit ans et quelques mois pour un crime commis à dix-sept ans ? Il me semble qu'elle n'est pas considérable.
Aujourd'hui, nous ouvrons une porte en donnant la possibilité à un juge de décider quelle publicité donner au procès d'un mineur devenu majeur. Cette proposition de loi ne mérite pas les effusions verbales que nous venons d'entendre, elle mérite au contraire qu'on la vote dans la sérénité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'ensemble de la proposition de loi.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 110
Nombre de suffrages exprimés 109
Majorité absolue 55
Pour l'adoption 96
Contre 13
(La proposition de loi est adoptée.)
Madame la présidente, permettez-moi d'adresser quelques mots à mes collègues qui ont voté ce texte, pour les remercier d'abord de leur présence et de la qualité de leurs interventions, mais aussi pour le travail accompli durant les réunions en commission et la table ronde.
Je remercie particulièrement Jack Lang qui, le premier, a entendu ce cri et qui a soutenu et accompagné nos travaux. Je remercie également les orateurs de son groupe, même si leur vote n'est pas conforme à ce qu'il souhaitait. Leurs contributions nous ont éclairés. C'était un débat utile.
Vote sur l'ensemble
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures quinze, est reprise à dix-huit heures trente-cinq.)
L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Guy Lefrand et plusieurs de ses collègues, visant à améliorer l'indemnisation des victimes de dommages corporels à la suite d'un accident de la circulation (nos 2055, 2297).
La parole est à M. Guy Lefrand, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État chargé de l'emploi, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, malgré la vigilante politique du Gouvernement en matière de sécurité routière, les accidents de la circulation demeurent une réalité dans notre pays. Même si tout est engagé pour qu'ils soient chaque année moins graves et moins nombreux, tous les efforts en ce domaine n'empêcheront pas la survenance résiduelle des accidents, sur la route ou ailleurs.
Lorsqu'un accident corporel survient, le seul vrai secours que la société puisse encore apporter à la victime, c'est de lui garantir une juste réparation. Pour que cette réparation soit juste, il faut qu'elle repose sur une évaluation personnelle et individuelle du préjudice subi par la victime. Il ne saurait y avoir de solution toute faite à l'indemnisation : chaque personne est unique, c'est un principe fondamental de notre ordre juridique.
Pour cette raison même, l'évaluation personnelle du dommage corporel exclut l'à-peu-près ou l'approximation. Chaque situation est différente, mais toutes les situations doivent être jugées sur les mêmes bases et avec les mêmes instruments d'évaluation. C'est ce cadre commun qui, aujourd'hui encore, fait défaut.
La présente proposition de loi veut combler cette lacune. En l'élaborant, avec nos collègues Geneviève Levy, Jean-François Chossy et Marie-Anne Montchamp, j'ai voulu définir des conditions et une méthodologie commune de l'indemnisation. Nous en étudierons les passages obligés au cours de l'examen des articles. Pour l'instant, contentons-nous de citer l'information complète due aux victimes, la définition-type des missions d'expertise médicale, un barème médical unique en droit commun ou encore une table de capitalisation des rentes indemnitaires révisable.
À la suite de nombreuses auditions et du travail mené notamment avec le Conseil d'État, nous avons finalement subdivisé la proposition de loi en deux parties, afin de ne pas réserver aux seules victimes d'accidents de la circulation le bénéfice de dispositions pouvant s'étendre à toutes les victimes de dommages corporels. Ainsi, le chapitre Ier du texte regroupe toutes les dispositions qui présentent un intérêt commun à l'ensemble des victimes de dommages corporels. Seul le chapitre II ne concerne que les victimes d'accidents de la circulation.
Le texte adopté par la commission des finances diffère de manière non négligeable de celui que j'avais déposé avec Geneviève Levy. Ce n'est pas que le rapporteur du texte que je suis ait renié le travail de l'auteur de la proposition que j'ai été. Mais, au cours de cette phase préparatoire des travaux de notre assemblée, de nombreux points se sont affinés, précisés, tandis que d'autres sont apparus sous un jour nouveau.
L'avis rendu par le Conseil d'État nous a été d'un grand secours dans la précision de nos intentions, et le texte de la commission a repris bon nombre des suggestions qu'il avait formulées. La principale différence que je vois entre ce texte et la proposition initiale ne doit cependant rien au Conseil d'État : il s'agit de la suppression d'un référentiel indicatif de l'indemnisation, qui aurait fourni une évaluation préalable, en fourchettes et en moyennes, des différents postes de préjudice corporel.
Les arguments des associations de victimes, des avocats et de certains membres de la magistrature ont emporté ma conviction : la base de données rénovée que nous proposons doit remédier aux actuels défauts d'information des victimes, sans qu'il soit besoin d'y ajouter un instrument intermédiaire qui risquerait d'être trop réducteur. Je voudrais saluer, à ce propos, Claude Leteurtre, avec lequel nous avons mené un travail qui fut d'un grand secours.
Une autre modification majeure mérite d'être signalée. Un article additionnel – l'article 4 – clarifie désormais les conditions pour être reconnu comme médecin « ayant des compétences en réparation du dommage corporel ». L'objectif n'est pas de créer une spécialité, mais d'empêcher que n'importe quel praticien puisse se prévaloir de connaissances particulières dans ce domaine très technique. Le nouvel article a fait l'objet de discussions approfondies avec le Conseil de l'ordre des médecins.
Cette proposition de loi est attendue tant par les associations de victimes – que je salue ici pour le travail long et parfois fastidieux qu'elles ont accepté de mener avec nous – et les médecins que par les assureurs, tous soucieux de participer à un processus d'indemnisation juste et équitable. De nombreux mois ont été nécessaires, et des dizaines d'auditions, pour arriver à ce consensus.
C'est pourquoi, mes chers collègues, je suis fier de vous présenter un texte qui a recueilli l'unanimité tant à la commission des affaires sociales qu'à la commission des finances : c'est, je crois, suffisamment rare pour être souligné. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Geneviève Levy, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de me permettre de vous présenter ce soir le texte que nous avons élaboré, Guy Lefrand et moi-même, et qui a déjà reçu un accueil unanime, tant auprès de la commission des affaires sociales que de celle des finances.
Il est le fruit d'un travail long et minutieux avec tous les acteurs du dommage corporel : en disant cela, je songe, bien sûr, aux associations de victimes, car c'est bien la situation des victimes que nous voulons améliorer, mais nous avons également écouté les avocats, les magistrats, les assureurs, les médecins. Je tiens à les remercier tous.
Les victimes de dommages corporels, notamment à la suite d'accidents de la circulation, sont protégées par la loi Badinter du 5 juillet 1985, qui a instauré une procédure d'indemnisation dérogatoire au droit commun, visant à assurer une réparation rapide et efficace de leurs dommages. Ce texte a marqué un progrès incontestable. Toutefois, les différentes auditions que nous avons menées ont mis en exergue différentes difficultés liées à son application, qui entraînent des dysfonctionnements préjudiciables aux victimes.
J'en relèverai trois. La loi est appliquée de façon trop disparate, et cela ne peut que heurter notre sens de l'équité : selon l'assureur ou le juge auquel la victime aura affaire, l'évaluation médicale et l'indemnisation sont susceptibles de varier dans des proportions non négligeables.
D'autre part, les victimes ne sont pas pleinement garanties par des procédures claires. Ainsi, il n'existe pas de définitions types des missions d'expertise médicale, pas plus qu'un système de reconnaissance des compétences des médecins en réparation du dommage corporel.
Enfin, les règles de calcul et de versement des indemnités méritent d'être améliorées : on sait, notamment, que les règles de capitalisation des rentes sont basées sur les taux d'intérêt et l'espérance de vie constatés en 1986.
Il apparaissait donc urgent pour les acteurs du dommage corporel de rendre plus efficace le système mis en place par la loi Badinter. Que proposons-nous ? En premier lieu, pour rendre l'indemnisation des victimes plus équitable, nous souhaitons mettre en chantier trois outils d'évaluation des dommages et des indemnités.
Le premier de ces outils est une nomenclature des postes de préjudice. Avant d'indemniser, il faut s'entendre sur ce qui constitue un préjudice ; or la nomenclature établie par M. Dintilhac n'a pas de portée contraignante. Moyennant quelques adaptations, nous proposons de la rendre obligatoire, mais non limitative, afin de laisser une certaine souplesse aux juges et aux parties en transaction.
Le deuxième outil est un barème médical unique. Il ne s'agit pas de toucher aux barèmes spécifiques à certaines législations relatives aux accidents du travail, aux maladies professionnelles ou aux pensions militaires. Il n'est pas question de toucher à ces barèmes officiels, élaborés dans la transparence. En revanche, pour tout ce qui relève d'indemnités qui ne sont pas régies par des barèmes officiels spécifiques, divers barèmes officieux coexistent : les uns ont la faveur des assureurs, les autres celle des associations. Conséquence : selon le barème appliqué, la victime n'aura pas le même taux d'incapacité. Nous proposons de remplacer les documents officieux et contradictoires par un barème officiel, élaboré dans la transparence.
Troisième outil : une base de données complète sur l'indemnisation des dommages corporels. Avec un tel outil, juges, victimes, avocats et assureurs sauront, pour chaque type de préjudice, quelle indemnité a été allouée dans quelles circonstances. Une telle base de données est déjà prévue par les textes, mais, faute d'un contrôle suffisant par l'État, elle fonctionne mal. Il faut donc renforcer son cadre légal.
Deuxième point : pour renforcer l'impartialité et le caractère contradictoire de la procédure d'indemnisation, nous proposons de reconnaître et d'encadrer les expertises médicales, sous l'autorité de l'Ordre des médecins. Son conseil national définira les compétences ou l'expérience requises pour être médecin conseil dans le domaine du préjudice corporel. Ses conseils départementaux tiendront la liste des médecins compétents et recueilleront leurs déclarations d'intérêts. Parallèlement, les victimes seront informées des risques de conflits d'intérêts des médecins, afin qu'elles puissent choisir leur conseil de façon éclairée.
Troisième point, notre texte tend à rééquilibrer la procédure d'indemnisation dans un sens plus favorable aux victimes. Notamment, pour qu'elles soient mieux informées de leurs droits, l'assureur devra leur remettre une notice officielle d'information dès son premier courrier.
Pour faciliter le retour à leur domicile, qui suppose souvent l'aide d'une tierce personne ou un aménagement de leur logement et de leur véhicule, les victimes pourront obtenir, de plein droit, une provision sur indemnité : c'est une véritable avancée.
Enfin, pour éviter toute transaction hâtive, nous proposons de porter de quinze jours à un mois le délai laissé à la victime pour dénoncer une indemnisation à l'amiable.
Telles sont quelques-unes des principales mesures que nous vous proposons et qui, sans remettre en cause les principes de la loi Badinter, sont de nature à améliorer la protection des victimes. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.
Monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, je me réjouis que nous examinions aujourd'hui votre proposition de loi qui vient compléter utilement la loi du 5 juillet 1985, dite loi Badinter. Cette proposition vise en effet à harmoniser les pratiques d'indemnisation du dommage corporel, à les rendre plus transparentes, plus compréhensibles, plus accessibles et plus équitables.
Avant d'entrer dans le détail de ce texte, je veux saluer l'immense travail que vous avez dû abattre pour arriver jusque-là. D'abord, vous avez une antériorité sur le sujet puisque votre intérêt pour ce dossier part d'une expérience locale sur laquelle vous vous êtes penchés aux côtés des associations de victimes, vous, monsieur Lefrand, à Évreux, dans la mairie où vous êtes adjoint, et vous, madame Levy, à travers votre engagement auprès de l'association pour les droits des victimes à Toulon. J'associe à ces remerciements Marie-Anne Montchamp et Jean-François Chossy, dont on sait l'intérêt pour ces questions.
C'est en partant de votre travail et de votre dialogue avec les associations de victimes que vous avez construit votre réflexion sur le sujet. C'est une matière technique, complexe, dans laquelle les intervenants sont nombreux et où les procédures d'indemnisation ne sont pas faciles à maîtriser. Vous avez donc dû investir pendant de longs mois en consultant, en écoutant, en élaguant dans le maquis juridique. Sur la fin, vous vous êtes appuyés sur le Conseil d'État, mais l'essentiel du travail a été fait ici, dans l'enceinte de l'Assemblée nationale, par vous. Il a fallu, ensuite, convaincre l'ensemble de la représentation nationale de soutenir cette proposition de loi et, enfin, faire en sorte qu'elle soit inscrite à l'ordre du jour.
Ce gigantesque travail illustre bien la nouvelle conception du Parlement, un Parlement qui prend l'initiative, avec des députés qui, partant de réalités qu'ils appréhendent au plus près de leurs compatriotes, portent des projets qui étaient sans doute dans des angles morts de l'attention du Gouvernement et permettent de compléter utilement notre dispositif public.
Cette proposition de loi traite en effet d'une préoccupation importante pour nous tous, à savoir l'indemnisation du dommage corporel des victimes d'accident et les moyens de l'effectuer dans les meilleures conditions. Le Gouvernement ne peut que se réjouir des avancées décisives qu'elle réalise dans trois domaines.
En matière de transparence, d'abord, votre proposition de créer une base de données réunissant l'information disponible pour les procédures d'indemnisation à la fois amiables et judiciaires assurera plus de clarté. Elle permettra aux victimes d'être mieux informées et de mieux comparer les indemnisations fixées par les assureurs et les pouvoirs judiciaires, ce qui était attendu.
En matière d'équité, ensuite, avec la création d'un barème unique pour les régimes d'indemnisation de droit commun. Ce barème permettra une indemnisation plus équitable des victimes selon les voies d'indemnisation.
En matière d'harmonisation, enfin, avec votre proposition d'insérer dans la loi une nomenclature qui s'imposera à tous les acteurs de l'indemnisation, aussi bien en procédure amiable que contentieuse. Les décisions d'indemnisation devront se référer à cette nomenclature qui permettra de mettre fin au foisonnement des postes de préjudice et participera à une plus grande cohérence des décisions d'indemnisation.
La création d'un barème unique de conversion des rentes en capital participera de ce même objectif d'harmonisation. Vous êtes allés jusqu'au bout de votre travail puisque vous avez même prévu une actualisation régulière qui permettra d'assurer la pérennité dans le temps, et surtout de mettre fin à une inéquité de traitement des victimes dans le temps en garantissant une meilleure prise en compte du contexte économique et démographique.
Autrement dit, ce n'est pas une simple actualisation de la loi Badinter que vous proposez. C'est véritablement une avancée supplémentaire qui était très attendue par les victimes de dommages corporels. Tout le monde saura ainsi que cette avancée est due au patient travail parlementaire que vous avez su mener dans la durée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Lorsque le travail est bien fait, il ne faut pas bouder son plaisir ; il faut le dire. Je veux saluer les travaux de nos collègues Guy Lefrand et Geneviève Levy, rapporteurs de talent et de compétence, qui, dans le cadre d'une mission UMP que leur a confiée Jean-François Copé, ont élaboré cette proposition de loi visant à améliorer l'indemnisation des victimes de dommages corporels à la suite d'un accident de la circulation.
Je voudrais revenir sur les méthodes de travail. J'ai noté que les auteurs de cette proposition avaient organisé de nombreuses auditions pour entendre le maximum de représentants des personnes concernées, ce qui a permis une évolution conséquente et judicieuse du texte en s'inspirant de la vérité des autres.
En fait, ce texte est un subtil mélange entre la réflexion et l'action. II s'agit, sur le fond, de compléter utilement le texte de la loi Badinter de 1985, sans en remettre en cause les acquis. Je note également que, sous la réserve de la prise en compte de quelques suggestions de forme, le Conseil d'État a émis, fin janvier, un avis favorable sur cette proposition de loi.
Mais je voudrais aussi m'attarder un instant sur les efforts positifs entrepris par les gouvernements successifs dans la lutte contre la violence routière. Par une prévention importante, assortie quand il le faut d'une répression juste et pertinente, le nombre de personnes tuées sur la route a sensiblement diminué ces dernières années, ainsi que le nombre de blessés qui a été réduit de moitié entre 1991 et 2007, mais cela représente encore en France 180 000 victimes à indemniser par an, pour 4,3 milliards d'euros.
L'indemnisation des cas les plus graves, dont l'existence et la vie sont bouleversées par l'accident, reste très variable suivant la voie choisie. Un préjudice évalué par un assureur peut être très différent de celui évalué en justice.
« Si environ 95 % des victimes acceptent une transaction avec un assureur, les litiges qui vont en justice obtiennent en général une indemnisation supérieure de 25 % au règlement amiable, mais cela peut être beaucoup plus » nous fait savoir Jean Picart, président honoraire de l'Association des familles de traumatisés crâniens.
Néanmoins, le texte que nous examinons et qui a enregistré le vote unanime de la commission des affaires sociales, ainsi que celui de la commission des finances, s'inscrit dans la politique de reconnaissance des droits des victimes et peut participer à un meilleur accompagnement des personnes traumatisées qui deviennent handicapées pour le restant de leur vie.
On sait ici ce que représente pour la personne atteinte et pour son entourage le fait de devenir subitement handicapé, c'est-à-dire privé d'une ou plusieurs de ses fonctions et condamné à affronter une nouvelle et cruelle réalité de la vie. Le handicap, c'est la rencontre entre la dépendance, la souffrance et le courage. Il faut de la volonté pour admettre son état et surmonter ses difficultés.
On peut tous devenir handicapé un jour ou l'autre, à la suite d'une maladie, d'un accident domestique ou d'un accident de la circulation. On devient dès lors fragilisé et la société étant sans pitié pour la fragilité, chaque acte banal de la vie quotidienne devient un véritable parcours du combattant. Le regard des autres pèse et comme la personne handicapée nous révèle et nous renvoie à ce que nous craignons de devenir, nous évitons pudiquement d'affronter son regard. Nous la considérons avec compassion, quelquefois même avec condescendance, souvent avec distance, ce qui amplifie le sentiment d'indifférence et d'intolérance que ressentent les personnes handicapées.
Alors un texte comme celui que nous allons voter peut contribuer à améliorer notre relation avec le monde du handicap, car il s'agit bien de proposer de nouveaux outils pour aider les victimes à faire valoir le droit à réparation intégrale de leurs préjudices et, comme le veut la loi du 11 février 2005, à compenser les conséquences liées au handicap.
La réparation intégrale accompagnée de l'individualisation de la réparation doit devenir la règle absolue et j'ai noté avec satisfaction qu'après les auditions et suivant l'avis de nombreux commissaires des affaires sociales, les rapporteurs avaient sagement renoncé à la disposition créant un référentiel indicatif qui pouvait abolir de fait le principe de la réparation intégrale.
De l'avis de nombreuses personnes concernées, des associations de personnes handicapées et des familles, le droit à réparation et l'indemnisation rencontrent de nombreuses difficultés liées aux délais très longs, aux expertises compliquées, aux procédures opaques et au non-respect du principe du contradictoire dans la procédure amiable.
Le but poursuivi par cette proposition est de répondre à un certain nombre d'injustices dénoncées par les victimes de la route souvent regroupées en collectif et qui veulent des mesures simples non seulement pour réduire significativement le nombre de morts et de blessés sur la route, mais aussi pour permettre une indemnisation décente et rapide des préjudices subis.
Dans ce but, je note avec intérêt l'amendement présenté par Geneviève Levy, qui énonce que « lorsque l'état de la victime nécessite l'aménagement de son logement, l'adaptation de son véhicule ou l'intervention d'une tierce personne, l'assureur est tenu de lui présenter une offre provisionnelle d'urgence », ce qui n'est pas sans rappeler d'ailleurs la disposition prévue dans la loi du 11 février 2005 qui préconise la compensation des conséquences du handicap à travers une prestation de compensation.
On peut s'étonner de l'absence, dans la loi de 1985, d'outils communs d'évaluation du préjudice entre assureurs, juges et victimes, ce qui crée des disparités importantes sur le montant des indemnisations pouvant aller du simple au double.
On mesure également les limites de l'expertise médicale actuelle avec un risque de conflits d'intérêts entre les médecins-conseils de victimes et les médecins experts près les tribunaux,
Le texte de Guy Lefrand et Geneviève Levy apporte des clarifications sur tous ces sujets dans l'intérêt bien senti des victimes, que ce soit dans la procédure amiable ou dans la procédure contentieuse. J'ai apprécié, et bien d'autres avec moi, la volonté de renforcer les obligations d'information de la victime par la mise en place d'une notice d'information dans une démarche de transparence.
En effet, cette notice, conforme à une notice type établie par décret et qui sera remise à la victime ou à ses proches, devra l'aider dans le choix d'un médecin conseil qui ne soit pas en situation de conflit d'intérêts et l'assureur devra signifier la liste des médecins qui ont des liens avec lui. Il rappellera à la victime que le conseil départemental de l'ordre tient à sa disposition la liste des médecins compétents en réparation des dommages corporels.
Le souci des rapporteurs de définir les critères qui qualifient les médecins compétents en matière de réparation du dommage corporel me semble également de nature à répondre à une volonté de clarification nécessaire, tout comme le fait que chaque médecin soit tenu de déclarer le nom de la compagnie d'assurance pour laquelle il travaille.
Pour ce qui concerne les délais de règlement toujours trop longs, pourquoi ne pas envisager une limite dans le temps pour régler les problèmes d'indemnisation ? La longueur et la lenteur des démarches s'ajoutent aux difficultés et à la douleur humaine.
Cette proposition du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, initiée par Guy Lefrand, Geneviève Levy et Marie-Anne Montchamp, répond à une attente forte et impatiente. Je suis heureux de constater qu'il s'agit, non pas d'un texte qui s'inscrit en termes d'opposition, mais plutôt d'une loi de consensus. Non pas d'un consensus mou, ou de circonstance, mais d'un consensus d'engagement, conforme à notre idéal républicain, au service de nos concitoyens fragilisés par le handicap.
En espérant que le vote de notre assemblée sera unanime, comme il le fut en commission des finances et en commission des affaires sociales, je confirme que le groupe UMP votera ce texte avec empressement, conviction, et engagement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion de la proposition de loi visant à améliorer l'indemnisation des victimes d'accidents de la circulation.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma