La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91, alinéa 6, du règlement.
La parole est à M. Christian Eckert.
Monsieur le ministre du budget, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, je voudrais tout d'abord remercier mon groupe de m'avoir permis de défendre cette motion de renvoi en commission : puisque vous n'avez pas, chers collègues de la majorité, adopté la motion de rejet préalable excellemment défendue par Pierre-Alain Muet vous avez l'occasion de vous rattraper.
Ce collectif budgétaire apporte au moins une confirmation, celle que le déficit du budget de 2009 atteindra bien 141 milliards d'euros. C'est un déficit colossal, la moitié des dépenses courantes du budget général !
Ce déficit s'accompagne d'une augmentation du chômage, qui touche près de 10 % de la population active en France.
Je voudrais revenir sur certains propos, notamment du rapporteur général, qui s'est fait applaudir sur nos bancs lorsqu'il a parlé de consolider les recettes.
Nous avons fait des propositions. Étaient-elles stupides, monsieur le ministre ?
Tout n'est pas stupide !
Le rapporteur général a affirmé que les dépenses étaient contenues. Mais, comme l'a fait remarquer le président de la commission, il ne faut pas oublier que des dépenses ont été sorties des comptes pour être incluses dans le plan de relance. Cela vous permet d'annoncer que vous avez contenu les dépenses. Il reste que, du côté des recettes, il y a beaucoup à dire.
Avec un déficit de 141 milliards d'euros, était-il nécessaire de conserver certaines exonérations fiscales ?
Je veux bien entrer dans votre raisonnement par lequel vous justifiez qu'à l'été 2007, dans l'euphorie de la victoire du président Sarkozy et de votre majorité aux élections législatives, vous ayez décidé la loi TEPA, le bouclier fiscal. Cela relève de votre idéologie. Nous ne la partageons pas mais c'était probablement un engagement de campagne du président, et nous admettons qu'il ait souhaité le tenir. Mais, depuis, chacun s'accorde à reconnaître qu'une crise est survenue.
Vous n'en êtes pas responsables, en tout cas pas seuls responsables. Mais cette crise nécessite, chacun peut le comprendre, que des efforts soient consentis. Les Français ont déjà eu, dans leur histoire, y compris récente, à traverser des crises qui ont obligé chacune et chacun à faire des efforts. Mais ces efforts sont compris lorsqu'ils sont partagés.
Aujourd'hui, les efforts que vous demandez aux Français sont-ils partagés ? Nous ne le pensons pas à gauche et nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls à le dire, puisque des amendements ont été présentés ici ou là, qui demandaient à revenir sur plusieurs dispositions de votre bouclier fiscal. Notre collègue Charles de Courson par exemple n'a-t-il pas souhaité en sortir la CSG et la CRDS ? D'autres n'ont-ils pas voulu aller plus loin, en excluant les impôts fonciers ? Allez jusqu'au bout, mes chers collègues, et vous, monsieur de Courson, cessez de retirer les amendements, intelligents parfois, que vous avez déposés.
Peut-être pourrait-on ainsi faire avancer les choses.
Une autre disposition a pu être prise, monsieur le ministre, dans la période où la croissance permettait de faire des folies, et vous auriez pu supprimer l'exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires, qui font manquer 3 milliards d'euros aux recettes de l'État, avec pour seul résultat une augmentation des heures supplémentaires, qui prennent la place d'emplois durables, d'emplois à durée indéterminée.
Vous auriez pu, monsieur le ministre, tirer les conséquences de la crise et accepter de revenir sur des dispositions inspirées par votre idéologie, au moins provisoirement, le temps que les choses aillent mieux.
Je veux bien que vous ayez une idéologie, même si nous ne la partageons pas, mais que cette idéologie l'emporte sur la raison au moment où les déficits deviennent abyssaux, cela, je ne peux l'accepter.
Autre mesure : la TVA au taux réduit sur la restauration.
On va avoir droit à tout !
Cette mesure fait perdre plus de 3 milliards d'euros de recettes au budget de l'État. Pour quel résultat ? Des baisses de prix ? Non, tout le monde le reconnaît. Des augmentations de salaires dans la profession ? Non. Des créations d'emplois dans la profession, les 40 000 à 70 000 envisagés ? Que nenni ! Pourtant, vous persistez, au prétexte qu'il s'agissait d'un engagement.
Vous avez même été jusqu'à refuser de supprimer un avantage des hôteliers, cafetiers, restaurateurs, qui leur accorde des exonérations de charges, à hauteur de 150 millions d'euros, sur la partie qu'ils sont obligés de consacrer à nourrir leurs personnels. Vous avez refusé un amendement que même ma collègue Chantal Brunel, qui, à ma connaissance, n'est pas d'extrême gauche…
Ça, c'est vrai !
Les 3,5 milliards ne suffisaient pas, il a fallu encore, cerise sur le gâteau, leur laisser 150 millions d'euros d'exonérations de charges !
Le plus curieux, c'est que 150 millions, c'est justement le montant que vous allez récupérer sur les indemnités journalières des accidentés du travail.
Vous osez même prétendre que si vous avez choisi, pour accompagner cette mesure qui coûte plus de 3 milliards au budget, de refuser de supprimer un avantage sur les cotisations sociales qui se montait à 150 millions, et de fiscaliser, en échange, les indemnités journalières des accidentés du travail, c'est au nom de la justice fiscale !
Vous nous dites avoir progressé sur la fiscalisation et les charges pesant sur les gros revenus variables des traders et autres acteurs du milieu bancaire. Si vous avez en effet instauré une contribution sur ces revenus, celle-ci n'est pas à la hauteur des contributions sur les revenus ordinaires.
Je voudrais dire un mot du crédit impôt recherche. Beaucoup d'entre nous se sont félicités, et se félicitent encore, de cette disposition du crédit impôt recherche, mais nous souhaiterions examiner les conséquences de cette mesure qui, grosso modo, coûte à notre budget 2 milliards d'euros.
Ce crédit impôt recherche profite essentiellement, on s'en aperçoit, aux banques et aux assurances. C'est quand même un peu curieux : les banques et les assurances sont les premiers bénéficiaires du crédit impôt recherche. Sans doute faut-il consacrer beaucoup de temps et d'énergie à trouver le dernier algorithme qui permettra de gonfler les bulles et de créer encore un peu plus de papier.
De plus, une bonne partie du crédit impôt recherche s'applique à des opérations qui sont effectuées à l'extérieur de notre pays. Les multinationales font faire de la recherche dans des pays éloignés, puis déclarent ces opérations au titre de la recherche pour bénéficier d'exonérations d'impôts. Je souhaite que la commission des finances recense les exonérations qui sont utiles pour l'économie, pour la recherche et pour l'avenir, et celles qui, finalement, ne sont que des effets d'aubaine.
Je voudrais revenir sur ce qui, selon vous, serait la seule cause du déficit abyssal que ce projet de loi de finances rectificative confirme, je veux parler de la crise et des banques, dont le poids ne cesse de croître.
Monsieur le ministre, BNP-Paribas est devenue, après le rachat de Fortis, la première banque mondiale en termes d'actifs. Son bilan a bondi de 59 %, à 2 290 milliards d'euros, soit 17 % de plus que le produit intérieur brut de la France en 2008. Dans quinze pays d'Europe, les banques pèsent désormais plus lourd que l'économie de leur pays. C'est dire si le rôle des banques est fondamental, voire essentiel. Too big to fail, on connaît la formule. Faut-il continuer cette escalade ? Faut-il avoir des banques dont la fragilité peut mettre en péril l'ensemble de l'économie de leur pays ?
Quel est le rôle des banques ? Elles doivent assurer le service bancaire, la garantie des dépôts ainsi que leur rôle de prêteur, pour les particuliers, les entreprises, les agriculteurs.
Faut-il des banques d'affaires ? Oui, il faut des banques d'affaires, qui soient contrôlées. Il faut que des dispositifs comme les LBO soient beaucoup plus surveillés. Il ne faut pas que ces banques d'affaires ne consacrent leur activité qu'à créer du papier et des bulles financières. Il faut surveiller les phénomènes de titrisation, il faut réfléchir aux normes. Nous devrons en outre aborder la question de la séparation ou non des banques en deux : des banques dites de dépôt et des banques d'affaires.
Le rôle de l'État est de contrôler l'accès pour tous aux services bancaires, de surveiller les risques et les garanties apportées par les établissements bancaires – ce qui peut nécessiter d'entrer dans leur capital.
Fluidifier le crédit est nécessaire, ce sujet a probablement été mieux abordé en France qu'ailleurs, probablement du fait de la structure de notre système bancaire. Mais vous vantiez le modèle anglo-saxon, monsieur le ministre, et le candidat Sarkozy donnait en modèle les prêts hypothécaires, les subprimes qui ont, semble-t-il, déclenché le cataclysme.
Je me souviens qu'il disait que c'était intéressant et qu'on pourrait faire la même chose chez nous. Je me souviens que Mme Lagarde avait comme ambition de mettre la place financière de Paris au même niveau que la City.
Eh oui !
Souvenez-vous de ses propos quand elle parlait de ces pauvres traders obligés de faire la queue devant l'Eurostar pour aller, en classe affaires, dans le paradis londonien. C'était durant l'été 2007, il n'y a pas si longtemps.
Je n'oublie pas la question des paradis fiscaux, sur laquelle d'autres orateurs se sont déjà exprimés.
Étant élu de Lorraine, je n'oublie pas, monsieur le ministre, que le Luxembourg est considéré comme un paradis fiscal.
Je n'oublie pas que l'État du Delaware est connu pour être le plus grand paradis fiscal au monde.
Je n'oublie pas que la City de Londres est à ranger dans la même catégorie. Il faut un jour que nous ayons le courage d'aller plus loin, même si des mesures ont été prises.
Le directeur du Fonds monétaire international a déclaré que 50 % des pertes des banques n'étaient toujours pas mises en évidence dans leur bilan, et que cette proportion est plus importante en Europe.
Vous avez tout à l'heure, monsieur le ministre, défendu l'action de la France et présenté le Président de la République comme le sauveur du monde, que dis-je, de la planète ! À vous entendre, nous aurions été les seuls à résister, les seuls à trouver les bonnes idées. La lecture de la presse mondiale et la réaction de certains grands présidents de ce monde par rapport au nôtre montrent que l'on ne peut être aussi catégorique !
Je souhaite m'attarder plus particulièrement sur les articles 14 et 28 de votre projet de loi.
L'article 28 est une parfaite illustration de votre méthode qui consiste à décréter sans démontrer le bien-fondé de vos décisions. Cet article relatif au coût de la disparition de la profession d'avoué – même si nous ne sommes pas ici pour défendre une profession en particulier – est une étape supplémentaire dans votre réforme de la justice qui s'élabore par étapes successives dans le brouillard le plus total. Cela a commencé avec la carte judiciaire et les pôles de l'instruction. Cela s'est poursuivi avec l'annonce de la disparition du juge d'instruction qui serait remplacé par le juge de l'instruction. Vous êtes dans l'improvisation permanente et cet article est symptomatique à cet égard. Avec l'article 28, vous proposez d'instaurer une taxe sur les personnes interjetant appel d'un jugement. Cette taxe est censée compenser le coût pour l'État de l'indemnisation d'une profession que l'État a décidé de faire disparaître. Ce coût est du reste discuté : certains parlent de 500 millions, d'autres d'un milliard d'euros. La vérité se situera probablement entre les deux. Pour arriver à cette somme, vous aviez, dans un premier temps, évoqué une taxe de 35 ou de 85 euros pour une procédure d'appel. Or que découvre-t-on dans le projet de loi de finances ? Une taxe de 330 euros pour la partie qui interjette appel, ce qui, à l'évidence, dissuadera un certain nombre de justiciables et constitue un frein à l'accès à la justice.
Était-il vraiment urgent de fixer le montant de cette taxe à 330 euros alors même que vous ne prévoyez sa mise en application qu'à partir du 1er janvier 2011 ? N'aurait-il pas mieux valu attendre de connaître le coût exact de l'indemnisation des avoués qui sera à mettre en oeuvre conformément à la loi que nous avons votée ? Ce seul exemple suffirait à justifier le renvoi en commission de votre texte.
J'en viens aux paradis fiscaux et au fameux article 14, celui avec lequel vous prétendez que la France va sauver le monde en montrant l'exemple par son attitude vertueuse. Pierre-Alain Muet a fort intelligemment fait remarquer…
…que vous vous en remettiez à l'OCDE, devenue l'alpha et l'oméga de l'évaluation des paradis fiscaux. Si vous êtes sur la liste, vous êtes honni, mis à l'index ; si vous en sortez, tout va bien et tout continue comme avant, comme pour les bonus !
Les paradis fiscaux n'ont pas miraculeusement disparu depuis que le G20 s'y intéresse. La liste grise établie par l'OCDE depuis avril dernier est-elle fiable ? Les membres du réseau Tax justice network, relayé en France par la plateforme des paradis fiscaux et judiciaires, ont démontré que le classement de l'OCDE n'est pas le plus pertinent. Ils ont établi une liste publiée dans Alternatives économiques, qui n'est pas un journal d'extrême gauche. Dans cette liste répertoriant dix territoires, seul Singapour figure encore sur la liste de l'OCDE. Les dix territoires qui arrivent en tête sont : l'État du Delaware aux États-Unis, le Luxembourg, la Suisse, les îles Caïmans, la City de Londres, l'Irlande, les Bermudes, Singapour, la Belgique et Hong-Kong. Au total, soixante territoires sont épinglés à partir d'une évaluation qui prend en compte douze critères parmi lesquels la présence ou non d'une politique anti-trusts, la mise en place ou non de lois anti-blanchiment, l'effort pour développer une vraie coopération fiscale multilatérale.
Vous me répondrez certainement que c'est ce que vous faites avec la liste de l'OCDE et les fameuses douze conventions nécessaires pour sortir de la liste grise. Le réseau Tax justice network estime à soixante le nombre de conventions pour pouvoir prétendre sortir des listes plus ou moins grises.
Les paradis fiscaux établissent des conventions entre eux, cela a été rappelé tout à l'heure à propos de Monaco. Retenir douze conventions est selon moi tout à fait insuffisant. En outre, vous excluez les pays européens. Pourquoi, alors même que l'OCDE s'interroge sur certain d'entre eux ? Il faudra que vous vous expliquiez, monsieur le ministre. À moins que vous n'estimiez que la question soit « stupide » !
La liste initiale exclut les pays européens. La mise à jour de la liste permet-elle de les inclure ? M. le rapporteur général a estimé que c'était possible.
Je souhaite que M. le ministre puisse nous le confirmer puisque sa parole vaut de l'or dans cet hémicycle. Il s'agit tout de même de la parole d'un ministre…
Et si la question n'est pas forcément « stupide », j'ose espérer que M. le ministre nous apportera cette réponse.
Vous avez en réalité fait un formidable effort de communication.
Le déficit explose : 141 milliards d'euros, c'est du jamais vu ! Et pourtant, vous affirmez que les dépenses ont été réduites de 2 milliards. Personne n'y comprend plus rien. M. le rapporteur général a souvent fait preuve de sagacité et d'un cartésianisme auquel je souscris. Mais pour ma part, monsieur le ministre, je souhaite que vous reveniez devant notre commission pour nous dire comment, en réduisant paraît-il les dépenses, vous arrivez à faire exploser le déficit. Vous allez sans doute nous demander des propositions, mais des propositions, nous en avons fait.
La première des choses, c'est de revenir sur les mesures que vous avez accumulées pour réduire les recettes. Le rapporteur général dit qu'il faut sécuriser les recettes.
Je ne sais pas s'il faut les protéger ou les sécuriser ! Ce que je sais, c'est que vous les avez diminuées, non en raison de la crise, mais par idéologie. Vous avez accordé des cadeaux fiscaux à une minorité dans l'espoir d'une contrepartie à venir un jour, mais c'est une autre histoire.
Si mes collègues, pour l'instant majoritaires dans l'hémicycle, votent la motion de renvoi en commission, vous aurez l'occasion, monsieur le ministre, de nous confirmer que votre volonté est d'en revenir à des comportements plus vertueux, car, pour ma part, je ne peux considérer que votre projet de loi de finances rectificative soit vertueux. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean-François Mancel.
L'intervention de notre collègue Eckert est loin d'être « stupide », elle a été au contraire très utile. Au moins, je saurai ce que je vais dire à mes électeurs ce week-end ! À l'ouvrier ou au parfait représentant des classes moyennes qui font des heures supplémentaires et qui bénéficient de l'exonération fiscale et sociale sur les heures supplémentaires… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC),…
…je dirai que le parti socialiste propose de supprimer cet avantage. (« Oui ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Et à un membre de la classe moyenne qui fera un petit héritage, je dirai que le parti socialiste veut réinstaurer les droits de succession pour les classes moyennes. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Rien qu'avec ces deux sujets, j'ai de quoi entretenir la conversation ce week-end ! Merci, mon cher collègue Eckert.
Je tiens à dire à Éric Woerth et à Christine Lagarde qu'ils ont été excellents dans cette période de crise. Ils ont fait preuve d'une parfaite maîtrise, de beaucoup de courage et d'efficacité. Les mois passant, nous verrons à quel point ils ont été pertinents dans les actions successives qui ont été menées (Exclamations sur les bancs du groupe SRC)…
…et qui ont permis à notre pays de traverser cette période particulièrement dure dans de bonnes conditions. Nous nous préparons à en sortir ; et, pour en sortir, il faut en effet protéger les recettes, comme le dit très justement notre rapporteur général.
Que je sache, il n'y a pas que des niches fiscales et sociales de droite !
Si on fait le bilan de toutes celles qui se sont accumulées au cours des années, il doit y en avoir un certain nombre, et même un sacré nombre, qui viennent de la gauche !
Nous aurons l'occasion d'en reparler.
En revanche, diminuer la dépense publique n'a jamais été une préoccupation de la gauche, qui préfère l'augmenter et augmenter les impôts à l'instar de ce qu'elle fait dans les collectivités territoriales ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
C'est la raison pour laquelle j'incite le ministre du budget à poursuivre dans la voie qu'il a tracée et qu'il vient de rappeler. La diminution de la dépense publique reste une préoccupation majeure pour notre majorité.
La lutte renforcée contre l'économie souterraine est un point important de ce projet. Il fallait relancer cette action qui tient à coeur à nos concitoyens et est en passe d'être réalisée avec ce texte.
Pour la première fois, une loi de finances rectificative contient des dispositions importantes en matière de lutte contre les paradis fiscaux. J'entends dire que cela n'est pas assez, mais que ne l'avez-vous fait, mes chers collègues ?
Vous n'avez jamais pris aucune initiative dans ce domaine. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous avez attendu Nicolas Sarkozy et Éric Woerth !
Vous nous reprochez d'être trop proches de l'OCDE. Eh bien, cela vaut mieux car il ne faut pas non plus que l'on se tire une balle dans le pied et que l'on nuise à la France en prenant des dispositions trop hâtives ou allant trop loin par rapport à celles de nos principaux concurrents.
Pour conclure sur cette motion de renvoi, je tiens à rappeler que j'ai eu le sentiment, pendant les réunions de la commission des finances, que l'on y travaillait parfaitement bien, avec un rapporteur général plein de pertinence, sous l'excellente présidence de Didier Migaud, qui est certes socialiste, mais qui occupe cette fonction grâce à nous. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Selon votre gouvernement, monsieur le ministre, nous vivons une époque moderne, celle où les recettes diminuent – la faute à la crise –, celle où les dépenses sont cadrées – grâce à la RGPP –, celle aussi où le déficit augmente et où la dette s'emballe – la faute à personne. Tout va très bien : la prochaine loi de finances rectificative nous permettra d'analyser les effets du grand emprunt, marque suprême du volontarisme de l'État.
Nous souhaitons pour notre part revenir aux fondamentaux avec la mise en oeuvre de politiques classiques : assumer les dépenses qui garantissent l'équilibre social, revenir sur les mesures qui ont réduit notre capacité d'action en diminuant nos recettes, en particulier celles relatives au bouclier fiscal, sur lesquelles, par dogmatisme, vous refusez de revenir, et tendre à l'équilibre, notamment par la réduction de nos déficits.
Christian Eckert a centré son propos sur la situation particulière du secteur bancaire. Elle est loin d'être stabilisée, nous le savons. Les professionnels du secteur retrouvent le niveau de leurs revenus, primes et options, et rien ne change vraiment. Il en va de même pour les paradis fiscaux alors que vous aviez affirmé que le G20 avait réglé ce problème. Nos concitoyens mesurent ainsi le décalage grandissant entre vos annonces et la réalité qu'ils vivent.
Oui, monsieur Mancel, nous assumons nos différences, forts de notre capacité à débattre. Nous aurons l'occasion de le montrer au printemps prochain, temps de débat à l'issue duquel une réponse nous sera donnée. Nous considérons en effet qu'il n'y a pas de séparation entre les enjeux locaux et les enjeux nationaux.
Cette loi de finances nous est présentée comme vertueuse, mais nous avons, je crois, montré qu'il n'en était rien en avançant des arguments sur lesquels nous nous appuierons dans le cadre de la présente discussion mais également dans les semaines et les mois à venir car, avec toute la force de notre conviction, nous voulons démontrer qu'une autre politique est possible pour notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Mes chers collègues, je suis parfois étonné par le tour que prennent nos débats. Même si vous êtes dans l'opposition, monsieur Eckert, vous pourriez reconnaître que ce texte comporte de très bonnes dispositions. La lutte contre la fraude s'inspire largement des travaux que nous avons menés dans le cadre de la commission des finances, cela a été rappelé par beaucoup d'orateurs. Vous pourriez le souligner au lieu de répéter que les choses ne vont pas. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Pour le non-dérapage des finances publiques, certes, chers collègues, le Gouvernement a été fortement aidé par une chute mécanique des intérêts de la dette de 5 milliards.
C'est la motion du groupe SRC, pas celle du Gouvernement !
Vous pourriez tout de même vous féliciter que le dérapage ait été limité à 3 milliards d'euros, soit 1 % du PIB, car il n'est pas simple de contrôler la dépense publique en période de crise.
Par ailleurs, vous nourrissez une véritable obsession contre la loi TEPA. Vous prétendez que si vous reveniez au pouvoir, vous supprimeriez les heures supplémentaires.
Il n'est pas sérieux de tenir de tels propos : une telle suppression serait une mesure antisociale. Si un jour vous revenez au pouvoir, je vous rappellerai chaque année les mesures que vous avez promises et que vous n'avez pas prises.
Quant au dispositif incitatif dans le domaine immobilier, il n'est pas raisonnable dans la situation actuelle du secteur immobilier de prétendre qu'il faut le supprimer, alors qu'il bénéficie avant tout aux couches moyennes, voire aux couches moyennes basses.
Votre argumentaire ne tient pas la route. Nous voterons donc contre votre motion. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
(La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, traditionnellement, la discussion du collectif budgétaire de fin d'année est l'occasion de faire le point sur l'exécution du budget en cours, de procéder aux ajustements nécessaires et d'apprécier la situation de nos finances publiques à quelques jours de la clôture de l'exercice. Cette loi de finances rectificative est bien entendu fortement marquée par la conjoncture.
Ce collectif dont nous débutons l'examen est le troisième de l'exercice, le cinquième en un peu plus d'un an. Cette multiplication traduit la violence de la crise dans laquelle nous sommes plongés depuis l'automne 2008 – la plus profonde depuis celle de 1929 – mais aussi la réactivité dont le Gouvernement a fait preuve pour y faire face. Ultime collectif de l'année, le texte qui nous est proposé est donc le reflet fidèle tout à la fois des effets de la crise et de l'intervention volontariste de l'État pour en atténuer les effets sur nos concitoyens et nos entreprises et pour préparer l'avenir.
L'effet de la crise se lit tout d'abord dans le montant des recettes, qui atteint le niveau le plus bas depuis 1996 avec 231,3 milliards, soit une chute de 61,9 milliards – une baisse de 21 % par rapport à 2008 –, dont 46 milliards sont la traduction directe de la situation économique. Hors mesures issues du plan de relance, le produit de l'impôt sur les sociétés est en recul de 22 milliards par rapport à 2008 et de 15,3 milliards par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale. La TVA, elle, est en recul d'environ 10 milliards d'euros.
L'intervention volontariste de l'État se lit à la fois dans les mesures fiscales de relance prises et dans les dépenses spécifiques engagées, notamment dans le cadre de la mission « Plan de relance de l'économie ».
Les mesures fiscales – remboursement anticipé de la TVA, créances de report en arrière, crédit d'impôt recherche et allégement d'impôt sur le revenu voté au printemps 2009 – auront réduit cette année les recettes de 16 milliards, avec un surcoût très significatif que nous constatons aujourd'hui par rapport aux estimations initiales. Ainsi, la mensualisation des remboursements de TVA s'élèverait finalement à 6,5 milliards contre 3,8 milliards prévus initialement.
Les crédits de la mission « Plan de relance », déjà renforcés à hauteur de 2,3 milliards lors de la seconde loi de finances rectificative bénéficient encore d'ouvertures à raison de 348 millions en crédits de paiement, essentiellement pour faire face au succès, et donc au surcoût, de la prime à la casse et à certains éléments du programme exceptionnel d'investissements publics.
Ces mesures de relance ont donc un coût important – 38,9 milliards d'euros au total – mais elles ont fait leurs preuves tout au long de l'année puisque, première en Europe, l'économie française est sortie de la récession dès le second trimestre avec une croissance de 0,3 % et que cette tendance se poursuit. La France affiche ainsi sur l'année des performances supérieures à celles de ses principaux partenaires, avec une contraction du PIB par habitant de 4 % contre 6 % dans le reste de la zone euro. Bon choix économique, ces mesures auront également été un bon choix budgétaire : non récurrentes et réversibles, elles n'engagent pas l'avenir.
Il faut aussi, monsieur le ministre, vous féliciter d'avoir, malgré la crise et les nécessités de la relance, et au-delà des apparences, persévéré cette année encore dans la voie courageuse des réformes structurelles et de la maîtrise de la dépense. Les annulations de crédits dépasseront cette année, pour la première fois depuis bien longtemps, les ouvertures. L'enveloppe de dépenses globale est scrupuleusement respectée et même légèrement au-delà puisque avant remboursement des organismes de sécurité sociale les dépenses de l'État seront inférieures de 2 milliards au plafond voté par le Parlement, soit une réduction en valeur de 0,1 % par rapport à 2008.
Il faut cependant noter que cette amélioration est due aux importantes économies – 5,1 milliards d'euros – constatées sur la charge de la dette, en raison de taux particulièrement bas. Cette marge de manoeuvre, inespérée au moment de la discussion de la loi de finances initiale, n'est pas reconductible. L'accroissement du stock de dettes issu de la crise s'avérera pénalisant dans les années à venir, dès la remontée des taux. L'an dernier, nous avions ainsi dû constater en loi de finances rectificative un surcoût de 4 milliards de la charge de la dette.
Nous nous félicitons en tout cas que la marge de manoeuvre de deux milliards ainsi dégagée ait été intégralement consacrée à assainir les relations financières entre l'État et les organismes de sécurité sociale. Le remboursement d'une partie de sa dette de 3,5 milliards constatée au 31 décembre 2008, ajouté à d'autres mesures de ce texte, porte l'effort financier de l'État en faveur de la sécurité sociale à 3,8 milliards et ramène ainsi sa dette à la fin de 2009 aux environs d'un milliard.
En tant que président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts, banquier de l'ACOSS, je m'en réjouis d'autant plus que cet apurement des dettes de l'État devrait alléger le besoin de trésorerie de cette dernière, estimé dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 à un maximum de 61,6 milliards, avec un plafond d'avances de trésorerie de 65 milliards.
Je me réjouis qu'une partie de la dette ait pu être remboursée, parce que la situation est particulièrement dramatique. Cette réduction de 2,3 milliards fera économiser 30 millions d'euros de frais financiers, il faut le rappeler.
Au total, le déficit de l'État, après une succession de révisions à la hausse liées à la crise et aux mesures de relance, atteindra cette année le niveau record de 141 milliards, soit 8,1 % du PIB. Sur ces 141 milliards, 38,9 milliards sont liés au plan de relance et devraient s'effacer progressivement. Le projet de loi de finances pour 2010 en prend déjà partiellement acte avec une réduction de 25 milliards du déficit prévisionnel.
Le solde de 102 milliards se répartit donc entre déficit conjoncturel et déficit structurel, la part de ce dernier se situant autour de 40 à 50 milliards, sur lesquels devront porter tous nos efforts dans les années à venir.
Ces efforts passent bien sûr par différentes mesures, entre autres par une contribution des opérateurs de l'État, au nombre de 489. Leur part dans le budget de l'État, avec 225 000 emplois et 34 milliards de crédits, est importante, mais ils suivent une évolution inverse. Alors que l'État réduit ses effectifs tous les ans, avec le non-remplacement d'un fonctionnaire partant à la retraite sur deux, le nombre d'emplois des soixante-dix opérateurs les plus importants a progressé de 6 %, leurs frais de fonctionnement de 10 %. Si chaque opérateur doit être considéré séparément, des efforts restent possibles, sur lesquels la mission LOLF est revenue à plusieurs reprises. À cet égard, monsieur le ministre, nous vous remercions d'avoir pris en compte les travaux engagés depuis plusieurs années par notre mission et sommes sensibles aux annonces faites à ce sujet le 3 décembre. Nous serons attentifs à leur réalisation.
S'agissant de la régulation budgétaire, nous apprécions la plus grande visibilité qu'a apportée la modification de la LOLF en 2005 à travers les informations délivrées sur les crédits mis en réserve.
Les mesures d'ouverture et d'annulation de crédits sont cependant restées très nombreuses dans les deux collectifs précédents et dans cette dernière version. Par ailleurs, comme chaque année, le collectif procède à la validation des trois décrets d'avance pris au cours de l'exercice, dont un, trop tardif, sera ratifié par amendement gouvernemental et transmis à notre commission.
Force est néanmoins de constater que, malgré les importants efforts réalisés, la LOLF n'a pas encore produit tous les effets escomptés quant à la limitation de la pratique des décrets d'avance : ils restent encore trop souvent un moyen d'ajustement des dotations budgétaires et leur nombre n'a pas diminué malgré deux lois de finances rectificatives en cours d'année.
Je ne reviens pas sur les différents postes correspondant à ces dépenses insuffisamment programmées. Malgré des efforts, nous en arrivons à des considérations répétitives sur les opérations extérieures, l'aide médicale d'État ou les dépenses pour calamités agricoles. Il nous faut impérativement pouvoir faire face à cette situation.
Enfin, le présent collectif comporte plusieurs mesures nouvelles dont je me réjouis particulièrement, car elles contribuent à la modernisation des relations de l'administration fiscale avec les usagers et surtout à la lutte contre l'économie souterraine et les paradis fiscaux, dans le droit fil des engagements pris devant le G20.
Sur ce dernier point, le texte qui nous est proposé constitue une avancée majeure, à la fois dans la définition de ce qu'est un État ou un territoire non coopératif – qui restait jusqu'ici un concept flou – et dans les sanctions applicables aux ressortissants fiscaux français concernés. Disposer à la fois d'une identification des territoires à problèmes et d'une gamme étendue de sanctions devrait permettre à terme, et plus encore si ces idées sont reprises ainsi que celles de la commission des finances, de moraliser certaines places et d'avantager celles qui sont vertueuses et peuvent souffrir d'une concurrence déloyale. L'élimination des détournements du droit en matière de régime « mère-filiale », d'élimination des doubles impositions ou de prix de transfert devrait permettre de mettre fin à un certain nombre d'abus manifestes.
Concernant la lutte contre l'économie souterraine, les mesures proposées mettront fin à une situation aberrante dans laquelle le travail occulte était finalement mieux poursuivi que les revenus du trafic de drogue par exemple. En allongeant les délais de reprise, en permettant la taxation d'office, en s'appuyant sur les produits saisis et le train de vie, l'administration fiscale aura les moyens de frapper au portefeuille, ce qui aura le triple avantage de faire participer la délinquance au budget de l'État, d'en réduire l'attrait, de renforcer la justice fiscale.
Notre commission a proposé la création d'une procédure d'enquête judiciaire fiscale qui, sans aller jusqu'à créer un service judiciaire fiscal, conférera à certains agents de l'administration des pouvoirs de police judiciaire bien encadrés et accélérera les procédures existantes. Je suis très favorable à ces dispositions.
Ce projet de loi de finances rectificative marque donc à la fois l'action volontariste de l'État face à la crise et une volonté maintenue de maîtrise de la situation budgétaire ordinaire, tout en évitant, au nom du respect de dogmes conçus pour temps calmes, d'augmenter la fiscalité, ce qui n'aurait fait que renforcer la crise par affaiblissement de la consommation.
Il améliore la transparence budgétaire et contient d'importantes mesures de justice fiscale et d'équité. Pour l'ensemble de ces raisons, notre groupe lui apporte son total soutien. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre, à ce stade de la discussion, j'éviterai de répéter ce qui a déjà été dit et que seul M. Mancel semble ne pas avoir entendu.
Mon impression est double.
D'un côté, j'ai le sentiment que, grâce aux efforts du rapporteur général, pour une fois on évoque assez sérieusement un certain nombre de questions qui d'habitude sont inabordables. Je parle notamment de la dette. Il m'a semblé en effet qu'une sorte de dialogue commençait à s'instaurer, même s'il a été quelque peu rompu par l'intervention de M. Mancel.
Votre intervention était tellement décalée !
De l'autre, j'ai l'impression que vous vous en tenez à votre « plan com » et non aux réalités financières et budgétaires du pays.
Depuis trois ans, vous nous répétez que vous allez gérer à l'économie, faire des économies et réduire les dépenses, allant jusqu'à mesurer cela à 0,5 % près. Sans doute jugez-vous cet engagement opportun vis-à-vis de votre électorat. Pourquoi pas ? Je peux comprendre ce point de vue, même si je ne le partage pas. Le problème, c'est que vous vous évertuez à essayer de faire entrer le plan com dans le discours politique, nonobstant la réalité des chiffres.
Comme l'a fait remarquer tout à l'heure M. Migaud, vous vous félicitez de la maîtrise des dépenses, alors que nous battons des records en matière de déficit budgétaire. Voilà qui est surréaliste, d'autant que pour parvenir à cet exploit il vous faut essayer de faire la distinction entre les dépenses qui seraient imputables à la crise et celles qui ne le seraient pas. Comme si elles étaient dissociables dans la réalité ! À cet égard, je salue, après le président de la commission des finances, l'imagination de vos collaborateurs, à moins que ce ne soit la vôtre car je sais que vous en êtes capable. Cet exercice, qui vous a pris sûrement beaucoup de temps, offre pourtant peu d'intérêt car vous ne ferez croire à personne que nous sommes dans une période d'économies alors que le déficit budgétaire atteint 140 milliards.
De même, monsieur Bouvard, et je vous prie de m'excuser de vous avoir interrompu, à quoi cela sert-il de vous féliciter que l'État ait remboursé 2 milliards en oubliant de dire que cette somme se retrouve dans le déficit budgétaire et alors que l'on demande au Parlement d'ouvrir une autorisation de crédits de 61 milliards ? Ne nous racontons pas d'histoires, aucun journaliste ne nous écoute, mes chers collègues, essayons de nous parler simplement et ne vendons pas de la poudre de perlimpinpin !
Monsieur le ministre, nous ne vous reprochons pas le montant du déficit car nous savons bien qu'il y a eu une crise. Mais cela n'a pas de sens d'aboutir à de tels niveaux de déficit et d'entendre le chef de l'État proclamer urbi et orbi qu'il n'a pas été élu pour augmenter les impôts.
L'expression urbi et orbi dans votre bouche, ça vaut son pesant de cacahuètes !
Je suis prêt à adopter ce terme si cela peut faire avancer les choses car on ne peut pas accumuler un tel déficit public en continuant à dire qu'on ne touchera pas aux impôts. Il faut sortir de cette ineptie.
Monsieur le ministre, vous nous reprochez de ne pas faire de propositions. Mais nous vous en faisons sans arrêt ! À chaque fois, on vous dit qu'on peut récupérer plus de 10 milliards sur l'amendement Copé, ou encore sur les niches fiscales, même si je comprends que votre position d'homme politique vous empêche de supprimer d'un seul coup toutes les niches fiscales. M. Mancel disait tout à l'heure que certaines avaient été instaurées par la gauche. Commencez donc par celles-là, nous ne vous en empêcherons pas. Cela soulagera votre conscience.
Il y en a donc pour plus de 20 à 30 milliards, et vous l'avez reconnu vous-même. On est déjà à 40 milliards, c'est-à-dire le montant du déficit usuel qui existait avant la crise car on n'est pas passé d'une gestion vertueuse à 141 milliards, et vous le savez aussi bien que moi, monsieur Bouvard.
On l'a enfin dit ce soir alors que cela fait trois ans que je le répète, mais chaque fois on me répond que je suis un stakhanoviste de l'impôt. En réalité, cette somme équivaut quasiment à toutes les réductions fiscales que nous avons consenties depuis 2000, monsieur Carrez.
Je le reconnais, j'ai été partisan de la suppression de la vignette qui a coûté, à l'époque, 12 milliards de francs ou encore de la suppression de la base salaire de la taxe professionnelle, qui a coûté 76 milliards de francs.
Et je me souviens d'avoir entendu Nicolas Sarkozy déclarer sur le plateau de TF1 que c'était une goutte d'eau, que cela ne comptait pas. En matière de démagogie, on aura du mal à faire mieux ! Si parfois nous avons quelques outrances, je vous demande de vous souvenir que nous n'arriverons jamais à la cheville de cet inspirateur sur ce terrain-là !
Il existe donc des pistes pour récupérer de l'argent, et chacun les connaît. C'est le cas en matière de fraude fiscale par exemple.
Monsieur Mancel, je vous conseille de rencontrer un chômeur plutôt qu'un ouvrier. Vous verrez que l'accueil ne sera pas le même. À l'heure actuelle, le nombre de chômeurs augmente, ce qui démontre que l'exaltation du plan de relance a ses limites si l'on établit des comparaisons avec d'autres pays. Soyez prudent, attendez quelques mois avant de pousser des cocoricos. J'ai malheureusement l'impression que personne n'est à l'abri de turbulences sévères et sérieuses et qu'en matière d'emploi tout le monde devrait être sur le qui-vive et très modeste. Il est donc inutile de venir dire ici que nous avons eu un inspirateur qui est à la fois roi de France, roi d'Europe, sauveur de la planète, etc.
Monsieur le ministre, lorsque vous avez mis en oeuvre votre plan de relance, nous vous avons indiqué quelles étaient à nos yeux ses insuffisances. Et nous avions raison. La preuve : il va falloir recourir à un grand emprunt. J'espère seulement, monsieur Giscard d'Estaing, que cet emprunt ne ressemblera pas à celui qui porte votre nom, même si vous n'en êtes pas l'instigateur.
De grâce, ne nous donnez pas de leçons en la matière ! Vous savez bien que, depuis l'affaire des assignats, il n'y a jamais eu d'aussi mauvaise affaire financière pour la République !
Cela dit, le problème du pouvoir d'achat et de la consommation n'est toujours pas réglé. Certes, la prime à la casse a marché, puisque 500 000 primes ont été attribuées pour un montant de 500 millions d'euros. Mais cela ne soigne pas pour autant la carence généralisée de pouvoir d'achat frappant certaines catégories qui tirent la langue –à l'exception de certains quartiers où l'on peut voir des Porsche 4X4. Je crois savoir que ce qui se passe en ce moment dans les grands magasins à la veille de Noël ne va malheureusement pas infirmer notre hypothèse quant à l'insuffisance du pouvoir d'achat.
Cessons cette gestuelle de la communication qui embrouille les esprits et les débats, même si ce n'est pas trop grave puisque personne ne nous écoute ce soir et que nous sommes entre nous.
J'en viens à l'économie. Là encore, le plan com passe avant tout. Vous nous avez expliqué que vous aviez supprimé 100 000 emplois, y compris dans la loi de finances pour 2010. Depuis deux ans et demi, c'est l'axe fort de la communication du Gouvernement en matière économique et de finances publiques. Tous les jours ou presque, quand ce n'est pas plusieurs fois par jour, on entend que l'on va restaurer les finances publiques et les déficits en supprimant des postes de fonctionnaires.
Or, au final, qu'aurons-nous ? Cent mille emplois supprimés, je le répète, dont plus de 30 000 pour l'année prochaine. Vous nous avez expliqué que cette mesure, ajoutée à la RGPP et au démantèlement des services extérieurs de l'État, avait permis d'économiser 3 milliards d'euros. Qu'en avez-vous fait ? Vous les avez donnés aux restaurateurs en baissant la TVA à laquelle ils sont assujettis. Même si, à 300 millions d'euros près, les chiffres ne coïncident pas, voilà une drôle de politique ! Comment allez-vous expliquer à vos électeurs que vous avez gaspillé toutes les économies réalisées pour atteindre le but si exaltant à vos yeux et aux leurs de restaurer les finances publiques ?
Est-ce là un modèle de gestion publique, un exploit ? Arrêtez ! Dites à votre conseiller en communication que ce n'est pas un bon plan. Je n'insisterai pas, nous nous sommes déjà expliqués sur ce point et, la dernière fois que je vous ai interrogé, vous m'avez répondu complètement à côté du sujet ; certes, l'exercice n'était pas facile.
J'en profite néanmoins pour rappeler qu'aller chercher 130 millions d'euros en taxant les accidentés du travail, ce n'est pas glorieux.
On vient donc de mettre toutes les économies réalisées pendant trois exercices budgétaires à la poubelle – je retire ce mot car il pourrait être mal interprété ; du moins les avez-vous dépensées de façon inutile…
…en prenant des mesures qui sont loin de nous paraître prioritaires, surtout quand on considère le type de débat qui en résulte entre les forces syndicales représentant le secteur concerné. Voilà de la grande politique, voilà une parfaite réussite !
Je n'entends pas vous assommer de chiffres. Je constate que M. Bouvard a beaucoup travaillé.
Il nous a livré quantité de pourcentages, de chiffres très précis. Je ne me livrerai pas à mon tour à cet exercice puisque M. Carrez l'a fait mieux que je ne le ferais. Et comme il possède un microprocesseur bien plus puissant que le mien, une culture et des connaissances sans commune mesure avec les miennes, je ne saurais m'aventurer sur ce terrain.
Venons-en à la lutte contre les paradis fiscaux. Je ne répéterai pas les noms de ceux qui n'ont pas entendu que nous sommes convenus, monsieur le ministre, que votre collectif budgétaire comprenait des parties solides, qu'on pouvait noter un effort. Le groupe qui a travaillé sur ce sujet au sein de la commission des finances l'a reconnu. Seulement, nous trouvons vos propositions insuffisantes.
Je ne suis du reste pas le seul de cet avis puisque nous avons cosigné, tous groupes confondus, plusieurs amendements du rapporteur général dans le but d'aller plus loin. C'est le cas par exemple de la définition des listes des paradis fiscaux car, vous le savez, compte tenu des règles européennes, bon nombre de nos voisins n'y figurent pas. Or certains sont tout de même de taille !
On évoque toujours le Luxembourg, mais il existe aussi des pays où les pratiques fiscales mériteraient quelques mises au point – je pense à nos très chers amis belges et à nos grands amis autrichiens.
Quand vous avancez qu'on va pouvoir toucher aux paradis fiscaux situés hors de l'Europe mais qu'on ne peut rien faire pour ceux situés à l'intérieur de l'Europe, nous répondons qu'il vaudrait mieux soigner l'intérieur avant de se préoccuper de l'esthétique à l'extérieur ! Roselyne Bachelot m'approuverait ! Il s'agit d'une règle sanitaire de base : on se préoccupe d'abord de l'intérieur de l'organisme et ensuite, éventuellement, de ce qui se passe à l'extérieur.
Or, en ce qui concerne l'extérieur, nous vous avons déjà dit qu'à nos yeux les règles de l'OCDE n'étaient pas parfaites. Nous avons auditionné les représentants de cette organisation et leur avons d'ailleurs tous dit quelles étaient les faiblesses et parfois la naïveté de leurs raisonnements – naïveté qui doit du reste plus à des contraintes politiques qu'à une incurie mentale.
Les États et territoires non-membres de la Communauté européenne ne sont pas considérés comme coopératifs s'ils n'ont pas signé une convention d'échange de renseignements fiscaux avec au moins douze pays ; or nous aimerions que la France soit systématiquement cosignataire ! Qu'on ne vienne pas nous dire que tel pays est sorti de la liste des paradis fiscaux parce qu'il a signé douze conventions mais avec d'autres États que la France !
M. Bouvard a évoqué une section judiciaire de l'administration des impôts. Voilà un geste : on ne peut pas dire que vous ne faites rien. Mais il nous paraît insuffisant. C'est pourquoi, en plus des amendements cosignés avec le rapporteur général, les députés du groupe socialiste en présenteront d'autres pour aller plus loin.
La commission des infractions fiscales, créée dans les années soixante-dix, qui partait sans doute d'un bon sentiment, consistant à vouloir protéger le contribuable contre une forme d'arbitraire, a développé sa propre logique et sa propre jurisprudence et elle est devenue aujourd'hui un barrage. Nous souhaitons renverser la situation pour en faire un vrai filtre contre les excès. Nous proposerons des amendements en ce sens.
Pour conclure, ne nous dites pas que ce collectif budgétaire est bon. S'il s'agit d'un collectif de crise, destiné à ramasser les morceaux brisés, à ne pas trop désespérer, à ne pas trop perdre la confiance de l'opinion publique à la veille d'une grande bataille politique, il n'y a vraiment pas de quoi pavoiser, et de cela nous sommes certains. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, comme le souligne avec à propos Gilles Carrez dans l'introduction de son rapport, « l'économie française est sortie de la récession mais elle est toujours en crise ».
Le Gouvernement a beau se féliciter de la timide reprise de la croissance, qui a atteint 0,3 % aux deuxième et troisième trimestres 2009, et d'une tendance au redémarrage de l'économie, le fait est que le PIB de notre pays a accusé un recul sans précédent depuis l'après-guerre et que le chômage poursuit sa hausse, au point qu'il pourrait atteindre, selon l'Observatoire français des conjonctures économiques, 9,5 % de la population active à la fin 2009 et 10,6 % fin 2010.
Certes, Gouvernement et majorité ne cessent de nous le rappeler : nos voisins européens, que l'on montrait en exemple il n'y a encore pas si longtemps, sont encore plus mal lotis et le recul du PIB y est encore plus net qu'en France.
Mais pourquoi pavoiser alors que le taux de chômage en France est très supérieur à celui observé en Allemagne, où il s'établit à 8,1 %, et alors que nous sommes le cinquième État le plus endetté de l'Union européenne ?
La raison pour laquelle notre PIB a moins reculé qu'ailleurs n'est d'ailleurs pas essentiellement à chercher dans la politique conduite par votre gouvernement, d'autant que l'investissement public a baissé. D'autres mesures ont eu des effets néfastes, notamment le bouclier fiscal et le maintien de niches qui bénéficient aux ménages les plus aisés, à l'heure où l'on proclame que les caisses sont vides. De surcroît, le plan de sauvetage des banques n'a été assorti d'aucune mesure contraignante visant à les responsabiliser.
Ce ne sont donc pas vos choix politiques qui expliquent les moins mauvais résultats relatifs de la France mais ce que le Gouvernement a lui-même appelé « l'amortisseur social », à savoir ce qui subsiste dans notre pays de protection sociale, de protection des salariés et de services publics. Bref, tout ce à quoi vous vous attaquez aujourd'hui.
Votre politique a consisté à mettre l'économie sous perfusion mais jamais vous ne vous êtes attaqués aux causes profondes de la crise. Vous vous êtes refusés à toute remise en cause des règles du système, permettant aux banquiers de reprendre leurs mauvaises habitudes en matière de spéculation et de préparer la bulle financière qui éclatera demain.
Que restera-t-il de votre politique quand vos plans de relance conjoncturels cesseront à court terme de produire leurs effets ? Nous nous retrouverons face à des déficits publics abyssaux, des marges de manoeuvre réduites à la portion congrue pour l'État comme pour les collectivités locales.
La dégradation du marché du travail risque d'étouffer la timide reprise actuelle. Elle accroît le nombre de ceux qui ne peuvent consommer faute de revenus : 4 millions de chômeurs sur 33 millions de personnes âgées de 20 à 60 ans, soit près d'un adulte sur huit. Alors que notre économie est pour une large part soutenue par la consommation des ménages, la montée du chômage va plomber un peu plus l'évolution des salaires, fragiliser les salariés qui conservent leur emploi, en les poussant à épargner, quand ils le peuvent, plutôt qu'à consommer et à investir.
Avec des déficits publics qui devraient représenter l'équivalent de 8,2 % du PIB en 2009 ; une dette publique qui a dépassé 1 400 milliards d'euros et atteindra 77 % du PIB à la fin de l'année, la question se pose de l'efficacité des orientations retenues. Nous demeurons dubitatifs aujourd'hui sur l'effet de levier attendu des choix du Gouvernement.
Je souhaite m'attarder à présent sur les deux mesures emblématiques de l'actuel projet de loi de finances rectificative : le traitement fiscal des activités illicites et les mesures visant les paradis fiscaux.
Sur le premier point, nous pouvons a priori être d'accord. Le nouveau dispositif, qui permet l'imposition des contribuables se livrant à un trafic illicite de biens liés à certains crimes et délits limitativement énumérés, nous paraît de bon sens. Cependant, monsieur le ministre, votre propos sur la question est pour le moins ambigu. En effet, vous dites qu'« on ne peut plus accepter que des délinquants qui vivent de la drogue, de la contrefaçon, du trafic d'armes ou de faux billets ou de la contrebande de tabac ou d'alcool ne soient jamais taxés. »
Cette phrase demande à être explicitée : il ne faudrait pas laisser entendre que l'État pourrait se trouver en position de receleur de biens mal acquis ou d'argent recueilli de manière illicite. Il convient donc d'expliquer que la taxation des biens issus de trafics illicites ne saurait avoir vocation à se substituer aux poursuites pénales.
Je vous ai bien écouté, monsieur le ministre, et il n'y a pas que dans les quartiers, comme vous dites, que l'on trouve des délinquants,...
Je ne crois pas avoir dit cela !
…à moins que vous ne pensiez aux beaux quartiers, ce qui ne serait du reste pas plus juste.
Outre cette maladresse, nous regrettons de manière plus fondamentale que le Gouvernement n'ait pas songé à étendre le champ de ces contrôles et sanctions aux produits d'activités délictuelles ou criminelles placés à l'étranger à des fins personnelles, par exemple par les dirigeants de régimes dictatoriaux dans les pays en développement.
Rappelons en effet que les détournements de fonds et les transferts illicites d'argent public, y compris l'aide publique au développement, entre des comptes nationaux et des comptes personnels, sont considérés, depuis 1991, comme une violation des droits de l'homme par le Conseil économique et social des Nations unies.
Dans le même ordre d'idée, nous ne pouvons que regretter que l'article concerné ne vise pas les délits de corruption et de trafic d'influence par le biais desquels certains gouvernants du Sud ont pu s'enrichir personnellement en touchant des rétro-commissions de sociétés étrangères ou de l'argent provenant du budget de l'État en octroyant des marchés publics ou en cédant des entreprises publiques à leurs proches ou à des compagnies étrangères. En d'autres termes, où en sommes-nous aujourd'hui, en France, des fonds africains d'origine illicite ? Il nous semble que nous ne pouvons prétendre nous attaquer efficacement au traitement fiscal des activités illicites sans nous pencher également sur ces questions.
En ce qui concerne les paradis fiscaux, source d'instabilité financière, cause de pertes énormes en termes de recettes fiscales, estimées à 2,5 % voire 3 % du PIB, et, plus encore, lieux de détournement d'argent de la sphère économique et sociale, il convient de répéter qu'ils sont non seulement immoraux mais représentent une gangrène pour l'économie nationale et mondiale.
Contrairement à certaines annonces, les paradis fiscaux n'ont pas disparu comme par enchantement au lendemain du G 20. La liste grise établie par l'OCDE depuis avril 2009 est en effet tout sauf fiable.
Rappelons que le nouveau classement des « juridictions à secrets » établi par le réseau Tax justice network montre notamment que, parmi les dix premiers paradis fiscaux, seul Singapour figure encore dans la liste de l'OCDE. Ni l'État du Delaware aux États-Unis, ni le Luxembourg, la Suisse, Malte, les Îles Caïman, la City de Londres, l'Irlande, les Bermudes, la Belgique, Hong Kong n'y figurent alors que ces juridictions sont de vrais paradis fiscaux et épinglées comme tels par le TJN, grâce à un indice qui prend notamment en compte la mise en place ou non, dans les pays considérés, de lois antiblanchiment et l'effort pour développer une vraie coopération fiscale multilatérale.
Sur ce point, il faut bien admettre que les exigences de l'OCDE sont très insuffisantes puisqu'il suffit de signer douze conventions d'échange de renseignements fiscaux pour être retiré de la liste grise. Monaco s'est ainsi contenté de signer douze conventions avec d'autres paradis fiscaux ! Cela s'appelle un tour de passe-passe. Derrière l'image que tentent de donner le Président de la République et le Gouvernement de s'attaquer aux paradis fiscaux, car nos concitoyens acceptent de moins en moins ces tricheries et privilèges des riches, il y a beaucoup de faux-semblants.
L'échange d'informations devrait être complet, sans exclusive, automatique. Or il est ici simplement proposé de répondre à une demande si celle-ci est jugée « pertinente ». Mais qui décide de la pertinence de la demande ? La mise en oeuvre d'un plan de lutte contre les paradis fiscaux nécessite évidemment le renforcement des moyens des administrations fiscales. Or, là aussi, nous sommes dans le faux-semblant. Alors que le président Obama, aux États-Unis, a recruté 800 agents supplémentaires, le nombre de contrôleurs du fisc en France a diminué de 12 % entre 2002 et 2008 et il en aura perdu 15 % en 2011. Nous avons donc un sérieux problème de cohérence entre les objectifs affichés et les moyens qui y sont consacrés.
Supprimer les paradis fiscaux serait la seule mesure de justice et d'efficacité, une mesure de salubrité publique et d'efficacité économique. D'ailleurs, c'est simple : vouloir « contrôler » les paradis fiscaux est la confirmation qu'ils subsistent.
La nécessité est aujourd'hui de s'assurer d'une meilleure répartition des richesses, d'une meilleure allocation des ressources, d'orienter l'argent non pas vers la spéculation et les placements financiers, dont 80 % ne se réinvestissent pas dans la production, mais vers l'emploi, la formation, la recherche et l'investissement productif.
C'est le sens de la proposition que nous vous avons faite de créer un pôle financier public constitué autour de la Caisse des dépôts, la Caisse nationale de prévoyance, la Banque postale, la Banque de France, Oséo. Ce pôle pourrait être complété par une coopération renouvelée avec le réseau des banques mutualistes.
Réorienter la politique du crédit en faveur de la satisfaction des besoins, dans l'intérêt général et non pour la satisfaction des intérêts privés, est le meilleur des remparts contre la crise.
Dans ces circonstances, nous voterons contre le présent projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Merci, monsieur Sandrier, d'avoir scrupuleusement respecté le temps qui vous était imparti.
La parole est à M. Charles de Courson.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'occasion de ce collectif de fin d'année, le groupe Nouveau Centre souhaiterait rappeler ses positions sur le fond de la politique budgétaire,…
…et attirer votre attention sur deux problèmes : la fiscalité des biocarburants et le financement des chambres consulaires.
Concernant le fond, c'est-à-dire la politique budgétaire, quelques remarques. Malgré tous vos efforts, monsieur le ministre, et vous avez un certain mérite à essayer de contenir les ardeurs de beaucoup de vos collègues ministres,…
…la croissance des dépenses est encore excessive. En dehors des 39 milliards liés au plan de relance, vous faites état d'une légère baisse par rapport à l'enveloppe de 348,2 milliards de dépenses brutes. C'est vrai : 2 milliards de moins dépensés. Mais vous avez eu de la chance. Ce n'est d'ailleurs pas interdit, en politique. L'économie de 5 milliards en matière de charges financières n'est pas le fruit d'efforts qui auraient été faits. C'est ce que l'on appelait autrefois, à la direction du budget, une économie de constatation.
C'est ce que j'ai dit, d'ailleurs.
Absolument. Le problème, c'est qu'elle n'est pas renouvelable. D'une part, elle est le fruit d'une baisse des taux d'intérêt, qui atteignent des niveaux historiquement bas. Or, dans votre projet de budget pour 2010, vous anticipez une remontée d'au moins 1 % des taux d'intérêt. Et, d'autre part, elle est le fruit d'une prise de risque, qui a consisté à augmenter la part des BTF dans l'encours de la dette de l'État.
Je rappelle que cette part était inférieure à 10 % il y a deux ans. Elle est aujourd'hui, grosso modo, de 20 %.
Le grand danger, c'est que cette économie de constatation, qui a permis de contenir la dépense, et même de la réduire de 2 milliards, nous la reperdions, et au-delà, dès l'année prochaine.
Conclusion pratique : il faut aller plus loin dans la tenue de la dépense. Et vous savez que nous, au Nouveau Centre – nous ne sommes pas très nombreux dans cette assemblée –, nous avons toujours poussé à une politique plus rigoureuse encore en matière de dépenses.
Deuxième remarque : on constate une chute des recettes de 53 milliards, c'est-à-dire de 20 %. Comme l'a dit notre rapporteur général, il faut protéger les recettes. Mais qu'est-ce que cela veut dire, protéger les recettes ?
Cela veut dire deux choses : d'une part, ne plus accorder de baisses fiscales, et, d'autre part, commencer à réduire les dépenses fiscales et les dépenses sociales.
Je sais, monsieur le ministre, même si vous le dites en général avec une certaine discrétion, que, sur le fond, vous partagez cette analyse, celle de la commission des finances et de notre rapporteur général. Nous espérons que l'année prochaine vous nous proposerez certaines des mesures que nous n'avons pas pu faire adopter cette année par voie d'amendement. Je pense notamment aux niches fiscales.
Troisième remarque : le plan de relance a été bien calibré, avec 39 milliards sur le budget de l'État, une vingtaine de milliards sur la sécurité sociale. En ce qui concerne le budget de l'État, ce sont pour l'essentiel des dépenses non reconductibles. Mais s'agissant de la sécurité sociale, il s'agit de dépenses renouvelables, puisque nous avons augmenté des prestations. C'est donc une dépense durable.
Enfin, je crois qu'il faut vous rendre hommage pour ce que vous nous proposez en matière de lutte contre la fraude. Certes, c'est un combat qui n'est jamais fini, mais vous nous proposez un certain nombre de dispositifs qui nous paraissent efficaces.
Je voudrais à présent aborder deux problèmes.
Je ne cesse de dire que la taxe carbone appliquée aux biocarburants est indéfendable. On ne peut pas, d'une part, expliquer que la politique menée par la France, dans un assez large consensus, vise à l'oxygénation des carburants, et donc à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, et d'autre part, taxer les produits qui permettent, d'après les études récentes de l'ADEME, de les réduire de 50 à 65 % selon les filières. Nous déposerons donc à nouveau des amendements en ce sens, et j'espère que vous nous écouterez, monsieur le ministre.
Le second problème que je souhaite aborder est celui du financement, à partir de 2011, des chambres de commerce, et, dès 2010, des chambres des métiers. Nous avons déjà attiré votre attention sur la situation des chambres de commerce. On est en train de complètement déstabiliser leur réforme. Car comment appuyer la majorité qui était en faveur de cette réforme à partir du moment où l'on ne sait pas comment elles seront financées à compter de 2011, et en leur annonçant qu'on va réduire leurs moyens de 5 % par an ? Une réduction de 5 % par an, je veux bien. Mais, à ce moment-là, qu'on le fasse aussi pour le budget de l'État. Or on a déjà bien du mal, s'agissant du budget de l'État, à parvenir au zéro volume, quand tout le monde sait qu'il faudrait passer au zéro valeur, voire un peu en dessous, pour obtenir, en cinq ou six ans, un redressement significatif.
En ce qui concerne les chambres des métiers, il y a eu un oubli. En effet, elles ne sont pas simplement alimentées par la taxe directe, mais par une majoration qui est répartie en fonction de la taxe professionnelle.
Il faut donc absolument que nous trouvions une solution pour alimenter les chambres des métiers car, à la différence des chambres de commerce, vous n'avez pas prévu les 60 millions qui permettraient de maintenir en l'état leur budget. Nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour trouver une solution avant le vote définitif. Pour nous, elle consisterait tout simplement à transposer le dispositif antérieur à la nouvelle contribution complémentaire et à la CLA. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les lois de finances rectificatives sont l'occasion pour le Gouvernement d'introduire d'importantes dispositions fiscales qui, bien que ne figurant pas en loi de finances initiale, sont essentielles. Cette année comme en 2007, la lutte contre la fraude fiscale et contre les États paradis fiscaux y fait une apparition qui ouvre de nouvelles perspectives.
Il est normal que l'État se donne les moyens de vérifier si les impôts sont correctement déclarés et payés, et assume cette situation.
La Commission européenne note que le contexte de libre circulation des capitaux, des biens, des services et des personnes rend les États membres « moins capables de combattre la fraude fiscale de façon isolée. Cette difficulté est renforcée au plan international par le phénomène de mondialisation de l'économie ».
En France, nous disposons de services administratifs tels que la DNEF, la DVNI, la DGE, la DNVSF, la DIRCOFI, qui assurent, au sein de la direction générale des finances publiques, les missions de contrôle fiscal.
Mais, le contrôle est inadapté à certaines fraudes, évaluées entre 30 et 40 milliards d'euros. Les redressements à l'international sont très peu nombreux compte tenu des délais de durée des contrôles, des lenteurs ou de la complexité des moyens d'information à mettre en oeuvre pour obtenir des renseignements des administrations fiscales étrangères.
Il faut, ensuite, démythifier le contrôle fiscal. Sur 35 millions de foyers fiscaux et sur 1,3 million d'entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés, le nombre de contrôles sur place est faible : 52 000. Le nombre de plaintes et poursuites correctionnelles est encore plus faible – 1 000 – et elles sont complexes à mettre en oeuvre.
Les droits des contribuables sont largement respectés par l'administration fiscale, et notre droit est protecteur, comme le soulignait à l'instant Henri Emmanuelli.
Dès lors, les mesures de lutte contre les paradis fiscaux deviennent une nécessité pour notre pays et le passage de l'enquête administrative aux investigations judiciaires une évidence, que notre commission a proposée dans le cadre de la mission sur la lutte contre les paradis fiscaux.
En effet, si le contrôle fiscal administratif est adapté à la plupart des fraudes, il est impuissant devant les fraudes complexes. Certaines mesures proposées dans la loi de finances rectificative vont dans le bon sens, par exemple le renforcement des dispositions en matière de prix de transferts. Il convient cependant de prévoir un service judiciaire fiscal.
Comme rapporteur spécial du programme « Gestion des finances publiques », j'ai déjà suggéré soit la création d'un service fiscal judiciaire, sur le modèle du service national de la douane judiciaire, soit la création d'un service judiciaire commun à la direction générale des finances publiques et à la direction générale des douanes et des droits indirects.
Le contrat pluriannuel de la douane 2009-2011 indique que « l'extension du champ de compétence du service national de douane judiciaire à des domaines connexes sera étudiée. » Dans le numéro 144 de la revue du ministère Échanges, de novembre-octobre 2008, le sous-directeur, chef du SNDJ, précisait : « Nous sommes prêts à mettre notre expérience au service d'une mission judiciaire fiscale, voire d'autres missions judiciaires au sein du ministère ».
En loi de finances rectificative 2007, la flagrance fiscale a été adoptée. Il a fallu, compte tenu de sa complexité, attendre septembre 2009 pour qu'elle soit effective. Monsieur le ministre, qu'envisagez-vous de faire et quelle sera votre position sur l'amendement proposé par notre commission et le rapporteur général ? Cet amendement va dans le bon sens, bien que n'instaurant aucune procédure d'enquête judiciaire fiscale.
Vous avez quasiment sanctuarisé les effectifs du contrôle fiscal. Il reste qu'il convient de renforcer les enjeux de l'expertise financière, comptable et juridique des personnels – certes de qualité – qui sont affectés à cette mission, comme c'est le cas dans les cabinets de conseil privés. Cela ne peut que s'accompagner d'une prise en compte du contrôle fiscal dans le pilotage des objectifs de la direction générale des finances publiques.
Les indicateurs relatifs à la lutte contre la fraude fiscale sont inadaptés. L'objectif n° 4 du programme « Gestion fiscale et financière de l'État » prévoit qu'ils sont au nombre de trois : le pourcentage des contrôles réprimant les fraudes les plus graves ; le taux brut de recouvrement de la direction générale des finances publiques en droits et pénalités sur créances de contrôle fiscal externe au titre de l'exercice de l'année n-2 ; le taux de paiement des amendes.
Ces indicateurs ne tiennent pas compte de la diversité et de la complexité des fraudes et de leur contrôle. Cela dénote que l'administration fiscale ne raisonne encore trop qu'en administration de prestations de services et n'a pas encore intégré une mission de contrôle fiscal.
Il apparaîtrait donc opportun d'élaborer un indicateur de couverture du tissu fiscal orienté sur la TVA intra-communautaire et extra-communautaire, ainsi qu'un autre chargé de suivre les rappels en matière de fiscalité internationale.
Les précautions d'encadrement qui sont prises conduisent parfois, parce que trop timorées, à un quasi-étouffement des mesures proposées, qui vont pourtant dans le bon sens. Comme l'a souligné Didier Migaud il y a quelques instants, les articles concernant la lutte contre la fraude fiscale ne seront efficaces que si on les accompagne d'un service judiciaire fiscal. Tôt ou tard, il faudra bien y parvenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais parler de l'explosion de la dette publique, qui, accumulée au fil des années, s'élève aujourd'hui à 1 140 milliards d'euros. Si l'on y ajoute celle des collectivités territoriales et de la sécurité sociale, le total avoisine 1 400 milliards d'euros. Le seul paiement de la charge d'une telle dette pourrait même devenir le premier poste budgétaire en 2012, si elle atteignait, ce que nous redoutons tous, 90 % du PIB à cette date.
Chacun l'a bien compris, un tel niveau d'endettement est insoutenable. Il menace l'indépendance même de notre gouvernance économique. Se saisir de cette question n'est donc pas un droit pour le législateur, c'est un devoir absolu. D'autant plus que la Commission européenne a fixé le mois dernier à la France, à l'horizon 2013, le retour sous la barre des 3 % de nos déficits publics.
Le groupe Nouveau Centre a démarré une entreprise de sensibilisation et de pédagogie sur ce thème, que ce soit avec le « tour de France de la dette » animé par notre collègue Charles de Courson, ou grâce aux jeunes centristes qui ont lancé une campagne de pétitions « Stop la dette », point de départ d'une mobilisation populaire et responsable visant à faire cesser, sur la question des déficits, le laisser-aller et l'impuissance qui existent depuis vingt-huit ans sans discontinuer.
Néanmoins, je tiens, monsieur le ministre, à exprimer ma satisfaction à l'égard de l'action courageuse que vous avez entamée, en annonçant la diminution de 10 milliards d'euros des dépenses de l'État. Je suis heureux de constater que le Gouvernement suit désormais la position défendue par le Nouveau Centre depuis longtemps, visant à inscrire dans le marbre de la Constitution la règle d'or de l'interdiction de présenter le budget de l'État en déficit de fonctionnement.
Mes chers collègues, il ne faut pas se tromper de débat, il ne faut pas confondre l'indispensable endettement d'investissement pour préparer l'avenir, comme le plan de relance ou comme cela devrait l'être pour le grand emprunt, de l'endettement qui vise à financer l'État dans son fonctionnement quotidien.
Les risques que font peser cet endettement déraisonnable ont aujourd'hui changé de nature pour trois raisons majeures.
Le premier motif d'inquiétude concerne l'accentuation du financement à très court terme de notre dette publique, accroissant d'autant sa vulnérabilité à la très probable remontée des taux d'intérêt couplée à la hausse probable de l'inflation. Je vous renvoie à l'excellent rapport du sénateur Jean-Pierre Fourcade, qui vient d'être publié. Nous en avons d'ailleurs un très bon exemple avec la diminution de la charge de la dette, dont chacun se félicite, de 5,1 milliards d'euros, du fait des conditions de prêt exceptionnelles, qui n'est en réalité qu'une économie de constatation, liée à des motifs purement conjoncturels. Certes, nous sommes heureux de pouvoir en bénéficier aujourd'hui, avec notamment le remboursement – il est vrai important – des dettes de l'État envers les organismes sociaux. Mais qu'adviendra-t-il quand les taux d'intérêt et l'inflation seront en hausse ?
Le second motif d'inquiétude concerne l'accroissement de la détention de titres de la dette par des résidents étrangers, qui est passée de 30 % avant la création de l'euro en 1999 à 66 % en juin dernier, contre 40 % seulement dans le cas de la dette britannique. La question de l'indépendance de notre gouvernance économique se pose ici, comme je l'ai déjà dit.
Enfin, le troisième motif d'inquiétude concerne le fait que la crise économique et financière a renforcé l'aversion pour le risque et donc l'attrait des emprunts français. Cette situation, chacun en convient, est pour le moment vertueuse, mais peut devenir à tout moment hautement préjudiciable dans les prochaines années.
Mes chers collègues, vous l'aurez compris, enrayer la dette est à la fois un impératif éthique, puisque nous ne pouvons pas faire payer aux générations futures les dépenses courantes d'aujourd'hui, et un impératif économique et social, puisque c'est l'assainissement de notre situation budgétaire qui nous permettra de trouver les marges de manoeuvre pour financer les dépenses d'investissement, vitales en matière de recherche, d'innovation et d'éducation, mais aussi pour garantir la cohésion sociale.
Enfin il nous faut mettre en place un objectif pluriannuel d'apurement de la dette, qui soutiendra la croissance et participera à la confiance indispensable pour créer les conditions d'une croissance durable. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
Monsieur le ministre, mon propos se limitera aux paradis fiscaux. Le G 20 de Londres avait marqué en ce domaine une volonté très affirmée. L'Assemblée nationale y a consacré une part de ses travaux Il y a eu la mission de la commission des finances et nous avions présenté avec Mme Guigou un certain nombre de propositions devant la commission des affaires européennes.
Vous auriez pu vous en remettre aux négociations internationales et à ce qui se passe dans l'enceinte de l'OCDE. Mais, dans le projet de loi de finances rectificative, vous introduisez un dispositif – dont on doit reconnaître le caractère novateur et positif à bien des égards – relativement large, puisque les dispositions touchent les mouvements de capitaux, de revenus, tant à l'entrée qu'à la sortie des paradis fiscaux. Malheureusement, ce dispositif comporte deux faiblesses importantes.
La première faiblesse, c'est l'exception faite pour les pays de l'Union européenne. On comprend que vous soyez soucieux, comme nous tous, des relations que nous entretenons avec nos partenaires. Mais, en matière fiscale, nous sommes – c'est encore le cas dans le traité de Lisbonne – sous le régime de l'unanimité. Vous faites preuve de retenue en matière de fiscalité, mais il faut bien dire qu'un certain nombre de nos partenaires sont loin de faire de même. Cette règle de l'unanimité leur permet de se soustraire à des règles qui seraient pourtant indispensables. C'est un frein considérable à l'harmonisation fiscale, pourtant nécessaire au sein de l'Union, et cela permet aussi le maintien d'un certain nombre de pratiques. Je pense à la directive Épargne, pour laquelle un certain nombre d'États persistent à se situer en dehors de la règle d'échange automatique d'informations. J'ai assisté hier matin à un colloque franco-luxembourgeois. M. Frieden, ministre des finances luxembourgeois déclarait très clairement qu'il ne voyait pas de raison de se soumettre dans ce domaine à d'autres règles que celles fixées par l'OCDE.
Où en sommes-nous de la refonte de la directive Épargne ? Aurons-nous la volonté de faire évoluer son champ d'application et de remettre en question les règles particulières dont bénéficient trois États ? Si nous n'y parvenions pas, nous comprendrions difficilement l'exception faite pour certains de nos partenaires.
La deuxième faiblesse c'est la référence aux travaux de l'OCDE. Vous établissez – c'est une excellente chose – une liste nationale. Mais le critère essentiel que vous avez fixé, à partir de 2011, résultera des travaux de l'OCDE. Les entrées et sorties de la liste nationale seront essentiellement commandées par ces travaux. Or l'expérience en ce domaine nous rend très prudents. En 2000, des listes ont été établies par l'OCDE et elles se sont peu à peu dépeuplées en sept ou huit ans, au point qu'il ne restait plus cette année que deux ou trois États sur la liste de l'OCDE.
Au moment du G 20 de Londres, le 2 avril, de nouvelles listes ont été dressées. Elles se sont évaporées à une vitesse vertigineuse, grâce à un mécanisme, rappelé par certains de nos collègues – celui des douze conventions. Ce n'est pas seulement parce que ces conventions sont conclues, pour une part d'entre elles, entre paradis fiscaux, mais aussi parce que, même si ces conventions sont sérieuses, elles n'ont qu'un caractère bilatéral et ne s'imposent en aucune façon aux États tiers. Cela vous montre la faiblesse du dispositif OCDE.
On nous parle de mettre en place aujourd'hui une évaluation par les pairs. Nous ne doutons pas du bon vouloir et du sérieux des experts de l'OCDE. Mais quelle est la volonté des États membres de l'OCDE ? L'expérience que nous avons vécue jusqu'à présent nous rend circonspects.
Si nous voulons que la liste nationale soit vraiment significative, on ne peut pas donner, à partir de 2011, un caractère essentiel aux seuls travaux de l'OCDE. Il faut se référer à d'autres critères.
Je voudrais souligner que deux autres listes étaient prévues : l'une à établir dans le cadre du GAFI et l'autre à établir en matière de régulation financière. J'observe qu'aucune de ces deux listes n'est sortie.
Un certain nombre d'amendements ont été déposés dans le cadre du collectif budgétaire. Si l'on ne resserre pas les mailles de ce dispositif, je crains, monsieur le ministre, que cette tentative ne reste malheureusement sans lendemain. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Chacun d'entre vous, mes chers collègues, a eu l'occasion de dire ce qu'il aurait fallu faire pour tenter de limiter, en 2009, les effets de la crise.
Je voudrais faire le tour des situations dans le monde, sans recherche d'exhaustivité, faire quelques mises en lumière sporadiques, afin que chacun puisse savoir, lorsque l'on dit que la crise n'est pas terminée, de quoi il s'agit.
Aux États-Unis, le comportement du consommateur a changé. Selon M. Dillon, le chairman de Kruger, la plus grande chaîne de supermarchés traditionnels aux États-Unis a réalisé au troisième trimestre 17,7 milliards de dollars de vente, via des milliers de dépanneurs, que l'on trouve aussi au Canada. Kruger a affiché 875 millions de dollars de pertes au troisième trimestre, Il a tenté d'identifier les raisons de cette contre-performance. M. Dillon explique les choses simplement : certains Américains ont choisi d'être plus disciplinés sur leurs dépenses et d'acheter moins cher quand les autres ont tout simplement arrêté d'acheter parce qu'ils n'ont pas l'argent pour dépenser.
En d'autres termes, le consommateur américain n'achète plus que dans les endroits où on lui offre des réductions ou des subventions – trois cravates pour le prix d'une –, des primes à l'automobile, ce qui est assez cohérent avec le fait qu'un adulte sur huit, soit 12,5 % de la population, et un enfant sur quatre, soit 25 % de la population, reçoivent désormais des food stamps, des bons alimentaires.
Dans la même veine, McDonald's a annoncé hier soir que ses ventes en novembre s'étaient contractées, pour le deuxième mois consécutif, aux États-Unis, et avaient également reculé en Chine et en Allemagne. La raison avancée est du même ordre : 1a compétition vers le prix le plus bas. À titre d'exemple, leur principal concurrent, Burger King, a mis le double cheeseburger à un dollar et Dunkin Donut propose aujourd'hui un menu à 99 cents.
Si, comme quelques-uns le pensent, le rebond des matières premières en 2009 était amené à se dégonfler une fois la vague de surinvestissements chinoise passée et si l'économie restait toujours aussi fragile, ce genre d'exemple montrerait à quel point le mécanisme déflationniste peut s'enclencher dans une économie où le ratio dette privée sur PIB est aussi élevé et où les acteurs du crédit possèdent tous de bonnes raisons de restreindre leur activité ou leur consommation.
Un indice peut être révélateur de la vision de nombreux professionnels des marchés du comportement futur sur les matières premières, c'est l'achat très récent par le Mexique, pour un montant de 1,2 milliard de dollars de primes, de ce que l'on appelle des puts, sur le pétrole, afin de couvrir le risque pour ses exportations de 2010 en cas de faiblesse persistante de la demande. Je rappelle que le même genre de couverture lui a rapporté 5 milliards de dollars en 2009. Mais qu'un des principaux acteurs du marché anticipe le prix à la baisse pose problème.
On connaît l'ampleur des difficultés de Dubaï. Du fait de la baisse de notation survenue hier, la Compagnie nationale d'électricité et d'eau sera obligée d'apurer par anticipation, le 14 décembre 2009, une dette de 2 milliards de dollars dont le remboursement était normalement prévu en 2036.
Cette situation fait craindre aux Mexicains que les pays du Golfe n'ouvrent grand les robinets de pétrole pour remplir leur caisse, ce qui ferait mécaniquement chuter les cours. Leur inquiétude se justifie d'autant plus que l'agence Moody's a déclaré ce matin qu'elle faisait passer un certain nombre de GRI, government related issuers – ces entreprises de service public qui ont la confiance des autorités des Émirats arabes unis –, sous revue négative, pour baisser éventuellement leur notation.
Au Japon, les statistiques publiées ce matin, qui expliquent d'ailleurs la baisse du Nikkei, décrivent une hausse de 1,3 % en rythme annuel de la croissance, alors que l'on nous annonçait il y a un mois à peine une hausse de 4,8 %. Voilà qui ne va pas dans le sens d'un rebond en V de l'économie, d'autant qu'en nominal, le PIB du Japon a en fait reculé de 0,9 % ; il n'affiche un résultat positif que grâce à la déflation.
C'est bien ce que je pense.
Toujours au Japon, les ventes de machines-outils ont encore reculé de 8,9 % sur un an et, si cette baisse paraît préférable à celle de 42 % précédemment affichée, ce n'est qu'en raison de l'effet des bases des mois d'octobre et novembre 2008. En fait, les ventes ont baissé de 67 % par rapport à mars 2008.
Pour terminer ce bref tour d'horizon par l'Europe, une grande confusion demeure sur la situation fiscale de la Grèce. On a entendu à ce sujet de nombreuses déclarations de responsables allemands et grecs, et la dette du pays est toujours sous pression. Ainsi, le spread, c'est-à-dire le taux de risque à dix ans, s'est écarté de 70 points de base de celui de l'Allemagne, ce qui représente une variation de 244 %, en quatre jours.
M. Migaud a salué la situation de l'Espagne, mais l'annonce par Standard & Poor's de la mise sous surveillance négative de la note de la dette espagnole ne va probablement pas créer la confiance dans sa capacité de rebond.
Face à la gravité de la situation, les masques finissent par tomber et les gouvernants naguère optimistes commencent à prendre la mesure de la situation. Barack Obama reconnaît ainsi qu'un deuxième plan de relance est en gestation, destiné principalement à la création d'emplois. L'annonce récente par M. Geithner de sa volonté de notifier au Congrès la nécessité de prolonger jusqu'en octobre 2010 le plan de soutien actuel aux institutions financières laisse entendre que la crise financière n'est pas nécessairement terminée aux États-Unis. La nouvelle a d'ailleurs envoyé un sévère coup de froid aux marchés d'actions américains.
À côté des mesures nationales, chacun doit assumer le fait que les décisions majeures se passent ailleurs. Au-delà de la qualité de nos échanges, il nous appartient d'en tenir compte ensemble, dans l'intérêt du pays. Ainsi, un jour ou l'autre, les dirigeants américains et européens, constatant qu'il est impossible de continuer à sauvegarder l'emploi par des subventions et des plans de soutien tant que la Chine persistera à empêcher sa monnaie de s'ajuster en fonction des déséquilibres des échanges mondiaux, engageront un bras de fer protectionniste. L'attitude actuelle de la Chine à l'égard de sa devise ne s'apparente-t-elle pas, en effet, à une forme de protectionnisme ?
Depuis octobre 2008, le gouvernement de Pékin a décidé, sans justification aucune, de coller sa monnaie au dollar américain, adoptant ainsi un système monétaire qui ne dirait pas son nom. Il y parvient du fait de la puissance de son économie et de ses réserves de change. À titre indicatif, là où la France dispose aujourd'hui d'environ 95 milliards d'euros et le Japon de 750 milliards de réserve de change, celle de la Chine dépasse actuellement les 1 850 milliards d'euros. Le cours si bas du yuan, maintenu artificiellement pour que les prix chinois restent bas eux aussi, pénalise en réalité la concurrence mondiale, sans que l'Organisation mondiale du commerce y trouve rien à redire, puisque la politique monétaire n'entre pas dans le champ de ses compétences. Et pour cause : il n'existe pas, au plan mondial, d'institution monétaire compétente.
Telle est la situation du monde, dont je tenais à donner un bref aperçu. Elle explique pourquoi les initiatives du projet de loi de finances sont nécessaires, au sens où elles peuvent constituer les prémices d'une organisation financière mondiale. La lutte contre la fraude est peut-être un moyen efficace de sécuriser des recettes, comme la définition des prix de transfert limite le risque d'évasion fiscale par le biais d'une astuce comptable.
Dans un tel contexte, chacun relève qu'il n'y avait guère d'alternative budgétaire si nous souhaitions être réactifs afin que la France puisse s'en sortir un peu mieux que ses voisins européens ou ses partenaires mondiaux. Dès que la crise reculera et que la croissance s'installera durablement, ce qui ne se produira sans doute pas dans tous les pays en 2010, il faudra inévitablement engager un désendettement massif et sécuriser les recettes. J'observe au passage que nos collègues socialistes ont, depuis quelques jours, rayé de leur vocabulaire l'expression « hausse d'impôts ». Peut-être ont-ils saisi que, dans un pays qui a atteint le sommet en matière de prélèvements obligatoires, on ne peut les augmenter encore sans conséquences graves pour l'économie. C'est au moins cela de gagné.
Pour toutes ces raisons, le groupe UMP soutiendra ce projet de loi qui, dans le contexte mondial que j'ai décrit, sécurise incontestablement les Français et maintient la situation économique nationale au-dessus de la ligne de flottaison. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'occasion de l'examen de ce projet de loi de finances rectificative, permettez-moi, faisant suite à l'intervention de M. Chartier, d'appeler votre attention sur la situation des collectivités territoriales qui ont contracté auprès d'établissements bancaires des emprunts dont l'indexation est complexe et risquée. La situation est inquiétante au regard du nombre de collectivités concernées, puisque la seule banque Dexia a vendu ce type de produits à plus de 4 000 d'entre elles. Elle l'est également au sens où elle expose potentiellement ces collectivités à un relèvement massif de leur charge d'intérêts.
Il y a un peu plus d'un an, lorsque j'ai commencé à alerter l'opinion publique sur le sujet, on a cru que je voulais régler mes comptes en incriminant la gestion de mes prédécesseurs à la tête d'un département. Depuis lors est intervenue une des plus grandes crises économiques que le monde ait connues. Certaines collectivités ont vu le taux d'intérêt de leurs emprunts bondir de 1,5 % à 13 % en raison de ces produits toxiques. Or leur situation budgétaire était déjà fragilisée par la mauvaise compensation des transferts de compétences de l'État, l'absence de réelle péréquation de la dotation globale de fonctionnement et des facteurs d'ordre conjoncturel comme la diminution des droits de mutation à titre onéreux, qui grève le budget des départements.
Dans un premier temps, je n'ai pas cru que des collectivités territoriales avaient pu contracter des emprunts à haut risque. Mais d'autres élus, qui n'ont pas de raisons d'observer la loi du silence, ont succédé comme moi à des majorités ayant signé ce type de contrat. Comme des centaines d'autres, j'ai donc essayé de comprendre ce qui s'est passé et ce que représente ce risque pour les institutions concernées : villes, départements, services départementaux d'incendie, hôpitaux ou offices HLM.
Comment en sommes-nous arrivés là ? La fusion, en 1996, du Crédit local de France avec le Crédit communal de Belgique, devenus Dexia, nous a fait entrer dans un nouveau monde économique. Ce système, dont le Président de la République s'est fait désormais une spécialité de dénoncer les dérives, a fait primer des logiques financières sur tout autre intérêt, y compris celui des Français. L'application stricte des règles de la concurrence bancaire, si vantées ces dernières années, au secteur des prêts aux collectivités locales a conduit un certain nombre d'établissements à imaginer des produits toujours plus risqués, toujours plus sophistiqués et apparemment toujours plus profitables. Ainsi sont nés les emprunts toxiques.
Ceux-ci ont agi comme une drogue douce. Des banquiers sont venus voir les élus pour leur vendre des produits à des taux défiant toute concurrence, le plus souvent ajustés au temps électoral. Leurs propositions étaient dangereuses pour la santé financière des collectivités. En effet, nul ne pouvait prévoir leur évolution, puisqu'ils étaient soumis aux fluctuations des marchés financiers en temps réel, et M. Chartier vient de montrer ce qui est advenu.
Les banques se défendent d'avoir mal agi. Elles incriminent l'incompétence des directeurs financiers des collectivités locales, alors que les meilleurs de leurs spécialistes n'ont pas vu venir la crise des subprimes qu'ils ont eux-mêmes créée. Elles nient haut et fort la vente de produits snow balls, omettant de signaler qu'elles ont placé des centaines de millions d'euros en produits de comparaison de devises. Leurs arguties ne résistent pas à l'examen.
On comprend, dans ces conditions, que la Cour des Comptes ait mis le Gouvernement en garde contre les dangers des emprunts toxiques et que la Commission bancaire ait ouvert, il y a un mois, une enquête sur les produits structurés de dette vendus par Dexia aux collectivités.
À leur décharge, les banques ont certainement profité d'un flou juridique qui relève de la responsabilité de l'État. L'accès des collectivités à différentes formes de taux indexés monétaires ou composites, au début des années 1990, avait pourtant fait l'objet, dans un premier temps, d'une réglementation d'une grande clarté.
Le 15 septembre 1992, une circulaire de la direction générale de la comptabilité publique et de la direction générale des collectivités locales prévoyait ainsi…
…que, si les collectivités voulaient passer d'un taux fixe à un taux indexé ou plafonner le coût d'un emprunt devant financer un investissement futur, elles pouvaient le faire en concluant un contrat pour certains produits dérivés, à condition de limiter ceux-ci à une partie seulement de leur encours de dette. Cette réglementation a empêché que des collectivités n'échangent une dette vingt fois supérieure à leur encours budgétaire, s'exposant à payer des charges financières qui auraient dépassé l'intégralité de leur budget – ce qui s'est produit au Royaume-Uni.
Cette réglementation a été battue en brèche lors de l'introduction par les banques auprès des collectivités de produits structurés, qui combinent un produit bancaire classique et un ou plusieurs produits dérivés. Ils n'étaient pas nécessaires : les produits de base, à taux fixe ou indexés, complétés par l'usage approprié de quelques produits dérivés suffisaient largement aux besoins des collectivités. En outre, ces produits manquent totalement de clarté puisqu'ils font intervenir des index inhabituels ou exotiques par rapport à l'univers macroéconomique dans lequel s'inscrivent les collectivités.
On me répond souvent que ces produits offraient dans un premier temps des conditions très avantageuses. Mais les marchés ne permettent plus depuis longtemps qu'elles se concrétisent, à moins qu'on ne reporte sans le dire la charge sur les années suivantes, ce qui s'apparente à de la tromperie. Les taux d'intérêt de produits affichés à 1,95 % convergent en réalité vers un surcoût de l'ordre d'au moins 30 %.
J'en veux pour preuve les propositions de renégociation que j'ai reçues dans mon département, qui font toujours état de ce surcoût.
J'appelle votre attention sur ce point, monsieur le ministre, car certains banquiers ont soutenu dans la presse que les collectivités locales n'avaient pas perdu d'argent. Actuellement, les banques me proposent de racheter pour 600 millions le stock de dettes du département de la Seine-Saint-Denis, qui se monte à 800 millions. Où s'évaporent les 200 millions de différence ? Et je n'ai pas l'impression que les gains, qu'elles estiment elles-mêmes à 20 millions pour les trois premières années, soient en relation avec les pertes annoncées pour les douze années qui viennent.
En revanche, l'absence de transparence permet aux banques d'augmenter très largement leurs marges par rapport à ce qu'un produit classique à taux fixe ou indexé autorise. C'est d'ailleurs ainsi, à mon avis, que tout a commencé. Lorsque, à la fin des années 1990, les collectivités locales disposaient de plus de recettes et n'avaient donc pas autant besoin de recourir à l'emprunt, faute de flux, les établissements bancaires s'intéressaient au stock et, pour se soustraire à la comparaison entre eux en ce qui concerne l'aménagement de dettes, ont alors proposé un certain nombre de produits exotiques.
Sauf à disposer d'une connexion en temps réel à un serveur de salle de marchés, type Reuters ou Fininfo, ou d'avoir engagé quatre traders se relayant jour et nuit pour assurer le traitement informatique des informations transmises depuis quatre continents,…
… il est impossible pour une collectivité de prévoir leur évolution différée ou potentielle. Or j'ai découvert il y a peu que ces produits ont été vendus à des communes de 5000 habitants !
Présentés comme des emprunts et non comme des produits dérivés, ils échappent de ce fait à la circulaire de 1992 et à l'obligation d'une délibération préalable exposant la stratégie de gestion des collectivités concernées.
L'État a laissé vieillir la circulaire de 1992, au nom de la non-régulation et du libéralisme économique. Sa seule actualisation, le 4 avril 2003, a été de pure forme. Les gouvernements successifs n'ont pas joué leur rôle. Ils ont pourtant été alertés à plusieurs reprises sur le danger de la situation.
Bien avant les récents avertissements de la Cour des comptes, bien avant l'enquête de la Commission bancaire sur Dexia, le consultant Michel Klopfer a alerté dès 2006 les pouvoirs publics sur les risques des emprunts structurés. Le 22 octobre 2007, le même Michel Klopfer et Louis Renouard, magistrat d'une chambre régionale des comptes, ont publié un article dans la Gazette des Communes, parlant de « risques inconsidérés » et de « manque de clarté ». Michel Klopfer a même conseillé à la DGCL d'actualiser la circulaire de 1992 face aux risques que couraient les collectivités. La DGCL lui a alors répondu que ce n'était pas une priorité et que son analyse était erronée !
Je suis convaincu que la DGCL aurait dû informer clairement les collectivités du risque que représentaient ces produits, et joué son rôle d'alerte. Sa mission est en effet de surveiller la sincérité des budgets. Or, avec de tels prêts, il nous est impossible d'inscrire la dépense puisque nous ne la connaissons pas !
Rien ou presque n'a été fait à ce jour. Le Gouvernement avait pourtant des outils adaptés. Avec la charte de bonne conduite discutée il y a de nombreux mois, il avait la possibilité de démontrer sa détermination à revenir à des pratiques saines.
Le seul intérêt de cette charte est qu'elle constitue le plus bel aveu possible de la responsabilité passée des banques. On y apprend en effet que les banques s'interdisent désormais de commercialiser des produits spéculatifs qui, d'après le ministère des finances, « par nature, ne sont pas adaptés aux besoins des collectivités ». Pourquoi alors en avoir vendu dans un passé récent ? On y apprend aussi qu'elles s'engagent « à mieux informer les collectivités sur les risques attachés aux emprunts structurés ». Est-ce à dire qu'elles n'ont pas respecté leur obligation légale de conseil dans un passé récent ? Elles s'engagent enfin « sur un devoir de conseil renforcé pour les collectivités ». Faut-il comprendre que les banques ont traité dans un passé récent les collectivités territoriales avec légèreté alors que des centaines de millions d'euros d'argent public étaient en jeu ?
Cette charte est restée enterrée pendant un an. La version qui a été déterrée et qui vient d'être présentée est lacunaire et non coercitive pour le futur, et elle ne propose rien pour le passé. C'est nier la responsabilité qui a été celle des établissements bancaires.
J'en ai déjà parlé. Vous comme moi, cher collègue, avons notre permis de conduire. Toutefois, il y a un code de la route. Je pense que, compte tenu de la complexité du produit, il fallait laisser à ces gestionnaires leur permis de conduire, mais mieux préciser le code de la route.
C'est pour cette raison que de grandes associations d'élus, comme l'ADF et l'ARF, demandent au Gouvernement une charte fixant une nouvelle règle du jeu en tenant compte du passé.
J'ai par contre accueilli avec beaucoup plus d'attention la création d'une mission confiée par le Gouvernement à M. Eric Gissler pour remédier aux grandes difficultés que rencontrent aujourd'hui un certain nombre de collectivités. Il me semble que notre assemblée devrait être informée de l'avancée de cette mission pour que nous puissions en tirer les conclusions législatives et réglementaires qui s'imposent.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, il est nécessaire et urgent d'agir. Je proposerai donc un amendement créant un article additionnel après l'article 30 afin que le Gouvernement remette au Parlement un rapport précisant l'encours total d'emprunt des collectivités touchées par les emprunts toxiques. Nous ne devons pas craindre un tel rapport public qui est de nature à rétablir un équilibre entre banques et collectivités dans les futures renégociations des prêts visés.
Je souhaite que les ministres de l'économie, du budget et de l'intérieur dialoguent avec la commission des finances de notre assemblée, lors d'une audition spécialement consacrée au règlement de cette question. Nous devons notamment prévoir ensemble les conditions de sortie des produits structurés si nous ne voulons pas que des collectivités se déclarent en cessation de paiements dans les mois qui viennent. Je crois vraiment que personne n'y a intérêt.
Enfin, je souhaite que les élus des collectivités concernées, au travers des associations d'élus peut-être, soient associés à la rédaction du prochain projet de loi de régulation bancaire, afin que des règles explicites soient désormais énoncées.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que la puissance publique s'est portée au secours des banques il y a quelques mois, ayons l'ambition d'imposer de nouvelles régulations politiques au capitalisme financier avant que de nouveaux scandales ne se produisent. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette loi de finances rectificative inclut toute une série de dispositions qui visent à lutter contre les paradis fiscaux, faisant de la France un pays pionnier dans ce domaine.
Ces dispositions correspondent directement aux conclusions du sommet du G20 à Pittsburgh les 24 et 25 septembre dernier. J'en profite pour me réjouir de voir que la France envisage la sortie de crise comme un enjeu mondial.
L'impératif de régulation est une des leçons que la crise nous a enseignées. Il est donc du devoir du législateur de responsabiliser les acteurs du monde bancaire et financier.
Dans cette perspective, je ne peux que saluer la volonté du Gouvernement de mettre fin à ces zones de non-droit que sont les paradis fiscaux. Il s'agit là d'un impératif à la fois éthique, économique et démocratique.
La plupart des mesures dont il est fait mention à l'article 14 du projet de loi reprennent certaines des trente propositions que nous avions formulées dans le rapport d'information sur les paradis fiscaux dont j'étais cosignataire avec MM. Carrez, Migaud, Brard, Emmanuelli et Mancel.
Je suis heureux de constater que ce long travail d'investigation, mené au-delà des clivages politiques habituels, n'a pas été vain ; on peut même y voir un exemple de coproduction législative réussie.
Tout d'abord, l'inscription de la définition de ce qu'est un « territoire non coopératif » dans le code général des impôts nous donne un outil formidable de lutte contre les paradis fiscaux, puisqu'elle fournit le socle législatif indispensable à la levée du secret bancaire. On sait, si l'on en juge par la façon dont les coopérations fiscales ont évolué récemment combien ce paramètre est important.
Cependant, et je crois me faire le porte-parole de nombre d'entre vous, je souhaiterais aller plus loin dans le renforcement des sanctions à l'encontre des paradis fiscaux, et corrélativement du secret bancaire, et ce dans la droite ligne de ce que nous avions proposé dans ce même rapport d'information. Il nous appartient en effet de renforcer les conditions d'inscription sur cette liste noire qui sera d'autant plus efficace que celles-ci sont contraignantes. Il apparaît dès lors indispensable d'y ajouter les pays qui, une fois la convention fiscale signée, n'ont pas mis en pratique l'échange d'informations entre administrations, ainsi que les pays ayant refusé de signer une convention avec la France, après que celle-ci en eut fait la demande. Toujours selon le même objectif, nous devons impérativement rendre obligatoire la justification de tout retrait d'un Etat de la liste des pays ne coopérant pas avec l'administration fiscale française.
Reste néanmoins en suspens, comme l'a rappelé le président de la commission des finances lui-même, la question de l'autonomie de la liste noire française par rapport à celle de l'OCDE, autonomie qui, dans l'état actuel du texte, est impossible.
J'ose espérer que la représentation nationale aura la sagesse d'approuver, comme nous l'avons fait en commission des finances la semaine passée, l'approfondissement du dispositif gouvernemental en question. Il y va de la crédibilité même de cet arsenal juridique.
Après un travail conjoint et utile sur les paradis fiscaux, nous devrions parvenir, au travers de ce que propose le Gouvernement, et dont je remercie Éric Woerth, et avec les amendements que nous avons signés, à constituer un arsenal juridique qui permettra à la fois de combattre la fraude dans les paradis fiscaux et d'aller vers une meilleure régulation financière. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)
Monsieur le ministre, je souhaite aborder à nouveau la situation des collectivités territoriales, et notamment des plus fragiles d'entre elles. Nous n'attendions pas grand-chose de ce projet de loi de finances rectificative, et en particulier de son article 2, mais mieux vaut se parler franchement que d'en rester à un dialogue de sourds.
M. le ministre de l'intérieur affirmait récemment que « comme par le passé le Gouvernement respectera pleinement le principe constitutionnel d'autonomie financière puisque la suppression de la taxe professionnelle sera compensée intégralement ». Nous aimerions le croire, mais nous avons du mal. En raison de ce que nous avons vécu et vivons encore, cela ne nous semble guère possible.
Personne n'était dupe des techniques utilisées pour se donner bonne conscience en choisissant, pour compenser, disait-on, à l'euro les transferts effectués, des critères où des références presque toujours défavorables aux collectivités, ces collectivités accusées de tous les maux, surtout quand elles sont de gauche, coupables de trop recruter, de trop augmenter les impôts, bref de dépenser sans compter. C'est là une manière habile de botter en touche, qui ne trompe pas grand monde mais qui permet d'éviter les vrais débats, ceux-là mêmes que nous aimerions avoir.
En Creuse, département peu riche s'il en est, la différence entre les dépenses et les recettes pour l'APA, le RMI-RSA et les mesures de décentralisation de 2004 est passée de 4 millions d'euros en 2003 à 16 millions en 2008. La charge totale en six ans se monte à 66 millions d'euros. Pour la Haute-Vienne, en 2009, il manque 32,9 millions d'euros, soit environ 11 % du budget de fonctionnement ou 36 points de fiscalité.
Comment discuter ensemble ? Comment se mettre d'accord sur certains sujets, sans que le Gouvernement considère nos demandes comme une longue plainte et que nous regardions ses arguments comme des accusations ? Nous aimerions pouvoir faire ensemble un constat, pour pouvoir ensuite, en toute transparence, définir les mesures à prendre.
Tout le monde parle de l'égalité des citoyens, je trouve, pour ma part, que l'on cite de plus en plus leurs devoirs sans vraiment examiner leurs droits. Moins de moyens équivaut à moins de services publics rendus à la population. « Il ne faut pas traiter la Creuse comme Neuilly », avait pourtant dit et écrit le Président de la République. Ce message d'espoir est, pour l'instant, resté sans suite.
La loi de finances pour 2010 n'apporte pas les réponses attendues, et nous n'attendons rien de plus de ce projet de loi de finances rectificative.
On entend dire que plus de quinze départements sont au bord de l'asphyxie financière. Nous ne jouons pas à nous faire peur, mais nous voulons regarder la réalité en face, lucidement, et l'affronter. Il s'agit de dire si l'on considère qu'il faut tenter de guérir ou s'il faut laisser mourir.
Il ne faut pas rompre la chaîne territoriale, des décisions politiques fortes s'imposent donc. Mêmes si elles se déroulent dans un temps contraint, les assises des territoires ruraux définiront, je l'espère, quelques-unes des pistes à suivre ; les moyens nécessaires devront être dégagés et nous demanderons que soient apportées des réponses précises à nos questions.
Dans quelques jours, à la fin du mois de janvier, des décisions seront prises pour l'affectation du grand emprunt : comme d'autres élus, je plaide pour une véritable prise en compte de la dimension rurale dans sa répartition. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Mon cher collègue, voilà une excellente conclusion.
La discussion générale est close.
La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État.
Je veux tout d'abord remercier le rapporteur général, Gilles Carrez, qui a mis en valeur les deux objectifs que s'est fixés le Gouvernement, en 2009, dans sa politique budgétaire. Cette dernière est fondée à la fois sur la confirmation d'une politique responsable de maîtrise de la dépense et sur l'activation du levier budgétaire pour soutenir la relance de l'économie.
Gilles Carrez a également rappelé l'importance de la baisse des impôts depuis 2000, en nous appelant à sécuriser les recettes, en repli, depuis cette année-là, de 66 milliards d'euros. Didier Migaud a, lui aussi, cité ce chiffre que l'on trouve dans les documents budgétaires. Même si Henri Emmanuelli y a fait allusion, on oublie qu'entre 2000 et 2002, la moitié de ces baisses d'impôts sont le fait de la gauche.
Vous dites un tiers, nous, la moitié ; je suppose que nous devons avoir à peu près les mêmes chiffres. Il ne s'agit sans doute que d'une divergence de méthode de calcul entre l'opposition et la majorité. (Sourires.)
En tout cas, 66 milliards d'euros, ce n'est pas rien et, comme nous, vous avez une part de responsabilité en la matière. Cela dit, il ne s'agit pas nécessairement d'une mauvaise chose pour l'économie, bien au contraire. C'est vrai pour les mesures, probablement nécessaires, que vous avez prises à l'époque, tout comme pour celles que nous avons prises. Il reste que, bien évidemment, je ne peux être indifférent à l'idée de protéger les recettes.
En ce qui concerne la maîtrise de la dépense et les 2 milliards d'euros d'économies obtenus par rapport à la loi de finances initiale, le président de la commission des finances nous dit qu'il ne faut pas calculer comme cela. Pourtant, le calcul est bon : nous économisons bien 2 milliards par rapport à la dépense prévue.
À ce sujet, j'ai d'ailleurs reconnu moi-même que nous n'étions pas pour grand-chose dans la diminution de la charge des intérêts de la dette – je suis d'accord sur ce point avec Charles-Amédée de Courson. Cette diminution s'explique par la baisse des taux qui est l'une des rares conséquences positives de la crise sur nos finances publiques ; mais cela ne durera probablement pas.
Nous faisons des économies, mais il y a aussi des dépenses supplémentaires, en dehors même des objectifs de relance. C'est le cas des prestations sociales, destinées à faire face à la montée du chômage, ou du prélèvement sur recettes de l'Union européenne, dont l'augmentation témoigne, en fait, de la bonne tenue de l'économie française comparée aux autres économies de l'Union.
Au total, il y a bien 2 milliards d'euros d'économies. D'ailleurs, si ces 2 milliards n'existaient pas, nous ne pourrions pas les affecter au remboursement de la dette de l'État vis-à-vis de la sécurité sociale.
Je souligne qu'en faisant ce choix nous avons renoncé à l'idée de créer des dépenses supplémentaires – à Dieu ne plaise ! – ou à celle de diminuer le déficit de l'État du même montant. Il ne s'agit pas d'une mesure extraordinairement démagogique ni extraordinairement populaire, qui permettrait de faire une émission de télévision. Monsieur Emmanuelli, je ne mets pas en oeuvre un « plan com ». Je pense seulement qu'il s'agit d'une bonne chose pour nos finances publiques, et que cela clarifie la relation compliquée entre l'État et la sécurité sociale.
Monsieur Migaud, je pense aussi que l'on peut vraiment faire une différence entre les dépenses liées au plan de relance et à la crise, et les autres dépenses. La notion de dépenses structurelles est très importante. En segmentant ainsi les dépenses, nous ne manipulons pas les chiffres, et cette présentation n'est pas le fait de la créativité du ministre ou de son cabinet. Au final, nous parvenons à un solde négatif qui est ce qu'il est : je ne le conteste pas, je l'assume.
Vous soulignez, comme M. Muet, que l'activité économique de l'Allemagne recule plus que celle de la France alors que, relativement, ses performances en matière d'emploi sont meilleures que les nôtres. Vous nous invitez donc à suivre cet exemple.
Je souligne tout de même que l'Allemagne fait un usage massif du chômage partiel, ce qui induit une diminution moyenne des heures travaillées par salarié, avec un effet de l'ordre de 0,7 à 1 point sur les statistiques du chômage. Il faut aussi tenir compte d'un effet statistique lié à une modification de la définition du chômage depuis le 1er janvier 2009, avec un impact de 0,7 point sur les chiffres. Par ailleurs, la démographie joue, avec une baisse de la population en âge de travailler. Sans tous ces éléments, en octobre 2009, le chômage en Allemagne se situerait, en réalité, au-dessus des 9 %.
Vous ne pouvez pas dire que notre manière de calculer n'est pas la bonne et prétendre que nos amis allemands seraient parfaitement vertueux. J'affirme simplement qu'il faut raisonner à périmètre constant et bien regarder ce qui a changé. Je ne dis pas que ces changements n'avaient pas lieu d'être ; ils relèvent de choix politiques du gouvernement allemand. Je tiens tout de même à les évoquer, sans quoi on ne comprend plus ce qui se passe.
Cher Michel Bouvard, j'ai été sensible à vos propos relatifs à la maîtrise de la dépense et à l'apurement de la dette contractée envers la sécurité sociale.
Vous avez aussi évoqué les 489 opérateurs de l'État. Ils existent, je les ai rencontrés ! Je les ai invités à Bercy pour discuter des nouvelles règles de gestion et des nouvelles modalités de relation avec l'État. Il s'agissait d'une première : il était très important de parler avec eux d'emploi, de financement, de frais de fonctionnement. Tous ces points ont été évoqués de façon très détaillée, et un cadre de gestion a été fixé. Nous poursuivrons cette démarche, opérateur par opérateur, selon les métiers de chacun d'entre eux, ou selon la pyramide des âges des personnels pour ce qui concerne la règle du non-remplacement d'une personne sur deux. Je sais que la commission des finances est très attentive à cette question et, à plusieurs reprises, ses membres m'ont pris à parti à ce sujet ; il me semble que nous avons déjà effectué un travail solide.
Monsieur Emmanuelli, je ne crois pas que j'aie un « plan com ».
J'essaie d'expliquer simplement des choses compliquées. Vous y parvenez vous-même assez bien, mais j'estime qu'en m'accusant ainsi, vous ne dites pas la vérité.
Dans la communication qui est la mienne, je tente d'expliquer la réalité, sans masquer les difficultés ni leur ampleur, ce qui serait d'ailleurs tout à fait impossible. Je ne mets rien sous le tapis.
Les choses sont ainsi. La réalité est souvent un tout petit peu plus compliquée que ce que vous voulez faire croire – je ne parle pas de ce que vous avez vraiment compris.
Pour notre part, nous sommes en pleine action, que ce soit avec le plan de relance ou encore avec les mesures de lutte contre les paradis fiscaux, la fraude ou l'économie souterraine. Vous avez d'ailleurs objectivement reconnu qu'il y avait là de réelles avancées dans le texte, même si nous n'étions pas allés aussi loin que ce que vous souhaitiez. Je remercie les députés de l'opposition qui ont fait le même constat que vous.
Monsieur Sandrier, vous évoquez les efforts insuffisants de l'OCDE. J'estime qu'il est très important d'avoir une vision internationale sur la question des paradis fiscaux. Ma position n'est pas originale, mais je crois, tout bêtement, qu'aucun État ne peut lutter seul contre une forme d'économie mondiale souterraine : aucun n'a la puissance pour le faire, à l'exception peut-être des Etats-Unis. En tout cas, la France ne le peut pas.
En conséquence, nous avons besoin de conventions et de règles internationales. La force du président français est, précisément, de réussir à amener un certain nombre de ses collègues à faire ce choix. Et ce n'est pas si simple de convaincre les Chinois ou les Américains de s'engager dans cette voie : d'autres intérêts sont en jeu, et nous sommes confrontés à d'autres cultures. A priori, ils peuvent ne pas partager notre sentiment.
Sur les paradis fiscaux, un consensus a émergé. Je suis d'accord avec vous : nous devons faire attention d'éviter l'économie de la promesse pour passer à l'économie de l'action. Or il me semble que, dans le projet de loi de finances rectificative français du mois de décembre 2009, il y a pas mal d'actions, et même assez contraignantes. Évidemment, il faut veiller à ce qu'elles ne soient pas un handicap pour notre économie et nos entreprises. Nous faisons donc la différence entre divers types de revenus et entre divers types d'activités commerciales.
Philippe Vigier, Charles de Courson, vous avez parlé de l'augmentation du risque de taux. Pour la France, ce pourrait être le risque de l'après-crise, mais c'est également vrai pour les autres pays. Je rappelle que le taux d'endettement français reste inférieur à la moyenne constatée dans l'Union européenne, qui se situe à 84 %, et qu'il est très inférieur à la moyenne des pays de l'OCDE. Les Français ne le savent pas : j'ai beau le répéter, cela ne passe pas ! Je l'avoue. (Sourires.)
Évidemment, je dis cela sans vouloir exonérer, en quoi que ce soit, le Gouvernement d'une quelconque action en la matière : notre endettement est évidemment trop élevé. Il reste que tous nos partenaires sont confrontés aux mêmes difficultés.
Je remarque toutefois que la France a financé son déficit budgétaire à hauteur de 50 % à court terme, alors qu'en Allemagne ce financement s'élève à 70 %. Cette dernière est donc plus exposée que nous puisque les financements à court terme sont très fortement dépendants de l'augmentation des taux.
Par ailleurs, j'ai été sensible à vos propos sur la dépense et sur la nécessité de définir des règles. Je sais que le Nouveau Centre y est particulièrement attaché et je le suis également. S'agissant de la maîtrise des dépenses, je proposerai au Gouvernement d'aller plus loin : nous le pouvons et nous le devons, sans tuer la reprise. Il nous faut avoir une vision plus forte du pilotage de la dépense publique. Quant à la définition de règles, j'ai un peu évolué sur ce sujet, en raison de la crise. Il me semble en effet qu'adopter des règles et les partager, c'est envoyer un signal, comme on dit aujourd'hui. Encore faut-il faut se mettre d'accord pour les appliquer de manière définitive.
Monsieur Garrigue, je ne reviendrai pas sur la question de l'OCDE. Je crois qu'une fois l'action lancée, elle porte sa propre crédibilité. En tout cas, si l'on ne fait rien, il est certain que l'on n'obtiendra pas de résultats. Quand la France avance au plan international, met en place des dispositifs internes, parfois avant beaucoup d'autres pays, cela a valeur d'exemple, même si celui-ci n'est pas toujours suivi.
J'ai été intéressé par l'intervention de Jérôme Chartier qui, en évoquant l'économie internationale et en nous faisant voyager dans différents pays, nous a montré l'ampleur de la crise. Au fond, on constate que la crise internationale, l'endettement des pays, se traduit par des décisions concrètes. Ainsi, le collectif budgétaire 2009 n'est pas un collectif hors-sol ; il a pour vocation d'apporter des réponses à la crise.
Monsieur Bartolone, une charte de bonne conduite est en cours de signature. Elle n'est peut-être pas le meilleur outil, mais elle fut difficile à élaborer. M. Gissler, qui est inspecteur général des finances, a été nommé il y a peu pour jouer le rôle de médiateur entre les collectivités locales et les organismes de prêt. Je comprends votre préoccupation. Toutefois, comme vous l'avez vous-même indiqué, toutes les collectivités locales n'ont pas eu recours à ces prêts structurés. Certaines s'y sont précipitées, pour des raisons qui leur appartiennent, et j'ignore si l'État a une responsabilité dans cette situation. Probablement n'a-t-il pas su conseiller suffisamment ces collectivités au moment où elles ont souscrit ces prêts. En tout état de cause, il faut essayer de trouver des solutions et je comprends vos difficultés.
Je remercie M. Perruchot pour ce qu'il a dit de l'action du Gouvernement dans la lutte contre les paradis fiscaux ; j'y ai été sensible.
Enfin, monsieur Vergnier, je ne doute pas de votre sincérité et je me garderai bien de contester vos propos sur un sujet que vous connaissez bien et que vous évoquez souvent. Il faudrait que nous parvenions à mener, en dehors des prétoires et de la presse, un travail plus serein sur les relations économiques et financières entre l'État et les collectivités. Peut-être serai-je, du reste, amené à faire quelques propositions en la matière, car il ne sort pas grand-chose de ce débat lancinant, fatigant pour l'État comme pour les collectivités. Pour agir, il faut d'abord se comprendre. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
J'appelle maintenant, dans le texte du Gouvernement, les articles de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2009.
Sur l'article 1er, je suis saisi d'un amendement n° 341 .
La parole est à M. le ministre du budget.
Cet amendement a pour objet d'ajuster la part du produit de la TIPP versée aux départements au titre de la compensation financière des transferts de compétences. Ces ajustements, à hauteur de 7,5 millions d'euros, prendront effet à compter de 2009 et sont fondés sur des données qui n'étaient pas disponibles lors du dépôt du PLFR à l'Assemblée nationale. Il s'agit essentiellement de prendre en compte une correction au titre de la compensation des postes de personnels TOS de l'éducation nationale constatés vacants.
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission.
Avis favorable. Toutefois, je souligne que cet amendement n'est pas exhaustif. Notre collègue Thierry Carcenac, qui préside la commission consultative d'évaluation des charges, défendra dans quelques instants un amendement dont je souhaite qu'il complète celui du Gouvernement.
(L'amendement n° 341 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 60 rectifié de M. Carrez.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
(L'amendement n° 60 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 265 rectifié .
La parole est à M. Thierry Carcenac.
Cet amendement vient compléter l'amendement n° 341 du Gouvernement, puisqu'il permet, non pas de corriger des erreurs avantageant les collectivités, comme nous venons de le voir, mais de prendre en compte des dépenses effectuées par les départements qui doivent être compensées. Il s'agit d'un solde de compensation au titre, d'une part, des postes dits « vacants intermédiaires » qui ont été constatés entre le 31 décembre 2003 et le 31 décembre 2008, pour 10 531 163 euros et, d'autre part, des emplois dits « disparus » entre le 31 décembre 2002 et le 31 décembre 2004, pour 2 616 149 euros.
Au sein de la commission consultative d'évaluation des charges, beaucoup de débats portent sur les dépenses, notamment celles qui doivent être compensées. Le Gouvernement reconnaît, par l'intermédiaire des directeurs du ministère de la santé et des sports, cette dette au titre des années 2004, 2005 et 2006. Toutefois, il nous propose d'en échelonner partiellement le remboursement sur les années 2010 et 2011, le solde devant être versé ultérieurement. Nous souhaitons que ce remboursement soit immédiat, en créant une colonne supplémentaire, afin de parvenir à une répartition département par département.
Favorable. Je rappelle que M. Carcenac défend cet amendement en tant que président de la commission consultative d'évaluation des charges. En l'espèce, la dette de l'État est reconnue et validée ; il s'agit ici uniquement des modalités de son remboursement. Or, compte tenu du montant de cette dette : 10 millions d'euros, il paraît préférable d'intégrer son remboursement dans le transfert complémentaire de TIPP auquel nous procédons dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, plutôt que de l'échelonner dans le temps.
Il s'agit d'un sujet complexe,…
…que nous abordons à une heure tardive. (Rires.) Il faut distinguer entre les emplois dits « disparus » et les emplois dits « intermédiaires »…
Oui, mais ce qui est beaucoup plus compliqué, c'est de vous dire « d'accord ! » : cela demande un long cheminement. (Sourires.) Mais, puisque personne ne souhaite entendre mon argumentation, je serai bref : le Gouvernement est favorable à cet amendement.
(L'amendement n° 265 rectifié , modifié par la suppression du gage, est adopté.)
(L'article 1er, amendé, est adopté.)
Sur l'article 2, je suis saisi d'un amendement n° 337 .
La parole est à M. le ministre.
Il s'agit également d'un amendement classique visant à ajuster une compensation financière, mais cette fois au profit des régions.
(L'amendement n° 337 , accepté par la commission, est adopté.)
Autre amendement de compensation.
(L'amendement n° 338 , accepté par la commission, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 264 rectifié .
La parole est à M. Thierry Carcenac.
Ce second amendement vise également à obtenir le remboursement d'une dette de l'État, mais aux régions, cette fois.
(L'amendement n° 264 rectifié , accepté par la commission et le Gouvernement, modifié par la suppression du gage, est adopté.)
(L'article 2, amendé, est adopté.)
Il s'agit de réduire de 55 à 35 millions le prélèvement effectué sur le produit des amendes de police au bénéfice du Fonds interministériel de prévention de la délinquance, le FIPD.
Tout d'abord, il faut savoir que les amendes de police sont une recette des collectivités locales.
Cette recette est répartie chaque année par le Comité des finances locales. Pour les communes de plus de 10 000 habitants, elle est répartie en fonction du nombre d'amendes constatées, et pas forcément recouvrées ; pour les communes de moins de 10 000 habitants, elle est répartie par les départements. Cette répartition se fait sur la base d'une valeur unitaire de l'amende, obtenue en divisant le produit – généralement entre 500 et 600 millions d'euros – par le nombre d'amendes.
En 2007, le Gouvernement nous a proposé, pour la première fois, un prélèvement de 35 millions d'euros destiné à abonder le FIPD, en indiquant, à juste titre, que les actions menées à l'initiative de l'État le sont au niveau local et servent à améliorer la sécurité dans les collectivités territoriales. Le Gouvernement avait précisé alors – beaucoup s'en souviennent – que ce prélèvement devait être unique.
Il a été reconduit en 2008 et en 2009 et, puisque nous faisons toujours preuve d'une grande mansuétude, nous l'avons accepté. En 2010, nous le retrouvons à nouveau, mais à hauteur de 55 millions. Or, en faisant des calculs en prévision de la réunion du Comité des finances locales qui se tiendra début février, je me suis aperçu qu'un tel montant entraînerait une très forte chute de la valeur unitaire, qui passerait d'environ 20 euros à un montant compris entre 15 et 17 euros. Il serait donc beaucoup plus raisonnable de s'en tenir à un prélèvement de 35 millions d'euros. J'ajoute que le Gouvernement pourra utiliser des reliquats du FUP.
Monsieur le ministre, sachez que cet amendement a été déposé dans un esprit coopératif et dans le souci de sauvegarder ce prélèvement, même s'il ne doit pas être pérennisé.
La parole est à M. Jean-Claude Sandrier, pour soutenir l'amendement n° 174 , qui est moins révolutionnaire que celui du rapporteur général. (Sourires.)
Absolument !
Cet amendement vise, d'une part, à restreindre le montant de l'affectation supplémentaire au Fonds interministériel pour la prévention de la délinquance à 5 millions d'euros au lieu des 20 millions prévus par le projet initial. Nous sommes en effet plus que réservés sur l'opportunité d'affecter 20 millions d'euros aux communes désireuses de procéder à l'installation de dispositifs de vidéosurveillance sur leur territoire. Nous jugeons plus utile que l'abondement de 5 millions d'euros serve au financement d'activités autrement plus utiles, telles que la lutte contre le décrochage scolaire des jeunes les plus exposés au risque de délinquance, les actions de prévention de la délinquance auprès des mineurs, de prévention de la récidive ou de prévention des violences intrafamiliales et des violences faites aux femmes.
D'autre part, nous proposons d'affecter 15 millions d'euros supplémentaires au Fonds de solidarité en faveur des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des catastrophes naturelles, fonds institué par la loi du 24 décembre 2007, qui doit contribuer à la réparation des dégâts causés aux biens non assurables des collectivités territoriales par un événement climatique ou géologique grave.
La commission est défavorable au montant de 40 millions d'euros et a préféré se rallier au montant de 35 millions d'euros, par conservatisme, si je puis dire.
J'imagine que M. Sandrier accepterait ce compromis.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Paradoxalement, je suis défavorable à l'amendement de M. Carrez, alors que j'étais favorable à ceux de M. Carcenac. En ce qui concerne le FIPD, la commission propose de réduire le prélèvement de 20 millions d'euros, en l'abaissant de 55 à 35 millions d'euros. L'objectif poursuivi par l'article 3 est de renforcer le financement de la vidéo-protection : nous parlons donc bien de sommes destinées aux collectivités locales dans le cadre de la prévention de la délinquance.
Il s'agit bien d'accompagner financièrement les communes qui souhaitent s'équiper en dispositifs de vidéo-protection.
Mais oui, c'est tout à fait cela, on leur rend l'argent ! Je vous remercie de m'aider à exprimer ma pensée, monsieur Migaud !
Le prélèvement supplémentaire auquel il est procédé doit permettre de mieux financer un certain nombre de projets prioritaires. C'est pourquoi le Gouvernement n'est pas favorable aux amendements défendus par M. le rapporteur général et par M. Sandrier.
Monsieur le ministre, vous savez qu'en ce qui concerne certains amendements, l'habitude a été prise, à la commission des finances, de suivre le rapporteur général à l'unanimité, dans un esprit participatif témoignant de notre bonne volonté. Si, de son côté, le Gouvernement se met à désavouer le rapporteur général, cela devient assez désagréable.
Par ailleurs, même si je ne suis pas là pour défendre M. Carrez – il dispose de suffisamment de soutiens au sein de cette assemblée pour ne pas avoir besoin de moi –, l'argument selon lequel vous allez prendre l'argent pour le rendre ne me paraît pas recevable. Pour faire des économies, il serait plus logique de laisser cet argent aux collectivités locales afin d'éviter des transferts successifs et des frais inutiles.
Votre raisonnement est plutôt bizarre, convenez-en, monsieur le ministre !
Ce n'est pas un raisonnement bizarre, c'est de l'argent affecté !
Mes chers collègues, pourquoi avons-nous la même discussion chaque année ? Tout simplement parce que nous n'avons pas appliqué une règle très simple, celle de l'affectation directe des amendes aux collectivités locales où l'infraction a été constatée – ce qui nous amène à procéder sans arrêt à des prélèvements de toute nature.
Il me semble qu'il faut soutenir la position de notre rapporteur général. Si j'étais provocateur, j'irais jusqu'à dire que le FIPD doit être financé sur le budget général. Arrêtons d'effectuer des prélèvements suivis de réaffectations, tout cela devient tellement compliqué que l'on n'y comprend plus rien ! Votons l'amendement Carrez, et n'en parlons plus – au moins provisoirement !
Les explications qui nous ont été données par M. le rapporteur général ont le mérite de la clarté et de la franchise. À mon sens, monsieur le ministre, elles auraient dû figurer dans le document exposant les évaluations préalables des articles de loi, préparé par vos services. En ce qui concerne la disposition envisagée, ledit document indique que la disposition proposée n'a pas d'incidence de nature micro- ou macro-économique, ni d'incidence financière sur les personnes physiques ou morales. C'est à croire que les collectivités locales n'existent pas, et dans ces conditions, il n'est pas étonnant que le Gouvernement donne un avis défavorable.
Par ailleurs, il est permis de s'interroger, comme l'a fait M. Sandrier, sur l'utilité de l'affectation à un fonds pour la vidéo-surveillance. À n'en pas douter, si les collectivités locales avaient l'entière disposition des fonds constituant le produit des amendes de police, elles sauraient les employer ! L'amendement proposé par M. Carrez est un moindre mal, mais les dispositions de l'article 3, tel qu'il figure dans la loi de finances rectificative, ont un impact dommageable pour les collectivités locales.
La question de la répartition des amendes de police est, comme l'a dit le rapporteur général, un vieux débat. L'État n'a pu résister, ces dernières années, à la tentation de prélever une partie du produit des amendes pour des usages auxquels il n'était normalement pas destiné – d'autant que ce produit s'est fortement accru. Cette pratique a régulièrement donné lieu à des négociations dans le cadre de l'équilibre des dotations aux collectivités territoriales et lors de l'examen de la loi de finances initiale.
Alors qu'un prélèvement a déjà été décidé en loi de finances initiale et que le rendement de la ressource est en diminution, il est proposé de procéder à un prélèvement supplémentaire. Il me semble pourtant que les actions financées par les fonds départementaux de répartition des amendes de police ont autant de légitimité que celles auxquelles l'État dit vouloir procéder. (« Bien sûr ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Ainsi, c'est avec cet argent que seront réalisés certains équipements – notamment des abris et des aménagements de voierie – le long des itinéraires de transport scolaire dans les zones rurales, afin d'assurer la sécurité des enfants. Cette destination me paraît tout aussi noble que le renforcement de la sécurité des personnes dans certaines communes urbaines.
La proposition du rapporteur général consiste à stabiliser le prélèvement au niveau de l'an dernier, mais j'insiste sur le fait que la légitimité des 55 millions d'euros affectés par l'État au FIPD reste à démontrer, qu'il s'agisse des 35 millions déjà prélevés au titre de 2008 ou des 20 millions supplémentaires qu'il nous est maintenant demandé d'accepter.
La proposition du rapporteur général est parfaitement honnête…
…et, s'il ne tenait qu'à moi, nous aurions supprimé l'intégralité du prélèvement de 55 millions d'euros !
Je veux simplement apporter deux précisions. Premièrement, lorsqu'on observe l'utilisation qui a été faite des 35 millions d'euros prélevés en 2007 et en 2008, on constate qu'environ un tiers de cette somme n'est pas allé aux collectivités locales.
Ainsi, 37 % ont été affectés aux actions de vidéo-protection et 35 % à des actions de sécurité des collectivités locales. Les quelque 30 % restants sont allés à des associations, sans que l'on puisse connaître la destination exacte de ces fonds.
Deuxièmement, du fait de leur caractère forfaitaire, les amendes provenant des radars automatiques auraient dû revenir aux collectivités locales. Nous avons eu une attitude très responsable vis-à-vis du Gouvernement en acceptant que le retour aux collectivités locales soit très limité. Je rappelle en effet que ce retour est de 100 millions d'euros pour les communes et de 30 millions d'euros pour les départements, tout le reste – soit plus de 300 millions d'euros – étant réparti entre le compte d'affectation spéciale et l'AFITF. Sur la question des amendes forfaitaires, je vous assure, monsieur le ministre, que les collectivités territoriales ont été on ne peut plus coopératives avec l'État.
Il me semble qu'il serait contreproductif de rompre l'équilibre actuel. À vouloir trop exiger, c'est l'ensemble de cet équilibre qui risquerait d'être remis en cause.
(L'amendement n° 10 est adopté.)
En conséquence, l'amendement n° 174 tombe.
(L'article 3, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 11 .
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement de coordination vise à prendre en compte, à l'article d'équilibre, la mesure que l'Assemblée vient d'adopter pour ramener à 35 millions d'euros le prélèvement affecté au FIPD.
Je suis saisi d'un amendement n° 374 , déposé par le Gouvernement et qui vient en discussion commune. En attendant que cet amendement soit distribué, je vous invite à le présenter, monsieur le ministre.
L'amendement n° 374 a pour objet de tirer les conséquences, sur l'article d'équilibre et l'état A annexé, des amendements adoptés par votre assemblée en première partie du projet de loi de finances rectificative. Trois mouvements sont pris en compte.
Premièrement, l'ajustement des montants de TIPP versés aux départements et aux régions au titre de la décentralisation.
Deuxièmement, l'ajustement des prélèvements sur les recettes de l'État au profit des collectivités locales : il s'agit de tirer les conséquences , à hauteur de 44 millions d'euros, du moindre encaissement constaté sur les amendes forfaitaires de police de la circulation.
Troisièmement, conformément à l'amendement déposé par le rapporteur général, la diminution de 55 à 35 millions d'euros du prélèvement sur le produit des amendes forfaitaires de police au profit du FIPD.
À ce stade de la discussion, les amendements déposés par le Gouvernement sur la seconde partie du projet de loi de finances rectificative sont neutres sur le solde du budget. À l'issue de la première partie, le solde budgétaire s'améliore ainsi de 90 millions d'euros pour s'établir à 140,9 milliards d'euros. Le tableau de financement est ajusté en conséquence par une diminution des émissions de titres à court terme.
Je précise que l'article d'équilibre tire également les conséquences de la ratification du troisième décret d'avance de l'année 2009, qui a ouvert 65 millions d'euros sur un compte de concours financiers, afin de financer une avance au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». Cette ouverture est gagée par une annulation du même montant sur le budget général. Il en résulte une amélioration du solde du budget général de 65 millions d'euros et une détérioration équivalente du solde des comptes spéciaux ; l'effet est donc neutre sur le solde général.
Mes chers collègues, bien que l'amendement du Gouvernement ne vous ait pas encore été distribué, je vous propose de procéder dès maintenant au vote sur cette mesure classique de récapitulation, étant donné l'avis favorable du rapporteur général.
Ce n'est pas normal !
(L'amendement n° 374 est adopté.)
(L'article 7 et l'état A, ainsi amendés, sont adoptés.)
Je mets aux voix l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2009.
(L'ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2009 est adopté.)
Défavorable.
(L'amendement n° 42 n'est pas adopté.)
Il s'agit d'indemniser à hauteur de 50 millions d'euros les compagnies pétrolières intervenant dans les départements français d'outre-mer. Dans ces territoires, les prix des carburants sont administrés et les préfets ont été amenés à les bloquer en raison de difficultés sociales. Ils sont inférieurs à ceux qui devraient être payés aux compagnies pétrolières. Il en résulte un préjudice pour ces compagnies qui interviennent localement : cela fait l'objet de négociations.
Contrairement à l'imputation initialement retenue pour l'ouverture de ces crédits, il apparaît que les transactions avec ces compagnies sont conclues avec le ministère en charge de l'industrie, qui procédera au paiement des indemnisations. Je rappelle d'ailleurs – la question avait été posée par Jérôme Cahuzac – que les premiers crédits, d'une quarantaine de millions d'euros, ont été ouverts dans un décret d'avance. Nous ouvrons à présent les 50 millions d'euros supplémentaires qui sont nécessaires pour compléter l'indemnisation.
Cet amendement prévoit une simple réaffectation entre deux missions : on passe du programme « Conditions de vie outre-mer » de la mission « Outre-mer » au programme « Développement des entreprises et de l'emploi » de la mission « Économie ». Mais il nous donne l'occasion de revenir sur un point important. Les compagnies pétrolières, auxquelles il a été demandé de baisser les prix des carburants, en particulier aux Antilles, ont bénéficié, par un décret d'avance de juillet dernier, d'un accord de principe pour une compensation de 44 millions d'euros. Nous y ajoutons 50 millions d'euros dans ce collectif.
La question, déjà soulevée lors de l'examen de la première partie de la loi de finances pour 2010, est celle de l'échéancier des versements. Où en est-on ? Au mois d'octobre, vous nous aviez répondu, monsieur le ministre, que les 44 millions n'étaient pas encore versés et qu'un accord n'avait toujours pas été trouvé avec la SARA – la Société anonyme de raffinerie des Antilles – et les autres compagnies pouvant être concernées. Pouvons-nous avoir des précisions sur l'état des négociations entre ces compagnies pétrolières et le Gouvernement ?
C'est l'indemnisation qui me choque. On nous a expliqué que la SARA était en situation de monopole. Je reposerai ici la question que nous avons été plusieurs à soulever : pourquoi importe-t-on de France, via la SARA, les produits pétroliers qui alimentent les Antilles françaises, alors que le Venezuela est tout proche ?
On nous a répondu qu'il fallait appliquer aux Antilles les normes européennes. Mais Bruxelles n'est pas seulement peuplée de gens dépourvus de bon sens : ne peut-on pas demander une dérogation ? Pourquoi le gouvernement français ne négocie-t-il pas en ce sens ? Cela ferait baisser les prix et mettrait un terme à cette situation.
Par ailleurs, comment l'indemnisation de la SARA est-elle calculée ? D'après ce qu'on en sait, cette société fait des bénéfices considérables.
Ses dirigeants pourraient du reste être assez astucieux – ce n'est pas très difficile – pour dissimuler ces bénéfices au moyen des prix de transfert puisqu'on ne peut pas maîtriser le prix du fret. Mais il semble que tel ne soit pas le cas. Cela signifie-t-il qu'on indemnise sur la base d'une marge standard sur les carburants ? Comment justifier, au regard des impôts des Français, ce dispositif qui consiste à consolider des rentes par voie fiscale ? La solution est libérale : il faut ouvrir le marché, prévoir des caractéristiques de carburant vénézuélien ou américain et importer ce carburant au plus près. Cela entraînerait un effondrement des prix. Va-t-on continuer à payer pendant des années 50 ou 100 millions parce qu'on est victime d'un monopole ?
Monsieur le ministre, comme je sais que vous êtes un homme rigoureux, je ne doute pas que vous allez essayer de trouver des solutions pour mettre fin à cette totale anomalie.
Cet amendement pourrait laisser penser que les compagnies pétrolières sont en difficulté. Nous savons bien pourtant que c'est tout le contraire. Doit-on voir là un nouveau cadeau pour les amis ? Je suis d'autant plus enclin à penser ainsi lorsque j'entends la demande d'explication quelque peu embarrassée de notre rapporteur général, éminent spécialiste. Il ne souhaite manifestement pas gêner un ministre de son camp.
M. de Courson, membre de la majorité,…
…et dont on connaît également les compétences financières, s'est dit, lui, sans ambages, choqué par cet amendement. Nous sommes nombreux à considérer que le dispositif proposé par le ministre est incohérent et indigne de quelqu'un qui prétend s'y connaître en finances même si l'ampleur des déficits peut laisser perplexe.
J'espère que nous allons en revenir à plus de cohérence ou en tout cas à une meilleure gestion financière. Si le Gouvernement avait la sagesse de retirer son amendement, nous éviterions des erreurs, des injustices, voire des abus.
Nous venons d'assister à une tentative du Gouvernement, heureusement contrariée par l'Assemblée, dont j'ose espérer que le vote sera respecté jusqu'au bout, ce qui n'est pas certain, visant à prendre quelques dizaines de millions d'euros aux collectivités locales pour les affecter au FIPD.
Voilà qu'à présent, il nous propose un amendement tendant à indemniser la SARA, parce qu'il faut bien appeler un chat un chat. Comment peut-on faire une telle suggestion quand on connaît la situation aux Antilles, et les marges pratiquées par cette société depuis de très nombreuses années ?
Monsieur le ministre, je n'ai pas envie de hausser le ton. Sachez simplement que, si cet amendement est adopté, nous n'en resterons pas là. Nous demanderons une mission d'information, voire davantage, pour examiner comment sont constituées les marges de cette société, et les raisons pour lesquelles s'appliquent aux Antilles les normes européennes et non américaines ou sud-américaines, etc. Je le dis très sereinement, vous ferez peut-être voter cet amendement ce soir, mais le groupe socialiste ne s'en tiendra pas là ; on entendra reparler de cette affaire. Si j'appartenais à la SARA, je vous téléphonerais pour vous demander de le retirer car je comprendrais qu'à l'arrivée, cela me coûterait beaucoup plus cher.
Ce n'est pas la première fois que nous évoquons le prix des carburants outre-mer. Le débat a déjà eu lieu sur les normes. On nous avait expliqué à l'époque que ces normes européennes appliquées aux Antilles avaient vocation à disparaître. Or tel n'est toujours pas le cas. Où en sommes-nous ?
Je me souviens que nous avions voté des majorations d'impôt pour les sociétés du groupe Total compte tenu de bénéfices liés à des opérations spéculatives au moment de hausses très fortes des prix du pétrole puis de diminutions non automatiquement répercutées.
En l'occurrence, nous avons affaire à une société en situation de monopole, qui tire une grande partie de ses résultats de ce monopole. Je partage le sentiment de Charles de Courson et de nombreux collègues qui ne comprennent pas qu'on ait versé une indemnisation pour prendre en compte un abaissement tarifaire qui semble parfaitement justifié au regard des marges dégagées par la SARA. Pourquoi le marché n'est-il toujours pas ouvert ?
Ce débat est très intéressant. Rappelons tout d'abord que, s'il y a un monopole pour la distribution, il n'y en a pas pour la vente aux particuliers puisqu'il existe plusieurs marques.
L'affaire est d'autant plus complexe qu'en Guyane, par exemple, les frontaliers sont approvisionnés de manière tout à fait illégale par le Surinam et le Brésil, où les prix sont nettement inférieurs.
Le problème vient du fait qu'il n'y a pas de raffinerie.
Si, car s'il y en avait une, il serait possible de s'approvisionner au Venezuela. Malheureusement, la taille critique nécessaire pour installer une raffinerie n'est pas atteinte. Le problème sera réglé le jour où on prendra malgré tout la décision d'en construire une car on n'aura plus besoin alors, pour des questions de normes, de transférer le carburant depuis la métropole jusqu'en Guyane, Martinique et Guadeloupe.
Il n'y a pas lieu de revenir sur la question de l'indemnisation, qui, comme l'a rappelé Éric Woerth, a été âprement négociée. En revanche, il faut régler celle, très importante, de la distribution. Pour mettre fin à la situation de monopole de la SARA dans les départements d'outre-mer, il faut à mon avis financer la construction d'une raffinerie sur place.
N'étant pas chargé de la négociation, je ne pourrai vous retracer l'histoire de la SARA au travers des âges.
En tout cas, nous ne pouvons pas retirer cet amendement puisque l'État doit de l'argent. Ce sont les délices de l'économie administrée !
Je vous en prie ! N'en rajoutez pas !
Pour répondre au rapporteur général, j'indique qu'il y a, d'une part, les 44 millions d'euros, qui sont en train d'être payés : si ce n'est pas déjà fait, le paiement interviendra dans les jours qui viennent. En effet, à chaque fois une négociation a lieu sur le prix, puisqu'il existe en réalité une différence entre le prix normal de vente et le prix réellement pratiqué, établi après négociation, qui figure dans les différentes conventions.
D'autre part, il y a les 50 millions, qui sont une provision sur le solde 2009, la négociation étant en cours avec la société. Pour 2010, nous n'avons rien prévu en ce qui la concerne dans le budget : nous verrons comment les choses se passent. Je crois d'ailleurs savoir que la situation évolue ; grâce à une mission d'inspection, nous essayons d'éclaircir tout cela.
Je le répète donc : cet argent est une provision sur ce qui devra probablement être payé en 2009 pour solder les comptes de cette année.
La parole est à M. Didier Migaud, président de la commission des finances.
Vous ne pouvez pas, monsieur le ministre, nous faire la même réponse à chaque fois ! Il est inconcevable de considérer que l'on doit indemniser une compagnie pétrolière, alors même que l'on connaît les bénéfices de cette catégorie de sociétés !
Il y a donc une vraie difficulté. Vous proposez de réparer et d'indemniser, mais par rapport à quoi ? À une marge qui aurait été moins importante que prévu ?
Peut-être pourriez-vous retirer cet amendement, monsieur le ministre, sous réserve d'inventaire. Il faut conduire une discussion plus approfondie et mener la négociation. D'ailleurs, puisqu'il s'agit d'une provision, il n'est sans doute pas utile de l'inscrire. Au contraire, cela risque de vous affaiblir dans le cadre de la négociation : si vous mettez en provision 50 millions d'euros, il est évident que, quand vous irez négocier, les représentants de la société auront beau jeu de vous dire que vous avez déjà prévu la somme !
Je pense donc qu'il serait plus sage d'attendre. Nous avons un collectif en janvier prochain. Négociez d'ici là et nous verrons bien, ensuite, s'il est utile d'inscrire quelque chose. Honnêtement, s'il doit y avoir une négociation, n'inscrivons surtout pas de provision : ce serait donner à la société le sentiment qu'elle peut obtenir tout ce qu'elle souhaite.
Notre collègue Michel Bouvard a posé les bonnes questions. Je confirme d'ailleurs ses propos : on nous avait annoncé, s'agissant des normes, un délai de deux ans.
Nous devions donc, dans deux ans, obtenir la dérogation. Ensuite, nous étions censés pouvoir procéder à l'approvisionnement à partir du Venezuela ou encore de Trinidad-et-Tobago – bref, de pays tout proches –, ce qui aurait pour résultat un effondrement des prix. Par conséquent, monsieur le ministre, la sagesse ne consisterait-elle pas à tenir bon, à montrer que l'Assemblée nationale n'est pas contente et qu'il faut arrêter de gaspiller les fonds publics ?
Nous ne devons pas nous méprendre. Je n'ai pas le sentiment que, parce qu'une provision est inscrite, cela va empêcher Éric Woerth de veiller à dépenser le moins d'argent public possible.
Ce serait lui faire un très mauvais procès.
En revanche, après réflexion, je suis prêt à souscrire à la proposition de M. Emmanuelli de constituer une mission d'information. Je trouverais très intéressant que nous allions étudier la formation des prix de la SARA. Ainsi, nous pourrions en faire état lors des débats en loi de finances.
Je précise que l'amendement en question n'a pas pour vocation d'ouvrir des crédits supplémentaires : les 50 millions figurent déjà dans le PLFR. Il s'agit simplement de les transférer de la mission « Outre-mer » à la mission « Économie ». C'est une simple réaffectation.
Sur le fond, la discussion reste ouverte. Il y a eu notamment la mission commune d'information, présidée par Patrick Ollier et dont votre collègue Jérôme Cahuzac était le rapporteur. Je n'entrerai pas dans ce débat. Il s'agit simplement d'intégrer dans le PLFR les sommes qui sont dues. L'évaluation de l'opportunité de cette dépense est une autre affaire, dont vous pourrez continuer à discuter en commission des finances, notamment pour l'année 2010. Il est vrai, en effet, que le système en vigueur est ancien.
Mais ici, je le répète, vous devez seulement voter, à travers deux amendements – le second viendra plus loin –, sur un transfert de crédits d'une mission vers une autre.
(L'amendement n° 364 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement, n° 367 , présenté par le Gouvernement.
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement vise à majorer de 10,4 millions d'euros l'annulation de crédits sur le programme « Charge de la dette et trésorerie de l'État », au regard notamment de la baisse des taux d'intérêt à court terme, qui réduit le coût de la dette.
Cet amendement vise à ouvrir des crédits supplémentaires, à hauteur de 7,4 millions d'euros, pour apurer les reports de charges sur l'enseignement technique agricole.
(L'amendement n° 354 , accepté par la commission, est adopté.)
Monsieur le président, ma présentation vaudra également pour l'amendement n° 360 . Il s'agit de la cité judiciaire de Paris, dans le cadre de l'opération d'acquisition du terrain des Batignolles, où doit être implanté le nouveau palais de justice de Paris, de même que la direction régionale de la police judiciaire.
Cette implantation a été annoncée par le Président de la République le 29 avril. Un protocole a été conclu le 20 novembre entre l'État et la ville de Paris. Le collectif ouvre des crédits sur les missions « Justice » et « Sécurité », pour un montant total de 83,6 millions d'euros, afin de financer les études et l'acquisition du terrain.
L'amendement vise à corriger le montant des autorisations d'engagement nécessaires à la couverture de l'intégralité de l'engagement juridique sur cette opération.
Favorable, et j'observe qu'il ne s'agit, en effet, que d'une ouverture d'autorisations d'engagement, non de crédits de paiement.
(L'amendement n° 359 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 332 .
La parole est à M. Patrice Martin-Lalande.
Comme on le sait, il existe pour France Télévisions un contrat d'objectifs et de moyens qui prévoit notamment le niveau des dépenses et des recettes. Je rappelle que la redevance, devenue contribution à l'audiovisuel public, ainsi que la compensation des dégrèvements et celle de la perte de recettes publicitaires – 450 millions d'euros pour cette année –, plus les recettes publicitaires qui restent à France Télévisions, équilibraient son budget, comme le prévoit le contrat d'objectifs et de moyens.
Un élément nouveau – et, par certains côtés, positif – est intervenu : le surcroît de recettes publicitaires par rapport aux prévisions, qui est pour l'instant estimé à une bonne centaine de millions. On aurait pu considérer que la meilleure décision était de réduire d'autant la compensation pour la perte des recettes publicitaires, en la faisant donc passer de 450 à 350 millions d'euros. Le Gouvernement a fait un choix un peu différent, puisqu'il a laissé à France Télévisions l'essentiel de la centaine de millions de ressources supplémentaires, ne prélevant que 35 millions. La compensation est donc tombée à 415 millions.
France Télévisions a pris l'engagement d'affecter ces ressources complémentaires à son désendettement. Pour cette année, cette solution peut être jugée satisfaisante. Cet amendement d'appel, monsieur le ministre, vise à demander que le Gouvernement, sous forme d'un avenant au contrat d'objectifs et de moyens en vigueur ou bien en l'inscrivant dans le prochain contrat, prenne avec France Télévisions l'engagement d'affecter tout excédent de recettes publicitaires au désendettement du groupe et non à la gestion courante. Ce serait aussi une bonne manière d'éviter les foudres de la Commission européenne, qui est très vigilante quant à l'utilisation des subventions publiques : elles doivent servir uniquement pour les spécificités du service public, pas pour autre chose !
Je suis défavorable à cet amendement d'appel, tout en comprenant l'intention, tout à fait louable, de son auteur !
Il s'agit, comme l'ont précisé aussi bien M. Martin-Lalande que M. le rapporteur général, d'un amendement d'appel. Il vise à nous faire réfléchir au cadre contractuel existant entre l'État et France Télévisions.
Le plan d'affaires 2009-2012 repose notamment sur une plus forte maîtrise des charges, sujet vraiment très important au sein du groupe France Télévisions. La modernisation de celui-ci doit, par ailleurs, s'accompagner d'une rénovation de la mesure de la performance. Là aussi, les choses sont en cours, nul ne peut le nier, et je souhaite que le groupe se dote rapidement des outils de pilotage.
France Télévisions doit donc continuer à faire des efforts, ce qui est intégré au contrat de performances. Ces efforts doivent porter sur les effectifs, la masse salariale, la politique de rémunération, l'achat et la gestion des stocks de programmes et la maîtrise des frais généraux : autant de sujets qui pourront faire varier la dotation dans le sens que vous souhaitez.
Je rappelle d'ailleurs, comme vous l'avez dit, que le montant de la dotation a été diminué, puisque les recettes publicitaires ont été plus importantes que prévu. Nous sommes donc passés de 450 à 415 millions d'euros pour tenir compte de la modification de la gestion du groupe France Télévisions, qui a été plutôt performant en cette période difficile. Je prends donc cet amendement d'appel pour ce qu'il est.
À terme, oui ! (Sourires.) Toutefois, je voudrais d'abord redire à M. le ministre, en ce qui concerne les 70 ou 75 millions d'euros de recettes publicitaires supplémentaires laissés à France Télévisions, qu'il faut inscrire durablement dans les contrats d'objectifs et de moyens le fait que ces excédents ne peuvent être affectés qu'à la résorption de la dette ou à l'équilibre budgétaire, et non à des dépenses courantes.
Cette année, il n'y a pas de problème ; le risque est évité. Mais, pour les années suivantes, ce devrait être une règle inscrite dans les contrats d'objectifs et de moyens. Je ne doute pas que le Gouvernement partage cette opinion. En conséquence, je retire cet amendement d'appel.
Je suis d'accord avec ce qui vient d'être dit. Nous avons eu justement une discussion avec France Télévisions pour réduire le montant de la dotation. Les choses n'ont pas été si simples, car ce n'était pas, au départ, ce que souhaitait le groupe ! Ensuite, nous nous sommes expliqués. Vous avez raison : si les performances vont au-delà de ce qui est prévu, les sommes doivent être consacrées au désendettement.
Prochaine séance, jeudi 10 décembre à neuf heures trente :
Questions orales sans débat.
La séance est levée.
(La séance est levée, le jeudi 10 décembre 2009, à une heure.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma