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Intervention de Michel Bouvard

Réunion du 9 décembre 2009 à 21h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2009 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Bouvard :

Je me réjouis qu'une partie de la dette ait pu être remboursée, parce que la situation est particulièrement dramatique. Cette réduction de 2,3 milliards fera économiser 30 millions d'euros de frais financiers, il faut le rappeler.

Au total, le déficit de l'État, après une succession de révisions à la hausse liées à la crise et aux mesures de relance, atteindra cette année le niveau record de 141 milliards, soit 8,1 % du PIB. Sur ces 141 milliards, 38,9 milliards sont liés au plan de relance et devraient s'effacer progressivement. Le projet de loi de finances pour 2010 en prend déjà partiellement acte avec une réduction de 25 milliards du déficit prévisionnel.

Le solde de 102 milliards se répartit donc entre déficit conjoncturel et déficit structurel, la part de ce dernier se situant autour de 40 à 50 milliards, sur lesquels devront porter tous nos efforts dans les années à venir.

Ces efforts passent bien sûr par différentes mesures, entre autres par une contribution des opérateurs de l'État, au nombre de 489. Leur part dans le budget de l'État, avec 225 000 emplois et 34 milliards de crédits, est importante, mais ils suivent une évolution inverse. Alors que l'État réduit ses effectifs tous les ans, avec le non-remplacement d'un fonctionnaire partant à la retraite sur deux, le nombre d'emplois des soixante-dix opérateurs les plus importants a progressé de 6 %, leurs frais de fonctionnement de 10 %. Si chaque opérateur doit être considéré séparément, des efforts restent possibles, sur lesquels la mission LOLF est revenue à plusieurs reprises. À cet égard, monsieur le ministre, nous vous remercions d'avoir pris en compte les travaux engagés depuis plusieurs années par notre mission et sommes sensibles aux annonces faites à ce sujet le 3 décembre. Nous serons attentifs à leur réalisation.

S'agissant de la régulation budgétaire, nous apprécions la plus grande visibilité qu'a apportée la modification de la LOLF en 2005 à travers les informations délivrées sur les crédits mis en réserve.

Les mesures d'ouverture et d'annulation de crédits sont cependant restées très nombreuses dans les deux collectifs précédents et dans cette dernière version. Par ailleurs, comme chaque année, le collectif procède à la validation des trois décrets d'avance pris au cours de l'exercice, dont un, trop tardif, sera ratifié par amendement gouvernemental et transmis à notre commission.

Force est néanmoins de constater que, malgré les importants efforts réalisés, la LOLF n'a pas encore produit tous les effets escomptés quant à la limitation de la pratique des décrets d'avance : ils restent encore trop souvent un moyen d'ajustement des dotations budgétaires et leur nombre n'a pas diminué malgré deux lois de finances rectificatives en cours d'année.

Je ne reviens pas sur les différents postes correspondant à ces dépenses insuffisamment programmées. Malgré des efforts, nous en arrivons à des considérations répétitives sur les opérations extérieures, l'aide médicale d'État ou les dépenses pour calamités agricoles. Il nous faut impérativement pouvoir faire face à cette situation.

Enfin, le présent collectif comporte plusieurs mesures nouvelles dont je me réjouis particulièrement, car elles contribuent à la modernisation des relations de l'administration fiscale avec les usagers et surtout à la lutte contre l'économie souterraine et les paradis fiscaux, dans le droit fil des engagements pris devant le G20.

Sur ce dernier point, le texte qui nous est proposé constitue une avancée majeure, à la fois dans la définition de ce qu'est un État ou un territoire non coopératif – qui restait jusqu'ici un concept flou – et dans les sanctions applicables aux ressortissants fiscaux français concernés. Disposer à la fois d'une identification des territoires à problèmes et d'une gamme étendue de sanctions devrait permettre à terme, et plus encore si ces idées sont reprises ainsi que celles de la commission des finances, de moraliser certaines places et d'avantager celles qui sont vertueuses et peuvent souffrir d'une concurrence déloyale. L'élimination des détournements du droit en matière de régime « mère-filiale », d'élimination des doubles impositions ou de prix de transfert devrait permettre de mettre fin à un certain nombre d'abus manifestes.

Concernant la lutte contre l'économie souterraine, les mesures proposées mettront fin à une situation aberrante dans laquelle le travail occulte était finalement mieux poursuivi que les revenus du trafic de drogue par exemple. En allongeant les délais de reprise, en permettant la taxation d'office, en s'appuyant sur les produits saisis et le train de vie, l'administration fiscale aura les moyens de frapper au portefeuille, ce qui aura le triple avantage de faire participer la délinquance au budget de l'État, d'en réduire l'attrait, de renforcer la justice fiscale.

Notre commission a proposé la création d'une procédure d'enquête judiciaire fiscale qui, sans aller jusqu'à créer un service judiciaire fiscal, conférera à certains agents de l'administration des pouvoirs de police judiciaire bien encadrés et accélérera les procédures existantes. Je suis très favorable à ces dispositions.

Ce projet de loi de finances rectificative marque donc à la fois l'action volontariste de l'État face à la crise et une volonté maintenue de maîtrise de la situation budgétaire ordinaire, tout en évitant, au nom du respect de dogmes conçus pour temps calmes, d'augmenter la fiscalité, ce qui n'aurait fait que renforcer la crise par affaiblissement de la consommation.

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