La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 (nos 1157,1211).
Cet après-midi, l'Assemblée a rejeté la motion de renvoi en commission.
Je vous informe que le Gouvernement demande la réserve des articles 31 à 75. La réserve est de droit. Par conséquent, la discussion de la quatrième partie du projet de loi commencera par l'examen des articles 76 à 80.
J'appelle maintenant, dans le texte du Gouvernement, les articles du projet de loi.
Nous abordons l'examen de la première partie du projet de loi, concernant les dispositions relatives à l'année 2007.
Sur le fondement de l'article 58, alinéa 1, ce rappel au règlement vise à appeler l'attention de tous sur le nombre très important d'amendements déclarés irrecevables au titre de l'article 40 de la Constitution. Si je peux comprendre que des règles soient nécessaires pour le bon fonctionnement de notre assemblée, avouez que celle-ci, dont on peut dire qu'elle n'est même pas appliquée avec « tact et mesure » (Sourires), entrave plus qu'elle n'encadre le travail législatif ! Les amendements déclarés irrecevables touchent directement à la vie de nos concitoyens, qu'il s'agisse du budget des hôpitaux, des franchises médicales, des aides aux personnes âgées, des pensions de réversion ou de la prise en charge des transports. Tous ces amendements ont été écartés alors qu'ils sont au coeur du sujet. Et s'agissant des accidents du travail et des maladies professionnelles, deux amendements seulement ont survécu à l'article 40.
Vous ne pouvez pas nous reprocher de ne formuler aucune proposition constructive et retoquer toutes celles que contiennent nos amendements. Le Président et le Gouvernement, qui se targuent depuis cet été d'avoir renforcé les pouvoirs du Parlement avec la réforme constitutionnelle, auraient dû commencer par assouplir les conditions de recevabilité des amendements afin de permettre aux parlementaires de présenter leurs propositions. C'est une question de démocratie, d'équilibre des pouvoirs et de respect du travail fourni par les élus de la nation et leurs collaborateurs.
Madame la députée, nous vous avons écoutée avec beaucoup d'attention, mais permettez-moi de vous rappeler cordialement qu'il n'est pas d'usage, dans notre assemblée, de remettre en cause les décisions prises par la commission des finances et son président.
La parole est à M. Yves Bur, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général.
Madame Fraysse, le président de la commission des finances devrait nous rejoindre dans une dizaine de minutes et il pourra alors sans doute répondre à votre interrogation.
Sur l'article 1er, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
Un mot sur les amendements qui ont été rejetés par la commission des finances. La commission des affaires sociales avait accepté quatorze de mes amendements, mais la moitié sont passés à la trappe, dont certains n'avaient pas de caractère financier très affirmé !
L'article 1er concerne l'approbation des tableaux d'équilibre relatifs à l'exercice 2007. Nous avons souhaité que la Cour des comptes certifie les comptes sociaux. Elle a fait des remarques, des recommandations, et a même refusé de certifier les comptes de l'ACOSS. Il serait souhaitable que ses recommandations soient suivies d'effets. Or, après avoir exprimé des réserves sur le mode de construction des tableaux d'équilibre de 2007, la Cour n'a pas noté d'amélioration en 2008, ce qui me paraît regrettable. J'espère qu'il n'en sera pas de même l'année prochaine et je suis certain que notre ministre des comptes sociaux suivra son avis. La Cour a ainsi majoré le déficit 2007 de 979 millions et refusé de certifier les comptes de l'ACOSS.
Je voudrais faire quelques remarques sur les résultats de 2007. Le déficit cumulé du FSV est bien de 4,8 milliards fin 2007. Même si une amélioration est prévue en 2008, est-ce bien le moment de le priver de recettes en transférant 0,2 % de CSG à la CADES ? Certes, ce déficit est lui-même transféré, mais l'équilibre du FSV est précaire et un nouveau déficit de 800 millions est prévu pour 2009.
L'ONDAM 2007 a été dépassé comme chaque année. Il avait, bien sûr, été présenté à l'époque comme réaliste et volontariste. J'avais alors eu l'occasion de dire que, comme d'habitude, il était sous-évalué. Il a donc été dépassé, comme cela était prévisible, de 3 milliards d'euros, soit de plus de 2,1 % de son montant initial. Ce dépassement est intégralement imputable aux soins de ville qui ont progressé de 4,5 % en 2007. Heureusement, l'ONDAM soins de ville 2009 est plus réaliste – 3,1 % –, mais il s'agit toujours d'un ONDAM économique. Il conviendrait d'obtenir enfin un ONDAM médicalisé comme l'avait préconisé M. Coulomb dans son excellent rapport, déjà un peu ancien, qui n'a jamais été suivi d'effets.
Je ne reviens pas sur les déficits cumulés du FFIPSA puisque, cette année, le Gouvernement reprend cette dette de 7,5 milliards, adosse la maladie à la CNAM, comme l'était déjà la famille. Mais que deviennent les retraites agricoles et quel est l'avenir du régime agricole ?
Monsieur Préel, je vous ferai, très cordialement aussi, la même remarque qu'à Mme Fraysse : la commission des finances et son président ont pris des décisions mûrement réfléchies.
La parole est à M. Jacques Desallangre.
Monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, depuis 2002, vos plans se succèdent – tous fondés sur la même recette : la baisse du niveau des prestations –, sans pour autant combler le « trou de la sécurité sociale ». Pourtant, souvenez-vous, celle-ci était excédentaire de 1998 à 2001. Nous avions réussi à équilibrer les comptes sociaux. Mais, de 2007 à 2009, vous avez, en dépit du bon sens, préféré multiplier les cadeaux et les exonérations qui s'élèvent à cinq fois le fameux « trou », sans pour autant prouver leur efficacité sociale. Même la Cour des comptes s'en est émue. Aujourd'hui, vous mentionnez dans votre présentation budgétaire les 46 milliards d'euros de niches sociales et promettez un rapport d'information, mais vous ne touchez pas au fond du sujet. Vous n'osez pas traiter de l'utilité réelle de ces exonérations de peur d'avoir à porter un jugement sur le sujet.
Refusant d'agir avec efficacité sur les recettes, vous restreignez les dépenses de santé en en reportant une part croissante sur les patients. C'était vrai en 2007 et ça l'est encore cette année. L'année dernière, vous aviez inventé les franchises médicales qui faisaient supporter une charge de 50 euros par patient et par an, soit 200 euros pour une famille avec deux enfants. Vous avez ainsi ponctionné directement 850 millions sur le budget des familles. Pour 2009, ce sera la ponction d'un milliard sur les mutuelles qui, à terme, devront la répercuter sur les malades par une hausse des cotisations ou une baisse des prestations. Vous transférez donc 1 milliard de charges sur les patients au risque d'aggraver les inégalités dans l'accès aux soins.
Votre politique injuste, car inégalitaire, n'assure pas pour autant l'équilibre budgétaire. Pour le moment, le déficit annuel oscille entre 4 et 8 milliards d'euros pour la branche santé, mais, en l'absence de réforme, il atteindra 34 milliards en 2050, ce qui reste toujours inférieur au montant des exonérations dont bénéficient les plus favorisés de nos concitoyens.
Certains de vos amis du MEDEF justifient l'existence des niches sociales et fiscales par la recherche de la compétitivité face à nos concurrents étrangers. Prenons-les au mot et, plutôt que de vider les caisses de la sécurité sociale par des exonérations sur le bien-fondé et l'efficacité desquelles on s'interroge, instituons un prélèvement différentiel sur les produits importés qui bénéficient du dumping fiscal et social sur leurs terres de production. Je suis l'auteur d'une proposition de loi allant en ce sens, qu'il pourrait être judicieux d'examiner et d'améliorer.
Pour terminer, parlons un peu des dépassements d'honoraires. J'ai lu que le projet de loi de financement de la sécurité sociale « ne contient pas de mesures coercitives à l'endroit du monde de la santé, du type lettres clés flottantes ou baisse autoritaire des tarifs ». Prenons alors le temps d'un rappel et d'un constat.
Le rappel : en avril 2007, l'IGAS jetait un pavé dans la mare en proposant de supprimer « en totalité ou partiellement » les dépassements d'honoraires afin de rétablir l'égalité d'accès aux soins. En vain !
Le constat : selon l'assurance maladie, les dépassements des spécialistes de secteur 2 représentent près du tiers de l'ensemble des honoraires perçus. En moyenne, le supplément demandé est supérieur de 50 % au tarif de la sécurité sociale. En 2006, plus de 39 % des spécialistes ont pratiqué de ces dépassements d'honoraires. Ce taux est allé jusqu'à 76 % pour les chirurgiens.
J'espère, monsieur le ministre, que vous allez enfin prendre des mesures pour rétablir l'égal accès aux soins. Pour cela, des mesures législatives sont nécessaires, car il faut moraliser et maîtriser les pratiques tarifaires. Vos objectifs de maîtrise dite « médicalisée », restés jusqu'ici hors de portée, pourraient-ils être atteints en 2009 sans mesures contraignantes vis-à-vis des professionnels de santé ? Il nous faut moraliser et maîtriser les pratiques tarifaires, je le répète, dans un cadre négocié avec les professionnels de santé et en instaurant un plafonnement et des engagements de qualité. Cela demande du volontarisme politique. Je vous souhaite d'en faire preuve.
En 2007, l'ACOSS a encaissé 331,2 milliards d'euros, soit une hausse de 5,3 %. Pour l'essentiel, cette évolution des recettes est liée aux reliquats de la soulte des cotisations familiales de La Poste et de celle de France Télécom. Cependant, dans son rapport, l'ACOSS explique cette croissance de 5,3 % du panier de recettes fiscales par un meilleur rendement de la CSG, notamment en raison de la mesure relative aux plans d'épargne logement – au terme de dix ans, votre majorité avait pris la décision de les taxer –, et par le dynamisme de la taxe sur les salaires. Il est intéressant de noter que, selon elle, celui-ci est dû essentiellement à l'évolution de l'emploi dans le secteur bancaire. Tout cela nous laisse à penser que la situation ne va pas s'améliorer au cours des années à venir !
Entre 2006 et 2007, l'endettement a fortement augmenté, ce qui induit un fort alourdissement de la charge des intérêts. D'après la Cour des comptes, cet alourdissement est de plus de 30 % d'un exercice budgétaire sur l'autre. J'aimerais comprendre les raisons d'une évolution aussi importante.
En outre, je rappelle que, depuis au moins six ans, il y a un fort décalage entre les recettes, toujours surestimées, que nous votons ici, et les dépenses, toujours sous-estimées. Je souhaiterais du reste connaître l'avis de M. le ministre sur deux éléments qu'il me paraît important d'évoquer.
En premier lieu, l'augmentation des recettes provenant de la masse salariale est évaluée de façon très optimiste. Or, compte tenu de la crise, elle ne pourra manifestement pas excéder 2 %, ce qui se traduira, dans le budget pour 2009, par un trou de près de 3 milliards d'euros.
D'autre part, le rendement de la contribution sociale généralisée prélevée non seulement sur les salaires, mais également sur les plus-values boursières et immobilières diminuera vraisemblablement de 2 % à 3 %, ce qui réduira encore les recettes de 2 à 3 milliards d'euros.
Autant dire que nous nous apprêtons à voter un budget auquel il manquera 5 à 6 milliards. Le comité d'alerte sera par conséquent appelé à intervenir. Il serait intéressant que la ministre, qui ne saurait être prise au dépourvu, nous indique quelles mesures elle prendrait, le cas échéant, puisque cette issue est plus que probable.
Enfin, je n'ai pas été convaincu par les précisions que le ministre nous a apportées sur la certification des comptes de l'ACOSS. On ne peut minimiser un écart d'un milliard d'euros en invoquant des divergences sur les méthodes de calcul, de gestion de la trésorerie ou de présentation de la comptabilité. La Cour des comptes ayant refusé sa certification, en a-t-il été tenu compte dans le tableau qui nous est présenté ? Non. Autant dire que le principe de la certification a perdu toute portée pour l'article 1er. Comment fonctionnera-t-on dans l'avenir ? La certification restera-t-elle d'actualité, s'il est avéré qu'on peut passer outre un écart de plus d'un milliard d'euros signalé par le premier président de la Cour des comptes ? Le problème n'est pas seulement financier, mais législatif !
Voilà sept jours que je suis ici, monsieur le ministre, mais je n'aurai pas l'occasion de participer à la discussion sur l'article 63 du projet de loi. En effet, vous l'avez fait réserver, ainsi que d'autres, et peu d'élus originaires des outre-mer seront présents dans l'hémicycle quand il viendra en discussion.
Je profite donc de ce que je suis encore présent pour dire un mot – auquel j'associe M. Fruteau et Mme Bello, élus de la Réunion – de cet article, qui porte sur les outre-mer, exception faite des départements français d'Amérique – Guadeloupe, Martinique et Guyane – et qui vise à réformer l'indemnité temporaire de retraite.
Je veux d'abord dénoncer une réforme menée avec brutalité, à la hussarde, sans concertation avec les partenaires sociaux ni les élus. Le document de travail préparé par le secrétariat d'État à l'outre-mer rappelle que des décisions avaient été annoncées en avril 2008 par le Président de la République. Mais celui-ci prévoyait alors, non de les inscrire dans la loi de financement de la sécurité sociale, mais de les renvoyer au rendez-vous de 2008 sur les retraites.
Je suis surpris de la précipitation qui préside désormais à nos travaux, et dont le Gouvernement a déjà fait preuve à plusieurs reprises.
Ainsi, les articles 43 et 65 de la loi de finances initiale, qui visent à plafonner ce que certains appellent des niches fiscales, mais que nous considérons simplement comme un mécanisme d'aide à l'investissement outre-mer, et à réviser le barème d'exonération des charges patronales de sécurité sociale s'appliqueront avant même que nous ne bénéficiions des avantages supposés de la LODEOM, la loi pour le développement économique de l'outre-mer. En effet, compte tenu de l'encombrement du calendrier parlementaire, on ignore encore à quelle date viendra en discussion cette loi dont nous sommes censés tirer profit.
Quant au RSA, le principe d'égalité devant les charges publiques et devant l'impôt nous astreint, comme tous les Français, à le financer. Loin de nous l'idée de le contester. Mais, si la charge est immédiate, le bénéfice que nous en retirerons n'interviendra pas avant 2011. En outre, quels sont les modes de financement retenus ? La non-actualisation des barèmes de la PPE, la révision de ceux de l'ISF et le plafonnement du mécanisme d'aide à l'investissement en outre-mer, ce qui ne nous semble pas très juste.
En somme, lorsque vous intervenez dès le projet de loi de financement de la sécurité sociale sans attendre la loi de développement économique de l'outre-mer, vous ne faites que reprendre une méthode devenue habituelle.
Quant au contenu de l'article 63 du projet de loi, nous ne pouvons qu'approuver une réforme qui tend à corriger certains abus manifestes liés à l'indemnité temporaire de retraite des fonctionnaires de l'État. Je rappelle en effet qu'il leur a été proposé, lors de la liquidation de leur retraite, une majoration qui s'élève dans l'océan Indien, à la Réunion ou à Mayotte, à 35 %, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à 40 % et, à Wallis-et-Futuna, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie, à 75 %. Ce bénéfice n'est pourtant pas lié au fait qu'ils aient été domiciliés sur ces territoires dans l'exercice de leurs fonctions.
N'étant pas partisans de l'immobilisme, nous ne sommes donc pas hostiles au principe d'une réforme. Mais il faut savoir annoncer une mesure et ménager des transitions. Les dispositions actuelles coûtent, selon les rapports, entre 290 et 315 millions, mais les abus évalués ne portent que sur 60 à 90 millions. Par ailleurs, pourquoi supprimer l'avantage dont bénéficient les fonctionnaires qui ont déjà pris leur retraite, en le limitant d'abord à 18 000, puis à 8 000 euros ? En la matière, il n'y a eu ni concertation ni évaluation ni étude d'impact, les rapporteurs l'ont reconnu. Bref, si nous comprenons la nécessité d'une réforme, nous n'acceptons ni la méthode adoptée par le Gouvernement ni la précipitation avec laquelle il agit. Nous lui demandons par conséquent de reporter la discussion, conformément à l'engagement pris par le Président de la République.
Par ailleurs, nous souhaitons que les économies réalisées soient réinvesties dans les outre-mer, comme le ministre nous en avait donné l'assurance. Sur des sommes de l'ordre de 300 millions, le Gouvernement pense réaliser entre 23 et 30 millions d'économies. Or il envisage de n'injecter que 16 millions dans le fonds exceptionnel d'investissement créé à notre demande, pour financer les infrastructures dans les économies d'outre-mer. En outre, je rappelle que nous sommes soumis, comme tous les départements, à la RGPP, ce ratiboisage général des politiques publiques, qui sévit dans les outre-mer.
J'ai accepté que vous vous exprimiez sur deux articles, monsieur Lurel. À présent, il faut conclure.
Je demande donc au Gouvernement de reporter, comme nous proposons de le faire par voie d'amendement, l'examen des mesures contenues dans l'article 63 à l'examen de la loi pour le développement économique de l'outre-mer.
L'article 1er du projet de loi donne en quelque sorte acte de la clôture des comptes du régime général pour 2007. J'ai déjà appelé votre attention, mes chers collègues, sur le problème de la sincérité du budget. Le ministre s'en est agacé, mais je n'ai fait que citer les observations de la Cour des comptes, dont il s'est engagé à prendre bonne note.
En 2007, un dérapage a été observé, puisque les dépenses ont augmenté de 4,2 %, du fait de la médecine de ville. Celle-ci a en effet connu une hausse de 4,5 %, soit un dépassement de 3,1 milliards d'euros, alors même que les établissements de santé sont demeurés en deçà de leurs objectifs hospitaliers, avec une sous-consommation de 160 millions d'euros. Voilà qui nous renvoie à un débat fondamental, que nous poursuivrons pendant l'examen du projet de loi.
Vous prétendez, monsieur le ministre, que nous n'avons pas de propositions. Nous suggérons au contraire de maintenir un financement suffisant aux hôpitaux publics, qui, depuis une dizaine d'années, sont engagés dans une réforme qu'ils gèrent au jour le jour, dans des conditions souvent difficiles. Ils ont rationalisé et externalisé certaines tâches.
Si ! Cela se traduit dans les chiffres. On le constate, par exemple, au CHU de Toulouse : le projet d'établissement intègre ces contraintes, tout en conciliant la nécessité de la qualité – il s'agit d'un pôle d'excellence et d'innovation – et l'obligation d'accueillir tous les publics, même les plus précaires, soumis à des pathologies plus lourdes et à des hospitalisations plus longues. L'hôpital public assure en effet la permanence des soins. Sa lumière reste allumée quand toutes les autres se sont éteintes, et il demeure, à certains égards, un havre et un refuge.
En 2007, nous avons clôturé les comptes avec 9,5 milliards de déficit, auxquels, selon la Cour des comptes, il faut ajouter 1 milliard supplémentaire. Or, contrairement à ce que vous pensez, monsieur le ministre, nous n'acceptons pas le déficit. Nous déplorons, au contraire, celui de près de 80 milliards accumulé depuis 2002, qui sera reporté sur les générations futures. Sur ce point, nous formulerons également des propositions.
Vous semblez engager le débat en vous conformant à un axiome selon lequel il ne faudrait pas de recettes supplémentaires, à l'exception des deux seules que vous avez choisies. Or il existe des gisements de recettes, notamment dans les niches sociales. Oui, des économies peuvent être réalisées dans les allégements de charges généraux ou ciblés. Nous proposerons ainsi l'extension du prélèvement social, dans une période de crise où la solidarité doit primer, à toutes les rémunérations qui nous paraissent exorbitantes. Nous irons même plus loin que les mesures votées en commission des affaires sociales ou des finances, en ce qui concerne la participation aux plus-values, les stock options, les retraites chapeaux ou les parachutes dorés.
Ainsi, nous engageons ce débat avec calme, mais nous formulerons, en matière de recettes, des questions et des propositions.
Par cet article inaugural, le Gouvernement nous propose d'approuver le tableau d'équilibre, par branche, de l'ensemble des régimes obligatoires de la sécurité sociale pour 2007.
Notons tout d'abord que la Cour des comptes émet de sérieux doutes sur ces chiffres. Elle parle même d'« irrégularités » ayant une « incidence directe sur les résultats des branches maladie et retraite, dont le déficit est minoré respectivement de 0,7 et de 0,3 milliard d'euros. » La Cour de comptes se permet même de présenter des tableaux d'équilibre qui différent sensiblement des vôtres.
Mais, même si votre présentation des comptes de la sécurité sociale pour 2007 améliore d'un milliard d'euros les résultats d'ensemble présentés dans le tableau d'équilibre du régime général, elle ne change pas la teneur de nos critiques.
Lors de l'examen du PLFFS pour 2007, nous avions ainsi prédit que ses multiples « recettes de poche », non pérennes, ne permettraient pas de remédier durablement au déficit de la sécurité sociale. Nous en avons malheureusement la confirmation.
En outre, nous avions vivement condamné les exonérations de cotisations sociales non compensées par l'État, et, surtout, l'absence de courage politique qui vous avait empêchés de réformer le financement de la sécurité sociale, malgré les promesses formulées quelques mois plus tôt par celui qui était alors Président de la République – Jacques Chirac –, lequel avait évoqué une réforme de l'assiette de ces cotisations.
Cette réforme est indispensable. Vous avez déclaré vouloir lutter contre les dérives du capitalisme financier ; fort bien, mais pourquoi ne pas commencer par là ? Pourquoi ne pas instaurer une sorte de bonus-malus en matière de cotisations sociales patronales, en les allégeant pour les entreprises qui embauchent et augmentent les salaires, et en les augmentant pour celles qui licencient et privilégient les placements financiers ?
Les appréciations et l'opposition dont nous avions fait état il y a deux ans restent donc inchangées.
Je me contenterai de formuler quelques remarques pour compléter les propos de mes collègues.
Tout d'abord, faut-il rappeler que cette année est la cinquième consécutive où le déficit des régimes et des fonds dépasse 10 milliards ? Excusez du peu !
D'autre part, l'examen attentif des rapports montre que les assurances complémentaires prennent aujourd'hui en charge 14 % des dépenses, c'est-à-dire 22 milliards environ, mes chers collègues ! Or, depuis 2004, la part assumée par les ménages a augmenté de 3 milliards.
Ainsi, depuis quelques années, le déficit avoisine 10 milliards, les mutuelles et les assurances complémentaires assument 22 milliards de dépenses, et les ménages en prennent, si j'ose dire, pour 3 milliards de plus !
Je constate en outre que les économies prévues n'ont pas été réalisées. Ainsi, la dépense de médicaments, dont vous attendiez qu'elle diminue de 2,5 %, augmente en réalité de 5 %. Certes, il y a des médicaments de plus en plus coûteux, mais tout de même !
Enfin – et j'en termine, puisque l'on nous a exhortés à respecter notre temps de parole –, cet article 1er est en réalité un aveu : celui de l'échec de votre loi de 2004, portée par M. Bertrand. À l'époque, MM. Bertrand et Douste-Blazy s'étaient targués de parvenir à l'équilibre en 2007, grâce au remède miracle du dossier médical personnalisé, dont on estime aujourd'hui qu'il ne verra pas le jour avant 2017.
Une dernière remarque en forme de question, madame la ministre, monsieur le ministre. En 2004 – je n'étais pas encore parlementaire, mais j'ai lu et relu les débats –, l'État, prônant la dérégulation, s'était engagé à intervenir de moins en moins dans la politique de santé. Or, depuis quelques semaines, la tendance semble s'inverser : on redécouvre les vertus de l'État régulateur.
Quelles sont vos intentions en la matière ? Souhaitez-vous qu'une fois l'ordre revenu – s'il revient, ce dont nous sommes nombreux à douter –, l'État se retire progressivement sans chercher à réguler le système, ou estimez-vous au contraire que cette politique de dérégulation – qu'on l'appelle libéralisation, dynamisation ou modernisation – a fait son temps ?
La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général.
Je sais que les remarques de la Cour des comptes sur la comptabilisation de la CSG ont conduit certains à s'interroger sur la certification des comptes. Nous en avons longuement débattu en commission.
Dans son rapport de certification des comptes 2007, publié le 30 juin 2008, la Cour a déclaré ne pas être en mesure de certifier les comptes combinés du recouvrement et ceux de l'ACOSS, en raison notamment de trois désaccords sur les méthodes comptables employées.
Le plus important résultait du fait qu'aux yeux de la Cour, les acomptes de CSG sur les revenus de placements et sur le prélèvement social de 2% afférents au mois de janvier 2008 étaient irrégulièrement imputés à l'exercice 2007. La justification de l'administration était en substance la suivante : d'un point de vue économique, le procédé était normal dès lors que les pratiques des établissements financiers teneurs des comptes des épargnants divergent, certains enregistrant comme il se doit les intérêts, donc les prélèvements sociaux, avant le 31 décembre, alors que d'autres ne le font qu'au début du mois de janvier de l'année suivante.
La Cour n'a pas suivi ce raisonnement, mais elle ne nie pas pour autant le problème que posent les pratiques actuelles des banques et des assurances, tolérées par une administration fiscale qui n'entend pas les remettre en cause. Elle n'est pas opposée par principe à une clarification permettant d'imputer à l'année qui s'achève les prélèvements à la source des intérêts capitalisés par les banques au 31 décembre, même s'ils ne sont inscrits qu'au début du mois de janvier de l'année suivante.
Dans le rapport qu'il a remis le 22 octobre au Haut Conseil interministériel de la comptabilité des organismes de sécurité sociale au nom du groupe de travail mandaté par ce dernier, M. Alain Dorison, inspecteur général des finances, a proposé d'interpréter en ce sens le plan comptable grâce à une modification du système déclaratif des banques et des assurances. Celle-ci permettrait de distinguer, au sein des produits inscrits en comptes en janvier, ceux qui le sont à juste titre de ceux qui sont imputables au mois de décembre de l'année précédente.
Cette solution est apparue à la Cour des comptes et à tous les membres de cette instance, notamment les représentants du Conseil national de la comptabilité, comme la plus appropriée et la plus respectueuse des droits constatés. Seule une modification du système déclaratif des banques et des assurances permettrait à l'ACOSS de rattacher à l'année qui s'achève les produits qui doivent l'être, ce qui suppose qu'elle dispose de l'information nécessaire.
Pour l'exercice 2008, le rapport Dorison encourage notamment les établissements payeurs à poursuivre les travaux déjà entrepris, qui visent à fournir soit un chiffre fondé sur une étude statistique, soit des éléments déclaratifs. L'administration devra du reste leur adresser sans tarder une documentation validant cette démarche.
L'engagement du Haut Conseil interministériel de la comptabilité des organismes de sécurité sociale devrait permettre de régler la question, donc de clore ce débat sur l'insincérité supposée des comptes.
La parole est à Mme la rapporteure pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.
Monsieur Terrasse, je rappelle que la certification des comptes constitue une avancée considérable permise par la LOLFSS et qu'elle concerne, pour le régime général, 323 milliards, auxquels doit être rapporté le décalage d'un milliard que vous avez mentionné.
Je ne reviens pas sur les explications que vous a fournies tout à l'heure M. Woerth, qui resituaient à juste titre le problème au niveau comptable, loin de l'impasse que vous évoquiez.
D'autre part, si l'on peut être sensible, comme M. Préel, à la nécessité de prendre en considération l'avis du certificateur, cela supposerait de modifier la LOLFSS. À défaut, le Gouvernement pourrait s'engager à étudier les modalités de cette prise en considération.
La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Monsieur Préel, comme l'a dit M. Bur, nous tiendrons évidemment compte des recommandations de la Cour dès 2008, en distinguant les exercices conformément aux préconisations du rapport Dorison. Nous ferons de même pour les exonérations de charges. Ainsi, les deux comptabilités, de l'État et de l'ACOSS, seront cohérentes. Je l'ai dit tout à l'heure, nous procéderons à ces modifications en loi de finances rectificative.
Quant au fonds de solidarité vieillesse, ses comptes s'améliorent : il est pour la première fois en excédent en 2007, et nous allons reprendre sa dette. La situation n'est pas facile, mais nous progressons.
S'agissant des retraites agricoles, nous reprenons également, vous l'avez dit, la dette du FFIPSA, ce qui réduira les charges d'intérêts. En outre, nous autorisons la MSA, qui gérera le régime vieillesse, à recourir à l'emprunt. Nous verrons comment intégrer ces mesures au rendez-vous de 2010 sur les retraites. En la matière, nous procédons de manière progressive. Certes, si nous en avions les moyens, nous en userions différemment ; mais nous agissons de manière correcte, saine et claire.
Quant à l'ONDAM, si le dépassement s'est accru en 2007, n'oublions pas que Roselyne Bachelot et moi-même avions alors réagi à l'avis du comité d'alerte par plusieurs mesures efficaces. A nos yeux – et le rapporteur partage, me semble-t-il, ce sentiment (M. Bur approuve) –, il ne faut pas s'en tenir au seuil d'alerte. J'en ai souvent discuté avec Roselyne Bachelot ; nous prendrons tous deux, dès cette année, des mesures énergiques dès que le dépassement de l'ONDAM sera sensible.
Nous le ferons naturellement en concertation avec la Caisse. Sinon, cela revient à dire que nous acceptons de voir l'ONDAM dépassé jusqu'au seuil d'alerte. Or, pour parvenir à l'équilibre, il faut respecter l'ONDAM.
Monsieur Desallangre, les niches sociales, vous le savez, résultent en grande partie des allégements généraux de charges.
Vous m'avez compris ! Les allégements de cotisations liés aux 35 heures représentent 20 des 33 milliards d'allégements de charges. (Protestations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR.)
Plusieurs députés SRC. Ce sont les allégements Fillon !
Soit : les allégements Fillon. Monsieur Le Guen, je sais que vous cultivez l'esprit de polémique, mais ce n'est pas mon cas. Pour ma part, je m'en tiens à la réalité : ces exonérations, qui représentent une grande partie des allégements de charges, s'élèvent à près de 20 milliards.
On peut débattre longtemps des niches sociales…
Elles sont certes trop nombreuses ; le ministre des comptes que je suis préférerait davantage de cotisations. Mais certains allégements s'expliquent aisément. (Protestations sur les bancs du groupe GDR.)
Et si on les supprime, il ne reste plus grand-chose ! Vous le savez bien, vous qui les avez instaurés.
Monsieur Terrasse, sur le « panier fiscal », les allégements généraux ont bien été intégralement compensés à l'euro près, selon la formule consacrée, en 2007, puisqu'un milliard de recettes supplémentaires a été ajouté en loi de finances rectificative.
M. Terrasse a encore raison pour ce qui concerne la progression de l'endettement…
Certes, mais il n'y a rien d'étonnant à voir les charges d'intérêts – qui sont passées, entre 2007 et 2008, de 700 millions à près d'un milliard d'euros – augmenter au même rythme que la dette. Nous avons donc décidé d'alléger celle-ci car, en la remboursant, nous générons d'importantes économies sur les charges d'intérêts – de l'ordre d'1,1 milliard d'euros en intérêts financiers pour l'ACOSS.
En 2007, par rapport aux prévisions, je confirme que nous avons bénéficié d'1,7 milliard d'euros de recettes supplémentaires.
Je tiens aussi à préciser que la mission de certification de la Cour des comptes n'est pas remise en cause.
Certes, mais nous avons expliqué pourquoi, et le premier président de la Cour des comptes n'a pas été particulièrement critique sur le sujet. Cela dit, et je vous l'ai déjà précisé, tout comme Marie-Anne Montchamp, nous tiendrons compte de ces remarques.
Monsieur Lurel, le dossier de l'ITR a déjà donné lieu à une longue concertation et voilà bien longtemps que nous discutons de ce sujet qui est traité à l'article 63 du PLFSS. Le Gouvernement a l'intention de revoir ce dispositif, mais il tiendra compte de certaines de vos demandes puisque des orateurs, comme M. Gaël Yanno, se sont exprimés sur le sujet. Quant aux exonérations DOM, nous y reviendrons dans quelques jours en examinant la seconde partie du projet de loi de finances pour 2009.
Monsieur Muzeau, en 2007, pour la deuxième année, la Cour des comptes a certifié les comptes de la branche maladie et de la branche retraite. Bien sûr, elle a fait part de certains points de désaccord ; nous les avons pris en compte, et nous leur apportons des réponses dès cette année. Aujourd'hui notre dialogue avec le certificateur est à la fois apaisé et constructif, sans que ce dernier se montre particulièrement indulgent.
Monsieur Eckert, Roselyne Bachelot l'a déjà dit : il n'y a pas d'augmentation du « reste à charge » des ménages. Au contraire, celui-ci est passé, entre 2002 et 2007, de 8,6 à 8,5 %. L'échec de la loi de 2004…
Je reprenais les termes de M. Eckert pour préciser qu'il usait d'un langage que je n'approuve pas : il n'y a pas d'échec de la loi de 2004. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Vous pouvez le contester, pourtant les faits sont là : le déficit de l'assurance maladie est passé de 11,6 milliards à 4 milliards d'euros en 2008…
Nous ne sommes pas réunis pour polémiquer sur ce sujet…
Mais ce budget me le permettrait, monsieur Le Guen.
À l'époque où vous étiez au pouvoir, vous avez bénéficié de 3 à 4 % de croissance – je vous laisse croire, si cela peut vous faire plaisir, que vous y étiez pour quelque chose –, mais, dans ces conditions, votre tâche était beaucoup plus facile. Si le contexte était le même aujourd'hui, la question du déficit de l'assurance maladie ne se poserait pas.
L'objectif national des dépenses de l'assurance maladie voté par votre majorité, en 2000, 2001 puis 2002 s'élevait, respectivement, à 2,5, à 3,5 puis à 4 %. Or la progression réelle des dépenses a été de 5,6 % en 2000 et 2001, et de 7,1 % en 2002 ! Le décalage a donc été considérable entre vos prévisions de dépenses et la réalité. Vous vous êtes contentés, à l'époque, de bénéficier de recettes particulièrement dynamiques, mais vous n'avez pas maîtrisé la dépense. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
(L'article 1er est adopté.)
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 2.
La parole est à M. Pascal Terrasse.
L'article 2 renvoie au rapport de l'annexe A décrivant les mesures prévues pour l'affectation des excédents et la couverture des déficits constatés sur l'exercice 2007.
À l'annexe B, le rapport décrivant les prévisions de recettes et de dépenses pour les quatre années à venir se fonde sur diverses hypothèses macroéconomiques pour fixer le retour à l'équilibre des comptes à l'horizon 2012. Cependant, j'ai en mémoire, comme certains de mes collègues, les engagements de vos prédécesseurs, madame la ministre – je pense en particulier à Philippe Douste-Blazy et Xavier Bertrand – qui, en 2003, la main sur le coeur, nous assuraient : « La réforme que je vous présente nous amènera à l'équilibre en 2007. »
Seulement l'équilibre n'est pas là, et jamais l'endettement n'a été aussi important. Lorsque Alain Juppé présentait son plan en 1995, il évoquait un déficit cumulé de 150 milliards de francs ; nous approchons aujourd'hui les 150 milliards, mais nous parlons en euros !
Nous sommes prêts à comprendre que le pays s'endette si les emprunts d'aujourd'hui doivent profiter aux générations futures, s'il s'agit d'investir pour l'avenir. Mais, avec ce projet de loi, nous ne sommes pas dans cette situation ; nous avons plutôt le sentiment que le Gouvernement crée un « impôt sur les naissances » sans oser en dire le nom.
Monsieur le ministre, vous pouvez toujours, par des tours de passe-passe dont vous êtes coutumiers, vous appuyer sur la CADES et piocher dans la CSG destinée au fonds de solidarité vieillesse : il faudra bien régler un jour l'endettement qui progresse, année après année. D'autant que, jusqu'en 2022, date à laquelle interviendra la caisse d'amortissement de la dette sociale, les salariés actuels et futurs – c'est-à-dire les étudiants d'aujourd'hui – paieront pour nos soins. L'attitude du Gouvernement est irresponsable.
Hier, monsieur Woerth, vous assuriez que l'opposition n'avait pas de propositions – la formule appartient aux éléments de langage de la majorité – ; ce n'est pas vrai. Nous proposons ainsi, dans le cadre d'une réflexion pluriannuelle, de revoir les dispositifs d'allégement de cotisations sociales. Si les petites entreprises – les PME, les PMI et les très petites entreprises – doivent pouvoir bénéficier d'exonérations de cotisations sociales, qu'en est-il des multinationales qui profitent d'un effet d'aubaine – au niveau de 1,6 SMIC – sans que la mesure ait d'impact positif sur l'emploi ?
L'opposition a également posé la question des niches sociales. Selon la Cour des comptes, plus de 40 milliards d'euros ne participent pas au financement de la protection sociale.
Par ailleurs, de nombreux rapports, à l'Assemblée nationale et au Conseil économique et social, portent sur l'évolution des ressources. Monsieur le ministre, les dépenses de santé vont continuer à croître. Au niveau européen, au sein de l'Eurogroupe que vous présidez avec Christine Lagarde, vous vous êtes engagé pour la France à ce que l'évolution des dépenses des établissements de protection sociale soit inférieure à 1 % par an en volume. Pourtant, vos actions nationales ne sont pas conformes à ces promesses européennes puisque vous prévoyez une évolution de l'ONDAM de 3,5 % – qui s'appuie de plus sur une hypothèse, qui me semble optimiste, d'une progression de 4,7 % de la masse salariale. Comment parviendrez-vous dans ces conditions à l'équilibre en 2012 ?
L'annexe A, à laquelle renvoie l'article 2, traite de la couverture du déficit.
Sur l'ensemble de l'année 2007, les charges financières de l'ACOSS, nettes des produits financiers, s'élèvent à 648 millions d'euros. Sur la même période, le résultat du FFIPSA a été déficitaire de 2,2 milliards d'euros et la charge d'intérêts liée aux déficits du fonds de solidarité vieillesse a représenté 271 millions d'euros.
Selon vous, monsieur Woerth, les décisions d'intégration dans le budget de l'État pour le FFIPSA, et de renvoi de la dette sociale à la CADES pour le régime général et le FSV permettraient à la sécurité sociale d'économiser un milliard d'euros de frais financiers. Mais alors, pourquoi de telles décisions n'ont-elles pas été prises dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 ? Vous auriez pu ainsi éviter de gaspiller des sommes énormes en frais financiers. Pourquoi avoir attendu pour prendre une décision qui paraît aujourd'hui logique ?
On peut lire dans l'annexe A que la dette de l'ACOSS a été couverte « par les emprunts de trésorerie que peut conclure l'Agence auprès de la Caisse des dépôts et consignations, ainsi que par l'émission par l'Agence de billets de trésorerie sur le marché financier ». Soit.
Mais, pour ce qui concerne la dette du FFIPSA, le rapport de l'annexe A nous indique que le financement des déficits a été assuré « par les emprunts de trésorerie que peut conclure la Caisse centrale de mutualité sociale agricole, sur délégation du FFIPSA, auprès du consortium bancaire CALYON ». Si mes calculs sont justes, la dette contractée auprès de CALYON s'élève à environ 5 milliards d'euros. Or, CALYON, banque de marché et d'investissement, filiale du Crédit agricole et de l'ancien Crédit lyonnais, se présente ainsi sur son propre site Internet : « CALYON dispose d'une plateforme mondiale permettant de syndiquer, structurer, traiter et gérer les instruments de crédit structurés. » Je commence à m'inquiéter, mais je poursuis ma lecture : « CALYON est un acteur reconnu sur le marché des options et swaps de taux d'intérêt et de produits exotiques et hybrides. » Vous imaginez bien que mon inquiétude redouble.
J'espère, monsieur le ministre, que vous pourrez nous rassurer. On nous a répété qu'il n'y avait « ni toxicité ni exotisme » dans les comptes des banques françaises mais, si le FFIPSA a souscrit des emprunts auprès d'une banque d'affaires spécialisée en produits exotiques et hybrides, nous nous interrogeons.
L'un de nos collègues a évoqué la question de la charge des intérêts. Je souhaiterais que vous nous rassuriez, monsieur le ministre, car je suppose que vous vous êtes assuré que ces engagements financiers, qui concernent une partie de nos régimes sociaux, ne comportaient pas de risque inconsidéré.
Lorsque l'on évoque l'année 2007, on est irrésistiblement renvoyé à la réforme de MM. Douste-Blazy et Bertrand, dont on nous disait qu'elle était la dernière chance de la sécurité sociale, réforme qui a été portée par cette majorité et dont les rapporteurs étaient d'ailleurs à peu près les mêmes que ceux qui siègent au banc des commissions ce soir.
Je n'insisterai ni sur les résultats de cette réforme – ils sont connus de tous –, ni sur le discours un tantinet cynique qui consiste à se targuer de ne pas augmenter les taxations alors que, année après année, on creuse la dette sociale de dizaines de milliards d'euros, qui sont autant d'impôts, augmentés des intérêts, que les Français paieront dans les années qui viennent.
Puisque nous sommes à l'heure du bilan, je préfère demander à nos collègues de la majorité s'ils se posent la question de savoir pourquoi la réforme de 2004 n'a pas fonctionné, en dépit des taxations supplémentaires – augmentation de l'assiette de la CSG, franchises et autres forfaits – imposées à nos concitoyens.
Face à cette situation, certains d'entre eux se disent qu'il n'y a finalement pas grand-chose à faire, sinon attendre la panne complète du système. D'autres, notamment au Gouvernement, estiment qu'il faut agir, non pas sur la problématique assurantielle, c'est-à-dire sur le comportement des consommateurs par le biais de l'assurance maladie – car cela ne marche pas, ou très peu –, mais sur l'offre de santé. Ceux-là sont d'autant plus mobilisés que nous avons constaté, au cours des quatre dernières années, que le système de santé primaire – cette fameuse médecine ambulatoire libérale, qui motivait tant d'exhortations idéologiques – s'est dégradé. La majorité se trouve donc face au constat suivant : du point de vue financier, cela ne fonctionne pas, et l'offre de santé se dégrade, malgré l'argent investi.
Or la tension qui existe entre ces deux tendances internes à la majorité aboutit à l'immobilisme, qui caractérise le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 comme le projet de loi « Hôpital, patients, santé et territoires », qui a été récemment présenté en conseil des ministres et que nous examinerons dans quelques mois. Donc, il ne se passe rien, ou plutôt si : le déficit continue de se creuser – l'année prochaine, il explosera, compte tenu des circonstances économiques et sociales – et la crise sanitaire s'amplifie, dans la médecine ambulatoire de premiers recours et, bientôt, dans l'hôpital.
Ce débat devrait inciter nos collègues de la majorité à réfléchir aux conséquences de l'échec de la réforme de 2004 : combien d'années vont-ils encore regarder passer les trains avant de prendre les mesures qui s'imposent ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant que ne débute l'examen des amendements, je souhaiterais vous exposer brièvement, comme je l'avais fait l'année dernière, les conditions dans lesquelles l'article 40 a été appliqué aux quelque sept cents amendements – un record – qui ont été déposés sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Un amendement peut être déclaré irrecevable pour deux motifs : soit parce qu'il aggrave une charge, soit parce qu'il est étranger à l'objet du texte. Je me suis efforcé d'appliquer la jurisprudence de la commission des finances, qui a été constante depuis le président Emmanuelli jusqu'au président Méhaignerie, lequel a d'ailleurs rédigé un rapport très clair sur le sujet.
Sont donc irrecevables tous les amendements créateurs de charges pour les organismes de sécurité sociale ; ils entrent, conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, dans le champ de l'article 40. À ce titre, est irrecevable tout amendement augmentant les remboursements à la charge de l'assurance maladie ou les prestations versées par les branches vieillesse ou accidents du travail, même s'il s'agit de mesures d'équité qui peuvent paraître opportunes. Je ne suis pas l'auteur de la Constitution ; j'ai d'ailleurs plaidé devant vous en faveur de la suppression de l'article 40.
Mais, dès lors que celui-ci existe encore, je suis bien obligé de l'appliquer. Au reste, j'aurais pu déclarer irrecevables aussi les amendements diminuant sans compensation les recettes des régimes ou des fonds ; je ne l'ai pas fait, dans le souci de favoriser la discussion en séance publique, et la commission des finances a gagé elle-même le petit nombre d'amendements qui ne respectaient pas cette règle.
Par ailleurs, sont irrecevables les cavaliers sociaux, que le Conseil constitutionnel contrôle de façon de plus en plus stricte chaque année. Ainsi, l'année dernière, alors que vous m'aviez fait certaines observations sur la manière dont j'avais appliqué l'article 40, j'ai sans doute été trop laxiste aux yeux du Conseil, puisqu'il a censuré dix-sept cavaliers sociaux, soit un article additionnel sur trois. Certes, ils n'avaient pas tous été votés par l'Assemblée nationale : le Sénat en avait pris sa part.
J'ai donc dû écarter les amendements ayant un effet trop indirect sur les recettes ou les dépenses de sécurité sociale. Par ailleurs, seuls sont recevables les amendements ayant trait aux régimes obligatoires de base : tous ceux qui concernent les régimes complémentaires sont des cavaliers. Sur ce point, la LOLFSS est claire ; là encore, je n'en suis pas l'auteur. Je me permets d'ailleurs de faire observer que le PLFSS n'est pas un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social, ni un projet de loi de santé publique. À ce propos, nous allons bientôt discuter d'un texte portant réforme de l'hôpital, et beaucoup d'amendements qui sont considérés comme des cavaliers au regard du PLFSS pourront être examinés lors de sa discussion, pourvu qu'ils respectent l'article 40.
Je souhaitais vous rappeler ces règles, que j'ai tenté d'appliquer avec le plus de discernement possible dans la mesure où certains articles du projet de loi lui-même témoignaient d'une conception assez large du domaine des lois de financement de la sécurité sociale. Au demeurant, malgré l'application que nous avons faite de l'article 40, il reste cinq cent vingt amendements très variés dont vous pourrez débattre – et je crois savoir que le Gouvernement en a ajouté quelques-uns. Encore une fois, je ne fais qu'appliquer la Constitution et la jurisprudence de la commission des finances.
Monsieur Le Guen, en 2004, le déficit de l'assurance maladie s'élevait à onze milliards et demi ; il est aujourd'hui de quatre milliards : vous ne pouvez pas dire que nous n'avons pas fait de chemin. Au reste, vous savez parfaitement que, si l'on ne faisait rien, l'augmentation des dépenses de l'assurance maladie serait de deux ou trois milliards d'euros par an. Donc, ne dites pas que les actions qui ont été menées n'ont pas eu d'impact : celui-ci a été, au contraire, très important.
Le déficit du régime général est bien en diminution, même si nous souhaiterions que cela aille plus vite. Et puis, où sont vos réformes ?
En ce qui concerne CALYON, monsieur Eckert, il s'agit d'un emprunt sur une année qui a été souscrit à taux fixe, donc sans risques particuliers.
Je conçois parfaitement que le président de la commission des finances, dont c'est le rôle, intervienne pour appliquer l'article 40 à ceux de nos amendements qui prévoiraient des dépenses anormales. En revanche, je me demande quelle est la légitimité de la commission des finances pour intervenir sur la question des cavaliers sociaux,…
…qui relève davantage, me semble-t-il, de la commission des affaires sociales. J'y vois un léger empiétement de la commission des finances sur le domaine de la commission des affaires sociales.
En tout cas, je souhaiterais que le président de la commission des finances et celui de la commission des affaires sociales nous répondent sur ce point.
Il me semble que le problème soulevé n'est ni hors sujet, ni sans importance. Si je ne conteste pas le fait qu'il y ait un règlement et une jurisprudence à respecter, je déplore en revanche que l'application d'un cadre extrêmement restrictif puisse avoir pour conséquence d'empêcher le Parlement de discuter de questions fondamentales telles que la santé au travail.
À titre d'exemple, je citerai deux amendements qui ont été déclarés irrecevables au regard de l'article 40 bien qu'il ne se soit agi, ni dans un cas ni dans l'autre, d'un cavalier social ou d'une dépense qu'il aurait été nécessaire de gager. Ces deux amendements avaient trait aux sanctions pénales frappant les chefs d'entreprise qui ne respectent pas la législation et ne protègent pas leurs salariés. Nos propositions visaient à passer d'un régime d'amendes plutôt complaisant à des sanctions pénales de nature plus « instructive » pour les chefs d'entreprise et leurs services, de façon à éviter les dérives. Ainsi, l'un de nos amendements avait pour objet de permettre la pleine application aux accidents du travail des dispositions de l'article 222-19 du code pénal, qui réprime les atteintes involontaires à l'intégrité de la personne ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois. Cet amendement revêtait un caractère purement préventif, puisqu'il visait à anticiper de possibles dérives susceptibles d'occasionner des dépenses à la charge de la sécurité sociale. Dans la mesure où il ne s'agissait en aucun cas de créer une dépense, j'aimerais que quelqu'un m'explique pourquoi il est impossible de débattre de semblables amendements en séance.
Il semble, monsieur Muzeau, que la situation que vous évoquez résulte simplement de l'application de la loi organique. Je laisse toutefois le soin à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, puis à M. le président de la commission des finances, de vous répondre. Nous passerons ensuite à l'examen du premier amendement sur ce projet de loi, mes chers collègues.
Vous avez la parole, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.
Pour répondre à la question intelligente de M. Le Guen, je précise que je respecterai les traditions de la commission des affaires sociales jusqu'au mois de mars prochain. En revanche, à partir du mois de mars, je compte bien me prononcer non seulement sur le respect de l'article 40, mais aussi sur la question des cavaliers.
J'ai respecté la tradition jusqu'à présent parce que cela m'a été conseillé, mais aussi afin que l'on puisse discuter en commission de certains amendements qui ne donneront pas lieu à un débat en séance publique, ce qui permet à leurs auteurs de faire valoir leur position, ne serait-ce que dans un cadre restreint.
Toutefois, je le répète, j'ai bien l'intention d'appliquer le nouveau règlement à compter du mois de mars prochain.
Pour répondre à M. Muzeau, les sanctions pénales telles que celles qu'il a évoquées sont considérées comme des cavaliers par application de la loi organique, selon laquelle ce type de propositions n'entre pas dans le champ du débat sur le PLFSS. C'est un fait, la loi doit respecter la loi organique et la Constitution.
En principe, chaque président de commission a le pouvoir de déclarer irrecevable un amendement qu'il estime contraire à l'article 40 ou constituant un cavalier. Pour les raisons qu'a exposées Pierre Méhaignerie, tous les présidents de commission ne font pas systématiquement usage de ce pouvoir. Toutefois, pour répondre à l'exigence d'unité de jurisprudence formulée par le Conseil constitutionnel, le président de la commission des finances est chargé, par délégation du président de l'Assemblée, d'assurer cette unité. Il me revient donc d'assurer ce rôle et de me prononcer à la fois sur la question de l'article 40 et sur celle des cavaliers. Croyez-moi, je me passerais volontiers de cette tâche, qui nécessite de passer beaucoup de temps sur chaque amendement ! Je précise qu'en cas de doute, celui-ci profite presque systématiquement à l'auteur de l'amendement.
Il me paraît difficile d'affirmer qu'il est impossible de débattre. En effet, la plupart des députés savent très bien comment contourner l'obstacle que constitue l'article 40 – par exemple, en demandant au Gouvernement de produire un rapport sur telle ou telle question, ce qui justifie de l'évoquer en séance. Par ailleurs, il me semble qu'avec les 520 amendements déposés sur ce texte, nous avons largement de quoi débattre, mes chers collègues !
Je suis saisi par M. Bur d'un amendement n° 660 .
Cet amendement vise à préciser une unité de compte – en l'occurrence, que les milliards dont il est question à l'annexe A de l'article 2 sont des milliards d'euros.
Quel est l'avis de la commission ?
Je mets aux voix l'ensemble de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.
(L'ensemble de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 est adopté.)
Nous abordons maintenant la deuxième partie du projet de loi, concernant les dispositions relatives à l'année 2008.
Sur l'article 3, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à M. Jacques Desallangre.
Monsieur le ministre, il me semble que vous pratiquez le pilotage à vue des comptes de la sécurité sociale, dont le déficit croissant risque de nous conduire à la remise en cause de ce système solidaire. Vous vous contentez d'appliquer quelques rustines de temps à autre, le Gouvernement étant incapable de proposer une réforme globale, cohérente et courageuse.
Et ne me répondez pas que nous n'avons rien à proposer, car vous savez très bien que, pour ma part, je plaide depuis des années pour une réforme globale de l'assiette de cotisation – je me souviens l'avoir déjà fait en 2004 auprès de M. Bertrand. Seule une telle réforme nous permettrait de préserver l'essentiel, à savoir la mutualisation des risques, la gestion intergénérationnelle et la solidarité.
Si le Gouvernement s'obstine à refuser d'explorer la voie d'une réforme des prélèvements, il se condamne à une perpétuelle agitation improductive comme celle à laquelle nous assistons depuis sept ans. À n'appliquer que quelques vieilles recettes consistant à abaisser les pensions, diminuer les remboursements, ponctionner telle ou telle catégorie – cette année, c'est le tour des mutuelles –, vous risquez de mettre à mal le principe de solidarité et de détruire le pilier principal, à savoir la confiance intergénérationnelle, sans pour autant assurer l'équilibre financier du régime.
Si vous poursuivez dans cette voie, le déficit va s'accroître en raison du vieillissement de la population. En 2030, la France comptera 20 millions de personnes de plus de 60 ans, dont 5 millions de plus de 80 ans, alors que les proportions étaient inférieures de moitié en 1975. Le vieillissement aura une incidence directe sur la situation financière du régime de retraite. Les comptes de la CNAV se dégradent rapidement : le déficit, qui était de 2 milliards en 2006, est passé à 4,6 milliards en 2007 et à 5,7 milliards en 2008. Il est permis de se demander si l'on doit faire confiance à vos projections pour 2009 à 2012 inscrites dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Vous faites semblant de croire, monsieur le ministre, à une résorption du déficit, alors que l'ensemble des études sérieuses des économistes et de la CNAV tablent sur son aggravation.
Les études prospectives menées avec l'INSEE prévoient un triplement de la masse des pensions à servir chaque année entre 2006 et 2050. En l'absence d'actions structurelles, le déficit annuel franchira la barre des 15 milliards en 2015 et celle des 25 milliards en 2020. En termes de déficit cumulé, la CNAV aura plus de 65 milliards de dettes en 2015 et 115 milliards en 2020. Ces chiffres sont d'une telle ampleur qu'ils ne sont pas sans évoquer ceux de la crise financière que nous traversons actuellement !
Vos mesurettes sont donc hors de proportion avec les enjeux. Plutôt que de prendre le risque d'une réelle réforme qui déplairait à vos alliés, vous allez progressivement amputer les pensions versées, par des biais multiples : absence de revalorisation malgré l'inflation, ou encore allongement de la durée de cotisation, qui se traduit en fait par une baisse des pensions.
Cette faillite annoncée a peut-être été souhaitée par certains d'entre vous, qui ne rêvaient que de substituer au système par répartition un régime de capitalisation, mais le modèle libéral est un peu moins en vogue ces derniers temps ! Il est vrai que la crise financière et la chute des fonds de pensions chargés de verser les retraites, notamment aux États-Unis, conduisent les libéraux à la prudence, alors qu'hier encore, ils vantaient le régime par capitalisation avec une assurance dogmatique qui paraît aujourd'hui bien dérisoire.
En 2005, on comptait 2,2 actifs pour un retraité de plus de 60 ans ; en 2050, il n'y en aura plus que 1,3 ou 1,4. La France a un très fort rapport de dépendance, ce qui signifie que pour dix personnes en âge d'activité, il y en a sept autres – celles âgées de zéro à 19 ans et celles de plus 65 ans – qui seront inactives. Nous devons abandonner l'assiette salariale comme source principale du financement car elle est devenue insuffisante et inadaptée, son poids relatif étant en régression pour des motifs démographiques, mais aussi et surtout en raison de la baisse de la part du travail dans la création de valeur ajoutée. À mesure que les besoins de financement, en croissance, reposeront sur une part de plus en plus faible de la population, la situation sera de moins en moins tenable. Il faut donc impérativement trouver d'autres sources de financement, qui existent bel et bien : prélevons sur la richesse produite et allégeons progressivement la charge pesant sur la masse salariale !
Voilà, monsieur le ministre, madame la ministre, quelques pistes de réflexion pour sauver nos régimes solidaires, expression de notre idéal républicain. Je crains que votre majorité n'y soit malheureusement pas favorable et qu'elle préfère attendre la faillite – ce refus d'agir constitue un choix politique – pour remplacer le système actuel de retraites par un régime par capitalisation, ce qui revient à opter pour un « chacun pour soi » irresponsable.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, l'article 3 vise à rectifier les données en matière de recettes et, parallèlement, nous permet de vérifier pour l'année 2008 le tableau des équilibres du régime général. Qu'il me soit d'abord permis de constater que les prévisions laissent apparaître une nouvelle dégradation de la branche vieillesse…
…puisque vous nous proposez d'ajouter un milliard d'euros de déficit complémentaire à la branche vieillesse.
Par ailleurs, on constate une hausse de 0,4 % sur le régime général. On pourrait, à l'instar de M. le ministre du budget, se féliciter de voir que les chiffres sont meilleurs que ceux qui avaient été annoncés lors du vote précédent sur le régime général. Cependant, il ne s'agit que de projections. Ainsi, le budget pour 2008 avait été construit sur la base d'une évolution de 4,8 % de la masse salariale. Or, en juin dernier, la commission des comptes de la sécurité sociale a revu cette estimation à la baisse, la ramenant à 4,5 %.
Depuis plusieurs mois, les chiffres du chômage ne sont pas bons, et nous savons que cela va encore s'aggraver. Dans ces conditions, le ministre va-t-il reconsidérer la situation et, s'il estime que la dégradation de l'emploi n'est pas sans conséquences sur les ressources attendues en 2008, va-t-il retenir une évolution plus proche des 3,5 % que des 4,5 %, sachant que 1 % de la masse salariale représente bon an, mal an, près de deux milliards d'euros ?
On constate par ailleurs que l'augmentation des recettes de la CSG, qui pèsent 84 milliards d'euros en 2008, va très nettement s'infléchir l'an prochain.
Le ministre a déclaré tout à l'heure que l'on n'attendrait pas le comité d'alerte pour prendre les mesures qui s'imposent et qu'il fallait agir rapidement. Profitons donc de ce PLFSS, qui est l'occasion d'un débat démocratique, plutôt que d'attendre le dernier moment pour que le Gouvernement décide unilatéralement de ce qu'il faut faire, dos au mur. Nous profiterons pour notre part des débats pour interroger la ministre sur les dispositions à prendre dans le cas où l'impasse serait de 4, 5 ou 6 milliards d'euros.
Comme en 2007, le dépassement de l'ONDAM sera en 2008 entièrement imputable aux soins de ville, pour près d'un milliard d'euros. Ce dépassement est certes moindre que l'année précédente, mais c'est sans compter les franchises que vous avez instaurées. Hors franchises, les soins de ville ont progressé de 4 %, soit sensiblement autant qu'en 2007. C'est une nouvelle preuve de l'échec de la politique de maîtrise médicalisée des dépenses de santé que vous avez instaurée en 2004. En revanche, les établissements hospitaliers sont, eux, restés dans les clous.
L'année 2008 est également marquée par l'accélération de la croissance des indemnités journalières, en hausse de 4,5 % sur les huit premiers mois. Il s'agit pourtant du seul secteur où la maîtrise médicalisée s'est révélée efficace. Cette hausse est-elle donc liée à un relâchement dans les contrôles ou plutôt, dans un contexte de hausse du chômage, d'intensification des cadences et d'aggravation de la précarité, à une recrudescence des pathologies liées au stress, comme, par exemple, les troubles musculo-squelettiques ? Ne craignez-vous pas en effet, monsieur le ministre, qu'avec la crise financière, les annonces de plans sociaux et les fermetures de sites industriels dans tel ou tel bassin d'emploi, les indemnités journalières ne repartent à la hausse malgré l'intensification des contrôles ?
L'article 3 rectifie pour chaque branche les prévisions de recettes et les tableaux d'équilibre pour 2008 du régime général, des régimes obligatoires et des organismes concourant au financement de ces régimes.
Ces prévisions correspondent à peu près à celles votées l'an dernier, mais à quel prix ! Celui de l'instauration, en plus du ticket modérateur et autres participations forfaitaires, de nouvelles franchises, dont le but est, pour reprendre un terme à la mode, de « responsabiliser » les patients qui, c'est bien connu, tombent malades par plaisir, surtout quand il s'agit d'accidents du travail ou de maladies professionnelles.
Par cette mesure, vous avez mis un peu plus à mal le principe de base de notre sécurité sociale, qui veut que chacun paie selon ses moyens et reçoive selon ses besoins. C'est à ce prix que vous avez voulu contenir le déficit de la branche maladie, lequel reste néanmoins important.
C'est une évidence, la maîtrise des dépenses a atteint ses limites, et l'on ne viendra pas à bout de ce déficit structurel sans modifier l'assiette de cotisations à la sécurité sociale afin d'augmenter les recettes, comme nous le réclamons sans relâche depuis des années. Pour ces raisons de fond, nous ne pouvons pas approuver l'article 3.
Les chiffres qui figurent dans cet article pour l'année 2008 constituent une preuve supplémentaire de l'échec de l'ambitieux programme de 2004.
Je m'étonne d'ailleurs que le ministre se soit félicité de ce qu'il a qualifié de réussite. Monsieur le ministre, vous devriez réapprendre à lire. J'étais, il y a quelques années encore, enseignant en école primaire et j'ai gardé quelques bonnes méthodes de lecture et de calcul. Je me mets gracieusement à votre disposition pour vous apprendre à lire la réalité des chiffres.
Proposez donc vos services à Xavier Darcos !
Vous parlez maintenant d'un retour à l'équilibre en 2012. Mais pourquoi pas en 2022, en 2043 ou en 2094 ?
Si encore le déficit était lié à une amélioration de l'accès au soins, mais ce n'est pas le cas, puisqu'il est prouvé qu'aujourd'hui, en France, des millions de personnes n'ont plus accès aux soins. La crise actuelle ne va rien arranger, pas plus que le double langage du président Sarkozy, que d'ailleurs vous n'écoutez pas.
Vous nous demandez sans cesse où sont nos propositions. Mais je vous rappelle que nous sommes dans l'opposition.
Si vous voulez démissionner et nous céder la place, monsieur le ministre, nous sommes volontiers preneurs. En attendant, nous vous déclinons chaque jour nos propositions par le biais de nos amendements, mais, chaque fois, vous faites la sourde oreille. Vous ne savez ni lire ni compter, mais vous avez de surcroît un problème de surdité. Il y a quelques minutes encore, nous suggérions de revoir les exonérations de charges, dont le moins que l'on puisse dire est qu'elles ne sont pas très efficaces, en tout cas si l'on en juge par les 40 milliards d'euros épinglés par la Cour des comptes.
J'en reviens au double langage du président Sarkozy, qui veut nous fait croire que l'on change de cap. Mais dès qu'on parle de taxer les parachutes dorés, c'est non ! Dès qu'on parle de taxer les stock options, c'est encore non, on n'y touche pas ! Écoutez donc nos propositions et votez-les. Elles permettront le retour à l'équilibre. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Comme Pascal Terrasse, j'aimerais savoir de quelle manière vous allez prendre en compte la situation économique et sociale pour les deux derniers trimestres. À lire le rapport, vous escomptez une progression de la masse salariale et des revenus, ce qui n'est pas ce que laissent présager les chiffres du chômage du mois d'août et, bientôt sans doute, ceux du mois de septembre. Prenez-vous ou non en compte ces avertissements et ne pensez-vous pas justifié d'anticiper d'autres mauvais résultats ?
Ma seconde question découle de la précédente : qu'en est-il du « rebasage » pour 2009 ?
La parole est à M. le rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.
Je voudrais d'abord répondre à ceux qui nous disent que rien n'a été fait, ce qui se traduit par des déficits – mais Mme Fraysse a eu l'honnêteté de reconnaître que nous étions arrivés à contenir ces derniers, ce dont je la remercie.
La branche vieillesse a contribué pour beaucoup à l'aggravation de ces déficits, et il me semble, mes chers collègues, que vous oubliez que la dégradation du solde de la caisse vieillesse est dû à un formidable progrès social, dont vous n'avez jamais voulu entendre parler quand vous étiez au pouvoir, entre 1997 et 2002, mais qui a permis à des salariés, nés entre 1949 et 1952 et ayant eu des carrières longues, de partir à la retraite de manière anticipée.
Cela concerne 300 000 personnes, qui savent ce que le progrès social veut dire !
Mais, naturellement, vous ne mettez jamais en avant ce progrès social, qui vous gêne parce qu'il vous renvoie à votre propre timidité en la matière.
En ce qui concerne la dégradation de la situation économique, la Commission des comptes a assez rapidement pris acte du ralentissement qui se faisait jour. Elle a fait preuve en cela d'un réalisme partagé par le Gouvernement, puisque la progression de la masse salariale est désormais évaluée à 4,5 %, chiffre qui apparaît réaliste compte tenu de l'évolution des salaires liée à la hausse de l'inflation que nous avons connue cette année.
Le Gouvernement a fait preuve du même réalisme en tablant sur une prévision de croissance de 1 % en 2009. Le ministre s'est d'ailleurs engagé à ajuster les données des recettes dès que l'INSEE nous fournira des chiffres stabilisés. Attendons quelques jours ; d'ici la CMP nous y verrons plus clair.
Monsieur Bapt, vous nous parlez de l'ONDAM 2008. Les dépenses ont crû de 3,3 %, ce qui est assez proche de l'objectif. C'est d'ailleurs le meilleur résultat depuis 1999.
Ce n'est pas ce que je dis, monsieur Roy, mais on peut parfois admettre la réalité des chiffres. Vous pouvez clamer de votre forte voix que tout va mal, mais cela n'y change rien : c'est la meilleure performance depuis 1999 !
C'est grâce aux 800 millions d'euros des franchises médicales, soyez franc !
Bien sûr, mais les franchises peuvent servir à respecter l'ONDAM.
Les indemnités journalières repartent en effet à la hausse en 2008, avec une augmentation de 4,7 %. Cela signifie que les effets du plan de 2004 s'estompent et que nous allons devoir relancer la machine.
Nous avons réagi en permettant à l'employeur de demander une contre-visite – c'est dans le PLFSS de l'an dernier – et en introduisant la possibilité pour l'assurance maladie de suspendre les indemnités journalières. Les caisses ont donc aujourd'hui des possibilités juridiques supplémentaires d'intervention ; je me suis très récemment rendu dans les locaux d'une caisse d'assurance maladie pour vérifier que les choses étaient faites, et pour discuter avec ceux qui s'en occupent sur le terrain.
Monsieur Roy, vous proposez, pour éliminer le déficit de l'assurance maladie, de taxer les stock-options et les parachutes dorés – vous avez l'air d'aimer ces termes-là,…
…mais c'est un peu court ! Le parti socialiste ne gouverne pas, il a donc tout son temps pour réfléchir : ces propositions sont bien superficielles. Vous devriez travailler plus !
Travailler plus pour gagner plus !
Vous ne gagnerez pas plus, mais vous aurez plus de résultats. Ce n'est pas comme cela, monsieur Roy, que nous réglerons le problème de l'assurance maladie : voilà au moins une certitude.
Monsieur Le Guen, plus sérieusement, je me suis exprimé sur la masse salariale pour 2008. Je le répète encore une fois, j'ai indiqué que si nous revoyons les perspectives de croissance, nous reverrons aussi les perspectives de masse salariale, et nous réviserons aussi les recettes prévues par le PLFSS.
Vous connaissez le tarif, si j'ose dire : vous savez bien que 0,1 % de masse salariale, c'est environ 200 millions d'euros ; nous ne sommes pas passés de 4,8 % à 4,5 % parce que la commission des comptes nous l'a demandé, mais parce que nous l'avons calculé. Nous avons pensé au mois de septembre que 4,5 % représentait le meilleur chiffre possible. Ce sera peut-être moins, selon les perspectives de croissance ; nous verrons cela en fonction des résultats du troisième trimestre…
Ces résultats sont mesurés par l'INSEE, et selon la croissance mesurée au troisième trimestre, Mme Christine Lagarde décidera, ou pas, de réviser les estimations et de revoir la masse salariale.
Non : pour l'année 2008. Je l'ai dit et redit.
J'ajoute, en réponse à M. Bapt, que nous nous sommes également interrogés sur la hausse des indemnités journalières. Je remarque que la première partie de l'année 2008 a vu l'emploi augmenter, et que cela entraîne une hausse mécanique des arrêts maladie : les gens travaillent plus, il leur arrive d'être malades.
S'agissant de la croissance, M. le ministre fait reposer son argumentation sur des indicateurs de l'INSEE. Mais nous disposons d'ores et déjà d'éléments solides : si nous nous tournons vers l'ACOSS, au conseil de surveillance de laquelle j'appartiens, les chiffres démontrent déjà que l'évolution de la masse salariale est inférieure à ces prévisions.
Mais non !
Je vous donnerai tout à l'heure les éléments nécessaires, monsieur le ministre ; nous ne sommes pas d'accord.
Nous prenons acte, monsieur Bur, de la décision prise en 2003 sur les carrières longues. C'est en effet une mesure de justice sociale. La difficulté, c'est qu'elle n'est pas financée ! M. Denis Jacquat est membre du conseil de surveillance de la CNAV : il pourrait confirmer que le dispositif des carrières longues coûte 2,2 milliards d'euros par an. Ce qui dégrade la situation de la CNAV, c'est d'abord cette mesure. Car qui, concrètement, la finance ? Ce sont – indirectement – les douze millions de retraités qui voient leur pouvoir d'achat diminuer. Ce n'est pas acceptable !
(L'article 3 est adopté.)
Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 4.
La parole est à M. Pascal Terrasse.
Cet article porte sur les organismes chargés de l'amortissement de la dette, la CADES et le FRR. Je rappelle d'abord que la dette portée au compte de la CADES se monte, dans son ensemble, à 107,6 milliards d'euros. Il reste aujourd'hui plus de 70 milliards à amortir.
Lorsque la CADES a été créée, un mécanisme financier destiné à couvrir l'amortissement a été institué : la contribution de remboursement de la dette sociale. Je ne comprends pas, aujourd'hui, qu'une part de la CSG – 0,2 % exactement – soit affectée au remboursement de la dette sociale. Il y a là un détournement d'objectif de la contribution sociale généralisée ! La CSG devait financer les dépenses sociales d'aujourd'hui, et non soutenir une caisse qui a pour mission d'amortir la dette sociale d'hier. Ces 0,2 % seront retirés du fonds social vieillesse et, dans les années à venir, l'affaibliront.
D'autre part, j'entends beaucoup parler du fonds de réserve pour les retraites. Je partage à ce sujet l'avis de notre rapporteur M. Bur : s'il est vrai que, le 14 octobre dernier, le conseil de surveillance a constaté que le rendement du FRR serait inférieur de 14% à leurs prévisions, les raisons, vous les connaissez : l'impact de la crise systémique et de la crise financière. Je crois qu'il ne faudrait pas profiter de ces éléments pour remettre en question le FRR. On sait très bien que les produits financiers qu'il détient ne s'appuient pas sur une titrisation de produits toxiques ; ce sont surtout des obligations. Le FRR ne doit être soldé qu'à l'horizon 2020-2022, il faut donc tenir le coup.
On pourrait d'ailleurs imaginer de revoir l'affectation des 2 % sur les revenus du capital ; nous avions fait des propositions en la matière.
J'ai aussi été très étonné que M. Éric Besson, secrétaire d'État en charge de l'économie numérique, renonce à l'ouverture d'une quatrième licence UMTS : cette ouverture aurait permis, outre un renforcement bienvenu de la concurrence, de renforcer les ressources du FRR.
Encore !
C'est la première fois que je m'exprime sur l'article 4, madame la ministre ! (Sourires.)
Je commencerai par revenir au problème des indemnités journalières. M. le ministre nous dit : il y a eu du relâchement, on va renforcer les contrôles. Mme Montchamp ajoute que, comme plus de gens ont travaillé en 2008, plus de gens se sont arrêtés.
Mme Billard est un trublion ! (Sourires)
Mais, en 2008, de nombreux emplois ont été détruits.
Les problèmes au travail sont grands, ils sont sérieux et douloureux : il y a des problèmes de santé, de précarité, de stress au travail. Je ne crois pas qu'il s'agisse seulement de relâchement, je ne crois pas qu'il s'agisse simplement du contrecoup de l'augmentation du nombre d'emplois.
Dans L'Espace social européen, une publication que vous connaissez bien,…
…je lis cette semaine un entretien avec quelqu'un qui est sans doute très compétent, M. Ducatte, directeur du management et des relations sociales au cabinet Epsy – quelqu'un qui ne siégerait sûrement pas de ce côté-ci de l'hémicycle.
Voici ce qu'il dit : « Toutes les périodes d'incertitudes, quand les craintes sur l'emploi des uns côtoient les attentes en matière de pouvoir d'achat des autres, se traduisent par une radicalité des comportements. Les dégradations de l'outil de travail, principalement informatique » – ce point m'a beaucoup étonné – « sont en forte augmentation depuis six mois, tout comme les séquestrations de dirigeants. Nous surfons aujourd'hui entre le risque d'une conflagration sociale aux issues incertaines et celui d'une perte de motivation de toutes les catégories de personnel, et il n'est pas dit que l'apathie sociale soit plus grave que l'apathie générale qui gagne lentement tout le pays ».
Avant de balayer d'un revers de main l'interprétation à donner à cette hausse des arrêts de travail, il faudrait considérer cela et, pour reprendre un mot de M. Préel, médicaliser notre approche de ce phénomène qui peut être très inquiétant.
Nous ne nous sommes pas compris. Je parlais de la première moitié de l'année 2008, et des chiffres que nous avons, pour souligner la crise n'y tient aucun rôle. Les questions que vous posez sont évidemment de véritables questions – même si je ne suis pas sûre que ces interrogations aient leur place à l'article 4 de ce PLFSS !
Je voudrais rassurer M. Terrasse, qui s'inquiète de l'avenir du FRR. Certes, au 30 septembre, le conseil de surveillance a pris acte que la performance était moins bonne que précédemment ; alors que les bourses ont baissé de 24 %, le FRR n'a perdu que 14,5 %. Le conseil a toujours privilégié une démarche à long terme, compte tenu de la vocation du FRR qui est de sécuriser les retraites à l'horizon 2020-2040, à travers une forme de lissage.
D'une part, il est important que le Parlement le sache, le F2R n'est investi dans aucun produit de titrisation toxique. D'autre part, le conseil de surveillance a considéré à l'unanimité, y compris les représentants de l'ensemble des centrales syndicales qui y participaient, qu'il n'était pas question de modifier notre allocation stratégique puisque nous sommes investis sur le long terme. D'autant que, finalement, si nous avions choisi une autre forme d'allocations stratégiques privilégiant davantage les obligations dans un souci de prudence, le résultat n'aurait sans doute guère été différent.
Aujourd'hui, nous considérons, au F2R, qu'il faut continuer la politique qui a été menée et faire profiter l'ensemble des salariés français dans les années à venir des plus-values que nous pourrons dégager au niveau des sommes investies – je rappelle que plus de 30 milliards d'euros ont été investis au F2R. C'est plutôt une bonne nouvelle.
Sur l'article 5, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
L'article 5 prévoit de diminuer la dotation du fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés de 100 millions d'euros, la dotation du fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins de 70 millions, et la dotation de l'établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires de 20 millions.
Cette annulation pour cause de non-utilisation pourrait laisser croire qu'il n'y a pas de besoins. Il n'en est rien, bien au contraire.
Je comprends le souhait du Gouvernement de faire des économies, mais ces fonds répondent à des besoins réels. S'ils ne sont pas utilisés, c'est en raison de lourdeurs administratives, de retards dans la préparation des dossiers.
Qui peut nier que les établissements de santé ont besoin d'être modernisés ? De nombreux établissements souhaiteraient pouvoir bénéficier de ces fonds. Il conviendrait donc de se donner les moyens de répondre en temps voulu aux demandes venant des établissements.
Qui peut nier que les soins de ville ont besoin de voir la qualité et la coordination améliorées ? Les besoins me semblent avérés.
Plutôt que de diminuer les dotations, ne conviendrait-il pas que le Gouvernement veille à les utiliser ?
Cet article m'interpelle. Il nous propose de diminuer les dotations de l'EPRUS – ce que l'on peut comprendre – mais également du fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés et du FIQCS. Pourtant, sur le terrain, nombre d'acteurs manquent de financement, notamment pour faire fonctionner les réseaux. L'installation des réseaux est essentielle pour permettre la mise en place de la coordination des soins et des programmes coordonnés de soins, notamment pour les patients chroniques. J'aimerais, madame la ministre, que vous nous donniez quelques explications sur cet article.
En ces périodes de difficultés financières, toute économie est bonne à prendre. Pour autant, il faut parfois savoir dépenser un peu en matière de santé publique et de prévention, pour permettre des économies conséquentes quand le soin curatif est onéreux à prendre en charge. Dès lors, je m'étonne beaucoup de la réduction de la dotation du fonds de modernisation des établissements publics et privés.
Compte tenu de la situation du tissu hospitalier, il est étonnant que des projets ne soient pas remontés par les agences régionales d'hospitalisation pour permettre l'aide à la restructuration, à la modernisation de nos hôpitaux et établissements hospitaliers publics et privés.
Et l'étonnement est encore plus grand ce qui concerne le FIQCS. M. Bapt évoquait les réseaux mais il n'y a pas qu'eux. Ainsi, 20 millions d'euros sont gelés dans le domaine de l'expérimentation de la permanence des soins, alors même que M. le président soulignait l'autre jour que des parlementaires avaient travaillé sur le sujet et produit d'excellents rapports, M. Colombier ou MM. Bernier et Christian Paul à propos de la démographie médicale. Des solutions ont été proposées qui méritent d'être reprises. Les territoires les soutiennent mais elles ne sont pas prises en charge dans ce FIQCS. C'est étonnant.
Sur la permanence des soins, il était indiqué qu'il était particulièrement important de traiter du sujet de la régulation médicale de la permanence des soins. De nombreuses régions le font, cela mériterait d'être évalué et pourrait donner lieu à un code de bonne conduite. Un tel code aurait une fonction d'éducation qualitative de la population, il permettrait de rendre homogènes les réponses que nous faisons quand nos concitoyens nous interpellent sur ce sujet. Je pense qu'on aurait pu consacrer les sommes du FIQCS à soutenir de telles initiatives, et je ne parle pas des maisons médicales ou des maisons pluridisciplinaires.
Par ailleurs, contrairement à ce que disait Gérard Bapt, je m'étonne que les crédits de l'établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires ne soient pas consommés. On ne parle plus du tout du risque de pandémie de grippe aviaire.
Si !
Pouvez-vous, madame la ministre, nous donner des renseignements sur la situation au niveau national et international sur ce sujet ?
La mission parlementaire sur la grippe aviaire à laquelle j'ai participé avait proposé de mettre en place toute une série de procédures pour prévenir cette pandémie si elle devait arriver dans notre pays. Des mesures ont été prises pour constituer des réserves de traitement ou de masques en particulier pour la grippe aviaire. Pour autant, le sujet est immense et ne se réduit pas qu'à des problèmes strictement sanitaires. Il faut réfléchir par exemple à la place de l'État dans une situation de confinement, à la place de l'éducation nationale, au rôle de l'État. Je pense qu'il y a matière à continuer de mener des études, à faire des exercices qui permettent d'être opérationnels au cas où ce type de pandémie arriverait.
Quand nous avions travaillé sur ces sujets, avec Xavier Bertrand à l'époque, nous avions indiqué qu'il était fondamental de pratiquer des exercices. Un incendie s'est déclaré récemment dans le tunnel sous la Manche. Les fréquents exercices qui sont pratiqués dans cette région avec tous les acteurs concernés ont permis de traiter le sujet de façon exemplaire, et d'éviter que des victimes ne soient à déplorer. Je suis donc étonnée que cette ligne de crédits ne soit pas plus consommée.
L'article 5 modifie certaines dépenses votées l'an dernier et décide notamment d'un gel de 100 millions d'euros de la dotation du fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés.
Rappelons que ce fonds créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 finance notamment les contrats d'amélioration des conditions de travail des personnels, les actions de modernisation sociale, les aides destinées à favoriser la mobilité et l'adaptation des personnels des établissements engagés dans des opérations de modernisation et de restructuration, les dépenses d'investissement et de fonctionnement des établissements de santé.
On pourrait croire, à tort, puisque la totalité du fonds n'a pas été dépensée, que les hôpitaux n'en ont pas besoin. Or d'après M. Xavier Bertrand, plus de 13 % des établissements ne respectent pas la conformité incendie, quinze établissements sont identifiés comme présentant de grandes surfaces amiantées, et deux centres hospitaliers aux Antilles ne sont pas conformes aux normes anti-sismiques. Il ne s'agit pas d'une liste à la Prévert, ce ne sont que quelques exemples. Quant aux hôpitaux de proximité, c'est fréquemment au nom de la sécurité qu'ils sont fermés.
Et vous nous annoncez qu'une partie non négligeable de l'enveloppe qui devait être consacrée à la modernisation de ces établissements de santé n'a pas été consommée. S'il est en effet de bonne pratique budgétaire de geler les dotations d'un fonds à hauteur des crédits non consommés, la vraie question est de savoir pourquoi, eu égard à la situation des établissements de santé, il existe un tel décalage entre les montants engagés annuellement par les agences régionales de l'hospitalisation au titre de ce fonds et les montants effectivement décaissés par la Caisse des dépôts et consignations, gestionnaire de ce fonds. C'est la réponse à cette question qui permettrait d'envisager des actions pour éviter ce décalage.
Je voudrais consacrer mon intervention au fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins, le FIQCS, et mettre en perspective la rectification à la baisse des crédits qui est prévue à cet article pour 2008 avec l'article 48, qui prévoit une autre réduction de la dotation inscrite pour 2009.
Je rappelle que le FIQCS a été créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 et qu'il correspondait à la fusion de deux fonds, dont il a repris les missions : le fonds d'aide à la qualité des soins de ville, le FAQSV et la dotation nationale de développement des réseaux. Il devait permettre de financer des actions qui devaient être au coeur d'une véritable réforme de parcours des soins, orientée vers une amélioration de la qualité des services des organismes de santé publique, ce qui d'ailleurs serait à terme la meilleure source possible d'équilibre financier de l'assurance maladie.
Le FIQCS est donc chargé de financer le développement des réseaux de santé – j'en ai parlé dans la motion de renvoi en commission – et de prendre en charge le financement des maisons de santé.
Nous avons beaucoup parlé, les années précédentes, du problème de la saturation des urgences des hôpitaux publics, du fait notamment d'un déficit d'accès à la médecine libérale dans certains endroits du territoire, notamment le soir et le week-end, et d'une tendance de nos compatriotes à se rendre directement à l'hôpital plutôt que d'aller voir le médecin traitant.
Les maisons de santé sont fondamentales. Tout à l'heure, mon collègue Roland Muzeau nous citait l'exemple d'une maison pluridisciplinaire de santé libérale dans sa commune de Gennevilliers qui est ouverte sept jours sur sept. Ces maisons permettent de désengorger les hôpitaux, de leur laisser leurs fonctions premières, d'urgence ou de mise en oeuvre d'actes lourds, et de développer des structures, style ces maisons de santé, pour distribuer les soins primaires dont nos compatriotes ont besoin.
L'intérêt de ce FIQCS est donc d'autant plus important. Or, sous prétexte qu'il avait été ajouté comme mission à ce FIQCS le fait de prendre en charge le financement du DMP, dont on sait ce qu'il en est aujourd'hui,…
…on nous propose de réduire les crédits, pour 2008 et pour 2009, alors que deux tiers des crédits sont affectés aux missions régionales de santé et un tiers à des actions de portée nationale ou interrégionale. Nous avons vraiment besoin de ces crédits. S'ils n'ont pas été dépensés en 2008, c'est plus en raison d'une faiblesse de la volonté que d'un manque de besoins.
Tout à l'heure, pendant que je défendais la motion de renvoi en commission, madame la ministre, vous aviez l'air de dire que, finalement, le décret était enfin sorti, contrairement à ce qu'indiquait le rapport. La loi de financement pour 2007 avait inscrit 178 millions d'euros de crédits pour le FAQSV et 170 millions pour la DNDR de l'époque, ce qui faisait pour le FIQCS 348 millions d'euros. Pour 2008, les crédits étaient réduits puisqu'ils passaient de 348 à 301 millions. Avec cet article 5, vous proposez de les ramener à 231 millions, et vous prévoyez de les réduire encore en 2009, à travers l'article 48, sous prétexte qui tous les crédits n'ont pas été consommés.
Franchement, je crois que c'est exactement le contraire qu'il faudrait faire : si l'on voulait soulager les hôpitaux, développer la médecine, inciter les professionnels de la santé à se regrouper, non seulement en tant que médecins mais plus largement, de façon à offrir un service complet de médecine et de santé, pas seulement de soins, à tous les niveaux.
Les cinq minutes sont dépassées.
Bien sûr, mais on peut dire des choses importantes dans une intervention courte.
Il faut vraiment aider les professionnels de santé à ces regroupements et donc utiliser les moyens qui étaient prévus pour le FIQCS au lieu de les réduire, comme vous nous le proposez et dans cet article 5 et dans l'article 48.
C'est pourquoi nous avons déposé à cet article un amendement n° 318 qui tend à supprimer la partie concernant la réduction du budget du FIQCS, et qui peut être considéré comme défendu au terme de cette prise de parole.
La parole est à M. le rapporteur pour les recettes et l'équilibre général.
Une fois n'est pas coutume, je voudrais m'associer aux interrogations de nos collègues. Madame la ministre, au vu de la diminution du montant des dotations de 190 millions d'euros, on peut se poser la question : ces fonds fonctionnent-ils bien ? Est-il normal que la consommation des dotations que nous votons ici soit aussi lente, donnant le sentiment que les priorités auxquelles elles correspondent semblent moins urgentes, voire moins pertinentes ? N'y a-t-il pas une réflexion à mener pour rénover les modalités de ces fonds au service d'un meilleur fonctionnement de notre système de santé, de la restructuration et de l'accompagnement de cette dernière au niveau hospitalier,…
… ou encore de l'amélioration de la qualité de la médecine de ville ? On a parfois du mal à comprendre ces lenteurs administratives.
La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Plusieurs questions ont été posées sur ces différents fonds.
En ce qui concerne le FIQCS, la dotation est fixée pour 2008 à 301 millions d'euros, auxquels s'ajoutent 55 millions de reports. Il faut se rappeler que 82 millions d'euros ont été provisionnés pour financer le GIP-DMP, dont la montée en charge a été retardée…
… puisque le projet DMP a fait l'objet d'une réorientation stratégique. Nous avons bien progressé cette année, et, monsieur Le Guen, vous avez suffisamment participé à nos travaux pour savoir exactement ce qu'il en est, et que j'essaie, avec votre aide, d'ailleurs, d'avancer du meilleur pas sur ce sujet.
En raison de ce retard, il est proposé de réduire cette part de 50 millions d'euros. En outre, l'enveloppe nationale « expérimentations, soins de premier recours et permanence des soins » a un besoin réel de 10 millions d'euros, et non de 30 millions, pour financer le programme des maisons de santé pluridisciplinaires. Je souscris à votre analyse : il s'agit d'une de mes priorités pour parfaire la démographie médicale ainsi que la permanence des soins. Mais 20 millions d'euros ne trouvent pas leur utilité. Ces deux éléments expliquent la réduction de 70 millions pour le FIQCS. Ce fonds disposant tout de même, à la fin de l'année 2008, d'un fonds de roulement de 110 millions d'euros, il n'est absolument pas aux abois.
Le FMESPP connaît, quant à lui, d'importants délais dans l'utilisation des crédits. Les causes en sont multiples : le report de la réalisation de certaines opérations, les retards dans les demandes de paiement des établissements ou l'abandon pur et simple de l'opération initialement retenue par l'ARH. Fin 2007, le solde cumulé était de plus de 550 millions d'euros.
Nous l'avons doté en 2008 de 301 millions d'euros, auxquels il faut ajouter 72 millions de reports de 2007 sur 2008. Compte tenu du rythme de consommation des crédits observés sur les derniers exercices, la reprise que je vous propose est tout à fait possible sans remettre aucunement en cause les engagements du fonds.
En ce qui concerne l'EPRUS, les prévisions de dépenses pour 2008 concernent principalement le programme de renouvellement des produits et des matériels permettant de maintenir un stock de précaution d'antibiotiques et d'antidotes. Parallèlement, l'EPRUS doit compléter le stock existant de masques FFP2 par l'acquisition de 200 millions de pièces supplémentaires. De même, afin de pouvoir répondre aux épidémies de méningocoque, un stock complémentaire de vaccins anti-méningocoque C devra être constitué. L'acquisition de vaccins anti-méningocoque B devra également être poursuivie pour faire face à l'épidémie qui sévit actuellement en Seine-Maritime. Vous connaissez nos difficultés d'approvisionnement sur ce vaccin.
Des marchés d'importation, de destruction, de transport urgent en froid dirigé sont également en cours de lancement par l'établissement. Le budget de l'EPRUS est établi en autorisations d'engagement et crédits de paiement, ce qui autorise un réglage budgétaire plus précis et permet d'ajuster les dotations de l'établissement au plus près du déploiement du programme d'acquisition et de renouvellement.
Ce programme prévisionnel a été établi pour les années 2008 à 2010 en tenant compte des hypothèses les plus solides, compte tenu du niveau des autorisations d'engagement versées à l'établissement en 2007 – 175 millions par l'État et 135 millions par l'assurance maladie. Les besoins en AE et CP apparaissent moins importants que prévu en 2008 en raison, d'une part, des délais administratifs de transfert de marché de la DGS à l'EPRUS et, d'autre part, des analyses en cours sur les stratégies de renouvellement des stocks, qui tendent à reporter à 2009 certains marchés. C'est dans ce contexte que la dotation de l'assurance maladie a été ramenée à 55 millions, mais nous maintenons, avec ces crédits, ce dont l'EPRUS a besoin.
La lutte contre la pandémie aviaire et la préparation à des crises de pandémie restent une priorité du Gouvernement. J'en veux pour preuve le grand exercice national qui s'est déroulé au mois de décembre, mobilisant l'ensemble du Gouvernement dans ce qu'on pourrait pompeusement appeler la war room du ministère de la santé, spécialement dédiée à cet effet. Cet exercice national avait été précédé d'exercices régionaux. Je me suis moi-même rendue à Bordeaux pour piloter l'exercice de zone dans cette ville. Je m'étais, dans la même période, rendue à Washington pour rencontrer les ministres de la santé du G8 et du Mexique, en particulier mon homologue le secrétaire d'État américain à la santé, pour régler un certain nombre de problèmes, en particulier la négociation avec les pays dont la pandémie était originaire, et les problèmes de propriété de souches virales, extrêmement conflictuels entre les pays qui développent les vaccins et les pays d'origine de la pandémie.
Je vous signale enfin que la lutte contre la pandémie virale est l'une des trois priorités que j'ai fixées à la présidence française de l'Union européenne pour le Conseil des ministres de la santé. C'est ainsi que le Conseil de septembre a vu se dérouler un exercice de préparation à la pandémie virale, auquel j'ai participé avec l'ensemble de mes homologues ministres de la santé. C'est un exercice dont nous avons tiré de nombreuses leçons pour mieux coordonner notre réponse en cas de pandémie, car on comprend bien que cette réponse ne saurait être uniquement nationale.
Nous en venons à la discussion des amendements à l'article 3. Je suis saisi d'un amendement n° 256 .
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
Il s'agit d'un amendement de suppression, c'est-à-dire d'un amendement bête et méchant, non soumis à l'article 40 qui permet d'écarter les questions que d'aucuns voudraient poser.
Madame la ministre, je vous repose la question : les fonds sont-ils indispensables ? Comment sont-ils gérés ? Pourquoi ne le sont-ils pas dans le cadre de la dotation globale de l'ONDAM, par exemple ? Ce serait plus simple.
Les besoins sont avérés aussi bien pour les établissements publics et privés que pour les soins de ville. S'agissant de fonds pluriannuels, on pourrait imaginer qu'il y a des listes d'attente et donc que le temps de l'instruction des dossiers devrait être pris en considération.
Madame la ministre, vous qui êtes très attachée aux Pays de Loire, et sans doute un peu à la Vendée, vous ne devez pas ignorer qu'un établissement actuellement en cours de restructuration a vu ses travaux, bien que prévus, arrêtés faute de financements pour la deuxième tranche.
Or j'ai compris qu'il y avait 100 millions de dotation.
Je ne demande pas 100 millions, mais une petite partie de cette somme, qui suffirait à résoudre le problème. (Rires.)
Je ne comprends pas, alors qu'il existe des besoins de restructuration, que l'on nous demande d'annuler une réserve ministérielle parce qu'elle ne serait pas utilisée. À un moment où se posent des problèmes de relance de l'économie, notamment dans le secteur du bâtiment, il serait bienvenu que tous ces fonds soient utilisés pour restructurer les hôpitaux.
Enseigner, c'est répéter, monsieur le président.
En ce qui concerne les soins de ville, nous pourrions également évoquer les réseaux en attente de financements. On ne voit pas, là non plus, pourquoi, les fonds n'étant pas utilisés, on ne peut pas financer ces réseaux.
Mais nous allons le faire !
Certains attendent depuis des mois, voire des années ! Alors qu'on les finance, mais qu'on n'annule pas ces dotations !
Contrairement à notre collègue Préel, je crois qu'un fonds d'intervention est un élément déterminant pour nous permettre de financer les réformes que nous souhaitons mener. Parce qu'autrement, soit on est dans du fonctionnement quotidien, soit on attend tout de la politique conventionnelle. Or nous savons tous que la politique conventionnelle a aujourd'hui atteint ses limites les plus extrêmes et que tant que nous ne nous doterons pas d'un outil financier approprié pour la restructuration de l'offre de soins, nous n'arriverons à rien. C'est pourquoi nous vous proposerons la création d'un fonds d'intervention, qui pourrait bénéficier, par exemple, des ressources aujourd'hui affectées à la CADES.
Par ailleurs, madame la ministre, je souhaiterais que vous nous expliquiez comment vous comptez réaliser l'une des promesses du Président de la République les plus récentes, à savoir passer de 7 à 10 % des dépenses de santé consacrées à la prévention ? Inutile de vous dire que nous approuvons totalement cet engagement. (« Oui ! » sur les bancs du groupe SRC.) Cependant, nous ne voyons pas bien comment vous ferez pour obtenir ces trois points, qui représentent tout de même entre 5 et 6 milliards d'euros.
Madame la ministre, vos propos ne m'ont pas convaincue parce que je n'arrive plus à comprendre votre logique : le Gouvernement ne cesse de dire qu'il ne faut pas de contraintes, et qu'il vaut mieux utiliser des incitations. Or lorsqu'il y a des fonds d'incitation comme ceux-ci, ils ne sont pas utilisés ! Alors que tout le monde est d'accord – il n'y a pas ici de clivage gauche-droite – qu'on en a besoin, et que l'on pourrait aller beaucoup plus vite, ce qui améliorerait sensiblement le fonctionnement de notre système de santé. J'ai donc du mal à comprendre que les fonds utilisables ne soient pas utilisés, et qu'en plus, année après année, on réduise les dotations à ces fonds.
Les règles de la maîtrise comptable sont ainsi respectées, monsieur le ministre !
Vous nous répondrez, madame la ministre, qu'il reste un matelas. Mais si c'est le cas, c'est bien parce que ces fonds sont très sous-utilisés. Je finis par me demander s'ils ne relèvent pas uniquement du décorum.
La parole est à M. le rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.
Nous nous interrogeons tous sur les origines du décalage entre les engagements et les décaissements des deux fonds – FMESPP et FIQCS – et de l'EPRUS. Néanmoins, au vu de la réalité financière, la commission ne pourra que donner un avis défavorable sur les deux amendements à l'article 5.
En effet, le fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés dispose de 552 millions d'euros de crédits non consommés. On peut se demander pourquoi ils n'ont pas été utilisés, mais le Gouvernement demande au législateur d'en tirer les conséquences, et de réduire sa dotation de 100 millions d'euros pour l'année 2008.
Quant au fonds d'intervention pour la qualité et la coordination des soins, on sait bien qu'il est né de la fusion du FAQSV – fonds d'aide à la qualité des soins de ville – et de la dotation nationale des réseaux. Il était doté de 301 millions d'euros, et devait participer à l'élaboration du dossier médical personnel à hauteur de 82 millions d'euros. Mais le DMP étant en retard, le Gouvernement propose de réduire la dotation de 70 millions d'euros. Cela me paraît logique.
Enfin, j'en viens à l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires – l'EPRUS. C'est un établissement formidable, créé il y a un an, et destiné aux urgences et aux risques sanitaires. Il a été doté de 75 millions d'euros. Mais il a connu des problèmes à sa tête – je crois qu'il y a maintenant une nouvelle direction. Nous savons que les stocks de masques et de médicaments sont complets. Il faudrait plutôt chercher à savoir où en sont les besoins de renouvellement, compte tenu de la durée de vie de ces stocks. Cela étant, baisser sa dotation de 20 millions d'euros ne me paraît pas non plus illogique.
La réduction de ces trois dotations ne gênera pas pour autant ces structures, qui conserveront des financements suffisants pour l'avenir.
M. Le Guen a excellemment répondu, en partie, à M. Préel : il est très intéressant d'avoir des fonds sanctuarisés, avec des enveloppes qui, sinon, risquerait d'être utilisées pour d'autres objets que ceux qui semblent recueillir, étant donné la structuration de nos comptes sociaux, le consensus de cette assemblée.
Une partie seulement des dotations est utilisée, mais il n'y a pas de liste d'attente : tous les projets qui nous ont été présentés ont été financés.
Voici la ventilation des financements pour 2007 : 704 réseaux de santé, pour un coût global de 135,5 millions d'euros, qui ont traité 750 000 patients ; vingt-sept projets de maisons de santé pluridisciplinaires, et dix autres sont en cours ; vingt-deux projets d'évaluation des pratiques professionnelles, d'un montant de 2,2 millions d'euros, pour 1 582 médecins au niveau national ; 197 projets de permanence des soins, dont 117 concernent les maisons médicales de garde, et soixante-trois des dispositifs de régulation des appels ; douze projets d'aide à l'installation, pour un montant global de 0,6 million d'euros – projets concrétisés dans une seule région pour le moment – ; enfin, onze projets de développement du système d'information sont également financés. Certains projets vont peut-être monter en puissance. Ainsi, j'ai lancé un programme de financement de 100 maisons pluridisciplinaires. Mais, pour l'instant, nous n'avons encore reçu aucun projet. Je les attends.
Avec 50 000 euros, on ne va pas loin, madame la ministre ! Mettez 200 000 euros, et on pourra discuter !
Soyez sérieux, monsieur Terrasse. Je rappelle que les maisons de santé pluridisciplinaires ont vocation à générer des économies dans l'exercice libéral de la médecine, et que les médecins concernés peuvent dès lors, eux aussi, accepter de financer une partie des investissements de ces maisons. Je vous trouve bien généreux avec l'argent des cotisants.
Nous avons eu, disais-je, la possibilité de financer tous les projets en stock ; et nous aurons, avec les crédits que je vous propose d'adopter, la possibilité de gérer le flux des projets à venir. Il n'y a donc aucun intérêt, en bonne gestion, à conserver dans ces fonds de l'argent qui ne sera pas utilisé alors que certains d'entre vous ont, à l'envie, stigmatisé la dette sociale tout au long de leurs interventions. Il faut tout de même établir un minimum de cohérence entre ses critiques et ses propositions.
Monsieur Le Guen, vous vous êtes interrogé sur la façon dont nous atteindrions l'objectif, extrêmement ambitieux, du Président de la République : augmenter de 50 % les crédits alloués aux politiques de prévention. C'est sans doute un des challenges les plus…
… intéressants qu'il nous soit donné de relever. Mais c'est un sujet que nous aborderons surtout au cours de l'examen de la loi relative à l'organisation du système de santé.
En effet, l'outil que nous utiliserons pour parvenir à développer la prévention, ce sera les agences régionales de santé. Car vous serez d'accord avec moi, monsieur Le Guen, pour dire que les politiques de santé publique ont besoin d'une territorialisation.
Quand on constate qu'il y a cinq ans de différence d'espérance de vie entre la région Nord-Pas-de-Calais et la région Île-de-France, et que l'on voit certains marqueurs – Mme Génisson et moi avons souvent eu l'occasion d'en parler –, comme l'obésité dans certaines régions, l'alcoolisme dans d'autres, il apparaît évident qu'il faut cette territorialisation. L'ARS le permettra. Une des deux commissions dédiées sera la commission de santé publique et de prévention. Non seulement les crédits de santé publique et de prévention seront sanctuarisés, mais ils bénéficieront d'un système de fongibilité asymétrique qui permettra de transférer des crédits du curatif vers le préventif, mais jamais l'inverse. Il y aura bien entendu des programmes spécialement dédiés.
La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.
Premièrement, s'agissant des problèmes que nous évoquons, il y a vraiment un besoin de transparence, et une méconnaissance des circuits et des dossiers.
Deuxièmement, je constate que nombre de dossiers de maisons pluridisciplinaires sont en attente, et non financés.
Il faudrait donc établir une communication avec les ARH et avec les URCAM.
Troisièmement, il ne faut pas dépasser, comme le disaient tout à l'heure les deux rapporteurs, le taux de subvention de 20 %.
Bien sûr.
Nous sommes dans un monde empli d'arrosoirs, et je vois des maisons pluridisciplinaires déjà arrosées d'argent public à plus de 50 % ! Je rappelle qu'elles regroupent des professions libérales qui peuvent tout de même payer des locations normales. Le taux de subvention de 20 % ne devrait pas être dépassé. Sinon, il y aura une surenchère de financements.
Et celle qu'a visitée le Président de la République, vous croyez qu'elle était financée à 20 % ?
Elle a 0 % de subvention, monsieur Le Guen !
S'agissant des maisons polyvalentes de santé, il ne faut pas se méprendre sur le concept. Si l'on parle de maisons de garde, elles sont financées par le revenu des professionnels de santé, et donc indirectement par le budget de la sécurité sociale. Mais, s'il s'agit de maisons polyvalentes de santé, on ne s'adresse pas seulement à la médecine de première intention : s'y retrouvent toute une série de professionnels qui travaillent dans le champ médico-social, peut-être aussi des acteurs du monde social tels que les travailleurs sociaux. Nous ne sommes donc plus du tout dans le même concept.
Quand Mme la ministre a annoncé son plan, j'étais de ceux qui ont applaudi. Nous-mêmes, lors de la campagne présidentielle, avions proposé 500 maisons de santé, après avoir vu ce qui se passait un peu partout en France.
Nous : 3 000 !
Mais il y a un manque d'explication. J'ai cru comprendre, madame la ministre, que vous parliez de maisons de garde.
Non, je parlais de maisons de santé pluridisciplinaires.
Alors, s'il s'agit de maisons de santé polyvalentes, ce n'est pas un crédit de 50 000 euros qui en permettrait la réalisation. J'en ai inauguré une dans mon département : s'il n'y avait pas eu l'aide du conseil général, que je préside, rien évidemment ne se serait passé. C'est d'ailleurs à ce moment-là que l'on évoque l'aspect fiscal de la question car on sait très bien que les collectivités locales n'auront pas les moyens d'accompagner tous les projets.
C'est pourquoi je demande à Mme la ministre de réévaluer le montant des opérations. Il ne s'agit pas de prévoir un montant fixe, mais d'envisager de financer un certain pourcentage des opérations. En effet, plus grand sera le nombre de professionnels de santé réunis dans ces maisons, plus élevé sera le coût de l'opération. Dès lors, 200 000 euros pourraient être insuffisants. Je vous demande, madame la ministre, de me préciser ce que vous entendez par « maison de santé pluridisciplinaire ».
Nous avions eu ce débat il y a un an, lors de l'examen du PLFSS pour 2008, et je crois qu'un an plus tard, il y a une double méconnaissance de la réalité des situations sur le terrain : méconnaissance de la part de Mme la ministre, et méconnaissance de la part du président Méhaignerie.
Madame la ministre, nous vous avons déjà dit, à plusieurs reprises – mais, sur ce sujet comme sur d'autres, je ne suis pas sûr que vous nous entendiez –, que ce n'est pas avec 50 000 euros, du FIQCS ou du ministère de la santé, que l'on crée aujourd'hui des maisons de santé. De plus, les crédits apportés par l'État proviennent majoritairement de la dotation globale d'équipement ou de la dotation de développement rural, et presque jamais de votre ministère, encore moins de l'assurance maladie. Je suis prêt à vous fournir une dizaine d'exemples dans une circonscription que je connais bien : nous faisons, dans ces territoires ruraux, une maison de santé par canton, et je peux vous assurer que les crédits du ministère de la santé ou de l'assurance maladie sont extrêmement minoritaires. Si vous voulez imprimer votre marque sur ce dossier des maisons de santé, il va falloir tout de même essayer d'y mettre les moyens.
J'ajoute que la majorité, il y a quelques jours, lors du vote de la loi de finances, a refusé – je pense que mes collègues le regrettent aujourd'hui – un amendement que nous avions déposé et qui aurait permis aux collectivités qui construisent des maisons de santé de récupérer la TVA.
Elles peuvent la récupérer.
Bien sûr que non, monsieur le ministre. Ou alors, donnez instruction aux préfets et aux trésoriers-payeurs généraux de rendre éligibles au fonds de compensation de la TVA les maisons de santé, qui, aujourd'hui, sont rigoureusement laissées à l'écart.
Lorsqu'il donne 50 000 euros, l'État reprend très vite au moins 100 000 euros par le biais de la TVA. Le financement étatique est incohérent : madame Bachelot, vous donnez peu, et M. Woerth reprend beaucoup grâce à la TVA. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
C'est un partage des rôles auquel nous commençons à être habitués.
Sans chercher à polémiquer, je dirais à M. Méhaignerie : si vous pensez qu'en aidant les maisons de santé à hauteur de 20 %, on parvient à lutter contre le désert médical et à faire venir des professionnels de santé dans des territoires qu'ils sont en train de fuir, je crois que vous vous trompez. Avec Marc Bernier qui en était le rapporteur, nous avons mené un travail d'investigation sur ce sujet pendant de nombreux mois. Aujourd'hui, les maisons de santé pluridisciplinaires sont plébiscitées dans les territoires, mais elles nécessitent autre chose que ces aides à 20 % : il s'agit de les rendre plus attractives pour les professionnels de santé, déficitaires dans ces zones.
Rappelons que nous sommes en train de piller les ressources humaines médicales de certains pays, la Roumanie en particulier, parce que la moitié des départements français ne savent pas attirer les professionnels de santé, notamment les médecins généralistes. Une telle méconnaissance de la situation ne va pas nous faire d'avancer ; je crains que dans un an, jour pour jour, nous abordions le même sujet dans à peu près les mêmes conditions.
Sur les maisons de santé, je crois que l'on confond un peu tout : maisons de santé pluridisciplinaires et maisons médicales de garde sont des structures complètement différentes.
Christian Paul vient d'évoquer la mission que nous avions menée, dans un climat de consensus, mais je ne suis quand même pas tout à fait d'accord avec ses propos. Je pense que les mesures financières incitatives ne constituent pas le seul moyen de lutte contre la désertification médicale. Actuellement, les collectivités territoriales se livrent à une sorte de surenchère dont Pierre Méhaignerie vient de parler. Tout le monde participe aux maisons de santé pluridisciplinaires : conseil régional, conseil général, communauté de communes.
Dans le rapport – et on y reviendra lors de l'examen de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires » – nous insistons sur la nécessité d'avoir un projet médical en amont. Avant de proposer le bâti, il faut s'assurer que les professions de santé ont la volonté de s'unir.
Ce n'est pas en construisant des buildings dans chaque canton que l'on va attirer des médecins. Il faut donc se montrer vigilants sur ce point et arrêter la surenchère : ce n'est pas en portant le financement de 50 000 à 100 000 euros que l'on fera venir des médecins. Ce n'est même plus au niveau du canton mais au niveau du bassin de vie qu'il faut envisager un pôle santé regroupant plusieurs maisons de santé pluridisciplinaires et permettant de tisser un maillage uniforme sur l'ensemble du territoire.
Le sujet des maisons de santé est tout à fait primordial. Comme certains l'ont souligné, les aides en faveur de l'installation des médecins en zones sous-denses sont très nombreuses, très complexes : pas moins de treize sortes, accordées par divers acteurs – l'État, l'assurance maladie, les différents niveaux de collectivités territoriales –, selon près de 200 modalités répertoriées. L'un des intérêts de l'Agence régionale de santé sera de constituer un guichet unique pour ces aides qui peuvent atteindre des montants importants. Très justement, Marc Bernier a expliqué que tout cela devait relever d'un projet de pôle de santé, de territoire de santé. Lorsque je suis allée dans sa circonscription, Jean-Pierre Door m'a signalé que deux maisons médicales installées à grands frais étaient vides…
…parce qu'elles ne correspondaient pas à un projet de santé, un territoire de santé structuré. Il faut donc veiller à ne pas parsemer le pays d'éléphants blancs totalement inutilisés, qui auront été très coûteux pour la collectivité parce qu'ils ne correspondront pas à ce territoire de santé.
Merci, madame la ministre. Je crois avoir compris que vous étiez défavorable à cet amendement.
Monsieur le président, je voudrais simplement apporter une précision à M. Christian Paul : si la maison médicale appartient à la commune ou au département qui l'a installée, la collectivité locale peut évidemment récupérer la TVA…
Mais si ! En revanche, si elle appartient à un groupement de médecins ou de professionnels, ils ne la récupèrent pas. C'est évident !
Nous avons bien compris qu'il existe un problème de TVA quand il s'agit d'un financement pour le compte de tiers.
Donc, l'avis du Gouvernement est défavorable.
(L'amendement n° 256 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Considérez-vous que l'amendement n°318 a été présenté, madame Billard ?
Oui, monsieur le président.
(L'amendement n° 318 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
(L'article 5 est adopté.)
Cinq orateurs sont inscrits sur l'article 6. Je leur demanderai d'être concis, et de respecter le temps de parole de cinq minutes.
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
Je suis toujours très concis ; il est exceptionnel que je dépasse mon temps de parole, monsieur le président !
Ma demande ne s'adresse pas qu'à vous mais à l'ensemble des intervenants, monsieur Préel.
Très bien, monsieur le président. Pourtant, avant d'aborder l'article 6, j'aurais eu bien envie de dire un mot sur la prévention et l'éducation dont Mme la ministre a parlé tout à l'heure.
Nous en reparlerons.
Les chiffres donnés sont souvent assez artificiels car, dans la réalité, les deux choses vont souvent de pair : tous les professionnels de santé font de la prévention et du soin en même temps. La DRESS l'a bien relevé : un bon médecin ou une bonne infirmière font souvent de la prévention et de l'éducation lorsqu'ils soignent un patient. Dès lors, il est assez artificiel de fournir des chiffres séparés.
Quant à l'article 6, il confirme la revalorisation de 0,8 % des retraites, intervenue le 1er septembre. Elles avaient été revalorisées de 1,1 % au 1er janvier, et j'avais estimé que c'était insuffisant pour maintenir le pouvoir d'achat des retraités. M. le ministre Xavier Bertrand avait promis une révision en cours d'année et je le remercie de tenir sa promesse. Cependant, cette révision modeste porte à environ 1,3 % la hausse annuelle des retraites, qui, de plus, ne seront pas modifiées avant le 1er avril.
Certes, la CNAV affiche un déficit important, lié en partie au dispositif « carrières longues »
…et au papy boom. Je plaide pour le maintien du pouvoir d'achat des retraités, mais surtout pour un régime de retraite universel géré réellement par les partenaires sociaux, et basé sur un système par point. Chaque année les partenaires sociaux responsabilisés décideraient eux-mêmes de la valeur d'achat et de liquidation du point, assurant ainsi l'équilibre du régime. Monsieur le président, je ne crois pas avoir dépassé mon temps !
À mon tour, je voudrais intervenir sur cet article 6, qui prévoit le coup de pouce donné aux retraites 2008, à compter du 1er septembre. Après avoir été revalorisées de 1,1 % selon les dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale de l'année dernière, les retraites ont bénéficié d'une revalorisation exceptionnelle de 0,8 % au 1er septembre.
Avec cette dernière hausse, le Gouvernement prétend que les retraités peuvent s'estimer satisfaits et que la question de leur pouvoir d'achat n'a plus à être posée. Vous nous permettrez d'en douter ! Nos calculs n'aboutissent pas aux mêmes résultats que ceux du Gouvernement. À l'évidence, les retraités auront perdu du pouvoir d'achat en 2008 puisque l'inflation sera de l'ordre de 2,9 % selon les propres estimations du Gouvernement.
À partir du moment où la revalorisation n'intervient qu'au 1er septembre 2008, il n'y a aucun rattrapage pour les huit premiers mois de l'année. Une augmentation destinée à rétablir le pouvoir d'achat des retraités devrait tenir compte des huit premiers mois de l'année et, selon nos calculs, elle devrait donc atteindre 1,3 % de plus sur l'ensemble de 2008.
Dans des articles ultérieurs, nous verrons qu'à partir de l'année prochaine, le calcul de la revalorisation des retraites s'effectuera au 1er avril. Nous ne discuterons pas ce principe, mais nous constatons que les trois premiers mois de l'année à venir ne compteront pas pour une revalorisation des retraites. Or dans les 0,8 % de rattrapage prévu, 0,6 % sont accordés par anticipation sur 2009. Cette anticipation doit être complétée par un rattrapage dès le 1er janvier, et pas simplement au 1er avril 2009.
Techniquement, la revalorisation nécessaire est sous-évaluée. Sans entrer dans des calculs très compliqués, en défilant massivement le 16 octobre dernier, les retraités ont fait savoir très clairement que le rattrapage du 1er septembre – qu'ils ont qualifié de « mini-coup de pouce » – ne leur suffisait pas. Aucune des explications données depuis deux jours ne peut les satisfaire. Les revalorisations successives – 1,1 % pour l'année, et 0,8 % pour le dernier trimestre – ne couvrent pas l'inflation, qui va atteindre 2,9 % en 2008. Nous sommes très loin du compte. Une véritable augmentation serait nécessaire à la garantie du pouvoir d'achat des retraités.
Nous avions déposé plusieurs amendements, qui sont tombés sous le couperet de l'article 40, comme l'a précédemment indiqué M. le président de la commission des finances. Nous le regrettons, même si nous le comprenons en droit. Nous pensons que le Gouvernement devrait donner un coup de pouce à son propre coup de pouce et, par des amendements ou des sous-amendements, permette une revalorisation complémentaire des retraites au titre de l'année 2008.
Je vais revenir sur le même thème : cette revalorisation au 1er septembre ne permet pas de maintenir le pouvoir d'achat des retraites en 2008, sans compter qu'elle inclut une anticipation pour 2009. C'est encore pire ! Depuis 2002, les revalorisations ne compensent pas l'inflation de ces six ans : l'indice général des prix a progressé de 12,19 % tandis que les retraites n'augmentaient que de 10,82 %.
De plus, l'indice général des prix minimise le renchérissement des produits de première nécessité, dont les coûts se sont envolés depuis un an. Ainsi, de septembre 2007 à septembre 2008, les produits d'alimentation ont augmenté de 4,7 % et l'énergie de 14,2 %. Or ces dépenses sont incontournables et grèvent plus particulièrement le budget des personnes qui perçoivent une petite retraite, celles qui vont le plus souffrir du faible coup de pouce donné au 1er septembre. Vous comprendrez que nous trouvions cet effort plus que minime, totalement insuffisant compte tenu de la situation des retraités de notre pays.
Malheureusement, l'article 40 nous empêche de faire d'autres propositions. Nous ne pouvons même pas proposer de créer de nouvelles recettes – basées sur les stocks-options, par exemple – et d'augmenter d'autant les petits retraites de nos concitoyens. C'est regrettable. Nous aurions souhaité défendre ce genre de mesure par des amendements, et nous ne pouvons le faire que dans le cadre de la discussion sur les articles.
Je ne parlerai ni de coupe de pouce ni de revalorisation exceptionnelle. En examinant la loi de 2003, notre assemblée avait délibéré du principe de l'indexation des pensions sur l'évolution pluriannuelle des prix. Comme l'ont justement observé Marisol Touraine et Jean-Luc Préel, l'évolution des retraites, pour les trois dernières années, a été minimisée. Dès lors, la revalorisation de 0,8 % ne fait que rattraper les retards de 2006, 2007 et 2008. Une simple règle de trois nous permet d'ailleurs de constater que, pour les trois derniers exercices budgétaires, l'évolution des pensions se limite à celle de l'indice des prix.
J'en viens à l'évolution structurelle pour l'année 2008. On sait aujourd'hui que l'inflation devrait être comprise entre 2,7 et 2,9 %. Il ne saurait être question que la revalorisation de 0,8 % prévue en septembre affecte celle prévue en avril : ce serait un tour de passe-passe contradictoire avec vos propres engagements. Je souhaiterais à cet égard connaître le montant global prévu pour les retraites en 2009, car je n'ai pas le sentiment qu'il intègre l'inflation de 2,7 %, sauf à considérer que le déficit de la Caisse nationale d'assurance vieillesse se creusera.
Dernier point, essentiel : si l'évolution des pensions des quelque 12 millions de retraités ne suit pas celle du coût de la vie, c'est que le coût des carrières longues n'est pas financé. Si cela constitue un avantage pour 800 000 à 1 million de retraités, tous les autres en subissent les conséquences.
Je déplore à mon tour que l'article 40 de la Constitution nous empêche d'amender le présent article, comme je regrette que la générosité du Gouvernement en reste, dans ce PLFSS, à des niveaux bien modestes. Certes, le rattrapage de 0,8 % compense une partie du manque à gagner de 2007 et anticipe très modérément sur l'inflation prévue pour 2008, dont on sait qu'elle a été forte, l'ajustement définitif ayant lieu en 2009. Or beaucoup de gens souffrent de ce que leurs pensions restent très modestes.
Selon un calcul simple que nous avons fait, une augmentation de 4,8 % aurait été plus raisonnable. Même plus coûteuse pour l'État, elle en valait la peine. Les retraités vous l'ont d'ailleurs dit en descendant dans la rue le 16 octobre dernier. Je pense qu'ils n'en resteront pas là, car ils ont le sentiment d'être les grands oubliés du moment.
Une telle disposition, non recevable financièrement, préfigure le débat que nous aurons sur le volet retraites du PLFSS. Les mesures que vous proposez sont des revalorisations parfois misérables de minima pourtant déjà indécents. L'article 5 de la loi de 2003, qui instaure les quarante et une annuités sans que le Parlement, hélas, ait pu en débattre, privera beaucoup de retraités d'une retraite à taux plein, donc correcte. Bref, le nombre de retraités pauvres augmentera encore, alors que 6 millions de retraités vivent déjà avec une pension inférieure au SMIC. Quant au minimum vieillesse, que vous prévoyez de porter à 676 euros dans ce PLFSS, il reste en deçà du seuil de pauvreté européen, à savoir 817 euros. Il y a donc encore beaucoup de gens misérables dans notre pays, et les femmes sont, une fois de plus, les plus touchées, puisque ce sont souvent elles qui ont interrompu leur carrière pour se consacrer à leur famille.
À ces menaces de régression sociale s'ajoute une faillite financière : l'allongement de la durée de cotisation, véritable pierre angulaire de votre stratégie, ne tiendra pas ses promesses budgétaires – les déficits précédemment accumulés sont là pour vous le rappeler. Or la loi de 2004 promettait le retour à l'équilibre en 2007 : ce sont vos amis, monsieur le ministre, qui l'affirmaient alors. Cela devrait vous inciter à la modestie quant aux promesses pour l'avenir.
Que l'on examine le problème des retraites sous l'angle social ou budgétaire, la seule issue tient en une formule, chère à notre Président de la République : remettre les Français au travail. Mais l'impératif du moment, monsieur le ministre, n'est pas de proposer à ceux qui travaillent déjà des heures ou des années supplémentaires : c'est d'ouvrir les portes de l'emploi aux jeunes et aux seniors. On verra plus en détail comment votre texte vise à favoriser le travail des seniors, en prévoyant des pénalités financières à l'encontre des entreprises qui ne joueraient pas le jeu. Toutefois, de telles évolutions réglementaires ne peuvent à elles seules changer les comportements. La mise à l'écart des seniors est une tendance lourde, confirmée par les chiffres : deux salariés sur trois sont littéralement éjectés de l'emploi avant même d'avoir acquis les droits à une retraite à taux plein. On peut craindre qu'un dispositif de sanction dont l'application sera incertaine n'y change rien.
À l'autre bout de l'échelle, rien n'est fait pour remédier au chômage des jeunes, dont le niveau constaté en 2007 continue de faire de notre pays l'un des plus mauvais élèves de la classe européenne. Aucune des mesures annoncées par le Président de la République en faveur de l'emploi ne concernent les jeunes. Or l'allongement de la durée de cotisation obligera ceux d'entre eux qui sont aujourd'hui au chômage à travailler jusqu'à un âge avancé, sauf à survivre avec des pensions réduites comme peau de chagrin.
Parmi les promesses de la loi Fillon de 2003, l'augmentation de la durée de cotisation est en définitive la seule que vous aurez tenue. Une autre politique, attentive aux évolutions sociales et démographiques et s'appuyant sur la constitution de réserves financières conséquentes, via le Fonds de réserve pour les retraites, nous semble possible pour maintenir les pensions à un niveau décent. Mais ce n'est pas le choix que vous avez fait.
En conclusion, il est fort dommage que votre PLFSS soit si peu hardi pour venir en aide à nos concitoyens les plus démunis.
Le pouvoir d'achat est toujours un sujet délicat : il y a, d'une part, les mesures de l'INSEE et, de l'autre, ce que l'on ressent.
Notre assemblée a décidé de s'appuyer sur les premières, car elles permettent de vraies comparaisons. La loi a donc mis en place un mécanisme d'ajustement postérieur. Or l'évolution du pouvoir d'achat ne s'analyse pas sur une année mais sur plusieurs : voyez sur ce point le tome III du rapport, pages 10 et 11. Vous constaterez ainsi, madame Billard, que pour un indice 100 – hors tabac – en 1990, l'évolution des prix a atteint 135,6 en 2008, contre 136,4 pour la revalorisation des pensions de vieillesse du régime général. Il n'y a donc pas eu de perte à cet égard, même si j'ai bien conscience que nos concitoyens ressentent le contraire.
Je me fonde sur des chiffres qui ne sont pas les miens : j'essaie comme vous d'être le plus juste et le plus à l'écoute possible. D'ailleurs, l'article 6 prévoit d'améliorer le mécanisme, en faisant passer l'équation de trois à deux paramètres à partir du 1er avril, ce qui la rendra plus fiable. Ainsi, en 2009, il n'y aura plus qu'une seule estimation : à la prévision d'inflation s'ajoutera le différentiel de 2008.
S'agissant de l'avance de 0,8 %,…
…elle se décline en deux parties : 0,2 % au titre de la compensation pour l'écart constaté en 2007, et 0,6 % pour anticiper l'ajustement sur l'inflation de 2008.
Monsieur Terrasse, si l'on avait suivi le mécanisme habituel, l'augmentation de 0,6 % ne serait intervenue qu'au 1er janvier ou au 1er avril prochain.
Bref, la revalorisation de 0,8 % constitue bien une avance destinée à aider les gens. La lettre du Président de la République la prévoyait, et nous l'entérinons ce soir, précisément parce que les gens ont la sensation d'avoir perdu du pouvoir d'achat.
Quant au taux pour l'an prochain, il s'établit pour le moment à 2,7 %, mais la Commission des comptes de la sécurité sociale, qui se réunira au mois de mars, peut l'augmenter en fonction de ses calculs pour l'année 2008.
Enfin, les retraités ayant de petites pensions peuvent bénéficier d'aides diverses, telles que l'aide à la cuve de fioul, l'aide complémentaire santé ou le tarif social pour le gaz : il faut en tenir compte.
Certes, mais, puisqu'ils nous posent la question, je le redis clairement : ceux qui ont les plus petites retraites peuvent bénéficier de ces aides. Le Gouvernement et nous-mêmes nous efforçons de rester à l'écoute des personnes : c'est notre travail. Mais il nous faut également décrire précisément, grâce aux chiffres de l'INSEE, la situation actuelle.
Et pour conclure, je souhaite un bon anniversaire à notre ami Jean-Luc Préel. (Sourires.)
La revalorisation de 0,8 % permet d'anticiper dès le mois de septembre le rattrapage de l'inflation de 2008 et de corriger l'écart constaté en 2007. C'est une mesure de justice, que nous n'étions pas obligés de prendre. Quant au réajustement définitif au titre de l'année 2008, il aura lieu le 1er avril 2009, de même que l'indexation prévue en fonction de la prévision pour 2009. Pourquoi en avril ? Pour avoir une idée plus précise et éviter des « tirer des plans sur la comète ». Bref, d'un côté on avance la revalorisation, et de l'autre on recule la date du réajustement : pour les retraités, les choses sont plus justes et plus efficaces ainsi.
Nous verrons quelle sera l'inflation l'an prochain. Mais nous verserons 7 milliards d'euros supplémentaires dans la Caisse nationale d'assurance vieillesse : 4 milliards au titre de la revalorisation, c'est-à-dire pour le pouvoir d'achat, et 3 milliards au titre de l'évolution du nombre de retraités. Le système me semble donc clair et bien construit.
(L'article 6 est adopté.)
Sur l'article 7, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.
Je voudrais profiter de cet article, qui traite des objectifs de dépenses et des équilibres financiers, dans lesquels le poids des hôpitaux est important, pour attirer votre attention sur ce que j'appellerai une véritable escroquerie. Dans un entretien accordé au Figaro, le patron de Dexia, Gérard Bayol, a expliqué que l'envolée des taux de remboursement des emprunts des collectivités locales, que notre groupe a déjà dénoncée lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative, était parfaitement justifiée.
Vous allez le comprendre, cher collègue : je ne m'éloigne pas du sujet.
Tout en admettant que les taux variables sont passés de 2,5 à 5 % en deux ans, le directeur général du groupe laisse entendre que les collectivités qui ont, à une période, bénéficié de la baisse des taux doivent aujourd'hui être prêtes à « accepter les contraintes de la hausse ».
Ces propos sont inacceptables, pour ne pas dire scandaleux. Le patron de Dexia oublie les quelque 6 milliards d'euros de garantie accordés par l'État à l'ensemble des sociétés du groupe, afin de leur permettre de continuer à imposer leur politique commerciale et les coûteuses conditions des contrats de prêts qu'ils consentent. Ainsi, Dexia se rémunère sur le dos des contribuables à double titre et aux deux bouts de la chaîne : au titre de la garantie de l'État, d'une part, et en imposant ses conditions d'emprunt aux établissements publics, notamment hospitaliers, d'autre part.
Madame la ministre, monsieur le ministre, l'État a le devoir d'intervenir auprès de Dexia pour exiger de sa direction des contreparties réelles à la garantie qu'il apporte, à la fois en termes de diminution du taux d'intérêt et de réduction du montant des commissions d'engagement ou des indemnités de remboursement anticipé.
Je vois M. Bur froncer le sourcil. Sachez, cher collègue, que Dexia envisage d'augmenter ses commissions sur les prêts qu'il a accordés aux hôpitaux publics. Cela ne fera qu'aggraver leurs charges financières.
Dexia ne peut pas avoir licence de faire peser sur les contribuables l'essentiel des risques dans une logique de socialisation des pertes et de privatisation des profits. C'est une question d'éthique, de justice. C'est aussi une question financière pour les hôpitaux publics.
La rédaction de l'article 7, relatif aux dépenses de l'année 2008, est particulièrement significative de l'ambiguïté qui caractérise la démarche de ce PLFSS. Il y est dit que, « au titre de l'année 2008, les prévisions rectifiées des objectifs de dépenses […] sont fixées à ». Les dépenses font-elles l'objet de prévisions ou d'objectifs ? On le voit bien, l'intention serait de fixer des objectifs, mais, comme la maîtrise n'est pas là, on se contente de rectifier les prévisions. Cette formule en dit long.
Si l'on examine plus avant la façon dont les objectifs de dépenses sont rectifiés pour la branche vieillesse, on apprend que le Gouvernement propose de les augmenter de 1,5 milliard, « sous l'effet notamment du dynamisme des départs anticipés » – ce que l'on peut comprendre – « et de la revalorisation des pensions de 0,8 point au 1er septembre ». C'est donc la démonstration implicite que la prévision initiale était fondée sur le non-maintien du pouvoir d'achat des retraites en question. Cela ne fait que renforcer mes inquiétudes pour l'année 2009. Le ministre l'a dit lui-même : les hypothèses économiques étant déjà dépassées, comme nous le verrons probablement demain à l'annexe B, nous ne serons plus ni dans les objectifs ni dans les prévisions, mais dans le vague. Dans ces conditions, on est en droit de se demander quelle suite sera donnée aux mesures que nous voterons peut-être demain.
(L'article 7 est adopté.)
Sur l'article 8, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à M. Jean-Luc Préel.
L'article 8 est la rectification de l'ONDAM 2008. L'année n'est pas terminée, mais l'on sait déjà que l'ONDAM sera dépassé de 750 millions, en raison d'une augmentation des dépenses de soins de ville de 920 millions, essentiellement due à un renchérissement des indemnités journalières de 4,5 %, l'accroissement des dépenses de soins médicaux s'établissant, quant à lui, à 1,7 %. Ce dernier chiffre est particulièrement raisonnable et limité, mais il faut bien reconnaître que les négociations conventionnelles n'ont pas abouti et qu'il n'y a pas eu de revalorisation : des difficultés sont intervenues et l'application de la décision votée l'année dernière a été reportée de six mois.
Cependant, je voudrais attirer votre attention, madame la ministre, sur les difficultés des spécialités cliniques. Lorsqu'on se plonge dans les études de la DRESS, qui publie les revenus des médecins, on découvre – ou redécouvre, car le phénomène est connu depuis longtemps – la modicité des revenus des psychiatres, des pédiatres, des gynécologues médicaux, des dermatologues. Or le futur secteur optionnel ne concernerait que les médecins utilisant des plateaux techniques lourds. Sans doute, dans leur cas, une revalorisation est-elle justifiée. Il me semble néanmoins que les spécialités cliniques sans appareils et sans plateau technique lourd devraient être prioritaires.
Dans cet esprit, je vous ai interrogée il y a quelques semaines sur la démographie des néphrologues assurant les hémodialyses dans les établissements hospitaliers. Ils sont indispensables pour le suivi des patients, mais la situation est très inquiétante, car il n'y en a quasiment plus. Ils sont recrutés par des associations – par exemple l'ECHO, dans les Pays de la Loire –, qui les rémunèrent davantage, et ils ont tendance à quitter les établissements publics. Il s'agit bien d'un problème de santé publique.
Je souhaiterais donc que les spécialistes cliniques puissent ne pas être oubliés et voir leur rémunération revalorisée. Il conviendrait également que nous nous préoccupions de démographie médicale. Sans doute en reparlerons-nous dans la loi Hôpital, patients, santé, territoires, mais, dans certaines spécialités, le problème est urgent.
Mon intervention va compléter celle de M. Préel, mais en abordant plus particulièrement la question de l'hospitalisation. Nous avons découvert tardivement le rapport sur la convergence tarifaire intersectorielle – c'est-à-dire la convergence entre le secteur public et le secteur privé – prévu par le PLFSS pour 2008, mais c'est qu'il a été remis avec retard. Il ne s'agit de toute façon que d'un rapport d'étape, qui montre que l'on progresse en matière d'échelles de coût, d'évaluation des coûts, de permanence des soins, mais qu'il reste du travail à accomplir dans de larges secteurs d'évaluation, notamment en ce qui concerne les charges spécifiques à l'activité de soins des hôpitaux.
Dans le même temps, à la page 58 de l'excellent rapport de M. Jean-Pierre Door,…
…il est indiqué que les établissements de santé restent confrontés à une situation difficile, « malgré ce choix de la poursuite de l'amélioration de l'efficience hospitalière ». M. Door confirme donc ce que je disais tout à l'heure : la réforme de l'hôpital est engagée depuis plusieurs années et ses efforts sont notamment tournés vers une meilleure efficience. Or, nous dit M. Door, « les modalités de la convergence intersectorielle ne sont toujours pas établies sur un constat objectif et partagé ».
En conséquence, madame la ministre, si cet article adapte les chiffres pour 2008, le PLFSS doit donner de premiers moyens pour mettre en application la loi de réforme hospitalière que, sur votre proposition, le Parlement aura à voter en janvier 2009. Une loi aussi ambitieuse – elle l'est, au moins, dans vos déclarations – nécessite des moyens, car une réforme sans moyens est vouée à l'échec. Nous n'avons pris connaissance des échelles de coût publiques et privées qu'avec retard, mais il nous semble que l'on ne peut dire, comme vous le faites systématiquement, que les coûts du privé soient inférieurs à ceux du public. En effet, c'est le public qui, comme par hasard, assume 70 % de la charge pour les dix GHS des pathologies les plus lourdes. Aussi militons-nous en faveur d'un moratoire de la convergence tarifaire et avons-nous déposé des amendements allant dans ce sens. Il faut nous laisser le temps d'approfondir le rapport sur la convergence intersectorielle et donner davantage de moyens à ces établissements dont M. Door dit qu'ils sont en difficulté, afin que, l'an prochain, au moment où la réforme sera mise en oeuvre, ces difficultés ne créent pas une situation de blocage.
Cet article vise à rectifier les comptes de l'ONDAM. Peut-être aurais-je dû poser cette question à l'article précédent, mais le ministre Woerth me pardonnera de le faire maintenant. Vous le savez, pour la branche vieillesse, la croissance a été plus forte en 2008 qu'en 2007. Elle a d'ailleurs versé des ressources supérieures de 5,9 % à ce qui avait été prévu l'année précédente. L'article 7 propose une rectification de 1,9 milliard, soit 1,4 % de plus. Le ministre nous a précisé tout à l'heure la ventilation de l'évolution des dépenses de cette branche pour 2009 : 4 milliards seraient liés à l'évolution des prestations servies et 3 milliards à l'évolution démographique.
Je voudrais cependant lui poser deux questions. Intègre-t-il dans les 4 milliards la revalorisation qui est intervenue au 1er septembre ? Pourrait-il nous dire, au doigt mouillé, si, dans cette somme, est comprise l'évolution qui sera précisée au 1er avril, et qui doit s'établir autour de 2,5 % ? Je ne vois pas comment, avec 2,5 % plus 0,8 %, le ministre arrive à 4 milliards servis aux retraités.
La parole est à M. le rapporteur pour l'assurance maladie et les accidents du travail.
Vous avez bien lu mon rapport, monsieur Bapt. Sachez donc que je n'ai pas dit que les établissements ont des difficultés, mais seulement que certains d'entre eux n'avancent pas aussi vite que nous le souhaiterions. Les auditions en commission ont révélé que la convergence intersectorielle, pourtant indispensable, se heurte parfois à des obstacles internes aux établissements. Nous les encourageons donc à avancer en ce sens.
M. Préel a élargi son propos à la négociation conventionnelle et à la bonne répartition par spécialités des médecins sur le territoire. Par le biais des ARH, qui contribueront à mieux encore décliner notre action dans les régions, et de l'examen classant national qui permettra de cibler les besoins selon les spécialités, il va de soi que les mesures que nous prenons visent à adapter au mieux la démographie médicale de spécialité.
Nous avons engagé un processus de rééquilibrage des rémunérations entre spécialités, en baissant celles de spécialités où s'observent d'importants gains de productivité, telles que la radiologie, pour, en contrepartie, mieux prendre en compte des spécialités très techniques et encore sous-évaluées. La première salve de revalorisations de 2005 fut suivie en 2007 d'une deuxième salve avec l'avenant 27 ; un nouveau cycle de revalorisations est en cours via l'avenant 28 et la classification commune des actes médicaux, ou CCAM.
Quant au secteur optionnel, la première phase de négociations conventionnelles a porté ses fruits, puisqu'elle a permis l'élaboration d'une définition apparemment consensuelle du secteur optionnel aux termes de laquelle 30 % au moins des actes sont réalisés à tarif opposable et les dépassements d'honoraires ne peuvent en aucun cas dépasser la moitié du tarif opposable. C'est à partir de ce cadre initial que se poursuit actuellement la négociation conventionnelle.
(L'article 8 est adopté.)
Je mets maintenant aux voix l'ensemble de la deuxième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.
(L'ensemble de la deuxième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 est adopté.)
Prochaine séance, aujourd'hui, jeudi 30 octobre, à neuf heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.
La séance est levée.
(La séance est levée, le jeudi 30 octobre, à une heure.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma