La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
Mes chers collègues, je suis heureux de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à une délégation de l'Assemblée nationale de la République de Maurice, conduite par son président, M. Rajkeswur Purryag. (Mmes et MM. les députés, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, se lèvent et applaudissent.)
Nous commençons par une question du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.
Monsieur le Premier ministre, vous avez mis à l'ordre du jour de votre sommet dit « de crise » une nouvelle étape de votre politique de super-austérité et de régression.
Vos réformes de compétitivité visent prioritairement le travail, que vous considérez comme un coût, alors qu'il est la source de création des richesses. L'humain est votre seule variable d'ajustement, mais jamais le capital, les actionnaires, la finance. Or c'est précisément cette politique qui est au coeur d'une crise historique.
TVA antisociale, casse du code du travail par une flexibilité sans limite… Avec vos plans de rigueurs successifs, vous ajoutez de la crise à la crise.
La situation de la France n'est pas due à ses dépenses sociales et d'intérêt général, mais au soutien sans condition aux banques et aux grands groupes qui continuent à fermer des usines, à délocaliser et à massacrer l'emploi. Entendez les salariés de Renault, Pétroplus, M-real, Aircelle et, dans le pays, de PSA, Fralib, SeaFrance et tant d'autres ! Entendez aussi les plaintes contre les banques qui spéculent tout en fermant le robinet du crédit pour les PME, les collectivités locales et les ménages !
Comme nous le proposons au Front de gauche, il faut avoir le courage d'affronter le système et les marchés financiers qui tirent leur toute-puissance du pouvoir que vous avez bien voulu leur concéder.
L'augmentation des salaires, des retraites, la taxation du capital, la relocalisation des activités industrielles, la création d'une sécurité sociale professionnelle et de formation ; un pôle public bancaire et financier au service de l'investissement, de l'emploi et de grands programmes en matière de logement, de transports, de santé, d'éducation et de culture sont les choix modernes et efficaces qu'il faut faire pour sortir de la crise.
Allez-vous enfin rompre avec la soumission aux puissances de l'argent en abandonnant vos réformes régressives et inhumaines ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le député, il y a les paroles, les grands discours, et il y a ceux qui agissent, comme le Président de la République, le Premier ministre et les ministres en charge de ces dossiers qui, ce matin, ont rencontré les partenaires sociaux pendant près de quatre heures.
En sortant, certains ont dit que des mesures utiles à l'emploi avaient été prises. Ce n'est pas moi qui le dis, ce sont eux qui l'ont indiqué.
Il y a des actions à court terme et urgentes à mettre en oeuvre. C'est le cas, notamment, de la formation des demandeurs d'emploi, des formations supplémentaires pour celles et ceux qui sont privés d'emploi depuis longtemps, depuis plus de deux ans, et qu'il faut ramener prioritairement vers l'emploi. Il s'agit également des jeunes. J'entends souvent parler de l'emploi des jeunes. Pour notre part, nous prenons des décisions.
Le dispositif zéro charge sera mis en place pour les entreprises de moins de dix salariés pour leur permettre de recruter des jeunes. Cela montre bien que nous ne sommes pas là uniquement pour faire des discours, mais pour faire en sorte que le chômage des jeunes, qui touche de nombreux pays européens, ne soit pas une fatalité.
Pour le reste, des moyens supplémentaires sont octroyés à Pôle emploi. Bien souvent, c'est ce qui est demandé sur différents bancs de cette assemblée, mais quand nous les mettons, vous n'êtes pas d'accord ! Il faudrait avoir un minimum de cohérence, car sur ces sujets, aujourd'hui, les Français voient bien ceux qui font la différence : celles et ceux qui, conformément à la volonté du Président de la République, prennent des initiatives applicables dès le mois de février et qui font suite aux mesures que nous avons déjà prises en mars et en octobre. Une chose est certaine, sur tous ces sujets liés à l'emploi, nous ne sommes pas embarrassés par les propositions de la gauche, c'est le moins qu'on puisse dire ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Nous, nous avançons et nous agissons. C'est ce qui fait la différence, et la différence, les Français la voient ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Dans cette période où le redressement des finances publiques est plus que jamais au centre des débats en France et en Europe, le Nouveau Centre se félicite que son engagement pour une meilleure maîtrise des dépenses publiques et une meilleure protection des recettes publiques commence à être partagé sur de nombreux bancs de cet hémicycle. Mais le redressement des finances publiques ne restera qu'un vain mot si nous n'inscrivons pas cette règle d'or dans le marbre de la Constitution.
Les centristes défendent cette règle d'or depuis bientôt plus de dix ans, car elle est le seul moyen de respecter les critères de Maastricht et de revenir à une notation triple A.
À l'heure où les agences de notation nous mettent sous surveillance et où les marchés attendent de nous des gestes forts, la suppression progressive de nos déficits publics est plus que jamais indispensable.
Cette règle d'or, nous souhaitons qu'elle s'applique à la loi de finances en rendant obligatoire le vote en équilibre de la section de fonctionnement, mais également à la loi de financement de la sécurité sociale avec une obligation de vote en équilibre.
Le retour à l'équilibre des finances publiques constitue un impératif éthique – ne pas faire supporter aux générations futures la mauvaise gestion des finances publiques –, un impératif économique – ne pas ponctionner l'équivalent de la quasi-totalité de l'épargne des ménages afin de financer un déficit de fonctionnement massif, ce qui pénalise lourdement la croissance française –, mais aussi un impératif politique : quel est le sens d'une démocratie dans laquelle, quelle que soit l'issue des élections, il n'existe que des marges de manoeuvre négatives ? C'est enfin un impératif européen, puisque tous les pays de la zone euro se sont engagés à inscrire dans leur Constitution la règle d'or.
Ma question, monsieur le Premier ministre, est toute simple : Pouvez-vous nous assurer que l'adoption de la règle d'or est toujours un objectif du Gouvernement et nous préciser si le Président de la République envisage de réunir le Parlement en congrès avant la fin de la présente législature pour inscrire cette règle d'or dans la Constitution ?
La parole est à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le député Charles de Courson, permettez-moi au préalable de vous rendre ainsi qu'à tous députés du groupe Nouveau Centre l'hommage qui vous est dû (Applaudissements les bancs du groupe NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) : C'est vous qui, en effet, avez été les premiers à mettre cette question de la règle d'or à l'agenda du Parlement.
Vous avez été constants, vous avez été persévérants, vous avez été visionnaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Force nous est tous de le reconnaître aujourd'hui ! (Exclamations sur les mêmes bancs.)
Allons, mes chers collègues ! Je vous remercie d'écouter attentivement cette réponse ! (Sourires.)
Qu'est-ce que la règle d'or ? Cela consiste à dire que nous allons revenir à l'équilibre budgétaire. C'est devenu une priorité pour notre pays parce que, vous le savez, la crise nous a laissés très lourdement endettés.
Ce chemin du désendettement, nous l'avons pris : nous avons baissé, en 2011, et c'est historique, le déficit de la France de 7,1 % à moins de 5,7 %. Il sera de 4,5 % cette année et de 3 % en 2013. L'engagement du Président de la République, c'est que nous parvenions à l'équilibre budgétaire en 2016. Qu'est-ce que cela veut dire ? Que nous allons appliquer cette règle d'or à la politique budgétaire de la France. C'est l'engagement du Gouvernement, c'est l'engagement de la majorité. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Malheureusement, nous aurions aimé que cette règle d'or puisse être inscrite dans notre Constitution : c'est ce qu'ont fait tous les partenaires européens. C'est une ceinture de sécurité. Cela garantit aux Français que tous les gouvernements sortis des urnes conduiront la même politique que nous. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Cette règle d'or est nécessaire ; l'opposition ne veut pas la voter (Protestations sur les bancs du groupe SRC) parce qu'elle ne veut pas se l'appliquer ! Il est évident qu'avec la règle d'or, on ne pourra pas recruter 60 000 fonctionnaires et on ne pourra pas revenir à la retraite à soixante ans. Mais l'Europe nous la réclame et nous l'appliquerons ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Henri Nayrou, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question, à laquelle j'associe ma collègue Frédérique Massat, s'adressait à M. le ministre de l'intérieur qui n'est pas présent.
Hier, c'est à Pamiers, en Ariège, que le Président de la République est venu présenter ses voeux au monde rural ; mais le monde rural qui aurait surtout mérité entendre le chef de l'État lui présenter ses condoléances, tant il est vrai que les réformes de la taxe professionnelle, la révision générale des politiques publiques entraînant des dizaines de milliers de suppressions de fonctionnaires et la réforme-charivari territoriale vont transformer notre pays en désert entre deux métropoles ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Après que nous avons procédé à l'accueil républicain du Président, un millier de citoyens ariégeois, mécontents mais aucunement belliqueux – j'insiste sur ce point – étaient rassemblés, immobiles à un kilomètre environ de la salle où le candidat Sarkozy tenait meeting. II paraît que la zone interdite commençait là. Vous parlez d'un danger ! Les membres des forces de l'ordre – au nombre d'un millier également – ont demandé à la foule de reculer. La foule n'a pas bougé et a entonné la Marseillaise, chant séditieux comme chacun sait. Alors, les policiers ont lancé les gaz lacrymogènes. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Deux conseillers généraux en ont pris plein les yeux et un coup au moral. Une dame a pris une balle en caoutchouc dans le dos. Ma collègue conseillère générale Mme Vilaplana m'a dit : « Je suis scandalisée. On a été traités comme des terroristes ! » (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
J'aurais voulu interroger M. le ministre de l'intérieur sur le coût – avec un « t », bien sûr ! – de ce déploiement disproportionné. Ces actes de délinquance républicaine seront-ils comptabilisés sur son bilan 2012 ?
Ce n'est pas ses voeux que le Président de la République n'aurait pas dû présenter au monde rural, mais bien ses excuses ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.)
La parole est à M. le ministre chargé des collectivités territoriales. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Allons ! écoutons la réponse du ministre qui seul a la parole !
Monsieur le député Henri Nayrou, comme vous le savez, je me trouvais, hier, avec la délégation qui accompagnait le Président de la République.
La relation que vous faites des événements ne correspond pas tout à fait à la réalité.
Oui, depuis 2007, le Président de la République va régulièrement sur le terrain, au contact de la population, à la rencontre des Français. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Depuis 2007, vous critiquez constamment et méthodiquement chacun de ses mouvements, chacune de ses initiatives. Je ne suis donc pas surpris que vous tentiez, une nouvelle fois, de créer une polémique médiocre. (Mêmes mouvements.)
Puisque vous m'interrogez sur l'ordre public en marge de son déplacement dans l'Ariège pour présenter ses voeux au monde rural, je vais essayer d'être précis, compte tenu des éléments dont nous disposons à ce stade. Comme pour chaque déplacement présidentiel, un service d'ordre a été mis en place…
…afin de sécuriser l'intervention du chef de l'État devant son auditoire. Un groupe de manifestants, estimé entre 300 et 400 personnes, autorisé à se rassembler de manière statique sur une place la ville, a décidé de former un cortège, contrairement aux engagements pris, pour se rendre à l'intérieur du site protégé. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Ils ont été bloqués par les forces de l'ordre dans leur progression vers la sous-préfecture. (Huées sur les bancs du groupe SRC.)
Le cortège a voulu forcer un barrage de CRS. En dépit de vos dénégations, les sommations réglementaires ont été effectuées, les manifestants ne relâchant pas pour autant leur pression. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Deux tirs de grenades lacrymogènes ont été effectués par les forces de l'ordre et les manifestants ont reflué. (Mêmes exclamations sur les mêmes bancs.) Lors des faits, quatre personnes, parmi lesquelles un délégué syndical, ont déclaré avoir été très légèrement blessées.
Elles ne font l'objet d'aucune incapacité totale de travail. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Ces personnes ont déposé plainte auprès des services de police. À l'occasion de ce déplacement présidentiel, les forces de l'ordre ont donc pleinement rempli leur mission. Pour le reste, il convient de laisser la justice instruire cette affaire avec la sérénité qui convient ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe NC.)
La parole est à M. Jérôme Chartier, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
La France, monsieur le ministre des finances, est un grand pays, je pense utile de le dire et de le redire encore.
En trente ans, de bouleversements mondiaux en crises internationales, elle a réussi à poursuivre sa croissance et à résister aux crises, en dépit de toutes les entraves économiques qu'elle a pu connaître et qui ont durement pénalisé sa compétitivité en augmentant le coût du travail.
La France a toujours su se relever des crises. Par trois fois, le PIB a été réduit et, par trois fois, la droite, qui était aux responsabilités, a su prendre les mesures lui permettant de retrouver la réussite économique et sociale. Cette fois-ci encore, elle sait le faire.
En 2007, elle multiplie par trois l'effort pour encourager la recherche en France, et cela marche. En 2009, elle supprime la taxe professionnelle qui taxait l'investissement et l'emploi, et cela marche. En 2010, elle réforme le régime de retraite pour rétablir l'équilibre du régime général, et cela marche.
La droite en France a toujours su faire face à ses devoirs. Elle n'a jamais dénigré la France. Elle l'a toujours encouragée à grandir et à se développer. La droite n'aime pas celles et ceux qui dénigrent la France. Elle n'aime pas celles et ceux qui se réjouissent de la dégradation de la France parce que, au fond, espérer la défaite ou la dégradation de la France ne donnera jamais le sentiment aux Français que l'on a la capacité d'être un homme d'État.
La droite sait relever des défis à tout moment, lorsque les circonstances l'exigent, pour satisfaire un seul objectif : faire gagner la France.
Trois défis sont devant nous : augmenter la flexibilité du travail, mieux former les personnes au chômage, redonner un avantage compétitif au coût du travail français.
Monsieur le ministre, ces trois défis majeurs étaient au centre du sommet social voulu par le chef de l'État ce matin. Quel est votre sentiment sur ce sommet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Je vous remercie d'abord, monsieur le député, de souligner les nombreux atouts dont dispose notre pays. Ils sont variés et ils sont soulignés par tous les acteurs, tous les opérateurs, tous les observateurs, tous les investisseurs : une économie diversifiée, une main-d'oeuvre qualifiée, un système bancaire qui fonctionne bien, qui est résilient, qui l'a montré au cours de la crise, un niveau d'épargne élevé. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Nous avons deux piliers sur lesquels repose l'action du Gouvernement, sous l'impulsion énergique du Président de la République : un premier, qu'a développé avec beaucoup de constance et d'énergie la ministre du budget, constitué par nos efforts pour réduire les déficits publics, et un second qui est la nécessité d'être ouvert sur le monde extérieur et de tirer les leçons de cette crise qui modifie les fondamentaux en profondeur.
Cette crise n'est pas juste une parenthèse, c'est un tournant, et la France doit s'y adapter. Elle n'a pas de temps à perdre. C'est la raison pour laquelle, dans le calendrier proposé par le Président de la République et nonobstant le calendrier électoral, ce sommet social est indispensable pour dresser un diagnostic partagé avec les partenaires sociaux, fixer des objectifs prioritaires d'action de modernisation de notre économie et, enfin, s'entendre sur le déroulé et les ajustements.
Nous devons tirer les leçons du niveau trop élevé du coût du travail. Nous devons comprendre que la convergence avec l'Allemagne est nécessaire. Nous devons tirer les leçons de la méthode Schröder dans les discussions avec les partenaires sociaux, qui ont abouti à une relance de la compétitivité de l'économie allemande.
C'est la raison pour laquelle il a été décidé ce matin des mesures d'urgence pour traiter la problématique liée à la crise, sur l'augmentation de l'activité partielle pour éviter la perte d'emploi, sur l'accompagnement des chômeurs de longue durée, sur l'exonération de charges sur les jeunes embauchés par de très petites entreprises.
Il a aussi été tracé des perspectives à moyen terme, c'est-à-dire avant la fin de cette législature, pour le financement de la sécurité sociale, le financement de l'industrie, la relocalisation. Le Premier ministre réunira les parlementaires dans les jours qui viennent pour formuler des propositions d'ici à une dizaine de jours. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Michel Liebgott, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
À entendre le ministre de l'économie à l'instant, on a l'impression que vous venez d'arriver au pouvoir. J'étais hier à Gandrange et j'ai entendu parler de la crise, de son aggravation, et de tromperie.
Aggravation de la crise, tout d'abord, car le chômage n'a jamais été aussi élevé. Ce que vous nous proposez aujourd'hui, ce n'est pas un sommet social. En réalité, c'est le sommet de la crise que nous avons atteint. C'est le SAMU que vous convoquez en urgence, car c'est vous qui avez rendu la France aussi malade. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Tromperie car, contrairement à ce que vous prétendez, vous ne mettez pas en place les moyens nécessaires. À la fin de l'année dernière, vous avez réduit de 12 % dans le budget de l'État les crédits consacrés au travail et à l'emploi. Comment osez-vous, deux mois après, nous parler de sommet social ?
Les conséquences de ces diminutions de crédits sont d'ailleurs claires.
Il y en a une première. Pour développer l'emploi, il faut d'abord donner à Pôle emploi des moyens pour aider chômeurs et entreprises à se trouver. Or un conseiller de Pôle emploi traite 200 dossiers en moyenne. Ce n'est pas sérieux. Nous vous l'avions dit d'ailleurs, il ne devrait pas avoir à s'occuper de plus de soixante ou soixante-dix dossiers. Vous êtes obligés de le reconnaître. C'est un aveu et nous en sommes satisfaits, mais c'est trop tard, et les 1 000 postes annoncés, c'est beaucoup trop peu.
Ainsi en est-il aussi des emplois aidés. Vous les dénoncez régulièrement, vous en réduisez la durée,…
…tout simplement parce que vous n'en avez jamais été partisans. Vous aviez prévu quelques contrats uniques d'insertion. Pour infléchir la courbe du chômage, vous voulez les relancer.
Par contre, vous vous gardez bien de revenir sur des mesures comme les exonérations d'heures supplémentaires, et c'est, de loin, le plus grave. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Vous ne changez pas de politique.
Vous venez de faire la preuve, monsieur le député, que vous êtes fâché avec le dossier de l'emploi. Si vous en aviez eu une bonne connaissance, vous n'auriez pas commis les erreurs que vous venez de commettre en parlant des chiffres du budget de l'emploi. Les crédits de ce budget ont, en effet, été intégralement préservés pour 2012, et toutes les actions sont maintenues. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
De quoi voulez-vous parler ? De certaines niches dont vous aviez demandé la suppression et qui ne sont plus traduites dans le budget ? Voulez-vous que je vous mette, une fois de plus, devant vos incohérences ? Il n'y a aucun problème, cela se voit régulièrement.
Vous avez oublié de dire que 2 000 équivalents temps plein à Pôle emploi seront redéployés pour conseiller les demandeurs d'emploi, en plus des 1 000 personnes qui seront recrutées à titre temporaire pour répondre à la demande des partenaires sociaux et à la volonté du Président de la République et du Gouvernement. Est-ce cela dont vous vouliez parler ?
Pour le reste, si la situation était simple dans tous les pays de l'Europe, cela se saurait, mais vous oubliez de le rappeler.
Vous oubliez aussi de rappeler que le seul pays où les résultats sont vraiment différents de ceux du reste de l'Europe, c'est l'Allemagne. Savez-vous pourquoi ? C'est parce qu'en Allemagne, ce n'est pas depuis quatre ans, comme nous, qu'ils font les réformes nécessaires, c'est depuis dix ans (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC), et ils n'ont jamais cessé d'en faire.
De nombreux députés du groupe SRC. Cela fait dix ans que vous êtes là !
En plus, en Allemagne, il y avait même des socialistes courageux qui ont engagé les réformes. Cela ne risque pas de nous arriver en France !
Vous avez parlé des heures supplémentaires. Allez jusqu'au bout et soyez clairs. Avouez que vous voulez revenir sur les heures supplémentaires qui profitent à 9 millions d'ouvriers. C'est vrai qu'avec les 35 heures et, maintenant, la remise en cause des heures supplémentaires, les ouvriers ont toujours fait les frais de la politique des socialistes. À bon entendeur… C'est important de le rappeler. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe NC.)
La parole est à M. Christian Jacob, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, depuis cinq ans, le Gouvernement et la majorité assument avec courage la réduction du nombre des effectifs dans la fonction publique d'État, car cette réforme est nécessaire au rétablissement de nos comptes publics.
Dans le domaine de l'éducation nationale, elle a permis une revalorisation sans précédent des salaires des enseignants en début de carrière.
Or, au moment où cette politique produit ses premiers effets, François Hollande décide de faire du recrutement de 60 000 enseignants supplémentaires la grande idée de son projet présidentiel. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC. – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Cette mesure vient de faire l'objet d'affrontements très violents au sein du parti socialiste. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.) M. Cahuzac considère que cela doit se faire par redéploiement. Il faudra qu'il nous dise combien de postes il supprime chez les policiers, les gendarmes, les fonctionnaires hospitaliers ou les magistrats. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Il s'est toutefois fait tacler sévèrement par le porte-parole de Mme Aubry, M. Hamon, soutenu par M. Emmanuelli (Rires et exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC), qui luiont rappelé qu'il ne s'agissait en aucun cas de redéploiements mais de créations nettes d'emplois.
C'était compter sans Mme Royal qui a expliqué ce matin qu'il fallait reporter cette réforme aux calendes grecques. (Mêmes mouvements.)
Monsieur le ministre, ma question est simple : compte tenu de notre démographie scolaire et de l'état de nos finances publiques, ces 60 000 postes sont-ils nécessaires ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Plusieurs députés du groupe SRC. Oui !
Plusieurs députés du groupe UMP. Non !
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.
Monsieur le président Christian Jacob, j'avoue qu'avec François Hollande et son équipe de campagne, il y a de quoi perdre son latin ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Au mois d'octobre, en pleine surenchère de la primaire socialiste, M. Hollande nous a expliqué que sa réponse à la question de l'avenir de l'éducation nationale, c'était la création de 60 000 nouveaux postes d'enseignants, de fonctionnaires,…
…promesse réitérée à plusieurs reprises depuis le mois d'octobre.
Et puis, lundi soir, coup de théâtre : le président de la commission des finances de votre assemblée, socialiste, expert en matière de finances publiques,…
…sans doute pris par un éclair de lucidité, a récusé cette idée,…
…employant le terme de « redéploiement », sans entrer davantage dans le détail.
Mesdames et messieurs les députés, qui faut-il croire ?
M. Cahuzac ? Mme Royal ? M. Hamon, qui a immédiatement démenti M. Cahuzac par voie de presse ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) En réalité, M. Hollande doit préciser son point de vue devant les Français. (Mêmes mouvements.)
Les Français ont le droit de savoir…
…si vous allez créer 60 000 postes de fonctionnaires supplémentaires, avec un coût de 100 milliards d'euros pour les finances publiques, ou si vous entendez redéployer ce nombre et du coup supprimer 60 000 postes d'infirmières, de policiers, de magistrats.
La vérité, monsieur Jacob, c'est que la campagne de M. Hollande est articulée autour d'un triple « i » : impréparation, improvisation, illusionnisme ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. André Chassaigne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le Premier ministre, je cherche un mot pour qualifier le spectacle auquel vous vous livrez : boniment ? illusionnisme ? arnaque ? Les trois, sans doute. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC. – Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
Je cherche un autre mot pour qualifier le remède présenté ce matin aux organisations syndicales. Disons « saignée » : c'est une nouvelle saignée pratiquée de sang-froid sur les plus modestes.
Mais quelle pantomime pour en arriver là ! Le Président a d'abord déclamé que tout nouveau plan de rigueur était exclu en 2012. Il a ensuite annoncé la création d'une taxe sur les transactions financières, avec des accents aussi révolutionnaires que ceux de sa promesse de chasse aux paradis fiscaux. Puis, il a jeté en pâture la TVA dite abusivement « sociale », gigantesque racket sur le pouvoir d'achat des citoyens et coup mortel contre notre système solidaire de protection sociale.
Il nous a enfin divertis avec l'affaire du triple A, chronique d'une mort refusée pendant plusieurs mois, tragédie d'un jour, le lendemain comédie d'un incident sans conséquence, pour conclure qu'il fallait trancher dans la législation sur le temps de travail !
Au final, des choix qui aggraveront la détresse de millions de familles, de jeunes, fauchés par la précarité, avec au bout du compte la récession pour le pays tout entier !
Nous voudrions comprendre. Pourquoi ne pas s'attaquer aux dividendes des gros actionnaires et aux salaires indécents, plutôt que de baisser le pouvoir d'achat du plus grand nombre ? (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Pourquoi ne pas faire le choix de la réindustrialisation et de la transition écologique, plutôt que laisser se multiplier les délocalisations avec leurs conséquences sociales et environnementales ? (Mêmes mouvements.)
Plus simplement, pourquoi ce refus obsessionnel d'affronter la finance et ce rejet systématique de la prise en compte de l'humain, de l'humain d'abord ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Monsieur le député, vous voulez maintenir des emplois en France ? Très bien ! N'y a-t-il pas un problème de coût du travail dans notre pays ?
Plusieurs députés du groupe GDR. Non !
Quand un salarié français et un salarié allemand touchent 1 700 euros nets par mois,…
…le coût pour l'entrepreneur allemand est de 2 720 euros alors qu'il est de 3 800 euros pour l'entrepreneur français. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Cette réalité s'impose à tous et, bien souvent, loin de ces bancs, loin des estrades ou des caméras, vous le reconnaissez ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Il y en a beaucoup, en ce moment, qui disent qu'il faut produire en France. Là encore, très bien ! Sauf que nous, nous voulons agir (Mêmes mouvements),…
…nous, nous mobilisons, nous n'attendons pas six ou neuf mois pour prendre les décisions et assumer nos responsabilités. (Mêmes mouvements.) Il est vrai que le courage ne caractérise pas souvent les décisions des socialistes, notamment sur la réforme des retraites, qui mettent en jeu la protection de notre modèle social.
Pour le reste, vous avez beaucoup parlé des salariés, des dividendes.
À ceci près que, lorsque cette majorité a décidé de voter la prime sur les dividendes, pour que, lorsque les dividendes progressent, il y en ait plus pour les salariés, nous nous sommes retrouvés bien seuls ! Vous n'avez jamais été présents. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Je vais vous dire une chose : les salariés, les ouvriers français savent bien que ce ne sont pas ceux qui parlent le plus fort qui parlent le plus juste à leur égard. Ceux qui les défendent sont plutôt de l'autre côté de l'hémicycle ; en tout cas, jamais à gauche, sauf dans les discours ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à M. Serge Poignant, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.
Monsieur le ministre, voilà bientôt trois ans que, sous l'autorité du Président de la République et du Premier ministre, vous oeuvrez à la refondation de notre modèle agricole, dans un contexte où se sont multipliés les défis économiques, sanitaires, environnementaux. Pendant ces années, vous avez placé notre agriculture à l'avant-garde des débats qui traversent aujourd'hui notre pays, qu'il s'agisse de compétitivité, de régulation ou encore de valorisation de nos productions.
La contribution de notre agriculture et de notre industrie agroalimentaire à notre balance commerciale témoigne du chemin parcouru, avec un excédent estimé à près de 9 milliards d'euros en 2011, le solde des échanges franco-allemands faisant apparaître un excédent de 1,5 milliard d'euros en 2010. Alors que les exportations de notre filière viticole étaient descendues à la troisième ou quatrième place mondiale, nous avons su revenir à la première place en valeur. Dans le secteur bovin, après des années de crise, nous voyons les prix de la viande se redresser, sous l'effet conjugué d'un effort de modernisation sans précédent de nos éleveurs, accompagnés par l'État, et d'une stratégie offensive d'ouverture de nouveaux marchés à l'export.
La réalité, c'est qu'après une crise sans précédent en 2008 et en 2009, notre agriculture a relevé la tête. Même s'il reste des difficultés que nous ne devons pas sous-estimer, même si l'effort doit être poursuivi, notre agriculture a de nouveau un cap. Nous avons vu les revenus agricoles se redresser et, dans le même temps, les prix agricoles repartir à la hausse dans de nombreuses filières.
Monsieur le ministre, vous étiez hier aux côtés du Président de la République qui présentait ses voeux au monde agricole et rural : pouvez-vous nous délivrer le message qu'il lui a adressé,…
Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Une bombe lacrymogène !
…et les perspectives qui se dessinent pour lui ? Je tiens à dire à mon collègue Henri Nayrou que c'est bien cela qui intéresse nos agriculteurs ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.
Monsieur le député, je vous confirme que le Président de la République, le Premier ministre et l'ensemble de la majorité ont aujourd'hui la confiance des agriculteurs français. Nous avons su fixer un cap clair : celui de la compétitivité en matière agricole – je rejoins, à cet égard, ce que disait Xavier Bertrand tout à l'heure. Nous avons su réduire le coût du travail dans l'agriculture française, car chacun sait bien, sur tous les bancs de cette assemblée, gauche et droite confondues, que si on ne réduit pas les charges qui pèsent sur le travail, dans ce secteur comme ailleurs, c'est l'emploi qui disparaîtra.
Nous avons la confiance des agriculteurs français parce que nous avons su, aux côtés du Président de la République, prendre les bonnes décisions sur le plan européen. Ainsi, il y a trois ans, la Commission européenne voulait baisser le budget de la politique agricole commune de 40 % ; aujourd'hui, le budget de la PAC est préservé à l'euro près. Je le dis à tous ceux qui, dans le monde rural, seraient tentés par le vote aux extrêmes : il n'y a pas d'avenir pour l'agriculture française sans le soutien de la politique agricole commune ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Nous avons la confiance des agriculteurs français parce que nous obtenons des résultats et que les paysans jugent leurs responsables politiques aux résultats. Ainsi, nous avons fait remonter les prix des viandes bovine et porcine, récupéré la première place en matière de viticulture et, aujourd'hui, grâce au travail de nos agriculteurs et au produit de l'exportation de l'industrie agroalimentaire, nous avons un excédent de la balance commerciale de 9 milliards d'euros. (Mêmes mouvements.)
Le cap que nous nous fixons tous, majorité, Premier ministre et Président de la République, est à l'opposé de celui qui a été fixé par le parti socialiste et les Verts. Je tiens à dénoncer ici, avec beaucoup de gravité, le choix qui a été fait par le parti socialiste et par les Verts dans un accord qui signifie le retour au soc et à la charrue pour les paysans français (Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR), la perte de compétitivité et toujours plus de surcharges administratives. D'ailleurs, certains d'entre vous, dont Arnaud Montebourg, se sont dissociés de cet accord. Les Verts et le parti socialiste voient l'agriculture comme un élément du passé, nous, nous la voyons comme un élément de l'avenir de la France. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Patrick Lemasle, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Tout d'abord, je tiens à rappeler à Xavier Bertrand que le budget de l'emploi a bel et bien baissé de 1,4 milliard d'euros en 2012. (« Tout à fait ! » sur de nombreux bancs du groupe SRC.)
Monsieur le Premier ministre, vendredi dernier notre pays a perdu sa notation AAA, qui était considérée par le Président de la République comme un trésor national. Lundi, la même agence de notation a baissé d'un cran la note du Fonds européen de stabilité financière à cause de l'abaissement de la note de la France et de l'Autriche. Hier, elle a dégradé la note de plusieurs entreprises publiques dont EDF, la SNCF, Aéroports de paris ainsi que la CADES et l'UNEDIC. Elle a, de plus, averti que les notes d'autres entreprises publiques, des groupes bancaires et des assureurs pourraient être abaissés dans les semaines qui viennent.
Ce sont de mauvaises nouvelles…
…qui sanctionnent votre politique parce qu'elles signifient un crédit plus rare et plus cher, une consommation et des investissements en baisse. Contrairement à vos affirmations, une autre agence n'a pas confirmé la notation AAA de la France. Elle a seulement indiqué que notre pays était sous observation, comme le reste de la zone euro, pour examen de sa perspective stable, avec communication de son expertise fin mars.
C'est certainement pour rassurer les marchés que vous envisagez un troisième plan de rigueur qui ne dit pas son nom à travers la mise en place de la TVA que vous dites « sociale ». Confirmez-vous que votre projet est de transférer la part familiale des cotisations patronales sur la TVA ? Cela pourrait représenter un transfert de plusieurs dizaines de milliards d'euros, soit plusieurs points de TVA de plus, que vous feriez payer aux familles, aux salariés, aux retraités et aux chômeurs, ceux-là mêmes qui viennent de subir deux plans d'austérité de 20 milliards d'euros, avec notamment la hausse de la TVA – déjà ! – et des taxes sur les complémentaires de santé, ceux-là mêmes qui n'oublient pas les cadeaux fiscaux que vous avez accordés aux plus favorisés depuis 2007, ceux-là mêmes qui n'oublient pas qu'en 2012, les plus favorisés bénéficieront encore et toujours du bouclier fiscal et de la baisse de l'impôt sur la fortune.
Ma question est simple : allez-vous mettre en place un nouveau plan d'austérité imposant la TVA antisociale pour satisfaire les marchés financiers ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le député, il y a quelque chose de triste à vous entendre verser des larmes de crocodile sur la décision d'une agence, elle-même contredite par une autre agence qui confirme l'excellence de la notation française. Il y a quelque chose de triste à vous voir bruyamment vous féliciter presque, dans les salles de militants, de ce qui s'est passé,…
…comme si Nicolas Sarkozy, pour dire le nom que vous avez aux bords des lèvres sans oser le dire, était responsable de la dette aux États-Unis – c'est la même agence qui a dégradé la dette américaine –, de l'endettement en Italie, au Portugal, en Grèce, en Irlande, dans la zone euro,…
…comme si Nicolas Sarkozy était responsable de la crise majeure qui entraîne le monde entier à s'interroger sur les fondamentaux de son économie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Revenons à l'esprit de responsabilité, à l'esprit de l'intérêt général. Il y a trois agences de notation : deux ont maintenu le AAA ; il y a un problème identifié : la gouvernance de la zone euro ; il y a une méthode : la coordination de l'action de la France et de l'Allemagne ; il y a un objectif : faire réussir l'accord du 9 décembre pour une plus grande discipline budgétaire et pour la mise en place de plus de sanctions à l'encontre de ceux qui dérivent, au service de l'expression d'une solidarité qui fonctionne. Telle est la question que nous avons à affronter et non pas, malgré la campagne électorale, de vulgaires polémiques.
Pour le reste, quelles sont les conséquences de ce qui s'est passé sur la réalité de notre économie ? Ce n'est pas une agence, et probablement pas celle-ci, qui va guider le choix des investisseurs sur la confiance à accorder à un pays comme la France. Quel est le rôle de ces agences ? Mesurer le risque d'un investisseur. Quel est le risque pour un investisseur s'agissant de la dette française ? Aucun ! Qui peut croire une seconde que la France ne remboursera pas ses dettes ? Quel que soit l'avis de cette agence ou d'une autre, la France est un investissement sans risque et elle le démontrera. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe NC.)
La parole est à M. Pascal Clément, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le garde des sceaux, c'est à vous que je m'adresse, parce ce que les questions de justice restent empreintes de si peu de sérénité… Il n'est qu'à lire la chronique judiciaire ou celle du ministère de la justice : il n'est de jour où les journalistes n'affrontent un magistrat mis en cause ou mis en examen. On se doute qu'il faudrait tout de même trouver des solutions.
J'apporte ma contribution en vous interrogeant sur l'application de la loi du 5 mars 2007, c'est-à-dire la loi dite « après Outreau ». Préparée par la commission spéciale de l'Assemblée nationale qui avait été particulièrement suivie par l'opinion publique, adoptée sans opposition à l'Assemblée nationale et pratiquement à l'unanimité au Sénat, cette loi n'est toujours pas appliquée. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Pourquoi n'est-elle toujours pas appliquée ? Parce que le Gouvernement a demandé au Parlement, à deux reprises, de repousser son application. La première fois, parce que le Gouvernement souhaitait supprimer le juge d'instruction ; la deuxième fois, la suppression du juge d'instruction n'étant plus à l'ordre du jour, parce qu'il jugeait le coût de cette réforme – 6 millions d'euros – trop élevé. Vous avouerez avec moi que, eu égard au budget de l'État, 6 millions d'euros ne représente pas une somme considérable.
Que prévoyait la loi ? Elle prévoyait d'abord la collégialité de l'instruction pour lutter contre cette culture du juge seul par opposition au juge qui travaille en équipe. Elle prévoyait encore la limitation de la détention provisoire et des pouvoirs accrus à la chambre de l'instruction.
Enfin, elle prévoyait l'enregistrement des gardes à vue au commissariat et des interrogatoires dans le cabinet du juge d'instruction.
Monsieur le garde des sceaux, quand pensez-vous appliquer la loi du 5 mars 2007 ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
Monsieur Pascal Clément, je comprends parfaitement que l'application de la loi de 2007 soit pour vous un souci.
C'en est aussi un pour le Gouvernement (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Cette loi de 2007 ne comportait pas que les mesures que vous venez de citer : elle contenait aussi d'autres dispositions que nous mettons en oeuvre au fil des ans.
Tout d'abord, il s'agissait de créer les pôles de l'instruction. Pour aller vers la collégialité, il faut rassembler les magistrats instructeurs. C'est ce que nous sommes en train de faire : nous avons ainsi créé 92 pôles de l'instruction, seuls compétents désormais pour les affaires criminelles.
Pour aller plus loin, nous avons mis en oeuvre la co-saisine des magistrats instructeurs, qui est une forme, certes inachevée, de collégialité. La co-saisine est de plus en plus utilisée : obligatoire si le procureur la requiert, elle peut, le cas échéant, être imposée par le président de la chambre de l'instruction à la demande des parties. C'est la loi, et nous l'appliquons petit à petit.
Nous réalisons également 300 opérations immobilières pour pouvoir répondre au troisième point de votre question : trois cents palais de justice font l'objet de rénovations pour être équipés des nouvelles technologies afin de permettre notamment les enregistrements.
Pas à pas, en fonction des moyens et des autres réformes, nous allons vers l'application de la loi de 2007, et notre objectif est de l'appliquer en totalité. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Jean-Louis Touraine, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et. divers gauche
Ma question s'adresse au ministère de l'intérieur car la politique de sécurité conduite depuis dix ans a échoué : les cambriolages augmentent ; les violences aux personnes, les coups et blessures, les menaces et incivilités diverses se sont multipliés. (Exclamations sur divers bancs du groupe UMP.)
À ce constat unanime, vous opposez les chiffres d'avant, déjà en progression notamment du fait de la mise en place d'une police de proximité qui incitait au dépôt de plainte.
Vous essayez aussi de masquer la réalité aveuglante des statistiques absurdes. Comment oser parler du chiffre de la délinquance, en englobant des faits aussi divers que le meurtre et le petit délit ? Cela n'a pas plus de sens que de parler du chiffre de la maladie en mêlant le cancer et le rhume des foins !
M. Guéant est d'ailleurs tellement brouillé avec les chiffres que le journal Libération lui a décerné la palme du menteur statistique 2011 (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC), ce à quoi il aurait répondu : on peut tout faire dire aux statistiques !
Oui, et vous essayez encore maintenant de prétendre à une pseudo-amélioration de quelques données. De fait, le subconscient de M. Guéant s'exprimait justement lorsqu'il déclarait : « la délinquance a recruté dans notre pays depuis 2002. »
À Lyon, un contrôle correct de la délinquance n'a été obtenu que grâce à un accroissement de l'effectif des policiers municipaux, mais nous ne pouvons pas demander à ces derniers de se substituer à une police nationale devenue insuffisante en nombre, dans la lutte contre le grand banditisme.
Une politique de répression juste, rigoureuse et efficace est nécessaire, mais il faut aussi d'authentiques mesures de prévention, de dissuasion, d'aide aux victimes. Comme l'indiquait récemment Robert Badinter, seul le retour en force de la prévention sur le terrain, y compris par le recours à une police de proximité…
…entraînera une véritable et durable amélioration de la sécurité ailleurs que dans le discours officiel.
Allez-vous enfin changer de logique pour améliorer vraiment la sécurité de nos concitoyens ou attendez-vous qu'une alternance politique le fasse à votre place ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le député Jean-Louis Touraine, comme l'a rappelé le ministre de l'intérieur, quelle que soit l'appréciation personnelle que vous portez, la délinquance est en baisse dans notre pays (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) pour la neuvième année dans notre pays, et quelles que soient vos dénégations.
La délinquance générale, c'est-à-dire tous les faits de criminalité et de délinquance parvenus à la connaissance de la police et de la gendarmerie, a baissé de 0,34 % en 2011 (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC), ce qui correspond à environ 12 000 faits.
La délinquance de proximité, c'est-à-dire les coups, les agressions et les vols sous diverses qualifications pénales, a baissé de 4,15 %, soit 60 000 faits. Depuis 2007, elle a baissé de 20 %, soit l'équivalent de 360 000 faits. Depuis 2002, la délinquance de proximité a baissé de 40 %. C'est un fait auquel les dénégations des uns et des autres ne changeront rien.
Pour que les choses soient bien claires, mesdames et messieurs les députés, sous le dernier gouvernement de gauche, entre 1997 et 2002, la délinquance générale avait progressé de plus de 17 %. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Actuellement, grâce à l'action déterminée des forces de l'ordre et à la volonté de cette majorité, nous enregistrons près de 700 000 victimes de moins qu'en 2002. Voilà une réalité !
En revanche, il reste, comme vous l'avez dit, un sujet de préoccupation : le nombre des cambriolages a augmenté de 16 %. Cette évolution tient pour une part à des raids commis par des malfaiteurs venus de l'étranger, notamment d'Europe centrale et orientale. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Plusieurs équipes itinérantes ont été démantelées, notamment à Strasbourg et à Toulouse. Pour avoir assisté à la présentation du bilan de l'action de la police à Strasbourg, je peux vous dire que lorsqu'on voit les territoires touchés par cette délinquance, on se rend compte qu'il s'agit d'un mal difficile à réparer.
Ce matin même, le directeur général de la police nationale a d'ailleurs indiqué que la délinquance commise par des étrangers en France représentait environ 20 % de la délinquance générale. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) L'Observatoire national de la délinquance publiera sur ce sujet une étude précise début février.
La parole est à M. Bernard Perrut, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse au ministre de l'emploi, du travail et de la santé.
Le Président de la République a réuni, ce matin, les partenaires sociaux pour trouver avec eux des solutions aux difficultés économiques que rencontre notre pays. Les points de consensus déjà trouvés, parmi lesquels figure la formation professionnelle des demandeurs d'emploi, témoignent, à mon sens, d'une forte volonté.
La formation professionnelle constitue, nous le savons tous, le meilleur passeport pour faire face aux mutations économiques et rebondir. C'est pourquoi il nous faut accroître notre effort collectif en ce sens, même si 600 000 demandeurs d'emploi sont déjà formés chaque année.
La loi de 2009 sur la formation professionnelle, issue d'un accord national interprofessionnel signé par les partenaires sociaux, a constitué un progrès notable, et la création du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels a permis d'orienter davantage les fonds de la formation professionnelle vers la formation des demandeurs d'emploi.
Il nous faut cependant aller plus loin, et c'est bien le sens de l'initiative prise par le Président de la République, par le Premier ministre et par le Gouvernement, qui ont annoncé, ce matin, un certain nombre de moyens et de mesures supplémentaires. Oui, mes chers collègues, il est essentiel d'encourager le recours à l'activité partielle. Oui, il est essentiel de former plutôt que de licencier. Oui, il est essentiel d'accompagner chaque chômeur de longue durée afin qu'il accède à une formation de nature à lui permettre de répondre aux exigences de ses potentiels employeurs.
Monsieur le ministre, ma question est double. Quels sont les moyens mis sur la table par l'État ? Qu'attendez-vous des autres parties prenantes, notamment des régions, dans ce combat pour l'emploi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Vous l'avez dit, monsieur le député, si on travaille tous ensemble dans la même direction, on pourra être encore plus efficace. Le Gouvernement a décidé de consacrer 150 millions d'euros supplémentaires,…
…dégagés par un redéploiement des ressources, c'est-à-dire sans modifier d'un seul euro le montant du déficit, à la formation des demandeurs d'emploi. Vous le savez, si l'on ne rapproche pas, par une formation, certains demandeurs d'emploi de l'emploi, ce sera beaucoup plus difficile pour eux, pour ne pas dire, dans certains cas, quasiment impossible.
Si cet effort supplémentaire est accompagné par les partenaires sociaux et par les régions, on pourra faire davantage encore. C'est la première étape.
Convenons-en, il nous faut, d'une certaine façon, bâtir un nouveau système de formation des demandeurs d'emploi. Qu'il s'agisse de la formation professionnelle ou de la formation des demandeurs d'emploi, une réforme radicale, une réforme d'ensemble, est nécessaire. Tous les demandeurs d'emploi ne se ressemblent pas, et les besoins de formation excèdent aujourd'hui largement nos capacités. Selon les calculs, 10 à 15 % des demandeurs d'emploi bénéficient d'une formation : c'est nettement insuffisant, et nous pouvons faire davantage.
Voilà pourquoi le Président de la République a confié à Gérard Larcher, que vous connaissez toutes et tous, le soin, dans les deux mois qui viennent, de rencontrer tous les acteurs et de proposer les bases d'une réforme d'ensemble. Sur ce sujet non plus, nous ne pouvons pas attendre. Nous devons entendre tout le monde, mais nous ne pouvons pas attendre.
Nous avons bien conscience, nous, que, sur de tels sujets, il ne s'agit pas de faire des déclarations, il s'agit d'engager, dès maintenant, de nouvelles réformes. La crise est telle qu'il nous faut aller plus loin dans le changement, plus loin dans les réformes. Ce sera le cas pour la formation des demandeurs d'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Martine Martinel, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture et de la communication.
En ce jour de sommet social, je pense que vous aurez à coeur, monsieur le ministre, de nous éclairer sur l'avenir des salariés de l'audiovisuel public. Ceux de RFI, troisième radio internationale et expression de la France dans de nombreux pays, s'inquiètent de la fusion à marche forcée de leur radio avec France 24 en vue de constituer le « CNN à la française » voulu par Nicolas Sarkozy depuis 2007, qui s'avère un véritable fiasco.
C'est à ces salariés de RFI que la cour d'appel de Paris a donné raison, lundi dernier, en ordonnant la suspension du projet de fusion RFI-France 24 pour irrégularités de procédure. Malgré les engagements pris, cette fusion, dont ni l'utilité ni la nécessité ne sont avérées, a été décidée à la hussarde, sans attendre les conclusions de la mission parlementaire en cours.
Aujourd'hui, le nom de l'Audiovisuel extérieur de la France est synonyme de scandales, de gabegie financière, de gouvernance à la limite de la légalité et de catastrophe sociale. Cette incurie que vous tolérez, monsieur le ministre, a un coût social et humain : 206 emplois ont été supprimés depuis 2009 et 126 sont menacés.
À ce gâchis de l'AEF s'ajoute celui de France Télévisions. Le résultat concret de toutes les réformes de l'audiovisuel public, menées avec l'argent des contribuables sous l'autorité de Nicolas Sarkozy, c'est, au final, que l'audience de M 6, chaîne privée, devance celle de France 3 et talonne désormais celle de France 2.
Monsieur le ministre, à moins qu'il ne soit déjà trop tard, les Français ont le droit de savoir, comme l'a dit M. Chatel. Quelles mesures entendez-vous prendre pour remettre à plat l'organisation de l'AEF ? Comptez-vous mettre un terme à ce gaspillage indécent de l'argent de nos concitoyens et redonner du lustre à l'audiovisuel public ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Madame la députée, le projet de fusion juridique de RFI, Monte Carlo Doualiya et France 24 s'inscrit dans le cadre de la réforme de l'Audiovisuel extérieur de la France, engagée à l'été 2007 pour améliorer la cohérence et l'efficacité de chacune des sociétés qui l'incarnent. Ce projet de fusion sera mené à terme.
Il s'agit de tirer pleinement profit de la complémentarité entre les sociétés et aussi de tirer profit du partage de l'information, des savoirs et des compétences, de porter un projet éditorial ambitieux grâce au travail en commun des différents médias du groupe.
J'ai pris note de la décision de la cour d'appel de Paris, qui n'a suspendu le processus de fusion que pour une seule raison, tout en validant tous les autres points du projet. Elle a décidé de suspendre la procédure d'information-consultation des personnels sur la fusion juridique tant que le cahier des charges définitif de l'audiovisuel n'a pas été transmis au comité d'entreprise. Dont acte, mais je précise que le comité d'entreprise de RFI a été consulté en septembre dernier sur le projet de cahier des charges, à l'initiative de la direction de la société.
De manière à exécuter l'arrêt de la cour d'appel de Paris, une nouvelle saisine du comité d'entreprise aura lieu dans les prochains jours. La version définitive du cahier des charges, postérieure à l'avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel, lui sera soumise.
Une fois cette procédure d'information-consultation du comité d'entreprise de RFI terminée, conformément à l'arrêt rendu par la cour d'appel, le processus de fusion entre les entités se poursuivra selon le calendrier prévu. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Philippe Boënnec, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à Mme Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
Avec ses zones économiques exclusives, avec ses 180 000 kilomètres de côtes la France est la deuxième nation maritime du monde, qui souvent l'ignore. Présente dans tous les océans, elle dispose d'une situation géostratégique forte. Grâce à ses collectivités d'outre-mer, elle concentre près de 10 % de la biodiversité marine mondiale.
La mer est un élément clef pour l'équilibre de notre climat. La mer, grâce à la richesse de sa biodiversité et de ses ressources naturelles, qu'elles soient alimentaires ou pharmacologiques, est la première assurance-vie de la planète.
Le Grenelle de l'environnement a jeté les bases d'une ambition stratégique globale de la mer et du littoral. Le Grenelle de la mer a posé l'élan d'une ambition collective. Le discours prononcé au Havre par le Président de la République a fixé le cap.
Le livre bleu adopté par le Comité interministériel de la mer trace la feuille de route, dite « stratégie nationale de la mer et des littoraux », autour de quatre axes – la connaissance et la formation, le développement économique, la protection, la gouvernance – qui forment le socle de la politique maritime de notre pays. Nous attendons l'installation par le Premier ministre du premier Conseil national de la mer et des littoraux.
Ma question est la suivante : par cette politique maritime ambitieuse menée par le Gouvernement, quelles perspectives s'offrent aux acteurs du monde maritime ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.
Monsieur Boënnec, le Grenelle de la mer est en effet une feuille de route extrêmement ambitieuse pour notre pays. C'est, pour la première fois depuis longtemps, la France qui regarde à nouveau vers la mer et ce sera une grande nouveauté de ce quinquennat.
Ce sont, surtout, des perspectives très concrètes pour les acteurs et des perspectives de développement économique pour un secteur qui compte déjà aujourd'hui plus de 600 000 emplois et qui regorge d'un énorme potentiel.
Je souhaite donner, très concrètement, quatre exemples pour dire sur quels axes nous travaillons.
D'abord la réforme portuaire. Nous l'avons achevée au mois de juin, avec Thierry Mariani. Aujourd'hui, plus de la moitié des marchandises qui arrivent en France par la voie maritime sont débarquées dans des ports étrangers. Notre objectif est tout simplement d'en rapatrier 50 % dans des ports français.
Il y a aussi la construction navale. Nous avons un certain nombre d'emplois, nous avons des savoir-faire, nous devons investir pour pouvoir les développer. Plus de 100 millions d'euros des investissements d'avenir iront ainsi au programme « navires du futur » pour des bateaux plus sûrs et plus économes en énergie.
Il y a également les énergies marines renouvelables, avec la plate-forme technologique France Énergies Marines à Brest et, surtout, avec le programme éolien offshore : nous prévoyons plus de dix milliards d'euros d'investissements et 10 000 emplois sur la façade ouest ; nous avons les compétences pour être un leader mondial.
Il y a enfin, c'est un axe d'avenir important, le développement de l'exploration des grands fonds marins. C'est une nouvelle frontière du XXIe siècle ; toutes les grandes nations sont en train de se positionner ; c'est une course folle. La France ne peut pas rester en arrière et j'ai décidé de déposer auprès de l'Autorité des grands fonds marins une demande de permis d'exploration dans l'Atlantique pour que nous soyons sur les rangs.
Monsieur le député Philippe Boënnec, l'élan doit être poursuivi. J'observe avec intérêt que la mer figure dans tous les programmes des candidats à l'élection présidentielle : que d'autres s'y intéressent enfin est aussi une victoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Chantal Berthelot, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Hier, dans cet hémicycle, M. Copé a déclaré être indigné de voir M. Hollande, depuis les Antilles, s'exprimer sur la dégradation de la note de la France. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Copé considère-t-il qu'un responsable politique ne peut s'exprimer depuis les outre-mer sur un sujet aussi grave ? (Mêmes mouvements - Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Dans quelques jours, le Président de la République adressera ses voeux à l'outre-mer depuis la Guyane.
Au cours de ce déplacement, il prévoit de se rendre à Maripasoula, dans le village de Twenké-Taluhen.
C'est une très bonne chose…
Le centre de santé attendu par la population depuis la visite, en 2008, de Mme Roselyne Bachelot, alors ministre de la santé, vient d'être achevé.
Cela remonte à 2008, mes chers collègues !
Les besoins restent encore nombreux. L'accès à l'eau potable et à l'électricité, deux droits universels, n'est pas assuré. L'orpaillage clandestin, avec ses méfaits sur les habitants et l'environnement, est encore une réalité. La gestion des déchets se pratique à travers des décharges sauvages.
La Communauté de communes de l'ouest guyanais avait prévu de réaliser certains investissements en 2012. Mais, le prélèvement d'office de 1,4 million d'euros au titre de la TGAP ne le lui permet pas, alors que nous sommes dans l'attente des conclusions d'une mission interministérielle à ce propos.
Il y a un an, j'ai interrogé M. le Premier ministre sur le malaise des Amérindiens de France sur ce territoire.
Au-delà de l'aspect médiatique et symbolique de la visite du président-candidat à Twenké-Taluhen, quelle est la position du Gouvernement sur la reconnaissance des peuples autochtones de Guyane afin de favoriser leur bien-être et leur épanouissement ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Madame la députée, je ne reviendrai pas sur le débat d'hier : nous n'avons pas besoin de rappeler incessamment que l'outre-mer, c'est la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP - Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Plusieurs députés du groupe SRC. Dites-le à M. Copé !
S'agissant de l'engagement de ce Gouvernement, notamment à l'égard de la Guyane, vous avez fait état des investissements qui doivent effectivement être réalisés pour permettre aux populations de l'ouest de la Guyane de se développer. Aujourd'hui, ces investissements sont prévus dans le plan d'aménagement du parc amazonien.
Lorsque ce Gouvernement a pris en charge les affaires de ce territoire, ce plan n'était engagé qu'à hauteur de 25 %. Aujourd'hui, grâce à l'action du département et des collectivités mais surtout à celle du Gouvernement, nous en sommes à plus de 65 %.
Il est vrai que se pose la question de la prise en compte des spécificités des populations autochtones. Vous savez que ces populations sont régies par la même Constitution et par les mêmes lois que les autres et que nous sommes, à ce titre, dans l'incapacité de ratifier les accords de l'ONU relatifs aux droits autochtones.
Pour autant, nous avons fait en sorte que ces droits soient renforcés, notamment en permettant à ces populations de disposer de terres beaucoup plus importantes, avec un principe de gratuité. Nous avons mis en place un droit foncier. Nous avons créé des communes le long du fleuve Oyapock. Nous avons aussi, par l'instauration de zones de protection, fait en sorte que ces populations puissent vivre selon leurs us et coutumes.
S'il y a aujourd'hui des évolutions, sachez que nous ne ferons rien sans l'avis du Conseil consultatif des populations amérindiennes et bushinenge, car c'est ce Gouvernement qui a officiellement installé ce conseil en juin 2010. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Populations de l'ouest guyanais
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Louis Giscard d'Estaing.)
M. le président a reçu de M. le ministre chargé des relations avec le Parlement une lettre l'informant que la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative aux recherches impliquant la personne humaine est inscrite à l'ordre du jour du jeudi 26 janvier 2012.
L'ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, de la proposition de loi de M. Jean-Pierre Door relative à l'exercice des professions de médecin, chirurgien-dentiste, pharmacien et sage-femme pour les professionnels titulaires d'un diplôme obtenu dans un État non-membre de l'Union européenne (nos 4105, 4152).
La parole est à M. Jean-Pierre Door, rapporteur de la commission des affaires sociales.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État chargée de la santé, mes chers collègues, le 15 décembre dernier, le Conseil constitutionnel, considérant qu'il s'agissait d'un cavalier législatif, a censuré l'article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, qui encadrait les conditions d'exercice de certains professionnels de santé titulaires d'un diplôme obtenu hors Union européenne. Ce faisant, il a placé ces derniers dans une situation extrêmement difficile, puisqu'ils ne sont habilités à poursuivre leur activité sous des statuts d'exercice restreint que jusqu'au 31 décembre 2011, dans le cadre de la procédure dérogatoire d'autorisation sur examen. Dès lors, si aucune mesure législative n'intervient, plusieurs milliers de ces praticiens ne pourront plus exercer leurs fonctions.
La proposition de loi que j'ai déposée vise donc à répondre à ce problème et à garantir la continuité de fonctionnement des établissements français de santé, qui dépend en partie de ces praticiens.
Le nombre exact des praticiens à diplôme hors Union européenne – PADHUE – semble difficile à déterminer. Selon le Centre national de gestion, ils seraient entre 6 700 et 7 100. Seuls 2 000 d'entre eux pourraient prétendre au bénéfice de l'actuelle procédure dérogatoire d'autorisation sur examen. S'agissant des seuls médecins, une étude publiée par un syndicat estimait qu'en janvier 2007, près de 17 000 PADHUE exerçaient en France sur 214 000 médecins actifs. Parmi ces 17 000 praticiens, environ 10 000 bénéficiaient déjà d'une une autorisation de plein exercice et 7 000 travaillaient encore sous des statuts d'exercice restreint, principalement ceux de « faisant fonction d'interne » et de « praticien attaché associé ». Cette même étude indique que, selon une enquête menée en 2005, ces médecins sont, pour 67 % d'entre eux, des hommes et qu'il s'agit de personnes plutôt jeunes, la majorité ayant moins de 40 ans. Ces praticiens ont, pour la plupart, obtenu leur diplôme en Algérie – 18 % –, en Europe de l'est – 17 % –, au Maroc et en Tunisie – 15 % –, ainsi qu'en Afrique subsaharienne – 12 %.
La proposition de loi que j'ai l'honneur de vous présenter vise à réformer la procédure dérogatoire d'autorisation de plein exercice sur examen dont peuvent bénéficier certains PADHUE.
Cette procédure prévoit que la limitation du nombre de postes ouverts aux lauréats des épreuves de vérification des connaissances organisées dans le cadre de la procédure de droit commun ne s'applique pas à ceux de ces praticiens qui ont exercé, sous des statuts précis déterminés par décret, des fonctions rémunérées avant juin 2004 et entre 2004 et 2006. Ces derniers subissent donc les mêmes épreuves de vérification des connaissances que les professionnels relevant de la procédure de droit commun, mais ils sont soumis à un examen, et non à un concours, car la limitation du nombre de postes ouverts ne leur est pas opposable. À l'instar des autres professionnels, ces praticiens doivent ensuite effectuer une période d'exercice probatoire avant de pouvoir se voir délivrer une autorisation de plein exercice.
Entre 2007, année d'organisation de la première session d'examen, et 2010, près de 4 000 PADHUE ont réussi les épreuves de vérification des connaissances dans le cadre de la procédure dérogatoire d'autorisation sur examen. Les résultats définitifs de la session 2011 ne sont pas encore connus, mais le ministère de la santé estime qu'environ 500 praticiens supplémentaires devraient être reçus aux épreuves. Plus précisément, en 2011, 1 662 candidats se sont présentés. Ils étaient en majorité de nationalité française, leur âge médian était de 44 ans et ils exerçaient principalement sous les statuts d'infirmiers et de faisant fonction d'interne dans des établissements publics, plus particulièrement en Île-de-France. Il s'agit, en général, d'hommes qui pratiquent la médecine – 58 % –, la chirurgie – 14 % – ou la psychiatrie – 12 %.
La procédure dérogatoire d'autorisation sur examen permet surtout aux PADHUE, dans l'attente de leur réussite aux épreuves de vérification des connaissances puis de l'obtention de leur autorisation de plein exercice, de poursuivre leur activité sous des statuts d'exercice restreint, et donc sous la responsabilité d'un professionnel de plein exercice, jusqu'à épuisement de leur droit à se présenter aux épreuves de vérification des connaissances et au plus tard jusqu'au 31 décembre 2011.
Il est nécessaire aujourd'hui de prolonger et de réformer la procédure dérogatoire sur examen.
Le texte que nous allons examiner vise à la prolonger jusqu'au 31 décembre 2014. Je vous proposerai de la prolonger par amendement jusqu'au 31 décembre 2016, pour des raisons d'équité entre les PADHUE. Il s'agit en effet de tenir compte du délai de trois ans durant lequel est offerte la possibilité de passer l'examen et de l'année de stage. Si le texte s'applique à compter de fin 2012, il nous faut donner du temps au temps.
Le texte a également pour objet de permettre aux praticiens concernés de poursuivre leur activité actuelle jusqu'en 2014 – ou 2016, si l'Assemblée en décide ainsi – sous des statuts d'exercice restreint, à condition qu'ils se présentent à la nouvelle épreuve de vérification des connaissances. La fixation d'une date butoir a pour objectif d'inciter les praticiens concernés à se présenter à la nouvelle épreuve de vérification des connaissances dans les meilleurs délais, afin de diminuer au plus vite le nombre de professionnels qui ne bénéficient pas de la plénitude d'exercice dans les établissements de santé.
Outre sa prolongation, je propose également une réforme de la procédure dérogatoire d'autorisation sur examen. Tout d'abord, serait créée une nouvelle épreuve annuelle de vérification des connaissances, désormais distincte de celle de la procédure de droit commun. Cette épreuve consisterait en un examen sur titres et travaux, suivi d'un entretien avec un jury.
Ensuite, la proposition de loi a pour objet de limiter à une année la durée de la période d'exercice probatoire à effectuer une fois l'examen réussi. La durée de la période probatoire imposée aux médecins et aux pharmaciens se trouvera donc réduite de trois à un an, mais elle demeurera inchangée pour les autres praticiens. Pendant cette année probatoire, les praticiens ne pourront travailler que sous des statuts d'exercice restreint et donc sous la responsabilité d'un professionnel de plein exercice.
Pour pouvoir bénéficier de la procédure dérogatoire rénovée, et donc poursuivre leur activité actuelle, les PADHUE devront remplir trois séries de conditions relatives à leur diplôme, à leur date de recrutement et à la durée et à la nature des fonctions qu'ils ont exercées en France.
Ils devront en particulier avoir été recrutés avant août 2010 pour les médecins, chirurgiens-dentistes et pharmaciens, et janvier 2012 pour les sages-femmes ; mais aussi justifier d'un exercice professionnel d'une durée d'au moins trois ans, sous des statuts et dans des conditions fixés par décret. La fixation d'une condition de durée minimale d'exercice hospitalier vise à limiter le droit à cette procédure dérogatoire aux praticiens réellement installés en France depuis un certain temps.
Enfin, la proposition de loi fixe au 1er janvier 2012 la date d'entrée en vigueur de ses dispositions, qui s'appliqueront donc de manière rétroactive, de façon à ce qu'il n'y ait pas de trou de garantie en matière d'assurances.
La procédure dérogatoire d'autorisation sur examen prenant fin au 31 décembre 2011, cette mesure apparaît nécessaire pour régulariser, a posteriori, la période d'exercice professionnel des praticiens concernés comprise entre le 1er janvier 2012 et la date d'entrée en vigueur de la loi.
Je tiens à souligner le consensus qui s'est dégagé autour de cette proposition de loi lors de sa discussion en commission des affaires sociales. Chacun a montré qu'il était conscient de la nécessité de régler au plus vite la situation des PADHUE.
J'ai moi-même échangé avec le rapporteur du Sénat, M. Yves Daudigny, et nous nous sommes, en particulier, mis d'accord sur la nécessité de prolonger la procédure dérogatoire jusqu'en 2016 – c'est là une mesure d'équité, que je vous proposerai d'adopter par voie d'amendement.
Enfin, les dispositions proposées permettront de régulariser la situation de nombreux hôpitaux, en particulier les centres hospitaliers généraux. À titre d'exemple, dans ma circonscription, ce sont 30 praticiens sur les 160 que compte le centre hospitalier de Montargis qui auraient dû cesser leurs fonctions au début de cette année, ce qui remettait en cause le bon fonctionnement de l'établissement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, mesdames et messieurs les députés, la proposition de loi qui vous est présentée par M. Jean-Pierre Door reprend, comme vous le savez, les dispositions sur l'exercice des praticiens à diplôme hors Union européenne.
Il s'agit d'un texte dont je n'ai pas besoin de souligner l'importance. Chacun a pu constater qu'il pose à la fois des problèmes humains, en raison du statut fragile de ces praticiens, et des problèmes liés à la fragilisation possible de notre système de soins, au cas où ces praticiens ne pourraient pas être confortés dans les établissements où ils exercent. Il était indispensable de les autoriser à continuer à exercer et de leur donner la possibilité de se présenter aux épreuves de vérification des connaissances dans le cadre de la procédure d'autorisation d'exercice.
Je tiens à remercier Jean-Pierre Door, rapporteur de cette proposition de loi, ainsi que les membres de la commission des affaires sociales, pour leur implication dans l'examen de la proposition de loi qui vous est présentée. Votre travail devrait permettre de concrétiser notre souhait de trouver une issue favorable à cette situation délicate et ce, dans les meilleurs délais.
Les dispositions sur l'exercice des praticiens à diplôme hors Union européenne avaient été introduites dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 mais, comme l'a dit M. le rapporteur, le Conseil constitutionnel a considéré qu'elles ne relevaient pas d'une telle loi. De ce fait, l'article 51 du projet de loi, qui prévoyait notamment de prolonger transitoirement l'exercice des praticiens à diplôme hors Union européenne dans les établissements de santé, a été censuré par le Conseil constitutionnel.
Je voudrais tout d'abord souligner le caractère consensuel de cette disposition. Accueillie favorablement par les parties concernées – le Conseil national de l'Ordre des médecins et les syndicats représentant les praticiens à diplômes hors Union européenne –, elle avait été adoptée à l'unanimité, tant par l'Assemblée nationale que par le Sénat.
Ce consensus tient très certainement au fait que l'ensemble des parlementaires ont conscience de l'importance de la mesure proposée, compte tenu de son impact sur la continuité de fonctionnement des établissements de santé. En effet, comme vous le savez, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 avait instauré une disposition dérogatoire visant à permettre aux praticiens remplissant certaines conditions d'ancienneté, de recrutement et de durée d'exercice en France, de poursuivre leurs fonctions dans l'attente de leur réussite aux épreuves de vérification des connaissances organisées dans le cadre de la procédure d'autorisation d'exercice qui leur était réservée.
Le terme de ce dispositif transitoire avait été fixé au 31 décembre 2011. En 2011, le Gouvernement a été saisi de deux types de difficultés. D'une part, le caractère inapproprié d'une partie des épreuves de vérification des connaissances ; d'autre part, surtout, l'obligation faite à un certain nombre de praticiens de cesser leurs fonctions au 1er janvier 2012, faute d'être lauréats des épreuves de vérification des connaissances.
Cette situation risquant de fragiliser la continuité de fonctionnement de certains établissements de santé, il était nécessaire de prendre une mesure. C'est pourquoi l'article 51 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, dont les dispositions sont reprises dans la proposition de loi de M. Jean-Pierre Door, prévoyait de permettre à ces praticiens, sous réserve qu'ils remplissent certaines conditions, de poursuivre leurs fonctions au sein des établissements de santé jusqu'au 31 décembre 2014, et de prolonger pour la même durée le dispositif transitoire d'accès par un examen à la plénitude d'exercice de la médecine, en l'adaptant à leur situation particulière.
Par ailleurs, la proposition de loi prévoit d'aménager la procédure d'autorisation d'exercice réservée à ces praticiens par l'institution d'une nouvelle épreuve de vérification des connaissances au contenu moins académique, laissant davantage de place à l'évaluation des compétences cliniques. Ses modalités seront précisées par décret.
Cette évaluation sera éventuellement suivie d'une année probatoire de fonctions exercées en établissement de santé, afin de permettre à la commission d'autorisation d'exercice compétente d'apprécier l'aptitude des praticiens à la prise en charge des patients.
Je souhaite préciser que, même si la date du 31 décembre 2011 ne concernait que les médecins et les chirurgiens-dentistes, dans un souci de cohérence, le Gouvernement a souhaité que l'ensemble des professions médicales et les pharmaciens puissent bénéficier de la mesure proposée.
Un décret précisera les fonctions exercées permettant de bénéficier de la possibilité de poursuivre ces fonctions, ainsi que les fonctions permettant d'être éligible au dispositif aménagé d'épreuves de vérification de connaissances et de ne pas être soumis, le cas échéant, à l'obligation d'effectuer l'année probatoire de fonctions.
Pour terminer, je souhaite appeler votre attention sur le fait que le caractère consensuel de la disposition, que j'évoquais au début de mes propos, conduit le Gouvernement à soutenir la proposition de loi de M. Jean-Pierre Door. Je ne doute pas que vos débats seront de grande qualité et je vous remercie de l'attention que vous voudrez bien apporter à cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le texte que nous allons étudier constitue un nouvel exemple de la tendance de la majorité à légiférer dans l'urgence – alors qu'en l'occurrence, il aurait été possible d'anticiper.
Vous permettrez que je fasse un récapitulatif des faits ayant mené à cette réelle crise, débutant à partir de la loi du 27 juillet 1999, qui interdit effectivement de recruter des diplômés étrangers n'ayant pas travaillé en France avant juillet 1999. Toutefois, du fait de la diminution du numerus clausus, les hôpitaux continuent de recruter un personnel nécessaire au bon fonctionnement de leurs services. Il faudra attendre 2005 pour voir apparaître un premier décret, mettant en place la nouvelle procédure d'autorisation, dite NPA, particulièrement inadaptée aux enjeux. Le projet est de subordonner l'autorisation d'exercer en France, pour les diplômés étrangers, au passage d'un concours ne tenant en rien compte de la situation de praticiens déjà en poste.
Après s'être engagé à la création d'une voie spéciale, le ministère s'était alors rétracté. Dès cette époque, les PADHUE – c'est-à-dire les praticiens à diplôme hors Union européenne – l'avaient pourtant alerté, dénonçant l'absence de reconnaissance officielle de leur travail. M. Bertrand, alors ministre de la santé – vous êtes hors de cause, madame Berra, puisque vous n'étiez pas encore au Gouvernement – avait prétexté des problèmes juridiques. Il disait n'avoir « pas renoncé à assurer un avenir et un statut à ces diplômés », on en voit le résultat quelques années plus tard.
Le 27 février 2006, c'est la HALDE qui, suite aux discriminations subies par les praticiens concernés – essentiellement des médecins – se chargeait du dossier en demandant officiellement des avancées au ministère de la santé dans un délai de quatre mois, notamment dans le sens d'une validation des acquis. Une fois de plus, les engagements pris alors n'ont pas été suivis d'effets. Il faudra donc attendre le projet de loi de financement de la sécurité sociale de 2007, et de nombreux mouvements sociaux, pour que les revendications des PADHUE soient enfin prises en considération. Le Gouvernement propose alors un examen dérogatoire, en parallèle du NPA, et suivi d'une période probatoire de trois ans, pour les praticiens recrutés par les hôpitaux avant juin 2004.
Toutefois, cette proposition ne s'applique pas aux praticiens titulaires du CSCT – le certificat de synthèse clinique et thérapeutique –, dont une partie de la formation est française. Dans un souci d'équité, notre groupe avait, à l'époque, soutenu l'accès à cette mesure dérogatoire pour des praticiens exerçant leur spécialité dans la précarité depuis des années. Nous avions d'ailleurs conditionné cet accès à l'exercice de trois ans de fonction hospitalière en France après la période de formation, et au fait d'être en poste au moment de la publication de la loi. Comment expliquez-vous qu'un praticien ayant effectué une partie de son cursus scolaire en France, ayant la nationalité française, et travaillant pour le service public de santé français, n'ait pas l'accès à cette dérogation ?
Aujourd'hui, ce sont ces quelque 6 700 praticiens à diplôme étranger, auxquels il faut ajouter 3 300 autres encore en formation, qui payent les conséquences d'une politique inadaptée. Ces personnes pourtant nécessaires au fonctionnement de notre système hospitalier, vous les avez oubliées ! Elles travaillent à des salaires inférieurs de 30 % à 50 % à leurs collègues titulaires d'un diplôme français – ce qui avait motivé la saisine de la HALDE – et ne bénéficient que d'un statut précaire contractuel renouvelable d'année en année. Il n'existe toujours, à l'heure actuelle aucune prise en compte des années d'exercice effectuées par ces praticiens, et du service qu'ils rendent tous les jours à la France. Qui retrouve-t-on dans les services de gériatrie, ou l'on manque de bras ? Qui assure les gardes pendant les périodes de vacances ou de jours fériés ? Qui, encore, accepte de travailler dans les régions peu peuplées, peu denses en médecins, ou dans les quartiers difficiles des villes, là où d'autres se découragent, si ce n'est ces praticiens diplômés hors Union européenne ?
Je vous pose donc une question : mais qu'avez-vous donc attendu ? Je vous rappelle pourtant la lettre, en date du 21 août dernier, du syndicat national des praticiens à diplôme hors Union Européenne, qui signalait déjà depuis mai la situation alarmante dans laquelle se retrouvent aujourd'hui ces diplômés étrangers, arrivés en France après juin 2004. Vous saviez donc que les mesures dérogatoires prévues par l'alinéa IV de l'article 83 de la loi du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale 2007, prenaient fin le 31 décembre 2011. Je rappelle également que Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée de la santé ici présente, a reçu ce syndicat en octobre dernier et, devant l'urgence de la situation, a décidé d'intégrer un article au PLFSS 2012. Le groupe socialiste ayant déposé un recours devant le Conseil constitutionnel, cet article a été retoqué par le Conseil, qui a considéré qu'il s'agissait d'un cavalier législatif – on voit ici les limites à la pratique consistant à légiférer dans l'urgence.
Depuis le 1er janvier dernier, ce sont des milliers de praticiens qui exercent dans l'illégalité, ce que les ARS ont constaté. Il y a donc urgence à légiférer pour tous ces praticiens médicaux et paramédicaux.
On entend dire que l'article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 serait tombé par la faute des socialistes : non ! Les Sages du Conseil constitutionnel ont fait leur travail, et l'ont considéré comme un cavalier législatif. Subordonner l'avenir de tous ces gens à un cavalier législatif est hautement irresponsable, et prouve combien vous les avez méprisés – ou, si le mot de mépris est un peu fort, combien vous les avez ignorés.
Toutefois, nous, groupe socialiste, radical et citoyen, ne nous opposons pas systématiquement, contrairement à ce qu'on entend régulièrement dans la bouche des membres du Gouvernement. Quand le chemin nous semble juste et bon, même si vous l'empruntez tard, puisque nous nous sommes exprimés sur ce sujet depuis 2006, nous n'hésitons pas à le suivre. Enfin, nous allons pouvoir régulariser une situation à propos de laquelle nous vous avons alertés, je le répète, depuis déjà longtemps. Mais comme dit la maxime populaire : mieux vaut tard que jamais !
Nous voterons donc sans réserve cette proposition de loi dont le rapporteur est notre collègue Jean-Pierre Door…
…à condition toutefois que les amendements que nous avons vu apparaître lors de la réunion de la commission tenue tout à l'heure en application de l'article 88, présentés notamment par M. Rolland, ne soient pas votés. Si ces amendements étaient adoptés, nous nous verrions dans l'obligation de voter contre ce texte ; mais, monsieur le rapporteur, je pense avoir été claire et je ne me fais pas de souci : ces amendements seront rejetés par l'ensemble des parlementaires présents. D'avance, merci.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, cette proposition de loi concerne les professionnels de santé, médecins, chirurgiens, dentistes, pharmaciens, sages-femmes titulaires d'un diplôme obtenu dans un État non membre de l'Union européenne, ceux que l'on appelle les PADHUE, qui sont en poste dans les établissements de santé et dont le mode d'exercice est dit « restreint ».
Le vote de cette proposition est nécessaire et urgent car ces professionnels n'ont plus le droit d'exercer, en théorie, depuis le 31 décembre 2011, s'ils n'ont pas satisfait aux épreuves de certification des connaissances.
En 2007, environ 8 000 praticiens étaient concernés – les PAC, praticiens adjoints contractuels. Depuis, 4 000 d'entre eux ont validé leur diplôme en réussissant les épreuves de certification des compétences. Mais, à ce jour, 4 000 autres environ n'ont pas encore validé leur diplôme, alors que la date butoir avait été fixée au 31 décembre 2011.
Ils n'ont donc plus le droit d'exercer. Or ils occupent des postes dans les établissements de santé où ils sont indispensables aux urgences, en réanimation, en médecine, notamment. Il semblerait d'ailleurs que 10 000 postes ne sont pas pourvus par des praticiens titulaires, dont 4 000 occupés par des praticiens titulaires d'un diplôme hors Union Européenne : nous sommes très heureux de les avoir pour assurer les soins au quotidien et faire fonctionner nos établissements.
Non seulement 60 % de ces praticiens sont français, ayant acquis la nationalité française notamment par le mariage, non seulement leurs enfants, nés sur le territoire national, sont eux aussi français, mais ils occupent des postes indispensables au fonctionnement des établissements où ils rendent des services importants pour des rémunérations inférieures à celles d'un titulaire. Leur activité est limitée par le statut d'exercice restreint, et ils ne peuvent exercer en médecine ambulatoire.
Cette proposition de loi ne concerne pas ni les praticiens qui peuvent obtenir une autorisation de plein exercice par la procédure dite « de droit commun », ni certains praticiens dispensés des épreuves de vérification des connaissances selon les procédures antérieures à 2007. Mais leur nombre est aujourd'hui limité, voire très limité.
Cette proposition de loi concerne les praticiens titulaires d'un diplôme hors Union Européenne, en fonction dans les établissements de santé, et n'ayant pas encore satisfait aux épreuves de vérification des connaissances, sous le statut d'exercice restreint.
La loi de financement de la sécurité sociale de 2007 avait prévu que ces praticiens ne pourraient plus exercer dans les établissements publics de santé au-delà du 31 décembre 2011. Or, à la fin de l'année 2011, 4 000 praticiens n'avaient pas encore satisfait aux épreuves de vérification des connaissances.
La loi de financement de la sécurité sociale de 2012, pour permettre le fonctionnement des établissements et pour tenir compte des services rendus par ces praticiens, a prévu de repousser la date butoir au 31 décembre 2014. Mais le Conseil constitutionnel, considérant qu'il ne s'agissait pas d'un article financier, a censuré cette mesure le 15 décembre 2011.
Il y a donc urgence à régler ce problème pour permettre aux établissements de fonctionner et donner un délai supplémentaire de trois ans aux praticiens qui exerçaient dans les établissements avant le mois d'août 2010, c'est-à-dire à la date de modification des nouveaux diplômes – en souhaitant que cette date ne pose pas demain de nouvelles difficultés.
J'espère que, d'ici à 2014, les 4 000 praticiens concernés auront réussi leur examen, grâce à la formule de l'entretien avec un jury et aux épreuves pratiques, mieux adaptées pour apprécier les connaissances que les épreuves théoriques.
La proposition de loi réforme donc l'épreuve de certification des connaissances et limite à un an, au lieu de trois, le stage probatoire sous le mode d'exercice restreint, après réussite à l'examen, avant de pouvoir demander l'autorisation de plein exercice accordée par le ministre.
Le Nouveau Centre est, bien sûr, d'accord pour voter cette proposition de loi indispensable.
Cependant, j'ai déposé un amendement pour permettre l'extension des terrains de stage à tous les établissements de santé pour être en conformité avec la loi Hôpital, patients, santé, territoires. En commission, le rapporteur Jean-Pierre Door, nous a précisé qu'il approuvait le but de cet amendement ; j'espère donc qu'il donnera dans quelques instants un avis favorable.
Je me méfie, par habitude. (Sourires.)
Je voudrais, avant de terminer, faire trois remarques. D'abord, pour les praticiens non concernés par cette proposition de loi, le parcours pour obtenir l'autorisation d'exercer est complexe, difficile, semé d'embûches, et de nombreuses compétences ne sont pas à ce jour prises en compte.
Ma deuxième remarque concerne le principe de la vérification des connaissances. Pour connaître nombre de ces praticiens, je sais qu'en règle générale, ils sont dévoués et compétents. Dès lors, pourquoi n'ont-ils pas passé les épreuves de vérification des connaissances avant la date fatidique ? D'ailleurs, ne serait-il pas judicieux que la vérification des connaissances se fasse avant la prise de fonction, même si ces praticiens exercent sous un statut restreint ?
Ma troisième remarque concerne l'inadéquation considérable entre les postes hospitaliers non pourvus et nos étudiants diplômés. Il semblerait que 10 000 postes hospitaliers ne soient pas pourvus par des praticiens titulaires – et je n'évoque pas ici la répartition géographique inégale des praticiens.
Est-il raisonnable d'imposer une sélection si drastique à la fin de la première année ? Aujourd'hui, il est nécessaire d'avoir obtenu une mention « très bien » en section scientifique, souvent de redoubler et parfois de suivre une année préparatoire. Est-il raisonnable de décourager autant de nos jeunes ?
La sélection sur ces bases est elle la meilleure ? Ne devrait-on pas prendre en compte les qualités humaines d'écoute, d'analyse et de synthèse ?
On peut aussi s'interroger sur l'attractivité des postes hospitaliers, qui sont indispensables pour assurer l'accueil des patients et la qualité des soins. Il est préoccupant de constater qu'un nombre considérable de ces postes demeurent vacants.
L'inadéquation de notre système de formation aux besoins de santé est donc patente.
Enfin, je souhaiterai rappeler que ce texte ne résout pas le problème des infirmières, ni celui des praticiens qui ont passé les examens selon la procédure de droit commun et qui ont parfois obtenu des notes excellentes, largement supérieures à la moyenne, sans pour autant recevoir l'autorisation d'exercer.
Après ces remarques et la défense de l'amendement déposé pour étendre le terrain de stage, le groupe Nouveau Centre votera ce texte urgent et indispensable au fonctionnement des établissements de santé.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, la proposition de loi relative à l'exercice des médecins, chirurgiens dentistes et sages-femmes titulaires d'un diplôme étranger hors Union européenne se donne pour objet de prolonger la dérogation instituée par la loi de 2007 permettant à ces professionnels d'accéder à l'autorisation d'exercer – la procédure d'autorisation d'exercice – non pas par la voie d'un concours comme le prévoit le droit commun, mais par un examen.
Jusqu'en 2007, la PAE ne pouvait être acquise que par la réussite à un concours très restrictif, avec très peu de postes ouverts – environ un poste pour dix candidats – de sorte qu'une infime proportion d'entre eux avait pu accéder à la juste reconnaissance de leur diplôme, y compris comme l'a précisé M. Préel des candidats ayant obtenu d'excellentes notes. Depuis, tous les professionnels de santé recrutés avant 2004 et justifiant d'une durée minimale d'exercice à un poste médical ont pu se présenter à cet examen de vérification des connaissances avant le 31 décembre 2011. Pour les autres, la voie du concours est restée la seule possibilité.
Si nous sommes de nouveau appelés à nous prononcer sur cette question, c'est parce que cette disposition, tout à fait insuffisante au regard de la démographie médicale, a mis des milliers de praticiens – et les hôpitaux au sein desquels ils exercent – dans une situation inextricable.
En effet, tous ceux qui ont été recrutés après l'année 2004, ne pouvant bénéficier de cette dérogation, sont théoriquement interdits d'exercer à partir du 1er janvier 2012 ; s'ils exercent, c'est dans l'illégalité.
Dans des zones sous-dotées où ces médecins d'origine étrangère représentent jusqu'à 50 % des effectifs, comme c'est le cas par exemple dans le Nord Pas-de-Calais, le Limousin ou en Normandie, les conséquences sont désastreuses.
Nous voici donc, légiférant dans l'urgence, pour tenter de stopper l'hémorragie causée par une loi malthusienne qui fragilise notre service public de santé et stigmatise ces praticiens, les laissant au ban de leur profession, insinuant le doute sur leurs compétences.
Beaucoup moins bien payés que leurs collègues titulaires d'un diplôme français, ils exercent le plus souvent dans des zones où d'autres ne souhaitent pas s'installer. Pour gagner leur vie, ils doivent accumuler les gardes, leur carrière est bloquée et ils ne sont pas autorisés à s'installer. C'est peu dire que ces hommes, ces femmes, ces médecins vivent quotidiennement dans la précarité et l'incertitude du lendemain.
Pourtant la situation est connue depuis longtemps. Un rapport de la Cour des comptes pointait déjà en 2006 leur absence de statut réel et le fait qu'ils soient sous-payés : « les irrégularités concernent plus particulièrement les conditions d'emploi des médecins recrutés en qualité de « faisant fonctions d'interne ». En principe ces médecins ont une attestation de formation spécialisée ou une attestation de formation spécialisée approfondie, délivrée pour une courte durée, de six mois à un an. Ils ont vocation à occuper des postes d'interne agréés par la faculté et non pourvus par des internes des facultés de médecine. Or, dans les établissements confrontés à des pénuries, les « faisant fonctions d'interne » occupent des postes d'assistant, voire de praticien, tout en ayant la rémunération correspondant à leur statut, soit » – écoutez bien – « un montant mensuel net de 1 365 euros auquel s'ajoutent les indemnités de permanence des soins, 113 euros par garde effectuée. »
Comme l'a déclaré la Haute autorité de lutte contre les discriminations dans sa délibération du 27 février 2006, c'est bien « dans l'exploitation qui est faite de leur absence de statut, alors même que leurs responsabilités concrètes sont identiques, que la discrimination à leur égard trouve sa source. »
Le sort injuste, ou plutôt indigne, réservé aux médecins d'origine étrangère a donc été évoqué plusieurs fois dans cet hémicycle. D'ailleurs, dans un rapport réalisé en 2009 au nom de notre commission des affaires sociales, notre collègue Jean-Marie Rolland écrivait : « ces praticiens […] exercent en France […] sous le statut de praticien associé alors qu'ils exercent des fonctions analogues aux praticiens hospitaliers », de manière tout à fait autonome. La situation est donc bien connue, mais ce n'est pas grave : on continue !
Nous sommes en 2012 et, malgré tous ces rapports dont nous sommes si friands, rien n'a été entrepris pour remédier à cette situation, mise à part la dérogation de 2007 que nous allons devoir prolonger jusqu'en 2014, et même, ai-je entendu, 2016, et modifier pour qu'elle inclue également les médecins recrutés entre 2004 et 2010.
Permettez, chers collègues, que nous nous interrogions sur cette grande hypocrisie qui consiste depuis quinze ans à recruter sans cesse des médecins hors Union européenne sans jamais leur avoir concédé un statut les mettant sur un pied d'égalité avec les médecins formés en France. C'est pourtant grâce à eux que certains territoires échappent encore à la désertification médicale. Finalement, vous faites de ces médecins étrangers la variable d'ajustement des zones sous-dotées.
Le problème de l'offre de soins dans notre pays reste entier. Je ne reviens pas sur l'insuffisance de la formation de médecins : nous ne formons pas assez de médecins pour répondre à tous les besoins, ni sur le terrain, notamment dans les déserts médicaux, ni à l'hôpital – là où il en reste encore car, évidemment, vous en avez beaucoup fermé, contribuant par votre politique à constituer ces déserts médicaux.
De plus, cette loi est incomplète, car tous les étudiants et nouveaux médecins étrangers exerçant depuis 2010 dans nos hôpitaux ne sont pas concernés par ce texte. Une nouvelle prolongation sera-t-elle mise en oeuvre pour régler leur situation dans quelques années ? Allons-nous continuer à maltraiter les jeunes diplômés étrangers comme le fait M. Guéant avec sa directive honteuse ? Allons-nous continuer à exploiter de jeunes médecins sans statut pour les protéger, main-d'oeuvre hautement qualifiée, corvéable à merci et à bon marché ?
Il faut choisir : soit leurs diplômes ne valent rien, ils sont incompétents, et n'ont alors rien à faire dans nos hôpitaux où ils mettent en danger la vie des patients ; soit ils sont compétents, comme ils le prouvent depuis toutes ces années, et ils ont droit à un statut professionnel et salarial égal à ceux de leurs homologues à diplôme français !
Il faut sortir de la situation actuelle qui nous déshonore.
Bien évidemment, nous voterons ce texte qui permet à près de 4 000 praticiens hospitaliers titulaires d'un diplôme étranger hors Union européenne d'exercer dans de meilleures conditions. Mais nous restons très insatisfaits sur son contenu qui est, finalement, circonstanciel et qui ne règle rien de façon durable. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Madame la secrétaire d'État, monsieur le président, monsieur le rapporteur, chers collègues, nous examinons aujourd'hui un dispositif que nous avons déjà adopté, à l'unanimité, dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 et que le Conseil constitutionnel a censuré pour raison de forme.
La compétence des quelque 7 000 à 8 000 médecins étrangers ou d'origine étrangère qui exercent dans nos hôpitaux doit être reconnue et tous ceux d'entre nous qui président le conseil de surveillance d'un hôpital apprécient la contribution de ces praticiens que l'on retrouve dans de nombreuses spécialités, sans compter les praticiens français qui ont effectué leurs études à l'étranger.
Une fois leur diplôme validé en France, ces médecins, après trois ans d'exercice restreint et une année probatoire, ont droit à une autorisation de plein exercice de la médecine par le biais d'une équivalence. Ils ont pour la plupart acquis la nationalité française, car ils vivent sur notre territoire depuis plus de dix ans ou sont mariés à un citoyen français.
C'est ainsi que la procédure d'autorisation d'exercice, la PAE, a été instaurée en 2006. Une période transitoire avait été prévue de manière à permettre la régularisation de la situation des médecins à diplôme étranger présents en France et ayant exercé avant juin 2004. Entre l'année 2007, première session d'examen, et l'année 2010, ce sont quelque 4 000 praticiens – soit la moitié des médecins concernés – qui ont bénéficié avec succès de ce dispositif permettant d'éviter la mise en concurrence de praticiens à diplôme hors Union Européenne ayant déjà exercé dans des hôpitaux français et ceux qui n'ont pas encore exercé en France.
Lors de la mise en place de cette procédure, l'article 83 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 avait fixé au 31 décembre 2011 la date au-delà de laquelle les professionnels de santé à diplôme hors Union européenne ne pourraient plus exercer dans les établissements publics de santé s'ils n'avaient pas satisfait aux épreuves de vérification des connaissances de la procédure transitoire d'autorisation d'exercice.
Aujourd'hui, environ 4 000 médecins sont encore concernés par ce dispositif et risquent d'être confrontés à des difficultés pour continuer à exercer leurs fonctions.
Je tiens à vous rappeler que la région Centre, à l'image d'autres régions, est touchée par la raréfaction des installations de jeunes médecins. La densité médicale y est faible ; d'où l'importance de cette proposition de loi pour nos territoires.
Exemple parmi tant d'autres, dans le Nord Loiret, le centre hospitalier de Pithiviers, ville de 9 000 habitants, compte, sur sa petite cinquantaine de médecins, une dizaine qui est concernée par notre examen.
Afin de ne pas fragiliser le fonctionnement des établissements de santé qui dépendent en partie de ces médecins, l'article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 avait prévu la prolongation jusqu'en 2014 du dispositif transitoire. La proposition de loi de notre collègue Jean-Pierre Door qui comporte deux articles rétablit cet article 51 du PLFSS pour 2012 afin de prolonger l'encadrement légal transitoire entourant l'exercice de ces praticiens.
Par souci de cohérence, les dispositions sont déclinées pour l'ensemble des professions de santé – médecins, chirurgiens dentistes, pharmaciens et sages-femmes, sachant que les chirurgiens dentistes, les pharmaciens et les sages-femmes représentent un nombre très réduit de professionnels.
Nous avons eu, en commission des affaires sociales, un débat sur la question des terrains de stages ouverts pour ces médecins et certains collègues ont déposé un amendement pour ouvrir ces terrains de stages aux établissements de santé privés.
Sur le fond, on peut certes regretter de ne pouvoir aller dans leur sens, mais je tiens à appeler votre attention sur l'urgence. Ce texte est indispensable pour régler l'instabilité juridique qui entoure aujourd'hui l'exercice de ces praticiens et nous comptons sur nos collègues sénateurs qui avaient adopté le même dispositif à l'unanimité lors de la discussion de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 pour confirmer leur vote.
Mes chers collègues, en attendant les premiers résultats des mesures prises par le Gouvernement et la représentation nationale pour lutter contre la désertification médicale, et pour toutes les raisons que je viens d'évoquer, le groupe UMP votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la secrétaire d'État, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cette proposition de loi, fût-elle quelque peu tardive, est effectivement bienvenue. Je viens d'ailleurs d'apprendre par Mme Lemorton que celle du groupe socialiste dont j'avais pris l'initiative et que nous avions déposée l'a été vingt-quatre heures après celle de M. le rapporteur.
Plusieurs députés UMP. Trop tard !
Mais je suis heureux que nous nous rejoignions aujourd'hui dans l'intention de corriger ce qui est une grave préoccupation pour les gestionnaires d'établissements hospitaliers et d'adopter ce qui est une mesure de justice pour ces praticiens ayant des diplômes acquis hors Union européenne, sous réserve bien entendu des différentes conditions énumérées par M. le rapporteur.
Tout cela n'est pas de la responsabilité de l'opposition. Certes, celle-ci soumet traditionnellement au Conseil constitutionnel le projet de loi de financement de la sécurité sociale de l'année suivante, parce qu'elle juge qu'il y a bien des raisons de le faire. Mais l'opposition n'avait absolument pas désigné cet article 51, qui fut censuré par la suite.
On ne peut toutefois que regretter le retard avec lequel vous avez pris en considération ce problème, qui est une préoccupation que je vis à deux titres.
Le premier, c'est que dans le Cantal dont je suis originaire et précisément à Murat, chef-lieu du canton dont je connais bien le député, un hôpital rural a fonctionné durant deux années grâce à deux médecins d'origine étrangère ayant acquis leur diplôme hors Union européenne. Le premier, praticien en exercice, qui, bien qu'étranger, avait obtenu l'équivalence de son diplôme pour l'exercice en France, en assumait la responsabilité. Il a d'ailleurs été naturalisé, ayant connu une professionnelle de santé dans ce même territoire. Le second, qui exerçait sous sa responsabilité en responsabilité restreinte, était également un praticien étranger ayant acquis son diplôme hors Union européenne, qui n'avait pas encore obtenu l'équivalence par la vérification des connaissances. Mais je puis vous assurer que les médecins généralistes établis dans ce chef-lieu de canton se félicitaient amplement de disposer de ces médecins, dévoués corps et âme puisqu'ils étaient pratiquement de garde l'un après l'autre à longueur d'année pour assurer la permanence des soins et des urgences.
C'est pourquoi je tenais à dire à mes collègues de la majorité que j'ai été particulièrement choqué par les propos tenus par leur collègue M. Tian qui expliquait qu'il avait beaucoup de réticence à voter cette proposition de loi : « Comment expliquer aux étudiants que des médecins venus de pays non européens vont occuper les places dont eux rêvent …», disait-il, ajoutant, cette fois à juste raison « …tout en se faisant exploiter par les hôpitaux ? ». Il faudra que nos collègues de la majorité expliquent à M. Tian ce que disait à l'instant M. Préel, à savoir que de nombreux postes sont actuellement inoccupés dans nos établissements hospitaliers publics.
Le plus désagréable est sans doute la façon dont M. Tian a poursuivi, parlant de praticiens connaissant à peine notre langue et « aux compétences approximatives » !
Je pense que ce genre de déclarations ne sied pas du tout à la situation que nous connaissons.
Permettez-moi, madame la secrétaire d'État, pour conclure cette courte intervention de rappeler qu'aux côtés de notre collègue M. Chassaigne, nous avons agi en faveur d'un médecin syrien pratiquant à l'hôpital de Thiers. Je m'y suis intéressé, car il se trouve que je préside le groupe d'amitié France-Syrie et que ce médecin est un chirurgien orthopédiste…
…excellent, en effet, d'après sa hiérarchie et ses collègues. Or sans son activité, dans une ville comme Thiers, le seul chirurgien orthopédiste restant n'aurait pas pu maintenir le service ouvert.
J'en profite donc, madame la secrétaire d'État, pour appeler à nouveau votre attention sur la situation de ce chirurgien d'origine syrienne dont la situation, tant sur les plans personnel, professionnel que politique, est particulièrement délicate. Dans le climat de consensus qui règne actuellement dans notre hémicycle, j'espère que vous accueillerez favorablement notre sollicitation conjointe.
Sous la réserve qu'indiquait précédemment Mme Lemorton, nous voterons donc cette proposition de loi qui, au fond, est commune, la dérogation fût-elle prolongée jusqu'en 2016. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Merci, monsieur Bapt. Je vous ai laissé dépasser légèrement votre temps de parole, mais vous évoquiez une situation dans un département que je connais bien.
Nous en venons au dernier orateur inscrit. La parole est à M. Jean Grenet.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur les circonstances qui nous amènent à discuter cette proposition de loi, préférant insister plutôt sur l'enjeu sanitaire qu'elle aborde dans l'urgence.
J'ai pris note des quelques réserves qui ont été formulées par certains d'entre nous, notamment en commission des affaires sociales. Mais je crois que nous devrions veiller à éviter un faux débat sur ce que ne contient pas cette proposition et nous concentrer sur l'enjeu immédiat, qui est de donner un cadre juridique à des praticiens étrangers, et de ce fait d'assurer la permanence des soins. Les praticiens étrangers concernés, qui n'ont pas encore validé leur diplôme, sont plus de 4 000 aujourd'hui.
La principale vertu de la proposition de notre collègue Jean-Pierre Door est la prolongation d'une procédure dérogatoire d'autorisation d'exercice. Une telle mesure a pour but d'éviter de susciter des tensions supplémentaires dans la permanence des soins dans les domaines médical et paramédical. Cette prolongation d'une procédure dérogatoire, dans un temps raisonnable qui reste à préciser – 2 014 ou 2 016 – doit permettre de trouver une solution durable et pérenne à une situation tendue face à des besoins sanitaires accrus.
Cette situation pose, au passage, la question de l'adaptation de notre système de formation qui n'est pas à la hauteur des enjeux sanitaires de notre pays. Je n'ai pas l'intention d'entrer dans le débat sur le numerus clausus. La sollicitude de Mme Fraysse, de M. Bapt ou de M. Chassaigne envers les médecins étrangers est tout à fait légitime. Mais je crois tout de même avoir le droit de penser que le diaphragme que constituait le numerus clausus était infiniment trop étroit et que l'on a privé d'études médicales un certain nombre d'étudiants français qui auraient été heureux de faire médecine.
C'est pourquoi je dis que nous devons nous poser la question de l'adaptation de notre système de formation.
Nous connaissons tous le contexte. Nous savons que les mesures prises pour faire face à cette situation de désertification médicale, – multiplication des maisons pluridisciplinaires de santé ou relèvement du numerus clausus –, ne produiront leurs effets qu'après un laps de temps certain.
Les deux articles de cette proposition, à l'écart du débat idéologique, inopportun en l'espèce, apportent une réponse urgente à un problème qui ne l'est pas moins. Il s'agit, d'une part, de clarifier le cadre juridique dans lequel exercent des praticiens étrangers qui assurent une mission essentielle sur notre territoire ; d'autre part, de garantir et de reconnaître les compétences acquises débouchant sur une autorisation de plein exercice de la médecine à terme.
J'ajoute qu'il n'est pas illégitime que la grande majorité des praticiens étrangers qui, depuis plusieurs années, exercent soit en centres hospitaliers généraux, soit en CHU, poursuivent leur mission dans notre pays, particulièrement dans les établissements confrontés à des difficultés de recrutement, et ceux-ci sont de plus en plus nombreux.
Ces praticiens ont acquis très souvent une expérience et une compétence réelles qu'on ne leur discute pas. Il faut le reconnaître et le valider. Ne pas le faire serait injuste et aggraverait les difficultés d'un certain nombre d'établissements confrontés à des vacances de postes.
Les conditions prévues dans ce texte pour l'autorisation de plein exercice de la médecine, une fois leur diplôme validé, garantissent la compétence attendue de ces praticiens et apportent une réponse à ce besoin de reconnaissance.
J'ajoute que l'échéance qu'elle soit fixée à 2 014 ou, comme le demande le rapporteur Jean-Pierre Door, à 2016, paraît adaptée et que la formule d'un entretien avec un jury et des épreuves pratiques paraît infiniment plus adaptée que des épreuves simplement théoriques, avec bien sûr, à la clef, une année probatoire à activité restreinte.
Voilà, mes chers collègues, les raisons pour lesquelles je suis favorable à cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.
Je propose de prolonger la durée de la procédure dérogatoire de 2014 à 2016. Le texte exige trois ans d'exercice avant de passer l'examen de validation. Ceux qui sont arrivés en 2010 ne pourront passer l'examen qu'en 2014, c'est-à-dire qu'ils ne pourront passer qu'un examen quand les autres pourront en passer trois. Si vous réussissez au premier coup, il n'y a pas de problème mais si vous échouez, vous avez droit à trois possibilités. Pour assurer l'équité à tous ces praticiens de valider leur expérience, il faut leur permettre de passer l'examen trois années successives et comme il y a trois ans d'exercice obligatoires, il faut porter le délai à 2 016 pour que les derniers arrivés en 2010 aient les mêmes possibilités que ceux de 2008.
Souhaitant un avis conforme du Sénat, je me suis rapproché de mon collègue du Sénat pour lui demander s'il validait l'amendement, ce qu'il a fait. Voilà pourquoi je vous demande d'adopter cet amendement.
Le Gouvernement a un avis favorable.
Le Sénat étant majoritairement à gauche, vous permettrez à l'opposition de gauche de cette assemblée de s'exprimer et de donner à cet amendement l'aval dont vous avez besoin, monsieur le rapporteur, pour que le texte soit adopté conforme dans les deux assemblées.
Le groupe des députés communistes, républicains et du parti de gauche s'associe bien sûr à cet amendement. Je ne pense pas que cela puisse poser problème au Sénat, je connais très bien la présidente de la commission des affaires sociales.
La parole est à Mme Chantal Berthelot, pour présenter l'amendement n° 2 .
Je comprends que tout le monde souhaite que l'adoption de ce texte soit rapide et donc que les amendements que nous adoptons aient obtenu l'aval du Sénat, mais j'aimerais quand même défendre mon amendement.
Les trois ans d'exercice en activité médicale sont obligatoires. Mais si on pouvait ouvrir à ceux qui n'ont pas ces trois ans d'exercice, cela permettrait d'augmenter le nombre de médecins. Vous avez tous exposé le fait que dans vos régions on constatait un vrai désert médical. Imaginez ce qui se passe dans les régions les moins attractives – et l'outre-mer peut ne pas être très attractif pour certains, surtout l'intérieur de nos territoires, je pense notamment au mien, en Guyane. Là aussi, nous avons besoin de médecins. Le fait d'ouvrir à ceux qui n'ont pas un exercice de trois ans permettrait d'augmenter le nombre de candidats potentiels à cet examen. J'ajoute que cela éviterait une discrimination dans la mesure où on ne demandait pas à ceux qui sont arrivés avant 2004 les trois ans d'exercice.
L'avis de la commission a été défavorable.
En premier lieu, la détermination des statuts qui ouvrent droit au bénéfice de procédure relève du domaine du décret. En second lieu, la proposition de loi ne vise qu'à régulariser une situation déjà existante, de praticiens exerçant dans le monde hospitalier avant 2010 et qui demandent à faire valider leurs compétences. La proposition qui nous est faite est un peu hors sujet et devra faire l'objet d'une autre proposition de loi. Pour l'heure, nous voulons régulariser la situation de quelques milliers de personnes qui sont en situation difficile depuis le 1er janvier puisqu'elles n'ont plus le droit assurantiel d'exercer.
Le Gouvernement est défavorable pour les mêmes raisons que celles évoquées par le rapporteur.
La profession d'infirmière est déjà prise en compte dans les textes sur cette question. Et je renverrai aux décrets ultérieurement sur les fonctions qui seront éligibles au dispositif aménagé d'épreuve de vérification des connaissances.
Le premier signataire de l'amendement est M. Giraud, mais je pense que je peux retirer l'amendement dans la mesure où on m'assure que cette question sera étudiée dans les décrets. Nous aurons la possibilité de revenir dessus à l'occasion de leur écriture.
(L'amendement n° 2 est retiré.)
J'ai eu l'occasion d'expliquer dans la discussion générale pourquoi je souhaitais déposer cet amendement.
Les médecins ayant un diplôme d'origine hors Union européenne doivent faire ensuite un stage pendant une année. Or il est quelquefois difficile de trouver un terrain de stage dans les établissements tels qu'il est prévu dans la loi actuellement, notamment en chirurgie qui est exercée aujourd'hui de façon importante dans les établissements privés.
De plus, le fait d'élargir le champs des terrains de stage permettrait de nous mettre en conformité avec la loi HPST, dont Jean-Pierre Door était l'un des éminents rapporteurs.
J'ai bien compris que vous souhaitiez, monsieur le rapporteur, madame la secrétaire d'État, un vote conforme du Sénat. Je regrette que cela ne puisse pas intervenir sur l'extension des terrains de stage car je ne vois pas qui peut s'opposer à ce principe pour apprendre et devenir compétent. J'aimerais donc, madame la secrétaire d'État, que vous puissiez introduire cette possibilité dans le décret, comme c'est le cas pour les internes de médecine.
La parole est à M. Jean-Marie Rolland, pour soutenir l'amendement n° 5 .
Beaucoup de choses ont été dites et j'aimerais que cet amendement soit examiné avec le même pragmatisme que celui dont a fait preuve le rapporteur pour aller demander à son homologue du Sénat l'autorisation de faire passer des amendements – ce qui me gêne quand même un peu, même si je comprends la démarche.
Comme l'a fait à l'instant Jean-Luc Préel, je rappelle que les candidats à l'homologation de leur diplôme doivent, aux termes de l'alinéa 10 de l'article 1er, exercer « durant une année probatoire des fonctions rémunérées, dans des conditions fixées par décret, dans un établissement public de santé ou un établissement de santé privé d'intérêt collectif ».
Je précise que l'essentiel de l'activité chirurgicale se fait dans les établissements privés et que le Défenseur des droits, qui s'est beaucoup penché sur le dossier des praticiens à diplôme étranger hors Union européenne, a rappelé que le nombre de lieux de stages était insuffisant. Je m'adresse donc à Mme la secrétaire d'État : nous ne pouvons pas, au moment où vous allez préparer les décrets d'application, et alors qu'un vaste champ de travail est prêt à accueillir ces praticiens, écarter d'un revers de main ces établissements pour des raisons dogmatiques. Il faut rester dans l'esprit pragmatique de cette proposition de loi pour régler une situation qui persiste depuis déjà un certain nombre d'années.
Je voudrais donc, madame la ministre, avoir votre assurance que ce terrain d'activité pourra être ouvert à ces praticiens.
Ces deux amendements se heurtent tout d'abord à l'absence de statut et de dispositions législatives expresses, qui rend impossible l'exercice médical restreint en établissement adapté, c'est-à-dire privé, à cause d'un problème d'assurance et de responsabilité de praticiens qui n'ont pas encore validé leurs compétences et ne sont donc pas reconnus par le Conseil de l'ordre.
Par ailleurs, monsieur Rolland, ma démarche ne consiste nullement à me laisser dicter ma conduite par les sénateurs mais à permettre que soit régularisée au plus vite la situation de ces quelques milliers de personnes qui connaissent depuis le 31 décembre des difficultés, notamment en ce qui concerne leur assurance, difficultés partagées par les centres hospitaliers qui les emploient.
Depuis le 1er janvier, ces professionnels n'ont plus d'assurance et l'on peut fort bien imaginer ce que signifieraient dans ces conditions des contentieux découlant d'incidents anesthésiques ou chirurgicaux qui leur soient imputables.
C'est ce que je veux à tout prix éviter. Or nous sommes déjà le 18 janvier. Le Sénat débattra du texte le 23, et j'ai donc en effet rencontré mon homologue sénateur pour connaître ses intentions. Il m'a affirmé que les sénateurs voteraient le texte mais qu'ils n'accepteraient pas ces amendements, position confirmée ce matin en commission par les députés socialistes. Si nous adoptons ces amendements nous n'obtiendrons donc pas de vote conforme au Sénat, ce qui retardera encore la mise en oeuvre de ces dispositions.
Face à l'urgence, il faut parfois savoir accepter des compromis. Si, sur le fond, je suis d'accord avec vous, je pense préférable, sur la forme, que les décrets à venir nous offrent la possibilité d'élargir les terrains de stage, dans la mesure où cela sera compatible avec les exigences assurantielles. Je souhaite donc que vous retiriez vos amendements, sans quoi je serai contraint de leur donner un avis défavorable.
Je ne remets pas en cause le bien-fondé des dispositions proposées par MM. Préel et Rolland. Il faut toutefois savoir que pour permettre à ces professionnels d'effectuer leur stage de période probatoire dans des établissements de santé privés, il faudrait redéfinir leurs conditions d'exercice, puisque leurs statuts n'autorisent pas actuellement un plein exercice de leurs fonctions.
Si ces amendements étaient adoptés, ils ne pourraient pas être appliqués en l'état. Je suis donc prête à retravailler sur les dispositions que vous défendez, mais cela mérite qu'elles soient examinées ailleurs que dans ce texte législatif. Je vous propose donc de retirer vos amendements.
J'ai bien entendu le double plaidoyer du rapporteur et de la ministre, et je retirerai mon amendement pour que le texte obtienne un vote conforme au Sénat.
Je regrette cependant que l'on ne puisse étendre le terrain de stage. Par ailleurs j'aimerais savoir ce qu'il en est pour les internes autorisés par la loi HPST à effectuer des stages en chirurgie dans des établissements privés, bien que leur statut ne leur confère pas le plein exercice, ce qui doit donc, là aussi, poser des problèmes d'assurance. Pourquoi ne calquerions-nous pas le droit des praticiens dont nous parlons sur celui des internes ?
Enfin je voudrais dire à Mme Lemorton, qui m'a expliqué hier, alors que nous souhaitions un vote conforme sur la réforme de la biologie médicale, qu'elle n'aimait pas qu'on lui mette le couteau sous la gorge. Or c'est ce que font ici les socialistes, menaçant de ne pas voter le texte au Sénat. C'est un comportement regrettable.
(L'amendement n° 1 est retiré.)
Monsieur le rapporteur, qu'il n'y ait pas de malentendus entre nous : je rends naturellement hommage à votre souci de régler rapidement ce dossier, de manière à ce que nous puissions régulariser la situation de ces 3 500 à 4 000 praticiens titulaires d'un diplômes obtenu hors de l'Union européenne.
En revanche, madame la secrétaire d'État, le nombre de stages va être insuffisant, et certains médecins devront, même si nous avons prolongé le délai, effectuer une année probatoire. Le Défenseur des droits nous mets donc en garde sur la pénurie de stages. J'ignore comment vous entendez résoudre ce problème.
Par ailleurs, l'argument de l'assurance me laisse un peu dubitatif, dans la mesure où, dans les établissements de santé privés d'intérêt collectif, le problème assurantiel est le même que dans une clinique privée.
Quoi qu'il en soit, partageant votre souci de régler ce dossier, je retire évidemment mon amendement.
(L'amendement n° 5 est retiré.)
Je voudrais, puisque j'ai été personnellement mise en cause par M. Préel, lui rappeler tout d'abord que je ne parle pas au nom du parti socialiste mais du groupe socialiste, radical et citoyen. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je respecte en effet les amis radicaux qui appartiennent à notre groupe, et je ne saurais représenter le seul parti socialiste.
D'autre part, monsieur Préel, si nous en sommes aujourd'hui à légiférer avec le couteau sous la gorge, c'est que, depuis des mois pour ne pas dire des années, qu'il s'agisse de la biologie médicale ou de ces diplômés hors de l'Union européenne, vous avez laissé pourrir la situation, ce qui nous oblige à légiférer dans l'urgence. Je suis donc désolée que le Sénat soit passé à gauche…
… désolée pour vous. Mais pour ma part, je m'en réjouis car cela nous permet de faire adopter quelques textes qui nous conviennent. C'est ainsi que fonctionne la démocratie dans notre pays.
Enfin, MM Préel et Rolland mélangent les genres lorsqu'ils comparent les diplômés hors de l'Union européenne qui effectuent des stages aux internes. Je vous rappelle que la gauche était opposée à la formation d'internes dans des établissements privés à but lucratif, estimant que la formation de nos futurs médecins et professionnels de santé devait rester dans le domaine public. Vous en avez décidé autrement dans la loi HPST, nous ne pouvons que le regretter.
J'insiste enfin sur le fait que, si nous sommes attachés à ce que ces diplômés hors de l'Union européenne accomplissent leur stage dans le milieu hospitalier, c'est que, selon les instances européennes et n'en déplaise à la fédération de l'hospitalisation privée, les missions de l'hôpital sont différentes des missions du privé. Ces diplômés doivent donc faire leur stage dans le secteur public.
Je rappelle à Catherine Lemorton que, si nous sommes là ce soir, c'est parce que l'article du PLFSS pour 2012 qui prévoyait de régulariser la situation de ces praticiens a été censuré par le Conseil constitutionnel, saisi par les députés et sénateurs du groupe SRC.
Je laisserai la ministre répondre sur la différence entre les internes et ces praticiens.
En revanche, si j'apprécie que Mme Lemorton soutienne la proposition de loi, je voudrais corriger ses propos sur les causes de l'urgence dans laquelle nous nous trouvons. La vérité, c'est que dès 2003-2004 nous avons, avec le regretté Paul-Henri Cugnenc, voté la validation des acquis de l'expérience et des compétences pour les praticiens étrangers et que les décrets sont parus en 2006-2007. Sur les 17 000 praticiens concernés, beaucoup ont passé les examens et ont été régularisés, mais plusieurs centaines voire quelques milliers ne l'ont pas fait, parfois par manque de temps, parfois par négligence, parfois encore par manque de motivation. N'allez donc pas dire que nous nous y prenons au dernier moment, alors qu'il s'agit de régler le sort des 3 500 à 4 000 praticiens qui n'ont pas passé ces examens. S'ils s'étaient, à l'époque, soumis à la procédure, il n'y aurait pas de problème !
Il fallait en effet que la disposition antérieure arrive à son terme pour évaluer le nombre de médecins concernés par le nouveau dispositif, et si la disposition avait été maintenue dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous n'en serions pas là.
Ceci étant, les internes qui peuvent effectuer des stages dans les établissements privés ont un statut très différent. Il s'agit d'étudiants qui se forment pour devenir médecins – ce qui renvoie à un statut identifié et inscrit dans les décrets –, alors que les médecins dont nous parlons ici sont a priori déjà formés et titulaires d'un diplôme. Les postes qu'ils occupent sont souvent des postes de praticiens associés ou de praticiens assistants associés, ce qui n'est pas la même chose. Il faudrait donc un autre décret pour définir le statut de ces médecins.
Vous vous inquiétez, monsieur Rolland, des possibilités de stage de ces médecins dans le service public. Vous avez bien compris que les périodes probatoires vont être facultatives. La commission pourra définir la période nécessaire à l'obtention de l'autorisation d'exercice, et j'imagine que, pour la majorité des médecins, chez lesquels l'exercice antérieur à l'épreuve de vérification des connaissances sera jugé suffisant pour valider les compétences cliniques et pratiques, il n'y aura pas besoin de stage supplémentaire. Les stages seront réservés à ceux pour lesquels une période probatoire supplémentaire sera requise par la commission d'autorisation d'exercice.
(L'article premier, amendé, est adopté.)
N'ayant pu intervenir dans la discussion générale, je voulais tout de même évoquer la situation des médecins qui exercent hors établissement. Ils peuvent eux aussi rencontrer des difficultés pour faire homologuer leurs diplômes alors qu'ils pourraient se rendre très utiles compte tenu de la situation de la démographie médicale. Ce texte est bienvenu, mais je souhaiterais que nous puissions prochainement l'élargir aux médecins exerçant hors établissement et qui pourraient choisir de s'installer dans des zones de déprise médicale. Les exemples ne manquent pas
(L'article 2 est adopté.)
Dans les explications de vote, la parole est à M. André Chassaigne pour le groupe GDR.
Je serai rapide, ce texte semblant recueillir l'unanimité et Mme Fraysse s'étant déjà exprimée sur le sujet.
J'insisterai cependant sur deux points.
Derrière l'urgence à adopter cette proposition de loi se cachent des cas humains, personnels, de praticiens de très grande qualité qui vivent aujourd'hui avec anxiété l'incertitude de leur situation professionnelle qu'ils n'arrivent pas à faire régulariser. Leurs collègues et leurs patients ont beau reconnaître leur savoir faire, ils ont beau s'être rendus indispensables dans les hôpitaux, ils restent très mal payés, ce qui est profondément injuste et insupportable.
Le sujet est par ailleurs important au regard du maintien de l'activité des hôpitaux de proximité. Plusieurs intervenants l'ont souligné, en particulier Vincent Descoeur, président du conseil général du Cantal. Notre pays est confronté au problème de la désertification médicale dont les conséquences sont extrêmement graves, en particulier au sein des hôpitaux de proximité, où des blocs opératoires ferment faute de praticiens, alors même que toutes les conditions de sécurité sont réunies, qu'il s'agisse de l'état de ces blocs, rénovés, ou de l'encadrement des praticiens.
Cette question est également essentielle pour le maintien de la médecine libérale, la médecine de ville. De plus en plus, les médecins ont besoin de sécurité. On dit qu'ils souhaitent travailler en collectivité, au sein de maisons médicales. C'est vrai mais ils veulent également pouvoir travailler à proximité d'un hôpital pour que soient traitées en toute sécurité les urgences, notamment chirurgicales.
Or, aujourd'hui, des territoires vivent un véritable drame. Nous avons tous été confrontés à cette situation, du moins dans les territoires ruraux. Je peux pour ma part vous citer l'exemple récent d'un médecin libéral qui a quitté fin 2011 son cabinet, sans avoir prévenu qui que ce soit, privant de médecin toute une population, en particulier beaucoup de personnes âgées qui ne peuvent même plus aujourd'hui faire renouveler leurs ordonnances. Ces personnes sont paniquées car les autres médecins, surchargés de travail, ne peuvent plus les accepter en rendez-vous. Il y a urgence à agir et l'État est responsable. La loi « Hôpital, patients, santé et territoires » était censée apporter des solutions. La responsabilité de l'État est très grave : il est impossible d'abandonner, sur des territoires entiers, des personnes qui ne peuvent plus être soignées. Voilà la réalité.
Vous pouvez penser que je m'éloigne du débat, mais pas tant que cela car ce texte, en favorisant le maintien des médecins dans les hôpitaux de proximité, apporte une première réponse à la désertification médicale des territoires ruraux.
Bien évidemment, nous voterons ce texte, comme Mme Fraysse l'avait annoncé.
Je voudrais juste conclure en rappelant la situation de ce formidable praticien syrien de l'hôpital de Thiers, reconnu par ses pairs et ses patients, et dont il devient urgent de régulariser la situation.
Je voudrais tout d'abord rappeler à M. Jean-Marie Rolland, qui, d'une certaine manière, remet en cause le droit des groupes parlementaires à déposer des recours devant le Conseil Constitutionnel, pourquoi nous en sommes arrivés à une telle situation. Cette proposition de loi n'arrive en effet qu'aujourd'hui devant nous, avec retard, parce que, pris par l'urgence, vous avez fait passer un article dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale alors qu'il n'y avait pas sa place, ce qui explique que le groupe SRC ait déposé, c'est son droit, un recours devant le Conseil constitutionnel. Si les Sages, qui n'ont pas tous leur carte au parti socialiste, décident de faire tomber des cavaliers législatifs, vous n'avez pas à remettre en cause leur décision et nous n'y sommes pour rien. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je vous renvoie au cauchemar que la proposition de loi Fourcade vous a fait vivre cet été : parce que vous avez légiféré n'importe comment, trente-cinq articles sont tombés sur soixante-dix ! Voilà la vérité et cessez de reporter la faute sur nous sous prétexte que nous aurions déposé un recours. Le recours est de droit.
Le jour où vous serez dans l'opposition, c'est-à-dire dans peu de temps, je vous fais confiance pour déposer systématiquement des recours.
Par ailleurs, M. Bertrand et Mme Berra souhaitent, à raison, augmenter le numerus clausus. Si l'on se préoccupe, pour le sujet qui nous intéresse, du manque de places en stage, je m'inquiète sincèrement de notre capacité à former de nouveaux médecins généralistes ! Vous disant cela, je me fais la voix de l'association nationale des chefs de clinique de médecine générale, de l'intersyndicale nationale autonome des internes en médecine générale, du syndicat national des enseignants en médecine générale et du regroupement autonome des généralistes, jeunes installés et remplaçants, qui s'inquiètent de notre capacité à former, accueillir et encadrer de nouveaux médecins suite à la hausse du numerus clausus, qui serait cependant une mesure bien fondée. Au vu des difficultés qui entourent les diplômés hors Union européenne, vous êtes-vous bien posé la question de l'accueil et de la formation de nouveaux médecins ?
Cela étant, les amendements qui tendaient à renvoyer au privé la formation de ces médecins ayant été retirés, le groupe SRC votera comme un seul homme et une seule femme cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(L'ensemble de la proposition de loi est adopté à l'unanimité.)
Je remercie l'ensemble des députés qui, comme un seul homme et une seule femme, tous rangs confondus, ont approuvé cette proposition de loi.
Merci également au rapporteur Jean-Pierre Door. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur les bancs du groupe NC.)
Je voudrais tout d'abord exprimer ma satisfaction d'être devant vous pour l'examen de la proposition de loi visant à renforcer l'éthique du sport et les droits des sportifs.
Je remercie Éric Berdoati, le rapporteur du texte, pour son travail et sa grande implication. Très sensible aux problématiques d'éthique dans le sport, c'est à ce titre qu'il a accepté de présider le comité du supportérisme.
Cette proposition de loi répond à une attente très forte du mouvement sportif et de l'ensemble des élus attachés au sport et à ses valeurs.
Il est coutume, dans cette Assemblée, de voir la majorité et l'opposition s'opposer sur les lois soumises à leur examen. C'est légitime, chacun porte les convictions de sa famille politique.
Cependant, la proposition de loi visant à renforcer l'éthique du sport et les droits des sportifs n'est pas une loi comme les autres. Elle dépasse les clivages politiques. Ce qui est en jeu, c'est l'intérêt du sport amateur et professionnel, l'intérêt des bénévoles, des sportifs, de nos enfants.
Nous sommes tous attachés à ce que le sport reste une école de la citoyenneté. Il doit demeurer un espace de transmission de valeurs qui fondent notre République. Cela fait consensus et c'est heureux.
D'ailleurs, cette proposition de loi a été adoptée à l'unanimité en première lecture au Sénat. Aujourd'hui, je vous invite à vous inscrire dans la même volonté de défense de l'intérêt général et à la voter de manière conforme.
Je ne vais pas vous mentir. J'aurais aimé, comme beaucoup d'entre vous, enrichir ce texte d'autres dispositions.
Cependant, compte tenu du calendrier législatif, il ne sera pas possible d'obtenir un deuxième vote au Sénat d'ici la fin de la législature.
Estimons-nous heureux, déjà, de pouvoir en discuter aujourd'hui et je remercie ceux qui ont permis son inscription à l'ordre du jour.
Le Gouvernement a déposé trois amendements tendant à supprimer les dispositions adoptées en commission. Nous sommes également défavorables aux amendements déposés par la suite.
Certains auraient mérité de figurer dans le texte, comme celui de Jean-François Lamour qui vise à limiter les aides des collectivités aux clubs professionnels. Cet amendement est intéressant, même si des limitations existent déjà et que ce n'est pas aux fédérations d'imposer des limites aux collectivités.
Je suis tout à fait disposé à commencer à travailler sur ces sujets pour une prochaine séquence. Cependant, le mouvement sportif attend les dispositions de cette proposition de loi depuis déjà des années. Renvoyer le texte au Sénat, c'est prendre le très grand risque de ne voir ni ces amendements ni l'ensemble de la proposition de loi adoptés, alors que le texte actuel représente déjà une avancée majeure pour le sport français.
Par ailleurs, je tiens à souligner que la plupart des autres amendements déposés sont contestables sur le fond.
Par exemple, celui sur les arbitres et les juges arbitres reprend le dispositif existant pour les sportifs de haut niveau. Cela compliquerait le dispositif commun. Ce sujet doit être traité comme un sujet à part entière, de manière approfondie, et non pas à la va-vite, sans concertation avec les arbitres et leurs représentants.
Je pense également à l'amendement concernant les relations qu'entretiennent les associations de supporters avec les représentants des collectivités locales et les autres acteurs du sport. Cet amendement revient sur un sujet déjà largement pris en compte au sein du comité du supportérisme. Son président, M. le rapporteur Éric Berdoati, ne me contredira pas.
Vous le voyez, le texte nous donne l'opportunité de faire avancer le sport français dès aujourd'hui. Ne la laissons pas passer.
La proposition de loi sur l'éthique du sport comporte des dispositions majeures, notamment en matière de moralisation du sport professionnel. Je sais que c'est un sujet qui vous préoccupe tous.
La situation du football européen est très inquiétante. En France, la santé financière des clubs a été mieux préservée du fait de l'existence d'une instance de contrôle : la Direction nationale de contrôle de gestion – la DNCG.
La proposition de loi permettra d'aller plus loin en matière de régulation des transferts de joueurs grâce à deux dispositions majeures : la possibilité pour les fédérations, d'une part, de plafonner la masse salariale des clubs – c'est le principe du salary cap – et, d'autre part, d'abaisser le plafond de rémunération des agents.
Nous avons bien conscience qu'au-delà de ces dispositions, la régulation des transferts doit se faire au niveau européen. J'y travaille activement avec la Commission et le Parlement européens. L'UEFA suit également de très près cette question. Je dois d'ailleurs revoir très prochainement Michel Platini sur ce sujet.
Pour revenir à la proposition de loi, le Gouvernement est également favorable à toutes les dispositions visant à prévenir la fraude liée aux paris sportifs en ligne.
Sur ce sujet-là également, et grâce à la volonté du Président de la République, la France a été moteur à l'échelle internationale, en posant un cadre législatif très strict lors de l'ouverture du marché des paris sportifs en ligne.
La proposition de loi sur l'éthique du sport permet de compléter la loi du 12 mai 2010 en posant de nouvelles interdictions pour prévenir les conflits d'intérêt.
Elle prévoit également la possibilité pour les fédérations d'accéder aux données de jeu, via l'Autorité de régulation des jeux en ligne, l'ARJEL, afin de vérifier que les acteurs de la compétition n'ont pas participé aux opérations de paris.
Enfin, nous soutenons fortement la création d'un délit pénal de corruption sportive qui accroîtra nos moyens d'investigation et de sanction pour lutter contre les fraudes.
La proposition de loi comporte aussi des avancées en matière de lutte contre le dopage. C'est un point auquel j'attache, vous le savez, beaucoup d'importance, car, malheureusement, les messages de banalisation existent bel et bien.
Je ne vais pas revenir sur les polémiques qu'il y a pu avoir ces derniers mois.
Le dopage est une forme de tricherie inacceptable. Tous les moyens possibles doivent être mis en oeuvre pour lutter contre.
La France a toujours été exemplaire dans cette lutte. La proposition de loi sur l'éthique du sport permet de parachever la mise en conformité de notre législation avec le code mondial antidopage.
Je tiens d'ailleurs à souligner que l'Agence mondiale antidopage m'a fait part, par écrit, de son soutien à la proposition de loi qui s'inscrit dans la lignée de ses préconisations.
Cette dernière élargit également le rôle et les compétences de l'Agence française de lutte contre le dopage – l'AFLD –, autorité indépendante dont la qualité des contrôles est largement reconnue à l'international. Je sais que la représentation nationale est très attachée à son action et à ses prérogatives, comme j'ai encore pu le constater lors du vote du budget Sports.
Mesdames et messieurs les députés, je vous ai dressé le tableau des principales avancées apportées par la proposition de loi visant à renforcer l'éthique du sport et les droits des sportifs. Il y en a d'autres, notamment l'obligation faite aux fédérations d'adopter une charte éthique.
Le Gouvernement soutient l'ensemble de ces dispositions qui recueilleront, je l'espère, un large consensus au sein de cette Assemblée.
La proposition de loi viendra compléter l'action du Gouvernement en matière sportive. Le sport ne s'arrête pas à une loi et à des réglementations. Depuis mon arrivée au ministère des sports, nous avançons concrètement sur les sujets du dopage et de la corruption, comme j'ai pu l'évoquer.
Il est également essentiel pour moi que l'État soit aux côtés des élus locaux pour les accompagner, entre autres, dans leurs projets d'équipements. Un comité des grands équipements a ainsi été créé pour éviter, par exemple, que les élus se lancent dans des projets disproportionnés par rapport à leurs besoins ou trop dépendants des finances publiques, notamment celles de l'État. Ce comité me sera d'une grande aide, dans les semaines à venir, lorsque nous aurons à prendre d'importantes décisions de financement.
Sur tous ces sujets, il va de soi que je continuerai à associer les parlementaires, qui sont au plus près de la réalité du terrain et des préoccupations de nos compatriotes. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Éric Berdoati, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.
Je crains que vous ne soyez déçu, cher collègue Rogemont !
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, mes chers collègues, « les peuples sans sport sont des peuples tristes », énonçait une maxime byzantine.
En effet, le sport est bien plus qu'une simple activité physique ou qu'un simple jeu. Par les valeurs de dépassement de soi et d'altruisme qu'il véhicule et par sa résonance sociale et médiatique, le sport ne s'apparente pas à une activité comme une autre. Il occupe bel et bien une place singulière dans notre pays et, à ce titre, tous ceux qui ont en charge de faire vivre les différentes disciplines ainsi que les sportifs ne sauraient s'affranchir des principes et des règles qui préservent le sport de toutes sortes de dérives morales ou économiques.
De longue date, des figures marquantes de l'Olympisme ont insisté sur le particularisme de l'esprit sportif. Ainsi Pierre de Coubertin soulignait-il que « le sport va chercher la peur pour la dominer, la fatigue pour en triompher, la difficulté pour la vaincre ». Plus près de nous, le psychologue sportif américain contemporain John Kessel a estimé, à juste titre, que « les qualités pour gagner sont plus importantes que les parties gagnées ». Cette philosophie imprègne aujourd'hui encore le mouvement sportif, quand bien même de nouveaux paramètres, notamment médiatiques ou économiques, entrent en ligne de compte.
Le législateur doit toutefois rester vigilant sur ces questions, qui touchent à l'intégrité du sport et, par extension, à une certaine conception des rapports en société, du fait notamment de la dimension pédagogique du sport. De ce point de vue, l'examen de la proposition de loi visant à renforcer l'éthique du sport et les droits des sportifs, adoptée en première lecture par le Sénat le 30 mai 2011, est utile et répond à des attentes fortes.
Plus que tout autre sujet, le sport transcende les clivages partisans.
Ce texte en donne une parfaite illustration puisqu'il résulte d'une initiative du groupe du Rassemblement démocratique et social européen – RDSE – et a été rapporté par un sénateur UMP, M. Jean-François Humbert, avant de faire l'objet, comme le rappelait M. le ministre, d'un vote consensuel en séance publique. Certes, le contenu a sensiblement évolué au cours des travaux sénatoriaux, mais la plupart des idées-forces défendues par M. Yvon Collin et les membres de son groupe ont été préservées et confortées.
À ce stade de mon propos, je tiens, pour être précis et pour que chacun comprenne bien la situation, à rappeler que les sénateurs socialistes ont voté ce texte. Lors de la discussion générale Jean-Jacques Lozach, sénateur socialiste, a tenu au nom du groupe socialiste les propos suivants : « Enfin ! Tel est le mot qui m'est venu à l'esprit, lorsque j'ai constaté qu'allait être soumis à la Haute Assemblée un texte abordant de manière large les enjeux du sport ». Il a même ajouté : « Je serai direct : je ne crois pas que la proposition de loi de mes collègues du groupe du RDSE révolutionnera la gouvernance et la pratique du sport en France ;... »
... « néanmoins, elle procède à de nécessaires adaptations, que nous attendions depuis longtemps ».
Lors de son explication de vote, toujours au nom du groupe socialiste, le sénateur Lozach indique : « A notre satisfaction, nous sommes parvenus à faire évoluer le dispositif de la proposition de loi sur plusieurs points, notamment : le maintien du pouvoir de sanction administrative des fédérations sportives, qui constituait pour notre groupe l'un des enjeux fondamentaux de ce texte ; l'habilitation des échanges d'informations entre l'AFLD et les agences nationales antidopage étrangères ; la possibilité pour l'AFLD de prendre des mesures de sanction sur le fondement de ces informations. [...] Compte tenu de ces différentes considérations et des avancées que vous avez bien voulu accepter ou concéder, je vous indique que le groupe socialiste votera pour cette proposition de loi du groupe RDSE. »
Si j'ai tenu à rappeler ces faits et à citer les propos du sénateur Lozach, c'est pour dénoncer avec la plus grande fermeté l'attitude politicienne et choquante de notre collègue Mme Fourneyron lors de l'étude en commission des articles du texte et des amendements. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
En effet, elle a alors qualifié la proposition de loi de « manoeuvre politicienne ». Mais, chère collègue, à qui adressez-vous cette interpellation ? Au groupe RDSE ou à vos collègues socialistes du Sénat ?
Toujours en commission notre collègue a qualifié cette proposition de loi comme étant l'illustration du « sport business ». Mais, encore une fois chère collègue, à qui adressez-vous ce reproche ? À vos collègues sénateurs socialistes qui ont voté ce texte ?
Enfin, pour clore dans la nuance et la subtilité sa première intervention, notre collègue Mme Fourneyron a dit la chose suivante : « Ce texte est à l'image de ce qui est finalement votre ligne de conduite dans le groupe majoritaire, c'est-à-dire la place de l'argent dans le sport ».
Chacun l'aura bien compris, cette diatribe insensée ne se conçoit qu'à l'aune de l'embarras qui est le vôtre, chers collègues de l'opposition, face à une situation dont la maîtrise vous échappe.
Nous sommes bien loin de la défense des valeurs et de l'éthique dans le sport.
Permettez-moi, à ce stade de notre discussion, d'évoquer succinctement les principales dispositions de cette proposition de loi, dont la teneur a été saluée par l'ensemble des personnes que j'ai pu auditionner avant nos échanges en commission et ce soir dans l'hémicycle.
Pour ce qui concerne le renforcement de l'éthique dans le sport, le texte donne aux fédérations sportives agréées la prérogative d'élaborer des chartes éthiques, dont un décret précisera le contenu, les modalités d'entrée en vigueur ainsi que les conditions d'application.
Par ailleurs, les fédérations sportives délégataires remplissant des prérogatives de puissance publique voient leurs pouvoirs réglementaires confortés, les règlements fédéraux étant appelés à contenir des dispositions relatives au nombre de sportifs formés localement dans les équipes, ainsi qu'au montant maximal des rémunérations versées aux sportifs par chaque société ou association sportive.
De même, pour la formation académique des sportifs, représentant un stade essentiel de la prévention des dérives, la proposition de loi élargit les assouplissements de cursus aux jeunes inscrits en centres de formation agréés mis en place par les associations et les sociétés sportives. En effet, ceux-ci ne bénéficient pas des mêmes aménagements de scolarité que les sportifs de haut niveau ou ceux classés Espoirs. Cet alignement me semble essentiel et présente une réelle avancée.
En matière de lutte contre le dopage, le texte ratifie en son article 9 l'ordonnance du 14 avril 2010 relative à la santé des sportifs et à la mise en conformité du code du sport avec les principes du code mondial antidopage. Il renforce également avec l'article 15 les pouvoirs de l'AFLD en matière de prévention et de recherche, d'une part, et de contrôle des manifestations sportives à l'étranger, d'autre part. Enfin, il resserre la concertation entre l'AFLD et ses homologues étrangères, tant au niveau de l'échange d'informations qu'à celui de la mise en oeuvre des sanctions.
Les sénateurs ont également considéré que le moment était venu d'offrir aux clubs professionnels la possibilité de recourir, outre aux statuts actuels des sociétés sportives, aux statuts de droit commun des sociétés commerciales.
Ces dispositions ne remettront pas en cause les liens entre les sociétés sportives et les associations.
Parallèlement, les conditions de prêt et de cautionnement aux clubs ont été assouplies, de manière à faire porter l'interdiction des prêts et cautionnements à des sociétés sportives concurrentes sur les seules personnes contrôlant de manière exclusive ou conjointe un club ou exerçant sur celui-ci une influence notable, au sens du code de commerce.
Le texte rejoint également une préoccupation forte de l'Assemblée nationale, en créant un délit de revente illicite de titres d'accès à une manifestation sportive, tout en tirant les leçons de la décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011 du Conseil constitutionnel sur la LOPPSI 2. Il me semble qu'une telle mesure devrait recueillir l'assentiment de tous.
Enfin, dans le prolongement de propositions formulées par le président de l'ARJEL, et par nos collègues Aurélie Filippetti et Jean-François Lamour dans leur rapport sur la mise en application de la loi du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne, la proposition de loi prévoit plusieurs dispositions : d'une part, elle impose aux fédérations sportives délégataires et aux organisateurs de manifestations sportives d'édicter des règles destinées à mieux prévenir les conflits d'intérêts et les délits d'initiés de la part de consultants sportifs d'opérateurs en ligne ; d'autre part, elle facilite les contrôles des fédérations sportives par un accès aux informations recueillies par l'ARJEL auprès des opérateurs ; enfin, elle pénalise les manipulations de compétitions sportives à travers l'instauration d'un délit de corruption sportive lié aux manifestations sportives faisant l'objet de paris, applicable aussi bien au corrupteur qu'au corrompu, sur le modèle de dispositions analogues dans d'autres pays de l'Union européenne.
Dernier volet, mais non des moindres : la diffusion de courts extraits de compétitions sportives ou contre le dopage.
En la matière, les sénateurs ont confié au CSA le pouvoir de fixer les conditions de diffusion de brefs extraits de compétitions sportives. Ils ont également allégé les modalités de mise en oeuvre de l'obligation de diffuser avant, pendant et après les retransmissions d'événements d'importance jugée majeure des programmes courts mettant en exergue les dispositions législatives relatives à la lutte contre le dopage et pour la préservation de la santé des sportifs, en conférant au CSA la charge de définir les modalités d'application de ces mesures.
Toutes ces dispositions vont assurément dans le bon sens ; elles seront utiles au monde sportif. Vous le voyez, mes chers collègues : les avancées sont significatives, réelles et attendues.
Le Gouvernement souhaite une adoption de ce texte à l'Assemblée dans les mêmes termes qu'au Sénat. Personnellement, je partage cette position, pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, et c'est là l'essentiel, la proposition de loi répond à des attentes importantes par des mesures pragmatiques, bienvenues et concrètes. Aucun des acteurs du monde sportif que j'ai pu auditionner ne l'a nié.
Ensuite, le contenu du texte, même s'il pourrait faire l'objet de quelques aménagements rédactionnels, est parfaitement intelligible en l'état et ne soulève pas de difficulté formelle ou juridique rendant impossible son adoption conforme.
Enfin, l'échéance rapprochée de la fin de la treizième législature rendrait illusoire une adoption définitive, et donc une entrée en vigueur avant la fin du mois de février, si notre Assemblée en modifiait un tant soit peu la teneur.
Comme beaucoup d'entre vous, mes chers collègues, je regrette que le débat sur ce texte intervienne dans ces circonstances. Le réalisme recommande néanmoins de privilégier l'aboutissement de la navette plutôt que des ambitions réformatrices qui ne manqueront pas de trouver un écho lors des échéances électorales qui vont jalonner le premier semestre de cette année 2012. Un mois avant que l'Assemblée nationale et le Sénat cessent de siéger, le temps n'est sans doute plus aux velléités de modernisation ou de changement du cadre juridique en vigueur ; il est à la mise en oeuvre des aménagements qui font consensus, dès lors qu'il en va de l'intérêt du monde sportif français.
Être utile pour un député, ce n'est pas forcément amender. (Rires sur plusieurs bancs des groupes SRC et GDR.)
C'est aussi permettre à un texte de devenir une loi et, ainsi, donner aux citoyens, et plus particulièrement aux seize millions de licenciés sportifs français, un cadre plus adapté qui permette à chacun d'agir et d'évoluer dans sa pratique sportive tout en préservant ce qui fait la singularité de cette discipline : le dépassement de soi dans le respect des règles et de son adversaire, tout simplement dans le respect des valeurs fondamentales du sport. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à Mme Michèle Tabarot, présidente de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis qu'une nouvelle fois nous puissions débattre de sport dans cet hémicycle.
Il est vrai que nos échanges parfois passionnés sur ce sujet peuvent donner le sentiment que nous nous y intéressons uniquement à travers le prisme de ses dérives. Ce n'est bien évidemment pas le cas, et nous mesurons ce que demande d'efforts le fait de devenir un sportif accompli.
Aussi, je veux saluer l'initiative de nos collègues du Sénat, qui nous permet de réaffirmer l'attachement de la représentation nationale au sport et à ses valeurs, tant il est vrai que l'actualité a plutôt tendance à retenir des faits qui heurtent nos convictions comme les violences, la corruption, les malversations, le dopage ; autant de comportements inacceptables qui nuisent au sport et qui se répercutent parfois depuis l'élite jusqu'aux amateurs.
Il faut tout mettre en oeuvre pour lutter contre ce qui sème le trouble sur la sincérité de la performance sportive ; c'est un objectif auquel ce texte contribue de manière indéniable.
(M. Jean-Christophe Lagarde remplace M. Louis Giscard d'Estaing au fauteuil de la présidence.)
Je ne reviendrai pas sur l'ensemble des dispositions du texte, parfaitement exposées par notre rapporteur, Éric Berdoati. Je le félicite pour la qualité de son travail et pour l'implication qui a été la sienne afin de mener toutes les auditions nécessaires en temps utiles. Merci beaucoup, monsieur le rapporteur!
Je veux souligner que cette proposition de loi va dans le sens de ce qui est souhaitable pour défendre la moralité du sport. Bien évidemment, je me réjouis des dispositions relatives à la formation des jeunes, à la lutte contre le dopage et aux prérogatives des fédérations sportives en matière d'éthique et de régulation des compétitions.
Je souhaite pour ma part revenir en quelques mots sur deux points.
Le premier d'entre eux concerne la possibilité pour les fédérations d'instaurer des plafonds salariaux comme c'est déjà le cas pour les sports majeurs aux États-Unis mais aussi pour le rugby dans plusieurs pays d'Europe, dont la France. Il s'agit un élément important de moralisation mais aussi d'équité sportive entre des clubs qui participent aux mêmes compétitions internationales, mais dont les capacités financières peuvent être très différentes selon les règles en vigueur dans leurs pays.
En adoptant cette disposition, la France affirmerait son soutien à l'initiative de l'UEFA et de son président Michel Platini en faveur de l'instauration d'un plafond salarial pour le football européen.
Le second point que je souhaite évoquer concerne la place des sports à la télévision.
La commission des affaires culturelles a eu l'occasion de souligner la faiblesse de l'exposition du sport sur les chaînes généralistes en termes d'heures de programme, mais aussi de diversité. Je regrette, par exemple, que les matches de l'équipe de France de handball, qui est la plus titrée de l'histoire, soit si peu diffusés alors qu'elle participe en ce moment même à une grande compétition.
Il est parfois frustrant pour les amateurs de sport de ne pas pouvoir suivre régulièrement les grandes victoires de nos champions.
Nos plus belles réussites ne sont pas toujours le fait des sportifs les plus médiatisés.
Dès lors je me réjouis de la volonté de renforcer les prérogatives du Conseil supérieur de l'audiovisuel, afin de veiller à la diversité des disciplines sportives présentées, et je forme le voeu que cela profite également aux disciplines féminines.
Ces derniers mois, l'Assemblée nationale a adopté plusieurs textes et dispositions concernant le sport. Je rappelle également le travail effectué par notre commission dans le cadre de tables rondes ou de missions d'informations. Ainsi, la mission d'information sur la gouvernance des fédérations sportives s'apprête à rendre ses conclusions après de nombreuses auditions menées par sa présidente, Valérie Fourneyron, et son rapporteur, Gilles d'Ettore.
Le texte soumis aujourd'hui à notre examen a été adopté à l'unanimité par les sénateurs. Ce n'est certes pas la grande loi d'orientation sur le sport que nous aurions pu souhaiter,…
…mais il répond à de véritables enjeux et il comporte des dispositions attendues par les fédérations sportives, par les clubs, et par les acteurs de la lutte contre le dopage et, surtout, des dispositions attendues par les sportifs, parce qu'elles contribueront à revaloriser l'effort et le mérite dans des compétitions parfois déséquilibrées par la corruption et le dopage.
L'adoption de ce texte renforcerait l'exemplarité de la France en matière sportive, que ce soit envers nos partenaires européens, qui doivent prendre conscience de la nécessité d'agir ensemble contre certaines dérives, ou envers nos concitoyens. Il est en effet essentiel de préserver une image saine du sport pour qu'il continue à promouvoir les valeurs essentielles de respect et de tolérance dans notre société. Monsieur le ministre, je sais que vous y êtes très sensible, aussi je veux saluer votre implication personnelle, que ce soit dans nos échanges à l'Assemblée ou sur le terrain, où vous rappelez régulièrement votre attachement au rôle éducatif majeur du sport.
Je pense que cette proposition de loi participe pleinement à cet objectif sur lequel nous pouvons tous nous rejoindre. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
J'ai demandé un rappel au règlement car les propos tenus par notre rapporteur, M. Éric Berdoati, m'ont choqué. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Je trouve choquant que le rapporteur, parce qu'il ne veut pas faire son travail et se refuse à modifier ou à enrichir le texte, se permette d'attaquer violemment Valérie Fourneyron…
Je demande à notre collègue, Éric Berdoati, d'être beaucoup plus circonspect lorsqu'il s'exprimera à l'avenir.
Monsieur Rogemont, je prends acte de votre intervention. Toutefois, je vous rappelle qu'un rappel au règlement doit se fonder sur le règlement de notre assemblée, et celui-ci ne contient rien au sujet du point que vous venez d'évoquer. Cela dit, il me semble que vous aurez largement l'occasion d'y revenir durant le débat.
J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.
La parole est à Mme Valérie Fourneyron.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, madame la présidente, mes chers collègues, dans cet hémicycle, nous sommes quelques-uns à avoir une passion pour le sport, à aimer travailler pour accompagner le sport dans ses enjeux d'éducation, de santé publique, d'excellence, de sincérité, de rayonnement de la France. Nous avons montré que nous sommes capables de nous retrouver, comme pour le vote unanime sur la retraite des sportifs de haut niveau, quand un texte est abouti, attendu, financé. Dans le cas précis que je viens de citer, la qualité des débats a permis de l'enrichir le projet de loi.
Mais, monsieur le ministre, aujourd'hui, avec cette proposition de loi, c'est tout l'inverse que vous nous proposez. Ce texte n'est pas à la hauteur de votre carrière sportive, pour laquelle j'ai, vous le savez, le plus profond respect.
Depuis plus de dix ans, le sport français, son organisation, ses financements, la place du Centre national pour le développement du sport, la répartition des compétences avec les collectivités et le mouvement sportif, la vie des clubs et le sport professionnel ont profondément évolué. Aucun texte législatif n'est pourtant venu traduire dans la loi ces changements ni une nouvelle ambition pour le sport.
Durant cette législature, au ministère des sports, le mercato a été permanent – on a compté cinq ministres en moins de cinq ans – et le bilan législatif bien triste : une loi sur les paris contestée, une loi sur les agents controversée, y compris récemment par vous-même, monsieur le ministre, une loi de circonstance pour les stades de l'Euro 2016, et aujourd'hui une loi de rattrapage sur l'éthique dont la définition – « qui appartient à la morale » – montre pourtant la responsabilité qui s'y attache.
Nous sommes en droit de nous interroger sur les vraies raisons qui conduisent la majorité et le Gouvernement à faire adopter à marche forcée, la présente proposition de loi sénatoriale, certes remplie de bonnes intentions mais finalement abandonnées au milieu du gué. Pourquoi appliquer la procédure accélérée et négliger les navettes parlementaires qui n'auraient pas manqué de l'améliorer ? À quelle impérieuse nécessité répond cette urgence pour que vous ayez voulu nous soumettre ce texte si rapidement et dans de si mauvaises conditions ?
Nous exprimons de profondes réserves sur certains articles de ce texte et notre position est identique en ce qui concerne le calendrier retenu : en toute fin de législature et à quelques mois de l'élection présidentielle.
Un texte inachevé et incomplet, c'est tout sauf anodin, surtout quand il touche à la pratique et aux droits des sportifs, à la moralisation du sport, au statut des clubs professionnels, à l'activité d'agent sportif, aux pouvoirs de l'Agence française de lutte contre le dopage, à la prévention du dopage au moyen de la télévision ainsi qu'à la place accordée aux différentes disciplines. Nous ne pouvons donc nous satisfaire d'une seule lecture dans chaque chambre et d'un vote conforme sur un texte visant à renforcer l'éthique du sport et le droit des sportifs. En effet, derrière ce titre se cachent des intentions louables, des déclarations, de l'affichage et un certain nombre d'avancées, mais aussi des articles qui ne sont pas acceptables en l'état.
C'est d'ailleurs, monsieur le ministre, ce qui avait poussé votre prédécesseure, Mme Chantal Jouanno, non seulement à émettre très clairement le souhait que cette proposition de loi soit améliorée lors de la navette parlementaire, mais aussi à demander la suppression de l'article relatif au statut des sociétés sportives. Au-delà des considérations techniques que vous ne manquerez pas de nous exposer pour nous faire croire que cet article ne fait courir aucun risque, il faudra que vous nous expliquiez avec le rapporteur en quoi cet article, qui permet aux sociétés sportives de prendre le statut de sociétés de droit commun, traite de l'éthique du sport et du droit des sportifs.
À cette loi de rattrapage dans cette législature bien pauvre – les lois incomplètes affaiblissant les lois nécessaires – s'ajoute un problème de forme. L'annonce de la volonté du Gouvernement d'obtenir un vote conforme a été faite avant même la discussion de la proposition de loi en commission, et avant les nombreuses auditions menées par le rapporteur dont il faut saluer l'important travail réalisé dans cette période peu propice de fin d'année – la qualité de ce travail dépasse d'ailleurs de beaucoup celle des propos tenus tout à l'heure par M. Berdoati. Monsieur le ministre, à peine venions-nous d'apprendre l'inscription de la proposition de loi à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale que vous nous annonciez que votre objectif était de refuser aux députés leur droit individuel d'amender ce texte.
Nous n'avons pas accepté ce jeu de dupes et nous avons travaillé pour proposer à tous nos collègues de nombreux amendements qui enrichissent indéniablement le texte. Je remercie les députés membres de la commission des affaires culturelles et de l'éducation qui, avant que les choses ne soient reprises en mains par la présidente, ont fini par contrevenir aux consignes, laissant la porte ouverte à trois amendements qui, contrairement à ce texte, font semble-t-il consensus.
Nous avons regretté ce choix peu respectueux de la démocratie qui devrait pourtant être le socle d'un texte sur l'éthique et les droits des sportifs. Les sportifs ont des droits, les parlementaires également, notamment celui d'amender. L'attitude visant à refuser toute amélioration, y compris celles que l'on a soi-même défendues dans une autre proposition de loi ou en audition, confine, en langage médical, à la schizophrénie. Certains députés de la majorité ont ainsi voté nos amendements, s'éloignant d'une logique que je ne peux partager, qui pousse notre travail vers le bas et entretient l'antiparlementarisme.
Vous voulez faire des députés des godillots, nous ne pouvons l'accepter.
À l'UMP non plus, ces méthodes ne sont pas acceptées par tous. M. Lamour a ainsi informé par voie de presse sa détermination à améliorer ce texte. Déposant un amendement, il a déclaré : « Je suis dans mon rôle de parlementaire. Il est hors de question de ne pas faire mon travail. Si on ne cherche pas à améliorer les textes, à quoi sert d'avoir un débat à l'Assemblée ? Je comprends que le Gouvernement veuille aller vite, mais il est normal que l'on puisse en débattre. J'assume le risque de provoquer un retard dans le calendrier, mais je ne conçois pas mon rôle autrement. »
Notre rôle, nous ne le concevons pas non plus autrement. Ce risque, nous l'assumons également. Nous l'assumons d'autant plus qu'il ne faut pas aller chercher bien loin les intentions du Gouvernement au travers de ce vote à la hussarde : vous tentez de rehausser votre triste bilan législatif sur le sport. Après la loi contestée sur les paris en ligne, la loi controversée sur les agents sportifs, la loi de circonstance sur les stades de l'Euro 2016, nous comprenons votre besoin de faire voter une loi sur l'éthique, éthique qui n'était pourtant pas au coeur de vos préoccupations lors du vote de ces trois textes.
C'est pour ces multiples raisons, mes chers collèges, que je vous inviterai tout à l'heure à voter cette motion de rejet préalable. C'est pour ces multiples raisons également que nous ne voterons pas la proposition de loi. Le seul article 7 AA suffit à justifier le rejet de ce texte, mais plus encore, l'attitude incompréhensible qui consiste, sur des enjeux de cette importance, à refuser d'écouter ce que nous demandent les sportifs pour leur reconversion, l'AFLD pour faire progresser la lutte contre le dopage, les arbitres sur la reconnaissance de leurs parcours, les élus sur les conséquences des modifications des normes sportives. Le sport est ainsi une nouvelle fois déconsidéré.
Qu'un ministre cherche à marquer de son empreinte son passage au ministère, rien de plus normal. Qu'un ministre des sports cherche à légiférer sur l'éthique sportive, c'est bien nécessaire. Mais vous ne pouvez pas, vous ne devez pas vous contenter du médiocre.
Auriez-vous accepté l'assurance d'une médiocre place d'honneur plutôt que de combattre pour aller chercher l'or avec les honneurs ? Quand on ne cesse d'entendre à chaque audition que le mieux est l'ennemi du bien, on se pose la question de la disparition de toute volonté d'ambition.
Cette loi ne résout rien, et si nous n'en étions pas convaincus, il suffisait de vous écouter, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur. J'ai bien noté, et je le comprends fort bien, que M. le rapporteur attachait de l'importance à ce que ses propos soient retranscrits avec fidélité. J'ai donc repris les propos des comptes rendus et du rapport avec la même fidélité.
Sur la formation des sportifs, M. Douillet déclarait : « beaucoup de travail reste encore à faire pour réglementer la vie, les besoins, les devoirs, et les droits des athlètes ». N'était-ce pas le rôle de cette proposition de loi ?
Sur les agents sportifs, M. Berdoati affirme : « la question, très complexe, mérite quasiment à elle seule une proposition de loi : il est impossible de l'aborder dans ce texte de nature plus générale ». Faut-il donc supprimer l'article 6 ter, qui traite justement de ce sujet ?
Concernant l'éthique, M. le ministre déclarait : « Il est indispensable que les fédérations sportives structurent leur action éducative… ». Il a raison, mais cette proposition ne fait rien pour cela.
Sur l'addiction, le Gouvernement signale, dans son amendement, que cela « dépasse le cadre de cette proposition de loi ».
Sur le dopage, M. Berdoati déclare, en parlant du passeport biologique : « cette évolution dans la lutte contre le dopage mériterait qu'on lui consacre une réflexion particulière ». N'est-il pas regrettable qu'une loi qui porte sur le dopage dans près de la moitié de ses articles ne s'attelle pas à cette réflexion ?
Sur les arbitres, M. le ministre ne manquera pas de nous dire qu'une PPL sera à l'étude en septembre, en anticipant sur le vote des Français à l'élection présidentielle, et M. Berdoati déclarait : « ce sujet mérite une réflexion plus approfondie ».
« Nouvelles propositions de lois nécessaires », « réflexions approfondies », « réflexions particulières », « beaucoup de travail reste à faire »… À quoi sert donc cette proposition de loi puisque, selon vous, tous les sujets qu'elle aborde sont trop complexes pour être traités ?
De cet inventaire se dégage un constat limpide : cette proposition de loi, dont nous avons noté aussi dans vos propos que vous auriez aimé « mille fois l'amender », monsieur le ministre, cette PPL touche à tous les sujets, mais n'en traite aucun sur le fond ; elle soulève de vrais problèmes, mais ne les résout pas.
Le législateur ne peut se permettre, pourtant, de ne faire que de l'à-peu-près.
Dans de nombreux articles, cette loi est déclarative et ne sera suivie d'aucun effet. Le rapporteur annonçait lui-même en commission que, pour la mise en place des chartes éthiques, un délai de six mois n'était pas tenable. Ne nous dites pas alors qu'il y a urgence au point de ne toucher à rien. Était-ce donc cet article qui était attendu avec tant d'impatience par le mouvement sportif, mais qui ne changera rien au maximum dans l'année ?
L'absence de contrainte est plus problématique sur l'article 3, qui évoque le salary cap, et le nombre minimum de joueurs formés localement dans les clubs devant faire partie des équipes premières.
Ces deux mesures ont bonne presse actuellement ; elles constituent l'une des bases du fair play financier porté par Michel Platini à l'UEFA dont tout le monde se revendique, y compris l'UMP. Il s'agit tout simplement de limiter les salaires astronomiques de certains sports et d'en finir avec les déficits des clubs. Alors, pourquoi cet article se contente-t-il d'offrir la possibilité aux fédérations d'instaurer ces mesures pourtant nécessaires ? Pourquoi ne les contraint-il pas ?
C'est d'autant plus inconcevable que, contrairement à ce que le rapporteur a déclaré en commission, ces mesures ne sont pas innovantes. Sans parler des exemples du rugby anglais ou du hockey sur glace russe, qui pratiquent le salary cap depuis des années, regardons chez nous, en France. La Pro A et la Pro B de basket commencent déjà à mettre en place des mesures concernant les joueurs formés localement. Et la Ligue nationale de rugby n'a pas attendu ce texte pour instaurer son salary cap, tout comme la Fédération française des sports de glace, qui le pratique depuis plusieurs années.
Vous légiférez donc pour autoriser les fédérations à mettre en place ce qu'elles font déjà. Quelle ambition ! J'espère que vous n'irez pas jusqu'à prétendre que, grâce à cette loi, vous mettez en place le salary cap…
La rédaction initiale du texte était pourtant claire. Vous le reconnaissez d'ailleurs dans votre rapport, monsieur Berdoati : « Initialement, cette mesure figurait à l'article 5 du texte déposé sur le bureau du Sénat, sous une forme obligatoire avec un plafond fixé par voie réglementaire. ».
Bref, sur le registre de la régulation économique, pourtant urgente, du monde du sport professionnel, le texte a été privé de sa substance, des avancées qui en faisaient la seule légitimité.
Symbole d'un texte vidé de toute substance, symbole de l'inconstance de la majorité : les agents sportifs.
Vous êtes pourtant, l'un et l'autre, sur la même longueur d'onde, en estimant, comme nous, que seule la rémunération par le joueur et non par le club peut permettre plus de transparence dans la profession d'agent. Tous les deux, vous souhaitez également qu'une nouvelle loi encadre cette profession atypique. Je comprends la frustration de notre collègue Berdoati, qui n'était pas encore député il y a dix-huit mois quand nous avons étudié le texte traitant de ce sujet, et sa volonté de revenir sur les erreurs de sa majorité. Vous en avez l'occasion aujourd'hui. Que ne le faites-vous ? Je comprends moins, par contre, M. le ministre, qui était déjà député lors du vote de cette loi, et que nous n'avions pas entendu sur le sujet. Aujourd'hui, vous déjugez dans vos positions le travail parlementaire de votre groupe. C'est étonnant !
Alors, messieurs, puisque votre majorité a légiféré seule sur le paiement des agents par le club, puisque vous reconnaissez publiquement qu'elle a eu tort, profitez donc de ce moment de rattrapage pour, enfin, vous prononcer officiellement contre la double rémunération des agents !
Il est indispensable, pour éviter tout conflit d'intérêts et réduire autant que possible les pratiques de rétrocommissions, de maintenir l'obligation du paiement de l'agent par le sportif.
Autre enjeu de cette simple rémunération : la préservation des intérêts du sportif n'est pas garantie lorsque l'agent est payé par le club. En effet, le club se trouve alors dans un rapport de force vis-à-vis de l'agent – et du joueur – qui lui est favorable. Le club peut donc faire pression sur l'agent pour se débarrasser d'un joueur ou agir contre l'intérêt du joueur par l'intermédiaire de l'agent, ce qui contrevient totalement au principe du mandat unique.
Vous n'avez pas l'impression que, sur ce registre des joueurs « marchandises », il y a de l'éthique à introduire ?
Par ailleurs, j'ai appris avec surprise, et avec plaisir, le positionnement récent du ministère des sports sur le cumul des agents de joueurs et d'entraîneurs.
En octobre dernier, notre collègue du groupe SRC François Loncle interrogeait le ministre des sports sur la nécessité d'interdire la possibilité pour un agent d'être mandaté à la fois par un joueur et par un entraîneur de la même discipline. Aucune réponse jusqu'à, comme par hasard, ce mardi 10 janvier, vingt-quatre heures après le dépôt de notre amendement sur cette incompatibilité, quand plusieurs médias se sont fait l'écho de la réponse du ministère des sports. Le ministère « étudie actuellement la possibilité juridique de renforcer la liste des incompatibilités s'appliquant à l'activité d'agent, notamment pour interdire à un agent de joueur d'être également agent d'entraîneur ».
Il s'agit en fait d'une position opportune qui voudrait feindre d'ignorer que ce sont les députés socialistes qui, la veille, par un amendement à votre proposition de loi « éthique du sport et droits des sportifs », avaient proposé d'interdire ce cumul pour les agents.
Malgré cette communication, l'amendement n'a pas été voté par votre majorité mercredi en commission. Toujours ce « foutu » vote conforme !
Nous vous invitons donc aujourd'hui à saisir la séance de rattrapage en soutenant nos amendements. Vous mettrez alors vos actes en conformité avec vos déclarations, et l'éthique du sport ne s'en portera que mieux.
Autre sujet abordé par ce texte et sur lequel vous vous sentez obligés de revenir : les paris en ligne. C'était en mai 2010, il y a moins de deux ans, et nous vous avions annoncé les effets pervers de cette loi. Revenir sur ce sujet est d'abord un aveu : vous avez été trop vite. C'est vrai qu'il y avait la Coupe du Monde 2010 et que certains piaffaient d'impatience !
Si la présente loi crée le délit de fraude sportive, mesure nécessaire, si elle traite des conflits d'intérêts, bien que de façon encore trop ambiguë, elle ne traite pas, en revanche, du problème de santé publique qu'est l'addiction aux jeux.
Heureusement, monsieur le ministre, nous avons pu, certes contre l'avis du rapporteur, pallier ce manque lors de l'étude du texte en commission, en prévoyant des dispositifs visant à réduire les risques d'addiction aux jeux.
Sur ce registre, nous avons pu nous apercevoir que M. le rapporteur avait une opinion bien tranchée. Je me félicite que cela n'ait pas été celle de la commission mercredi dernier ; je me félicite que ce ne soit pas celle du sénateur UMP François Trucy dans son rapport sur les jeux en ligne remis le 12 octobre 2011 ; je me félicite aussi que, même s'il s'illustre par son inaction, ce ne soit pas l'avis du Gouvernement.
Vous nous avez dit en commission, monsieur le rapporteur : « l'étude de prévalence sur le jeu pathologique, conduite par l'Observatoire français des drogues et toxicomanies et l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, a évalué à 1,3 % la population des joueurs à risque, dont 0,4 % seulement présentant des prévalences de jeu excessives. L'opposition nous reproche souvent de légiférer à partir d'un événement : je ne suis pas certain que nous devions adopter un amendement pour quelques joueurs présentant un comportement déviant. »
Ces « quelques » joueurs sont aujourd'hui, dans le rapport de l'INPES, au nombre de 200 000 et ce ne sont pas des joueurs occasionnels. Ce sont des joueurs addictifs, qui prennent des risques au plan personnel. Il est donc regrettable que nous n'ayons pas pu aller plus loin sur la question de l'addiction.
Autre citation sur le sujet : « L'addiction est un phénomène qui, bien que largement étudié lorsqu'il s'agit de consommation de substances, demeure très peu connu lorsqu'il s'agit de pratiques comme le jeu. Difficile en effet d'établir une distinction scientifique entre le joueur occasionnel pour qui le jeu est un divertissement, le joueur compulsif qui peut se ruiner et le professionnel qui en fait son activité principale. Pour autant, cette question est aujourd'hui devenue un enjeu central de santé publique. Le jeu en ligne est d'autant plus dangereux qu'il possède certaines caractéristiques qui contribuent à augmenter le risque addictif. Il permet, en effet, des mises d'un faible montant tout en étant particulièrement facile d'accès. Il autorise, en outre, des successions rapides de phases courtes de jeu et rend possible la simulation de paris. »
Le texte que je viens de lire est l'exposé des motifs de l'amendement adopté en commission, et il dresse un constat que nous partageons tous, puisqu'il reprend, mot pour mot, une proposition de loi signée, il y a un an, par plus de soixante députés UMP. Non seulement il ne faut pas traiter le sujet avec suffisance, non seulement il ne faut pas minimiser ce phénomène en le réduisant à « quelques joueurs », mais il s'agit de légiférer et de légiférer rapidement face à ce fléau qui menace, ce dont tout le monde semble prendre conscience aujourd'hui. Et je me permets de rappeler à cette occasion l'excellent travail de notre collègue Michèle Delaunay en citant les propos qu'elle tenait dès 2010 : « Au moment où notre ministère de la santé prend conscience des effets délétères du risque addictif, celui-ci ne doit pas être oublié. Nous ne pouvons rester indifférents au fait qu'il s'agit d'une maladie nouvelle et évitable. Cette maladie est nouvelle parce qu'elle est une maladie sociétale que l'évolution de la société a créée et que, de ce fait, les politiques ont une responsabilité particulière non seulement dans les soins à y apporter mais aussi dans sa prévention. » Elle poursuivait : « Nos amendements ont trait à la première promotion commerciale, en particulier à ce très dangereux « premier pari gratuit » qui a pour effet, pour une personne qui jusqu'alors ne s'intéressait pas au jeu, de pouvoir miser et peut-être gagner. S'il gagne, il met bien souvent le doigt dans l'engrenage, recommence ; s'il perd ensuite, il voudra refaire son gain. C'est le processus délétère de l'addiction au jeu, d'autant plus facilement enclenché que la personne n'a pas d'activité ou que sa situation financière et sociale est précaire et qu'elle espère un gain quelconque. » Vous êtes le seul, monsieur le rapporteur, à mésestimer le risque de l'addiction.
Vous citez une étude de l'INPES, mais savez-vous seulement qu'elle a été réalisée à partir de données antérieures à la loi sur les paris en ligne ?
Je crois que vous l'avez lu, et je l'évoquais précédemment, les 0,4 % de joueurs présentant des prévalences de jeu excessives représentent 200 000 joueurs, alors que cette étude a été réalisée avant 2010. Non, ce ne sont pas que « quelques joueurs » présentant un comportement déviant ! C'est pourquoi je me félicite qu'en commission, les députés UMP signataires de cette PPL sur les bonus commerciaux aient voté en responsabilité politique notre amendement, lequel était aussi le leur. J'invite tous mes collègues à défendre ces acquis et, ainsi, à rejeter les surprenants amendements de suppression d'un gouvernement qui prétend pourtant se mobiliser sur ces graves problématiques.
Les rustines présentées par cette loi ne nous permettent pas de revenir sur la troisième loi controversée votée par votre gouvernement : celle de l'Euro 2016. Cela nous empêche donc de relever un certain nombre d'incohérences de la majorité et de revenir sur un texte qui a levé les garde-fous protégeant les collectivités territoriales sur certains grands chantiers. Mais, puisque nous parlons aujourd'hui d'éthique, est-ce vraiment éthique de consacrer 168 millions d'euros du CNDS, qui vise le sport amateur, le sport pour tous, pour financer les stades de l'Euro 2016 ? L'investissement total est de 1,7 milliard d'euros.
Vous évoquez sans cesse, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, et vous l'avez encore fait tout à l'heure, le vote à l'unanimité des sénateurs. Mais relisons de plus près l'explication de vote de mon collègue Jean-Jacques Lozach : « Je tiens à remercier le président Yvon Collin et ses collègues du groupe RDSE. Ils nous ont donné l'occasion, cet après-midi, de débattre des enjeux inhérents au sport moderne, qui est devenu un phénomène de société, et de le faire « à froid », si je puis dire, en dehors de toute urgence ou considération d'actualité. À notre satisfaction, nous sommes parvenus à faire évoluer le dispositif de la proposition de loi sur plusieurs points. Néanmoins, notre satisfaction est toute relative, car nous avions conditionné notre vote au sort réservé à l'amendement de M. le rapporteur sur le statut des sociétés sportives. »
Le vote du groupe s'était expliqué par les concessions qui avaient été faites ; or force est de constater que vous ne voulez en faire aucune aujourd'hui. Cette loi s'inscrivait dans un processus de travail législatif et n'a jamais eu vocation à être votée conforme. Cet article 7 AA, déjà évoqué par M. Lozach, est rédhibitoire. Il n'est pas acceptable que les clubs professionnels deviennent des sociétés de droit commun sous prétexte qu'il existe six statuts différents pour les sociétés sportives. Cet article n'a rien à voir avec l'éthique du sport. Au contraire, un texte sur l'éthique aurait dû aborder avec profondeur de nombreux thèmes : l'éthique dans les fédérations, oui, mais en allant au-delà d'une simple charte ; le salary cap, le nombre maximum de joueurs, oui, mais en imposant, pas en proposant ; les agents de joueurs, oui, mais en traitant le sujet avec l'importance qu'il mérite et en montrant la volonté de lutter contre les risques de blanchiment ; les paris en ligne, oui, mais en allant jusqu'au bout de la problématique des conflits d'intérêts et des risques de corruption avec l'explosion des personnes intéressées au résultat, et en prenant en compte fermement les problèmes de l'addiction ; les arbitres, oui, l'amendement que nous avons fait voter est une avancée saluée par le monde de l'arbitrage – ne faites pas machine arrière, car dans une loi sur l'éthique, le corps arbitral vous attend – ; le dopage, oui, mais avec enfin la reconnaissance du profilage biologique ; le sport à la télévision, oui, mais en imposant, madame la présidente, une révision de ce décret TSF pour élargir la diffusion du nombre de disciplines sportives et la place du sport féminin, ce que nous proposons dans un amendement ; la répartition des compétences, oui, mais en redonnant à la puissance publique ses prérogatives dans les incidences financières d'évolution des normes des équipements sportifs. Les thèmes sont là, il vous suffirait de voter nos amendements pour avoir un texte de loi conséquent et responsable sur l'éthique.
Rien ne justifie dans cette proposition, qui aborde un sujet sérieux comme celui de l'éthique, de bâcler le travail pour répondre à votre souci de la voir adoptée avant la fin de la législature, alors que ce gouvernement a eu cinq ans pour agir.
Le vote conforme réclamé par M. le ministre incarne le refus du Gouvernement de considérer le sport dans notre pays comme un véritable enjeu de société. Nous ne pouvons que regretter que les directives ministérielles nous privent d'une discussion sereine et d'intérêt général sur tous les articles et les amendements de cette proposition de loi.
Le sport, avec ses trente-cinq millions de pratiquants, ses seize millions de licenciés, ses deux millions de bénévoles, mérite mieux qu'un texte a minima de rattrapage à l'image d'un ministère qui, en moins de cinq ans, aura vu passer pas moins de cinq ministres, tantôt dans un secrétariat d'État, tantôt dans un ministère de plein exercice, comme c'est votre cas, monsieur Douillet, tantôt rattaché à la santé, à la jeunesse, à la vie associative, tantôt à la cohésion sociale…
Monsieur le ministre, si votre prédécesseur a demandé que ce texte soit amélioré à l'Assemblée, c'est qu'il y a des raisons. Si certains députés de la majorité ont osé voter nos amendements en commission, c'est qu'il y a des raisons. Si deux anciens ministres des sports, présents dans cet hémicycle, souhaitent amender cette loi, c'est qu'il y a des raisons. Vous nous répétez à l'envi, monsieur le rapporteur, que le mieux est l'ennemi du bien : peut-être, mais le médiocre ne peut être l'ami de la représentation nationale ; et ce texte est pourtant bien médiocre.
C'est dommage pour la France du sport, c'est pourquoi je vous invite à voter cette motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Pour mieux comprendre l'exposé de trente minutes de notre collègue, j'ai cherché dans notre règlement quel était normalement l'objet d'une motion de rejet préalable, puisque tel en est l'intitulé. Notre règlement prévoit que : « l'objet est de faire reconnaître que le texte proposé est contraire à une ou plusieurs dispositions constitutionnelles ». Je dois dire que, pendant les trente minutes de discours de notre collègue, discours certes intéressant, je n'ai pas entendu un seul argument répondant à cet article du règlement de l'Assemblée nationale. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Sans doute notre collègue Nayrou n'a-t-il pas bien écouté. Peut-être faisait-il davantage d'informatique ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Chers collègues, laissez l'orateur s'exprimer. On ne peut pas se plaindre de ne pas avoir le temps de parler dans ce débat !
Si nos collègues socialistes ne sont plus d'accord avec le règlement de l'Assemblée, je pense qu'il faudra demander à la présidence de le réactualiser assez rapidement.
La présidence n'en décide pas seule, puisque c'est soumis à un vote des parlementaires. Le mieux est de revenir au débat.
Mais, pour l'instant, tel n'a pas été le cas. Je pense que le règlement est encore en vigueur. Je n'ai, par conséquent, trouvé aucun argument qui justifie le vote de cette motion de rejet préalable. Je laisserai le soin au ministre de répondre plus longuement.
Je serai bref, car il est temps de nous mettre au travail.
Je n'ai jamais entendu autant de critiques vis-à-vis de nos amis sénateurs. Il est hallucinant de voir à quel point leur travail a été dénigré ! À entendre ce discours, on se demande ce qu'ils ont bien pu faire et quelle est la monstruosité qu'ils ont bien pu voter à l'unanimité ! C'est tout de même quelque peu inquiétant !
Cela prouve d'ailleurs, et nous le constatons pendant cette campagne présidentielle, combien il est difficile pour nos amis socialistes de se mettre d'accord sur tous les sujets et de travailler ensemble. Ils viennent de faire la démonstration d'un dysfonctionnement total entre la gauche du Sénat et celle de l'Assemblée nationale. On imagine ce que cela pourrait donner s'ils étaient à la tête du pays ! (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP.)
C'est peut-être une des raisons pour lesquelles le monde du sport s'inquiète quant à la poursuite de ces travaux. Comme je l'ai dit dans mon propos introductif, nous continuerons à travailler sur ce sujet ; nous n'y manquerons pas ! Mais il est clair qu'aujourd'hui, les sportifs veulent que cette proposition de loi soit rapidement votée, car ils en ont besoin. Elle peut être, bien sûr, améliorée et nous aurons le temps de le faire dans l'avenir. Nous étudierons alors chaque sujet au cas par cas, et certains sujets pourront faire à eux seuls l'objet d'un texte de loi.
Les ministres européens responsables du sport assisteront à la conférence du Conseil de l'Europe le 15 mars. Dieu sait si j'aurai, à titre personnel, besoin de m'appuyer sur cette loi pour aborder la corruption sportive en tant que délit pénal. J'invoquerai l'adoption rapide d'une telle mesure par la France pour qu'elle soit adoptée le plus vite possible par l'Europe. Je m'appuierai aussi sur ce texte pour que l'on puisse avancer en matière de dopage à l'échelle européenne. Et cette proposition de loi me permettra d'expliquer qu'en France, le dispositif salary cap est un outil mis à la disposition de nos fédérations. C'est un travail concret, dont le sport français a besoin aujourd'hui. On peut évidemment prendre le temps de la réflexion, mais vous savez que, dans le monde du sport comme dans la vie, il est des moments où il faut réfléchir et se concentrer et d'autres où il faut accélérer. Nous sommes, là, dans une phase d'accélération. C'est le sport qui le demande, c'est l'intérêt général qui le commande. Or je constate, une fois de plus, que l'intérêt général et l'écoute d'un milieu par la gauche posent un vrai problème.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Très bien !
Nous en arrivons aux explications de vote. Je rappelle à tous les futurs intervenants qu'elles sont limitées à deux minutes par notre règlement, lequel vient d'être rappelé.
La parole est à M. François Rochebloine.
Je tiens, à mon tour, à me réjouir que nos collègues sénateurs, toutes sensibilités politiques confondues, aient voté ce texte.
À vous écouter, madame Fourneyron, il faudrait surtout ne rien faire et attendre. Je crois, comme vient de le rappeler très justement le ministre, qu'il y a urgence à légiférer. C'est pourquoi je souhaite vraiment que l'on puisse très rapidement aborder la discussion générale puis l'examen des différents articles.
Vous avez évoqué, madame Fourneyron, les amendements de différentes sensibilités politiques adoptés par la commission. Nous pouvons reprendre tous les textes de loi sur lesquels nous avons débattu et nous constaterons qu'il en va toujours ainsi. C'est tout à fait normal. Ce n'est pas parce que des amendements sont adoptés en commission qu'ils le sont en séance publique, nous devons en avoir conscience.
Cette proposition de loi vise à renforcer l'éthique du sport et les droits des sportifs, notamment pour moraliser le sport professionnel, transmettre les valeurs du sport, qui sont aussi celles de la République, prévenir les risques de fraude liés aux paris sportifs en ligne et, enfin, parachever la mise en conformité de notre législation avec le code mondial antidopage, domaine où notre pays n'est pas en reste – et j'ai déjà eu l'occasion de saluer l'action de Mme Buffet dans la lutte contre le dopage.
Le groupe Nouveau Centre, vous l'aurez compris, rejettera cette motion de rejet pour que nous puissions passer très rapidement à la discussion générale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Après avoir lu le titre de cette proposition de loi, nous pensions aborder les questions de l'éthique dans le sport et des droits des sportifs, sujet extrêmement important, c'est vrai, lorsque l'on voit la place du sport dans notre société.
Le sport est souvent une référence, un modèle pour un grand nombre de jeunes, et nous savons que, dans le contexte actuel, il est soumis à de très nombreux défis liés notamment aux questions de l'argent et de sa mutualisation et aux dérives liées aux paris en ligne et au dopage.
Sur l'éthique et les droits des sportifs, ce texte ne va pas assez loin. C'est pourquoi j'ai déposé une série d'amendements tendant à améliorer les articles portant sur ce sujet.
Vous nous avez demandé, monsieur le ministre, de nous dépêcher de finir la discussion générale pour démarrer le travail, mais quel travail allons-nous effectuer dans cet hémicycle puisque, depuis des jours et des jours, vous nous expliquez que le texte devra être voté conforme et que nous ne pourrons rien changer ?
M. Rochebloine considère qu'il faut passer à la discussion, mais quel est le but d'une telle discussion puisque nous ne pourrons pas modifier les articles ?
Monsieur Rochebloine, nous savons très bien que vous êtes passionné lorsque nous parlons des sociétés sportives, des clubs professionnels, parce que vous voudriez libéraliser le plus possible le sport professionnel. Ce n'est pas mon opinion et c'est la raison pour laquelle je combattrai notamment l'article 7 AA, qui vise à remettre en cause la société à vocation sportive au profit de la société de droit commun, c'est-à-dire à plonger de plus en plus le sport professionnel dans le libéralisme le plus complet.
C'est pourquoi nous voterons la motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Comme l'ont souligné certains, ce ne sera pas une loi-cadre pour le sport. C'est une proposition de loi émanant d'un sénateur, qui contient des mesures attendues par le sport français dans une année olympique ô combien importante, et notre groupe y est favorable. On peut certainement rêver d'un texte qui proposerait mieux et plus mais ce sera une nouvelle étape. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Le ministre a expliqué qu'il y avait urgence, et il a même osé dire que c'était parce que les socialos arrivaient. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Attention, la gauche arrive, a-t-il dit, et donc il y a urgence et le monde sportif attend des décisions ! Oui, la gauche va arriver.
Il nous a expliqué ensuite qu'il fallait absolument accélérer. Il a raison. Le problème, c'est que, selon lui, ce texte était attendu depuis des années. S'il est attendu depuis des années, pourquoi n'a-t-il pas été présenté avant ?
Cela signifie simplement, mes chers collègues, que c'est une décision politique.
Ce n'est pas une question de calendrier. C'est vous qui décidez qu'il y a urgence et nous ne partageons pas cet avis.
Rappelons, puisqu'on a évoqué le règlement intérieur, que M. Copé parlait de coproduction.
Aujourd'hui, la coproduction consisterait uniquement pour nous à voter, comme le ministre le souhaite.
J'en viens au Sénat puisque vous voulez absolument que j'en parle. Pourquoi nos collègues ont-ils voté cette proposition ? Parce qu'il y a eu un travail collectif, un débat, que des amendements ont été discutés. Ici, nous n'avons aucune possibilité de discuter.
Vous parlez de l'éthique du sport. Selon le quotidien Libération, dans un article paru en septembre, Florent Malouda se serait plaint en petit comité de l'avantage donné par Laurent Blanc à Franck Ribéry pour le poste sur le flanc gauche chez les Bleus, le joueur de Chelsea laissant sous-entendre que l'agent commun entre le joueur bavarois et le sélectionneur national n'y était pas pour rien.
Si l'on parle d'éthique sportive, il faut impérativement régler la question des agents sportifs. Une telle situation n'est pas normale et nous attendons des explications, monsieur le ministre, sur l'utilité qu'il y a à transformer les sociétés à objet sportif en sociétés banales.
Merci, monsieur Rogement.
Je vais mettre aux voix la motion de rejet préalable.
Vous aviez deux minutes pour intervenir, je vous ai interrompu à deux minutes cinquante-cinq après vous avoir rappelé plusieurs fois à l'ordre. La motion de rejet préalable ayant été déposée par le groupe SRC, j'imagine, sortant un peu de mon rôle, que votre groupe est favorable à son adoption.
(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.)
Le philosophe Alain écrivait que la vie sportive ménageait de ces instants où « l'homme éprouve le plaisir de faire et de penser en même temps ». C'est dire à quel point le sport ne se résume pas à une simple discipline physique, et qu'il ne fait pas seulement appel aux compétences corporelles.
C'est ainsi que, dans la société française d'aujourd'hui, le sport a été investi de valeurs considérables. Désormais, il est considéré comme un facteur de cohésion sociale, mais aussi comme un vecteur d'éducation et d'identité culturelle, de promotion sociale, ou encore un moyen de rapprocher les gens et de dépasser tous les clivages, on le voit entre autres à l'occasion des Jeux olympiques ou de la Coupe du monde de football.
De même convient-il de prendre en compte l'impact considérable des grands clubs sportifs sur leur territoire. En tant qu'élu du département de la Loire, je mesure l'importance considérable qu'a pu prendre au fil des ans le club de l'AS Saint-Étienne, et ce n'est pas mon collègue Régis Juanico qui me démentira, dans la vie de la ville, mais aussi dans le département et, bien au-delà, au plan régional et national, voire international.
Pour notre jeunesse, parfois en manque de repères aujourd'hui, le sport peut assurément contribuer à inculquer la rigueur, le respect, le civisme, le sens de l'effort. On sait bien que, du fait de l'hypermédiatisation du sport, les jeunes s'identifient totalement aux sportifs professionnels ou de haut niveau. Encore faut-il, pour que le sport soit à la hauteur de tous les espoirs que la société met en lui, qu'il retrouve ses valeurs, une éthique, et la sincérité de ses débuts, ce qui fondait l'espoir de Pierre de Coubertin lorsqu'il donna un nouveau souffle aux Jeux olympiques. Il s'agit en quelque sorte de raviver la flamme originelle, d'entretenir un tel état d'esprit, voire, pour certaines disciplines sportives, de le restaurer.
Au Nouveau Centre, il nous paraît urgent de faire en sorte que le sport de compétition et les sportifs de haut niveau puissent de nouveau constituer un exemple et un modèle à suivre pour l'ensemble de la société.
Comment mettre un terme aux dérapages que nous avons déplorés ces derniers temps : violences dans les stades, dopage de certains sportifs, cas de corruption, paris illégaux, joueurs qui insultent l'arbitre ou leur entraîneur, sportifs qui se mettent en grève et bien d'autres ?
Tel est l'objectif, qui nous paraît louable et légitime, de la proposition de loi que nous allons étudier aujourd'hui.
Premier point, nous sommes favorables à l'esprit du titre Ier de la proposition de loi, visant à inciter les fédérations sportives, qui constituent, comme on l'a dit souvent, le bras armé de notre politique en la matière, à prendre en compte des aspects éthiques. Nous sommes très favorables aux bases juridiques de la licence-club, du fair-play financier cher à Michel Platini, ou encore à la règle de la formation locale des joueurs, mais aussi au renforcement des organes de contrôle au sein des fédérations et à l'élargissement de leur indépendance.
En particulier, il nous paraît très utile d'imposer à chaque fédération l'élaboration et le respect d'une charte, ainsi que la régulation de l'activité administrative, juridique et financière des clubs par une licence-club accordée à ceux qui respectent les règles financières. Nous sommes ainsi favorables à ce que l'agrément des fédérations soit conditionné à la mise en place d'une charte éthique et, ce qui est encore mieux, à son application. De plus, le fait que la mise en oeuvre de cet article soit renvoyée à un décret permettra au comité national olympique et sportif français de jouer un rôle à la fois moteur et d'harmonisation.
Il était également indispensable de préciser le pouvoir des directions du contrôle de gestion, dont je salue le travail. Elles mèneront désormais leur mission de contrôle financier de l'équité sportive dans un cadre juridique solide.
Le second point que je veux souligner concerne le sport professionnel géré par les ligues, qui doit être exemplaire et équitable, car il y a de très gros enjeux financiers. L'introduction d'un plafond des salaires et de la rémunération des agents est une mesure pertinente pour désintoxiquer le milieu sportif de ses excès.
Nous sommes extrêmement favorables à la possibilité pour les fédérations sportives de diminuer le plafond des commissions des agents sportifs, en vertu du principe selon lequel le sport ne saurait être un objet de spéculation. C'est vrai que, là aussi, il y a beaucoup de choses à dire même si des efforts ont déjà été réalisés.
C'est la même logique qui nous amène à approuver fortement le principe d'un meilleur encadrement des paris sportifs en ligne, dans le cadre de la lutte, qui n'en est certes qu'à ses débuts, contre les tentatives de corruption liées à ces paris.
Il nous paraît indispensable de mettre en oeuvre des dispositions visant à préserver l'intégrité des compétitions sportives face au développement des paris en ligne, notamment en introduisant un dispositif d'incrimination de la revente illégale des billets sportifs, source de nombreux troubles à l'ordre public aux abords des stades.
Nous nous félicitons que l'on n'ait pas attendu l'examen d'une clause de revoyure envisagée dans la loi pour chercher à moraliser davantage le marché des jeux en ligne, et nous considérons qu'il faut en la matière travailler dans deux axes : le renforcement de la prévention en matière de conflits d'intérêt et la mise en place d'un délit de corruption sportive.
Un débat a été ouvert sur l'éventualité, qui était présente dans la proposition de loi avant sa discussion au Sénat, de la suppression du pouvoir de sanction des fédérations dans les affaires de dopage. Il nous semble que cette suppression risquerait de déresponsabiliser les fédérations, alors que nous devrions au contraire renforcer leur intervention dans ce domaine essentiel, comme le font d'ailleurs certaines fédérations, notamment l'athlétisme et le cyclisme.
Cette proposition de loi ne va évidemment pas améliorer immédiatement de manière radicale la gouvernance et la pratique du sport en France, mais elle va permettre de mettre en oeuvre des adaptations qui étaient fortement nécessaires et que nous attendions depuis longtemps pour réintroduire l'éthique sur le devant de la scène sportive.
C'est une remise en cause générale des mentalités qui doit aussi se produire si l'on veut que des messages négatifs de violence, de dopage, de non-respect des autres ne soient plus véhiculés par le sport. C'est à cette remoralisation du sport que la présente proposition de loi doit contribuer, en instaurant des règles de base et en réaffirmant les valeurs intangibles auxquelles le monde sportif, dans sa globalité, ne devrait plus déroger.
Nous attendons que cette proposition de loi soit rapidement suivie des aménagements qu'elle appelle. La politique sportive française exige des idéaux, des finalités de grande portée, des efforts supplémentaires, financiers, bien sûr, mais pas seulement. C'est ainsi que nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour agir de façon à défendre les valeurs du sport et les intérêts des sportifs, notamment au niveau européen.
Pour conclure, le groupe Nouveau centre entend soutenir tous les efforts qui permettront de redorer le blason du sport en restaurant l'éthique dans ses pratiques et ses activités et en renforçant les droits des sportifs. Notre groupe votera donc, vous l'aurez compris, cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Lorsque j'ai vu le titre de cette proposition de loi, je me suis dit : « Enfin, à quelques mois des Jeux olympiques – où je souhaite, comme vous, monsieur le ministre, que nos équipes françaises obtiennent les meilleurs résultats possibles –, nous allons parler d'éthique dans le sport ! »
Hélas, le contenu du texte qui nous est soumis ne correspond pas vraiment au titre. Quelle déception ! Une déception accrue par le fait que, chaque fois que nous avons, en commission, proposé des améliorations au texte, on nous a répondu « il faut voter conforme » ou « il ne s'agit pas d'une loi-cadre ».
Depuis 2007, aucune loi-cadre n'a revisité l'ensemble des leviers, des règles, des moyens nécessaires au développement du sport, comme si le contexte dans lequel évolue le sport était le même qu'à la fin du siècle précédent, comme s'il n'était pas confronté à de nouveaux défis. Au lieu d'avoir l'ambition de donner un cadre actuel au modèle sportif français, on modifie par petites touches le droit du sport. De petites lois en cavaliers, on bride ou on casse le moteur du développement du sport : le partage des missions de service public entre l'État et le mouvement sportif pour assurer le droit au sport.
Nous avons eu le texte sur les agents sportifs, qui a renforcé l'emprise des clubs sur les joueurs, considérés par eux comme des actifs que l'on vend ou que l'on achète lors du Mercato. Nous avons eu la loi sur les paris en ligne, la loi d'exception sur les stades de l'Euro 2016, l'amendement sur l'OL Land. Ces textes vont tous dans le même sens : celui de la marchandisation du sport.
Aucun d'eux n'a donné de moyens nouveaux aux bénévoles ou aux fédérations pour développer la pratique sportive.
Aucun n'a renforcé l'éthique, bien au contraire !
Et arrive ce texte, dit d'éthique, comme pour s'excuser des lois précédentes. Un texte bien incomplet qui, tout en parlant d'éthique, habille des mesures qui vont dans un sens opposé.
Vous souhaitez, monsieur le ministre, voir ce texte voté conforme. Il s'agirait, nous a expliqué le rapporteur en commission, de régler en urgence certains problèmes, tels que celui de la billetterie avant Roland Garros. Pensez-vous vraiment que ce genre d'urgence justifie de priver les parlementaires de leur droit d'amendement ?
J'espérais que vous accepteriez les trois seuls amendements adoptés par la commission. Hélas, ces avancées, vous voulez les gommer. Qui fait de l'obstruction parlementaire si ce n'est vous, monsieur le ministre, et le Gouvernement ?
En poussant au vote conforme, vous privez le monde sportif d'un texte réellement porteur d'avancées, à un moment où les attentes en matière de droits et d'éthique sont importantes. Ce qui mine le sport, c'est, d'un côté, un afflux considérable d'argent non régulé, non mutualisé, et, de l'autre, le rabougrissement des moyens publics des collectivités et du ministère. On peut parler d'une véritable misère du ministère des sports.
La présente loi ne répond à aucun de ces problèmes. C'est une sorte de taillis, elle touche un peu à tout, reste fort imprécise et inopérante quand sont abordées les questions éthiques, mais est très précise et contraignante lorsqu'il s'agit de libéraliser.
Parler des droits des sportifs, deuxième objectif de la loi, c'est évoquer toute une palette de mesures, mais vous refusez nos amendements concernant la formation, la carrière des sportifs, l'accès à la pratique sportive. Sur tous ces sujets, je vous referai des propositions concrètes durant les débats.
Quand je pense aux familles qui n'arrivent pas à inscrire leurs enfants dans des clubs, je me dis : prenons cet argent qui coule à flots dans certains sports et utilisons-le pour favoriser le développement des sports moins bien dotés et baisser le prix des licences ! C'est simple. Nous pouvons augmenter la taxe sur les droits audiovisuels. Nous serions au coeur des objectifs de ce texte.
Quand je pense aux sportifs de haut niveau et à un grand nombre de sportifs professionnels, je me dis : pour que notre pays permette à l'excellence de s'exprimer, il faut sécuriser les parcours des sportifs, de la formation à la reconversion. Il faut des moyens pour les centres régionaux d'éducation physique et sportive, il faut revaloriser les diplômes et ouvrir des passerelles pour l'avenir. Mais chaque fois que nous défendons ces amendements constructifs, on nous répond que ce n'est pas le moment, on nous dit que ce n'est pas le bon texte, on nous dit « conforme ! »
Monsieur le ministre, vous pouvez changer d'attitude. Vous pouvez encore, ce soir, faire de cette loi un texte utile au mouvement sportif. Je vous le demande mais en même temps je doute, car, si ce texte est faible sur l'éthique et les droits, il contient aussi plusieurs articles de régression.
Il propose ainsi de mettre en oeuvre des « licences-club ». Il autorise donc les ligues, sur délégation des fédérations, à exclure des clubs de leurs compétitions sur la base de critères qu'elles détermineront elles-mêmes.
Ces licences pourront, de manière facultative, comporter des mesures limitant les hauts salaires et obligeant les clubs à recruter des jeunes issus de leurs centres de formation. Mais nous savons aussi, depuis le rapport Besson sur la compétitivité du football, que l'enjeu réel de ces licences, c'est d'obliger les clubs des premières ligues à construire des espaces-stades commerciaux et d'aller de plus en plus vers un sport-spectacle. Et vous prétendez mettre une telle disposition dans une loi sur l'éthique !
Toutes les règles qui relèvent de l'éthique ont une base juridique : c'est la loi, ce sont les conventions entre les fédérations et le ministère, les statuts types pris par le ministère, les règlements intérieurs des fédérations. Et c'est bien naturel car les règles éthiques ne peuvent se décliner que de façon identique dans toutes les fédérations et pour tous les licenciés.
Ce texte permet également aux clubs sportifs de choisir toutes les sociétés prévues par le code de commerce et de ne réserver les statuts types qu'à deux d'entre elles. C'est cela, l'urgence de cette loi ? Quand on sait ce que pensent les actionnaires de ces statuts types, autant dire que cet article signe leur arrêt de mort, alors qu'une loi portant sur l'éthique devrait au contraire tout faire pour les généraliser.
Comment prétendre sans rire qu'une telle mesure a été pensée pour renforcer l'éthique ou les droits des sportifs ? Une telle mesure, monsieur le ministre, n'a été pensée que sous la pression de certains financiers de la Ligue 1, et il est regrettable que vous ayez jugé positif de la mettre à l'ordre du jour de notre assemblée.
Je pourrais continuer la liste des cadeaux qui leur sont faits. On continue de permettre à une même personne d'être actionnaire d'un club et d'avoir des actions dans un autre club de la même discipline ou de lui faire des prêts. Si vous voulez combattre pour l'éthique, monsieur le ministre, j'ai deux amendements à vous soumettre : l'un interdisant d'être actionnaire de plusieurs clubs, l'autre de faire des prêts à un autre club de la même discipline. Ce serait le retour à la loi de 1999 sur le sport professionnel.
En les adoptant, vous témoignerez de votre volonté de ne plus voir s'affronter dans un même championnat des clubs dans lesquels une même personne a des intérêts financiers. En adoptant ces amendements, vous faciliterez le travail de la direction nationale du contrôle de gestion bien plus efficacement qu'en élargissant ses compétences en matière d'éthique.
Regardons maintenant les articles touchant à l'éthique. La loi donne la possibilité aux fédérations de réduire la rémunération des agents sportifs. À cet égard, je vous propose d'enrichir ce texte d'un article interdisant le double mandatement de ces agents. Comme vous l'avez souligné vous-même en commission, le 27 octobre dernier, il n'est pas raisonnable de penser qu'une personne payée par un club pour défendre ses intérêts défendra réellement ceux du joueur. Ce sont vos paroles.
Cette loi corrige aussi deux ou trois oublis de la dernière loi sur les paris sportifs, en matière d'interdiction de paris et d'incrimination pénale. Elle ratifie l'ordonnance sur le dopage et élargit les compétences de l'Agence française de lutte contre le dopage, sans toutefois donner à celle-ci les moyens qui lui permettraient, à compétences inchangées, de déployer encore plus largement son action.
Enfin, je veux m'arrêter sur l'article 1er de cette loi, qui rend obligatoire l'élaboration d'une charte éthique dans toutes les fédérations. Plusieurs fédérations ont déjà agi en ce sens, car le mouvement sportif français est, dans sa très grande majorité et même, ai-je envie de dire, dans sa quasi-totalité, mobilisé sur ces questions, mais il veut aussi que l'État assume ses responsabilités. La charte ou d'autres mesures contenues dans cette loi ne peuvent pas remplacer le nécessaire partenariat avec l'État, lequel a son rôle à jouer sur ces questions, comme sur toutes les autres questions concernant le sport.
Comme vos prédécesseurs, monsieur le ministre, vous avez fait le choix d'un retrait de la puissance publique. Cette perspective, je la rejette avec la plus grande vigueur, et nous sommes nombreux à penser que l'avenir réside dans un partenariat rénové mais solide entre l'État et les fédérations.
L'avenir du modèle sportif français ne peut se décider sur un coin de table. Il mérite un grand débat démocratique, avec les hommes et les femmes du mouvement sportif, les élus locaux et, bien sûr, les parlementaires.
En attendant qu'un gouvernement daigne nous accorder ce salutaire débat, le groupe GDR s'opposera à tout ce que nous considérons être, dans ce texte, une régression. Il défendra des amendements constructifs. Si vous en restez au dogme du « votez conforme », notre groupe votera contre cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, je voudrais resituer cette proposition de loi dans son contexte. Elle vise à renforcer l'éthique du sport et traite des droits des sportifs, et je rappelle qu'elle a été adoptée par le Sénat à l'unanimité.
Elle contient des dispositions qui, pour l'essentiel, tendent à moraliser le sport professionnel, notamment le football, en donnant plus de pouvoir aux fédérations pour, en particulier, plafonner la masse salariale des clubs en instituant à terme un salary cap, comme il en existe aux États-Unis dans la NBA et dans les autres disciplines sportives.
Elle vise également à transmettre les valeurs du sport, qui sont aussi celles de notre République, à prévenir les risques de fraude liés aux paris sportifs en ligne, à parachever la mise en conformité de notre législation avec le code mondial antidopage et à élargir les compétences de l'Agence française de lutte contre le dopage.
Cette proposition de loi s'articule autour de trois axes essentiels. Le premier est le respect des valeurs du sport ; c'est l'objet de son Titre Ier, qui fait porter aux fédérations sportives la responsabilité en termes de régulation et d'exemplarité. En effet, les fédérations, délégataires du ministère des sports, doivent édicter des règles destinées à encadrer les compétitions qu'elles organisent, et ce dans le respect d'une charte éthique.
Plus avant, le texte a été enrichi, d'une part, de mesures de lutte contre la corruption et les conflits d'intérêts, et, d'autre part, de la mise en place de « licences-club » définissant un nombre minimum de sportifs formés localement. C'est indispensable dans l'évolution du sport de haut niveau, en particulier du sport professionnel. Elle vise aussi à un plafonnement des rémunérations, ce qui est une excellente chose.
Par ailleurs, les ligues professionnelles, lorsqu'il en existe dans les disciplines, devront toutes à terme disposer d'un organisme indépendant assurant un contrôle financier et juridique rigoureux.
Ce texte pointe également la revente illicite des billets de manifestations sportives, constitutive d'une infraction très sévèrement punie.
Sur un autre plan, la proposition de loi envisage la possibilité pour les fédérations d'introduire un plafonnement des rémunérations des agents sportifs, à un taux inférieur à 10 %.
Il faudra, en l'espèce, revoir une loi antérieure, afin que les agents précités soient uniquement rémunérés par les sportifs et non plus par leur club employeur. Cela me semble essentiel.
Le dispositif envisage par ailleurs un renforcement de la réglementation relative à la prévention des conflits d'intérêts en matière de paris sportifs. À cet effet, un article important confère la capacité aux fédérations de demander à l'Autorité de régulation des jeux en ligne, organisme créé par la loi sur les paris sportifs et qui dispose des fichiers clients des opérateurs, des informations sur un acteur sportif en vue d'une éventuelle procédure disciplinaire. C'est tout à fait essentiel également.
Dans la continuité de ce qui précède, le choix a été fait d'ériger en infraction à caractère pénal la corruption liée aux manifestations sportives faisant l'objet de paris.
Deuxième point important : le développement du sport et la formation des sportifs. Dans ce domaine, le texte ne prévoit pas tout, mais il prévoit notamment la libération des financements des clubs par des acteurs classiques ainsi que l'élargissement du champ de compétence pour les élèves, tant du second degré que de l'enseignement supérieur, issus des centres de formation et assimilés aux athlètes des pôles, de façon que le temps scolaire ou universitaire puisse être aménagé.
Troisième point important : la lutte contre le dopage. Il s'agit par ce texte de ratifier une ordonnance de 2010 relative à la santé des sportifs et de mettre en conformité le code du sport avec les dispositions du code mondial antidopage. À ce titre, les déclarations d'usage thérapeutique, dites « DUT », devront être supprimées. C'est un sujet qui avait été longuement évoqué lors de l'examen d'un texte dont j'avais été le rapporteur. Par ailleurs et à titre complémentaire, l'Agence française de lutte contre le dopage aura des compétences élargies qui lui permettront notamment d'effectuer des contrôles sur les sportifs français lors de compétitions se déroulant à l'étranger. Ce n'était pas le cas jusqu'ici, ce qui a pu poser des problèmes.
Parallèlement à ce que je viens de détailler, il convient de remarquer que cette proposition de loi conforte la possibilité de diffuser de brefs extraits de compétitions pour les chaînes non titulaires des droits sportifs télévisuels.
Enfin, ce texte réaffirme les valeurs de respect et de civisme qui constituent les fondements de la pratique du sport, ainsi que la volonté d'adapter le code du sport aux nouveaux enjeux du contexte sportif que nous connaissons, parmi lesquels figurent la professionnalisation des joueurs, l'hypermédiatisation des compétitions, la politisation du sport et la valorisation de son impact.
J'ai bien entendu que certains auraient souhaité modifier tout ou partie du dispositif, mais qu'il me soit permis de rappeler qu'il s'agit d'une proposition de loi et non d'une loi-cadre sur le sport. J'en appelle donc à la sagesse de chacune et de chacun. Les mesures incluses dans la proposition de loi apporteront beaucoup, dès 2012, pour toutes les compétitions majeures dans lesquelles les Françaises et les Français sont engagés, notamment s'agissant des jeux Olympiques de Londres. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous sommes unanimes pour affirmer que le sport joue un rôle social et éducatif essentiel, qu'il est vecteur fondamental de transmission des valeurs républicaines, qu'il représente un formidable potentiel de croissance et d'emplois et qu'il peut dynamiser l'ensemble de nos territoires. Enfin, notre rapporteur et tous les intervenants l'ont rappelé, sublimant même le sujet : il est également une composante majeure du quotidien de la société française.
Or qu'avons-nous vécu ces cinq dernières années ? Les politiques sportives ont été malmenées. Les moyens sont insuffisants : 0,15 % du budget de l'État contre les 3 % promis au début du quinquennat par le Président de la République. Depuis le début de la législature, n'ont été adoptées que des lois contestables et contestées visant surtout à conforter le sport lié à l'argent, telles la loi encadrant – ou plutôt n'encadrant pas – la profession d'agent sportif, la loi légalisant les paris en ligne, la loi d'exception pour les stades de l'Euro 2016, et je ne m'attarderai pas sur l'application de la RGPP, qui a démantelé le réseau des CREPS et supprimé bon nombre d'animateurs sportifs. La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui ne fait pas exception. Si le monde du sport attend un texte fondateur, susceptible de promouvoir une politique sportive exigeante, ce n'est sûrement pas celui-ci ! Le Comité national olympique et sportif, le mouvement sportif dans son ensemble réclament une loi qui exprime une véritable ambition pour le sport français, un texte qui permette l'accès au sport à tous, sous toutes ses formes et avec équité sur l'ensemble des territoires. Mme Buffet l'a rappelé : certaines familles ne peuvent pas payer les 160 euros, coût d'une licence annuelle pour un enfant.
La responsabilité financière des politiques sportives est trop souvent renvoyée aux collectivités territoriales alors que nous savons bien que cette charge ne peut être assumée de la même façon selon que l'on a affaire à une grande ville riche ou à une petite commune située dans un département plus pauvre.
Oui, monsieur le ministre, trente-cinq à quarante millions de pratiquants, seize millions de licenciés, au moins deux millions et demi de bénévoles, 180 000 clubs et associations, 250 000 emplois méritent mieux qu'un texte d'affichage qui mêle rafistolage et déclarations d'intention, et qui ne règle rien. Les droits des sportifs sont peu ou pas traités, la prévention contre le dopage ne fait l'objet d'aucune proposition concrète, le développement du sport ne bénéficie d'aucun levier réel, la formation et la reconversion des sportifs de haut niveau sont à peine ébauchées, le trafic autour de la revente de billets n'est pas complètement réprimé et le fléau de l'addiction au jeu est seulement évoqué. De plus, la question du statut des agents sportifs n'est pas résolue, et les dysfonctionnements continueront allègrement : un agent pourra toujours être mandaté par un joueur et un entraîneur, le club continuera à rémunérer un agent défendant les intérêts d'un sportif et, pire encore, l'interdiction aux sociétés sportives de posséder des actions dans plusieurs clubs a été levée ! Là, nous ne sommes plus dans la progression, ni même dans la stagnation, mais dans la régression, et je crains que les valeurs du sport ne cèdent le pas devant la valeur de l'argent.
Le contenu de cette proposition de loi contredit son intitulé car l'éthique du sport et les droits des sportifs ne sont pas renforcés. La déception est grande, monsieur le ministre, pour les élus de l'opposition et, oserai-je le dire, pour certains élus de la majorité. Même si nos amis sénateurs ont voté ce texte à l'unanimité, ils espéraient encore un mieux lors de la lecture à l'Assemblée nationale. Nous avions l'occasion d'améliorer le climat qui entoure le sport pour tous comme le sport de haut niveau, mais l'accélération soudaine de la procédure, l'obsession du vote conforme, l'obstination surprenante avec laquelle tous nos amendements de bon sens destinés à renforcer le texte ont été repoussés, tout cela nous laisse un goût amer.
Vous-même, monsieur le ministre, avez avoué souhaiter des améliorations et des aménagements, notamment pour lutter davantage contre la corruption liée aux paris en ligne ou pour combattre plus efficacement le dopage. Osez donc, monsieur le ministre, accepter nos amendements. Il reste encore quelques heures pour adoucir notre amertume, celle du monde sportif… et peut-être la vôtre. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, si nous devons trouver un terrain d'entente en ces temps de campagnes électorales, vous conviendrez que la promotion et la défense de l'éthique sportive ont été et restent l'un de nos plus constants combats. J'ai bien entendu, sur les bancs de l'opposition, des critiques sur le fond, et il en a toujours été ainsi quand nous évoquions le sport mais, et je m'adresse à l'ancienne ministre des sports, nous nous sommes aussi rassemblés à d'autres moments, en particulier à propos de la lutte contre le dopage. Mais, madame Fourneyron, je n'aime pas votre condescendance quand il s'agit de parler du parcours de l'actuel ministre des sports. Il a été député, et nous sommes ici par le vote des citoyens et pas par nos antécédents. Je vous demande donc de respecter ce principe…
…et de ne pas ressasser à l'envi de ce qu'a été le parcours de tel ou tel de nos collègues.
Cela étant dit, cette proposition de loi est pour moi opportune. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, madame la présidente, vous l'avez rappelé : son économie générale est bonne ; les principes qu'elle met en application sont utiles à la préservation de l'intégrité des compétitions sportives à une époque où, comme le rappelle l'exposé des motifs sénatorial, les schémas traditionnels se trouvent incontestablement bousculés, tant par la professionnalisation que par l'hypermédiatisation.
Mais d'autres mesures doivent trouver place dans ce débat. Il s'agit de mesures de régulation et d'économie. Je souhaite en effet proposer des économies qui, à la fois nécessaires et indolores, viendront renforcer l'encadrement d'un domaine qui requiert toute l'attention de la représentation nationale. À cet égard, je m'étonne que l'un de mes deux amendements ait été déclaré irrecevable au titre de l'article 40, mais j'y reviendrai plus loin.
Par mon amendement à l'article 3, j'ai tenu à relever la grave disproportion entre le budget des clubs professionnels et les subventions qui leur sont versées par les collectivités territoriales. Mon avis est qu'un club prêt à salarier un joueur plusieurs centaines de milliers d'euros par mois n'a pas besoin de bénéficier d'argent venant de la collectivité, donc du contribuable. Les investissements nécessaires à la construction d'équipements dédiés au sport professionnel semblent également de moins en moins compatibles avec une bonne gestion de la collectivité. Je ne remets nullement en cause les sommes investies par les clubs pour rémunérer leurs joueurs. Si le modèle économique le permet, l'attractivité des clubs français au niveau international est indispensable non seulement à la qualité de nos championnats nationaux, mais encore et surtout à la pérennité de la filière sportive et donc des très nombreux emplois qui en dépendent. Mais, en temps de crise, la frontière doit être clairement tracée entre les dépenses assumées par le contribuable et celles qui sont prises en charge par le secteur privé. L'exemple du futur stade Jean Bouin, que vous avez d'ailleurs évoqué, monsieur le ministre, intégralement financé par la Ville de Paris, à hauteur de 200 millions d'euros, pour qu'un club professionnel de rugby puisse y jouer dix matchs par an, est à cet égard particulièrement édifiant, totalement décalé, parfaitement scandaleux, et assez emblématique des dérives que je souhaite signaler.
Je propose donc que les fédérations et les ligues puissent elles-mêmes réglementer le montant maximum des subventions versées par les collectivités en matière d'investissement et de fonctionnement.
J'aurais en outre souhaité, monsieur le ministre, poursuivre le débat que vous avez vous-même initié il y a quelques semaines quant à la lutte contre la triche et la corruption dans le sport. Cette initiative a été rejetée par le service de l'article 40 ; c'est là un point de procédure qui mérite éclaircissement. En effet, depuis la loi du 12 mai 2010, que j'ai rapportée devant cette assemblée, l'Autorité de régulation des jeux en ligne s'est imposée comme un modèle européen et mondial non seulement dans le domaine de la régulation des jeux et paris en ligne, mais encore dans le champ plus général de la préservation de l'intégrité des compétitions sportives à travers la surveillance efficace de leur déroulement. Pour cette raison, l'ARJEL dispose de toute la légitimité et de tout le savoir-faire pour englober et renforcer les responsabilités et les pouvoirs aujourd'hui dévolus à l'AFLD.
Un tel transfert de compétence constituerait également une mesure d'économie puisque l'intégration des services juridiques et des fonctions de support de l'AFLD dans l'ARJEL coûterait moins au budget de l'État que la coexistence de deux autorités dont l'une agit dans le champ de l'autre. Je suis donc très étonné que la commission ait déclaré mon amendement irrecevable. Je suis plus étonné encore quand je vois qu'un amendement qui représente un coût pour le budget de l'État est, lui, passé à travers les mailles du filet, celui qui vise à doter l'ARJEL de la personnalité morale. Certes, c'est une recommandation que j'avais faite avec ma collègue Aurélie Filippetti dans notre rapport d'évaluation de la loi du 12 mai 2010, mais une telle mesure constituerait incontestablement une charge supplémentaire pour l'État, ne serait-ce que parce qu'elle conduirait l'ARJEL à souscrire une assurance.
Cette décision d'irrecevabilité est dommageable puisque l'amendement en cause était un signe fort envoyé au mouvement sportif international au moment où l'Agence mondiale anti-dopage peine à imposer un modèle universel et cohérent en matière de contrôle et de recherche, et que l'AFLD elle-même se fourvoie dans l'application des dispositifs du plan ADAMS de localisation des sportifs de haut niveau.
De plus, il a été très clairement acté que la lutte contre les paris sportifs illégaux et la triche sportive devait prioritairement être appliquée au niveau national. Le rapprochement entre les deux autorités prendrait ainsi tout son sens.
Monsieur le Ministre, j'aurai grand plaisir à vous entendre répondre à ces interrogations.
Ces remarques étant faites, je conclus en soulignant que, conscient des délais qui contraignent l'examen de cette proposition de loi et surtout soucieux que ses dispositions soient rapidement mises en oeuvre, je ne m'opposerai évidemment pas à son adoption conforme par notre assemblée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est un drôle d'itinéraire en vérité qu'a emprunté cette proposition de loi de mon collègue et ami Yvon Collin, qui porte un titre beau comme l'antique : « pour renforcer l'éthique du sport et les droits des sportifs. »
Elle arrive dans notre assemblée à l'heure de la relève, avec une invraisemblable feuille de route : niet à tout amendement, on vote le texte conforme et silence dans les rangs !
Éthique du sport ? Éthique en matière de coproduction parlementaire selon la réforme constitutionnelle de 2008, monsieur le rapporteur ? Deux questions et des réponses qui ne peuvent être apportées dans un débat tronqué.
En fait, il semble que votre majorité souhaite, dans la dernière ligne droite, envoyer un message au mouvement sportif qui aura été le parent pauvre de ces dix dernières années : entre 2002 et 2007, tout pour le sport professionnel ; entre 2007 et 2012, cinq ministres des sports se sont succédés pour un résultat de misère et de la communication.
Alors, d'accord pour parler des valeurs du sport, mais encore faut-il préciser lesquelles. Je vais le faire pour vous.
Les valeurs marchandes du sport comme elles furent portées au pinacle entre 2002 et 2012 ? Pour moi, c'est non.
Les valeurs du sport ramenées à l'autorisation pour les clubs de payer les commissions aux agents de leurs joueurs salariés, ouvrant grandes les portes des prétoires ? C'est non.
Les valeurs d'éthique comme quand le Président de la République recevait Lance Armstrong à l'Élysée le jour même de la présentation du Tour de France dont les responsables venaient de déclarer la guerre au dopage ? C'est toujours non.
Pourtant, monsieur le ministre, à votre entrée en fonctions, vous m'aviez agréablement surpris en suggérant de renverser quelques tables de la loi : le scandale de la rétribution des agents ; les outils à l'eau de rose pour éradiquer les tricheries en matière de dopage et les périls sur les paris sportifs ; la gouvernance du sport français ; et le problème posé au budget du sport par le contrat du Stade de France.
J'avais même eu l'impression que la ponction sur le Centre national pour le développement du sport pour les stades de l'Euronations 2016 de football, ainsi que la sinistre RGPP altérant les capacités des services déconcentrés, ne vous faisaient pas monter aux cimaises de votre ministère.
Alors je pensais ingénument – je suis ingénu, bien sûr – que cette proposition de loi Collin était pour vous le véhicule idéal pour renverser cette fois la tendance du désamour entre le Gouvernement et le mouvement sportif, dont voici quelques exemples.
Concernant les agents sportifs, je voudrais rafraîchir la mémoire de nos collègues de la majorité. Nous avons travaillé, il y a cinq ans, dans le cadre d'une mission d'information sur les conditions de transfert des joueurs professionnels et les activités des agents.
La plus importante des vingt propositions était l'interdiction formelle de la rémunération des agents par les clubs. Elle a été refusée par la majorité UMP. Puis, contre toute logique, cette même majorité a adopté, sous cette législature, la proposition de loi déposée par le sénateur Humbert, ouvrant une fois de plus en grand les possibilités de multiplier les malversations.
Vous avez dit éthique ? Pas vous, monsieur le ministre, puisque vous avez dit publiquement les 27 octobre et 11 janvier que cette disposition était inadmissible. Pourquoi n'avoir pas réglé ce problème dans cette proposition de loi ? Pour voter conforme, certes, mais pas conforme à l'éthique en tout cas !
Quant au salary cap, ce plafond salarial applicable aux clubs, il relevait d'une obligation dans la rédaction initiale du texte du sénateur Yvon Collin. L'ancienne majorité du Sénat en a fait une simple possibilité soumise à l'appréciation des fédérations. Autrement dit, vous avez choisi délibérément de ne pas lutter contre les extravagances financières dans le football français, que même M. Lamour, récemment converti, avait condamnées.
Cette PPL pouvait accrocher la France au wagon Platini et aux règles de fair play financier vers lesquelles s'oriente l'UEFA. Manqué et dommage !
Concernant les jeux en ligne, le président de l'ARJEL, M. Vilotte, a remis en mars dernier un rapport à la ministre d'alors, Chantal Jouanno, prônant la pénalisation de la corruption sportive et la création du système de surveillance sous forme d'un groupement d'intérêt public. Le principe en avait été validé par le ministère des sports et celui du budget sans que soit réglée la question de son financement qui devrait, selon le patron de l'ARJEL, être en partie assumé par le mouvement sportif.
Aujourd'hui, monsieur le ministre, vous vous seriez dit prêt à constituer ce GIP dans les plus brefs délais. La question de l'harmonisation des règles disciplinaires devrait, quant à elle, connaître une amorce de réponse début février avec la publication par le Comité international olympique d'un ensemble de recommandations à ses fédérations affiliées.
Agents, salary cap, GIP sur les jeux en ligne : je souhaite que vous éclairiez la représentation nationale sur ces sujets d'importance.
Ma conclusion sera simple, lapidaire, voire cruelle : ce soir, je n'aimerais être à la place ni de M. le ministre, ni de M. le rapporteur, ni des députés de la majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis très heureux de participer à ce débat puisqu'il me touche à plusieurs titres, comme vous tous.
Nous traitons là d'un sujet qui parle encore à l'universel et qui est capable d'allumer des étoiles dans les yeux des enfants, des jeunes et des moins jeunes du monde entier, à tout instant. Peu de sujets ont ce pouvoir.
Tout d'abord, je voudrais saluer le grand sportif qui est devant nous. Monsieur le ministre, vous avez été de ceux qui m'ont donné des étoiles, même s'il y en a quelques autres dans cette assemblée.
Mais pas dans la même discipline, mon cher ami ! Il aurait aimé, au demeurant, comme moi.
La France est un grand pays sportif. Les Français ne sont pas uniquement des sportifs en fauteuil, contrairement à ce que d'aucuns prétendent. La France aime le sport et ce texte est le bienvenu en cette année olympique qui a marqué les esprits : les jeux qui auraient dû se dérouler à Paris vont avoir lieu à Londres, mais il n'empêche que nombre de nos concitoyens pensent déjà à cet événement.
En plus de ces jeux, nous retrouverons aussi les grandes compétitions habituelles : le tournoi de Roland Garros dont le terrain doit être étendu ; le Tour de France qui, avec douze millions de spectateurs, est l'épreuve la plus suivie dans le monde après les jeux olympiques et la coupe du monde de football.
Cela étant posé, je suis touché parce que j'ai la chance d'être papa de garçons et de filles qui font du sport, dont deux d'entre eux ont commencé une pratique dite de haut niveau. Dans le sud-ouest, mon ami, mon frère, Henri Nayrou ne me démentira pas, il s'agit bien sûr de rugby mais c'est quand même du sport de haut niveau.
Une chose touche notamment mon fils aîné, c'est quand on lui demande s'il se dope ou s'il a pris des substances pour acquérir les muscles qu'il a ou pour courir comme il le fait. C'est un garçon sympa…
…mais je vois à chaque fois la révolte dans ses yeux.
Monsieur le ministre, vous avez eu raison de bien mettre en lumière la déontologie et la prévention pour que tous nos concitoyens prennent conscience que, effectivement, le sport de haut niveau est aussi et avant tout une question d'honnêteté, d'intégrité vis-à-vis des autres et de respect de soi-même.
Nous sommes aussi un pays – et il n'y en a pas beaucoup – qui n'hésite pas à dénoncer des compétitions nationales, comme nous l'avons fait dans le cas du Tour de France…
…où nous avons mis certaines grandes étapes sur le devant de la scène. Dans certains domaines nous avons peut-être des leçons à recevoir mais pas forcément dans celui-là.
Pendant la minute qui me reste, je voudrais insister sur un point : il faut certainement améliorer les moyens de former les jeunes sportifs de haut niveau. Nous avons fait d'énormes progrès mais si nous voulons arriver à la place de l'Espagne, un pays de taille comparable au nôtre, il faut des salles, des lieux spécialisés pour permettre de bien préparer ces sportifs.
Il faut donner à ces jeunes la capacité de penser tranquillement à leur reconversion, quels que soient les sports. Il faut peut-être aussi mettre plus en avant les sports féminins – quelqu'un l'a dit avant moi – mais vous ne pouvez pas le faire seul sans les médias, les télévisions.
Nous gagnerions à montrer que le sport est universel, ne serait-ce que parce que les hommes et les femmes en font, mais pas forcément toujours ensemble.
C'est un domaine sur lequel je ne vais pas m'étendre mais qui est porteur.
Enfin, n'oublions pas que la France est un pays de sport de masse, que tous les jeunes Français aspirent à faire du sport et qu'il leur faut des modèles les plus irréprochables possible. S'ils ne sont pas champions du monde à tous les coups, qu'ils soient peut-être un peu plus décents pour certains en matière de mode de vie et surtout de gains perçus. Profitons de la période de crise pour leur faire comprendre que même si leur carrière est courte, ils ne doivent pas être indécents.
Tout ce qui fait progresser le sport fait progresser l'homme. Ce texte a le mérite de poser le problème. Monsieur le ministre, le grand sportif que vous êtes et que vous resterez toujours, s'attachera à améliorer la suite. Je vous remercie. (Applaudissements sur divers bancs)
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le sport occupe une place très importante dans notre société comme en attestent les chiffres qui ont été rappelés : 35 millions de pratiquants, 16 millions de licenciés, 2 millions de bénévoles.
Les intérêts et même les vertus du sport sont particulièrement nombreux. Ils reposent, nous le savons tous, sur des valeurs particulièrement fortes et utiles à l'individu et à la société : le goût de l'effort, le dépassement de soi, le respect d'autrui et des règles.
C'est sur ces bases que, peu à peu, s'est construite une légende du sport incarnée par les exploits réalisés par des femmes et des hommes qui sont, toutes disciplines confondues, des références, des modèles et des exemples.
C'est pour cette raison que le sport est une source inégalable d'émotions et donc un puissant vecteur de cohésion sociale. Les exploits de nos sportifs, la popularité de certaines manifestations comme le Tour de France cycliste démontrent la valeur, la puissance symbolique du sport et sa capacité à rassembler la nation tout entière autour de ces valeurs.
Mais nous savons aussi que le sport, comme Janus, a deux faces. À côté de l'idéal sportif et peut-être du fait même de cet idéal, des pratiques douteuses et parfois terriblement dangereuses sont apparues au fil des années. La tricherie, la corruption, le dopage et la violence sont autant de maux qu'il faut combattre avec réalisme et fermeté pour que le sport garde ses lettres de noblesse et qu'il demeure une activité empreinte de l'idéal qui le définit si bien et qui lui permet de remplir pleinement sa fonction humaine, sociale et politique.
Dans cette perspective, la proposition de loi déposée au mois d'avril 2011 par le groupe du Rassemblement démocratique et social européen du Sénat visant à renforcer l'éthique du sport et les droits des sportifs mérite, monsieur le ministre, toute notre attention et tout notre soutien. Ses quatre axes principaux sont en effet bien adaptés à la problématique actuelle du sport et constituent des réponses appropriées aux enjeux du moment. Ainsi l'obligation faite aux fédérations sportives d'établir une charte éthique permet-elle de réaffirmer la place des valeurs dans le sport tout en laissant aux fédérations le soin et la liberté de définir elles-mêmes les principes auxquelles elles sont très attachées. C'est une excellente disposition, car il aurait effectivement été excessif que le législateur se substitue aux mouvements sportifs sur ce point précis.
Dans le même esprit, la moralisation du sport professionnel est une nécessité que personne ne peut nier même s'il convient sur ce point, comme l'a rappelé M. le ministre, de continuer à travailler dans le cadre de l'Europe. Toutefois, d'ores et déjà, la limitation des rémunérations des agents sportifs, la création d'une infraction relative à la revente illicite de billets, la prévention des conflits d'intérêt, la lutte contre la corruption sportive liée aux manifestations qui font l'objet de paris sont autant de bonnes mesures et d'avancées significatives qui étaient attendues depuis longtemps par le mouvement sportif et par l'opinion publique.
La lutte contre le dopage est un autre volet important de ce texte. Sur ce sujet, il faut faire preuve de réalisme et de fermeté.
Il faut faire preuve de réalisme, car il serait à la fois très injuste et très inefficace, monsieur le ministre, de limiter la lutte contre le dopage à quelques disciplines qui font parfois figure de victimes expiatoires dans ce nécessaire combat, qui concerne à la fois l'éthique sportive et la santé publique, ce que ne semble malheureusement pas avoir compris M. Noah.
Quant à la fermeté, ce texte n'en manque pas. Il convient effectivement que le code du sport soit mis en conformité avec les principes du code mondial antidopage, comme il convient aussi de renforcer les pouvoirs de l'Agence française de lutte contre le dopage. Certes, tout n'est pas dans ce texte, et il eût notamment été opportun de prévoir un dispositif spécial pour les juges et les arbitres, qui sont, nul ne le conteste, au coeur même de l'éthique sportive.
Cela dit, la proposition qui nous est présentée aujourd'hui a déjà fait l'objet, le ministre et le rapporteur l'ont rappelé, d'un vote unanime de la Haute assemblée. Surtout, le monde sportif, dans ses différentes composantes, est tout à fait favorable à ce texte, tout simplement parce qu'il répond à un objectif très ambitieux et qu'il édicte des règles dont le bien-fondé, la justesse et la précision ne sont pas sérieusement contestables. C'est la raison essentielle pour laquelle notre majorité, monsieur le ministre, soutient ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord, en tant que président de l'Amicale parlementaire du handball, au nom de tous mes collègues membres de cette amicale – je pourrais citer M. Rochebloine mais ils sont nombreux sur tous les bancs – de féliciter l'équipe des Experts, qui vient de l'emporter sur la Russie par le score de 28 à 24. (Applaudissements sur de nombreux bancs.)
Cette remarque ne sera pas décomptée de votre temps de parole. (Sourires.)
Valérie Fourneyron, Marie-George Buffet et beaucoup d'autres collègues l'ont dit avant moi : ce texte sur l'éthique du sport manque d'ambition. On nous impose pourtant de le voter conforme.
Nous aurions souhaité, et nous le montrerons tout à l'heure en défendant nos amendements, aller beaucoup plus loin en matière de santé publique, à propos des comportements addictifs provoqué par les paris en ligne, sur le fair-play financier, sur la notion de « salary cap » ou sur la formation des jeunes.
Aujourd'hui, ce texte comporte des incitations, il offre des possibilités, mais il ne prévoit aucune obligation. Il n'a donc pas d'ambition, et il n'y a pas d'impulsion des pouvoirs publics. Nous aurions souhaité aller plus loin sur l'arbitrage, sur la lutte contre le dopage et, bien évidemment, sur tout ce qui concerne les retransmissions sportives à la télévision, avec, notamment, l'élargissement du décret « télévision sans frontières ». Tout cela nous sera apparemment interdit.
Nous aurions souhaité un texte qui reprenne les valeurs fondamentales du sport et qui s'appuie sur elles. C'était le cas de la loi Avice, adoptée en 1984, dont l'article premier rappelait fort justement les enjeux des activités physiques et sportives : la santé, l'éducation et la vie sociale comme outils de cohésion. Nous aurions donc souhaité un texte qui s'adresse très largement aux 35 millions de pratiquants et aux 16 millions de licenciés, et pas un texte a minima.
Cette proposition de loi est examinée à la fin de la législature. Le bilan de celle-ci, si l'on considère les textes adoptés par la majorité, est bien maigre. Deux mesures courageuses ont été votées : Valérie Fourneyron a évoqué tout à l'heure la retraite des sportifs de haut niveau ; j'y ajouterai, pour ma part, la suppression du droit à l'image collectif. C'était une niche fiscale, et nous avons été nombreux à nous mobiliser pour sa suppression,…
…même si François Rochebloine était très réticent.
Surtout, au cours de ces cinq ans, ce sont essentiellement des textes d'opportunité, des textes de circonstance, qui ont été adoptés. Ils avaient pour finalité le renforcement du sport business, pas le développement de la pratique sportive pour le plus grand nombre. De ce point de vue, nous attendons toujours les signes tangibles d'une volonté politique.
Prenons l'exemple de la loi de 2010 sur l'encadrement de la profession des agents sportifs. Elle ne s'attaque pas aux pratiques douteuses, par exemple à l'opacité des transactions en matière de transferts. Elle a, au contraire, encouragé les dérives et la confusion en permettant la rémunération des agents sportifs par les clubs.
En 2010 toujours a été adoptée la loi sur l'ouverture à la concurrence des jeux d'argent en ligne. Son titre suffit à en résumer la philosophie !
En 2011, avec la loi sur l'organisation des championnats d'Europe de football de 2016, c'est, nous le savons tous, un texte d'opportunité qui a été adopté. Il s'agit d'un cadeau fait aux majors du BTP, taillé sur mesure pour satisfaire quelques intérêts privés. D'ailleurs, nous en avons vu la traduction avec ce qui s'est passé à Nancy il y a quelques semaines : cela a tourné au fiasco.
Même la loi sur la lutte contre le trafic des produits dopants d'avril 2008, autre texte de circonstance, voté à la veille du tour de France, pour permettre la saisie par les forces de l'ordre des produits dopants, notamment dans les véhicules suiveurs, ne comportait pas de volet fort concernant la prévention du dopage chez les jeunes sportifs. Il ne comportait pas non plus de garanties sur les moyens humains et financiers de l'Agence française pour la lutte contre le dopage.
Je tenais à dresser ce bilan de la législature.
Citons, pour terminer, les propos qu'a tenus M. le ministre devant la commission des affaires culturelles au moment de l'examen du projet de loi de finances pour 2012. David Douillet disait alors que chacun devait faire avec ce qu'il avait mais il précisait que « dès que ce sera possible, ce ministère aura un budget à la mesure de nos ambitions ». Il ajoutait : « si l'État abandonnait vraiment le sport, je ne serais pas ministre des sports ». Et pourtant ! Depuis cinq ans, avec un budget qui représente aujourd'hui 0,15 % du budget de la nation, soit l'un des plus faibles, avec la RGPP, dont on a parlé tout à l'heure –, avec la baisse des crédits alloués au sport pour tous, avec le CNDS, dont on a également parlé tout à l'heure, nous sommes loin, aujourd'hui, des ambitions de départ.
Tout à l'heure, Valérie Fourneyron a rendu hommage à plusieurs reprises au parcours sportif du ministre des sports. De ce point de vue, les attaques de Jean-François Lamour sont assez injustes, mais ce brillant parcours sportif ne changera rien au contenu d'une proposition de loi que nous n'avons pas la possibilité de modifier ni d'améliorer pour en faire un texte à la hauteur de nos ambitions.
Monsieur le ministre, si nos amendements ne sont pas adoptés, nous ne pourrons pas voter cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion de la proposition de loi sur l'éthique du sport et le droit des sportifs.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures dix.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron