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Intervention de Valérie Fourneyron

Réunion du 18 janvier 2012 à 15h00
Éthique du sport et droits des sportifs — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Fourneyron :

Malgré cette communication, l'amendement n'a pas été voté par votre majorité mercredi en commission. Toujours ce « foutu » vote conforme !

Nous vous invitons donc aujourd'hui à saisir la séance de rattrapage en soutenant nos amendements. Vous mettrez alors vos actes en conformité avec vos déclarations, et l'éthique du sport ne s'en portera que mieux.

Autre sujet abordé par ce texte et sur lequel vous vous sentez obligés de revenir : les paris en ligne. C'était en mai 2010, il y a moins de deux ans, et nous vous avions annoncé les effets pervers de cette loi. Revenir sur ce sujet est d'abord un aveu : vous avez été trop vite. C'est vrai qu'il y avait la Coupe du Monde 2010 et que certains piaffaient d'impatience !

Si la présente loi crée le délit de fraude sportive, mesure nécessaire, si elle traite des conflits d'intérêts, bien que de façon encore trop ambiguë, elle ne traite pas, en revanche, du problème de santé publique qu'est l'addiction aux jeux.

Heureusement, monsieur le ministre, nous avons pu, certes contre l'avis du rapporteur, pallier ce manque lors de l'étude du texte en commission, en prévoyant des dispositifs visant à réduire les risques d'addiction aux jeux.

Sur ce registre, nous avons pu nous apercevoir que M. le rapporteur avait une opinion bien tranchée. Je me félicite que cela n'ait pas été celle de la commission mercredi dernier ; je me félicite que ce ne soit pas celle du sénateur UMP François Trucy dans son rapport sur les jeux en ligne remis le 12 octobre 2011 ; je me félicite aussi que, même s'il s'illustre par son inaction, ce ne soit pas l'avis du Gouvernement.

Vous nous avez dit en commission, monsieur le rapporteur : « l'étude de prévalence sur le jeu pathologique, conduite par l'Observatoire français des drogues et toxicomanies et l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé, a évalué à 1,3 % la population des joueurs à risque, dont 0,4 % seulement présentant des prévalences de jeu excessives. L'opposition nous reproche souvent de légiférer à partir d'un événement : je ne suis pas certain que nous devions adopter un amendement pour quelques joueurs présentant un comportement déviant. »

Ces « quelques » joueurs sont aujourd'hui, dans le rapport de l'INPES, au nombre de 200 000 et ce ne sont pas des joueurs occasionnels. Ce sont des joueurs addictifs, qui prennent des risques au plan personnel. Il est donc regrettable que nous n'ayons pas pu aller plus loin sur la question de l'addiction.

Autre citation sur le sujet : « L'addiction est un phénomène qui, bien que largement étudié lorsqu'il s'agit de consommation de substances, demeure très peu connu lorsqu'il s'agit de pratiques comme le jeu. Difficile en effet d'établir une distinction scientifique entre le joueur occasionnel pour qui le jeu est un divertissement, le joueur compulsif qui peut se ruiner et le professionnel qui en fait son activité principale. Pour autant, cette question est aujourd'hui devenue un enjeu central de santé publique. Le jeu en ligne est d'autant plus dangereux qu'il possède certaines caractéristiques qui contribuent à augmenter le risque addictif. Il permet, en effet, des mises d'un faible montant tout en étant particulièrement facile d'accès. Il autorise, en outre, des successions rapides de phases courtes de jeu et rend possible la simulation de paris. »

Le texte que je viens de lire est l'exposé des motifs de l'amendement adopté en commission, et il dresse un constat que nous partageons tous, puisqu'il reprend, mot pour mot, une proposition de loi signée, il y a un an, par plus de soixante députés UMP. Non seulement il ne faut pas traiter le sujet avec suffisance, non seulement il ne faut pas minimiser ce phénomène en le réduisant à « quelques joueurs », mais il s'agit de légiférer et de légiférer rapidement face à ce fléau qui menace, ce dont tout le monde semble prendre conscience aujourd'hui. Et je me permets de rappeler à cette occasion l'excellent travail de notre collègue Michèle Delaunay en citant les propos qu'elle tenait dès 2010 : « Au moment où notre ministère de la santé prend conscience des effets délétères du risque addictif, celui-ci ne doit pas être oublié. Nous ne pouvons rester indifférents au fait qu'il s'agit d'une maladie nouvelle et évitable. Cette maladie est nouvelle parce qu'elle est une maladie sociétale que l'évolution de la société a créée et que, de ce fait, les politiques ont une responsabilité particulière non seulement dans les soins à y apporter mais aussi dans sa prévention. » Elle poursuivait : « Nos amendements ont trait à la première promotion commerciale, en particulier à ce très dangereux « premier pari gratuit » qui a pour effet, pour une personne qui jusqu'alors ne s'intéressait pas au jeu, de pouvoir miser et peut-être gagner. S'il gagne, il met bien souvent le doigt dans l'engrenage, recommence ; s'il perd ensuite, il voudra refaire son gain. C'est le processus délétère de l'addiction au jeu, d'autant plus facilement enclenché que la personne n'a pas d'activité ou que sa situation financière et sociale est précaire et qu'elle espère un gain quelconque. » Vous êtes le seul, monsieur le rapporteur, à mésestimer le risque de l'addiction.

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