Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous sommes unanimes pour affirmer que le sport joue un rôle social et éducatif essentiel, qu'il est vecteur fondamental de transmission des valeurs républicaines, qu'il représente un formidable potentiel de croissance et d'emplois et qu'il peut dynamiser l'ensemble de nos territoires. Enfin, notre rapporteur et tous les intervenants l'ont rappelé, sublimant même le sujet : il est également une composante majeure du quotidien de la société française.
Or qu'avons-nous vécu ces cinq dernières années ? Les politiques sportives ont été malmenées. Les moyens sont insuffisants : 0,15 % du budget de l'État contre les 3 % promis au début du quinquennat par le Président de la République. Depuis le début de la législature, n'ont été adoptées que des lois contestables et contestées visant surtout à conforter le sport lié à l'argent, telles la loi encadrant – ou plutôt n'encadrant pas – la profession d'agent sportif, la loi légalisant les paris en ligne, la loi d'exception pour les stades de l'Euro 2016, et je ne m'attarderai pas sur l'application de la RGPP, qui a démantelé le réseau des CREPS et supprimé bon nombre d'animateurs sportifs. La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui ne fait pas exception. Si le monde du sport attend un texte fondateur, susceptible de promouvoir une politique sportive exigeante, ce n'est sûrement pas celui-ci ! Le Comité national olympique et sportif, le mouvement sportif dans son ensemble réclament une loi qui exprime une véritable ambition pour le sport français, un texte qui permette l'accès au sport à tous, sous toutes ses formes et avec équité sur l'ensemble des territoires. Mme Buffet l'a rappelé : certaines familles ne peuvent pas payer les 160 euros, coût d'une licence annuelle pour un enfant.
La responsabilité financière des politiques sportives est trop souvent renvoyée aux collectivités territoriales alors que nous savons bien que cette charge ne peut être assumée de la même façon selon que l'on a affaire à une grande ville riche ou à une petite commune située dans un département plus pauvre.
Oui, monsieur le ministre, trente-cinq à quarante millions de pratiquants, seize millions de licenciés, au moins deux millions et demi de bénévoles, 180 000 clubs et associations, 250 000 emplois méritent mieux qu'un texte d'affichage qui mêle rafistolage et déclarations d'intention, et qui ne règle rien. Les droits des sportifs sont peu ou pas traités, la prévention contre le dopage ne fait l'objet d'aucune proposition concrète, le développement du sport ne bénéficie d'aucun levier réel, la formation et la reconversion des sportifs de haut niveau sont à peine ébauchées, le trafic autour de la revente de billets n'est pas complètement réprimé et le fléau de l'addiction au jeu est seulement évoqué. De plus, la question du statut des agents sportifs n'est pas résolue, et les dysfonctionnements continueront allègrement : un agent pourra toujours être mandaté par un joueur et un entraîneur, le club continuera à rémunérer un agent défendant les intérêts d'un sportif et, pire encore, l'interdiction aux sociétés sportives de posséder des actions dans plusieurs clubs a été levée ! Là, nous ne sommes plus dans la progression, ni même dans la stagnation, mais dans la régression, et je crains que les valeurs du sport ne cèdent le pas devant la valeur de l'argent.
Le contenu de cette proposition de loi contredit son intitulé car l'éthique du sport et les droits des sportifs ne sont pas renforcés. La déception est grande, monsieur le ministre, pour les élus de l'opposition et, oserai-je le dire, pour certains élus de la majorité. Même si nos amis sénateurs ont voté ce texte à l'unanimité, ils espéraient encore un mieux lors de la lecture à l'Assemblée nationale. Nous avions l'occasion d'améliorer le climat qui entoure le sport pour tous comme le sport de haut niveau, mais l'accélération soudaine de la procédure, l'obsession du vote conforme, l'obstination surprenante avec laquelle tous nos amendements de bon sens destinés à renforcer le texte ont été repoussés, tout cela nous laisse un goût amer.
Vous-même, monsieur le ministre, avez avoué souhaiter des améliorations et des aménagements, notamment pour lutter davantage contre la corruption liée aux paris en ligne ou pour combattre plus efficacement le dopage. Osez donc, monsieur le ministre, accepter nos amendements. Il reste encore quelques heures pour adoucir notre amertume, celle du monde sportif… et peut-être la vôtre. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)