La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
La parole est à Mme George Pau-Langevin, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le ministre de la justice. Bien des problèmes se posent aujourd'hui dans le fonctionnement de notre justice. Nous aurions ainsi pu vous interroger sur votre budget pour 2012, que certaines organisations syndicales jugent insincère ; nous aurions pu vous interroger sur la nomination proposée de votre directeur de cabinet au poste éminemment sensible de procureur de la République à Paris, ou encore sur la convocation qu'a reçue une habitante du 20e arrondissement, pour une audience en 2014 à propos d'un litige sur l'attribution d'une allocation de handicapé !
Mais ce sur quoi il nous semble important aujourd'hui d'entendre vos explications, c'est cette taxe de 35 euros, entrée en vigueur récemment, pour toute procédure judiciaire engagée, mesure que notre groupe a combattue lors de la discussion du budget rectificatif en juin dernier. Désormais donc, la femme battue qui se résout à divorcer, le locataire qui conteste son relevé de charges, le salarié qui réclame des bulletins de paie ou s'élève contre un licenciement abusif se verront donc taxés de 35 euros.
Les citoyens ont déjà le plus grand mal à se défendre, faute de moyens – ainsi la plupart des jugements d'expulsion sont prononcés en l'absence des locataires – et vous renchérissez encore l'accès à la justice ! Cette taxe nouvelle ne sera pas due pour l'aide juridictionnelle mais, quand on gagne mille euros par mois et que l'on ne peut prétendre à cette aide, on a pourtant du mal à boucler son budget.
Cette taxe est censée financer la présence de l'avocat en garde à vue. Mais la garde à vue est une prérogative de la puissance publique : pourquoi la faire payer par les classes populaires ? Avec mon collègue Philippe Gosselin, nous avions proposé d'autres pistes.
Monsieur le ministre, l'accès à la justice est garanti par les textes fondateurs de notre démocratie. Allez-vous renoncer à une réforme qui contribue à déposséder de ce droit essentiel les citoyens de notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Madame la députée, vous me permettrez de répondre à toutes vos questions.
La première concernait le budget du ministère de la justice. C'est le budget prioritaire de ce quinquennat. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Il aura augmenté de 20 % en cinq ans, et le ministère de la justice est le seul ministère qui a été autorisé à créer chaque année des emplois supplémentaires, soit au total plus de cinq mille postes en cinq ans. Telle est notre idée de la justice, madame Pau-Langevin. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Votre seconde question portait sur la nomination du directeur de cabinet du garde des sceaux au poste de procureur général de Paris. Mais qu'est-ce qui vous dérange, au fond ? Est-ce qu'un magistrat à la compétence reconnue et à la carrière exemplaire – une carrière menée au deuxième parquet de France, le parquet de Bobigny – puisse prétendre aujourd'hui à de hautes fonctions ? Non, ce qui vous dérange, c'est qu'il ait exercé d'éminentes fonctions à la Chancellerie !
Respectez donc l'État et ses serviteurs ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) La nomination du directeur de cabinet du garde des sceaux est légitime. Elle a été proposée au Conseil supérieur de la magistrature qui, depuis la réforme constitutionnelle de 2008, est obligatoirement saisi pour toutes les nominations de procureurs généraux. Nous renforçons les contre-pouvoirs ; respectez-les ! (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous me parlez enfin des 35 euros de frais de justice qui seront désormais demandés aux justiciables. Sachez, madame Pau-Langevin, que l'accès de tous les justiciables à la justice est notre priorité. C'est pour cela que nous avons renforcé l'aide juridictionnelle. Nous demandons simplement une quote-part de 35 euros.
La parole est à M. Claude Goasguen, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre d'État, ce matin, en Égypte, un jeune otage franco-israélien, Gilad Shalit, a été libéré (Applaudissements sur tous les bancs),après cinq années de détention au cours desquelles il n'a pu ni bénéficier des protections accordées par la convention de Genève, ni recevoir le moindre courrier ou la moindre visite.
C'est avec émotion et soulagement que nous avons appris sa libération. Nous sommes satisfaits, monsieur le ministre, mais sans joie, car des centaines de familles israéliennes pleurent aujourd'hui la libération des assassins de leurs enfants. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes SRC et GDR.)
Je voudrais saluer l'effort permanent que la France a consenti, mais aussi celui de certains parlementaires qui n'ont pas hésité à afficher leur soutien dans leur mairie. Je pense à Jean-François Copé, qui nous a beaucoup aidés (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), à Éric Raoult (Même mouvement), à Jacques Kossowski (Même mouvement), à Dominique Tian (Même mouvement), à Rudy Salles (Même mouvement) – et à Patrick Bloche pour vous faire plaisir – qui ont témoigné officiellement leur soutien au jeune otage.
Je voudrais dire aussi à tous ceux qui font partie du groupe d'amitié entre la France et Israël que nous avons beaucoup oeuvré malgré les difficultés.
Monsieur le ministre d'État, comment se sont déroulées les ultimes négociations ? Quel a été le rôle de la France et celui du Président de la République (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) dans cet heureux dénouement ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes.
Monsieur le député, au moment où je vous parle, Gilad Shalit est libre. Il est en Israël où il rejoindra très bientôt sa famille, son père Noam et sa mère Aviva.
Je les ai rencontrés tous les deux lors de ma dernière visite en Israël, sous la tente qu'ils avaient dressée dans les rues de Jérusalem. Minés par le chagrin de la séparation, il n'en demeuraient pas moins totalement déterminés à obtenir la libération de leur fils.
La France s'est pleinement engagée dans ce combat. Il n'est pas une seule rencontre, avec les autorités palestiniennes ou les autorités israéliennes, à l'occasion de laquelle le Président de la République n'ait plaidé pour cette libération. D'ailleurs, le président Shimon Pérès l'a remercié par téléphone hier, à l'annonce de la libération.
Je voudrais saluer l'efficacité de la médiation égyptienne qui a permis d'aboutir à ce résultat, mais aussi le courage du Premier ministre Benyamin Netanyahou, qui a engagé et réussi cette négociation avec le Hamas, avec le soutien d'une large partie de l'opinion publique israélienne.
Je voudrais enfin souhaiter que cette libération soit le prélude à d'autres avancées, à commencer par l'allègement et la levée du blocus qui pénalise injustement la population de Gaza (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC),la réconciliation inter-palestinienne qui est une des conditions majeures de la résolution du conflit, enfin la reprise des négociations entre Israéliens et Palestiniens sans condition préalable. C'est la seule manière de garantir au peuple juif et au peuple palestinien la vie en paix et en sécurité dans deux États internationalement reconnus. Vous savez que c'est la position constante de la France.
Je voudrais enfin former le voeu que plus jamais un jeune homme de vingt ans, pris en otage au mépris de toutes les règles du droit des gens, ne passe les cinq plus belles années de sa vie en prison. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Plusieurs députés SRC et GDR. Et Salah Hamouri ?
La parole est à M. Jacques Desallangre, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Dexia est en train de mourir et les contribuables, notamment locaux, vont payer l'enterrement.
Il y a trois ans, Dexia était asphyxiée, victime de sa folie spéculative : rachat d'un rehausseur de crédits toxiques américain avec 5 milliards d'euros de pertes à la clé ; alliance imprudente avec Sanpaolo, achat d'une banque espagnole, achat d'obligations à long terme avec des marges copieuses mais un endettement pernicieux du fait de l'achat de produits complexes et de dettes grecques, italiennes, islandaises, etc.
Pour financer le tout, Dexia a placé auprès des collectivités locales des produits toxiques : selon la Cour des comptes, 30 à 35 milliards d'euros de dettes des collectivités locales, sur un total de 160 milliards, sont aujourd'hui toxiques.
L'État a volé au secours de Dexia pour 5 milliards d'euros, alors que M. Richard, parti, cumule une retraite de 600 000 euros par an avec un salaire annuel de 400 000 euros en tant que président du conseil de surveillance. Chaque jour, la banque empruntait des sommes colossales pour financer le portefeuille obligataire de Dexia, équivalant à la dette grecque, soit 260 milliards d'euros.
Ce qui est encore rentable est aujourd'hui à vendre, le reste sera liquidé. L'État participera à la garantie de 90 des 180 milliards d'euros d'actifs pourris casés dans une bad bank, et le contribuable paiera. L'étendue de la casse n'est pas connue mais c'est bien du démantèlement d'une banque en perdition qu'il s'agit. Au secours la Caisse des dépôts et la Banque postale !
J'interrogeais en 2008 votre prédécesseur pour critiquer ces prêts subordonnés qui empêchaient l'État d'intervenir afin de mettre un terme aux spéculations folles et à des bonus qui représentaient jusqu'à deux années de smic.
Vous vantiez le système, mais la Cour des comptes affirme que les effets de votre plan de soutien sont susceptibles d'annuler complètement le résultat budgétaire en 2011.
Quand l'État mettra-t-il enfin les banques sous tutelle ? Quand créerez-vous un pôle financier public ?
Des paroles, nous en avons entendu, mais les actes, nous les attendons. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur quelques bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Il est paradoxal de conclure ainsi votre question après avoir, hier, voté contre le projet de loi qui vise visait justement à organiser une restructuration ordonnée autour d'un pôle public, afin d'éviter une chute des charges dans l'activité de prêt aux collectivités locales, dont nous savons que c'est l'un des soutiens essentiels à l'investissement, à l'activité économique, à la création d'emplois.
Vous ne pouvez pas dire tout et son contraire : dénoncer le projet du Gouvernement et appeler de vos voeux la constitution d'un pôle public stable.
Ce pôle public stable est formé par la Caisse des dépôts et consignations et la Banque postale, pour assurer la continuité de l'action des prêts aux collectivités locales.
Le pôle public stable, c'est la négociation menée sous l'autorité du Premier ministre avec son homologue belge et les discussions avec l'État luxembourgeois pour protéger les comptes des particuliers et les déposants de la banque belge.
Le pôle public stable, c'est la coordination avec l'État luxembourgeois pour la cession de la banque internationale luxembourgeoise qui permettra d'obtenir des garanties de crédibilité.
Nous avons tiré les leçons de deux tristes souvenirs de l'économie bancaire, américaine comme française.
Je pense à Lehman Brothers : l'administration américaine a voulu faire un exemple ; il y a eu défaut et le système bancaire international en a été embrasé.
Je pense au Crédit lyonnais, dont je n'ai rien à vous apprendre puisque vous étiez alors aux responsabilités. (« Non ! » sur les bancs du groupe GDR.) Nous en avons tiré toutes les leçons. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le ministre, la France fait partie de la quinzaine d'États dont la dette bénéficie de la note la plus élevée, triple A, ce qui permet à notre pays de profiter de taux d'intérêt bas.
Pour conserver cette notation qui est un bien précieux pour notre pays, il convient de poursuivre avec courage l'effort de réduction des déficits publics. Vous savez combien le groupe Nouveau Centre a toujours eu une position en pointe sur ce sujet, en préconisant même l'inscription dans la Constitution de la règle d'or, c'est-à-dire du retour à l'équilibre de fonctionnement du budget de l'État et de celui de la Sécurité sociale, et aussi des mesures d'économies, notamment en matière de niches fiscales et de niches sociales.
Or la dégradation des perspectives économiques internationales a déjà incité, à juste titre, le Gouvernement à réduire de respectivement 2 % et 2,25 % à 1,75 % les prévisions économiques de croissance pour 2011 et 2012. Cependant, le ralentissement de la croissance se poursuit dans la plupart des grands pays d'Europe, d'Amérique du Nord et même d'Asie, ce qui va se traduire par une moindre croissance cumulée d'environ 1 % de la richesse nationale sur 201l et 2012, entraînant des pertes de recettes supplémentaires de l'ordre de 10 milliards d'euros.
Cette analyse a été confortée ce matin par votre déclaration sur France 2 selon laquelle « la prévision de croissance pour 2012 était probablement trop élevée par rapport à l'évolution de l'activité économique ». Cette évolution explique probablement la décision de l'agence Moody's de se donner trois mois pour déterminer si la perspective de stabilité de la note triple A pour la France était toujours justifiée, en surveillant et en évaluant les progrès effectués par le gouvernement français pour mettre en oeuvre les mesures annoncées de réduction du déficit budgétaire.
Aussi, ma question est toute simple. Le Gouvernement est-il favorable, dans le cadre de la discussion sur le vote du budget pour 2012 qui commence aujourd'hui, à renforcer les mesures de réduction des dépenses et d'accroissement des recettes pour éviter toute dérive des déficits publics ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le député, je rends hommage au groupe Nouveau Centre et au groupe majoritaire UMP pour avoir soutenu constamment les efforts proposés par le Gouvernement en vue d'atteindre les objectifs intangibles de réduction de déficits publics.
Nous vous en sommes reconnaissants et nous allons poursuivre notre action. C'est bien en effet la détermination à poursuivre ce qui est une stratégie, un cap, une direction, qui nous permettra d'être au rendez-vous ou en avance sur ces objectifs.
Nous connaissons les circonstances et le contexte : un niveau de dette difficilement soutenable. Nous devons donc réduire les déficits.
La stratégie repose sur quelques idées simples.
Première idée simple : des réformes de structure. À cet égard, les réformes les plus signifiantes de l'action gouvernementale sont la réforme des retraites et la révision générale des politiques publiques. Tout autre discours consistant à remettre en cause ce qui a été mis en oeuvre s'éloigne de la responsabilité et du contexte économique dans lequel nous nous trouvons.
Deuxième idée simple : la poursuite des réductions de niches fiscales. Nous nous sommes engagés avec Valérie Pécresse, après les arbitrages du Président de la République et du Premier ministre, à proposer un objectif élevé, d'égale valeur à celui que nous avons proposé pour le budget de 2011, de l'ordre de 11 milliards. Cela nous permettra d'atteindre le but fixé.
Troisième idée simple, enfin : la protection de la croissance convalescente, le soutien à l'activité économique et le rejet de toute mesure qui affecterait le pouvoir d'achat, singulièrement celui des plus démunis et des plus fragiles d'entre nous.
C'est autour de cette stratégie, de cette détermination et de cette capacité d'adaptation que le Gouvernement confortera les éléments de stabilité et, derrière cela, les éléments de protection du modèle social auquel nous sommes très attachés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et plusieurs bancs du groupe NC.) .)
La parole est à Mme Aurélie Filippetti, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche
Monsieur le ministre de l'intérieur, hier le directeur des services de renseignement français, M. Squarcini, a été mis en examen par une juge d'instruction indépendante pour violation du secret des correspondances par personne dépositaire de l'autorité publique aux dépens d'un journaliste du Monde qui enquêtait sur l'affaire Woerth-Bettencourt. (« Et Guérini ? » sur plusieurs bancs du groupe UMP.) « Mis en examen », cela signifie des indices graves et concordants qu'il ait fait espionner ce journaliste. Les faits mêmes ne sont d'ailleurs pas contestés par l'intéressé.
La protection des sources des journalistes a été piétinée, de même que la loi de 1991 sur les interceptions de sécurité car jamais la commission qui contrôle ces interceptions n'a été saisie. Si elle l'avait été, elle aurait refusé son aval.
M. Squarcini bénéficie de la présomption d'innocence, mais la question qui vous échoit n'est pas juridique, elle est politique : on ne peut diriger les services de contre-espionnage qu'en étant parfaitement insoupçonnable. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Pourtant, vous refusez d'exiger la démission du directeur des renseignements.
Alors de deux choses l'une : soit il a agi de sa propre initiative, et vous devez mettre un terme à ses fonctions ; soit vous n'exercez pas votre autorité, et cela signifie qu'il aura agi sur ordre du ministre de l'intérieur de l'époque, M. Hortefeux, ou du secrétaire général de l'Élysée de l'époque, ministre de l'intérieur actuel, vous-même monsieur Guéant.
L'affaire ne s'arrête pas là : le Gouvernement vient de proposer que soit nommé procureur de Paris quelqu'un qui est impliqué dans ce dossier en tant que directeur du cabinet de l'ancienne et de l'actuel gardes des sceaux.
Quand donc ce gouvernement va-t-il cesser de bafouer et l'indépendance de la justice, et la liberté de la presse ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Madame la députée, je rappellerai d'abord que la mise en examen ne signifie pas la culpabilité. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Je me souviens même que c'est un gouvernement socialiste qui a voulu substituer au terme « inculpation », celui de « mise en examen »,...
..compte tenu de la confusion que cela créait – il s'agissait de Michel Vauzelle, suivi en cela par Pierre Méhaignerie.
Je rappellerai par ailleurs que tout le monde dans ce pays, je l'espère, bénéficie et continuera à bénéficier de la présomption d'innocence.
La question posée est de savoir si la mise en examen du directeur du renseignement intérieur lui permet de continuer à exercer ses fonctions. (« Non ! » sur les bancs du groupe SRC.) Je ferai à cet égard deux observations.
La première est que c'est un excellent chef de service, d'un service qui est essentiel à la sécurité des Français.
La seconde est que les juges d'instruction n'ont mis aucune limite à l'exercice de ses fonctions. La conclusion que j'en tire c'est qu'il peut demeurer dans l'exercice de ses fonctions. (« Guérini ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Vous me permettrez d'ajouter quelques commentaires.
Vous dites être sur vos bancs respectueux de la présomption d'innocence. Ce n'est pas du tout ce que j'entends dans les interviews à la radio, à la télévision et dans la presse.
Ce que je constate, c'est que pour le parti socialiste, il y a ceux qui doivent bénéficier de la présomption d'innocence, à savoir les socialistes, et ceux – tous les autres – qui n'y ont pas droit. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Ce matin encore un sénateur socialiste a été mis en examen : allez-vous demander sa démission ? (« Très bien ! » sur les mêmes bancs.)
J'entends en outre des déclarations invraisemblables. C'est ainsi qu'un personnage très important du parti socialiste, M. François Hollande, me demande que M. Squarcini soit démis de ses fonctions...
..et que j'exerce à cette fin mes responsabilités. M. Hollande est en train d'inventer un concept juridiquement nouveau, extrêmement choquant et dangereux pour notre démocratie et nos libertés : l'exécution avant jugement ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe Nouveau Centre. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Jean-Claude Mathis, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire
Madame la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, nous entamons aujourd'hui l'examen du budget pour 2012, budget que nous pouvons qualifier de responsable.
Il est responsable car il tient compte de notre environnement mondial et de la crise des dettes souveraines, qui rend absolument indispensable de résorber les déficits publics pour stabiliser notre dette. C'est une question de responsabilité envers les générations futures.
Pour ce faire, il existe deux solutions : l'augmentation des impôts ou la diminution du poids des dépenses publiques.
Notre pays vit déjà avec un taux élevé de prélèvements obligatoires, qui freine notre compétitivité et notre croissance par rapport à nos concurrents. La seule voie efficace est donc de réduire intelligemment la dépense publique.
Ainsi les économies dégagées par la réforme de certaines politiques publiques menée par notre majorité permettent de soutenir cet effort digne d'un bon père de famille.
Il est parfois difficile de prendre des décisions et des mesures courageuses, mais on ne demande pas à un homme politique, ni à une femme politique, d'ailleurs,…
…d'être populaire, mais bien de prendre des mesures dans l'intérêt général du pays.
Madame la ministre, pouvez-vous nous rappeler les moyens mis en oeuvre pour maintenir notre trajectoire de réduction du déficit ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député, le budget 2012 constitue une étape cruciale sur le chemin du désendettement et de la réduction des déficits.
En 2010, nous étions à plus de 7 % de déficit ; en 2011, nous serons à 5,5 % ; en 2012, à 4,5 % ; en 2013, à 3 %. Voilà notre trajectoire, voilà notre cap, voilà notre engagement ! Nous n'en dévierons pas, quelles que soient les évolutions de la situation économique. Nous l'avons prouvé.
Nous l'avons prouvé le 24 août dernier lorsque, au coeur de l'été, le Premier ministre a annoncé un plan d'effort supplémentaire de 12 milliards d'euros parce que la croissance venait à faiblir. Nous prendrons nos responsabilités lorsque cela sera nécessaire, et à chaque fois que cela sera le cas parce que la réduction des déficits est pour nous un engagement inébranlable.
En multipliant les dépenses, en rouvrant les vannes de l'emploi public, en rétablissant la retraite à soixante ans, le projet socialiste nous propose de faire demi-tour. Je vous le dis, mesdames et messieurs les députés, cela se traduirait par une véritable sortie de route pour la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le ministre des transports, mercredi dernier, un accident tragique a eu lieu dans le département d'Ille-et-Vilaine, impliquant un TER qui assurait la liaison Rennes-Saint-Malo et un poids lourd. En cet instant, je voudrais avoir une pensée attristée pour les familles touchées par ce drame.
Cet accident a causé la mort de deux femmes et l'on déplore également une quarantaine de blessés. Pour trois d'entre eux le pronostic vital était encore réservé il y a quelques heures.
Une enquête conduite par le bureau enquête et accident de votre ministère tente actuellement de définir les responsables de ce drame.
Monsieur le ministre, je souhaite appeler votre attention sur ce passage à niveau. Il n'a pas été classé comme préoccupant à la suite de l'audit et de la mise en place du plan de sécurisation des passages à niveau lancé en 2008, mais nous avons affaire au deuxième accident grave constaté à cet endroit depuis 2007.
L'amélioration des conditions de sécurité par Réseau ferré de France n'a pas permis d'éviter la répétition de ces événements malheureux. Pourtant il apparaît clairement que RFF travaille avec le Gouvernement pour améliorer le réseau puisque, depuis 2008, pas moins de 13 milliards d'euros ont été investis.
De nouvelles solutions ont été trouvées pour sécuriser les passages à niveau, comme la mise en place de ponts et de souterrains, la limitation de vitesse aux abords des voies ferrées ou l'installation de radars antifranchissement, déjà expérimentés dans l'Oise et le Nord.
Monsieur le ministre, je souhaiterai connaître les moyens d'actions concrets dont dispose aujourd'hui le Gouvernement pour atteindre l'objectif fixé : diviser par deux le nombre d'accidents au passage à niveau d'ici à dix ans ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
Monsieur le député, vous avez hélas raison : mercredi dernier s'est produit un accident particulièrement tragique. Deux personnes ont perdu la vie, quarante-huit personnes ont été blessées – neuf gravement et trente-neuf plus légèrement. Le soir même, je me suis rendu sur les lieux avec Guillaume Pépy, le président de la SNCF. Nos premières pensées vont bien évidemment aux familles des victimes.
L'enquête judiciaire a été ouverte le jour même : elle permettra de savoir qui est responsable de cet accident. Mais la question n'est pas là. J'ai d'ores et déjà demandé au bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre de diligenter immédiatement une enquête technique.
Ce passage à niveau n'était pas classé comme dangereux mais, comme vous l'avez rappelé, un accident avait déjà eu lieu en novembre 2007 au même endroit. Même s'il n'est pas classé « préoccupant », après deux accidents, nous devons légitimement le considérer comme dangereux. J'ai donc demandé à RFF de me proposer rapidement un plan le concernant.
Mais, indépendamment des plans que nous pouvons mettre en place, je veux rappeler que 95 % des accidents mortels aux passages à niveau sont dus à l'inobservation de la signalisation. À la suite de l'accident de 2007, le chauffeur du poids lourd avait ainsi été condamné à trois mois de prison avec sursis pour imprudence et inattention. Avant même les travaux, la meilleure prévention, c'est le respect de la signalisation.
Vous avez raison, monsieur le député, nous ne pouvons pas rester sans rien faire. Depuis le lancement, en 2008, du plan de sécurisation des passages à niveau par mon prédécesseur Dominique Bussereau (« Bravo ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP), 650 d'entre eux ont été supprimés. Aujourd'hui, les montants engagés sont passés de 6,6 à 31 millions d'euros ; la sécurisation de cent vingt nouveaux passages à niveau est enclenchée et le nombre de victimes d'accident sur les passages à niveau a diminué de moitié en dix ans.
Nous continuons d'appliquer, en l'accentuant, ce plan de sécurisation, mais, je le répète, la meilleure prévention est le respect de la signalisation. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes NC et UMP.)
La parole est à M. Michel Issindou, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Monsieur le Premier ministre, lors de la présentation du projet de budget de la sécurité sociale pour 2012, votre gouvernement n'a pas manqué de se féliciter de ramener le déficit prévisionnel à 13,9 milliards. Il est vrai qu'après un pic historique de près de 30 milliards en 2010, vous faites un peu mieux. Mais à quel prix ? Il y a peu encore, notre système de protection sociale était l'un des meilleurs au monde, et nous pouvions en être collectivement fiers. Hélas ! budget après budget, vous le détériorez gravement. (« Que proposez-vous ? » sur les bancs du groupe UMP.)
Qu'on en juge. S'agissant du volet santé, l'accès aux soins est de plus en plus difficile, car vous n'avez pas pris les mesures courageuses qui s'imposaient pour lutter contre les déserts médicaux. (« Et les 35 heures ? » sur les bancs du groupe UMP.) Vous avez augmenté les franchises médicales et le forfait hospitalier et multiplié les déremboursements. Et que dire de votre inaction face aux abus du secteur non conventionné ?
Au final, ce sont toujours les plus modestes qui font les frais de votre politique.
Dans le projet de budget pour 2012, vous continuez votre travail de casse. Outre la réduction de crédits de 395 millions pour l'hôpital public, vous prévoyez – mesure emblématique du projet de loi de financement – une augmentation de la taxe sur les mutuelles, dont la répercussion sur les adhérents est inévitable. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Beaucoup ne pourront plus adhérer aux mutuelles et rejoindront le quart de nos concitoyens qui n'accèdent plus correctement aux soins dentaires et d'optique, par exemple.
Qu'il est loin, l'esprit de solidarité qui présida à la création de la sécurité sociale en 1945 !
À la fin de l'année 2012, la dette sociale s'élèvera à près de 150 milliards d'euros. Vous pourrez invoquer la crise pour justifier un tiers de ce déficit, mais les deux tiers restants seront le fruit de votre mauvaise politique.
Monsieur le Premier ministre, quand allez-vous enfin prendre les mesures justes et efficaces qui assureraient un accès correct aux soins à tous nos concitoyens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le député, même si cela doit ne pas vous faire plaisir, le système de santé français est toujours le meilleur au monde ; toutes les études internationales le montrent.
Du reste, pourriez-vous me citer un seul pays dans lequel vous préféreriez que vos proches ou vous-mêmes soient soignés plutôt qu'en France ? Moi, je choisirais la France ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) Voilà la réalité du système de santé.
Parce que nous vivons de plus en plus longtemps, que le progrès technique et les nouveaux médicaments coûtent de plus en plus cher, il faut en permanence moderniser et réformer notre système de santé.
Pour cela, il faut du courage. Il vaut mieux demander des efforts, et fixer un objectif national des dépenses d'assurance maladie en progression de 2,8 %, plutôt que d'avoir à demander un jour des sacrifices, avec un ONDAM en baisse. Sur notre continent, certains pays baissent leurs dépenses de santé ; tel n'est pas le cas de la France. Mais, encore une fois, pour cela, il faut du courage.
Par ailleurs, le reste à charge est, en France, le plus faible de tous les pays de l'OCDE, derrière les Pays-Bas. Voilà la vérité !
Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. C'est faux !
J'ajoute que les plus modestes bénéficient de la CMU et de la CMUC et que, pour ceux qui sont trop riches pour être aidés, nous avons créé l'aide à la complémentaire santé, que nous allons renforcer pour élargir le nombre de ses bénéficiaires.
Enfin, permettez-moi d'évoquer une réalité que vous connaissez bien, monsieur le député. Votre région est la première de France pour les maisons de santé pluridisciplinaires, lesquelles ont été mises en place par la volonté de la majorité. Vous auriez pu le dire, comme vous auriez pu dire que le nombre de scanners et d'IRM y est en progression. Votre région est la deuxième de France pour l'accès aux soins.
Sur l'ensemble de ces sujets, nous veillons à renforcer l'offre de soins et l'accès aux soins. L'intérêt des Français et de notre système de santé est important, pour nous.
Même si cela ne vous fait pas plaisir, je préfère privilégier l'intérêt du pays et de la santé des Français plutôt que celui du parti socialiste. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
La parole est à M. Franck Riester, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre de la culture et de la communication, alors que la HADOPI est au travail et que les premiers résultats sont au rendez-vous, le parti socialiste, fidèle à sa ligne démagogique, prône sa suppression.
Pour la remplacer, il nous ressort la vieille utopie de la licence globale. Devant l'enjeu du financement de la création, cette solution simpliste est irréaliste. Qui peut croire, en effet, qu'en payant un euro par mois, on peut avoir un accès illimité à la culture sur Internet ?
C'est impossible. Le faire accroire, c'est se moquer de tous les créateurs et de toutes celles et ceux qui travaillent dans les filières culturelles.
C'est également irresponsable, car totalement déconnecté de la réalité. En effet, la licence globale serait en contradiction totale avec le droit international, qui protège le droit d'auteur. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Enfin, cette question est symptomatique de toute l'ambiguïté de M. Hollande. (Sourires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Qui peut en effet, aujourd'hui, expliquer clairement la position de celui-ci sur la HADOPI ? Un jour, ne pouvant nier ses résultats concrets et tangibles et soucieux de se mettre dans la poche le vote des artistes, il rompt avec les promesses de son parti et se prononce pour le maintien de la Haute autorité. Le lendemain, sous l'influence de quelques-uns de ses collègues socialistes et pour ne pas les froisser, il clame haut et fort qu'il faut la supprimer. Finalement, M. Hollande renvoie à plus tard cette question pourtant essentielle et nous dit, comme souvent : « On verra ! » L'indécision et l'ambiguïté : voilà la ligne de conduite du nouveau candidat socialiste ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le ministre (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC), pouvez-vous nous rappeler l'action claire, responsable et déterminée qui a été engagée par le Président de la République et la majorité en matière de droits d'auteur ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Monsieur le député (« Bonsoir ! » sur les bancs du groupe SRC), à l'évidence, le parti socialiste a un problème avec le droit d'auteur. Quelle est sa ligne ? Abrogation de la loi HADOPI un jour, revirement le lendemain, licence globale pour les uns, ralliement de dernière minute à la réponse graduée pour les autres. Qui peut oublier, pourtant, l'opposition acharnée de la plupart des socialistes, à l'exception d'un ou deux, contre la loi HADOPI ?
Cette tentation du laisser-faire, de l'irresponsabilité, il faudra en répondre un jour devant les artistes, les entreprises de cinéma et de la musique, qui ont défendu depuis le début cette pédagogie. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Qui pourrait prendre au sérieux les propositions d'un parti qui compte tant de fervents partisans de la licence globale, cette négation du droit d'auteur et de tout le travail effectué depuis des décennies par les sociétés d'auteurs ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Au milieu de ces palinodies répétées, de ce grand écart permanent, votre seule constance est le principe d'ambiguïté, votre seul fil conducteur, le flou artistique.
En fait, vous ne savez même pas que HADOPI est en train de réussir, alors que même la presse hostile s'en aperçoit ! (Mêmes mouvements.)
Grâce au soutien déterminé du Gouvernement, nos industries créatives prennent, de surcroît, contrairement à ce que vous dites et à ce que vous regardez sans vouloir le voir, le tournant du numérique pour le plus grand bénéfice des internautes et de la diversité culturelle.
Nous pouvons être fiers d'appartenir à une majorité qui a tenu bon sur HADOPI et qui est suivie maintenant pratiquement dans le monde entier. (Mêmes mouvements.)
La parole est à Mme Martine Faure, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale.
Mercredi dernier, votre ministère a présenté à des inspecteurs de l'éducation nationale médusés un nouveau dispositif destiné à combattre l'échec scolaire. Il s'agit d'un livret appelé « Aide à l'évaluation des acquis en fin d'école maternelle » et sous-titré « Outil de repérage des élèves présentant des risques pour les apprentissages ». Celui-ci permettrait de classer les élèves de grande section de maternelle en trois catégories : « RAS » – pour « rien à signaler » –, « risque » et « haut risque ». Les enseignants devraient remplir une « fiche élève » et une « fiche classe » reprenant les « scores » réalisés par les enfants aussi bien pour leur comportement que pour leur maîtrise du langage, leur développement moteur ou leur « conscience phonologique ». Je rappelle qu'il s'agit d'enfants de cinq ans !
Les mots sont rarement innocents. L'école maternelle va-t-elle entrer à son tour dans l'ère du dépistage, de la sélection et de la compétition, conformément au souhait d'un ancien ministre de l'intérieur, devenu Président de la République, qui voulait en 2005 que « les enseignants puissent détecter les problèmes comportementaux d'un certain nombre de jeunes avant qu'il ne soit trop tard » ?
La mise en place de ce nouvel outil est annoncée pour novembre 2011, sans la moindre concertation avec les associations de parents d'élèves et les syndicats d'enseignants, qui ont fort mal accueilli cette initiative aboutissant au calibrage des enfants par un processus d'étiquetage. Ils soulignent l'incohérence de ce projet, à un moment où l'on supprime par milliers des postes de personnels des RASED et de la médecine scolaire. Le ministère va-t-il réellement mettre en oeuvre ce funeste projet, ou peut-il comprendre qu'il vaut mieux y renoncer ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de la vie associative.
Madame la députée, dès qu'il vous est possible de le faire, vous jetez de l'huile sur le feu (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) et n'hésitez pas, pour cela, à exploiter la situation et à nourrir les craintes. Vous me permettrez de délaisser le terrain du mythe pour revenir sur celui de la réalité.
C'est en fait d'un document de travail, n'ayant rien de définitif, que nous parlons. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Le dispositif proposé consiste simplement à identifier les fragilités des élèves rencontrant des difficultés dans l'apprentissage des enseignements fondamentaux et de les aider, dès la grande section de maternelle. Il faut prévenir l'échec scolaire et les discriminations, ce qui est l'objectif de ce nouvel outil destiné aux enseignants.
Il faut convenir qu'une maladresse a été commise lors de la rédaction de ce document de travail, certains termes que vous avez cités étant porteurs d'une connotation totalement opposée à la finalité du dispositif. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) C'est pourquoi Luc Chatel s'est immédiatement engagé à faire disparaître ces termes du document de travail.
J'insiste sur un point : il ne s'agit pas d'une évaluation, il n'est absolument pas question de classer les élèves de maternelle et il n'y aura d'ailleurs aucune remontée nationale des résultats, qui ne seront pas inscrits dans le livret scolaire.
Les données, qui resteront à l'échelle de la classe, ne seront conservées que le temps nécessaire à la mise à disposition du dispositif pédagogique. Il s'agit simplement, je le répète, de proposer un outil aux enseignants afin de leur permettre de lutter contre les difficultés que rencontrent certains enfants.
Ce dispositif de personnalisation doit servir à l'accompagnement particulier des enfants ayant des difficultés.
Vous pouvez donc abandonner tous ces termes excessifs tels que « tri » et « fichage », madame la députée : il ne sert à rien d'agiter un chiffon rouge ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Louis Cosyns, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Le vendredi 14 octobre, Anne Pavageau, une policière âgée de trente ans, épouse de policier et mère de deux enfants, a été sauvagement assassinée. Rappelons les faits : suite au refus de la préfecture de Bourges de lui accorder une autorisation de port d'arme, un homme commet l'irréparable. Ulcéré de voir sa demande rejetée, il s'en prend à la fonctionnaire au guichet et, armé d'un sabre japonais, la blesse légèrement. Il s'attaque ensuite à une policière appelée en renfort, qu'il blesse gravement et qui décédera des suites de ses blessures. Il s'agissait d'Anne Pavageau, dont les obsèques auront lieu jeudi prochain
L'individu auteur de cette agression a été incarcéré et mis en examen. D'après le procureur, il avait conscience de ses actes et n'a pas exprimé clairement de regrets. Aujourd'hui, je voudrais rendre hommage, devant l'Assemblée nationale, à cette fonctionnaire de police, à sa famille et à ses proches. Elle a laissé derrière elle, rappelons-le, un veuf et deux enfants.
Je voudrais, plus largement, rendre hommage au courage des employés de la préfecture ainsi qu'au sang-froid de l'ensemble des policiers qui sont intervenus. Enfin, je voudrais adresser mon soutien à l'ensemble du corps de police, choqué et endeuillé par ce drame, et lui dire mon indignation – notre indignation à tous.
Ce drame nous interpelle sur la difficulté des métiers de policier et de gendarme, consistant à assurer la protection de nos concitoyens, car c'est malheureusement au péril de leur vie qu'ils accomplissent leur mission. Anne Pavageau est morte dans l'exercice de ses fonctions, assassinée alors qu'elle faisait son devoir. Ce meurtre est inacceptable : tuer un policier est un acte très grave, qui doit être puni avec la plus grande sévérité.
Face au déchaînement de violence dont la police est l'objet, face à la gravité préoccupante des actes commis à l'encontre des dépositaires de l'autorité publique, quelles mesures, monsieur le ministre, comptez-vous prendre pour protéger la vie de ceux qui se battent chaque jour pour notre sécurité ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Monsieur le député, le Gouvernement s'associe à l'hommage que vous venez de rendre à Mme Pavageau, ainsi qu'à la douleur, dont j'ai pris la mesure lors de ma visite à Bourges à vos côtés, montrée par ses collègues, par les fonctionnaires de la préfecture et l'ensemble de la population berruyère. J'ai noté à quel point les élus locaux s'associaient aux manifestations spontanées de tristesse ayant eu lieu après ce décès.
Cet événement tragique nous rappelle effectivement que les métiers de policier, de gendarme, de policier municipal, sont des métiers dangereux. Il y a, chaque année, un peu plus de vingt policiers et gendarmes qui perdent la vie dans l'exercice de leurs fonctions. En 2011, déjà dix gendarmes et trois fonctionnaires de police ont été tués. Le rappel de ces chiffres met en évidence le caractère scandaleux des tentatives visant à avilir les policiers, telle l'initiative des créateurs du site web Copwatch. Fort heureusement, la justice a donné suite à l'action que j'ai introduite, et a interdit l'accès à ce site (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La première conclusion que nous avons à tirer, c'est qu'il faut effectivement que l'ensemble de la population française soutienne ses forces de l'ordre.
La deuxième consiste en une série de décisions qu'il me revient de prendre. Il faut, d'abord, renforcer les conditions de sécurité des policiers et des gendarmes dans l'exercice de leurs fonctions. Mme Pavageau portait un gilet pare-balles mais, contrairement à son collègue qui en portait un également et a seulement été blessé, cet équipement n'a, en ce qui la concerne, pas suffi à lui sauver la vie – son agresseur lui ayant porté un coup de sabre à un endroit du corps que le gilet ne peut couvrir.
Il convient, ensuite, de renforcer la formation des fonctionnaires de police dans la difficile appréciation de la légitime défense, appréciation à laquelle ils doivent procéder très rapidement et dans des circonstances dramatiques. C'est en ce sens que le Gouvernement est déterminé à continuer à oeuvrer. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Michel Françaix, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse au ministre de la culture et de la communication.
Vous le savez, les médias, mais plus encore la presse écrite, sont dépositaires d'un bien éminemment précieux : la liberté de choisir son information. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP.)
Chaque catégorie de lecteurs, chaque communauté, qu'elle soit constituée autour d'une pensée, d'une terre ou d'une solidarité, a le même droit que toutes les autres à disposer du type d'informations qui correspond à ses désirs et à ses besoins.
Face à l'avalanche et au choc des images et des informations non contrôlées, elle doit servir de référence, permettre la mise en perspective et non la mise en scène – comme c'est le cas pour certains de nos collègues.
Monsieur le ministre, je ne veux mettre en doute ni votre amour de la presse, ni votre soutien à ce secteur, ni votre attachement au pluralisme. Et pourtant on laisse mourir La Tribune ! Peut-être – je n'ose y croire – est-ce pour faciliter le développement des Échos, dirigé par Bernard Arnault, qui est un ami cher du Président de la République ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Comme si, en ces périodes de crise, on pouvait se satisfaire d'un seul journal économique.
On ne pourrait donc rien faire pour France-Soir, un titre emblématique qui s'éteint doucement ? On ne devrait pas s'interroger sur l'avenir du Monde ? On devrait se désintéresser de la mort programmée de la presse régionale, alors que L'Indépendant, Le Midi libre, Centre Presse et Paris-Normandie sont en grande difficulté ?
Vous allez insister sur votre bonne foi et m'assurer que le Gouvernement fait ce qu'il peut. Toujours l'impuissance quand il s'agit de défendre le pluralisme, de défendre notre démocratie et nos valeurs ! Et pourtant, 1,1 milliard d'euros sont distribués au titre des aides à la presse. Mais c'est la presse magazine, les magazines télévisés ou Voici qui en profitent prioritairement – j'allais dire injustement.
Je sais que les magistrats, les syndicats, les élus et la presse sont des empêcheurs de tourner en rond pour ce gouvernement et que le Président de la République veut tout contrôler. Eh bien, vivement une démocratie ouverte, une république au fonctionnement normal, avec un président normal. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – « Pipeau ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le député, au-delà de cette litanie, permettez-moi de vous rappeler qu'aucun gouvernement n'a fait autant pour la presse que celui-ci. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
L'État a pris sa responsabilité dans un programme très vaste. Sans lui, le paysage de la presse française ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui. (Rires ironiques sur les bancs du groupe SRC.) Le pluralisme de l'information en aurait été la première victime. La presse doit être accompagnée et soutenue dans cette période de rupture profonde. Le Gouvernement s'y emploie constamment. Je vois sans cesse passer des lettres indiquant les montants que nous accordons à tel ou tel titre – et il ne s'agit pas de presse people, monsieur Françaix.
J'ai annoncé un budget des aides à la presse légèrement préservé pour 2012 : 390 millions de crédits de paiement pour l'année prochaine. La persistance de la crise publicitaire, la baisse des ventes, l'essor des publications via internet – dont la rentabilité économique est encore incertaine et doit être réétudiée – obligent plusieurs éditeurs à ne pas retarder plus longtemps des ajustements qu'ils croyaient pouvoir reporter.
Mais il ne s'agit pas de se replier sur des postures de défense. Il faut bien passer à l'offensive et à la reconquête. Cela passe par des opérations comme « Mon journal offert », qui remporte un très grand succès et qui nous rappelle que la priorité doit aller avant tout au public et aux contenus.
Le Gouvernement parie sur les contenus, sur une information de qualité et totalement pluraliste, et surtout sur la diffusion de cette information auprès du public le plus large. C'est tout le sens de notre action et, à cette aune, on ne peut pas dire que le Gouvernement soit en retard sur ce que vous préconisez, monsieur Françaix. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Gilles d'Ettore, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question, à laquelle j'associe l'ensemble de mes collègues du Languedoc-Roussillon, ainsi que M. Dino Cinieri, député de la Loire, s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation.
Selon les professionnels du tourisme et au vu des premiers chiffres que nous avons enregistrés, nous venons de vivre une fin de saison touristique exceptionnelle, tant au niveau économique qu'au niveau de l'insécurité, en baisse de 10 % cet été dans nos stations balnéaires de Méditerranée.
Cela démontre une nouvelle fois la vitalité d'un secteur d'activité majeur,…
…non délocalisable, qui représente 7 % du produit intérieur brut, plus de 2 millions d'emplois et constitue un pilier de la compétitivité de l'économie française, même si les candidats socialistes ont totalement ignoré cette thématique tout au long du lancinant débat des primaires. (Murmures sur les bancs du groupe SRC.)
En plein coeur de la saison estivale, vous avez accompagné le Président de la République, Nicolas Sarkozy, qui est venu en Languedoc-Roussillon, plus particulièrement au Cap d'Agde, présenter les enjeux du tourisme de demain, parmi lesquels figure la qualité de l'accueil, qui est essentielle si l'on veut attirer de nouvelles clientèles.
Le Président de la République a souligné la nécessité d'investir pour moderniser l'offre touristique de notre pays et demandé à l'administration de faciliter les démarches des professionnels du tourisme. Toutefois, les stations balnéaires du littoral languedocien, qui, comme vous le savez, ont été le fruit de la volonté de l'État, et plus précisément de celle du général de Gaulle, ont désormais quarante ans et nécessitent, pour conserver leur attractivité, d'être modernisées et développées en fonction des nouvelles attentes des clientèles.
Ce grand chantier est aujourd'hui piloté par les collectivités locales, dans un contexte réglementaire extrêmement contraignant. Je vous demande donc, monsieur le secrétaire d'État, de bien vouloir nous indiquer les actions engagées afin de répondre, au côté des élus locaux, aux défis actuels du développement touristique, pour que notre pays conserve sa place de première destination mondiale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation.
Monsieur le député, je vous remercie d'abord de souligner la place primordiale du tourisme dans l'économie de notre pays : plus de 7 % du PIB. Dans chaque région de France, chacun sait bien à quel point le tourisme est essentiel. (« Bravo ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Vous avez rappelé que le bilan estival est globalement positif, quoique contrasté. Sur le pourtour méditerranéen, en Languedoc-Roussillon, 72 % des professionnels notent une hausse par rapport à l'année dernière. Quand on étudie, partout en France, la situation des acteurs du tourisme, une chose frappe particulièrement. Si des records ont été battus, notamment en matière d'hébergement – hôtels, campings –, ce qui est étonnant avec une météo pour le moins pluvieuse,…
…on constate surtout que ce qui a fonctionné, c'est la qualité : tous ceux qui ont joué la qualité et la diversité ont eu des résultats.
Vous me demandez ce qu'il faut faire. Il convient, évidemment, de continuer à aller le plus loin possible dans la qualité et à valoriser le patrimoine vivant de notre pays – je pense à la gastronomie, ou encore au spectacle vivant. Il faut, par ailleurs, faire la promotion de notre offre à l'étranger et renforcer la qualité de l'accueil. C'est la raison pour laquelle nous avons signé un document dans ce sens avec tous les partenaires du secteur de l'accueil.
Vous posez, enfin, une question précise sur l'offre d'hébergement. Nous travaillons sur la question des bâtiments qui ont été construits dans les années soixante-dix. Nous expertisons de nouveaux outils – notamment avec l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, chère à Jean-Louis Borloo – pour essayer de mettre en place des dispositifs efficaces. Voyez-vous, sur ce sujet, les 235 000 acteurs du secteur ont montré la voie. Il faut faire des efforts et il ne sert à rien de rêver en matière économique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Gwendal Rouillard, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Ma question s'adresse à M. le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Je souhaite attirer votre attention, monsieur le ministre, sur la situation préoccupante que connaissent les universités dites de territoire.
Présentes dans des villes de taille moyenne, ces universités attirent chaque année de nombreux étudiants qui voient en elles un service public de proximité : un service public qui leur garantit à la fois des conditions d'études de grande qualité et un taux d'insertion professionnelle pouvant dépasser les 90 %, comme à l'université de Bretagne-Sud dans le Morbihan. Dans un contexte de crise, ces universités constituent un levier de développement nouveau, ancré dans les territoires.
Si je m'adresse à vous, monsieur le ministre, c'est parce que ces universités sont aujourd'hui en danger, et je pèse mes mots. Dans une tribune parue le 5 juillet, quinze présidents d'université…
…ont appelé votre attention sur le système de dotation actuel, qui fait courir le risque d'une asphyxie des universités.
À l'université de Bretagne-Sud, cela se traduit par de graves difficultés à payer les personnels titulaires depuis plus d'un mois, et par une menace de gel de vingt postes pour le budget 2012. En dépit de la hausse continue des effectifs d'étudiants, d'une recherche de plus en plus performante et de l'investissement constant des collectivités locales, l'actuel système condamne de façon mécanique ces universités. C'est pourtant par des partenariats renforcés entre les universités, les entreprises et les collectivités que la France trouvera de nouveaux gisements d'emplois, comme dans les énergies marines.
Telle est la « République contractuelle », telle est la « République des territoires » que nous appelons de nos voeux.
Monsieur le ministre, deux questions simples : quelles mesures comptez-vous prendre pour assurer la pérennité de ces universités ? Et quelles garanties pouvez-vous apporter à leurs présidents et à leurs personnels ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le député, vous insistez sur l'organisation de l'enseignement supérieur et de la recherche en matière d'aménagement du territoire. C'est l'un des grands sujets auxquels nous avons à faire face, car savons que les territoires recèlent de véritables richesses et que, si nous voulons les développer, il convient que chaque territoire puisse profiter de la mise en oeuvre de programmes qui correspondent à ses richesses.
C'est ce que nous essayons de faire, vous le savez, dans le domaine des collectivités en les regroupant. C'est ce que nous essayons de faire en permettant de répondre aux besoins des territoires, en particulier au travers des services.
C'est aussi, bien sûr, ce que nous faisons dans le domaine de l'université, où la réforme a été engagée dans deux directions.
La première vise à permettre plus d'autonomie, plus de responsabilité. Cette démarche nous permet déjà aujourd'hui, dans de grandes universités, d'obtenir des résultats que nul ne saurait contester. Pour la recherche et l'université, c'est une démarche que nous devons continuer à porter car, notamment au niveau international, elle produit des résultats.
Mais nous devons également réfléchir à la situation des pôles qui n'atteignent pas un niveau identique de recherche et de résultats, réfléchir à la situation de ces universités de territoire que vous évoquez, qui méritent une approche qui soit propre au territoire…
…en établissant des correspondances avec les grands pôles de recherche et les grandes universités de référence. C'est grâce à ces partenariats que ces universités pourront développer leur futur.
Si je prends l'exemple de l'Alsace, l'université de Strasbourg s'est développée, devenant un véritable pôle, et l'université de Haute-Alsace est aujourd'hui en léger retrait. C'est le partenariat entre elles qui permettra de faire en sorte que, demain, en Haute-Alsace, nous obtenions les mêmes résultats. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
La parole est à Mme Valérie Boyer, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'État chargée de la santé.
Madame la secrétaire d'État, en juillet, j'ai eu l'honneur d'être rapporteure d'un texte actualisant la loi « Hôpital, patients, santé, territoires ». Nous avions introduit, à ma demande et suite à ma proposition de loi que Xavier Bertrand avait cosignée, des dispositions essentielles pour régler l'épineux problème de la responsabilité civile médicale des professionnels de santé.
Aujourd'hui, en cas d'accident médical grave, les professionnels de santé responsables – le plus souvent des gynécologues obstétriciens, des chirurgiens ou des anesthésistes, mais aussi l'ensemble des professionnels de santé médicaux ou paramédicaux – peuvent être poursuivis sur leur patrimoine propre ou celui de leurs ayants droit, c'est-à-dire de leurs descendants, en raison de l'absence d'une couverture assurantielle suffisante de leur risque professionnel.
Nous voulons éviter cela.
Grâce à votre engagement, à celui de M. Bertrand et de l'ensemble du Gouvernement et des députés, nous avons adopté un dispositif, complet et opérationnel, fondé sur la mutualisation du risque entre l'ensemble des professionnels de santé, qui permet de couvrir les sinistres dépassant le plafond couvert par les assurances et, ainsi, combler les trous de garantie. Ce dispositif permet d'accéder à la demande des médecins, de les protéger et de supprimer notamment l'action récursoire.
C'est la santé des femmes et des enfants qui est en jeu aujourd'hui, ainsi que la couverture des professionnels de santé.
Madame la secrétaire d'État, ces dispositions ont-elles été réintroduites dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, et quel est leur champ d'application ?
Elles constituent une avancée considérable pour les professionnels de santé, qui verront ainsi disparaître l'épée de Damoclès qui pesait sur leur tête, et qui ont tant besoin d'être rassurés après les propositions calamiteuses du parti socialiste en matière de santé. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Nous avons besoin de ce dispositif, madame la secrétaire d'État. Dans quelles conditions a-t-il été réintroduit ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Madame la députée, vous avez raison, nous avions porté ensemble, majorité et Gouvernement, la réforme sur la responsabilité civile médicale dans le cadre de la proposition de loi Fourcade. Alors que cette disposition avait trouvé un large consensus auprès des professionnels de santé, l'opposition socialiste a fait le choix de saisir, pour des questions de forme, le Conseil constitutionnel neuf jours après le vote de la loi. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) On voit ici le mépris du parti socialiste à l'égard des professionnels de santé libéraux ! (Même mouvement.)
Nous avons donc inscrit, comme vous le souhaitez, le dispositif à l'article 60 du projet de loi de finances pour 2012. Il prévoit une cotisation mutualisée sur l'ensemble des professionnels de santé, comprise entre 15 et 25 euros par an, et modulée, bien sûr, entre les professionnels de santé. Cette cotisation permettra d'alimenter un fonds public de mutualisation dont la gestion sera confiée à la Caisse centrale de réassurance. Ce fonds permettra d'indemniser les patients de victimes de sinistres supérieurs à 8 millions d'euros. Nous apportons ainsi une réponse globale, consensuelle et durable aux professionnels de santé, et ce dès le début de l'année 2012.
N'en déplaise au parti socialiste (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), le Gouvernement est déterminé à apporter des réponses concrètes aux questions que se posent nos concitoyens ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Responsabilité civile professionnelle des médecins
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze.)
Dans les explications de vote, la parole est à M. Olivier Jardé, pour le groupe Nouveau Centre.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation, mes chers collègues, nous travaillons trop. Or l'inflation législative entraîne des formalités administratives qui sont synonymes de pertes de temps. La complexité est coûteuse, elle nuit à nos entreprises et à leur compétitivité. Le Nouveau Centre adhère donc complètement à cette démarche de simplification du droit et de l'allégement des démarches administratives.
Le texte va d'abord permettre une simplification du bulletin de paye, répondant ainsi aux nombreuses récriminations qui sont faites par les artisans et les commerçants et que nous entendons dans nos permanences.
Le texte va ensuite créer l'armoire numérique sécurisée, la déclaration sociale nominative. Il propose également la dématérialisation des déclarations de paiement de cotisations sociales. Enfin, il prévoit, acte qui était demandé par nos concitoyens, le rescrit social. Le Nouveau Centre a par ailleurs enrichi ce texte d'un amendement de simplification des contrats dans le secteur viticole.
Néanmoins, ce texte a couvert un champ très élargi, peu approfondi parfois, entraînant des modifications multiples et aussi diverses que les transports, les médias, le tourisme, l'installation hydroélectrique, autant de choses qui, de prime abord, ne semblaient pas très liées. Je pense qu'il ne faut pas dépasser le cadre de la simplification afin que ces modifications n'entraînent pas elles-mêmes, à long terme, une complexification.
La proposition de loi ayant pour but la simplification du droit et l'allégement des démarches administrative, le groupe Nouveau centre lui apporte son soutien et la votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)
La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Nous voterons cette proposition de loi relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives.
Auparavant, je voudrais souligner le travail remarquable du président de la commission des loi, Jean-Luc Warsmann, et du rapporteur, Étienne Blanc. Pour avoir assisté à un certain nombre d'auditions, je constate qu'on nous dit toujours au début des auditions que les lois sont trop nombreuses, trop compliquées. Le travail réalisé a été sérieux, avec le souci de bien écouter et une réelle volonté de simplifier. La voie fut d'ailleurs bien tracée par les assises organisées par Frédéric Lefebvre.
Cependant, force est de constater que, filière par filière, il n'est pas simple du tout d'exprimer simplement ce qu'il faut simplifier. Très vite, si l'on n'y prend garde, on peut dériver et proposer des amendements cavaliers. Nous les avons rejetés. De même nous sommes-nous aperçus que 650 amendements ne pouvaient pas, chacun, simplifier ou améliorer encore l'excellent texte de cette proposition de loi.
Nos collègues de l'opposition nous ont reproché d'en être au quatrième ou cinquième texte de simplification. Quoi de plus normal ! Il devrait y en avoir deux par an des textes comme celui-ci, et non amendé.
Pourquoi notre droit et nos démarches administratives sont-ils si compliqués ? Notre droit est compliqué parce que nous voulons légiférer sur tout, même sur l'exception qui, en principe, confirme la règle. La règle devient alors illisible et la démarche administrative compliquée et dépendante des décrets, dont nous ne contrôlons pas la rédaction.
L'exception, je le disais, confirme la règle et nos amendements devraient toujours recaler des détails de la loi. Mais, bien souvent, ils sont générés par la volonté de régler des cas particuliers, au risque de ne pas faire avancer l'intérêt général. Cela finit par compliquer la vie de ceux qui travaillent, cela les démotive et, au final, nuit à la compétitivité de l'économie française.
Monsieur Warsmann, votre proposition de loi va dans le bon sens, celui qui consiste à donner à ceux qui entreprennent, artisans, commerçants, TPE, PME, un peu d'oxygène, à leur redonner le moral dans leur quotidien d'entrepreneur et donc d'employeur.
Vous avez touché à tous les secteurs et certains qualifient donc votre texte de fourre-tout. C'est mal connaître le combat journalier de ceux qui entreprennent contre les complications du droit et les démarches administratives. C'est vraiment mal connaître ce milieu, chers collègues socialistes, que de ne pas avoir, à l'occasion d'un scrutin public, voté, à une exception près, la simplification du bulletin de paye, la première mesure réclamée dans toutes les assises de la simplification.
Pour faire court – c'est aussi cela la simplification – votre texte va dans le bon sens pour améliorer l'environnement de tous ceux qui entreprennent. Il en appelle d'autres, pour simplifier encore. Le groupe UMP le votera donc avec enthousiasme. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Michel Clément, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
Examiner un quatrième texte de simplification du droit sous cette législature est le signe que nous légiférons trop, faute de bien légiférer. Pensez que, depuis le début de la législature et avant même cette année parlementaire, nous en étions à 156 projets de lois et 69 propositions de lois ! Qui s'étonnera qu'il nous faille, après coup, un véhicule législatif particulier, sorte de véhicule balai, pour préciser, corriger, rendre intelligibles des lois et des textes qui ne font plus sens ?
Cette proposition de loi de simplification du droit s'est adjoint, cette fois, deux versants particuliers :
Le premier figure dans le titre : l'allégement des procédures administratives. Il s'agirait, à en croire les auteurs, de s'attaquer aux mesures qui pèsent sur les forces économiques de notre pays, pour desserrer l'étau législatif et réglementaire qui contraint les acteurs de notre croissance. Rien que cela !
Le second versant est le fruit du travail parlementaire qui se voulait, je le rappelle, de simplification : de 94 articles, nous sommes passés à 116 et une déferlante d'amendements est venue conforter une impression gênante. Il fallait avant tout donner satisfaction à des groupes de pressions ou des corporatismes, chacun cherchant à satisfaire une veille revendication ou un intérêt particulier, voire à ressortir de l'oubli des textes ayant reçu l'aval de nos assemblées sans avoir été jamais inscrits à l'ordre du jour.
Les cavaliers législatifs se sont ainsi succédé et nous avons examiné des amendements que Prévert ou Boris Vian auraient non pas écartés mais mis dans leur inventaire seulement !
Jugez plutôt : nous avons examiné le contrat vendange, les essieux de camion, le permis de conduire des tracteurs pour les agriculteurs retraités, le service minimum dans les transports de marchandises, l'armoire numérique sécurisée, la définition de la consultation juridique, et j'en passe.
Mais ce texte est à sens unique, c'est un texte d'inspiration libérale. La remise en cause de l'équilibre et la cohérence des lois sur les sociétés commerciales ou celles, plus discrètes, des dispositions du Grenelle sont les signes plus d'une dérégulation voulue que de la simplification annoncée. Quant aux règles relatives au droit du travail, elles montrent que votre écoute a été sélective.
Au final, un tel texte aggrave le mal qu'il prétend soigner. Même s'il apparaîtra toujours utile de revisiter les lois que nous votons, il y a beaucoup d'espace entre simplification et adaptation des textes, ce à quoi nous procédons en fait ici.
Pour que notre travail soit utile, il faut changer de méthode, que les commissions saisies pour avis le soient au fond pour reconsidérer une loi dont elles ont préalablement débattu, que le mot « simplification » soit associé au mot « intelligibilité », principe constitutionnel, seul principe qui doit commander notre travail législatif en pareilles circonstances.
Cela, nous ne l'avons pas fait et, au terme du débat, nous avons inventé une nouvelle catégorie de loi : les lois difformes.
Nous l'avons dit, la qualité de la loi n'est pas une simple question technique, c'est le gage de sa légitimité. Et parce que nous ne souhaitons pas participer à l'oeuvre collective qui nous est proposée, le groupe SRC votera contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Marc Dolez, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, pour le groupe GDR, cette proposition de loi dite de simplification du droit est irrecevable, tant sur la forme que sur le fond.
Si nous partageons l'ambition de simplifier le droit, nous faisons également le constat qu'un tel objectif se peut se réaliser au travers de grandes lois fourre-tout, examinées, qui plus est, selon la procédure d'urgence. Ce sixième texte de simplification depuis 2003 comporte, comme les précédents, près d'une centaine d'articles et les domaines concernés sont multiples.
Pourtant, dès 2006, le Conseil d'État relevait que « l'effort de simplification du droit ne conduit pas, dans l'immense majorité des cas, à une réduction du nombre d'articles ou de dispositions applicables, voire entraîne, au contraire, un alourdissement de certains textes ».
Une grande partie de la doctrine se montre également très sévère à propos de ces véhicules législatifs, soulignant que « en matière juridique, simplifier peut aussi entraîner des complications supplémentaires lorsqu'il va s'agir d'appliquer la règle ».
Enfin, depuis le précédent de la scientologie, des voix s'élèvent, jusque dans la majorité parlementaire, pour dénoncer des retouches conjoncturelles isolées qui peuvent être de nature à altérer l'équilibre général du bloc législatif modifié et à y introduire des incohérences, voire des contradictions.
En l'occurrence, le principal défaut de la proposition de loi est, malgré l'objectif affiché de simplification, de comprendre de nombreuses modifications de fond, comme notre rapporteur l'a d'ailleurs reconnu à demi-mot en concédant que dans ce texte nous nous approchions parfois du fond.
Ainsi, l'article 88 par exemple engage une réforme radicale des principes de la commande publique, puisqu'il marque la fin des procédures de publicité et de mise en concurrence pour tous les marchés publics de moins de 15 000 euros. C'est la porte ouverte à l'opacité.
Mais le plus grave réside dans les nombreuses entailles faites au droit du travail. Au terme de l'examen du texte, ce sont vingt-trois articles du code du travail qui ont été modifiés. Droits des salariés en situation de télétravail, assiettes des régimes de retraite complémentaires : des brèches inquiétantes ont été ouvertes.
Quant à l'article 40, il réécrit le code du travail pour autoriser une plus grande flexibilité des horaires de travail pour les employeurs, un mauvais coup porté aux salariés sans concertation préalable, sans étude d'impact et en l'absence du ministre du travail lors des débats, un mauvais coup dénoncé par les organisations syndicales qui poursuit le détricotage du code du travail commencé en 2002.
C'est pour toutes ces raisons que les députés communistes, républicains, citoyens, du parti de gauche et verts voteront contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'ensemble de la proposition de loi.
(Il est procédé au scrutin.)
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 487
Nombre de suffrages exprimés 485
Majorité absolue 243
Pour l'adoption 292
Contre 193
(La proposition de loi est adoptée.)
Vote sur l'ensemble
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures trente, est reprise à seize heures quarante.)
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le ministre de l'économie, mesdames, messieurs les députés, un budget, c'est tout à la fois le reflet d'une réalité et l'expression d'une volonté.
La réalité, nous la connaissons. C'est une croissance mondiale qui ralentit. Ce sont des turbulences financières et des incertitudes économiques qui amènent la France, qui préside le G20, à prendre une fois encore la tête de la lutte contre la crise. Et je sais que François Baroin y reviendra dans quelques instants.
Mais la réalité, mesdames et messieurs les députés, ce sont aussi trente années de laxisme budgétaire. En 1980, les dépenses publiques représentaient 46 % de la richesse nationale. Cela fait désormais plus de vingt ans que nous avons franchi une barre symbolique : depuis 1990, nos administrations consomment chaque année plus de la moitié de la richesse nationale et cela ne nous surprend même plus.
Alors, la réalité, mesdames et messieurs les députés, la voici, aussi abrupte soit-elle : nous dépensons trop et nous ne pourrons jamais porter nos recettes au niveau de nos dépenses. Nous devons tout simplement faire des économies, oui, des économies, un mot que tous les foyers connaissent mais que l'État a trop souvent tendance à oublier. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Ce n'est pas une question d'idéologie, ce n'est pas un débat théorique, c'est un fait, un fait brut, un fait indiscutable : la seule manière de désendetter le pays, c'est de réduire nos dépenses publiques. (Mêmes mouvements.)
Depuis trois ans, c'est le socle de notre stratégie, sa composante de base. Nous avons défini un cap en matière de réduction des déficits : nous sommes à 5,7 % de déficit public en 2011, nous serons à 4,5 % en 2012 puis à 3 % en 2013. Ce budget, quelles que soient les évolutions de la situation économique, sera celui des engagements tenus : ce cap, ces objectifs, nous les respecterons en effet à la lettre, ils sont notre engagement intangible.
Car ce budget 2012, mesdames et messieurs les députés, marque d'abord un tournant historique : les dépenses de l'État, hors dette et pensions, baisseront pour la première fois depuis 1945.
Ce budget, c'est aussi un budget d'équilibre et d'équité : d'équilibre car nous avons dosé nos efforts pour ne peser ni sur la croissance ni sur l'emploi ; d'équité car ce sont les plus favorisés qui, pour l'essentiel, contribueront au redressement de nos finances publiques.
Notre stratégie, mesdames et messieurs les députés, c'est d'abord un effort inégalé de maîtrise des dépenses publiques par des réformes profondes.
Notre méthode pour maîtriser les dépenses, elle porte un nom : réformes. Les réformes sont au coeur de notre stratégie de désendettement. Elles sont au coeur de ce budget, avec la réforme de l'État, bien sûr, mais aussi avec la réforme des retraites, la réforme de l'hôpital, la réforme du médicament.
C'est grâce à ces réformes qu'en 2011, nous sommes parvenus à geler en valeur les dépenses de l'État. C'était déjà sans précédent. En 2012, nous irons plus loin encore : les dépenses de l'État vont baisser grâce au milliard d'euros d'économies supplémentaires annoncé le 24 août. Ce n'était jamais arrivé depuis 1945. C'est donc cette majorité, mesdames et messieurs les députés, qui aura mis fin à la hausse continue des dépenses de l'État.
J'entends déjà l'opposition nous dire que c'est une attaque contre l'État, une menace pour les services publics. Je veux le dire clairement : aujourd'hui, les vrais défenseurs du service public, les vrais défenseurs de l'État, les vrais défenseurs de la protection sociale, ce sont ceux qui garantissent leur sécurité financière et leur stabilité à long terme. En promettant toujours plus de dépenses, toujours plus d'emplois publics, toujours plus de crédits, vous n'êtes pas, mesdames et messieurs de l'opposition, les défenseurs du service public. Vous en êtes les fossoyeurs.
Cette baisse historique des dépenses, mesdames et messieurs les députés, c'est le résultat de notre action de réforme de l'État depuis cinq ans.
Pendant cinq ans, un départ à la retraite dans la fonction publique sur deux n'a pas été remplacé : cela représente 150 000 postes de fonctionnaires d'État en moins.
Cet effort sans précédent, nous l'avons mené à bien en réorganisant et modernisant nos administrations. Il aboutira, en 2012, à une autre première historique : la masse salariale de l'État baissera de près de 200 millions d'euros. Cela n'était jamais arrivé.
Depuis cinq ans, nous agissons également pour réduire les dépenses de fonctionnement. En fixant un objectif de baisse des dépenses de fonctionnement de 10 % entre 2011 et 2013, nous nous sommes imposé de réduire le train de vie de l'État. Et nous progressons : en matière immobilière, 300 000 mètres carrés en moins, mais aussi 10 000 voitures de fonction en moins, un tiers de logements de fonction supprimés, 500 millions d'euros déjà économisés sur les achats. Ce sont autant de signes tangibles d'une meilleure gestion de l'État.
Cet effort d'économie, il s'impose aux ministères, mais il doit s'imposer également aux opérateurs de l'État, avec 3 700 emplois supprimés en 2011 et 2012. Le mouvement a été enclenché, mais il faudra aller plus loin – j'y reviendrai.
En réalité, en matière de maîtrise des dépenses publiques, le principe est simple : à effort d'intérêt national, engagement général. C'est la raison pour laquelle les collectivités locales, elles aussi, doivent y participer. Cette année encore, le projet de loi de finances prévoit le gel des dotations que leur verse l'État, ce qui représente une économie d'un milliard d'euros. Cette répartition équitable de l'effort, il me paraît naturel qu'elle vaille aussi pour l'effort d'économies supplémentaire annoncé le 24 août. J'y reviendrai.
Les réformes, mesdames et messieurs les députés, nous ont également permis de maîtriser les dépenses sociales comme elles ne l'avaient sans doute jamais été. La réforme des retraites, ce sont 5,5 milliards d'euros de dépenses en moins dès 2012. Grâce à la maîtrise de l'ONDAM, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie – autre rupture majeure –, nous avons économisé 11 milliards d'euros depuis 2008.
Ce budget, vous l'avez compris, mesdames et messieurs les députés, est d'abord placé sous le signe des réformes et des économies. C'est grâce à cette action que la France reste crédible en matière budgétaire et que notre notation est préservée.
Alors, mesdames et messieurs de l'opposition, aujourd'hui, vous nous expliquez que vous voulez faire demi-tour dans les réformes.
Je vous le dis, vous êtes bien seuls en Europe. Aucun gouvernement, de droite comme de gauche, ne le propose. François Hollande peut chercher en Espagne, en Suède ou en Allemagne : les seuls socialistes en Europe qui veulent créer des emplois publics, doubler des budgets ou baisser l'âge de la retraite, ils sont dans cet hémicycle !
Vous allez à contresens et vous le faites à contretemps.
Parlez donc de votre budget ! La campagne électorale, ce n'est pas ici !
Car, à l'heure où la convergence est au coeur de l'avenir de la zone euro, votre programme se résume en un mot : la divergence. C'est une erreur profonde, parce que la divergence, c'est l'isolement, et l'isolement aujourd'hui, c'est l'échec.
Cet effort d'économie, mesdames et messieurs les députés, nous le concilions avec des priorités budgétaires fortes.
Voilà une autre différence, profonde, entre la majorité et l'opposition. Vous nous promettez une priorité chaque jour, le lundi la culture, le mardi l'éducation, puis la santé et ainsi de suite. À chaque journée sa dépense !
C'est tout le contraire, une fois de plus, de notre stratégie. Nos priorités – que vous voulez connaître, monsieur le député…
Elles sont en petit nombre, et c'est ce qui fait la différence.
Nous voulons d'abord donner une priorité absolue à l'innovation.
C'est pourquoi l'enseignement supérieur et la recherche sont au coeur de la vision et de l'action du Président de la République.
Souvenez-vous, mesdames et messieurs les députés, de l'université française en 2007 : mal-aimée, sous-dotée, elle semblait condamnée au déclin. Cinq ans après, avec l'autonomie, elle a changé de visage et elle n'hésite plus à afficher ses ambitions, grâce à 9 milliards d'euros supplémentaires en cinq ans, 9 milliards pour faire réussir nos étudiants et renaître une vraie fierté universitaire.
Car notre vision pour nos enfants, pour nos jeunes, ce n'est pas une jeunesse qui va d'allocation d'autonomie en emplois-jeunes, c'est une jeunesse qui réussit grâce à une université ouverte, exigeante, forte.
Alors, mesdames et messieurs de l'opposition, vous voulez, je crois, à présent parler à la jeunesse.
Vous voulez parler d'innovation. Mais alors pourquoi donc avez-vous combattu la réforme des universités ? Pourquoi avez-vous soutenu les blocages des facs ? Pourquoi avez-vous refusé le rapprochement de la recherche publique et de la recherche privée ? Tout cela, vous l'avez peut-être oublié, mais moi, je m'en souviens, et les Français aussi.
Depuis cinq ans, avec la réforme de l'université et de la recherche, avec le triplement du crédit impôt recherche, avec les 35 milliards d'investissements d'avenir, nous construisons une France plus forte, une France plus compétitive.
Et c'est la deuxième des priorités de ce budget : investir pour créer les emplois de demain.
Aujourd'hui, j'entends le parti socialiste annoncer qu'il veut alléger l'impôt sur les sociétés pour les entreprises qui investissent.
Nous ne sommes pas encore au pouvoir ; attendez donc d'être dans l'opposition pour faire ces commentaires !
C'est une idée aussi neuve que les emplois jeunes ! Elle existait en France dans les années 90 et Lionel Jospin l'a supprimée parce qu'elle ne marchait pas. C'est lui qui l'a remplacée par le régime actuel, le taux réduit d'impôt sur les sociétés pour les PME.
Vous devriez donc écouter Lionel Jospin – comme vous auriez dû écouter François Mitterrand, qui qualifiait la taxe professionnelle d'impôt « imbécile ». Vous auriez donc été bien inspirés de nous soutenir lorsque nous avons supprimé cet impôt qui, précisément, pénalisait les entreprises qui investissent, c'est-à-dire les PME. Ce sont elles qui sont, avec nos industries, les grandes gagnantes de la suppression de la taxe professionnelle, parce que cela facilite justement leurs investissements !
Notre troisième priorité budgétaire, c'est la protection des plus fragiles. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Cela vous dérange certainement de le reconnaître !
Nous avons augmenté les crédits de l'allocation adulte handicapé, et nous continuons : au total, elle a progressé de 33 % en cinq ans. Nous avons revalorisé le minimum vieillesse de 25 % en cinq ans. Nous avons créé le revenu de solidarité active.
Au total, les dépenses sociales financées par l'État ont augmenté de 4,4 milliards d'euros en cinq ans, soit 37 % de plus ! Les chiffres parlent d'eux-mêmes : les filets de protection sociale n'ont jamais été si solides dans notre pays. Cette année encore, les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » augmentent de 423 millions d'euros.
Enfin, notre quatrième priorité, c'est évidemment l'exercice des missions régaliennes de l'État, et d'abord la justice, dont nous aurons augmenté le budget de 20 % en cinq ans. Année après année, vous le savez, elle a été le seul ministère à bénéficier de créations d'emplois.
Plus largement, au cours du quinquennat, nous aurons augmenté de 2,2 milliards d'euros les moyens dont disposent les ministères de la défense, de l'intérieur et de la justice, parce que, pour nous, la sécurité, c'est la première des libertés.
Là encore, cet effort s'est accompagné d'une réorganisation en profondeur, car tous les moyens du monde ne suffiront jamais si nous ne transformons pas les structures : c'est pourquoi, par exemple, nous avons agi pour que les forces de police soient là où les Français en ont besoin et quand ils en ont besoin. Entre 2005 et 2009, la Cour des comptes l'a constaté, la part des policiers sur le terrain a augmenté de 10 %.
Tenir un discours de vérité, mesdames et messieurs les députés, c'est dire aux Français que dans l'un des pays les plus taxés au monde, la hausse générale des impôts n'a pas d'avenir.
J'ai bien sûr entendu François Hollande annoncer un « grand soir fiscal », dont les détails restent terriblement flous.
Et comme le dirait Martine Aubry, c'est qu'en réalité, peut-être, il y a un loup.
Oui, j'ai fait les comptes, l'addition de toutes les promesses de la primaire : j'ai trouvé des dépenses – et même beaucoup de dépenses. Je n'ai bien sûr trouvé aucune économie ; mais il n'y a rien d'étonnant à cela, puisque le mot « réforme » a disparu du vocabulaire socialiste. Et en contrepartie, je peux d'ores et déjà vous annoncer une augmentation d'impôts, un choc fiscal de plus de 50 milliards d'euros, qui briserait net une croissance encore convalescente.
Là encore, nous divergeons complètement. Car notre stratégie, c'est d'utiliser la fiscalité comme un complément, et non pas comme un point de départ.
En 2012, nos recettes vont augmenter de 19,2 milliards. Pour la majeure partie, cette augmentation est spontanée et résulte du rattrapage de la baisse des recettes enregistrée pendant la crise. Elle traduit également les effets du plan anti-déficit du 24 août, qui prévoyait 3,6 milliards de ressources supplémentaires pour l'État en 2012. L'essentiel de ces mesures a été adopté au mois de septembre, mais il vous reste à examiner la contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus.
Cette contribution, c'est le prolongement de cinq années d'action pour renforcer l'équité de notre système fiscal. Les leçons de justice fiscale, nous sommes en effet en position de les donner et non de les recevoir. (Rires sur les bancs du groupe SRC.)
Car nous avons fait voter près de vingt-cinq mesures alourdissant la fiscalité des ménages les plus aisés. Stock-options, retraites-chapeau et parachutes dorés : vous les exonériez ; nous les avons taxés !
Les foyers les plus aisés ont plus de revenus, plus d'immobilier et plus de patrimoine.
Eh bien, ils paieront trois fois. Et ce sont aussi les plus hauts patrimoines qui supporteront la réforme de l'impôt de solidarité sur la fortune.
En ce qui concerne plus précisément la contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus, nous avons beaucoup travaillé avec le rapporteur général Gilles Carrez…
…ainsi qu'avec l'ensemble de la majorité pour mettre au point le dispositif le plus équitable possible. Nous avons notamment travaillé sur le seuil d'entrée : il était fixé à 500 000 euros par part dans le projet du Gouvernement, vous avez souhaité abaisser la barre à 250 000 euros ; je soutiendrai cette proposition, qui me paraît juste et équilibrée. Vous augmenterez également le taux de 3 % à 4 % au-delà de 500 000 euros. Cette proposition me paraît également juste et équilibrée.
Au total, entre 2011 et 2012, la charge fiscale des plus aisés, réforme de I'ISF comprise, aura augmenté de près de 2 milliards d'euros. Aujourd'hui, je le dis à la majorité comme à l'opposition, les hauts revenus, surtout ceux du patrimoine, sont plus taxés en France qu'en Allemagne !
Mais pour les classes moyennes, c'est l'inverse. Et c'est juste.
Le deuxième axe de notre politique fiscale, mesdames et messieurs les députés, c'est la poursuite de notre effort sans précédent de réduction des avantages fiscaux et sociaux. Et sur ce point aussi, nous tenons un discours de vérité : nous ne prétendons pas, contrairement à d'autres, qu'il serait facile de supprimer 50 milliards de niches. Pour atteindre ce chiffre, il faudrait en effet remettre en cause des dispositifs qui sont socialement ou économiquement justifiés : allez-vous imposer les prestations familiales ou le salaire des apprentis ? Allez-vous supprimer l'abattement de 10 % sur les retraites ? Allez-vous supprimer la prime pour l'emploi, le crédit d'impôt sur les emplois à domicile ou la TVA réduite pour les équipements des personnes handicapées ? Si c'est le cas, dites-le aux Français, ils ont le droit de le savoir.
Notre effort de réduction des niches, lui, est ambitieux, mais réaliste et juste. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Comme l'année dernière, nous appliquerons donc un rabot de 10 % sur les réductions et crédits d'impôts à l'impôt sur le revenu. Mais nous préserverons les dispositifs qui soutiennent la croissance et renforcent la cohésion sociale,…
…comme les avantages fiscaux liés aux services à la personne et à l'investissement dans le logement social ultramarin.
Enfin, ce projet de budget nous permet d'avancer sur un terrain un peu nouveau, celui de la fiscalité comportementale, avec en particulier la création d'une taxe sur les boissons à sucres ajoutés.
J'ai entendu les propositions des uns et des autres et nous aurons naturellement un débat à ce sujet. Mais dans l'esprit du Gouvernement, les choses sont claires : il s'agit d'une taxe de santé publique,…
…qui vise à modifier les comportements et prévenir l'obésité, notamment chez les jeunes.
Comme vous, monsieur Muzeau, je constate qu'il y a un consensus scientifique sur le lien entre boissons sucrées et surpoids.
L'essentiel, aujourd'hui, c'est donc d'envoyer un message très clair aux entreprises comme aux familles. Et ce message, nous risquons de le brouiller en élargissant l'assiette de cette taxe.
Monsieur Muzeau, lisez les rapports de l'OMS. J'étais ministre de la recherche quand nous avons lancé le plan anti-obésité. Ce que je dis est vrai et vous le savez.
Je sais que vous proposez d'accroître le produit de cette taxe pour pouvoir, en contrepartie, baisser le coût du travail agricole. Cette mesure est souhaitée par le Président de la République pour des raisons de compétitivité de notre agriculture et de convergence franco-allemande.
Mais, en accord avec le ministre de la santé, je souhaite que cette taxe ne soit pas détournée de son objet et qu'elle ne porte que sur les boissons à sucres ajoutés.
Notre stratégie porte ses fruits, car le déficit de l'État baissera de 15 % en 2012.
Nous réduirons en effet de 14,8 milliards d'euros le déficit budgétaire de l'État, avec un solde ramené à 80,8 milliards d'euros. Et, entre 2010 et 2012, nous aurons aussi divisé par deux le déficit de l'assurance maladie et pris plus de deux ans d'avance sur nos objectifs de réduction du déficit de la sécurité sociale. En conséquence, le déficit public baissera de 1,2 point de PIB, passant ainsi de 5,7 % à 4,5 % de la richesse nationale.
La France respectera donc ses engagements grâce à des efforts structurels qui représentent 90 % de cette baisse. En 2011 et en 2012, ce sont 45 milliards d'euros d'efforts que nous faisons, et, pour plus de la moitié, ce sont des économies réalisées sur les dépenses.
Ces économies, mesdames et messieurs les députés, nous les décidons ensemble. Ce ne sont pas toujours des choix faciles, mais ce sont des choix responsables, que nous assumons collectivement. C'est pourquoi – et c'est une démarche inédite – j'ai souhaité que nous travaillions ensemble sur la répartition de l'économie supplémentaire d'un milliard d'euros sur les dépenses. Et nous avons avancé autour d'un principe simple : nul ne doit être exempté de cet effort d'intérêt public.
Nous avons donc mûrement pesé les exceptions à cette règle. Je vous proposerai donc de ne sanctuariser que trois priorités absolues : l'enseignement supérieur et la recherche, l'aide publique au développement compte tenu du drame que connaît actuellement la corne de l'Afrique, et les prestations sociales.
À ces exceptions près, tous les acteurs publics sont appelés à prendre leur part de cet effort, y compris les collectivités locales.
J'ai proposé que ces dernières participent à hauteur de 200 millions d'euros. Pourquoi ? Tout simplement parce que les concours que leur verse l'État représentent 20 % de ses dépenses, et 20 % d'un milliard, cela fait 200 millions.
200 millions d'efforts sur un budget consolidé des collectivités locales de 200 milliards d'euros, soit 1 pour mille : voilà qui me semble un effort mesuré et atteignable.
Toutefois, pour garantir la stabilité et la prévisibilité des ressources principales des collectivités, je suggère de sanctuariser la dotation globale de fonctionnement accordée par l'État aux communes, aux intercommunalités, aux départements et aux régions. Elle sera maintenue au niveau exact de l'an dernier.
L'État supportera, pour sa part, un effort de 800 millions d'euros, qui portera sur les ministères, pour 480 millions d'euros, et sur les opérateurs, pour 320 millions d'euros.
En effet, je vous propose de remettre de l'ordre dans les taxes affectées, qui constituent aujourd'hui un point de fuite inacceptable de la dépense publique, dénoncé par nombre d'entre vous.
Ces principes font aujourd'hui largement consensus et je remercie tout spécialement le rapporteur général, Gilles Carrez, qui a joué un rôle essentiel dans ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP),…
…en lien étroit avec les rapporteurs spéciaux et avec l'ensemble de la majorité, et dans le cadre, j'y insiste, d'une coresponsabilité assumée entre le Gouvernement et le Parlement pour la réduction des déficits.
Mesdames, messieurs les députés, dans les circonstances exceptionnelles que nous traversons, nous avons plus que jamais, collectivement, un devoir de vérité.
Le temps où l'État dépensait sans compter, le temps où les campagnes électorales se gagnaient à coup de promesses de milliards d'euros,…
…ce temps-là est révolu. Et aujourd'hui, plus que jamais,…
…il faut prendre ses responsabilités.
Ce n'est pas à nous qu'il faut dire cela puisque cela fait dix ans que nous ne sommes plus aux responsabilités !
Prendre ses responsabilités, ce n'est pas fermer les yeux, ce n'est pas rêver, c'est regarder la réalité en face, c'est agir, comme le fait le Président de la République.
Je le répète, il n'y a pas d'alternative à la réduction des déficits, il n'y a pas d'alternative aux économies, il n'y a pas d'alternative aux réformes. Dans un pays qui fait déjà partie des plus imposés du monde,…
…il n'y a pas d'autre chemin pour se désendetter.
À tous ceux qui prétendent démondialiser, à tous ceux qui expliquent que l'on peut revenir à la retraite à soixante ans, à tous ceux qui promettent aux Français de ne jamais faire un euro d'économie, je le dis clairement : ne vivez pas dans le déni,…
…parce que votre choix, ce sera de vous renier ou de nous ruiner.
Nous sommes les gardiens de la crédibilité du pays. Cette crédibilité, c'est un bien précieux qui fait de nous une nation respectée et écoutée, une économie solide créatrice d'emplois, protectrice des plus fragiles. Cette crédibilité, notre devoir à tous, dans cet hémicycle, c'est de la préserver.
Réduire les déficits, c'est une priorité nationale…
…et quelles que soient les évolutions de la conjoncture, cet engagement, nous le tiendrons pour les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les députés, l'actualité économique particulièrement chargée de ces dernières semaines donne un relief singulier à la présentation du projet de loi de finances pour 2012 et revêt une importance toute particulière.
Comme vient de le rappeler avec force Valérie Pécresse, la période est incertaine, en France comme dans le monde et ce budget pour 2012 prend la juste mesure de ces difficultés.
À l'heure où certains persistent à préconiser des solutions confuses, contradictoires, déconnectées des réalités économiques et financières, ce projet de budget proposé par le Gouvernement s'appuie sur des choix réalistes et responsables.
Dans cette période incertaine et turbulente, nous ne négligeons aucun signal, nous ne méprisons aucun message. Nous regardons tout, nous écoutons tout.
J'ai entendu ces derniers jours que certains poursuivent l'ambition de « réenchanter le rêve français ». (Sourires.)
Réenchanter le rêve français, pour vous socialistes, cela revient à commettre les mêmes erreurs qu'en 1981. À l'époque, il vous avait fallu deux ans pour comprendre que votre politique ne pouvait conduire qu'au désastre économique : une inflation à deux chiffres, le blocage des prix, le gel des salaires, la France sur le point de demander l'aide du FMI, les dévaluations successives, enfin une explosion du chômage. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
C'est au Parlement que vous vous adressez, vous n'êtes pas dans un préau d'école !
Le slogan de l'époque, c'était : « changer la vie ». Deux années ont suffi à vous faire changer d'avis ! Trente ans plus tard, vous vous drapez dans la même illusion, le même aveuglement.
Mais les temps ont changé. Ce n'est pas en deux ans que la sanction interviendra, mais en deux minutes, à l'issue de la fin du prononcé de tel ou tel discours de portée générale. En deux minutes, vous plongez la France dans les tréfonds d'une dégradation et c'est évidemment les Français qui paieront la facture.
C'est maintenant, c'est tout de suite qu'il vous faut remiser ce projet fou au placard, ce projet qui consiste à faire croire aux gens qu'on peut accumuler les dépenses et imposer un choc fiscal sans précédent, alors que l'enjeu essentiel est de réduire les déficits et de soutenir l'activité.
Mesdames, messieurs les députés du groupe socialiste, pourquoi l'ensemble des économies occidentales se posent-elles la question de l'absence de choix et de la réduction imposée des déficits ?
Pourquoi l'ensemble des gouvernements, de gauche comme de droite, arrivent-ils aujourd'hui aux mêmes conclusions ? Pourquoi les socialistes français sont-ils les seuls à ne pas se poser cette question ?
Comment pouvez-vous proposer simultanément la remise en cause de la réforme des retraites et le retour de l'âge de la retraite à soixante ans, qui coûterait 43 milliards d'euros sur la période 2012-2015, la remise en cause de la réforme générale des politiques publiques dont l'économie s'élève à 4,4 milliards entre 2007 et 2013, la création de 200 000 contrats de génération – je ne comprends même pas ce que ce terme signifie – pour un coût de 8 milliards d'euros, la création de 60 000 postes supplémentaires dans l'éducation, pour un coût de 2,5 milliards d'euros ?
Ces quatre seules mesures constituent en elles-mêmes le caractère de discrédit du projet que vous portez, que vous continuez de défendre ici même,...
Comment avez-vous fait pour qu'il y ait aujourd'hui dans notre pays 4 millions de chômeurs ?
…et je ne doute pas que vous continuerez de le défendre dans un aveuglement et une cécité incroyable.
Comment avez-vous fait pour qu'il y ait aujourd'hui dans notre pays 9 millions de pauvres ?
Vous refusez de regarder le monde tel qu'il est. Les conséquences immédiates de votre politique, ce ne serait pas le réenchantement du rêve français, mais évidemment le cauchemar éveillé ! Vous avez raison de sourire, car vous êtes encore dans l'élan des deux mois de campagne qui vous ont animés les uns contre les autres. Mais qu'avez-vous gagné ? Une victoire de l'un contre l'autre ! C'est à l'intérieur de votre famille que vous vous êtes battus.
Et aujourd'hui, vous êtes lestés d'un projet que tous les observateurs considèrent comme étant dépassé.
Vous avez été aux affaires, certains d'entre vous ont même exercé des responsabilités ministérielles.
Vous pouvez fermer les yeux, c'est votre choix…
…mais vous n'avez pas le droit de fermer les yeux des Français. C'est irresponsable.
Entendez-moi bien : il ne s'agit pas pour vous de donner quitus à la politique du Gouvernement. Il ne s'agit pas pour vous d'être liés par le bilan du quinquennat de Nicolas Sarkozy. Il s'agit de prendre la seule voie qui permettra à la France de sortir de la crise au plus vite.
Depuis deux mois, vous faites des chèques électoraux, mais vous ne pouvez pas adresser la facture aux Français sans mettre en face une politique responsable. C'est cette politique responsable que le Gouvernement propose à travers ce budget dans le cadre d'une stratégie cohérente et adaptée aux circonstances.
Ce n'est ni la pensée unique, ni la politique unique.
Si nous étions les seuls à le faire, vous pourriez dire que c'est Nicolas Sarkozy qui est responsable de tout. Mais tous les pays, les États-Unis, l'Espagne, le Portugal, la Grèce, l'Irlande, l'Italie, sont confrontés aux mêmes difficultés.
Que je sache, ils ne sont pas tous gouvernés par Nicolas Sarkozy.
Ils doivent gérer l'impact d'une crise sans précédent. Sortez de ce slogan, regardez la réalité, ouvrez les yeux, changez votre projet.
Avant l'été, vous aviez élaboré un projet qui était déjà dépassé. Depuis, beaucoup de choses se sont passées. Mais vous continuez à nier ces réalités. Et depuis les primaires, vous n'avez même pas vu, ni compris, ni regardé, ni entendu ce qu'il fallait faire en matière de stabilité, de coordination de nos politiques européennes.
Monsieur le président, c'est un détournement de la procédure parlementaire !
L'ensemble des pays européens est engagé dans la réduction des déficits publics. Aucun pays occidental, compte tenu de son niveau de dette – pas même l'Allemagne – ne propose des augmentations de dépenses et des additions d'impôts dont la seule conséquence sera d'étouffer la croissance convalescente. Il est encore temps, rue de Solferino, de revoir sa copie.
Je vous ramène peut-être à l'euphorie de cette journée de dimanche, qui, à l'évidence, a altéré votre capacité de jugement…
…qui se lit sur vos sourires.
Écoutez bien ce que vous disent vos propres amis ou celles et ceux que vous avez soutenus.
François Hollande, dimanche soir dernier, a reçu le soutien de Martine Aubry – fort bien. Très fier de sa victoire, il l'en a remerciée.
Êtes-vous donc journaliste ? Vous vous mettez à commenter l'actualité maintenant ?
Or Martine Aubry lui a attaché au pied un sacré boulet. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Ce boulet a un prénom : le projet ; il a un nom : socialiste.
Ce projet socialiste, si vous ne vous en écartez pas, sera le critère de vérité que les Français choisiront pour refuser non pas l'alternance simple et douce mais un choix inique et incompatible avec les exigences du temps.
Le moment de vérité, pour vous, ce sera en avril ou en mai de l'année prochaine !
Il faut en revenir à l'histoire car de l'histoire vous ne retenez que la saveur d'une victoire solitaire, celle de 1981.
La victoire, vous ne la revivrez pas dans les mêmes circonstances, pour peu que vous la remportiez.
Votre projet, qui a plus de trente ans de retard, ne peut prospérer dans des temps incertains et turbulents. Vous pensez encore qu'il peut constituer une bouée de sauvetage alors qu'il est une ancre qui va entraîner le paquebot France vers le fond. Voilà la réalité. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Voilà vingt minutes que vous vous exprimez sans avoir encore abordé le budget !
Que penser de votre réaction à l'annonce de la position de l'agence Moody's de « surveiller » la note de la France ? Vous affirmez vouloir prendre les mesures nécessaires pour protéger le pays alors que le projet que vous défendez va exactement à l'opposé de ce qu'il convient de faire.
Nous y reviendrons dans la motion de renvoi en commission, monsieur le ministre !
Si vous voulez prendre les mesures vraiment nécessaires pour protéger l'excellence de notre notation,…
…retournez-vous pour aller dans la bonne direction.
Voter ce budget est le meilleur service que vous puissiez rendre à la nation. Avant de vous en présenter les grands axes (« Ah ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR)…
Cela vous gêne-t-il donc que j'évoque votre projet ? (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous regrettez que nous n'ayons pas assuré la promotion des primaires, mais, quand on parle de vous, vous protestez aussi ! Au fond, que soutenez-vous à part vous-mêmes et que combattez-vous à part vous-mêmes ? (Mêmes mouvements.)
Je reviens brièvement sur la stratégie du Gouvernement développée par Valérie Pécresse. Le monde, l'Europe en particulier, est secoué par des dérèglements inédits : surendettement des États, accumulation de déséquilibres des balances de paiement courants, systèmes bancaires fragilisés par des prises de risque excessives.
Ces difficultés nous incitent à opérer des réformes de grande envergure. Dans les enceintes internationales du G20 et du G7, comme au sein de la zone Euro, le Président de la République et le Gouvernement y travaillent avec détermination. C'est dans ce contexte que le Gouvernement poursuit son effort historique de réduction des déficits publics.
Cette politique, nous ne la menons pas pour satisfaire les marchés ou les agences de notations,…
…même s'il est important de rassurer les investisseurs afin de continuer de bénéficier de taux d'intérêt bas. Un État endetté est un État faible et dépendant des marchés financiers. Un État endetté est un État qui perd sa souveraineté et la maîtrise de son destin.
Les difficultés que traversent certains de nos partenaires en apportent la démonstration.
Le rétablissement de nos finances publiques, c'est la condition de notre indépendance vis-à-vis des marchés, la seule voie de l'équité vis-à-vis des générations futures, la condition indispensable pour permettre aux Français de retrouver le chemin de la croissance, de l'emploi et de la prospérité. Lorsqu'un État est en déficit, il n'existe pas de solution miracle. Il faut rééquilibrer les recettes et les dépenses.
Certains préconisent une augmentation massive des impôts.
Toujours les mêmes !
Choisir cette voie alors que la France a le niveau de prélèvements obligatoires le plus élevé de l'OCDE aurait de graves conséquences.
Les ménages, les entreprises, ne peuvent supporter un choc fiscal de 50 milliards d'euros d'impôts supplémentaires prévus par votre projet. Cette somme correspond à 2,5 points de PIB : comment une économie convalescente pourrait-elle supporter un tel choc ?
Vous ne pouvez pas avancer cela, personne n'y croit et pas même vous d'ailleurs. Quel Français peut croire que ce n'est pas la crise qui est à l'origine de la situation des déficits ?
Quel Européen, quel Américain peut-il le croire ? Puisque vous êtes dans le déni de la réalité, considérez-vous que c'est M. Zapatero, président socialiste du gouvernement espagnol, qui soit responsable de la crise dans son pays ?
Il a d'ailleurs été conduit à provoquer une dissolution…
…et il s'est sacrifié lui-même sur l'autel de la responsabilité parce qu'il n'était pas en mesure non pas de trouver un accord avec son opposition qui, elle, s'est montrée responsable, mais parce qu'il s'est trouvé dans l'incapacité d'offrir une dynamique supplémentaire à son pays dont la situation s'était dégradée.
Nous ne voulons pas de la politique que vous prônez, mais vous n'entendez toujours pas le message. Nous continuerons par conséquent de vous le rappeler et nous continuerons de surligner au feutre fluorescent les dispositions irréalistes de votre projet, nous continuerons d'écraser la craie pour en montrer le caractère caduc et nous continuerons d'affirmer que François Hollande, votre candidat depuis dimanche, le traînera comme un boulet.
C'est en effet un discours de vérité que nous devons aux Français pendant les mois qui nous séparent de cette grande respiration démocratique qu'est l'élection présidentielle.
Le Gouvernement poursuit sa stratégie économique avec constance et détermination.
C'est justement cette stratégie qui s'appuie sur des réformes de structure, sur des réformes en profondeur,…
…sur la protection d'une croissance convalescente qui doit être entretenue et non remise en cause par des slogans, par des facilités de langage qui ne correspondent à rien de ce que nous vivons en France, de ce que l'Europe traverse, de ce que le monde entier doit affronter.
Comme nous nous y étions engagés, Valérie Pécresse l'a rappelé, nous avons plafonné les niches fiscales et sociales.
C'est ça : vous n'êtes pas responsables car vous seriez arrivés au pouvoir après leur création !
Comme nous nous y étions engagés, nous avons mis en oeuvre de nouvelles règles pluriannuelles de maîtrise des finances publiques. Comme nous nous y étions engagés, nous avons conduit des réformes de structure nous permettant de consolider nos régimes sociaux,…
…je pense à la réforme des retraites que vous continuez de contester aujourd'hui encore.
Pour 2011, compte tenu de l'environnement économique international, nous nous sommes adaptés et avons revu notre hypothèse de croissance à 1,75 %. Nous en avons tiré toutes les conséquences…
…avec courage, force et lucidité, bref, avec un esprit de responsabilité. Dès la fin du mois d'août, nous avons pris les mesures complémentaires pour nous assurer du respect de notre objectif de déficit.
Le Premier ministre l'a rappelé hier soir, nous voulons tenir un discours de vérité vis-à-vis des Français et vis-à-vis de nos partenaires. Comme nous l'avons fait au mois d'août, après avoir révisé les chiffres de la croissance, nous saurons prendre toutes les mesures nécessaires, en temps réel, pour adapter notre politique économique à l'évolution de la conjoncture mondiale – je ne reviens pas sur les excellents propos de Valérie Pécresse concernant la trajectoire à suivre en matière de réduction des déficits publics.
Ce projet de budget pour 2012 s'inscrit dans un contexte international incertain. Je vous rappellerai quelques chiffres puisque vous ne semblez pas les entendre, et ce ne sont pas les chiffres du Gouvernement.
Il s'agit de faits qui expliquent la réalité du ralentissement économique mondial.
Le prix du pétrole en dollars, ce n'est tout de même pas Nicolas Sarkozy qui le fixe ! Sa hausse, d'environ 35 % au premier semestre, est due notamment à ce qui s'est passé dans le monde arabe et en particulier en Libye, quatrième exportateur africain. L'activité économique s'en est ressentie.
La croissance a ralenti ces derniers mois aux États-Unis. Or c'est Barack Obama qui en est le président, pas Nicolas Sarkozy !
Et le ralentissement américain a naturellement un impact sur la croissance mondiale.
Les tensions sur les dettes souveraines, que ce soit aux États-Unis ou dans la zone euro, ce n'est pas le Président de la République qui en est responsable ; c'est un fait qui s'impose à nous depuis l'extérieur.
Et l'Allemagne ? Ce n'est pas le Président de la République qui la dirige mais la chancelière allemande. L'Allemagne subit elle aussi, comme la France, les aléas de la conjoncture. Notre premier partenaire commercial a connu un ralentissement de sa croissance au deuxième trimestre.
Ces paramètres objectifs, sérieux, qui s'imposent à nous ont un impact important sur la situation de notre économie, de nos banques, de nos entreprises, de nos emplois et donc sur chacun de nos concitoyens.
Pourtant, dans ses prévisions les plus récentes, l'INSEE table sur une légère augmentation de la croissance au troisième trimestre – 0,3 % –…
…et, malgré les turbulences des marchés financiers, l'économie réelle résiste. Là aussi, il s'agit d'un fait.
Le discours de vérité que nous entendons tenir doit mettre en perspective les éléments positifs sans ignorer l'ampleur des défis auxquels nous devons faire face, sans non plus méconnaître les rééquilibrages actuellement à l'oeuvre dans le monde.
Un grand nombre d'États s'engagent dans la voie du désendettement. Dans la zone Euro, les efforts budgétaires consentis par la Grèce, l'Italie, l'Espagne et le Portugal restent sans précédent. Les États-Unis, pour leur part, ont présenté un plan ambitieux, conforme aux fondamentaux de leur économie. Pour l'année 2012, leur croissance est estimée à 2 %. Les économies des pays émergents devraient rester dynamiques en 2012 et le plan de reconstruction au Japon devrait tirer sa croissance vers le haut. Enfin, la situation en Libye permettra une reprise de ses exportations pétrolières. Voilà d'autres éléments à intégrer à l'analyse concernant la partie positive.
Par ailleurs – et c'est un point important – les États – et c'est la seule réponse efficace, possible et pertinente – conjuguent leurs efforts pour protéger l'économie.
Déjà en 2008-2009, sous l'impulsion du Président de la République, le G20 était parvenu à stopper l'effondrement des marchés.
La problématique a changé par rapport à 2008, mais la même méthode s'impose, à savoir la coordination des politiques publiques puisque l'enjeu porte sur la dette des États et donc sur la dette publique.
Dans le cadre européen – un mot de conjoncture –, nous avons pris des mesures essentielles pour assurer la viabilité des finances publiques et mettre en oeuvre les décisions prises le 21 juillet 2011. Ce plan a été adopté par tous les pays de la zone Euro. Il permettra d'accroître la capacité d'action du Fonds européen de stabilité financière.
À l'heure où certains sont tentés par le repli sur soi, chacun doit être conscient que revenir sur les acquis de la construction européenne aurait des conséquences dramatiques. Je ne doute pas que nous pourrons, au moins sur ce point, nous retrouver.
La priorité, aujourd'hui, c'est l'amélioration de la gouvernance de la zone Euro. La France et l'Allemagne y travaillent. Nous voulons instaurer une capacité de décision rapide et efficace, et faire davantage converger nos politiques budgétaires. Nous devons également, à l'égard de nos opinions publiques, tirer les leçons de ces crises à répétition. Le statu quo du fonctionnement de la zone Euro n'est plus possible.
L'intégration budgétaire, la convergence des politiques fiscales ne devraient pas être contestées : il s'agit d'une politique de responsabilité,…
…la seule à même de garantir, de sauvegarder ce qu'il y a de plus précieux dans la construction européenne, ce qui nous lie à chaque instant, c'est-à-dire une monnaie commune.
À ce titre, le rendez-vous de dimanche est évidemment important. La France travaille à une proposition de réponse forte, structurée, stable, durable et globale pour garantir la stabilité de la zone Euro.
Il faudra pour cela apporter une réponse à la situation économique de la Grèce, à la maximisation, et donc à l'efficacité du Fonds européen de stabilité financière – amorce de Fonds monétaire européen –, à la capacité des banques à affronter les chocs les plus sévères, en intégrant le risque souverain et donc leur éventuelle recapitalisation.
Le même esprit nous anime au sein du Gouvernement, sous l'égide du Président de la République, dans la perspective du G20, que présidera la France jusqu'au sommet de Cannes de début novembre.
Le G20 finances s'est achevé samedi dernier par un consensus aux termes duquel les membres du G20 s'engagent à prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver la stabilité des systèmes bancaires et des marchés financiers.
Les banques centrales ont renouvelé leur engagement durable à continuer de fournir aux banques les liquidités nécessaires. Aussi, à ceux qui s'interrogent sur le fait de savoir si les banques ont des problèmes de liquidité, je réponds qu'elles n'en auront pas puisque les banques centrales seront présentes et de façon illimitée : 5 000 milliards d'euros de collatéraux seront disponibles pour les liquidités dont les banques auraient besoin. Il n'y a donc pas de question à se poser sur le rétrécissement de l'accès au crédit auprès des entreprises ou auprès des particuliers. Il s'agit d'un message que le Gouvernement adresse aux établissements bancaires.
Nous devons par ailleurs rester attentifs à ce que les banques françaises atteignent les objectifs définis par les accords de Bâle III, sans pour autant resserrer le crédit aux entreprises et aux particuliers. Les établissements de crédit français ont un accès aux financements suffisant. Ils ont déjà considérablement augmenté leurs fonds propres : 50 milliards d'euros en l'espace de deux ans. Ils devront poursuivre cette voie. Nous sommes en train de définir une coordination européenne sur ce type de dispositif.
Nous avons discuté hier, un peu dans le même esprit qu'en ce moment, ce que je regrette, des modalités de restructuration de la banque Dexia. La situation financière de Dexia nécessitait une réaction très rapide et coordonnée.
Étant donné le modèle très spécifique de cette banque, et parce qu'elle implique fortement les collectivités locales françaises ainsi que les déposants belges et luxembourgeois, le Gouvernement s'est immédiatement mobilisé – comment pouvez-vous le lui reprocher ? – pour apporter sa garantie au plan de restructuration ordonnée proposé par Dexia.
C'est un pôle public qui se met en place, dispositif qui fait partie des quelques rares bonnes mesures de votre projet. Or si vous l'appeliez de vos voeux, pourquoi donc avoir voté contre ?
Nous vous avons répondu hier, ce n'est pas la peine de vous faire polémique en permanence !
Le projet de loi de finances pour 2012 est un acte de constance et de détermination. C'est aussi, j'ai la faiblesse de le penser, un acte de courage politique car il emprunte la seule voie réaliste, celle qui nous permettra de redresser durablement nos comptes publics.
La crise que nous traversons depuis 2008 est partie des États-Unis avec la crise des subprimes, qui s'est poursuivie avec la faillite de Lehman Brothers, laquelle a entraîné la crise du système bancaire mondial – dont l'épicentre était encore les États-Unis.
L'une des répliques touche aujourd'hui l'Europe avec la crise des dettes souveraines. La facilité consistant à en faire porter la responsabilité à un gouvernement ne résiste désormais à aucune analyse,…
…ni à celle de l'opinion publique, ni à celle des investisseurs.
Les querelles partisanes qui ont agité les États-Unis au cours de l'été dernier et ont entraîné la dégradation de la note souveraine américaine doivent nous servir de leçon.
La qualité du débat politique est lue comme un élément important dans l'appréciation de la confiance portée à un pays.
Ce débat doit être à la hauteur de ces exigences et des enjeux budgétaires et financiers auxquels la France, comme d'autres pays, doit faire face.
Commençons par nous entendre sur le diagnostic. Nous divergerons peut-être sur les réponses à apporter. Mais au moins, entendons-nous sur le diagnostic. Nous aurons déjà fait une partie du chemin.
En proposant pour la France un budget cohérent, un budget de vérité, un budget qui fixe le cadre de notre politique économique pour l'année prochaine, nous conservons le cap tout en nous adaptant aux circonstances. Nous prenons nos responsabilités. Nous les assumons. Et nous pourrons, nous, dans quelques mois, regarder les Français dans les yeux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Article 58, alinéa 1, relatif au déroulement de la séance, monsieur le président.
Je voudrais exprimer ici la stupéfaction qui a été la mienne en écoutant M. le ministre de l'économie et des finances, M. Baroin. Nous sommes à l'Assemblée nationale, monsieur le président, mes chers collègues. Et nous entendons le ministre de l'économie qui se trompe d'endroit, qui se croit aujourd'hui à la convention nationale de l'UMP consacrée à la mise en coupe réglée du projet du parti socialiste, se livrant à des attaques qui n'ont aucun sens, caricaturales, contre le candidat du parti socialiste, François Hollande.
Est-ce que vous mesurez, monsieur le ministre, le côté presque pathétique de votre intervention ? Est-ce que vous oubliez un instant que ceux qui gouvernent, dont vous-même, sont au pouvoir depuis dix ans, et que Nicolas Sarkozy, à la fin de son quinquennat, laissera la France en plus mauvais état qu'il ne l'a trouvée au début ? Croyez-vous que les Français ont oublié que vous avez multiplié les déficits et la dette, que vous avez accru les inégalités et la précarité dans notre pays, que vous avez été incapables de construire une alliance de confiance avec l'Allemagne, pour réorienter l'Europe dans le sens de la croissance et de l'emploi ? (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP.)
C'est votre responsabilité ! C'est votre bilan ! Alors, revenez un peu aux réalités ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le président, afin que le Gouvernement retrouve un peu plus de sérénité et de dignité dans un débat qui est consacré à la loi de finances, je demande une suspension de séance.
Je vais suspendre la séance. Mais auparavant, je donne la parole à M. le ministre, qui me l'a demandée.
Mais il ne s'en lasse pas, monsieur Emmanuelli.
Monsieur Ayrault, par respect pour votre fonction, et puis, au fond, par respect pour la vie partagée sur ces bancs depuis près de vingt ans, puisque cela fait au moins près de vingt ans que nous nous croisons et recroisons ici, je vous pose juste une question : si, ici, on ne parle pas de politique, des enjeux démocratiques, de l'avenir de la France, où est-ce qu'on en parle ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Rappel au règlement
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures trente-cinq, est reprise à dix-sept heures quarante-cinq, sous la présidence de Mme Catherine Vautrin.)
La séance est reprise.
La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Madame la présidente, madame la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, mes chers collègues, je vais parler du budget. (« Ah ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Le fil directeur de ce projet de loi de finances pour 2012, c'est clairement, il faut l'assurer, la poursuite de la réduction du déficit public. Ce point doit être d'autant plus souligné que 2012 est une année électorale. Je veux donc commencer par rendre hommage à la vertu du Gouvernement,…
…qui, malgré une année électorale, nous propose un budget sincère, comportant une réduction des déficits de 1,2 point de PIB, c'est-à-dire 23 milliards d'euros sur l'ensemble de nos comptes publics.
Je ne peux que me souvenir, et c'est d'ailleurs un très mauvais souvenir, de la première loi de finances que j'ai présentée en qualité de rapporteur général. La première fois laisse toujours un souvenir particulier ; c'était la loi de finances rectificative de juillet 2002. Ce sera la seule allusion que je ferai à la gestion passée, mais en juillet 2002, il a fallu corriger de fond en comble une loi de finances totalement obsolète, Michel Bouvard et Charles de Courson s'en souviennent.
Les dépenses étaient sous-estimées de trois à quatre milliards d'euros, et les recettes étaient surestimées dans les mêmes grandeurs.
Tel n'est pas le cas de ce budget.
L'autre point que je souhaite souligner, madame la ministre, est que votre budget repose solidement sur deux pieds. Le premier en est la maîtrise des dépenses, je souhaite m'y attarder, car ce point n'a pas été suffisamment souligné. La maîtrise de la dépense publique est la colonne vertébrale de ce projet de budget pour 2012.
Le second pied sur lequel repose ce projet de budget est constitué par ce que je ne veux pas nommer augmentation d'impôts, mais que je qualifierai de consolidation de recettes. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Cette consolidation des recettes s'opère par le biais d'une réduction de niches fiscales. Mais le choix des différents éléments de consolidation des recettes n'obéit qu'à une seule préoccupation : ne pas prendre le risque d'altérer la croissance de notre pays, et en particulier les deux moteurs de cette croissance que sont la consommation et la compétitivité des entreprises. Ce projet n'altère donc en rien le pouvoir d'achat des ménages, ni la capacité d'investissement des entreprises.
Vous le voyez, nous sommes sur la trajectoire de réduction des déficits publics, hors de laquelle nous ne pourrions pas conserver la plénitude de notre souveraineté nationale. Loin de moi l'idée d'employer de grands mots, mais il faut bien que nous soyons conscients, dans ce monde où tout bouge de semaine en semaine, que préserver nos conditions de financement grâce au respect de nos engagements de réduction de déficit est devenu une condition de souveraineté nationale.
Depuis cet été, les mauvaises nouvelles s'enchaînent, et en ce début d'automne, on ne peut pas dire que cet enchaînement se soit interrompu.
Au mois de juillet, la note de la dette souveraine des États-Unis a été dégradée. Puis est survenu le problème de la Grèce, et le plan du 21 juillet mis en place à l'initiative de la présidence française, mais qui n'a pas encore pu être mis en oeuvre. Je vous rappelle que le parlement slovaque ne l'a voté que la semaine dernière. Ainsi, l'incertitude a été alimentée, et, dans ce climat, les marchés financiers se sont précipités sur des actions spéculatives, ce qui explique que la situation se soit détériorée.
La France est un pays complètement ouvert sur l'Europe, et sur le monde, et il n'est donc pas étonnant que, face à ces conditions internationales en dégradation constante depuis la mi-juin, nos prévisions de croissance pour 2011, mais plus encore pour 2012, se soient progressivement détériorées.
Ainsi, au mois de juin, dans le cadre du débat d'orientation budgétaire pour l'année 2012, nous espérions conserver un taux de croissance autour de 2 %. Aujourd'hui, nous prévoyons un taux de croissance de 1,75 %. Et il faut être lucides : nous étions satisfaits de la croissance de 0,9 % que nous avons connue au premier trimestre de l'année 2011, car elle permettait d'entretenir de beaux espoirs. Mais ce qui compte souvent dans l'élaboration des prévisions budgétaires, ce n'est malheureusement pas le premier trimestre, mais plutôt les troisième et quatrième trimestres. C'est ce que l'on appelle l'acquis de croissance.
Malheureusement, comme dans tous les autres pays – il se passe la même chose en Allemagne aujourd'hui –, nous terminerons l'année avec un faible acquis de croissance. De ce fait, la prévision de croissance pour 2012 de 1,75 % est une prévision qui exigerait un rebond extraordinairement favorable dès le deuxième trimestre de 2012.
Il faut l'espérer. Pour ma part, je pense que le Gouvernement a raison, après avoir abaissé la prévision de croissance à plusieurs reprises, de ne pas continuer aujourd'hui. Mais nous devons être conscients qu'il faudra peut-être prendre des mesures d'ici la fin de l'année, par exemple dans le cadre du collectif budgétaire, pour procéder aux ajustements nécessaires. Rien ne serait pire que de ne pas tenir nos engagements de réduction de déficit. Cet objectif n'est pas hors de portée, il faut tenir un langage de vérité : 0,5 % de croissance en moins équivaut à 5 à 6 milliards de recettes en moins. On ne me fera jamais croire qu'il n'est pas possible de compenser 5 à 6 milliards de perte sur plus de 1 000 milliards de dépense publique. Entre l'État, les comptes sociaux et les collectivités territoriales, nous pouvons trouver de quoi compenser.
Le Gouvernement a réagi très vite, cela n'a pas été suffisamment souligné. Dès le 24 août, c'est-à-dire en plein été, le Premier ministre a annoncé tout un ensemble de mesures avec effet, pour une partie d'entre elles, dès 2011. Nous avons sécurisé au mieux possible l'objectif de réduction de déficit pour 2011, puisque nous devons terminer cette année à 5,7 % de déficit. C'est un aspect absolument déterminant, parce que la prévision que nous allons voter dans le cadre de la loi de finances pour 2012 restera une prévision au début de l'année prochaine, même si les conditions générales internationales continuaient à se dégrader.
Mais comment cette prévision sera-t-elle jugée par les analystes lorsqu'elle sera publiée par Eurostat en février ou mars prochain ? Elle sera jugée en fonction des résultats que nous aurons eus sur l'exécution 2011. C'est pourquoi l'Assemblée a accentué la sécurisation de l'exécution de 2011 dans la loi de finances rectificative votée début septembre, et le Sénat l'a votée conforme. Ce point n'a peut-être pas toujours été bien compris, mais au vu des événements de ces dernières semaines, je pense que les propositions de la commission des finances, et que le Gouvernement a acceptées, étaient bonnes.
Nous avons essayé de modifier le seul paramètre sur lequel nous avions encore une capacité d'action dans le cadre de l'exécution 2011 : le cinquième acompte d'impôt sur les sociétés. Contrairement à l'impôt sur le revenu ou la TVA, l'impôt sur les sociétés s'applique à l'exercice même de l'entreprise. Il est possible de le modifier sans altérer la compétitivité des très grandes entreprises.
C'est la raison pour laquelle nous avons pris deux mesures. Dès juillet, j'avais proposé dans le rapport qui a été approuvé par la commission des finances que nous sanctuarisions une partie du bénéfice par rapport au report déficitaire, et le Gouvernement a repris cette idée. Mais nous sommes allés plus loin en appliquant l'augmentation de la quote-part de 5 % à 10 % sur les plus-values et en supprimant le bénéfice mondial consolidé dès l'exercice 2011.
Nous avons eu d'autant plus raison qu'il est aujourd'hui question de réviser l'accord du 21 juillet 2011, en accentuant la restructuration de la dette grecque, ce qui fera peut-être plaisir à Charles de Courson qui plaidait en ce sens depuis deux ans. La dévaluation des avoirs ne serait plus de 21 % mais peut-être de 40 % à 50 %.
Cela signifierait que les institutions financières, qui représentent, en année courante, entre un cinquième et un quart du produit de l'impôt sur les sociétés, vont passer des provisions beaucoup plus importantes dès l'exercice 2011. Nous serons alors très heureux, face à cette perte d'impôt sur les sociétés des institutions financières, de bénéficier des mesures que nous avions proposées et que la ministre a acceptées dans le collectif budgétaire de septembre.
Si je m'étends sur ces aspects, c'est pour que chacun d'entre nous comprenne bien une chose : indépendamment des polémiques, notre devoir, dans une situation très mouvante et qui nous échappe, dans le sens où de nombreux événements dépendent d'éléments internationaux, est de tout faire, avec la réactivité maximale, pour protéger la croissance de notre pays, et les engagements de réduction de déficit que nous avons pris. Ce devrait être le fil conducteur du débat budgétaire dans les prochaines semaines.
D'ailleurs, madame la ministre, les décisions que nous avons prises en commission des finances, et dont l'essentiel recueillera votre accord, ont toutes pour but de protéger les recettes. Nos propositions vous apportent des recettes supplémentaires, ce qui me paraît essentiel dans le contexte actuel. Le ministre disait tout à l'heure que les États-Unis ont payé la dégradation de leur dette du fait de leur incapacité politique à trouver un accord sur l'augmentation du plafond de la dette. Au contraire, nous avons montré, avec le collectif budgétaire de septembre, que nous étions capables de réagir immédiatement. La commission des finances a fait des propositions responsables, et nous l'avons fait à nouveau la semaine dernière au titre du projet de budget pour 2012.
C'est pourquoi, je le dis aux collègues de l'opposition, je n'ai pas compris votre vote d'hier.
C'est un vote contraire à l'intérêt national, lié à des considérations partisanes, et vous ne pouvez pas nous reprocher de parler de politique dans cet hémicycle alors qu'hier, vous avez fait de la mauvaise politique politicienne contre les intérêts de la France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Je souhaite dire quelques mots des dépenses. J'ai lu ici ou là que l'effort en dépenses était insuffisant ; je ne partage pas ce point de vue.
Monsieur de Courson, vous le savez mieux que quiconque : pour maîtriser la dépense publique, il faut un travail de longue haleine, progressif, méthodique, et dont la qualité première est la constance.
Prenons deux exemples. En premier lieu, le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.
La première année, vous ne gagnez pas grand-chose : 300, 400, 500 millions. La seconde année, vous ajoutez à nouveau 500 millions. La troisième année, cela représente une véritable économie.
Deuxième exemple : la règle dite du zéro volume devenue également zéro valeur. Elle ne produit pas non plus grand-chose au début. Mais, au bout de deux ou trois ans, elle conduit à réaliser de véritables économies structurelles.
Les chiffres, au titre de l'exécution 2011, sont très intéressants. Je parle des seules dépenses de l'État : sur l'exécution 2011, l'économie globale représente plus de 4 milliards d'euros par rapport à ce qu'aurait été la tendance si nous n'avions rien fait – cela commence à compter ! Nous avons un milliard en brut au titre du non remplacement d'un fonctionnaire sur deux ; 800 millions, en brut, au titre du gel des dotations aux collectivités locales ; 250 millions sur un certain nombre de dépenses de fonctionnement ; 1,5 milliard sur les dépenses d'intervention, en particulier les dépenses de guichet ; et 700 millions sur les dépenses discrétionnaires. Au total, cela fait 4 milliards. Cet effort est poursuivi en 2012.
Certains éléments concernant la dépense sont favorables pour 2012. Premier élément : nous avons aujourd'hui – et on voit bien là l'importance du maintien de notre notation AAA – une baisse tellement importante des taux d'intérêt, par rapport à la loi de programmation votée en décembre dernier, que nous devrons verser 1,7 milliard d'euros d'intérêts en moins en 2012.
En revanche, nous avons 600 millions de plus sur les pensions ; mais nous avons, en net, un milliard d'économies. Ce montant d'un milliard aurait été recyclé, en d'autres temps, sur les autres dépenses. Mais ce ne sera pas le cas, car nous avons introduit une nouvelle règle depuis un an : toutes les autres dépenses du budget de l'État qui ne sont pas liées au passé – ni intérêts de la dette, ni dépenses de pensions – doivent rester à zéro. On a donc là un milliard en net d'économie structurelle.
Par ailleurs, M. le Premier ministre a demandé, le 24 août dernier, à juste titre, qu'un effort supplémentaire soit effectué afin de réduire encore les dépenses d'un milliard d'euros. Un milliard d'euros sur 350 milliards de dépenses de l'État, en réintégrant les prélèvements sur recettes, ce n'est pas hors de portée. Nous avons commencé à travailler, à l'initiative du Gouvernement, dans plusieurs directions.
Premièrement, en direction des opérateurs de l'État ; Prenons l'exemple du Centre national du cinéma, c'est peut-être le plus emblématique. Il a connu une forte progression de ses recettes. Il est normal que celles-ci ne restent pas acquises au Centre national du cinéma, sinon cette progression de recettes sera convertie en dépenses en faveur du cinéma. Qu'est-ce qui est le plus important lorsqu'on dispose, ici ou là, d'un euro supplémentaire de recettes ? Faire un euro supplémentaire de dépenses, ou consacrer cet euro à diminuer le déficit ? Aujourd'hui, le choix est clairement de faire baisser le déficit.
J'ai cité le CNC. Je pourrais citer également les agences de bassin. Et je vais déposer un amendement sur France Télévisions, en soutien à celui proposé par Patrice Martin-Lalande, qui a été adopté en commission des finances. En effet, France Télévisions a bénéficié deux années de suite d'un excédent de recettes publicitaires de 150 millions d'euros, par rapport aux prévisions de son contrat d'objectif et de moyens : je ne trouve pas normal que cette somme de 300 millions d'euros soit tout entière acquise à France Télévisions Je trouve légitime – et c'est la responsabilité de la représentation nationale – que la moitié au moins de cette somme soit affectée à la réduction du déficit. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
J'en viens aux collectivités locales, et je me tourne vers nos collègues de l'opposition. Ils pensent absolument impossible de trouver 200 millions d'économies sur les 220 milliards de dépenses des collectivités. Je ne suis pas d'accord. Entre 1990 et 2009, sur une période de vingt ans – ce qui représente déjà une période significative – les effectifs des collectivités territoriales ont augmenté, en moyenne, de 36 000 personnes par an, soit 700 000 en vingt ans, sans compter les transferts de personnels liés à la décentralisation.
Qu'on ne nous dise pas qu'il est impossible de trouver des marges de manoeuvre. Mais les deux ministres ont compris – l'un d'eux préside l'exécutif d'une grande ville de France – qu'il y a des points intangibles. On ne touchera pas à la DGF, elle ne diminuera pas en 2012 par rapport à 2011 ; l'engagement de l'État est totalement respecté.
Elle ne diminuera, ni pour les communes, ni pour les départements, ni pour les régions.
De plus, monsieur Muzeau, on ne touchera pas au FCTVA, qui restera un remboursement.
Je pense que vous nous ferez bientôt, madame la ministre, des propositions sur ces deux points. Je pense que l'on peut, que l'on doit, trouver ces 200 millions. Il s'agit d'une question de solidarité nationale. Les collectivités locales, même si nous sommes tous ou presque élus locaux, doivent participer à l'effort général.
Et puis il faut corriger certaines choses. J'espère, madame la ministre, que vous soutiendrez l'excellent amendement de Hervé Mariton sur le bonus-malus automobile, qui consiste à supprimer le compte de concours financier. On ne peut pas accepter que le fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres continue à être déséquilibré. Hier, lors de l'examen du collectif budgétaire sur le sauvetage de Dexia, nous avons été conduits à ajouter 35 millions de crédits pour abonder le bonus écologique. À la fin de l'année 2011, un déficit de 215 millions sera enregistré. Ce n'est pas acceptable. Nous devons nous obliger à parvenir à l'équilibre dès l'année 2012.
Je vais aborder le chapitre des recettes. L'essentiel des mesures a été voté dans le cadre du collectif de septembre, notamment la réforme des plus-values immobilières et l'augmentation des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine. Le projet de budget comporte cependant des mesures nouvelles, qui ne produiront leurs effets qu'à partir de 2012 et qui ne figuraient pas dans le collectif. Il y en a essentiellement trois.
Premièrement, la contribution exceptionnelle. Je me réjouis que le Gouvernement ait choisi comme assiette le revenu fiscal de référence. En effet, contrairement à une tranche supplémentaire sur l'impôt sur le revenu qui ne prend en compte, pour l'essentiel, que les revenus du travail, le revenu fiscal de référence englobe à la fois les revenus du travail et tous les revenus du patrimoine, à commencer par les plus-values. Quand on examine la composition des revenus des ménages les plus aisés, on constate que l'élément patrimonial est prépondérant – et notamment les plus-values immobilières et mobilières – par rapport à la rémunération du travail. Cette assiette est donc profondément juste.
La commission des finances a adopté, de façon unanime, un seuil d'intervention à 250 000 euros la part, puis sur proposition de nos collègues du Nouveau Centre, une majoration du taux de 3 à 4 % sur la part supérieure à 500 000 euros. De ce fait, au lieu d'une recette espérée de 200 millions d'euros, nous pourrons compter sur une recette de l'ordre de 420 millions d'euros. C'est encore un exemple du côté profondément responsable des propositions de la commission des finances. Nous n'avons pas déshabillé cette taxe, au contraire. Cela répond également à un souci d'équité, puisque, au lieu des quelque 7 000 ménages concernés, si le seuil avait été à 500 000 euros la part, 27 000 ou 28 000 ménages seront concernés à partir de 250 000 euros la part.
Il faut mentionner en second lieu le coup de rabot supplémentaire de 10 % sur les niches fiscales, qui avaient déjà subi ce sort l'année dernière.
J'évoquerai enfin deux dispositifs de réduction : le dispositif dit Scellier et le dispositif économie d'énergie, que l'on appelle, dans le jargon du code des impôts, le 200 quater. Je voudrais à son sujet formuler une observation sur notre politique en matière de dérogation fiscale ou de taxes. Aujourd'hui, nous devons absolument raisonner – et ceci vaudra quand on parlera de la taxe sur les boissons sucrées – par rapport à l'économie française, à l'emploi en France, à la création de valeur ajoutée en France. Dès l'automne 2007, Marc Le Fur s'en souvient, nous avons interpellé le ministre de l'environnement de l'époque pour l'inciter à « refroidir » tout de suite le crédit d'impôt sur les panneaux photovoltaïques. (Sourires.) Malheureusement, il aura fallu trois anspour le refroidir. Entre-temps, nous aurons dépensé, deux ans de suite, 800 millions d'euros pour des panneaux solaires importés pour 90 % de Chine !
Il n'est plus possible de s'affranchir d'une réflexion sur l'économie nationale quand on parle fiscalité, qu'il s'agisse de niches fiscales ou de taxes nouvelles.
Ce n'est pas du tout du protectionnisme. Il s'agit de raisonner – on pourrait citer le cas du bonus écologique – sur le poids des dispositifs en dépenses ou en recettes par rapport à l'économie et à l'emploi en France.
Je m'interroge sur les recettes. L'objectif de dépenses fiscales ne pourra pas être respecté, semble-t-il, en 2011, comme il ne l'a pas été en 2010. Nous observons un écart de l'ordre de 2 milliards. Il faut absolument que le Gouvernement s'astreigne au respect de cet objectif de dépenses fiscales, que nous avons introduit dans la loi de programmation.
Dans ces conditions, nous devons rallier le plus rapidement possible deux niveaux de déficit.
D'abord le niveau de déficit public qui stabilise la dette, c'est-à-dire le niveau à partir duquel notre dette, en pourcentage du PIB, n'augmente plus, soit 3 %. Il faut absolument atteindre les 3 % dès 2013.
Puis, il y a un deuxième type de déficit très important, le « déficit primaire ». On fait table rase du passé et on considère que, si nous n'avions aucune dette, il n'y aurait pas d'intérêts de la dette à verser. On retranche donc les 48 milliards d'intérêts de la dette qui figurent dans le déficit, prévu pour 2102 à hauteur de 82 milliards d'euros. Si l'on ôte ces 48 milliards de frais financiers des 82 milliards de déficit, il reste un déficit primaire. Ce n'est pas bon, car cela signifie que même si nos prédécesseurs ont vécu à crédit, nous continuons – même si nous effaçons la facture qu'ils laissent – à dépenser plus que nos ressources. Nous obtiendrons ce déficit primaire entre 1,5 et 1,7 point.
Un peu comme, en naviguant, on se repère sur des phares et des balises, il faut constamment garder ces éléments à l'esprit. C'est un élément fondamental de notre responsabilité générationnelle vis-à-vis de nos enfants et de nos petits-enfants.
Je terminerai par quelques mots sur la réforme fiscale. J'ai regardé, le plus honnêtement possible, comment on pouvait trouver 50 milliards de réduction de niches fiscales. Eh bien, mes chers collègues, on n'y arrive pas.
Nous finissons par faire le même constat !
On n'y arrive pas, sauf à prendre des risques absolument majeurs pour le fonctionnement de l'économie, qu'il s'agisse de l'emploi, de la consommation ou de l'investissement. Un exemple : avec d'autres collègues, j'ai voté, alors que j'étais dans l'opposition…
À cet égard, j'aimerais que, de temps en temps, tel ou tel d'entre vous ait le courage de voter avec nous quand les mesures sont bonnes, et soient moins liées par des considérations systématiques. En septembre 1999, j'ai voté, tout comme Michel Bouvard, la TVA à 5,5 % pour les travaux réalisés dans le logement.
J'en suis persuadé, le retour de 5,5 % à 19,6 % aurait d'importants effets pervers en rétablissant l'économie souterraine.
En revanche, la remonter à 7 ou 8 % permet peut-être de limiter ces effets pervers. Mais cette niche fiscale des travaux dans le logement est la plus importante de toutes : elle représente 5,5 milliards d'euros. Vouloir la supprimer totalement serait absurde !
Mes arguments valent également pour les emplois familiaux. Quoi qu'il en soit, il faudra garder quelques niches fiscales de ce type.
Je voudrais faire une mise en garde sur un autre aspect. Penser que l'on peut procéder à 50 milliards de réduction de niches fiscales est une illusion. Mais je reste également persuadé que ce vaste impôt, qui procéderait de la fusion de l'impôt sur le revenu et de la CSG, serait la réforme de tous les dangers pour les classes moyennes et les familles.
Pourquoi de tous les dangers ? L'explication est simple. L'impôt sur le revenu, c'est 60 milliards d'euros, et il n'y a que la moitié des ménages qui le paient. La CSG, c'est plus de 80 milliards d'euros, et tout le monde la paie.
À partir du moment où la CSG devient progressive et est intégrée dans le barème, ce sont, à l'évidence, les classes moyennes – la moitié de ceux qui paient l'impôt sur le revenu – qui devront payer 40 milliards de CSG, qui ne seront plus payés par les autres.
Par ailleurs, et je m'adresse à Marc Le Fur, la CSG n'est pas familialisée. Adieu le quotient familial.
Pour couronner le tout – j'ai fait le calcul – , la fusion IR-CSG consistera à matraquer tous ceux qui gagnent plus de 4 000 euros par mois ; « 4 000 euros par mois », cela doit vous rappeler des souvenirs. (Sourires sur les bancs du groupe UMP.)
Dans notre pays, il est impossible de continuer à augmenter les prélèvements obligatoires. La vraie question qui se pose pour l'avenir, la vraie réforme fiscale, ce n'est pas augmenter les impôts, c'est redéployer.
Comment ? D'abord, en protégeant l'impôt sur les sociétés des comportements excessifs d'optimisation des grands groupes.
Ensuite, en explorant à nouveau la voie de la fiscalité écologique, à laquelle vous êtes très attaché, monsieur Launay. Pour ma part, je ne crains pas de dire qu'il faudra remettre sur l'établi le sujet de la taxe carbone.
Enfin, en augmentant la TVA, notamment dans les secteurs où la TVA à 5,5 % n'est pas justifiée.
Mais en aucun cas, mes chers collègues, ce redéploiement ne doit servir à des dépenses nouvelles. (« Tout à fait » sur les bancs du groupe UMP.) Les recettes ainsi dégagées ne doivent tendre que vers un seul but : l'abaissement du coût du travail.
Car si nous ne réussissons pas à abaisser le coût du travail dans notre pays, la compétitivité de nos entreprises, mesurée à l'aune de la dégradation inexorable du solde de notre commerce extérieur, ne fera que s'altérer. Or l'on ne dira jamais assez que les vrais emplois ne sont pas les emplois publics, financés par la dette. Les vrais emplois sont dans nos entreprises, et c'est ce gisement qu'il faut essayer de protéger. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Voilà quelques pistes pour l'avenir. En attendant, chers collègues, je vous invite, dans quelques jours, à voter le budget pour 2012. C'est un budget sincère. C'est le budget le mieux adapté possible à la situation très dangereuse que tous les pays, dont le nôtre, traversent actuellement.
Vous avez, madame la ministre, monsieur le ministre, le soutien total de votre majorité. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)
Je suis rassuré pour vous, madame la ministre, vous avez un soutien total ! (Sourires.)
La parole est à M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Madame la présidente, madame la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, convenons que ce débat budgétaire commence dans des conditions peu habituelles, puisque les orateurs qui m'ont précédé à cette tribune ont cru opportun – je ne suis pas sûr qu'ils aient eu tort – de rappeler ce qui fut fait, d'indiquer ce qu'ils aimeraient voir se réaliser, nonobstant le fait que les mêmes sont aux affaires du pays depuis dix ans – d'évidence, il semblerait que vous ayez des regrets, madame la ministre, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général. En indiquant ce que vous souhaitez, vous indiquez ce que vous ne souhaitez pas, avec les accents qui vous sont propres et la dignité que vous estimez nécessaire à vos fonctions de ministre et de rapporteur général.
Pensant n'avoir à m'exprimer que sur le budget, je n'avais pas envisagé d'avoir à faire le bilan de cette législature et encore moins à présenter le projet d'un candidat à la présidence de la République. La raison en est simple : je ne pourrai le présenter que lorsque celui-ci l'aura défini et présenté lui-même. Au demeurant, vous aussi auriez du mal, mes chers collègues de la majorité, à indiquer quel projet vous vous apprêtez à défendre loyalement derrière le candidat qui sera le vôtre – car qui peut douter, au moins dans cet hémicycle, que celui que vous soutiendrez est l'actuel Président de la République ?
Du haut de cette tribune, je pourrais moi aussi m'interroger. Est-ce que les projets sociétaux que vous vous apprêtez à défendre, monsieur le ministre de l'économie et de l'industrie, correspondent aux projets sociétaux qu'une partie de vos amis, regroupés sous le nom de droite populaire, s'apprêtent à promouvoir ? Vous reconnaissez-vous toujours dans leurs projets ? Ou, pour en rester à l'économie et à la fiscalité, approuvez-vous la proposition du responsable de votre parti politique, ce parti de gouvernement qu'est l'UMP, qui se propose d'augmenter la TVA afin de compenser le manque de recettes qui résulterait de la diminution des charges sociales pesant sur les entreprises ?
J'ai entendu le rapporteur général du budget indiquer, après avoir, pendant dix ans, produits des rapports,…
… qu'il devenait urgent de baisser le coût du travail pour faire cesser la dégradation de notre compétitivité. Peut-être serez-vous en responsabilité pour mettre en oeuvre cette politique, pour ne pas l'avoir fait pendant dix ans, mais alors la proposition de Jean-François Copé prend tout son relief. Approuvez-vous, madame la ministre, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, le projet d'augmentation de la TVA que certains appellent TVA anti-délocalisation, que d'autres appellent TVA sociale, mais que tous savent être une augmentation pure et simple de la TVA ?
On en connaît les avantages. L'on sait qu'une augmentation de la TVA revient à une mini-dévaluation compétitive, puisque l'abaissement du coût du travail qu'elle induit améliore la compétitivité des entreprises françaises, et que les produits qui sont importés sont frappés, de surcroît, par cette augmentation de TVA.
Mais il faut alors aller au bout du raisonnement. Si vous vous apprêtez, ce que je crois, mes chers collègues, à proposer au pays pour les années à venir une augmentation de la TVA, il faut – après tout, vous nous avez engagés à cet effort de sincérité, de lucidité à l'égard des Français et pour vous-mêmes, et je vous engage à ce même effort – indiquer à celles et ceux qui pourraient être séduits que cette mini-dévaluation compétitive n'a de chance de produire des effets durables qu'à une condition : le gel des salaires et des pensions.
Je suis étonné que sur les bancs de la majorité, et parmi les responsables de votre parti, mes chers collègues, ceux qui prônent l'augmentation de la TVA n'aient pas le courage d'indiquer ce qu'est la mesure complémentaire nécessaire, sans laquelle cette mesure est inutile.
Dès lors que 40 % des produits sont importés dans notre pays, leur appliquer une hausse de TVA revient à une augmentation de leur coût, donc à une diminution de pouvoir d'achat.
Si vous décidez de compenser cette diminution de pouvoir d'achat, c'est-à-dire d'augmenter les salaires, vous annulez évidemment le bénéfice qu'a constitué pour les entreprises l'abaissement des charges sociales. Vous annulez l'effet de cette augmentation de la TVA qui n'est plus une mini-dévaluation compétitive à partir du moment où les salaires augmentent. Cette mesure que, manifestement, les responsables de l'UMP souhaitent promouvoir, que probablement votre candidat s'apprête à proposer, cette mesure sur laquelle je vous trouve d'une discrétion assez remarquable en dépit de ses conséquences, cette mesure peut se défendre, mais alors l'honnêteté du débat démocratique auquel vous appelez, monsieur le ministre, commande d'indiquer que la conséquence en sera le gel des salaires et des pensions. Vous avez tout à l'heure indiqué ce que les Français pourraient trouver peut-être de moins séduisant dans les conséquences des projets de l'opposition : convenez que le gel des salaires et des pensions peut ne pas apparaître comme une éventualité à laquelle les Français se résoudraient facilement. Mais j'attends de vous entendre sur ce sujet.
J'attends que vous nous disiez, à l'occasion de ce débat, si cette perspective est la vôtre, madame la ministre, monsieur le ministre, ou bien si vous l'écartez, estimant que l'année prochaine, ce n'est peut-être pas le moment de geler les salaires et les pensions tant il est vrai que la croissance de la consommation des ménages est la contrepartie pour près de 60 % de la croissance économique de notre pays. Nous savons tous que si, par convention, ce budget est bâti sur une croissance de 1,75 % l'année prochaine, qui croit sincèrement que telle sera la croissance du pays en 2012 ? Personne, pas même les ministres qui, pourtant, nous présentent un budget fondé sur cette hypothèse.
Le débat que vous appelez de vos voeux, tout comme nous, ayons-le loyalement. Ne faisons pas semblant de croire que les projets des uns et des autres sont nécessairement les projets des candidats que nous soutiendrons. Sachons voir ce que peuvent être les propositions qui seront retenues. Après tout, monsieur le ministre, vous avez raison, si nous ne débattons pas dans cette enceinte, au sein de l'Assemblée nationale, alors, il n'y a pas de débat politique digne de ce nom dans ce pays. Pour ma part, ce débat ne m'a jamais fait peur. Je l'ai même souvent appelé de mes voeux, tentant, modestement, d'en prendre ma part. (Sourires sur les bancs du Gouvernement.)
Sur ce budget qui comporte, me semble-t-il, trois mesures – certes davantage d'articles, mais pour l'essentiel trois mesures –, on peut dire quelques mots.
La première mesure dont je parlerai le plus brièvement –aucun des trois orateurs précédents n'ayant jugé bon de l'évoquer – concerne la péréquation horizontale au sein du bloc communal et intercommunal. L'enjeu n'est pas mince. Pour reprendre la formule du rapporteur général du budget, je dirai que le moment est plutôt historique car tous les élus locaux attendaient la création d'une péréquation horizontale digne de ce nom. Il est vrai qu'une loi de finances précédente a prévu qu'un fonds de péréquation d'un milliard d'euros soit créé. Il est vrai que cette loi de finances commence à l'abonder à hauteur de 250 millions d'euros. En conséquence, en quatre ans, si les choses continuent à ce rythme, ce fonds sera créé. Peut-être peut-on juger plus contestable la façon de déterminer quelles seront les communes éligibles au versement et celles éligibles à la subvention et à l'abondement au titre de la péréquation. L'on sait – les travaux en commission des finances ont été à cet égard très instructifs grâce au directeur général des collectivités locales qui a répondu à toutes les questions de la façon la plus transparente et loyale qui soit – que la solution que vous nous présentez dans ce projet de budget peut comporter des risques d'incompréhension et que le clivage pourrait ne pas être entre la gauche et la droite de cet hémicycle, mais peut-être davantage entre les élus et les responsables de collectivités de cinquante, soixante, cent mille habitants ou davantage et les responsables de collectivités moins peuplées. La stratification retenue dans ce projet de budget, en définissant un potentiel financier moyen agrégé, risque de rendre éligible au versement des communes appartenant aux deux ou trois premières strates, alors même qu'elles sont moins riches que des communes de strate supérieure. Vous aurez à vous en expliquer avec l'ensemble de la représentation nationale, tant il est vrai qu'en principe la péréquation est faite pour que les territoires plus riches aident ceux qui le sont moins. Or une telle péréquation risque d'opérer une redistribution à rebours, c'est-à-dire des communes peut-être les moins aisées vers celles qui le sont davantage.
L'examen de cet article sera, j'en suis sûr, l'occasion pour les élus locaux d'exprimer leur position, et je répète que le clivage risque de se faire pour l'essentiel selon le niveau de population des territoires qu'ils représentent.
Deuxième mesure notable dans ce budget : la taxe sur les boissons sucrées. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Au moment où la croissance faiblit, où la crise européenne connaît une réplique d'une vigueur préoccupante, au moment où l'on parle de recapitaliser les banques, selon des modalités dont la représentation nationale n'est pas saisie, le Gouvernement décide l'instauration d'une taxe sur les boissons sucrées, car cet objectif de santé publique est soudain devenu prioritaire à ses yeux. À entendre les ministres présenter leur budget devant la commission, telle est en effet la raison qui a conduit à créer cette taxe, même si, par la suite, aucun des parlementaires de la majorité n'a plus invoqué ce motif mais plutôt la nécessité de trouver une assiette et un taux permettant de dégager des ressources afin d'améliorer la compétitivité de notre filière agroalimentaire.
Je peux entendre cet argument, mais alors choisissons : soit il s'agit d'une taxe dictée par un objectif de santé publique ; soit il s'agit d'un prélèvement – dont le produit, à défaut d'être affecté dans le projet de budget, l'est déjà dans les cerveaux des ministères – destiné à améliorer la compétitivité d'un secteur qui en a bien besoin, puisque sous votre majorité la France, qui était le premier exportateur européen dans le domaine agroalimentaire, a été dépassé d'abord par l'Allemagne – nous en avons l'habitude –, puis par les Pays-Bas – ce qui est sans doute plus vexant…
Qu'il s'agisse ou non de financer une baisse du coût du travail dans la filière agroalimentaire, je doute que cette mesure suffise à restaurer notre compétitivité. Qu'on en juge : nous baisserons le coût horaire du travail au niveau du SMIC de 0,96 euros.
J'ignore s'il s'agit d'un progrès dont se prévaudra la majorité devant ses électeurs, mais je constate qu'il s'agit d'une taxe de plus.
S'il l'on tente de faire la liste des taxes imaginées, proposées par le Gouvernement et votées par la majorité UMP depuis 2007, nous atteindrons avec celle-ci, si vous la votez, une trentaine ! Vous avez taxé les clefs USB et les disques durs ; vous avez taxé le droit d'ester en justice et le droit de faire appel ; vous avez taxé les véhicules selon des caractéristiques d'ailleurs fluctuantes au gré des lois de finances ; vous avez même voulu taxer les poissons, les crustacés et les mollusques avant d'être rappelés à l'ordre par la Commission européenne ; vous vous apprêtez à taxer la location des chambres de bonne, pour un bénéfice attendu d'un million d'euros ! Une trentaine de taxes ont donc été imaginées, tandis que me reviennent en mémoire les propos de notre excellent collègue Jean-François Copé dénonçant les socialistes et estimant qu'ils ne savaient rien faire d'autre que proposer de nouvelles taxes pour résoudre les problèmes. Eh bien, je vous mets au défi, mes chers collègues, de trouver une mandature au cours de laquelle autant de taxes ont été votées.
Celle de Jospin !
Vous détenez ce record, et je forme le voeu qu'il en soit longtemps ainsi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Quant à vos objectifs de santé publique, il semble que ce prétexte fasse débat au sein même du Gouvernement. Xavier Bertrand indique que cette taxation se traduira par une augmentation de un à deux centimes d'euro du prix de la cannette. Les cannettes se vendant en général par pack de six, cela représente une augmentation de six à douze centimes d'euros.
J'ai été constater, dans la ville dont je suis maire, les différences de prix des packs de cannettes dans deux enseignes commerciales – Leclerc et Auchan, pour ne pas le citer. Elles sont de l'ordre de vingt à quarante centimes d'euros. Ce qui signifie que vous vous apprêtez à voter une taxe dont le but est de dissuader, notamment les jeunes, de boire des boissons sucrées, alors qu'il leur suffira, s'ils trouvent les prix trop élevés, de changer d'enseigne pour acheter leur boisson au meilleur prix, la compétition commerciale ayant automatiquement pour effet d'annuler les effets de votre taxe.
En termes de santé publique, votre taxe sera donc inefficace. S'il s'agit de dégager des moyens pour abaisser le coût du travail dans l'agroalimentaire, vous y parviendrez, mais dans des proportions telles que cela ne changera rigoureusement rien, je le pense, à notre compétitivité et à notre classement parmi les pays exportateurs dans ce domaine.
Quant à la troisième mesure, il s'agit de la taxation des hauts revenus, puisque vous avez décidé, en fin de mandature, de taxer les hauts revenus, certes en prenant quelques précautions. Cette taxe, même amendée par la représentation nationale, doit rapporter autour de 400 millions d'euros par an. Puis-je vous rappeler qu'il y a quelques semaines, lors de la réforme de l'ISF, vous avez renoncé à 1,9 milliard d'euros de recettes !
Il y a donc un rapport de un à cinq entre la recette supplémentaire que vous vous apprêtez à voter et la perte de recettes à laquelle vous avez consenti il y a trois mois… Outre que je vois mal la cohérence d'une telle politique, il me semble que le compte n'y est pas et que vous aurez du mal, mes chers collègues, à convaincre que l'équité fiscale est votre principale préoccupation.
J'ai d'ailleurs entendu tout à l'heure le rapporteur général indiquer que, compte tenu du niveau de revenus concerné, il ne s'agissait pas de revenus du travail mais de revenus du capital. Il a raison. C'est d'ailleurs ce que nous vous avons répété pendant des années, alors que vous défendiez le bouclier fiscal, arguant qu'il protégeait les revenus du travail. Nous disions au contraire que ce bouclier que vous vous êtes enfin résolu à supprimer ne protégeait que les revenus du patrimoine, ce que vient de confirmer, avec vigueur et sincérité, le rapporteur général.
Cette taxation ne suffira évidemment pas. Alors que notre déficit s'élève à 5,5 ou 5,6 % du PIB et alors que notre stock de dette, selon que l'on tient compte ou non de l'aide à la Grèce, avoisine les 85 à 87 % du PIB, les 400 millions d'euros de recettes supplémentaires ne sont pas à la mesure des problèmes que notre pays doit affronter pour restaurer ses finances publiques. Pas un de nous ici ne le croit une seconde.
Cette taxation est une mesure d'affichage qui ne rétablit nullement l'équité fiscale. Pour cela, il faudrait accepter de plafonner l'avantage fiscal au titre de l'impôt sur le revenu en valeur absolue et non le maintenir, comme c'est le cas aujourd'hui, à 18 000 euros plus 6 % du revenu fiscal de référence. C'est ce mode de calcul qui permet à certains de nos concitoyens de défiscaliser non pas des dizaines de milliers mais des centaines de milliers d'euros, alors qu'un plafonnement en valeur absolue empêcherait cette dépense fiscale dont notre pays n'a absolument plus les moyens.
C'est une proposition que nous vous avons faite à plusieurs reprises. Les travaux de la commission des finances et les amendements adoptés, souvent à l'initiative du rapporteur général, vont d'ailleurs dans le sens de ce plafonnement, et l'on peut penser que la transformation des mesures d'assiette en réductions d'impôt – modification fondamentale de notre droit fiscal en matière de niches – devrait permettre le plafonnement en valeur absolue, si toutefois l'on mise sur une certaine continuité dans nos travaux, d'une législature à l'autre. Cela représenterait pour les finances de notre pays un rendement loin d'être négligeable.
Vous voulez, en cette fin de mandature, des recettes supplémentaires sans renoncer à l'équité ? Eh bien, la chose est possible : plutôt que d'instaurer une taxe exceptionnelle et temporaire – comme si l'équité devait être limitée dans le temps –, alignez sur un même barème de l'impôt sur le revenu les revenus du capital et les revenus du travail, ce qui pourrait vous rapporter près de deux milliards d'euros !
Cela nous emmènerait beaucoup plus loin que votre taxation des boissons sucrées, des hauts revenus ou des chambres de bonne.
Ces trois mesures peineront donc à définir un budget qui restera dans les mémoires, à moins que vous n'acceptiez certains de nos amendements. Puisque vous en appelez au sens des responsabilités de chacun, monsieur le ministre, peut-être en effet accepterez-vous des amendements de l'opposition qui offrent un rendement sans commune mesure avec les dispositions que vous nous proposez, un rendement à la mesure des difficultés budgétaires et financières que notre pays affronte.
Car la situation est extrêmement délicate. Notre pays avait-il jamais été jusqu'alors placé sous surveillance par une agence de notation ?
C'est la première fois que notre pays bénéficie de cette redoutable attention de la part d'une des trois principales agences de notation, qui a indiqué que la dette de notre pays, ainsi que notre politique budgétaire et fiscale, seraient désormais sous surveillance.
Au-delà des recettes marginales et des économies dans la dépense bien difficiles à dégager – il a fallu près d'un mois de négociations pour dégager un milliard d'euros –, il sera difficile, cinq à six fois plus difficile, malgré l'enthousiasme dont fait montre notre rapporteur général, de trouver cinq à six milliards d'euros supplémentaires, et je doute, cher Gilles Carrez, que même votre vaillance, votre honnêteté et votre connaissance du sujet y suffisent.
Les agences de notation ont bien compris que non seulement la croissance ne serait pas de 1,75 % l'an prochain mais qu'elle était de surcroît en train de s'affaisser. Si elle s'affaisse, c'est que ses trois composantes s'affaissent.
La croissance économique de notre pays repose avant tout sur la consommation des ménages. Celle-ci n'a progressé que de 0,7 % ces douze derniers mois, ce qui est extrêmement faible. Cela s'explique facilement par l'augmentation du chômage – passé de 8,3 % au sens du BIT en 2001, à 9,6 % à la fin du deuxième trimestre, puis à 9,9 % à la fin du mois d'août –, alors que le Président de la République nous avait promis lors d'une intervention télévisée début 2010 qu'il allait baisser. Non, le chômage n'a pas baissé ; le chômage a augmenté et continue d'augmenter. Et il est rare dans de telles conditions que la consommation des ménages soutienne la croissance. Ne comptons donc pas trop, dans les mois qui viennent, sur la croissance de la consommation des ménages – je le déplore, mais la lucidité le commande.
La deuxième composante de la croissance économique est l'investissement. Il était jusqu'à présent satisfaisant, en progression de 4,5 % ces douze derniers mois. Si vous lisez cependant la note de conjoncture de l'INSEE, vous constaterez que l'Institut prévoit un affaissement de l'investissement, ce qui s'explique aisément : le taux de marge des entreprises étant de 29 % – je parle des entreprises non financières, car les autres, secourues à l'occasion par l'État, vont plutôt bien. C'est un taux historiquement bas. Depuis dix ans que vous êtes aux affaires, il aurait fallu restaurer la compétitivité des entreprises, restaurer leurs marges et favoriser l'investissement pour créer de l'emploi.
Avec 29 %, le taux de marge de nos entreprises n'avait jamais atteint un niveau aussi bas. Ce chiffre est évidemment connu. Dès lors, comment pouvez-vous imaginer que celles et ceux qui surveillent la France, sa dette et ses politiques, n'en déduisent pas, eux aussi, que les entreprises, avec un tel taux de marge, n'ont plus les moyens d'investir comme il se devrait. Elles en ont d'autant moins les moyens que, nous le savons aussi, s'il n'y a pas de restriction massive du crédit, il s'est tout de même réduit. Or, en France, malheureusement, c'est principalement en s'endettant auprès des établissements bancaires et financiers que les entreprises peuvent investir. Un grand journal économique a fait le calcul : l'investissement des entreprises représente 10 % du produit intérieur brut de notre pays. 30 % de cet investissement sont financés exclusivement par le crédit. Pour 3 %, la croissance de notre pays tient donc à l'investissement des entreprises financé intégralement par le crédit.
Naturellement, tout le crédit, ni même la moitié, ne se retirera pas – je ne le souhaite pas en tout cas – et je ne prétends pas que nous aurons trois points de croissance en moins, ni même 1,5 point. En revanche, qui peut croire que, les entreprises n'ayant plus les moyens d'investir au regard de leur taux de marge et le secteur bancaire se retirant faute de liquidités pour prêter, l'investissement des entreprises pourrait reprendre ou, à tout le moins, se maintenir au niveau qui fut le sien ?
Sachant par ailleurs que les ménages n'investissent pas davantage car ils préfèrent épargner – je vous renvoie à la même note qui indique que le taux d'épargne a encore progressé dans notre pays –, la deuxième composante de la croissance économique manque à son tour.
Reste le commerce extérieur, mais son déficit atteindra cette année les 75 milliards d'euros, ce qui ne s'est jamais vu.
Ne comptons pas sur le commerce extérieur pour dégager de la croissance dans notre pays. Pire, il aggrave notre situation.
Ne croyons pas qu'élever des barrières douanières aux frontières de la France ou de l'Europe serait une solution. C'est avec la zone euro que notre déficit est le pire et au sein de la zone, il n'y a pas de problème de change. Quant à la crise, tous les pays y sont confrontés de la même manière.
Il s'agit donc bel et bien d'un problème interne.
Cela fait dix ans que vous êtes aux affaires, mes chers collègues. Je ne prétendrai jamais que tout ce qui fut fait est à rejeter…
… mais je constate simplement que vous aviez décidé de restaurer la compétitivité de notre pays. Le rapporteur général l'a très bien exprimé : quel meilleur indicateur de la compétitivité nationale que le commerce extérieur ? Or il atteint un niveau de déficit jamais vu. Au moins, au bout de dix ans, convenez que le succès n'est pas au rendez-vous.
Les raisons en sont multiples. Croire que telle politique conduite par vos prédécesseurs est la seule et unique responsable serait vous aveugler, même si je ne prétends pas que cette politique ait pu être sans conséquences en la matière.
Dès lors que la croissance n'est pas là, vous en êtes réduits aux deux seuls expédients qui restent aux pays qui doivent impérativement ajuster leurs finances publiques sans croissance : la fiscalité et l'économie dans la dépense. Nous y sommes.
Les prélèvements obligatoires, qui devaient baisser de quatre points au cours de cette mandature, atteindront dans deux ans un niveau historiquement élevé. Notre pays n'a jamais connu un taux de prélèvements obligatoires rapporté au PIB supérieur à 45 %. Nous y serons : après 43,7 % pour cette année, ce seront 44,5 % l'année prochaine, puis 45 % dans deux ans – je vous renvoie au document officiel très éclairant du ministère du budget.
En 2010, notre taux était de 42,5 %. Il sera de 45 % en 2013, soit deux points et demi de PIB supplémentaires, ce qui représente 50 milliards.
Madame la ministre, vous dénoncez chez vos opposants le choc fiscal de 50 milliards mais, en augmentant les prélèvements obligatoires dans une telle proportion en trois ans, vous-même le mettez en oeuvre !
Ce qui nous sépare n'est pas que les uns demanderaient un effort quand les autres prétendraient que les Français pourraient s'en exonérer. Notre différence tient à ce que nous ne demanderons cet effort aux Français qu'après avoir engagé la réforme fiscale, afin que cet effort soit juste et équitable, ce qui implique notamment d'inclure sous le même barème de l'impôt sur le revenu les revenus du travail et les revenus du capital.
Il vous reste donc la fiscalité ou la dépense publique. Vous voulez la réduire. Là encore, parlons chiffres en nous appuyant sur ce petit document – je remercie les services du ministère de l'avoir rendu aussi lisible et accessible.
En 2001, la dépense publique rapportée au PIB s'élevait à 51,6 %. Je me souviens, car je siégeais alors dans cet hémicycle, des propos vigoureux que l'opposition d'alors – probablement certains d'entre vous, chers collègues – tenaient pour dénoncer la dérive des financements publics, des postes publics, des fonctionnaires. Qu'avez-vous fait ?
Ce qui prouve que le sujet n'est peut-être pas si majeur.
En 2007, la dépense publique rapportée au PIB était supérieure à 51,6 % puisqu'elle était de 52,3. Qu'avez-vous fait depuis ? 56,6 % l'année dernière, 56,3 % cette année, soit beaucoup plus qu'en 2001 !
Vous croyez faire oeuvre utile en dénonçant ceux qui voudraient créer des emplois publics, alors que ces créations seraient gagées par la suppression d'autres emplois publics ou par des économies dégagées par ailleurs. Ce faisant, vous ne faites que dénoncer ce que vous avez fait puisque vous avez augmenté la dépense publique de plus de quatre points de PIB en dix ans. C'est beaucoup pour vous permettre de donner des leçons à ceux qui proposent aux Français un projet alternatif. Essayons au moins, au regard de ce que les uns et les autres ont fait, d'offrir aux Français de vrais choix politiques, de vrais choix de société. Ne nous jetez pas à la figure l'irresponsabilité supposée de ceux qui augmenteraient la dépense publique, alors que vous-mêmes l'avez aggravée de quatre points de PIB, c'est-à-dire 80 milliards d'euros en dix ans.
Comment pouvez-vous alors faire la leçon à des parlementaires qui, depuis la même période, s'efforcent loyalement, en conscience, d'exercer leur mandat de députés de l'opposition – ils sont, eux aussi, dépositaires d'une partie de la légitimité nationale.
Voilà, mes chers collègues, ce que je voulais vous dire. Je me suis permis de reprendre le même plan que les deux membres du Gouvernement qui ont visé large en évoquant, au-delà de ce projet de budget, ce qui avait été fait et ce qui pourrait l'être. Je vous ai donné mon sentiment en m'appuyant sur les chiffres tirés des documents officiels.
J'espère qu'à l'occasion de ce débat nous pourrons, les uns et les autres, mieux définir ce que nous pensons être bon pour notre pays. Sans qu'il soit nécessaire d'en appeler au sens des responsabilités de tous, car nous sommes tous également responsables ici, nous saurons que ce projet de budget, pour la première fois de notre histoire, est discuté alors même qu'une agence de notation a décidé que la France devait être surveillée, ce qui ne me semble pas être le signe d'une particulière efficacité des politiques menées jusqu'alors. Surtout, je vois mal comment vous pourriez, dans ces conditions, madame la ministre, monsieur le ministre, donner des leçons péremptoires et définitives aux parlementaires qui estiment que l'on peut mieux faire. Modestement, j'en fais partie. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur les bancs du groupe GDR.)
J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.
La parole est à M. Pierre-Alain Muet.
Le début de ce débat fut assez surréaliste puisqu'en vous entendant, monsieur Baroin, j'ai eu le sentiment que vous vous trompiez de rôle, ou du moins d'époque, et que vous aviez sept mois d'avance. Vous êtes encore, monsieur Baroin, le ministre de l'économie et des finances ; mais j'ai cru entendre déjà le défenseur de la motion de rejet préalable de la politique que nous conduirons si les Français nous font confiance...
Puisque vous nous y invitez, après avoir parlé de votre budget, je vous présenterai notre projet.
Quelle sera la situation en 2012 ? Quelques mots suffiront pour la décrire : explosion de la dette qui aura doublé en dix ans, explosion du chômage, explosion des inégalités, dérive abyssale du déficit extérieur, le tout dans un contexte de croissance malheureusement assez éloigné des prévisions de 1,75 % pour plutôt se rapprocher de 1,2 % si l'on en croit les instituts de conjoncture.
Explosion de la dette et du déficit, donc. Vous allez nous répondre, comme vous le faites depuis trois ans, qu'il faut s'en prendre à la crise.
Non : si la France se retrouve dans une telle situation, la crise n'en est pas la cause principale. Selon vos propres services, madame la ministre, monsieur le ministre, sur les 140 milliards de déficit de l'année 2010, seuls 40 milliards sont de nature conjoncturelle. Le reste, 100 milliards, représente un déficit structurel, soit celui que la France aurait eu si la croissance était restée forte, égale à la croissance potentielle, c'est-à-dire s'il n'y avait pas eu la crise.
Sur ces 140 milliards, 100 sont donc dus pour l'essentiel aux politiques que vous avez menées ces dix dernières années.
La dette aura doublé, passant d'un peu moins de 900 milliards à l'été 2002, à 1800 milliards à l'été 2012, toujours selon vos services. Elle aura augmenté de 350 milliards sous Jacques Chirac – il n'y avait pas de crise –, et de 550 milliards sous Nicolas Sarkozy – là, oui, la crise était là.
Déduisons de cette hausse de la dette ce qui peut être imputable à la crise. Ces trois dernières années, environ 40 milliards sont dus chaque année à la crise, soit entre 120 et 150 milliards. Il reste tout de même une aggravation de la dette de plus de 400 milliards, ce qui ne s'est jamais vu en plus de cinquante ans.
La crise n'explique donc pas la situation de notre pays. Regardez d'ailleurs chez nos voisins. Les Allemands ont eux aussi connu la crise. En 2005, la France et l'Allemagne avaient toutes deux un déficit supérieur à 3 %. Mais, alors que l'Allemagne a profité d'une période de croissance pour le ramener à zéro en 2008, à la veille de la crise, la France l'a laissé dériver, votant le paquet fiscal et un budget approchant des 3 % de déficit – pour finalement s'élever à 3,5 % en exécution.
Si la France se retrouve aujourd'hui dans une telle situation, c'est qu'elle n'a pas profité de la période de croissance qui a précédé la crise pour réduire ses déficits. Au contraire, elle les a laissés dériver.
Entre 1997 et 2002, c'est vrai.
Voilà pourquoi, quand l'Allemagne, au plus fort de la crise, affichait un déficit de 3,3 % du PIB – et cette année, sans doute 2 % –, la France atteignait les 7,5 % et se retrouve encore largement aujourd'hui au-dessus de 4 ou 5 %.
C'est votre politique qui a mis notre pays dans cet état.
S'agissant du chômage, vous allez me renvoyer de la même façon à la crise. Comparons encore avec l'Allemagne. Les deux pays avaient le même taux de chômage à la veille de la crise, à l'été 2008, soit 7,5 %. Aujourd'hui, l'Allemagne compte 6 % de chômeurs…
Elle n'a pas connu les 35 heures.
…alors qu'en taux de chômage harmonisé, la France tourne autour de 10 %.
Pendant cette période, l'Allemagne a utilisé tous les instruments à sa disposition pour limiter la progression du chômage : réduction du temps de travail – 35,5 heures hebdomadaires contre 38 heures en France –, Kurzarbeit ou chômage partiel – les salariés, au plus fort de la crise, ont ainsi pu rester dans les entreprises, ce qui a permis à l'Allemagne, lorsque la croissance a repris, de redémarrer fortement avec un taux de croissance de 3 % en 2010.
Là non plus, ce n'est donc pas principalement la crise qui explique la situation. C'est la politique absurde que vous avez conduite : vous avez réussi, dans une période de crise avec un chômage massif, à maintenir une politique qui n'aurait eu de sens, et encore, que si la France avait connu le plein emploi. Autant l'on pouvait, dans les années cinquante et soixante, quand il n'y avait pratiquement pas de chômage, se poser la question de subventionner les heures supplémentaires – même si celles-ci se développaient alors naturellement, cela aurait pu avoir un sens, car la France butait à l'époque sur le plein emploi –, autant, aujourd'hui, on en est loin. Subventionner en période de chômage massif les heures supplémentaires n'a qu'un seul effet :...
..faire croître le chômage. Ainsi, madame et monsieur les ministres, ce que vous croyez faire gagner aux salariés qui font des heures supplémentaires, vous le perdez par le nombre de salariés qui se retrouvent au chômage.
Quand on fait le bilan en termes de pouvoir d'achat, le résultat est égal à zéro, avec une croissance du pouvoir d'achat global extrêmement faible.
Telle sera la réalité de l'année 2012, et telles sont les raisons pour lesquelles nous sommes malheureusement déjà dans cette situation.
S'agissant des déficits extérieurs et de leur dérive, on a tout entendu. Aussi faut-il rappeler quelques données, à commencer par le fait que nos 75 milliards d'euros de déficit sont un montant que l'on n'avait jamais connu. Il faut se rappeler que, voici dix ans, la France était en excédent. Pendant de nombreuses années, entre 1995-1996 et 2002-2003, notre pays avait entre 20 et 30 milliards d'euros d'excédent extérieur. Il en est loin aujourd'hui, et l'on sait pourquoi : cela ne tient pas à un problème de compétitivité-prix, mais, pour l'essentiel, à l'absence complète de politique industrielle, de politique d'innovation et de compétitivité – la politique que doit conduire un pays qui a le niveau de développement que nous connaissons. C'est ainsi que, faute d'avoir développé son industrie, la France se retrouve avec 75 milliards de déficit, quand son principal voisin a 150 milliards d'excédent.
Que nous proposez-vous pour faire face à cette situation ?
Un budget qui est un catalogue à la Prévert, dont la seule logique est une austérité aveugle et massive.
Austérité aveugle du côté des recettes, d'abord : alors que vous disposiez de nombreux rapports pour supprimer des niches fiscales injustes et inefficaces – le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires, dont nous nous sommes beaucoup inspirés pour nos amendements, ou encore celui de l'Inspection générale des finances, que vous avez commandé mais gardé sous le coude, sans doute parce que ses propositions vous embarrassaient –, vous avez non pas supprimé le nombre des niches, ce qui aurait pu réduire les déficits sans effet négatif sur la croissance, mais inventé de nouveaux impôts ! Je ne reprendrai pas l'énumération que le président de la commission des finances en a faite, mais vous êtes les champions de l'invention de nouveaux impôts,...
On n'a rien inventé du tout !
..parfois profondément choquants. Je pense en particulier à la taxe sur les mutuelles : croyez-vous que l'on puisse réduire les déficits en empêchant les plus modestes de se soigner ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
C'est la réalité !
Austérité aveugle du côté des dépenses, ensuite, avec des coupes dans tous les budgets, en particulier celui de l'emploi : comment peut-on, dans la situation que notre pays connaît en la matière, diminuer de 12 % le budget de l'emploi ? Et que dire de la politique de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ? Non seulement la Cour des comptes a montré que, loin du milliard et demi d'euros d'économies que vous prétendiez ainsi réaliser, celles-ci n'ont été que de l'ordre de quelques centaines de millions – 200 à 300 millions, jamais plus –, mais le regretté Philippe Séguin a dit lui-même, en 2009, que c'était une politique absurde, « caractéristique d'un État incapable d'analyser ses besoins et de programmer ses effectifs ».
Et pendant ce temps, la baisse de la TVA dans la restauration nous a fait perdre 120 milliards !
Cette politique, qui pèse sur l'emploi, le pouvoir d'achat et la croissance pour tenter de réduire le déficit, est une impasse. En cassant un peu plus la croissance par des plans d'austérité successifs, vous allez, de plan d'austérité en plan d'austérité, réduire les recettes tout en courant derrière la réduction des déficits sans jamais y parvenir. Tel est le cercle vicieux auquel aboutissent les politiques d'austérité. D'ailleurs, le Premier ministre ne vient-il pas, alors que le débat budgétaire s'engage, d'annoncer un nouveau plan d'austérité pour ajuster sa politique à une croissance plus faible que prévue ?
Quant au déficit budgétaire de 2011, vous le confortez dans le projet de loi de finances à un niveau identique à celui du projet de loi de finances rectificative que nous avons discuté début septembre, soit un déficit supérieur de près de 4 milliards – 3,9 milliards exactement – à celui voté en loi de finances initiale. À qui ferez-vous croire qu'il faut une règle constitutionnelle pour que les lois de finances initiales respectent une programmation fixée a priori quand toutes les dérives, comme en 2011, sont dues à une variation entre la loi de finances initiale et la loi de finances réalisée ? Pour lire toujours attentivement ses rapports, je constate d'ailleurs que notre rapporteur général fait état, dans son rapport, d'un risque élevé que la loi de règlement pour 2011 mette en évidence une nouvelle dérive des déficits.
Comme dans le projet de loi de finances que nous avons discuté l'an dernier, l'État se défausse de ses responsabilités financières sur les collectivités locales. Il le fait, comme toujours, en gelant les dotations aux collectivités et en ne finançant pas des dépenses qu'il a mises à leur charge – des dépenses de solidarité générale qui augmentent fortement.
Je le répète, ne pas indexer les dotations sur l'inflation et la croissance est profondément choquant. Elles ont en effet remplacé des impôts qui avaient une dynamique propre, correspondant à l'inflation et à la croissance. De 1997 à 2002, des gouvernements respectueux des collectivités locales continuaient, eux, lorsqu'ils réduisaient les déficits publics, à indexer les dotations sur l'inflation et sur la moitié de la croissance. En n'agissant pas ainsi, vous faites porter la réduction des déficits sur les collectivités, qui ne sont pourtant en rien concernées par la dérive des déficits et de la dette.
Dois-je rappeler dans cette enceinte que la dette des collectivités locales, soit 8 % du PIB, n'a pas bougé depuis trente ans ?
Nous ne parlons pas de la même !
Celui qui est responsable de la dette, c'est l'État, avec l'explosion de la dette publique.
Nous avons donc, d'un côté, un État cigale, qui a baissé les impôts en laissant dériver les déficits pendant huit ans, et, de l'autre, des collectivités locales fourmis, bien obligées d'ajuster leurs comptes puisqu'elles ne s'endettent que pour investir.
Si la cigale et les fourmis étaient indépendantes, la première – l'État – serait bien obligée de mettre de l'ordre dans ses finances en augmentant ses impôts ou en réduisant ses dépenses. Bref, l'État ne pourrait pas se permettre de faire ce que vous avez fait pendant huit ans, c'est-à-dire laisser dériver les déficits en faisant 70 milliards d'euros de cadeaux fiscaux,...
..financés entièrement à crédit, essentiellement aux plus fortunés de nos concitoyens. Il suffit de rapprocher les 100 milliards d'euros de déficit structurel – que je citais pour l'année 2010 – de vos 70 milliards de cadeaux fiscaux, pour comprendre d'où vient ce déficit structurel.
Je reviens à ma comparaison : contrairement à ce qui se passe dans la fable de La Fontaine, la cigale a un pouvoir considérable. Elle a progressivement remplacé les ressources des collectivités par des dotations qu'elle maîtrise, et elle leur impose des dépenses de solidarité nationale dont elle est seule à maîtriser le financement. Alors quand la cigale doit réduire ses déficits comme aujourd'hui, elle trouve une façon simple de se défausser en partie de cette responsabilité : réduire les dotations aux collectivités et ne pas ajuster les compensations aux dépenses effectives de celles-ci. Et l'État le fait avec d'autant plus de désinvolture qu'il sait bien que les collectivités locales sont obligées, elles, d'appliquer la vertu dont lui seul s'exonère.
Voilà comment aujourd'hui les collectivités locales sont conduites soit à augmenter leurs impôts soit à réduire leurs dépenses, notamment leurs dépenses d'investissement, pour financer la « débauche » de l'État ! Cette politique, c'est le vice qui se finance sur le dos de la vertu.
Il faut, bien sûr, réduire les déficits, et nous sommes favorables à l'objectif de ramener celui des finances publiques à 3 % du PIB en 2013, cela pour deux raisons. La première est qu'il s'agit d'un engagement de la France. Quant à la seconde, elle tient, dans la situation que nous allons connaître en 2012 – c'est-à-dire une dette égale à 86 % du PIB et une croissance comprise entre 1,2 et 1,5 % –, au calcul du seuil de déficit, soit 3 %, qui arrête l'explosion de la dette dont vous êtes responsable depuis des années et des années en la laissant croître de façon quasi illimitée. C'est pour stopper rapidement l'explosion de la dette qu'il faut revenir à 3 % de déficit.
Or, réduire les déficits, madame et monsieur les ministres, ne se fait pas par une politique d'austérité, mais par une politique macroéconomique globale. Si vous vous contentez en effet d'une politique d'austérité en coupant dans les dépenses ou en inventant de nouveaux impôts comme vous le faites, le seul résultat sera...
..d'aggraver la récession ou le ralentissement économique, tout en courant toujours derrière la réduction des déficits.
Ce qui réduit les déficits, ce n'est pas une politique d'austérité. C'est une politique complète qui s'attaque simultanément aux trois déficits que connaît notre pays : le déficit des finances publiques, bien sûr, mais aussi le déficit d'emploi et le déficit de compétitivité. Or je n'ai rien vu dans ce budget qui s'attaque à ces deux derniers – s'agissant de l'emploi, on assiste même à une baisse de 12 % du budget qui lui est consacré. Dans la situation de notre économie, c'est profondément choquant.
Alors…
C'est la vraie question ! Puisque l'on m'y invite, j'en dirai quelques mots, monsieur le ministre.
C'est une excellente question, mais j'observe qu'elle vient de la gauche…
Au cours du débat budgétaire, nous proposerons des amendements qui déclinent une grande partie de nos propositions. Je les regrouperai en trois thèmes.
Le premier a trait à l'emploi. Il faut d'abord mettre fin à ce dispositif absurde de subvention des heures supplémentaires, qui coûte 4,5 milliards.
En le supprimant, on peut facilement redéployer la somme correspondante pour financer, par exemple, 300 000 emplois-jeunes pour un coût de 3 milliards d'euros. Au total, on aura créé des emplois et empêché la suppression de 80 000 autres, tout en redonnant du revenu, en restaurant la confiance et en relançant la croissance. C'est de cette façon qu'en 1997 la croissance française est repartie. La situation était, certes, moins dramatique, mais je me souviens tout de même que le Président de la République avait dissous l'Assemblée parce qu'il ne savait pas comment boucler le budget et respecter le critère de 3 %.
Et vous en avez fait quoi, de la croissance ?
Nous avons ramené la dette publique à 58 % du PIB alors que nous l'avions trouvée à plus de 60 %, et nous avons réduit le déficit à 1,5 % du PIB alors qu'il était à 3,5 %.
Parce que le PIB a progressé ! Vous avez augmenté la dette en volume !
Vous pourrez consulter les statistiques – domaine dans lequel votre ministère est particulièrement bon : ces deux critères de Maastricht ont été scrupuleusement respectés pendant toute la période 1997-2002.
On ne peut pas en dire autant de la période suivante : vous avez été en déficit excessif sept années sur dix et, depuis la fin de l'année 2002, la dette de la France n'a jamais été au-dessous de 60 % du PIB.
Une deuxième série d'amendements concerne la justice fiscale.
Comment ne pas mettre en regard de la taxe que vous créez sur les hauts revenus, et qui rapportera environ 400 millions d'euros, le dernier cadeau fiscal que vous avez osé faire aux contribuables les plus riches ? Vous leur avez offert 1,8 milliard d'euros en supprimant leur ISF.
Que pèsent 3 ou 4 % de prélèvements supplémentaires sur les hauts revenus quand on sait que la combinaison des niches fiscales et des prélèvements libératoires sur les revenus du capital conduit à ce paradoxe que les détenteurs des dix plus hauts revenus du pays paient moins de 20 % de leurs revenus en impôts ?
Avec votre nouvelle mesure, madame Bettencourt va sans doute voir son taux d'imposition sur le revenu passer pendant deux ans de 15 % à 18 ou 19 %, et cela n'est même pas certain,…
…mais que représente ce taux lorsque l'on sait qu'un cadre supérieur verse au fisc 30 % de la totalité de ses revenus, lesquels proviennent de son seul travail ?
Nous avons besoin d'une réforme fiscale majeure. Elle doit être très simple et passer au barème tous les revenus du capital. Aujourd'hui, ils y échappent, soit grâce aux niches fiscales, soit grâce au prélèvement libératoire qui s'applique tant aux plus-values qu'aux intérêts et aux dividendes.
Je me souviens du pathétique débat qui vous agitait sur la taxation des plus-values, lors d'un précédent collectif budgétaire. Certains, du côté droit de cet hémicycle, s'inquiétaient pour le salarié modeste qui aurait vendu sa résidence secondaire sans être propriétaire de sa résidence principale : il aurait dû payer 19 % de prélèvement libératoire. Mes chers collègues, pour régler ce problème éventuel, il y a une solution simple, conforme à la justice fiscale : que toutes les plus-values soient soumises au barème de l'impôt sur le revenu. Dans ce cas, si un salarié disposant de revenus modestes vend un bien, il ne paiera rien ; en revanche, celui qui a des revenus élevés paiera en fonction de ces derniers. C'est cela, la justice fiscale.
Aujourd'hui, l'impôt sur le revenu est devenu complètement régressif. Il est temps de faire une réforme fiscale profonde, pour que tous les revenus soient imposés au barème et que l'impôt dépende du montant des revenus et non de leur origine. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Une troisième série d'amendements correspond à notre volonté de relancer durablement la croissance, notamment en mettant en place une réforme fiscale qui favorisera les profits réinvestis plutôt que les produits distribués. Cela ne suffira pas, nous savons qu'il faudra aussi retrouver le volontarisme industriel que notre pays a oublié depuis dix ans,…
…d'innovation, de compétitivité et de justice fiscale, notre pays continuera malheureusement à voir se dégrader tous ses déficits, comme c'est le cas aujourd'hui.
Pour conclure, je veux dire un mot de la crise européenne. Il ne s'agit pas d'une nouvelle crise mais de la même crise qui revient, pour la simple raison que rien n'a été fait pour la résoudre.
Rien n'a été fait en matière de régulation financière, ou très peu, et rien n'a été fait en matière de régulation des politiques économiques. Si l'Europe est dans cette situation, c'est parce qu'elle s'enfonce dans des politiques d'austérité dont elle pourrait en partie sortir s'il y avait un minimum de coordination des politiques économiques.
Pour y parvenir, il nous faudrait retrouver un peu de l'esprit des réformes qu'insuffla Roosevelt lors de la crise des années trente. En 1933, confronté à la récession, Roosevelt a lancé le New Deal et instauré une protection sociale dans un pays qui n'en disposait pas. Il a également fait voter une forte imposition des plus hauts revenus – on oublie souvent que les revenus les plus élevés, qui n'étaient presque pas taxés, l'ont été alors à plus de 80 %, et même à 90 % au moment de l'entrée en guerre du pays. Roosevelt a enfin obtenu une séparation entre banques d'affaires et banques de dépôts, c'est-à-dire une régulation fondamentale du secteur.
Il n'y a pas de chance que ça arrive chez nous : M. Pébereau n'en veut pas !
Ces trois types de mesures ont structuré durant trente ans tout le développement de l'économie mondiale. La période de Bretton Woods, l'après-guerre, ce que nous appelons en France les trente glorieuses, était caractérisée par une économie financière fortement régulée, une intervention publique forte à travers la protection sociale et une fiscalité sur les hauts revenus qui permettait de réduire fortement les inégalités – tout le contraire de ce qui se fait depuis trente ans, avec la domination de l'idéologie libérale qui a conduit à démanteler tout cela.
En Europe comme ailleurs, on se trompe d'époque. Pour répondre à la crise à laquelle nous sommes confrontés, il faut retrouver de la solidarité. Nous savons parfaitement que, dans une économie mondialisée, une usine moderne bénéficiant des technologies les plus récentes peut être construite n'importe où sur la planète. Cependant, pour qu'elle fonctionne efficacement, il faut une main-d'oeuvre compétente, un système d'éducation et de formation, et une protection sociale qui permette aux individus de prendre des risques. Il faut de la recherche. Il faut ce que l'on appelle de façon générale des biens publics, c'est-à-dire des infrastructures de recherche, d'éducation, de santé, de protection sociale… Cette nécessité explique peut-être que les pays les plus développés du monde soient ceux qui ont construit un secteur public performant et important. Voilà la réalité économique ! C'est elle que l'idéologie libérale a négligée durant trente ans en s'imaginant qu'avec moins d'État on rendrait l'économie plus performante. Mais vous vous trompez !
Cette erreur a conduit à la crise de l'économie mondiale. Si vous voulez la résoudre, il faut remettre de la solidarité dans le système. Il faut de la solidarité en Europe car elle manque entre les nations qui la composent, et il faut de la solidarité dans notre pays. Toute l'histoire économique démontre que la solidarité est aussi de l'efficacité économique. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur Muet, en défendant une motion de rejet préalable au nom de votre groupe, vous avez repris la litanie de tous les poncifs auxquels vous nous avez habitués depuis deux ans au moment de la discussion budgétaire…
Vous me dites que je manque de nuance, et vous ajouterez sans doute que cela manque d'élégance et qu'il est tout de même curieux qu'un ministre fasse de la politique à l'Assemblée. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Je m'étonne que vous vous étonniez : vous ne ratez aucune tribune pour assassiner et massacrer le Gouvernement, souffrez que de temps en temps un ministre puisse vous répondre sur le terrain politique ! Cela me paraît être la moindre des choses. Je m'étonne que vous vous étonniez que, dans la grande maison de la démocratie, qui est notre maison commune, nous puissions nous exprimer sur des arguments que vous avez développés avec abondance dans les médias durant deux mois. Nous avons une modeste tribune, l'Assemblée nationale ; nous tentons de vous répondre, cela me semble être de bonne guerre.
Monsieur Muet, je relève dans vos propos un premier poncif, une première facilité de discours, et surtout une première contrevérité. C'était la défense et l'illustration de la politique de Lionel Jospin,…
…à laquelle vous avez largement contribué puisque, si ma mémoire est bonne, vous apparteniez au cabinet du Premier ministre. Vous expliquez cette période dorée par la maîtrise budgétaire, la rigueur en matière de suivi des finances publiques et une certaine idée du niveau des prélèvements obligatoires et des dépenses publiques qu'il ne fallait pas dépasser.
Vous oubliez l'essentiel : il y avait durant cette période une croissance XL, je dirais même XXL, et le gouvernement Jospin n'y était pour rien. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Elle nous venait en grande partie des États-Unis. Il s'agissait de la bulle internet, qui pendant trois ans a créé des conditions de développement de l'activité économique qui ont dopé les recettes. (Même mouvement.)
Juppé avait pourtant dissous parce qu'il n'avait pas de marge de manoeuvre budgétaire !
Il y a une vraie question à laquelle vous ne répondez jamais : qu'avez-vous fait des recettes exceptionnelles de cette période de croissance exceptionnelle qui ne vous était due en rien ? Qu'en avez-vous fait ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous avez additionné les dépenses publiques. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Vous vous êtes inspirés du gouvernement Rocard qui, à la fin des années 1980, au travers du protocole Durafour, a mis en place des contraintes et des contingences de finances publiques qui ont pesé sur les charges de personnel avec la création de centaines de milliers de postes de fonctionnaires. Vous avez procédé de la même manière avec les emplois-jeunes et avec la politique des 35 heures. C'est à cette période que l'affaire des 35 heures commence : au-delà du désastre psychologique pour notre société, au-delà du désastre économique pour les finances publiques, cela a créé un choc dont nous portons encore aujourd'hui le fardeau. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous pouvez critiquer le Gouvernement en tout temps, en tout lieu, en toutes circonstances ; vous pouvez utiliser toutes les tribunes, vous pouvez faire entendre toutes les cornes de brume que vous voulez ; vous pouvez allumer tous les fumigènes que vous voulez dans les meetings des sections socialistes des fédérations de France, rien n'y fera : vous avez dilapidé cette croissance, vous avez lesté les finances publiques de boulets supplémentaires dont nous portons aujourd'hui malheureusement les stigmates. Car si nous raisonnons à l'envers, en creux, nous pouvons nous demander si la situation de notre pays serait la même s'il n'y avait pas eu les 35 heures. La réponse est non. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Avant de critiquer et de regarder ce que nous faisons, acceptez d'assumer la responsabilité qui est la vôtre.
Je ne vous en veux pas, monsieur Muet : vous étiez collaborateur du Premier ministre et, aveuglé par votre loyauté, vous vous laissez entraîner dix ans plus tard dans une position dont est absente toute prise de conscience et toute reconnaissance de vos responsabilités. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Vous pouvez crier et vociférer : le bruit n'ajoute rien à l'affaire et il ne remettra jamais en cause votre bilan qui aura été négatif pour le pays. D'ailleurs, vous avez été battus.
Vous entretenez une deuxième contrevérité, une deuxième illusion : nous serions responsables de la dette et de la crise que le pays traverse. Nous serions directement et exclusivement responsables du niveau de déficit de notre pays. (« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Laissez-vous emporter par votre élan de générosité – après tout vous portez ce sentiment en permanence en bandoulière : nous sommes aussi responsables du niveau de dette de la Grèce, du Portugal, de l'Italie, de la Grande-Bretagne, de l'Irlande et des États-Unis. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Nous sommes aussi responsables du blocage des relations entre Obama et le Congrès américain et de la dégradation de la note américaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Faites-vous plaisir ! Allez-y gaiement ! Tout cela ne résiste évidemment pas à l'analyse.
Notre pays traverse la plus grave crise que l'économie mondiale ait connue depuis celle de 1929. Il s'agit d'un fait que personne de sérieux ne peut contester. J'ai du respect pour vous : je ne doute pas qu'il y ait des gens sérieux parmi vous. Donnez-leur la parole – ils ne contesteront pas ces données – et cessez de la laisser à ceux qui ne le sont pas, nous les entendons trop !
Le problème de la dette nous est imposé, nous devons le régler avec intelligence. Nous devons faire des économies, c'est le sens de ce budget. Mais nous devons aussi protéger la croissance convalescente, et tel est le sens des mesures ciblées que nous prenons pour éliminer et effacer les niches fiscales. C'est pourquoi cette loi de finances est équilibrée et juste.
Elle s'inscrit dans un contexte difficile et dans une période de turbulences et d'incertitudes, personne ne le conteste. La question de la stabilité de la zone euro se pose et nous enregistrons un ralentissement de l'activité économique américaine et mondiale, qui peut le nier ? Pour toutes ces raisons, par pragmatisme, sans idéologie, le Gouvernement prendra toutes les mesures pour adapter l'évolution des recettes et la politique de tenue des objectifs intangibles que sont les rendez-vous en matière de déficit public.
Monsieur Muet, je pourrais répondre à chacun de vos arguments. Je ne le ferai pas car le temps nous manque et parce que nous devons voter.
J'en viens à ma conclusion et, puisque vous attendiez ce moment avec impatience, je m'en tiendrai là, en vous remerciant de m'avoir écouté. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Au titre des explications de vote, la parole est à M. Michel Bouvard, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe UMP ne votera évidemment pas la motion de rejet préalable, laquelle, je le rappelle, a normalement pour objet de faire reconnaître que le texte proposé est contraire à une ou plusieurs dispositions constitutionnelles ou de faire décider qu'il n'y a pas lieu à délibérer.
Naturellement, Pierre-Alain Muet a saisi l'occasion que lui offrait cette motion de procédure pour exposer le projet du parti socialiste et revenir sur un certain nombre des propositions qu'il contient. C'est légitime, et nous ne lui reprocherons pas.
Bien entendu, l'endettement de la France est comparable à celui des autres pays de l'Union européenne et, de manière générale, à celui des autres pays développés. Il a fortement progressé, non seulement à cause de la crise, mais aussi parce que, depuis des années,…
…ces pays ont une croissance plus faible, un système de protection sociale de plus en plus exigeant et une population vieillissante.
Certes, le chômage a également progressé, même si, en France, il est inférieur au pic que l'on a pu connaître par le passé et à la moyenne des pays de l'Union européenne.
Mais, sur un sujet, le propos de Pierre-Alain Muet – pour qui j'ai beaucoup de respect – m'a paru, je ne dirai pas insincère, mais injuste. En effet, on ne peut pas dire que, depuis cinq ans, le Gouvernement ne s'est pas préoccupé de la politique industrielle. (« Si ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Au contraire, il a souhaité renouer avec des priorités industrielles, en créant le fonds stratégique d'investissement, en rénovant OSÉO, en réformant UBIFRANCE, en menant la politique du crédit impôt recherche ou l'étude des filières industrielles. Encore une fois, s'il est un reproche que l'on ne peut pas adresser à la majorité actuelle, c'est bien celui de s'être désintéressée de la politique industrielle française. Seuls deux pays dans le monde ont réussi à se réindustrialiser : la Suède et le Japon. Quant à nous, nous nous sommes dotés des moyens pour y parvenir. L'opposition aurait donc dû nous faire grâce au moins de cette critique.
Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe UMP ne votera pas la motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean Launay, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.
En défendant la motion de rejet préalable, Pierre-Alain Muet a rappelé à juste titre l'explosion de la dette, du chômage et des inégalités, la dérive du déficit du commerce extérieur : autant de signes de l'insincérité qui a caractérisé les différents budgets de cette législature. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
La crise a bon dos. En dix ans, la dette aura doublé, passant de 900 milliards d'euros en 2002 à 1 800 milliards en 2012. En réalité, les mauvais choix fiscaux, en particulier la loi TEPA – qui fut le péché originel de cette législature –, ont affaibli nos marges de manoeuvre et contribué à accroître les déficits. Vous êtes friand de comparaisons avec l'Allemagne, monsieur le ministre. Pourtant, dans ce domaine, elles ne sont pas flatteuses pour vos choix. En dépit de l'accroissement du chômage, vous continuez de subventionner les heures supplémentaires. Le tout aboutit à des tensions – et le mot est faible – sur le pouvoir d'achat du plus grand nombre des Français et au creusement des inégalités, avec l'aggravation de la précarité et des fins de mois difficiles.
Sous couvert du nécessaire rétablissement des finances publiques, vous préférez, préfigurant ainsi une motion de rejet préalable que vous pourriez présenter l'an prochain à la même époque, anticiper sur le budget pour 2013, qu'il pourrait nous revenir de présenter. Cela vous permet de ne pas vous appesantir sur votre propre projet de budget. Pierre-Alain Muet, dans sa motion de rejet préalable, a confirmé le risque de dérive du déficit public et souligné les pressions que vous exercez sur les collectivités territoriales, la dette de ces dernières n'étant pour rien dans l'explosion de la dette publique.
Oui, le retour à un déficit réduit à 3 % est nécessaire, mais votre méthode, fondée sur l'austérité, n'est pas la bonne, car elle ne s'attaque pas aux causes du sous-emploi et du manque de compétitivité des entreprises.
Notre projet comporte des propositions alternatives. Elles sont, pour une bonne part, connues, et sont fondées sur une politique globale, comme celle menée par Lionel Jospin entre 1997 et 2002. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Ces propositions, que nous avons présentées, au fil des projets de loi de finances successifs, à travers des amendements que vous avez toujours rejetés, ont pour objet d'instaurer une véritable justice fiscale. Nous les présenterons cette année encore.
Nous vous proposerons ainsi de taxer tous les revenus, afin de redonner une véritable progressivité à l'impôt sur le revenu. En effet, la taxation additionnelle des hauts revenus que vous nous proposez n'est pas à la hauteur de la situation actuelle, qui est probablement comparable à celle qui a résulté de la crise de 1929. À chacune de vos propositions, nous répondrons par la solidarité. En attendant, nous voterons la motion de rejet préalable.
En conclusion, monsieur le ministre, je veux vous rappeler que, sous le gouvernement de Lionel Jospin, la croissance française était de 3,2 %, quand la croissance mondiale était de 3,4 %,…
…alors qu'entre 2002 et 2007 elle était de 2 % et la croissance mondiale de 4,5 %. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
La parole est à M. Jean-Claude Sandrier, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le ministre, j'en suis désolé, mais vous allez à nouveau entendre des poncifs : oui, vous êtes responsables de la situation ! Il suffit de lire le rapport que l'ONU a consacré aux causes de la crise pour s'en convaincre. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Selon l'ONU, en effet, la crise est due aux mauvais choix du privé et à des politiques publiques fondées sur l'idée selon laquelle les marchés, en particulier les marchés financiers, peuvent s'autoréguler et assurer le développement de l'économie. Comme tous les gouvernements qui ont suivi cette règle, vous portez la responsabilité de la crise.
Votre budget a trois caractéristiques.
Tout d'abord, il est hors de la réalité, puisque nous savons d'ores et déjà – et le rapporteur général l'a très honnêtement reconnu – que, l'année prochaine, la croissance sera, non pas d'1,75 %, mais vraisemblablement de 1 %, voire moins.
Ensuite, il est profondément injuste. Vous prenez péniblement 400 millions d'euros aux plus riches – après avoir envisagé de ne leur en prendre que 200 – pendant deux ans seulement, alors que – si la majorité ne change pas l'année prochaine, ce qui m'étonnerait beaucoup – vous allez taxer les dépenses de santé des Français en leur prenant 1,2 milliard par le biais d'une taxe sur les mutuelles.
Mme Pécresse nous dit que vous prélevez 2 milliards d'euros sur les plus hauts revenus, mais se souvient-elle que les cinq cents plus grosses fortunes ont augmenté de 120 milliards d'euros en dix ans ? Ces 2 milliards ne représentent que 1,6 % de cette augmentation : il n'y a donc vraiment pas de quoi pleurer, surtout quand on sait que cette taxe ne sera appliquée que pendant deux ans !
Enfin, ce projet de budget est inadapté, car l'austérité, ainsi que vient de le rappeler l'Observatoire français des conjonctures économiques, mène tout droit à la récession.
Il n'existe qu'un seul chemin pour sortir de la crise, celui qui consiste à mobiliser l'argent pour relancer la croissance, par la consommation, l'investissement public et privé. Vous ne savez pas où se trouve l'argent ? Vous lisez pourtant les journaux comme moi : les profits, les dividendes, les bonus et les rémunérations des grands patrons augmentent. Ainsi, on pouvait lire, dans Les Échos de ce matin, que les résultats des entreprises et leurs dividendes sont en progrès constant, au point de renouer avec les sommets passés. Selon AlphaValue, 400 sociétés non financières disposent de 100 milliards d'euros de cash après dividendes et de 3 milliards d'euros de liquidités. Il faut prendre l'argent là où il est ! Puisque vous vous y refusez, nous voterons la motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
(La motion de rejet préalable n'est pas adoptée.)
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite du projet de loi de finances pour 2012.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures quarante.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Nicolas Véron