La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures trente.)
Hier soir, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles de la première partie, s'arrêtant à l'article 11.
Je suis saisi d'un amendement n° 112 , tendant à supprimer l'article 11.
La parole est à M. Jean-Louis Idiart.
Monsieur le ministre du budget, vous nous proposez de geler plusieurs dotations de fonctionnement. Or vous savez que les collectivités territoriales – communes, départements, régions – sont les principaux investisseurs de notre pays et qu'elles vont commencer l'année dans la plus grande insécurité, leur financement étant bloqué par les difficultés du système bancaire. La proximité qu'elles entretiennent avec leurs administrés, en outre, les rend particulièrement sensibles à la crise. Enfin, non seulement les réformes à venir les plongent dans une profonde instabilité, mais les déclarations faites du matin au soir par le « Château » ne sont pas de nature à les rassurer.
Au moment où les collectivités locales ont besoin à la fois de sécurité et de dynamisme, vous allez dans le sens contraire de celui que vous semblez vouloir prendre à l'échelon national. Notre amendement tend donc à supprimer cet article.
Défavorable, dans la mesure où il est nécessaire de diminuer certaines dotations afin de garantir l'indexation de l'augmentation de l'enveloppe globale – comprenant l'augmentation de la DGF – sur l'inflation prévisionnelle de 2 %.
Comme vous de votre côté, monsieur Idiart, nous n'avons pas changé d'avis depuis hier.
La nuit porte pourtant conseil ! La vôtre aurait-elle donc été blanche ?
La nuit nous a porté conseil : celui de ne pas sortir du cadre fixé. J'ai déjà expliqué longuement notre logique – que vous avez naturellement le droit de contester. J'émets donc un avis défavorable.
Je suis sûr que c'est à contrecoeur !
(L'amendement n° 112 n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 22 .
La parole est à M. le rapporteur général.
Au sein de l'enveloppe évoquée par le ministre, et qui progresse de 1,1 milliard d'euros, il faut intégrer l'augmentation du FCTVA, soit plus de 600 millions d'euros en sus d'autres dotations. Cet amendement permet de gagner 10 millions d'euros, et donc de desserrer la contrainte pesant sur des dotations qui servent de variables d'ajustement.
Ce n'est pas énorme.
La somme peut paraître faible si on la ramène au 1,1 milliard d'euros dont je viens de parler, mais c'est souvent en réalisant de petits pas que l'on progresse, en tout cas en matière financière.
Le fonds de solidarité des collectivités territoriales touchées par des catastrophes naturelles, créé l'an dernier, a été doté de 20 millions d'euros prélevés sur l'enveloppe de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, qui sert elle-même de variable d'ajustement. Or, comme ce fonds n'a été créé que fin septembre, les crédits disponibles s'élèvent à une quinzaine de millions d'euros. Aussi, plutôt que de le doter de 20 millions d'euros au détriment de la DCTP – qui, par ailleurs, diminue malheureusement –, est-il proposé de ne doter le fonds que de 10 millions d'euros.
Je suis saisi d'un amendement n° 214 , tendant à supprimer l'article 12.
La parole est à M. Jérôme Cahuzac.
Cet amendement va dans le même sens que ceux que nous avons précédemment présentés. Il s'agit d'éviter que le Gouvernement ne fasse des collectivités locales une variable d'ajustement budgétaire.
Monsieur le rapporteur général, l'augmentation du FCTVA en 2009 n'est pas le fruit d'une politique décidée par le Gouvernement et que vous approuveriez ; elle n'est pas non plus un cadeau des pouvoirs publics aux collectivités locales ; elle est la conséquence des choix faits par celles-ci il y a deux ans. Il est donc tout à fait abusif de la présenter comme un signe positif émis par les pouvoirs publics à l'égard des collectivités. Vous n'y croyez d'ailleurs pas vous-même !
Défavorable. Monsieur Cahuzac, cessez d'affirmer que nous présentons des mesures auxquelles nous ne croyons pas ! Ce n'est pas vrai.
Vous avez tout à fait le droit de contester notre approche, mais je crois profondément que, dans le présent contexte, notre analyse et nos propositions sont justes.
Je préfère encore que vous disiez cela. (Sourires.)
Je ne mets absolument pas en cause votre sincérité, monsieur le ministre. En revanche, je maintiens mes propos sur votre présentation de l'augmentation du FCTVA. Celle-ci ne résulte pas d'un choix de votre part, mais d'une décision prise par les collectivités locales il y a deux ans. Quand j'entends certains – vous-même, monsieur le ministre ou encore le rapporteur général – indiquer qu'elle serait due à votre souci de l'avenir des collectivités, je maintiens que vous ne croyez pas à ce que vous dites.
(L'amendement n° 214 , repoussé par la commission, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 23 .
La parole est à M. le rapporteur général.
Il s'agit, ici aussi, de desserrer la contrainte mais cette fois à hauteur de 100 millions d'euros et non plus de 10 millions.
Le produit des amendes forfaitaires de la police de la circulation, qui bénéficie aux collectivités locales, devrait passer l'an prochain de 600 à 700 millions d'euros. Il paraît possible, sans détériorer la valeur du point de ces amendes telle qu'elle sera fixée par le comité des finances locales à la fin de l'année – probablement aux alentours de 25 euros –, d'affecter l'intégralité de la différence à la dotation globale de fonctionnement.
La hausse de la DGF étant elle-même fixée à 2 %, cela permettra de diminuer la réfaction sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle. La baisse de la DCTP et des autres dotations d'ajustement devrait s'en trouver réduite de plusieurs points.
Je suis saisi d'un amendement n° 24 , tendant à supprimer l'article 13.
La parole est à M. le rapporteur général.
L'article 13 reconduit la dérogation relative au FCTVA, consistant à admettre les dépenses engagées pour l'équipement en téléphonie mobile des zones qui en sont dépourvues.
L'État s'était engagé, il y a six ans, à poursuivre cet équipement grâce à une aide d'État, laquelle a été transformée en éligibilité au FCTVA – puisque, comme vous le savez, ce fonds ne joue que pour les dépenses concernant des équipements dont la propriété est celle de la collectivité locale, et dans des conditions très restrictives lorsqu'il s'agit de la propriété d'autrui et que la dépense est donc réalisée sur un équipement n'appartenant pas à la collectivité.
Cette dérogation a été reconduite par deux fois.
…et à ses collègues. Reconduire cette éligibilité au FCTVA aurait pour conséquence de majorer… Suivez-moi bien, monsieur Cahuzac, car je plaide pour votre paroisse !
Nous vous écoutons très attentivement, monsieur le rapporteur général !
Reconduire l'éligibilité, donc, revient à majorer le FCTVA, même si c'est de façon modeste, c'est-à-dire à hauteur d'une dizaine de millions d'euros. Dès lors, les autres dotations s'en trouvent minorées.
C'est vrai.
Il ne s'agit donc plus d'une aide d'État, mais d'une aide autofinancée, si l'on peut dire, par les collectivités territoriales.
La reconduction de cette dérogation, s'inscrivant dans un contexte budgétaire qui n'a plus rien à voir avec celui de 2003, nous paraît excessive. Si l'État souhaite financer de nouveaux investissements en matière de téléphonie mobile, il lui appartient de le faire sur ses propres crédits.
Le Gouvernement – qui croit en ce qu'il dit – n'est cette fois pas favorable à l'excellent amendement du rapporteur général.
Il est important de pouvoir continuer à favoriser l'investissement des collectivités dans le domaine de la téléphonie mobile. Plusieurs plans ont été relancés afin de couvrir de nouvelles zones. Le remboursement n'est que de 4 millions d'euros, et il semble utile de laisser aux collectivités la possibilité de bénéficier de cette somme qui n'est pas considérable, d'autant que la couverture du territoire n'est pas achevée.
(L'amendement n° 24 est adopté.)
Sur l'article 14, je suis saisi d'un amendement n° 217 .
La parole est à M. Jérôme Cahuzac.
Cet amendement a trait à la compensation par l'État des dépenses liées au RMI. Au-delà de la défense de cet amendement, qu'il me soit permis de mettre en évidence l'effet de ciseaux dont les collectivités territoriales vont être victimes. Leurs dépenses vont en effet augmenter – les temps qui s'annoncent ne prévoient pas de diminution de ces dépenses sociales que vous appelez, monsieur le ministre, revenus d'assistance et que nous appelons, nous, revenus de solidarité –, tandis que d'autres dépenses vont augmenter moins vite que l'inflation, l'intégration du FCTVA dans l'enveloppe normée revenant à faire progresser les autres dotations nettement moins que l'inflation officielle : 0,8 % au lieu de 3 %.
La commission a repoussé cet amendement.
Lorsque le fonds de mobilisation départementale pour l'insertion a été créé, il l'a été, il faut le reconnaître, par dérogation à la règle de compensation à l'instant t du transfert de compétences. Il est vrai qu'à l'époque, le RMI était en assez forte progression.
La création, tout à fait légitime, de ce fonds, était prévue pour un an, après quoi il a été prorogé jusqu'en 2008 – et il faut tout de même saluer l'effort que fait le Gouvernement en le reconduisant à nouveau en 2009.
Comme vient de le dire M. Bouvard, il y a des départements…
…où le coût du RMI a augmenté sensiblement parce qu'ils ont des populations fragiles, et d'autres où, parce que le contexte est plus favorable mais aussi parce que la gestion est plus rigoureuse, il a diminué. Il faut aussi le souligner.
Avec le FMDI, l'État va au-delà de ses obligations légales, voire constitutionnelles. Nous le reconduisons, ce qui me semble justifier un rapport de confiance, ou d'honnêteté, entre les collectivités locales et l'État.
Il est également vrai que le dynamisme des dépenses au titre du RMI varie selon les départements. Il ne s'agit pas de donner des leçons, car les choses sont complexes, mais il faut bien reconnaître que certains départements gèrent les choses de façon très précise, allocataire par allocataire, et suivent avec attention ce qui est fait en matière d'insertion. On voit bien qu'il y a des différences – je le constate dans mon propre département – entre certains départements qui acceptent que quelqu'un reste des années et des années au RMI sans qu'il se passe rien, et d'autres qui considèrent, à partir d'un moment donné, qu'une telle situation fait problème. Il y a donc, et je le dis sans vouloir heurter qui que ce soit, un vrai enjeu de gestion du RMI.
Je suis saisi d'un amendement n° 113 , tendant à supprimer l'article 15.
La parole est à M. Jérôme Cahuzac.
Cet amendement a pour but de mettre en évidence un phénomène qui, malheureusement, se répète, et qui n'est pas favorable aux collectivités territoriales. Encore une fois, ce ne sont pas les collectivités qui ont décidé la réforme concernant la taxe sur le foncier non bâti. C'est une décision qui a été prise et annoncée unilatéralement par le Président de la République. Le Parlement, ensuite, a suivi, et accepté qu'elle ait force de loi.
On voit bien l'effet de ciseaux, dont je parlais tout à l'heure, auquel sont soumises les collectivités, puisque le dynamisme de cette imposition n'est absolument pas pris en compte par les dotations d'État, bien au contraire. Je le redis, les enveloppes qui se trouvent dans l'enveloppe normée – hormis le FCTVA – évoluent globalement de 0,8 %, quand l'inflation subie par les ménages est de 2,9 %, et alors même que, les travaux de l'AMF en témoignent, celle subie par les municipalités est plutôt comprise entre 4,5 et 5 %. C'est donc, en euros constants, d'un manque de près de 4 % que vont souffrir les collectivités, qui sont bien, je le maintiens, la variable d'ajustement budgétaire de la politique du Gouvernement !
(L'amendement n° 113 , repoussé par la commission, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 215 .
La parole est à M. Jérôme Cahuzac.
Il est défendu.
(L'amendement n° 215 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Cet amendement appelle quelques commentaires, et me donnera également l'occasion de répondre aux amendements précédents.
Les concours de l'État aux collectivités territoriales augmentent de 1,1 milliard d'euros. Le FCTVA croît de 660 millions d'euros. Le solde croît de 0,8 %. Le solde, c'est une cinquantaine de milliards, dont une quarantaine de milliards de DGF.
Le Gouvernement propose, et il a tout à fait raison, que la DGF progresse de 2 %. Nous avons donc, grosso modo, un ensemble de 45 milliards qui doit progresser de 0,8 %, et, au sein de cet ensemble, un sous-ensemble de 40 milliards qui doit progresser de 2 %.
Pourquoi donner priorité à la DGF ? Parce qu'elle est le seul moyen d'assurer une péréquation. Et comme la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale vont connaître une progression sensible, il faut, pour faire tenir l'édredon dans la valise (Sourires), diminuer toutes les autres dotations. Il s'agit essentiellement des dotations de compensation de la taxe professionnelle et de la taxe sur le foncier bâti.
S'agissant de la dotation de compensation des exonérations de la taxe sur le foncier non bâti, les dispositions de l'article 15 ne concernent, comme nous l'avions décidé l'an dernier, que les parts régionale et départementale de cette taxe, à l'exclusion de la part communale.
Nous avons écarté la dotation de compensation des exonérations de la taxe d'habitation, qui représente pourtant 1,5 milliard d'euros. C'était tentant, mais cela aurait été une erreur, car nous aurions pénalisé les communes accueillant des populations en difficulté. Cette dotation compense en effet des exonérations accordées notamment à des personnes sans ressources ou à des personnes handicapées.
Le Gouvernement prévoit que l'ensemble de ces dotations de compensation, hors DGF, diminue en moyenne de près de 23 %. Nous essayons, et c'est là que l'exercice devient difficile, de rendre le taux de diminution plus supportable. C'est pourquoi je vous ai proposé, tout à l'heure, le fonds de 10 millions et le transfert de 100 millions d'amendes de police. Et c'est aussi pourquoi, par le présent amendement, je soumets au Gouvernement une autre idée. Certes, les temps sont très difficiles, monsieur le ministre, mais je crois qu'il faut être juste. Plus les temps sont difficiles, plus il faut être juste.
Or, parmi toutes ces dotations, il en est une, la dotation spéciale pour le logement des instituteurs, dont le montant est d'une trentaine de millions par an, mais que le Gouvernement a pu, du fait de l'existence de reliquats en 2008, ramener à 5 millions.
Non, monsieur Cahuzac, c'est exactement le contraire : cette dotation a toujours été surcalibrée, car on a toujours sous-estimé le nombre d'instituteurs qui choisissaient de devenir professeurs des écoles.
Bref, il convient, dans le cadre d'une enveloppe contrainte, de faire remonter cette dotation de 5 millions à 30 millions. Le Gouvernement a en effet retenu une base de 5 millions alors que la base normale, en régime de croisière, est de 30 millions. Il nous fait ainsi supporter la différence sur notre propre enveloppe.
Je reconnais, cela dit, que cet amendement fait problème, car nous demandons au Gouvernement de trouver ces 30 millions en dehors de son enveloppe de 1,1 milliard.
La parole est à M. le ministre, pour donner l'avis du Gouvernement et soutenir l'amendement n° 296 .
Le Gouvernement ne peut être favorable à l'amendement du rapporteur général. Si l'on commence à ouvrir une brèche, la digue s'effondrera, et les choses ne feront que s'aggraver au Sénat. Il faut vraiment faire très attention.
Nous avons un principe, dont je considère qu'il n'est pas d'une dureté excessive. Vous avez le droit de penser le contraire, mais au moins est-il clair, et je crois aussi qu'il est juste, notamment dans les circonstances présentes. D'autre part, si l'on commence à écorner les principes, il n'y a plus de règle qui tienne.
Le Gouvernement propose, en revanche, un amendement qui tire les conséquences de votre proposition, monsieur le rapporteur général, relative aux amendes de police. Les 100 millions d'euros que celles-ci rapportent permettront d'amoindrir l'écrasement des variables d'ajustement, et donc de vous donner satisfaction par d'autres moyens.
…du moins à me rallier à l'amendement du Gouvernement – ce qui est tout différent –, mais à une condition, que j'énonce ici avec quelque solennité. Si le Gouvernement se limite, ici, à accepter des amendements de redéploiement, il faut qu'il fasse de même au Sénat, car si nous devions passer, au terme de l'examen par ce dernier, de 1,1 à 1,15 ou 1,2 milliard, notre position deviendrait injustifiable.
Un cadre a été fixé par le Premier ministre lui-même, qui a annoncé en juillet dernier aux associations d'élus que, pour un ensemble de dotations de 55 milliards, la progression serait la même que pour l'ensemble du budget de l'État, soit 2 %, ce qui veut dire 1,1 milliard et pas un euro de plus. Cette règle, définie par le Premier ministre, nous sommes prêts à l'accepter – et je suis prêt à me rallier à l'amendement du Gouvernement –, mais il faut qu'elle vaille jusqu'au terme de la discussion budgétaire.
Il se pose un problème de forme et un problème de fond.
L'amendement n° 25 a été adopté par la commission. Il ne me semble pas que les commissaires aux finances, et notamment ceux qui appartiennent à la majorité, aient fait preuve, en tout cas jusqu'à présent, de la moindre déloyauté à l'égard du gouvernement qu'ils soutiennent. Et nous devinons d'ailleurs ce qu'il leur en coûte, car nombre d'entre eux animent aussi des exécutifs locaux, et savent aussi bien que nous ce que sera l'année 2009, compte tenu –je reprends là vos propres termes, monsieur le ministre – de l'écrasement des variables d'ajustement. Car il y a toujours un moment où les mots finissent par traduire la réalité : vous avez bel et bien parlé, monsieur le ministre, et le compte rendu en fera foi, d'« écrasement des variables d'ajustement », rejoignant ainsi ce que nous ne cessons de dire depuis le début de ce débat sur les collectivités locales.
L'amendement de la commission a été adopté en conscience, non seulement par les parlementaires de l'opposition, mais aussi par ceux de la majorité, dont le soutien et la loyauté n'ont jamais fait défaut au Gouvernement. Je comprends l'embarras du rapporteur général, mais l'argument qui consiste à dire qu'il faut nous enfermer dans une pièce rigoureusement étanche car le moindre souffle d'air risquerait d'amener les sénateurs à ouvrir grand la fenêtre, revient d'une certaine manière à faire jouer aux parlementaires, de l'opposition comme de la majorité, en d'autres termes à la représentation nationale dans son ensemble, un rôle qu'elle ne souhaite pas jouer à l'égard des collectivités locales.
Il est un peu trop facile, monsieur le ministre, de nous demander d'être plus durs que d'autres ne s'apprêtent à l'être, et de permettre ainsi au Sénat, une fois de plus, de paraître plus conscient que nous du sort des collectivités locales.
L'amendement de la commission doit être maintenu, et je compte sur nos collègues de la majorité pour que leur vote, en séance, soit conforme à celui qu'ils ont émis en commission.
Si j'ai bien compris, M. le rapporteur général n'a pas dit qu'il retirait l'amendement.
Monsieur Cahuzac, je vous remercie de vous exprimer, en même temps, pour l'opposition et la majorité… (Sourires.)
La matière est complexe. Le Gouvernement a fait une avancée qui mérite considération, et nous pourrons approfondir certaines questions en deuxième partie.
On décèle une sorte de gêne dans les propos du rapporteur général ; il est vrai que c'est difficile pour lui, mettons-nous à sa place… Je comprends son abnégation, mais qu'il prenne garde, car de l'abnégation, on passe facilement au renoncement, puis à la capitulation !
Il est très important que les jeunes citoyens qui suivent nos débats dans les tribunes se rendent compte que, lorsque l'on a des convictions, on ne doit pas y renoncer mais les défendre jusqu'au bout, quoi qu'il en coûte ! Nos collègues de la majorité qui ont voté cet amendement ne sont pas des girouettes : ils se doivent de rester fidèles à la position qu'ils ont prise.
Que va-t-il se passer, en effet ? Les propos du ministre et du rapporteur général sont très clairs : si l'amendement de la commission est voté, le Sénat risque fort de ne pas suivre l'Assemblée. Le texte va donc nous revenir, et nous conserverons ainsi une marge de discussion. Si, au contraire, nous renonçons d'emblée, ce ne sera pas le cas.
Je propose qu'ensemble, nous tirions le rapporteur général de son embarras, afin qu'il ne succombe pas à la déchirure qui, actuellement, le fait souffrir. Il est écartelé entre sa connaissance du sujet, sa loyauté vis-à-vis de la commission des finances et son esprit de discipline. Mais la discipline n'a jamais rien réglé. Nous avons un devoir d'indocilité, qui est une vertu dès lors qu'elle correspond à des convictions profondes. Il faut donc garder notre amendement en l'état.
Nous avons bien vu que le rapporteur général, qui connaît la difficulté de se faire entendre du Gouvernement, n'a pas été convaincu par les propos du ministre. Tenons-nous en donc à la position de la commission !
Sur le vote de l'amendement n° 25 , je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. le ministre.
Monsieur Cahuzac, je n'ai pas parlé d'« écraser les variables d'ajustement », mais de faire jouer les variables d'ajustement à l'intérieur du périmètre. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR .) Je n'ai jamais dit que les collectivités locales jouaient le rôle de variable d'ajustement.
En réalité, la variable d'ajustement, c'est le budget tout entier, c'est l'ensemble de la dépense publique. Et il y a, au sein de celle-ci, les relations financières entre l'État et les collectivités locales. Les collectivités locales ne sont pas la variable d'ajustement du projet de budget pour 2009, et elles n'ont d'ailleurs pas vocation à l'être.
Elles participent au même effort que l'ensemble des dépenses de l'État. Les choses sont construites là-dessus.
Je salue l'esprit de responsabilité et de pugnacité de la majorité, et plus particulièrement du rapporteur général. Nous sommes nombreux ici à être également gestionnaires de collectivités locales, mais nous devons aussi, de façon responsable, tenir compte des réalités dans l'élaboration du budget et d'un nouveau cadre de relations financières entre l'État et les collectivités locales.
Le Sénat est naturellement très sensible à ces sujets, plus encore que l'Assemblée de par le rôle que lui confère la Constitution. Nous lui demanderons de faire preuve du même esprit de responsabilité, et nous n'accepterons pas ses amendements – mais j'imagine qu'il n'y en aura pas.
Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'amendement n° 25 .
(Il est procédé au scrutin.)
Je suis saisi de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 15.
La parole est à M. Dominique Baert, pour soutenir l'amendement n° 173 . J'en profite pour lui souhaiter un bon anniversaire. (Sourires.)
Monsieur le président, j'apprécie votre attention et je vous en remercie.
Je voudrais faire un retour en arrière. J'ai déjà présenté cet amendement, l'an dernier, lors de l'examen du budget. À l'époque, je n'avais pas eu le bonheur d'être écouté par le rapporteur général. Sans doute n'avait-il pas apprécié la portée normative et simplificatrice de cet amendement, qui tend à corriger – si j'ose dire – une incongruité administrative, selon laquelle la prise en compte des dépenses réimputées au sein du FCTVA se fait avec un décalage de deux ans pour les communautés urbaines, alors que, pour les communautés d'agglomération – dont le régime est plus récent –, le décalage n'est que d'un an.
Il y a actuellement quatorze communautés urbaines et plusieurs milliers de communautés d'agglomération. J'ai tendance à penser que la simplification administrative commanderait que le régime des communautés urbaines soit aligné sur celui des communautés d'agglomération. C'est pourquoi je propose qu'il soit mis fin au décalage de deux ans du remboursement des dépenses en provenance du FCTVA pour les communautés urbaines.
Monsieur Baert, je suis certain que M. le rapporteur général vous avait écouté, mais peut-être n'avez-vous pas été entendu ! (Sourires.)
La parole est à M. le rapporteur général.
Comme l'a indiqué M. Baert, les communautés urbaines datent de 1965 et sont donc plus anciennes que les communautés d'agglomération. Mais il aurait pu ajouter que les communes sont plus anciennes encore, puisqu'elles ont deux siècles… Or, le régime de droit commun, qui s'applique aux communautés urbaines et aux communes, est la récupération au bout de deux ans.
En revanche, lors de la création, en 1999, des communautés d'agglomération et des communautés de communes à taxe professionnelle unique, le ministre de l'intérieur d'alors, M. Chevènement, a souhaité encourager ce type d'intercommunalité en lui octroyant quelques avantages – un supplément modeste de DGF et la récupération du FCTVA dès la première année. Les résultats ont été au rendez-vous, mais, dans l'esprit du ministre – je me souviens des débats de l'époque –, ce régime dérogatoire était consenti à titre temporaire. Il n'est certes pas question de le supprimer dans l'immédiat, mais il n'est pas question non plus d'aligner sur lui les autres régimes, en particulier celui des communautés urbaines.
Mon explication était volontairement détaillée, afin de justifier la position actuelle du Gouvernement.
Même avis. Lorsque les communautés d'agglomération ont été créées, une incitation était nécessaire, car les communautés urbaines existaient déjà. En outre, l'alignement demandé aurait un coût très important en trésorerie : quelque 200 millions d'euros.
(L'amendement n° 173 n'est pas adopté.)
Cet amendement, déposé par Christian Paul et les membres du groupe SRC, devrait recevoir également le soutien de nos collègues de la majorité, car il a trait à l'importante question de la démographie médicale.
De nombreuses zones du territoire, notamment rurales, connaissent un manque de praticiens, qui est appelé à s'aggraver encore. Nous avions d'ailleurs longuement évoqué ce problème lors de la discussion de la loi sur le développement des territoires ruraux.
La construction des maisons de santé n'est actuellement pas éligible au FCTVA. Lorsque les collectivités décident de construire de tels établissements, elles doivent s'acquitter de la TVA au taux de 19,6 %.
Le présent amendement vise donc à rendre la construction des maisons de santé éligible au FCTVA dans les zones déficitaires en médecins, afin d'y inciter à la construction de ces établissements. Cela rejoint le débat que nous avons eu hier soir à propos des hôpitaux et des établissements médico-sociaux. L'ampleur des investissements qui s'imposeront sur les collectivités désireuses de répondre à la demande de service public sur leur territoire nous impose de réfléchir à cette réalité.
La commission n'a pas accepté l'amendement.
Il est toujours délicat de définir le périmètre exact du FCTVA. Si la commune reste propriétaire de l'équipement et qu'elle le met à disposition gratuitement, elle récupère la TVA, au titre du FCTVA. Par ailleurs, si l'équipement peut être loué, il devient également éligible au régime de la TVA, et la récupération se fait normalement à travers la location.
Dans le cas, en revanche, où la commune n'est pas propriétaire de l'équipement et où elle le met à disposition gratuitement, le problème de la récupération de la TVA se pose, mais je n'y vois pas de solution, sinon celle consistant à prévoir, en amont, des montages juridiques permettant de se placer sous le régime de la TVA applicable aux activités commerciales – ou, en restant propriétaire, sous celui des collectivités locales.
L'amendement est satisfait par la règle actuelle. La question ne se pose pas si les investissements de la commune – qu'il s'agisse de constructions ou de locations – s'inscrivent dans le périmètre du remboursement du FCTVA. Elle se pose si la commune n'est pas propriétaire, mais on sort alors du champ du FCTVA.
(L'amendement n° 210 n'est pas adopté.)
L'amendement n° 201 , cosigné notamment par mes amis Claude Bartolone et Bernard Derosier, a trait à la compensation des compétences transférées et à la péréquation.
Le dégrèvement dit « ticket modérateur » prend pour référence, pour les départements, le plus faible des trois taux suivants : le taux de l'année 2005, celui de l'année 2004 majoré de 7,3 % et celui de l'année d'imposition.
Or ce taux de référence, à l'origine du ticket modérateur particulièrement élevé en 2007 pour le Nord – 31,4 millions d'euros –, pour la Seine-Saint-Denis – 21,5 millions d'euros – et pour le Pas-de-Calais – 14,5 millions d'euros –, ne tient pas compte de la disparité de situation des départements ni de la nécessité, pour ceux dont les marges de manoeuvre financières sont réduites du fait de la précarité dans laquelle vit leur population – les trois départements que j'ai cités ont été particulièrement touchés par la crise industrielle –, d'augmenter la fiscalité pour financer les transferts de charge mal compensés par l'État.
Le ticket modérateur est également en contradiction avec l'objectif de péréquation. Les montants les plus élevés de ticket modérateur concernent les départements qui ont les indices de précarité les plus défavorables.
Les revenus moyens par habitant vont, si l'on exclut Paris, et si l'on prend les chiffres de 2006, du simple au double ; 7 078 euros pour le Pas-de-Calais, 7 715 euros en Seine-Saint-Denis, 7 646 euros dans le Nord, 12 621 euros dans les Yvelines, 14 231 euros dans les Hauts-de-Seine. Inversement, le taux de chômage s'élevait, en 2006, à plus de 12 % dans le Pas-de-Calais, en Seine-Saint-Denis et dans le Nord, contre moins de 8 % dans les Yvelines et les Hauts-de-Seine.
Notre amendement tend donc à supprimer le ticket modérateur pour les départements où la hausse relativement élevée de la fiscalité s'explique par la nécessité de financer les charges de transfert de compétences non compensées par l'État. Il tend également à imposer au Gouvernement de communiquer toutes les données fiscales, financières et économiques nécessaires à l'analyse de l'impact de la réforme de la taxe professionnelle sur la fiscalité et le tissu industriel des départements.
Quant à l'amendement n° 200 , il est de repli.
Elle ne les a pas adoptés, car leur mise en oeuvre serait très compliquée. Ils visent en effet à moduler en fonction de critères sociaux la valeur ajoutée servant au calcul du plafonnement de la taxe professionnelle.
En tant qu'élu d'Île-de-France, je connais bien la Seine-Saint-Denis : les bases de taxe professionnelle y ont fortement progressé ces dernières années grâce à une gestion très dynamique, dont témoignent des opérations telles que l'aménagement de la Plaine-Saint-Denis et l'implantation de nombreuses entreprises, et le département a donc pu ne pas augmenter les taux. Or, je rappelle que le ticket modérateur ne joue que lorsque les taux ont été augmentés.
Une assiette qui évolue favorablement permet à une collectivité d'éviter d'augmenter les taux, et donc de rester très attractif pour les entreprises. Plus le taux de taxe professionnelle est bas, plus les entreprises sont enclines à s'installer. Je crois savoir que la Seine-Saint-Denis connaît actuellement une dynamique économique très favorable dans de nombreux secteurs. La ville de Montreuil, par exemple – et je sais que l'ancien maire, ici présent, y a contribué pour beaucoup…(Sourires) –, a connu un dynamisme économique tout à fait remarquable.
Je ne vous contredirai évidemment pas, monsieur le rapporteur général (Rires), mais le taux de taxe professionnelle n'est pas l'essentiel : ce qui compte, c'est la dynamique permettant de créer un environnement favorable à l'accueil des entreprises. Je pense, par exemple, aux lycées, aux transports, aux services sociaux pour les salariés. Bref, la propagande faite par certains autour de la taxe professionnelle ne résiste pas à l'analyse. Ce qui décide une entreprise à s'installer ou non dans une commune n'est pas le taux de taxe professionnelle, mais les conditions d'accueil, d'accessibilité notamment, qu'elle peut y trouver.
Par ailleurs, que les entreprises versent leur écot à la nécessaire solidarité n'a rien de choquant. Après tout, ce sont les collectivités locales qui paient les infrastructures. Dans ces conditions, que les entreprises soient mises à contribution pour financer ce qui leur permet d'« extraire la plus-value » – comme aurait dit l'ancêtre (Sourires) – dans les meilleures conditions n'est que justice.
La taxe professionnelle est au coeur de l'actualité, nous en avons d'ailleurs largement débattu hier.
Je ne suis pas d'accord avec vous, monsieur Brard. Je considère, au contraire, que le taux de taxe professionnelle joue un rôle dans l'implantation des entreprises.
Chantilly est une ville modeste par rapport à Montreuil ! (Sourires.)
Le taux a une incidence indéniable, puisque les chefs d'entreprise dénoncent régulièrement le poids de cet impôt.
Cela ne joue peut-être pas sur le dynamisme de Montreuil, mais les douanes sont heureuses de s'y être implantées, même si force est de reconnaître qu'elles ne contribuent guère à la taxe professionnelle.
Le coût global du plafonnement de la taxe professionnelle est passé de 5,7 milliards en 2006 à 8,5 milliards en 2007, soit une augmentation de moitié. L'État a financé ce dégrèvement à hauteur de 92 %, le reste – soit 278 millions d'euros – l'a été par les collectivités.
Je suis prêt à vous communiquer toutes les informations dont nous disposons sans pour autant qu'il faille passer par une décision législative. L'administration, la mienne tout particulièrement, est à votre entière disposition pour vous fournir les informations dont vous avez besoin.
Avis défavorable, donc.
(Les amendements nos 201 et 200 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi d'un amendement n° 155 .
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Avant de présenter mon amendement, je veux informer nos collègues – M. le ministre est sûrement déjà au courant – que M. Bernard Tapie est en train de négocier un forfait fiscal en Suisse ! Comme vous le voyez, les gens qui n'ont pas de morale, qui n'ont aucune fibre patriotique s'expatrient pour mettre à l'abri des revenus récents dont la moralité reste à établir…
Je veux par ailleurs mettre en garde les autorités helvétiques : si, en plus d'être un paradis fiscal et d'un paradis bancaire, la Suisse devient un repaire de personnalités à la moralité douteuse, je ne crois pas que cela contribue à améliorer le rayonnement d'un pays qui a déjà quelque difficulté à justifier ses pratiques !
J'en viens à l'amendement.
L'emploi précaire se généralise dans notre pays, en vertu du dogme, cher au MEDEF, de la flexibilité. Vos cadeaux fiscaux ont des conséquences sur les conditions de travail des salariés et sur leur santé.
Le CDI doit être le contrat de travail normal. Aussi notre amendement tend-il à taxer le travail précaire. Pour illustrer notre propos, je voudrais vous lire un extrait d'un excellent article publié le 30 mars dernier dans un non moins excellent quotidien régional, Ouest France, et intitulé : « Plongée dans le monde du travail précaire ».
« Suffit-il de travailler plus pour gagner plus ? Est-ce parce qu'ils ne se bougent pas assez que certains ne décollent jamais du SMIC ? Elsa Fayner, une journaliste de trente ans, a voulu expérimenter de l'intérieur les discours que l'on entend sur le monde du travail. Début 2007, après avoir allégé son CV, elle a cherché du travail à Lille, où elle a passé trois mois. Elle est devenue successivement télévendeuse, serveuse à la cafétéria d'un grand magasin de meubles, femme de ménage dans un hôtel de luxe.
« À la question : “Quand on cherche, on trouve, entend-on. Avez-vous trouvé facilement ?”, elle a répondu : “Oui, certains boulots sont tellement pénibles que les gens abandonnent vite. Dans les call centers notamment – les centres d'appel –,c'est le travail à la chaîne des Temps modernes. Pire même, parce qu'au lieu d'un contremaître, c'est un ordinateur qui surveille.” – Big Brother, nous y sommes ! “Je vendais des abonnements téléphoniques, il fallait passer 300 appels par jour, pour 100 conversations ! Les cadences étaient infernales, le management humiliant, infantilisant. Nous étions écoutés en permanence. Ceux qui réalisaient de bonnes ventes gagnaient des tickets à gratter et des pots de confiture ! Nous n'avions le droit d'aller aux toilettes qu'à certains moments. Quand quelqu'un réalisait une vente, des mains apparaissaient sur l'écran et tout le monde devait applaudir ! La fatigue mentale était terrible.”
« À la remarque : “Votre expérience la plus positive a été celle de la cafétéria. Pourtant, elle avait aussi ses revers”, la journaliste répond : “Oui, ils nous disaient que nous faisions partie d'une grande famille, nous poussaient à être polyvalents, responsables, autonomes... En fait, à la cafétéria, l'autonomie se borne à décider dans quel ordre vous accomplissez vos tâches ; est-ce que vous décongelez d'abord le poulet ou les saucisses ? La polyvalence fait que l'on ne maîtrise pas tous les postes, on passe sans gants de la caisse à la cuisine, on croit que l'autre a accompli la tâche et il ne l'a pas faite... Et surtout, l'état d'esprit famille est assez incompatible avec le temps partiel et les emplois du temps qui changent tous les quinze jours !” »
Je pourrais poursuivre la lecture de cet article, mais je ne veux pas abuser de mon temps de parole. Je tenais cependant à vous montrer où conduit la précarité de l'emploi ! Il s'agit de quelque chose qui se passe non pas en Corée du Sud ou au Japon, mais chez nous ! Les vies de ces salariés sont complètement déstabilisées, leurs salaires très faibles ne permettent pas de faire vivre une famille, et ils sont plus que d'autres touchés par des problèmes de stress et de santé.
Je vous invite donc à adopter l'amendement que nous vous proposons. Je suis persuadé que le rapporteur général, qui n'est pas insensible à ces problèmes, comprendra qu'il importe de changer la législation !
Avis défavorable, mais je vous demanderai, monsieur Brard, de me donner les références de cet article…
(L'amendement n° 155 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)
Je suis saisi d'un amendement rédactionnel, n° 47, de M. le rapporteur général.
(L'amendement n° 47 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 16, amendé, est adopté.)
Article 18
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures trente, est reprise à dix heures quarante.)
Ces amendements très importants concernent tous les élus locaux : régulièrement, ces derniers rencontrent dans leur permanence des concitoyens venus l'un après l'autre leur demander à quoi peut bien servir cette petite colonne qui figure tout en bas de leur feuille d'impôts…
…, qui constitue un prélèvement fiscal, que l'on retrouve dans le montant de l'impôt local, mais qui ne va pas à la collectivité locale. C'est là une question de bon sens ; honnêtement, qui d'entre nous, sur quelque banc qu'il siège, ne se l'est jamais posée ?
Ce prélèvement représente des sommes importantes, qui servent, nous dit-on – telle est du moins la version officielle –, à financer le recouvrement de l'impôt local, assuré par l'État. À l'heure de la RGPP, de la modernisation, de la technique communicante, alors que vous ne cessez de nous vanter, monsieur le ministre, la modernisation de votre ministère et de vos administrations, les taux restent curieusement inchangés : 5,4 % et 4,4 %, tels sont les taux qui grèvent les impôts locaux. N'est-il pas temps de les réduire, monsieur le ministre ?
Par l'amendement n° 143 , nous proposons donc de les ramener respectivement à 2,7 et 2,2 %. Néanmoins, comme nous vous entendions déjà nous opposer, outre la modernisation du ministère, les marges de manoeuvre budgétaires et l'équilibre financier, et parce que nous pouvons être sensibles à ces arguments, nous avons déposé des amendements de repli qui permettront au Gouvernement d'adapter le niveau de ces prélèvements à ses capacités budgétaires. Le geste demeurerait intéressant, et répondrait aux souhaits de tous les élus locaux.
Tel est le sens de l'amendement n° 142 , qui propose une décote de 0,4 % ; de l'amendement n° 208 , qui la ramène à 0,3 % ; de l'amendement n° 207 , aux termes duquel elle ne dépasserait pas 0,2 % ; enfin – dois-je poursuivre encore, monsieur le président ? –, de l'amendement n° 206 , qui limite la réduction à 0,1 %.
Monsieur le ministre, faites un geste ! Montrez que la modernisation de votre ministère peut remplir les poches de nos concitoyens. Ne serait-ce pas la meilleure manière de prouver que la modernisation sert à tout le monde, et d'abord au contribuable ?
Cet amendement est systématiquement déposé, sous des formes variées, depuis quinze ans…
… et une jurisprudence constante, quelle que soit la majorité en place, veut qu'il soit rejeté. Avis défavorable.
On présente généralement mal les choses. Il faut distinguer les frais de gestion pour l'État, qui représentent 2,8 milliards environ, et sont, il est vrai, légèrement inférieurs à ce qui est perçu ; les remboursements ; et les frais de dégrèvement, en réalité bien plus importants que ce que supportent les collectivités locales.
C'est une logique un peu compliquée à comprendre, mais qui est bel et bien réelle. Les dégrèvements seraient de toute façon pris en charge par les collectivités si l'État ne le faisait pas. Il faut savoir qu'ils coûtent plus cher à l'État qu'ils ne coûtent en réalité aux collectivités. L'État rembourse en effet plus que ce qu'il ne reçoit car il joue le rôle d'assureur, ce qui a un coût. Si l'on fait le total des différents postes, on aboutit, pour l'État, à 5 milliards d'euros de coûts et 5 milliards d'euros de recettes. En d'autres termes, l'opération est neutre.
Nous commençons à tenir le bout de la pelote : vous venez en effet de reconnaître, monsieur le ministre, que vous faites un bénéfice sur les coûts de gestion, puisque vous avez déclaré que ceux-ci étaient inférieurs à ce qui est prélevé sur l'argent des contribuables. Et, pour vous en sortir, vous avez tenté d'additionner des carottes et navets…
Les dégrèvements sont une décision politique. Vous raclez quelques sous pour les mettre dans le tonneau des Danaïdes, oubliant que ce sont les contribuables qui paient. Et cela fait beaucoup d'argent, de l'argent dont la légitimité n'est pas bien assise.
Je rappelle que le gouvernement Mauroy avait pris des décisions courageuses en ce domaine.
Et, après tous les gestes d'amitié marqués que vous avez faits en direction des contribuables fortunés, peut-être pourriez-vous faire un petit geste, moins intense mais notable, à l'égard des contribuables les moins riches. Pensez à la vieille dame de nos quartiers qui doit payer la taxe foncière sans bénéficier d'une quelconque réduction, et qui doit payer aussi la taxe d'habitation, qui est certes plafonnée mais qui entraîne des frais de gestion venant alourdir sa feuille d'impôt. La modernisation vous a permis de faire beaucoup d'économies de gestion ; il serait légitime d'en restituer une partie aux contribuables.
Monsieur le ministre, je dois dire que je suis sensible aux amendements de mon collègue, car j'en ai déposé de semblables entre 1997 et 2002 – et Didier Migaud, alors rapporteur général, m'opposait les mêmes arguments que ceux invoqués aujourd'hui par Gilles Carrez…
Il faut que les choses soient claires. Nous avons bien vu que vous avez dû opérer un rétablissement s'agissant des sommes réellement encaissées par l'État au titre des coûts de gestion de la fiscalité locale.
Certes, nous sommes dans un contexte budgétaire spécifique, mais nous sommes aussi à l'aube d'une réforme de la fiscalité locale. Je souhaiterais que le Gouvernement, par votre intermédiaire, s'engage à mener, à l'occasion de cette réforme, une opération de transparence sur les coûts de gestion de la fiscalité locale, et que l'État s'engage ensuite à ne pas percevoir plus que ce que lui coûte réellement cette gestion.
J'ajoute qu'il y a des économies d'échelle à faire – et nous ne doutons pas de votre volonté en la matière. Sans doute seront-elles plus faciles grâce à la réforme de la fiscalité locale. Il faut en tout état de cause que nous puissions régler ce problème. C'est un vieux contentieux, qui s'est accentué après que la majoration décidée dans le cadre de la révision générale des bases a été maintenue alors même que la révision n'a jamais vu le jour.
Monsieur le ministre, vous avez reconnu que le coût de gestion de la fiscalité locale est inférieur aux sommes perçues au titre de ces deux prélèvements, lesquels n'ont pas vocation à financer des dégrèvements mais bien, pour s'en tenir à une formule littérale, les frais d'assiette et de recouvrement. Or, comme l'a souligné Jean-Pierre Brard, l'État perçoit plus que cela ne lui coûte.
Depuis que vous exercez vos fonctions, vous ne cessez de nous dire que vous traquez les économies et que l'administration se modernise rapidement. J'imagine que cela se traduit par des gains de productivité – ces gains dont la méthode des comptes de surplus nous apprend, depuis les années soixante, que nous pouvons les restituer, sous forme de baisse de prix, aux usagers, c'est-à-dire, en l'occurrence, aux contribuables. Faites-les donc bénéficier d'une partie des gains de productivité réalisés en baissant les taux de prélèvement !
Enfin, monsieur le président, je vous demande de mettre au vote ces amendements successivement, car j'aimerais que M. le ministre nous éclaire sur ce que représenterait une baisse de 0,1 %. Nous appliquerons ensuite une règle de trois pour savoir où la représentation nationale pense pouvoir arrêter le curseur.
Je comprends que ces amendements ne soient pas acceptés, mais nous devrions au moins reconnaître, les uns et les autres, que nous apportons des explications quelque peu emberlificotées – comme celles que j'ai eu moi-même l'occasion d'en fournir entre 1997 et 2002, en tant que rapporteur général.
Dès lors que nous sommes convenus de remettre à plat les relations financières entre l'État et les collectivités territoriales, nous devons aborder ce sujet de front. Un rapport de la Cour des comptes a montré que l'État fait payer davantage aux collectivités territoriales que le service qu'il leur rend ne lui coûte. Mettons tous ces éléments sur la table, faisons une « opération vérité », et voyons de quelle façon progresser en évitant de nous livrer à cet exercice trop convenu auquel se plient les majorités successives au fil des alternances. Si nous pouvions nous accorder pour dire que c'est la dernière fois que nous avons à le faire, je m'en réjouirais.
Monsieur le président, vous êtes chargé, avec notre collègue Jean-Pierre Balligand, d'une mission d'information sur les relations financières entre l'État et les collectivités locales. Il serait bon que vous preniez cette question en considération et que nous puissions l'aborder au cours de l'année 2009.
Il est vrai que ce débat est forcément confus, dans la mesure où un grand nombre d'éléments différents sont à prendre en compte. J'en resterai au tableau récapitulatif des coûts et des recettes. L'État reçoit 2 milliards d'euros au titre des dégrèvements ordinaires et des admissions en non-valeur. Je précise qu'il ne s'agit pas des dégrèvements législatifs liés, par exemple, aux allégements de taxes d'habitation au titre du revenu.
Il y a bien un moment où vous devez nous faire confiance !
Je passe ma vie à contrôler : vous pouvez donc me faire une confiance absolue ! (Sourires.)
Je le répète, il s'agit de dégrèvements ordinaires : recours en justice, impayés, problèmes de trésorerie. Ces dégrèvements s'effectuent hors la vue des collectivités locales, et l'État joue en quelque sorte le rôle d'assureur en leur garantissant qu'elles percevront bien le montant qui a été décidé. Le coût pour ce poste est de 2,5 milliards.
Pour le recouvrement des impôts locaux, en revanche, les recettes sont supérieures aux coûts. Et lorsqu'on établit le total des postes en ajoutant les autres recettes et les avances sur trésorerie de l'État liées à la mensualisation du paiement, on aboutit quasiment à l'équilibre, avec un très léger déficit pour l'État.
Cela étant, nous pouvons aller plus loin dans l'analyse. Je suis prêt à ce que la plus grande transparence soit faite. Il nous faut progresser, sans quoi nous en parlerons encore dans vingt ans.
(Les amendement nos 143 , 142 , 208 , 207 et 206 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Je suis saisi de trois amendements, nos 303 , 26 rectifié et 218 , pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 303 .
Cet amendement vise à modifier le tableau de l'alinéa 2 pour tenir compte des 100 000 euros provenant des amendes de police.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 26 rectifié .
Non, monsieur le président, car il s'agit d'un amendement hautement symbolique. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, nous voulons que le Gouvernement prenne acte du fait que le FCTVA ne doit pas figurer dans l'enveloppe normée. Il ne s'agit pas d'une simple question de présentation, c'est aussi une question de justice, compte tenu de ce que sont les remboursements de TVA aux collectivités locales. Nous souhaitons donc que soient distingués le FCTVA et les dotations aux collectivités locales.
En conséquence, l'amendement n° 218 tombe.
(L'article 19, amendé, est adopté.)
Sur l'article 22, je suis saisi d'un amendement n° 1 .
La parole est à M. le président de la commission des finances.
Cet amendement de M. Rogemont vise à ce que le Centre national de la cinématographie établisse chaque année un rapport adressé au Parlement en même temps que le projet de loi de finances afin de rendre compte du rendement et de l'emploi prévisionnels des taxes, prélèvements et autres produits. Nous remédierons ainsi à un dégât collatéral d'une réforme qui n'est pas critiquable sur le fond.
J'apporterai néanmoins deux corrections mineures à cet amendement, monsieur le président. Il s'agit de remplacer les mots : « autres produits de l'article 44-1 » par les mots : « autres produits mentionnés à l'article 44-1 » et d'ajouter après les mots : « projet de loi de finances », les mots : « de l'année ».
(L'amendement n° 1 , accepté par le Gouvernement, tel qu'il vient d'être rectifié, est adopté.)
(L'article 22, amendé, est adopté.)
L'article 23 concerne les mesures relatives à la redevance audiovisuelle et au compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel » – à noter la disparition du mot « public », et pour cause !
Avec 2,5 milliards d'encaissement net garanti de redevance et 0,5 milliard de plafond de dégrèvement de redevance pris en charge par le budget général de l'État, ce sont à peu près 3 milliards de ressources publiques qui sont alloués aux organismes de l'audiovisuel public à partir du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », soit une progression globale de leurs ressources de 3,18 %, conforme, cela doit être souligné, aux engagements pris par l'État et par les organismes de l'audiovisuel public dans le cadre des contrats d'objectifs et de moyens qui régulent l'activité de ces organismes.
Christian Kert, Muriel Marland-Militello et moi-même considérons que l'article 23 peut être amélioré sur plusieurs points.
En ce qui me concerne, j'avais déposé un amendement à l'article 23 qui visait à maintenir, en 2009, le dégrèvement des contribuables qui bénéficient du régime dit des droits acquis. Cet amendement, qui concerne pourtant directement la recette de la redevance, a été déclaré « irrecevable » ; il sera donc examiné dans le cadre de la seconde partie de la discussion budgétaire. Je souhaite qu'il soit adopté avec le soutien du Gouvernement, afin de prolonger le bénéfice de ces droits acquis en 2009.
Deux autres améliorations me semblent indispensables pour respecter ce que nous avons voulu en réformant la redevance en 2005, à savoir que la redevance soit la ressource dédiée entièrement et exclusivement à l'audiovisuel public. C'est la raison pour laquelle nous sommes réservés et défavorables au plafonnement du remboursement des dégrèvements par l'État, de même – Michel Bouvard nous rejoindra probablement sur ce point – qu'à l'imputation des crédits nécessaires au GIP « France Télé Numérique » sur le compte « Avances à l'audiovisuel public ».
Quelques mots pour rappeler l'importance des dépenses que ce GIP devra faire. Je rappelle que la loi du 5 mars 2007 prévoit la desserte de la télévision numérique terrestre pour l'ensemble des foyers de France, qui se traduira par le basculement vers la diffusion numérique, puis par l'extinction de la diffusion analogique.
Ce processus donnera lieu à la libération de fréquences basses de très bonne qualité permettant des caractéristiques de propagation exceptionnelle, ce qu'on appelle le dividende numérique. L'exploitation de ces fréquences est une opportunité historique pour notre pays puisqu'elle doit permettre le développement du secteur audiovisuel, des télécommunications et des services en ligne sur une autre échelle.
Concrètement, ce basculement permettra d'apporter à tous les Français dix-huit chaînes gratuites de la TNT avec de la qualité et des services supplémentaires, des chaînes en haute définition, des services de télévision mobile personnels et l'internet à haut et très haut débit sur l'ensemble du territoire.
Ce passage doit être achevé le 30 novembre 2011 – objectif réaffirmé lundi dernier par le Président de la République à l'occasion de la présentation du plan France numérique 2012 élaboré par le secrétaire d'État chargé du développement de l'économie numérique Éric Besson.
La loi du 5 mars 2007 a prévu, d'une part la mise en place d'une aide financière à destination des foyers défavorisés afin que tous les Français puissent profiter de cette révolution numérique, d'autre part la mise en place d'une structure opérationnelle, le GIP « France Télé Numérique ». Ce groupement sera chargé de toutes les opérations de communication et il mettra en oeuvre l'aide financière de l'État prévue par la loi pour aider à passer au numérique.
Soulignons que la réattribution des fréquences du dividende numérique pourrait représenter pour l'État, et selon les estimations disponibles actuellement, une ressource de 1,4 milliard d'euros. Par ailleurs, le groupe France Télévisions économisera, à l'issue du passage au « tout numérique », près de 180 millions d'euros de coût de diffusion chaque année : ce n'est pas négligeable.
Si nous sommes favorables à la mise en place d'un financement pérenne pour le GIP, nous nous interrogeons sur la bonne imputation de cette dépense.
J'ajoute que, pour l'année 2009, le GIP pour lequel il est demandé 15 millions d'euros, doit agir très concrètement sur un certain nombre de plans : l'achèvement de l'opération pilote de Coulommiers, la mise en oeuvre d'une deuxième opération pilote en Alsace, à Kaysersberg, le passage au « tout numérique » de la zone de Cherbourg et le passage, à la fin 2009, au « tout numérique » de l'Alsace. Près de 2 millions de personnes seront concernées, d'ici à 2009, par l'action de ce GIP.
Le budget de ce groupement servira à financer, d'une part le début de campagne national au 1er semestre 2009 visant à sensibiliser l'ensemble des Français deux années et demie avant la fin du processus de basculement, d'autre part les opérations locales nécessaires dont je viens de citer quelques exemples.
L'année 2010 devrait voir plus de dix régions basculer, ainsi que l'année 2011, d'où une demande de financement du GIP qui s'accroît rapidement : 15 millions pour 2009, 72 millions pour 2010, 131 millions pour 2011, soit environ 220 millions.
Le problème, c'est l'imputation de cette dépense dont tout le monde, dans nos rangs, estime qu'elle est indispensable, voire stratégique.
L'imputation sur la redevance nous semble contestable et non optimale en ce qu'elle est contraire à ce que nous avons voulu lors de la réforme de la redevance, c'est-à-dire que la redevance serve entièrement et uniquement à financer l'audiovisuel public. Dans cette opération, il y aura d'autres bénéficiaires : le service public mais aussi les télévisions privées et le secteur des télécoms qui sera l'un des gagnants du dividende numérique. Les bénéfices sont donc beaucoup plus larges que ceux qui reviennent au service public.
Monsieur Martin-Lalande, vous avez largement dépassé votre temps de parole !
Je conclus, monsieur le président. Cela me permettra d'alléger d'autant la présentation de mes amendements !
Dans le cadre de la commission pour une nouvelle télévision publique, présidée par Jean-François Copé, nous avons souhaité réduire l'imputation sur la redevance du financement d'un certain nombre d'organismes dont l'INA, de façon à concentrer ce financement sur la télévision publique. Nous souhaitons donc qu'une solution puisse être trouvée, afin d'éviter de créer un précédent et de financer autre chose que la télévision publique, et ce de façon durable.
Monsieur le ministre, nous aimerions obtenir une réponse sur ce point lorsque nous examinerons les amendements à l'article 23 dont j'ai défendu l'essentiel – mais pas la totalité…
Les motivations de mon amendement ont largement été prises en compte par M. Martin-Lalande.
Je rappellerai ma vigilance ainsi que celle de la commission des finances sur le problème des recettes affectées. Il faut éviter de multiplier le nombre de bénéficiaires, faute de quoi nous risquons de voir s'envoler les prélèvements qu'il est nécessaire d'effectuer sur le contribuable pour satisfaire tous les affectataires. C'est la raison pour laquelle, sans contester l'utilité du passage à la diffusion numérique et à son accompagnement, je propose d'extraire la nouvelle entité bénéficiaire de la redevance.
Notre amendement n° 87 vise à interpeller l'Assemblée face à l'élargissement du champ des bénéficiaires de la redevance audiovisuelle. Il s'agit d'un détournement inadmissible des crédits de la redevance pour assumer des dépenses que l'État ne veut pas prendre à sa charge.
Il me semble pourtant que le Président de la République s'est exprimé sur le sujet, indiquant que l'arrêt de la diffusion analogique et le passage à la diffusion numérique devaient être financés par le budget et non par la redevance. Déjà que la suppression de la publicité fragilise le financement de la télévision publique, voilà qu'on y ajoute une perte probable de recettes sur la redevance, de 15 millions d'euros en 2009, 72 millions en 2010, 131 millions en 2011, soit un hold-up total de 218 millions.
Nous estimons que l'audiovisuel public doit avoir les ressources qu'il mérite. Tel est le sens de notre amendement.
Je veux d'abord rappeler les raisons pour lesquelles la commission a soutenu l'amendement n° 70 de M. Bouvard.
Il ne nous a pas paru raisonnable, alors que le produit de la redevance devient une denrée tellement rare que nous serons prochainement conduits à l'indexer dans le cadre de l'examen d'un texte, ce qui n'a pas été fait depuis quatre ans,...
...d'ajouter un nouveau bénéficiaire, même si le champ d'activité de ce GIP est bien celui de l'audiovisuel...
Dès lors qu'on l'évaluait à 15 millions d'euros environ, cela rendait encore plus difficile la répartition entre les bénéficiaires historiques. Voilà pourquoi nous avons souhaité maintenir l'excellent dispositif imaginé il y a déjà plusieurs années par M. Martin-Lalande, qui consiste à garantir chaque année un niveau de ressources.
Je sais que le Gouvernement va nous proposer de réintégrer le GIP en tant que bénéficiaire et qu'on ne peut pas nier qu'il contribue au développement de la télévision. De même, il est légitime que l'INA figure parmi les bénéficiaires de la redevance puisque, même si ce n'est pas un diffuseur de radio ou de télévision, il y contribue en stockant et en améliorant les archives de l'audiovisuel.
Monsieur Martin-Lalande, j'ajoute que la commission n'a pas souhaité supprimer le plafond concernant les dégrèvements. Il fait partie de l'évaluation des ressources générales de l'audiovisuel public.
Je donnerai un avis global sur ces amendements compte tenu du fait que le Gouvernement a déposé deux amendements, nos 301 et 302 , sur le même sujet.
Je comprends l'esprit qui anime MM. Martin-Lalande et Bouvard : ils souhaiteraient intégrer le coût réel des dégrèvements. Mais cela n'a aucune incidence sur le financement de la télévision publique : nous versons ce que nous devons verser, comme le prévoit le « contrat », quel que soit le montant total des sommes collectées au titre de la redevance ; le groupe France Télévision n'a rien à voir avec la collecte de la ressource.
Pour ce qui concerne le financement du GIP numérique, je comprends vos interrogations. Une solution autre que celle que nous proposons, qui consisterait à passer par la redevance aurait un impact budgétaire sur la norme de dépense – quand bien même celui-ci serait, au final, neutralisé : or nous essayons précisément, sous votre amicale pression, de veiller au respect de cette norme.
Les amendements nos 301 et 302 du Gouvernement visent à répondre à votre préoccupation en limitant dans le temps, c'est-à-dire à trois ans, le financement par le biais de la redevance de ce saut technologique que représente l'installation de la télévision numérique. Ce financement permet à l'ensemble de l'audiovisuel de réaliser ce progrès technologique, comme cela a déjà été le cas, par le passé, pour d'autres grands progrès technologiques audiovisuels. Cette mesure nous permet d'afficher jusqu'à 130 millions d'euros en 2011, puis de revenir à l'état normal du droit.
J'ai écouté attentivement M. le ministre. Muriel Marland-Militello, Christian Kert, Michel Bouvard et moi-même voulions éviter la création durable d'un financement par la redevance d'actions qui ne concernent pas seulement l'audiovisuel public, mais également l'audiovisuel privé, et qui bénéficieront largement aux télécommunications puisque le développement numérique sera partagé entre l'audiovisuel et les télécommunications, ce qui est de l'intérêt général du pays et de nos concitoyens. Votre réponse, monsieur le ministre, qui écarte le risque d'en faire un précédent à valeur permanente, si elle n'est pas totalement satisfaisante, va dans le sens de notre préoccupation. Dans la mesure où nous voulons réussir le passage au tout numérique audiovisuel à l'horizon 2012 et contribuer également à respecter la norme de progression de la dépense que vous avez évoquée, je retire mon amendement, étant certain que le financement de ces dépenses stratégiques sera assuré.
Je suis saisi d'un amendement n° 86 .
La parole est à Mme Muriel Marland-Militello.
Je le retire, monsieur le président.
(L'amendement n° 86 est retiré.)
(L'article 23, modifié par les amendements adoptés, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 156 , tendant à supprimer l'article 25.
La parole est à M. Jean-Pierre Brard.
Les radars suscitent toujours des débats…
L'amendement n° 156 tend à supprimer l'article 25 visant la répartition du produit des amendes des radars automatiques. Notre propos n'est pas de remettre en cause la pertinence de ce moyen de contrôle et de sanction. Il convient néanmoins de s'interroger sans esprit de polémique sur l'opportunité de reporter intégralement le produit des amendes perçues par le biais de ces appareils dans la mise en place de nouveaux radars. On peut en effet imaginer un développement exponentiel grâce aux recettes que les premiers radars engendrent.
Ne serait-il pas plus sage ou plus judicieux de reverser désormais une part du produit de ces amendes aux collectivités pour compenser l'insuffisance des crédits alloués par l'État au regard du transfert aux départements des routes nationales et apporter une contribution financière à la réalisation des travaux de sécurité routière dans les départements qui en ont la charge ?
Il serait intéressant de réfléchir posément au conventionnement de l'instauration d'une forme de redevance forfaitaire proportionnelle au trafic routier des axes sur lesquels sont installés les radars. En tout état de cause, l'installation de nouveaux dispositifs de contrôle automatisés n'exige nullement que l'État y consacre l'intégralité d'un produit des amendes en constante et forte progression sans réfléchir dès à présent à l'affectation future des surplus de recettes engrangés.
Tel est le sens de cet amendement de suppression que d'appeler à l'ouverture sincère de ce débat, dans lequel le Gouvernement écarterait toute possibilité ou toute volonté de récupérer sans le dire quelques recettes de poche.
Monsieur Brard, le produit des radars est estimé à 150 millions d'euros, dont une partie non négligeable est reversée aux collectivités locales : une centaine de millions d'euros va en effet aux communes et, depuis l'année dernière, une trentaine aux départements – ces 30 millions d'euros étant reconduits pour 2009. Chacun se souvient du rôle joué dans cette affaire par Thierry Carcenac, membre de la commission des finances et président du conseil général du Tarn…
… et des nouvelles modalités de répartition entre les départements proposées dans le cadre des comités des finances locales. Or celles-ci ne sont pas modifiées pour 2009.
N'oublions pas non plus le fléchage du solde qui va à l'AFITF, une fois opéré le prélèvement CAS : or ce solde, qui s'élèvera à 208 millions d'euros, sert au financement d'opérations de transport. Quant à la part du CAS, qui s'élève à 212 millions, elle ira pour partie, monsieur Brard, c'est vrai, au développement du programme radars et à l'exploitation de ce programme, mais également à des opérations de sécurité routière. On ne peut donc pas dire que la totalité du produit de ces amendes aille au financement du développement du programme radars.
Le CAS radars passe de 194 à 212 millions d'euros de 2008 à 2009. Il permet de financer l'entretien et le système logiciel du programme radars ainsi que l'installation de nouveaux radars – 500 par an.
Les collectivités locales quant à elles recevront 130 millions d'euros – c'est un montant garanti sur lequel nous avions eu un débat l'année dernière dans les deux assemblées – à raison de 100 millions pour les communes et 30 millions pour les départements.
De plus le financement de l'AFITF passe de 150 à plus de 200 millions d'euros de 2008 à 2009. Le surplus de recettes dû aux radars financera les 50 millions d'euros supplémentaires allant à l'AFITF. Il est possible qu'un jour on n'installe plus de nouveaux radars : il s'agira alors de remettre les choses à plat, mais il n'y a aucune raison de le faire aujourd'hui.
(L'amendement n° 156 n'est pas adopté.)
(L'article 25 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement rédactionnel de la commission, n° 33.
(L'amendement n° 33 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 27, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement rédactionnel de la commission, n° 41.
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement me donne l'occasion d'évoquer l'ERAP, objet de l'article 28.
La commission n'a pas proposé d'amendements sur l'ERAP : il n'en reste pas moins, monsieur le ministre, que je me pose quelques questions au vu de ce qui s'est passé ces dernières semaines, durant lesquelles le Gouvernement a été conduit à créer un ensemble de structures, assurément dédiées au domaine bancaire, mais avec une société de prise de participation – la SPPE — et une société de refinancement. Hier, Mme Lagarde nous a annoncé la création d'un fonds d'investissement appuyé sur la Caisse des dépôts, notamment en direction des petites et moyennes entreprises.
Établissement industriel et commercial public dont la création remonte à plusieurs décennies, l'ERAP a servi à porter des participations de l'État notamment dans des entreprises industrielles, minières ou d'énergie. En 2003, lorsqu'il a fallu recapitaliser France Télécom, on est encore passé par l'ERAP qui a bénéficié d'une garantie de l'État pour emprunter et investir en fonds propres dans France Télécom.
C'est dans ce contexte que l'article 28 présente, sans aucune réflexion de fond, me semble-t-il, une mesure purement financière consistant à transférer la dette de 2,4 milliards d'euros, qui reste à rembourser au titre de l'investissement dans France Télécom, dans la dette de l'État. L'échéance de 2010 devra donc être automatiquement honorée au titre de la dette de l'État.
Or nous avons eu la semaine dernière des débats sur les problèmes de consolidation de la dette, débats qui ont été présentés par le Gouvernement plutôt en termes de… déconsolidation, en vue de faire porter la dette par différentes structures, dès lors que des actifs existent en contrepartie – ce qui est parfaitement logique.
Monsieur le ministre, je m'interroge sur le fait que l'article 28 nous présente cette question sous un aspect purement financier : transfert de la dette de l'ERAP dans la dette de l'État, et reprise en contrepartie des actifs de l'établissement. Sans parler de l'aspect budgétaire, tout à fait mineur – quelques centaines de milliers d'euros –, il n'est reste pas moins que ce montage paraît aller totalement à rebours des décisions prises ces dernières semaines, et mériter quelques explications. Plutôt que de le mettre en sommeil, ne serait-il pas plus intéressant d'étudier comment l'ERAP pourrait concourir, à travers les circuits financiers et économiques que nous imaginons actuellement, à améliorer le fonctionnement de notre économie et à faciliter la prise de participation dans différentes entreprises industrielles de taille moyenne ou de plus grande taille ?
(L'amendement n° 41 est adopté.)
(L'article 28, amendé, est adopté.)
Sur l'article 29, je suis saisi d'un amendement n° 71 .
La parole est à M. Michel Bouvard.
Je souhaite, par cet amendement d'appel, que le Gouvernement me confirme que les engagements pris par la société Autoroutes de France quant à la recapitalisation de l'une des dernières sociétés autoroutières et tunnelières publiques seront bien tenus, et dans les délais prévus.
L'État ne se soustraira pas à ses obligations après la dissolution d'ADF. Cette réponse vous convient-elle, monsieur Bouvard ? (Sourires.)
Je profite de cet article pour appeler l'attention du Gouvernement sur de graves dysfonctionnements dans la délivrance des passeports, dysfonctionnements qui, pour des raisons obscures, concernent plusieurs départements.
La fabrication des nouveaux passeports a visiblement généré une bureaucratie invraisemblable : pour la Seine-Saint-Denis, les composants sont préparés du côté de Marne-la-Vallée puis envoyés à Douai, ce qui accroît les délais d'autant. Or nos concitoyens ne sont pas égaux face à la procédure de délivrance : à Paris, pour des raisons inconnues, les délais sont ainsi bien plus courts qu'en Seine-Saint-Denis, où – je parle sous le contrôle de notre collègue Gaudron – ils peuvent atteindre jusqu'à sept semaines.
Ne pas obtenir son passeport dans un délai raisonnable constitue selon moi une véritable entrave à la liberté de se déplacer. Les conséquences de cette situation sont d'autant plus graves que nos concitoyens, pour voyager au prix le plus bas, achètent souvent des billets en vol charter ou au dernier moment. Après quoi ils font leur demande de passeport, omettant les délais extraordinairement longs de la procédure. Qui plus est, les billets d'avion achetés dans ces conditions ne sont pas remboursables : pour une famille de deux ou trois personnes, à petit budget, qui envisageait un voyage en Israël ou ailleurs, tout est perdu…
Ajoutons que le degré d'exigence de l'administration est parfois invraisemblable. Un exemple, monsieur le ministre, illustrera l'arbitraire et les dysfonctionnements de l'appareil d'État : un photographe de ma ville avait besoin pour lui-même d'une carte d'identité et d'un passeport. Pour ce faire, il a fourni deux fois la même photo, laquelle fut « retoquée » pour le passeport et admise pour la carte d'identité ! Ce n'est même pas Clochemerle – au moins l'on y rit –,…
…mais plutôt Ubu. Le plus insupportable, c'est cet arbitraire, cette lutte du pot de terre contre le pot de fer. Tout cela donne une image désastreuse, au demeurant globalement non méritée, de notre administration.
Même si le sujet ne concerne pas directement l'article 30, monsieur le ministre, je vous invite à y prêter attention : si vous avez observé nos collègues opiner du chef à mes propos, vous aurez d'ailleurs constaté qu'il fait consensus ! (Sourires.) Et cela m'étonnerait que le problème ne se pose pas à Chantilly…
Même si le passeport peut être délivré en catastrophe pour peu qu'un député intervienne auprès du préfet, de tels dysfonctionnements ne sont pas admissibles. Profitons donc de l'article 30 pour y mettre bon ordre. J'ajoute, monsieur le ministre, que cette situation rend encore plus illégitime l'augmentation que vous proposez : non seulement le service n'est pas rendu, mais il y a rupture d'égalité et atteinte à la liberté de circulation.
Non, monsieur le président : j'y viens.
L'augmentation du droit de timbre perçu sur les demandes de passeport, discrètement introduite dans les tréfonds du projet de loi de finances, est une manière quelque peu inélégante d'aller piocher dans le porte-monnaie de nos compatriotes. L'augmentation de 50 % des droits perçus pour la délivrance des passeports aux majeurs et aux mineurs et la création d'un droit d'un montant de 20 euros pour les moins de quinze ans revient à faire payer fort cher aux usagers du service public l'innovation du passeport biométrique.
Selon l'exposé des motifs du projet de loi, monsieur le ministre, le passeport biométrique coûte plus cher. Mais vous vous gardez bien de donner des chiffres ! Je ne suis pas sûr que cette affirmation soit tout à fait vraie, ni, si elle l'est, qu'elle justifie l'augmentation prévue. Celle-ci est d'autant plus inadmissible que, comme je viens de l'expliquer, les délais de délivrance sont très longs : à tout le moins devrait-on renvoyer l'augmentation à la prochaine loi de finances. C'est pourquoi nous proposons de supprimer l'article 30.
L'article 30 est symptomatique du texte car il crée ou augmente bien des taxes qui pèseront directement sur le budget des ménages.
Au fil des articles, fort discrètement, on voit, ici une taxe, là une augmentation du droit de timbre. Tout cela va coûter. D'autres articles prévoient ainsi des dispositions relatives à la carte d'identité ou au certificat d'immatriculation des véhicules : autant de prélèvements socialement injustes – puisque, proportionnellement, elles touchent davantage les revenus modestes et moyens – et économiquement aberrant.
L'article 30 concerne les droits de timbre pour les demandes de passeport, ce qui ne laisse pas de nous étonner : n'est-ce pas la fonction même de l'État de fournir un tel document à nos concitoyens ? Il n'est pas légitime que celui-ci soit aussi coûteux, d'autant que le relèvement proposé – près de 50 % – n'est franchement pas raisonnable : un passeport normal passe ainsi de 60 à 89 euros ; celui d'un mineur ayant entre quinze et dix-huit ans, de 30 à 45 euros ; celui, enfin, d'un mineur de moins de quinze ans coûtera 20 euros. Ce sont plusieurs centaines d'euros que devra débourser la famille évoquée à l'instant par Jean-Pierre Brard, ce qui pèsera lourdement sur ses maigres revenus.
Qui paie tout cela ? Le citoyen. Prenez garde, monsieur le ministre : à force de ponctionner, on finit par amputer le pouvoir d'achat dans des proportions dramatiques. Sans doute me permettra-on, sur un sujet aussi sérieux, une pointe d'humour. Je remercie au passage ceux qui ont eu l'obligeance de m'offrir un opuscule sur les petites perles parlementaires, et je trouve fort à propos de citer l'un de nos prédécesseurs, dont le nom n'est pas précisé : « À force de traire la vache à lait, vous finirez par tuer la poule aux oeufs d'or ! » (Rires.) Voilà bien un article, monsieur le ministre, qui illustre cette citation.
La commission a repoussé ces deux amendements.
Nous restons, monsieur Baert, dans la ligne des tarifs pratiqués depuis des décennies. Au début des années quatre-vingt, un passeport coûtait ainsi 315 francs, ce qui correspond à 90 euros. On ne peut donc pas parler d'augmentation.
Il n'y avait pas eu de réévaluation depuis 1998 ; il est donc vrai qu'une marche est aujourd'hui franchie. Ajoutons que les nouveaux passeports sont beaucoup plus sûrs.
Cela dit, je souhaite revenir sur les propos de Jean-Pierre Brard, qui a bien exposé le fond du problème.
Cet été, les délais de délivrance ont atteint six voire sept semaines, en tout cas en région parisienne – n'est-ce pas, monsieur Schosteck. Les maires ont ainsi constaté des situations très difficiles : beaucoup de familles modestes achètent en effet des billets d'avion à prix réduit, dont les dates ne sont pas modifiables. En outre, même les nourrissons doivent désormais avoir leur passeport.
Dans l'ancien système, on se contentait d'ajouter la mention de l'enfant sur le passeport des parents. Cela prenait dix jours. Dans ma mairie, j'ai reçu beaucoup de familles désespérées, qui devaient faire une demande de passeport pour le nourrisson, ce qui prend six semaines, sans parler de la photo !
Et le visage immobile ! (Sourires.) Bref, certaines situations en deviennent kafkaïennes.
Si l'on est revenu aujourd'hui à des délais plus normaux, de l'ordre de trois semaines, il serait souhaitable que l'administration du ministère de l'intérieur en charge de ces procédures soit aussi efficace que l'administration fiscale – je pense à nos débats d'hier sur le remboursement des crédits de TVA.
Le seul moyen d'accélérer la délivrance est de demander un passeport dit DELPHINE – délivrance de passeports à haute intégrité de sécurité.
En effet, et cette procédure est réservée aux déplacements professionnels.
Le sujet est sérieux et il ne faudrait pas que l'on retrouve les mêmes difficultés l'été prochain. Car, une fois de plus, qui est directement confronté aux demandeurs ?
Je laisserai ma collègue Michèle Alliot-Marie répondre aux questions sur la rapidité de délivrance des titres.
Mais non : c'est un problème de compétence, au sens juridique du terme !
Avec vous, ça irait plus vite ! Surtout si c'est pour encaisser après !
Vous pourrez poser toutes ces questions à Michèle Alliot-Marie quand la commission élargie se réunira.
En ce qui concerne les passeports biométriques, l'objectif de l'État est de parvenir à un temps de délivrance moyen de une semaine. Certes, il y a toujours un peu de marge entre les objectifs et la réalité, on peut même constater quelques loupés, mais alors que, aujourd'hui, ce temps de délivrance moyen est de quatre semaines, il passera à une semaine lorsque le système fonctionnera – j'ignore combien de temps il faudra pour qu'il soit parfaitement rodé. Il est vrai que les élus auront un peu plus de travail, mais une compensation financière est prévue. Le dossier sera transmis à l'Agence nationale des titres sécurisés, puis à l'Imprimerie nationale, avant de retourner au domicile du demandeur ou à la mairie – au demeurant pas nécessairement celle où la demande a été déposée, ce qui permet de mieux tenir compte des besoins de chacun. Tout cela coûte forcément plus cher, les exigences de conception, de création, d'impression du document étant bien plus élevées que pour les passeports actuels. À noter que personne n'est obligé d'adopter sur-le-champ ce nouveau passeport : vous pourrez conserver votre passeport actuel jusqu'à sa date d'expiration et ne le changer qu'à la date normale de renouvellement. Vous ne serez donc pas obligé de débourser immédiatement 89 euros. Cela change un peu la donne.
Il est bien naturel que l'État fasse payer le prix de revient d'un titre.
Parfaitement : C'est de la bonne gestion. Il est d'ailleurs des États où le prix des documents de voyage est beaucoup plus élevé.
Personne n'est obligé d'avoir un passeport.
C'est vrai qu'on peut rester à la maison… Mais il est difficile de s'en passer quand on va aux États-Unis !
Vous devez avoir un document d'identité, mais la carte d'identité, par exemple, reste gratuite, sauf lorsque vous la faites renouveler parce que vous l'avez perdue. Dans ce cas, en effet, on la fait payer, car vous n'imaginez pas le nombre de personnes qui perdent leur carte d'identité.
Comme c'est gratuit, ils y retournent. Depuis que le remplacement est payant, ils cherchent un peu plus longtemps leur carte perdue, dans les poches d'une veste ou entre les deux sièges de la voiture.
Nous aurons donc un peu plus de réalité des coûts et de justice. C'est pourquoi je vous demande de ne pas voter ces amendements. Que pourrais-je dire d'autre ? Je crois avoir fait le tour de la question.
Nous souhaitons tous voir disparaître certaines difficultés récurrentes liées à la délivrance d'un passeport, mais cet article et cette augmentation du droit de timbre perçu sur les demandes de passeport nous donnent l'occasion, à la fin de l'examen du projet de loi de finances pour 2009, de revenir sur le contexte global dans lequel il nous est présenté. Je l'ai dit avec d'autres : l'équilibre de ce budget masque une augmentation de taxes dans de nombreux domaines. Au lieu de la baisse globale de la fiscalité qu'on nous a annoncée, on constate une multiplication des taxes de diverses natures qui font peser sur le plus grand nombre la réalité d'un budget déficient. Une fois de plus, il nous faut dénoncer le caractère injuste des sollicitations fiscales faites dans le cadre de ce budget. Les largesses du paquet fiscal, la protection du bouclier, c'est pour un nombre réduit de nos concitoyens. Pour le reste, ce qui concerne le plus grand nombre augmente dans des proportions assez injustes.
Monsieur le ministre, la fin de votre intervention était très significative : « Que pourrais-je dire d'autre ? » avez-vous demandé. Je vous imagine fort bien, dans une prochaine vie, derrière un étal de marché, à Montreuil ou à Chantilly, devant une montagne de pommes de terre, vous demandant comment les vendre le mieux et le plus cher possible. (Sourires.) On passe donc de 60 à 89 euros : en réalité, c'est 90 euros.
Comme sur les marchés, vous fixez un prix psychologique en faisant le kilo à un peu moins de 90 euros. Vous parlez du prix de revient du passeport, mais on voit bien que c'est de l'habillage. D'ailleurs, malgré sa proximité avec le Président de la République, M. Jérôme Chartier approuve mes paroles. (Rires.)
Monsieur le ministre, je ne crois pas que vous soyez en mesure de démontrer que ces 89 euros correspondent effectivement au prix de revient des passeports biométriques. En réalité, ce sont là des recettes de poche supplémentaires. Je ne proposerai pas la constitution d'une mission de la commission des finances pour détailler le prix des différentes pages du passeport, mais vos affirmations ne sont pas crédibles. Vous vous contentez en fait de taxer davantage. Quand une famille de trois enfants partira en voyage à l'étranger – de nos jours, les gens voyagent de plus en plus et c'est heureux –, elle devra débourser une forte somme, qui renchérira d'autant le prix de ses vacances.
(Les amendements identiques nos 114 et 158 ne sont pas adoptés.)
(L'article 30 est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 59 .
La parole est à M. le rapporteur général.
Cet amendement prévoit une affectation pour trois ans du droit de francisation et de navigation au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, qui lui est réservée depuis trois ou quatre ans. Cela lui permettra d'avoir une meilleure visibilité sur ses ressources. Les années précédentes, vous avions souhaité une affectation d'une seule année. À chaque loi de finances, nous procédions à des ajustements de la taxe selon la longueur ou la jauge. Aujourd'hui, tout porte à croire qu'elle est définitivement stabilisée. Elle est affectée en totalité au Conservatoire et, de surcroît, celui-ci bénéficie d'un contrat d'objectifs qui va jusqu'en 2011. Il serait donc préférable de dire que la taxe est affectée en 2009, 2010 et 2011 dans les conditions définies par l'article.
(L'amendement n° 59 est adopté.)
En conséquence, l'amendement n° 72 tombe.
(L'article 31, amendé, est adopté.)
Je suis saisi d'un amendement n° 295 du Gouvernement, portant article additionnel après l'article 32.
La parole est à M. le ministre.
Avec cet amendement, nous mettons en place un système qui, je le pense, est excellent pour les collectivités territoriales. Nombre d'emprises de défense vont être reconnues inutiles par le ministère de la défense, pour des raisons de réorganisation de l'armée, et les collectivités locales sont très souvent intéressées par le foncier disponible. Jusqu'à présent, les temps d'attente pouvaient être très longs, les discussions sur le prix des biens assez vives, et des projets se retrouvaient ainsi bloqués, ce qui n'était dans l'intérêt ni de l'État ni des collectivités. Il est parfois délicat, au niveau local et au plan affectif, de voir partir un régiment, et il est bon de pouvoir rebondir sans tarder et de réutiliser un foncier souvent de qualité, situé en coeur de ville.
L'amendement n° 295 propose de faciliter une libération très rapide du foncier et sa transmission à une collectivité territoriale pour un euro, dans les vingt-quatre zones des contrats de redynamisation de site de défense – CRSD – qui sont considérées comme les plus prioritaires, celles où les départs sont les plus importants. Cela concerne donc peu ou prou l'ensemble du territoire national. À terme, dans un délai de quinze ans, les plus-values liées à l'opération que souhaite mener la collectivité seront partagées. Évidemment, si elle crée un équipement public et n'engrange aucune plus-value, le transfert de propriété aura été fait sans autre compensation ; mais, si elle réalise une opération immobilière qui dégage une importante plus-value, il est logique que le propriétaire – l'État – puisse en récupérer une partie.
Reste le problème de la dépollution des sites : nous proposons de réintégrer son coût dans le calcul de la plus-value.
L'amendement prévoit également les cas où ce n'est pas une collectivité qui achète, mais où le bien est cédé à une société foncière, telle la SOVAFIM. Il n'est pas obligatoire que l'État y soit majoritaire pour permettre la transmission. Nous modifions en cela une procédure créée en 2006 et utilisée, notamment, au moment des transferts entre l'État et RFF. Là aussi, nous apportons un peu de souplesse. Cela concerne essentiellement quelques immeubles de la défense qui ne sont pas compris dans les zones de CRSD et qui, dans un premier temps, pourraient être transmis à une société foncière.
Ces amendements vont dans le sens qui a souvent été évoqué par les collectivités locales pour rendre opérationnels le transfert et la redynamisation des sites laissés libres par la défense.
La commission n'a pas examiné cet amendement, mais il me paraît tout à fait intéressant, dans la mesure où il permettra aux collectivités locales d'activer des projets d'utilisation ou de développement des emprises de la défense. Il est, surtout, très équilibré. D'une part, cette mesure n'est pas générale, ne concernant que les vingt-quatre zones les plus affectées par la libération de locaux de défense. D'autre part, il y aura un retour à l'État si l'opération produit une plus-value. Enfin, cette plus-value sera appréciée de façon équitable, dès lors que le texte prévoit explicitement qu'elle intégrera les coûts de dépollution liés à la valorisation de ces terrains.
Monsieur le ministre, je voudrais avoir une précision sur le IV. Nous avons eu un débat, il y a quelques années, au moment du transfert des terrains du domaine public ferroviaire à RFF, sur les conditions d'intervention et le fonctionnement de la SOVAFIM. Le passage par la case SOVAFIM est-il obligatoire ? Nous avons bien compris qu'il n'était plus nécessaire que l'État soit majoritaire dans la société foncière, via la SOVAFIM. Mais peut-il y avoir des opérations en dehors de la SOVAFIM ? Nous découvrons aujourd'hui cet amendement et ce IV à propos duquel nous n'avons pas forcément le souvenir de tout ce que nous avons voté il y a deux ans. Pourriez-vous nous apporter quelques précisions ?
Cette procédure consiste en un transfert de propriété par arrêté, sans passer par appel d'offres. Pour l'utiliser, la SOVAFIM doit participer à l'opération – sans nécessairement être majoritaire.
(L'amendement n° 295 est adopté.)
Cet amendement concerne lui aussi une modification relevant du ministère de l'intérieur, relative cette fois aux plaques d'immatriculation définitives.
C'est une modification judicieuse, dont vous pourrez débattre au fond avec Mme Alliot-Marie.
En effet : la modification est judicieuse précisément parce qu'elle est proposée par Mme Alliot-Marie. (Rires.)
C'est ce qu'on appelle avoir le sens de la solidarité gouvernementale !
Grâce à cet excellent dispositif,…
…la carte grise sera désormais transmise à domicile. La redevance ne vise qu'à compenser le coût de ce service par La Poste.
Au contraire, ce n'est pas une taxe : c'est la compensation d'un service rendu, qui a un coût.
Non, ce n'est pas le même état d'esprit.
Que cela s'appelle une taxe, un droit de timbre ou une redevance, une chose est sûre : on paie !
L'opinion publique est naturellement opposée à cette réforme stupide : les Français sont attachés aux départements – auxquels vous vous apprêtez à passe la corde à cou. Songez aux familles sur la route des vacances d'été : les gamins n'aiment-ils pas à identifier les départements grâce aux numéros d'immatriculation ?
À quoi ressemble donc ce numéro définitif que vous souhaitez imposer ? N'est-ce qu'un simple mimétisme européen – après qu'un eurocrate en mal d'innovation a, au concours Lépine des sottises, voulu laisser son nom dans l'histoire ? C'est du Courteline, mais en pire ! Et qui plus est, vous le faites payer ! Mais peut-être, au fond, est-ce là votre vraie motivation : trouver un prétexte pour faire rentrer des sous au budget !
Rien ne vous empêchera, mon cher collègue, de conserver votre macaron « J'aime mon 9-3 » à l'arrière de votre Trabant, et de manifester ainsi votre attachement à la Seine-Saint-Denis ! (Rires.)
Après la création d'un collectif rassemblant beaucoup de parlementaires et de citoyens, un compromis a été trouvé qui permettra de conserver la référence au département sous forme accessoire et facultative.
Cela étant, précisons que ce dispositif utile et cohérent n'est pas une taxe nouvelle, mais la simple contrepartie d'un coût réel. Mme Alliot-Marie nous en expliquera tout l'intérêt lors de l'examen des crédits de son champ de compétences, et vous démontrera que la référence traditionnelle au département demeurera visible sur les routes de France.
Favorable. L'acheminement par courrier au prix de 2,50 euros est moins onéreux que le voyage jusqu'à la sous-préfecture de Saint-Gaudens, monsieur Idiart : le temps, surtout le vôtre, c'est de l'argent !
Il est vrai qu'il faut désormais parcourir plus de cent kilomètres pour se rendre au tribunal !
Quoi qu'il en soit, un service d'envoi à domicile à 2,50 euros constitue un véritable progrès pour le service public !
Quant à la question des départements, elle est résolue : leur numéro pourra figurer de manière facultative sur les plaques.
En effet, la plupart des Français, monsieur Brard, sont attachés aux départements – dont l'avenir est radieux, comme chacun sait… Les automobilistes de Seine-Saint-Denis souhaiteront conserver cette référence. Nous sommes arrivés à un bon équilibre. C'est l'exemple même de l'amélioration du service rendu aux usagers !
Je confirme qu'un cartouche sera bien réservé sur les plaques d'immatriculation pour les automobilistes souhaitant y faire figurer le numéro de leur département.
D'autre part, la réception de la carte grise à domicile coûtera moins cher à l'usager que de se rendre à la préfecture – un déplacement peu amusant, comme chacun sait. Le coût de l'envoi est très modeste, et l'usager y gagnera, en temps comme en argent.
Avec tout le respect et l'amitié que j'ai pour vous, monsieur Carrez, je ne peux pas vous laisser expliquer aux Français qu'ils vont payer une taxe nouvelle pour, au bout du compte, payer leur carte grise moins cher ! Pendant ce temps, vous déshabillez les territoires : il faut désormais conduire jusqu'à cent cinquante kilomètres pour se rendre au tribunal !
Non, de même que l'on ne demande pas une carte grise tous les jours. Cependant, on dépouille peu à peu des territoires entiers de leurs administrations. Peut-être que cela va de soi pour certains, mais les territoires ruraux en souffrent !
On nous dit que l'envoi à domicile ne coûte pas cher, et qu'il est cohérent avec le Grenelle mais, lorsqu'il s'agit d'obliger les gens à effectuer de longues distances pour accéder à un service public, la question ne se pose plus. On se moque des gens !
Quant à la référence au département, combien coûte de maintenir le dispositif existant ? Nous vivons un siècle de perte de repères, où les gens se sentent noyés. Certains phénomènes d'identification ne coûtent pas cher et, à force de les supprimer, vous les verrez évoluer vers d'autres domaines bien plus inquiétants !
Mes chers collègues, je vous remercie pour la courtoisie de ce débat.
La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.
M. le président a reçu de M. le Premier ministre une lettre l'informant de sa décision de charger M. René-Paul Victoria, député de la Réunion, d'une mission temporaire auprès de M. le secrétaire d'État chargé de l'outre-mer, de M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi et de M. le haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.
Prochaine séance, lundi vingt-sept octobre à seize heures :
Discussion de l'article 33 du projet de loi de finances pour 2009 (prélèvement européen) et suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2009.
La séance est levée.
(La séance est levée à douze heures dix.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma