La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
Cet après-midi, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.
Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de six heures trente-deux minutes pour le groupe UMP, huit heures cinquante et une pour le groupe SRC, trois heures cinquante-cinq pour le groupe GDR, deux heures cinquante-cinq pour le groupe NC et quarante minutes pour les députés non inscrits.
La parole est à M. Daniel Goldberg.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État chargé du développement de la région capitale, monsieur le rapporteur de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, chers collègues, chacun le sait, chacun le dit : l'Île-de-France concentre beaucoup des réussites de l'ensemble de notre pays, mais aussi de nombreuses difficultés structurelles qui freinent le développement de la métropole et qui pèsent sur l'ensemble du territoire national.
La région est composée de territoires attractifs qui font notre renommée mondiale, mais un chômage important, souvent concentré dans certains quartiers, mine notre société.
Nous avons une métropole-capitale, avec Paris qui rayonne sur toute la planète, mais aussi des ghettos sociaux qui se constituent par le haut, où les égoïsmes locaux pénalisent et fragilisent l'ensemble du territoire régional.
Nous procédons à des rénovations urbaines importantes, mais celles-ci ne parviennent pas à résorber une crise du logement qui laisse – au propre comme au figuré – des centaines de milliers de familles à la porte d'un logement décent, adapté à leurs revenus et pas trop éloigné de leur travail.
La région est composée d'une juxtaposition de zones industrielles, de pôles économiques forts et d'une agriculture toujours présente, mais l'étalement urbain dévore toujours plus d'espaces disponibles, en l'absence de garde-fous identifiés, et ce du fait de votre refus de valider le nouveau schéma directeur d'aménagement de l'Île-de-France.
L'Île-de-France bénéficie d'un réseau de transports publics vital pour les habitants comme pour les entreprises ; mais, faute d'investissements suffisants pendant les années où l'État était seul maître à bord, celui-ci est vieillissant et demande des efforts importants dans les quinze années à venir pour obtenir un maillage fin de l'ensemble du territoire francilien, permettant de désenclaver certaines zones de la petite couronne et de développer des parties plus excentrées de la capitale.
Enfin, du point de vue structurel, l'Île-de-France est une région qui, de par la volonté décentralisatrice continue de l'État depuis 1981, a acquis et fait vivre des responsabilités considérables. Je salue au passage le président de la région qui assiste à notre débat.
À côté, des départements ont adapté leur rôle de proximité et des intercommunalités prennent peu à peu leur place dans le paysage régional.
On attendait d'un projet de loi relatif au Grand Paris qu'il apporte une vision de l'Île-de-France de demain, qu'il permette de relever les défis considérables d'une région-capitale qui ne serait pas concurrente des différentes métropoles françaises, qu'il nous renforce solidement dans la compétition internationale pour faire valoir les atouts de tout le territoire régional, et, enfin, d'un « Grand Paris » qui se pense et se vit comme une nouvelle forme de démocratie évoluée, capable de porter une véritable métropole du XXIe siècle.
Nous attendions de ce texte une vision qui aurait été discutée, passée au tamis de la démocratie, à l'instar des propositions non convergentes – et c'est bien normal ! – des dix équipes d'architectes et d'urbanistes missionnées par le Président de la République ; une vision qui prenne l'ensemble des problèmes et enjeux pour tenter de proposer un avenir à chacun ; une vision, enfin, qui saurait que la manière d'arriver à un but compte, dans notre société évoluée, souvent autant que le but lui-même.
C'est bien là, monsieur le secrétaire d'État, qu'est notre principale déception. Nous constatons en effet les différences entre le discours du Président de la République, le 29 avril dernier au Palais de Chaillot, et le contenu de vos propositions. Nous contestons à la fois les présupposés qui sont à la base de votre projet de loi et les mécanismes que vous proposez pour les mettre en oeuvre.
Votre projet, c'est en fait la création de pôles économiques reliés entre eux par un métro automatique rapide, le tout se justifiant, d'après vos hypothèses, par la possibilité d'atteindre une forte croissance économique régionale et un million d'emplois nouveaux dans les quinze prochaines années. Quelles conséquences de cette croissance hors norme de l'Île-de-France pour les autres régions françaises ? Quelle serait la corrélation entre cette forte augmentation de la population active, si elle se réalisait, et la population totale de la région ? Validez-vous ou non ces études sérieuses qui vont jusqu'à évoquer une Île-de-France à 13,5 millions d'habitants en 2020 comme seule possibilité d'atteindre cette augmentation du nombre d'emplois que vous proposez ? De tout cela, vous ne dites rien.
De même, d'où viendrait cette nouvelle main-d'oeuvre ? Des autres régions françaises ? D'un apport de main-d'oeuvre étrangère ? Où seraient logés les nouveaux Franciliens ? Rien n'est précisé, là non plus, dans votre projet. C'est notre première objection de fond : vous lancez des projets sans définir précisément votre point d'arrivée. Puisque vous utilisez cette image, je connais peu de décideurs qui osent lancer le premier étage d'une fusée sans savoir précisément d'où les étages suivants décolleront et même où ils atterriront… C'est pourtant bien la situation dans laquelle nous sommes !
Mais, même en nous situant dans la réalité de la situation actuelle, nous contestons également votre postulat qui croit pouvoir, à partir de certains lieux définis uniquement par leur vocation économique, organiser harmonieusement l'ensemble du territoire régional.
C'est bien de cela, et seulement de cela qu'il s'agit, contrairement à vos affirmations d'hier, monsieur le secrétaire d'État, puisque j'ai reçu aujourd'hui même une invitation à participer en votre présence à une réunion dans mon département, qui ne parle du Grand Paris qu'en termes d'enjeux économiques, ce qui est sans doute nécessaire, mais, à coup sûr, pas suffisant.
Où sont les habitants dans votre projet, leurs besoins en termes de cadre de vie et même de déplacements urbains quotidiens ? Absents.
Où sont les constructions de logements adaptées aux revenus des demandeurs actuels ? Nulle part.
Comment empêchez-vous l'étalement urbain afin de mettre en pratique les engagements du Grenelle de l'environnement ? Ce n'est pas dit.
Quel choix d'aménagement issu des travaux des dix équipes d'architectes mettez-vous en avant ? Aucun.
Où sont les modes de concertation et d'information des citoyens ? Réintroduits partiellement et à la va-vite dans un projet de loi que nos commissions ont déjà dû profondément amender.
Où sont les modalités de co-élaboration avec les élus ? Vous proposez de contracter – le couteau sous la gorge ! – avec les maires en vous affranchissant des responsabilités des départements, et encore plus de la région, que le législateur a pourtant chargés de l'aménagement !
Où sont les pouvoirs de contrôle et d'évaluation indépendante de l'action menée une fois engagée, puisque seul l'État aura les mains libres pour décider ce qu'il lui semblera bon ? Il n'en existe pas.
Comment se prémunir d'un effet d'aspiration des compétences des autres régions vers l'Île-de-France, qui ne les demande d'ailleurs pas forcément ? Rien n'est dit.
Où est la démocratie moderne permettant une large association de l'État – comme pilote et comme stratège – et des élus afin que, tous, nous avancions d'un même pas, avec des objectifs partagés ? Pour y répondre, vous organisez la mise sous tutelle des élus dans une « Société du Grand Paris » et ses filiales, un établissement à vocation commerciale – tout est dit ! –, qui aura la haute main sur une large part du territoire francilien et qui pourrait même avoir quelques visées sur d'autres régions, par l'intermédiaire de ces mêmes filiales.
Notre rapporteur, que je salue pour son écoute, n'en a pas moins expliqué hier que le terme « société », en l'espèce, faisait moderne, alors que cela fait surtout « libéral » ! Dans cette société, les élus auront juste le droit de surveiller, sans rien décider. Elle devra avant tout produire de la valorisation foncière pour porter financièrement l'emprunt de 17 milliards, qui est la seule ressource active de votre projet.
Malgré tout, je vous accorde une certaine logique : sur tous les sujets qu'aborde votre gouvernement, vous considérez les élus locaux, départementaux et régionaux comme coupables de tous les maux, et les citoyens comme des empêcheurs de décider en vase clos !
Qu'il s'agisse de la taxe professionnelle, de la réforme territoriale ou de votre présente démarche, ces pauvres élus n'ont rien compris, ni les uns ni les autres, face à un État vertueux par essence – et sans doute aussi parce que c'est un État-UMP par tous ses ressorts ! –, un État, donc, qui sait tout mieux que tout le monde et qui doit pour cela mettre en place des outils dérogatoires à toute la pratique usuelle de l'urbanisme, de l'aménagement, mais aussi de la démocratie locale.
Quant aux pauvres parlementaires que nous sommes, la manière dont le Gouvernement se comporte montre à quel point vous considérez nos débats plus comme un mauvais moment à passer que comme le lieu démocratique par essence.
Vous avez ainsi largement communiqué à la presse votre tracé de métro, alors qu'il n'en a été nullement question à l'Assemblée nationale. Et lorsque le Premier ministre charge notre collègue Gilles Carrez – celui-ci l'a rappelé tout à l'heure – d'une mission rassemblant des parlementaires de la majorité et de l'opposition et que ceux-ci parviennent ensemble à une hypothèse de concordance des dispositifs, vous agissez comme si ces conclusions n'avaient jamais existé, alors que nous avions abouti ensemble à un résultat assez consensuel. De la même façon, vous n'avez pas tenu compte des travaux des dix équipes d'architectes et d'urbanistes.
Et, pour humilier un peu plus le Parlement, vous lancez avant-hier, à la veille même de l'examen, ici, de votre projet de loi, à grand renfort d'encarts publicitaires, une consultation des Franciliens qui laisse entendre que notre discussion parlementaire n'est que théâtre et que tout est déjà joué.
Je ne dirai rien de nos collègues sénateurs qui n'auront même pas eu l'honneur d'un débat préalable en commission… Pour plaisanter, j'en appellerai presque à M. Copé pour qu'il revoie son appellation : c'est à un « hypo-Parlement » que le Gouvernement impose, comme l'a découvert hier le président de notre assemblée, une seule lecture de ce texte.
Le Grand Paris : aujourd'hui, personne ne sait ce que c'est, si ce n'est un outil de communication gouvernemental à la veille des élections régionales, qui se double de la première étape d'une recentralisation autoritaire de tous les pouvoirs locaux, au seul profit de l'État !
Car ce métro automatique en forme de « grand huit » – je vous prie d'excuser ce mauvais jeu de mots, monsieur le secrétaire d'État –, c'est un peu la foire et le trône : la foire d'empoigne à qui aura sa gare après vous avoir rencontré et le trône d'un État recentralisateur à outrance, prêt à tout pour évacuer des leviers de décision les élus, vus essentiellement comme des empêcheurs d'aménager rapidement !
Vous refusez ainsi tout pouvoir d'aménagement à la région ; vous refusez même que l'on puisse, dans votre texte, citer le terme « SDRIF » – le schéma directeur de la région Île-de-France –, quel que soit son contenu et quelle que soit la majorité à la tête de la région. C'est une preuve que le Président de la République et votre majorité n'accordent que peu de chances de victoire à Valérie Pécresse aux prochaines élections régionales. De ce côté, vous ne serez pas déçus : les Franciliens suivront vos recommandations !
Monsieur le secrétaire d'État, je vous propose d'écouter ce que nous avons à vous dire ici et d'en tenir compte, de ce que diront, bien sûr, les parlementaires socialistes et de gauche, mais aussi certains membres de la majorité avec lesquels, je crois, nous partageons des préoccupations.
Écoutez les élus locaux. Écoutez Ile-de-France Environnement ou la Fédération des usagers des transports. Écoutez les architectes et les urbanistes, Paul Chémetov, Jean Nouvel, Daniel Béhar ou Roland Castro, qui ne sont pas tous – et sûrement aucun d'entre eux – adhérents du parti socialiste, je vous l'assure !
Chers collègues – et je m'adresse aux quelques députés de la majorité qui sont présents, ce dont je les remercie – pensant faire appel à votre sensibilité la plus naturelle, je vous ai proposé, hier, d'écouter en séance les déclarations du MEDEF, lesquelles ont ému certains d'entre vous. Mais, ne reculant devant aucun sacrifice pour vous convaincre, je vous rappellerai aujourd'hui ce que disait Nicolas Sarkozy, lui-même, de l'ambition que devait porter le projet du Grand Paris : « Entre la main invisible du marché qui indexe tout le développement de l'agglomération sur le niveau de la rente foncière et la planification rigide qui a détruit tant de villes, il faut trouver l'équilibre. » Eh bien, c'est justement cet équilibre que vous ne trouvez pas en maniant d'une même main et dans un même mouvement le recours au marché et à la planification rigide ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, depuis plus de trente ans, en Île-de-France, les ségrégations territoriales se sont renforcées, les inégalités sociales, économiques, culturelles ont explosé sous le coup d'un modèle de développement libéral.
La disparition de centaines de milliers d'emplois, conséquence de la désindustrialisation, a laissé de profondes cicatrices sociales et esthétiques dans nos banlieues franciliennes. Des années de combats menés par les élus locaux ne sont pas parvenues à gommer les fractures territoriales et les nuisances rejetées par la capitale dans sa périphérie. Nous avons assisté à la hausse du foncier, à une politique d'étalement urbain anarchique, à la constitution de véritables ghettos, à la rupture de l'égalité des chances, fondement de l'égalité républicaine.
Voilà la situation de la région Île-de-France aujourd'hui à laquelle un projet de loi ambitieux pour le Paris du XXIe siècle devrait s'attaquer, afin de rétablir la cohésion sociale, la participation démocratique des citoyens et l'égalité entre les territoires et, notamment, l'égalité fiscale.
Dans un monde marqué par la crise financière, l'urgence climatique et la nécessité d'autres modes de production et de consommation, le présent projet de loi apparaît, en effet, en complet décalage.
Au sein d'une des agglomérations les plus riches de la planète, les poches de grande misère économique, sociale et culturelle côtoient des pôles d'extrême richesse. Les revenus moyens des habitants de certaines villes, comme Clichy-sous-Bois, sont en dessous du seuil de pauvreté, avec moins de 6 000 euros, alors qu'à l'ouest de l'agglomération, les Neuilléens perçoivent des revenus moyens quatre fois supérieurs. Je ne peux me résigner à ce que subsistent des injustices aussi criantes qui touchent tous les aspects de la vie sociale, économique et culturelle. Peut-on se résoudre à ce qu'il y ait trois fois moins de salles de cinéma en Seine-Saint-Denis qu'à Paris ? Peut-on se résoudre à ce qu'il y ait quatre fois moins de médecins par habitant en Seine-Saint-Denis qu'à Paris ? Peut-on se résoudre à ce qu'il y ait dix fois moins de librairies par habitant en Seine-Saint-Denis qu'à Paris ? Peut-on se résoudre à ce qu'il y ait trente fois moins d'avocats par habitant en Seine-Saint-Denis qu'à Paris ? Peut-on, enfin, se résoudre à ce que la moitié des moins de dix-huit ans de Seine-Saint-Denis vivent sous le seuil de pauvreté, contre 8 % dans les Yvelines ?
La même inégalité prévaut dans le domaine des transports. Les habitants de banlieue parisienne ont accès à un réseau de gares dix fois moins développé que le coeur d'agglomération, mais s'acquittent d'un abonnement qui atteint parfois 123 euros mensuels, près du triple de ce que paient les parisiens. La tarification unique accessible à tous est une nécessité absolue. Ce serait une mesure de justice pour des foyers franciliens poussés en marge de la capitale par la hausse des loyers et du foncier et un modèle de développement concentrique. Je regrette que l'amendement que nous avions déposé en ce sens ait été jugé irrecevable du fait de son coût, pourtant modique.
Je crains que votre projet de loi, monsieur le secrétaire d'État, ne vienne pas à bout des pannes, retards, saturation et autres dysfonctionnements des transports franciliens, qui empoisonnent la vie de nos concitoyens. Les 25 % de RER en retard sur la ligne B perdureront tant que l'État ne respectera pas ses engagements sur le financement de la modernisation du réseau existant par la région Île-de-France.
Devant ce constat, le statu quo n'est naturellement pas acceptable. Tous les Franciliens doivent pouvoir bénéficier d'une Île-de-France de première classe. C'est pourquoi je suis favorable à l'intervention de l'État en Île-de-France, car il doit être le garant de la cohérence du territoire et de l'égalité des chances où que l'on habite. Pour autant, cette intervention ne peut revenir sur le mouvement démocratique de décentralisation qui a rapproché les décisions des citoyens. Elle doit se faire en synergie avec les collectivités – la région, les départements et les communes – et le Grand Paris ne doit pas être imposé aux collectivités territoriales en accaparant leur foncier et en s'appropriant les plus values. Ce serait un Monopoly foncier à l'échelle de la région.
Si le but du projet de Grand Paris est de constituer une place financière attirant les capitaux spéculatifs étrangers sur la base du développement d'une poignée de territoires spécialisés et reliés entre eux – les clusters –, le texte que vous nous présentez est à n'en pas douter un bon projet. Le Président de la République ne jure que par la « concurrence des territoires » – ce sont les mots du MEDEF – et la nécessité que Paris participe à la compétition des « villes-mondes ». Mais jusqu'où nous mènera cette folle concurrence entre les territoires et entre les citoyens promue par le libéralisme mondialisé ?
Notre modèle n'est pas le paradis fiscal de la City de Londres où se blanchit l'argent sale des trafics, des guerres, de la fraude fiscale. La réalité, c'est que les habitants d'Île-de-France se moquent d'entrer dans le hit-parade des « villes-mondes » attirant les capitaux à coups d'exonérations fiscales et de délitement des institutions.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez dit dans le quotidien Le Monde que la France devait gagner un championnat du monde. Cette métaphore footballistique n'est sans doute pas fortuite, car vous comptez, vous aussi, sur la main invisible du marché. Mais la main bien visible des financiers nous a menés à la crise systémique du capitalisme que nous connaissons aujourd'hui.
Dans tous les domaines, une même logique est à l'oeuvre : favoriser les avantages d'un petit nombre en promettant que les autres bénéficieront de retombées positives. Or cette logique a structuré l'Île-de-France en pôles de grande richesse juxtaposés à des territoires de grande pauvreté.
La Seine-Saint-Denis accueille, entre autres, le premier aéroport européen et ses 100 000 emplois. Vous connaissez l'importance que j'attache au développement de la plate-forme aéroportuaire de Roissy. Mais les retombées, en termes d'emplois pour la population, sont insuffisantes pour différentes raisons. Cela est dû, notamment, à une desserte en transport déficiente et à l'impéritie des pouvoirs publics qui n'ont pas investi dans les infrastructures pour assurer le transport des salariés vers Roissy. Actuellement, 90 % des travailleurs de la plate-forme se déplacent en voiture, ce qui est une aberration, alors qu'ils pourraient emprunter les transports en commun ! Sans doute est-ce dû à l'absence de vision des dirigeants de l'époque.
La région capitale a, bien sûr, besoin de développement. Elle doit être à la pointe dans le domaine technologique et scientifique, rayonner par sa culture et ses arts, oeuvrer à l'émancipation des citoyens. Elle a également besoin de créer des richesses, mais dans le partage équitable des fruits de la croissance. En effet, ce que veulent avant tout les habitants d'Île-de-France, c'est, je le pense, un travail et une amélioration de leur vie quotidienne grâce à l'amélioration des transports de banlieue à banlieue, au rapprochement entre le domicile et le lieu de travail, à la construction de logements, qui est la grande absente de ce projet, et, enfin, grâce à l'amélioration de l'environnement et à la limitation des nuisances.
Vous évoquez une « ville-monde » post-Kyoto, mais le Grand Paris dessine une agglomération du bétonnage où les richesses naturelles de la région seront absorbées par l'étalement urbain. Vous évoquez une grande métropole cohérente, mais elle ne pourra pas être créée sans une réforme globale de la fiscalité locale permettant une véritable justice fiscale. Comment accepter qu'un couple d'ouvriers d'Aubervilliers soit plus imposé pour un appartement de type « F3 » qu'un cadre supérieur qui habite dans le 7e arrondissement de Paris ? De la même façon, il est inadmissible que la ville de Sevran, abritant des populations modestes, soit contrainte d'imposer 22 % de taxe d'habitation, quand des villes favorisées de l'ouest parisien telles que Puteaux ou Courbevoie peuvent imposer simplement à 5 % ? C'est un cercle vicieux de dumping fiscal régional qu'il nous faut briser. En effet, les populations défavorisées ne peuvent continuer à contribuer plus fortement à l'effort public que les classes aisées.
En conclusion, le texte qui nous est présenté se réduit, hélas, à un réseau de transport, sans doute utile s'il se met au service des Franciliens, mais qui se borne à créer autour de chaque gare de métro de nouvelles « La Défense », lesquelles seront sans doute très riches, mais accentueront les fractures territoriales. Qu'en sera-t-il alors de la cohésion sociale, qui est au coeur des enjeux de la région capitale ? Quelle sera la place de l'égalité et de l'émancipation des citoyens, véritable ADN de notre République ?
Monsieur le secrétaire d'État, votre ambition, comme celle du Président de la République, ne répond pas à ces questions ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les débats d'hier et j'ai pu constater, comme vous sans doute, que s'était instauré un véritable dialogue de sourds entre les deux côtés de cet hémicycle, alors même que cette ambition du Grand Paris aurait pu nous réunir. Je devrais d'ailleurs dire « devrait impérativement nous réunir », car comment imaginer, monsieur le secrétaire d'État, qu'un projet de 20 milliards d'euros s'étalant sur vingt ans puisse raisonnablement être mis en oeuvre par un État en grande difficulté budgétaire sans le soutien minimum de la population, des municipalités et des départements de la région ?
Je crois, tout d'abord, comme vous, qu'il y a urgence à agir et je me suis sincèrement réjoui lorsque le Président de la République a pris ce dossier à bras-le-corps.
En effet, comment ne pas voir que la région parisienne, l'une des grandes métropoles mondiales, vivait depuis trop longtemps sur les acquis du grand aménageur Paul Delouvrier ? Ces acquis se sont peu à peu essoufflés, laissant, à la place, de multiples dérives : dérive du déséquilibre croissant entre l'habitat et l'emploi ; dérive de la saturation des infrastructures de transport ; dérive de l'urbanisation en tache d'huile dépassant même les limites de l'Île-de-France pour s'étendre au reste du Bassin parisien ; dérive des inégalités de plus en plus criantes. Tout cela est simplement dû au fait que l'État a oublié de jouer son rôle en Île-de-France depuis des années. On constate ainsi un sous-investissement dans les transports en commun, la séparation de RFF et de la SNCF, la dictature des Verts bloquant tout projet routier et l'implantation anarchique des zones d'activités et de bureaux. Les collectivités locales ont fait ce qu'elles pouvaient, mais leur dispersion, l'absence de réelle coordination entre la région, les départements et les intercommunalités expliquent le retard dans la mise en oeuvre des projets du STIF. À cet égard, je regrette qu'à la gauche de cet hémicycle, on reproche au Grand Paris de manquer d'ambition tout en s'indignant du retour de l'État, Or l'une ne peut pas aller sans l'autre. Pour autant, le retour de l'État ne peut pas constituer en soi une politique, et ce d'autant plus que les temps ont changé et que les collectivités ont pris des responsabilités. L'articulation entre une nécessaire ambition nationale et une non moins incontournable mobilisation au niveau local pour la mise en oeuvre du Grand Paris passe par un projet pertinent, cohérent et répondant vraiment aux besoins des habitants. Ce n'est qu'à cette condition que l'État pourra légitimement intervenir et dépenser autant d'argent public. Je ne doute pas de votre sincérité, mais ce n'est malheureusement pas le cas de votre projet du Grand Paris. S'il survit, il risque de se transformer en immense gâchis, et ce pour trois raisons fondamentales. Tout d'abord, votre Grand Paris n'est pas à la bonne échelle, celle du territoire francilien. Déjà dans les années soixante, Paul Delouvrier avait compris que pour « remettre de l'ordre » selon le célèbre mot du général de Gaulle, il fallait structurer le territoire et prévenir la tache d'huile ou, du moins, l'organiser. Cela fut tout de même fait avec les villes nouvelles qui proposaient parallèlement emplois, habitat et infrastructures de transport. Plus de quarante ans après, vous vous refermez sur la petite couronne en oubliant les cinq millions d'habitants de la grande couronne, ceux qui ont la vie la plus pénible et qui ne disposent pas des infrastructures de transport dont profitent heureusement la petite couronne et Paris. Vous auriez même pu aller plus loin – le Président de la République l'a d'ailleurs fait lorsqu'il a évoqué Le Havre comme port de Paris – en concevant votre projet à l'échelle du Bassin parisien. Il existe toute une ceinture de villes moyennes ou grandes à une heure de Paris ou moins : Auxerre, Rouen, Chartres, Orléans, Reims, Troyes, Beauvais, et je pourrais en citer d'autres. Ces villes pourraient servir de points d'appui pour un véritable aménagement du territoire. Comment ne pas voir le formidable potentiel d'aménagement équilibré, à échelle humaine, qu'elles représentent pour une conception très large de l'Île-de-France ?
Il est, en effet, impératif d'éviter une hypertrophie de la métropole parisienne, trop peuplée, congestionnée et polluée, donc invivable. Ce n'est pas en concentrant toujours plus d'habitants au coeur de l'agglomération…
…sans politique d'aménagement du territoire dans notre pays et sans politique d'aménagement du territoire au niveau du Bassin parisien, que vous pourrez rendre attractives les fameuses « villes-monde » de demain. En effet, les villes qui seront attractives, celles où les chercheurs dont vous parlez beaucoup, et ce à juste titre, monsieur le secrétaire d'État, auront envie de venir vivre seront celles qui seront équilibrées !
La deuxième faille de votre projet est votre refus d'aller aux causes des difficultés des transports. En vous focalisant uniquement sur le métro automatique, vous oubliez l'essentiel, les déséquilibres entre l'habitat et l'emploi. Laisser ainsi ajouter 450 000 mètres carrés de bureaux supplémentaires à La Défense est une pure folie. Aucun système de transport, aussi coûteux soit-il, ne supportera cette fuite en avant dans la concentration des emplois autour de quelques pôles, d'autant que le prix des logements à Paris et en petite couronne interdit à celles et ceux qui y travaillent d'y habiter.
Votre première priorité, notre première priorité, devrait être le rééquilibrage entre habitat et emploi. C'est pourquoi, à défaut de rétablir l'agrément, l'on pourrait au moins augmenter la taxe sur les bureaux en fonction du degré de densité des emplois dans les communes.
Sous certaines réserves. Il a tout de même été considérablement allégé.
Il faudrait aussi favoriser l'émergence de parcs d'affaires, de bureaux, d'ateliers, autour des pôles situés dans les départements les moins dotés, où le taux d'emploi est faible et les déplacements considérables. Ce que vous imaginez pour Saclay, qui va dans le bon sens, pourquoi ne pas l'étendre en Seine-et-Marne, en créant un nouveau quartier d'affaires entre Roissy et Marne-la-Vallée, dans le Val-de-Marne et l'Essonne, en transférant les activités de congrès et les salons de la porte de Versailles à Orly, qui ferait un magnifique centre de congrès pour toute l'Île-de-France ? Pourquoi ne pas l'étendre aussi à la Picardie ? Je maintiens en effet que, si l'on veut éviter la congestion aéroportuaire et des pollutions toujours plus fortes, il faudrait, en réservant des terres, préparer la possibilité de construire un troisième aéroport couplé à celui de Roissy, si les besoins s'en font sentir dans vingt ans.
Dans cette hypothèse, il va de soi que votre métro automatique perdrait de son intérêt, et c'est ma troisième et dernière critique au projet de Grand Paris.
En l'état des difficultés et des enjeux auxquels est confrontée la région capitale, le « grand huit » est une absurdité financière aux modalités des plus contestables car il ne répond ni aux besoins des habitants, ni à ceux des entreprises.
Ce projet à 21 milliards d'euros, qui ne pourra pas être réceptionné avant dix ou vingt ans, vise à mettre en relation des pôles qui ne sont pas les plus mal lotis en transports en commun quand on regarde ce qui se passe en grande couronne, alors même que vous oubliez les axes les plus surchargés qui permettent aux salariés d'aller vers ces pôles. Comment pouvez-vous décemment proposer un tel circuit ?
Pour relier des banlieues entre elles, la solution du tramway ou, surtout, du bus en site propre présente un rapport entre efficacité et coût bien supérieur. Avec ces 21 milliards, nous pourrions développer des liaisons de banlieue à banlieue en petite et grande couronne bien plus importantes que le fameux « grand huit ». Où est donc la pertinence, la cohérence de ce projet ?
Trois millions d'usagers quotidiens du RER manquent de l'essentiel, et vous leur proposez l'accessoire pour dans quinze ans. « Il n'y a plus de pain, donnez-leur donc de la brioche ! »
Comment croire un instant que notre pays, qui n'arrive pas à emprunter pour le fameux grand emprunt, qui s'est un peu dégonflé, plus de 35 milliards d'euros pour préparer le XXIe siècle, avec des enjeux industriels et scientifiques colossaux, puisse dégager 30 milliards pour les transports en Île-de-France, vos 20 milliards et les 10 que, selon certains membres de la majorité, investirait le STIF en enlevant l'arc express ?
Bien évidemment, la grande boucle et les dix tunneliers des grandes entreprises du BTP, qui doivent bien se lécher les babines, accapareront les moyens nécessaires à la vie quotidienne des habitants.
Mes chers collègues de la majorité, vous n'aurez pas à la fois le « grand huit » et l'entretien des réseaux fatigués qui n'en peuvent plus.
Les finances de notre pays ne permettront pas de faire les deux.
Ces habitants, monsieur le secrétaire d'État, qui ne viennent pas de Shanghai ou New York, voudraient tout simplement pouvoir aller travailler dans de bonnes conditions. Ceux de la ligne D, qui passe par ma ville, ne trouvent pas de travail parce que, sur leur CV, il est écrit « ligne D ». Eux qui habitent Montereau, Corbeil, Évry, Rambouillet, Cergy et autres voudraient que l'État fasse son travail avec les collectivités et investisse les moyens publics nécessaires pour que les infrastructures soient dignes de notre métropole.
Redescendons sur terre, mes chers collègues.
Avec un milliard d'euros, on peut remettre en état la ligne D du RER, empruntée quotidiennement par deux fois plus de passagers que l'ensemble des TGV roulant en France. En triplant cette somme, avec 3 milliards d'euros seulement, on peut rénover l'ensemble du réseau RER. Avec 600 millions d'euros, somme que l'on prétendait impossible à réunir il y a quelques années, même à la région Île-de-France, on peut construire un nouveau tunnel entre Châtelet et la gare du Nord désengorgeant le RER B et le RER D. Avec seulement 100 millions d'euros par an, on peut doubler toutes les lignes de bus en grande couronne. Dans les quatre départements de la grande couronne, pour 5 millions d'habitants, il n'y a pas de bus le week-end, il n'y a pas de bus le soir.
Oui, il faut une belle ambition pour la région capitale, des investissements massifs de l'État, oui, il faut imposer certaines choses aux élus parce que la dispersion des intérêts particuliers l'emporte parfois, mais, dans ces conditions, il ne faut pas se tromper de projet. Il faut que ce projet soit cohérent, pertinent, réponde aux besoins des habitants, ait une légitimité, et c'est cette légitimité qui donnera à l'État sa capacité d'intervention.
Pour conclure, je ne souhaite qu'une chose, c'est que votre Grand Paris puisse exister, mais sur des bases saines, pas sur une chimère, pas sur des intérêts. Raisonnez à la bonne échelle, celle du bassin parisien, aménagez le territoire en instituant des pôles équilibrés d'habitat et d'emploi.
Investir dans des projets concrets qui servent les habitants, mettre en oeuvre une véritable péréquation fiscale, clé du système, rétablir des agréments pour éviter la concentration des emplois dans certains pôles, ces priorités me paraissent majeures. Si elles étaient ignorées au profit d'une folie des grandeurs totalement déplacée, je suis convaincu que le projet du Grand Paris serait profondément néfaste non seulement aux finances de notre pays mais à l'intérêt des habitants, et c'est pourquoi je voterais contre.
Monsieur le secrétaire d'État, vous permettrez à une élue du Grand Ouest de s'exprimer sur le Grand Paris en saluant l'engagement du Président de la République, du Gouvernement et le vôtre.
Jamais sans doute nous n'avons eu autant besoin dans notre pays de perspectives, de prospectives, d'innovation politique et d'une vision renouvelée de la place et du rôle de nos territoires dans l'espace européen.
Reconfigurer Paris, renforcer la région métropole, c'est donner une chance nouvelle à la France, dans un contexte de mondialisation qui met en compétition autant les systèmes économiques que les systèmes publics d'organisation et de gestion territoriale notamment.
La visibilité européenne des territoires est l'un des paramètres essentiels de leur compétitivité et l'évolution du monde nous amène à juste titre à redéfinir l'aménagement du territoire et à promouvoir des concepts nouveaux – je pense en particulier à tout ce qui concernera le développement de la politique des estuaires ou celui des métropoles. Il faut se féliciter que le chantier que vous ouvrez, sur lequel vous avez travaillé avec énormément d'ardeur, s'ouvre parallèlement à la réforme des collectivités territoriales, qui marque là encore l'esprit de mouvement et d'innovation politique de notre majorité.
Je voudrais centrer mon propos sur l'interactivité qui s'impose entre les procédures d'aménagement du Grand Paris et le positionnement des régions et des zones adjacentes, car, comme vient de le dire l'orateur précédent, il est important que le projet du Grand Paris soit aussi celui du territoire national et, singulièrement, des régions directement concernées.
De Venise à Rotterdam, de Singapour à Hambourg, les théories de Braudel visant à dire que les villes-mondes ont toujours été ouvertes sur la mer sont plus vraies que jamais. C'est d'autant plus évident que les échanges maritimes, expression directe de la mondialisation, sont en croissance constante et vont prochainement se développer avec l'ouverture des nouvelles routes maritimes du Nord et de l'Arctique.
Faire de l'axe de la Seine un potentiel fluvial s'appuyant sur le débouché maritime du Havre constitue donc un apport considérable à la fois pour le futur Grand Paris et, naturellement, pour les deux Normandie.
Je suis élue de cette façade Ouest et je mesure la formidable opportunité pour nous d'avoir cet axe renouvelé entre la capitale et la mer. Les deux régions normandes ont intérêt à se retrouver dans cette dynamique que vous ouvrez. Il s'agit d'un élément de réussite déterminant pour Paris et pour nos régions. Bonaparte y avait pensé il y a quelques années. L'essor de la façade maritime est d'ailleurs largement lié au XIXe et au XXe siècle à celui de Paris.
Je terminerai par trois réflexions.
La première concerne les infrastructures ferroviaires, qui occupent une large place dans la présentation de votre projet. Le désenclavement de Paris concerne tout l'Ouest et il y a là une urgence tant le déficit des infrastructures sur cette partie du territoire est réel. L'aménagement de la région de Mantes et du tronçon qui y conduit est essentiel et, là encore, l'intérêt est partagé. Je plaide pour un TGV normand desservant Caen et Le Havre et constituant pour le Grand Paris l'exutoire essentiel et nécessaire que vous appelez de vos voeux.
Il faut par ailleurs donner à la capitale une réelle perspective européenne avec l'axe vers Londres. Nous devons créer un arc européen qui relie Paris à Londres et qui permette de rapprocher les deux pôles économiques les plus importants de l'Europe de l'Ouest, car il y a là des synergies qui n'échappent à personne.
Tout cela suppose une concertation permanente. Dominique Bussereau l'a engagée pour le ferroviaire avec l'ensemble des élus. Puisque le phasage sera assez comparable, je pense que les synergies pouvant résulter de cette démarche, qu'il s'agisse de la recherche, de l'économie ou de la culture, appelleraient une formalisation des échanges, des concertations, des informations, des groupes de travail, et je souhaiterais que nous ayons votre appui pour que prenne forme cette concertation et que nous puissions envisager ce développement du Grand Paris vers l'Ouest avec toute la rigueur, la force et l'efficacité qu'un tel enjeu réclame.
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le thème du Grand Paris est un thème d'actualité. Après des rapport et des débats, ce sont une dizaine d'ambitieux projets architecturaux et urbanistiques qui ont été présentés en réponse à une consultation internationale lancée dès 2007. Et c'est maintenant votre projet de loi « Le Grand Paris », monsieur le secrétaire d'État, qui nous réunit ce soir.
Derrière cette appellation, on ne sait trop si l'on parle d'une ville, d'une région, d'une métropole, d'une aire urbaine ou d'une entité administrative nouvelle.
On peut considérer aujourd'hui que l'idée d'un Grand Paris aux traits et au tracé encore indéfinis concerne les 100 kilomètres carrés de la ville de Paris et les 12 000 kilomètres carrés de la région Île-de-France. Cet espace est, à l'échelle mondiale, une concentration exceptionnelle de richesses et de dynamisme.
Cependant, les nécessités de réforme en termes d'aménagement et de gouvernement sont évidentes, tant les problèmes sont colossaux en matière de logement, de transport, de recherche, d'enseignement et d'inégalités territoriales.
Les modes de vie et de bâti se sont transformés. Réalités et réseaux se sont affranchis des pourtours administratifs hérités des siècles passés. Un tiers des actifs parisiens travaillent en banlieue. Comme l'écrivent Frédéric Gilli et Jean-Marc Offner : « Paris n'appartient plus aux Parisiens. Aujourd'hui, Parisiens et Franciliens, mais aussi visiteurs, touristes et professionnels vivent des appartenances territoriales plurielles : on vote là où l'on dort, on travaille là où l'on ne paie pas d'impôts. »
Le sujet du Grand Paris, s'il est à enjeux fondamentaux, n'en est pas pour autant nouveau. Il existe probablement depuis l'affirmation de la métropole capitale.
Frédéric Gilli et Jean-Marc Offner soulignent avec force que l'essentiel de la problématique du Grand Paris, comme d'ailleurs de toutes les métropoles dans le monde, est une dissociation croissante entre les territoires de la représentation, de la délibération et de l'action. En conséquence, il est à leurs yeux peu important de s'inquiéter du mille-feuilles institutionnel, l'essentiel étant d'arriver à discuter et à promouvoir une légitimité et une identité métropolitaines.
Monsieur le secrétaire d'État, j'ai lu avec beaucoup d'intérêt le discours que, vous, vous avez entendu du Président de la République et qu'il prononcé le 29 avril sur la colline de Chaillot pour l'inauguration de l'exposition du Grand Paris. Certains y ont vu un discours fondateur, d'autres un discours inspiré, voire sympathique, mais décevant.
Pour ma part, j'ai avant tout relevé l'ambition du Président de la République, s'exprimant en ces termes : « Le Grand Paris, c'est celui de la ville durable, de la ville de l'après-Kyoto, de la ville écologique, de la ville qui s'allie avec la nature au lieu de la combattre ; c'est le grand défi de la politique du XXIe siècle. »
Mais cette belle ambition, monsieur le secrétaire d'État, n'aura vécu que le temps d'un discours. En effet, bien avant la présentation des propositions des dix équipes pluridisciplinaires d'architectes et d'urbanistes retenues pour imaginer une stratégie de développement du Grand Paris intégrant la nouvelle donne post-Kyoto visant à limiter les émissions de gaz à effet de serre et à réorienter le schéma directeur de la région Île-de-France, vous avez précisé à la presse que votre projet de Grand Paris se limitait à un projet de transport urbain en périphérie de la métropole.
C'est ainsi que la grande ambition du Président de la République se réduisit à ce que l'on appelle maintenant un « grand huit » souterrain de métros automatiques. Comme l'a dit publiquement un architecte : « Les mirages annoncés du Grand Paris se sont dissipés. »
Nous le savons, les modifications des modes d'habiter dans l'espace urbain, l'usage de l'automobile, la densification des réseaux ferrés ont conduit à une modification des dynamiques territoriales. La banlieue n'est plus uniquement dortoir et le centre ne concentre plus la totalité des flux traversant la ville. Il s'agit donc de considérer les logiques et les conséquences pratiques de ces évolutions sur la trame urbaine. Ces perspectives renouvellent les problématiques franciliennes, et votre projet de loi, monsieur le secrétaire d'État, ne répond pas aux nouveaux enjeux identifiés.
Le premier enjeu porte sur l'affirmation de la centralité. En effet, si celle-ci a éclaté, elle n'a pas disparu des espaces métropolitains contemporains. L'interdépendance des pôles ne doit pas se traduire par une centralité diluée ou fragmentée ; Paris doit rester le coeur qui irrigue de nombreux pôles économiques et demeurer le point de rencontre des réseaux humains et physiques.
Le deuxième enjeu concerne la question des densités urbaines. En effet, dans le cadre d'une géographie discontinue de territoires aux contours flous, se pose celle de la maîtrise de l'étalement urbain et de la consommation des sols.
La mixité sociale et fonctionnelle dans cette nouvelle métropole est un autre enjeu majeur, sans doute primordial, car les logiques économiques, sociales et urbaines ne tirent pas toutes la métropole dans le même sens. Dans un espace élargi, les répartitions possibles sont plus nombreuses que dans un espace restreint.
Maintenir ou favoriser une métropole mixte est un des héritages des villes européennes que l'on doit valoriser. Il faut promouvoir une organisation de l'espace urbain qui ne sépare pas les lieux d'emploi des centres de loisir et de consommation et des lieux de résidence, afin de créer une ville plusdurable.
Enfin, la place des villes dans la hiérarchie mondiale de 2020 se décide aujourd'hui. Investir dans l'adaptation des structures urbaines est un autre enjeu lié au nouveau contexte métropolitain.
Les zones d'activité, de logement et d'infrastructures de transport continuent d'orienter fortement la région parisienne. Elles en sont la structure. Toutefois, les transformations de la ville rendent nécessaire une adaptation de ce squelette urbain à la nouvelle morphologie de la métropole.
Il importe que les équipements urbains franciliens fassent l'objet d'une adaptation et d'une amélioration. Je rappelle que Londres a décidé d'un plan d'investissement de 23 milliards d'euros pour son métro, et que New York a creusé un tunnel ferroviaire pour réunir le New Jersey à Manhattan et a prolongé ses lignes de métro. C'est aussi ce que propose la région Île-de-France, par le biais de son plan de mobilisation pour les transports, d'un montant de 18 milliards d'euros. Plan qu'elle se voit dans l'obligation de lancer sans l'aide financière de l'État, afin d'améliorer au plus vite les conditions de transport des Franciliens.
Enfin, monsieur le secrétaire d'État, il est une autre raison qui nous conduira à ne pas soutenir votre projet : c'est que celui-ci est conduit en dehors de toute stratégie d'aménagement du territoire national. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, en cohérence avec la suppression de la taxe professionnelle et la réforme des collectivités territoriales, ce texte sur le Grand Paris marque, par son caractère autoritaire, un recul de plusieurs dizaines d'années.
Élue des Hauts-de-Seine, dans la circonscription de Suresnes et de Nanterre, dont j'ai été maire pendant plus de seize ans, je tiens à dire à cette tribune ce qu'a coûté aux villes concernées et à leurs habitants la mise en oeuvre des méthodes que vous préconisez dans votre texte.
Pendant des années, l'EPAD, technocratique et centralisateur, a géré les territoires de La Défense d'autorité et sans projet précis si ce n'est celui de dégager des espaces au service des grands groupes et de la finance.
Ainsi, dès le périmètre fixé sur les trois communes de Nanterre, Courbevoie et Puteaux, nous avons assisté à l'expropriation de quartiers entiers. Ce furent de véritables traumatismes pour les familles obligées de quitter leurs habitations. Ces expropriations participèrent à l'irruption d'un paysage de désolation sur le territoire de Nanterre et à l'aggravation des déséquilibres entre emploi et logement, transports et besoins des usagers, entre les villes elles-mêmes.
Les infrastructures routières et ferroviaires implantées n'importe comment sont des obstacles aux déplacements et des plaies béantes dans notre ville.
Si l'on y ajoute les gâchis financiers induits par cette façon de procéder, comme les viaducs jamais utilisés qu'il a fallu ensuite démolir, on ne s'étonnera pas du déficit abyssal de l'EPAD.
Et c'est le modèle que vous présentez aujourd'hui comme le sommet de la modernité, pour servir l'intérêt général, dites-vous, dans le cadre d'un aménagement futuriste, harmonieux et durable. Permettez-moi de dire que c'est un mensonge. C'est même plus que cela : c'est un cauchemar ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
C'est le retour brutal à la case départ, à l'époque où, face au rouleau compresseur de l'EPAD, les citoyens de Nanterre, sous l'impulsion de la municipalité, ont dû réagir fermement et travailler à un projet prenant en compte leurs aspirations. Nos actions ont conduit, après d'intenses échanges, à la création de l'Établissement public d'aménagement Seine-Arche, l'EPASA, chargé de mettre en oeuvre le projet élaboré en commun. Alors, et alors seulement, a débuté un partenariat dans la confrontation utile et assumée entre l'État et la ville.
Qu'en est-il neuf ans plus tard ? Personne n'a renoncé à ses prérogatives et chacun respecte l'autre. Au sein de l'établissement public, d'abord, où siègent à parité huit représentants de l'État et huit élus, dont six de Nanterre. Mais également sur le projet signé en 2000, fruit d'une large concertation avec les Nanterriens et d'un compromis avec les exigences de l'État.
De beaux aménagements, salués par tous, sont réalisés et en cours de réalisation derrière l'Arche de La Défense. La ville a tenu tous ses engagements, tant à l'égard de la population que de l'État, et les finances de l'EPASA sont saines. Si des ajustements sont encore à faire, nous y sommes prêts, avec la volonté de poursuivre dans un partenariat loyal et équitable.
Mais vous avez décidé de changer la donne et de vous livrer à une grossière reprise en main, autoritaire et brutale, de l'aménagement de ce territoire : deux projets de décrets sont tombés cet été, le 3 août, comme par hasard, pour élargir le périmètre dit d'intérêt général à près de la moitié du territoire de la ville de Nanterre, et dissoudre l'EPASA dans un établissement public où, sur quinze membres, il n'y aura plus que deux élus de Nanterre, alors que l'essentiel du territoire à aménager se situe sur cette commune.
Pourquoi cet autoritarisme, quand quatre collectivités sur six, y compris parmi celles que dirigent vos amis de l'UMP, ont majoritairement rejeté ces décrets ? Parce que vous savez que personne ne veut du mode de développement que vous défendez, tant il est obsolète, à l'origine de la crise économique, sociale et environnementale que nous traversons.
Vous savez que personne, à part vous, n'envisage de construire tous ces mètres carrés de bureaux sans savoir comment ces milliers de salariés supplémentaires se rendront à La Défense, alors que tous les transports collectifs sont déjà hyper-saturés.
Vous savez que si vous mettez vos projets en débat, ils seront rejetés, et vous le redoutez. Vous redoutez, finalement, la démocratie. Il vous faut donc imposer vos projets en remettant en cause la décentralisation et l'autonomie communale.
Ce que vous faites aujourd'hui à La Défense, en dehors de toute concertation, n'est que la partie visible du traitement de choc que vous envisagez pour toute la région Île-de-France et, au-delà, pour le pays.
Mes chers collègues, l'Assemblée nationale s'honorerait à mettre en échec la philosophie d'un texte dangereux pour notre République. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, élu de Seine-Saint-Denis, de la petite Couronne parisienne, je souhaite m'impliquer fortement sur ce projet.
La semaine dernière, j'ai d'ailleurs changé temporairement de commission afin de soutenir ce projet qui est indéniablement essentiel, tant pour ses répercussions régionales, nationales qu'internationales.
En effet, 80 % de la population vit dans les villes. Il est donc évident que la question urbaine est une question centrale dans notre économie et notre tissu social.
L'agglomération parisienne est, pour des raisons historiques et administratives, une réalité difficile à cerner. En effet, à l'inverse de ses homologues étrangères, comme Londres ou Berlin, la commune de Paris n'a pas agrandi ses limites depuis 1860. Par conséquent, il existe un décalage flagrant entre le Paris politique et la réalité géographique, économique et humaine de la métropole.
Avec une superficie de 105 kilomètres carrés, Paris est petite. Londres est, par exemple, quinze fois plus étendue. En revanche, en 2008, l'Île-de-France concentrait plus de 11,7 millions d'habitants, soit une densité de population de 974 habitants au kilomètre carré, l'une des plus élevées au monde.
Nous avons donc un défi économique, un défi social, un défi de renommée internationale à relever. Ce n'est pas un défi qui se résume uniquement à un métro automatique ultramoderne ni à une architecture créée et conceptualisée par les plus grands. C'est un défi très ambitieux, très audacieux et entreprenant auquel ce projet présidentiel répond.
Le Grand Paris, c'est créer une nouvelle structure métropolitaine capable de gérer tout ou partie des problèmes communs aux différentes villes de l'agglomération. Il est temps à présent que ce sujet soit concrètement abordé et traité.
Il est vrai que quelques efforts ont déjà été faits, surtout dans les années soixante et soixante-dix. Mais en sa qualité de première destination touristique au monde, Paris ne peut pas se permettre l'amateurisme ou des opérations de « com », au regard de ses sérieuses concurrentes européennes que sont Berlin, Londres, Madrid ou encore Lisbonne. Il est impératif et urgent de rétablir une compétitivité et une attractivité chancelantes, résultat des douze ans de gestion socialistes et vertes de la région.
Il faut le souligner : c'est notre gouvernement, celui de M. Sarkozy, celui de M. Fillon, celui de la droite, qui prend à bras-le-corps le passage de la ville capitale à la région capitale, qui assure un avenir à notre capitale et à notre pays.
Après avoir défendu l'image et l'ambition que ce projet assure, avec ses retombées économiques, commerciales et touristiques, je tiens aussi à m'attacher aux Parisiens, aux Franciliens, aux hommes et aux femmes qui habitent le Grand Paris. En effet, ce projet, c'est une réorganisation des transports et de l'habitat, pas seulement une logique de frontières et de prérogatives administratives. C'est un système conçu et envisagé dans une dynamique globale. La ville est un lieu de vie, un lieu de travail, un lieu d'échanges, un lieu d'hébergement.
L'Île-de-France, premier bassin d'emploi européen, concentrant 500 millions de consommateurs annuels, se doit d'assurer la mobilité. La question des transports tient donc une place centrale dans ce texte. Celui-ci réaffirme qu'il faut mener en priorité les projets qui permettront de remettre à niveau le réseau existant et son extension. Celui de l'Île-de-France est à la limite de la saturation et de l'usure. Il ne répond absolument plus aux besoins actuels. En Seine-Saint-Denis, depuis 1998, j'ai pu mesurer les progrès apportés par une extension des transports en commun, à savoir les deux embranchements prolongeant le RER E. Ce texte envisage la jonction entre la gare Saint-Lazare et La Défense d'ici 2015. C'est une avancée majeure à la condition de prévoir dès à présent l'augmentation des fréquences et des capacités de la ligne actuelle. Par ailleurs, si nous convenons tous de la nécessité d'augmenter le schéma des transports en commun, il ne faut pas omettre de terminer les travaux déjà commencés en matière d'autoroute – je pense plus précisément à l'A 103, monsieur le secrétaire d'État.
Ce projet garantit aussi de construire une ville pour l'homme, une ville plus humaine, plus belle, une ville de la citoyenneté, du lien civique et social, de la convivialité, de la solidarité, un lieu de partage ; Paris ne doit pas être seulement une ville musée. L'architecture a aussi pour vocation d'humaniser nos banlieues et cités trop longtemps laissées à l'abandon. Le Grand Paris, c'est rompre avec cette tendance à l'éloignement des lieux de production, de savoir et de savoir-faire. Le Grand Paris, c'est donc un plan social,…
…empreint de cohésion urbaine et humaine, un plan économique qui correspond parfaitement aux volontés présidentielles, et un plan architectural nécessaire à la pérennité de notre renommée d'envergure internationale.
Pour conclure, je ne peux m'empêcher de vous faire part d'un article du Parisien de ce matin,…
…qui abonde dans le sens de l'importance et du bien-fondé de ce projet du Président de la République, et surtout souligne les revers et l'échec de l'action improductive ou contreproductive des socialistes : Serge Méry, actuel vice-président du conseil régional chargé des transports, tire sa révérence. Ou plutôt il est poussé dehors. À bon entendeur.... La conclusion quant au travail des socialistes à la région se dégage d'elle-même. Que la gauche, monsieur le secrétaire d'État, soit contre ce projet, nous, en Seine-Saint-Denis, n'en sommes pas surpris car nous avons l'habitude de ce genre de comportement : le conseil municipal de la ville de Saint-Denis avait voté contre l'implantation du Grand Stade (Protestations sur les bancs du groupe GDR),…
…alors que, grâce à cet équipement, la ville est en pleine transformation depuis.
Mes chers collègues, nous devons engager pleinement notre région capitale dans le XXIe siècle.
Nous devons voter pour ce projet. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Ils en sont réduits aux mensonges ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Mes chers collègues, je vous en prie !
La parole est à M. François Brottes.
Monsieur le secrétaire d'État, vous êtes en droit de vous demander ce que je viens faire dans ce débat sur le Grand Paris. (« Mais non ! » sur les bancs du groupe SRC.)
D'abord, je viens revendiquer quelques faits d'armes. J'ai le souvenir d'avoir représenté mon groupe, il y a deux ans – début 2007 précisément –, pour débattre d'une proposition de loi du sénateur Karoutchi, déposée à la veille de Noël, qui visait déjà à donner un statut d'exception à l'établissement public de La Défense. À l'époque, le petit Jean n'était pas encore très grand, mais nous avions, sans le savoir, déjà écrit une page furtive de son destin. J'avais d'ailleurs fait des ratures nombreuses afin de mieux dénoncer, notamment l'exclusion de Nanterre – notre collègueJacqueline Fraysse, qui était présente, s'en souvient –, et l'antienne bien connue : « Pour Neuilly, le quartier d'affaires et ses ressources ; pour les autres, le logement et ses dépenses. »
La démarche de M. Karoutchi visait déjà à contrarier le schéma d'aménagement de l'Île-de-France, schéma largement concerté à l'époque autour du conseil régional.
Mais vous aussi, monsieur le secrétaire d'État, vous avez quelques faits d'armes qu'il faut savoir vous reconnaître. Vous avez été l'un des artisans des pôles de compétitivité et, dans un rapport dédié, vous vous êtes appuyé sur l'exemple de Grenoble et sa région, en particulier le site de Crolles, pour démontrer à quel point il était malin et performant de réduire le temps et l'espace entre la recherche publique en amont et le développement pour la production industrielle en aval. Je n'ai jamais remis en cause la pertinence de ce modèle de partenariat librement consenti, qui, en période de crise, a plutôt fait ses preuves. Le volontarisme d'État n'est donc pas toujours pour nous déplaire. D'ailleurs, il est à l'origine de nos plus belles réussites industrielles, dans le domaine de l'énergie, des télécommunications ou de l'aérospatiale. Mais, tout de même, c'est à la condition qu'il serve les intérêts de l'ensemble de la communauté, et qu'il n'exerce pas une toute-puissance au bénéfice de quelques-uns, et surtout au détriment de quelques autres.
Si je m'exprime aujourd'hui, c'est que je considère que vous êtes en passe de prendre le risque de casser ce qui a réussi en région partout où les pôles scientifiques ont généré dans leur sillage des industries innovantes et performantes. En effet, vous êtes en train d'installer un dispositif dérogatoire à toutes les règles du jeu, qui pourra déshabiller les régions de France et siphonner les initiatives au profit du seul établissement public de Paris-Saclay. Paris, c'est aussi la France et l'une de nos fiertés nationales, mais Paris ne peut pas être à lui seul toute la France. Votre projet passe outre la démocratie locale et le respect des élus locaux, il déroge à toutes les règles en matière d'urbanisme, de foncier, d'acquisition immobilière, de gestion de la forêt et du patrimoine naturel, il installe le fait du prince à tous les étages, au nom de l'efficacité. Cela pourrait ressembler à une déclaration de guerre, monsieur le secrétaire d'État, si vous n'étiez pas connu comme un homme de médiation et de consensus. Mais, à ce propos, quel fut le degré de médiation et de concertation avec les autres pôles de développement scientifique et économique du pays ? Je vous pose la question.
Aujourd'hui, le volontarisme d'État tel que vous le concevez se traduit par des choix imposés, qui ne sont ni plus ni moins qu'un véritable hold-up à tous les étages ! Un hold-up sur les ressources fiscales des collectivités locales puisque, avec la fin de la taxe professionnelle telle que vous l'organisez, vous supprimez la capacité des collectivités à être responsables de leurs recettes fiscales ; un hold-up sur les territoires car votre projet de réformes des collectivités, en supprimant les élus par milliers, va redonner à la technostructure sa capacité d'agir sans rendre de compte à la population – les mauvaises langues disent qu'on ne renie pas ses origines –; un hold-up aussi sur les valeurs du Grenelle de l'environnement et sur le modèle de la ville durable, qui se situent à l'antipode de l'étalement urbain qu'entraînera votre projet de Grand Paris ; un hold-up sur le Grand Paris lui-même car vous voulez le construire par-dessus la tête des élus et des collectivités ; enfin, un hold-up sur le reste du territoire : avec l'établissement public de Paris-Saclay, vous créez un rouleau compresseur du déménagement non concerté du territoire.
Je ne fais pas de procès d'intention. Je m'en tiens au texte. Résumons : avec l'établissement public de Saclay, c'est l'État qui donne, qui commande et qui finance, c'est le Monopoly étendu à toute la France, mais il n'y a que cet établissement qui aura le droit d'y jouer, avec des règles qu'il décidera lui-même. Vous trouvez certainement que je grossis le trait. Pourtant, voici ce que j'ai lu au titre IV de votre projet : l'établissement public de Paris-Saclay peut agir sur un périmètre qui peut être à tout moment modifié par simple décret du Gouvernement ; il peut, sans modifier le périmètre en question, agir hors périmètre, donc dans toute la France, pour acheter des terrains, de l'immobilier, des sociétés, etc. Cet établissement n'aura en fait de public que le nom puisqu'il permettra, plus tard, de privatiser ce qu'il aura acquis, notamment par voie d'expropriation ou de prise de participation, pour mieux rembourser les sommes considérables qui auront dû être empruntées pour amorcer la pompe du processus. Avec l'argent de l'État, qui pourra d'ailleurs lui faire un tas de dons puisque le projet de loi dispose que l'établissement pourra bénéficier de transferts « en pleine propriété et à titre gratuit », celui-ci pourra troubler le jeu, tirer les cartes, défaire les projets des autres, les déménager ; bref, il disposera d'une capacité d'action dont les autres territoires ne bénéficieront pas. C'est une drôle de conception, reconnaissez-le, de l'égalité républicaine et de l'aménagement du territoire !
Ce nouveau cluster marketing que vous souhaitez vendre au monde entier participe d'une « vision legos » de l'économie, où il suffirait d'additionner et d'empiler les compétences en les concentrant de force sur certains points du territoire pour produire plus, et donc bien sûr, selon vous, pour produire mieux. Cette vision artificielle de la promotion économique des territoires va à l'encontre de nos histoires. Notre économie est plurielle et multiple. Ce sont des imbrications d'aventures scientifiques et universitaires, d'histoires humaines locales, d'initiatives partagées et d'actions publiques, liant souvent État et collectivités locales dans une logique partenariale, qui font qu'à un moment donné, un pôle émerge et se développe durablement – et je sais de quoi je parle.
Or ce projet de loi est l'un des trois piliers de votre réforme de recentralisation des pouvoirs, mouvement allant à contre-courant de notre histoire car vous demandez instamment aux représentants du peuple que nous sommes, bientôt aux représentants des élus, de rendre les clefs de la ville au tout-puissant, une sorte de seigneur qui installerait progressivement sa dynastie. Pour notre part, ce ne sera pas sans combattre, malgré l'urgence – désavouée, me semble-t-il, par le président Larcher – et malgré les pressions du Sénat. Cela me rappelle quelques vers de Prévert :
« Et je te vois Marianne
Ma pauvre petite soeur
Pendue encore une fois
Dans le cabinet noir de l'histoire
Cravatée de la Légion d'Honneur
Et je vois
Barbe bleue blanc rouge
Impassible et souriant
Remettant les clefs de la Ville
Remettant les clefs tachées de sang
Aux grands serviteurs de l'Ordre
L'Ordre des grandes puissances d'argent. »
Monsieur le secrétaire d'État, votre concept de ville monde dont seul « l'État stratège garant du temps long », selon vos propres termes, pourrait être le metteur en scène, est à la fois un déni de démocratie et une nostalgie d'un collectivisme ancien où tout avançait à la baguette ! Ce Grand Paris est un mauvais pari pour la France parce qu'il n'est pas partagé par tous. C'était pourtant le souhait du Président de la République. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je tiens d'abord à réaffirmer àM. Calméjane qu'il a dit un mensonge. Je lui enverrai les trois comptes rendus du conseil municipal de Saint-Denis, réuni au sujet du Grand Stade, au mois d'août 1993 : il s'apercevra que la décision d'accepter la construction du Stade de France, sous certaines conditions que nous avions négociées avec l'État à l'époque, a été adoptée à l'unanimité moins une voix.
Vous me permettrez, monsieur le secrétaire d'État, de poursuivre le début de mon intervention par une note d'humour. Vous avez pu lire comme moi hier, dans un quotidien gratuit, distribué dans le métro, que certains d'entre nous figurions sur la carte du Grand Paris, affublés d'un pseudonyme.
Non, je ne l'ai pas vu.
Comme vous n'en avez pas eu connaissance, je vous indique que vous étiez « Le Missionnaire », M. Huchon « Le Plombier » – alors qu'il a suffisamment de relais ici pour ne pas avoir à poser des écoutes téléphoniques. Quant à moi, j'étais « Le Fayot » (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC), parce que j'ai commencé à travailler avec vous sur un contrat territorial.
Mais j'ai cru comprendre que ce journaliste connaissait bien mes goûts culinaires et qu'il savait que j'appréciais beaucoup les haricots… surtout quand ils étaient blancs ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Ma note d'humour est terminée.
Monsieur le secrétaire d'État, je suis désolé, mais « Le Fayot » va sans doute quelque peu vous décevoir sans complètement satisfaire « Le Plombier ».
Nous engageons ce débat sans même savoir si la procédure accélérée sera appliquée sur ce texte. J'espère que nous aurons rapidement la réponse,…
…mais, quelle qu'elle soit, on ne peut que constater qu'une fois de plus, l'exécutif tente de dicter sa loi aux représentants du peuple.
Ainsi, ce texte pourrait ne faire l'objet que d'une seule lecture, alors que nous déplorons déjà le fait qu'il n'ait pas donné lieu à un débat plus large avec les principaux intéressés : les élus et les populations.
Monsieur le secrétaire d'État, nous l'avons néanmoins examiné sérieusement et jaugé à l'aune des territoires dont nous représentons les habitants.
Dans un premier temps, nous avons voulu croire qu'il était incomplet. Il s'annonce comme portant sur le Grand Paris, et ne s'attache qu'à la création d'un réseau de transport. Nous l'avons cru élaboré trop vite, sans consultation en amont des principaux intéressés que sont les élus territoriaux – ce qui expliquait peut-être le peu de place qui leur était accordée en matière de gouvernance du projet.
Nous l'avons examiné de manière constructive. Pour la plupart, nous sommes des élus locaux engagés dans le développement territorial au service des habitants. Nous sommes très attentifs à leurs difficultés aggravées par la crise et à leur volonté de perspectives meilleures. Ils aspirent à une meilleure qualité de vie à court terme, mais aussi à pouvoir se projeter avec confiance dans l'avenir, comme tout être humain.
Nous sommes donc toujours prêts à travailler en coopération avec les pouvoirs publics sur tout projet qui ouvrirait des perspectives, en particulier en termes d'emploi et de cohésion sociale.
Pour notre part, nous avons salué et mis en valeur le travail novateur, riche et ouvert des dix équipes pluridisciplinaires de la consultation internationale. Nous avons donc pensé que ces résultats – au moins leurs principes – inspireraient le projet de loi. La commande portant sur la métropole durable de l'après-Kyoto, il ne paraît pas concevable que le Grand Paris du XXIe siècle s'exonère de répondre à l'exigence écologique.
Or, depuis la première mouture, la copie n'a été revue qu'à la marge. Nous avons pu croire que nous avons été trompés ou soumis à une douche écossaise, ce qui nous amène à porter un regard plus rigoureux sur ce texte.
Si le projet de loi s'intitule « Le Grand Paris », c'est qu'aux yeux de ses rédacteurs, la totalité de ce concept s'y trouverait résumée.
S'il y est principalement question de la création d'un réseau de transport en région capitale, c'est que le projet, sur le fond, y serait totalement contenu.
Que révèle ce « grand huit » en termes de modèle de développement ? Une conception strictement économique, visant à renforcer le pouvoir d'attraction et la compétitivité dans la sphère mondiale du pôle métropolitain que représente la capitale. Des clusters concentrent compétences, innovation, forte valeur ajoutée et entreprises et institutions publiques en pointe dans l'économie de la connaissance.
Une dynamique de croissance est induite de manière quasi automatique, à un taux exceptionnel puisqu'on avance un apport de 800 000 à un million d'emplois, en tablant sur un effet démultiplicateur. Dans une période où la rentabilité économique s'articule sur des destructions d'emplois partout dans le monde, y compris dans les services publics, comprenez que nous soyons sceptiques, surpris. Peut-être ne s'agit-il que d'un système de vases communicants, les richesses nationales étant aspirées vers la centralité francilienne ?
Il n'est proposé aucun changement de logique économique, quels que soient les effets dévastateurs de la crise pour nombre de populations, en particulier dans les quartiers populaires de banlieues. Ne parlons pas de la mise à mal d'une cohésion sociale déjà très fragilisée par les inégalités, particulièrement insupportables à l'échelle locale, et qui constituent un handicap sérieux au rayonnement mondial, même économique, de la métropole capitale.
Ce seul schéma de transport rapide chargé de relier les pôles économiques et les aéroports – c'est-à-dire les zones riches du territoire métropolitain – risque vraiment de contribuer à accentuer les inégalités et les mécanismes d'exclusions territoriales et sociales dans la région la plus riche de France. D'ailleurs, l'un des objectifs avoués – et sans doute le plus assumé – du projet est simplement de créer les conditions de la reprise, au sortir de la crise, en prétendant avoir conforté les résistances aux chocs conjoncturels et structurels.
La « polycentralité » que ce schéma prétend desservir n'est que de façade : les pôles en question sont unidimensionnels et unifonctionnels, et votre maillage fait fi de l'échelle de proximité. Ce n'est pas la conception de la « polycentralité » que nous défendons.
Ce « grand huit » – l'alpha et l'oméga de ce projet de développement économique – n'est pas destiné à être la colonne vertébrale d'un réseau diversifié de transports, capable de servir à la fois les habitants, l'emploi et le développement économique, ce qui aurait pu se travailler avec les collectivités locales à tous les échelons. Votre concept requiert un tel niveau d'engagement financier qu'il aspire toutes les ressources jusqu'en 2025. Ainsi, aucun projet complémentaire ne pourra sans doute être envisagé.
La création de la Société du Grand Paris comme outil global de ce projet amène à aborder la question de la gouvernance, sans le dire, alors que le Président de la République affirmait, à juste titre, la subordonner au projet. Force est d'admettre que ce projet-là est si éloigné dans sa logique et sa cohérence de l'intérêt des territoires, qu'il faut imaginer une gouvernance étatique, mettant en cause les principes de la décentralisation.
Ainsi, l'État prend la main, y compris sur l'usage des retombées territoriales possibles, en recettes comme en en choix des dépenses, au nom de l'efficacité et au détriment des élus locaux et des cohérences travaillées démocratiquement dans les schémas directeurs de tous niveaux.
À vouloir réduire l'engagement des élus locaux à des intérêts de clocher, on en oublie qu'ils sont à l'origine de plus de 70 % des investissements publics, ainsi que de l'élan économique de bien des territoires, et que l'intercommunalité choisie leur permet de concevoir et porter des projets d'échelle métropolitaine.
Seuls les contrats de développement territorial permettront aux collectivités d'entrer en négociation et en partage relatif des responsabilités, sachant qu'ils restent totalement à construire et que, par défaut, l'État pourrait décider. Mais au moins, je le concède, il s'agit d'une ouverture qu'il convient d'utiliser pleinement afin de définir et de mettre en oeuvre des principes de co-élaboration, de co-décision et de co-pilotage dans des partenariats fondés sur une véritable égalité.
Pour avoir souvent appelé l'État à jouer son rôle, nous ne pouvons qu'être favorables à son investissement dans le développement de la région capitale. Mais pas de cette manière, pas en imposant un mode de développement contraire à l'intérêt général et à une projection ambitieuse dans l'avenir pour l'ensemble des populations et des acteurs socio-économiques de la région.
Des outils existent, comme le STIF. La loi surimpose les compétences de la Société du Grand Paris par la reprise de la plupart de ses compétences et de celles des communes, les sortant du droit commun. La fonction stratégique de définition d'orientations d'aménagement et de développement territorial serait donc assumée par l'État. Tout ceci est porté à son summum dans l'article sur le pôle de Saclay.
Ce texte, porteur d'un tel projet, n'est donc pas acceptable. Il porte une logique dangereuse pour l'avenir, tant économiquement qu'écologiquement et socialement.
Nous sommes à un moment où la crise indique que nous allons vers des catastrophes à tous les niveaux, tant sur le plan des mutations climatiques que sur celui de l'humain et du social, si l'on continue à offrir l'exclusion et l'inégalité pour tout avenir. Il y a urgence et nécessité à dire stop et à engager un processus partagé vers un changement de logique de développement. Pour cela, il faut changer le regard et les enchaînements de causes, renverser les priorités, imprimer un autre sens à la métropole que nous voulons construire.
Face au projet du Grand Paris tel que défini dans ce texte, c'est un véritable contre projet qu'il faut faire partager. Nous le déclinerons au travers des propositions d'amendements. Nous avons l'ambition de contribuer à construire une métropole nouvelle, sur une logique d'inclusion sociale, ce qui pourrait être une expérience originale à l'échelle mondiale.
Pour ce faire, nous disposons des principes et des analyses issues de la consultation internationale des architectes, mais aussi des expériences de développement solidaire engagées et partagées avec les populations sur des territoires qui sont aussi des centralités en émergence, ainsi que du cadre posé par le SDRIF à l'échelle régionale, même si celui-ci n'est pas parfait ou sacré à nos yeux.
La métropole moderne se doit de répondre à deux défis fondamentaux : l'exigence écologique et l'exigence sociale. Il ne s'agit vraiment pas d'une question technique aux réponses préexistantes. Il s'agit d'un débat sur nos modes de vie, sur notre manière de vivre ensemble, et sur notre capacité à nous projeter collectivement dans l'avenir.
Il faut partir de l'homme, de son habitat, de ses possibilités de travail, de sa condition urbaine, de sa « mal-vie » dans l'inégalité. Les travaux des dix équipes de la consultation internationale font largement écho à une telle démarche. Ils questionnent la réalité complexe de la métropole et la place de l'homme dans ces nouveaux flux et ces réseaux multiples.
Un projet de loi sur le Grand Paris pourrait s'articuler autour d'autres principes, pour développer une logique différente.
Le premier principe rejoint les préoccupations de Nicolas Dupont-Aignan : il faut définir un périmètre pertinent devant comprendre toute l'aire urbaine de l'Île-de-France. C'est nécessaire pour travailler les équilibres et les diversités, une cohérence d'interpénétration de la nature et de la ville, les mobilités comme la diversité de l'habitat.
Deuxième principe : la multipolarité. Il s'agit de permettre à tout citoyen, quels que soient son milieu social, sa condition et son lieu de résidence, d'appartenir à un lieu qui compte et d'avoir accès à l'ensemble des services qu'offre la ville. C'est la condition principale pour éviter la poursuite d'un développement qui repousse sans cesse plus loin les couches populaires et moyennes d'une centralité qui ne cesse de se survaloriser, avec un dedans et un dehors qui évoluent en opposition et qui bientôt ne se parleront plus.
Troisième principe : la définition des pôles comme pôles urbains multifonctionnels, véritables centralités, en réseau, et non simples clusters économiques.
Quatrième principe : un développement métropolitain basé sur l'égalité et la solidarité. Cela permet de définir des dynamiques fondées sur des synergies nouvelles qui mettent en mouvement une autre logique, plutôt qu'en termes de retombées statiques au profit des territoires dits en difficulté. Ceux-ci devraient être considérés du point de vue de leurs atouts qui sont nombreux, et devenir le coeur d'une dynamique nouvelle et d'une multiplicité de pôles.
Le cinquième principe impose de retravailler le schéma de transports à partir des règles suivantes : relier les centralités dans leur diversité ; désenclaver l'ensemble du territoire francilien ; articuler les logiques locales et métropolitaines ; donner accès à l'emploi par un maillage fin hors les murs de Paris ; aborder les différentes échelles de distances et de rapidité ; et surtout fixer des critères d'amélioration de la qualité des transports.
Cette qualité se mesure par la baisse du temps passé dans les transports, la facilitation des trajets, la liberté de se déplacer, une tarification unifiée et incitative. Il y a urgence. Il ne s'agit pas de simples améliorations de confort, mais de réponses à une cause majeure de « mal-vie ».
Un engagement financier exceptionnel doit être envisagé, comme c'est d'ailleurs le cas pour le « grand huit ». L'État doit s'engager fortement. L'enjeu des mobilités est crucial pour le rayonnement de la métropole francilienne. Des partenariats spécifiques avec les entreprises doivent être montés, les impliquant de manière novatrice dans le développement territorial dont elles sont solidairement dépendantes.
Sixième principe : l'économie doit être ancrée sur les territoires. Il s'agit de s'appuyer sur les potentialités et la créativité des territoires, y compris sur l'économie sociale et solidaire, sur la diversification des activités économiques, sur des chartes de développement territoires-entreprises et sur des synergies, en particulier avec les universités, les politiques de formation et d'insertion.
Septième principe : la création d'un outil opérationnel autre que la Société du Grand Paris, dominée par l'État mais au statut d'EPIC, donc transformable en statut privé et munie de la possibilité de sous-traiter à des filiales.
En effet, l'outil pose la question de la gouvernance. Un projet multipolaire et complexe nécessite une gouvernance elle-même complexe, où aucune partie ne peut prendre seule les décisions. Cette gouvernance doit exprimer la diversité des territoires, des échelles et des orientations. Si l'on considère qu'il faut créer un outil, alors il doit au moins reposer sur des principes de gestion égalitaires, sans majorité absolue, avec une place prépondérante accordée aux autorités territoriales.
Une autre option pourrait être de considérer que l'on dispose déjà de tous les outils capables d'associer l'ensemble des parties – dont l'État –, la seule question étant d'organiser les processus de décision. Pourquoi, par exemple, ne pas articuler des conférences de présidents d'intercommunalités avec les conseillers généraux, le conseil régional et le conseil de Paris ?
En vérité, la gouvernance est partie prenante du projet, et sur la base de principes, nous pourrions continuer de l'expérimenter à travers les intercommunalités existantes et du syndicat mixte d'études Paris Métropole, lequel a vocation à travailler sur ce qui « fait métropole » en partant des collectivités territoriales et en mettant en oeuvre, pour définir des orientations partagées, des pratiques de débats et d'échanges.
Cela concerne aussi les contrats de développement territorial, où les collectivités locales doivent, en associant les populations, tenir le premier rôle. De nouvelles modalités de partenariat avec l'État doivent impérativement être formalisées, afin d'assurer l'égalité, la co-élaboration et la co-décision, et pas simplement la consultation pour agrément.
La place de la population dans l'élaboration des projets qui feront une métropole humaine ne saurait se limiter à l'article 3 du titre Ier. Le débat public doit se déployer avec les moyens d'une information objective, avec la connaissance des enjeux et l'accès aux analyses et aux propositions diverses. De ce point de vue, alors que nous réclamons un tel débat public depuis longtemps, les pages publiées dans les journaux et les flashes diffusés à la radio aux frais du Gouvernement, à la veille de notre débat, m'apparaissent comme une manipulation. La présentation en est si peu objective que, loin d'assurer la compréhension des enjeux et l'informer des citoyens, elle pourrait inciter l'opinion publique à se retourner contre des élus qui ne soutiennent pas votre projet de loi.
Le présent texte, ainsi que la réforme de la taxe professionnelle et celle des collectivités locales, visent à réduire les possibilités pour ces dernières de développer des services publics répondant aux besoins et aux attentes de l'ensemble des populations. C'est pourquoi, même si les amendements les plus significatifs de notre projet alternatif pour la région capitale ont été rejetés au titre de l'article 40, nous défendrons, tout au long du débat, notre vision d'un territoire francilien synonyme de partage du pouvoir, permettant des co-élaborations et des co-décisions avec les collectivités territoriales, en particulier sur la définition des orientations et des mobilisations territoriales, dans le respect des grands principes de la décentralisation.
Le devenir de la métropole francilienne doit rester un processus coproduit avec les territoires ; c'est par un projet humaniste de métropole solidaire que nous répondrons efficacement aux défis environnementaux et sociaux du XXIe siècle sans tourner le dos aux dynamisme que nous défendons et à la grande ambition, que nous avons aussi, pour Paris Métropole. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous avons à légiférer sur l'acte I de la création du Grand Paris. C'est donc un acte fondateur, qui fait suite au discours de lancement, ambitieux et visionnaire, du Président Sarkozy le 29 avril dernier, devant les élus et les architectes urbanistes ayant répondu à la consultation sur l'avenir de la métropole.
Comment faire en sorte que les décisions prises soient l'aboutissement d'un travail fait à travers des structures adaptées, où chacun ait toute sa place et puisse s'exprimer ? Comment faire en sorte que, dans une politique d'urbanisme global, Paris, la capitale, trouve sa juste place ? Quelles structures pour quels projets ?
Quand on évoque l'aménagement urbain, de grandes références viennent à l'esprit : le baron Haussmann, le préfet Delouvrier ont été de grands aménageurs et des hommes inspirés ; mais l'époque n'est plus la même, la décentralisation est passée par là et les élus exigent aujourd'hui, à juste titre, d'être considérés dans toutes leurs fonctions et toutes leurs responsabilités. Ils seront présents dans le conseil d'administration de la Société du Grand Paris, et les états généraux, auxquels ils doivent participer, sont essentiels pour définir les priorités dans la réalisation des futurs projets, quels qu'ils soient.
Monsieur le secrétaire d'État, nous avons aussi entendu les architectes, qui craignent de ne pas trouver leur juste place. Ils ont raison de s'en préoccuper, et de s'être organisés en un groupement dont Christian de Portzamparc a pris la tête. Si l'Atelier international du Grand Paris devra entériner les projets retenus avec la collaboration des services d'urbanisme de l'État, de la région et des villes concernées, afin de lancer ensuite les appels d'offre internationaux, il ne devrait à mon sens le faire qu'à partir de projets examinés par le groupement des architectes et soumis aux élus concernés. Non seulement les architectes ne sauraient être écartés, mais ils doivent, tout comme les élus, être au coeur de l'histoire : on ne le répétera jamais assez.
Prenons un exemple : l'acte I du Grand Paris porte sur la création d'une nouvelle ligne de métro automatique de 130 kilomètres de long autour de Paris et reliant les pôles d'activité économique. Deux questions, au moins, se posent : comment ces 130 kilomètres seront-ils agencés ? Quelles seront les séquences souterraines et les séquences en surface ? Les tracés doivent être justes, et je vois mal les élus et les architectes absents d'un tel débat. Les politiques, les géographes, les architectes et les urbanistes doivent s'exprimer sur ce sujet, et fournir, comme c'est indispensable, une analyse fine.
Quant aux liens entre les différents pôles d'activité économique, liens dont les chambres de commerce débattront, il ne faut pas oublier que 93 % des trajets effectués en transports en commun le sont par des usagers qui vont de leur domicile à leur lieu de travail, à leurs lieux de loisirs ou aux commerces, contre seulement 7 % pour les trajets entre entreprises. Là encore, le point de vue des élus et des architectes doit être pris en compte, sans oublier, bien sûr, la population elle-même : la Commission nationale du débat public est d'ailleurs chargée d'organiser la consultation populaire.
Après cette brève évocation des structures à mes yeux indispensables, j'en viens à la place de Paris capitale dans ce grand projet. « Je ne connais aucune autre ville où le coeur est à ce point détaché de ses membres », a déclaré Richard Rogers, l'un des dix architectes urbanistes, au sujet de Paris et de sa région. Il y a aujourd'hui urgence à penser une politique d'urbanisme globale afin de recoudre un tissus urbain malmené, entre autres, par un périphérique assimilable à un rempart enserrant la ville.
Sur ce point aussi, je prendrai un exemple : l'aménagement du 81e quartier de Paris sur le site des Batignolles, la plus grande superficie d'un seul tenant – cinquante hectares au total – à aménager dans la capitale. Pour l'instant, seuls un parc de dix hectares – dont cinq à peu près aménagés à ce jour – et, grâce à l'opiniâtreté de la maire du 17e arrondissement Brigitte Kuster et surtout à la décision du Président de la République, le tribunal de grande instance, ont trouvé leur place.
Les élus du 17e arrondissement demandent par ailleurs le prolongement de la ligne 14 vers la Porte de Clichy et l'arrêt à Cardinet, afin d'assurer la desserte de ce nouveau quartier. Mais ne croyez-vous pas que, dans le cadre du Grand Paris, et compte tenu de l'emplacement de ce futur quartier de cinquante hectares situé aux abords immédiats du périphérique, les dix cabinets d'architectes devraient conduire une réflexion plus globale pour donner une vraie identité, un nouveau souffle, à toute la partie nord de notre capitale et aux nombreuses communes avoisinantes ?
Ce territoire parisien est stratégique pour le développement d'un véritable bassin de vie pouvant regrouper une activité économique innovante, tous types de logements – sociaux, étudiants, intermédiaires et privés – justement répartis, et des équipements de proximité autour de plate-formes stratégiques de transport et de stationnement. Nous aimerions, monsieur le secrétaire d'État, que vous vous penchiez attentivement sur cette question, et que cet aménagement fasse éventuellement l'objet d'un contrat de développement territorial.
Bien plus qu'un projet, le Grand Paris engage avant tout la concrétisation d'une vision ; il nous revient d'inventer et de choisir le Grand Paris de demain : un Grand Paris exemplaire, dynamique, rayonnant et solidaire, où chacun trouve sa place et puisse s'exprimer. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, sous le triste éclairage de la crise économique et sociale que nous traversons, ce projet de loi est une erreur économique, une régression urbaine et un contresens historique envisagé sur le dos des franciliens ; surtout, la trame du texte révèle une terrible méprise sociale.
J'évoquerai d'abord l'erreur économique. Assujettir le développement de la métropole francilienne à la création d'un tube reliant les pôles économiques est une erreur qui a déjà fait ses preuves. L'autopsie de la crise que nous traversons amène une très grande majorité d'économistes à faire ce constat : les inégalités économiques et sociales sont un facteur de crise. La décision politique qui ignore ce postulat est inconsciente de la situation économique et sociale.
Le développement économique de la métropole dépend de notre capacité à trouver un point d'équilibre en faisant reculer les inégalités. Tout miser sur neuf pôles d'affaires correspond à une logique économique restrictive. Les pôles concentrent et captent sans vraiment rayonner, sans redistribuer : c'est là accentuer une géographie des ghettos et entériner les inégalités urbaines et sociales.
En effet, les marges de ces pôles sont souvent des territoires négligés qui regardent passer la croissance. Les habitants de ces zones grises savent bien que côtoyer la richesse ne signifie pas devenir riche. Que dire, alors, aux habitants qu'on laissera sur le quai du métro, à ceux qui regarderont passer les trains ? Que la richesse est à portée de rame, à deux stations de boucle ? Privilégier les secteurs économiques à forte valeur financière et intellectuelle n'a de sens que si l'on s'attache à renforcer les filières et la production industrielle, à irriguer et à diversifier les dortoirs et les poches de pauvreté de la métropole.
Pour commencer, on ne propulsera pas Paris devant Londres et Shanghai avec 600 000 chômeurs. La croissance partagée, voilà le ressort de la compétitivité. Au contraire, le projet de loi gravera dans la rame ce slogan publicitaire et satirique des années quatre-vingt : « Métro-boulot-dodo », allusion ironique à la monotonie parisienne. C'est là que se situe, à mon avis, la deuxième impasse du texte, qui néglige totalement la vie dans la ville. Comment adopter un projet de métropole où des hommes à mallette se déplaceront de pôle en pôle sans que l'on sache où et comment loger les habitants qui y vivent ?
J'essaie aujourd'hui, avec un certain nombre de responsables de communes ou d'intercommunalités de la Seine-Saint-Denis, de déployer des moyens considérables et d'insuffler de l'énergie pour réparer les erreurs commises par un État tout-puissant qui nous a légué les villes nouvelles et les banlieues dortoirs. Quelle métropole voulons-nous ? Un territoire où l'État de droit aura gagné : droit au logement, droit à la mobilité, droit à la santé, droit au travail, droit à l'éducation.
Lorsque le président de la région, Jean-Paul Huchon, porte le plan de mobilisation avec les collectivités d'Île-de-France, il met en oeuvre le droit à la mobilité. Ce n'est pas seulement – même si c'est une exigence impérieuse – en desservant quelques villes emblématiques de l'exclusion, comme Clichy-sous-Bois, que l'on répondra à la double nécessité à l'origine du programme du plan de mobilisation : le maillage fin en zone dense et le désenclavement des zones grises du coeur de la métropole.
Quand le comité de suivi du droit au logement opposable, pourtant mis en place par ce gouvernement, réclame des réquisitions, c'est un aveu d'échec de la mise en oeuvre du droit au logement. Combien de temps supporterons-nous encore, avant de renvoyer à une échéance de quinze à vingt ans, les « villes voyous » qui transgressent la loi SRU ? Il faut construire des logements adaptés aux ressources des Franciliens, logements qui doivent constituer un véritable parcours résidentiel.
Cela coûte de l'argent. Cela exige surtout, au niveau de l'État, une volonté politique qui, aujourd'hui, fait cruellement défaut.
Surtout, malgré la présentation qui en est faite, ce projet de loi est dénué d'ambition. Je regrette que le Président de la République ait renoncé à la force du discours qu'il a prononcé au Palais de Chaillot. Il a mobilisé les plus belles signatures architecturales du moment. Ces dix équipes ont fourni un travail remarquable, une somme qui finira dans un magnifique livre d'esquisses pour férus d'architecture.
Enfin, ce projet de loi est un contresens historique qui signe le retour de l'État autocrate. Je le déplore. La ville n'émerge jamais par décret, même si l'on y met les moyens, ce qui, en l'occurrence, est loin d'être le cas. On n'administre pas la première métropole française comme au temps des colonies, a minima, sans les gens, voire contre eux.
Monsieur le secrétaire d'État, permettez-moi de conclure par une note plus personnelle. Bien que n'ignorant pas sur quels bancs siégiez, j'avais été agréablement surpris par la nouvelle de votre nomination au Gouvernement. Le parcours d'un homme qui avait été capable de passer de la Nouvelle-Calédonie à l'invention des pôles de compétitivité, de la direction de la RATP à celle d'Air France, me paraissait un symbole prometteur.
Dès nos premières discussions après votre prise de fonction, j'ai pensé que vous alliez jeter, pour les mois et les années à venir, les bases de la ville intense que nous appelons de nos voeux. Ma déception est d'autant plus forte que j'étais sincère. La création d'un métro souterrain automatique à l'horizon 2030 ne peut constituer une réponse aux questions de ceux qui n'ont d'autre perspective que les prochaines quarante-huit heures.
Monsieur le secrétaire d'État, alors que votre volonté s'érode visiblement d'arbitrages en arbitrages, ce ne sont pas la procédure d'urgence et un débat tronqué qui nous permettront de bâtir collectivement une vision alliant court et moyen termes : ce serait pourtant répondre à cette question politique majeure du xxie siècle qu'est l'avenir de l'Île-de-France.
À la veille de ces élections européennes… (Rires sur les bancs du groupe UMP.) À la veille de ces élections régionales – j'espère que les résultats ne seront pas comparables –, nous pouvons légitimement nous demander si ce projet de loi n'est pas déjà un texte sans pilote, et s'il ne risque pas, lui aussi, de tourner en rond. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ce débat n'en est pas un, c'est une litanie d'interventions…
C'est que je n'ai pas terminé mon raisonnement ! J'allais en effet ajouter qu'il y a néanmoins des exceptions, à gauche, bien sûr, et même à droite. Certes, quelques collègues de droite font profession d'être laudateurs. En écoutant Mme de Panafieu, dont les formules relèvent de l'admiration aveugle pour le Président de la République et pour ce projet de loi, je pensais à une formule de Mme de Staël, sur laquelle je suis tombé par hasard dans un livre intitulé Une histoire de la langue de bois – domaine dans lequel le Gouvernement est expert. Mme de Staël parlait d'une « kyrielle de phrases usées » et « des idées fausses revêtues d'images exagérées ». La formule est plaisante, n'est-ce pas, madame de Panafieu ?
C'est justement pour cela que je peux vous évaluer à votre juste prix ! (Rires.)
Parmi les exceptions que j'évoquais, il y a Gilles Carrez, qui, avec quelques-uns de ses collègues, réforme les textes gouvernementaux : on l'a vu à propos de la taxe professionnelle, on l'a vu avec son rapport sur les transports en Île-de-France, particulièrement critique pour qui sait le lire en appréciant le poids des mots. Gilles Carrez est un homme responsable, courtois, bien élevé. Il n'utilise donc pas les mêmes mots que nous : ce n'est pas que nous ne soyons pas courtois et bien élevés, mais nous ne siégeons pas sur les mêmes bancs. Il est tout de même extraordinaire que, sous l'avalanche de textes que le Gouvernement impose aux assemblées, il se trouve des personnalités de la majorité qui, comme Gilles Carrez, ont le courage de dire que cela ne va pas, et qui font des contre-propositions. Hélas, vous avez un problème : vous n'êtes pas appareillés, vous ne branchez jamais le Sonotone. Il est vrai que c'est mal remboursé par la sécurité sociale, et de moins en moins bien, même, grâce à Mme Bachelot : de ce point de vue aussi, vous vous montrez solidaires.
À l'occasion de cette discussion sur le projet de loi relatif au Grand Paris, je ne peux que déplorer la vraie cohérence affichée par le Gouvernement dans son entreprise de recentralisation et dont la réforme de la taxe professionnelle fut le prélude.
À n'en point douter, ce sera un parfait terrain d'expérimentation pour tester votre modèle de développement territorial. Ce développement, vous nous dites, monsieur le secrétaire d'État, qu'il doit reposer sur la mise en réseau des pôles d'excellence situés en Île-de-France, afin de rester en bonne place dans la compétition internationale. En dépit de ce que pourraient penser les partisans de ce projet, il s'agit là d'une vision terriblement étroite du futur de la région.
Si la recherche de la rentabilité du capital irrigue abondamment ce projet, il est particulièrement aride en ce qui concerne les défis quotidiens qui sont posés à nos concitoyens : vingt-neuf articles et pas une seule phrase sur les conditions de vie des Franciliens. Pourtant, ce dont les Franciliens ont besoin en priorité, c'est une politique qui réponde aux défis posés par la pénurie de logements, l'éloignement toujours plus grand entre domicile et lieu de travail ou encore les difficultés éprouvées par nos concitoyens dans les déplacements de banlieue à banlieue. Ironie suprême, ces demandes sont d'ailleurs relayées par le MEDEF Île-de-France, qui, dans un communiqué du 19 novembre dernier, rappelle que « plusieurs urgences doivent être traitées », comme la modernisation du RER, le prolongement d'Eole – RER E – jusqu'à La Défense, le prolongement de la ligne 14 pour alléger la 13, le prolongement ou la création de sept lignes de tramway.
Hier, certains de nos collègues se sont gaussés en voyant que le MEDEF s'exprime comme le font certains d'entre nous. Mais c'est que les patrons – notamment les petits patrons – savent que, pour que leurs entreprises fonctionnent bien, il faut qu'elles aient des salariés bien formés, qui puissent accéder à leurs logements et à leurs lieux de travail dans les meilleures conditions, qui puissent se reposer, renouveler leur force de travail, comme aurait dit notre grand ancêtre – qui, je crois, n'est pas le vôtre, monsieur le secrétaire d'État.
Ce projet procède d'un aménagement extrêmement sélectif et ignore nombre de territoires dont les projets resteront en souffrance si la loi est adoptée. Je suis par exemple effrayé par le délaissement de l'Est parisien. Alors que le projet de rocade ferroviaire Arc Express semble sérieusement compromis, le métro automatique de la Société du Grand Paris évitera complètement des communes comme Montreuil, Fontenay, Saint-Mandé, Vincennes, Rosny, Champigny, Noisy-le-Sec, Le Perreux, Romainville, Bondy et Bry-sur-Marne. N'est-ce pas là une belle intercommunalité, monsieur Beaudouin ? Il en est ainsi, monsieur Blanc. Ce que je dis n'est-il pas vrai ?
C'est vrai !
Votre énumération est vraie, mais c'est bien tout !
À cette énumération, on peut encore ajouter Saint-Maurice ou Charenton-le-Pont. Vous êtes en train de réinventer ce ventre mou que nous avions commencé à surmonter grâce à la pugnacité des élus, à leur imagination, à leur écoute des besoins des habitants et à leur vision de l'avenir de leurs concitoyens et de la région capitale.
Ce projet concerne la métropole parisienne, mais il néglige bien des villes proches de Paris. Qu'adviendra-t-il des pôles tertiaires de Montreuil-Bagnolet et de Montreuil-Fontenay, qui ne sont pas du tout évoqués dans vos travaux ? Il est pourtant beaucoup plus difficile de développer des activités dans cette partie de l'Île-de-France qu'à La Défense, où, pour continuer d'assouvir vos fantasmes, vous êtes obligés d'avoir recours au knout contre la ville de Nanterre, tandis que nous, dans l'Est parisien, nous avons été capables de nous entendre pour porter des projets communs, au-delà des clivages politiques. Vous devriez en prendre de la graine…
…et écouter les vôtres, ceux de votre majorité – je ne parle pas des courtisans, mais de ceux qui ont des idées et qui ont le courage de les formuler.
À ce déni des réalités économiques et sociales s'ajoute un véritable déni de démocratie. Ce texte est un catalogue de mesures technocratiques convergeant vers le même but : contourner les collectivités territoriales et reprendre la main sur l'aménagement. Ainsi, ce projet du Grand Paris est traversé par un extraordinaire paradoxe : une vision qui se veut d'avenir, fondée sur un urbanisme du passé, car l'État renoue ici avec la politique d'aménagement autoritaire des années soixante.
La Société du Grand Paris, instituée par ce texte afin d'assurer la maîtrise d'ouvrage du métro automatique, pilotera seule ce projet jusqu'à réception des travaux, la propriété étant ensuite restituée au STIF et l'exploitation revenant à la RATP. Mais de qui se moque-t-on ? Le STIF, qui possède non seulement la légitimité démocratique, mais aussi l'expérience pratique, est réduit au rôle d'exécutant.
Comme si la dépossession du STIF ne suffisait pas en matière de mépris pour la démocratie locale, c'est toute l'architecture de l'aménagement régional qui est contournée. Le SDRIF, qui devrait constituer le cadre intellectuel et légal, est ici traité comme une variable d'ajustement. Ainsi, les contrats de développement territorial – article 18 de votre projet de loi – s'imposeront tous au SDRIF, comme ils s'imposeront aux plans locaux d'urbanisme. Que dire de la création de zones d'aménagement différé dans lesquelles les communes n'auront plus qu'un droit de préemption subsidiaire ? Est-ce que ces communes devront renoncer à construire des écoles parce que la Société du Grand Paris préfère jouer sur la spéculation foncière ?
Et que dire, monsieur le secrétaire d'État, de votre projet concernant Saclay ? Certes, vous avez prévu des méthodes expéditives pour arriver à vos fins, mais, si vous consentiez à discuter avec les habitants de cette partie de l'Île-de-France, avec les chercheurs et les savants qui y travaillent, il n'est pas douteux que nous progresserions.
Vous avez donc beaucoup de monde à écouter : les gens dont je viens de parler, et les membres de votre majorité qui ont formulé des propositions. Écoutez-les et ainsi, en renonçant à la procédure d'urgence, nous aurons un débat d'une plus grande qualité, de nature à ouvrir de nouvelles perspectives à l'Île-de-France, qui ne soient pas politiciennes et uniquement dictées par la perspective des régionales – ceci pour évoquer la rapidité de cet examen accéléré – et sans aucun rapport avec les conditions de vie de nos concitoyens – ceci pour parler du contenu de votre projet, qui annexe de nouveaux territoires et va en désertifier d'autres, futurs ghettos, comme si les politiques menées depuis trente ans n'en avaient pas déjà créé suffisamment ! Il est vrai que cela permet ensuite au Président de la République d'aller bomber le torse, comme il l'a fait hier en Seine-Saint-Denis… Car les problèmes auxquels notre société est aujourd'hui confrontée, y compris du point de vue de la sécurité, sont effectivement le résultat de toutes ces politiques passées, que votre projet aggravera encore. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
Il n'échappe à aucun d'entre nous que presque tous les intervenants de cette longue discussion générale sont maires ou ont exercé ce mandat. On pourrait en conclure que nous débitons simplement la litanie interminable des revendications que nous portons pour nos territoires ; je pense exactement l'inverse, et, à mon avis, c'est le coeur de notre débat.
Personne mieux que les maires ne connaît la réalité de leurs villes, les aspirations de leurs habitants et les exigences d'un aménagement du territoire équilibré. C'est d'ailleurs pourquoi, je le fais observer sans ironie à mes collègues de gauche, j'ai toujours été favorable au cumul des mandats. Imaginons un instant un débat comme celui de ce soir sans l'expérience des maires ! Il serait totalement abstrait, dénué de toute substance.
À mon tour, maire d'une ville de 80 000 habitants, Saint-Maur-des-Fossés, sur la boucle de la Marne, comptant quatre gares sur la ligne du RER A, dans un cadre privilégié, je voudrais exprimer les aspirations et les inquiétudes d'un maire.
Tout d'abord, l'espoir : le Grand Paris, chantier ambitieux et magnifique ouvert par le Président de la République, a suscité énormément d'attentes sur tous les bancs. Aucun maire ne peut être contre l'idée de réconcilier la capitale et la banlieue, de projeter notre région dans le vingt-et-unième siècle, d'en faire le territoire le plus compétitif d'Europe et, surtout, car on n'en parle pas assez ce soir, de satisfaire aux exigences du développement durable et d'entériner les conséquences du Grenelle de l'environnement. Aucun maire – surtout pas le maire d'une ville de proche banlieue – ne peut être contre l'idée que la priorité des priorités est l'amélioration des transports, aujourd'hui au bord de l'asphyxie, avec le développement des transports de banlieue à banlieue, pour offrir aux Franciliens une alternative à la voiture. De cela, nous sommes tous d'accord.
Vous verrez, monsieur Brard, que j'ai d'autres points d'accord avec vous !
La première inquiétude des maires, en revanche, porte sur le rééquilibrage de notre région. En tant que maire d'une commune du Val-de-Marne, je constate que le projet, tel qu'il est formulé, risque d'aggraver encore les déséquilibres entre l'est et l'ouest de notre région.
Les emplois sont toujours plus à l'ouest et les logements à l'est ! Là réside l'origine des problèmes de transports.
Vous me répondrez qu'il faut relier les pôles qui existent. Nous sommes tous d'accord, notamment lorsqu'il s'agit de Saclay, des aéroports et des grands centres d'emploi et de recherche, mais c'est une raison de plus, cher secrétaire d'État, pour être très ambitieux à l'est, car c'est seulement ainsi que l'on parviendra à un rééquilibrage.
Plus fondamentalement encore, comme tous les maires, je voudrais dire, ce soir, qu'il y a des urgences, au premier rang desquelles se place le RER.
Le RER A est la ligne la plus saturée et la plus encombrée d'Europe. La situation est devenue insupportable. Je suis personnellement d'accord avec le projet d'un métro de grande capacité à grande vitesse qui élargisse considérablement le réseau, mais à condition que l'on ne sacrifie pas les urgences de court terme.
Surtout, je voudrais me joindre aux très nombreux collègues qui, au-delà des clivages idéologiques traditionnels, soulignent qu'un tel projet ne peut réussir qu'avec les maires, et non pas contre eux. Je suis en désaccord, monsieur le secrétaire d'État, avec le parti pris du projet, qui est de recentraliser, dans une vision jacobine que je crois vouée à l'échec, et je m'en suis expliqué avec vous. Que l'État, constatant l'incapacité des collectivités locales, notamment les retards accumulés par la région et par le STIF, tape du poing sur la table et décide de proposer un tracé, pourquoi pas ? En revanche, que l'État, à partir de ce tracé – devenu projet d'intérêt général et s'imposant de façon totalement dérogatoire aux normes d'urbanisme dans nos communes, au mépris de la démocratie locale – en profite pour imposer une densification forcée, notamment dans les communes de la petite couronne qui seront sur le tracé, ce qui risque de se traduire par une détérioration du cadre de vie et par une aggravation de la fracture entre la proche banlieue et la grande banlieue – alors qu'il faudrait se projeter, de nombreux collègues l'ont dit, à l'échelle du bassin parisien pour aller même, comme y a invité le Président de la République, jusqu'au Havre – je crois que c'est une erreur profonde, qui sera source de nombreux contentieux et conduira à de nombreux reculs et probablement, à terme, à une impasse financière.
Je ne crois pas du tout en effet que la valorisation des terrains puisse rapporter des sommes aussi considérables que les dizaines de milliards d'euros évoquées dans les rapports de nos assemblées. Je pense que c'est là nourrir beaucoup d'illusions et que les montants seront très insuffisants pour financer un projet d'une telle ampleur. Surtout, vous risquez de vous heurter au désaccord des populations et, par conséquent, de ne finalement pas pouvoir avancer.
Vous m'objecterez que vous avez fait une concession substantielle avec le contrat de développement territorial…
Ce n'est pas une concession !
…en même temps qu'une innovation juridique majeure.
Je pense que de cette innovation peuvent sortir le meilleur et le pire. Le meilleur serait un dialogue équilibré entre les maires et l'État, dans lequel les maires auraient le dernier mot sur l'urbanisation de leurs territoires. Ils disposent en effet de la confiance de leurs populations et savent mieux que personne ce qui est supportable pour les habitants et ce qui ne l'est pas.
Cependant, tel qu'est formulé le projet et sous réserve d'une évolution au cours de nos débats, à la faveur de l'adoption d'amendements substantiels, c'est l'inverse qui va se produire : les maires vont négocier avec un pistolet sur la tempe !
Soit les maires ne signent pas, et ils n'obtiennent rien, soit ils signent, et c'est l'État qui décidera…
Ainsi revient-on à une centralisation qui a conduit à de graves échecs dans le passé, comme cette fracture entre la banlieue et la capitale à laquelle vous voulez aujourd'hui remédier, ou ces ghettos, source de tant d'insécurité. Il serait dramatique que, renouant avec les vieilles méthodes, vous aboutissiez, avec les meilleures intentions du monde, aux mêmes échecs. Le Grand Paris est un grand rendez-vous. Ne le manquons pas, écoutez les maires !
Dernier point, les autres grandes métropoles sont la référence constante du projet – Shanghai, Tokyo ou, plus proche de nous, Londres. Mais pourquoi ne pas essayer de renouer avec la grande tradition française d'urbanisme, qui a fait l'admiration du monde entier et qui fait encore de l'Île-de-France la région la plus touristique du monde ? Si nous retrouvions l'urbanisme à la française, en écoutant les grands architectes, mais pas seulement eux ? Si, tout en tenant le plus grand compte de l'héritage, nous inventions un modèle original préservant l'art de vivre en Île-de-France ?
Pour ma part, monsieur le secrétaire d'État, et au risque de choquer certains, je n'aurais aucune envie de quitter mon cher Saint-Maur et la boucle de la Marne pour aller vivre à Shanghai ou à Tokyo.
J'ai beaucoup de respect pour ces grandes métropoles, que j'éprouve le plus grand plaisir à visiter, mais il existe un art de vivre propre à ce que l'on appelait auparavant la douce Île-de-France.
Mettez donc un peu de douceur dans votre projet, protégez le cadre de vie des Franciliens, travaillez à un aménagement équilibré avec les maires, alors vous resterez dans l'histoire de notre région ! Avec tous les atouts qui sont les vôtres, vous pouvez y entrer, monsieur le secrétaire d'État, comme celui qui a réussi à réconcilier les Franciliens tant avec la ville capitale qu'avec leur région. (M. Jean-Pierre Brard et Mme George Pau-Langevin applaudissent.)
Ce qui me frappe dans ce débat engagé depuis hier, c'est d'abord une adhésion assez générale à l'idée qu'il faut une nouvelle ambition pour la région Île-de-France, et que l'État a un rôle majeur à jouer – rôle qu'il n'a d'ailleurs peut-être pas assez joué ces dernières années, d'où certaines des difficultés de cette région ; mais c'est aussi que cette adhésion s'accompagne de beaucoup d'interrogations, pour ne pas dire de scepticisme, devant le projet qui nous est présenté. Si notre débat a une utilité, au-delà de la litanie des interventions que certains ont évoquée, ce sera peut-être de nous permettre de répondre à certaines de ces interrogations.
Tout d'abord, l'idée que l'État puisse jouer son rôle dans cette région ne fait pas débat entre nous, ou seulement à la marge. C'est la région capitale : le développement de l'Île-de-France contribue à l'ensemble de la richesse nationale. Sur ce plan, le fait que le Président de la République ait décidé de s'investir et d'engager l'État dans cette région va dans le bon sens.
Il est cependant vrai que les modalités du projet qui nous est présenté, sa pertinence, sa faisabilité posent un certain nombre de questions. Je voudrais en évoquer trois, qui me semblent au coeur de notre débat.
La première interrogation porte sur le parti pris d'aménagement. Sans revenir sur tout ce qui a déjà été dit, il est vrai que le projet présenté relève, pour reprendre d'ailleurs un terme employé par notre rapporteur, d'une forme de pari, selon lequel la réalisation d'un réseau de transport permettrait en quelque sorte de refaire la ville, d'y localiser activités, logements, centres de recherche, etc.
Vous-même, monsieur Albarello, soulignez qu'il n'existe aucun exemple au monde d'une réalisation de ce type, et vous écrivez dans votre rapport : « Bien entendu, le caractère très innovant de cette approche de l'aménagement du territoire ne préjuge ni de sa réussite ni de son échec, les modalités de mise en oeuvre d'un tel projet étant sans doute plus essentielles encore que son point de départ. »
Reconnaissez que cette phrase n'est pas de nature à nous rassurer. En tout cas, elle ne nous conforte pas. C'est un projet – vous le dites vous-même – dont il n'est pas totalement sûr qu'il soit pertinent. Alors même qu'il demandera un engagement financier considérable, il n'est peut-être même pas totalement adapté ; c'est ce que je crois comprendre en vous lisant, monsieur le rapporteur.
Il y a donc des interrogations très fortes sur ce parti pris. Elles ont d'ailleurs été formulées par les architectes et les urbanistes, et ici même par M. Carrez, qui dit clairement que, certes, la réalisation d'un nouveau réseau de transport est peut-être une priorité, mais que la priorité des priorités, c'est de faire en sorte que le réseau actuel soit modernisé et qu'il soit maillé. C'est notamment ce qui est proposé avec le plan de mobilisation.
Après les commentaires que l'on a entendus depuis le début de l'examen de ce texte par notre assemblée, il faut, monsieur le secrétaire d'État, que vous nous convainquiez de la pertinence de ce projet en matière d'aménagement. Pour le moment, nous sommes très loin d'en être convaincus.
La deuxième source d'interrogations, c'est évidemment le financement de ce projet. Là aussi, je me réfère au travail conduit par M. Carrez, et qu'il a défendu ici même. Il a présenté, de manière extrêmement sérieuse et rigoureuse, des hypothèses de financement, et ce en essayant de maîtriser le plus possible le recours à l'emprunt, de faire évoluer un certain nombre de recettes, et d'adosser ces projets sur des recettes nouvelles.
En commission, vous nous avez dit, monsieur le secrétaire d'État, que ce n'était pas du tout votre intention, et que, dans votre esprit, il y avait une totale dissociation entre, d'une part, le financement du réseau de transports actuel et de ses compléments – je pense au plan de mobilisation – et d'autre part, le financement du réseau nouveau que vous nous proposez. Vous nous avez clairement dit que celui-ci serait financé en totalité par l'État, et ce en recourant, pratiquement en totalité, à l'emprunt.
Il y a, là aussi, une source d'interrogations fortes. Car l'État s'apprête, si j'ai bien compris, à lancer un grand emprunt, autour de 35 milliards – peut-être un peu plus, on verra.
Je sais que des députés UMP ont en effet signé un texte où ils demandent qu'on aille très au-delà. Mais ils vont être entièrement satisfaits, puisque, en réalité, à ces 35 milliards, il faut ajouter le deuxième emprunt, celui du Grand Paris. À combien s'élèvera-t-il : 15, 20 milliards ? C'est à peu près l'ordre de grandeur.
Honnêtement, je suis un peu étonné que l'on ajoute ainsi de la dette à la dette, par milliards, et que cela soit accepté, finalement, sans beaucoup de débat, sauf par M. Carrez, qui est rapporteur général du budget et qui exprime manifestement certaines inquiétudes. Je ne veux pas parler à sa place, mais j'ai bien compris que son propos reflétait une vraie inquiétude quant à la dérive extrêmement forte des financements et de la dette.
Là encore, monsieur le secrétaire d'État, nous attendons de vous des précisions, des informations. Vous devez nous dire comment l'État entend concrètement financer ce projet.
Troisième interrogation, la gouvernance. Beaucoup de députés de la majorité nous ont expliqué, avec des accents très gaulliens, que l'État peut tout, que lui seul peut porter un projet de ce type. C'était peut-être vrai il y a quelques années. Mais entre nous, nous savons tous, car il y a parmi nous des maires, qui se sont d'ailleurs exprimés comme tels, que l'État n'est pas aujourd'hui au mieux de sa forme. Souvent, au niveau local, lorsque l'État a des projets, il se tourne vers les collectivités territoriales pour les financer. C'est comme cela que ça se passe. L'idée que l'État va porter, tout seul, un projet de cette nature me semble extrêmement aventureuse.
À cet égard, je reprends mot pour mot ce qu'a fort bien dit M. Carrez : « Si l'État et les collectivités locales ne s'entendent pas, nous irons droit dans le mur ».
Lui-même semble donc douter que l'État puisse, simplement en claquant des doigts, mener à bien ce projet. Et de fait, tout cela paraît extrêmement hypothétique. Sur le plan de la gouvernance aussi, ce projet nous semble donc extrêmement présomptueux.
Comment sortir des difficultés dans lesquelles vous allez vous trouver si ce texte est voté en l'état ? Il y a deux points sur lesquels je voudrais insister.
Premièrement, il y a la question du SDRIF. Je regrette de le dire, mais, là aussi, M. Carrez y a insisté avant moi. Ce projet ne peut s'inscrire que dans le cadre d'un projet d'aménagement plus global. Aujourd'hui, je n'en connais pas d'autre que le schéma d'aménagement de la région Île-de-France. On peut en penser ce qu'on veut, mais il a été élaboré par la région, avec la collaboration de tous les départements et des communes, au terme d'un travail très approfondi, qui n'est contesté par personne, sauf par l'État.
Monsieur le secrétaire d'État, votre blocage sur le SDRIF est véritablement incompréhensible. Par ailleurs, il risque de vous revenir comme un boomerang. Car ne croyez pas que les contrats territoriaux échapperont à la mise en compatibilité avec le schéma directeur. C'est la loi.
Si vous ne mettez pas aujourd'hui votre projet en compatibilité avec le SDRIF, vous irez demain vers d'innombrables contentieux. Nous le montrerons dans le débat.
Deuxièmement, et ici encore je reprends une proposition de Gilles Carrez,…
Eh oui, honnêtement, j'ai trouvé que son intervention faisait progresser le débat et permettait sans doute de sortir d'un certain nombre de difficultés.
Le deuxième point, donc, c'est la question de l'outil d'aménagement et de réalisation qui sera mis en place. Sur ce point aussi, M. Carrez propose quelque chose de sage et de raisonnable, à savoir une même institution, un STIF, qui serait modifié, avec, d'un côté, un conseil d'administration tel qu'il est aujourd'hui, où siègent les collectivités territoriales, et de l'autre, un conseil d'administration où siège l'État – mais avec la même direction, le même directeur, les mêmes fonctionnaires. Parce que cela nous ferait gagner du temps, et parce que les compétences, actuellement, sont entre les mains du STIF, de l'IAURIF, de l'APUR, mais plus beaucoup dans celles de l'État.
Ce serait aussi un gage de bonne coordination et de cohérence entre ce que fait la région, dans le cadre du plan de mobilisation, et le projet que vous nous présentez.
Vous avez qualifié cette idée de monstrueuse, monsieur le secrétaire d'État. Nous tenterons de vous démontrer que loin d'être monstrueuse, elle serait sans doute un gage d'efficacité. Elle permettrait de faire un peu atterrir votre projet, qui, pour le moment, me semble très « hors sol ». (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Le Grand Paris est une ambition, une grande ambition, qui dépasse, et de loin, le quotidien qui est le nôtre. Il faut porter loin son regard pour imaginer ce que pourrait être, demain, cette ville-monde.
Bien sûr, cela relativise, ou devrait relativiser, les petits calculs immédiats, les oppositions conjoncturelles dues aux échéances, l'affrontement des hommes dans la lutte pour le pouvoir. Ce n'est pas tous les jours qu'un tel saut dans l'avenir est proposé.
Paris a connu, dans son développement, de grandes étapes, qui ont marqué des générations de Français. Le Paris d'aujourd'hui est, dans sa structure, celui du XIXe siècle, de Napoléon III et du baron Haussmann. De Gaulle et Delouvrier ont complété cette organisation, conscients qu'il fallait faire sortir Paris de l'enceinte de ses limites anciennes et prendre en compte l'existence de la « banlieue » pour en faire la région parisienne.
Face au vieux Paris, surpeuplé et incapable de loger en totalité l'importante immigration provinciale, les banlieues ont absorbé le trop-plein de l'expansion démographique liée à l'exode rural et à la croissance économique de la ville. Ce fut la construction de cinq villes nouvelles et du réseau RER dans les années soixante, pour répondre aux besoins nouveaux. Désormais, on parle moins de Paris que de la région parisienne, alors qu'apparaissent de nouveaux problèmes jusqu'alors largement négligés, comme celui des transports.
Aujourd'hui, la région Île-de-France compte un Français sur cinq et génère un tiers du produit national brut. Son développement est donc un enjeu national. Elle doit se hisser au niveau des autres villes-monde : New-York, Tokyo et, demain, Shanghai et Bombay. C'est le sens du discours fondateur du Président de la République le 29 avril dernier à la Cité de l'architecture.
Ce projet de loi est le premier acte de cette ambition.
Un premier acte intelligent, si j'ose dire, en ce qu'il met en place, d'abord, les infrastructures. Trop longtemps, devant la nécessité et l'urgence, nous avons construit des quartiers au milieu de rien, en petite couronne et en grande banlieue ; après quoi on attendait pendant des années l'arrivée des transports et des services.
Des zones résidentielles importantes ont été créées qui sont très peu ou très mal desservies par un réseau de transports des plus vétustes. C'est la question lancinante, par exemple, de la ligne A qui est posée. De manière générale, chacun s'accorde à dénoncer l'obsolescence des transports en région parisienne.
Cette fois, ce projet de loi jette les bases d'un réseau de transport d'avenir. Le métro automatique va dessiner l'épine dorsale du développement économique et résidentiel.
Autour de cette double boucle, la vie va s'organiser avec les projets urbains qui changeront le visage d'une région pour la rendre attractive, moderne, puissante, écologique.
Travailler sur le bien-être de ses habitants sera possible avec ce réseau de transport qui devrait relier tous les pôles d'excellence et créer des gares autour desquelles vont s'agréger activités, logements et loisirs.
Les différents projets des architectes de renommée internationale pourront, avec l'audace et le talent qui les caractérisent, transformer notre environnement à l'image des grandes villes, des grandes métropoles comme Londres, Barcelone,…
…et façonner le Grand Paris en le tournant vers la modernité.
Pour une fois, nous allons procéder dans l'ordre, de manière structurée et intelligente.
La Société du Grand Paris aura les moyens d'agir avec des procédures simplifiées, mais en passant des contrats de développement avec les collectivités dans un partenariat gagnant-gagnant.
La Société du Grand Paris pourra aussi traiter avec les établissements publics administratifs existants, dont la mission d'aménagement devra être coordonnée avec cette nouvelle structure.
Les établissements publics administratifs sont nombreux en région Île-de-France, et prennent en compte l'aménagement de territoires en associant l'État, la région, les conseils généraux et les communes.
C'est le cas notamment de l'EPA ORSA, Orly-Rungis- Seine Amont. Ces treize communes du Val-de-Marne sont aujourd'hui l'objet d'un plan d'aménagement qui devrait modifier en profondeur la structure de cet espace, en créant des voies nouvelles, des ponts sur la Seine et sur la Marne, des activités et des logements.
Ce territoire inclut l'aéroport d'Orly qui sera demain desservi par le métro automatique, comme votre projet le prévoit, monsieur le secrétaire d'État. Il est permis de s'en réjouir quand on sait que cet aéroport situé à sept kilomètres de Paris, et qui accueille vingt millions de passagers par an, n'a pas de liaison directe par transports en commun avec la capitale, ce qui ne laisse pas d'étonner.
Ce territoire jouxte d'autre part le plateau de Saclay qui est une pièce très importante du dispositif avec ses 17 000 chercheurs. Cet ensemble – Orly, Rungis, Saclay – compte 90 000 emplois et constitue l'équivalent à l'est de ce que représente la Défense à l'ouest.
Un des mérites du Grand Paris et de ce nouveau réseau de transport sera sans doute de rééquilibrer l'est et l'ouest de la région en matière de création d'emplois et d'activités.
Monsieur le secrétaire d'État, vous portez avec le Gouvernement une grande ambition. Nous souhaitons qu'elle soit partagée par le plus grand nombre, au-delà des contours de la majorité présidentielle, dans l'intérêt même de notre région et de la France des années qui viennent. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je partage l'essentiel du contenu des interventions de mes collègues des groupes SRC et GDR. Chacun comprendra donc que je concentre mon propos sur la fin du projet de loi – c'est-à-dire les neufs articles consacrés à la création d'un pôle scientifique et technologique sur le plateau de Saclay, pôle pour lequel je me suis beaucoup investi depuis des années – et que j'évoque ici les doutes, les inquiétudes, voire les fortes oppositions que suscite votre projet.
Tout d'abord, il faut rappeler que le pôle scientifique du plateau de Saclay existe déjà. Plus de 25 000 chercheurs, et autant d'étudiants travaillent chaque jour sur ce territoire au sein d'établissements reconnus nationalement, et pour certains mondialement. De grandes entreprises ont déjà installé, depuis de nombreuses années, des centres de recherche pour profiter des synergies potentielles avec les centres universitaires et de recherche.
Le plateau constitue le coeur de trois pôles de compétitivité dont l'un, le pôle Systematic, est l'un des cinq pôles à l'échelle mondiale.
Aujourd'hui, il existe une fondation scientifique territorialisée, la seule en France, regroupant deux réseaux thématiques de recherche avancés, l'un sur l'informatique du futur et l'autre sur la physique. Enfin, les médailles Fields les plus récentes sont l'honneur de l'université d'Orsay Paris-Sud, tout comme le prix Nobel de Physique, Albert Fert, dont les travaux se sont déroulés dans le cadre d'une coopération entre le CNRS, la faculté d'Orsay et Thales.
À la périphérie de Saclay se trouvent l'aéroport d'Orly, un noeud de transports important – le pôle de Massy –, plusieurs zones industrielles de grande envergure, comme celles de Courtaboeuf ou de Vélizy, et surtout un potentiel foncier dont je parlerai plus tard. Bref, le Pôle de Saclay existe et on peut s'interroger sur les raisons qui vous obligent aujourd'hui à proposer un projet de loi pour qu'il se développe.
Dans un rapport remis en 2004 au Premier ministre, monsieur le secrétaire d'État, vous aviez pris le plateau de Saclay comme exemple d'un pôle à échelle européenne qui ne créait pas le nombre d'entreprises nécessaire – pas plus d'une dizaine par an –, alors que des pôles équivalents dans le monde en créaient plus d'une centaine. Vous n'aviez pas tort et, si l'on s'arrêtait à ce seul paramètre, on pourrait considérer que, cinq ans après, les choses ont peu évolué. Vous souligniez, encore à juste titre, qu'il manquait un outil fédérateur puissant pour que le plateau de Saclay prenne enfin son envol. Notre constat d'accord en restera là.
J'avais déjà regretté, à l'époque, que vous ne rencontriez pas davantage les élus pour qu'ils vous parlent des vraies raisons des blocages et qu'ils évoquent avec vous les solutions pour faire de Saclay, non pas le pôle qui va déshabiller la région parisienne ou la province de leurs fleurons de la recherche et de l'innovation, mais un véritable campus scientifique tirant profit de l'existant, se dotant d'un projet dans des filières d'excellence, associant l'ensemble des acteurs locaux, régionaux et nationaux.
Vous pensez répondre aujourd'hui aux problèmes du plateau de Saclay en créant un établissement public doté de pouvoirs exorbitants, géré par un président-directeur général – c'est une première – nommé par décret et dont les liens n'existent même pas avec son propre conseil d'administration, Pour l'instant, les élus y siègent et font de la figuration. Ce PDG, qui ne sera même pas concerné par la limite d'âge actuellement pratiquée dans les EPAD – M. Devedjian en sait quelque chose –, à savoir soixante-cinq ans,…
… régnera sur un territoire de quarante-neuf communes, représentant trois fois la superficie de Paris, et pour les connaisseurs deux fois celle des Hauts-de-Seine. À ce propos, monsieur le secrétaire d'État, je crois qu'il serait bon que vous confirmiez ou infirmiez l'information parue ce matin, dans un hebdomadaire satirique, pour reprendre la formule qui désigne Le Canard Enchaîné, selon laquelle vous prendriez la présidence de cet EPIC après les élections régionales, …
…ce qui expliquerait a posteriori certains mystères de la construction de ce projet de loi.
Monsieur le secrétaire d'État, j'ai peur que la construction quelque peu technocratique que vous proposez dans ce projet ne résolve rien et n'ajoute même un peu plus de complexité à ce dossier qui n'en avait pas besoin.
Que manque-t-il réellement au plateau de Saclay pour se développer ?
Le projet ? Il existe : c'est le Plan Campus, élaboré par les acteurs scientifiques et universitaires, en lien avec les élus, et reconnu par le ministère de la recherche.
L'outil juridique permettant d'aménager la lisière sud du plateau, là où sont présents les centres de recherche actuels ? Il existe aussi : c'est le SDRIF, voté par la région et négocié avec les élus locaux, qui, eux-mêmes, avaient proposé, dans un document adopté en juin 2008, l'aménagement de 350 hectares, permettant ainsi d'en préserver 2 300 pour une activité agricole viable sur le plateau. Vous savez, monsieur le secrétaire d'État, que le chiffre de 2 300 hectares est le fruit d'un compromis passé entre élus, acteurs associatifs et agriculteurs et qu'il est primordial que ce potentiel soit maintenu. D'autant qu'avec ces 350 hectares on peut développer à peu près 2,5 millions de mètres carrés de surface hors oeuvre nette, ce qui devrait être bien suffisant !
Alors que manque-t-il ? Certainement pas la volonté des élus ! Je reconnais qu'elle a été un peu poussive il y a quelques années – pardonnez-moi, monsieur Lagarde, mais cette langueur provenait plutôt des élus appartenant à votre majorité –, …
.. mais aujourd'hui cette volonté est unanime et sans faille. Je parle bien entendu des élus locaux, mais également de la région Île-de-France et des deux départements de l'Essonne et des Yvelines.
Des coopérations existent aujourd'hui entre quatre intercommunalités majeures : Massy, Saint-Quentin-en-Yvelines, la communauté d'agglomération du plateau de Saclay et celle de Versailles. Nous allons créer ensemble une agence d'urbanisme. Les liens avec d'autres structures comme l'excellente vallée scientifique de la Bièvre sont permanents.
Ce qui manque au plateau, monsieur le secrétaire d'État, c'est d'abord que l'un des plus gros propriétaires fonciers du plateau – l'État – débloque ses terrains.
L'État possède sur le plateau de Saclay, à travers ses différents ministères, près de 40 % du foncier aménageable.
Ce qui manque également sur le plateau de Saclay, c'est un réseau de transports collectifs cohérent. C'est le problème majeur du plateau. Le réseau routier est saturé, celui des autobus totalement inadapté. Et lorsque je parle de besoins en transports, je n'évoque pas un hypothétique projet de transports en commun lourd, mais un transport collectif en site propre, léger et rapide, reliant Massy à Saint-Quentin-en-Yvelines pour la liaison est-ouest et son homologue pour le lien nord-sud. Ces transports sont indispensables pour que les salariés, quelle que soit leur condition, se rendent de leur domicile jusqu'au plateau et inversement. Or je vous rappelle qu'il a fallu plus de quinze ans pour faire émerger 4,5 kilomètres de transports en site propre entre Massy et Polytechnique et que l'État n'a pas inscrit un euro au contrat de plan État-région au titre des transports sur le plateau de Saclay…
Ce qui manque en réalité pour un projet décrit comme d'envergure nationale, ce sont les crédits provenant de l'État pour financer le développement du plateau, tout comme de nombreux projets de recherche. L'État n'a pas mis un euro dans l'aménagement du plateau depuis des années. Le financement du Synchrotron Soleil, équipement majeur du plateau, construit il y a quelques années, n'a été financé qu'à hauteur de 5 % par l'État – les 95 % restant étant payés par la région et le département. Le projet coûtait 150 millions d'euros.
Dans l'immédiat, rien ne permet de penser que l'État va s'engager plus, alors que, pour viabiliser les 350 hectares dont je parlais tout à l'heure, 500 millions d'euros sont nécessaires. Pour la petite histoire, il faut savoir que l'État demande à ma communauté d'agglomération, dont ce n'est pourtant pas la compétence, les maigres 600 000 euros nécessaires à l'assainissement du premier équipement du futur pôle commun de recherche en informatique, puisqu'il ne dispose pas du moindre euro pour financer ce projet.
Ce n'est pas de notre compétence. Enfin, monsieur le secrétaire d'État, ce qui manque – vous l'aviez souligné dans votre rapport de 2004 –, c'est un outil fédérateur réunissant tous les acteurs du plateau : l'État, les élus et les acteurs scientifiques, économiques et universitaires.
Il est dommage que le ministre d'aujourd'hui n'ait pas relu le rapporteur d'hier qui proposait, pour répondre à ce déficit, la création d'une structure d'animation associative, réunissant tous les partenaires publics et privés et une société d'aménagement financièrement soutenue par le conseil régional. Vous teniez là, monsieur le secrétaire d'État, la clé : des structures souples, pragmatiques, associant les acteurs locaux, et un ou plusieurs outils d'aménagement dirigés par des élus conscients des besoins du terrain et de la programmation des financements.
L'année suivante, pourtant, l'État annonçait une opération d'intérêt national, créée finalement au début de cette année sur le secteur du plateau. Pendant cinq ans, nous avons vu passer trois préfets de région, deux chefs de mission de préfiguration, un délégué ministériel sympathique et compétent, mais qui part prochainement à la retraite. Nous en sommes à la réalisation de la troisième étude permettant de préfigurer… ce que les élus avaient déjà imaginé il y a plusieurs années.
Tous les conseils municipaux des quarante-neuf communes se sont prononcés pour la création d'un groupement d'intérêt public regroupant État, élus et acteurs scientifiques. L'État n'a même pas daigné annoncer à ces mêmes élus que ce GIP était mort-né. Pas plus qu'il n'a daigné les consulter cet été lorsqu'il a défini un périmètre de zone d'aménagement différé mordant largement sur les hectares de terres agricoles à préserver.
Monsieur le secrétaire d'État, nous sommes aujourd'hui à la croisée des chemins. Le pôle scientifique à échelle mondiale, aménagé dans un cadre de vie durable que peut devenir le plateau de Saclay, ne pourra se faire sans l'adhésion de tous, et tout particulièrement de ses habitants ou de leurs représentants. Rappelez-vous que le schéma directeur de 1965 prévoyait la construction d'un pôle scientifique et d'une ville nouvelle sur le plateau de Saclay ! Faute d'avoir mis chacun à sa place, d'avoir respecté les élus, les associations et les habitants, rien n'a été fait.
Nous ne sommes plus à l'époque de Paul Delouvrier, encore moins à celle du baron Haussmann, comme le rappelait hier Annick Lepetit. Aujourd'hui, il vous faut infléchir profondément votre projet, en acceptant ce que vous proposent les élus, à savoir un co-pilotage du projet sur un périmètre plus restreint. Si vous vous obstinez à créer un monstre technocratique plaqué sur la réalité, nous constaterons ensemble dans quelques années, que rien n'a avancé, malheureusement pour les besoins du pays et des habitants de la Région Île-de-France. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Le Président de la République promettait, au printemps dernier, une véritable révolution dans l'aménagement de la région Île-de-France, pour en faire une grande capitale à l'échelle mondiale. Quel écart avec ce projet de loi, réduit à la réalisation d'un métro circulaire reliant quelques pôles qualifiés de stratégiques, comme La Défense et les aéroports de Roissy et Orly !
Il est assez effarant que ce texte qui promet de revoir les infrastructures de la région capitale passe complètement à côté du défi climatique, à quelques jours du sommet de Copenhague. Alors que les émissions de CO2 atteignent un niveau record, que les conséquences observées du changement climatique s'avèrent chaque année pires que les prévisions les plus pessimistes du GIEC, et qu'il nous faut aussi penser le monde de l'après-pétrole, comment pouvez-vous proposer un projet d'aménagement régional entièrement orienté autour de la civilisation de la vitesse, de la voiture et de l'avion, secteurs particulièrement émetteurs de CO2 ?
Une loi pour la région capitale pourrait être utile. Avec presque un sixième de la population française et 29 % de la richesse nationale, l'Île-de-France est aujourd'hui la région la plus riche d'Europe. Mais c'est aussi une région de détresses, du fait de grandes disparités sociales et territoriales, et notamment des disparités fiscales entre collectivités. Les révoltes de jeunes survenues en novembre 2005, qui ont mis en lumière les réalités de l'Île-de-France avec ses ghettos de riches et ses ghettos de pauvres, sont-elles à ce point oubliées ?
Avec ce projet de loi, nous sommes très loin d'un projet global visant à rééquilibrer les territoires, à réduire les zones de pauvreté et les inégalités, et à faciliter les déplacements de l'ensemble des Franciliens. Le groupe d'architectes, qui a été mandaté par le Président de la République lui-même pour réfléchir à la métropole parisienne de demain et dont les propositions d'avenir étaient cohérentes et pertinentes, est aujourd'hui scandalisé par la pauvreté du projet retenu.
En effet, les Franciliens regarderont passer les trains, puisqu'il n'est pas question de ralentir ce transport express pour managers courant entre pôles d'activités, et il est encore moins question de desservir les zones d'habitation et d'activités qu'il traversera. À aucun moment, la loi n'aborde les conditions de vie des populations et ne résout en rien les problèmes de déplacements de banlieue à banlieue. De plus, le billet d'accès à ce « métro de riches » dénommé « grand huit » ne sera pas compris dans les abonnements de type Navigo. Étonnant, puisque ces pôles de compétitivité sont censés être des zones d'emploi ! Cela coûtera donc plus cher aux salariés et aux employeurs. De plus, dans la majorité des cas, l'absence de connexions avec le reste du réseau de transport collectif et les zones d'habitation provoquera de fait une augmentation des déplacements automobiles : une incohérence de plus par rapport aux grandes déclarations sur l'urgence de lutter contre les émissions de gaz à effets de serre…
Alors que la région Île-de-France, en concertation avec les départements, les communes et les intercommunalités, vient d'élaborer son schéma directeur de développement, le SDRIF, exemplaire tant pour son élaboration démocratique et participative que pour ses préconisations de planification écologique, et alors qu'il existe un syndicat des transports d'Île-de-France, le chef de l'État entend s'emparer du contrôle de tous les projets dans la région. Les manoeuvres actuelles visant à déstabiliser la vie institutionnelle de la région sont particulièrement scandaleuses : je pense au refus de transmettre au Conseil d'État le projet de SDRIF, adopté définitivement par la région depuis plus d'un an, et à la tentative de dissoudre progressivement le STIF dans la RATP. Du reste, vous ouvrez plusieurs brèches vers la privatisation de la RATP, notamment par le biais de l'amendement de deux députés UMP qui prévoit sa scission en deux entités juridiquement séparées, l'une en charge des infrastructures du métro, l'autre de l'exploitation des réseaux de transports – à l'image de la division SNCF-RFF dont on voit tous les jours les conséquences en termes de dysfonctionnements. Votre amour du libéralisme et de la concurrence effrénée n'a jamais de limite…
Ce texte vise à permettre à l'État de s'affranchir des consultations et des études nécessaires à la mise en place de ce réseau de transports, dont le tracé est basé sur une vision passéiste de compétition entre territoires. La direction exécutive de la Société du Grand Paris sera directement nommée en conseil des ministres, écartant de la prise de décision les élus locaux. Ce projet tourne radicalement le dos à plus d'un quart de siècle de décentralisation. C'est une totale remise en cause du fonctionnement démocratique de notre République.
De plus, pour trouver les 24 milliards d'euros nécessaires à ce projet, vous proposez l'endettement massif et la saisie de biens et de terrains des collectivités territoriales, et vous escomptez une très hypothétique valorisation foncière des terrains ainsi accaparés. Or ce dernier moyen, sans lequel le projet n'est pas réalisable, est clairement mis en doute par le rapporteur général de la commission des finances. En réalité, les revenus éventuellement dégagés seront sans commune mesure avec les investissements envisagés. Finalement, ce sont les collectivités territoriales qui seront mises à contribution – donc les contribuables – alors que ce projet n'apportera aucune amélioration à leur vie quotidienne. Loin de résoudre les problèmes pour les prochaines décennies, il ne fera qu'accentuer la ségrégation territoriale, les discriminations sociales et géographiques de l'Île-de-France.
En outre, faute d'une réflexion globale d'aménagement du territoire national, votre projet crée, de fait, une compétition entre la région parisienne et les autres. Il a pour objectif, et vous l'assumez, d'attirer encore plus de population en Île-de-France, alors que la vie y est déjà difficile pour les habitants actuels. Les milliards ainsi dépensés seraient plus utiles et même indispensables pour répondre aux besoins criants en matière de transports et de logements, alors que l'État s'est désengagé au cours des dernières années.
La priorité est de favoriser la relocalisation écologique des activités et de réduire les trajets domicile-travail qui sont l'une des principales sources d'émissions de CO2. C'est notamment ce que propose le SDRIF que le Gouvernement a choisi de torpiller. Votre projet de Grand Paris est à l'opposé de notre vision d'une région capitale écologique et solidaire, qui planifierait le rapprochement des activités économiques et des lieux de vie et d'habitation des Franciliens, réduisant donc l'étalement urbain. À la perspective d'une société du toujours plus – plus de croissance, plus de compétitivité, plus de vitesse, plus de consommation… –, nous opposons une société du vivre autrement, du lien social et de la coopération, du vivre plus lentement, tout simplement pour vivre mieux, pour vivre bien. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Réfléchir à l'avenir de la région parisienne est un enjeu passionnant pour un élu. Anticiper les aspirations et les besoins des Franciliens à une échéance de vingt-cinq ans est, en effet, tout à fait primordial. Vous aviez bien commencé en réunissant les architectes et urbanistes les plus brillants de notre pays pour réfléchir à la création d'une région capitale dynamique, multipolaire, plus écologique et plus solidaire. Se pencher sur ce qui a été rêvé dans les projets qui sont aujourd'hui exposés est un vrai plaisir, et méditer par exemple les réflexions de Roland Castro sur le droit à l'urbanité est tout aussi important.
Hélas, leur travail est pour l'instant méprisé de vous. Nous voici conviés à discuter en urgence d'un projet qui, de ces grandes perspectives, n'a retenu que l'idée d'un métro souterrain, même s'il s'agit d'un très grand métro ! Nous nous retrouvons face à un texte qui recueille, au mieux, la circonspection, au pire l'hostilité de la part des élus franciliens, quelle que soit leur appartenance politique.
Le plus frappant est cette recentralisation autoritaire, qui reprend aux élus locaux des pouvoirs et des compétences qui leur étaient reconnus depuis longtemps, notamment en matière d'urbanisme et d'aménagement de la vie des habitants. Or l'échelon local est particulièrement adapté pour prendre en compte les aspirations des citoyens. Vous allez manifestement à l'encontre d'un principe constitutionnel important. La Constitution reconnaît que les collectivités territoriales ont vocation à prendre certaines décisions et leur reconnaît le droit de s'administrer librement. Votre projet constitue en fait une attaque frontale contre le principe de libre administration des collectivités garanti par la Constitution. À plusieurs reprises, le Conseil constitutionnel a jugé que les pouvoirs conférés aux collectivités représentaient une liberté fondamentale. En tant que telle, elle est protégée. Il ne suffirait donc pas que les collectivités – voire le STIF –conservent un pouvoir formel, tout en se faisant doubler par des structures, comme le grand établissement que vous prévoyez. C'est là un élément important d'appréciation de votre texte.
Par ailleurs, vous proposez la mise en place d'un établissement public. Lorsque vous expropriez des collectivités ou des particuliers, il faut en effet que cela soit pour un motif d'intérêt général. Mais on sait qu'il est possible de passer sans grande difficulté du statut d' EPIC à celui de société anonyme commerciale. Il y a là un risque d'utilisation de certaines prérogatives de puissance publique au bénéfice, à terme, d'une société privée. Cela se fera au détriment des collectivités que vous exproprierez. Vous conserverez ensuite les terrains et vous pourrez, ultérieurement, réaliser des profits qui seront sûrement non négligeables. Dans un premier temps, votre opération sera très lourde pour la collectivité et lorsqu'il y aura des profits, cela sera au bénéfice d'une société privée. Il s'agit d'une opération cynique qui ignore les lois existantes, et dont le financement est aléatoire ; d'une chimère destinée à donner l'illusion d'un projet digne de Haussmann ou de Delouvrier. Il est grand temps de revenir sur terre et de mettre en oeuvre des projets conformes à l'aspiration des Franciliens et de leurs élus. Il faut cesser de rêver, monsieur le secrétaire d'État, et se mettre à travailler véritablement dans le sens de l'intérêt général. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Aujourd'hui, dans le monde, cinq cents agglomérations dépassent un million d'habitants et concentrent 60 % de la population mondiale. C'est là que se joue la bataille pour créer des emplois, installer une dynamique économique durable, offrir une meilleure qualité de vie. Nous pouvons faire de notre capitale, Paris, une ville-monde à la hauteur de ses voisines européennes et mondiales.
Bousculant les habitudes de pensée et les comportements, le Président de la République, en lançant ce projet, a voulu dans un premier temps remettre l'architecture au coeur des choix politiques. Il a souhaité que la réflexion des architectes et des urbanistes constitue le point de départ de l'élaboration du projet.
Le but était que dix penseurs, dix équipes d'architectes parmi les plus grands s'emparent d'un des problèmes les plus difficiles au monde : comment refaire de la ville, de la citoyenneté, du lien civique, du lien social, de la convivialité, de la solidarité ? Le résultat est stupéfiant : le travail accompli est sans précédent par sa profondeur, son audace ; les points de vue s'enrichissent les uns les autres.
Ce qui me frappe le plus, c'est qu'il ne s'agit pas d'un rêve fou faisant table rase de la réalité, mais de propositions réalistes, concrètes, permettant de rendre la vie plus facile dans une ville faite pour l'homme.
Ne trouvez-vous pas, chers collègues, que M. Muselier a l'accent de Ménilmontant ? C'est pour cela qu'il trouve tout extraordinaire ! (Sourires.)
Ils ont bâti la ville sur la ville et ils l'ont apaisée. Elle devient belle, grande et juste.
La méthode suivie est intéressante. De nombreuses consultations se sont tenues entre le Gouvernement, les institutions, les professionnels et le public pour construire le projet de loi que nous examinons aujourd'hui, qui met en musique le résultat de ces réflexions.
Comment faire pour que nos grandes métropoles redeviennent des lieux de progrès, de prospérité et de partage ?
Comment inventer la ville durable, la ville de l'après-Kyoto, la ville écologique, la ville qui s'allie avec la nature ?
La ville est un tout, un sentiment d'appartenance. La ville, c'est une égale dignité offerte à tous les citoyens, c'est un espace construit par l'homme et pour l'homme.
Le Grand Paris ne s'inscrit pas dans un plan figé, rigide, qui fermerait l'avenir. C'est un processus de transformation. C'est l'exploration de toutes les possibilités, de toutes les potentialités, mais c'est aussi un déclic collectif, une remise en question générale. Toutes les collectivités, toutes les institutions engagent des réflexions, préparent des chantiers, préparent l'avenir.
Il faut faire passer l'émergence d'un projet collectif avant la réforme institutionnelle et administrative. Laissons de côté, à ce stade, tous les enjeux de pouvoir : l'essentiel est que les habitants de cette ville se sentent de plus en plus heureux d'y vivre.
La France a besoin d'une ville-monde, d'une capitale internationale. Mais elle a besoin aussi d'autres métropoles, en particulier d'une capitale euro-méditerranéenne de tout premier plan.
Pour toutes ces raisons, je songe aussi au Grand Marseille.
Nous possédons, en France, des atouts considérables. Alors que la crise rebat les cartes, c'est le moment ou jamais de renverser la tendance et de créer une nouvelle dynamique territoriale dont le Grand Paris sera le foyer et le Grand Marseille la continuité.
Vision, ambition, travail collectif, réalisation : tels doivent être nos maîtres-mots. Nous devons travailler ensemble, penser « collectif ». Quand on joue la carte du territoire, on peut gagner.
Votre dernier voyage à Marseille a entraîné soit beaucoup de dégâts, soit un résultat sportif honorable !
Le consensus est donc nécessaire, afin de dégager une vision commune de l'avenir.
Ce futur espace métropolitain a besoin d'une nouvelle géographie culturelle, d'une nouvelle géographie de pouvoir. Il a besoin de repères, de monuments, de lieux symboliques et familiers par l'intermédiaire desquels chaque territoire participe à l'identité commune.
Les défis que nous devons relever, nous les connaissons : donner une cohérence au développement territorial ; construire des transports urbains et interurbains performants ; renforcer notre attractivité nationale et internationale grâce à des pôles d'excellence lisibles et identifiés ; inscrire l'urbanisme dans une démarche de développement durable ; donner une puissante impulsion économique en créant de nombreux emplois.
Le projet de loi développe avec cohérence et intelligence ces grandes perspectives, monsieur le secrétaire d'État. Si la capitale donne l'impulsion, soyez assuré que nos grandes cités françaises sauront adopter la même démarche et construire des territoires modernes et attractifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui contient les premières dispositions législatives nécessaires à la réalisation du Grand Paris.
Ce texte vient à point nommé : on ne peut que se réjouir d'un projet ambitieux qui associe les transports, le développement économique, l'urbanisme, la culture et l'environnement. Il permettra à l'État, en concertation avec les collectivités locales, de donner une impulsion décisive au développement de la région capitale.
Ce projet d'envergure nationale dépasse largement le seul cadre de la région Île-de-France. Loin de le réduire à un projet uniquement parisien ou francilien, il faut souligner l'effet de levier qu'il exercera sur la France entière.
Absolument, monsieur Brard : notre collègue Muselier l'a parfaitement prouvé.
Condition nécessaire d'une ambition économique nationale, la croissance économique de la région capitale ne tire cependant son sens que du mieux vivre qu'elle assure à tous ses habitants. Vous mettez donc en avant, monsieur le secrétaire d'État, les effets bénéfiques indéniables de ce grand projet, notamment pour les habitants de la région, dont il réduira les temps de transport et les désagréments afférents grâce à un réseau capable d'accueillir trois millions de passagers par jour.
L'idée de bâtir un projet fondé sur une vaste infrastructure de transports publics mérite d'être saluée. On ne peut que se réjouir de la réalisation d'une double boucle de métro automatique de 130 kilomètres, fonctionnant vingt-quatre heures sur vingt-quatre et capable de transporter 40 000 passagers par heure en période de pointe.
Cela étant, monsieur le secrétaire d'État, le réseau que les Franciliens utilisent aujourd'hui n'est pas en bon état. Il est donc impératif de porter un diagnostic et d'entreprendre de le rénover en même temps que l'on crée ce « grand huit ».
Notre rapporteur l'a souligné, force est de constater que les habitants de la grande couronne pâtissent de l'offre actuelle de transports et qu'un rattrapage est indispensable. Aujourd'hui, il est urgent de créer des réseaux là où l'urbanisation progresse et de développer les relations entre banlieues.
Il faut impérativement privilégier les trajets entre domicile et lieu de travail.
Or je constate à regret que l'examen du projet de schéma de principe du nouveau réseau de transport de Paris-région capitale, tel qu'il est actuellement présenté, fait malencontreusement abstraction de la quasi-totalité du Val d'Oise, pourtant indissociable du reste de l'Île-de-France.
Les grandes zones de polarité urbaine des Yvelines, des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val de Marne seront reliées entres elles et à Paris par un nouveau système de transport rapide à grande capacité dont ne bénéficie malheureusement pas le Val d'Oise, à l'exception notoire de l'aéroport Roissy-Charles de Gaulle, mais uniquement pour sa liaison avec La Défense. Or il est primordial que le réseau de métro automatique intègre une liaison La Défense-Argenteuil-Cergy-Roissy : je rappelle que 70 % des trajets s'effectuent aujourd'hui de banlieue à banlieue.
La seule infrastructure lourde annoncée et attendue, le prolongement de la Francilienne – qui ne constitue vraiment pas un dossier nouveau –, ne profitera guère aux liaisons internes au département. Il est essentiel d'améliorer l'accès routier à Paris par l'A15 – actuellement saturé tous les matins dès six heures quinze –, notamment en élargissant l'A86 et en reprenant le projet de boulevard urbain de Clichy et de Saint-Ouen.
Au nombre des priorités figurent également l'achèvement du boulevard interurbain du Parisis jusqu'à l'A1 et la construction sur ses emprises foncières centrales ou latérales d'un réseau de tramway qui connecterait Roissy à La Défense en rocade, reliant ainsi les trois pôles économiques et les bassins d'habitat de l'est du Val d'Oise, de la vallée de Montmorency et du Parisis.
Actuellement, monsieur le secrétaire d'État, aucun grand projet n'est annoncé dans notre département ; le pôle universitaire de Cergy et le pôle de développement d'Argenteuil-Bezons restent exclus de la dynamique nouvelle que vous allez instaurer. Les « territoires de projets » porteurs d'avenir, d'activités économiques et d'emplois sont concentrés dans les mêmes départements que ceux qui bénéficieront de nouvelles infrastructures de transport. Le Val d'Oise subira ainsi une double peine. Seul le développement de l'aéroport Roissy-CDG est pris en considération. On peut malheureusement craindre que les objectifs annoncés – cent millions de passagers par an, cinq millions de tonnes de fret – contredisent les intérêts et les aspirations à une meilleure qualité de vie de nos concitoyens de la vallée de Montmorency et de l'est du département.
Monsieur le secrétaire d'État, vous nous présentez ce projet comme le premier acte du Grand Paris. Nous comptons sur vous pour que l'élaboration de sa seconde phase tienne davantage compte des attentes des habitants de la grande couronne. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'histoire, notamment celle des villes, connaît des moments de cristallisation où l'on sent que quelque chose se passe, ou au moins que quelque chose est possible. Cela ne signifie pas que tout deviendrait possible… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
…, mais que quelque chose de fondamental l'est. Et c'est ce qui s'est passé, jusqu'à une date récente, s'agissant de la métropole.
Alors que la métropolisation constitue un phénomène ancien, largement subi, voilà en effet que l'on essayait de penser, de vouloir, d'imaginer cette métropole. Face à cette immense responsabilité qui nous incombe à toutes et à tous, élus, citoyens, architectes, urbanistes, chercheurs, pouvoirs publics, une forme de consensus s'est créée – chose extrêmement rare dans la culture politique de notre pays, monsieur le secrétaire d'État…
…, trop rare sans doute, et donc très précieuse.
Alors que les familles politiques sont habituées à se combattre et que l'approche des élections tend généralement leurs rapports, alors que des équipes d'architectes, souvent en compétition, évitent de développer les mêmes idées, quelque chose d'extraordinaire est arrivé. Sans que soient oubliés les déséquilibres qui caractérisent notre région, les injustices qui séparent nos territoires et les responsabilités de chacun, mais grâce à un désir d'aller plus loin, quelque chose d'étonnant s'est produit : tous se sont montrés extrêmement disposés à faire progresser un projet dont le fondement, au moins, était consensuel. Cela vaut des élus comme des métropolitains, car le fait d'avoir entre les mains le sort de treize millions de ceux-ci, voire de vingt millions de Franciliens, crée une puissante obligation.
Autre source d'étonnement : les dix équipes d'architectes, françaises ou étrangères, ayant travaillé avec cinq cents chercheurs, ont développé des projets convergents, par exemple pour répondre aux questions qu'ont soulevées nos collègues Muselier et Bodin.
Il s'agissait de construire la ville sur la ville, de mailler le réseau de transports existant, là où les métropolitains vivent et se déplacent, en tenant compte de leur vie quotidienne. Cette ville serait une ville intense, selon la belle expression du président du conseil général de Seine-Saint-Denis ; une ville sobre, économe du temps de ses habitants comme de l'espace qu'elle occupe. Mais c'est aussi une ville généreuse en biomasse, par son rapport à la nature, par sa capacité à assurer une qualité de vie et à ressusciter une métropole métissée, aux fonctions mixtes, qui réserve une place à l'agriculture vivrière et qui pense, au-delà des hautes technologies, le retour à la production matérielle et à l'artisanat. Car là est aussi l'avenir, là réside l'un des atouts de l'Île-de-France, l'une des raisons de l'attractivité française, l'une des caractéristiques de la « marque France » à l'échelle internationale. C'est enfin une ville de l'après-Kyoto et de l'après-Copenhague.
Des propositions très précises ont même été formulées : ainsi, une équipe a suggéré de faire économiser vingt minutes de trajet par jour à chaque Francilien, d'ajouter cinq mètres carrés à la superficie de chaque foyer francilien, ou encore de faire baisser de deux degrés la température en Île-de-France.
Et l'on mettrait tout cela dans la loi ?
Mais ni les projets des élus, ni ceux des architectes et des urbanistes, ni le plan de mobilisation ne mentionnent le « grand huit » de M. le secrétaire d'État.
Chose étonnante : alors que le moment est historique, qu'il faudrait saisir cet instant de cristallisation, ce potentiel, vous le laissez échapper, et c'est ce qui nous déconcerte. C'est pourtant ainsi que l'on entre dans l'histoire, monsieur le secrétaire d'État. Vous avez au contraire décidé d'adopter la posture de l'homme seul contre tous…
Eh oui ! C'est cela qui est tragique !
Ce n'était pas suffisant !
…, mais aussi contre tous les architectes, et même contre le Premier ministre : nul ne trouve grâce à vos yeux. Voilà qui est non seulement étonnant, mais surtout dommage, pour vous – ce qui n'est pas bien grave –, mais aussi pour nos concitoyens, pour les Franciliens, pour les métropolitains, pour les Français, pour les contribuables.
Je vois d'ailleurs une forme d'acte manqué dans le fait que ce « grand huit » soit un métro souterrain, conçu pour traverser des territoires sans les voir, empêchant tout regard bienveillant, attentif, ambitieux…
Faut-il voir aussi la marque de l'inconscient dans le choix de l'intitulé du site internet qui sert de support à la consultation que vous avez lancée : « mon-grandparis.fr » ?
Votre Grand Paris n'est naturellement pas le nôtre, chers collègues.
S'agissant du financement, Christophe Caresche, et Gilles Carrez avant lui, ont évoqué les problèmes posés.
Une seule chose me séduit dans les hypothèses de votre projet, monsieur le secrétaire d'État, mais il faudrait que vous l'assumiez pleinement et la fassiez comprendre à vos collègues du Gouvernement : c'est la question migratoire. Vous vous donnez par exemple pour objectif de faire passer de 25 000 à 60 000 par an le nombre des créations d'emplois dans la région, alors qu'un tiers des actifs de l'Île-de-France va partir à la retraite dans les dix ans et qu'en 2030 les trois quarts des habitants supplémentaires de cette région auront plus de soixante ans. D'où viendront les personnes qui occuperont ces 60 000 emplois annuels ? Faudra-t-il vider la région Provence-Alpes-Côte d'Azur de tous ses actifs pour combler les besoins de développement du Grand Paris ? Ou faut-il plutôt envisager un apport migratoire ? Si, sans doute seul contre tous dans votre gouvernement, vous affirmez qu'il faut ouvrir largement notre pays à une immigration diverse, de toute nature – de cols blancs aux cols bleus, des ouvriers aux cadres supérieurs –, alors je serai prête à vous soutenir. Mais je doute que vous assumiez cette position et l'expliquiez à votre majorité et à vos collègues du Gouvernement.
Le consensus est précieux et rare. Il n'est, à notre sens, pas trop tard pour que vous quittiez votre posture de démiurge. Il est rarement bon de se prendre pour Dieu. Valéry disait : « Dieu a tout fait de rien, mais le rien perce ». (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Le projet du Grand Paris est ambitieux et novateur : il nous projette clairement dans l'avenir, à l'horizon 2020, date à laquelle Paris aura retrouvé sa place dans le peloton des villes les plus importantes du monde. Imaginer le Paris de demain, c'est une belle intention pour notre région.
Ce projet concerne toute la grande banlieue de Paris, mais je pense plus particulièrement à la Seine-Saint-Denis, qui, proche de Paris, mérite mieux que les portraits peu flatteurs dont elle fait trop souvent l'objet. Elle aussi a besoin de projets novateurs, de pôles de compétitivité, d'infrastructures de transports pour être valorisée, ce que votre projet rendra possible.
La méthode employée, souhaitée par le Président de la République pour réduire les fractures dans les domaines du logement, de l'environnement, des infrastructures, de la qualité de vie dans notre région, est exemplaire. Beaucoup en ont parlé et je n'y reviendrai pas, mais il faut saluer la démarche qui tient compte à la fois du court et du long termes.
Les transports, chacun le sait, constituent une préoccupation quotidienne pour nos concitoyens. En Île-de-France et plus particulièrement en Seine-Saint-Denis, cette question revêt une telle dimension qu'elle donne souvent lieu à polémiques. Il faut souligner ici que sans l'État, la nouvelle approche territoriale que vous nous proposez serait impossible à financer et donc à mettre en place.
Les Séquanodionysiens ont besoin eux aussi de la réponse immédiate que va leur apporter le projet. En plus de vingt ans, les élus socialistes et communistes ont été incapables de répondre à leurs demandes ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
L'héritage du passé est problématique à maints égards. Il convient de parler de tableau noir des transports avec des routes et des autoroutes construites au coeur même des villes, ce qui induit des nuisances considérables en termes de pollution de l'air et de pollution sonore, problèmes que la région ou le STIF n'ont pas réussi à régler et ne régleront jamais. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Les exemples sont nombreux et beaucoup pourraient être cités.
Le maillage des réseaux est particulièrement dense entre les territoires locaux mais les réseaux de transports sont aujourd'hui saturés. Le RER B est devenu une galère pour les usagers avec des retards quasiment quotidiens et les pannes d'un matériel hors d' âge et d'usage.
Le réseau routier est un point noir aux heures de pointe : il apparaît complexe, voire peu fonctionnel. Le constat est clair : nous ne disposons pas de réseaux efficaces de transports collectifs directs est-ouest et ce n'est pas le rapporteur Yves Albarello qui me contredira sur ce point.
Dans ces conditions, la question des connexions du futur réseau de transport au réseau existant est importante, j'allais dire primordiale. J'y reviendrai lors de la discussion des amendements.
La Seine-Saint-Denis n'a pas bénéficié d'une égalité de traitement, pire, elle a été victime d'une inégalité totale par rapport aux autres départements franciliens, qui s'est aggravée au long des années. Nous sommes persuadés qu'avec ce projet, ces inégalités disparaîtront.
À cet égard, il n'est plus acceptable que de nombreux ménages aux revenus modestes, n'ayant pas accès à l'automobile et utilisant les transports en commun, ne puissent en contrepartie bénéficier d'une offre satisfaisante.
Le projet d'un nouveau métro est un grand projet qui mérite l'attention de tous, avec quelques passages obligés.
Je souhaite que les gares disposant d'infrastructures existantes soient retenues comme lieux d'interconnexion entre les différents modes de transport. Hier, le rapporteur a relayé mes inquiétudes sur ce point, ce dont je le remercie. Le choix de l'implantation des futures gares se révélera vital pour les secteurs et les villes concernés.
Chacun le sait, les inégalités territoriales engendrent des inégalités sociales et, par ricochet, un développement économique difficile en dehors de certains secteurs.
Le Président de la République nous a appelés à mettre en place une politique efficace de développement urbain. C'est bien le défi des prochaines années.
Loin d'être secondaire, la question du bien vivre ou du vivre mieux va de pair avec le retour de l'attractivité et ce projet tend à y répondre. Les besoins de la population doivent être pris en compte et il est plus que temps de réparer les dégâts du passé.
La Seine-Saint-Denis doit non seulement bénéficier d'une égalité de traitement, mais faire l'objet d'un rattrapage dans le domaine des transports, du traitement des nuisances, du cadre de vie, des infrastructures intégrées, car, rappelons-le, nous sommes sinistrés. C'est précisément l'un des éléments pris en compte par ce texte.
La société du Grand Paris devra gérer ce projet avec les collectivités locales, quelles qu'elles soient, et tenir compte de leurs avis. C'est à ce prix que ce projet d'aménagement réussira.
Mais ce projet n'intéresse pas seulement les élus franciliens, il intéresse tous les Français, qu'il faut associer pleinement à ce grand projet novateur, le plus important mis en chantier depuis le général de Gaulle et le préfet Delouvrier. Lorsque ce projet sera achevé, le Grand Paris fera de notre métropole l'une des plus importantes du monde, avec des retombées pour tous les habitants de notre pays. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)
Loin, très loin de la situation analysée par Jean-François Gravier dans son célèbre Paris et le désert français, la région capitale souffre aujourd'hui d'un véritable décrochage, avec un taux de croissance à peine équivalent à la moyenne nationale alors qu'il est deux fois supérieur dans les autres villes-monde, dont elle ne fera peut-être plus partie demain, avec ses déchirures urbaines et sa fragmentation sociale.
Du fait de ce tassement, elle ne joue plus son rôle de locomotive à l'égard du reste du territoire et ne constitue plus pour la nation un atout décisif dans la compétition internationale. À cet égard, il ne faut pas commettre l'erreur de penser que ce texte ne concerne que Paris et l'Île-de-France : il s'agit bel et bien d'un projet d'intérêt national.
Si Paris est en déclin, si la région capitale est moins attractive que le Grand Londres, c'est en raison de l'absence d'une politique d'expansion suffisamment ambitieuse, dans une région qui est la moins intercommunalisée de France et où l'émiettement des responsabilités politiques ne favorise pas la conduite de projets cohérents.
Et c'est toute la France qui se trouve tirée vers le bas.
Au vu de tels enjeux stratégiques, qui pourrait reprocher à l'État d'assumer ses responsabilités régaliennes et de rompre avec l'approche trop timorée qui prévalait jusqu'à présent ?
On ne pouvait attendre plus longtemps sans prendre une initiative de grande ampleur. C'est ce qui a conduit le Président de la République, dans un esprit visionnaire, à vouloir cette ambition pour la France et à dessiner la ville de l'après-Kyoto. Il installera dès le 14 décembre un atelier des architectes ayant travaillé aux projets du Grand Paris.
Relever les défis de l'avenir, c'est penser collectivement notre développement de manière différente, sans reproduire les modèles du passé.
Avec ce projet de loi, premier acte de la création d'un Grand Paris, nous engageons une démarche originale qui consiste à imaginer d'abord une grande infrastructure de transports publics, créant une dynamique totalement nouvelle, au lieu de commencer par construire les pôles de développement, pour les relier ensuite entre eux.
C'est la première fois qu'est conçu un tel réseau en cohérence avec les problématiques de développement économique, d'urbanisme et d'architecture dans les territoires reliés.
Cette première étape, essentielle, assurera les fondations du Grand Paris à venir, tel que l'a décrit le Président de la République dans son discours abondamment cité du 29 avril. J'aurais pour ma part souhaité que son financement passe aussi par le grand emprunt,…
… car les conclusions du rapport Carrez révèlent les difficultés de financement de la première étape, qu'il faudra bien clarifier. Celui-ci doit être bien indépendant du financement de la modernisation du réseau existant qui ne peut, à l'évidence, souffrir aucun retard.
Qui peut nier que l'amélioration des transports figure au premier rang des priorités de nos concitoyens quand on sait que la RATP transporte chaque jour – et dans quelles conditions – 10 millions de voyageurs ?
Une des caractéristiques de ce métro automatique en rocade, c'est qu'il est compatible avec le plan de mobilisation des transports d'Île-de-France et qu'il répond à une faiblesse majeure de notre réseau, à savoir la prédominance des liaisons radiales en étoile sur les liaisons en rocade.
Ces deux projets sont complémentaires, comme en atteste le prolongement au sud et au nord de la ligne 14, la démarche du Grand Paris bénéficiant du plan de mobilisation en amont, tout en diminuant à terme de 10 à 15% le trafic sur la ligne 13, totalement saturée.
Cette nouvelle offre de transport soustraira de la circulation parisienne pas moins de 150 000 à 200 000 véhicules aux heures de pointe et allégera de 15 à 20 % le nombre de passagers sur les lignes intérieures parisiennes.
Il est évidemment primordial que les liaisons radiales soient connectées à la rocade, notamment dans les zones proches des dessertes de métro, et intègrent le réseau maillé des bus. L'intermodalité est une des clefs du succès.
La prolongation d'Éole constituerait aussi une autre liaison ferroviaire est-ouest sous la capitale, éventuellement partagée avec des TGV et ouvrant une porte vers la Normandie et Le Havre.
Plusieurs territoires de la capitale, j'y insiste, monsieur le secrétaire d'État, méritent eux aussi de faire l'objet de contrats de développement territorial. Je pense à Bercy, Broussais, Seine-Rive Gauche, et particulièrement Batignolles, où un immense espace est à urbaniser.
Les nouveaux instruments juridiques mis en place permettront de surmonter les lourdeurs procédurales et de réduire les délais de réalisation, car on ne peut plus perdre de temps dans la compétition mondiale. Il s'agit de satisfaire les attentes de nos concitoyens tout en respectant les compétences des échelons locaux, les procédures de consultation, notamment celle du STIF, et en tenant compte des préoccupations environnementales.
Le recours à la commission nationale du débat public, l'amélioration de la représentation des collectivités locales, au sein desquelles nous proposons d'inclure les arrondissements parisiens concernés, et un meilleur encadrement juridique et financier des interventions ont permis au rapporteur d'améliorer le texte.
Comme le Président de la République l'a déclaré dans son discours fondateur du 29 avril dernier : « le Grand Paris, c'est l'État qui prend ses responsabilités, c'est l'État qui se donne les moyens juridiques d'agir, mais c'est aussi l'État qui associe, qui ne décide pas seul. »
Mes chers collègues, ne laissons pas passer cette chance historique, car nos concitoyens attendent de nous non de vaines querelles, mais que leurs préoccupations soient enfin prises en compte. Nous pourrons le faire avec ce projet ; ne les décevons pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Mes chers collègues, avant de donner la parole à M. Pupponi, je souhaite apporter quelques précisions sur le déroulement de nos travaux. Je propose à tous les orateurs inscrits dans la discussion générale qui sont présents de s'exprimer, à condition qu'ils ne dépassent pas leur temps de parole – bien que je ne puisse pas les y contraindre puisque la procédure du temps global s'applique.
Vous avez la parole, monsieur Pupponi.
Je m'étonne de constater que peu d'entre nous ont essayé de comprendre pourquoi la région parisienne était dans une situation telle qu'elle nécessite, de l'avis général, la mise en oeuvre d'un grand projet. Si les réseaux de transports fonctionnent mal et si cette région très riche comprend des zones de relégation, c'est peut-être un peu à cause de l'État. Souvenez-vous de cette phrase du général de Gaulle disant au préfet Delouvrier, alors qu'il survolait en hélicoptère la région parisienne : « Mettez-moi de l'ordre dans ce bordel ! ». C'est bien l'État qui, dans un premier temps, a décidé de construire les grands ensembles, puis les villes nouvelles très loin de Paris, et les réseaux de transports qui aujourd'hui fonctionnent mal.
Je trouve mes collègues de la majorité quelque peu culottés de mettre en cause, en matière de réseaux de transports, la région, le STIF et Jean-Paul Huchon, puisque celui-ci ne préside ledit STIF que depuis trois ans…
Pendant des décennies, c'est l'État qui l'a présidé, et qui a construit les réseaux de transports et acheté le matériel, ce qui oblige le ministre ici présent à mettre en oeuvre en catastrophe un projet dit du Grand Paris, mais qui est, de fait, un réseau de transport destiné à suppléer, à compléter le réseau actuel et à tenter de remédier à ses dysfonctionnements.
On peut espérer que le projet qui nous est soumis tentera de remédier aux dysfonctionnements qui existent entre les zones très riches et les zones très pauvres d'une même région. Mais on constate, monsieur le secrétaire d'État, en examinant ce projet, que le Val-d'Oise semble en être le grand oublié puisqu'il n'y aurait aucune gare du « grand huit » dans ce département – hormis le cas de Roissy. On ne peut accepter qu'un département qui compte 1,2 million d'habitants soit ainsi exclu d'un tel projet. Le projet du Grand Paris doit concerner tous les départements franciliens, sans quoi il ne pourra pas porter ce nom.
De plus, beaucoup de territoires sont relégués. Certes, un effort est réalisé en ce qui concerne Clichy-Montfermeil, villes emblématiques suite aux événements de 2005. En effet, si chacun s'accorde à reconnaître que nous sommes dans une belle région malgré certains dysfonctionnements, il ne faut pas oublier que ce territoire s'est embrasé il y a quatre ans. Le monde entier avait alors découvert l'Île-de-France et ses émeutes urbaines, ses drames humains.
L'année dernière, à Villiers-le-Bel, 120 policiers ont été la cible de tireurs. Deux d'entre eux ont été blessés par des munitions de chasse normalement destinées aux sangliers. C'est aussi cela, la dure réalité du territoire francilien.
Sommes-nous certains que l'ensemble des zones reléguées de la région parisienne, en particulier celles de Seine-saint-Denis et du sud du Val-d'Oise, seront enfin désenclavées grâce à votre projet ? En examinant le projet de « grand huit », je n'ai pas le sentiment que toutes ces zones le seront. Si le projet que vous portez et que nombre d'entre vous appellent de leurs voeux ne rétablit pas une égalité territoriale sur l'ensemble de la métropole francilienne, nous n'aurons pas réparé cette erreur historique et nous aurons pris devant l'histoire une responsabilité grave.
S'agissant enfin de l'article 18 qui concerne les contrats de développement territorial, nous ne pouvons qu'être favorables au fait d'associer les élus et les habitants à la création d'une gare sur leur territoire communal. Mais ce qui me gêne, c'est que ces contrats sont facultatifs : cela signifie que l'État peut passer outre et décider, dans sa toute-puissance, avec un texte dérogatoire du droit public, d'imposer sur un territoire communal la construction d'une gare et l'aménagement des alentours. J'espère que nous pourrons revenir sur ce contresens historique.
Je suis député-maire de Sarcelles, ville qui est le parfait exemple de ce qu'il ne faut plus faire. Pourtant, c'est ce que vous risquez de reproduire avec ces contrats de développement territorial s'ils ne sont pas contractualisés de manière obligatoire.
Sarcelles, c'est le Grand Ensemble. La Caisse des dépôts y avait acheté des terrains et construit autoritairement une ville de 42 000 habitants. Pendant trente ans, elle a attribué tous les logements et décidé tout l'aménagement de la ville. Cinquante ans plus tard, on se retrouve avec un ghetto social, ethnique et urbain…
Voilà ce qu'il ne faut pas recommencer. La construction de nouveaux quartiers, éventuellement de nouvelles villes, doit se faire en concertation avec les élus et les habitants. Car n'oubliez pas, monsieur le secrétaire d'État, que ce sont les élus qui gèreront ensuite ces villes. Si vous ne leur donnez pas les moyens de les administrer, vous créerez les ghettos de demain.
Sur l'article 18, nous nous battrons, car il ne faut pas recommencer les erreurs du passé. Tirons les leçons de ces erreurs et faisons en sorte que ce Grand Paris que nous appelons tous de nos voeux se bâtisse en concertation avec les élus et la population. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Conforter la place de premier plan qu'occupent Paris et l'Île-de-France face à la concurrence croissante des grandes métropoles internationales, tout en réduisant les inégalités territoriales, tel doit être le défi que votre projet de loi sur le Grand Paris doit relever. L'État se doit de proposer un développement équilibré pour toute la région Île-de-France.
Ce projet ne peut pas réserver les équipements en infrastructures au coeur de l'agglomération parisienne, qui concentre déjà les principales infrastructures de transport en commun. Ignorer les départements de la grande couronne reviendrait à ghettoïser plus de 5 millions de Franciliens qui participent au dynamisme de notre région.
Les emplois, les équipements et les transports en commun ne peuvent être réservés à Paris et à la petite couronne, cependant que la grande couronne n'aurait droit qu'aux logements et aux routes. L'Île-de-France ne peut pas avancer à deux vitesses. Paris et la petite couronne ne peuvent à elles seules contribuer à la dynamique de développement de la région, comme le dessinait le projet du SDRIF voté par la région.
Face à la vision du SDRIF qui concentre les efforts d'investissement structurant sur le coeur de l'agglomération, le projet de Grand Paris doit lui substituer une vision claire et puissante de l'organisation de la totalité du territoire francilien.
Cela suppose que soit fait le choix d'une répartition juste et équilibrée des investissements et des infrastructures d'équipement, le choix d'objectifs de construction de logements dont nul ne puisse s'exonérer, chacun devant prendre sa part, le choix d'un développement plus marqué des différents pôles d'emplois. Ces choix répondraient aux attentes et préoccupations des Essonniens et de leurs élus, car la situation de l'Essonne est très préoccupante aujourd'hui. Elle a vu sa population croître sans que les infrastructures de transports suivent.
Depuis sa création en 1965, l'Essonne a vu sa population plus que doubler, passant de 480 000 à 1 207 500 habitants. A elle seule, elle a absorbé plus de 25 % de la croissance démographique de toute l'Île-de-France. Malheureusement, celle-ci ne s'est pas accompagnée d'une croissance économique équivalente.
Aujourd'hui, l'Essonne compte 597 000 actifs et seulement 450 000 emplois. Cela signifie concrètement que de nombreux Essonniens sont contraints de travailler souvent très loin de leur domicile, au prix de plusieurs heures de transports, dans des conditions très souvent difficiles à cause d'infrastructures de transports vétustes, voire inexistantes dans le cas des déplacements de banlieue à banlieue, et en tout cas inadaptées aux besoins de nos habitants.
Faute d'avoir été correctement étudiés par la région et le conseil général de l'Essonne, les projets de transport du département inscrits au contrat de plan 2000-2006 n'ont toujours pas été réalisés. Il s'agissait de la tangentielle ferrée sud et du tramway Villejuif-Juvisy. Pire, le contrat de projet 2007-2013 aggrave les inégalités. L'Essonne a vu ses crédits réduits de 55 % par rapport aux précédents, eux-mêmes insuffisants.
C'est pourquoi les Essonniens et les élus attendent beaucoup de la réalisation du Grand Paris. Ils attendent surtout que le futur réseau de transports améliore le réseau existant, et que certains projets indispensables soient reconnus et dotés des crédits nécessaires à leur réalisation urgente.
Il faut faire fonctionner correctement les lignes C et D du RER, mener à bien le projet de tram-train Massy-Évry, avatar de la tangentielle ferrée sud annoncée et attendue depuis vingt ans, effectuer la prolongation du tramway Villejuif-Athis-Mons jusqu'à Juvisy et au-delà vers Évry et Corbeil, réaliser les pôles multimodaux de Massy et Juvisy, réaliser des transports en commun en site propre sur la RN 20 d'Arpajon à Massy , les transports en commun en site propre Massy-Les Ulis, Massy-Orly, Val d'Yerres-Val de Seine, Orly et sur la Francilienne.
Toutes ces opérations sont essentielles et urgentes pour la qualité de vie des Essonniens et le développement économique du département. Elles répondent à une logique de déplacements de proximité attendue par les habitants.
Sur ces interrogations et préoccupations partagées par l'ensemble des élus, pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'État, apporter des réponses afin de les apaiser ?
S'agissant plus particulièrement de la ligne C du RER, je veux appeler votre attention sur le schéma directeur adopté par le conseil d'administration du STIF le 8 juillet dernier. Les trains deviendront omnibus entre Choisy et Bibliothèque François Mitterrand et les Essonniens supporteront des temps de transport allongés de près de dix minutes. Le passage à six voies entre Juvisy et Paris, seule solution pour apporter une réponse pérenne, n'est même pas évoqué par le STIF et les travaux destinés à régler les problèmes de régularité ne sont pas programmés à court terme. Ce projet est catastrophique pour les Essonniens. Le passage à six voies entre Juvisy et Paris coûterait 1 milliard d'euros. Ce montant peut-il être financé par le projet du Grand Paris ou par le plan de mobilisation de la région pour les transports ?
Concernant le pilotage de l'aménagement du plateau de Saclay, pouvez-vous nous apporter quelques éclaircissements sur la gouvernance de la future instance de décision, ses compétences, sur les transports et l'accessibilité au plateau de Saclay et sur l'avenir des terres agricoles ?
S'il ne s'agit pas d'un EPCI classique, comment les élus des communautés d'agglomération et des quarante-neuf communes pourront-ils faire valoir leur point de vue aux côtés des acteurs économiques et du monde scientifique ? Pourront-ils bénéficier d'une représentation adaptée et efficace ? Aujourd'hui; la mission de préfiguration de l'établissement public a jugé utile et important d'avoir un échange régulier avec les communes. Elle réunit périodiquement les quarante-neuf maires en assemblée générale pour les consulter sur le projet.
Une telle assemblée générale, qui donne satisfaction à tous et permet d'avoir une coopération et une concertation fine et efficace, pourrait-elle être pérennisée ?
S'agissant des compétences et du périmètre, comment seront conciliées les compétences de l'OIN avec celles de l'établissement public, des quatre communautés d'agglomération et de l'agence d'urbanisme qu'il est envisagé de créer ? Comment la cohérence du projet sera-t-elle assurée ?
Le futur établissement public sera-t-il l'aménageur exclusif du territoire du plateau ? D'autres aménageurs pourront-ils intervenir ? Dans l'affirmative, comment s'articuleront leurs interventions, toujours dans le souci d'assurer la cohérence du projet ?
Une forte attente concerne l'accessibilité du plateau. C'est un véritable problème. La mission de préfiguration de l'OIN est très consciente de cette difficulté. Aujourd'hui, les projets routiers sont les grands absents du projet. Il conviendrait de les réintroduire rapidement dans la réflexion, sinon le plateau de Saclay risque d'être inaccessible.
Quel sera l'avenir de l'aérodrome de Toussus-le-Noble ? Si la présence d'un tel équipement peut être une chance pour le développement et l'attractivité du territoire, la question des couloirs aériens est un sujet de préoccupation pour de nombreuses communes, qu'il convient de prendre en compte dans la réflexion sur l'avenir de cet aérodrome.
Le très haut débit, moyen de transport de l'information, est également absent du projet.
Or, il est difficilement concevable de développer un cluster sans un réseau haut débit hyper performant. Quelles mesures comptez-vous prendre à ce sujet ?
Un dernier point d'inquiétude, qui devrait être levé grâce à l'adoption en commission de l'amendement de mon collègue Pierre Lasbordes, concerne la protection et la conservation des terres agricoles. Le domaine agricole fait partie intégrante de l'identité du territoire. Un article spécifique lui est consacré dans le projet de loi, mais il faut aller plus loin pour répondre aux besoins des agriculteurs.
Permettez-moi enfin, monsieur le ministre, de vous faire une suggestion. Pour donner une visibilité mondiale au Plateau de Saclay, il faudrait lui délivrer un code postal spécifique, comme ce fut fait pour Paris-La Défense. De la même façon que l'on s'adresse aujourd'hui du monde entier à Paris-La Défense, on s'adresserait demain à Paris-Saclay. Le code postal Paris-La Défense a donné une visibilité mondiale à un quartier d'affaires. Eh bien, le code postal Paris-Saclay donnera une visibilité mondiale à ce pôle scientifique et universitaire auquel nous souhaitons le plus grand succès !
Philippe Goujon évoquait à l'instant le souvenir de Jean François Gravier, auteur de Paris et le Désert français. Depuis lors, la politique d'aménagement du territoire et les lois de décentralisation ont rééquilibré la géographie de notre pays.
C'est désormais à l'échelle planétaire qu'il faut raisonner. Notre pays a besoin d'une région capitale puissante pour relever les défis de la mondialisation et je suis satisfait de voir que l'État assume à nouveau ses responsabilités en renouant, pour la première fois depuis Paul Delouvrier, avec une vision ambitieuse et volontariste de l'avenir. Notre région doit pouvoir rivaliser avec les grandes métropoles mondiales, et avoir un effet d'entraînement et de rayonnement sur l'ensemble de notre pays.
Le projet de loi qui nous est soumis traite à la fois la question fondamentale des transports – j'observe avec intérêt que cette fois on ne met pas la charrue avant les boeufs – mais il met aussi en place les outils qui serviront à réaliser les grandes opérations d'urbanisme évoquées par le Président de la République grâce, notamment, aux contrats de développement territorial.
La création d'un métro automatique de grande capacité en rocade aura un effet puissamment structurant sur le développement de la région, tout en améliorant notablement la vie des habitants, en facilitant leurs déplacements. Ceux qui opposent le présent à l'avenir ne font que répéter les erreurs du passé car il faut tout à la fois anticiper les besoins et améliorer la qualité du service rendu aux usagers des réseaux existants, dont nous connaissons tous l'état. De ce point de vue, le financement indépendant de la grande rocade est le meilleur moyen de garantir que le STIF pourra réaliser les travaux de modernisation du réseau existant que nous voulons tous.
Ce métro rapide jouera un rôle déterminant pour l'attractivité du territoire. Puissamment structurant, il insufflera un nouveau dynamisme au troisième pôle économique de l'Île-de-France – Saint-Quentin-en-Yvelines, Versailles et Vélizy – mais aussi à l'opération d'intérêt national de Saclay qu'il reliera aux autres grands pôles régionaux. Sans lui, l'OIN atteindrait difficilement sa maturité et perdrait en cohérence. François Lamy a évoqué le transport en commun en site propre, mais celui-ci ne suffira malheureusement pas à satisfaire les besoins en déplacements.
Faut-il rappeler ici que l'OIN ne peut se résumer à Saclay ? Elle couvre un vaste ensemble sur les Yvelines et l'Essonne.
Enfin, je souhaite évoquer les relations de complémentarité entre l'OIN et le Parc naturel régional de la Haute Vallée de Chevreuse. À l'instar de l'équilibre qui s'est instauré avec le pôle de Saint-Quentin en Yvelines, l'attractivité de l'OIN sera enrichie par le voisinage du premier parc naturel régional d'Île de France, en termes de qualité et de cadre de vie. Le développement économique local et le développement durable pourront aussi trouver leur compte dans la construction d'une filière bois valorisant la ressource du parc naturel régional.
Pour conclure, je suis satisfait de l'adoption en commission d'une série d'amendements qui ont permis d'améliorer le texte en assurant une meilleure protection des espaces naturels et agricoles du plateau de Saclay, en accordant une meilleure place aux élus locaux et en reconnaissant le rôle des associations de protection de l'environnement.
II me reste quelques amendements dont j'espère qu'ils recueilleront des avis favorables, mais en toute hypothèse j'apporte mon soutien à ce projet de loi ambitieux pour notre région, ses habitants et plus largement la place de notre pays dans la compétition mondiale. Je vous remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Lorsque le Président de la République, le 29 avril dernier, à la Cité de l'architecture et du patrimoine, se découvrait un nouveau grand chantier, la construction d'un Grand Paris, il a souhaité convoquer les écrits de Victor Hugo, voulant poser les bases d'une ville de Paris qui, « étant l'héritière de Jérusalem, d'Athènes et de Rome, se devait d'incarner le vrai, le beau, le grand ».
Sept mois plus tard, qu'en est-il de ce grand projet ?
À cette heure tardive, je ne voudrais pas reprendre ce qui a été si bien dit par les élus de mon groupe et ceux du groupe GDR, mais pointer ce double contresens, cette régression fondamentale, ce retour en arrière que représente le projet de loi soumis aujourd'hui à notre discussion.
Contresens déjà, dans le cadre national qui est le nôtre depuis les grandes lois de décentralisation de 1982, que cette intervention de l'État pour reprendre la main, dans un déni démocratique, sans concertation préalable et véritable avec les élus. On cite Delouvrier, mais Delouvrier, c'est de Gaulle, et de Gaulle, c'est l'État jacobin, les trente Glorieuses, une croissance économique forte – sur des bases productivistes qui, avouons-le, ne s'embarrassaient pas à l'époque de préoccupations environnementales et encore moins de préoccupations sociales.
Sans doute personne, en effet, à l'époque ; mais nous sommes aujourd'hui en 2009, en pleine crise économique et sociale. François Pupponi rappelait à l'instant les événements qui se sont produits dans les banlieues voici trois ou quatre ans. Nous voyons bien que nous avons changé d'époque. Ce projet de loi n'en apparaît que plus décalé.
L'élu parisien que je suis aimerais soulever un autre contresens. Rappelons-nous que Paris n'a un maire que depuis 1977. Jusqu'alors, c'était un préfet qui gérait Paris. Les mairies d'arrondissement sont nées ensuite grâce à la loi PLM de 1982 mais il a fallu attendre l'élection de Bertrand Delanoë le 18 mars 2001 pour qu'enfin Paris sorte de son superbe isolement.
Parfaitement, monsieur Lamour. Vous n'étiez pas encore élu de Paris, vous n'avez pas vécu cette rupture historique : jusqu'à la victoire de la gauche à Paris en 2001, on disait avec raison que Paris envoyait au-delà du périphérique ses pauvres, ses morts et ses déchets. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Oui, il y a bien eu une rupture historique en 2001. Patiemment, il a fallu rétablir des rapports de confiance, faire oublier le passé aux élus franciliens, aux habitants des départements d'Île-de-France. Je ne prendrai qu'un seul exemple, celui de Jean Tibéri, encore élu parisien, siégeant toujours sur nos bancs. Souvenez-vous du jour où il prit cette folle décision, mais qui disait tout, de restreindre l'accès au périphérique extérieur pour tous les Franciliens qui devaient se rendre, souvent pour des raisons professionnelles, au coeur de la capitale. C'était l'exemple même d'un isolement honteux, d'un égoïsme inconcevable. La rupture s'est en effet produite en 2001. Il a fallu retisser des rapports de confiance, construire des partenariats avec des élus de droite comme de gauche,…
…bâtir patiemment Paris Métropole en associant bien entendu la région Île-de-France. C'est cela qui est en cause aujourd'hui, cette patiente reconstruction d'un Paris qui noue avec les autres départements de la région des rapports d'égalité et de solidarité. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
Je suis désolé, mes chers collègues, de vous avoir réveillés à une heure si tardive, mais dans le respect du délai qui m'est imparti, je voudrais vous dire que nous porterons tout au long de ces débats une vision d'un Grand Paris, s'il faut l'appeler ainsi, bien différente de celle de votre projet de loi, qui se résume à une ligne de métro automatique, pourvue de quarante nouvelles gares.
Bâtir un grand Paris, c'est vouloir corriger les injustices qui frappent notre territoire et aider chacun à trouver sa place dans une ville du 21e siècle. C'est également vouloir une métropole plus solidaire, plus agréable à vivre, et plus accueillante pour le monde. Une métropole qui connaît certes son passé, mais se tourne avec enthousiasme vers son avenir. Si un tel esprit nous porte, alors assurément nous pourrons faire du Grand Paris une ville-monde au service de tous ses habitants. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Ce projet de loi doit nous permettre de faire émerger une gouvernance efficace et de mettre à disposition des instruments juridiques nouveaux pour donner à la région capitale, frappée d'inertie, les moyens de tenir son rôle dans la compétition entre les grandes métropoles mondiales.
Je me réjouis de la prochaine naissance d'un grand projet de développement, piloté par une structure de mission originale, que j'appelais de mes voeux depuis le lancement du débat sur le Grand Paris par le Président de la République. Cette idée d'une entité dynamique, chargée d'engager des projets, malgré l'inertie des décideurs territoriaux actuels, avait d'ailleurs présidé, voici près de dix ans, dans le même esprit, naturellement plus modeste, à la création de l'Association des collectivités territoriales de l'Est parisien, l'ACTEP, pour rééquilibrer la région francilienne au profit de l'Est parisien, et notamment du territoire situé entre le périphérique et Marne-la-Vallée, trop souvent négligé, voire oublié.
L'intérêt du métro en rocade pour donner une nouvelle dimension aux pôles de compétitivité franciliens est incontestable. Il devra cependant desservir, non seulement les grands pôles de développement économique, mais aussi les territoires. Cela passe, notamment, par un renforcement des pôles multimodaux reliant le « grand huit » aux lignes radiales existantes. La double boucle donnerait ainsi tout leur sens aux prolongements de lignes prévus par le contrat de projet État-région.
Je pense, en particulier, à la nécessité de relier – je vous en ai souvent parlé, monsieur le ministre – la gare du Val de Fontenay à celle de Champigny, point de passage envisagé de la double boucle. Nous proposons de prolonger la ligne 1 du métro, ce qui est déjà prévu jusqu'au Val de Fontenay par les études inscrites au contrat de projet État-Région. C'est l'une des pistes avancées par l'association Orbival, qui défend, de longue date, la création d'un métro en rocade afin d'améliorer la desserte du territoire val-de-marnais. Une telle solution pourrait être une alternative acceptable si Val de Fontenay n'était pas situé sur le tracé du « grand huit ».
Le Val de Fontenay constitue, en effet, un enjeu majeur pour le rééquilibrage de la région au profit de l'Est parisien. Bien desservi par le réseau autoroutier – A4, A86 –, sa gare est l'une des plus fréquentées d'Île-de-France, et le raccordement au métro automatique que nous demandons permettra à ce territoire de développer tout son potentiel.
Ainsi, entre Fontenay-sous-Bois et les communes environnantes, une étude est en cours. Ce secteur recèle des possibilités de développement urbanistique considérables, tant en termes d'activités tertiaires que d'équipements publics et de logement – bien que, en matière de logements, nous soyons déjà bien lotis. Une étude récente démontre qu'une surface de plus de 500 000 mètres carrés pourrait être mobilisée.
Le prolongement de la ligne 1 est d'autant plus pertinent qu'il permettrait de relier Val de Fontenay à la Cité Descartes. Celle-ci, répartie sur les territoires de Marne-la-Vallée, Champs-sur-Marne et Noisy-le-Grand, va devenir un véritable cluster économique, modèle, qui plus est, en matière de développement durable.
Son université, ses cinq écoles, ses deux organismes de recherche, ses vingt-sept laboratoires – soit, au total, 1 700 chercheurs et ingénieurs spécialisés dans le développement durable – en font déjà un site de référence. Avec l'université Paris XII Val-de-Marne, avec laquelle elle forme le pôle de recherche et d'enseignement supérieur « Université Paris-Est », elle a fortement profité de l'opération Campus.
L'arrivée du métro automatique, les nombreux projets de développement, comme le pôle scientifique et technique de l'écologie, vont encore renforcer son attractivité et lui donneront une dimension nouvelle, la rendant capable de rivaliser avec les plus grandes institutions mondiales. La proximité du futur lycée international de l'Est parisien, projet imaginé par les élus de l'ACTEP, et enfin engagé par la région, sera un atout supplémentaire.
Allons plus loin. Je crois qu'il faudra profiter de cette dynamique pour faire le lien entre ce pôle, encore en devenir, et les institutions déjà établies à l'est du périphérique, afin que ces dernières, dont la localisation est souvent méconnue du grand public, puissent être rassemblées au sein d'un réseau cohérent et, ainsi, être mieux identifiées, développées, fréquentées.
Les institutions constitutives de ce que l'on pourrait appeler un « axe bioculturel », placé sous le signe du développement durable, pourraient être regroupées autour de trois grands thèmes. « L'histoire et la culture » tout d'abord, avec le château de Vincennes et le service historique de la Défense, la cité de l'immigration, le musée de la Résistance nationale. Ensuite « la nature et le corps », avec le muséum d'histoire naturelle, le zoo et l'hippodrome de Vincennes, l'école vétérinaire de Maisons-Alfort, l'INSEP, la Marne. Enfin « l'image et les sciences », avec l'Institut géographique national, Météo France – prochainement installée à Saint-Mandé –, le SHOM, l'INA, la SFP.
Ainsi regroupées, ces institutions seraient amenées à travailler ensemble. Ce couloir bioculturel donnerait naissance à des synergies intellectuelles, culturelles, scientifiques et deviendrait, par là même, un ensemble d'institutions complémentaires et compétitives, tournées vers l'innovation, la créativité et le « plus culturel » qui donnerait enfin une identité forte, et insufflerait un dynamisme nouveau à l'est parisien.
Enfin, l'ACTEP étudie une autre proposition : la transformation – assez originale, il faut bien l'avouer – d'infrastructures autoroutières en avenues métropolitaines, combinant régulation de la vitesse et voie dédiée à un transport en commun en site propre. Un tel projet permettrait non seulement de réduire la pollution atmosphérique et sonore, mais aussi de reconquérir les rives des autoroutes. Une telle solution pourrait notamment être envisagée pour l'autoroute A4. L'ACTEP a lancé des études à ce sujet.
Ce texte, monsieur le secrétaire d'État, permet donc l'émergence de grands projets structurants. Pour qu'il soit un réel succès, il faudra savoir articuler le global avec le local. L'émergence de pôles de dimension mondiale devra être combinée à un aménagement au plus près des territoires et des populations.
Il faudra, pour y parvenir et donner toute sa force à la Société du Grand Paris – M. le rapporteur y a travaillé –, octroyer une large place aux populations, à la faveur du débat public conduit par la commission nationale. Il convient naturellement d'y associer le club des architectes et les élus locaux dans le cadre des contrats de développement territoriaux. Ils sont en effet les mieux à même de faire le lien entre le quotidien et l'avenir.
Je crois en ce projet ; je le voterai avec confiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, il y a sept mois, le Président de la République nous invitait à faire preuve d'audace et d'ambition pour le Grand Paris. Il scellait alors l'acte I de la révolution métropolitaine du XXIe siècle.
Sept mois plus tard, nous sommes au rendez-vous de l'acte II de ce Grand Paris que nous appelons de nos voeux. Il est vital : il concerne les transports.
Le Grand Paris est avant tout un projet politique au sens le plus noble du terme : nous décidons, en toute responsabilité, de changer durablement le quotidien de nos concitoyens.
L'acte I a été celui des dix cabinets d'architectes, mandatés par le Président de la République.
C'est désormais à nous, députés, d'en poser la première pierre sur le fondement de votre excellent rapport, monsieur le rapporteur.
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, sachez au préalable que tous les élus UMP de Paris accompagnent cet acte II avec satisfaction.
Nous nous réjouissons que cette vue d'ensemble inclue Paris, tant il est vrai que la capitale concentre une accumulation de dysfonctionnements qui affectent le quotidien de ses habitants et des Franciliens. Ainsi, le texte propose des réponses précieuses auxquelles nous avons souhaité apporter notre contribution.
Nous ne pouvons ni opposer Paris au Grand Paris, ni faire le Grand Paris sans Paris. Le meilleur exemple, je crois, est le projet de rassemblement des états-majors des armées et du ministère de la défense dans ma circonscription, à Balard. Ce projet de « cité de la défense », qu'a évoqué le Président de la République dans son discours du 29 avril dernier, prendra corps au coeur de Paris, dans le XVe arrondissement cher à notre collègue Philippe Goujon.
Le nouveau tracé qui nous est proposé doit prendre en considération un certain nombre de problématiques parisiennes. C'est par exemple le cas dans le XVIIe arrondissement, évoqué par le Président de la République lui-même. Il s'agit d'y installer la cité judiciaire. Je suis très heureux, monsieur Pupponi, que vous soyez resté pour m'écouter, quoique j'ignore si c'est bien pour cela que vous êtes resté …
Vous avez fait référence à la situation difficile de Sarcelles. Vous avez évoqué le problème des ghettos, avec une mixité sociale plus que déséquilibrée. Je vous rappellerai seulement que dans ces quartiers du XVIIe arrondissement, le maire de Paris Bertrand Delanoë et sa première adjointe, Mme Hidalgo, rêvent d'entasser des familles dans des tours de logements sociaux hautes de cinquante mètres ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
Êtes-vous prêts à échanger la population de Sarcelles contre celle de votre circonscription, monsieur Lamour ?
Je vous associe à M. Delanoë et Mme Hidalgo, madame Lepetit, prenez-en aussi pour vous !
Faut-il rappeler qu'ils veulent, en dépit des équilibres sociologiques élémentaires, atteindre dans ces secteurs le taux de 55 % de logements sociaux ? Voilà quels sont leurs objectifs !
L'histoire urbaine de notre pays a d'ores et déjà disqualifié – et je pèse mes mots – de telles lubies dévastatrices de notre tissu social.
Vous avez récemment rencontré Mme Hidalgo et M. Delanoë, monsieur le rapporteur, mais ils ont bien dû se garder de vous apporter toutes ces précisions.
C'est la raison pour laquelle nous avons souhaité présenter des amendements concernant tous ces secteurs et je regrette vivement, monsieur le secrétaire d'État, qu'ils aient été frappés d'irrecevabilité. Je respecte évidemment la lettre de la Constitution et celle du Règlement de l'Assemblée, mais je reste très perplexe sur l'opportunité d'une telle décision. En tout cas, cela nous prive d'un débat fondamental, voire fondateur ; débat qui a pourtant lieu ailleurs, dans d'autres assemblées. Si l'État se saisit à juste titre du projet du Grand Paris, il doit s'en saisir complètement. Je souhaite connaître votre position sur le sujet, monsieur le secrétaire d'État, vous qui avez fait des contrats de développement la pierre angulaire de votre dispositif.
Mais pour fluidifier les transports, il faut aller plus loin : il faut fluidifier également l'usage de la voiture. Il est donc fondamental que les futures gares parisiennes prévoient systématiquement une offre proportionnée de stationnement souterrain. Si nous ratons ce rendez-vous, alors la pagaille que nous connaissons déjà à Paris sera définitive.
Enfin, en ce qui concerne les innovations en matière de transports, il est essentiel que l'un des principaux liens entre Paris intra muros et le reste du monde, à savoir l'accès à l'aéroport Charles-de-Gaulle, soit parfaitement opérationnel. Nous devrons donc prévoir la ligne idoine mais également l'intermodalité la plus efficace vers tous les sites concernés, Paris aussi bien que la Défense.
Ces innovations ne peuvent exister et prospérer sans rester en phase avec l'acte fondateur, l'acte I : les travaux des architectes. Et ce n'est pas pour rien que le Président de la République doit de nouveau les rencontrer dans les prochains jours. Ces innovations ne peuvent pas non plus se faire, à court, moyen et long termes, sans la participation des élus locaux et, pour Paris, des maires d'arrondissement.
Ce que nous proposons d'ailleurs, ce n'est pas une forme de gouvernance du Grand Paris. Ce que nous appelons de nos voeux, c'est une gouvernance réaliste de l'urbanisme du Grand Paris.
Enfin, le présent projet de loi est une invitation à l'audace. C'est fort de cette audace, monsieur le secrétaire d'État, que nous vous proposons une autre piste de travail : celle de l'accessibilité des transports. Les nouvelles gares seront accessibles à tous, mais que se passera-t-il, ensuite, quand on arrivera à Paris, avec des gares et des stations inadaptées, vieillissantes et encerclées d'escaliers, nouveaux murs de Berlin sociétaux de notre quotidien ?
Oui, monsieur le secrétaire d'État, il est temps de lancer ce grand défi, ce grand chantier, cette grande ambition ; le Grand Paris doit être celui de l'accessibilité.
Cette révolution a un coût. Vous le savez, je suis partisan de l'utilisation d'une partie du futur grand emprunt pour alimenter le capital de la Société du Grand Paris – j'en profite pour saluer le travail particulièrement intéressant de notre collègue Gilles Carrez. Ainsi, avec d'autres collègues, nous avons souhaité que ce soit la pertinence des projets qui fixe le plafond de cette ressource, indispensable au rebond et au développement de notre pays dans les années qui viennent.
Vous l'avez compris, ce projet est un formidable rendez-vous. Nous partageons cette ambition commune. C'est que nous restons dans l'histoire aussi par notre capacité à rendre notre quotidien meilleur et plus juste. C'est là toute notre responsabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, ultime orateur inscrit ce soir.
Aux termes de l'article 1er du projet, dans le texte de la commission, le Grand Paris a pour objet de susciter le développement de l'ensemble de la région capitale et vise à une plus grande solidarité entre territoires. Mon but n'est pas de me lancer dans un plaidoyer pro domo, mais au moins d'appeler votre attention sur l'impact qu'aura le Grand Paris sur les franges rurales de la région Île-de-France.
Même si le périmètre du Grand Paris est circonscrit à un territoire compris dans les quatre ou cinq premières zones de la carte orange, les habitants qui résident au-delà, comme ceux du sud des Yvelines, département qui ne vous est pas complètement inconnu, monsieur le secrétaire d'État, s'interrogent, comme leurs élus, sur l'impact de ce projet sur leur territoire.
Les projets de transport, d'aménagement, de constitution de grands centres de recherche, avec les emplois et les logements qu'ils devraient créer, auront sans aucun doute un impact important sur des territoires ruraux marqués par quatre caractéristiques qui posent déjà problème à nos élus. D'abord, la population croît rapidement ; ensuite, l'offre de transport est au mieux la même qu'il y a quelques années, quand sa qualité ne diminue pas ; en outre, la capacité de construction de logements est comme partout limitée par la protection des espaces ruraux et forestiers ; enfin, conséquence de ces trois derniers points, les communes seules ne peuvent faire face à un besoin croissant d'équipements publics.
Or, monsieur le secrétaire d'État, le Grand Paris, au-delà de ses frontières administratives, marquera évidemment le territoire rural. Notre collègue Lamy, notamment, a tout à l'heure largement évoqué le projet de Saclay : la concentration sur un territoire important d'un grand ensemble dédié à la recherche, avec à la clef des créations d'emplois, aura des conséquences sur notre territoire voisin. On pourrait en dire tout autant du sud de l'Essonne, je suppose.
Il est possible que les personnes qui iront travailler dans ces centres de Saclay s'installent dans notre territoire, prennent les transports à partir de là, et ainsi il se pourrait que notre territoire rural connaisse un afflux de population, entraînant un besoin accru d'équipements et de logements. Si nous ne pouvons y faire face directement, nous subirons dès lors les inconvénients de ce grand projet plutôt que nous ne bénéficierons de ses avantages.
Bien sûr, les habitants du sud des Yvelines se réjouissent de l'amélioration du réseau de transports inscrit dans le périmètre du Grand Paris. Je suppose que le futur métro et les aménagements prévus dans la partie du projet sur laquelle nous travaillons avec Gilles Carrez profiteront à tous les Franciliens. Mais pour les habitants du sud des Yvelines ou du sud de l'Essonne, il faudra rejoindre ce nouveau réseau de transports. Or je ne pense pas qu'en l'état actuel, le réseau existant le permette complètement.
Monsieur le secrétaire d'État, mon intervention peut donc se résumer à une seule question : j'ai compris que le projet relatif au Grand Paris était marqué par une volonté de solidarité entre les territoires. Mais comment l'État va-t-il pouvoir, soit à lui seul, soit en s'appuyant sur les collectivités territoriales, faire en sorte que l'impact du Grand Paris sur les zones rurales se fasse dans le sens d'une plus grande solidarité entre les territoires, pas seulement ceux qui sont circonscrits dans le périmètre administratif du Grand Paris, mais au delà ? Mon intervention, monsieur le secrétaire d'État, vise à appeler votre attention sur la ruralité francilienne. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Prochaine séance, jeudi vingt-six novembre 2009 à neuf heures trente :
Suite du projet de loi relatif au Grand Paris.
La séance est levée.
(La séance est levée, le jeudi 26 novembre 2009, à une heure quarante-cinq.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma