La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi organique de M. François de Rugy et plusieurs de ses collègues relative à l'initiative législative citoyenne par droit de pétition selon l'article 11 de la Constitution (nos 2908, 2984).
La parole est à M. François de Rugy, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Monsieur le président, monsieur le ministre chargé des collectivités territoriales, mes chers collègues – mes cinq chers collègues (Rires), car vous n'êtes que cinq, sans doute est-il utile de le souligner alors que nous sommes dans les séances d'initiative législative réservées aux groupes de l'opposition –,…
nous voici réunis pour examiner un texte qui devrait, en toute logique, recueillir un large assentiment sur les bancs de cette assemblée.
Il s'agit en effet de rendre effectif un élément de la modification de la Constitution adoptée par la majorité parlementaire en juillet 2008 et qui, faute de loi organique, demeure aujourd'hui lettre morte.
J'ai entendu M. le Premier ministre indiquer, lors de sa déclaration de politique générale, qu'il projetait de déposer un projet de loi en ce sens. Chacun connaît le calendrier législatif et la difficulté d'y inclure de nouveaux textes.
Le projet de loi auquel faisait allusion M. le Premier ministre nous est inconnu à ce jour. Il attend, sinon d'être rédigé, en tout cas d'être publié, transmis à notre assemblée, au président de la commission des lois, à ses membres et à votre rapporteur. Il n'a pas été discuté en Conseil des ministres, encore moins déposé sur le bureau de l'une ou l'autre des assemblées.
Nous vous offrons aujourd'hui, monsieur le ministre, une occasion de gagner du temps, de rendre possible dès maintenant l'adoption de la loi organique que vous nous annoncez. Vous avez le pouvoir d'y inclure les amendements qui vous semblent utiles, voire nécessaires. Vous pouvez le faire. Vous avez la majorité.
Pourquoi devrions-nous attendre encore ? Pourquoi louvoyer plus longtemps ?
J'entends les quolibets et les objections, ou plutôt je les imagine, tant il y a peu de monde à droite de notre hémicycle. Le Premier ministre lui-même, presque par anticipation – mais était-ce vraiment un hasard ? –, a déclaré l'autre jour : « Il est étonnant de voir l'impatience des députés siégeant sur les bancs de la gauche à voir mise en oeuvre une réforme que la plupart d'entre eux ont combattue et n'ont pas votée ! » Quand en finirons-nous avec ce petit jeu politicien qui lasse tant nos concitoyens ?
Nous n'avons pas voté la réforme constitutionnelle de 2008, c'est un fait. Elle comportait bien des dispositions que nous combattions – singulièrement, d'ailleurs, en ce qui concerne les droits du Parlement, et la suite, hélas, ne nous a pas donné tort.
Mes chers collègues, un représentant de la majorité, dans nos débats en commission, nous a expliqué que, s'il a voté la réforme constitutionnelle, cela ne signifiait pas qu'il en approuvait l'ensemble des éléments. Souffrez donc que nous vous tenions le raisonnement inverse : ne pas avoir voté la réforme ne signifie pas que nous en rejetions par principe tous les éléments.
Je tiens à rappeler que nous n'avions pas fait montre d'opposition pavlovienne lors de l'examen de la révision constitutionnelle. Chacun peut se rapporter à nos travaux et au compte rendu des débats de l'époque, et constater que nous avions été actifs sur la question du référendum, d'initiative populaire ou citoyenne. Nous avions, dans les débats et par nos amendements, proposé des dispositifs plus ambitieux, et plus clairs, que la mouture fort timide de l'article 11 de la Constitution qui fut finalement adoptée. La meilleure preuve en est que ce dispositif, certes amendé et raboté, est issu d'un amendement adopté par notre assemblée, et dont le rédacteur initial était notre collègue socialiste Arnaud Montebourg.
Nous avions donc été constructifs dans ce débat.
S'étonner ou se gausser de nous voir aujourd'hui aussi exigeants quant à la mise en oeuvre effective de l'initiative citoyenne par voie de pétition tient donc clairement de la posture ou du jeu politicien.
Mais quittons la forme, si vous le voulez bien, et venons-en au fond. Je vous le dis sans détour : le texte que nous avons rédigé, mes collègues Yves Cochet, Anny Poursinoff, Noël Mamère et moi-même, n'est pas celui que nous aurions voulu vous soumettre. La raison en est simple : il n'est que l'application du vôtre, mesdames et messieurs de la majorité. Sur de nombreux points, il nous semble clairement manquer d'ambition. Nous aurions notamment souhaité qu'il fasse coexister une double initiative – parlementaire et citoyenne – grâce à l'abaissement sensible du nombre de signatures individuelles exigées, et non pas une initiative obligatoirement partagée avec le Parlement.
Malgré nos ambitions, nos idéaux, notre vision idéale de l'initiative référendaire citoyenne, nous avons choisi la voie de la responsabilité et du réalisme législatif. Même restreinte, cette chance d'une participation citoyenne doit être saisie. Nous avons donc traduit fidèlement – c'est l'objet d'une loi organique – le dispositif voté en 2008, en lui apportant cinq types de précisions, à nos yeux essentielles.
La première précision porte sur les délais. Afin de rendre applicable le référendum d'initiative partagée, la présente proposition de loi organique prévoit deux types de délais.
Elle fixe, en premier lieu, un délai maximal d'un an pour collecter les déclarations de soutien des électeurs, ce que l'on appelle les pétitions. Il s'agit à la fois de définir un terme raisonnable pour l'organisation matérielle des opérations de collecte de plus de quatre millions et demie de pétitions, et de fixer une échéance mobilisatrice, seule capable d'emporter l'adhésion rapide et massive de plusieurs millions de citoyens sur un même texte.
De manière similaire, le fait que chaque assemblée ait un délai de trois mois pour se prononcer par un vote, en première lecture, sur une proposition susceptible d'être soumise à référendum vise à empêcher un enterrement, un enlisement de l'initiative par une sorte de grève de zèle législatif, tout en garantissant le respect des procédures et délais d'examen des textes prévus par la Constitution comme par les règlements de nos assemblées.
La deuxième voie de clarification proposée par notre texte tient à l'intervention du Conseil constitutionnel dans le processus. En effet, l'article 61 de la Constitution prévoit seulement que le contrôle de conformité à la Constitution des propositions de loi de l'article 11 intervient « avant qu'elles ne soient soumises à référendum ». Il n'est pas précisé, en revanche, si ce contrôle doit intervenir avant ou après les opérations de collecte des signatures de soutien. Il nous a semblé qu'il serait difficilement compréhensible par les citoyens qu'une déclaration de non-conformité à la Constitution, prononcée par une institution certes indépendante mais dont la légitimité démocratique est régulièrement contestée, fasse obstacle au vote du Parlement, a fortiori à l'organisation d'un référendum, sur une proposition de loi qui aurait déjà recueilli plus de 4,5 millions de soutiens. C'est pourquoi nous proposons que le contrôle préalable de constitutionnalité se fasse dès l'enregistrement de la proposition de loi, et non pas une fois sa recevabilité attestée par les signatures populaires.
Nous avons également souhaité préciser la place des organisations collectives dans le recueil des pétitions. Il nous paraît nécessaire de reconnaître que celui-ci, pour atteindre l'objectif fixé, ne relève pas simplement d'initiatives individuelles.
Afin d'éviter que le référendum d'initiative partagée soit instrumentalisé ou serve soit de plébiscite, soit, inversement, de sanction, et pour qu'il devienne au un véritable instrument de la vie démocratique favorisant l'exercice de la citoyenneté, nous proposons que l'obligation faite au Président de la République d'organiser un référendum dans le cadre de l'article 11 soit suspendue dans les trois mois qui précèdent la tenue d'une élection présidentielle ou législative. J'ai toutefois déposé un amendement visant à permettre que le référendum puisse avoir lieu, en revanche, le même jour qu'une élection nationale.
Enfin, nous souhaitons que soit explicitée la notion d'« examen » par le Parlement, car il y a dans la rédaction de l'article 11 un grand flou sur le sujet. Nous vous suggérons de lever toute ambiguïté en précisant qu'il revient à chacune des deux assemblées, dans le délai de trois mois qui lui est imparti, soit de s'abstenir de faire quoi que ce soit pour permettre l'organisation d'un référendum, soit de se prononcer, en séance publique, par un vote de rejet ou d'adoption, sur le texte qui lui est soumis.
II s'agit là d'une lecture respectueuse, ni plus ni moins, de la lettre de l'article 11. Ni plus, car nous n'avons pas tenté de réintroduire les améliorations que nous appellerions de nos voeux ; ni moins, car nous souhaitons avoir la certitude que les faibles avancées obtenues ne soient pas rabotées par des dispositions d'application trop contraignantes.
Dans ce contexte, qu'est-ce qui pourrait justifier le rejet d'une proposition de loi organique visant à rendre possible l'application d'une disposition constitutionnelle votée par le Parlement réuni en Congrès ?
J'observe que les constitutionnalistes que nous avons entendus ont tous souligné la qualité juridique de notre travail, ainsi que vous pourrez le lire dans le rapport.
Les objections émises par nos collègues de la majorité en commission tenaient, soit à des postures politiciennes, soit à des positions personnelles hostiles au principe même du droit d'initiative partagée.
Mais, comme je ne peux pas croire qu'une majorité de nos collègues de l'UMP soient mus par de simples calculs politiciens ou par une hostilité personnelle au droit de pétition citoyenne et au référendum, c'est peut-être dans les propos de notre collègue Marie-Jo Zimmermann qu'il faut chercher un début d'explication : déposer une proposition de loi avant la présentation d'un projet de loi lui semble, a-t-elle dit, « quelque peu démagogique ».
Quel aveu ! Et quel désaveu pour ceux qui nous expliquaient, il y a quelques mois encore, que nous étions entrés dans l'ère de la coproduction législative – selon l'expression chère à l'ancien président du groupe UMP,…
…qui avait même évoqué un « hyper-Parlement » – mais sans doute l'expression n'avait-elle d'autre visée que la promotion de son auteur.
Dans quelle vraie démocratie parlementaire, fût-elle rationalisée, refuserait-on au Parlement le droit d'élaborer et d'adopter une loi organique qui ne soulève aucune objection d'ordre politique ou juridique, sous le prétexte que le Gouvernement aurait l'intention de déposer son propre projet ?
Notre calendrier législatif est-il à ce point dégagé que nous pourrions nous permettre de laisser passer l'occasion de hâter le pas ? Notre confiance dans le jugement de notre assemblée et dans le sérieux de nos travaux est-elle à ce point affaiblie qu'il semblerait impossible de légiférer sans l'imprimatur gouvernemental ?
Vous souhaitiez, mes chers collègues, restaurer le rôle du Parlement, c'est du moins ce que vous avez affirmé. En vous proposant ce texte qui permet l'application effective de la nouvelle voie d'initiative de la loi et du référendum d'initiative partagée, nous vous en offrons l'occasion. Saisissez-la ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Monsieur le président, monsieur le vice-président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, je suis heureux d'avoir l'occasion, à la faveur de l'examen de cette proposition de loi organique, de faire le point, devant la représentation nationale, sur l'état d'avancement des travaux du Gouvernement sur la procédure de référendum d'initiative populaire introduite à l'article 11 de la Constitution par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.
Je me félicite tout d'abord du soutien apporté à cette nouvelle procédure par les auteurs de la proposition de loi.
J'ai bien noté vos réserves, monsieur le rapporteur, et votre souhait d'aller encore plus loin dans la démocratie participative, mais votre initiative souligne également l'intérêt qui s'attache à cette nouvelle procédure de référendum d'initiative populaire. Et je ne peux que m'en féliciter.
La France ne disposait pas d'une telle procédure qui existe pourtant dans de nombreux États – je pense par exemple, entre autres, à la Suisse, à l'Italie ou, plus loin de nous, à la Californie, qui sont souvent cités à ce sujet.
La révision constitutionnelle de 2008, initiée et voulue par le Président de la République, a donc remédié à cette carence et a consacré un nouveau droit d'expression pour nos concitoyens. Ce faisant, elle a permis de renforcer les instruments de démocratie directe.
L'idée d'introduire dans le droit français le référendum d'initiative populaire a d'ailleurs des racines anciennes.
Dès 1793, Nicolas de Condorcet proposa à la Convention nationale de créer un droit d'initiative populaire.
Ce droit fut ensuite défendu par plusieurs grands constitutionnalistes au XXe siècle, à l'instar de Raymond Carré de Malberg.
Plus récemment, le référendum d'initiative populaire figurait dans les propositions du rapport remis en 1993 par le comité consultatif pour la révision de la Constitution présidé par le doyen Vedel.
Enfin, cette proposition a également été reprise, en 2007, par le comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République, présidé par l'ancien Premier ministre Édouard Balladur.
La révision constitutionnelle a donc été, en quelque sorte, un aboutissement. Elle a permis d'arrêter une rédaction équilibrée dont l'objet n'est pas de concurrencer la démocratie représentative, dont vous êtes l'expression, mais de donner l'opportunité à nos concitoyens de s'exprimer plus directement sur des propositions de réforme.
Depuis la révision constitutionnelle de 2008, le Gouvernement a engagé un travail en profondeur pour proposer des modalités sécurisées de mise en oeuvre de l'article 11 de la Constitution.
Le constituant a prévu que le référendum puisse être organisé à l'initiative d'un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales, soit environ 4,5 millions de soutiens.
C'est donc une procédure massive qui implique une réflexion très poussée sur la procédure de recueil, de centralisation et de contrôle des soutiens en termes de moyens humains, techniques et budgétaires.
Les modalités retenues devront présenter toutes les garanties requises afin d'assurer le caractère effectif du droit de soutien – en évitant notamment les fraudes – ainsi que celui du contrôle du nombre de soutiens apportés à l'initiative.
Un autre point essentiel a trait à la protection des données et aux libertés publiques. Bien que les soutiens apportés par les électeurs ne soient pas assimilables à un vote, les opinions ainsi exprimées présentent un caractère sensible appelant une protection particulière des données collectées.
L'attention portée à l'ensemble de ces points, qu'il s'agisse de la procédure de recueil, des moyens d'assurer un contrôle effectif des soutiens ou encore de la protection des données, a nécessité de consacrer un temps d'étude et de réflexion suffisant pour déterminer les différentes options envisageables, leurs avantages et leurs inconvénients respectifs.
Un travail très important a été mené qui a impliqué, entre autres, les services du ministère de l'Intérieur, l'INSEE, l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information ainsi que les services de la Chancellerie. Nos partenaires européens – la Suisse et l'Italie – ont également été consultés.
Ce travail est désormais achevé. Un projet de loi organique a été élaboré, et j'indique à la représentation nationale qu'il est en cours d'examen par le Conseil d'État.
On peut aller plus vite en adoptant notre proposition de loi dès aujourd'hui !
Dans son discours de politique générale, François Fillon, a rappelé, vous l'avez entendu, l'engagement du Gouvernement en faveur du référendum d'initiative populaire, et assuré que les dispositions ad hoc seront délibérées en conseil des ministres avant la fin de l'année. Ce projet de loi organique devrait être présenté au conseil des ministres du 22 décembre.
Vous le voyez, mesdames et messieurs les députés, le Gouvernement tient ses engagements.
Il a pris le temps de bâtir une procédure sécurisée et nous aurons bientôt l'occasion d'en débattre ensemble, dans cet hémicycle, dans le cadre de l'examen parlementaire d'un projet de loi organique déposé par le Gouvernement.
La principale faiblesse de la proposition de loi présentée par Mme Poursinoff et MM. de Rugy, Cochet et Mamère tient à ce que, sur bien des points, la procédure proposée n'offre pas de garanties suffisantes, notamment quant au respect des libertés publiques et à l'effectivité du contrôle des soutiens collectés.
Certes, sur quelques dispositions, nous pourrons nous rejoindre et votre proposition de loi organique est une contribution utile au débat.
Je pense en particulier à celles qui prévoient l'examen par le Conseil constitutionnel de la recevabilité de l'initiative en deux temps : d'abord, la constitutionnalité de la proposition de loi, puis, à l'issue de la période de recueil des soutiens, l'attestation que le seuil minimal a été atteint. Le schéma retenu permet d'offrir aux électeurs une certaine sécurité juridique puisque l'initiative à laquelle ils apporteront leur soutien aura préalablement été déclarée conforme à la Constitution.
Mais, sur de très nombreux aspects, la procédure que vous nous proposez et les garanties qui l'accompagnent sont nettement insuffisantes.
Je prendrai trois exemples si vous me le permettez.
S'agissant premièrement de la procédure de recueil des signatures, la proposition de loi ne semble pas trancher entre une procédure centralisée et une procédure décentralisée, ce qui a pour conséquence de faire coexister une procédure complètement libérale, où l'électeur enverra directement son soutien au Conseil constitutionnel, et une procédure plus centralisée, où des « organisateurs » – sans doute des partis politiques ou des associations – organiseront le recueil des soutiens et les transmettront eux-mêmes au Conseil constitutionnel.
Cette dualité de procédure, combinée à la multiplicité envisagée des canaux de transmission des soutiens– la proposition de loi semble privilégier un soutien sous format papier sans exclure toutefois un soutien sous forme électronique –, conduira à d'importantes difficultés de centralisation des données et de contrôle des doublons – s'agissant, potentiellement, de plusieurs millions de soutiens collectés. Ce dispositif, vous en conviendrez, est de nature à rendre purement théorique le contrôle confié au Conseil constitutionnel.
Par ailleurs, l'ensemble du dispositif de la proposition de loi repose sur le seul Conseil constitutionnel, ce qui n'apparaît pas réaliste…
.eu égard, notamment, à la faiblesse de ses moyens matériels et humains, alors même qu'il doit déjà traiter les nombreuses questions prioritaires de constitutionnalité dont il est saisi.
La deuxième insuffisance tient à la sincérité et à la sécurisation de la procédure de recueil des soutiens. L'impossibilité dans laquelle se trouvera le Conseil constitutionnel de contrôler effectivement l'ensemble des soutiens recueillis est d'autant plus dommageable que la proposition de loi n'encadre nullement la procédure de recueil des soutiens.
Aucune disposition, en effet, ne vient préciser les conditions minimales de présentation des soutiens permettant d'assurer la sincérité du recueil.
Ainsi, rien n'impose aux « organisateurs » de faire figurer, sur leurs formulaires de pétition, le libellé de la proposition de loi sur laquelle porte l'initiative, précaution qui doit permettre à l'électeur de pétitionner en connaissance de cause. De telles dispositions sont prévues, en revanche, en Italie, où l'on recourt à des formulaires standardisés, homologués par les autorités compétentes. S'agissant d'une procédure prévue par la Constitution, pouvant déboucher sur un référendum, ce type de dispositions, dont l'objet est de préserver la sincérité de la procédure de soutien, doit être prévu.
Aucun dispositif n'encadre non plus les opérations de recueil afin de prévenir les risques de fraude, qu'il s'agisse du déroulement de ces opérations dans l'espace public ou de la sécurisation de la procédure électronique, vaguement envisagée.
La troisième faiblesse est celle de la protection des données collectées. Compte tenu du caractère sensible de celles-ci, qui peuvent notamment révéler l'orientation politique des électeurs et font en outre apparaître leurs coordonnées, il ne saurait être fait l'économie d'une réflexion sur la gestion et l'encadrement de l'utilisation de ces données.
Pourtant, la proposition de loi est absolument silencieuse sur ce point. Qu'adviendra-t-il des données collectées ? Ne faut-il pas interdire leur reproduction, de même que l'interdiction de réutilisation à des fins politiques ou commerciales ? Si aucun cadre juridique de protection des données n'est prévu, il est à craindre que les électeurs ne soient dissuadés d'apporter leur soutien, privant ainsi d'effectivité le nouveau droit que la Constitution vient de leur accorder.
Vous le voyez, mesdames et messieurs les députés, ces questions qui sont sensibles, notamment du point de vue du respect des libertés publiques, doivent faire l'objet d'une vigilance toute particulière.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a pris le temps d'élaborer un projet de loi qui offre un maximum de sécurité et de garanties. Je le répète, ce projet de loi devrait être soumis en conseil des ministres le 22 décembre prochain.
Le projet de loi organique est en cours de finalisation. Il sera rendu public dans les prochaines semaines et nous aurons l'occasion d'en débattre ensemble. C'est pourquoi, suivant en cela la position de votre commission des lois, je ne peux que vous inviter à rejeter cette proposition de loi organique. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Avant d'en venir à mon intervention, je souhaite répondre aux propos de M. le ministre et lui indiquer que les deux arguments qu'il a mis en avant sont d'une extrême faiblesse. Ainsi du reproche qu'il nous fait de ne pas faire figurer dans notre proposition de loi certaines dispositions d'ordre réglementaire : je le renvoie à l'article 19 de la proposition, qui précise que les conditions d'application sont fixées par décret en Conseil d'État, notamment pour tout ce qui touche à l'organisation matérielle et à la lutte contre la fraude.
Tout cela relève de décrets, et j'espère que le futur projet du Gouvernement n'entrera pas trop dans les détails en la matière. Il faut certes organiser les choses et veiller à ce que le Conseil constitutionnel ait les moyens de sa mission, mais faire figurer cet aspect dans une loi de vingt articles ne s'impose pas.
Le second argument avancé par le ministre a consisté à dire que, dans la mesure où le Gouvernement prévoit un projet de loi, il n'était pas utile de voter notre proposition de loi.
Hormis ces deux arguments, M. le ministre n'en a avancé aucun autre qui justifierait que l'on renonce à adopter cette proposition de loi dès aujourd'hui. Au plan juridique, notre texte offre toutes les garanties et va dans le sens de la réforme constitutionnelle de 2008, sa mise en oeuvre devant encore être précisée.
Mettre en place un processus d'initiative citoyenne contribuerait à compléter la démocratie – même si nous sommes attachés, bien sûr, attachés à la démocratie représentative – conformément à la volonté affichée par le Président de la République et qui est la nôtre depuis très longtemps, puisqu'au moment des élections européennes en 1984 – souvenir du XXe siècle… – le référendum d'initiative populaire figurait dans le programme des Verts. Un tel référendum doit évidemment être bien encadré, et il ne s'agit pas de faire voter sur n'importe quelle thématique.
Il ne s'agit naturellement pas de revenir sur les libertés individuelles et collectives. On peut envisager, comme le prévoit l'article 11 de la Constitution, de soumettre à référendum un projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics ou des sujets d'actualité, et j'en prendrai deux exemples.
Cette proposition de loi pourrait être un instrument au service de la démocratie environnementale.
La convention d'Aarhus, signée en 1998 par trente-neuf États, vise à donner à toute personne, en matière d'environnement, le droit d'être informée, de s'impliquer dans les décisions et d'exercer des recours. L'initiative citoyenne aurait toute sa place dans les débats environnementaux, par exemple sur les OGM, dont l'innocuité ou la non-innocuité fait toujours débat.
À l'échelle de l'Union européenne, une pétition a été lancée en mars 2010 par Greenpeace pour demander un moratoire sur les OGM, le temps que la science continue à nous informer. En quelques mois, elle a recueilli plus d'un million de signatures. Nous attendons toujours la réponse de la Commission. Selon le dernier sondage Eurobaromètre 2010, 53 % des personnes interrogées considèrent que les OGM représentent un danger pour l'environnement, 59 % jugent qu'ils ne sont pas sans danger pour leur famille, et 58 % estiment qu'ils ne sont pas sûrs pour les générations futures et qu'en outre on peut faire de l'agriculture « autrement ».
Voilà un sujet de société qui continue de diviser l'opinion, et qui pourrait être abordé à la faveur d'une proposition de loi selon la procédure que définit notre texte.
Second exemple : le nucléaire. On sait que la France est le pays le plus nucléarisé du monde ; c'est l'objet d'une entreprise de marketing entamée il y a quelque trente-cinq ans par le gouvernement de M. Pierre Messmer, à la suite du premier choc pétrolier, après quoi tous les gouvernements successifs ont répété avec application que le nucléaire, c'était formidable.
Pourtant, un sondage IFOP-VSD a montré que 51 % des Français, et 61 % des Français âgés de moins de trente-cinq ans, étaient favorables à un « arrêt total » du nucléaire.
Le Président de la République lui-même n'en a pas moins décidé, avant même que la commission nationale du débat public ne se soit prononcée sur l'opportunité de cette décision, d'installer un deuxième EPR à Panly.
Il faut donc davantage de démocratie dans ces domaines ; or le texte présenté par François de Rugy offrirait un excellent exemple de cette démocratie avancée à laquelle nous aspirons tous. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le vice-président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, après avoir choisi de voter contre la révision constitutionnelle de juillet 2008,…
…après avoir dénoncé le dévoiement de nos institutions dont elle serait prétendument porteuse, et après avoir voté contre la plupart des textes d'application de cette réforme, nos collègues du groupe de la Gauche démocrate et républicaine ont aujourd'hui décidé de se saisir enfin des nouveaux droits que la révision constitutionnelle offre aux groupes de l'opposition et aux groupes minoritaires pour réclamer, dans le cadre de leur ordre du jour réservé, l'application rapide d'une disposition de la révision constitutionnelle.
En d'autres termes, après avoir voté contre la révision constitutionnelle, l'opposition trouve à cette rénovation de nombreuses vertus.
Présentée par le groupe GDR, cette proposition de loi vise à permettre l'application de l'article 11 de la Constitution, dans sa rédaction issue de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Cet article, relatif aux modalités de convocation d'un référendum, offre désormais aux citoyens la possibilité de proposer la tenue d'une telle consultation.
Nouvelle dans l'ordre juridique de la Ve République, cette procédure du « référendum d'initiative populaire » n'est cependant pas totalement absente de la tradition constitutionnelle française. L'article 115 de la Constitution du 24 juin 1793 permettait ainsi aux assemblées primaires de demander la révision de l'acte constitutionnel.
Puis, en 1993 – vous l'avez rappelé, monsieur le ministre –, le comité Vedel a proposé d'introduire à l'article 11 de la Constitution une procédure de référendum d'initiative minoritaire, associant parlementaires et citoyens. En 2007, le comité Balladur a proposé à son tour d'instaurer un droit d'initiative populaire, reprenant ainsi en partie la préconisation du comité Vedel.
Absente du texte initial, cette proposition a été remise sur les rails, si j'ose dire, par quelques parlementaires : Noël Mamère, Arnaud Montebourg, Jean-Claude Sandrier,…
…le centriste François Sauvadet et Christian Vanneste, député du groupe UMP.
Que dit-elle, et que dit l'article 11 ? Que, d'une part, le Président de la République « peut soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics » ou « sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale », et que, d'autre part, un référendum portant sur l'un de ces objets « peut être organisé à l'initiative d'un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales ».
Nous, centristes, étions de ceux qui estimaient, voici bientôt trois ans, que la modernisation des institutions de la Ve République impliquait non seulement de revoir les règles applicables aux rapports entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, mais aussi de donner à nos concitoyens de nouveaux droits, de nouveaux moyens de s'impliquer dans la vie de ces institutions et, par là, de peser dans le débat public. Pour cette raison, cette possibilité nouvelle d'une initiative citoyenne susceptible d'aboutir à la convocation d'un référendum était l'une des principales motivations de notre vote final.
Depuis deux ans, nous n'avons eu de cesse de demander l'application la plus rapide possible de toutes les dispositions de la révision constitutionnelle.
À ce jour, et alors que nous examinerons dans quelques semaines le projet de loi organique relatif au futur défenseur des droits, le référendum d'initiative populaire est l'une des dernières réformes à mettre en oeuvre pour que soit entièrement transposée avant la fin de la législature la volonté exprimée par le constituant.
Pour autant – ne nous y trompons pas ! –, qu'on la juge ou non imparfaite, partielle ou inaboutie, la nouvelle rédaction de l'article 11 de la Constitution représente bien, à l'instar de la question prioritaire de constitutionnalité, une révolution dans notre tradition juridique. Jugez plutôt : sur la quinzaine de textes constitutionnels dont s'est dotée la France au cours de son histoire, un seul, la Constitution de l'an I, a défini, dans son article 115, un mécanisme proche dans son principe de celui dont nous discutons.
Il est donc faux de prétendre que la déclinaison sous forme de loi organique du nouvel article 11 serait un exercice aisé du point de vue de la technique juridique. Et si le constituant a déjà tranché sur certains points, notamment quant au nombre de parlementaires et de citoyens requis pour ouvrir la procédure, il en est bien d'autres sur lesquels nous devons encore nous prononcer. Comment, et sous quel délai, les signatures seront-elles recueillies ? Dans quelles conditions le Conseil constitutionnel sera-t-il amené à juger de la validité de la procédure ?
En réalité, ce modèle français de référendum d'initiative citoyenne reste presque entièrement à inventer. Voilà pourquoi nous pouvons comprendre – plutôt que le regretter, mes chers collègues – que cette réforme prenne du temps et qu'elle doive être appliquée par le Gouvernement.
De ce point de vue, la proposition de loi organique dont nous discutons a un grand mérite,…
…celui d'énoncer clairement les termes d'un débat dont la finalité nous réunit tous : il s'agit de permettre à nos concitoyens de se saisir de toute question d'intérêt public, ce qui doit pouvoir donner lieu, le cas échéant, à un référendum.
Toutefois, la lecture attentive des dispositions qu'elle contient peut laisser sceptique.
Je songe d'abord au fardeau dont vous chargez le Conseil constitutionnel et ses services, mes chers collègues – des services traditionnellement peu développés, si on les compare à ceux du Conseil d'État,…
…et déjà très occupés par l'application de la question prioritaire de constitutionnalité.
Se pose également, mes chers collègues, la question des modalités de contrôle des signatures. Comment le Conseil pourrait-il matériellement authentifier, certifier la validité d'une signature ? Cette question peut paraître anecdotique, mais elle détermine largement la crédibilité même de cette nouvelle voie de droit.
Au demeurant, cela atteste de l'intérêt, pour les parlementaires que nous sommes, de disposer, pour chaque projet de loi, d'une étude d'impact précise et détaillée.
Comme sur les retraites ? (Rires sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Pour toutes ces raisons, je juge l'initiative de nos collègues du groupe GDR bienvenue à plus d'un titre,…
…et je forme le voeu que le débat qui s'engage devant la représentation nationale nous permette enfin de progresser sur ces questions qui, nous le savons tous, suscitent de fortes attentes chez nos concitoyens.
À l'appui de mon propos, et à titre de conclusion, je veux rappeler deux épisodes qui permettent de souligner, monsieur Cochet, la différence entre démocratie représentative et démocratie participative. Que serait-il advenu de la loi du 17 janvier 1975 sur l'interruption volontaire de grossesse si, à l'époque, l'initiative populaire avait pu « torpiller » ce projet ? (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
Que serait devenue, dans la même hypothèse, la loi du 9 octobre 1981 portant abolition de la peine de mort ?
Cette disposition est donc à manier avec parcimonie et avec la plus grande délicatesse. C'est par conséquent au Gouvernement qu'il appartient d'encadrer et d'affiner les dispositions nouvelles que nous avons inscrites dans la Constitution.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le vice-président de la commission des lois, mes chers collègues, on sait depuis saint Paul (Exclamations sur divers bancs) que les convertis de fraîche date sont toujours les plus zélés propagateurs de la foi.
Nos collègues du groupe GDR le démontrent une fois de plus.
Ils ont voté contre la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.
Ils l'ont combattue, ils l'ont vilipendée, ils n'ont pas eu de mots assez durs pour la dénoncer.
Et voilà qu'ils lui trouvent soudain toutes les vertus,… (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
…au point d'être impatients de voir toutes ses dispositions entrer en vigueur.
Ainsi de la consultation des commissions des assemblées sur les nominations envisagées par le Président de la République. Nos collègues de l'opposition ont participé activement aux premières auditions – et ils ont eu parfaitement raison de le faire.
Il en va de même de la question prioritaire de constitutionnalité : dès les premières décisions du Conseil constitutionnel, par exemple sur la garde à vue ou sur la cristallisation des pensions, l'opposition s'est félicitée, et elle voit aujourd'hui dans cette réforme une véritable révolution juridique.
Je pourrais encore citer le défenseur des droits, l'examen en séance publique du texte de la commission, l'ordre du jour partagé, l'institution des résolutions et tous les droits nouveaux reconnus aux groupes de l'opposition.
Vous n'avez pas voté ces réformes, et vous êtes les premiers, chers collègues de l'opposition, à en profiter et à vouloir les appliquer – ce qui, je le répète, est bien normal.
Il en va de même du référendum d'initiative populaire, désormais prévu aux alinéas 3 à 7 de l'article 11 de la Constitution, dans la rédaction issue de la révision du 23 juillet 2008. Au cours des débats sur la révision, vous avez durement critiqué ce dispositif que vous appelez aujourd'hui de vos voeux.
Notre excellente collègue Martine Billard observait ainsi que, la tenue du référendum étant tributaire de « l'initiative d'un cinquième des membres du Parlement soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales, soit au moins vingt-neuf députés et 4,5 millions d'électeurs », il en résultait que « seuls l'UMP et le parti socialiste seraient en mesure de recourir à une telle procédure ». Elle ajoutait qu'il s'agissait « moins de donner la parole aux extrémistes que de limiter le pluralisme ».
Le groupe GDR a-t-il changé d'avis ? Cette proposition de loi est-elle le signe que vous vous êtes rangés à l'avis de la majorité ? Si tel est le cas, le groupe UMP s'en félicite.
Reconnaissez toutefois que votre soudaine envie que se mette en place sans délai le dispositif que vous avez tant décrié paraît suspecte. Elle n'est rien d'autre – personne n'est dupe – que de l'agitation politicienne.
En réalité, vous savez parfaitement, chers collègues, que notre majorité a à coeur de faire aboutir sereinement…
…ce nouveau droit de pétition, cette avancée démocratique considérable.
Preuve de notre bonne foi, le président de la commission des lois, Jean-Luc Warsmann, comme il l'a rappelé en commission la semaine dernière, a écrit une lettre à ce sujet au ministre de l'intérieur afin qu'un projet de loi organique soit très prochainement déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale.
Et si le projet tarde un peu par rapport à vos attentes, c'est que le Gouvernement a mené un travail approfondi pour élaborer un projet de loi organique, actuellement soumis à l'examen du Conseil d'État. Vous venez, monsieur le ministre, de décrire la complexité du système qu'il faut construire et les garanties dont il faut s'entourer pour éviter toute fraude et tout détournement. Le Parlement sera donc saisi d'un texte mûrement réfléchi, conformément aux engagements pris par le Président de la République.
La semaine dernière encore, et je suis sûr que vous l'aurez entendu, dans son discours de politique générale, François Fillon a rappelé l'engagement de notre majorité sur le référendum d'initiative populaire. Il a assuré que les dispositions concernées seraient délibérées en conseil des ministres avant la fin de l'année. Le ministre vient d'évoquer la date du 22 décembre.
C'est la raison pour laquelle le groupe UMP vous invite à retirer votre proposition de loi (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR), dans l'attente de la discussion du projet de loi organique déposé par le Gouvernement. Dans le cas contraire, nous voterons contre, vous le comprendrez.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, à cet instant du débat, plusieurs éléments me reviennent en mémoire.
Lors de la réforme constitutionnelle de 2008, nous avions essayé de mettre en garde nos concitoyens contre l'« enfumage » démocratique que vous nous proposiez – le mot n'est pas très joli mais je n'en ai pas trouvé d'autres.
Nous avions raisons d'être méfiants et sceptiques, persuadés que nous étions que les promesses qui nous étaient faites ne seraient pas tenues. Nous savions déjà que ces promesses généreuses, qui nous annonçaient un pouvoir parlementaire revigoré, n'avaient d'autre but que de nous amener à voter une réforme essentiellement motivée par la volonté de marquer l'histoire : 1958, De Gaulle, Debré ; 2008, Sarkozy-Sarkozy.
Les ciseaux d'Alain Marleix…
…sévissaient déjà dans l'ombre pour faire passer des réformes creuses et sans véritable sens.
Toutefois, ma jeunesse en tant que député me permettait encore de croire à la force de l'institution parlementaire. Je pensais aussi que vous ne pourriez pas rester éternellement sourds aux recommandations que nous vous suggérions dans l'intérêt d'une démocratie parlementaire ardemment revivifiée. J'espérais encore.
Hélas, force est de constater vingt-quatre mois après, que notre institution est loin d'assumer les prérogatives qui sont les siennes. L'opposition est bafouée, muselée, phagocytée par une majorité grégaire, intransigeante, repliée sur elle-même.
Je vous donnerai la définition si vous avez des problèmes, mon cher collègue : cela n'a rien à voir avec la guerre, cela veut dire « être ensemble ».
Nous assistons vraiment, comme l'a souligné notre collègue Jean Jacques Urvoas, à l'agonie de la démocratie parlementaire.
Il l'a démontré, monsieur Geoffroy, en éminent constitutionnaliste qu'il est.
En cette fin d'année 2010 le constat est alarmant : l'équilibre et la séparation des pouvoirs, chers à Montesquieu, n'existent plus en France. La démocratie fondée sur la pondération entre l'exécutif, le législatif et le judiciaire est aujourd'hui mise à mal.
Souvenez-vous, mes chers collègues, de cette formule de Montesquieu : « C'est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser ».
Le temps de dire non à la fin de notre pouvoir de parlementaires est venu !
Rappelons ces mots illustres des présidents de l'Assemblée nationale : « C'est ici que bat le coeur de la République », disait l'un ; « C'est au sein de l'Assemblée nationale que la nation s'exprime », disait un autre.
Dernièrement, Jean-Marc Ayrault a déclaré : « si la majorité veut un régime présidentiel, qu'elle commence par voter la disparition du droit de dissolution et l'autonomie du Parlement ». Sachez écouter, cher et unique collègue de la majorité, cette mise en garde prémonitoire : le Parlement doit redevenir le lieu du débat et l'instance privilégiée de la délibération nationale.
Nous ne pouvons plus accepter des propos invraisemblables comme ceux de M. Copé, qui déclarait alors qu'il était ministre : « Pour un membre du Gouvernement, il y a souvent deux façons de concevoir le Parlement : soit c'est un pion qu'on manipule, soit c'est un obstacle à contourner. »
Rien n'a changé, et la dernière réforme constitutionnelle n'est qu'une mascarade électoraliste. Les outils d'étude, d'analyse et de proposition qui permettraient aux parlementaires de faire leur travail sont toujours aussi dérisoires. Notre engagement socialiste a toujours été d'affirmer haut et fort les droits du Parlement.
Au-delà de vos annonces sans suite, notre discussion d'aujourd'hui nous montre une fois de plus le peu de considération que vous portez à notre institution et à nos lois. Inscrire le droit de pétition dans la réforme de 2008 nécessitait le vote d'une loi organique afin qu'il soit efficient.
Là encore me reviennent en mémoire quelques effets d'annonce qui révèlent le peu de sincérité de la majorité et des membres du Gouvernement.
M. Karoutchi, alors ministre des relations avec le Parlement, déclarait le 12 février 2009 : « Quant au projet de loi organique sur le référendum, nous y travaillons. Bien sûr, tous les textes prévus par la révision constitutionnelle seront présentés progressivement au Parlement au cours de l'année 2009. »
Je veux rappeler encore les promesses faites par M. de Raincourt, alors ministre des relations avec le Parlement, le 15 octobre 2009 : « Le Gouvernement tient son engagement. Le projet de loi organique relatif au référendum d'initiative parlementaire et populaire sera déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale, comme je l'ai indiqué mardi, avant la fin de l'année 2009. »
François Fillon, lors de son discours de politique générale mercredi dernier, indiquait que « les deux dernières lois organiques attendues pour l'application des dispositions votées ont été transmises au Conseil d'État et seront délibérées en conseil des ministres avant la fin de l'année : je veux parler du référendum d'initiative populaire et du nouveau régime de mise en cause de la responsabilité du chef de l'État. »
La date est fixée : ce sera le 22 décembre !
Il y a fort à parier que cette question ne sera examinée en conseil des ministres qu'en janvier : sachant combien l'agenda de notre assemblée est rempli et confus, il est à peu près certain que nous n'évoquerons ce sujet qu'au mois de juin, avec un peu d'espoir, et plus certainement à la fin de l'année 2011.
Mes chers collègues, l'adoption de cette proposition de loi organique permettrait de rendre plus crédibles vos positions et promesses passées. Ce texte va dans le sens d'une démocratie plus aboutie, enfin digne de la France et de son histoire.
La France est et doit rester le berceau de l'idéal démocratique qui passe nécessairement par le respect de l'expression populaire et de la démocratie parlementaire. Beaucoup de pays européens, plusieurs états américains permettent déjà cette forme d'expression qui autorise les habitants d'un pays, d'un canton, d'un État à manifester concrètement leur volonté de changement et leur souhait de construire ensemble de façon pragmatique sur tel ou tel sujet.
En un mot, cette procédure permet au peuple de s'exprimer souvent et sur des sujets variés, pouvant concerner tant l'organisation des pouvoirs publics ou les droits fondamentaux de la personne que les règles de vie en société ou les choix en matière sociale, civile, de façon générale sur tous les sujets sociétaux qui concernent chacun d'entre nous.
Ce droit à l'expression populaire est un moyen de permettre à chaque individu de s'intéresser à la chose publique. Seul l'exercice de ce droit permettra à l'avenir de redonner du souffle à nos institutions.
Ces derniers mois, l'actualité sociale nous a apporté la démonstration qu'il existait une crise de confiance profonde entre l'opinion et l'exécutif. Les votations populaires organisées sur le statut de La Poste en sont l'exemple le plus flagrant. Notre assemblée ne doit pas se couper des réalités du terrain et des aspirations de nos concitoyens en dehors des périodes de campagne électorale.
Notre assemblée a déjà examiné par trois fois la suppression du bouclier fiscal dans le cadre de propositions de loi, et ce dans la plus parfaite indifférence de la majorité. Soutenue par un dixième des citoyennes et citoyens inscrits sur les listes électorales, une telle proposition aurait bénéficié d'une attention accrue du Gouvernement et de sa majorité.
Pour toutes ces raisons, il nous apparaît aujourd'hui indispensable de passer enfin à l'acte et de donner à l'article 11 de la Constitution la traduction législative nécessaire à son application.
Cette proposition de loi parfaitement ciselée et réfléchie est certes encore loin de répondre à l'exigence d'un véritable droit de référendum d'initiative populaire. Nous souhaitons procéder par étapes, peut-être inconsciemment pour vous rassurer. La modification constitutionnelle que nous proposons aujourd'hui consiste seulement en la possibilité d'inscrire à l'agenda du Parlement un texte que les assemblées ne voudraient pas inscrire ou tarderaient à inscrire à leur ordre du jour.
En l'état, cette proposition de loi n'est pas encore constitutive d'un droit réel d'initiative citoyenne puisque l'appel citoyen se doit d'être accompagné et même précédé du soutien d'un nombre conséquent de parlementaires – un cinquième des membres du Parlement, soit 184 députés ou sénateurs. Le peuple est finalement appelé à soutenir une initiative parlementaire. Il n'a donc pas à proprement parler l'initiative de la loi. Nous nous situons dans le cadre d'une initiative partagée.
La primauté du Parlement est ainsi préservée et notre rôle de législateur à nouveau affirmé.
Cette proposition de loi organique permettra enfin à nos concitoyens de s'exprimer pleinement sur des sujets qui les intéressent. C'est une première étape avant que nous puissions intégrer et absorber dans notre constitution le droit d'initiative populaire.
Je voudrais ici souligner la très grande qualité du travail accompli par nos collègues GDR auquel j'adresse mes sincères félicitations, en rappelant combien leur contribution est minutieuse et exemplaire.
Ce texte est une véritable proposition de consensus. Il prend en compte toutes les variables de ce futur droit citoyen auquel nous sommes les uns et les autres très attachés.
Alors, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est temps tous ensemble, au-delà de nos clivages politiques ou idéologiques, de mettre en place le dispositif prévu par cette proposition de loi qui permettrait de pallier la carence avérée de votre gouvernement, pour reprendre une formule employée par Guy Carcassonne, et de redonner plus de pouvoir à la société civile en même temps que plus de crédibilité à nos institutions parlementaires.
M. de La Verpillière a évoqué saint Paul. Je me refuse à utiliser ce genre de références,…
…et préfère conclure en disant : vive la République ! Vive la République parlementaire ! Vive la sociale ! Vive la laïque ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la crise démocratique qui touche la plupart des démocraties représentatives européennes n'épargne pas la France. Les faibles niveaux de participation aux élections, y compris locales, ne sont que l'expression du fossé grandissant entre les citoyens et leurs représentants. Une part croissante de la population a le sentiment de ne pas être écoutée ni entendue, et se détourne du vote. La défiance à l'égard de la classe politique ne fait que s'accroître, donnant le sentiment que les élus n'ont plus la légitimité leur permettant d'oeuvrer dans le sens de l'intérêt général. La fracture sociale qui frappe de nombreux quartiers populaires est renforcée par la fracture démocratique.
Pour autant, une large partie de la population continue à s'intéresser à la chose publique et à s'investir dans le débat. L'implication associative, la participation aux mouvements sociaux, l'engagement syndical ou encore le bénévolat sont autant de moyens de s'engager pour peser sur la vie politique. L'heure n'est donc pas au repli sur la sphère privée.
Parmi les multiples réponses à apporter à cette crise de la représentation, il est urgent de mettre en place des mécanismes de démocratie plus participative et délibérative afin de réimpliquer les citoyens dans la vie de la cité. Il ne s'agit pas d'opposer ici démocratie participative et représentative, mais bien de trouver une nouvelle combinaison harmonieuse entre ces deux dimensions.
Un débat ouvert avec la société est nécessaire. Les décisions en découlant n'en seront que plus légitimes, efficaces et acceptées. Faire de la politique autrement doit aujourd'hui se concrétiser par une nouvelle façon d'élaborer les politiques publiques avec les citoyens.
L'exemple du récent « référendum citoyen sur l'avenir de La Poste », dont vient de parler notre collègue Jacques Valax,…
…est à ce titre intéressant. Il a permis de récolter plus de deux millions de signatures à travers la France et suscité de très nombreux débats et discussions, en choisissant la forme symbolique de la consultation référendaire. Autre exemple, en novembre dernier, le groupe Europe écologie-Les Verts du conseil régional d'Île-de-France a proposé aux Franciliens et aux Franciliennes un « droit d'interpellation populaire ». De nombreuses expériences étrangères montrent l'intérêt de créer des outils de démocratie participative.
Au niveau européen, l'article 11 du traité de l'Union européenne prévoit une telle disposition. Cet instrument contribuera à renforcer le sentiment d'appartenance des citoyens à l'Union et à rapprocher concrètement les institutions européennes des habitants. Une pétition, dont nous a parlé notre excellent collègue Yves Cochet, réclamant un moratoire sur les OGM, a récolté plus d'un million de signatures et sera prochainement remise à la Commission européenne.
La législation française reconnaît l'importance de l'interpellation citoyenne. S'il n'est pas encore allé au bout de sa démarche, le législateur a inscrit, dès 2003, le droit de pétition dans la Constitution, mais c'est évidemment la révision constitutionnelle de juillet 2008 qui autorise le Parlement à mettre en oeuvre cette avancée démocratique.
Notre position de principe est très simple : il faut qu'une loi organique entre en vigueur avant les échéances électorales de 2012.
Le refus du Gouvernement devra s'entendre comme le renoncement à voir s'appliquer une procédure qui est l'une des rares avancées de la révision constitutionnelle de 2008.
Votre refus de nous suivre sur ce texte apparaîtrait comme la trahison d'une promesse faite par le Président de la République au peuple français.
Alors que les droits du Parlement sont sans cesse bafoués quand l'exécutif prend des décisions à la hussarde, sans laisser les parlementaires en débattre, le texte présenté par notre excellent collègue François de Rugy,…
J'ai en effet remarqué qu'il est d'usage à cette tribune de qualifier nos collègues d'excellents. (Sourires.)
En l'occurrence, notre collègue François de Rugy est excellent. Sa proposition de loi permet de redonner la parole au peuple. Elle consiste tout simplement à remettre debout la pyramide républicaine, en faisant en sorte que les textes que nous votons puissent être appliqués.
Je ne comprendrais pas que nos collègues de droite…
…refusent notre proposition alors qu'ils soutiennent celle du Président de la République visant à assurer la présence des citoyens dans les tribunaux correctionnels. On ne peut pas à la fois dire que les citoyens ne sont pas suffisamment associés au fonctionnement de nos institutions et refuser qu'ils se saisissent de ce qui les regarde.
Les députés écologistes n'ont pas soutenu le projet constitutionnel, qui renforçait la présidentialisation du régime.
Cependant, ils ont approuvé l'idée d'un référendum d'initiative populaire.
Que la loi organique sur ce sujet se fasse toujours attendre, malgré certaines promesses que nous venons d'entendre, est une atteinte à la démocratie, les citoyens étant empêchés de prendre des initiatives. C'est la raison d'être de cette excellente proposition de loi, que nous voterons. Nous sommes certains, chers collègues, qu'un consensus au sein de cette assemblée permettra son adoption. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Il n'y en a pas de mauvais, ce n'est pas comme chez vous… (Sourires.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, excellents collègues (Rires), intervenant devant la commission des affaires sociales de notre assemblée il y a quelques jours, M. Jean-Paul Delevoye, Médiateur de la République, faisait état d'un sondage. Interrogés sur leurs relations avec le monde politique, 40 % des Français répondent : « Ils nous ont oubliés ». Et le Médiateur, citant maints exemples, de déplorer que nous nous attachions plus au respect des procédures qu'au respect des hommes. Alors, intéressons-nous à ce que pensent nos concitoyens.
La nouvelle rédaction de l'article 11 de la Constitution prévoit la possibilité d'organiser des référendums d'initiative partagée. Pour cela, il faut une loi organique, que le Gouvernement nous a annoncée à plusieurs reprises. Le projet correspondant devait même – le Gouvernement s'y était engagé – être déposé au Parlement avant le 31 décembre 2009. Il faut toujours préciser l'année, car le calendrier est glissant. M. de Raincourt, homme de parole, s'y était engagé. Une fois de plus, nous avons là une belle illustration du crédit que l'on peut accorder à la parole de ce gouvernement. On ne peut même pas espérer que cela s'arrange avec le nouveau Premier ministre puisque c'est le même qu'avant ! (Rires sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Il faut dire que l'exemple vient d'en haut. Pendant des années, M. Sarkozy a justifié chaque semaine le bouclier fiscal par l'existence d'un tel dispositif en Allemagne, dispositif inscrit même, paraît-il, dans la Constitution allemande. Il fallait prendre exemple sur notre partenaire. Mais un jour, d'un seul coup, sans crier gare, il promet de supprimer le boucler fiscal sous prétexte qu'il n'existe pas en Allemagne et qu'il faut prendre exemple sur notre partenaire.
Pas un mot d'explication, encore moins d'excuse : avalez cela, chers amis gogos !
Sur l'article 11, nous ne sommes guère surpris, compte tenu du sort réservé à la résolution que le groupe SRC avait inscrite à l'ordre du jour il y a plus d'un an, le 15 octobre 2009. À l'époque, le groupe UMP avait pris grand soin de voter, par un vote solennel, contre ce texte qui se contentait d'estimer urgente la mise en oeuvre de la réforme de l'article 11. C'est dire leur acharnement à ne pas vouloir qu'il s'applique.
Devant la carence du Gouvernement, les parlementaires qui, de bonne foi paraît-il, avaient voté la révision constitutionnelle de juillet 2008, notamment ceux de l'UMP, auraient pu, auraient dû déposer une proposition de loi organique. Ils ne l'ont pas fait. Ainsi, plus d'un an après l'engagement pris, M. de Raincourt et le Gouvernement auquel il appartient n'ont pas réussi à résoudre les problèmes qu'ils avaient invoqués pour retarder la mise en oeuvre de l'article 11 et du référendum d'initiative partagée. Ces problèmes étaient techniques et fort nombreux. Souvenez-vous, il fallait « définir des conditions ne laissant place à aucune forme de contestation ou de doute », « vérifier l'inscription sur les listes électorales et authentifier les signatures des électeurs », « prévoir les modalités de procuration », disait à l'époque M. de Raincourt. Il en était pathétique !
Si le ministre s'est alors engagé à déposer un projet de loi organique, il n'a pris aucun engagement sur la date d'inscription à l'ordre du jour, encore moins sur la date d'adoption, et moins encore sur la date de mise en application. Je vous vois donc venir, monsieur le ministre : l'engagement est reporté d'un an et, pour son inscription à l'ordre du jour, on verra plus tard… M. Sarkozy et sa majorité UMP ont un double langage, tout le monde l'a entendu. Ils promettent des droits nouveaux et font tout pour que ces droits ne s'appliquent jamais.
Pourtant, les sujets d'importance ne manquent pas sur lesquels un référendum permettrait à nos concitoyens de s'exprimer. Sur La Poste, on a vu le mépris avec lequel le Gouvernement et l'UMP ont traité la votation citoyenne du 3 octobre 2009 pour la défense du service public. Des plus de deux millions de signatures en quelques jours, malgré une organisation purement bénévole et les menaces contre les maires qui participaient, la majorité n'a tenu aucun compte. Sur la question des retraites, le Gouvernement a préféré le passage en force sans négociation, a fortiori sans écoute de la volonté populaire, malgré l'ampleur remarquable du mouvement social.
Sur les sujets que le Président de la République a annoncés comme figurant au menu des prochains mois – suppression de l'ISF, financement de la dépendance –, de quoi le Gouvernement a-t-il peur ? Je m'interroge. Sa crainte de l'expression populaire ne légitime-t-elle pas notre inquiétude ?
Pourtant, l'article 11 n'est pas si révolutionnaire. D'abord, il faut 20 % des membres du Parlement. À certaines époques de l'histoire récente, aucun groupe parlementaire n'appartenant pas à la majorité n'aurait pu prendre une telle initiative. Ensuite, il faut 4,5 millions de signatures. Cela laisse songeur. Enfin, si la majorité politique de l'Assemblée nationale est d'accord avec le texte, elle l'adopte et la procédure s'arrête ; si elle y est opposée, elle le rejette et la procédure s'arrête. C'est seulement dans le cas où la majorité politique de l'Assemblée nationale déciderait de ne pas examiner le texte que celui-ci serait soumis au référendum. Il ne restera donc plus que les textes avec lesquels la majorité est en désaccord, ceux qu'elle n'a pas le courage de rejeter et dont elle pense qu'ils seraient rejetés par les électeurs à sa place. Le périmètre est assez étroit. Faut-il donc que le Gouvernement ait peur de la décision populaire pour chercher à enterrer ce dispositif !
En réalité, la révision constitutionnelle de juillet 2008 est un marché de dupes. Les droits du Parlement et les droits de l'opposition sont dans la main de la majorité. Le renforcement supposé des droits de l'opposition est un leurre. J'en prendrai deux exemples.
L'opposition dispose, il est vrai, du fameux droit de tirage sur les commissions d'enquêtes, seule une majorité des trois cinquièmes pouvant s'opposer à une résolution de cette nature. Or le texte de cette résolution peut être amendé à la majorité simple. À deux reprises dans cette assemblée, un texte de résolution a été dénaturé à la majorité simple par l'UMP ; les auteurs de l'opposition, ne se retrouvant plus dans leur texte, l'ont retiré et la commission d'enquête n'a pas été créée. Nous l'avons vu pour la demande de commission d'enquête sur les sondages financés par l'Élysée. Ceux-ci ayant été sortis du champ pour des raisons de séparation des pouvoirs, la commission d'enquête perdait tout intérêt. Cela s'est également produit pour la proposition de résolution sur les risques psychosociaux en entreprise, et notamment chez France Télécom, que nos collègues du groupe GDR avaient déposée. La mention de France Télécom ayant été enlevée, ils ne se sont pas retrouvés dans le texte et ne l'ont jamais présenté au vote. Le droit de tirage a donc été complètement vidé de son contenu.
Deuxième exemple, nous avons la possibilité de travailler dans des missions d'information au sein desquelles sont désignés en alternance des rapporteurs de gauche et de droite. Moi-même, je copréside la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale. Des rapports sont produits, qui contiennent des préconisations et qui sont adoptés à l'unanimité. Une fois dans l'hémicycle, tout amendement ou texte mettant en oeuvre ces préconisations est rejeté. Pourquoi ?
À l'occasion d'un rapport sur le médicament, sujet d'actualité, des amendements, des préconisations ont été formulés, notamment sur les tests contre comparateurs ou les essais contre placebos. Ce sont des éléments qui, probablement, permettraient d'éviter des drames comme ceux que l'on connaît aujourd'hui avec le Médiator. Alors que ces propositions et préconisations ont été adoptées à l'unanimité en mission d'évaluation, à chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale lors duquel elles ont été présentées, elles ont été rejetées à la majorité. Pourquoi ?
Autre exemple : les préconisations faites par la commission d'enquête sur la grippe A n'ont été suivies d'aucun effet. Pourtant, on ne peut pas nous reprocher d'avoir noyauté le dispositif puisque le président et le rapporteur de cette commission étaient de droite. On le voit, aucune suite n'est donnée aux préconisations, amendements ou dispositifs que nous pouvons proposer.
Les bonnes paroles de M. Sarkozy, c'est intéressant à écouter à la télévision, mais c'est de la poudre aux yeux. En réalité, le Gouvernement et cette majorité refusent toute avancée de la démocratie, et le texte dont nous discutons cet après-midi en est une illustration, à moins que, pour terminer mon propos sur une note optimiste,…
…l'UMP et les centristes évoluent et que l'entourage de M. Sarkozy montre enfin sa bonne foi en votant la proposition de loi organique qui prévoit la mise en oeuvre effective et sans tarder de l'article 11 de la Constitution. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme les précédents orateurs, je veux dire combien, dans cette période où le peuple connaît la souffrance, où la démocratie connaît une crise sociale, financière et économique gravissime mais aussi une crise morale, il est important que le Parlement se penche sur ce qui peut renforcer cette démocratie en crise, notamment la démocratie participative, la démocratie directe – c'est le référendum – et la démocratie locale qui a été malheureusement touchée par le Gouvernement avec la récente loi sur les collectivités locales.
Il est très important de se pencher sur cette question, même si le texte que nous défendons aujourd'hui est un minimum, car nous avons un besoin urgent de défendre la République, en tout cas de respecter la volonté constituante du Congrès du Parlement réuni à Versailles qui a réformé l'article 11 de la Constitution, sur la suggestion du Président de la République lui-même.
En octobre 2009, j'avais défendu une proposition de résolution du groupe socialiste demandant qu'un projet de loi organique soit déposé par le Gouvernement. J'ai été amené à reposer cette question au ministre qui m'avait répondu solennellement que le projet de loi organique nécessaire à l'application de la volonté du pouvoir constituant serait déposé avant la fin de l'année 2009. Or nous sommes à la fin de 2010. J'ai bien compris que, cette fois, le Gouvernement allait tenir parole. Il est de son devoir constitutionnel de respecter la volonté du pouvoir constituant du Parlement réuni en Congrès.
L'article 11 de la Constitution est bien timide, bien loin de la Constitution de l'an I qui a été évoquée tout à l'heure et de ce qui se pratique dans les pays étrangers qui reconnaissent le droit de référendum populaire. M. Mallot, avec l'intelligence du coeur et de l'esprit qu'on lui connaît, avec ce talent immense qui fait la gloire de notre Assemblée…
..et qui m'accepte parmi ses collègues avec beaucoup de gentillesse (Sourires), disait à l'instant qu'il y a un tel encadrement du pouvoir d'initiative parlementaire et populaire dans cet article 11 qu'on ne voit guère comment ces conditions pourraient être réalisées.
L'initiative citoyenne requiert, dans notre pays, le soutien de 4,5 millions de personnes. Quel pays a l'humour aussi déplacé ou un tel mépris du peuple pour imposer ces conditions ? À cela s'ajoute le blocage de la majorité parlementaire que M. Mallot a parfaitement exprimé.
Pourtant, les sujets ne manquent pas qui pourraient attirer la manifestation de la volonté populaire, et notamment tout ce qui a trait aux piliers de la République : la réforme de la démocratie locale, la réforme de proximité, la décentralisation qui a vu malheureusement ses pouvoirs régresser récemment avec l'adoption d'une loi par la majorité, ou encore le droit à la retraite, acquis social qui a lui aussi connu un recul.
Si la pétition destinée à empêcher la privatisation de La Poste a recueilli 2 millions de signatures, peut-être pourrait-on en obtenir 4,5 millions pour l'ensemble des services publics. Avec plus de 200 parlementaires, j'ai signé un texte prévoyant, comme cela a été fait pour l'environnement, qu'une charte des services publics soit inscrite dans la Constitution, afin de défendre les services publics devant les menaces qu'une droite réactionnaire fait peser sur ceux-ci.
Mais, mon cher collègue, n'oubliez pas la devise de la République ! L'égalité et la fraternité reposent sur les services publics. La santé publique, l'éducation nationale : c'est cela, la République…
…et c'est là que le peuple pourrait prendre le relais d'une majorité parlementaire qui est en régression par rapport à nos valeurs républicaines.
Cette pétition demandant l'inscription dans la Constitution d'une charte des services publics avait recueilli 200 signatures parmi les parlementaires – nous avions donc bien atteint ce qui était proposé par le constituant – et 400 000 signatures dans l'opinion publique. Nous reprendrons bien sûr cette démarche.
Je n'ignore pas, bien entendu, les dangers que représente le pouvoir du peuple, la démocratie référendaire, la démocratie directe. Nous venons d'en avoir l'exemple une fois de plus en Suisse qui exprime des votes qui ne donnent pas l'image qui est la nôtre du peuple suisse, puisqu'il s'agit de racisme et de xénophobie, images détestables au coeur de l'Europe. Cela pourrait arriver en France, sur la peine de mort par exemple. Il ne faut donc pas être démagogue, et sans doute doit-on encadrer l'exercice de ce référendum populaire,…
…mais pas au point de briser toute possibilité pour le peuple de s'exprimer. Voilà pourquoi nous défendrons tout à l'heure, à l'article 8, un amendement qui vise à éviter que de grandes entreprises privées, des multinationales ayant leur siège en France profitent de cette possibilité pour se lancer dans une campagne de lobbying à grande échelle.
Avec la mondialisation, il existe un problème majeur pour la démocratie, puisque c'est l'argent qui est roi et non, comme le prétend la Constitution et comme on pourrait le faire croire aux jeunes qui en reçoivent l'enseignement à l'école, le peuple. Voilà pourquoi cet amendement me semble utile.
En tout cas, avec cette proposition de loi du groupe GDR, nous donnons une certaine direction, nous montrons un certain attachement à une démocratie et à une République mises en péril aujourd'hui. Ce serait une bonne chose que l'Assemblée nationale puisse se prononcer favorablement sur cette initiative que je salue. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
Monsieur le président, je souhaite d'abord remercier tous les orateurs pour leur présence, et ce d'autant qu'ils sont peu nombreux, surtout sur les bancs du groupe UMP. Voilà pourquoi je salue la présence de M. de La Verpillière. Je remercie plus particulièrement les orateurs socialistes et écologistes qui apportent leur soutien à la présente proposition de loi. Si les orateurs sont peu nombreux, ils sont excellents et on ne le dira jamais assez. Croyez-moi, ce n'est pas qu'une clause de style.
Monsieur le ministre, je souhaite réagir à quelques-uns de vos propos. Je m'étonne que ce soit le ministre de l'intérieur, que vous représentez, qui ait été mandaté par le Gouvernement pour suivre cette proposition de loi organique. Je m'attendais plutôt, même s'il n'y a aucune obligation en la matière, à ce que ce soit le garde des sceaux. En effet, traditionnellement, les affaires constitutionnelles sont plutôt suivies par le ministre de la justice, mais il est vrai que, lors de la révision constitutionnelle, la garde des sceaux de l'époque était déjà aux abonnés absents, le ministre des relations avec le Parlement étant intervenu au nom du Gouvernement.
Certains orateurs ont cité des exemples étrangers qui montrent que cette pratique est très intéressante et enrichissante pour la démocratie.
On dit que nos amis suisses pratiquent le référendum populaire à grande échelle, mais les dérives, comme celle portant sur l'interdiction ou non de la construction de minarets, sont tout à fait condamnables. C'est pourquoi notre proposition de loi organique prévoit un contrôle de constitutionnalité a priori, c'est-à-dire avant même que l'on puisse collecter des signatures. Il ne serait donc pas possible, en France, que l'on ait à se prononcer, par exemple, sur la peine de mort, puisque c'est anticonstitutionnel. Je le précise car la rédaction de l'article 11 de la Constitution n'est pas très claire. C'est un sujet sur lequel il est intéressant de discuter.
J'ai été quelque peu surpris par vos arguments selon lesquels les auteurs de la proposition de loi étaient silencieux sur certains points, que des choses avaient été écartées, ou encore que l'on manquait de garanties par rapport à différentes questions. Les modalités pratiques de recueil des signatures ou de contrôle, par exemple, ne sont pas dans le champ de la loi organique. Depuis 1958, alors que l'on a restreint le champ de la loi et augmenté le champ réglementaire, on a créé beaucoup de confusions.
Permettez-moi également de vous dire, avec tout le respect que je dois aux membres du Gouvernement, que le projet que vous annoncez semble avoir été tellement « approfondi » que personne ne l'a encore vu remonter à la surface ! (Sourires.) C'est dommage, car nous aurions pu en discuter. Peut-être auriez-vous pu proposer des amendements, car le Gouvernement a un droit d'amendement dont il sait user – sans abuser, je l'espère.
Vous auriez pu également souffler à des parlementaires de la majorité des propositions d'amendements. Pour ma part, je suis très ouvert sur la question, puisque j'ai moi-même déposé des amendements pour améliorer la présente proposition de loi, tout comme le groupe SRC. Je comprends que vous ayez voulu transmettre votre projet de loi organique à la CNIL et au Conseil d'État, mais je ne vois pas ce qui vous empêchait d'en donner connaissance à la représentation nationale, au président de la commission des lois et au rapporteur que je suis.
Notre initiative n'aura pas été totalement inutile, un article paru dans Le Monde aujourd'hui même expliquant que nous avons poussé le Gouvernement à accélérer les choses, ce que je crois en effet.
Nous avons respecté la procédure parlementaire en déposant cette proposition de loi plus de six semaines avant son examen. C'est la règle et c'est très bien. Nous aurions cependant pu profiter de ces six semaines pour comparer nos propositions avec celles du Gouvernement.
Je ne reviendrai pas sur ce que vous avez dit, sauf m'étonner que vous ayez affirmé que nous favoriserions le format papier plutôt que le format électronique pour le recueil des pétitions : au contraire, nous avons envisagé très clairement la possibilité du format électronique, et j'ai même déposé un amendement en ce sens. Nous n'avons rien contre l'idée de formulaires standardisés, mais elle ne relève pas de la loi organique.
Vous avez également soutenu, monsieur le ministre, que nous ferions peser un fardeau trop lourd sur les épaules du Conseil constitutionnel – M. Benoit est allé dans le même sens. J'aimerais savoir si ces propos visent à protéger le Conseil et s'il sera par conséquent doté de moyens supplémentaires, ou s'ils laissent entendre que c'est le ministère de l'intérieur qui prendra la main et contrôlera les opérations.
Malgré tout le respect que nous avons pour les institutions de la République et pour ceux qui les dirigent, nous ne sommes pas favorables à ce que lesdites opérations se déroulent sous la houlette du ministère de l'intérieur.
Nous souhaitons que ce soit le Conseil constitutionnel qui chapeaute le processus.
C'est inscrit dans la Constitution !
Je sais bien que l'article 11 de la Constitution le prévoit, mais l'on pourrait fort bien imaginer que les signatures soient collectées auprès des préfectures et donc visées, dans un premier temps, par les autorités préfectorales pour être transmises ensuite au Conseil constitutionnel.
Notre proposition en la matière relève non de la loi mais du règlement : il s'agirait de mettre en place un site internet qui centraliserait l'inscription des soutiens et qui permettrait un contrôle très facile. Chaque électeur inscrit sur les listes électorales serait ainsi doté…
Nos débats sont très brefs, monsieur le président ; voilà à peine une heure et demie que nous discutons et si, franchement, nous ne pouvons pas consacrer sur ces questions quelques minutes supplémentaires… Je souhaite en outre répondre à nos collègues.
Monsieur de Rugy, je ne vous permets pas de remettre en cause la présidence.
Vous disposez de cinq minutes et vous venez de parler pendant sept minutes ; il me semble tout de même normal que je vous invite à conclure.
J'aimerais bien savoir si, à l'occasion d'autres débats, les rapporteurs se sont vu couper la parole de cette façon.
Yves Cochet a cité avec raison des débats sur les OGM, sur l'énergie nucléaire, que l'on a eu beaucoup de mal à déverrouiller au Parlement, d'où l'utilité de l'intervention citoyenne.
Je constate en outre que Thierry Benoit a plutôt salué le fait que cette proposition de loi faisait avancer les choses.
M. de La Verpillière s'est livré à un long plaidoyer pour la réforme constitutionnelle, c'est son droit ; nous demandons simplement que la disposition que nous avions soutenue lors des débats parlementaires sur cette réforme soit appliquée – Thierry Benoit a rappelé que notre collègue Noël Mamère avait alors déposé des amendements dont j'étais cosignataire.
Je remercie Jacques Valax pour son soutien.
Si, monsieur le ministre, l'engagement pris par vos prédécesseurs à ce banc d'appliquer cet aspect de la réforme constitutionnelle avant 2009 n'a pas été tenu, ce n'est pas un hasard. Ne nous racontons pas d'histoires : on voit bien que le calendrier que vous avez établi vise à empêcher nos concitoyens d'user de ce dispositif avant l'élection présidentielle de 2012 alors qu'ils auraient pu le faire dès 2009.
Voilà qui pose un réel problème politique : il en va de la crédibilité de la parole du constituant que nous sommes.
Anny Poursinoff a bien fait de relever la contradiction qui consisterait à introduire les citoyens dans les tribunaux et non dans la procédure législative – alors que la Constitution le prévoit.
Jean Mallot l'a lui aussi rappelé et il a remarqué à juste titre les différentes possibilités de référendums. Si les restrictions prévues par l'article 11 ne permettent pas d'engager un référendum, restent les motions référendaires à la discrétion du Parlement ou du Président de la République qui peut demander au Gouvernement de soumettre un projet de loi à référendum.
Je salue, pour conclure, les propos tenus juste avant moi par Michel Vauzelle. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Je vous ferai observer, monsieur le rapporteur, que vous disposiez de cinq minutes et que vous avez parlé neuf minutes et demie.
Vous ne pourrez donc pas prétendre que la présidence vous a empêché de parler.
Nous verrons ce qu'il en est à l'occasion d'autres débats et avec d'autres rapporteurs.
Je ne voudrais pas abuser de votre temps mais je souhaite malgré tout apporter la lumière des travaux de la commission. Je ne reprocherai pas à M. de Rugy d'avoir été davantage le rapporteur de son texte que celui des travaux de la commission.
Certes, mais il n'est pas inutile que la commission fasse connaître à l'Assemblée le fruit de son travail.
Contrairement aux apparences et à ce qui pourrait être dit à l'issue du débat, il n'y a pas d'opposition de fond sur le sujet en discussion. La Constitution a été révisée en juillet 2008. Depuis, l'article 11 prévoit de nouvelles dispositions dont la mise en oeuvre doit faire l'objet d'une loi organique. Personne ne doit être a priori suspecté, ni d'un côté ni de l'autre, de vouloir revenir sur ce qui est désormais gravé dans le marbre de nos institutions.
Ensuite, contrairement à ce qu'une simplification abusive pourrait laisser croire, il ne s'agit pas de décider ici de la mise en oeuvre d'une procédure de référendum d'initiative populaire. Certains l'ont bien rappelé, mais en enveloppant leurs propos dans d'autres plus généraux. Il convient d'insister sur le fait que la procédure dont il est question doit permettre la mise en oeuvre du référendum d'initiative partagée dans le cadre bien défini des textes susceptibles d'être votés par le Parlement et, demain, par le peuple au titre de l'article 11 de la Constitution.
Enfin, même si le terme se révèle quelque peu excessif, il s'agit de « légitimer » la présence au banc du Gouvernement du ministère de l'intérieur à travers le ministre chargé des collectivités territoriales. Le rapporteur commet en effet une erreur : si, en matière constitutionnelle, il revient d'ordinaire au garde des sceaux de défendre un texte portant réforme de la Constitution, cela n'a jamais été le cas pour un texte de loi organique, texte de déclinaison de la loi constitutionnelle. Lors des discussions sur les projets ou propositions de loi organique, le Gouvernement a toujours été représenté, à l'Assemblée, par le ministre concerné.
J'ai ainsi été rapporteur de la loi organique portant autonomie financière des collectivités locales, le ministre de l'intérieur de l'époque représentant le Gouvernement. Nous n'aurions du reste pas compris que ce fût le garde des sceaux qui vînt défendre…
…un projet de loi organique relatif à l'autonomie financière des collectivités locales.
Par ailleurs, la commission des lois – on a rappelé les termes de la lettre de son président au chef de l'État et au Gouvernement – attend que le projet de loi organique soit déposé sur le bureau de l'Assemblée après avoir été adopté en conseil des ministres. Il s'agit d'une demande très forte, récurrente de la commission.
Le ministre a donné aujourd'hui un début de réponse à cette demande, alors que nous sommes en train d'examiner cette proposition : non seulement ce projet de loi organique existe, mais il a déjà reçu un avis favorable de la CNIL et il est en cours d'examen au Conseil d'État avant d'être présenté en conseil des ministres le 22 décembre, après quoi il sera examiné par l'Assemblée, dont le Gouvernement conserve partiellement la maîtrise de l'ordre du jour.
Il importe de le rappeler car, si la présente proposition était identique, ou simplement analogue, au texte que nous soumettra le Gouvernement, à savoir un texte sur lequel il a travaillé de manière approfondie avec le concours de tous les organes de l'État et en particulier du Conseil d'État, il n'y aurait pas de difficulté en termes purement juridiques. Or le présent texte, aussi intelligente soit sa rédaction, n'a pas bénéficié – ce n'est pas une honte, ce n'est pas un scandale mais un constat – de tout ce travail de mûrissement, d'approfondissement auquel le Gouvernement a pu se prêter.
Le législateur n'est pas privé du droit d'initiative en matière de lois organiques.
La logique veut malgré tout qu'il appartienne au Gouvernement de rédiger un projet de loi d'application d'une nouvelle disposition constitutionnelle. Nous comprendrions que vous persévériez dans votre initiative si le Gouvernement n'était pas sur le point de déposer très prochainement un tel projet de loi sur le bureau de l'une ou l'autre assemblée. Or ce n'est pas le cas.
S'il est bien une raison pour laquelle la commission n'a pas adopté cette proposition – puisqu'elle ne l'a pas adoptée –,…
…c'est que, contrairement à ce que notre excellent collègue Yves Cochet a déclaré, la question de la collecte des pétitions n'est pas exclusivement technique, loin de là. Il s'agit d'une question éminemment importante, puisqu'il s'agit d'articuler l'intention et la lettre du constituant avec le respect de l'ensemble de la procédure. L'expression du peuple français doit bien être celle commandée par la lettre constitutionnelle, à l'exclusion de toute autre considération qui déborderait le cadre clairement exprimé par l'article 11, qu'on le regrette ou qu'on s'en réjouisse.
Comment définir autrement que dans la loi organique, ou que dans une loi simple prévue par la loi organique, cette articulation entre la position du maire, qui aura probablement un rôle à jouer, et celle du préfet, représentant de l'État qui, en tant que tel, présiderait à la démarche initiale de collecte des pétitions en relation avec le Conseil constitutionnel ?
Cette procédure mérite de figurer dans la loi. La commission a par conséquent considéré qu'on ne pouvait se contenter d'un décret, fût-il pris en Conseil d'État, pour déterminer cette articulation des plus sensibles, sans doute décisive pour la réussite de l'application des nouvelles dispositions de l'article 11 de la Constitution.
Je souhaitais ainsi, en espérant ne pas avoir abusé du temps de la commission, proposer qu'à ce débat de très belle facture, marqué du sceau de l'excellence, succède un vote de raison, à savoir de rejet de la proposition de loi. Je crains en effet que le rapporteur qui, pourtant, nous a parfois montré qu'il était capable de sagesse, ne décide de maintenir son texte.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur, monsieur le vice-président, mes chers collègues – je suis parlementaire pour encore quelques jours –, le Gouvernement se rallie pour l'essentiel aux propos de M. Geoffroy,…
…qui s'est exprimé au nom de la commission et a développé les mêmes arguments que j'ai exposés en début de séance.
Je souhaite revenir néanmoins sur les interventions précédentes. Je me réjouis réellement de la convergence des uns et des autres sur le souhait de voir aboutir le plus rapidement possible et dans les meilleures conditions l'application des nouvelles dispositions de l'article 11 de la Constitution.
Je rappellerai que certains orateurs se sont employés à justifier le fait qu'ils n'ont pas voté la réforme constitutionnelle, pour ensuite insister sur tous les bienfaits d'une partie non négligeable de ladite réforme.
J'ai été très attentif aux arguments qui ont mis en évidence l'intérêt de cette réforme, M. Cochet allant même jusqu'à dire que ce droit d'initiative était inscrit dans le texte fondateur des Verts. Finalement, les Verts l'ont rêvé, la majorité l'a fait. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Je ne veux pas vous faire revenir en arrière, ni vous faire regretter de ne pas avoir voté la révision constitutionnelle, mais on sent bien que, d'une certaine façon, vous êtes un peu frustrés de ne pas avoir été aussi loin.
J'ai entendu M. le rapporteur s'étonner que le projet de loi organique soit soumis au Conseil d'État.
Si, vous vous en êtes étonné. Je dois rappeler que le texte a été soumis à la CNIL, et qu'il y a eu plusieurs allers-retours, de vraies discussions, et encore aujourd'hui, sur un certain nombre de points que vous semblez vouloir totalement minorer alors qu'ils sont extrêmement importants. La question de la collecte des données, par exemple, ce n'est pas si évident. M. Geoffroy l'a rappelé, je n'insisterai donc pas.
Vous avez laissé entendre que le Gouvernement aurait peut-être l'intention de faire contrôler les choses – vous n'êtes pas allé jusqu'à dire « encadrer » – par le ministère de l'intérieur. Il n'en est rien. Dans la loi constitutionnelle que vous n'avez pas votée, ce que je regrette, il est clairement précisé que c'est bien le Conseil constitutionnel, et non le ministère de l'intérieur, qui procède aux contrôles et aux vérifications. Les choses sont claires, et je crois que personne n'a envie de remettre en cause la Constitution. Il y a suffisamment de garanties pour éviter de tels dérapages.
À plusieurs reprises, vous avez demandé si l'on pouvait vraiment être sûr que le cheminement législatif du texte gouvernemental était dans sa phase finale.
Écoutez, ce texte a été soumis à la CNIL, il est aujourd'hui soumis au Conseil d'État, et je vous indique que, revenant du Conseil d'État, il sera soumis, dans moins de trois semaines, au Conseil des ministres.
Voilà des informations très tangibles, qui ne sont pas contestables. Le texte est donc, si vous me permettez cette expression un peu triviale, « dans les tuyaux ».
Vous avez souhaité démontrer que mes réticences, en particulier sur les garanties qui doivent entourer la collecte des signatures, étaient infondées. Ces garanties ne seraient pas nécessaires, il ne s'agirait que d'un point technique.
C'est au contraire très important, et c'est l'un des points sur lesquels notre débat avec le Conseil d'État se poursuit. Il y a de vraies interrogations, que l'on ne peut pas ignorer, sur les trois sujets que j'ai abordés dans mon propos liminaire. Je n'y reviens donc pas.
Voilà, mesdames, messieurs les députés, les raisons pour lesquelles le Gouvernement reste défavorable à la proposition de loi. Mais j'ai bien compris que cette position est en convergence avec celle de la commission.
En vertu de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution, et en application de l'article 96 du règlement de l'Assemblée nationale, le Gouvernement demande la réserve des votes sur les articles de la proposition de loi.
J'appelle maintenant les articles de la proposition de loi organique, dans le texte dont l'Assemblée a été saisie initialement, puisque la commission n'a pas adopté le texte.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 9 à l'article 1er.
Monsieur le président, je voulais d'abord répondre à l'interpellation sur le retrait de la proposition de loi organique, puisque on nous a demandé si nous la retirions. Je voulais simplement dire que nous ne la retirons pas.
Monsieur de Rugy, ce n'est pas vous qui présidez. Vous n'avez pas à répondre au ministre. Vous avez la parole pour défendre votre amendement. Vous avez deux minutes pour ce faire.
Monsieur le président, je ne fais pas de commentaires sur la présidence. Quand un ministre demande à l'auteur d'un amendement de le retirer, celui-ci dit s'il le retire ou pas. De la même manière, l'auteur de la proposition de loi organique vous dit qu'elle n'est pas retirée. D'ailleurs, je tiens à préciser, et chacun pourra le vérifier dans le compte rendu, que la commission des lois a pris une position qui n'est pas celle du groupe UMP. C'est le président du groupe UMP qui a écrit qu'il souhaitait le retrait de ce texte. La commission des lois, elle, s'est bornée à ne pas l'adopter. Ce n'est pas la même chose.
J'ajoute qu'il n'y a eu en commission aucun débat, absolument aucun, sur la question de la collecte électronique. Là encore, chacun pourra le vérifier en lisant le compte rendu de la commission.
Quant à l'amendement n° 9 , il s'agit simplement d'un amendement de précision. Il est proposé que les signataires ne puissent pas retirer leur signature en cours de procédure.
La commission a repoussé cet amendement, comme d'ailleurs tous les autres.
Si cet amendement vise à sécuriser la procédure de référendum d'initiative populaire, il ne résout pas l'ensemble des difficultés que j'ai rappelées dans mon propos liminaire. Pour des raisons de cohérence, le Gouvernement émet donc un avis défavorable à cet amendement, comme sur l'ensemble du texte.
Je rappelle que les votes sur l'amendement n° 9 et l'article 1er sont réservés.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement, n° 8 , portant article additionnel après l'article 1er.
Il s'agit d'un amendement un peu plus important. Il vise à préciser deux points.
D'une part, lorsqu'un parlementaire a signé une proposition de loi transmise au Conseil constitutionnel dans le cadre de l'article 11, il ne peut pas en signer une autre dans la même période. C'est là une petite restriction dont le but est d'éviter de voir fleurir beaucoup de procédures en même temps, ce qui aurait pour effet de brouiller les choses pour nos concitoyens.
D'autre part, l'amendement prévoit qu'une proposition de loi ne peut pas être débattue au Parlement tant que le délai de collecte des signatures n'est pas clos. Il s'agit d'éviter que le Parlement adopte une attitude dont l'effet serait de rendre caduque la collecte des signatures.
La commission a fait savoir qu'elle est défavorable à cet amendement.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Également défavorable. Outre ce que j'ai dit tout à l'heure, cet amendement conduit à poser une nouvelle condition de recevabilité et non pas une condition de présentation. Les conditions de recevabilité ayant déjà été précisées par la Constitution, il ne semble pas entrer dans la compétence du législateur organique d'en ajouter une.
La parole est à M. François de Rugy, pour défendre l'amendement n° 7 à l'article 2.
Cet amendement est quasi rédactionnel.
Le troisième alinéa de l'article 61 de la Constitution prévoit, dans sa rédaction issue de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, que, pour « les propositions de loi mentionnées à l'article 11 avant qu'elles ne soient soumises au référendum », le Conseil constitutionnel doit statuer dans le délai d'un mois, qui peut être ramené à huit jours, à la demande du Gouvernement, s'il y a urgence.
Le présent amendement prévoit donc que le Conseil constitutionnel statue, sur une proposition de loi transmise par un cinquième des membres du Parlement et susceptible d'être soumise à référendum, dans les délais – d'un mois ou, à défaut, de huit jours – prévus à l'article 61 de la Constitution.
Je précise que cet amendement n'a pas reçu un avis favorable de la commission.
Il paraît difficile d'imposer au Conseil constitutionnel de donner une réponse dans un délai de huit jours. Il serait curieux que nous revenions sur ce que prévoit l'article 61 de la Constitution. Le délai habituel est d'un mois.
Je rappelle que les votes sur l'amendement n° 7 et l'article 2 sont réservés.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 6 à l'article 6.
Cet amendement touche à un point qui a déjà été évoqué à plusieurs reprises au cours du débat. C'est la question de savoir si la collecte des signatures peut se faire sous forme électronique ou non.
Je rappelle que l'article 11 a placé la barre très haut : un dixième des électeurs inscrits, cela représente environ 4,5 millions de personnes, alors que le nombre de signatures requis est de 500 000 en Italie, de 50 000 en Suisse, de 400 000 en Californie, et de un million pour l'ensemble de l'Union européenne.
Pour que l'objectif puisse être atteint, pour que cette barre ne soit pas, de fait, un moyen d'empêcher un référendum d'initiative populaire, il est proposé ici de préciser explicitement que les pétitions peuvent être établies et transmises sous forme dématérialisée, sous forme électronique, comme le prévoient d'ailleurs déjà différents codes. Je ne citerai que l'exemple des télédéclarations pour l'impôt sur le revenu. Il est donc possible de mettre en place des procédures tout à fait sécurisées. Cela permettrait d'atteindre l'objectif des 4,5 millions de signatures.
La commission a fait savoir qu'elle est défavorable à cet amendement.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Nous avons déjà eu l'occasion de parler des différentes possibilités de transmission. Qu'il y ait toute une gamme de possibilités, je crois que ce n'est pas la bonne solution. Au lieu de choisir un mode de transmission, les auteurs de cet amendement prévoient une possibilité supplémentaire. C'est la raison pour laquelle nous maintenons notre avis défavorable.
Je rappelle que les votes sur l'amendement n° 6 et l'article 6 sont réservés.
Il y a eu des ambiguïtés, monsieur le président, sur la manière dont le débat s'est déroulé jusqu'à présent. Je voulais rappeler à tout le monde l'article 56, alinéa 1, de notre magnifique règlement : « Les ministres, les présidents et les rapporteurs des commissions saisies au fond obtiennent la parole quand ils la demandent. » Pour eux, aucun temps de parole n'est fixé.
Le rapporteur a pris la parole tout à fait naturellement. Je la lui ai d'ailleurs laissée. Il n'y aucun problème sur ce point. L'usage veut simplement, monsieur Cochet, que le rapporteur ne reprenne pas une seconde fois la parole pour une durée supérieure à celle de sa première intervention. C'est la pratique, monsieur Cochet.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 5 à l'article 7.
Je remercie notre collègue Cochet de son très utile rappel au règlement. Il convenait en effet de rappeler que le rapporteur prend la parole lorsqu'il la demande. Lorsque je demanderai la parole, je vous remercie par avance, monsieur le président, de bien vouloir me l'accorder.
L'amendement n° 5 est rédactionnel. La rédaction initiale de cet article 7 était quelque peu redondante.
La commission est défavorable à cet amendement.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
L'article 3 de la Constitution dispose déjà que sont électeurs « tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques ». Cet amendement me paraît donc superfétatoire.
Je rappelle que les votes sur l'amendement n° 5 et l'article 7 sont réservés.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 4 à l'article 8.
La commission a fait savoir qu'elle est défavorable à cet amendement.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Même avis.
Il s'agit d'amendements d'une très grande simplicité, tout à fait en cohérence avec ce que nous avons dit, les uns et les autres. Notre collègue Vauzelle parlait tout à l'heure du risque de voir cette procédure utilisée comme un moyen de lobbying. Il ajoutait que, à une époque où l'argent est roi, il fallait dire clairement que ceux qui sont du côté des puissances de l'argent, ceux qui ont le vent de la mondialisation en poupe ne doivent pas pouvoir interférer. Cette procédure est bien un référendum d'initiative populaire : nous voulons que le peuple devienne, ou reste, souverain. C'est là une valeur forte à laquelle nous sommes attachés.
C'est pourquoi nous proposons d'introduire une précision dans cet article 8, qui définit les conditions que doivent remplir les personnes physiques et morales afin d'organiser à titre collectif une pétition de soutien à une proposition de loi en vue de la soumettre à un référendum.
Le 2° de l'article prévoit que l'organisateur de la pétition peut être « une personne morale de droit privé ». L'amendement n° 2 précise : « une personne morale de droit privé à but non lucratif ».
C'est là une restriction qui nous permettrait incontestablement d'éviter que des groupes de pression, soutenus par des groupes dont je tairai le nom, puissent interférer dans une procédure destinée à être une manifestation vraie et sincère de la volonté populaire.
L'amendement n° 1 a le même objet.
La commission les a examinés dans le cadre de l'article 88 de notre règlement. À titre personnel, j'y suis favorable, car ils apportent une précision utile. La commission les a cependant repoussés.
Les précisions qu'il est proposé d'introduire dans le texte sont pertinentes, mais elles ne suppriment pas le risque d'une multiplication des canaux de pétition. Je rappelle qu'il y a 45 millions d'électeurs. Si 4,5 millions d'entre eux participent à une telle procédure, cela requiert un contrôle important. C'est la raison pour laquelle je ne suis pas favorable à ces deux amendements.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 3 à l'article 17.
Il s'agit d'un point important, relatif aux délais. L'article 17 introduit un délai avant l'élection présidentielle ou les élections législatives au cours duquel il n'est pas possible d'organiser un référendum au titre de l'article 11.
Lors des débats sur la loi constitutionnelle, ce point avait été évoqué. Certains, dont, je crois, M. de Raincourt, qui avait également répondu à des questions sur ce sujet au nom du Gouvernement, avaient évoqué un délai d'un an. Nous avons proposé un délai de trois mois.
Mais, suite aux consultations que nous avons menées en commission, et pour plus de clarté, nous proposons que ce délai de trois mois s'entende à l'exclusion du jour même de l'élection du Président de la République ou de celle des députés. En effet, dans les pays où ce type de procédure existe, elle est souvent couplée à une élection générale ou nationale. Ce serait sans doute le meilleur moyen d'empêcher toute interférence du résultat du référendum dans la campagne présidentielle ou législative, et donc toute instrumentalisation de cette procédure.
L'avis de la commission est le même que précédemment.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
La superposition de plusieurs campagnes, présidentielle ou législative d'une part, référendaire d'autre part, n'est pas souhaitable. Elle risque d'entretenir la confusion dans l'esprit des électeurs, et la campagne référendaire pourrait facilement être instrumentalisée par les candidats.
Par ailleurs, la charge qui résulterait de l'organisation simultanée d'une élection et d'un référendum serait très difficile à gérer pour les services des préfectures et des mairies déjà mobilisés pour les scrutins nationaux. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable à cet amendement.
Je rappelle que les votes sur l'amendement n° 3 et l'article 17 sont réservés.
En application de l'article 44, alinéa 3 de la Constitution, le Gouvernement demande à l'Assemblée de se prononcer par un seul vote sur les amendements, les articles et l'ensemble de la proposition de loi organique.
Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble de cette proposition de loi auront lieu le mardi 7 décembre, après les questions au gouvernement.
Prochaine séance, mardi 7 décembre à neuf heures trente :
Questions orales sans débat.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-sept heures.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,
Claude Azéma